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1 Le lundi 8 octobre 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 25.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
6 Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour à
8 toutes les personnes dans le prétoire. Affaire 04-84-T, le Procureur contre
9 Ramush Haradinaj et consorts.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
11 Monsieur Haradinaj, en votre absence, la Chambre a exprimé à quel point
12 elle regrettait les circonstances qui vous ont poussé à demander cette mise
13 en liberté provisoire. Nous espérons tous que vous parviendrez à supporter
14 cette douleur, vous et votre famille.
15 Je voudrais donner quelques indications aux parties en ce qui concerne les
16 annexes de la déclaration 92 ter de M. Stijovic.
17 La Chambre a essayé de faire preuve de la plus grande précision
18 possible en la matière. Vous comprendrez aisément, il n'est pas toujours
19 facile sur le plan logistique de trouver le moment idéal pour avoir des
20 délibérations, des échanges de vues, de façon à prendre la bonne décision.
21 En d'autres termes, ici, je ne suis pas en train de rendre une décision,
22 mais j'annonce aux parties qu'elles ne devraient pas être surprises si les
23 annexes que je vais citer ne vont pas nécessairement être versées au
24 dossier. Je peux vous dire d'ores et déjà que ceci ne couvre pas toute la
25 série des annexes. Mes remarques concernent les annexes qui vont jusqu'au
26 point 52. Par conséquent, les parties ne seront pas surprises si les
27 annexes 17 et 18 ne sont pas versées au dossier; pareil pour l'annexe 25;
28 les annexes 40, 41, 42 et 43 également. Si l'annexe 46 n'est pas versée au
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1 dossier, vous ne serez pas surpris, pas plus que pour ce qui est de
2 l'annexe 49.
3 Je ne vais pas vous motiver ces remarques. Vous aurez peut-être noté
4 que le rapport en tant que tel -- ou des rapports de la DB ne sont pas
5 encore mentionnés dans le cadre de ces remarques. Ceci peut avoir toutes
6 sortes de raisons. Il y a dans ces rapports des éléments qui viennent
7 corroborer d'autres éléments de preuve ou montrent qu'il y a une prise de
8 conscience des événements qui ont eu lieu ou qui vont avoir lieu. Par
9 conséquent, pour ce qui est de l'admission et de la teneur, la Chambre ne
10 pensera pas automatiquement que la teneur est véridique.
11 Si vous voulez analyser de façon plus affinée ces remarques que je
12 suis en train de faire, vous allez constater que la déclaration fait état
13 d'un acte très précis attribué à un accusé très précis, et la Chambre, à
14 cet égard hésite, elle se demande si elle doit verser cet élément au
15 dossier.
16 Si votre analyse porte également sur les déclarations faites juste après le
17 24 mars 1998 - je parle de déclarations fournies par les individus qui,
18 apparemment, qui ont à la suite de ce qui s'est passé le 24 mars, qui ont
19 été détenues, bien là, la Chambre hésite aussi. Aussi parce que nous avons
20 entendu en audience beaucoup de témoins qui sont venus parler de ce qui
21 s'est passé le 24 mars. Et parfois dans les déclarations écrites, on semble
22 trouver bon nombre de contradictions.
23 Je ne vous ai pas fourni tous les motifs, mais ceci vous guidera peut-être
24 - je m'adresse à toutes les parties - quand vous penserez au reste des
25 annexes.
26 Monsieur Re, les annexes 1 et 26, elles concernaient les parties de la
27 déclaration 92 ter qui ont désormais été expurgées. Ceci ne signifie pas
28 pour autant que vous ne pourrez pas essayer d'en demander le versement,
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1 mais la Chambre voulait attirer votre attention sur le fait que le lien
2 direct entre la déclaration 92 ter, donc pas nécessairement avec les dires
3 du témoin, mais le lien direct avec la déclaration 92 ter, il a disparu, ce
4 lien.
5 Voilà, c'étaient les instructions ou directives que nous voulions vous
6 communiquer.
7 Monsieur Re, vous pouvez poursuivre l'interrogatoire principal du témoin.
8 Mais nous allons d'abord demander à Mme l'Huissière de faire entrer le
9 témoin, M. Stijovic, dans le prétoire.
10 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
13 Juges.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous rappelle que vous êtes toujours
15 tenu par la déclaration solennelle que vous avez faite au début de votre
16 audition.
17 Je pense qu'il y avait autre chose, une proposition concernant une décision
18 à propos de l'opération Krug, que vous alliez regarder dans votre chambre
19 d'hôtel si vous l'aviez. Est-ce que vous l'avez trouvée ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous parlions du magazine Bezbednost. J'ai dit
21 que j'avais ce numéro-là. Mais je n'ai pas pu le retrouver, même si je peux
22 vous dire qu'il s'agissait du numéro 5 de l'année 1998.
23 Ici, j'en ai un autre exemplaire. C'est un magazine, une revue
24 professionnelle du ministère de l'Intérieur. Mais ce numéro que j'ai dans
25 les mains est de 2005. Or, pendant ma déposition, je faisais allusion au
26 numéro 5 de 1998. C'est une revue spécialiste, professionnelle concernant
27 la sécurité.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais j'ai mélangé -- excusez-moi -- deux
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1 choses. Oui, effectivement, ceci c'est sur la base des statistiques.
2 Maître Emmerson, est-ce que ça vous aiderait d'examiner ce numéro 5 ?
3 M. EMMERSON : [interprétation] Instinctivement, je dirais non, parce que le
4 témoin ne cite pas ces informations de cette source-là.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a d'autres conseils de la
6 Défense qui veulent l'examiner, ce numéro ? Ils me le diront si c'est le
7 cas.
8 Monsieur Re, êtes-vous prêt à poursuivre ?
9 Monsieur le Témoin, M. Re va poursuivre son interrogatoire principal.
10 LE TÉMOIN: ZORAN STIJOVIC [Reprise]
11 [Le témoin répond par l'interprète]
12 Interrogatoire principal par M. Re : [Suite]
13 M. RE : [interprétation]
14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Stijovic.
15 R. Bonjour.
16 Q. Jeudi après-midi, je vous ai posé des questions à propos du vingtième
17 paragraphe de votre déclaration, on y parlait de statistiques que vous avez
18 mentionnées ici, du nombre d'attaques menées par les séparatistes entre
19 1992 et 1998. Il y en a eu huit en 1992 et plus de 1 486 jusqu'au 30
20 novembre de 1998.
21 Excusez-moi, est-ce qu'il y a un problème, il semblerait qu'un micro a été
22 débranché et l'autre branché. Est-ce qu'on m'entend ? Parce que le micro
23 que j'ai à ma gauche me pose des problèmes.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais les deux sont branchés pour le
25 moment. Parce que vous voyez, il y a des papiers qui frottent contre le
26 micro --
27 M. RE : [interprétation] Mais il y a quelqu'un qui les débranche sans
28 arrêt; ce n'est pas moi.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, l'auteur de ce fait est invisible.
2 M. RE : [interprétation]
3 Q. Voici ma question : pour ce qui reste du paragraphe du (a) au (t), les
4 attaques que vous mentionnez, est-ce qu'elles incluent les attaques que
5 vous mentionnez au début du paragraphe ?
6 R. Oui.
7 Q. Jeudi après-midi vous avez également parlé du meurtre d'un certain
8 Luftu Ajazi, c'était le paragraphe 19. Quel renseignement aviez-vous reçu à
9 l'époque quant aux raisons de cet assassinat ?
10 R. Peut-être y a-t-il eu une erreur au niveau de l'interprétation ou on ne
11 s'entend pas bien. Je parlais d'une attaque terroriste. Luftu Ajazi a été
12 sérieusement grièvement blessé, or dans l'interprétation que j'ai reçue, on
13 parlait de meurtre.
14 Q. Mais je parlais de "l'attaque" plutôt que d'un "meurtre". Quels sont
15 les renseignements que vous avez reçus à l'époque en ce qui concerne les
16 raisons pour lesquelles cette personne a été attaquée ou agressée ?
17 R. Luftu Ajazi a longtemps travaillé pour la RDB au Kosovo. Il était de
18 Glogovac, dans la région de Drenica. Il connaissait très bien le
19 fonctionnement des terroristes albanais au Kosovo.
20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith.
22 M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection. Parce que la réponse ne répond
23 pas à la question. La question cherchait à savoir quels étaient les
24 renseignements que le témoin avait obtenus.
25 S'il veut s'étendre au niveau de sa réponse, pas d'objection, mais on
26 parle de niveau des renseignements. Maintenant, il en profite pour nous
27 faire toute une leçon sur ce qu'a fait ce monsieur en particulier. Or, la
28 question cherchait à obtenir essentiellement des informations, des
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1 renseignements.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith, si on parle de
3 renseignements reçus concernant une attaque dirigée contre une certaine
4 personne, peut-être qu'effectivement on peut -- il est important de savoir
5 ce que faisait cette personne pour avoir des renseignements.
6 Mais de votre côté, Monsieur Re, essayez d'obtenir une réponse.
7 M. RE : [interprétation]
8 Q. Essayez de répondre de la façon la plus concise possible aux Juges pour
9 nous donner les sources dont vous disposiez pour ces informations. Vous
10 m'avez compris ?
11 R. Oui. Je comprends la question. J'étais sur le point d'y répondre, mais
12 je voulais vous expliquer pourquoi il avait été choisi comme cible. Mais
13 puisque vous insistez pour avoir les sources de ces renseignements, je le
14 savais par connaissance personnelle, j'ai eu un coup de fil avec son frère
15 aussitôt après l'attaque terroriste. Mais nous avons aussi obtenu des
16 informations par nos activités opérationnelles à propos de cette attaque.
17 Q. C'est ça qui m'intéresse, cette dernière chose. Quelles étaient les
18 informations que vous avez sur les raisons pour lesquelles ce monsieur a
19 été attaqué, a été pris pour cible ?
20 R. Je tenais ces informations des personnes qui ont participé directement
21 au groupe terroriste qui était autour de Prekaze qui se trouvait près de
22 Srbica.
23 Q. Qu'est-ce que ces personnes vous ont dit ? Qu'est-ce que vous avez
24 découvert ?
25 R. Notre source nous a donné des informations disant que le groupe
26 terroriste d'Adem Jashari avait en sa possession des listes de personnes
27 qui étaient censées attaquer dans la zone de Drenica. Ça s'adressait
28 surtout au travail de la police, au service de sécurité ainsi qu'aux
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1 Albanais qui travaillaient dans divers services du ministère de
2 l'Intérieur.
3 Luftu Ajazi était un des hommes les plus compétents et les plus haut placés
4 dans la zone du Kosovo dans une de ces catégories de la liste.
5 Q. Est-ce que son nom figurait sur cette liste ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que vous vous aviez votre nom sur cette liste aussi ?
8 R. Non.
9 Q. Pourquoi pas ?
10 R. Je ne sais pas. Je suppose que Luftu Ajazi avait son nom sur cette
11 liste parce qu'il était du coin. Il était bien connu dans la région. Il
12 travaillait directement avec le Mouvement populaire du Kosovo pendant
13 plusieurs années, il avait travaillé dans les services de la Sécurité. Il a
14 commencé à travailler pour la RDB au début des années 1970.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harvey, vous voulez intervenir ?
16 M. HARVEY : [interprétation] Voilà, la lumière a jailli.
17 Oui, j'ai tardé à réagir, mais je me dois de le faire. Parce qu'une telle
18 question demande des suppositions, et la réponse a bien été de pure
19 conjecture. Vraiment on n'aurait pas dû la poser, on n'aurait dû avoir
20 cette réponse.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, j'y ai réfléchi aussi et je me
22 suis demandé si moi-même j'aurais posé la question au témoin. Je suppose
23 que je lui aurais demandé pourquoi il savait son nom ne figurait pas sur
24 cette liste.
25 La réponse était probable "non." Et on aurait pu après lui demander s'il
26 savait la composition de ces listes. Il aurait pu tout comme il n'aurait
27 pas pu dire que les noms de cette liste étaient des noms de personnes de la
28 région. Donc on aurait pu sauter la question, mais j'aurais tendance à dire
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1 avec vous que la façon dont la question a été posée n'était pas idéale.
2 M. HARVEY : [interprétation] Merci.
3 M. GUY-SMITH : [interprétation] Autre problème au vu de la façon dont les
4 questions sont posées, c'est qu'il y a un postulat, c'est qu'il y a liste.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai réfléchi moi aussi, mais on aurait
6 pu dire la liste supposée.
7 M. RE : [interprétation] Ecoutez, on n'arrête pas de faire des objections.
8 En trois minutes, j'aurais pu régler la question, parce que la question
9 suivante que je veux poser c'était est-ce que vous avez la liste, mais je
10 ne peux pas la poser parce qu'on ne cesse de m'interrompre.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si vous aviez commencé par
12 cette question vous auriez pu éviter toutes ces objections et toutes ces
13 réflexions qui ont traversé les esprits des avocats comme des Juges. Mais
14 je l'ai déjà dit, ce n'est pas grave ni dramatique.
15 Oui, Maître Emmerson.
16 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que je peux répéter quelque
17 chose à propos de cette déposition et d'autres, ici on donne des sources
18 qui ne sont pas nommées, et nous supposons, sans soulever d'objections, que
19 le témoin n'est pas prêt à révéler ses sources sans donner de noms.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce qu'on a dit jeudi dernier.
21 Si le témoin est à même de donner des noms pour ses sources, il est
22 invité à le faire. S'il ne le fait pas, on comprendra que le témoin a des
23 raisons de ne pas donner ces noms.
24 M. RE : [interprétation] Vous savez, Monsieur le Président, je ne peux pas
25 toujours poser les questions dans l'ordre que vous escomptez.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, pas dans l'ordre que
27 j'escompte. Mais il y a une certaine logique. Si vous voulez savoir du
28 témoin s'il a vu la liste avant et de lui demander des explications pour
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1 savoir qui se trouve sur cette liste et qui ne s'y trouve pas, on peut
2 éviter beaucoup de problèmes si on demande tout d'abord s'il a bien vu
3 cette liste. Alors, on saura quel est le fondement de ses connaissances
4 pour savoir qui y figure, qui n'y figure pas. La question d'après sera de
5 savoir pourquoi un tel est sur la liste et l'autre ne l'est pas.
6 Poursuivez.
7 M. RE : [interprétation]
8 Q. Je vous ai demandé si votre nom figurait sur cette liste. Vous avez
9 répondu que non.
10 Est-ce que les services de la Sûreté d'Etat serbe ont vu cette liste
11 où ils en avaient un exemplaire ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous, vous avez vu cette liste ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce la raison pour laquelle vous avez dit aux Juges de la Chambre
16 que votre nom n'y figurait pas, parce que vous avez cherché votre nom et
17 que vous ne l'avez pas trouvé; est-ce bien cela ?
18 R. C'est comme ça.
19 Q. Est-ce que vous savez si les gens qui avaient dressé cette liste
20 savaient qui vous étiez ?
21 R. Oui.
22 Q. Comment le savez-vous ? Quelle est la réponse ?
23 R. Sans doute que oui.
24 Q. Les services de la Sûreté d'Etat serbe, comment ont-ils obtenu cette
25 liste ?
26 R. En 1994, vers le milieu de l'année plus exactement, nous avons mené une
27 action d'arrestation, nous avons arrêté un grand groupe de personnes
28 membres du ministère travaillant au Kosovo. Au cours des enquêtes et des
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1 poursuites judiciaires déclenchées ultérieurement, nous avons établi que le
2 service dit parallèle de la sûreté de la République du Kosovo avait fait
3 une enquête très poussée sur les mouvements, le comportement et les
4 rapports de membres de la SDB dans cette zone; enquête qui a découvert
5 l'identité de gens qui étaient en contact avec la DB. Ils avaient une liste
6 ou ils avaient connaissance de plusieurs Albanais qui s'étaient trouvés en
7 contact avec la RDB serbe.
8 Ce que nous avons découvert en tant que DB pendant cette enquête, c'est que
9 ce service de sûreté parallèle --
10 Q. Je voulais une réponse courte, comme du genre qui est-ce qui vous a
11 donné la liste ?
12 R. Nous avons reçu la liste des services de la Sûreté de l'Etat, après
13 avoir perquisitionné l'appartement de Mehmetovic Avdija, qui était à
14 l'époque le chef de la sûreté au Kosovo. Je parle là du chef de ce service
15 parallèle albanais de la DB.
16 Q. Cette liste, qu'est-ce qu'elle est devenue ? Où est-ce qu'elle se
17 trouve aujourd'hui ?
18 R. Elle se trouve dans les archives des services de la Sûreté d'Etat de la
19 République de Serbie, ou de la BiH. Il y avait une opération en rapport
20 avec cela. Elle portait le nom de Zeto [phon].
21 Q. Veuillez consulter le paragraphe 17 de votre déclaration. La Chambre ne
22 va pas admettre ce paragraphe. Je vous avertis déjà de cela. Je voudrais
23 simplement vous poser une question à propos du document mentionné en tant
24 qu'annexe numéro 1, dans ce paragraphe. Déclaration publique de la NPK
25 publiée le 1er septembre 1993, publiée dans la lettre d'information Zeri i
26 Kosoves.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je précise qu'il s'agit de la pièce
28 P933.
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1 M. RE : [interprétation]
2 Q. Pourquoi ce document était-il important aux yeux de la Sûreté de l'Etat
3 lorsqu'elle en a pris connaissance ?
4 M. RE : [interprétation] Dans l'intervalle, je rappelle aux Juges de la
5 Chambre que ces extraits sont des extraits du livre que M. Jakup Krasniqi
6 vous a apporté dans le prétoire. Les Juges avaient posé des questions à M.
7 Krasniqi à propos du communiqué. Ceci se retrouve au compte rendu
8 d'audience entre les pages 5 159 et 5 160. Quand on parle de livre, c'est
9 le livre qu'a apporté M. Krasniqi, qu'il a présenté aux Juges à la fin de
10 la déposition.
11 Q. Monsieur Stijovic, qu'elle est l'importance que revêtaient ce
12 communiqué de presse et cette déclaration publique pour le service de
13 sûreté lorsqu'elle en a pris connaissance ?
14 R. La réunion a eu lieu en août dans la région de Drenica. Le LPK était
15 tout particulièrement important pour nous. A l'issue de la réunion, il y a
16 eu un engagement général du mouvement populaire du Kosovo pour préparer
17 l'action armée de la population sur le territoire du Kosovo-Metohija.
18 Q. Quel est le rapport de ce que vous dites avec cette déclaration qu'on
19 trouve à la pièce P933, ayant reçu une cote provisoire MFI ?
