Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 24 mai 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez citer l'affaire, s'il vous

7 plaît, Monsieur le Greffier.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-01-48-

9 T, le Procureur contre Sefer Halilovic.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Messieurs.

11 Bonjour, Monsieur le Témoin.

12 LE TÉMOIN: BAKIR ALISPAHIC [Reprise]

13 [Le témoin répond par l'interprète]

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Est-ce que vous vous êtes bien reposé

16 hier soir ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois bien.

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Etes-vous prêt à poursuivre aujourd'hui ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

21 Monsieur Re, veuillez poursuivre votre interrogatoire principal.

22 M. RE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

23 Juges.

24 Interrogatoire principal par M. Re : [Suite]

25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Alispahic. Je voudrais vous rappeler

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1 où nous en étions hier avant de faire la pause. Vous parliez du fait que

2 vous aviez rencontré M. Emin Zebic au commissariat de Jablanica et qu'il

3 vous décrivait un massacre dont il avait entendu dire que ce massacre avait

4 été perpétré par les Unités de la Police. Vous avez dit que ce massacre

5 avait eu lieu dans un village. Quel était le nom de ce village ?

6 R. Je ne crois pas avoir dit que l'on ait parlé d'un village particulier.

7 On a juste dit que cela s'était passé dans un certain village, un village

8 c'est ce que l'on m'a dit au commissariat.

9 Q. Est-ce que vous vous souvenez maintenant que l'on vous ait dit le nom

10 de l'endroit où ces massacres avaient eu lieu ?

11 R. Je crois qu'il s'agissait du village de Grabovica, je crois que c'est

12 le nom du village.

13 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de ce village, de Grabovica, avant

14 votre conversation de ce jour-là avec M. Zebic ?

15 R. C'est la première fois que l'on ait parlé de ce village. Je ne m'y

16 étais jamais rendu auparavant ou avant cet incident où ce crime, ni

17 d'ailleurs après, mais je l'ai situé sur une carte. Il s'agit d'un village

18 en aval du fleuve Neretva. C'est tout ce que je sais. Je sais que la

19 population de ce village était en majorité croate.

20 Q. Comment est-ce que vous avez situé ce village sur la carte ? A ce

21 moment-là ou a un autre moment ?

22 R. Quand je me suis intéressé à savoir où exactement se trouvait le

23 village. Aucun citoyen ordinaire ne trouverait que c'est un village

24 particulièrement important, je crois. C'est simplement un village le long

25 de la route, c'est aussi simple que cela, donc, je l'ai retrouvé plus tard

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1 sur la carte. La police dans leur - comment dire - dans leur travail

2 utilise des cartes, donc, vous pouvez lire le nom de ce village sur une

3 carte et ainsi le situer.

4 Q. Lorsque vous avez vu M. Zebic, qui d'autre était avec vous lorsqu'il

5 vous parlait du massacre qui s'était déroulé dans ce village ?

6 R. Je ne me souviens d'aucun nom. Je crois que le commandant y était et

7 quelques-uns de ses associés, deux ou trois personnes peut-être, Emin Zebic

8 et deux ou trois de ses associés.

9 Q. Lorsque vous discutiez avec M. Zebic, où se trouvait

10 M. Halilovic ?

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Pardon, je ne sais pas si le témoin a dit

12 qu'il parlait ce matin-là, peut-être que j'ai raté quelque chose --

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Mieux vaudrait d'abord établir

14 exactement quand cela se passait.

15 M. RE : [interprétation]

16 Q. Je croyais vous avoir entendu dire hier qu'il s'agissait de la

17 "matinée," mais je ne retrouve pas cela. Je ne sais pas pourquoi j'avais

18 cela à l'esprit, je crois l'avoir lu, mais enfin, s'il y a un doute, à quel

19 moment exactement de la journée est-ce que vous avez eu cette discussion

20 avec M. Zebic ? Dans la matinée, dans l'après-midi, le soir ?

21 R. C'était dans le courant de la matinée, pas très tôt, mais dans la

22 matinée, alors que l'on reprend - comment dire - on reprend le travail

23 normalement ou on reprend les activités normales. En tout cas, cela se

24 passait dans la matinée.

25 Q. Où se trouvait M. Halilovic pendant cette réunion avec

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1 M. Zebic ?

2 R. Quand je me trouvais au commissariat, c'est-à-dire, quand nous étions

3 en train de discuter, quelque chose s'est produit et je ne sais pas où se

4 trouvait le général Halilovic. Je ne savais vraiment pas où il se trouvait,

5 où il logeait, où il était à ce moment précis. Toutefois, lorsque j'ai posé

6 la question, M. Zebic m'a fait un téléphone afin que je puisse essayer

7 d'atteindre

8 M. Halilovic, afin de pouvoir fixer un rendez-vous pour pouvoir discuter de

9 la question. Zebic a composé un numéro quelque part et il a atteint le

10 général Halilovic, donc, c'est depuis le commissariat que j'ai eu cette

11 conversation téléphonique.

12 Q. Est-ce que vous nous dites que vous avez demandé à M. Zebic de

13 constater M. Halilovic pour vous ?

14 R. Oui, c'est ce que j'ai demandé à M. Zebic, cela me parait logique,

15 puisque Zebic savait où se trouvait qui et où les choses se trouvaient à

16 Jablanica. C'était beaucoup plus facile pour lui de retrouver les gens que,

17 pour moi, il savait où les gens logeaient, je ne faisais que passer par là.

18 Je ne disposais pas de ce genre d'information. Zebic savait où se trouvait

19 le commandement, où se trouvaient les téléphones qui étaient encore

20 opérationnels et qui répondaient à ces téléphones. Je n'avais pas ce genre

21 d'information.

22 Q. Pourquoi souhaitiez-vous parler à M. Halilovic ?

23 R. Je voulais lui transmettre ce que la police de Jablanica venait de me

24 raconter. Je voulais analyser les différentes options, je voulais agir

25 faire quelque chose en tant que policier. Je voulais dire qu'il fallait

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1 agir dans ce genre de situation, faire quelque chose, qu'il fallait soit

2 que l'armée, soit que la police intervienne. Je voulais que la question

3 soit élucidée. Je voulais obtenir des explications. C'est la raison

4 principale pour laquelle je voulais voir le général.

5 Q. Pourquoi souhaitiez-vous parler à ce général, en particulier, et non

6 pas à tout autre haut responsable militaire, qui aurait pu se trouver dans

7 la région ?

8 R. Du fait de sa position, il était le chef de l'état-major, c'est-à-dire,

9 le numéro deux de l'armée toute entière de Bosnie-Herzégovine. En deuxième

10 lieu, je croyais ou je savais ou j'avais compris que le général Halilovic

11 était le commandant de l'opération qui était en cours, et qu'il était la

12 personne qui détenait toutes les informations. Dans le contexte, tout ce

13 qui se passait sur le terrain, cela s'étendait à des incidents ou des

14 crimes potentiels. Donc, la logique reposait sur le fait, d'abord sur la

15 hiérarchie -- la structure hiérarchique, la filière de commandement, et

16 aussi pour dire les choses comme elles sont, sur le fait que M. Halilovic

17 était le chef de l'opération. En fin de compte, dans la brève conversation

18 que j'ai eue, je me suis rendu compte que tous les autres commandants, qui

19 se trouvaient auprès du général Halilovic, se comportaient de la même façon

20 vis-à-vis de lui, le considérant comme la personne responsable, le chef.

21 Q. Quand vous parlez d'une brève conversation, à quoi faites-vous allusion

22 au juste ?

23 R. La brève conversation que j'ai eue pendant mon séjour, c'est-à-dire,

24 après avoir quitté le commissariat, lorsque je suis arrivé au poste de

25 commandement avant. Nous avons discuté en présence d'autres officiers, je

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1 me suis rendu compte que ces autres officiers avaient aussi à faire avec le

2 général Halilovic, en conséquence, j'y ai passé très peu de temps. Voilà

3 comment on peut situer ce qui s'est passé.

4 Q. J'y reviendrai dans un instant. Vous avez dit que vous croyez ou que

5 vous aviez compris que le général Halilovic était le commandant de

6 l'opération qui se déroulait, et que c'était lui qui disposait de toutes

7 les informations pertinentes. Qu'est-ce qu'il y a au juste qui vous a

8 permis de comprendre ce jour-là, que c'était

9 M. Halilovic qui commandait l'opération en cours ?

10 R. Tout ce qui se passait, après la réunion à Zenica et les discussions

11 qui y ont eu lieu, la resubordination de l'Unité spéciale à l'ABiH et, pour

12 l'essentiel, la déclaration ou le discours fait par le général Halilovic

13 concernant les besoins des forces militaires et ces besoins étaient

14 réellement légitimes, aussi je me fondais sur des conversations que j'avais

15 eues avec différents commandants, tels que le général Delic et d'autres

16 commandants encore. C'était sur la base de tous ces éléments que je me suis

17 rendu compte et c'est une question de logique, tenant compte de la façon

18 dont je fonctionne. J'avais réfléchi, je me suis rendu compte que le

19 général Halilovic était responsable de ce secteur et de cette activité, en

20 particulier. Quand je parle "d'activité", je me réfère, en fait, à deux

21 notions. J'entends par là qu'en tant que numéro un de cette opération, il

22 aurait dû savoir ce qui se passait et, en deuxième lieu, il était le numéro

23 deux de l'armée. Dans le secteur, il était le plus haut gradé, le plus haut

24 responsable, donc, c'est à lui qu'il incombait normalement de résoudre tout

25 problème, raison pour laquelle j'ai voulu parler directement au général,

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1 raison pour laquelle nous avons eu cette discussion.

2 Q. Vous avez fait allusion à une déclaration, un discours fait par le

3 général Halilovic sur les besoins des forces militaires; de quoi s'agit-il

4 au juste ? Est-ce que cela s'est passé à Zenica ou à un autre moment ?

5 R. A Zenica, oui. La définition des activités. En ce qui concerne

6 l'opération de Neretva ou l'action de Neretva, je pense que l'on peut en

7 parler ainsi, puisque cette action s'appelait Neretva 93, c'est à Zenica

8 que les raisons et les besoins ont été identifiés. Tout simplement, tous

9 les éléments, qui concernaient le début de cette action, ont été identifiés

10 à ce moment-là lors de cette réunion, je crois, alors que je m'y trouvais

11 le premier jour de la réunion; encore plus tard, je crois, puisque la

12 réunion a duré quelque temps. D'un point de vue opérationnel, toutes ces

13 choses ont été définies avec beaucoup de précision, sans doute que des

14 documents ont été rédigés. Des unités ont été affectées. Différentes

15 tâches, enfin, tout ce que fait l'armée dans le cours de cette activité

16 ordinaire, son travail technique, si vous voulez, il y avait beaucoup de

17 choses à faire. Ce n'était pas une chose aisée que de déplacer ces unités,

18 de les amener dans le secteur concerné. Il n'était pas facile non plus de

19 s'assurer un approvisionnement suffisant. Même si cela avait été une

20 activité de paix, elle aurait été suffisamment compliquée, mais, dans le

21 type de situation qui régnait, c'est encore bien plus difficile et cela

22 nécessitait beaucoup d'activités et de nombreuses obligations.

23 A partir du moment où cette réunion a eu lieu, j'essaie de mettre un peu de

24 l'ordre dans tout cela. Je me suis rendu compte que le général Halilovic

25 était le commandant de l'opération qui était sur le point de débuter. C'est

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1 la raison pour laquelle je me suis adressé à lui.

2 Q. Vous avez dit aussi, il y quelques instants, que vous avez compris

3 qu'il était le commandant de cette opération sur la base de conversations

4 que vous avez eues avec différents commandants tels que le général Delic et

5 d'autres encore.

6 Je vous demanderais de nous en dire plus -- de dire plus à la Chambre,

7 concernant les conversations que vous avez eues avec le général Delic et

8 d'autres commandants qui vous ont incités à croire que le général Halilovic

9 était le responsable de cette opération.

10 R. Je vous ai déjà donné les raisons principales. La définition de

11 l'opération qui allait avoir lieu, des besoins auxquels cette opération

12 allait répondre, cela s'est passé au cours de la réunion évoquée. Après

13 cette réunion, j'ai discuté avec le général Delic et il m'a dit que cela

14 serait le général Halilovic, personnellement, qui serait responsable de

15 cette opération, qu'il avait tous les pouvoirs nécessaires pour mobiliser

16 le matériel et les provisions nécessaires ainsi que les unités nécessaires

17 afin qu'il puisse mener à bien ses activités de combat avec succès. C'est

18 ce dont je me souviens. Ce sont les choses dont j'ai discuté avec Delic.

19 Dans ce contexte où la structure militaire reflétait la structure de

20 commandement, par exemple, Vehbija Karic, je ne suis pas sûr quel était son

21 grade, à l'époque, mais il était un grade élevé où, par exemple, Zicro

22 Suljevic, Veljko Bilajac, on s'adressait à eux comme un des commandants, on

23 les appelait "chef", mais, dans ce contexte, il y avait très souvent des

24 changements -- une succession rapide de changements de grades ou de

25 positions. Le général Halilovic au départ était commandant et, tout d'un

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1 coup, il est devenu chef.

2 Il y avait une sorte d'inertie qui participait à ces changements. Donc, les

3 gens s'adressaient à lui en tant que chef ou commandant et, quand ils

4 n'étaient pas sûr de quelque chose, ils s'adressaient au général Halilovic.

5 Quant aux choses dont les gens n'étaient pas sûrs ou voulaient s'assurer,

6 je ne peux pas vous en dire plus. Je ne pensais pas que c'était juste dans

7 ce genre de détail, donc, je ne le faisais pas. J'essaie de vous expliquer

8 quel était le contexte et quels étaient les rapports entre les différentes

9 personnes.

10 Q. Pour revenir à la conversation que vous avez eue avec le général Rasim

11 Delic, est-ce que vous vous souvenez combien de temps après la réunion de

12 Danica et avant que vos unités ne se rendent en Herzégovine, que vous avez

13 eu cette conversation avec lui ?

14 R. Nous avons souvent des conversations à Sarajevo. Il a été souvent

15 nécessaire d'entrer en contact avec le général Delic pour de nombreuses

16 raisons puisqu'il y avait de nombreux problèmes qu'il fallait résoudre.

17 Nous étions dans une situation où nous étions confrontés à tous les

18 problèmes dont j'ai parlé hier au cours de ma déposition, situations que je

19 vous ai décrites. Nous avions cette tâche qu'il nous fallait mener à bien,

20 d'une façon ou d'une autre. Donc, je rencontrais le général Delic plusieurs

21 par semaine, nous discutions, nous rencontrions dans ce contexte que je

22 vous ai décrit pour faire face à ces problèmes et pour parler, notamment,

23 des relations entre l'armée et la police.

24 Pour régler ces problèmes, il y avait aussi des différentes positions

25 officielles dont il fallait tenir compte. Delic me disait que c'était un

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1 processus en cours, que certaines unités avaient été transférées, d'autres

2 pas. Il m'a demandé si j'avais préparé certaines unités à être envoyées, si

3 j'avais reçu des informations sur ces problèmes.

4 Q. Quand vous dites "problèmes", est-ce que vous faites allusion à Mostar

5 ici ?

6 R. Je n'ai pas compris votre question.

7 Q. Dans votre dernière réponse, vous avez dit : "Avoir rencontré le

8 général Delic plusieurs fois par semaine car il s'agissait, de façon

9 générale, à trouver une solution à ces problèmes," les problèmes qui

10 existaient entre l'armée et la police. Il vous a demandé si vous aviez

11 préparé des unités pour les envoyer, et on vous a demandé si vous aviez une

12 quelconque information sur ces problèmes en question. Quand vous dites

13 "problèmes", qu'entendez-vous par là ?

14 R. Je crois que vous m'avez mal compris. Ce n'est pas à cause de ces

15 difficultés que Delic m'a posé des questions à propos de ses unités.

16 Lorsqu'il m'a posé des questions là-dessus, il m'a demandé si j'avais

17 préparé ce que je devais faire. Autrement dit, je devais allouer un certain

18 nombre d'unités, autrement dit, mettre à sa disposition un certain nombre

19 d'unités pour cette opération. Mais, pour ce qui est des autres

20 difficultés, ce sont des choses que nous avons abordées de façon générale,

21 autrement dit, les problèmes qui existaient à Sarajevo et comment trouver

22 une solution. Donc, il ne faut pas tout mélanger. Il voulait savoir

23 simplement si j'avais rempli toutes les tâches auxquelles je m'étais engagé

24 au cours de cette opération.

25 Il y avait d'autres questions portant sur les activités et les difficultés

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1 rencontrées à Sarajevo, les activités menées à Sarajevo et les problèmes

2 rencontrés à Sarajevo.

3 Q. Lorsque vous parlez "d'opérations", est-ce que vous faites toujours ici

4 à l'opération en Herzégovine que vous avez appris à connaître sous le nom

5 d'opérations Neretva ?

6 R. Oui.

7 Q. Repartons un petit peu en arrière et parlons des conversations

8 téléphoniques que M. Zebic a eues avec le général Halilovic le matin,

9 depuis le poste de police de Jablanica. Vous dites vous être entretenu avec

10 M. Halilovic. Que lui avez-vous dit ?

11 R. C'était une conversation très brève que nous avons eue et il s'agissait

12 simplement de comprendre qui était présent, c'est tout. Pour pouvoir

13 aborder ce que je souhaitais aborder comme questions et ceci n'était pas à

14 proprement parler une conversation. Nous avons simplement abordé la

15 question de savoir où et quand nous pourrions nous réunir et le général a

16 dit que le mieux serait si je me rendais, moi-même, à la centrale

17 hydroélectrique qui se trouvait à Jablanica; c'est là que se trouvait le

18 poste de commandement avancé. Je crois que le "poste de commandement

19 avancé" était un terme militaire qui décrit un type de poste de

20 commandement.

