Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 11 octobre 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 10.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

6 Monsieur le Greffier, veuillez, s'il vous plaît, donner le numéro de

7 l'affaire.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. L'affaire IT-

9 04-84-T, le Procureur contre Ramush Haradinaj et consorts.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

11 Le témoin que nous allons entendre maintenant est un témoin qui a

12 fait l'objet d'une demande de mesures de protection : octroi d'un

13 pseudonyme et distorsion des traits du visage à l'écran et déformation de

14 la voix. Aucune objection n'a été formulée contre cette demande. La Chambre

15 fait droit à cette demande de mesures de protection. Les critères utilisés

16 par la Chambre, c'est qu'il faut qu'il existe des risques bien réels quant

17 à la sécurité du témoin ou de sa famille. Au cas où on apprendrait que le

18 témoin a déposé ici même, ceci peut être prouvé si on établit qu'une menace

19 a été proférée à l'encontre du témoin, ou de sa famille, ou contre les

20 deux, ou un autre critère : c'est qu'il est possible que la déposition du

21 témoin lui mette à dos certaines personnes qui vivent dans la zone où il ou

22 elle travaille; où elle dispose de biens et a l'intention de retourner;

23 ceci est également le cas s'il existe une situation instable dans le

24 territoire en question. Voici la dernière partie de ces critères qui est,

25 tout le monde s'accorde à dire que c'est bien le cas au Kosovo.

26 Pour toutes ces raisons, après l'examen de tous ces critères, la Chambre

27 donne droit à la requête de mesures de protection. Le témoin déposera sous

28 le pseudonyme 68, en bénéficiant de la déformation de ses traits à l'écran

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1 et de la déformation de sa voix.

2 Je vous demande de bien veiller à éteindre vos micros quand le témoin

3 s'exprime.

4 Maître Guy-Smith.

5 M. GUY-SMITH : [interprétation] S'agissant du témoin suivant encore --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- un certain nombre d'annexes, environ 90,

8 je crois, ont été jointes à sa déposition. Je ne crois pas qu'il s'agisse

9 d'un témoin protégé.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin qui viendra ensuite n'est pas

11 un témoin protégé. C'est M. Zivanovic, si je ne m'abuse.

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, effectivement,

13 M. Zivanovic.

14 Je voudrais parler des annexes qui ont été jointes à la déclaration de M.

15 Zivanovic. Vingt-cinq de ces 90 annexes ne figurent pas sur la liste 65

16 ter. Aucun motif valable n'a été apporté. Aucune demande n'a été faite dans

17 ce sens. On ne nous explique pas pourquoi on a soudain ajouté ces nouveaux

18 documents et pourquoi cela est nécessaire. Nous nous y opposons.

19 Je peux --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- spécifier soit maintenant pour ce qui

22 figure au compte rendu d'audience soit par écrit, de quelles annexes il

23 s'agit.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il ne serait pas très utile

25 de donner lecture de l'ensemble de ces références.

26 M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne serait pas agréable pour les

28 interprètes ni pour la sténotypiste.

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1 Monsieur Di Fazio, s'agissant de ce témoin suivant --

2 M. DI FAZIO : [interprétation] C'est Mme Gustafson qui va s'en occuper.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous expliquer pourquoi ces 25

4 documents supplémentaires ne figurent pas sur la liste 65 ter.

5 Mme GUSTAFSON : [interprétation] En fait, c'est M. Re qui va interroger le

6 témoin suivant, le témoin qui viendra après celui que nous allons entendre

7 maintenant. Nous allons lui faire savoir ce qu'il en est.

8 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

9 M. DI FAZIO : [interprétation] Excusez-moi. Je n'avais pas très bien

10 compris.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, je n'avais pas non plus moi-

12 même été d'une clarté absolue.

13 J'ai parlé du : "Témoin qui viendrait ensuite." Ça manquait de clarté.

14 Toutes mes plus plates excuses.

15 Madame Gustafson, êtes-vous prête à interroger votre témoin ?

16 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dès que l'on aura baissé les stores, je

18 vais demander que l'on fasse entrer le témoin dans le prétoire.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je vais peut-être

21 indiquer la chose suivante -- mais non, je vais attendre.

22 Est-ce que vous disposez d'un résumé de la déclaration 92 ter ?

23 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, je crois que nous avons envoyé ce

24 document à la Défense hier soir et à la Chambre ce matin.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas encore consulté mes

26 courriels ce matin. Je vais le faire sans attendre.

27 [Le témoin est introduite dans le prétoire]

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour. Bonjour. Est-ce que vous

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1 m'entendez dans une langue que vous comprenez ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] (expurgé), avant que vous ne

4 déposiez ici même, il est prévu au terme du Règlement de procédure et de

5 preuve que vous prononciez une déclaration solennelle dans laquelle vous

6 êtes engagée à dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 Le texte de la déclaration solennelle va vous être remis par

8 l'huissière. Je vous demande de prononcer ladite déclaration.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

11 LE TÉMOIN: SST7/TEMOIN 68 [Assermentée]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez prendre place, (expurgé)

15 (expurgé). Rebonjour. La Chambre a décidé qu'au cours de cette déposition

16 nous n'utiliserions pas votre véritable nom. Nous allons nous adresser à

17 vous en vous appelant Témoin 68. Personne à l'extérieur de ce prétoire ne

18 sera en mesure de voir votre visage.

19 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Personne ne pourra non plus entendre

21 votre véritable voix à l'extérieur du prétoire. Cependant, à l'extérieur du

22 prétoire, on pourra suivre votre déposition dans ces conditions-là.

23 C'est Mme Gustafson, substitut du Procureur, qui va maintenant procéder à

24 votre interrogatoire principal.

25 Mme GUSTAFSON : [aucune interprétation]

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie d'avoir fait droit à ma

27 demande, car je ne souhaitais pas que mon nom soit prononcé.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, veuillez à bien

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1 éteindre votre micro quand le témoin parle. Maintenant, bien entendu, vous

2 pouvez allumer votre micro.

3 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais qu'on présente au témoin

4 la pièce 2082 dont je vais demander le versement également.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, une cote.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce 1015, sous pli scellé.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur.

8 Interrogatoire principal par Mme Gustafson :

9 Q. [interprétation] Témoin 68, veuillez, je vous prie, examiner l'écran

10 que vous avez devant vous et nous dire si toutes les informations qui

11 figurent à l'écran vous correspondent bien et sont exactes ?

12 R. Oui.

13 Q. Merci.

14 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais que la feuille de pseudonyme

15 soit versée au dossier.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a aucune objection. La pièce est

17 versée au dossier.

18 Veuillez poursuivre.

19 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais qu'on présente au témoin la

20 pièce 2080, qui est également une pièce sous pli scellé.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une cote, je vous prie, Monsieur le

22 Greffier.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P1016, versée au

24 dossier sous pli scellé.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

26 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais qu'on nous présente la page

27 suivante.

28 Q. Témoin 68, est-ce que c'est bien ici la déclaration que vous avez

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1 signée le 9 octobre 2007 ?

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce que cette déclaration est véridique et conforme à la réalité ?

4 R. Oui.

5 Q. Si je devais aujourd'hui dans ce prétoire vous poser les mêmes

6 questions qu'au moment où vous avez fait cette déclaration, est-ce que vous

7 me feriez les mêmes réponses qu'alors ?

8 R. Oui.

9 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Nous avons préparé une version expurgée de

10 cette déclaration, les paragraphes 17 à 19 en sont expurgés. J'aimerais

11 demander le versement au dossier.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection ?

13 La version expurgée de la déclaration est versée au dossier de

14 l'affaire.

15 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaiterais donner lecture d'un résumé

16 de la déclaration du témoin.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais auparavant, il ne s'agit pas de

18 P1016, parce que P1016 c'était la déclaration non expurgée, ou est-ce que

19 vous demandez le versement au dossier des deux pièces, expurgée et non

20 expurgée ?

21 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Uniquement la version non expurgée [comme

22 interprété].

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, c'est P1016 ?

24 Mme GUSTAFSON : [interprétation] La pièce 2080 sur la liste 65 ter.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

26 Veuillez lire la déclaration.

27 Mme GUSTAFSON : [interprétation] En 1998, le témoin habitait à Pec avec son

28 mari et leur trois enfants. Le Témoin 68 est Serbe.

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1 Elle a vu pour la dernière fois son mari le matin du 16 juillet 1998

2 alors qu'il quittait la maison pour aller travailler. Il était inspecteur

3 du marché de la municipalité de Pec.

4 L'époux du Témoin 68 a déclaré à celle-ci qu'avant d'aller au travail, il

5 irait voir des proches à Djakovica puis dans le village de Dobric, quand il

6 retournerait à la maison. Il voulait voir comment allaient les membres de

7 sa famille à Dobric parce qu'ils avaient fait l'objet d'une attaque de

8 l'UCK quelques jours auparavant.

9 Vers 13 heures 30 ce jour-là, le mari du mari 68 l'a appelé au téléphone

10 pour lui dire qu'il quittait Djakovica afin de se rendre au village de

11 Dobric. C'est la dernière fois que le Témoin 68 a entendu son mari.

12 Vers 21 heures ce jour-là, le Témoin 68 a appelé le SUP de Pec. On lui a

13 dit qu'ils avaient entendu dire par leurs collègues du SUP de Djakovica,

14 que le Témoin 68 avait été capturé dans le village de Dujak par l'UCK.

15 En septembre 1998, le MUP de Djakovica a dit au Témoin 68 qu'ils avaient

16 arrêté un groupe de membres de l'UCK et que deux de ces hommes de Dujak

17 avaient enlevé le Témoin 68.

18 Le Témoin 68 a quitté le Kosovo avec ses trois enfants le 14 juin 1998 avec

19 les forces de la VJ et du MUP qui étaient en train de se retirer du pays.

20 Les membres de l'UCK dont on lui a dit qu'ils avaient enlevé son mari

21 étaient Ljuan et Krist Perforci.

22 Q. Témoin 68, votre déclaration a été versée au dossier, je ne vous

23 poserai donc que quelques questions. Toutes ces questions ont trait à ce

24 que vous avez appris sur ce qu'était arrivé à votre mari après sa

25 disparition.

26 Vous dites qu'en septembre 1998, vous avez reçu un coup de fil du MUP

27 de Djakovica et on vous a dit qu'on avait arrêté un groupe de membres de

28 l'UCK qui était responsables de l'enlèvement de votre époux. Vous avez

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1 ajouté que vous étiez allé au MUP de Djakovica, et on vous avait dit que

2 deux individus portant tous deux le nom de famille de Perforci avaient

3 enlevé votre mari.

4 Je voudrais savoir si vous êtes allée au MUP de Djakovica le jour

5 même où on vous a appelée ou si vous êtes allée plus tard ?

6 R. Quand je suis allée pour l'identification, c'est ce jour-là que

7 j'y suis allée. Mais ils ne savaient rien. Plusieurs jours près, ils m'ont

8 rappelée, ils m'ont dit qu'un groupe d'hommes avait attaqué le bâtiment du

9 MUP, que certains d'entre eux avaient été arrêtés, et qu'on pensait que

10 parmi eux se trouvaient ceux qui avaient enlevé mon mari. Je crois que ça

11 se passait à la fin du mois de septembre.

12 Q. Combien de temps s'est écoulé entre le moment où on vous a

13 appelée et le moment où vous vous êtes rendue en personne au bâtiment du

14 MUP de Djakovica ?

15 R. Je crois que c'est le lendemain que j'y suis allée, ou deux ou trois

16 jours plus tard. Je ne m'en souviens pas avec précision.

17 La première fois que je suis allée au SUP, ils n'ont rien pu me dire

18 et quand j'y suis retournée, c'était juste après leur appel, deux ou trois

19 jours après ma première visite.

20 Q. Merci. Quand vous êtes allée au MUP de Djakovica, après le coup

21 de téléphone qui vous annonçait l'arrestation, c'est à ce moment-là qu'au

22 MUP on vous a parlé de ces deux personnes dénommées Perforci, qui étaient

23 responsables de l'enlèvement de votre mari, n'est-ce pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que les policiers vous ont expliqué comment ils avaient pu

26 établir que c'était ces deux individus du nom de Perforci qui avaient

27 enlevé votre mari ?

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

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1 M. EMMERSON : [interprétation] Ici ce que j'ai entendu -- la question de

2 savoir si le témoin a peut-être vu des documents. Ces documents ne nous ont

3 pas été communiqués, ils ne semblent pas être disponibles. Comme vous le

4 savez, nous nous opposons à la présentation de documents qui seraient

5 disponibles ou de documents qui seraient présentés par l'intermédiaire de

6 ce témoin. Donc, là, objection de ma part.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'imagine que les deux autres équipes de

8 la Défense abondent dans votre sens.

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous prenons bonne note de votre

11 objection, nous allons voir comment Mme Gustafson va aborder la chose.

12 Vous savez qu'un certain nombre de documents font l'objet

13 d'objections, des documents qui sont disponibles. Donc, si vous évoquez des

14 documents, il faudra que ce soit des documents qui ne sont pas disponibles.

15 Continuez, nous verrons comment les choses évoluent.

16 Mme GUSTAFSON : [interprétation]

17 Q. Je répète ma question, quand vous êtes allée au MUP de Djakovica, est-

18 ce que les policiers vous ont expliqué comment ils avaient pu établir que

19 c'étaient ces deux individus dénommés Perforci qui avaient enlevé votre

20 mari ?

21 R. Il y avait eu une attaque menée contre le SUP, un groupe d'hommes

22 avaient été arrêtés et c'est sans doute au moment où ils ont fait leur

23 déclaration qu'ils ont dit qu'ils avaient enlevé mon mari. On ne m'a pas

24 donné les détails, on m'a simplement dit que c'était les frères Perforci

25 qui avaient commis cet acte.

26 Q. Vous dites : "Ça a dû se passer pendant qu'ils faisaient leur

27 déclaration." Est-ce que le MUP vous a dit si on avait recueilli les

28 déclarations de ces personnes ou pas ?

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1 R. Ce jour-là, on m'a simplement dit que c'était ces deux individus qui

2 les avaient enlevés. On m'a dit que, dans les déclarations qu'ils avaient

3 faites après leur arrestation, ils leur avaient dit qu'ils les avaient

4 enlevés.

5 Q. J'aimerais que nous précisions votre dernière réponse. Est-ce que les

6 fonctionnaires du MUP vous ont parlé des déclarations faites par ces

7 individus, ou est-ce qu'ils vous ont simplement donné des informations

8 présentées de manière générale ?

9 R. Ils m'ont dit que ces individus l'avaient enlevé, qu'ils l'avaient

10 remis à leur chef qui s'appelait Vuk, et puis, qu'on l'avait emmené à

11 Glodjane. Je ne sais pas ce qui s'est passé ensuite.

12 Q. Est-ce que -- ces informations que vous avez reçues au sujet de ce qui

13 était arrivé à votre mari, est-ce que c'est uniquement le MUP qui vous les

14 a transmises, ou est-ce que vous avez obtenu des informations venant

15 d'autres sources ?

16 R. Non, mais je n'étais pas sur les lieux. Je n'ai rien vu d'autre. Je

17 sais simplement ce qu'on m'a dit au MUP.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a eu peut-être une certaine

19 confusion qui est due à votre question.

20 Témoin, vous dites : "Je n'ai rien vu." En fait, Mme Gustafson vous a dit

21 si vous aviez vu quoi que ce soit pendant que vous étiez au MUP.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que, quand vous êtes allée sur

24 place, on vous a simplement donné des informations verbalement au sujet de

25 ce qui s'était passé ? Est-ce que ça s'est passé uniquement comme ça, ou

26 est-ce que vous avez vu de vos yeux autre chose qui a pu vous apprendre

27 quelque chose de plus ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ils m'ont simplement dit qu'ils les

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1 avaient arrêtés -- qu'ils avaient arrêté un groupe et qu'eux, ils faisaient

2 partie de ce groupe, ceux qui l'avaient enlevé, et qui l'avaient ensuite

3 remis à leur chef, le dénommé Vuk, et qu'ensuite, on l'avait emmené à

4 Glodjane. Je n'ai rien vu d'autre.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Madame Gustafson.

6 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Q. Vous dites qu'ils vous ont dit que ces deux individus dénommés Perforci

8 avaient remis votre mari à leur chef Vuk, et qu'ensuite, on l'avait emmené

9 à Glodjane.

10 Est-ce qu'à ce moment-là, on vous a dit où il avait été

11 enlevé ?

12 R. Oui, dans la localité de Dujak.

13 Q. Vous souvenez-vous d'autres détails dont on vous aurait fait part ce

14 jour-là au sujet de ce qui était arrivé à votre mari ?

15 R. Non. A Djakovica, non, sauf ce camp, si on peut appeler ça comme ça,

16 dont Ramush Haradinaj était responsable. Je ne l'ai pas vu personnellement.

17 Je ne le connais pas non plus d'ailleurs.

18 Q. "Ce camp", de quoi parlez-vous exactement ?

19 R. Je parlais de Glodjane parce qu'on m'a dit que c'est là qu'on avait

20 emmené mon mari.

21 Q. Merci. Ultérieurement, après cette visite au SUP de Djakovica, avez-

22 vous obtenu des informations supplémentaires sur ce qu'il était advenu de

23 votre époux ?

24 R. Oui. En janvier, j'ai reçu un coup de fil du MUP de Pec, et on m'a dit

25 que les deux frères étaient à Pec dans une prison à Istok Dubrava. J'ai

26 demandé comment je pouvais consulter leurs déclarations, parce que

27 finalement je n'avais jamais réussi à savoir ce qui s'était passé. Le

28 fonctionnaire du MUP m'a dit qu'ils avaient déclaré qu'il avait été tué, et

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1 qu'il était -- c'est tout ce qu'ils m'ont dit, qu'il avait eu son compte.

2 J'ignore s'ils ont été déclarés coupables, s'ils ont été condamnés. Tout ce

3 que je sais, c'est qu'en 1999, ils étaient en prison à Dubrava.

4 Q. Vous dites qu'en janvier, on vous a appelée du MUP de Pec. C'était en

5 janvier 1999 ?

6 R. Oui, 1999.

7 Q. Quand vous avez reçu ce coup de téléphone en provenance de Pec, qu'est-

8 ce que vous avez fait ?

9 R. Je suis allée au SUP, et j'ai une fois encore fait une déclaration en

10 sujet de la journée où il avait disparu. Bien entendu, précédemment j'avais

11 signalé la disparition de mon mari le 16 juillet 1998, mais je ne pouvais

12 strictement rien faire, parce que j'ignorais qui avait fait cela. Personne

13 ne m'a montré ces gens-là. Je sais simplement qu'ils étaient emprisonnés à

14 Dubrava.

15 Q. Vous dites que quand ils vous ont appelée, vous dites que c'était en

16 janvier, vous avez demandé si vous pouviez consulter leurs déclarations.

17 Est-ce que vous avez jamais pu consulter cette déclaration ?

18 R. Non. Je n'ai pu que savoir ce qu'ils m'ont dit, mais je n'ai jamais eu

19 ça entre les mains. Je n'ai pas pu savoir ce qui s'était passé. Je n'ai pas

20 pu lire cela.

21 Q. Lorsque vous êtes allée au SUP en janvier, est-ce que vous avez appris

22 quoi que ce soit de plus sur ce qui était arrivé à votre mari, en plus de

23 ce que vous saviez déjà après votre visite au MUP de Djakovica en septembre

24 ?

25 R. Non. Je suis allée à toutes les séances d'identification quand on

26 m'appelait, mais à part cela, non.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, votre dernière

28 question, c'était : "Lorsque vous êtes allée au SUP en janvier." J'avais

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1 compris la réponse précédente à la question précédente concernant déjà une

2 visite au MUP en janvier, parce que les questions précédentes étaient :

3 "Quand on vous a appelée en janvier, vous avez demandé si vous pouviez

4 consulter cette déclaration." Le témoin a dit : "Je n'ai rien eu entre les

5 mains à ce moment-là."

