Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 24 août 2011

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 22.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes ici

  6   présentes.

  7   Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire inscrite au rôle.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Affaire

  9   IT-04-84bis-T, le Procureur contre Haradinaj, Balaj, et Brahimaj.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   Les parties peuvent-elles se présenter, pour l'Accusation.

 12   M. ROGERS : [interprétation] En présence de Mme Pedersen, notre commise à

 13   l'affaire, et Mme Prija Gopalan.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 15   Pour M. Haradinaj.

 16   M. EMMERSON : [interprétation] Rod Dixon, Mme O'Reilly, et moi-même, ainsi

 17   qu'Andrew Strong.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 19   Pour M. Balaj.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Gregor Guy-Smith, et nous avons toujours

 21   pour représenter les intérêts de M. Balaj, M. Zyberi et Chad Mair.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour M. Brahimaj.

 23   M. HARVEY : [interprétation] Nous défendons, Me Paul Troop et Me Sophie

 24   Rigney ainsi que moi, les intérêts de M. Brahimaj.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 26   M. ROGERS : [interprétation] Merci de nous avoir donné le temps de régler

 27   quelques questions ce matin, parce que Me Karnavas avait fourni un petit

 28   rapport médical, et je l'ai maintenant distribué à la Défense. Merci de


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  1   m'avoir donné ce temps avant de commencer l'audience. C'est peut-être

  2   important. Je ne sais pas si vous allez rendre une décision mais peut-être

  3   avant de le faire, il faudrait peut-être demander à la Défense s'il veut

  4   parler de cette question médicale.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous autorisez la Chambre à conduire

  6   ce procès ?

  7   M. ROGERS : [interprétation] Bien entendu.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous ne savons rien d'une décision

  9   médicale. Nous allons rendre cette décision car rien n'a été prévu pour ce

 10   qui est d'autre chose.

 11   Il y avait une demande orale qui avait été faite.

 12   La Chambre est saisie d'une demande faite oralement le 23 août 2011, pour

 13   que soit versé au dossier le compte rendu de la déposition de Shefqet

 14   Kabashi dans le procès Limaj pour que la Chambre juge de la véracité de sa

 15   teneur. Le témoin a déclaré sous serment, à plusieurs reprises, que la

 16   teneur de cette déposition est faite à la véracité. Il est fait surtout

 17   référence aux pages du compte rendu 385 et 401 de l'audience du 22 août

 18   2011 et de la page du compte rendu 426 de l'audience du 23 août. Il a été

 19   dit que ces éléments de preuve ont valeur probante et peuvent être déclarés

 20   recevables en application de l'article 89(C) du règlement de procédures et

 21   de preuves.

 22   Les accusés font objection à la demande. La Défense Haradinaj dit que

 23   l'Accusation n'a pas le droit d'invoquer l'article 89 lorsqu'elle a fait

 24   valoir les dispositions des articles 92 bis et 92 ter parce que ces

 25   éléments ne sont remplis. Pour ce qui est de l'article 92 ter, le témoin a

 26   dit, même s'il était présent dans le prétoire, qu'il n'était pas prêt,

 27   qu'il n'était pas capable de répondre à des questions de fond, que ce soit

 28   à charge ou à décharge et que le témoin n'a pas dit que le compte rendu


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  1   Limaj était le reflet fidèle de ses propos. La position avancée est que si

  2   l'Accusation n'est pas en mesure de respecter les dispositions de l'article

  3   92 ter, elle n'a pas le droit d'invoquer le article 89. La jurisprudence

  4   invoquée est surtout la décision Galic du mois de juin 2002 et la décision

  5   Milosevic du 30 septembre 2003, pour dire que si les conditions de

  6   l'article 92 bis ne sont pas remplies, on n'a pas le droit d'invoquer

  7   l'application du 89(C).

  8   Les avocats des deux autres défenses se sont associés aux arguments

  9   présentés par la Défense Haradinaj.

 10   Le Procureur a répondu, notamment, que l'Accusation n'avait jamais eu

 11   l'intention de faire citer ce témoin en application de l'article 92 ter,

 12   car, a-t-elle dit, il convenait de l'entendre à l'audience, de viva voce.

 13   L'Accusation dit que le témoin a fourni quelques éléments limités à

 14   l'audience et qu'en général, l'article 92 ter, avant la venue d'un témoin

 15   et avant le début de sa déposition de viva voce.

 16   La demande orale porte sur la recevabilité du compte rendu de la

 17   déposition faite antérieurement par ce témoin pour déterminer la véracité

 18   de sa teneur. La procédure régie par le dépôt de déclarations écrites à la

 19   place de témoignage à l'audience est visée par l'article 92 bis. Celui-ci

 20   autorise la Chambre à faire valoir son propos discrétionnaire pour déclarer

 21   recevable des déclarations écrites faites auparavant pour autant que des

 22   conditions précisées au règlement et corroborés par la jurisprudence soient

 23   respectées. La Chambre d'appel s'est prononcée sur l'application ou la

 24   fiabilité du 92 bis et du 89(C) et de leur application à des déclarations

 25   préalables ou antérieures. La Chambre dit qu'une partie n'a pas le droit de

 26   demander le versement d'une déclaration écrite en invoquant le 89(C) pour

 27   évoquer les conditions plus rigoureuses que pose l'article 92 bis. Vous

 28   avez la décision Galic du paragraphe 31 qui le dit. Dans la décision en


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  1   appel Galic, aux paragraphes 28, 30, ainsi que dans la décision Milosevic

  2   du 30 décembre 2002, paragraphe 18, alinéa 3, le 92 bis, dans sa totalité,

  3   porte sur un type très particulier et très précis de ouïe dire qui aurait

  4   dû être déclaré recevable en vertu du 89(C), c'est-à-dire la déclaration

  5   d'un témoin susceptible de venir déposer aux fins de la procédure

  6   judiciaire. Pour être sûre que l'élément de preuve ainsi déposé ait valeur

  7   pertinente, la Chambre d'appel a dit que le 92 bis, c'est une lex specialis

  8   qui dit que ce genre de déclarations de témoins potentiels que le compte

  9   rendu de leur déposition ou des comptes rendus d'audience ne font pas

 10   partie de la lex generalis prévue ou stipulée par l'article 89(C), même si

 11   les dispositions générales implicites dans l'article 89(C) restent

 12   applicables lorsqu'on invoque l'article 92 bis. C'est ce que disait la

 13   décision Galic paragraphe 31, la déclaration Milosevic, 30 septembre 2002.

 14   Mais la Chambre d'appel l'a dit dans sa jurisprudence : L'article 92

 15   bis n'exclut pas le versement de déclarations dans toutes les

 16   circonstances. On dit que, lorsque peut s'appliquer cet article 92 bis, il

 17   faut respecter ses conditions, mais l'interdiction d'utiliser le 92 bis ne

 18   s'applique pas aux éléments qui ne sont pas régis ou visés par l'article 92

 19   bis. Ceci est dit dans la décision Milosevic du 30 septembre 2003,

 20   paragraphes 9 et 10.

 21   La Chambre d'appel dit qu'une déclaration écrite, fournie par un

 22   témoin potentiel à un enquêteur ou à un substitut du Procureur à des fins

 23   judiciaires, peut être versée au dossier, nonobstant le fait qu'elle

 24   n'aurait pas respecté le 92 bis. Par exemple, lorsqu'il n'y a pas eu

 25   d'objection formulée au versement demandé ou deuxième, lorsque cette

 26   déclaration devient recevable, par exemple si cette déclaration est censée

 27   contenir une déclaration antérieure qui ne correspond pas à la déposition

 28   faite à l'audience par le témoin, paragraphe 18 de la décision Milosevic,


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  1   ainsi que paragraphe 14.

  2   D'autres exemples d'éléments, qui ne sont pas visés par le 92 bis

  3   invoqué par la Chambre d'appel, concernent aussi des éléments de ouïe dire

  4   qui n'ont pas été préparés à des fins judiciaires. Par exemple, un rapport

  5   qui n'a pas été préparé à ces fins ou une situation dans laquelle le témoin

  6   est présent à l'audience et peut attester oralement de la véracité de sa

  7   déclaration préalable, paragraphe 16 de la décision Milosevic du 30

  8   septembre 2003.

  9   De l'avis de la Chambre, l'article 92 bis ne s'applique pas en

 10   l'espèce. Le témoin a été appelé à la barre pour témoigner de viva voce. Il

 11   a commencé sa déposition et a d'ailleurs fourni certains éléments à

 12   l'audience. Puis, le témoin a déclaré qu'il lui était impossible de

 13   répondre aux questions du Procureur. Il est apparu clairement, pendant

 14   l'interrogatoire principal, que son attitude ne correspondait pas ici, en

 15   l'espèce, à l'attitude qu'il avait eue dans le procès Limaj, car dans ce

 16   dernier, il avait pu répondre aux questions que lui avait posé l'Accusation

 17   alors que les questions portaient sur les mêmes événements que ceux qui

 18   étaient à la base des questions posées ici en l'espèce et pouvaient aussi

 19   relater les événements pertinents. De l'avis de la Chambre, c'est une des

 20   situations spécifiquement envisagées par la Chambre d'appel où on nous dit

 21   qu'on peut admettre un élément de preuve écrit ou une déclaration écrite.

 22   La Chambre est convaincue que en l'espèce, vu ces circonstances, l'article

 23   92 bis n'est pas une lex specialis excluant l'applicabilité de le 89(C).

 24   Notons que, dans biens des systèmes juridiques, il faut suivre une

 25   procédure très précise quand une partie citant un témoin veut le contre-

 26   interroger, ou demande le versement de sa déclaration préalable antérieure

 27   pour déterminer la véracité de sa teneur. La Chambre d'appel a confirmé que

 28   ici, au TPIY, il incombe à la Chambre saisie de l'affaire de décider si


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  1   elle autorisera une partie citant un témoin à demander le versement de sa

  2   déclaration préalable ou le contre-interroger. C'est en fonction de la

  3   question de l'hostilité du témoin, du caractère hostile du témoin, que sera

  4   déterminé la décision.

  5   Là, nous avons la décision Popovic du 1er février 2008, paragraphe 28.

  6   On a dit à la Chambre que, si les conditions visées par le 92 ter ne

  7   sont pas remplie, l'Accusation n'a pas le droit de s'appuyer sur les

  8   dispositions générales énoncées à l'article 89. De l'avis de la Chambre, le

  9   92 ter ne s'applique pas en l'espèce, en ces présentes circonstances, car

 10   la jurisprudence le dit, que cet article 92 ter, c'est d'assurer un procès

 11   rapide et équitable tout en respectant les droits des accusés. Décision

 12   Prlic du 21 juillet 2007, et décision Delic du 27 septembre 2007, ce sont

 13   des décisions prises en jugement, en première instance. 

 14   Le 92 ter porte sur les modalités de dépositions, que ce soit viva voce ou

 15   que ce soit pour interrogatoire principal ou pour contre-interrogatoire si

 16   le témoin vient dans la prétoire, et pour attester que la déclaration ou le

 17   compte rendu est le reflet fidèle de ce que le témoin dirait si les

 18   questions lui étaient reposées. Pour le dire autrement, l'article 92 ter

 19   n'a pas pour vocation de remplacer une déposition orale faite à l'audience.

 20   La Chambre d'appel l'a dit, c'est pour cela elle exclut la situation où le

 21   témoin est présent à l'audience, peut être contre-interrogé, peut répondre

 22   aux questions des Juges et peut attester oralement de la véracité de sa

 23   déclaration préalable et du fait de ce qu'elle dirait si elle était

 24   examinée, interrogé, dans le cadre de la déclaration du 92 bis. Vous voyez

 25   le paragraphe 16 de la décision Milosevic, du 30 septembre 2003.

 26   La Chambre note que la décision Milosevic de cette date a été rendue avant

 27   que ne soit adopté en 2006, l'article 92 ter. Cet article 92 ter s'inspire

 28   dans une large mesure de ladite décision susmentionnée.


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  1   La Chambre se demande maintenant si le compte rendu d'audience serait

  2   recevable en application du 89(C). Cette disposition dit que peut être

  3   déclaré recevable par la Chambre tout élément dont elle estime qu'il a

  4   valeur probante. La Chambre est convaincue que ce compte, dont on demande

  5   le versement a les deux, est pertinent et a valeur probante, parce qu'il

  6   porte sur la connaissance qu'avait le témoin de deux hommes, M. Krasniqi et

  7   Skender Kuci, qui étaient victimes des actes allégués dans l'acte

  8   d'accusation, et qui sont pertinents pour ce qui est de l'acte d'accusation

  9   en l'espèce. Le témoin a déposé sous serment devant une autre Chambre de ce

 10   Tribunal. Il a été interrogé par l'Accusation dans le procès Limaj, et

 11   contre-interrogé par les trois équipes de la Défense, dans le procès Limaj.

 12   Le témoin a confirmé, devant la Chambre Limaj, que ce qu'il disait était

 13   exact -- ce qu'il avait dit dans le procès Limaj est exact. L'article 89 en

 14   son alinéa (C) confère à la Chambre de vaste pouvoir discrétionnaire, et la

 15   Chambre d'appel a dit que :

 16   "Bien sûr, ce pouvoir discrétionnaire doit s'exercer en harmonie avec

 17   le Statut et les autres articles du Règlement dans la plus grande mesure

 18   possible."

 19   Décision Kordic du 21 juillet 2000, paragraphe 20; décision Galic,

 20   déjà mentionnée auparavant en son paragraphe 27.

 21   Par conséquent, la Chambre va se demander si vu les circonstances

 22   actuelles, il est dans l'intérêt supérieur de la justice de verser ce

 23   compte rendu ou s'il va léser les accusés. Rien dans l'article 92 ni dans

 24   un autre article d'ailleurs ne prévoit la situation qui est maintenant

 25   surgie. Lorsque vous avez un témoin qui est appelé à la barre pour

 26   témoigner de viva voce, qui a prêté serment, et à ce moment-là, n'est pas

 27   prêt ou ne veut pas répondre aux questions de la partie qui l'a cité. Les

 28   éléments que recherchaient l'Accusation, si on n'a pas un témoignage viva


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  1   voce, doivent être les meilleurs possibles. Ici, il était possible d'avoir

  2   un contre-interrogatoire des parties, et rien dans le dossier n'indique que

  3   le témoin n'aurait eu d'hésitation, de difficulté quant à son aptitude à

  4   témoigner.

  5   S'agissant de la question de savoir si le versement éventuel de ce compte

  6   rendu risque de léser les accusés, la Chambre note que sa décision

  7   d'admettre le compte rendu en application du 89(C) n'empêchera pas la

  8   Défense de procéder au contre-interrogatoire.

  9   Vu l'attitude du témoin, hier et avant-hier, la Chambre se dit que le

 10   témoin va peut-être refuser de répondre aux questions de la Défense, si tel

 11   est le cas. La Chambre pourrait accepter et déclarer recevable en

 12   application du 89(C) tout document que la Défense aurait voulu soumettre au

 13   témoin, mais qu'elle n'a pas pu soumettre au témoin en raison du

 14   comportement de ce dernier. La Chambre va aussi tenir compte de la mesure

 15   dans laquelle ce témoin était interrogé et contre-interrogé lorsqu'il

 16   s'agira de déterminer le poids à accorder au compte rendu d'audience. Par

 17   ces motifs, la Chambre décide de verser au dossier le compte rendu de la

 18   déposition de Shefqet Kabashi. Nous allons demander à Mme la Greffière de

 19   nous donner une cote.

 20   Monsieur Rogers.

 21   M. ROGERS : [interprétation] Deux références au prétoire électronique,

 22   3047, c'est la version publique expurgée du compte rendu. Je pense que

 23   c'est la première cote qu'il faudra donner. Quant à l'autre, il s'agit de

 24   3047.1, c'est le compte rendu qui n'a pas été expurgé à verser sous pli

 25   scellé, s'il vous plaît, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Rogers, et vous avez dit

 27   3047.1.

 28   M. ROGERS : [interprétation] Oui. Je pense que c'est juste, mais oui, c'est


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  1   ça.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, d'accord, d'accord. Oui, oui,

  3   d'accord, on ne voit pas ici des cotes. Très bien.

  4   Est-ce que nous pouvons donner une cote à chacun de ces documents.

  5   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant la cote --

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Avant le versement officiel et formel, est-

  8   ce que je peux demander une interruption de quelque 15 minutes, pour que

  9   nous nous consultions entre nous pour savoir si nous allons peut-être

 10   présenter des arguments s'agissant de la poursuite du procès. Nous voulons

 11   nous demander entre nous si nous voulons vous inviter à faire une

 12   suspension du procès pour voir s'il faut peut-être un appel interlocutoire.

 13   Manifestement ceci nécessitera une consultation entre les équipes de la

 14   Défense, parce que nous n'avions pas votre décision.

 15   Une solution de substitution envisageable, c'est qu'en application de

 16   l'article 89(D), nous demandions l'exclusion du compte rendu que vous

 17   pensez maintenant déclarer recevable. Lorsque sera terminé la déposition du

 18   témoin, pour autant qu'elle se poursuivre, parce que ceci va peut-être le

 19   fondement de notre requête, en application de l'article 89(D), aux fins

 20   d'exclusion. Alors, bien sûr, je ne sais pas si vous voulez donner une

 21   cote; est-ce que vous voulez vraiment déclarer officiellement le compte

 22   rendu recevable, c'est semer la confusion ?

 23   Je ne suis peut-être pas clair, mais ce que je demande maintenant

 24   dans l'immédiat, c'est une suspension courte pour que nous consultions nos

 25   clients respectifs et que nous discutions de la chose pour voir quelle est

 26   la meilleure marche à suivre, et pour disons en ne versant pas encore ledit

 27   compte rendu d'audience, ce serait préférable parce que nous pourrions

 28   avant le versement officiel faire notre demande.


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  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Emmerson, pourriez-vous m'éclaire

  3   ? Vous évoquez maintenant, vous faites référence à l'article 89(D), peut-

  4   être quelque chose, peut-être que je ne comprends pas tout, mais la Chambre

  5   vient de rendre une décision, je pense que ça réglait cette question-là,

  6   non. J'ai raté quelque chose.

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Aucune décision quant à la recevabilité

  8   n'est immuable. Les événements peuvent se produisent pendant le reste de la

  9   déposition autorisation la Défense a faire une demande d'exclusion. C'est

 10   tout à fait possible. Dans la plupart des systèmes juridiques, il est tout

 11   à fait possible qu'une Chambre exclue des éléments de preuve après que ces

 12   éléments de preuve eussent été versés au dossier.

 13   Par exemple, vous avez un témoin qui refuse d'être contre-interrogé,

 14   et la Chambre a estimé qu'il fallait retirer son interrogatoire principal

 15   du dossier de l'instance. C'est simplement une proposition que je fais. Je

 16   dis qu'en fait, le timing importe peu. Je pense qu'effectivement, le

 17   versement peut être déclaré officiel si les Juges estiment qu'il faut peut-

 18   être retirer cet élément à la fin de la déposition.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ah, je crois que je vous ai compris

 20   maintenant, mais ça n'empêche pas une cote.

 21   M. EMMERSON : [interprétation] Pas du tout.

 22   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

 23   M. EMMERSON : [interprétation] Pas du tout. Je me contente de dire qu'on

 24   peut faire une demande par la suite sur le plan procédural de deux façons

 25   si la Chambre à temps utile --

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous ai saisi, cinq sur cinq.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous demandez une suspension de 15

 28   minutes. Si vous voulez consulter vos clients pour interjeter appel, libre


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  1   à vous de le faire pendant la pause suivante, mais pourquoi faire une pause

  2   maintenant, C'est une question de vie ou de mort.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, ce n'est pas une question de vie ou de

  4   mort, mais pourquoi se précipiter dans la phase suivante de la procédure ?

  5   Ne serait-il pas prudent et responsable de notre part pour nous avocats de

  6   consulter nos clients puisque nous venons d'entendre votre décision ?

  7   Comment voulez-vous que nous sachions ou que nous aurions su quelle serait

  8   votre décision ? Disons que si nous économisons 15 minutes maintenant, ça

  9   nous fera gagner plein d'heures après.

