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1 Le mercredi 19 mai 2010
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaite un bon après-midi à toutes
6 et à tous.
7 Apparemment, Monsieur Karadzic, vous avez quelques questions que vous
8 souhaitez soulever.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Excellence. Puis-je procéder ?
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai un certain nombre de sujets à aborder
12 devant vous, dont l'un qui est l'un des plus importants est l'intention -
13 j'espère que ce n'est pas encore une décision - d'instaurer une semaine de
14 travail de quatre jours. Nous avons déjà du mal à supporter une semaine de
15 travail de trois jours, compte tenu des moyens à notre disposition. Lord
16 Bonomy, rappelez-vous, avait même dit que les journées de travail se
17 limiteraient à deux jours, et mon équipe comptait huit personnes.
18 Mais cette équipe vient d'être réduite à cinq personnes, dont un
19 spécialiste des questions juridiques, alors que les autres membres de cette
20 équipe n'ont pas la capacité de réaliser tout le travail que nous avons à
21 réaliser.
22 Dès le début du procès, j'avais dit que je tirerais profit de toutes les
23 opportunités et que je ferais tout ralentir la procédure. Or, c'est
24 effectivement mon droit, j'ai le droit de freiner toute présentation
25 d'affirmations erronées, et en particulier, toute présentation
26 d'affirmations clairement erronées de la part du Procureur, et ceci a une
27 très grande importance pour mon peuple là-bas pour le rétablissement de la
28 paix. Etant donné le procès au cœur duquel je me trouve, qui doit se mener
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1 dans l'équité entre les parties, il est très important pour moi de faire
2 tout ce qui est en mon pouvoir pour gagner du temps.
3 Donc une journée de trois semaines me paraît convenable tant que nous
4 n'aurons pas obtenu du greffe trois collaborateurs supplémentaires pour
5 nous trouver avec une équipe au moins égale à ce qu'elle était jusqu'à il y
6 a peu. Etant donné que par tous ces changements on limite les possibilités
7 qui sont les miennes et que l'équivalent de ces limitations se résume pour
8 le Procureur un raccourcissement de l'interrogatoire principal, je dirais
9 que ce raccourcissement de l'interrogatoire principal n'a aucun sens très
10 important pour nous. Au contraire, le travail n'en est pas facilité pour
11 nous; il en est, dirais-je même, rendu plus difficile. Le nombre de moyens
12 de preuve qui sera soumis à tel ou tel témoin de la part du Procureur
13 demeurera en tout état de cause le même, quelle que soit la durée du temps
14 consacré aux questions.
15 Donc véritablement, la Défense estime que cet exemple est un des
16 derniers bastions démontrant que le procès peut vraiment être un procès
17 exemplaire du point de vue de son équité, et donc un modèle pour la
18 communauté internationale. Au cas où cela ne serait pas le cas, nous nous
19 trouverions dans une situation difficile, car le procès ne sera pas, dans
20 ces conditions, équitable. Nous n'aurons pas la possibilité d'exposer
21 l'ensemble des éléments que nous souhaitions exposer et nous n'aurons pas
22 la possibilité de présenter tous les arguments qui sont exigés, étant donné
23 les nombreuses accusations pesant sur nous du fait de l'action du
24 Procureur.
25 Nous espérions, quant à nous, que la durée de la semaine de travail
26 serait de deux jours. Même si l'on n'entendait que les témoins viva voce et
27 les témoins 92 ter, dans ces conditions, peut-être pourrions-nous faire le
28 travail nécessaire avec huit collaborateurs. Mais dans les conditions qui
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1 sont proposées aujourd'hui, la situation pour nous est véritablement très
2 difficile, pratiquement impossible, aussi bien du point de vue des moyens
3 matériels, que du nombre des collaborateurs, que du point de vue de la
4 durée de travail.
5 Vous aurez tous remarqué que les substituts du Procureur se succèdent
6 du côté du Procureur pour l'audition des différents témoins à charge. Or,
7 nous n'avons, de notre côté, que cinq personnes susceptibles d'interroger
8 les témoins. Donc il est tout à fait clair que nos moyens humains et nos
9 moyens financiers sont considérablement limités, qu'ils ne sont pas égaux à
10 ceux du Procureur.
11 Nous demandons donc que si une modification doit intervenir dans la
12 durée de travail, elle consiste à mettre en place des journées de deux
13 jours, et pas des journées de quatre jours, car nous avons absolument
14 besoin de contrer tout ce qu'il doit être contré dans ce procès.
15 Autre remarque. Par amitié à l'égard de M. van Lynden et de M. Doyle, qui
16 ont eu la gentillesse de la Défense, j'ai découvert que ces deux hommes
17 étaient en possession de notes ou de carnets, un peu comme des agendas,
18 alors que nous n'avons pas vu ces notes. Vous constaterez pendant la
19 procédure que pour la première fois, il y a des éléments qui n'ont été
20 évoqués dans aucune émission télévisée et dans aucun reportage des médias,
21 qui apparaissent dans des déclarations préliminaires de témoins ou durant
22 les témoignages verbaux des témoins. Donc il faut bien que ces éléments qui
23 sont tous à notre détriment viennent de quelque part, et nous pensons
24 qu'ils viennent probablement de ces carnets de notes. C'est la raison pour
25 laquelle nous prions que la question soit posée à M. van Lynden,
26 responsable de la Section de défense des Témoins et des Victimes, et
27 qu'injonction lui soit faite de remettre ses notes et ses agendas, hormis,
28 bien entendu, les passages qui concernent des questions personnelles ou des
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1 événements familiaux. Nous demandons également que la même question soit
2 posée à M. Doyle, nous aimerions aussi jeter un coup d'œil aux notes qu'il
3 avait en sa possession. Il les avait sur la table durant la réunion et nous
4 en avons parlé, bien sûr. Il a dit qu'il y avait dans ces carnets de notes
5 un grand nombre de renseignements d'ordre privé, ce que nous respectons
6 tout à fait. Mais si nous devions obtenir ces documents de la part de ces
7 deux hommes, ou même sur injonction de la Chambre, nous aurons besoin, bien
8 entendu, de quelque temps pour étudier le contenu de ces carnets et
9 éventuellement enquêter sur un certain nombre d'événements qui pourraient y
10 être évoqués. Donc il faudrait qu'au moins la date prévue pour le contre-
11 interrogatoire soit légèrement repoussée, car la Défense ne peut pas
12 prendre connaissance de documents aussi volumineux en si peu de temps. Nous
13 n'avons découvert qu'hier ce qu'il en était de ces carnets.
14 Voilà les préoccupations que la Défense voudrait exposer devant la Chambre
15 aujourd'hui. Nous ne savons pas d'ailleurs laquelle des deux est la plus
16 importante; c'est sans doute la première que j'ai évoquée, à savoir la
17 question de la durée de la semaine de travail et de la durée du contre-
18 interrogatoire.
19 M. van Lynden a dit qu'il lui fallait quitter La Haye après la première
20 partie de l'audience de vendredi. Ceci signifie que le temps consacré à son
21 audition sera réellement très limité, or c'est un témoin important. Son
22 opinion peut avoir un effet important sur l'opinion publique mondiale.
23 C'était un témoin oculaire. Il a vu ce qui se passait des deux côtés. Nous
24 n'aimerions donc pas que des contraintes aussi importantes nous rendent la
25 situation plus difficile. Si la Chambre le décide ainsi, nous sommes prêts
26 à travailler toute la journée de demain, et M. van Lynden pourrait
27 comparaître à un autre moment.
28 Merci.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.
2 M. TIEGER : [interprétation] Merci de me donner la parole, Monsieur le
3 Président, et je vais peut-être aborder une autre question. M. Nicholls
4 était présent, et sans doute sera-t-il mieux placé pour répondre aux
5 questions concernant les carnets de notes.
6 En matière de calendrier, pour l'essentiel, l'Accusation s'en remet à la
7 Chambre, car c'est la Chambre qui doit décider de ces questions, mais
8 permettez-moi ces brèves observations.
9 Voici la première. Je n'ai aucun souvenir d'une mention faite par le Juge
10 Bonomy d'une semaine de deux jours, et si on a parlé d'une semaine de deux
11 jours, je suppose que ce n'était pas dans ce contexte-ci, mais je ne
12 voulais pas que mon silence éventuel soit compris ici dans cette salle
13 d'audience comme étant la corroboration de cette référence que nous aurions
14 à notre connaissance.
15 Ça va de soi, mais vous savez comment perçoit l'accusé son devoir
16 envers le peuple serbe, les Serbes, les Musulmans, mais ceci ne saurait
17 être un critère régissant les décisions que vous devez prendre en l'espèce,
18 et c'est peut-être ainsi signaler certaines des raisons qui sont à
19 l'origine des inégalités qu'il y a entre ce qu'on estime un temps de
20 contre-interrogatoire suffisant pour la Défense et ce qu'en pense la partie
21 adverse ou ce qu'en pense la Chambre.
22 Je relève enfin que nous avons des exemples nombreux où la Défense a mal
23 utilisé ses ressources en évoquant des questions qu'il ne fallait pas
24 nécessairement aborder. Nous avons un tel cas dans une requête récemment
25 déposée. Et ceci est peut-être une réponse partielle à la question des
26 ressources et du temps dont l'accusé dit avoir besoin.
27 Pour ce qui est des carnets de notes, je vais peut-être donner la parle à
28 M. Nicholls, mais je rappelle que ce ne sont pas des documents que possède
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1 l'Accusation et qu'on n'aurait pas communiqués. Pas du tout. Ce n'est pas
2 la question qui se pose ici. Apparemment, dans le cadre des enquêtes que
3 l'accusé a menées ou fait mener, l'existence de ces carnets a été confirmée
4 et l'accusé s'y intéresse aujourd'hui. S'il y a une arrivée tardive de ces
5 carnets de notes, c'est pour cette seule raison.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.
7 Vous voulez ajouter quelque chose, Monsieur Nicholls ?
8 M. NICHOLLS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
9 Je souhaite simplement confirmer, ce que je voulais le dire en début
10 d'audience, malheureusement, effectivement M. van Lynden devra nous quitter
11 vendredi vers 11 heures car il y a un vol qui l'attend. J'en ai informé la
12 partie adverse dès hier. Le témoin suivant sera prêt.
13 Et je confirme ce qu'a dit M. Tieger à propos des carnets de notes. C'est
14 au cours du récolement que nous avons eu hier avec M. van Lynden que nous
15 en avons eu connaissance pour la première fois, et ce sont les associés de
16 M. Karadzic qui m'en ont parlé. J'ai dit que je ne les avais pas vus moi-
17 même, que je ne les avais pas, ces carnets. Je ne sais pas ce qu'en pensera
18 le témoin. Faudra-t-il examiner la question plus tard, et si c'est le cas,
19 nous ferons l'impossible pour vous aider s'agissant de ces carnets de
20 notes.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que, avant que vous ne rendiez une
23 décision, je puis me permettre de dire quelque chose ?
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais répliquer à ce que M. Tieger vient
26 de dire.
27 D'abord, le Procureur est dans une situation avantagée si énorme qu'il y a
28 eu investissement d'une quantité énorme d'éléments de preuve en application
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1 du 92 bis. Et il y en a d'autres que les conseils de la Défense n'ont
2 jamais vus et n'ont jamais eu l'occasion d'examiner ou d'en faire l'objet
3 d'un contre-interrogatoire. Il y a énormément d'affirmations, allégations,
4 éléments de preuve, et je dois avoir l'opportunité de contester, ou alors
5 que le Procureur dise quels sont les éléments sur lesquels il renonce.
6 Parce que qu'est-ce qui ne va pas constituer un fondement pour une
7 condamnation potentielle. Mais tout ce qui risque potentiellement d'être
8 matière à condamnation, je demande à pouvoir contester par investigation,
9 par analyse, par exposé de contre-arguments et par confrontation des
10 témoins avec les éléments que nous avons en notre possession, avec ce que
11 nous en savons.
12 Quand M. Tieger a dit qu'il y a eu des questions qu'on n'aurait pas dû
13 évoquer, ça c'est, en général, des éléments juridiques et non pas des
14 éléments de fait.
15 Mais que le Procureur dispose de trois documents à mon encontre, tout ceci
16 n'aurait pas été nécessaire. Ils n'ont rien, ils essaient de m'ensevelir
17 avec des documents, et j'ai l'impression qu'ils ont besoin de tous les
18 témoins qui sont décédés entre-temps pour qu'on les fasse verser au dossier
19 afin d'assurer un jugement en condamnation.
20 Pour ce qui est des Musulmans et des Serbes, bien entendu, c'est un élément
21 complémentaire. Je me défends moi-même, mais le fait est que cette affaire
22 dépasse l'importance d'un seul individu. Il y a eu mise en place
23 d'illusions immenses. Bon nombre de personnes ont participé à la création
24 de ces illusions, les journalistes, le bureau du Procureur, les diplomates,
25 les éléments militaires étrangers, les Services secrets. Donc on a fait en
26 sorte que les Balkans soient toujours une espèce de peau en ébullition et
27 qu'il y ait toujours des éléments de haine ou de mer de sang.
28 Alors, je me défends, mais je veux tirer les choses au clair parce
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1 que cela est une chose qui a beaucoup d'importance pour la vie des gens là-
2 bas.
3 Donc il faudrait être un peu plus modeste pour ce qui est de la
4 contestation des possibilités de la Défense, étant donné que de leur côté
5 les possibilités sont pratiquement illimitées, et si elles ne sont pas
6 illimitées c'est très disproportionné par rapport aux possibilités qui ont
7 été accordées à la Défense.
8 Merci.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez être surpris d'apprendre,
10 Monsieur Karadzic, que la Chambre a l'intention d'organiser une semaine de
11 cinq jours après la pause estivale.
12 De toute façon, la Chambre se prononcera en la matière. Mais en mon nom
13 personnel, je pense qu'une amorce de solution pourrait être celle-ci : on
14 pourrait, par exemple, à une audience où vous seriez représenté par toute
15 une équipe qui serait en mesure de mener des enquêtes, ou ici d'ester en
16 justice.
