Affaire n° : IT-04-84-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II

Composée comme suit :
M. le Juge Carmel Agius, Président
M. le Juge Hans Henrik Brydensholt
M. le Juge Albin Eser

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
6 juin 2005

LE PROCUREUR

c/

RAMUSH HARADINAJ
IDRIZ BALAJ
LAHI BRAHIMAJ

___________________________________________

DÉCISION RELATIVE À LA DEMANDE DE MISE EN LIBERTÉ PROVISOIRE DE RAMUSH HARADINAJ

___________________________________________

Le Bureau du Procureur :

Mme Carla del Ponte
M. Dermot Groome
Mme Marie Tuma

L’Accusé et les Conseils de l’Accusé :

Ramush Haradinaj

M. Rodney Dixon
M. Ben Emmerson
M. Conor Gearty
M. Michael O’Reilly

    I. RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

  1. Ramush Haradinaj (l’« Accusé ») et deux co-accusés, Idriz Balaj et Lahi Brahimaj, sont visés par le même acte d’accusation, confirmé le 4 mars 2005 et initialement placé sous scellés. Le 9 mars 2005, l’Accusé, alors Premier Ministre du Kosovo en exercice depuis 2004, se livre volontairement et est transféré le même jour au Quartier pénitentiaire des Nations Unies. Le 10 mars 2005, l’acte d’accusation est rendu public. Le 14 mars 2005, lors de sa comparution initiale, l’Accusé a plaidé non coupable de tous les chefs d’accusation retenus contre lui1.

  2. La Chambre de première instance II du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal  ») est aujourd’hui saisie de la demande de mise en liberté provisoire de Ramush Haradinaj (Defence Motion on Behalf of Ramush Haradinaj for Provisional Release ) (la « Requête »), déposée le 21 avril 2005 par le conseil de l’Accusé (la  « Défense ») en application de l’article 65 du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal (le « Règlement »).

  3. Le 5 mai 2005, le Bureau du Procureur (l’« Accusation ») a déposé une réponse (Prosecution’s Response to Defence Motion on Behalf of Ramush Haradinaj for Provisional Release) (la « Réponse ») par laquelle il demande le rejet de la Requête. Le 12 mai 2005, la Défense a demandé l’autorisation de répondre à la Réponse en application de l’article 126 bis du Règlement et déposé une réplique (Defence’s Reply to Prosecution’s Response to Defence Motion on Behalf of Ramush Haradinaj for Provisional Release) (la « Réplique »). Le 17 mai 2005, la Chambre de première instance a fait droit à la demande et accueilli la Réplique2. Le 24 mai 2005, les parties ainsi qu’un représentant de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (la « MINUK ») ont été entendus par la Chambre de première instance lors d’une audience3.

  4. L’Accusé, qui serait un ancien commandant de l’Armée de libération du Kosovo (l’« ALK »), doit répondre, sur le fondement de l’article 7 1) du Statut du Tribunal (le « Statut »)4, de 17 chefs d’accusation de crimes contre l’humanité, en application de l’article 5 du Statut, et de 20 chefs de violations des lois ou coutumes de la guerre, en application de l’article 3 du Statut. Tous les crimes reprochés dans l’acte d’accusation auraient été commis entre le 1er mars et le 30 septembre 1998 sur le territoire du Kosovo en ex-Yougoslavie.

    II. ARGUMENTS DES PARTIES

    A. Conclusions

  5. À l’appui de sa Requête, la Défense fait valoir :

    a) que l’Accusé a immédiatement démissionné de son poste de Premier Ministre du Kosovo lorsqu’il a été informé de sa mise en accusation et qu’il s’est livré volontairement et sans retard au Tribunal ;

    b) que l’autorité légitime chargée de l’administration du Kosovo, la MINUK, a accepté de fournir les garanties nécessaires au respect de toute condition que la Chambre de première instance pourra poser à la mise en liberté provisoire de l’Accusé ;

    c) que l’Accusé a déjà été mis en liberté provisoire au Kosovo pendant trois jours pour raisons humanitaires et qu’il a, à cette occasion, pleinement respecté l’ensemble des conditions qui lui avaient été imposées5  ;

    d) que l’Accusé s’est engagé par écrit auprès de la Chambre de première instance à se représenter au procès, à ne faire pression d’aucune manière sur les victimes et les témoins et à respecter pleinement toutes les conditions que la Chambre de première instance pourra poser ;

    e) qu’il n’y a pas eu de pressions exercées par l’Accusé sur les témoins dès lors que tout portait à croire qu’il serait mis en accusation, soit depuis le mois de novembre 2004, et qu’il n’est pas établi que l’Accusé mettrait concrètement en danger quiconque ;

    f) que l’Accusé jouit d’une exceptionnelle réputation personnelle et politique confirmée par un certain nombre de personnalités politiques, militaires et diplomatiques internationales qui toutes sont d’avis que l’Accusé observerait toutes les conditions posées par la Chambre de première instance6 ;

    g) que, compte tenu des circonstances de la reddition de l’Accusé, la mise en liberté provisoire de l’Accusé ne devrait pas poser de problèmes de sécurité au Kosovo et que son retour y ferait au contraire avancer le processus de transition7.

  6. L’Accusation s’oppose à la Requête au motif que les conditions de la mise en liberté provisoire ne sont pas réunies. En premier lieu, l’Accusation avance que la Chambre de première instance ne peut, sur la foi des éléments de preuve produits, être convaincue que la MINUK est, dans les faits, en mesure de procéder à l’arrestation de l’Accusé si la nécessité s’en fait sentir. À cet égard, l’Accusation renvoie en particulier à l’affaire Limaj, dans laquelle la demande de mise en liberté provisoire de l’accusé avait été rejetée. Dans cette affaire, la MINUK avait refusé de fournir des garanties au motif, d’une part, qu’elle disposait de ressources limitées et d’autre part que, « SéCtant donné la situation géographique du Kosovo, S…C et l’assistance dont bénéficierait une personne dans la situation de M. Limaj si elle cherchait à éviter l’arrestation, il serait relativement facile de quitter le Kosovo pour un pays voisin »8. L’Accusation fait valoir que la Chambre de première instance devrait tirer la même conclusion en l’espèce, au motif que les facteurs ayant motivé le refus de la MINUK de fournir lesdites garanties sont toujours d’actualité. A fortiori, soutient l’Accusation, dans la mesure où l’Accusé en l’espèce disposerait d’une assistance plus grande encore que Fatmir Limaj. L’Accusation rappelle que l’Accusé occupait un poste élevé dans la hiérarchie, que les accusations portées contre lui sont très graves et qu’à ce titre il est passible d’une lourde peine de prison. Quant à la précédente mise en liberté provisoire accordée à l’Accusé pour une durée de trois jours, l’Accusation rappelle que l’Accusé était placé sous la surveillance constante soit de la MINUK soit du personnel du Tribunal9.

