Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 7 avril 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez citer le numéro de l'affaire,

7 s'il vous plaît, Monsieur le Greffier d'audience.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, bonjour, Monsieur le Président. Il

9 s'agit de l'affaire IT-01-48-T, le Procureur contre Sefer Halilovic.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

11 Bonjour, Monsieur le Témoin.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez lire la déclaration solennelle

14 d'après le papier que vous allez recevoir de l'Huissière.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

16 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

17 LE TÉMOIN: TEMOIN G [Assermenté]

18 [Le témoin répond par l'interprète]

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez vous asseoir.

20 Je souhaite tout d'abord informer toutes les parties que cet après-midi,

21 nous aurons une audience entre 3 heures 30 et 5 heures, et non pas à 7

22 heures.

23 Oui, Madame Chana, êtes-vous prête pour l'interrogatoire principal ?

24 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Interrogatoire principal par Mme Chana :

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

2 R. Bonjour.

3 Q. Je vais vous montrer un papier par le biais de l'Huissière d'audience.

4 Est-ce que votre nom et votre date de naissance figurent sur ce papier, et

5 veuillez nous confirmer qu'il s'agit bien là de vos coordonnées ?

6 R. Oui. Ces données sont exactes.

7 Mme CHANA : [interprétation] Un instant, Monsieur le Président.

8 Apparemment, je ne reçois pas l'interprétation, je ne sais pas quel est le

9 problème. Un instant, s'il vous plaît.

10 Apparemment, cela ne marche pas.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être pourriez répéter la question

12 que vous avez posée au témoin pour tester.

13 Mme CHANA : [interprétation] Pardon, Monsieur le Président ?

14 Q. Excusez-moi, il y avait un problème technique, je pense que la chose

15 fonctionne maintenant.

16 Est-ce que vous pourriez examiner ce papier, et dire à la Chambre si

17 votre nom et votre date de naissance figurent bel et bien sur ce papier.

18 R. Oui, ces données sont exactes.

19 Q. Merci.

20 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite verser cela

21 au dossier.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le document est versé au dossier.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction de

24 l'Accusation P337 versé sous pli scellé.

25 Mme CHANA : [interprétation]

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10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana.

11 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Si vous souhaitez traiter des questions

13 liées au contexte général avec ce témoin, je pense qu'il vaut mieux passer

14 à huis clos partiel.

15 Mme CHANA : [interprétation] Oui, je viens de réaliser cela. Je ne vais

16 plus traiter du contexte général.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Très bien. Poursuivez.

18 Mme CHANA : [interprétation]

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4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense qu'il vaut mieux que l'on passe

5 à huis clos partiel.

6 Mme CHANA : [interprétation] Je suis d'accord.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] On passe à huis clos partiel.

8 Nous sommes à huis clos partiel.

9 [Audience à huis clos partiel]

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11 Page 5 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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2 [Audience publique]

3 Mme CHANA : [interprétation]

4 Q. Oui, je vous demandais quelle était la composition du Bataillon

5 indépendant de Prozor ?

6 R. Pour la plupart, le Bataillon indépendant de Prozor était constitué des

7 Bosniens de ces trois zones peuplées. Il y avait également des Bosniens qui

8 avaient fui, ou qui s'étaient réfugiés des territoires qu'on appelait

9 provisoirement occupés de Prozor. C'étaient surtout des Bosniens de Prozor

10 qui faisaient partie du Bataillon indépendant de Prozor. Il est vrai que de

11 temps en temps, des personnes tierces venaient. Je me souviens d'avoir d'un

12 volontaire bulgare. Je ne sais pas d'où il est venu; il est resté très peu

13 de temps et il a fui ensuite. Il s'agissait surtout de Bosniens de la

14 municipalité de Prozor.

15 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire de quelles localités en particulier

16 venaient ces soldats ?

17 R. C'étaient des soldats du village de Here, Kute, Scipe, Skrobucani,

18 Donja Vast, Klek, Lapsanj, la ville de Prozor, et cetera. Parmi les

19 premières zones peuplées que j'ai mentionnées, ils venaient majoritairement

20 de ces localités-là.

21 Q. Est-ce que les soldats connaissaient le terrain de leur zone de

22 responsabilité ?

23 R. Les personnes dont le bataillon a été constitué à l'époque, sauf le

24 commandant qui ne venait pas de Prozor, qui était quelqu'un de l'extérieur,

25 en ce qui concerne tous les autres, on peut dire qu'ils connaissaient

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1 parfaitement bien le terrain.

2 Q. Qu'en est-il de ceux qui vivaient dans la région ?

3 R. Je ne comprends pas votre question.

4 Q. Est-ce qu'ils connaissaient le terrain aussi, la population ? Je veux

5 dire, est-ce qu'ils connaissaient non pas seulement le terrain mais aussi

6 la population ?

7 R. Je ne comprends toujours pas la question. De quelle catégorie des gens

8 parlez-vous ? Si on parle de l'ensemble de la population, de l'ensemble des

9 gens qui faisaient partie du Bataillon indépendant de Prozor, ils venaient

10 de la municipalité de Prozor, et ils connaissaient parfaitement bien le

11 terrain.

12 Q. Oui. S'ils venaient de ce territoire, évidemment, ils connaissaient

13 également les gens qui y vivaient. Est-ce que ceci serait une affirmation

14 exacte ?

15 R. En partie, oui.

16 Q. Quelle était la réputation de ces soldats, des soldats du Bataillon

17 indépendant de Prozor ?

18 R. Je pense qu'ils étaient de bons soldats, de bons combattants, et que

19 leurs activités étaient surtout déterminées par le commandant. Ils

20 obéissaient sans réserve à ce que leur disait leur commandant.

21 Q. Qui était le commandant du Bataillon indépendant de Prozor ?

22 R. Ils étaient plusieurs, ils changeaient souvent. A l'époque dont vous

23 parlez, c'était Enver Buza. J'ai entendu dire qu'il était originaire de

24 Visoko. C'est une ville près de Sarajevo.

25 Q. Quand est-ce qu'Enver Buza a joint les rangs du Bataillon indépendant

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1 de Prozor ?

2 R. Je ne peux pas vous dire la date exacte, mais je pense que c'était à

3 peu près en mai 1993.

4 Q. Quel était l'impact de cela sur le Bataillon indépendant de Prozor

5 lorsqu'Enver Buza est devenu commandant ?

6 R. Bien sûr, nous comparions le commandant précédent à celui qui venait

7 d'arriver. Tout au début, nous étions plus que contents de son travail et

8 de la manière dont il dirigeait le bataillon par rapport au commandant

9 précédent. Il était meilleur compte tenu du fait qu'il avait amélioré le

10 système des transmissions. Puis, il a mélangé les unités qui avaient été

11 purement territoriales. Avant, il y avait une unité appelée Here, l'autre

12 appelée Kute, l'autre appelée Scipe. Il a séparé le commandement du

13 bataillon de la zone habitée, et il l'a rendu entièrement indépendant de ce

14 qu'on appelle chez nous l'influence du village.

15 A notre avis, au début, il a effectué certaines bonnes choses. Par la

16 suite, il a vu son propre rôle comme celui d'un homme qui a un pouvoir

17 illimité et qui ne doit être responsable de quoi que ce soit, devant qui

18 que ce soit. A mon avis, il violait à la fois les ordres, et il dépassait

19 les pouvoirs dont il disposait.

20 Q. Que diriez-vous au sujet de son rapport avec ses subordonnés ?

21 R. Il avait deux amis au sein du commandement du bataillon. Il acceptait

22 exclusivement leurs suggestions. Quant à tous les autres, il les rejetait.

23 Q. A quoi ressemblait votre rapport avec lui ?

24 R. Au début, c'était correct. Par la suite, très mauvais et à la fin un

25 conflit.

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1 Q. Que voulez-vous dire par un conflit ?

2 R. Je veux dire un conflit verbal. Je veux dire que nous ne pouvions plus

3 travailler au même endroit, et je demandais d'être démis de mes fonctions.

4 Il a été plus qu'heureux de m'accorder cela. J'ai été démis de mes

5 fonctions au début de l'année 1994.

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13 Q. Où était basé le Bataillon indépendant de Prozor ?

14 R. Tout d'abord, le premier siège de son commandement était dans le

15 village de Scipe. Ensuite le commandement a été muté dans un autre village,

16 dans une autre maison de ce village, puis en 1993, le commandant du

17 bataillon a été transféré à Dobro Polje, une localité qui s'appelle ainsi

18 où se trouvait une grosse cabane, une grande cabane de forêt. C'est là que

19 se trouvait le commandement du bataillon et notre centre de transmission.

20 Q. Afin de nous permettre de nous orienter par rapport à la localité

21 exacte, je souhaite vous montrer cette photographie. Il s'agit de 0299-

22 2279. Ceci apparaîtra à l'écran immédiatement.

23 En attendant, je vais peut-être profiter de l'occasion pour vous

24 rappeler que puisque vous êtes un témoin protégé, veuillez éviter de dire

25 quoi que ce soit qui pourrait vous identifier au cours de votre déposition.

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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce MFI331.

2 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

3 Q. Est-ce que vous pourriez me dire ce que représente cette photographie ?

4 R. Cette photographie montre cette cabane. En fait, c'était une structure

5 plus grande car on a détruit certaines parties après la guerre. Puis on

6 voit la route qui mène à Prozor en descendant la vallée. Puis entre cette

7 cabane et Prozor, la distance est d'environ 22 kilomètres, et dans l'autre

8 sens, la route mène vers une montagne. Cependant, si on poursuivait ce

9 chemin-là on arriverait à Fojnica, qui est une petite ville près de

10 Sarajevo.

11 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez nous dire -- marquer la

12 cabane dans laquelle se trouvait votre commandement ? Est-ce que vous

13 pouvez nous dire comment s'appelait votre poste de commandement ?

14 R. La cabane est ici.

15 Q. C'est là que se trouvait votre poste de commandement ?

16 R. Oui.

17 Q. Comment s'appelait la zone dans laquelle se trouvait ce poste de

18 commandement ? C'est Dobro Polje ?

19 R. Tout cela est Dobro Polje. Ici cela s'appelle Rizak, car un petit

20 fleuve passe par ici. On ne le voit pas ici mais il se trouve là, donc

21 c'est cela.

22 Q. Monsieur le Témoin, suivez mes instructions, s'il vous plaît pour le

23 moment. En dessinant votre cercle, est-ce que vous pourriez marquer par la

24 lettre C, le poste de commandement ou PIB et C, ce qui voudrait dire le

25 poste de commandement du Bataillon indépendant de Prozor.

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1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Un instant s'il vous plaît. Cette flèche est pointée dans quelle

3 direction ? Si vous vouliez aller à Uzdol, c'était dans cette direction-là.

4 Est-ce que vous pourriez écrire cela, Uzdol ?

5 R. C'est pareil, le bâtiment était en fait le poste de commandement,

6 l'endroit où se trouvait le commandant et le centre de transmission. C'est

7 cela --

8 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Puis-je demander

9 le versement de cette pièce au dossier ? Merci.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Il n'y a pas d'objection, Monsieur le

11 Président.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Cette pièce sera versée au dossier.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela portera la cote P331.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que la photographie marquée,

15 ainsi que l'original, seront toutes les deux versées au dossier.

16 M. LE GREFFIER : [interprétation] La photographie originale porte le numéro

17 P330 également.

18 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

19 L'original, Monsieur le Président, porte 331 et celle qui a été marquée par

20 le témoin portera le numéro 332.

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact, Madame Chana.

22 Mme CHANA : [interprétation]

23 Q. Pouvez-vous quel genre d'action militaire le Bataillon indépendant de

24 Prozor entreprenait principalement ?

25 R. Le Bataillon indépendant de Prozor entreprenait principalement des

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1 activités de combat de défense, pour défendre le territoire de Here, Scipe,

2 Kute, ainsi que les territoires d'autres régions plus petites dans cette

3 partie du territoire. Mais le bataillon faisait également des opérations de

4 reconnaissance et de sabotage. Ceci en fait le requérait d'infiltrer les

5 positions arrière de l'ennemi, pour attaquer des positions clés, ou

6 d'obtenir des éléments d'information. Ou parfois même la population civile

7 bosniaque s'était retirée de cette partie du territoire. Elle, en fait,

8 errait dans les bois et était emmenée dans notre territoire.

9 Q. Est-ce qu'ils exerçaient ou menaient leurs opérations surtout dans des

10 parties du territoire habité ou inhabité ?

11 R. Ces activités ou ces opérations étaient surtout menées en terrain

12 ouvert ou sur des champs, sauf pour quelques actions. Mais généralement,

13 comme je l'ai dit, c'était en terrain ouvert.

14 Q. Pouvez-vous nous dire si vous arrivez à vous rappeler ce qui ce passait

15 en octobre 1992 ? Pourriez-vous nous dire brièvement, dire au Président et

16 aux Juges ce qui ce passait à l'époque à Prozor ?

17 R. Au cours de la semaine qui a commencé le 27 octobre 1992, je ne sais

18 pas quelle date exacte, c'était le lundi, mais le lundi de cette semaine,

19 ce jour-là, des tensions se sont développées à Prozor parce que des unités

20 du HVO, de l'armée croate, que nous ne connaissions pas, ont encerclé

21 Prozor et toutes les routes d'accès. Sur toutes les routes d'accès à

22 Prozor, ils ont établi des points de contrôle, où les gens et les véhicules

23 qui souhaitaient passer étaient contrôlés. On pouvait sentir la tension

24 accrue jusqu'au jeudi, date à laquelle une session de la présidence de

25 Guerre avait été organisée, pour essayer d'obtenir une explication de la

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1 part des Croates sur ce qui se passait. Au cours de la dite réunion, des

2 explications ont été données, que nous avons trouvé inacceptables. Ils ont

3 dit que ceci se passait parce qu'il y avait des problèmes à Novi Travnik et

4 parce qu'il y avait des problèmes à Jajce. Nous n'arrivions pas à

5 comprendre pourquoi il était nécessaire d'encercler Prozor, à cause des

6 raisons que je viens de mentionner.

7 Deuxièmement, c'était le début de l'année scolaire 1992/1993, et c'est une

8 question qui a été soulevée, parce que les Croates ont argué que l'année

9 scolaire devait commencer selon les plans de l'éducation et de

10 l'instruction en Croatie. Le 23 octobre, ils ont émis un ultimatum et ils

11 ont demandé que le côté bosniaque accepte la manière dont la communauté

12 croate de Bosnie-Herzégovine avait organisé des choses. Il fallait accepter

13 son existence, alors que nous ne voulions pas l'accepter. C'était comme un

14 para-état. En outre, il y avait quelques types d'accords auxquels on est

15 parvenu au cours de cette réunion, un accord officiel selon lequel les

16 postes de contrôle devaient être démantelés, et les unités militaires

17 devaient être renvoyées d'où elles venaient. Tout ceci allait devenir

18 officiel au cours d'une pause à 15 heures 00 après la réunion.

19 Le président du HDZ est arrivé et il a dit : Vous êtes en train de

20 négocier, mais vous êtes en train de tuer des gens déjà. Il a quitté la

21 délégation ainsi que l'endroit où se tenait la réunion, et cinq minutes

22 après, l'artillerie était en train de tirer de manière massive sur la

23 ville.

24 C'était le 23 octobre. A environ midi le lendemain, le HVO, donc

25 l'armée croate, je ne sais pas quelle unité exactement, mais plusieurs

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1 unités de l'extérieur ont pénétré dans la ville, et une unité armée de 13

2 ou 14 chars est également entrée dans la ville. La Défense territoriale de

3 Bosnie-Herzégovine a perdu le contrôle de la ville à la suite de cette

4 opération.

5 Q. Quelle portion du territoire était occupée par le HVO en septembre

6 1993 ?

7 R. En septembre 1993, le HVO occupait peut-être 85 ou 90 % du territoire

8 de la municipalité de Prozor. Il y avait seulement une poche qui restait

9 non occupée à la partie nord-est ou orientale de la municipalité. Ce sont

10 les localités de Here, Kute et Scipe qui étaient concernées.

11 Q. Qu'est-ce qui est arrivé à la population bosniaque de Prozor, après que

12 le HVO l'ait occupée ?

13 R. La population bosniaque était rassemblée dans des centres de

14 rassemblement. On a fait des enquêtes et les gens ont été forcés à signer

15 des déclarations, déclarant que des extrémistes musulmans étaient

16 responsables de certains conflits, et cetera. A l'époque, le territoire

17 sous le contrôle du HVO était le territoire dans lequel la population

18 bosniaque avait été complètement éliminée, parce que des 7 400 Bosniaques

19 vivant dans la municipalité de Prozor en 1991, il n'y avait plus que 128

20 Bosniaques restants. Dans la municipalité de Prozor, il y en avait six qui

21 restaient encore à Duge, et la famille Delic, qui était encore dans le

22 petit hameau d'Orasac. C'était les seuls qui restaient des 7 000 personnes

23 qui vivaient auparavant, les seuls qui restaient en 1993.

24 A l'époque, nous avions une liste de 181 personnes qui avaient

25 disparu. Neuf cents soixante huit hommes en âge de porter les armes étaient

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1 dans des camps à l'époque.

2 Q. Pouvez-vous maintenant nous parler d'un incident qui a eu lieu en

3 juillet 1993, et qui a trait à certains prisonniers bosniaques ?

4 R. Pourriez-vous répéter la date, s'il vous plaît ?

5 Q. En juillet 1993, pourriez-vous nous parler d'un incident qui a eu lieu

6 en rapport avec des prisonniers bosniaques.

7 R. Dans la ville de Prozor, il y avait un centre de rassemblement dans

8 lequel se trouvaient plusieurs centaines de prisonniers. Ce centre était

9 dans le bâtiment de l'école secondaire. Le 31 juillet 1993, l'ABiH a mené

10 une action dans la zone de Crni Vrh. C'est une montagne qui se trouve au

11 nord-est de Prozor. Des membres du Bataillon indépendant de Prozor, ainsi

12 que d'autres unités ont participé à cette action, d'autres unités de

13 l'ABiH. Ce jour-là, les lignes de défense du HVO étaient pratiquement

14 détruites. Nos unités se sont avancées jusqu'au passage de Makljen, qui est

15 un poste important, une position importante à tenir, parce que la route

16 principale qui va de Mostar à Banja Luka et à Zagreb, c'est un carrefour

17 important là. Ces lignes avaient été traversées. Il y avait environ 80

18 prisonniers dans ce centre de rassemblement de l'école secondaire qui ont

19 été rassemblés et ensuite, ils ont été formés ou ils ont été mis en

20 formation de ligne, ils ont été utilisés contre l'ABiH. Deux chaînes ou

21 deux lignes dans la zone de Crni Vrh et une ligne a été utilisée vers

22 Gornji Vakuf. Une de ces lignes de prisonniers, comportant 24 Bosniaques en

23 âge de porter les armes ont été tués. Selon les déclarations des

24 survivants, ils ont été tirés dans le dos, c'est ainsi qu'ils ont été tués.

25 La seconde ligne de prisonniers est arrivée à se retrouver, à revenir de

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1 l'autre côté au cours de la même opération. J'ai parlé à ces gens, je les

2 ai vus, je leur ai parlé, aucun d'eux ne portait des chaussures, ils

3 étaient tous pieds nus. En fuyant, ils avaient perdu leurs chaussures.

4 La troisième ligne de prisonniers a été utilisée de la manière suivante :

5 un homme qui avait été emprisonné dans l'école secondaire conduisait un

6 bulldozer. Derrière lui, il y avait cette ligne, ce bouclier vivant, cette

7 ligne de prisonniers, et l'ABiH ou des membres de l'ABiH ont tiré et les

8 ont blessés. Maintenant, certains se sont enfuis. C'est comme cela que

9 l'action est arrivée à sa fin. Bien qu'un policier militaire les a menacés

10 de les tuer tous s'ils revenaient. C'est de cette manière que je me

11 souviens de l'incident le 31 juillet.

12 Il y a un autre élément important. Ce jour-là, un membre du HVO est allé au

13 village de Lapsunj qui se trouve à environ à 2 kilomètres de la ville, et

14 il a tué un bébé de 9 mois ainsi que la mère de l'enfant. Son nom est Haris

15 Pilav. C'est le nom de l'enfant, et le nom de la mère est Semsa.

16 Q. Je vous remercie, Monsieur le Témoin.

17 Juste pour clarifier les choses, quand vous parlez d'une chaîne humaine,

18 une ligne humaine, que voulez-vous dire exactement ?

19 R. Je voulais dire que ce jour-là, le HVO a utilisé un bouclier vivant

20 d'individus qui avaient été capturés au combat. Une chaîne de ces chaînes

21 humaines a été tuée entièrement. Ils ont été mis dans une fosse commune.

22 Ensuite, ils ont été retirés, amenés dans un autre village, et c'est là

23 qu'on les a trouvés. Ils n'ont pas tous été identifiés. Vingt d'entre eux

24 ont été identifiés, quatre d'entre eux n'ont pas pu être identifiés parce

25 que ce n'était pas possible.

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1 Q. Est-ce que certains de ces prisonniers bosniaques qui avaient été

2 utilisés comme boucliers vivants, est-ce qu'ils ont pu s'échapper et

3 rejoindre les rangs du Bataillon indépendant de Prozor ?

4 R. Le deuxième bouclier vivant, la deuxième chaîne humaine de prisonniers

5 qui ont survécu, la plupart d'entre eux se sont portés volontaires pour

6 rejoindre les rangs du Bataillon indépendant de Prozor.

7 Q. Pouvez-vous nous dire, s'il vous plaît, au sujet de ces soldats qui

8 avaient été utilisés comme boucliers vivants et qui rejoint les rangs du

9 Bataillon indépendant de Prozor, quel était leur état d'esprit général ?

10 R. J'ai parlé à certains d'entre eux. J'ai parlé de la tragédie qui les

11 avait frappés. Leur point de vue, leur position, néanmoins, était qu'ils

12 allaient se battre jusqu'au bout contre le HVO, parce que d'être utilisés

13 comme boucliers vivants n'était pas la seule expérience qu'ils aient vécue.

