Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 27

  1   Le mardi 4 décembre 2007

  2   [Audience d'appel]

  3   [Audience publique]

  4   [Les appelants sont introduits dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 8 heures 33.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   Madame la Greffière, veuillez, je vous prie, donner le numéro de l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour. Affaire

  9   IT-01-47-A, le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 11   Je me tourne vers MM. Hadzihasanovic et Kubura. Je voudrais savoir s'ils

 12   sont en mesure de m'entendre et de suivre la procédure grâce à

 13   l'interprétation.

 14   L'APPELANT HADZIHASANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le

 15   Président, Messieurs les Juges. Bonjour à toutes et à tous. J'entends bien

 16   et je comprends tout. Merci.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci, Monsieur Hadzihasanovic.

 18   L'APPELANT KUBURA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je

 19   vous entends bien et je comprends l'interprétation.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 21   Je vais maintenant demander aux parties de se présenter, à commencer par M.

 22   Kubura.

 23   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 24   les Juges. M. Kubura est défendu par Nermin Mulalic, Rodney Dixon, et moi,

 25   je m'appelle Fahrudin Ibrisimovic.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 27   Pour M. Hadzihasanovic.

 28   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

Page 28

  1   les Juges. Le général Hadzihasanovic est défendu par Edina Residovic,

  2   conseil principal, et Stéphane Bourgon, co-conseil.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

  4   Maintenant, je vais me tourner vers l'Accusation.

  5   Mme McCALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

  6   Juges. L'Accusation est représentée par moi-même, Shelagh McCall. Je suis

  7   accompagné de Steffen Wirth, Barbara Goy et Marwan Dalal; notre commis à

  8   l'affaire est Sebastiaan van Hoodydonk.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Nous sommes réunis aujourd'hui à l'occasion de l'audience d'appel dans

 11   l'affaire Hadzihasanovic-Kubura.

 12   Je vais pour commencer résumer les moyens d'appels dont est saisie la

 13   Chambre d'appel et je vais vous expliquer la manière dont nous allons

 14   travailler aujourd'hui.

 15   Cet appel porte sur la responsabilité du supérieur hiérarchique de MM.

 16   Hadzihasanovic et Kubura pour ne pas avoir empêché ou puni des crimes

 17   commis par des unités qui leur étaient subordonnés en République de Bosnie-

 18   Herzégovine en 1993.

 19   Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura ainsi que l'Accusation ont interjeté

 20   appel du jugement qui a été rendu le 15 mars 2006 par la Chambre de

 21   première instance numéro II, composée du Juge Antonetti qui la présidait,

 22   et des Juges Rasoazanany et Swart.

 23   La Chambre de première instance a déclaré Hadzihasanovic coupable au terme

 24   de l'article 7(3) [comme interprété] du Statut du Tribunal pour ne pas

 25   avoir empêché ou puni les meurtres commis par ses subordonnés à Bugojno

 26   ainsi qu'au camp d'Orasac, chef 3; coupable également de traitement cruel

 27   commis par ses subordonnés à l'école de musique de Zenica au camp d'Orasac

 28   ainsi que dans divers centres de détention à Bugojno, chef 4. La Chambre de

Page 29

  1   première instance a acquitté Hadzihasanovic de tous les autres chefs. La

  2   Chambre de première instance a condamné M. Hadzihasanovic à une peine

  3   unique de cinq ans d'emprisonnement. M. Hadzihasanovic demande l'annulation

  4   des déclarations de culpabilité prononcée à son encontre.

  5   L'Accusation a interjeté appel contre la peine prononcée contre M.

  6   Hadzihasanovic.

  7   La Chambre de première instance a déclaré M. Kubura coupable au terme de

  8   l'article 7(3) du Statut, coupable de ne pas avoir empêché ou puni des

  9   actes de pillage commis par ses subordonnés à Vares et dans les villages

 10   situés dans la zone de Ovnak, chef 6. La Chambre de première instance a

 11   acquitté Kubura de tous les autres chefs d'accusation. Kubura a été

 12   condamné à une peine unique d'emprisonnement de deux ans et demie. M.

 13   Kubura a interjeté appel de sa condamnation et de sa peine. L'Accusation a

 14   interjeté appel de l'acquittement de M. Kubura pour le crime de destruction

 15   sans motif de la ville de Vares en octobre 1993. Elle a également interjeté

 16   appel au titre de la peine prononcée.

 17   Amir Kubura et Enver Hadzihasanovic ont déposé leurs actes d'appel

 18   respectivement les 13 et 18 avril 2006. Le 22 janvier 2007, M. Kubura a

 19   déposé son mémoire d'appel. Le 5 février 2007, Hadzihasanovic a déposé son

 20   mémoire d'appel sous pli scellé avec un certain nombre d'annexes qui ont

 21   ensuite été redéposées le 27 février 2007. L'Accusation a déposé son acte

 22   d'appel le 18 avril 2006 et son mémoire d'appel, le 3 juillet 2006.

 23   Je vais maintenant résumer les moyens d'appel soulevés. Amir Kubura soulève

 24   trois moyens d'appel.

 25   Au titre du premier moyen d'appel, M. Kubura fait valoir que la Chambre de

 26   première instance a commis des erreurs de faits et de droit en le

 27   condamnant pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires et raisonnables

 28   pour empêcher et punir les actes de pillage dans le villages de la zone de

Page 30

  1   Ovnak en juin 1993.

  2   Au titre de son deuxième moyen d'appel, M. Kubura a fait valoir que la

  3   Chambre de première instance a commis des erreurs de faits et de droit en

  4   le déclarant coupable de ne pas avoir pris de mesures nécessaires et

  5   raisonnables pour empêcher et punir les actes de pillage à Vares en

  6   novembre 1993.

  7   Au titre du troisième moyen d'appel, M. Kubura a fait valoir que la Chambre

  8   de première instance s'est fourvoyée dans l'exercice de son pouvoir

  9   d'appréciation au moment de décider de la peine en le condamnant à une

 10   peine de deux ans et demie d'emprisonnement.

 11   Enver Hadzihasanovic soulève cinq moyens d'appel.

 12   Au titre des premier et deuxième moyens d'appel,

 13   M. Hadzihasanovic fait valoir que la Chambre de première instance a commis

 14   de nombreuses erreurs de faits et de droit qui l'ont privé de son droit à

 15   bénéficier d'un procès équitable.

 16   Au terme de son troisième moyen, il a fait valoir que la Chambre de

 17   première instance a commis des erreurs de faits et de droit en concluant

 18   qu'il n'avait pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour punir

 19   les responsables du meurtre de Mladen Havranek et du traitement cruel de

 20   six prisonniers au magasin de meubles le 5 août 1993, ainsi que pour ne pas

 21   avoir prévenu de pareils agissements dans d'autres centres de détention de

 22   Bugojno.

 23   Au terme de son quatrième moyen d'appel, M. Hadzihasanovic fait valoir que

 24   la Chambre de première instance a commis des erreurs de faits et de droit

 25   en concluant qu'il avait failli à son obligation de supérieur hiérarchique

 26   en ne prenant pas des mesures nécessaires et raisonnables pour punir les

 27   auteurs de violence physique infligées aux personnes qui se trouvaient à

 28   l'école de musique de Zenica et ainsi que des agissements semblables.

Page 31

  1   Au terme du cinquième moyen d'appel, M. Hadzihasanovic fait valoir que la

  2   Chambre de première instance a commis des erreurs de faits et de droit en

  3   concluant qu'il n'avait pas pris les mesures nécessaires et raisonnables

  4   pour empêcher le meurtre de Dragan Popovic et les traitements cruels qui

  5   ont été commis entre le 19 et le 31 octobre 1993 par des membres du

  6   Détachement El Moudjahidine.

  7   L'Accusation quant à elle soulève quatre moyens d'appel.

  8   Au titre des premier et troisième moyens d'appel, l'Accusation fait valoir

  9   que Hadzihasanovic et Kubura ont reçu des peines qui manifestement sont

 10   inappropriées.

 11   Au titre du deuxième moyen d'appel, l'Accusation interjette appel de

 12   l'acquittement de Kubura au titre du chef 5, concernant la destruction sans

 13   motif de Vares en octobre '93.

 14   Pour finir, au titre du quatrième moyen d'appel, l'Accusation fait valoir

 15   que la Chambre de première instance a commis une erreur de droit en

 16   concluant qu'un supérieur pouvait s'acquitter de son obligation de punir en

 17   prenant des mesures uniquement de simples mesures disciplinaires. Bien que

 18   l'Accusation reconnaisse que cette erreur n'est pas un impact sur le

 19   verdict, elle a souhaité l'évoquer car elle estime qu'elle présente un

 20   intérêt général pour le Tribunal international.

 21   Au cours de cette audience, les conseils, bien entendu, sont libres

 22   d'aborder les différents moyens d'appel dans l'ordre qui leur paraît le

 23   plus approprié. Mais je voudrais les encourager à ne pas se contenter de

 24   répéter mot pour mot ou de résumer longuement ce qui figure déjà dans les

 25   mémoires dont les Juges de la Chambre ont pris connaissance.

 26   Je souhaite également préciser que conformément à l'ordonnance portant

 27   calendrier du 14 novembre 2007, la Chambre d'appel a invité les parties a

 28   évoqué certaines questions bien précises au cours de cette audience, je ne

Page 32

  1   vais pas réitérer la nature de ces questions maintenant.

  2   Cet appel - et j'insiste sur ce fait - nous ne faisons bien entendu

  3   sans préjudice de toute autre question que les parties où la Chambre

  4   d'appel souhaiterait évoquer. Cela ne constitue nullement une expression,

  5   d'une opinion quant au fond même de l'appel.

  6   Je voudrais maintenant vous rappeler les critères qui s'appliquent aux

  7   erreurs de faits et de droits évoqués au moment de l'appel.

  8   Une procédure d'appel n'est pas un nouveau procès et les appelants ne

  9   doivent pas se contenter de répéter les arguments qu'ils ont présentés en

 10   première instance. Non. Conformément à l'article 25 du Statut, les

 11   appelants doivent limiter leurs arguments aux erreurs de droit qui selon

 12   eux invalident le jugement de première instance ou aux erreurs de fait, qui

 13   selon encore entraîne [imperceptible] de justice. De plus, il convient de

 14   rappeler que les appelants sont dans l'obligation de fournir des références

 15   précises quant aux éléments qui étayent leurs arguments présentés en appel.

 16   Cette audience va se dérouler conformément au calendrier qui figure

 17   dans la décision portant à la fois sur la requête urgent de Hadzihasanovic

 18   aux fins de versement au dossier de l'appel de certaines traductions

 19   officielles et à la demande de temps supplémentaire lors de l'audience

 20   d'appel, demandé par M. Kubura le 30 novembre 2007. Le conseil d'Amir

 21   Kubura va présenter ses arguments ce matin pendant 40 minutes. L'Accusation

 22   répondra pendant 40 minutes aussi, suite à quoi le conseil de M. Amir

 23   Kubura répliquera pendant 20 minutes.

 24   Après une pause de 30 minutes, l'Accusation présentera ses moyens d'appel,

 25   pendant une heure.

 26   Il serait fort utile pour la Chambre d'appel que les parties présentent

 27   leurs arguments de manière concise et de manière claire.

 28   Je souhaite vous rappeler qu'à tout moment les Juges pourront vous

Page 33

  1   interrompre pour poser des questions, il est possible également que les

  2   Juges préfèrent attendre la fin de chaque intervention pour ce faire.

  3   Ceci étant dit, maintenant que tout a été -- que la manière de procéder ce

  4   matin a été précisée, je vais demander au conseil de

  5   M. Kubura de nous présenter les arguments qui sous-tendent de ses moyens

  6   d'appel.

  7   Vous avez la parole.

  8   M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Moi, je vais intervenir ici au sujet de deux moyens d'appel seulement, les

 10   moyens 1 et 2, c'est-à-dire les moyens par lesquels

 11   M. Kubura a interjeté appel des condamnations pour ne pas avoir empêché ou

 12   puni des actes de pillage conformément à l'article 7(3).

 13   Pour le reste, l'appelant se fonde sur les écritures qui ont déjà été

 14   déposées.

 15   Je souhaiterais rappeler que M. Kubura a bénéficié d'une mise en liberté

 16   anticipée conformément à une ordonnance délivrée par le Président le 11

 17   avril 2006, il avait à ce moment-là purgé plus de

 18   95 % de sa peine de deux ans et demi.

 19   Il s'en suit que toute réduction éventuelle de sa peine serait quelque

 20   chose finalement de purement théorique et qui n'aurait une valeur que dans

 21   la mesure -- la jurisprudence du TPIY en matière de peine.

 22   Mais même si M. Kubura est aujourd'hui en liberté, nous estimons que

 23   l'appel qu'il interjette contre les deux déclarations de culpabilité

 24   prononcées contre lui va au-delà de l'exercice académique.

 25   D'emblée, il convient d'insister sur le fait que, pour

 26   M. Kubura, la totalité du jugement est raisonnée, et l'essentiel des

 27   conclusions de la Chambre de première instance et les acquittements

 28   prononcés, les motifs qui les justifient, tout cela ne fait l'objet

Page 34

  1   d'aucune contestation ni de la part de l'Accusation ni de la part de M.

  2   Kubura.

  3   Ce que dit M. Kubura simplement c'est qu'il y a eu des erreurs bien

  4   précises que l'on retrouve dans les deux dernières conclusions de la

  5   Chambre de première instance et qui portent sur les seules déclarations de

  6   culpabilité qui ont été prononcées au titre des pillages et ceci concerne

  7   le chef 6.

  8   C'est la raison pour laquelle nous avons interjeté appel à la fois pour le

  9   dossier, et parce que, bien entendu, comme ces déclarations de culpabilité

 10   ont été prononcées à présent un Tribunal international, ceci a un effet

 11   délétère sur les perspectives de carrière de M. Kubura dans l'armée en

 12   Bosnie, ou d'ailleurs, sur toute autre possibilité de carrière, ça un

 13   impact également sur sa capacité de se déplacer sur sa réputation.

 14   Pour terminer, à titre d'introduction, dans -- selon nous rien ne justifie

 15   l'augmentation de la peine de M. Kubura, comme le demande le bureau du

 16   Procureur au titre du troisième moyen d'appel, il s'agit en effet de crimes

 17   sur les biens, il faut également tenir compte des circonstances

 18   atténuantes, et puis, des effets -- des conséquences assez négatives qu'ont

 19   eu ces deux déclarations de culpabilité dont je viens de vous parler

 20   brièvement. Maintenant, je précise que je reviendrai sur le moyen d'appel

 21   de l'Accusation dont je viens de parler un peu plus tard.

 22   Parlons maintenant des deux moyens d'appel de M. Kubura contre sa

 23   condamnation.

 24   Nous avançons quant à nous que ni n'aurait pu sur la base des éléments de

 25   preuve disponibles au dossier condamner M. Kubura pour ne pas avoir empêché

 26   les actes de pillage à Ovnak en juin 1993 ou pour ne pas avoir empêché ou

 27   puni les actes de pillage qui ont eu lieu plus tard à Vares, en fait, le

 28   lendemain à Vares -- un seul jour à Vares, le 4 novembre 1993.

Page 35

  1   Les arguments de l'appelant s'articulent autour de trois éléments

  2   principaux. Je vais les passer en revue.

  3   D'abord, parlons d'Ovnak.

  4   L'argument essentiel de l'appelant c'est que rien n'indique que M. Kubura

  5   ait eu la connaissance requise c'est-à-dire qu'il ait su que les membres de

  6   sa brigade s'étaient appropriés des biens de manière illicite - et je parle

  7   donc ici de ses subordonnés - et aucun élément de preuve n'allait dans ce

  8   sens, aucun élément de preuve permettant une Chambre de première instance

  9   raisonnablement de prononcer une déclaration de culpabilité.

 10   Pourquoi ? Parce qu'il n'y a aucun élément de preuve direct indiquant que

 11   M. Kubura ait assisté à des actes de pillage et qu'il ait vu des biens

 12   pillés ou qu'il ait vu que l'on distribue toutes ces marchandises. La

 13   Chambre de première instance n'a rien indiqué de tel, l'Accusation ne fait

 14   référence à rien de tel non plus dans le dossier.

 15   Deuxièmement, il n'y a aucun rapport des commandants ou des membres de la

 16   brigade de M. Kubura au sujet des pillages, aucun rapport non plus des

 17   autres brigades qui étaient impliquées. On ne trouve que trois ordres de

 18   portée générale qui viennent du commandement du 3e Corps et qui sont

 19   adressés à la totalité des brigades à "toutes" les brigades, c'est un terme

 20   d'ailleurs qui est repris dans ces ordres, ordres donnant instructions

 21   d'empêcher les actes de pillage suivant des opérations, des opérations qui

 22   ne sont pas précisées, opérations entre l'ABiH et le HVO. Or là il n'est

 23   pas fait mention dans aucun de ces ordres d'Ovnak. Je fais référence ici

 24   aux pièces P186, c'est l'ordre du 10 juin; je fais référence également à la

 25   pièce DH65, c'est l'ordre du 19 juin.

 26   M. Kubura a simplement transmis cet ordre à sa brigade dans un ordre dont

 27   le bureau du Procureur nous dit que c'est l'ordre du 20 juin, P427, et il

 28   l'a fait comme tout les autres chefs ou commandants de brigade du 3e Corps,

Page 36

  1   comme ils devaient le faire, bien entendu. Cet ordre du 20 juin ne fait pas

  2   non plus référence explicite à Ovnak ou à la zone d'Ovnak -- ne fait pas

  3   référence au fait que la

  4   7e Brigade ait été impliquée dans toutes ces opérations. Selon nous, ces

  5   ordres sur lesquels se fonde l'Accusation indiquent simplement que M.

  6   Kubura obéissait les ordres qui venaient de sa hiérarchie et les

  7   transmettait en aval également, il s'agissait d'ordres de portée générale

  8   interdisant des actes de pillage et il a transmis ses ordres à ses

  9   subordonnés comme le fait d'autres commandants de brigade.

 10   Il faut insister sur le fait que la Chambre de première instance au

 11   1943 a conclu que différentes brigades -- que des réfugiés également des

 12   civils ont participé aux actes de pillage qui se sont déroulés dans la zone

 13   d'Ovnak.

 14   Si bien que tout ce qui nous reste c'est sur quoi s'est appuyé la

 15   Chambre de première instance pour en arriver à sa conclusion. C'est un

 16   paragraphe clé du jugement, paragraphe 1957, et pour conclure, à la

 17   connaissance de M. Kubura de ce qui s'était passé, la Chambre de première

 18   instance s'est appuyée sur un simple témoin, le Témoin BA, qui a dit que

 19   les biens pillés de Ovnak avaient été distribués par la 7e Brigade. La

 20   Chambre de première instance a conclu que, pour que cela se fasse, il a

 21   fallu forcément qu'il y ait auparavant un ordre, une décision du

 22   commandement de M. Kubura.