  7. En second lieu, l’Accusation soutient que, s’il est mis en liberté provisoire, l’Accusé mettra en danger les victimes et les témoins. Tout en admettant ne pas être en possession d’éléments d’information prouvant que des témoins en l’espèce ont été victimes d’intimidations exercées par l’Accusé, l’Accusation cite de nombreux exemples montrant que le Kosovo reste une région particulièrement dangereuse pour les témoins entendus dans une procédure pénale et avance que la mise en liberté provisoire de l’Accusé aura un effet négatif sur l’idée que se fait le public de la sécurité des témoins éventuels10. L’Accusation tire également argument d’une infraction au Règlement portant régime de détention du Quartier pénitentiaire des Nations Unies commise par l’Accusé11.

  8. L’Accusation présente deux autres conclusions qui sont suspendues à la décision que prendra la Chambre de première instance. Si la Requête est rejetée, l’Accusation s’engage expressément à déployer toutes les ressources nécessaires pour accélérer la phase préalable au procès12. Si la demande de mise en liberté de l’Accusé est accueillie, l’Accusation demandera, en application de l’article 65 E) du Règlement, un sursis à son exécution afin de pouvoir interjeter appel de la décision13.

  9. Dans la Réplique, la Défense réaffirme qu’il y a lieu de croire que l’Accusé se livrerait de nouveau volontairement au Tribunal et que la MINUK serait tout à fait en mesure d’assurer la comparution de l’Accusé au Tribunal14. La Défense ajoute que l’Accusation n’a pas rapporté la preuve de l’existence d’un lien entre l’Accusé et les cas de pression ou d’intimidation dont ont été victimes des témoins et se borne à invoquer l’idée que s’en fait le public, argument insuffisant. La Défense fait observer que l’Accusé a au contraire toujours fait montre de sa volonté de permettre aux témoins de sortir de leur silence sans craindre les intimidations et de déposer devant le Tribunal15. Au reste, la Défense ne s’oppose pas à la demande de mesures de protection de témoins avant le procès présentée par l’Accusation, et ce, malgré la « nature générale de ces allégations »16.

  10. Le 17 mai 2005, la Chambre de première instance a reçu un rapport écrit confidentiel de la MINUK porté par la suite à la connaissance des deux parties. La MINUK y indique qu’elle est investie des pleins pouvoirs de police au Kosovo et, partant, qu’elle est en mesure de fournir des garanties précises quant à l’Accusé, si la Chambre de première instance en fait la demande17. La MINUK fait d’autre part remarquer que depuis 2003, époque à laquelle elle a refusé de fournir des garanties dans l’affaire Limaj, ses pouvoirs de police ont été considérablement renforcés, notamment par l’augmentation des effectifs du Service de police du Kosovo (SPK) ainsi que par d’autres mesures telles que l’instauration d’un cadre juridique global et la mobilisation de nouvelles ressources techniques 18.

    B. Exposés

  11. À l’audience, la Défense a fait valoir que « tout militait » en faveur de la mise en liberté provisoire de l’Accusé19. Aux arguments présentés dans ses conclusions, la Défense a ajouté que la perspective de commencer le procès de l’Accusé avant 2007 était lointaine et que, quand bien même l’Accusation mobiliserait toutes les ressources à sa disposition pour accélérer la mise en état du procès, la Défense aurait de toute façon besoin de beaucoup de temps pour s’y préparer20. La Défense a clarifié sa Requête en précisant que l’Accusé demandait à être mis en liberté provisoire à Pristina/Prishtinë, mais qu’il souhaitait en outre pouvoir se déplacer directement entre Pristina/Prishtinë et son lieu de résidence dans le Kosovo occidental 21. Au terme de l’audience, l’Accusé s’est adressé en personne à la Chambre de première instance pour réaffirmer son engagement à se représenter et à ne pas faire pression sur les victimes ou les témoins 22.

  12. L’Accusation a pour sa part maintenu que la Requête devait être rejetée. Elle a prié la Chambre de première instance de bien vouloir examiner les limites de l’aptitude de la MINUK à fournir des garanties quant à sa propre capacité de procéder à l’incarcération de l’Accusé s’il ne respectait pas une des conditions qui lui sont imposées, au motif, tout d’abord, qu’on ne peut pas savoir si le mandat de la MINUK et, partant, sa capacité d’incarcérer l’Accusé, restera identique durant toute la période de liberté provisoire ; au motif, ensuite, que ces garanties ne seront pas reprises ou assurées dans la même mesure par les institutions nationales qui seront, selon toute probabilité, chargées d’incarcérer l’Accusé, en l’occurrence le Corps de protection du Kosovo (CPK) et le SPK, dont les liens passés avec l’Accusé sont étroits. L’Accusation a, en outre, présenté des pièces supplémentaires montrant que la sécurité reste une source de préoccupation permanente pour les témoins au Kosovo23.

  13. À l’audience, la MINUK était représentée en la personne de l’Adjoint principal du Représentant spécial du Secrétaire général, M. Larry Rossin. Ce dernier a déclaré que la MINUK était non seulement disposée à fournir à la Chambre de première instance des garanties à la mesure de l’importance de l’Accusé, mais était également tenue de coopérer pleinement avec le Tribunal24. L’Adjoint principal a confirmé que les capacités de la MINUK s’étaient substantiellement renforcées ces dernières années et a précisé que « le niveau général de sécurité au Kosovo SétaitC bon » et que le « niveau général de la criminalité et de la violence SétaitC bas »25. M. Rossin a expliqué que le CPK n’était pas chargé de tâches de sécurité au Kosovo et que le SPK était actuellement placé sous le commandement et l’autorité du Commissaire de police de la MINUK26. Toutefois, s’agissant de l’hypothèse de l’ouverture du procès en 2007, M. Rossin n’a pas su dire si le mandat de la MINUK resterait identique pendant toute la durée de mise en liberté provisoire de l’Accusé. Il a en revanche assuré la Chambre de première instance que les institutions appelées à succéder à la MINUK respecteraient les principes de l’État de droit et de la transparence de l’État27.

    Conclusions déposées après l’audience

  14. À l’audience, l’Accusation a demandé l’autorisation de déposer des conclusions supplémentaires portant sur des éléments d’information obtenus quelques heures à peine avant l’ouverture de l’audience28. La Chambre de première instance a non seulement fait droit à cette demande, mais a également autorisé la Défense à répondre aux arguments présentés dans ces conclusions ainsi qu’à toutes les nouvelles questions soulevées par l’Accusation lors de l’audience 29.

  15. Le 25 mai 2005, l’Accusation a déposé, à titre confidentiel, des conclusions supplémentaires relatives à des éléments d’information nouveaux intéressant la demande de mise en liberté provisoire de l’Accusé (Prosecution’s Submission of New Information Relevant to Ramush Haradinaj’s Application for Provisional Release) (les « conclusions supplémentaires de l’Accusation »), dans lesquelles il est fait état d’une apparente tentative d’assassinat perpétrée récemment au Kosovo contre un témoin protégé dans le cadre d’une autre affaire devant le Tribunal. Tout en concédant que l’identité des suspects n’a pas encore été établie et qu’il est prématuré de faire le rapprochement entre la tentative d’assassinat présumée et l’intervention de la victime dans la procédure devant le Tribunal, l’Accusation prie malgré tout la Chambre de première instance, dans l’hypothèse où elle envisagerait de faire droit à la Requête, de bien vouloir surseoir à l’exécution de sa décision pendant un délai raisonnable, le temps que la MINUK achève l’enquête préliminaire ouverte sur cette affaire et remette ses conclusions à la Chambre de première instance30. Revenant sur une question posée à l’audience, l’Accusation admet que la détention d’un accusé avant le procès n’empêche pas nécessairement l’intimidation des témoins, mais maintient que sa mise en liberté provisoire saperait la confiance des témoins dans le Tribunal et doit, à ce titre, faire l’objet d’un examen soigneux31. Faute de quoi, et même si le représentant de la MINUK soutient le contraire, l’Accusation persiste à penser que les inquiétudes pour la sécurité des témoins au Kosovo sont extrêmement vives32.