 10   Manifestement, nous le comprenons tous. C'est une décision très importante

 11   pour ce qui est du déroulement du présent procès. Si 15 minutes c'est trop,

 12   je vous en demande 12.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en donne 14 et demie, sauf que

 14   j'aimerais savoir dans quel système juridique les conseils ou parties

 15   savent à l'avance quelle sera la décision de la Chambre.

 16   Nous allons faire une suspension de 15 minutes. L'audience est suspendue.

 17   --- L'audience est suspendue à 9 heures 48.

 18   --- L'audience est reprise à 10 heures 16.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Emmerson.

 20   M. EMMERSON : [interprétation] Est-ce que vous vous adressez à moi parce

 21   que je suis debout ?

 22   Très bien. Merci. Je voudrais vous remercier pour le temps que vous nous

 23   avez octroyé. Nous n'avons aucun argument à présenter pour l'instant et,

 24   par conséquent, l'interrogatoire du témoin peut continuer.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 26   Madame la Greffière d'audience, voulez-vous donner une cote à ces pièces ?

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le compte rendu expurgé, qui a la

 28   référence 65 ter 03047, deviendra la pièce P119, et le compte rendu


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  1   complet, qui a la référence 65 ter 03047.1 recevra la cote P120 sous pli

  2   scellé.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Madame la Greffière d'audience.

  4   Monsieur Rogers.

  5   M. ROGERS : [interprétation] Merci. Je souhaiterais que le témoin rentre à

  6   nouveau dans le prétoire.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Peut-on faire entre le

  8   témoin dans le prétoire, s'il vous plaît ?

  9   [Le témoin vient à la barre]

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour Monsieur Kabashi. Vous pouvez

 11   vous asseoir, s'il vous plaît.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, veuillez vous asseoir.

 14   Oui, Monsieur Rogers.

 15   M. ROGERS : [interprétation] Au vu de la décision des Juges de cette

 16   Chambre, c'est-à-dire le versement du compte rendu d'audience dans

 17   l'affaire Limaj, et au vu du comportement de par le passé du témoin pour

 18   essayer d'obtenir des éléments dans le cadre de sa déposition, l'Accusation

 19   n'a pas l'intention de poser des questions supplémentaires et, en fait, lui

 20   permet directement d'être contre-interrogé par la Défense.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Rogers.

 22   Monsieur Emmerson.

 23   LE TÉMOIN: SHEFQET KABASHI [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Contre-interrogatoire par M. Emmerson : 

 26   Q.  [interprétation] Monsieur Kabashi, hier, vous avez dit à M. Rogers que

 27   vous n'étiez pas en mesure de répondre à d'autres questions concernant les

 28   événements qui se sont produits en 1998 à Jabllanice. Vous n'avez pas dit


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  1   que vous ne souhaitiez pas le faire, mais vous nous avez dit que vous aviez

  2   l'impression que vous n'étiez pas en mesure de répondre à ces questions.

  3   Est-ce que vous vous en tenez à cette position ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Merci.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

  7   Contre-interrogatoire par M. Guy-Smith : 

  8   Q.  [interprétation] Monsieur Kabashi, pour obtenir une précision, je vais

  9   vous poser, en fait, la même question que Me Emmerson vous a posé. Hier,

 10   vous avez dit à M. Rogers que vous pensiez que vous n'étiez pas en mesure

 11   de répondre à d'autres questions concernant les événements qui se sont

 12   produits en 1998 à Jabllanice. Vous n'avez pas dit que vous ne souhaitiez

 13   pas le faire, mais vous avez dit que vous aviez l'impression que vous

 14   n'étiez pas en mesure de répondre à d'autres questions. Est-ce que ceci

 15   reste votre position au moment où je vous parle ?

 16   R.  Vous savez, mon père me disait même s'il faut marcher pendant plus de

 17   24 heures pour rendre un service à quelqu'un, il faudrait le faire. Mais

 18   là, je ne me sens pas capable de faire quoi que ce soit. C'est la raison

 19   pour laquelle je m'en tiens à ma position.

 20   Q.  Merci.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Harvey.

 22   Contre-interrogatoire par M. Harvey : 

 23   Q.  [interprétation] Monsieur Kabashi, je vous prie de m'excuser, mais je

 24   vais vous poser pour la troisième fois la même question que mes confrères.

 25   J'espère que vous comprenez. Vous avez dit à la cour hier, et vous avez dit

 26   à la cour aujourd'hui, que vous n'êtes pas -- ce n'est pas que vous n'êtes

 27   pas disposé à répondre à d'autres questions, c'est que vous n'êtes pas en

 28   mesure, vous ne vous trouvez pas dans une situation qui vous permettrait de


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  1   répondre à cette question. Est-ce que vous vous en tenez à cette position

  2   au moment où je vous parle ?

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   M. HARVEY : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions. Merci,

  5   Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Harvey.

  7   Monsieur Rogers, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?

  8   M. ROGERS : [interprétation] C'est difficile de penser à des questions

  9   supplémentaires vu la teneur des réponses qui ont été apportées.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation] 

 11   M. ROGERS : [interprétation] Non, je n'ai pas de questions supplémentaires.

 12   Merci.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 14   Monsieur Kabashi, je vous remercie. Vous êtes arrivé au terme de votre

 15   déposition devant ce tribunal dans cette affaire. Nous arrivons donc au

 16   terme de votre déposition. Vous pouvez disposer et si vous rentrez chez

 17   vous, je vous souhaite un bon retour chez vous.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie.

 20   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Karnavas, vous pouvez

 22   également disposer.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous souhaite un bon retour. Je ne

 25   sais pas où vous allez, mais quelque soit votre destination, bon voyage.

 26   [Le témoin se retire]

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Rogers.

 28   M. EMMERSON : [interprétation] Je suis désolé, mais avant que M. Rogers ne


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  1   continue, comme je vous l'ai dit, je voudrais faire une requête en vertu de

  2   l'article 89(D) pour l'exclusion du compte rendu d'audience. Il y a

  3   également une demande faite en vertu de l'article 89(D) pour exclure les

  4   parties du compte rendu d'audience mises à part celles que M. Rogers a

  5   utilisées en ce qui concerne, donc, Skender Kuci et Pal Krasniqi. Je

  6   pourrais -- pourrais-je vous donner les raisons de cette requête ?

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

  8   M. EMMERSON : [interprétation] Tout d'abord, il s'agit d'une situation où

  9   un témoin a refusé de répondre aux questions dans le cadre -- dans le

 10   contre-interrogatoire. La Défense n'a par conséquent pas eu la possibilité

 11   de poser des questions à ce témoin.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites qu'on vous a empêché ?

 13   M. EMMERSON : [interprétation] Oui, le témoin nous a empêché. Je pense que,

 14   lorsque que la Défense ne peut pas poser des questions, il n'y a pas de

 15   procès équitable.

 16   Donc, pour donner une base très générale à cette requête, même s'il est

 17   exact que le témoin a déposé dans l'affaire Limaj, je ne sais pas si vous

 18   avez la possibilité de lire le compte rendu d'audience de cette affaire, la

 19   grande partie de sa déposition a très peu à voir avec les événements de

 20   Jabllanice, et aucune question n'a été déposée par des conseils de la

 21   Défense dans le procès Limaj concernant Jabllanica. Jabllanica ne constitue

 22   pas une partie de l'acte d'accusation contre les défendant et les co-

 23   défanants dans l'affaire Limaj, et toutes les questions qui ont été posées

 24   au témoin dans le contre-interrogatoire par des conseils qui ne

 25   représentent pas les accusés ne portent pas sur des questions qui sont

 26   pertinentes pour ce procès. Donc il semble que vous ayez pensé que le

 27   compte rendu d'audience avait une authenticité ou une validité

 28   supplémentaire qui permettait donc ensuite d'avoir posé des questions dans


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  1   le cadre de contre-interrogatoire. En fait, les parties qui sont

  2   pertinentes pour ce procès ne remplissent pas ce critère.

  3   Deuxième point, le fait que la Défense n'ait pas eu la possibilité de poser

  4   des questions dans le contre-interrogatoire signifie que cela va à

  5   l'encontre d'un procès équitable. Un témoin comparait dans la présentation

  6   des éléments à charge, il s'agit d'un témoin très important, et les droits

  7   à un procès équitable des accusés est le droit de pouvoir avoir un contre-

  8   interrogatoire efficace du témoin sont encore plus importants lorsque le

  9   témoin est considéré comme sans trace, qui a été mentionné par la Chambre

 10   d'appel. C'est encore plus important lorsque sa déposition n'a pas fait

 11   l'objet de vérification par d'autres sources ou par d'autres personnes. J'y

 12   reviendrais dans quelques instants.

 13   Le troisième point de principe que je souhaiterais mentionner dans la

 14   décision que cette Chambre a prise, vous avez dit que le témoin avait

 15   apporté des réponses. Il avait dit que la déposition qu'il avait faite dans

 16   l'affaire Limaj était véridique, et la Chambre n'a pas mentionné. Je

 17   voudrais donc vous le rappeler tous les passages de la déposition du témoin

 18   d'hier, où le témoin a dit le contraire, c'est-à-dire la page 4 240, lignes

 19   1 à 3; page 4 -- page 424, lignes 1 à 3; page 425, lignes 10 à 1; page 425,

 20   lignes 21 à 25, où le témoin a dit qu'il ne pouvait pas vraiment confirmer

 21   que les éléments qu'il avait mentionnés dans le procès Limaj étaient

 22   fiables. A la page 426, lignes 5 à 9, il a dit :

 23   "C'est là le problème, je ne me souviens pas exactement de ce qui

 24   s'est passé à l'époque."

 25   Compte tenu de cela, vous devez trouver un équilibre ou rétablir un autre

 26   équilibre. Dans le précédent procès - on fait référence à cela seulement

 27   parce qu'il s'agit d'une décision par une Chambre, une autre Chambre de

 28   première instance, pas parce qu'il y a un lien entre ces deux procès ou il


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  1   n'y aurait pas de lien entre ces deux procès - un témoin à qui on avait

  2   donné le pseudonyme 55 a répondu à une question dans le cadre de

  3   l'interrogatoire principal, on lui a demandé donc des questions dans le

  4   cadre de questions générales, et ensuite sa déposition s'est terminée.

  5   Ensuite il a refusé de revenir dans le cadre du contre-interrogatoire. Les

  6   Juges de la Chambre ont fait une enquête, demandé une expertise concernant

  7   son état de santé, et on conclut que compte tenu de son état de santé

  8   mentale, on ne pouvait pas lui demander de revenir pour le contre-

  9   interrogatoire. En vertu de l'article 89(D), il était nécessaire d'exclure

 10   la déposition du témoin lorsque la Défense n'était pas en mesure de

 11   terminer un contre-interrogatoire, en nonobstant le fait que le témoin

 12   avait déjà participé à ce procès en déposant déjà.

 13   Je vais vous donner la référence, il s'agit des raisons qui

 14   justifient la décision de la Chambre de première instance d'exclure la

 15   déposition du témoin 55, en vertu de l'article 89(D) et de ne pas lui

 16   permettre de redéposer conformément à l'article 92 quater, décision du 14

 17   décembre 2007.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans quelle affaire ?

 19   M. EMMERSON : [interprétation] Dans cette affaire.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord.

 21   M. EMMERSON : [interprétation] Encore une fois, ce n'est pas parce qu'il

 22   s'agit d'une affaire portant sur les mêmes accusés, c'est simplement parce

 23   qu'il s'agit d'une décision d'une Chambre de première instance.

 24   La décision consistait à conservé au compte rendu et on conservait comme

 25   pièce à conviction l'interrogatoire principal, et que le compte rendu

 26   devrait être versé conformément à l'article 92 quater, concernant -- en

 27   raison de l'état de santé mentale. Je vais donner lecture du paragraphe 10

 28   de la décision.


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  1   "La Chambre est tombée d'accord avec l'Accusation que la déposition du

  2   Témoin 55 était pertinente pour la participation supposée de Haradinaj dans

  3   la participation qui figure dans l'acte d'accusation. Les conflits entre

  4   l'UCK et le FARK et l'utilisation supposée du canal du lac Radoniq pour y

  5   avoir déposé des corps. La déposition par conséquent porte sur les

  6   questions centrales dans l'affaire y compris les actions et le comportement

  7   des accusés."

  8   Donc, la déposition du témoin ne porte pas sur le comportement de M.

  9   Haradinaj. Les éléments de preuve que vous venez d'admettre ne mentionnent

 10   pas du tout les actions, ni le comportement de M. Haradinaj mais portent

 11   sur d'autres accusés. En fait cela concerne les actions et les

 12   comportements de l'accusé.

 13   "La déposition par conséquent porte sur les questions centrales liées

 14   à l'affaire et concerne les actions et le comportement de l'accusé. Par

 15   conséquent, l'absence de contre-interrogatoire signifie que la valeur

 16   probante de la déposition n'est pas suffisante pour décider qu'il y a eu un

 17   procès équitable pour l'accusé. A moins que les Juges de la Chambre

 18   considèrent que la déposition du témoin soit fiable, et étant donné qu'il y

 19   a également des liens importants avec d'autres témoins concernant les

 20   allégations centrales, la déposition du témoin a en fait été retirée des

 21   documents figurant au dossier en vertu de la requête dans le cadre de

 22   l'article 92 quater.

 23   Un élément qui n'a pas été mentionné dans la décision mais qui va

 24   contre ce qui s'est passé au niveau de ce témoin, je vous rappellerais que

 25   le témoin a dit hier, qu'il n'était pas en mesure de le faire. Donc on ne

 26   peut pas en fait choisir ce qui nous convient dans le compte rendu et

 27   ignorer le reste. Hier, le témoin a dit qu'il n'était pas disposé à dire

 28   quelles étaient les parties du compte rendu d'audience dans l'affaire Limaj


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  1   étaient fiables et celles qui n'étaient pas. Donc nous nous trouvons dans

  2   une situation, il ne peut pas faire l'objet d'un contre-interrogatoire, il

  3   n'est pas question de parler au fait qu'on peut utiliser des documents

  4   plutôt que de procéder au contre-interrogatoire d'un témoin. On ne peut pas

  5   substituer ceci au droit à un contre-interrogatoire, puisque c'est ce qui

  6   s'est passé dans le cadre du témoin 55.

  7   On n'a pas eu la possibilité de contre-interroger ce témoin. Ce qui

  8   signifie, si vous voulez, que maintenant on n'est pas vraiment dans le

  9   cadre d'un procès équitable. L'article 89(D) exige que les Juges de la

 10   Chambre évaluent la valeur probante des éléments de preuve par rapport au

 11   droit à un procès équitable de l'accusé. Vous n'avez pas encore lu les

 12   éléments de preuve, donc il sera difficile de prendre une décision quant à

 13   la valeur probante. Donc ce n'est pas une décision que vous pouvez pendre

 14   immédiatement. Par conséquent, nous vous invitons à reconsidérer au vu de

 15   ce que nous venons de présenter le contenu de ce compte rendu d'audience

 16   dans l'affaire Limaj.

 17   La position est la suivante : Tout ce qui ne porte pas sur Jabllanica

 18   dans le compte rendu d'audience est nul, et non avenu, c'est-à-dire que sa

 19   valeur probante est nulle pour ce procès en l'espèce. Tout ce qui porte sur

 20   les événements de Jabllanica, mais qui n'a pas fait l'objet de vérification

 21   compte tenu de la déposition du témoin a une valeur probante très limitée.

 22   Le seul aspect de sa déposition dans l'affaire Limaj et l'Accusation a

 23   voulu se fier à cela, et vous, Messieurs les Juges, vous vous êtes basé là-

 24   dessus, dans votre décision c'était le fait que le témoin avait répondu à

 25   des questions dans l'affaire Limaj concernant Skender Kuci et Pal Krasniqi.

 26   Il a donné des réponses différentes ou aucune réponse dans ce procès.

 27   Les allégations concernant Skender Kuci et Pal Krasniqi sont

 28   également corroborés par d'autres éléments de preuve. Dans cette mesure,


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  1   cette partie de la déposition dans l'affaire Limaj peut faire l'objet de

  2   vérification croisée, mais tout ce qui irait au-delà de cela, n'a qu'une

  3   valeur probante limitée, voire nulle. Si l'on lit soigneusement le compte

  4   rendu d'audience d'hier, on voit que le témoin n'était pas sûr d'avoir

  5   vraiment corroboré tout cela ou d'aller dans le sens ce qu'il avait dit

  6   dans l'affaire Limaj.

  7   Donc nous vous invitons à vous livrer à un exercice que logiquement

  8   vous n'avez pas pu faire pour l'instant, c'est-à-dire d'évaluer la valeur

  9   probante de tous ces éléments, et au vu du fait que pour les accusés ce

 10   serait injuste, par conséquent, il faudrait exclure si en vertu de

 11   l'article 89(D). Si tel n'est pas le cas, les seuls passages que l'on

 12   devrait inclure au dossier, je peux vous donner les références dans

 13   quelques instants. C'est les pages 4 255 à 4 260, à huis clos partiel, dans

 14   ce compte rendu d'audience, et il s'agit, donc, des passages qui portent

 15   sur deux témoins qui constituent la base également de la requête et qui

 16   constituent la base également de la décision de cette Chambre de première

 17   instance. Le reste du compte rendu d'audience devrait être exclut.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Une question, Maître Emmerson, avant

 19   que vous vous rasseyez. Vous avez mentionné le Témoin 55 dans cette affaire

 20   dans le précédent procès.

 21   M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous vous êtes penché sur

 23   ce qui s'est passé dans le procès Martic en ce qui concerne la déposition

 24   de Milan Babic ?

 25   M. EMMERSON : [interprétation] Non, mais je peux le faire, bien sûr.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous invite à le faire.

 27   M. EMMERSON : [interprétation] Je vous invite également, Monsieur le

 28   Président, à vous pencher sur la décision de la précédente Chambre de


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  1   première instance dans cette affaire concernant le Témoin 55.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Tout à fait.

  3   M. EMMERSON : [interprétation] Je disais, en fait, plus les éléments de

  4   preuve sont importants et plus il est injuste de ne pas avoir le droit de

  5   procéder à un contre-interrogatoire et le fait que l'on ai pas eu le doit à

  6   avoir un contre-interrogatoire, ce sera décisif dans ce procès et ça n'a

  7   rien à voir avec les faits. Si en plus on l'applique à ces faits, vous

  8   n'avez en tête qu'un seul passage de la déposition qui est déterminante et

  9   qui a une valeur probante directe et qui peut faire l'objet de

 10   vérifications. C'est le passage qu'a utilisé M. Rogers et que vous avez

 11   utilisé, mais il y a énormément d'éléments que l'on aurait pu utiliser dans

 12   le cadre d'un contre-interrogatoire.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Emmerson.

 14   Oui, Monsieur Rogers.

 15   Oui, Maître Guy-Smith.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais dans le sens des remarques faites

 17   par Me Emmerson et je voudrais rappeler également qu'un exercice de contre-

 18   interrogatoire est un droit minimum qui doit être garanti en vertu de notre

 19   statut, article 21(iv)(e) en vertu du document normatif ICCPR, article

 20   14(iii) [comme interprété] et également la convention européenne sur les

 21   droits de l'homme, article 6, alinéa iii. La reconnaissance de l'importance

 22   du contre-interrogatoire est mentionnée dans ces instruments normatifs, ce

 23   qui permet d'obtenir la vérité dans le cadre d'un procès et ceci ne

 24   nécessite pas une uniquement que les parties soient en mesures de procéder

 25   à un contre-interrogatoire, ce que nous n'avons pas eu ici, mais en même

 26   temps, ceci permet à -- aux Juges, c'est-à-dire à vous, d'avoir une

 27   compréhension complète et d'avoir consigné à un compte rendu d'audience une

 28   déposition complète que nous -- vous n'avez pas ici.


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  1   En ce qui concerne la déposition de M. Babic dans l'affaire Martic -- en

  2   fait, vous avez parlé de l'affaire Martic, mais je suis allé directement à

  3   l'affaire Babic.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais je n'ai pas parlé de

  5   l'affaire Babic, j'ai parlé de la déposition de M. Babic dans l'affaire

  6   Martic.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est une affaire que vous connaissez très

  8   bien, je crois.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pas nécessairement.