 23   En ce moment, si on regarde ce que déclare le Témoin BA, on voit

 24   qu'il dit qu'il ne sait pas qui a réalisé cette distribution. Cela figure

 25   aux pages 808 et 809 du compte rendu d'audience, et au dossier, vous ne

 26   trouverez aucun autre élément de preuve relatif à ces distributions. On

 27   s'appuie uniquement sur ce témoin-là.

 28   De plus, la Chambre de première instance a conclu explicitement que

Page 37

  1   la présence de M. Kubura au QG où les biens étaient distribués, elle a

  2   conclu donc que cette présence justement elle n'avait pas été établie au-

  3   delà de tout doute raisonnable. Cela vous pourrez le trouver au paragraphe

  4   1956 du jugement de première instance.

  5   De surcroît, la Chambre de première instance a conclu que l'armée

  6   avait le droit de confisquer des biens privés qui pouvaient être utilisés

  7   dans un objectif militaire, pouvaient être utilisés directement dans un

  8   objectif militaire. Ceci figure au paragraphe 1941 du jugement. Il n'y

  9   avait rien de répréhensible à la mise en place d'un centre de Rassemblement

 10   du butin de guerre ou à la mise en place de commission telle que l'a

 11   ordonné M. Kubura dans son ordre du 5 juin 1993. Pièce P420 du dossier,

 12   paragraphe 1939 du jugement. Selon nous donc contrairement à ce que dit

 13   l'Accusation, il n'est pas vrai que ces ordres montrent qu'il savait que

 14   ces biens avaient été pillés. Non, cela montre simplement qu'il a mis en

 15   place un système tout à fait licite, reconnu d'ailleurs comme tel par la

 16   Chambre de première instance.

 17   C'est essentiel il n'existe aucun ordre portant sur la distribution

 18   des biens, des marchandises qui ont été récupérées à Ovnak. D'autre part,

 19   il n'y aucun rapport émanant de M. Kubura indiquant qu'il était au courant

 20   de cette façon de procéder. Comme je l'ai dit, le Témoin BA n'a pas pu dire

 21   au cours de sa déposition qui était ceux qui participaient à toute cette

 22   procédure.

 23   Maintenant, je vais passer à la deuxième partie de mon argumentation

 24   qui s'articule autour de la question suivante : est-ce qu'il y a d'autres

 25   exemples de pillage entre juin 93 à Ovnak et novembre 93 à Vares ?

 26   La Chambre d'appel avait demandé au bureau du Procureur de présenter

 27   des éléments de preuve relatifs à des pillages commis par la 7e Brigade

 28   entre ces deux périodes. Selon nous, ces éléments de preuve n'existent pas,

Page 38

  1   on ne peut pas trouver d'éléments portant sur des cas précis de pillage

  2   dont on pourrait tenir M. Kubura responsable au titre de l'article 7(3)

  3   pour ne pas avoir empêché ou puni des actes de pillage. En tout cas, il n'a

  4   nullement été mis en cause pour d'autres incidents.

  5   Si bien qu'il n'existe aucun élément de preuve indiquant la mise en

  6   place d'un système auquel M. Kubura ne se serait pas opposé. Un système qui

  7   aurait pu lui mettre la puce à l'oreille, le mettre en garde ou un système

  8   tel qu'il aurait pu se douter que ce type d'agissement illicite allait se

  9   reproduire.

 10   Comme je l'ai déjà dit, il n'existe aucun élément de preuve relatif à

 11   Ovnak sur la participation de ces hommes à des activités à cet endroit.

 12   Mais même si on part du principe qu'il avait ces informations, il n'y a pas

 13   eu d'actes répréhensibles qui se sont produits après, et c'est au bureau du

 14   Procureur qu'il appartient de prouver qu'il avait connaissance des actes de

 15   pillage qui ont eu lieu à Vares au début du mois de novembre, ceci afin de

 16   déclarer que

 17   M. Kubura était responsable pour ne pas avoir empêché ces actes de se

 18   produire.

 19   Le volet que je vais maintenant aborder sera le dernier et il

 20   concerne Vares. Nous arrivons à la dernière partie pour ce qui est de la

 21   conduite.

 22   Pour ce qui est de Ovnak, rien ne prouve à notre avis que

 23   M. Kubura était en possession de la connaissance requise concernant des

 24   infractions précises en matière de pillage qui ont été commises par ses

 25   subordonnés de la 7e Brigade.

 26   La Chambre a été claire dans son jugement, elle a déclaré que cette

 27   opération c'était une opération menée par plusieurs corps, plusieurs

 28   brigades, par trois corps, en fait, commandés par un groupe opérationnel

Page 39

  1   que nous allons appeler et qui s'appelle le GO Istok. Paragraphe 1966 et

  2   paragraphe 1978.

  3   Il n'y aucune preuve attestant du fait que M. Kubura aurait été

  4   témoin d'acte de pillage à Vares e 4 novembre ou aussitôt après. Il n'y a

  5   non plus aucune preuve montrant qu'il aurait reçu des rapports de ses

  6   subordonnés. Rapports disant qu'il y avait des actes de pillage.

  7   Au contraire, Kasim Podzic, c'était le commandant du

  8   2e Bataillon de la 7e Brigade. Il se trouvait à Vares ce jour-là. Il est

  9   venu témoigner du fait que ses effectifs se sont retirés sur des ordres

 10   donnés à 15 heures 00 et que ces hommes ne se sont pas livrés à des actes

 11   de pillage à Vares. Les références seront celles-ci paragraphes ou pages du

 12   compte rendu 18656 à 18658. Je précise pour être complet que la Chambre de

 13   première instance en parle au paragraphe 1838 sans se prononcer sur la

 14   crédibilité ou l'absence de crédibilité dudit témoin. La Chambre semble

 15   s'être appuyée sur les dires du témoin au moment de rédiger le jugement.

 16   La Chambre l'accepte d'ailleurs, il y a ces carences dans

 17   l'administration, la preuve, mais en plus il y a deux rapports du

 18   commandement du Groupe opérationnel Istok en date du 4 novembre concernant

 19   les pillages à Vares et ces deux rapports n'ont pas été envoyés à M.

 20   Kubura. La Chambre le dit dans le jugement et il y a deux documents P445 et

 21   P676. 

 22   Par conséquent, au niveau du jugement, il apparaît clairement qu'il

 23   ne reste que trois documents sur lesquels la Chambre s'est appuyée dans ses

 24   conclusions. Il s'agit des pièces P675, P446 et P468. Or, ceci se trouve

 25   dans un paragraphe capital pour ce qui est du chef retenu contre

 26   l'appelant, à savoir le paragraphe 1986.

 27   L'Accusation laisse entendre que l'appelant a eu un regard artificiel

 28   et très particulariste pour ce qui est de ces documents sans tenir compte

Page 40

  1   de la chronologie des événements et des autres éléments de preuve formant

  2   le contexte. Au contraire, dans le peu de temps qui me reste, je voudrais

  3   examiner chacun de ces documents pour montrer aussi les liens qui existent

  4   entre eux. C'est ainsi que je finirais la première présentation de mes

  5   arguments.

  6   D'abord, parlons de la pièce 675. Un ordre venant du commandement du

  7   groupe opérationnel, le 4 novembre, le jour où il y a eu pillage. Vous le

  8   verrez cet ordre n'est pas adressé à la

  9   7e Brigade. Cet ordre dit au contraire que l'armée et là je cite : "L'armée

 10   doit se replier et qu'elle doit aussi arrêter d'emmener des objets ou

 11   quoique ce soit qui se trouve en ville." Le commandant de la 7e Brigade est

 12   responsable, c'est dit explicitement de la bonne exécution de cet ordre.

 13   Mais remarquons qu'on ne dit nul part dans cet ordre que la 7e Brigade se

 14   serait rendu coupable d'actes de pillage. Je reviendrai à cet ordre lorsque

 15   je regarderai les ordres donnés ce jour-là et les jours suivants par la 7e

 16   Brigade.

 17   Document suivant, document P446. Il y a ce rapport du commandement du 3e

 18   Corps d'armée. Il est adressé au commandement du Groupe opérationnel. La

 19   date elle est elle aussi celle du 4 novembre, l'ordre dit ceci, je cite :

 20   "Nous avons donné des ordres aux brigades pour qu'elles exigent de tous les

 21   éléments de la police militaire qu'ils empêchent les actes de pillage."

 22   La 7e Brigade était la seule brigade du 3e Corps d'armée engagée à Vares. La

 23   Chambre a conclu que forcément cet ordre avait été transmis à la 7e

 24   Brigade.

 25   Il y a un premier point qui n'est pas exact dans cette conclusion, c'est

 26   que la 7e Brigade n'était pas la seule qui ait participé à Vares. Nous

 27   avons le document 448, c'est un rapport concernant l'opération qui montre

 28   clairement qu'il y avait participation de plusieurs brigades du 3e Corps et

Page 41

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  

Page 42

  1   d'autres unités. De toute façon, l'autre rapport -- le rapport le dit ce

  2   mot : "Brigades," est utilisé au pluriel, donc, on ne parle pas simplement

  3   de "la 7e."

  4   Mais ce qui compte encore davantage c'est qu'il n'a pas été prouvé que M.

  5   Kubura aurait été avisé d'actes de pillage commis par ses subordonnés dans

  6   une opération qui exigeait la participation de plusieurs brigades.

  7   Document suivant, le document P468, rapport qui émane du

  8   2e Bataillon et qui a été envoyé au commandement de la 7e Brigade le 11

  9   novembre, quelques jours plus tard. A notre avis, cet élément de preuve ne

 10   permet pas de conclure que des actes illicites auraient été commis par des

 11   subordonnés de M. Kubura en particulier. Dans ce rapport, il y a qu'une

 12   mention d'appropriation de butin de guerre en vertu d'une politique tout à

 13   fait illicite, comme je l'ai dit et il est dit explicitement qu'il faut

 14   empêcher des actes de pillage. Donc, ce n'est pas la preuve qu'il y a eu

 15   pillage si ce rapport dit le contraire, [imperceptible] qu'il n'a pas eu

 16   pillage.

 17   La Chambre d'appel a posé plusieurs questions en partie notamment celles-ci

 18   : d'après le dossier quand est-ce que M. Kubura a été informé d'actes de

 19   pillage commis à Vares le 4 novembre ? Si l'on examine les pièces du

 20   dossier, on peut répondre ceci, jamais, à aucun moment n'a-t-il été informé

 21   qu'il y avait des activités de pillage commises par ses subordonnés le 4

 22   novembre.

 23   La Chambre renvoie à deux ordres de la 7e Brigade, l'Accusation aussi

 24   d'ailleurs. Il s'agit de la pièce DK50 et de la pièce 478. Ces deux ordres

 25   émanent tous deux de la 7e Brigade - l'un est donné le 4, l'autre le 5

 26   novembre - mais aucun de ces deux ordres ne mentionne que la 7e Brigade

 27   doit se retirer en raison d'actes de pillage commis par la 7e brigade ou

 28   parce qu'un ordre aurait été reçu de se retirer -- de se replier en raison

Page 43

  1   de pillages commis par la 7e Brigade.

  2   Selon nous que nous disent ces ordres ? Comme je l'ai dit, je reviendrai à

  3   l'examen de la pièce P675, l'ordre donné par le commandement du Groupe

  4   opérationnel à l'armée pour qu'elle se retire. Mais que représentent ces

  5   ordres, c'est que le commandement de la

  6   7e Brigade donne l'ordre aux effectifs de se retirer le 4 novembre ce que

  7   devait faire d'ailleurs toutes les forces engagées dans cette opération

  8   menée par plusieurs brigades.

  9   En résumé, ces documents n'apportent pas la preuve de connaissance

 10   qu'aurait eu M. Kubura d'actes de pillage commis par la 7e Brigade, tout ce

 11   qu'ils prouvent c'est que la 7e Brigade appliquait des ordres donnés par

 12   les échelons supérieurs de la hiérarchie pour se retirer comme devaient le

 13   faire d'ailleurs toutes les brigades subordonnées.

 14   En conclusion, je me permets de vous demander de vous rapporter à la

 15   jurisprudence, paragraphe 12 de notre mémoire en appel, inutile de vous

 16   ordonner davantage de détails puisque nous avons certaines contraintes en

 17   matière de temps. Mais ceci reviendrait à dire que la connaissance ne peut

 18   pas être présumée. Pour savoir si on avait des raisons de savoir ou une

 19   connaissance directe. C'est l'Accusation qui a la charge de la preuve par

 20   voie de référence à des informations qu'avaient en fait les supérieurs

 21   hiérarchiques. On ne peut pas présumer que M. Kubura avait ces

 22   informations. Il faut montrer -- démontrer que ces informations il les a

 23   trouvés dans des rapports, des ordres, dans des réunions où il faut montrer

 24   les témoins directs qui le prouvent.

 25   La condition exigée dans l'article 7(3), la connaissance n'a pas été

 26   prouvée et établie à partir des informations qu'avait véritablement M.

 27   Kubura au moment des faits. Par conséquent, ce que nous disons c'est

 28   qu'aucune Chambre de première instance raisonnable n'aurait pu déclarer M.

Page 44

  1   Kubura coupable partant des éléments de preuve présentés.

  2   Voilà les arguments que je voulais vous présenter. Vous avez bien sûr

  3   toutes nos écritures mais je voulais mettre en exergue ces points-ci.

  4   Je vous remercie, Messieurs les Juges.

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur le Juge Liu, vous avez une

  6   question.

  7   M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

  8   Ce qui m'intéresse beaucoup c'est la fréquence et la portée des ordres de

  9   la 7e Brigade des opérations de juin à novembre 1993. Pourriez-vous nous

 10   dire où dans le dossier de première instance il y a des éléments de preuve

 11   ainsi que la question de savoir où dans le jugement il y a des références à

 12   ces opérations militaires ?

 13   M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 14   J'en avais, en fait, discuté avec l'Accusation parce que la question avait

 15   d'abord été posée à l'Accusation. La Chambre voulait savoir sur quelles

 16   opérations, l'Accusation s'appuyait s'il y avait des éléments de preuve

 17   concernant le pillage en particulier.

 18   Nous avons examiné le dossier de première instance, il n'y a pas eu preuve

 19   d'autres opérations militaires menées à cette époque par la 7e Brigade. Ça

 20   ne veut pas dire bien entendu qu'il n'y a pas eu de telles opérations. Nous

 21   avons une pièce P621, mon estimé consœur de l'Accusation va peut-être en

 22   parler là effectivement on parle peut-être d'autres opérations menées par

 23   la 7e Brigade, entre autres, Brigade du 3e Corps à ce moment. Mais on ne

 24   retient pas de charges contre M. Kubura par rapport à ces opérations.

 25   Mais la question plus importante est peut-être de savoir s'il y a des

 26   éléments de preuve attestant d'actes de pillage pendant cette période. Je

 27   sais que l'Accusation va vous en parler de ce point et j'avais l'intention

 28   de répliquer, mais à ce stade, je peux dire d'après nous qu'il n'y a pas

Page 45

  1   d'autres exemples, d'autres cas. On aurait pu retenir contre M. Kubura où

  2   il y aurait eu connaissance de sa part et manquement à l'obligation de

  3   punir les membres de la

  4   7e Brigade pour pillage.

  5   Mais nous avons des éléments de preuve montrant que certaines mesures

  6   disciplinaires de rétribution ou de punition ont été prises à l'encontre de

  7   membres de la 7e Brigade dont l'Accusation va peut-être parler, mais c'est

  8   en dehors de tout contexte militaire. Il y a eu des vols de voitures, vols

  9   par infraction, ce genre de chose. Il s'agit dans des villes, ceci

 10   n'intervenait pas -- ne s'inscrivait pas dans le cadre d'opérations

 11   militaires dont aurait pu être responsable M. Kubura pour autant que ceci

 12   était le cas.

 13   M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. LE JUGE GUNEY : Merci, Monsieur le Président.

 15   [interprétation] Est-ce qu'il avait la connaissance requise pour ce qui est

 16   d'actes à Vares et qui pouvaient l'aviser qu'il y avait ce genre d'actes de

 17   pillage, mais est-ce qu'il a bien été à la hauteur de devoir qui était le

 18   sien d'empêcher pillage en essayant de mettre fin au pillage une fois qu'il

 19   avait commencé de façon à éviter que ne se reproduise des actes ou ne se

 20   répètent des actes de pillage ?

 21   M. DIXON : [interprétation] Les deux actes importants dont j'ai déjà parlé

 22   ou les deux ordres - c'est la pièce P478 ainsi que la pièce DK50 - M.

 23   Kubura donne l'ordre à ses troupes de se retirer immédiatement sur le

 24   champ, A cet égard, à notre avis, ces documents montrent qu'il a agi sans

 25   tarder pour que ses effectifs se retirent une fois qu'un ordre a été donné

 26   de l'échantillon supérieur de commandement, l'échantillon disant que

 27   l'armée doit se retirer aussi tôt de Vares, mais ces ordres ne prouvent pas

 28   qu'il l'a fait parce qu'il savait que ses subordonnés se livraient à des

Page 46

  1   actes de pillage. Peut-être y avait-il des informations générales à propos

  2   de la participation de plusieurs corps -- de plusieurs brigades se livrant

  3   à des actes de pillage, mais ça ne suffit pas ? Il faut pour prouver sa

  4   culpabilité qu'il savait que ses effectifs commettaient des actes, et en

  5   raison de cela, qu'il devait prendre certaines actions, prendre des

  6   mesures.

  7   Mais ici, on ne peut pas le critiquer parce qu'il n'a pas ou parce qu'il a

  8   appliqué des ordres venant des échantillons supérieurs. Ses effectifs ont

  9   effectivement été retirés sur le champ. Il y a aussi eu un poste de

 10   contrôle qui vérifiait que les hommes partaient. Ceci est mentionné.

 11   Donc, si j'ai bien compris votre question, effectivement, le

 12   4 novembre, il a retiré ses effectifs, mais ce que nous disons c'est

 13   qu'aucune preuve n'a été apportée qu'il avait connaissance du fait que ses

 14   effectifs se seraient livrés à des actes illicites et que c'est la raison

 15   pour laquelle il a retiré ses hommes ce jour-là. Voilà l'argument que nous

 16   voulons faire valoir.

 17   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE POCAR : [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Maître Dixon, si Kubura savait

 20   néanmoins qu'il y avait pillage dans la région d'Ovnak en juin 1993 la

 21   connaissance qu'il avait ainsi veut-elle nécessairement qu'il savait ou

 22   avait des raisons de savoir qu'il y avait pillage à Vares en novembre 1993

 23   ?

