Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 17588

1 Le lundi 21 mars 2005

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro

6 de l'affaire, s'il vous plaît.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Affaire

8 numéro IT-01-47-T, le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

10 Je vais demander à l'Accusation de bien vouloir se présenter.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tous

12 dans le prétoire et à l'extérieur du prétoire. Pour l'Accusation, Tecla

13 Henry-Benjamin et Daryl Mundis, assistés par notre commis à l'affaire,

14 Andres Vatter.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

16 Je vais demander aux avocats de bien vouloir se présenter.

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

18 Monsieur les Juges. La Défense du général Hadzihasanovic est représentée

19 par Edina Residovic, conseil principal; et Stéphane Bourgon, co-conseil.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

22 Monsieur les Juges. La Défense du général Kubura est représentée par

23 Fahrudin Ibrisimovic et Nermin Mulalic.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : En cette journée du 21 mars 2005, je salue toutes

25 les personnes présentes, je salue les représentants de l'Accusation, je

Page 17589

1 salue les avocats, je salue les deux accusés qui sont présents ainsi que

2 tout le personnel de cette salle d'audience.

3 Nous devons poursuivre nos travaux par l'audition d'un témoin, mais avant

4 cela la Défense va nous faire le point des demandes de versement à la

5 procédure au dossier de certaines pièces résultant de l'audition du témoin

6 de vendredi. Avant cela, la Chambre aura une décision orale dans la

7 question de l'adjonction des noms de témoins.

8 Sur la demande de la Défense d'aider la Chambre concernant les scénarios 1

9 à 15 par l'adjonction de témoins. La Chambre estime que ce document peut

10 être joint en annexe aux écritures de la Défense en date du 22 février

11 2005, intitulé : "Notification par la Défense des modalités de la

12 déposition d'un témoin." Le sens de la décision orale, c'est d'ajouter aux

13 écritures de la Défense la liste des scénarios 1 à 15 avec les noms des

14 témoins.

15 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. C'était dans le Témoin Izmirlic. Voilà. Par

17 ailleurs, nous avons appris par la Juriste de la Chambre que la Défense

18 souhaitait faire des audiences supplémentaires au cours de la semaine du

19 mois d'avril et, après consultation des Juges, nous estimons que ces

20 audiences pourraient se tenir ultimement dans la semaine du 4 avril au 11

21 avril, puisqu'il était prévu de terminer vos témoins le 1er avril. Mais les

22 audiences supplémentaires pourront se tenir le lundi 4 avril, le mardi 5

23 avril, mercredi 6 avril, jeudi 7 avril et vendredi 8 avril. Ce qui

24 permettra aux avocats de la Défense du général Kubura d'entamer comme vous

25 l'avez prévu l'audition de leurs témoins à compter du 11 avril.

Page 17590

1 Par ailleurs, concernant le planning, nous ferons le point demain puisque

2 Me Dixon, qui n'est pas là, a souhaité que les points puissent se faire en

3 sa présence demain, donc nous ferons cela demain matin.

4 Je vais donner la parole à la Défense pour les documents.

5 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour que la Chambre

6 et le Greffier puissent suivre, nous avons des copies à l'intention de la

7 Chambre, du Greffe et de l'Accusation. Je souhaiterais que ces documents

8 soient distribués à tout le monde. Nous avons également une copie à

9 l'intention de la sténotypiste qui l'a demandée.

10 L'INTERPRÈTE : Les interprètes souhaiteraient une copie également.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai entendu de la part de la cabine des

12 interprètes, si les interprètes pouvaient avoir une copie également. Là

13 c'est peut-être tard, mais dans le futur. Bon. Continuons.

14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] La Défense souhaiterait proposer le

15 versement au dossier des documents suivants : numéro 1, il s'agit d'un

16 document émanant du commandement du 3e Corps, le numéro confidentiel 17-1,

17 daté du 27 novembre 1992; document numéro 3, numéro 0542; document numéro

18 10, numéro 0840; numéro 15, numéro 1364; numéro 16, numéro 1408; numéro 20,

19 numéro 0746; document numéro 23, 0881; document numéro 27, numéro 1288;

20 document numéro 31, numéro 0887; document numéro 32, 0917; document numéro

21 33, numéro 1469; document numéro 41, numéro 1702; document numéro 50,

22 numéro 0859; document numéro 52, numéro 1384; document numéro 53, numéro

23 1466; document numéro 54, numéro 1402; document numéro 55, 1419; document

24 numéro 58, 0972; document numéro 60, 1127; document numéro 62, 1289;

25 document numéro 63, 1290; document numéro 65, 1432; document numéro 66,

Page 17591

1 1452; document numéro 67, 1453; document numéro 68, 1467; document numéro

2 69, 1471; document numéro 70, 1477; document numéro 72, 1481; document

3 numéro 73, 1488; document numéro 75, 1548; document numéro 76, 1553; et

4 document numéro 79, qui est un document émanant du secteur de la Sécurité

5 du 3e Corps daté du 12 janvier 1994, numéro ERN 04034202 à 04034204.

6 La Défense suggère qu'étant donné que les traductions en anglais de

7 certains documents présentés au témoin ne sont pas encore disponibles, les

8 documents suivants soient marqués aux fins d'identification.

9 Document numéro 6, émanant du secteur de la Sécurité du commandement

10 du 3e Corps, numéro 03/100-61-2, daté du 19 mars 1993, numéro ERN 04034538

11 et 04034539.

12 Document numéro 9, c'est un document émanant du commandement du 3e

13 Corps, numéro 1008-3, daté du 7 avril 1993, numéro ERN 01298086.

14 Document numéro 12, numéro 1002. Je pense qu'il y a déjà un numéro

15 d'identification; sinon, nous en demandons un.

16 Ensuite, le document 17, un document du commandement du

17 3e Corps, secteur de la Sécurité, référence numéro 03/100-291-3, daté du 31

18 août 1993.

19 Document 19, commandement du 3e Corps, strictement confidentiel,

20 numéro 03/100-391-2, 20 octobre 1993, numéro ERN 04033475.

21 Document numéro 28, document émanant du commandement du 3e Corps et

22 du MUP et du CSB de Zenica, daté du 6 septembre 1993, numéro ERN 04033406 à

23 04033408.

24 Document 29, 1695, je pense que ce document déjà la cote DH1695, donc je

25 ne demanderais pas le versement au dossier de ce document.

Page 17592

1 Ensuite, le document numéro 71, 1478, puis le document 74, 1517 et

2 77, 1560.

3 Le conseil souligne que l'auteur de ce document bénéficie de mesures

4 de protection. L'auteur de ce document ou quelqu'un qui a signé en son nom.

5 Nous demandons que les documents numéro 6, 10, 12, 17, 33, 55 et 79 soient

6 conservés à titre confidentiel sous scellé. Merci.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : L'Accusation.

8 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. L'Accusation n'a

9 pas d'objection à soulever. Cela étant, nous demandons un éclaircissement

10 au Greffier concernant le document au numéro 29, 1695. Nous ne savons pas

11 si ce document a déjà été versé au dossier, si ce n'est pas très clair, si

12 tel est le cas nous souhaiterions le savoir, nous n'avons pas d'autre

13 commentaire à formuler.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, le document 1695, il y est

15 marqué.

16 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Effectivement, le Greffe

17 confirme que le numéro 1695 est bien versé au dossier. Il a été versé au

18 dossier le 18 janvier 2005, avec le témoin Kadric.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, faites votre office pour les

20 pièces dont les numéros ont été demandés.

21 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Je passe à l'anglais pour

22 énumérer les nouvelles pièces versées au dossier, comme pièces de la

23 Défense.

24 [interprétation] Le premier document est un nouveau document intitulé

25 : "Commandement du 3e Corps," référence interne 17-1, daté du 27 novembre

Page 17593

1 1992. Ce document est versé au dossier sous la référence DH2081, avec la

2 mention E pour la traduction en anglais.

3 Le document numéro 2 est versé sous la cote DH2081/E.

4 Le document 542 est admis au dossier sous la référence DH542 avec la

5 mention E pour la traduction en anglais.

6 Le document intitulé : "Commandement du 3e Corps, secteur de la

7 Sécurité", référence interne, daté du 19 mars 1993, portant le numéro ERN

8 04034538, est marqué pour identification sous la référence DH2082 ID.

9 Le document intitulé : "Commandement du 3e Corps", référence interne

10 numéro 1008-3, daté du 7 avril 1993, portant le numéro ERN 01298086, est

11 marqué pour identification sous la référence DH2083 ID.

12 Je reviendrai brièvement au document précédent, le document DH2082

13 ID, est un document confidentiel. Le document 840 est également un document

14 confidentiel, il est versé au dossier sous la référence DH840 avec la

15 mention E pour la traduction en anglais.

16 Le document 1002 a déjà un numéro d'identification. A présent il sera

17 considéré comme un document confidentiel.

18 Le document 1364 est désormais versé au dossier, sous la référence

19 DH1364, avec la mention E pour sa traduction en anglais.

20 Le document 1408 est versé au dossier sous la référence DH1408, avec

21 la mention E pour la traduction en anglais.

22 Le document intitulé : "Commandement du 3e Corps, secteur de la

23 Sécurité," référence interne numéro 03/100-291-3, daté du 31 août 1993, est

24 marqué pour identification sous la référence DH2084 ID. Ce document sera

25 conservé à titre confidentiel.

Page 17594

1 Le document intitulé : "Commandement du 3e Corps, strictement

2 confidentiel," c'est l'intitulé du document, je précise, numéro 03/100-391-

3 2, daté du 20 octobre 1993, est marqué aux fins pour identification sous la

4 référence DH2085 ID.

5 Le document 746 est versé au dossier sous la référence DH746, avec

6 une traduction en anglais portant la mention E.

7 Le document 881 est versé au dossier sous la référence DH881, avec la

8 mention E pour la traduction en anglais.

9 Le document 1288 est versé au dossier sous la référence DH0288, la

10 traduction en anglais de ce document portera la référence DH1288/E.

11 Le document intitulé : "Commandement du 3e Corps, MUP-CSB Zenica,"

12 daté du 6 septembre 1993, portant le numéro ERN 04033406, est marqué pour

13 identification sous la référence DH2086 ID.

14 Le document 887, est versé au dossier sous la référence DH887, la

15 traduction en anglais portant la mention E.

16 Le document 917 est versé au dossier sous la référence DH917, avec la

17 traduction en anglais portant la mention E.

18 Le document 1469 est versé au dossier sous la référence DH1469, avec

19 la mention E pour la traduction en anglais. Ce document est confidentiel.

20 Le document 1702 est versé au dossier sous la référence DH1702, la

21 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

22 Le document 859 est versé au dossier sous la référence DH859, la

23 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

24 Le document 1384 est versé au dossier sous la référence DH1384, la

25 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

Page 17595

1 Le document 1466 est versé au dossier sous la référence DH1466/E.

2 Le document 1402 avait déjà un numéro d'identification.

3 Le document 1419ID est versé au dossier sous la référence DH1419, la

4 traduction en anglais de ce document portant la mention E. Ce document est

5 confidentiel.

6 Le document 972 est versé au dossier sous la référence DH972, la

7 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

8 Le document 1127 est versé au dossier sous la référence DH1127, la

9 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

10 Le document 1289 est versé au dossier sous la référence DH1289, la

11 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

12 Le document 1290 est versé au dossier sous la référence DH1290, la

13 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

14 Le document 1432 est versé au dossier sous la référence DH1432, la

15 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

16 Le document 1452 est versé au dossier sous la référence DH1452, la

17 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

18 Le document 1453 est versé au dossier sous la référence DH1453, la

19 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

20 Le document 1467 est versé au dossier sous la référence DH1467, la

21 traduction en anglais de ce document portant la mention la mention E.

22 Le document 1471 est versé au dossier sous la référence DH1471, la

23 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

24 Le document 1477 est versé au dossier sous la référence DH1477, la

25 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

Page 17596

1 Le document 1478 reçoit un numéro d'identification sous la référence

2 DH1478ID.

3 Le document 1481 est versé au dossier sous la référence DH1481, la

4 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

5 Le document 1488 est versé au dossier sous la référence DH1488, la

6 traduction de ce document en anglais portant la mention E.

7 Le document 1517 reçoit un numéro d'identification sous la référence

8 DH1517ID.

9 Le document 1548 est versé au dossier sous la référence DH1548, la

10 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

11 Le document 1553 est versé au dossier sous la référence DH1553, la

12 traduction en anglais de ce document portant la mention E.

13 Le document 1560 reçoit un numéro d'identification sous la référence

14 DH1560ID.

15 Le document intitulé : "3e Corps, secteur de la Sécurité", numéro

16 ERN04034202, daté du 12 janvier 1994, est versé au dossier sous la

17 référence DH2087, la traduction en anglais de ce document portant la

18 mention E. Ce document est confidentiel.

19 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous est donné acte, Monsieur le Greffier, sous

21 réserve de contestation ultérieure des numéros qui ont attribués à ces

22 pièces.

23 Maître Bourgon, une petite rectification ?

24 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Madame la Juge.

25 Bonjour, Monsieur le Juge. Monsieur le Président, simplement pour profiter

Page 17597

1 de l'occasion puisque nous sommes dans les documents pour demander à ce que

2 le rapport de l'expert que nous allons entendre dans quelques minutes soit

3 déposé au dossier dès à présent pour obtenir un numéro. Merci, Monsieur le

4 Président.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce rapport d'expert, Monsieur Mundis ?

6 M. MUNDIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro pour le rapport de

8 l'expert.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ce rapport

10 recevra la cote 2088 avec une version anglaise. Le document sera donc le

11 DH2088 avec /E. Merci, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'introduire le témoin, on va passer à huis

13 clos partiel.

14 M. LE GREFFIER : Nous sommes maintenant en audience à huis clos partiel.

15 [Audience à huis clos partiel]

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 17598

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 17598 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 17599

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 [Audience publique]

15 M. LE JUGE ANTONETTI : En audience publique, nous attendons l'arrivée de

16 l'expert.

17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais d'abord vérifier que vous entendez

19 bien dans votre langue la traduction de mes propos. Si c'est le cas, dites

20 je vous comprends.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends et je vous comprends.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de vous faire prêter serment, je me dois de

23 vous identifier. Pouvez-vous nous donner votre nom, prénom, date de

24 naissance et lieu de naissance.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon nom est Vahid Karavelic. Je suis né au

Page 17600

1 village de Brezovik, la municipalité de Visoko en Bosnie-Herzégovine, le 7

2 avril 1956.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession ou fonction actuelle ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Rien de spécial.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'avez aucune activité ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Depuis ces quelques mois, enfin, ces derniers

7 mois, j'ai travaillé sur ce travail d'expert, sur la rédaction du travail,

8 du rapport.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais vous deviez avoir, avant de n'avoir aucune

10 activité, une activité. Si oui, laquelle, quelle était votre dernière

11 activité professionnelle ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant que je n'entreprenne ce travail sur le

13 rapport d'expert, j'ai passé quatre ou cinq mois à retrouver une vitesse de

14 croisière dans ma vie, après avoir pris ma retraite.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez pris votre retraite de quelle profession

16 ou de quelle fonction ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Après avoir servi à titre professionnel au

18 sein de l'armée de la Fédération de Bosnie-Herzégovine.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous pris votre retraite avec quel grade ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais le grade de général de brigade.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-on vous appeler général, aujourd'hui ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous le souhaitez.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, pouvez-vous indiquer également à la

24 Chambre, en 1992/1993, cela fait plus de 13 ans : quelle était à l'époque

25 votre activité ? Si c'était une activité militaire, pouvez-vous nous dire

Page 17601

1 où étiez-vous affecté ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992, au début de cette année-là, lorsque

3 l'agression sur la Bosnie-Herzégovine a commencé, j'ai été l'un des

4 premiers à avoir été nommé commandant de l'état-major du district de la

5 Défense territoriale pour le nord-est de la Bosnie, pour le district de

6 Tuzla, jusqu'à ce que j'ai été fait prisonnier, fin avril de cette même

7 année. Ensuite, après avoir été échangé, fin mai de cette même année, j'ai

8 commencé à travailler au sein de l'état-major en tant que chargé des

9 opérations, à savoir, l'état-major de la République de la Défense

10 territoriale de Bosnie-Herzégovine. Ensuite, avec la création de l'ABiH de

11 la Défense territoriale, je suis resté au sein de ce même état-major

12 jusqu'au

13 1er septembre 1992, en tant que l'un des officiers chargé des opérations.