21 Q. Vous lui avez dit pourquoi vous souhaitiez le rencontrer ?

22 R. Je ne me souviens pas lui avoir invoqué le motif de cette réunion

23 lorsque je lui ai parlé au téléphone. Je lui ai simplement dit que : "Je

24 souhaite vous rencontrer. Il y a certaines difficultés et ce sont pour ces

25 raisons-là que je souhaite vous rencontrer. Peut-être je suis en train de

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1 m'exprimer en détail, mais, très honnêtement, je ne m'en souviens pas

2 aujourd'hui.

3 Q. Qu'avez-vous fait après cette conversation téléphonique que vous avez

4 eue avec M. Halilovic ?

5 R. Après cette conversation, je me suis immédiatement rendu dans les

6 locaux qui se trouvaient tout près de là. Je suis arrivé dans ces locaux et

7 à l'entrée, à la porte, je crois qu'il y avait un soldat qui montait la

8 garde.

9 Ensuite, je suis entré dans une pièce où il y avait un certain nombre

10 d'officiers dont le général Halilovic, Zicro Suljevic, Vehbija Karic était

11 là également ainsi que l'officier Bilajac et peut-être d'autres officiers

12 de haut rang. Ils n'étaient pas si nombreux que cela en revanche. C'est de

13 la pièce qui servait de place de commandement avancé et cela se trouvait à

14 l'intérieur de la centrale hydroélectrique de Jablanica. Cette pièce

15 auparavant était une salle de conférence. A cette époque-là, c'était une

16 pièce qui était utilisée à des fins militaires.

17 Q. Qui avait-il dans cette pièce ?

18 R. Il y avait une longue table avec des chaises tout autour et, sur un

19 mur, il y avait un tableau ou quelque chose comme cela. Je ne sais pas très

20 bien ce qu'il y avait en dessous de ce tableau, mais il y avait des cartes

21 qui recouvraient ce tableau et il avait des inscriptions, et il y avait, je

22 suppose, que c'était des différentes positions des forces qui étaient

23 déployées en Herzégovine qui était indiqué sur cette carte. C'était une

24 carte militaire. Je n'ai pas lu ces cartes, comme on dit dans le langage

25 militaire, donc, je ne pourrais pas vraiment vous dire ce que ces cartes

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1 représentaient, ce qu'il y avait là-dessus. Il se trouve que j'étais assez

2 près de ces cartes pour constater qu'il s'agissait de cartes militaires.

3 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer quelques instants, s'il

4 vous plaît, la pièce D134 qui est la plus grande carte qui se trouve

5 derrière moi ? J'ai dit D134, mais, en réalité, il s'agit de la pièce D131.

6 Q. Monsieur Alispahic, vous dites avoir vu des cartes qui se trouvaient

7 sur le mur, des cartes militaires, semble-t-il. Je vous demanderais, s'il

8 vous plaît, lorsque vous voyez bien cette carte de dire à la Chambre de

9 première instance --

10 R. Je ne vois pas la carte.

11 Q. -- savoir si vous reconnaissez cette carte, si celle qui vient d'être

12 affichée comme étant une carte qui était sur le mur et, deuxièmement, que

13 pouvez-vous dire à propos de cette carte-ci par rapport aux différents

14 types de cartes que vous avez vues au poste de commandement avancé ?

15 R. Je ne puis pas vous dire avec certitude qu'il s'agit précisément

16 de cette carte-ci que j'ai vue sur le mur, cette carte que j'ai sous les

17 yeux aujourd'hui. En me fondant sur ce que j'ai vu, et étant donné la

18 situation dans laquelle je me trouvais alors, étant donné la distance qui

19 se trouvait entre moi et les cartes, je ne peux pas affirmer avec certitude

20 qu'il s'agit de la carte en question.

21 Pour ce qui est du type de carte, compte tenu de mon expérience et de

22 mes rapports avec la police et l'armée pendant la guerre, et compte tenu de

23 mon expérience et de l'habitude que j'ai de travailler avec des cartes, je

24 puis vous dire qu'il s'agit d'une carte typiquement d'une carte militaire

25 qui indique les positions des forces de l'ABiH et du HVO. Je crois que les

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1 autres caractéristiques importantes sont également indiquées sur la carte,

2 comme la disposition des armes, des combats, de matériel militaire, le

3 déploiement des activités. Je crois que tout commandement militaire possède

4 ce type de cartes et je crois que ces cartes évoluent au jour le jour,

5 quelquefois, et je crois que toute modification est immédiatement

6 répertoriée sur la carte, toutes les fois qu'il y a des changements sur le

7 terrain. Ces changements sont immédiatement reportés sur la carte.

8 Si nous regardons le nom de cette opération, le nom de l'opération se

9 trouve en général en haut de la carte.

10 Q. Non, ce n'est pas par rapport à cette carte-ci en particulier. La seule

11 chose que je souhaite savoir si vous avez vu des cartes semblables à celles

12 que vous avez sous les yeux, sur le mur de ce poste de commandement avancé,

13 où vous vous trouviez ?

14 R. Oui, oui, il s'agissait de cartes militaires, qui comportent certains

15 éléments d'information que je viens de vous décrire, et ce sont des

16 informations qui sont consignées sur toute carte militaire, ou de telles

17 cartes militaires doivent exister toutes les fois que des opérations de

18 combat sont menées. Ceci est même dans des postes de commandement moins

19 importants, bien sûr, évidemment, les postes de commandement avancés, où se

20 trouvent les officiers de haut-rang, c'est encore plus davantage le cas.

21 Q. Lorsque vous avez dit, un peu plus tôt, à la Chambre de première

22 instance pourquoi vous pensiez que M. Halilovic était responsable de

23 l'opération et que c'est la raison pour laquelle vous souhaitiez le

24 rencontrer au poste de commandement avancé, qu'il y avait quelque chose eu

25 égard à l'attitude des autres commandants qui se trouvaient avec le général

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1 Halilovic et leur attitude vis-à-vis de lui, c'est ce qui vous a porté à

2 croire que c'est lui qui était en charge de tout cela. Je souhaite que vous

3 disiez à la Chambre de première instance ce que vous avez observé à propos

4 du comportement des autres personnes au poste de commandement avancé ce

5 jour-là, par rapport au général Halilovic.

6 R. Je ne sais pas si ceci sera une explication suffisante, mais, au sein

7 de l'armée et de la police, on voit très clairement qui est le chef et qui

8 ne l'est pas. C'est en raison des systèmes de communication entre les

9 différentes personnes au sein de l'armée, le système de commandement est

10 évidemment très important car la hiérarchie ou la structure permet de

11 comprendre qui est le supérieur hiérarchique. Le général était le chef

12 d'état-major, par conséquent, pour moi, cela ne faisait pas l'ombre d'un

13 doute que c'était lui qui était le numéro un au sein de cette structure de

14 commandement.

15 Q. Comment se comportaient les autres vis-à-vis de lui ? Comment

16 s'adressaient-ils à lui ? Comment s'exprimaient-ils ?

17 R. Étant donné que je ne suis pas resté suffisamment longtemps à cet

18 endroit-là pour observer tout ceci, -- bien comprendre tout ceci, je ne

19 sais pas quoi vous dire à propos des autres officiers. Je ne sais rien à

20 propos de leur grade. Je sais qu'ils remettaient leurs rapports au général,

21 il était tenu informer sur ce qui se passait. Il écoutait et ils écoutaient

22 ses ordres. Si, moi-même, je m'adressais au général, je m'adressais à lui

23 en tant que numéro un de l'armée. Alors, je l'ai fait car je souhaitais

24 m'entretenir avec la bonne personne à propos des difficultés qui étaient

25 les miennes. Je ne pensais pas devoir m'entretenir avec Vehbija Karic. Je

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1 crois qu'en ce qui me concerne, ceci aurait été peu approprié. D'après moi,

2 c'est le général Halilovic qui dirigeait cette opération, pour ce qui est

3 de l'opération en tant que telle et pour ce qui est de la manière dont

4 cette opération devait se dérouler. Lorsque je parle "de la forme et du

5 fond", je vous ai déjà parlé de tout ceci.

6 Q. Comment se passe-t-il entre vous ? Est-ce qu'il s'adressait à vous en

7 parlant du ministère de l'Intérieur et vous-même, vous vous adressiez à

8 lui en tant que général -- ou chef d'état-major.

9 R. Je ne sais pas. Je crois que nous avions des rapports corrects, tels

10 qu'ils existent entre les êtres humains. J'étais en mesure de tout dire au

11 général et vice-versa. Il pouvait tout me dire. Nos rapports n'étaient pas

12 trop formels. Moi-même, je n'étais pas un membre de l'armée; par

13 conséquent, les Règles de subordination de l'armée ne s'appliquaient pas à

14 moi. Qui plus est, les rapports que j'avais avec le général n'étaient pas

15 trop formels. Nous estimions qu'en communiquant de personne à personne,

16 nous arriverions à trouver des solutions plus rapidement, que ce moyen de

17 communication faciliterait notre tâche et nous permettrait d'être plus

18 efficace, donc, notre communication était une communication tout à fait

19 appropriée.

20 Q. Que vous lui aviez-vous dit lors de cette réunion ?

21 R. Lorsque je suis arrivé sur les lieux, il y avait plusieurs officiers de

22 haut rang, ainsi que le général. Je crois qu'ils étaient en train de parler

23 d'une question militaire et de certaines questions militaires, je ne sais

24 pas exactement de quoi il s'agissait. Je suis arrivé à cet endroit-là, j'ai

25 commencé par dire : "Mon Général, tel et tel problème surgit, le poste de

Page 17

1 police m'a rapporté ces informations." Il peut s'agir de questions très

2 importantes. Nous n'en connaissons pas la portée aujourd'hui, mais je crois

3 que ceci n'aurait dû se passer. Je propose, par conséquent, que nous

4 essayions de faire la clarté sur les faits et de prendre des mesures

5 appropriées aux fins de prendre des mesures disciplinaires. Je crois que le

6 général avait déjà été informé en partie ou en tout cas entièrement de ce

7 qui était arrivé. Je me suis rendu compte qu'il considérait qu'il

8 s'agissait là d'un problème très important, qu'il n'était pas indifférent.

9 Après cette conversation que nous avons eue - si je puis l'appeler comme

10 cela - je souhaitais, en ma qualité de ministre de l'Intérieur ou ministre

11 de la Police, le tenir informer de ce qui était arrivé et je souhaitais que

12 les auteurs de cet incident, de ces crimes soient tenus pour responsables.

13 Je souhaitais en tenir informer le général Halilovic. Le général a pris

14 tout ceci en compte. Je crois qu'à cette occasion-là, il m'a dit que

15 l'armée résoudrait cette question avec toutes les ressources dont elle

16 disposait et qu'il était inutile que la police n'intervienne et que les

17 auteurs du crime auraient pu créer un incident avec les policiers. C'est

18 ainsi que j'ai compris les choses et j'ai cru que c'était une solution

19 raisonnable. Je lui ai offert mon aide, j'entends par là toute aide

20 professionnelle par l'intermédiaire de la police, évidemment, puisqu'il

21 avait besoin d'aide. Je mettrais à sa disposition les forces de police. Je

22 crois qu'un autre officier est intervenu, à ce moment-là - c'était peut-

23 être Vehbija Karic - et j'ai réagi en disant qu'il fallait renvoyer ces

24 gens à Sarajevo, qu'ils devaient être écartés de la région pour éviter tout

25 incident à l'avenir. C'était, de façon générale, la teneur de nos échanges

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1 et de ma visite dans la région lorsque je rencontrais le général et les

2 autres personnes. Nous n'avons pas parlé de l'événement en tant que tel et

3 nous n'avons pas parlé de ces questions-là et, après un court séjour à cet

4 endroit-là, j'ai quitté la région.

5 Q. Vous avez dit que vous êtes arrivé à cet endroit-là, et vous dites

6 avoir dit : "Général, il y a tel et tel problème qui a surgi, j'en ai été

7 informée par le poste de police et je pense qu'il peut s'agir d'un problème

8 majeur," ensuite, vous avez dit : "J'ai pensé que le général en avait déjà

9 été informé entièrement ou en partie". Je souhaite apporter une

10 clarification ici. Avez-vous dit au général Halilovic ce que M. Zebic vous

11 avait rapport sur ce qui s'était passé à Grabovica ?

12 R. J'ai transmis au général ce que je savais, ce que j'avais appris d'Emin

13 Zebic. Je crois que, lorsque nous avons parlé de ce problème-là, des crimes

14 commis à Grabovica, ni moi, ni le général Delic ou Zebic avaient tous les

15 éléments d'information, avaient véritablement compris tout ce qui s'était

16 passé à Grabovica. Ce sont des choses dont nous avons entendu parler. Nous

17 avons entendu parler de ces crimes, de cet incident, ceci nous a été

18 rapporté. Nous avons eu des éléments d'information à cet égard. On nous a

19 dit qu'il était impossible de se rendre dans la région et les

20 renseignements dont nous disposions indiquaient un bon nombre de personnes,

21 une vingtaine, une trentaine étaient les chiffres avancés, à ce moment-là.

22 Il y avait, parmi les victimes, des civils, des personnes âgées et des

23 femmes; néanmoins, tous les détails ne nous ont pas été communiqués à

24 l'époque. Telle était la situation au moment où nous nous sommes

25 entretenus.

Page 19

1 Q. D'après vous, quelles étaient les informations dont disposait le

2 général Halilovic à propos des événements des Grabovica ?

3 R. Je ne peux pas estimer cela, je crois que je viens de vous dire que

4 lui-même ne le savait pas. Il ne connaissait l'étendue des crimes à

5 l'époque.

6 Q. Quelle a été votre attitude, à ce moment-là, par rapport à la

7 participation de votre Unité Laste à cette opération ?

8 R. L'incident qui a eu lieu, à ce moment-là, était la goutte d'eau qui a

9 fait déborder le vase car il y a eu un incident provoqué par certains

10 membres de l'armée, par certains individus, c'était véritablement la goutte

11 qui a fait déborder le vase. J'ai été absolument scandalisé, choqué, et

12 j'ai dit que, lorsqu'il s'agissait de cette opération-là, l'opération

13 Neretva, qui devait libérer l'ensemble du territoire jusqu'à Mostar, j'ai

14 dit que je ne permettrais pas à l'Unité Laste de continuer à participer à

15 cette opération. Cette unité pouvait prendre part à des opérations de

16 combat. Elle était déployée à Mostar, mais, après cet incident, j'ai dit au

17 général à ses collaborateurs, la chose que j'ai répété à Delic, que j'étais

18 contre et que je ne permettrais pas à des Unités spéciales de prendre part

19 à cette opération et de continuer à y prendre part.

20 J'avais encore -- j'ai cette impression -- cet événement avait fait

21 une impression très forte sur moi et j'étais encore assez affecté par tout

22 cela et bouleversé par ce qui s'était passé. Donc, j'ai propose qu'il y ait

23 un abandon de cette opération jusqu'à ce qu'on en établisse les faits. Je

24 craignais que ce type de comportement puisse être perpétré à nouveau et

25 qu'il puisse mener des opérations militaires semblables. C'est ainsi que

Page 20

1 j'ai réagi.

2 Q. Quelle a été la réponse ou la réaction de M. Halilovic lorsque vous

3 avez dit que vous souhaitiez vous retirer de cette opération, de retirer

4 vos hommes ?

5 R. Ce que je puis dire, c'est que j'ai supposé que ce n'était pas

6 important pour lui à l'époque parce qu'il n'y avait pas beaucoup de

7 personnes, qui appartenaient à l'Unité spécialisée, qui en faisaient

8 partie. 50 personnes, cela en fait pas mal de personnes, mais ceci n'est

9 pas en nombre très important et aucun commandement ne changerait d'opinion

10 à cause de cela. Cela ne changerait pas son opération. Il s'est décidé de

11 continuer avec l'opération et il a dit que les membres de l'armée devaient

12 se soumettre à la discipline qui pourrait les contrôler, mais je ne pense

13 pas que cela mette en cause l'opération. Je crois qu'il s'agissait là d'une

14 question d'évaluation militaire et il avait pris la décision pour continuer

15 avec cette opération pour pouvoir libérer cette zone.

16 Q. Est-ce que M. Halilovic a répondu au moment où vous avez dit que vous

17 voulez vous retirer de cette opération ? Il y a quelques instants, vous

18 avez dit que vous pensez que ceci n'était pas important pour lui, mais est-

19 ce qu'il vous a donné une réponse ?

20 R. Je ne peux réellement pas me souvenir si le général avait donné une

21 réponse concrète quant à la question que je lui ai posée.

22 Q. Très bien.

23 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer au témoin la photo 0299-

24 2334, sur notre liste de pièces à conviction ? Il s'agit de la pièce D65

25 ter.

Page 21

1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera MFI 432.

2 M. RE : [interprétation]

3 Q. Il s'agit là de quelle photographie ?

4 R. Je suppose qu'il s'agit d'une photo aérienne, une photographie de

5 Jablanica. On y voit la structure urbaine de Jablanica.

6 Q. Pouvez-vous voir l'immeuble dans lequel se trouvait le poste de

7 commandement avancé au mois de septembre 1993 ?

8 R. Si l'on suit la route ou le chemin qui rentre à Jablanica, à gauche.

9 Q. Je vous demanderai par la suite de l'indiquer sur la carte. Mais est-ce

10 que vous le voyez maintenant ?

11 R. Oui.

12 Q. Très bien. Pourriez-vous juste --

13 R. Oui, oui, je vois ici Jablanica.

14 Q. Est-ce que vous pourriez marquer par un cercle ce bâtiment ?

15 R. [Le témoin s'exécute]

16 Q. Est-ce que vous pourriez écrire les lettres "IKM" juste en dessous.

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 M. RE : [interprétation] Je demanderai le versement de cela au dossier ?

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Pas d'objection.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] C'est versé au dossier.

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P432.

22 M. RE : [interprétation]

23 Q. Vous étiez avec qui à la réunion en question ?

24 R. Au poste de commandement avancé ?

25 Q. Oui.

Page 22

1 R. Il y avait le général Halilovic, Vehbija Karic, Zicro Suljevic,

2 Bilajac, et d'autres officiers dont je ne me souviens pas maintenant, mais

3 ils n'étaient pas très nombreux.

4 Q. Ce que je souhaitais savoir -- excusez-moi, je vous ai interrompu en

5 plein milieu de votre phrase.