17 Pour ce qui est des notes, M. Tieger a dit que l'Accusation ne les avait
18 pas, et c'est vous qui pourrez poser la question au témoin vous-même
19 pendant l'interrogatoire principal ou le contre-interrogatoire. J'espère
20 que vous trouverez une solution, quelle qu'elle soit.
21 Demain, il y a une salle d'audience qui est libre. Je vais cet après-midi
22 demander à M. le Greffier s'il est possible d'avoir une audience plus
23 longue demain. Nous ferons de notre mieux et nous verrons ce que ça va
24 donner. Nous verrons en fin d'audition s'il faut rappeler à la barre M. van
25 Lynden ou pas.
26 Ceci étant dit, nous allons demander à M. l'Huissier d'aller chercher le
27 témoin.
28 Monsieur Karadzic, est-ce que vous avez l'intention d'ajouter des écritures
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1 à ce que vous avez dit à l'audience pour ce qui est du calendrier prévu des
2 audiences ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si les Juges de la Chambre estiment que c'est
4 nécessaire, nous le ferons très volontiers, parce que nous avons toujours
5 fait objection pour ce qui est des cadences et de l'inégalité des armes et
6 des ressources. Si tout cela est mis de côté et si cela donne lieu à une
7 accélération des cadences, ça nous ferait parvenir à une situation où le
8 procès ne serait pas du tout équitable. Alors, si vous estimez que cela
9 risque d'influer sur votre décision, je vais certainement me trouver
10 contraint à vous présenter des écritures.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- voir, c'est vous qui décidez de
12 l'opportunité de déposer un complément à ces arguments que vous venez de
13 présenter.
14 Mais faisons entrer le témoin.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Combien de temps ai-je pour le faire ?
16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Disons, d'ici à la fin de la journée de
18 vendredi.
19 Bonjour, Monsieur van Lynden.
20 Je vais vous demander de prononcer la déclaration solennelle.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN : AERNOUT VAN LYNDEN [Assermenté]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
26 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, vous avez la parole.
28 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Interrogatoire principal par M. Nicholls :
2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur van Lynden.
3 R. Bonjour.
4 Q. Je vous l'ai dit, nous allons ici en l'espèce demander le versement de
5 la déclaration que vous avez faite, accompagné de quelques questions de
6 suivi.
7 Etes-vous en mesure de confirmer que vous avez lu la déclaration de
8 synthèse les 25 et 26 février de cette année, déclaration que vous avez
9 signée le 16 mars 2010 ?
10 R. Je le confirme.
11 Q. Confirmez-vous que cette déclaration est tout à fait précise et exacte
12 et que si ces mêmes questions vous étaient reposées aujourd'hui, vous y
13 répondriez de la même façon ?
14 R. En effet.
15 Q. Merci. Enfin, dans cette déclaration sont mentionnées plusieurs
16 séquences vidéo visées en annexe à la déclaration. Confirmez-vous que ces
17 séquences vidéo sont des copies conformes des reportages télévisés que vous
18 avez faits ?
19 R. Oui.
20 Q. Merci.
21 M. NICHOLLS : [interprétation] Je demande le versement de cette déclaration
22 de synthèse qui porte le numéro de la liste 65 ter 22289.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document est versé et devient la
24 pièce…
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] P926. Merci, Monsieur le Président.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
27 Je vais maintenant donner lecture d'un court résumé de la déposition du
28 témoin.
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1 Il était journaliste de la télévision qui se spécialisait dans les
2 reportages en zone de guerre. A ce titre, il a fait des reportages sur les
3 guerres de Croatie et de Bosnie-Herzégovine à partir de 1991. Il
4 travaillait pour la chaîne de télévision "British Sky News." "Sky News,"
5 c'était une chaîne satellitaire, ce qui voulait dire que tout le monde en
6 Europe qui avait les moyens techniques nécessaires pouvait voir ces images
7 et ces reportages.
8 Il est arrivé à Sarajevo fin du mois de mai 1992, et il est resté à
9 Sarajevo jusqu'en septembre 1992. Après, il a passé quelque trois semaines
10 à Pale, et il est rentré en octobre 1992 à Sarajevo pour y poursuivre ses
11 activités. Il est resté un certain temps à Sarajevo.
12 En 1993 et en 1994, le témoin a fait des reportages dans d'autres zones de
13 la Bosnie-Herzégovine et effectué des déplacements aussi à Sarajevo. A
14 Sarajevo, il a surtout séjourné à l'ancien hôpital de la JNA, appelé aussi
15 hôpital municipal ou hôpital d'Etat. Il y a dans ce bâtiment quelque 12 ou
16 13 étages et il se trouve pratiquement au centre de la ville, près de la
17 place Marin Dvor, du parlement, de la ligne de front de Grbavica, ce qui
18 veut dire que M. van Lynden et son équipe étaient très bien placés pour
19 voir ce qui se passait et pour filmer ce qui se passait à l'hôpital.
20 L'hôpital a souvent été la cible de tirs avant l'arrivée de M. van Lynden,
21 mais il y a eu de tels incidents pendant son séjour également. Pendant
22 qu'il se trouvait là, il n'a pas vu de tireurs embusqués qui auraient tiré
23 depuis l'hôpital.
24 Une fois arrivé à Sarajevo, il a pu voir dans quelles conditions vivait la
25 population. Il a vu les difficultés énormes provoquées par l'absence des
26 denrées les plus nécessaires, que ce soit de la nourriture, de l'eau ou
27 d'autres services, et il a vu aussi l'effet qu'a eu le pilonnage sur la
28 population de Sarajevo. Il décrit la peur qui accompagnait les attaques et
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1 pilonnages. Il a vu des gens touchés par balles, gisant dans les rues de
2 Sarajevo, et ces tirs de tireurs embusqués sont devenus quelque chose de
3 tellement fréquent, que finalement, à moins qu'il n'y ait quelque chose de
4 particulièrement horrible qui vienne s'y greffer, on n'en parlait même pas
5 à la télévision.
6 M. van Lynden parle de la situation qui régnait dans les rues de Sarajevo,
7 où les gens devaient traverser en courant à des carrefours pour ne pas être
8 touchés par des tirs de tireurs embusqués. Il parle de ces pilonnages à
9 l'artillerie lourde à Sarajevo, de ces tirs de tireurs embusqués, des
10 pilonnages intenses sur la ville, sur la caserne du maréchal Tito début
11 juin 1992; d'autres incidents d'artillerie lourde en juin 1992, de plus en
12 plus intenses; on a tiré sur les tours UNIS et dans d'autres quartiers de
13 Sarajevo; il a vu des civils blessés qu'on emmenait à l'hôpital de la
14 ville, début juin 1992; et le 5 décembre 1992, il a vu un immeuble où il y
15 avait des appartements qui avaient été pilonnés et qui, ainsi, avaient été
16 incendiés.
17 Il parle de cette situation à Dobrinja en juillet 1992; il parle de cette
18 réunion avec Juka Prazina en mai et en juin 1992; il a effectué une visite
19 à la prison de Kula en septembre 1992; à Vlasenica, il y a eu les obsèques
20 de 28 soldats de la VRS en septembre 1992, il y était aussi, M. Karadzic
21 était présent; et il parle de la situation qui régnait à Srebrenica en
22 novembre 1992 lorsque le témoin est entré dans l'enclave.
23 En septembre et en octobre 1992, il a fait des reportages à partir de Pale
24 pour relater la guerre du point de vue serbe. Et à cet égard, pendant qu'il
25 était à Pale, il a passé plusieurs soirées avec M. Karadzic et au cours de
26 ces soirées ils ont eu des conversations à bâtons rompus après le travail
27 qui se faisait dans le bureau de M. Karadzic, à l'occasion desquelles M.
28 Karadzic, avec deux cartes, expliquait sa vision des choses, et M. van
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1 Lynden a dit qu'il avait vu que c'était une obsession chez M. Karadzic que
2 de prendre Sarajevo.
3 En septembre 1992, il a pu interviewer le général Mladic. A cette occasion,
4 le général Mladic a emmené l'équipe de M. van Lynden et M. van Lynden sur
5 une position d'artillerie qui surplombait directement Sarajevo. Tout ceci a
6 été filmé. Nous allons voir une carte aujourd'hui, et M. van Lynden pourra
7 vous dire approximativement où se trouvait cette position, là où s'est
8 faite l'interview.
9 Après cette interview du général Mladic en septembre 1992, M. van Lynden et
10 son équipe ont effectué plusieurs déplacements sur le périmètre de Sarajevo
11 pour voir des positions tenues par les Serbes de Bosnie, dont Grbavica, le
12 cimetière juif, où M. van Lynden a pu parler aux soldats qui s'y
13 trouvaient. Il est aussi allé au mont Trebevic, à Hrasno, et les Musulmans
14 de Bosnie l'ont emmené sur une position qui se trouvait près de Zuc Hill.
15 En février 1993, il a fait un reportage sur le moment où il est entré à
16 Gorazde. Il a dû, là, passer deux nuits et il y a passé un certain temps.
17 Il a relaté les conditions qu'il y avait trouvées, la grande pauvreté qui y
18 régnait, même si elles n'étaient pas aussi mauvaises qu'à Srebrenica.
19 Février 1994, après les incidents de Markale, il est envoyé à Pale, d'où il
20 a envoyé plusieurs reportages concernant des négociations qui portaient sur
21 le retrait des armes lourdes de Sarajevo. Une fois l'accord conclu et une
22 fois le retrait des armes lourdes effectué, il a pu traverser à pied la
23 place Marin Dvor qui, jusqu'alors, avait été un endroit trop dangereux pour
24 s'y aventurer.
25 Depuis Pale, ses caméramans ont filmé la réunion à laquelle ont participé
26 Gvero, Milovanovic, Karadzic, Mladic, entre autres, et c'est cette fois-là
27 que le général Mladic, lorsqu'il a vu M. van Lynden, s'est approché de lui
28 en colère et lui a dit qu'il n'était pas content de la façon dont il avait
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1 relaté les événements de Zuc et de Gorazde.
2 C'est ainsi que se termine le résumé de la déposition du témoin.
3 Q. Je n'ai plus que quelques questions de contexte à vous poser avant de
4 passer directement à Sarajevo, en 1992.
5 Vous avez grandi et vous avez été formé au Royaume-Uni ?
6 R. Oui.
7 Q. Dites-nous quelques mots de votre service militaire que vous avez fait
8 dans la marine irlandaise, n'est-ce pas, de 1976 à 1978 ? Avez-vous une
9 spécialité ?
10 R. J'ai suivi une formation d'officier d'infanterie et j'ai une spécialité
11 en tant que chef de section de mortier.
12 Q. Après ce service militaire, vous êtes devenu correspondant de guerre ?
13 R. Oui.
14 Q. Avant l'ex-Yougoslavie en 1991, quels conflits avez-vous vus ?
15 R. J'avais commencé par le conflit au Liban, qui avait commencé en 1975.
16 J'ai vécu à Beyrouth de 1982 à 1986. J'ai aussi fait des reportages sur la
17 guerre Iran-Irak, qui avait commencé en 1980. L'occupation soviétique
18 d'Afghanistan, et j'ai fait quatre missions en Afghanistan dans les années
19 1980, chaque fois à pied, pendant trois mois, avec la résistance afghane.
20 J'ai couvert aussi la révolution en Roumanie en décembre 1989, puis la
21 guerre du Golfe après la prise du Koweït par l'Irak, et j'étais avec les
22 forces alliées pendant l'opération Tempête du désert, au moment de la
23 libération du Koweït, début 1991.
24 Q. Merci. Et si je ne me trompe pas, à partir de 1988 vous travailliez à
25 plein temps pour "Sky News" ?
26 R. Oui. Avant, je travaillais surtout pour la presse écrite et la radio.
27 Q. L'essentiel de votre témoignage portera aujourd'hui sur ce que vous
28 avez vécu à partir de votre arrivée à Sarajevo.
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1 Quand êtes-vous êtes arrivé, en mai 1992 ?
2 R. Fin mai, mais je ne me souviens pas de la date exacte de mon arrivée.
3 Q. Vous en parlez dans votre déclaration au paragraphe 6. Mais quelle
4 était la couverture satellitaire de "Sky News" ? Où pouvait-on capter cette
5 émission ?
6 R. Dans toute la Yougoslavie, je pense, comme dans le reste de l'Europe.
7 Si vous aviez une antenne, vous pouviez suivre les émissions de "Sky News."
8 Q. J'espère l'avoir bien expliqué dans ce résumé. D'abord, vous avez eu
9 votre base dans ce qui était l'hôpital de la JNA, de la ville, ce qu'on
10 appelait aussi l'hôpital d'Etat à Sarajevo. Pourquoi avoir choisi ce lieu
11 comme base ? Pourquoi avoir choisi ce lieu comme point de départ de vos
12 activités ?
13 R. Lorsque nous sommes entrés dans Sarajevo en véhicule, il n'y avait pas
14 d'hôtel qui soit ouvert. En général, dans un pays étranger, un journaliste
15 séjourne dans un hôtel. Ce n'était plus possible à Sarajevo. Tous étaient
16 fermés ou avaient déjà été incendiés. J'ai été voir la présidence de
17 Bosnie, j'ai demandé son aide pour trouver un logement.
18 C'est ainsi que nous avons été emmenés dans un bâtiment dont on nous a dit
19 qu'il avait été utilisé de par le passé pour accueillir des personnalités
20 étrangères, et c'était devenu la maison à Sarajevo du commandant des
21 Nations Unies, qui n'était pas encore là. C'est là que nous avons été
22 hébergés. Un bâtiment pas très haut, tout près de la présidence, dans le
23 centre de la ville, et nous avons passé une nuit là. Les pilonnages n'ont
24 pas été particulièrement intensifs mais il y a eu des pilonnages, et nous
25 avons constaté que vu que ce bâtiment n'était pas assez élevé, il était
26 impossible de filmer, ce qui fait que les jours suivants, nous nous sommes
27 mis à la recherche d'un bâtiment plus élevé depuis lequel nous pourrions
28 filmer les pilonnages qui avaient lieu.