14 A partir du 1e septembre 1992, jusqu'au mois d'août 1993, j'ai été

15 commandant adjoint du 1er Corps de l'ABiH à Sarajevo. Après cela, à partir

16 du mois d'août 1993, j'ai été commandant de ce même corps, jusqu'au mois

17 d'août 1995.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Une petite précision. Mon Général, avez-vous

19 déjà témoigné devant un tribunal international ou un tribunal national sur

20 les faits qui se sont déroulés dans votre pays en 1992/1993, ou c'est la

21 première fois que témoignez ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai déposé de nombreuses fois

23 devant de nombreux tribunaux de Bosnie-Herzégovine. Voire ici aussi à trois

24 reprises, mais sur ces trois reprises, je n'ai eu l'occasion de déposer

25 réellement qu'une fois. C'était dans l'affaire Galic, Stanislav Galic.

Page 17602

1 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans l'affaire Stanislav Galic, vous étiez un

2 témoin de l'Accusation ou un témoin de la Défense ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais un témoin de l'Accusation.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans les dossiers nationaux dans lesquels vous avez

5 témoigné, vous étiez témoin de l'Accusation, de la Défense, expert, vous

6 étiez dans quel statut ? Vous souvenez-vous des noms des affaires dans

7 lesquelles vous avez témoigné ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait plutôt d'une sorte de déposition

9 au sens où je donnais mes déclarations, ma déclaration. Je n'intervenais

10 pas directement, que ce soit au nom du Procureur ou de la Défense. Entre

11 autres, pour un certain nombre d'événements qui se sont produits dans la

12 zone de responsabilité de mon corps, tels que des événements connus qui se

13 sont produits en 1993, dans l'affaire Caco et Celo, c'est sur ce nom que

14 l'on connaît cette affaire, des problèmes eu égard aux brigades que j'avais

15 au sein de mon corps, donc je suis intervenu au sujet de cela, et aussi au

16 sujet d'une prison ou un lieu de détention, qui a existé également dans ma

17 zone de responsabilité à Turcin.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Pouvez-vous lire le serment.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

21 LE TÉMOIN: VAHID KARAVELIC [Assermenté]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, mon Général, vous pouvez vous

24 asseoir.

25 Avant de donner la parole à la Défense, qui va entamer l'interrogatoire

Page 17603

1 principal, je vais vous donner quelques éléments d'information, sur la

2 façon dont va se dérouler les audiences qui sont programmées sur plusieurs

3 jours.

4 Comme vous le savez vous avez été appelé par la Défense en qualité

5 d'expert; c'est uniquement en cette qualité que vous témoignez, vous êtes

6 un expert militaire qui va répondre à des questions de la Défense du

7 général Hadzihasanovic et du général Kubura, qui a estimé que vous deviez

8 venir apporter votre contribution à la manifestation de la vérité et afin

9 d'éclairer les Juges sur certains points, tenant à l'exercice du

10 commandement militaire ou à des points, en particulier, que la Défense

11 souhaite évoquer.

12 Pour cela, vous allez répondre. La Défense vous a indiqué

13 qu'elle a envisagé de vous poser des questions, pendant une durée grosso

14 modo de ce qui fait qu'il va y avoir plusieurs jours d'audience. Nous

15 allons commencer par aujourd'hui. D'ores et déjà, je vous annonce que

16 demain vous ne viendrez parce que demain, nous avons un témoin qui doit,

17 malheureusement, s'intercaler dans votre audition. Vous profiterez de votre

18 journée de demain, peut-être de faire du tourisme et de profiter du beau

19 temps qui s'est abattu sur notre région et de ce fait vous reviendrez

20 témoigner mercredi et jeudi. Il se trouve que vendredi en raison d'une fête

21 de l'ONU et de lundi, vous ne pourrez pas témoigner, ni vendredi, ni lundi,

22 les auditions reprendront mardi.

23 Comme je l'ai indiqué, la Défense va vous interroger pendant une durée de

24 huit heures. A l'issue de cette phase, l'Accusation, qui est située à votre

25 droite, vous posera également des questions dans le cadre du contre-

Page 17604

1 interrogatoire. La Défense nous a indiqués, peut-être, qu'elle ne prendra

2 pas huit heures, mais durera une certaine durée de temps où la Défense vous

3 posera des questions.

4 A l'issue de cette phase, les avocats des défenseurs vous poseront des

5 questions supplémentaires, qui seront en lien direct avec les questions

6 posées par l'Accusation. Lors de ces deux phases, des documents pourront

7 vous être présentés, d'ailleurs, la Défense qui a tout prévu met à votre

8 disposition sur votre droite des classeurs concernant les pièces qui vous

9 seront soumises, soit pour que vous donniez votre point de vue d'expert sur

10 ces pièces ou pour avoir des commentaires sur certains documents.

11 Les trois Juges qui sont devant vous pourront, s'ils estiment nécessaire,

12 également vous poser des questions. Puisque vous êtes un expert militaire,

13 et comme nous sommes dans une affaire concernant des militaires, il se peut

14 que les Juges aient également à vous poser des questions, soit pour

15 éclaircir des documents ou des points qui auront été évoqués lors de votre

16 témoignage, soit parce qu'ils estiment que, compte tenu de votre qualité

17 d'expert, vous pouvez dans l'intérêt même de la justice apporter une

18 contribution utile à des interrogations que pourraient avoir les Juges.

19 Lorsque les Juges vous poseront des questions, sans aucun parti pris, soit

20 pour la thèse de l'Accusation ou la thèse de la Défense, les Juges laissent

21 à ce moment-là aux parties le soin de reposer derrière les questions des

22 Juges, toutes questions qui leur semblent utiles et appropriées, et à ce

23 moment-là, tant l'Accusation que la Défense reprennent la parole pour poser

24 des questions afin de vous faire préciser tous points utiles suite aux

25 réponses que vous avez données aux Juges.

Page 17605

1 Bien que vous soyez expert, je me dois d'appeler votre attention sur deux

2 points importants de notre procédure : le premier, c'est que vous avez juré

3 de dire toute la vérité, ce qui exclu tout faux témoignage, et cela vous ne

4 pouvez que bien le comprendre; le deuxième point est d'ordre tout à fait

5 technique. Un témoin peut refuser de répondre à une question s'il estime

6 qu'un jour la réponse à la question posée pourrait se retourner contre lui

7 et constituer des éléments à charge. Mais dans cette hypothèse, rassurez-

8 vous que nous ne l'avons jamais rencontré jusqu'à présent. La Chambre peut

9 demander au témoin de répondre quand même, mais la Chambre dans cette

10 hypothèse vraiment exceptionnelle garantit à ce moment-là au témoin une

11 forme d'immunité, à savoir que ses propos ne pourront pas être utilisés

12 contre lui. C'est une disposition qui existe dans notre règlement et dont

13 je tenais à vous informer.

14 Par ailleurs, nous sommes, même si nous avons des mesures de pièces, dans

15 une procédure essentiellement orale. Ce qui va compter dans votre

16 déposition, ce sont les propos que vous allez tenir et les propos que vous

17 allez tenir sont traduits. Vous le voyez devant vous, il y a un écran, sont

18 traduits en langue anglaise, et ce sont ces propos qui constitueront

19 l'intégralité de votre déposition, d'où l'importance des réponses que vous

20 donnez aux questions posées.

21 Si vous ne comprenez pas le sens d'une question, demandez à celui qui vous

22 la pose de la reformuler en termes clairs, car il faut que votre réponse

23 soit utile pour les Juges. Car si vous êtes là, c'est bien entendu, pour

24 que les Juges puissent apprécier certains éléments, éléments qui sont

25 portés à notre connaissance au travers soit du rapport que vous avez déjà

Page 17606

1 rédigé, mais également du complément que vous allez apporter en répondant à

2 des questions, d'où l'importance, bien entendu, de votre déclaration orale.

3 Comme je l'ai indiqué, si vous ne comprenez pas le sens d'une question,

4 demandez à celui qui vous la pose de bien la reformuler.

5 Pendant cette audience, nous sommes, pour des raisons techniques, obligés

6 de faire des suspensions toutes les heures et demie afin de permettre aux

7 interprètes de se reposer, mais également aux techniciens de changer les

8 bandes, et également afin que vous puissiez, vous-même, vous reposer, car

9 vous allez vous en apercevoir, répondre sans arrêt à des questions parfois

10 hautement techniques, cela peut être épuisant. Vous avez également le droit

11 de vous reposer. Si vous estimez qu'il faut allonger les pauses, n'hésitez

12 pas à nous le demander, car répondre pendant des heures durant à des

13 questions, comme je l'ai indiqué, vous verrez à la fin, vous serez

14 totalement épuisé.

15 Je compte évidemment sur la Défense pour ne pas trop vous harceler de

16 questions afin de vous permettre de répondre normalement. Par ailleurs, je

17 dois vous indiquer, mais la Défense vous le dira, comme vous allez vous

18 exprimer dans votre langue, prenez du temps afin de permettre aux

19 interprètes de nous faire, en langue anglaise et en langue française, une

20 traduction appropriée de vos propos. Voilà de manière très générale la

21 façon dont va se dérouler cette audience qui au minium est prévue sur deux

22 semaines.

23 Je vais maintenant donner la parole aux avocats qui vont commencer

24 l'interrogatoire. Compte tenu du fait que le pupitre est devant Me Bourgon,

25 je crois que c'est Me Bourgon qui va commencer l'interrogatoire.

Page 17607

1 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

2 Avant de débuter, j'aimerais apporter deux précisions : la première, c'est

3 qu'il semble y avoir un problème avec le compte rendu d'audience qui, par

4 moment, ne reflète pas tout à fait les propos du témoin. Je ne sais pas si

5 je suis le seul à voir l'écran, mais par moment, j'ai de la difficulté à

6 voir les mots sur l'écran. Je ne sais pas si c'est un problème technique ou

7 si les autres ont le même problème, mais cela risque de compliquer les

8 choses pour l'utilisation du transcript le soir.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : On va suivre cela de très près.

10 M. BOURGON : Le deuxième point, Monsieur le Président, concernant la durée

11 de l'interrogatoire principal. Ce que j'avais annoncé à la Chambre la

12 semaine dernière, c'est que la Défense comptait utiliser 12 heures pour

13 interroger le témoin expert, étant donné les circonstances et le témoin qui

14 sera entendu demain, je vais essayer de réduire le plus possible

15 l'interrogatoire principal, et je doute, toutefois, être en mesure d'aller

16 en deçà de dix heures.

17 Merci, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Faites pour le mieux, Maître Bourgon.

19 Interrogatoire principal par M. Bourgon :

20 Q. [interprétation] Bonjour, mon Général.

21 R. Bonjour.

22 Q. Permettez-moi de me présenter moi-même ainsi que ma collègue. Je suis

23 Stéphane Bourgon. Ma collègue est Me Residovic. Ensemble, nous représentons

24 ici l'accusé le général Hadzihasanovic.

25 Comme vous le savez, Général, votre déposition s'applique aux deux accusés.

Page 17608

1 Je saisis l'occasion pour vous présenter aussi mes collègues qui sont assis

2 derrière, Me Fahrudin Ibrisimovic et aussi M. Nermin Mulalic. Ils

3 représentent le général Kubura. Ensemble, nous représentons les deux

4 accusés. J'ai quelques questions à vous poser au sujet de votre rapport

5 d'expert qui vient d'être versé au dossier, en l'espèce, en tant que pièce

6 2088.

7 Comme vous l'avez entendu, je viens de le dire au Président, nous

8 passerons, je pense, dix heures ensemble. Comme vous pouvez l'imaginer,

9 j'ai une série de sujets à couvrir avec vous. Avant de commencer, je

10 voudrais cependant vous poser quelques questions au sujet de votre

11 expérience, de votre parcours militaire. Même si vous avez annexé votre

12 curriculum vitae à votre travail d'expert, je pense qu'il est important que

13 l'on voit les postes que vous avez occupés afin de pouvoir jeter les bases

14 de votre déposition en tant qu'expert.

15 Je commencerai par le début de votre carrière militaire, à partir du début

16 jusqu'au moment où vous avez déserté les rangs de la JNA. Je pense que vous

17 avez déserté en 1991. Général, pouvez-vous brièvement décrire quels sont

18 les postes que vous avez occupés depuis le début de votre carrière jusqu'en

19 1991.

20 R. J'ai terminé l'école secondaire à Visoko en 1975. A partir de cette

21 année-là, je suis militaire et je suis membre de la JNA.

22 En 1979, je suis sorti diplômé de l'Académie militaire de Belgrade. A

23 partir de 1979 jusqu'à 1982, j'ai été commandant d'un peloton à l'école de

24 formation à Bileca, à l'école de formation de la JNA, de formation des

25 officiers.

Page 17609

1 A partir de 1982, j'ai été muté pour devenir commandant d'une compagnie

2 d'infanterie en Slovénie, à Pivka, près de la frontière italienne.

3 A partir de 1985 jusqu'en 1988, j'ai suivi un cours de six mois à Sarajevo

4 pour pouvoir devenir commandant de bataillon au sein de l'armée populaire

5 yougoslave. Pendant cette même période, en 1988, je suis devenu commandant

6 du bataillon motorisé, commandant du Bataillon A à Ljubljana, et j'ai

7 occupé ce poste jusqu'à la fin de l'année 1991.

8 A la fin de l'année 1991, à la mi-décembre, j'ai déserté. J'ai

9 déserté de l'armée populaire yougoslave, de la caserne à Tuzla. Mon grade,

10 à ce moment-là, était celui de capitaine de première classe, même si

11 pendant que j'étais commandant du bataillon en 1989, j'avais réussi

12 l'examen final pour obtenir le grade de commandant à Belgrade. J'ai omis de

13 dire quelques faits importants, à savoir, en 1991, après l'attaque de la

14 JNA sur la république de Slovénie le 26 juin, peu de temps après cela, le

15 20 août de cette même année, avec mon unité, j'ai été réaffecté de

16 Ljubljana au centre de Bosnie-Herzégovine dans la caserne de Zenica. Deux

17 mois plus tard, j'ai été redéployé avec mon unité de la caserne à Zenica

18 dans une nouvelle caserne au nord-est de Bosnie-Herzégovine à Tuzla. C'est

19 de là que j'ai déserté à la mi-décembre.

20 Q. Merci, Général.

21 M. BOURGON : Je voudrais faire une observation concernant le compte rendu

22 d'audience qui ne permet pas de reprendre ou de voir les propos du témoin.

23 Je ne sais pas s'il faut prendre -- si une pause est préférable à ce stade-

24 ci pour régler ce problème avant d'entrer dans les questions de fond ou

25 s'il s'agit d'un autre problème qui ne peut être résolu.

Page 17610

1 M. LE JUGE ANTONETTI : Même sur l'autre écran à côté c'est pareil ?

2 M. BOURGON : C'est la même chose, Monsieur le Président, sur les trois

3 écrans ici.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause.

5 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Le mieux c'est qu'on fasse la pause parce qu'on va

7 faire venir le technicien.

8 On reprendra aux environs de 15 heures 40.

9 --- L'audience est suspendue à 15 heures 13.

10 --- L'audience est reprise à 15 heures 46.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Je crois que la technique a

12 fait office et cela marche.

13 M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Q. [interprétation] Soyez le bienvenu encore dans ce prétoire, mon

15 Général. Avant de marquer une pause pour des raisons techniques, dans votre

16 déposition, vous étiez à faire une description à l'intention de la Chambre

17 de première instance vos activités de militaire, du moment où vous êtes

18 entré dans l'armée en 1975 jusqu'au moment où vous avez déserté la JNA en

19 1991.

20 Maintenant, je voudrais vous demander pourquoi quelles raisons vous avez

21 déserté des rangs de la JNA à cette époque-là ?

22 R. J'ai dit avoir été membre de l'armée populaire yougoslave de 1975

23 jusqu'à la fin de l'année 1991. Jusqu'en 1991, pour ce qui est de l'armée

24 populaire yougoslave, je la sentais comme étant véritablement la mienne.

25 En 1991, de nombreux problèmes ont surgi, probablement, dus à ce qui

Page 17611

1 s'était produit quelques années avant cela, surtout dans les années 90 dus

2 à des problèmes d'ordre politique qui se sont opérés dans la République

3 sociale fédérale de Yougoslavie.

4 En effet, lorsque, le 26 juin 1991, une attaque a été perpétrée

5 contre la Slovénie, je vous ai dit que j'étais en qualité de commandant

6 dans le Bataillon motorisé. J'ai eu l'occasion de voir, d'observer et de

7 connaître de nombreux faits qui, en vérité, je me dois de vous l'avouer,

8 m'ont fortement surpris. En effet, d'un jour à l'autre, à commencer par

9 l'été 1991, l'armée populaire yougoslave allait de plus en plus dans un

10 sens qu'on devrait intituler comme étant le sens de la lutte engagée pour

11 les intérêts d'un seul peuple de l'ancienne Yougoslavie, à savoir du peuple

12 serbe. Ce fait-là, je l'ai constaté dans de nombreuses de mes activités.

