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1 Le lundi 21 janvier 2008
2 [Réquisitoires]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
7 Veuillez, Monsieur le Greffier, donner le numéro de l'affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à
9 toutes et à tous. Affaire IT-04-84-T, le Procureur contre Ramush Haradinaj
10 et consorts.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup.
12 Bonjour à toutes et à tous. Nous nous retrouvons après une assez
13 longue interruption de nos débats. Nous sommes réunis aujourd'hui afin
14 d'entendre les réquisitoires et les plaidoiries des parties. Les parties
15 ont déposé leur mémoire de clôture, et peuvent maintenant développer leurs
16 thèses devant nous. Mais avant de passer à cette partie de notre audience,
17 je souhaiterais aborder un certain nombre de questions d'ordre pratique
18 très limitées. Premièrement, le greffe - et ceci est au dossier, je pense -
19 a éliminé la pièce P1124, ainsi que les pièces P1125, P1128 et P1132.
20 Pourquoi ? Parce qu'il s'agissait de pièces qui, en fait, avaient déjà été
21 versées au dossier sous d'autres cotes. Ceci maintenant est officiellement
22 consigné au compte rendu d'audience et au dossier.
23 Deuxième chose, il s'agit d'une vidéo qui a été visionnée dans le prétoire
24 le 20 août 2007, ainsi que le 22 août 2007 également. Le Procureur a
25 présenté au témoin Dunjic une vidéo, qui a fait des observations au sujet
26 de ce film. Cette vidéo a été présentée sous la cote V000/6012. On m'a dit
27 que c'était la pièce P452. Cependant, là il y a un problème, parce que la
28 pièce P452, c'est la vidéo V000/6011. La bonne cote de la pièce présentée
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1 sous la cote V000/6012, c'est D66. Voilà la cote exacte de cette vidéo.
2 Nous avons porté cette correction afin que l'on sache bien en consultant le
3 dossier que ce n'est pas la pièce P452, mais la pièce D66 qui a été
4 visionnée par le témoin Dunjic le 20 et le 22 août 2007.
5 Je vais maintenant passer au point suivant. Il s'agit de la pièce P921. En
6 raison d'un problème technique d'une pièce, P921, qui a été présentée au
7 témoin Rade Repic par l'Accusation, cette pièce a reçu une mauvaise
8 annotation dans le système de prétoire électronique. On a indiqué qu'elle
9 avait été versée au dossier. C'est la raison pour laquelle elle ne figurait
10 pas dans la liste de la Chambre comme une des pièces nécessitant
11 explication supplémentaire de la part des parties au cours de la dernière
12 audience consacrée aux questions d'intendance. A aucun moment l'Accusation
13 n'a demandé le versement au dossier de cette pièce. Ces documents ne sont
14 pas des déclarations recueillies pour les audiences entendues devant le
15 Tribunal, mais concerne malgré tout le comportement et les agissements de
16 l'accusé. Comme nous avons expliqué dans la décision que nous avons prise
17 le 29 novembre 2007 au sujet des documents présentés dans le cadre de la
18 déposition du témoin Stijovic, et, entre parenthèses, je souhaiterais
19 attirer votre attention sur le paragraphe 11 de cette décision, comme nous
20 l'avons indiqué, les documents analogues au document P922 ne sauraient être
21 versés au dossier. Vu cette décision en ce paragraphe 11 du 29 décembre
22 2007, la Chambre ne souhaite pas verser au dossier la pièce P921 et change
23 donc le statut de cette pièce puisqu'il avait été indiqué qu'elle était
24 versée au dossier mais, en fait, cette pièce maintenant est officiellement
25 marquée aux fins d'identification. Voilà.
26 Maintenant, passons aux versions publiques de déclarations 92 ter. Nous
27 avons envoyé un courrier électronique aux parties, un courrier qui porte
28 sur la question suivante : Comment doit-on communiquer au public les
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1 versions non expurgées des déclarations versées au public, 92 bis et 92
2 ter.
3 Point suivant que je veux aborder maintenant, il s'agit de la déposition du
4 témoin Fazliu. La Chambre a demandé aux parties de se mettre d'accord sur
5 les passages du compte rendu de la déposition de M. Fazliu qui peuvent être
6 rendus publics. Nous n'avons reçu aucune réponse de la part des parties, si
7 bien que nous n'avons pas été en mesure de savoir s'il y avait eu accord
8 conclu. Aujourd'hui même, nous avons envoyé aux parties un courrier
9 électronique, et dans ce courriel nous leur demandons non seulement de se
10 mettre d'accord, mais nous allons plus loin et nous faisons une proposition
11 aux parties pour voir si elles peuvent être d'accord ou pas avec ce que
12 nous leur proposons. Nous voudrions savoir si vous êtes en mesure d'arriver
13 à un accord, et nous voudrions que vous nous en informiez au plus tard
14 mercredi, mercredi de cette semaine, en tout cas avant la fin du procès,
15 s'il y a accord ou même s'il n'y a pas d'accord, la Chambre de première
16 instance pourra délivrer une ordonnance afin que le greffe rende public
17 certains passages de la déposition du témoin Fazliu.
18 Dernière chose que je souhaite aborder, c'est la déposition des mémoires
19 révisées assorties de corrigenda. Ceci a été proposé : un dépôt de mémoires
20 modifiés avec des écritures supplémentaires. Pour plusieurs raisons nous
21 avons refusé cela et nous continuons à le refuser. Bien entendu, il faut
22 qu'il y ait corrigendum si nécessaire, mais pour des raisons autant
23 pratiques que de précision, à savoir quel est véritablement le mémoire qui
24 est définitif, et cetera, mais aussi en pensant au nombre considérable de
25 pages qui sont mises en cause si on redistribue, si on recopie un mémoire,
26 nous sommes opposés à cette manière de procéder. Bien entendu, nous
27 comprenons la situation. La Défense de M. Haradinaj, nous le savons,
28 souhaiterait présenter une version absolument parfaite pour le dossier.
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1 Certes, nous le comprenons. Mais pour les raisons pratiques que j'ai
2 mentionnées, nous refusons d'agréer à cette demande.
3 Je dois dire que moi aussi, quand j'ai fait une erreur, je préfère
4 que ce soit corrigé, et qu'une version parfaite, si j'étais à votre place,
5 qu'une version parfaite soit versée au dossier, mais pour des raisons
6 pratiques ce n'est pas toujours possible et il faut apprendre à accepter
7 l'imperfection.
8 Voilà les questions que je voulais aborder avant le réquisitoire de la
9 plaidoirie. Je vous rappelle qu'il a été prévu que l'Accusation aurait
10 trois heures; la Défense, quatre heures et demie au total; l'Accusation,
11 pour sa réplique, une heure; et la Défense, pour sa réplique, une heure et
12 demie. Je serais implacable quant à l'application de ces horaires.
13 Je ne sais pas si c'est moi qui me suis trompé ou s'il y a eu un problème
14 de transcription. Page 2, ligne 16, il est question de la pièce "P921",
15 alors qu'en fait il s'agit de la pièce "P922". Puis page 2, ligne 19, si
16 j'ai parlé du 29 décembre 2007, je me suis trompé, parce qu'en fait c'était
17 novembre. Ceci étant dit, cette correction étant portée, je vous donne la
18 parole, Monsieur Re, pour que vous prononciez votre réquisitoire.
19 M. RE : [interprétation] Avant de commencer, je souhaiterais vous
20 présenter les membres de notre équipe, parce qu'il y a quelqu'un qui est
21 nouveau parmi nous. Je m'appelle David Re. Je suis accompagné de Gramsci Di
22 Fazio, Philip Kearney, Gilles Dutertre, Katrina Gustafson qui est une
23 juriste, Rut Ley, son assistante, Romana Schweiger, et un nouveau membre de
24 notre équipe, M. Will Bryne qui ne porte pas de toge.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
26 M. RE : [interprétation] Nous allons nous servir du logiciel PowerPoint
27 dans le cadre de notre réquisitoire et présenter des extraits du compte
28 rendu d'audience grâce au système Sanction. Je le signalerai le moment venu
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1 pour que les pièces pertinentes soient présentées.
2 Nous en sommes arrivés à la fin de ce procès. Nous avons entendu de très
3 nombreux témoins, quelque 100 témoins. Ceci représente quelque 11 000 pages
4 de compte rendu d'audience. Nous en sommes à ce moment-là arrivés à la
5 conclusion de nos moyens à charge et nous estimons que la culpabilité de
6 Ramush Haradinaj, Idriz Balaj et Lahi Brahimaj a été prouvée au-delà de
7 tout doute raisonnable, au-delà de tout doute. Ils sont coupables des
8 crimes de persécution en tant que crime contre l'humanité. Ils sont
9 coupables également de beaucoup d'autres crimes contre l'humanité dont ils
10 ont été accusés, ainsi que de crimes de guerre. Nous avançons que nous
11 avons prouvé la culpabilité des accusés au titre de chacun des chefs de
12 l'acte d'accusation.
13 Je vais commencer par rappeler aux Juges qui ont entendu tous les
14 témoins, toutes les ressemblances, les similitudes qui marquent cette
15 affaire, parce que c'est cela qui va amener à la condamnation de Haradinaj,
16 Balaj et Brahimaj au titre des persécutions quant au titre de crimes contre
17 l'humanité. Les similitudes sont les suivantes : Toutes ces victimes
18 correspondaient à un schéma bien donné. Il s'agissait de civils serbes qui
19 sont restés sur place après l'expulsion de la population serbe de la zone
20 de Dukagjin au printemps, au cours de Pâques 1998. Il s'agissait de
21 collaborateurs ou d'espions serbes ou de gens qui étaient perçus comme
22 tels. Il y a aussi les corps qui correspondent à un schéma, à une ligne de
23 conduite particulière. Même chose pour les corps, les corps qui avaient
24 subi des mauvais traitements semblables qui correspondaient à des actes de
25 torture, de traitements cruels notamment, des blessures que l'on trouve sur
26 le corps de personnes qui ont été emprisonnées et torturées.
27 Sur les 31 corps qui ont été trouvés dans le canal, 20 des victimes
28 avaient succombé à des blessures par balle. La Défense, d'ailleurs, ne l'a
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1 pas contesté. Ces corps ont été trouvés dans une zone isolée qui se trouve
2 à proximité du camp d'entraînement des Aigles noirs de Balaj. Ce terrain
3 est isolé et se trouve à 1,94 kilomètres en ligne droite de la maison de
4 Haradinaj, dans une zone qui à l'époque au moment où les corps ont été
5 abandonnés à cet endroit, une zone qu'il contrôlait d'une main de fer.
6 Autre similitude, c'est que ces corps ont été trouvés pratiquement dans
7 l'ordre où les personnes concernées ou disparues ont été emprisonnées ou
8 kidnappées. Nous avançons qu'il y a beaucoup trop de corps de gens qui se
9 ressemblent beaucoup trop, des civils serbes, des civils qui étaient
10 recherchés par l'UCK, des Rom, des collaborateurs ou perçus comme tels. Il
11 y a trop de ressemblance pour que ce soit le fait du hasard. Il y a deux
12 victimes qui ont été enlevées par Balaj en personne et qui ont été trouvées
13 ensemble au canal. Il s'agissait de la mère et de la sœur du Témoin 4. Il y
14 a le corps de quelqu'un qu'on a vu pour la dernière fois alors qu'il se
15 dirigeait vers le canal, on l'a trouvé à l'arrière de la jeep de Balaj.
16 Balaj a emmené ce corps et ce corps a été retrouvé sur le corps des deux
17 personnes qui avaient été emprisonnées ou fait kidnappées par Balaj
18 quelques mois auparavant.
19 Le corps de Pal Krasniqi a été torturé de manière très cruelle au centre de
20 détention de Brahimaj, et on a trouvé ce corps à côté de celui d'une
21 victime, Sali Berisha, dont le père Misin se trouvait sur une liste de
22 personnes recherchées par l'UCK. Il y a beaucoup trop de ressemblance ici
23 pour que cela soit le fait du hasard. Il y a beaucoup trop de coïncidences
24 qui se manifestent pour que l'on puisse dire que ces crimes ont été commis
25 au hasard ou par hasard par des gens qui ne se connaissaient pas et qui
26 agissaient de manière individuelle. L'unique conclusion à laquelle on
27 puisse parvenir, c'est que tous ces crimes se sont déroulés, ont été commis
28 dans le cadre d'une entreprise criminelle commune, d'un dessein criminel
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1 commun. Il n'y a pas d'autres explications à proposer.
2 Cette zone, Haradinaj la contrôlait avec fermeté à l'époque. Les meurtres,
3 les enlèvements, les tortures, que nous avons présentés dans le cadre de la
4 présentation de nos moyens, n'auraient jamais pu se dérouler sans que
5 Haradinaj le sache, sans qu'il soit complice de ces agissements. Il est
6 extrêmement important que la Chambre de première instance appréhende les
7 éléments de preuve dans leur globalité et pas comme le conseil de Haradinaj
8 voudrait que vous le fassiez, et il ne faut pas examiner chacun des chefs
9 séparément et prendre une décision séparément, sans tenir compte de la
10 totalité du dossier, parce que c'est uniquement en faisant cela, qu'en
11 examinant tous les chefs, en les examinant globalement qu'on voit une ligne
12 de conduite se dégager, un schéma se dégager. C'est à ce moment-là que l'on
13 comprend ce qui s'est passé. Une fois qu'on comprend ce qui s'est passé,
14 qu'on voit ce qui s'est passé, on comprend qu'il est impossible que ces 40
15 meurtres aient été commis par coïncidence ou qu'ils soient le fait du
16 hasard. Ce n'est pas possible.
17 Il est également essentiel d'examiner ces faits, ces faits que nous avons
18 présentés dans l'acte d'accusation et que nous avons prouvés, de les voir
19 dans le contexte historique des événements du Kosovo et de l'évolution
20 militaire de l'UCK. Comme nous l'avons indiqué dans l'introduction de notre
21 mémoire qui présente le contexte historique, l'année 1998 a été une année
22 qui a été marquée par d'énormes bouleversements au Kosovo. L'Albanie était
23 plongé dans le chaos, son économie était en ruines, les dépôts d'armes
24 avaient été pillés et les armes passaient en grand nombre au Kosovo. Les
25 autorités serbes ont pris des mesures de répression contre la population
26 albanaise, la majorité albanaise de la province, des mesures à caractère
27 juridique. On peut dire qu'à l'époque il y avait énormément d'armes qui
28 circulaient au Kosovo, des armes albanaises. C'est dans ce contexte que
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1 l'UCK, l'Armée de libération du Kosovo, a vu sa chance et l'a saisie au
2 vol.
3 Mais que savait l'armée du Kosovo pendant les quatre ou cinq années qui
4 précédaient ? L'UCK avait mené à bien des attaques terroristes de petites
5 envergures contre l'Etat serbe, contre ses partisans et contre les civils.
6 L'UCK a tué des policiers, attaqué des postes de police, assassiné des
7 représentants officiels des municipalités, attaqué également des centres de
8 rassemblement des réfugiés serbes, comme par exemple à Babaloc. Vous avez
9 entendu des témoins vous parler de l'attaque menée par l'UCK à Babaloc
10 pendant la période visée à l'acte d'accusation. Mais après avoir mené à
11 bien ces attaques, après avoir tué, dynamité, plastiqué des locaux, et
12 cetera, l'UCK revendiquait fièrement la responsabilité de ces actions. Elle
13 a revendiqué cette responsabilité, la responsabilité du meurtre de civils
14 serbes. Il s'agissait pour elle d'une sorte de mise en garde adressée aux
15 autres. C'est en 1998, lorsqu'elle a eu accès aux armes qui venaient
16 d'Albanie en grand nombre, que l'UCK a saisi l'occasion d'organiser une
17 lutte armée contre les autorités serbes. On avait une escalade de la
18 violence des attaques et l'UCK s'est organisée du point de vue militaire.
19 Pour la première fois, l'UCK a constitué une véritable menace militaire
20 pour la Serbie. Comment a réagi la Serbie ? La Serbie a augmenté ses
21 mesures de recours à la force ainsi que les violations des droits de
22 l'homme dans la province, si bien que l'UCK a pris des mesures de
23 représailles et c'est ainsi que s'est enclenché un cycle de violence où
24 chacun répondait aux mesures de violence de l'autre de manière de plus en
25 plus violente.
26 Les éléments du dossier montrent au-delà de tout doute raisonnable - et
27 cela n'a pas été contesté de manière sérieuse par les accusés - qu'à la mi-
28 avril 1998 déjà, un conflit armé avait surgi au Kosovo. Malheureusement,
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1 comme dans de nombreuses guerres, ce sont les civils qui ont été les
2 victimes du conflit armé qui existait déjà à la mi-avril 1998 dans cette
3 zone. Des deux côtés, des atrocités ont été commises contre la population
4 civile. Des deux côtés, on a commis des actes de persécution ainsi que
5 d'autres actes de crime contre l'humanité ainsi que des violations des lois
6 de la guerre, telles celles qui figurent à l'acte d'accusation en l'espèce.
7 Les éléments du dossier démontrent que les attaques menées contre les
8 civils dans le secteur de Dukagjini étaient particulièrement violentes. Le
9 conflit, comme beaucoup d'autres conflits qui ont éclaté dans l'ex-
10 Yougoslavie, a débouché sur ce qu'on appelle communément le nettoyage
11 ethnique des civils de la partie adverse. Mais la justice se doit d'être
12 aveugle et les auteurs des crimes commis des deux côtés au cours du conflit
13 doivent rendre des comptes devant ce Tribunal, les uns autant que les
14 autres.
15 Malheureusement pour les civils serbes et pour ceux qui étaient
16 considérés comme des opposants de l'UCK, les membres de l'UCK dans la zone
17 de Dukagjin sous la direction de Ramush Haradinaj ont à la fois attaqué
18 l'Etat serbe et une partie de la population civile, une des attaques menée
19 contre les civils serbes en général, ainsi que contre les Albanais du
20 Kosovo et les Rom et les autres civils qui étaient considérés comme
21 collaborant avec les forces serbes ou s'opposant à l'UCK. En 1998, le
22 dossier nous montre que les trois accusés étaient incontestablement membres
23 de l'entreprise criminelle commune qui est visée à l'acte d'accusation.
24 Le dessein criminel commun recherché, c'était pour l'UCK de renforcer le
25 contrôle qu'elle avait sur la zone de Dukagjini en expulsant de manière
26 illégale et en faisant subir des mauvais traitements aux Serbes et aux
27 autres civils qui étaient considérés comme collaborant avec le régime serbe
28 ou qui étaient opposés à l'UCK. Haradinaj, Balaj, Brahimaj, ainsi que
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1 d'autres participants de cette entreprise criminelle commune, dont les
2 frères de Haradinaj et Brahimaj, ont mis en œuvre avec enthousiasme et sans
3 aucune pitié ce dessein criminel commun. Des familles serbes qui vivaient
4 depuis longtemps dans cette région ont été chassées de leurs foyers. Les
5 civils serbes ont fait l'objet de mauvais traitements, certains ont été
6 enlevés, assassinés. Ceux qui étaient soupçonnés de collaborations ont été
7 persécutés, chassés et tués. A la mi-avril 1998, l'essentiel de la
8 population serbe du secteur en avait été chassé suite à toute une série
9 d'attaques et de mesures de persécutions dirigées contre eux dans le cadre
10 du dessein criminel commun.
11 L'UCK se servait d'une propriété installée en profondeur dans son
12 fief de Jablanica pour détenir et torturer des prisonniers. L'accusé, Lahi
13 Brahimaj, disposait d'un bureau et participait personnellement à la torture
14 et aux mauvais traitements des prisonniers de l'UCK. Des listes noires de
15 collaborateurs soupçonnés ont été établies. Les noms de ces personnes ont
16 été distribués lors des réunions de l'état-major de l'UCK et aux gardiens
17 de village qui étaient membres de l'UCK et qui tenaient les nombreux postes
18 de contrôle établis dans les zones contrôlées par l'UCK. Le sort des
19 personnes dont les noms figuraient sur cette liste était connu; c'était une
20 mort presque certaine.
21 Les sept personnes mentionnées dans l'acte d'accusation se trouvaient
22 toutes sur les listes noires de l'UCK ou étaient recherchées par l'UCK.
23 Istref et Nurija Krasniqi, chefs 21 et 22; Zenun Gashi, chefs 19 et 20;
24 Misin Berisha, ça fait 19 et 20; Skender Kuci, chefs 31 et 32; Sejd Noci,
25 chefs 21 et 22; le Témoin 3, chefs 31 et 32; et Sanije Balaj, chefs 21 et
26 22.
27 Le commandement de l'UCK pour la vallée de Baran qui faisait rapport à
28 Ramush Haradinaj a fait circuler une liste des personnes recherchées dans
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1 laquelle figurait le nom des collaborateurs supposés; Istrej et Nurije
2 Krasniqi, Zenun Gashi, Misin Berisha, et Skender Kuci. Ces cinq personnes
3 ont été enlevées et assassinées par l'UCK. Les corps d'Istref et Nurije
4 Krasniqi, Zenun Gashi, Misin Berisha et ses deux fils ont été retrouvés à
5 quelques mètres l'un de l'autre au canal.
6 Haradinaj a nommé Balaj, que tout le monde connaissait à l'époque sous son
7 nom de Toger, au poste de lieutenant afin qu'il commande une unité de l'UCK
8 particulièrement connue, les Aigles noires. Cette unité qui comptait
9 environ 30 hommes a terrorisé les victimes pendant toute la période
10 couverte par l'acte d'accusation. Balaj faisait directement rapport à
11 Haradinaj. Balaj, lui aussi, disposait de sa propre liste noire qu'il
12 gardait dans un carnet qu'il l'avait toujours sur lui. Balaj et Haradinaj
13 se rencontraient souvent et travaillaient ensemble. Balaj a personnellement
14 violé une victime et a enlevé d'autres. L'unité de Balaj s'entraînait et
15 était située près du canal du lac de Radonjic. Comme je l'ai indiqué plus
16 tôt, la propriété familiale du clan Haradinaj se trouve à 2 kilomètres à
17 peine, en pleine campagne, du canal. En 1998, lorsque les corps ont été
18 abandonnés entre la propriété familiale de Haradinaj et le canal, se
19 trouvait le camp d'entraînement des Aigles noires de Balaj.