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je me souviens bien, mais peut-être que

 11   ma mémoire me dessert et si tel est le cas, je m'en excuse, mais je crois

 12   me souvenir que dans cette affaire, il avait été possible de procéder à

 13   l'interrogatoire ciblé et je parle ici des conseils qui avaient pu faire

 14   cet interrogatoire ciblé de ce témoin concernant sa déposition --

 15   déposition qui avait pris fin en raison de sa mort, pris fin avant la fin

 16   de celle-ci. La demande de l'inclusion de la déposition de M. Babic avait

 17   été faite en vertu, si je me souviens bien, de l'article 92 quater et étant

 18   donné que cette demande ou cette requête avait été faite dans le cadre d'un

 19   article qui constitue une lex specialis, avait une conséquence sur les

 20   décisions de cette Chambre de première instance.

 21   Mais ce qui est plus important, ce qui existait à l'époque, mais qui

 22   n'est pas le cas ici et ce qui est très clair à la lecture de compte rendu

 23   d'audience dans l'affaire Limaj et je crois que ceci est vraiment différent

 24   de ce qui a été mentionné dans les attendus de la déclaration

 25   d'aujourd'hui, je crois que c'est à la page 9, mais peut-être que je me

 26   trompe, c'est que les conseil à l'époque avaient eu en partie la

 27   possibilité d'avoir un contre-interrogatoire ciblé sur certains aspects qui

 28   étaient importants pour l'affaire en question. Comme M. Rogers l'a


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  1   mentionné et comme je l'ai mentionné l'autre jour, l'affaire Limaj portait

  2   sur différents aspects et ne se concentrait pas sur les événements de

  3   Jabllanice. Les conseils dans cette affaire-là n'ont reçu aucune

  4   instruction et n'ont pas posé des questions concernant les événements de

  5   Jabllanice, puisque ceci n'avait aucune importance dans l'affaire Limaj.

  6   Nous nous trouvons dans une situation où nous n'avons pas la possibilité de

  7   procéder à un contre-interrogatoire concernant ces événements et, par

  8   conséquent, ceci est fondamentalement injuste et ceci mine le fondement

  9   même de ce système de justice. Quand je parle du fondement de ce système,

 10   je parle d'un -- de ceci dans un sens institutionnel et si l'on s'aventure

 11   dans cette voie et si l'on n'exclue pas ces éléments de preuve, ce sera

 12   très dangereux pas uniquement pour cette affaire, mais également pour

 13   l'évolution du droit international.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de vous asseoir, Maître Guy-

 15   Smith, j'aimerais que vous soyez très clair, à l'instar de Me Emmerson.

 16   Est-ce que vous voulez que toutes -- tous ces éléments de preuve soient

 17   exclus, ou seulement une partie qui, selon vous, sont considérées comme

 18   sans importance pour l'affaire en question ? Et par conséquent, est-ce que

 19   vous êtes d'accord pour que l'on incluse les éléments qui portent sur Pal

 20   Krasniqi et Skender Kuci ?

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais dans le sens des remarques

 22   prononcées par Me Emmerson.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 24   Maître Harvey.

 25   M. HARVEY : [interprétation] Monsieur le Président, je me rallie moi aussi

 26   à toutes les observations faites à la fois par Me Emmerson et Me Guy-Smith

 27   et je souhaite simplement ajouter et rappeler la Chambre -- à la Chambre du

 28   -- le fait que M. Brahimaj n'est pas traîné devant ce tribunal pour des


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  1   faits relatifs, que ce soit à M. Skender Kuci ou M. Pal Krasniqi. J'ai

  2   simplement souhaité souligner cela et je sais que vous en tenez compte. Les

  3   comptes rendus d'audience qui sont maintenant pièce P119 et P120 concernent

  4   la déposition faite avant que ces trois accusés ne comparaissent devant ce

  5   tribunal. Par conséquent, ils n'étaient pas représentés par des conseils.

  6   Je ne suis même pas sûr s'ils étaient arrêtés à l'époque. Je pense qu'ils

  7   ont certainement été arrêtés au cours du même mois, mais je pense qu'ils

  8   n'étaient pas arrêtés au moment de la date de ces comptes rendus

  9   d'audience.

 10   Je ne souhaite ajouter quoi que ce soit à ce qui a déjà été dit. Je

 11   souhaite soutenir tout ce qui a été exprimé par Me Emmerson à l'égard de la

 12   recevabilité et la pertinence des comptes rendus d'audience en vertu de

 13   l'article 89(D) et je souhaite simplement indiquer qu'il existe une erreur

 14   dans le compte rendu d'audience portant sur les arguments avancés

 15   aujourd'hui. Me Emmerson, à la page 20, ligne 13, est correctement cité en

 16   disant : Je m'arrête là. La déposition de ce témoin, c'est-à-dire de M.

 17   Kabashi à Limaj, ne concerne pas les actes et comportements des accusés --

 18   de l'accusé, Monsieur Haradinaj. C'est exact. Mais ce n'est pas le cas de

 19   la phrase suivante qui dit que l'on n'y mentionne pas du tout les actes et

 20   le comportement de l'accusé. Car vous en -- je pense que Me Emmerson a

 21   clairement indiqué que sa déposition mentionne les actes et le comportement

 22   des deux autres accusés.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous redonner

 24   la référence ?

 25   M. HARVEY : [interprétation] C'est page 20 aujourd'hui, lignes 13 à 15.

 26   J'espère que ceci vous aide à clarifier les choses.

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, je souhaite me corriger j'ai

 28   parlé de 92 quater concernant la situation Babic et je n'ai pas eu raison.


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  1   Compte tenu de la manière dont les choses se déroulent ici, je souhaitais

  2   simplement corriger cette erreur devant la Chambre, car si j'ai bien fait,

  3   c'était admis conformément à 89(C) et (D).

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous comprenons que parfois on fait

  5   des erreurs.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je souhaite souligner concernant cette

  7   décision le paragraphe 70 où il est décrit :

  8   "La Chambre de première instance sait que M. Milan Babic a déposé pendant

  9   environ 25 heures devant ce Tribunal sous serment en présence de l'accusé.

 10   Son contre-interrogatoire a duré approximativement dix heures et demie. La

 11   Chambre de première instance constate que le contre-interrogatoire a duré

 12   jusqu'au moment de sa mort et qu'il a été suffisant pour que la Chambre de

 13   première instance puisse juger de manière équitable de la crédibilité et

 14   fiabilité de M. Babic en tant que témoin."

 15   Donc ces facteurs n'existent pas dans l'affaire présente.

 16   M. EMMERSON : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis clarifier

 17   ce qu'a dit Me Harvey pour éviter tout malentendu je pense que nous pouvons

 18   tous être d'accord sur le fait que la déposition que vous avez prise en

 19   considération et concernant à laquelle vous avez rendu une décision portant

 20   sur sa recevabilité ne comporte pas des allégations concernant l'acte et le

 21   comportement de M. Haradinaj mais ceux de M. Balaj et Brahimaj.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne suis pas en désaccord avec Me

 23   Emmerson pour ce qui est de M. Haradinaj. Mais je suis en désaccord avec

 24   lui pour ce qui est de M. Balaj car si vous lisez cette déposition vous

 25   pouvez voir que cet individu n'a pas particulièrement spécifiquement parler

 26   de lui.

 27   M. EMMERSON : [interprétation] Peut-être je dois me corriger. Il n'y a pas

 28   de dispute concernant le fait que la déposition porte concrètement sur les


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  1   actes et le comportement de M. Brahimaj, dans la mesure dans laquelle ceci

  2   concerne les actes et le comportement des accusés.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je souhaite simplement savoir quelle

  4   est la position des conseils et éviter que l'on doive passer à une nouvelle

  5   brève pause.

  6   M. HARVEY : [interprétation] M. Brahimaj est mentionné dans une mesure

  7   limitée. Bien sûr, il n'était pas représenté dans cette procédure. Il n'y a

  8   pas eu de contre-interrogatoire. Il n'y a pas eu de contre-interrogatoire

  9   concernant Jabllanice. Des références limitées à sa présence et ses actes

 10   et comportement impliqués ont été présentés, effectivement.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 12   M. HARVEY : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 14   Monsieur Rogers, est-ce que vous souhaitez ajouter quelque chose à ce débat

 15   ?

 16   M. ROGERS : [interprétation] Je l'espère. Je ne sais pas si vous considérez

 17   que ceci est utile ou pas. Une requête a été faite en vertu de l'article

 18   89(D), et c'est sur cette base que la Chambre pourrait exclure la

 19   déposition si la valeur probante n'est pas considérée comme suffisante.

 20   Mes éminents collègues fondent sur -- requête sur deux bases : tout

 21   d'abord, disant qu'il n'y a pas de valeur probante, et deuxièmement, disant

 22   que ceci ne serait pas équitable vis-à-vis de --

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ne représentez pas mal les choses --

 24   M. ROGERS : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- ils ont que -- si je puis utiliser

 26   la phrase de Me Guy-Smith, qu'ils n'ont pas pu contre-interroger le témoin

 27   compte tenu de sa disposition.

 28   M. ROGERS : [aucune interprétation]


Page 482

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais ils ont le droit, et ils ont

  2   exercé ce droit. Ils ont posé chacun une question au témoin.

  3   M. ROGERS : [interprétation] Oui, et le témoin a répondu d'une seule

  4   manière que ceci voulait dire que leur droit au contre-interrogatoire ne

  5   pouvait pas être exercé de manière effective. C'est le témoin qui leur a

  6   nié le droit de le contre-interroger, d'après eux mais tel n'était

  7   simplement pas la situation. Mes éminents collègues ont eu l'occasion,

  8   s'ils le souhaitaient, de poser d'autres questions au témoin concernant les

  9   raisons pour lesquelles il ne souhaitait pas continuer à déposer, ses

 10   raisons, le fondement de cela, et ils ont pu vérifier dans quelle mesure

 11   les questions traitées dans l'affaire Limaj étaient pertinentes or ils

 12   n'ont pas fait cela.

 13   Mes éminents collègues ont plutôt choisi de leur poser une seule question,

 14   et c'était, je cite :

 15   "Vous avez dit à M. Rogers que vous considériez que vous étiez incapable de

 16   répondre aux autres questions concernant les événements de 1998, ce n'est

 17   pas que vous ne le souhaitiez pas, mais que vous considériez que vous étiez

 18   incapable de répondre à ces questions. Est-ce que telle est toujours votre

 19   position ?

 20   "Réponse : Oui."

 21   C'est ce que Me Emmerson a dit à la page 14, ligne 23, et jusqu'à la page

 22   15, ligne 2. Puis ils ont faiblement, avec tout le respect de manière tout

 23   à fait respectueuse, accepté cette réponse. Ils n'ont pas essayé d'aller

 24   au-delà de cela car le témoin a simplement dit : "Je me sens incapable de

 25   répondre aux questions," ensuite ils se sont assis.

 26   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ils n'ont pas été privés du

 27   droit de contre-interroger le témoin de manière effective. Ils ont

 28   simplement choisi d'accepter la réponse du témoin, et ce n'est pas du tout


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  1   la même chose.

  2   Mes éminents collègues font référence aux réponses qui ont été données,

  3   lorsqu'il était question de la valeur probante. Dire qu'il n'y a pas de

  4   valeur probante dans la déposition de ce témoin concernant l'affaire Limaj,

  5   en raison de ses réponses aux questions aujourd'hui, n'est pas acceptable,

  6   il a dit qu'il ne pouvait pas maintenant faire la différence entre l'an

  7   2005 et 2011. J'examine particulièrement la page 425, lignes 10 à 15; et 21

  8   à 25.

  9   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous vous souviendrez, d'après

 10   le débat tenu ici hier, qu'hier nous avons entendons un argument concernant

 11   ce point. J'ai avancé mes arguments disant que le témoin ne disait pas que

 12   ce qu'il avait dit en 2005 était erroné, mais simplement, qu'aujourd'hui,

 13   il ne se souvenait plus comment les choses se déroulaient à l'époque.

 14   Ensuite mon éminent collègue - c'était aux lignes 5 à 9, page 426 - il a

 15   suggéré que ceci signifiait au-delà de tout doute possible que le témoin

 16   n'était pas prêt à maintenir sa déposition. Je n'ai pas trouver la bonne

 17   citation excusez-moi de paraphraser. Mais voici ce qu'il a dit dans sa

 18   réponse à ma question, et maintenant je vais lire l'ensemble, lignes 1 à 9

 19   :

 20   "Lorsque vous avez répondu aux questions en 2005, est-ce que vous avez fait

 21   cela de la meilleure manière possible ? Est-ce que vous avez essayé de vous

 22   vous rappelez tout ce qui s'est passé de fournir à la Chambre un récit

 23   honnête et véridique au mieux de vos capacités, à l'époque, et de vos

 24   souvenirs ?"

 25   Il a dit :

 26   "C'est là que le problème réside, je ne me souviens pas de cette époque, je

 27   ne peux pas faire la distinction entre cette époque et le présent. J'ai

 28   fait de mon mieux, je pense que j'ai fait de mon mieux pour dire la vérité


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  1   car je ne suis pas habitué à mentir. Mais vraiment, je ne suis pas dans

  2   l'état d'esprit me permettant de clarifier bien les choses."

  3   Ensuite regardons sa déposition précédente, compte rendu d'audience 385 en

  4   répondant à ma question, très simple, à la ligne 25 :

  5   "Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit dans l'affaire Limaj

  6   lorsque vous avez déposé à l'époque devant ce Tribunal ?

  7   "Réponse :

  8   "Oui, pour ce qui est de ma déposition là-bas."

  9   Question :

 10   "Et ce que vous avez dit devant la Chambre de première instance était

 11   la vérité, n'est-ce pas, Monsieur Kabashi ?"

 12   Réponse :

 13   "Oui. Ma déposition devant un tribunal, ce tribunal, oui, d'après ce dont

 14   je me souviens."

 15   Monsieur le Président, vous devez tenir compte de la progression de

 16   l'interrogatoire principal. Je pense que ceci est pertinent. Les questions

 17   portant sur ses souvenirs ont été posées au cours de l'interrogatoire

 18   principal et d'après son comportement et tout ce qu'il disait, il suggérait

 19   qu'il n'était pas prêt à déposer, mais il n'était question de ses souvenirs

 20   et du fait qu'il se souvenait seulement d'une petite partie de cela. C'est

 21   ce dont il a été question vers la fin. Est-ce que c'était vrai ou pas ?

 22   Est-ce qu'il pouvait se rappeler ou ne pas -- ne pouvait vraiment pas se

 23   rappeler est une autre question qui n'a pas été explorée par la Défense ?

 24   Ils ont eu l'occasion de faire cela s'ils l'avaient souhaité, mais ils ont

 25   opté à ne pas le faire. Ils ont simplement accepté ce que le témoin a dit,

 26   car ceci est conforme à leurs intérêts et certainement aux intérêts de M.

 27   Balaj et Me Harvey, c'est-à-dire je ne vais pas leur dire comment présenter

 28   les arguments leurs points de vue afin de contester ce que avait dit M.


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  1   Kabashi à l'égard de leurs client dans l'affaire Limaj et pour savoir si

  2   ceci était la vérité ou pas. Mais ils ont simplement choisi d'accepter

  3   qu'il se sentait incapable de répondre aux questions, quelles qu'elles

  4   soient. Il ne s'agit pas là de la privation du droit à -- au contre-

  5   interrogatoire, mais simplement d'une décision tactique qu'ils ont prise

  6   dans l'intérêt de leur client. Mais objectivement, ils ont eu l'opportunité

  7   de traiter de cela avec ce témoin. Il avait donné des réponses à quelques

  8   questions au cours de son interrogatoire principal et effectivement, il y a

  9   des questions auxquelles il n'a pas répondu. Je l'accepte.

 10   Comme je l'ai dit, le comportement du témoin suggère plutôt qu'il

 11   peut y avoir des raisons multiples quant à la question de savoir pourquoi

 12   il ne souhaite pas déposer.

 13   Monsieur le Président, je peux traiter de cela peut-être en raison du

 14   fait que cette requête faite pour la Défense se fonde sur les suppositions

 15   qu'il dit bien la vérité lorsqu'il disait dans ses réponses qu'il ne

 16   pouvait pas se rappeler. Je souhaite simplement présenter mes arguments de

 17   manière verbale.

 18   Mes éminents collègues vont peut-être faire objection quant à la

 19   manière dont je formule les choses --

 20   M. EMMERSON : [interprétation] Tout simplement, ceci n'est pas exact. Il

 21   n'est pas exact de suggérer que nous affirmons que le témoin disait

 22   nécessaire la vérité --

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-lui de répondre et ensuite,

 24   vous allez répliquer.

 25   M. ROGERS : [interprétation] Vous vous souviendrez que au fur et à mesure

 26   que l'interrogatoire principal avançait, tout d'abord, le témoin essayait

 27   de contrôler le questionnement dans une certaine mesure. Ceci a commencé

 28   dès la page 334 du compte rendu d'audience et votre -- les -- le Président


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  1   a dû intervenir et poser des questions concernant son appartenance

  2   ethnique. Dès le début, il souhaitait contrôler ce qui se passait. Page

  3   342, ligne 11 :

  4   "Allez droit au but. Qu'est-ce que vous voulez savoir ? Qu'est-ce que

  5   vous voulez que je vous dise ?"

  6   343 :

  7   "Ne passez pas milles chemins."

  8   356 :

  9   "Je ne vais pas vous permettre de me poser des questions. Si vous

 10   m'envoyez en prison, ne me posez pas de questions."

 11   Ensuite, il y a toute une série de déclarations faites au cours de sa

 12   déposition lorsqu'il a demandé qu'on ne lui pose plus de questions, bien

 13   avant que l'on commencer à prêter des questions liées à sa mémoire.

 14   "Je n'ai pas de raison de vous répondre et vous savez pourquoi."

 15   Page 355.

 16   "Est-ce que l'homme sur ma droite pourrait arrêter de me poser des

 17   questions, car je n'ai pas de réponse à donner."

 18   339 :

 19   "Pourquoi devrais-je répondre ? Quel est le but ?"

 20   433 [comme interprété] :

 21   "Qui est en charge du groupe ?"

 22   C'était la question.

 23   Réponse :

 24   "Est-ce que vous allez tout d'abord me dire pourquoi je suis emprisonné ici

 25   ? Est-ce que vous allez d'abord me dire cela ?"

 26   358, lignes 9 à 11 :

 27   "Je peux affirmer ici simplement qu'il n'y a pas du tout de justice.

 28   Vous parlez des bêtises."


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  1   Ligne 18 :

  2   "Il n'y a pas de justice, d'après ce que je vois. Amenez-moi en

  3   prison et gardez-moi là-bas si vous voulez."

  4   393 :

  5   "Pourquoi est-ce que je devrais me sentir obligé de répondre ?"

  6   Après que le président a dit au témoin de répondre à la question.

  7   Il évitait de répondre aux questions. Il n'était pas prêt à le faire.

  8   Lorsque l'on a montré des cartes au témoin, la Chambre se rappellera des

  9   réponses portant sur son manque d'éducation, sur le fait qu'il ne savait

 10   pas se débrouiller en utilisant les cartes et il disait qu'il ne pouvait

 11   pas identifier la ville en question. Il a demandé de savoir pourquoi les

 12   autres ont fait l'objet de poursuites ou d'enquêtes.

 13   Page 355 :

 14   "Vos enquêteurs sont pires que les Serbes."

 15   La Chambre se souviendra de lorsqu'il a dit :

 16   "Vous avez commis plus de crimes avec ce que vous avez fait."

 17   C'est 356 :

 18   "C'est vous qui devrez le savoir et les enquêtes devraient être portées sur

 19   vous."

 20   392 :

 21   "Il y a eu beaucoup d'autres choses qui n'ont pas été prises en

 22   considération ni traînées en justice" et ensuite le Président est

 23   intervenu. Il a dit au témoin de s'arrêter et il lui a dit qu'il ne

 24   revenait pas à lui de lui poser -- de poser ce genre de questions et il lui

 25   a donné l'instruction de répondre à la question. A la page 393, il ne sait

 26   toujours pas la réponse à la question."

 27   Ensuite, il traite de M. Kuci à la page 381 et il a dit :

 28   "Je ne peux pas répondre à cette question. Ce n'est pas que je ne souhaite


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  1   pas, mais je ne peux pas."