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1 Le deuxième ou le troisième jour, nous sommes allés à un endroit qu'on
2 appelait encore l'hôpital militaire. On nous avait dit qu'on s'occupait de
3 blessés là, mais il y avait aussi encore un soldat de la caserne du
4 maréchal Tito encore occupée qui avait été emmené là après avoir été
5 blessé. Nous voulions interviewer cette personne pour voir et savoir ce qui
6 s'était passé.
7 Nous avons rencontré le chirurgien en chef de l'hôpital, le Dr Abdulah
8 Nakas, et à notre arrivée, nous avons vu que ce bâtiment avait été déjà
9 souvent la cible de tirs, mais qu'il était élevé. Il avait l'air à avoir
10 été bien fait, donc on s'est dit que de là ce serait peut-être un bon point
11 pour filmer dans les étages supérieurs qui avaient été évacués. L'hôpital
12 avait été évacué. Ce n'était plus considéré comme étant un lieu sûr. Donc
13 nous sommes allés à l'étage du haut et nous avons demandé à M. Nakas si
14 nous pourrions y passer les nuits afin, effectivement, de filmer
15 d'éventuels combats.
16 Il y avait deux éléments intéressants à propos de ce bâtiment. Il était
17 élevé, donc on voyait bien la ville de là. Et à gauche, il y avait un
18 balcon d'où on pouvait filmer la vieille ville de Sarajevo. Et devant, il y
19 avait la place Marin Dvor, le parlement et les collines au sud de Sarajevo.
20 Et de l'autre côté, à droite, il était possible de filmer la nouvelle ville
21 de Sarajevo. Donc c'était un point de vue idéal.
22 Nous avons demandé au chirurgien en chef s'il était possible d'occuper cet
23 étage supérieur d'un bâtiment qui avait déjà été souvent pilonné, et c'est
24 là que nous avons pratiquement passé chaque nuit à Sarajevo.
25 Q. Merci. Est-ce que vous avez cherché à vérifier si ce bâtiment était
26 utilisé par des forces musulmanes de Bosnie et est-ce que vous avez cherché
27 à savoir s'il y avait des activités de tireurs embusqués depuis cet hôpital
28 ?
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1 R. Oui, c'est ce que nous avons fait aussitôt. Parce que si vous allez
2 dans un bâtiment qui a fait l'objet d'attaques répétées, manifestes, on se
3 demande pourquoi forcément. J'étais correspondant, j'avais à ma charge une
4 équipe de télévision et j'avais donc la responsabilité de sa sécurité dans
5 la mesure du possible puisqu'on était en zone de guerre. Donc je vais
6 vérifier si c'est bien un bâtiment utilisé ou pas par des forces
7 militaires, et cette vérification a été minutieuse. L'expérience de 1991 en
8 ex-Yougoslavie m'avait déjà appris une chose, les soldats yougoslaves, de
9 quelque bord qu'ils soient, de quelque nationalité ou religion qu'ils
10 soient, ils ne sont pas très propres quand ils partent. En général, s'ils
11 occupent un endroit et qu'ils partent, il reste des douilles. On n'en a
12 jamais trouvé. Et nous sommes souvent allés sur le toit la nuit, c'est
13 dangereux parce qu'à ce moment-là on vous voit dans la lumière de la nuit.
14 Nous n'avons rien trouvé. Et nous avons eu beaucoup de conversations avec
15 d'autres personnes, et jamais personne n'a dit que ce bâtiment avait été
16 utilisé à des fins militaires par les forces musulmanes de Bosnie.
17 Q. Merci. Vous êtes resté à Sarajevo cette fois-là jusqu'à la fin du mois
18 de mai ou jusqu'au début juin, est-ce que l'hôpital a été la cible de tirs
19 ?
20 R. Oui.
21 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de dire quels sont les armes ou
22 projectiles utilisés à cette fin ?
23 R. La question est difficile. Si vous êtes dans un bâtiment qui est
24 touché, on ne sait pas toujours -- bon, on a le degré de bruit, on ne sait
25 pas quelle est l'importance des dégâts causés, c'est difficile de le dire.
26 Mais pendant que j'étais à l'intérieur du bâtiment, il me semblait que la
27 plupart des tirs venaient de calibre faible, 20, 30, 40-millimètres, donc
28 ça peut être tiré par des canons antiaériens, et il n'y a eu qu'une seule
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1 fois où je me suis trouvé dans le bâtiment et où je me souviens
2 parfaitement qu'on était assez sûr que c'était un obus de char, enfin,
3 quelque chose de ce goût-là, parce que la détonation était très forte et ça
4 a détruit une partie de la cage d'ascenseur.
5 Q. Merci. J'aimerais vous montrer une vue panoramique de Sarajevo. Il
6 s'agit du numéro 14665A de la liste 65 ter.
7 Madame, Messieurs les Juges, il s'agit d'une photographie qui constitue la
8 pièce à conviction que j'ai ajoutée à ma liste d'éléments de preuve et j'en
9 ai fait une notification.
10 Alors, ce que nous sommes en train de voir tout au bas de l'écran c'est le
11 14665, et nous n'avons fait qu'agrandir la partie centrale de la photo ici.
12 Donc dans la partie supérieure de la photo, Monsieur van Lynden -- il me
13 semble que c'est quand même un peu trop zoomé. Revenons un peu. Voilà.
14 Voyez-vous où est-ce que se trouvait cet ex-hôpital militaire où vous vous
15 trouviez ?
16 R. Oui. C'est à droite. Le bâtiment blanc à droite.
17 M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que quelqu'un peu aider M. van Lynden
18 afin qu'il puisse annoter l'emplacement de cet immeuble avec son stylet.
19 Q. Peut-être pourriez-vous mettre une flèche et mettre un numéro 1 ?
20 R. [Le témoin s'exécute]
21 Q. Merci. Est-ce que vous pouvez voir et indiquer quelles sont les tours
22 de l'entreprise UNIS ?
23 R. [Le témoin s'exécute]
24 Q. Merci.
25 R. Ce sera le numéro 2 ?
26 Q. Oui, en effet. Merci.
27 R. [Le témoin s'exécute]
28 Q. Est-ce que vous pouvez nous indiquer maintenant l'édifice du parlement
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1 ou mettre une flèche ?
2 R. [Le témoin s'exécute]
3 Q. Mettez donc un numéro 3.
4 R. [Le témoin s'exécute]
5 Q. Merci. Est-ce que vous pouvez également nous indiquer l'emplacement de
6 l'hôtel Holiday Inn ?
7 R. [Le témoin s'exécute]
8 Q. Mettez un numéro 4. Alors, ceci est une photo qui ne date pas de
9 l'époque. C'est plus récent. Est-ce que vous pouvez nous indiquer
10 l'emplacement de cette caserne maréchal Tito ?
11 R. Oui, c'est assez grand, c'est derrière ces immeubles-ci [Le témoin
12 s'exécute]. Ce serait le numéro 5 ?
13 Q. Oui, s'il vous plaît. Merci.
14 R. [Le témoin s'exécute]
15 M. NICHOLLS : [interprétation] Je voudrais que ceci soit versé au dossier.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tel qu'annoté ?
17 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, tel qu'annoté.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce
20 P927. Merci.
21 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci. Vous pouvez enlever ceci de nos
22 écrans.
23 Q. Maintenant que nous avons déterminé l'endroit où vous vous trouviez et
24 qu'on a annoté ces différents endroits, je voudrais que vous me disiez ce
25 que vous avez pu constater au quotidien concernant les conditions de vie de
26 la population à Sarajevo suite à votre arrivée. Ceci se rapporte aux
27 paragraphes 21 à 30 de votre déclaration consolidée. Est-ce que vous
28 pourriez dire brièvement, en utilisant vos propres mots, quelles ont été
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1 vos impressions lorsque vous êtes arrivés concernant les conditions dans
2 lesquelles se trouvaient les citoyens pour ce qui est de tout ce qui
3 constituait vivres, eau, fournitures, approvisionnement, et cetera ? Dites-
4 nous ce dont vous vous souvenez.
5 R. Bien, ce qui a fait une impression claire sur nous c'est qu'une fois
6 qu'on est venus par la route, depuis Ilidza, qui était tenue par les Serbes
7 de Bosnie, et lorsqu'on est entrés sur le territoire qui était contrôlé par
8 le gouvernement bosnien, il n'y avait personne sur la route. La caserne du
9 maréchal Tito était encore entre les mains de la JNA, et on a dû faire tout
10 le tour en passant par les collines aux fins d'arriver au centre de
11 Sarajevo. On n'a vu pratiquement aucun véhicule sur la route. Et si ça a
12 été le cas, c'étaient des véhicules qui conduisaient extrêmement vite. On
13 avait l'impression que c'était une ville fantôme, une ville vide. Si on
14 voyait des gens sur les routes sur le territoire tenu par le gouvernement
15 de la Bosnie dans les collines du sud de Sarajevo, on voyait les gens
16 courir. Donc il y en avait qui étaient vieux, qui n'étaient pas capables de
17 courir, et quand il fallait traverser la rue, tout le monde courait pour
18 traverser.
19 Lorsque nous sommes arrivés, il n'y avait pas de tirs à l'arme lourde qui
20 auraient été permanents. C'était occasionnel. Il y avait aussi des tirs de
21 fusils. Les gens couraient pour traverser les rues et il n'y avait pas
22 d'abris et pour traverser, il fallait courir.
23 Je n'ai jamais été dans une ville pareille -- j'ai vécu à Beyrouth, c'était
24 une ville qui était en guerre, mais la situation n'était pas du tout
25 pareille, parce qu'il y avait de grandes parties de la ville où les gens ne
26 pouvaient traverser qu'en courant, et je parle de Sarajevo.
27 Q. Merci.
28 R. Mais pour ce qui est des approvisionnements en électricité, gaz, eau,
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1 vivres, il n'y avait pas de magasins ouverts. Tout était vide fin mai 1992.
2 Il y avait de tout petits marchés où des individus vendaient ce qu'ils
3 produisaient. Mais il était encore possible à Sarajevo d'acheter des
4 bouteilles de vin rouge. Mais ça c'est disparu très vite. Il y avait un peu
5 de légumes, très peu au marché, et déjà les vivres constituaient un
6 problème pour la population.
7 L'électricité, ça n'a toujours pas été un grand problème en mai 1992. Par
8 la suite, dans la majeure partie des secteurs de Sarajevo, il n'y avait pas
9 d'électricité du tout.
10 Pour autant que je sache, s'agissant des approvisionnements en gaz et eau,
11 les problèmes étaient bien pires plus tard lorsque la guerre faisait rage.
12 Mais à ce moment-là, il y avait encore de l'eau courante dans les maisons.
13 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
14 Je voudrais qu'on nous passe brièvement un clip vidéo. Il s'agit du 65 ter
15 40264A, ça a été diffusé à la date du 1er juin.
16 A cet effet, je voudrais qu'on fasse un arrêt au début même, où on voit un
17 symbole.
18 On s'est arrêté à 00:00:06:8, et on voit un écran d'ordinateur avec une
19 date. Alors, est-ce que vous pouvez nous indiquer ce qui est montré au
20 début de votre émission ? On en verra pas mal des cas comme cela lorsqu'on
21 verra les autres clips.
22 R. Ceci est placé par le bureau central de Londres avant la diffusion de
23 ce qui a été filmé, alors c'est repris par ordinateur. Ce qui fait que vous
24 voyez une montre qui est réglée à 45 [comme interprété] secondes, et ça
25 s'est arrêté à deux secondes avant la fin, et c'est là qu'on commence à
26 diffuser. Alors ici, on voit l'intitulé, "Aernout" et "Yugo," et "Yugo"
27 veut dire Yougoslavie. On voit le récit qui se rapporte à la date du lundi
28 1er juin 1992.
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1 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
2 Madame, Messieurs les Juges, c'est le clip vidéo qui est évoqué au
3 paragraphe 44 de la déclaration.
4 Est-ce qu'on peut nous faire voir le clip vidéo maintenant.
5 [Diffusion de la cassette vidéo]
6 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
7 "A Sarajevo, sur les carrefours, on risque d'être tué. Il faut traverser
8 très rapidement. L'artillerie serbe autour de Sarajevo sur les collines
9 sont des points de tir. Les personnes âgées doivent accepter que c'est une
10 nouvelle réalité désagréable de la vie de tous les jours. Voir les gens de
11 Sarajevo courir dans les rues, à voir cela, on propose des cessez-le-feu, à
12 convenir à une réunion des représentants des Nations Unies et du président
13 Alija Izetbegovic --"
14 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais qu'on s'arrête ici. Merci.
15 Q. Tout d'abord, il me semble que c'est le tout premier extrait vidéo que
16 vous avez envoyé de Sarajevo en mai 1992, une fois arrivé ?
17 R. Pour autant que je me souvienne, oui.
18 Q. La scène qu'on a vue tout à l'heure, ces personnes qui sont en train de
19 courir pour traverser la rue ou un carrefour - et vous avez commencé à en
20 parler - était-ce là chose normale ou est-ce que c'était exceptionnel ?
21 Est-ce que c'était difficile de trouver des cas de figure comme cela ou
22 est-ce que c'était quotidien ?
23 R. C'était tout à fait quotidien.
24 Q. Vous en parlez aussi, et au paragraphe 46 de votre déclaration, vous
25 dites que Sarajevo était très différente de votre expérience de Beyrouth.