20 Les éléments du dossier montraient qu'au moins 40 victimes
21 d'entreprise criminelle commune ont été assassinées pendant la période
22 couverte par l'acte d'accusation. Les corps d'au moins 31 victimes ont été
23 retrouvés en aval d'un lieu d'exécution situé au canal en septembre 1998.
24 Les trois accusés ne contestent pas que 20 de ces victimes ont succombé à
25 des blessures par balle. Les corps de deux victimes serbes civiles portées
26 disparues ont été retrouvés dans une fosse située dans un fossé près de
27 Dashinoc, une zone contrôlée par l'UCK. L'UCK contrôlait la zone du canal à
28 partir du mois d'avril jusqu'à ce que les forces serbes regagnent
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1 provisoirement le contrôle du territoire en septembre 1998 et ils fassent
2 cette macabre découverte.
3 L'UCK depuis longtemps suivait une politique consistant à attaquer les
4 civils serbes et ceux que l'UCK considérait comme coopérant avec les
5 autorités serbes. La Chambre de première instance peut examiner les
6 éléments de preuve relatifs aux attaques menées par l'UCK contre les civils
7 et les collaborateurs serbes. Ces éléments de preuve témoignent de
8 l'élément moral de l'intention requise pour les persécutions que
9 partageaient les membres de l'UCK dans l'entreprise criminelle commune dans
10 le secteur de Dukagjini en 1998. Les communiqués de l'UCK émis en 1994 et
11 1998 glacent le sang. Je souhaiterais que l'on montre à l'écran le
12 communiqué numéro 13 en date du mois de juin 1995. Comme vous le voyez à
13 l'écran, dans ce communiqué il est fait référence à une attaque contre un
14 poste de police serbe au mois d'avril. Le texte se poursuit ainsi : "Deux
15 maisons récemment construites pour des colons serbes et monténégrins ont
16 été minées au début du mois de mai. Les explosions à Junik sont un
17 avertissement à l'intention des colons qui acceptent de suivre la politique
18 de nettoyage ethnique mené par Belgrade."
19 Il est dit ensuite que : "Mucaku, un espion serbe, a été assassiné au cours
20 de la dernière semaine du mois de mai."
21 Puis, il est dit : "Nous lançons un appel à la population civile serbe pour
22 qu'elle réfléchisse attentivement à son avenir au Kosovo et ne participe
23 pas et ne devienne pas membre des forces de police et de l'armée occupante
24 qui lutte contre les Albanais."
25 Zoran Stijovic, qui était le chef des services de Sûreté de l'Etat serbe à
26 Pristina, a attesté de la véracité de ces communiqués et a confirmé que ces
27 faits se sont bel et bien produits.
28 Un autre communiqué était publié le 20 novembre 1997, soit quelques mois
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1 avant l'éclatement du conflit armé dans la zone de Dukagjini au Kosovo,
2 dans le communiqué numéro 39. Il est explicitement fait mention de l'état-
3 major central de l'UCK qui se livre à "une opération armée contre Qamil
4 Gashi, de Komoran… Après plusieurs avertissements ignorés concernant les
5 attentes à la cause nationale dont il serait responsable. Il s'agissait
6 d'un membre du parlement serbe, d'un membre de la Confédération socialiste
7 serbe de la municipale de Gllogovc et d'un missionnaire de l'envahisseur
8 serbe contre notre guerre de libération."
9 Ce sont les termes utilisés.
10 Les attaques se sont poursuivies. M. Stijovic a témoigné ici du nombre
11 croissant d'attaques menées entre 1992 et 1998. Dans son témoignage qui a
12 été versé au dossier, il s'agit de la pièce P931, paragraphe 20, il dit
13 qu'en 1992 le nombre d'attaques était de huit. Ce nombre a augmenté; 11
14 attaques en 1993, quatre en 1994, neuf en 1995, 31 en 1996, 75 en 1997,
15 pour atteindre le chiffre de 1 486 en 1998, à la date du 30 novembre. Au
16 début de ce paragraphe, il dit que : "Le nombre d'attaques menées en 1995,
17 1996 et 1997, contre la police et contre les Albanais, qui n'étaient pas en
18 faveur du programme des séparatistes, a augmenté considérablement."
19 Puis, au paragraphe 62 de sa déclaration préalable qui a été versée au
20 dossier, il parle de 1 486 attaques menées entre le 1er janvier et le 30
21 novembre 1998. Puis, il effectue une ventilation de ces attaques; 90
22 attaques qui ont été menées contre des Albanais et des Serbes, 105 contre
23 des membres du MUP, 37 contre des membres de la VJ. Au cours de ces
24 attaques, 481 personnes ont été blessées, dont 96 civils, 283 membres du
25 MUP et 102 membres de la VJ. Mais au cours de cette même période, 221
26 personnes ont été enlevées, le sort de la plupart d'entre elles restant
27 inconnu.
28 Donc, il faut garder à l'esprit le comportement de l'UCK à l'égard des
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1 civils serbes, ou comme ils les qualifiaient, à l'égard des colons, c'est
2 dans ce contexte que les motivations criminelles des participants à
3 l'entreprise criminelle commune dans la zone de Dukagjin doivent être
4 considérées.
5 Je souhaiterais maintenant que l'on parle de façon plus détaillée de la
6 participation des trois accusés aux crimes reprochés qui auraient été
7 commis en rapport avec le charnier situé au niveau du canal. Nous avons
8 imprimé des photographies du canal qui ont été annotées par le Pr
9 Aleksandric, peut-être que ces exemplaires pourraient être distribués aux
10 Juges de la Chambre et aux conseils de la Défense. Il convient de se poser
11 la question suivante : pourquoi l'UCK a-t-elle abandonné les corps des
12 victimes assassinées dans ce canal-ci ?
13 Le secteur du canal est trop vaste pour qu'une photographie suffise. Sur ce
14 premier cliché, nous voyons où a été retrouvé le premier groupe de corps.
15 Sur la deuxième photographie, nous voyons le secteur en aval. C'est là
16 qu'ont été retrouvés les autres cadavres. Vous devez vous demander pourquoi
17 l'UCK a abandonné ces corps à cet endroit ? Pourquoi ces corps n'ont-ils
18 pas inhumés à Jablanica ou à Gllogjan ? Mais si vous considérez la région,
19 vous verrez que tous laissent à penser qu'il s'agit d'un lieu d'exécution,
20 d'un charnier classique. Ce charnier était situé suffisamment loin du
21 centre de la zone d'influence de l'UCK, où se trouvait la propriété
22 familiale des Haradinaj, le QG de l'UCK à Gllogjan, le QG des Aigles noirs
23 à Rznic, et ce, afin de ne pas tirer l'attention des observateurs
24 étrangers. Il était situé à un endroit en profondeur dans le territoire
25 contrôlé par l'UCK. Il s'agit d'une zone que l'on choisirait naturellement
26 pour abandonner des cadavres. C'était une zone isolée, difficile d'accès.
27 Les forces serbes avaient difficilement accès à cette zone. Il était
28 quasiment impossible d'aller là-bas, et les preuves démontrent que ce n'est
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1 que dans le cadre d'une opération militaire de grande envergure menée au
2 mois de septembre, de concert par les forces du MUP et de la VJ qu'ils y
3 ont eu accès. Il était quasiment impossible pour les observateurs étrangers
4 de la MOCE, de l'OSCE, pour les attachés militaires britanniques et
5 américains, de se rendre dans cette zone, le colonel Crosland, qui a déposé
6 en l'espèce, en a parlé. Il était quasiment impossible pour toutes ces
7 personnes de se rendre dans ce secteur qui était gardé par, d'un côté, le
8 camp d'entraînement des Aigles noirs de Balaj, et de l'autre côté, par de
9 nombreux postes de contrôle de l'UCK, des tranchées fortifiées, entre
10 autres.
11 Il est important de se souvenir de la proximité de cet endroit avec la
12 propriété familiale des Haradinaj. Si vous examinez les photographies, nous
13 voyons que cet endroit se trouve à plus de 1 kilomètre de la propriété
14 familiale, comme je l'ai dit, ce secteur se trouvait sous contrôle de
15 l'UCK. On ne pouvait y arriver par hasard. Mais l'existence de ce lieu
16 était un secret de polichinelle pour tous les habitants du secteur. Nombre
17 de personnes en avaient connaissance.
18 Venons-en maintenant à l'entreprise criminelle commune. L'Accusation a
19 établi qu'entre mars et septembre 1998, en exécution du but criminel
20 commun, Haradinaj, Balaj, Brahimaj et d'autres membres de l'UCK ont créé
21 une "zone libre" dans le secteur de Dukagjini, où les forces de l'UCK
22 pouvaient se déplacer et agir librement. L'Accusation a prouvé que toutes
23 ces personnes ont établi une structure militaire placée sous l'autorité
24 militaire et civile de Haradinaj dans le secteur de Dukagjini et ont mené
25 une campagne de violence et de persécution contre les opposants de l'UCK.
26 Quel rôle Ramush Haradinaj a-t-il joué au sein de l'entreprise criminelle
27 commune et en exécution du but criminel commun ? Comme l'a entendu la
28 Chambre, Haradinaj était un homme fort, puissant, charismatique. Certains
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1 témoins le considéraient ainsi à l'époque et le considèrent toujours ainsi
2 aujourd'hui, ils le considèrent comme une idole. Un témoin a même déclaré :
3 Dieu règne dans les cieux, Haradinaj règne sur terre. Il s'agissait d'une
4 présence forte et dominante dans la zone de Dukagjini pendant toute la
5 période couverte par l'acte d'accusation. C'était le chef militaire de
6 l'UCK, l'homme le plus puissant dans la zone de Dukagjin. Il organisait les
7 opérations militaires, il les commandait, il les contrôlait, et s'occupait
8 également d'affaires civiles. Haradinaj abusait de ses fonctions pour
9 contribuer à la réalisation du but criminel commun. Haradinaj lui-même a
10 joué un rôle essentiel dans la création, la mise en œuvre et le maintien
11 d'un système de violence et de persécution à l'égard des collaborateurs ou
12 des personnes perçues comme telles et des opposants de l'UCK en 1998. Sans
13 sa participation, tout cela n'aurait pas pu exister. Son degré de contrôle
14 sur les questions civiles et militaires dans la zone en 1998 était tel que
15 les persécutions, les meurtres, les tortures, les enlèvements et les viols
16 perpétrés à l'encontre de civils serbes et d'opposants présumés n'auraient
17 pas pu avoir eu lieu sans son approbation.
18 Les mauvais traitements et les persécutions commis en exécution des buts
19 criminels communs étaient tellement généralisés et systématiques qu'ils
20 n'auraient pas pu avoir lieu sans son approbation. Haradinaj a créé et
21 soutenu tous ces actes et exerçait un commandement général sur tous les
22 éléments de ce système. Parmi les outils dont il s'est servi, il y avait
23 les Aigles noirs de Balaj, le centre de détention de Jablanica de Brahimaj,
24 et la police militaire de l'UCK. Il se déplaçait constamment dans la zone.
25 Il était en contact avec des commandants de village de l'UCK et d'autres
26 officiers de l'UCK. Il a participé de façon détaillée à toutes sortes de
27 questions militaires. Il a personnellement ordonné la nomination et le
28 transfert de soldats, d'unités, il s'occupait de l'armement, de la
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1 distribution des armes, des soins médicaux, de la collecte et de la
2 distribution des fonds, de la formation militaire, du financement, et
3 s'occupait également des armes et de la contrebande d'armes en provenance
4 d'Albanie.
5 Le 24 juin 1998, il a ordonné la mobilisation de tous les hommes âgés
6 de 19 à 35 ans. Le procès-verbal de cette réunion qui atteste du poids
7 qu'il exerçait dans son zone prouve son degré de participation, puisqu'il a
8 convoqué des réunions, établi des ordres du jour, reçu des rapports, donné
9 des ordres, contrôlé les débats. La preuve a été faite qu'il connaissait de
10 façon détaillée les événements et les opérations qui se déroulaient dans le
11 secteur. La preuve a été faite également qu'il a dirigé des opérations
12 militaires sur tout le territoire en question. Le commandant de la sous-
13 zone de l'UCK, Cufe Krasniqi, a témoigné de cela à la page 5 811 du compte
14 rendu d'audience. Un autre commandant, Shemsedin Cekaj, en a également
15 parlé, il a dit que Haradinaj se trouvait souvent sur la ligne de front.
16 Son niveau de participation et de contrôle dans les questions militaires
17 est démontré par le fait qu'il sélectionnait ses commandants dans les
18 différents secteurs. Il a nommé Balaj à la tête des Aigles noirs; Rrustem
19 Tetaj et Shemsedin Cekaj, en tant que commandants de village et en tant que
20 commandants de sous-zone; Din Krasniqi, en tant que commandant pour la
21 vallée de Baran; Faton Mehmetaj, en tant que commandant de la police
22 militaire de l'UCK; Nazmi Brahimaj, en tant que commandant adjoint de
23 l'état-major opérationnel de Dukagjini; et Pjeter Shala, en tant que
24 commandant de Dujak le 2 juillet.
25 Haradinaj était en contact avec Din Krasniqi à Vranoc, lequel
26 recevait ses ordres de Haradinaj et lui faisait rapport. Pjeter Shala a
27 parlé des autorisations données par Haradinaj. Il a dit : "Je ne sais pas
28 le moment exact, mais j'allais à Gllogjan pour chaque document dont j'avais
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1 besoin." Page 9 980 du compte rendu d'audience.
2 Nous avons vu également que Haradinaj signait des certificats
3 d'enregistrement. Ceci apparaît à la pièce P1268 en date du 4 juillet 1998.
4 On voit que Shefket Kemaj, un homme d'affaires, a reçu deux bombes.
5 Au moindre signe de manque de manque de loyauté, Haradinaj relevait de
6 leurs fonctions ses subordonnés, ce fut le cas notamment pour Nasim
7 Haradinaj qu'il a accusé d'avoir commis un "acte de trahison" en quittant
8 son poste contrairement aux instructions données par Haradinaj. Le niveau
9 de contrôle exercé par Haradinaj est évident sachant que Haradinaj s'est
10 attribué le plus haut pouvoir en matière civile dans la zone. Des documents
11 versés au dossier prouvent qu'il contrôlait tout ce qui touchait aux soins
12 médicaux, aux naissances, aux décès, à l'enregistrement des véhicules, aux
13 autorisations de déplacement, au mouvement des civils, même en ce qui
14 concernait l'abattage de bois.
15 Le 22 juillet, il est allé jusqu'à interdire à quiconque de consommer ou de
16 vendre des boissons alcoolisées, non seulement aux militaires mais
17 également aux civils qui ne devaient ni consommer ni vendre de l'alcool.
18 Cela figure dans la pièce P246. Haradinaj a fait en sorte que l'UCK exerce
19 le contrôle sur le mouvement de la population civile avec la mise en place
20 d'un système de postes de contrôle de village. Des autorisations de
21 déplacement ont été émises par les commandants de l'UCK dans les villages.
22 Il y a la pièce P146 qui démontre que le 24 juin Haradinaj, de façon
23 explicite, a émis un ordre pour empêcher le déplacement de la population
24 civile sans que la permission soit donnée par le commandement pertinent de
25 l'UCK. Si vous regardez le paragraphe 7 à l'écran, vous verrez qu'il "est
26 interdit qu'il y ait le moindre mouvement des combattants, des officiers
27 militaires et de la population à l'intérieur de la région sous la
28 responsabilité de l'état-major opérationnel de la plaine de Dukagjini sans
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1 que la permission ait été donnée par le commandant du quartier général en
2 question."
3 Le 9 juillet 1998, lors d'une réunion de son propre état-major, et encore
4 une fois on voit le niveau d'intérêt de la part de Haradinaj par rapport au
5 mouvement des civils à l'intérieur de la zone, il a dit que les
6 autorisations étaient émises pour un seul voyage vers un seul village. On a
7 prouvé qu'il y avait une raison assez macabre pour qu'il démontre un tel
8 intérêt pour les déplacements des civils, c'est-à-dire un seul voyage vers
9 un seul village, le contrôle du mouvement des civils de cette façon
10 permettait à l'UCK de savoir très facilement où se trouvaient les personnes
11 soupçonnées d'être des collaborateurs ou des personnes opposées à l'UCK, ce
12 qui faisait partie de l'entreprise criminelle conjointe. Ceci a été prouvé
13 par un bon nombre de victimes, y compris dans les chefs 5 et 6, Stanisa et
14 Rosa Radosevic et Novak Stijovic; les chefs 17 et 18, Tush et Illira
15 Frrokaj; les chefs 21 et 22, Sanije Balaj et Sjed Noci; 27 et 28, le Témoin
16 6; les chefs 29 et 30, Nenad Remistar.
17 Le 2 juillet, et là nous avons la pièce P158, Haradinaj est allé encore
18 plus loin et il a interdit les partis politiques ou les organisations
19 politiques. Si vous regardez l'écran vous verrez un "ordre exécutif" qui
20 dit :
21 "Toute activité politique est interdite de la part de tout parti politique
22 ou d'une part d'une association de nature politique dans la zone
23 opérationnelle de Dukagjini. Nous donnons l'ordre d'abolir tous les partis
24 politiques en attendant la libération complète du pays."
25 Vous voyez qu'en bas de cet ordre se trouve la signature de
26 Haradinaj.
27 Nous avons encore un exemple de l'intérêt pour des questions civiles de
28 Haradinaj, à savoir l'ordre émis le 28 juillet, cela concerne Fadil et
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1 Bekim Betiki [phon] qui avaient le droit de vendre des vivres, sel, sucre,
2 huile, riz et pâtes dans cette région. De cette façon, Haradinaj décidait
3 qui pouvait livrer des vivres à la population civile de la région. Il y a
4 une note manuscrite P127, signée par Nazim -- Brahimaj et Ramush Haradinaj,
5 et cela concerne le transfert de Fadil du dispensaire, c'était le 9 juin
6 1998, son transfert d'un dispensaire à un autre dispensaire. Cela montre
7 encore une fois qu'il y avait énormément d'intérêt de la part de Haradinaj
8 et de la part d'autres concernés par les accusations concernant leur
9 participation à l'entreprise criminelle conjointe et qui concernait toute
10 la vie quotidienne de la région en 1998.
11 Encore un exemple, le 11 août 1998, Achilleas Pappas, moniteur de la MOCE,
12 a été détenu, il a été arrêté ainsi que d'autres moniteurs, et il a été
13 accusé d'espionnage pour le compte des Serbes. Ce groupe d'espions
14 soupçonnés a été emmené au QG de Gllogjan. Ce Grec ainsi que son interprète
15 albanais ont été interrogés, probablement soupçonnés de contacts ou
16 d'implication avec ce soi-disant espion serbe, et Pappas a dit : "Balaj a
17 commencé à frapper, à donner des coups de pieds à l'interprète en
18 l'injuriant, en faisant des gestes comme s'il essayait d'extraire l'arme de
19 sa veste et de lui tirer dessus."
20 Ensuite, Haradinaj est arrivé et a interrogé les membres du groupe
21 avant de les laisser partir. Pappas dans sa déclaration devant ce Tribunal
22 P271, paragraphe 26, a décrit ceux qui l'ont détenu comme des extrémistes.
23 C'était le troisième groupe de membres de l'UCK qu'il avait rencontré au
24 Kosovo. Il avait parlé de ce "groupe qui les avait enlevés". Il a dit :
25 "Ils agissaient séparément dans une zone dont ils exerçaient le contrôle.
26 Ils avaient un leader à qui ils obéissaient sans remettre en question sa
27 personne ou ses ordres. Et là, je fais référence à Ramush Haradinaj. Avant
28 l'arrivée de Haradinaj, les autres soldats étaient très malpolis et se
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1 comportaient mal, mais dès son arrivée, ils se sont calmés et se
2 comportaient de façon plus normale. Je dirai néanmoins que je n'ai vu ou
3 entendu Haradinaj donner un ordre que deux fois. La première fois était
4 lorsqu'il était en train de fouiller une voiture et un groupe de soldats, y
5 compris la femme, sont arrivés, l'ont salué et il a dit quelque chose en
6 albanais.
7 "La deuxième fois était lorsqu'il a dit aux trois qui nous avaient
8 enlevés, y compris Idriz Balaj, de nous escorter pour partir."
9 En ce qui concerne le contrôle de la zone de la part de Haradinaj et
10 de son implication dans l'entreprise criminelle conjointe, il faut voir
11 dans ce contexte ce qu'il a fait de façon délibérée - et je le dis à bon
12 escient - il a négligé toute question de discipline à l'intérieur de l'UCK.
13 Il n'y avait aucun système de tribunal militaire et aucune discipline
14 interne; au contraire, il utilisait les forces de police militaire pour
15 promouvoir et encourager le dessein criminel conjoint. Il a permis à ses
16 subordonnés à l'intérieur de l'UCK d'opérer avec impunité dans toute la
17 région. Il n'y avait personne parmi les 14 officiers au sein de l'état-
18 major de Dukagjini qui s'occupait de la discipline militaire.
19 Il y avait un ancien officier de l'UCK, Rrustem Tetaj, qui a témoigné
20 qu'il n'était au courant d'aucune mesure disciplinaire qui aurait été prise
21 contre aucun membre de l'UCK entre mai et septembre 1998. Il semblerait que
22 les seules mesures disciplinaires prises concernent des actes de déloyauté.
23 Haradinaj n'a pris aucune mesure contre les membres de l'UCK qui ont commis
24 les nombreux crimes contre des civils qui font l'objet du chef d'accusation
25 et dont on a prouvé l'existence pendant ce procès. Ceci n'était pas par
26 hasard, c'était tout à fait délibéré. Haradinaj avait une autorité quasi-
27 totale dans cette zone où les crimes ont été commis. S'il l'avait souhaité,
28 il aurait pu imposer des mesures disciplinaires aux membres de l'UCK ayant
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1 commis ces nombreux crimes. Mais de façon délibérée il a décidé plutôt
2 d'encourager le dessein criminel conjoint en permettant et en encourageant
3 les membres de l'UCK de perpétrer de tels crimes. Encore une fois, comme
4 j'ai déjà dit, la seule "discipline" qui existait sous Haradinaj était le
5 système de violence et de persécution visant des civils qui étaient
6 considérés comme étant des collaborateurs. En ce qui concerne ce qui a été
7 appelé par le commandement de l'UCK comme "mesures disciplinaires", nous
8 avons un très bon exemple si on regarde le compte rendu de l'état-major
9 opérationnel de Dukagjini suite à une réunion du 24 juin, on voit qu'il n'y
10 avait jamais eu d'enquêtes, ni de sanctions imposées en ce qui concerne les
11 disparitions dans la zone de contrôle.