14 Certains de ces prisonniers qui avaient été rassemblés dans l'école

15 secondaire ont été emmenés dans une décharge et ont été tués, et non jamais

16 été retrouvés. La décharge est une décharge qui est constamment entre deux

17 brûlés, les déchets sont en train de brûler. Nombre de personnes ont été

18 humiliées. Les filles ont été violées. Nombre de femmes et de filles ont

19 été brûlées. Alors, c'était leur point de vue. C'était un point de vue qui

20 était partagé par la plupart d'entre nous.

21 Q. Quand vous dites "nous", il s'agit du Bataillon indépendant de Prozor,

22 n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

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3 Q. Que s'est-il passé à cette date en particulier ?

4 J'aimerais vous rappeler, Monsieur le Témoin, que comme vous avez demandé

5 d'obtenir des mesures de protection, si vous dites certaines choses très

6 précises, vous pouvez facilement être identifié. Je voudrais vous rappeler,

7 encore une fois, de ne rien dire de votre position.

8 Mme CHANA : [interprétation] Si l'on pouvait retirer ceci du compte rendu.

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Le témoin ne doit pas être en position de

10 découper des bouts de sa déposition. S'il y a des éléments de preuve qui

11 sont sensibles, alors, je crois qu'il doit avoir l'opportunité de dire tout

12 ce qu'il a à dire, de répondre de manière appropriée.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien. Nous ne sommes pas encore arrivés

14 au cours de cette audition aux parties les plus sensibles.

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord

16 avec ce que vous dites, et je ne fais aucune objection à ce que dit mon

17 éminent collègue. Si nous allons arriver à des parties sensibles ou à un

18 domaine dans lequel certaines parties seront, de sa déposition ou de son

19 témoignage sont sensibles et d'autres non, le témoin, je crois, peut

20 décider de ce qu'il a vu et ce qu'il veut dire.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, d'accord.

22 Mme CHANA : [interprétation] Je crois que je sais à quoi on fait référence.

23 L'Accusation n'a aucune intention d'élucider des éléments de preuve. Le

24 témoin a tous les droits de dire ce qu'il veut dire au sujet de questions

25 sensibles ou non. C'est le message le plus clair que je puisse donner pour

Page 19

1 ce qui est des questions sensibles.

2 M. LE JUGE LIU : Bien, nous verrons.

3 Mme CHANA : [interprétation]

4 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé ce jour-

5 là, le 5 septembre 1993 ?

6 R. J'étais au poste de commande du Bataillon indépendant de Prozor ce

7 jour-là. Je ne voyais pas, ou je ne sais pas s'il s'agit exactement du 4, 5

8 ou 6 septembre, mais je crois que c'était au tour de ces dates que

9 Halilovic s'est rendu à notre poste de commandement en compagnie d'autres

10 commandants et ils ont tenu une réunion avec notre commandant, Enver Buza.

11 Nous avons marché autour du bâtiment en attendant de voir ce qui

12 allait résulter de cette réunion qui se tenait. Le général Halilovic est

13 venu à cette occasion et au cours de cette période. Il est d'ailleurs venu

14 deux fois ou trois fois. Je me souviens qu'au cours de ces réunions, le

15 bâtiment a été bombardé par l'artillerie, ou a été touché par les obus de

16 l'artillerie. Je ne sais pas si c'est au cours de sa première visite ou au

17 cours de la seconde.

18 Q. Pouvons-nous aller un petit peu plus lentement, s'il vous plaît.

19 Pouvez-vous nous dire qui accompagnait le général Halilovic quand il est

20 venu vous rendre visite pour la première fois ? Vous avez dit autour du 5

21 environ.

22 R. Lors de cette visite, il avait son escorte avec lui. Il y avait un

23 journaliste, Sefko Hodzic. Il y avait également d'autres commandants. Je

24 crois que Hazo Hakolovic était là, le commandant de la 45e Brigade, et je

25 crois qu'il y avait certains commandants de certaines brigades. Je ne me

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1 souviens pas exactement desquelles, mais il y avait d'autres commandants.

2 Peut-être Selmo Cikotic, commandant d'un groupe opérationnel, mais je n'en

3 suis pas sûr. Je sais qu'il y avait un certain nombre de commandants qui

4 l'accompagnait.

5 Q. Est-ce que le commandant du 6e Corps d'armée était là, Salko Gusic ?

6 R. Je crois que oui. Il est également venu au cours de cette période. Je

7 ne sais pas s'il est venu au cours de la première ou de la seconde visite

8 de Halilovic, en tout cas, il est venu.

9 Q. Au cours de cette période, était-ce la première fois que vous voyiez le

10 général Halilovic ?

11 R. En personne, oui. Je l'avais vu avant à la télévision quand nous avions

12 du courant électrique en 1992, 1993. Je l'avais vu à la télévision, je

13 connaissais son visage, je l'ai reconnu immédiatement.

14 Q. Etiez-vous présent à la réunion, à cette réunion qu'il a tenue avec

15 votre commandant Enver Buza ?

16 R. Je n'étais pas présent à cette réunion. Je n'étais pas dans la pièce

17 dans laquelle s'est tenue la réunion. Par après, nous avons été appelés par

18 le commandant qui a appelé ses adjoints, et qui nous a informés sur ce qui

19 s'était dit au cours de la réunion.

20 Q. Que vous a dit votre commandant Enver Buza sur ce qui s'était passé à

21 la réunion ?

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

23 puis-je intervenir.

24 Je ne me suis pas levé jusqu'à présent, il n'y a pas d'objection à

25 entendre ce que le témoin a à dire dans cette Chambre. Je dois dire, encore

Page 21

1 une fois, que le Procureur ou l'Accusation a décidé sciemment de retirer

2 Enver Buza de la liste des témoins.

3 Je vais passer une objection à tout élément de preuve soit amené sur ce

4 qu'a dit M Buza.

5 Je devrais dire, Messieurs les Juges, Monsieur le Président, que j'ai

6 également une objection similaire sur le témoignage précédent. Monsieur le

7 Président, vous avez été à l'encontre de mon objection. Je n'ai pas d'autre

8 chose à dire pour le moment. Je veux simplement que ceci figure au compte

9 rendu d'audience. C'est une manière de politique, et nous ne voulons pas

10 ces questions soient soulevées.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, oui. Je peux dire que, je crois que

12 ce Tribunal accepte un témoignage par ouï-dire. Je vais prendre en

13 considération vos objections, et nous allons évaluer cette partie des

14 éléments de preuve.

15 Vous pouvez continuer, Madame Chana.

16 Mme CHANA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

17 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire ce qu'Enver Buza a dit après

18 la réunion avec Halilovic et son équipe ?

19 R. Il nous a dit que le moment était venu de libérer Prozor, que c'était

20 le moment pour l'Etat de nous aider d'une manière ou d'une autre. Il nous a

21 dit que tout le monde dans le voisinage nous assisterait, nous aiderait

22 pour libérer Prozor. Finalement, que le temps était venu d'aller nager dans

23 le lac de Rama qui était de l'autre côté de la municipalité. C'était le

24 genre de choses qu'il disait. Il disait que cela allait être une opération

25 à grande échelle menée par le général Halilovic, le chef d'état-major.

Page 22

1 C'était le point de vue exact qu'il soutenait à l'époque pour autant que je

2 m'en souvienne.

3 Q. Quand vous dites que le général Halilovic allait mener cette opération,

4 comment compreniez-vous cela ? Qu'est-ce que cela voulait dire ?

5 R. Je crois que cela veut dire ce que je viens de dire; que le général

6 Halilovic était, à mon avis, une personnalité d'autorité à l'époque.

7 Jusqu'à récemment, il avait été le commandant de l'ABiH, et il était

8 l'officier de grade supérieur de notre armée, le plus élevé de notre armée.

9 Il était avec nous, et il nous donnait de l'espoir. Nous espérions que tout

10 allait se dérouler de la manière dont les choses étaient prévues. Il

11 s'agissait vraiment d'une figure d'autorité pour nous.

12 Q. Quelle était la position de Halilovic au sein de l'armée telle que vous

13 l'entendiez à l'époque ?

14 R. Nous avons reçu des informations un mois ou deux auparavant - je ne me

15 souviens pas exactement - selon laquelle, un commandant d'état-major

16 général ou commandant du chef d'état-major suprême, je ne me souviens pas

17 du titre exact parce que du poste a changé. Le chef d'état-major était le

18 général Halilovic. Il est resté à ce poste.

19 Pour ce qui est des explications officielles, nous avons reçu une

20 explication selon laquelle l'état-major de l'armée allait finalement être

21 constitué, que personne n'allait être remplacé, qu'il s'agissait simplement

22 de renforcer l'organisation et d'établir une structure finale, de la faire

23 monter en puissance pour établir l'état-major général. Même sans une telle

24 explication, nous considérions Sefer Halilovic comme étant une figure

25 d'autorité.

Page 23

1 Q. Cette nouvelle selon laquelle vous deviez participer à la libération,

2 enfin de libérer Prozor, est-ce que c'était une bonne nouvelle pour vous et

3 vos soldats ?

4 R. Pour nous, c'était une bonne nouvelle. Cela nous a réjoui. Nous avons

5 accepté et soutenu cela entièrement.

6 Q. Par la suite, comment compreniez-vous le rapport entre Halilovic et

7 Delic vis-à-vis de cette restructuration de l'armée ?

8 R. Au moment de ces changements, nous ne savions rien; nous n'avions que

9 des informations officielles. Ce sont les informations dont on disposait,

10 et on les a acceptées. Par la suite, cependant, j'ai appris que ce n'était

11 pas toute la vérité; que finalement, il y avait d'autres raisons pour

12 lesquelles le commandant avait été nommé. Le but était de réduire les

13 pouvoirs du chef d'état-major. Peut-être, comme on le disait dans les

14 couloirs à l'époque, en raison du conflit entre la ligne de Sandzak et la

15 ligne des Bosniens au sein de l'ABiH. Il s'agissait de rumeurs qui n'ont

16 jamais été totalement vérifiées. On les a acceptées avec un grain de sel.

17 Je ne peux pas vous dire si c'était vrai ou pas.

18 Q. Est-ce que l'autorité de Halilovic n'a jamais été remise en question en

19 votre présence à quelque moment que ce soit ?

20 R. Non, jamais.

21 Q. Est-ce que l'on vous a dit quel devait être le but principal de cette

22 opération ?

23 R. Je suppose que le but principal pour ce qui nous concerne, nous, en ce

24 qui nous concerne nous, était de reprendre Prozor. Deuxièmement, je pense

25 qu'à l'époque, on parlait du fait que le HVO avait outrepassé les limites

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1 dans lesquelles on pouvait les supporter en tant que formation militaire en

2 Bosnie-Herzégovine.

3 Car ils ont commencé leurs attaques ce jour-là. Des ordres avaient

4 été donnés visant à désarmer l'armée et à la resubordonner au HVO. Nous

5 étions au courant de cela. Malheureusement, cette guerre est devenue

6 inévitable et les opérations qui se sont en suivies également. L'effet

7 domino avait été déclenché.

8 Q. Est-ce que vous pouvez-vous me dire si le général Halilovic est venu à

9 votre poste de commandement à un moment ultérieur. Si oui, quand ?

10 R. Il est venu peu avant l'action elle-même, et je pense qu'il est resté

11 peu de temps. A l'époque, il nous a été dit qu'il traversait cet endroit,

12 car il allait vers le village de Voljevac, dans la municipalité de Gornji

13 Vakuf. Puis, les unités qui étaient dans cette région-là appartenaient à

14 notre Bataillon indépendant; ils étaient sur notre droite. A cette époque-

15 là, les accords définitifs concernaient la manière dont cette opération

16 allait se dérouler.

17 Q. Je souhaite vous demander si vous pouvez me dire la date. Je sais que

18 beaucoup de temps s'est écoulé, mais la première réunion a eu lieu le 5

19 environ, et combien de jours plus tard, ou combien de jours est-ce que

20 Sefer Halilovic est venu à Dobro Polje ? Est-ce que c'était au bout de

21 quelques jours ? Cinq jours ? Dix jours ? Six jours ?

22 R. Environ six, sept jours après.

23 Q. Que s'est-il passé lorsqu'il est venu cette fois-ci ? Qui a-t-il

24 rencontré ?

25 R. Il a rencontré le commandant.

Page 25

1 Q. Etiez-vous là ?

2 R. Je ne me souviens pas bien des détails, plus de 11 ans se sont écoulés.

3 Je sais qu'à l'époque, au sein de notre commandement, des discussions

4 étaient en cours concernant la direction dans laquelle le Bataillon

5 indépendant de Prozor devait agir.

6 En ce qui concerne cela, je dois dire, je peux dire qu'une fois je

7 suis entré dans le bureau du commandant, c'est ce que j'ai déjà dit dans ma

8 déclaration préalable, il y a six mois je pense. C'est exact ce que j'ai

9 dit. En fait, j'avais vu un ordre d'attaque dans le cadre de cette

10 opération-là, signé par le général Sefer Halilovic. Cet ordre définissait

11 la direction de l'attaque du Bataillon indépendant de Prozor, ce qui

12 m'intéressait le plus, bien sûr. La direction était Crni Vrh, Makljen, je

13 pense. Je pense que le village d'Uzdol n'était pas mentionné dans ce

14 document, même si j'ai eu l'occasion de voir ce papier pendant très peu de

15 temps, deux ou trois minutes, pas plus. Ensuite, je suis sorti du bureau,

16 puisqu'il s'agit d'un document hautement confidentiel. En règle générale,

17 je n'aurais pas dû avoir accès à ce document.

18 Q. Pourquoi l'avez-vous examiné ?

19 R. Vous savez c'est la curiosité humaine. Je m'intéressais à la question

20 de savoir dans quelle direction notre unité devait partir. Je n'ai pas pu

21 m'empêcher de regarder cela.

22 Q. Oui. Je souhaite maintenant vous montrer un document, ensuite, je vais

23 vous poser une question. Il s'agit du document P124, il apparaîtra sur

24 votre écran.

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

Page 26

1 simplement demander s'il s'agit bien du document en date du 15 septembre,

2 c'est l'ordre en date du 15 septembre ?

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je suppose; c'est apparemment ce qui est

4 à l'écran.

5 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vais peut-être soulever quelque chose

6 tout à l'heure, mais on va voir d'abord comment cela va se passer. Nous

7 avons reçu les notes de récolement. De toute façon --

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

9 Poursuivez, Madame Chana.

10 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Q. Est-ce que vous pourriez examiner ce document et nous dire tout d'abord

12 si vous le reconnaissez. Tout d'abord, dites-nous de quel type de document

13 il s'agit ?

14 R. Ici c'est un ordre.

15 Q. Donné par qui ?

16 R. C'est écrit en haut à gauche, d'après le document on peut voir. Puis

17 deuxièmement, vous savez 12 ans se sont écoulés, peut-être même 13, je ne

18 sais plus. Je ne peux pas vous dire avec exactitude si c'est bien le

19 document que j'ai vu à l'époque. Mais si ce n'est pas le document en

20 question, cela lui ressemble certainement.

21 Car je vous ai dit dans quelles circonstances j'ai vu le document. Je ne

22 suis pas sûr à 100 % d'avoir pu voir l'ensemble du document et le retenir

23 pour que je puisse m'en souvenir exactement aujourd'hui. Cela peut être

24 très bien ce document ou quelque chose qui y ressemble. J'ai compris ce

25 document comme ordre d'attaque définissant les directions de l'attaque.

Page 27

1 Q. Si vous examinez la partie intitulée tâches, est-ce que ceci reflète ce

2 que vous avez compris à l'époque par rapport à la ligne d'attaque du

3 Bataillon indépendant de Prozor ?

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Le but de

5 cette question est clair, alors que le témoin n'est pas sûr si c'était

6 vraiment le document qu'il avait vu. Je n'ai pas d'objection à ce que mon

7 éminente collègue demande à ce témoin ce qu'il avait compris, en ce qui

8 concerne les instructions données à Buza, à l'époque. Mais on ne peut pas

9 poser cette question en s'appuyant sur ce document, car le témoin a

10 clairement répondu ce qu'il pense par rapport à ce document.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le témoin n'est pas sûr à 100 %

12 concernant ce document, il n'est pas sûr si c'est le document qu'il a vu à

13 l'époque, mais il a dit néanmoins qu'il a vu un document semblable à celui-

14 ci. Je pense que le Procureur a le droit de continuer à poser ce genre de

15 questions. Tout d'abord nous verrons le contenu de ce document, ensuite,

16 nous allons voir quel poids nous allons y accorder.

17 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez examiner la partie

19 concernant les tâches, et dire s'il s'agissait là de la ligne de l'attaque

20 que vous avez compris, lorsque vous avez examiné le document à l'époque,

21 concernant les attaques du Bataillon indépendant de Prozor ?

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

23 Excusez-moi d'interrompre, Monsieur le Témoin, mais j'ai une

24 objection juridique.

25 Si l'on examine la question qui vient d'être posée, il est dit :

Page 28

1 "Est-ce que c'est ce que vous avez compris après avoir vu le document à

2 l'époque ?"

3 Cependant, le témoin a justement dit qu'il n'est pas sûr. Le témoin

4 justement n'a pas dit cela. Je fais objection.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je pense que cette objection

6 est bien fondée.

7 Mme CHANA : [interprétation] Simplement, je demande au témoin de

8 clarifier cela.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que le témoin a dit qu'il n'est

10 pas sûr s'il a vu ce document à l'époque.

11 Mme CHANA : [interprétation] Tout à fait. Voyons, si je pose la question

12 suivante au témoin :

13 Q. A l'époque où vous avez dit que vous avez examiné ce document, et vous

14 avez dit que c'était un ordre de combat du général Halilovic, vous vouliez

15 savoir quelle était la ligne de l'attaque, n'est-ce pas ? C'est cela que

16 vous avez dit ?

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Ceci contient plusieurs suppositions et

18 plusieurs objections d'ailleurs.

19 Je ne fais pas objection à ce que l'on pose des questions au témoin

20 concernant le document qu'il a vu à l'époque, mais il ne faut pas

21 introduire les termes comme l'ordre de combat dans la question. Il faut

22 demander au témoin ce qu'il a vu dans ce document, et cetera. Je fais

23 objection à ce que l'on insère ce genre de terme dans les questions.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, est-ce que vous pourriez

25 procéder pas à pas ?

Page 29

1 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

2 Q. Lorsque vous dites que vous avez vu le document dans le bureau d'Enver

3 Buza, est-ce que vous pouvez nous dire de quel type de document il

4 s'agissait ? Veuillez ne pas examiner le document devant vous. Quelle était

5 la nature de ce document ?

6 R. Je vous ai déjà dit que j'ai vu ce document très rapidement. Je ne peux

7 pas dire quelle était sa nature dans son ensemble. Je cherchais simplement

8 à voir où devait partir le Bataillon indépendant de Prozor. Tout le reste

9 ne m'importait pas beaucoup. D'après ce document, j'ai compris que le

10 Bataillon indépendant de Prozor devait prendre la direction de

11 Crni Vrh-Makljen, et lorsque j'ai trouvé cela, j'ai arrêté de lire le

12 document.

13 Q. Veuillez clarifier cela pour la Chambre et moi. Lorsque vous dites que

14 cela vous intéressait de voir, je souhaite que l'on soit tout à fait précis

15 pour éviter des objections. Lorsque vous dites que le bataillon devait

16 prendre la direction, en anglais "move down," est-ce que vous pouvez

17 clarifier cela, définir ce terme ?

18 R. Partir où ? Je ne comprends pas comment définir cela ?

19 Q. Vous avez dit, Monsieur le Témoin, "prendre la direction," en anglais

20 "move down," en parlant du Bataillon de Prozor. Nous souhaitons simplement

21 comprendre ce que vous vouliez dire par ce terme.

22 R. Lorsque je parlais du fait qu'il allait prendre cette direction,

23 simplement je souhaitais dire que le Bataillon indépendant de Prozor allait

24 effectuer une attaque dans la direction que je citais, et que le

25 commandement supérieur allait déterminer qui allait être à gauche et à

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1 droite par rapport à eux. Lorsque l'on parle du "déplacement de ce

2 bataillon," nous parlons du déplacement lors des combats, et on a fait

3 référence à la direction que les troupes devaient prendre dans le cadre de

4 cette action.

5 Q. Ceci se réfère à l'opération militaire ?

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection encore une fois; cette fois-ci

7 une question directrice a été posée.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le témoin a dit que lorsque l'on parle du

9 fait de se déplacer, on parle d'un déplacement lors d'un combat.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, je --

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ceci implique une opération militaire.

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Bien sûr.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que cette question n'était pas

14 directrice.

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Ce qui me préoccupe, c'est le terme

16 "opération" compte tenu du fait bien sûr ceci n'a pas été dit directement

17 par ce témoin. Action militaire, cela ne me pose pas de problèmes. Je ne

18 suggère pas qu'ils allaient pique-niquer là-bas, mais je fais objection au

19 terme "opération." C'est le terme "opération," et peut-être ce terme

20 n'était pas crucial du point de vue de mon éminente collègue.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Pour le moment, je ne vois pas vraiment

22 une différente entre une action et une opération.

23 Mais Madame Chana, veuillez si possible employer le terme action plutôt

24 qu'opération.

25 Mme CHANA : [interprétation] Oui. Le témoin a déjà dit qu'il y avait

Page 31

1 un plan de défense visant à libérer Prozor, et moi j'appelle cela une

2 opération. Je n'essaie pas de lui donner un nom, mais je dis que c'est une

3 opération militaire.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] C'est une caractérisation militaire ou

5 juridique de cet acte. A ce stade, vous pouvez employer un terme plus

6 neutre.

7 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

8 Q. Lorsque vous avez examiné ce document afin de voir quelle était la

9 ligne de combat de votre unité, est-ce qu'il y avait d'autres unités aussi

10 ou est-ce qu'on faisait référence seulement à votre unité dans cet ordre

11 que vous avez vu sur le bureau d'Enver Buza ?

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Je fais objection à ce terme "ordre". Le

13 témoin a dit qu'il n'était pas sûr quant à la nature du document. Je ne

14 souhaite pas que l'on insère ce genre de suppositions dans des questions.

15 Je fais objection à l'emploi du terme "ordre."

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous allons voir ce document, traiter du

17 document. Madame Chana, vous devez tout d'abord établir s'il s'agit bel et

18 bien d'un ordre ou pas.