20 R. Le lien est direct. Le LPK, dans cette déclaration politique, dit
21 publiquement et ouvertement qu'il faut entreprendre des mesures actives
22 pour s'élever contre les autorités en Serbie, tout d'abord, pour ce qui est
23 des activités et des actions armées sur le territoire du Kosovo-Metohija.
24 Q. Comment est-ce que ceci s'intègre dans la transition générale quand on
25 parle des premières attaques de 1992, il y en a huit, et qu'il y en a en
26 1997 un nombre aussi important ? Alors cette déclaration, où s'insère-t-
27 elle dans cette chronologie de cette montée en puissance des attaques ?
28 R. Même si on fait une analyse superficielle, on comprendra aisément
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1 qu'après la réunion de Drenica, les violences terroristes au Kosovo-
2 Metohija ont augmenté et pour culminer.
3 A partir de 1995, il y a une augmentation spectaculaire du nombre des
4 attaques et cela n'a fait qu'augmenter jusqu'à la fin de 1998. Ceci est dit
5 au paragraphe 20, puisque vous voyez 1 486 attaques en 1998, jusqu'au 30
6 novembre.
7 Q. Veuillez prendre le paragraphe 20(b) de votre déclaration préalable.
8 M. RE : [interprétation] On pourrait peut-être l'afficher à l'écran. Merci.
9 Q. Vous parlez du communiqué numéro 18 de l'UCK. Ceci se trouve en annexe
10 6 à votre déclaration.
11 R. Oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. le Greffier a préparé une liste de
13 toutes les preuves provisoires pour les annexes, et normalement, la sixième
14 porterait le numéro P938.
15 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
16 M. RE : [interprétation] Merci.
17 Q. Paragraphe 20(b), vous parlez du : "Caractère synchronisé des attaques
18 et qui montre qu'il y a un degré significatif d'intégration et de
19 communication entre les différents groupes de l'UCK dès le début de l'année
20 1996."
21 Mais prenons le communiqué lui-même, plus exactement.
22 M. RE : [interprétation] Le premier paragraphe qu'on va afficher sur le
23 prétoire électronique de ce communiqué numéro 18.
24 Q. En février 1996, on dit que : "L'UCK a lancé des actions dans la zone
25 opérationnelle numéro 1, à l'aide de grenades à main sur les camps de
26 colonisateurs serbes qui habitent à Krajina dans la capitale de la
27 République du Kosovo, sur les colons ou colonisateurs."
28 Pourquoi dites-vous que ce furent des actions synchronisées ?
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1 R. C'est très clair, c'est l'organisation autonome des actions effectuées
2 en l'espace de dix minutes sur un grand territoire du Kosovo. Ceci montre
3 qu'il y avait un plan, une intention de mener ces actions. Parce que sinon,
4 il n'est pas aisé de lancer autant d'attaques si on ne dispose pas de bonne
5 préparation, d'une bonne logistique.
6 Les cibles de ces attaques n'ont pas été choisies au petit bonheur la
7 chance. Pourtant ici, les cibles directes, c'était les installations où se
8 trouvaient des personnes protégées par les Nations Unies.
9 Les cibles véritables, c'était les autorités, à qui on voulait dire
10 ceci. Vous l'avez lu dans ce communiqué. Les colonisateurs serbes devraient
11 sortir de la république. C'est l'UCK qui devrait avoir la responsabilité.
12 Ceci montre qu'il y a une évolution logique des événements quant à la façon
13 dont ces nouvelles activités étaient planifiées.
14 Après ces actions et beaucoup d'autres, nous avons décidé, après
15 analyse, de renverser cette action opérationnelle. Cette action et d'autres
16 actions qui avaient lieu en même temps nous ont donné le droit absolu de
17 conclure qu'ils étaient soutenus par un groupe ou une organisation bien
18 structurée qui effectuait ces actions.
19 Q. Je sais que vous voulez dire beaucoup de choses aux Juges, mais s'il
20 vous plaît, Monsieur, s'il vous plaît, essayez de répondre directement aux
21 questions que je vais poser. Ici, elle portait sur le degré de
22 synchronisation.
23 Une question de suivi : à l'écran, vous avez le premier paragraphe de ce
24 communiqué numéro 18. On parle de soi-disant "colonisateurs serbes." Mais
25 ce communiqué, qui désigne-t-il ainsi ? Quelle était la signification,
26 l'importance que ceci revêtait face aux objectifs et aux actions menées par
27 l'UCK ?
28 R. Il s'agissait de personnes qui, en tant que réfugiés provenant du
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1 territoire de la République de Croatie, étaient hébergées sur le territoire
2 du Kosovo-Metohija.
3 Q. S'agissant toujours de ces colonisateurs serbes, je vous invite à vous
4 reporter au paragraphe 22(e) de votre déclaration, où il est fait référence
5 aux communiqués de l'UCK. Notamment, au communiqué numéro 22 qui a trait à
6 deux attaques menées à Babaloc.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que vous voulez parler du
8 paragraphe 20(e).
9 M. RE : [interprétation] Oui, effectivement.
10 M. GUY-SMITH : [interprétation] L'expression "soi-disant" doit être évitée
11 dans le cadre de ce procès. S'agissant du communiqué dont nous parlons,
12 l'expression "soi-disant" est utilisée. M. Re a utilisé cette expression.
13 Il parle des personnes qui sont soi-disant des colonisateurs serbes.
14 Cette question a déjà été soulevée dans le cadre d'une demande que
15 nous avons déposée au sujet de la déposition de ce témoin et nous avions
16 évoqué la terminologie utilisée. Je signale ceci aux Juges de la Chambre,
17 car il faut être très prudent par rapport à l'utilisation de l'expression
18 "soi-disant."
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, apparemment, l'expression
20 "soi-disant" laisse entendre que l'objet ou la personne visée n'est pas ce
21 qu'elle prétend être. Je vois bien pourtant que c'est l'expression utilisée
22 par le témoin lui-même dans le cadre de sa déclaration en application à
23 l'article 92 ter. Si vous faites référence à ceci --
24 M. RE : [interprétation] C'est justement ce que j'ai fait.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vérifier quelque chose,
26 un instant.
27 Si vous dites ce que vous appelez le "soi-disant," et cetera, on comprend
28 mieux alors que c'est ce qu'a dit le témoin.
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1 Poursuivez, Monsieur Re.
2 M. RE : [interprétation] A l'écran, il est question des personnes qui sont
3 "soi-disant des colonisateurs serbes," donc j'invite simplement le témoin à
4 examiner ce passage du document.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith, un jury pourrait être
6 facilement perplexe, mais ce n'est pas le cas des Juges de cette Chambre.
7 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me rends bien compte. Je voulais
8 simplement m'assurer que nous n'aurons pas de problèmes à cet égard plus
9 tard.
10 M. RE : [interprétation]
11 Q. Monsieur Stijovic, au paragraphe 20(e) de votre déclaration, il est
12 fait référence au communiqué numéro 22, qui mentionne "une attaque menée
13 contre trois maisons à Babaloc, maisons occupées par des personnes étant
14 soi-disant des colonisateurs serbes, c'est-à-dire des réfugiés de Krajina."
15 M. EMMERSON : [interprétation] Avant que le témoin ne réponde, je signale
16 que ce paragraphe vient des informations contenues dans l'annexe 10, où il
17 est fait référence à une attaque menée non pas contre des maisons où
18 étaient hébergées des réfugiés, mais des appartements en cours de
19 construction, c'est-à-dire sur un chantier.
20 M. RE : [interprétation] Merci, mais je suis sûr que la Défense, en temps
21 voulu, pourra poser les questions qu'elle souhaite lors du contre-
22 interrogatoire.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, il y a des questions qui se
24 posent ici. Tout d'abord, les références doivent être aussi précises que
25 possible dans le cadre de l'interrogatoire principal. Le contre-
26 interrogatoire ne sert pas à vérifier ou à corriger ces références. Quant à
27 savoir si ces maisons servaient d'hébergement à des personnes considérées
28 comme des colonisateurs, ces maisons étaient en construction ou étaient
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1 utilisées, je ne suis pas sûr que cela fasse une différence.
2 M. EMMERSON : [interprétation] Mais la question posée porte sur les
3 personnes qui étaient hébergées dans ces bâtiments.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, Maître Emmerson, ce n'est pas vrai
5 non plus. Il s'agit d'une attaque menée contre trois maisons et non pas
6 d'une attaque menée contre des personnes. Donc la cible c'est la maison
7 elle-même.
8 Mais essayons de ne pas passer des heures sur cette question. Cette
9 question n'est peut-être pas si importante que cela.
10 Mais je vous invite à poursuivre, Monsieur Re, et je demande à la
11 Défense de bien vouloir éviter d'interrompre sans cesse la déposition du
12 témoin.
13 Poursuivez, Monsieur Re.
14 M. RE : [interprétation] S'agissant de la dernière objection qui a été
15 soulevée, je rappelle aux Juges de la Chambre et à Me Emmerson qu'à
16 l'annexe 3 de la déclaration 92 ter de M. Krasniqi, qui constitue la pièce
17 P328, nous trouvons un rapport portant sur cette attaque. Ce rapport a été
18 versé au dossier et il fait référence à une attaque menée au village de
19 Deqan où habitaient des réfugiés serbes et des réfugiés monténégrins, donc
20 au village de Babaloc. Il s'agit d'un communiqué émis par l'UCK qui a été
21 publié.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne résout pas la question de savoir
23 si au moment de l'attaque ces maisons étaient habitées ou non. Comme je
24 l'ai dit, il s'agit de détails d'importance mineure. Mais poursuivons.
25 M. RE : [interprétation] Veuillez m'accorder un instant que je retrouve la
26 question, s'il vous plaît.
27 Q. Je vous ai posé une question au sujet de l'attaque menée dans ce
28 hameau, peu importe que les maisons étaient construites ou pas. Est-ce
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1 qu'il s'agit là des mêmes réfugiés que ceux que vous avez mentionnés un peu
2 plus tôt ?
3 R. Non. Peut-être pourrais-je apporter quelques précisions pour mieux
4 comprendre. La localité de Babaloc comportait de nombreuses maisons, où des
5 Serbes ou des Monténégrins qui avaient fui l'Albanie et qui étaient venus
6 en tant que réfugiés, devaient être hébergés. Tout cela était financé par
7 le HCR. Les maisons étaient en cours de construction, les gens venaient s'y
8 installer au fur et à mesure, il y avait de nombreuses maisons.
9 Il s'agit d'une localité dont tout le monde savait quelle était
10 peuplée de réfugiés serbes et monténégrins.
11 Q. Dans le communiqué numéro 22 de l'UCK, premier paragraphe, il est dit,
12 je cite : "Comme il est indiqué dans le communiqué
13 numéro 22 du 7 juillet et du 10 juillet, l'UCK a procédé à d'autres
14 tentatives d'attaques. La première attaque a été menée à l'encontre d'un
15 collaborateur avec le régime serbe, Shukri Krasniqi, d'Ostrozubi, et la
16 deuxième a eu lieu à Podujevo à l'encontre du policier criminel Sredoje
17 Radojevic."
18 Est-ce que vous disposez d'information concernant les attaques menées
19 contre le collaborateur et le policier mentionnés dans ce communiqué ?
20 R. Oui. Shukri Krasniqi a été tué dans un établissement de restauration,
21 et les informations que nous avons obtenues dans le cadre de l'enquête
22 permettaient de conclure que Fatmir Limaj était impliqué. Pour ce qui est
23 de l'attaque menée contre le policier répondant au nom de Radojevic, nous
24 savons de source sûre que la personne qui l'a exécuté était surnommée Vuk,
25 le Loup, et c'est lui qui était responsable des activités menées par l'UCK
26 dans les secteurs de Llap et de Podujevo.
27 Q. Qui était Shukri Krasniqi mentionné dans un communiqué de l'UCK comme
28 étant un collaborateur ?
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1 R. Je n'ai pas d'information précise à son sujet si ce n'est qu'il s'agit
2 d'une personne qui était vue en compagnie de policiers, et c'est peut-être
3 la raison pour laquelle on l'a pris pour cible.
4 Q. Quant à la personne répondant au surnom de Loup, est-ce qu'il avait un
5 nom ?
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harvey.
7 M. HARVEY : [interprétation] La situation s'aggrave. Nous ne savons
8 absolument pas qui est la source de cette information. Nous ne savons pas
9 en quoi ces informations sont pertinentes par rapport à la déposition de ce
10 témoin, donc nous nous éloignons du sujet beaucoup trop à mon goût.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce qui est des sources, Monsieur
12 Re.
13 M. RE : [interprétation] Je compte en parler. Ce n'est pas en soulevant des
14 objections que nous allons y arriver plus vite.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le deuxième problème qui se pose - et je
16 me suis posé moi-même la question - c'est en quoi est-il important
17 d'évoquer de façon détaillée ce qui s'est passé plusieurs années avant la
18 période couverte par l'acte d'accusation, ces informations qui ont trait à
19 l'UCK et qui sont mentionnées dans le communiqué de l'UCK.
20 M. RE : [interprétation] Il en va là de la fiabilité de la précision des
21 informations contenues dans les communiqués de l'UCK. La Chambre de
22 première instance a entendu le témoignage de M. Krasniqi qui a parlé de
23 cela. Et la Défense de M. Haradinaj s'opposait au versement au dossier de
24 ces documents pour leur teneur. Or, M. Stijovic est particulièrement bien
25 placé pour témoigner de la véracité de la teneur de ces documents. Je parle
26 là des communiqués de l'UCK qui sont joints en annexe à sa déclaration. Il
27 ressort des communiqués de l'UCK qu'il y a eu une montée en puissance des
28 activités de l'UCK à l'encontre des collaborateurs, des policiers serbes,
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1 et cela a fini par culminer dans un conflit armé qui a éclaté pendant la
2 période couverte par l'acte d'accusation.
3 Donc il est très important de voir l'évolution de la situation et comment
4 on en est passé d'attaques terroristes menées contre les collaborateurs et
5 les policiers jusqu'à un conflit armé.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, compte tenu des objections
8 qui ont été soulevées par rapport à la teneur de ces documents, nous
9 comprenons bien que vous devez passer quelque temps là-dessus, mais inutile
10 d'entrer dans les détails.
11 Poursuivez.
12 M. RE : [interprétation]
13 Q. Me Harvey voulait savoir quelle était la source de vos informations
14 s'agissant de l'attaque menée contre Shukri Krasniqi et le policier
15 répondant au nom de Radojevic. Pourriez-vous dire aussi brièvement que
16 possible aux Juges de la Chambre d'où la Sûreté de l'Etat tenait ces
17 informations ?
18 R. On a intercepté un groupe de personnes appartenant à la LPK, notamment
19 le frère de Fatmir Limaj ainsi que d'autres personnes ayant été impliquées
20 dans ces activités-là. Je parle de Shukri Krasniqi.
21 Et pour ce qui est de Sredoje Radojevic, par le biais de notre agent,
22 nous avons appris l'existence d'une personne qui procédait à des attaques
23 dans le secteur de Podujevo. Nous avons obtenu un numéro de téléphone et un
24 pseudonyme utilisé dans le cadre d'échanges téléphoniques. Ce pseudonyme
25 était Vuk, c'est à dire le Loup.
26 Nous avons placé sur écoute des téléphones et nous avons ainsi appris
27 que cette personne avait joué un rôle-clé dans l'exécution d'attaques
28 terroristes dans le secteur de Podujevo.
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1 Q. Savez-vous quel était le véritable nom de M. Vuk ?
2 R. Zahir Pajaziti.
3 Q. Comment avez-vous estimé la fiabilité de ces informations ? Est-ce
4 qu'elles vous ont paru fiables ?
5 R. Oui, oui, tout à fait.
6 Q. [aucune interprétation]
7 R. Pour déterminer la fiabilité de ces informations, nous avons mis à
8 profit les moyens techniques à notre disposition ainsi que les contacts
9 avec les sources que j'ai mentionnées.
10 Q. Pourquoi ces informations étaient-elles fiables ?
11 R. Parce que la source qui nous a informé du meurtre de Sredoje Radojevic
12 était en contact étroit avec feu M. Zahir Pajaziti. Si vous m'y autorisez,
13 je souhaiterais expliquer quelque chose, de préférence à huis clos partiel.
14 Je souhaiterais dire où cette personne se trouvait à l'époque. Je ne
15 voudrais pas le mettre en danger.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.
17 Nous sommes dans la salle d'audience numéro II. Par conséquent, nous devons
18 baisser le rideau.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
20 [Audience à huis clos partiel]
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14 [Audience publique]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
16 M. RE : [interprétation]
17 Q. Je vous invite à examiner le paragraphe 20(h) de votre déclaration,
18 vous parlez des blessures graves infligées au doyen de l'Université de
19 Pristina, le Pr Radivoje Papovic, et à son chauffeur, le 16 janvier 1997.
20 Ceci est mentionné dans le communiqué de l'UCK numéro 29, qui figure à
21 l'annexe 13 qui porte la cote P946, une cote provisoire.
22 Vous dites que l'UCK a revendiqué cela.
23 M. RE : [interprétation] Excusez-moi, je parlais de la cote "946." En fait,
24 je voulais parler de la cote 945.
25 Q. Monsieur le Témoin, en janvier 1997, que saviez-vous des raisons pour
26 lesquelles Radivoje Papovic avait été agressé par l'UCK ? Il est décrit ici
27 comme étant un ennemi du peuple. Pourquoi donc ?
28 R. Radivoje Papovic était professeur à l'Université de Pristina. Il
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1 en était également le doyen.
2 En outre, c'était une personnalité bien connue. En tant que tel, il
3 débattait souvent ouvertement de la situation au Kosovo-Metohija. Il
4 connaissait bien la situation et les activités menées par les séparatistes
5 albanais. Il pouvait dire quels étaient leurs véritables intentions et
6 objectifs.
7 Dans les médias albanais, on le présentait comme un radical parmi les
8 Serbes. Il a souvent été la cible d'agressions verbales et d'agressions
9 physiques également, comme nous pouvons voir ici.
10 Q. Etait-ce un civil ?
11 R. Tout à fait. Il était professeur à la faculté de mathématiques et de
12 sciences naturelles. En fait, je crois qu'il était spécialisé en chimie. Il
13 avait un doctorat en chimie. C'était une personne bien connue qui avait
14 beaucoup d'influence au Kosovo-Metohija parmi la population serbe.
15 Q. La DB a-t-elle comparé les informations figurant dans le communiqué de
16 l'UCK numéro 29, en date du 19 janvier 1997, avec d'autres informations ?