12 Le Témoin 6, qui a été emprisonné et torturé au centre de détention
13 de Jablanica au milieu du mois de juin 1998, c'est un très bon exemple.
14 Après six semaines de détention et de torture, Brahimaj l'a relâché avec
15 une autorisation qui disait qu'en application du règlement de l'UCK, et
16 c'est la pièce P355, l'état-major opérationnel a décidé que l'accusé,
17 c'est-à-dire le Témoin 6, doit être relâché à une condition près, c'est-à-
18 dire s'il récidive, il fera l'objet de poursuites judiciaires.
19 La police militaire de l'UCK était un élément essentiel dans l'entreprise
20 criminelle conjointe. Contrairement au service de police militaire
21 habituel, le rôle de ce service n'était pas d'imposer une discipline
22 militaire, mais plutôt de chasser et de trouver ceux qui étaient soupçonnés
23 comme étant opposants à l'UCK. Haradinaj avait une relation très étroite
24 avec les services de police, et d'ailleurs les services de police avaient
25 besoin de son imprimatur pour pouvoir fonctionner.
26 La pièce P140 nous montre les règlements 3 et 4, qui concernent la
27 tâche qui incombait à la police, c'est-à-dire de "mener des enquêtes et de
28 trouver, en utilisant tous les moyens de persuasion nécessaires, toute
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1 personne qui serait en collaboration avec l'ennemi."
2 Et : "Prendre des mesures nécessaires."
3 Le subordonné loyal de Haradinaj, Faton Mehmetaj, était le commandant
4 des services de police. Le commandant Tetaj, un commandant de l'UCK, a
5 expliqué que Mehmetaj mettait sur une liste noire toute personne soupçonnée
6 de ne pas être loyale à l'UCK, qui aurait des attitudes sympathisantes avec
7 l'opposition, et qui aurait travaillé pour le MUP ou pour d'autres
8 autorités, et ces listes noires étaient données aux gardes des villages. Il
9 a été prouvé que la police militaire de l'UCK détenait, malmenait et/ou a
10 assassiné au moins cinq victimes du chef d'Accusation : Kemal Gashi, Zenun
11 Gashi, Sanije Balaj, Naser Lika et Fadil Fazliu, et dans tous les cas, soi-
12 disant parce que ces personnes auraient été collaborateurs ou se seraient
13 opposées à l'UCK. Personne sur ces listes n'était membre de l'UCK. Les
14 trois qui ont été assassinés après la détention par la police militaire de
15 l'UCK ont été vus en vie pour la dernière fois aux alentours de Baran.
16 Leurs cadavres, R-1, R-2 et R-4, ont été trouvés à une distance d'environ
17 10 kilomètres avec le groupe de cadavres retrouvés près du canal.
18 Pendant ce temps-ci, la police militaire de l'UCK avait malmené et
19 assassiné les opposants, et pendant ce temps-là, si vous regardez la pièce
20 P224, vous verrez que Haradinaj faisait rapport à l'état-major pour dire :
21 "Nous avons constitué notre police militaire qui fonctionne bien."
22 Nous essayons de retrouver la pièce 224, c'est la dernière page en
23 anglais. Encore une fois, je me répète. En même temps, le rapport donné par
24 Haradinaj à l'état-major de l'UCK a été de dire : "Nous avons formé la
25 police militaire qui fonctionne bien."
26 Aux fins du dessein criminel commun de l'entreprise criminelle commune, et
27 ceci a été prouvé par l'évidence, effectivement cela fonctionnait très
28 bien.
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1 Quelques jours plus tard, le 1er août 1998, Haradinaj a donné un ordre
2 à tous les QG locaux de la zone de Dukagjini d'aider cette police militaire
3 qui fonctionnait si bien. Vous verrez la liste des tâches, c'est-à-dire :
4 "Agir contre l'ennemi pour répondre aux besoins des lignes de front."
5 Et il y avait aussi : "Le besoin de fournir une aide à la police
6 militaire."
7 En donnant cet ordre, Haradinaj encourageait l'UCK locale d'aider la
8 police militaire dans le cadre du dessein criminel commun de l'entreprise
9 criminelle commune.
10 Et comme ça déjà été dit, Haradinaj devait éliminer toute opposition
11 à ses forces dans la zone de Dukagjini. Dans le mémoire, il y a une
12 description détaillée donnée du conflit entre les forces armées du Kosovo,
13 c'est-à-dire les FARK, et l'UCK lorsque les soldats des FARK sont passés de
14 l'Albanie dans la zone de Haradinaj vers la fin du mois de juin 1998 - ce
15 sont les paragraphes 156 à 167. Dans le contexte du dessein criminel
16 commun, il fallait que Haradinaj exerce le contrôle total de la zone et
17 mette fin à toute opposition. C'était pendant cette période que Haradinaj
18 et d'autres participants à l'entreprise criminelle conjointe ont continué
19 leurs activités contre les opposants, les mettant en prison, les torturant,
20 et en faisant circuler des listes de personnes recherchées, soi-disant des
21 collaborateurs, et certaines de ces personnes se trouvaient enfouies près
22 du canal.
23 Il y a une confrontation entre Haradinaj et Balaj et les soldats des
24 FARK le 4 juillet 1998, et c'est un très bon exemple de la façon dont il
25 faisait face à cette menace potentielle au dessein criminel commun posée
26 par les FARK, et leur avis explicite était que les forces des FARK devaient
27 partir. Le Témoin 29 dans son témoignage a parlé de l'attitude des soldats
28 de l'UCK de Haradinaj. Il a dit : "On m'a dit que si on ne rentrait pas en
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1 Albanie, M. Haradinaj ainsi que ses officiers et ses soldats se battraient
2 contre nous d'abord, et ensuite contre les forces serbes. Ce qui voulait
3 dire qu'ils allaient nous tuer d'abord, et ensuite combattre l'ennemi."
4 Ensuite à la page 3 496, il poursuit et il dit : "Pendant la réunion
5 entre Haradinaj et Tahir Zemaj, c'est-à-dire le commandant des FARK - et
6 vous avez beaucoup entendu parler du conflit entre Tahir Zemaj et Haradinaj
7 - et je cite : "On a dit : vous n'avez pas besoin de venir au Kosovo. Vous
8 devez retourner là d'où vous venez. Le Kosovo n'a pas besoin de vous. Le
9 Kosovo n'a pas besoin des forces armées de la République du Kosovo ou des
10 FARK. Si vous ne retournez pas, nous allons nous battre contre vous. Nous
11 n'allons pas combattre l'ennemi. Nous allons laisser de côté l'ennemi. Nous
12 allons vous battre."
13 Le 4 juillet 1998, le Témoin 29 ainsi que trois autres soldats des FARK ont
14 été enlevés de force par Balaj et Daut Haradinaj, et ensuite emmenés à
15 Gllogjan où ils ont rencontré Hamush Haradinaj. Après un accueil plutôt
16 chaleureux, Haradinaj a frappé avec un pistolet un des soldats des FARK, et
17 ensuite a mené un passage à tabac brutal des quatre hommes impliquant un
18 groupe d'entre 20 et 30 soldats de l'UCK. Pendant ce passage à tabac,
19 Haradinaj a tiré lui-même sur le témoin, l'atteignant à l'épaule droite. Le
20 Témoin 29 dit que Haradinaj avait essayé de l'atteindre au cou :
21 "Il voulait me tirer au cou, mais étant donné mes mouvements, la
22 balle m'a frappé au bras et non pas au cou. C'était au cou qu'il visait."
23 Le témoin poursuit. On lui a demandé : "Combien de temps avait duré ce
24 passage à tabac ?"
25 Il a répondu qu'il ne pouvait pas répondre parce que "ça avait
26 commencé très soudainement, et ça s'était interrompu tout aussi
27 soudainement." Ensuite il ajoute : "A ce moment-là" - c'est ce qu'il a vu
28 après le passage à tabac - "à ce moment-là, je les ai vus tirer les autres
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1 soldats par les cheveux. Daut Haradinaj et Idriz Balaj les traînaient par
2 les cheveux et les rouaient de coups en même temps. Ils les traînaient vers
3 le village de Gllogjan."
4 Il poursuit plus loin, à la page 3 531, après l'interruption de cette
5 agression très soudaine, il dit : "Quand cela s'est arrêté, j'ai vu Idriz,
6 Petrit et Azem, un autre soldat, qui étaient tirés par les cheveux par Daut
7 et Balaj qui les frappaient à coup de Kalachnikov et également avec la
8 crosse de leurs pistolets, en leur donnant également des coups de poing. On
9 les traînait vers le QG."
10 "A ce moment-là," dit le Témoin 29, "Ramush avait toujours son
11 pistolet à la main. Il l'a conservé dans sa main pendant toute cette
12 période et il m'a dit : 'Tu as deux minutes pour quitter le village de
13 Gllogjan. Marchez tout droit le long de la route principale. Tu as deux
14 minutes pour quitter le village", alors que les autres soldats étaient
15 emmenés vers le QG du village de Gllogjan.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, vous n'avez pas vos
17 écouteurs mais les interprètes se sont manifestés.
18 M. RE : [interprétation] Je m'excuse, je vais ralentir.
19 Tahir Zemaj lui-même a signalé cette attaque au commandement Suprême le 5
20 juillet 1998, la pièce 167. Quel était le degré de participation
21 personnelle de Haradinaj ? Qu'est-ce qui a été prouvé au procès ? Les
22 éléments du dossier démontrent que Haradinaj a abusé de manière flagrante
23 de son poste de commandant. On peut dire qu'il a donné le ton et que, du
24 fait de son comportement, la violence était devenue acceptable dans la zone
25 de Dukagjin, et ce degré d'acceptation était extrêmement fort. Il a lui-
26 même commis des actes de violence contre ceux qu'il jugeait comme
27 s'opposant à l'UCK, je l'ai expliqué avec les soldats des FARK. Et ces
28 agissements prouvaient de la manière la plus claire et la plus brutale qui
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1 soit qu'il approuvait, qu'il encourageait l'élimination de ceux qui étaient
2 considérés comme des opposants, et ceci que ce soit fait par ses
3 subordonnés dans la violence et en faisant régner la crainte. Il n'aurait
4 pas pu envoyer de message plus clair à ses subordonnés dans l'UCK et dans
5 la population civile.
6 Il y a un exemple de cette intervention personnelle de sa part dans
7 l'attaque menée par les subordonnés de l'UCK contre ses voisins serbes et
8 leurs cousins le 18 avril 1998, chefs 3 et 4. Les éléments du dossier nous
9 ont montré qu'à la date de Pâques 1998, la Pâques orthodoxe, il n'y avait
10 pratiquement plus de familles serbes qui restaient dans le secteur de
11 Gllogjan. Il a également été démontré que Ramush Haradinaj avait pris des
12 mesures en personne pour s'en assurer, que lui-même a commis des mauvais
13 traitements, et a fait en sorte que ses propres voisins serbes soient
14 chassés de Dubrave, les voisins qui habitaient à côté de la propriété de
15 Ramush Haradinaj.
16 Le dossier a montré que Haradinaj vivait tout à côté de chez
17 Dragoslav Stojanovic, qui avait à peine deux ans de plus que lui. Ils
18 étaient allés à l'école ensemble, ils se connaissaient bien. Que s'est-il
19 passé ? Le 18 avril 1998, des hommes de l'UCK sous le commandement de
20 Haradinaj ont enlevé, persécuté, torturé ses voisins, Dragoslav et Mijat
21 Stojanovic, ainsi que leur cousin Veselin Stijovic, il s'agissait de trois
22 civils serbes. Ils ont ensuite été expulsés par la force - je parle de
23 Stojanovic - ils ont été expulsés de leur maison vers un territoire
24 contrôlé par les Serbes en dehors de la zone de Dukagjini.
25 Dragoslav Stojanovic a raconté dans un témoignage qui glace le sang ce
26 qu'avait fait Haradinaj ce jour-là, il a parlé de sa présence à Gllogjan ce
27 jour-là. Le dossier nous montre qu'environ 30 soldats de l'UCK, dont le
28 frère de Haradinaj, Daut Haradinaj, étaient entrés dans la maison de
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1 Stojanovic pour la fouiller. Ils ont contraint les trois hommes à se mettre
2 face contre terre. Ils leur ont lancé des invectives raciales. Ils les ont
3 frappés. Ils leur ont donné des coups de pied et ils leur ont donné des
4 coups de crosses de fusil. Les coups ont continué à pleuvoir jusqu'à
5 l'arrivée de Nasim Haradinaj, qui a ordonné qu'on emmène ces hommes
6 jusqu'au QG de l'UCK à Gllogjan. Alors qu'ils saignaient, qu'ils avaient
7 été grièvement blessés, ces trois hommes ont été contraints à se rendre à
8 pied jusqu'au QG de l'UCK dans la maison de Smajl Haradinaj à Gllogjan à
9 quelque 1 500 mètres de là. En chemin, les soldats de l'UCK les ont
10 insultés, et ont continué à les rouer de coups en affirmant que tous les
11 Serbes devaient quitter le Kosovo. Tout ceci correspond tout à fait bien à
12 la teneur des communiqués de l'UCK que je vous ai présentés auparavant.
13 Haradinaj était à proximité. Il était présent, il a dû voir ce groupe
14 important de soldats de l'UCK armés qui escortaient ces trois Serbes sur la
15 route, en plein jour, tout en les rouant de coups et en les insultant. Son
16 frère Daut ainsi que 2 autres soldats de l'UCK ont amené les victimes à
17 l'étage du QG et les ont accusé - c'est un thème qui revient constamment
18 dans le dossier - les ont accusés d'être des espions serbes.
19 Ramush Haradinaj était donc présent, il a participé à tout ceci, et son
20 voisin, Dragoslav Stojanovic a déposé sur ce point, à la page 1 886. On lui
21 demande : "Vous venez de parler de Ramush, vous l'avez-vous vu ?
22 "Réponse : Oui, mais pas dans cette pièce. Ramush est venu plus tard dans
23 la journée, accompagné de cinq ou six autres soldats. J'étais étendu par
24 terre dans le corridor, parce que je ne pouvais pas bouger. D'ailleurs je
25 n'avais pas le droit de bouger. Il est arrivé avec cinq ou six de ses
26 hommes, c'était son escorte, j'imagine, je ne sais pas. Il est arrivé, il
27 m'a poussé du pied, et il m'a dit : Salut, voisin, tu me reconnais. J'ai
28 dit : Non. A ce moment-là, il m'a donné un coup de pied dans le dos et il
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1 m'a dit que je finirais bien par apprendre qui il était."
2 Question suivante posée à ce témoin :
3 "Quelle a été la violence du coup de pied qu'il vous a donné ?
4 Réponse : Moi, ça m'a paru assez violent. C'était violent parce que
5 d'autant plus qu'il portait des Rangers, des chaussures, des bottes
6 militaires."
7 Cet extrait est diffusé à l'écran actuellement.
8 Bien entendu que Dragoslav Stojanovic savait pertinemment qui était
9 Ramush Haradinaj, il avait des raisons excellentes cependant de ne pas le
10 reconnaître à ce moment-là alors qu'il était pris par la peur et vu la
11 situation dans laquelle il se trouvait. A la page 1 888 et 1 889 également,
12 il dit également à la Chambre de première instance en réponse à une
13 question, je cite, à la question qui était de savoir s'il l'avait reconnu
14 quand il était arrivé.
15 "Réponse : Oui, oui, je le connaissais bien.
16 "Question : Mais, pourquoi avez-vous dit : Non, je ne te reconnais pas,
17 lorsqu'il vous a demandé si vous le reconnaissiez ?
18 "Réponse : Parce que nous étions pratiquement les premiers à être arrêté ou
19 fait prisonnier dans ce secteur. J'avais peur, j'avais peur de reconnaître
20 que je savais qui il était. J'avais peur d'être tué, sinon l'un d'entre
21 nous aurait pu aller à la police et raconter ce qui s'était passé. Il y a
22 une chose que je dois dire, c'est ce n'est pas le seul qui m'ait posé la
23 question à ce moment-là. Son frère, ses cousins aussi sont venus, Padram,
24 le fils de Smajl, il m'a demandé : Et voisin, tu me reconnais ? Je n'ai
25 répondu à aucune de ses questions. J'ai répondu non à chacun d'entre eux.
26 "Et le fils de Mustafa, qui avait été à l'étranger pendant longtemps, il
27 est venu ce jour-là, il m'a posé la même question, et j'ai répondu à chacun
28 d'entre eux la même chose : Non, je ne te connais pas."
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1 La Chambre de première instance doit se demander ce que M. Stojanovic
2 aurait pu faire de différemment dans ces circonstances. Il avait peur de
3 mourir, et il s'est dit que la seule chose qu'il pouvait faire pour éviter
4 cela, c'était de dire qu'il ne connaissait celui qui était depuis très
5 longtemps son voisin, Ramush Haradinaj. Mais Ramush Haradinaj et ce qu'il
6 dit est terrifiant, on voit à quel point il pensait contrôler la situation,
7 et ça démontre qui était responsable de ces opérations d'expulsion des
8 Serbes, ça démontre qui contrôlait qui, qui commandait cette zone. C'est
9 l'UCK qui contrôle, et vous, vous les civils serbes, vous devez partir. Ses
10 propos correspondent tout à fait aux pièces qui vous ont été présentées et
11 qui démontrent les actes de mauvais traitements, persécutions et pris pour
12 cibles des civils serbes dans la zone au début de cette période.
13 En parlant des blessures qu'il a subies, Dragoslav Stojanovic nous dit à la
14 page 1 889 [comme interprété] qu'il avait été grièvement blessé. Il nous
15 dit : "J'avais le visage en sang, mais en fait je n'avais pas de blessures
16 ouvertes. Pour ce qui est des blessures internes, j'ai subi une rupture du
17 pancréas, de l'estomac à deux endroits différents, du colon, et ainsi que
18 des parois de l'estomac. On peut dire qu'il s'agissait de blessures
19 internes assez graves, je souffrais beaucoup, je souffrais énormément, et
20 j'avais l'impression de suffoquer."
21 Quand on lui demande : "Est-ce que vous aviez déjà subi ou reçu ces
22 blessures au moment où Ramush Haradinaj vous a donné un coup de pied ou
23 est-ce que c'est plus tard ou êtes-vous incapable de le dire ?"
24 "Réponse : Ça devrait être avant."
25 Le dossier nous montre que Haradinaj arrive, voit son voisin qui a été
26 maltraité, brutalisé, qui est grièvement blessé, il est là, il gît au QG de
27 l'UCK à Gllogjan, il lui donne un coup de pied, il donne un coup de pied à
28 cet homme sans défense, cet homme qui affirme qui ne connaissait pas Ramush
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1 Haradinaj.
2 Le rapport "spotlight" de Humanitarian Law Centre, pièce 6, nous montre une
3 situation que l'on connaissait très bien à l'époque. Je souhaiterais vous
4 présenter un extrait de cette pièce où il est question de Dragoslav et
5 Mijat Stojanovic, fils de Ljubisa Stojanovic, et leur cousin, Veselin
6 Stojanovic ont été amenés au QG de l'UCK à Gllogjan, et ensuite on voit ce
7 qu'ils ont déclaré à ce sujet. On voit ce qu'il a déclaré en tout cas
8 Stojanovic Mijat à ce sujet.
9 La signification des propos tenus par Ramush Haradinaj, des propos qu'il a
10 tenus à ce voisin, ce voisin grièvement blessé, la signification de ses
11 propos est devenue claire dans les jours qui ont suivi alors que l'UCK
12 expulsait par la force et a tué les quelques Serbes qui restaient encore
13 dans les villages entourant Gllogjan. Le dossier montre que le 23 avril,
14 cinq jours après que Haradinaj, son frère Daut, et d'autres subordonnés de
15 l'UCK eurent torturés les frères Stojanovic, leurs voisins, et avant de les
16 expulser de chez eux, à ce moment-là l'UCK avait expulsé pratiquement tous
17 les Serbes qui restaient encore dans les villages entourant Gllogjan.
18 Plusieurs de ces habitants ont été faits prisonniers, amenés à Gllogjan
19 pour y être passés à tabac ou interrogés avant d'être chassés, comme par
20 exemple, Novak Stijovic et Stanisa Radosevic. L'UCK, les preuves du dossier
21 le montrent, l'UCK a assassiné les quelques personnes qui restaient encore
22 sur place. Il s'agit des sœurs Vukosava Markovic et Darinka Kovac, de
23 Milovan et Milka Vlahovic, de Slobodan Radosevic et de Milos Radunovic,
24 entre autres. Les soldats de l'UCK ont aidé une famille serbe et leurs
25 voisins serbes à quitter Dashinoc le 23 avril, Haradinaj a manifesté sa
26 désapprobation, il s'est dit en désaccord avec cette manière de procéder et
27 aux faits qu'on ait permis à des Serbes de partir. La Chambre a reçu des
28 éléments lui indiquant que Haradinaj s'était rendu dans le village et avait
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1 concrètement rappelé à l'ordre le membre de l'UCK en question en demandant
2 pourquoi on avait autorisé ces familles à quitter le village sans leur
3 faire de mal.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je regarde l'horloge. Vous
5 avez pratiquement parlé pendant une heure et demie. Enfin 75 minutes
6 plutôt, 75 minutes. Est-ce que vous pourriez peut-être bientôt faire une
7 pause. Ça fait une heure et demie que nous siégeons.
8 M. RE : [interprétation] Oui, bien sûr.
9 Nous avons ici à l'écran une photographie des victimes visées aux chefs 11
10 et 12 de l'acte d'accusation.