  2   392 :

  3   "Maintenant, il est trop tard de parler des choses de mon point de

  4   vue. Ça n'a aucune signification de parler de cela maintenant."

  5   Sans cesse, il essaie de nous faire part de ses opinions quant à la

  6   question de savoir ce qu'il pense au sujet de ce procès, s'il est préparé à

  7   continuer à répondre aux questions. Il fait un discours à la page 397

  8   lorsque j'ai de nouveau essayé de obtenir de lui qu'il page de Skender Kuci

  9   et de Pal Krasniqi, il fait référence aux personnes disparues. Il a dit

 10   qu'il n'était pas capable de déposer."

 11   401 :

 12   "Il n'y a plus rien que je puisse ajouter à ce procès. C'est au-delà

 13   de moi, c'est impossible. Excusez-moi."

 14   Page 401, lignes 14 à 15, après que je lui ai demandé s'il était prêt à

 15   répondre à ma question, il a dit :

 16   "Si je pouvais, je l'aurais fait, mais vraiment, je ne sais pas. Je ne vois

 17   pas de raison pourquoi faire cela."

 18   Lorsqu'on lui a demandé si sa déposition dans Limaj était véridique, il a

 19   dit :

 20   "Je suis incapable de traiter de cela de manière supplémentaire."

 21   402, ensuite :

 22   "J'ai déjà dit : ce n'est pas que je ne veuille pas, mais je suis

 23   incapable de répondre à vos questions. C'est quelque chose qui est en moi."

 24   402, il continue :

 25   "Si ce procès ici a pour but de rendre la justice et découvrir les

 26   crimes et les bureau du Procureur n'a rien fait, pourquoi m'impliquer ? Je

 27   suis quelqu'un sans signifiance. Il n'y aura pas de différence si je dépose

 28   ou ne dépose pas. Je ne suis pas capable de parler de cela."


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  1   Page 405, ligne 12 :

  2   "Non, je n'ai pas peur, je suis incapable de déposer. Il ne s'agit

  3   pas de la peur. C'est quelque chose dans moi, un sentiment que j'ai dans

  4   moi, quelque chose qui vous maintient en vie, qui vous permet de continuer

  5   de vivre là où vous vivez. Il y a des choses qui m'empêchent. J'essaie, je

  6   fais de mon mieux, mais je ne peux pas. Je ne vois pas de droit qui

  7   pourrait me forcer. C'est la raison pour laquelle je ne déposer pas. J'ai

  8   dit ce que je voulais dire. Je ne pense pas que je puisse dire autre

  9   chose."

 10   Monsieur le Président, apparemment, dans son for intérieur, il a

 11   l'impression d'avoir une espèce de boussole morale qui ne lui permet pas

 12   pour une quelconque raison de parler; peut-être c'est une explication. Il

 13   peut y avoir d'autres, il peut y avoir des raisons multiples. Mes éminents

 14   collègues ont pris une décision tactique, et je la comprends. Ils ont

 15   décidé de ne pas poser de questions à ce témoin. Ils ont le droit effectif,

 16   et ils ont choisi de ne pas l'utiliser. Mais simplement -- faiblement

 17   d'accepter la position du témoin selon laquelle il était incapable de

 18   parler de cela en raison de la défaillance de sa mémoire.

 19   Monsieur le Président, c'est pour cela qu'il faudra rejeter la requête de

 20   mes éminents collègues. Tout d'abord, les matériels fournis par le biais du

 21   compte rendu d'audience Limaj traitent directement des questions qui

 22   concernent cette Chambre de première instance et cette affaire. La base de

 23   l'exclusion serait que si l'on essaie d'établir un équilibre entre la

 24   valeur probante et les droits à un procès équitable, c'est le deuxième

 25   volet qui devrait primer.

 26   Monsieur le Président, quant à la référence faite à la décision concernant

 27   le Témoin 55, tout simplement nous considérons que ceci n'est pas du tout

 28   pertinent car c'est un témoin qui avait commencé et qui n'est pas revenu


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  1   pour le contre-interrogatoire. Or, ici, nous avons une situation tout à

  2   fait différente. Ce sont mes arguments.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Rogers.

  4   Maître Emmerson.

  5   M. EMMERSON : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur le Président, vous

  6   connaissez le contexte et ce qui s'est passé devant le Juge Orie, et ce qui

  7   a été décrit comme un récit sans fin de ce témoin, et son refus de déposer.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je souhaite vous rappeler que je ne

  9   sais pas personnellement ce qui s'est passé devant le Juge Orie.

 10   M. EMMERSON : [interprétation] Dans le jugement rendu par la Chambre de

 11   première instance, il a été ordonné de rouvrir ce procès. Il y avait un

 12   témoin qui a été amené devant le Tribunal plusieurs fois, qui adoptait les

 13   mêmes positions que celles qu'on a vues ici, autrement dit il ne souhaitait

 14   pas répondre aux questions pour toute sorte de raisons différentes, autre

 15   que peur. Certainement, ce n'est pas le cas qu'en vertu de l'article -- de

 16   la requête de la Défense, en vertu de l'article 89(D). Nous considérons que

 17   ce témoin dit la vérité lorsqu'il dit qu'il ne se souvient pas des choses.

 18   Peut-être que c'est une partie des raisons, mais ce n'est pas tout. Mais de

 19   toute façon, nous avons vu ce qui s'est passé avec les tentatives de M.

 20   Rogers d'obtenir des réponses à ses questions, et à chaque fois que M.

 21   Rogers essayait d'obtenir des réponses portant sur les faits, le témoin

 22   disait, je ne suis pas prêt à répondre à vos questions.

 23   Je n'ai pas compté le nombre de fois où le témoin a dit, je ne suis pas

 24   prêt à répondre, mais si l'on suggère que la Défense aurait pu essayer de

 25   contre-interroger le témoin, compte tenu de cela, ceci ne tient pas debout

 26   compte tenu du fait que nous avons vu que le témoin a refusé de répondre.

 27   La suggestion que nous avons acceptée, son affirmation faiblement lorsqu'il

 28   a dit qu'il ne souhaitait pas déposer est absurde. Ce témoin a décidé, il


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  1   est déterminé depuis des années de ne pas répondre sur le fond de

  2   l'affaire. Il est absurde, et il s'agit d'une déformation de la

  3   représentation de ce qui s'était passé dans ce prétoire, si on essaie de

  4   dire que la Défense n'a même pas essayé d'obtenir les réponses. Car le

  5   témoin a une position qui est claire, et qui est, je ne vais pas déposer.

  6   C'est la situation à laquelle la Chambre fait face, et il ne s'agit pas là

  7   de notre tactique. A un moment donné, il faut tirer un trait. C'est ce que

  8   j'ai fait, c'est ce que Me Harvey et Me Guy-Smith ont fait également.

  9   Plusieurs fois, est-ce que vous allez déposer, non, je ne vais pas déposer,

 10   ça n'a aucun sens.

 11   Puis, deuxièmement, M. Rogers apparemment implique que le témoin

 12   mentit concernant ses raisons. Or, hier, il a dit d'une manière sans

 13   équivoque, qu'il était clair que le témoin avait des problèmes de mémoire,

 14   et c'était le fondement de la requête faite par M. Rogers hier. --

 15   M. ROGERS : [interprétation] Vous savez que je n'en dis bien plus

 16   aussitôt après, lisez le compte rendu qui enchaînait sur cette partie. Donc

 17   ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit, ça, c'est de un. Puis, j'ai été

 18   très précis, vous en souvenez.

 19   M. EMMERSON : [interprétation] Il y avait peut-être d'autres raisons,

 20   mais la position de départ, si vous avez demandé le versement du compte

 21   rendu d'audience, c'est parce qu'a-t-il dit, il était clair que le témoin

 22   avait du mal à se souvenir des faits. On ne peut pas être clair et faux en

 23   même temps, dans le même souffle. Alors, M. Rogers vous dit qu'à l'heure

 24   actuelle, vous devez conclure qu'il avait des problèmes de se souvenir, des

 25   difficultés à se souvenir que c'est un menteur. Là, on n'a pas de

 26   [inaudible] sur ce point. M. Rogers, lui, est peut-être très souple et

 27   prendre le contre-pied de ce qu'il dit en moins de temps qu'il faut pour le

 28   dire, mais nous, nous n'avons pas d'avis sur la question. Comprenez,


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  1   Messieurs les Juges, que dans les motifs que vous avez donnés à votre

  2   décision, il y a dans les réponses du témoin au compte rendu d'audience,

  3   pages 424 à 426. Alors, si vous regardez ces passages, si vous pensez de

  4   ces passages qui lui étaient impossibles, en fait, de reprendre ce qu'il

  5   avait dit dans le procès Limaj, c'est exactement ce qu'il vous a dit, je

  6   lis :

  7   "Je ne suis pas en mesure de vous donner une réponse précise, parce

  8   que je ne me souviens pas. Je ne veux pas faire d'erreur, parce que ça va

  9   me causer des ennuis."

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous ne cessez de revenir sur ce

 11   point. Alors quel est votre point de vue ? Dites-vous que les déclarations

 12   faites par le témoin hier, en l'espèce, à propos de l'avis qu'il a de sa

 13   déposition dans le procès Limaj ? Pensez-vous que son avis va déterminer la

 14   valeur probante de sa déposition dans le procès Limaj ?

 15   M. EMMERSON : [interprétation] Non, vous avez donné une décision basée sur

 16   plusieurs de ses réponses de la veille. Permettez-moi de répondre à votre

 17   question. M. Rogers lui a demandé : Ce que vous avez dit est-il vrai ? Il a

 18   répondu par l'affirmative. Donc ce n'est pas complet ce que vous dites.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais rappelez-vous aussi que, dans la

 20   décision, il est dit qu'il avait reconnu que c'était vrai dans le procès

 21   Limaj, il a répété cela dans ce procès-ci.

 22   M. EMMERSON : [interprétation] Mais ce n'est pas ce qu'il a dit ici dans ce

 23   procès. Si vous lisez bien la totalité de sa déposition, et les passages

 24   que vous ne mentionnez pas dans votre décision, il sape tout cela en disant

 25   qu'il n'est pas capable de dire si ses dires dans le procès sont fiables ou

 26   pas. C'est écrit noir sur blanc.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais du coup, je vous pose la question

 28   : Est-ce que vous dites que ce qu'il a dit aujourd'hui a un effet sur la


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  1   valeur probante de sa déposition ou est-ce que ce qu'il a dit alors ?

  2   M. EMMERSON : [interprétation] Non, ce qui a une incidence sur la valeur

  3   probante de sa déposition, c'est que vous vous appuyez sur ce qu'il a dit

  4   ici, en l'espèce.

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, mais c'est quand même lié à ce

  6   qu'il a dit dans le procès Limaj, où il a fait une déclaration, il en a

  7   fourni une, il a répondu aux questions --

  8   M. EMMERSON : [interprétation] Oui, maintenant, je comprends qu'il dit

  9   qu'il ne sait plus sur quoi on peut s'appuyer. C'est ce qu'il a dit aux

 10   pages 424 à 426, du compte rendu en l'espèce. Vous pensez peut-être qu'il

 11   ment et qu'il a d'autres motifs, que c'est un menteur. Alors, il faut le

 12   dire expressément dans votre décision, parce que ceci aurait une influence

 13   sur la valeur probante des éléments de preuve dont vous, vous êtes saisi.

 14   Mais vous ne pouvez pas louvoyer et éviter de répondre à cette question,

 15   qui est examinée, et les réponses du témoin qui sapent fondamentalement

 16   l'équité du procès, parce que ceci touche à sa crédibilité. Soit il vous

 17   disait la vérité, hier, il dit : Moi, je ne me souviens pas si ce que j'ai

 18   dit au procès Limaj était vrai ou pas, ou il vous ment. Mais quoi qu'il en

 19   soit, vous ne pouvez contourner l'obstacle, il faut prendre une conclusion

 20   quant à la valeur probante à donner à sa déposition dans le procès Limaj.

 21   Donc je pense que vous devez prendre le taureau par les cornes, quand vous

 22   parlerez et quand vous -- et de la requête en application du 99(D) [comme

 23   interprété]. Je pense aussi que ce serait utile pour la Chambre d'appel de

 24   voir comment vous avez examiné ceci. Ce serait utile d'avoir votre avis,

 25   parce que; sinon, on va peut-être entacher tout ceci de conjecture quant au

 26   poids que vous auriez accordé.

 27   Alors, avec tout le respect que je vous dois, je vous demande de vous

 28   pencher sur cette partie, sur ce volet-là du compte rendu d'audience, parce


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  1   que c'est tellement important et essentiel pour comprendre et établir la

  2   valeur probante de sa déposition dans le procès Limaj. On ne pourra pas

  3   avoir une décision sur notre requête d'implication du 89(D) si vous ne le

  4   faites pas.

  5   Je comprends, vous avez pu prendre une décision de principe en vertu

  6   du 89(C) sans le compte rendu Limaj, parce qu'il suffit, pour le 89(C)

  7   d'avoir la pertinence et la valeur probante. M. Rogers vous a dit que ceci

  8   concernait Krasniqi et Skender Kuci. Du coup, vous avez décidé que c'était

  9   probant. Mais en vertu du 89(D), vous devez faire une analyse relative du

 10   degré de valeur probante et ça, on ne peut pas le faire sans étudier à la

 11   loupe le compte rendu, chacun des mots du témoin. Parce que, en fait, dans

 12   le 89(C), ça n'est une infime portion uniquement que vous avez examinée par

 13   rapport à tout le procès et ça concerne aussi le contre-interrogatoire.

 14   Maintenant qu'ici, vous avez une autre analyse à faire, suivant le

 15   89(C) ou le 89(D), parce que pour le 89(D), vous devez déterminer si la

 16   valeur probante, la pertinence sont -- disons, ne priment pas vu la

 17   nécessité d'équité du procès, alors il faudra voir vraiment sur quoi

 18   s'appuie l'Accusation, à quelle fin, si ces éléments sont corroborés par

 19   d'autres éléments du procès, s'il y a injuste envers les accusés et la

 20   question de savoir comment juger les raisons véritables qui motivaient le

 21   témoin, hier, par exemple. Nous vous invitons, Messieurs les Juges, à ne

 22   pas ignorer ces éléments, à les accepter ou à les rejeter. Si vous les

 23   accepter, sa simple valeur probante et si vous les rejetez, il mentait.

 24   Là, nous sommes en zone, vraiment sur une peinte savonneuse, vous

 25   savez, parce qu'ici, il n'y a rien -- le seul passage qui peut être

 26   corroboré, c'est celui utilisé par l'Accusation dans le procès -- premier

 27   procès. Page 4255 à 4260. Là, on parle de Skender Kuci et Krasniqi et même

 28   là, on n'a pas respecté les règles régissant l'équité en vertu du 89(D).


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  1   Enfin, je dirais que M. Rogers n'a même pas effleuré la question de

  2   la valeur probante. Il a simplement affirmé que la déposition dans le

  3   procès Limaj avait valeur probante. Mais il faut, normalement, donner une

  4   liste des références de page qui mentionnent ces éléments en l'espèce,

  5   parce que, manifestement, le procès Limaj portait sur une toute autre zone

  6   du Kosovo que Jabllanice. Donc, il y a beaucoup d'éléments sans pertinence.

  7   Alors, manifestement, en vertu du 89(D), ces pages sont exclues, parce

  8   qu'elles n'ont aucune valeur probante ici, en l'espèce. Elles n'ont jamais

  9   été utilisées par l'Accusation dans le premier procès. Il y a des passages

 10   utilisés dans le premier procès, mais le seul qui ait jamais été corroboré

 11   de façon indépendante, c'est celui que j'ai cité. Nous estimons que c'est

 12   clair, il faut exclure. Il vous est impossible de procéder à une évaluation

 13   sans examiner les passages et pour voir si ces critères très rigoureux de

 14   la valeur probante sont respectés et il faut voir ceci au regard de ce que

 15   ce témoin-ci a dit aujourd'hui, par exemple sur ce qu'il était prêt à dire

 16   quoi que ce soit à propos du procès Limaj. Il était impossible à ce témoin,

 17   il n'était d'ailleurs pas prêt à le faire de dire quelles étaient les

 18   parties qu'il pouvait reprendre à son compte.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour faire brève, je rejoins ce qu'a dit Me

 21   Emmerson. Nous connaissons la genèse de ce litige. Je pense ici surtout à

 22   la décision en appel. Peut-être la question pourra-t-elle resurgir, faire

 23   pression sur un témoin, l'assommer. C'est ce qui a été suggéré. Bon, je ne

 24   sais pas si c'est vrai, ce qu'il a dit, mais le témoin se sent "victimisé."

 25   Il est un petit peu à fleur de peau. Alors, est-ce que c'est souvent le cas

 26   pour des témoins qui viennent ici. Alors, vous voulez maintenant l'assommer

 27   de questions, faire pression sur lui pour finalement n'avoir aucune

 28   réponse. Vous l'avez vu pendant toute une journée, il n'y a pas eu de


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  1   réponse. Je trouve que ce serait non seulement irresponsable dans le cadre

  2   de la Défense que j'assure pour mon client, mais ce serait de surcroît

  3   ridicule. Il était ridicule de pense qu'on aurait pu tirer autre chose de

  4   lui.

  5   Je suis quelque peu préoccupé par un des points sur lesquels a insisté M.

  6   Rogers. Il essaie de transmuter, de transformer son argumentaire. Il dit :

  7   Voilà. Il dit que notre requête se fonde sur une faille de mémoire de M.

  8   Kabashi. Ce n'est pas vrai. Ça, c'est une des facettes qu'on a vues ici.

  9   Mais Kabashi a été très, très clair et je vais vous dire en quoi il a été

 10   clair. Là, je reprends une partie d'une réponse qu'il a fournie :

 11   "J'ai fait de mon mieux, j'espère."

 12   Ça, c'est déjà une des citations, conjectures --

 13   M. ROGERS : [interprétation] Avez-vous une référence de page ?

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] 426, c'est un passage sur lequel on ne

 15   cesse de revenir, lignes 1 à 9. Je commence à la ligne 6 -- ou plutôt à la

 16   ligne 5. Autant reprendre le tout :

 17   "C'est là, le problème. Je ne me souviens pas de cette période. Je ne

 18   parviens pas à faire la différence entre cette période-là et aujourd'hui,

 19   le présent."

 20   Donc, peut-être qu'il y a ici une dislocation cognitive. C'est peut-être

 21   aussi un problème. Comment voulez-vous que nous le sachions ?

 22   Il dit : "J'ai fait de mon mieux…"

 23   Mais pour quoi faire, à propos de quoi ?

 24   "J'espère…" dit-il.

 25   Parfait. Mais qu'est-ce qu'il espère ? Il espère qu'il a fait de son mieux,

 26   pour faire quoi ?

 27   "Je pense que je dis la vérité, mais…"

 28   "J'ai fait de mon mieux, j'espère. Je pense." C'est ce qu'il dit; ce sont


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  1   ses mots à lui et pas les miens. Mais, évidemment, moi, je les leur donne

  2   un éclairage particulièrement différent, ici, mais est là que bas blesse,

  3   parce que vous n'avez pas de réponse claire pour savoir ce qui se passe

  4   chez ce témoin.

  5   Il dit : "Je n'ai pas pour habitude de mentir."

  6   Mais qui a pour habitude de mentir ? Est-ce que vous avez jamais

  7   entendu quelqu'un dans ce prétoire dire : "J'ai pour habitude de mentir" ?

  8   C'est ça, qui est sans doute vu dans votre expérience de Juges l'idée

  9   d'avoir quelqu'un qui dit : "Moi, moi, oui, j'ai l'habitude de mentir,

 10   c'est ce que je fais, comme ça, d'habitude. C'est le comportement qui est

 11   le mien d'habitude." Ce n'est pas quelque chose que vous aurez souvent

 12   entendu. Bon, peut-être que vous l'avez entendu et à ce moment-là, ce sera

 13   vraiment une situation particulièrement extrême que vous avez

 14   éventuellement rencontrée.

