Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 26 septembre 2011

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes

  6   ici présentes ainsi qu'autour du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire inscrite au rôle.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Affaire IT-

  9   04-84bis-T, le Procureur contre Ramush Haradinaj, Idriz Balaj et Lahi

 10   Brahimaj.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 12   Les parties peuvent-elles se présenter, à commencer par l'Accusation.

 13   Mme KRAVETZ : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Daniela

 14   Kravetz, au nom du bureau du Procureur, avec mon collègue, Aditya Menon;

 15   Line Pedersen, étant notre commise; et nous avons un stagiaire juridique,

 16   M. Duttan.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 18   M. EMMERSON : [interprétation] Ben Emmerson, au nom de M. Haradinaj, avec

 19   Rodney Dixon, Annie O'Reily et M. Strong.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 21   Pour M. Balaj, ce sera.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Gregor Guy-

 23   Smith, avec Collen Rohan et Chad Mair, et M. Gentian Zeberi qui comparait

 24   aujourd'hui pro bono.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 26   Et pour M. Brahimaj.

 27   M. HARVEY : [interprétation] Richard Harvey, avec Luke Boenisch et Mme

 28   Jasini.


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Harvey.

  2   Nous allons bientôt commencer, mais auparavant j'ai quelques questions à

  3   vous poser, Madame le Procureur. Dans la liste notifiant la Chambre des

  4   témoins prévus cette semaine, nous avons les Témoins 80 et -- faut-il

  5   passer à huis clos partiel peut-être ? Oui, je voulais simplement savoir

  6   ceci, Madame : est-ce que ces témoins vont comparaître, les Témoins 80 et

  7   75 ?

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Pour ce qui est du Témoin 80, nous avons une

  9   requête pendante dont la Chambre est saisie --

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 11   Mme KRAVETZ : [interprétation] -- pour que nous l'entendions par

 12   visioconférence. Donc nous l'avons prévu en fonction de la requête que nous

 13   avions déposée. Nous pourrions avoir aussi une séance en application de

 14   l'article 4.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense qu'il est plus utile de

 16   passer à huis clos partiel.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 1125-1150 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 17   [Audience publique]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Madame Kravetz.

 20   Mme KRAVETZ : [interprétation] L'Accusation appelle à la barre le Témoin

 21   77. Et nous souhaiterions passer à huis clos avant que le témoin n'entre

 22   dans le prétoire.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Je souhaiterais que la Chambre

 24   passe à huis clos.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos.

 26   [Audience à huis clos]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Madame Kravetz, vous avez la parole.

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie.

 22   Interrogatoire principal par Mme Kravetz : 

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 24   R.  Bonjour.

 25   L'INTERPRÈTE : L'interprétation de la cabine anglaise : peut-on demander au

 26   témoin de se rapprocher du microphone.

 27   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez vous rapprocher du microphone.


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  1   Mme KRAVETZ : [interprétation] Est-ce que M. l'Huissier peut aider le

  2   témoin.

  3   Q.  Monsieur, est-ce que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez

  4   ?

  5   R.  Oui.

  6   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'aurais besoin que l'huissier nous aide,

  7   qu'il remette au témoin la feuille comportant le pseudonyme, s'il vous

  8   plaît.

  9   Q.  Monsieur, je voudrais que vous examiniez le document qui vous sera

 10   remis, n'en donnez pas lecture, s'il vous plaît, mais confirmez si les

 11   renseignements qui figurent sur ce document sont exacts, s'il vous plaît.

 12   Lisez le document pour vous-même, s'il vous plaît, et dites-nous si

 13   les renseignements personnels qui figurent sur la feuille sont exacts.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je vous remercie, Monsieur.

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je demande le versement de ce document

 17   03100, et j'en demande le versement sous pli scellé, s'il vous plaît.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document 03100 est versé au

 19   dossier. Est-ce que nous pouvons avoir une cote, s'il vous plaît.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P301.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation] Très brièvement, je demanderais que l'on

 23   passe à huis clos partiel.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Nous passons à huis clos partiel.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos [comme

 26   interprété].

 27   [Audience à huis clos partiel]

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 20   [Audience publique]

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 22   Oui, Madame Kravetz, veuillez continuer.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur, à quel moment les forces des FARK sont-elles entrées au

 25   Kosovo ?

 26   R.  C'était en 1998. Au début du mois de juin, si je me souviens bien.

 27   Q.  Est-ce que vous savez quelle était l'importance de ces forces

 28   lorsqu'elles sont entrées au Kosovo ? Je veux dire par là quel était le


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  1   nombre d'hommes qui composaient les FARK à ce moment-là ?

  2   R.  La 134e Brigade comptait de 200 à 250 hommes environ.

  3   Q.  Est-ce que vous savez quelles sont les armes que ces forces ont

  4   apportées au Kosovo, si jamais elles ont eu des armes, lorsqu'elles sont

  5   entrées à la date que vous avez indiquée ?

  6   R.  C'était des armes légères.

  7   Q.  Est-ce que vous pouvez expliquer ce que vous entendez par là ?

  8   R.  C'était des armes automatiques, des grenades, des grenades à main, des

  9   fusils.

 10   Q.  Et les FARK étaient-ils en uniforme ? Quel était cet uniforme ?

 11   R.  Ils avaient des uniformes de camouflage.

 12   Q.  Et savez-vous pourquoi ces forces sont-elles entrées au Kosovo en 1998,

 13   quel était leur objectif ?

 14   R.  L'objectif des FARK a été de se battre contre les paramilitaires

 15   serbes.

 16   Q.  Et qui a pris la décision de faire entrer ces forces au Kosovo pendant

 17   la période que vous avez indiquée, le savez-vous ?

 18   R.  C'est Ahmet Krasniqi qui a pris la décision, parce que l'état-major

 19   était basé à Tirana, le colonel Tahir Zemaj devait s'occuper de leur

 20   entrée, et c'est Ahmet Krasniqi qui a donné l'ordre à ces forces de

 21   s'introduire au Kosovo dès que possible.

 22   Q.  Je voulais juste que l'on précise qui sont les différents hommes que

 23   vous avez mentionnés. Premièrement, Ahmet Krasniqi, qui était-il ?

 24   R.  Ahmet Krasniqi, c'était le commandant des forces armées de la

 25   République du Kosovo.

 26   Q.  Et à ce moment-là, où était-il stationné ?

 27   R.  Il était à Tirana.

 28   Q.  Vous avez également mentionné Tahir Zemaj, qui aurait été colonel. Est-


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  1   ce que vous pouvez nous en dire plus sur cet homme-là ?

  2   R.  C'était le commandant de la 134e Brigade. C'est Ahmet Krasniqi qui

  3   l'avait nommé à ce poste-là.

  4   Q.  Et Tahir Zemaj, est-ce qu'il est arrivé au Kosovo avec la 134e Brigade

  5   en juin 1998 ?

  6   R.  Oui. C'était lui qui était à la tête de la brigade.

  7   Q.  A partir du moment où les FARK sont entrées au Kosovo, est-ce que vous

  8   savez s'ils se sont cantonnés dans un village en particulier au Kosovo ?