11 Zoran Stijovic a parlé de tout cela au paragraphe 59 de sa déclaration de
12 témoin, pièce P931. Il est bien au courant de cela parce qu'il avait des
13 membres de sa famille qui vivaient dans le secteur.
14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
15 M. RE : [interprétation] Et il a dit, je le cite :
16 "En mai 1998 déjà, il n'y avait pu aucun Serbe ou Monténégrin qui restait
17 dans les villages de Dasinovac, Ratis, Ljumbarda, Prapaqan, Maznik,
18 Rastavica, Rznic, il utilise les toponymes serbes.
19 "Pratiquement plus de 1 000 personnes ont quittés les zones de Klina --
20 Novo et cetera. Leurs maisons et leurs biens ont été détruits. Ces attaques
21 étaient de notoriété publique et ces estimations, les estimations du nombre
22 de réfugiés m'ont été donné par mes collègues de la DB dans la zone. En
23 résumé, toute la population serbe et monténégrine a quitté la zone."
24 Ensuite, au paragraphe 60, il fait référence aux populations de ces
25 villages qui sont parties pour les villes de Pec et de Decani vers le
26 Monténégro et plus loin. En mai et en juin, les combats ont commencé à se
27 déplacer près de ces villes. L'UCK a attaqué les villages de Klina, Pec,
28 Istok, tous les jours, et cetera, et cetera.
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1 Le moment est bien venu pour faire une pause, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause, et nous
3 reprendrons à 16 heures 10 précise.
4 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.
5 --- L'audience est reprise à 16 heures 12.
6 M. RE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai une petite
7 correction à apporter au compte rendu d'audience. Page 18, ligne 14, il
8 s'agit de Nasim, c'est ce qu'on peut lire. Il faut corriger par Nazmi.
9 Donc, si c'est Nasim, il faut remplacer par Nazmi, et inversement.
10 M. Alex Paradis, un stagiaire du bureau du Procureur, se trouve dans le
11 prétoire. Je tenais à le signaler.
12 Avant la suspension de l'audience, j'ai parlé de ce que l'on appelle
13 communément le nettoyage ethnique dans le secteur de Dukagjin. J'en viens
14 maintenant à une réunion de l'état-major de Gllogjan présidée par Haradinaj
15 le 9 juillet 1998. En conformité avec les communiqués de l'UCK numéro 13,
16 18 et 23, tous versés au dossier, qui qualifient les Serbes de "colons", je
17 cite : "L'opinion des membres de l'UCK au sujet de la présence de
18 Monténégrins dans la zone libre de l'UCK est claire." Dans le procès-verbal
19 de cette réunion, le représentant de Dobrigje -- les propos du représentant
20 de Dobrigje sont mentionnés dans la pièce P190. Le procès-verbal témoigne
21 de l'intention persécutoire [phon] des participants à la réunion, y compris
22 Ramush Haradinaj. Dans le procès-verbal, il est dit, je cite : "Nous avons
23 deux maisons monténégrines, dix personnes. Nous pouvons avoir recours à nos
24 armes."
25 Qu'est-ce que cela peut signifier ? Dans le contexte des témoignages
26 entendus par la Chambre au sujet des attaques contre les civils serbes et
27 monténégrins et des personnes perçues comme des collaborateurs, qu'est-ce
28 que cela pourra signifier d'autre si ce n'est que ces personnes étaient
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1 menacées directement seulement du fait de leur simple appartenance
2 ethnique, ces personnes étaient menacées par l'UCK. Il n'est pas fortuit
3 qu'en quelques jours l'UCK ait attaquée ces familles monténégrines à
4 Dobrigje et enlevait un civil serbe répondant au nom de Zdravko Radunovic
5 qui avait commis l'erreur d'aller voir ses proches, les membres de sa
6 famille, des Monténégrins. Son corps a été retrouvé au canal en septembre
7 1998.
8 S'agissant d'une intention persécutoire des personnes qui ont commis
9 ce nettoyage ethnique, Stanisa Radosevic a également témoigné des insultes
10 à caractère racial qu'il avait été proféré à son encontre tandis que des
11 soldats de l'UCK le frappaient. Page 973 du compte rendu d'audience, je
12 cite : "Les soldats de l'UCK ont insulté nos mères serbes et nous ont
13 demandé : 'Qu'est ce que vous voulez ? Savez-vous qui nous sommes ?' Ils
14 ont dit toutes sortes de choses, mais ils ont avant tout proféré des
15 insultes à l'encontre de nos mères serbes affirmant qu'il s'agissait là de
16 leurs terres en nous demandant ce qu'on y faisait, et ainsi de suite."
17 A la page 974 du compte rendu, il est de nouveau question du mode
18 opératoire de l'UCK et des personnes qui agissaient en exécution du but
19 criminel commun. Il a dit, à propos de son passage à tabac, je cite :
20 "Lorsque j'ai essayé de protéger Novak, il m'a frappé," il s'agit d'un
21 soldat de l'UCK, "il m'a frappé jusqu'à ce que je tombe à terre, puis il
22 m'a donné des coups de pied alors que j'étais à terre. Lorsque j'ai repris
23 conscience, ils nous ont jetés dans une voiture, ils ont continué à nous
24 frapper en se servant de leur crosse de fusil pour nous frapper. J'ai reçu
25 un coup à l'aide d'une crosse de fusil sur la tête et ma main saignait.
26 "A ce moment-là, ils ont confisqué mon carnet d'adresse et pour tous les
27 noms qui figuraient dans mon carnet, qu'il s'agisse d'un Serbe, d'un Rom ou
28 de qui que ce soit, j'étais frappé. Ils voulaient savoir absolument tout au
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1 sujet de ces personnes."
2 Tout cela doit être examiné à la lumière du contexte historique dans lequel
3 ont été paru les communiqués de l'UCK qui qualifiaient les Serbes de colon.
4 C'est ainsi que l'on doit tenir compte du comportement de ces personnes à
5 l'égard des civils serbes persécutés dans la zone de Dukagjini.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, une petite question au
7 sujet d'une correction que vous avez apportée tout à l'heure.
8 M. RE : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez parlé de la page 18, ligne 14.
10 Je n'ai pas très bien compris. Vous avez dit : "On peut lire dans le compte
11 rendu d'audience, Nasim et non pas Nazmi." Sur la version que j'aie du
12 compte rendu, je vois "Nazmi." Nasim, je pense qu'il s'agit de Nasim
13 Haradinaj, un nom souvent mentionné dans le compte rendu d'audience. Mais
14 ensuite, vous avez ajouté : "Quoi qu'on puisse lire, il faut lire
15 l'inverse."
16 Je ne comprends pas très bien. Donc s'il s'agit de Nazmi, il faut que
17 ce soit Nasim; si c'est Nasim, il faut lire Nazmi. Alors est-ce que c'est
18 Nasim -- mais Nasim Brahimaj, ça ne me dit rien.
19 M. RE : [interprétation] En fait, il faut lire Nasim Brahimaj.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que j'ai compris.
21 M. RE : [interprétation] Je ne sais pas ce qui s'est passé. Peut-être ma
22 langue a-t-elle fourché.
23 Peut-être mes propos n'ont-ils pas été bien compris. En fait, on peut
24 lire Nazim pour le moment, mais il faut comprendre Nasim.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nasim Brahimaj ? Car si je cherche
26 Nasim, Nasim Brahimaj, d'habitude je trouve Nasim Haradinaj. Donc est-ce
27 que vous pouvez me dire qui est Nasim Brahimaj ?
28 M. RE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, est-ce que je
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1 peux y revenir un peu plus tard ?
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Poursuivez.
3 M. RE : [interprétation] J'en viens maintenant à la question du contrôle
4 exercé par Haradinaj et l'UCK dans le secteur libre de Dukagjini. Aux
5 paragraphes 76 à 95 du mémoire en clôture, on décrit la création de la zone
6 libre de l'UCK et de ses frontières. Les preuves convergent tous dans le
7 même sens pour ce qui est du témoignage des témoins de l'UCK et des civils
8 serbes s'agissant du secteur contrôlé par l'UCK pendant la période couverte
9 par l'acte d'accusation.
10 Comme je l'ai dit plus tôt, les combattants de l'UCK ont assuré la
11 sécurité dans leur zone libre par le biais de postes de contrôle et de
12 postes d'observation. Les combattants de l'UCK pouvaient se déplacer
13 librement et ouvertement dans cette zone. Tout ceci est mentionné dans le
14 témoignage d'un membre de l'UCK, Shaban Balaj, qui a dit : "Presque dans
15 tous les villages situés au nord et à l'ouest du lac Radoniq, il y avait un
16 poste de contrôle de l'UCK jusqu'au mois de septembre 1998."
17 Les membres de l'UCK et les représentants étrangers sont passés par
18 ces nombreux postes de contrôle situés dans la zone. Certains étaient
19 situés à 50 mètres à peine de la route Peje-Gjakove, et c'est par ces
20 postes de contrôle que l'UCK contrôlait l'accès à la zone de Dukagjini.
21 Vous avez entendu les dépositions de certains témoins qui ont qualifié ces
22 postes de contrôle, de poste de région de routine, normal dans la zone de
23 Dukagjini. Les commandants de village de l'UCK ont témoigné en disant
24 qu'ils délivraient des autorisations de circuler à l'encontre de civils,
25 les autorisant ainsi à passer ces postes de contrôle. Il y a une réponse
26 qui revenait sans cesse en réponse aux questions posées au sujet du
27 contrôle exercé par Haradinaj sur cette zone. L'attachée militaire
28 britannique, le colonel John Crosland, a rencontré Haradinaj en mars ou
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1 avril 1998 et a parlé du contrôle exercé par Haradinaj à l'époque, à la
2 page 2 968. Il avait l'habitude de ce genre de zones, il se rendait, il
3 voyageait souvent entre Belgrade et le Kosovo afin d'apprécier les
4 effectifs de l'UCK et des forces serbes, de surveiller la situation. Il a
5 rencontré personnellement Haradinaj en mars ou avril 1998. Il a dit, dans
6 le texte que nous voyons à l'écran, je cite, la question posée était la
7 suivante :
8 "Question : Comment avez-vous compris le degré de direction et de
9 commandement exercé par Haradinaj lorsque vous l'avez rencontré ?"
10 Il a répondu la chose suivante : "Je pense que j'ai raison de dire
11 qu'il a déclaré qu'il contrôlait ce qui est appelé la zone de Dukagjin. Il
12 s'agit la zone que j'ai décrite et dont j'ai décrit l'importance. Cela a
13 été confirmé par des agences de renseignements extérieures."
14 Comme je l'ai dit tout à l'heure, le colonel Crosland était bien
15 placé pour faire cette appréciation. Donc c'est ce qu'a déclaré Haradinaj,
16 c'est ce qu'a dit le colonel Crosland, et cela correspondait à ce que
17 déclaraient les sources de renseignements à ce sujet. Cela correspond
18 également à la déposition du Témoin 29, page 3 488 du compte rendu. La
19 question qui lui était posée était la suivante : "Entre le 24 mars et la
20 fin du mois de juin 1998, dans le cadre de vos conversations avec les
21 soldats de l'UCK et les commandants de village, avez-vous appris s'il y
22 avait un commandant suprême de l'UCK pour la zone de Dukagjini ?"
23 Il a répondu, je cite : "Ce n'est pas toute la zone de Dukagjini qui était
24 en état de guerre, mais la plupart de la communauté de Decani, une partie
25 de la municipalité de Gjakove. Mais tout le monde disait que Ramush
26 Haradinaj était le commandant suprême."
27 Le président de la Chambre a posé au colonel Crosland un certain nombre de
28 questions très pertinentes lors de sa déposition au sujet de la direction
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1 et du commandement exercé par l'UCK, et page 3 029 du compte rendu, le
2 colonel Crosland a déclaré :
3 "Les Serbes ont également adopté la position selon laquelle ils
4 pouvaient contenir en quelque sorte les combattants dans cette zone en
5 exerçant leur contrôle sur les routes. Je ne suis pas d'accord avec cette
6 stratégie, mais c'est ainsi qu'ils ont fait les choses, car ils ne se
7 sentaient pas en sécurité.
8 C'est ainsi qu'ils se sont occupés d'incidents isolés entre Pec et
9 Klina jusqu'au Djakovica et jusqu'à Pec. Donc ces routes assuraient l'accès
10 et lorsqu'il y avait un incident majeur, on nous demandait d'aller avec les
11 Serbes pour aller sur le site supposé du massacre à Gllogjan" --
12 M. RE : [interprétation] Est-ce que je vais trop vite ?
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
14 M. RE : [interprétation] Ensuite on peut lire : Maintenant, je ne pense pas
15 que beaucoup soient allés au-delà de 5 ou 6 kilomètres en contrebas de la
16 route, car ils allaient dans un territoire qu'ils ne connaissaient vraiment
17 pas bien. C'est la raison pour laquelle j'ai dit que cette zone, d'après
18 moi, était essentiellement une zone contrôlée par l'UCK et les Serbes
19 restaient à l'extérieur et essayaient de dominer et d'influencer la zone en
20 la pilonnant à l'aide de tirs indirects de longue portée depuis des chars
21 ou des véhicules de transport de troupes blindés ou depuis des véhicules de
22 défense antiaérienne."
23 Me Emmerson, à la page 4 486 du compte rendu, a demandé la chose suivante à
24 Shemsedin Cekaj : "Monsieur Cekaj, est-ce que vous comprenez la question
25 que je vous pose ? Je suggère qu'entre le 26 mai" --
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, s'il vous plaît, veuillez
27 ralentir, pas juste quelques secondes mais en général, ainsi la traduction
28 en français se fera plus aisément.
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1 M. RE : [interprétation] "Je vous suggère qu'entre le 26 mai, date à
2 laquelle vous êtes arrivé, et le 12 juillet, date à laquelle vous êtes
3 parti, il y avait des forces serbes, y compris des paramilitaires, qui
4 agissaient de temps à autre sur le territoire situé le long du canal."
5 Ignorant totalement cette possibilité, Cekaj a répondu la chose suivante :
6 "Je n'ai aucune information à ce sujet. Il était impossible que les forces
7 serbes entrent dans ce secteur à l'époque."
8 L'importance de Gllogjan et le contrôle de ce secteur, en vue de
9 l'exécution du but criminel commun et pour des raisons militaires,
10 ressortent de la déposition de M. Stijovic, paragraphe 25 de la pièce P931,
11 où le témoin affirme ce qui suit : "L'UCK organisait la réception et la
12 distribution de l'équipement à travers le Kosovo-Metohija, en se servant
13 des axes déjà établis. Gllogjan et Jablanica avaient une importance
14 stratégique le long de cet axe, et c'est pourquoi la famille Haradinaj a
15 assumé ultérieurement une position importante au sein de l'UCK. Ils avaient
16 la capacité de décider qui était autorisé à circuler dans ce secteur qui
17 était le leur et qui ne l'était pas. Les commandants de l'UCK d'autres
18 secteurs devaient demander l'autorisation que leurs hommes passent dans ce
19 secteur en chemin vers la frontière albanaise et dans l'autre sens. Les
20 villages de Jablanica et de Gllogjan sont devenus des bases logistiques de
21 l'UCK contrôlées par les familles Brahimaj et Haradinaj respectivement."
22 Au paragraphe 61 de sa déclaration préalable, il parle plus en détail de ce
23 qui se passait :"Suite à ces avancées territoriales en avril, mai et juin,
24 l'UCK a réussi de manière significative à créer une 'zone libre' unique qui
25 reliait Drenica, Dukagjin, et la frontière albanaise. Les fiefs de l'UCK
26 dans les villages de Gllogjan, Jablanica, Junik, Jasic et Smonica
27 revêtaient une importante stratégique toute particulière à cet égard. Nos
28 sources ont indiqué que la plupart des armes de l'UCK venaient d'Albanie,
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1 que ce soit des marchés noirs à l'étranger ou de Bosnie et de Croatie. Ces
2 armes étaient essentiellement de fabrication chinoise ou yougoslave au
3 début, mais l'UCK a obtenu les lance-roquettes 'Armbrust' les plus modernes
4 utilisées par l'OTAN."
5 En ce qui concerne la violence ou l'intensité du conflit armé, la Chambre a
6 entendu de nombreux témoignages de combattants de l'UCK, d'observateurs
7 étrangers, ainsi que des témoignages de deux généraux serbes à la retraite.
8 Je reviendrai brièvement sur la déposition de M. Stijovic à propos des
9 armes d'Albanie. A la page 9 010 du rapport officiel de l'ONU de 1997, il
10 est dit que "plus de 650 000 armes, ainsi qu'une grande quantité d'armes,
11 ont disparu des dépôts militaires officiels en Albanie. Toutes les mesures
12 prises par les autorités albanaises officielles plus tard, avec l'aide de
13 la communauté internationale, permettent de conclure de façon approximative
14 que 30 à 40 % de ces armes n'étaient pas placées sous le contrôle des
15 autorités, et que le gros de cette quantité, 30 à 40 % de ces 650 000 armes
16 se sont retrouvées entre les mains de l'UCK."
17 Faisant de façon détournée un compliment à l'UCK, il a dit que : "L'UCK
18 avait tiré profit au mieux de la situation."
19 A titre d'exemple, s'agissant de la sophistication des armes dont
20 disposait l'UCK, de l'armement, des fortifications, j'afficherai brièvement
21 la pièce P910, il s'agit de photographies des tranchées et des
22 fortifications de l'UCK à Lodza, lorsque les Serbes ont pris le contrôle de
23 ces positions en juillet 1998.
24 Dragan Zivanovic, général à la retraite, dans sa déclaration faite en
25 application de l'article 92 ter, P1018, paragraphes 103 à 104, a également
26 fait quelques compliments à l'UCK pour ce qui est de la résistance dont il
27 a été le témoin. Décrivant les combats à Prilep au mois d'août 1998, il dit
28 la chose suivante : "Nous avons rencontré une résistance très forte de la
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1 part de l'UCK. Les combattants de l'UCK se servaient des tours en pierre
2 des propriétés familiales entourées de murs pour tirer sur le MUP et la VJ.
3 Ces tours étaient particulièrement adaptées pour des tirs embusqués contre
4 nos forces. Le tir des fusils automatiques chinois rendait difficile de
5 déterminer les positions de tir."
6 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
7 M. RE : [interprétation] "L'UCK tirait sur nous depuis des positions
8 situées derrière les murets des propriétés, en se servant de lance-
9 roquettes portables. Au centre du village, la cour, il était difficile de
10 prendre le contrôle de la cour principale car l'UCK se servait de mortiers
11 pour tirer sur nos positions. Je sais que tous les civils ont quitté le
12 village avant l'entrée du MUP et de la VJ à Prilep et les combats ont
13 commencé."
14 Il poursuit : "Nous n'avons pas pu utiliser les chars à Prilep car le
15 terrain était très plat et nous n'avons pas pu obtenir une ligne directe de
16 tirs, nous ne voyions pas les cibles.
17 "Un certain nombre de bâtiments ont été détruits pendant les combats
18 suite à l'utilisation de munitions perçant les blindages, de type
19 incendiaire, de lance-roquettes portables et de grenades à main, environ
20 dix maisons ont été incendiées. Alors que nos unités se sont approchées des
21 bâtiments en pierre, ils ont réussi à s'enfuir grâce à des trous percés
22 dans les murets en pierre. L'UCK minait les maisons, les bâtiments avec des
23 mines antipersonnel et des engins explosifs."
24 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
25 M. RE : [interprétation] Je passe maintenant au rôle d'Idriz Balaj, connu
26 son le nom de Toger aussi, et des Aigles noirs. Au-delà de tout doute
27 raisonnable, les pièces à conviction ont démontré qu'Idriz Balaj était et
28 est toujours Toger. Personne, côté Défense, n'a suggéré qu'il y avait plus
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1 d'un Toger qui opérait dans la région de Dukagjini en 1998, personne n'a
2 dit qu'il y avait un Toger autre qu'Idriz Balaj, qui était en tête des
3 Aigles noirs, une unité notoire surtout pour ce qui concerne ses actes
4 d'une extrême brutalité envers les Serbes et les opposants civils de l'UCK.
5 Balaj avait le commandement des Aigles noirs; Haradinaj l'a mis en place à
6 ce poste en 1998. Leur relation de travail était particulièrement étroite.
7 Balaj était un membre important de l'état-major de Gllogjan de Haradinaj.
8 Balaj, Toger, agissait en tant que garde du corps personnel de Haradinaj.
9 On les voyait souvent ensemble. Balaj accompagnait Haradinaj presque à
10 chaque fois qu'il devait participer à une réunion importante de l'UCK et
11 des FARK dans le secteur de Dukagjini. A ces réunions, entre les FARK et
12 l'UCK, Balaj avait la responsabilité de protéger Haradinaj, donc il était
13 responsable de sa sécurité.
14 Si l'on regarde la pièce P177, nous allons voir la fonction qu'il occupait,
15 on voit la composition de l'état-major de Gllogjan au 8 juillet 1998, et si
16 vous regardez l'élément 11 à l'écran, on verra que Togeri, c'est-à-dire
17 Balaj, était commandant des unités spéciales. Vous verrez aussi d'autres
18 noms bien connus, Faton Mehmetaj, Daut Haradinaj, Ramush Haradinaj,
19 Shkelzen Haradinaj; Ramush Haradinaj était bien sûr le commandant. Il y a
20 le compte rendu de la réunion du 23 juin 1998 qui décrit la fonction de
21 Balaj comme étant "responsable des combats de sabotage et des activités
22 antiterroristes". Responsable : Togeri. Ensuite, il y a le mot "Décision".