13 Dans mon bataillon j'avais un grand nombre d'officiers qui étaient, du

14 point de vue de leur appartenance ethnique, membres de tous les groupes

15 ethniques de l'ex-Yougoslavie. A la différence des relations qui régnaient

16 préalablement, je me suis rendu maintenant faire des relations qui ont été

17 tout à fait différentes à l'égard de ceux qui ont été non-Serbes. Depuis

18 lors, j'ai été de muté de Ljubljana à Zenica; j'avais comme second un

19 officier qui, peut-être, devait avoir trois ou quatre ans moins que moi,

20 qui répondait au nom de Vinko Pandurevic, qui ne pouvait aucunement être

21 élève officier à l'Académie de commandement de l'état-major de Belgrade.

22 Mais, voilà, que lorsque j'ai été muté, lui, tout simplement, mon second

23 préalable, était devenu maintenant un officier de l'état-major de Belgrade.

24 C'est là qu'il y a eu une érosion de cadres parmi deux, notamment, qui

25 était les officiers non-serbes. Très vite, cela sera la majorité ce sera la

Page 17612

1 même situation parmi les troupes.

2 Lorsque le 22 octobre, deux mois plus tard, j'ai été muté à Tuzla, a-

3 t-on eu l'idée de m'envoyer, de me dépêcher à la tête de mon bataillon pour

4 mener des combats à Vukovar, qui se trouve dans la partie nord-est de la

5 Croatie, pour remplacer un bataillon qui avait déjà été dépêché et qui lui

6 aussi venait de Tuzla. Dans tous ces préparatifs et lors des attentes qui

7 étaient les mienne, pendant une nuit et je ne vous présente que cet

8 exemple-ci, pendant une nuit, donc, j'ai été réveillé. Une fois réveillé,

9 je suis sortie pour me rendre compte qu'il y avait une masse de soldats

10 devant moi, j'ai pu voir énormément de soldats, un très grand nombre de

11 soldats qui à leur couvre-chefs avaient les insignes que nous appelons

12 comme étant les cocardes. Parmi ces troupes-là, j'ai pu avoir la

13 possibilité de voir mon adjoint, mon second, Vinko Pandurevic.

14 Or, celui-ci, une fois venu à Belgrade, l'Académie du commandement de

15 l'état-major a cessé de travailler, lui, il a pris une unité de la partie

16 centrale de Serbie pour la mener en direction de Knin en République de

17 Croatie pour mener des combats. Or, cette nuit-là, n'était-il que de

18 passage à Tuzla. Cette nuit-là, ne serait-ce que pour quelques moments,

19 j'ai pu me rendre compte du fait, pour prouver ce que j'avais ressenti

20 auparavant, que l'armée populaire n'est plus mon armée à moi, et que ce

21 n'est plus seulement de tous mais qu'elle ne défendait que les intérêts des

22 uns et d'aucun, c'est-à-dire, la Serbie.

23 Aussitôt après, j'ai déserté de l'armée. Jusqu'à ce moment-là,

24 jusqu'au moment de cette désertion, il m'est difficile, évidemment, de vous

25 préciser le chiffre exacte de parler de ces gens-là, mais je dirais que

Page 17613

1 plus de 70 % ou 80 % du total des cadres officiers et des troupes non-

2 serbes avaient déjà déserté et cela dit, je parle de mon bataillon, du

3 bataillon dont j'étais le commandant.

4 Q. Mon Général, lorsqu'en 91, vous désertez de la JNA; qu'avez-vous fait

5 très exactement ? Si oui, si vous avez, par exemple, rejoint les effectifs

6 d'une autre armée, dites-nous : où, comment, et en quelle qualité, et à

7 quelle fonction avez-vous été nommé ?

8 R. Lorsque vers le milieu du mois de décembre 91, j'ai déserté des rangs

9 de l'armée populaire yougoslave, un avis de recherche avait été envoyé

10 après moi pour arriver à la police de Visoko, c'est-à-dire, où j'avais

11 toutes mes matricules. Il s'agissait d'ailleurs d'un document qui émanait

12 du tribunal militaire de Sarajevo.

13 Par la même occasion, j'ai dû cherché un travail, un emploi; à la recherche

14 d'un emploi, je dois dire que c'est mon père qui m'a aidé et certains de

15 mes amis qui ont essayé de m'assister pour que je trouve un emploi peut-

16 être si possible à la police. A la recherche d'un travail, pensant avoir

17 trouvé un emploi, voilà que, vers la fin de 1991, en début de 1992, je

18 tombe et atterri, pour ainsi dire, en pleine réunion avec Sefer Halilovic

19 et Karisik Kemo. Il s'agit de deux hommes qui, à cette époque-là, étaient à

20 la tête d'une organisation qui, à bien des égards, dans pas mal de ses

21 segments, avaient déjà été formés. Il s'agissait de la Ligue patriotique.

22 Ils me posent la question de savoir si je voulais prendre part en vue de

23 mobiliser et sensibiliser les citoyens de Bosnie-Herzégovine, en vue de se

24 préparer à défendre la Bosnie-Herzégovine si une agression était perpétrée

25 contre la Bosnie-Herzégovine.

Page 17614

1 Chose acceptée par moi. Or, après quelque temps en janvier 1992, j'ai

2 été dépêché en qualité de coordinateur vers la Bosnie nord-est, dans la

3 région de Tuzla, où, en janvier, février et mars, j'ai dû travailler en

4 tant que coordinateur de la Ligue patriotique de la région de Tuzla, pour

5 embrasser par mes activités environ 19 municipalités. J'ai dû permettre à

6 ce que des contacts se soient établis avec des gens et en vue de

7 sensibiliser les citoyens de cette région. en vue d'une défense éventuelle

8 de la Bosnie-Herzégovine au cas où celle-ci aurait été agressée.

9 Chose faite par moi jusqu'au 6 avril 1992, en quelle date la Bosnie-

10 Herzégovine a été reconnue comme étant un Etat, un sujet internationalement

11 reconnu. Après quoi, le 12 avril 1992, lorsqu'une nouvelle Défense

12 territoriale de Bosnie-Herzégovine a été établie, de même que son quartier

13 général de la République, j'ai été nommé commandant du QG du district de la

14 région de Tuzla, c'est-à-dire, de cette région nord-est de Bosnie-

15 Herzégovine.

16 Q. Mon Général, pouvez-vous dire maintenant, à l'intention de la Chambre

17 de première instance, ce qu'il était advenu de vous personnellement une

18 fois que vous avez été nommé commandant du QG de district de Tuzla, QG de

19 la Défense territoriale ?

20 R. Jusqu'alors, je me trouvais dans la région, de temps à autre, avais-je

21 reçu des instructions et des directives du sommet politique de Bosnie-

22 Herzégovine. J'ai dû me rendre dans plusieurs municipalités de la région

23 nord-est de Bosnie pour établir des contacts avec des citoyens et auprès

24 des citoyens, leur demandant qu'ils en fassent autant en retour pour

25 contacter des gens en Bosnie-Herzégovine, au cas où il y aurait une

Page 17615

1 agression contre le pays, pour qu'ils se trouvent prêts et bien préparés

2 pour défendre leurs villages, leurs hameaux, leurs maisons, leurs cités et

3 villes et en définitive leur Etat.

4 Le 1er avril 1992, lorsque toujours dans cette région, et proprement dit

5 dans cette région une agression a été perpétrée contre la Bosnie-

6 Herzégovine, plus précisément contre Bijeljina. Il s'agit d'une ville qui

7 se trouve à l'angle même de la région nord-ouest de Bosnie-Herzégovine. Il

8 s'agissait d'une incursion des hommes d'Arkan dans cette ville. J'ai tenté

9 d'organiser la défense et de défendre la ville. Je n'y ai pas réussi. Après

10 quoi, lorsque la Bosnie-Herzégovine a été reconnue internationalement

11 parlant le 6 avril, deux jours plus tard, le 8 avril 1992, une attaque

12 encore plus farouche a été lancée contre la ville de Zvornik, qui se trouve

13 au sud de Bijeljina et qui longe cette île là également, la frontière qui

14 sépare le territoire d'avec la République de Serbie. Trois semaines

15 entières ai-je dû défendre cette ville ? Le 26 avril, nous l'avons perdue.

16 Nous n'avons pas pu défendre la ville.

17 Entre-temps, le 12 avril, j'ai été nommé commandant du QG de la

18 Défense territoriale de Tuzla. Le lendemain, à parler de cette date-là, à

19 savoir en date du 27 avril 1992, étant donné que dans la région de la

20 Bosnie du nord-est il y avait encore beaucoup d'unités dans les casernes de

21 la JNA de Tuzla et d'autres villes, et étant donné que la situation

22 politique et militaire était trouble, confuse, incertaine, que l'on ne

23 pouvait même pas soupçonner quant à ses évolutions. Etant donné ces

24 circonstances-là, lorsque Osmo Dzudzakovic de Zivinice m'a invité pour

25 venir le rencontrer à midi, par suite de problèmes ressentis à l'aéroport

Page 17616

1 militaire de Zivinice près de Tuzla, faute de pouvoir s'approvisionner,

2 notamment, lorsqu'il s'agit des points avancés de cette unité, je suis venu

3 à cette réunion.

4 Le commandant Pracar, commandant second étant dans sa pièce, dans son

5 bureau avec deux policiers militaires. Une fois que j'étais venu, j'ai été

6 désarmé et en un rien de temps, on m'a transféré à l'aéroport de Dubrava,

7 après quoi j'ai été héliporté le même jour vers les heures d'après-midi en

8 direction de Belgrade, et à bord d'un véhicule, de Belgrade, on m'a

9 transféré à la prison de Sremska Mitrovica.

10 A la prison de Sremska Mitrovica, je resterai jusqu'au 9 mai, où j'ai été

11 jugé par trois colonels. A la fin, on m'a dit que le plus vrai

12 semblablement ceci devait être la peine capitale qui devait être la forme

13 de la décision à prendre, lorsqu'on m'a demandé ce que j'aurais préféré

14 comme moyen d'exécution, j'ai dit une balle. Soudainement, la même date, le

15 9 mai, j'ai été transféré à Belgrade, et à bord d'un hélicoptère depuis

16 Belgrade directement en Bosnie-Herzégovine vers Pale au dessus de Sarajevo.

17 Lorsque le 13 mai en 1992, j'ai été échangé à Stup, un lieu qui se trouve à

18 un endroit dans la ville de Sarajevo, j'ai été échangé grâce aux évolutions

19 qui se sont déroulées le 10 mai 1992 à Sarajevo. En effet, c'est à cette

20 occasion que le président de la Bosnie-Herzégovine, Alija Izetbegovic, a

21 été arrêté à l'aéroport de Sarajevo lorsqu'il était de retour de

22 pourparlers de Genève. Lorsqu'il y avait cet échange contre le général

23 Kakanjac, il y avait l'événement fatidique de Sarajevo en date du 2 mai, à

24 laquelle occasion environ 200 officiers de l'armée populaire yougoslave ont

25 été capturés, parmi lesquels une figure de proue parmi les officiers, un

Page 17617

1 des adjoints du général Aco Vasiljevic, c'est-à-dire, l'homme numéro un en

2 matière de sécurité dans les rangs de l'armée populaire yougoslave.

3 Pour récupérer ces officiers, de leur côté, j'y ai vu évidemment une chance

4 pour moi de me faire échanger sans évidemment en connaître les détails pour

5 ce qui est des échanges.

6 Q. Merci, mon Général. Je voudrais vous demander maintenant ce qui s'était

7 passé après cet échange. Mais avant de répondre à cette question, dites-moi

8 vous avez fait mention de Ligue patriotique, je voudrais tout simplement

9 vous demander de nous dire quelque chose de plus, de plus en détails de la

10 Ligue patriotique. Quand avez-vous rejoint les rangs de la Ligue

11 patriotique ? Qu'est-ce que représentait cet organisme ? Qu'est-ce qu'il

12 était devenu définitivement ? Qu'est-ce qu'il s'était passé lorsque la

13 Bosnie-Herzégovine est devenue un Etat souverain ?

14 R. La Ligue patriotique était un organe militaire officieux sans avoir de

15 structure d'organisation propre. Il s'agissait d'un organisme que les gens

16 rejoignaient plutôt sur des bases bénévoles. En vérité, c'est en

17 travaillant à la Ligue patriotique et surtout à des niveaux différents,

18 jusqu'au sommet, que j'ai pu voir pas mal de conclusions qui ont été

19 adoptées. Il s'agissait de conclusions, d'appréciations et évaluations où

20 on pouvait lire que la Ligue patriotique est organisée au cas où il y

21 aurait une agression perpétrée contre la Bosnie-Herzégovine.

22 Lors de nos travaux, réunions, consultations, notamment à celles du 6

23 à 7 février dans le village de Mehurici, il y avait les commandants des

24 quartiers généraux de district de la Ligue patriotique pris dans son

25 ensemble. Cette réunion a duré 24 heures. La réunion a eu lieu dans une

Page 17618

1 maison de la localité. Or, en conclusion, avons-nous reçu une espèce de

2 plate-forme politique, c'est un document qui figure parmi nos documents et

3 entre autres en une phrase ou deux, tout se résume comme quoi la Ligue

4 patriotique doit s'organiser à un degré souhaitable, à savoir pour la

5 simple et bonne raison, que l'agression contre la Bosnie-Herzégovine

6 s'avérait de plus en plus évidente. Pour s'organiser, la Ligue patriotique

7 devait y faire entrer dans cette défense, tous les citoyens de Bosnie et

8 Yougoslavie, la Ligue patriotique ayant pour but majeur, si jamais

9 l'agression est perpétrée, au cas où il y a lieu et nécessité de défendre

10 la Bosnie-Herzégovine, celle-ci devrait donner lieu à la future force armée

11 de Bosnie-Herzégovine pour défendre la Bosnie-Herzégovine, défendre le pays

12 qui est la Bosnie-Herzégovine, l'état que celle-ci représente, en prenant

13 la défense de tous les citoyens, de tous les hommes, de toutes les femmes

14 sans distinction aucune.

15 Q. Merci, mon Général. Maintenant, que vous avez été dans l'un des

16 commandants du QG de district de la Défense territoriale à Tuzla, c'est-à-

17 dire, maintenant que nous avons vu que la Bosnie-Herzégovine était reconnue

18 indépendante, qu'est-il advenu de la Ligue patriotique ?

19 R. Le 6 avril, lorsque la Bosnie-Herzégovine a été internationalement

20 reconnue comme étant un Etat souverain, deux jours plus tard, le 8 avril,

21 la présidence de Bosnie-Herzégovine prend un décret moyennant lequel, entre

22 autres, l'intitulé : "La désignation de la République a déjà été modifiée,"

23 c'est-à-dire, par la même occasion a été dissout l'ancien quartier général

24 de la Bosnie, République socialiste, pour donner lieu à un nouveau quartier

25 général, de la défense de la République de Bosnie-Herzégovine. Le

Page 17619

1 lendemain, un nouveau décret a été adopté, moyennant lequel, furent

2 établies les forces armées, sous le nom de Défense territoriale de la

3 République de Bosnie-Herzégovine. Dans ce décret, on pouvait lire entre

4 autres, que jusqu'alors, quelque soit les forme de toute unité ou

5 formation, celle-ci était tenue de se joindre dans les quartiers généraux

6 de la république, c'est-à-dire, de district, c'est-à-dire, des

7 municipalités pour se soumettre sous le commandement de ces QG, de ces

8 trois échelons différents, pour se placer sous le contrôle et le

9 commandement unique du QG suprême de la Défense de la République de Bosnie-

10 Herzégovine. Le délai a été fixé, à savoir, le 15 avril 1992. Ceux, qui ne

11 se seraient pas soumis à cette chaîne de commandement, se verraient

12 encourir des sanctions légales.

13 Après le 15 avril 1992, la Ligue patriotique n'existait plus pour ainsi

14 dire.

15 Q. Mon Général, je vous prie de nous décrire brièvement l'état dans lequel

16 vous vous trouviez, vous-même, au moment où vous avez fait l'objet d'un

17 échange à Sarajevo, et dites-nous : qu'avez-vous fait une fois que vous

18 avez été échangé ?

19 R. Lorsque j'ai été échangé en date du 13 mars -- 13 mai 1992, j'ai passé

20 d'abord un certain temps à l'hôpital pour me ressaisir et me faire soigner

21 des conséquences dues à ma détention de la prison de Sremska Mitrovica.

