Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 27 mars 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire et à

7 tous ceux à l'extérieur du prétoire qui nous assistent.

8 Madame la Greffière, pouvez-vous citer l'affaire, s'il vous plaît ?

9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

10 Messieurs les Juges. Ceci est l'affaire IT-04-84-T, le Procureur contre

11 Ramush Haradinaj et consorts.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

13 Monsieur Re, êtes-vous prêt à poser des questions supplémentaires au

14 témoin ?

15 Nouvel interrogatoire par M. Re :

16 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Stojanovic.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, avant que M. Re ne

18 commence à vous interroger, j'aimerais vous dire que vous êtes lié par la

19 déclaration solennelle que vous avez donnée vendredi dernier.

20 Monsieur Re, vous avez la parole.

21 LE TÉMOIN : DRAGOSLAV STOJANOVIC [Reprise]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 M. RE : [interprétation]

24 Q. Il y a différents points que j'aimerais éclairer sur la base des

25 questions que Me Emmerson vous a posées hier. Je vais vous poser quelques

26 questions au sujet de ces points-là. Etes-vous d'accord ?

27 R. Oui, très bien.

28 Q. La première porte sur votre mère. Quelle est l'année de naissance de

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1 votre mère ?

2 R. Je crois que c'est l'année 1930 ou par là.

3 Q. Autre question que j'aimerais vous poser. Hier, Me Emmerson - c'était à

4 la page 64 du compte rendu d'audience - vous a posé la question sur le fait

5 que votre mère indique que les hommes qui vous avaient fouillé avant

6 l'incident du 24 mars 1998 ont trouvé un pistolet sur vous. Vous avez

7 répondu, je cite : "Comment ma mère pourrait-elle, ou d'ailleurs qui que ce

8 soit d'autre, savoir quelque chose comme cela, si ce n'est moi-même ? Ce

9 n'est pas la seule fois où ils m'ont fouillé physiquement à l'époque. Quand

10 ils m'ont arrêté, ensuite ils m'ont fouillé environ à cinq reprises."

11 Juste pour m'assurer que l'interprétation était tout à fait claire, les

12 cinq fois où vous avez été fouillé, est-ce que vous faites référence à

13 seulement cette occasion-là quand vous avez été arrêté ou vous dites qu'il

14 y avait eu d'autres occasions où on vous avait fouillé ?

15 R. Cette fois-là, ce soir-là en particulier.

16 M. RE : [interprétation] Ceci conclut mes questions, Monsieur le Président,

17 Messieurs les Juges.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, les Juges de la

21 Chambre n'ont pas d'autres questions à vous poser. Cela veut dire que ceci

22 conclut votre déposition qui était vraiment courte ce matin. J'en conclus

23 du moins que les questions supplémentaires n'ont pas suscité d'autres

24 questions de la part de la Défense. Je vois qu'il y a trois personnes qui

25 opinent du chef.

26 Monsieur Stojanovic, vous avez été dans le prétoire ici pendant trois

27 jours, vous avez répondu à toutes les questions qui vous ont été posées.

28 Les Juges de la Chambre aimeraient vous remercier d'être venu jusqu'ici et

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1 vous souhaitent un bon voyage de retour.

2 Madame l'Huissière, voulez-vous s'il vous plaît escorter le témoin en

3 dehors du prétoire ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup de m'avoir appelé à la barre,

5 et au revoir.

6 [Le témoin se retire]

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, est-ce que

8 l'Accusation est prête à appeler le prochain témoin ?

9 M. RE : [interprétation] Oui, le prochain témoin suivant sera M.

10 Mijat Stojanovic. M. Di Fazio va interroger ce témoin. Il y a un autre

11 avocat dans notre équipe, c'est Mme Romana Schweiger.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bienvenue dans ce prétoire.

13 [Le témoin est introduit dans le prétoire.]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Avant

15 que vous ne fassiez votre témoignage, les règles dans ce prétoire

16 requièrent que vous fassiez la déclaration solennelle selon laquelle vous

17 allez dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Le texte va

18 vous être donné par Madame l'Huissière. J'aimerais que vous me lisiez la

19 déclaration.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

21 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin. Veuillez vous

23 asseoir.

24 Je vous ai dit, Monsieur le Témoin, que je crois comprendre que votre nom

25 est Mijat Stojanovic. Vous allez d'abord être interrogé par M. Di Fazio,

26 conseil pour l'Accusation.

27 Monsieur Di Fazio, veuillez poursuivre.

28 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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1 LE TÉMOIN : MIJAT STOJANOVIC [Assermenté]

2 [Le témoin répond par l'interprète]

3 Interrogatoire principal par M. Di Fazio :

4 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, j'aimerais vérifier quelques

5 détails personnels vous concernant, s'il vous plaît. Puis-je vous demander

6 de donner votre nom en entier, votre date de naissance et votre lieu de

7 naissance, s'il vous plaît ?

8 R. Je m'appelle Mijat Stojanovic. Je suis né le 29 janvier 1964 à

9 Djakovica.

10 Q. J'aimerais obtenir des précisions sur votre famille immédiate, c'est-à-

11 dire vos frères et sœurs et vos parents. J'aimerais obtenir de vous ces

12 précisions selon la situation en 1998. Pouvez-vous commencer par votre père

13 et votre mère, en donner les noms, ensuite vos frères et sœurs en

14 commençant par le plus âgé en allant vers le plus jeune ?

15 R. Ma mère s'appelle Ljubica. Mes frères sont Predrag, Dragoslav, Vlado,

16 et mes sœurs Slavica, Nadica, Milica et Dragica. Il y a encore un frère qui

17 s'appelle Veselin.

18 Q. Excusez-moi, je ne crois pas avoir entendu le nom de votre père.

19 R. Mon père s'appelle Drago. Il était décédé déjà à l'époque.

20 Q. Je vous remercie. En effet. Bien que vous soyez né à Djakovica, je

21 crois que vous avez vécu pendant de nombreuses années dans un petit village

22 qui s'appelle Dubrava; est-ce exact ?

23 R. Oui, je suis né à Djakovica. J'ai vécu à Dubrava jusqu'à l'âge de 17 ou

24 18 ans, pendant toute ma vie jusque-là.

25 Q. J'ai une autre question à vous poser au sujet de votre famille au sens

26 large. Avez-vous un cousin qui s'appelle Veselin Stijovic ?

27 R. Veselin Stijovic, oui. C'est bien mon cousin. C'est le fils de ma

28 tante.

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1 Q. Juste pour que ce soit tout à fait précis, est-ce du côté de votre mère

2 ou de votre père, c'est-à-dire la sœur de votre mère ou de votre père ?

3 R. Du côté de ma mère.

4 Q. Est-ce qu'il porte un surnom ?

5 R. Vesko.

6 Q. Est-ce que vous avez un surnom ?

7 R. Oui. Dans ma famille, on m'appelle Kika.

8 Q. Merci.

9 M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce P10, s'il

10 vous plaît ? C'est une carte géographique.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, ceci prend un tout

12 petit peu de temps avant d'apparaître à l'écran.

13 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci.

14 Je me demandais si la greffière de la Chambre aurait l'obligeance

15 d'agrandir la moitié du bas jusqu'à -- oui, c'est exact. Un peu plus, s'il

16 vous plaît. Merci.

17 Q. Veuillez examiner cette carte. Est-ce que vous y voyez figurer

18 Dubrava ?

19 R. Oui.

20 Q. Bien. Je crois que ceci ne fait pas l'objet de discussion, et tout le

21 monde serait d'accord pour dire que cela trouve au nord d'un endroit qui

22 s'appelle Gramocelj; c'est bien cela ? Au sud, un autre endroit s'appelle

23 Glodjane; est-ce exact ? Seriez-vous d'accord avec cela ?

24 R. Oui.

25 Q. Merci.

26 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci. C'est encore mieux.

27 Q. A quelle distance se trouve Dubrava de Glodjane ?

28 R. Dubrava est contigu à Glodjane. Notre maison était la dernière sur

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1 Dubrava, et la suivante était la propriété qui se trouvait sur le

2 territoire de Glodjane.

3 Q. Je vais essayer de donner aux Juges de la Chambre une idée de la

4 localisation géographique. Si vous étiez au centre de Dubrava et que vous

5 marchiez vers le centre de Glodjane, à quelle distance cela se trouverait-

6 il ?

7 R. Peut-être 1 kilomètre et demi ou 2 kilomètres. Je ne peux pas vous le

8 dire de manière très détaillée.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, nous avons un

10 quadrillage sur la carte géographique, donc nous connaissons vos dires.

11 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit de kilomètres carrés. Veuillez

13 poursuivre.

14 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci.

15 Q. Pour ce qui est des bâtiments entre Dubrava et Glodjane, est-ce qu'il y

16 a du terrain non construit entre les deux endroits ou est-il couvert de

17 bâtiments, de maisons, de fermes, de magasins, et cetera, entre Dubrava et

18 Glodjane ?

19 R. Non, il y a du terrain non construit. Il y a quelques maisons

20 éparpillées, mais il s'agit surtout de terres agricoles, de prairies. Le

21 village de Dubrava lui-même a un centre, et ensuite il y a le centre du

22 village de Glodjane. Mais entre les deux, il y a des prairies, du terrain

23 agricole, du terrain non construit avec quelques maisons éparpillées.

24 Q. Merci pour cette description.

25 M. DI FAZIO : [interprétation] J'en ai fini avec cette pièce.

26 Q. Etes-vous allé à l'école primaire dans la région ?

27 R. Jusqu'en cinquième année, je suis allé à l'école à Djakovica. Ensuite,

28 je suis allé à Rznic et ensuite j'ai terminé mon enseignement secondaire à

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1 Decani.

2 Q. Pendant que vous habitiez toujours dans le village de Dubrava et que

3 vous vous rendiez à partir de là à l'école ?

4 R. Oui, c'est exact.

5 Q. Quel était le nom de l'école à Rznic ?

6 R. Petar Prlja.

7 Q. Connaissez-vous un homme du nom de Ramush Haradinaj ?

8 R. Oui.

9 Q. Depuis combien de temps le connaissez-vous ?

10 R. Depuis que j'ai commencé à suivre la scolarité à partir de la cinquième

11 année, quand j'étais à l'école à Rznic.

12 Q. Est-ce qu'il est allé à cette école primaire, l'école Petar Prlja ?

13 R. Oui.

14 Q. Comment vous rendiez-vous à l'école ?

15 R. A pied, le plus souvent. A l'époque. Il n'y avait que quelques rares

16 bus qui circulaient quelques fois par jour. La plupart des étudiants s'y

17 rendaient à pied.

18 Q. A l'époque, à cette occasion-là, est-ce que vous croisiez Ramush

19 Haradinaj enfant, bien évidemment ?

20 R. Oui.

21 Q. Avait-il des frères et soeurs ?

22 R. Oui. Daut, qui allait à l'école avec lui aussi, qui était un petit peu

23 plus jeune. A partir d'un certain moment, il accompagnait son frère à

24 l'école.

25 Q. Connaissiez-vous ses parents ?

26 R. Je connaissais son père, Hilmi. Je ne connaissais pas sa mère.

27 Q. Que faisait son père quand vous étiez un jeune garçon ou un

28 adolescent ?

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1 R. Pour autant que je m'en souvienne, pendant un moment il travaillait

2 dans un magasin à Rznic. Je ne sais pas si c'était à ce moment-là ou plus

3 tard. Je ne me souviens pas avec précision.

4 Q. Merci. Vous rendiez-vous de temps en temps au magasin pour faire

5 quelques emplettes ?

6 R. Oui.

7 Q. Avez-vous jamais vu M. Ramush Haradinaj ou l'un de ses frères aux

8 environs du magasin ?

9 R. Je ne me souviens pas de les avoir vus dans le magasin.

10 Q. A une occasion ou l'autre, avez-vous vu Ramush Haradinaj dans les

11 environs du village, pas nécessairement juste à Dubrava, mais dans les

12 villages alentour, y compris Glodjane ?

13 R. Oui. Je l'ai vu à Glodjane.

14 Q. Savez-vous où il habitait ?

15 R. Oui. Pendant quelque temps, il vivait dans le centre du village.

16 Ensuite, ils ont construit une maison près de notre maison.

17 Q. A peu près quand cela s'est-il produit ?

18 R. Je ne me souviens pas exactement quand cette maison a été construite.

19 Q. Cela suffit. Je ne vous demande pas de date précise, mais si vous vous

20 souvenez de votre vie à vous, s'agissait-il d'un moment lorsque vous étiez

21 enfant, adolescent ? Est-ce que vous pourriez établir le moment par rapport

22 à cela ?

23 R. Oui, environ à ce moment-là.

24 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas compris la dernière partie de la

25 réponse.

26 M. DI FAZIO : [interprétation]

27 Q. Pourriez-vous répéter votre réponse, si cela ne vous ennuie pas ?

28 R. Oui, c'était quand j'étais un jeune homme.

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1 Q. A quelle distance se trouvait la maison des Haradinaj de la vôtre ?

2 R. A environ 150 ou 200 mètres, quelque chose comme cela.

3 Q. Après que la maison fut construite, avez-vous vu Ramush Haradinaj dans

4 la maison ou autour de la maison ?

5 R. Oui, oui, sur la propriété.

6 Q. Qu'en est-il de son père, Hilmi, et de son frère, Daut ?

7 R. Je me souviens avoir vu Hilmi. Je ne me souviens pas avoir vu Daut. La

8 raison pour laquelle je me souviens avoir vu Hilmi est parce que parfois,

9 je tondais la pelouse.

10 Q. Vous souvenez-vous s'il avait d'autres frères ?

11 R. Il avait des frères plus jeunes, mais je ne les connaissais pas bien du

12 tout.

13 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous êtes en train de poser la

14 question sur les frères de Hilmi ?

15 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, je vois. Excusez-moi. Ceci peut prêter

16 à confusion.

17 Q. Je vous pose la question au sujet des frères de Ramush Haradinaj. Y

18 avait-il d'autres frères dont vous connaissiez l'existence, à part Daut ?

19 R. Je les connaissais de vue, mais je ne connaissais pas leurs noms.

20 Q. Merci. Pendant combien de temps avez-vous continué à habiter dans la

21 région ?

22 R. J'y ai habité jusqu'à l'âge de 18 ans de façon permanente. Ensuite, je

23 suis allé étudier à Belgrade. J'ai tout d'abord fait mon service national.

24 Ensuite, je suis allé à Belgrade pour étudier, mais je revenais à la maison

25 assez souvent.

26 M. DI FAZIO : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, si vous

27 voulez bien me donner quelques instants, s'il vous plaît.

28 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

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1 M. DI FAZIO : [interprétation]

2 Q. Dans l'intervalle, au moment où vous êtes parti pour faire votre

3 service militaire et où vous êtes allé à Belgrade, êtes-vous retourné de

4 temps à autre à Dubrava ?

5 R. Pas de temps en temps; j'allais là très souvent.

6 Q. Après que vous soyez allé à l'université -- excusez-moi, je ne crois

7 pas que vous ayez vraiment dit cela, mais je ne crois pas que cela pose de

8 problème. En fait, vous avez commencé à aller aux cours de l'université à

9 Belgrade, n'est-ce pas, et vous n'avez pas terminé vos études; est-ce

10 exact ?

11 R. Oui. Je n'ai jamais obtenu de diplôme.

12 Q. Bien. Après cette période, est-ce que vous avez continué à retourner à

13 Dubrava avec la même fréquence ?

14 R. Oui, oui.

15 Q. Chaque année, c'était souvent ? Avec quelle fréquence diriez-vous que

16 vous retourniez à Dubrava et avec quelle fréquence restiez-vous là ?

17 Pendant combien de temps restiez-vous là-bas lorsque vous y retourniez ?

18 R. C'étaient deux ou trois fois par an au moins. Parfois, je restais toute

19 une semaine, parfois seulement une fin de semaine, un week-end. Parfois,

20 j'y passais tout mon temps de permission ou de congé. Finalement, j'ai

21 obtenu du travail. Chaque fois que j'étais en congé, je retournais à la

22 maison, chez moi.

23 Q. Bien. Cette façon de faire s'est poursuivie jusqu'à la première partie

24 de 1998 ?

25 R. Oui.

26 Q. Maintenant, entre le moment où vous êtes allé à l'université, la

27 première partie de 1998, période pendant laquelle vous retourniez chez vous

28 de temps en temps, n'avez-vous jamais vu Ramush Haradinaj ?

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1 R. Oui.

2 Q. Est-ce que vous pouvez vous rappeler des incidents précis,

3 particuliers ? Veuillez nous en parler. Si vous ne pouvez pas, dites-le

4 clairement. Je voudrais savoir si vous vous rappelez quelque incident

5 précis ou si simplement vous vous souvenez de l'avoir aperçu, vu de temps à

6 autre.

7 R. On se voyait pas mal l'un et l'autre, mais je ne me rappelle pas d'un

8 incident particulier.

9 Q. Je vous remercie. Quand vous vous aperceviez, est-ce que vous vous

10 saluiez ou est-ce que vous reconnaissiez simplement de qui il s'agissait ?

11 R. Je ne peux pas me souvenir, savoir si on se saluait ou non, mais je

12 suis certain qu'on se reconnaissait.

13 Q. Pendant cette période dont nous parlons, c'est-à-dire quand vous êtes

14 allé à l'université à Belgrade et cette période de la première partie de

15 1998, est-ce que vous avez aussi continué à voir son père de temps à autre,

16 à l'occasion de ces visites ?

17 R. Oui.

18 Q. Daut, est-ce que vous l'avez vu de temps à autre au cours de ces

19 visites ?

20 R. Je ne m'en souviens pas.

21 Q. Je vous remercie. Je voudrais maintenant que vous pensiez à la première

22 partie de 1998 et je voudrais que vous disiez aux Juges quelle était votre

23 situation, c'est-à-dire où est-ce que vous viviez à l'époque et où aviez-

24 vous votre travail. Où alliez-vous au travail ?

25 R. En allant en 1995, j'ai quitté Belgrade en mai 1995, je crois. J'ai

26 commencé à travailler avec mon frère à Indjija, et nous faisions de la

27 teinture oxydante. Nous avions un petit magasin. La plupart de mes affaires

28 étaient au Kosovo; c'est là que j'ai vendu la plus grande partie de mon

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1 stock. Par conséquent, entre 1995 et 1998, je me suis trouvé à passer la

2 plus grande partie de mon temps au Kosovo.

3 Q. Avec quel frère est-ce que vous travailliez ? Enfin, avec lequel de vos

4 frères étiez-vous en train de faire des affaires ?

5 R. Veselin.

6 Q. Où se trouve Indjija ?

7 R. En Serbie.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, je ne suis pas de

9 langue maternelle anglaise. Lorsque vous parlez de "dye", de teinture, est-

10 ce que c'est une sorte de couleur pour des tissus, des textiles ?

11 M. DI FAZIO : [interprétation] Je ne sais pas, c'est une forme de peinture,

12 mais je peux demander au témoin et obtenir des détails.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

14 M. DI FAZIO : [interprétation]

15 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre exactement quelle est

16 la substance que vous fabriquiez ?

17 R. C'était de la coloration, de la teinture oxydée. C'est une sorte

18 de couleur. C'était de la peinture pour les murs. Normalement on les

19 blanchit à la chaux, ce genre de chose, mais là c'est de la coloration

20 industrielle qui est essentiellement utilisée pour les travaux de

21 construction.

22 Q. Je vous remercie de ces éclaircissements. Où viviez-vous de 1995

23 à 1998 ?

24 R. Je l'ai dit il y a un moment, j'allais de temps en temps à Belgrade ou

25 peut-être à Indjija, mais je passais la plus grande partie de mon temps au

26 Kosovo.

27 Q. Bien. D'accord. Mais où précisément au Kosovo ? Ce qui m'intéresse

28 vraiment, c'est de savoir où était votre domicile, où vous viviez en

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1 réalité, où vous alliez, où vous rentriez pour manger, dormir et ainsi de

2 suite. Où est-ce que c'était ?

3 R. A Dubrava, Dubrava proprement dit.

4 Q. Est-ce que c'est le même endroit que là où vous aviez grandi ?

5 R. Oui. C'est la seule maison que nous ayons.

6 Q. Je vous remercie. Maintenant, je voudrais vous demander de penser aux

7 premiers ou aux deux ou trois premiers mois de 1998, disons janvier,

8 février, mars 1998. Je voudrais vous poser des questions sur les événements

9 à Dubrava. Pour commencer, est-ce que ce que vous avez décrit aux Juges

10 s'est poursuivi ? Vous avez continué de la même manière ? Est-ce que vous

11 passiez du temps à Dubrava pendant ces trois mois ?

12 R. Oui. Parfois, bien sûr, il fallait que j'aille plus loin pour essayer

13 de vendre une partie de notre marchandise.

14 Q. Mais est-ce que c'étaient des voyages pour affaires qui duraient

15 longtemps ou est-ce que c'étaient plutôt des voyages très brefs et vous

16 reveniez à Dubrava ?

17 R. Cela durait une journée, en général. Normalement, je partais dans la

18 matinée et j'allais faire une tournée, j'allais à une ville précise au

19 Kosovo, puis j'étais de retour à la nuit.

20 Q. Je vous remercie. Quelle voiture conduisiez-vous ?

21 R. C'était une Lada 1200 de fabrication russe. C'était une camionnette.

22 Q. Je vous remercie. Votre frère Dragoslav, est-ce qu'il avait une

23 voiture ? Est-ce qu'il en possédait une ? Dans l'affirmative, quelle était

24 ma marque ?