  9   R.  Dans un premier temps, ils se sont arrêtés au village de Jasiq.

 10   Q.  Et ils y sont restés pendant combien de temps, au village de Jasiq ?

 11   R.  Pendant plusieurs jours. Je ne sais plus exactement pendant combien.

 12   Q.  Après l'arrivée des FARK au Kosovo, est-ce que vous savez si Tahir

 13   Zemaj a eu des entretiens avec Ramush Haradinaj ?

 14   R.  Oui, ils se sont rencontrés. Une réunion s'est tenue à Junik.

 15   Q.  Savez-vous à peu près la date de cette réunion de Junik ?

 16   R.  C'était deux ou trois jours après l'arrivée de la brigade à Jasiq.

 17   C'est à ce moment-là que l'on a prévu cette réunion.

 18   Q.  Et qui l'a organisée ?

 19   R.  Pour autant que je le sache, Naim Maloku et un autre homme, je ne me

 20   souviens plus de son nom, et le commandant de Junik. Et là non plus, je ne

 21   me souviens plus de son nom.

 22   Q.  Ce n'est pas grave. Vous venez de mentionner Naim Maloku. Qui était-il

 23   ?

 24   R.  C'était un officier. A l'époque, on disait qu'il sortait de l'armée

 25   yougoslave en tant qu'officier.

 26   Q.  Et quel a été l'objectif de cette réunion ?

 27   R.  On a organisé cette réunion parce que les forces voulaient continuer

 28   d'avancer, voulaient s'introduire plus en avant au Kosovo dans le secteur


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  1   de Decani. Et ils ont rencontré une résistance de la part de certaines

  2   personnes, donc ils n'ont pas pu continuer depuis Jasiq dans la direction

  3   de Decani, vers les villages à proximité de Decani.

  4   Q.  Vous venez de nous dire que "la raison a été que les forces voulaient

  5   continuer d'avancer…"

  6   Mais de quelles forces parlez-vous, s'il vous plaît ?

  7   R.  Je parle de la 134e Brigade.

  8   Q.  Vous dites qu'un certain nombre de personnes leur ont opposé résistance

  9   et qu'ils n'ont pas pu continuer à partir de Jasiq. De quelles personnes

 10   parlez-vous ?

 11   R.  Ramush Haradinaj leur a fait comprendre qu'ils n'étaient pas les

 12   bienvenus plus en avant sur le territoire kosovar.

 13   Q.  Mais lorsque vous dites qu'"il leur a dit qu'ils n'étaient pas les

 14   bienvenus", "ils" ou "eux" c'était qui ?

 15   R.  Cette même brigade, la 134e  Brigade, que nous avons déjà mentionnée.

 16   Q.  Et --

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz.

 18   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vois que le moment est venu de faire une

 19   pause.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que le moment s'y prête bien ?

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, tout à fait.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons revenir à 

 23   10 heures 45. L'audience est suspendue.

 24   Je demande que l'on passe à huis clos, s'il vous plaît.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos à présent.

 26   [Audience à huis clos]

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  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Nous allons suspendre l'audience et nous allons revenir à l'heure pleine

  8   moins le quart.

  9   --- L'audience est suspendue à 10 heures 17.

 10   --- L'audience est reprise à 10 heures 46.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je demande que l'on passe à huis clos.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.

 13   [Audience à huis clos]

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 21   [Audience publique]

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

 23   Greffier.

 24   Madame Kravetz, vous avez la parole.

 25   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci.

 26   Q.  Monsieur, avant la pause, vous nous avez dit qu'au moment où la 134e

 27   Brigade s'est trouvée à Jasiq, Ramush Haradinaj aurait envoyé un message

 28   leur disant clairement qu'ils ne devraient pas se permettre d'entrer au


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  1   Kosovo plus en avant au Kosovo. Qu'est-ce qui vous permet de le savoir ?

  2   R.  C'est le commandant, Tahir Zemaj, qui nous l'a dit.

  3   Q.  Et savez-vous qui est venu au nom de Ramush Haradinaj pour relayer ce

  4   message aux FARK de Jasiq ?

  5   R.  Si je me souviens bien, c'était Naim Maloku, et c'est la raison pour

  6   laquelle on a convoqué cette réunion.

  7   Q.  Ramush Haradinaj est-il venu assister à cette réunion organisée à Junik

  8   ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Savez-vous s'il est venu seul ou accompagné ?

 11   R.  Il a été accompagné à ce moment-là de policiers militaires. C'est comme

 12   cela qu'on les appelait. Mais je ne sais pas qui c'était exactement. Mais

 13   Naim Maloku était là et quelques autres officiers, deux ou trois, mais je

 14   ne me souviens pas de leurs noms.

 15   Q.  Et vous dites que c'était des policiers militaires. Ils portaient quel

 16   type d'uniforme ?

 17   R.  Leur uniforme était noir. 

 18   Q.  Y avait-il un insigne ou un badge, quelque chose, sur cet uniforme ?

 19   R.  Celui de l'UCK. Mais je ne sais pas si c'était PU-KLA ou autre. Mais

 20   c'était des uniformes noirs de la police militaire.

 21   Q.  Vous avez dit que vous ne vous souvenez plus très bien si c'était écrit

 22   PU-KLA. Mais qu'est-ce que cette abréviation, normalement, représentait ?

 23   R.  Cela aurait désigné la police militaire.

 24   Q.  Savez-vous de quoi on a parlé lors de cette réunion à laquelle est venu

 25   assister Ramush Haradinaj à Junik ?

 26   M. EMMERSON : [interprétation] Avant que le témoin ne réponde, est-ce que

 27   Mme Kravetz peut, s'il vous plaît, jeter les bases. Qu'est-ce qui permet au

 28   témoin de parler de cette réunion ? Etait-il à la réunion lui-même, quelle


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  1   est la source de son information. Et nous allons objecter de nouveau si les

  2   questions sont posées de cette manière-là.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame Kravetz.

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation] Tout à fait.

  5   Q.  Est-ce que vous savez, premièrement, qui a vu M. Haradinaj lorsqu'il

  6   est venu à Junik --

  7   M. EMMERSON : [interprétation] La même objection pour la même raison.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je pense que le témoin nous dira s'il le

  9   sait ou non, et je peux partir à partir de là.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je vous en prie.

 11   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur, est-ce que vous savez qui M. Haradinaj a-t-il rencontré

 13   lorsqu'il s'est rendu à Junik, à cette occasion-là dont nous étions en

 14   train de parler ?

 15   R.  Il a vu Tahir Zemaj, Nazif Ramabaja et un autre officier dont je ne me

 16   souviens pas le nom; mais je dois dire que je ne me suis pas trouvé dans la

 17   même pièce où s'est déroulée la réunion. J'étais dans une antichambre avec

 18   d'autres soldats.

 19   Q.  Est-ce que vous avez vu Ramush Haradinaj à ce moment-là à Junik ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  L'avez-vous rencontré ou est-ce que vous aviez déjà eu l'occasion de le

 22   voir avant ce moment-là ?

 23   R.  Non, c'est la première fois que je l'ai vu.

 24   Q.  Et comment saviez-vous que c'était bien Ramush Haradinaj l'homme que

 25   vous avez vu ?

 26   R.  Ceux qui le connaissaient ont dit que c'était Ramush Haradinaj, que

 27   l'autre était Naim Maloku, et puis le troisième, je ne me souviens pas de

 28   son nom. Je pense que c'était lui le commandant à Junik, mais je ne me


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  1   souviens pas de son nom.

  2   Q.  Ce n'est pas grave. Vous nous avez dit que vous n'avez pas assisté à

  3   cette réunion; vous étiez dans une antichambre avec d'autres soldats. Est-

  4   ce que les personnes qui, elles, ont été présentes pendant la réunion vous

  5   ont relaté l'objet de la réunion et des propos proférés ?