 15   Je reprends le compte rendu d'audience : "Mais, maintenant, je n'ai -

 16   - je ne suis pas dans un état d'esprit qui me permet de préciser les choses

 17   comme il se doit…"

 18   Ça n'a rien à voir avec une faculté de souvenir. Ça n'a rien à avoir

 19   avec la question de savoir s'il a un problème dans les mécanismes internes

 20   de ses facultés cognitives. On ne sait pas. S'il y a là un problème, on ne

 21   le sait pas. Que nous reste-il ? Il nous reste un témoin qui refuse de

 22   témoigner. Mais comment le dit-il ? Il dit : Bien, je ne peux pas, je ne

 23   sais pas répondre à ces questions. Alors, que faire ? Que faire dans une

 24   telle situation ? M. Rogers voudrait vous dire que nous avons été dociles,

 25   que nous avons accédé à ces affirmations, que nous les avons acceptées.

 26   Mais ça frise le ridicule, nous étions tous ici, nous avons vu comment il

 27   s'est comporté. Nous avons vu, il a répondu, quand il a répondu, ce qu'il a

 28   répondu. Mais l'occasion ne nous a pas été donné de contre-interroger cet


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  1   homme. Que vous reste-il, même pas une histoire dont vous n'auriez vu qu'un

  2   versant ? J'en ai terminé.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Harvey.

  4   M. HARVEY : [interprétation] Je reprends tout ce qu'ont dit mes confrères.

  5   Mais j'aimerais ajouter ceci. Je pense qu'un substitut n'a pas le doit de

  6   dire : Vous avez eu l'occasion, vous aviez une chance que vous auriez dû

  7   saisir de contre-interroger. Alors, lui, lui-même a pris une décision

  8   tactique, la décision de ne pas vous demander à vous la permission de

  9   contre-interroger son propre témoin. S'il pense qu'il s'agit ici d'un

 10   témoin récalcitrant envers l'Accusation, il avait -- il était justifié à

 11   vous demander de le qualifier de témoin hostile, et de le contre-

 12   interroger. Mais au lieu de faire cela, c'est lui qui a pris une décision

 13   tactique, celle de passer par derrière pour faire entrer par la petite

 14   porte des éléments de preuve qu'il voulait faire introduire au dossier, les

 15   éléments qui remontent à un procès qui s'est tenu en 2005.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais est-ce que c'est juste cette

 17   qualification que vous donnez de la position adoptée par M. Rogers en la

 18   matière, parce que, si je vous comprends bien, vous dites qu'il a pris une

 19   décision tactique de faire ce qu'il a fait. Mais n'y a-t-il pas une

 20   distinction très nette à opérer entre la procédure qui aurait été invoquée

 21   si on nous avait demandé d'éventuellement qualifier le témoin de témoin

 22   hostile, et la requête qu'a faite M. Rogers aux fins de recevabilité du

 23   compte rendu d'audience en vertu du 89(C) ?

 24   M. HARVEY : [interprétation] Certes, il y a une distinction à opérer entre

 25   ces deux voies. Ce que j'essaie de dire c'est ceci, et je suis sûr que vous

 26   accepteriez chacun de vous cette idée. Des éléments de preuve écrits

 27   provenant d'un procès antérieur, qui n'ont pas fait l'objet d'un contre-

 28   interrogatoire en l'espèce, et qui ne peuvent pas l'être, parce que nous


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  1   avons été privés de cette possibilité de contre-interrogatoire. Par

  2   excellence, par définition, le poids, la valeur probante est nettement

  3   moindre qu'une situation où vous, vous auriez vu la situation où des

  4   questions sont posées et des réponses sont fournies. Je pense qu'il y a une

  5   autre qualité à un tel élément de preuve. Ce n'est pas l'élément de preuve

  6   que vous, Messieurs les Juges, vous auriez privilégié, j'en suis sûr. Je

  7   suis sûr que vous préféreriez obtenir du témoin --

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-moi d'intervenir, Maître

  9   Harvey.

 10   M. HARVEY : [interprétation] Volontiers.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais est-ce que la décision concernant

 12   la recevabilité, est-ce qu'en fait, elle n'a pas déjà abordé la question du

 13   poids à donner, vu les circonstances que vous avez évoquées ?

 14   M. HARVEY : [interprétation] Vous vous êtes  dit, bien sûr, vous allez

 15   déterminer le poids à donner à ce compte rendu d'audience du procès Limaj.

 16   Mais le dilemme qui assaille toujours un avocat dans de telles

 17   circonstances dans ce Tribunal, c'est ce qu'on ne sait pas quel est le

 18   poids que vous allez donner.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais est-ce que vous le savez dans un

 20   autre système juridique ? Voici, c'est le problème. Vous dites c'est le

 21   problème dans ce Tribunal, mais dans un autre système juridique; est-ce que

 22   vous savez quel est le poids à donner par un juge à un élément de preuve ?

 23   M. HARVEY : [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais j'aimerais pouvoir vous donner

 25   cette décision, si c'était possible.

 26   M. HARVEY : [interprétation] Je me contente de dire que forcément, vous

 27   allez donner moins de poids à un élément de preuve sur lequel il n'y a pas

 28   eu de contre-interrogatoire, sur un élément écrit, un élément qui était


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  1   fourni il y a six ans, moins de poids que le pois que vous accorderiez à un

  2   témoin que vous auriez vu en processus d'audition, que vous avez eu

  3   l'occasion de voir dans son comportement en répondant à des questions

  4   précises. Je pense que là, c'est une démarche fondamentale qui sera retenue

  5   par n'importe quel tribunal. Je ne veux pas aller plus loin, je ne cherche

  6   pas non plus ici à entreprendre votre décision, pas du tout. Je suis sûr

  7   que vous l'avez soupesé avec les plus grands soins.

  8   Tout ce que je dis, c'est que je comprends parfaitement d'ailleurs les

  9   raisons du Procureur, il a pris une décision tactique. Il n'a pas cherché à

 10   contre-interroger ce témoin, après quoi, il accuse la Défense d'avoir elle,

 11   pris une décision tactique de ne pas contre-interroger ce témoin.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous interromps. Il ne vous accuse

 13   pas, il le dit simplement comme ça, si j'ai bien compris, bien sûr pour

 14   autant que je l'ai compris. Il ne cherche pas à vous imposer la

 15   responsabilité en disant que c'était une mauvaise décision. Vous avez dit

 16   que vous avez utilisé votre sagacité pour prendre cette décision, mais il

 17   dit qu'il essayait de nous montrer ce qui à son avis est la conséquence de

 18   cette décision.

 19   M. HARVEY : [interprétation] Moi, je vous dis comment je vois les

 20   conséquences de cette décision. Moi, je ne pense pas être l'accusé ici. Je

 21   n'ai pas le sentiment d'être mis en accusation.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais, non, bien sûr, et l'Accusation

 23   ne vous accuse pas d'être ici de quoi que ce soit.

 24   M. HARVEY : [interprétation] Je n'ai pas la peau si fine, disons je ne suis

 25   pas si tendre que cela. Mais ce qui est important c'est l'aspect que prend

 26   l'administration de la justice, qui, peut-être, image qui peut être entamée

 27   si la Défense n'a pas l'occasion de procéder au contre-interrogatoire

 28   d'éléments de preuve qui, d'après l'Accusation, ont une grande importance.


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  1   C'est tout ce que je peux faire raisonnablement, trois jours d'audience ont

  2   été consacrés à la question ou de voir si le témoin allait dire quoi que ce

  3   soit. Je ne peux pas aller plus loin, me semble-t-il. Maintenant, j'examine

  4   la page 397 du compte rendu d'audience, ligne 19. Une question était posée,

  5   elle portait sur Krasniqi et Skender Kuci, c'était à la ligne 11 de cette

  6   page. M. Rogers, a demandé, pour la question suivante :

  7   "Monsieur Kabashi, je reviens à ces deux hommes, Pal Krasniqi et Skender

  8   Kuci; qu'est-ce que vous pouvez dire à la Chambre à propos de ce que vous

  9   avez vu, entendu dire à propos de ces hommes à Jabllanica, en 1998 ?"

 10   Quelques lignes plus loin, je ne pense pas ici [inaudible] était important,

 11   voici la réponse du témoin : 

 12   "L'auteur, il est libre aujourd'hui, et jamais il a été mis en détention,

 13   jamais il n'a été l'objet de poursuite. Et je parle précisément du même

 14   sujet que j'ai vu bien des fois dans ma vie. Comment faire confiance à

 15   l'Accusation, comment croire que le Procureur a fait de son mieux ?"

 16   On a lancé beaucoup de conjectures pour essayer de deviner pourquoi le

 17   témoin a dit qu'il ne pouvait pas répondre. Il y a plusieurs raisons,

 18   semblait-il, notamment le fait qu'il sent qu'il a été en fait dupé, pas par

 19   M. Rogers en personne mais par tous ceux qui ont mené l'enquête, il y a

 20   bien des années de cela. Il a l'impression d'être la victime de

 21   l'Accusation, en l'espèce. La seule question simple qui se posait était

 22   celle-ci, en tant qu'avocat de la Défense, pouvions-nous le convaincre de

 23   dire autre chose, parce que nous, nous ne sommes pas l'Accusation ? Il nous

 24   voit comme étant des avocats de la Défense, et on lui demande s'il peut

 25   répondre à nos questions, il dit non, à quoi sert-il d'aller plus loin.

 26   M. EMMERSON : [interprétation] Une question technique avant que vous ne

 27   suspendiez l'audience pour décider de ce que vous allez faire. Vous avez

 28   fait référence au paragraphe 16 de la décision Milosevic. Il y a un passage


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  1   dans ce paragraphe qui ne se retrouve pas dans votre décision, paragraphe

  2   16, disais-je :

  3   "Lorsque le témoin est présent devant les Juges et atteste oralement de

  4   l'exactitude de la déclaration qu'il a faite précédemment, les éléments

  5   versés au dossier ne sauraient être considérés comme étant exclusivement

  6   écrits au sens où l'entend le 92 bis. Le témoignage de ce témoin est un

  7   panachage d'éléments écrits et oraux, verbaux."

  8   Ceci étant, vous devrez examiner au moment de juger cette déposition, si

  9   elle reste au dossier, vous n'aurez pas simplement à voir le compte rendu

 10   dans le procès Limaj mais aussi ce qu'a dit le témoin ici à l'audience ou,

 11   en tout cas, bon, les passages du compte rendu Limaj que vous considérez

 12   comme probants sur l'iniquité possible du procès. Donc c'est un mélange si

 13   vous voulez, et puisque la Chambre d'appel Milosevic l'a dit je vous

 14   rappelle, il faut que le témoin atteste oralement de l'exactitude des

 15   éléments repris -- écrits donc dans l'administration de la preuve dans le

 16   domaine pénal. Il faut voir s'il a attesté de l'exactitude. Ça doit être

 17   au-delà de tout doute raisonnable et la charge de la preuve revient comme

 18   dans tous les cas à l'Accusation. Par conséquent, vous devrez vous penchez

 19   sur les réponses données par ce témoin pour ce qui est de la fiabilité de

 20   ce qu'il a dit dans le procès Limaj pour ce qui est des critères dans

 21   l'administration de la preuve.

 22   Si j'ai bien compris ce qu'a dit Me Harvey, lundi soir, M. Rogers nous a

 23   dit que, s'il n'avait pas de bonne réponse, il allait peut-être demander à

 24   être -- il allait peut-être envisager la possibilité de le contre-

 25   interroger.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il envisageait de le faire.

 27   M. EMMERSON : [interprétation] Mais, vendredi, il a envoyé une lettre --

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous n'avons pas reçu cette lettre --


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  1   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous ne voulons pas la voir.

  3   M. EMMERSON : [interprétation] Je peux vous dire qu'il a dit à la Défense

  4   qu'il allait en toute probabilité demander l'autorisation de contre-

  5   interroger le témoin.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Je ne dis pas qu'il en a l'obligation. Mais

  8   pourquoi ne l'a-t-il pas fait ? Il n'aurait pas eu de réponse. Il sait

  9   aussi bien que nous.

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, mais vu une décision que nous

 11   avons reçue récemment, je ne sais pas comment vous allez aborder la

 12   question de l'amalgame du fait, par exemple, que, moi, je me rallie aux

 13   remarques de Me Harvey.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Guy-Smith.

 15   Pour ne pas perdre de temps, il faudra respecter le Règlement. Quand vous

 16   avez un requerrant, il doit motiver sa requête, il termine, il y a une

 17   réponse, et puis il s'arrête, à moins qu'il n'y ait une demande de proroger

 18   ou de prolonger parce que sinon on fait du ping-pong tout le temps.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je vous donne la parole.

 21   M. ROGERS : [interprétation] Excusez-moi, moi aussi, je suis parti trop tôt

 22   des "starters."

 23   Je ne veux pas proroger excessivement le débat, mais il y a pas mal de

 24   choses qui ont été dites par rapport à la valeur de la déposition dans le

 25   procès Limaj. Il a dit notamment que je n'avais pas donné une liste des

 26   références du procès Limaj. Je suis tout à fait prêt à vous donner la

 27   plupart des parties concernées, et ça ne concerne pas que Krasniqi et Kuci.

 28   Ça concerne aussi les questions des dirigeants de la base, par exemple, à


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  1   Jabllanice, la question de la continuité des événements entre avril 1998

  2   jusqu'en juin, juillet, et même plus tard, et d'autres événements survenus

  3   dans la région. Donc cet homme ne sait pas contenter de ne parler que de

  4   Kuci et de Krasniqi. Il mentionne d'autres personnes, certaines étant

  5   mentionnées dans l'acte d'accusation et d'autres pas, des liens qu'il y

  6   avait entre ces personnes, de ce qu'il a vu s'agissant de deux des accusés,

  7   il parle aussi un peu de M. Haradinaj, mais il ne fait pas que parler de

  8   Krasniqi et de Kuci. Je suis sûr qu'après avoir lu le compte rendu vous

  9   l'aurez déjà remarqué. Ça c'était une brève remarque.

 10   Je pense que vous avez aussi déjà réglé cette question-ci, ici tout tourne

 11   autour du poids que vous avez donné, la Défense -- on m'a dit que j'étais

 12   agile, mais non, moi, je n'ai pas -- on dit que j'ai essayé de louvoyer,

 13   que j'ai essayé de trouver la fragile équilibre entre la valeur probante et

 14   le poids, alors qu'ici tout tourne autour du poids à donner à cet élément,

 15   la Défense le sait bien elle dit qu'il n'y a pas de poids à donner, donc du

 16   coup il n'y a pas de valeur probante. Nous ne sommes pas d'accord. Il y

 17   avait clairement une valeur probante, inutile d'en dire plus. Je vous

 18   remercie.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de poursuivre, je vous dois des

 20   excuses, parce que nous avions fait une pause auparavant, et du coup, nous

 21   avons oublié si nous devons faire une pause sous peu parce qu'il y a les

 22   interprètes. La sténotypiste jette les bras en l'air tellement elle est

 23   épuisée. Je pense que, pour elle -- ne serait-ce que, pour elle, l'heure

 24   est venue de faire une pause, et je vois qu'elle opine du chef. Ce n'est

 25   peut-être pas le moment habituel auquel où nous faisons une pause.

 26   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Une seule vérification, Maître

 28   Emmerson.


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  1   Vous dites que le greffe a reçu une lettre ?

  2   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ou est-ce que vous devriez l'envoyer--

  4   M. EMMERSON : [interprétation] Non, j'ai dit que j'avais cru comprendre -

  5   peut-être que je me trompe; si je me trompe, je le dirai - j'avais cru

  6   comprendre que la lettre de M. Rogers, envoyée lundi à 18 heures 49, qui

  7   disait ceci : Attendez-vous à une demande de considérer le témoin comme

  8   hostile --

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 10   M. EMMERSON : [interprétation] -- est envoyée au greffe et je vois la liste

 11   des destinateurs peut-être que la lettre n'a pas été au greffe.

 12   M. ROGERS : [interprétation] Effectivement. C'est simplement une espèce de

 13   courtoisie que j'ai manifesté à l'égard de la Défense pour l'aider à se

 14   préparer. J'espère -- je veillerai à ce que ces rapports soient plus

 15   complets, en tout cas, plus formels à l'avenir.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors, je ne sais même plus maintenant

 17   quand il faut faire la pause. En tout cas, nous allons faire une pause

 18   maintenant et nous reprendrons à midi 15, et puis nous irons jusqu'à la fin

 19   de la journée.

 20   --- L'audience est suspendue à 11 heures 43.

 21   --- L'audience est reprise à 12 heures 18.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous avons reçu le message comme quoi

 23   vous vouliez prendre la parole, mais avant de ce faire, nous voulions dire

 24   aux parties que nous avions entendu tous les arguments qui sous-tendaient

 25   leurs demandes et que les Juges de la Chambre vont donc se penchez là-

 26   dessus.

 27   Oui, Maître Guy-Smith.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci beaucoup. Je crois que le témoin, qui


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  1   va être appelé par l'Accusation, le témoin suivant --

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation] [hors micro] 

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je crois que le témoin, qui va être

  4   appelé par l'Accusation, est M. Stijovic, la Défense de M. Balaj a déposé

  5   une requête ex-parte pour laquelle nous n'avons pas encore reçu de

  6   décision, qui pourrait avoir un impact direct sur le contre-interrogatoire

  7   potentiel de ce témoin. Compte tenu de cela, je pense ou je dirais nous ne

  8   serons pas en mesure de procéder au contre-interrogatoire si cela se

  9   produit. Mais je ne sais pas quelle sera la décision des Juges de la

 10   Chambre concernant notre requête.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous prenons acte du fait que nous

 12   n'avons pas pris la décision. Est-ce que cela vous causerait problème si le

 13   témoin déposait ?

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, mais je voulais que vous le sachiez

 15   avant qu'il dépose, parce que je ne voulais pas ensuite me lever et faire

 16   la demande à ce moment-là. Donc, je ne voulais pas que cela se produise.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous vous en sommes très reconnaissant

 18   et nous essaierons de prendre une décision rapide.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci à vous.

 21   Oui, Monsieur Rogers.

 22   M. ROGERS : [interprétation] Deux points avant de faire comparaître M.

 23   Stijovic. Le premier porte sur le témoin numéro 75. Il est prévu pour

 24   comparaître cette semaine. Il est sur notre demande en vertu de l'article

 25   92 ter, mais nous avions visé à le retirer de la liste avant qu'une

 26   décision soit prise. Mais je présente une requête orale pour re-prévoir la

 27   comparution de ce témoin viva voce. Je pensais que je me devais de vous

 28   avertir de cela et du fait qu'il est à nouveau sur le calendrier des


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  1   comparutions.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Merci. Je me souviens avoir vu

  3   quelque chose à ce sujet. Est-ce que les parties ont des commentaires à

  4   faire à ce sujet ?

  5   Maître Emmerson.

  6   Maître Guy-Smith.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Harvey ?

  9   M. HARVEY : [interprétation] Non.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il n'est pas prévu à nouveau sur la

 11   liste des témoins.

 12   M. ROGERS : [aucune interprétation]

 13   L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend : Il est maintenant à nouveau prévu

 14   sur la liste des témoins.

 15   M. ROGERS : [interprétation] L'autre point porte sur le témoin numéro 80.

 16   Je savoir si l'on pourrait aller passer à huis clos partiel.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à huis

 18   clos partiel ?

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous y sommes.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 512-520 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 24   [Audience publique]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Madame la Greffière d'audience.

 26   Oui, Monsieur Rogers.

 27   M. ROGERS : [interprétation] Le témoin suivant est Zoran Stijovic, et c'est

 28   Mme Kravetz et M. Menon qui vont interroger ce témoin. Si vous me le


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  1   permettez, je vais quitter le prétoire.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez quitter le prétoire.