25 R. Dragoslav avait deux voitures : une Mazda 626 et une Volkswagen Jetta.

26 Q. Je vous remercie. Au cours des deux ou trois premiers mois de 1998,

27 avez-vous remarqué s'il y avait de jeunes hommes au village de Dubrava qui

28 auraient attiré votre attention ?

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1 R. Oui, effectivement, partout à Dubrava et à Glodjane. Leur présence

2 était très manifeste, très visible, on pourrait dire.

3 Q. Ces jeunes gens qui étaient vus dans les villes et les villages, bien

4 sûr, je voulais savoir s'il y avait quoi que ce soit de particulier ou

5 d'inhabituel concernant leur présence, ces jeunes gens. En d'autres termes,

6 c'étaient des jeunes gens différents ou est-ce qu'ils étaient plus nombreux

7 que ce à quoi vous étiez habitué jusqu'à ce moment-là ?

8 R. Ils étaient beaucoup plus nombreux, et il y en avait un grand nombre

9 que je ne reconnaissais pas.

10 Q. Où est-ce que vous les aperceviez, d'habitude ?

11 R. Normalement, c'était dans la soirée, au centre-ville, que je les

12 voyais, lorsque j'étais de retour chez moi. C'était au centre des villages.

13 Q. Vous voulez parler de Glodjane ou d'autres villages voisins aussi ?

14 R. Glodjane. Pour les autres villages voisins, je ne sais pas, à

15 l'exception de Glodjane et de Dubrava.

16 Q. Est-ce que vous traversiez en voiture à Glodjane de temps à autre en

17 allant travailler ou au retour ou pour d'autres raisons au cours de ces

18 premiers mois de 1998 ?

19 R. Il y avait une route goudronnée qui traversait Glodjane, donc c'était

20 la raison pour laquelle j'empruntais cet itinéraire la plupart du temps.

21 Q. Pourriez-vous dire aux Juges si vous avez observé quoi que ce soit

22 d'autre que la simple présence de ces jeunes gens ? Est-ce que vous les

23 avez vus avoir certaines activités ou y a-t-il quelque chose qui a attiré

24 votre attention, outre le fait qu'il y avait un certain nombre d'entre eux

25 qui n'étaient pas de la région ?

26 R. Oui. Un soir, j'étais en train de rentrer chez moi et j'ai remarqué que

27 la plupart de ces jeunes gens portaient des sacs.

28 Q. Quel type de sacs ?

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1 R. C'étaient des sacs du type Marlboro, qui servent à faire de la

2 publicité.

3 Q. Je ne suis pas encore très sûr de savoir ce que vous voulez dire. Que

4 voulez-vous dire ? C'étaient des sacs en plastique, des sacs en plastique

5 pour faire des courses ou autre chose ?

6 R. Des sacs en plastique, oui, des sacs en plastique.

7 Q. Pourquoi est-ce que ceci a attiré votre attention ? Qu'est-ce qu'il y

8 avait d'inhabituel à cela ?

9 R. Il était inhabituel que chacun et presque tous ces jeunes gens aient un

10 sac en plastique comme cela. J'étais en train de rentrer chez moi - d'où je

11 venais, je ne me rappelle plus - et en passant, je me suis rendu compte

12 qu'absolument chacun de ces jeunes gens portait un sac en plastique qu'il

13 portait à la main.

14 Q. Où étaient-ils ? Est-ce qu'apparemment, ils se rendaient quelque part,

15 d'après ce que vous pouviez discerner ?

16 R. Ils venaient, enfin, ils étaient en provenance de Dubrava et ils se

17 dirigeaient en direction de Glodjane.

18 Q. Ils étaient à pied ou ils étaient en voiture ?

19 R. Ils étaient à pied.

20 Q. Quel était en gros leur nombre ?

21 R. Je ne pourrais pas vous le dire maintenant, parce qu'ils marchaient en

22 étant relativement peu concentrés. Mais ils étaient très nombreux,

23 cependant.

24 Q. Cela, c'est un épisode parmi d'autres ou est-ce que c'est un phénomène

25 que vous avez vu à plusieurs reprises ?

26 R. Juste ce soir-là.

27 Q. Pourriez-vous nous dire quand c'était approximativement, en 1998 ?

28 Maintenant, ne devinez pas, mais si vous pouvez nous donner une idée,

Page 1997

1 allez-y, s'il vous plaît.

2 R. Je ne me rappelle pas exactement.

3 Q. Est-ce que vous avez eu quelque idée ou est-ce qu'on vous a renseigné

4 sur ce qu'il pouvait y avoir dans ces sacs ?

5 R. Un peu plus tard, des jeunes dont j'ai parlé, ou on avait parlé à

6 certaines personnes dont je ne me rappelle pas exactement les noms, mais

7 j'ai appris que dans ces sacs en plastique, ils portaient des grenades.

8 Q. Je souhaiterais maintenant que vous disiez aux Juges, autant que vous

9 pouvez le faire, quelle était la source des renseignements que vous avez

10 obtenus, de qui vous avez obtenu ces renseignements. Je sais que vous dites

11 que vous ne pouvez pas vous souvenir des noms, mais je souhaiterais savoir

12 quelle est l'origine ethnique des personnes en question, si c'étaient des

13 hommes ou des femmes, à quel village ils appartenaient, s'il s'agissait de

14 plus d'une personne qui vous a donné ces renseignements. Veuillez dire aux

15 Juges, autant que vous pouvez le faire, quelle est votre source

16 d'informations concernant ces bombes ou ces grenades qui se trouvaient dans

17 les sacs.

18 R. J'ai vécu dans une région où ma maison était la seule maison serbe, de

19 sorte que les seules personnes de qui j'aurais pu apprendre cela, c'étaient

20 des Albanais.

21 Q. Pouvez-vous vous rappeler s'ils vous ont donné ces renseignements

22 spontanément en ce qui concerne ces bombes ou grenades dans les sacs ou

23 est-ce que c'est vous qui avez essayé de vous renseigner ?

24 R. Je pense que c'est moi qui leur ai demandé. C'était dans le cadre de

25 conversation informelle.

26 Q. D'après ce que vous avez pu voir, est-ce que ces jeunes gens qui

27 portaient ces sacs, est-ce qu'ils avaient quelque chose de particulier ? Je

28 sais que vous nous avez dit ce que vous avez vu, je crois, à Dubrava,

Page 1998

1 allant de Dubrava en direction de Glodjane, je pense que c'est cela que

2 vous avez dit dans votre déposition, mais est-ce que vous savez où ils

3 allaient de façon précise ?

4 R. Je ne sais pas. Ils allaient en direction de Glodjane, mais il y avait

5 un grand nombre de personnes qui vivaient à Glodjane dans le centre de ce

6 village.

7 M. DI FAZIO : [interprétation] Si vous voulez bien m'accorder un instant,

8 s'il vous plaît, Monsieur le Président.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Pendant que M. Di Fazio est en train de

10 vérifier ses notes --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 M. EMMERSON : [interprétation] -- je me demande si je pourrais demander

13 s'il peut expliquer et obtenir du témoin les renseignements de savoir

14 comment il se fait que les Albanais auxquels il parlait avaient ces

15 renseignements.

16 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, peut-être que vous

18 pourriez poser des questions un peu plus directes dans le genre : est-ce

19 que vous avez appris cela dans un bar, au village, à quel endroit ?

20 Mme DEL PONTE : [interprétation] Non, je pense que --

21 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, la question que j'envisageais,

22 mes commentaires, ce n'était pas que j'aimerais savoir comment le témoin

23 avait appris cela, mais de qui, de quelle personne, à quelle personne il

24 parlait.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que nous souhaiterions

26 avoir un tableau complet, y compris davantage de détails en ce qui concerne

27 les lieux et le moment.

28 M. DI FAZIO : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

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1 Q. Témoin, vous avez entendu cet échange avec le conseil de la Défense,

2 les Juges de la Chambre et moi-même, alors nous souhaiterions tous savoir

3 un peu plus sur ces bombes -- excusez-moi, ces sacs qui étaient censés

4 contenir des bombes. Vous nous avez dit que là où vous étiez, il n'y avait

5 pas un grand nombre de Serbes dans la région, de sorte que les personnes

6 qui vous ont dit cela étaient des Albanais. Vous nous avez également dit

7 que ceci s'était passé au cours de conversations qui étaient officieuses.

8 Est-ce que vous pouvez essayer de vous reporter l'époque et essayer

9 de nous dire si ces conversations ont eu lieu dans un café, dans un bar,

10 dans la rue, dans une maison avec des amis ? Deuxièmement, ce qui est

11 important, est-ce que vous pourriez nous dire si vous savez comment eux-

12 mêmes savaient ce qu'il y avait dans ces sacs ? Essayez de vous reporter à

13 l'époque pour ces deux questions et voir si vous pouvez nous fournir un peu

14 plus de détails. Si vous ne pouvez pas le faire, dites-le-nous. Mais si

15 vous avez des détails supplémentaires, veuillez nous le dire.

16 R. Je ne peux pas m'en souvenir.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Témoin, je voudrais vous demander

18 néanmoins de faire un effort. Est-ce que c'était quand vous rendiez visite

19 à des gens ? Est-ce que c'était lorsque vous avez rencontré des gens dans

20 la rue qu'on vous en a parlé ? Vous dites que vous avez demandé ces

21 renseignements. Vous osiez poser ces questions. Est-ce que vous aviez envie

22 de les poser ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Etant donné le fait qu'au moment où ils ont

24 commencé à arrêter des voitures au cours de la nuit, la police et ce genre

25 de chose, c'étaient évidemment des conversations à bâtons rompus, et j'y ai

26 participé. J'ai entendu poser cette question ou répondre à cette question

27 précisément à un moment donné. Mais la réponse que j'ai eue à l'époque,

28 c'était tout simplement cela. Comment une personne a réussi à apprendre

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1 cela, à avoir cet élément d'information, c'est quelque chose que je ne sais

2 pas.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je dois comprendre de votre

4 réponse que c'était une personne qui vous a dit cela, et non pas plusieurs

5 personnes qui vous ont raconté la même histoire ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Juste une seule personne.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

8 Veuillez poursuivre, Monsieur --

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Il y a un point qui m'intéresse.

10 Monsieur Stojanovic, vous avez mentionné le fait qu'un certain nombre de

11 personnes qui passaient par Dubrava pour aller au village de Gllogjan

12 n'étaient pas du village. Par conséquent, une question qui aurait été

13 intéressante, je pense, c'était de savoir où ils se rendaient, parce que

14 vous avez dit qu'ils vivaient là. Mais d'après vos premiers renseignements,

15 il semble également qu'il y ait eu un groupe de personnes qui étaient

16 d'ailleurs. Où se sont-ils rendus ? Est-ce que vous savez quoi que ce soit

17 à ce sujet ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas où ils se rendaient. Mais là

19 encore, je dois dire qu'un grand nombre d'Albanais travaillaient quelque

20 part à l'étranger. Il est possible que ces personnes aient été des

21 habitants de Glodjane, des résidents dont j'ai oublié les visages. Il y

22 avait des personnes qui pour moi n'étaient pas familières.

23 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Bien. Je vous remercie.

24 M. DI FAZIO : [interprétation]

25 Q. Une dernière question sur ce sujet. En réponse à la question du

26 Président, vous avez dit que cet élément d'information concernant les

27 bombes ou grenades dans les sacs, dans des sacs Marlboro, est-ce que vous

28 avez vu cela dans le contexte d'une autre conversation à bâtons rompus,

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1 parlant de ces voitures qui étaient arrêtées la nuit ? Est-ce que vous

2 pourriez nous dire si vous avez obtenu ces renseignements concernant les

3 sacs au cours de conversations plus générales sur ce qui se passait dans

4 votre région, dans votre secteur ? Est-ce que je vous ai bien compris ?

5 R. Je crains de devoir dire que je n'ai pas entièrement compris la

6 question. Pourriez-vous s'il vous plaît me l'expliquer ?

7 Q. Vous avez dit que vous aviez des conversations à bâtons rompus

8 concernant le fait que des voitures étaient arrêtées et que c'est à ce

9 moment-là que cette question des jeunes hommes et des sacs a été évoquée.

10 Ce que je souhaiterais savoir, c'est ceci : est-ce que vous avez obtenu ces

11 renseignements concernant ces jeunes gens et ce qui se trouvait dans les

12 sacs au cours d'une conversation traitant de la sécurité en général dans

13 votre région ?

14 R. Oui. Il s'agissait bien de la situation générale du point de vue de la

15 sécurité.

16 Q. Bien. Je vous remercie. Un peu plus tôt dans votre déposition, vous

17 avez parlé de la maison Haradinaj. Je crois, à moins que je ne me trompe,

18 que vous avez dit que c'était très près de chez vous. Est-ce que cet

19 endroit avait un mur qui entourait cette maison ? Est-ce que la maison

20 Haradinaj avait un mur tout autour, un mur d'enceinte ?

21 R. Oui.

22 Q. Est-ce que vous pouviez voir à l'intérieur de cette enceinte dans le

23 jardin, à partir de votre maison ?

24 R. On pouvait, oui.

25 Q. Si on se trouvait simplement sur le terrain, on pouvait voir à

26 l'intérieur ?

27 R. Non, pas à l'intérieur. Le mur empêchait de voir à l'intérieur.

28 Q. Je voudrais là encore que vous vous reportiez au trois premiers mois de

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1 1998. A ce moment-là, avez-vous vu des véhicules autour de la maison

2 Haradinaj ?

3 R. J'ai vu des véhicules qui portaient des matériaux de construction, mais

4 j'ai aussi parlé à un certain nombre d'Albanais qui m'ont dit que ce

5 n'étaient pas simplement des matériaux de construction et que sous toutes

6 ces piles de matériaux, il y avait des armes qui étaient cachées.

7 Q. Là encore, pourriez-vous vous rappeler quels sont les Albanais qui vous

8 ont fourni ces renseignements ?

9 R. Je ne me rappelle pas. Un grand nombre d'Albanais venaient chez nous;

10 par conséquent, il est difficile de me rappeler qui précisément.

11 Q. Est-ce que vous avez remarqué les numéros d'immatriculation des

12 voitures ou des véhicules ?

13 R. La plupart du temps, je ne retenais pas quelles étaient les plaques

14 d'immatriculation, mais d'une façon générale, c'étaient des voitures qui

15 appartenaient à des sociétés albanaises.

16 Q. Je vous remercie. Outre le fait de voir ces véhicules qui arrivaient

17 avec des matériaux de construction et indépendamment du fait que des

18 Albanais vous aient dit, à une occasion ou à une autre, qu'il y avait peut-

19 être des armes qui étaient cachées sous les matériaux de construction,

20 n'avez-vous aucun autre renseignement à ce sujet ? Est-ce que j'ai bien

21 compris ?

22 R. Non.

23 Q. Bien.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, pourriez-vous nous

25 dire si c'était une seule personne qui vous a parlé de ces armes, ou y en

26 avait-il davantage ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Une seule, je crois, mais je ne me rappelle

28 pas. C'étaient simplement des conversations comme cela. Parfois, on

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1 évoquait des sujets de ce genre.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Di Fazio.

3 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie.

4 Q. Maintenant, quel était le travail de votre frère Predrag au cours des

5 premiers mois de 1998 ? Qu'est-ce qu'il faisait ?

6 R. Depuis les années 1980, mon frère était dans la police à Djakovica.

7 Q. Les renseignements que vous avez eus concernant les jeunes gens qui

8 portaient des grenades dans des sacs Marlboro, la possibilité que des armes

9 soient cachées sous les matériaux de construction qui se rendaient aux

10 maisons des Haradinaj et le fait que des voitures de certaines personnes

11 étaient arrêtées la nuit, comme vous l'avez dit, est-ce que vous avez

12 jamais donné des détails de ce genre à votre frère ou est-ce que vous lui

13 avez rendu compte d'une façon ou d'une autre à ce sujet ?

14 R. Non, jamais. Je ne me suis jamais particulièrement préoccupé de cela.

15 C'étaient des conversations à bâtons rompus.

16 Q. Je voudrais savoir ceci. Est-ce que vous lui avez rendu compte de façon

17 officieuse ou de façon officielle ?

18 R. Non, à vrai dire, je le voyais peu.

19 Q. Est-ce que vous avez rendu compte de cela de façon officieuse ou

20 officielle à d'autres membres de la police serbe, à un policier serbe ?

21 R. Non, je n'avais pas de temps pour ce genre de chose.

22 Q. Je vous remercie.

23 R. De toute façon, normalement je ne me mêlais pas de ce genre de chose.

24 Q. D'accord. Ecoutez simplement mes questions, s'il vous plaît. Est-ce que

25 vous avez rendu compte de cela de façon officielle ou officieuse à un

26 membre quelconque de l'armée, un militaire serbe ?

27 R. Non.

28 Q. Avez-vous une idée de ce qu'était le travail de Predrag à la police au

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1 cours des trois premiers mois de 1998 ? Quelles étaient ses tâches dans la

2 police ?

3 R. Pour autant que je sache, il était factionnaire essentiellement, il

4 faisait des tournées.

5 Q. Est-ce que vous savez où il était posté ?

6 R. Non, je sais très très peu de choses concernant son travail.

7 Q. Est-ce que vous savez si au cours des trois premiers mois de 1998, il

8 était posté à tel endroit et quel était l'itinéraire des tournées qu'il

9 faisait ?

10 R. A Djakovica.

11 Q. En 1998, au cours des trois premiers mois, est-ce que vous-même

12 personnellement ou d'autres membres de votre famille possédiez des armes

13 qui étaient gardées à domicile à la maison de Dubrava ?

14 R. Non, jamais. La seule chose que nous avions à la maison, c'était un

15 fusil de chasse et le pistolet de mon père. Je ne crois pas que qui ce soit

16 d'autre dans notre maisonnée ait eu une arme, pas que je sache en tous cas.

17 Q. Savez-vous depuis combien de temps le fusil de chasse et le pistolet se

18 trouvaient en possession de la famille ?

19 R. Vraiment, je n'en sais rien, je vous prie de me croire.

20 Q. Bien. Je voudrais insister encore un petit peu sur ce point. Pourriez-

21 vous nous dire - on pourrait compter cela en jours, en semaines, en mois,

22 en années - depuis combien de temps ces armes se trouvaient dans la

23 famille ?

24 R. On pourrait dire que c'était pendant des années. C'était quelque chose

25 que ma famille avait hérité de mon père qui avait un permis de chasse, un

26 permis pour cette arme qui était tout à fait valable. Il avait également un

27 permis pour son pistolet.

28 Q. Je vous remercie. J'aimerais maintenant que vous réfléchissiez plus

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1 précisément au mois de mars 1998, en particulier à la période qui se situe

2 aux environs des 23, 24 mars 1998. A ce moment précis, où vous trouviez-

3 vous et où passiez-vous vos nuits ?

4 R. Si je me souviens bien, et je ne m'en souviens pas -- je m'en souviens,

5 je passais la nuit à la maison.

6 Q. Je ne crois que ce soit contesté, mais y a-t-il eu une fusillade à un

7 moment où à un autre dans cette période aux alentours de la propriété

8 Haradinaj ?

9 R. Je passais la nuit à la maison, mais le matin je sortais. Peu après, je

10 suis rentré, je ne me souviens pas exactement. Je suis rentré peu de temps,

11 je me suis aperçu qu'il y avait des échanges de coups de feu autour de la

12 maison.

13 Q. Vous rappelez-vous la date ? Ce n'est pas grave si vous ne vous

14 rappelez pas, mais pourriez-vous nous dire quel est le jour où vous dites

15 être revenu et vous être aperçu qu'il y avait des échanges de tirs ?

16 R. Simplement la date ?

17 Q. Oui, simplement la date.

18 R. Le 24 mars 1998.

19 Q. Ce jour-là, êtes-vous allé en déplacement professionnel ? Avez-vous

20 quitté la maison ?

21 R. Il me semble que oui, le matin, je ne m'en souviens plus exactement. Il

22 me semble qu'après quelque temps, je suis rentré.

23 Q. Qu'avez-vous remarqué à votre retour ?

24 R. J'ai remarqué qu'il y avait quelque chose qui ressemblait à un combat

25 aux environs de la maison de Ramush.

26 Q. C'est tout près de votre maison. Qu'avez-vous fait quand vous avez vu

27 cela ?

28 R. Puisqu'il y avait un peu partout des policiers, même tout près de la

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1 cour de ma maison, j'ai reçu l'ordre de rentrer à l'intérieur.

2 Q. Votre mère était là?

3 R. Oui.

4 Q. Vous rappelez-vous si un autre membre de votre famille était présent

5 aussi ?

6 R. Il y avait mon petit neveu qui avait trois ans. Il s'appelle Vlado. Il

7 y avait aussi Dragoslav.

8 Q. Avez-vous eu la possibilité de voir quelles étaient les armes utilisées

9 par la police ou par les gens sur qui la police tirait ? Quelles étaient

10 les armes utilisées ?

11 R. Je ne suis pas spécialiste en armes. Il y avait des fusils. Est-ce que

12 c'étaient des fusils automatiques ou pas, est-ce qu'il y avait d'autres

13 armes ? Je n'en sais rien.

14 Q. Combien d'officiers de police se trouvaient sur votre terre, à peu

15 près ?

16 R. Une quinzaine, une vingtaine.

17 Q. Comment êtes-vous parvenu à vous approcher de votre maison à bord de

18 votre voiture s'il y avait tous ces policiers déployés autour de votre

19 maison et tous ces coups de feu ?

20 R. Je me suis approché de la maison par l'autre côté, du côté de Babaloc

21 où il n'y avait pas de tirs. Les combats se déroulaient dans la zone située

22 entre notre maison et Glodjane.