  16. Le 25 mai 2005 également, la Défense a déposé, à titre confidentiel, une réplique supplémentaire (Defence’s Confidential Further Reply in Respect of the Application for Provisional Release of Ramush Haradinaj) (les « Conclusions supplémentaires de la Défense »). La Défense y souligne que ni l’existence d’un lien entre la tentative d’assassinat présumée et un procès devant le Tribunal, ni la preuve d’une quelconque implication de l’Accusé n’ont été établies et fait valoir, par conséquent, que cette affaire ne saurait avoir une influence en l’espèce. Il s’ensuit que la Défense s’oppose à la demande de sursis de l’Accusation33. En outre, faisant observer que l’Accusation n’a pas choisi au hasard les extraits de documents qu’elle a produits à l’audience consacrée à la présence internationale de sécurité au Kosovo, la Défense présente à son tour des documents qui pointent vers une autre conclusion34. La Défense précise également que, s’il est libéré, l’Accusé demande l’autorisation d’intervenir dans les affaires politiques et de pouvoir se déplacer librement sur l’ensemble du territoire du Kosovo, mais qu’il s’engage à ne parler en aucune manière de son procès devant le Tribunal35. La Défense s’oppose aussi à la demande par laquelle l’Accusation prie la Chambre de première instance de surseoir à l’exécution d’une décision de mise en liberté provisoire de l’Accusé36.

  17. Le 26 mai 2005, la Chambre de première instance a demandé à la MINUK de lui faire savoir si les éléments d’information présentés dans les conclusions supplémentaires infléchissaient la position exprimée à l’audience sur la Requête37.

  18. Dans sa réponse du 27 mai 2005, la MINUK conclut, après avoir passé en revue toutes les conclusions supplémentaires, que sa position n’est pas remise en cause et réaffirme qu’elle est en mesure de s’acquitter de toutes les obligations que la Chambre de première instance pourrait imposer38.

    III. LE DROIT

  19. L’article 21 du Statut du Tribunal intitulé « Les droits de l’accusé » dispose, en ses passages pertinents, que :

    1. Tous sont égaux devant le Tribunal international.

    [...]

    3. Toute personne accusée est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie conformément aux dispositions du présent statut.

    [...]

  20. L’article 65 du Règlement régissant la mise en liberté provisoire dispose, en ses passages pertinents, que :

    Une fois détenu, l’accusé ne peut être mis en liberté que sur ordonnance d’une Chambre.

    La mise en liberté provisoire ne peut être ordonnée par la Chambre de première instance qu’après avoir donné au pays hôte, et au pays où l’accusé demande à être libéré la possibilité d’être entendus, et pour autant que Sla ChambreC ait la certitude que l’accusé comparaîtra et, s’il est libéré, ne mettra pas en danger une victime, un témoin ou toute autre personne.

    La Chambre de première instance peut subordonner la mise en liberté provisoire de l’accusé aux conditions qu’elle juge appropriées, y compris la mise en place d’un cautionnement et, le cas échéant, l’observation de conditions nécessaires pour garantir la présence de l’accusé au procès et la protection d’autrui.

    [...]

    Le Procureur peut demander à ce que la Chambre de première instance sursoie à l’exécution de sa décision de libérer un accusé au motif qu’il a l’intention d’interjeter appel de la décision ; il présente cette demande en même temps qu’il dépose sa réponse à la requête initiale de l’accusé aux fins de mise en liberté provisoire.

    [...]

  21. L’article 65 du Règlement doit être lu à la lumière de l’article 21 3) du Statut 39. Il incombe à l’accusé d’apporter la preuve que, s’il est libéré, il se présentera au procès et ne mettra pas en danger une victime, un témoin ou toute autre personne40. Pour décider si elle est convaincue que, s’il est libéré, un accusé se représentera, une chambre de première instance n’est pas tenue de passer en revue tous les éléments qu’elle peut prendre en considération41, il lui suffit d’indiquer tous les éléments pertinents dont elle a tenu compte dans sa décision, autrement dit de motiver celle-ci42.

  22. Pour déterminer si l’accusé peut être mis en liberté provisoire, la Chambre de première instance doit prendre en compte les circonstances propres à l’affaire. S’agissant du risque de non-comparution de l’accusé, les Chambres de première instance ont souvent accordé un grand poids aux garanties fournies par l’État ou l’entité où l’accusé demande à être libéré43. Quant à l’appréciation du risque de mise en danger d’une victime, d’un témoin ou de toute autre personne si l’accusé est libéré, les autres Chambres de première instance ont, par le passé, notamment pris en compte les éléments donnant à penser que l’accusé a entravé le cours de la justice depuis la confirmation de l’acte d’accusation établi à son encontre44. L’appréciation du danger que pourrait présenter l’accusé ne peut se faire in abstracto. Un danger précis doit être mis en évidence45.

  23. La Chambre d’appel a estimé qu’il convenait de prendre tout particulièrement en compte, avant de décider d’accorder ou non une mise en liberté provisoire, les autres facteurs suivants :

    a. La gravité des crimes reprochés à l’accusé ;

    b. La longueur de la peine d’emprisonnement encourue par l’accusé ;

    c. Les circonstances de la reddition de l’accusé ;

    d. Le degré de coopération des autorités de l’État où l’accusé demande à être libéré  ;

    e. Les garanties offertes par ces autorités et, le cas échéant, par l’accusé lui-même  ;

    f. Dans le cas d’une infraction aux conditions de mise en liberté provisoire, la probabilité que les autorités compétentes procéderont à l’arrestation de l’accusé s’il refuse de se livrer ;

    g. Le degré de coopération de l’accusé avec l’Accusation46.

  24. S’agissant de la gravité des crimes reprochés, la Chambre de première instance doit indiquer précisément la lourdeur de la peine qu’encourt l’accusé s’il est déclaré coupable et apprécier le risque de fuite qui en découle47. La Chambre de première instance observe que la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que « la gravité des accusations portées ne suffit pas à motiver la durée prolongée de la détention provisoire »48. La Chambre de première instance convient également que l’argument de la lourdeur de la peine ne peut pas être invoqué in abstracto contre l’accusé dans la mesure où tous les accusés poursuivis devant le Tribunal encourent une peine lourde s’ils sont reconnus coupables49.