23 Et si vous regardez à l'écran, vous verrez l'albanais au milieu de la page.
24 Mais en réalité, sa responsabilité était de localiser, de malmener et
25 d'assassiner des collaborateurs allégués et des opposants à l'UCK, tout
26 ceci aux fins du dessein criminel commun. Les Aigles noirs portaient des
27 uniformes noirs faciles à reconnaître, étaient mieux armés que les autres
28 soldats de l'UCK, et étaient mieux entraînés également, leur base était à
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1 l'école militaire de Gllogjan jusqu'à ce que ce soit déménagé par Balaj
2 lui-même à Rznic après le retrait du MUP le 21 avril. Balaj conduisait une
3 jeep noire facile à reconnaître. Les Aigles noirs opéraient avec impunité à
4 travers tout le secteur de Dukagjini. Leur zone d'entraînement était à la
5 ferme Ekonomija qui avait été abandonnée, c'est une entreprise agricole
6 d'Etat qui se trouvait directement à côté du canal où on avait trouvé les
7 31 corps. On voit sa position sur la photographie qui est à l'écran. Balaj
8 et les Aigles noirs entraient dans des villages à la recherche de personnes
9 qui se trouvaient sur la liste des personnes recherchées à l'UCK. Balaj
10 avait un carnet qui contenait le nom de toutes les personnes recherchées, y
11 compris Faik Gecaj et Musa Berisha. Un commandant de l'UCK a dit lors de
12 son témoignage que Faik était sur la liste parce qu'il était impliqué dans
13 des activités de contrebande d'armes en provenance d'Albanie, ceci pour des
14 gains personnels, mais Musa Berisha travaillait pour une organisation de
15 droit de l'homme à Decan.
16 La Chambre a entendu des présentations de preuve concernant le fait qu'au
17 mois de juin 1998, Balaj a tiré sur la voiture de Musa Berisha, à un point
18 de poste de contrôle à Rznic lorsque Berisha, un civil non armé, essayait
19 de joindre Gllogjan. Vous avez également entendu parler du fait que Balaj a
20 tiré sur un civil âgé, Adem Hulaj, à Rznic lorsque ce dernier quittait sa
21 voiture. Balaj était en tête d'un groupe de membres de l'UCK qui, de façon
22 brutale et de façon répétée, harcelait, enlevait et assassinait des membres
23 de la famille du Témoin 4, étant donné les contacts de la famille avec les
24 autorités serbes. Balaj était en tête des activités d'enlèvement et de
25 mauvais traitement du Témoin 1, et il a personnellement violé le Témoin 2,
26 étant donné la suspicion de collaboration du Témoin 1 avec la police serbe.
27 Il a emmené le corps de Sanije Balaj à la région du canal, il a laissé son
28 corps sur les deux corps de la mère du Témoin 4 ainsi que de sa fille. Il
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1 avait été responsable lui-même de leur enlèvement quelques mois auparavant.
2 Il est également responsable d'avoir perpétré les viols dans les
3 chefs d'accusation 36 et 37 [comme interprété] du chef d'accusation. Il
4 était impliqué également dans d'autres agissements menaçants que j'ai déjà
5 décrits. Le 4 juillet, il a été responsable de malmener et d'intimider des
6 soldats et des officiers des FARK. Au début du mois de juillet, il a essayé
7 d'intimider un haut officier des FARK à Rznic en mettant en cause
8 l'autorisation donnée à cet officier de traverser la région. Le 11 août,
9 Balaj a détenu un groupe d'observateurs de la MOCE à Rznic, les accusant
10 d'activités d'espionnage pour le compte des Serbes, il a malmené
11 l'interprète du groupe et ensuite, il les a livrés à Haradinaj à Gllogjan,
12 ce dernier a interrogé chaque membre du groupe.
13 Même les membres de l'UCK avaient peur de Balaj. Pjeter Shala a dit
14 que d'autres unités "essayaient d'éviter tout contact" avec l'unité de
15 Toger. Avni Krasniqi a dit dans sa déposition que lorsqu'il accompagnait
16 Balaj et deux autres soldats pour déplacer le corps de Sanije Balaj, il est
17 parti avec un autre soldat de l'UCK tellement il avait peur de Toger, qu'il
18 a identifié comme étant la même personne qu'Idriz Balaj.
19 Pjeter Shala a parlé de la sécurité au centre d'entraînement de
20 Balaj, pages 9 974 et 75, et il a dit qu'il fallait demander l'autorisation
21 à Haradinaj avant d'y aller. Et c'est quelque chose que Shala devait
22 certainement savoir.
23 "La question était : Est-ce qu'il était facile de rendre visite à ce centre
24 d'unité d'élite ?
25 "Réponse : Je n'avais rien à voir avec cette unité mais vous étiez obliger
26 de demander une autorisation spéciale parce que les autres unités ne
27 fraternisaient pas avec cette unité.
28 "Question : Et savez-vous auprès de qui il fallait obtenir cette
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1 autorisation ?
2 "Réponse : Ramush."
3 A l'intérieur des FARK, on savait très bien que Balaj enlevait des civils.
4 Le Témoin 17 a dit dans son témoignage, pages 7 579 à 7 580 que Tahir Zemaj
5 avait dit que si quelqu'un était détenu et envoyé ou emmené à Gllogjan et
6 si on ne savait pas ou se trouvait cette personne, c'est la responsabilité
7 de Toger, c'est Toger qui est responsable de ces mises en prison. Et c'est
8 pour cela que les villageois s'intéressaient à ces choses et donnaient à
9 Tahir des informations concernant les incidents, étant donné qu'il y avait
10 quelque chose qui clochait. On disait que les personnes disparues, ceux qui
11 avaient été détenus et qui étaient portés disparus étaient envoyés à
12 Gllogjan.
13 Le Témoin 4 a perdu sa mère et ses deux sœurs suite à la persécution
14 perpétrée par Balaj étant donné l'allégation concernant l'implication de sa
15 famille avec les autorités serbes. Il a dit dans son témoignage ce qui
16 avait été dit par sa sœur.
17 "Question :Qu'est-ce qu'elle vous a dit ?
18 "Réponse : Elle a dit qu'il y avait eu une prison à Irzniq.
19 "Question : Et qui était responsable de cette prison ?
20 "Réponse : L'UCK.
21 "Question : Est-ce que votre sœur vous a parlé de ce qu'elle avait vu dans
22 cette prison de Rznic ?
23 "Réponse : Elle a dit qu'elle avait vu des prisonniers jeunes et âgés.
24 "Question : A-t-elle dit quelque chose en ce qui concerne ce qu'elle aurait
25 fait ou les ordres qui étaient données ? Est-ce qu'elle a parlé en tant que
26 des membres des l'UCK ?
27 "Réponse : Oui, oui, elle nous a parlé. Elle nous a dit qu'elle avait reçu
28 des ordres de Togeri, de tuer quelqu'un, et si elle ne le tuait pas, il me
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1 tuerait."
2 Dans notre mémoire, nous présentons un tableau qui donne des informations
3 concernant les moments et les endroits ou Balaj aurait été vu pendant la
4 période concernée par l'acte d'accusation. Je souhaites vous montrez cela
5 par le système PowerPoint, et cela vous montrera ou Idriz Balaj a été vu
6 pendant cette période.
7 A la première page, on fait référence au paragraphe 253 du mémoire en
8 clôture. La première fois, c'était lors de l'entraînement des soldats de
9 l'UCK, mars 1998. Ensuite, fin mars 1998, lors de l'enterrement de soldats
10 de l'UCK à Gllogjan. Troisième fois, formation et entraînement des Aigles
11 Noirs à Gllogjan, avril/mai. Ensuite, mi-avril, une réunion avec Tetaj et
12 Haradinaj. Enlèvement des sœurs, mi-avril, c'était la sœur S. Le retour de
13 la sœur S chez-elle, mi-avril. Ensuite, rencontre avec Shemsedin Cekaj, le
14 20 avril, ça c'était avec Haradinaj. Au volant de sa jeep noir, mai 1998,
15 c'était à Lumbardh. Le retour, la deuxième fois que la sœur S a été
16 retournée chez elle, début mai 1998. Ensuite, un avertissement qui a été
17 émis à la famille du Témoin 4, fin mai 1998. Juin 1998, Adem Hulaj, dont
18 j'ai déjà parlé, tire sur Adem Hulaj. Fin 1998, il tire sur Musa Berisha --
19 non, pardon, la voiture. Ensuite, Besim qui est emmené d'Irzniq pour
20 creuser des tranchées, juin 1998. Ensuite, toujours en juin 1998,
21 enlèvement de la famille du Témoin 4 à Ratis, la mère à Ratis. Le 26 juin
22 1998, rencontre des FARK à l'UCK avec Haradinaj. Le 4 juillet,
23 confrontation avec les soldats des FRAK. Le 4 juillet, attaque contre les
24 soldats des FARK à Gllogjan en présence de Haradinaj. Le 8 juillet, la
25 confrontation avec le Témoin 17 à Irzniq. Le 10 juillet, toujours avec
26 Haradinaj, l'ultimatum qui est donné au commandement des FARK à Prapaqan.
27 Le 10 et 11 juillet, le Témoin 17 se plaint à Haradinaj au sujet du
28 comportement de Balaj à Lluke et Prapagan. Le 20 juillet 1998 --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, vous avez votre
2 présentation informatisée, mais qui ne coincide pas tout à fait avec ce que
3 vous êtes en train de dire, donc cela prête à une certaine confusion.
4 M. RE : [interprétation] Oui, oui, c'est vrai. Je comprends.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et en disant cela, je ne vous demande
6 pas de parler encore plus vite.
7 M. RE : [interprétation] Nous sommes au --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A l'écran, nous avons la cérémonie du 20
9 juillet.
10 M. RE : [interprétation] C'est le numéro 21. C'était la cérémonie de Baran,
11 et d'ailleurs, il y a un film vidéo qui a été vu et qui est versé au
12 dossier. On voit très bien que Balaj est là ainsi que Haradinaj.
13 Ensuite, nous avons une rencontre avec Bislim Zyrapi de l'état-major
14 général de l'UCK avec Haradinaj, c'est en juillet 1998 à Irzniq. 23,
15 enlèvement du Témoin 1, le viol du Témoin 2, dans les derniers chefs de
16 l'acte d'accusation, c'était en août, début août 1998. 24, détention de
17 l'équipe ECMM et ensuite, leur envoi à Haradinaj a Gllogjan, c'était le 11
18 août 1998. 25, une réunion avec Haradinaj, Tahir Zemaj, et le Témoin 17,
19 c'était entre les 11 et 20 août 1998. 26, c'est ce que vous avez entendu en
20 ce qui concerne le déplacement du corps de Sanije Balaj dans sa jeep noire,
21 donc le déplacement de son corps vers le canal, c'est au milieu du mois
22 d'août 1998. 27, à la fin du mois d'août ou au milieu du mois d'août 1998,
23 enlèvement de la sœur M du Témoin 4. Numéro 28, il rencontre les
24 commandants des villages avec Haradinaj à Prapagan, c'est le 20 août 1998.
25 29, il interroge Tush et Illira Frrokaj qui ont été enlevés au point de
26 contrôle de Gllogjan en août 1998. La trentième fois qu'il est repéré,
27 c'est lorsqu'il procède à l'instruction des soldats au QG de l'UCK Gllogjan
28 en août 1998. 31, il est vu par un témoin juste avant son départ du village
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1 d'Irzniq à la fin août 1998.
2 Et si vous regardez la dernière diapositive de cette présentation, on voit
3 tous les endroits qu'Idriz Balaj a été repéré et tous ces éléments ont été
4 versés au dossier pour la période concernée. Les éléments qui ont été
5 versés au dossier contre Idriz Balaj sont extrêmement convaincants. On voit
6 qu'il a joué un rôle significatif, un rôle brutal dans la persécution des
7 victimes dans le cadre de l'entreprise criminelle commune.
8 Passons maintenant aux faits criminels, aux crimes qui accompagnent les
9 moments où on voit Balaj, alias Toger, on le repère. Aux chefs 13 et 14 de
10 l'acte d'accusation, il est question de persécution, meurtre, enlèvement,
11 emprisonnement, harcèlement de membres de la famille du témoin Ratis, et je
12 voudrais qu'on examine ensemble ce chef d'accusation pour voir quel est le
13 rôle de Haradinaj et comment ça se rapporte à l'entreprise criminelle
14 commune et à son objectif.
15 Pendant une période de peut-être cinq mois entre mars et août 1998, Balaj,
16 en personne, son unité des Aigles Noires, et autres membres de l'UCK ont
17 harcelé, ont terrorisé la famille du Témoin 4 Ratis avant d'enlever et
18 d'assassiner ses deux sœurs et sa mère. Le père qui était décédé à ce
19 moment-là avait été garde forestier. Et la famille avait un ami très proche
20 qui était policier serbe à la retraite.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de vous laisser continuer,
22 Monsieur Re, pour mieux vous suivre, vous parlez de cinq mois s'étant
23 écoulé entre mars et avril, c'est ce que vous avez dit.
24 M. RE : [interprétation] Ma langue a fourché, il s'agissait du mois d'août.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.
26 M. RE : [interprétation] Conformément au système d'attaque, d'agression, de
27 persécution contre ceux qui étaient accusés de ne pas soutenir l'UCK et qui
28 étaient suspectés de collaborer avec les Serbes, Balaj et les membres de
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1 l'UCK qui participaient à l'entreprise criminelle commune ont persécuté de
2 manière brutale cette famille. Ils sont arrivés pour la première fois à la
3 fin mars 1998. C'était tard le soir, certains portaient des uniformes,
4 d'autres des cagoules, d'autres des habits noirs. Ils ont affirmé qu'ils
5 appartenaient à une unité spéciale et qu'ils devaient perquisitionner la
6 maison pour voir s'il y avait des armes parce que le père du Témoin 4 avait
7 un permis de port d'armes. La présence de ces hommes a plongé la famille
8 dans une terreur absolue. Plusieurs semaines plus tard, tard dans la nuit à
9 la mi-avril 1998, Balaj est revenu, il est revenu accompagné de soldats de
10 l'UCK armés qui étaient placés sous son commandement, il est revenu dans la
11 maison de cette famille. Le Témoin 4 a entendu un soldat répéter le mot de
12 Toger à de très nombreuses reprises. Balaj s'est présenté à la mère du
13 Témoin 4 en disant qu'il s'appelait Toger. Il a déclaré à cette femme que
14 dans chaque famille il fallait qu'il y ait un soldat qui serve dans
15 l'armée. Ensuite, il a enlevé la sœur aînée de la famille, S. Quatre jours
16 plus tard environ, Toger a ramené brièvement cette femme à la maison avant
17 l'amener à nouveau. Toger et cette sœur S portaient des uniformes noirs de
18 l'UCK avec des insignes de l'UCK. La sœur S a déclaré qu'elle était
19 hébergée dans l'ancienne école de Rznic qui servait de base à l'UCK.
20 C'est au début de mai 1998 qu'a eu lieu la quatrième visite à la maison.
21 Une ou deux semaines plus tard, Toger a déposé cette jeune femme à la
22 maison, une deuxième fois, elle portait encore un uniforme de l'UCK, un
23 uniforme noir, elle a déclaré que Toger lui avait ordonné de tuer quelqu'un
24 qu'elle avait refusé dans la prison à Rznic, mais elle avait peur, elle a
25 refusé de donner des détails supplémentaires parce qu'elle avait peur que
26 Toger, c'est-à-dire Balaj, ne lui fasse du mal. Et en obéissant aux ordres
27 de Toger, elle est repartie à pied vers Rznic. Un peu plus tard dans la
28 journée, Toger est revenu et il a demandé pourquoi elle était en retard. Le
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1 Témoin 4 a répondu à Toger qu'elle était déjà partie. La famille de cette
2 femme ne l'a jamais revue.
3 La cinquième visite, elle a eu lieu à la fin mai 1998, deux ou trois
4 semaines plus tard. Le Témoin 4 s'est rendu au QG de Ratis pour demander un
5 permis afin que la famille puisse se déplacer. On lui a refusé de lui
6 livrer ce permis, mais peu de temps après, Balaj ainsi que d'autres soldats
7 de l'UCK sont revenus dans la maison de cette famille, et ils ont dit à
8 cette mère qu'il lui était interdit d'aller où que ce soit parce que son
9 mari avait travaillé pour les autorités serbes. Il a menacé de la tuer si
10 elle essayait d'aller où que ce soit. Voici des éléments qui nous donnent
11 la preuve directe de l'intention persécutante de Balaj.
12 Et si ça ne suffisait pas, il faut penser à cette sixième visite, cette
13 sixième visite qui a eu lieu vers le mois de juin 1998, à ce moment-là,
14 Balaj, accompagné d'un groupe de soldats armés, est arrivé à la maison tard
15 le soir. Il a interrogé la mère au sujet de son fils, il a demandé où il
16 était ce fils aîné, puis, il a enlevé cette femme. Il l'a amenée et jamais
17 les membres de sa famille ne l'ont revue. Son corps a été retrouvé au canal
18 au mois de septembre. Balaj est revenu une septième fois dans cette maison.
19 Très tard le soir à la mi-août ou à la fin août 1998, Balaj et plusieurs
20 membres de l'UCK armés sont revenus, ils ont enfoncé la porte. Et Balaj a
21 amené la sœur M, c'est-à-dire la sœur du Témoin 4. Sans lui permettre de
22 mettre des chaussures, il l'a traînée hors de la pièce par la porte qui
23 était défoncée.
24 Quatre ou cinq jours plus tard, son corps a été retrouvé au bord de la
25 route à 5 ou 6 kilomètres de distance. Elle avait été égorgée. On lui avait
26 tiré un coup de feu derrière l'oreille, elle avait été poignardée à
27 plusieurs endroits aux bras, dans le dos, à l'épaule. Elle avait la main
28 droite levée au-dessus la tête et la main gauche appuyée sur le sol comme
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1 si elle avait essayé de se lever juste avant de mourir. On a retrouvé son
2 blouson en cuir à côté de son corps qui était criblé de balles et on a
3 trouvé 50 à 50 déchirures faites par des couteaux. Sa famille l'a enterrée
4 à côté de la maison, puis ensuite est partie se réfugier dans le village,
5 dans un village où habitait l'un de leurs parents. Le bureau du Procureur a
6 ensuite fait exhumer le corps de cette victime, et l'autopsie a révélé que
7 son corps présentait de nombreuses blessures par balles, qui avaient
8 entraîné sa mort.
9 Balaj ou d'autres personnes agissant avec lui ont tué cette femme; il n'y
10 pas d'autre explication aux faits, aucune autre conclusion ne peut être
11 déduite des éléments de preuve présentés. La seule conclusion à laquelle on
12 puisse parvenir c'est qu'il l'a assassinée dans une intention de
13 persécution. Mais ce qui est décisif ici, ce qui est décisif s'agissant de
14 sa participation à ses actes, c'est la manière et l'endroit où ces corps
15 ont été trouvés. Les corps de la mère et de la sœur, R-11 et R-12, comme on
16 peut le voir ici, ont été trouvés au niveau du mur de la paroi du canal
17 sous le corps du témoin, le corps de Sanije Balaj, R-1. Leurs têtes étaient
18 rapprochées et entre elles, il y avait un nœud qui avait été fait avec du
19 fil de fer barbelé et dans lesquels il y avait des cheveux noirs, en état
20 de putréfaction ainsi que des tissus humains. La paroi du canal au-dessus
21 des corps portait de nombreux impacts de balles.
22 Les corps de la mère et de la fille comportaient de nombreuses
23 blessures. Il y avait là des blessures pour ce qui est du corps de la fille
24 qui correspondaient à des blessures par balle. C'était la même chose pour
25 la mère, dont le corps portait également de multiples fractures. On a
26 retrouvé des balles à l'intérieur de la housse mortuaire dans ses
27 vertèbres.
28 J'en reviens aux ressemblances dont j'ai parlé au départ, les
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1 ressemblances entre toutes les blessures trouvées sur ces corps, la cause
2 du décès, les corps retrouvés dans la housse mortuaire du corps de la mère,
3 et cetera, et les blessures qui indiquent des -- qu'on a utilisé des
4 instruments contondants, le fil de fer barbelé, les cheveux, et cetera.
5 Tout ceci montre que ces personnes ont été torturées avant d'être
6 exécutées. Ce qui est important ici, c'est que ces deux personnes sont
7 mortes avant que le corps de Sanije Balaj ne soit abandonné à cet endroit
8 par Balaj ou par quelqu'un qui agissait sous ses ordres. Ceci correspond
9 tout à fait à la date et à la chronologie donnée par le témoin.
10 Toger, c'est Balaj. Ceci est incontestable. On l'a reconnu. Ceci se prouve,
11 prouve au-delà de tout doute raisonnable que Balaj, c'est Toger. Le Témoin
12 4 a reconnu que Toger, c'était Balaj, et ceci à cause des "sept visites"
13 qui ont été faites par Balaj chez lui, dans sa maison. Toger, c'est-à-dire
14 Balaj, n'a rien fait pour cacher son identité quand il a commis tous ces
15 crimes. Autres faits, autres facteurs qui démontrent le niveau d'autorité
16 qui était le sien et le niveau d'impunité qui était le sien, c'est qu'il a
17 toujours porté les mêmes vêtements, l'uniforme spécial de l'UCK, uniforme
18 de couleur noir qui était celui des Aigles noirs, et il semblait toujours
19 être au commandement des autres soldats qui l'accompagnaient. Balaj et
20 d'autres ont persécuté les membres de cette famille et d'autres parce
21 qu'ils jugeaient qu'ils collaboraient avec les autorités serbes. Ces trois
22 victimes étaient toutes des civils.
23 Ces victimes ont toutes été tuées avec des armes à feu après le
24 relèvement par Balaj. Leurs corps, ce qui leur est arrivé, est un
25 [inaudible] à ce qui est arrivé à Sanije Balaj. Cette jeune femme, qui
26 avait à peu près 22 ans au moment où elle a trouvé la mort, une mort
27 totalement inutile, une mort cruelle, une mort qui prouve qu'il y a un lien
28 direct entre Balaj, Haradinaj et les autres participants de l'entreprise
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1 criminelle commune aux fins de persécution. Les éléments du dossier - et
2 vous les avez entendus comme nous - montrent que le 12 août 1998 des
3 policiers militaires de l'UCK, Mete Krasniqi et d'autres, l'ont arrêtée au
4 point de contrôle du village de Baran, parce que son nom figurait sur une
5 liste d'Albanais qui devaient être interceptés. Et là, vous avez l'endroit
6 à l'écran, vous pouvez voir où se trouve Baran.