6 Donc, la question suivante en fait semble ne pas tenir compte de ce qu'a

7 répondu le témoin avant, et on dirait que vous cherchez à avoir des

8 renseignements différents, tandis que la question porte sur le même aspect.

9 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Elle a

10 dit qu'elle n'avait pas pu consulter les déclarations, et je pensais

11 qu'elle avait pu recevoir des renseignements d'une autre façon à cette

12 occasion. C'est ça que je demandais.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous avez suggéré que c'était

14 une autre occasion, peut-être que j'ai mal compris votre question. Peut-

15 être que vous vouliez dire : "Lorsque vous êtes allée au SUP en janvier,"

16 l'accent était mis sur "lorsque vous êtes allée là," et par conséquent, la

17 réponse précédente concernait la même circonstance, mais il se peut que je

18 vous aie mal compris dans ces circonstances.

19 Je n'aurais peut-être pas dû vous poser la question mais j'étais un

20 petit peu dans le doute; le témoin, apparemment, pas.

21 Veuillez poursuivre.

22 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

23 Mme GUSTAFSON : [interprétation]

24 Q. Je crois qu'il y a, Témoin 68, un peu de confusion sur ce qui s'est

25 passé exactement au mois de janvier lorsque vous êtes allée au SUP.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je pense que j'étais

27 dans le doute plutôt que qui que se soit d'autre dans ce prétoire.

28 Donc, j'ai compris que, lorsque vous êtes allée au SUP en janvier, vous

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1 n'avez jamais vu de déclaration, vous n'avez jamais pu consulter de

2 déclaration et vous n'avez pas reçu de renseignements supplémentaires; est-

3 ce que j'ai bien compris des choses en plus que ce que vous saviez déjà ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. En 1999, je n'ai rien appris ou obtenu de

5 plus que ce que j'avais déjà appris à Pec, si ce n'est qu'il avait été tué

6 et que son corps avait abouti au lac Radonjic. Je n'ai rien appris de plus

7 que cela.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, donc, ça c'était les renseignements

9 complémentaires. C'était là où on l'a retrouvé. Ceci comprend également le

10 fait qu'il aurait été tué, ce qui n'était pas absolument certain avant

11 cela.

12 Oui, merci, Madame Gustafson.

13 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Q. Donc, en 1999, vous avez appris que votre mari avait été tué et que son

15 corps avait été retrouvé au lac Radonjic. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

16 dire à la Chambre de première instance exactement comment vous avez appris

17 cela ? A qui avez-vous parlé ? Qui vous l'a dit ? Qu'est-ce qu'on vous a

18 montré, si on vous a montré quoi que ce soit ?

19 R. Lors de l'identification, oui; mais pas au SUP à Pec si ce n'est le

20 fait qu'ils m'ont dit qu'il avait été tué.

21 Au début de septembre, tout le monde pouvait identifier -- tout le monde a

22 pu identifier leurs proches par des vêtements, des effets vestimentaires,

23 tandis que, dans mon cas, je n'ai pas pu identifier les restes de mon mari

24 parce que je n'ai pas retrouvé de vêtements. Malgré cela, ils avaient

25 encore des doutes et ils continuaient de penser que ses restes humains

26 pouvaient se retrouver parmi les autres. Peut-être que c'était moi qui ne

27 voulais pas, qui étais en train de faire la négation, qui ne voulait pas

28 accepter qu'il ait pu se retrouver parmi eux.

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1 Ce n'est qu'en 2004, lorsqu'en fait, ses restes ont été identifiés et qu'on

2 m'a dit qu'il en faisait partie de ces autres restes, que je l'ai accepté

3 finalement.

4 Q. Merci. Témoin 68, je sais que ce n'est pas facile pour vous, mais est-

5 ce que vous pourriez essayer de vous centrer sur ce qui s'est passé en

6 janvier lorsque vous êtes allée au SUP ? A cette fois-là, vous dites que

7 vous avez appris que votre mari avait été tué et qu'on l'avait retrouvé au

8 lac Radonjic.

9 Lorsque vous avez appris ça en janvier, pourriez-vous dire à la Chambre de

10 première instance comment vous l'avez appris ? A qui vous avez parlé ?

11 Quand ils vous l'ont dit, qu'est-ce qu'ils vous ont montré, s'ils vous ont

12 montré quoi que ce soit ?

13 R. En janvier, sauf le fait qu'ils m'ont dit que les frères avaient dit

14 qu'il avait été tué et jeté au lac Radonjic, on ne m'a rien montré d'autre,

15 on ne m'a rien dit, on ne m'a pas donné de détails supplémentaires. Et je

16 suis rentrée chez moi et je ne pouvais rien faire d'autre. Je ne savais pas

17 à qui m'adresser. J'avais, avant cela, essayé tout ce que je pouvais pour

18 essayer d'en savoir davantage; mais au SUP, ils ne m'ont rien dits, si ce

19 n'est ce que je vous ai raconté. Ils ne m'ont rien dits de plus.

20 Q. Merci, Témoin 68. J'ai encore une question à vous poser, une question

21 mineure qui n'est pas claire à 100 % d'après ce que vous avez dit dans

22 votre déclaration. Votre origine ethnique c'est que vous êtes Serbe et,

23 dans votre déclaration, vous dites que votre mari était allé visité des

24 parents qui étaient Monténégrins. Je voudrais vous demander : exactement,

25 quelle était l'origine ethnique de votre mari ?

26 R. Oui, monténégrin.

27 Q. Je vous remercie, Témoin.

28 Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'en ai fini avec mes questions.

Page 9272

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

2 M. EMMERSON : [interprétation] Je n'ai pas de questions.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Guy-Smith.

4 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je n'ai pas de questions.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harvey.

6 M. HARVEY : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 Questions de la Cour :

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question à vous poser, Témoin,

10 question suivante : est-ce que vous avez jamais -- au cours de votre vie,

11 avez-vous jamais vu un document contenant des déclarations ou une

12 déclaration émanant de l'un ou des deux frères dont on vous a dit qu'ils

13 avaient été mêlés à la disparition de votre mari ?

14 R. Un document, non, sauf le fait qu'on m'a dit à Djakovica que c'était

15 ceux qui -- c'était eux qui avait enlevé mon mari.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, dans vos conversation, par

17 la suite, avec les membres du bureau du Procureur, avez-vous jamais vu un

18 document, ou est-ce qu'on vous a jamais montré un document d'où vous auriez

19 pu apprendre que cela pouvait contenir la déclaration ou les déclarations

20 des deux personnes mentionnées ?

21 R. On m'a lu une déclaration qui avait été faite par Krist Perforci ou par

22 son frère, je ne peux pas me souvenir maintenant. Ils déclaraient qu'ils

23 l'avaient enlevé -- qu'ils avaient enlevé mon mari, qu'ils l'avaient arrêté

24 parce qu'il se trouvait dans sa propre voiture. Et je ne peux pas vraiment

25 me rappeler les détails, c'était il y a longtemps. C'est pour ça que je ne

26 peux pas vous donner les détails précis.

27 Alors, c'était la déclaration qu'ils ont donnée à Djakovica.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais, Madame, vous avez dit : "Ils

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1 ont donné lecture d'une déclaration". Et ma question concernait vos

2 conversation avec le bureau du --

3 R. Je ne voulais pas dire -- enfin, ils ne m'ont pas donné lecture; ils

4 m'ont dit. Peut-être que j'ai utilisé une mauvaise expression. Ils m'ont

5 parlé de lui. Ils ne m'ont pas donné lecture de quelque chose et je n'ai

6 pas eu le document entre les mains de façon à être en mesure de lire. Ils

7 m'ont transmis ce qu'ils avaient -- ce qu'ils leurs avaient déclaré. Ils

8 m'ont transmis cela.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maintenant, je comprends votre

10 réponse comme se référant à ce qui c'est passé à l'époque, que ce soit à

11 Djakovica ou à Pec. Mais ma question maintenant était -- ou elle portait

12 sur vos conversations avec les membres du bureau du Procureur de ce

13 Tribunal plus récemment. Donc, est-ce qu'on vous n'a jamais montré une

14 déclaration lors de vos entretiens avec les membres du bureau du Procureur

15 de ce Tribunal-

16 ci ?

17 R. Ici ou à Belgrade ?

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'un ou l'autre endroit.

19 R. Pendant le récolement, on me l'a montré et je l'ai lu pour me

20 rafraîchir la mémoire. C'était il y a longtemps et les noms, bien sûr,

21 lorsque je les ai lus m'étaient connus parce qu'en fait, ils étaient restés

22 gravés dans ma mémoire. Mais avant cette fois-là, je n'ai pas lu les

23 déclarations.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, c'est la première fois que vous

25 avez, en fait, pu voir un document contenant les déclarations, en

26 l'occurrence, un document que, si j'ai compris votre déclaration, vous

27 n'aviez pas vu précédemment ?

28 R. Oui, c'est bien cela.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie de ces réponses.

2 Est-ce que les questions des membres de la Chambre incitent à poser

3 d'autres questions ? Non.

4 Bien, alors, Témoin 68, ceci met fin à votre déposition. Vous n'avez

5 passé que très peu de temps en salle d'audience, mais comme vous l'aurez

6 compris d'après le résumé, la Chambre a reçu votre déclaration qui a été

7 versée au dossier comme élément de preuve, et je tiens à vous remercier

8 beaucoup d'être venue à La Haye pour répondre à des questions qui ont trait

9 à une question, à savoir la disparition de votre mari. C'est probablement

10 très difficile pour vous de parler de cela, donc, je tiens à vous remercier

11 beaucoup, par conséquent, d'être venu ici pour répondre à ces questions.

12 Madame l'Huissière, je vais vous demander de bien vouloir --

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- escorter le témoin hors de la salle

15 d'audience.

16 [Le témoin se retire]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, nous sommes en audience

18 publique même si les stores sont descendus pour le moment. Est-ce que l'on

19 pourrait peut-être --

20 M. EMMERSON : [aucune interprétation]

21 M. EMMERSON : [interprétation] Oui --

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait peut-être relever

23 les stores avec l'aide d'autres membres de l'équipe du greffe du Tribunal.

24 M. EMMERSON : [interprétation] Oui. A ce stade, il y avait quelque chose

25 que je voulais évoquer en ce qui concerne la déposition que nous venons

26 d'entendre. L'Accusation a communiqué certains documents concernant les

27 poursuites contre Leke Pervorfi qui, en fait, ne donne aucune indication

28 d'une reconnaissance de culpabilité, ni d'une condamnation en ce qui

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1 concerne l'enlèvement qui aurait été fait, mais simplement en ce qui

2 concerne la possession illégale d'armes. En temps utile, nous demanderons à

3 ce que ces documents soient -- ceci fasse l'objet d'un accord entre les

4 parties dont la Chambre pourrait tenir compte.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ces documents, et je regarde

6 également dans votre direction, Madame Gustafson. Contiennent-ils des

7 renseignements sur ce qui s'est passé lors de ce procès ? Je veux dire un

8 jugement c'est une chose, le compte rendu ou le procès-verbal, la procédure

9 en est une autre bien entendu.

10 M. EMMERSON : [interprétation] Nous avons des renseignements très limités.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, les renseignements très limités.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Nous avons des dates, il y a une

13 reconnaissance de culpabilité, un appel contre la condamnation, les motifs,

14 les moyens invoqués en appel contre cette condamnation, la réduction de

15 peine --

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

17 M. EMMERSON : [interprétation] Mais ce qui paraît clairement dans ces

18 documents, c'est qu'il n'a pas été poursuivi en tous les temps en ce qui

19 concerne une participation quelconque d'un enlèvement qui a eu lieu.

20 Les choses, c'est que l'autre homme en question, Krist Perforci - qui, en

21 fait, est un cousin et non pas un frère - est mort en prison dans une

22 situation qui est bien connue de notoriété publique et qui faisait l'objet

23 d'autres chefs d'accusation dans d'autres actes d'accusation.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons examiner cette

25 documentation. C'est important, je pense que la Chambre reçoive tout cela

26 de façon à être à même d'apprécier.

27 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'apprécier les positions et donc il

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1 faudra que la Chambre reçoive autant d'éléments de preuve que possible et

2 même peut-être qu'il ne sera pas facile d'apprécier cela.

3 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que dans certains systèmes, même

5 si quelqu'un avoue un crime, parfois il se peut que ça ne soit pas

6 suffisant pour entrer en voie de condamnation.

7 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne suggère pas quoi que ce soit que --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 M. EMMERSON : [interprétation] -- d'autre chose que la Chambre peut avoir

10 eu évidemment impression que ces poursuites ou ce procès aurait pu avoir

11 abouti à une reconnaissance de culpabilité en ce qui concerne cette

12 question. Et cette impression devrait être corrigée.

13 Est-ce que je pourrais --

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous n'aviez pas évoqué la question,

15 j'aurais demandé --

16 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- des renseignements complémentaires à

18 ce sujet.

19 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que je pourrais dire que la nature de

20 la document pourrait être décrite comme présentée à ce sens qu'il y a

21 différentes affaires, différents accusés. Et tout ceci a été repris dans

22 les documents. Donc, peut-être qu'il serait plus simple pour nous d'avoir

23 un accord qui énoncerait quel est l'essentiel des renseignements, ceci pour

24 la Chambre de première instance. Peut-être que Mme Gustafson et moi

25 pourrions discuter de la question.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous êtes encouragés à le faire.

27 Madame Gustafson, j'interprète plus ou moins ce que vous semblez manifester

28 pour le moment comme le fait que vous seriez disposé à accepter

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1 l'invitation de Me Emmerson.

2 Oui.

3 Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

5 Est-ce que l'Accusation est prête à faire entendre le témoin suivant ?

6 M. DI FAZIO : [interprétation] Sur cette question j'aurais besoin de

7 demander de suspendre l'audience. Maintenant, il y a un certain nombre de

8 motifs pour cela. Première la question par le conseil de la Défense ce

9 matin et ce serait bon si Me Re avait la possibilité de s'organiser pour

10 traiter de ces questions. Pour ces motifs, nous pourrions suspendre

11 maintenant. Je suis sûr que ça permettra d'avoir une déposition beaucoup

12 plus ordonnée pour le témoin suivant.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suspens la séance qui sera reprise à

14 10 heures 30.

15 --- L'audience est suspendue à 10 heures 01.

16 --- L'audience est reprise à 10 heures 33.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, avant d'inviter

18 l'Accusation à faire entrer son témoin suivant dans le prétoire, j'aimerais

19 que nous abordions une question qui a été évoquée à plusieurs reprises, si

20 j'ai bonne mémoire. En effet, cette semaine j'ai fait référence à une

21 décision rendue en mai, si je me souviens bien, et j'ai donné lecture du

22 paragraphe 6 de cette décision, qui énumère les différents critères à

23 respecter par les nouvelles pièces à conviction qui ne figurent pas sur la

24 liste 65 ter. Je crois me rappeler avoir dit que les pièces telles que les

25 listes de pseudonymes, qui ne sont pas des documents d'une importance

26 cruciale, bien entendu, feront l'objet d'une attitude assez souple de la

27 part des Juges.

28 Me Guy-Smith appelle l'attention de la Chambre sur le fait que 25 pièces

Page 9278

1 figurant sur la liste des pièces Zivanovic ne figurent pas sur la liste 65

2 ter. C'est un peu surprenant de voir que ces documents ont reçu des numéros

3 65 ter. Je vais essayer d'être le plus neutre possible, en imaginant que

4 vous avez utilisé cette numérotation pour charger ces documents dans le

5 système électronique. Mais en même temps, lorsqu'on voit un numéro 65 ter,

6 on a l'impression bien entendu que ces documents figurent sur la liste 65

7 ter, alors qu'ils n'y figurent pas.

8 M. RE : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour à toutes les

9 personnes dans le prétoire. Je suis accompagné de

10 Mme Elena Martin Salgado, ce matin, qui m'a aidé à préparer l'audition du

11 témoin qui va entrer dans le prétoire à l'instant.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

13 M. RE : [interprétation] Je remarque, bien entendu, la requête de Me Guy-

14 Smith, qui a été portée à ma connaissance par voie de courriel il y a

15 quelques instants. Bien entendu, nous avons l'intention, et je le fais, de

16 demander l'ajout de ces documents à la liste 65 ter. Que ce soit une

17 question importante sur le fond ou une simple question d'interprétation, en

18 tout état de cause, il va falloir traiter de chacun de ces documents et

19 présenter des arguments par rapport à sa valeur relative en comparaison

20 avec les autres documents.

21 Notre réponse générale, c'est que nous demandons l'ajout de ces documents à

22 la liste. Me Guy-Smith a souligné qu'il n'y avait aucun préjudice sur le

23 plan de la procédure ou sur le fond à l'ajout de ces documents sur la liste

24 qui était jusqu'à présent une liste virtuelle.

25 Monsieur le Président, vous avez tout à fait raison. La numérotation

26 65 ter est le seul moyen d'obtenir le chargement de documents dans le

27 système électronique, et de pouvoir en obtenir l'affichage sur les écrans.

28 S'agissant de l'ensemble des documents, la déclaration écrite que

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1 nous avons communiquée en août 2007, je crois que c'était le 20 août 2007,

2 et la Défense a reçu tous ces documents au plus tard le

3 24 août 2007. Un grand nombre de ces documents ont été reçus par nous cette

4 année en réponse à des demandes de coopération judiciaire.

5 Quand je parle des annexes 1, 2, 3, 48, 49 et 50, nous les avons

6 reçues le 15 mars, après le début du procès intenté par les autorités

7 serbes. Ces documents ont été envoyés à la Défense par communication

8 électronique le 10 avril.

9 Quant aux annexes 9, 11, 15, 16, 18, 25, 26, 28, 30, 32 et 86, elles

10 ont été reçues par l'Accusation le 30 mars des autorités serbes, et ont été

11 chargées dans le système électronique et communiquées à la Défense le 10

12 avril 2007.

13 Les annexes 52, 57, 58, 60, 62, 75, 81 et 84 ont été reçues en octobre de

14 l'année dernière, et j'essaie de me rappeler quand ces documents ont été

15 communiqués, mais en tout cas ils étaient communiqués, c'est certain, à la

16 fin août de cette année.

17 L'annexe 82 a été reçue le 1er mars 1997 [comme interprété], chargée dans le

18 système électronique le 24 juillet 2007. L'annexe 56 a été communiquée le

19 10 avril 2007.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, l'annexe 82 a été reçue le

21 1er mars de quelle année ?

22 M. RE : [interprétation] De cette année.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De cette année ? Je vois "1997" au

24 compte rendu d'audience, donc, il faut lire "2007."

25 M. RE : [interprétation] Et l'annexe 59, qui constitue le document 492 sur

26 la liste 65 ter, figurait déjà sur la liste.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

28 M. RE : [interprétation] Et il y en a encore une, l'annexe 88. Nous sommes

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1 en possession de cette annexe depuis 1999. Je crois qu'elle vient de

2 l'enquête Milosevic.

3 Donc, de façon générale, je puis dire qu'il n'y a aucun préjudice en

4 matière de procédure ou sur le fond par rapport à la Défense. La Défense

5 dispose de ces documents depuis un temps qui lui a amplement suffit pour

6 préparer sa propre enquête. La Défense était informée de notre intention

7 d'utiliser ces documents militaires avec ce témoin depuis déjà plusieurs

8 mois. La plupart de ces documents ont été déposés en janvier et d'autres au

9 mois d'août.

10 La grande majorité d'entre eux, 95 à 99 % dirais-je même, sont des

11 documents militaires, c'est-à-dire des ordres militaires, des rapports de

12 combat, et cetera. Il est certain qu'ils ont un intérêt pour la justice. En

13 tout cas, c'est ce que nous soutenons. Il est intéressant que les Juges de

14 la Chambre entendent des témoignages au sujet du contenu de ces documents,

15 puisqu'ils font référence à la déclaration 65 [comme interprété] ter de

16 Zivanovic.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 M. RE : [interprétation] Et il est intéressant que la Chambre comprenne la

19 situation militaire, donc, ces documents ont un intérêt global.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que dois comprendre que le

21 24 août, c'est bien la date que vous avez citée -- est-ce que c'est le 24

22 août que la Défense a appris que vous alliez utiliser ces documents ?