17 Plutôt, est-ce que ce communiqué de l'UCK reflète fidèlement ce qui s'est
18 passé ?
19 R. Oui, c'est identique.
20 Q. On parle dans ce communiqué d'une troisième attaque menée à Skenderaj
21 contre un collaborateur. Est-ce que vous pouvez nous dire de quelles
22 informations vous disposiez à ce sujet ? La personne qui était prise pour
23 cible s'appelait Xun Dervishi, considéré comme un collaborateur des Serbes.
24 R. Le RDB, quelques heures après l'attaque, en a entendu parler. Nous
25 avons compris de quoi il retournait. Nous avons suivi la chronologie des
26 événements. En surveillant un certain nombre de personnes, nous nous sommes
27 rendu compte que l'attaque était le fait de membres du groupe d'Adem
28 Jashari.
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1 Q. La Chambre souhaiterait savoir quelle est la source de cette
2 information. Comment la DB a-t-il entendu parler de cela ?
3 R. Je peux mentionner des pseudonymes, si c'est important pour les Juges
4 de la Chambre. Je peux vous donner le pseudonyme de nos contacts qui
5 étaient bien placés dans les cercles terroristes de Podujevo.
6 Q. Est-ce que vous dites que ce sont ces sources bien placées au sein de
7 l'UCK qui vous ont communiqué des informations au sujet de ce qui s'est
8 passé ?
9 R. Il s'agit de personnes qui étaient très proches des dirigeants de
10 l'UCK. Il s'agissait de membres actifs de l'UCK.
11 Q. Est-ce que si vous mentionniez leurs noms en audience publique, cela
12 mettrait leur vie en danger ?
13 R. Pas du tout. Etant donné que ce collaborateur du RDB a été compromis
14 après 1999. Des membres de l'UCK et de la LPK ont eu connaissance de son
15 identité. Je peux évoquer son pseudonyme ainsi que son prénom et son nom de
16 famille, et d'autres renseignements le concernant. Cette personne a été
17 tuée à Drenica, après quoi elle a reçu le grade de colonel au sein de
18 l'UCK. Son pseudonyme était Moralec. Il y avait une brigade dans la région
19 qui a été baptisée en son honneur. Si vous le souhaitez, je peux vous
20 donner son prénom et son nom de famille, mais le nom de la brigade a changé
21 par la suite. Si j'évoque son nom, sa famille ne risque rien.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, dites-le-nous.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Mehe Uka. Il a passé plus de 15 ans en prison.
24 Il a également travaillé pour nous. Nous l'avons recruté à l'époque où il
25 purgeait sa peine.
26 Après sa libération, il a travaillé au sein du groupe d'Adem Jashari
27 et au sein du groupe national pour la libération du Kosovo--
28 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu deux noms mentionnés par
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1 le témoin.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] -- grâce à lui, nous avons pu monter une
3 opération d'arrestation très rapidement.
4 [La Chambre de première instance se concerte]
5 M. RE : [interprétation]
6 Q. Pourquoi ce colonel de l'UCK communiquait-il des informations aux
7 services de la Sûreté de l'Etat serbe ?
8 R. Il a été promu général à titre posthume. Une brigade de l'UCK a porté
9 son nom. La raison pour laquelle Mehe Uka a accepté de collaborer avec le
10 RDB, c'est parce qu'il était déçu des rapports qui existaient à l'époque et
11 de l'opportunisme de certains membres de l'UCK.
12 Au plan idéologique, il était marxiste-léniniste. C'était un radical,
13 sa position était claire. Il nous a dit qu'il était en profond désaccord
14 avec ce qui se passait au sein du NPK et que ce n'est pas ce qu'il voulait
15 à l'époque où il était devenu membre de ce parti.
16 Q. Qu'est-ce que la DB lui a donné en retour contre ses informations ?
17 R. Malheureusement, hormis un certain soutien, rien d'autre.
18 Q. Comment est-ce que les renseignements qu'il vous fournissait étaient
19 appréciés par vous, pour ce qui est de la fiabilité ?
20 R. Il était tellement fiable que je peux mentionner deux très bons
21 exemples qui peuvent être facilement corroborés.
22 Q. Est-ce que vous vous rapportez à votre déclaration, est-ce que cela a
23 trait aux incidents dont il est question dans votre déclaration ?
24 R. Non.
25 M. RE : [interprétation] Il serait peut-être plus facile, pour aider la
26 Chambre de première instance, si je peux poser les questions. Si la Chambre
27 a des questions qui la préoccupent, d'une façon générale, en ce qui
28 concerne la fiabilité de l'information sur laquelle elle se fondait. Nous
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1 verrons --
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harvey.
4 M. HARVEY : [interprétation] Peut-être que cela pourrait aider les Juges de
5 la Chambre de savoir si la personne dont le témoin vient de parler, Mehe
6 Uka, dont il vient juste de parler, est bien celui qui, d'après une statue,
7 je regarde c'est grâce à Google, il semble être décédé en 1996.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, pour commencer, est-
9 ce que c'est bien cela les renseignements que vous avez aussi, à savoir que
10 la personne est bien décédée en 1996 ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Mehe Uka --
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous voyons maintenant au
13 paragraphe 20 beaucoup de renseignements concernant les premières années.
14 En tant que tel, ceci ne nous surprend pas particulièrement, parce que cela
15 ne couvre pas les événements de 1998.
16 Par conséquent, Maître Harvey, si vous ne savez pas si votre référence à
17 Google -- est-ce que vous suggérez qu'il n'aurait pas pu donner des
18 renseignements fiables parce qu'il était déjà décédé avant les événements
19 qui ont eu lieu, qu'il n'aurait pas pu donner de renseignements à ce sujet
20 ? Est-ce que c'est cela que vous suggérez ?
21 M. HARVEY : [interprétation] Non, je ne suggère pas ceci. Je suggère que
22 nous avons consacré beaucoup de temps à l'année 1996.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 M. HARVEY : [interprétation] Je me demande si nous allons pouvoir passer à
25 quelque chose qui soit vraiment pertinent à la présente affaire.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, ceci n'a rien à voir avec la
27 fiabilité de cette source. Ceci n'était pas présenté à ce moment-là.
28 Monsieur Re, la Chambre -- Maître Emmerson -- n'a pas de préoccupations en
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1 ce qui concerne la fiabilité de la personne qui est décédée en 1996.
2 Veuillez poursuivre.
3 Maître Emmerson.
4 M. EMMERSON : [interprétation] Je me demande si on pourrait peut-être
5 éclaircir un point. Il se peut qu'il y ait un malentendu. Je croyais que
6 ceci avait trait à des renseignements acquis d'une source en ce qui
7 concernait des événements qui avaient eu lieu en 1997.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, il va falloir que je vérifie
9 cela.
10 Monsieur Re.
11 M. RE : [interprétation] Ça n'est pas dit dans le communiqué, ceci. Ce
12 communiqué a été publié en 1997, en ce qui concerne ce troisième objectif.
13 On ne dit pas quand ils ont attaqué le collaborateur serbe, M. Xun
14 Dervishi.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.
16 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis en train de regarder le communiqué
17 lui-même. La troisième attaque est datée de janvier. La deuxième action
18 date du 16 janvier. La troisième, qui n'a pas de date, puisqu'il s'agit
19 d'une troisième attaque, on pourrait penser qu'elle a eu lieu après cette
20 date. C'est une question de logique, s'il s'agit bien de l'année 1997.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vérifier.
22 Monsieur Re, du point de vue de la chronologie, en suivant la logique de
23 Maître Guy-Smith, est-ce que vous pourriez dire --
24 M. RE : [interprétation] Il faut que --
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- établir que --
26 M. RE : [interprétation] Je n'ai pas de renseignements sur le communiqué
27 quant à la date de l'attaque contre M. Xun Dervishi. Je ne vais pas essayer
28 de présenter un argument pour une question de savoir si ça a eu lieu au
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1 cours de ce mois-là, ou un mois plus tôt, ou où que ce soit.
2 M. HARVEY : [interprétation] Monsieur le Président, là encore, Google
3 insiste sur le fait que l'attaque contre le recteur de l'université, qui
4 était également un dirigeant très important du Parti socialiste serbe, a eu
5 lieu que ce soit le 15 ou le 16 janvier 1997.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Parlant de la fiabilité, est-ce que
7 vous considérez que Google est une source fiable, Maître Harvey ? Est-ce
8 que --
9 M. HARVEY : [interprétation] Plus que ce témoin, Monsieur le Président.
10 M. RE : [interprétation] Est-ce que c'est --
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re.
12 M. RE : [interprétation] Est-ce que ceci est une chose qui est admise par
13 la Défense, à savoir que cette attaque contre le recteur de l'Université de
14 Pristina sur la base du fait que c'était un collaborateur serbe, le 16
15 janvier 1997 ?
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non --
17 M. HARVEY : [interprétation] Je ne vais pas descendre jusqu'à ce niveau,
18 Monsieur le Président.
19 M. RE : [interprétation] Alors pourquoi Google, est-ce que --
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, une tentative imparfaite de
21 vérifier certaines dates est une tentative imparfaite de voir si une
22 personne qui est morte en 1996 pourrait donner des renseignements
23 concernant un événement qui pouvait avoir lieu en 1997, c'est ça la
24 question dont nous sommes en train de parler, le problème. La fiabilité de
25 cette source, c'est de savoir si la Chambre, sans consulter Google
26 fréquemment, n'a pas, disons, de première main, n'a pas de préoccupation
27 grave en ce qui concerne la fiabilité. Peut-être que sur la base de ce qui
28 a été avancé, là encore ce n'est pas une réponse définitive, mais une
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1 tentative de chercher rapidement à vérifier certaines données. Ceci
2 pourrait nécessiter davantage de l'hésitation sur la fiabilité de cette
3 source.
4 Veuillez poursuivre.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, est-ce que
6 je pourrais vous dire quelque chose ?
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez avoir remarqué que
8 certaines questions ont été évoquées en ce qui concerne le point de savoir
9 qui pouvait donner des renseignements relatifs aux événements qui ont eu
10 lieu à un moment précis, à un moment donné, si vous avez, - bien que vous
11 soyez un témoin - les questions qui peuvent nous aider à mieux comprendre,
12 ces documents, par ces documents, oui, vous êtes invité à nous donner des
13 renseignements à ce sujet.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque l'on parlait de Zahir Pajaziti, j'ai
15 parlé d'une personne qui nous donnait des renseignements depuis la prison,
16 y compris le numéros de téléphone et le pseudonyme de Vuk, ils étaient
17 utilisés par Pajaziti. Cette personne, toutefois, n'était pas Mehe Uka.
18 Mehe Uka utilisait le pseudonyme de Moralec. Il participait aux activités
19 de l'UCK.
20 Il était donc possible pour nous de savoir quel était l'organisateur-
21 clé des actions contre M. Radojeviq. La personne qui nous a aidés à la
22 dernière partie était une autre personne, ce n'était pas Mehe Uka. C'était
23 une personne qui était également en prison en Serbie. Je peux vous dire
24 quel était son nom. Toutefois, ce sont deux personnes distinctes. L'un
25 d'entre eux nous a aidés en ce qui concerne l'attaque contre Radivoje
26 Papovic.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re.
28 M. RE : [interprétation]
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1 Q. Je voudrais vous demander maintenant de regarder le paragraphe 20 de la
2 déclaration, le paragraphe 20(o) de votre déclaration. Ceci a trait au
3 communiqué numéro 40, à savoir la cote MFI P953. M. Jakup Krasniqi a fait
4 une déposition dans le procès Limaj T33, à la page 3 325. Ça fait partie de
5 la déposition dans Limaj qui est maintenant comme élément de preuve ici.
6 Ceci a trait à un certain nombre d'attaques lancées en novembre 1997 contre
7 différentes personnes.
8 L'une d'entre elle, la première est Zdravko Tomcic, et le communiqué
9 dit que c'était le président imposé par les Serbes dans la commune de
10 Podujeve, dans la zone d'opération numéro 5.
11 Or, quels étaient les renseignements de début à ce moment-là que le
12 service de sûreté avait en ce qui concerne ces attaques particulières, et
13 qu'est-ce que l'on veut dire par président imposé par les Serbes à la
14 commune ?
15 R. Je vais commencer par le commencement. Je pense que le nom de la
16 personne était Zdravko, bien que je ne sois pas à 100 % sûr de cela. Il a
17 été nommé par l'assemblée serbe au poste de président de la municipalité de
18 Podujevo, puisqu'il y avait eu un boycott qui était mis en place du côté
19 des Albanais pour ce secteur. Ils avaient refusé de participer aux travaux
20 avec les autorités. Il n'a pas été imposé en tant que tel, mais il a été
21 placé là de façon à assurer le fonctionnement des autorités locales,
22 puisque les Albanais ne souhaitaient pas le faire. L'assemblée a dû prendre
23 une décision désignant une personne à ces fonctions pour remplir les tâches
24 prévues par la loi.
25 Ça été tout à fait une surprise pour nous, l'attaque contre cette
26 personne, puisque sa résidence était dans la municipalité de Kursumilja,
27 qui est la municipalité adjacente de Podujevo, à côté. Toutefois, le
28 message était bien clair, que ce soit à Kursumilja ou ailleurs, même le
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1 président de la municipalité ou tout autre personne ne pouvait pas être en
2 sécurité.
3 Q. Est-ce que c'était un civil ?
4 R. Oui, absolument.
5 Q. Est-ce que les renseignements dans ce communiqué de l'UCK, il a été
6 attaqué à la grenade, est-ce que c'est bien de cela qu'a été informé le
7 service de Sûreté ? Ça correspond bien à ce que savait le service, des
8 informations qu'il a reçues ?
9 R. Absolument. Le service de Sûreté a fait une enquête sur les lieux, et
10 nous avons trouvé un certain nombre de fragments de la grenade qui avaient
11 été lancée contre la maison de M. Tomcic. Il y avait tout un dossier
12 concernant cette affaire.
13 Q. Dans votre déclaration, également aux paragraphes 20(r) et 20(s) et
14 20(t), il est question toujours du même communiqué relatif à une attaque au
15 train de vos collègues Dragan Davidovic, un autre policier Zeljko Lutovac,
16 et le meurtre de Dalup Dugoli, et apparemment le fait que l'on ait abattu
17 ou qu'on aurait abattu un Cessna 310, un avion à l'aérodrome de Golesh.
18 Question générale, pour essayer de progresser rapidement jusqu'à ce stade :
19 quelle était la précision de ces renseignements dans le communiqué de l'UCK
20 ou comment est-ce que ceci se compare avec les renseignements que le
21 service de Sécurité avait à l'époque ?
22 R. En ce qui concerne ce cas précis, c'est tout à fait inexact. La
23 citation du point (T) parle du fait qu'un Cessna 310 a été abattu le 26
24 novembre 1998. Ça, c'est inexact. C'est une autre chose qui est apparue
25 régulièrement dans de nombreux communiqués de l'UCK. Ils utilisaient
26 souvent des moyens de propagande ou des arguments de propagande pour dire
27 que dans leurs actions en général ils avaient causé des pertes graves à
28 l'occupant, eux qui s'étaient retirés sans pertes ou conséquences.
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1 Q. Dans ce communiqué particulier -- je crois que vous avez dit, il me
2 semble, 26 novembre 1998. Est-ce que vous avez bien dit 1998 ou 1997 ? Le
3 compte rendu dit "1998."
4 R. 1998 ? Mais c'est 1997. Toutefois, dans ce sous-paragraphe l'alinéa, il
5 y a une erreur sur l'année et c'est ce qui a causé cette confusion. C'était
6 probablement une erreur de dactylographie.
7 Q. Bien, je --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux considérer qu'un
9 rapport de décembre 1997 ne pouvait pas prêter d'une question qui aurait eu
10 lieu en novembre 1998.
11 De plus, Monsieur Re, je voudrais appeler votre attention sur le fait
12 que dans l'annexe 10 il y a, semble-t-il également, une certaine confusion
13 des erreurs de dactylographie dans le texte anglais. Le premier communiqué
14 mentionné ici devrait être le 21, comme l'original, et non pas le 22.
15 M. RE : [interprétation] Je vois.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Re. Donc ceci est encore
17 une correction à apporter.
18 M. EMMERSON : [interprétation] Et sur ce même document, nous avons juste vu
19 le sous-paragraphe (s) et il est invraisemblable également qu'il y a la
20 même erreur de date.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re.
22 M. RE : [interprétation] Oui, je suppose, mais je peux certainement
23 éclaircir ce point avec le témoin.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, s'il vous plaît, voulez-vous faire
25 ça, ensuite nous allons suspendre la séance.
26 M. RE : [interprétation] Très bien.
27 Q. Je souhaiterais éclaircir un point, Monsieur le Témoin. Cette date au
28 paragraphe ou à alinéa (s), est-ce que cela ne devrait pas être 1997 ?
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1 Et une autre chose que je vais vous demander, c'est l'exactitude de
2 ce qui est dit par rapport à ce que vous avez écrit au paragraphe (s) --
3 non, excusez-moi, aux paragraphes (r) et (s), comment est-ce que ça
4 s'adapte par rapport à l'exactitude du communiqué de l'UCK. Est-ce que le
5 communiqué de l'UCK est exact pour autant que vous le sachiez ? Est-ce que
6 vous pouvez corriger la date à novembre 1997 ?
7 R. Quant au paragraphe (r), il est absolument exact en ce qui concerne les
8 dates et les renseignements pour ce qui est contenu dans ce paragraphe qui
9 a trait au meurtre de Dragan Davidovic.
10 Quant au paragraphe (s), l'erreur c'est novembre 1997.
11 Q. Est-ce que ceci reflète exactement les choses par rapport au
12 renseignement que vous aviez, qui était à leur disposition, ou est-ce qu'il
13 reflète de façon -- enfin à l'exception de l'attaque qui aurait eu lieu
14 contre le Cessna qui aurait été abattu ?
15 R. A mon avis, non, parce que Zarko Milosevic est un proche ami et c'est
16 un policer, et il m'a expliqué - et également dans les documents officiels
17 je savais comment cet événement a eu lieu - dans le communiqué public
18 Gjocaj est présenté comme une personnalité importante de l'UCK. Nous
19 n'avons pas de renseignements selon lesquels il faisait partie de l'UCK.