19 Mme CHANA : [interprétation] Le témoin a dit préalablement, et là je cite

20 ce qu'il a dit : "Cet ordre a été signé par Sefer Halilovic," cet ordre

21 qu'il a vu. Il a dit le mot "ordre." Je ne souhaite pas rendre le témoin

22 perplexe en évitant ce terme.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je comprends, mais je veux dire que le

24 témoin faisait référence au document qu'il a vu à l'époque. Maintenant nous

25 sommes en train de traiter du document que nous avons devant nous, document

Page 32

1 214.

2 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous devons tout d'abord établir si le

4 document 214 est un ordre ou pas, d'après le témoin.

5 Mme CHANA : [interprétation] Oui, merci.

6 Q. Vous pouvez examiner maintenant le document qui est à l'écran devant

7 vous. Comment le caractériseriez-vous, compte tenu de vos connaissances des

8 affaires militaires ? Si vous examinez le début, est-ce qu'il est écrit :

9 "numéro d'ordre" ?

10 R. Oui, c'est écrit.

11 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire de quoi il s'agit, pour que la Chambre

12 puisse comprendre totalement comment est-ce que vous caractériseriez ce

13 document, le document qui apparaît à l'écran ?

14 R. Je pense que tout est écrit dans le document. Il m'est difficile de

15 caractériser de mon côté ce document.

16 Q. Peu importe si ceci est superflu ou pas, mais veuillez faire un

17 commentaire sur cela Monsieur le Témoin, s'il vous plaît.

18 R. D'après ce document on voit qu'en haut à gauche, nous voyons que c'est

19 un document émanant de l'état-major principal du commandement Suprême, créé

20 à Voljevac le 15 septembre 1993. Il s'agit de certaines directions

21 tactiques, d'après ce que l'on voit dans le deuxième paragraphe de ce

22 document. Ceci se réfère aux unités, le Bataillon indépendant de Prozor, le

23 Bataillon de Sutjeska, certaines parties de la 45e Brigade. Vous pouvez

24 voir tout cela.

25 Q. Est-ce un document intitulé "ordre numéro" ? Est-ce que c'est ce qui

Page 33

1 figure en haut du document ? Est-ce que vous pouvez le voir ?

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Encore une fois -- non finalement, je vais

3 d'abord entendre la réponse du témoin. Excusez-moi.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je sais d'après la pratique

5 administrative, pour ainsi dire, c'est que ce document porte une date. Je

6 ne sais pas ce que veut dire ce numéro de protocole. Il est écrit que c'est

7 un ordre. Cet ordre contient tous les éléments concernant les éléments

8 pertinents.

9 Mme CHANA : [interprétation]

10 Q. Lorsque vous dites "les éléments pertinent", c'est quoi, Monsieur le

11 Témoin. Est-ce qu'il s'agit d'un ordre de combat ?

12 R. Est-ce que je peux prendre un peu plus de temps; deux minutes pour bien

13 examiner le document ?

14 Q. Oui, bien sûr. Prenez votre temps.

15 Mme CHANA : [interprétation] Cela dit, peut-être nous pourrions faire une

16 pause en ce moment pour permettre au témoin de lire cela pendant la pause.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Y a-t-il des objections, Maître

18 Morrissey ?

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une objection

20 que je vais soulever tout à l'heure. Si le Procureur souhaite poursuivre de

21 cette manière, elle peut faire comme elle le souhaite. Je n'ai pas

22 d'objection à ce que l'on montre toutes sortes de documents au témoin et

23 qu'on lui permette de bien les lire pour qu'il puisse répondre en

24 connaissance de cause.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Nous allons faire une pause, et nous

Page 34

1 allons reprendre notre travail à 11 heures pile.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 26.

3 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, veuillez poursuivre.

5 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, merci.

6 Q. Avant la pause, nous examinions le document P124. Je crois que vous

7 avez la dernière version devant vous pour que vous puissiez l'examiner

8 pendant la pause. Monsieur le Témoin, avez-vous eu l'occasion de

9 l'examiner ?

10 R. Oui. J'ai regardé le document. Je vous remercie de m'avoir donné le

11 temps de la pause pour l'examiner.

12 Q. Qu'en avez-vous pensé pendant que vous l'avez-vous lu ?

13 R. Quand on compare ce document entre la correspondance habituelle entre

14 les hauts niveaux de commandement et les commandants inférieurs de l'ABiH,

15 il y a une certaine différence, une différence, par exemple, d'un exemple

16 traditionnel d'un ordre donné qui est donné à un commandant subordonné. Je

17 peux dire qu'un ordre issu de l'ABiH ne contenait pas de référence à la

18 personne à qui elle est adressée. D'ailleurs, on ne dit pas qu'il s'agit

19 d'un "ordre"; on dit simplement : "Par la présente, j'ordonne." Quand ce

20 terme est utilisé dans notre langue, il a une force beaucoup plus forte.

21 C'est obligatoire. Quand on compare ceci à des types d'ordres standard qui

22 sont émis, voici les différences que je peux remarquer. Ce document

23 contient tous les autres éléments, par exemple, dans le coin inférieur

24 gauche, on cite le destinataire. C'est adressé à la personne qui est

25 concernée par cet ordre. Ce document contient tous les éléments pertinents.

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1 Q. Je voudrais retourner maintenant à l'occasion à laquelle vous avez vu

2 Enver Buza pour la première fois, quand vous êtes entré dans son bureau,

3 quand vous avez vu un document sur son bureau. Vous étiez curieux,

4 curiosité humaine. Vous vouliez simplement voir quel était l'endroit que le

5 Bataillon indépendant de Prozor allait attaquer.

6 Qu'est-ce qui vous a fait remarquer ce document d'abord sur le bureau

7 de M. Enver Buza, et voir que ce document -- qu'est-ce qui vous a indiqué

8 que ce document allait vous donner cette information ? De quoi

9 s'agissait-il ?

10 R. Il y avait beaucoup de rumeurs sur ce qui allait se produire au cours

11 de cette période de temps. On s'attendait à ce qu'un ordre arrive. Un ordre

12 donné par quelqu'un. On attendait des instructions. Nous nous attendions à

13 ce que quelque chose arrive, on s'attendait à ce que tout cela arrive. Je

14 ne sais pas comment ce document est arrivé sur le bureau. Si quelqu'un l'a

15 délivré en personne ou s'il a été transmis par le système de communication

16 que nous avions également. Cet équipement était d'ailleurs assez fiable et

17 bien protégé. Comme je l'ai dit, je ne sais pas si ce document avait été

18 délivré en personne, ou s'il avait été transmis par le système de

19 communication que nous avions à l'époque.

20 Quand j'ai vu ce document sur le bureau, je savais de quoi il s'agissait.

21 J'ai su immédiatement de quoi il s'agissait. Je l'ai lu et j'ai essayé de

22 voir si le bataillon de Prozor allait être engagé dans une action. A vrai

23 dire, dans cette première partie du document, il y a certains axes

24 tactiques indiqués mais qui sont en fait mentionnés plus bas, je n'ai peut-

25 être pas tout vu le document à ce moment-là, parce que tout ce qui

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1 m'intéressait c'était ce qui concernait le bataillon de Prozor. Je ne peux

2 pas dire avec certitude que ceci est le document que j'ai vu. Il y a une

3 foule de détails dont je ne me souviens pas non plus.

4 Q. Pour ce qui est du Bataillon indépendant de Prozor et de sa tâche dans

5 cette offensive, s'agit-il de la même chose, de la même tâche que vous avez

6 vue décrite dans ce document, que celle que vous voyez sur le document qui

7 vous a été montré dans le prétoire. Est-ce la même tâche que vous avez

8 observée dans l'un et l'autre ?

9 R. Je vais seulement vous parler de la manière que j'ai compris la tâche,

10 telle que je l'ai lue dans le document, par rapport à ce qui a transpiré

11 par la suite. Je ne peux pas comparer ce document avec l'autre, avec

12 l'autre document. A cette époque, certaines alternatives, d'autres

13 possibilités étaient discutées, telles que la possibilité de changer l'axe

14 que le bataillon indépendant de Prozor allait utiliser pour arriver à

15 pénétrer la ligne. Toutes les tactiques étaient discutées par notre

16 commandement, mais la décision finale autour de l'armée était toujours

17 prise par le commandant.

18 Q. Quand vous avez examiné le document à l'époque, quel était,

19 qu'avez-vous compris sur la direction qu'allait prendre l'unité ?

20 R. A la lecture de ce document, je pensais que tout le bataillon entier de

21 Prozor allait suivre l'axe de Crni Vrh-Makljen. Je crois que c'était l'axe

22 de l'attaque à venir. C'est une chaîne montagneuse qui se trouve au nord-

23 est et au nord de la ville de Prozor.

24 Q. Est-ce que cela correspond avec ce que vous voyez sur ce document ici ?

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, ceci

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1 n'est pas permissible. Il ne s'agit pas de savoir si le témoin peut dire

2 oui ou non si cela correspond, mais il s'agit de savoir qu'ici, le Tribunal

3 fait une inférence, fait une conjecture sur ce point.

4 Je voudrais déclarer très clairement maintenant que quand je vais contre-

5 interroger le témoin sur ce document, il va avoir une opportunité de

6 considérer tous les documents. Je veux déclarer bien clairement, et je

7 donne à mon collègue l'opportunité de traiter les éléments de preuve dans

8 son interrogatoire principal.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, voulez-vous lire le

10 document et le comparer avec celui qui est présenté au témoin ?

11 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que ceci apparaît clairement aux

13 éléments de preuve.

14 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie du

15 conseil que vous me donnez, et je vais essayer d'obtenir la protection de

16 la Cour, pour ce qui est de la remarque faite par mon éminent collègue. Il

17 y a quelque chose d'étrange qui se passe et qui n'est pas, qui reste sans

18 réponse.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vais m'expliquer si vous le voulez.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, il apparaît qu'on

22 demande au témoin de commenter sur ce document, malgré la date claire qui

23 apparaît sur ce document. Il ne peut pas dire, pour sûr, qu'il s'agit du

24 document qu'il a vu. Mais l'Accusation veut, malgré la date qui figure sur

25 le document, que le témoin fasse des conjectures sur -- s'il s'agit au

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1 moins du document qu'il a vu.

2 Mon éminente collègue ne lui a pas demandé quand était la date de l'attaque

3 menée sur Uzdol.

4 Maintenant, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne veux pas

5 faire une objection devant le témoin, mais, Messieurs les Juges, vous avez

6 vu nombre de documents amenés dans le prétoire. Ce document était un

7 document très semblable à celui qui a été présenté au témoin. Cela pourrait

8 aurait pu même un avant-projet de ce document. Or, il s'agit d'un autre

9 document émis par Vehbija Karic, mais il porte la signature de Halilovic en

10 bas. En fait, cela a été versé au dossier comme une pièce différente, mais

11 il porte la même date.

12 Il y a d'ailleurs d'autres ordres que je vais présenter au témoin moi-même,

13 concernant des ordres de combat, et cetera, autres pièces qui ont été

14 versées au dossier. Je ne sais pas si ces pièces ont déjà été présentées au

15 témoin. Mais je voudrais vous prévenir, encore une fois. Le témoin est ici

16 présent, je ne veux pas rentrer dans les détails de la critique que je veux

17 formuler, mais cela clarifie peut-être ce que je veux dire, quand je dis

18 qu'il y a quelque chose d'irrégulier. C'est ce que j'explique.

19 Voulez-vous que je poursuive ici avec le témoin ou pas ?

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Non, je crois que j'ai compris votre

21 position, je l'ai entendue et je crois que vous allez avoir toute latitude

22 pour contre-examiner le témoin sur ces documents.

23 Madame Chana, peut-être voulez-vous expliquer la pertinence de ce document

24 vis-à-vis de notre affaire, par rapport à ce qui s'est passé à Uzdol ?

25 Donc, à partir de la date de ce document. Ce document a été émis après ce

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1 qui s'est passé à Uzdol. Est-ce que correct ?

2 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est la date

3 supposée, mais il va être amené comme élément de preuve, Monsieur le

4 Président, que ceci n'est pas la date exacte.

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Vous devez présenter les éléments de

6 preuve.

7 Mme CHANA : [interprétation] Pas nécessairement avec le témoin.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Mais au moins à ce moment-ci, vous devez

9 établir une certaine pertinence.

10 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vais

11 certainement demander au témoin, je vais questionner le témoin sur la date,

12 et nous verrons à partir de ce qu'il dit, mais je crois encore que les mots

13 utilisés par mon éminent collègue sont un petit peu malheureux.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je comprends.

15 Mme CHANA : [interprétation]

16 Q. Monsieur le Témoin, ce document que vous voyez apparaître à l'écran, il

17 s'agit de la pièce P124. Quelle est la date qui figure sur ce document ?

18 R. Je ne vois pas la date à l'écran mais j'ai le document, un exemplaire

19 papier devant moi, et la date qui y figure est le 15 septembre 1993.

20 Q. Pouvez-vous nous dire quand s'est produite la première attaque ? La

21 date, pour le moment. Nous sommes en train d'essayer d'établir les

22 différentes dates, pour le moment.

23 R. L'attaque menée sur Uzdol a eu lieu le matin du 14 septembre.

24 Q. Ayant dit cela et après avoir examiné le document, diriez-vous que ceci

25 est la date exacte ?

Page 40

1 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

2 comment est-ce que le témoin pourrait répondre à cette question ? Le témoin

3 a dit qu'il ne sait pas si ce document qui lui est présenté, s'il s'agit du

4 document qu'il avait vu auparavant ou pas. Alors, si on lui demande s'il

5 s'agit de la date exacte sur le document, à mon avis on lui demande de

6 deviner quelque chose qu'il ne sait pas.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le témoin a certifié qu'il a vu un

8 document semblable à celui-ci. Je crois que le témoin était quelque part

9 dans le bataillon et que cela s'est passé avant la date, et que le

10 bataillon a pris part dans l'opération ou l'action.

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, bien sûr.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense qu'alors le témoin peut nous

13 donner son opinion sur cet événement, et nous allons voir jusqu'où on peut

14 aller.

15 M. MORRISSEY : [hors micro]

16 Mme CHANA : [interprétation]

17 Q. Monsieur le Témoin, au vu de la date qui figure sur ce document, étant

18 donné que les combats ont commencé le 13, pensez-vous qu'il s'agit de la

19 date correcte sur ce document ?

20 R. Tout ce que je puis dire, c'est que le 15 septembre, il y avait encore

21 des combats en cours. Les combats n'ont cessé que quelques jours plus tard,

22 mais les combats ont commencé le 13. Je peux confirmer cela, ce sont des

23 faits.

24 Ce document porte la date du 15 septembre, et c'est tout ce que je peux

25 dire. Je ne sais pas quoi d'autre vous attendez de moi par rapport à ces

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1 faits, puisque les faits sont établis.

2 Q. Bien merci, Monsieur le Témoin, de cette aide. Je vais passer à autre

3 chose.

4 Pouvez-vous nous dire tout ce qui c'est passé immédiatement après ? Juste

5 pour vous aider à vous remémorer les faits. Vous avez vu cet ordre d'Enver

6 Buza, qu'est-ce qui c'est passé après ?

7 R. Après cela, nous avons eu certaines discussions avez des commandants de

8 différentes unités, pour voir quels pourraient être les différents axes des

9 attaques, pour voir ce que certains officiers avaient proposé pour essayer

10 de décider quels seraient les axes les plus appropriés pour pénétrer la

11 ligne adverse. Puisque nos unités avaient déjà mené auparavant des

12 activités de combat, selon ces axes-là, et qu'elles avaient une certaine

13 expérience, et que c'était difficile pour eux de pénétrer les lignes de

14 défense les plus résistantes du HVO qui étaient là, il y a eu des

15 tentatives de renverser la situation, et je crois que le commandant a pris

16 la décision finale. Je ne sais pas à qui il allait soumettre cette

17 proposition pour la faire accepter et la faire adopter par la suite.

18 Il y a eu d'autres accords dont je ne me souviens pas exactement du

19 contenu, mais je sais que le plan final d'action, nous en avons eu

20 connaissance, mais pas avant le 12 septembre. C'est à cette date-là que

21 nous avons eu connaissance de l'axe de l'attaque menée, donc la veille.

22 Q. Maintenant, pour que les choses soient bien claires, au début nous

23 avions compris que l'action allait être menée en poursuivant l'axe de

24 Makljen et Crni Vrh; est-ce exact ? Etait-ce votre première information que

25 vous avez obtenue ?

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1 R. Oui.

2 Q. Apparemment cela a changé. L'axe a changé vers Uzdol et Gradina; est-ce

3 exact ?

4 R. Pas vraiment, parce que c'est ce qui c'est produit finalement, parce

5 que certaines de nos unités étaient engagées le long de la ligne de Crni

6 Vrh-Makljen, mais pas entièrement. C'est le résultat d'un changement.

7 Q. En définitive, quelle était votre cible d'attaque ? Quel axe suiviez-

8 vous, le Bataillon indépendant de Prozor ?

9 R. Le Bataillon indépendant de Prozor était censé apporter de l'aide le

10 long de l'axe Crni Vrh-Makljen. Elle a été envoyée pour remplir cette

11 tâche. Le second axe était celui d'Uzdol, l'objectif était de détruire les

12 forces militaires du HVO dans le village, et dans les environnements

13 immédiats. Il s'agissait de combattre les forces militaires du HVO, si je

14 dois le spécifier, qui consistaient d'un bataillon qui était dans les

15 environs, un poste de commandement qui se trouvait dans les bâtiments de

16 l'école primaire, un centre de communication, une batterie de mortiers de

17 différents calibres, des mortiers qui ont été utilisés dans différents

18 endroits. Mais il y avait une batterie entière à côté de l'école primaire.

19 Il y avait également deux chars, un à côté du bâtiment de l'école primaire,

20 et un autre ailleurs dans un autre endroit qui s'appelle Kranjcici. Cet

21 objectif ou cette cible-là a été exclu de l'objectif général au final, à la

22 toute dernière minute. C'était là les cibles, les objectifs de notre

23 attaque. Un autre objectif était de pénétrer la ligne de front du HVO, où

24 ils avaient des positions fortifiées en tranchées.

25 Q. Maintenant, pour vous aider et essayer de permettre à Messieurs les

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1 Juges de voir, je vais vous montrer deux photographies. Je vais d'abord

2 vous montrer la photographie portant le numéro 0299-2306. La photographie

3 va apparaître.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce MFI333.

5 Mme CHANA : [interprétation] Merci.

6 Q. Voyez-vous la photographie ?

7 R. Oui, je la vois.

8 Q. Pouvez-vous nous dire d'où cette photographie a été prise ? Peut-être

9 qu'on peut utiliser Here ? Auriez-vous l'obligeance d'entourer Here d'un

10 cercle et d'y inscrire Here ?

11 On va vous aider dans un instant. Voilà.

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Sous le contrôle de qui était cette zone ?

14 R. Cet endroit était sous le contrôle de l'ABiH et du Bataillon

15 indépendant de Prozor.

16 Q. Pouvez-vous maintenant nous dire de quel côté se trouve Kriz, dans

17 quelle partie d'Uzdol ? Voulez-vous bien l'entourer, s'il vous plait.

18 R. Kriz se trouve ici.

19 Q. Voulez-vous bien indiquer une flèche indiquant dans quelle direction se

20 trouvait l'école, où se trouvait la base militaire, dans quelle direction à

21 partir de Kriz ?

22 R. [Le témoin s'exécute]

23 Q. Vous auriez dû suivre une ligne qui venait de Here traverser Kriz vers

24 Uzdol. Est-ce bien cela la ligne ? Je vais vous montrer une autre

25 photographie dans un instant, qui va rendre les choses plus claires. C'est

Page 44

1 juste pour orienter Messieurs les Juges.

2 Là où vous avez inscrit Here, voulez-vous bien indiquer ABiH pour que nous

3 sachions sous le contrôle de qui se trouvait cet endroit.

4 R. [Le témoin s'exécute]

5 Q. Très bien. Maintenant, auriez-vous l'obligeance de marquer Kriz, dans

6 l'autre cercle ?

7 R. [Le témoin s'exécute]

8 Q. Voulez-vous bien entourer d'un cercle la colline de Krstiste.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Voulez bien y inscrire KR. KR, c'est suffisant.

11 R. [Le témoin s'exécute]

12 Q. Sous le contrôle de qui se trouvait ce lieu-là ?

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Voulez-vous bien me dire pour les besoins du compte rendu d'audience,

15 s'il vous plaît.

16 R. Cette zone se trouvait sous le contrôle de l'ABiH. En fait, il

17 s'agissait d'une colline.

18 Q. Bien. J'aimerais que vous voyiez ceci.

19 Mme CHANA : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je

20 voudrais que cette pièce soit versée au dossier, aussi bien l'original que

21 la photographie portant les indications.

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Je n'ai pas d'objection, Monsieur le

23 Président.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien. Cette pièce sera versée au dossier.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] L'original portera la cote, pièce à

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1 conviction de l'Accusation, P333, celle qui est marquée, P334.

2 Mme CHANA : [interprétation]

3 Q. Nous allons maintenant vous montrer une photographie qui porte le

4 numéro 0299-0922. S'agit-il d'une photographie qui est prise de l'autre

5 côté ?

6 R. Je vois la même photographie à l'écran.

7 Q. Excusez-moi, voyez-vous maintenant la nouvelle photographie ?

8 R. Oui. Cette photographie est prise à partir de Here vers Uzdol.

9 Q. Voulez-vous bien y inscrire "Here", s'il vous plaît.

10 R. [Le témoin s'exécute]

11 Q. Si vous voulez bien entourer d'un cercle la colline de Krististe.

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Voulez-vous bien aussi y indiquer la colline de Gradina.

14 R. [Le témoin s'exécute]

15 Q. Sous le contrôle de qui se trouvait cette colline ?

16 R. Sous le contrôle du HVO.

17 Q. Voulez-vous bien inscrire, s'il vous plaît, là où vous avez inscrit KR,

18 cela peut être confondu avec Kriz. Voulez-vous bien indiquer un T après KR

19 pour que nous sachions qu'il ne s'agit pas de Kriz.

20 R. [Le témoin s'exécute]

21 Q. Maintenant, pouvez-vous nous dire, en y inscrivant une flèche, dans

22 quelle direction se trouvait le Bataillon indépendant de Prozor ?