23 M. RE : [interprétation] C'est la date à laquelle nous avons communiqué les

24 annexes à la Défense --

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

26 M. RE : [interprétation] -- globalement dans un classeur, et je pense que

27 nous avons remis les documents à la Chambre dans la semaine qui a suivi.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous dites que la Défense doit

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1 être informée. Nous sommes aujourd'hui le 11 octobre n'est-ce pas ?

2 M. RE : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dire que la période allant du 24 août au

4 11 octobre constitue "plusieurs mois," c'est un bon exemple d'exagération

5 de votre part par rapport à la réalité de la situation.

6 M. RE : [interprétation] C'est la date à laquelle nous avons communiqué les

7 annexes. Quant à la déclaration écrite - nous l'avons communiquée le 15

8 août - cette déclaration fait référence au document dont je suis en train

9 de parler, qui était chargé dans le système électronique auquel avait accès

10 la Défense.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 M. RE : [interprétation] Cela fait bien plusieurs mois.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moins de deux mois en réalité. Je ne

14 suis pas sûr qu'on puisse parler de quelques mois dans cette situation.

15 Mais en tout cas, cela fait seulement quelques jours que la Chambre a dit

16 très clairement qu'elle ferait preuve de souplesse vis-à-vis des questions

17 d'une importance secondaire, mais qu'en dehors de cela, puisque la Chambre

18 a rendu une décision au mois de mai, les Juges exigent une pleine

19 application de cette décision, et donc l'ajout de pièces à conviction à la

20 liste 65 ter, ce qui bien sûr n'a pas encore été fait.

21 C'est la raison de notre débat aujourd'hui. Il est possible que le moment

22 auquel ces documents ont été reçus justifie pleinement cette réalité. Je ne

23 me prononce ni en faveur, ni contre cette proposition. Mais nous passons

24 maintenant un certain temps dans le prétoire à parler d'une bonne

25 application d'une décision qui en fait n'a été appliquée qu'il y a quelques

26 jours, au moment où la Chambre a appelé l'attention très précisément sur

27 cette exigence de la procédure pour l'Accusation.

28 Mais en dehors de cela, Maître Guy-Smith, pourriez-vous répondre ?

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1 M. GUY-SMITH : [interprétation] Très rapidement, parce que je ne voudrais

2 pas abuser du temps de la Chambre.

3 Nous avons déposé une requête demandant des éclaircissements sur le

4 problème de la procédure 65 ter il y a quelques mois, c'est la raison pour

5 laquelle la Chambre a rendu sa décision. Il n'y a pas de suite à cette

6 procédure. Nous demandons que la procédure soit appliquée comme il convient

7 de l'appliquer de façon à ce que nous puissions traiter de façon informée

8 des renseignements qui nous parviennent.

9 Le fait que quelque chose soit introduit dans le système électronique - et

10 je ne vais pas entrer dans les détails techniques en ce moment même - c'est

11 un élément de confort, rien de plus. Nous avons reçu des milliers et des

12 milliers et des milliers de pages de documents que nous devons explorer et

13 que nous avons reçues par informatique. Mais il y a une autre règle dans

14 l'institution où nous nous trouvons sur les délais de préavis suffisants ou

15 pas.

16 La question réelle ici, c'est la longueur de ce préavis et le fait que des

17 documents, dont il vient d'être admis qu'ils étaient importants, ont été

18 communiqués très tardivement. L'Accusation ne veut pas appliquer les

19 règles, nous demandons quelle soit invitée à le faire et que des menaces de

20 sanction soient utilisées pour la convaincre.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous allons réfléchir à la

22 question. Mais la Chambre ne peut pas --

23 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je comprends très bien.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- répondre immédiatement.

25 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je comprends bien.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

27 M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous essayons entre autres d'obtenir que

28 cessent ces petits jeux qui se déroulent depuis plusieurs mois, en réalité.

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1 La Défense est sans cesse en train de courir pour rattraper le train

2 lorsque la communication se fait tardivement. Nous avons reçu des

3 déclarations 92 ter tardivement, ce qui nous amène à de grandes difficultés

4 pour comprendre la thèse de l'Accusation. Nous aimerions que ces petits

5 jeux cessent.

6 M. RE : [interprétation] Je veux dire le 20 août, enfin le 15 août, est-ce

7 que c'est ça une communication tardive de la déclaration écrite ? Le témoin

8 est entendu le 11 octobre ?

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je parle des difficultés générales.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ne confondons pas tout. D'abord, la

11 communication électronique se fait, ensuite, il y a la liste des annexes

12 qui peut varier. Bien entendu, nous ne parlons pas de milliers et de

13 milliers de documents dans le cas présent, nous ne parlons pas de

14 communication électronique.

15 Mais en dehors de cela, les problèmes liés à la communication des

16 déclarations écrites 92 ter sont un peu différents du problème dont nous

17 traitons en ce moment, à savoir l'ajout de documents à la liste 65 ter.

18 Ne mélangeons pas tout.

19 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne voudrais pas tout mélanger. Mais

20 c'est lorsque nous analysons une déclaration 92 ter que nous pouvons

21 établir un lien avec les annexes et voir si nous avons des objections à ce

22 que les annexes soient portées à la connaissance de la Chambre. C'est à

23 cela que je faisais référence.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est clair.

25 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense que les objections sont notées. Je

26 comprends que la Chambre ne puisse pas traiter dans le détail de chaque

27 annexe à l'instant même --

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet.

Page 9284

1 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- ce qui souligne bien la nature du

2 problème à mon avis.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec votre

4 interprétation.

5 Monsieur Re, est-ce que vous êtes prêt à entendre

6 M. Zivanovic ?

7 M. RE : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président, j'invite à

8 entrer dans le prétoire le général de division, Dragan Zivanovic.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 M. RE : [interprétation] En attendant qu'il arrive, j'aimerais évoquer un

11 point qui a un rapport avec les annexes et les documents intercalaires

12 annexés aux déclarations écrites. Il y en a 90 environ qui sont annexés à

13 cette déclaration-ci. Je proposerais, si cela convient à la Chambre, d'en

14 traiter de la même façon que nous l'avons fait avec la déposition de M.

15 Stijovic, c'est-à-dire de donner une cote et d'enregistrer ces documents

16 aux fins d'identification dans leur ordre chronologique.

17 Plusieurs d'entre eux sont déjà au dossier et sont des pièces de la

18 Défense. Par conséquent, nous n'en parlerons pas parce que manifestement je

19 ne vais pas soumettre au témoin chacun des documents séparément, en tout

20 cas nous suivrons le même ordre.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous invitons M. le Greffier, à donner

22 une cote à ces documents, ce qui bien sûr ne préjuge en rien de la façon

23 dont la Chambre se prononcera le moment venu, donc c'est simplement à des

24 fins administratives.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, quelques mots, si

27 vous me le permettez, pour vous dire que nous avons déjà essayé d'aborder

28 le problème du temps. C'est un témoin dont le contre-interrogatoire, si mes

Page 9285

1 prévisions sont exactes, durera un certain temps, et je pense qu'il est

2 assez peu réaliste de prévoir que sa déposition se termine aujourd'hui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois me rappeler que la durée prévue

4 était de deux heures.

5 M. EMMERSON : [interprétation] Pour l'interrogatoire principal.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 M. EMMERSON : [interprétation] En effet.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Oui, j'avais mal compris.

9 "Durera un certain temps," cela veut dire pas mal de temps. Oui.

10 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit "little time," en anglais,

12 c'est le mot "little" qui m'est resté gravé dans l'esprit. Il a fallu que

13 je relise ce que vous avez dit pour bien comprendre.

14 M. RE : [interprétation] Il y a également la déclaration 92 ter écrite. Je

15 voudrais en donner lecture pour le compte rendu d'audience au début de

16 l'audition de ce témoin. Je ne l'ai pas fait avec

17 M. Stijovic parce qu'il y avait une décision en suspens au moment où il a

18 pénétré dans le prétoire. Mais comme la Chambre le sait, nous avons résolu

19 la question des expurgations hier soir.

20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, avec l'aide de la Chambre, si je me

22 souviens bien.

23 M. RE : [interprétation] Cela va sans dire.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic, m'entendez-vous dans

25 une langue que vous comprenez ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne déposiez, il vous faut

28 prononcer une déclaration solennelle indiquant que vous allez dire la

Page 9286

1 vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Le texte vous est tendu à

2 l'instant par Mme l'Huissière, je vous invite à en donner lecture.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

4 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

5 LE TÉMOIN: DRAGAN ZIVANOVIC [Assermenté]

6 [Le témoin répond par l'interprète]

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Zivanovic. Vous pouvez

8 vous asseoir. C'est M. Re, représentant de l'Accusation, qui sera le

9 premier à vous interroger.

10 Interrogatoire principal par M. Re :

11 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Zivanovic.

12 R. Bonjour.

13 Q. Commençons par le commencement. Je vous demanderai de nous dire si

14 votre nom est bien Dragan Zivanovic et si vous êtes bien né le 8 janvier

15 1955. Je vous demanderai aussi si vous êtes général de division à la

16 retraite de l'armée de la République de Serbie, et si avant cela vous étiez

17 général de l'armée de la République fédérale yougoslave, et avant cela

18 encore de la JNA. Ceci est exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez pris votre retraite de l'armée de la République de Serbie le

21 31 mars 2006, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous avez sous les yeux --

24 M. RE : [interprétation] C'est un document qui intéresse toutes les

25 personnes présentes dans le prétoire -- un exemplaire de votre déclaration

26 écrite 65 ter et un exemplaire des annexes à cette déclaration. Tout cela

27 dans un classeur qui va de 1 à 90 en anglais et en B/C/S.

28 Q. Je vous demanderai de vous pencher sur votre déclaration écrite que

Page 9287

1 vous avez signée et datée le 9 août 2007. Ma première question est la

2 suivante : est-ce que vous avez ce texte sous les yeux ?

3 R. Oui.

4 Q. Ce document porte-t-il votre signature et son contenu est-il véridique

5 et exact ?

6 R. Oui, j'y vois ma signature et ce document correspond à la réalité.

7 Q. Si je devais vous interroger au sujet des thèmes abordés dans cette

8 déclaration écrite aujourd'hui, fourniriez-vous les mêmes réponses que

9 celles que vous avez faites le jour de la rédaction de ce document ?

10 R. Les mêmes.

11 Q. L'Accusation a accepté - avec la collaboration des Juges de la Chambre

12 bien entendu - l'Accusation s'est mise d'accord avec la Défense pour

13 supprimer la dernière phrase du paragraphe 42 qui commence par les mots

14 "nous avons entendu"; l'intégralité du paragraphe 47; la première phrase du

15 paragraphe 48 qui commence par les mots "moi aussi"; ainsi que les mots que

16 l'on trouve à la ligne 5 du paragraphe 94 en anglais, et ces mots sont "par

17 l'UCK".

18 Avec ces expurgations auxquelles il sera procédé ultérieurement, je demande

19 le versement au dossier de ce document.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Y a-t-il des objections du côté de

21 la Défense ?

22 Monsieur le Greffier, je ne sais pas si ce document est déjà chargé dans le

23 système électronique, en tout cas, la version amendée, et si vous avez pu

24 lui affecter une cote, si oui, cette cote ?

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

26 pièce P1017.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. P1017, c'est un document versé au

28 dossier désormais. Quant à la déclaration relative aux annexes, elle suivra

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1 le versement au dossier de celle-ci.

2 Veuillez procéder, Monsieur Re, je vous prie.

3 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

4 M. RE : [interprétation]

5 Q. Monsieur Zivanovic, je vous demanderais de revenir sur un certain point

6 figurant dans votre déclaration écrite, mais avant cela, je vais donner

7 lecture d'un résumé de votre déclaration pour introduction au compte rendu

8 d'audience et pour information du public.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'un exemplaire de la

10 déclaration a été remis aux cabines d'interprétation ?

11 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

12 M. RE : [interprétation] Oui, les cabines ont reçu ce texte. Je vous prie

13 de m'excuser, Monsieur le Président, je l'avais moi-même il y a un instant.

14 Bien, le voici, résumé de la déclaration 92 ter de Dragan Zivanovic :

15 Dragan Zivanovic a pris sa retraite en tant que général de division de

16 l'armée de la République de Serbie en 2006. Il a servi au Kosovo dans les

17 rangs de l'armée yougoslave -- de l'armée serbe, depuis 1997 jusqu'à son

18 départ en juin 1999.

19 Il était chef d'état-major du Corps de Pristina au sein de la 125e

20 Brigade mécanisée depuis le 1er septembre 1997, jusqu'au 12 juin 1998, date

21 à laquelle il a été nommé commandant de la 125e Brigade mécanisée. Sa zone

22 de responsabilité couvrait les municipalités de Pec, Decani, Istok et

23 Klina, ainsi que - j'utilise les mots serbes parce que le témoin est serbe

24 - ainsi que les villages de Glodjane et de Jablanica et le nord-ouest du

25 haut du lac Radonjic, y compris la zone du canal du lac Radonjic.

26 La 125e Brigade mécanisée a vu ses effectifs croître tout au

27 long de l'année 1998. Ses effectifs sont passés de 1 400 hommes en janvier

28 1998, à 2 500. Le 28 février 1998, plusieurs policiers ont été tués lors

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1 d'une embuscade de type militaire contre une patrouille du MUP à Likosane.

2 Cette embuscade a démontré que l'UCK était en train de s'organiser sur le

3 plan militaire.

4 Le MUP a constaté que l'UCK s'entraînait, bâtissait des bunkers et

5 des tranchées. Les transports d'armes par la frontière de l'Albanie vers le

6 Kosovo-Metohija se sont accrus et les postes-frontières de l'armée

7 yougoslave ont été renforcés pour empêcher ces incursions. A partir du 28

8 février, la 125e Brigade mécanisée avait des ordres très fermes pour être

9 prête au combat dans les six heures. En mai 1998, l'aptitude aux combats a

10 été réduite à un délai d'une heure.

11 Le résultat direct de l'action de l'UCK a été que le MUP a créé des

12 postes de contrôle sur le groupe principal. L'UCK n'a pas cessé ses

13 attaques contre ces postes de contrôle. Une fois que Likosane a été attaqué

14 le 28 février, la région de Kosovska Mitrovica-Pec, cette route, a été sous

15 le contrôle de l'UCK, et la 125e Brigade mécanisée a été contrainte

16 d'utiliser la route Kosovska Mitrovica-Pristina-Pec au lieu de celle-ci. En

17 1997, un soldat aurait pu couvrir la distance Kosovska Mitrovica-Pec tout

18 seul et sans armes [comme interprété].

19 Les Groupes de Combat ont été créés au sein de la 125e Brigade mécanisée en

20 avril 1998 pour aider le MUP à maintenir son contrôle sur la route Pec-

21 Decani-Djakovica, les unités du MUP subissant constamment des attaques sur

22 cette route.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez ralentir un peu.

24 M. RE : [interprétation] En avril 1998, l'UCK a attaqué les positions de

25 l'armée yougoslave au lac Radonjic au niveau de l'usine d'épuration d'eau.

26 Le 25 avril, le général de division Pavkovic a ordonné que "les terroristes

27 capturés" soient traités dans le respect des conventions de Genève et des

28 lois de la guerre. L'armée yougoslave n'était pas présente dans la zone

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1 située à l'est de la route Pec-Decani-Djakovica. Le MUP a pénétré le

2 secteur de temps en temps, mais ce secteur était sous le contrôle de l'UCK.

3 Le chef de la sécurité de la brigade de Zivanovic lui a fait savoir que le

4 quartier général de Ramush Haradinaj se trouvait dans la zone de Glodjane.

5 Zivanovic a été informé du fait que Haradinaj disposait de 500 à 1 000

6 hommes entraînés et armés, entraînés à des actions terroristes. Zivanovic a

7 également été informé du fait qu'à Jablanica, qui était un bastion de

8 l'UCK, se trouvait une prison dans laquelle les Serbes enlevés ainsi que

9 des Rom et des Albanais loyaux étaient en détention.

10 En mai 1998, et suite au conflit avec l'UCK, l'assemblée de la République

11 fédérale yougoslave a voté une loi spéciale qui donnait le contrôle d'une

12 zone de cinq kilomètres de territoire le long de la frontière à l'armée

13 yougoslave. En mai 1998, l'armée yougoslave ne pouvait plus utiliser la

14 route Pristina-Klina-Pec, pas plus que la route Pristina-Klina-Djakovica,

15 Kosovska Mitrovica-Pec et Pec-Decani-Djakovica. L'UCK contrôlait les routes

16 qui partaient vers l'est, c'est-à-dire vers Glodjane, ainsi que toutes les

17 routes situées à l'est de la route Pec-Djakovica.

18 La 125e Brigade mécanisée n'a pas subi les attaques de l'UCK dans les

19 premiers mois de 1998. Le 23 mai 1998, Zivanovic a emmené 220 soldats à la

20 frontière sur la route Djakovica-Ponosevac-Morina et a été attaqué par

21 l'UCK à l'aide de mortiers et de lance-roquettes portables. A la mi-juin

22 1998, sa brigade subissait trois à quatre attaques par jour.

23 A la fin juillet, début août, la 125e Brigade mécanisée a aidé le MUP à

24 mener à bien une opération visant à nettoyer la route Pec-Pristina. Au

25 début du mois d'août 1998, le Groupe de Combat numéro 3 de la 125e Brigade

26 a aidé le MUP dans le secteur de Dukagjini à désarmer des soldats de l'UCK.

27 Je devrais parler : "D'une opération destinée à désarmer les soldats de

28 l'UCK." C'est ce qu'on devrait lire dans le texte.

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1 Les patrouilles du MUP étaient attaquées tous les jours par l'UCK. Les

2 hommes du MUP et de la 125e Brigade mécanisée qui étaient à peu près 420 au

3 total, se sont emparés de Prilep après deux jours de résistance de la part

4 de l'UCK, qui disposait, selon les estimations, d'une soixantaine d'hommes.

5 Ensuite, ces mêmes forces se sont emparées de Rznic. Le MUP a créé des

6 barrages qui ont été attaqués par l'UCK qui, à ce moment-là, a repris le

7 contrôle du secteur.

8 Une importante opération combinée armée yougoslave/MUP a eu lieu

9 contre l'UCK dans la période allant du 6 au 8 septembre 1998. La 125e

10 Brigade a avancé jusqu'à Zarki Pojas. Quant au MUP, il a poursuivi son

11 avance jusqu'à Rznic et jusqu'à la zone du canal du lac Radonjic. Des

12 unités faisant partie de la 549e Brigade mécanisée ont aidé les forces du

13 MUP à s'emparer de Glodjane.

14 C'est la fin du résumé de la déclaration.

15 Q. Monsieur Zivanovic, je vais maintenant vous poser quelques

16 questions au sujet des thèmes abordés dans votre déclaration écrite de

17 façon à ce que vous donniez des détails complémentaires aux Juges et que

18 des précisions supplémentaires soient apportées sur ces sujets.

19 Le premier thème que j'aborderai, c'est, de façon générale, la situation

20 qui présidait au niveau de la frontière en 1998, et l'importance militaire

21 de ce qui se passait au niveau de cette frontière entre l'Albanie et le

22 Kosovo.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'était peut-être pas suffisamment

24 clair, parce que vous avez dit : "La première chose sur laquelle je

25 souhaiterais vous interroger". On ne sait pas s'il s'agit d'une demande

26 faite au témoin de nous expliquer l'importance.