 24   De façon connexe, est-ce que vous voulez dire qu'il n'y a aucune preuve

 25   qu'il avait connaissance ou connaissance constructive des actes de pillage

 26   à Vares ?

 27   M. DIXON : [interprétation] Oui. Me permettez-vous de commencer par la

 28   première question ?

Page 47

  1   S'il est établi qu'il avait connaissance en juin d'actes de pillage à

  2   Vares, ceci en soit ne suffit pas pour le déclare coupable de ne pas avoir

  3   empêché ce qui s'est passé en novembre. Nous parlons ici de pillage en un

  4   seul jour à Ovnak et il y a eu un seul jour de pillage à Vares, sur une

  5   période de cinq mois. S'il n'y a pas preuve du caractère systématique de

  6   ses actes ce serait exagéré de dire que, parce qu'il savait en juin, il

  7   devait forcément être au courant de ce qui s'est passé en novembre.

  8   Pour ce qui est du deuxième élément, nous disons qu'il n'y a pas preuve qui

  9   a été apportée du fait qu'il savait que ses hommes commettaient des actes

 10   de pillage à Vares en 1993. Il y a des ordres à propos des actes d'incendie

 11   volontaire ou de pillage, mais vous savez qu'il y a eu échange entre le

 12   commandement du GO et le commandement mais rien ne va en matière d'ordre du

 13   commandement du

 14   3e Corps à la brigade -- à la 7e Brigade. Je vous ai parlé de cette pièce

 15   675, la brigade doit appliquer cet ordre, mais ce n'est pas un ordre qui

 16   interdit la poursuite d'actes de pillage par des membres de la 7e Brigade,

 17   on dit à ces hommes qui doivent se retirer ce qu'ils ont fait. Selon nous,

 18   c'est un processus qui s'est passé, donc, on ne peut pas lui imputer une

 19   responsabilité à cet égard.

 20   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Dixon.

 21   M. DIXON : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Y a-t-il d'autres

 23   questions ?

 24   Si ce n'est pas le cas je vais donner la parole à l'Accusation, bon, sa

 25   réponse.

 26   M. WIRTH : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Je m'appelle

 27   Steffen Wirth. Je vais répondre -- deux premiers moyens d'appel introduits

 28   par M. Amir Kubura.

Page 48

  1   Les conseils de la Défense n'ont pas parlé ici en audience des moyens

  2   concernant la peine imposée, nous ferons de même. Nous allons revenir à

  3   cette question dans notre propre appel en temps utile.

  4   Pour ce qui est du premier moyen du recours de M. Kubura, pillage d'Ovnak,

  5   voici ce que j'ai à dire, mais auparavant je voudrais vous faire un bref

  6   rappel des faits pertinents eu égard à ce moyen.

  7   Le 8 juin 1993, la 7e Brigade est entrée à Ovnak, les soldats croates

  8   étaient déjà partis. Le lendemain, le 9 juin, les membres de la 7e Brigade

  9   et d'autres se sont livrés à des actes de pillage commis de manière

 10   extensive et répétée. Dans beaucoup de domiciles, il y a eu pillage

 11   d'équipement technique, d'appareils ménagers utiles, et on a volé de la

 12   nourriture. Les marchandises ainsi pillées ont été rassemblées de façon

 13   systématique dans l'église de Brajkovici, dans un des villages de la zone

 14   d'Ovnak, et finalement, ont été transportées à la caserne de Bilmiste à

 15   Zenica, le QG de Kubura.

 16   Ces marchandises ainsi volées ont fini par être distribuées aux membres de

 17   la 7e Brigade.

 18   La Chambre a conclu que Kubura était -- au courant, avait connaissance de

 19   ces pillages et a manqué à l'obligation de prendre les mesures nécessaires

 20   pour punir les auteurs de ces actes et, par conséquent, il a été condamné

 21   pour se manquement à l'obligation de punir.

 22   Kubura avance que la Chambre s'est fourvoyée, ce faisant, a eu tort de

 23   conclure que M. Kubura avait connaissance de ces actes de pillage.

 24   La Chambre de première instance a conclu que ces marchandises avaient été

 25   distribuées aux membres de la 7e Brigade et a conclu que ceci n'aurait pas

 26   pu se faire sans avoir au moins le consentement de M. Kubura.

 27   Ce matin, M. Kubura affirme que cette conclusion tirée par la Chambre est

 28   erronée et elle avance deux arguments à ce titre.

Page 49

  1   Le premier étant que la Chambre ne s'est appuyée que sur un seul

  2   témoignage, celui du Témoin BA. L'autre argument étant que la Chambre de

  3   première instance a eu tort de conclure qu'il fallait nécessairement que M.

  4   Kubura ait donné son consentement pour que soient distribuées ces

  5   marchandises. Ces deux arguments devraient être rejetés.

  6   Tout d'abord, la Chambre avait le droit de s'appuyer sur un seul témoin,

  7   c'est une conclusion du jugement Aleksovski, à son paragraphe 62.

  8   Mais aussi, il faut rappeler qu'il y a eu plusieurs éléments de preuve, pas

  9   un seul, qui ont attesté du fait que ces marchandises pillées ainsi volées

 10   avaient été amenées au QG de M. Kubura et que c'est lui qui avait pris la

 11   décision de les distribuer pas simplement donner son consentement.

 12   Ces marchandises ont été transportées au QG de Kubura, la caserne de

 13   Bilmiste à Zenica, et c'est Kubura aussi qui avait choisi ce lieu comme

 14   étant l'endroit où devait être rassemblé tout le butin de guerre. Elément

 15   de preuve de l'Accusation, P420 et paragraphe 1939 du jugement.

 16   Même si ça avait été une procédure tout à fait licite, ce qui nous a

 17   été dit ce matin, on peut dire qu'il y a eu un usage abusif de cette

 18   procédure car on l'a utilisé non pas pour s'occuper de butin de guerre

 19   licite mais de marchandises volées.

 20   Ce n'était un secret pour personne ces marchandises qu'on avait

 21   prises à Ovnak ont été emmenées aux installations de la 7e Brigade. L'état-

 22   major de la Défense municipale de Zenica, c'est sa sécurité et le service

 23   de Renseignement le savait, c'est ce qui a été rapporté au commandement du

 24   3e Corps deux jours après le pillage, le 11 juin, Pièce P424 du paragraphe

 25   1936 du jugement.

 26   Nous avons d'autres éléments de preuve qui contredisent ce qu'avance

 27   Kubura les éléments qui prouvent que, de façon générale, c'est Kubura qui

 28   prenait des décisions en matière de distribution de marchandises, il l'a

Page 50

  1   fait dans une réunion du 7 juillet 1993, P789 et aussi pour ce qui est des

  2   marchandises pillées à Vares, paragraphe du jugement 1993.

  3   Enfin, le système organisé de pillage à Ovnak n'aurait pas pu se

  4   faire sans l'autorisation préalable de Kubura, c'est d'ailleurs ce que

  5   conclu la Chambre en ce paragraphe 2091. Si nous voyons tout ceci de

  6   concert, ces éléments de preuve montrent que les effectifs de la 7e Brigade

  7   ont de façon systématique et extensive pillé le secteur d'Ovnak, ont

  8   utilisé ouvertement les locaux de la 7e Brigade au QG de Kubura pour y

  9   entreposer ces marchandises, que c'est -- avaient été choisies par Kubura

 10   et que c'est lui qui a pris la décision de distribuer, de la manière de

 11   distribuer ces marchandises.

 12   Donc, la Chambre n'a pas été déraisonnable lorsqu'elle a conclu

 13   partant de cela qu'il avait tout du moins au bas mot donné son consentement

 14   pour ce qui est de la distribution à Ovnak. Par conséquent, il avait

 15   forcément connaissance de ces actes de pillage.

 16   Permettez-moi maintenant d'aborder le deuxième moyen d'appel à moins

 17   que vous n'ayez déjà des questions pour ce qui est du premier moyen que je

 18   viens d'aborder.

 19   Cependant, avant de parler et de revenir sur les arguments avancés

 20   par M. Kubura, j'aimerais répondre à la question posée par la Chambre

 21   d'appel. La question 3A, est-ce que la 7e Brigade avait participé à des

 22   opérations militaires entre juin et novembre 1993 ? Est-ce qu'il y avait eu

 23   des actes de pillage au cours de ces opérations ? La réponse est celle-ci,

 24   il y a des éléments de preuve montrant qu'il y a eu des opérations

 25   militaires menées par la

 26   7e Brigade pendant cette période, et qu'il y a des éléments de preuve

 27   attestant d'actes de pillage.

 28   Nous avons la pièce P631, il s'agit d'une demande envoyée par Kubura

Page 51

  1   pour ce qui est d'arrestation de soldats. Nous avons la date, 16 octobre

  2   1993 et elle dit qu'il y a eu des combats menés constamment depuis le 7

  3   avril par brigade et qu'il faut donc un certain repos. Ceci montre qu'il y

  4   a eu participation de cette brigade à des opérations pendant cette période.

  5   Maintenant, preuves d'actes de pillage menés au cours de ces

  6   opérations. Vers la même période, au moment où il y avait pillage du

  7   secteur d'Ovnak, il y a eu des actes répétés et extensifs de pillage par

  8   cette 7e Brigade, paragraphe 1 913 et 1 915 du paragraphe. Ces paragraphes

  9   n'ont pas été retenus contre Kubura, c'est pour ça qu'il n'y a pas eu

 10   condamnation et la Chambre de première instance n'en a donc pas parlé.

 11   Il y a aussi pillage à Cukle à la suite de l'attaque menée sur ce

 12   village, paragraphe 1910.

 13   Eléments de preuve suivant, pour l'examiner, je vais vous demander de

 14   passer rapidement à huis clos partiel, Monsieur le Président.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 16   [Audience à huis clos partiel]

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27   [Audience publique]

 28   M. WIRTH : [interprétation] Ces éléments de preuve se trouvent corroborés

Page 52

  1   par P898, il s'agit d'un rapport du 3e Corps où il est dit que le 17 juin

  2   1993, un membre du MOS a été impliqué dans une action où ils ont emporté

  3   des appareils électriques à bord d'un wagon dans la zone d'Ovnak.

  4   La Chambre de première instance a conclu que le terme "MOS," dans ce

  5   rapport, signifiait la 7e Brigade, et vous pouvez voir au paragraphe 1 943

  6   du jugement, que ceci se lie en établissant un lien avec le paragraphe 410

  7   du jugement.

  8   La pièce suivante concerne le pillage commis par la 7e Brigade à Kakanj.

  9   Tous les membres de la 7e Brigade ont fait l'objet d'enquête pour des

 10   allégations de pillage à Kakanj et plusieurs officiers de la 7e Brigade ont

 11   été relevés de leurs fonctions par le commandant de la 7e Brigade pour

 12   avoir failli d'empêcher ce crime de pillage à Kakanj. Il s'agit de la pièce

 13   P544, rapport d'Hadzihasanovic qui porte la date du 25 juin 1993.

 14   Mais non seulement ce document montre que la 7e Brigade a participé au

 15   pillage, mais aussi que Kubura savait cela et qu'il a réagi en se

 16   contentant de relever des officiers de leurs fonctions. Puis, le pillage à

 17   Fojnica, dans le secteur de Fojnica, il y avait des soldats de la 7e

 18   Brigade qui sont entrés dans des maisons croates, pièce P840, rapport de la

 19   7e Brigade, de son commandement qui porte la date du 5 août 1993.

 20   Il y a aussi autres rapports au pénal qui accusent les membres de la 7e

 21   Brigade d'avoir pris des biens en menaçant à bout portant leurs

 22   propriétaires. Des membres de la 7e Brigade auraient utilisés leurs armes

 23   pour prendre une voiture, le 16 août 1993. Pièce DH1481, un rapport au

 24   pénal contre des membres de la 7e Brigade.

 25   Puis, un autre rapport au pénal, pièce DH1553 contre des membres de la 7e

 26   Brigade qui ont pris l'argent et d'autres biens de leurs victimes encore

 27   une fois en les menaçant d'une arme à bout portant à plusieurs reprises, en

 28   septembre 1993.

Page 53

  1   Tant ces soldats auraient pris des biens en menaçant leurs victimes d'une

  2   arme à bout portant, ce qui montre qu'ils ont agi pendant des actions

  3   militaires ou des opérations militaires. Des soldats de l'ABiH n'avaient

  4   que des armes à canon long. Dans le compte rendu d'audience, page 13 768,

  5   des soldats de l'ABiH sont -- on voit qu'ils sont autorisés à avoir

  6   uniquement des armes à canon long pendant les opérations militaires, pièce

  7   DH2086, chiffre romain VIII confirmé par la pièce P4475.

  8   De plus, des documents supplémentaires montrent que le pillage était un

  9   problème récurrent et que l'ABiH était bien au courant de cela, plus aux

 10   ordres d'Hadzihasanovic concernent le problème que pose le pillage. Ces

 11   ordres, on s'y réfère au paragraphe 2 024 et dans la suite du jugement en

 12   l'espèce. Je vais essayer d'en signaler deux.

 13   Le premier P193, ordre du commandement du 3e Corps du

 14   18 septembre 1993, qui interdit strictement le pillage des biens et exige

 15   que des commandants, y compris des commandants des brigades, si cela se

 16   produit, prennent des mesures nécessaires et qu'ils imposent des punitions

 17   -- des sanctions. Cet ordre s'adresse, entre autres, à toutes les brigades.

 18   Le deuxième ordre est l'ordre d'attaquer Vares. Cet ordre, qui a été

 19   envoyé à Kubura le 3 novembre 1993, c'est la pièce P674. La veille de

 20   l'attaque sur Vares, il est explicitement à l'attention de Kubura que le

 21   butin de guerre doit être traité en respectant l'ordre du commandement du

 22   3e Corps, l'esprit de cet ordre.

 23   A la différence de ce qui a été avancé comme argument de la part de

 24   la Défense Kubura ce matin, ces ordres concernent le problème flagrant de

 25   pillage de même qu'ils montrent que le pillage commis par des membres de la

 26   7e Brigade se poursuit et montrent donc que le pillage d'Ovnak n'était pas

 27   un incident isolé. Ce n'était pas quelque chose que Kubura aurait pu

 28   ignorer ou aurait pu ne pas s'y consacrer lorsqu'il a préparé l'attaque sur

Page 54

  1   Vares.

  2   Alors, maintenant, la question 3B de la Chambre d'appel. La première

  3   partie de la question est la suivante : à quel moment le

  4   4 novembre 1993 Kubura a-t-il appris qu'il y a eu pillage ?

  5   Ceci ne ressort pas clairement des éléments de preuve. On sait que la

  6   7e Brigade est entrée dans la ville vers 8 heures -jugement, paragraphe 1

  7   966 - et que la situation est devenue chaotique une fois que la 7e Brigade

  8   est entrée dans la ville - pièce 676 - et on sait que tout a été pillé à ce

  9   moment.

 10   Ce qu'on sait également c'est que le Groupe opérationnel Istok a été

 11   mis au courant du pillage au plus tard à 10 heures 45, lorsque son chef

 12   d'état-major fait rapport que la 7e Brigade entrait dans la ville et qu'ils

 13   étaient en train de tout piller enfin de prendre tout ce qu'ils voyaient.

 14   On sait également que le Groupe opérationnel Istok ainsi que le 3e

 15   Corps en son commandement ont donné l'ordre d'arrêter le pillage - P675 et

 16   P446 -mais on ne sait pas d'après les éléments de preuve à quel moment

 17   Kubura a reçu ces ordres.

 18   La deuxième partie de la question 3B est : quand et comment Kubura a-

 19   t-il réagi pour mettre fin au pillage ? La réponse c'est qu'il a donné

 20   l'ordre à ces hommes de se retirer; c'est l'ordre qui a été reçu à 15

 21   heures. Transcription -- donc, pages de la transcription 18 657, corroborer

 22   par la pièce P448, page 12.

 23   A moins qu'il y ait des questions, je vais poursuivre. Je vais donc

 24   parler du deuxième moyen d'appel de Kubura.

 25   Le 4 novembre 1993, lorsque la 7e Brigade est rentrée dans la ville

 26   abandonnée, la ville de Vares, une situation de chaos s'est instaurée et

 27   tout a été pillé et incendié. Des soldats de la

 28   7e Brigade se sont mis à piller et à voler tout ce qu'ils ont vu. Après

Page 55

  1   avoir été mis au courant de cette situation, des membres d'autres unités

  2   ont eux aussi pris part au pillage généralisé.

  3   Des soldats de l'ABiH qui semblaient être alcoolisés circulaient et

  4   tiraient des coups de feu avec leurs armes. Il y avait des fenêtres

  5   brisées, des portes brisées. Il s'agit de la pièce P448, page 11, une

  6   analyse qui a été fournie par le Groupement opérationnel Istok, et comme

  7   vient de le signaler le conseil de la Défense, c'est le GO Istok qui a

  8   commandé l'opération de Vares.

  9   Alors, si l'objectif principal du pillage était les commerces qui

 10   longent la rue principale, mais aussi c'étaient des maisons particulières.

 11   Sur la base de cela et sur la base d'autres éléments de preuve, la Chambre

 12   de première instance est arrivée à la conclusion que le crime du pillage a

 13   été commis par plusieurs unités de l'ABiH et en particulier par des soldats

 14   de la 7e Brigade en ces 2e et 3e Bataillons. La Chambre de première instance

 15   a également conclu que Kubura était au courant de cela sur deux bases

 16   distinctes : premièrement, la Chambre de première instance est arrivée à la

 17   conclusion Kubura avait raison de savoir que le pillage allait se produire

 18   à Vares puisqu'il savait qu'il y a eu par le passé des pillages dans la

 19   zone d'Ovnak.

 20   La deuxième base pour les connaissances de Kubura, c'était qu'il a

 21   appris du pillage à partir du moment où ce pillage avait commencé et

 22   plusieurs documents le montrent. Il s'agit du paragraphe 1986. Kubura n'a

 23   pas pris des mesures par la suite afin d'empêcher le pillage et à partir du

 24   moment où le pillage a commencé et il n'a pas pris des mesures afin d'en

 25   punir les auteurs. La Chambre de première instance a déclaré Kubura

 26   coupable d'avoir omis d'empêcher et punir le pillage de Vares.

 27   Parlons maintenant du moyen d'appel de Kubura contre sa déclaration

 28   de culpabilité.

Page 56

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  

Page 57

  1   La Chambre de première instance a estimé que le mens rea a été prouvé

  2   dans le pillage d'Ovnak et que Kubura a omis de punir, qu'il était avisé du

  3   fait que la 7e Brigade était susceptible de répéter de tels actes.