23 Q. Très bien. Vous êtes arrivé à partir de la direction de Babaloc, qui

24 est au sud de Dubrava. Vous n'avez pas eu besoin de traverser Glodjane ce

25 jour-là pour rentrer à votre domicile; c'est bien cela ?

26 R. Oui.

27 Q. Vous êtes parvenu à vous rapprocher à bord de votre voiture, à vous

28 rapprocher de la maison et à pénétrer à l'intérieur sans problème; c'est

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1 bien cela ?

2 R. Cela ne s'est pas passé sans problème. Il a fallu que je demande

3 l'autorisation à quelques-uns de ces soldats qui se trouvaient dans le

4 centre même de Dubrava pratiquement pour qu'ils me laissent passer.

5 Q. Une fois que vous êtes arrivé jusqu'à votre maison et que vous y avez

6 retrouvé votre neveu et votre mère ainsi que votre frère, une fois que l'on

7 vous a dit de rentrer dans la maison, est-ce qu'ensuite vous êtes resté à

8 l'intérieur ?

9 R. Oui, pratiquement tout le temps. Je suis resté à l'intérieur de la

10 maison 80 % du temps.

11 Q. A l'extérieur, est-ce que les combats ont continué ?

12 R. Oui, jusqu'à la soirée.

13 Q. Les combats ont duré plusieurs heures au moins, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, plusieurs heures, mais peu à peu ils se sont éloignés de la maison

15 de Ramush. Quand je suis arrivé, les tirs étaient concentrés dans les

16 environs de la maison de Ramush, et peu à peu ils se sont déplacés vers le

17 village de Glodjane, parce que la police a essayé d'évacuer un officier de

18 police blessé.

19 Q. Quand vous y repensez aujourd'hui, au moment où vous êtes arrivé dans

20 votre maison, les combats avaient déjà commencé, n'est-ce pas ?

21 R. Oui.

22 Q. Les combats avaient déjà commencé. Il y avait des officiers de police

23 un peu partout dans le secteur, mais aussi sur votre terre, n'est-ce pas ?

24 R. Dans une partie de notre propriété, oui --

25 Q. Bon, d'accord. Très bien. Les combats se sont poursuivis avec des

26 policiers déployés dans les environs immédiats qui étaient en train de

27 tirer, y compris à partir de votre terre, de votre propriété, n'est-ce pas

28 ?

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1 R. Oui.

2 Q. Finalement, la zone où les combats étaient les plus intenses s'est peu

3 à peu déplacée dans la direction de Glodjane. En tout cas, c'est ce que

4 vous avez été en mesure de voir, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, oui, à l'endroit où je pouvais les voir.

6 Q. Que voulez-vous dire par là ?

7 M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur Stojanovic, essayez de ne pas

8 parler dans votre barbe, de parler un peu plus clairement, un peu plus

9 distinctement pour que les interprètes et nous-mêmes soyons capables de

10 bien entendre ce que vous dites, d'accord ?

11 Voilà ce que je voudrais savoir. Quand vous êtes rentré chez vous,

12 les combats avaient déjà commencé. Il a fallu quelque temps pour que les

13 tirs se déplacent peu à peu depuis la propriété des Haradinaj jusqu'au

14 village de Glodjane. C'est bien ce que vous avez dit jusqu'à présent,

15 n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. D'accord. D'après vous, combien de temps à peu près a-t-il fallu pour

18 que les tirs se déplacent de la propriété des Haradinaj vers Glodjane ?

19 R. Je ne me souviens pas.

20 Q. Est-ce que cela s'est passé en quelques minutes ou est-ce que cela a

21 pris plus longtemps ?

22 R. Je ne me souviens pas. Vraiment, je ne me souviens pas. Je dirais

23 quelques minutes, mais je ne me souviens pas.

24 Q. D'accord. Mais ce qui est sûr, c'est que les combats se sont poursuivis

25 pendant plusieurs heures jusqu'à la soirée, n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 Q. Et que 15 à 20 policiers au moins étaient engagés dans ces combats.

28 Quand je dis 15 à 20, je parle uniquement de ceux qui se trouvaient sur

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1 votre propriété, n'est-ce pas ?

2 R. Ils n'étaient pas tous sur notre propriété. Il y en avait qui

3 avançaient sur la route, il y en avait qui étaient au coin de notre

4 propriété, il y en avait qui étaient cachés dans les buissons, ce genre de

5 chose.

6 Q. Vous diriez que les policiers étaient nombreux ?

7 R. Que voulez-vous dire, nombreux ? Je ne comprends pas.

8 Q. Vous diriez que les policiers étaient plus nombreux que les 15 à 20

9 dont vous avez dit qu'ils se trouvaient sur votre terre ?

10 R. Sur notre propriété, il y en avait le nombre que j'ai dit. C'est le

11 nombre que j'ai vu. Pour le reste, ailleurs, je ne sais pas. J'ai vu ceux

12 qui étaient sur la route, au coin de la propriété, dans les buissons. J'ai

13 dit que c'était à peu près 15 à 20.

14 Q. En tout cas, il a fallu ce nombre de policiers -- non, je retire ce que

15 je viens de dire.

16 D'après ce que vous avez pu voir, d'après ce que vous avez pu constater, la

17 police n'a apparemment pas remporté ce qu'on pourrait appeler une victoire

18 rapide, n'est-ce pas, d'après ce que vous avez pu voir ?

19 R. Non.

20 Q. Merci. Etes-vous resté dans le secteur après cette fusillade ?

21 R. Oui, oui.

22 Q. Encore une question. Est-ce que vous avez vu la police employer des

23 hélicoptères et des lance-roquettes ?

24 R. Des hélicoptères, j'en ai vu. Des lance-roquettes, je n'en ai pas vu.

25 J'ai vu que les hélicoptères ont essayé d'atterrir à côté de cet officier

26 de police blessé dont j'ai parlé tout à l'heure, Otovic, mais qu'ils n'y

27 sont pas parvenus à plusieurs reprises.

28 Q. Avez-vous la moindre idée de ce qui empêchait les hélicoptères

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1 d'atterrir pour dégager ce policier blessé ?

2 R. On tirait depuis la maison de Ramush Haradinaj, de sorte que les

3 hélicoptères n'avaient aucun moyen de s'approcher pour évacuer le policier

4 blessé.

5 Q. Qu'en est-il des victimes de cette fusillade ? Vous venez d'en

6 mentionner une, le policier dont vous venez de parler. Est-ce que par la

7 suite vous avez eu connaissance de l'existence de victimes albanaises ou en

8 tout cas de victimes de l'autre côté, du côté des hommes que la police

9 combattait, ou d'autres victimes, d'ailleurs civils, par exemple ?

10 R. Non, je n'en ai pas eu connaissance à l'époque.

11 Q. Par la suite, est-ce que vous avez appris quelque chose à ce sujet ?

12 R. Le lendemain, dans le journal "Zeri Rinis" et "Rilindja" que j'ai lu,

13 j'ai appris que deux autres jeunes gens avaient été blessés.

14 Q. Merci.

15 R. Mais est-ce qu'ils avaient été abattus ?

16 Q. Merci.

17 R. Je ne sais pas s'ils auraient été abattus à cet endroit-là ou ailleurs.

18 Q. Merci. Est-ce que vous-même et votre famille avez quitté votre

19 propriété ce jour-là ou le lendemain ?

20 R. Ce soir-là, un policier est venu nous voir et nous a ordonné de quitter

21 la propriété, enfin, la maison, pour des raisons de sécurité.

22 Q. Vous êtes allés où ?

23 R. Dragoslav et ma mère sont partis pour Djakovica pour faire une

24 déposition. Quant à moi, je suis allé chez Erec, et de chez lui ensuite à

25 Decani chez mon frère.

26 Q. Vous-même, je parle bien de vous personnellement, où est-ce que vous

27 avez résidé le reste du mois de mars et les 2 premières semaines d'avril ?

28 R. Deux ou trois jours plus tard, moi-même, ma mère et Dragoslav avons été

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1 logés par la municipalité dans un camp situé à Decani.

2 Q. Quel était ce camp ?

3 R. C'était un centre de vacances appartenant à une entreprise qui avait

4 été abandonné.

5 Q. Y avait-il un monastère tout près ?

6 R. Oui, le monastère de Decani.

7 Q. Est-ce que c'était un endroit où il y avait des bungalows ?

8 R. Oui, oui, des bungalows.

9 Q. Quand vous-même, votre frère et votre mère avez été logés à cet

10 endroit, qui d'autre y habitait ?

11 R. A ce moment-là, quand nous sommes arrivés, il n'y avait personne dans

12 ces bungalows, mais un peu plus tard, des civils qui avaient été chassés de

13 leurs villages pour des raisons de sécurité nous ont rejoints.

14 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de ces villageois ?

15 R. Ils étaient tous Serbes.

16 Q. Ils venaient de villages situés dans quelle zone ?

17 R. Dans la zone de Decani, c'est-à-dire Dasinovac, Ratis et les autres

18 villages où il y avait encore quelques habitants serbes.

19 Q. Je vais vous demander de faire quelque chose, et si vous pouvez le

20 faire, je vous prie de bien vouloir le faire. Je vous demanderais de nous

21 dresser la liste des villages en repensant aux gens qui se trouvaient dans

22 ces bungalows dans ce camp. Est-ce que vous pourriez nous donner le nom de

23 tous les villages d'où ils venaient ?

24 Vous venez de parler de la région de Decani en précisant les villages

25 de Ratis et de Dasinovac, mais est-ce que vous avez en tête le nom d'autres

26 villages que Ratis et Dasinovac où il y avait des habitants serbes ? Si

27 vous connaissez le nom d'autres villages où il y avait des habitants serbes

28 autres que Ratis et Dasinovac, j'aimerais que vous essayiez de nous donner

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1 le nom de ces villages.

2 R. Ljubarda. Les autres Serbes, je ne sais plus d'où ils venaient. Mais

3 enfin, tous ces villages étaient dans le même secteur, pour l'essentiel.

4 Q. Est-ce que vous avez habité dans ces bungalows plusieurs semaines ?

5 R. Nous y avons passé pratiquement une année. J'ai repris mes activités

6 professionnelles en faisant des déplacements professionnels un peu partout

7 au Kosovo, à Belgrade, et cetera. Mais ma mère n'a pas bougé de là.

8 Q. Au cœur de l'été de cette année-là, l'année 1998, quel était d'après

9 vous le nombre de Serbes qui étaient hébergés dans ce camp ?

10 R. Une trentaine de famille à peu près. Peut-être un peu plus, mais une

11 trentaine, c'est sûr.

12 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre si tous ces Serbes venaient

13 de l'endroit où vous habitiez ou s'il y en avait qui venaient d'autres

14 régions du Kosovo ou peut-être d'autres zones ?

15 R. Non, non, ils venaient tous de la municipalité de Decani.

16 Q. D'accord. Et 30 familles, cela fait combien en nombre de personnes ?

17 R. Ecoutez, je ne saurais vous le dire, disons trois ou quatre personnes

18 par famille et peut-être plus pour certaines, mais je ne sais pas

19 exactement.

20 Q. Merci. J'aimerais maintenant vous poser quelques questions

21 complémentaires au sujet de votre propriété. Depuis combien de temps votre

22 maison et votre terre étaient-elles la propriété de votre famille ?

23 R. Ma famille est propriétaire de cet endroit depuis 1922, si ma mémoire

24 est bonne.

25 Q. Vous en êtes toujours propriétaire ?

26 R. Oui, oui.

27 Q. Quand est-ce que vous y êtes allé pour la dernière fois ?

28 R. J'y suis allé lorsque l'OSCE est arrivée au Kosovo, et ensuite plus

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1 jamais.

2 Q. Pouvez-vous nous donner une date pour ce moment-là ?

3 R. C'était en 1998.

4 Q. Merci.

5 M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

6 il n'est que 10 heures 22, mais ce serait pour moi un bon endroit pour

7 m'interrompre, car je vais ensuite traiter d'autres événements. Si vous

8 préférez, je peux continuer, mais si cela ne vous dérange pas, ce serait

9 plus naturel de s'interrompre maintenant.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais j'ai une question à vous

11 poser. De combien de temps pensez-vous avoir besoin encore, Monsieur Di

12 Fazio ?

13 M. DI FAZIO : [interprétation] Quarante minutes.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire la pause un peu plus

15 tôt que d'habitude et nous reprendrons nos débats à 11 heures moins 10.

16 Mais avant de suspendre, j'aimerais parler avec les parties de pièces à

17 conviction.

18 Monsieur Stojanovic, nous allons maintenant faire une pause. Je vous

19 demanderais de bien vouloir suivre Mme l'Huissière, qui va vous montrer où

20 vous allez passer le temps de cette pause.

21 [Le témoin quitte la barre]

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, je ne sais pas si

23 vous êtes maintenant en mesure de parler des pièces à conviction relatives

24 au témoin précédent. La pièce P31, la carte avec annotations; des

25 objections ? Non. Elle est versée au dossier. La pièce P32, la photographie

26 du village de Glodjane; pas d'objection, elle est admise au dossier. La

27 pièce P33, le document de sortie de l'hôpital; pas d'objection, document

28 admis en tant que pièce à conviction. La pièce P34, séquence vidéo; pas

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1 d'objection, admise au dossier puisque je vois que la Défense opine du

2 chef, ce qui signifie qu'il n'y a pas d'objection.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A titre d'information, j'indique que la

5 transcription est un document du prétoire électronique qui concerne un DVD

6 dont l'original est entre les mains du greffe.

7 La pièce P35, photo aérienne de Glodjane et des environs; pas d'objection,

8 admise au dossier. La pièce P36, photographie montrant la maison de Ramush

9 Haradinaj; admise au dossier. Maintenant, nous passons aux pièces de la

10 Défense.

11 Je voudrais savoir si ces documents sont bien versés au dossier. D22,

12 déclaration du témoin de l'Accusation Dragoslav Stojanovic de 2001; la

13 demande de versement a-t-elle été faite, Maître Emmerson ?

14 M. EMMERSON : [interprétation] Je pense que je m'en suis servi au cours du

15 contre-interrogatoire, Monsieur le Président, donc nous pouvons en rester

16 là.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, donc ce document demeure

18 enregistré aux fins d'identification.

19 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'en demandez pas le versement

21 au dossier, donc ce document n'est pas admis pour le moment.

22 D23, le rapport sur l'incident survenu au centre de droit humanitaire en

23 date du 9 avril 1998.

24 M. EMMERSON : [interprétation] Je pense que c'est déjà une pièce à

25 conviction. Si ce n'est pas le cas, nous en demandons le versement.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous devrons vérifier. Bien. La

27 vérification est faite.

28 Des objections ? Monsieur Di Fazio, le rapport du centre de droit

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1 humanitaire, D23 --

2 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- qui faisait partie des documents

4 soumis au témoin Andjelkovic --

5 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, est-ce que c'est le rapport où on

6 trouve les propos prononcés par la mère de --

7 M. EMMERSON : [interprétation] C'est exactement ce que je voulais demander.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Dans le document D26, il y a d'une

9 part les propos de la mère et d'autre part les propos du frère, parce que

10 tous les deux ont parlé des événements du 9 février. Le document D23, c'est

11 le document 1161 dans la liasse 65 ter. Le document D26 est le document

12 1162 de la liasse 65 ter.

13 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur le Président,

14 pourrais-je parler à M. Re avant de me prononcer ? Je pense qu'il n'y aura

15 sans doute pas de problème, mais j'aimerais vérifier auprès de M. Re une

16 chose en particulier avant de me prononcer.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, voici quelle est la

18 situation. Je demande qu'on m'indique si je me trompe. A l'origine, ces

19 documents faisaient partie d'une pièce à conviction multiple dont le

20 versement avait été demandé par l'Accusation par le biais du témoin

21 Marijana Andjelkovic. Cela n'avait rien à voir avec le carnet de notes dont

22 la traduction est encore attendue, mais si j'ai bien compris, voilà quelle

23 était la situation. Le document D23, c'est le document contenant les propos

24 de la mère, Ljubica, en date du 9 avril, et le document D26, c'est le

25 document contenant les propos du frère Vladimir.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Les deux documents sont présentés pour

28 versement au dossier par la Défense.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Aux fins de --

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous entendrons l'Accusation pour savoir

4 si elle a des objections, mais nous vérifierons également ce qu'il en est

5 exactement du statut de ces deux documents qui font partie d'une pièce

6 multiple avec les cotes précises.

7 M. EMMERSON : [interprétation] eglodj.doc.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans l'ordinateur, c'est eglodj.doc.

9 M. EMMERSON : [interprétation] J'indiquerai très concrètement pourquoi j'ai

10 divisé cette pièce en plusieurs sous-pièces, parce que quand on interroge

11 un témoin et qu'on lui soumet un document, il faut beaucoup de temps pour

12 télécharger le document dans le système électronique. Il m'a semblé que si

13 on divisait les documents, c'était une façon plus rapide de travailler

14 lorsqu'un document est très volumineux.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, le document D24, le numéro ID

16 020733.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Je n'ai pas de description sur ma liste.

18 Madame la Greffière, est-ce que vous pourriez retrouver ce document ?

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une photographie aérienne --

21 M. EMMERSON : [interprétation] Une photographie aérienne.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

23 Pas d'objection, Monsieur Di Fazio ?

24 M. DI FAZIO : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D24 est admis.

26 D25, article de presse en langue serbe.

27 M. EMMERSON : [interprétation] J'en demande le versement.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Des objections, Monsieur Di Fazio ?

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1 M. DI FAZIO : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D25 est versé au dossier.

3 Nous reprenons à 11 heures moins 5.

4 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

5 [Le témoin vient à la barre]

6 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, veuillez poursuivre.

8 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

9 Avant de poursuivre, si ceci peut vous être d'aucune aide, il y a

10 deux autres documents qui n'ont pas encore été véritablement versés au

11 dossier. J'aimerais vous indiquer qu'il n'y a pas de problème en ce qui

12 nous concerne pour ces deux documents.

13 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

14 M. DI FAZIO : [interprétation] Il s'agit des deux documents de droit

15 humanitaire D23 et D26 admis au dossier sous condition qu'il ne s'agit que

16 d'une page.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Nous avons vérifié cela, et ils portent déjà

18 une cote. Il s'agit de la pièce P5. Nous espérons que vous nous le

19 pardonnerez, Monsieur le Président --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ils sont donc maintenant doublés d'une

21 version en format isolé.

22 Veuillez poursuivre.

23 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 Q. Vous nous avez parlé de l'échange de tirs et de coups de feu à l'entour

25 des maisons de la famille Haradinaj et que vous étiez resté dans ce

26 campement. A la suite de cela, est-ce que vous êtes retourné chez vous en

27 avril ?

28 R. Pas pour autant que je m'en souvienne. Je ne suis pas certain, mais ce

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1 n'est pas en avril.

2 Q. Bien. Est-ce que vous êtes retourné chez vous suite à votre déplacement

3 au camp de Decani ?

4 R. Je vous ai dit il y a quelques instants que j'y suis retourné tant que

5 la mission de l'OSCE était encore en cours.

6 Q. Avez-vous jamais été assailli ou attaqué personnellement, physiquement,

7 je veux dire en 1998 ?

8 R. Le 18 avril 1998 -- excusez-moi, j'ai mal compris votre question. Pour

9 la première fois en 1998, le 18 avril, mes frères Dragoslav, Vesko et moi-

10 même sommes partis chercher quelque chose à Dubrava.

11 Q. Est-ce que vous y êtes arrivés, à Dubrava ?

12 R. Oui, nous y sommes arrivés. Nous avons traversé Babaloc en voiture.

13 Nous nous sommes rendus, toujours en voiture, à la maison.

14 Q. Maintenant, je voudrais savoir qui précisément est allé à Dubrava. Il y

15 avait vous-même, votre frère Dragoslav. La troisième personne, qui était-

16 ce ? Qui était la troisième personne ?

17 R. Vesko, Vesko Stijovic, Veselin Stijovic, qu'on appelle Vesko.

18 Q. Il ne s'agit pas de votre frère, n'est-ce pas ?

19 R. Il est notre cousin, qui, je crois, est la dénomination que l'on

20 utilise par ici.

21 Q. Bien. Quoi qu'il en soit, vous y êtes allés en voiture, dans les

22 voitures que vous avez mentionnées auparavant dans votre déclaration,

23 c'est-à-dire la Mazda et la Lada ?

24 R. Oui, je conduisais moi-même la Lada, et Dragoslav conduisait la Mazda.

25 Q. Quelle est la raison pour laquelle vous êtes retournés chez vous ?

26 R. Nous avions fui vers le camp à Decani et n'avions pas nos affaires avec

27 nous, donc nous sommes retournés chez nous pour prendre nos affaires

28 personnelles ainsi que du foin pour le bétail, que nous avions amenés

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1 auparavant au monastère à Decani.

2 Q. Aviez-vous une remorque pour y charger le foin ?

3 R. Oui. Dragoslav avait une remorque du type généralement utilisé pour

4 tracter les voitures, mais nous l'avons néanmoins utilisée pour apporter le

5 foin d'un endroit à l'autre.

6 Q. A quelle heure de la journée êtes-vous arrivé là ?

7 R. Entre 8 heures 30 et 9 heures, pour autant que je m'en souvienne, mais

8 je ne suis pas sûr.

9 Q. Bien.

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de 8 heures 30 ou

11 9 heures du matin ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Du matin.

13 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

14 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci pour cette précision, Monsieur le

15 Président.

16 Q. Avez-vous commencé à charger la remorque et la voiture -- les

17 voitures ?