  6   R.  Oui, bien sûr. Une fois qu'ils sont sortis de la réunion, Tahir Zemaj

  7   nous a dit, à nous tous, qu'il y avait des problèmes, qu'on avait donné

  8   l'ordre, tout d'abord, de rebrousser chemin, de revenir en Albanie et de ne

  9   pas avancer au Kosovo plus en avant.

 10   Q.  Vous nous avez dit au début de votre réponse qu'il vous a dit à vous

 11   tous qu'il y avait des problèmes. Mais de quels problèmes plus précisément

 12   a-t-il parlé ?

 13   R.  Le problème c'était que ces officiers ne pouvaient pas continuer

 14   d'avancer vers l'intérieur du Kosovo à partir de là, parce qu'ils n'étaient

 15   pas les bienvenus.

 16   Q.  Mais vous parlez de "ces officiers"; à qui pensez-vous précisément ?

 17   R.  Tahir Zemaj était le commandant de la 134e Brigade, mais il y avait

 18   d'autres officiers, il y en avait 25, qui sortaient des rangs de l'armée

 19   yougoslave.

 20   Q.  Vous nous avez dit qu'on vous a donné l'ordre de revenir en Albanie et

 21   de ne pas avancer vers l'intérieur du Kosovo. Alors, d'où sont venus ces

 22   ordres, qui les a donnés ?

 23   R.  Je pense que Tahir a dit que Ramush, Naim Maloku et la troisième

 24   personne avaient dit cela.

 25   Q.  Lorsque vous parlez de ces officiers, donc Tahir Zemaj et les autres

 26   officiers, qui n'étaient pas les bienvenus, ils n'étaient pas les bienvenus

 27   du point de vue de qui ?

 28   R.  Mais comme je l'ai déjà dit, trois personnes étaient présentes pendant


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  1   cette réunion : Ramush, Naim Maloku et cette troisième personne.

  2   Q.  Je vous ai demandé, Monsieur, de la part de qui Tahir Zemaj et les

  3   autres officiers n'étaient pas les bienvenus. Avez-vous bien fini votre

  4   réponse ?

  5   R.  Ramush, Naim Maloku et la troisième personne.

  6   Q.  Je vous remercie. Je pense que c'est clair.

  7   En tant que résultat de cette réunion entre Ramush Haradinaj, Tahir Zemaj

  8   et les autres officiers que vous avez mentionnés, est-ce que les FARK ont

  9   quitté le village de Jasiq ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Et ils y sont restés pendant combien de temps encore ?

 12   R.  Une dizaine de jours, dirais-je.

 13   Q.  Et une fois ces dix jours écoulés, ces forces du FARK, où sont-elles

 14   allées ?

 15   R.  Ces forces sont restées sur place jusqu'au moment où Sali Ceku, Ismet

 16   Ceku et moi-même --

 17   Q.  Excusez-moi.

 18   Mme KRAVETZ : [interprétation] Il faudrait peut-être passer pour ce passage

 19   à huis clos partiel.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, passons à huis clos partiel.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 22   [Audience à huis clos partiel]

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 17   [Audience publique]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons

 19   suspendre l'audience et reprendre à 12 heures 30.

 20   --- L'audience est suspendue à 12 heures 03.

 21   -- L'audience est reprise à 12 heures 30.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je demande que l'on passe à huis clos pour

 24   que le témoin puisse entrer dans le prétoire.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, passons à huis clos.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos à présent.

 27   [Audience à huis clos]

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 12   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 1191-1194 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 28   [Audience publique]


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier

  2   d'audience.

  3   Madame Kravetz.

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Monsieur, après l'incident que vous nous avez décrit, est-ce que vous

  6   avez revu Ramush Haradinaj ?

  7   R.  Oui, je l'ai vu quelques fois.

  8   Q.  La fois d'après, après cet incident, est-ce que vous pouvez nous dire à

  9   quel moment vous l'avez revu ? Vous en souvenez-vous ?

 10   R.  La fois d'après, après cet incident, c'était quand il est venu, parce

 11   qu'on était cantonnés à Prapaqan, à l'école, la 134e Brigade au complet

 12   était cantonnée là avec tous ses officiers. Et puis, un jour, Ramush et

 13   Toger sont venus sur place. Ils sont entrés dans le bloc, ils sont entrés

 14   dans les bâtiments de l'école. Il y avait des gardes là qui assuraient la

 15   sécurité de la caserne, c'est comme ça qu'on appelait cela à l'époque, et

 16   Haradinaj et Toger sont entrés dans la cour de l'école et ils ont demandé

 17   que l'on évacue l'endroit en l'espace de 20 ou 30 minutes, je ne me

 18   souviens pas exactement.

 19   Q.  Vous nous avez dit précédemment que la 134e Brigade a été cantonnée au

 20   village d'Isniq. Mais à quel moment est-ce qu'elle a été redéployée au

 21   village de Prapaqan, est-ce que vous vous en souvenez, pour être cantonnée

 22   à l'école que vous venez de mentionner ?

 23   R.  Quelques jours plus tard, j'étais encore en convalescence. Et une fois

 24   que je m'étais remis debout, j'ai vu qu'ils étaient cantonnés à l'école de

 25   Prapaqan. Peut-être deux ou trois semaines s'étaient passées, dirais-je.

 26   Q.  Et par rapport au moment où Ramush et Toger sont venus à l'école, vous

 27   avez dit qu'ils sont rentrés dans la cour de l'école et qu'ils ont demandé

 28   que tout le monde quitte les lieux. Alors, mais ils se sont adressés à qui


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  1   pour dire cela ?

  2   R.  Je ne sais pas à qui ils ont parlé en premier lieu. Mais quand ils ont

  3   tiré en l'air, tout le monde est sorti pour voir ce qui se passait. Ramush

  4   et Toger étaient sur place avec d'autres soldats habillés en noir dans ce

  5   qui servait de caserne. Il y avait plein de soldats en tenue noire.

  6   Q.  Vous dites qu'ils ont tiré dans l'air et que tout le monde est sorti.

  7   Vous parlez de qui ? Qui a tiré en l'air ?

  8   R.  Tout le monde. Les officiers, les soldats sont sortis pour voir ce qui

  9   se passait, car une partie de la brigade s'entraînait dehors, alors que

 10   d'autres étaient à l'intérieur des bâtiments scolaires. Et Tahir Zemaj, lui

 11   aussi, est sorti pour voir quel était le problème. On lui a dit qu'il

 12   devait vider l'école et repartir de là d'où il était venu.

 13   C'est ce qu'il lui a dit.

 14   Q.  Moi, ma question était de savoir qui tirait. Je comprends bien qui est

 15   sorti pour savoir ce qui se passait. Mais qui est-ce qui tirait ?

 16   R.  Ramush.

 17   Q.  [aucune interprétation]

 18   R.  Ramush.

 19   Q.  Comment Tahir Zemaj a-t-il répondu ou réagi lorsque Ramush lui a dit

 20   qu'il fallait vider l'école et repartir là d'où il était venu ?

 21   R.  Il a dit : Non, ça ne va pas. Il ne faudrait pas maintenant se livrer à

 22   une lutte fratricide. Nous allons simplement vider les lieux. C'est bon, on

 23   s'en va.