22 Après quoi, j'ai rejoint le QG de la Défense territoriale de la République,

23 placé sous le commandement du général Hasan Efendic, premier commandant du

24 QG de la République de la Défense territoriale. Une fois que Sefer

25 Halilovic a pris ses fonctions pour venir donc remplacer Hasan Efendic,

Page 17620

1 j'ai continué à vaquer à ces occupations. Au QG j'ai toujours été à la même

2 fonction, une fois que l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine a été

3 établie, je demeure encore toujours à l'état-major général à des officiers

4 chargés des opérations jusqu'au 1e septembre 1992, en quelle date j'ai été

5 nommé commandant adjoint du 1er Corps d'armée de l'ABiH.

6 Q. Merci, mon Général. Dans le curriculum que nous pouvons lire, et qui se

7 trouve joint en annexe, je peux voir qu'en septembre 1992, vous avez été

8 nommé commandant en second du 1er Corps, après quoi vous avez été nommé le

9 commandant du Corps d'armée en juillet 1993, pour rester à cette fonction

10 jusqu'à 1995, lorsque vous avez été nommé commandant du commandement de la

11 Bosnie occidentale. Après quoi, depuis ce moment-là, et par la suite

12 jusqu'en 1995, vous avez été chef de la Direction chargée de question

13 opérationnelle au quartier général suprême ?

14 R. Oui, mais pour parler d'un laps de temps assez court, j'ai été aussi

15 également à la fonction de commandant du commandement de la Bosnie

16 occidentale de Novi Travnik.

17 Q. Sur la base de ce que nous pouvons lire dans votre curriculum, vous

18 avez été promu en 1993, au grade de brigadier, et en 1999, vous avez été

19 promu au grade de général de brigade de l'ABiH, est-ce exact ?

20 R. Oui, en décembre 1993, j'étais promu au rang de brigadier, et en

21 juillet plutôt 1982 -- 1999 j'ai été promu au grade de général de brigade,

22 cela est exact.

23 Q. Au cours de votre carrière, avez-vous suivi une formation quelconque en

24 matière de commandement militaire ou de gestion.

25 R. Après la guerre, j'ai été envoyé pour assister à un nombre de cours et

Page 17621

1 séminaires organisés par l'OTAN, et d'autres des organisations

2 internationales. Notamment du mois de décembre 1997 jusqu'au mois de mai

3 1999, c'est-à-dire, pendant environ un an et demi, je suis resté aux Etats-

4 Unis et j'ai passé quelque temps à San Antonio au Texas, puis à Monterrey

5 dans une école pour les officiers de marine, j'ai suivi des cours intitulés

6 : "Gestion matérielle," ce qui correspond à l'utilisation des ressources

7 d'un pays en vue de sa défense.

8 Ensuite, j'ai participé à de nombreux cours organisés par l'OTAN,

9 notamment, à Garmisch Parten Kirchen et beaucoup d'autres cours en Norvège,

10 en Croatie, en Allemagne et ainsi de suite.

11 Q. Dans votre biographie --

12 R. J'ai participé à de nombreux séminaires également organisés par le

13 partenariat pour la Paix, des séminaires qui se tenaient de temps à autre

14 et qui suivaient les cours précédemment suivis, dont il y avait un certain

15 suivi dans ces formations.

16 Tous ces cours, toutes ces formations qui ont eu lieu après la guerre et

17 que j'ai suivis jusqu'au moment de ma retraite étaient consacrés à la

18 gestion et à l'installation de la paix en ex-Yougoslavie dans les Balkans

19 et en Europe.

20 Q. Merci, mon Général. Dans votre curriculum vitae, vous précisez que vous

21 avez obtenu une maîtrise de sciences en 1992 à l'université de Sarajevo à

22 la faculté de Sciences politiques; est-ce exact ?

23 R. Non, pas en 1992, mais en 2002. Ceci doit être une erreur.

24 Q. C'est ce qui figure dans votre curriculum vitae, joint à votre rapport

25 d'expert. Il est question de l'année "1992". Avez-vous obtenu une maîtrise,

Page 17622

1 le cas échéant, en quelle année ?

2 R. Oui, j'ai obtenu une maîtrise à la faculté de Sciences politiques de

3 Sarajevo en 2002, au mois de juillet. J'ai obtenu cette maîtrise de

4 Sciences politiques.

5 Q. Mon général, est-ce que vous avez écrit une thèse ou un mémoire de

6 maîtrise ? Le cas échéant, quel en était le sujet ?

7 R. Ma thèse de maîtrise portait sur les : "Préparatifs politiques et

8 militaires aux vues de l'agression contre la Bosnie-Herzégovine et leur

9 mise en œuvre dans la région de la Bosnie, du nord-est en 1991 et 1992."

10 Q. Dans votre curriculum vitae, il est également mentionné que vous avez

11 reçu une récompense pour votre contribution et vos efforts au sein de la

12 Ligue patriotique, ainsi qu'une autre récompense pour votre service dans

13 l'armée ?

14 R. J'ai reçu de nombreuses récompenses au sein de ma carrière dans l'armée

15 populaire yougoslave également, alors que j'étais membre de la Ligue

16 patriotique, il est exact que j'ai reçu une récompense; toutefois, ce n'est

17 pas la présidence de la Bosnie-Herzégovine qui m'a remis cette récompense,

18 mais un échelon inférieur. S'agissant de l'autre récompense qui m'a été

19 remise, je l'ai reçue en 1997, cette récompense m'a été remise par le

20 président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine, pour ma contribution à

21 la défense de la Bosnie-Herzégovine au cours de la période allant de 1992 à

22 1995. Après la guerre, j'ai reçu d'autres récompenses.

23 Q. Mon Général, dans votre rapport d'expert, vous avez cité un ouvrage

24 dont me semble-t-il vous êtes l'auteur. Est-ce que vous pourriez nous dire

25 quel est l'objet de cet ouvrage et à quelle date il a été écrit ?

Page 17623

1 R. J'ai publié un livre intitulé : "L'agression contre la Bosnie-

2 Herzégovine de 1991 à 1992." Ce livre est le produit de ma thèse de

3 maîtrise.

4 Q. Avant d'aborder la première question principale dont nous allons

5 parler, compte tenu du fait que vous étiez commandant du 1er Corps, je

6 souhaiterais que vous nous décriviez brièvement la situation dans laquelle

7 vous vous êtes retrouvé en tant que commandant du 1er Corps en 1993 et au

8 cours de la période qui a suivi ?

9 R. En 1992 et en 1993, à Sarajevo, j'ai été d'abord membre de l'état-major

10 de la Défense territoriale de la République, puis commandant en second du

11 1er Corps. En 1993, je suis devenu le commandant du 1er Corps et ce qui est

12 important s'agissant du deuxième semestre de l'année 1992 et du début de

13 l'année 1993, c'est que la situation à Sarajevo était la suivante : le

14 système politique, le fonctionnement de l'Etat à hauteur de 60 ou 70, voire

15 80 % était détruit, et n'existait plus en tant que tel. Le système de

16 défense du pays pouvait être décrit de la même manière, voire pire, et ce

17 pour la simple raison que la majorité de la population serbe était partie,

18 avait quitté les structures politiques de l'Etat, ainsi que les structures

19 de défense militaire. Tout cela s'est accompagné d'un exode de la

20 population croate également dans une moindre mesure. Ceci montre que du

21 point de vue de l'organisation de la défense de la ville de Sarajevo

22 pendant l'été 1992, la situation était extrêmement confuse, au point qu'on

23 ne savait pas vraiment qui donnait les ordres, ni qui était censé les

24 exécuter, qui se trouvait où. Il n'y avait pas de véritables communications

25 entre les nombreuses et différentes unités qui ont été constituées dès le

Page 17624

1 mois d'avril 1992, dans différentes parties de la ville de Sarajevo. Tandis

2 que l'ennemi même, avant le mois d'avril 1992, avait pris le contrôle des

3 positions situées autour de la ville de Sarajevo. Il a pris le contrôle de

4 tous les points élevés, si bien que la ville de Sarajevo, en tant que

5 capitale de l'état de Bosnie-Herzégovine, était totalement encerclé,

6 bloquée, que seul les oiseaux pouvaient entrer ou sortir de la ville.

7 En plus de l'encerclement et du blocus de la ville de Sarajevo, de

8 nombreuses casernes étaient remplies de soldats de l'armée populaire

9 yougoslave. Parmi eux, la communication était bonne, et compte tenu de la

10 dispersion des différents groupes hostiles dans la ville de Sarajevo, étant

11 donné que l'objectif général était dans une période de temps brève se

12 montant à quelques jours ou quelques semaines d'agir simultanément de

13 l'extérieur et de l'intérieur, les effectifs cantonnés dans ces casernes

14 ont été déployés dans la ville de Sarajevo. Une action conjointe a été mise

15 en place, dont l'objectif était la capitulation des dirigeants politiques

16 de Bosnie-Herzégovine, afin que la Bosnie-Herzégovine devienne partie

17 intégrante de la nouvelle Yougoslavie, ou plutôt de la grande Serbie.

18 L'une des dates fatidiques était le 2 mai, dont j'ai parlé un peu plus tôt,

19 un peu plus tard au cours de l'été 1992, le QG de la Défense territoriale

20 de district de Sarajevo, qui fonctionnait à l'époque, et dirigé par Mustafa

21 Hajrulahovic, surnommé l'Italien, s'est efforcé d'établir la liaison entre

22 les différentes et nombreuses unités de moindre envergure. Ceci était très

23 difficile, car ces unités devaient être reliées, développées, et une chaîne

24 de commandement unique devait être mise en place, lorsque nous avons créé

25 le 1er Corps d'armée, le 1e septembre 1992, un certain nombre de personnes

Page 17625

1 ont immédiatement été affectées au sein du commandement du 1er Corps, nous

2 avons dû travailler dur pour réaliser cela.

3 Cependant, les progrès étaient évidents, au fur et à mesure que le temps

4 passait. Mais je peux vous dire et j'assume pleinement la responsabilité de

5 mes propos, que ce processus n'a pas été réalisé de façon satisfaisante,

6 avant la fin de l'année suivante, c'est-à-dire, 1993, ce qui prouve à quel

7 point il était compliqué de s'occuper de cela, je veux parler de

8 l'organisation et de la défense de la ville de Sarajevo, en tant que centre

9 du pays, et de l'Etat. Car si la ville de Sarajevo était tombée, cela

10 aurait très probablement constitué la fin de l'état de Bosnie-Herzégovine.

11 Q. Compte tenu de ce que vous venez de dire, s'agissant des conséquences

12 qu'aurait eues la capitulation de la ville de Sarajevo, je souhaiterais

13 vous poser la question suivante, de votre point de vue, de commandant d'un

14 corps d'armée, quelles étaient vos priorités, quels étaient vos objectifs

15 et dans quel cadre s'exerçaient vos fonctions de commandant de corps

16 d'armée, vu la situation ?

17 R. Pour vous répondre simplement, si la guerre devait se reproduire, je

18 n'accepterais absolument pas un tel poste. A l'époque, en tant que

19 commandant en second du 1er Corps, puis commandant de ce Corps, ma priorité

20 fondamentale était d'établir des contacts dans les plus brefs délais avec

21 toutes ces nombreuses unités qui se trouvaient dans la ville de Sarajevo,

22 que je viens de mentionner, et celles qui à l'extérieur de la ville de

23 Sarajevo, étant donné que le 1er Corps avait également des responsabilités

24 au-delà de la ville même de Sarajevo. Lorsque des contacts étaient établis

25 avec ces unités, il s'agissait de les réunir afin de constituer des unités

Page 17626

1 plus importantes car c'est la seule manière d'obtenir des succès, en

2 matière de défense.

3 Je dois reconnaître que dans de nombreuses situations, j'ai réussi à

4 obtenir des succès, mais cela n'a été que de la chance, par exemple.

5 Lorsqu'il s'agissait de constituer des unités plus grandes, à partir

6 d'unité plus petite. Notre problème, fondamental résidait dans le fait que

7 ces nombreuses unités avaient été constituées sur une base de volontariat,

8 si bien que dans chaque rue ou dans chaque quartier de Sarajevo, quelqu'un

9 bénéficiait d'une certaine autorité et rassemblait des effectifs, et c'est

10 ainsi qu'une unité était constituée, que l'on appelle une section, une

11 escouade, une compagnie, ou un détachement, voire un bataillon, mais on ne

12 sait jamais poser la question à savoir, si ces personnes étaient

13 compétentes ou capables de diriger de telles unités, mais lorsque le moment

14 est venu de réunir ces unités afin de constituer des unités plus grandes,

15 il était très difficile de parler avec ces personnes, voire souvent

16 impossible. Il était impossible de dire à cette personne que son unité,

17 qu'il s'agisse d'une section, d'un détachement ou d'une compagnie, dire à

18 cette personne que son unité devait être intégrée dans une unité plus

19 importante, c'était impossible. Il était impossible de faire comprendre à

20 ces personnes qu'elles auraient désormais un supérieur hiérarchique car un

21 nombre de ces personnes se considérait comme au-dessus de tous. Les seules

22 personnes qui avaient la capacité de diriger une unité et qui avaient des

23 hommes qui les suivaient pensaient être au dessus de tout et faire ce que

24 bon leur semblait.

25 Pendant longtemps, cette situation a eu des conséquences dans la ville de

Page 17627

1 Sarajevo en 1992 et dans une grande mesure en 1993 également. Mais grâce à

2 des efforts incessants et un travail intense, cette transformation a pu

3 aboutir. La transformation de ces unités s'est accompagnée simultanément de

4 contacts quotidiens en rapport avec la Défense de la ville de Sarajevo.

5 Au cours de l'année 1992, l'objectif des forces ennemies autour de Sarajevo

6 était de diviser la ville en plusieurs parties car ils se sont rendus

7 compte qu'il serait difficile de capturer la ville car il s'agissait d'une

8 zone urbaine peuplée. D'après les principes militaires, les combats sont

9 plus difficiles dans les zones habitées. C'est la raison pour laquelle ils

10 ont essayé de diviser la ville en plusieurs parties et de s'occuper de ces

11 différentes zones, l'une après l'autre. Peu de temps après cela, nous avons

12 connu des problèmes très graves en matière d'approvisionnement en

13 nourriture, en eau, en armements, en munitions, en moyens de transmission,

14 et tout ce dont une formation, comme un corps d'armée avait besoin. Ici, il

15 s'agissait du 1er Corps d'armée.

16 Grâce à une lutte incessante et quotidienne, grâce aux efforts déployés par

17 tous, nous avons mené cette lutte, les forces ont été organisées,

18 développées et ses activités se sont poursuivies jusque dans le courant de

19 l'année 1993. Je peux dire, à cette occasion, que j'ai réussi à obtenir un

20 niveau satisfaisant d'organisation de mon corps en octobre ou peut-être en

21 novembre 1993. En effet, en octobre, sous la contrainte, j'ai placé sous

22 mon commandement deux de mes brigades qui avaient voulu quitter mon

23 commandement, faire bande à part. Peu de temps après cela, au début du mois

24 de novembre 1993, une brigade croate, appelée "le roi Tvrtko", une brigade

25 du HVO, en réalité, qui se trouvait à Sarajevo, mais qui n'était pas placée

Page 17628

1 sous mon commandement, j'ai réussi à la contraindre d'être placée dans ma

2 chaîne de commandement de façon à ce que nous luttions de façon unie pour

3 la défense de la capitale de l'état Bosnie-Herzégovine.

4 Q. Merci. Une question très rapide avant de passer à autre chose. Combien

5 de subordonnés aviez-vous en tant que commandant du 1er Corps d'armée ?

6 R. Le 1er Corps d'armée de la République de Bosnie-Herzégovine était l'un

7 des corps les plus importants en 1993. J'avais trois groupes opérationnels,

8 chacun était composé de cinq, six ou sept brigades. Il y avait également un

9 certain nombre d'unités indépendantes. A titre d'exemple, dans le courant

10 de l'été 1993, le 1er Corps d'armée comptait plus de 75 000, s'agissant du

11 nombre d'officiers, qu'il s'agisse d'officier supérieurs, de sous-officiers

12 et ainsi de suite, il m'est difficile de vous donner des chiffres

13 aujourd'hui.

14 Il y avait beaucoup de personnes qui étaient, qui dépendaient de moi dans

15 la chaîne de commandement, il m'était très difficile de commander le 1er

16 Corps de l'ABiH pendant la guerre.

17 Q. Mon Général, compte tenu de votre expérience en tant que commandant du

18 1er Corps ayant participé à la Défense de la ville de Sarajevo pendant la

19 guerre, compte tenu de votre expérience au sein de la JNA de 1975 à 1991,

20 et compte tenu de la période que vous avez passé après la guerre en sein de

21 l'armée de la Fédération en tant que chef des opérations et de la

22 formation, considérez-vous être qualifié pour témoigner en tant que témoin

23 expert sur l'exercice du commandement dans l'armée au niveau supérieur ?