18 R. Oui. Non, pas la remorque. Nous avons mis des affaires dans la Lada,

19 Vesko et moi-même. Dragoslav essayait de réparer la remorque. Un des pneus

20 était plat, et il fallait le changer.

21 Q. Pouvez-vous maintenant, dans vos propres mots, nous dire ce qui est

22 arrivé par la suite ?

23 R. Après un court instant, après que nous ayons chargé toutes les affaires

24 dans la Lada, nous avons entendu des coups de feu provenant de Dubrava.

25 Nous n'avons pas véritablement prêté attention à ces premiers coups de feu.

26 Cependant, ceux-ci ont très rapidement été suivis par d'autres coups de feu

27 de Glodjane, et plus particulièrement à partir de la maison de Ramush

28 Haradinaj. J'étais sur le seuil de ma propre maison et je me suis réfugié à

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1 l'intérieur. Pour autant que je m'en souvienne, Dragoslav et Veselin ont

2 foncé à l'intérieur de la maison; Dragoslav en tout cas, et Veselin je n'en

3 suis pas sûr.

4 Après que les coups de feu se soient poursuivis pendant environ 40 minutes,

5 jusqu'à ce qu'ils soient arrivés dans la cour, on nous a ordonné à ce

6 moment-là d'ouvrir la porte. Dragoslav l'a fait. Il est revenu vers eux. Il

7 a ouvert la porte. Ensuite, 15, 20 ou 30 --

8 Q. Excusez-moi de vous interrompre, je voulais simplement clarifier un

9 point. Est-ce que les coups de feu se sont poursuivis pendant 14 ou 40

10 minutes ?

11 R. Quarante, 40, environ 40 minutes.

12 Q. Très bien.

13 R. Pour autant que je m'en souvienne, du moins.

14 Q. Je vous remercie. Pour ce qui est des échanges de coups de feu,

15 pourriez-vous dire s'il s'agissait d'armes légères, c'est-à-dire des fusils

16 ou des fusils automatiques, ou y avait-il d'autres armes, d'après ce que

17 vous avez pu constater ?

18 R. Je pense qu'il s'agissait d'armes automatiques et d'armes légères, pour

19 la plupart.

20 Q. Savez-vous s'il y a eu des dégâts à votre maison ?

21 R. Les vitres ont explosé. La Lada a subi des dégâts. Elle était garée

22 juste devant la Mazda. Il y a eu des dégâts de tous côtés. Les balles ont

23 ricoché à travers les fenêtres et à l'intérieur des pièces.

24 Q. Comment vous êtes-vous protégé ?

25 R. C'est qu'il y avait un couloir avec des portes qui donnaient sur toutes

26 les pièces. Nous nous sommes protégés dans le couloir central pendant que

27 les attaques continuaient. Dragoslav regardait régulièrement par la

28 fenêtre. Il jetait un coup d'œil pour voir ce qui se passait à l'extérieur.

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1 Q. Je vous remercie. Pouvez-vous nous dire ceci ? Est-ce qu'aucun d'entre

2 vous trois, vous, Dragoslav ainsi que votre cousin, était armé ?

3 R. Aucun de nous n'était armé, ni avant ni maintenant.

4 Q. Merci. Vous êtes arrivé au point de votre récit précédent dans lequel

5 vous disiez - je ne me souviens pas exactement - qu'un certain nombre

6 d'hommes sont apparus ou sont arrivés dans la maison. Veuillez poursuivre à

7 partir de là et nous donner des détails sur combien d'hommes sont arrivés

8 dans la maison. J'aimerais également savoir comment ils étaient vêtus et

9 s'ils étaient armés.

10 R. Ils portaient des uniformes de camouflage ainsi que des armes légères.

11 Leurs uniformes étaient des uniformes de camouflage.

12 Q. Tous les hommes portaient des uniformes de camouflage ? Ces uniformes

13 étaient-ils entiers, c'est-à-dire de pied en cap, ou étaient-ils

14 partiellement des uniformes de camouflage, seulement certaines pièces ?

15 R. Non. Pas tous portaient des uniformes de camouflage. Il y avait des

16 soldats qui portaient des hauts d'uniformes de camouflage, alors que les

17 bas étaient des pantalons en jean ou autre genre de vêtement civil ou

18 l'inverse, d'ailleurs. C'était un mélange.

19 Q. Y avait-il des insignes ? Portaient-ils des insignes, pour autant que

20 vous vous en souveniez ?

21 R. Pour autant que je m'en souvienne, ils portaient les insignes de l'UCK.

22 M. DI FAZIO : [interprétation] Pourrait-on montrer au témoin la pièce P9,

23 s'il vous plaît ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, ne serait-il pas une

25 meilleure idée de d'abord demander au témoin s'il peut décrire ce qu'il a

26 vu ?

27 M. DI FAZIO : [interprétation] C'est une bonne idée. Merci, Monsieur le

28 Président.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. DI FAZIO : [interprétation]

3 Q. Pourriez-vous répondre à la question de M. le Président et nous dire à

4 quoi ceci ressemblait, avant que nous montrions quoi que ce soit ?

5 R. L'extérieur était rouge. A l'intérieur, il y avait un aigle à deux

6 têtes et ensuite c'était marqué "UCK", ce qui veut dire l'Armée de

7 libération du Kosovo, en dessous, en lettres jaunes.

8 Q. Merci. Très bien. Pouvez-vous regarder ce qui va maintenant apparaître

9 à l'écran, s'il vous plaît ? Avez-vous vu ce symbole auparavant ?

10 R. Oui, je l'ai vu dès qu'ils nous ont capturés. Je ne l'avais pas vu

11 auparavant, cependant.

12 Q. Oui, merci.

13 M. DI FAZIO : [interprétation] J'en ai terminé avec ce point-là.

14 Q. Avez-vous reconnu aucun des hommes qui sont venus ou qui étaient dans

15 votre maison à cette occasion ?

16 R. Le premier qui est entré à travers la porte de la véranda était le

17 frère de Ramush, Daut, suivi par Xhavit Nimonaj. J'ai reconnu pas mal

18 d'entre eux, mais dès que l'on nous a ordonné de nous coucher par terre,

19 face contre terre, ils ont commencé à nous rouer de coups, moi-même et

20 Veselin. Dragoslav a été frappé par Daut avec la crosse du fusil. Alors

21 qu'ils entraient, ils ont commencé à nous frapper et à nous insulter.

22 Q. Vous souvenez-vous des insultes qu'ils ont utilisées, les mots mêmes ?

23 R. Normalement, il s'agissait d'insultes concernant nos mères serbes et

24 autres termes méprisants.

25 Q. Y avait-il une référence dans ces insultes à votre appartenance

26 ethnique, au fait que vous étiez Serbes, à part la référence qu'ils

27 faisaient à vos mères serbes ?

28 R. Oui.

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1 Q. Merci. Vous nous avez déjà parlé de Daut Haradinaj, mais cet autre

2 homme, Xhavit Nimonaj, d'où venait-il ?

3 R. C'était un de nos voisins, voisin à gauche lorsqu'on regarde de Dubrava

4 vers Glodjane. A la même distance que Ramush.

5 Q. Lui, il avait été votre voisin depuis un certain nombre d'années ?

6 R. Oui.

7 Q. Merci. Depuis combien de temps étiez-vous dans la maison avant d'avoir

8 été emmené ?

9 R. Très peu de temps. Je ne peux pas être plus précis, mais très peu de

10 temps. Ensuite, on nous a emmenés par la cour devant la maison. Ils ont

11 vérifié notre identité. Ils nous ont dit de garder la tête baissée, de ne

12 pas les regarder en face. Ensuite, ils m'ont demandé ainsi qu'à Veselin de

13 montrer nos documents, ce que nous avons fait.

14 Q. Pour ce qui est de Dragoslav, lui a-t-on demandé de montrer ses

15 documents d'identité ou non ?

16 R. Je ne me souviens pas, parce que dans l'intervalle, Nasim Haradinaj

17 était arrivé.

18 Q. Qui était Nasim Haradinaj ?

19 R. Nasim Haradinaj est le cousin de Ramush Haradinaj.

20 Q. Vous le connaissiez déjà depuis un certain nombre d'années puisqu'il

21 était de la région ?

22 R. Oui.

23 Q. Merci. Vous avez décrit certaines des insultes orales et vous avez

24 parlé du fait que Dragoslav avait été frappé par Daut avec la culasse de

25 son fusil dans la maison, à l'intérieur. Est-ce que vous-même et Veselin

26 avez été frappés ?

27 R. Oui. Nous étions couchés face contre terre, donc je ne pouvais pas voir

28 de qui il s'agissait, qui me frappait avec la culasse du fusil et qui me

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1 donnait des coups de pied. Je ne voyais vraiment pas qui faisait cela.

2 Q. Bien. A ce moment-là, lorsque vous avez été frappé, les trois hommes

3 dont vous étiez à l'extérieur, et on vous avait demandé de montrer vos

4 documents d'identité et de garder la tête baissée, pourriez-vous dire si

5 aucun d'entre vous trois avait des blessures à la suite des coups reçus,

6 s'il y avait du sang à ce moment-là ?

7 R. Non, pas à ce moment-là. Je ne regardais pas vraiment. Nous ne pouvions

8 pas lever les yeux les uns sur les autres puisqu'on nous avait dit de

9 garder la tête baissée.

10 Q. Bien. Où êtes-vous allés à partir de ce moment-là ?

11 R. Après un moment, je ne sais pas exactement combien de temps, ils ont

12 commencé à nous emmener vers le quartier général de Glodjane. Du moins,

13 c'est ce qu'ils ont dit.

14 Q. Où êtes-vous arrivés, en réalité ?

15 R. Nous sommes allés dans la maison de Smajl Haradinaj, qui est le père de

16 Nasim Haradinaj. En chemin, ils ont continué à nous insulter, à nous

17 frapper et à tirer des coups de feu derrière nous et juste au-dessus de nos

18 têtes.

19 Q. Y êtes-vous allés à pied ?

20 R. Oui.

21 Q. Maintenant, repensez au trajet à partir de votre maison jusqu'à la

22 maison de Smajl Haradinaj. En chemin, c'est-à-dire entre votre maison et

23 celle de Smajl Haradinaj, est-ce que vous avez reconnu qui que ce soit ?

24 R. A un moment donné, en route vers la maison, oui, j'ai reconnu

25 quelqu'un, Ramush Haradinaj. Près de la cour avant, il y a un petit chemin

26 qui part en direction de la maison, et j'ai reconnu plusieurs de mes

27 voisins qui avaient participé à tout cet incident. Ils ont continué à nous

28 dire de ne pas regarder vers la gauche et de garder nos têtes baissées.

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1 Q. Maintenant, vous avez dit avoir reconnu Ramush Haradinaj près de la

2 cour avant. Où était-il placé ? La cour avant de quelle maison ?

3 R. Non, il était à l'extérieur de la cour de la maison, sur le chemin.

4 Comment puis-je l'appeler, je ne sais pas si je peux préciser les choses

5 plus avant. Il y avait un pré ainsi qu'un sentier et un petit chemin qui

6 menait vers la maison.

7 Q. Vers l'ensemble des maisons de la famille Haradinaj que vous avez

8 décrites précédemment ?

9 R. Oui.

10 Q. Etait-il seul lorsque vous l'avez vu ou était-il accompagné d'autres

11 personnes ?

12 R. Pour autant que je m'en souvienne, il y avait deux ou trois autres

13 personnes, deux qui étaient là debout.

14 Q. Quel genre de vêtements portait-il lorsque vous l'avez vu ?

15 R. Un uniforme de camouflage vert ainsi qu'un béret rouge.

16 Q. Quoi ? Un béret rouge ?

17 R. Noir, noir, excusez-moi, un béret noir.

18 Q. A environ quelle distance de la maison de Smajl Haradinaj se trouvait

19 cet endroit, là où vous l'avez vu ?

20 R. A 700 ou 800 mètres, pas plus.

21 Q. Bien.

22 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Avons-nous bien compris ? S'agissait-

23 il bien de 700 à 800 mètres ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Entre sa maison et la maison de Smajl.

25 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

26 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci.

27 Q. Vous avez été emmenés vers la maison de Smajl Haradinaj et là où avez-

28 vous été emmenés exactement dans cette maison ?

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1 R. Nous avons été emmenés dans sa maison qui était vide depuis quelque

2 temps puisque la famille de Smajl Haradinaj ne résidait pas à Glodjane

3 jusqu'à il y a quelques jours. Ils avaient été à l'étranger. Pour autant

4 que je sache, ils avaient été en Suède. Encore une fois, on nous a emmenés

5 au premier étage.

6 Q. Cette maison, la maison de Smajl Haradinaj, jusqu'au moment où il y a

7 eu l'échange de coups de feu sur la propriété Haradinaj le 24 mars, est-ce

8 que jusqu'à ce moment-là, la maison était restée vide ? Est-ce que je vous

9 ai bien compris ?

10 R. Oui, la maison était restée vide jusqu'alors, jusqu'à ce que nous ayons

11 été emmenés.

12 Q. Bien. Quoi qu'il en soit, ce jour-là vous y avez été emmenés et vous

13 avez dit qu'on vous avait emmenés au premier étage. Pourriez-vous dire aux

14 Juges de la Chambre ce qui s'est produit après cela ?

15 R. Lorsque nous sommes montés à l'étage, sur la droite il y a un couloir

16 étroit ainsi qu'une petite pièce. C'est là que Dragoslav a été emmené.

17 Vesko et moi-même avons été gardés à l'extérieur, nous attendions dans le

18 couloir.

19 Q. Que pouviez-vous voir ou entendre après que Dragoslav ait été emmené

20 dans cette pièce ?

21 R. Lorsque je suis entré, j'ai vu des jeunes hommes nettoyer leurs armes

22 et les graisser, un entretien standard, si je puis dire. Ils avaient

23 probablement reçu ces armes le même jour. J'ai vu donc un nombre de jeunes

24 soldats monter et entrer dans la pièce commune.

25 Q. Maintenant, cette pièce que vous appelez la pièce commune ou pièce

26 d'invités, est-ce bien la pièce dans laquelle Dragoslav avait été emmené ?

27 R. Non, non, pas à ce moment-là. Il a d'abord été emmené dans la petite

28 pièce de 3 mètres sur 2. Je crois qu'elle n'était certainement pas plus

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1 grande cela, 3 mètres par 2.

2 Q. Pour que tout soit clair pour tout le monde dans le prétoire, vous vous

3 trouvez au premier étage, vous êtes dans le couloir, il y a une salle

4 commune ainsi qu'une plus petite pièce.

5 R. Oui, la petite pièce et un petit couloir étroit qui sépare les deux.

6 Q. Bien. Vous avez dit que Veselin avait été emmené dans la petite pièce.

7 Pouviez-vous l'entendre à partir d'où vous étiez ? Pouviez-vous

8 l'entendre ?

9 R. Non, pas Veselin, Dragoslav. C'est Dragoslav qui a été emmené dans la

10 petite pièce.

11 Q. Oui, excusez-moi, c'est mon erreur. Dragoslav a été emmené dans la

12 petite pièce. Pouviez-vous l'entendre à partir d'où vous étiez ?

13 R. Oui, nous pouvions l'entendre.

14 Q. Bien. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre comment les événements

15 se sont déroulés et auriez-vous l'obligeance de dire aux Juges pas

16 seulement ce que vous avez vu, mais ce que vous pouviez entendre ?

17 R. Peu de temps après, Dragoslav s'est senti mal. Il était malade à

18 l'intérieur de la pièce et il a été jeté dehors, après quoi ils ont emmené

19 Veselin à l'intérieur de cette pièce. J'entendais Veselin crier et gémir.

20 Q. Cette expression, selon vos mots, "Dragoslav était malade", avez-vous

21 une idée de ce qui aurait pu causer cela ?

22 R. Ce n'est que plus tard que j'ai appris qu'on avait proposé à Dragoslav

23 du café, qu'il avait bu. C'était probablement à cause des coups qu'il avait

24 reçus auparavant qu'il y avait eu des complications et --

25 Q. Monsieur le Témoin, veuillez ralentir. Je voudrais connaître plus de

26 détails de ce que vous voulez bien nous donner. Vous nous avez dit qu'ils

27 vous ont emmenés tous les trois, vous êtes montés au premier étage. Vous

28 nous avez dit qu'il y avait une salle commune là et vous nous avez dit

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1 qu'il y avait une petite pièce. Vous nous avez également dit que Dragoslav

2 a été emmené dans la petite pièce.

3 R. Oui, dans la petite pièce.

4 Q. Maintenant, quand Dragoslav se trouvait dans la petite pièce,

5 qu'entendiez-vous de vos propres oreilles ? Qu'entendiez-vous ?

6 R. Des cris qui suivaient immédiatement les coups portés qu'on entendait.

7 Je ne sais pas exactement ce qui se passait à l'intérieur, mais je pouvais

8 entendre les cris.

9 Q. Qui criait ?

10 R. C'était Dragoslav, bien sûr.

11 Q. C'est cela que je voulais savoir. Pendant combien de temps est-ce que

12 cela a duré ?

13 R. Je ne pourrais pas vraiment vous dire combien de temps cela a duré.

14 Q. Lorsque vous avez vu Dragoslav par la suite, dans quel état était-il et

15 quelle était son apparence ?

16 R. Dragoslav ne pouvait pas respirer. C'est quand ils ont décidé de le

17 jeter dans le couloir. Il était pâle. Il se tenait le ventre et l'estomac

18 et, à un moment donné, il a tout simplement dû s'étendre un peu par terre

19 sur le sol de ciment.

20 Q. Est-ce qu'il avait du sang sur lui ?

21 R. Il y avait du sang sur son visage, mais pas beaucoup.

22 Q. Après qu'on l'ait jeté dans le couloir, que vous est-il arrivé à vous

23 ainsi qu'à votre cousin Veselin ?

24 R. Ensuite, Veselin a été emmené à l'intérieur. Ils ont commencé à le

25 battre et au bout d'un certain temps ils m'ont fait entrer aussi.

26 Q. Arrêtez-vous un instant, là. Premièrement, comment savez-vous qu'ils

27 ont commencé à le frapper aussi, si vous n'étiez pas là ? Est-ce que vous

28 avez entendu quelque chose ?

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1 R. Oui, oui. Je pouvais entendre ses cris tandis que je me trouvais dans

2 le petit couloir.

3 Q. Finalement, vous dites que vous-même au bout d'un certain temps, ils

4 vous ont fait entrer dans cette pièce, et quand êtes entré dans la pièce,

5 qu'est-ce que vous avez vu, tout d'abord ?

6 R. J'ai vu Veselin. Il avait le visage tourné vers un coin de la pièce. Il

7 était torse nu. Après cela, lorsque je suis entré, Zeqir Nimonaj qui était

8 là m'a dit de me mettre torse nu.

9 Q. Vous l'avez fait ?

10 R. Oui.

11 Q. Que s'est-il passé alors ?

12 R. Alors, ils ont commencé à m'interroger. Il y avait une petite table de

13 bureau. Pour autant que je puisse m'en souvenir, Besnik était assis au

14 bureau, Besnik Haradinaj, c'est le fils de Rasim Haradinaj et c'était le

15 cousin de Ramush Haradinaj. Il posait des questions auxquelles il fallait

16 qu'on réponde et s'il n'était pas satisfait de la réponse, alors il

17 continuait à nous battre.

18 Q. Est-ce que vous avez été frappé ? Est-ce que vous avez été battu par

19 ces hommes ?

20 R. Oui, oui. Ils nous ont frappés. Ils nous ont battus et nous ne pouvions

21 pas et nous n'osions pas riposter. Il y avait deux autres personnes qui se

22 trouvaient là qui nous ont frappés tout le temps.

23 Q. Bien. Alors, je voudrais simplement obtenir quelques détails

24 supplémentaires concernant cette scène. Pour commencer, comment est-ce que

25 Besnik et les deux hommes que vous ne connaissiez pas étaient-ils vêtus ?

26 R. Besnik était en uniforme noir du type militaire et les deux autres,

27 pour autant que je puisse m'en souvenir, portaient des uniformes de

28 camouflage.

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1 Q. Zeqir Nimonaj, comment était-il vêtu ?

2 R. Zeqir Nimonaj portait un uniforme de camouflage.

3 Q. Avez-vous vu des insignes de l'UCK sur l'un quelconque de ces hommes

4 qui se trouvaient dans la pièce ?

5 R. Oui. Tous portaient l'insigne de l'UCK.

6 Q. Est-ce qu'on vous a frappés ? Comment vous a-t-on frappés ? Est-ce que

7 c'étaient des coups de poing, des coups de pied ou est-ce qu'il y avait des

8 instruments qui ont été utilisés ou un peu des deux ? Dites-nous

9 précisément.

10 R. Zeqir avait une sorte de bâton, il avait un manche en bois et il y

11 avait quelque chose qui était en caoutchouc et il y avait un ressort tout

12 autour. Tout en haut, il y avait une boule de plomb qui faisait très mal et

13 les coups étaient très violents même si la personne qui s'en servait ne

14 frappait très fort. Ils ont aussi frappé à coups de crosse de fusil et à

15 coups de crosse de pistolet, et bien que la plupart du temps le visage

16 était tourné vers le mur, on n'osait pas les regarder. Une ou deux fois,

17 j'ai demandé à Zeqir : pourquoi est-ce que tu fais cela, pourquoi ? Zeqir a

18 répondu : ne mentionne pas mon nom, ne dis pas mon nom. Il m'a dit que

19 j'étais un Chetnik. Il a insulté ma mère serbe et d'une façon générale il

20 m'insultait.

21 Q. Au cours de ce processus, est-ce que d'autres personnes sont entrées, à

22 part Zeqir, Besnik et les deux autres hommes de l'UCK que vous ne

23 connaissiez pas ? Est-ce que quelqu'un d'autre est entré ou est juste entré

24 et sorti ?