23 R. [Le témoin s'exécute]

24 Q. Est-ce que vous pourriez y inscrire "BIP", s'il vous plaît ?

25 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Il vous fallait combien de kilomètres le long de cette route avant

2 d'arriver à votre poste de commandement ?

3 R. Environ 10 kilomètres.

4 Q. Là où vous avez inscrit KR, est-ce que vous pourriez y inscrire un T,

5 s'il vous plaît.

6 R. Oui, je l'ai ajouté ici.

7 Q. Non. Vous avez placé cela au mauvais endroit. Est-ce que vous pourriez

8 mettre cela à l'endroit où se trouve Krististe, KR.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Est-ce que vous pouvez effacer le T de Gradina.

11 R. Comment est-ce que l'on fait cela ?

12 Q. Peut-être, Madame l'Huissière, pourrait vous aider. Simplement

13 l'effacer. Merci.

14 Nous allons revenir à ces photos tout à l'heure. Je souhaite verser au

15 dossier ces deux photographies.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas d'objection.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Les photographies sont versées au

18 dossier.

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] L'original est la pièce à conviction de

20 l'Accusation P335, et celle qui est marquée, est la pièce à conviction de

21 l'Accusation P336.

22 Mme CHANA : [interprétation]

23 Q. Je souhaite maintenant que l'on traite de la nuit du 13 au -- du 12 au

24 13 septembre, s'il vous plaît. Qu'est-ce qui s'est passé au cours de cette

25 nuit ?

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1 R. Au cours de la nuit entre le 12 et le 13 septembre, d'après nos

2 informations, cette action a été lancée. Nous avons entendu des détonations

3 de combats violents dans la direction de

4 Crni Vrh-Makljen. Nous étions à une distance qui nous permettait d'entendre

5 le bruit des combats et des détonations. Les unités de notre bataillon ne

6 se sont pas déplacées, car le commandant personnellement - et là je parle

7 d'Enver Buza - aurait dû donner ce genre d'ordre. Il ne l'a pas fait, et il

8 a tenu l'ensemble du bataillon regroupé là-bas. Nous, nous sommes restés

9 là. Nous étions nerveux en attendant l'ordre.

10 Q. Est-ce que vous savez quelles unités ont commencé l'attaque que vous

11 avez entendue ?

12 R. Nous savons que d'après la direction dont émanaient les bruits, il

13 s'agissait des unités qui étaient dans cette direction. C'était la 317e

14 Brigade de Gornji Vakuf et les unités de la

15 45e Brigade qui étaient dans cette direction également. Nous avons reçu des

16 informations selon lesquelles les unités du Groupe opérationnel ouest

17 avaient également commencé une action dans leur propre direction, et

18 qu'elles ont eu du succès. Ensuite, elles ont été dirigées ailleurs.

19 Q. Vous n'avez pas reçu un ordre de combat vous-même. Lorsque vous avez

20 constaté cela, est-ce que vous avez demandé à Enver Buza ce qui se passait,

21 quelle était la position de tous les soldats ?

22 R. Nous n'avons rien demandé; nous ne faisions qu'attendre un ordre.

23 Q. Le 13 septembre, est-ce que quelqu'un est venu vous voir, voir votre

24 poste de commandement à Dobro Polje ?

25 R. Le général Halilovic est venu. Je pense que c'était après midi. Il

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1 était déçu et fâché de nous trouver là-bas. Il était tellement fâché et

2 déçu qu'il est entré voir notre commandant. Il criait sur lui. Il le

3 menaçait. Il lui disait que ce qu'il faisait c'était, comment dirais-je,

4 que c'était complètement idiot de ne pas entrer en action au moment où tous

5 les autres le faisaient.

6 Q. Vous étiez présent à ce moment-là. Combien d'autres personnes ont

7 assisté à cette occasion lorsque le général Halilovic a fait preuve de sa

8 colère contre Buza ?

9 R. Il y avait plusieurs personnes du commandement. Je pense qu'on était

10 cinq ou six. A ce moment-là, il avançait certains prétextes que nous, nous

11 ne comprenions pas, à savoir, il disait que nous n'avions pas eu de

12 carburant, et que c'est pour cette raison-là que le bataillon n'était pas

13 allé en action.

14 Q. Qui est "il", lorsque vous dites "il" ?

15 R. Le commandant Buza. Lui, il expliquait au général Halilovic les

16 raisons. Sa réputation avait disparu dans mes yeux car il ne s'agissait que

17 de simples prétextes. Nous savions très bien que ce n'était pas la

18 véritable raison.

19 Q. Oui, je sais que ceci s'est passé il y a quelque temps. Est-ce que vous

20 vous souvenez exactement ce que le commandant Halilovic avait dit à Buza ?

21 R. Il lui a dit qu'il allait le tuer s'il n'intégrait pas le bataillon

22 dans l'action.

23 Q. Autre chose ?

24 R. Oui, certainement, mais je ne sais pas exactement. C'est ce qui m'est

25 resté gravé dans la mémoire. Notre commandant lui répondait, lui donnait

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1 ses propres raisons, entre autres, le carburant. Je pense qu'il mentionnait

2 la nourriture aussi. Mais la nourriture on en avait; cela non plus ce

3 n'était pas une raison.

4 Q. A votre avis, quelle était la raison pour laquelle Enver Buza n'est pas

5 allé dans cette action, n'a pas envoyé son unité ?

6 R. Je pense que la raison principale était qu'il n'était absolument pas à

7 la hauteur de la situation. A ce moment-là, il était apeuré et affolé

8 compte tenu de tout ce qui se passait. Tout simplement, ce n'était pas un

9 véritable soldat en termes de son talent et ses compétences. Il a

10 complètement perdu la tête.

11 Q. Qu'a fait Halilovic ensuite ?

12 R. Après cela, il a demandé auprès du commandant de regrouper nos unités.

13 Nous avons vu la première photographie, là où nous nous sommes regroupés

14 autour de la cabane. Il a tenu un bref discours tout à fait pondéré. Je

15 peux vous dire que c'était une personne tout à fait différente par rapport

16 à celle que l'on avait vue avec le commandant, qu'il a tenu un discours de

17 cinq, six, peut-être dix minutes. Je ne me souviens pas de toutes les

18 phrases exactement, mais je peux dire ce dont je me souviens. Cela, c'est

19 le fait que tout d'abord il a dit que nous étions en retard, et que c'était

20 inadmissible que le but le plus important était de rompre le HVO et libérer

21 Prozor, et que l'on s'attendait à ce que nous nous battions pour Prozor

22 avec autant d'esprit de sacrifice que les autres. A ce moment-là, on

23 entendait déjà les bruits de combats de la direction de Crni Vrh.

24 Il a dit que l'on allait nous battre dans des zones habitées, qu'il

25 fallait adapter les combats à cette situation, et que les combats étaient

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1 beaucoup plus dangereux dans de telles situations. Puis, il a dit qu'il

2 fallait agir de manière ferme en tant que soldat et de manière courageuse

3 aussi. C'est ce qu'il répétait. Il nous a dit aussi de faire très

4 attention. C'est ce qu'il a dit.

5 Après son discours, nous avons compris la gravité de la situation.

6 Après cela, il est parti vite de cet endroit. Au bout d'une heure peut-

7 être, notre commandant lui aussi a fait venir les unités qui étaient là-

8 bas. Il a tenu lui aussi un discours très émotionnel. Il criait beaucoup.

9 Je suppose qu'il souhaitait regagner la réputation qui avait affaibli à nos

10 yeux. Je ne me souviens pas de tous les détails, mais il nous a dit à peu

11 près qu'il s'attendait à ce que l'on se baigne dans le lac de Rama suite à

12 la libération de Prozor. Il a dit que nous devions agir de manière ferme,

13 déterminée et courageuse afin d'atteindre un autre objectif, et que peut-

14 être les autres allaient nous aider également.

15 Q. Je souhaite que l'on revienne à ce discours. Tout d'abord, il vous a

16 dit qu'il y aurait des combats dans une zone habitée, que cette opération

17 militaire allait avoir lieu dans une zone habitée ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce qu'il a mentionné quoi que ce soit au sujet de la question de

20 savoir de quelle manière il fallait traiter les civils dans cette zone de

21 combat ?

22 R. Je ne me souviens pas de ces détails-là. Je ne sais pas comment parler

23 des civils, mais ce que je sais, c'est qu'à cette époque-là et dans de

24 telles conditions, peu de gens tenaient compte des civils. Même s'il avait

25 dit quoi que ce soit, je ne sais pas si ceci aurait vraiment eu un certain

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1 effet en raison de la situation dans la municipalité de Prozor que je vous

2 ai décrite dans la première partie de ma déposition.

3 Q. Pourquoi est-ce qu'il ne tenait pas compte des civils ? Qu'est-ce qu'il

4 y a dans la culture qui explique que personne ne se préoccupait des

5 civils ?

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Je pense que la première partie de la

7 question est légitime. Peut-être mon éminente collègue devrait se limiter à

8 cette partie.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec M. Morrissey.

10 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, moi-même, je trouve que

11 Me Morrissey a raison.

12 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner un peu plus de détails, est-ce que

13 vous pouvez nous dire pourquoi personne ne tenait compte des civils ?

14 R. Vous savez, il est difficile de dire si quelqu'un tenait compte des

15 civils ou pas, mais nous étions très frustrés à l'époque. Le 28 août, nous

16 avons accueilli en une journée 2 800 réfugiés, personnes qui avaient

17 expulsées et qui sont arrivées au territoire bosniaque. Cela s'est fait une

18 journée. Il s'agit d'un chiffre approximatif, mais il s'agissait au moins

19 de 2 500 personnes. Nous avions également des informations concernant ce

20 qui arrivait aux civils bosniens, là-bas.

21 Je vous l'ai déjà dit, encore aujourd'hui, il y a un grand nombre de

22 personnes disparues, je pense qu'ils sont au nombre de 56 ou 54. Je ne peux

23 pas dire dans ce prétoire quel était le chiffre exact, mais je sais que tel

24 était le cas. C'était l'ambiance qui régnait à l'époque, et l'ambiance dans

25 laquelle avant tout il était important de tenir compte, du fait que la

Page 52

1 population bosnienne allait se faire pratiquement détruire à Prozor en

2 septembre 1993.

3 D'après ce que nous pouvions voir depuis nos positions, Uzdol était

4 un village à moitié abandonné, il y avait beaucoup plus de soldats que de

5 civils là-bas, mais nous savons qu'il y avait de civils aussi, d'ailleurs

6 ceci s'est confirmé par la suite.

7 Q. Lorsque le général Halilovic a parlé des méthodes différentes qui

8 devaient être utilisées dans ce combat, comment avez-vous compris cela ?

9 R. J'ai considéré que ceci voulait dire qu'il fallait se protéger mieux,

10 qu'il fallait que l'on se souvienne de ce que l'on avait appris pendant

11 l'entraînement, au sujet des combats en zone habitée. Notamment, se

12 rappeler du fait que chaque maison pouvait être un centre de résistance

13 dans une telle situation, et que la tâche était beaucoup bien plus

14 compliquée par rapport aux tâches que l'on avait reçues auparavant.

15 Q. Est-ce que le Bataillon indépendant de Prozor - vous nous avez

16 mentionné cela déjà ce matin - est-ce qu'il était habitué au combat en zone

17 habitée ?

18 R. Non.

19 Q. Avez-vous reçu certaines instructions quant à la question de savoir

20 quelle règle il fallait suivre, lorsque vous alliez mener des combats dans

21 une zone dans laquelle les civils étaient mélangés aux soldats ?

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Jusqu'à

23 maintenant, je n'ai pas fait d'objection, car les questions portaient sur

24 le contexte général. Mais maintenant, je fais objection, car ceci est

25 pertinent par rapport à M. Halilovic. C'est-à-dire que d'après l'acte

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1 d'accusation, il aurait dû empêcher le crime à Uzdol, et je n'ai pas essayé

2 de contre-interroger les gens au sujet de cela, et je n'ai pas l'intention

3 de faire cela à ce stade. Même si je n'ai pas fait d'objection jusqu'à ce

4 stade, compte tenu du contexte général, cette question porte uniquement sur

5 l'omission d'empêcher Uzdol. Je pense que c'est une question sans

6 pertinence, compte tenu de l'acte d'accusation et j'objecte à cela.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous n'avons pas l'acte d'accusation

8 devant nous; peut-être Mme Chana pourrait nous expliquer ?

9 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai parlé de cela dans

10 mon intervention liminaire, j'ai dit pour quelle raison le fait d'avoir

11 omis d'empêcher, même si ce fait n'est pas contenu dans l'acte d'accusation

12 à l'encontre du général Halilovic, est tout à fait pertinent. Car dans

13 l'acte d'accusation on parle du fait qu'il a omis de punir. Mais je pense

14 que c'est tout à fait pertinent.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Maître Morrissey.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, si vous examinez la

17 question, il faut comprendre que cela n'a rien à voir avec les tendances

18 prétendument criminelles du Bataillon indépendant de Prozor.

19 Mais la question était de savoir si M. Halilovic a donné des

20 instructions. Mon éminente collègue peut poser toutes les questions qu'elle

21 souhaite poser concernant le bataillon, et concernant ce que Sefer

22 Halilovic a fait à ce sujet, là je n'aurais pas d'objection. Mais cette

23 question peut seulement se référer à la partie de l'acte d'accusation qui a

24 été retirée.

25 En ce qui concerne cela, je maintiens mon objection. Je pense que

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1 cette question en particulier n'est pas justifiée.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que cette partie de la

3 déposition concerne les chefs d'accusation portant sur le fait qu'il a omis

4 de punir les auteurs de crimes. Il s'agit d'une séquence d'actions qui

5 visent à prouver la thèse de l'Accusation. Il est permis de poser ces

6 questions à ce stade.

7 M. MORRISSEY : [interprétation] Comme vous le voulez, Monsieur le

8 Président.

9 Mme CHANA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, mais je pense que

11 vous devriez tenir compte des objections de la Défense, et du fait que

12 l'accusé n'est pas accusé en terme de l'acte d'accusation, pour le fait

13 d'avoir omis d'empêcher le crime qui a eu lieu à Uzdol.

14 Mme CHANA : [interprétation] Je vais suivre les instructions de la Chambre.

15 Q. Monsieur le Témoin, en fait, j'ai oublié ma question.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] Quelles instructions ont-ils reçus en terme

17 de combat dans des zones peuplées ?

18 Mme CHANA : [interprétation] Merci beaucoup à mon éminent collègue.

19 Q. Effectivement, est-ce que l'on a donné des instructions, et si oui

20 lesquelles aux soldats, en ce qui concerne la manière dont ils devaient

21 traiter les civils dans des zones habitées. Comme je l'ai dit déjà, dans un

22 théâtre de la guerre et au cours des combats à de tels endroits.

23 R. J'ai déjà dit ce que nous a dit M. Halilovic, au moment où nous nous

24 sommes alignés devant le commandement à ce moment-là, ou regroupés si vous

25 voulez. A ce moment-là, il ne nous a pas donné d'instructions précises, à

Page 55

1 mon avis, nous n'avions pas le temps pour cela. Après cela, notre

2 commandant Enver Buza, il a eu un discours lui aussi, et dans ce discours

3 il n'a pas du tout donné d'instructions quant à la question de savoir

4 comment il fallait traiter des civils, ou au moins je ne m'en souviens pas.

5 J'ai déjà dit qu'en fait nous n'avions pas d'expérience dans les combats

6 pour ce qui est du traitement des civils, mais nous avions des civils

7 croates sur notre territoire, et nous avions eu une longue expérience avec

8 eux. Ces personnes, il s'agissait de simples citoyens, et je peux dire en

9 toute liberté ici que même le commandement du Bataillon de Prozor était au

10 service de ces personnes, et pour ce qui est de la population civile au

11 cours de combats, vous savez, dans de telles activités de combat, personne

12 ne peut prévoir comment les choses risquent de se dérouler et comment il

13 fallait exactement traiter les civils. C'est ce que je peux faire en terme

14 de commentaires à cette question.

15 Q. Oui. Pour autant que vous le sachiez, est-ce que Sefer Halilovic savait

16 que dans le Bataillon indépendant de Prozor, existaient certains éléments

17 qui avaient participé à ce que vous avez mentionné tout à l'heure, à savoir

18 aux mauvais traitements infligés aux détenus. Est-ce que Sefer Halilovic le

19 savait ?

20 R. Je pense que le général Halilovic était au courant de la situation

21 générale à Prozor, et nous lui avons même écrit une lettre à ce sujet. Là,

22 je parle notamment par rapport à l'importance de Prozor et de ce territoire

23 en terme de la guerre, des résultats de la guerre, des plans stratégiques,

24 de ce que l'on pensait, des intentions de la République de la Croatie vis-

25 à-vis de la Bosnie-Herzégovine et des tentatives visant à faire en sorte

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1 que l'ensemble du territoire contre le HVO en Bosnie-Herzégovine soit

2 annexé au territoire dans la région de Kiseljak et en Bosnie centrale.

3 En ce qui concerne le rapport du HVO envers les civils, les hommes aptes à

4 combattre étaient bien connus par tout le monde en Bosnie-Herzégovine, je

5 pense. Je pense que tout le monde était informé de cela. Surtout, compte

6 tenu du fait que nous avions rendu public un grand nombre de communiqués de

7 presse, et nous avons également informé le sommet militaire et le sommet de

8 l'Etat, le pouvoir de l'Etat de Bosnie-Herzégovine de ce qui s'était passé

9 à Prozor, et nous étions déçus de la passivité de ce sommet de l'Etat par

10 rapport à Prozor. Car pendant six mois, pratiquement rien ne s'était passé,

11 personne ne s'était posé la question de savoir ce qui se passait là-bas, et

12 pourquoi les choses se déroulaient ainsi. Jusqu'en 1993, nous nous sentions

13 plutôt seuls dans notre lutte pour la Bosnie-Herzégovine dans cette région

14 là.

15 Q. Vous avez dit que vous avez écrit une lettre au général Halilovic. Est-

16 ce que vous vous souvenez de la date de cette lettre, lorsque vous avez

17 attiré son attention sur ces questions là ?

18 R. Je pense que c'était en avril à peu près ou peut-être mai 1993. Nous

19 lui avions adressé cette lettre à lui, en tant que chef de l'état-major,

20 notre état-major de la Défense territoriale, l'a écrite et je l'ai signée.

21 Q. Nous allons passer à autre chose. Lorsque vous êtes allé au combat, et

22 là je vais vous montrer une photographie qui pourra nous aider pour nous

23 expliquer de quelle manière la bataille s'est déroulée. Je me demande si

24 j'ai déjà utilisé cette photographie. Peut-être Ram me le dira, 0299-2292.

25 Est-ce que je l'ai déjà utilisée ?

Page 57

1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction de

2 l'Accusation P335.

3 Mme CHANA : [interprétation] Oui.

4 Q. Je vais vous montrer la pièce 335. Il y a une autre photographie que je

5 souhaite vous montrer, à savoir, la photographie numéro 299-2990. Je vais

6 utiliser ces deux-là. Mais tout d'abord P335.

7 Est-ce que vous pourriez examiner cette photographie ? Est-ce que

8 vous pourriez nous dire exactement, peut-être si vous pouvez faire

9 référence à cette photographie.

10 Ou êtes-vous allés ? Vous pouvez utiliser la photographie pour décrire vos

11 mouvements, ceux de votre unité.

12 R. Nos unités se sont rassemblées aux alentours de minuit, dans la nuit du

13 13 au 14 septembre. Nous nous sommes rassemblés au dessus du village de

14 Here. Sur la photographie, cela pourrait se trouver ici, sur ce point-là.

15 Q. Quand vous mentionnez un lieu, pourriez-vous l'entourer d'un cercle et

16 inscrire son nom pour que Messieurs les Juges puissent suivre votre

17 témoignage plus facilement.

18 R. Dans la nuit du 13 au 14 septembre, nous nous sommes rassemblés dans

19 cet endroit, au dessus du village de Here. Il s'agit d'une grande portion

20 de territoire ouvert, on ne le voit pas dans la photographie, mais après

21 avoir assuré les fournitures, les munitions, l'alimentation, nos troupes se

22 sont dirigées vers cette direction.

23 Q. Veuillez aller plus lentement, Monsieur le Témoin, si cela ne vous

24 dérange pas. Voulez-nous dire où se trouve Here, où vous vous êtes

25 rassemblés et l'entourer d'un cercle s'il vous plaît.

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1 L'INTERPRÈTE : Microphone s'il vous plaît.

2 Mme CHANA : [interprétation] Excusez-moi.

3 Q. Vous vous êtes rassemblés à Here, avez-vous dit ?

4 R. Nous ne nous sommes pas rassemblés dans Here. Nous nous sommes

5 rassemblés dans une zone ou dans un endroit 300 ou 400 mètres avant Here.

6 Q. Est-ce que l'on peut voir sur cette photographie l'endroit où vous vous

7 êtes rassemblés ?

8 R. Non, on ne peut pas voir cet endroit sur la photographie. A partir du

9 cercle que j'ai indiqué sur la photographie, le lieu se trouve à 200 mètres

10 dans cette direction.

11 Q. Voulez-vous essayer s'il vous plaît de garder ce que vous inscrivez à

12 l'intérieur du cercle. A partir du cercle, pouvez-vous nous dire quel est

13 le nom du lieu que vous avez entouré ?

14 R. Je ne peux pas l'indiquer sur la photographie puisque le lieu où nous

15 nous sommes rassemblés ne se trouva pas sur cette photographie. Il s'agit

16 d'une zone ouverte, un terrain complètement ouvert et plat qui s'appelle

17 Lanisce, si cela vous dit quelque chose.

18 Q. Il s'agit de la direction générale de la flèche que vous avez indiquée

19 sur la photographie.

20 Où vous êtes-vous rendus ensuite ?

21 R. Il y a une chose que je devrais mentionner. L'objectif principal

22 au cours de la première étape de notre action était d'infiltrer les rangs

23 ennemis sans nous remarquer, c'est-à-dire, notre objectif était de les

24 prendre par surprise. Je ne peux pas dire exactement où se sont dirigés

25 tous les groupes de combat, je ne peux pas vous dire comment ils ont

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1 infiltré les rangs ennemis, mais je peux vous dire que 80 % des troupes se

2 sont infiltrées en suivant cet axe que j'indique. Il s'agit de la direction

3 qu'ils ont suivie, en contrebas du village, derrière cette colline.