  3   M. ROGERS : [interprétation] Merci.

  4   M. DIXON : [interprétation] Alors que M. Rogers quitte le prétoire et avant

  5   que le témoin arrive, vous avez pris une décision hier concernant -- vous

  6   avez donc pris une décision hier concernant une décision confidentielle

  7   pour la déclaration 92 ter du témoin suivant. Il y a une question

  8   importante concernant une déclaration 92 ter qui doit être résolue avant

  9   qu'un témoin comparaisse. En fait, la déclaration qui a été versée - et

 10   l'Accusation a fait la demande pour que cette déclaration soit également

 11   admise dans ce nouveau procès - il y a eu certaines expurgations qui ont

 12   été apportées à cette déclaration. C'est suite à une décision qui a été

 13   prise par la précédente Chambre de première instance, c'est dans cette

 14   déclaration expurgée -- c'est cette déclaration expurgée que l'Accusation a

 15   demandé d'être versée dans ce procès. Je voulais donc bien confirmer qu'il

 16   s'agissait bien de la déclaration expurgée avec un certain nombre de

 17   paragraphes qui avaient été enlevés. On demande donc au témoin de confirmer

 18   cette déclaration-là et pas une autre. C'était la première question, mais

 19   peut-être que l'on peut obtenir la réponse à ce premier point avant de

 20   passer au deuxième.

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, me permettez-vous de

 22   répondre à cette question ?

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

 24   Mme KRAVETZ : [interprétation] Nous avons remarqué que cette déclaration 92

 25   ter est recensée dans l'annexe. Donc il s'agit en fait de la même

 26   déclaration expurgée qui avait été versée dans le présent procès. Nous

 27   n'avons pas l'intention de demander la version non expurgée -- de demander

 28   le versement de la version non expurgée, et ceci a été mentionné à la


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  1   Défense, dans l'annexe de notre requête.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y, Maître Dixon.

  3   M. DIXON : [interprétation] Oui, la raison pour laquelle j'ai pris la

  4   parole, c'est que, dans la liste des pièces qu'il souhaite utiliser dans le

  5   cadre de l'interrogatoire du témoin, la version non expurgée de cette

  6   déclaration figure sur la liste. Donc je voulais m'assurer qu'il n'allait

  7   pas utiliser cette déclaration avec le témoin alors que la demande qui

  8   avait été faite portait sur la version expurgée. Si tout est clair, dans ce

  9   cas-là, nous n'avons pas besoin de poser d'autres questions.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Dixon.

 11   M. DIXON : [interprétation] La deuxième question, il y a un certain nombre

 12   de documents qui ont été présentés au témoin durant sa déposition qui a

 13   duré sept jours environ. Beaucoup de ces documents n'ont finalement pas été

 14   versés au dossier suite à une décision de l'ancienne Chambre de première

 15   instance, tel que ceci vous a été mentionné précédemment. L'Accusation

 16   d'après ce que j'ai compris, n'a l'intention que de présenter un de ces

 17   documents, d'après le préavis des pièces qui seront utilisées. Donc c'est

 18   un seul document en question, et nous en parlerons lorsque ce document sera

 19   présenté au témoin. Mais je pense qu'il est important de le mentionner.

 20   Etant donné qu'on aura tout le corpus des éléments de preuve qui seront

 21   annotés, il est important de prendre en compte la décision des Juges de la

 22   Chambre, dans la mesure où lorsque ces documents ont été exclus de la

 23   déposition précédente, les Juges de cette Chambre ont pris une décision que

 24   la déclaration 92 ter pouvait être versée. Mais étant donné que ces

 25   documents étaient exclus, ils ont été expurgés de la déclaration 92 ter, et

 26   les Juges de la Chambre ont dit : C'est qu'en fait, ils allaient ignorer

 27   les documents lorsqu'ils allaient lire la déclaration 92 ter, et que toute

 28   déclaration qui a été faite concernant ces documents étaient considérés


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  1   comme n'ayant pas de vraies sources. Donc nous voudrions rappeler cela,

  2   c'est-à-dire que les documents qui ont été exclus et l'Accusation n'a pas

  3   souhaité reprendre ces documents, ces documents ne devraient pas être pris

  4   en compte conformément à la décision de la précédente Chambre de première

  5   instance. Parce qu'étant donné que l'Accusation a fait la demande du

  6   versement de cette déclaration, qui faisait l'objet donc de [inaudible], à

  7   savoir les documents qui n'étaient pas considérés comme étant recevables.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Dixon, les Juges de la Chambre

  9   ont mentionné à plusieurs reprises que nous ne vivons pas dans l'ombre du

 10   premier procès.

 11   M. DIXON : [interprétation] Je comprends tout à fait très bien.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ça, c'était pour commencer.

 13   Deuxièmement, cette Chambre de première instance a pris bonne note de

 14   l'avertissement ou des bémols qu'a exprimés la Chambre d'appel dans sa

 15   décision, à savoir que certains éléments ont eu lieu dans le précédent

 16   procès que l'on doit prendre en compte; cependant, nous prenons également

 17   acte du fait que la même décision de cette Chambre d'appel stipule qu'il

 18   est fort possible de verser des documents dans ce nouveau procès qui n'ont

 19   pas été versés dans le présent procès et vice versa. Tout dépendra de ce

 20   qui est versé par les différentes parties en fonction des critères que nous

 21   appliquerons. Bien sûr, la Chambre d'appel a apporté ces bémols et nous

 22   prenons ceci en compte. Mais je ne pense pas que les Juges de cette Chambre

 23   devront prendre exactement les mêmes mesures qui ont été prises par la

 24   précédente Chambre de première instance.

 25   M. DIXON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, mais je voulais

 26   simplement m'assurer que c'était très clair, à savoir que la déposition qui

 27   va venir a fait l'objet de certaines expurgations, et cetera.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'Accusation ne se sent pas contestée.


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  1   Maître Dixon, je vous propose que, le moment voulu, lorsque quelqu'un --

  2   quelque chose se produira, vous puissiez faire une objection. Mais nous

  3   gérerons ces objections le moment voulu.

  4   M. DIXON : [interprétation] C'était simplement pour prendre les devants.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais la manière dont vous présentez

  6   ceci, vous avez -- vous avez l'impression -- j'ai l'impression que vous

  7   essayez, en fait, de lier les mains des Juges de cette Chambre et de

  8   l'Accusation.

  9   M. DIXON : [interprétation] Il y aura certaines objections.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous les gérerons le moment voulu.

 11   M. DIXON : [interprétation] Merci.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne pense pas que Me Dixon essaie de lier

 13   les mains de qui que ce soit. Je pense qu'il faudrait interpréter ceci de

 14   manière différente. Si les choses évoluent de la même manière, il y a eu

 15   une décision que l'on pourrait appeler la loi sur -- dans l'affaire. On

 16   pourrait considérer ceci comme des orientations, mais si la situation est

 17   similaire, dans ce cas-là, on vous encourage à prendre en compte et à

 18   suivre la décision de la précédente Chambre de première instance. Si ce

 19   n'est pas le cas et si, donc, la situation n'est pas la même -- si la

 20   situation est la même et que vous ne suivez pas la décision de la première

 21   Chambre de première instance, dans ce cas-là, on a l'impression qu'en fait,

 22   une personne va être jugée pour les crimes à deux reprises.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas sûr que j'aie besoin de

 24   vous répondre. Il n'y a pas une question de juger deux fois la même

 25   personne pour les mêmes crimes. Il s'agit d'un nouveau procès, et pour ces

 26   six chefs d'accusation, on doit considérer qu'il n'y a jamais eu de premier

 27   procès.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je comprends tout à fait ce que vous voulez


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  1   dire, mais ceci, malheureusement, ne permet pas d'éviter le fait qu'une

  2   personne soit jugée deux fois pour les mêmes crimes.

  3   Je comprends très bien votre position, Monsieur le Président, mais en

  4   disant qu'il s'agit d'un nouveau procès uniquement sur les six chefs

  5   d'Accusation, cela ne suffit pas. On pourrait dire qu'il s'agit d'un procès

  6   de novo, d'un nouveau procès ou quoi que ce soit, mais cela n'évite pas

  7   nécessairement le principe qui sous-tend qu'une personne ne peut pas être

  8   jugée deux fois pour les mêmes crimes. J'espère que nous n'arrêterons pas à

  9   ce stade.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   Oui, Madame Kravetz.

 12   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je n'ai pas d'argument à présenter par

 13   rapport au point que vient de soulever de Me Guy-Smith.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est simplement que vous étiez

 15   debout, donc je pensais que vous vouliez prendre la parole.

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je voulais simplement attendre que le témoin

 17   arrive.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais je vais vous dire une chose et

 19   peut-être que c'est quelque chose qui m'est spécifique. En général,

 20   lorsqu'une partie se lève, l'autre partie est assise. Lorsque tout le monde

 21   se lève, j'ai l'impression que vous voulez en fait avoir maille à partir

 22   sur un box de ring [comme interprété]. Donc, je vous propose que lorsqu'il

 23   y en a un qui parle, l'autre est assis et vice-versa. Donc, lorsque vous

 24   êtes assis, j'ai l'impression que lorsque vous vous levez, c'est que vous

 25   avez quelque chose d'urgent à dire.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je prends note de ce que vous voulez dire.

 27   J'avais entendu la porte s'ouvrir et je pensais que le témoin allait entrer

 28   dans le prétoire.


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

  2   Nous sommes en audience publique. Est-ce que l'on peut faire

  3   maintenant entrer le témoin dans le prétoire ?

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le témoin peut-il lire la déclaration

  6   solennelle ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  8   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Bonjour Monsieur.

 10   Veuillez vous asseoir.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   LE TÉMOIN: ZORAN STIJOVIC [Assermenté]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   Interrogatoire principal par Mme Kravetz

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. Est-ce que vous pourriez dire, pour

 18   le compte rendu d'audience, quel est votre nom et votre prénom ?

 19   R.  Je m'appelle Zoran Stijovic.

 20   Q.  Où êtes-vous né et où, Monsieur Stijovic ?

 21   R.  Je suis né le 13 novembre 1962, à Podgorica, au Monténégro.

 22   Q.  Monsieur, avez-vous déjà fait une déclaration auprès du bureau du

 23   Procureur de ce Tribunal le 26 septembre 2007 ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Avez-vous eu l'occasion de passer en revue cette déclaration récemment

 26   ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Suite à cela, est-ce que vous pouvez nous dire si ceci reflète de


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  1   manière exacte ce que vous avez dit au moment de votre entretien ?

  2   R.  Oui, c'est le cas.

  3   Q.  Si l'on vous examinait aujourd'hui, concernant les mêmes questions,

  4   est-ce que vos réponses auraient été les mêmes ?

  5   R.  Certainement, oui.

  6   Q.  Merci, Monsieur.

  7   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, la déclaration porte

  8   le numéro 00931, en vertu de l'article 65, et je demande son versement au

  9   dossier à ce stade.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La déclaration est versée au dossier.

 11   Peut-on lui attribuer une cote ?

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P121.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 14   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Monsieur, avez-vous déjà déposé devant ce tribunal dans l'affaire

 16   contre Haradinaj et consorts en octobre 2007 ?

 17   R.  Oui, j'ai déposé.

 18   Q.  Est-ce que au cours de cette dernière journée, vous avez eue l'occasion

 19   de passer en revue le compte rendu de votre déposition préalable précédente

 20   ?

 21   R.  Oui. Pendant le week-end, j'ai passé en revue -- ou plutôt, j'ai écouté

 22   l'enregistrement audio du compte rendu d'audience.

 23   Q.  Ayant réécouté cela, est-ce que vous êtes convaincu que ceci reflète de

 24   manière exacte ce que vous avez à l'époque, lorsque vous avez fait votre

 25   déposition dans cette affaire ?

 26   R.  Oui. Ceci reflète ce que j'ai dit à l'époque.

 27   Q.  Si on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vos

 28   réponses auraient été les mêmes -- seraient les mêmes ?


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  1   R.  Certainement, oui, pour ce qui est du fond. Mais peut-être s'agissant

  2   de la terminologie, il y aurait certaines correction ou plutôt certains

  3   éléments que j'aurais ajoutés. Mais au fond, j'aurais dit la même chose.

  4   Q.  Merci beaucoup.

  5   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier

  6   de cette -- ce compte rendu d'audience. Il y a deux numéros 65 ter. D'abord

  7   04049. C'est la version publique et expurgée du compte rendu d'audience, et

  8   puis la deuxième qu'il faut verser sous pli scellé, 04050.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Avant que la Chambre rende une décision

 10   concernant cela, est-ce que puis-je demander d'avoir un voir dire sur la --

 11   concernant la question au sujet des écoutes de l'enregistrement audio de la

 12   déposition -- du compte rendu de la déposition de ce témoin ?

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez demandé quoi ?

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Voir dire.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Vous pouvez.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci beaucoup.

 17   Q.  Bonjour, Monsieur.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 20   Q.  Bonjour, Monsieur. Vous avez dit que vous avez écouté l'enregistrement

 21   audio de votre déposition pendant le week-end.

 22    Est-ce que vous pouvez nous dire combien de temps -- combien d'heures vous

 23   avez passées à écouter votre -- l'enregistrement audio de votre déposition

 24   ?

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que ceci ne serait

 26   pas pertinent au moment du contre-interrogatoire, Maître Guy-Smith ?

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est peut-être pertinent maintenant pour

 28   ce qui est de la recevabilité de ces informations, car ceci peut concerner


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  1   sa crédibilité.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le

  3   Président, je pense que mon éminent collègue pourrait traiter de cela au

  4   moment où il passera au contre-interrogatoire de ce témoin.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est justement ce que j'essayais

  6   d'explorer avec le conseil.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je peux en traiter plus tard, si vous le

  8   souhaitez. Je pensais qu'il était plus approprié de le faire maintenant,

  9   mais je me plierai à la décision de la Chambre.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Faites-le pendant votre

 11   contre-interrogatoire.

 12   Poursuivez, Madame Kravetz.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'ai demandé que ces deux versions du compte

 14   rendu d'audience reçoivent des cotes.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame la Greffière d'audience, ces

 16   documents sont versés au dossier en vertu de l'article 65 ter. Quelles sont

 17   leurs -- les cotes, s'il vous plaît ?

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce 65 ter 04049 sera P122 et 65

 19   ter 04050 sera P123 sous pli scellé.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, il existe plusieurs

 22   documents s'y référant, des pièces à conviction qui concernent à la fois le

 23   compte rendu d'audience et la déclaration écrite de ce témoin, ce qui

 24   figure dans l'annexe à notre requête en vertu de l'article 92. Nous avons

 25   informé que le Juriste de la Chambre et la Défense nous leur avons

 26   communiqué la liste des pièces à conviction qui, à notre avis, se réfère à

 27   la déclaration écrite et le compte rendu d'audience et nous demandons leur

 28   versement au dossier. Puisqu'il s'agit d'une longue liste, comme la Chambre


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  1   le sait certainement, sur la base de notre requête, je propose au lieu de

  2   lire chacun des numéros 65 ter pour le compte rendu d'audience que la

  3   Chambre donne l'ordre au Juriste de la Chambre et que les cotes soient

  4   attribuées par la suite. Mais si vous le préférez, je peux donner lecture

  5   de ces références.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous pouvons donner cette ordonnance

  7   seulement s'il n'y a pas d'objection de la part de la Défense; sinon, il va

  8   falloir en traiter une par une.

  9   M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, comme nous avons indiqué

 10   dans notre réponse à la requête 92 ter, nous n'avons pas d'objection à ce

 11   que ces documents qui ont été versés au dossier dans le cadre du premier

 12   procès -- dans le cadre de la déposition de ce témoin soient versés au

 13   dossier. Mais notre objection porterait seulement sur les documents qui

 14   n'ont pas été versés au dossier et qui ne sont pas sur la liste, donc nous

 15   ne nous opposons à ce que les cotes leur soient attribuées. La seule

 16   condition c'est que l'Accusation fournisse seulement ces documents-là, les

 17   documents qui ont déjà été versés au dossier dans l'autre affaire.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ne faut-il pas les verser au dossier

 19   pendant votre contre-interrogatoire ?

 20   M. DIXON : [interprétation] Je pense que nous pouvons faire cela pendant

 21   que nous sommes debout.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ai-je bien compris que vous dites

 23   clairement qu'il s'agit de la liste qui comporte seulement les documents

 24   qui ont déjà été versés au dossier dans le procès précédent ?

 25   M. DIXON : [interprétation] Oui, versés au dossier et admis.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, et contre-interrogés, ils ont

 27   fait l'objet du contre-interrogatoire ?

 28   M. DIXON : [interprétation] Oui.


Page 534

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les autres n'y étaient pas.

  2   M. DIXON : [interprétation] Effectivement, non.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc vous n'avez pas d'objection sur

  4   toute la liste ?

  5   M. DIXON : [interprétation] Effectivement.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est la position de la Défense Balaj.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Harvey.

  9   M. HARVEY : [interprétation] Oui, et de la Défense Brahimaj aussi.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La déclaration et les pièces à

 11   conviction peuvent être versées au dossier et Madame la Greffière

 12   d'audience vous pouvez leur attribuer des cotes en dehors du temps utilisé

 13   dans ce prétoire.

 14   Madame la Greffière d'audience.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Un mémoire interne sera déposé dès que

 16   les cotes seront assignées.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 18   Mme KRAVETZ : [interprétation] Puis autre chose concernant les documents

 19   s'y référant. Je souhaite simplement attirer l'attention de la Chambre sur

 20   le fait qu'environ 13 de ces documents ont été versés au dossier dans le

 21   procès précédent avec des projets de traduction, que nous avons gardés en

 22   tant que tel dans le prétoire électronique simplement pour ne pas modifier

 23   le compte rendu d'audience par rapport à ce qui a été déjà versé au

 24   dossier, mais peut-être une traduction révisée serait utile à la Chambre et

 25   il serait utile qu'elle soit téléchargée -- je dis simplement cela car à un

 26   moment donné lorsque vous examinerez les pièces à conviction peut-être vous

 27   allez constater qu'il y en a beaucoup qui n'ont pas été révisées ou qui

 28   sont sous forme de projets de traduction.


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je souhaite être sûr de vous

  2   comprendre. Dans la mesure dans laquelle ces traductions existent déjà dans

  3   le prétoire électronique, je pense que la Chambre ne veut pas de

  4   duplication. Dans la mesure dans laquelle vous dites qu'il s'agit des

  5   projets de traduction ou des traductions non révisées je pense qu'il est

  6   surprenant de les appeler projets alors qu'ils ont été versés au dossier.

  7   Mme KRAVETZ : [interprétation] C'est ainsi qu'ils ont été versés au

  8   dossier.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 10   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je ne veux pas expliquer pourquoi c'était le

 11   cas.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je suppose qu'il n'y avait pas suffisamment

 14   de temps pour obtenir des traductions révisées à l'époque, mais c'est

 15   simplement une supposition de ma part.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis un peu surpris par la position de

 18   l'Accusation. Les pièces à conviction ont été versées au dossier, elles

 19   sont dans le compte rendu d'audience, on s'est fié sur ces traductions, ils

 20   ont fait partie des déclarations 92 ter, ils sont des pièces à conviction

 21   se référant à la déposition de ce monsieur, et l'idée qu'il serait possible

 22   de remplacer ces traductions ferait l'objet de nos objections, car ceci ne

 23   serait pas approprié pour toute une série de raisons.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Comme je viens de dire à Mme Kravetz,

 25   la Chambre ne considère pas que ceci est nécessaire.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Consigné au compte rendu

 28   d'audience qu'il ne s'agit plus de projets de traduction, mais ce sont des


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  1   traductions versées au dossier.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci.

  3   Avec votre permission je vais lire le résumé.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

  5   Mme KRAVETZ : [interprétation] Le témoin a travaillé en tant que chef de la

  6   section analytique du centre du Sûreté de l'Etat de Serbie à Pristina, la

  7   DB, entre 1995 et 1999. Il décrit la zone de responsabilité du SUP de

  8   Djakovica. Il décrit également les sources avec lesquelles il recueillait

  9   les informations pour la police.

 10   Le témoin a décrit l'organisation de la RDB -- KIM [phon] et la manière

 11   dont la RDB et la section analytique recueillait les renseignements et les

 12   informations de trois centres de RDB régionaux : Pristina, Prizren, et

 13   Gnjilane. Ensuite il décrit le flux d'information des opérationnels du RD

 14   sur le terrain jusqu'à Belgrade, et l'organisation et le rôle de la section

 15   analytique à Pristina.

 16   Il décrit les sources depuis lesquelles la section analytique recevait les

 17   informations.

 18   A partir du milieu des années '90 une opération appelée Krug, cercle, était

 19   menée par le DB de Pristina afin de surveiller les activités de LPK et

 20   d'UCK. Le témoin a décrit cette opération.