25 R. Il y avait des gens qui entraient et sortaient, mais personnellement,

26 je ne pouvais pas voir qui c'étaient, qui entrait et sortait. Plusieurs

27 personnes sont entrées, d'autres sont sorties. Je pouvais entendre le bruit

28 de leurs pas alors qu'ils entraient et sortaient par la porte.

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1 Q. A un moment donné, les coups ont dû cesser. Pourriez-vous nous donner

2 une idée, si vous le pouvez, bien sûr, de la durée ? Pendant combien de

3 temps est-ce que vous avez été frappé de cette manière ?

4 R. Je n'arrive pas à me rappeler maintenant, mais cela a duré longtemps.

5 Après un certain temps, Veselin et moi-même avons été jetés dehors et nous

6 avons vu Dragoslav qui gisait là et était à moitié mort.

7 Q. Je voudrais maintenant que vous décriviez aux Juges les apparences.

8 Est-ce que vous savez si vous aviez du sang sur le visage ou sur vos

9 vêtements ? Effectivement, est-ce que vous aviez du sang sur la poitrine ou

10 sur les jambes ?

11 R. Pour autant que je sache, je n'avais pas de sang, mais Dragoslav était

12 déjà dans une mare de sang. Il avait vomi du sang et il avait une blessure

13 à la tête. Jusqu'à ce moment-là, je n'avais pas vu qu'il avait cette

14 blessure du côté du nez. C'est seulement à ce moment-là que je me suis

15 rendu compte qu'il avait été blessé au nez et qu'il avait perdu

16 connaissance.

17 J'ai essayé de l'aider. Les soldats qui nous gardaient dans le même couloir

18 - et il y avait à un moment de cinq à six, voire 10 soldats qui nous

19 gardaient, parfois il n'y en avait que deux - ils ne voulaient pas nous

20 permettre de l'aider. Chaque fois que je voulais aider Dragoslav, il

21 fallait que je demande leur permission. Ou ils me la donnaient, ou ils ne

22 me la donnaient pas.

23 Jusqu'au moment où nous sommes partis, c'étaient eux qui venaient jusqu'à

24 nous, nous donnaient des gifles, nous frappaient. Pour être précis, il y

25 avait cet homme qu'on appelait le Russe. C'est la première fois que je l'ai

26 vu là, à Glodjane, et il nous giflait. Il portait une sorte de bâton ou de

27 matraque et il a frappé Dragoslav alors même qu'il avait perdu

28 connaissance. Il a frappé Veselin, puis il m'a frappé aussi. Mais il a

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1 semblé que j'étais celui qui était en moins mauvais état que les autres, et

2 il m'a battu et frappé jusqu'à ce qu'il en soit fatigué. Il m'a frappé

3 jusqu'à ce qu'il soit en sueur avec cette tige de métal. Je n'ai pas osé

4 regarder. Je gardais la tête baissée tout le temps.

5 Q. Je vous remercie. A partir de ce moment-là, quand tout ceci a eu lieu,

6 quel était apparemment l'état de Veselin ? Qu'est-ce qu'on pouvait voir ?

7 R. Je ne sais pas comment vous expliquer. Veselin souffrait beaucoup. Il

8 avait du sang qui lui coulait des oreilles. Je ne sais pas très bien

9 comment décrire exactement son état.

10 Q. Est-ce que vous pouviez voir du sang autour de ses oreilles ?

11 R. Oui, oui. Autour de ses oreilles, il y avait du sang. Je ne sais pas

12 pourquoi. Je ne peux pas m'en souvenir maintenant.

13 Q. Merci. Est-ce que Dragoslav a repris connaissance ?

14 R. Dragoslav reprenait connaissance et reperdait connaissance. C'était

15 tout le temps. A partir du moment où Dragoslav reperdait connaissance,

16 entrait dans un coma, j'essayais de l'aider. A ce moment-là, des soldats ne

17 me permettaient pas de le faire et me frappaient à coups de crosse. C'était

18 terrible. Mais j'essayais de le surveiller. Je pensais qu'il était en train

19 de mourir et je ne pouvais pas l'aider. Il avait perdu connaissance et de

20 temps en temps il reprenait connaissance.

21 Q. Je vous remercie. Votre épreuve a à un moment donné pris fin, et je

22 voudrais maintenant que vous prêtiez votre attention sur la façon dont vous

23 avez quitté cet endroit. Vous avez décrit de façon détaillée les coups que

24 vous aviez reçus. Est-ce que finalement vous avez quitté cet endroit ?

25 R. Oui. A un moment donné, Nasim Haradinaj s'est approché de nous et a dit

26 que nous serions remis en liberté et qu'ils avaient décidé de nous donner

27 un véhicule. J'ai supposé à ce moment-là qu'il s'agissait de ma Lada, parce

28 que la Mazda 626 de Dragoslav était un véhicule relativement neuf, et j'ai

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1 dit : Nasim, si vous voulez nous tuer, tuez-nous ici, mais ne nous torturez

2 pas plus longtemps si vous voulez nous laisser partir. Il m'a dit à ce

3 moment-là : où penses-tu qu'on devrait vous emmener, d'abord ? J'ai répondu

4 à ce moment-là que s'ils pensaient vraiment, s'ils étaient vraiment sérieux

5 pour ce qui était de nous laisser partir, à ce moment-là ils devaient nous

6 emmener au village de Babaloc, parce que des réfugiés serbes qui venaient

7 d'Albanie y vivaient.

8 A ce moment-là, lui-même et, je crois, une tierce personne sont allés en

9 direction de la maison pour prendre une de mes voitures, une des deux

10 voitures, et lorsque nous nous sommes mis en route, nous parlions comme si

11 rien de s'était passé dans l'intervalle. Il m'a demandé : pourquoi est-ce

12 que vous n'êtes pas restés dans la maison, pourquoi ne nous avez-vous pas

13 rejoints, pourquoi n'est-on pas resté ici ? Il a dit : vous deviez rester

14 ici, vous deviez aller dans nos écoles, et ainsi de suite.

15 En route, en direction de la maison de Ramush Haradinaj que j'ai décrite

16 plus tôt, sur la route j'ai vu ma Lada qui était criblée d'impacts de

17 balles, et les roues étaient sous les jantes. Les pneus avaient été ôtés,

18 et Nasim a dit : tout ce que tu as, tu n'as qu'à la réparer. J'ai essayé de

19 la réparer dès que j'ai pu ouvrir --

20 Q. Bien. Je vais vous demander de faire une pause maintenant. Je voudrais

21 simplement parler de cette partie de votre récit pour préciser certains

22 éléments. Pour commencer, cette Lada, est-ce que vous l'avez trouvée là où

23 vous l'aviez garée à l'origine ?

24 R. Non. La Lada était garée dans la cour où elle se trouvait lorsque nous

25 avons été arrêtés. Maintenant, j'ai vu qu'elle était sur le chemin. Ce

26 n'était pas une route, c'était un chemin qui conduisait à la maison de

27 Ramush Haradinaj.

28 Q. En route à partir de cette maison de Smajl Haradinaj où vous avez été

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1 battu et torturé, en route pour aller vers votre voiture, la Lada, avez-

2 vous reconnu quelqu'un ? Est-ce que vous avez vu quelqu'un que vous avez

3 reconnu ?

4 R. Oui. Alors que nous arrivions, j'ai vu Eljmi Haradinaj dans la cour. Il

5 était venu plus tard, et je l'avais vu. J'ai vu qu'il se trouvait là avec

6 Ramush Haradinaj. Il y avait aussi d'autres soldats qui se trouvaient là en

7 groupes de deux ou trois dans cette cour assez grande de la maison de

8 Smajl. Je ne peux pas me rappeler s'ils se tenaient séparément ou en

9 groupes, mais le père de Ramush était là. Cela, j'en suis sûr.

10 M. LE JUGE STOLE : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de Hilmi ? Il est

11 dit "Eljmi" Haradinaj. Est-ce que c'est Hilmi, le père ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Hilmi, oui, c'est cela, avec un H.

13 M. LE JUGE STOLE : [interprétation] Je vous remercie.

14 M. DI FAZIO : [interprétation]

15 Q. Vous avez dit que vous étiez sûr que c'était lui, en ce qui concerne

16 Ramush Haradinaj. Vous dites que vous l'avez vu qui se tenait là avec

17 Ramush Haradinaj. Vous êtes absolument sûr que c'était Ramush ?

18 R. Oui. J'en suis sûr à 100 %.

19 Q. Est-ce que c'est au moment où vous sortiez de la maison de Smajl

20 Haradinaj, en route pour aller vers la voiture, en route vers la Lada ?

21 R. Oui, oui.

22 Q. Bien. Est-ce que vous avez réussi à faire fonctionner la Lada, la

23 remettre en état ?

24 R. Non. J'ai essayé de réparer la Lada, mais quand j'ai pu prendre le

25 cric, je me suis rendu compte que même si je pouvais lever le véhicule, il

26 y avait des problèmes, de graves problèmes de moteur et que des parties du

27 moteur avaient été détruites. J'ai essayé de réparer, et Nasim se trouvait

28 là, peut-être à 10 ou 12 mètres de distance, et il la regardait. A un

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1 moment donné, il s'est approché de moi et m'a demandé si je pouvais la

2 réparer, et j'ai dit que non, je ne pouvais pas. Alors, nous avons décidé

3 de retourner au quartier général.

4 Q. Et --

5 R. Ils ont décidé que je devais retourner au quartier général.

6 Q. Bien. Est-ce que c'est ce que vous avez fait ?

7 R. Oui.

8 Q. Lorsque vous dites le "quartier général", le "QG", je suppose que vous

9 voulez parler de la maison de Haradinaj, cet endroit ?

10 R. Oui. Enfin, au lieu de l'appeler quartier général, je préférerais

11 appeler cela une prison.

12 Q. Bien. Il s'agit du bâtiment, de la maison de Smajl Haradinaj ?

13 R. Oui, oui.

14 Q. Est-ce que vous êtes retourné là-bas ? Dans l'affirmative, qu'est-ce

15 que vous avez fait lorsque vous y êtes arrivé ?

16 R. Lorsque j'y suis arrivé, j'ai demandé à Nasim la permission d'emmener

17 Dragoslav en bas, et lorsque je suis monté à l'étage Dragoslav n'était plus

18 dans le couloir où on l'avait laissé lorsque je suis parti. Je l'ai trouvé

19 dans la petite pièce à côté de la porte et j'ai dit à Veselin qu'il fallait

20 qu'on puisse le faire descendre. Personne n'a fait attention à nous.

21 Personne ne nous a plus frappés. J'étais en mesure de faire descendre

22 l'escalier à Dragoslav.

23 Nous nous sommes arrêtés là dans la cour pendant un moment, puis

24 Hilmi, le père de Ramush, s'est approché de nous. Il nous a offert de la

25 nourriture et quelque chose à boire. Nous avons dit que nous ne pouvions

26 pas à cause des coups que nous avions subis. Nous n'osions pas. Il ne nous

27 est pas venu à l'esprit -- vraiment, nous n'avions pas envie ni de manger

28 ni de boire quoi que ce soit.

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1 Nous sommes restés là. Vraiment, nous n'avions pas envie de manger ou

2 de boire quoi que ce soit. Nous sommes restés là et nous avons commencé à

3 marcher, bien que nous étions censés attendre qu'un véhicule officiel ne

4 vienne pour nous emmener. Nous avons commencé à marcher en direction de la

5 maison où, m'a expliqué Nasim, ils devraient procéder à une fouille de

6 notre maison.

7 Alors que nous avions quitté Glodjane, un tracteur est arrivé. Cela

8 devait être du côté de la quatrième ou la cinquième maison du village. Un

9 tracteur est arrivé de l'une de ces maisons. Je ne sais pas le nom de

10 l'homme que nous avons vu, mais je sais dans quelle maison il se trouvait,

11 et nous lui avons demandé d'emmener Dragoslav sur le tracteur parce qu'il

12 était en si mauvais état.

13 Pour commencer, on l'a mis à l'extérieur, mais il était en si mauvais

14 état que finalement on l'a installé dans la cabine du tracteur. J'ai marché

15 derrière le tracteur avec Nasim.

16 Lorsque nous sommes arrivés à la maison, Nasim m'a donné l'ordre --

17 enfin, il y avait un figuier qui se trouvait dans notre jardin, et ma mère

18 mettait de la paille autour tous les hivers pour l'empêcher de geler.

19 Q. Je vais vous demander de vous arrêter un moment ici. Est-ce

20 qu'ils ont fouillé du côté du figuier et cherché des armes dans la maison ?

21 R. Oui.

22 Q. Bien. Est-ce qu'ils ont trouvé des armes ?

23 R. Oui. J'étais sur le point de vous expliquer tout cela. Ils ont pensé

24 qu'il y avait quelque chose de caché à côté du figuier à cause de cette

25 quantité de paille qui l'entourait. Il m'a tendu un couteau, et j'ai vu

26 qu'il coupait la corde ou la ficelle qui servait à attacher et j'ai vu

27 qu'il n'y avait rien que de la paille.

28 Q. Bien. Je vous remercie de nous avoir dit cela. Je vous remercie de nous

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1 avoir informé de cela. Juste quelques questions. Vous nous avez dit qu'ils

2 avaient essayé de fouiller la maison et vous nous avez dit également qu'ils

3 avaient également cherché du côté de l'arbre. Ce que je voudrais savoir,

4 c'est à la fin de cette fouille, est-ce qu'ils ont trouvé des armes dans

5 votre maison ?

6 R. Non.

7 Q. Alors, réfléchissez bien au moment où vous vous trouviez, jusqu'au

8 moment où, je voudrais savoir si l'un quelconque d'entre eux, Nasim ou l'un

9 des autres hommes qui sont d'abord entrés dans votre maison ou l'un

10 quelconque de ceux qui vous ont interrogé dans la maison de Samjl

11 Haradinaj, vous ont-ils posé des questions concernant les activités de

12 votre mère et ce qu'elle faisait au cours des mois qui venaient de

13 s'écouler ?

14 R. Non. Ils n'ont pas posé de questions concernant ma mère.

15 Q. Très bien. D'accord. Est-ce qu'ils ont proféré des accusations contre

16 vous -- plus exactement, je retire ma question. Est-ce qu'ils ont proféré

17 des accusations contre votre mère ?

18 R. Non, pas contre notre mère, mais ils continuaient de nous appeler des

19 espions, tout le temps.

20 Q. Est-ce que vous avez jamais fourni des détails selon lesquels vous

21 auriez des activités d'espionnage ?

22 R. Non. Ils avaient leurs soupçons parce que comme notre frère était un

23 policier, ils nous soupçonnaient de lui transmettre des renseignements.

24 Q. Est-ce qu'ils ont dit cela ou est-ce que c'est ce que vous pensez ?

25 C'est cela que je voudrais savoir.

26 R. Cela, c'est ce que je pensais --

27 Q. Bien.

28 R. -- que c'étaient les soupçons qu'ils avaient, parce que je ne peux pas

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1 comprendre pourquoi on nous aurait appelé des espions sans raison.

2 Q. Je voudrais être bien au clair sur ce point. Est-ce que c'est quelque

3 chose que vous avez pensé ? C'est bien cela ?

4 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi, mais avant que mon confrère ne

5 poursuive avec ses questions, je voudrais qu'on soit bien au clair du fait

6 qu'il dit qu'il s'agit de quelque chose que le témoin a pensé, parce que le

7 compte rendu dit clairement que le témoin indiquait que lui ou eux avaient

8 été appelés des espions à cette occasion. En d'autres termes, il avait

9 verbalement été accusé d'espionnage.

10 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vais aborder la question de cette

11 manière.

12 Q. Dans votre réponse vous avez dit : "Non, eux." Je vous ai demandé :

13 "Est-ce qu'eux, ils ne vous ont jamais fourni des détails concernant le

14 fait que vous espionniez ?"

15 Vous avez dit : "Non, ils avaient leurs soupçons, parce que comme notre

16 frère était policier, ils nous soupçonnaient de lui transmettre des

17 renseignements."

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, j'ai quelques

19 difficultés à comprendre votre dernière observation, parce qu'à ce que j'ai

20 compris, il y avait deux questions qui se posaient; premièrement, ce qu'ils

21 ont dit, c'était parce qu'ils espionnaient; et la seconde, c'est pourquoi

22 le témoin pensait qu'ils pourraient avoir dit cela. Je comprends que pour

23 le premier aspect, c'est tout au moins ce qu'il dit dans sa déposition,

24 mais vérifions.

25 Monsieur Stojanovic, est-il vrai qu'ils aient dit que vous étiez des

26 espions ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont souvent dit cela tandis qu'ils nous

28 battaient. Zeqir répétait : espion, espion, Chetnik, toi le Chetnik, et

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1 toutes sortes de ce type d'insultes. C'est pourquoi, enfin, je veux dire,

2 c'est le seul motif qui pourrait les avoir incités à nous soupçonner

3 d'espionnage. Il n'y avait aucune autre base à ces accusations.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que vous pensez, pas ce qu'ils

5 ont dit. Ils n'ont pas dit : vous êtes des espions parce que vous

6 transmettez tous les renseignements à votre frère. Cela, ce sont vos

7 propres pensées.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ils n'ont pas dit cela.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, cela est clair.

10 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie.

11 Q. Passons à un autre sujet et à la continuation du récit des événements.

12 Vous nous avez dit que vous trois, vous avez pu retourner chez vous et

13 qu'il y a eu une fouille de ces lieux. On a même fouillé le figuier. Est-ce

14 que pour finir vous avez quitté votre maison en compagnie des soldats de

15 l'UCK ?

16 R. Avant que nous ne repartions, cette autre personne qui se trouvait avec

17 Nasim est allée dans toute la maison, bien qu'ils savaient qu'ils avaient

18 déjà fouillé, et a tout renversé. Tandis que nous nous tenions là dans la

19 cour, Nasim est entré et a coupé un rideau en deux et l'a utilisé pour

20 faire des bandeaux pour nous bander les yeux et nous attacher les poignets.

21 A un moment donné, une Opel Ascona est arrivée. Ils nous ont fait

22 monter dans cette voiture et nous ont emmenés à Babaloc. De temps à autre,

23 ils s'arrêtaient, ils parlaient avec certaines personnes et ils disaient :

24 ces gars-là, ce sont des bons, nous avons décidé de leur sauver la vie,

25 nous ne voulons pas les tuer. C'est cela qu'ils ont dit. C'est une

26 traduction mot à mot de l'albanais. Je comprends l'albanais, alors c'est

27 cela qu'ils ont dit. Ils continuaient de dire cela tout au long du chemin

28 jusqu'à Babaloc, jusqu'au moment où ils nous ont fait sortir de la voiture.

Page 2042

1 Ils ont garé la voiture en sens inverse. Dragoslav était assis en

2 face, de l'autre côté. Ils m'ont dit que je ne devais pas me retourner, que

3 je ne devais pas regarder derrière moi et que je devais prendre mon frère,

4 lui prendre la main et l'aider à descendre. Pendant 100 mètres, nous avons

5 reçu l'ordre de marcher sans nous retourner. Après cela, nous avons eu

6 l'autorisation de courir au bout de ces 100 mètres.

7 Tout le monde savait ici, au camp à Babaloc, que nous allions venir.

8 Les Serbes qui se trouvaient à Babaloc avaient été avisés par mon frère.

9 Ils nous ont vus arriver, ils sont venus nous prendre dans une voiture et

10 ils nous ont emmenés à un centre médical à Decani. A partir de là, ils nous

11 ont immédiatement emmenés à Pec --

12 Q. Arrêtez-vous un instant ici. Vous dites que les Serbes à Babaloc

13 avaient été avisés par votre frère. Ils vous ont vus arriver et ils sont

14 venus à votre rencontre pour vous prendre en voiture. Quel est le frère qui

15 les a avisés et comment savez-vous cela ? Qui les avait avisés de quoi ?

16 R. Le frère qui était dans la Lada les avait avisés que nous étions

17 partis. Le frère nommé Vlado leur a dit cela ce matin-là, parce que la

18 police ne se rendait plus dans ce secteur. On supposait que nous avions été

19 faits prisonniers parce que l'accord fait à l'origine, c'était que nous

20 aurions dû être de retour dans l'heure ou l'heure et demie.

21 Q. Bien, je vous comprends. Vous n'étiez pas au courant du fait que votre

22 frère avait transmis un message. Vous étiez en retard. On vous attendait

23 plus tôt. Est-ce que je vous ai bien compris, n'est-ce pas ?

24 R. C'est tout à fait cela.

25 Q. La question que je vais vous poser maintenant peut vous paraître

26 évidente, mais j'ai tout de même besoin que vous y répondiez. Ce secteur

27 autour de Babaloc, c'était un secteur où la police serbe exerçait toujours

28 son contrôle et où les habitants serbes pouvaient encore résider ?

Page 2043

1 R. Oui, c'est à cet endroit que l'Etat - à moins que ce ne soit les

2 Nations Unies, je ne sais pas - avait construit un lotissement pour les

3 Serbes réfugiés qui avaient fui l'Albanie.

4 Q. Très bien, merci. Quand vous êtes sortis de la Lada pour la première

5 fois, est-ce que vous aviez encore les yeux bandés, vous-même ou vous

6 tous ?

7 R. Oui, nous avions encore tous les yeux bandés. Nasim nous a enlevé les

8 bandages que nous avions sur les yeux, l'un après l'autre.