4 Ensuite, nous sommes arrivés ici dans cet endroit.

5 Après quoi, les unités ont infiltré les rangs ennemis en suivant

6 cette direction, la direction de l'école, alors que d'autres unités étaient

7 censées surveiller ou assurer le contact avec les unités principales qui

8 allaient mener une attaque à ce point-là.

9 Q. De quoi s'agit-il ce que vous avez encerclé dans le coin supérieur

10 gauche ? S'agit-il d'Uzdol ?

11 R. Oui, c'est Uzdol. C'est le bâtiment de l'école primaire.

12 J'aimerais également dire, ou plutôt j'aimerais vous expliquer

13 pourquoi on a suivi cette direction-là, cet axe-là. Comme je l'ai dit,

14 cette colline était sous contrôle du HVO. Elle s'appelle Gradina. Cette

15 partie s'appelle Glavica. Le HVO, les positions du HVO étaient concentrées

16 là également. C'est un lieu qui s'appelle Borak. Le HVO avait des positions

17 fortifiées là. Je peux d'ailleurs y indiquer HVO. A gauche de cette

18 colline, il y avait une colline plus élevée sous contrôle du HVO, que l'on

19 ne voit pas sur cette photographie, mais qui pourrait avoir une influence

20 considérable sur la compréhension de l'action menée. Il s'agit là de

21 positions fortifiées tenues par le HVO dans cette zone précise. Dans cette

22 zone, il y a les villages de Kranjcici, Osljani et [imperceptible].

23 L'artillerie avait été postée là. Il y avait un char ici à côté de l'école.

24 C'est de cette manière que les forces du HVO étaient déployées dans la

25 zone.

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1 Pour ce qui est du village d'Uzdol lui-même, je vais vous indiquer la

2 manière dont le village se répand. Dans la zone, il y a les premières

3 maisons ici à l'entrée du village, qui ont été abandonné en octobre 1992.

4 Dans cette zone-ci que l'on ne voit pas très clairement, il y a quelques

5 hameaux, dont l'un s'appelle Bobari. Il y a également Pribucak, ensuite il

6 y a Kriz, ensuite on a Zelenike, Rajici. Ce sont tous des hameaux.

7 Q. Voulez-vous indiquer des points pour illustrer les hameaux que vous

8 venez de citer ?

9 R. C'est difficile de faire cela car il n'y a pas assez de place sur la

10 photographie.

11 Ici, il y a le village de Bobak. Il y a le village de Bobari, comme

12 je l'ai dit. Ici, il y a le hameau de Kriz. Ici, plus bas, il y a le hameau

13 de Rajici. Ici, il y a un autre hameau encore, Zelenike. Ensuite, il y a

14 Budimi. Il y a une église là dans les environs. Tous ces hameaux se

15 trouvent avant l'école.

16 Q. Vous avez traversé tous ces hameaux avant d'atteindre l'école; c'est

17 cela, avant d'atteindre cette cible militaire; est-ce exact ? Le HVO -- je

18 veux dire Uzdol qui se trouve encerclé, voulez-vous bien l'inscrire en

19 toute lettre pour que nous ayons une idée de la direction que vous suiviez.

20 Voulez-vous bien inscrire "Uzdol", s'il vous plaît, dans le cercle.

21 R. Toute la zone indiquée ici s'appelle Uzdol. Cependant, ce n'était pas

22 seulement l'école qui représentait la cible militaire. Tout ceci que j'ai

23 indiqué ici faisait partie de la cible militaire. Cela n'aurait pas pu être

24 la seule cible militaire; cela aurait été de l'autodestruction. Vous pouvez

25 le voir ici, celui que j'indique ici, ce que j'indique ici, il s'agit de la

Page 61

1 route la plus courte.

2 Q. Monsieur le Témoin, quand vous indiquez quelque chose sur la

3 photographie, les Juges ne peuvent rien voir. Ce n'est que quand vous

4 marquez quelque chose sur la photographie que les Juges peuvent voir ce à

5 quoi vous faites référence. Voulez-vous bien continuer à marquer la

6 photographie sur l'écran pour que les Juges puissent vous suivre.

7 Si vous parlez d'une route, voulez-vous bien la marquer quand vous en

8 parlez.

9 R. Voici la route. C'est ce que je crois que j'ai dit. C'est la route ici.

10 Il y a quatre kilomètres qui séparent Here de l'école à Uzdol.

11 Q. Bien.

12 R. Au tout début de cette route, il y a le hameau de Bobari ainsi que les

13 positions fortifiées, ici exactement, tout au début de la route. Alors que

14 la route longe ses positions, il y a une maison qui, à notre avis, était

15 également un poste fortifié à côté de l'école à proximité de la route.

16 Q. Merci, Monsieur le Témoin.

17 Je vais maintenant vous montrer une autre photographie.

18 Mme CHANA : [interprétation] Je voudrais demander le versement de la

19 précédente au dossier à toutes fins utiles, bien que je crois que celle-ci

20 sera plus claire.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

22 Mme CHANA : [interprétation] Elle représente les positions du HVO en

23 général.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Cette pièce sera versée au dossier.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction de

Page 62

1 l'Accusation P337.

2 Mme CHANA : [interprétation]

3 Q. Monsieur le Témoin, maintenant, je vais vous montrer une autre

4 photographie qui est plus détaillée, qui montre une direction.

5 Quand la photographie sera affichée à l'écran, je voudrais que vous

6 expliquiez où vous êtes allés. Il s'agit de la pièce 0299-2290. Maintenant,

7 vous avez déjà indiqué sur la photographie précédente où se trouvaient les

8 unités du HVO, et vous avez déjà marqué les collines sur la photographie

9 précédente. Maintenant, sur cette photographie, si vous voulez bien marquer

10 simplement le chemin parcouru par vos unités en pointillé. Si on veut bien

11 vous assister. Pouvez-vous voir la colline de Krstiste et la marquer s'il

12 vous plaît ?

13 R. Je vois, je la vois.

14 Q. Pouvez-vous y inscrire colline de Krstiste ou tout simplement KRT ?

15 R. [Le témoin s'exécute]

16 Q. Pouvez-vous nous dire maintenant si c'est la direction que vous avez

17 suivie, vous ou votre unité, inscrire une flèche pour illustrer cette

18 direction, et une autre flèche pour indiquer la direction d'autres unités ?

19 R. Nous ne sommes pas allés là puisque c'était l'unité sous notre

20 contrôle, comme je l'ai déjà dit. Notre unité a suivi cet axe-ci.

21 Q. Veuillez bien, veuillez y inscrire une ligne pointillée.

22 R. A mon avis, certaines unités s'étaient déjà divisées ici.

23 Q. Où s'étaient-elles divisées ? C'est ce que je voudrais savoir. Je

24 voudrais savoir où votre unité s'est dirigée, et où l'autre unité s'est

25 dirigée --

Page 63

1 R. Oui.

2 Q. -- à partir de la colline ?

3 R. En direction de l'école.

4 Q. Voulez-vous marquer une ligne droite de cette direction s'il vous

5 plaît ?

6 R. Je ne peux pas indiquer une ligne, puisque je n'y suis pas allé. Je ne

7 sais pas exactement.

8 Q. Une direction générale de la direction qui a été prise par la même

9 unité. Une flèche, même courte sera suffisante, en tout cas.

10 R. Je peux simplement indiquer une flèche en direction de l'école. A

11 savoir si l'unité l'a suivi, je ne sais pas exactement. C'est la direction

12 générale.

13 Q. La direction empruntée par votre unité ou par l'autre unité ?

14 R. Par l'autre unité qui se dirigeait vers l'école. Je ne sais pas

15 exactement où se sont rendues les autres unités. Il y avait un certain

16 nombre de groupes de combats. Je ne peux que faire des spéculations. Quant

17 à la direction qu'ils ont suivie, tout ce que je sais, c'est la direction

18 que nous avons suivie.

19 Q. Bien.

20 Mme CHANA : [interprétation] J'aimerais demander le versement de cette

21 pièce au dossier.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois qu'il n'y a pas d'objection.

23 Dans ce cas, cette pièce sera versée au dossier.

24 M. LE GREFFIER : [interprétation] L'original de cette photographie porte la

25 cote P338, et celle qui est marquée, porte la cote P339.

Page 64

1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Serait-ce le bon moment de prendre une

2 pause ?

3 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Dans ce cas, nous allons nous interrompre

5 et reprendre à une heure moins le quart. Merci.

6 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

7 --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Madame Chana, veuillez poursuivre s'il

9 vous plaît.

10 Mme CHANA : [interprétation]

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 Mme CHANA : [interprétation] Excusez-moi Monsieur le Président, pouvons-

19 nous retirer ceci ?

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Parfois si le témoin répond des questions

21 concernant notre identité, nous allons l'extirper, nous allons le retirer

22 du compte rendu. Mais je crois que de la part de l'Accusation, je devrais

23 vous mettre en garde.

24 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une indication

25 ici pour essayer de me le rappeler, et j'ai eu des condamnations

Page 65

1 précédentes, bien plus que mon éminente collègue pour avoir fait des

2 erreurs comme celles-ci. Je crois que les conseils peuvent se le rappeler

3 l'un l'autre d'être prudents.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que s'il n'y pas de

5 confrontation entre les parties, c'est plus facile.

6 Vous pouvez poursuivre, Madame Chana.

7 Mme CHANA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je suis toujours

8 contente de travailler avec le Conseil de la Défense.

9 Q. Vous avez dit que vous étiez dirigés, votre groupe, par Osman Hero.

10 Était-il en communication avec qui que ce soit ?

11 R. Il était en contact direct avec le commandant Enver Buza.

12 Q. Quel était le moyen technologique utilisé pour cette communication ?

13 R. Les moyens de communication radio.

14 Q. Ensuite, quand vous êtes partis au combat, combien de temps êtes-vous

15 restés sur le terrain ?

16 R. Les unités ont commencé à infiltrer les rangs ennemis vers 2 heures du

17 matin. Cette tâche a été conclue à la levée du jour. Tout ce que je peux

18 dire, c'est que toute la vallée était en feu. La vallée était en flammes et

19 tout cette période de temps n'a semblé ne durer que quelques secondes.

20 A un certain moment, mon groupe avait réalisé sa première tâche, qui était

21 d'attaquer une position fortifiée que j'ai déjà indiquée. Ce groupe-là

22 s'est ensuite divisé, ou il a été divisé, je ne sais pas quelle est la

23 formulation exacte, mais quoi qu'il en soit, je ne sais pas où ils sont

24 allés. Comme j'étais pratiquement désarmé, j'ai contribué au retrait, j'ai

25 retiré les blessés de la ligne de front, je suis retourné au village de

Page 66

1 Here vers midi. Pendant tout le temps que le combat a duré, le HVO a

2 pilonné le village en entier, c'était des tirs d'artillerie nourris sur

3 tout le village. A mon avis, il était difficile de savoir qui tirait sur

4 qui et qui se battait contre qui.

5 Au début de l'après-midi, environ à midi ou une demi-heure plus tard, il y

6 a eu un retrait partiel, et le retrait de ces unités a continué au cours de

7 la journée. Le HVO a commencé à pilonner le village de Here aussi, et c'est

8 ainsi que se sont poursuivis les combats au cours de cette journée.

9 Q. Est-ce que vous-même vous êtes retourné à Here ?

10 R. Oui.

11 Q. Avant de poursuivre, j'ai oublié de vous demander combien il y avait de

12 soldats dans votre unité ou plutôt dans votre groupe de combat, excusez-

13 moi ?

14 R. Je ne sais pas exactement.

15 Q. Pourriez-vous nous donner un ordre de grandeur, nous donner une idée :

16 s'agissait-il de dizaines, de vingtaines, de centaines de soldats ?

17 R. Il n'y a pas pu avoir plus de dix hommes dans ce groupe, cela c'est

18 certain. Mais le nombre entier qui participait au combat était de plus de

19 120 parce que les troupes d'un bataillon de la Bosnie orientale, de la

20 Sutjeska, ont été rattachées à notre groupe, mais je ne sais pas exactement

21 combien il y en avait.

22 Q. Après être retourné à Here, avez-vous rencontré quelqu'un au sous-sol

23 ou dans une cave ?

24 R. J'étais très fatigué parce que j'avais porté un homme en montant la

25 colline, et je ne voulais pas vraiment quitter le lieu confortable que

Page 67

1 j'avais trouvé pour me reposer. Mais j'y étais forcé à cause des tirs

2 d'obus. Dans une zone récemment construite, construite avant la guerre,

3 construites en béton, je m'y suis réfugié et j'ai rencontré Zicro Suljevic

4 à ce moment-là. Je ne sais pas quel était son grade mais je lui ai parlé.

5 Quand les tirs d'obus ou le pilonnage ont commencé, nous nous sommes

6 parlés, il était très étonné de l'intensité des tirs ce jour-là.

7 Q. Avez-vous eu l'occasion de voir les soldats du Bataillon indépendant de

8 Prozor après que l'offensive se soit calmée ?

9 R. Non, pas ce jour-là, mais un petit plus tard.

10 Q. Quand avez-vous croisé les soldats ?

11 R. C'est difficile de pouvoir dire exactement quand je les ai rencontrés,

12 peut-être, que certains d'entre eux, je les ai rencontrés ce jour-là et

13 peut-être que d'autres plus tard, mais je ne suis pas sûr de les avoir tous

14 rencontrés en même temps. Dès lors, c'est difficile pour moi de vous dire

15 quand je les ai croisés.

16 Q. Avez-vous entendu parler des victimes de ces opérations de combat ?

17 R. Nous avons immédiatement appris que trois ou quatre membres de l'ABiH

18 avaient été tués. Nous avons entendu dire que le côté croate avait

19 également eu des pertes parmi ses rangs, mais je n'ai entendu parler de

20 victimes civiles que par les médias, alors que j'écoutais un poste de radio

21 local de Croatie, un ou deux jours après. Pour ce qui est de l'information

22 qui nous aurait été fournie par nos soldats, je n'ai pas entendu parler de

23 quoi que ce soit à ce sujet.

24 Q. Est-ce que les soldats ont parlé de victimes, qu'elles soient civiles

25 ou militaires, et qu'avez-vous entendu dire de leur part ?

Page 68

1 R. Dans la soirée, nous avons immédiatement appris le nombre de victimes

2 qu'il y avait eues dans leurs rangs. Mis à part le fait que nous nous

3 attendions à ce que certains des hommes puissent battre en retraite, mais

4 ils n'ont pas pu le faire. Nous les avons comptés parmi nos victimes.

5 L'information que nous avons obtenue faisait état de pertes considérables

6 infligées au rang du HVO, apparemment un char avait été détruit, celui qui

7 se trouvait à côté de l'école. L'artillerie a été soit détruite, soit très

8 abîmée. Cela veut dire qu'elle a atteint les positions des mortiers.

9 Q. Avez-vous entendu quoi que ce soit par les prisonniers, quelques

10 informations sur les victimes dans l'école ?

11 R. Il n'y avait pas de prisonniers.

12 Mais il y a autre chose que je devrais mentionner. Les Bosniens qui se

13 trouvaient dans le camp à Prozor à l'époque, un jour ou deux plus tard, ont

14 été recrutés, ont été engagés pour nettoyer l'école. Et eux, ont dit qu'il

15 y avait beaucoup de sang sur le bâtiment, qu'il y avait des traces de

16 combat et beaucoup de sang sur les murs. Je ne fais référence qu'à l'école

17 maintenant. Dans d'autres parties du village, je ne sais pas s'ils ont été

18 obligés de nettoyer d'autres parties du village.

19 Q. Avez-vous entendu par les médias croates, que des civils avaient été

20 tués dans cette offensive de combat, et qu'avez-vous fait après avoir

21 entendu cette information ?

22 R. Je pourrais vous donner des informations générales sur les médias en

23 temps de guerre, et la tâche des médias en temps de guerre. Je dois

24 informer cette Chambre sur le fait qu'il est généralement communément

25 accepté, que la vérité est la première victime en temps de guerre. Il y a

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1 très peu de gens qui croient ce qu'ils entendent par les médias. C'était là

2 la situation plus ou moins à l'encontre de la station de radio. Nous avions

3 une station de radio sur laquelle il y avait un porte-parole du HVO ou qui

4 agissait en tant que porte-parole. L'autre point de vue, quand on entendait

5 l'information à la radio, on ne la croyait pas nécessairement. Avec le

6 passage du temps, je crois qu'un petit peu de temps après, il y avait

7 certaines images qui sont passées à la télévision, mais il n'était pas

8 possible pour nous de regarder la télévision sur le terrain, parce qu'il

9 n'y avait pas d'électricité. Je n'ai vu aucune image à l'époque, mais plus

10 tard avec le passage du temps, nous avons commencé à soupçonner le fait

11 qu'il y avait des victimes civiles, qu'il y avait eu des victimes civiles

12 et que c'était de plus en plus probable.

13 Q. A quelle date était-ce, ce que vous avez entendu à la radio, votre

14 station de radio de Prozor, qu'il y avait eu les victimes civiles. Pouvez-

15 vous essayer de vous souvenir de la date, s'il vous plaît ?

16 R. C'était probablement un jour après le retrait. Mais il est très

17 difficile de répondre à cette question, avec un tant soit peu de précision.

18 Le temps semblait passer très vite, peut-être au bout de deux jours, un ou

19 deux jours, mais certainement pas trois jours.

20 Q. D'après ce que vous dites, la date serait le 15 ou le 16 septembre

21 1993 ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous avez dit que des images ont été diffusées à la télévision ce jour-

24 là, même si vous ne les avez pas vues vous-même ?

25 R. J'ai déjà dit que je ne les ai pas vues, et je ne sais pas si les

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1 images ont été diffusées ce jour-là ou plus tard. Je pense que ce jour-là,

2 ceci n'aurait pas été possible.

3 Q. Est-ce que vous avez parlé de cela à votre commandant, Enver Buza ?

4 R. Non, pas avec le commandant. Je n'ai pu parler avec le commandant de

5 quoi que ce soit à cette époque-là déjà. Deuxièmement, ce genre de

6 comportement, ou je ne sais pas comment appeler cela, des violations

7 éventuelles, ceci relève du domaine de l'adjoint du commandant chargé de la

8 sécurité. Je ne considérais pas que je devrais entreprendre quelque chose

9 moi-même. Surtout, compte tenu d'un fait, à savoir que chaque opinion

10 émanant de moi, à ce moment-là déjà, était accueillie par beaucoup

11 d'intolérance de la part du commandant. Même pour ce qui est des questions

12 pour lesquelles j'étais personnellement responsable, dont j'étais en

13 charge.

14 Q. Est-ce que vous savez si une plainte a été déposée à l'encontre de

15 Buza, au sujet de cela ?

16 R. J'ai entendu dire que le général Halilovic avait porté plainte contre

17 notre commandant. Je n'ai pas vu cette plainte, elle faisait l'objet des

18 discussions, des rumeurs. Les gens disaient qu'elle portait sur son

19 comportement pendant ces jours-là, mais je ne suis pas sûr qu'elle portait

20 sur les pertes subies par des civils à Uzdol. Mais peut-être que si, car je

21 n'ai pas vu cette plainte, je ne sais pas de quoi il s'agissait. Il

22 s'agissait simplement des rumeurs qui circulaient.

23 Q. Qu'est-il arrivé à Buza, pour autant que vous le sachiez ?

24 R. Le 24 janvier 1994, l'armée régulière croate et le HVO ont lancé une

25 attaque très violente contre cette région. A ce moment-là, en une journée,

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1 32 de nos soldats sont morts et quelques civils aussi, un petit nombre. Il

2 y a eu des civils aussi.

3 Notre commandant, peu de temps avant cette action, avait limogé un

4 tiers de la formation. Il leur a permis d'être de repos même s'il avait

5 reçu des renseignements concernant les préparatifs du camp croate pour une

6 offensive. Par la suite, j'ai appris que la brigade locale du HVO, Rama

7 avait participé à cette offensive, de même que la 175e Brigade de l'armée

8 croate qui était stationnée à Prozor à l'époque. Ils sont arrivés à Prozor

9 en novembre ou décembre 1993.

10 Je pense que le commandant Buza a commis une grande erreur à ce

11 moment-là, et que ce village a tombé en raison de son erreur de

12 commandement et de contrôle. Une équipe a été constituée, chargée de

13 l'enquête relative à cela. Je pense que la personne qui était en charge de

14 cette enquête, c'était M. Dzemal Najetovic. Par la suite, il a soumis une

15 proposition afin que notre commandant soit démis de ses fonctions.

16 Effectivement, il a été démis de ses fonctions. Par la suite, j'ai entendu

17 qu'il a ensuite été promu. Il a obtenu un grade militaire encore plus

18 élevé; ce que personnellement je trouve très controversé.

19 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez si des enquêtes ont été

20 menées au sujet des morts des civils à Uzdol ?

21 R. Je ne sais pas si des enquêtes ont été menées. Je n'ai pas fait de

22 déclaration auprès de qui que ce soit. Personne ne s'est adressé à moi

23 concernant quoi que ce soit. Je ne suis pas au courant de telles activités

24 en Bosnie-Herzégovine.

25 J'ai entendu dire que le président Izetbegovic avait donné l'ordre afin

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1 qu'une enquête soit menée. Je ne sais pas qui devait être en charge de

2 l'enquête ni à qui il avait donné ces ordres; cela je ne sais pas. Ce que

3 je sais, c'est qu'on n'avait pas fait grand-chose au sujet de cela. En

4 fait, rien n'a été fait.

5 Q. Qui vous a dit que le président Izetbegovic avait demandé une enquête ?

6 R. Je ne sais pas exactement qui c'était, car c'était une information qui

7 circulait dans les médias aussi. On pouvait trouver cela dans la presse, à

8 la radio, la télévision, et cetera. Je ne peux pas vous dire un tel m'a

9 transmis cette information. Peut-être c'était le cas. Dans ce cas-là, je

10 l'ai oublié.

11 Q. Très bien, Monsieur le Témoin. Je vous remercie vivement d'avoir

12 répondu à mes questions.