26 Dans le bref extrait qu'on vous a montré avant de s'arrêter au 00:45:4, on
27 a vu des vues depuis les collines surplombant Sarajevo. On a vu un
28 carrefour de filmé. Comment les lignes de tir de Sarajevo différaient-
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1 elles, de votre point de vue, de ce que vous aviez eu l'occasion de voir à
2 Beyrouth ?
3 R. D'abord, il faut savoir que Sarajevo ça s'est construit autour d'une
4 rivière qui se trouve au bas d'une vallée, la rivière Miljacka, ensuite la
5 ville monte vers les collines qui sont autour, au sud et au nord. Ce que
6 vous avez vu là-haut ce sont les collines du sud qui étaient tenues par les
7 Serbes. Et littéralement parlant, on l'a vu en septembre 1992, lorsque nous
8 avons travaillé du côté des Serbes de Bosnie et lorsque nous avons filmé
9 depuis ces positions-là, on a pu voir que ceux qui se trouvaient là
10 pouvaient voir littéralement les différentes rues, les différents
11 carrefours de la ville de Sarajevo et du centre de Sarajevo, donc on voyait
12 toute la vallée qui se trouvait en contrebas.
13 Q. Quand vous dites ceux qui étaient en haut pouvaient voir en bas la
14 vallée, à qui faites-vous référence ?
15 R. Je fais référence aux Serbes de Bosnie.
16 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
17 Monsieur le Président, je voudrais que l'on accorde une référence à cette
18 vidéo.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, ce document
21 sera désormais la pièce P928. Merci.
22 M. NICHOLLS : [interprétation]
23 Q. Alors, dans le paragraphe 26 de votre déclaration, vous évoquez un
24 incident concret de tireurs embusqués, et vous précisez que vous n'avez pas
25 été témoin oculaire de tirs en direction de personnes ou de personnes qui
26 auraient été touchées par impact de balle, mais vous les avez vus dans la
27 rue. Plus tard, lorsque l'on avait essayé de les sauver, pouvez-vous nous
28 dire ce que vous avez vu cette fois-là ?
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1 R. Si je m'en souviens bien, c'était en juillet 1992. Nous étions au poste
2 de télévision et nous étions en train de retourner vers la télévision le
3 long du boulevard du maréchal Tito. Et avant que d'arriver à la caserne du
4 maréchal Tito, on nous a arrêtés. Des gens dans la rue nous ont fait
5 stopper, et nous avons pu voir qu'un certain nombre de personnes étaient
6 allongées dans la rue. La rue était assez large, et c'étaient des gens qui
7 étaient touchés par balles lorsqu'ils essayaient de traverser la rue. Pour
8 autant que je m'en souvienne, il y en avait trois. Ils étaient tous les
9 trois vivants, mais grièvement blessés. On nous a d'abord dit qu'il y avait
10 une personne de touchée et blessée, qu'une autre personne avait couru pour
11 l'aider et que cette autre personne avait été touchée aussi, et il est
12 arrivé la même chose à une troisième personne. Par la suite, les gens ont
13 compris le message et ils ont compris qu'il ne fallait plus courir là-bas.
14 Ils attendaient donc l'arrivée d'un véhicule bleu blindé, qui était
15 probablement un blindé des forces de la police, qui s'est placé entre
16 l'emplacement des corps et la position à partir de laquelle il y a eu ces
17 tirs, donc au sud de Beyrouth -- non, de Sarajevo. Excusez-moi. Ça a duré
18 un moment, et lorsque le blindé est arrivé, il y a eu une suite de tirs en
19 direction des personnes qui étaient allongées dans la rue. Et pour autant
20 que je m'en souvienne, deux des trois étaient mortes. On a placé les corps
21 à bord du blindé de transport et ils les ont emmenés. On a suivi ce
22 véhicule et on est arrivé à la morgue de l'hôpital de Kosevo, c'était
23 l'hôpital de l'académie médicale de Sarajevo, où l'on a pris les corps et,
24 de façon graphique, on nous a montré comment ces personnes avaient été
25 tuées. Je me souviens qu'il avait passé pratiquement son doigt entier dans
26 le trou de balle de cet homme mort pour montrer la trajectoire qui a été
27 suivie par la balle.
28 Q. Est-ce que vous vous souvenez du fait que c'étaient des hommes ou des
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1 femmes ?
2 R. Pour autant que je m'en souvienne, il s'agissait d'une femme et de deux
3 hommes.
4 Q. Est-ce que vous avez pu savoir si c'étaient des civils ou des soldats ?
5 R. C'étaient définitivement des civils. A cette phase-là, la plupart des
6 soldats du côté bosnien avaient porté des uniformes. Ceux-là n'avaient pas
7 porté d'uniformes. Pour autant que je m'en souvienne, la femme qui a été
8 touchée avait un sac de shopping et elle était d'un âge moyen. Nous nous
9 sommes renseignés, et pour autant que nous le sachions, c'étaient des
10 civils.
11 Q. Merci. Comme nous l'avons déjà indiqué dans ce bref résumé au tout
12 début de votre témoignage, au paragraphe 49 de la déclaration, vous
13 précisez que ces incidents de tireurs embusqués étaient devenus si
14 habituels que les incidents particuliers ne valait même pas la peine d'en
15 rapporter dans la presse.
16 R. Je crains fort que ce soit le cas. C'était au tout début de la guerre.
17 Si on faisait, par exemple, un parallèle, c'est comme les attentats
18 suicides en Irak de nos jours. Au début, c'était la grande nouvelle, début
19 1993 [comme interprété], mais maintenant, on mentionne à peine ce genre
20 d'incidents. Et à Sarajevo, ça a été quelque chose de similaire. Au début
21 de la guerre, c'était quelque chose de tout à fait nouveau, c'était la
22 ville qui avait été la ville hôte des Jeux olympiques d'hiver en 1984 était
23 tout à coup exposée à des tirs de tireurs embusqués et les citoyens étaient
24 ciblés par ces tireurs embusqués, puis les choses ont changé en été 1992.
25 Donc à quelques mois à peine plus tard, les incidents de tireurs embusqués
26 étaient si nombreux que cela ne valait même pas la peine de les rapporter.
27 A moins de parler, par exemple, de l'incident où un jeune homme et une
28 jeune femme qui avaient essayé de s'enfuir de Sarajevo, c'était une espèce
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1 de récit ou d'histoire où il y aurait un Roméo ou une Juliette qui était
2 l'un Musulman et l'autre Orthodoxe, et ils ont été tous les deux tués. Donc
3 cela a attiré l'attention du public international. Mais dans l'ensemble,
4 les médias n'avaient plus prêté du tout attention à ce type d'incidents
5 individuels avec des tirs de tireurs embusqués.
6 Q. [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Microphone, Monsieur Nicholls.
8 M. NICHOLLS : [interprétation]
9 Q. Nous allons passer maintenant à juin 1992 pour ce qui est de ce que
10 vous aviez envoyé comme reportage dans les premières semaines de juin.
11 Madame et Messieurs les Juges, il s'agit des paragraphes 52 à 58 de cette
12 déclaration consolidée, et ça se rapporte aux pilonnages et aux tirs en
13 direction de la ville. J'ai relevé qu'il y a une erreur de frappe dans les
14 écritures de lundi. Paragraphe 52, note de bas de page 14, il y a un
15 mauvais numéro pour ce qui est du 65 ter. Le bon numéro est le 40264C, une
16 vidéo, que je voudrais qu'on nous passe maintenant. C'est daté du 5 juin,
17 comme on l'indique au début.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais pour autant que je m'en souvienne,
19 vous avez dit qu'il fallait entendre un D.
20 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, j'ai peut-être par erreur lu ce qui
21 était erroné. C'est un D qu'il faut entendre. Merci. Oui, c'est bon.
22 [Diffusion de la cassette vidéo]
23 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
24 "Quelques heures après l'évacuation des troupes depuis les casernes --"
25 M. NICHOLLS : [interprétation] Non, non, ce n'est pas le bon. Arrêtez-vous
26 là. C'est le numéro 4024C [comme interprété]. Oui, excusez-moi. On va
27 d'abord faire passer cet enregistrement-ci.
28 [Diffusion de la cassette vidéo]
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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
2 "La nuit tombe sur Sarajevo. On voit tomber des obus parmi les vieux
3 minarets et cela annonce encore une nuit de pilonnage lourd.
4 "Au fil des six heures à venir, ça ne relâchera pas. Tristement éclairée
5 par des balles traçantes, la ville est ciblée de toutes parts et de toutes
6 armes pratiquement. On voit les tracés des tirs de mitrailleuses qui
7 descendent le long des rues avant que d'atteindre les cibles visées. Les
8 obus lourds sont en train d'atterrir sur des bâtiments qui s'enflamment
9 immédiatement après. Des masses de flammes folles qui proviennent de ces
10 tirs successifs d'obus de mortier éclairent les flancs de l'une des
11 collines.
12 "Le monde entier est en train de voir des scènes de destruction agressives
13 d'une ville, sans rien n'entreprendre du tout."
14 M. NICHOLLS : [interprétation]
15 Q. Bien, le clip vidéo qu'on vient de voir, la date au début était celle
16 du 5 juin. Et on a pu clairement voir ce que vous avez filmé, mais est-ce
17 que vous pouvez nous dire ce qu'on voit ? Quelles sont les parties de la
18 ville qu'on est en train de nous montrer, qu'est-ce que vous avez filmé au
19 juste ?
20 R. Toutes ces images sont des vues prises à partir de la position que nous
21 avions occupée à l'hôpital militaire, telle que je l'ai décrit au début de
22 l'audience. Les premières images ont été prises depuis le balcon qui se
23 trouvait à gauche et qui surplombait la vieille ville de Sarajevo. On a pu
24 voir les roquettes. Les tirs de roquettes depuis le sommet des collines à
25 l'est de Sarajevo, et c'était en train de tomber sur la vieille partie de
26 la ville de Sarajevo. Ce que vous avez vu par la suite ça a été tourné à
27 partir des fenêtres du milieu du bâtiment qui donne sur la partie centrale
28 de Sarajevo, ensuite depuis le balcon qui se trouvait à droite, où l'on
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1 voit les tirs d'obus, et de mitrailleuses lourdes, vers la nouvelle partie
2 de Sarajevo.
3 Mais tous ces tirs viennent du sud de Sarajevo depuis les collines qui se
4 trouvent au sud et les retombées c'est sur la ville. La ville entière était
5 ciblée. Ce n'était pas des tirs spécifiques, pour cibler un endroit
6 particulier ou le quartier particulier, c'étaient des tirs qui étaient
7 dirigés vers la ville entière.
8 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire suite à cette vidéo brève qui s'arrête
9 à 09.28.8 - et c'est une question plutôt difficile - mais combien de tirs
10 avez-vous pu filmer cette nuit-là s'agissant de ce clip, qu'est-ce que cela
11 constitue ? Ensuite j'aurais une question de suivi. Mais dites-nous d'abord
12 ce que vous avez réussi à filmer ?
13 R. Tous ceux qui n'ont pas été travailler pour la télévision dans une zone
14 de guerre, il faut dire que tourner ce genre de chose ou filmer ce genre de
15 chose c'est très difficile. D'abord, vous entendez boum, puis ça se trouve
16 d'un côté. Le temps que vous arriviez c'était déjà fini. Il y avait de la
17 fumée et c'est tout. Mais la nuit c'était encore plus difficile. Alors vous
18 vous dites : Je devrais peut-être continuer à filmer de ce côté, puis ça
19 tombe de l'autre côté. Par conséquent, pour qu'une équipe de la télévision
20 réussisse à filmer autant de choses - non seulement une nuit mais pendant
21 les nuits qui ont suivi - réussisse donc à tourner tous ces tirs-là, ça
22 signifie que les tirs étaient bien plus nombreux que ce qu'on a réussi à
23 filmer. Le caméraman qui était en ma compagnie c'est un caméraman qui a été
24 dans la guerre du Golfe avec moi, il a été pendant la révolution en
25 Roumanie, avec moi en 1991 en Croatie aussi. Mais nous n'avons jamais été
26 en mesure de tourner, de filmer ce type de vue pour ce qui est des tirs à
27 l'article. Et cela vous indique clairement qu'il s'agissait d'une nuit de
28 pilonnage très lourd, comme cela était le cas dans les nuits d'après.
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1 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner une idée concernant la durée de ces
2 pilonnages ? Quand est-ce que cela commençait, au soir et combien cela
3 durait-il la nuit, ou jusqu'au jour ?
4 R. Bien, ça variait d'un jour à l'autre. Vous avez pu voir qu'ici il
5 faisait encore jour. Ça a commencé fin d'après-midi, début de soirée. Et
6 autant que je m'en souvienne, dans cette nuit-là, ça avait duré jusqu'à
7 trois ou quatre heures du matin, à peu près.
8 Q. Merci. Je voudrais -- oui, excusez-moi.
9 M. NICHOLLS : [interprétation] Je voudrais d'abord qu'on nous donne une
10 cote pour cette vidéo.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce que nous avons vu à présent c'est une
12 référence D et non pas une référence C pour que les choses soient claires.
13 M. NICHOLLS : [interprétation] Non, c'était un C. Référence C.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, si c'était un C. Merci.
15 Alors donnez-nous donc une référence. Ce sera le P292 ?
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Non, rectificatif. Ce sera le 929. Merci.
17 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie.
18 Q. Alors vous nous avez déjà parlé aujourd'hui de cette caserne qui
19 s'appelait maréchal Tito et de la situation qui y prévalait.
20 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre un autre clip
21 vidéo qui est le 40264D daté du 6 juin. Il s'agit d'une vue de la caserne.
22 [Diffusion de la cassette vidéo]
23 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
24 "A quelques heures seulement après l'évacuation de la caserne du
25 maréchal Tito, elle devient la cible principale. Les obus tombent dans la
26 cour de la gare ferroviaire de la ville. Et à l'intérieur de ce grand
27 complexe militaire, ceux qui sont venus piller comprennent le message qui
28 leur est envoyé et fuient. Peu de temps après, l'artillerie, depuis les
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1 collines au-dessus de la capitale de Bosnie, trouve un spectre de tirs --
2 ou un angle de tirs et la caserne explose dans ses flammes. Alors, bien que
3 ce soit la cible principale, cette caserne, les autres parties de la ville
4 n'y échappent pas. Il y a des roquettes qui tombent dans la nuit et ça
5 éclaire le vieux centre de la ville de Sarajevo, ensuite c'est enseveli
6 sous des ruines. Les obus tombent individuellement, par paires, par trois,
7 et on a l'impression que la ville est en train de sangloter.