6 R. Je pense qu'à ce moment-là, il n'y avait pas beaucoup d'officiers au

7 poste de commandement avancé, donc, je ne peux pas me souvenir de beaucoup

8 de noms. Je ne vous donne les noms que des personnes dont je suis sûr

9 qu'elles étaient là, que j'avais vu là-bas et je pense que, pendant toute

10 la durée des activités militaires, ils étaient là-bas et qu'ils avaient

11 participé également à la régulation d'autres activités militaires.

12 Q. Ma question visait à savoir si vous y êtes allé seul ou vous étiez

13 accompagné ?

14 R. Je me suis rendu tout seul dans mon véhicule. Je savais où ce poste de

15 commandement avancé se trouvait, c'est-à-dire, on m'avait dit où il fallait

16 que je me rende. Avant de m'y rendre, je ne le savais pas où ce poste de

17 commandement avancé se trouvait. Je ne connaissais que l'endroit où se

18 trouvait le poste de police de Jablanica. Toujours est-il que je m'y suis

19 rendu seul.

20 Q. Après la réunion avec M. Halilovic au poste de commandement avancé, où

21 est-ce que vous êtes allé ?

22 R. J'avais d'autres tâches que je devais effectuer à Jablanica, qui

23 n'étaient pas très importantes. Je devais, par la suite, rencontrer à

24 Konjic, Rusmir Mahmutcehajic. Il était l'ancien ministre du gouvernement de

25 Bosnie-Herzégovine.

Page 23

1 M. RE : [interprétation] Pourriez-vous montrer au témoin la pièce à

2 conviction D188 [comme interprété] ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que Mahmutcehajic n'est pas bien

4 épelé dans le compte rendu d'audience. Il s'agit de Rusmir Ahmutcehajic.

5 M. RE : [interprétation]

6 Q. Nous allons apporter des corrections plus tard dans le compte rendu

7 d'audience et je vous remercie de nous l'avoir signalé.

8 Est-ce que vous voyez ce document devant vous à l'écran ? Il s'agit d'un

9 document du 9 septembre 1993, qui s'adresse au 4e Corps d'armée et où on

10 dit : "Que M. Alispahic doit être le lendemain à Konjic à 10 heures du

11 matin, le 10 septembre, pour rencontrer

12 M. Rusmir Mahmutcehajic," et Sefer Halilovic, le chef de l'état-major, y

13 est également mentionné.

14 Vous avez dit que vous aviez rendez-vous avec M. Mahmutcehajic; est-ce que

15 le document que vous voyez ici fait référence à cette réunion ?

16 R. C'est le document où l'on me parle du moment exact du rendez-vous. J'ai

17 été tout simplement informé au moment où je partais de Sarajevo pour

18 l'Herzégovine. Je m'étais tout simplement mis d'accord avec M.

19 Mahmutcehajic que nous allions nous rencontrer quelque part dans la région,

20 sans préciser exactement le moment quand cela devait avoir lieu. On devait

21 discuter des questions qui relevaient de ses compétences et que cela allait

22 se faire par le biais du 4e Corps d'armée. Nous n'avions pas décidé au

23 préalable de l'heure à laquelle nous devrions nous rencontrer. Ici, il est

24 écrit "à 19 heures 30", qui marque l'heure à laquelle nous devions nous

25 rencontrer. Je n'avais pas vu auparavant ce document. On m'avait tout

Page 24

1 simplement transmis oralement le lieu et l'heure du rendez-vous.

2 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu l'heure à laquelle vous

3 deviez vous rencontrer.

4 M. RE : [interprétation]

5 Q. Est-ce que vous avez bien parlé de 19 heures 30 -- 19 heures, l'heure

6 qui était marquée dans ce document ?

7 R. J'ai tout simplement lu ce qui était marqué dans ce document. Ce qui

8 est écrit ici c'est "19 heures 00".

9 Q. Est-ce que les dates qui figurent sur ce document concordent avec ce

10 que vous avez retenu dans votre mémoire ? Etait-ce bien l'heure à laquelle

11 vous avez rencontré M. Mahmutcehajic et

12 M. Halilovic ?

13 R. Je pense que cela doit correspondre puisqu'il s'agit là d'un document

14 et tout le monde sait que M. le Ministre Mahmutcehajic était un homme très

15 précis et ponctuel, et sans aucun doute, c'était bien l'heure à laquelle la

16 réunion devait avoir lieu parce que

17 M. Mahmutcehajic ne change jamais d'heure de rendez-vous. Il ne rallonge

18 jamais la durée d'un rendez-vous. Il est très précis, donc, je pense que

19 ceci doit être exact.

20 Q. Avez-vous rencontré M. Mahmutcehajic, ce jour-là, après avoir eu

21 rendez-vous avec M. Halilovic ?

22 R. Oui, nous avions eu un rendez-vous, une réunion de travail. M.

23 Mahmutcehajic à ce moment-là avait d'importantes choses à résoudre en tant

24 que ministre de l'Energie. Il devait s'occuper des questions de logistique

25 de fournir en combustible l'armée et la police. Il avait essayé d'aider en

Page 25

1 sa qualité de ministre. Il était en tant que ministre également chargé de

2 l'industrie militaire. A Konjic, nous fabriquions de la munition pour

3 l'infanterie. Je me suis rendu avec le ministre Mahmutcehajic à l'usine en

4 question et il avait parlé également avec des ingénieurs et le directeur

5 qui travaillait à l'usine. Il avait parlé des questions qui relevaient de

6 ses compétences. M. Mahmutcehajic a été logé. Il était dans un bâtiment

7 militaire dans la proximité immédiate de Konjic, c'est là-bas que nous

8 avons eu notre entretien. Toute notre discussion concernait les activités

9 militaires. Voilà c'est comme cela que s'est passé.

10 Q. Est-ce que vous nous parlez ici d'un rendez-vous que vous avez eu avec

11 lui, ce jour-là, ou de deux rendez-vous ?

12 R. Ce jour-là, il n'y avait eu qu'une seule rencontre, c'était impossible

13 que nous ayons deux réunions. Mais nous tous qui travaillons dans le

14 domaine de la défense, nous avons tout le temps eu des réunions avec

15 Mahmutcehajic parce que toutes les questions de logistique concernant

16 l'approvisionnement en énergie, c'était avec lui qu'on essayait de les

17 résoudre, et il essayait de nous aider.

18 Q. Vous avez dit que vous avez d'abord vu -- visité l'usine de munitions

19 avec lui, que par la suite vous avez eu un entretien avec lui à l'endroit

20 où étaient logés les militaires; est-ce que je vous ai bien compris ?

21 R. Il est aussi possible que je sois allé visiter avec lui l'usine des

22 munitions le lendemain -- en fait, je m'excuse, je pense que peut-être ce

23 que vous avez dit est exact parce que, quand je suis arrivé à Konjic, je

24 suis arrivé au poste de police et j'avais appris que Mahmutcehajic y était

25 déjà. Je pense que la deuxième partie de la journée et avant notre réunion,

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1 que nous nous étions rendus à l'usine de munitions. Je ne puis pas

2 l'affirmer avec certitude, mais ces réunions avaient eu lieu dans ce

3 contexte-là.

4 Q. Vous avez parlé de cet entretien-là, qui était présent à l'entretien,

5 est-ce que M. Halilovic y était ?

6 R. Je pense que le général Halilovic avait eu beaucoup d'obligations,

7 après je crois qu'il est arrivé à la réunion, je pense qu'on avait discuté

8 en premier lieu des questions qui intéressaient le ministre Mahmutcehajic,

9 donc des questions qui relevaient de son travail. Il y avait également un

10 certain nombre de collaborateurs de M. Mahmutcehajic, j'étais présent, il y

11 avait Vehbija Karic peut-être, quelques uns de ses collaborateurs. Il y

12 avait peut-être également des personnes qui travaillaient dans le domaine

13 de la logistique militaire. On essayait de discuter des questions de

14 logistique qui permettraient la continuation des activités militaires, des

15 activités de combat.

16 Q. Avait-on parlé des événements qui avaient eu lieu à Grabovica ?

17 R. On avait parlé de cet événement-là, mais je dois souligner que l'on

18 n'en avait pas parlé dans le contexte de la réunion dont nous parlons. On

19 en avait parlé dans un contexte informel, puisqu'on ignorait ce qui s'était

20 passé exactement, on ne disposait pas de toutes les informations

21 nécessaires. Je pense que moi-même et le général Halilovic nous en avions

22 parlé avec Mahmutcehajic, nous avions parlé de ce qui s'était passé.

23 Personnellement, j'ai été étonné que ce crime avait eu lieu, que je

24 n'arrivais pas à l'admettre, j'ai parlé avec le général Halilovic et donné

25 des instructions au poste de police dans le sens où il devait entreprendre

Page 27

1 toutes les mesures nécessaires pour que ce problème soit résolu. J'ai

2 également dit qu'il s'agissait de quelque chose qui n'aurait jamais due

3 arriver à l'ABiH. Je dois dire que Mahmutcehajic était également stupéfait.

4 Il avait également réagi de façon à exprimer qu'il n'approuvait pas cet

5 incident. Il disait qu'il fallait tout faire pour établir qui étaient les

6 auteurs du crime, qu'il fallait qu'ils soient sanctionnés. Même si, par

7 ailleurs, c'était un homme ne se mêlait pas dans des affaires militaires,

8 mais il avait réagi en tant qu'être humain. Vers la fin de notre entretien,

9 au moment où je voulais déjà partir pour Sarajevo, il avait suggéré qu'une

10 fois à Sarajevo j'en informe le président et le général Delic, qu'il ne

11 fallait pas ne pas parler de ce problème-là, qu'il ne fallait pas le

12 cacher. C'était cela la réaction de Rusmir, c'était cela son attitude en la

13 matière.

14 Q. Est-ce que vous avez eu l'intention d'en informer le président

15 Izetbegovic et le général Delic ?

16 R. Je n'avais aucun doute par rapport à cela, je n'en ai pas aujourd'hui

17 non plus, j'ai pensé qu'il s'agissait de la première chose que je devais

18 faire en tant que quelqu'un qui avait été sur les lieux, je devais tout

19 simplement aller les voir et leur demander à ce que toute la lumière soit

20 faite sur cet incident. C'était mon intention première de le faire à mon

21 retour à Sarajevo, je pense encore aujourd'hui que c'était la façon

22 appropriée de réagir.

23 Q. Est-ce que vous en avez informé -- est-ce que vous avez parlé de votre

24 intention de voir le président Izetbegovic et le général Delic ? Est-ce que

25 vous avez parlé de votre intention au général Halilovic ?

Page 28

1 R. Non, je considérais cela tout simplement comme étant mon obligation qui

2 émanait de la fonction que j'occupais, à ce moment-là.

3 Q. Je voudrais que l'on soit un peu plus précis. La deuxième réunion que

4 vous avez eue avec M. Halilovic, où avait-elle eu lieu ?

5 R. Vous voulez parler de la réunion avec Rusmir Mahmutcehajic avec

6 Halilovic et les personnes chargées des questions de logistique.

7 Q. Oui, tout à fait.

8 R. Il s'agissait d'un bâtiment qui s'appelait Arka, tout simplement en

9 proximité immédiate de Konjic. Il s'agit-là d'une installation militaire

10 qui était très sophistiquée, c'était un immeuble qui a été construit pour

11 servir de bâtiments militaires. Il y avait également quelques petits

12 bâtiments qui servaient comme lieu de réunion. Dans un de ces petits

13 bâtiments qui étaient juste à côté de la rivière Neretva, nous avons tenu

14 notre réunion.

15 Q. A quel moment, êtes-vous rentré à Sarajevo ?

16 R. Je suis rentré à Sarajevo probablement cette nuit-là. Pourquoi est-ce

17 que je dis cette nuit-là, je précise que c'était la nuit parce qu'on ne

18 pouvait rentrer à Sarajevo que pendant la nuit. Pendant la journée, il

19 était impossible de rentrer à Sarajevo à cause des combats qui mettaient en

20 danger toute entrée ou sortie de Sarajevo. Pour accéder à Sarajevo en

21 descendant le mont Igman et c'était impossible de le faire dans la journée

22 puisque les dangers étaient trop grands, et nombreuses étaient des

23 personnes qui avaient péril sur cette route-là. Je suis arrivé à Sarajevo

24 pendant la nuit et le lendemain matin j'ai été à mon poste et je suis allé

25 voir les personnes dont je vous ai parlées.

Page 29

1 Q. J'ai oublié de vous poser une question tout à l'heure. Vous souvenez-

2 vous d'avoir vu Sefko Hodzic pendant que vous étiez à Jablanica ou à

3 Konjic, je pense au jour où vous aviez eu votre entretien avec Halilovic et

4 avec Mahmutcehajic ?

5 R. J'ai vu en passant, j'ai croisé le journaliste Hodzic. Je pense que

6 c'était à Konjic. Je pense que nous avons eu un échange informel. Il

7 voulait savoir où je me rendais et ce que j'étais en train de faire. Je

8 pense lui avoir dit que je me rendais à une réunion organisée par Ruzmir

9 Mahmutcehajic. Par ailleurs, Sefko Hodzic était le journaliste qui envoyait

10 des rapports aux médias de Sarajevo pendant la durée de cette opération.

11 Il en informait les médias à Sarajevo qui, par la suite, le publiait. Il

12 parlait d'éventuels succès de l'armée et ainsi de suite. C'était cela le

13 travail de Sefko Hodzic.

14 M. RE : [interprétation] Il est presque 10 heures 30, Monsieur le

15 Président, Messieurs les Juges. Peut-être que nous pourrions maintenant

16 procéder à la pause.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, tout à fait. Nous allons reprendre à

18 11 heures.

19 --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

20 --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Re, veuillez poursuivre.

22 M. RE : [interprétation]

23 Q. Monsieur Alispahic, nous en sommes maintenant au moment où vous avez

24 discuté avec M. Delic. Avez-vous posé des questions concernant votre

25 réunion avec M. Delic et cette réunion que vous avez eue avec M.

Page 30

1 Izetbegovic ?

2 Tout d'abord, vous nous avez dit que vous êtes rentré à Sarajevo le

3 lendemain. Après votre réunion avec M. Halilovic, vous êtes allé voir M.

4 Delic. Pourquoi êtes-vous allé voir M. Delic ?

5 R. La raison principale pour laquelle je m'y suis rendu dans la matinée -

6 je ne me souviens pas de l'heure exacte, mais c'était dans la matinée - en

7 tout cas, je me suis rendu au commandement où se trouvait le général Delic

8 et la raison principale c'était pour l'informer des choses que j'avais lors

9 de mon séjour à Jablanica et en Herzégovine. Je lui ai dit que j'avais reçu

10 les informations de base du chef du poste de police, puis je lui ai raconté

11 ce que j'avais entendu dire lorsque je me trouvais au poste. Je lui ai dit

12 que j'en avais informé le général Halilovic, que j'en avais aussi parlé à

13 Rusmir à Konjic. Enfin, je lui ai dit que j'étais venu l'informer, lui

14 également, de toutes ces choses parce que nous avions de très bons rapports

15 et je pensais pouvoir lui parler, notamment, de ce que j'avais appris, et

16 aussi le prévenir qu'il avait là un problème à résoudre.

17 Pour être tranquille, moi-même, je voulais en informer le général,

18 personnellement. C'était mon point de vue, je suis resté peu de temps

19 auprès du général, peut-être une demi-heure et, pendant ce temps nous

20 n'avons pas discuté uniquement de ce problème-là, mais d'autres questions

21 aussi. Le général Delic m'a fait savoir qu'il avait déjà tenu certaines de

22 ces informations, mais je n'avais pas l'impression qu'il en savait

23 beaucoup. Il semblait qu'il n'était pas conscient de toute l'ampleur du

24 problème, moi non plus d'ailleurs.

25 Q. Comment a-t-il réagi à votre visite et au fait que vous lui avez

Page 31

1 transmis les informations que vous aviez reçues sur les éléments à

2 Grabovica ?

3 R. J'ai vu qu'il était perturbé ou bouleversé - je ne sais pas quel terme

4 d'utiliser au juste - mais qu'il regrettait cet état de fait. Sa réaction

5 m'a fait comprendre que, selon lui, cela n'aurait pas dû se produire, que

6 c'était inadmissible, que c'était honteux, c'est l'impression qu'il m'a

7 donnée. Il a dit qu'il allait, personnellement, exiger qu'une enquête soit

8 menée, et qu'il aille veiller, personnellement, à ce que cela soit fait.

9 Q. Est-ce qu'il vous a dit à un moment quelconque qu'il avait ordonné

10 qu'une enquête soit menée ?

11 R. Après notre rencontre dans les jours qui ont suivi, nous nous sommes

12 revus à plusieurs reprises pour différentes raisons, afin de régler

13 différents problèmes, des questions qui relevaient de nos compétences.

14 Ainsi, enfin je ne peux pas l'affirmer avec certitude, mais le général m'a

15 bien dit qu'il avait donné l'ordre d'enquêter sur ces choses. Il voulait

16 recevoir de plus amples informations, ou plutôt je lui ai demandé s'il

17 avait reçu de plus amples informations, des informations plus fiables à ce

18 sujet. Il m'a dit qu'il avait pris certaines mesures à cette fin. Il m'a

19 dit : "J'ai envoyé une dépêche." Je ne savais pas quel était le sujet de la

20 dépêche, mais j'ai compris que cela se rapportait à l'incident et qu'il

21 était probable que cela correspondait à un ordre qu'il avait donné, afin

22 qu'une enquête soit menée sur ces faits et que les faits puissent être

23 établis.

24 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait soumettre au témoin la

25 pièce D157 ?

Page 32

1 Q. En attendant, est-ce qu'il y avait d'autres personnes qui ont assisté à

2 la réunion entre vous-même et M. Delic, ou est-ce qu'il n'y avait que vous

3 et lui ?