  25. Pour ce qui est des garanties gouvernementales, la Chambre d’appel a considéré que le « poids à accorder aux garanties fournies par un gouvernement peut dépendre, dans une large mesure, de la situation personnelle du requérant, notamment en raison des fonctions qu’il exerçait avant son arrestation »50. Selon la Chambre d’appel, la Chambre de première instance doit apprécier cette situation non seulement telle qu’elle est au moment où elle se prononce sur l’élargissement, mais également et dans la mesure où elle peut le prévoir, telle qu’elle sera au moment où le procès s’ouvrira et où l’accusé devra se représenter51. Dès lors que la Chambre de première instance se fonde sur les garanties, « SlCa place d’un accusé dans la hiérarchie et ses conséquences sur le poids à accorder aux garanties fournies par un gouvernement sont effectivement des éléments importants que la Chambre de première instance devrait normalement prendre en considération dans la mesure où elle pourraient avoir une incidence importance sur la bonne volonté d’un État et son empressement à arrêter cette personne si elle refuse de se livrer  »52. La Chambre de première instance a en outre conscience que, faute de moyens de coercition propres, le Tribunal dépend totalement de l’autorité et des pouvoirs dont disposent les États et autres organismes pour assurer l’arrestation des fugitifs53.

  26. La Chambre de première instance fait remarquer que, en application de la résolution 1244 adoptée le 10 juin 1999 par le Conseil de sécurité, la MINUK est l’autorité chargée, en coordination avec la KFOR (les forces de l’OTAN au Kosovo) d’assurer la sécurité publique et la surveillance des frontières et qu’elle est dotée des moyens nécessaires à cet effet54. Par conséquent, la Chambre de première instance entend tenir compte des garanties fournies par la MINUK.

  27. La Chambre de première instance reste libre de refuser de libérer un accusé quand bien même les deux conditions fixées à l’article 65 du Règlement se trouveraient réunies55. Il s’ensuit que les conditions expressément énoncées à l’article 65 B) ne sauraient être interprétées comme ayant pour objet de dresser la liste exhaustive des raisons pour lesquelles une demande de mise en liberté doit être rejetée dans un cas donné56.

  28. Dans ce qui suit, la Chambre de première instance examinera les facteurs pertinents applicables à la demande de mise en liberté provisoire. Elle attachera une attention toute particulière aux circonstances de l’espèce et appréciera si l’intérêt public, nonobstant la présomption d’innocence, l’emporte sur la nécessité du respect du droit de l’accusé à la liberté de sa personne57.

    IV. EXAMEN

    A. S’il est libéré, l’Accusé se représentera-t-il à son procès ?

    Les accusations portées contre l’Accusé

  29. Tout en sachant que la culpabilité de l’Accusé est une question devant être examinée au fond et tranchée au procès, la Chambre de première instance note que l’Accusé doit répondre de 37 chefs d’accusation et notamment de persécutions, un crime contre l’humanité et une violation des lois ou coutumes de la guerre. Ainsi, s’il est déclaré coupable, l’Accusé encourt une lourde peine d’emprisonnement. Sans perdre de vue que ce facteur ne suffit pas en soi à justifier une période prolongée de détention avant le procès58, la Chambre de première instance entend néanmoins tenir compte du fait que la lourdeur de la peine encourue risque d’inciter l’Accusé à s’enfuir. Aussi la Chambre de première instance a-t-elle également pris en considération les conclusions des parties sur la question de savoir quand l’affaire sera en état d’être jugée. Or, comme la Défense l’a fait remarquer à l’audience, il est improbable que le procès de l’Accusé commence avant 200759, une prévision que l’Accusation n’a pas contestée à l’audience60. Vu les droits de l’accusé et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en la matière évoquée plus haut61, la Chambre de première instance estime donc que ce facteur mérite d’être pris en compte avant de se prononcer sur cette question.

    Les circonstances de la reddition volontaire de l’Accusé

  30. Lorsqu’il s’est livré au Tribunal, l’Accusé était un dirigeant politique. Le 3 décembre 2004, il avait été élu premier ministre du Kosovo par l’Assemblée du Kosovo. Il est par ailleurs président de l’Alliance pour l’avenir du Kosovo, l’un des principaux partis politiques.

  31. Le 8 mars 2005, l’Accusé a appris qu’un acte d’accusation, initialement placé sous scellés, avait été dressé contre lui. À peine quelques heures plus tard, l’Accusé a annoncé sa démission de ses fonctions de premier ministre et sa reddition volontaire au Tribunal. Lors d’une conférence de presse ultérieure, l’Accusé a expliqué sa décision dans les termes suivants :

    Je suis appelé aujourd’hui à faire un autre sacrifice que je n’aurais jamais cru devoir consentir. On vient de m’apprendre que le Tribunal de La Haye avait établi un acte d’accusation contre moi. Avant tout, je tiens à proclamer devant vous que je suis innocent des crimes qui me sont reprochés. Je le proclame parce que c’est devant mon peuple que je suis responsable et à lui que je dois rendre des comptes avant toute chose. [...] J’ai déclaré, par le passé, avoir toujours œuvré en faveur de l’avènement d’une société démocratique digne de figurer dans le concert des nations modernes. Par définition, cet objectif passe par la coopération avec la justice internationale, aussi injuste puisse-t-elle être sur le moment. Dans cette affaire, je suis blessé, je suis profondément touché. J’ai le sentiment qu’on m’écarte de mon travail à un moment où j’investis toute mon énergie pour mon pays, mais il me faut l’accepter pour le bien de ce pays, pour le bien de nous tous. [...]

    C’est la raison pour laquelle j’assume ce fardeau. Et je vous demande de l’accepter. Je vous demande à tous d’accepter ce qui est presque impossible, mais faites-le pour l’honneur de votre pays et de votre nation. Je vous demande de penser à l’intérêt général du pays62.

  32. Le lendemain, l’Accusé a quitté le Kosovo pour se rendre au Tribunal. La situation, sur le plan de la sécurité, est restée calme dans toutes les régions du Kosovo 63.

  33. La Chambre de première instance ne conteste pas, bien au contraire, le caractère exemplaire des circonstances de la reddition de l’Accusé qui contrastent, ce qui est là tout à son honneur, avec l’attitude d’autres personnes de même rang qui ont été mises en accusation par le Tribunal. La Chambre de première instance est particulièrement sensible au fait que l’Accusé soit déterminé à se soumettre à la justice internationale et qu’il ait appelé publiquement les Kosovars à accepter sa mise en accusation. Cette observation étant faite, la Chambre de première instance estime d’un autre côté que le poids à accorder au caractère volontaire de la reddition de l’Accusé en l’espèce ne devrait pas être trop différent de celui qui a été accordé dans toutes les autres affaires où l’accusé a pris la décision d’abandonner sa famille, ses amis et son travail pour se livrer volontairement au Tribunal.