27 M. RE : [interprétation] : Oui, il s'agissait de --

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, est-ce que c'était vraiment

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1 une question, parce que --

2 M. RE : [aucune interprétation]

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- j'avais l'impression que le témoin

4 attendait une véritable question, et il n'était pas très sur, il ne savait

5 pas si vous lui demandiez déjà de donner des explications.

6 M. RE : [interprétation]

7 Q. C'est ma première question, Monsieur Zivanovic. Je voudrais que vous

8 nous expliquiez l'importance des événements qui se déroulaient à la

9 frontière au début janvier de cette année 1998.

10 R. L'objectif essentiel de l'armée de la Yougoslavie au Kosovo-Metohija et

11 de la 125e Brigade motorisée c'était de protéger la république de l'Etat.

12 Aux termes de la Constitution, c'est l'armée qui était chargée de garder la

13 frontière de la République fédérale de Yougoslavie. Elle s'occupait de la

14 garde, de ce ruban de terrain de 100 mètres. Tout le reste relevait du

15 ministère de l'Intérieur.

16 Au début de l'année 1998, on a vu une augmentation du nombre de

17 traversées illicites de la zone frontalière dans la zone de responsabilité

18 de la 125e Brigade, qui se trouvait sur la zone. Vous avez une frontière

19 entre le Monténégro, l'Albanie et la Yougoslavie, et entre Morina et --

20 dans le village de Morina, à côté de la tour de garde de Kosare.

21 On a enregistré de nombreux passages; jusqu'à 200 personnes en avril.

22 Oui, je voulais parler du mirador. L'objectif de ces gens c'était d'aller

23 en Albanie pour acheter des armes, et ces armes et ces équipements

24 militaires, ensuite, on les ramenait au Kosovo-Metohija pour fournir des

25 armes aux terroristes.

26 Q. Je vais vous demander de vous interrompre quelques instants, parce que

27 souhaiterais, grâce au logiciel Sanction, présenter le paragraphe 28 de

28 votre déclaration, au sujet de ces franchissements de la frontière.

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1 Vous parlez d'un approvisionnement en armes illégales en provenance

2 de l'Albanie. Veuillez nous parler de la magnitude de ce problème du point

3 de vue des fonctionnaires de l'Etat yougoslave au cours du début de cette

4 année 1998.

5 R. Pour nous, c'était un problème très important, très grave, pour les

6 raisons qui sont les suivantes : D'abord, avec l'effondrement des

7 structures militaires en Albanie, ces forces armées albanaises ne gardaient

8 plus les dépôts d'armes d'équipements militaires en Albanie, si bien que

9 les civils pouvaient y avoir accès et ça pouvait, éventuellement, entraîner

10 des opérations de contrebande d'armes.

11 Avec ce qui se passait au Kosovo-Metohija, les actions terroristes au

12 Kosovo-Metohija, il existait un besoin, de la part de ces gens-là,

13 d'approvisionner les leurs en armes pour mettre en place cette soi-disant

14 Armée de libération du Kosovo. Voilà le problème que représentaient pour

15 nous ces franchissements illégaux de la frontière du Kosovo-Metohija en

16 Albanie d'abord, pour aller acheter des armes.

17 Pour ce faire, dans tous les villages ils levaient des fonds, et au

18 niveau de la région également, ils s'adressaient également à la diaspora, à

19 l'étranger, puis ils s'adressaient également aux hommes d'affaire de leurs

20 communautés. Puis ensuite, on désignait certaines personnes qui avaient

21 pour mission de franchir la frontière, ce à quoi il faut ajouter qu'ils

22 disposaient de guides qui étaient très bien entraînés et qui savaient très

23 bien comment fonctionnait la sécurité sur les zones frontalières parce

24 qu'ils avaient surveillé la chose pendant longtemps. Ça faisait plus de

25 trois ans qu'ils regardaient ce qui se passait à la frontière et, de ce

26 fait, ils étaient en mesure de guider ces personnes qui se livraient à des

27 agissements illicites et qui formaient des colonnes, soit à pied, soit à

28 dos d'ânes. Ils pouvaient les faire passer, puis une fois qu'ils avaient

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1 acheté toutes ces marchandises, ils les faisaient revenir.

2 Q. Pendant ces trois mois de l'année 1998, est-ce que vous savez à peu

3 près combien d'armes ont franchi la frontière ?

4 R. D'après le ministère de l'Intérieur, d'après ses estimations pour le

5 début de l'année 1998, au Kosovo-Metohija, quelque 80 000 à 100 000 armes

6 se trouvaient dans le pays, mais d'après les estimations officieuses, ça

7 pouvait même être beaucoup plus important; 200 000 armes. A la fin 1998,

8 une fois que certains villages ont restitué volontairement leurs armes, en

9 septembre et en octobre, nous avons estimé que l'on pouvait compter quelque

10 400 000 armes dans la région.

11 Q. Je vous demande ce qu'il en est des armes qui ont traversé la frontière

12 au cours de ces premiers mois de l'année 1998 ?

13 R. Au cours du premier semestre de cette année, dans ce secteur de 40

14 kilomètres dans ma propre zone, j'ai fait rapport du passage de quelque 20

15 000 armes à travers la frontière.

16 Q. Quel était le genre d'armes que la VJ parvenait à intercepter ?

17 R. Il s'agissait, pour l'essentiel, d'armes qui, précédemment, étaient des

18 armes de l'armée albanaise : des armes de fabrication chinoise, pour

19 l'essentiel, qui venaient de l'arsenal de l'armée albanaise; des fusils

20 semi-automatiques; des fusils automatiques type

21 Kalachnikov; des mitraillettes; des mitrailleuses; des lance-roquettes

22 portable de plusieurs types, trois ou quatre sortes avec une portée de 150

23 à 400 mètres; des mortiers de 60 millimètres et de 82 millimètres; avec

24 tout l'équipement y affairant, des chargeurs et tout ce qui était

25 nécessaire à toutes sortes d'armes, à commencer par des projectiles de

26 calibres 7.62, 14.5, 12.7, 75 millimètres, 82 millimètres, 120 millimètres.

27 Vous aviez également des obus pour les lance-roquettes ou autres portables,

28 des mines anti-personnel, et cetera.

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1 Q. Quels sont les systèmes d'armement les plus lourds que vous ayez

2 interceptés au cours de cette période ?

3 R. En avril, l'arme la plus lourde qu'on ait saisie c'était un canon sans

4 recul de 82 millimètres de calibre; des mortiers du même calibre; des

5 munitions pour armes d'infanterie; des canons sans recul; des lance-

6 roquettes portable; des mortiers, et cetera.

7 Q. Vous avez évoqué, il y a quelques instants, des colonnes qui

8 traversaient la frontière soit à pied, soit à dos d'âne et qui revenaient

9 une fois quelles étaient, quelles s'étaient procurées ce qu'elles

10 cherchaient.

11 Pouvez-vous nous décrire un peu plus en détail ces colonnes et pouvez-vous

12 nous dire de quelle manière les marchandises c'est-à-dire les armes étaient

13 ensuite transportées à travers la frontière ?

14 R. D'après ce que nous avons pu observer de la zone frontière, d'après les

15 renseignements que nous avons reçus pour la sûreté de l'Etat mais surtout à

16 partir des observations que nous avons pu faire - et je parle là des

17 autorités, des instances chargées de la surveillance des frontières - vous

18 voyez des convois, des convois qui partaient acheter des équipements

19 militaires et des armes, et généralement, ils se réunissaient à proximité

20 de la frontière. Généralement, c'était à côté de Tropoje, une agglomération

21 de taille moyenne. C'est là que l'on amenait en camions les équipements

22 militaires, les armes, et cetera. La distribution se faisait pendant la

23 nuit, peut-être que c'était vendu. Moi, je ne sais pas parce que j'étais

24 quand même -- je n'étais pas sur place.

25 Ensuite, suivant leurs propres évaluations de la situation, ils décidaient

26 s'il valait mieux refranchir -- franchir la frontière en colonnes uniques

27 ou par groupes de cinq ou six personnes ou autres, et c'est ainsi qu'ils

28 revenaient. Ils empruntaient des itinéraires qui n'étaient pas idéaux,

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1 enfin, pour les itinéraires les plus souhaitables pour traverser la

2 frontière que ce soit pour des aliments ou pour des piétons. En fait, ils

3 choisissaient des itinéraires où ils estimaient qu'ils ne tomberaient pas

4 dans une embuscade, qui n'auraient pas une embuscade qui soit tendue par

5 les équipes des miradors ou des zones où ils pensaient ne pas tomber sur

6 les gardes frontières.

7 Il faut dire que cette zone de 40 kilomètres de long, elle était surveillée

8 par 150 hommes qui étaient répartis en trois, en quatre ou cinq miradors

9 suivant la saison, suivant ça dépendait, c'était différent en été ou en

10 hiver. Mais c'est très difficile de couvrir toute cette zone, une zone de

11 40 kilomètres avec des équipes, et chaque équipe était constituée de 30 à

12 40 hommes. Les lieux où les embuscades se déroulaient changeaient mais ils

13 étaient très bien préparés. Ils observaient les activités des gardes

14 frontières et ils utilisaient les zones où ils savaient que nous ne serions

15 pas pour y passer.

16 Q. Est-ce que ces franchissements de la frontière se faisaient la nuit ou

17 le jour ?

18 R. La plupart du temps, ils franchissaient la frontière la nuit ou à

19 l'aube; il arrivait également mais c'était assez exceptionnel qu'ils

20 franchissent la frontière pendant la journée si la météo était défavorable

21 enfin s'il ne faisait pas beau, s'il y avait, par exemple, du brouillard ou

22 s'il pleuvait.

23 Q. Pour franchir la frontière, quels étaient les endroits qu'ils

24 choisissaient, les points de franchissement ?

25 R. Ce n'était pas ce qu'ils utilisaient les points de franchissement

26 licites, ils passaient à Bobicevica -- par Bogicevica, c'est à une hauteur

27 qui s'élève à plus de 2 500 mètres au-dessus du niveau de la mer, donc, ils

28 passaient partout.

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1 Q. Une fois que les armes étaient arrivées au Kosovo, où est-ce qu'elles

2 allaient ces armes ?

3 R. Bien, les armées étaient transportées dans les états-majors qui

4 existaient dans les villages et à ce moment-là ces QG ou ces états-majors

5 décidaient à qui il convenait d'envoyer les armes ou de les distribuer. Ces

6 armes étaient distribuées à des volontaires qui voulaient rejoindre les

7 rangs de cette organisation terroriste.

8 Ultérieurement, ils avaient eu recours à une mobilisation, au caractère

9 obligatoire, et ici, j'utilise le terme militaire de "mobilisation." En

10 fait, ce qui se passait c'est qu'ils contraignaient les habitants, les

11 jeunes pour l'essentiel à prendre les armes et à rejoindre les rangs de

12 formations armées, de Groupes de Terroristes, qui, selon eux, étaient

13 investis de certaines missions.

14 Q. Vous avez parlé et ça figure également au paragraphe 28 de votre

15 déclaration, vous parlez : "Des postes-frontières qui ont été renforcés

16 pour essayer d'empêcher ces franchissements illicites."

17 Pouvez-vous nous décrire ces postes-frontières, en quoi consistaient-ils

18 exactement ?

19 R. Prenons un exemple du poste-frontière de Morina qui se trouve au niveau

20 du village de Ponosevac, Gornja et Donja Morina, Tropolja, ça se trouve à

21 cet endroit. La zone de responsabilité de ce poste-frontière s'étend sur 13

22 kilomètres de Boka ou Kamen en passant par le village de Prevoj et jusqu'au

23 poste-frontière de Kosare. Il y avait là 30 à 40 hommes, y compris le chef

24 et son adjoint et il s'agissait là d'officiers de métier.

25 Comment assuraient-ils la sécurité du poste-frontière ? Les miradors en

26 tant que tels se trouvaient à une vingtaine de mètres de la frontière à vol

27 d'oiseau. Il existait un plan qui changeait chaque jour suivant les

28 décisions du commandant de la compagnie ou du commandant du Bataillon

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1 cantonné à Djakovica.

2 On envoyait des patrouilles, par exemple, on peut dire qu'il y avait deux

3 patrouilles qui organisaient des embuscades, et dans les patrouilles, on

4 comptait trois, cinq ou huit hommes. Si on recevait des informations au

5 sujet de certaines difficultés particulières, on augmentait les effectifs

6 des patrouilles. Parfois les patrouilles étaient envoyées dans directions

7 différentes mais, dans cette zone frontalière -- dans ce ruban frontalier

8 de quelques cent mètres.

9 Les patrouilles se déplaçaient, de manière tout à fait visible, officielle,

10 parce qu'elles défendaient leur propre pays. Mais parfois, quand il y avait

11 vraiment des problèmes, et avec l'augmentation des attaques des terroristes

12 contre les forces assurant la sécurité de la frontière, il arrivait que les

13 patrouilles se déplacent en essayant de se cacher lorsqu'ils passaient.

14 Lorsqu'ils devaient traverser une zone à découvert, ils le faisaient très

15 rapidement en essayant de ne pas se faire voir.

16 Quant aux embuscades, elles étaient aussi préparées pour avoir lieu pendant

17 des périodes précises. Il y en avait qui durait deux à trois heures,

18 d'autres six heures. En fait, on se plaçait le long d'axes ou on pensait

19 pouvoir prendre par surprise des gens qui auraient souhaité franchir la

20 frontière illégalement dans un sens ou dans l'autre, ou dans les deux sens.

21 Il était décidé, à ce moment-là, de se poster là pendant un certain temps.

22 Il s'agissait également de faire respecter la discipline dans ce genre

23 d'opérations, il fallait surtout ne pas se faire entendre, ne pas se faire

24 voir.

25 Si les patrouilles respectaient ces directives, effectivement,

26 personne ne les remarquait; sinon, ceux qui essayaient de franchir la

27 frontière illégalement risquaient de les remarquer.

28 Q. Ces embuscades -- ces patrouilles, pouvez-vous nous dire quelle en a

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1 été la fréquence pendant les quatre premiers mois de l'année 1998 ?

2 R. Jusqu'au mois d'avril, la situation était pratiquement normale. Il y

3 avait deux opérations d'embuscade par jour.

4 Mais à partir du mois d'avril, avec l'augmentation du nombre

5 d'affranchissements illégaux de la frontière, le Corps de Pristina a

6 renforcé certains postes-frontières en leur fournissant des effectifs

7 supplémentaires, en particulier pour ce qui a été des opérations de

8 reconnaissance afin de détecter ne temps utile, toute difficulté ou

9 problème éventuel.

10 Mais ces renforts ne pouvaient pas tout résoudre quand on avait 30 à

11 40 hommes sur un poste de contrôle et qu'ils recevaient un effectif

12 supplémentaire de 20 hommes, ça représentait un renforcement de 50 %. Mais

13 ces hommes supplémentaires n'étaient pas chargés de mener à bien des

14 patrouilles, mais de mener à bien des opérations de reconnaissance et des

15 observations depuis les miradors.

16 Q. Vous nous dites que la situation était pratiquement normale, il y avait

17 deux embuscades par période de 24 heures. Qu'est-ce que cela avait de

18 normal cela ?

19 R. Ce qui était normal et habituel, c'est qu'il y ait une opération de ce

20 type pendant la journée et un autre pendant la nuit. Il fallait faire

21 intervenir mes hommes, cela correspondait au règlement des forces postées

22 aux frontières. Il ne fallait pas permettre un relâchement, quel qu'il

23 soit, au niveau des postes- frontières et de la zone frontalière. La

24 discipline devait être respectée absolument.

25 Q. Donc, vous dites que, lorsque les choses étaient calmes, la situation

26 était calme. Il y avait deux embuscades par jour et que c'était différent,

27 si les choses -- si la situation devenait plus agitée, ou est-ce que vous

28 essayez de nous dire autre chose ?

Page 9300

1 R. C'est exactement ce que je suis en train de vous -- de vous expliquer.

2 Lorsque la situation était calme, il y avait deux opérations d'embuscade

3 mais elles ne pouvaient pas avoir lieu en même temps. Une de ces opérations

4 avait lieu pendant la nuit et l'autre pendant la journée.

5 S'il y avait une opération de ce type peut-être la journée, cela durait

6 deux heures et les dix heures suivantes se déroulaient sans opération de ce

7 type - et je parle ici de la situation d'un poste-frontière. Voilà ce qui

8 se passait au niveau de chaque poste-frontière.

9 S'il n'y avait pas de patrouille à ce moment-là, la zone en question

10 faisait l'objet d'observation de notre part autant que possible, cette zone

11 de 13 kilomètre, donc, faisait l'objet d'observation à partir des miradors.

12 Q. Il y a quelques instants, vous nous avez parlé de renforts

13 d'ordre allant dans ce sens. Vous avez parlé au paragraphe 28 d'un ordre du

14 général Pavkovic en date du 18 mars 1998.

15 M. RE : [interprétation] Intercalaire 3, annexe 3. J'aimerais que ce

16 document soit affiché à l'écran.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il a déjà un numéro

18 d'enregistrement, Monsieur le Greffier ?

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce numéro 01930 sur la liste 65 ter,

20 cote aux fins d'identification P1021.

21 M. RE : [interprétation]

22 Q. Est-ce que vous avez trouvé, Monsieur le Témoin, le document qui se

23 trouve à l'intercalaire numéro 3 ? C'est un ordre du 18 mars 1998 signé par

24 le général Pavkovic, le général de brigade Pavkovic du commandement de

25 Corps de Pristina qui a dit qu'il était nécessaire, en cas d'aggravation de

26 la situation dans les zones de responsabilité du Corps de Pristina,

27 d'augmenter le niveau de la sécurité.

28 Est-ce que c'est l'un des ordres auquel vous faisiez

Page 9301

1 référence ?

2 R. Oui, précisément. C'est là un ordre qui a trait aux unités subordonnées

3 du commandement du Corps leur demandant d'envoyer des renforts à certains

4 secteurs pour assister à des bataillons et des postes-frontières, et plus

5 particulièrement, cet ordre prévoit que sur la Brigade motorisée -- la 125e

6 Brigade motorisée, 20 hommes doivent être déployés au poste de frontière

7 Kosare et remis sous les ordres du commandent de poste-frontière pour

8 fournir une sécurité accrue à la frontière. Ces hommes étaient envoyés

9 depuis la garnison de Pec.

10 Q. Quelle est l'importance de cet ordre-ci par rapport aux incursions, la

11 situation de la sécurité à l'époque ?

12 R. L'importance est la suivante : Nous avions ressenti la nécessité

13 d'essayer d'empêcher alors que l'armée de la Yougoslavie, y avait ces

14 passages de frontière illégaux, il fallait empêcher ces trafics d'armes, il

15 fallait également empêcher que les terroristes ne soient armés. Par

16 "terroristes" je veux dire soi-disant l'UCK qui avait causé de graves

17 problèmes pour nous.

18 Le commandement du Corps avait de l'autorité pour le faire parce que

19 ces bataillons qui se trouvaient à la frontière et nos brigades étaient

20 subordonnés au commandement du Corps. En envoyant ces renforts, il essayait

21 d'accroître la sécurité, d'empêcher que l'on passe illégalement les

22 frontières, et si des passages de frontières illégaux ne pouvaient pas être

23 empêchés, tout au moins, il fallait tenter de saisir les cargaisons, les

24 armes qui étaient entrées en contrebande, à la frontière.

25 Q. Vous venez d'utiliser le mot "terroristes" et vous avez dit : "Je veux

26 dire la soi-disant l'UCK." Si vous regardez le paragraphe 21, je voudrais

27 qu'on le présente un moment avec le système Sanction. Dans votre

28 déclaration, vous dites : "Les documents de la VJ auxquels je me réfère

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1 dans cette déclaration, parlent des terroristes, les terroristes et des

2 Groupes de Sabotage (DTG) et des Terroristes de forces de sabotage, (DTS).

3 Ces termes sont employés essentiellement pour parler de l'armée de

4 libération du Kosovo.