7 Elle a été interrogée, cette jeune femme, au QG de la police
8 militaire de l'UCK à Baran, donc dans le bâtiment de l'école. L'un de ceux
9 qui l'ont interrogé, Idriz Gashi, Galani, qui a été condamné et déclaré
10 coupable par un tribunal du Kosovo pour ce meurtre, il a fait sortir Sanije
11 Balaj. Il a annoncé qu'il avait trouvé les noms de policiers serbes dans
12 son carnet, et qu'il fallait l'emmener à Gllogjan pour qu'elle y soit
13 questionnée et interrogée. Galani et Avni Krasniqi, un autre policier
14 militaire, l'ont ensuite conduite vers le QG de Haradinaj à Gllogjan afin
15 qu'elle y soit de nouveau interrogée. Mete et Avni Krasniqi étaient tous
16 deux membres de la police militaire de l'UCK de Baran, sous le commandement
17 de Hasan Gashi. La Chambre de première instance a entendu des témoins lui
18 expliquer que Haradinaj avait nommé Galani, le meurtrier, au poste de
19 commandement de Lugu i Drinit. Avni Krasniqi a déclaré que ceci signifiait
20 qu'il fallait obéir à Galani, le fait qu'il ait été nommé à ce poste. De
21 plus, il faut savoir que Galani était très proche de Mete Krasniqi.
22 Alors qu'il se dirigeait vers Gllogjan, Galani ou Gashi a fait sortir
23 Sanije Balaj de la voiture et il l'a tuée, il l'a tuée d'un coup de
24 pistolet. La Chambre de première instance a entendu Avni Krasniqi lui
25 expliquer ce qu'il en était. Avni Krasniqi était présent au moment où
26 Galani a assassiné cette jeune femme. Après ce meurtre, qui était vraiment
27 difficile à dissimuler, et plus tard dans la même journée, Galani a ramené
28 Iber et Avni Krasniqi, leur ordonnant d'enterrer le corps. Nous avons à
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1 l'écran la pièce P925, sur laquelle on voit l'endroit où la personne en
2 question a été tuée et a été enterrée. La nouvelle de ce meurtre s'est
3 bientôt très vite répandue dans le secteur. Quelques jours plus tard,
4 Haradinaj s'est rendu en personne chez le frère de Sanije, Shaban, donc
5 pour présenter ses condoléances.
6 Mete Krasniqi a déclaré à Haradinaj que Galani avait tué Sanije
7 Balaj. Cependant, environ trois jours plus tard, trois jours après le
8 meurtre, Balaj ou Toger est arrivé à Baran à bord d'une jeep noire avec
9 Galani, c'est-à-dire le meurtrier et deux autres soldats. La Chambre de
10 première instance a entendu des témoins très convainquant lui parler de
11 l'identité et du rôle de Balaj dans ce qui a été ensuite fait pour se
12 débarrasser du corps. Galani a ordonné à Krasniqi d'aider Balaj à déplacer
13 le corps vers un endroit sûr. Balaj a emmené Avni Krasniqi, ainsi que les
14 autres soldats vers Lugu i Isufit, c'est l'endroit que je vous ai montré il
15 y a quelques instants. Balaj a attendu dans la jeep pendant que les autres
16 déterraient le corps et le plaçaient à bord de sa jeep.
17 Ensuite, Balaj a emmené Iber et Avni Krasniqi, les a ramenés d'où ils
18 venaient, et il est reparti avec le corps. Le corps a été retrouvé au canal
19 avec les corps de Kemal Gashi et Zenun Gashi. Zenun Gashi, c'est le
20 policier rom qui se trouvait sur la liste de l'UCK, la liste des personnes
21 qu'elle recherchait et qui a été retrouvée le 28 août 1998. Il est forcé
22 que Balaj ait emmené ce corps à cet endroit. Il n'y a pas d'autre
23 explication au fait qu'on ait trouvé ce corps au-dessus des autres
24 victimes, des autres victimes de Balaj qui étaient tombés sous ses coups
25 dans les mois qui précédaient.
26 Comme je l'ai déjà dit précédemment, son corps, pièce 418, a été
27 trouvé au-dessus du corps des victimes R11 et R12, la mère et la sœur,
28 qu'on a vu la dernière fois le jour entre les mains de Balaj, le jour avant
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1 que Balaj n'ait recherché le corps de Sanije Balaj.
2 En tant que collaborateur collaboratrice soupçonnée, Sanije Balaj a
3 été arrêtée et assassinée en exécution du but criminel commun. Si l'on
4 prend soigneusement en considération les circonstances qui ont conduites à
5 la conclusion, la seule et unique conclusion, que Haradinaj doit être lié
6 aux meurtres, il faut garder à l'esprit le système de persécution qui
7 régnait à l'époque. Il a contribué manifestement à ce système en aidant à
8 dissimuler ce meurtre violent.
9 Trois jours après le meurtre, il devait savoir par Galani, Mete Krasniqi,
10 ou son fidèle lieutenant à Baran, Din Krasniqi, où se trouvait le corps.
11 Pendant ce temps, son bras droit Balaj, alors qu'il parlait à la famille,
12 son fidèle lieutenant qui avait également participé à l'entreprise
13 criminelle commune, était en train de déterrer le corps pour l'emmener au
14 canal. La seule déduction raisonnable possible est que Haradinaj a ordonné,
15 ou du moins a approuvé, le déplacement de son corps.
16 Le fait que Balaj a conduit le corps au canal à l'époque était un
17 secret de polichinelle. Haradinaj a fait valoir qu'il n'était pas chargé
18 d'enquêter sur le meurtre, car ce meurtre ne s'était pas produit dans son
19 secteur, et qu'il n'avait pas de moyens à sa disposition, il n'avait pas de
20 prisons, ni de tribunaux, et le suspect semblait avoir quitté le secteur.
21 Tout cela est difficile à croire. Haradinaj était la personne la plus
22 puissante dans ce secteur. Idriz Gashi, Galani, c'est lui qui l'avait
23 nommé. Mete et Avni Krasniqi recevaient leurs ordres de Din Krasniqi et de
24 Haradinaj, conformément à la structure de commandement parallèle de facto
25 qui existait à Baran.
26 La seule raison possible expliquant que l'on ait conduit le corps de Sanije
27 Balaj au canal, à un endroit considéré comme "sûr", disais-je, était de
28 dissimuler la vérité concernant sa détention et le fait qu'elle avait été
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1 tuée par des membres de l'UCK. Il ne s'agit pas d'une coïncidence. Il
2 s'agit là d'un acte de plus s'inscrivant dans le cadre des persécutions et
3 des meurtres perpétrés à l'encontre de ceux que l'on soupçonnait de
4 collaboration.
5 J'en viens maintenant au rôle de Lahi Brahimaj dans l'entreprise criminelle
6 commune. Brahimaj était la deuxième personne la plus importante après
7 Haradinaj pour ce qui est de la puissance et du prestige dans la zone de
8 Dukagjini. Il commandait le fief stratégique de l'UCK de Jablanica. Le
9 dossier montre que c'est le premier village dans la zone de Dukagjini où
10 une force importante de l'UCK a pu s'installer. Brahimaj a également joué
11 un rôle essentiel dans la création de la base de l'UCK à Gllogjan. Il était
12 membre de l'état-major général de l'UCK. C'est lui qui était en charge des
13 finances. Il s'occupait de la liaison entre l'état-major général et la zone
14 de Dukagjini. C'était l'oncle de Haradinaj, une personnalité importante et
15 respectée au sein de l'UCK pour ce qui est de la zone de Dukagjini.
16 Avant les affrontements à Gllogjan, affrontements qui ont opposé l'UCK et
17 les forces serbes le 24 mars, Pjeter Shala, que tout le monde redoutait, et
18 Idriz Balaj ont agi à Jablanica, où se trouvait Brahimaj. Le 30 mars 1998,
19 Jablanica était gardé et fortifié grâce à l'aide d'environ 200 membres de
20 l'UCK armés et formés, placés sous le commandement de Brahimaj. Brahimaj
21 était un proche collaborateur de Haradinaj, comme le montrent les éléments
22 de preuve présentés, et il a contribué à l'organisation et au renforcement
23 de la position de l'UCK dans la zone de Dukagjini. Ils étaient tellement
24 proches qu'après que les hommes de Haradinaj se sont retirés de Gllogjan le
25 24 mars, Haradinaj, qui avait été blessé lors de l'attaque, a trouvé refuge
26 dans la maison de Brahimaj. Jablanica, tout comme Gllogjan, se trouvait à
27 un endroit stratégique le long d'un axe essentiel pour l'UCK s'agissant de
28 l'importation d'armes, d'équipement et de soldats en provenance d'Albanie.
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1 Haradinaj et Brahimaj ont coordonné les efforts en matière d'armement dans
2 le cadre desquels de nombreux soldats de l'UCK circulaient entre l'Albanie
3 et Jablanica; Brahimaj en personne a conduit des groupes qui ont franchi la
4 frontière pour aller chercher des armes. Le 23 juin, Brahimaj est devenu le
5 commandant en second de Haradinaj; Haradinaj l'a relevé de ses fonctions
6 quelques semaines plus tard en raison apparemment d'absences non
7 autorisées. Mais Brahimaj a continué à exercer ses fonctions de commandant,
8 et s'est servi de son autorité personnelle pour affirmer publiquement son
9 soutien aux persécutions contre les collaborateurs soupçonnés et les
10 opposants de l'UCK. Des villageois de Grabanice ont été également
11 persécutés, ceux qui étaient en faveur du parti d'opposition, le LDK. Ces
12 hommes sont devenus des 'personnes recherchées' par l'UCK, suite aux
13 accusations publiques proférées contre elles par Brahimaj.
14 A la fin du mois de mai 1998, Brahimaj et le commandant de l'UCK, Alush
15 Agushi, ont intercepté et confronté un groupe de villageois de Grabanice,
16 près de Gllogjan, villageois qui quittaient leur village pour échapper aux
17 forces serbes qui se rapprochaient du secteur. Brahimaj a ordonné aux
18 villageois de Gllogjan de ne pas aider le groupe qui se repliait de
19 Grabanice et l'état-major de Jablanica a commencé à rechercher les hommes
20 de Grabanice. Ils ont donné pour instruction aux villageois de Jablanica de
21 livrer leurs hommes à l'état-major de l'UCK.
22 Pjeter Shala et deux autres membres de l'UCK en ont enlevé deux, Fadil
23 Fazliu et Naser Lika à Zabelj. Ils les ont frappés, les accusant d'être des
24 traîtres et les conduisant de force à Jablanica. Brahimaj était responsable
25 de la caserne de l'UCK utilisé comme centre de détention à Jablanica. Cette
26 caserne a été mise sur pied au moins à partir de mars 1998. Pièce P357 à
27 l'écran, nous voyons-là le centre de détention situé dans la caserne de
28 l'UCK à droite ou c'est à gauche que se trouve l'entrée. Ce centre de
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1 détention visait à contribuer à la réalisation du but criminel commun en
2 détenant, torturant et assassinat des collaborateurs et des opposants de
3 l'UCK ou perçus comme tels.
4 Il n'existe aucun élément de preuve indiquant que cette prison
5 servait à autre chose que ce que je viens de mentionner. En créant et
6 administrant une prison bien connue, et en commettant personnellement des
7 actes de violence contre des opposants supposés de l'UCK, Brahimaj a aidé
8 et encouragé les membres de l'UCK à mener d'autres attaques en exécution du
9 but criminel commun. Tous les prisonniers, dont on sait qu'ils ont été
10 détenus pendant la période couverte par l'acte d'accusation, étaient
11 considérés comme des collaborateurs ou des ennemis ou opposants de l'UCK,
12 du simple fait de leur appartenance ethnique.
13 Brahimaj, en tant que commandant de l'UCK à Jablanica, exerçait un
14 commandement général sur la caserne et le centre de détention, et il
15 exerçait un contrôle sur la détention, la libération et le traitement des
16 prisonniers à Jablanica; il était quasiment tout le temps présent au centre
17 de détention, au point même qu'il disposait de son propre bureau au centre
18 de détention, à côté des cellules. Les gardiens l'appelaient le commandant.
19 Il fallait obtenir son autorisation pour libérer des prisonniers. Vous avez
20 entendu comment il contrôlait l'accès à la caserne en ayant recours à des
21 civils. C'est lui qui décidait entièrement du sort des prisonniers. C'est
22 lui qui décidait qui serait emprisonné, qui serait malmené. C'est lui qui
23 décidait de sortir des prisonniers de leurs cellules pour les frapper, les
24 interroger, et il pouvait ordonner à des soldats de l'UCK de frapper les
25 prisonniers. L'UCK à Jablanica traitait les prisonniers serbes et
26 monténégrins, considérés comme les ennemis absolus et automatiques de
27 l'UCK, avec une brutalité particulière.
28 Le Témoin 6, un civil albanais du Kosovo, et Nenad Remistar, un civil
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1 serbe, ont été enlevés par l'UCK au même moment et emprisonnés et frappés à
2 la caserne. Après quoi, le Témoin 6 a été libéré; Remistar a été conduit
3 hors de la prison et assassiné au bout de 24 heures. Pendant trois jours,
4 trois Monténégrins et un Bosniaque, également emprisonnés, ont été frappés
5 à l'aide de battes de baseball et ont reçu des coups de poignard jusqu'à ce
6 qu'ils soient couverts de sang et crachent le sang, après quoi, ils ont été
7 amenés et n'ont jamais été revus.
8 Ensuite, Brahimaj encourageait directement les actes de mauvais traitements
9 menés par ses subordonnés et accusait les prisonniers de collaboration.
10 Lorsque le Témoin 3 a nié ces accusations, Brahimaj lui a remis un revolver
11 et lui a dit de se tuer car Brahimaj ne voulait pas se salir les mains avec
12 le sang du prisonnier en question. Brahimaj a pourchassé et puni le Témoin
13 3 après que celui-ci s'est enfui de prison. Cette prison était de notoriété
14 publique. Les proches du Témoin 6 ont appris que le Témoin 6 avait été
15 détenu à Jablanica de la bouche de villageois. Un proche du Témoin 6 se
16 rendait sur les lieux tous les jours et les gardiens lui donnaient des
17 nouvelles du Témoin 6.
18 Les service de la Sûreté de l'Etat, la DB Serbe, ainsi que la VJ avaient
19 également connaissance de l'existence de la prison de l'UCK à Jablanica,
20 prison où l'on avait placé en détention des Serbes, des Roms, et Albanais
21 considérés comme loyaux, enlevés auparavant. Je ne montrerai pas à l'écran
22 la pièce P981 où sont détaillés les renseignements dont disposait la DB à
23 l'époque. Brahimaj menait ouvertement ces activités dans une caserne de
24 l'UCK remplie de soldats et en présence d'autres membres de l'UCK. Ce
25 comportement montre qu'il approuvait et encourageait pleinement l'ambiance
26 générale de violence et de terreur, encourageant ces actes de violence et
27 de terreur à l'encontre de collaborateurs et d'opposants de l'UCK au centre
28 de détention.
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1 Nenad Remistar, un civil serbe, était policier chargé de la circulation à
2 Gjakove. Il était civil au sens de la définition d'un conflit armé. Il n'a
3 pas pris part active aux hostilités, il n'était pas membre des forces
4 serbes. Le dernier jour où sa famille l'a vu, le 13 juin 1998, il a quitté
5 son domicile pour se rendre au travail à abord d'une Kadett Opel bleue en
6 tenue civile. Ces proches se sont inquiétés après de ne pas avoir eu de ses
7 nouvelles pendant plusieurs jours. Ils ont appris qu'il n'était jamais
8 arrivé sur son lieu de travail. A la fin du mois de juin, des Albanais du
9 Kosovo ont dit à son père que Nenad Remistar avait été emprisonné avec un
10 Albanais catholique à Jablanica. Voilà exactement ce qui s'est passé.
11 Le Témoin 6 a déclaré à la page 5 210 la chose suivante : "Merci. Vous avez
12 mentionné la personne dont vous avez vu des photographies à bord de l'Opel
13 Kadett, cette personne que vous connaissiez sous le nom de Nenad, est-ce
14 que vous l'avez jamais vu ?
15 "Réponse : Nous nous trouvions dans la même pièce cette nuit-là. Nous avons
16 tous les deux été frappés, attachés avec une corde pendant 24 heures,
17 jusqu'au lendemain matin.
18 "Question : Merci. Est-ce que vous-même, vous avez vu de vos propres yeux
19 Nenad être frappé ?
20 "Réponse : Oui, nous deux.
21 "Question : Et savez-vous qui a participé au passage à tabac de Nenad ?
22 "Réponse : Nazmi, avec un groupe de soldats. Les soldats n'étaient pas
23 toujours les mêmes. Ils se relevaient. Il est resté là 24 heures."
24 Et un peu plus loin, on peut lire :
25 "Question : Dans quel état était-il lorsqu'on est venu le chercher ?
26 "Réponse : Il ne pouvait pas marcher. Nous avions tous les deux les mêmes
27 blessures. Nous avons tous les deux été roués de coups. Ces deux soldats
28 l'ont amené et je ne sais pas ce qu'ils ont fait de lui ensuite.
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1 "Question : Avez-vous revu Nenad par la suite ?
2 "Réponse : Non."
3 S'agissant des trois Bosniaques et du Monténégrin, le Témoin 6 a dit à la
4 page 5 277 qu'il avait vu ces personnes pendant trois jours, qu'elles
5 avaient été frappées à l'aide de battes de baseball, et qu'elles étaient
6 couvertes de sang, page 5 277.
7 Un autre prisonnier détenu à Jablanica était Pal Krasniqi, dont le cadavre
8 a été retrouvé au canal. Pal Krasniqi a cherché à rallier l'UCK près de
9 Jablanica, mais l'UCK l'a accusé d'être un espion des Serbes, il a donc été
10 détenu, torturé et assassiné par l'UCK. Le Témoin 6 a déclaré l'avoir vu
11 pour la dernière fois à Jablanica. Nous voyons ici une photographie de Pal
12 Krasniqi, il s'agit de la pièce P334.
13 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
14 M. RE : [interprétation] Aux pages 5 240 et 5 241 du compte rendu
15 d'audience, le Témoin 6, lorsqu'on lui a demandé de décrire l'état dans
16 lequel se trouvait Pal Krasniqi à Jablanica, lorsqu'il l'a vu pour la
17 dernière fois, en réponse à la question suivante, je cite : "Dans quel état
18 était-il ? Quelles étaient ses capacités physiques d'après ce que vous avez
19 pu en juger ?"
20 Il a répondu la chose suivante : "Il ressemblait à quelqu'un qui va mourir.
21 "Question : Est-ce qu'il était couvert de sang ?
22 "Réponse : Oui, il était couvert de sang. Il crachait du sang. Son corps
23 était couvert d'ecchymoses en raison des coups, il était tuméfié. Il gisait
24 par terre. Je lui apportais de l'eau. Il est resté dans cet état pendant
25 une semaine. J'ai été libéré et je ne sais pas ce qui lui est arrivé.
26 "Question : Est-ce que vous l'avez revu ?
27 "Réponse : Non."
28 La raison pour laquelle il ne l'a jamais revu, c'est parce que Pal Krasniqi
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1 a été assassiné. Son corps, R-9, a été retrouvé près du canal parmi
2 d'autres corps qui se trouvaient dans la partie vaste du canal. Son corps a
3 été trouvé criblé de balles. L'autopsie a révélé la présence de fractures
4 au niveau des mains et des jambes qui témoignent de la brutalité du passage
5 à tabac. Il a succombé à plusieurs blessures par balle à la tête et au
6 torse ainsi que dans les membres supérieurs. Les traces de balles
7 retrouvées dans le canal et sur son corps indiquent qu'il a sans doute été
8 conduit là depuis le centre de détention de Jablanica et exécuté sur place.
9 La seule conclusion possible dans de telles circonstances, sachant qu'il a
10 été vu pour la dernière fois mourrant au centre de détention de Jablanica,
11 et vu que son corps a été retrouvé dans un charnier de l'UCK sur un
12 territoire contrôlé par l'UCK, la seule conclusion, disais-je, est qu'il a
13 été assassiné par des membres de l'UCK en exécution de l'entreprise
14 criminelle commune.
15 Il y a une autre personne dans le même chef d'accusation, c'est-à-dire
16 Skender Kuci. On a démontré que ce prisonnier du centre de détention de
17 Jablanica a été "terriblement frappé" jusqu'à ce qu'il ne soit plus en
18 position de se relever. Il était dans l'incapacité de se promener. Il était
19 arrivé au stade où il s'urinait dessus.
20 Le Témoin 6 a dit dans sa déposition que Lahi Brahimaj et Nazmi
21 Brahimaj étaient présents lorsque cet homme a été frappé et il a dit qu'ils
22 participaient aux passages à tabac des prisonniers du centre de détention
23 de Jablanica.
24 Si vous voulez bien, je vais m'arrêter un instant pour vous présenter les
25 diapositives assez rapidement. Ça concerne l'enlèvement de Skender Kuci à
26 Jablanica. Il y a Pal Krasniqi qui quitte Peje pour se rendre à l'UCK à
27 Jabllanice. L'arrestation du Témoin 3 à Zhabel, ensuite emmené a
28 Jabllanice. Tous les trois sont passés à tabac et torturés à Jabllanice. Le
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1 Témoin 3 s'échappe, Skender Kuci meurt suite à ses blessures. Il est
2 enterré à Jabllanice. Vous voyez ici, à la pièce 267, il a été enterré dans
3 les bois proche du centre de détention de Jabllanice, et on y voit la
4 flèche rouge qui indique l'emplacement. Le cercle noir montre le QG de
5 l'UCK de Jablanica. En septembre 1998, on a retrouvé les restes du corps de
6 Pal Krasniqi près du canal, et vous voyez sa dépouille à l'écran. C'est la
7 pièce P667.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, je regarde l'horloge. Je
9 souhaiterais que nous fassions une interruption jusqu'à 18 heures, et
10 ensuite il vous restera 20 minutes, et je serai très strict en ce qui
11 concerne le respect du temps reparti --
12 M. RE : [interprétation] Il n'y a aucun problème.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ensuite, Maître Emmerson, je vous
14 demanderais, à vous ou un de vos collègues, de bien vouloir commencer pour
15 les 40 minutes restantes de la journée.
16 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
18 Nous allons reprendre à 18 heures.
19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.
20 --- L'audience est reprise à 17 heures 59.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Re, il vous reste 20 minutes.