    La personnalité de l’Accusé

  34. Un grand nombre de références certifiant l’intégrité personnelle et professionnelle de l’Accusé, dont les déclarations du Représentant spécial du Secrétaire général au Kosovo (le « RSSG »), Søren Jessen-Petersen, de l’ancien commandant de la Force du Kosovo (la « KFOR »), le général Klaus Reinhardt, et du Président du Kosovo, Ibrahim Rugova64, ont été portées à la connaissance de la Chambre de première instance. Søren Jessen-Petersen présente l’Accusé comme un « homme d’action, de conviction et de vision » et salue « la dignité et la maturité » dont il a fait preuve en décidant de se constituer prisonnier65. Le général Reinhardt, commandant de la KFOR d’octobre 1999 au printemps 2000, a décrit l’Accusé comme « un homme en qui Sil aC une confiance sans réserve et dont SilC sollicitaiStC l’avis activement » et comme « un homme politique aux qualités exceptionnelles qui sera l’un des artisans de la réconciliation des différentes minorités ethniques du Kosovo »66. La Chambre de première instance accordera toute l’importance qu’il convient à chacune de ces références.

  35. La Chambre de première instance constate également que l’Accusé a réaffirmé son intention de revenir à la vie publique après son procès67. Ce facteur compte pour savoir si l’Accusé a des raisons de prendre la fuite.

    L’engagement de l’Accusé

  36. Il est noté que l’Accusé s’est engagé à respecter pleinement toutes les ordonnances que la Chambre de première instance rendra68.

    Les garanties offertes par la MINUK

  37. Il va sans dire que la MINUK, étant l’autorité chargée de l’administration civile intérimaire du Kosovo et étant investie à ce titre du pouvoir de police, apportera sa pleine coopération et son assistance pour toute question en lien avec les affaires portées devant le Tribunal. En l’espèce, la MINUK s’est déclarée prête et disposée, ce dont la Chambre de première instance est absolument convaincue, à appréhender l’Accusé, si la nécessité s’en fait sentir.

  38. Néanmoins, l’Accusation fait valoir que la Chambre de première instance devrait examiner les limites qui entravent, dans les faits, la capacité pour la MINUK d’arrêter l’Accusé s’il tente de prendre la fuite69, et rappelle à cet égard les raisons invoquées par la MINUK pour refuser de fournir des garanties dans l’affaire Limaj et les facteurs sous-jacents qui, selon l’Accusation, seraient inchangés : les frontières et la géographie du Kosovo, les ressources de police dont dispose la MINUK et le réseau de soutien dont pourrait bénéficier l’Accusé70. À l’audience, l’Accusation a remis une série de rapports présentés par le Secrétaire général des Nations Unies au Conseil de sécurité sur la présence internationale de sécurité au Kosovo ainsi que d’autres documents qui, selon l’Accusation, corroborent la thèse que les capacités pratiques de la MINUK à cet égard sont limitées71.

  39. En premier lieu, la Chambre de première instance tient à faire remarquer que, même si elle ne veut pas et ne peut pas établir de comparaison entre la présente espèce et l’affaire Limaj s’agissant de la gravité des crimes reprochés ou des autres circonstances relatives aux accusés, les deux affaires diffèrent fondamentalement quant à la situation de la MINUK. Alors que, dans l’affaire Limaj, la MINUK avait clairement fait comprendre qu’elle n’était pas en mesure de fournir les garanties nécessaires à l’éventuelle mise en liberté provisoire d’un ou de plusieurs des accusés, dans l’affaire Haradinaj au contraire, la MINUK a bien fait comprendre qu’elle était tout à fait disposée à fournir toutes les garanties nécessaires à la mise en liberté provisoire de l’Accusé. La Chambre de première instance constate en second lieu que, nonobstant les éléments de preuve présentés par l’Accusation à l’audience et dont il a déjà été fait mention, la MINUK a réaffirmé, après avoir été invitée par la présente Chambre de première instance à se prononcer sur ces pièces, qu’elle était en mesure de fournir toutes les garanties nécessaires.

  40. Aussi la Chambre de première instance n’est-elle pas convaincue par l’argument de l’Accusation selon lequel la situation relative à la capacité pour la MINUK d’appréhender les fugitifs reste inchangée aujourd’hui. Au contraire, les éléments de preuve dont dispose la Chambre de première instance sont suffisants pour établir que les ressources de la MINUK ont depuis été considérablement renforcées72. Naturellement, on ne peut jamais être absolument certain que l’entité fournissant les garanties sera en mesure de les honorer et les ressources de la MINUK sont d’une certaine façon limitées comme le sont du reste celles des États. Toutefois, au vu des éléments de preuve qui lui ont été présentés, la Chambre de première instance n’a besoin d’être convaincue que d’une chose : que la MINUK soit capable d’assurer la comparution de l’Accusé devant le Tribunal.

  41. La Chambre de première instance est par ailleurs attentive au fait que, et c’est là une différence fondamentale, c’est la MINUK, organisme international placé sous la responsabilité des Nations Unies, qui fournit les garanties, et non le gouvernement dont l’Accusé a été le premier ministre, ce qui leur aurait donné moins de poids.

  42. D’autre part, à l’audience, l’Accusation a douté que la MINUK soit à même d’exercer son contrôle pendant une période prolongée de détention provisoire en raison d’un éventuel aménagement de son mandat à l’avenir, perspective que la MINUK n’a pas pu écarter73. La Chambre de première instance relève qu’il est possible que le mandat de la MINUK change au cours des années à venir et qu’un tel changement ait des conséquences pour l’autorité et les capacités dont celle-ci disposerait pour appréhender l’Accusé. Constatant cependant que rien n’annonce un tel changement dans un proche avenir, la Chambre de première instance estime que les garanties que la MINUK fournirait en l’espèce gardent toute leur validité. Cela étant posé, la Chambre de première instance surseoit à statuer sur le dispositif défini dans la présente Décision, si besoin est.

  43. Compte tenu de ce qui précède, la Chambre de première instance est convaincue que l’Accusé se représentera à son procès s’il est libéré.

    B. S’il est libéré, l’Accusé mettra-t-il en danger une victime, un témoin ou toute autre personne ?

    Situation générale des témoins

  44. L’Accusation a multiplié les exemples prouvant que les manœuvres d’intimidation à l’encontre des témoins au Kosovo, et même les atteintes à leur vie, étaient un problème récurrent. La Chambre de première instance prend ces éléments très au sérieux, d’autant qu’elle a bien conscience que les cas rapportés ne constituent sans doute qu’une fraction des cas effectifs74. D’un autre côté, la Chambre de première instance prend note d’une amélioration à cet égard75.

  45. Dans ces conditions, la Chambre de première instance ne juge pas utile de s’attarder plus longtemps sur les conclusions présentées par les deux parties à propos des conditions générales de la sécurité et du niveau général de la criminalité au Kosovo. La Chambre de première instance a soigneusement examiné les conclusions supplémentaires remises par l’Accusation après l’audience et note que cette dernière trouve la situation alarmante à cet égard. La Chambre de première instance n’est cependant pas en mesure d’accorder la même importance à ces conclusions étant donné que, d’une part, les allégations qui y sont avancées ne sont pas suffisamment étayées et que, d’autre part, la MINUK, ainsi qu’il a déjà été indiqué, n’a pas jugé, après avoir été consultée à ce propos, qu’il y avait lieu de revoir sa position quant aux garanties nécessaires qu’elle est en mesure de fournir dans le cadre de la présente espèce.