5 C'est ça qui est dans votre déclaration.

6 Je voudrais que vous regardiez maintenant la pièce MFI P9555, c'est un

7 ordre -- pardon. Il s'agit de renseignements émanant du ministre adjoint,

8 de la Fédération de Yougoslavie en date du 16 mars 1998. Vous ne le

9 trouverez pas dans votre dossier, mais vous allez le voir apparaître à

10 l'écran dans un instant.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, vous avez dit, P955 ?

12 M. RE : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Comme ça les choses sont plus

14 claires maintenant.

15 Veuillez poursuivre.

16 M. RE : [interprétation]

17 Q. Pourriez-vous expliquer pourquoi les mots, "terroriste," "DTG" ou

18 "DTS," étaient utilisés dans un grand nombre de communications à l'époque

19 pour dire -- plutôt, que de dire "l'UCK" ou "KLA" ?

20 R. Dans les documents officiels, nous recevions des échelons les plus

21 élevés de la VJ, cette terminologie, c'est qui était employée, et nous

22 agissions parce que c'était le cas. Un Groupe de Terroristes pouvait avoir

23 de deux à cinq, ou dix, ou 15, ou 20 hommes.

24 Pourquoi est-ce qu'on parlait comme étant "des Groupes de Sabotage de

25 terroristes" ? Je pense que c'était la même chose dans le monde entier : un

26 groupe qui attaque les organes officiels, les autorités officielles et met

27 en danger les personnels et les biens à la fois des personnes, des

28 individus et des institutions d'un pays.

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1 S'il y avait plusieurs Groupes de Sabotage et de Terroristes, nous

2 les appelions des "forces de sabotage" ou de groupes. L'expression "UCK" ou

3 "KLA" était toujours écrite entre guillemets. Ça voulait dire l'armée de

4 libération du Kosovo.

5 Mais pourquoi est-ce qu'on le mettait entre guillemets ? C'était

6 parce que nous ne voulions pas reconnaître cette force, puisque dans le

7 pays il n'y avait qu'une armée régulière et c'était l'armée yougoslave.

8 C'était l'armée de la République fédérale de Yougoslavie. Si nous avions

9 accepté de reconnaître le terme "armée de libération du Kosovo," ou UCK,

10 cela aurait voulu dire que nous acceptions qu'ils étaient l'ennemi, mais

11 notre partie adverse, notre adversaire.

12 Il y avait une tendance remontant à plusieurs années de créer une

13 Armée de libération du Kosovo ayant pour objectif final d'accélérer la

14 sécession du Kosovo-Metohija et une proclamation de leur indépendance par

15 rapport à ce qui était à l'époque la République fédérale de Yougoslavie.

16 C'est la raison pour laquelle ce terme, cette expression était très

17 importante pour nous. De plus, nous n'avions pas les renseignements portant

18 au fait qui était responsable en face et qui pouvait être considéré comme

19 étant des personnes avec qui négocier.

20 Q. Regardez devant vous à l'écran le document dont on a parlé. Il s'agit

21 de renseignement de mars 1998 émanant du ministère de l'Intérieur.

22 M. RE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait présenter la page suivante.

23 Nous allons défiler. Voilà. Peut-être que l'on pourrait agrandir ?

24 Q. Monsieur Zivanovic, vous rappelez-vous avoir vu ce document-ci au

25 moment de sa diffusion, c'est-à-dire en mars 1998 ?

26 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je n'étais pas à même de

27 voir ce document avant aujourd'hui. C'est la toute première fois que je

28 vois ce document.

Page 9304

1 A l'époque, j'étais le chef d'état-major de la 125e Brigade motorisée qui

2 était stationnée à Kosovska Mitrovica. Donc, ce qui se passait là, ça me

3 passait par-dessus la tête, ce n'était pas du tout de mon niveau. C'était

4 bien au-dessus.

5 Puis-je faire un commentaire maintenant que vous avez posé la question ?

6 Q. Ma question était simplement la suivante : est-ce que vous voyez là,

7 sur ce document, là où il est dit, je cite : "Nous pensons que les

8 opérations par les organes du MUP ne peuvent pas être décrites comme un

9 conflit armé interne, au sens de l'article 3 des conventions de Genève et

10 du droit des conflits armés.

11 "Ceci concerne une intervention de la police pour empêcher des crimes, des

12 actes de terrorisme. C'est une distinction importante, pour décrire les

13 exemples précités, pour ce qui est de conflits armés internes --"

14 L'INTERPRÈTE : La sténographie demande que l'on veuille bien ralentir les

15 échanges.

16 M. RE : [interprétation] Est-ce que vous auriez certaines implications

17 juridiques au point national ?

18 Ça poursuit en disant : "Gardant à l'esprit, nous proposons que les organes

19 compétents n'utilisent pas le terme 'conflit armé' dans les communiqués

20 publics, dans les communiqués officiels, mais pour parler des opérations

21 des organes du ministère de l'Intérieur pour empêcher les crimes."

22 Ça c'est la traduction en anglais.

23 M. RE : [interprétation] Je présente mes excuses pour ne pas avoir parlé

24 suffisamment lentement.

25 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne regardais pas le compte-rendu,

27 mais si vous voulez bien regarder vous-même, Monsieur Re, vous verrez :

28 "Veuillez, s'il vous plaît, ralentir aux fins du compte-rendu"; et là, il

Page 9305

1 s'agit des sténographes.

2 J'étais également en train de regarder le document, donc je n'ai pas pu

3 voir cela, mais pourriez-vous, s'il vous plaît, mais également le témoin,

4 essayer d'éviter de parler si rapidement.

5 Maître Emmerson, je me demande en fait ce qui a été perdu au compte-rendu.

6 Je vois il y a une dizaine de secondes.

7 M. EMMERSON : [interprétation] Je ne suis pas sûr de savoir quelle est la

8 question M. Re a l'intention de poser sur la base de ce qui précède, mais

9 je remarque, comme il était en train de lire -- oui, il a omis la dernière

10 phrase du premier paragraphe et est passé directement à une conclusion qui

11 semble être pour le document qui est basé sur deux considérations.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que M. Re pourrait --

13 M. RE : [interprétation] C'est juste. Le témoin a le document devant lui.

14 Il a déjà reçu une cote. Je veux dire, le témoin peut le voir, tout le

15 monde peut le voir. Si vous voulez, je peux à nouveau lire cette ligne pour

16 qu'elle apparaisse au compte rendu.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être, une fois que vous aurez

18 commencé à lire --

19 M. RE : [interprétation] D'accord.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- bien sûr, votre choix, le choix de ce

21 que vous avez lu pourrait ne pas être dépourvu de pertinence.

22 Donc, je serais d'accord avec vous si vous voulez inviter le témoin à lire

23 l'ensemble du document, très bien, mais quand vous le lisez, à ce moment-

24 là, si vous voulez, lisez toutes les parties.

25 M. RE : [interprétation] D'accord.

26 Les parties qui n'ont pas été inscrites au compte rendu parce que je

27 parlais trop rapidement et qui ont été sautées sont, je cite : "Pour

28 décrire les incidents susmentionnés comme un conflit armé interne, ceci

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1 pourrait être interprété comme une reconnaissance implicite de la soi-

2 disant 'armée de libération du Kosovo' comme étant une partie adverse, et

3 nous aurions à ce moment-là certainement des implications juridiques au

4 plan international.

5 "Ceci est également important de façon à déterminer quelles pourraient être

6 les compétences du Tribunal pénal international à La Haye, qui est

7 responsable exclusivement des crimes commis," en disant, alors, là, on voit

8 : "'International/tel que c'est imprimé/' les conflits internes, à

9 l'exception du crime de génocide."

10 Q. Ces textes que vous avez lus là, Monsieur Zivanovic, est-ce que ce que

11 vous avez lu là corresponde bien à la pratique des organes officiels de

12 l'Etat, tels que l'armée, le ministère de l'Intérieur, la sûreté de l'Etat,

13 les organes les plus élevés ? Est-ce que ça correspond bien, effectivement,

14 avec votre propre pratique et de ce que vous écriviez dans les ordres, les

15 rapports et les documents de l'époque ?

16 R. Oui, précisément. Ce document du ministère des Affaires étrangères va

17 dans le même sens et il est interprété précisément de cette manière par les

18 ambassades dans le monde entier. Les Groupes de Terroristes et les Groupes

19 de Sabotage sont traités d'une certaine manière par un pays déterminé, et

20 ce pays peut demander l'aide d'autres pays, si nécessaire. Notre pays, en

21 revanche, estimait qu'il pouvait faire face à ces forces de terroriste et

22 de sabotage au Kosovo tout seul. C'était bien le cas.

23 Q. Le sujet suivant dont je vais vous parler, c'est les Groupes de Combat.

24 Que sont-ils, quelles sont leurs tâches, quelle est leur importance.

25 M. RE : [interprétation] Si l'on pouvait présenter avec le dispositif

26 Sanction.

27 Q. Le paragraphe 17 de votre déclaration dans lequel vous dites que le

28 Groupe de Combat numéro 3 de votre Brigade motorisée avait été créé en

Page 9307

1 avril 1998. Il était basé à la caserne de Pec. Citation : "Le but

2 consistant à établir cette unité était de s'efforcer de maintenir le

3 contrôle des routes autour de Pec."

4 Qu'est-ce qu'"un Groupe de Combat" du point de vue militaire, et quelle

5 était l'importance de la création de ces Groupes de Combat à ce moment

6 particulier ?

7 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour répondre comme il

8 convient à cette question et pour répondre de façon qui soit juste,

9 j'aurais besoin d'un peu plus de temps. L'armée yougoslave et toutes les

10 armées du monde existent de façon à pouvoir être entraînées et formées à

11 certaines activités. De façon plus spécifique, la brigade dont j'étais le

12 chef d'état-major à l'époque recevait des appelés, des recrus qui faisaient

13 leur service militaire ordinaire en mars, juin, septembre et décembre. Le

14 nombre d'appelés variait de 200 à 300 jusqu'à même 500 par arrivée.

15 La force des effectifs de la brigade, y compris les officiers de

16 carrière, des civils contractuels, les sous-officiers et les hommes du

17 rang, les appelés faisant leur service militaire, variait de 900, pour

18 certains mois en 1997, à 1 880 à la fin de 1998.

19 De façon à former, à entraîner ces soldats - et il y avait entraînement et

20 formation pendant trois à six mois - nous avions une formation de trois

21 mois pour les hommes du rang, les groupes, les sections, jusqu'au niveau du

22 peloton ou des sections, ce qui était la formation de base.

23 Au cours des trois mois suivants, il y aurait des exercices ou une

24 formation conjointe, où ils apprenaient les techniques plus développées,

25 plus avancées, utilisées dans les situations d'urgence et les situations

26 extraordinaires, à savoir les combats.

27 Un groupe qui avait achevé sa formation complète pouvait être - je

28 parle au conditionnel, enfin ça représentait la moitié de la brigade -

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1 utilisé pour des tâches particulières de ce genre, et ces tâches

2 particulières pour la brigade étaient les suivantes : Premièrement, engager

3 une partie des forces dans des opérations de sécurité approfondie pour la

4 frontière de l'Etat.

5 Pourquoi est-ce que je souligne le mot "en profondeur" ? Parce que la

6 ligne de sécurité - excusez-moi, je parle encore trop vite, probablement -

7 les lignes de sécurité, pour une ceinture de 100 mètres, avaient déjà été

8 créées par l'unité qui était directement subordonnée au commandement du

9 corps; tandis que le secteur de responsabilité de la 125e Brigade, si on

10 pense à la Metohija, était un secteur de 40 kilomètres, et notre tâche en

11 premier lieu était de prêter assistance à la sécurité en profondeur de la

12 frontière de l'Etat.

13 Maintenant, en deuxième lieu, les installations militaires dont il fallait

14 assurer la sécurité, c'était là que nous étions déployés, plus le fait

15 d'assurer la sécurité du personnel et des équipements dans ces

16 installations militaires, et de fournir nos propres détachements chargés de

17 sécurité qui étaient en mouvement, ou qui faisaient des exercices, ou qui

18 étaient en formation, ou tous autres mouvements pendant, par exemple, des

19 catastrophes naturelles, apporter une aide humanitaire, et cetera.

20 Cette moitié de la brigade pouvait être désignée aux fins de tâches

21 particulières et devait être engagée de manière suivante : la brigade était

22 censée assurer la sécurité de 11 installations; trois casernes à Kosovska

23 Mitrovica, Vucitrn et Pec; puis, il y avait dix installations dites

24 détachées, commençant par Baja, les postes ou stations plus anciennes,

25 Svinjare, Doljane. Je ne peux pas me les rappeler toutes.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce sont ces renseignements

27 que vous cherchez véritablement à obtenir ? Est-ce que vous considérez que

28 ceci peut être d'une grande aide à la Chambre ? Je veux dire, cette réponse

Page 9309

1 très longue, vraiment très longue et très détaillée concernant des

2 questions, alors qu'on pourrait se contenter de moins de détails.

3 M. RE : [interprétation] Il est clair que ce n'est pas le cas. En évidence,

4 ce n'est pas le cas.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, faites quelque chose à ce

6 sujet, s'il vous plaît, Monsieur.

7 M. RE : [interprétation] Oui. Bien. Je vais m'en occuper.

8 Q. Monsieur Zivanovic, s'il vous plaît. Des Groupes de Combat, pourquoi en

9 avez-vous formé un -- pourquoi est-ce qu'on en a formé un en avril 1998 ?

10 S'il vous plaît, une réponse aussi brève que possible, si vous le pouvez.

11 R. J'étais en train d'expliquer l'ordre précédent qui avait été émis pour

12 le commandement au mois de mars. De façon à renforcer la sécurité à la

13 frontière de l'Etat, le commandant avait décidé, compte tenu des forces

14 disponibles, que nous constituons que nous pouvions tout juste à peine

15 former ce Groupe de Combat, ce Groupe numéro 3, et le garder stationné à la

16 caserne de Pec en vue d'intervention éventuelle à la frontière. C'est ma

17 réponse la plus brève.

18 Q. Mais quelle est la différence entre un Groupe de Combat et les autres

19 unités au sein de la 125e Brigade ?

20 R. Jusqu'au mois d'avril, les Groupes de Combat 1 et 2 existaient au sein

21 de la 125e Brigade. Ils existaient depuis 1985. C'est juste les effectifs

22 personnels pour lesquels il y avait une rotation au sein de ces Groupes de

23 Combat, mais il n'y a pas de différences spécifiques. Le Groupe de Combat

24 numéro 2, qui était installé à Pec, avait également pour objectif premier

25 de renforcer la sécurité de la frontière de l'Etat et de protéger les

26 installations dans le secteur de Pec.

27 Q. Le troisième a été formé en avril. Pourquoi ?

28 R. Je viens juste d'expliquer ça il y a un moment, parce qu'à ce moment-là

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1 le Groupe de Combat numéro 2 se trouvait dans le secteur de Djakovica, dans

2 un secteur appelé Bec. Il était à ce moment-là, ce groupe, en formation, et

3 n'avait pas achevé sa formation et son entraînement à l'époque.

4 A ce stade, le commandant avait décidé de former le Groupe de Combat

5 numéro 3 à Pec, qui serait plus mobile et qui pourrait, par exemple,

6 atteindre le poste-frontière de Morina plus rapidement que ne pouvait le

7 faire le Groupe de Combat numéro 2.

8 Q. Dans votre déclaration, au paragraphe 11, vous avez dit que la force en

9 effectifs de la brigade avait varié d'environ 1 400 hommes en janvier 1998,

10 jusqu'à 2 500 vers la fin de l'année. Quelle était la raison de cet

11 accroissement très important des effectifs de la brigade au cours de

12 l'année ?

13 R. La raison pour le renforcement des effectifs, c'était les violations de

14 frontière, les problèmes de frontière qui avaient lieu. Ces Groupes de

15 Combat avaient été créés de façon à nous protéger, à fournir une sécurité

16 approfondie à partir de la frontière de l'Etat, et éventuellement, à un

17 stade ultérieur, à combattre le terrorisme.

18 Q. Ce que je vais maintenant vous demander figure au paragraphe 13, et il

19 s'agit de la notion ou de l'idée de préparation au combat, le fait d'être

20 prêt au combat.

21 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

23 M. EMMERSON : [interprétation] Il y a une certaine ambiguïté dans la

24 dernière réponse où le témoin a parlé de Groupes de Combat qui, à

25 l'origine, avaient été créés pour établir la sécurité aux frontières et, de

26 façon à nous protéger, a-t-on dit et peut-être à un stade ultérieur, à

27 combattre le terrorisme."

28 Je me demande si les choses pourraient -- pour dire clairement que le

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1 témoin puisse expliquer à quel stade où il se réfère puisque M. Re est en

2 train de parler des périodes.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Peut-être que si le témoin le sait,

4 ce terme "éventuellement" où est en quelque sorte une surprise.

5 Est-ce que vous pourriez expliquer ce que vous voulez dire par "par

6 la suite" ou "plus tard" et ce que vous vouliez dire par "éventuellement"

7 lorsque vous parliez de "combattre le terrorisme" ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'armée de Yougoslavie, Monsieur le

9 Président, chaque unité, y compris celle dans laquelle j'étais, avait pour

10 tâche d'évaluer -- de faire des appréciations, des évaluations. C'est la

11 raison pour laquelle nous avons formé ces groupes. Nos estimations c'était

12 que si les autorités de l'Etat de la Fédération de Yougoslavie décidaient

13 de mettre en place l'état d'urgence au Kosovo, nos unités auraient

14 automatiquement à se mettre en mode antiterroriste.

15 C'est ça que je voulais dire par "éventuellement."

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ça n'a jamais eu lieu ? Est-

17 ce qu'un état d'urgence a été proclamé ? Et dans l'affirmatif, quand, de

18 façon à ce que nous sachions si les unités sont allées automatiquement en

19 mode antiterroriste ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] L'état d'urgence n'a pas été mis en place dans

21 l'Etat de la Fédération de Yougoslavie. Toutefois, le Conseil suprême de

22 Défense de la Yougoslavie a décidé en juin 1998 que les unités de l'armée

23 de Yougoslavie dans les territoires de Kosovo-Metohija pouvaient être

24 employées pour appuyer les forces du MUP dans la lutte contre le

25 terrorisme.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie de cette réponse.

27 Monsieur Re.

28 M. RE : [interprétation]

Page 9312

1 Q. Donc, la préparation au combat ou le fait d'être prêt est ce qui est

2 dit au paragraphe 13 de votre déclaration. Vous indiquez, je cite : "A

3 partir de février 1998, nous avions des ordres permanents visant à être

4 prêt à engager le combat à six -- dans les six heures."

5 Alors, il y deux lignes -- six lignes plus bas : "Toutefois aussi, ce

6 janvier les brigades devaient être prêtes pour passer de l'état de

7 préparation au combat à l'engagement au combat dans les six heures."

8 Ensuite, je cite : "Le 1er mars, le colonel Zdravkovic, qui était à

9 l'époque le commandant de la brigade, a ordonné que les Unités

10 d'Intervention soient prêtes à intervenir dans l'instant, sur le champ."

11 Donc, je voudrais vous demander de bien vouloir expliquer brièvement à la

12 Chambre de première instance cette notion de préparation ou d'être prêt au

13 combat, ce que l'on veut dire dans le contexte de ces ordres, c'est-à-dire

14 d'être prêt au combat dans une heure, six heures ou sur le champ. S'il vous

15 plaît, une brièvement explication.

16 R. Etre prêt au combat, c'est être dans un état de préparation de

17 formation, d'organisation et de lien dans l'ensemble de l'unité, c'est-à-

18 dire d'être prêt à des objectifs et des tâches particulières.

19 Dans notre terminologie, nous avions une situation de préparation au combat

20 qui était permanente, et puis une situation de préparation au combat accrue

21 et occasionnelle et le fait d'être constamment prêt à intervenir. Ça c'est

22 une situation relativement calme. Quand il s'agit de préparation accrue ou

23 occasionnelle, il s'agit encore d'une situation calme. La préparation au

24 combat accrue est mise en place en cas de problèmes particuliers tels qu'un

25 incident terroriste. Finalement, le fait d'être prêt au combat, la

26 préparation complète, ça voulait dire faire en sorte que l'ensemble des

27 effectifs du personnel dans un Etat était mis en alerte et prêt à engager

28 des actions de combat.