9 Q. Que vous a dit Nasim, une fois qu'il vous a débandé les yeux ?

10 R. Je l'ai déjà dit tout à l'heure. Il a dit : ne vous retournez pas; si

11 jamais vous vous retournez, on vous tirera dessus à partir des points de

12 contrôle que nous tenons, les nôtres sont en train de suivre le moindre de

13 vos mouvements. Voilà, ce genre de chose.

14 Q. D'accord. Je suppose que vous avez suivi son conseil et que vous avez

15 continué à avancer ?

16 R. Tout ce qu'il disait de faire, il fallait que nous le fassions. De

17 toute façon, nous avions très peur que ce dont il nous avait menacé ne se

18 produise.

19 Q. Un autre point dont je ne pense pas qu'il soit contesté, votre frère a

20 été hospitalisé et soigné à l'hôpital. Vous a-t-on également dispensé des

21 soins médicaux ?

22 R. On m'a soigné à Pec. Om m'a proposé de rester à l'hôpital, mais j'ai

23 refusé pour des raisons de sécurité. J'allais à l'hôpital tous les jours en

24 compagnie de Veselin pour me faire soigner.

25 Q. D'accord, merci beaucoup d'avoir répondu à mes questions.

26 M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

27 je n'ai plus de questions à poser à ce témoin.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Di Fazio.

Page 2044

1 Avant que je ne donne la parole à la Défense pour le contre-interrogatoire,

2 je demande s'il y a un accord entre les parties quant à la situation

3 géographique de la maison de Smalj. J'ai entendu un grand nombre de

4 détails, le nom de plusieurs écoles, et cetera, mais il est encore

5 difficile de dire si la localisation exacte de la maison de Smalj fait

6 l'objet des pièces à conviction et n'est pas contestée. Est-ce qu'on la

7 voit sur une photographie aérienne ? Je ne suis pas tout à fait au clair

8 là-dessus.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Je peux vous indiquer, Monsieur le

10 Président, ce qu'il en est sans témoigner moi-même.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si les parties sont d'accord --

12 M. EMMERSON : [interprétation] Cela n'a pas fait l'objet d'un accord

13 officiel entre les parties. Je suis sûr que nous pouvons en parler nous-

14 mêmes. Cette maison se trouve dans le village de Glodjane, mais pas au-delà

15 de la limite qui sépare Glodjane et Dubrava.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être pourrait-on montrer au témoin

17 la photographie aérienne du village et lui poser une question ?

18 M. EMMERSON : [interprétation] D'accord.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que la même question a été posée

20 au témoin précédent.

21 M. DI FAZIO : [interprétation] Cela ne me pose aucun problème. Je suis

22 plutôt favorable à cela.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De façon à ce que nous sachions au moins

24 où se trouve cette maison.

25 Maintenant, il faut que je retrouve le numéro.

26 M. DI FAZIO : [interprétation] -- 35 --

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il s'agit de la pièce P32 ou

28 --

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1 M. DI FAZIO : [interprétation] -- 35, je pense.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, 35. Je demanderais que l'on

3 soumette la pièce P35 au témoin. Non, ce n'est pas P35. Je pense que c'est

4 P32. A moins que --

5 M. DI FAZIO : [interprétation] Je ne sais pas très bien de quel document

6 vous parlez, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document où l'on voit les maisons, et

8 cetera.

9 M. DI FAZIO : [interprétation] La grande photographie globale ?

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

11 Je ne sais si l'on va la retrouver de cette façon.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Peut-être pourrait-on continuer le contre-

13 interrogatoire, après quoi revenir sur ce point ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me souviens maintenant quel était le

15 problème. Pendant votre propos liminaire, vous avez utilisé une

16 photographie du village qui était beaucoup plus claire et permettait

17 beaucoup mieux de s'y retrouver. C'est celle que j'aimerais que l'on

18 retrouve. Il s'agissait du document U014-3045 dans le classeur de

19 photographies qui a été remis aux Juges au début du procès. Veuillez

20 poursuivre, Maître Emmerson.

21 Contre-interrogatoire par M. Emmerson :

22 Q. [interprétation] Monsieur Stojanovic, si vous n'y voyez pas

23 d'inconvénient, j'aimerais commencer par vous poser quelques questions au

24 sujet de ce que vous venez de dire dans votre déposition quant au fait que

25 vous connaissiez les frères Haradinaj, et ce, depuis l'époque où vous

26 résidiez à Dubrava, avant de quitter Dubrava pour aller au service

27 militaire en 1982.

28 D'abord, vous avez dit un plus tôt ce matin dans votre déposition que vous

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1 connaissiez Ramush Haradinaj depuis votre cinquième année d'école primaire

2 quand vous avez changé d'école en passant de Gjakove à Irzniq, avant

3 d'aller à l'école à Decani; c'est bien cela ?

4 R. L'école de Rznic, oui.

5 Q. Vous nous avez dit que vous étiez passé à Rznic durant la cinquième

6 année d'école primaire; c'est bien cela ?

7 R. Oui.

8 Q. Quel âge aviez-vous à ce moment-là, en cinquième année d'école

9 primaire ?

10 R. A peu près 12 ans. Je ne me souviens pas exactement.

11 Q. Combien de temps avez-vous passé à l'école de Rznic avant d'être

12 transféré à Decani pour la suite de vos études ? Combien de temps êtes-vous

13 allé à l'école du village de Rznic ?

14 R. Trois ans.

15 Q. A peu près entre l'âge de 12 ans et 15 ans; c'est bien cela ?

16 R. Oui.

17 Q. Je pense qu'il n'est pas contesté que Ramush Haradinaj a à peu près

18 quatre ans et demi de moins que vous. On peut penser qu'à cette période,

19 lui-même avait entre sept et onze ans, cette période où vous étiez en même

20 temps dans la même école.

21 R. Oui.

22 Q. Ensuite, vous avez changé d'école pour aller à l'école à Decani; c'est

23 bien cela ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous êtes resté à l'école de Decani jusqu'à votre départ de Dubrava

26 pour aller au service militaire en 1982; c'est bien cela ?

27 R. Je suis allé à l'école de Decani, mais je rentrais à la maison tous les

28 jours. Je faisais le trajet de Dubrava à Decani tous les jours pour aller à

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1 l'école. Je rentrais ensuite à la maison. Je ne restais à Decani que

2 pendant la durée des cours à l'école.

3 Q. Oui, je comprends. C'était une école où vous alliez pendant la journée.

4 En 1982, vous quittez Dubrava pour aller au service militaire; c'est bien

5 cela ?

6 R. Oui.

7 Q. Combien de temps a duré votre service militaire ?

8 R. Douze mois.

9 Q. Immédiatement après votre service militaire, êtes-vous parti faire vos

10 études à l'université à Belgrade ?

11 R. Si je me souviens bien, je suis d'abord resté deux mois à peu près au

12 Kosovo avant de partir pour Belgrade.

13 Q. Il me semble savoir que vous n'avez pas terminé vos études

14 universitaires à Belgrade, puisqu'à un certain moment vous avez pris un

15 emploi --

16 R. En effet.

17 Q. Vous avez pris un emploi dans une usine de chaussures à Belgrade où

18 vous avez passé quelque temps, n'est-ce pas ?

19 R. Exact.

20 Q. Peut-être qu'il n'est pas très important de savoir à quel moment cela

21 s'est passé exactement, mais peut-on résumer les choses en disant ce qui

22 suit, à savoir que vous n'êtes pas retourné vivre à Dubrava avant 1995,

23 n'est-ce pas ?

24 R. En effet.

25 Q. Revenons au moment où vous avez quitté le village. Est-ce que mes

26 calculs sont justes ? Finalement, vous n'avez pas résidé à Dubrava pendant

27 à peu près 13 ans, c'est-à-dire entre 1982 et 1995. Dans cette période de

28 15 ans, vous n'aviez pas votre résidence permanente à Dubrava ?

Page 2048

1 R. En effet.

2 Q. Quand vous avez quitté Dubrava pour aller au service militaire, Ramush

3 Haradinaj avait à peu près 13 ans, n'est-ce pas ?

4 R. Je ne sais pas, je ne sais pas quel âge il avait à ce moment-là. Si

5 vous l'avez calculé, ce doit être cela.

6 Q. Non, c'est simplement pour savoir à quel point vous connaissiez bien

7 les frères de la famille Haradinaj, sur la base des relations que vous

8 pouviez avoir avec eux. Je vous demande maintenant combien il y avait de

9 frères dans la famille Haradinaj.

10 R. Il y avait six frères Haradinaj, pour autant que je le sache.

11 Q. En dehors de Ramush et de Daut, est-ce que vous connaissez les prénoms

12 des autres frères ?

13 R. J'ai déjà dit que je ne les connaissais pas parce qu'ils étaient

14 beaucoup plus jeunes que moi. Je les rencontrais de temps en temps,

15 c'étaient des gamins du village, mais je ne les connaissais pas plus que

16 cela. C'étaient simplement des enfants du voisinage pour moi.

17 Q. Ce que je vais vous dire, c'est que ce que vous venez d'affirmer est

18 faux. Ce n'étaient pas des enfants, loin de là, parce que deux d'entre eux,

19 Luan et Shkelzen, avaient une vingtaine d'années en 1998. Ils avaient

20 respectivement deux et quatre ans de moins que Ramush et ils étaient plus

21 vieux que Daut. Ils se situaient entre les deux. Vous le saviez, cela ?

22 Vous les connaissiez ?

23 R. Je parlais des plus jeunes. Je n'ai pas parlé des plus âgés.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter votre

25 réponse ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que c'était les plus jeunes, que je

27 ne les connaissais pas.

28 M. EMMERSON : [interprétation]

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1 Q. Est-ce que vous connaissez les prénoms des plus âgés ? M. Di Fazio vous

2 a demandé, il y a quelques instants, si vous connaissiez les prénoms des

3 autres frères. Est-ce que vous connaissez les prénoms des plus âgés ?

4 R. Non. Quand on a emménagé dans la nouvelle maison, j'ai fait la

5 connaissance des deux plus âgés parce que j'allais à la même école qu'eux.

6 Q. Pour que tout soit clair, vous dites bien dans votre déposition que

7 vous n'alliez pas dans la même école que Shkelzen et Luan Haradinaj ?

8 R. Peut-être que si, mais je n'en ai pas le souvenir. Ils ont habité

9 pendant quelque temps dans le centre du village ou peut-être pas tout à

10 fait dans le centre du village, mais en tout cas en face de la maison de

11 Smalj.

12 Q. Monsieur Stojanovic, on peut tout de même partir du principe, n'est-ce

13 pas, que vous n'étiez pas des amis intimes de tous ces garçons ?

14 R. Non.

15 Q. Pour que ma question soit encore plus claire, je la précise, vous

16 n'étiez pas ami intime de Ramush Haradinaj, n'est-ce pas ?

17 R. Non, en dehors du fait que nous faisions le trajet ensemble. Nous

18 n'avions pas des conversations intimes. Je ne lui rendais pas visite chez

19 lui. Je n'allais chez eux à la maison que lorsque la nécessité s'en faisait

20 sentir, quand j'allais couper l'herbe des prés de son père, Hilmi. Je ne me

21 souviens plus quand c'était exactement, mais il m'arrivait d'aller dans sa

22 maison pour couper l'herbe.

23 Q. Les autres frères plus âgés, est-ce que vous avez fait leur

24 connaissance ?

25 R. Probablement, mais je ne m'en souviens pas.

26 Q. Pendant que vous alliez à l'école, est-ce que vous connaissiez le nom

27 de Ramush Haradinaj ?

28 R. Oui, oui, oui. Je me souviens que oui.

Page 2050

1 Q. Est-ce que vous vous rappelez avoir connu les prénoms des autres

2 enfants Haradinaj quand vous étiez à l'école ?

3 R. Non. Ramush et moi, nous habitions dans le même quartier, dans le

4 même secteur, et en provenance de ce secteur, le nombre d'enfants qui

5 allaient à l'école était assez limité. C'est parce que nous faisions le

6 chemin jusqu'à l'école ensemble que j'ai connu Ramush Haradinaj.

7 Q. Je comprends, c'est ce que vous avez dit dans votre déposition déjà,

8 Monsieur Stojanovic, mais la question que je vous posais, c'est puisque les

9 autres enfants allaient sans doute à l'école, est-ce que vous vous rappelez

10 avoir connu leurs prénoms à l'époque, les prénoms des autres frères ?

11 R. Je ne m'en souviens pas, non, je ne m'en souviens pas.

12 Q. Penchons-nous sur cette période de 13 ans où vous n'avez pas vécu à

13 Dubrava. Vous nous avez déjà dit que de temps en temps, vous retourniez à

14 Dubrava dans cette période. Est-ce qu'il vous arrivait à ces moments-là,

15 quand vous alliez en week-end ou quand vous alliez passer une semaine à

16 Dubrava, est-ce qu'il vous arrivait de rencontrer Ramush Haradinaj ?

17 R. Je ne m'en souviens pas. D'ailleurs, je n'allais pas à Dubrava

18 uniquement deux jours de week-end ou une semaine. Il m'arrivait de passer

19 un mois entier de congé à Dubrava, donc je ne me souviens pas.

20 Q. Même question pour les autres frères : est-ce que vous vous rappelez

21 avoir rencontré les autres frères à ces occasions, quand vous étiez à

22 Dubrava provisoirement ?

23 R. Je l'ai déjà dit, je ne m'en souviens pas. Je ne sais pas.

24 Q. J'aimerais maintenant vous poser quelques questions au sujet de la

25 journée du 18 avril. Si je vous ai bien entendu, vous nous avez dit que les

26 premiers coups de feu que vous avez entendus quand vous étiez dans votre

27 maison venaient de la direction de Dubrava, n'est-ce pas ?

28 R. Oui, en tout cas, c'est l'impression que j'ai eue, que les tirs

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1 venaient de Dubrava.

2 Q. Cela signifie que par rapport à la localisation de la maison des

3 Haradinaj par rapport à la vôtre, les tirs venaient de la direction

4 inverse ?

5 R. Oui.

6 Q. Après quoi vous avez dit avoir entendu des tirs provenant de Gllogjan;

7 c'est bien cela ?

8 R. Oui.

9 Q. Etiez-vous vraiment en mesure de dire précisément d'où venait ce

10 deuxième coup de feu ?

11 R. Je ne pouvais pas le faire parce que la balle a frappé la Lada

12 provenant de la direction de la maison de Ramush, parce que ce côté de la

13 voiture faisait face à la maison de Ramush, c'est-à-dire à la route de

14 Glodjane. Notre maison est tout près de la route, tout comme la maison de

15 Ramush. La nôtre est juste à côté de la route, et celle de Ramush, un peu

16 plus loin sur la droite.

17 Q. Pour que tout soit clair, vous dites dans votre déposition que le

18 deuxième coup de feu provenait de façon générale de la direction de

19 Gllogjan, mais que vous ne sauriez être plus précis que cela; c'est bien ce

20 que vous dites ?

21 R. En effet, je ne peux pas être plus précis. Il provenait de la direction

22 de Glodjane, oui, mais je ne peux pas être plus précis que cela, c'est

23 vrai.

24 Q. Vous nous avez dit dans votre déposition ce qui s'est passé pendant

25 toute cette période où on vous a fait marcher vers le village de Gllogjan à

26 partir de votre maison. Vous avez décrit un moment précis où vous dites

27 avoir vu Ramush Haradinaj en chemin. Vous vous rappelez avoir dit cela ce

28 matin dans votre déposition ?

Page 2052

1 R. Oui.

2 Q. J'aurais une ou deux questions à vous poser sur ce sujet, si cela ne

3 vous ennuie pas. D'abord, vous avez fourni plusieurs descriptions de cet

4 endroit dans les diverses déclarations préalables qui vous ont été

5 demandées au fil du temps, et l'Accusation, lors d'une rencontre qu'elle a

6 eue avec vous pour parler de votre déclaration préalable, vous a reposé des

7 questions à ce sujet, n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Si je ne me trompe, lors de votre dernière rencontre avec les

10 représentants du bureau du Procureur le 23 mars, vous étiez très désireux

11 de corriger une erreur dans votre déclaration préalable, car dans la

12 première déclaration préalable que vous avez faite, vous avez dit avoir vu

13 Ramush Haradinaj devant la cour de votre maison, et vous vouliez corriger

14 en disant qu'en fait vous l'aviez vu devant la maison des Haradinaj, devant

15 la propriété des Haradinaj, n'est-ce pas ?

16 R. En effet.

17 Q. Si vous dites que vous l'avez vu devant la cour de sa maison, est-ce

18 que vous pourriez, je vous prie, nous donner une estimation de la distance

19 qui séparait Ramush Haradinaj à ce moment-là de sa propre maison ?

20 R. Je ne saurais pas vous donner une distance exacte. J'ai demandé que ce

21 soit corrigé, cette erreur. Je l'ai demandé le 23 mars, parce que je

22 parlais de la route. Je ne sais pas très bien comment vous expliquer cela.

23 De la route qui mène à la maison, il était plus près de la cour de sa

24 maison que de la route elle-même à ce moment-là. Mais je ne suis pas sûr de

25 la distance en tant que telle.

26 Q. Ne vous inquiétez plus de la distance pour le moment, de la longueur de

27 la route. Nous y reviendrons dans un instant. Je tiens à m'assurer que j'ai

28 bien compris ce que vous avez dit. Il y a un chemin qui mène depuis la

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1 route jusqu'à la propriété des Haradinaj, n'est-ce pas ? C'est cela que

2 vous êtes en train de décrire; c'est bien cela ?

3 R. Oui.

4 Q. Je vous demanderais votre aide, je vous prie. L'homme que vous dites

5 avoir vu, était-il tout près de la propriété Haradinaj ?

6 R. Mais à qui vous pensez, à Ramush ou -- parce que j'ai dit qu'il y avait

7 un autre homme et même peut-être deux autres hommes debout à côté de lui.

8 Vous pensez à ces deux autres hommes ou vous pensez à Ramush ?

9 Q. Aux trois, puisque vous avez dit qu'ils étaient au même endroit

10 ensemble. Est-ce qu'ils étaient tout près de la maison Haradinaj ?

11 R. Je vous ai dit il y a un instant qu'ils étaient à peu près à mi-chemin.

12 Q. C'est justement cela que j'aimerais tirer au clair. Ils étaient à mi-

13 chemin entre la route et la maison sur le chemin qui relie les deux ?

14 R. Oui, sur ce chemin, sur ce petit chemin, oui.

15 Q. Quand vous dites à mi-chemin, vous voulez dire plus près de la maison

16 des Haradinaj ou plus près de la route ?

17 R. Un peu plus près de la route.

18 Q. Presque à mi-chemin, mais tout de même un peu plus près de la route ?

19 R. Oui, oui, c'est possible, un peu plus près de la route.

20 Q. Alors, je vais vous demander votre aide encore quelques instants.

21 M. EMMERSON : [interprétation] J'aimerais que l'on soumette au témoin la

22 pièce à conviction D24.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, je regarde aussi

24 l'horloge. Il va nous falloir faire une pause. Je ne sais pas de combien de

25 temps vous avez besoin encore avant d'en finir avec le sujet dont vous

26 traitez actuellement.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Je pense que je serai certainement très

28 bref. Une minute ou deux me suffiront, si vous m'autorisez à poursuivre.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.

2 M. EMMERSON : [interprétation]

3 Q. Concentrons-nous, si vous le voulez bien, sur ce petit chemin. Vous

4 voyez qu'à mi-chemin, ce petit chemin fait une courbe, n'est-ce pas,

5 Monsieur Stojanovic ?

6 R. Oui, oui.

7 Q. Je crois me rappeler que vous avez dit qu'il se trouvait presque à mi-

8 chemin, mais un peu plus près de la route. Pourriez-vous, je vous prie,

9 annoter la photographie en montrant où il se trouvait ?

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut une cote.

11 Madame la Greffière, quelle est la cote pour cette photographie ?

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

13 D27, enregistrée aux fins d'identification, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 M. EMMERSON : [interprétation]

16 Q. Monsieur Stojanovic, est-ce que vous pouvez vous orienter ? Vous

17 comprenez ce que nous sommes en train de regarder, n'est-ce pas, Monsieur

18 Stojanovic, avant d'annoter la photographie ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Stojanovic l'a déjà annotée.

20 M. EMMERSON : [interprétation] Je vois --

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous regardez --

22 M. EMMERSON : [interprétation] Bon, cela ira.

23 M. DI FAZIO : [interprétation] Je pense qu'il faut tout de même que le

24 témoin réponde à la question posée par Me Emmerson.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, vous avez placé une

26 annotation sur la photographie. Est-ce que c'était par erreur ou est-ce que

27 c'est bien l'endroit où vous souhaitiez indiquer que les trois hommes se

28 tenaient à ce moment-là ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais indiquer où se trouvaient les trois

2 hommes.

3 M. EMMERSON : [interprétation] Oui --

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez vous-même des

5 difficultés à vous orienter sur cette photographie aérienne ou est-ce que

6 cela ne vous pose aucun problème ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est difficile, c'est difficile. Je trouve

8 que c'est difficile de travailler avec une photographie aérienne.

9 M. EMMERSON : [interprétation]

10 Q. Voyons si je puis vous aider, Monsieur Stojanovic, parce qu'il y a un

11 risque de confusion. Si vous regardez la propriété Haradinaj, à laquelle un

12 certain nombre de constructions ont été ajoutées depuis l'époque où vous

13 habitiez dans ce quartier, mais le chemin que vous êtes en train de

14 regarder sur cette photographie, c'est le petit chemin qui relie la grande

15 route à la propriété Haradinaj. Si on déplace un peu la photographie à

16 l'écran, vous voyez le point inférieur gauche de la photographie, juste à

17 côté de la route --

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais il faut déplacer la

19 photographie, sinon le témoin ne peut rien voir.