24 R. C'est une question difficile que vous me posez parce que je ne souhaite

25 pas parler de moi. Je ne peux pas vous donner de réponses directes ou

Page 17629

1 simples.

2 Toutefois, disons que j'ai accepté de travailler sur ce rapport d'expert

3 précisément à cause de tout ce que je vous ai déjà dit aujourd'hui en

4 pensant que ce que j'ai vu dans mon expérience, dans ma carrière

5 professionnelle, et en particulier, compte tenu du fait que j'ai exercé la

6 fonction du commandant du 1er Corps et cette fonction, à mon avis, était une

7 fonction très difficile et très complexe. J'ai estimé que je pouvais

8 présenter des arguments et donner des faits, décrire les circonstances en

9 suivant les questions posées pour le rapport d'expert ou éventuellement en

10 formulant des commentaires suite aux questions qui me seraient posées ici

11 dans cette salle d'audience. J'ai pensé que dans leur ensemble, mes

12 réponses ainsi que mes commentaires, au sujet des événements réels, tels

13 qu'ils se sont produits, et au sujet de la manière dont ils se sont

14 déroulés, au sujet de la situation telle qu'elle s'est présentée d'une

15 manière générale. J'ai estimé, donc, que ceci pouvait être d'utilité, d'une

16 grande utilité à la Chambre de première instance dans la suite de ses

17 travaux lorsqu'il faudra qu'elle se penche, qu'elle apprécie l'ensemble de

18 ce qu'elle a reçu comme informations. Qu'il s'agisse d'expertises et qu'il

19 s'agisse de questions qui seront posées dans ce prétoire. C'est la raison

20 pour laquelle j'ai accepté d'assumer cette tâche. C'est la raison qui m'a

21 décidé.

22 Q. Mon Général, comme vous le savez, l'un des accusés en l'espère est le

23 général Hadzihasanovic. Vous savez que le général Hadzihasanovic a été le

24 commandant du 3e Corps pendant une partie de la période pendant laquelle

25 vous avez été vous-même commandant du 1er Corps au sein de la même armée.

Page 17630

1 Ma question est la suivante. Pensez-vous qu'il vous est possible d'être

2 suffisamment indépendant pour présenter une opinion d'expert indépendante.

3 Une opinion d'expert militaire indépendante et objective.

4 R. Précisément, en partie, si l'on pense à ce que je vienne de vous dire

5 à l'instant, ma réponse serait oui. Dans la majeure partie de mes réponses

6 et conformément à ce que j'ai déjà rédigé soit dans mon rapport propre,

7 soit dans les annexes, l'on voit qu'il s'agit de faits, d'arguments exposés

8 portant sur les activités, les démarches que j'ai eus à entreprendre moi-

9 même aussi en tant que commandant de corps. Je me suis trouvé dans une

10 situation tout à fait comparable, sinon identique, à celle qui a été la

11 situation du commandant du 3e Corps d'armée.

12 Encore une fois la conclusion à laquelle je suis arrivé c'est que

13 précisément grâce à des explications que je fournirai au sujet de ces

14 événements, par des détails que je donnerai pour ce qui est des obligations

15 qui sont celles du commandant du corps et que j'ai été. Aussi de toutes les

16 autres instances, le long de la filière de commandement, pour ce qui est de

17 l'ensemble des relations entre les supérieurs et les subalternes, les

18 obligations qui sont celles de l'Etat qui est tenu d'assurer de nombreux

19 éléments à une unité opérationnelle telle que le corps d'armée. En évoquant

20 de nombreux faits de cette nature, je tâcherai de vous présenter sous un

21 aspect véridique les événements qui se sont produits et j'espère que ceci

22 s'avérera grandement utile dans l'affaire qui vous occupe. Il n'y a pas de

23 liens directs à mon sens. Lorsque vous me demandez, je ne sais pas pour

24 quelle raison, si je peux être suffisamment neutre, ou suffisamment

25 indépendant, lorsqu'on évoque le cas du commandant du

Page 17631

1 3e Corps.

2 Q. Mon général, quelle était la nature de vos relations avec le général

3 Hadzihasanovic, le connaissiez-vous bien, depuis quand le connaissiez-

4 vous ?

5 R. J'ai fait la connaissance du général Hadzihasanovic, je l'ai rencontré,

6 pour la première fois, me semble-t-il, en juin ou en juillet 1992,

7 précisément à l'état-major général du commandement Suprême à Sarajevo, car,

8 à un moment donné, en été 1992, on s'est trouvé sur place tous les deux en

9 tant qu'officiers chargés des opérations au sein de cet état-major. A

10 partir de ce moment-là, de temps à autre, il nous est arrivé de nous

11 rapprocher, mais il y a eu quand même très peu de situations, très peu de

12 moments, où on s'est trouvé l'un à côté de l'autre, c'est jusqu'au 1er

13 septembre 1992, qu'on est resté tous les deux à cet état-major et le 1er

14 septembre 1992, on a été nommé au commandement du 1er Corps de l'ABiH. Lui-

15 même est resté au commandement du 1er Corps, je crois, pendant deux ou trois

16 mois -- deux mois. En novembre, début novembre 1993, il était déjà parti du

17 commandement du 1er Corps en Bosnie centrale pour exercer ses nouvelles

18 fonctions, pendant la guerre en 1993, et en 1994, on s'est vu rarement.

19 Lorsqu'il a été de nouveau nommé à un poste plus important, lorsqu'il est

20 devenu chef de l'état-major au sein de l'état-major général de l'ABiH, à la

21 mi-1993, on a eu des contacts plus fréquents, mais, selon la logique de la

22 chaîne du commandement, ce qui ressort de la structure même et de

23 l'organisation même de l'ABiH, et pendant la période d'après guerre, de

24 temps à autre, plutôt rarement il nous est arrivé de nous voir. Je pense

25 que le général Hadzihasanovic a du respect pour moi, et la même chose

Page 17632

1 s'applique à moi. Nous ne nous fréquentons pas en dehors du travail. Nos

2 familles ne se voyaient pas. C'était en somme des situations où on s'est

3 croisé ou on s'est vu rarement et occasionnellement.

4 Q. Une dernière question pour vous, mon Général, pour ce qui est de votre

5 parcours professionnel : d'après tout ce que vous nous avez dit

6 aujourd'hui, j'en arrive à la conclusion que vous avez été commandant d'un

7 bataillon et qu'après avoir été commandant de l'état-major de la Défense

8 territoriale du district, vous êtes devenu le commandant d'un corps

9 d'armée. Par conséquent, je ne pense pas que vous ayez jamais été, par

10 exemple, commandant d'une brigade. A votre avis, est-ce que c'est un

11 chaînon manquant dans votre parcours professionnel ? Est-ce que vous pouvez

12 apporter quelques éléments à la Chambre dans ce sens ?

13 R. Dans la carrière d'un officier, ce qui a une certaine importance c'est

14 que cet officier passe par tous les échelons, à tous les niveaux de

15 commandement, qu'il les exerce tous avant de devenir général, avant

16 d'occuper des postes très importants pour ne pas dire les plus importants

17 dans la hiérarchie militaire; cependant, je suis d'avis que ce qui est très

18 important ce sont aussi les postes qu'on occupe dans l'organigramme.

19 Par exemple, commandant de compagnie, commandant de bataillon, ce

20 sont des fonctions très importantes. Je ne peux pas dire que lorsqu'on est

21 commandant d'une brigade que ceci n'a pas de poids, bien sûr que non. Par

22 la suite, effectivement, je suis devenu directement commandant du 1er Corps,

23 l'absence de ceci dans ma carrière, le fait que je n'ai pas été commandant

24 d'une brigade, je pense que je l'ai compensé précisément à partir du moment

25 où j'ai été officier chargé des opérations à l'état-major de la Défense

Page 17633

1 territoriale, c'est-à-dire, aussi à l'état-major général de l'ABiH en 1992.

2 En plus de cela, j'ai été commandant adjoint du

3 1er Corps pendant une année. Il me semble que ces fonctions-là sont venues

4 compenser dans une large mesure cette éventuelle carence. Mais en guerre

5 ceci est tout à fait justifié et, personnellement, je suis d'avis que d'un

6 point de vue de carrière professionnelle pour ce qui est de mon expérience

7 de militaire, compte tenu de ce que j'ai eu l'occasion de voir et de vivre

8 pendant la guerre, que ceci ne constitue pas un vrai problème, que ce n'est

9 pas un vrai défaut, ou déficience, le fait que je n'ai pas été commandant

10 de brigade.

11 Q. Mon général, merci. Au sujet d'une question qui vous a été posée par le

12 Président de la Chambre, vous avez dit que vous avez travaillé pendant

13 quelque temps sur la rédaction de ce rapport d'expert. Dans la première

14 partie, d'après ce que j'ai vu, vous expliquez comment vous avez rédigé ce

15 rapport. Pouvez-vous nous expliquer comment vous vous êtes pris, vous vous

16 êtes mis à la rédaction de ce rapport ? Comment avez-vous procédé ?

17 R. En août de l'année passée, je suis parti à la retraite, je n'étais plus

18 un officier actif et même avant que je ne quitte l'exercice dans l'active,

19 Me Mme Residovic m'avait convié à une conversation dans son bureau à

20 Sarajevo. Elle m'a proposé de réfléchir à cela, à savoir, est-ce que je

21 pouvais voir si j'étais prêt à rédiger ce rapport d'expert. Je ne suis pas

22 tout à fait certain, mais il me semble que je n'ai pas accepté tout de

23 suite. Nous avons eu une autre réunion lors de laquelle je l'ai accepté.

24 En même temps que j'étais encore officier actif, j'ai commencé à travailler

25 sur ce rapport d'expert. Après avoir pris ma retraite, je m'en suis bien

Page 17634

1 occupé bien davantage. Je dois reconnaître que, dans son ensemble, le

2 travail que j'ai fait pour rédiger le rapport et tout ce qui va avec, je

3 dois dire que cela a été très difficile, très ingrat, compte tenu la portée

4 des questions et de tout ce que l'on m'a demandé pour examiner, pour

5 préparer, pour prendre connaissance des documents, et cetera. J'ai

6 travaillé sans arrêt ces derniers mois, les derniers mois de l'année

7 passée.

8 J'ai d'abord rédigé une première version du rapport d'expert et il me

9 semble qu'il contenait plus de deux cent pages et, par la suite, l'on m'a

10 demandé d'abréger, de raccourcir. On m'a dit que le rapport ne pouvait pas

11 contenir plus que 150 pages, au maximum, voire qu'il fallait couper

12 davantage, et c'est ce que j'ai fait.

13 A plusieurs reprises, j'ai eu des contacts, j'ai eu des réunions avec Mme

14 Residovic, avec vous-même, pendant que je travaillais sur le rapport

15 jusqu'à ce qu'on aboutisse à une version finale, définitive.

16 Q. Mon Général, est-ce que vous avez été aidé pendant la période qui a été

17 celle de la rédaction du rapport ?

18 R. Absolument, pour la majeure partie, j'ai travaillé seul avec mes trois

19 assistants, assistants qui étaient chargés de dactylographier, un assistant

20 qui était chargé de faire des desseins à l'aide des ordinateurs, et cetera.

21 J'ai été grandement aidé par le bureau de Mme Residovic à Sarajevo avec le

22 général Mustafa Polutak à la tête de ce bureau. Pour ce qui est de tous ces

23 documents que vous avez ici sur main droite, d'autres documents encore.

24 J'ai été énormément aidé par des nombreuses personnes pour ce qui est de

25 l'utilisation des documents qui figurent dans les archives de l'ABiH et

Page 17635

1 ainsi de suite et ainsi de suite. J'ai reçu tous les documents de

2 l'Accusation, tous les documents de la Défense que j'ai lus comme tels,

3 dont j'ai pris connaissance et dont je me suis servi pour rédiger la

4 version définitive de mon rapport.

5 Q. Mon Général, je vois à côté de vous un certain nombre de classeurs,

6 classeurs orange. Le Président de la Chambre vous a dit, au début

7 d'audience, que c'est quelque chose qui a été fourni par la Défense, mais

8 pourriez-vous, s'il vous plaît, préciser ce que sont ces documents, qui les

9 a rédigés, qui les a préparés, ce que c'est, ce qu'ils représentent.

10 R. Ces documents qui se trouvent à ma droite sont, en réalité, tous les

11 documents référencés devant ce Tribunal, que ce soit des documents de la

12 Défense ou des document de l'Accusation. C'est en partie moi-même qui les

13 ai préparés mais pour la majeure partie c'est le bureau de Mme Residovic

14 qui les a préparés avec M. Polutak, qui s'en est chargé en premier lieu.

15 On a ici un classement chronologique des documents, aussi un certain nombre

16 de documents sont répertoriés selon les événement et lorsqu'ils ne

17 rentraient pas dans les événements, il y a d'autres catégories : le HVO,

18 l'armée de la République serbe, ou autres, il y a aussi une catégorie

19 "autres". Dans chacun de ces classeurs, on voit de quelle série de

20 documents il s'agit, quelle est la date, "de quand à quand" va cette

21 période et les documents sont classés dans l'ordre chronologique. En page

22 de garde, dans chacun de ces classeurs, l'on trouve la liste des documents

23 contenus, tels que référencés devant ce Tribunal.

24 Q. Mon Général, pouvez-vous nous dire quel est le nombre de documents qui

25 sont contenus dans ces classeurs, à peu près ? Est-ce que vous avez lu tous

Page 17636

1 ces documents ?

2 R. Pour ce qui est du nombre de documents, il y en a beaucoup, vraiment

3 beaucoup. Lorsqu'on a calculé, il me semble qu'on en est arrivé à plus 5

4 000 pages, d'après certains calculs. Je n'ai pas lu tous ces documents pour

5 la simple raison qu'à un moment donné je suis arrivé à la conclusion que

6 c'était impossible; cependant, j'en ai lu la majorité.

7 Quant aux documents que je n'ai pas lus, je les ai au moins tenus entre mes

8 mains, ou je les ai au moins parcourus en diagonale pendant que je

9 travaillais sur ce rapport d'expert.

10 Q. Merci, mon Général.

11 A présent, je voudrais qu'on s'occupe brièvement de la question des annexes

12 à votre rapport.

13 Pouvez-vous dire à la Chambre comment ont été préparées ces annexes et dans

14 quelles intentions vous les avez préparées ?

15 R. Vous parlez des annexes ?

16 Q. Oui, je parle des annexes selon le rapport.

17 R. En plus du rapport, j'ai aussi préparé 108, plus trois, annexes; je

18 pense, en tout, 111 annexes. Toutes ces annexes figurent dans mon travail

19 d'expert, dans mon rapport et leur finalité est de préciser certains

20 éléments, certaines définitions qui figurent dans les différentes sources.

21 J'ai préparé aussi des organigrammes de différentes sortes et qui sont

22 nombreux des représentations somatiques, et cetera. Leur objectif est de

23 préciser le texte du rapport lui-même. Tout ceci, je pense, toutes ces

24 annexes peuvent être vues grâce à nos ordinateurs, je suppose.

25 Q. Mon général, si on parcourt ces annexes, j'ai remarqué que certaines

Page 17637

1 annexes étaient fournies en plus du texte et du rapport mais qu'on ne s'y

2 réfère pas dans le rapport, et aussi j'ai vu qu'il y a des interruptions

3 dans la numérotation des annexes. Est-ce que vous pouvez nous expliquer

4 cela ?

5 R. Il s'agit de --

6 Q. Je vais vous donner un exemple, si vous le voulez, un exemple, avez-

7 vous compris lorsque je vous ai dit qu'il y avait des annexes qui sont

8 fournies avec le rapport, mais qu'ils ne figurent pas dans le texte du

9 rapport, qu'on ne s'y réfère pas ?

10 R. Je vais vous expliquer cela. Je pense que c'était dans la deuxième

11 version du rapport. Lorsque j'ai travaillé là-dessus, je pense que c'est à

12 ce moment-là que j'ai fourni la liste définitive des annexes, de toutes les

13 annexes qui -- étaient nécessaires avec cette variante là du rapport. Mais,

14 par la suite, il y a eu des corrections pendant les traductions du bosnien

15 à l'anglais et retour de l'anglais vers le bosniaque, il y a eu de

16 nombreuses corrections et, parfois, on a même rayé, ou rayé complètement,

17 ou ajouté des chapitres. Aussi, lorsqu'il y a eu correction du texte, et

18 parfois on a supprimé un chapitre et automatiquement une annexe était

19 supprimée. Mais pour ne pas avoir à refaire complètement une nouvelle

20 numérotation des annexes dans le texte même, dans le corps même du rapport,

21 ce qui est assez pénible et long, c'est pour cela qu'il y a quelques

22 interruptions dans la numérotation et il y a des annexes sans annexes.