4 R. Je crois qu'il y avait que nous deux.

5 Q. Si vous voulez bien vous reporter au document, que vous voyez sur la

6 gauche de l'écran, un ordre, en date du 12 septembre 1993, portant le nom

7 de Rasim Delic. Au bas de la page, vous avez dit il y a un instant, que

8 d'après vous, enfin, ce que vous avez compris, il avait donné un ordre;

9 avez-vous déjà vu ce document --

10 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, cela ne traduit pas

11 avec précision ce qu'il a dit. Il a dit qu'une dépêche avait -- enfin,

12 Messieurs les Juges, vous savez ce qu'il a dit. Il a dit : "Je lui ai

13 demandé s'il avait obtenu des informations plus fiables à ce sujet et il a

14 dit : 'J'ai pris certaines mesures à cet effet. Il m'a dit qu'il avait

15 envoyé une dépêche.' Je ne savais pas quel était le sujet de la dépêche,

16 mais j'ai compris qu'elle se rapportait à l'incident et que, très

17 probablement, il s'agissait d'un ordre qu'il avait donné afin qu'une

18 enquête soit menée sur cette affaire."

19 C'est ce que le témoin a dit.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

21 M. RE : [interprétation] Ce que j'ai fait c'était paraphrasé ce que le

22 témoin a dit, j'ai compris que cela se rapportait à l'incident et, très

23 probablement, et cetera.

24 M. LE JUGE LIU : [interprétation] J'espère que votre paraphrase correspond

25 bien à ce que le témoin a dit. Je vous demanderais de le refaire et de

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1 prendre en compte les objections formulées par la Défense.

2 M. RE : [interprétation] En fait, je vais citer plutôt que de paraphraser,

3 cela prendra plus de temps, mais c'est ce que je vais faire.

4 Q. Très bien. Monsieur Alispahic, il y a un moment, vous avez dit et je le

5 cite : "Il m'a dit, je cite : 'J'ai pris certaines mesures à cette fin.

6 J'ai envoyé une dépêche.' C'est ce qu'il m'a dit. Je ne savais pas quel

7 était le sujet de la dépêche, mais j'ai compris qu'elle se rapportait à

8 l'incident et que, très probablement, il s'agissait d'un ordre qu'il avait

9 donné afin qu'une enquête soit menée pour établir les faits."

10 Maintenant, pour revenir à ce que vous avez dit, il y a quelques instants,

11 concernant le document --

12 R. J'aimerais vous donner une explication aussi simple que possible.

13 Q. Dans un instant, je voulais d'abord vous demander si vous avez vu ce

14 document, avant de venir à La Haye.

15 R. Non, je n'ai jamais vu ce document auparavant.

16 Q. Est-ce que les informations, que l'on lit dans ce document, concordent

17 avec votre compréhension des mesures qui ont été prises par Rasim Delic,

18 d'après ce qu'il vous a dit ?

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, j'estime que cette

20 question n'est pas admissible. Le témoin a dit certaines choses dans sa

21 déposition concernant ce que M. Delic lui a dit, et la Chambre a l'ordre

22 sous les yeux. Si le témoin a des informations concernant ce document, il a

23 peut-être des choses à dire qui sont pertinentes. Mais lui demander s'il

24 pense que le document concorde ou reprendre les termes utilisés par mon

25 éminent confrère : "Est-ce que les informations concordent votre

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1 compréhension de ce que M. Delic a dit ?"

2 Cela revient à demander si ce document reflète bien ce qui a été dit

3 par M. Delic ? Il n'appartient pas au témoin d'apporter une réponse à la

4 question, il appartient à la Chambre de l'apprécier à la lumière de tous

5 les autres éléments de preuve.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, et aussi à la lumière du

7 témoignage et du fait que le témoin a dit qu'il n'a jamais vu ce document

8 auparavant.

9 M. RE : [interprétation] J'insiste sur la question, sur le fait de savoir

10 si ce document concordait bien avec ce que M. Delic lui a dit. La Défense a

11 remis en cause ce document. On a dit beaucoup de choses sur l'origine du

12 document, des critiques et l'Accusation estime qu'elle a le droit de

13 soumettre le document au témoin puisqu'il a dit que M. Delic lui avait dit

14 qu'il avait donné un ordre dans des termes similaires à ceux qu'on trouve

15 dans le document. Je crois que nous sommes en droit de lui demander si les

16 termes utilisés dans ce document concordent bien avec ce que M. Delic lui a

17 dit. Je pense que c'est une façon de procéder qui doit être autorisé pour

18 l'Accusation pour démontrer la véracité de ce document puisque l'auteur du

19 document n'est pas ici. C'est un autre élément de preuve qui doit -- qui

20 tente à établir la fiabilité ou qui tente à établir que ce document est

21 bien légitime.

22 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Procédez lentement. Tout d'abord, il faut

23 établir si le document inclut des ordres; et en deuxième lieu, vous pouvez

24 demander au témoin ce que M. Delic a dit exactement à ce moment-là; ensuite

25 en troisième lieu, vous pouvez lui soumettre le document pour voir si cela

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1 correspond bien à ce que M. Delic a dit.

2 M. RE : [interprétation] Très bien. Je vais procéder de la sorte.

3 Q. Monsieur Alispahic, tout d'abord, quand vous avez parlé de "dépêche"

4 tout à l'heure, est-ce que c'est un terme qui se référait à des ordres ?

5 R. Selon les termes que j'utilise, et que l'on utilise au sein du

6 ministère de l'Intérieur, une "dépêche" est un moyen de communication. L'on

7 peut envoyer différents types de documents qui peuvent s'étendre à des

8 ordres, des instructions, toute sorte de document peut être envoyé par le

9 biais d'une dépêche. Dans le cas particulier, c'est bien par le biais d'une

10 dépêche que le général a donné un ordre concernant certaines choses, donc

11 je souhaiterais que l'on comprenne bien ce que j'ai dit. Je ne sais pas

12 comment vous interprétez ce que j'ai dit, mais je vous répète : une dépêche

13 est tout simplement un moyen de communication ou de transmission de

14 certains documents. Il s'agit d'une manière d'expédier des documents à

15 quelqu'un et il peut s'agir d'information, d'un ordre, d'instruction. Dans

16 ce cas précis, un ordre a été envoyé par le biais d'une dépêche.

17 Q. En deuxième lieu, si vous essayez de vous souvenir de ce que M. Delic

18 vous a dit, qu'est-ce que M. Delic vous a dit sur la teneur de cet ordre ?

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Un instant, Messieurs les Juges, c'est tout

20 à fait -- enfin, c'est une question qui oriente le témoin, qui ne reflète

21 pas de façon exacte ce que le témoin a dit et c'est une façon de procéder

22 qui est tout à fait inéquitable. On lui pose des questions avec un ordre

23 qu'il a sous les yeux, alors qu'il a dit très clairement auparavant ce

24 qu'il en savait. La Chambre a autorisé mon éminent confrère à poser trois

25 questions. La deuxième était : quels sont les termes exacts qu'il a

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1 utilisés ? Mon éminent confrère tente de contourner cela. Il faudrait que

2 la question suivante porte sur les termes exacts utilisés par M. Delic.

3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je pense que vous pouvez formuler la

4 question comme vous l'avez faite dans la première partie de la question,

5 c'est-à-dire, essayez de vous souvenir ce que

6 M. Delic vous a dit ? Un point c'est tout.

7 M. RE : [interprétation]

8 Q. Monsieur Alispahic, essayez, s'il vous plaît, de vous souvenir ce que

9 M. Delic vous a dit concernant ce qu'il avait fait, quoi qu'il ait fait ?

10 R. Il a dit qu'il avait envoyé un ordre visant à ce qu'il y ait une

11 enquête sur ce qui s'était passé à Grabovica, un ordre visant à établir les

12 faits. Il a envoyé un ordre concernant Grabovica. Je ne peux rien dire au

13 sujet de ce document, mais le général Delic a dit qu'il avait envoyé un

14 ordre afin qu'une enquête soit menée au sujet de l'incident.

15 Q. Maintenant, la troisième chose que le Président Liu m'a demandée de

16 faire c'est de vous soumettre le document et de vous demander si ce qui

17 figure dans ce document correspond bien à ce que M. Delic a dit.

18 R. Je crois que ce que M. Delic a dit est conforme au contenu de cet

19 ordre, ou de la dépêche qui contient tous les éléments se rapportant à

20 l'enquête. Cet ordre donne même les instructions sur ce qu'il faut faire,

21 sur ce qu'il fallait faire. Je ne sais pas si vous voulez qu'on entre dans

22 ces détails maintenant, mais ce document fait état d'un certain nombre

23 d'exigences faites au commandement et concernant ce qui devait être fait.

24 Je crois que tous les éléments sont contenus, se retrouvent dans cet ordre.

25 Q. Il y a un petit moment je vous ai interrompu lorsque vous nous avez dit

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1 que vous souhaiteriez nous expliquer quelque chose. Est-ce qu'il y aurait

2 encore quelque chose que vous souhaiteriez nous expliquer ? Quelque chose

3 au quelle vous vous êtes référé plus tôt.

4 R. Peut-être, à la fin, une fois que nous en aurons terminé avec toute la

5 discussion, j'aimerais déclaré certaines choses qui ne se rapportent pas à

6 cette question bien précise. Donc, peut-être vaudrait-il mieux d'attendre

7 la fin ?

8 Q. Est-ce que vous voudriez bien -- enfin, ce que vous souhaiteriez vous

9 dire se rapporte à quelle question alors, à quoi ? Sans entrer dans les

10 détails mais de quel sujet s'agit-il ?

11 R. Oui, je peux vous le dire tout de suite. J'ai certaines choses écrites

12 concernant les activités qui ont eu lieu conformément aux différents plans,

13 notamment, le plan Trebevic. Je voulais mettre en exergue le fait que ce

14 plan avait été vérifié ou entériné par la présidence de Bosnie-Herzégovine,

15 présidence au complet avec tous les membres présents, et cette présidence a

16 également approuvé le plan opérationnel. Le général Delic et moi-même, nous

17 n'avons fait qu'exécuter l'ordre donné par la présidence concernant le plan

18 Trebevic.

19 Q. Très bien. Nous y reviendrons un peu plus tard. Maintenant, revenons à

20 votre rencontre avec M. Delic.

21 Hier, vous avez dit à la Chambre que vous avez eu des discussions

22 régulières avec M. Delic concernant les problèmes se rapportant aux Unités

23 à Sarajevo. Est-ce qu'à cette réunion particulière, parce que vous avez

24 informé M. Delic des événements de Grabovica, vous avez parlé de ces

25 problèmes concernant les Unités à Sarajevo ?

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1 R. Non, parce qu'il n'y avait pas beaucoup de temps. Ce n'était pas

2 nécessaire. J'étais sur le point d'aller voir le président, donc la réunion

3 a été très brève, et nous n'avons discuté que des choses que je viens de

4 vous décrire.

5 Q. Lorsque vous discutiez avec M. Delic et sur la base de votre expérience

6 en tant que chef de la police de Sarajevo, et en tant que ministre de

7 l'Intérieur, quel était votre point de vue, à l'époque, concernant les

8 difficultés ou autres qui peuvent entraver une enquête, ou qui peuvent

9 rendre difficile toute tentative d'arrêter les personnes qui étaient

10 membres de ces Unités de Sarajevo à Grabovica ?

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai une objection à

12 la question. D'abord, elle en comprend deux et, en deuxième lieu, cette

13 question repose sur une présomption qui n'était pas étayée pas le moindre

14 élément de preuve ici.

15 M. RE : [interprétation] Pardonnez-moi, je retire la question. Voilà qui

16 est fait.

17 Q. Lors de cette réunion, est-ce que vous avez parlé avec

18 M. Delic de la possibilité d'arrêter ou de faire arrêter des membres des

19 brigades qui avaient prétendument commis ou qui étaient prétendument les

20 auteurs des massacres à Grabovica ?

21 M. MORRISSEY : [interprétation] Je suis désolé, mais, encore une fois,

22 cette question repose sur une présomption, présomption selon laquelle il y

23 aurait eu des membres des brigades qui auraient prétendument commis le

24 massacre à Grabovica et, d'après les éléments de preuve à l'époque, les

25 auteurs du massacre n'avaient pas été identifiés.

Page 39

1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] En effet, il s'agit d'une question

2 complexe, qui comporte plusieurs volets. Je vous prie de procéder étape par

3 étape.

4 Nous pouvons retenir la première partie de la question. Tout d'abord, il

5 faut établir s'il y avait ou non des discussions entre eux et, ensuite,

6 passer à la teneur de ces discussions.

7 M. RE : [interprétation]

8 Q. Est-ce que vous avez parlé à M. Delic de l'identité des personnes qui

9 avaient prétendu prétendument commis les crimes à Grabovica ?

10 R. Tout d'abord, il était tout à fait évident que les auteurs du crime

11 étaient des membres de l'armée, c'était une évidence pour nous tous. A

12 l'origine, nous, du moins, la police, avaient leurs hypothèses concernant

13 les auteurs possibles de ces crimes et il était logique de présumer que ces

14 crimes avaient perpétrés par les soldats qui y étaient déployés, qui se

15 trouvaient sur place pour mener les opérations de combat. Conformément à

16 cette logique, nous en avons déduit l'identité des auteurs possibles ou

17 plutôt de quels membres, de quelles unités, il s'agissait. Notre objectif

18 principal était d'identifier les auteurs individuels et nous voulions mener

19 une enquête exhaustive afin d'identifier les auteurs pour faciliter la

20 tâche de la police militaire et des autres organes judiciaires.

21 Toutefois, il y avait aussi un souci, nous étions préoccupés par la

22 possibilité que, si les auteurs n'étaient pas identifiés et isolés, que ces

23 mêmes personnes provoqueraient un autre incident ou se comporteraient de

24 nouveau de façon similaire, à la lumière de la situation et de qui étaient

25 ces personnes, elles représentaient un risque pour l'armée et d'autres

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1 membres de l'armée. C'est la raison pour laquelle j'ai insisté pour que

2 l'on prenne au sérieux ce problème, raison pour laquelle j'ai réagi de la

3 sorte. De mon point de vue, il fallait absolument résoudre ce problème.

4 Q. Ce qui m'intéresse c'est l'identité des personnes qui ont commis le

5 massacre et l'objection formulée par mon éminent confrère était

6 manifestement erronée, il y a un instant, parce qu'hier, à la page 72, le

7 témoin a dit que M. Zebic lui avait dit qu'il y avait eu des informations

8 opérationnelles, il a parlé de l'armée à Sarajevo, il a dit ou peut-être

9 des membres des Unités de Celo ou de Saco, peut-être qu'ils avaient tué des

10 personnes dans le village. Ce sont les informations que j'ai reçues à

11 l'origine. Le témoin a dit qu'il a transmis ces informations à M. Halilovic

12 et à M. Delic, et je présume que ce sont les mêmes informations qu'il a

13 données, c'est le fondement de ma question.

14 Monsieur Alispahic, est-ce que vous avez discuté ? Vous avez dit plus tôt

15 que vous avez donné ces informations à M. Delic et à

16 M. Zebic -- que vous aviez donné à M. Delic les informations que

17 M. Zebic vous avait données.

18 M. MORRISSEY : [interprétation] J'ai une objection, Messieurs les Juges.

19 Cette question est beaucoup trop longue. Je le fais parfois aussi, je

20 l'avoue. La meilleure de procéder c'est de poser une question, notamment,

21 dans le cas de l'interrogatoire principal, une simple question.

22 Est-ce que Celo ou Caco a été mentionné dans le cadre de cette discussion ?

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, mais il s'agit d'une question dont

24 on a déjà parlé à plusieurs reprises et peu importe, si l'Accusation veut

25 s'assurer des faits, cela ne pose de problèmes. Nous connaissons tous le

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1 contexte dans lequel cette question s'inscrit.

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, vous avez raison.

3 Pour que les choses soient très claires, je ne cherche par à argumenter à

4 tout prix, mais, pour que le témoin comprenne aussi, quand je me réfère à

5 des "auteurs", j'entends par là des meurtriers et non pas les unités dont

6 les meurtriers étaient membres. Il faudrait que cela soit clair. Il n'a

7 jamais été dit par M. Zebic ou par quelconque qu'à ce stade, les auteurs

8 avaient été identifiés. C'est l'objection déjà formulée. Mon ami, mon

9 confrère dit que ce n'est pas exact.

10 Mais c'est exact. Bien entendu, il est exact de dire que les unités ont été

11 mentionnées. Le témoin l'a dit hier et c'est bien le cas.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Entendons la suite, ce que le témoin a à

13 dire.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de l'identité des auteurs,

15 j'ai dit très clairement aujourd'hui que nous ne disposions pas de leurs

16 noms au début, ce qui est logique pour la raison que j'ai citée. Parce

17 qu'Emin Zebic m'a dit que des membres de l'Unité de Celo - je crois qu'il

18 également évoqué l'Unité de Caco - mais je sais que ce sont les unités, les

19 membres de l'Unité de Celo qui ont commis ce crime.

20 M. RE : [interprétation]

21 Q. Avez-vous parlé de cela avec M. Delic, autrement dit, quand vous avez

22 dit que c'était les Unités de Celo et peut-être les Unités de Caco ou, en

23 tout cas, les membres de ces unités qui avaient commis ces crimes ?

24 R. C'est exactement ce que je lui ai dit. Je lui ai dit que j'y étais, que

25 j'avais entendu cela et que les gens disaient que c'était précisément les

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1 membres de ces unités là qui avaient commis ces crimes.

2 Q. Après avoir vu M. Delic, êtes-vous allé voir le Président ? Etes-vous

3 allé rencontrer le président Izetbegovic, le président de la Bosnie-

4 Herzégovine ?

5 R. Après avoir vu M. Delic, et cette réunion était courte, comme je vous

6 l'ai déjà indiqué, je me suis rendu directement à la présidence pour aller

7 rencontrer le président de la Bosnie-Herzégovine, comme cela avait été

8 prévu.