8 A 3 heures du matin, la caserne redevient la principale cible de
9 l'attention du tireur. Il s'agit d'un grand complexe militaire qui est
10 désormais en flammes. Et comme il commence à faire jour, des gens sont en
11 train de sortir pour voir les dégâts."
12 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci. On s'est arrêté au point 12:53:2,
13 c'est-à-dire à l'endroit où on voit sur la vidéo des gens en train de
14 sortir un lit d'un immeuble.
15 Q. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que nous avons vu au début
16 même ? Vous avez parlé de cet éventail de cibles, d'obus qui tombaient sur
17 la gare ferroviaire.
18 R. Il est normal pour toutes les unités d'artillerie ou de mortiers,
19 lorsqu'on leur assigne une cible, au début, les obus vont aller au-delà ou
20 ne vont pas atteindre le niveau ciblé. Alors, on a vu que les premiers obus
21 étaient passés par-dessus la caserne et avaient touché la gare ferroviaire,
22 au nord de la caserne, ensuite ils ont trouvé l'ajustement du tir. C'est
23 ainsi qu'on procède dans toutes les unités d'artillerie et de mortier dans
24 le monde entier. D'abord, vous dépassez le tir, ensuite vous réajustez le
25 tir, puis vous ciblez bien.
26 Après ces quelques obus de départ, il y a eu des tirs extrêmement précis
27 pendant toute la nuit en direction de la caserne du maréchal Tito, et des
28 parties entières de la caserne ont brûlé. Vous avez pu le voir dès le
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1 début.
2 Q. Et ce qu'on voit par la suite, est-ce que c'est le même type de tirs ou
3 est-ce que c'est autre chose qu'on cible, ou c'est toujours la caserne
4 maréchal Tito ?
5 R. Ce qu'on voit après, c'est pendant que l'on avait ciblé directement la
6 caserne du maréchal Tito, en même temps, il y a eu des tirs vers les autres
7 quartiers de la ville, et là-bas, s'agissant de ces quartiers, on a tiré
8 plus au hasard et il est plus difficile de filmer, parce qu'il tombe un ou
9 deux obus dans une partie de la ville, puis on cesse de tirer dans cette
10 direction pendant un certain temps, puis alors on court d'une fenêtre à
11 l'autre de cet hôpital pour filmer ce qu'on était en train de cibler
12 désormais. Donc c'était au hasard. Ce n'était pas concentré comme cela a
13 été le cas des tirs dirigés vers la caserne du maréchal Tito.
14 Lorsque j'étais avec les forces britanniques et américaines dans la guerre
15 du Golfe, un peu avant la campagne terrestre pour libérer le Koweït, j'ai
16 passé beaucoup de temps avec des unités d'artillerie. Je n'étais pas dans
17 l'artillerie, je n'ai pas suivi ce type d'entraînement, alors je leur ai
18 demandé comment est-ce qu'ils planifiaient leurs opérations au début de
19 cette campagne terrestre de libération du Koweït. Ils nous ont expliqué
20 qu'on leur donnait des cibles concrètes et que, s'agissant de ces cibles,
21 il y a toujours une situation où le personnel militaire sur le terrain,
22 après les tirs d'artillerie, donc l'infanterie lance ses assauts. Mais ici,
23 il n'y avait aucune espèce d'infanterie, rien ne se produisait. C'était des
24 tirs de barrage en direction de la caserne du maréchal Tito, mais aussi en
25 direction des autres quartiers de la ville.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
27 Je voudrais un numéro de pièce à conviction, Monsieur le Président. C'était
28 une référence D.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Certes.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document sera
3 la pièce P930. En plus, j'ajouterais que nous n'avons pas obtenu le
4 document qui accompagne en général une pièce à conviction. Merci.
5 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais à présent vous poser une question
6 au sujet du sort des tours UNIS. Nous verrons également une séquence vidéo
7 à ce sujet, paragraphe 59 de votre déclaration.
8 Monsieur le Président, suis-je en droit de penser que nous avons cinq
9 minutes avant la pause ?
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cela va bien.
11 M. NICHOLLS : [interprétation] Donc nous pouvons poursuivre.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
13 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais maintenant que soit visionnée la
14 vidéo qui constitue le document 40264E, séquence qui date du 7 juin, selon
15 le code de date que l'on voit au début de la séquence.
16 [Diffusion de la cassette vidéo]
17 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
18 "Ceci était le symbole de la Sarajevo moderne, et aujourd'hui le symbole de
19 sa destruction. Les flammes détruisent les rez-de-chaussée et montent
20 jusqu'aux étages les plus élevés en faisant pleuvoir des débris sur les
21 rues du cœur de la capitale bosniaque. La désintégration de l'une des tours
22 UNIS de la ville se reflète dans les vitres brisées de la tour jumelle.
23 Trois cents mètres plus loin, de l'autre côté de la rue, le Parlement de
24 cet Etat nouvellement indépendant est également touché. Il ne brûle pas,
25 mais la caserne du maréchal Tito, située non loin de là, est en flammes.
26 Depuis son évacuation deux jours plus tôt, elle fait l'objet d'attaques
27 systématiques visant à sa destruction.
28 Toutes les nuits à Sarajevo, on pense que les choses ne peuvent pas
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1 empirer, mais en fait, elles empirent en transformant les efforts des
2 médiateurs pour ramener la paix dans la ville qui s'enfonce dans la guerre
3 en une tentative risible.
4 Moins de 24 heures plus tôt, les commandants serbes avaient apposé leurs
5 signatures sur un nouvel accord, encore, affirmant une trêve qui ne fut
6 jamais respectée ainsi que leur volonté de rouvrir l'aéroport. Aujourd'hui,
7 les canonniers serbes sur les collines montrent quelle est la réalité de
8 l'engagement pris par eux. Sous une lune fatiguée, la ville bondit sous les
9 explosions, éclairée par les incendies et les étincelles qui s'envolent au-
10 dessus de ses toits.
11 Avec le retour du jour, nous trouvons les salles de l'hôpital pleines
12 d'amputés gémissants. Certains survivront, mais les médecins sont résignés
13 à la mort de cette fillette. Pas loin de l'endroit où gît cette fillette,
14 deux autres blessés sont déjà partis. C'est un lieu de mort au hasard, avec
15 certains cadavres couverts, d'autres non. Une petite maison de l'horreur
16 bosniaque."
17 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
18 M. NICHOLLS : [interprétation]
19 Q. Je pense que cette séquence et le récit qui l'accompagnait se suffisent
20 à eux-mêmes. Mais pourriez-vous nous dire ce que vous savez au sujet de
21 cette personne que l'on a vue dans la dernière image, ce jeune garçon sur
22 la table, que lui est-il arrivé ?
23 R. Il n'était pas sur une table, il était sur un brancard, sur le sol.
24 C'était un garçonnet, comme vous l'avez dit. Et d'après ce que l'on peut
25 comprendre, il avait succombé à des éclats d'obus.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
27 Je demande un numéro de pièce à conviction, Monsieur le Président, pour ce
28 document, 4264E [comme interprété].
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P931, Monsieur le
3 Président.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Vingt-cinq minutes de pause.
5 --- L'audience est suspendue à 15 heures 34.
6 --- L'audience est reprise à 16 heures 02.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Nicholls,
8 je vous prie.
9 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Q. Ce sera ma dernière question au sujet de cette vidéo qui nous montrait
11 les tours Unis, Monsieur van Lynden. Avez-vous pu voir si des flammes
12 provenaient des tours UNIS au moment où elles ont été touchées ?
13 R. Je n'ai jamais vu la moindre flamme sortant des tours UNIS, non. Nous
14 avions pénétré dans ces tours quelques jours plus tôt, parce que la caserne
15 du maréchal Tito était toujours occupée par la JNA à ce moment-là, et nous
16 souhaitions être en position élevée de façon à filmer cette caserne du
17 maréchal Tito. Nous avons souhaité ouvrir une fenêtre, nous n'y sommes pas
18 parvenus. Les fenêtres étaient scellées. Il y avait un système d'air
19 conditionné. Par conséquent, à moins de briser une vitre, cela ne pouvait
20 pas se transformer en pas de tirs particulièrement favorables. Voilà le
21 premier argument.
22 Puis le deuxième c'est que peu de jours après, il est vrai que nous
23 nous sommes trouvés dans l'hôpital, et nous avons vu les tours UNIS tous
24 les jours, mais nous n'avons jamais vu un tir partant de ces tours UNIS,
25 non.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie.
27 J'aimerais maintenant que nous poursuivions avec le visionnage d'une autre
28 vidéo du 9 juin 1992. C'est le document 40264F, c'est le numéro sur la
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1 liste 65 ter.
2 [Diffusion de la cassette vidéo]
3 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
4 "Sarajevo brûle dans son cœur et dans ses faubourgs. Brutalement,
5 dans la nuit de dimanche, toute la ville est devenue une cible. Pas un
6 quartier n'a été épargné, tout tremble alors qu'à toutes les dix secondes
7 les obus de roquettes et obus de mortiers s'abattent, les tirs étant si
8 intenses et si incessants que les rayons mortels qui éclairent la nuit se
9 croisent entre eux. Au début de la matinée de lundi, l'inondation des
10 hôpitaux a commencé pour les médecins et les infirmières de l'ancien
11 hôpital militaire de la ville qui, du début de la journée jusqu'au soir,
12 passent des moments particulièrement pénibles, les plus pénibles que nous
13 ayons connus. Des doigts entraînés travailleront 24 heures pour étancher le
14 sang, extraire des morceaux de métal éclaté, sauver des vies. Mais les
15 victimes de la guerre sont nombreuses et les visages déformés et membres
16 fracturés aussi.
17 A l'hôpital principal de la ville, la situation est encore pire. La
18 contre-offensive de la Défense territoriale bosniaque s'est transformée en
19 un tir de barrage d'arme lourde incessant avec un coup énorme, et le flot
20 de victimes ne s'arrête pas.
21 C'est une scène de cauchemar. Pas une minute ne s'écoule sans qu'une
22 nouvelle camionnette, une nouvelle ambulance n'amène de nouveaux blessés.
23 La bataille de Sarajevo a atteint son point culminant. Un nombre très
24 important de jeunes gens sur des civières se battent contre la tombée de la
25 nuit, et beaucoup d'entre eux finissent dans cette morgue déjà débordante
26 de cadavres.
27 Dans la ville et en son centre moderne, de nouveaux tirs font rage au
28 niveau du front. D'une façon ou d'une autre, les hommes tirent, mais leurs
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1 efforts sont vains. Ils sont impuissants alors que l'eau est coupée et que
2 tout ce qu'ils peuvent faire c'est se tenir debout et regarder. A 50 mètres
3 de distance, d'autres tirs viennent des champs de bataille dévastés. Des
4 faubourgs, de petits groupes d'hommes répliquent aux tirs d'artillerie par
5 des tirs d'armes d'infanterie.
6 Et alors que le soir tombe sur la ville, des dizaines et des dizaines
7 d'incendies touchent les murs, faisant pièce à l'endurance, aux visages
8 marqués par la peur, le choc et l'épuisement."
9 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
10 M. NICHOLLS : [interprétation]
11 Q. Dans cette séquence, nous voyons qu'au début, il y a toujours des tirs
12 d'obus de plus en plus importants, et vous avez dit que toute la ville
13 devenait une cible. C'est ce que nous entendons dans la vidéo. Pouvez-vous
14 nous dire, si vous vous souvenez, quels sont les quartiers de la ville qui
15 étaient pilonnés cette nuit-là, quels secteurs de la ville ?
16 R. Comme je l'ai dit, notre impression était que toute la ville a été la
17 cible des tirs. Nous n'avons pas vu des tirs aussi intenses que cette nuit-
18 là depuis, par exemple, à la caserne du maréchal Tito et d'autres quartiers
19 de la ville qui avaient été frappés également, mais cette nuit-là, la ville
20 semblait être la cible unique et globale des tirs. C'était notre impression
21 que tout cela se faisait pour terroriser les habitants de cette ville.
22 Q. Je vous remercie. Plus tard dans cette même séquence, on a vu des
23 soldats qui étaient amenés pour répliquer à ces tirs dans le cadre d'une
24 contre-offensive. Pourriez-vous nous dire en quelques mots ce que nous
25 voyons là ?
26 R. Ça c'est une autre question. D'après ce que nous avons pu comprendre, à
27 un endroit qui n'était pas loin de la maternité de l'hôpital de Sarajevo,
28 l'armée bosnienne avait lancé une sorte de contre-offensive pour faire
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1 reculer le front serbe dans le secteur. Les combats ont donc été très
2 intenses, beaucoup d'hommes ont été blessés et tués, et comme je m'en suis
3 rendu compte, cette offensive n'a pas fonctionné, elle n'a pas été
4 fructueuse. Mais il faut distinguer les images que nous avons filmées cette
5 nuit-là de celles qui ont été filmées la nuit précédente. En tout cas,
6 cette nuit-là, toute la ville est devenue la proie des tirs. Mais les deux
7 sont des nuits différentes.
8 Quant aux combats qui se déroulent dans la journée, il y avait des
9 tirs sur la ville aussi, mais pas aussi intenses que pendant la nuit, et
10 ces combats étaient beaucoup plus concentrés sur le secteur du nord de
11 Sarajevo.
12 Q. Rapidement, vous parlez, au paragraphe 59 de votre déclaration, des
13 différents groupes ethniques. Je ne vais pas revenir sur l'incident en
14 question dans le détail, mais quand vous avez regardé les gens qui étaient
15 blessés et qu'on amenait à l'hôpital, vous êtes resté à cet endroit un
16 certain temps, vous êtes allé dans d'autres hôpitaux également. Quelle
17 était l'appartenance ethnique de ces personnes qu'on amenait ? Est-ce que
18 il n'y avait que des Musulmans de Bosnie ou y en avait-il d'autres
19 également ?