    Effet sur les témoins de la mise en liberté provisoire de l’Accusé

  46. Dans les conclusions que l’Accusation a remises à la Chambre de première instance, il n’est ni établi ni même allégué que l’Accusé puisse être impliqué dans l’un des cas d’intimidation de témoins mentionnés. L’argumentation principale de l’Accusation part de l’hypothèse, d’une part, que les responsables de ces actes auraient un même intérêt à intimider les témoins en l’espèce et, d’autre part, que la mise en liberté provisoire de l’Accusé aurait un effet négatif sur l’idée que se fait le public de la sécurité des témoins éventuels76.

  47. La Chambre de première instance ne voit pas en quoi le premier argument de l’Accusation démontre que la présence de l’Accusé au Kosovo aurait un effet négatif sur la sécurité des témoins ou inciterait les auteurs des précédents actes à s’en prendre à ces derniers. Quant au deuxième argument, la Chambre de première instance admet que l’idée que se fait le public de la sécurité des témoins peut influer de façon décisive, compte tenu des conditions qui règnent au Kosovo, sur la propension de ces derniers à déposer. Néanmoins, constatant qu’il n’a pas été établi que l’Accusé mettrait concrètement en danger quiconque, y compris les victimes et les témoins, la Chambre de première instance n’est pas convaincue que le risque d’un effet négatif sur l’idée que se fait le public de la sécurité des témoins potentiels suffise à justifier le rejet de la mise en liberté provisoire. Ainsi que l’a déclaré la Chambre de première instance dans l’affaire Prlic, « même si l’Accusé conserve une influence, il ne s’ensuit pas nécessairement qu’il va en user de manière illicite »77.

  48. En l’espèce, la Chambre de première instance constate que rien, dans les éléments de preuve présentés, n’indique que l’Accusé a entravé ou entravera le cours de la justice78. L’Accusé s’est également engagé à n’avoir aucun contact avec les témoins éventuels et à n’exercer aucune pression, directe ou indirecte, sur eux79.

    Mesures de protection

  49. En outre, la Chambre de première instance a récemment décidé d’accorder une série de mesures de protection à des témoins pendant la phase préalable au procès. Ainsi, vingt-sept témoins potentiels se sont vu attribuer un pseudonyme et l’Accusation a été autorisée à ne pas communiquer à la Défense l’identité des intéressés jusqu’à trente jours avant le commencement du procès80. La Chambre de première instance estime que ces mesures contribuent à la sécurité des témoins et constituent une garantie supplémentaire de la protection des témoins éventuels préoccupés par la mise en liberté provisoire de l’Accusé.

  50. Compte tenu de ce qui précède, la Chambre de première instance est, sur cette question-là aussi, convaincue que rien n’indique que l’Accusé ne mettra pas en danger une victime, un témoin ou toute autre personne s’il est libéré.

    V. CONCLUSION

  51. Au vu des preuves qu’a produites l’Accusé, comme il y était tenu, et en particulier de sa reddition volontaire, des garanties offertes par la MINUK et de ses propres engagements, et à la lumière en outre des considérations qui précèdent, la Chambre de première instance conclut que, s’il est libéré, l’Accusé se représentera à son procès et que rien n’indique qu’il mettra en danger une victime, un témoin ou toute autre personne.

  52. Pour les raisons qui précèdent, la Chambre de première instance fait droit, sous certaines conditions, à la demande de mise en liberté provisoire.

    VI. DISPOSITIF

  53. Par ces motifs, et en application de l’article 65 du Règlement, la Chambre de première instance ACCUEILLE la demande de mise en liberté provisoire et ORDONNE CE QUI SUIT :

    1. L’Accusé sera transporté à un aéroport des Pays-Bas par les autorités néerlandaises  ;

    2. À l’aéroport, l’Accusé sera provisoirement confié à la garde d’un représentant de la MINUK qui aura été préalablement nommé à cet effet et qui accompagnera l’Accusé durant le reste de son trajet jusqu’au Kosovo ;

    3. L’Accusé restera sur le territoire du Kosovo pendant toute la durée de la mise en liberté provisoire et, plus précisément, dans les limites des municipalités de Pristina/Prishtinë ou de Glodjane/Gllogjan, et il communiquera son adresse à ces deux endroits à la MINUK et au Greffier du Tribunal avant sa mise en liberté provisoire  ;

    4. Au retour, l’Accusé sera accompagné par le même représentant de la MINUK qui remettra l’Accusé à la garde des autorités néerlandaises à l’aéroport de Schiphol à une date et une heure que la Chambre de première instance fixera par ordonnance, et les autorités néerlandaises assureront son transport jusqu’au Quartier pénitentiaire des Nations Unies à La Haye ;

    5. Durant la première période de quatre-vingt-dix (90) jours, l’Accusé ne sera pas autorisé à faire d’apparitions en public ou à participer d’aucune manière à des activités politiques publiques. L’Accusé sera néanmoins autorisé à reprendre des activités administratives ou organisationnelles à titre de président de l’Alliance pour l’Avenir du Kosovo, sous réserve que ces activités ne rentrent pas en conflit avec les autres conditions fixées dans la présente Décision. Passé cette période de quatre-vingt-dix (90) jours et si la Défense en fait la demande, la Chambre de première instance réexaminera cette condition à la lumière de l’expérience acquise et après audition de l’Accusation et de la MINUK.

    6. Pendant la période de liberté provisoire, l’Accusé observera les conditions énoncées ci-dessous, que la MINUK veillera à faire respecter :

    a) il restera sur le territoire des municipalités de Pristina/Prishtinë ou de Glodjane /Gllogjan ;

    b) il informera la MINUK au moins 24 heures à l’avance de ses déplacements entre Pristina /Prishtinë et Glodjane/Gllogjan et de la durée envisagée de ses séjours dans l’une et l’autre de ces deux municipalités ;

    c) il remettra son passeport à la MINUK qui en assurera la garde ;

    d) il se présentera toutes les semaines à la MINUK à une heure et un lieu d’affectation local désignés par la MINUK ;

    e) il consentira à ce que la MINUK vérifie sa présence et à ce que la MINUK ou toute personne désignée par le Greffier du Tribunal lui rende de temps à autre des visites impromptues,

    f) il n’aura aucun contact avec ses deux coaccusés en l’espèce ;

    g) il n’aura aucun contact avec des victimes ou des témoins éventuels, n’exercera aucune pression sur eux et ne tentera en rien d’entraver le cours ou la bonne administration de la justice ;

    h) il ne parlera de son procès à personne d’autre (médias compris) que son conseil  ; il ne fera aucune déclaration et ne s’associera à aucune déclaration, publique ou autre, relative à la présence espèce ou à une autre affaire portée devant le Tribunal ou à des procès similaires en instance devant les tribunaux du Kosovo ;

    i) il n’exercera pas de fonctions au sein du Gouvernement du Kosovo, à quelque niveau que ce soit ;

    j) s’il accepte un emploi ou exerce une activité, il en informera le Greffier du Tribunal dans les trois jours de son entrée en fonctions et lui communiquera le nom et l’adresse de l’employeur ;

    k) il se pliera rigoureusement à toutes les conditions posées par toute personne relevant de la MINUK nécessaires à l’exécution des obligations et des garanties qui incombent à cette dernière en vertu du présent dispositif ;

    l) il se représentera devant le Tribunal à la date et à l’heure que la Chambre de première instance fixera par ordonnance ;

    m) il se conformera rigoureusement à toute nouvelle ordonnance de la Chambre de première instance qui modifierait les conditions de la mise en liberté provisoire ou y mettrait un terme.