9 Q. Vous y êtes-vous rendu seul ?

10 R. Oui, oui, seul.

11 Q. Vous étiez seul, tous les deux. Il y avait vous et

12 M. Izetbegovic; c'est cela ?

13 R. Oui.

14 Q. Qu'avez-vous dit à M. Izetbegovic ?

15 R. J'ai trouvé M. Izetbegovic dans son bureau et je lui ai dit que j'étais

16 là pour le tenir informé de ce qui s'était passé sur le terrain. Compte

17 tenu du fait que j'étais rentré de la Bosnie-Herzégovine, la veille, en

18 tenant des propos assez brefs, je l'ai tenu informer de ce que j'avais

19 appris et de ce que le chef de la police du poste de police m'avait dit. Je

20 lui ai communiqué cela, je lui ai dit que je m'étais entretenu avec le

21 général Delic et le général Halilovic, des membres de l'armée, et que

22 j'étais finalement venu le voir pour l'informer directement, lui et le

23 président. Ils voulaient savoir ce qui s'était passé et, dans la mesure du

24 possible, je lui ai relaté ce que j'avais entendu dire, comme je vous l'ai

25 dit ici aujourd'hui. Il était visiblement troublé, il était visiblement

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1 bouleversé par cette annonce. Je crois avoir été le premier à lui

2 communiquer la nouvelle, à cause de ses réactions. En tout cas, le

3 président a condamné cela en ma présence, en entendant cela, c'était

4 toujours des éléments qui n'avaient pas été vérifiés, mais il n'était pas

5 d'accord avec cela. Il a demandé à son secrétaire qu'une réunion soit

6 organisée avec le général Delic. Ils se sont entretenus au téléphone et le

7 général Delic était là pour le voir qu'il avait été informé de façon très

8 générale du problème en question. Il a exigé que le général adopte une

9 attitude sérieuse à cet égard et à ce problème. Je ne sais pas pourquoi il

10 a réagi ainsi, mais je crois qu'il souhaitait lancer un avertissement au

11 général, autrement dit, qu'il était important de faire la lumière sur tout

12 ceci. C'était généralement parlant la teneur de la conversation que j'ai

13 eue avec le président ce jour-là.

14 Q. Je souhaite repartir un petit peu en arrière et évoquer la réunion que

15 vous avez eue avec Rasim Delic. Je ne sais pas si vous avez entièrement

16 répondu à cette question ou en partie. Vous dites, avoir dit à M. Halilovic

17 la vieille que vous ne souhaitiez pas que vos unités prennent part

18 davantage à cette opération, étant donné ce qui s'est passé, avez-vous dit

19 quelque chose de semblable à

20 M. Delic ?

21 R. Oui, et j'en ai parlé à Delic également. J'estimais que cela ne devrait

22 pas être permis. Je ne souhaitais pas que mes unités prennent part à cette

23 opération -- ne prennent plus part à cette opération. J'ai dit qu'ils

24 pouvaient rester à Mostar pendant quelque temps, occuper les postes qu'ils

25 occupaient à l'époque.

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1 Q. Quelle a été la réponse de M. Delic à tout ceci ?

2 R. Je crois que c'est quelque chose qu'il acceptait. Il n'a fait aucun

3 commentaire. Il a simplement dit : "Bien."

4 Q. Vous dites avoir parlé au général Delic, le commandant en chef, le

5 commandant de l'armée, ainsi que le président Izetbegovic, et qu'en est-il

6 du chef du service de Sûreté militaire, est-ce que vous l'avez contacté ou

7 est-ce que vous lui avez parlé par rapport aux événements de Grabovica ?

8 R. Le chef de la sûreté militaire, je ne peux pas dire que je me suis

9 entretenu avec lui, dit plutôt que c'est moi qui ai demandé à lui relater

10 un certain nombre d'éléments car j'étais allé voir le général Delic et le

11 président Izetbegovic. C'était une question de courtoisie, nous avions de

12 bons rapports, c'est la raison pour laquelle je souhaitais que le chef des

13 services de Sûreté militaire, M. Jasarevic, soit tenu au courant de tout

14 ceci, afin d'éviter qu'il y ait une quelconque malentendu, pour m'assurer

15 qu'il ne comprenne pas mal tout ceci.

16 Q. Je souhaite que vous clarifier ce point, s'il vous plaît. "Je ne dirais

17 pas qu'à proprement parler que je me suis entretenu avec lui." Lui avez-

18 vous parlé ? Avez-vous eu une conversation téléphonique ? Avez-vous eu une

19 réunion ? Avez-vous envoyé une lettre par rapport aux événements de

20 Grabovica ?

21 R. J'ai parlé avec Jasarevic au téléphone, à l'époque, mais je ne lui

22 parlais pas très souvent. Il avait toujours une coopération avec le chef du

23 service de Sûreté, Nedzad Ugljen, qui était un homme avec lequel il

24 coopérait. Ils avaient des contacts quotidiens ou des contacts réguliers.

25 Ils communiquaient beaucoup entre eux. Il s'agissait simplement -- il

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1 s'agissait pour moi de rester courtois et d'assurer le contact entre les

2 deux institutions, mais nous n'avons parlé de rien en particulier. Je crois

3 qu'il a simplement à continuer à remplir ses fonctions. Ses supérieurs

4 hiérarchiques avaient été informés, toutes les personnes importantes

5 avaient été informées, par conséquent, je n'estimais pas qu'il était --

6 j'estimais qu'il n'était pas nécessaire d'aller voir le chef des services

7 de Sûreté militaire pour tout lui expliquer. L'information avait été

8 échangée entre les services de Sûreté de l'Etat et les services de Sûreté

9 militaire par rapport aux événements qui s'étaient produits dans le

10 contexte de l'échange de renseignements. C'était plutôt comme cela.

11 Par la suite, je n'ai quasiment eu aucun contact avec Jasarevic.

12 Mais, j'étais en contact avec mon propre chef des renseignements du service

13 secret, mais la communication avec Jasarevic n'était pas vraiment très

14 fréquente en tout cas en ce qui concernait cela.

15 Q. Je souhaite que vous fassiez la clarté là-dessus, eu égard à votre

16 dernière réponse. Je ne sais si vous lui avez véritablement parlé de

17 Grabovica ou non. "Ce que j'ai fait ou ce que j'ai dit, n'était qu'un geste

18 de courtoisie, car il s'agissait de maintenir la communication entre les

19 deux institutions."

20 Est-ce que vous êtes en train de dire que vous lui avez parlé ou que

21 vous ne lui avez pas parlé de Grabovica ?

22 R. Je lui ai certainement dit que j'étais allé voir les supérieurs

23 hiérarchiques sur l'incident en question qui s'était produit à Grabovica.

24 Donc, la raison de mon appel était de lui dire que j'étais allé voir ces

25 personnes, pour évoquer la question de Grabovica. Lorsque je lui ai parlé,

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1 je lui ai dit également, je lui ai parlé de ce qui s'était passé à

2 Grabovica, mais je ne m'attendais à aucune réaction de sa part car cela

3 n'aurait pas été logique et j'ai compris que le général Jasarevic était au

4 courant de cette affaire, et il s'agissait d'une simple question de

5 courtoisie. C'est la raison pour laquelle je l'ai appelé, bien que

6 j'estimais que cela n'était pas véritablement nécessaire.

7 Q. Quelle autorité ou pouvoir avaient les membres de la police civile du

8 MUP pour enquêter sur des crimes qui auraient été prétendument commis par

9 des membres de l'armée ?

10 R. La police n'avait aucun pouvoir en la matière, n'avait aucun pouvoir

11 sur les membres de l'armée. J'entends par là les membres de l'armée qui

12 étaient intégrés à des unités militaires et qui prenaient part à des

13 opérations de combat. Certaines unités qui étaient engagées dans ce genre

14 d'activités relevaient de l'autorité de leur propre commandant et

15 répondaient, par conséquent, à leur supérieur hiérarchique. Nos pouvoirs se

16 limitaient au cas où des civils commettaient des infractions, c'est à ce

17 moment-là que nous pouvions intervenir, mais nous n'avions aucun pouvoir,

18 en particulier. Certains documents, certains ordres avaient été donnés à

19 cet effet. Il y avait également des instructions orales qui avaient été

20 données en vertu de quoi la police ne devait pas intervenir dans les zones

21 de combat. Je crois que ceci s'applique à toutes les armées du monde,

22 autrement dit, que la police n'a aucun pouvoir dans une région où il y a

23 des combats. La même chose s'appliquait au MUP de la Bosnie-Herzégovine. Je

24 ne parle pas seulement de l'affaire qui nous concerne ici. Je parle d'un

25 principe communément appliqué.

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1 Q. La police avait-elle le pouvoir de mener ou de lancer sa propre

2 enquête, eu égard aux meurtres commis à Grabovica ?

3 R. D'après les pouvoirs qui lui étaient conférés par la loi et en

4 application des documents qui régissaient le travail de la police, la

5 police avait le pouvoir et voire même l'obligation de mener une enquête. Il

6 s'agissait pour elle de recueillir des renseignements et tout élément se

7 rapportant à la Sûreté de l'Etat. C'était leur rôle, je pense, au service

8 de Sûreté. Pour ce qui est du service de Sécurité publique, je crois qu'il

9 n'avait aucune autorité et aucun pouvoir. Il n'aurait pu en avoir à moins

10 que l'armée ne leur ait demandé de les aider en la matière.

11 Les services des Renseignements - et ceci faisait partie du ministère

12 - avaient le pouvoir de rassembler les éléments d'information, des

13 renseignements, et c'est compte tenu de cela qu'ils ont recueilli des

14 renseignements sur cet incident-là, et sur d'autres incidents qui se sont

15 produits au cours de la guerre.

16 Q. Quel organe avait l'autorité ou le pouvoir de mener une enquête sur les

17 meurtres commis à Grabovica ?

18 R. Très honnêtement, je ne peux pas répondre à cette question de façon

19 précise. Mais il devait s'agit d'organe militaire et d'organe judiciaire

20 militaire qui avaient été mis en place en Bosnie à l'époque si ce n'était

21 pas civil, c'étaient des organes judiciaires civiles, si ce n'était pas

22 militaire. Ce sont sans doute des organes judiciaires militaires ou des

23 organes judiciaires civiles qui auraient dû réagir.

24 Q. Quel organe aurait été responsable de la conduite de l'enquête aux fins

25 d'enquêter sur les meurtres de Grabovica ?

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1 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, à la lumière de la

2 dernière réponse fournie par le témoin, j'avance qu'il s'agit toujours de

3 la même question. Il a indiqué qu'il ne pouvait pas répondre de façon

4 précise, mais qu'il devait sans doute s'agir d'un organe militaire. Donc,

5 c'est simplement une autre façon de poser la même question et je m'y

6 oppose.

7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je crois que le témoin a déjà

8 répondu à cette question.

9 M. RE : [interprétation] Veuillez m'accorder quelques instants, s'il vous

10 plaît.

11 Q. La police civile a-t-elle jamais pris part aux enquêtes pour les crimes

12 commis par les membres de l'armée ?

13 R. Oui, dans certains cas, en application des demandes qui avaient été

14 faites par l'armée.

15 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre, s'il vous plaît, quel

16 était le rôle joué par l'armée et par la police civile dans des

17 circonstances comme celle-ci ?

18 R. Je ne peux parler que de l'époque où j'étais, moi-même, ministre de

19 l'Intérieur. Toutes les activités policières qui intervenaient dans le

20 cadre de problèmes d'ordre militaire, qu'il s'agisse d'enquêtes ou

21 d'incidents à propos de certains crimes, seraient lancées lorsqu'une

22 requête en avait été faite par l'armée. En principe, les services de

23 Renseignements de l'armée ou la Police militaire déposait alors une demande

24 par écrit ou faisait une demande directement, et ceci serait enregistré, et

25 s'il s'agissait d'une demande d'aide autrement dit, ils avaient besoin de

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1 la coopération de la police et devaient utiliser les ressources de la

2 police. Ceci était précisé, par exemple, lorsqu'une enquête devait être

3 menée ou qu'il fallait fournir une opinion d'expert. Le ministère de

4 l'Intérieur disposait de ce type de ressources à l'époque et avait peut-

5 être, à ce moment-là, davantage de ressources en la matière que l'armée,

6 puisque l'armée était en train de mettre en place ces différentes

7 structures et qu'elle n'avait pas toutes les ressources nécessaires, au

8 début de la guerre en tout cas. Le ministère de l'Intérieur aidait souvent

9 l'armée et trouvait des solutions avec -- et trouvait des solutions

10 ensembles avec l'armée, mais ce sont les organes de la Sûreté militaire qui

11 était chargés de leur mis en œuvre.

12 Q. D'après la dernière partie de votre réponse, est-ce que vous entendez

13 que les organes de la Sûreté militaire assuraient le contrôle ou -- de

14 toute enquêteur à laquelle participait la police civile ?

15 R. Oui, c'est ce que je tente de dire.

16 Q. Quels étaient les rôles respectifs, joués par la police militaire ou

17 les organes de la Sûreté militaire et la police civile, lorsqu'une enquête

18 était menée et que la police civile y prenait part ? J'entends par là : que

19 faisaient les militaires et que faisait la police civile ?

20 R. Cela dépendait évidemment du cas en question. Il n'y avait jamais deux

21 cas qui se rassemblaient. Si les auteurs étaient des membres de l'armée, à

22 ce moment-là, c'est la police militaire qui les arrêtait et les plaçait en

23 détention. Ils relevaient, à ce moment-là, de la compétence des tribunaux

24 militaires. Tout autre acte ou tout autre cas qui nécessitait une enquête

25 relevait, à ce moment-là, du ministère de l'Intérieur qui avait davantage

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1 de ressources, ceci pouvait être fait en présence de la police. Certains

2 documents étaient rédigés et ces documents ont été, par la suite, utilisés

3 lorsqu'il s'agissait de lancer des poursuites. Quelquefois, un Juge

4 d'instruction faisait partie de la phase d'instruction et il fallait

5 toujours mettre en place une certaine équipe, et cette équipe était nommée

6 conformément à certaines Règles et, à ce moment-là, des documents étaient

7 rédigés, documents propres à l'affaire en question étaient rédigés.

8 Q. Je vous demanderais de bien vouloir être un peu plus précis, s'il vous

9 plaît. Comment ces rôles, comment se départait-on ces rôles, s'il vous

10 plaît ? J'entends par là : que faisait la police militaire et que faisait

11 la police civile lors de ces enquêtes. Comment se faisait la division des

12 tâches ?

13 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, je m'oppose à cela.

14 Messieurs les Juges, mon confrère demande à témoin de répondre à une

15 question où il a déjà dit qu'il n'était pas sûr, il ne savait pas si

16 c'était l'organe militaire et ou si cela relevait de l'organe militaire,

17 lorsqu'il s'agissait d'une enquête, en particulier.

18 J'avance qu'il s'agit simplement d'une troisième façon de poser la

19 question, la même question. Si mon éminent confrère a un exemple précis et

20 qu'il, dont il est au courant à propos de ce témoin et que s'il peut en

21 donner un exemple et indiquer ce qui s'est passé dans un cela précis, à ce

22 moment là, je peux faire attention à cette question. Sinon, à ce moment-là,

23 je ne m'opposerai pas à ce que cette question posée puisque dans ce cas-là,

24 elle puisse aider la Chambre.

25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Peut-être il y a une idée ici qui

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1 pourrait être intéressante.

2 M. RE : [interprétation] Le témoin a dit que les militaires -- que la

3 police militaire était en droit de les arrêter et de les détenir et toute

4 autre chose. Il a déjà répondu à cela en indiquant ce que la police

5 militaire était à même de faire.

6 Je lui demande la question, la même question à propos du rôle joué par la

7 police civile. Je ne comprends l'objection, je lui posais simplement la

8 question à propos des rôles respectifs joués par ces deux organes. Il nous

9 a dit que la police militaire les arrêtaient et les passaient en détention.

10 Je lui pose la question sur le rôle joué par la police civile lorsque la

11 police militaire prenait part à ces enquêtes. Il est ministre de

12 l'Intérieur.

13 M. MORRISSEY : [interprétation] Si mon confrère veut bien s'arrêter là, je

14 veux lui indiquer ceci. Si c'est là la question, je ne m'y oppose pas. Que

15 faisait la police civile dans un tel cas ? Bien sûr, si le témoin le sait,

16 je ne m'y oppose pas.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Veuillez poursuivre.

18 M. RE : [interprétation]

19 Q. Donc, à supposer que l'armée demande à la police de lui fournir son

20 aide dans certains cas et il s'agit de tâches qu'ils souhaitent bien

21 ensemble, il doit, à ce moment-là, y avoir une enquête sur place et une

22 évaluation sur place. Donc, l'armée déposerait une demande et demanderait à

23 la police officiellement de lui apporter son aide.

24 Cette demande indiquerait clairement au quel type d'aide elle souhaiterait

25 avoir de la police et, autrement dit, cela définissait le rôle de la

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1 police, dans ce cas-là, en d'autres termes. Tout autre organe, à

2 l'exception de l'armée, relevait de la compétence de la police. Tout ce qui

3 avait trait aux citoyens, à la protection des biens, à ce moment-là,

4 relevait du domaine de la police.

5 Pour ce qui est des militaires, il revenait à d'autres organes de mener ces

6 enquêtes.

7 Q. Il s'agissait d'identifier les scènes du crime. Qui en portait la

8 responsabilité, la police militaire ou la police civile ?

9 R. C'est la police militaire. S'il y avait un incident dans les zones où

10 il y avait des opérations de combat et, en tout cas, dans une région si un

11 incident avait lieu quelque soit l'endroit où se trouvait déployée l'armée,

12 à ce moment-là, cet incident, qui impliquait des soldats ou des auteurs, le

13 lieu du crime devait être clairement identifié par l'armée, et toutes les

14 autres tâches, qui s'en suivaient, étaient menées par l'armée et la police.

15 Je crois que la meilleure façon de l'exprimer pouvait aider si on le lui

16 demandait et offrir toute l'assistance qu'elle pouvait dans ces cas-là.

17 Mais, en réalité, c'est l'armée qui mène l'enquête du début à la fin.

18 Q. Qu'en est-il du fait de recueillir des éléments médicaux légaux, comme

19 la prise de photographies, d'empruntes digitales, de traces de pas,

20 d'échantillons de sang ou de toutes autres choses, c'est la police civile

21 ou la police militaire qui s'en occupait ?