20 R. Pour autant que j'ai pu m'en rendre compte, il y avait aussi tous les
21 Slaves. Je veux dire du même groupe ethnique, mais de religions
22 différentes. On nous a dit que ceux qui étaient capables de parler -- je
23 veux dire, ceux qui avaient été blessés mais qui pouvaient encore parler
24 nous ont dit que la plupart d'entre eux étaient Musulmans, mais qu'il y
25 avait aussi là des catholiques, autrement dit ceux qu'on appelle des
26 Croates, ainsi que des Serbes de Bosnie orthodoxes parmi les soldats
27 blessés.
28 Pendant toute la guerre, chaque fois que j'étais en Bosnie, j'ai
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1 rencontré des Serbes dans les rangs de l'armée des Musulmans de Bosnie.
2 Q. Merci. Je vais maintenant passer au paragraphe 62 de votre déclaration
3 préalable, où vous évoquez le reportage que vous avez tourné à Dobrinja. Je
4 ne vais pas vous montrer les images maintenant, mais pourriez-vous préciser
5 un point du paragraphe 62, où vous dites :
6 "Pendant les premiers moments de la guerre," et nous parlons ici de juillet
7 1992, "Dobrinja a subi un siège distinct de celui de Sarajevo."
8 Pourriez-vous nous dire ce que vous entendez par là.
9 R. Je voudrais d'abord voir l'écran pour relire les mots prononcés par
10 moi.
11 Q. Je peux revenir sur cette question plus tard, si vous le souhaitez. Ce
12 serait peut-être même préférable.
13 Mais en tout cas, qu'entendez-vous par "siège distinct de celui de
14 Sarajevo pour le siège de Dobrinja" ?
15 R. Dobrinja c'est un faubourg de Sarajevo situé à l'ouest de Sarajevo, qui
16 est tout près de l'aéroport et de la cité dans laquelle étaient logés les
17 athlètes ayant participé aux Jeux olympiques d'hiver de 1984. Après cela,
18 cet endroit est devenu un lieu où les jeunes couples, si on m'a bien
19 renseigné, pouvaient obtenir assez facilement un appartement. C'est un
20 quartier un peu séparé de la ville. Tout ce quartier n'est pas tombé dans
21 les mains du gouvernement musulman de Bosnie, mais une grande partie l'a
22 fait. Donc les Serbes bosniaques contrôlaient une colline, qu'on appelle la
23 Colline de Mojmilo, qui permettait de rejoindre Dobrinja et le reste de la
24 ville de Sarajevo et, par conséquent, les Serbes ont empêché toute
25 connexion directe entre la ville de Sarajevo et le quartier de Dobrinja
26 dans le cadre d'un siège distinct. On ne trouvait pas leur voiture à
27 Dobrinja. Cela n'est devenu possible qu'au moment où, en juillet, les
28 forces du gouvernement bosnien, qui étaient à l'intérieur de Dobrinja, se
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1 sont emparées de la colline de Mojmilo. Par la suite, une connexion directe
2 a été établie entre ce faubourg occidental de la ville et la ville en tant
3 que telle. Nous avons pu aller à Dobrinja, mais c'était très dangereux.
4 Nous avons été les premiers journalistes à y entrer, on nous a dit que cinq
5 autres voitures avaient essayé de faire le voyage pendant la journée et que
6 ces cinq voitures avaient été touchées par des tirs serbes. Mais nous
7 sommes parvenus à y entrer. Nous y avons passé 48 heures, puis en sommes
8 sortis, et dans les deux cas, à l'entrée et à la sortie, nous avons essuyé
9 des tirs.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie.
11 Monsieur le Président, ce dernier document, 40264F, la vidéo que nous
12 venons de voir, je n'en ai pas encore demandé le versement au dossier. Je
13 le fais donc maintenant.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Il s'agira de la pièce P932.
15 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie.
16 Q. Je vais maintenant passer, Monsieur van Lynden, au mois de septembre
17 1992 et à la durée de votre séjour à Pale. Je vous demanderais d'abord
18 rapidement comment vous êtes arrivé à Pale.
19 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les
20 Juges, je vais maintenant parler de ce que l'on peut trouver aux
21 paragraphes 65 à 90 de la déclaration préliminaire du témoin.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous souhaitez que j'explique comment --
23 M. NICHOLLS : [interprétation] Bien, je vais d'abord vous poser une
24 question.
25 Q. Je crois comprendre, à la lecture de votre déclaration préliminaire,
26 que vous avez rencontré M. Karadzic à Pale au mois de juin 1992, puis à
27 Londres au mois d'août 1992, et encore une fois à Belgrade en septembre
28 1992. Pourriez-vous expliquer rapidement comment ces rencontres ont été
Page 2415
1 organisées et comment elles ont abouti à ce que vous puissiez tourner un
2 reportage depuis Pale.
3 R. Quand nous sommes allés pour la première fois à Sarajevo vers la fin du
4 mois de mai 1992, nous étions partis de Belgrade en voiture et sommes allés
5 à Pale. Il avait été décidé par la haute direction de "Sky" - parce que
6 nous avions une liaison satellitaire avec Londres qui nous permettait de
7 communiquer - donc la direction a estimé qu'à ce moment-là il n'était pas
8 sûr d'aller à Sarajevo, et nous avons donc été interrompus dans notre
9 voyage. Nous étions à Pale dans une pension qui s'appelait la Pension
10 olympique. Je n'y ai pas rencontré M. Karadzic, mais nous sommes allés en
11 ville. Nos reportages étaient envoyés à partir de Pale. Puis à un certain
12 moment, nous avons quitté Sarajevo pour retourner à Pale, parce que nous
13 avions besoin d'envoyer nos reportages à partir de cette ville. C'était au
14 mois de juin. Nous avons encore essayé de travailler à partir de Pale un
15 certain nombre de jours pour couvrir la guerre à partir de l'autre partie
16 belligérante. C'est à ce moment-là que j'ai rencontré rapidement M.
17 Karadzic. La chose s'est finalement avérée impossible, parce que nous
18 étions sortis de notre hôtel à Pale et voulions aller dans d'autres
19 quartiers, et nous avons été interrompus dans notre progression à plusieurs
20 postes de contrôle.
21 Mais mes chefs à Londres ont décidé à ce moment-là de me retirer du
22 secteur pendant un moment, j'ai été renvoyé à Londres et plus tard je suis
23 retourné à Sarajevo.
24 A la conférence du mois d'août qui s'est tenue à Londres, j'ai eu
25 l'occasion de rencontrer M. Karadzic et de lui demander son aide pour
26 organiser mon retour à Pale et me permettre de travailler effectivement
27 depuis Pale de façon à ce que nous puissions rendre compte de la vision de
28 toute cette guerre par l'autre partie belligérante, autrement dit que nous
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1 permettions aux Serbes bosniaques de s'exprimer. Nous avons convenu que
2 nous allions nous réunir à Belgrade. Lorsque je m'y suis trouvé au début du
3 mois de septembre, une rencontre a été organisée à l'Intercontinental de
4 Belgrade pour organiser notre voyage à Pale. Une fois à Pale, comme cela
5 s'était déjà passé à plusieurs reprises précédemment, je l'ai rencontré à
6 nouveau et il a organisé que deux policiers militaires constituent en
7 permanence une escorte qui nous permettait de travailler au sein du camp
8 serbe de Bosnie.
9 Q. Merci. Est-ce que vous avez eu une lettre d'autorisation ou une lettre
10 d'accréditation des autorités bosno-serbes que vous pouviez montrer et qui
11 vous permettait d'y travailler ?
12 R. Oui. Encore une fois, c'était après la conversation avec M. Karadzic,
13 et on nous a donné une lettre le lendemain, qui n'était pas signée de sa
14 main, mais de la main de M. Krajisnik, qui était à l'époque le président du
15 parlement bosno-serbe.
16 Q. Je vous remercie. Aux paragraphes 69 à 75 de votre déclaration
17 préliminaire, vous dites avoir rencontré officieusement M. Karadzic à
18 plusieurs reprises pendant votre séjour à Pale, jamais officiellement, et
19 avoir discuté avec lui de plusieurs sujets. Je vais vous poser des
20 questions à ce sujet.
21 D'abord, où rencontriez-vous M. Karadzic lorsque vous le rencontriez
22 ?
23 R. Nous nous rencontrions dans son bureau, sauf une fois où cela s'est
24 passé à la station de télévision. Il s'y trouvait, et nous avons entamé une
25 conversation avec plusieurs autres personnes qui travaillaient à la
26 télévision de Pale.
27 Q. Pourriez-vous nous dire sur quoi ces conversations ont porté ? Que se
28 passait-il à la station de télévision depuis votre arrivée ?
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1 R. Nous allions à la station de télévision pour pouvoir envoyer nos
2 reportages qui, à l'époque, allaient de Pale à Belgrade et de Belgrade à
3 Londres par voie satellitaire. Et lorsque nous nous sommes trouvés là ce
4 soir-là, une dispute a éclaté. Un certain nombre des gens qui travaillaient
5 à la télévision de Pale nous ont attaqués en raison de la couverture par
6 nous des événements de Sarajevo -- enfin, d'un reportage que j'avais déjà
7 fait sur Sarajevo et, notamment, d'un reportage où je parlais d'un certain
8 Jusuf Prazina, un Musulman de Bosnie. Eux avaient le sentiment que je
9 présentais cet homme comme un héros alors que je crois que dans ce
10 reportage. J'ai montré clairement que cet homme avait fait de la prison et
11 qu'il était un criminel. M. Karadzic est intervenu dans cette conversation.
12 La conversation portait également sur d'autres sujets, mais pour moi,
13 c'était un exemple de la mentalité un peu bizarre qui semblait être celle
14 de tous ces hommes qui se trouvaient à Pale, à savoir un reportage
15 concernant un homme qui est décrit comme l'un des principaux défenseurs de
16 Sarajevo, un reportage tourné au début du mois de juin, montre Jusuf
17 Prazina, dont je dis qu'il s'agit d'un criminel condamné, et eux ont
18 l'impression que ce récit va à l'encontre de leurs intérêts. Et ils ne
19 parlent jamais des deux autres reportages sur Sarajevo où j'ai montré les
20 pilonnages de la ville, et les vidéos qui viennent d'être vues ici dans ce
21 prétoire, non. C'est un reportage qui va, en fait, dans leur intérêt, qui
22 provoque chez eux le sentiment d'être attaqués. Et les reportages que vous
23 auriez pu invoquer comme ayant été tournés par moi et n'étant pas dans
24 votre intérêt, eux, vous n'avez rien contre. C'est ce que je leur ai dit.
25 J'ai trouvé ça assez bizarre.
26 Q. Je vous remercie. Je ne vais pas poursuivre, parce que dans votre
27 déclaration préliminaire on trouve tous les détails au sujet de ces
28 rencontres. Mais au paragraphe 73, vous dites que Karadzic, parlant de
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1 Sarajevo, a fait référence au mur de Berlin qui avait été construit pour
2 séparer la ville en deux. Pourriez-vous nous dire rapidement quelle a été
3 cette conversation que vous avez eue avec M. Karadzic où il vous a dit
4 quelques mots au sujet des habitants de Sarajevo ?
5 R. Si je me souviens bien, c'est une conversation qui a eu lieu à la fin
6 de la soirée, très tard, vers 23 heures. On nous avait proposé un verre de
7 vin, et si je me souviens bien, il a bu du vin blanc et nous a montré des
8 cartes. Il a dit, qu'à son avis, Sarajevo était une ville serbe, qu'elle
9 appartenait aux Serbes, que c'était une territoire serbe, et il a répété
10 cela à plusieurs reprises en affirmant qu'il était impossible de vivre aux
11 côtés de ces gens-là. Et il a dit qu'un mur pourrait être une solution. Je
12 ne suis pas sûr des mots qu'il a prononcés exactement. Je ne sais pas s'il
13 a dit que c'était la seule solution, mais en tout cas c'était l'une des
14 solutions qu'il proposait, à savoir la construction d'un mur entre les
15 quartiers serbes et les quartiers habités par les autres populations de
16 Sarajevo. J'ai estimé que ce commentaire était vraiment scandaleux, parce
17 que cela faisait moins de trois ans que le mur de Berlin était tombé, mur
18 qui avait été le symbole de la division européenne et qui avait finalement
19 chuté. Donc proposer de construire un mur dans une ville afin de diviser
20 une population dans les mêmes conditions en Europe à la fin du XXe siècle,
21 je trouvais cela totalement déplacé, pour être franc avec vous.
22 Q. Merci. A un autre moment - c'est une question de suivi que je voudrais
23 vous poser - au paragraphe 71 de votre déclaration préliminaire, vous
24 parlez du Dr Karadzic et dites qu'il vous a déclaré que les Serbes tenaient
25 les secteurs septentrionaux et Banja Luka, et il a dit que la Bosnie
26 orientale était entièrement serbe. Je cite :
27 "Il m'a dit que les enclaves étaient inacceptables, qu'elles étaient
28 devenues partie intégrante du territoire serbe."
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1 Alors, dans cette conversation de septembre 1992, quel est le secteur qui
2 était discuté ? De quoi parliez-vous lorsqu'il a dit que les enclaves
3 n'étaient pas acceptables ?
4 R. Nous parlions des enclaves de Gorazde, de Srebrenica, et vous savez, il
5 y avait aussi plusieurs autres petites enclaves. Je ne me rappelle pas le
6 nom de chacune d'entre elles, mais la Bosnie orientale comportait des
7 enclaves que chacun connaissait, et lui avait le sentiment qu'elles
8 n'étaient pas viables sur le plan économique, mais aussi qu'elles étaient
9 l'épine dans le pied des Serbes de Bosnie et qu'il importait de retirer
10 cette épine. Il l'a dit très clairement.
11 Q. Merci. Je pense que je passe à autre chose - nous avons ici les
12 paragraphes 76 à 90 - et j'ai quelques questions à vous poser à propos de
13 l'interview que vous avez faite du général Ratko Mladic en septembre 1992.