20 Nous savions qu'il était un sympathisant de l'UCK, donc on a vu la façon
21 très habile par laquelle il a tiré son arme dans le véhicule où il était
22 détenu, et vu le manque d'attention du policier, il a tué un policier et a
23 blessé Zarko Milosevic et c'est le troisième qui était là, Lutovac.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Une question générale en ce qui
25 concerne tous ces documents. Si vous donnez les dates dans votre
26 déclaration au titre de l'article 92 ter maintenant, vous avez énormément
27 pris ça des documents ou est-ce que vous avez souvenir personnel concernant
28 ces dates ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous parle sur la base des souvenirs
2 concernant ce mois-là. Ensuite, je regarde le document, donc je peux vous
3 donner une date précise. Dans certains cas, je peux parler directement de
4 la date où de la période où ceci a eu lieu. C'est quelque chose qui est
5 très clair que je peux me rappeler, parce que c'était le même jour qu'il y
6 a eu une attaque contre le poste de police de Rznic.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, il faut que je pose la
8 question suivante. Un instant, s'il vous plaît.
9 L'un des documents dont vous avez parlé concernait deux attaques, l'une
10 contre Shukri Krasniqi et l'autre Sredoje Radojevic. L'autre concernait
11 l'attaque contre quatre postes de police, et le troisième événement
12 mentionné ici concerne la destruction de trois appartements à Babaloc.
13 Alors, ces trois événements, en ce qui concerne la publication du
14 communiqué, comment est-ce que votre mémoire vous rappelle quoi, de quelle
15 manière en ce qui concerne ces communiqués par rapport à ces événements ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Les communiqués paraissaient un jour ou
17 quelques jours après un événement, un incident. La publication du
18 communiqué avec Zeri i Kosoves, ça dépend - il y a un journal qui est
19 publié en Suisse, ceci dépendrait de sa publication périodique. L'attaque
20 était effectuée un jour particulier, puis il y avait le développement de
21 ces activités terroristes, l'UCK au bout d'un certain temps pouvait publier
22 immédiatement des communiqués après une action.
23 Mais parfois, les communiqués étaient publiés un jour ou deux après, et par
24 la suite étaient publiés dans Zeri i Kosoves.
25 Plus tard, ces communiqués étaient envoyés à tous les médias locaux et
26 aussi internationaux.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les communiqués suivaient toujours, vous
28 disiez, en un ou deux jours l'événement. Est-ce que cela pouvait être plus
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1 d'une semaine ou est-ce que ces communiqués étaient toujours publiés un ou
2 deux jours après l'événement ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis convaincu que trois à cinq jours était
4 le maximum, d'après les analyses qui étaient faites concernant l'événement
5 qui avait eu lieu jusqu'à la publication qui a eu lieu.
6 En ce qui concerne 1997, 1998 et 1999, la revendication de responsabilité
7 était faite attaque par attaque.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous pose la question pour la raison
9 suivante : c'est que dans votre déclaration 92 ter, au point (e), vous
10 faites référence à trois communiqués de l'UCK et vous dites que tous
11 étaient datés du 14 août. Je me demandais ce qui vous fait accepter que ces
12 événements qui sont décrits comme ayant eu lieu les 7 et 10 juillet,
13 l'attaque contre quatre postes de police datée du 2 août, et finalement
14 l'attaque contre les appartements situés à Babaloc, avait eu lieu au mois
15 d'août, le 8 août. Qu'est-ce qui vous fait penser que ces trois communiqués
16 sont tous les trois, datés du 14 août ? Alors j'étais en train de me poser
17 des questions.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Les communiqués concernant cet événement. Le
19 jour où ça été publié à Zeri i Kosoves, il y avait une présentation de
20 toutes les déclarations des numéros 21, 22 et 23 concernant les attaques
21 qui auraient été lancées dans ce secteur. Et toutes étaient datées du 14
22 août. Alors peut-être que j'ai fait une erreur là, peut-être que je me suis
23 trompé et peut-être que tout ceci a eu lieu le même jour.
24 Si nous avions ici le communiqué 21, lorsque Radovic a été tué
25 c'était un à cinq jours après la mort de Radovic.
26 Et le communiqué en espèce a, en ce concerne Zeri i Kosoves, a mis
27 ces trois communiqués et a décrit ceci comme ayant eu lieu cette fois-là.
28 Maître Emmerson.
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1 M. EMMERSON : [interprétation] Je regarde simplement à cet égard ce qui est
2 dit dans la traduction de l'annexe 10.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
4 M. EMMERSON : [interprétation] C'est effectivement la traduction de Zeri i
5 Kosoves, un article dans lequel les trois communiqués sont apportés.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 M. EMMERSON : [interprétation] Mais pas le 14 mais le 29 août.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non. Maître Emmerson, excusez-moi,
9 je pense que vous êtes en train de faire erreur. Cette publication est
10 datée du 29 août.
11 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais d'après ce que j'ai compris, il n'y
13 a pas de référence faite aux dates des communiqués --
14 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- les communiqués qui sont couverts par
16 cela.
17 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et le témoin, par conséquent, dit dans
19 sa déclaration - il donne la date du 14 août comme étant la date en
20 question et je me demande ce qui l'a amené --
21 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- à dire que tous étaient du 14 août.
23 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tandis que les autres communiqués
25 d'habitude sont tout à fait distincts, ils ont des dates tout à fait
26 distinctes.
27 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, en plus de cela, Monsieur Re, nous
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1 avons une question distincte, mais je pense qu'ensuite nous allons avoir
2 notre suspension de séance.
3 En ce qui concerne le paragraphe 20, alinéa (a), est-ce que nous
4 pourrions l'avoir à l'écran. Il s'agit de l'annexe 5, à savoir la pièce
5 P937.
6 Est-ce que nous pouvons la voir à l'écran, peut-être qu'elle est déjà à
7 l'écran, voilà.
8 Dans votre -- il faut qu'on vérifie ce point.
9 Monsieur le Témoin, dans votre déclaration 92 ter, on lit qu'en juin 1995,
10 le poste de police d'Irzniq a été attaqué. J'ai quelques difficultés à
11 trouver quelque chose qui étaye cela dans l'annexe 5, à savoir le document
12 P -- Est-ce que vous pourriez jeter un coup d'œil à cela ? Il s'agit de
13 P937.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Au deuxième alinéa, vous pouvez lire que le
15 commandement de --
16 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu les noms qui ont été attaqués.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez répéter. Les interprètes -
18 -
19 L'INTERPRÈTE : Les interprètes anglais disent que le témoin lisait en
20 albanais.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, lire ce
22 que vous avez dit concernant le paragraphe deux.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais pas dans le deuxième paragraphe. Ce que
24 je lis, c'est ce qui est annoncé comme étant le communiqué numéro 13. Au
25 deuxième alinéa, il est dit que le poste de police de la police serbe à
26 Irzniq a été attaqué, que cette attaque a été lancée --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand a-t-elle été lancée, cette attaque
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Le même jour que l'incident concernant
2 Milosevic a eu lieu. Cette attaque qui a été lancée à Irzniq contre les
3 communications radio, a certainement eu un manque d'attention de la part
4 des fonctionnaires de sécurité qui conduisaient ces personnes, et ceux qui
5 sont les auteurs de cet incident, dans ce véhicule.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mon problème est le suivant. Dans votre
7 déclaration, vous dites que ceci a eu lieu en juin 1995. Toutefois, dans ma
8 traduction du communiqué numéro 13, l'attaque lancée contre le poste de
9 police d'Irzniq, ceci semble être conforme à d'autres éléments de preuve
10 que nous avons entendus, a eu lieu en avril et non en juin, bien que le
11 communiqué soit daté du mois de juin. Je ne sais pas si vous voulez --
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est absolument certain que le poste de
13 police d'Irzniq était fréquemment exposé à des attaques. Il y a eu une
14 attaque au mois d'avril au village d'Irzniq, cela c'est exact. Ceci peut
15 être vérifié dans les documents de la sécurité publique du SUP de Decani.
16 Il est également exact que ce jour-là, lorsque Davidovic a été tué
17 dans le véhicule et où Lutovac et Milosevic ont été blessés, ce jour-là, à
18 ce moment-là, une attaque a été lancée contre le poste de police à Irzniq.
19 Ce qu'on a entendu du communiqué, c'était l'appel à l'aide par le poste de
20 police à Irzniq qui a conduit à un moment d'inattention pendant lequel la
21 personne a pu prendre l'arme d'un des policiers, a tué Davidovic, a blessé
22 les deux autres, et après cela, dans un échange de coups de feu mutuels, il
23 a également été tué.
24 Au moment où le poste de police d'Irzniq a été attaqué et quand
25 l'appel à l'aide a été lancé, ce qui fait que Uka a utilisé ce moment
26 d'inattention pour effectuer sa propre attaque, je ne suis pas allé
27 vérifier exactement combien il y a eu d'attaques à ce moment-là. C'est
28 quelque chose qui pourrait être vérifié. En fin de compte, la police a
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1 quitté ce poste de police sans y laisser de personnel.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous vous souvenez du moment
3 où ça s'est passé, de ce retrait, sans laisser aucun personnel sur place ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'était très peu de temps après les
5 événements du mois de mars 1998, après le conflit du 4 mars à Gllogjan,
6 autour duquel le policier Otovic -- c'est peu de temps après. La police
7 s'est retirée de Rznic. Comme je vous l'ai dit, ce poste de police était en
8 but à des attaques incessantes, des attentats à la bombe, des tirs des
9 tireurs embusqués, des tirs d'armes automatiques. A mon avis, une décision
10 erronée a été prise par l'administration de la police, qui a été d'extraire
11 les policiers et de les installer à Decan. Après quoi, il y a eu
12 augmentation du nombre de policiers, mais finalement, le bâtiment lui-même,
13 a été abandonné.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas tout à fait clair, car vous
15 venez de parler de quelque chose survenu en juin. Est-ce qu'en juin on a
16 attaqué le poste de commandement de police à Irzniq aussi ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela s'est passé en avril, cela s'est passé en
18 juin. Je peux vous dire en âme et conscience, que ces attaques étaient si
19 fréquentes qu'il serait peut-être important que vous ayez la liste
20 répertoriant les attaques et les effets qu'elles ont eus.
21 Le poste de police de Rznic était une cible constante, tout comme
22 c'était vrai à Cellopek et à Decane. Ces endroits étaient l'objet
23 d'attaques incessantes.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que j'étais un petit peu
25 confus par rapport à la dernière question, parce que tout ceci se passait
26 en 1995, et non pas en 1998. Merci de me l'avoir rappelé.
27 Fort bien, nous allons faire une pause. Nous reprendrons à 16 heures 30.
28 --- L'audience est suspendue à 16 heures 03.
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1 --- L'audience est reprise à 16 heures 33.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
3 M. RE : [interprétation]
4 Q. Avant la pause, Monsieur Stijovic, nous étions en train d'examiner
5 l'annexe 21.
6 M. RE : [interprétation] C'est la pièce 953 MFI. Je voulais avertir les
7 Juges qu'il en est fait mention dans l'annexe 5 de la déclaration 92 ter de
8 M. Jakup Krasniqi. Il s'agit de la pièce P328 et il y est référence à une
9 publication. Attendez que je la retrouve.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. RE : [interprétation]
12 Q. Monsieur Stijovic, au paragraphe 20(k), vous faites référence à la mort
13 d'Ali Qullapeku. Vous dites que dans les années 1940 et 1950, il avait été
14 un informateur de la DB. L'UCK a dit l'avoir tué dans son communiqué 35, 19
15 octobre 1997. Ceci se trouve à l'annexe 16, P948. Pourriez-vous vous
16 expliquer auprès de la Chambre lorsque vous avez dit qu'il était
17 informateur dans les années 1940 et dans les années 1950 ? Qu'est-ce que
18 vous vouliez dire ?
19 R. C'était un collaborateur actif des services de la Sûreté de l'Etat.
20 Q. A votre connaissance, les habitants du village où il habitait, le
21 village de Tertenik, près de Glogovac, ils le savaient ?
22 R. Le village s'appelle Trstenik. Il y a une petite erreur au compte rendu
23 d'audience dans la traduction. C'est n'est pas Tertenik, mais Trstenik.
24 Dans les années 1980, dans les années 1990, les troubles politiques ont
25 commencé au Kosovo-Metohija. Au début, il y a des gens qui ont répondu à
26 l'appel de l'Alliance démocratique du Kosovo pour quitter leurs postes.
27 Après cet appel, les gens quittaient leurs emplois aussi dans les services
28 de l'Etat.
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1 Dès le début des années 1990, on savait dans la région qu'il avait
2 travaillé auparavant pour la DB.
3 Q. Vous avez maintenant à l'écran le communiqué 35. Il s'agit de la pièce
4 MFI P948. Il dit ceci, je lis : "Auparavant, une unité de guérillas s'est
5 occupée de l'assassinat d'Ali Qullapeku de Trstenik, et de Ramiz Luku de
6 Bajiqa [phon] de Gllogovcu [phon] étaient motivés par leurs activités
7 antinationalistes."
8 On parle de leurs activités antinationalistes, qu'est-ce qu'ils ont
9 fait exactement ?
10 R. Qullopeku avait un âge où il ne pouvait plus rien faire. C'était un
11 monsieur âgé sans vraiment beaucoup de statut.
12 Q. Je vous demande, ce qu'ils lui ont fait.
13 R. Ali Qellopeku a été tué dans le village où il habitait. Il a été tué
14 par des membres de l'UCK.
15 Q. On fait aussi référence à ceci dans l'annexe 2 de la déclaration 92 ter
16 de Jakub Krasniqi. La pièce P328.
17 Prenons le 21e paragraphe de votre déclaration. La Chambre de
18 première instance a décidé de ne pas verser au dossier la déclaration sous
19 cette forme. Vous faites référence à l'utilisation du terme "groupe de
20 sabotage et de terrorisme." Qu'est-ce qu'on voulait dire par là ? Est-ce
21 que vous pourriez étoffer votre propos ? Dans quel contexte était-il
22 utilisé ? Qui l'utilisait ?
23 R. Au début du développement des activités terroristes de l'UCK, quelqu'un
24 qui était l'auteur de tels actes était présenté comme étant quelqu'un qui
25 faisait partie d'un groupe de sabotage et de terrorisme, ou un groupe
26 terrorisme. Ceci faisait tout d'abord référence au fait qu'il y avait un
27 certain carriérisme dans la hiérarchie et qu'on voulait être direct,
28 appeler un chat un chat.
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1 Auparavant, quand le terme était utilisé dans les transmissions et
2 dans les renseignements de la DB, dès ce moment-là, c'était très clairement
3 compris comme étant une organisation terroriste bien organisée. Ce fût une
4 période de terrorisme. Après cela, l'escalade des activités terroristes a
5 débouché sur un soulèvement qui s'est produit en 1998. Je pense que les
6 dirigeants politiques et les dirigeants de la police, et je vous
7 expliquerai ceci dans un instant, ont minimisé le niveau de danger que
8 représentait l'UCK pour la Yougoslavie. Ceci a contribué à ce que des
9 décisions ont été mal prises et trop tard par les dirigeants, en vue de
10 combattre ces activités.
11 Q. Restons à ces termes. Ce libellé, "groupe terroriste et de sabotage,"
12 donnez-nous les noms, les termes en serbe, s'il vous plaît.
13 R. "Diverzantsko-terroristicka grupa".
14 Q. Le sigle était DTG ?
15 R. Oui.
16 Q. Quand on trouve référence à ce libellé DTG dans votre texte et qu'on
17 retrouve dans d'autres archives officielles de Serbie de cette période,
18 est-ce qu'on veut parler, en utilisant ce sigle, de l'UCK ou pas ?
19 R. L'UCK et le terme DTG sont mal utilisés. Lorsque nous faisions des
20 analyses, nous n'utilisions pas ces termes pour ce qui est des
21 renseignements recueillis sur le terrain, on les corrigeait et on utilisait
22 plutôt le terme ou la phraséologie de "la soi-disant armée de libération du
23 Kosovo, en français le terme "UCK."
24 Q. Prenons si vous voulez bien l'annexe 23. Il s'agit de la pièce P955
25 MFI. Il s'agit d'information venant du ministère des Affaires étrangères et
26 qui porte sur la bonne appellation à donner aux activités du ministère de
27 l'Intérieur au Kosovo-Metohija. Il s'agit de la date du 16 mars 1998.
28 "Nous pensons," est-il écrit "que des opérations menées par des
Page 8998
1 organes du MUP ne seraient être qualifiées de conflits internes au sens de
2 l'article 83 des conventions de Genève. Il s'agit d'actes de terrorisme, de
3 crimes politiques. C'est une distinction importante qu'il faut faire. Si on
4 disait que ces affrontements susmentionnés sont un conflit armé interne, on
5 pourrait interpréter cela comme étant une reconnaissance implicite de la
6 soi-disant UCK en tant que partie belligérante, ce qui peut avoir aussi des
7 retombées en droit international et pour le TPY qui a seulement
8 responsabilité ou compétence pour des conflits internes ou génocide."
9 Puis on dit qu'on n'utilise pas ce terme "conflit armé" pour décrire
10 ces affrontements. Là, j'en ai simplement paraphrasé le sens.
11 Revenons à ce document. Etait-il largement distribué ? En avez-vous eu
12 connaissance ? Comment l'a-t-on perçu ?
13 R. J'ai bien vu que ce document, mais il n'a pas fait l'objet d'une
14 diffusion très répandue. Il a été envoyé aux dirigeants de l'Etat dans les
15 services du sécurité publique qui, à leur tour, ont envoyé les informations
16 aux unités subalternes quant à l'utilisation des termes permettant de
17 qualifier les actions qu'ils fallaient mener.
18 En fait, c'était davantage une question de formelle, une façon de
19 minimiser toutes les choses qui se passaient. Au fond, ceci était la raison
20 pour laquelle tout cela s'est passé.
21 Q. Vous avez dit que quelque fois on utilisait "DTG" au lieu de "UCK." Ce
22 document diffusé par le ministère des Affaires étrangères, comment
23 s'intègre-t-il dans cette confusion quand on dit DTG pour UCK ou pas ?
24 R. Cela s'intègre de cette façon-ci. Ce document, si j'ai bien compris, il
25 date de mars 1998. En mars 1998, il est question d'actes de terrorisme.
26 En mars 1998 au Kosovo-Metohija, ce qui se passait, en fait, c'était
27 le début d'un soulèvement armé. Donc, là de nouveau, on a essayé de
28 minimiser la situation réelle qui se présentait sur le terrain en raison
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1 d'autres intérêts. Vous avez vous-même lu les motifs d'une telle attitude.
2 Q. Sur quoi vous basez-vous pour dire ce que vous venez de dire à savoir
3 qu'au début du mois de mars 1998, ce fut le début d'un soulèvement armé ?