  54. La Chambre de première instance DEMANDE, en outre, que la MINUK s’engage, en confirmant à la Chambre de première instance sa capacité d’agir ainsi :

    a) à designer un représentant à la garde duquel l’Accusé sera provisoirement confié et qui accompagnera celui-ci d’un aéroport des Pays-Bas à son lieu de résidence à Pristina/Prishtinë ou Glodjane/Gllogjan, et à informer dès que possible la Chambre de première instance et le Greffier du Tribunal de l’identité dudit représentant  ;

    b) à prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer la protection et la sécurité de l’Accusé pendant la mise en liberté provisoire, et à informer sans délai le Greffier du Tribunal de toute préoccupation à cet égard ;

    c) à faciliter, à la demande de la Chambre de première instance ou des parties, la coopération et la communication entre les parties et à en garantir la confidentialité  ;

    d) à vérifier régulièrement la présence de l’Accusé sur son lieu de résidence à Pristina /Prishtinë ou Glodjane/Gllogjan et à présenter à la Chambre de première instance toutes les deux semaines un rapport écrit sur le respect par l’Accusé des conditions énoncées dans le présent dispositif ;

    e) à procéder immédiatement à l’arrestation et à l’incarcération de l’Accusé au cas où il ne respecterait pas l’une des conditions énoncées dans le présent dispositif et à en informer sans délai la Chambre de première instance ;

    f) à informer sans délai la Chambre de première instance de toute modification du mandat de la MINUK qui influerait sur sa capacité d’assumer les responsabilités mentionnées dans la présente Décision.

  55. La Chambre de première instance DONNE INSTRUCTION au Greffier du Tribunal de consulter le Ministère de la justice des Pays-Bas quant aux modalités pratiques de la mise en liberté de l’Accusé et de garder celui-ci en détention au Quartier pénitentiaire des Nations Unies à La Haye jusqu’à ce que la Chambre de première instance et le Greffier aient reçu notification de l’identité du représentant désigné de la MINUK, à la garde duquel l’Accusé doit être confié, et DEMANDE aux autorités de tous les États que traversera l’Accusé :

    a) d’assurer la garde de l’Accusé pendant toute la durée de son transit à l’aéroport,

    b) de procéder à l’arrestation et à l’incarcération de l’Accusé dans l’attente de son transfert au Quartier pénitentiaire des Nations Unies à La Haye au cas où il tenterait de fuir.

  56. Enfin, la Chambre de première instance fait droit à la demande de l’Accusation et ORDONNE qu’il soit sursis à l’exécution de la décision de mettre en liberté provisoire l’Accusé en attendant qu’il soit statué sur l’appel que l’Accusation entend interjeter en application de l’article 65 D), E), F) et G) du Règlement.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 6 juin 2005
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance
_____________
Carmel Agius

[Sceau du Tribunal]