22 M. RE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Si vous voulez bien, regardez l'écran, la dernière diapositive. Avant
24 d'interrompre l'audience, j'ai dit qu'en septembre 1998, la dépouille de
25 Pal Krasniki a été retrouvée près du canal. Ici, à l'écran, on voit que
26 c'était près de R-8, donc vous voyez les noms et les références que Velizar
27 Stosic, R-8/1, Zdravko Radunovic, et près du R-7, Sali Berisha, et R-4,
28 Zenun Gashi. Il s'agit de la pièce P667. Zenun Gashi était sur la liste des
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1 personnes recherchées par l'UCK.
2 Maintenant, je passe à un autre chef concernant des civils albanais du
3 Kosovo qui figuraient sur les listes des personnes recherchées de l'UCK, et
4 cela concerne Nurije et Istref Krasniqi, les chefs 21 et 22, le paragraphe
5 83 de l'acte d'accusation. Vous voyez leurs photos en P347 et P346. A
6 l'époque, en 1998, Istref avait environ 60 ans, et Nurije, sa femme, 56 ou
7 58. Le 12 juillet 1998, quatre soldats armés de l'UCK les ont pris de leur
8 maison à Turjak. Ils étaient soupçonnés de collaboration avec les Serbes.
9 D'après des rumeurs à Turjak, c'était des "fils de Bosniaques et des
10 collaborateurs serbes."
11 Aux alentours du 10 juillet, le commandant de l'UCK, Rrustem Tetaj,
12 accompagné de soldats armés de l'UCK, est arrivé chez eux dans des jeeps
13 noires de l'UCK. Tetaj s'était présenté en tant qu'adjoint de Ramush
14 Harandinaj. Deux jours plus tard, lors d'une rencontre du commandement de
15 l'UCK de la vallée de Baran qui a eu lieu chez son commandant, le Dr Din
16 Krasniqi, nommé par Haradinaj, une liste a été diffusée sur laquelle
17 figurait des personnes recherchées par Din Krasniqi et l'UCK. A l'écran,
18 vous voyez cette liste et vous voyez qu'il y a deux femmes collaboratrices
19 de Turjak. Une des ces personnes était forcément Nurije, étant donné la
20 façon dont son nom a été inclus sur cette liste. On fait référence à son
21 fils qui a reçu une balle dans le cou et le Dr Din Krasniqi, en fait, avait
22 soigné le fils qui avait été blessé.
23 Le Témoin 17 dit que tous ceux qui étaient présents à cette réunion
24 savaient très bien, étaient tout à fait au courant de l'existence de ces
25 collaborateurs. Le jour même de la réunion, et à cette réunion la liste
26 était diffusée, les deux Krasniqi sont rentrés à la maison. Le commandant
27 Tetaj et les soldats de l'UCK sont venus chercher une autre personne, Smajl
28 Gashi de Turjak, pour l'amener au QG de l'UCK de Gllogjan pour être
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1 interrogé, mais vers minuit Tetaj renvoyait Gashi avec des soldats de l'UCK
2 pour leur montrer ou se trouvait la maison des Krasniqi. Ces soldats de
3 l'UCK ont ensuite mis Istref et Nurije Krasniqi dans une jeep noire, en
4 leur disant qu'ils les emmenaient à Gllogjan en application des ordres
5 donnés par Tetaj.
6 Ensuite, il y avait des rumeurs de leur enlèvement et leur meurtre, et
7 Tahir Zemaj a nommé Fadil Nimonaj pour enquêter sur leur disparition. La
8 conclusion de l'enquête de Selca était que l'UCK avait enlevé ce couple et
9 que Tetaj était à l'origine de ce qui s'était produit. Le 15 juillet, Din
10 Krasniqi a dit à un parent que lui, Krasniqi, s'était rendu au QG de l'UCK
11 à Gllogjan et on lui avait dit qu'ils avaient été interrogés et ensuite
12 relâchés. Si l'on regarde les notes officielles de Selca qui figuraient à
13 l'écran tout à l'heure, ceci est confirmé : Krasniqi avait été pris du
14 village de Turjak pour être interrogé concernant la question de sa
15 collaboration avec les forces de police serbes.
16 Alors, que s'est-il passé, qu'est-il advenu de ce couple ? Après leur
17 enlèvement par les soldats de l'UCK, le nom de l'un a figuré sur une liste
18 de personnes recherchées par l'UCK, et dans l'autre cas il s'agissait d'un
19 nom rajouté pour des raisons de suspicion de collaboration, et ensuite
20 leurs dépouilles, R-14 et 15, ont été retrouvées le 12 septembre près du
21 mur du canal. Deux cadavres se trouvaient dans du gravier près d'autres
22 cadavres. Le deux portaient des marques de blessures par balles multiples
23 et c'était cela l'origine de leur décès. Leurs corps se trouvaient à
24 l'endroit où il y avait des traces de balles sur le mur même, ce qui
25 conforte l'impression qu'ils avaient été exécutés à l'endroit même. Le
26 couple avait été accusé de collaboration et leurs noms figuraient sur la
27 liste de personnes recherchées par l'UCK. Des soldats de l'UCK les ont
28 amenés au QG de Gllogjan de Haradinaj en suivant l'ordre donné par son
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1 adjoint. Leurs corps exécutés ont été retrouvés près d'autres victimes de
2 l'UCK.
3 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la seule conclusion que l'on
4 peut tirer de ces éléments est que ces personnes ont été assassinées par
5 des membres de l'UCK conformément à l'entreprise criminelle commune. Si
6 vous regardez la diapositive, vous verrez que leurs dépouilles ont été
7 retrouvées près du cadavre du R-10, Vukosava Markovic, la sœur âgée, la
8 sœur serbe qui avait été portée disparue en avril 1998 dans un territoire
9 contrôlé par le l'UCK dans le secteur de Ratishe-Gllogjan.
10 Un autre exemple --
11 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
12 M. RE : [interprétation] -- le décès de Zenun Gashi et Misin Berisha dans
13 les chefs 19 et 20 de l'acte d'accusation. Zenun Gashi était un policier à
14 la retraite, et sa famille craignait qu'étant donné sa collaboration avec
15 l'UCK, il deviendrait une cible de l'UCK -- je me reprends. Etant donné sa
16 collaboration avec les Serbes pendant qu'il était officier de police, à
17 cause de cela il pourrait devenir cible. Ces craintes étaient tout à fait
18 justifiées, il suffit de regarder ce qui s'est passé pour le comprendre.
19 Aux alentours du 1er août 1998, des membres de la police militaire de l'UCK
20 ont enlevé Zenun Gashi chez lui, l'amenant à Mete Krasniqi au QG de l'UCK à
21 Baran en suivant l'ordre de Faton Mehmetaj, qui avait été nommé par
22 Haradinaj, vous en souviendrez.
23 Si vous regardez l'écran, le nom de Zenun Gashi figure sur la liste
24 des collaborateurs qui a été diffusée lors de la réunion du 12 juillet,
25 avec son fils. Il y a aussi le numéro 9, Misin Berisha, un Rom de Gllogjan.
26 Deux mois plus tard, les dépouilles de Misin Berisha, ses fils Xhevet et
27 Sali, et de Zenun Gashi ont été retrouvées ensemble au mur du canal. Misin
28 Berisha, un civil rom, qui soutenait Ibrahim Rugova, l'opposition, vivait à
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1 Gllogjan, Peje, avec ses fils. Les preuves circonstancielles du sort de
2 Zenun Gashi, de sa mort, étayent ce qui a été dit et prouvé en ce qui
3 concerne son enlèvement et les mauvais traitements qu'il a subis aux mains
4 de l'UCK.
5 Le commandant de Baran, Din Krasniqi, a dit au Témoin 17 que Faton Mehmetaj
6 a donné l'ordre de transporter Zenun Gashi à Gllogjan. Et c'est là, bien
7 sûr, que Mehmetaj et Haradinaj partageaient le même bureau. Din Krasniqi a
8 dit que Gashi serait tué par la police secrète de l'UCK s'il était amené à
9 cet endroit. Le Témoin 17 a essayé d'obtenir la libération de Gashi et on
10 lui a dit qu'il avait été relâché. Din Krasniqi a dit que Gashi serait
11 "liquidé" s'il devait de nouveau être arrêté. Et c'est exactement de ce qui
12 s'est produit, ce qui entre dans le schéma de persécution de tous ceux
13 considérés comme ennemis de l'UCK.
14 Lorsque le Témoin 17 a demandé à Din Krasniqi de le relâcher de nouveau,
15 Din Krasniqi a confirmé au Témoin 17, en faisant un mouvement latéral en
16 passant d'un côté de sa gorge à l'autre, que Zenun Gashi était mort, et
17 ceci est confirmé par les rapports de médecin légiste.
18 Ensuite, il y a une autre victime, Sejd Noci, dont le corps a été retrouvé
19 au canal, c'était un Kosovar civil de Dujak. La dernière fois qu'il a été
20 vu, c'était lorsqu'il a été amené à un point de contrôle de l'UCK près de
21 Junik, c'était au mois de juillet.
22 Sa dépouille a été retrouvée partiellement près d'une pente à environ
23 650 mètres en aval du canal, près des corps de R-22 et R-23, tous les deux
24 qui avaient disparu en juin ou juillet 1998.
25 Donc on voit très clairement que ces attaques contre les civils étaient
26 monnaie courante. A l'intérieur du secteur contrôlé par l'UCK de Haradinaj,
27 toutes les victimes provenaient d'une région qui était géographiquement
28 assez limitée. On a déjà vu à l'écran à l'avance que l'attaque perpétrée
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1 sur une période de six mois a été perpétrée de façon systématique. Si l'on
2 regarde la localisation des corps près du canal, on voit aussi qu'il y a eu
3 une systématisation. Regardez l'indication par couleur, nous avons les
4 Serbes et les Monténégrins, et vous voyez d'où ces personnes ont disparu.
5 Ensuite, nous avons les Roms égyptiens, Ashkali, et c'est en vert.
6 Troisième, les Catholiques.
7 Quatrième, les personnes soupçonnées d'être collaborateurs et les
8 opposants à l'UCK. Les noms de toutes ces victimes sont indiqués à l'écran.
9 Si vous lez mettez tous ensemble, si vous regardez l'emplacement des
10 différents points, si vous regardez où se trouve Gllogjan, où se trouve
11 Jablanica, et où se trouve le canal, vous allez comprendre qu'il s'agissait
12 bel et bien d'une attaque systématique pendant cette période.
13 Haradinaj, Balaj et Brahimaj ainsi que d'autres ont participé à cette
14 campagne de terreur et de persécution de ces villes. Ils ont réussi en ce
15 qui concerne leur objectif de nettoyer tous les Serbes du secteur de
16 Dukagjini et à imposer la soumission de la part des autres par des moyens
17 de terreur. Et aux alentours de la fête de Pâques orthodoxe 1998, il n'y
18 avait plus de Serbes. Si vous regardez le canal et vous voyez les victimes
19 trouvées là, vous voyez très clairement d'où venaient toutes ces victimes,
20 où elles étaient pendant la période entre mars et août 1998.
21 Vous avez entendu des témoins qui ont parlé de leur expérience
22 personnelle en ce qui concerne les chefs de l'accusation, par exemple, le
23 viol, la torture, et des traitements cruels. Il y avait très clairement une
24 implication personnelle dans certains crimes, il y avait aussi la nature
25 organisée des activités de l'UCK dans le contexte de ces crimes perpétrés
26 dans une région qui était géographiquement extrêmement limitée. A notre
27 avis, les preuves sont très claires.
28 Les accusés ont participé à une entreprise criminelle commune qui a
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1 coûté la vie à au moins 40 victimes. D'autres vies ont été détruites, cela
2 concerne la famille des personnes décédées, les victimes de torture, de
3 viol, de traitements cruels, et d'autres crimes. Il n'y a que trois
4 participants qui font l'objet de l'acte d'accusation. Mais il y en avait
5 d'autres, ainsi le frère de Haradinaj, Daut; le frère de Brahimaj, Nazmi,
6 qui n'ont pas été accusés. Mais je pense qu'il serait utile de revenir sur
7 certains éléments qui concernent leur action, c'est-à-dire le rôle joué par
8 Nazmi Brahimaj dans la persécution au centre de détention de Jablanica où
9 le Témoin 6 a été frappé avec tant de violence par une batte de baseball
10 que son visage a été déformé et il a perdu connaissance, il y avait aussi
11 l'assassinat de Skender Kuci, l'implication de Daut Haradinaj dans les
12 détentions et la torture des frères Stojanovic en avril 1998. Ces actions
13 ainsi que d'autres sont décrites dans les paragraphes 285 à 335 du mémoire.
14 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, chacun des accusés a joué un
15 rôle essentiel dans l'entreprise criminelle commune. Haradinaj, en tant que
16 commandant de tous ceux qui ont commis ces crimes; Balaj, en tant que
17 commandant des Aigles noirs; Brahimaj, en tant que responsable du centre de
18 détention à Jablanica. Les actes et agissements de ces accusés étaient
19 extrêmement brutaux. Ils ont agi conformément à leur dessein criminel
20 commun visant une persécution. Leurs victimes ont été ciblées, ont été
21 choisies à cause de leur appartenance ethnique, leur persuasion politique,
22 ou leur religion. Mais ces événements sont tragiques à cause des vies
23 gâchées, des vies détruites, tout ceux qui se sont retrouvés sans maison,
24 sans parents. Il y avait les Serbes âgés qui sont restés à Ratis et
25 Dashinoc qui ne posaient aucune menace en ce qui concerne les objectifs
26 politiques ou militaires de l'UCK. Il n'y avait aucune nécessité de les
27 assassiner, mais c'était leur présence qui était une offense pour ceux qui
28 ont participé à l'entreprise criminelle commune. Il n'y avait aucun besoin
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1 de détenir ni de torturer les voisins de la famille de Haradinaj. La
2 famille du Témoin 4 ne posait aucune menace à l'UCK. Comme dans toute
3 situation où c'est la minorité qui détient le pouvoir politique, l'arme
4 politique, le LDK, aurait remporté la lutte politique, probablement sans
5 qu'il y ait d'autres partis politiques.
6 Cette persécution a été une tragédie qui n'était vraiment pas
7 nécessaire. Il y avait ces crimes, ces 40 meurtres, et les autres crimes
8 qui méritent une véritable punition. L'Accusation a prouvé la participation
9 de chacun des accusés à ces actes au-delà de tout doute raisonnable. Dans
10 les circonstances, l'Accusation a présenté ses preuves et nous demandons à
11 ce que des sentences de 25 années de prison soient données à Ramush
12 Haradinaj, Idriz Balaj et Lahi Brahimaj.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Re.
15 Maître Emmerson, êtes-vous prêt --
16 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- vous êtes le premier à intervenir,
18 n'est-ce pas ?
19 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous savez que la Chambre vous a laissé
21 le soin de décider comment vous répartiriez le temps entre vous ?
22 M. EMMERSON : [interprétation] Oui.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
24 M. EMMERSON : [interprétation] Au début de son intervention cet après-midi,
25 M. Re a critiqué la Défense de Haradinaj, et il nous a critiqué pourquoi,
26 parce que nous avions engagé la Chambre de première instance à examiner les
27 éléments de preuve pour chacun des chefs d'accusation pris
28 individuellement, de les examiner avec beaucoup d'attention. M. Re a
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1 déclaré que la Chambre de première instance devait prendre les éléments de
2 preuve dans leur globalité, et non pas de manière individuelle en tenant
3 compte de quelques défaillances dans les preuves présentées pour les chefs
4 d'accusation pris individuellement. Il a dit, en réalité, que la totalité
5 était plus importante que la somme de chacune de ses parties.
6 En fait, il a raison d'une certaine manière. Il a raison de mettre en
7 évidence une différence d'approche entre l'Accusation et la Défense. Nous,
8 de notre côté, nous affirmons que c'est uniquement au moment où la Chambre
9 de première instance se sera prononcé sur les faits et sur les conclusions
10 qui doivent être prises pour chacun des chefs d'accusation
11 individuellement, c'est seulement à ce moment-là qu'il est possible de se
12 faire une image générale de cette affaire. Bien entendu, il convient de
13 replacer chacun de ces chefs dans leur contexte. Mais cette approche
14 globale que l'Accusation est contrainte de promouvoir, selon nous, elle ne
15 saurait remplacée une évaluation méthodique des éléments de preuve. Et si
16 l'on procède à un examen critique et méthodique de ces éléments de preuve,
17 il apparaît manifeste et clair que l'ensemble du système de déduction qu'a
18 essayé de mettre sur pied l'Accusation repose sur des fondations
19 extrêmement fragiles de sable.
20 A la fin de son intervention, M. Re a dit quelque chose d'assez
21 surprenant à la Chambre de première instance, il a déclaré que l'Accusation
22 avait prouvé la participation personnelle de chacun des accusés pour chacun
23 des chefs de l'acte d'accusation, et ceci au-delà de tout doute
24 raisonnable. Or, si vous examinez l'acte d'accusation, vous verrez qu'il
25 contient cinq fois deux chefs d'accusation dans lesquels il est dit que M.
26 Haradinaj a personnellement commis, incité à commettre ou aidé ou encouragé
27 les crimes qui figurent à l'acte d'accusation. Comme M. Re le sait
28 pertinemment, au fil du procès, chacune de ces allégations a peu à peu
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1 disparu. L'Accusation n'a présenté aucun élément de preuve fiable relatif à
2 la participation personnelle de Ramush Haradinaj dans aucun des chefs
3 figurant à l'acte d'accusation.
4 Dans son mémoire en clôture, l'Accusation suggère timidement que la
5 Chambre de première instance pourrait conclure que M. Haradinaj était
6 présent au cours des mauvais traitements infligés au Témoin 38, qui font
7 l'objet des chefs 1 et 2 de l'acte d'accusation. Mais cet argument,
8 l'Accusation ne le présente pas avec beaucoup d'enthousiasme, et d'ailleurs
9 cet argument, M. Re ne l'a nullement repris au cours de son réquisitoire.
10 Pourquoi, la réponse est assez claire, les éléments portant sur
11 l'identification sont totalement dépourvus de fiabilité, et il y a de
12 nombreux motifs incitant à se poser des questions quant à la crédibilité de
13 la déposition du Témoin 38. Son identification repose sur l'observation
14 qu'elle a faite d'un homme, dont elle dit qu'elle l'a vu de profil à 30
15 mètres de distance, alors qu'elle était gravement traumatisé et que des
16 buissons et des arbres lui bloquaient la vue. Elle affirme qu'elle a
17 reconnu M. Haradinaj plusieurs mois plus tard, quand elle l'a vu à la
18 télévision, mais ceci, elle ne l'a dit à personne pendant sept ans et demi,
19 alors qu'elle avait portant fait une déclaration détaillée au MUP en l'an
20 2002. Son identification n'a pas été confirmée par le Témoin 58, et sa
21 déposition fait apparaître de nombreuses incohérences par rapport à ses
22 déclarations précédentes. Donc rien ne permet à la Chambre de première
23 instance de conclure que l'homme qu'elle a vu, c'était véritablement Ramush
24 Haradinaj comme elle l'affirme.
25 Pour des raisons que je vais développer plus avant un peu plus tard,
26 nous avançons qu'il en va de même pour ce qui est de l'affirmation selon
27 laquelle M. Haradinaj était présent au moment où les frères Stojanovic et
28 où Veselin Stijovic ont été agressés. Les éléments relatifs à la
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1 reconnaissance de notre client portant sur les chefs 3 et 4 sont tout à
2 fait dénués de fiabilité, quelle que soit la norme que l'on applique. J'y
3 reviendrai plus en détail quand je parlerais de ces chefs d'accusation-là.
4 S'agissant des autres chefs d'accusation, l'Accusation en réalité a retiré
5 toutes les allégations qui avaient été faites contre M. Haradinaj en
6 personne, soit parce que les éléments de preuve présentés manquaient
7 totalement de fiabilité, soit parce que l'on n'a présenté aucun élément de
8 preuve, si bien que pour commencer une analyse des faits imputés à M.
9 Haradinaj, il faut partir de la constatation suivante, c'est qu'aucune
10 preuve n'indique qu'il ait personnellement participé aux crimes qui lui
11 sont reprochés.
12 La thèse qui a été évoquée contre M. Haradinaj repose uniquement sur
13 l'allégation pour laquelle il participait à une entreprise criminelle
14 commune, et cette thèse dépend uniquement d'éléments de preuve à caractère
15 indirect. Au cours de ma plaidoirie, je vais évoquer cette allégation,
16 cette accusation dans trois grands chapitres. En premier lieu, je vais
17 revenir sur l'allégation selon laquelle il faisait partie d'une entreprise
18 criminelle commune dont l'objectif était de persécuter des civils serbes.
19 En deux mots, nous avançons que les éléments de preuve présentés ne
20 prouvent pas l'existence d'un tel accord. D'autres part, il n'y a aucun
21 élément fiable indiquant que M. Haradinaj ait autorisé, toléré ou accepté
22 les crimes figurant à l'acte d'accusation.
23 Dans la deuxième partie de ma plaidoirie, je vais revenir sur les
24 allégations selon lesquelles M. Haradinaj aurait participé à toute une
25 campagne, toute une stratégie de mauvais traitements et d'exécution
26 sommaires dirigés contre des opposants ou contre ceux qui étaient
27 considérés comme des collaborateurs. Nous estimons que ces agissements, son
28 comportement et ces interventions nous montrent exactement le contraire.
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1 Enfin, je vais répondre aux arguments de l'Accusation relatif aux restes
2 humains trouvés au canal du lac Radoniq et je vais parler des conclusions
3 qui doivent être tirées de ces éléments de preuve. M. Re a placé ceci au
4 centre même de son inquisitoire, et j'entrerai dans les détails moi-même de
5 cette question. Mais en quelques mots, nous, ce que nous disons, c'est que
6 l'Accusation n'a absolument pas prouver qu'il s'agissait d'un site
7 d'exécution utilisé par l'UCK ou qu'il s'agissait d'un lieu ou l'UCK se
8 débarrassait des victimes situées dans un territoire contrôlé uniquement et
9 exclusivement par l'UCK. Selon nous, il y a beaucoup de points
10 d'interrogation qui se dessinent, relatif notamment à l'intégrité, à la
11 fiabilité de l'enquête. Nous affirmons que lorsque l'ont examine chacun des
12 éléments de preuve en détail et individuellement, la thèse de l'Accusation
13 s'effondre. Mais ce qui est plus important encore, c'est qu'il n'y a aucun
14 élément de preuve permettant de faire un lien entre M. Haradinaj et ces
15 décès.