4 R. Je le dis parce qu'à partir du mois de mars, il y a eu une escalade des
5 activités, de leurs activités. Les activités politiques des partis
6 politiques albanais étaient là pour le LPK. Sur le terrain ça voulait dire
7 concrètement qu'étaient fusionnés les partis politiques albanais à la Ligue
8 démocratique et tous les autres au sein de la structure de l'UCK pour
9 prendre le contrôle de grandes portions du territoire au Kosovo.
10 Ceci a été suivi de l'interruption de communication régulière par
11 l'utilisation des routes et des artères au Kosovo-Metohija. On peut dire
12 qu'il y a un axe stratégique important pour la Serbie, c'est la route de
13 Pec à Pristina, et là c'était devenu tout à fait précaire et dangereux,
14 sans aucune sécurité pour les civils comme pour les militaires.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith.
16 M. GUY-SMITH : [interprétation] Dans la mesure où le témoin -ici il donne
17 son avis sur la question du soulèvement armé. Je fais objection parce qu'on
18 ne le présente pas expert.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit ce qu'on lui
20 a demandé. On lui a demandé sur quoi il s'appuyait pour donner cet avis, et
21 je pense que M. Re essayait d'obtenir du témoin des faits, un base
22 factuelle, c'est clair. Ici je pense qu'il y a une certaine confusion.
23 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Dans la mesure où on s'appuie sur un
24 avis du témoin, je fais objection.
25 M. RE : [interprétation]
26 Q. Ne vous en faites pas. Je ne vous demande pas un avis d'expert
27 juridique sur quoi que ce soit. Je reviens à ce que vous venez de dire.
28 Vous avez parlé de la fusion des partis albanais qui se sont insérés dans
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1 la structure de l'UCK pour prendre le contrôle d'une grande portion du
2 territoire au Kosovo. Quelle est la signification de tout cela à ce moment-
3 là, à savoir en mars 1998 ? C'est ça que je vous demande.
4 R. Ça été d'une importance décisive pour ce qui allait se passer au
5 Kosovo-Metohija. Parce qu'à Tirana le 21 mars 1998, en Albanie, se tient
6 une conférence de presse organisée par la NPK, elle est présidée par
7 Dzemailji. Il y a aussi le président de NPK, Rexha Iberdemaj, et une autre
8 personne dont le nom m'échappe pour le moment.
9 Le message, c'est qu'il n'y a plus de place pour la politique, le
10 moment est venu pour l'UCK. L'idée c'est qu'il n'y aura plus de discussion,
11 que tout le monde doit désormais participer à la rébellion au soulèvement
12 armé.
13 Et que donc Emrush Dzemailji est venu illégalement de Tirana au
14 Kosovo et après est resté au QG de Ramush Haradinaj à Glodjane en se
15 servant d'un pseudonyme pour assurer sa sécurité.
16 Q. Au compte rendu d'audience vous avez dit "NPK." Est-ce que c'est NPK ou
17 LPK ? Est-ce que c'est la même chose, parce que je vous ai entendu dire
18 autre chose de ce qui se retrouve sur le compte rendu d'audience ?
19 R. Non, non, c'est exact comme ça. C'est NPK. En tout cas c'est comme ça
20 en albanais. Mais c'est la même chose.
21 Q. Paragraphe 23 de votre déclaration. Il est fait référence en la
22 présence en 1996, je lis : "En 1996, l'UCK avait une présence visible dans
23 le village Jablanica sous forme de garde de postes de contrôle et
24 l'imposition d'un couvre-feu."
25 La Chambre a demandé à obtenir d'autres éléments de fait pour établir ce
26 que vous écrivez ici. Je ne veux pas consacrer trop de temps à cette
27 question, mais je vous demande comment vous êtes parvenu à cet avis que
28 vous exprimez dans ce paragraphe ?
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1 R. Selon ces informations, c'étaient les rapports de la RDB. Chaque fois
2 qu'il y avait des réunions avec la RDB, il était dit que leurs forces,
3 leurs patrouilles ne voulaient aller dans le secteur de Jablanica, car il
4 risquait d'y avoir des affrontements dans ce secteur. C'était manifeste à
5 ce moment-là qu'il y avait des activités terroristes, qu'il y avait des
6 mouvements nocturnes dans le village de Jablanica, ce qui rendait la zone
7 dangereuse parce que c'était contrôlé par eux, et que toute présence de la
8 police risquait de provoquer un conflit qui risquait s'élargir. Voilà au
9 fond les informations communiquées.
10 Et nous avons réussi à confirmer tout ceci par les activités de la
11 RDB. Nous avons informé le secteur de la sécurité publique de ce qui se
12 passait dans cette partie-là du pays.
13 Q. A la fin du paragraphe, vous dites ceci : "L'UCK restait une
14 organisation clandestine à Glodjane en 1996, elle n'avait pas encore
15 infirmé sa présence aussi visiblement qu'à Jablanica."
16 Dites aux Juges quelles sont vos sources pour dire ce que vous écrivez ici
17 dans cette déclaration.
18 R. Excusez-moi. Voulez-vous répéter la question.
19 Q. Je pense que c'est l'avant-dernière phrase de ce paragraphe où vous
20 dites que : "L'UCK était toujours une organisation clandestine à Glodjane."
21 Je voudrais que vous disiez aux Juges quelles sont les sources
22 d'information qui vous permettent de dire ceci, ce qu'on retrouve dans
23 votre déclaration préalable. Bien entendu, pas seulement la source, mais la
24 qualité des renseignements obtenus ?
25 R. Les sources c'étaient de nombreux rapports venant du terrain. C'était
26 aussi les connaissances que nous avions acquises grâce à des moyens
27 technologiques, comme le fait de placer sous écoute des membres de la
28 famille Lahi Brahimaj; c'est aussi par une surveillance de Lahi Brahimaj au
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1 cours de ses fréquentes visites à Pec et aussi grâce à ces contacts au
2 réseau qu'il avait établi.
3 En analysant tout cela, nous avons réussi à définir clairement les rapports
4 qu'il y avait au sein de cette structure. A ce moment-là, l'organisation
5 qui fonctionnait dans le secteur de Jablanica était bien plus importante
6 que ce qu'il y avait à Glodjane et Lahi Brahimaj était très important dans
7 ce cadre, il était en fait d'une importance capitale.
8 Q. Qu'est-ce qui vous permet de le dire ?
9 R. Je vous l'ai déjà dit. Lahi Brahimaj a été surveillé par la RDB, il
10 était placé sous surveillance. Nous avons mis en place des mesures de
11 surveillance, de mise sous écoute, des conversations téléphoniques et dans
12 son proche entourage nous avions beaucoup de sources, de personnes qui
13 surveillaient ses activités au nom de la RDB.
14 Q. Annexe 29, il s'agit du numéro -- de l'annexe 24, MFI P956. Il y a deux
15 passages en particulier qui m'intéressent.
16 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
17 M. RE : [interprétation]
18 Q. Nous trouvons là un paragraphe qui fait référence au fait que des
19 patrouilles de reconnaissance ont été constituées et déployées sur les
20 hauteurs de Crmljanska Suka et Grgocko Brdo.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, si vous nous référez à
22 l'annexe 24, je constate qu'il y a eu des expurgations dans ce document.
23 Est-ce que vous pourriez nous en dire davantage au sujet de ces
24 expurgations et qu'est-ce qui a été supprimé.
25 M. RE : [interprétation]
26 Q. Monsieur Stijovic, vous constaterez qu'il y a eu des expurgations. Tout
27 d'abord, en haut de la première page, à gauche, là où il est question du 3
28 avril 1998. Qu'est-ce qui a été supprimé à cet endroit ?
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1 R. On voit ici : "Lahi Brahimaj." Oui, là-haut. Très bien. En haut à
2 droite, nous voyons les initiales de la sténotypiste qui a dactylographié
3 le document. Juste en dessous de la date, nous voyons ici les initiales, le
4 paraphe de l'un des employés des services techniques qui a dactylographié
5 le document.
6 Q. Il y a un autre passage expurgé un peu plus bas dans cette page, après
7 le nom de Lahi Brahimaj. Il y a une mention qui a été caviardée. De quoi
8 s'agit-il ?
9 R. Ce qui a été caviardé, c'est une mesure utilisée pour surveiller Lahi
10 Brahimaj. Comme je l'ai expliqué le premier jour de ma déposition, on a
11 pris ce que l'on appelle des mesures initiales. Des mesures ont été prises
12 par le service à son encontre à l'époque, donc on a pris une mesure
13 initiale appelée PO dans le document.
14 Si vous le souhaitez, je peux vous apporter quelques explications. Il
15 y a eu un dossier ouvert le concernant, où on mentionnait le nom des
16 contacts, les mesures techniques utilisées.
17 Nous le surveillions en permanence. Nous avons réussi à découvrir quelles
18 étaient ses activités à Jablanica et dans la région.
19 Q. En rapport avec les parties caviardées du document, vous dites que des
20 mesures initiales ont été prises. A quoi servaient-elles ?
21 R. Je suppose - même si je ne saurais l'affirmer avec certitude - qu'il
22 s'agit de mesures initiales "predhodna obrada, mesures initiales "PO". On
23 doit trouver le numéro du dossier avec le centre du RDB à Prizren et
24 Djakovica qui devait être mentionné. Ce sont eux qui étaient chargés de
25 traiter son dossier.
26 Q. Pourquoi est-ce que ces informations ont-elles été supprimées du
27 document ?
28 R. J'ai été assez surpris de constater cela, je ne vois pas pourquoi on a
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1 caviardé ces passages. En fait, j'aurais voulu que l'on montre ici son
2 dossier afin de voir de qui il s'agit.
3 Q. Passons maintenant à la dernière page du document en serbe, document
4 P956 MFI. Ce document porte la date du 3 avril 1998. On dit que des
5 patrouilles de reconnaissance ont été constituées et stationnées sur les
6 hauteurs mentionnées. Est-ce qu'il s'agit du MUP, de l'armée ou de l'UCK ?
7 Ces patrouilles de reconnaissance, à quelle organisation appartenaient-
8 elles ?
9 R. Ici, il est fait référence à des patrouilles de l'UCK.
10 Q. Deux paragraphes plus loin -- ou plutôt, paragraphe suivant, il est dit
11 : "Pendant plus de cinq ans, les employés du MUP ne sont pas entrés dans le
12 village de Jablanica ni les employés d'autres organes et institutions de
13 l'Etat."
14 Est-ce exact, compte tenu des renseignements que vous aviez à l'époque, et
15 dans l'affirmative, pourriez-vous nous dire d'où vous tenez ces
16 renseignements ?
17 R. C'est tout à fait exact. Notre antenne de Djakovica a réussi à obtenir
18 ces renseignements dans le cadre de ses activités, notamment en surveillant
19 les activités du groupe à Jablanica.
20 Q. Et un peu plus loin, on peut lire "qu'il y a une tendance visant à
21 élargir ce secteur et à créer un corridor en direction de Klina et de
22 Drenica, c'est-à-dire vers Glodjane, et plus loin jusqu'à la République
23 d'Albanie, et ce, afin de préparer de façon organisée une 'guerre de
24 guérilla,' c'est-à-dire afin d'étendre le conflit armé au Kosovo-Metohija."
25 Est-ce exact ? Et dans l'affirmative, d'où tenez-vous ces
26 informations ?
27 R. Oui, c'est exact. Les connaissances qu'avait la RDB pour ce qui
28 est de la situation au Kosovo-Metohija mais également à Jablanica - mais il
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1 y a des questions de l'antenne de Djakovica - tout cela, tous les
2 renseignements obtenus permettaient de conclure que l'UCK souhaitait
3 établir un corridor entre Glodjane et Jablanica et l'Albanie afin de faire
4 venir des armes et du matériel pour les terroristes déployés dans le pays.
5 Donc ainsi, on pouvait s'assurer de l'approvisionnement en matériel.
6 Il y a eu des opérations le long de cet axe, des Serbes qui vivaient
7 le long de cet axe, ont été attaqués. On a cherché à semer la terreur afin
8 que les Serbes s'en aillent. A un moment, ce corridor a été
9 particulièrement utilisé à l'époque où on ne pouvait plus circuler sur la
10 route entre Pec et Pristina. Puis, en 1998, en provenance d'Albanie, en
11 passant par Jablanica et Glodjane, des quantités très importantes d'armes,
12 d'équipements, de volontaires et de terroristes de l'UCK sont arrivés dans
13 le secteur de Drenica pour ensuite se déployer sur l'ensemble du territoire
14 du Kosovo-Metohija.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant. On a parlé des membres du
16 MUP qui n'étaient pas entrés dans le village de Jablanica depuis cinq ans.
17 Vous dites que "c'est exact," et que vous savez cela "sur la base des
18 renseignements obtenus par l'antenne de Djakovica dans le cadre de ses
19 activités, notamment dans le cadre de la surveillance des activités à
20 Jablanica."
21 Donc qui surveillait quoi à Jablanica ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit au début, le village de
23 Jablanica était surveillé par la RDB du Kosovo-Metohija, qui était organisé
24 au plan territorial. Le village de Jablanica dépendait du centre régional
25 de Prizren.
26 Djakovica était une antenne du RDB, qui avait pour tâche de
27 surveiller la situation à Jablanica. Quant à l'antenne de Pec, elle était
28 chargée de surveiller les activités dans le village de Glodjane.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais savoir si on surveillait
2 physiquement ce qui se passait à Jablanica ou si la surveillance
3 s'effectuait par le truchement d'informateurs, de collaborateurs ou
4 d'autres. Est-ce qu'ils avaient des employés du RDB là-bas ou est-ce qu'ils
5 se contentaient de recevoir des renseignements provenant d'autres personnes
6 ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Mais vous avez raison, Monsieur le
8 Président, lorsque vous dites que le RDB exerçait un certain contrôle au
9 plan opérationnel sur les activités à Jablanica. Nous savions qu'il y avait
10 un groupe dirigé par Lahi Brahimaj dans ce secteur et que le secteur
11 n'était pas sûr. Nous avons obtenu ces renseignements par le biais de nos
12 agents.
13 En surveillant les activités de Lahi Brahimaj, nous avons transmis
14 des mises en garde en temps voulu au secteur de la Sûreté de l'Etat afin
15 qu'ils réagissent et mette un terme aux activités de ce groupe composé à
16 l'époque seulement de 40 ou 50 personnes armées. La police a mal apprécié
17 la situation et elle ne s'est pas rendue dans ce secteur.
18 Elle n'a pas assuré le contrôle physique du secteur en question.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les employés du RDB suivaient
20 M. Brahimaj ? Vous parlez de surveillance de ses activités, cela peut
21 englober beaucoup de choses. Est-ce qu'on le suivait dans ses déplacements
22 ? Est-ce que les employés du RDB se rendaient à Jablanica ou restaient en-
23 dehors du village ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Les employés du RDB n'allaient pas à
25 Jablanica. Cependant, si Lahi Brahimaj quittait Jablanica, on le suivait
26 dans ses déplacements sur les territoires du Kosovo. On prenait des
27 photographies, on notait ce qui se passait lors de ses déplacements, les
28 contacts qu'il avait, et cetera. Ensuite, lorsqu'il entrait à Jablanica, on
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1 arrêtait de le suivre à l'entrée de Jablanica. Nous savions quels étaient
2 ses déplacements, nous savions avec qui Lahi Brahimaj était en contact.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on a donné pour instructions
4 aux employés du RDB de ne pas entrer à Jablanica ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Les effectifs du RDB étaient peu
6 importants, on aurait remarqué ces gens. Dans le secteur de Jablanica, il y
7 avait une trentaine d'agents. Tout le monde les connaissait. La police en
8 uniforme n'aurait pas pu se rendre sur place en grand nombre. Il fallait
9 être réaliste, il nous était impossible d'envoyer sur place un agent bien
10 connu à bord d'un véhicule. Nous avons eu recours à des sources indirectes,
11 à des agents opérationnels, à des collaborateurs afin d'obtenir nos
12 informations. Pour répondre à votre question le RDB ne s'est pas rendu
13 physiquement sur place.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question portait sur le fait de
15 savoir si vos employés avaient reçu pour instructions de ne pas entrer dans
16 le village ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela n'a pas fait l'objet d'une directive
18 officielle mais c'était bien connu. On nous a recommandé de ne pas envoyer
19 d'employés sur place. Aucun de nos employés n'y est allé.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans votre déclaration, vous dites que
21 le MUP n'est pas entré dans Jablanica. Nous parlons maintenant du RDB qui
22 n'est pas entré à Jablanica. S'agit-il là de votre expérience personnelle ?
23 Est-ce que vous savez personnellement que les employés du RDB ne sont
24 jamais entrés dans le village de Jablanica ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait. Ils ne sont pas entrés à
26 Jablanica et il en va de même pour Prekaze, où se trouvait le groupe d'Adem
27 Jashari ainsi que pour une partie de Podujevo. Il y a des secteurs où les
28 employés du RDB, compte tenu du risque en matière de sécurité, ne sont pas
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1 allés. C'est la raison pour laquelle, Monsieur le Président, que nous avons
2 demandé au service de la sécurité publique, c'est-à-dire la police,
3 d'assurer l'ordre public dans ces secteurs, afin de nous permettre
4 d'envoyer nos agents. Ils avaient la police en uniforme, les véhicules,
5 l'équipement nécessaire pour assurer le maintien de l'ordre public.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez vous-même demandé
7 aux policiers en uniforme d'assurer le maintien de l'ordre public ? Est-ce
8 vous personnellement qui leur avez demandé d'assurer le maintien de l'ordre
9 public ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas moi, personnellement. Je n'ai pas
11 assisté aux réunions où il en a été question. Je n'ai pas transmis
12 directement ces instructions au service de la sécurité publique.
13 Le département chargé de l'analyse, nous a mis en garde contre les
14 risques et nous avons toujours insisté sur le fait qu'il n'y avait pas de
15 présence de la police en ces lieux et que, par conséquent, les
16 organisations illégales ont pu augmenter en nombre.
17 Pour répondre à votre question, nous avons agi conformément à nos
18 attributions et à nos prérogatives. Nous avons transmis à qui de droit
19 notre analyse de la situation. Nous avons dit que l'ordre public devrait
20 être maintenu dans ces secteurs. Mais, cela ne dépendait pas de nous.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, le fait que le MUP
22 n'était pas présent à Jablanica, a eu des répercussions sur le
23 fonctionnement de votre service ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
25 M. RE : [interprétation]
26 Q. Pourriez-vous passer au paragraphe suivant de votre déclaration,
27 Monsieur Stijovic. Il s'agit du paragraphe 24. La Chambre souhaiterait
28 recevoir des informations complémentaires concernant ce paragraphe.