  4   Kubura affirme premièrement que la Chambre de première instance a

  5   commis une erreur parce que Kubura n'était pas au courant du pillage à

  6   Ovnak, et j'ai expliqué pourquoi ceci n'était pas exact. Une période

  7   considérable s'est passée entre le pillage d'Ovnak et le pillage de Vares,

  8   et l'information et l'avertissement qu'il a reçu à Ovnak donc c'était

  9   effacé entre-temps.

 10   Mais j'en ai parlé lorsque j'ai parlé des questions de la Chambre

 11   d'arrêt en montrant que le pillage était une question qui était très

 12   d'actualité, très présente et Kubura était au courant de cela.

 13   Maintenant, la deuxième base pour le mens rea de Kubura, à savoir

 14   qu'il a appris que le pillage a eu lieu après son début.

 15   La Chambre de première instance a constaté que Kubura a reçu deux

 16   ordres, deux ordres et un rapport l'informant de ce fait et il s'agit des

 17   éléments de preuve qui sont repris au paragraphe 1986 du jugement.

 18   Alors, le premier document c'est la pièce P675. C'est un ordre du

 19   Groupement opérationnel Istok, et dans cet ordre on exige que l'on mette la

 20   fin au pillage et M. Kubura se voit confier la tâche d'exécuter cet ordre.

 21   La Chambre de première instance est arrivée à la conclusion que M.

 22   Kubura réagit suite à cet ordre, qu'il a replié ses hommes de Vares.

 23   La Défense affirme que la pièce P675 n'affirme pas, de manière

 24   expresse, que la 7e Brigade a pris part au pillage. Toutefois, le fait

 25   qu'on ait exigé de la part de M. Kubura d'exécuter cet ordre, c'est une

 26   base pour un juge de fait raisonnable pour arriver -- lui permettant

 27   d'arriver à la conclusion qu'il a été informé par le truchement de cet

 28   ordre que ces hommes avaient commis un pillage à Vares. Quoi qu'il en soit,

Page 58

  1   s'il n'y a pas autre chose, il y a cet ordre qui l'a avisé clairement qu'il

  2   est nécessaire d'engager une enquête supplémentaire, qu'il est nécessaire

  3   de prendre -- d'émettre un ordre afin de savoir qui a pillé à Vares

  4   puisqu'il savait sans aucun doute que ses effectifs étaient déployés là-

  5   bas.

  6   Le deuxième document -- maintenant, le deuxième ordre, qui est arrivé à M.

  7   Kubura, cet ordre c'était un ordre du commandement du

  8   3e Corps. Il s'agit de la pièce P448 -- ou plutôt, c'est dans cette pièce

  9   on se réfère à cet ordre et il y est dit que cet ordre a été envoyé aux

 10   brigades. La Chambre de première instance est arrivé à la conclusion que la

 11   7e Brigade était la seule brigade subordonnée au

 12   3e Corps qui était présente à Vares, et que par conséquent, cette pièce,

 13   cet ordre, donc, cet ordre, dont il est question la pièce P446, a

 14   nécessairement atteint la 7e Brigade.

 15   Ce matin, nous avons entendu de la part de Kubura que s'agissant de la

 16   pièce P448, qu'elle évoque d'autres brigades qui auraient été présentes à

 17   Vares, d'autres brigades du 3e Corps, donc, qui auraient été présentes à

 18   Vares également. J'ai rapidement parcouru la pièce P448, et en particulier

 19   ces pages 11 et 12, où il est question de l'opération de Vares et le

 20   pillage est mentionné. Je n'ai pas pu retrouver cet élément d'information

 21   disant que d'autres brigades du 3e Corps étaient présentes dans le secteur

 22   de Vares.

 23   Quoi qu'il en soit, si le commandement du 3e Corps a envoyé un ordre afin

 24   de mettre fin au pillage, on ne peut pas imaginer -- on ne peut pas

 25   supposer qu'il n'aurait pas envoyé à toutes les brigades concernées, et en

 26   particulier puisque le commandement du 3e Corps avait appris par le biais

 27   du rapport du OG Istok que des soldats de plusieurs unités étaient en train

 28   de piller à Vares.

Page 59

  1   Alors, la pièce P 468, la Défense conteste que la Chambre de première

  2   instance se soit fondée sur cette pièce, il s'agit d'un rapport du 2e

  3   Bataillon de la 7e Brigade informant Kubura du fait qu'il y a eu

  4   regroupement du butin de guerre de manière organisée. La Défense signale

  5   que le rapport dit également que le pillage a été empêché.

  6   La Chambre de première instance était en droit de ne pas tenir compte de ce

  7   commentaire qui figure dans la pièce P468 puisqu'il y a des indices forts

  8   montrant qu'en partie ce rapport cherche à se douaner. Le rapport a été

  9   rédigé par la 7e Brigade qui a commis le pillage.

 10   Puis, je souhaite appeler votre attention sur un autre élément de preuve,

 11   le quatrième élément de preuve qui étaye l'affirmation que M. Kubura était

 12   au courant du pillage à Vares, et il s'agit de l'ordre de Kubura du 7

 13   novembre 1993, au sujet de la distribution des biens illicites parmi les

 14   membres de la 7e Brigade. Il s'agit d'un paragraphe du jugement 1993. Il

 15   n'aurait pas pu donner cet ordre s'il n'avait pas été au courant.

 16   Enfin, M. Kubura était le commandant de la 7e Brigade et il était présent

 17   dans ce secteur.

 18   La Chambre de première instance, au paragraphe 2 093, a constaté qu'il y

 19   avait un système organisé pour ce qui est du pillage à Vares, ceci n'aurait

 20   pas pu être mis en œuvre sans qu'il y ait eu une approbation préalable de

 21   la part de Kubura.

 22   J'en arrive à la fin de mes arguments pour ce qui est du deuxième moyen

 23   d'appel de Kubura, et que nous vous invitons à rejeter dans sa totalité.

 24   Si vous n'avez pas de questions, j'en ai terminé.

 25   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Il n'y a pas de

 26   questions.

 27   Je vais donc m'adresser à la Défense pour lui demander de répliquer.

 28   Maître Dixon, une question si vous voulez bien, une question qui me

Page 60

  1   permettrait de mieux comprendre votre position.

  2   M. DIXON : [interprétation] Oui, je vous en prie.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous avez déclaré préalablement qu'on

  4   ne peut pas supposer qu'il y a connaissance.

  5   Connaissance doit être prouvée par des moyens de preuve directs.

  6   De la manière dont je vous ai compris, vous estimez que des éléments de

  7   preuve spécifiques doivent être présentés qui démontrent la connaissance à

  8   la date précise où des événements se sont produits.

  9   Est-ce que c'est un point de droit, d'après vous, donc, que la connaissance

 10   ne peut pas être prouvée par des éléments de preuve indirects ?

 11   Si c'est ce que vous estimez, pour quelle raison ?

 12   M. DIXON : [interprétation] Oui. Je vous remercie. Je vais commencer par

 13   répondre à cette question.

 14   Absolument notre position n'est pas que la connaissance peut être prouvée

 15   uniquement par le truchement des éléments de preuve directs. Bien entendu,

 16   des éléments circonstanciels et des éléments circonstanciels qui convergent

 17   peuvent permettre d'arriver à la conclusion raisonnable disant que le

 18   commandant savait ou avait raison de savoir.

 19   Nous estimons qu'il n'y a pas -- donc, il n'y a ni élément de preuve direct

 20   ni indirect prouvant que M. Kubura était au courant de ces infractions. Il

 21   n'était pas le témoin de ces infractions, il n'y a pas d'élément montrant

 22   qu'il y avait des rapports qui lui sont parvenus directement. Qui plus est,

 23   les circonstances ne nous permettent pas d'arriver à une déduction

 24   raisonnable disant qu'il savait que ses hommes étaient directement

 25   impliqués à la commission de ces crimes.

 26   Puis, si je peux avancer rapidement pour répondre. Le seul point au sujet

 27   duquel je voudrais m'exprimer ce sont des actes de pillage entre juin et

 28   novembre, pour répondre à l'allégation qui a été avancée par l'Accusation

Page 61

  1   disant qu'il y avait un système répétitif et que M. Kubura devant

  2   nécessairement être au courant et devait savoir que ces événements allaient

  3   se produire à Vares en novembre 1993.

  4   J'ai déjà parlé de DH1553 et des documents qui s'y rapportent au sujet de

  5   ces événements qui sont des crimes ordinaires commis peut-être par des

  6   militaires mais non pas dans le contexte des opérations armées.

  7   De plus, il y a des références qui ont été faites à des événements qui sont

  8   englobés dans le chef concernant Vares et avant cela Ovnak. Il s'agit des

  9   éléments de preuve du Témoin ZA, lorsqu'il parle de ce qui s'est passé à

 10   Ovnak quelques jours ou peu de temps après, et la Chambre en a parlé.

 11   Aussi, dans la pièce P674, à savoir c'est l'ordre de M. Hadzihasanovic qui

 12   s'adresse à M. Kubura et qui concerne Vares, et directement parle des

 13   événements de Vares et il se réfère à une procédure appropriée à respecter

 14   pour ce qui est du butin de guerre.

 15   Donc, je ne pense pas que ces références soient utiles ou qu'elles soient

 16   pertinentes ici.

 17   Puis, une autre catégorie qui peut être exclue, je pense, ce serait des

 18   ordres généraux portant sur le pillage, donc, des ordres émanant du

 19   commandement qui disent qu'il faut empêcher le pillage ou le prohibé dans

 20   toutes les circonstances, l'interdire dans toutes les circonstances, et

 21   qu'il faut appliquer les règles. Ce sont des ordres de nature générale qui

 22   se situe entre juin et novembre.

 23   Mon confrère s'est référé à Cukle; et au secteur de Fojnica; et un ordre au

 24   sujet du pillage à Kakanj.

 25   J'estime qu'il n'y a pas eu d'incidents particuliers pour lesquelles M.

 26   Kubura aurait pu être tenus responsables au titre de l'article 7(3) ou qui

 27   lui auraient été reprochés dans l'acte d'accusation. Pour ce qui est de

 28   Cukle, comme l'a indiqué mon éminent confrère, il s'agit de quelque chose

Page 62

  1   qui n'a pas été reproché à

  2   M. Kubura et il n'y a pas eu de moyens de défense là-dessus. C'est la

  3   raison pour laquelle la Chambre de première instance au paragraphe

  4   1 924 affirme qu'elle estime que plus que l'accusé Kubura n'a pas été

  5   mentionné dans l'acte d'accusation au sujet du pillage commis à Cukle en

  6   juin 1993, qu'il n'y a pas lieu de se poser la question des mesures qu'il

  7   aurait prises à ce sujet.

  8   Donc, là encore, il s'agit d'un incident qui n'est pas pertinent ici, qui

  9   n'a pas été reproché à M. Kubura et ce n'est par conséquent pas quelque

 10   chose au sujet de quoi il faisait parler des mesures prises.

 11   Un deuxième point pour ce qui est du secteur de Fojnica et le document

 12   auquel s'est référé l'Accusation, il s'agit de la pièce P814. Je pense que

 13   dans le compte rendu d'audience on a écrit P840, mais je pense que c'est la

 14   pièce P814 qui porte la date du 5 août 1993. C'est un rapport de

 15   l'assistant du commandant chargé de la sécurité du 2e Bataillon de la 7e

 16   Brigade qui s'adresse à l'assistant du commandant chargé de la sécurité du

 17   commandement de la 7e Brigade. Donc, il s'agit d'un rapport qui s'inscrit

 18   dans le secteur chargé de la Sécurité de la brigade. Page 2, il y est dit

 19   clairement que le secteur chargé de la Sécurité a mis sur pied une

 20   patrouille afin d'empêcher les incendies et les pillages.

 21   Donc, ce rapport ne dit pas qu'il y a eu un pillage, il dit qu'il y a eu

 22   des mesures qui ont été prises afin d'empêcher le pillage. Donc, nous

 23   estimons qu'on ne peut pas se fonder là-dessus pour prouver qu'il y a eu

 24   des pillages dans cette zone, et encore moins, pour prouver que M. Kubura

 25   était au courant de cela -- au courant de quelques allégations que ce soit

 26   relatif aux pillages. Donc, nous estimons que rien de cela ne figure dans

 27   ce document.

 28   C'est important, c'est important de souligner que dans nombre de ces

Page 63

  1   documents y compris de celui-ci il n'y a pas d'éléments qui ont été

  2   présentés, pas de preuves qui ont été présentés devant la Chambre par

  3   l'Accusation pour parler de ces personnes qui ont pris part à cela, qui ont

  4   fait -- produit des documents, qui ont reçu des documents, donc, ceci n'a

  5   pas été présenté au sujet du pillage.

  6   Puis, enfin, pour ce qui est de Kakanj, la pièce P544. Il s'agit de

  7   l'ordre du 25 juin de Hadzihasanovic qui s'adresse au commandant adjoint de

  8   l'état-major du commandement Suprême. Donc, c'est un ordre qui ne s'adresse

  9   pas aux unités subalternes -- à une quelconque brigade du 3e Corps.

 10   Dans ce rapport, il est dit qu'un certain nombre de membres de la 7e

 11   Brigade ont été relevés de leurs fonctions par le commandement de la

 12   brigade à Kakanj pour ne pas avoir exécuté un ordre leur intimant

 13   d'empêcher des commissions de crime et de pillage.

 14   Donc, pour autant qu'on le sache, il semblerait que c'est une indication

 15   des mesures qui ont été prises afin d'empêcher ce type d'action.

 16   Là encore, ce n'est pas quelque chose sur quoi on puisse se fonder pour

 17   déclarer M. Kubura responsable en sa qualité de commandant au terme de

 18   l'article 7(3), et là encore, ce n'est pas un document -- et là encore,

 19   c'est un document qui est sorti de tout contexte. Nous ne savons pas

 20   exactement de quels actes il s'agit, quelles sont les mesures qui ont été

 21   prises pour empêcher des actes qui étaient en train de se produire. Nous ne

 22   savons rien de tout cela. Donc, c'est la raison pour laquelle nous

 23   maintenons notre position, à savoir qu'entre juin et novembre, il n'y a pas

 24   de situations. M. Kubura aurait pu être tenu responsable et que ceci ce

 25   serait additionné pour montrer qu'il était au courant, qu'il avait la

 26   connaissance qui lui aurait permis d'anticiper sur les actions qui allaient

 27   se produire et qui seraient illicites en novembre 1993.

 28   Enfin, je reviens sur un argument de mon éminent collègue de l'Accusation

Page 64

  1   qui nous disait qu'il n'y avait aucune autre brigade du 3e Corps impliqué

  2   dans l'opération de Vares, on a parlé du document P448. Or, il est fait

  3   référence à d'autres brigades, en fait : la 302e, la 304e, pour ne

  4   mentionner que quelques-unes. Toutes les brigades du 3e Corps sont

  5   numérotées par un numéro qui commence par "3," or, à la page 12, on voit

  6   qu'il est fait référence à trois brigades du 3e Corps qui participent à

  7   l'opération sous le commandement de OG Istok, des brigades qui participent

  8   aux opérations à partir du nord et du sud, et il y a une section de la 7e

  9   Brigade qui est impliquée aussi. Nous estimons donc que la Chambre de

 10   première instance a conclu qu'un certain nombre d'unités ont participé à

 11   ces opérations, d'autres unités, d'autres groupes de personnes, y compris

 12   des civils ont participé aux activités de pillage à Vares. Voilà. J'en ai

 13   terminé de la présentation de mes arguments. Bien entendu, je suis prêt à

 14   répondre à toutes questions que vous auriez à me poser.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Dixon.

 16   Ah, oui, je vois que le Juge Guney souhaite vous poser une question.

 17   L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

 18   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Maître Dixon, j'ai une question à

 19   vous poser au sujet de Ovnak, du secteur d'Ovnak et des pillages ou des

 20   appropriations illicites de biens qui ont eu lieu dans ce secteur. Je

 21   voudrais savoir si les biens qui ont été saisis dans le secteur d'Ovnak

 22   avaient une finalité militaire. Enfin, est-ce qu'ils pouvaient les utiliser

 23   à des fins militaires directement, ou est-ce qu'il y a eu à ce moment-là

 24   appropriation totalement illicite de ces biens, si bien qu'il ne montre pas

 25   dans le cadre de la définition de ce qu'on appelle le butin de guerre ?

 26   Merci de bien vouloir répondre à cette question.

 27   M. DIXON : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Juge.

 28   Nous n'avons pas fait appel de la décision de la Chambre de première

Page 65

  1   instance selon laquelle il y a eu appropriation illicite de biens dans la

  2   zone d'Ovnak en juin 1993, et ceci concernait des marchandises, des biens

  3   qui ne relevaient pas de la définition du butin de guerre. Il s'agissait

  4   d'agissements illicites.

  5   Non, nous sur quoi nous faisons appel c'est que nous disons que

  6   l'appelant n'avait pas connaissance, n'avait pas connaissance de ses

  7   actions, des actions de ses subordonnés.

  8   La Chambre de première instance n'a pas été en mesure de préciser

  9   quels biens, quelles marchandises ont été volées par tel ou tel groupe, par

 10   telle ou telle unité, par tel ou tel civil. Tout ceci a été une action

 11   collective. Nous n'avons pas fait appel de cela. Mais ce sur quoi nous

 12   reposons notre appel c'est la connaissance qu'avait M. Kubura des

 13   événements et nous disons qu'il ne savait pas que ses soldats participaient

 14   à ces actions, et donc, il n'a pas pris les mesures qui s'imposaient.

 15   Je dirais d'ailleurs que la même chose vaut pour Vares.

 16   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je pense que le moment est bien choisi

 18   pour faire une pause.

 19   Nous reprendrons dans 30 minutes, c'est-à-dire à 10 heures 35.

 20   --- L'audience est suspendue à 10 heures 04.

 21   --- L'audience est reprise à 10 heures 37.  

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] On me fait savoir qu'on pourra

 23   réaliser, procéder à la transcription ultérieurement, et si tout le monde

 24   est d'accord, je pense qu'on peut commencer et travailler comme ça.

 25   Il y a des objections ? Non. Dans ce cas, allons-y, et je donne tout de

 26   suite la parole à l'Accusation.

 27   Mme GOY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 28   Juges. Je vais commencer par le premier moyen d'appel.

Page 66

  1   Enver Hadzihasanovic a été reconnu coupable au titre de l'article 7(3) pour

  2   le meurtre de deux personnes et les traitements cruels infligés à l'école

  3   de musique de Zenica, au camp de Orasac ainsi que dans quatre centres de

  4   détention à Bugojno. 

  5   L'Accusation demande une augmentation de sa peine de cinq à dix ans

  6   d'emprisonnement. Nous la faisons donc passer de cinq à dix ans

  7   d'emprisonnement.