 24   Q.  Et est-ce que ça s'est bien passé ? Est-ce que la 134e Brigade a quitté

 25   les lieux qu'elle occupait, à savoir cette école de Prapaqan ?

 26   R.  Oui. Tous les officiers ont plié bagage et ont quitté la caserne, mais

 27   ils voulaient que les soldats, eux, restent sur place. Ramush et Rrustem

 28   Tetaj se sont mis à parler devant les hommes. J'étais présent. Ils ont dit


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  1   : Voilà, c'est la fin de la Serbie. Ils viennent de la Serbie. C'est la

  2   main de la Serbie. Ils sont venus de Serbie. Ne les écoutez pas.

  3   Et à ce moment-là, tous les soldats ont jeté leurs armes et ont voulu

  4   partir de la caserne.

  5   Q.  Et est-ce que les soldats sont partis de la caserne eux aussi ?

  6   R.  Pas tout de suite. En tout cas, ils ont jeté leurs armes à terre. Et

  7   bien sûr qu'ils n'étaient pas d'accord avec ce qu'on leur demandait de

  8   faire, ils n'étaient pas d'accord pour quitter la caserne. Nous sommes

  9   repartis dans cette pièce de la maison d'Isniq. L'incident n'a pas duré

 10   longtemps.

 11   Q.  Est-ce que la 134e Brigade a fini par quitter le Kosovo ?

 12   R.  Non, non. En effet, dans la soirée, Rrustem Tetaj s'est entretenu avec

 13   Tahir Zemaj. Les deux hommes ont décidé qu'il y aurait une réunion à Lluke

 14   e Poshtme.

 15   Q.  Vous venez de parler d'une personne répondant au nom de Rrustem Tetaj.

 16   Pourriez-vous nous dire qui était cet homme ?

 17   R.  Il faisait fonction de commandant à l'état-major de Lluke e Posthtme.

 18   Q.  Pour que ce soit acté au dossier, pourriez-vous nous rappeler le nom du

 19   village où ces hommes ont décidé d'organiser une réunion ?

 20   R.  Si je me souviens bien, il s'appelait Lluke e Poshtme. C'est là

 21   qu'était Rrustem Tetaj.

 22   Q.  Et est-ce que vous savez ce qui s'est passé au cours de cette réunion

 23   qui s'est tenue dans ce village ?

 24   R.  Je ne saurais être précis, mais je sais qu'un accord a été obtenu et

 25   que tout le monde est rentré dans l'école, qui était cette caserne

 26   improvisée à Prapaqan.

 27   Q.  Je sais que vous dites être incapable d'être précis, mais est-ce que

 28   vous connaissez la nature de cet accord ? Si vous ne le savez pas, dites-le


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  1   simplement.

  2   R.  Je ne sais pas exactement. Je vous ai dit que je savais uniquement que

  3   tous les officiers avaient regagné la caserne, et c'est tout. C'est tout ce

  4   que je sais à propos de l'accord parce que je n'y ai pas assisté, à cette

  5   réunion.

  6   Q.  Aucun problème.

  7   Aujourd'hui, au cours de votre déposition, vous avez parlé de Toger.

  8   Je vous ai demandé quelle était son identité, son nom complet. Vous avez

  9   dit qu'il s'agissait d'Idriz Balaj. Quand avez-vous appris que l'homme

 10   répondant au surnom de Toger s'appelait, en fait, et s'appelle toujours

 11   Idriz Balaj ?

 12   R.  Je ne me souviens pas de la date exacte à laquelle je l'ai appris, pas

 13   plus que les circonstances dans lesquelles j'ai appris qu'il s'appelait

 14   Idriz Balaj. Je me souviens uniquement que les gens disaient que --

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le témoin a déjà répondu à la question.

 16   Objection. Le témoin a dit : "Je ne me souviens plus exactement des

 17   circonstances dans lesquelles j'ai appris qu'il s'appelait Idriz Balaj," et

 18   ceci répond à la question de Mme Kravetz.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

 20   Mme KRAVETZ : [interprétation] Parfait. Je continuerais en posant d'autres

 21   questions.

 22   Q.  Vu les informations que vous aviez à l'époque, à savoir en 1998, quelle

 23   était la réputation qu'avait cet homme que vous connaissiez sous le nom de

 24   Toger ?

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Une nouvelle objection, pour plusieurs

 27   raisons, la moindre n'étant pas celle de la pertinence, quelle est la

 28   valeur probante. Je pense que l'article 93 n'autorise pas ce genre de


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  1   question. Et ça revient à mon point de départ, parce qu'on parle de rumeur

  2   ici, et là, lorsqu'il s'agit de rumeur, il est déplacé de se baser sur des

  3   rumeurs pour poser des questions. Parce que la réputation de M. Balaj n'est

  4   pas ici au banc des accusés.

  5   Et là, je demande que soit sanctionnée l'Accusation pour avoir posé

  6   une question portant sur la réputation, surtout réputation à partir de

  7   rumeurs.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je demande au témoin s'il a des

  9   informations personnelles --

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce n'est pas la question qui a été

 11   posée.

 12   M. EMMERSON : [interprétation] Permettez-moi de dire simplement ceci : si

 13   Mme Kravetz veut présenter des éléments portant sur la notoriété, il

 14   faudrait d'abord nous dire sur quoi ceci porte et sur quel chef ceci porte

 15   et quelle est la pertinence au regard des chefs pour qu'on puisse la

 16   jauger. Et puis, si on suggère des histoires de réputation, est-ce que la

 17   Chambre va être aidée pour trancher la question au fond. J'en doute

 18   vivement.

 19   Alors, avant de présenter des arguments portant sur la réputation,

 20   avant de présenter des éléments aussi généraux, il faudrait préciser au

 21   regard de quoi cette question est censée intervenir.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame Kravetz.

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je pourrais facilement reformuler ma

 24   question, si ceci nous permet d'avancer.

 25   Vous me permettez de poursuivre ?

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour autant que vous reformuliez votre

 27   question.

 28   Mme KRAVETZ : [interprétation]


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  1   Q.  Vous nous avez parlé de la participation qu'a eue cet homme répondant

  2   au surnom de Toger dans l'incident que vous avez relaté aujourd'hui. Est-ce

  3   que vous savez s'il y avait d'autres soldats des FARK qui avaient été

  4   l'objet de mauvais traitements similaires de la part de Toger ?

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection. Pour deux motifs : pertinence,

  6   et puis c'est une question directrice.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'objection est rejetée.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  9   Q.  Vous pouvez répondre, Monsieur le Témoin.

 10   R.  Un soldat de la 134e a subi le même sort à Isniq. Toger l'avait frappé,

 11   l'avait forcé à se déshabiller. C'était un jeune homme de Drenoc qui

 12   s'appelait Bujar. Je ne me souviens plus de son nom de famille.

 13   Q.  Mais comment se fait-il que vous soyez au courant de cela ?

 14   R.  Mais il est venu informer le commandant. Les agissements de Toger ne se

 15   sont pas arrêtés. Même après l'accord auquel ils étaient parvenus, il a

 16   continué de se livrer à de tels actes contre les soldats de la 134e

 17   Brigade. Si je me souviens bien, un jour, il est venu à la caserne et a

 18   emmené Rexh Osaj, je ne sais pas s'il l'a arrêté ou s'il l'a simplement

 19   emmené. Si Tahir Zemaj n'était pas intervenu, eh bien, c'est ce qui serait

 20   passé. Il est entré sans aucune permission dans la caserne. Il voulait

 21   emmener Rexh Osaj. Je ne sais pas où il voulait l'emmener exactement ou ce

 22   qu'il voulait faire de lui.