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1 Vous y déclarez que : "En mars 1997, des quantités importantes d'armes et
2 de matériels ont été pillés dans des casernes de l'armée située en Albanie
3 et que l'UCK s'en est servie pour entreposer un nombre de ces armes, nombre
4 de matériels."
5 D'où tenez-vous ces informations ? Quelle en est leur qualité ?
6 R. Je pense qu'il s'agit d'informations tout à fait fiables provenant de
7 diverses sources.
8 Il était de notoriété publique à l'époque, qu'entre janvier et mars
9 1997, le régime albanais s'est effondré et on a pu se saisir d'armes
10 auparavant entreposées dans des armureries de l'armée, qui n'étaient pas
11 surveillées.
12 En Albanie, on en a beaucoup parlé à la télévision, pas seulement en
13 Albanie mais également à l'étranger. Nous avions des informations très
14 précises à ce sujet. Il y avait un risque de déstabilisation au Kosovo,
15 comme il a été indiqué dans un rapport rédigé par une commission des
16 Nations Unies, en collaboration avec les autorités albanaises. Il ressort
17 de ce rapport officiel des Nations Unies qu'à partir de l'été 1997, plus de
18 650 000 armes ont disparu des armureries officielles albanaises. Il était
19 estimé que 30 à 40 % de ces armes n'étaient pas contrôlées par les
20 autorités. La grande majorité de ces armes, 30 à 40 % de ces 650 000 armes,
21 se sont retrouvées entre les mains de l'UCK.
22 L'UCK a tiré profit de la situation et dès le début, elle s'en ait
23 servi. Ces armes ont commencé à arriver en grande quantité au Kosovo-
24 Metohija à partir du printemps. Il y avait des armes automatiques, semi-
25 automatiques, des bombes. Les informations concernant ces armes sont
26 détaillées dans le rapport de la commission des Nations Unies qui a enquêté
27 sur la question.
28 Q. Revenons quelques instants au paragraphe précédent. J'ai omis de vous
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1 poser une question à ce sujet. Vous avez dit qu'il y avait une tendance
2 visant à élargir le secteur et à créer un corridor en direction de Klina et
3 de Drenica. Vous dites que l'objectif était d'établir un corridor entre
4 Glogjane, Jablanica et l'Albanie afin de faire venir des armes des
5 terroristes et de l'équipement dans le pays.
6 De quelle période parlez-vous ?
7 R. L'équipement et les armes arrivaient sans cesse au Kosovo-Metohija. Les
8 quantités ont été peut-être moins importantes en été, car en été il faut
9 savoir que la région est assez inaccessible. La frontière séparant la
10 Serbie de l'Albanie est difficile d'accès. Il s'agit d'une région
11 montagneuse. Les montagnes ont une hauteur de plus de 2 000 mètres. Seul
12 des petits groupes peuvent passer.
13 A la fin du mois de mars et au début du mois d'avril, il y a eu la
14 trêve du printemps. Ou en fait, la neige a commencé à fondre et on a pu se
15 servir de ces axes pour la contrebande d'armes. C'est là que les armes ont
16 commencé à arriver en grand nombre, les armes et le matériel.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stijovic, on vous a posé une
18 question au sujet de l'élargissement du corridor.
19 Mais maintenant, les choses sont claires. Merci.
20 M. RE : [interprétation]
21 Q. Ce qui m'intéressait dans l'annexe 24, pièce P956, enregistré aux fins
22 d'identification, c'est la dernière page, ou le dernier paragraphe. Il est
23 dit que pendant plus de cinq ans, les employés du MUP ne sont pas entrés à
24 Jablanica et qu'il y avait une tendance cherchant à l'élargir la région et
25 à créer un corridor.
26 De quelle période voulez-vous parler ?
27 R. Tout cela a commencé en 1997. Entre 1997 et 1998, le corridor
28 fonctionnait plutôt bien. Cela dépendait des activités de la police qui a
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1 cherché à mettre un terme à ces activités.
2 Q. M. le Président Orie vous a posé, il y a quelques instants, une
3 question au sujet des activités de surveillance menées par la DB à
4 Jablanica. Est-ce que vous-même, vous vous êtes rendu près de Jablanica en
5 1997 ou en 1998 ?
6 R. Je n'ai pas entendu cette question. Nous avons parlé de groupes de
7 reconnaissance de l'UCK. Non, non.
8 Q. Pourquoi pas ?
9 R. Parce que je dirigeais le service d'analyse et d'opération. Je ne
10 m'occupais pas des activités sur le terrain. Je me trouvais à Pristina à
11 l'époque. Il y avait un service au sein de la DB qui s'occupait de ces
12 activités.
13 Q. Il y a un autre paragraphe dans votre déclaration, au sujet duquel les
14 Juges de Chambre souhaiteraient avoir des renseignements complémentaires.
15 Il s'agit du paragraphe 25. Je vous invite à en prendre connaissance.
16 Inutile de le lire à voix haute. Je répète, il s'agit du paragraphe 25 de
17 votre déclaration.
18 R. C'est bon. Allez-y.
19 Q. D'où teniez-vous les renseignements concernant le contrôle exercé par
20 les familles Brahimaj et Haradinaj sur Jablanica et Glodjane ? Comment
21 savez-vous qu'il y a eu création de base logistique de l'UCK à ces endroits
22 ?
23 R. Par des agents à nous ou des personnes qui ont été arrêtées par l'armée
24 ou la police en traversant la frontière. Dans le cadre des interrogatoires,
25 nous avons obtenu les renseignements que j'ai mentionnés.
26 Pour ce qui est de la famille Haradinaj, comme je l'ai dit dans ma
27 déclaration, elle a joué un rôle important dans l'UCK par la suite.
28 L'importance de Glodjane et l'importance du clan Haradinaj ont eu une
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1 incidence importante.
2 Ce que je dis plus tard dans ma déclaration, c'est que ce sont eux
3 qui ont décidé qui pouvait se déplacer dans ce secteur. Tout ceci confirme
4 le moment où Ramush Haradinaj est devenu le maître de la région.
5 Q. Parlons des personnes qui ont été arrêtées par l'armée ou la police.
6 Est-ce que vous pourriez donner aux Juges de la Chambre des exemples de
7 sources, des exemples d'information communiqués à l'armée et au MUP ?
8 R. Vous voulez des noms ? Ou est-ce que vous voulez que je réponde en
9 termes généraux ?
10 Q. Répondez de façon générale, si vos réponses ne risquent pas de mettre
11 en danger qui que ce soit, vous pourrez nous fournir quelques détails.
12 R. A chaque fois que la Sûreté de l'Etat pouvait entrer en contact,
13 s'entretenir avec une personne de la région, elle le faisait. Il s'agissait
14 de renseignements obtenus auprès des habitants de la région. Puis, il y
15 avait des gens qui venaient de Pec, Djakovica, Decani. La police menait à
16 bien quotidiennement des activités à ces endroits et était en contact avec
17 des personnes. Les gens avaient des choses à faire dans les bureaux du SUP.
18 Parfois, ils venaient y chercher des papiers d'identité, d'autres
19 documents.
20 Excusez-moi, je parle un peu trop vite.
21 Puis de nombreuses informations ont été obtenues dans le cadre
22 d'entretiens avec des personnes qui avaient été arrêtées ou détenues alors
23 qu'elles s'efforçaient de franchir illégalement la frontière. Nous avons
24 obtenu des renseignements et nous sommes parvenus à certaines conclusions
25 après nous être entretenus avec nos collaborateurs. C'était là la source la
26 plus importante de nos informations. Ce sont eux surtout, qui nous
27 permettaient d'obtenir des renseignements et de tirer des conclusions.
28 Q. Revenons-en aux neuf premières lignes du paragraphe en question. Après
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1 ce passage, on peut voir, par exemple, "l'annexe 25, qui est un rapport de
2 la DB de Pec en date du 24 mars 1998."
3 Quel est le lien entre les renseignements mentionnés dans la première
4 partie du paragraphe et ce rapport ?
5 R. Il y a un lien direct entre les deux. Dans la première partie, j'évoque
6 l'importance de Glodjane et de Jablanica. Je fonde ces informations sur un
7 rapport de la DB de Pec, en date du 24 mars 1998, qui évoque plus en détail
8 l'importance du groupe de Jablanica dirigé par Brahimaj et la participation
9 de ce groupe aux activités de contrebande d'armes, de munitions, d'engins
10 explosifs et autres en provenance d'Albanie.
11 Cela permet de conclure à juste titre que le village de Jablanica
12 constituait une base pour les activités des rebelles et des terroristes
13 dans le secteur de Glodjane. Cela confirme l'importance de Jablanica en
14 matière de contrebande d'armes en provenance d'Albanie et pour ce qui est
15 de leur distribution sur le territoire du Kosovo, dans la région de Drenica
16 et plus loin sur le territoire.
17 Q. Un instant, s'il vous plaît. Le document que vous avez mentionné, je le
18 signale, porte la cote P957 MFI, annexe 25.
19 Est-ce que vous aviez terminé votre réponse, Monsieur le Témoin ?
20 R. Oui.
21 Q. La partie suivante de votre déclaration sur laquelle j'appelle votre
22 attention est le paragraphe 27, sur lequel les membres de la Chambre de
23 première instance souhaitent en entendre davantage de votre part.
24 Vous dites que "le 26 novembre 1997, un affrontement armé grave a eu
25 lieu dans le village de Lausca, lorsque l'UCK a attaqué un convoi de police
26 motorisé dans une embuscade. Pendant le retrait, un albanais du nom de
27 Halit Geci a été tué dans les échanges de feu par une balle perdue et
28 Shaban Rrecaj a été blessé."
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1 Alors quelle est la source de vos renseignements pour cela, la
2 qualité de la source et l'importance ? Trois éléments.
3 R. Il y a plusieurs sources pour cette information. La première est un
4 rapport officiel du MUP. Il y a les unités de police qui remplissaient
5 leurs fonctions et le convoi mécanisé sur la route qui est mentionné a été
6 pris dans une embuscade. Puis, il y a eu un affrontement très grave dans
7 lequel des lance-grenades ont été utilisés.
8 La deuxième source, c'était les médias de langue albanaise qui se
9 félicitaient de ceci comme étant la première bataille de l'UCK où la police
10 aurait été battue. Ce matériel de propagande donnait même des
11 renseignements sur le fait que certains véhicules de combat de la police
12 avaient été saisis lors des combats. Des renseignements concernant la mort
13 de Halit Geci, qui était un professeur de ce village. Il avait été blessé
14 et était décédé par la suite. Cette autre personne Rrecaj, avait été
15 blessée. C'est également des renseignements qui étaient très connus. C'est
16 quelque chose qui a été rapporté de façon très développée par la télévision
17 de Tirana dans leur journal du soir, ainsi que le lendemain, en langue
18 albanaise, par les médias à Pristina qui publiaient des rapports très
19 détaillés concernant cet incident.
20 Q. Quelle était l'importance de cet incident-là -- excusez-moi, de
21 l'incident qui avait eu lieu à cette époque ?
22 R. L'importance consistait dans le fait que c'était une unité de police
23 mécanisée où il y avait un grand nombre de policiers qui utilisaient des
24 véhicules blindés. C'était une unité de police très respectée qui s'est
25 trouvée prise dans une embuscade. Ensuite, il y a eu un affrontement qui a
26 duré un certain temps. La situation était qu'une force de police si
27 respectée, si forte, avec des armes très importantes, avait dû se retirer
28 du secteur. Dans cet échange de coups de feu, cet enseignant a été tué. Il
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1 n'avait rien à voir avec le combat, il a été tué par une balle perdue, et
2 Rrecaj a été blessé.
3 Plus tard après cet incident. Il y a eu ensuite des obsèques qui ont
4 eu une grosse importance pour l'UCK.
5 Q. Paragraphe suivant, je voudrais que vous regardiez le paragraphe 32 de
6 votre déclaration. La Chambre de première instance souhaiterait également
7 avoir des renseignements complémentaires concernant, je crois, les neuf
8 premières lignes, jusqu'au point où il est dit, je crois que --
9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre.
10 M. RE : [interprétation] Excusez-moi.
11 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Avant que nous passions au paragraphe
12 suivant, je voudrais vous poser la question suivante. Quelle est la base de
13 vos renseignements concernant la cause du décès lors de cet échange de
14 coups de feu ? Est-ce que vous savez, pour Halit Geci, comment a-t-il été
15 tué ? Qu'est-ce que vous savez et comment le savez-vous ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui a été publié dans la langue albanaise,
17 dans les médias, correspond à la version officielle du MUP que nous avons
18 reçue.
19 Halit Geci, enseignant de Lausha - malheureusement, je vais utiliser
20 une expression qui n'est pas adéquate - a été une victime collatérale du
21 conflit. Lors du retrait de la police, il a été frappé par une balle
22 perdue. Balle qui tirée par qui, cela c'est quelque chose que je ne peux
23 pas dire. Je n'exclus pas le fait que cela ait pu être une balle tirée par
24 la police, mais c'était une victime totalement innocente dans cet
25 affrontement. Il n'était pas armé et il ne faisait pas l'objet d'une
26 attaque ou quoi que ce soit de ce genre.
27 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous remercie.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Question supplémentaire, Monsieur le
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1 Témoin. Est-ce qu'il y a eu une enquête pour savoir si cela a été tiré par
2 une arme appartenant à un policier ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas la réponse à cette question.
4 Personnellement, je doute qu'il y ait eu une enquête concernant ce fait
5 particulier. Très rapidement, ce secteur est devenu très peu sûr pour ce
6 qui est des déplacements. Il était très difficile de procéder à une enquête
7 convenable. Les conditions n'étaient pas réunies pour quelque chose de ce
8 genre. En fait, je ne connais pas la réponse à cette question.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.
10 M. EMMERSO.N : [interprétation] Je me demande. Le témoin va parler de ces
11 tirs comme ayant eu lieu, ces échanges de coups de feu au cours du retrait
12 de la police et je me demande s'il serait en mesure d'aider la Chambre de
13 première instance sur les distances, à quelle distance est-ce que
14 l'affrontement qui aurait eu lieu, à quelle distance est-ce que M. Geci a
15 été blessé d'une balle au moment de ce retrait.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si le témoin le sait, bien sûr.
17 Témoin, est-ce que vous savez à quelle distance par rapport à
18 l'affrontement se trouvait M. Geci lorsqu'il a été frappé par cette balle ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je peux assister en
20 donnant une description géographique de l'endroit où l'embuscade a eu lieu
21 et à l'endroit d'où la police se retirait. C'est un secteur plein de
22 collines avec une route qui serpente et qui est étroite était un endroit
23 qui convient très bien entouré par des villages et les maisons appartenant
24 à des familles. C'était un endroit qui leur convenait. Cet endroit a un
25 nom, mais je ne peux pas me rappeler le nom maintenant, mais c'est un nom
26 connu. C'était un endroit qui leur convenait, parce qu'il s'agissait de
27 véhicules mécanisés qui doivent à ce moment-là ralentir. Il y a des virages
28 difficiles dans cette route, c'est là qui avait eu lieu l'embuscade. La
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1 police a riposté. L'affrontement a eu lieu et à ce moment-là la police a
2 commencé à se retirer. Des deux côtés on a tiré. Donc je ne sais pas
3 exactement comment ça s'est passé.
4 Comme je l'ai dit, je n'exclus pas la possibilité que la balle perdue
5 ait pu être tirée par la police, mais c'était une situation très difficile
6 faisant pouvoir déterminer d'où provenait cette balle.
7 Cet homme qui se trouvait sur le côté, il ne se trouvait pas en contact
8 avec la police ou la partie adverse. Il y avait des maisons alentour par
9 rapport à ce secteur et je ne sais pas comment il s'est fait qu'il a été
10 touché.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que le corps a été récupéré ?
12 C'est une question précise. Est-ce qu'il y a eu enquête sur la façon dont
13 il a été frappé par cette balle.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas qu'il y a eu enquête sur la
15 façon, l'autre corps a été trouvé, la personne a été enterrée deux jours
16 plus tard à l'endroit où il était né, à Laus. Et ses funérailles ont été
17 importantes.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je demandais très précisément si la
19 balle a été trouvée ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce que vous serez d'accord
22 avec moi que si quelqu'un est tué par une balle et qu'il y a un nombre
23 limité de policiers qui ont été la cible d'une attaque par embuscade, il
24 est relativement simple de comparer en examinant la balle qui a tué la
25 victime et les armes qui étaient utilisées par la police pour pouvoir
26 identifier si oui ou non cette balle a été tirée par une de ces armes.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez raison, Monsieur le Président, mais
28 seulement dans la situation dans laquelle la police serait en mesure de
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1 procéder à une telle enquête, si la police aurait pu faire une autopsie de
2 ce corps et procéder à d'autres examens. Mais ils n'ont pas eu cette
3 possibilité de faire ces examens et ces tests.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
5 Monsieur Re, je regarde la pendule, et nous avons posé quelques
6 questions supplémentaires au témoin. Si ceci est un moment qui convient,
7 alors ça va bien, mais je suis conscient du fait que j'ai interrompu
8 également votre interrogatoire. Est-ce que le moment convient bien pour
9 suspendre la séance.
10 M. RE : [interprétation] Oui, le moment convient très bien, Monsieur le
11 Président.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc nous allons suspendre la
13 séance et nous reprendrons à 18 heures 05. La séance est suspendue.
14 --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.
15 --- L'audience est reprise à 18 heures 07.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, veuillez poursuivre.
17 M. RE : [interprétation]
18 Q. Avant la suspension, je vous demandais de regarder le paragraphe 27,
19 ensuite le paragraphe 32. Veuillez, s'il vous plaît, relire le paragraphe
20 32 pour vous-même.
21 A la première ligne, on lit : "Les attaques par l'UCK contre la police
22 parmi les Serbes et d'autres non-Albanais, et des Albanais loyaux à l'Etat
23 se sont accélérées en janvier et février 1998. Les attaques se produisaient
24 quotidiennement et suivaient un schéma commun destiné à provoquer les
25 forces serbes en conflit."
26 Ce qui intéresse les membres de la Chambre, c'est la source de
27 l'information, sa fiabilité, la qualité de l'information et comment vous
28 êtes venu à donner votre opinion sur cette question dans votre déclaration.
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1 M. GUY-SMITH : [interprétation] En ce qui concerne la question des
2 opinions, une fois encore, je voudrais élever la même objection que
3 précédemment.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, mais ce qu'on essaie de
5 faire maintenant, ce n'est pas tant d'avoir une opinion que davantage de
6 faits, mais en tous les cas, votre objection est au procès-verbal.