  8   Un des meurtres en question est particulièrement odieux, il s'agit du

  9   meurtre de Dragan Popovic. Le 21 octobre 1993, Dragan Popovic a été tué. On

 10   l'a égorgé et puis on l'a décapité. Le soldat qui s'est acquitté de cette

 11   mission a brandi fièrement cette tête et a forcé d'autres détenus à

 12   l'embrasser.

 13   Hadzihasanovic avait la capacité matérielle d'empêcher ce meurtre

 14   atroce et rituel, mais il ne l'a pas fait.

 15   Mladen Havranek, lui il était détenu au magasin de meubles de

 16   Bugojno. On l'a fait venir du sous-sol où il se trouvait. Les autres

 17   détenus l'on entendu gémir, hurler, il implorait qu'on arrête de le battre.

 18   Ensuite, il n'était plus capable de marcher si bien que les autres

 19   prisonniers ont été contraints de le traîner en bas des escaliers. Il a

 20   perdu connaissance et il est décédé des conséquences de ces passages à

 21   tabac. Hadzihasanovic n'a pas pris les mesures nécessaires pour punir les

 22   auteurs de cet acte.

 23   Hadzihasanovic était également responsable en tant que supérieur

 24   hiérarchique des traitements cruels horribles qui ont été infligés dans des

 25   centres de détention pendant plusieurs mois. Au camp de Orasac, les

 26   traitements cruels infligés étaient très violents. Les prisonniers étaient

 27   passés à tabac avec tout ce qui tombait sous la main de leurs bourreaux.

 28   Beaucoup ont été fracturés, ont eu des os fracturés, ont perdu

Page 67

  1   connaissance. Les prisonniers non seulement étaient victimes de violence

  2   physique mais ils étaient menacés de mort. Ils étaient harcelés de toute

  3   sorte de manières.

  4   A l'école de musique de Zenica, des victimes sans défense ont été soumises

  5   à des violences physiques extrêmement cruelles devant d'autres détenus. Un

  6   détenu a été frappé à coups de pied, coups de poing jusqu'à ce qu'il

  7   commence à saigner au visage. On a lié les mains d'un autre détenu derrière

  8   son dos puis on l'a frappé avec un bâton jusqu'à ce qu'il ait les cotes

  9   cassées. Ensuite, il pouvait à peine marcher, à peine respirer.

 10   Il est arrivé que d'autres détenus aient le crâne fracturé, les mains

 11   brisées et qu'ils doivent ensuite avoir une hanche artificielle. Voilà

 12   seulement quelques exemples de ce qui s'est passé. Les traitements cruels

 13   ne cessaient de se répéter. Les détenus vivaient constamment dans

 14   l'angoisse.

 15   A Bugojno, dans les centres de détention, les traitements cruels et

 16   violents étaient monnaie courante. Au magasin de meubles, chaque nuit

 17   pratiquement il y avait des passages à tabac. Mladen Havranek est décédé de

 18   ces mauvais traitements.

 19   Le Témoin Alvir, lui, a eu des cotes cassées. Lorsque le Témoin ZH

 20   est arrivé à l'école Gimnazija, il a été frappé à coups de cross à

 21   l'estomac. Une fois qu'il est tombé par terre on l'a frappé au niveau des

 22   reins jusqu'à ce qu'il perde connaissance. Après ce passage à tabac, il

 23   avait la clavicule brisée, ensuite, il a perdu 60 % -- ou plutôt, son rein

 24   droit ne fonctionnait plus qu'à 40 %. Il souffre de deux hernies et il a dû

 25   être opéré pour ce fait.

 26   La gravité de ces crimes, la Chambre de première instance n'en a pas

 27   tenu compte, alors qu'il a tenu compte de circonstances atténuantes qui

 28   n'avaient pas lieu d'être.

Page 68

  1   Or, d'après l'arrêt Celebici, la gravité est un élément qui doit

  2   absolument être pris en compte lors de la détermination de la peine. Il

  3   s'agit de prendre en compte des circonstances dans lesquelles se sont

  4   déroulées les crimes ainsi que de la participation de l'intéressé à ces

  5   crimes.

  6   La Chambre de première instance a seulement tenu compte brièvement ou

  7   superficiellement de ces éléments. En fait, quand on regarde le jugement on

  8   voit qu'au moment de fixer la peine elle ne fait référence qu'aux

  9   circonstances atténuantes et aggravantes.

 10   Si bien qu'en décrivant les circonstances du crime, la Chambre de

 11   première instance a seulement mentionné la période concernée, le nombre de

 12   victimes, le caractère odieux de la décapitation mais pas l'impact sur les

 13   victimes, les victimes qui ont eu l'obligation d'embrasser la tête

 14   décapitée.

 15   Si bien que la Chambre de première instance n'a pas rendu compte de

 16   la totalité de la culpabilité de Hadzihasanovic en tant que supérieur

 17   hiérarchique de haut niveau qui n'a pas pris les mesures nécessaires pour

 18   punir des crimes extrêmement graves.

 19   De plus, la Chambre de première instance s'est trompée puisqu'elle a

 20   adopté ou retenu des circonstances atténuantes telles que la compétence,

 21   l'efficacité, l'intelligence, la bonne éducation ainsi que l'absence de

 22   formation théorique et pratique. Hadzihasanovic était militaire de carrière

 23   depuis 20 ans. C'était l'ancien commandant du bataillon de police. Donc, il

 24   avait l'expédience de la responsabilité du supérieur hiérarchique et de son

 25   exercice. Toute absence de formation théorique ou pratique pour exercer les

 26   fonctions de chef de corps est sans pertinence. ¸

 27   Je vous demande donc de faire droit au premier moyen d'appel de

 28   l'Accusation.

Page 69

  1   Je ne sais pas s'il y a des questions au sujet du premier moyen

  2   d'appel, s'il y en n'a pas je vais passer au troisième moyen.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, il y a une question.

  4   Monsieur le Juge Liu.

  5   M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous nous parlez de la gravité du crime

  6   et de sa prise en compte ou non dans la détermination de la peine prononcée

  7   contre M. Hadzihasanovic. Or, si j'ai bien compris, l'accusé a été déclaré

  8   coupable au titre de sa responsabilité de supérieur hiérarchique.

  9   Il y a une question de droit qui se pose quand on condamne quelqu'un au

 10   titre de la responsabilité du supérieur hiérarchique, est-ce qu'il faut

 11   tenir compte également de la gravité des crimes commis par ses subordonnés

 12   ou bien est-ce qu'il faut uniquement tenir compte de la gravité de son

 13   manquement, de son manquement, son obligation d'empêcher ou de punir les

 14   crimes de ses subordonnés.

 15   Merci.

 16   Mme GOY : [interprétation] Notre réponse à cette question est la suivante,

 17   il faut tenir compte des deux choses pour prononcer une responsabilité au

 18   titre de l'article 7(3). La nature des crimes sous-jacents, elle est

 19   définie au paragraphe 732 de l'arrête Celebici, et effectivement il faut en

 20   tenir compte également.

 21   M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

 22   Mme GOY : [interprétation] Bien. S'il n'y a pas de questions

 23   supplémentaires au sujet de Hadzihasanovic, je vais maintenant présenter

 24   nos moyens d'appel au sujet de la peine prononcée contre

 25   M. Kubura.

 26   Deux ans et demi de prison pour Amir Kubura, c'est une peine qui est

 27   manifestement insuffisante pour deux incidents -- deux pillages. La Chambre

 28   de première instance n'a tenu compte de la gravité des faits et elle

Page 70

  1   n'aurait pas dû reconnaître aucun mérite à Kubura du fait qu'il a obéi à un

  2   ordre qui lui demandait de mettre un terme au pillage à Vares. La Chambre

  3   de première instance a abusé de son pouvoir discrétionnaire en tenant

  4   compte du fait au titre des circonstances atténuantes que Kubura avait

  5   rapidement obéi à l'ordre de l'OG Istok le 4 novembre 1993 pour mettre fin

  6   aux dégradations à Vares et retirer ses hommes de cet endroit. Le fait

  7   qu'un commandant obéisse à un ordre pour mettre un terme à des crimes, ça

  8   n'a rien à voir avec les circonstances atténuantes.

  9   [La Chambre d'appel se concerte]  

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que vous pourriez ralentir un

 11   tout petit peu pour les interprètes.

 12   Mme GOY : [interprétation] Non seulement la Chambre de première instance a

 13   tenu compte d'une circonstance atténuante qui n'avait pas lieu d'être mais

 14   elle n'a pas tenu compte de la gravité des faits. A Ovnak, tout comme à

 15   Vares, les actes de pillage ont été extrêmement graves.

 16   Dans la zone d'Ovnak, la vie des victimes concernées a été gravement

 17   affectée. Beaucoup de maisons ont été pillées, et juste après la chute des

 18   villages, la police militaire de la 7e Brigade amenait des camions et

 19   s'emparait des équipements techniques, des appareils électroménagers, des

 20   matériaux de construction et des vivres. Tout ceci était rassemblé dans des

 21   points de collecte à Brajkovici avant d'être transporté au QG de la 7e

 22   Brigade à Bilmiste, c'était là le point de collecte qui avait été mis en

 23   place par Kubura.

 24   A Vares, les actes de pillage étaient encore bien plus graves. Les

 25   soldats se sont emparés de tout ce qui leur tombait sous la main et ceci

 26   sans aucune restriction. Ils ont utilisé la force pour arriver à leur

 27   objectif. Ils ont détruit des vitrines, enfoncer des portes. Un témoin l'a

 28   raconté, dans toutes les boutiques vous aviez au moins un vitrine qui avait

Page 71

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  

Page 72

  1   été cassée.

  2   Le vol des vivres était une partie de la stratégie des soldats qui

  3   ont pillé Vares. A ces deux endroits, systématiquement on a abusé de la

  4   procédure de butin de guerre, et Kubura n'a pas simplement omis de punir,

  5   il a accepté, organisé ce pillage à Vares. Il a récompensé les pilleurs. Il

  6   a rendu un ordre écrit où il donnait l'autorisation aux soldats de

  7   participer à cette opération et de confisquer les biens qui avaient été

  8   distribués.

  9   Cependant, dans la partie du jugement qui concerne la peine prononcée

 10   contre Kubura, on a uniquement parlé du caractère systématique de ces

 11   activités, de l'intervention personnelle de Kubura au titre de

 12   circonstances atténuantes.

 13   Or, la gravité du pillage n'est pas reflétée dans la peine prononcée

 14   de deux ans et demi d'emprisonnement, surtout si on tient compte du fait

 15   que au terme du code pénal de la RSFY c'est un crime qui est passible d'au

 16   moins cinq ans de prison. La Chambre de première instance doit donc se

 17   demander quel est le message qu'envoie un commandant qui non seulement

 18   n'empêche ou ne punit pas les actes de pillage mais récompense ses hommes

 19   qui se livrent à ces activités.

 20   J'en ai terminé de mes arguments sur ce point, s'il n'y a pas de

 21   questions, M. Wirth va -- lui va prendre la suite.

 22   M. WIRTH : [interprétation] Ma consoeur vient de vous le dire, je

 23   vais vous parler du deuxième moyen d'appel de l'Accusation.

 24   La Chambre s'est fourvoyée lorsqu'elle a acquitté M. Kubura pour

 25   n'avoir pas puni ou empêché les destructions et le pillage à Vares. Elle

 26   n'a pas compris que Kubura savait que Vares avait été pillé et que ceci est

 27   souvent associé à ce pillage avec la destruction de magasins, de maisons,

 28   ne serait-ce pour permettre à ceux -- aux pilleurs d'entrer dans les

Page 73

  1   magasins qu'ils veulent

  2   piller ? Ceci montre tout du moins que M. Kubura avait la connaissance en

  3   portant obligation de se renseigner.

  4   La Chambre n'a pas non plus compris que le commandement du 3e Corps

  5   avait donné l'ordre à la 7e Brigade de mettre fin aux destructions

  6   infligées à Vares. Une fois de plus, ceci aux bas mots, informait Kubura,

  7   il avait ainsi l'obligation d'agir.

  8   Le 4 novembre 1993, lorsque la 7e Brigade est entrée dans la ville de Vares

  9   qui était alors désertée, le chaos s'est installé. Non seulement des

 10   soldats ont volé tout ce qu'ils voyaient, tout ce qui leur tombait sous les

 11   yeux, ils ont aussi provoqué des destructions de biens à grande échelle.

 12   Les soldats de la 7e Brigade ont détruit des étalages, ont enfoncé des

 13   portes d'entrée, ceci uniquement pour piller. Paragraphe 1846 du jugement.

 14   Résultat, c'est que pratiquement tous les commerces de Vares ont vu leurs

 15   étalages, leurs vitrines détruits. De plus, des soldats de l'ABiH

 16   semblaient être ivres lorsqu'ils ont utilisé leurs armes et provoqué des

 17   dégâts à des maisons et à des bâtiments. Paragraphe 1844.

 18   Pièce 448 aussi, nous avons un rapport qui le dit. Cette destruction s'est

 19   faite à un niveau tel que le Groupe opérationnel a exprimé son inquiétude

 20   dans deux rapports envoyés au commandement du 3e Corps, pièce 676 et pièce

 21   446.

 22   Quelle fut la réaction du 3e Corps de ce commandement ? Il a donné des

 23   ordres à la 7e Brigade apparemment je n'ai pas bien donné la cote de la

 24   deuxième pièce de l'Accusation, P446, je le répète.

 25   Le commandement du 3e Corps a donc réagi en envoyant des ordres à la 7e

 26   Brigade, ordre lui intimant de mettre fin à la destruction et aux pillages,

 27   paragraphe 1946. Bien sûr, la Chambre le savait, cette destruction de

 28   grande envergure commise par la 7e Brigade à Vares correspondait à

Page 74

  1   l'élément constitutif de l'infraction de destruction. Mais la Chambre a

  2   estimé que Kubura n'était pas responsable de ces crimes au motif qu'il

  3   n'avait pas réuni des conditions nécessaires pour l'élément moral. C'était

  4   une erreur car aux bas mots Kubura était informé et avait ainsi obligation

  5   de se renseigner.

  6   La Chambre de première instance a soit commis une erreur de droit soit une

  7   erreur de fait. C'est ce que nous disons dans notre mémoire. Aujourd'hui,

  8   je me bornerai à aborder les faits. Aucune Chambre de première instance

  9   raisonnable n'aurait pu conclure que Kubura n'était pas informé et n'avait

 10   pas l'obligation de se renseigner s'agissant de la destruction infligée à

 11   Vares.

 12   Quel est le droit applicable pour établir qu'il avait connaissance de cela

 13   ? La Chambre devait conclure qu'il avait au moins raison de connaître ou de

 14   savoir que ses subordonnés avaient commis des destructions à Vares.  Nous

 15   avons l'arrêt Blaskic paragraphe 64 qui dit que l'interprétation faisant

 16   foi de ces termes, raison de savoir, se trouve dans l'arrêt Celebici.

 17   Que dit l'arrêt Celebici ? L'information générale reçue par le commandant

 18   ne doit pas pousser à la conclusion forcée qu'un crime est commis, et ceci

 19   indique qu'il faut obtenir un complément d'informations. Ceci se trouve aux

 20   paragraphes 236, 238 et 241 de l'arrêt Celebici.

 21   Ici, en l'occurrence, nous avons deux bases en matière de preuve. Si

 22   chacune indépendamment montre que Kubura avait suffisamment d'informations

 23   alarmantes indiquant que la 7e Brigade s'était livrée à des actes de

 24   destruction, et puis, Kubura savait que la 7e Brigade avait pillé une ville

 25   toute entière, c'est la première base.

 26   En soit, ceci automatiquement soulève une question, celle de savoir

 27   comment les auteurs de ces méfaits ont pu trouver ces biens pour les piller

 28   si ce n'était en défonçant des portes et des portes de commerce, c'est-à-

Page 75

  1   dire que la destruction est associée au pillage d'une ville, c'est

  2   indissociable, et c'est ce qui s'est passé à Vares.

  3   La Chambre a conclu que la destruction de ces étalages, de ces

  4   vitrines et de ces portes de commerce a été commise uniquement pour se

  5   livrer à des actes de pillage.

  6   Aux vues de toutes ces informations, le fait que Kubura savait que la

  7   ville de Vares avait été pillée, en tant que conditions minimales, lui

  8   montrer qu'il avait l'obligation de mener une enquête plus approfondies

  9   pour savoir si les soldats qui s'étaient rendus coupables de ces méfaits

 10   étaient, effectivement, les soldats qui avaient commis le pillage, donc, si

 11   c'était les mêmes soldats qui avaient commis ces destructions.

 12   Deuxième base pour établir cette connaissance en portant obligation

 13   de se renseigner, c'est l'ordre du 4 novembre interdisant la poursuite des

 14   destruction à Vares, ordre reçu par la 7e Brigade, paragraphe 1 852 du

 15   jugement, et ceci a été utilisé par la Chambre de première instance pour

 16   établir que Kubura était au courant des crimes de pillage à Vares,

 17   paragraphe 1 986.

 18   Cet ordre est mentionné dans la pièce P446, rapport du commandement

 19   du 3e Corps OG Istok, et ce rapport est explicite. Il dit que l'ordre était

 20   qu'il fallait empêcher que des destructions soient commises à Vares. De

 21   nouveau, aux bas mots, Kubura était avisé grâce à cet ordre de la nécessité

 22   d'enquêter pour savoir si la

 23   7e Brigade, ces hommes, qui étaient sur le terrain, qui étaient à Vares,

 24   s'étaient livrés à ces destructions.

 25   Une simple enquête, une simple recherche faite auprès de ces soldats,

 26   auprès du commandement du 3e Corps, auprès du Groupe opérationnel Istok ou

 27   auprès des organisations internationales présentes sur le terrain auraient

 28   révélé que la 7e Brigade était responsable de ces actes de destruction.

Page 76

  1   En résumé, aucune Chambre de première instance raisonnable n'aurait

  2   pu conclure que Kubura n'avait pas l'élément moral nécessaire montrant

  3   qu'il n'avait pas puni des destructions à Vares. Par conséquent, nous

  4   demandons que la Chambre d'appel condamne Kubura pour manquement

  5   d'obligation de punir ces crimes de destruction sans motif à Vares, et donc

  6   d'augmenter la peine à [imperceptible].

  7   J'en ai terminé, je vous remercie.

  8   M. LE JUGE POCAR : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE LIU : [interprétation] Est-ce que vous voulez bien que la

 10   Chambre de première instance se base dans ses conclusions sur la

 11   connaissance qu'avait Kubura des actes de pillage de même que des actes de

 12   destruction et qu'elle se base sur le même jeu de

 13   documents ? Je m'explique les ordres, les rapports.