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1 Nous avons également l'état concernant la reconnaissance aérienne et les

2 alertes par la reconnaissance aérienne et la marine engagée pendant la

3 préparation régulière au combat.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends que le témoin parle de la

5 rapidité avec laquelle les unités se mettent en état de capacité à engager

6 des combats. C'est certainement ce dont vous êtes en train de parler, c'est

7 ce que les mots du témoin concernaient.

8 M. RE : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a les yeux sur

9 vous et je ne peux lui faire de signe pour lui demander autre chose.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous --

11 M. RE : [interprétation] Je ne peux pas l'interrompre parce que, bien sûr,

12 cela gênerait les interprètes. C'est ça le problème.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais il y a d'autres moyens peut-

14 être

15 M. RE : [interprétation] Nous allons essayer de lui faire un signe, je vais

16 essayer.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, cela nous aiderait. Vous pouvez

18 faire un signe à moi et j'interviendrai.

19 Nous devons maintenant suspendre pour une pause de 20 minutes, nous

20 reprendrons à midi 20.

21 --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.

22 --- L'audience est reprise à 12 heures 28.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Des raisons extrêmement importantes ont

24 contraint les Juges de la Chambre à ne pas se trouver dans la salle à

25 l'heure indiquée précédemment car nous avons largement dépassé l'heure de

26 reprise des débats.

27 Monsieur Zivanovic, lorsque vous répondez aux questions qui vous sont

28 posées, je vous enjoins de vous concentrer exactement sur la question

Page 9314

1 posée, cela est le premier point; et le deuxième, c'est que la plupart des

2 questions de M. Re semblent porter sur les conditions et les circonstances

3 dans lesquelles des transformations ont lieu ou dans lesquelles on est

4 revenu sur certaines décisions, et non sur les modalités techniques de

5 l'exécution de ces décisions finalement.

6 Donc, je vous demanderais de bien vous centrer sur l'aspect important de la

7 question, à savoir que les conditions qui ont provoqué certaines

8 transformations et certains événements, plutôt que de parler de l'aspect

9 technique de toutes ces questions. Si vous jetez un regard du côté de M. Re

10 de temps en temps, il pourra vous faire signe au cas où vous êtes en train

11 de parler de choses qui sont moins importantes.

12 Veuillez procéder.

13 M. RE : [interprétation]

14 Q. Monsieur Zivanovic, revenons donc au niveau d'alerte de l'armée. Là, je

15 vous fais un signe avec mes deux doigts qui vous montre que je vous

16 demanderais d'être très concis.

17 Veuillez expliquer, je vous prie, la signification de la réduction d'un

18 délai de six heures à un délai d'une heure, de ce niveau d'alerte ou de

19 préparation au combat ?

20 R. L'importance, cela signifie, parce que c'est ce qu'on lit dans ce

21 document, que l'on parle des effectifs égaux à ceux d'un peloton dans une

22 garnison. C'est très important pour pouvoir faire intervenir les

23 installations militaires comme il convient.

24 Q. Dans ce même paragraphe, nous voyons que, le 1er mars 1998, Zdravkovic a

25 ordonné aux unités d'intervention d'être prêtes à entrer en action

26 immédiatement. Pourquoi est-ce que le colonel Zdravkovic a, à ce moment-là,

27 ordonné aux hommes de la 125e Brigade d'être prêts à entrer en action

28 immédiatement, sachant qu'il était votre prédécesseur au commandement ?

Page 9315

1 R. En raison des actes du Groupe terroriste Siptar contre une patrouille

2 du MUP qui avait eu lieu dans le secteur de Likosane le 28 février. Au

3 cours de cette action, quatre policiers avaient été tués et deux autres

4 blessés. Pour empêcher ce genre de chose de se reproduire, nous avons pris

5 les dispositions nécessaires vis-à-vis de nos hommes.

6 Q. Combien d'hommes au sein de votre brigade étaient en état d'alerte,

7 étaient en capacité d'entrer en action immédiatement, à la date du 1er mars

8 1998 ?

9 R. Deux Groupes de Combat de 150 hommes et deux pelotons de 35 hommes.

10 Cela fait 510 hommes.

11 Q. Au paragraphe 18 de votre déclaration écrite, vous parlez du fait que

12 le colonel Zdravkovic a créé un poste de commandement avancé. Le sigle dans

13 le texte pour "poste de commandement avancé" est "IKM". Il l'a fait en

14 avril 1998, et vous avez été placé au commandement de ce poste avancé.

15 Ma question est la suivante : quand ce poste de commandement avancé a-t-il

16 été créé, et pourquoi à ce moment-là ? Je vous demande d'être, encore une

17 fois, très concis dans votre réponse.

18 R. Un poste de commandement avancé est créé lorsque la sécurité des hommes

19 d'une unité ainsi que la sécurité des installations physiques est en danger

20 de façon à influencer depuis le niveau hiérarchique le plus élevé sur

21 l'évolution de la situation.

22 Dans la situation de l'époque parce que les unités déployées au Kosovo

23 étaient séparées physiquement des unités déployées en Metohija, donc, il a

24 été considéré comme nécessaire que le chef d'état-major de la brigade et le

25 commandant se trouvent à Pec en raison des incidents dus au terroriste et à

26 la possibilité que nos unités aient à se défendre contre les attaques

27 terroristes.

28 Q. Mais qu'est-ce qui était particulièrement en danger en avril 1998 et

Page 9316

1 qu'est-ce qui a conduit donc la 125e Brigade mécanisée à en venir de créer

2 un poste de commandement avancé ?

3 R. Il est très difficile de répondre à cette question de façon concise

4 mais je n'efforcerai de le faire. Les Unités de Pec, il y avait là un

5 Bataillon mécanisé et un Bataillon de Blindé. Le Bataillon de Blindé, très

6 concrètement, n'a pas le droit de s'éloigner de ses chars, donc, le nombre

7 de ces hommes était très limité. Les Groupes terroristes avaient, dans

8 cette période, considérablement intensifié leurs actions en visant un

9 nombre de village plus important. Ces Groupes terroristes attaquaient, ils

10 assassinaient les Serbes, les Roms et les Albanais qui étaient loyaux vis-

11 à-vis de l'Etat de Serbie. C'est la raison pour laquelle ce poste de

12 commandement avancé a été créé pour influencer l'évolution des événements

13 dans la période suivante et sur la vie qui devait continuer à se dérouler

14 normalement à Pec. Voilà pourquoi il a été créé.

15 Q. Quels étaient les effectifs du poste de commandement avancé ?

16 R. Il variait selon la période, mais on peut parler de 400 hommes.

17 Q. En avril 1998 et mai 1998 ?

18 R. C'était ça, à peu près 400 hommes.

19 Q. Et ces hommes étaient à quel niveau d'alerte depuis le moment c'est-à-

20 dire avril/mai 1998 où le poste de commandement avancé a été créé ?

21 R. Le Groupe de Combat était dans un niveau d'alerte de six heures, et le

22 peloton dans un niveau d'alerte d'une heure. Quant aux autres, en raison de

23 la tension qui régnait à ce moment-là, ils avaient interdiction de circuler

24 dans la ville parce que la menace -- des troubles à l'ordre public étaient

25 permanents.

26 Q. Votre dernière réponse concernait le poste de commandement avancé dont

27 vous avez le commandement à Pec jusqu'au 12 juin 1998. Au paragraphe 18 de

28 votre déclaration écrite, dernière ligne, nous lisons que : "Le Corps de

Page 9317

1 Pristina avait également créé un poste de commandement avancé à Djakovica."

2 Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quels étaient les effectifs

3 présents dans ce poste de commandement avancé là, celui de Pristina ? Je

4 vous demanderais également de dire aux Juges si ce poste avait été créé

5 pour les mêmes raisons que celles que vous venez d'évoquer en parlant du

6 poste de commandement avancé de Pec ?

7 R. Le poste de commandement avancé créée par le commandement du Corps de

8 Pristina l'a été le 21 avril et il avait son siège à Djakovica, dans la

9 caserne de Djakovica. Il fallait que ce poste soit créé copte tenu de la

10 division géographique en deux partie, le Kosovo d'une part et la Metohija

11 d'autre part, ce qui garantissait que les plus élevé du commandement aient

12 une vision complète de la situation à tout moment. Il fallait donc le Corps

13 de Pristina soit présent dans la partie Metohija de cette région pour

14 contrôler la vie quotidienne des membres des diverses unités présentes dans

15 ce secteur.

16 Quant au poste en tant que tel, il avait des effectifs de dix à 15 hommes,

17 uniquement c'était un groupe tout à fait restreint et ces hommes avaient le

18 droit de prendre des décisions.

19 Q. J'aimerais que nous passions au paragraphe 26.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande un instant, j'aimerais

21 une précision du témoin.

22 M. RE : [interprétation] Bien sûr.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez été interrogé au sujet des

24 effectifs présents dans un poste de commandement avancé tout à l'heure.

25 Vous avez parlé de 400 homes alors que maintenant vous parlez de dix à 15

26 hommes pour ce poste de commandement avancé. Si, alors, il semble que vous

27 ayez distingué entre les hommes qui se trouvaient physiques au poste de

28 commandement et ceux qui étaient commandés à partir de ce poste.

Page 9318

1 J'aimerais mieux comprendre votre première réponse quand vous avez parlé de

2 400 hommes qui se trouvaient dans le premier poste de commandement avancé;

3 est-ce que vous pourriez nous dire si en dehors des dix à 15 hommes qui se

4 trouvaient dans le poste de commandement avancé de Djakovica, il y avait

5 d'autres soldats qui étaient commandés par ces dix à 15 responsables, à

6 moins que je n'ai pas bien compris ce que vous avez dit.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je répondrai d'abord à la dernière partie de

8 votre question en disait "oui." Vous m'avez bien compris. Il y avait à Pec

9 sous mes ordres 400 hommes environ, 400 à 500.

10 S'agissant du poste de commandement avancé de Djakovica j'ai parlé d'un

11 groupe restreint de dix à 15 hommes dont je dirais maintenant cela

12 représentait à peu près toutes les unités présentes dans la partie

13 Metohija, dans les régions c'était Pec, Prizren, Djakovica et les

14 bataillons frontaliers, alors si on additionne le nombre total de ces

15 hommes on aboutit à trois à quatre milles hommes. Mais je ne peux pas être

16 plus précis que cela car je n'étais pas préparé à cette question.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

18 Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

19 M. RE : [interprétation]

20 Q. Au paragraphe 26 de votre déclaration écrite, après l'attaque contre le

21 MUP, à Likosane, vous dites que : "Le MUP s'est rendu compte que les

22 membres de l'UCK se voyaient distribuer des uniformes, étaient entraînés de

23 façon plus intensive y compris au maniement des armes à feu et à la

24 construction de fortifications, bunkers et tranchées, et en matière aussi

25 de soins à dispenser aux blessés," et cetera.

26 Je voulais simplement aller un peu plus dans le détail avec vous et vous

27 posez des questions plus précises au sujet des informations dont vous

28 disposiez.

Page 9319

1 Quelles sont les informations que vous avez reçues au sujet de

2 l'entraînement de l'UCK au début de 1998 et au moment de l'attaque contre

3 les hommes patrouillant à Likosane le 18 février ?

4 R. Les renseignements que je recevais, je les recevais de mes supérieurs

5 hiérarchiques c'est-à-dire du commandement du Corps de Pristina; ainsi que

6 des commandements subalternes, c'est-à-dire dans le cas précis, le

7 commandement de Pec, de Vucitrn; et les commandements des bataillons

8 stationnés à Mitrovica qui étaient des Bataillons d'Artillerie.

9 Puis, je recevais aussi des renseignements du MUP qui étaient transmis d'un

10 commandement à l'autre. Puis, il y avait en sus de cela, des renseignements

11 émanant des services de Sûreté d'Etat, lorsque j'en avais connaissance. A

12 l'époque, l'armée n'avait pas son propre service de renseignements.

13 Q. Que vous a-t-on dit au sujet de l'entraînement de l'UCK à ce moment-là

14 ?

15 R. On nous a dit que dans la partie de Metohija de la région, c'est-à-dire

16 entre Pec et Djakovica, et notamment sur la route reliant les deux

17 localités, des entraînements étaient en cours dans un certain nombre de

18 villages. Depuis Papracane jusqu'à Istinici, en allant vers Dasinovac,

19 Gornja Luka, Glodjane et, quand on parlait d'entraînement, on parlait

20 d'entraînement militaire en bonne et due forme parce que les patrouilles du

21 MUP dans la région dit Labat-Propan [phon] ont découvert des endroits où

22 ils ont retrouvé des douilles et ils ont retrouvé les traces visibles d'un

23 emploi récent de lance rocket portable et ont retrouvé également des traces

24 d'autres projectiles, d'autres munitions, ce genre de choses, et également

25 des bandes pour panser les plaies.

26 Q. D'accord, mais les fortifications maintenant, quels renseignements

27 avez-vous reçus au sujet de l'UCK en train de construire des

28 fortifications, bunkers et tranchées ? Et de quelle qualité étaient ces

Page 9320

1 renseignements ?

2 R. Nous avons reçu ces renseignements, qui nous indiquaient que des

3 travaux de génie militaire étaient en cours, et au départ, on nous a

4 indiqué l'endroit où se trouvait les tranchées qui étaient en train d'être

5 creusées, en tout cas, le périmètre des maisons concernées par ces

6 tranchées, qui se trouvaient toutes dans les -- à périphérie d'un village.

7 Puis, on nous a parlé du fait que des tranchées étaient en train d'être

8 creusées dans les cours de certaines maisons, ainsi que sur les routes

9 devant certaines maisons, le long de certaines voies d'eau quand il y en

10 avait, et aussi sur des terrains situés en altitude et longeant la route.

11 Nous avons considéré tout cela comme les signes que les terroristes se

12 préparaient à une attaque contre des patrouilles du MUP ou contre des

13 hommes de l'armée yougoslave circulant sur la route.

14 Mais, bien entendu, c'était le MUP qui était le seul en droit de contrôler

15 ce secteur situé à l'est de la route Decani-Djakovica.

16 Q. Où se trouvaient les tranchées et à quel moment ont-elles été creusées

17 ?

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson, je vois que vous êtes

19 debout.

20 M. EMMERSON : [interprétation] Excusez-moi. Le témoin - page 65, lignes 1 à

21 8 du compte-rendu d'audience - a parlé des découvertes faites par les

22 patrouilles du MUP, et à la ligne 20, il évoque la responsabilité exclusive

23 du MUP eu égard à la zone située à l'est de Decani-Djakovica -- de la route

24 Decani-Djakovica.

25 Est-ce qu'il pourrait s'expliquer sur le moment dont il parle ?

26 M. RE : [interprétation] C'était exactement ce que j'étais en train de

27 faire. Donc question suivante, Où se trouvaient les tranchées et à quel

28 moment ont-elle été creusées ?

Page 9321

1 Q. De quelle période parlez-vous exactement ?

2 R. Je parle de la première moitié de l'année 1998, ultérieurement au 28

3 février. Dans la plupart des lieux habités situés le long de la route

4 reliant Decani à Djakovica, des tranchées ont été créées, et les éléments

5 dont j'ai parlés ont été retrouvés.

6 Q. Vous avez parlé de tranchées; mais qu'en est-il des fortifications ?

7 R. Dans une phase ultérieure, c'est-à-dire à partir du mois de juin, les

8 fortifications construites, dans le langage militaire, on appelle ça un ou

9 plusieurs bunkers. Ce sont des constructions que l'on bâtis entre deux

10 localités, normalement, le long d'une route ou sur des hauteurs. Elles sont

11 donc très visibles, ces fortifications, dans les lieux où il y a de la

12 population parce que, dans les villages du Kosovo, les maisons sont

13 entourées de murs assez hauts avec des petites ouvertures. Chaque fois

14 qu'une ouverture se présente, on peut voir très facilement qu'elles étaient

15 largement utilisées pour servir de [imperceptible] de tir, et ces

16 constructions étaient renforcées chaque fois que c'était possible par des

17 sacs de sable.

18 Q. Quelle était l'importance militaire de ces constructions de

19 fortification, de bunkers par l'UCK, et du fait qu'elle creusait des

20 tranchées ?

21 R. Les fortifications qui ont été construites le long des routes créaient

22 un danger pour les organes de l'Etat serbe et de l'Etat de la République

23 fédérale Yougoslave, et en particulier pour les hommes du MUP. Dans la

24 période ultérieure, chaque fois que j'ai essayé d'organiser un entraînement

25 qui crée la nécessité d'utiliser ces routes locales, il y avait le danger

26 de se faire tirer dessus à partir des ouvertures dans les murs dont j'ai

27 parlé si l'on était un homme du MUP ou un homme de l'armée yougoslave.

28 Q. De quelle période êtes-vous en train de parler ?

Page 9322

1 R. Je parle de la première moitié de l'année 1998, à partir de février, ou

2 plus précisément du début du mois de mars, donc, la période mars à juin.

3 Q. Dans ce même paragraphe 26 de votre déclaration écrite, vous parlez du

4 fait que le MUP avait été informé du fait que l'UCK était également

5 entraînée à l'exercice des soins médicaux, bandages, et cetera. Quels

6 renseignements exacts avez-vous reçu dans ce

7 domaine ?

8 R. Ces renseignements je les ai reçus de responsables du MUP et des

9 organes de Sécurité qui indiquaient que cette forme d'entraînement se

10 déroulait et concernait un certain nombre d'hommes qui avaient obtenus des

11 diplômes à l'étranger; ça c'était la première catégorie. D'autres --

12 deuxième catégorie, des hommes qui avaient été membres de la JNA, donc, des

13 soldats bien formés. Et troisième catégorie, des hommes qui travaillaient

14 dans des organes -- qui avaient travaillé dans des organes du MUP en

15 Serbie, donc, uniquement des hommes instruits.

16 Le village -- l'incident survenu dans le village de Likosane, ainsi que

17 d'autres actions qui ont eues lieu par la suite, ont bien confirmés à notre

18 intention que ces entraînements étaient le signe d'une très bonne

19 organisation de la part des forces en question. Dans le cadre de leur

20 structuration -- de leur organisation, ils avaient un Groupe d'Assaut qui

21 était sensé assurer leur défense sur les flancs, ainsi que dans le sens de

22 la -- dans la direction d'où provenait l'attaque, à savoir Obilic et

23 Pristina dans le cas qui nous intéresse. Il y avait aussi un Groupe chargé

24 d'Organiser la retraite et un Groupe chargé de la Logistique.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic, la question, qui

26 vous a été posée, portait sur l'entraînement aux soins médicaux. Dans votre

27 réponse à l'instant, vous parlez de Groupes d'Assaut, et cetera, et cetera,

28 ce qui n'avait -- ce qui n'était pas évoqué dans la question. Cela laisse

Page 9323

1 quelques doutes. S'agissant de la partie assez générale de votre réponse,

2 vous avez dit que l'entraînement concernait telle ou telle catégorie de

3 personnes. Est-ce que vous pourriez confirmer que la première partie de

4 votre réponse concernait bien l'entraînement aux soins médicaux ?

5 S'agissant de la deuxième partie de votre réponse, je vous demanderais,

6 puisque vous parliez à l'instant d'un Groupe chargé d'Organiser la retraite

7 et de la Logistique, si, dans ce groupe, on trouvait des responsables

8 médicaux. En quel cas vous auriez pu le dire tout de suite, sans passer par

9 la description de tous ces autres aspects, donc, plus de concentration sur

10 les questions qui vous sont posées car nous manquerons de temps ?