23 Aussi, un certain nombre d'annexes sont restées qui ne figurent plus dans

24 le texte de mon rapport, tout simplement parce que j'ai hésité, j'ai pensé

25 si on avait besoin de ces annexes. Il valait mieux qu'elles soient là et

Page 17638

1 qu'on puisse les utiliser.

2 Q. Mon Général, les questions qui vous ont été posées, pour rédiger votre

3 opinion d'expert, vous avez dit il y a un moment que les questions étaient

4 ingrates, quelque chose de ce genre, pouvez-vous nous dire qui vous a posé

5 ces questions et comment vous vous y êtes pris pour répondre à ceci ?

6 R. Dès le départ, comme je viens de vous le dire à l'instant, depuis ce

7 premier entretien avec Mme Residovic, lorsque j'ai accepté de relever ce

8 défi, assez rapidement j'ai reçu par la suite une première version des

9 questions auxquelles il fallait que je réponde, ou plutôt selon lesquelles

10 il fallait que je me prépare et que je rédige mon rapport.

11 Au bout d'un mois ou deux, on a apporté des corrections à ces questions. Il

12 y a eu des ajouts; il y a eu des suppressions d'un certain nombre de

13 questions. C'est précisément Mme Residovic, et aussi vous-même, qui m'avez

14 fourni cela. Enfin, lors de la rédaction de la version définitive à cause

15 des traductions en février, il y a eu les dernières corrections apportées

16 parce qu'il y a eu certains écarts qui sont apparus à cause de la

17 traduction vers l'anglais, et retour vers le bosniaque. Il y a eu des

18 différences, des écarts lorsqu'il s'agit d'un certain nombre de pensées

19 exprimées par certaines phrases.

20 Q. Mon général, je vous remercie. Une dernière question au sujet de la

21 rédaction du rapport. Maintenant, pouvez-vous nous dire combien de temps

22 vous avez passé à préparer votre rapport d'expert ?

23 R. Là vous me posez encore une question difficile. Je pense que ce travail

24 d'expert est vraiment exhaustif. Il a exigé beaucoup de temps. C'est un

25 travail d'expert que pouvait difficilement assumer un homme seul sans se

Page 17639

1 faire aider par des assistants. C'est un travail où il a fallu lire un

2 grand nombre de documents, un grand nombre de pages. Cette expertise a

3 demandé que je consulte de nombreuses sources à commencer par des

4 règlements militaires, en passant par de nombreux livres, susceptibles

5 d'être des sources utiles pour la rédaction du rapport. Pour être objectif,

6 je dirais qu'une période d'au moins quatre mois de travail continu. Ce

7 serait le temps minimal nécessaire pour rédiger ce travail de ce rapport

8 d'expert en se faisant aider par des assistants.

9 Q. Mon général - et maintenant ma dernière question - avez-vous été payé ?

10 Est-ce que c'est quelque chose que vous avez fait contre rémunération ?

11 R. Pour le moment, je n'ai pas touché un seul "penny". A l'avenir, est-ce

12 que j'en aurai, je ne sais pas, cela dépend de vous. Si je puis ajouter

13 pour ce qui est de l'exercice des fonctions du commandant de corps pendant

14 la guerre, lorsque j'ai dit que je n'assumerais pas de nouveau ces

15 fonctions, la même chose s'applique à ce travail. Je ne suis pas sûr si

16 j'accepterais encore une fois une tâche aussi exigeante que la rédaction de

17 ce rapport.

18 Q. Mon général, je vais vous poser une question plus précise : est-ce une

19 tâche pour laquelle vous serez payée et est-ce que vous avez accepté de le

20 faire en échange d'une rémunération ?

21 R. C'est précisément cela.

22 Q. Je vous remercie, mon Général.

23 M. BOURGON : La pause maintenant.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 17 heures 15. Nous allons faire la pause et

25 nous reprendrons aux environs de 6 heures moins 20, 6 heures moins quart.

Page 17640

1 --- L'audience est suspendue à 17 heures 16.

2 --- L'audience est reprise à 17 heures 47.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. On va faire attendre le

4 témoin quelques instants, parce que je crois que l'Accusation veut

5 intervenir.

6 Monsieur Mundis.

7 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 Le Procureur considère que nous devons attirer l'attention de la Chambre de

9 première instance sur le fait que, d'après nous, le témoin se réfère à des

10 notes manuscrites. Lorsqu'il était venu là, nous avons cru qu'il s'agissait

11 de son opinion d'expert par écrit, il faut dire ce qui ne devrait pas être

12 problématique, mais, à mesure qu'il dépose, nous avons pu nous rendre

13 compte que sur ce rapport, il devait y avoir quelque chose qui est surligné

14 ou souligné, ce qui devrait pas être inapproprié. Tout simplement je

15 considère qu'il est de mon devoir de porter à la connaissance de la Chambre

16 de première instance le fait que le témoin dispose de notes manuscrites qui

17 se trouvent sur le document, c'est-à-dire, en tant que document qui est le

18 sien. Je voulais attirer votre attention de la Chambre de première

19 instance, sans la présence du témoin.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : -- que la procédure fait en sorte qu'il doit avoir

21 son rapport, ses annexes, mais pas en plus des documents pré rédigés, je le

22 sais, mais vous pouvez-vous nous éclairer ?

23 M. BOURGON : Ce que je sais, Monsieur le Président, c'est qu'il a beaucoup

24 de notes, il a son rapport qui est annoté avec toute de sorte de collants,

25 toute sorte de trucs. Mais je ne sais pas, je me proposerais moi-même de

Page 17641

1 lui poser la question, puisque j'ai remarqué, moi aussi, qu'il lisait

2 souvent, qu'il semblait regarder quelque chose, alors je voulais lui poser

3 la question moi-même. Je sais qu'il a son rapport, je sais qu'il a ses

4 documents, je sais que son texte est annoté, puisque même alors que nous

5 travaillons ensemble au cours du weekend, il prenait des notes. Si

6 l'Accusation souhaite ses notes lui soient retirées et remplacées par un

7 rapport vierge, je crois que je n'ai pas de problème, c'est comme

8 l'Accusation le veut, Monsieur le Président. Merci.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, on peut peut-être demander au

10 témoin, quelles sont les notes qu'il a, parce que, si c'est des feuilles de

11 son rapport, il n'y a pas de problème.

12 M. MUNDIS : [interprétation] Ceci sera peut-être la façon la plus simple de

13 régler la question, Monsieur le Président. Tout de même j'ai pu observer

14 qu'il s'agit de feuille de papier ou tel des notes surlignées au jaune.

15 J'ai cru qu'il était de mon devoir de vous le faire savoir, Monsieur le

16 Président.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, on va lui demander.

18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon général, juste avant de redonner la parole à

20 l'avocat, l'avocat de la Défense va vous poser une question sur les

21 documents que vous avez sous les yeux. Je vais donner la parole à Me

22 Bourgon qui va --

23 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

24 Q. [interprétation] Bienvenue, mon Général. J'ai une question à vous

25 poser, avant de poursuivre au sujet du document que vous avez devant vous,

Page 17642

1 parce que nous avons compris que vous regardiez tout le temps quelque chose

2 en répondant à vos questions. Nous avons voulu vous poser la question de

3 savoir ce que vous avez exactement sous vos yeux aujourd'hui ?

4 R. Dans la serviette, je n'ai rien de spécial : mon téléphone portable,

5 quelques "markers" et quelques "bics", un "walkman", "compact" disque. Ici,

6 ce que montre maintenant, il s'agit de mes notes que j'ai prises tout

7 simplement et le rapport expert qui est le mien.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, quand vous dites : "Les notes que j'ai

9 prises," c'est quoi les notes que vous avez prises ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit des notes issues des conversations

11 que j'ai eues avec M. Stéphane.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce sont des notes que vous avez élaborées à l'issue

13 de l'entretien que vous avez eu avec l'avocat; c'est cela ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, une partie de mes notes porte exactement

15 sur cela. D'autres notes ont été faites par moi-même.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Mais avez-vous besoin de ces notes pour

17 répondre aux questions, ou vous pouvez les laisser de côté, vous contentez

18 que de regarder le rapport et les annexes ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux procéder ainsi.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Bourgon.

21 M. BOURGON : Je pense que ce serait préférable, Monsieur le Président, que

22 nous retirons les notes, et les notes peuvent être remises, pas de

23 problème.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

25 M. BOURGON : Pour autant qu'il puisse garder son rapport.

Page 17643

1 Q. [interprétation] Mon Général, est-ce que vous pouvez séparer vos notes

2 de votre rapport, opinion d'expert, et garder uniquement votre rapport.

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Mon Général, dites-moi : ce rapport, est-ce bien le rapport que vous

5 avez sur vous, lorsque nous avons travaillé ensemble y compris toutes les

6 notes, c'est-à-dire, ce que vous avez pris comme notes ? Je vous ai vu

7 enfin inscrire au rouge des lignes, et cetera.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 M. LE JUGE ANTONETTI : L'Accusation. Bien.

10 M. BOURGON :

11 Q. [interprétation] Mon Général, nous avons déjà pris du retard, étant

12 donné le temps qui m'est imparti et que j'ai planifié pour mener

13 l'interrogatoire principal. Je vous prie d'être plus court dans vos

14 réponses. Bien entendu, lorsque cela est possible, cela dit, je ne veux pas

15 vous empêcher de dire ce que vous avez envie, et ce que vous souhaitez

16 dire.

17 Ma première question est une question qui concerne la rédaction de votre

18 rapport d'expert comme tel, dites-moi, étant donné que vous avez travaillé

19 à la rédaction de ce rapport d'expert, y a-t-il une question qui semble

20 parfaitement particulière, dont vous vous êtes occupé et que vous pouvez

21 peut-être présenté à la Chambre de première instance, lorsqu'il s'agit

22 d'exercice de commandement des deux personnes accusées dans cette affaire ?

23 R. Vous voulez dire que je dois répondre conformément à ce rapport

24 d'expert que j'ai rédigé, et conformément aux questions, et conformément à

25 ce qui m'a été demandé, sous forme de question, pour la plupart il

Page 17644

1 s'agissait de réflexion faite ou recherche de source et de référence en vue

2 d'étayer le tout, ou en vue de trouver des documents datant de cette

3 époque-là. Cela dit j'ai voulu parler et mettre en exergue deux faits qui

4 semblent inexistants, lorsqu'il s'agit de parler de l'exercice fait par un

5 officier supérieur, un chef, un leader, pour qu'un rapport d'expert soit

6 aussi complet que possible, c'est-à-dire, pour compléter les réflexions qui

7 sont les miennes. Je crois pouvoir dire que ce qui me manque surtout, c'est

8 la notion de réalité et du réalisme avec lequel il a fallu traiter de tout

9 ce qui s'était produit pour parler de l'ensemble de la situation politique

10 et militaire en cours de guerre, en Bosnie-Herzégovine.

11 Lorsque je parle de cette notion de réalisme, c'est-à-dire, des réalités,

12 je crois qu'il faudra évidemment avoir à l'esprit cette réalité-là pour

13 pouvoir répondre à plus de questions possibles. Or, la réalité telle quelle

14 était extrêmement difficile parce qu'elle se trouvait caractérisée par un

15 manque d'organisation ou pour la plupart des cas, par l'inexistence d'un

16 système tant politique que de défense pendant les tous premiers débuts de

17 la guerre. Il s'agissait d'une situation qui, en un mot, devait être fort

18 confuse à tout point de vue et dans chaque secteur et segment du système

19 social en vigueur, surtout lorsqu'il s'agit de parler du régime de défense.

20 Cela sera un premier élément, un premier fait à souligner.

21 Un autre fait que j'aimerais souligner, c'est qu'il faut avoir la

22 possibilité de consulter les faits qui traitent du caractère, de la nature

23 de la guerre menée en Bosnie-Herzégovine. Or, une fois de plus, à prendre

24 dans son ensemble le conflit et la guerre en Bosnie-Herzégovine, ce fait a

25 un impact extrêmement négatif surtout sur toute mission que devait remplir

Page 17645

1 chaque leader, chaque chef, commandant, surtout lorsqu'il s'agit des plus

2 haut échelons.

3 A titre d'exemple, dirais-je que je demeure profondément persuadé qu'il

4 est difficile un exemple pareil dans toutes les guerres menées dans le

5 monde aujourd'hui pour dire qu'il y avait une situation similaire à celle

6 qui prévalait en Bosnie-Herzégovine au cours des années 1992-95. Car vous

7 avez d'un côté les forces d'un gouvernement dont l'état était

8 internationalement reconnu comme étant la Bosnie-Herzégovine et ses forces

9 se trouvaient inférieures à tout point de vue par rapport notamment à

10 toutes les forces qui voulaient faire sécession, et cetera. Or, les forces

11 des gouvernements, notamment, au cours de l'année 1993 devraient livrer

12 bataille à trois ennemis différents et ainsi de suite, pour parler de

13 faits.

14 Q. Merci, mon Général. Ma question suivante concerne l'évaluation du

15 travail fait par un commandant dans une situation de guerre. D'après vous,

16 quel serait le facteur le plus important à avoir à l'esprit pour faire

17 évoluer exercé par un haut commandant ?

18 R. Le facteur majeur, je dirais, pour traiter de tout commandement, c'est

19 de traiter de sa mission. Chaque chef supérieur a été affecté par telle ou

20 telle mission par son officier supérieur ou plutôt par le sommer politique

21 et militaire de l'état. Tout le reste serait secondaire, c'est la mission à

22 accomplir par ces chefs supérieurs qui est à la première place,

23 primordiale.

24 Q. Merci, mon Général. Lorsque nous regardons la capacité dont se

25 trouverait investi un chef commandant en chef supérieur pour exercer son

Page 17646

1 commandement, pouvez-vous nous parler de quelques facteurs qui pouvaient

2 avoir un impact sur le prise de décision par le commandant en chef

3 supérieur ?

4 R. Je crois que, lorsqu'il s'agit de prises de décision d'un quelconque

5 chef militaire, il serait difficile de dire qu'il y aurait pas de choses

6 qui auraient un impact sur sa prise de décision. Mais, pour parler

7 maintenant en termes absolus, tout ce qui se passait dans cette région,

8 dans ce pays, pendant ce temps-là, d'une manière ou d'une autre, d'une

9 façon plus directe ou moins directe, influençait la prise de décision par

10 les chefs et les hauts commandants. Quels seraient ces facteurs qui, d'une

11 manière directe, ont un impact important sur la mission d'un chef officier.

12 Je pourrais peut-être essayer de dresser toute une chronologie à laquelle

13 cela se situe. D'abord, la mission à accomplir serait le facteur important.

14 Tout dépend comment la mission a été conçue, tout dépend de ce qui a été

15 prévu pour qu'une mission soit bien remplie, si elle sera couronnée de

16 succès ou pas.

17 Ensuite, il y a un autre facteur qui s'y rajoute tout de suite, à savoir le

18 facteur personnel cadre qui, eux, cadres personnels, ont un impact direct

19 sur les aboutissements dans toute mission. Pour la simple et bonne raison

20 que plus le commandant en chef officier a à sa disposition des cadres

21 personnels, plus il faut savoir comment se présente ce personnel. S'agit-il

22 de cadres bien instruits, bien entraînés, habilités à remplir de nombreuses

23 missions organiquement établies dans le cadre d'un dispositif dans le cadre

24 d'une unité militaire.

25 Ensuite, il faut prendre en vue la question d'approvisionnement qui, lui,

Page 17647

1 représente un facteur qui a son impact sur l'accomplissement de toute

2 mission. Or, sans logistique, sans approvisionnement ou réapprovisionnement

3 de quelque unité ou formation militaire que ce soit, il ne peut y avoir

4 lieu de parler de bon accomplissement d'une mission.

5 A titre d'exemple, si vous n'êtes pas régulièrement approvisionné en

6 vivres, en habits, chaussures, armement, munitions, carburant, et cetera,

7 automatiquement, il en découle que la mission ne pourra pas s'accomplir et

8 si accomplie, ce serait évidemment à un degré réduit qui correspond, cette

9 réduction d'ailleurs, et manquement correspond justement au manque de

10 logistique.

11 Pour parler de d'autres facteurs, évidemment ce sont les communications,

12 les transmissions, qui constituent un facteur fort important qui ont un

13 impact sur la bonne conduite des missions. C'est un fait notoire dans

14 toutes les armées du monde que "qui dit communications, transmissions"

15 parlent pratiquement circulation sanguine et du sang dans un organisme

16 humain. Sans une bonne circulation, il ne peut y avoir de vie. Si une unité

17 ne dispose pas de bons moyens de communication, de transmission, c'est que

18 dans l'exacte mesure, évidemment, elle souffrira pour autant dans

19 l'accomplissement de ses missions.