 14   M. WIRTH : [interprétation] Oui. C'est ce que nous disons. Nous disons que

 15   l'ordre mentionné dans la pièce P446 donnait suffisamment d'informations

 16   pour qu'il soit mis au courant du fait qu'il y avait eu des actes de

 17   destruction de la part de la 7e Brigade. Je viens de vous donner la

 18   deuxième base pour établir cette connaissance en portant obligation de se

 19   renseigner, c'est simplement qu'il était au courant qu'il y avait eu des

 20   actes de pillage, ce qu'a reconnu la Chambre de première instance

 21   d'ailleurs.

 22   M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Puisqu'il n'y a pas d'autres qui vous

 24   sont adressées, vous pouvez poursuivre.

 25   M. WIRTH : [interprétation] C'est M. Dalal qui va vous parler du quatrième

 26   moyen d'appel---

 27   M. DALAL : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Je

 28   m'appelle Marwan Dalal, et je vais vous présenter nos arguments en ce qui

Page 77

  1   concerne notre quatrième moyen d'appel, à propos d'une erreur commise par

  2   la Chambre de première instance qui est importante pour ce qui est de la

  3   jurisprudence du Tribunal.

  4   Ceci n'a pas d'effet sur le verdict rendu par la Chambre de première

  5   instance.

  6   Nous avons ici l'obligation du supérieur hiérarchique visé par l'article

  7   7(3) du Statut qui est de punir des subordonnés s'ils ont commis des

  8   violations graves des lois et coutumes de la guerre d'un crime de guerre.

  9   De l'avis de l'Accusation, les mesures disciplinaires en tant que tel ne

 10   suffisent pas pour que le supérieur hiérarchique soit acquitté de son

 11   obligation que lui impose l'article 7(3) du Statut qui est de punir des

 12   subordonnés.

 13   Permettez-moi de préciser ceci à votre attention nos arguments concernent

 14   les mesures disciplinaires. Il se peut que le terme utilisé en anglais, par

 15   "summary disciplinary measure," si ceci a semé le trouble, nous nous en

 16   excusions. Soyons clair, nous parlons des mesures disciplinaires en tant

 17   que tel qui ne sont pas suffisantes pour qu'un commandant soit exonéré de

 18   son obligation de punir ses subordonnés en suffisant pas pour qu'il soit

 19   acquitté de son obligation.

 20   L'obligation de ce supérieur hiérarchique d'après l'article 7(3), selon

 21   nous, c'est qu'il a l'obligation de reporter -- rapporter au système

 22   judiciaire à l'organe de Poursuite de tel fait. Le droit est clair. La

 23   situation l'est; nous avons un supérieur hiérarchique qui savait ou avait

 24   des raisons de savoir qu'il y avait de graves violations du droit

 25   international humanitaire qui ont été commises à présent ses subalternes,

 26   ses subordonnés, alors, il a un choix comment d'acquitter de son obligation

 27   de punir.

 28   De notre avis, pour que ce choix reste dans le cadre de la loi, il faut

Page 78

  1   qu'il rende compte de cette question aux autorités judicaires compétentes,

  2   aux autorités chargées des Poursuites. Un supérieur -- un commandant

  3   militaire ne peut pas pour punir se limiter à imposer des mesures

  4   disciplinaires militaires uniquement.

  5   On ne peut pas demander l'impossible à un supérieur. Il a l'obligation de

  6   faire ce qui est raisonnable, ce qui est nécessaire, de ce qui est juste

  7   aussi.

  8   Quelle est l'erreur commise en droit par la Chambre de première instance ?

  9   Je vais vous le dire et reprendre les quatre points qui à notre avis,

 10   constituent le devoir, l'obligation car un commandant militaire à savoir

 11   celui de rapporter la question aux autorités chargées des Poursuites.

 12   Les mesures disciplinaires 30 à 60 jours d'emprisonnement sont des mesures

 13   raisonnables pour qu'un supérieur s'acquitte de son obligation de punir des

 14   actes de pillage. Si je n'ai pas été suffisamment clair je vous rappelle

 15   qu'ici nous parlons donc d'un crime de guerre que est celui de pillage.

 16   C'est une conversation de la Chambre qui est en contradiction avec

 17   l'article 142 du code pénal de la RSFY, lequel impose un minimum de cinq

 18   ans d'emprisonnement pour ce crime de pillage en tant que crime de guerre.

 19   Cette décision ne correspond pas à la conclusion tirée par la Chambre dans

 20   le paragraphe 2041, à savoir qu'il s'agissait de pillage généralisé et

 21   significatif.

 22   Au paragraphe 1 777, la Chambre a bien cité le droit applicable eu égard à

 23   d'autres crimes retenus dans le Statut, à savoir meurtre et mauvais

 24   traitement, à notre avis la Chambre ne s'est pas trompée là, mais elle a

 25   mal appliqué le droit au crime de pillage.

 26   Permettez-moi de citer rapidement ce qu'a dit la Chambre de première

 27   instance s'agissant de l'obligation qu'a un chef de rapporter de tels actes

 28   à l'organe de Poursuite.

Page 79

  1   "La Chambre ne saurait trop souligner qu'au regard du droit international

  2   un supérieur hiérarchique se doit de prendre des mesures nécessaires et

  3   raisonnables pour punir les auteurs de violations de lois au coutume de la

  4   guerre. L'accusé Hadzihasanovic ne pouvait se contenter au titre de mesure

  5   punitive d'une sanction disciplinaire n'excédant pas 60 jours de détention.

  6   Il lui incombait de prendre des mesures concrètes pour que ces auteurs

  7   soient traduit en justice et de faire rapport au Procureur militaire à cet

  8   effet."

  9   Permettez-moi aussi de faire référence au jugement de première instance

 10   Strugar paragraphe 376, le jugement première instance Kordic au paragraphe

 11   446, et jugement première instance Halilovic, paragraphes 97/98, qui

 12   résument les éléments de droit applicable.

 13   Autre argument que nous avançons, il y a obligation de la part du supérieur

 14   hiérarchique de dire aux organes de Poursuite compétents qu'un crime de

 15   guerre a été commis par un subordonné en tant que mesure punitive, il y a

 16   aussi la question de l'insuffisance des mesures disciplinaires, et

 17   l'obligation qu'impose le droit international humanitaire de rapporter de

 18   tels crimes aux autorités chargées des Poursuites, et l'obligation qu'a

 19   l'Etat de mener des enquêtes et de poursuivre pour crimes de guerre et

 20   l'obligation de faire part aux organes de Poursuite compétents de la

 21   commission de tels actes.

 22   La gravité ne serait être minimisée et ne serait être contestée. Le crime

 23   de pillage a été défini comme un crime grave depuis au moins 100 ans. On le

 24   mentionne à l'article 3 du Statut du TPIY; à l'article 4 du Statut du TPIR;

 25   dans l'article 8 du Statut de la CPI; dans l'article 4 du Deuxième

 26   protocole additionnel aux conventions de Genève 1977; dans l'article 33 de

 27   la Quatrième convention de Genève de 1949; dans la Charte du tribunal

 28   militaire international de Nuremberg; article 6, plus précisément; ainsi

Page 80

  1   que dans les articles 28 et 47 des conventions de La Haye sur les lois et

  2   coutumes de la guerre.

  3   Le pillage est considéré dans les lois et coutumes de la guerre comme étant

  4   un crime grave, un crime de guerre grave, et ceci depuis longtemps, et on

  5   ne saurait sous-estimer la gravité de cet acte. La gravité qui impose

  6   l'obligation supérieur hiérarchique de traduire en justice en tout cas de

  7   rapporter aux organes de Poursuite compétents de tels actes si ce supérieur

  8   hiérarchique avait connaissance ou avait des raisons de connaître de tels

  9   actes commis pour ses subordonnés.

 10   De plus, les mesures disciplinaires à elles seules ne dégagent pas un

 11   supérieur hiérarchique de l'obligation que lui impose l'article 7(3) du

 12   Statut. Il y a la discipline militaire, leur finalité -- elle a une

 13   finalité, s'est instaurée, et de faire respecter l'ordre dans l'armée, de

 14   réguler les rapports de subordination, et d'assurer le bon fonctionnement

 15   de l'armée.

 16   Sa finalité n'est pas de punir pour crimes de guerre. Ceci peut s'inscrire

 17   dans les mesures retenues à cet effet, mais jamais elles ne suffisent à

 18   elles seules, pour qu'un supérieur hiérarchique s'acquitte ainsi par leur

 19   application de son obligation d'empêcher ou de punir.

 20   Nous avons le paragraphe 948 du jugement, qui mentionne la conduite qui va

 21   déclancher l'imposition de mesures disciplinaires. Nous avons, par exemple,

 22   la désertion, le fait d'abandonner son poste, ou de refuser de combattre ou

 23   de désobéir à des ordres, et ce ne sont pas là des crimes de guerre. On ne

 24   peut pas considérer que ce sont là des crimes de guerre. Ce sont des

 25   questions internes, internes à régler par l'armée elle-même qui ne tiennent

 26   pas compte de ce qui existe à l'extérieur de l'armée. Or, quand on pense à

 27   la punition pour crime de guerre, c'est bien quelque chose qui est aussi

 28   extérieur à l'armée. Il y a aussi le règlement de discipline militaire de

Page 81

  1   l'ABiH qu'il faut prendre en compte, la pièce P325, ainsi que les articles

  2   3 et 7, où sont décrits les agissements passibles de punitions par mesures

  3   disciplinaires. Or, si vous les regardez aucune ne mentionne des crimes de

  4   guerre.

  5   Les mesures disciplinaires sont souvent déclenchées de façon unilatérale

  6   par un supérieur hiérarchique qui utilise ainsi le pouvoir qui lui est

  7   donné par sa fonction. De plus, ces mesures imposent des sanctions

  8   minimales quand on les compare aux violations graves des lois et coutumes

  9   de guerre.

 10   Pensez à la pièce P120, la loi ou le décret portant service dans l'ABiH qui

 11   mentionne les sanctions où l'on peut imposer par voie de mesures

 12   disciplinaires. J'en cite quelques-unes : avertissement, réprimande, heures

 13   supplémentaires ou services supplémentaires jusqu'à trois pauses, le fait

 14   de ne pas pouvoir quitter la caserne pendant -- jusqu'à quatre jours, le

 15   fait d'être rétrogradé ou prison -- emprisonnement, mis sous arrêt pour une

 16   période qui peut aller jusqu'à 60 jours.

 17   Ces mesures ne suffisent pas pour punir un crime de guerre, y compris celui

 18   de pillage.

 19   Cette mesure est insuffisante et dès lors oblige le supérieur hiérarchique

 20   d'en faire rapport aux autorités compétentes chargées des Poursuites et aux

 21   autorités judiciaires compétentes. Le droit coutumier international impose

 22   une obligation très claire aux supérieurs hiérarchiques. Il doit en rendre

 23   compte aux autorités militaires chargées des Poursuites. Qu'entend-on par

 24   obligation de compte rendu et je ne vais pas pouvoir les citer toutes ces

 25   obligations, mais il faut notamment dire où il y a eu pillage. Il faut

 26   mentionner les unités ou individus qui se sont rendus coupable, des

 27   personnes qui se sont trouvées sur les lieux concernés; et les rapports

 28   qu'on a demandés aux subordonnés sur ce qui s'est passé sur les lieux, tout

Page 82

  1   ceci doit être envoyé aux organes de Poursuite.

  2   Nous avons l'article 87(1) mais aussi l'article 87(3) -- Protocole

  3   additionnel des conventions de Genève qui impose ce devoir, cette

  4   obligation. Nous avons un commentaire du CICR en son article 87 qui dit que

  5   le supérieur hiérarchique a le devoir, je cite : "De renvoyer l'affaire aux

  6   autorités judiciaires en tant que de besoin et de soumettre les preuves

  7   factuelles qu'il est possible de trouver."

  8   Il s'agit du paragraphe 3 562, page 1 023 du commentaire du CICR.

  9   De plus, le Statut de la CPI, article 28 le dit explicitement. Elle

 10   dit que : "Le supérieur militaire a cette obligation et voit engager sa

 11   responsabilité pénale s'il n'a pas renvoyé l'affaire aux autorités

 12   compétentes chargées des Enquêtes et Poursuites."

 13   C'est un devoir clair qui est imposé par le droit coutumier

 14   international mais qui est aussi corroboré par la pratique des Etats. On a

 15   des textes de lois nationaux qui définissent eux aussi l'obligation qu'a le

 16   supérieur hiérarchique de rapporter de tels cas aux autorités judiciaires

 17   compétentes chargées des Poursuites, s'ils avaient connaissance ou avaient

 18   des raisons de savoir que de tels crimes avaient été commis. Je parle ici

 19   du Canada, de l'Allemagne, de l'Australie, de l'Angleterre qui pratiquent

 20   ces procédures. Nous avons aussi mentionné ceci au paragraphe 5.25 de notre

 21   mémoire en appel.

 22   Enfin, un Etat a l'obligation d'enquêter et de poursuivre pour crimes

 23   de guerre. Ce sont là d'autres sources qui montrent qu'il y a cette

 24   obligation de rendre compte de tels agissements aux autorités chargées des

 25   Poursuites. En effet, s'il n'y avait pas cette obligation, l'obligation

 26   n'aurait plus de sens. Il faut faire une distinction entre la connaissance

 27   qu'a un supérieur hiérarchique et sa capacité à prendre les mesures

 28   nécessaires entre cette obligation du supérieur hiérarchique et

Page 83

  1   l'obligation qu'a un Etat de poursuivre pour crime de guerre. Cette

  2   dernière obligation elle est consacrée dans l'article 86 du premier

  3   Protocole additionnel aux conventions de Genève, ainsi que dans l'article

  4   158 de l'étude du CICR sur le droit et coutume international lequel dit :

  5   "Qu'un Etat doit mener des enquêtes sur des crimes de guerre présumés

  6   commis par des ressortissants ou des forces armées sur le terrain et en

  7   tant que de besoins poursuivre les suspects."

  8   Je parle ici de la page 607 de cette étude du CICR, premier volume.

  9   En conclusion, la notification que des crimes de guerre de pillage

 10   ont été commis aux autorités compétentes chargées des Poursuites, c'est une

 11   mesure raisonnable, mais c'est aussi une mesure nécessaire. Le supérieur

 12   hiérarchique peut le faire et doit le faire, il doit dire qu'il y a eu

 13   commission d'un crime de guerre, il doit dire où il a été commis, il doit

 14   donner l'identité des individus ou des unités qui s'en sont rendu coupables

 15   ou qui se sont trouvés sur les lieux du crime, et il doit aussi transmettre

 16   les rapports qu'il a reçus de ses subordonnés sur la commission du crime de

 17   guerre.

 18   L'obligation de notification aux autorités compétentes chargées des

 19   Poursuites c'est donc par conséquent un devoir clair qui lui est imposé en

 20   application de l'article 7(3).

 21   Je ne sais pas si vous avez des questions. J'y serai,s bien sûr, prêt à y

 22   répondre, mais nous nous permettons de demander que soit accordé les

 23   mesures que le bureau du Procureur a demandé à la Chambre d'appel.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur le Juge Meron.

 25   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Ce grief -- ou cet argument, est-il de

 26   nature institutionnel ? Est-ce que vous opposez la poursuite pénale à la

 27   notion de mesures disciplinaires ?

 28   Imaginons un instant que vous avez une procédure disciplinaire qui permet

Page 84

  1   d'infliger cinq ans d'emprisonnement. Est-ce que ceci vous dérangerait ?

  2   M. DALAL : [interprétation] En fait, les deux éléments sont ceux que nous

  3   invoquons. Nous invoquons l'élément de la procédure pénale et celui des

  4   mesures disciplinaires. Vous voyez que, dans beaucoup d'Etats, on a une

  5   peine minimale. Nous avons aussi notre mémoire supplémentaire qui donc, en

  6   général, la sanction est minimale et la procédure est rapide. Je parle ici.

  7   C'est en rapport direct, avec le rapport de subordination et la façon dont

  8   les rapports hiérarchiques sont établis au sein de l'armée.

  9   Compte tenu de l'expérience acquise dans beaucoup de systèmes nationaux que

 10   nous mentionnons en annexe à notre mémoire. Il est possible de dire qu'en

 11   général la sanction imposée est minimale; cependant, s'il y a un exemple

 12   théorique ou une exception concrète montrant que la sanction n'est pas

 13   minimale mais élevée, ceci nous permettrait peut-être de réétudier la

 14   question, mais la question de la procédure est très importante. Un crime de

 15   guerre mérite une procédure sérieuse et sincère au niveau de la rétribution

 16   de la punition et aussi une sanction qui sera proportionnelle, donc, les

 17   deux éléments sont associés. On ne doit pas préférer la sanction à la

 18   procédure ou la procédure à la sanction. Les deux sont importants.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 20   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Monsieur, je m'interroge là-

 21   dessus et je vous remercie de nous avoir soumis vos arguments à présent.

 22   J'aimerais savoir lorsqu'il est question de l'obligation du supérieur

 23   hiérarchique, est-ce qu'à ce moment-là, le fait de punir signifie la même

 24   chose que lorsque c'est un tribunal qui prononce des mesures de punitions ?

 25   M. DALAL : [interprétation] L'obligation du supérieur hiérarchique

 26   militaire est de prendre des mesures nécessaires raisonnables.

 27   Généralement, bien entendu, il n'a pas l'attribution lui permettant

 28   d'engager des poursuites. Donc, nous ne pouvons pas dire qu'il a la même

Page 85

  1   obligation que les autorités judiciaires compétentes, mais l'Accusation

  2   affirme qu'il y a là un lien important qui mène donc à une procédure

  3   adéquate et sanction pour crimes de guerre, et ce lien s'est de faire

  4   rapport qui constitue partie intégrante de son obligation de supérieur

  5   hiérarchique.

  6   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Mais, le Juge Meron a eu raison

  7   de vous signaler que des mesures disciplinaires peuvent elles aussi être

  8   sévères. Donc, êtes-vous en train de nous dire que lorsque nous avons le

  9   cas d'un officier supérieur qui a imposé des mesures disciplinaire sévères;

 10   est-ce que vous allez nous dire qu'il n'a pas puni le subordonné en

 11   question ?

 12   M. DALAL : [interprétation] Il a puni. Nous allons toujours pouvoir trouver

 13   des situations d'exemption où une mesure disciplinaire a été sévère.

 14   Toutefois, si on cherche des exemples concrets et nous en avons parlé de

 15   manière détaillée dans nos écritures, nous ne pouvons pratiquement pas

 16   trouver de mesure disciplinaire qui comporterait une punition aussi sévère.

 17   Encore une fois, un crime de guerre mérite d'être puni dans les deux

 18   aspects, d'une part : il mérité une procédure sérieuse, et pas quelque

 19   chose de précipiter, et il mérite une sanction adéquate donc qui correspond

 20   à la gravité du crime

 21   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Je vais revenir à vos écritures,

 22   bien entendu, et en particulier, je vais relire l'addendum auquel vous vous

 23   êtes référé. Mais est-ce que vous pourriez me citer une source qui serait

 24   pertinente sur ce sujet ?