 23   Q.  Et vous dites, je vous lis, "si Tahir Zemaj n'était pas intervenu, ça

 24   se serait passé." Alors, qu'a fait Tahir Zemaj lorsque Toger est venu à la

 25   caserne ?

 26   R.  Je n'étais pas là au moment où ça s'est produit. Mais quand j'ai été

 27   plus tard à la caserne, Rexh Osaj m'a dit que Toger était venu à la

 28   caserne, voulait emmener Rexh Osaj et que Zemaj était intervenu pour l'en


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  1   empêcher. Et Toger était dans une pièce à l'époque, il n'était pas armé

  2   apparemment, et plus tard ils avaient parlé et l'avaient relâché.

  3   Q.  Pourquoi Toger est-il venu et pourquoi recherchait-il Rexh Osaj, le

  4   savez-vous ?

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection. On demande au témoin de se

  6   livrer à des conjectures.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Objection rejetée.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  9   Q.  Vous pouvez répondre à la question, Monsieur le Témoin.

 10   R.  Pendant --

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question qui vous a été posée était

 12   celle-ci : savez-vous pourquoi Toger était venu chercher Rexh Osaj ? Alors,

 13   normalement, vous devez répondre par oui ou par non.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le sais.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Poursuivez, Madame.

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi il venait à la recherche de

 18   M. Osaj?

 19   R.  Après qu'Osaj soit tombé aux mains des Serbes, Rexh Osaj était allé à

 20   Irzniq, à l'hôpital de campagne, pour y récupérer des médicaments ou du

 21   matériel médical qui s'y trouvaient. Des intraveineuses, tout ce qu'on

 22   pouvait récupérer de cet hôpital de campagne. Puis, il était rentré à la

 23   caserne. Toger y était venu un peu plus tard et lui avait demandé pourquoi

 24   il était allé là-bas. Il l'accusait de venir espionner, d'essayer de savoir

 25   où se trouvait leur base, et cetera.

 26   Q.  Mis à part les incidents que vous avez relatés, avez-vous connaissance

 27   d'autres incidents auxquels aurait participé Toger au cours desquels les

 28   soldats des FARK auraient été l'objet de mauvais traitements ?


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  1   R.  Je n'en ai plus de souvenir précis aujourd'hui. Il y a eu un autre

  2   incident dont je viens de me souvenir maintenant, à l'instant même --

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce que c'est un incident

  4   concernant les FARK ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation] 

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, d'accord.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] A ma connaissance, il y avait un jeune homme,

  8   c'était un soldat de la 134e, il nous a parlé de son père qui avait été

  9   pris à parti dans un incident à Irzniq. Son père se trouvait à bord d'une

 10   voiture au moment où Toger avait essayé d'arrêter la voiture et il n'avait

 11   pas arrêté la voiture là où lui avait ordonné de le faire Toger --

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Mais ceci n'a rien à voir avec les FARK.

 13   Même si c'est un soldat, même si le soldat qui relatait l'incident était un

 14   soldat des FARK. Mais ce n'était pas un incident des FARK.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais est-ce que ça veut dire que ce

 16   témoin ne peut parler que des incidents concernant les FARK ?

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ma question portait sur des incidents ayant

 18   un rapport avec les FARK. Page 78, ligne 18 :

 19   "Mais à part les incidents que vous venez de décrire, est-ce que vous savez

 20   s'il y en a d'autres concernant Toger au cours desquels les soldats des

 21   forces armées de la République du Kosovo auraient été l'objet de mauvais

 22   traitements ?"

 23   Puisque c'est la question qui a été posée, on peut dire que la réponse

 24   fournie ne répond pas à la question posée. Et elle est sans pertinence.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz.

 26   M. EMMERSON : [interprétation] Avant sa réponse --

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais une chose à la fois, attendez.

 28   M. EMMERSON : [interprétation] Très bien.


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  1   Mme KRAVETZ : [interprétation] Est-ce que je peux reformuler ma question.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

  3   Maître Emmerson, vous avez la parole.

  4   M. EMMERSON : [interprétation] Je vais peut-être attendre de voir comment

  5   elle va s'y prendre.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Fort bien. Posez votre question,

  7   Madame Kravetz.

  8   Mme KRAVETZ : [interprétation]

  9   Q.  Mis à part les incidents que vous avez décrits qui concernaient des

 10   soldats des FARK, est-ce que vous savez s'il y a eu d'autres incidents

 11   auxquels a participé cette personne que vous connaissez sous le nom de

 12   Toger où des personnes auraient été victimes de mauvais traitements ? Je

 13   parle des civils ou d'autres soldats qui ont été maltraités.

 14   M. EMMERSON : [interprétation] Ceci ne répond pas à la question que je

 15   voulais. Vous avez déclaré ce témoignage recevable pendant un certain temps

 16   uniquement parce qu'ici on plaide une allégation d'entreprise criminelle

 17   commune avec l'exclusion des FARK. Nous disons que ce témoin n'est pas

 18   pertinent au regard des chefs retenus dans ce nouveau procès partiel.

 19   L'Accusation a répondu ceci : Voilà, nous avons décidé de plaider la même

 20   entreprise criminelle comme nous venons de le proposer dans laquelle se

 21   trouvait une allégation concernant une entreprise criminelle commune visant

 22   à exclure les FARK du Kosovo. C'est sur cette base que la Chambre a décidé

 23   que ce témoignage était recevable. Si on va au-delà de cela, et apparemment

 24   c'est ce que recherche la dernière question, à ce moment-là on dépasse

 25   votre décision.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous dites que l'entreprise

 27   criminelle commune plaidée se limite à l'exclusion des FARK ?

 28   M. EMMERSON : [interprétation] J'ai ici la décision sous les yeux


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  1   concernant la recevabilité du 23 août 2001, paragraphe 51, qui indique que

  2   les événements concernant un affrontement entre l'UCK et les FARK puis dit

  3   plus tard qu'il concernait des allégations concernant les actes et le

  4   comportement allégués dans l'acte d'accusation pour ce qui est de

  5   l'entreprise criminelle commune.

  6   Donc, là, bien sûr, il y aura litige pour savoir s'il y a un lien

  7   quelconque des FARK avec les charges retenues ici. Mais quoi qu'il en soit,

  8   les éléments dépassant le cadre de ce témoignage, à savoir les

  9   affrontements entre l'UCK et les FARK, et vous avez dit que c'était la base

 10   de votre décision de responsabilité, et tout ce qui dépasse cela dépasse

 11   votre décision.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous venez de lire la décision, et

 13   votre lecture ne m'a pas dit s'il est affirmé que l'entreprise criminelle

 14   commune en l'espèce se limite à l'exclusion des FARK. Or, c'est la question

 15   que je vous pose.

 16   M. EMMERSON : [interprétation] Manifestement, ce n'est pas le cas.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 18   M. EMMERSON : [interprétation] L'exclusion des FARK n'a rien à voir avec

 19   l'entreprise criminelle commune, telle qu'elle est plaidée ici dans ce

 20   Tribunal.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crois que nous ne nous comprenons

 22   pas. Ma question est celle-ci : est-ce que vous êtes en train de dire que

 23   l'entreprise criminelle commune en l'espèce se limite à l'exclusion des

 24   FARK ?

 25   M. EMMERSON : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et puis, vous m'avez lu la décision de

 27   la Chambre de première instance. Et ça ne répond toujours pas à ma

 28   question.