14 Pourriez-vous dire en quelques mots dans quelles circonstances elle a
15 pu avoir lieu ? Comment avez-vous obtenu l'autorisation de l'interviewer ?
16 R. Je me suis adressé à M. Karadzic et en passant par son bureau. Je pense
17 que c'était un juriste, un Serbe de Bosnie, qui travaillait pour M.
18 Karadzic, et nous avions des contacts quotidiens avec ce juriste, pas avec
19 M. Karadzic. Dès notre arrivée à Pale, nous avons demandé à avoir
20 l'autorisation d'interviewer le général Mladic.
21 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais diffuser la séquence concernée.
22 La 40259B.
23 [Diffusion de la cassette vidéo]
24 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
25 "…c'est le fléau de Sarajevo, le guerrier en chef des Serbes. Il
26 s'appelle Ratko Mladic. Ratko ça veut dire guerrier dans sa langue, et il
27 est à la hauteur de la réputation que lui a gagnée son nom. Le commandant
28 est en marche, il va aux chalets de montagne où les Serbes de Bosnie ont
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1 établi leur gouvernement séparatiste mais à titre temporaire. Il ne parle
2 que des attaques subies par ses forces, et pas de celles que celles-ci ont
3 lancées. Il nous donne une occasion rare ici de l'accompagner sur des
4 positions de l'artillerie où les observateurs des Nations Unies brillent
5 par leur absence.
6 Nous avons ici des canons de 100-millimètres enfouis dans les rochers
7 et surplombant Sarajevo, une position de force manifeste qui satisfait
8 manifestement le général, car il dit qu'il a ainsi dans sa main la ville.
9 Et dans ce brouillard en bas, nous avons la preuve de sa puissance. C'est
10 un homme qui n'a aucun doute, qui ne se repentit jamais car il est sûr
11 qu'il a raison, que le monde a tort, et que ses personnes ont toujours été
12 insultées.
13 J'espère que le Conseil de sécurité prendra les mesures pour
14 comprendre que nous, les Serbes, sommes une réalité dans ce monde, et pas
15 des extra-terrestres, et que nous avons le droit de nous défendre.
16 A proximité, il y a d'autres positions enfouies dans le sol. Il dit
17 qu'ici, il ne va pas être arrêté par le fait que le monde lui nie ses
18 droits.
19 Tant que nous existerons, nous allons nous défendre. C'est la seule
20 façon d'agir, et nous sommes prêts à mener une longue guerre.
21 Les Nations Unies préparent une résolution sur les crimes de guerre.
22 Mais ceci ne trouble pas du tout Ratko Mladic.
23 Moi ça ne me dérange pas du tout, dit-il. Moi, je n'ai participé à
24 aucun crime, je n'ai fait que défendre mon peuple.
25 Il part après avoir prononcé ces mots pour quitter une ligne de front
26 dans une guerre dont il ne voit pas la fin, ni lui ni ses officiers.
27 Aernout van Lynden, en dehors de Sarajevo, Sky News."
28 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
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1 M. NICHOLLS : [interprétation] Puis-je demander une cote pour ce document.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P933.
4 M. NICHOLLS : [interprétation]
5 Q. J'ai quelques questions à propos de ces images.
6 Vous décrivez ces bâtiments qu'on entrevoit dans le brouillard, mais ce
7 n'est pas très facile à voir sur les images ici sur nos écrans. A l'époque,
8 pourriez-vous nous dire ce que vous avez vu, est-ce que ces bâtiments en
9 question étaient très visibles, est-ce qu'il était possible de voir la
10 ville ?
11 R. Oui, on pouvait la voir, et sur les images prises alors, on voit la
12 ville. Mais vous savez, il y a beaucoup de copies de ces images, et la
13 qualité s'en est détériorée. Mais il y avait effectivement une espèce de
14 brouillard ou de brume qui pesait sur Sarajevo, mais on voyait très bien en
15 contrebas la ville depuis ces positions d'artillerie.
16 Q. Pourriez-vous nous dire si vous avez subi des restrictions pour ce qui
17 est de filmer ?
18 R. Non, on nous a donné l'autorisation de filmer, mais à la fin, lorsque
19 le général est parti, le caméraman, lui, a suivi de sa caméra le général et
20 les hommes qui l'accompagnaient, qui partaient, et ils ont longé le
21 cimetière. Et le caméraman a pu filmer ces images, et on nous a dit de ne
22 pas inclure ces images dans le reportage que nous avons envoyé à Londres.
23 Mais dans toute zone de guerre, les équipes de télévision sont en général
24 priées de faire beaucoup de prudence pour ne pas dévoiler les positions de
25 telle ou telle partie à la partie adverse. La demande semblait donc
26 raisonnable, même si l'endroit est tellement connu des gens qui connaissant
27 Sarajevo que c'était inutile de dissimuler cet endroit.
28 M. NICHOLLS : [interprétation] P00914, voici donc la pièce que j'aimerais
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1 vous montrer. Je précise pour les Juges de la Chambre que c'est le même
2 document que le document P00842, c'est la même carte, mais c'est simplement
3 une partie que nous avons un peu agrandie et que j'aimerais maintenant vous
4 montrer au témoin.
5 Q. Alors, je ne sais pas si vous parvenez à repérer l'endroit approximatif
6 où s'est déroulée cette interview ?
7 R. [Le témoin s'exécute]
8 Q. Quand on voit cette carte -- vous procédez à l'interview puisque vous
9 aviez filmé cette séquence sur place, vous pensez que c'est là que ceci a
10 eu lieu ?
11 R. Oui. Ça se trouve à l'est de la ville, on regarde de l'est sur toute la
12 ville, donc c'était à peu près sur ces hauteurs.
13 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
14 Puis-je avoir une cote.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que j'ai oublié de demander au
16 témoin d'indiquer la date et de signer le document. Pourriez-vous le faire
17 peut-être au moment opportun --
18 M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, j'ai oublié de le lui demander.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous indiquer la date
20 d'aujourd'hui et signer ?
21 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur van Lynden. Ceci va être
23 enregistré. Une cote, Monsieur le Greffier.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P934.
25 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
26 Q. Sur place, sur cette position avec le général Mladic et son escorte,
27 avez-vous vu une indication qui aurait montré que cette position était
28 vulnérable, en ce sens qu'elle aurait pu subir le feu adverse ?
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1 R. On était vraiment sur les hauteurs -- c'était une position très élevée.
2 Evidemment, si l'opposition disposait de sa propre artillerie, ça aurait
3 été une position vulnérable que celle-ci. Mais sinon, pas parce que c'était
4 trop loin de la ligne de front. De ce côté-là ce n'était pas du tout
5 favorable. Si l'armée de Bosnie avait disposé d'armes lourdes à Sarajevo, à
6 ce moment-là, oui, elle aurait pu riposter et tirer sur cette position.
7 Mais je ne l'ai jamais vu d'indication montrant qu'il y aurait eu des tirs
8 dirigés sur cette position-ci.
9 Q. Quand vous avez revu le général Mladic, a-t-il réagi au reportage que
10 vous aviez fait ou est-ce qu'il vous a indiqué qu'il avait vu ce que vous
11 aviez dit ?
12 R. La télé de Pale a eu une réaction assez négative à mon reportage,
13 surtout pour ce qui était des premiers mots que j'avais utilisés pour
14 présenter ce reportage, j'ai dit que "c'était lui le fléau de Sarajevo." La
15 télé de Pale a estimé que c'était là de ma part un commentaire négatif.
16 Quant au général Mladic même, on l'a rencontré par hasard sur la route
17 trois ou quatre jours plus tard, il s'est arrêté et a dit : Bonjour. Et
18 vraiment, avec un grand sourire s'affichant sur ses lèvres, il a dit en
19 serbo-croate : C'est moi le fléau de Sarajevo, et m'a tapé l'épaule de la
20 main. Il m'a dit : On va manger ensemble. Et effectivement, j'ai déjeuné
21 avec lui et ses hommes. Il ne donnait pas l'impression de penser que les
22 commentaires que j'avais formulés auraient été plus négatifs. Au contraire,
23 il avait l'air d'en être fier.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je précise que le compte rendu
25 d'audience devrait dire "fléau," en anglais "scourge," et pas "courage."
26 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
27 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] De rien.
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1 M. NICHOLLS : [interprétation]
2 Q. -- ce n'est pas dans l'interview, mais apparemment, vous avez demandé
3 au général Mladic si vous pouviez rendre visite à ses hommes et à ses
4 positions. Est-ce que vous avez pu effectuer une visite d'autres positions
5 serbes après cette interview ?
6 R. Nous avions aussi manifestement posé la question à M. Karadzic, et
7 c'était possible, a-t-il dit. Nous avons été sur le mont Trebevic voir ses
8 positions, et nous sommes aussi allés à Grbavica, à Sarajevo, et nous avons
9 vu certaines positions serbes à Hrasno. Plus tard, on nous a fait
10 contourner Sarajevo en empruntant une route qui avait été construite
11 manifestement après le début du siège, en passant Vogosca et -- ça n'a pas
12 toujours été possible de coopérer avec eux. Les commandants locaux, même si
13 on avait une escorte composée de deux policiers serbes et une lettre de M.
14 Krajisnik, comme je vous l'ai déjà dit, les commandants locaux refusaient
15 parfois de nous laisser filmer ou même de nous parler. Nous sommes allés à
16 Hadzici, et à proximité de Hadzici, nous avons été autorisés à filmer sur
17 certaines positions sur la ligne de front. Mais la plupart des images qui
18 ont été filmées à Hadzici, ce fut lorsque nous avons passé le mont Trebevic
19 pour aller à Grbavica et Hrasno.
20 M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne vais pas maintenant diffuser la vidéo
21 que j'avais prévue, mais nous allons maintenant passer au document de la
22 liste 65 ter 40259D, qui relate les positions que vous avez visitées. Le
23 paragraphe 102 de la déclaration préliminaire et paragraphe 103 aussi.
24 Peut-on montrer ces images.
25 [Diffusion de la cassette vidéo]
26 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
27 "Nous sommes ici au couvent catholique de Sarajevo. Mais pratiquement, il
28 n'y a que quelques nonnes qui sont restées, les autres étant parties parce
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1 que ce bâtiment est juste sur la ligne de front de la guerre. La sœur
2 Matila [phon] continue d'apporter un repas chaque jour à un voisin serbe
3 âgé.
4 C'est un des rares havres qu'il y a encore à Sarajevo, connu pour
5 cette guerre qui éclate de partout.
6 Nous avons ici le cimetière juif. Il y a des tombes enchevêtrées,
7 récentes ou non, et on se bat. On voit ici des bunkers. On a redécoré les
8 murs avec des bûches. On fait preuve d'innovation, par exemple, ici, on a
9 une meurtrière qui permet de voir de tous les angles. Ici, le commandant de
10 bataillon est très confiant, effectivement.
11 Nous sommes prêts pour une longue lutte, mais nous pensons que nous
12 pouvons tenir ces positions longtemps. Ce sera la paix ou ce sera une
13 guerre généralisée que nous essaierons de gagner.
14 Le commandant a des raisons d'être confiant. Lui, il ne doit pas
15 faire face à ce support logistique aggravé par le siège. Et il le fait
16 depuis une position de force, parce qu'il surplombe la ville de sorte que
17 personne n'ose n'y bouger.
18 Aernout van Lynden, Sarajevo."
19 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
20 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
21 Q. En fin de séquence, dans l'optique de la VRS, on voit des images
22 montrant la ville en contrebas, mais j'aimerais savoir s'il y a eu des
23 images filmées depuis le cimetière juif ?
24 R. Je ne pense pas. Je pense qu'on a filmé depuis un autre point de vue.
25 Q. Mais c'est depuis les positions qu'on a vues dans le reportage où vous
26 parliez, ou est-ce qu'elles ont été prises d'ailleurs ?
27 R. Non, parce que le cimetière juif était un peu plus en contrebas, alors
28 qu'ici on était plus en hauteur. Sans doute était-ce la même zone où vous
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1 avez vu ce commandant qu'on a vu sur ces images. C'est sans doute cette
2 zone qu'il commandait. Mais on a filmé ces images à différents endroits. Et
3 le dernier bâtiment que vous avez vu c'est le parlement, et c'est là dans
4 cette zone tenue par les Musulmans de Bosnie que se trouvent ces rues.
5 M. NICHOLLS : [interprétation] Puis-je avoir une cote, Monsieur le
6 Président.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P935. Merci.
9 M. NICHOLLS : [interprétation] Dernière séquence vidéo que je vais diffuser
10 aujourd'hui, c'est le 40267 dans la liste 65 ter, et la date est celle du 5
11 décembre, ou enfin, vers cette date du 5 décembre 1992.
12 [Diffusion de la cassette vidéo]
13 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
14 "…quatre jours, les Serbes prennent les faubourgs à l'ouest de
15 Sarajevo. Maintenant, les défenseurs qui avaient essayé de rompre le siège
16 sont battus. Les pilonnages se poursuivent de façon incessante. Ceux qui
17 peuvent s'échappent. Ceux qui ne peuvent s'échapper doivent sans doute
18 faire face à la mort. Pour les forces onusiennes et pour les hommes
19 politiques qui les ont envoyées, ces derniers combats sont une nouvelle
20 humiliation qui rend les efforts pour parvenir à la paix tout à fait
21 ridicules. Et ça, ils l'admettent, pour une fois.
22 La situation empire. Il n'y a aucun progrès. Et toutes les
23 résolutions du Conseil de sécurité, tout ce qui a été fait, tout ce que
24 nous faisons à l'aéroport pour améliorer la situation, pour sauver des
25 vies, pour refaire fonctionner les services, ça échoue. On fait un pas en
26 avant, puis on recule de deux pas.
27 Voyons la réalité de la ville. C'est bien vrai, les Serbes, ici,
28 provoquent des incendies. Les gens sont désespérés lorsqu'ils voient leur
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1 maison, leur appartement, leurs biens détruits. Ici, il y a des roquettes
2 qui frappent ces immeubles ou font ricocher pour retomber dans la rue.