11 Monsieur Re, vous pouvez poursuivre.

12 M. RE : [interprétation]

13 Q. Quand vous dites entraînement complexe concernant avant tout des

14 personnes ayant obtenu des diplômes à l'étranger, est-ce que vous parliez

15 de diplôme dans le domaine de la médecin ou d'autres choses ?

16 R. Je parlais surtout d'entraînement militaire, et l'entraînement aux

17 soins médicaux fait partie de l'entraînement militaire.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, c'est certain. Mais pourriez-

19 vous nous dire quels renseignements exacts que vous avez reçus au sujet

20 d'un entraînement médical ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais vous dire précisément s'ils ont

22 formé à la mobilisation des os et aux bandages des plaies mais, en tout

23 cas, selon les informations que nous avons reçues, ils étaient formés aux

24 premiers soins, aux soins d'urgence, voilà ce que je peux dire. Je ne sais

25 pas si vous comprenez. Si on vous apprend à faire des pansements ou si on

26 vous apprend comment faire cesser un épanchement de sang, cela signifie

27 qu'on entraîne les hommes à la meilleure façon de dispenser certains soins

28 médiaux, et c'est ce qu'en serbe, on appelle les premiers soins.

Page 9324

1 M. RE : [interprétation]

2 Q. Est-ce que vous aviez des renseignements qui portaient sur la qualité

3 de cette formation ainsi que sur les matériels utilisés pour la dispenser ?

4 R. La qualité des matériels que nous avons retrouvée était un peu

5 inférieure à celle des matériels utilisés par nous dans l'armée yougoslave.

6 Dans la période ultérieure, nous avons retrouvé -- enfin, c'est le MUP qui

7 a retrouvé, y compris un certain nombre d'articles médicaux servant

8 normalement à pratique des interventions chirurgicales mineures. Quant à la

9 qualité de leur entraînement, je n'ai pas été renseigné sur ce point.

10 Q. Quand vous dites dans la période ultérieure; qu'est-ce que cela

11 signifie ?

12 R. Cela signifie que lorsque les forces du MUP recherchaient des

13 terroristes et elles ont retrouvé ce genre de matériel à l'intérieur de

14 certaines maisons ou à l'intérieur des bunkers, dont j'ai déjà parlé, et ça

15 c'était à partir du mois de juin.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuilles poursuivre, Monsieur Re.

17 M. RE : [interprétation]

18 Q. J'aimerais vous demander de vous pencher maintenant sur les paragraphes

19 30 et 31 de votre déclaration écrite où il est question du contrôle des

20 routes. La première phrase du paragraphe 31, ou plutôt dans le paragraphe

21 30, il est question du fait que le MUP a créé des barrages routiers et au

22 paragraphe 31, nous lisons : "Ceci a eu lieu au cours de la première moitié

23 de 1998 et était le résultant direct de l'intensification de l'action de

24 l'UCK."

25 Puis, un peu plus loin, je cite : "Les attaques dues à l'UCK contre

26 ces barrages se sont intensifiées dans les quelques mois précédents le mois

27 de juin 1998. Un certain nombre d'officiers du MUP ont été tués ou blessés

28 dû au cours d'affrontement avec l'UCK."

Page 9325

1 Il y a un document que j'aimerais vous soumettre, c'est un document qui

2 date du 27 avril 1998. Il s'agit d'un rapport dont vous êtes l'auteur au

3 poste de commandement avancé de Pec, vous faites rapport donc quant aux

4 faits que la route liant Klina-Serbica n'était pas sous le contrôle du MUP.

5 Je parle du document MFI D168. J'aimerais l'affichage de ce document sur

6 les écrans, grâce au prétoire électronique je remarque simplement qu'il

7 s'agit du document qui a fait l'objet des objections de Me Guy-Smith eu

8 égard à son versement au dossier.

9 Q. Monsieur Zivanovic, pourriez-vous, je vous prie, vous pencher sur ce

10 document qui se trouve à l'intercalaire 9 de votre classeur. Vous voyez que

11 c'est un rapport de combat régulier, vous en avez ici un exemplaire papier

12 si vous préférez. En tout cas, on lit dans ce document qu'il s'agirait d'un

13 rapport de combat régulier. Pourriez-vous en une phrase indiquer aux Juges

14 de la Chambre ce qu'est un rapport de combat régulier, dans quel contexte

15 un tel rapport est-il rédigé ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre sait pertinemment ce qu'est

17 un rapport de combat régulier donc à moins qu'il n'y ait vraiment quelque

18 chose de très particulier dans celui-ci qui le distingue des autres, je

19 vous invite à passer à autre chose.

20 M. RE : [interprétation] Moi, ce qui m'intéresse, c'est le paragraphe 5 du

21 rapport à la deuxième page dans le version en serbe du document. Il est

22 indiqué : "Qu'au cours de la journée, un Détachement de Sabotage et

23 antiterroriste du MUP de la République de Serbie est arrivé dans la zone de

24 Decane-Istok avec tout son équipement et deux hélicoptères de type MI-24,

25 les Frenkijevci. Nous sommes entrés personnellement en contact avec

26 Stamatovic - Frenki."

27 Q. Pouvez-vous nous parler des activités communes quand vos unités avec le

28 Détachement antiterroriste et d'Anti-sabotage du MUP dont il est question

Page 9326

1 ici ?

2 R. Ce détachement est arrivé dans la zone de Visoki Decani, c'était la

3 zone de responsabilité de la 135e Brigade et j'avais des ordres qui

4 m'enjoignaient d'entrer en contact avec lui. C'est ce que nous avons fait,

5 j'ai désigné un officier pour le faire.

6 Q. Est-ce que vous, personnellement, vous avez parlé à Frenki Simatovic ?

7 R. Non. Je ne connais pas cet homme, ce n'est qu'ultérieurement que j'ai

8 appris qui il était et je l'ai vu à la télévision donc je réponds non.

9 Q. Qui au sein de votre brigade a pris contact avec lui; vous en souvenez-

10 vous ?

11 R. Le service chargé de la Sécurité qui se trouvait à Pec, c'était le

12 sergent de l'état-major Ikonic.

13 Q. Pouvez-vous nous dire ce qu'était cette unité dont il est question dans

14 ce paragraphe ?

15 R. J'ai appris plus tard et j'ai vu ensuite des éléments de cette unité,

16 c'était une unité chargée des opérations spéciales, unités de type JSO, de

17 la sûreté de l'Etat serbe. Leur mission, à l'époque, c'est-à-dire pendant

18 la fin du mois d'avril, mai et juin, c'était de déterminer exactement où se

19 produisaient les franchissements illicites de la frontière afin que les

20 autres forces puissent intervenir afin de mettre un coup d'arrêt à ces

21 franchissements illégaux de la frontière.

22 Q. A qui était subordonnée cette unité ?

23 R. C'est une question à laquelle j'ai beaucoup de difficulté à répondre

24 parce que j'ignore de qui relevait cette unité, en tout cas, ils ne

25 relevaient pas de nous, l'armée. J'imagine qu'ils relevaient du chef de la

26 sûreté de l'Etat de la République de Serbie, ou du ministre de l'Intérieur.

27 Q. A quel moment avez-vous appris qui était Frenki Simatovic ?

28 R. Après l'arrestation de Milosevic, quand on a montré les images à la

Page 9327

1 télévision, dans lesquelles on le voit à Kula inspecter les unités. C'est

2 là que j'ai appris qu'il était l'un des chefs de l'unité chargée des

3 opérations spéciales.

4 Q. Dans le rapport de combat, son nom est orthographié "Stamatovic" et non

5 pas "Simatovic." Avez-vous une raison à nous donner sur ce point ? Pourquoi

6 son nom a-t-il mal été orthographié ?

7 R. Je n'y ai pas vraiment prêté attention. Il y a sans doute eu une erreur

8 dans l'orthographe du nom.

9 M. EMMERSON : [interprétation] Page 71, ligne 21. Le témoin nous dit avoir

10 vu des éléments de cette unité : "Je l'ai appris plus tard et j'ai vu des

11 éléments de cette unité."

12 Est-ce que le témoin peut nous expliquer dans quelles circonstances et à

13 quel moment il a vu ces éléments ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je m'interroge. Je me

15 demande s'il appartient à Me Emmerson de soulever de nouvelles questions.

16 On peut se demander s'il pourrait le faire pendant le contre-

17 interrogatoire, mais cela peut cependant permettre à la Défense et à la

18 Chambre de mieux comprendre la déposition.

19 M. RE : [interprétation] Ça ne me gêne pas du tout. Je suis prêt à ce que

20 le témoin nous donne plus d'éléments sur ce point.

21 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous voulez que je vous répète la

22 question qui vient de vous être posée ?

23 R. Ultérieurement, dans le cadre des activités antiterroristes menées au

24 cours des mois de juillet et d'août, j'ai eu l'occasion de voir sur le

25 terrain certains éléments de cette unité, en particulier dans la zone de

26 responsabilité ou dans ce qu'on appelait la zone des opérations de Drenica.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez vu ces éléments, mais quelles

28 activités étaient les leurs à ce moment-là ?

Page 9328

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils se livraient à des activités

2 antiterroristes classiques le long des axes désignés; à des activités de

3 combat classiques.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez assisté à cela une

5 fois ou à plusieurs reprises ? Il s'agissait donc d'opérations de combat en

6 bonne et due forme.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] A trois reprises. Je les ai vus à trois

8 reprises, et chaque fois une journée seulement. Donc, en tout, cela fait un

9 total de trois jours.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

11 Monsieur Re.

12 M. RE : [interprétation] J'aimerais que l'on présente avec le logiciel

13 Sanction le paragraphe 63 de votre déclaration, où il est indiqué que : "Le

14 25 avril 1998" - ici c'est écrit "Petkovic", mais en fait c'est "Pavkovic"

15 - "le général Pavkovic a ordonné à ses unités subordonnées, y compris la

16 125e Brigade motorisée, de traiter les terroristes faits prisonniers

17 conformément aux dispositions des règlements relatifs au traitement des

18 prisonniers de guerre, et dans l'esprit des conventions de Genève et du

19 droit international de la guerre."

20 M. RE : [interprétation] Le document qui figure à l'annexe 6 est un

21 document dont je souhaiterais qu'il soit affiché grâce au système de

22 prétoire électronique, et j'aimerais que lui soit attribué une cote aussi.

23 Q. Le paragraphe qui m'intéresse est le paragraphe 6, page 2 en anglais.

24 Monsieur le Témoin, veuillez je vous prie examiner ce paragraphe 6.

25 Quelle est la signification de cet ordre ? Concrètement, que deviez-

26 vous faire pour respecter les dispositions de cet ordre ?

27 R. Ici, le chef de corps nous met en garde et il nous explique que si nous

28 faisons prisonnier des terroristes, nous devons les traiter conformément

Page 9329

1 aux dispositions indiquées ici, c'est-à-dire qu'il ne doit pas y avoir

2 d'exemples de torture, de mauvais traitements, de sévices, et cetera. A

3 l'époque, pendant ce premier semestre et plus tard également, il avait été

4 établi que tous les prisonniers devaient être remis au MUP.

5 Si on regarde les passages qui précèdent le paragraphe 6, on peut

6 voir qu'il est question de prisonniers, de membres des forces terroristes

7 qui sont engagés dans des attaques directes contre les forces de police, ou

8 qui contreviennent au régime qui s'applique dans la zone frontalière, ceci

9 nonobstant les dispositions antiterroristes habituelles.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une cote, s'il vous plaît.

11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document reçoit la cote aux fins

12 d'identification P1024. Ce document porte sur la liste 65 ter le numéro

13 392.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

15 Veuillez je vous prie continuer, Monsieur le Procureur.

16 M. RE : [interprétation]

17 Q. J'aimerais que vous nous fournissiez une explication. Précédemment, je

18 vous ai montré un document qui émanait du ministère des Affaires

19 étrangères, dans lequel il était indiqué qu'on ne voulait pas évoquer la

20 lutte contre les terroristes comme étant un conflit armé interne, parce

21 qu'à ce moment-là les conventions de Genève s'appliqueraient.

22 Dans l'ordre du général Pavkovic, on parle des conventions de Genève.

23 Pouvez-vous expliquer la contradiction apparente qui émane de l'examen de

24 ces deux documents ?

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, dans votre question, vous

26 dites que les conventions s'appliquent. Or ce n'est pas ce que je lis dans

27 cet extrait : "Ils doivent être traités conformément aux dispositions et à

28 l'esprit des conventions de Genève." Le témoin peut me corriger si je me

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1 trompe, mais c'est que, quelle que soit la manière dont le conflit ait été

2 caractérisé ou qualifié, ça peut avoir des implications qu'on souhaitait

3 peut-être éviter.

4 Pour moi, ce paragraphe 6 signifie simplement la chose suivante, il

5 faut suivre ces règles et ces dispositions, même si ces règles ou ces

6 dispositions ne s'appliquent pas directement. Voilà ce que je retire d'une

7 simple lecture de ce passage. Le témoin pourra me dire si mon

8 interprétation correspond à celle qu'il a de ces deux documents, et le

9 premier document, si j'ai bien compris, il ne l'a pas vu.

10 Monsieur le Témoin, pouvez-vous me dire si j'ai bien compris ces deux

11 documents ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, précisément. Dans

13 le cas où des prisonniers sont capturés, il faut suivre ces instructions,

14 donc votre façon de comprendre les choses est exacte.

15 Quant à la partie antérieure de la question concernant l'intervention

16 du ministère des Affaires étrangères, ça c'est peut-être une tentative pour

17 empêcher l'internationalisation de ces activités au Kosovo-Metohija.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais tout particulièrement

19 avoir votre confirmation sur le fait que, bien qu'il faille suivre les

20 règles, ces conventions qui sont mentionnées là ne s'appliqueraient pas

21 directement, bien qu'on devait observer la teneur de ce qui se trouve dans

22 ces conventions. Est-ce que j'ai bien compris ce qui est dit au paragraphe

23 6 ?

24 Est-ce que vous avez compris ma question?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous devions et nous allions respecter les

26 dispositions des conventions.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'elles s'appliquaient

28 directement ? Si vous dites qu'il n'y avait pas de conflit armé interne, il

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1 pourrait y avoir une difficulté alors à accepter que des règles qui

2 s'appliqueraient à un conflit armé interne, trouve une application directe.

3 Est-ce que vous comprenez mon problème et ce que j'essaie de savoir ?

4 Je pourrais dire que je ne suis pas tenu par le code de la route;

5 néanmoins, bien que je ne sois pas tenu par ce code, j'observerais les

6 règles de la circulation. Vous comprenez ce que je veux dire ?

7 Par exemple, imaginez que j'ai une propriété privée, un terrain où le

8 code de la route ne s'applique pas directement, je pourrais quand même

9 décider que si quelqu'un vient de la droite, je vais le laisser passer.

10 Est-ce que vous voyez sur quoi ma question porte ? Observer des

11 règles qui ne sont pas obligatoires ou qui ne sont pas directement

12 applicables, voilà ce que veut dire ma question. Comment dois-je

13 interpréter le paragraphe 6 ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, soyez bien assuré que

15 nous étions formés à respecter ces règles. Nous pensions qu'elles étaient

16 obligatoires.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A l'égard de qui ? A l'égard des

18 terroristes ou à l'égard des prisonniers de guerre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'égard des prisonniers quels qu'ils soient

20 terroristes, combattants, terroristes combattants, je ne sais pas quelles

21 sont les différentes catégories possibles, mais en tout les cas des

22 prisonniers.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Re, veuillez poursuivre.

24 M. RE : [interprétation]

25 Q. Etaient-ils considérés comme des terroristes combattants, ces membres

26 de l'UCK qui ont été faits prisonniers ?

27 R. Je n'ai eu aucune occasion de faire prisonnier qui que ce soit dans mon

28 unité, mais les terroristes étaient considérés comme étant les mieux

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1 entraînés et les plus incorrigibles combattants. Mais dans le cas où ils

2 étaient faits prisonniers, ils devaient être traités dans l'esprit des

3 conventions de Genève.

4 Q. Est-ce que ceci était même avant que le général Pavkovic ait donné

5 l'ordre du 25 avril 1998 ?

6 R. Oui. C'était une règle non écrite, tacite.

7 Q. Je vais maintenant vous demander d'évoquer une opération qui visait à

8 débloquer une route -- une certaine route en mai 1998, ceci on le retrouve

9 aux paragraphes 80, 81, 82, 83, 84 et 85 de votre déclaration.

10 M. RE : [interprétation] Je voudrais demander qu'on le présente par le

11 système Sanction.

12 Q. Dans un cas au paragraphe 81, il est question d'une opération

13 couronnée de succès pour débloquer la route Korenica-Ponosevac-Morina -- en

14 coordination avec d'autres unités de la VJ, et cinq soldats de l'UCK ont

15 été faits prisonniers, et des positions de tir dans des casemates et des

16 constructions fortifiées ont été neutralisées.

17 Ces cinq soldats de l'UCK, est-ce qu'ils ont été traités conformément

18 aux conventions de Genève en particulier les dispositions concernant les

19 prisonniers de guerre.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Emmerson.

21 M. EMMERSON : [interprétation] Nous avons eu des difficultés en ce qui

22 concernait les questions directrices, mais je pense que peut-être nous

23 serons tous d'accord là qu'il s'agit bien d'une question directrice.

24 D'une façon plus précise, si l'on regarde ce paragraphe et la phrase

25 dans son contexte, il semble qu'il se soit agit d'une opération conjointe.

26 On ne voit pas du tout clairement si ces prisonniers ont été fait

27 prisonniers par la VJ et par le MUP, ou en fait, si le témoin a participé

28 ou non à leur capture.

Page 9333

1 M. RE : [interprétation] Le témoin peut répondre à cela, s'il était là.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Entendons la réponse du témoin.

3 Etiez-vous là ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 22 mai ? Non, je n'étais pas là, et ces

5 prisonniers n'avaient pas été faits prisonniers par mon unité.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Re.

7 M. RE : [interprétation]

8 Q. Au paragraphe 82, il est question d'un ordre du général Pavkovic --

9 M. RE : [interprétation] Ceci est également à l'annexe 34, si on peut le

10 présenter par le logiciel e-court.

11 Q. Il s'agit du 24 mai 1998. Cet ordre dit : "Après cela, dû aux

12 activités de des bandes terroristes dans le secteur de Decani, [inaudible]

13 et Prilep…" "Jusqu'à nouvel ordre, tout mouvement dans le secteur de Decani

14 est interdit." Il a été envoyé à votre brigade et à d'autres unités du

15 Corps de Pristina.

16 La question que je pose est tout simplement : quelle était l'importance de

17 cet ordre visant à interdire les mouvements le long de la route le 24 mai

18 1998 ?

19 R. La situation était très difficile. Les forces terroristes contrôlaient

20 la route et attaquaient occasionnellement des patrouilles du MUP, donc,

21 cette route n'était pas sûre en ce qui nous concernait. Ce n'était pas sûr

22 pour l'armée et nous avions effectivement besoin de recevoir des vivres et

23 du matériel pour nos postes-frontières.

24 Par ces routes, il était nécessaire également de transporter du personnel

25 pour aller dans les polygones de tirs ou pour recevoir des soins médicaux à

26 Pristina ou à Nis, et par conséquent, nous avions pour ordre d'utiliser des

27 propres véhicules pour de tels transports ou d'utiliser la route reliant

28 Pec à Rozaj.

Page 9334

1 Q. Quel était le danger pour la circulation des militaires sur cette route

2 ?

3 R. C'était un grand danger, même dès le mois d'avril. La partie de l'unité

4 qui était déployée dans le secteur du lac Radonjic était l'objet d'attaques

5 de terroristes. Dans ma propre unité, le

6 23 mai - et ça c'est la date de ce document - il y a eu une attaque dans le

7 secteur de Smonica, et mon premier soldat a été blessé dans le secteur de

8 Morina. Ce qui était une indication que si nous continuions à utiliser ces

9 routes à l'avenir, inévitablement nous subirions des pertes.