20 Oui, Madame l'Huissière, je sais bien.

21 [La Chambre de première instance et l'Huissière se concertent]

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on demander un agrandissement à

23 l'écran, Maître Emmerson --

24 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A ce moment-là, on ne voit plus

26 l'annotation, mais ce serait peut-être préférable.

27 M. EMMERSON : [interprétation] J'aimerais que l'on conserve l'annotation,

28 si possible.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait que l'on recommence une fois

2 que le témoin se sera orienté.

3 Laissons tomber cela pour le moment. Reprenons l'original de la

4 photographie aérienne avec la même cote pour l'instant. Faisons d'abord un

5 agrandissement à l'écran et demandons au témoin de s'orienter, après quoi

6 il lui sera demandé de placer une annotation une nouvelle fois sur la

7 photographie.

8 M. EMMERSON : [interprétation] Très bien.

9 Q. Est-ce que vous avez toute la photographie sur l'écran, Monsieur

10 Stojanovic ?

11 R. Oui.

12 Q. Si vous regardez le chemin qui circule à la verticale, le long du bord

13 gauche de la photographie, du haut en bas, c'est la route qui va de Dubrava

14 à Gllogjan --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur --

16 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Du haut en bas, ce serait plutôt

17 l'inverse.

18 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

19 Q. Si on a Dubrava en bas et Gllogjan en haut, vous me suivez ?

20 R. Cette photographie, je la comprends mal.

21 Q. Bon --

22 R. Je ne m'y retrouve pas avec ces photos aériennes.

23 Q. Je vais essayer de vous aider, Monsieur Stojanovic, pour que tout

24 soit clair à vos yeux. Très bien.

25 Cette route qui circule le long du bord gauche de la photographie, à

26 la verticale, du haut en bas, représente la route qui va vers Gllogjan en

27 bas et vers Dubrava en haut. D'accord. Le grand bâtiment que l'on voit sur

28 la droite, c'est la propriété Haradinaj. Vous admettez cela, si je vous le

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1 dis ?

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans son aspect d'aujourd'hui.

3 M. EMMERSON : [interprétation]

4 Q. Dans son aspect d'aujourd'hui. Le bâtiment qui se trouve en bas, à

5 gauche de la photographie, donc en bas à droite, c'est votre propriété ?

6 R. Oui, oui. Je la vois.

7 Q. Maintenant, vous vous êtes orienté. Le chemin qui mène à la propriété

8 Haradinaj, c'est le chemin que vous aviez sous les yeux il y a quelques

9 instants, c'est-à-dire le chemin qui va du coin inférieur droit en faisant

10 une légère courbe jusqu'à la propriété Haradinaj. Maintenant, on pourrait

11 peut-être regarder de nouveau ce chemin un peu agrandi.

12 R. Oui.

13 Q. Je répète ma question. Vous avez dit dans votre déposition, il y a

14 quelques instants, que quand vous avez vu Ramush Haradinaj en compagnie de

15 deux autres hommes, ils étaient à peu près à mi-chemin sur ce chemin, et

16 vous nous avez indiqué où ils se trouvaient. Pourriez-vous maintenant, je

17 vous prie, refaire la même chose, c'est-à-dire annoter sur la photographie

18 l'endroit à peu près à mi-chemin où ils se trouvaient ?

19 R. [Le témoin s'exécute]

20 Q. Merci.

21 R. C'était là. Je pense que je l'avais déjà annoté avant.

22 Q. Oui. Merci. Maintenant, peut-être pourrait-on --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais une seconde, je vous prie.

24 Monsieur, inscrivez une croix plutôt qu'un point, parce que votre point est

25 très petit. Inscrivez une croix.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] [Le témoin s'exécute]

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

28 Il s'agira de la pièce D27, n'est-ce pas, Madame la Greffière ?

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1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

3 Plutôt que de travailler sur la base de cartes, je proposerais que le

4 document U0143045 soit affiché à l'écran, et on pourrait en faire une pièce

5 de la Chambre puisque ce document a été soumis aux Juges. Maître Emmerson,

6 nous aimerions également que ce soit la pièce D28 pour vous. Il est plus

7 facile de s'y retrouver sur ces documents.

8 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On voit le village, et il a été demandé

10 au témoin d'identifier la maison de Smajl sur la base de la pièce D23, si

11 je me souviens bien, mais il pourrait peut-être être invité à le faire sur

12 cette photographie également. Est-ce que vous vous y retrouvez, Monsieur

13 Stojanovic ? Est-ce que vous voyez ce que représente cette photographie ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est Glodjane, mais c'est un peu

15 flou.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous pensez pouvoir

17 retrouver la maison de Smajl sur cette photographie ? Peut-être que cette

18 photographie montre les choses de façon un peu différente de ce qu'elles

19 étaient à l'époque ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est probable. Il y a de nouvelles maisons,

21 d'après ce que je peux voir. J'ai un peu de mal à reconnaître les formes.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je comprends qu'il y a de nouvelles

23 maisons, mais pourriez-vous retrouver l'emplacement de la maison de Smajl

24 sur cette photographie, d'après le souvenir que vous en avez ?

25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu la réponse du témoin.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous ne le trouvez pas, dites-nous

27 simplement que vous ne le trouvez pas, et nous poursuivrons. Je vois que

28 vous niez.

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1 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les différentes parties sont invitées à

3 -- je ne sais pas si nous pouvons trouver la maison sur cette photographie,

4 si l'on pouvait arriver à un accord sur lequel on va trouver un endroit où

5 les choses se sont actuellement produites ou, du moins, l'endroit dit où

6 elles se sont produites.

7 Nous allons interrompre la séance et reprendre à 13 heures.

8 --- L'audience est suspendue à 12 heures 37.

9 --- L'audience est reprise à 13 heures 05.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, en réponse à votre

12 question, la maison n'apparaît pas sur la photographie sur laquelle M. le

13 Président a attiré notre attention.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

15 M. EMMERSON : [interprétation] Nous sommes en train d'essayer d'avoir une

16 photographie aérienne assez claire pour faire l'objet d'un accord avec

17 l'Accusation.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas nécessairement besoin

19 d'une photographie, mais au moins de pouvoir savoir approximativement où

20 elle est située sur la carte, une carte plus détaillée. Pour ce qui est de

21 savoir si elle était sur la photographie, il s'agit plus ou moins de la

22 même région, n'est-ce pas ?

23 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois que la réponse est un petit peu

24 différente. Ce n'est pas la photographie qui se trouve dans le classeur de

25 photographies. Je crois qu'il s'agit de la même photographie que celle que

26 vous avez, Monsieur le Président.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y avait une photographie différente

28 qui avait été montrée au témoin, prise d'un angle différent du village de

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1 Glodjane.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Je crois que je puis dire, pour votre

3 information, Monsieur le Président, et corrigez-moi si je me trompe, que le

4 bâtiment se trouve plus bas.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 M. EMMERSON : [interprétation] La photographie, en d'autres mots, derrière

7 la position dans laquelle la photographie aérienne a été prise et à partir

8 de là dès lors n'est plus à l'écran parce qu'elle est plus basse que ce que

9 nous pouvons voir.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

11 M. EMMERSON : [interprétation] Ce que nous aimerions faire, ce que nous

12 essayons de faire, c'est de montrer quelque chose qui est aisé à voir et

13 qui peut être marqué pour vous aider, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 Qui plus est, on m'a dit que la vidéoconférence n'est pas possible pour la

16 semaine prochaine. Nous vous avions dit hier, et j'y reviendrai peut-être

17 au cours de la demi-heure qui suit, mais techniquement il semble être

18 impossible d'établir la vidéo connexion. Ce serait seulement possible pour

19 la semaine après la semaine prochaine. Voilà, ceci est pour votre

20 information. Monsieur Di Fazio, veuillez contacter le greffe, s'il vous

21 plaît.

22 M. DI FAZIO : [interprétation] Bien. Ceci pourrait avoir des conséquences

23 pour le calendrier des témoins qui comparaîtront la semaine prochaine.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. En effet, peut-être.

25 M. DI FAZIO : [interprétation] Voulez-vous que nous revenions vers vous sur

26 ce sujet aujourd'hui ? Je sais que cela intéresse Me Emmerson.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. En fait, une communication complète

28 entre les parties est essentielle, et je crois qu'il faut éviter d'utiliser

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1 du temps dans le prétoire à cet effet.

2 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce sont là le genre de sujets dont nous

4 pouvons traiter en nous envoyant des documents, dans la mesure où il est

5 acceptable par la Chambre. C'est plus pratique pour la communication entre

6 les parties.

7 M. DI FAZIO : [interprétation] M. Re contactera sûrement Me Emmerson pour

8 en parler. Je vous remercie.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Très bien.

10 Monsieur Emmerson, je suggère -- en fait, ce que j'ai suggéré, c'est que la

11 pièce D28 ne soit pas utilisée comme pièce à conviction. Nous avons, enfin,

12 en ce moment, nous avons une cote qui est U0143045. Nous l'avons sur le

13 compte rendu d'audience. Cela identifie la photographie qui a été montrée

14 au témoin. Le témoin n'a pas été en mesure de s'orienter sur la

15 photographie, donc laissons-là tomber, et cela résout le problème de savoir

16 si ceci doit être considéré comme une pièce à conviction de la Défense ou

17 de l'Accusation.

18 Veuillez poursuivre.

19 M. EMMERSON : [interprétation]

20 Q. Monsieur Stojanovic, oublions pour un moment la maison de Smajl

21 Haradinaj --

22 M. EMMERSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

23 Q. Si l'on revient au moment où vous étiez en train de marcher le

24 long de la route vers Gllogjan le 18 avril, et vous avez décrit avoir vu

25 Ramush Haradinaj, vous avez dit qu'il se trouvait en compagnie de deux

26 autres personnes. Etes-vous en mesure de décrire ces deux autres

27 personnes ?

28 R. Non, je ne m'en souviens pas.

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1 Q. Lorsque vous avez dit dans votre déposition un petit peu plus tôt

2 aujourd'hui --

3 M. EMMERSON : [interprétation] Pour vous aider, Monsieur le Président,

4 Messieurs les Juges, ceci se trouve à la page 44, à la ligne 24.

5 Q. Vous avez dit qu'à ce moment-là, vous avez vu Ramush Haradinaj sur la

6 route qui partait de la route principale et qu'il y avait d'autres voisins

7 à l'entour, mais : "Ils nous disaient constamment de ne pas regarder ni à

8 gauche ni à droite, mais de garder la tête baissée."

9 Je voulais simplement établir clairement, Monsieur Stojanovic, vous

10 disaient-ils de ne pas regarder vers la gauche ou vers la droite et de

11 garder la tête baissée alors que vous marchiez le long de la route ?

12 R. Oui, sur la route goudronnée.

13 Q. Est-ce la raison pour laquelle vous n'étiez pas en mesure de voir les

14 deux autres hommes qui étaient debout à côté de Ramush Haradinaj ?

15 R. D'après ce que je me rappelle, l'un deux me tournait le dos, et je ne

16 connaissais probablement pas l'autre.

17 Q. Est-ce que celui qui vous tournait le dos était plus près de vous que

18 l'était Ramush Haradinaj ?

19 R. Non. Non, il ne me tournait pas vraiment le dos, mais il était de côté.

20 Q. Y avait-il d'autres gens qui se trouvaient sur cette petite route, à

21 part les trois que vous avez décrits ?

22 R. Il y avait un poste de contrôle qui se trouvait là et une tranchée.

23 C'était considéré comme un point de contrôle. Du côté gauche, il y avait

24 des soldats qui étaient sortis de la maison de Xhavit. Je ne me souviens

25 plus de son nom de famille.

26 Q. Pouvons-nous essayer de garder les choses les plus simples possible,

27 garder cet événement comme étant séparé ? Vous avez parlé de la maison de

28 Xhavit. Vous avez dit qu'elle se trouvait de l'autre côté de la route

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1 principale, c'est-à-dire du côté opposé de la route à celui de la propriété

2 Haradinaj.

3 R. Oui.

4 Q. Je ne vous parle pas du moment où les gens sortaient de la maison de

5 Xhavit. Vous les avez vus sortir de la maison de Xhavit. Sur la route qui

6 mène à la route principale, à la propriété des Haradinaj, est-ce là que

7 vous avez vu des soldats se trouvant à un poste de contrôle ?

8 R. Vous voulez dire les deux soldats ou d'autres soldats ?

9 Q. Laissez-moi vous reposer la question, pour éviter toute confusion

10 possible. Vous avez dit que l'homme que vous pensiez être Ramush Haradinaj,

11 qui était là debout avec d'autres soldats, et vous l'avez montré sur la

12 photographie où il se trouvait. Laissez cela de côté un instant. Y avait-il

13 d'autres personnes sur la route, à part ces trois individus ?

14 R. Oui, il y avait un certain nombre d'autres soldats.

15 Q. Se trouvaient-ils plus près de la route principale que de la maison de

16 Ramush Haradinaj ou entre la maison de Ramush Haradinaj et la propriété ou

17 l'ensemble de maisons de la propriété Haradinaj ?

18 R. Ces soldats se trouvaient essentiellement sur la route principale.

19 Q. Y avait-il des soldats qui se trouvaient sur la route secondaire qui

20 menait vers la propriété Haradinaj ?

21 R. Je ne crois pas, je ne me souviens pas très bien.

22 Q. Vous nous avez dit qu'il y avait un poste de contrôle ou une tranchée.

23 Etait-ce sur la route secondaire ?

24 R. C'était sur le coin. Il y avait un fossé là, donc au croisement de la

25 route principale et de la route secondaire, une tranchée avait été creusée.

26 Q. Y avait-il des soldats ou des gens, disons, plutôt des gens qui étaient

27 là au croisement, qui étaient debout au croisement, à l'endroit où vous

28 avez décrit qu'il y avait une tranchée ?

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1 R. J'ai dit qu'il y avait un certain nombre de soldats à proximité de la

2 tranchée, peut-être à 5 ou 10 mètres de la tranchée, et cinq ou 10 soldats.

3 Q. Veuillez vous interrompre là, s'il vous plaît.

4 M. EMMERSON : [interprétation] Pouvons-nous regarder à nouveau, s'il vous

5 plaît, la nouvelle version de la pièce D24 ? Si nous pouvions agrandir

6 l'intersection entre les deux routes.

7 Q. Maintenant, Monsieur Stojanovic, en regardant le croisement, s'il vous

8 plaît, voulez-vous bien prendre le marqueur et marquer d'une ligne, une

9 ligne droite, l'endroit où se trouve le fossé que vous décrivez ?

10 R. [Le témoin s'exécute]

11 Q. D'un côté de la route telle que vous l'avez dessinée ou des deux

12 côtés ?

13 R. Je me souviens que c'était de ce côté-ci. Je ne me souviens pas qu'il

14 était également de l'autre côté, puisque la maison de Xhavit se trouvait

15 ici. Je ne me souviens pas du nom de Xhavit. En fait, je le connais assez

16 bien. C'était un de mes camarades de classe. Ils sortaient de sa maison, et

17 c'est ici que se trouvait le fossé.

18 Q. Excusez-moi, ma question était ambiguë. Quand j'ai dit "d'un seul

19 côté", voyez-vous l'endroit où la route secondaire rejoint la route

20 principale, vous avez marqué d'une ligne rouge l'ouverture où la route

21 secondaire rejoint la route principale. Y avait-il également un fossé de

22 l'autre côté ? Ne touchez pas à l'écran avec le marqueur si vous n'avez pas

23 l'intention de marquer la photographie.

24 R. Non, non. Je ne comprends pas très bien. Que voulez-vous dire par le

25 côté opposé ? Je venais de Dubrava avec mon frère Dragoslav.

26 Q. Laissez-moi expliquer ma question. Vous marchiez du bas de la

27 photographie le long de la route qui va vers le haut de la photographie, et

28 vous avez marqué à notre attention --

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1 R. Oui.

2 Q. -- une ligne rouge pour indiquer le fossé au premier coin que vous avez

3 rencontré du côté droit. Si vous continuez le long de cette route vers

4 Gllogjan, de l'autre côté de cette ouverture de l'autre coin, y avait-il

5 également un fossé sur l'autre coin de la route qui mène vers la propriété

6 Haradinaj ? Y avait-il également un fossé de ce côté-là ?

7 R. Non. Non, non pas d'après ce que je me rappelle.

8 Q. Maintenant, vous nous avez dit que vous, et il y avait un certain

9 nombre d'autres hommes, je crois, à 5 ou 10 mètres du fossé. Pouvez-vous

10 nous montrer où se trouvaient ces hommes ?

11 R. Sur la gauche, du côté gauche. C'est ce que je voulais dire, parce que

12 quand j'ai dit avant qu'il y avait un grand nombre d'hommes, c'est qu'ils

13 sont tous sortis de la maison, et c'est là que j'ai pu reconnaître Zeqir

14 Nimonaj.

15 Q. Voulez-vous bien marquer du chiffre 1 le lieu où ces hommes étaient

16 debout ?

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 Q. Merci. Y avait-il d'autres hommes sur la route secondaire, à part

19 Ramush Haradinaj et les deux personnes dont vous avez parlé ?

20 R. Comme je l'ai déjà dit, je ne m'en souviens pas, mais je ne crois pas.

21 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous montrer où vous vous trouviez

22 lorsque vous avez levé les yeux et vous l'avez vu ? Pourriez-vous nous

23 marquer l'endroit d'une croix, s'il vous plaît, sur cette carte ? Peut-être

24 serait-il une bonne idée d'utiliser une autre couleur.

25 R. Quelque part par ici, au milieu de la route.

26 Q. Très bien, très bien. C'est fait.

27 La croix que vous avez marquée sur cette carte indique l'endroit où vous

28 étiez debout à ce moment-là, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui, mais laissez-moi indiquer que la route ici apparaît beaucoup plus

2 courte qu'elle ne semble l'être ici sur cette photographie aérienne.

3 Q. Nous allons pouvoir mesurer la distance exacte en temps utile grâce aux

4 marquages que vous avez bien voulu faire, Monsieur Stojanovic.

5 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut donner une cote à cette

6 pièce aux fins d'identification ?

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, voulez-vous s'il

8 vous plaît --

9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Cette

10 pièce portera le numéro D28 aux fins d'identification.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

12 M. EMMERSON : [interprétation]

13 Q. Je voudrais vous demander brièvement ceci. Avant cette journée, quand

14 est-ce que pour la dernière fois vous avez vu ou vous avez parlé à Ramush

15 Haradinaj ? Avant de répondre à cette question, je voudrais dire que Ramush

16 Haradinaj n'était pas au Kosovo en 1991, car il ne vivait pas là entre 1991

17 et la fin de février 1998. Il ne vivait pas dans la maison qui se trouvait

18 là pendant cette période.

19 R. Je ne me rappelle pas quand je l'ai vu pour la dernière fois.

20 M. EMMERSON : [interprétation] On peut maintenant retirer cette pièce à

21 conviction. J'en ai fini avec cette image.

22 Q. Je voudrais maintenant qu'on passe à une autre période des événements

23 que vous avez décrits lorsqu'on vous a fait sortir de la maison de Smajl

24 Haradinaj pour que vous rentriez chez vous et que vous répariez la voiture

25 qui était endommagée. Vous avez dit dans votre déposition que lorsque vous

26 êtes sorti de la maison, vous avez vu Hilmi Haradinaj dans la cour de la

27 maison de Smajl Haradinaj; c'est bien cela ?

28 R. Oui.

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1 Q. Est-ce que c'est la première fois que vous avez vu Hilmi Haradinaj, ce

2 jour-là ?

3 R. Non.

4 Q. Quand le 18 avril avez-vous vu pour la première fois Hilmi Haradinaj ?

5 A quel moment ?

6 R. Quand il a apporté du jus de fruits pour Dragoslav.

7 Q. Est-ce que c'était avant qu'on ne vous fasse sortir dans la cour pour

8 ensuite aller réparer la voiture, dépanner la voiture ?

9 R. Je pense que c'est cela. Je ne me rappelle pas exactement. C'était dans

10 le couloir, oui.

11 Q. Vous nous avez parlé d'une circonstance dans laquelle Nasim Haradinaj

12 est venu et vous a dit que vous alliez être remis en liberté. Je voudrais

13 vous demander si cette circonstance coïncide avec le moment où vous avez vu

14 pour la première fois Hilmi Haradinaj. En d'autres termes, avez-vous vu

15 Hilmi Haradinaj avant, après ou grosso modo au même moment que celui où on

16 vous a dit que vous alliez être remis en liberté ?

17 R. Je ne me rappelle pas. Je pense que c'était après Nasim Haradinaj, mais

18 je ne me rappelle pas exactement.

19 Q. Lorsque vous l'avez vu - je veux parler de Hilmi Haradinaj - à

20 l'extérieur dans la cour, y avait-il d'autres personnes que lui dans la

21 cour, indépendamment de lui et de l'homme que vous avez identifié comme

22 étant Ramush Haradinaj ? Y avait-il d'autres personnes qui se trouvaient

23 dans la cour à part eux ?

24 R. Oui.

25 Q. Combien étaient-ils ?

26 R. Je ne peux pas vous donner un chiffre, parce qu'ils se tenaient là en

27 groupes, en petits groupes, et la cour de Smajl est assez vaste, donc je ne

28 pourrais pas vous donner de chiffre approximatif.

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1 Q. Mais là encore, pourriez-vous nous donner une idée du nombre de

2 personnes qui se trouvaient là ?