22 R. Je souhaite ajouter ceci et expliquer ceci le plus simplement possible.

23 Si la police civile devait appréhender un soldat, par exemple, la police

24 civile ne peut pas entrer et emmener un soldat pour l'interroger. La police

25 civile ne peut pas appréhender un soldat et le placer en détention. Ceci ne

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1 peut jamais être fait par la police civile car la structure est bien

2 distincte lorsqu'il s'agit de soldats. Etant donné que le ministère de

3 l'Intérieur, avant la guerre, disposait de matériel performant, et de

4 membres du personnel extrêmement bien formés qui pouvaient aller sur le

5 champ mener des enquêtes ou sur les lieux du crime, il disposait de tous

6 les moyens techniques nécessaires et était en mesure de mener ces enquêtes.

7 Sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ils se rendaient sur les lieux

8 du crime ensemble afin de pouvoir, pour essayer d'identifier les auteurs.

9 Ils allaient sur le cite pour y recueillir le plus d'éléments possibles.

10 Cela pouvait être un simple cambriolage ou une rixe entre les gens qui

11 pouvait provoquer la mort. Donc, il s'agit beaucoup d'élément de prendre en

12 compte. Si différents experts devaient être consultés en le matériel, ceci

13 montre bien combien il est difficile de répondre à cette question puisqu'il

14 s'agit d'une question très complexe.

15 La police faisait beaucoup. Ils formaient leurs services eux-mêmes et je

16 peux même rajouter, je crois, qu'aujourd'hui, en Bosnie-Herzégovine, leurs

17 services sont bien développées et d'un point de vue de l'organisation du

18 travail, je pense qu'ils ne possédaient ni le personnel, ni l'équipement

19 nécessaire pour faire tout ce qui était nécessaire. C'est dans ce sens-là

20 que le ministère leur apportait une aide dans l'exercice de leurs missions.

21 Q. Qu'en est-il des autopsies et des exhumations ? Est-ce qu'en 1993,

22 pendant que vous étiez ministre de l'Intérieur, est-ce que les militaires

23 pouvaient effectuer ces tâches eux-mêmes ou ils avaient besoin de

24 l'assistance du ministère de l'Intérieur ?

25 R. Je pense qu'en règle générale, pour ce qui est des autopsies et des

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1 exhumations, évidemment, on se servait des services des organisations qui

2 étaient qualifiées pour effectuer ce travail. Il y avait un département qui

3 travaillait dans le cadre des enquêtes menées pour mener, en matière de

4 crimes de guerre, qui était spécialisé en matière d'exhumation et ils

5 utilisaient également les services du Centre hospitalier de Sarajevo. Ni

6 les ministères de l'Intérieur, ni l'armée n'avaient de services

7 suffisamment qualifiés, à l'époque.

8 Q. Qu'en est-il des enquêtes qui relevaient en premier lieu du travail des

9 militaires, mais où la police civile prenait part, est-ce que la police

10 civile avait le droit de recueillir des déclarations de témoins ?

11 R. La police civile était autorisée à le faire si les militaires lui

12 demandaient de prendre part à ces enquêtes, mais la police civile n'était

13 pas autorisée de commencer une enquête de leur plein gré, surtout quand il

14 s'agissait d'interroger les militaires. Il fallait qu'il y ait une demande

15 d'une façon ou d'une autre pour que le ministère de l'Intérieur prenne part

16 à cela.

17 Q. Qu'en est-il du fait que la police civile pouvait ou ne pouvait pas

18 recueillir des déclarations de témoin civil ?

19 R. Le ministère des Affaires intérieures pouvait recueillir des

20 déclarations des témoins, dans le cadre d'une enquête menée par les

21 militaires.

22 Q. Que les écoutes téléphoniques étaient quelque chose, pourquoi votre

23 ministère était compétent ?

24 R. Oui.

25 Q. De quelle façon était-ce autorisé, dans quel cadre juridique cela se

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1 faisait-il ?

2 R. Premièrement, l'écoute était quelque chose qui relevait du service de

3 Sécurité de l'Etat. Ce service-là devait fournir une explication pour qui

4 était pris pour chaque écoute. Il fallait rédiger un document où il y

5 aurait une explication qui expliquerait la nécessité de la mise sous

6 écoute. Il fallait qu'il y ait trois signatures à trois niveaux, l'agent

7 sur le terrain qui propose la mesure, son chef qui l'approuve et le

8 ministre qui donne l'aval pour qu'on procède à cette mesure-là. Parmi les

9 différentes mesures utilisées par les services de Renseignements, la mise

10 sous écoute en étant une, pour toutes ces mesures, avant de les

11 entreprendre, il fallait qu'elles soient vérifiées ou qu'un aval soit donné

12 au niveau politique, c'est-à-dire, auprès du président de la République. Il

13 y avait également les mesures qui pouvaient être analysées par le ministre

14 de l'Intérieur et également par le chef du service de Sécurité. C'était la

15 législation qui était en vigueur, à l'époque.

16 Q. Est-ce que les militaires et leur service de Renseignement avaient le

17 droit d'entreprendre de mise sous écoute en 1993 ?

18 R. Je pense qu'en 1993, l'armée n'avait pas de telle possibilité. Une

19 telle procédure était limitée également au sein du service de Sécurité de

20 l'Etat, puisque nos télécommunications ont été gravement endommagées et en

21 grande partie, ce qui voulait dire, que nos capacités étaient limitées pour

22 procéder à cette mesure-là. Pour des raisons techniques, tout simplement,

23 vous ne pouviez pas procéder à une mise sous écoute. Je pense que, vers la

24 fin de la guerre - ou je ne sais pas en 1996 ou 1997 peut-être - que les

25 militaires avaient réussi à mieux s'équiper et, jusqu'à ce moment-là, ils

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1 utilisaient quelque chose que je pourrais dire, tout simplement, les

2 services du service de la Sécurité de l'Etat car il s'agissait d'un

3 problème de sécurité et, à l'époque, quand il y avait une question de

4 sécurité, c'était de l'ingérence ou du ressort des deux ministères, donc,

5 de deux services de Renseignements, civil et militaire.

6 Q. En 1993, est-ce que le téléphone de M. Halilovic était mis sous

7 écoute ?

8 R. Oui, on écoutait ses conversations téléphoniques pendant une période.

9 Q. Qui est-ce qui, on avait posé la question, qui est-ce qui avait donné

10 l'autorisation pour qu'on mette sous écoute le téléphone de M. Halilovic ?

11 R. Avant de répondre à votre question, puis-je vous dire quelque chose au

12 préalable.

13 Q. Oui, allez-y.

14 R. Vous parlez de la mesure --

15 Q. Pourriez-vous parler plus fort, s'il vous plaît.

16 R. On m'avait dit d'être à une distance particulière du micro, bon si vous

17 voulez je peux me rapprocher.

18 En 1993, toujours est-il, il s'agissait là de mesures très sensibles

19 au sein de Service secret. J'étais ministre en 1993 et, une fois que j'ai

20 été ministre et que j'ai fait un point sur le fonctionnement de service de

21 la Sécurité de l'Etat et, à l'époque, on essayait de faire en sorte à ce

22 que ce service-là travaille d'après un cadre légal, on avait trouvé que les

23 mesures en question ont été appliquées avant mon arrivée et également que

24 c'était fait par le chef du secteur de Sécurité de la ville de Sarajevo,

25 Munir Alibabic.

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1 Q. Pendant que vous-même vous étiez ministre, qui avait demandé à ce

2 que le téléphone de M. Halilovic soit mis sous écoute et qui avait donné

3 son autorisation pour que ceci soit fait ?

4 R. Si vous me permettez encore une phrase, parce que je pense que

5 ceci est important.

6 Q. Oui, allez-y. Mais après, s'il vous plaît répondez à ma question.

7 R. Oui, je vais le faire. En fait, toutes les mesures entreprises par le

8 service de Sécurité et toutes les mesures en écoute ont été annulées, et on

9 ne les mettait pas en vigueur. Ceci était l'une des premières choses dont

10 avait décidé le chef du service de Sécurité. On parle ici du mois de juin

11 1993, c'était une situation particulièrement difficile à l'époque. Donc, à

12 partir de ce moment-là, les mises sous écoute n'étaient plus -- on ne

13 procédait plus à mise sous écoute, y inclus à la mise sous écoute du

14 téléphone du général Halilovic. Vous avez toute la documentation qui en

15 parle. En revanche, à la demande du service de Sécurité et de

16 Renseignements militaires et avec l'aval du président Izetbegovic, on a à

17 nouveau mis sous écoute le téléphone du général Halilovic.

18 Je pense que le document qui le demande et qui l'autorise doit se trouver

19 dans les archives du service de Sécurité de l'Etat. Etant donné que,

20 d'après sa fonction et vu la personnalité du général Halilovic, on avait

21 exigé à ce que ce travail soit bien effectué de manière professionnelle. Je

22 sais que j'ai pu lire à l'époque que ceci était fait, c'est-à-dire qu'on

23 avait mis sous écoute le téléphone du général Halilovic. C'était le chef de

24 sécurité qui s'en occupait.

25 Q. Quand vous dites que c'était le chef de service de Sécurité qui s'en

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1 était occupé, vous parlez ici de M. Jasarevic ?

2 R. Oui, je pense que c'était une demande faite par Jasarevic. Je pense que

3 c'était lui qui était le chef de service à l'époque. C'était une fonction

4 où le chef changeait assez souvent, mais je pense qu'à l'époque c'était

5 bien Jasarevic qui était le chef du service de Renseignements.

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le moment est arrivé pour procéder à une

7 pause et nous allons reprendre à une heure moins le quart.

8 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

9 --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Re, veuillez poursuivre.

11 M. RE : [interprétation]

12 Q. Nous n'étions pas en train de parler des écoutes téléphoniques, du

13 téléphone de M. Halilovic. Pour quelles raisons il a été demandé de mettre

14 son téléphone sur "écoute" ?

15 R. A ce moment-là, lorsque le téléphone a été mis sous écoute, enfin, je

16 pense que je dois vous donner de plus amples explications.

17 Q. Quelle unité ?

18 R. La demande a été faite par le service de Sécurité militaire.

19 L'explication donnée était la suivante : des problèmes devaient réglés, des

20 problèmes se rapportant aux unités en ville, qui avaient déjà provoqué un

21 certain nombre de problèmes. Ce que j'ai évoqué au début, les brigades sous

22 le commandant de Caco et de Celo et de d'autres formations plus petites, ce

23 sont elles qui étaient impliquées. Puis l'incident à Grabovica, cet

24 incident est venu s'ajouter à tout le reste et pour couronner le tout, les

25 structures militaires et la présidence ont ainsi décidé qu'il fallait

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1 s'attaquer à ce problème. Je crois que c'est dans le contexte de cette

2 campagne là que le service de Sécurité militaire a demandé que l'on mette

3 sur écoute le téléphone du général Halilovic parce que comme ils l'ont dit

4 : "Il avait des contacts avec certains officiers, tels que Celo et Delalic"

5 -- certains officiers tels que Celo, Delalic et d'autres, dont j'ai oublié

6 les noms pour l'instant. Mais tous ces noms figurent dans les documents et

7 ces contacts étaient considérés comme étant potentiellement un problème du

8 point de vue de la sécurité et quelque chose qui avait son importance afin

9 de pouvoir résoudre le problème. Les autorités voulaient se faire une

10 meilleure idée du rôle joué par le général Halilovic et de sa position par

11 rapport à ses commandants et à ses unités.

12 Q. Y avait-il d'autres hauts responsables militaires où les téléphones ont

13 été mis sous écoute à ce moment-là ? Ou s'agissait-il uniquement de M.

14 Halilovic ?

15 R. Plusieurs téléphones ont été mis sous écoute. Je ne saurais vous donner

16 les noms des personnes dont les téléphones ont été mis sous écoute, mais il

17 s'agissait sans aucun doute des membres de l'armée qui présentaient un

18 intérêt du point de vue des services de Sécurité qui causaient des

19 problèmes, qui étaient en contact avec des individus problématiques. En

20 conséquence, le service de Sécurité estimait qu'il était approprié que l'on

21 prenne la mesure ou que l'on demande au SDB de prendre cette mesure. A

22 l'époque, c'était très difficile, la guerre se poursuivait et la situation

23 à Sarajevo était très difficile.

24 Q. Ce qui m'intéresse, ce sont des personnes du même rang que M. Halilovic

25 ou directement subordonnés à lui, par exemple, des membres du commandement,

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1 de l'état-major du commandement Suprême ou des commandements de corps ou

2 d'autres personnes du même rang. Est-ce que vous pouvez nous dire

3 aujourd'hui si d'autres personnes ont vu leur téléphone mis sous écoute ?

4 R. Autant que je m'en souvienne, le général Halilovic était le plus haut

5 responsable militaire dont le téléphone a été mis sous écoute.

6 Q. Il n'y avait qu'une seule personne d'un rang encore plus élevé que lui,

7 c'était M. Delic; qu'en était-il des personnes moins haut gradées, par

8 exemple, les commandants de corps ?

9 R. Je ne crois pas que la mesure soit prise en fonction du rang ou de la

10 fonction. Je crois que la mesure est prise s'il y a des raisons de croire

11 que la personne pourrait présenter un intérêt du point de vue de la

12 sécurité. Peu important la fonction ou le rang, qu'il s'agisse du chef de

13 l'état-major général ou d'un commandant de corps ou d'un commandant de

14 brigade, je ne crois pas que la mesure est prise en fonction du poste

15 qu'occupe un officier ou de son rang.

16 Q. Outre les mises sur écoute téléphonique, y a-t-il eu d'autres formes de

17 surveillance de M. Halilovic ? Surveillance de la part de votre service ou,

18 à votre connaissance, de la part des services des Renseignements militaires

19 ou des services de Sécurité militaire ?

20 R. Autant que je le sache, en fait, j'en suis certain. Je suis certain que

21 le SDB n'a pas pris d'autres mesures à l'encontre du général Halilovic.

22 Autant que je le sache, c'est ce que je peux vous dire sur la base des mes

23 connaissances et de mon domaine de compétence. Maintenant, quant à toutes

24 autres mesures qui auraient pu être prises par les services de Sécurité

25 militaires, je ne saurais vous dire à ce propos. Le SDB n'a exécuté que la

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1 mise sur écoute téléphonique et cela a été fait à la demande des services

2 de Sécurité militaire.

3 Q. Est-ce que cela inclut également le fait d'intercepter des

4 communications radio ou est-ce que vous vous limitiez à l'interception des

5 conversations téléphoniques ?

6 R. La mesure se rapportait exclusivement aux conversations téléphoniques.

7 Pour ce qui est d'intercepter radio, autant que je le sache, cela relevait

8 de compétence générale, enfin, tout le monde pouvait les écouter. Les

9 moyens techniques étaient si limités en ville que n'importe qui pouvait

10 détecter différents signaux et intercepter différentes communications. Mais

11 ce n'était pas une mesure que prenait le SDB et cela n'a pas été fait par

12 rapport au général Halilovic. Il est certain que les services de Sécurité

13 de l'Etat n'ont pas pris de telles mesures.

14 Q. Qui était responsable de l'écoute du téléphone de

15 M. Halilovic et qui était responsable de contrôler et de surveiller ces

16 écoutes ?

17 R. C'est une question purement technique. Il s'agissait d'un professionnel

18 qui écoutait, en tant que professionnel, les lignes mises sur écoute. Cet

19 homme était un officier du SDB, un officier qui s'est vu confier cette

20 tâche conformément aux Règlements du SDB. L'officier rédigeait des rapports

21 qui décrivaient la façon dont la mesure était mise à exécution, il était de

22 son devoir de rédiger ces rapports, et ces rapports étaient envoyés

23 uniquement au chef des services de Sécurité militaire qui alors précisaient

24 à quelles autres personnes ces rapports devaient être transmis. Donc, il

25 s'agissait d'une question purement technique.

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1 Q. Si vous pouvez nous dire de façon concise, quel était le rôle d'Enver

2 Mujezinovic dans l'écoute téléphonique ?

3 R. Un rôle purement technique. Il n'était pas en mesure ou habilité à

4 prendre des décisions. Il ne pouvait que mettre à exécution des mesures qui

5 avaient été approuvées.

6 Q. Quel était votre rôle en tant que ministre de l'Intérieur, dans le

7 cadre de l'opération Trebevic qui a eu lieu fin octobre 1993 ?

8 R. Je pensais, conformément au plan pour cette opération Trebevic, une

9 fois qu'il avait été entérinée par la présidence de Bosnie-Herzégovine,

10 j'occupais une position, un poste qui était un poste de direction.

11 J'assumais également un rôle de coordination et, conformément au plan

12 mentionné, je devais commander les Unités de Police qui collaboraient avec

13 les forces militaires. Je devais assurer la coordination pour différentes

14 questions, différents problèmes qui pouvaient se poser dans le cadre de

15 l'opération Trebevic. La personne qui était responsable de l'opération dans

16 son ensemble était le général Delic. Conformément au document, j'étais son

17 adjoint et j'étais responsable des questions que je viens de vous décrire.

18 M. RE : [interprétation] Est-ce que l'on voudrait bien soumettre au témoin

19 la pièce D261 ?

20 M. MORRISSEY : [interprétation] J'aimerais juste soulever une question,

21 Messieurs les Juges. Ce contre-interrogatoire s'étend bien au-delà de la

22 déclaration du témoin et aussi au-delà des notes de récolement dont nous

23 disposons. De nombreuses questions ont été évoquées, je crois voir où l'on

24 veut en venir. Mais, si j'ai bien compris, la pièce dont il s'agirait

25 serait la pièce D261, et je ne vois pas cette pièce sur la liste qui nous a

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1 été donnée. Je suis quelque peu surpris.

2 M. RE : [interprétation] Je le regrette, cette pièce devrait figurer sur la

3 liste. Il s'agit du document se rapportant à l'opération Trebevic. Je

4 voudrais juste demander au témoin s'il s'agit bien de ce document-là.

5 M. MORRISSEY : [interprétation] Je n'ai pas de note à ce sujet. Est-ce que

6 mon éminent confrère se réfère au document qui a été présenté par

7 l'équipe ?