 25   M. DALAL : [interprétation] Sur les obligations du supérieur

 26   hiérarchique.

 27   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Oui. Le sujet que vous

 28   abordez, et votre position à savoir qu'une sanction disciplinaire ne

Page 86

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  

Page 87

  1   constitue pas une mesure suffisante, ce n'est pas ainsi qu'un supérieur

  2   hiérarchique peut s'acquitter de son obligation de punir.

  3   M. DALAL : [interprétation] Si vous avez à l'esprit une publication

  4   lorsque vous parlez de source, je ne pourrais pas vous en citer une. Mais

  5   la position de l'Accusation est la suivante, une interprétation claire de

  6   l'obligation du supérieur hiérarchique en application à l'article 87 du

  7   premier protocole des conventions de Genève, et son commentaire par le CICR

  8   nous incite sans ambiguïté aucune à conclure que ce genre d'obligation doit

  9   se lire à la lumière du Statut de la Cour pénale internationale.

 10   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Je pense que vous avez sans

 11   doute raison, je vais vérifier cela.

 12   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Si j'ai bien compris, vous en avez

 13   terminé avec votre réplique. S'il n'y pas d'autres questions.

 14   Nous pouvons peut-être entendre les répliques, très bien. Nous allons

 15   suivre l'ordre du jour et nous allons entendre la Défense Hadzihasanovic.

 16   Vous avez la parole.

 17   M. BOURGON : Plaise à la Cour.

 18   [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges de la Chambre

 19   d'appel, permettez-moi de dire, pour commencer, que pour ma consoeur et

 20   pour moi-même, il s'agit d'un honneur et d'un privilège de pouvoir prendre

 21   la parole devant vous ce matin.

 22   Pour nous deux qui avons travaillé devant ce Tribunal international depuis

 23   dix ans, c'est un événement tout à fait, un moment tout à fait

 24   exceptionnel, c'est la première fois que nous avons cette possibilité.

 25   Personnellement, il y a plus de six ans au moment du début des poursuites

 26   engagées contre le général Hadzihasanovic en juillet 2001, j'ai été donc

 27   invité à rejoindre cette équipe de la Défense et j'ai été invité donc à le

 28   faire et j'ai pris la décision d'abandonner la position confortable qui

Page 88

  1   était celle de travailler pour les Juges du Tribunal, une position

  2   confortable dans le cadre du système onusien et j'ai décidé d'accepter cet

  3   engagement.

  4   Je n'imaginais pas un second, à ce moment-là, que six ans plus tard, je

  5   serais devant vous -- devant cette même Chambre d'appel et dans cette même

  6   affaire engagée contre le général Hadzihasanovic.

  7   J'insiste -- je souligne qu'il s'agit de plus de six ans puisque ceci a eu

  8   une incidence sur cette procédure, depuis le tout début, depuis que l'on a

  9   dressé l'acte d'accusation contre le général Hadzihasanovic en juillet 2001

 10   et lorsqu'il s'est livré de son propre chef au Tribunal pénal

 11   international.

 12   Nous estimons, Monsieur le Président, que les chefs d'accusation pour

 13   responsabilité de supérieur hiérarchique dressés contre le général

 14   Hadzihasanovic nous l'estimons, et nous l'avons estimé à l'époque que ces

 15   chefs d'accusation n'étaient pas fondés, et nous maintenons cette position

 16   qui a été la nôtre au départ. Mais aujourd'hui, il nous faut bien répondre

 17   aux arguments de l'Accusation, l'Accusation affirme que la peine de prison

 18   de cinq ans qui a été décidée contre le général Hadzihasanovic est

 19   inappropriée et elle n'est pas raisonnable.

 20   A ce sujet, Monsieur le Président, nous estimons - et je vais en avoir

 21   l'occasion de prendre la parole à ce sujet demain - que le Chambre de

 22   première instance a commis de nombreuses erreurs dans le cadre du procès

 23   contre général Hadzihasanovic. Il s'agit des erreurs de droit, des erreurs

 24   de faits et également, comme je l'ai déjà dit, il s'agit des erreurs qui

 25   ont eu un impact sur le droit de l'appelant à avoir un procès équitable, et

 26   ont entravé son droit.

 27   Mais, nous estimons, cependant, que la sentence ne constitue pas les mêmes

 28   erreurs qui ont été commises. Étant dit, c'est sur la base des chefs

Page 89

  1   d'accusation pour lesquels il y a eu déclaration de culpabilité contre le

  2   général Hadzihasanovic et il s'agit des huit incidents spécifiques qui se

  3   fondent sur deux chefs.

  4   Plus précisément, s'agissant des huit incidents pour lesquels le

  5   général Hadzihasanovic a été déclaré coupable par la Chambre de première

  6   instance, nous estimons que la peine prononcée aurait pu être moins sévère.

  7   Nous sommes arrivés à cette conclusion sur la base du rôle qu'il a joué et

  8   aussi sur la forme du degré, la forme de sa participation, également sur la

  9   base de la gravité des incidents pour lesquels il y a eu déclaration de

 10   culpabilité et pour lesquels il y a eu déclaration de non culpabilité.

 11   Cela étant dit, nous n'avons pas été en mesure de repérer d'erreur

 12   distincte qui aurait été commise par la Chambre de première instance sur ce

 13   point.

 14   Nous estimons qu'aucune erreur n'a été commise qui aurait requis une

 15   réduction ou une erreur qui aurait justifié ou qui aurait exigé une

 16   aggravation de la peine. Par conséquent, notre position est la suivante :

 17   Premièrement, nous estimons que notre appel, l'appel interjeté au nom

 18   de M. Hadzihasanovic va avoir pour conséquence, le renversement du moyen

 19   d'appel de l'Accusation sur la peine.

 20   Deuxièmement, si tel n'était pas le cas, il n'y a pas de raisons, de

 21   justifications qui exigeraient une modification sur le plan de la peine

 22   prononcée.

 23   Le premier point sur lequel je voudrais répondre à l'Accusation c'est

 24   la question, celui qui est devant vous aujourd'hui et que vous aurez

 25   l'occasion d'entendre demain. L'Accusation n'a pas parlé de la personnalité

 26   du général Hadzihasanovic, et nous estimons que les points sont trop de

 27   l'appel de l'Accusation, et surtout lorsqu'il s'agit de la gravité des

 28   crimes pour lesquels il a été déclaré coupable, pris en considération par

Page 90

  1   la Chambre de première instance. Nous estimons que les points clés sont la

  2   personnalité de l'accusé, la manière de laquelle il a exercé son

  3   commandement dans des circonstances les plus difficiles, qui soit la forme

  4   et le degré de sa participation et les crimes pour lesquels le général

  5   Hadzihasanovic a été déclaré coupable.

  6   Sans revenir aux arguments que nous avons déjà exposés dans nos

  7   écritures, nous estimons qu'il est important d'attirer l'attention de la

  8   Chambre d'appel sur certains de ces points.

  9   Il nous semble nécessaire de souligner à l'attention de la Chambre

 10   d'appel qu'il s'agit d'une affaire portée contre un commandant qui, malgré

 11   des circonstances impossibles, est parvenu à mener à bien la mission qui

 12   lui a été confiée, à savoir il a exercé son rôle de commandant, tout en

 13   prenant des mesures sans nombre afin d'empêcher ses subordonnés à commettre

 14   des violations du droit humanitaire international et de manquer à la

 15   discipline.

 16   Le général Hadzihasanovic a été le commandant du 3e Corps pendant à

 17   peu près une période de dix mois. Il a souligné l'importance de

 18   l'instruction et la formation de ses hommes y compris le fait de porter à

 19   leur connaissance les règles du droit humanitaire international.

 20   S'agissant de la police militaire, la Chambre de première instance a

 21   constaté que le général Hadzihasanovic avait rappelé à plusieurs occasions

 22   la police militaire -- ou le Bataillon de Police militaire de la nécessité

 23   de prendre toutes les mesures nécessaires afin d'empêcher les activités

 24   criminelles. A ce sujet, le 3e Corps a agi de manière irréprochable et je

 25   le dis en me fondant sur les éléments de preuve.

 26   Suite aux ordres qui ont été émis par le général Hadzihasanovic, le

 27   commandant du Bataillon de la Police militaire du 3e Corps a déposé 377

 28   rapports au pénal ou plaintes au pénal concernant 804 personnes identifiées

Page 91

  1   et 20 non identifiées; et ceci se situe dans la période allant du 14

  2   septembre 1992 jusqu'au

  3   1er mars 1994. Monsieur le Président, la Chambre de première instance s'y

  4   est référée dans son jugement.

  5   En outre, nous avons d'autres éléments de preuve qui n'ont pas été

  6   pris en considération par la Chambre de première instance dans son

  7   jugement, et pour lesquels nous estimons qu'ils sont pertinents à ce stade.

  8   A savoir la Chambre de première instance ne s'est pas référée aux

  9   documents DH119. Il s'agit là d'un rapport du procureur du district

 10   militaire de Travnik, et ce rapport concerne l'année 1993, 823 plaintes au

 11   pénal auraient été déposées à en juger d'après ce rapport devant le

 12   procureur, auprès du procureur militaire de district, et ce, contre 1 044

 13   personnes, 627 de ces individus étaient des membres ordinaires de l'ABiH,

 14   386 étaient des conscrits qui étaient également membres de l'armée.

 15   La Chambre de première instance ne s'est pas référée non plus à une

 16   autre pièce importante, DH274. Il s'agit là d'un rapport émanant du

 17   tribunal militaire du district de Zenica. Donc, c'est un autre district, et

 18   ce rapport concerne la période allant du 1er janvier jusqu'au 10 décembre

 19   1993. Pendant cette période-là, donc, là, nous parlons d'un autre tribunal

 20   d'un autre district, il y a eu 432 procédures au pénal qui ont été lancées

 21   contre des membres du

 22   3e Corps contre 869 individus qui étaient dans les rangs de l'ABiH.

 23   Donc, nous nous sommes penchées sur les types d'infraction dont il

 24   est question dans ces rapports, et la Chambre de première instance s'est

 25   référée, par exemple, à la pièce DH155.2, et les types concernent 16

 26   auteurs qui ont été identifiés dans des cas de meurtres; pour ce qui est de

 27   l'homicide intentionnel -- pour ce qui est de l'homicide involontaire, il y

 28   en a 8; 9 pour atteinte grave à l'intégrité physique; 1 pour double

Page 92

  1   meurtre; 1 pour comportement violent, et à ce sujet, un comportement

  2   violent est tel que visé à l'article 204 du code pénal de la RSFY. J'y

  3   reviendrais demain.

  4   Monsieur le Président, si je me penche sur l'appel de l'Accusation,

  5   premièrement, il nous faut voir quelle est la manière de laquelle elle a

  6   exercé son commandement, mais nous devons aussi nous référer aux arguments

  7   avancés par l'Accusation que selon la gravité des crimes pour lesquels ils

  8   affirment qu'il n'en a pas tenu compte.

  9   Nous estimons, Monsieur le Président, que la gravité n'est pas un

 10   facteur dont la Chambre première instance n'a pas tenu compte, puisque la

 11   gravité englobe à la fois les crimes qui ont été commis, et nous sommes

 12   d'accord avec l'Accusation là-dessus, et la forme et le degré de

 13   participation de l'accusé. Nous estimons que la Chambre de première

 14   instance a pris les deux en considération.

 15   Nous estimons également, Monsieur le Président, que la Chambre de

 16   première instance a eu droit -- a eu raison de se focaliser sur le degré de

 17   participation sur la forme et le degré de participation, donc, en se

 18   fondant sur le fait qu'il s'agissait exclusivement d'une affaire qui

 19   portait sur la responsabilité du supérieur hiérarchique.

 20   La Chambre de première instance est arrivée à la conclusion qu'aucun

 21   élément de preuve en l'espèce ne permettait d'arriver à la conclusion que

 22   la responsabilité de l'accusé est engagée au titre de l'article 7.1 du

 23   statut. A ce sujet, il est très important de se polariser sur la gravité de

 24   l'omission pour employer les termes utilisés par l'un des honorables Juges

 25   de cette Chambre d'appel.

 26   L'argument de l'Accusation au sujet du grade et de la position, tout

 27   simplement, il n'y a pas là d'automatisme. Lorsque vous avez un supérieur

 28   hiérarchique, un haut gradé, il n'est pas automatique qu'il mérite une

Page 93

  1   punition plus sévère. Il y a des instances où cela sera vrai mais d'autres

  2   où cela ne s'appliquera pas.

  3   Alors, s'agissant de la gravité de la l'omission, il est important de

  4   relever un point. Il y a une distance entre l'accusé et les événements qui

  5   se sont produits ou les crimes qui ont été commis.

  6   Parlons d'Orasac. Bien entendu, l'événement qui s'est produit à Orasac est

  7   très grave, c'est un crime très grave. Nous aurions tous souhaité que ceci

  8   ne se soit pas produit, mais il faut tenir compte du fait que cela s'est

  9   produit là où personne dans les rangs du

 10   3e Corps ne savait qu'il y avait des civils qui avaient été emmenés. Donc,

 11   ils avaient été emmenés au camp d'Orasac.

 12   Donc, il s'agit de facteurs qui doivent être pris en considération

 13   lorsque nous apprécions la gravité de l'omission.

 14   Pour ce qui est l'argument de l'Accusation disant que la Chambre de

 15   première instance a commis une erreur lorsqu'elle a mal interprété la

 16   personnalité de l'accusé, à savoir que c'était quelqu'un de cultivé,

 17   d'intelligent et quelqu'un qui n'a pas eu suffisamment de formation et

 18   d'instruction pratique.

 19   Un point qui n'a pas été mentionné par l'Accusation mais qui a été

 20   mentionné dans leur mémoire, c'est le fait qu'une peine minimale de cinq

 21   ans aurait normalement été imposée des crimes pour lesquels il a été

 22   déclaré coupable. Nous estimons que cet argument n'est pas juste et nous

 23   l'avons expliqué dans notre mémoire, je me réfère plus précisément aux

 24   articles 41, 42 et 43 du code pénal de la RSFY. Cela explique pourquoi ce

 25   n'est pas fondé, mais, je suis à votre disposition pour répondre à toutes

 26   questions que vous auriez à ce sujet.

 27   Monsieur le Président, il s'en suit que la Chambre de première

 28   instance n'a commis aucune erreur sur le plan de la peine prononcée, il n'y

Page 94

  1   a pas de raison pour que la Chambre d'arrêt modifie la peine qui a été

  2   prononcée par la Chambre de première instance.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur le Juge Meron souhaite

  4   en parler.

  5   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Très brièvement, pourquoi le procureur

  6   militaire ne s'est pas occupé des destructions ou pillages de bien ?

  7   M. BOURGON : Je vous remercie d'avoir posé cette question. J'ai souligné

  8   tout simplement le crime le plus grave contre les individus. Mais cela

  9   comprend également d'autres types de crimes. Mon objectif était de montrer

 10   que le général Hadzihasanovic n'a rien laissé sans punition.

 11   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc, d'autres crimes, les crimes

 12   contre les biens ont déclenché des poursuites ?

 13   M. BOURGON : Oui, tout à fait dans certains cas, oui.

 14   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie.

 15   M. BOURGON : Pour ce qui est du dernier moyen d'appel, très brièvement,

 16   tout simplement pour dire que nous ne sommes pas d'accord avec l'argument

 17   de l'Accusation parce qu'il ne se focalise pas sur les responsabilités et

 18   les obligations du commandant. Ce qui est important à la lumière de

 19   l'article 7(3) du statut, c'est de voir si les mesures qui ont été prises

 20   ou le manquement de prendre des mesures existe et si les mesures étaient

 21   nécessaires et raisonnables. Dans certains cas les mesures disciplinaires

 22   suffisent; dans d'autres cas, il est nécessaire d'engager des poursuites au

 23   pénal. Dans certains cas, il suffit de rapporter l'affaire aux supérieurs.

 24   Je vous remercie, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Bourgon.

 26   M. BOURGON : Je vous remercie, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Il n'y a pas de questions ? Nous sommes

 28   un petit peu en avance par rapport à l'ordre du jour. Mais peut-être qu'on

Page 95

  1   pourrait faire une pause maintenant à moins que l'autre équipe souhaite

  2   commencer pendant dix minutes, mais il nous faudra faire une pause après.

  3   M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, ce serait peut-être le

  4   mieux effectivement de faire une pause maintenant.

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Nous allons faire une pause

  6   de 20 minutes.

  7   --- L'audience est suspendue à 11 heures 50.

  8   --- L'audience est reprise à 12 heures 07.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] L'audience reprend donc maintenant, et

 10   je donne la parole à la Défense de M. Kubura qui va répondre à

 11   l'Accusation.

 12   C'est à vous, Maître Dixon.

 13   M. DIXON : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 14   Mme RESIDOVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 15   Excusez-nous de notre retard.

 16   M. DIXON : [interprétation] Je ne vais pas traiter du quatrième moyen

 17   d'appel soulevé par l'Accusation parce que ça n'a pas un impact sur notre

 18   réponse ou sur nos moyens d'appel. Je vais me limiter aux moyens 2 et 3. A

 19   commencer par la destruction à Vares, et ma réponse s'articule en deux

 20   volets.

 21   En premier lieu, il n'y a pas d'erreur de droit, aucune erreur de droit n'a

 22   été mise en évidence par l'Accusation.

 23   La Chambre de première instance a dit très clairement au paragraphe 1

 24   853 du jugement que l'Accusation n'avait pas prouvé que l'intimé savait ou

 25   avait des raisons de savoir qu'il y avait eu des destructions qu'il allait

 26   avoir des destructions. La Chambre ne s'est pas limitée à la certitude ou à

 27   la connaissance. Elle a examiné les choses de manière plus avant. Elle a

 28   examiné les différents ordres et les rapports auxquels a fait référence

Page 96

  1   l'Accusation, afin de voir si on pouvait à partir de tous ces éléments de

  2   preuve arriver à la conclusion que l'intimé avait des raisons d'être au

  3   courant de ces destructions.

  4   La deuxième erreur de droit qui est mentionnée par l'Accusation n'est

  5   pas recevable non plus, selon nous. La Chambre de première instance n'a pas

  6   conclu qu'il était nécessaire de prouver que le supérieur avait la

  7   certitude que les crimes avaient été commis. La Chambre de première

  8   instance a appliqué le niveau de preuve bien établi qui est celui que la

  9   Chambre de première instance doit être certaine ou convaincue que les

 10   éléments de preuve montrent que l'accusé savait ou avait des raisons de

 11   savoir que des crimes étaient commis, c'est-à-dire la norme de la preuve

 12   au-delà de tout doute raisonnable. On trouve ceci au paragraphe 1852 du

 13   jugement.