3 R. Non. Non, vraiment, je ne peux pas.

4 Q. Où se trouvait Hilmi lorsque vous l'avez vu dans la cour ?

5 R. En face de la barrière. Je ne sais pas exactement à quelle distance il

6 se trouvait de la barrière, cependant. Guère plus de 10 à 15 mètres, je

7 pense. Je parle de l'entrée principale, la barrière principale.

8 Q. Est-ce que Nasim vous a emmené et fait sortir du bâtiment et vous a

9 fait sortir directement de la cour, ou est-ce qu'on vous a dit de rester

10 dans la cour pendant un moment ?

11 R. Nous nous sommes tenus là pendant un moment dans la cour.

12 Q. Là encore, pourriez-vous nous dire en gros combien de temps cela a

13 duré ?

14 R. Non. Non, je ne peux pas. Vraiment, je ne peux pas. Mais nous sommes

15 restés là pendant un bref instant.

16 Q. Savez-vous quelle est actuellement l'apparence de Shkelzen Haradinaj ?

17 R. Non. Shkelzen, non.

18 Q. Ou l'un des frères Haradinaj qui étaient plus âgés ? A ce moment-là,

19 vous ne saviez pas quelle était son apparence, son aspect, de quoi il avait

20 l'air ?

21 R. Non, comme je l'ai déjà dit.

22 Q. Je me demande, je vais vous poser quelques questions qui concernent

23 d'abord une interview donnée à un journal, que vous avez donnée à un

24 journal, et pour cela il serait utile de voir à l'écran la pièce D25 dans

25 sa traduction anglaise.

26 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrait-on, s'il vous plaît, remettre au

27 témoin une copie papier de l'original ? Parce que c'est beaucoup plus

28 facile à lire sur le papier qu'à l'écran.

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1 Q. Monsieur Haradinaj [sic], ceci est une copie de l'article de journal

2 qui a été publié le 24 avril 1998 dans le magazine serbe appelé

3 "Illustrojana Politika", et il contient une interview recueillie

4 directement qui est assez longue et dans laquelle vous êtes cité. Nous

5 avons surligné pour vous un passage, un sous-paragraphe qui correspond dans

6 notre traduction aux mots : "Nous n'étions pas armés…"

7 M. EMMERSON : [interprétation] Pour vous, Monsieur le Président, Messieurs

8 les Juges, il s'agit de la page 3 de la traduction. Merci. Vous pouvez voir

9 cela à l'écran.

10 Q. Monsieur Stojanovic, est-ce que vous vous rappelez avoir donné une

11 interview à un journal ou à une revue peu de temps après que cet incident a

12 eu lieu ?

13 R. Oui.

14 Q. Est-ce que vous reconnaissez le passage qui y figure avec ces mots que

15 vous avez employés ?

16 R. Oui.

17 Q. Je suis très heureux de pouvoir vous donner l'occasion, si vous le

18 souhaitez, de lire intégralement l'article. A l'évidence, nous avons eu la

19 possibilité de voir la traduction, et je n'ai que quelques questions à vous

20 poser à ce sujet. Pour commencer, dans cette interview, il n'est fait

21 aucune mention du fait que vous auriez vu Ramush Haradinaj ce jour-là. Est-

22 ce que vous savez pourquoi ?

23 R. Oui. Personne ne m'a posé de question à son sujet à ce moment-là.

24 Q. Mais il y a une description très détaillée, Monsieur Stojanovic, de ce

25 qui s'est passé dans votre maison, et vous pouvez voir cela, je crois.

26 R. Il n'y a pas tant de détails que cela qui sont fournis, simplement le

27 nom des personnes qui m'ont battu. Je ne parle pas des noms des personnes

28 que j'ai vues. Je parle des noms des personnes qui m'ont frappé.

Page 2071

1 Q. Cela allait être la question que j'allais ensuite vous poser, parce que

2 vous voyez ce sous-titre qui dit : "Ils ont enlevé leurs cagoules."

3 M. EMMERSON : [interprétation] Il s'agit de notre page 4.

4 Q. Vous décrivez ce qui s'est passé dans la maison. Je voulais simplement

5 vérifier quelque chose avec vous, parce que vous nous avez dit dans votre

6 déposition que Daut Hardinaj, un nom que vous avez reconnu, faisait partie

7 de ceux qui ont fait irruption dans la maison et qui ont pris part au

8 passage à tabac. Je voulais simplement vous dire qu'il n'y a dans cet

9 article de journal aucune mention de Daut Haradinaj.

10 R. C'est très possible. Je n'ai aucune idée de ce qu'ont écrit les

11 journalistes. Mais je suis certain que Daut était parmi eux. Les

12 journalistes peuvent inclure ou omettre ce qu'ils veulent. Ce n'est pas à

13 moi d'en juger.

14 Q. Est-ce que vous pourriez retrouver ce sous-titre à nouveau, s'il vous

15 plaît ? "Ils nous ont bandé les yeux…"

16 R. Oui.

17 Q. Dans la traduction anglaise, les mots qui suivent immédiatement ce

18 sous-titre disent ceci, et c'est vous qui êtes en train de décrire ce qui

19 s'est passé à la maison de Smalj Haradinaj : "Vers 4 heures de l'après-

20 midi, le voisin dont c'était la maison est arrivé et nous a dit qu'ils

21 allaient nous relâcher."

22 Puis ensuite, il y a ceci : "Il était probablement leur chef."

23 R. Oui. A ce moment-là et dans la plupart des autres cas, c'est la

24 façon dont ils s'adressaient à tous les Haradinaj ou les saluaient, pas

25 seulement Nasim. Qui plus est, même le jeune Haradinaj qui nous a

26 interrogés a été interrogé de la même manière.

27 Q. J'allais revenir à lui dans un moment. Est-ce que ceci traduit de

28 façon exacte ce que vous avez dit, à savoir que Nasim était probablement

Page 2072

1 leur chef ?

2 R. C'est ce que j'ai supposé à l'époque. Mais je n'étais pas certain qu'il

3 en était le chef. Chaque fois qu'il venait, les autres soldats le

4 saluaient. Tous les soldats qui portaient des bérets noirs étaient salués,

5 de sorte que c'est cela qui m'a donné cette impression particulière.

6 Q. Est-ce que ceci veut dire que, s'il s'agit bien de quelque chose

7 d'exact, vous ne donnez pas à penser qu'il était une personne parmi

8 d'autres qui était responsable ? Si ceci traduit de façon exacte ce que

9 vous avez dit, vous semblez suggérer qu'il était la personne, pour autant

10 que vous puissiez voir, qui était responsable ?

11 R. [aucune interprétation]

12 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrions-nous regarder, s'il vous plaît, la

13 pièce qui figure sur la liste, article 65 ter --

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je dis, c'est qu'il était l'un des

15 hommes en charge, l'un des hommes responsables.

16 M. EMMERSON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, maintenant

17 regarder la pièce 1146 de la liste 65 ter ?

18 Pour les Juges, il s'agit là encore d'un de ces rapports qui fait

19 partie de la pièce à conviction P5, mais qui a déjà été identifié.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que nous allons procéder comme

21 nous l'avons fait précédemment. Nous pourrions donner un chiffre

22 supplémentaire.

23 Madame la Greffière, ce sera --

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce

25 à conviction numéro D29, qui reçoit une cote provisoire aux fins

26 d'identification.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

28 M. EMMERSON : [interprétation]

Page 2073

1 Q. Maintenant, Monsieur Stojanovic, je vais devoir vous lire ce document

2 ou les passages de ce document parce que le texte n'est pas disponible en

3 serbe. Il s'agit là d'un compte rendu qui a été présenté par une femme

4 appelée Marijana Andjelkovic, qui travaillait pour une organisation appelée

5 le centre de droit humanitaire, "Humanitarian Law Centre". Comme nous

6 pouvons le voir sur notre document à la page 2 --

7 M. EMMERSON : [interprétation] Peut-être que nous pourrions présenter cette

8 page, le deuxième paragraphe ?

9 Q. Ce paragraphe se base sur une interview que Marijana Andjelkovic a

10 recueillie auprès de vous le 25 avril à un café à Decani, sur la route qui

11 conduit au monastère de Decani. Il s'agit là d'une interview qui a eu lieu

12 un jour plus tard, le lendemain de l'article que nous venons de voir et qui

13 a été publié.

14 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que vous avez ce passage, Monsieur le

15 Président, Messieurs les Juges ?

16 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] En fait, il s'agit du même jour. Est-

17 ce que ce n'était pas le 25, Maître Emmerson ?

18 M. EMMERSON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

19 Juge.

20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Mais --

21 M. EMMERSON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

22 Juge.

23 Q. Il s'agit d'une interview qui a eu lieu le même jour que la publication

24 de l'article de cette revue. Je voudrais simplement vous poser une question

25 ou deux à ce sujet, parce que pour être absolument juste à votre égard, il

26 faut que je vous donne l'occasion de voir un ou deux passages, un ou deux

27 extraits très lentement. Je regarde maintenant le deuxième paragraphe sous

28 le sous-titre : "Déclaration de Mijat Stojanovic." On écrit ici que vous

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1 avez décrit votre arrivée, c'est-à-dire celle de vous-même et de votre

2 frère dans cette maison, le début des coups de feu, le fait que la

3 fusillade a continué pendant environ 40 minutes, le fait que vous n'étiez

4 pas armés, le fait qu'ils sont venus dans la cour et vous avez décidé de

5 vous rendre, le fait que le frère Dragoslav a ouvert la porte, et ensuite

6 que 10 à 15 soldats ont fait irruption.

7 Ceci se poursuit comme cela : "Ils ont frappé Dragoslav avec une crosse de

8 fusil et lui ont donné des coups de pied. Il est tombé. Ils ont ordonné à

9 Veselin ainsi qu'à moi-même de nous mettre sur le sol à côté de Dragoslav.

10 Ils nous ont également battus. Quand Nasim Haradinaj est arrivé, les coups

11 ont cessé pendant un moment. Il leur a dit de ne pas nous frapper, mais ils

12 ont néanmoins continué."

13 Puis, cela poursuit en décrivant que vous avez été jeté dans la cour

14 et qu'on vous a emmené au quartier général. Cette interview rend compte

15 également du fait que vous n'avez pas mentionné Daut Haradinaj et que vous

16 n'avez pas dit qu'il était présent dans la maison, mais vous avez mentionné

17 Nasim Haradinaj comme étant présent dans cette maison. Pourriez-vous nous

18 aider à ce sujet ?

19 R. D'abord, je n'ai jamais entendu parler de cette femme. Je le dis de

20 façon tout à fait catégorique. Je ne lui ai jamais donné la moindre

21 interview. J'ai donné trois interviews à la représentante du fonds de

22 défense des droits humanitaires, mais pas à cette femme-là. Je suis prêt à

23 la confronter à quelque moment que ce soit.

24 Q. Très bien, Monsieur Stojanovic. Je ne voudrais pas vous mettre en

25 défaut. Il est possible que vous confondiez les noms, mais la femme qui a

26 recueilli votre déclaration et pris des notes à ce sujet, c'est la personne

27 qui a témoigné devant ce Tribunal. Peut-être ne vous rappelez-vous pas son

28 nom, mais s'agissant de la fondation de défense des droits humanitaires,

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1 comme vous l'appelez, le centre du droit humanitaire étant, si je ne

2 m'abuse, le nom exact de cette organisation, la représentante de cette

3 organisation qui vous a interviewé est venue témoigner devant ce Tribunal

4 et elle avait son carnet de notes, les notes qu'elle avait prises au moment

5 de votre interview et sur la base desquelles elle a rédigé son article. Je

6 ne voudrais pas vous placer dans une situation difficile. Vous avez accordé

7 une interview, comme vous venez de nous le dire, à une femme représentant

8 ce que vous appelez la fondation de défense des droits humanitaires, n'est-

9 ce pas ?

10 R. Ce que je dis, c'est ce que j'ai en mémoire. Je ne pense pas avoir

11 parlé à cette femme à quelque moment que ce soit.

12 Q. Et bien --

13 R. Je n'exclus pas totalement la possibilité que j'aie pu le faire, mais

14 je n'en ai pas le souvenir. C'est une interview qui s'est déroulée dans un

15 café et qui était destinée à une chaîne de télévision de Slovaquie ou peut-

16 être de la République tchèque, mais en tout cas de ce pays. C'était dans un

17 café. Si je me souviens bien, c'est là que j'ai donné une interview.

18 Q. Monsieur Stojanovic, ne vous inquiétez pas du nom de cette personne.

19 Vous venez de nous dire il y a un instant que vous avez accordé des

20 interviews à une représentante de la fondation de défense des droits

21 humanitaires; c'est bien cela ?

22 R. Il y a un instant, j'ai dit que je ne l'avais pas fait, n'est-ce pas ?

23 Parce que je ne me souviens pas avoir dit il y a quelques instants ce que

24 vous venez de me dire. Je pense avoir dit que je ne lui ai pas parlé.

25 Q. Vous avez dit il y a quelques instants, Monsieur Stojanovic, je cite :

26 "J'ai accordé trois interviews à une femme représentant la fondation de

27 défense des droits humanitaires, mais pas à cette femme-là."

28 R. Non. J'ai dit que j'avais accordé trois interviews au total au sujet de

Page 2076

1 cet incident. Je n'ai pas dit à qui j'ai accordé ces interviews il y a un

2 instant, et maintenant je parle d'une autre interview. La première, je l'ai

3 accordée à "Illustrojana", qui représente le journal "Politika"; la

4 deuxième, à la chaîne de télévision de Slovaquie ou de la République

5 tchèque; et la troisième, je l'ai accordée à une chaîne de télévision

6 américaine au monastère de Decani. Je ne suis pas sûr de son nom.

7 Q. D'accord. Soyons tout à fait clairs sur ce point, Monsieur Stojanovic.

8 Etes-vous en train de dire que vous n'avez pas accordé d'interview à une

9 femme représentant une organisation de défense de droits de l'homme ou

10 êtes-vous en train de dire que vous ne savez pas ?

11 R. Je n'en ai pas le souvenir.

12 Q. Très bien. Je vais maintenant vous poser quelques questions sur le

13 document que nous sommes en train d'examiner où on trouve un certain nombre

14 de fois des références à Nasim Haradinaj. Dans ce document, il est dit que

15 Nasim Haradinaj arrive au moment où vous êtes à l'intérieur de votre

16 maison. Il est dit qu'il est présent quand vous êtes emmené pour la

17 première fois dans la maison de Smajl Haradinaj. Il est dit qu'il revient

18 dans l'après-midi et vous dit qu'on va vous relâcher, et il est dit qu'il

19 vous ramène à votre maison pour vérifier l'état de votre Lada et qu'il vous

20 annonce qu'on va vous conduire à Babaloc, et qu'il vous accompagne pour

21 garantir votre sécurité. En bref, et je dis bien en bref, chaque fois que

22 vous faites référence à Nasim - ou plutôt, excusez moi - chaque fois que

23 Nasim Haradinaj est mentionné dans ce document, il est mentionné comme

24 disant aux autres présentes de ne pas vous frapper, de ne pas vous faire de

25 mal.

26 La première question que je veux vous poser, c'est : est-ce que vous

27 vous rappelez que Nasim Haradinaj était présent dans la maison au moment où

28 vous avez été attaqué pour la première fois ?

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1 R. Il est arrivé après un court instant. C'est difficile à dire parce que

2 je pense que Nasim est arrivé 15 ou 20 minutes après.

3 Q. Il a dit aux autres personnes présentes de ne pas vous frapper ?

4 R. Il l'a dit aux autres, mais il faisait en même temps des clins d'œil

5 dirigés vers l'extérieur pour leur faire savoir qu'ils pouvaient continuer

6 à frapper.

7 Q. Est-ce que --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, je regarde l'horloge.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aurais besoin de deux ou trois

11 minutes, donc je pense que ce serait un bon moment pour interrompre, mais

12 je vous invite donc à vous interrompre.

13 Maître Emmerson, est-ce que vous pourriez nous dire de combien de temps

14 vous aurez besoin demain ?

15 M. EMMERSON : [interprétation] Oui, pas plus d'une demi-heure à une heure,

16 sans doute moins d'une heure.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Et les autres conseils de la

18 Défense ?

19 M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour l'instant, je ne pense pas que je vais

20 poser de questions à ce témoin, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 Maître Harvey.

23 M. HARVEY : [interprétation] Je ne poserai pas de questions à ce témoin.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, une idée du temps

25 qu'il vous faudra pour les questions supplémentaires ?

26 M. DI FAZIO : [interprétation] Quatre à cinq minutes, si les choses

27 continuent comme elles ont commencé.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr.

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1 Monsieur Stojanovic, nous aimerions vous revoir demain matin dans ce

2 prétoire, et je vous enjoins de ne parler à personne du contenu de votre

3 déposition jusqu'à ce moment-là, pas plus de ce que vous avez dit jusqu'à

4 présent que ce que vous avez l'intention de dire plus tard. Nous espérons

5 que votre audition pourra se terminer demain matin.

6 Madame l'Huissière, pouvez-vous escorter M. Stojanovic hors du prétoire ?

7 J'aimerais maintenant rendre une décision de la Chambre sur l'audition en

8 vidéoconférence.

9 [Le témoin quitte la barre]

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une décision qui concerne la

11 requête partiellement confidentielle de l'Accusation du 23 mars 2007, aux

12 fins d'obtenir l'audition d'un témoin par vidéoconférence. La Défense n'a

13 pas élevé d'objection par rapport à cette requête en dehors du fait de

14 demander que ce témoin soit entendu par des professionnels. La Chambre

15 répète ce qu'elle a déjà dit et qui figure dans sa décision écrite du 21

16 mars.

17 Voici quels ont les critères. Le témoin doit, pour être entendu par

18 vidéoconférence, être incapable de venir au Tribunal ou avoir de bonnes

19 raisons de ne pas souhaiter le faire. Il faut que la déposition de ce

20 témoin soit suffisamment importante pour que l'absence de cette déposition

21 pour la partie qui souhaite entendre ce témoin constitue un défaut

22 d'équité. Il faut en troisième lieu que l'accusé ne subisse aucun préjudice

23 dans l'exercice de son droit à confronter le témoin.

24 La Chambre a examiné les documents confidentiels soumis par l'Accusation en

25 accompagnement de sa requête et s'est convaincue que le témoin en question

26 a de bonnes raisons de ne pas souhaiter venir à La Haye. Ce témoin a des

27 obligations permanentes par rapport à une tierce personne dont il ne peut

28 pas être relevé facilement, ce qui lui interdit tout voyage à La Haye.

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1 La Chambre constate que l'équité pour les deux parties implique la

2 nécessité d'entendre ce témoin, et si ce témoin n'est pas entendu à La

3 Haye, il importe qu'il soit entendu par des professionnels. Si cela n'est

4 pas possible, son audition doit se faire par vidéoconférence. Comme la

5 Chambre l'a déjà fait savoir aux parties, puisque la décision leur a déjà

6 été partiellement communiquée par oral, la Chambre fait droit à la requête,

7 et c'est la conclusion de la décision de la Chambre sur cette question.

8 Maître Emmerson.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense et

10 l'Accusation également, si je ne m'abuse, souhaiteraient obtenir une

11 réponse de l'Accusation.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

13 M. EMMERSON : [interprétation] Nous avons beaucoup avancé. Nous espérons

14 pouvoir déposer ce document demain, mais puisque nous essayons d'éviter la

15 multiplication des dépôts de documents par les diverses équipes de

16 Défenseurs, puisque les écritures principales de l'Accusation sont assez

17 volumineuses, il est fort probable que nous dépassions un peu les délais

18 demain.

19 Est-ce que vous pourriez nous donner un délai de grâce, le cas

20 échéant ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 Monsieur Di Fazio.

23 M. DI FAZIO : [interprétation] Quelques heures, ce n'est pas un problème.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Il est fait droit à votre

25 requête en cas de nécessité.

26 M. EMMERSON : [interprétation] Merci.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je rappelle aux parties que nous avons

28 dit que le prochain témoin qui se trouve à La Haye en ce moment --

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1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, l'audition

3 du témoin actuel devrait facilement se conclure au cours de la première

4 partie de la matinée de demain. Le témoin suivant devrait être entendu

5 pendant une heure, une heure et demie. Par conséquent, il serait bon que

6 nous terminions l'audition du témoin suivant à moins, Maître Emmerson, que

7 vous n'ayez besoin d'un délai supplémentaire et que je ne sois pas au

8 courant. Il serait bon de terminer cette audition demain.

9 M. EMMERSON : [interprétation] A moins que quelque chose d'imprévu ne

10 surgisse dans sa déposition --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr --

12 M. EMMERSON : [interprétation] Je pensais que nous devrions pourvoir

13 conclure demain --

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous sommes suffisamment efficaces,

15 nous pourrions terminer l'audition de ce témoin demain, ce qui nous

16 permettrait de ne pas siéger jeudi. Par conséquent, si les parties se

17 concentrent sur les éléments importants et évitent toute répétition dans

18 leur interrogatoire, nous devrions pouvoir --

19 M. DI FAZIO : [interprétation] Et bien --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- en terminer demain.

21 M. DI FAZIO : [interprétation] M. Kearney est mieux placé pour vous dire ce

22 qu'il en est. Je pense qu'il sera bref.

23 M. KEARNEY : [interprétation] Monsieur le Président, je ferai de mon mieux

24 pour en terminer le plus rapidement possible.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, vous savez que la

26 Défense aura besoin de plus de temps si vous obtenez davantage de temps.

27 Nous pourrions en terminer et ne pas avoir à siéger jeudi.

28 Nous suspendons jusqu'au 28 mars, 9 heures, prétoire II.

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1 --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le mercredi 28 mars

2 2007, à 9 heures 00.

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