7 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
8 M. RE : [interprétation] Il se peut que je me sois trompé en disant
9 "opinion." En fait, ceci se prête à interprétation.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que vous avez dit, en
11 l'occurrence.
12 M. RE : [interprétation] Je sais que c'est ce que j'ai dit, mais il est
13 probable que je me suis mal exprimé en employant le mot "opinion." On
14 pourrait l'interpréter comme "les faits."
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'utilise la méthode d'analyse de la séquence
17 des événements, et en analysant les activités de l'UCK, nous avons
18 facilement pu conclure que les attaques de l'UCK contre la police, les
19 militaires et les citoyens, les habitants, étaient le résultat d'une
20 opération plus intensive de l'UCK entre janvier et mars 1998.
21 Je n'ai pas cette documentation avec moi, mais avec votre permission,
22 si vous voulez bien regarder les statistiques sur ce qui se passait en
23 janvier et février seulement et les attaques pendant cette période, sur la
24 base de ces deux méthodes générales d'analyse, il est très facile de
25 parvenir à cette conclusion.
26 L'INTERPRÈTE : Est-ce que les bruits de fond pourraient être réduits au
27 minimum, s'il vous plaît.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'habitude, c'est quelqu'un qui
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1 dactylographie sur une table lorsque un microphone est allumé. Peut-être
2 qu'il vaudrait mieux ne pas éteindre un microphone, mais arrêter de
3 dactylographier sur la même table, si on peut garder ça à l'esprit.
4 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.
5 M. RE : [interprétation]
6 Q. Vous dites ensuite : "La police constituait ensuite des points de
7 contrôle selon lesquels -- il y avait ensuite des attaques utilisant des
8 tactiques où les attaquants tiraient et se retiraient à toute vitesse. Dans
9 le cas de la police qui a essayé de donner la chasse à ces personnes, il y
10 a des habitants du village qui se sont également enfuis et qui se sont
11 retirés dans les collines. L'UCK avait cette méthode pour ramener les
12 villageois et recruter de nouveaux membres en accusant les forces serbes
13 d'un emploi excessif de la force.
14 Donc vous parlez de l'UCK en mars 1998 à l'annexe 17. Il s'agirait de
15 la pièce 949 MFI, pour le compte rendu, et je voudrais simplement que vous
16 puissiez nous développer ou nous expliquer la source ou les sources de
17 votre information et ce qui vous permet de dire que l'UCK employait des
18 tactiques consistant à attaquer, tirer et se retirer à toute vitesse, et
19 cetera.
20 R. En utilisant nos stratégies analytiques, en analysant et en
21 prévoyant les événements, il était clair pour nous - et j'ai simplement
22 mentionné deux méthodes que nous employions - il était clair pour nous que
23 l'UCK ne se préoccupait pas du tout de commencer un conflit armé
24 ouvertement avec la police et l'armée. C'était leur vœu de se fonder sur la
25 sympathie de la communauté internationale. Leur seule maxime, c'était que
26 pour l'opinion, pire la situation était, le mieux c'était pour eux. Dans ce
27 contexte et le contexte de ces événements, j'ai utilisé cette expression de
28 tactique qui consiste à "shoot and run," c'est-à-dire tirer et s'enfuir,
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1 pour les embuscades dans lesquelles on utilisait les tireurs isolés, où il
2 y avait des jets de grenades et les auteurs se retiraient immédiatement.
3 Des policiers étaient tués sur le terrain, et lorsque la police réagissait,
4 ouvrait le feu contre ces agresseurs, d'habitude, il y avait poursuite de
5 ces personnes et fouille des villages, ce qui faisait que les habitants des
6 villages s'enfuyaient, ensuite, l'UCK exploitait cette situation pour
7 recruter et armer de nouveaux membres. C'est une tactique bien connue.
8 Q. Quelle était la source de vos informations ?
9 R. La source de mes informations, pour commencer, c'était les situations
10 opérationnelles qui se produisaient lorsque différents membres de la police
11 se trouvaient sur le terrain. La source de nos renseignements, c'était nos
12 habitants des villages contrôlés par l'UCK. Quand je dis "nos habitants,"
13 je veux dires nos sources d'information pour la Sûreté de l'Etat qui nous
14 disaient ce qui se passait et ce que faisait l'UCK.
15 A mon avis et du point de vue de la Sûreté de l'Etat, la police n'a
16 pas réagi comme il fallait à cette situation. Dans leur tactique, au
17 contraire - enfin personnellement, je préférerais ne pas entrer dans les
18 détails, mais ce qu'ils faisaient, c'était qu'ils constituaient des points
19 de contrôle sur les routes dès qu'il y avait des éléments de ce genre. Ils
20 essayaient de garder la direction de la situation, le contrôle de la
21 situation essentiellement pour les différentes routes en créant ces points
22 de contrôle.
23 Q. Bien. Je vous remercie. Maintenant, le rapport auquel vous vous
24 référez, en quelque sorte la description des activités de l'UCK dans le
25 rapport du poste de la Sûreté de l'Etat de Pec, le
26 24 mars 1994, c'est à l'annexe 17, document MFI P949. Et je souhaiterais
27 que vous fassiez de brefs commentaires sur ces sources ainsi que la
28 fiabilité de ces sources, mais aussi brièvement que possible, s'il vous
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1 plaît.
2 R. C'est un document authentique qui provient de la Sûreté de l'Etat et
3 qui a été rédigé par le bureau ou le poste du RDB à Pec. C'est un résumé
4 analytique à titre d'information sur ce qui se passait dans le secteur
5 entre le 30 décembre et le 24 mars 1997, le 30 décembre 1997 jusqu'au 24
6 mars 1998 dans ce secteur.
7 Ce document, je crois que j'ai eu ces renseignements à ma disposition
8 quelques jours après l'événement. C'était sur la base d'un grand nombre de
9 rapports qui avaient été obtenus sur le terrain. Pour l'essentiel, il
10 s'agit surtout d'un résumé de tous ces rapports par un résumé analytique
11 des événements.
12 C'est une mesure habituelle utilisée pour informer la direction des
13 services de façon à essayer de voir quelles seront les activités qui
14 pourraient avoir lieu et notamment quelles devraient être celles du service
15 de Sécurité de l'Etat.
16 Q. Sur la base de tout ce que vous saviez à l'époque, quelle est
17 l'exactitude dans votre estimation de ce rapport ?
18 R. Ce rapport est absolument véridique et exact, puisque la Sûreté de
19 l'Etat, lorsqu'il y a avait des attaques directes, utilisaient des rapports
20 de la police qui, précisément rendaient compte de tous les incidents, le
21 comportement illicite ou de désordre ou d'attaque contre l'ordre public.
22 En plus, ce document contient également des renseignements obtenus
23 lors de l'audition de sources vivantes utilisées par la Sûreté de l'Etat
24 afin de rassembler des données sur les activités de ce groupe.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.
26 M. EMMERSON : [interprétation] Je me rends compte que les indications
27 données au début de la séance d'aujourd'hui n'ont pas encore pris la forme
28 d'une ordonnance.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
2 M. EMMERSON : [interprétation] En ce qui concerne l'annexe 17, cela fait
3 partie de ces --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les annexes 17 et 18 risquent de ne pas
5 être admises ou versées au dossier, et il peut être clair que la 18, comme
6 étant une déclaration faite par la personne correspondante à l'annexe 18 et
7 précisément mentionnée dans le rapport ayant le numéro 17, compte tendu des
8 détails contenus à l'annexe 18 et également compte tenu du fait que la
9 déclaration a trait de façon assez directe aux actes et aux comportements
10 de l'un des accusés, Monsieur Re, également compte tenu des circonstances
11 dans lesquelles cette déclaration a été recueillie, certainement après
12 qu'il y ait eu des fouilles et des saisies, je considère d'après le
13 contexte et également d'après cette personne qui était arrêtée - enfin ceci
14 n'est pas entièrement clair - je me demande si nous devrions procéder de la
15 façon dont nous procédons actuellement, en disant que tout est fiable.
16 M. RE : [interprétation]
17 Q. Est-ce que nous pourrions passer, s'il vous plaît, à l'annexe suivante,
18 l'annexe 18, c'est une déclaration de --
19 M. RE : [interprétation] Apparemment, une objection est élevée. Je ne sais
20 pas pourquoi.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
22 M. EMMERSON : [interprétation] Simplement pour être parfaitement clair, je
23 veux dire peut-être que M. Re fait ceci intentionnellement, mais l'annexe
24 18 est la déclaration qui est tirée de l'annexe 17.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
26 M. EMMERSON : [interprétation] Et elle est également l'objet de ce qu'a dit
27 la Chambre de première instance.
28 M. RE : [interprétation] Tout au moins, je voudrais lui demander pourquoi.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai également évoqué au moins une
2 question et je ne voudrais pas créer qu'il y ait une attente à ce que la
3 réponse à cette question ait immédiatement pour conséquence d'écarter
4 l'annexe 18 avec ce risque de ne pas être admise ou versée au dossier.
5 Maître Harvey.
6 M. HARVEY : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais revenir aux
7 neuf premières lignes du paragraphe 30 de cette déclaration du témoin, où
8 il fait une affirmation selon laquelle : "Les attaques par l'UCK contre la
9 police, l'armée, les Serbes et d'autres non-Albanais et Albanais loyaux à
10 l'Etat s'étaient intensifiées ou accélérées en janvier et février 1998. Ces
11 attaques avaient lieu quotidiennement."
12 "L'UCK annonçait leur présence dans un secteur, d'abord avec des
13 patrouilles de nuit pour provoquer une réaction de la police, et leur
14 arrivée dans le secteur. La police à ce moment-là constituait des points de
15 contrôle que l'UCK attaquait peu de temps après cela en utilisant ces
16 tactiques consistant à attaquer et à se retirer très rapidement."
17 Monsieur le Président, j'ai recherché en vain, à la fois dans l'annexe 17
18 et 18, un seul mot qui puisse corroborer ces allégations pour les mois de
19 janvier et février 1998, et M. Re a maintes fois demandé au témoin, je n'ai
20 pas encore entendu de réponse du témoin, si vraiment constitue une réponse
21 à cette question précise, et c'est la raison pour laquelle j'ai demandé la
22 parole.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous demandez que le
24 témoin réponde à cette question ou est-ce que vous souhaitez que --
25 M. HARVEY : [interprétation] Exactement.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- ou est-ce que vous voulez que l'on
27 essaie d'établir qu'il n'y a pas eu de réponse ?
28 M. HARVEY : [interprétation] Je propose que le témoin réponde à la
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1 question.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Alors, voyons.
3 M. RE : [interprétation] Mais alors, de quelle question s'agit-il parce que
4 je suis un peu perdu. Veuillez me dire à quelle ligne.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour donner en fait une base factuelle
6 qui convient et fournir une source qui puisse être satisfaisante pour la
7 Chambre de façon à ce qu'elle puisse accepter cette partie de la
8 déclaration comme quelque chose que le témoin peut dire sans aller au-delà
9 de ce qu'un témoin peut dire.
10 M. RE : [interprétation]
11 Q. Est-ce que vous pourriez donner aux membres de la Chambre de première
12 instance des renseignements complémentaires sur la façon dont vous êtes au
13 courant des questions dont Me Harvey vient juste de donner lecture, vient
14 juste d'évoquer pour le compte rendu concernant le paragraphe 32 de votre
15 déclaration.
16 R. Je peux mentionner plusieurs exemples, si ceci peut être utile.
17 Q. Oui, tout à fait. Allez-y, s'il vous plaît.
18 R. Un cas très caractéristique qui a causé une panique dans la population
19 serbe du secteur, ça a été le meurtre, par exemple, Djordje Belic, qui
20 était un agriculteur de l'un des villages autour de Klina. Il a été tué par
21 une balle d'un tireur isolé pendant la nuit. Ça c'est en ce qui concerne
22 les agriculteurs.
23 Mais de façon à illustrer la panique qui a été causée par ce meurtre,
24 c'était de dire qu'un groupe d'Albanais a écrit une lettre et a annoncé
25 publiquement au président des Etats-Unis, à l'OSCE et aux hauts
26 fonctionnaires internationaux pour demander qu'une enquête soit effectuée
27 sur les événements et qu'ils fassent en sorte qu'il y ait la possibilité
28 d'avoir une existence normale et pacifique pour l'ensemble du Kosovo.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais vous arrêter là un moment.
2 Vous dites que les attaques contre - et ici, vous avez mentionné tout un
3 nombre de catégories - s'étaient intensifiées ou accéléré en janvier et
4 février. Vous avez dit que ça se produisait quotidiennement, et qu'ensuite
5 "il y a eu comme un schéma commun qui était destiné à provoquer les forces
6 serbes dans le conflit."Pour commencer, l'UCK annonçait leur présence dans
7 un secteur, d'abord par des patrouilles de nuit de façon à provoquer une
8 réaction de police, ensuite, la police constituerait un point de contrôle
9 et à ce moment-là l'UCK attaquerait.
10 Donc sur l'exemple que vous donnez, pourriez-vous nous dire s'il y
11 avait une annonce de ce genre ? Parce que ce que vous avez dit en fait,
12 c'est que quelqu'un avait été tué cette nuit-là, ce qui, bien sûr, est
13 beaucoup plus limité que ce qui est affirmé au paragraphe 32. Pourriez-vous
14 nous dire pour ce premier exemple s'il y avait eu une annonce de la
15 présence premièrement avec ces patrouilles de nuit pour provoquer une
16 réaction de la police ? Est-ce que ceci a précédé l'événement ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous en dire davantage de
19 quelle façon est-ce que ça été annoncé ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] La personne mentionnée se trouvait au village
23 non loin de la route allant de Pec à Pristina. A proximité, il y avait ce
24 corridor mentionné par lequel était acheminé des armes et du matériel de
25 l'Albanie à Drenica.
26 Le secteur de ce corridor on essayait qu'il soit libre pour permettre
27 le passage des terroristes par la frontière. C'est dans ce sens que le
28 village Kijevo posait un gros problème puisqu'il y habitait beaucoup de
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1 Serbes. Il y avait aussi un gros poste de police dans ce village.
2 L'assassinat de Djordje Belic a provoqué beaucoup de peur et
3 d'incertitude et d'insécurité dans la population serbe.Il y avait tout d'un
4 coup la peur que les autorités n'aient plus le contrôle.
5 Il y a eu des patrouilles de l'UCK, si je peux les appeler comme ça, qui
6 étaient fréquentes dans ce village sur une distance de trois à cinq
7 kilomètres. On ne pouvait pas sortir du village la nuit. Ceci s'était vrai
8 pour les citoyens, la police et les militaires.
9 C'est ce qui a fait que la police a installé un poste de contrôle
10 important aux abords du village. Il était aussi décisif pour la police que
11 plusieurs mois plus tard, lorsqu'ils ont essayé de récupérer le contrôle du
12 corridor, et lorsque toute la population du village et le poste de police
13 qui était très important, ont été bloqués pendant quelques jours, il y a eu
14 des forces spéciales qui sont venues par l'hélicoptère pour restaurer la
15 sécurité autant pour la population civile que des policiers du poste de
16 police. C'est un événement important.
17 Je peux continuer, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous nous donnez un exemple
19 analogue. Pourriez-vous nous dire exactement où ce poste de police érigé
20 par la police était installé ? A quelle extrémité du village ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était sur la gauche du village de Kijevo,
22 sur la gauche de la route allant de Pec à Pristina.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez un autre exemple ? Vous avez
24 dit qu'il y avait plus d'activités de l'UCK qui provoquaient la police ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Par exemple en janvier, si je ne m'abuse, dans
26 la zone de la municipalité de Decani. Un ancien policier, Radosevic a été
27 tué dans une embuscade. Il se trouvait dans un véhicule, le 28 février
28 1998.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous arrête un instant.
2 Vous avez dit que ce schéma c'était l'annonce d'une présence de l'UCK plus
3 intense, des patrouilles de nuit, ce genre de chose.
4 Pourriez-vous nous donner ce même genre de détail par rapport à ce
5 policier qui a été tué, cet ancien policier, Radosevic ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était à bord du véhicule quand il a été
7 tué. Il était accompagné d'une femme. Je connaissais son nom à cette dame,
8 mais je ne m'en souviens plus aujourd'hui. Cet incident a semé une grande
9 peur parmi la population serbe. Dans la région de Decani dans ses villages,
10 où il n'y avait de toute façon pas beaucoup de Serbes. Toute la
11 municipalité de Decani comptait quelques 800 Serbes. Quand je dis "800,"
12 j'inclus tout le monde, du plus petit au plus âgé.
13 Après cela, la police a érigé un poste de contrôle --
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Après le meurtre ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, après le meurtre. Plusieurs postes de
16 contrôle ont été érigés par la police qui voulait ainsi couper la route et
17 rendre le déplacement de l'UCK plus difficile. Par ailleurs, ça devait
18 permettre aux unités de la police sur le terrain d'apporter leur aide dans
19 les meilleurs délais. Ils voulaient en fait couvrir le territoire où il y
20 avait ces mouvements et ces patrouilles de nuit.
21 La partie de Drecina et la partie de la route étaient contrôlées par
22 l'UCK, en attaquant les postes de contrôle qui avaient été érigés. En
23 raison de ces attaques, la police devait réagir.
24 Un exemple : le 28 février 1998, une patrouille de la police a été attaquée
25 et est tombée dans une embuscade dans le village de Likoshari. Lorsque la
26 patrouille a demandé de l'aide par radio, des renforts de police sont
27 arrivés, mais ils se sont rendus compte que ce n'était simplement qu'un
28 stratagème utilisé par l'UCK. En fait, c'est un coup de main. Au cours de
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1 la nuit, ils ont installés plusieurs postes de contrôle dans la direction
2 de mouvement autour de ces postes de contrôle. Ils ont tué cinq membres de
3 la police. Du coup, la police a renforcé la route et les postes de
4 contrôle. Ils ont voulu installer ce corridor vers le territoire qui était
5 tenu par l'UCK. Ils ont essayé de couvrir et de quadriller le territoire en
6 installant des postes de contrôle.
7 Je peux vous donner un autre exemple. J'avais commencé à en parler. C'était
8 tout particulièrement important. Cela a été vraiment un tournant par
9 rapport à la méfiance de la population albanais dans la vie quotidienne.