8 M. RE : [interprétation] Oui, le document signé par Rasim Delic.

9 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai pas

10 d'objection à ce que ce document soit soumis au témoin.

11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Mais il est vrai que

12 l'interrogatoire principal dure plus longtemps que prévu.

13 M. RE : [interprétation] Oui, en effet plus longtemps que je l'avais prévu

14 aussi.

15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Cela dit, le témoin nous donne des

16 informations très utiles sur certains aspects. Je pense que cela sera utile

17 aussi pour la présentation de la thèse de la Défense.

18 M. RE : [interprétation] Il est même possible que cela réduise la longueur

19 -- la durée du contre-interrogatoire, nous n'en savons rien.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous demande de poursuivre votre

21 interrogatoire principal.

22 M. RE : [interprétation]

23 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez le document sous les yeux ?

24 R. Oui.

25 Q. J'aimerais simplement que vous confirmiez en utilisant ce document, si

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1 c'est bien le document qui vous a nommé adjoint au sein du groupe qui

2 devait diriger l'opération de Trebevic et de

3 Trebevic 2 ?

4 R. Il s'agit bien de ce document.

5 Q. Quel rôle avez-vous joué ce jour-là, c'est-à-dire, le 26 octobre 1993 ?

6 Qu'avez-vous fait au juste ?

7 R. Ce jour-là, je me trouvais au travail. A l'époque, il m'incombait de

8 veiller à ce que le plan entériné par la présidence soit exécuté en

9 collaboration avec le général Delic, comme vous pouvez le voir, cela

10 ressort de cet ordre. C'était un peu hasard que le ministère de l'Intérieur

11 soit désigné à cette fin. Je me trouvais là avec certains membres de mon

12 équipe, nous étions sur place, nous devions exercer le contrôle sur les

13 activités qui se déroulaient ou devaient se dérouler dans la matinée.

14 Ainsi, ce que je faisais ce jour-là, c'était de m'assurer que le plan

15 Trebevic était mis à exécution.

16 Q. Combien d'Unités du ministère de l'Intérieur ont été impliquées dans

17 l'opération Trebevic ?

18 R. Je crois qu'il y avait toute une série d'unités différentes, il me

19 serait difficile de me souvenir exactement d'unité individuelle : des

20 Unités spéciales, le Détachement Bosna du ministère de l'Intérieur, l'Unité

21 spéciale de Laste, ainsi qu'un certain nombre d'officiers de police qui ont

22 été affectés à cette mission particulière. Une évaluation avait eu lieu

23 d'après laquelle on prévoyait que la situation pourrait devenir très

24 compliquée, et il a ainsi été décidé d'affecter un nombre plus élevé

25 d'officiers de police à cette opération. Voilà un aperçu général de la

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1 situation. Puis, nous avons continué à évaluer la situation et à faire

2 d'autres déclarations dans le courant de la journée eu égard aux besoins

3 qui devaient être évidents.

4 Q. Au paragraphe 5, du document D261, daté 25 octobre 1993, il est dit :

5 "Utilisez tous les moyens dont vous disposez, y compris les armes pour

6 ramener Musan Topalovic, Ramiz Delalic, s'il y a la moindre résistance, la

7 moindre opposition." Il s'agissait de Caco et de Celo.

8 Est-ce que vous avez participé à cette opération visant à mettre la

9 main sur Caco ou Celo ?

10 R. Est-ce que je peux vous demander de préciser la question ?

11 Q. Très bien. Selon le paragraphe 5 de ce document, l'un des objectifs de

12 cette opération était d'utiliser tous les moyens dont vous disposiez pour

13 mettre la main sur -- je suppose que cela veut dire arrêter Caco et Celo.

14 Quel rôle avez-vous joué, si vous avez joué un rôle, dans

15 l'arrestation soit de Caco, soit de Celo ?

16 R. Bien le rôle que j'ai joué était défini par ce document. Le plan qui

17 avait été dressé. Il ne s'agit là que d'un paragraphe qui définissait

18 l'attitude à adopter vis-à-vis de ces deux officiers haut gradés. L'ordre

19 disait ou plutôt l'autorisation était donnée en cas de résistance de leur

20 part, l'autorisation a été donnée de prendre toutes mesures utiles.

21 L'opération Trebevic en l'essentiel était une action militaire. La

22 situation était tellement grave que --

23 Q. En fait, je voudrais qu'on se limite à l'arrestation de Caco et de Celo

24 et du rôle que vous avez joué, si tant est que vous ayez joué un rôle dans

25 l'arrestation de ces deux hommes. Est-ce que vous avez participé à

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1 l'arrestation de Celo ?

2 R. L'arrestation de Caco et de Celo s'est révélée être une opération très

3 complexe, rendue encore plus difficile par le fait qu'ils ont opposé une

4 résistance. L'opération toute entière avait été planifiée et initiée dans

5 le plus grand secret et il n'y a pas eu de fuites jusqu'au début de

6 l'opération. Une fois l'opération lancée, les commandants concernés se sont

7 tout de suite rendus compte de ce qui allait leur arrivée. Il est tout à

8 fait possible qu'ils y aient présumé qu'on allait les arrêter et qu'on

9 allait prendre des mesures à leur encontre. Ainsi ce qu'ils ont fait, cela

10 a été de bloquer, de fortifier leurs installations et ils ont résisté de

11 manière efficace. Il s'en est suivi un échange de tirs dans le cadre duquel

12 des membres de la police et des membres de l'armée ont été tués. Sarajevo,

13 comme vous le savez, faisait l'objet d'un siège. Il y avait aussi des

14 opérations de combat qui étaient le fait de l'ennemi et maintenant en ville

15 la situation était telle qu'il y avait un conflit entre les forces

16 ordinaires et les rebelles pour ainsi dire. L'arrestation de Caco s'est

17 révélée être une opération extrêmement compliquée et une des choses qui a

18 été faite c'est que l'ancien ministre, Jusuf Pusina, s'y est rendu pour

19 convaincre Caco de se rendre aux premiers -- au commandement du 1er Corps.

20 Ramiz Delalic, surnommé Celo, a également opposé une forte résistance et

21 cela n'a pas été facile de le maîtriser. Donc, c'est une opération qui a

22 duré la journée entière et qui a provoqué des combats. Delalic a demandé à

23 parler à un membre du gouvernement ou de la présidence. Je crois que le

24 président ou alors le premier ministre Silajdzic a décidé que je devais me

25 rendre au commandement de Celo, de même que le premier ministre Silajdzic.

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1 L'ambiance était catastrophique. Il y avait beaucoup de panique et de peur.

2 Après tout il y avait eu un échange de tirs. Celo a demandé des garanties

3 qu'il ne serait ni tuer, ni persécuter, ainsi que d'autres garanties

4 encore. Il a même demandé à pouvoir parler au président, à ce que le

5 président le reçoive.

6 A ce moment-là, nous voulions avant tout régler le problème des otages. Il

7 y avait déjà eu des victimes, notamment au poste de commandement de Caco,

8 là où Caco avait organisé un siège, six officiers de police avaient trouvé

9 la mort, donc nous avons accepté la demande. Nous lui avons donné les

10 garanties qu'il demandait -- que Delalic demande. Nous avons amené deux

11 véhicules et nous sommes partis vers l'immeuble de la présidence, où le

12 premier ministre Silajdzic a sans doute eu d'autres discussions avec Celo,

13 lui a donné des conseils, lui a offert d'autres garanties, alors que, moi-

14 même, je me suis rendu, je suis retourné au ministère de l'Intérieur. Celo

15 et Caco et un nombre d'autres membres de ces unités ont aussi été arrêtés,

16 à ce moment-là. Les deux premiers ont été détenus au commandement du corps

17 où ils ont été interrogés. Je crois qu'environ 100 soldats ont été arrêtés,

18 ce jour-là. Cela ne veut pas dire qu'ils ont été incarcérés. On les a

19 simplement arrêtés pour évaluer leur responsabilité individuelle. Je crois

20 que dix ou 15 d'entre eux ont, finalement, été détenus et les autres ont pu

21 rentrer à la maison. Les membres de ces unités ont été détenus lorsqu'il a

22 été démontré qu'ils étaient coupables d'infractions criminelles.

23 Q. Vous avez dit que certains policiers avaient été tués. Six officiers de

24 police ont trouvé la mort au poste de commandement de Caco. Comment ont-il

25 trouvé la mort ?

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1 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai une objection. M.

2 Halilovic, de toute façon, était chez lui dans son appartement, enfin, je

3 pense que cela n'a pas encore été présenté comme élément de preuve, mais

4 nous savons que, le 26, M. Halilovic, de toute manière, n'a pas pu jouer un

5 rôle qui soit de la moindre pertinence dans cette affaire. Donc ce qui

6 s'est passé lors du combat avec Caco, en tout cas, selon moi, cela n'a

7 aucune pertinence, et cela n'est d'aucun secours pour la décision de cette

8 Chambre.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Est-ce que vous alliez évoquer des

10 moyens de preuve qui sont pertinents pour notre affaire ?

11 M. RE : [interprétation] Je vais poser une autre question.

12 Q. Monsieur Alispahic, est-ce que M. Halilovic a joué le moindre rôle dans

13 l'arrestation de Caco ou de Celo, le 26 octobre 1993 ?

14 R. Pour ma part, je n'ai pas connaissance d'un rôle qu'il aurait joué ou

15 d'une tâche qui aurait été la sienne dans le cadre de cette opération ou de

16 toute activité.

17 Q. Est-ce que vous savez si on lui a demandé d'être impliqué dans cette

18 opération d'une manière ou d'une autre ?

19 R. Je pense que le général Jasarevic ou l'un des officiers de haut rang,

20 l'un des officiers militaires, ce jour-là, pendant que la situation était

21 difficile et délicate, je pense que l'un d'entre eux avait demandé au

22 général Halilovic de faire preuve de son autorité auprès de ces gens-là.

23 Etant donné qu'il avait été commandant et, par la suite, chef de l'état-

24 major et qu'il était, dès le début la guerre, l'un des responsables dans

25 ces structures-là dans la ville et quel que soit le comportement de ces

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1 personnes-là, il respectait quand même le général Halilovic. Je pense que,

2 c'est à cette occasion-là, que Halilovic avait donné une réponse négative.

3 D'après Jasarevic, Halilovic avait déclaré ne pas vouloir se mêler de ce

4 que nous faisions et nous a dit de continuer à faire notre travail. C'est

5 ce que Jasarevic m'avait transmis.

6 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire, très brièvement, quelle a été la

7 nécessité de mener cette opérations à l'encontre des personnes appartenant

8 à la 9e Brigade, donc, cette opération en octobre 1993 ?

9 R. Si je devais utiliser une grille de classification au sein de la

10 police, on dirait que ceci était nécessaire parce que c'était fait dans le

11 but d'une autodéfense. Il était nécessaire de résoudre ce problème et, pour

12 dire toute la vérité, même si on avait demandé à Halilovic d'intervenir, la

13 question se pose : est-ce qu'on aurait pu obtenir quelque chose puisque

14 l'opération avait déjà été lancée et ils avaient ouvert le feu à un

15 conflit ? Un conflit a éclaté; je crois qu'il leur aurait été très

16 difficile de réussir à faire quoi que ce soit.

17 Q. Le général Karavelic avait déclaré qu'il y avait quelques

18 5 000 hommes qui avaient participé à l'opération Trebevic, donc, contre les

19 Unités de la 9e et la 10e Brigades. Pourriez-vous nous dire pourquoi était-

20 il nécessaire d'utiliser autant d'hommes contre les membres de l'armée

21 bosniaque à Sarajevo ?

22 R. Je vais vous donner deux réponses. Je ne suis pas tout à fait sûr,

23 mais, étant donné que Karavelic avait commandant du corps, je ne suis pas

24 tout à fait sûr qu'il y ait eu réellement 5 000 qui y avaient participé.

25 Peut-être que, d'après les estimations, on pensait que 5 000 devraient

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1 participer si l'on se décidait de suivre certaines options. Les options

2 étaient que, si les membres des brigades décidaient de quitter les lignes

3 de front que, dans ce cas-là, d'autres hommes devraient les remplacer,

4 c'est dans ce contexte-là que je pense que ces chiffres pourraient être

5 véridiques, mais je ne puis pas vous donner une réponse plus précise

6 puisque cela ne relevait pas de moi, et cela c'est tout simplement mon

7 estimation. Tout comme maintenant et à l'équipe, j'ai estimé qu'il était

8 nécessaire de procéder à cette opération-là.

9 Q. Est-ce que Sefer Halilovic a été arrêté ? Est-ce que cela faisait

10 également partie de l'opération Trebevic ?

11 R. Pour ce qui est du ministère des Affaires intérieures, Sefer Halilovic

12 n'a jamais été arrêté. Je parle ici d'après les critères et les Règlements

13 d'une arrestation. Comment on définit au sein du ministère de l'Intérieur

14 une arrestation ?

15 Q. On avait pu entendre des témoignages qui disaient qu'il avait été

16 interrogé, à partir du mois de la fin octobre et jusqu'à la mi-novembre

17 1993, au quartier général, au siège du ministère des Affaires étrangères.

18 Pourquoi on l'avait interrogé là-bas ?

19 R. Ces interrogatoires avaient été menés à la demande des services de

20 Renseignements et, après l'aval du président de la République, on l'avait

21 interrogé à la direction du service de la Sécurité de l'Etat, et cela a été

22 fait par Enver Mujezinovic. Ceci a été effectué là-bas parce qu'on avait

23 estimé qu'à cet endroit-là, il y avait des personnes qualifiées et de haut

24 rang, qui pouvaient interroger quelqu'un aussi haut placé que le général

25 Halilovic. Mais je sais également que les membres de la police militaire ou

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1 des membres des renseignements militaires y avaient également participé.

2 Q. Est-ce qu'à l'époque, il était en détention ?

3 M. MORRISSEY : [interprétation] Je soulève une objection puisque ceci ne

4 peut pas être une question pertinente. Auparavant, l'Accusation avait déjà

5 essayé de poser des questions directrices, depuis, la Chambre avait entonné

6 une décessions et je crois qu'ici, nous devons suivre cela. Nous savons

7 qu'à partir du 26 octobre, on n'a pas -- c'est une période qui ne nous

8 concerne pas.

9 M. RE : [interprétation] En fait, faisant partie de cette affaire, on voit

10 qu'il y avait une campagne politique pour se venger contre M. Halilovic.

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Je souhaiterais que le témoin quitte le

12 prétoire.

13 M. RE : [interprétation] Je n'y vois pas d'objection.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Ce Tribunal devrait s'occuper de la

15 responsabilité criminelle individuelle et non pas uniquement des

16 responsabilités. Ce qui est très important pour nous, c'est d'établir

17 qu'après le 26 octobre, M. Halilovic avait été arrêté et interrogé. Par

18 ailleurs - et ceci est un autre sujet - quelle a été la situation une fois

19 que M. Halilovic avait été relâché ? Ceci est quelque chose qui n'a pas été

20 clarifié. Est-ce que M. Halilovic avait repris ses fonctions, en tant que

21 chef de l'état-major ?

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Je voudrais juste vérifier que ceci figure

23 dans les preuves et, sinon, il faut les mettre dedans, mais je crois qu'il

24 y a eu un ordre du président par lequel il a été révoqué de ses fonctions.

25 Il va falloir que j'aille vérifier la date. Il s'agit de la pièce à

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1 conviction 263, donc, par cet ordre-là, le 1er novembre, il a été révoqué de

2 ses fonctions de chef de l'état-major. Après, j'ai failli dire qu'on lui a

3 trouvé un autre travail, un autre poste, mais, toujours est-il que le 1e

4 novembre il cesse formellement d'être chef de l'état-major ?

5 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je ne pense pour autant qu'il soit

6 nécessaire pour nous de rentrer dans les détails des interrogatoires, ni

7 des conditions dans lesquelles M. Halilovic aurait été interrogé.

8 M. RE : [interprétation] Je ne voulais pas rentrer dans les détails de ces

9 interrogatoires. Je voulais établir s'il était détenu pendant cette

10 période ?

11 M. MORRISSEY : [interprétation] Je n'y vois pas d'objection.

12 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous pouvez continuer.

13 M. RE : [interprétation]

14 Q. Pendant que vos services et les services de Renseignements militaires

15 aient interrogé M. Halilovic, était-il en détention ?

16 R. En ce qui concerne le ministère des Affaires intérieures, pour nous, le

17 général n'était pas en détention tous les jours -- ou les jours où l'on se

18 mettait d'accord, il arrivait en utilisant son véhicule au ministère de

19 l'Intérieur, là où l'entretien devait avoir lieu. C'était là que l'on

20 voyait la relation entre les services de la

21 Sécurité de l'Etat et le général Halilovic. Pour nous, il n'était pas en

22 détention.

23 Q. Qu'est-ce que vous savez des badges de Sefer Halilovic ? Est-ce qu'il

24 en avait eus ?

25 R. Je pense que, pendant une courte période, il y avait eu de tels badges.

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1 C'était comme des pins, c'étaient des petits badges ronds, et je dois dire

2 que, pour certains d'entre nous, cela prêtait à un sourire, c'était drôle

3 de voir que certains -- mêmes ridicules de voir que certaines personnes

4 portaient ce badge, ce pin du général. C'était une réaction à l'arrivée du

5 général Delic à son poste qui était mécontent avec la décision. Auprès

6 d'une partie des militaires, ceci représentait un soutien apporté au

7 général Halilovic.

8 Q. Qu'était-il sur ces badges ? Pouvez-vous les décrire ?

9 R. Je pense que, tout simplement, il y avait sa photo, son image. Je ne

10 sais pas exactement. Vous savez, ce sont des choses qu'on peut trouver dans

11 n'importe quel magasin. C'était un badge qui pouvait s'accrocher à

12 n'importe quelle partie de l'uniforme. C'était sur un col, par exemple. Je

13 ne sais pas. Je me souviens que Nedzad Ugljen qui auparavant avait été chef

14 des services de la Sécurité de l'Etat qui me l'avait montré.