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  1   M. EMMERSON : [interprétation] Bien sûr que l'entreprise criminelle commune

  2   ne se limite pas à l'exclusion des FARK. Elle est plus large, comme ça a

  3   été le cas dans le premier procès d'ailleurs.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Exact.

  5   M. EMMERSON : [interprétation] Mais vous le savez pertinemment, la question

  6   qui se pose ici en ce nouveau procès, en tout cas l'entreprise criminelle

  7   commune s'appliquant à ces crimes supposés avoir été commis à Jabllanica,

  8   reprend une allégation concernant les FARK dans ce conflit, l'exclusion de

  9   ces forces.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous dites qu'on appelle ce

 11   témoin à la barre pour ne parler que des FARK ?

 12   M. EMMERSON : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'est pas comme ça que j'avais

 14   compris.

 15   M. EMMERSON : [interprétation] Fort bien.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 17   Poursuivez, Madame.

 18   Mme KRAVETZ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 19   vous demande une petite minute d'indulgence car je dois retrouver ma

 20   dernière question, enfin la dernière question que j'ai posée.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord.

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 23   Q.  Alors, Monsieur, je vais vous répéter ma dernière question. Je vous

 24   avais demandé si, hormis ces incidents que vous avez décrits et auxquels

 25   ont participé des soldats des FARK, j'aimerais savoir si vous êtes informé

 26   d'autres incidents où serait partie prenante la personne que vous

 27   connaissez sous le surnom de Toger, incidents dans le cadre desquels des

 28   personnes ont également été maltraitées ?


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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Alors, là, je vais soulever une objection -

  2   et je comprends très bien votre point de vue, Monsieur le Juge - mais je

  3   dirais que cela n'a absolument rien à voir en fait avec l'entreprise

  4   criminelle commune telle qu'elle a été énoncée.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et comment est-ce que l'entreprise

  6   criminelle commune a été énoncée, Maître Guy-Smith ?

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Eh bien, voilà, l'objectif de l'entreprise

  8   criminelle commune était de renforcer, consolider le contrôle total de

  9   l'UCK sur la zone opérationnelle de Dukagjin, et ce, par le mauvais

 10   traitement imposé aux civils serbes en procédant au transfert illégal de

 11   civils serbes et en leur infligeant des mauvais traitements, ainsi qu'aux

 12   civils albanais, aux Rom/Egyptiens du Kosovo et à d'autres civils

 13   collaborant ou soupçonnés de collaborer avec les forces serbes ou

 14   soupçonnés de ne pas soutenir l'ALK [comme interprété].

 15   Et voilà ce dont il est question maintenant.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Or, Maître Guy-Smith, je pense que

 17   vous n'avez absolument pas raison.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] A moins qu'il n'y ait une relation de cause

 19   à effet --

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] -- entre ce qu'avance l'Accusation, à

 22   savoir ces sévices et mauvais traitements, et l'objectif de ces mauvais

 23   traitements, tel que cela est allégué par l'acte d'accusation, mais bon, ce

 24   n'est pas pertinent.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc vous venez de nous dire que

 26   l'objectif de l'entreprise criminelle commune était de permettre à l'ALK

 27   [comme interprété] un total contrôle sur la zone en procédant au transfert

 28   illégal de civils serbes et en leur infligeant des mauvais traitements.


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  1   Alors, là, il s'agit justement d'un civil --

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, mais il faut qu'il y ait une relation

  3   de cause à effet entre le mauvais traitement imposé aux civils et

  4   l'objection de ces sévices et mauvais traitements.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Eh bien --

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Et il faut qu'il y ait un lien qui soit

  7   établi entre le mauvais traitement et les sévices et l'objectif, et tant

  8   que le lien n'a pas été établi, il n'y a pas pertinence.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et nous allons entendre justement quel

 10   est l'objectif, et pour ce faire, le témoin doit pouvoir répondre aux

 11   questions.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, mais c'est tout à fait différent,

 13   Monsieur le Président, parce que la question a été posée : est-ce que vous

 14   êtes au courant de mauvais traitements ?

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais il nous dira quels sont les

 16   sévices et mauvais traitements qui ont été infligés --

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Encore faut-il que le témoin ou que

 18   n'importe quel témoin puisse le dire. Moi, pour le moment, je fais

 19   référence au témoignage de ce monsieur qui se trouve ici.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 21   Poursuivez, Madame Kravetz.

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous vous souvenez de ma question ou dois-je la répéter à

 24   nouveau ?

 25   R.  Pourriez-vous répéter votre question, je vous prie.

 26   Q.  Alors, je vais la reformuler, en fait. Ce n'est pas la peine que je

 27   perde davantage de temps à la rechercher.

 28   Alors, ce que je voulais savoir, c'est ce qui suit : vous avez décrit des


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  1   incidents, des incidents auxquels les soldats de la FARK étaient partie

  2   prenante, mais hormis ces incidents que vous avez décrits, ce que

  3   j'aimerais savoir, c'est si vous avez été informé d'autres cas où la

  4   personne que vous connaissez qui répondait au surnom de Toger aurait

  5   participé, incidents dans le cadre desquels des personnes auraient fait

  6   l'objet de mauvais traitements ? Et lorsque je parle de "personnes",

  7   j'entends à la fois des civils et des soldats. Donc, êtes-vous au courant

  8   d'autres incidents ?

  9   R.  Oui. A Irzniq - et c'est une information, d'ailleurs, que je tiens du

 10   fils de la personne en question qui se déplaçait en voiture - donc Toger

 11   lui a donné l'ordre de s'arrêter, mais il n'a pas pu s'arrêter

 12   immédiatement, sur-le-champ, là où Toger lui avait demandé de s'arrêter.

 13   Donc la voiture s'est arrêtée quelques mètres plus loin. Toger, donc, est

 14   allé jusqu'à la voiture en question et a brandi son fusil en le pointant

 15   vers lui, vers cette personne, et il lui a dit : Tu sais, quand je demande

 16   qu'on s'arrête, tu dois t'arrêter là où je te demande de t'arrêter, et non

 17   pas à quelques mètres de cet endroit.

 18   Q.  Et que s'est-il passé après qu'il a eu ces propos ? Est-ce qu'il a fait

 19   quelque chose, Toger -- est-ce que vous savez ce qui s'est passé après ?

 20   R.  Je n'ai pas compris la question.

 21   Q.  Vous venez de nous dire que Toger s'est approché de la voiture et a

 22   pointé un pistolet vers cette personne en lui disant : Tu sais, quand je te

 23   dis de t'arrêter, tu dois t'arrêter et tu t'arrêtes là où je t'ai demandé

 24   de t'arrêter, et non pas à quelques mètres de cela. Donc, que s'est-il

 25   passé après qu'il a eu ces propos, est-ce que vous le savez, ce qui s'est

 26   passé par la suite ?

 27   R.  Alors, avant de lui dire ceci, il lui avait tiré dans le pied, et c'est

 28   à ce moment-là qu'il lui a dit : Tu t'arrêtes là où je te demande de


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  1   t'arrêter.

  2   Q.  Et qui était cette personne sur laquelle Toger a tiré à cette occasion

  3   ?