 14   De plus, il convient d'examiner les conclusions de la Chambre de

 15   première instance dans le contexte de la totalité du jugement de première

 16   instance. Je souhaiterais vous renvoyer aux paragraphes 309 et 311 du

 17   jugement, au paragraphe 311 la Chambre note qu'elle souscrit à la thèse que

 18   si une déduction peut être faite à partir d'éléments de preuve directs ou

 19   indirects, elle doit être raisonnable et de portée limitée. En conséquence,

 20   la Chambre de première instance rejette toute discussion basée sur des

 21   suites de déduction. D'autre part, dans les cas où plusieurs déductions

 22   peuvent être formulées à partir des mêmes éléments de preuve et qui sont

 23   toutes aussi plausibles, la Chambre a estimé qu'elle ne pourrait pas

 24   retenir la plus préjudiciable aux accusés, excepté dans le cas où la

 25   déduction la plus favorable aux accusés ne pourrait être soutenue à la

 26   lumière des faits du cas d'espèce.

 27   Selon nous, la Chambre de première instance a analysé de manière tout

 28   à fait remarquable et raisonnable le niveau des preuves requises, et c'est

Page 97

  1   ce qui a été appliqué au sujet de la destruction de Vares.

  2   Maintenant j'en viens au deuxième volet de ce moyen d'appel. Il n'y a

  3   pas eu d'erreur de fait, non plus, selon nous. La Chambre de première

  4   instance a tenu compte de la totalité des éléments de preuve. L'Accusation

  5   n'a jamais avancé que la Chambre de première instance avait laissé de côté

  6   certains éléments, et elle a conclu - la Chambre de première instance - que

  7   la connaissance requise n'était pas établie au-delà de tout doute

  8   raisonnable.

  9   La Chambre, en particulier, a conclu que les ordres venant du

 10   commandement du Groupe opérationnel à destination du commandant du

 11   3e Corps le 4 novembre - et on en a parlé beaucoup ici aujourd'hui, mais je

 12   le répète encore une fois - il s'agit de pièces P445 et P676 - et d'autre

 13   part, la réponse du commandement du 3e Corps du même jour, pièce 446,

 14   s'agissant de ces pièces donc la Chambre de première instance a estimé que

 15   de prime à bord ces pièces ne permettaient pas d'établir que M. Kubura

 16   avait connaissance des destructions.

 17   Il est important de se souvenir que la Chambre de première instance

 18   ne disposait d'aucun autre élément de preuve en rapport avec ces documents,

 19   c'est-à-dire qu'aucun témoin n'a été cité à la barre pour expliquer comment

 20   il fallait interpréter ces documents, dans quel contexte il fallait les

 21   replacer, et cetera. La Chambre de première instance, au paragraphe 297 et

 22   suivants du jugement, fournit une explication -- une analyse de sa manière

 23   de percevoir ces documents.

 24   Je vais me contenter de vous donner lecture du paragraphe 297 du

 25   jugement, je cite : "De manière évidente la Chambre a privilégié le contenu

 26   d'un document expliqué de manière convaincante par un témoin, par rapport à

 27   un document non versé par l'entremise d'un témoin qui est isolé, et non

 28   commenté."

Page 98

  1   Une fois encore, selon nous, la conclusion de la Chambre de première

  2   instance est tout à fait raisonnable.

  3   Selon nous, il n'existe aucun élément de preuve indiquant que le

  4   commandement du 3e Corps, et je parle toujours de ces ordres. Le

  5   commandement du 3e Corps est manifesté des préoccupations auprès de M.

  6   Kubura après avoir reçu des rapports au sujet des destructions de la part

  7   du commandement du Groupe opérationnel. La Chambre de première instance, au

  8   paragraphe 1 852, dit explicitement qu'il est possible que ces

  9   préoccupations se soient manifestées. Mais elle conclut, cependant - la

 10   Chambre de première instance - que les éléments de preuve ne permettent pas

 11   de conclure que cela a été établi au-delà de tout doute raisonnable.

 12   En d'autres termes, pour appliquer la jurisprudence à laquelle fait

 13   référence l'Accusation, la Chambre de première instance a conclu qu'il

 14   n'avait pas été établi au-delà de tout doute raisonnable que

 15   M. Kubura avait reçu des informations lui indiquant qu'il y avait des

 16   destructions ou qu'il était nécessaire pour lui de se renseigner plus

 17   avant.

 18   Selon nous, une Chambre de première instance aurait pu raisonnablement

 19   arriver à cette conclusion sur la base des éléments de preuve disponibles.

 20   On ne saurait trouver quoi que ce soit à redire au raisonnement de la

 21   Chambre de première instance à cet égard.

 22   De plus, selon nous l'Accusation se trompe lorsqu'elle dit, elle a tort

 23   lorsqu'elle dit que le simple fait qu'un commandant ait connaissance

 24   d'actes de pillage signifie automatiquement qu'il a connaissance d'autres

 25   actes. Selon nous, il y a un principe fondamental qui se manifeste ici,

 26   l'Accusation doit prouver la connaissance pour chacun des crimes mis en

 27   cause ou incriminés que ce soit pillage, traitement cruel, destruction, et

 28   cetera.

Page 99

  1   Selon nous, la Chambre -- ou l'Accusation affirme à tort que les éléments

  2   de preuve relatifs au pillage de Vares étaient les mêmes que les éléments

  3   de preuve sur lesquels s'est appuyée l'Accusation pour établir la

  4   destruction de Vares.

  5   Tout ceci vous le retrouvez détaillé aux paragraphes 13 à 15 de notre

  6   mémoire en réponse. Je souhaiterais particulièrement attirer votre

  7   attention sur la pièce P468, un ordre du 2e Bataillon de la

  8   7e Brigade, j'en ai parlé précédemment, et c'est une pièce sur laquelle la

  9   Chambre de première instance s'est fondée dans son raisonnement au sujet du

 10   pillage. C'est un document qui n'a rien à voir avec la destruction

 11   puisqu'il n'y a aucun autre document semblable qui soit figuré au dossier

 12   en rapport avec la destruction.

 13   Il y a également le document P675, vous souviendrez que c'est un document

 14   au terme desquels le commandant de la 7e Brigade devait prendre des

 15   mesures, et tout ce qu'on dit c'est qu'il faut empêcher l'appropriation de

 16   biens. Il n'est nullement question de destruction. Je pense que la Chambre

 17   de première instance pouvait raisonnablement s'appuyer sur cette pièce pour

 18   ce qui était de sa détermination de la connaissance de M. Kubura.

 19   Enfin, aucune conclusion n'a été rendue au sujet de la destruction d'Ovnak

 20   en juin 1993. M. Kubura a été acquitté pour avoir manqué à son obligation

 21   d'empêcher ou de punir la destruction de la zone d'Ovnak. Chef d'accusation

 22   numéro 5. D'ailleurs, il faut savoir que l'Accusation n'a pas interjeté

 23   appel de cette décision de la Chambre de première instance. On ne peut pas

 24   dire qu'il y a eu une série d'actes systématiques, un système qui est

 25   commencé à ce moment-là et qui est continué à Vares.

 26   Enfin, sur les faits, l'Accusation a attiré votre attention sur la pièce

 27   que je viens de mentionner, la pièce P675, au terme de laquelle l'ordre est

 28   donné de mettre un terme à tous les actes non autorisés.

Page 100

  1   Selon nous, on ne peut pas interpréter ce document comme se référant aux

  2   destructions. On ne peut pas le faire à première vue, on ne précise pas de

  3   quels actes illicites ou non autorisés il s'agit. On ne précise pas non

  4   plus de quelles unités il s'agit donc nous étions face à une opération où

  5   intervenaient de nombreuses brigades, de nombreuses unités, et ce qui est

  6   important c'est qu'on ne parle pas de destruction dans ce document.

  7   Une fois encore, la Chambre de première instance a très raisonnablement

  8   conclu que ce document parmi d'autres d'ailleurs, que ce document ne

  9   permettait pas de prouver la connaissance au-delà de tout doute

 10   raisonnable.

 11   En résumé, selon nous, il n'y a pas eu d'erreurs dans le raisonnement de la

 12   Chambre de première instance, erreurs occasionnant un déni de justice et

 13   nous demandons respectueusement à la Chambre d'appel de rejeter le moyen

 14   d'appel soulevé par l'Accusation.

 15   Je vais maintenant passer au troisième moyen d'appel, troisième moyen

 16   d'appel qui porte sur la peine.

 17   Je souhaite apporter une correction au compte rendu d'audience, page 36,

 18   ligne 3. Je n'ai pas parlé de "Kosovo." J'ai parlé de "across the

 19   threshold," donc, correction en anglais.

 20   Pour ce qui est de la peine, nous faisons valoir que la Chambre de première

 21   instance a tenu compte qu'elle le devait de tous les facteurs pertinents,

 22   et je souhaite ici présenter cinq arguments. Premièrement, tous les

 23   facteurs pertinents ont été appréciés correctement et pris en compte par la

 24   Chambre de première instance.

 25   Premièrement, il faut savoir que la situation de M. Kubura est un petit peu

 26   inhabituel puisqu'il a été uniquement déclaré coupable pour ne pas avoir

 27   empêché et/ou puni des pillages au terme de l'article 7(3) du Statut alors

 28   qu'il a été acquitté d'infractions beaucoup plus graves.

Page 101

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  

Page 102

  1   En deuxième lieu, comme ça déjà été dit, dans l'ordre du président -- dans

  2   l'ordonnance du Président du 11 avril 2006, dans la jurisprudence du

  3   Tribunal, et d'ailleurs dans les juridictions nationales aussi, les crimes

  4   commis contre les biens sont considérés comme des crimes qui sont moins

  5   graves que ceux qui visent des personnes. Paragraphe 8 de l'ordonnance du

  6   11 avril 2006 du Président.

  7   En troisième lieu, selon nous, il est assez significatif de voir que le

  8   bureau du Procureur a initialement requis dix ans d'emprisonnement contre

  9   M. Kubura pour la totalité des faits figurant à l'acte d'accusation et ceci

 10   recouvrait 30 meurtres, des actes de détention de traitement cruel, et

 11   cetera. Or, selon nous, il serait tout à fait hors de proportion pour

 12   l'Accusation d'affirmer maintenant que la peine à prononcer pour manquement

 13   à l'obligation de punir deux journées de pillages devraient être supérieure

 14   à la peine qui a, effectivement, été imposée par la Chambre de première

 15   instance surtout qu'il s'agit ici uniquement de deux déclarations de

 16   culpabilité qui ont été prononcées au titre de deux chefs d'accusation et

 17   qui concernent uniquement des crimes contres des biens ou des infractions

 18   contre des biens.

 19   Les réquisitoires de l'Accusation se trouvent au compte rendu d'audience,

 20   pages 19 108 à page 19 109.

 21   En quatrième lieu, la jurisprudence du Tribunal veut que les peines

 22   prononcées s'inscrivent dans la fourchette des peines prononcées pour des

 23   crimes semblables, pour des infractions semblables. Or, il n'existe aucune

 24   affaire qui ressemble à la nôtre, c'est-à-dire que d'autre part personne

 25   n'a été à ce jour mis en accusation devant les tribunaux de Bosnie pour

 26   crimes de guerre qui auraient uniquement trait à des biens. La peine, qui a

 27   été prononcée, est une peine faible par rapport aux autres et elle doit le

 28   rester par rapport à des peines plus élevés, plus lourdes qui ont été

Page 103

  1   prononcées, qui ont été confirmées au titre de crimes plus graves commis à

  2   l'encontre de personnes.

  3   Enfin, pour terminer, il faut considérer comme une circonstance atténuante

  4   les faits de prendre des mesures pour empêcher qu'un crime ne se poursuive.

  5   Si on constate que dès qu'une personne est avertie ou dès qu'un intéressé

  6   est averti d'un crime qui est en train d'être commis, ou prend des mesures

  7   pour y mettre un terme, ça c'est quelque chose qui doit être pris en compte

  8   et ça été pris en compte par la Chambre de première instance à très juste

  9   titre au lieu de laisser ces crimes continués.

 10   Si bien que, selon nous, il n'y a aucune erreur manifeste dans le

 11   raisonnement de la Chambre de première instance au moment de prononcer et

 12   de déterminer la peine, si bien qu'il convient de rejeter le moyen d'appel

 13   de l'Accusation qui porte sur cette question.

 14   J'en ai terminé de mon intervention.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Maître Dixon.

 16   Je vois qu'il n'y a aucunes questions parmi mes collègues. Si bien

 17   que nous allons maintenant pouvoir entendre la réplique de l'Accusation.

 18   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 19   M. WIRTH : [interprétation] Je serai très bref, Messieurs les Juges,

 20   lorsque je vais répondre au premier et second moyen d'appel.

 21   Le conseil de M. Kubura a déclaré qu'il n'y avait aucun élément qui

 22   montrait que le commandement du corps d'inquiétait manifestement au vu des

 23   destructions occasionnées à Vares, mais ce n'est pas tout à fait correct ce

 24   qu'il a dit. Nous le savons, grâce à la pièce P446, le commandement du 3e

 25   Corps a envoyé un ordre ordonnant de mettre fin aux destructions notamment.

 26   La seule chose qui ne soit pas dite, expressio verbis [phon] dans

 27   cette pièce 446 s'agissant de la teneur de l'ordre, c'est le nom des

 28   auteurs de ces faits.

Page 104

  1   On ne mentionne pas la 7e Brigade dans cette pièce. A cet égard, ce

  2   que nous faisons valoir c'est ceci, Kubura avait au moins été averti. Il

  3   avait l'obligation dès lors de se renseigner, d'aller voir si ses hommes

  4   avaient participé à ces actes de pillage, ce qui avait inquiété le

  5   commandement du 3e Corps d'armée.

  6   Deuxième élément que j'avancerais, la Défense nous dit qu'il est erroné de

  7   penser qu'un acte de pillage implique qu'on a connaissance des

  8   destructions. Ce n'est pas ce que nous disons. Ce que nous disons c'est que

  9   si un auteur sait que toute une ville a été pillée, si un accusé sait que

 10   toute une ville a été pillée, ça veut dire que quelqu'un est averti.

 11   Il a l'obligation par conséquent de voir, de savoir comment les

 12   auteurs de ces pillages s'ils sont pris ici dans beaucoup d'autres cas il y

 13   a eu pillage parce qu'on a enfoncé des portes de commerce, on a défoncé des

 14   portes pour entrer par infraction.

 15   Troisième élément, la Défense nous a dit qu'il n'y avait pas de conclusion

 16   portant sur la destruction, c'est vrai. Mais pourquoi n'y en a-t-il pas.

 17   C'est parce que la Chambre n'a pas bien fait la distinction entre les

 18   destructions effectuées par les forces croates et les destructions

 19   occasionnées par les effectifs de l'ABiH.

 20   Par conséquent, la Chambre n'a pas été capable de donner les noms des

 21   auteurs de ces faits de destruction. Paragraphe 1832.

 22   Mais à Vares, nous savons que les auteurs de ces faits de destruction

 23   étaient des membres de la 7e Brigade et c'est là la distinction qu'il

 24   aurait fallu faire.

 25   C'est ainsi que je termine. Je vous remercie. Si vous avez des

 26   questions, je suis bien entendu prêt à y réponde.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Je ne pense pas qu'il y ait des questions.

Page 105

  1   M. WIRTH : [interprétation] Mme Goy va maintenant répondre à la question de

  2   la peine.

  3   Mme GOY : [interprétation] Je vais d'abord rapidement revenir à la question

  4   soulevée par les avocats de M. Hadzihasanovic.

  5   Cette Défense nous a rappelé le contexte, la personnalité et le poste de

  6   commandement qu'avait M. Hadzihasanovic. Mais pourtant la Chambre de

  7   première instance a tenu compte de ces deux facteurs. Au paragraphe 2080,

  8   elle a tenu compte du fait qu'elle avait une [imperceptible], qu'il pouvait

  9   s'amender et se réinsérer et qu'il n'avait pas non plus de casier

 10   judiciaire et qu'il bénéficiait auparavant d'une bonne réputation. Ce que

 11   nous n'avons pas contesté. La Chambre s'est aussi appuyée sur le fait qu'il

 12   a œuvré à appliquer les règles.

 13   Pour ce qui est de la gravité au regard de l'article 7(3) aussi pour

 14   ce qui est du droit pénal en Yougoslavie, nous vous demandons de vous

 15   rapporter à nos écritures, surtout au paragraphe 2.22 et jusqu'au point

 16   2.24 de notre mémoire en réplique.

 17   S'agissant de l'appel formé contre la sentence, la peine infligée à

 18   M. Kubura, la Défense semble laisser entendre qu'il n'est pas logique que

 19   l'Accusation au moment du procès ait demandé -- requis dix ans

 20   d'emprisonnement et qu'en dépit de tous les chefs pour lesquels il a été

 21   acquitté nous disions aujourd'hui que cette peine de deux ans et demi est

 22   manifestement insuffisante. C'est comme si en fait une peine se composait

 23   d'un cumul de peine individuelle pour chacun des chefs. Mais l'article 7(C)

 24   nous dit qu'une Chambre peut imposer une peine pour chaque déclaration de

 25   culpabilité et doit dire si cette peine doit être purgée de façon

 26   consécutive ou s'il y aura comme ce cas-ci une seule peine qui va traduire,

 27   qui va refléter la totalité du comportement répréhensible.

 28   Ici, là, le pillage doit atteindre un certain degré de gravité pour

Page 106

  1   que nous en tant que Tribunal nous ayons la compétence, et la Chambre l'a

  2   d'ailleurs dit au paragraphe 55 dans le volet juridique de son jugement.

  3   Il y a les circonstances aggravantes, le côté systématique du

  4   pillage, la participation du personnel militaire, ce qui nous permet de

  5   dire que cette peine de deux ans et demi est manifestement insuffisant.

  6   Je vous remercie.

  7   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

  8   Est-ce que vous en avez ainsi terminé ?

  9   Mme GOY : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce qu'il y a des questions ? Il ne

 11   semble pas que ce soit le cas.

 12   Ceci met donc fin à l'examen de l'appel interjeté par l'Accusation.

 13   Maître Bourgon.

 14   M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président.

 15   Je voudrais simplement m'excuser pour avoir interrompu les débats et pour

 16   être arrivé en retard. Une fois de plus, je vous présente nos sincères

 17   excuses.

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous allons suspendre. L'audience

 19   reprendra demain à 8 heures 30. Nous allons à ce moment-là être saisi de

 20   l'appel interjeté par M. Hadzihasanovic.

 21   L'audience est suspendue.

 22   --- L'audience est levée à 12 heures 35 et reprendra le mercredi 5 décembre

 23   2007, à 8 heures 30.

 24  

 25  

 26  

 27  

 28