13 Mme CHANA : [interprétation] C'est la fin de mon interrogatoire principal,

14 Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

16 Est-ce que vous souhaitez contre-interroger le Témoin, Maître Morrissey ?

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Contre-interrogatoire par M. Morrissey :

19 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin G, je vous remercie.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Est-ce que l'on peut placer devant le

21 témoin la pièce P298, s'il vous plaît. C'est une photographie. Merci.

22 Q. Je vais devoir m'adresser à vous en disant Témoin G pour le contre-

23 interrogatoire. Si jamais je me trompe, il faudra me corriger.

24 La photographie que vous voyez montre la région d'Uzdol en général. Elle a

25 été prise de la région au-dessus de l'école; est-ce exact ?

Page 73

1 R. Oui.

2 Q. Est-ce que la région que l'on appelle en général Uzdol était constituée

3 de plusieurs hameaux ayant leur propre nom ?

4 R. Dans ce village, des hameaux différents ont leur propre nom.

5 Q. Oui. Le nom du hameau dans lequel se trouve l'école est Cer, n'est-ce

6 pas ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Je vais vous demander maintenant d'apposer certaines annotations sur

9 cette carte. Puis, je vais vous demander d'indiquer, enfin pas la carte,

10 mais la photographie. Sur cette photographie, est-ce que vous pourriez

11 apposer un petit cercle aux endroits dans lesquels se trouvaient pour

12 autant que vous le sachiez les positions fortifiées du HVO.

13 R. Je peux dire que les positions du HVO étaient concentrées ici autour de

14 l'école. Je peux dire également que les points fortifiés du HVO se

15 trouvaient ici, ici.

16 Q. Arrêtez-vous là. Merci. Excusez-moi. Je ne souhaite pas vous

17 interrompre. Y a-t-il eu d'autres positions fortifiées que vous souhaitez

18 encercler ou est-ce que vous avez montré tout sur la photo ?

19 R. Il y en a d'autres.

20 Q. Très bien. Est-ce que vous pourriez inscrire des petits cercles bleus

21 pour indiquer ces endroits, ces positions ?

22 R. Au-dessus de ces quelques maisons ici, c'est le hameau de Bobari. Ici,

23 il y avait un point fortifié, mais je ne peux pas dire exactement si

24 c'était ici ou à 100, à 300 mètres à gauche ou à droite, car cet endroit

25 était bien caché. Cela, c'était dans ce hameau. Je pense que dans ce

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1 hameau, des soldats étaient installés également dans des maisons. Les

2 soldats ne dormaient pas seulement à l'école, mais les membres du bataillon

3 d'Uzdol - c'est ainsi que le bataillon s'appelait à l'époque - certains

4 membres dormaient dans des maisons aussi, peut-être lorsqu'ils étaient de

5 repos, lorsque ce n'était pas leur relève. En ce moment, il est difficile

6 de dire qui était dans quelle maison.

7 Q. Très bien. Parmi ces trois cercles, trois petits cercles bleus que vous

8 avez marqués, est-ce que celui qui est à gauche se trouve sur la colline

9 appelée Borak ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que vous pourriez inscrire le mot "Borak" à côté de ce petit

12 cercle bleu.

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Est-ce que vous pourriez inscrire le mot "Kriz" dans la zone dans

15 laquelle on peut trouver le village de Kriz. Je comprends qu'on ne peut pas

16 le voir sur cette photographie car il est derrière la colline. Est-ce que

17 vous pourriez inscrire le mot "Kriz" pour indiquer la zone générale dans

18 laquelle se trouve ce village.

19 R. [Le témoin s'exécute]

20 Q. Très bien. Est-ce que vous pourriez maintenant marquer le village de

21 Zelenike.

22 R. [Le témoin s'exécute]

23 Q. Le village de Rajici.

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 Q. A l'école, près de l'école, est-ce que vous pouvez écrire le mot "Cer".

Page 75

1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Maintenant, on va revenir au petit cercle. Est-ce que vous pourriez

3 marquer l'endroit où était le char.

4 R. [Le témoin s'exécute]

5 Q. Est-ce que vous pourriez marquer l'endroit où se trouvait le mortier

6 qui était à l'école approximativement.

7 R. [Le témoin s'exécute]

8 Q. Très bien, merci. Est-ce que sur cette photographie, il y a d'autres

9 positions d'artillerie du HVO qui apparaissent ?

10 R. Il m'est difficile de répondre à cette question, car je ne sais pas ce

11 qui fait partie de l'artillerie. Car un mortier de

12 65 millimètres, selon les critères yougoslaves, n'est pas une pièce

13 d'artillerie, mais c'est une pièce capable de lancer des obus. Il y avait

14 plusieurs pièces de ce type ici. Ces pièces étaient d'habitude plus près

15 des lignes. Il m'est difficile de dire quelles étaient exactement les

16 pièces d'artillerie dans cette zone.

17 Q. Oui, je comprends votre réponse. Est-ce qu'il est exact de dire

18 également que les mortiers étaient des pièces d'artillerie légères, et

19 pouvaient facilement être déplacés ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Cependant, y a-t-il eu des positions de mortier fixes que l'on voit sur

22 cette photographie d'après vos souvenirs ou pas ?

23 R. Oui. Je pense qu'ici, il s'agissait des positions de mortier fixes et

24 permanentes.

25 Q. Oui. Compte tenu de cela, pour que l'image soit complète, est-ce que

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1 vous pourriez placer la lettre T à côté de l'endroit où se trouve le cercle

2 indiquant le petit char ?

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Est-ce que vous pourriez dessiner des petits cercles bleus aux endroits

5 où se trouvaient les positions de mortier fixes au mieux de vos souvenirs.

6 Ensuite, est-ce que vous pouvez apposer la lettre M pour indiquer mortier à

7 côté.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Peut-être, lorsque vous aurez terminé, vous pouvez nous le dire.

10 R. Je pense que j'ai terminé en ce qui concerne les positions de mortier

11 fixes dans cette partie-là. Cependant, l'image n'est pas complète ici. Car

12 ici, à gauche par rapport à ce que l'on voit, il y a également eu des

13 positions d'artillerie tournées vers le village de Here. Il y avait un

14 lance-roquettes multiple qui était très souvent en fonctionnement. Un char

15 aussi et d'autres pièces d'artillerie au sujet desquelles je ne peux pas

16 vous donner une énumération exacte. Il y avait plus de pièces d'artillerie

17 ici à gauche dans le village de Kranjcici que j'ai montré tout à l'heure.

18 Donc, plus là qu'à Uzdol.

19 Q. Très bien. Mais pour que les Juges puissent comprendre, dites-nous ou

20 dessinez, s'il vous plaît, veuillez inscrire une petite flèche à gauche de

21 la photographie et écrire au dessous "autres pièces d'artillerie". Cette

22 flèche devrait être tournée dans la direction dans laquelle ces pièces

23 d'artillerie se trouvaient en dehors de la photographie.

24 R. [Le témoin s'exécute]

25 Q. Merci. Pour finir, est-ce que vous pourriez indiquer sur cette

Page 77

1 photographie où est le village de Here.

2 R. [Le témoin s'exécute]

3 Q. Merci.

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Je propose le versement au dossier de ce

5 document.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.

7 Mme CHANA : [interprétation] Pas d'objection.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Dans ce cas-là, c'est versé au dossier.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction D340.

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci.

11 Q. Nous allons laisser la photographie sur l'écran pour le moment. J'ai

12 encore quelques questions à vous poser au sujet de la situation militaire

13 des forces du HVO à l'époque.

14 Dans le village d'Uzdol, dans la zone d'Uzdol à l'époque, approximativement

15 combien de soldats du HVO y avait-il, à votre avis, sur la base des

16 informations dont vous disposiez à l'époque, que ce soit de bonnes ou de

17 mauvaises informations ?

18 R. D'après nos informations, à l'époque, à Uzdol, se trouvait un

19 bataillon. Cependant, nous avions un bon aperçu de la route que les unités

20 du HVO prenaient. Nous pouvions voir lorsque les renforts arrivaient,

21 lorsque les soldats venaient et partaient. Nous informions notre

22 commandement de cela de manière régulière. Les rapports étaient envoyés de

23 ces unités qui surveillaient la situation. Il est difficile de dire cela

24 car la situation changeait sans cesse. En termes généraux, je peux dire que

25 le HVO était plus puissant pour ce qui est des moyens techniques et des

Page 78

1 équipements.

2 Parfois, on avait des situations où ils tiraient une centaine, ou des

3 centaines d'obus contre nous en une journée alors que nous n'en avions pas

4 deux pour riposter, s'agissant de l'artillerie.

5 Q. Je vais justement poser une question au sujet de cela. Est-ce que

6 vous aviez des chars ?

7 R. Non, nous n'avions pas de chars.

8 Q. De quelles pièces d'artillerie disposiez-vous, et combien de pièces de

9 munition aviez-vous à votre disposition pour les utiliser ?

10 R. Je dois vous expliquer comment l'artillerie s'est développée.

11 Dans le commandement du Bataillon indépendant de Prozor, il y avait un

12 adjoint du commandant chargé de l'artillerie. Au début, il n'y avait même

13 pas une pièce d'artillerie. Après - je vais vous dire la date exacte -

14 c'était le 22 janvier 1993 que nous avons reçu notre premier mortier de 82

15 millimètres. Celui-ci a été placé sur cette colline. Pour ce mortier, le

16 plus souvent, nous n'avions pas suffisamment de munitions ou d'obus ou très

17 peu. Après, dans certaines actions, l'on a capturé un certain nombre de

18 mortiers. C'était surtout des mortiers de 82 millimètres et de 60

19 millimètres.

20 Je pense - oui, en été 1993, on a jeté, je ne sais pas d'où, d'Igman, je

21 suppose, deux obusiers de 105 millimètres. S'agissant de ces deux obusiers,

22 nous n'avions absolument pas de projectiles pour les utiliser. Une fois,

23 nous avons eu trois obus que nous avons tirés en une journée. A cette

24 époque-là, nous avions deux obusiers, et nous disposions de trois obus pour

25 ces obusiers.

Page 79

1 Q. Est-ce que l'on a fait venir des pièces d'artillerie

2 supplémentaires pour l'opération de combat qui a eu lieu le 14 septembre

3 dans ce secteur ?

4 R. Nous n'avons reçu aucune nouvelle pièce d'artillerie. D'après ce que je

5 sais, nous n'avons même pas reçu d'obus. Pour ce qui est des obus dont

6 disposait l'ABiH dans cette région-là, et là je parle surtout des obus pour

7 les pièces d'artillerie de 82 millimètres, je dois dire qu'il n'était pas

8 du tout précis, car les charges de poudre étaient faites de manière

9 improvisée, car nous n'avions pas les équipements appropriés pour faire

10 cela. Les obus avaient été produits dans des usines qui faisaient autre

11 chose avant la guerre; ces pièces, ces munitions n'étaient pas du tout

12 précises, on ne pouvait pas savoir qu'elle allait être l'échelle de tirs en

13 utilisant ce genre d'obus.

14 Q. Merci de cette explication.

15 Je souhaite maintenant que l'on parle de la situation qui prévalait dans le

16 Bataillon indépendant de Prozor à l'époque, puisque nous avons parlé du

17 HVO. Est-ce que pendant cette opération, et là je parle de l'attaque contre

18 Uzdol le 14 septembre, est-ce que le Bataillon indépendant de Prozor y a

19 envoyé environ 120 à 130 troupes ce jour-là, pour autant que vous le

20 sachiez ?

21 R. Oui.

22 Q. Excusez-moi un instant, Monsieur le Témoin G.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] J'ai déjà proposé le versement au dossier

24 de ce document, mais je demande qu'il reste sur l'écran, et je pense que

25 maintenant le témoin pourrait apposer d'autres annotations, peut-être il

Page 80

1 vaut mieux le verser au dossier maintenant.

2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, le témoin peut continuer à apposer

3 des annotations. Cela ne pose pas de problèmes.

4 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci.

5 Q. Nous allons parler maintenant du Bataillon indépendant de Prozor et de

6 sa situation.

7 Vous avez dit que ce bataillon était constitué surtout des personnes venant

8 de trois villages, mais vous avez dit qu'il y avait certaines personnes qui

9 venaient de l'extérieur, et notamment environ 25 personnes qui avaient

10 survécu à l'incident des boucliers humains. Voici ma question : est-ce que

11 personnellement vous avez pu faire une distinction entre les extrémistes du

12 HVO d'un côté, et les voisins locaux croates innocents de l'autre ? Peut-

13 être que la question était trop compliquée; je vais la reposer.

14 Est-ce que vous, personnellement, vous aviez envie de vous venger ou de

15 tuer des civils croates locaux qui étaient des personnes âgées ou des

16 enfants ?

17 R. Certainement pas. Je peux prouver cela à cette Chambre par le biais

18 d'un exemple.

19 A cette époque-là, dans cette zone se trouvaient deux villages croates dans

20 la zone contrôlée par l'ABiH, peut-être même plus ou deux hameaux. Un

21 village se trouvait dans no man's land. Dans un de ces villages, tout au

22 long de la guerre, 13 à 14 civils vivaient, parmi lesquels une jeune fille

23 âgée de 9 ou 10 ans, et les autres, c'était surtout des personnes âgées. Si

24 le but avait été de tuer des civils, il n'aurait pas été nécessaire d'aller

25 mourir pour tuer des civils. Cela aurait toujours pu être possible dans ce

Page 81

1 village-là, si quelqu'un y avait pensé, mais bien sûr, personne n'y avait

2 jamais songé. Cependant à un moment donné, lorsque la situation est devenue

3 trop risquée, surtout pour les gens qui avaient été traumatisés, puis qui

4 pour ainsi dire avaient des raisons personnelles éventuellement de se

5 venger, nous avons dû créer un point de sécurité à l'endroit où se

6 trouvaient leurs maisons, devant leurs maisons

7 Je vais vous relater un incident qui s'est passé et qui est lié à

8 cela. A ce moment-là, une fois le HVO a pilonné le village de Scipe. Devant

9 l'école, une enseignante à l'époque a été tuée de même qu'un enfant de deux

10 ans, et aussi une jeune fille qui gardait le bétail à ce moment-là. Je sais

11 que sa mère a fait irruption à l'école. A ce moment-là il y avait une

12 prison et il y avait un membre du HVO capturé à ce moment-là. Elle y est

13 entrée et l'a attaquée. Même lui, on ne pouvait plus le tenir dans cette

14 prison en raison de cette ambiance surchauffée à l'époque, ou peut-être il

15 y avait même deux membres du HVO, je ne me souviens pas actuellement. A ce

16 moment-là, ils ont été transférés dans une autre prison près de Hadzici. Je

17 sais néanmoins qu'on les a échangés et qu'ils étaient encore vivants. A la

18 suite de cela, nous avons dû établir un point de contrôle pour protéger ces

19 civils croates 24 heures sur 24.

20 Q. L'histoire du Bataillon indépendant de Prozor n'inclut pas d'éléments

21 d'attaques de civils, qu'ils soient motivés par la vengeance ou tout autre

22 motif; est-ce exact ?

23 R. Je pense que c'est exact. Le Bataillon de Prozor n'a jamais voulu se

24 venger en attaquant la population civile, pas plus qu'il n'ait reçu d'ordre

25 à cet effet. Cela c'était le cas à cette occasion également.

Page 82

1 Q. D'après ce que vous avez compris, la lutte de l'armée bosniaque était

2 une lutte pour préserve une Bosnie multiethnique; est-ce exact ?

3 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président, je m'objecte à ceci. Je

4 ne crois pas que le témoin veut parler au nom de toute l'armée bosniaque.

5 Peut-être qu'il devrait répondre en son nom propre.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que vous pourriez lui poser la

7 question à titre individuel.

8 (expurgée)

9 (expurgée). Alors je peux lui demander ce qu'il

10 pense de la situation en son nom propre, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

12 M. MORRISSEY : [interprétation]

13 Q. Excusez-moi, Monsieur le Témoin, je vais vous poser la question d'une

14 autre manière dans ce cas. Excusez-moi.

15 Etait-ce d'après ce que vous aviez compris vous personnellement, le fait

16 que l'armée bosniaque se battait dans le but de défendre une Bosnie

17 multiethnique ou pluriethnique ?

18 R. Je vais essayer de répondre à cette question de la manière la plus

19 simple possible.

20 La présidence de Bosnie-Herzégovine au début de 1993, ou plutôt vers la fin

21 de l'année 1992, je ne sais pas exactement quand ce document a été émis,

22 néanmoins cela s'appelle la Plateforme de la présidence de Bosnie-

23 Herzégovine en temps de guerre. Dans ce document, que nous avons accepté

24 entièrement, il est fait état d'objectifs en temps de guerre de l'ABiH.

25 Vous allez voir le document vous-même, c'est un document très connu. Il a

Page 83

1 été adopté par la présidence comprenant sept membres de la présidence de

2 Bosnie-Herzégovine. Cette présidence de Bosnie-Herzégovine était composée

3 d'individus, et tous les peuples constitutifs, pour ce qui est de la

4 légitimité du président à l'époque, c'était une toute autre question. Mais

5 pour ce que contient le document, je suis certain que le document fait état

6 du fait que la Bosnie-Herzégovine est un Etat multiethnique, une communauté

7 multiethnique, une démocratie civile. C'était la tâche qui m'incombait en

8 tant que commandant adjoint. Il était de mon devoir d'informer mes troupes

9 du contenu de ce document.

10 Q. Avez-vous fait cela ?

11 R. Oui, à nombre d'occasions.

12 Q. Quand vous avez expliqué le contenu de ce document et son sens, à

13 l'époque, quels étaient les points principaux que vous essayiez de faire

14 passer aux soldats ?

15 R. Mes troupes m'ont demandé si nous avions des objectifs militaires et la

16 seule réponse que j'ai faite, c'est que notre objectif militaire était en

17 fait exprimé dans cette plate-forme. En fait, il n'y avait pas quoi que ce

18 soit d'autre à quoi j'aurais pu faire référence, en faisant ou en donnant

19 des explications officielles sur notre position. C'était du moins deux

20 éléments sur la position officielle, position d'un Etat pour lequel nous

21 nous battions.

22 Q. En expliquant aux troupes quels étaient les fondements de cette plate-

23 forme, on leur a expliqué que les atrocités contre tous les groupes

24 ethniques et les civils en particulier devaient être évités à tout prix ?

25 Est-ce exact ?

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1 R. C'est exact.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-être pourrions-nous passer à huis clos

3 partiel pour un instant, s'il vous plaît ?

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel

5 s'il vous plaît.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

7 partiel.

8 [Audience à huis clos partiel]

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2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 [Audience publique]

5 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci.

6 Q. Suite à ces questions que nous avons soulevées au cours du huis clos

7 partiel, que nous n'allons pas devoir répéter, je voulais dire qu'il était

8 parfaitement clair qu'à nombre d'occasions, les hommes du Bataillon

9 indépendant de Prozor avaient compris qu'ils ne devaient pas commettre

10 d'atrocités contre soit des civils, ou d'autres groupes ethniques; est-ce

11 exact ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Je voudrais maintenant passer à des points qui ont trait ou qui sont en

14 rapport avec le commandant Buza, et peut-être que ceci nous emmènera à la

15 clôture de la séance avec ce passage.

16 M. MORRISSEY : [interprétation] En fait, Monsieur le Président, Messieurs

17 les Juges.

18 Q. Voulez-vous m'excuser pour un moment Monsieur le Témoin.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Je ne sais pas, c'est une question un petit

20 peu délicate, je ne sais pas si nous allons pouvoir finir dans le temps qui

21 nous est imparti cet après-midi, je ne suis pas sûr si c'est possible,

22 étant donné la façon dont les réponses sont arrivées à la fin, c'est entre

23 les mains de la Chambre. Je ne suis pas sûr de pouvoir terminer cet après-

24 midi.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous avons arrangé une séance

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1 supplémentaire cet après-midi, puisque demain nous ne pouvons pas tenir

2 séance. Nous espérons dans la mesure du possible, que vous allez pouvoir

3 clôturer aujourd'hui. Cela ne veut pas dire que je voudrais limiter vos

4 droits en aucune manière.

5 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je vais me

6 dépêcher dans ce cas, merci pour cette indication.

7 Q. Monsieur le Témoin, il ne s'agit que de questions d'intendance.

8 Nous allons passer au commandant Buza, en fait, je ne veux pas entrer

9 dans trop de détails. Mais, c'est un fait que quand le commandant Buza est

10 arrivé, il a amené quelques changements dans l'organisation du Bataillon de

11 Prozor; est-ce exact ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Un des problèmes avec le commandant Buza, c'est qu'il, après un certain

14 moment, semblait être le représentant, ou semblait se prendre pour le

15 représentant supérieur de la loi. Est-ce exact ?

16 R. Il vous est apparu, du moins, vous, individuellement, qu'il prenait des

17 décisions sans consulter ses subordonnés qui, peut-être, avaient plus de

18 connaissances dans le domaine que lui; est-ce exact ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Une des raisons pour laquelle il a voulu faire cela, du moins en

21 partie, c'était pour s'assurer de la confidentialité de l'information qu'il

22 donnait à ses commandants, était-ce une des raison qui motivait le fait

23 qu'il ne les consultait pas ?

24 R. Pourriez-vous répéter la question s'il vous plaît ?

25 Q. Est-ce que le commandant Buza, ou plutôt devrais-je peut-être d'abord

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1 vous demander une question plus générale.

2 Est-ce que le commandant Buza vous a donné une raison pour laquelle il ne

3 vous consultait pas, ou ne consultait pas ses subordonnés qui avaient de

4 bonnes connaissances générales dans le domaine, ou de bonnes connaissances

5 du terrain ou de la localité ?

6 R. Je crois qu'il essayait de ne pas faire état des motivations qui le

7 poussaient à ne pas nous informer. Mais, par ailleurs, nous pouvions

8 deviner quelles étaient ses raisons sur la base de son comportement.

9 Je vais vous donner un exemple qui illustre cela. Quand nous étions dans la

10 zone de la municipalité de Prozor, nous avions une maison dans laquelle les

11 autorités civiles étaient installées, je parle des institutions civiles. Le

12 commandant nous a donné l'ordre à l'unité de sabotage d'aller tirer sur le

13 bâtiment municipal pour les effrayer. Ceci était inacceptable à mon avis,

14 et il y a eu nombre d'autres actes que je ne comprenais pas.