20 Q. Mon Général, je ne me propose surtout pas de vous interrompre, mais je

21 voudrais que vous me disiez comment ces facteurs, tels que vous les

22 évoquez, influent sur la capacité d'un commandant d'exercer la fonction de

23 commandant qui est la sienne, c'est-à-dire, sa façon de penser, à commencer

24 par les transmissions que vous avez évoquées entre autres. Par exemple,

25 comment tout cela se répercute sur la possibilité d'un commandant, lorsque

Page 17648

1 celui-ci doit mener à bien telle ou telle tâche ?

2 R. A titre d'exemple, pour vous faire mieux entendre, voici deux exemples

3 : une situation dite normale, ou une situation du temps de la guerre en

4 Bosnie-Herzégovine.

5 Dans une situation dite normale, chaque officier, chef supérieur, par voie

6 réglementaire, se trouve doter de communication et transmission au sein de

7 la structure de ses unités, à commencer par les plans, jusqu'aux moyens

8 techniques et équipements matériels de transmission dont les unités se

9 trouvent doter. Or, dans de telles circonstances, chaque chef d'unité,

10 ayant à sa disposition de tels moyens de communication et de transmission,

11 se voit créer tous les préalables à ce qu'à un degré maximum ses missions

12 soient accomplies.

13 Dans d'autres cas, c'est-à-dire, dans les cas de la guerre menée en Bosnie-

14 Herzégovine, où presque tous les officiers chefs, ou chefs d'unité, se

15 trouvaient dans une situation où, non seulement ils n'étaient dotés de

16 moyens ou matériel, mais ils étaient privés de plans, lorsqu'il n'y avait

17 pas évidemment de plan, c'est-à-dire, de matériel, en matière de

18 communication et transmission, cela voulait dire qu'au début, ils ne

19 disposaient pas de structure d'une unité telle quelle sur place. Parce que

20 pour qu'il y ait d'abord un plan, pour qu'il y ait ensuite à l'appui d'un

21 plan tel ou tel matériel et équipement, il faut y avoir une bonne structure

22 mise sur pied. Or, étant donné ce manque de moyens, moyens de communication

23 et de transmission, et dans une si large mesure, chaque chef d'unité se

24 trouve obliger à y aller en diagonale, par exemple, pour essayer de faire

25 de pontage, pour ainsi dire, d'une unité à l'autre, depuis l'échelle

Page 17649

1 supérieure ou subalterne. Par conséquent, chaque chef officier supérieur se

2 voit obliger, évidemment, d'avoir recours à des moyens de communication

3 dits primitifs, c'est-à-dire il est obligé, évidemment, d'y faire entrer

4 énormément de troupes, et cetera. Ce qui a un impact direct sur

5 l'accomplissement de la mission.

6 Q. Merci, mon Général. Si, par exemple, un commandant -- vous avez dit

7 tout à l'heure que le facteur que représentent les ressources humaines est

8 quelque chose qui peut avoir un impact sur la prise de décision. Comment

9 les ressources, dites personnelles, peuvent avoir une influence directe sur

10 la possibilité d'un commandant de prendre de décisions ?

11 R. Pour parler de la société prise dans son ensemble, on parle de

12 ressources humaines comme étant un facteur, et dans l'armée, en est-il de

13 même, tout commence par la ressource humaine. Sans une ressource humaine

14 bien préparée et de bonne qualité, il ne peut y avoir un bon

15 accomplissement de mission.

16 En voici un exemple : dans toutes les armées du monde actuellement, toutes

17 les unités et formations militaires sont dotées d'armement, de matériel

18 fort sophistiqué, surtout lorsqu'on parle d'équipement et de matériel de

19 pointe. Par conséquent, pour tout cela, il faudra pouvoir disposer de

20 cadres et de personnel hautement qualifié et bien préparés. Si un officier

21 chef n'est pas dans cette situation-là pour en disposer, et lorsqu'il doit

22 remplir une mission, lui-même se voit obliger de se débrouiller, c'est-à-

23 dire, avoir recours à des initiatives qui sont les siennes pour essayer de

24 trouver une solution qui serait encore solution d'un petit peu passe-

25 partout, pour ainsi dire, lorsqu'il est obligé d'en avoir recours, ce qui

Page 17650

1 n'est pas sans avoir un impact sur la qualité de la mission. Si un chef

2 supérieur ne dispose pas d'officiers cadres le long de la chaîne de

3 commandement, alors une série de questions s'impose, à commencer par la

4 question de voir si vraiment la chaîne de commandement peut fonctionner du

5 haut vers le bas, et par automatisme, en retour, du bas vers le haut, et

6 cetera. Alors que, d'autre part, si un officier chef dispose de personnel

7 et de cadres hautement qualifiés, bien préparés, dans la chaîne de

8 commandement, il y a chance et grande ressemblance de voir chaque officier

9 chef, à un très haut pourcentage, pouvoir être à même de remplir à 100 % la

10 fonction de chef militaire, qu'il l'est d'ailleurs, le long de la chaîne du

11 commandement, du sommet vers la base, et depuis la base vers le sommet.

12 Q. Mon Général, si un officier commandant de corps d'armée a des problèmes

13 dans sa zone de responsabilité, par exemple, si ces routes sont barrées,

14 bloquées, si la liberté de mouvement et de circulation est évidemment

15 limitée, comment tout cela peut avoir un impact négatif sur sa capacité

16 d'exercer son commandement ?

17 R. Une telle situation devrait avoir un impact très négatif, et plutôt

18 vilain je dirais, sur chaque officier, parce que chaque officier supérieur,

19 dans sa zone de responsabilité, aurait à se heurter à un problème grave.

20 D'abord, comment résoudre le problème posé par les barrages ? Sans avoir de

21 bonnes communications dans telle ou telle zone de responsabilité relevant

22 de la compétence de telle ou telle unité, sans de bonnes routes

23 praticables, il est très difficile, voire impossible, de mener les

24 activités de combat. Par conséquent, il est impossible d'accomplir la

25 mission qui lui a été affectée. Si ces routes-là sont, par exemple,

Page 17651

1 impraticables ou surtout barrées, bloquées en permanence ou de façon

2 intermittente, c'est un facteur qui mettrait, tôt ou tard, chaque officier

3 chef dans une situation sans issue, dans une impasse, c'est-à-dire dans une

4 situation où, par moment, chaque officier chef se mettrait à réfléchir s'il

5 fallait user de la force pour lever le blocus et le siège des routes, si ce

6 ceci n'était pas possible, évidemment, de faire autrement, c'est-à-dire

7 sans avoir recours à la force.

8 Q. Je vais vous citer un autre exemple. Par exemple, le sentiment de la

9 population dans la zone de responsabilité du commandant. Comment est-ce que

10 cela pourrait avoir une incidence sur la capacité de ce dernier à exercer

11 son commandement ?

12 R. Chaque dirigeant militaire préfère une situation claire dans sa zone de

13 responsabilité en temps de guerre. Il souhaiterait que la population dans

14 sa zone de responsabilité - je veux parler de la population civile - il

15 souhaiterait que celle-ci lui soit favorable, qu'elle l'appuie, soutienne

16 l'armée, ou l'unité placée sous son commandement. Ce serait là une

17 situation idéale. Toutefois, si tel n'est pas le cas ou si la situation est

18 telle que celle qui prévalait en Bosnie-Herzégovine où différentes parties

19 du territoire et de nombreuses zones de responsabilité présentaient une

20 composition ethnique mixte; il y avait des Croates qui étaient

21 majoritairement en faveur du HV0.

22 Par exemple, la population serbe était plus ou moins en faveur de

23 l'armée de la Republika Srpska. La majorité de cette population ou une

24 grande partie d'entre elle était dispersée à travers les zones de

25 responsabilité des différents corps d'armée de l'ABiH. Tous ces gens

Page 17652

1 auraient pu représenter un problème important pour tous les chefs

2 militaires à un moment donné. Car il était possible de transmettre toutes

3 sortes d'informations, et ils pouvaient devenir une cinquième colonne dans

4 la zone de responsabilité d'un chef militaire. Par conséquent, lorsque nous

5 parlons des rapports entre les unités en Bosnie-Herzégovine, la situation

6 était bien différente de celle qui prévale dans d'autres régions du monde

7 en cas de guerre, lorsque nous parlons des rapports entre l'armée et la

8 population civile. Cependant, je pense que dans un effort visant à trouver

9 la meilleure solution, les chefs militaires ont réussi à trouver les

10 meilleures solutions et éviter des situations qui auraient pu être encore

11 pires.

12 Q. Il y a un dernier domaine à propos duquel je souhaiterais que vous nous

13 expliquiez en quoi il pouvait avoir une incidence sur la capacité d'un

14 commandant militaire de haut rang à exercer son mandat, à savoir l'ennemi.

15 Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre si cet élément a une

16 incidence sur le raisonnement et la prise de décisions des commandants

17 militaires de haut rang, et le cas échéant, pourquoi ?

18 R. L'ennemi est le facteur-clé. La partie adverse a une incidence directe

19 sur l'accomplissement de la mission ou les décisions prises par les

20 commandants de haut rang.

21 En quoi cet élément influence la mission et le mandat de tous les

22 dirigeants militaires ? En réalité, il est très important de pouvoir

23 contrôler la situation eu égard à l'ennemi. Il faut savoir quelle est la

24 puissance de l'ennemi, quel est son caractère, sa composition, de quel type

25 d'armements elle dispose, de quel type de formation ont bénéficié ses

Page 17653

1 effectifs, quelle est sa mission, et ainsi de suite. Pour être plus clair,

2 je reviendrai à la mission de l'ennemi. Il est bien connu, par exemple, que

3 la mission de l'armée de la Republika Srpska, ou plutôt de l'armée de la

4 Yougoslavie, était d'occuper la Bosnie-Herzégovine au cours des toutes

5 premières semaines et de l'annexer à la Grande Serbie par la suite, après

6 avoir mis en place les structures de pouvoir politique et militaire

7 requises. Ceci n'a pas été le cas donc la mission s'est poursuivie, et son

8 objectif a été de prendre et d'occuper une surface du territoire de la

9 Bosnie-Herzégovine aussi grande que possible.

10 Lorsque les dirigeants politiques de Belgrade et de Banja Luka n'ont pas

11 réussi à réaliser cet objectif dans les délais aussi brefs qu'ils

12 souhaitaient, lorsqu'ils n'ont pas réussi à le faire dans le courant de

13 l'année 1992, ils ont commencé à établir des liens de collaboration avec

14 Mostar et Zagreb. Leur objectif était de parvenir à un accord sur

15 l'exécution de cette mission. Ils ont joint leurs forces, et ce faisant, le

16 HVO et l'armée de la Republika Srpska est devenu une seule force ennemie,

17 en fait, il s'agissait d'un ennemi à deux têtes que le gouvernement devait

18 combattre. Après 1993, un troisième ennemi est apparu, c'était Fikret Abdic

19 de Bosanska Krajina. Voilà, en ce qui concerne la nature de l'ennemi et ce

20 qu'il convenait pour les officiers de haut rang de prendre en compte eu

21 égard à ces forces ennemis.

22 Si tous ces ennemis du gouvernement de Bosnie-Herzégovine étaient nombreux,

23 si vous prenez cela en considération, donc des ennemis divers, et le fait

24 que l'équipement et les armes dont ils disposaient étaient plus

25 sophistiqués que ceux mis à la disposition des forces du gouvernement, si

Page 17654

1 vous prenez en considération le fait que les troupes et les officiers de

2 l'ennemi étaient mieux formés, mieux entraînés, cela vous montre dans

3 quelle mesure cela a une influence sur les décisions prises par les chefs

4 militaires des différentes unités qui faisaient partie des forces

5 gouvernementales en Bosnie-Herzégovine en 1992.

6 Q. Je vais vous donner un dernier exemple. Si les soldats ennemis

7 commettent des crimes à l'égard de la population civile ou de vos propres

8 soldats, est-ce que cela aurait une incidence sur la capacité du commandant

9 à mener à bien sa mission, et le cas échéant, pourquoi ?

10 R. Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît.

11 Q. Oui. Vous venez de parler de l'importance de bien connaître l'ennemi

12 pour que le commandant puisse pleinement exercer son commandement. Si

13 l'ennemi commet des actes criminels à l'encontre de vos propres soldats ou

14 à l'encontre de la population civile, est-ce que ceci aurait une incidence

15 sur la capacité du commandant à exercer son commandement, et le cas

16 échéant, dans quelle mesure ?

17 R. Comme je l'ai déjà dit, tout avait une incidence sur les décisions

18 prises ou l'accomplissement des missions confiées au commandant. Eu égard à

19 ce que vous venez de mentionner, ceci avait une influence importante sur la

20 mission.

21 Tout crime commis par l'ennemi, qu'il s'agisse de crimes commis à

22 l'encontre des membres de ses propres unités ou à l'encontre de la

23 population civile, influence la manière dont les décisions sont prises. Car

24 si un crime est commis, à l'encontre des soldats d'une unité ou à

25 l'encontre de la population civile, la population civile peut avoir un lien

Page 17655

1 direct avec les soldats d'une unité car ils font partie de la même

2 population. Il s'agit de parents d'une même famille, cela crée un climat

3 psychologique très particulier au sein de la population et dans de telles

4 situations, les gens essaient de réagir ou réagissent parfois d'une manière

5 qui n'est pas habituelle, car il est impossible de contrôler ce que nous

6 pouvons appeler la peur. Par le biais des soldats ou parmi les soldats et

7 les officier ce la chaîne de commandement ceci peut être ressenti jusqu'au

8 sommet. Cela dépend de la nature, de la portée, du crime commis, mais cela

9 peut avoir une influence importante sur la qualité des décisions prises par

10 les chefs militaire dans l'accomplissement de leur mission.

11 Q. Un peu plus tôt, mon Général, vous avez dit que tout avait une

12 incidence sur les capacités du commandant à exercer son commandement. Nous

13 avons évoqué un certain nombre de facteurs à cet égard. Ce que je voudrais

14 savoir c'est si ces facteurs minimisent la responsabilité d'un commandant.

15 R. Non. D'après les règlements en vigueur, la responsabilité d'un

16 commandant ne peut pas être minimisée ou diminuée de la manière dont vous

17 venez de le décrire. Cela étant, toutes les circonstances que nous venons

18 d'époque montrent à quel point la situation était difficile et complexe et

19 à quel point il était difficile de mener à bien sa mission. Les problèmes

20 étaient nombreux. A titre d'exemple, je peux vous parler des problèmes que

21 j'ai rencontrés en tant que commandant du 1er Corps, ou quels étaient les

22 problèmes rencontrés par le commandant du 3e Corps et d'autres commandant à

23 différents échelons de l'armée. En réalité, cela démontre que la situation

24 était extrêmement complexe à l'époque et que de nombreux facteurs avaient

25 une incidence sur les décisions prises. Ces facteurs étaient notamment le

Page 17656

1 produit de l'état. Nombre de ces facteurs devaient être pris en compte par

2 les chefs militaires afin de prendre les mesures qui s'imposaient et de

3 prendre les décisions qui convenaient.

4 Q. Merci, mon Général. Je souhaiterais que l'on parle d'un autre aspect de

5 votre rapport à savoir, celui qui porte sur les obligations et les

6 responsabilités d'un commandant. Je vous renvoie à la section 3 de votre

7 rapport, paragraphes 488 à 491. Je vous invite à examiner cette partie de

8 votre rapport dans laquelle vous abordez la question des obligations et des

9 responsabilités d'un commandant.

10 Ma première question à cet égard est la suivante. Est-ce que vous constatez

11 une différence entre les responsabilités d'un commandant d'une part et les

12 obligations d'un commandant d'autre part ?

13 R. Il existe une différence entre ces deux notions. La notion de

14 responsabilités englobe la responsabilité de tous les chefs militaires. Un

15 chef militaire, tout d'abord, est responsable à l'égard des échelons

16 inférieurs de la chaîne de commandement, il droit également rendre compte à

17 ses supérieurs hiérarchiques situés à un échelon supérieur dans la chaîne

18 de commandement. En fait, il s'agit d'un concept très vaste. Mais c'est là

19 que réside le facteur clé dans la notion de responsabilité. S'agissant de

20 la notion d'obligation. Cette notion est évoquée au paragraphe 491 de mon

21 rapport. J'ai énuméré un certain nombre d'obligations dans ce paragraphe.

22 Mais il ne s'agit d'une liste exhaustive, il est difficile de dresser une

23 liste de toutes les obligations qui incombent à un commandant de haut rang.

24 Q. Merci, mon Général. S'agissant des responsabilités d'un commandant

25 conformément à la chaîne de commandement, comment est-ce que vous décririez

Page 17657

1 sa responsabilité ?