16 Avant que je développe mon argumentation, je souhaiterais commencer par
17 dire quelques mots au sujet du concept de la direction du commandement. A
18 cette époque dans le Kosovo occidental en 1998, au moment ou apparaît l'UCK
19 sur la scène, il est juste de dire, me semble-t-il, que M. Re a reconnu que
20 l'idée force en réalité de la thèse de l'Accusation à l'encontre de M.
21 Haradinaj se résume à une seule et unique chose, et de quoi s'agit-il :
22 c'est que M. Haradinaj ayant été un commandant influent, charismatique, il
23 faut de ce fait partir du principe ou conclure qu'il a autorisé ou toléré
24 les crimes figurant à l'acte d'accusation.
25 Nous avançons, quant à nous, que c'est la une contrevérité, un
26 principe totalement erroné qui est au cœur même de la thèse de
27 l'Accusation. Les éléments du dossier montrent que l'UCK est apparue en
28 tant que mouvement, comme un mouvement, dans la région de Dukagjin, et
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1 ceci, pendant une certaine période de temps, sans disposer des structures
2 de commandement officiel et formel d'une armée conventionnelle.
3 Le contexte des événements figurant dans l'acte d'accusation est
4 formé par toute une série d'attaques extrêmement violentes des forces
5 serbes contre Prekaze et Likoshan. Les éléments du dossier montrent qu'elle
6 était la crainte, une crainte terrible, un sentiment d'insécurité très
7 fort, qui était celui de la population albanaise civile. Après l'attaque
8 contre Gllogjan le 24 mars, et alors que les forces serbes se rassemblaient
9 dans la zone et montaient en puissance alors qu'elles s'apprêtaient à tout
10 moment à lancer des offensives dévastatrices pour les civils, dans ce
11 contexte donc, on a vu un nombre de villages croissants commencer à
12 organiser leurs propres défenses de fortune. Certains se sont baptisés eux-
13 mêmes UCK; d'autres ont décidé de se baptiser défenses territoriales ou
14 défenses villageoises.
15 Mais aucun de ces hommes n'était des soldats. Non, c'étaient des
16 agriculteurs, des commerçants le jour et des combattants la nuit. Ils
17 étaient tous volontaires, bénévoles. Il n'existait pas de commandement
18 central, pas de procédures officielles ou formelles de recrutement ou de
19 contrôle des soldats, aucune manière efficace de faire appliquer la
20 discipline militaire. De quoi s'agissait-il ? Il s'agissait d'un mouvement
21 de civils albanais totalement terrifiés qui se sont développés à partir de
22 structures qui existaient dans les villages et à partir de relations entre
23 les gens du village.
24 La Défense ne conteste pas que M. Haradinaj se soit efforcé de coordonner
25 tous ces groupes pour en faire une force de combattants cohérente. Il est
26 manifeste qu'il est vite apparu comme une figure de proue pour le mouvement
27 de la résistance après l'échec des forces serbes, lorsqu'elles ont essayé
28 le 24 mars d'éliminer la famille Haradinaj. Mais si on regarde la réalité
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1 de sa position de commandant, ça n'a strictement rien à voir avec celle
2 d'un chef militaire au sens conventionnel du terme. C'est la raison pour
3 laquelle autant de témoins nous ont parlé d'une organisation plutôt
4 horizontale que verticale.
5 Lorsqu'on a essayé pour la première fois de coordonner ces différents
6 groupes autonomes dans les villages dans le cadre d'une structure de
7 commandement militaire le 26 mai, à ce moment-là donc, Ramush Haradinaj
8 n'était finalement pas grand-chose de plus qu'un chef de village influant
9 avec une solide réputation de combattant, un homme derrière lesquels
10 beaucoup d'autres étaient prêts à se rassembler.
11 Les dirigeants de ce mouvement naissant ont emprunté la langue des
12 armées conventionnelles pour promouvoir la cohésion et le moral. On a
13 distribué des titres, on a décidé d'une organisation, d'une structure, mais
14 tout cela n'avait qu'une ressemblance très faible avec la réalité sur le
15 terrain.
16 L'acte d'accusation est constitué de toute une kyrielle de crimes qui
17 n'ont rien à voir les uns avec les autres et qui auraient eu lieu dans
18 différentes localités dans la région visée à l'acte d'accusation, et ceci
19 pendant plusieurs dates pendant la période visée à l'acte d'accusation.
20 Mais dans la plupart des cas, les auteurs de ces agissements ne sont pas
21 identifiés. Selon nous, les faits incriminés ne font pas apparaître de
22 système manifeste qui puisse correspondre à une entreprise criminelle
23 commune. Et quand l'Accusation affirme que le simple fait qu'au fil du
24 temps M. Haradinaj soit devenu le dirigeant de l'UCK dans la zone de
25 Dukajin, M. Haradinaj a forcément autorisé ou toléré que ces crimes soient
26 commis, selon nous, une telle affirmation n'est pas logique et ne
27 correspond pas aux éléments de preuve.
28 Egalement, quelque chose qui manque totalement de fondement, c'est
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1 l'affirmation selon laquelle M. Haradinaj se serait efforcé d'exclure, de
2 subordonner ensuite les forces des FARK dans le cadre de l'entreprise
3 criminelle commune visée à l'acte d'accusation. Les éléments du dossier
4 nous montre qu'après l'arrivée tout à fait inattendue des forces de la FARK
5 dans la zone de Dukagjin, il y a eu toute une série de réunions au cours
6 desquelles on s'est réuni des deux côtés et où sont apparues des
7 divergences légitimes et assez sérieuses au sujet du déploiement des
8 officiers des FARK. Personne ne voulait céder du terrain dans le cadre de
9 ces rencontres. Mais le Témoin 17, qui a participé, a déclaré que M.
10 Haradinaj a gardé 'son sang froid' pendant toutes ces réunions, qu'il a
11 fait preuve d'un esprit 'constructif et modéré' lors de ces discussions. Je
12 reprends les termes que le témoin a utilisés lui-même.
13 Ceci est assez révélateur de la manière dont l'Accusation présente sa
14 thèse, c'est que M. Re ait choisi de ne pas vous rappeler les propos tenus
15 par le Témoin 17 qui pourtant a participé à ces réunions, au lieu de cela,
16 M. Re a décidé de s'appuyer sur une vision de la situation complètement
17 déformée présentée par le Témoin 29 qui n'a pas assisté à ces réunions.
18 Malgré deux cas de confrontation le 4 et le 10 juillet, les forces
19 des FARK ont pu finalement être intégrées et incorporées à l'UCK avec la
20 création de trois brigades mixtes le 12 juillet, c'est-à-dire moins de
21 trois mois après leur arrivée au Kosovo. Le Témoin 17 a confirmé également
22 qu'après la mise en place des brigades, les relations entre M. Haradinaj et
23 M. Zemaj se sont améliorées.
24 L'incident du 4 juillet à Gllogjan était un incident brutal, un
25 incident tout à fait déplorable de confrontation entre des soldats, mais
26 ceci ne fait nullement la preuve d'une campagne de persécution des civils,
27 et d'ailleurs ceci ne figure nullement à l'acte d'accusation. Pour des
28 raisons qui sont présentées dans notre mémoire en clôture, nous faisons
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1 valoir que la déposition du Témoin 29, au sujet de cet incident, manque de
2 foi, et ceci à de nombreux égards, tout comme ce qu'il nous a dit au sujet
3 des réunions avec les FARK. Là aussi, ses propos ne sont pas dignes de foi.
4 Mais quelle que soit la manière dont cette confrontation ait eu lieu, tout
5 montre que l'on a trouvé rapidement une solution lors d'une réunion entre
6 Tahir Zemaj et Ramush Haradinaj dès le lendemain. Si l'on prend tout ceci
7 dans le contexte de négociations constructives dont nous a parlé le Témoin
8 17 auparavant, et si l'on se rappelle également les négociations
9 constructives, les solutions qui ont été trouvées quelques jours après,
10 dans ce contexte, cet incident unique ne saurait prouver l'intention
11 d'exclure les forces des FARK pour des raisons et dans un objectif tout à
12 fait inconnu en rapport avec l'entreprise criminelle commune.
13 Mais l'élément peut-être le plus manifeste qui indique quelle a été la
14 démarche de M. Haradinaj, c'est le fait qu'il ait autorisé les FARK à
15 occuper la caserne de Prapaqan qui avait été mise en place et financée par
16 l'UCK et qui constituait les meilleurs installations dont ils disposaient.
17 Ça, ce ne sont pas les agissements d'un commandant qui aurait essayé
18 d'exclure ou de subordonner les FARK pour des raisons criminelles.
19 Le 21 août, après la défaite de l'UCK à Gllogjan, M. Haradinaj a
20 démissionné en tant que commandant de la zone. Il n'a pas cherché à
21 subordonner les FARK, bien au contraire, il a accepté de servir sous le
22 commandement de Tahir Zemaj. Quinze jours plus tard, les suites de cette
23 décision n'avaient rien à voir avec M. Haradinaj, mais étaient les
24 conséquences d'une lutte de pouvoir entre l'état-major général et le
25 gouvernement en exil, chacune de ces instances cherchant à avoir un
26 représentant choisi par leur soin, chargé de commander la région de
27 Dukagjin qui aurait été d'une importance stratégique.
28 La suggestion selon laquelle les problèmes entourant l'intégration et
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1 l'incorporation des FARK montrent que les éléments de preuve relatifs à
2 l'existence d'une soi-disant entreprise criminelle commune sont peu
3 crédibles. Nous faisons valoir qu'il n'y a rien à cet égard dans la thèse
4 de l'Accusation et que la Chambre de première instance devrait rejeter
5 toutes ces allégations en conséquence.
6 J'en viens maintenant à l'allégation selon laquelle M. Haradinaj était
7 l'organisateur d'une campagne visant à persécuter et à expulser par la
8 force des civils serbes. La preuve a été faite qu'un nombre relativement
9 peu élevé de crimes isolés a été commis à l'encontre de civils serbes
10 pendant la période couverte par l'acte d'accusation. Dans la plupart des
11 cas, il n'y a eu aucun élément de preuve présenté concernant l'identité des
12 auteurs de ces actes, et l'Accusation n'a présenté aucun élément de preuve
13 crédible ou fiable indiquant que M. Haradinaj aurait autorisé ou toléré la
14 commission de l'un quelconque des crimes incriminés.
15 Il ne fait aucun doute que les armes étaient beaucoup plus facilement
16 accessibles aux Albanais à l'époque. Cela faisait inévitablement partie des
17 préparatifs de défense entrepris par les civils albanais en vue des
18 attaques prévues des forces serbes. Mais ces armes ne se trouvaient
19 aucunement entre les mains de personnes qui se considéraient membres de
20 l'UCK. Il existe des éléments de preuve clairs et incontestables que des
21 groupes isolés et des personnes isolées ont participé à des voyages de
22 l'autre côté de la frontière pour amener des armes destinées à servir à la
23 défense de leur village.
24 Le nombre croissant d'armes disponibles permet d'expliquer ces attaques
25 isolées menées contre les civils serbes.
26 Au cours du mois d'avril, de nombreuses familles serbes ont quitté leurs
27 domiciles situés dans les zones rurales du Kosovo occidental pour leur
28 propre sécurité. Ces personnes se sont essentiellement installées dans des
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1 grandes villes sous le contrôle des Serbes. Mais des éléments de preuve
2 présentés en l'espèce n'indiquent pas que cet exode était le résultat d'une
3 quelconque campagne organisée d'expulsion. Ces personnes n'ont pas été
4 systématiquement chassées de leur domicile. Elles sont parties car elles
5 vivaient dans des régions isolées, majoritairement peuplées par des
6 Albanais de souche.De nombreux témoins ont décrit leur crainte suscitée par
7 la visibilité de plus en plus croissante de villageois albanais armés,
8 notamment pendant la nuit, villageois qui circulaient dans les villages,
9 érigeaient des postes de contrôle et tiraient en l'air. Ces personnes sont
10 peut-être parties à cause de cela, mais ceci n'établit pas qu'il existait
11 une campagne de persécution.
12 Un certain nombre d'incidents bien précis semblent avoir contribué au
13 sentiment d'insécurité qui régnait parmi la population serbe à l'époque. Je
14 vous rappelle notamment le fait que Slobodan Praskevic a été abattu le 2
15 mars et que des attaques ont été menées contre les maisons de plusieurs
16 Serbes. Mais ces éléments de preuve indiquent qu'il s'agit ni plus ni moins
17 que d'incidents isolés et qu'ils ne faisaient pas partie d'une attaque
18 coordonnée menée par l'UCK.
19 Par exemple, selon les propos de Zoran Stijovic, le meurtre de
20 Slobodan Praskevic n'avait rien à voir avec l'UCK. Malgré l'idée que se
21 faisait certaine personne qu'il s'agissait là d'un assassinat mené par
22 l'UCK, l'enquête de police réalisée à ce sujet a établi de manière
23 irréfutable que ce meurtre a été commis pour des raisons personnelles. Ceci
24 montre clairement que ces incidents ont pu faire l'objet d'une fausse
25 interprétation.
26 De même, Marijana Andjelkovic a déclaré que l'attaque menée contre la
27 maison de Radenko Fatic à Cermjan avait été menée par l'un de ses voisins.
28 Miloica Vlahovic a déclaré pour sa part que son père avait vu un groupe de
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1 voisins à bord d'un tracteur qui tirait en l'air devant son domicile. Rien
2 de ces éléments de preuve n'indique qu'il y ait eu une campagne de
3 persécution, mais vu l'ambiance tendue et les tensions sous-jacentes qui
4 ont suivi l'attaque du 24 mars, ces incidents étaient interprétés comme
5 signifiant qu'un conflit ouvert allait éclater.
6 C'est à la lumière de cette situation confuse et désorganisée que les
7 chefs de l'acte d'accusation doivent être examinés. Il y a dix allégations
8 de mauvais traitements et de meurtres commis à l'encontre de Serbes
9 reprochés dans l'acte d'accusation. Je vais parler de certaines de ces
10 allégations.
11 Les chefs 3 et 4 de l'acte d'accusation portent sur l'agression des frères
12 Stojanovic et de Veselin Stijovic le 18 avril. Cette attaque ne témoigne
13 pas du tout de l'existence d'une campagne de persécution ethnique. Ces
14 personnes ont été prises pour cibles, non pas parce qu'il s'agissait de
15 Monténégrins, mais parce que certains avaient l'impression que leurs
16 familles avaient participé à l'offensive serbe menée contre Gllogjan. Il
17 était inévitable que les villageois éprouvent de ressentiment et de la
18 colère à l'encontre des personnes dont ils croyaient qu'elles étaient
19 responsables de l'attaque qui avait coûté la vie à trois jeunes hommes,
20 provoqué la destruction de nombreuses maisons et conduit à des arrestations
21 massives et à des mauvais traitements.
22 La preuve a été faite que beaucoup avaient l'impression dans le village que
23 la famille Stojanovic avait fourni des renseignements qui avaient conduit
24 les forces serbes à attaquer Gllogjan. Predrag Stojanovic était policier et
25 avait lui-même pris part à l'offensive. Là, il a d'ailleurs participé à
26 l'incident dans l'école du village. Le domicile de la famille Stojanovic
27 avait été utilisé comme installation militaire ce jour-là, et Mijat
28 Stojanovic a déclaré qu'il s'attendait à des représailles de la part des
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1 villageois. C'est la raison pour laquelle la police serbe avait prévenu la
2 famille, lui demandant de quitter le secteur après le 24 mars.
3 L'attaque menée contre ces hommes était une réaction de violence spontanée
4 de la part des villageois de Gllogjan, dont les maisons et les familles
5 avaient été attaquées. Cette attaque n'avait pas été planifiée de quelque
6 manière que ce soit. Elle s'est faite de façon fortuite lorsque la rumeur a
7 commencé à se propager, rumeur selon laquelle les frères Stojanovic étaient
8 rentrés au village. Veselin Stijovic et Mijat Stojanovic ont tous les deux
9 déclaré que le village semblait se retourner contre eux, que les gens
10 sortaient des champs et des maisons pour participer à l'attaque. Nombre de
11 personnes qui ont participé à l'attaque, ont-ils dit, étaient des
12 adolescents qui avaient plus ou moins le même âge que les trois
13 adolescents tués par les forces serbes le 24 mars. Rien de ce que je viens
14 d'évoquer n'excuse ce qui s'est produit, mais cela remplace l'incident dans
15 son contexte. Ceci n'a pas été le premier incident dans le cadre d'une
16 campagne planifiée de violence à l'encontre de la population civile serbe.
17 Il s'agissait d'une réaction spontanée due au fait que certains pensaient
18 que les personnes visées avaient participé à l'attaque dévastatrice contre
19 Gllogjan.
20 S'agissant de l'allégation selon laquelle Ramush Haradinaj était présent et
21 n'avait rien fait, nous faisons valoir que les éléments de preuve présentés
22 concernant l'identification manquent manifestement de fiabilité. Il faut
23 se rappeler que chaque fois que l'on aurait vu Ramush Haradinaj, les
24 circonstances étaient dramatiques. Mijat Stojanovic affirmait avoir aperçu
25 M. Haradinaj qui se tenait sur la route près de sa maison, alors que les
26 trois hommes étaient conduits dans le village. Ils avaient reçu pour ordre
27 de garder les mains en l'air, de regarder à terre et de ne pas tourner la
28 tête ni à gauche ni à droite. Il aurait reconnu Ramush Haradinaj alors
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1 qu'il n'a fait que l'apercevoir dans des conditions pénibles et difficiles
2 à plus de 70 mètres de distance. Il a affirmé par la suite avoir aperçu de
3 nouveau M. Haradinaj alors qu'il quittait le QG de l'UCK, mais là encore il
4 n'a fait que l'apercevoir très brièvement et dans des circonstances toutes
5 aussi traumatisantes.
6 Pour ce qui est de l'identification effectuée par Dragoslav Stojanovic,
7 elle n'était pas non plus fiable. Ce dernier affirme avoir reconnu M.
8 Haradinaj alors qu'il gisait à terre à moitié conscient. Il a déclaré, et
9 cela en disant sur son témoignage, qu'il ne pouvait pas décrire les autres
10 hommes qui étaient présents à ce moment-là, car il ne pouvait pas regarder
11 convenablement les autres. La jurisprudence du Tribunal dans son ensemble
12 nous met en garde contre le danger qu'il y a à s'appuyer sur des éléments
13 de preuve portant sur l'identification de cette qualité.
14 Le fait que ces identifications alléguées auraient permis de reconnaître
15 Ramush Haradinaj peuvent être défaillantes. Bien que la famille Stojanovic
16 était et habitait à côté de la famille des Haradinaj, aucun des témoins
17 cités n'avait vu Ramush Haradinaj depuis de nombreuses années. Même dans
18 les cas de reconnaissance, encore faut-il que le témoin ait pu observer de
19 façon fiable la situation. Qu'il ait pu voir clairement le sujet pendant
20 suffisamment de temps, c'est une condition préalable avant que l'on
21 considère une identification comme fiable. Je vous renvoie à l'affaire
22 Turnbull à ce sujet.
23 Il est bien connu qu'il est difficile d'apprécier la fiabilité de
24 l'identification ou les éléments de preuve relatifs à la reconnaissance
25 d'un individu en s'appuyant uniquement sur le comportement du témoin. C'est
26 la raison pour laquelle la jurisprudence en droit international est
27 constante sur ce point. Il faut qu'il y ait des critères objectifs qui
28 soient appliqués. Si l'on applique ces critères objectifs, les
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1 identifications en question n'ont pas la qualité requise pour que la
2 Chambre puisse prononcer une déclaration de culpabilité, compte tenu des
3 normes applicables.
4 Mais les difficultés en la matière ne s'arrêtent pas là. Dans l'affaire
5 Kupreskic, la Chambre d'appel a souligné explicitement le risque
6 complémentaire qu'il y a lorsque du temps s'est écoulé depuis les faits. Le
7 témoin a pu également être influencé par certaines suggestions. Cela
8 s'applique sans nul doute au témoignage de Mijat et Dragoslav Stojanovic.
9 Dans le cadre de conversations avec Veselin Stijovic, les deux hommes ont
10 dit à propos des personnes qu'ils avaient reconnues, qu'ils avaient
11 participé aux événements du 18 avril. Or, aucun d'entre eux n'a mentionné
12 le nom de Ramush Haradinaj.
13 Une semaine après l'incident, Mijat Stojanovic a été interrogé par Marijana
14 Andjelkovic et interviewé par un magazine serbe appelé "Ilustrovana
15 Politika." Dans le cadre de ces deux entretiens, il a nommé les personnes
16 qu'il avait reconnues, mais il n'a jamais mentionné le nom de Ramush
17 Haradinaj. Cette mémoire défaillante pose particulièrement problème en
18 l'espèce, car la famille Stojanovic avait des liens étroits avec les forces
19 de sécurité serbes, et parce que la famille Stojanovic tenait la famille
20 Haradinaj pour responsable de la perte de leur maison.
21 En bref, nous faisons valoir qu'aucun élément de preuve fiable n'a
22 été présenté indiquant que Ramush Haradinaj était présent sur les lieux le
23 18 avril. Nous pensons donc que rien ne permet de conclure qu'il a permis
24 aux mauvais traitements -- reprochés d'être commis conformément à ce qui
25 est dit aux chefs 3 et 4 de l'acte d'accusation.
26 Je vois l'heure. Je m'apprête à passer à un autre sujet. Peut-être que
27 l'heure serait venue de lever l'audience.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous pouvez aborder ce nouveau sujet
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1 en deux minutes, allez-y; sinon, nous attendrons demain.
2 M. EMMERSON : [interprétation] Ce n'est pas le cas.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons donc lever l'audience pour
4 reprendre nos débats demain, le mardi, 22 janvier à 14 heures 15 dans la
5 salle d'audience numéro I.
6 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mardi 22 janvier
7 2008, à 14 heures 15.
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