10 M. RE : [interprétation] Pourrait-on, s'il vous plaît, avec le système

11 Sanction présenter le paragraphe suivant, à savoir le paragraphe 86 de

12 votre déclaration.

13 Q. Vous parlez d'un ordre donné le 30 mai et le 1er juin 1998, au

14 commandement du Corps de Pristina et au poste de commandement du Corps de

15 Pristina, émettant des ordres, et un char de la 125e Brigade motorisée

16 reçoit l'ordre d'apporter une aide aux forces du MUP le long de la route

17 Crni Breg-Prilep, compte tenu de la forte résistance qui a été rencontrée.

18 Ma question est la suivante : quelle est l'importance qu'on ait donné

19 l'ordre à un peloton ou d'une section de fournir une assistance aux forces

20 du MUP ?

21 R. C'était la période critique pendant laquelle les forces terroristes

22 mettaient en danger la sécurité des patrouilles du MUP de façon très

23 importante, de sorte que les patrouilles du MUP n'étaient pas en mesure

24 d'effectuer ces patrouilles le long de la grand-route de Decani à

25 Djakovica.

26 S'ils n'étaient pas en mesure de le faire, à ce moment-là cette route

27 était pratiquement coupée et il n'y avait pas d'autre route possible, que

28 ce soit pour le MUP ou pour l'armée. C'est pour cela qu'il était très

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1 important d'aider ces forces du MUP, afin qu'elles soient en mesure de

2 remplir leur mission et de parvenir à Crni Breg. Ce n'est pas très loin. Ce

3 n'est qu'à deux ou trois kilomètres, si je me rappelle bien.

4 Q. Pourquoi fallait-il des chars et combien de chars ?

5 R. Il y avait un Peloton de Chars, en tout, trois chars. C'était un appui

6 psychologique aux forces du MUP parce qu'en fait, ils n'étaient pas encore

7 vraiment prêts et suffisamment préparés pour combattre le terrorisme.

8 C'était purement pour apporter un appui psychologique.

9 Q. Je voudrais maintenant que nous passions à une offensive qui a eu lieu

10 au mois d'août. Je voudrais vous demander de regarder le paragraphe 112 de

11 votre déclaration, que l'on trouve à la page 22 du texte anglais. Il s'agit

12 du 8 août. "J'ai rendu compte au commandement du Corps de Pristina de

13 l'engagement des Groupes de Combat 1 et 2 à l'appui du MUP, des

14 Détachements PJP du MUP, dans les opérations effectuées entre le 25 et le

15 26 juillet, et le 6 août 1998."

16 Vous parlez d'un document que l'on retrouve à l'intercalaire 56, et

17 qui en fait est déjà une pièce à conviction, qui a reçu pour cote MFI D165.

18 M. RE : [interprétation] Si on pouvait le présenter par le logiciel

19 e-court, s'il vous plaît, le D165. On le retrouve également à

20 l'intercalaire 56.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait qu'on ait un numéro ? Je

22 vois que c'est déjà numéroté.

23 M. RE : [interprétation]

24 Q. Maintenant, ce document fait mention de l'utilisation d'un groupe

25 appelé Groupe Brazil, qui effectuait des opérations de pénétration profonde

26 et d'incendie sur tous les axes.

27 J'ai maintenant deux questions : Premièrement, qu'est-ce que c'était

28 que ce Groupe Brazil ? Le savez-vous ?

Page 9336

1 R. Non, non, non. Ça, c'était plus tard.

2 Q. Que voulez-vous dire par plus tard ?

3 R. Brazil ? Bien, il y avait une Unité spéciale du MUP.

4 Q. Que savez-vous à son sujet ?

5 R. Il y avait environ 100 hommes qui étaient armés avec du matériel

6 spécial, ce qui veut dire des optiques spéciales, et qui avaient reçu une

7 formation de soldat d'élite, qui étaient donc mieux entraînés même que

8 certaines unités de l'armée yougoslave.

9 Q. Ces questions de pénétration profonde et d'incendie, pourriez-vous

10 donner à la Chambre de première instance une description complète de ce que

11 veut dire cette pénétration profonde et ces incendies, du point de vue

12 militaire.

13 R. Un rapport a été envoyé aux supérieurs, à la hiérarchie supérieure,

14 parce qu'elle avait demandé d'être informée sur ce qui se passait quant à

15 la méthode de déplacement et à la progression des unités.

16 "Avancer dans l'intérieur", c'est un terme militaire, et "mettre le feu" ou

17 "incendier", c'est une expression qui n'est pas strictement de la

18 terminologie militaire, dirais-je. Cela signifie que lorsqu'on avance en

19 profondeur, on tire avec tous les moyens disponibles, c'est-à-dire, avec

20 des mitrailleuses, avec des mortiers, et cetera, et cetera, de façon à

21 permettre l'avancée de l'infanterie. Cela se passe en général latéralement

22 sur les flancs, lors d'un combat qui oppose l'unité en question à des

23 Siptar qui se trouvent en hauteur et qui assurent leur défense, une défense

24 terroriste. Cela ne se passait que rarement, sinon jamais, dans des zones

25 densément peuplées.

26 Avancer en profondeur et mettre le feu, ce sont des actes de mort.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, j'aimerais --

28 M. RE : [interprétation] J'allais demander au témoin de faire un dessin

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1 pour montrer quel est le type d'unité de formation militaire classique en

2 cas d'avancée en profondeur et d'incendie. Cela pourrait aider les Juges.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Non, j'essayais de me retrouver

4 dans les documents.

5 Tout va bien. Veuillez poursuivre.

6 M. RE : [interprétation] D'accord.

7 Q. Monsieur, je vais vous demander de dessiner, grâce au stylo que va vous

8 donner Mme l'Huissière, sous forme graphique, une opération classique

9 d'enfoncement en profondeur et d'incendie.

10 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me demandais si nous pourrions obtenir

11 des précisions au sujet de la dernière partie de la réponse. Je lis au

12 compte rendu d'audience qu'il s'agissait d'actes de mort et que c'était le

13 parti qui faisait cela.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, oui --

15 M. RE : [interprétation] Je vais poser la question.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela m'est venu à l'esprit également.

17 M. RE : [interprétation]

18 Q. Pourriez-vous dessiner le graphique et je vous demanderai une précision

19 dans un instant.

20 Je vous demanderais, pour le moment, de dessiner sur l'écran le lieu où se

21 trouvait l'ennemi, l'endroit où se trouvaient les soldats qui voulaient

22 effectuer leur percée, leur avancée, et les lieux concernés par les

23 incendies.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, est-ce que vous demandez au

25 témoin de dessiner quelque chose sur un écran vierge ?

26 Mais si tel est bien le cas, l'écran vierge a besoin d'une cote.

27 Monsieur le Greffier.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, une fois que

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1 les annexes auront reçu une cote, la pièce qui succèdera aux annexes sera

2 la pièce P1101.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, P1101.

4 Pourriez-vous dessiner ce schéma, comme vous l'a demandé M. Re, de

5 façon à expliquer visuellement ce que vous venez de dire.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je vais faire de mon

7 mieux. Je pense que ce que vous aurez comme élément de preuve à votre

8 disposition dépendra beaucoup de mon aptitude à dessiner.

9 Voyons le déploiement général. Ici, on a un Groupe de Terroristes Siptar,

10 puis ici, un deuxième, ici un troisième, sur le même théâtre d'opérations

11 contrôlé par eux. C'est à partir de ces endroits qu'ils mettent en danger

12 nos forces.

13 Ici, on a une unité qui fouille le terrain, et cette unité devrait

14 s'emparer de l'installation que je place ici, qui est un bâtiment de la

15 police ou de l'armée.

16 M. RE : [interprétation]

17 Q. Nous aimerions, une fois que vous avez quitté le prétoire, pouvoir

18 faire la distinction entre ces différents groupes. Or, vous les avez tous

19 représentés en rouge. Peut-être pourriez-vous inscrire la lettre "A" à côté

20 de ce que vous avez appelé le Siptar, et "B" pour représenter vos forces.

21 R. [Le témoin s'exécute]

22 Q. D'accord.

23 R. J'avais déjà commencé à le faire. Les lettres "STS" correspondent aux

24 forces terroristes Siptar, et la lettre "B" correspond aux forces du MUP.

25 Dans le cas précis dont je parle, le commandant du Groupe Brazil a décidé

26 d'effectuer une percée au milieu. Avec toutes les armes disponibles, ces

27 hommes ont d'abord tiré sur la partie centrale que je montre ici. Quant au

28 MUP, seule une partie des forces qu'il avait à sa disposition ont servi à

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1 protéger les flancs par rapport à l'ennemi. Une fois que les flancs ont été

2 contrôlés, ces unités qui se trouvaient dans la partie centrale ont

3 traversé. C'est cela que l'on appelle une avance en profondeur, une percée.

4 C'est le fait de franchir les lignes terroristes, en laissant derrière soi

5 certaines unités qui ont la tâche précise d'assurer la sécurité des hommes

6 qui avancent sur les flancs, sur les côtés. Ici, on voit ce qu'on appelle

7 "le feu" dans le document.

8 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète au sténotypiste. Chaque fois que le mot

9 "incendie" a été prononcé, le remplacez par "feu."

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Le feu, c'est quand on tir avec toutes les

11 armes disponibles, les armes d'infanterie, les mortiers, les lance-

12 roquettes portable, les canons sans recul, et qu'on utilise aussi des

13 grenades.

14 Ici, on voit le Groupe Brazil, qui compte une centaine d'hommes. La

15 largeur tenue par ce groupe sur le terrain est de dix à 50 mètres. Elle ne

16 peut pas être plus importante, parce que 100 hommes n'ont pas la capacité

17 de maintenir un terrain plus important sous leur contrôle. Voilà les

18 explications les plus courtes que j'ai pu fournir.

19 Quant à la signification des "actions de mort", quand on voit un

20 bâtiment sur un terrain inconnu, le fait de faire une avancée comme celle

21 que je viens d'indiquer est une action très dangereuse pour les hommes.

22 M. RE : [interprétation] Cela me suffit. Est-ce que cela est utile à

23 la Chambre ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me demandais si la Chambre d'appel

25 comprendrait ce dessin.

26 Voyons d'abord les flèches. La partie supérieure droite du dessin est

27 expliquée dans la dernière partie de la réponse du témoin, puisqu'il s'agit

28 d'une indication montrant que cela se passe dans une partie habitée du

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1 terrain.

2 S'agissant du dessin, le témoin a expliqué que les tirs se

3 concentraient d'abord sur le centre. Ça, c'est illustré par les flèches qui

4 montent du bas de la page ou de l'écran vers le haut, et ensuite la percée

5 se fait lorsque les troupes franchissent cette zone centrale. Le témoin l'a

6 illustré par une flèche qui contourne ce secteur et il inscrit à côté "dix

7 à 50 mètres." Cela peut être utile pour le gens qui verront ce dessin.

8 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pensais qu'il aurait peut-être

9 autre chose à faire pour aider le lecteur de ce dessin.

10 Je ne suis pas sûr s'il y a un feutre d'une autre couleur à la

11 disposition du témoin éventuellement, mais en tout cas la zone de feu ou de

12 tir intense décrite pourrait être illustrée par une couleur différente --

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- ce qui pourrait nous donner un

15 point focal pour la personne qui regarde le dessin.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela n'est peut-être pas

17 possible tout de suite dans le prétoire. En tout cas, j'ai donné des

18 explications qui devraient suffire.

19 J'ajoute que les lettres "STS" concernent les trois lignes

20 horizontales qui se déplacent vers la droite au centre du dessein, donc qui

21 sont au centre, un peu vers la droite, alors que l'unité Brazil comptant

22 100 hommes est représentée par cinq petits tirets droits au bas du dessin,

23 dans la partie la plus à droite, et ces cinq tirets se sont dirigés vers le

24 haut.

25 M. RE : [interprétation] Peut-être que ce serait une bonne idée de demander

26 au témoin d'utiliser plusieurs marqueurs et de recommencer son dessin.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

28 M. EMMERSON : [interprétation] Pour le moment, cela ira peut-être.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi ?

2 M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait pour le moment

3 sauvegarder ce document ?

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, de façon à ce que nous soyons

5 informés de son existence, mais, je pense, qu'en fait, il a déjà reçu une

6 cote. La pièce P1101. J'en demande la sauvegarde et l'enregistrement à des

7 fins d'identification.

8 Il l'est déjà, n'est-ce pas ? Oui.

9 M. RE : [interprétation] Pourrais-je indiquer quel est mon but dans les

10 questions que je pose au témoin en ce moment. Je n'ai plus beaucoup de

11 temps à utiliser. Je voudrais soumettre la pièce P10 au témoin.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

13 M. RE : [interprétation] Je vais donner une indication du temps qu'il me

14 faut encore, qui n'est pas très long. J'aurais besoin de montrer au témoin

15 ce plan et de lui demander des annotations illustrant l'offensive des mois

16 d'août et septembre menée par l'armée yougoslave et le MUP, et je lui

17 montrerais également ces images de satellite qui montrent le terrain où

18 entraient les forces en présence. Je ne pense pas que je puisse le faire en

19 cinq minutes. Compte tendu de l'heure, je pense qu'il était bon que

20 j'indique quel était mon objectif final.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne pense pas non plus que vous aurez

22 le temps de finir.

23 Peut-être le témoin pourrait-il réfléchir aux cartes qui lui seront

24 présentées, et à la façon dont il va les annoter plus tard dans le

25 prétoire, et il pourra se préparer.

26 Monsieur Re, vous allez demander au témoin d'annoter quoi exactement sur

27 cette carte, lorsque vous le référez, c'est-à-dire pas maintenant ?

28 M. RE : [interprétation]

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1 Q. Monsieur Zivanovic, je vais vous demander d'annoter une carte qui

2 illustre l'offensive du mois d'août à laquelle vous avez participé, et dont

3 vous faites état, si je ne m'abuse, aux paragraphes 98, 99, 100 jusqu'au

4 paragraphe 109, de votre déclaration écrite. Nous sommes au mois d'août, et

5 en utilisant les documents qui se trouvent dans votre classeur, pourriez-

6 vous montrer où se trouvaient vos unités et l'annoter --

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas maintenant, mais cela devra être

8 fait.

9 M. RE : [interprétation] L'autre carte, c'est la carte du mois de septembre

10 qui est évoquée au paragraphe 130 -- ou plutôt, 135 et 136 -- non, 130 à

11 136 de votre déclaration écrite.

12 Q. Je vous demanderais de faire appel à votre mémoire et d'annoter sur

13 cette deuxième carte l'illustration des ordres militaires que vous avez

14 dans le classeur sous forme de document, en tout cas que cela soit près

15 pour lundi.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez qu'il annote les copies

17 papier, non ?

18 M. RE : [interprétation] Mais cela est bien, je pensais --

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a deux possibilités.

20 La première, c'est que vous demandiez au témoin de le faire comme

21 devoir à la maison, et la deuxième, c'est que nous lui demandions de se

22 préparer à le faire dans le prétoire à la prochaine de l'audience.

23 Vous préférez, Monsieur le Témoin, le faire chez vous comme un devoir

24 de -- à domicile, si j'ai bien compris.

25 M. RE : [interprétation] Je pense que c'est ainsi que les choses devraient

26 se faire. Car vous voyez quel est l'aspect du produit fini que nous avons.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord

28 M. RE : [interprétation] Si cela vous convient, nous pouvons en demander le

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1 versement; sinon, nous le -- nous pouvons demander le versement de la copie

2 papier; sinon, nous demanderons le versement de l'écran.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être pourrait-on demander au témoin

4 de préparer plusieurs copies --

5 Est-ce que vous avez des stylos de couleurs différentes, que vous pourriez

6 utiliser pour annoter ces cartes ? Est-ce que vous êtes prêt à faire ces

7 annotations sur la carte relative à l'opération du mois d'août, et sur la

8 carte relative à l'opération de septembre ?

9 Oui ? Alors, il y a autre chose. C'est les documents contenus dans le

10 classeur dont disposent le témoin. Il a été beaucoup question de -- des

11 documents qui peuvent servir à compenser la mémoire. Y a-t-il des

12 objections de la part de la Défense ?

13 Car, sinon, dans les circonstance --

14 Ah, je vois que les conseils hochent du chef. Je crois comprendre

15 qu'il n'y a donc pas d'objections de la part de la Défense.

16 Par conséquent, Monsieur le Témoin, vous êtes invité à faire ces

17 annotations à la maison, enfin, chez vous. Si vous avez besoin de stylos de

18 couleurs, la Section chargée des Victimes et des Témoins vous en fournira

19 car je vous ai, bien sûr, interdit de parler à quoi que ce soit de votre

20 déposition, celle que vous avez déjà faite, ou celle que vous vous apprêtez

21 à faire au début de la semaine prochaine. Par conséquent, si vous avez

22 besoin de quoi que ce soit, vous pouvez vous adresser à la Section chargée

23 des Victimes et des Témoins, et pas au bureau du Procureur, qui ne doit

24 plus communiquer avec vous.

25 Monsieur Re, pourriez-vous nous donner une indication du temps qu'il vous

26 encore ?

27 M. RE : [interprétation] Je pense que j'aurais besoin d'une quinzaine de

28 minutes, à mon avis.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Parce que vous avez déjà dépassé

2 deux heures.

3 M. RE : [interprétation] Vraiment ?

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous aviez indiqué -- ah oui, oui, oui.

5 Bien, 15 minutes lundi.

6 M. EMMERSON : [interprétation] Je voulais simplement, en raison de la façon

7 dont se présente cette déposition très efficace, sous forme d'une

8 déclaration 92 ter, accompagnée d'un grand nombre de pièce à conviction,

9 que le contre-interrogatoire prendra un certain temps, comme je crois

10 l'avoir déjà dit il y a quelques instants.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 M. EMMERSON : [interprétation] Encore une fois, je répète qu'on ne doit pas

13 s'attendre nécessairement à ce que le contre-interrogatoire s'achève lundi.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord.

15 Monsieur Re.

16 M. RE : [interprétation] S'agissant de la semaine prochaine, du témoin qui

17 sera entendu la semaine prochaine -- des témoins qui seront entendus la

18 semaine prochaine. Le Pr Aleksandric reviendra mardi, et nous avons un

19 témoin qui fait l'objet d'une injonction qui a déclaré -- qui sera entendu

20 mercredi. Donc, la semaine est remplie, je pense, s'agissant de l'audition

21 des témoins.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Néanmoins, la Chambre verra combien

23 de temps sera utilisé par la Défense. La Défense a dit qu'elle aura besoin

24 de pas mal de temps. Donc, nous verrons. La Défense a dit qu'elle aurait

25 pas mal de temps, compte tenu de la façon dont s'est déroulé

26 l'interrogatoire principal.

27 Nous y réfléchirons ultérieurement.

28 M. RE : [interprétation] Excusez-moi, le Pr Aleksandric sera entendu

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1 mercredi. Toutes mes excuses.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mercredi. D'accord.

3 Bien, y a-t-il un changement d'horaire ? Bien, je vérifie. Une seconde, je

4 vous prie. Donc, vous avez dit que ce serait Aleksandric -- le Pr

5 Aleksandric lundi, ah non. Cet autre témoin --

6 M. RE : [interprétation] L'autre témoin dont j'ai parlé sera aussi entendu

7 mercredi. Je peux les entendre tout les deux. Le témoin sous injonction

8 sera plus concis.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par conséquent, si je vous comprends

10 bien, il n'y aura pas de gros problèmes si le contre-interrogatoire de M.

11 Zivanovic ne se termine pas lundi, parce que mardi --

12 M. RE : [interprétation] Pas du point de vue du programme prévu pour

13 l'audition des témoins.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Je comprends cela. Il peut y

15 avoir d'autres considérations.

16 Monsieur Zivanovic, nous vous revoyons donc lundi, 15 octobre, à 14 heures

17 15, dans ce même prétoire.

18 Je suspends l'audience.

19 --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le lundi 15 octobre

20 2007, à 14 heures 15.

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