15 Une fois, il y a eu un incident qui concernait l'utilisation de matériel

16 médical. Nous avons eu un problème assez grave parce que nous n'avions pas

17 de médecins généralistes, mais nous avions néanmoins quelqu'un qui

18 travaillait dans le domaine pharmaceutique, mais le commandant adjoint pour

19 les questions médicales, était une ordonnance médicale, et il gérait le

20 matériel médical et les médicaments dans certains flacons. Quand le

21 pharmacien est arrivé, il ne comprenait pas comment le système

22 fonctionnait. Il a écouté les instructions du pharmacien pendant quelques

23 jours et ensuite, il l'a renvoyé, il a mis l'ordonnance médicale au poste

24 de responsable des fournitures médicales.

25 Il y a d'autres exemples d'actes absurdes. Il a utilisé beaucoup de

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1 carburant, il se promenait sans aucune raison. Nous ne comprenions pas

2 pourquoi il partait tout d'un coup, il quittait l'unité ou laissait l'unité

3 sans commandant à sa tête. C'était la raison pour laquelle nous ne nous

4 entendions pas. Nous avions un commandant adjoint qui était certainement

5 instruit, et ses propositions en revanche n'étaient jamais prises en

6 considération. A mon avis, elles étaient déniées sans raison.

7 Q. Je crois que nous sommes arrivés à la fin de nos questions. Il y a

8 juste une question que j'aimerais vous poser avant d'interrompre le contre-

9 interrogatoire : est-ce qu'il avait un surnom ou un titre qu'il se donnait

10 lui-même, qu'il aimait bien qu'on l'utilise quand on l'appelle ?

11 R. Oui, il nous a dit que son surnom c'était Cigra. C'est-à-dire -- non.

12 Je ne sais pas ce que veut dire Cigra exactement. Cela reflète un lien

13 d'affection. C'est comme cela qu'il se présentait, il se présentait comme

14 étant un soldat d'expérience qui avait combattu en Algérie, qui avait été

15 colonel dans l'armée algérienne.

16 Q. Merci beaucoup, Monsieur le Témoin.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Je crois que c'est un bon moment pour

18 s'interrompre.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien.

20 Nous allons reprendre à 15 heures dans le prétoire.

21 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 13 heures 47.

22 --- L'audience est reprise à 15 heures 48.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez m'excuser de ce retard, mais

24 quoi qu'il en soit nous allons tenir séance jusqu'à 17 heures.

25 Monsieur Morrissey.

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1 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Merci beaucoup, Monsieur le Témoin G, avant la pause nous parlions du

3 Commandant Buza et nous avons posé des questions générales. J'en ai de plus

4 précises maintenant à vous poser quant à ses rapports avec vous. Vous avez

5 déjà expliqué certains des problèmes, mais ce que je voudrais vous demander

6 maintenant c'est : si lui vous a consulté sur des plans d'activités de

7 combat dans votre zone, après qu'il soit devenu commandant ?

8 R. Non, il ne m'a pas consulté parce que je n'étais pas responsable de la

9 planification d'activités de combat. Cela ne faisait pas partie de mes

10 fonctions, mais je sais que son chef d'état-major adjoint jouait un tel

11 rôle, avait une telle responsabilité, et il m'a fait part de l'information.

12 Il m'a dit qu'il avait agi de manière très têtue; il n'avait pas pris en

13 considération les arguments qui lui avaient été présentés.

14 Q. Qui était le chef de la sécurité militaire du SVB au sein du Bataillon

15 indépendant de Prozor, je veux dire en septembre 1993 ? On nous a donné le

16 nom d'un individu qui était Bektas. Est-ce que vous vous rappelez d'un

17 individu portant le nom de Bektas ?

18 R. Je ne crois pas qu'il était le commandant adjoint responsable de la

19 sécurité. Je crois que c'était plutôt Zijo Camatic [phon], mais je n'en

20 suis pas sûr, parce que cela allait changer. Je crois qu'il était le

21 commandant adjoint responsable de la sécurité. Bektas était impliqué dans

22 le domaine de la sécurité.

23 Q. Etes-vous capable, 11 années plus tard, de vous souvenir du rôle précis

24 joué par Bektas ?

25 R. Je crois que pendant une certaine période de temps, il était adjoint,

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1 et c'était avant. Quand M. Camatic est arrivé, il a repris ce poste, cette

2 position, puisque Buza l'avait nommé à ce poste. Bien évidemment, cela

3 comportait des problèmes également, parce qu'à mon avis, une telle

4 nomination aurait dû être faite auprès d'autres membres du commandement, et

5 après avoir obtenu l'autorisation de membres du commandement supérieur, et

6 je ne suis pas sûr qu'il ait requis leur approbation. Plus tard, M. Bektas

7 était devenu une sorte de personnage officiel dans le domaine de la

8 sécurité où il était, disons, un représentant officiel de niveau inférieur,

9 quelque chose comme cela.

10 Q. D'après ce que vous avez compris, si un crime était commis dans la zone

11 de responsabilité du Bataillon indépendant de Prozor, l'instance

12 professionnelle avec la compétence à enquêter, était-ce le service de

13 sécurité militaire; est-ce exact ?

14 R. Oui.

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19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Morrissey, voulez-vous être très

20 attentif et très prudent.

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. J'ai

22 été extrêmement obtus et c'est ma faute. Je vous demande de m'excuser.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] J'espère que la note qui est devant vous

24 va vous aider à vous en rappeler.

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui.

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1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez poursuivre.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vous demande de m'excuser. Avec mon

3 histoire précédente, je préfère être prévenu plutôt que puni.

4 Q. Je m'excuse, Monsieur le Témoin G. Je voudrais continuer, mais

5 j'aimerais demander certaines questions sur ce sujet.

6 M. MORRISSEY : [interprétation] J'aimerais passer en audience à huis clos

7 partiel s'il vous plaît.

8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel. Veuillez

9 poursuivre s'il vous plaît.

10 [Audience à huis clos partiel]

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19 [Audience publique]

20 M. MORRISSEY : [interprétation]

21 Q. Je voudrais poser des questions sur le commandant Buza, à savoir s'il

22 était prêt à partager l'information. Il y a un document que je voudrais

23 vous montrer maintenant, vous ne l'avez peut-être pas vu auparavant.

24 Je voudrais que vous l'examiniez rapidement, que vous me disiez si vous

25 l'avez déjà vu. Il s'agit du document D140, c'est une pièce qui a déjà été

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1 versée au dossier.

2 On va vous montrer maintenant un document qui constitue une proposition

3 militaire qui a été soumise au commandement du 6e Corps d'armée, et en

4 particulier à Salko Gusic, le commandant du 6e Corps d'armée. Il a été

5 rédigé par Zukanovic, un assistant d'état-major. Je vais vous poser

6 quelques questions sur ce document. Si vous l'avez déjà vu vous-même et

7 après cela, je vais vous poser des questions sur les plans dont il est fait

8 état dans ce document.

9 Est-ce que vous avez ce document à l'écran ?

10 R. Je vois la première partie de ce document.

11 Q. Très bien.

12 M. MORRISSEY : [interprétation] Puis-je demander que l'on donne au témoin

13 l'occasion de lire le document.

14 Q. Je ne vais vous interroger précisément sur le contenu du document; il

15 n'est pas nécessaire de lire de manière détaillée, mais vous pouvez nous

16 demander de ralentir pour avoir le temps de lire.

17 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la première et la

18 dernière page, l'introduction, et ensuite la dernière, pour lui montrer que

19 ce document a été signé par M. Zukanovic.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-on avoir la version en anglais de la

21 dernière page ?

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Je vais vous expliquer ce qui se passera.

23 Lorsque le témoin aura eu l'occasion de voir la dernière page et vérifier

24 sa signature, je vais lui demander de recommencer, ensuite je veux lui

25 poser quelques questions concernant la première page. Nous pouvons revenir

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1 maintenant à la première page.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Pouvons-nous retourner à la première page,

3 s'il vous plaît.

4 Q. Est-ce que vous savez qui est M. Zukanovic d'après vos connaissances

5 directes ?

6 R. Je vois que c'est un document de la 44e Brigade de Jablanica, qui était

7 relativement grande. C'était une Brigade de Montagne; il y avait un grand

8 nombre de personnes qui faisait partie de cette brigade et que je ne

9 connaissais pas. C'est pareil pour ce Enes Zukanovic, je ne me souviens pas

10 exactement qui était cet homme et ce qu'il faisait.

11 Q. Pour autant que vous vous en souveniez, est-ce que vous avez déjà vu ce

12 document ?

13 R. Je ne peux pas confirmer l'avoir vu.

14 Q. J'essaie simplement de vous poser quelques questions et je ne vous

15 demanderai pas d'analyser le document, mais je veux vous poser quelques

16 questions. Est-ce que vous vous souvenez autour du 28 août 1993, disons fin

17 août 1993, s'il y a des discussions entre Salko Gusic, le commandant du 6e

18 Corps d'armée, et Enver Buza, qui était le commandant du Bataillon

19 indépendant de Prozor à l'époque, concernant les lignes d'attaque

20 proposées ?

21 R. Ces communications existaient au jour le jour. Tous les jours, notre

22 commandant du corps d'armée était en contact avec lui. Quant au contenu

23 exact de leurs conversations, je ne peux pas le dire maintenant ici, en

24 fait, je ne le sais pas. Mais je sais qu'il y a eu de vives discussions

25 concernant la question de savoir comment il fallait coordonner les actions

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1 de la 44e Brigade de Jablanica et la 45e Brigade, qui jouxtait notre

2 territoire, et de notre Bataillon indépendant. Il y avait des réflexions

3 différentes concernant la question de savoir ce qu'il fallait faire, afin

4 de nous faciliter la situation à nous, et de la rendre plus difficile pour

5 le HVO. Je sais qu'il y en a qui disait qu'il fallait couper les

6 communications de notre direction, et rendre impossible la communication

7 entre la base logistique et le commandement du HVO à Prozor, par rapport à

8 la direction sud qu'ils détenaient vers Jablanica. Ce genre de réflexion

9 existait, des discussions avaient lieu mais je ne suis pas au courant des

10 détails ou peut-être seulement de quelques détails, mais je ne sais pas

11 s'ils sont importants. Par exemple, conformément à ces tendances, ces

12 aspirations, à un moment donné, un endroit a été miné. C'était une action

13 assez compliquée qui se déroulait approximativement en été 1993. Je ne sais

14 pas si c'était au mois de juillet ou au mois d'août.

15 Q. Peut-être que cette période précède la période qui nous intéresse

16 vraiment -- on verra tout à l'heure si c'est pertinent pour nous ou pas.

17 Est-ce que le commandant Buza devait vous informer, vous, du contenu de ces

18 discussions avec Salko Gusic du 6e Corps d'armée ?

19 R. En termes généraux à de nombreuses reprises, nous avons demandé au

20 commandant de nous informer de ce qui se passait, et "nous," je veux dire

21 par là certains membres de ce commandement. Nous avions toujours des

22 malentendus à ce sujet avec lui. A un moment donné, nous n'avions plus

23 envie d'en parler. Je sais que lors des réunions régulières au sein du

24 corps d'armée, lui, il assistait à ces réunions mais nous ne savons ce

25 qu'il disait. Je sais qu'à un moment donné, nous avons reçu l'ordre de

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1 remettre au commandement du corps d'armée les obus de type Maljutkas, les

2 obus antichars. Je sais qu'il s'était vanté du fait de les avoir en sa

3 possession; en fait, je sais que nous ne les avions pas et, nous, de même

4 que nos voisins, nous n'avions rien de tout cela. Nous n'avons pas pu

5 exécuter cet ordre du commandement du corps d'armée. Il a dû aller prier le

6 commandant de Voljevac; bien sûr, celui-ci n'a pas répondu à cette demande.

7 Ce n'était pas la première fois qu'on recevait des demandes par rapport aux

8 choses que nous ne possédions pas. Là, il s'agit de quelques exemples qui

9 montrent bien que le commandant n'avait pas une quelconque communication

10 avec nous.

11 Q. Je souhaite vous poser une autre question. Votre unité était le

12 Bataillon indépendant de Prozor; sur votre gauche se trouvait la 44e

13 Brigade de Jablanica; est-ce exact ?

14 R. Non, c'était la 45e Brigade qui était à notre gauche.

15 Q. Excusez-moi, c'est moi qui me suis trompé. A votre gauche la 45e

16 Brigade, et sur votre droite, est-ce que c'est là que se trouvait la 317e

17 Brigade ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Très bien. De l'autre côté de la 317e Brigade, il y avait une frontière

20 qui séparait le 6e Corps d'armée; puis, il y avait aussi une unité attachée

21 au 3e Corps d'armée, qui s'appelait le Groupe opérationnel ouest. Est-ce

22 exact ?

23 R. Oui. La zone de responsabilité de notre bataillon, à la frontière, à

24 droite, était l'endroit où s'arrêtait la zone de responsabilité du 6e Corps

25 d'armée et à partir de cet endroit, commençait la zone de responsabilité de

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1 la 317e Brigade.

2 Q. Oui, je comprends. Est-ce qu'il est exact de dire que par rapport à la

3 ville de Prozor et sa libération, un certain nombre d'unités étaient

4 potentiellement pertinentes, dans le cadre de cette action, dont certaines

5 appartenaient au 6e Corps d'armée et d'autres relevaient du commandement du

6 3e Corps d'armée. Est-ce exact ?

7 R. Oui, c'est exact.

8 Q. Pour qu'une quelconque action militaire ait du succès par rapport à la

9 libération de la ville de Prozor, visiblement, il était nécessaire d'avoir

10 un certain niveau de coordination entre le

11 3e Corps d'armée et le 6e Corps d'armée. Est-ce exact ?

12 R. Je pense que oui.

13 Q. Très bien. Je souhaite, maintenant, vous poser une question concernant

14 l'équipe d'inspection. Est-ce qu'à un moment donné, fin août ou début

15 septembre 1993, vous avez appris qu'il y avait une équipe d'inspection

16 présidée par Sefer Halilovic et dont faisaient partie d'autres officiers de

17 l'armée de haut niveau comme Karic, Suljevic et Bilajac en Herzégovine ?

18 R. Je ne sais pas quel était le rôle de cette équipe. Je ne sais pas si

19 c'était une équipe d'inspection ou de commandement. Je ne sais pas, c'est

20 vrai que je ne le sais pas. Quant à certaines de ces personnes, comme M.

21 Suljevic, je les ai rencontrées sur le terrain, cependant, je n'étais pas

22 habilité à leur demander quels étaient leurs pouvoirs et, d'ailleurs,

23 personne ne m'a dit de quel pouvoir ils disposaient.

24 Q. C'était justement ma question suivante. Est-ce que vous aviez

25 l'autorité ou est-ce qu'il vous revenait, à vous, de vous enquérir au sujet

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1 du rôle précis de ces hauts officiers qui étaient venus en Herzégovine,

2 notamment, Halilovic, Karic, Suljevic et Bilajac ?

3 R. Dans des circonstances normales, par le biais du commandant de notre

4 bataillon, j'aurais dû être informé du but, du rôle et de la mission de

5 cette équipe et du général Halilovic. Mais je vous affirme et je dis, en

6 toute responsabilité, qu'il ne nous a rien dit au sujet de cela, si ce

7 n'est qu'après la première réunion, il nous a dit que le général Halilovic

8 était là et qu'il allait mener cette action. C'est ainsi qu'il s'est

9 exprimé.

10 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il a utilisé le mot, "rukovodjenje"

11 dans ce contexte ?

12 R. En ce qui concerne ce mot, je pense qu'ils ne l'ont pas utilisé. Je

13 n'ai pas entendu ce terme ou sinon je l'ai oublié ou peut-être je ne me

14 souviens pas exactement du mot, s'ils parlaient du mot "rukovoditi. [phon]"

15 Q. Oui, bien sûr, je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais

16 vous avez employé le mot "vodi;" est-ce exact ?

17 Peut-être je devrais vous poser une autre question. Est-ce que vous

18 vous souvenez du terme exact qui a été utilisé, maintenant, en 2005, est-ce

19 que vous vous en souvenez ?

20 R. Je fais une différence entre le terme "rukovoditi," diriger et

21 "voditi," mener. Ce n'est pas la même chose dans l'armée. Mais à vrai dire,

22 je ne peux pas confirmer que qui que ce soit ait dit que le général

23 Halilovic allait diriger ou commander cette opération, je ne peux pas le

24 dire, mais je sais qu'ils ont dit qu'il allait mener cette action. Le

25 commandant nous a dit qu'il allait la mener, mais qu'est-ce que cela veut

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1 dire.

2 Q. Oui, je comprends. Est-ce qu'il vous a expliqué, ensuite, ce que cela

3 voulait dire ? Lorsque je dis "il," je veux parler du commandant Buza ?

4 R. Non, il n'a jamais fait d'efforts afin de nous expliquer beaucoup de

5 choses. Il voulait toujours laisser un certain vide, laisser flotter un

6 flou. Nous n'étions pas bien informés au sujet des questions très

7 importantes.

8 Q. Je comprends. Est-ce qu'en septembre 1993, on ne vous a jamais montré

9 un ordre en date du 31 [comme interprété] août 1993, rédigé par le

10 commandant Delic qui nommait l'équipe d'inspection et qui leur confiait des

11 tâches concrètes ?

12 R. Je n'ai pas vu un tel ordre. On ne me l'a pas montré, je ne sais pas de

13 quoi il s'agit.

14 Q. Très bien.

15 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-on montrer, maintenant, au témoin, la

16 pièce à conviction D146.

17 Mme CHANA : [interprétation] Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Madame Chana.

19 Mme CHANA : [interprétation] S'agissant de cet ordre, le témoin ne l'a

20 jamais vu. Je ne vois pas pourquoi il faudrait lui montrer cet ordre.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, nous avons besoin d'une explication

22 sur cela.

23 M. MORRISSEY : [interprétation] Très bien. Je souhaite montrer cela au

24 témoin et je souhaite lui demander si Sefer Halilovic exerçait,

25 apparemment, les pouvoirs qui lui étaient confiés, d'après cet ordre. Mais

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1 si mon éminente collègue dit qu'il ne faudrait pas montrer au témoin un

2 document qu'il n'a jamais vu, bien sûr, c'est une objection légitime et je

3 ne vais pas le lui montrer. Mais je vais poser d'autres questions.

4 Q. Lorsque vous avez eu la séance de récolement, ici, à

5 La Haye, quels sont les documents qui vous ont été montrés, pour autant que

6 vous vous en souveniez, Monsieur le Témoin G ?

7 R. On m'a montré deux documents. Tout d'abord, le document que j'ai lu

8 tout à l'heure; puis, un autre document émanant du commandement de la 317e

9 Brigade qui portait sur la manière dont les actions, activités de combat

10 devaient se dérouler. Ceci a été signé par le commandant de la Brigade,

11 Zejnilagic ou plutôt, Enver Zejnilagic.

12 Q. Est-ce qu'on ne vous a pas montré un rapport de combat émanant du

13 commandant du Bataillon indépendant de Prozor, lui-même, Enver Buza,

14 concernant l'action à Uzdol ? Ils ne vous ont pas montré ce document,

15 n'est-ce pas ?

16 R. Non.

17 Q. D'ici 30 minutes, environ, je vais vous le montrer, on va voir ce qui

18 se passera. Mais vous avez déjà eu la possibilité de faire un commentaire,

19 à ce sujet.

20 En attendant, cependant, on va passer à autre chose. Je souhaite que

21 vous examiniez un autre document. Il s'agit, là, d'un document qui se

22 trouve sur votre droite. Est-ce que vous le voyez, cette grande carte qui

23 est derrière vous intitulée, "Opération

24 Neretva 93" ?

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Je remercie, comme toujours, le personnel

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1 de m'avoir aidé à présenter cette pièce. Il s'agit de D313 [comme

2 interprété].

3 Q. Veuillez examiner ce document et nous dire si cela vous semble être une

4 carte militaire et s'il est écrit en haut, à gauche, "odobravam,"

5 "j'approuve," signé par le commandant Rasim Delic ?

6 R. Est-ce que vous pourriez me répéter la question ?

7 Q. Oui. La question est simplement de savoir si vous avez l'impression

8 qu'il s'agit, là, d'une carte militaire intitulée "Operacija Neretva," qui

9 a été autorisée par les mots "odobravam," "j'approuve," inscrit en haut, à

10 gauche, au-dessus du nom du commandant Rasim Delic ? Ou plutôt, première

11 question : est-ce que vous pouvez lire cela de l'endroit où vous êtes ?

12 R. Oui, maintenant, je vois.

13 Q. Je vous remercie.

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Mon assistant a attiré mon attention, d'une

15 manière tout à fait raisonnable, sur le fait que le témoin ne devrait pas

16 se lever pour protéger son identité.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Nous pouvons peut-être passer à huis clos

18 partiel car, maintenant, la caméra va se focaliser sur la carte. Je pense

19 que ceci risque de dévoiler l'identité du témoin.

20 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, je ne savais pas, je ne sais pas

21 comment cela fonctionne; peut-être par excès de zèle, il vaut mieux passer

22 à huis clos partiel.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-on passer à huis clos partiel.

24 Nous sommes à huis clos partiel.

25 [Audience à huis clos partiel]

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14 [Audience publique]

15 M. MORRISSEY : [interprétation]

16 Q. Excusez-moi. Je suppose que la question s'est perdue dans tout cela. Je

17 vais vous la reposer. Est-ce que les lignes sur cette carte, même si ceci

18 est tracé à un haut niveau, reflètent, en gros, ce qui se passait dans le

19 cadre des opérations les 13 et

20 14 septembre ?

21 R. Je peux dire que ceci reflète ce qui s'est déroulé dans la partie nord,

22 au nord de Jablanica, là, je peux parler de la région que je connais bien.

23 En ce qui concerne la partie au sud de Jablanica, je ne sais pas avec

24 exactitude qui allait où et je ne peux pas faire de commentaires à ce

25 sujet.

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1 Q. Je ne souhaite pas, non plus, vous importuner avec cela. Merci de cela.