10 Après que Djordje Belic, ce citoyen a été tué, un couple albanais a
11 écrit une lettre dans laquelle ces personnes demandaient aux autorités
12 serbes et au président des Etats-Unis, de l'OSCE ou d'autres organisations,
13 d'élucider cette affaire. D'après ces personnes, ils l'ont dit dans la
14 lettre, ils estimaient qu'il était un citoyen tout à fait honorable.
15 Ce qui s'est passé peu de temps après, un signataire de cette lettre
16 Ibrahim Zogaj, qui en fait est originaire du même village qu'un des
17 accusés, Iglarevo. Il a été enlevé, lui et ses deux fils, alors qu'ils
18 étaient dans la maison familiale. Ils ont été enlevés en présence des
19 membres de leur famille, épouse et enfants. Ils ont été enlevés parce qu'on
20 avait exigé publiquement une solution à ce meurtre et on voulait que les
21 gens vivent normalement au Kosovo.
22 Quelques jours plus tard, on les a retrouvés au bord de la route en même
23 temps que deux autres frères, Berisha. Ils avaient subi des sévices. On en
24 a retrouvé les traces, des ecchymoses sur leurs corps. Notamment, ils
25 avaient été tués.
26 S'il vous est possible de consulter une carte de la région à vol
27 d'oiseau, cela se trouve à 15 ou 20 kilomètres. Le père et les deux fils
28 ont été tués parce que le père avait exigé des autorités de Serbie et aussi
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1 des représentants de la communauté internationale, pour que cette question
2 soit résolue.
3 A côté d'eux, se trouvaient les cadavres de ces deux autres frères,
4 les frères Berishas. L'un d'entre eux était propriétaire d'une station
5 service.
6 Nombreux sont les incidents de ce genre. Je le répète, maintenant je me
7 remémore tout ceci, mais il serait important que vous puissiez disposer de
8 ce qui s'est passé tous les jours en janvier, février dans cette zone. Vous
9 comprendriez alors clairement que toute réaction de la police était
10 précédée d'une attaque terroriste. La réaction de la police n'était qu'une
11 réponse à une action terroriste.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup de votre réponse,
13 Monsieur.
14 Monsieur Re, veuillez poursuivre.
15 M. RE : [interprétation] Prenons l'annexe 18, numéro MFI P950. Je ne
16 demande pas que ceci soit affiché pour le moment, parce que c'est une
17 déclaration du 21 février 1998 d'une personne particulière.
18 Q. Je vais vous poser des questions à son propos, mais je voudrais vous
19 demander si le fait de révéler son nom risque de lui faire courir des
20 risques.
21 R. Oui.
22 Q. Si c'est le cas, je demanderais que cette pièce ayant une cote
23 provisoire soit déposée sous pli scellé pour le moment.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ce sera la pièce MFI P950, qui sera
25 pour le moment déposée sous pli scellé.
26 Monsieur Re.
27 M. RE : [interprétation]
28 Q. Que savez-vous des circonstances dans lesquelles cette déclaration a
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1 été recueillie ?
2 R. Si je me souviens bien, c'est un membre de l'UCK qui a été arrêté par
3 la police et la DB a eu plusieurs interrogatoires d'instruction avec lui
4 pour savoir ce qu'il savait et quel était le rôle qu'il jouait dans les
5 activités de l'UCK.
6 Je pense que plus tard, une enquête judiciaire -- ou plutôt des
7 poursuites ont été engagées contre lui.
8 Q. Que savez-vous du comportement de la police et de la DB au moment de
9 recueillir ces déclarations ?
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On pourrait d'abord demander peut-être
11 au témoin s'il était présent lorsque cette déclaration a été recueillie.
12 Est-ce que vous étiez présent, à ce moment-là, Monsieur ? Est-ce que --
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez reçu des
15 informations détaillées portant sur les circonstances dans lesquelles cette
16 déclaration a été recueillie ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai lu deux documents afférents à cette
18 personne. Le premier, c'est une note de service après entretien informatif,
19 et le deuxième document c'est la déclaration qui a été recueillie en
20 application du code de procédure pénale par l'organisation de la DB à Pec.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez reçu des
22 informations supplémentaires quant aux circonstances plus précises, par
23 exemple, la durée de la déclaration, le temps qu'il a fallu pour la
24 recueillir, qui l'a recueillie ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] En application du code de procédure pénale ou
26 de la loi portant sur la procédure pénale en Serbie à l'époque, d'après
27 cette disposition, la police avait le droit de garde à vue ou de mise en
28 examen ou de garder la personne qu'elle souhaitait interroger pendant 72
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1 heures, période qui pouvait être prorogée de 24 heures pour arriver au
2 maximum à 96 heures, suivant les circonstances. Il fallait le demander.
3 La DB a pu interroger cette personne pendant 96 heures, et après ce
4 délai, il devait être remis aux organes judiciaires.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas ça que je voulais savoir.
6 Je voulais, par exemple, savoir si cette personne a été interrogée pendant
7 six heures ou 12 ou neuf ou 18.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il est probable qu'il a
9 été interrogé pendant plusieurs heures. Nous avons utilisé toutes les
10 possibilités que nous donnaient la procédure pour passer trois ou quatre
11 jours avec cette personne, et si elle tenait le coup physiquement,
12 psychologiquement, si on pouvait parler tout ce temps avec cette personne,
13 c'est ce qu'on a fait. Il est certain qu'on a passé au moins dix heures
14 avec cette personne. Je ne sais pas exactement combien d'heures.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez examiné sa
16 déclaration ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je l'ai lue, parce qu'il s'agit d'une
18 déclaration qui donne une bonne idée d'ensemble et très complète à propos
19 de la situation de l'UCK. Dans cette déclaration sont mentionnées des
20 personnes qui font partie des activités --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma première question c'était simplement
22 de savoir si vous l'aviez examinée, cette déclaration.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il était coutumier de donner
25 les noms des personnes qui procédaient à l'interrogatoire ? Est-ce que
26 c'était quelque chose d'habituel ?
27 Est-ce que nous trouvons le nom de la personne à la RDB de Pec qui a
28 autorisé - est-ce qu'on trouve ce nom ou ces noms dans ce document ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'y retrouve pas trop dans ces
2 documents. Je peux vous dire quel était le règlement.
3 D'après la loi portant procédures pénales --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui m'intéresse surtout, c'est ce que
5 vous avez examiné. Ici, dans ces documents que vous avez examinés, vous
6 trouvez à l'intercalaire 18 le nom des personnes qui ont mené
7 l'interrogatoire. Nous avons la version en B/C/S après la version en
8 anglais.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai trouvée. Je l'ai trouvée dans la
10 déclaration.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est en bas à droite. Vous voyez, "U003533,"
13 on voit la signature du citoyen, la personne dont il est question, et en
14 dessous, vous avez la signature des trois agents de la DB. Partant de ces
15 signatures, je reconnais deux de ces agents, j'en suis certain. Et je pense
16 même que je sais qui est la troisième personne qui a signé.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Donnez-nous les noms de ces
18 agents.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de l'agent Jokic. Il travaillait
20 dans notre détachement, au bureau de la DB à Decani. C'est la deuxième
21 signature, celle de Jokic.
22 La troisième est celle de Vladimir Mirtic. Lui aussi est un de nos
23 agents qui travaillait au bureau de Decani, à la DB.
24 Quant à la première signature, je ne suis pas sûr. Je ne pourrais pas
25 vraiment vous le dire, même si j'ai une idée.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que le règlement exige de
27 consigner les noms des agents, des préposés, ou est-ce que le règlement se
28 contente de dire que la signature de la personne qui a recueilli les
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1 déclarations peut mettre sa signature ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] La signature suffisait, étant donné que la
3 déclaration ainsi recueillie ne pouvait pas être utilisée dans un procès.
4 C'était remis au juge d'instruction, lequel devait placer cette déclaration
5 dans une enveloppe spéciale qu'il pouvait utiliser -- ou qu'il pouvait
6 utiliser cette déclaration pour poser des questions à lui.
7 Cependant, la déclaration en tant que telle ne pouvait être utilisée
8 dans une procédure judiciaire, d'après notre règlement. Mais à partir de
9 cette déclaration, le juge d'instruction aurait été habilité à interroger
10 le témoin en présence de son avocat et d'un représentant du parquet, un
11 procureur adjoint. C'est ce que prévoit la loi pour ce genre de procédure.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
13 Poursuivez.
14 M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir le nom du
15 premier agent, si possible, car il y a plusieurs Jokic dans cette affaire.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Connaissez-vous le prénom de l'individu
17 répondant au patronyme de Jokic ? Si vous l'ignorez, dites-le-nous.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Vraiment, je n'en sais rien, mais tous les
19 accusés le savent. Ils peuvent le dire. Il y avait trois agents qui
20 travaillaient à Decani. Tout le monde sur place les connaissait. Jokic -
21 excusez-moi, je ne m'en souviens pas.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, beaucoup d'années se sont écoulées.
23 Je vous comprends.
24 Poursuivez.
25 M. RE : [interprétation]
26 Q. Dans cette déclaration, on mentionne une attaque contre une école à
27 Rznic -- ou plutôt contre l'académie militaire ou le poste de police de
28 Rznic. Page 8 en anglais, en page 6 en serbe, me semble-t-il.
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1 Il est ensuite fait référence à la page 9 de la version en anglais
2 d'une attaque menée à Babaloc, des grenades ont été lancées contre un camp
3 de réfugiés.
4 Est-ce que vous pouvez retrouver ces références ?
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vois pas de numérotation dans la
6 version en serbe.
7 M. RE : [interprétation] Il s'agit de la page 6 tout en haut, U0003525.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. On ne voit pas très bien les
9 numéros de page, mais ils y sont. Excusez-moi.
10 M. RE : [interprétation]
11 Q. Il est question d'une rencontre avec quelqu'un de l'école de Rznic,
12 d'une attaque menée contre le poste de police, après quoi on parle d'une
13 attaque à l'aide de deux grenades contre un camp de réfugiés à Babaloc.
14 Je souhaiterais à ce sujet vous renvoyer au communiqué de l'UCK numéro 36 -
15 - excusez-moi, je l'avais sous les yeux il y a quelques instants.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela figure à l'intercalaire 19,
17 Monsieur Re.
18 M. RE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 Donc à l'intercalaire 19, nous trouvons la pièce P951 enregistrée aux fins
20 d'identification.
21 Est-ce que les incidents mentionnés par la personne qui a fait cette
22 déclaration sont en rapport avec les informations mentionnées dans le
23 communiqué de presse numéro 36 de l'UCK, qui constitue la pièce P951, qui
24 est une cote provisoire, je me rappelle ?
25 R. Oui.
26 Q. Que pouvez-vous nous dire au sujet de l'exactitude des informations
27 contenues dans ce communiqué, de ce qui est dit dans la déclaration ?
28 R. Pour ce qui est du communiqué de l'Armée de libération du Kosovo, il
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1 est tout à fait exact de dire que les 11 et 12 septembre plusieurs
2 opérations synchronisées ont eu lieu dans la première zone opérationnelle.
3 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent au témoin de répéter le nom des
4 zones en question.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez répéter le nom des zones que
6 vous venez d'évoquer, je vous prie.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Je parle un peu trop vite et cela
8 suscite des problèmes.
9 Je disais donc que des opérations synchronisées sont mentionnées,
10 opérations qui ont été menées par l'UCK les 11 et
11 12 septembre sur le territoire de la première zone opérationnelle, dans les
12 sous-zones de Drenica, Jerenik [phon], Pastrik, Dukagjin, Karadak, et Llap.
13 Et là où se trouvaient des postes de police, c'est-à-dire à Glogovac, dont
14 la RDB de Pristina s'occupait dans Prizren, Calap [phon], Kijevo, Pec,
15 Rudnik. Donc c'est dans ces endroits que j'ai mentionnés où se trouvaient
16 les postes de police que l'on a procédé à des attaques. Toutes ces
17 informations sont donc tout à fait exactes.
18 M. RE : [interprétation]
19 Q. Il est fait référence à une attaque menée -- enfin, la date mentionnée
20 est celle du 26 novembre 1997. Cela figure à la page 11 du document dans sa
21 version anglaise. On parle d'une attaque contre un poste de police qui,
22 semble-t-il, se trouve à Rznic. Il serait passé par Ratis ?
23 R. Ratis ?
24 Q. Pouvez-vous examiner le communiqué de presse numéro 40, qui figure à
25 l'annexe 21, il s'agit du document MFI P953. Je souhaiterais que vous nous
26 fassiez part de vos commentaires sur ce communiqué de l'UCK. Est-ce que
27 vous pourriez communiquer les informations se trouvant dans ce communiqué
28 de l'UCK avec les informations figurant dans la déclaration portant la cote
Page 9041
1 provisoire P950.
2 R. Vous voulez que je compare le communiqué numéro 40 avec les
3 commentaires de la personne en question. Cette personne parle de sa
4 participation à une attaque menée dans la sous-zone de Dukagjin, il elle a
5 donc participé à cette attaque. Il parle des coauteurs de l'attaque depuis
6 le début, alors il parle des préparatifs de l'attaque menée par l'un des
7 accusés. Il a lui-même pris part à cette attaque. Il s'efforce d'expliquer
8 quand, où et comment ils se sont mis d'accord pour mener l'attaque et de
9 quel type d'armes ils ont utilisées dans le cadre de cette attaque. Voilà
10 grosso modo ce qu'il a dit à la police.
11 Il explique en détail le rôle qu'il a joué dans l'attaque, il parle
12 du groupe, du rôle joué par l'accusé Brahimaj et de l'endroit où il se
13 trouvait.
14 Q. Est-ce que dans le communiqué de presse numéro 40, dans la déclaration
15 faite par l'intéressé, il est question du même incident ?
16 R. Oui, dans une certaine mesure. Dans sa déclaration, l'individu parle en
17 gros des mêmes éléments que ceux mentionnés dans le communiqué numéro 40.
18 Q. Pouvez-vous examiner le paragraphe 37 de votre déclaration.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais bien comprendre les
20 choses. A la page 11 du document anglais, nous parlons du 26 novembre. Les
21 personnes mentionnées se rencontrent. J'essaie de trouver précisément
22 l'endroit où a eu lieu l'attaque contre le poste de police. Il se trouvait
23 à 200 mètres de la route, mais je souhaiterais avoir des informations plus
24 précises. Dans sa réponse, le témoin a parlé d'information approximative.
25 Il a dit "grosso modo," "en gros." Je souhaiterais donc savoir si nous
26 parlons bien de la même chose ou de la même chose grosso modo.
27 Puis je regarde l'heure et je me dis qu'il vaudrait peut-être mieux
28 explorer la question plus tard. Ainsi, nous aurons la possibilité de
Page 9042
1 comparer de façon détaillée les deux sources.
2 Monsieur Stijovic, il est près de 19 heures, nous devons lever l'audience.
3 Nous souhaiterions vous revoir demain matin à 9 heures dans la salle
4 d'audience numéro I, si je ne m'abuse.
5 Monsieur le Greffier d'audience ?
6 Oui, demain nous siégerons dans la salle d'audience numéro I à 9 heures. Je
7 vous rappelle que vous ne devez parler à personne de la déposition que vous
8 avez faite ou de celle que vous apprêtez à faire.
9 Je demanderais à Mme l'Huissière de bien vouloir vous raccompagner hors du
10 prétoire.
11 [Le témoin quitte la barre]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, pouvez-vous nous dire de
13 combien de temps vous avez encore besoin ? Je pense qu'il est inutile de
14 rappeler une fois de plus que cette déposition a été interrompue un certain
15 nombre de fois. Peut-être avons-nous été un peu trop optimistes en versant
16 au dossier tant de documents. Nous pensons toutefois que la Défense et la
17 Chambre voudraient examiner en détail ces documents avant de laisser partir
18 le témoin.
19 M. RE : [interprétation] Bien entendu, nous nous remettons entre les mains
20 de la Chambre. J'espérais terminer aujourd'hui, mais sinon ce sera demain.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au cours de la première séance.
22 M. RE : [interprétation] Oui. Mais certaines des réponses fournies par le
23 témoin sont un peu longues.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous pouvez également
25 interrompre le témoin en lui disant que ce n'était pas là l'objet de votre
26 question.
27 Maître Emmerson.
28 M. RE : [interprétation] Merci.
Page 9043
1 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, il me faudrait trois
2 séances environ avec ce témoin. J'ai cru comprendre qu'il avait quelques
3 difficultés, ce qui signifie qu'il doit terminer sa déposition avant la fin
4 de l'audience de mercredi.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mercredi. C'est pour cela que je
6 souhaiterais savoir de combien de temps vous avez besoin.
7 Maître Guy-Smith et Maître Harvey.
8 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'espère utiliser une séance, peut-être un
9 peu plus, mais j'essayerai de terminer mon contre-interrogatoire en une
10 séance. Cela dépendra, bien sûr, de ce qui se passera.
11 Nous allons parler d'un certain nombre de documents.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harvey.
13 M. HARVEY : [interprétation] Environ une séance également.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne les annexes 17 et 18
15 - et j'encourage M. Re et M. Harvey de s'efforcer de trouver une solution
16 pour ce qui est des actes du comportement de Lahi Brahimaj - car nous
17 sommes en train de comparer les déclarations faites par cette personne avec
18 les communiquées de l'UCK y afférentes donc afin de voir s'il y a des
19 correspondances. Alors, je ne sais pas si M. Re souhaite explorer cette
20 question plus avant, mais la Chambre pense que vous pourriez peut-être
21 restreindre votre utilisation des annexes 17 et 18. Ainsi, nous pourrions
22 éviter des débats sur l'admission et la non admission de ces annexes, et
23 cela aiderait à la Chambre. Mais si ce n'est pas possible, tant pis.
24 M. HARVEY : [interprétation] J'accepte ce qui a déjà été dit par la Chambre
25 en ce qui concerne l'usage limitée des annexes 17 et 18. Je ne souhaite pas
26 faire perdre de temps à la Chambre là-dessus.
27 Mais il y a quelque chose qui me préoccupe. Le témoin en a parlé
28 brièvement. Il semble qu'il existe un dossier concernant mon client. Le
Page 9044
1 témoin a dit qu'il était étonné que ce dossier n'ait pas été communiqué et
2 présenté ici.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme toujours, pour ce qui est des
4 questions de communication, nous vous encourageons à entrer en contact avec
5 M. re afin de voir s'il y a des raisons pour lesquelles on ne vous a pas
6 communiqué ce document ou si M. Re
7 lui-même est surpris par l'existence de ce dossier.
8 Nous levons l'audience pour le moment, et nous reprendrons nos débats
9 demain à 9 heures.
10 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mardi
11 9 octobre 2007, à 9 heures 00.
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