15 Q. Savez-vous qui les confectionnait ?

16 R. Non, je ne le sais pas.

17 Q. Vous avez dit que c'étaient des soldats qui les portaient. Ils

18 appartenaient à quelles unités ?

19 R. Je pense que, pour la plupart, ils appartenaient à l'Unité de Delalic.

20 Je pense qu'à l'époque, le général Halilovic et le commandant de cette

21 unité-là étaient en bons termes et que le rapport était tout à fait

22 correct. Je pense que c'était eux qui les avaient arborés.

23 Q. Est-ce que vous avez vu personnellement quelqu'un qui portait un tel

24 badge ?

25 R. Non, je ne peux pas dire que j'ai vu ce badge-là. Il aurait fallu que

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1 je sois beaucoup plus présent en ville, que je me promène dans la rue.

2 Quelqu'un en avait apporté un et je l'ai vu. Donc, je ne peux pas dire que

3 j'en ai vu un dans la rue, mais je dois également dire ici qu'il n'y avait

4 pas beaucoup de soldats qui se promenaient dans la rue.

5 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait avoir la pièce à conviction

6 au titre de la conférence 65 ter 154. Il s'agit d'une pièce datée du 11

7 octobre 1993 où il est marqué MUP et le service de Sécurité de l'Etat,

8 signé par son chef Mujezinovic.

9 Q. Qu'est-ce que représente ce document, Monsieur Alispahic ?

10 R. Il s'agit là d'une information qui reflète d'une situation concernant

11 la sécurité. On doit l'utiliser, par la suite, et c'est adressé au chef de

12 l'armée et au chef du service de Sécurité au ministère de l'Intérieur.

13 Ceux-ci sont les destinataires d'une telle information. On peut en déduire

14 qu'il s'agit là d'un document de bonne qualité, rédigé avec soin.

15 Q. Le nom qui est écrit en bas de la page est celui de

16 M. Mujezinovic. Pour vous, qu'est-ce que cela évoque de voir son nom et sa

17 signature en bas de la page ?

18 R. Cela veut dire que le chef de secteur du service de la Sécurité de

19 l'Etat qui, à l'époque, était Mujezinovic, que c'était lui le signataire et

20 il était le chef d'une unité -- d'un service qui devait recueillir des

21 renseignements. On voit ici que les destinataires sont importants, les

22 chefs de Service secret, par exemple. Je vois que cette information, ce

23 mémo a plusieurs volets différents. La teneur, à chaque fois, est

24 intéressante d'un point de vue des services de Renseignements.

25 Q. Est-ce qu'il s'agit là d'un document que vous avez vu ou que vous

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1 auriez pu voir en tant que ministre de l'Intérieur au mois d'octobre 1993 ?

2 M. MORRISSEY : [interprétation] Peut-être que d'abord il faut procéder par

3 étapes, l'a-t-il vu et après, si nécessaire, poser la deuxième question.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

5 M. RE : [interprétation]

6 Q. Vous souvenez-vous d'avoir vu ce document quand vous étiez ministre de

7 l'Intérieur au mois d'octobre 1993 ?

8 R. Oui, ce document a dû me parvenir et je pense que j'y ais prêter

9 attention. Vu l'attention qui lui a été accordé par le chef des services de

10 la Sécurité de l'Etat, qu'on a pu l'envoyer aux chefs des renseignements

11 militaires.

12 Q. Pourriez-vous nous dire dans le plus de détails possibles quelle est la

13 fiabilité de ce document ?

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Messieurs les Juges, réellement, c'est à

15 vous de le décider, mais il faudrait peut-être poser des questions quant à

16 la source du document.

17 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui. Vous pouvez poser les questions

18 quant à la source de ce document.

19 M. RE : [interprétation]

20 Q. Qui, d'après quelle source, était rédigé un tel document ?

21 R. On voit ici que Memija Mufid est à l'origine parmi d'autres de ce

22 document puisqu'on voit ici qu'il est considéré comme quelqu'un qui pose

23 problème parce que d'après le général Halilovic c'est quelqu'un qui ne

24 transmet pas dans les medias les informations importantes qu'il aurait dû

25 transmettre. Il s'agit là d'une source et je pense que, soit Salko Gusic ou

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1 quelqu'un d'autre qui faisait partie des structures militaires, c'était

2 soit lui soit quelqu'un d'autre qui explique le comportement du général

3 Halilovic. Vous pouvez voir ici les tentatives du général Halilovic de

4 promouvoir auprès des médias ce succès militaire.

5 Le service considérait que ceci était intéressant d'un point de vue

6 des renseignements et qu'il fallait en rendre compte. Dans le texte même,

7 il est dit d'après les données apportées par une source fiable, si on le

8 voulait en regardant exactement leur référence qui est ici, on pourrait

9 arriver à la source de l'information. On pourrait pouvoir déterminer si on

10 le souhaitait qui était à l'origine de cette information.

11 Q. Qu'est-ce que c'est "qu'une source fiable", d'après votre expérience en

12 tant que ministre de l'Intérieur, qui représentait une source fiable ?

13 R. Une source fiable, cela peut être un document, qui est tout à fait

14 véridique, qu'il ne sème pas de doute. Par la suite, cela peut être un

15 collaborateur qui était une source fiable auparavant. Cela peut également

16 être une information obtenue lors des mesures de mise sous écoute secrète,

17 qui n'est pas forcément liée au sujet premier de l'écoute. Ce que je veux

18 dire par là, vous mettez une personne sous écoute, et vous obtenez une

19 information intéressante sur quelqu'un d'autre.

20 Q. Quant à Zulfikar Alispago, est-ce qu'il avait donné des pots de vin à

21 certaines personnes dans les médias, pour quelles parlent "de succès de

22 l'armée" ? Quel type de source était-il ?

23 R. Je ne pense pas être en mesure de vous donner une opinion là-dessus, de

24 faire un commentaire là-dessus. C'est très difficile de le dire. Zulfikar

25 Alispago pouvait être lui-même la source de l'information. Il avait peut-

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1 être déclaré, il avait déclaré un certains nombres de services qu'il avait

2 effectivement faits. Mais, il me serait difficile de l'affirmer,

3 maintenant, avec certitude. Je crois que la meilleure solution serait de

4 vérifier auprès de Zulfikar Alispago. Si je devais prendre une décision là-

5 dessus, personnellement, je vérifierais auprès de lui.

6 Q. Pourriez-vous donner des commentaires sur la véracité, la fiabilité des

7 informations contenues dans le document ?

8 M. MORRISSEY : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit au témoin de

9 l'établir, c'est à la Chambre de le décider.

10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je pense que nous avons entendu déjà

11 assez à ce sujet-là.

12 M. RE : [interprétation] Je souhaiterais verser ce document au dossier.

13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Y a-t-il d'objection ?

14 M. MORRISSEY : [interprétation] Non, nous n'avons pas d'objection, puisque

15 le témoin l'a déjà vu.

16 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Dans ce cas-là, le document est versé au

17 dossier.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document P243 [comme

19 interprété].

20 M. RE : [interprétation] Je souhaite poser tout simplement deux questions,

21 quant au type de document. Le premier document P212 et le deuxième, P415.

22 Q. Qu'est-ce que représente ?

23 Pendant que ces documents arrivent, je voudrais vous poser une autre

24 question. Quand vous dites que la police militaire pouvait demander de

25 l'assistance et de l'aide de la police civile, est-ce que c'était quelque

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1 chose qui se faisait quand il fallait mener une enquête pour établir un

2 crime, qui pouvait le faire ?

3 R. N'importe quel officier supérieur de l'armée pouvait s'adresser à la

4 police, il pouvait avoir une réponse dans un bref délai, c'est-à-dire, il

5 pouvait avoir de l'aide dans des très brefs délais. Je pourrais même dire

6 que notre coopération était bonne. On donnait toujours la priorité aux

7 demandes formulées par l'armée.

8 Q. Je vous remercie. Pourriez-vous, maintenant, regarder le document P212,

9 un document émanant du ministère de l'Intérieur du 2 novembre 1993, et cela

10 relève de l'activité de combat négatif, quant à Sefer Halilovic.

11 Ce qui m'intéresse c'était quel type de document était-ce par rapport

12 à son statut et par rapport au statut du ministère de l'Intérieur ?

13 R. Ce document est le résultat d'un travail conjoint entre le ministère et

14 de l'armée, du service de Sécurité de l'Etat. Je pense que cette

15 information était rédigée en deux exemplaires. Je ne pense pas qu'il y a eu

16 davantage d'exemplaires et ce document était considéré comme étant un

17 secret d'Etat et il fallait le rendre à sa source une fois après

18 l'utilisation. L'armée et la police étaient arrivées à ces conclusions,

19 qu'elles avaient caractérisé comme étant un comportement négatif du général

20 Halilovic. Je l'ai signé en ma qualité de ministre et de chef de sécurité

21 intérieure. Il y avait de la part des militaires, c'était signé par

22 Jasarevic. Je pense que parmi les hommes politiques ou les structures

23 politiques, c'était Izetbegovic qui a pu le recevoir, peut-être

24 éventuellement quelqu'un d'autre.

25 Q. Enfin, la pièce à conviction 415. Il s'agit là d'un document daté du 16

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1 octobre 1993. Le ministère de l'Intérieur, centre de service de Sécurité de

2 Sarajevo, sujet : "Analyse de la situation de sécurité et l'abus du pouvoir

3 de Ramiz Delalic," en terme de confidentialité c'était marqué, "très

4 confidentiel".

5 Qu'est-ce que vous pourrez nous dire ici ? Comment placez-vous cela dans

6 les structures de sécurité ?

7 R. Il s'agit là d'une analyse de différentes données intéressantes pour

8 les services des Renseignements. Le service de la Sécurité de l'Etat a le

9 droit de recueillir de telles informations. Je pense que ceci devait

10 arriver au niveau du chef de service de la Sécurité de l'Etat ainsi que le

11 chef des renseignements militaires. Je pense qu'il s'agit là d'un document

12 qui doit contenir les informations qui doivent être assez véridiques. Le

13 degré de véracité de ces données est très élevé.

14 Q. Est-ce que vous l'avez vu à l'époque ?

15 R. Je ne pense pas l'avoir vu. Je pense avoir disposé des différentes

16 informations dont je vous ai parlé tout à l'heure, mais d'après le contenu

17 de ce document, on voit qu'il y figure des renseignements que j'ai pu avoir

18 par ailleurs.

19 M. RE : [interprétation] On vient de m'informer qu'en fait, il s'agit pour

20 l'instant toujours du MFI 415, pièce qui n'a pas encore été versée au

21 dossier. J'aimerais demander que cet élément de preuve soit -- ou que ce

22 document soit versé au dossier grâce à ce témoin.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

24 Y a-t-il des objections ?

25 M. MORRISSEY : [interprétation] Donnez-moi un instant, s'il vous plaît.

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1 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

2 [Le conseil de la Défense se concerte]

3 M. MORRISSEY : [interprétation] En fait, oui, je formule une objection. Il

4 s'agit d'un des documents qui se rapportait au témoin précédent et par

5 rapport auquel une décision n'a pas encore été prise. Peut-être que nous

6 pourrons régler cette question un peu plus tard, mais, en tout cas, pour

7 l'instant, je formule une objection parce que le témoin n'a pas vu le

8 document.

9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bien. Nous pouvons peut-être reporter à

10 un petit peu plus tard la discussion concernant la recevabilité de ce

11 document ainsi que le document 150, donc, ces deux documents restent en

12 suspens pour l'heure.

13 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci.

14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

15 Monsieur Re.

16 M. RE : [interprétation] Bien, oui. Il s'agit d'éléments de preuve

17 présentés dans le cadre de l'interrogatoire principal. Je pourrais encore

18 poser d'autres questions sur la teneur du document, mais peut-être à un

19 autre moment.

20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je crois qu'à la fin de ce

21 témoignage, nous allons passer quelque temps à discuter de ces documents et

22 vous pourrez poser d'autres questions à ce sujet.

23 Monsieur le Témoin, je regrette mais nous allons devoir nous arrêter là.

24 Nous n'avons plus de temps aujourd'hui. Il n'est pas sûr qu'une audience

25 aura lieu demain, donc nous verrons ce qu'il en est et j'espère que vous

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1 gardez à l'esprit ce dont je vous ai rappelé hier. Mme l'Huissière va

2 maintenant vous escorter afin que vous quittiez le prétoire.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ne pose aucun problème.

4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.

5 [Le témoin se retire]

6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Morrissey, est-ce que cela vous

7 convient que nous ne tenions pas d'audience demain ?

8 M. MORRISSEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous espérons,

9 comme je l'ai dit, obtenir un rapport de notre collaborateur à Sarajevo. Je

10 peux déjà vous indiquer quelle est notre position. Enfin, nous réservons

11 notre position. Je garde l'esprit ouvert concernant la situation, mais je

12 ne vais pas maintenant soulever un problème qui peut-être n'en deviendra

13 pas un. Il est possible que notre contre-interrogatoire soit très bref.

14 C'est une des possibilités que nous envisageons. On verra bien comment les

15 choses évoluent.

16 Est-ce que cela vous conviendrait, Messieurs les Juges, que nous vous

17 informions de ce qu'il en est vers 17 heures 30 aujourd'hui ?

18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui.

19 M. MORRISSEY : [interprétation] Nous allons, bien sûr, en informer

20 l'Accusation aussi.

21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Très bien. Merci.

22 M. MORRISSEY : [interprétation] Merci.

23 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Pour l'heure, la Chambre doit aussi

24 rendre une décision concernant la requête de la Défense au sujet de la

25 recevabilité d'un rapport, un nouveau rapport d'expert militaire, déposé le

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1 23 mai 2005.

2 Le 31 mars 2003, l'Accusation a soumis à la Chambre l'opinion du témoin

3 expert, le général Ridgway. Pendant la Conférence de mise en état du 28

4 avril 2005, l'Accusation a indiqué qu'elle chercherait à obtenir le

5 versement au dossier du rapport de M. Ridgway et le citerait à comparaître

6 devant cette Chambre. Par une lettre du 12 mai, l'Accusation a soumis à la

7 Défense une version du rapport rédigé par Ridgway, un rapport qui a été

8 révisé ou modifié par l'Accusation. La version modifiée de ce rapport

9 d'expert a été reçue par la Chambre de première instance le 13 mai 2005. Le

10 13 mai, la Défense a déposé une requête concernant l'utilisation et la

11 recevabilité de ce rapport d'expert militaire. Dans cette requête, la

12 Défense formule une objection à l'encontre du rapport dans sa forme - que

13 ce soit dans sa forme initiale ou révisée - une objection par rapport à

14 l'utilisation du rapport dans le cadre du procès, et objection par rapport

15 à la recevabilité. La Défense a également formulé une objection quant à la

16 citation à comparaître de M. Ridgway en tant que témoin expert. La Chambre

17 a également évoqué cette question, le 12 et le 13 mai.

18 Le 18 mai 2005, l'Accusation a déposé sa réponse à la demande de la

19 Défense, consentant l'utilisation et la recevabilité du rapport militaire.

20 Dans le cadre de cette réponse, l'Accusation a fourni la Chambre, compte

21 tenu d'un nouvel examen du rapport d'expert, à la lumière des objections

22 formulées par la Défense, que l'Accusation n'a plus l'intention de se

23 fonder sur le rapport dans son intégralité, ni d'ailleurs dans sa forme

24 modifiée. L'Accusation déclare qu'elle accepte l'hypothèse selon laquelle

25 il ne serait pas pratique à ce stade du procès d'attendre du témoin expert

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1 qu'il puisse étudier et faire la synthèse de tous les résumés des éléments

2 de preuve ainsi que de tous les documents supplémentaires afin de donner

3 réponse ou une opinion qui pourrait être utile à la Chambre.

4 Ainsi, la Chambre estime que la demande formulée par la Défense le 13

5 mai 2005 concernant le rapport d'expert comme étant désormais sans objet.

6 Dans sa réponse, l'Accusation définit aussi l'ampleur proposée du

7 témoignage de l'expert et a indiqué qu'elle fournirait à la Défense une

8 brève opinion, rédigée par M. Ridgway le 20 mai 2005. Le 20 mai 2005, en

9 effet, l'Accusation a déposé auprès de la Chambre une nouvelle opinion

10 d'expert, formulée ou rédigée par le général Ridgway. Le 23 mai 2005, la

11 Défense a déposé sa requête concernant la recevabilité de ce rapport ainsi

12 que l'usage qui en serait fait. La Défense une fois de plus formule une

13 objection quant à l'utilisation et à la recevabilité de ce nouveau rapport

14 et s'oppose également à ce que M. Ridgway soit cité en tant que témoin

15 expert. L'Accusation a répondu à cette requête de la Défense concernant le

16 nouveau rapport d'expert pendant l'audience qui a eu lieu, le 23 mai 2005.

17 La Chambre a passé en revue les arguments formulés par les deux parties. La

18 Chambre estime que la divulgation du nouveau rapport à ce stade très avancé

19 de la procédure n'est pas conforme aux Règlements de procédure et de

20 preuve. La recevabilité de ce rapport pourrait s'avérer préjudiciable aux

21 intérêts de l'accusé et serait contraire à l'exigence fondamentale d'un

22 procès équitable. Par ailleurs, la pertinence de ce nouveau rapport, pour

23 ce qui est de l'affaire que nous avons à juger, n'est pas certaine, et la

24 Chambre estime que le rapport et le témoignage opposés, donc, de M.

25 Ridgway, ne seraient d'aucun secours pour cette Chambre. Ainsi,

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1 conformément à l'Article 21(4)(b) et l'Article 94 bis du Règlement de

2 procédures et de preuves, la Chambre décide de considérer le rapport

3 d'expert comme non recevable et la Chambre décide aussi de ne pas entendre

4 M. Ridgway, en tant que témoin expert dans le cadre de cette affaire. Il en

5 est ainsi décidé.

6 L'audience est suspendue pour aujourd'hui. Nous vous reverrons après

7 demain.

8 --- L'audience est levée à 13 heures 56 et reprendra le jeudi 26 mai 2005,

9 à 9 heures 00.

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