2 R. Tout chef militaire et, en particulier, ceux de haut rang, existent,

3 fonctionnent à l'intérieur d'une chaîne de commandement. Cette chaîne de

4 commandement existe, quant à elle, conformément à la structure et

5 l'organigramme, qui sont conçus par avance. La structure et l'organigramme

6 qui, après, connaissent le re-complètement, et c'est de cela que découle la

7 chaîne de commandement.

8 Tout chef militaire a l'obligation, tout d'abord, de servir d'exemple

9 sur le plan militaire à tous ses subalternes, à tous ceux qui se situent à

10 des échelons inférieurs par rapport à lui. Tout chef militaire est tenu de

11 faire en sorte que les conditions satisfaisantes soient réunies pour la

12 vie, pour le travail des militaires. Il doit garantir une bonne logistique,

13 de tout ce qui se situe dans sa chaîne de commandement, que ce soit les

14 officiers et commandants, les officiers ou les unités. Tout chef militaire

15 en fonctionnant à l'intérieur de sa chaîne de commandement, doit prendre

16 les dispositions pour assurer, pour développer le moral des troupes. Tout

17 chef militaire doit prendre les mesures qui s'imposent pour garantir le

18 respect de la meilleure discipline possible à tous les échelons dans son

19 unité. Il doit surveiller, il doit contrôler, les plans de mobilisation, il

20 doit surveiller et contrôler la prise de décision à des échelons

21 inférieurs. Il doit mettre sur pied un réseau, ou plutôt il doit établir

22 des communications, des transmissions, dans son unité, et cetera.

23 Q. Mon Général, j'examine maintenant votre rapport aux chapitres 490 et

24 491, vous dites, qu'il y a une différence entre les responsabilités, les

25 obligations qui sont énumérées ici. Vous expliquez cette différence. Mais

Page 17658

1 ce que je ne vois pas dans ces deux paragraphes, ce sont les

2 responsabilités juridiques, au sens juridique du terme. Si cette catégorie

3 de responsabilité existe ou est-ce qu'on doit l'insérer dans ce schéma, que

4 vous avez décrit dans ces deux paragraphes ?

5 R. S'il vous plaît, pourriez-vous être un peu plus précis ?

6 Q. Oui, je vais essayer d'être plus précis. Donc j'examine maintenant le

7 paragraphe 490 de votre rapport, et vous dites que le commandant est

8 responsable devant l'état et qu'il est responsable devant ses subordonnés.

9 Aussi, au paragraphe 491, vous dressez la liste de toutes les obligations

10 qui sont celles d'un commandant. Ce qui ne figure pas ici, ce sont des

11 responsabilités au sens juridique du terme. J'aimerais savoir où est-ce que

12 la loi trouve sa place dans ces deux paragraphes ?

13 R. L'obligation légale en tant qu'obligation n'existe pas en tant que

14 point particulier ou obligation, une responsabilité juridique s'entend dans

15 tous ces éléments. D'un point de vue légal, tout chef militaire est tenu de

16 respecter les paramètres légaux, à savoir, les textes de loi lorsqu'il mène

17 ses différentes activités.

18 Q. Mon Général, je vous remercie. Maintenant pour ce qui est du paragraphe

19 491, pourriez-vous, s'il vous plaît, parcourir cette liste que vous avez

20 dressée dans votre rapport, pourriez-vous nous expliquer ce que le

21 commandant doit faire dans le cadre de chacune de ses obligations, parce

22 que la liste est vraiment très impressionnante. Nous avons trois pages de

23 listes ici. Pourriez-vous, s'il vous plaît, parcourir chacun de ces

24 éléments et nous dire ce que le commandant est tenu de faire, selon ses

25 différentes obligations ?

Page 17659

1 R. Je vais avancer dans l'ordre au cas par cas. Tout d'abord, pour ce qui

2 est de surveiller la mobilisation, alors nous prenons le cas d'un

3 commandant de corps. Dans des circonstances normales, tout commandant de

4 corps, lorsqu'il s'agit de la mobilisation, recevrait tous les effectifs

5 voulus, et ce, de la part du ministère de la Défense, et de ses organes,

6 qui sont chargés d'assurer cela. Le commandant du corps lui est tenu d'agir

7 selon le plan de mobilisation, il doit préciser lui selon ce plan, quel

8 sera le point de rassemblement des effectifs mobilisés. Une fois que ces

9 effectifs mobilisés ont été reçus au point déterminé, c'est à partir de ce

10 moment-là que le commandant du corps est responsable de ses hommes qui se

11 présentent pour faire partie de l'unité.

12 S'agissant du rôle joué par le commandant du corps dans le cadre de ceci,

13 il a, dans son état-major, au sein du commandement du corps, un organe

14 spécialisé qui compte plusieurs officiers, qui sont chargés de préparer des

15 plans et de mettre en œuvre les plans de mobilisation.

16 Le commandant du corps ne fait qu'approuver ces plans et naturellement, il

17 a un impact sur la qualité de ces plans. De temps à autre, d'une certaine

18 manière il les contrôle.

19 Un deuxième point, sélectionner les meilleurs officiers, envoyer des

20 recommandations à l'état-major du commandement Suprême, pour leur

21 nomination aux différents postes de commandement. Si la situation était

22 normale, au moment de la création du corps, c'est précisément grâce à

23 l'existence des plans de mobilisation au préalable, que quelqu'un d'autre a

24 été chargé de faire, l'ensemble des hommes serait déjà affecté dans le

25 cadre de l'organigramme du corps à commencer par tous les officiers

Page 17660

1 jusqu'aux soldats du rang. En même temps, tous ces effectifs seraient

2 formés, seraient éduqués et ils seraient prévus pour certaines positions

3 dans l'organigramme qui requiert telle ou telle capacité ou compétence.

4 Puisque aucune unité de l'ABiH n'a connu de telles circonstances, de

5 telles conditions, ce qui s'est produit c'est qu'elle s'est créée si je

6 puis dire de rien, à partir de rien. Dans ce contexte-là, les commandants

7 se sont trouvés dans une situation où ils devaient se procurer, eux-mêmes,

8 des effectifs, des hommes à commencer par des soldats jusqu'aux officiers

9 commandants.

10 Si je puis employer là un autre thème, je dirais, ils se sont même abaissés

11 au point de repérer des soldats, des officiers, sur leur territoire, et de

12 les proposer à leur supérieur, pour que ceux-ci les nomment à différents

13 postes de l'organigramme. Là, on emploie le thème de chez nous, on allait

14 quasiment à la pêche pour pêcher des hommes. On peut vraiment se demander

15 s'ils étaient capables pour exercer telle ou telle fonction, et cetera,

16 sans parler du fait qu'il a fallu structurer toutes ces unités du corps

17 jusque tout en bas, qu'il a fallu trouver les effectifs, tous les soldats,

18 qu'il a fallu les placer dans les unités, qu'il a fallu trouver des

19 commandants pour ces unités, trouver l'armement nécessaire, les munitions,

20 et qu'il fallait, par la suite, partir dans des actions de combat, enfin

21 qu'il fallait mener des missions confiées.

22 Un troisième point --

23 Q. Avant que vous ne poursuiviez, d'après ce que je comprends, vous avez

24 commencé à nous décrire de manière très détaillée chacune de ces

25 obligations, Mais ce que je souhaiterais c'est que vous précisiez à la

Page 17661

1 Chambre ce que le commandant fait dans la pratique réellement pour ce qui

2 est de chacune de ces obligations. Quel est le rôle du commandant, et peut-

3 être en vous fondant sur votre expérience à Sarajevo, pourriez-vous nous

4 dire cela ?

5 R. Le troisième point, la création d'un réseau de communication, le

6 commandant se trouvait dans une situation où il a fallu qu'il travaille

7 avec ses organes subalternes pour rédiger un plan, un plan de transmissions

8 ou de communications, et, par la suite, il devait seul s'efforcer pour

9 trouver des solutions, pour trouver des équipements pour ce réseau de

10 communications et, dans une large mesure, dans une grande partie, il

11 fallait qu'il trouve des gens formés pour travailler sur ces moyens de

12 communications pour établir dans toute la mesure du possible des

13 communications au sein de son unité, ou un système de communications.

14 Ensuite, afin de garantir une formation. Dans les corps de l'ABiH, le moins

15 qu'on puisse dire c'est qu'il fallait au minimum avoir du personnel

16 qualifié qui allait assurer cette formation, qu'il fallait avoir des moyens

17 pour procéder à la formation, pour la réaliser, et qu'il fallait avoir un

18 lieu, des locaux, pour ce faire. Un commandant de corps d'armée de l'ABiH

19 n'avait que dans des proportions minimales tout ce que je viens d'énumérer

20 et souvent il n'avait rien de tout cela.

21 Ensuite --

22 Q. Mon Général, si je puis vous interrompre. Pour ce qui est de la

23 formation, il y a une question que je souhaite vous poser à ce sujet. En

24 vous fondant sur votre expérience, est-ce que vous vous attendriez à ce que

25 le commandant du corps organise ou supervise la formation d'une compagnie

Page 17662

1 ou d'un bataillon, par exemple ?

2 R. Non, absolument pas. Le commandant du corps est un chef militaire de

3 haut rang. C'est le commandant d'une structure militaire au niveau

4 opérationnel. Au niveau de la compagnie, voire même d'un bataillon, et dans

5 une grande mesure aussi au niveau de la brigade, ceci ne relève pas des

6 missions, ni des obligations d'un commandant de corps. Ce sont des hommes

7 dans la chaîne de commandement situés à des échelons inférieurs qui sont

8 tenus de faire cela. Pour ce qui est du commandant du corps et de la

9 formation, il est tenu de former le commandement du corps et aussi de

10 procéder à une certaine forme de formation pour améliorer le fonctionnement

11 du commandement du corps, et pour une certaine partie, il peut prendre part

12 à une sorte de formation à des échelons inférieurs, mais cela, par exemple,

13 lorsqu'il s'agit des exercices des commandements, des postes, des brigades,

14 ou la formation des commandements des brigades. Tout le reste à des

15 échelons inférieurs ne relève pas des activités que le commandant du corps

16 est tenu d'avoir, ni d'y participer, ni de contrôler cela.

17 Q. Si l'on continue à suivre votre liste, pour ce qui est du moral,

18 qu'est-ce que le commandant doit faire pour maintenir le moral au plus haut

19 niveau ? De quelle manière est-ce que ceci est important pour lui ?

20 R. Le moral des troupes est également un facteur significatif et

21 important, pour renforcer le moral l'on s'attend de la part de chaque

22 commandant de servir d'exemple aux autres, de par son comportement, de par

23 la manière dont il s'acquitte de ses obligations, de ses tâches et, par la

24 suite, il doit exiger la même chose de la part de ses subalternes. Afin de

25 s'assurer un bon moral des troupes, il est très important et significatif

Page 17663

1 de fixer des objectifs clairs du combat dès le départ, depuis le sommet des

2 plus hautes instances d'Etat, les plus hautes instances politiques.

3 Ensuite, pour ce qui est de l'ensemble des effectifs au sein d'une unité,

4 pour ce qui est de l'ensemble des hommes dans les différentes unités, il

5 faut leur garantir les meilleures conditions possibles pour le travail,

6 pour la vie, pour l'exercice de leurs tâches journalières allant jusqu'aux

7 missions de combat. Tout commandant est tenu, afin de renforcer le moral,

8 réunir tous les moyens nécessaires, à savoir les approvisionnements, la

9 logistique pour tous les hommes de son unité; sinon, ceci aura une

10 incidence directe sur le moral des hommes.

11 Le commandant de l'unité est également tenu d'exiger sans cesse la plus

12 grande responsabilité de la part de tous ses subalternes, à tous les

13 échelons, dans toutes ces unités, et là encore ceci a un impact direct sur

14 le moral des troupes, et ceci permet de maintenir le moral, et ainsi de

15 suite, et ainsi de suite.

16 Q. Mon Général, j'avance dans votre liste et je vois en haut

17 - peut-être que vous n'avez pas la même pagination que moi - mais dans la

18 version anglaise, je vois au haut de la page : "Transformer des missions

19 d'opération, orientation, direction reçue de la part de l'état-major du

20 commandement Suprême en objectifs tactiques et tâches tactiques pour guider

21 ce que les unités subalternes devront exécutés." Qu'est-ce que cela

22 signifie ? Qu'est-ce que le commandant du corps fait dans le cadre de cette

23 obligation ?

24 R. Tout ordre, et notamment lorsqu'il s'agit d'un ordre de combat, le

25 commandant du corps lorsqu'il reçoit de la part de son commandement

Page 17664

1 Supérieur, que ce soit par voie écrite, ou par voie orale, le commandant du

2 corps doit rassembler les officiers de son commandement, du commandement du

3 corps et, dans la mesure où cela est nécessaire, il doit s'adresser aux

4 officiers du commandement et il doit leur transmettre la tâche, leur fixer

5 un délai pour préparer une proposition et, par la suite, il les re-convie

6 de nouveau et, à ce moment-là, il expose leurs propositions. Chacun

7 s'exprime pour ce qui est de ses compétences et de son secteur. Le

8 commandant les entend et il prend une décision, il émet un ordre, et son

9 ordre vise à ce qu'un ordre écrit soit rédigé pour qu'il le signe. A partir

10 du moment où ceci est fait, on a transformé pratiquement cet ordre qui est

11 venu du commandement supérieur, disons, par exemple, de l'état-major

12 général du commandement Suprême de l'armée vers le commandement du corps.

13 Il existe maintenant cet ordre que lui transmet à ses unités subalternes

14 des Groupes opérationnels ou des brigades. Il émet un ordre à l'intention

15 de toutes ses unités pour qu'une action de combat soit menée.

16 C'est à peu près de manière semblable que fonctionnent les échelons

17 inférieurs, des Groupes opérationnels vers les brigades et les brigades

18 vers les bataillons. C'est ainsi qu'un tel ordre connaît une transformation

19 depuis l'état-major général, cela arrive au commandant du corps et ensuite

20 se transforme en ordre d'échelons inférieurs, c'est-à-dire, ordre tactique.

21 Le long de la chaîne de commandement, l'ordre descend jusqu'aux unités

22 situées le plus bas sur l'échelle.

23 Q. Mon Général, on n'a pas suffisamment de temps pour parcourir l'ensemble

24 de votre liste, mais j'ai compté 34 obligations ici et il me semble que

25 cette liste est plutôt impressionnante. Dites-moi : le commandant du corps,

Page 17665

1 est-ce qu'on s'attend de sa part à ce qu'il remplisse toutes ces

2 obligations ? Vous-même, en tant que commandant du 1er Corps, est-ce que

3 vous vous êtes acquitté de toutes ces obligations ?

4 R. Ces obligations que j'ai énumérées au paragraphe 491, ce sont des

5 obligations qui concernent tout chef militaire de haut rang. Je dois vous

6 dire d'emblée qu'en tant que commandant du 1er Corps, je ne me suis pas

7 acquitté de toutes ces obligations. Je ne les ai pas toutes remplies.

8 Pourquoi ?

9 Précisément, à cause de tout ce que nous avons évoqué précédemment, à cause

10 de tous ces facteurs, très nombreux et objectifs qui m'ont empêché de

11 remplir toutes ces obligations telle qu'énumérées ici. Lorsqu'il s'agit de

12 savoir si un commandant de corps a rempli toutes ses obligations ou non,

13 cela dépend de ce qu'il avait comme facteurs autres, comme facteurs

14 objectifs, donc, non pas quelque chose qui découlerait des déficiences ou

15 d'un manque de zèle de la part du commandant du corps, mais qui résulte de

16 d'autres circonstances objectives. Dans quelle mesure est-ce que ces

17 facteurs ont empêché le commandant dans l'exercice de toutes ces

18 obligations dans la mesure prévue ? Il y a là un lien de cause à effet de

19 réciprocité. Compte tenu de leur importance, il a été moins capable de

20 s'acquitter de ses missions.

21 Q. Je vous remercie, mon Général. Comme le Président vous a dit, vous ne

22 déposerez pas demain. On vous reverra, cependant, mercredi pour que vous

23 poursuiviez avec l'interrogatoire principal.

24 Je vous remercie.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, comme vous venez de l'entendre, vous

Page 17666

1 reviendrez mercredi pour l'audience qui débutera à 14 heures 15. D'ici là,

2 vous ne rencontrez personne puisque vous n'avez pas le droit de rencontrer

3 l'avocat de la Défense ou l'Accusation. Bien entendu, vous pouvez repartir

4 avec votre cartable et toutes vos affaires et nous nous reverrons mercredi

5 à 14 heures 15.

6 Il est 19 heures 03. Je remercie toutes les personnes et je demande à tout

7 le monde de revenir pour l'audience qui débutera demain à 14 heures 15 avec

8 un autre témoin.

9 --- L'audience est levée à 17 heures 03 et reprendra le mercredi 22 mars

10 2005, à 14 heures 15.

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25