  4   R.  Adem Lokaj.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection, pour ce qui est de la façon dont

  6   la question a été formulée. Bien sûr qu'elle peut poser des questions, mais

  7   elle aurait pu demander : Qui aurait été. Il faudrait utiliser un

  8   conditionnel, parce que là elle suppose que c'est un fait et qu'on lui a

  9   tiré dessus.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Kravetz.

 11   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui. Le témoin, me semble-t-il, a déjà

 12   indiqué que l'on avait tiré sur cette personne --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, il l'a indiqué, mais l'objection

 14   était qu'il nous a dit qu'on lui avait relaté que la personne --

 15   Mme KRAVETZ : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- qu'on avait tiré sur cette

 17   personne. Mais en fait, là, vous êtes en train d'avancer un fait. Vous

 18   auriez dû dire : Qui était cette personne sur laquelle on a tiré ? C'est ce

 19   que vous avez dit. Vous auriez dû poser la question suivante : Qui était

 20   cette personne dont on vous a dit qu'on lui avait tiré dessus ? C'est ainsi

 21   que vous auriez dû poser la question.

 22   Mme KRAVETZ : [interprétation] Eh bien, écoutez, je peux reposer la

 23   question.

 24   Q.  Monsieur, qui était cette personne dont on vous a dit que Toger lui a

 25   tiré dessus ?

 26   R.  C'était Adem Lokaj.

 27   Q.  Et est-ce que vous savez qui il était ?

 28   R.  Oui, c'était le père d'un jeune homme qui faisait partie de la 134e


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  1   Brigade.

  2   Q.  Merci, Monsieur.

  3   Avez-vous fini par partir du Kosovo en 1998 ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Pourriez-vous nous dire la raison de votre départ du 

  6   Kosovo ?

  7   R.  Je suis parti parce que je ne voulais pas être tué, je voulais assurer

  8   ma sécurité. Parce qu'il y avait beaucoup de choses qui s'étaient passées,

  9   et j'ai commencé à me dire : Un jour, tu vas être tué et personne ne saura

 10   si c'est du fait des Albanais ou du fait des Serbes. Donc j'ai demandé au

 11   commandant Zemaj, qui m'a d'ailleurs autorisé à quitter le Kosovo, et c'est

 12   ce que j'ai fait. Il y avait d'autres raisons encore plus impérieuses.

 13   Lorsque nous nous trouvions à Ulqin, nous avons entendu que cinq personnes

 14   avaient été tuées, et ces cinq personnes faisaient toutes partie de la 134e

 15   Brigade, ou, comme on l'a appelée par la suite, la Brigade Mergimi. Et

 16   d'aucuns disaient que ces personnes avaient justement été emmenées par

 17   Toger et tuées, et c'est la raison pour laquelle je suis parti également du

 18   Monténégro et que je suis allé en Europe.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je souhaiterais soulever une objection à

 20   propos de cette rumeur bien précise.

 21   Mme KRAVETZ : [interprétation] J'allais justement demander au témoin quelle

 22   était sa source, la source de cette information.

 23   Q.  De qui avez-vous entendu cela, qui vous a parlé de cet incident au

 24   cours duquel ont été tués cinq membres de la 134e 

 25   Brigade ?

 26   R.  C'est mon frère qui me l'a relaté.

 27   Q.  Merci, Monsieur.

 28   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de


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  1   questions à poser à ce témoin. Alors, bon, je suis consciente du fait qu'il

  2   y ait des personnes présentes dans la galerie, mais si mes collègues

  3   envisagent de poser des questions à propos de l'incident décrit par le

  4   témoin, je souhaiterais que cela soit fait à huis clos partiel pour les

  5   mêmes raisons qui m'ont poussée à poser mes questions dans le cadre de

  6   l'interrogatoire principal à huis clos partiel au témoin.

  7   J'aimerais également demander ce qui suit : si des références vont

  8   être faites à propos de la déposition faite par un autre témoin dans

  9   l'affaire précédente à propos du même incident, je souhaiterais que ces

 10   questions soient posées à huis clos partiel, à nouveau afin de protéger

 11   l'identité du témoin.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Et comme vous le savez, si

 13   vous éprouvez le besoin de le faire, vous pouvez intervenir et demander à

 14   ce que nous passions à huis clos partiel.

 15   Vous avez un contre-interrogatoire, Maître Emmerson ? Il vous reste

 16   20 minutes.

 17   M. EMMERSON : [interprétation] Eh bien, je vais commencer, et puis nous

 18   reprendrons demain.

 19   Contre-interrogatoire par M. Emmerson : 

 20   Q.  [interprétation] Témoin 77, je vais vous poser quelques questions à

 21   propos des FARK de façon générale. Mais avant de vous poser ces questions,

 22   j'aimerais juste vous demander une précision.

 23   M. EMMERSON : [interprétation] Et je pense que cela va être aussi utile

 24   pour vous que pour la Chambre de première instance.

 25   Q.  Il est absolument indubitable qu'il y avait un conflit à Gllogjan le 4

 26   juillet. Il y a eu donc un affrontement physique, des tirs ont été tirés,

 27   alors voilà. Et c'est dans ce contexte que je vais poser quelques

 28   questions.


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  1   Donc, Témoin 77, premièrement, je voudrais essayer de bien comprendre pour

  2   ce qui est de l'arrivée des FARK au Kosovo, de leur entrée au Kosovo. Pour

  3   que la Chambre de première instance comprenne bien ce dont il est sujet, la

  4   brigade des FARK dont vous nous avez parlé était composée de 200 hommes et

  5   25 officiers. Est-ce bien exact?

  6   R.  Oui.

  7   M. EMMERSON : [interprétation] Je vois que mon micro est automatiquement

  8   débranché lorsque le témoin répond. Peut-être que M. le Greffier pourrait

  9   m'indiquer ce que je devrais faire.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Eh bien, débranchez votre micro chaque

 11   fois que le témoin répond à sa question, c'est tout.

 12   M. EMMERSON : [interprétation] Fort bien.

 13   Q.  Donc les forces des FARK considéraient qu'elles agissaient avec

 14   l'autorité qui leur était conférée par le gouvernement albanais du Kosovo

 15   en exil; est-ce bien exact ?

 16   R.  Non, ce n'est pas ce qu'elles revendiquaient. Elles agissaient.

 17   Q.  Et ce gouvernement qui s'est autoproclamé gouvernement et qui se

 18   trouvait en exil, est-ce qu'il avait un mandat qui lui avait été conféré

 19   par des élections ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et quand est-ce que ces élections ont été organisées et où, Témoin 77 ?

 22   R.  Au Kosovo. Je ne me souviens pas de la date.

 23   Q.  Est-ce que ces élections ont été organisées en respectant le droit

 24   universel à exprimer son suffrage pour que tous les Albanais du Kosovo

 25   puissent avoir la possibilité d'élire leur gouvernement et de le choisir ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et le résultat du scrutin a donné quelque 225 hommes, comme vous nous

 28   l'avez dit. Donc ceux d'entre vous qui êtes arrivés au Kosovo à la fin du


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  1   mois de juin, est-ce que vous pensiez véritablement que vous alliez pouvoir

  2   battre les Serbes avec une force composée de 225 hommes ?

  3   R.  On aurait pu battre les Serbes même sans arme si les gens avaient été

  4   ce qu'ils devraient être pour se battre pour leur pays, et non pas pour

  5   leur porte-monnaie. Mais nous n'étions pas aussi nombreux que ce que vous

  6   avez dit. Nous avions des soldats qui avaient été formés, et nous -- il y

  7   avait le gouvernement pour organiser les gens, pour organiser les jeunes,

  8   pour leur apprendre à se battre, pour avoir un seul commandement, et non

  9   pas ce qu'il y avait à ce moment-là.