2 En ce qui concerne cette carte, je souhaite vous demander la question

3 suivante : est-ce que vous étiez personnellement présent à Jablanica, le 4

4 septembre, lorsque cette carte a été signée au-dessous du mot "odobravam"

5 par Rasim Delic en haut, à gauche et contresigné par le chef d'état-major

6 Halilovic, en bas, dans l'angle en bas. Est-ce que vous étiez présent

7 lorsque ceci s'est passé ?

8 R. Je pense que je n'y ai pas assisté. Je ne m'en souviens pas.

9 Q. Très bien. Est-ce que le commandant Buza vous a dit que Rasim Delic

10 était venu en Herzégovine et avait eu une réunion à Jablanica et qu'il

11 avait signé et autorisé cette carte ?

12 R. Le commandant Buza ne nous a pas dit cela. Puis, je vous ai déjà dit

13 qu'elle était son style pour ce qui est de l'information à donner. Il ne

14 nous a pas dit cela, ni bien d'autres choses que nous aurions dû savoir.

15 Q. Oui. Je vous remercie de votre patience, s'agissant de ces questions.

16 Vous avez répondu de manière générale, mais je vais devoir poser quelques

17 questions concrètes. Mais de toute façon, nous allons passer à autre chose.

18 Maintenant, je vais vous poser des questions au sujet d'une réunion qui a

19 eu lieu à Dobro Polje, au quartier général du Bataillon indépendant de

20 Prozor.

21 Vous avez dit que vous n'étiez pas à l'intérieur de la pièce, mais que le

22 Commandant Buza vous a raconté ce qui s'était passé.

23 Voici ma question : est-ce que vous aviez l'impression que le commandant

24 Buza vous racontait toujours de manière exacte et fiable ? Autrement dit,

25 est-ce qu'il vous donnait des informations fiables lorsqu'il vous parlait

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1 de quelque chose ?

2 R. Je pense qu'au fond, il nous donnait des informations superficielles,

3 ces informations là n'étaient jamais complètes; c'était le cas aussi cette

4 fois-là. C'est ainsi que j'analyse ce qu'il nous a dit à l'époque. Je pense

5 que c'était des informations incomplètes et qu'il a omis de nous dire bien

6 des choses qui avaient dites.

7 Q. En ce qui concerne les commandants que vous avez vu assister à cette

8 réunion, je souhaite savoir quels étaient leurs noms. Est-ce que vous savez

9 si Salko Gusic a assisté à la réunion à Dobro Polje ?

10 R. Je pense que oui.

11 Q. Qu'en est-il de son adjoint ? L'adjoint du commandant Bahrudin Fazlic.

12 Est-ce que vous vous souvenez s'il a assisté à cette réunion ?

13 R. Je ne me souviens pas avec exactitude.

14 Q. Est-ce que vous vous souvenez si Haso Hakalovic, le commandant de le 4e

15 [comme interprété] Brigade de Neretva était présent ?

16 R. Oui.

17 Q. Selmo Cikotic du Groupe opérationnel ouest ?

18 R. M. Cikotic est venu plusieurs fois, je pense qu'il a assisté à cette

19 réunion. En ce qui le concerne, je peux dire avec un haut niveau de

20 certitude qu'il était là plusieurs fois.

21 Q. Qu'en est-il de Vehbija Karic ?

22 R. Je pense qu'il n'a pas assisté à cette réunion mais je ne suis pas sûr

23 en général, je peux simplement vous dire que d'après mes souvenirs il n'y

24 était pas.

25 Q. Le journaliste Sefko Hodzic, je pense que vous avez dit qu'il était là.

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1 Sefko Hodzic, vous vous en souvenez ?

2 R. Je m'en souviens.

3 Q. Poursuivez.

4 R. Je pense qu'il y a assisté certainement. C'est lui qui a parlé avec

5 nous. Mis à part ce qu'il faisait il avait un but qui était le sien, à

6 savoir de publier par çi par là un article dans des journaux différents, et

7 je me souviens qu'il avait un appareil photo sur lui.

8 Q. En ce qui concerne les commandants que j'ai déjà énumérés, parmi eux,

9 Gusic, Fazlic, Hakalovic, Sefer Halilovic lui-même. Ils étaient tous des

10 gens qui étaient en position de supériorité par rapport à Enver Buza; est-

11 ce exact ?

12 R. Je dois dire que le Bataillon indépendant de Prozor était une unité

13 indépendante, qui avait tous les pouvoirs d'unités indépendantes comme

14 l'aurait par exemple une brigade. Les autres unités cependant étaient plus

15 grandes, et j'ai à l'esprit l'opération "Ouest cap" qui comprenait deux

16 brigades. Notre commandant était dans une position particulière. Je crois

17 que son importance par rapport aux commandants des autres unités, n'était

18 pas aussi considérable. L'état-major et le commandement du corps d'armée et

19 de l'état-major lui étaient naturellement supérieurs dans la hiérarchie

20 militaire.

21 Q. Ma question porte plutôt sur ceci : Vous devez comprendre après la

22 réunion que ces gens étaient venus spécialement pour une réunion ou pour se

23 réunir avec lui ou qu'il s'agissait d'une réunion à caractère général, à

24 laquelle il était venu tout comme d'autres participants ?

25 R. On voit qu'il n'était qu'un parmi les participants. Il n'aurait rien pu

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1 dire d'autre. Je ne peux pas vous dire ce qu'il a dit en particulier sur

2 cette question. Nous avions tous l'impression qu'il était un des

3 participants parmi d'autres à cette réunion.

4 Q. Oui.

5 R. Et c'est tout.

6 Q. Après cette réunion au cours de laquelle vous avez dit que Buza vous

7 avait dit certaines choses, votre compréhension -- plutôt devrais-je vous

8 la question de la manière suivante : saviez-vous déjà que Sefer Halilovic,

9 après l'avoir vu dans les journaux, dans la presse en général; est-ce

10 exact ?

11 R. C'est exact.

12 Q. Sefer Halilovic est apparu très souvent dans la presse au cours de

13 l'année précédente; est-ce exact ?

14 R. C'est exact.

15 Q. C'était une personne que ceux qui combattaient pour la Bosnie, dans la

16 région de Bosnie-Herzégovine, espéraient qu'il viendrait leur apporter son

17 aide; est-ce exact ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Vous le connaissiez comme commandant de l'armée; sa position officielle

20 était d'être chef d'état-major de l'état-major principal, mais sa fonction

21 réelle était d'être commandant de l'armée; est-ce exact ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Après qu'il ait été remplacé en tant que commandant de l'armée par

24 Rasim Delic, il y a eu des communiqués officiels du QG de l'armée, tentant

25 d'expliquer quels avaient les changements apportés. Je suggère qu'il

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1 s'agissait aussi de calmer les soldats qui étaient très fidèles à Sefer

2 Halilovic; qui le tenaient en grande estime; est-ce exact ?

3 R. Tout ce que je peux dire, c'est que les explications officielles

4 concernant ce point là disaient qu'aucun changement n'avait été apporté au

5 chef d'état-major, ou à l'état-major du commandement suprême. Je ne sais

6 pas quel en était le nom à l'époque. Il avait été simplement établi

7 entièrement; aucun changement n'avait vraiment été apporté; c'était

8 l'explication officielle.

9 Q. Ils n'ont certainement pas donné une liste des nouvelles obligations ou

10 responsabilités de Sefer Halilovic, en tant que chef d'état-major, telles

11 qu'elles avaient été établies par l'ordonnance sur la réorganisation du 18

12 juillet 1993; est-ce exact ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Ce que vous saviez du rôle de Sefer était ce que vous en aviez entendu

15 dire; est-ce exact ?

16 R. Outre l'information officielle que nous avions reçue du plus haut

17 niveau ou des officiers militaire de plus haut niveau.

18 Q. Oui. Mon éminent collègue le Procureur, vous a demandé plus tôt

19 aujourd'hui quelle était l'autorité de Sefer Halilovic ou si vous saviez

20 que cette autorité avait mise en question ? Ce que je veux vous demander,

21 c'est la chose suivante : était-ce à vous de remettre en question

22 l'autorité de Sefer Halilovic ?

23 R. Ce n'était pas mon rôle et d'ailleurs ce n'était possible à l'époque.

24 Je n'aurais pas pu remettre en question son autorité, pas plus que j'aurais

25 pu remettre en question son rôle au sein de l'armée.

Page 110

1 Q. Vous avez indiqué que vous avez tiré une conclusion ou que vous

2 étiez honnêtement certain qu'il était le commandant d'opération. La

3 question que je vais vous demander est celle-ci, vous avez tiré cette

4 conclusion, sur base des informations que l'on vous a transmises et parce

5 que Buza vous a dit qu'il était là pour mener l'opération. Est-ce que c'est

6 un résumé fidèle de la situation, ce que je viens de vous suggérer ?

7 R. En général, oui.

8 Q. Vous-même, n'avez jamais demandé à Sefer Halilovic, pas plus qu'il ne

9 vous a dit lui-même, quelle était sa fonction précise. Est-ce exact ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Je vous remercie. Je vais maintenant passer à la deuxième occasion au

12 cours de laquelle Sefer Halilovic est venu dans la zone du Bataillon

13 indépendant de Prozor. Je crois que vous avez dit, alors que vous ne

14 souvenez pas de la date exacte, que la réunion à Dobro Polje a eu lieu, ou

15 s'est tenue à une date aux alentours des 4, 5 ou 6, et ensuite vous avez

16 indiqué qu'il est revenu quelques jours plus tard, environ six ou sept

17 jours plus tard. Est-il établi que Sefer Halilovic est revenu à Dobro Polje

18 pour voir Enver Buza, quand vous n'étiez pas présent vous-même, mais que

19 vous êtes revenu plus tard, et que vous en avez entendu parler ? Je ne veux

20 pas parler de l'occasion au cours de laquelle il était en désaccord ou

21 fâché avec Buza, je vous parle d'une circonstance préalable à cela.

22 R. J'étais à Dobro Polje au cours de ces trois visites, mais je n'ai pas

23 assisté aux réunions. Avec le passage du temps, je ne peux pas vous dire

24 aujourd'hui combien de temps s'est écoulé entre la première et la seconde

25 visite, mais ce que je sais, c'est qu'il est peut-être venu pour d'autres

Page 111

1 préparations en vue de l'action, et pour trouver d'autres accords qui

2 étaient nécessaires à l'époque, mais ce ne sont que des spéculations.

3 Je dois également informer que la Chambre d'un autre fait : le

4 commandant de la brigade dont il était dit qu'il était le commandant absolu

5 sur cette zone territoriale à l'époque, et lui, était le commandant d'une

6 brigade qui semblait jouir d'un tel pouvoir. Voilà la situation.

7 Q. Excusez-moi, je n'ai pas bien saisi de qui vous parliez, du commandant

8 de la brigade qui était là ? C'était Buza ou ---

9 R. Je fais référence à tous les commandants de brigade qui exerçaient leur

10 commandement sur certaines portions du territoire.

11 Q. Donc ils semblent être des rois dans leur petit royaume. Est-ce

12 l'impression générale que vous avez décrite ?

13 R. On pourrait l'exprimer ainsi, mais ce n'était pas le cas avec les

14 brigades qui étaient constituées de réfugiés. Je vais vous donner un

15 exemple, d'une de ces brigades, Jajce, qui était sur notre territoire et

16 son commandant n'avait pas de véritable commandement sur son territoire. Il

17 y avait de telles brigades qui étaient des unités de Bosanska Krajina, de

18 Travnik aussi, et des unités de la sorte. Mais toutes les brigades qui

19 avaient leur propre territoire, comme notre Bataillon indépendant

20 d'ailleurs, dans toutes ces brigades, les commandants pouvaient se

21 permettre de se comporter de la sorte.

22 Q. Je comprends d'après vos observations que l'armée bosniaque à l'époque

23 était une institution en devenir, qui était encore relativement immature;

24 est-ce exact ?

25 R. C'est exact.

Page 112

1 Q. Laissez-moi continuer. Alors la chronologie que vous nous avez donnée

2 ici est la suivante : il y a une réunion à Dobro Polje, ensuite six ou

3 sept jours plus tard, il y a une deuxième visite dans la zone de Dobro

4 Polje par Sefer Halilovic. Après cela, il y a la circonstance au cours de

5 laquelle vous avez remarqué l'ordre donné, et après cela il y a la

6 troisième visite de Sefer, au cours de laquelle il semblait fâché contre

7 Buza. Je voudrais attirer votre attention à cette seconde ou la deuxième

8 visite de Sefer.

9 Vous avez indiqué que vous n'aviez pas vous-même assisté à la réunion.

10 Étiez-vous présent dans la cabane ou alentour à Dobro Polje quand Sefer est

11 arrivé la deuxième fois, ou est-ce que vous étiez ailleurs et vous êtes

12 revenu et vous avez entendu parler de la visite de Sefer par la suite ?

13 R. Je ne me souviens pas très bien de sa deuxième visite. C'est la seule

14 visite dont je me souviens le moins bien. J'ai quitté la zone très peu à

15 cette époque, si c'était le cas, ce n'était que durant quelques heures.

16 S'il est venu à ce moment-là, quand ceci s'est produit, peut-être étais-je

17 absent. Mais j'ai entendu dire par d'autres gens qu'il est arrivé à Dobro

18 Polje, j'ai entendu parler de détails de sa visite, qui confirme le fait

19 que je me souviens très mal de ceci, parce qu'il y avait quelqu'un je

20 crois, le commandant adjoint des affaires d'effectifs, qui disait qu'il

21 avait été avec le général Halilovic, qu'il avait rassemblé un groupe de

22 combattants, qu'il avait une mission informelle pour discuter de la lutte

23 pour la Bosnie-Herzégovine. Mais je ne me souviens pas, or il dit que ceci

24 s'est passé avec certitude.

25 Q. Vous n'allez pas pouvoir commenter sur ce point, mais je vais vous

Page 113

1 poser la question néanmoins. Nous avons eu des éléments de preuve, Hodzic,

2 qui concerne une visite à Dobro Polje, qui est peut-être au courant de

3 cette ooccasion-là ou pas, mais il dit qu'à cette occasion-là, Halilovic

4 avait parlé aux troupes ou à certains troupes et, a indiqué qu'ils devaient

5 se comporter correctement vis-à-vis des civils et des prisonniers de

6 guerre. J'allais vous demander si vous étiez en mesure de confirmer cela ou

7 non. Si Halilovic avait fait une telle déclaration en présence de Sefko

8 Hodzic ou pas. Je devrais vous poser la question suivante, pouvez-vous

9 confirmer ou infirmer d'une manière ou d'une autre, que cela s'est passé ?

10 R. Quand j'ai parlé au commandant adjoint, pour les affaires, les

11 questions d'effectifs, j'ai appris que c'était le cas, or, je n'étais pas

12 là. Cette personne a insisté sur le fait que Halilovic avait fait une telle

13 déclaration, qu'il avait parlé de l'objectif d'établir un état

14 multiethnique, il n'a pas parlé de la méthode de combat ou de combattre la

15 population civile, quelle que soit leur appartenance ethnique. Ce n'était

16 pas un des objectifs. C'est un fait à Dobro Polje à l'époque. Peut-être que

17 Sefko Hodzic était là à l'époque; c'est très possible.

18 Q. A votre connaissance, d'après ce que vous avez entendu parler dans les

19 médias ou par des soldats, votre opinion était que Sefer Halilovic voulait

20 absolument que l'armée bosniaque ne blesse ou ne tue pas de civils

21 innocents; est-ce exact ?

22 R. Jusqu'en septembre 1993, puisque c'est la période de laquelle nous

23 parlons, les tentatives de l'ABiH de ne pas détruire les bâtiments

24 religieux d'autres croyances ont été mises en lumière. Ils ont également

25 déclaré que la population ne serait pas persécutée à cause de son

Page 114

1 appartenance ethnique. Des centres de rassemblement avaient également été

2 établis pour des membres d'autres confessions, de groupes ethniques. Ceci

3 était des objectifs qui étaient soulignés. C'étaient les principes sur

4 lesquels ils insistaient.

5 Q. Quand vous dites "ils" insistaient, Sefer Halilovic, en tant que

6 dirigeant de l'armée, était un de ceux qui insistaient sur cela; est-ce

7 exact ?

8 R. Je ne sais pas exactement, parce que je n'avais que très récemment

9 rencontré le commandant Halilovic à l'époque. Vous devez comprendre que les

10 moyens de communication étaient relativement mauvais. Le général Halilovic

11 n'aurait pu avoir d'autres positions, sans quoi, il aurait eu le pouvoir de

12 mettre en œuvre ces positions si cela eut été différent. Etant donné la

13 manière dont l'ABiH s'est conduite alors qu'il était commandant, je crois

14 que l'on peut dire qu'ils se sont conduits en accord avec les principes

15 auxquels je viens de faire référence. L'ABiH s'est conduite d'une manière

16 qui démontrait un respect des principes auxquels je viens de faire

17 référence. Vous ayant donné cette explication, je peux vous confirmer que

18 c'était bien le cas.

19 Q. Bien. Je vous en remercie. Maintenant, puis-je vous demander d'apporter

20 votre attention à l'occasion à laquelle vous avez examiné le document, cet

21 "ordre". Vous avez examiné le document dans le bureau d'Enver Buza.

22 Maintenant, vous avez dit pourquoi vous aviez regardé le document, qu'il

23 s'agissait -- que vous aviez agi par curiosité et par préoccupation de ce

24 qu'il allait arriver à vous et aux hommes dont vous étiez responsable.

25 Puis-je simplement vous demander ceci : pendant que le commandant Buza

Page 115

1 était en dehors de la pièce, combien de temps avez-vous eu pour examiner le

2 document ?

3 R. Peut-être que j'ai eu une minute environ pour l'examiner.

4 Q. Je crois que votre état d'esprit, à l'époque, c'est que vous comme les

5 autres dans le bataillon, vous attendiez des ordres, des ordres pour aller

6 au combat. Vous saviez que quelque chose allait arrivé, mais vous ne saviez

7 pas quoi. Vous attentiez des ordres; est-ce exact ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Quand vous avez vu ce document sur le bureau, la conjecture ou la

10 conclusion que vous avez tirée à ce moment-là, c'est qu'il s'agissait peut-

11 être de l'ordre; est-ce exact ?

12 R. Oui.

13 Q. Evidemment, vous ne vous êtes pas attardé pour vérifier si ce document

14 était un ordre ou une directive ou tout autre type de document militaire.

15 Plutôt que cela, vous vous êtes penché directement sur la substance, sur le

16 contenu pour voir ce qui avait trait au mouvement du Bataillon indépendant

17 de Prozor; est-ce exact ?

18 R. Oui, c'est exact. En fait, je n'ai pas eu assez de temps pour lire tout

19 le document. J'ai simplement essayé de voir quels allaient être les axes

20 d'attaque du Bataillon indépendant de Prozor. Une fois que j'avais

21 découvert quels étaient ces axes, j'ai arrêté de lire le document.

22 Q. Vous n'avez certainement pas vérifié la signature au bas de ce

23 document, à savoir, s'il s'agissait de Sefer Halilovic ou pas, n'est-ce pas

24 ?

25 R. J'ai l'impression que Sefer Halilovic avait signé le document. Je ne

Page 116

1 peux pas le confirmer. Je ne peux pas confirmer si son nom était seulement

2 tapé à la machine ou s'il était également signé personnellement. Pour que

3 le document soit entièrement valide, il faudrait que dans le coin inférieur

4 droit, il y ait le nom tapé à la machine, ainsi que la signature et le

5 tampon de l'institution à laquelle il est fait référence dans le coin

6 supérieur gauche. Evidemment, je n'ai pas eu le temps de vérifier ceci.

7 Q. Dans cette minute que vous aviez pour l'examiner, vous avez simplement

8 regardé s'il était fait référence au Bataillon indépendant de Prozor. Quand

9 vous avez vu que cela le concernait, vous avez tenté de voir quels étaient

10 les détails des mouvements qui étaient prévus pour les actions; est-ce

11 exact ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Vous n'êtes pas capable de dire s'il s'agissait ici d'un ordre ou d'une

14 proposition. Vous ne pouvez pas faire de commentaires à ce sujet; est-ce

15 exact ?

16 R. Je ne peux pas dire à coup sûr de quoi il s'agissait.

17 Q. Je comprends. A l'époque, personne ne vous avait expliqué que Sefer

18 Halilovic était, quelles qu'aient été ses autres responsabilités, qu'il

19 était responsable d'une équipe d'inspection, et qu'il avait été nommé par

20 le commandant Rasim Delic ?

21 R. Personne ne nous a dit quoi que ce soit à l'époque. Personne ne nous

22 avait dit qu'on avait mis sur pied une équipe d'inspection. Personne ne

23 nous avait parlé du rôle du Général Delic sur le terrain. Je répète ceci;

24 la seule confirmation que nous avions reçue, c'est que cette action allait

25 être menée par le général Halilovic.

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1 Q. Je comprends. Sur base de ces informations que vous aviez par le

2 commandant Buza, quel qu'ait été ce niveau, le niveau de fiabilité, vous

3 avez agi sur la base de cette information; est-ce exact ?

4 R. Oui, absolument. C'est exact.

5 Q. Je vous remercie pour cela.

6 M. MORRISSEY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

7 je vais passer maintenant à un sujet qui requiert l'examen d'ordres par le

8 témoin. Je vais montrer au Témoin G l'ordre qui allait -- auquel il a été

9 fait référence plus tôt par le commandant Buza. Je voudrais faire ceci : en

10 somme, je crois qu'il faudrait tout faire ensemble à cause de la

11 numérotation. Peut-être pourrions-nous nous interrompre --

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être nous pourrions nous interrompre

13 ici et reprendre lundi prochain.

14 Monsieur le Témoin, je regrette de vous dire que vous allez devoir passer

15 votre week-end à La Haye. Vous devez comprendre que vous êtes sous l'empire

16 de votre déclaration solennelle. Ne laissez personne vous parlez, et ne

17 parlez à personne de votre témoignage. Est-ce que vous comprenez ceci ?

18 R. Oui, je comprends, et j'accepte aussi.

19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons suspendre

20 la séance. Madame l'Huissière va retirer les stores. Je vais vous demander

21 de rester pour le moment.

22 L'audience est suspendue.

23 --- L'audience est levée à 16 heures 57 et reprendra le lundi 11 avril

24 2005, à 14 heures 15.

25