 21   Il décrit également le développement de l'organisation de l'UCK. Il décrit

 22   le rôle de Ramush Haradinaj dans l'organisation de l'UCK et dans la zone de

 23   Dukagjin et le rôle de Lahi Brahimaj à Jablanica. Il déclare qu'il a reçu

 24   les renseignements indiquant que Idriz Balaj, alias Toger était le

 25   commandant de l'unité de réaction rapide de l'UCK appelée les Aigles noirs

 26   qui avait leur quartier général à l'école de Rznic et que l'on le

 27   considérait comme étant le commandant direct de Ramush Haradinaj.

 28   Finalement, le témoin parle des communiqués de l'UCK et il indique qu'ils


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  1   étaient conformes aux informations recueillies par le SUP de la par

  2   d'autres sources.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  5   Q.  [aucune interprétation]

  6   Mme KRAVETZ : [interprétation] Maintenant je souhaite que l'on affiche le

  7   document dont le numéro 65 ter est 03067. Et si la version serbe seulement

  8   pourrait être montrée pour le témoin car les autres disposent de la version

  9   en anglais.

 10   Q.  Est-ce que vous avez le document sous les yeux ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Monsieur, est-ce que vous reconnaissez ce document; et si oui, est-ce

 13   que vous pouvez faire un commentaire là-dessus ?

 14   R.  Oui, je reconnais. Il s'agit d'une note officielle concernant une

 15   activité effectuée le 26 février 1997, dans les locaux du centre du service

 16   de la Sûreté de l'Etat à Prizren. M. David Gajic a assisté à cette réunion

 17   de travail. Il était à l'époque le chef de la Sûreté de l'Etat pour le

 18   Kosovo et le Metohija, ensuite le coordinateur de la 3e administration, et

 19   a assisté également c'était M. Ljubomir Joksic, ainsi que le chef de --

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous interrompre, est-ce que

 21   vous pouvez ralentir un peu. Car je vois que les interprètes ont du mal à

 22   vous suivre.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Excusez-moi.

 24   Donc le chef du centre de la Sûreté de l'Etat de Prizren, M. Milivoj Savic;

 25   ensuite Jovanovic, qui était son assistant; ensuite le chef du département

 26   du service de Sûreté publique à Pec, M. Branko Djukic; et Sreten Camovic,

 27   qui était le chef de ce département à Djakovica. C'est M. Camovic qui a

 28   fait les propos liminaires et qui était le chef du département de la Sûreté


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  1   de l'Etat à Djakovica, il a informé les personnes présentes des

  2   informations dont il disposait concernant l'existence d'un groupe illégal

  3   dans le village de Jablanica, municipalité de Djakovica, à la tête duquel

  4   se trouvait Lahi Brahimaj, et aussi des mesures prises par le secteur

  5   opérationnel de Djakovica à l'encontre de ce groupe, à savoir un dossier a

  6   été ouvert -- dossier préalable est ouvert concernant Lahi Brahimaj. C'est

  7   une forme d'activité du service de sûreté de l'Etat et par le biais de ce

  8   dossier, l'on a analysé et examiné tous les membres de ce groupe et l'on a

  9   planifié à la suite des activités.

 10   Dans les conclusions de -- au moment des conclusions de cette

 11   réunion, l'on a décidé de toute une série d'activités concrètes qu'il

 12   fallait initier au cours de la période à venir afin de mettre fin à cette

 13   activités à ces activités indiquées et identifiées à l'époque, menées par

 14   M. Lahi Brahimaj. Si nécessaire, je peux expliquer plus en détail ce que

 15   cela impliquait.

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 17   Q.  Avant que vous ne fassiez cela, dites-nous s'il vous plaît, s'agit-il

 18   d'un document que vous avez reçu normalement à l'époque ? Je vois que la

 19   date est le 27 février 1997, mais est-ce que vous pouvez dire à haute voix

 20   votre réponse, pour que ceci puisse être consigné au compte rendu

 21   d'audience ?

 22   R.  Nous avons reçu ce document à Pristina, soit le lendemain, soit le

 23   surlendemain du 27, c'est-à-dire soit le 28 février ou le 1er mars, en

 24   fonction du nombre de jours du mois de février de cette année, et donc,

 25   c'est une note relative à cette réunion.

 26   Q.  Monsieur, nous voyons que ce document fait référence au -- à une

 27   enquête qui sera lancée contre le chef du groupe, Lahi Brahimaj, et

 28   référence est faites aux mesures et activités à prendre. Sur la base des


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  1   informations dont vous disposiez à l'époque, est-ce que vous savez pourquoi

  2   il a décidé que le RDB mène l'enquête concernant Lahi Brahimaj et ses

  3   activités ?

  4   M. HARVEY : [interprétation] Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Harvey.

  6   M. HARVEY : [interprétation] Cette dernière question, d'après la manière

  7   dont elle a été posée, semble inviter le témoin à se lancer dans des

  8   conjectures ou à exprimer une opinion, ou bien c'est une question

  9   directrice et nous faisons objection sur les trois bases.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi vous parlez des conjectures ?

 11   Voici ce que je vois ici : Sur la base des informations que vous aviez à

 12   l'époque, est-ce que vous savez pourquoi il a été décidé que ce soit le RDB

 13   qui mène une enquête concernant Lahi Brahimaj et ses activités ? Il ne

 14   s'agit pas de conjectures et la question est simplement : Est-ce que vous

 15   savez ?

 16   M. HARVEY : [interprétation] Si la réponse se limite à cette question

 17   précise, je n'ai pas d'objection. Mais pour le moment, j'annonce simplement

 18   mon point de vue.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je suggérer tout d'abord que nous

 20   n'annonçons pas nos points de vue, nous faisons des objections lorsqu'il

 21   est possible des les faire et nécessaire.

 22   Madame Kravetz, oui, vous pouvez poursuivre.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense que la question est tout à

 25   fait acceptable.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que vous pouvez répondre à ma question ?

 28   R.  Je sais et le service de la sûreté de l'Etat le savait à l'époque,


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  1   c'est-à-dire que au cours de l'année 1995, 1996, toute une série d'actions

  2   terroristes ont été exécutées, des attaques contre les policiers et les

  3   citoyens vivant dans des maisons dans cette région, la région de Klina,

  4   Decan, Djakovic, le triangle de ces trois municipalités. Et les

  5   informations, à qui se parle ? La section opérationnelle du RDB de Djakovic

  6   indiquait qu'il s'agissait d'un groupe à la tête duquel se trouvait Lahi

  7   Brahimaj, et c'est la raison pour laquelle cette réunion a été convoquée et

  8   lors de cette réunion, des activités concrètes ont été décidées et ce qui

  9   était le plus important s'agissant de cela, c'est que par le biais de

 10   l'ouverture d'un dossier dans le cadre de l'action Krug, le cercle, menée à

 11   bien par les services de la Sûreté de l'Etat au Kosovo et Metohija et qui

 12   concernait le terrorisme albanais. Il a été décidé de donner la priorité

 13   dans le travail aux personnes appartenant à ce groupe à la tête duquel se

 14   trouvait Brahimaj et afin de également examiner de manière supplémentaire

 15   les autres activités par le biais de ce dossier. Dans ce sens --

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Harvey.

 17   M. HARVEY : [interprétation] Je ne souhaite pas interrompre ce témoin, mais

 18   il est en train de donner une longue réponse et visiblement, ceci montre à

 19   quel point nous sommes dans un domaine risqué, car il dit à la page 87,

 20   ligne 6 :

 21   "Et les informations acquises par la section opérationnelle du RDB

 22   indiquaient…" et cetera.

 23   A ce stade, Monsieur le Président, je pense qu'il est tout à fait clair que

 24   maintenant nous sommes en train de parler des ouïe dire de première,

 25   deuxièmes ou, je ne sais pas, peut-être troisième mains, et à ce stade,

 26   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, avec tout le respect que je

 27   vous dois, je souhaite indiquer que nous avons besoin que le témoin nous

 28   indique quelles sont les sources de ces informations sur lesquelles il se


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  1   fonde lorsqu'il parle de cela.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz ne doit-elle pas avoir

  3   l'opportunité de traiter des sources ?

  4   M. HARVEY : [interprétation] Je vois que la réponse s'étale sur environ 20

  5   pages -- 20 lignes et donc, je commence à me préoccuper, à me dire que nous

  6   sommes en train de nous éloigner de la question de base. Mais je vais

  7   écouter attentivement et je vais essayer de ne pas interrompre plus que

  8   nécessaire. Je pense qu'il est très clair où nous allons.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Harvey. Nous apprécions

 10   ce que vous venez de dire.

 11   Vous pouvez poursuivre, Madame Kravetz. Essayez de contrôler votre témoin.

 12   Vous lui avez posé une question simple. Vous savez, la réponse aurait pu

 13   être oui ou non.

 14   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci. Je tiendrais compte de vos

 15   directions, Monsieur le Président, de vos instructions.

 16   Q.  Monsieur, nous allons revenir à la réponse que vous avez fournie en

 17   faisant référence aux informations requises par le secteur opérationnel du

 18   RDB de Djakovica, qui a indiqué que ce groupe avait Lahi Brahimaj à sa

 19   tête. Est-ce que vous pouvez nous clarifier aussi brièvement que possible à

 20   quelle information vous faites référence, quelle était la source de ces

 21   infos ?

 22   R.  A l'époque, la source de nos informations, c'étaient les entretiens

 23   menés avec les sources, avec lesquelles le service de la sûreté de l'Etat

 24   était en contact, donc c'étaient des personnes vivantes, c'étaient nos

 25   informateurs. Ensuite, les informations que l'on recevait concernant les

 26   attaques de la part de la police et ce sont les informations sur la base

 27   desquelles le département de la Sûreté de l'Etat de Djakovica avait

 28   identifié Lahi Brahimaj en tant que chef du groupe. La personne la plus


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  1   extrémiste dans cette région et c'est la raison pour laquelle il a été

  2   prévu qu'il fasse partie de ce premier traitement et dossier par le biais

  3   duquel on allait traiter de toutes les activités de ce genre, dans la

  4   région. S'agissant de chaque attaque et tout ce qui se passait dans cette

  5   région en 1995 et 1996, il y a eu énormément d'attaques à l'époque. Nous

  6   recevions des dépêches, il s'agit des télégrammes urgents qui informaient

  7   de ces attaquent qui avaient pour séquelle des blessures, des attaques

  8   contre les maisons, des meurtres et c'étaient la base sur laquelle il a été

  9   décidé, d'ailleurs, d'avoir cette réunion à Djakovica, donc dans cette

 10   région. Donc, le degré et l'intensité de ses activités ont abouti à réunion

 11   où l'on a demandé de prendre des mesures concrètes afin d'empêcher la suite

 12   de telles activités.

 13   M. HARVEY : [interprétation] Messieurs les Juges, excusez-moi. Ce fut un

 14   nombre effort de la part de Mme Kravetz quand elle demande au témoin d'être

 15   le plus concis possible. Vous voyez le résultat. Et je pense que forcément,

 16   la prochaine question doit porter sur les sources, parce qu'à ce stade,

 17   nous en sommes toujours au niveau d'un ouïe dire accumulé de [inaudible]

 18   comme le compte rendu le montre jusqu'à présent. J'attire l'attention de

 19   tout le monde que nous nous sommes bien égarés de ce que peut savoir

 20   exactement ce témoin.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez un commentaire ?

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation] Bien, je vais revenir à la réponse du

 23   témoin, mais je ne pense pas que le moment se prête à des plaidoiries sur

 24   la fiabilité du témoignage de ce témoin. C'est à vous de décider de ceci à

 25   un stade ultérieur lorsque le moment sera venu de procéder à un examen de

 26   la somme des éléments de preuve. Donc, ici, nous essayons de voir ce qu'il

 27   savait à l'époque.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Permettez-moi de m'interposer. Il y a une


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  1   objection, mais le témoin ne répond pas non plus à la question posée. Il va

  2   bien plus loin que cela, et je vous demande de rappeler à Mme Kravetz

  3   qu'elle doit mieux maîtriser son témoin, de façon à ce que nous ne soyons

  4   pas ici soumis à des ouï-dire multiples de énième main, nous l'avons dit

  5   dès le début du procès. Ceci nous inquiète beaucoup, c'est très

  6   préoccupant.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si j'ai bien compris ce qu'a dit le

  8   témoin jusqu'à présent, et vous savez que j'ai vraiment fait un effort pour

  9   m'abstenir d'intervenir, mais j'ai l'impression que ce monsieur fait partie

 10   d'un service de Sécurité et il a dit qu'il avait obtenu des informations,

 11   des renseignements de la part d'informateur. Je suppose que nous pouvons

 12   nous attendre à ce qu'on nous dise ce qu'il a fait de ces informations, et

 13   comment il a tiré certaines choses au clair. C'est comme ça que travaille

 14   la police, elle travaille avec les informateurs, elle pose des questions,

 15   après quoi seulement elle mène une enquête. Je ne sais pas si c'est dans ce

 16   sens que va l'interrogatoire principal. J'ai essayé de ne pas prendre la

 17   position, de ne pas intervenir, mais je pense que si vous avez un témoin

 18   qui occupe le poste qu'occupait celui-ci à l'époque des faits, ce type de

 19   source est accepté pour autant qu'il nous dise et c'est ce que la Chambre

 20   va examiner, autant qu'il nous dise ce qu'il a fait à la suite des

 21   informations, ce qu'il a découvert.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est bien possible, mais je l'ai déjà dit,

 23   et souvent, il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs. Est-ce qu'il

 24   s'est appuyé sur des informateurs, est-ce qu'il a reçu des renseignements,

 25   c'est une autre question. Est-ce que vous avez obtenir des informations,

 26   réponse oui ou non ? Ici, nous en sommes au B.A-BA de l'interrogatoire

 27   principal. Qui, quand, quoi, comment.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz, alors qui, quand,


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  1   quoi, comment.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais

  3   permettez-moi de signaler que certaines des questions signalées par Me Guy-

  4   Smith sont déjà abordées dans la déposition antérieure déjà donnée par le

  5   témoin, et j'essaie de ne pas revisiter ce qu'il a déjà dit. Il a déjà

  6   parlé des sources de ces renseignements, parce que nous sommes ici avec un

  7   témoin 92 ter, et ça paraît peut-être disloqué, c'est pas très courant,

  8   parce qu'il ne redonne pas tous les détails qu'il a déjà donnés.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est une affaire de maîtrise du

 10   témoin.

 11   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est un problème souvent dans ce

 13   Tribunal, on pose une question à un témoin, on lui demande quel est son nom

 14   ? Après quoi, on nous donne tout l'arbre généalogique de la famille au lieu

 15   simplement d'avoir le nom du témoin. Je pense qu'il est important que les

 16   avocats et substituts soient conscients du problème mais essayer de bien

 17   maîtriser le témoin. Alors écoutez la question, répondez-y, vous,  vous

 18   écoutez la réponse et vous arrêtez votre témoin dans la foulée, s'il

 19   continue. Parce que c'est vous qui maîtrisez, qui conduisez les débats.

 20   Vous savez où vous voulez arriver, lui, il ne sait pas. C'est vous qui

 21   devez le diriger, c'est pour cela que c'est un examen, un interrogatoire

 22   principal, c'est vous qui menez le jeu.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci.

 24   Q.  Revenons au document, on voit ce qu'il y a dans cette note de service.

 25   Il est dit que le groupe dirigé par Lahi Brahimaj sera observé, il fera

 26   l'objet d'enquête ultérieure et d'activités dirigées visant ce groupe.

 27   Quelles sont les mesures qui ont été prises par le RDB à l'époque pour

 28   mener des activités d'observation de surveillance d'activité de ce groupe ?


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  1   R.  Oui, je sais.

  2   Q.  Pourriez-vous nous dire quelles furent ces mesures ?

  3   R.  Il y avait les mesures habituelles d'infiltration par nos informateurs

  4   de ces groupes, en plus de ça, il y a eu des mesures de mise sur écoute, ou

  5   intercepter des conversations, par exemple mise sur écoute de téléphone de

  6   la famille de Brahimaj. Nous avons aussi fait de la surveillance

  7   clandestine. La filature de M. Brahimaj, nous avons coordonné, synchronisé

  8   toutes les activités que nous avons obtenues s'agissant de l'activité de

  9   toutes ces personnes travaillant dans le secteur du Kosovo-Metohija,

 10   coordination avec le service qui travaillait à Belgrade, lui.

 11   Q.  Vous avez parlé de filature de M. Brahimaj, qu'est-ce que vous vouliez

 12   dire par là exactement ou surveillance clandestine.

 13   R.  A son insu donc. La filature c'est une mesure spéciale décidée par la

 14   Sûreté de l'Etat et qui est menée par le personnel du service de la Sûreté

 15   de l'Etat. Et cela veut dire que concrètement, les personnes qui y sont

 16   chargées, surveillent les contacts qu'a la personne surveillée, en fonction

 17   des besoins du service de la Sûreté de l'Etat.

 18   Q.  Vous parlez ici de surveillance, de filature ou d'observation de M.

 19   Brahimaj et d'autres mesures, vous parlez de la mise sur écoute par

 20   exemple; est-ce que ces mesures étaient appliquées en 1998 ?

 21   R.  Oui, mais en 1998 nous avons eu des difficultés à poursuivre ces

 22   activités de surveillance, car Brahimaj n'allait plus aussi souvent à

 23   Djakovica et Pec. Il a essayé d'éviter d'y aller, ce qui veut dire que les

 24   occasions d'effecteur ces mesures étaient très limitées. Nous nous sommes

 25   surtout appuyés sur les renseignements fournis par des informateurs, et les

 26   informations obtenues par la mise sur écoute de téléphone de la famille

 27   Brahimaj.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz, je pensais qu'il


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  1   s'agissait d'un témoin 92 ter. Vous aurez besoin de combien de temps encore

  2   ?

  3   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je ne souhaite lui présenter que cinq

  4   documents, Monsieur le Président, ça, c'était le premier, j'en ai encore

  5   quatre. Je n'ai plus qu'une question sur ce document et puis je passe aux

  6   autres.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Fort bien.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci.

  9   Q.  Monsieur, dans ce document, au premier paragraphe, plutôt au second,

 10   nous voyons qu'il est fait référence à Lahi Brahimaj. On dit de lui qu'il

 11   dirigeait le groupe de Jabllanica. Après les mesures d'enquête et de

 12   surveillance que vous avez effectuée jusqu'en 1998, savez-vous s'il est

 13   resté chef du groupe basé à Jabllanica, pendant cette année 1998 ?

 14   R.  Oui, oui, il est resté.

 15   Q.  Merci.

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je demande le versement du document

 17   03067[phon], c'est le numéro de la liste 65.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est versé au dossier.

 19   Une cote, Madame la Greffière.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pour précision, lorsque le conseil a

 21   demandé le document, c'était le document 03069 de la liste 65 ter, pas 67.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Moi, j'ai 67.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce qui veut dire que le document 03067,

 24   devient la pièce P124.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 26   Mme KRAVETZ : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document de

 27   la liste 65 ter, 03068.

 28   Je demande que soit affiché à l'intention du témoin la version en serbe --


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  1   en B/C/S.

  2   Q.  Est-ce que vous avez ce document sous les yeux, Monsieur le témoin ?

  3   R.  Oui, je le vois.

  4   Q.  Pourriez-vous, en quelques mots, nous dire si vous connaissez le

  5   document et si vous le connaissez, ce qu'il représente.

  6   ?  R.  Je connais ce document. C'est une note de service, note officielle,

  7   du département de la Sûreté de l'Etat de Kovica, la date étant celle du

  8   21 septembre 1997. Note officielle. Il y a une explication brève

  9   destinée aux officiers supérieurs de Pristina disant qu'il y avait une

 10   incursion qui était prévue, qui était planifié -- un raid su Jablanica.