 10   Q.  Je vais vous poser quelques questions au sujet de l'arrivée des FARK et

 11   au sujet du conflit entre les deux forces en présence, mais sur la base de

 12   votre expérience, est-ce que vous êtes en train de nous dire que les FARK

 13   qui sont arrivées au Kosovo à la fin du mois de juin/début juillet étaient

 14   des forces professionnelles ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous-même, donc, j'en déduis, aviez reçu une formation dans le domaine

 17   militaire ?

 18   R.  Personnellement, non.

 19   Q.  Mais vous venez de nous dire que c'était des professionnels qui

 20   allaient se battre qui composaient ces forces. Et vous nous dites que vous-

 21   même, vous n'aviez pas de formation. Alors, est-ce qu'il y avait des

 22   soldats qui étaient formés; et si oui, combien, quel pourcentage ?

 23   R.  J'ai déjà dit qu'il y avait 25 officiers qui étaient des militaires de

 24   carrière. Mais je pensais à l'armée de manière générale. Je pensais aux

 25   jeunes qui étaient en train d'être formés au maniement des armes, à la

 26   défense, sur comment utiliser les armes, comment tirer et quelles étaient

 27   les munitions nécessaires. Quant aux militaires de carrière, là j'avais à

 28   l'esprit uniquement les officiers de l'armée, non pas l'ensemble des


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  1   militaires.

  2   Q.  Et votre grade, qu'était-ce lorsque vous êtes arrivé au Kosovo ?

  3   R.  J'étais simple soldat, j'étais un volontaire. Je voulais aider mon

  4   peuple. Je n'avais pas de grade. Les grades ne m'intéressaient pas.

  5   Q.  Vous nous avez dit que les 25 officiers étaient des militaires

  6   d'actives, et ils vous ont appris à vous - vous personnellement - au moins

  7   le B.A-BA de la guerre, n'est-ce pas, comme le fait qu'il fallait tuer des

  8   militaires, des combattants, et non pas des civils ? Est-ce qu'ils vous ont

  9   appris cela ?

 10   R.  Ils ne nous ont pas appris cela, mais le commandant de la brigade

 11   n'arrêtait pas de dire : Quoi qu'il advienne, restez calmes. Nous ne sommes

 12   pas ici pour nous battre les Albanais, mais contre les forces serbes.

 13   Indépendamment de ce qui se passe maintenant, il ne faut pas y prêter

 14   attention parce que nous ne voulons pas nous laisser entraîner dans une

 15   guerre fratricide.

 16   Q.  Bon, laissons la guerre fratricide de côté pour l'instant. Mais lorsque

 17   vous êtes arrivé au Kosovo, vous-même, est-ce que vous saviez que d'après

 18   la loi, en termes de droit, vous pouviez tirer sur des combattants, mais

 19   non pas sur des non-combattants, ou des 

 20   civils ? Est-ce que vous, personnellement, le saviez ?

 21   R.  Bien entendu que oui.

 22   Q.  Donc le 4 juillet, le jour de ce conflit --

 23   Mme KRAVETZ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons, s'il vous plaît,

 24   passer à huis clos partiel.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je demande que l'on passe à huis clos

 26   partiel.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 28   [Audience à huis clos partiel] 


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 28   [Audience publique]


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. EMMERSON : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur le Témoin 77, en audience à huis clos partiel, vous avez

  4   répondu au sujet d'un incident au sujet duquel je ne vais plus vous

  5   interroger. Mais vous nous avez dit que ce jour-là, vous-même et vos

  6   camarades étiez des combattants et que vous étiez en mission à ce moment-

  7   là. Cela est exact, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Je voudrais que l'on reparle de l'arrivée des FARK au Kosovo pendant la

 10   deuxième moitié du mois de juin, et à ce sujet, je voudrais vous soumettre

 11   quelques dates. Nous savons que des dépositions détaillées ont été données

 12   ici, y compris par un officier haut gradé des FARK, au sujet de ce

 13   processus qui a amené les FARK au Kosovo. Je vous soumets l'affirmation

 14   suivante : à partir du moment où vous êtes entrés en traversant la

 15   frontière albanaise, trois réunions ont eu lieu à Jasiq/Junik, réunions

 16   entre les commandants de votre force et les commandants de l'UCK qui

 17   étaient déjà déployés sur le terrain au Kosovo.

 18   R.  Cela est possible.

 19   Q.  Je vous soumets qu'il y a eu une réunion le 25 juin à Jasiq; la

 20   deuxième, le 26 juin à Jasiq puis à Junik, et c'est à ce moment-là que M.

 21   Haradinaj était présent; et puis le 30 juin, à Junik, la troisième réunion.

 22   Est-ce que cela pourrait correspondre ?

 23   R.  Je ne m'en souviens pas.

 24   Q.  Vous saviez, n'est-ce pas, qu'il y avait une différence de point de vue

 25   de taille entre votre commandant, Tahir Zemaj, et les commandants qui

 26   étaient déjà actifs sur le terrain au Kosovo, et que ce différend ou cette

 27   différence portait sur le déploiement ?

 28   R.  Je n'ai pas compris votre question.


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  1   Q.  Je vous soumets que s'il y avait un différend entre les commandants des

  2   FARK, y compris Tahir Zemaj, et les commandants de l'UCK qui étaient

  3   déployés au Kosovo, y compris M. Haradinaj et M. Maloku, au sujet du

  4   déploiement des FARK. Et plus concrètement.

  5   Ceux qui étaient déjà organisés au Kosovo sur le terrain, eh bien, ils

  6   voulaient que les brigades des FARK soient réparties parmi les unités qui

  7   s'organisaient déjà pour monter la défense des villages, tandis que les

  8   commandants des FARK placés sous le commandement de Zemaj considéraient que

  9   l'ensemble des 225 officiers des FARK devaient rester ensemble, regroupés à

 10   un endroit.

 11   Et c'était cela l'objet de leur discorde, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je ne pense pas. Je ne le sais pas.

 13   M. EMMERSON : [interprétation] Je vois l'heure. Et il me faudra passer à

 14   huis clos partiel pour continuer à explorer cela pour parler du commandant

 15   de haut rang qui est venu déposer dans le procès précédent pour pouvoir

 16   confronter ce témoin à la déposition du témoin précédent.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Alors, dans ce cas-là, vous

 18   n'aurez pas suffisamment de temps aujourd'hui. Nous allons nous en tenir à

 19   cela aujourd'hui.

 20   M. EMMERSON : [interprétation] Très bien.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons revenir à huis clos.

 22   Et je voudrais juste mettre en garde le témoin avant cela, Monsieur le

 23   Greffier.

 24   Monsieur, votre déposition n'est pas terminée. Vous allez revenir demain.

 25   Mais je dois vous dire que vous n'avez pas le droit de parler de cette

 26   affaire jusqu'à ce que votre déposition ne soit entièrement terminée. En

 27   particulier, vous n'avez pas le droit de rencontrer les membres de l'équipe

 28   de l'Accusation. Merci.


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  1   Nous pouvons passer à huis clos. Merci.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.

  3   [Audience à huis clos]

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 10   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mardi 27 septembre

 11   2011, à 9 heures 00.

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