1 -  Compte rendu d’audience (CR.), p. 25 à 43.
2 -  Ordonnance fixant la date d'une audience consacrée à la demande de mise en liberté provisoire présentée par Ramush Haradinaj, 17 mai 2005.
3 -  CR., p. 52 à 93.
4 -  Statut du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, adopté par le Conseil de sécurité le 25 mai 1993 en vertu de la résolution 827 (1993) et modifié pour la dernière fois par la résolution 1481 (2003).
5 -  Décision relative à la demande urgente de mise en liberté provisoire présentée par la défense de Ramush Haradinaj, 16 avril 2005. L’Accusé avait été provisoirement libéré à Glodjane/Gllogjan, au Kosovo, du 17 avril au 19 avril 2005, période pendant laquelle il était en permanence sous la protection et la surveillance de la MINUK.
6 -  À cet effet, la Défense joint, entre autres, à la Requête les déclarations des personnalités suivantes : Søren Jessen-Petersen (Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo), le général Klaus Reinhardt (ancien commandant de la Force internationale de maintien de la paix au Kosovo, la KFOR), Joe Biden (sénateur américain), Robin Cook (ancien Ministre britannique des affaires étrangères), Ibrahim Rugova (Président du Kosovo) et Nexhat Daci (Président de l’Assemblée du Kosovo).
7 -  Requête, par. 3, 5 à 24.
8 -  Le Procureur c/ Limaj et consorts, affaire n° IT-03-66-PT, Décision relative à la demande de mise en liberté provisoire de Fatmir Limaj, 12 septembre 2003, p. 7.
9 - Réponse, par. 12 à 22, 37 et 38.
10 - Réponse, par. 23 à 36, 39. L’Accusation cite, entre autres, les rapports de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) portant sur la période allant de mars 2002 à octobre 2004 et évoque les exemples de pression exercées sur les témoins dans l’affaire Limaj précitée. De même, l’Accusation joint en annexe un rapport de l’Institute for War and Peace Reporting daté du 2 avril 2005 et intitulé « Special Report: Witness Intimidation a Serious Problem in Kosovo Cases ».
11 - Réponse, par. 41, dans laquelle l’Accusation évoque les reportages parus dans les médias sur l’intervention téléphonique adressée par M. Haradinaj à un auditoire au Kosovo. Dans la Réplique, la Défense concède certes que M. Haradinaj a prononcé un discours par téléphone lors d’un meeting politique de son parti organisé le 2 mai 2005 pour saluer l’assemblée, mais soutient que rien dans le Règlement portant régime de détention n’interdit ce type d’appels (Réplique, par. 32 à 35). La Réplique est accompagnée d’une lettre adressée le 3 mai 2005 à l’Accusé par le Greffier adjoint du Tribunal qui l’avertit que « tout contact direct ou indirect avec les médias découlant d’un abus des privilèges accordés par le Quartier pénitentiaire des Nations Unies est rigoureusement interdit ». Cette question n’a pas été abordée à l’audience.
12 - Réponse, par. 42.
13 - Réponse, par. 43.
14 - Réplique, par. 4 à 9.
15 - Réplique, par. 10 à 12, 14 et 18.
16 - Réplique, par. 13, renvoyant à la Prosecution Motion for Pre-Trial Protective Measures for Witnesses, 7 avril 2005, et Defence Response on Behalf of Ramush Haradinaj to Prosecution Motion for Pre-Trial Protective Measures for Witnesses, 3 mai 2005, par. 2, 4 et 7. Dans l’intervalle, la Chambre de première instance a accordé la majeure partie des mesures de protection demandées : Décision relative à la requête de l’Accusation aux fins de mesures de protection de témoins avant le procès, 20 mai 2005.
17 - Lettre de la MINUK en date du 12 mai 2005, p. 1 (document confidentiel). Dans une lettre adressée le 9 mai à la Défense, la MINUK se déclarait prête, « dans la mesure du possible », à fournir toutes les garanties pouvant être demandées.
18 - Lettre de la MINUK en date du 12 mai 2005, p. 2 (document confidentiel).
19 - CR., p. 55.
20 - CR., p. 64.
21 - CR., p. 65.
22 - CR., p. 87 et 88.
23 - CR., p. 67 à 73, 75 à 78 ; annexes 1 à 11 remises à la Chambre de première instance et à la Défense à l’audience.
24 - CR., p. 80. M. Rossin a fait explicitement référence au paragraphe 14 de la Résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.
25 - CR., p. 80 à 84.
26 - CR, p. 85 et 86.
27 - CR., p. 85.
28 - CR., p. 73 et 74 (audience à huis clos partiel).
29 - CR., p. 75, 88 à 91.
30 - Conclusions supplémentaires de l’Accusation, par. 4 et 10.
31 - Ibidem, par. 8.
32 - Ibid., par. 5 à 7, 9.
33 - Conclusions supplémentaires de la Défense, par. 27 à 29.
34 - Ibidem., par. 16 à 23, 26.
35 - Ibid., par. 2 à 15.
36 - Ibid., par. 31 à 33.
37 - Requête adressée le 26 mai 2005 à la MINUK (document confidentiel).
38 - Réponse de la MINUK, 27 mai 2005 (document confidentiel).
39 - Le Procureur c/ Prlic et consorts, affaire n° IT-04-74-PT, Ordonnance relative à la demande de mise en liberté provisoire de Jadranko Prlic (la « Décision Prlic en première instance »), 30 juillet 2004, par. 13.
40 - Le Procureur c/ Prlic et consorts, affaire n° IT-04-74-AR65, Décision relative aux demandes de réexamen et d’éclaircissements, à une demande de mise en liberté provisoire et à des demandes d’autorisation d’interjeter appel (la « Décision Prlic en appel »), 8 septembre 2004, par. 28.
41 - Le Procureur c/ Sainovic et Ojdanic, affaire n° IT-99-37-AR65, Décision relative à la mise en liberté provisoire (la « Décision Sainovic en appel »), 30 octobre 2002, par. 6.
42 - Ibidem.
43 - Le Procureur c/ Sainovic et Ojdanic, affaire n° IT-99-37-PT, Décision relative aux requêtes déposées par Nikola Sainovic et Dragoljub Ojdanic aux fins de mise en liberté provisoire (la « Décision Sainovic en première instance »), 26 juin 2002, par. 16 ; Le Procureur c/ Rasim Delic, affaire n° IT-04-83-PT, Decision on Defence Request for Provisional Release, 6 mai 2005, p. 4 ; Le Procureur c/ Milan Milutinovic, affaire n° IT-99-37-PT, Décision relative à la deuxième demande de mise en liberté provisoire, 14 avril 2005, par. 8 et s.
44 - La Décision Sainovic en première instance, par. 16 ; Le Procureur c/ Vladimir Lazarevic, affaire n° IT-03-70-PT, Décision relative à la demande de mise en liberté provisoire, 14 avril 2005, p. 3.
45 - Décision Prlic en première instance, par. 28.
46 - Décision Sainovic en appel, par. 6.
47 - Décision Prlic en appel, par. 30.
48 - Arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme rendu le 26 juillet 2001 dans l’affaire Ilijkov c/ Bulgarie, par. 81, cité dans Le Procureur c/ Stanisic, affaire n° IT-03-69-PT, Décision relative à la mise en liberté provisoire, 28 juillet 2004, par. 21 [traduction non officielle].
49 - Décision Prlic en première instance, par. 29.
50 - Décision Sainovic en appel, par. 7.
51 - Ibidem.
52 - Ibid. par. 9.
53 - Le Procureur c/ Seselj, affaire n° IT-03-67-PT, Décision relative à la requête de la Défense aux fins de mise en liberté provisoire, 23 juillet 2004, par. 7.
54 - Le Procureur c/ Limaj et consorts, affaire n° IT-03-66-AR65, Décision relative à la demande de mise en liberté provisoire de Limaj, 31 octobre 2003, par. 25.
55 - Aux termes de l’article 65 B), « [l]a mise en liberté provisoire ne peut être ordonnée » qu’une fois que la Chambre de première instance a la certitude que les deux conditions y mentionnées sont satisfaites (non souligné dans l’original). Voir aussi Le Procureur c/ Kovacevic, affaire n° IT-97-24-PT, Décision relative à la requête de la défense aux fins de mise en liberté provisoire, 21 janvier 1998 ; Le Procureur c/ Brdanin et Talic, affaire n° IT-99-36-PT, Décision relative à la requête de Momir Talic aux fins de mise en liberté provisoire, 28 mars 2001.
56 - Décision Prlic en première instance, par. 18.
57 - Voir Le Procureur c/ Miodrag Jokic, affaire n° IT-01-42-PT, Ordonnance relative à la requête de Miodrag Jokic aux fins de mise en liberté provisoire, 20 février 2002, par. 17.
58 - Voir par. 24 supra.
59 - CR., p. 64.
60 - CR., p. 70.
61 - Voir supra paragraphe 24 et note de bas de page 48.
62 - Déclaration du Premier Ministre Haradinaj lors de la conférence de presse du 8 mars 2005 à 12 h, jointe à la Requête.
63 - Constatation de la MINUK sur les circonstances entourant la mise en accusation de M. Haradinaj, 12 avril 2005, jointe à la Requête.
64 - Annexes à la Requête.
65 - Déclaration du RSSG à la suite de la démission du Premier Ministre, communiqué de presse, 8 mars 2005.
66 - Lettre adressée le 10 avril 2005 par le général Reinhardt à la Chambre de première instance, jointe à la Requête.
67 - Conclusions supplémentaires de la Défense, par. 2 à 10 ; Réponse, par. 42.
68 - Déclaration de Ramush Haradinaj, ancien Premier Ministre du Kosovo, aux fins de mise en liberté provisoire, 20 avril 2005, jointe à la Requête.
69 - CR., p. 67. Réponse, par. 21 ; voir supra, par. 6.
70 - Réponse, par. 21 ; voir supra, par. 6.
71 - CR., p. 66.
72 - Lettre de la MINUK du 12 mai 2005, p. 2 (document confidentiel).
73 - CR., p. 70, 85.
74 - « OSCE Mission in Kosovo : Review of the Criminal Justice System », avril 2003-octobre 2004, p. 74 et 75, cité dans la Réponse, par. 28.
75 - Ibidem, p. 76 et 77.
76 - Réponse, par. 23 à 36, 39 ; Conclusion supplémentaire, par. 8, 9 a et c.
77 - Décision Prlic en première instance, par. 28.
78 - L’argument pris de l’infraction au Règlement portant régime de détention invoquée antérieurement par l’Accusation (voir par. 7 supra) n’a été repris dans aucune de ses conclusions ultérieures. La Chambre de première instance y accorde peu d’importance.
79 - Déclaration de Ramush Haradinaj, ancien Premier Ministre du Kosovo, aux fins de mise en liberté provisoire, 20 avril 2005, jointe à la Requête.
80 - Décision relative à la demande de mesures protection de témoins avant le procès présentée par l’Accusation, 20 mai 2005.