 11   Cette note s'inspire de renseignements obtenus auparavant. Il y avait eu

 12   un télégramme urgent de Djakovica. Ici, les dirigeants du service de

 13   Djakovica font l'analyse de la situation qui prévaut de la région, à ce

 14   moment-là, et sont transmises des informations disant qu'une telle

 15   opération serait, pour l'heure, prématurée, que le plan qu'avait la

 16   police a été dévoilé, que le groupe de Jabllanice était au courant qu'il

 17   y avait des préparatifs en vue d'une telle action. Les hauts dirigeants

 18   sont priés de s'abstenir de lancer cette action, d'y renoncer --

 19   Q.  Je vous interromps. On voit au quatrième paragraphe qu'il est fait

 20   référence au fait que le RDB de Djakovica mène une enquête sur ce même

 21   groupe. Ici, dans le texte, il est dit : "Le groupe ennemi illégal de

 22   Jablanica, dans l'enquête ouverte sur Lahi Brahimaj." Est-ce qu'il s'agit

 23   de la même enquête que dans le premier document ou s'agit-il ici d'une

 24   autre enquête ?

 25   R.  C'est la même enquête qui est le résultat d'une réunion de travail qui

 26   a eu lieu en février au centre de sûreté de l'Etat à Djakovica et

 27   mentionnée dans le document précédent.

 28   Q.  Merci.


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  1   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je demande le versement de ce document qui

  2   porte le numéro de la liste 65 ter 03068.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est versé au dossier.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document devient la pièce P125.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  6   Mme KRAVETZ : [interprétation] 03014, page 4 plus précisément. Peut-on

  7   afficher cette page à l'écran ? J'aimerais que soit montrée uniquement la

  8   version en Albanais à l'intention du témoin.

  9   Q.  Nous voyons ici un document, Monsieur, intitulé : l'UCK fait une

 10   déclaration sur l'exécution de collaborateur. Au premier paragraphe il est

 11   fait mention de deux Albanais de souche accusés de collaborer avec les

 12   autorités de Belgrade et qui ont été exécutés par l'UCK, l'armée de

 13   libération du Kosovo. Vous voyez ? Il y a un paragraphe qui commence

 14   [inaudible] question d'un mercredi. Est-ce que vous voyez cela dans le

 15   texte ? Vous faites un signe de la tête. Donc, c'est très bien.

 16   Si vous poursuivez la lecture, vous voyez qu'il est fait référence à Jakup

 17   Kastrati, chef local et Cen Desku, arrêté par la police parce que -- parce

 18   que c'était son adjoint. Ils avaient été arrêtés par la police militaire,

 19   parce qu'ils avaient appelé les gens à rendre leurs armes pour ceux qui

 20   travaillent avec des collaborateurs, dit la déclaration de l'UCK.

 21   Nous voyons la date du 4 novembre 1998. Est-ce qu'à l'époque, vous aviez

 22   des renseignements -- excusez-moi, je vois pourquoi vous avez l'air un peu

 23   interloqué. Ce n'est pas la bonne page à l'écran.

 24   R.  Oui, c'est n'est pas la bonne page.

 25   Q.  Mais nous allons d'abord parler de cette page qui se trouve à l'écran.

 26   Nous reviendrons à l'autre plus tard. Je vois maintenant pourquoi vous

 27   étiez un peu perdu.

 28   Ici, on voit l'UCK revendique la responsabilité de l'assassinat d'un membre


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  1   albanais du SPS.

  2   Ici, il est question d'un certain Maliq Sheholli, abattu par inconnu à

  3   Podujevo, jeudi dernier, et on dit qu'il était membre du SPS, du parti

  4   socialiste des Serbes. C'était le seul Albanais de souche dans la liste du

  5   SPS.

  6   Est-ce qu'à l'époque, vous étiez au courant, est-ce que vous aviez des

  7   renseignements à propos de cet incident survenu le 13 janvier 1997 ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Quel genre de renseignements aviez-vous ?

 10   R.  Depuis le mois de novembre ou de décembre 1996, nous avions des

 11   informations disant que dans la zone de Podujevo, il y avait un groupe qui

 12   était actif, dirigé par Zahir Pajaziti, surnommé le Loup. C'était un homme

 13   qui était à l'origine des actions du premier grand groupe de l'UCK dans la

 14   zone. Mais lorsque -- nous avons surveillé ces activités, nous les avons

 15   observées, c'est ainsi que nous avons appris que l'homme avait tué Maliq

 16   Sheholli en personne. Moi, je connaissais Maliq Sheholli, je connaissais

 17   aussi les membres de sa famille. Comment dire ? C'était un employé d'une

 18   entreprise de Podujevo et disons qu'il était présent dans les médias parce

 19   qu'il était membre du Parti socialiste de Serbie. Ce qu'on me montre ici,

 20   c'est la traduction d'un texte publié en albanais, en deuxième publication

 21   en albanais, Koha ou un autre quotidien, je ne sais plus.

 22   Q.  Regardons le milieu de la page. Il y est dit :

 23   "Une organisation albanaise qui s'appelle l'UCK, armée de libération du

 24   Kosovo, a revendiqué la responsabilité de l'assassinat de Maliq Sheholli

 25   dans un fax en date du 12 janvier…" Enfin, l'année n'est pas indiquée, mais

 26   il s'agit de l'année 1997.

 27   Est-ce que vous aviez des informations à l'époque qui correspondent à

 28   ce qui est dit ici dans ce document ?


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  1   R.  La déclaration qu'a faite l'UCK a été faite après les faits. Nous

  2   avions des renseignements sur l'assassinat de Sheholli et de Nikolic, Milos

  3   Nikolic, qui vivait dans son village qui se trouvait tout prêt de Podujevo.

  4   Nous savions que ça avait été fait par un groupe qui avait à sa tête Zahir

  5   Pajaziti. Plus tard, fin janvier de l'année suivante, suite à une autre

  6   action à laquelle a participé Pajaziti, nous avons essayé de l'arrêter,

  7   mais il y a eu des échanges de coups de feu prêt de Vucitrn et un membre

  8   des forces spéciales a été blessé, Pajaziti a été tué et un certain Hoxha

  9   et son cousin, Hakim Zejnujla, ont été tués aussi. Je peux ajouter que nous

 10   avions mis sur écoute le téléphone de la maison où résidait illégalement

 11   Pajaziti dans un quartier de Pristina et nous l'avions aussi en filature.

 12   Le jour où il a été tué, nous avions essayé de l'arrêter à la gare

 13   autoroutière de bus de Pristina, mais il avait remarqué que des gens le

 14   suivaient et il avait pu se soustraire à leur surveillance.

 15   Q.  On voit ici "Zahir Bajaziti" au compte rendu d'audience; est-ce que

 16   nous parlons bien de cette personne ?

 17   R.  Non, c'est Zahir Pajaziti, P comme Paris, Pajaziti.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 19   Mme KRAVETZ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant voir la

 20   page 6 du même document ? Nous montrons à l'intention du témoin que la

 21   version en albanais -- excusez-moi. J'ai dit page 6, j'aurais dû dire page

 22   5.

 23   Q.  Oui, c'est de cette page-ci que je parlais au départ. On dit :

 24   "L'UCK fait une déclaration sur soi-disant 'exécution' de

 25   collaborateurs."

 26   Voyez la date 4 novembre 1998. Il est question de deux Albanais de

 27   souche accusés de collaboration avec les autorités de Belgrade et qui ont

 28   été entre guillemets exécutés par l'UCK. Vers la fin de cet article on


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  1   parle de deux personnes, d'un Jakup Kastrati, un chef local de la LDK, et

  2   de son adjoint, Cen Desku, arrêté par la police militaire de l'UCK, parce

  3   que ces hommes avaient appelé les gens à rendre leurs armes aux autorités

  4   serbes et avaient, entre guillemets, dit "la déclaration" donc de l'UCK

  5   coopéraient avec des collabos."

  6   Alors, ici, en quoi est-ce que ceci recoupe les informations que vous avez

  7   concernant les personnes de la LDK qui auraient été prises pour cible par

  8   l'UCK à l'époque ?

  9   M. HARVEY : [interprétation] Qu'est-ce que ça veut dire "à l'époque" ? Est-

 10   ce que ça veut dire plusieurs mois après la fin de la période mentionnée à

 11   l'acte d'accusation ?

 12   Mme KRAVETZ : [interprétation] Moi, je parle de l'époque du document,

 13   novembre 1998 et puis j'y reviendrais --

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, alors, dites "Novembre 1998," ce

 15   serait très utile, Madame Kravetz. Donc nous parlons de novembre 1998.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, ici, nous n'avons qu'un parmi et

 17   énormément d'événements, qui se sont déroulés au cours de la période

 18   précédente, donc en 1998, étaient ciblés non seulement des membres de la

 19   Ligue démocratique du Kosovo; c'était aussi des membres d'autres partis

 20   politiques qui prônaient une démarche plus modérée pour trouver une

 21   solution aux problèmes qu'il y avait au Kosovo, à l'époque. Nous avions

 22   énormément de renseignements à ce propos.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'ai des problèmes d'écouteur. C'est pour ça

 24   que j'attends quelquefois la fin de la réponse du témoin.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous voulez qu'un technicien vienne

 26   vous aider ?

 27   Mme KRAVETZ : [interprétation] Non, je pense que je m'en sortirais pour les

 28   cinq minutes qui restent.


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  1   Q.  Vous avez parlé de la période précédente, vous dites "1998." Est-ce que

  2   vous parlez de la totalité de l'année 1998 -- ou plutôt, d'un moment précis

  3   de cette année au cours duquel vous auriez entendu parler de ces attaques ?

  4   Pourriez-vous être plus précis ?

  5   R.  Je vais faire de mon mieux. Les services de Sûreté de l'Etat - et ceci,

  6   depuis 1996 et jusqu'en 1997/1998 - ont effectivement constaté ces

  7   activités. Donc. dans tout cela, si c'est nécessaire, je peux vous donner

  8   des exemples révélateurs.

  9   Q.  Si je vous ai bien compris, vous parlez de 1998 mais aussi de la

 10   période qui a précédé l'année 1998 ? Est-ce que bien ce que vous dites dans

 11   votre réponse ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Dites en quelques mots : quelles sont les sources de vos renseignements

 14   ? Comment savez-vous qu'il y avait des membres de la LDK qui aient été pris

 15   pour cible par l'UCK au cours de cette période que vous avez mentionnée ?

 16   R.  Pour être précis, il y avait eu des interviews ou des entretiens avec

 17   des membres de ces partis politiques actifs au Kosovo et Metohija, nous

 18   avions les informations que nous tenions de nos informateurs et d'autres

 19   renseignements que nous donnaient les activités de surveillance. Il y a

 20   énormément de renseignements de ce genre.

 21   Q.  Partant des renseignements que vous avez ainsi pu obtenir, comment se

 22   fait-il, pourquoi se fait-il que des membres de la LDK aient été pris pour

 23   cible par l'UCK ?

 24   R.  Mais il me faudrait quelques minutes ne serait-ce que pour vous dresser

 25   le contexte de l'époque.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Stijovic, la question était

 27   simple. Vous n'avez pas besoin de minutes pour dire, Oui, vous savez; non,

 28   vous ne savez pas. Après quoi, Mme Kravetz, si elle veut une explication de


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  1   votre part, elle vous pose une question à cet effet.

  2   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  3   Q.  Une précision : Savez-vous pourquoi ces attaques avaient eu lieu et

  4   savez-vous pourquoi donc --

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- votre réponse devrait, Oui, je sais

  6   pourquoi; ou non, je ne sais pas pourquoi.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je sais pourquoi.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  9   Q.  Dites aux Juges : comment il se fait que vous le sachiez --

 10   R.  J'ai parlé personnellement au président d'un parti politique d'albanais

 11   de souche il avait été arrêté au mois d'août avec d'autres partis

 12   politiques dans le secteur de Drenica après une opération antiterroriste

 13   menée par la police et l'armée. Par exemple, nous avons reconstitué de

 14   façon très détaillée des activités entreprises à l'époque.

 15   Q.  Je reviens à ma question, je vous avais demandé si vous saviez pourquoi

 16   et vous avez répond par l'affirmative. Alors -- ah, excusez-moi, je vois

 17   que --

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Me Harvey souhaite intervenir.

 19   M. HARVEY : [interprétation] Il a dit au mois d'août, mais il n'a pas dit

 20   dans quelle année. Pendant quelle année ?

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur le Témoin, pourriez-vous préciser de quelle année vous parlez

 23   quand vous parlez "du mois d'août" ?

 24   R.  1998.

 25   Q.  Je reviens à ma question de départ - nous arrivons presque au terme de

 26   la séance d'aujourd'hui donc je vais vous demander d'être bref - savez-vous

 27   pourquoi ces attaques ont eu lieu ? Vous aviez dit que vous saviez

 28   pourquoi, alors pourquoi ?


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  1   R.  A un mot commençant, en fait, c'était une différence d'approche à la

  2   résolution des problèmes au Kosovo et Metohija. L'Alliance démocratique du

  3   Kosovo ainsi que d'autres partis politiques albanais, tels que, par

  4   exemple, le Parti social démocrate et le Parti chrétien, étaient en faveur

  5   de négociations, et des dialogues. Alors que l'UCK était contre cela et par

  6   conséquent ils insistaient pour que la résolution de ces problèmes se fasse

  7   par un conflit armé et par l'usage d'armes.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  9   je vois que nous n'avons plus vraiment beaucoup de temps. Il me reste

 10   encore quelques questions concernant le document. Je peux reprendre demain

 11   matin et j'aurai un document supplémentaire à présenter au témoin.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Madame Kravetz.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] Pour que le compte rendu d'audience soit

 14   très clair, je pense que ce document devrait être déjà versé au dossier et

 15   je peux y revenir demain.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] J'ai une objection.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour quelle raison ?

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Tout d'abord, parce que les incidents

 19   mentionnés ne sont pas couverts par la période de l'acte d'accusation,

 20   puisqu'ils sont -- ils représentent les périodes d'avant et après l'acte

 21   d'accusation. Deuxièmement, ce que nous avons à l'heure actuelle, c'est une

 22   traduction albanaise d'une copie d'un document en anglais d'un service nord

 23   européen, et d'après le document lui-même, il semble que la source de cet

 24   article vient de Pristina en Yougoslavie, donc, par conséquent, je pense

 25   qu'il y a des difficultés à établir l'authenticité de ce qui est présenté

 26   devant ce tribunal en ce qui concerne les traductions.

 27   De plus, pour l'instant, nous n'avons eu que des discussions concernant les

 28   pages 4 et 5 de ce document. Par conséquent, je ne vois pas exactement


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  1   pourquoi l'Accusation souhaite verser ce document au dossier, parce que ce

  2   document est composé de beaucoup plus de page que cela.

  3   Mme KRAVETZ : [interprétation] Si je peux répondre. Je ne souhaite verser

  4   au dossier que les deux pages que j'ai présentées au témoin, à savoir les

  5   pages 4 et 5 de cette pièce qui, à la référence 75 -- 65 ter 03014. En ce

  6   qui concerne l'objection mentionnée par Me Guy-Smith, je voudrais attirer

  7   votre attention sur le fait que des documents, qui sont très similaires,

  8   font déjà partie des éléments de preuve qui ont été versés par -- et

  9   acceptés par cette Chambre de première instance et ceci fait l'objet, en

 10   fait, d'une requête conjointe déposée par la Défense et l'Accusation dans

 11   cette affaire, et je parle plus particulièrement de la pièce P65, qui est

 12   un déclaration de témoins -- d'un témoin appelé Jakup Krasniqi, et si vous

 13   consultez la page 14 de cette déclaration du témoin, il s'agit de l'annexe

 14   2 de cette déclaration du témoin. Il s'agit d'un document du même type que

 15   celui que j'aborde avec le témoin et donc, cette annexe fait partie de

 16   cette P65. Il s'agit d'un communiqué de l'UCK qui porte du -- qui date du 8

 17   août 1997, donc qui n'est antérieure à la période couverte par l'acte

 18   d'accusation.

 19   La page 90 de la même page est un -- dans l'annexe 19 est un communiqué du

 20   17 octobre 1998 qui n'est donc couvert par la période de l'acte

 21   d'accusation, mais ce document constitue la totalité d'une déclaration de

 22   témoin et mes collègues de la défense ont accepté que ceci soit versé au

 23   dossier en l'espèce. Voilà, donc, ma justification. Ces types de document

 24   ont donc déjà été versés au dossier.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ceci est exact. Il s'agissait d'une

 26   déposition dans le cadre d'une -- d'un témoin spécifique qui avait

 27   authentifié ces communiqués.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne comprends pas vraiment. Madame


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  1   Kravetz, j'aimerais que vous éclairiez ma lanterne, mais peut-être

  2   également la Défense. Au début de votre interrogatoire principal de ce

  3   témoin, vous avez versé au dossier cette déclaration et vous avez également

  4   versé les annexes de cette déclaration. La Défense n'a pas eu d'objection à

  5   ce que vous versiez la totalité de ces documents. Ai-je bien compris ? Le

  6   document qui est à l'écran ne fait pas partie des déclarations, c'est la

  7   raison pour laquelle vous voulez le verser séparément par rapport aux

  8   documents que vous avez versés au départ ?

  9   Mme KRAVETZ : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

 10   Président. Il s'agit de documents supplémentaires et nous avions mentionné

 11   dans notre demande 92 ter que une des raisons pour lesquelles nous

 12   souhaitions faire comparaître ce témoin comme un témoin en vertu de

 13   l'article 92 ter était pour obtenir des éléments de preuve supplémentaire

 14   sur certains nouveaux documents. La Défense a été informée des pièces que

 15   nous souhaitons utiliser dans le cas de cet interrogatoire principal. C'est

 16   la raison pour laquelle, au fur et à mesure, je demande le versement

 17   d'autres documents et cela ne fait pas partie des pièces associées pour

 18   lesquelles j'avais demandé le versement.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Ceci éclaire ma lanterne. Je

 20   voulais savoir si c'était un témoin viva voce ou autre chose.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour que le compte rendu soit complet, mon

 22   objection concernant ce document, ce document est un rapport issu de

 23   journaux, de quotidiens, concernant ce qui semblerait être contenu dans les

 24   communiqués émanant de l'UCK. Donc, il s'agit vraiment d'informations

 25   indirectes.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, bien sûr qu'il s'agit de

 27   documents ou d'éléments indirects, mais le problème, c'est que les règles

 28   de ce Tribunal permettent des éléments de preuve qui relèvent de l'ouïe


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  1   dire. Alors, où est-ce que je m'arrête, dans ce cas-là ?

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je dirais que, pour faire preuve de preuve,

  3   on parle ici, bien sûr, de ouïe dire, mais je ne pense pas que, de manière

  4   générale, le ouïe dire soit approprié et je m'en remets à vous, bien sûr,

  5   puisqu'il y a en fait des critères qualitatifs en ce qui concerne le ouïe

  6   dire pour ce qui est de la recevabilité, pas en termes de pondération,

  7   parce que si ça n'a aucun sens, ce n'est pas nécessaire, en fait de verser

  8   ceci, parce que ceci ne va faire que des documents ou une montagne de

  9   documents qui va constituer un obstacle à votre évaluation des éléments de

 10   preuve. Par conséquent, je pense qu'il n'est pas nécessaire de verser ce

 11   type de document. Vous pouvez simplement dire dès le départ : Nous ne

 12   sommes pas intéressés, nous ne voulons pas avoir ce faible niveau de

 13   qualité d'élément de preuve, parce que ceci ne peut pas nous permettre de

 14   jeter toute la lumière sur les faits qui se sont déroulés, parce qu'ils ne

 15   sont pas fiables.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans toute ma sagesse, je vais

 17   accepter le versement de cette pièce au dossier.

 18   Peut-on demander à la Greffière d'audience d'accorder une cote à ce

 19   document ?

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P126 et je

 21   demanderais aux conseils de l'Accusation de nous dire quelles sont les

 22   pages exactes qui ont été téléchargées sur le système de prétoire

 23   électronique.

 24   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, bien sûr.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Est-ce que l'on peut lever

 26   l'audience pour aujourd'hui ?

 27   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui.

 28   M. DIXON : [interprétation] Même si le document a été versé, il y avait,


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  1   bien sûr, la question de la pondération. Nous parlerons de la question de

  2   la pondération, donc de la valeur probante de ces éléments, le moment

  3   voulu.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, Maître Dixon.

  5   M. DIXON : [interprétation] Je voulais simplement rajouter ça.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   La séance est levée.

  8   --- L'audience est levée à 13 heures 55 et reprendra le jeudi 25 août 2011,

  9   à 9 heures 00.

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