3 Comme toujours, les pompiers, ces héros de Sarajevo, ripostent. Pour une
4 fois, il y a de l'eau pour alimenter les pompes des bouches d'incendie.
5 Mais ce n'est pas le souci principal. Le problème c'est le carburant qui
6 commence à manquer pour les véhicules des pompiers.
7 L'escalade se poursuit dans le centre de Sarajevo, qui montre une
8 fois de plus l'impuissance des forces internationales en Bosnie. Les
9 cessez-le-feu et les pourparlers de paix n'ont servi à rien et,
10 manifestement, personne ne veut vraiment mettre fin à cette guerre.
11 Aernout van Lynden, Sarajevo."
12 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
13 M. NICHOLLS : [interprétation]
14 Q. A un moment donné, nous voyons une espèce d'objet qui rebondit, puis
15 qui tombe. Qu'est-ce que c'était exactement que cet objet ?
16 R. C'était une balle. L'armée yougoslave avait des balles incendiaires.
17 Nous, on ne les avait pas dans les forces néerlandaises, et je ne pense pas
18 que dans les pays de l'OTAN, il n'y en avait non plus, avant 1989. Ce sont
19 des balles incendiaires qui servent à provoquer un incendie dans un
20 bâtiment. J'avais mon caméraman à côté de moi et, en fait, ça a rebondit
21 sur sa tête cette balle.
22 Q. On a vu les pompiers qui pénétraient dans un immeuble qui essayaient de
23 parvenir à l'endroit où l'incendie s'était déclaré ?
24 R. Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, et on venait du centre de
25 Sarajevo on retournait vers la station de télévision, dans la partie plus
26 moderne de Sarajevo, on a vu la balle pénétrer dans l'immeuble, on a vu un
27 début d'incendie surtout en haut de la partie supérieure, puis quelques
28 balles au milieu de l'immeuble. Nous nous sommes arrêtés pour filmer. Vous
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1 avez des plans rapprochés de l'immeuble, ça a été pris par mon caméraman.
2 Ce que vous voyez filmé de plus loin de ce même bâtiment qui avait été
3 touché, ça a été pris par une équipe de la CNN. Et nous avons procédé à un
4 échange de séquence ce soir-là.
5 Lorsque sont arrivés les pompiers, ils sont montés dans la cage d'escalier
6 pour aller en haut de l'immeuble. Mais ce qu'on a vu c'est qu'il y avait de
7 nouvelles balles incendiaires qui étaient dirigées vers la partie
8 inférieure de l'immeuble, et on a cru comprendre l'intention de ceux qui
9 tiraient, ils voulaient provoquer de nouveaux incendies pour que ceux qui
10 étaient dans la partie supérieure de l'immeuble ne puissent pas en
11 descendre.
12 Q. Merci. Vous avez dit que c'était une cible civile. Pourriez-vous être
13 plus clair. Avez-vous eu des indications montrant que des tirs avaient eu
14 leur origine dans cet immeuble ?
15 R. Au moment où nous nous trouvions à ce moment-là dans la guerre, nous le
16 savions parfaitement, chaque fois qu'il y avait un incident à Sarajevo, les
17 Serbes de Bosnie invoquaient comme défense que ça avait été une cible
18 militaire légitime ou encore que les Musulmans de Bosnie tiraient sur eux-
19 mêmes. Nous parlons ici de décembre 1992. Chaque fois que nous sommes allés
20 quelque part on a posé la question, on a demandé, si le bâtiment en
21 question a été utilisé par des forces musulmanes de Bosnie ? Vous avez vu
22 cet homme absolument désespéré qui avait perdu l'appartement, mais on en a
23 vu d'autres, et il dit : Mais vous êtes fou, est-ce que vous pensez qu'on
24 autoriserait l'armée à utiliser notre immeuble parce qu'on sait très bien
25 ce que ça allait donner. Dès qu'on tirait de l'immeuble il y aura un tir de
26 riposte, et ils étaient catégoriques, ils avaient dit que jamais ces
27 immeubles n'avaient été utilisés à des fins militaires.
28 Puis on a vérifié auprès des Nations Unies qui, à ce moment-là,
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1 commençaient à être beaucoup mieux organisés à Sarajevo, on était en
2 décembre, ils étaient mieux organisés qu'en mai ou en juin 1992, et ils
3 n'ont pas vraiment réussi, qui que ce soit, à tirer contre qui que ce soit,
4 mais ils pouvaient mieux déterminer d'où les tirs venaient. Et les Nations
5 Unies disaient que d'après les observations faites, jamais il n'y avait eu
6 de tirs venus de cet immeuble.
7 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci. Je demande une cote. Il s'agissait du
8 document 4267 [comme interprété].
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P936. Merci.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
12 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur van Lynden.
13 Je n'ai pas d'autres questions à poser à ce témoin.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Parfait. Vous demandez le versement de
15 tous les documents qui n'ont pas été présentés aujourd'hui au témoin en
16 audience ?
17 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, encore que le
18 40264B, c'était une coquille, je ne voulais pas présenter ce document.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'en aviez pas l'intention ?
20 M. NICHOLLS : [interprétation] Non.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous des objections au versement de
22 ces documents, Monsieur Karadzic, nous parlons de ces pièces connexes ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas d'objection.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Ces documents sont versés, et en
25 temps utile le greffier attribuera une cote à chacun de ces documents, il
26 reprendra dans un mémo qui sera distribué aux parties.
27 Vous allez maintenant procéder au contre-interrogatoire du témoin, Monsieur
28 Karadzic. Vous avez demandé 14 heures pour procéder à ce contre-
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1 interrogatoire, même si au départ vous aviez demandé 12 heures. Mais de
2 l'avis de la Chambre, 14 heures c'est là un temps déraisonnable pour mener
3 un contre-interrogatoire. Nous nous sommes demandé s'il était possible de
4 siéger plus longtemps demain, mais il y a un Juge qui siège dans une autre
5 affaire demain matin. Ce qui veut dire qu'il ne sera pas possible d'avoir
6 une audience plus longue. Mais vendredi nous verrons s'il est possible de
7 commencer à
8 8 heures 30, éventuellement.
9 Ceci étant, ça devrait vous donner à peu près sept heures en tout. Et à mon
10 personnel, je pense que c'est là un nombre suffisant d'heures dans la
11 mesure où vous pourrez vous concentrer sur les questions qui comptent
12 véritablement et que vous allez vous abstenir de faire des déclarations, et
13 sans présenter au témoin des textes inutiles. Mais, bien sûr, nous ne
14 voulons pas du tout empiéter sur votre droit au contre-interrogatoire. Nous
15 allons faire de notre mieux pour utiliser ce temps au mieux, puis nous
16 verrons où nous en sommes, nous ferons le point et nous verrons de quelle
17 façon vous avez effectué ce contre-interrogatoire et nous verrons si vous
18 avez besoin de temps supplémentaire. A ce moment-là, nous pourrions
19 demander au témoin de revenir à l'audience si ceci s'avérait nécessaire.
20 Ceci étant dit, vous pouvez commencer.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je vous indiquer que je dois rentrer chez
22 moi et qu'il ne m'est pas possible de passer toute la matinée du vendredi.
23 Je ne sais pas si ça a été clair, mais je l'avais dit avant d'entrer car
24 j'ai un vol qui est prévu vendredi.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous en avons été informés. Si nous
26 avons bien compris, vous devez partir à 11 heures au plus tard, et nous
27 allons faire l'impossible pour que vous puissiez terminer votre audition.
28 Mais si le besoin s'en faisait ressentir, nous vous demanderions de revenir
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1 un jour qui vous convient. Nous verrons.
2 Vous pouvez commencer, Monsieur Karadzic.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Je crains fort que cela ne
4 puisse suffire. Quand bien même nous arrivions à faire ce que M. van Lynden
5 et moi avons convenu de faire, à savoir de procéder à un maximum de
6 questions pour faire en sorte qu'il puisse répondre par un oui ou par un
7 non. Et si on y arrive, il se peut qu'on ait besoin d'un peu moins d'heures
8 pour ce qui est de ce contre-interrogatoire. Mais ce que je crains fort
9 c'est qu'il ne doive revenir, s'il s'avère que nous ne pouvons pas
10 travailler demain un peu plus longtemps que prévu.
11 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
12 Q. [interprétation] Monsieur van Lynden, bonjour. Et merci d'avoir eu
13 l'amabilité de rencontrer les conseils de la Défense avant le contre-
14 interrogatoire. Je crois bien que cela nous aidera dans une certaine
15 mesure.
16 Pour commencer, j'aimerais vous demander que vous nous cédiez vos notes et
17 votre journal, les parties qui sont privées ne nous intéressent guère et
18 sur les copies on peut les caviarder. Mais la raison pour laquelle nous
19 devons l'obtenir c'est qu'à plusieurs reprises vous allez parler d'éléments
20 qui n'existent pas dans les rapports que vous avez présentés et c'est
21 drastiquement divergent de ce que nous avons et savons. Donc il faudrait
22 que nous -- ça doit figurer dans votre journal ou dans votre agenda tenu à
23 jour à l'époque.
24 Que pouvez-vous en dire ?
25 R. Tout d'abord, je n'ai pas pris d'accord avec M. Karadzic, lorsque je
26 l'ai rencontré hier pour lui dire que j'allais simplement répondre par oui
27 ou par non. Il m'a dit que c'était bien là ce qu'il aimerait me voir faire,
28 mais c'est à lui de déterminer la façon dont il pose ses questions. Je n'ai
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1 pas été d'accord. C'est une première chose.
2 Puis ce Tribunal n'a jamais demandé à obtenir mes notes jusqu'à
3 présent, et j'ai conservé bon nombre de mes carnets de notes mais je n'en
4 ai pas possession directe, parce que nous avons déménagé des Pays-Bas en
5 Italie et tout ceci a été mis sous clé, donc je ne peux pas les trouver, et
6 je ne suis pas non plus sûr que j'ai mes carnets de notes concernant la
7 période couverte par les faits retenus dans ce procès.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux continuer ? Merci.
9 Q. Alors, je crois nous sommes tombés d'accord, parce que ma question
10 était celle de savoir si nous pouvions être plus efficaces et abréger, et
11 vous avez dit que cela dépendrait de mes questions -- si je posais ce type
12 de questions, ce serait le cas. Alors, voilà une question de ce genre :
13 Est-ce que nous sommes tombés d'accord pour dire que vous avez
14 compris que l'armée musulmane, l'ABiH, était en train de se battre pour
15 mettre en place une Bosnie-Herzégovine unitariste ?
16 R. Oui, même si, à mon avis, ce n'est pas une armée musulmane. Je l'ai
17 déjà dit. Dans toute la Bosnie, chaque fois que j'ai rencontré l'armée de
18 Bosnie, il y avait aussi dans ses rangs des hommes qui n'étaient pas
19 musulmans.
20 Q. Oui, ça, vous l'avez dit aujourd'hui. Mais je vais vous poser une
21 question à cet effet : saviez-vous qu'il y avait moins de
22 3 % de Serbes dans l'ABiH ? Ça, c'est un chiffre qu'ils ont avancé eux-
23 mêmes.
24 R. On ne m'a jamais donné de pourcentage. On ne m'a jamais indiqué en
25 pourcentage l'appartenance religieuse de ces forces armées. Ce que je dis,
26 c'est que quand j'ai rencontré certains éléments, j'ai rencontré aussi des
27 Serbes et des Croates dans toutes les unités que j'ai vues de l'ABiH, au
28 cours des différents séjours que j'ai faits en Bosnie pendant la guerre,
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1 mais on ne m'a jamais donné de pourcentage. Je n'en ai d'ailleurs pas
2 demandé.
3 Q. Merci. Est-ce qu'on vous a dit que dans l'armée serbe, il y avait aussi
4 des Croates et des Musulmans, et qu'il y avait même des unités toutes
5 entières qui n'étaient composées que de Musulmans; oui ou non ? Ça, on peut
6 répondre par un oui ou non.
7 R. Jamais je n'ai rencontré un seul Musulman dans une unité serbe.
8 Q. Est-ce que ça vous intéressait de savoir s'il y a en
9 avait ? Est-ce que vous sauriez distinguer un Musulman ou un Serbe ? Est-ce
10 qu'ils diffèrent tant l'un de l'autre, au point de pouvoir faire la
11 différence ?
12 R. Non. Je vous l'ai déjà dit aujourd'hui, ce sont tous des Slaves, et
13 oui, nous avons posé la question. Etait-il possible de faire tout de suite
14 la différence ? Bien sûr que non. Mais on a posé la question, et jamais je
15 n'ai rencontré un seul Musulman dans une unité serbe.
16 Q. Merci. Vous auriez dû être mieux informé, puisque vous étiez censé
17 envoyer des rapports exhaustifs. Alors, je voudrais bien savoir comment
18 vous avez fait pour ne pas constater qu'il y avait des unités entières
19 composées de Musulmans dans l'armée serbe. Mais laissons cela de côté.
20 Quand vous vous trouviez à certains endroits, vous aviez quelqu'un qui
21 était directeur de la production et que c'était votre source d'information.
22 Mais qui étaient encore les sources d'information que vous aviez à votre
23 disposition ?
24 R. Pour revenir aux Musulmans dans l'armée serbe, s'il y en avait dans
25 l'armée serbe, c'était l'armée serbe ou votre bureau qui auraient dû nous
26 les présenter, ces Musulmans, mais vous ne l'avez jamais fait, et je n'ai
27 aucun souvenir qu'on m'ait dit à Pale que vous ou le général Mladic, vous
28 m'auriez dit qu'il y avait des Musulmans qui combattaient dans votre armée.
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1 Et vous dites car je n'étais pas à tel ou tel endroit -- excusez-moi,
2 mais je ne comprends pas du tout votre question.
3 Q. Je vous ai demandé où est-ce que vous vous étiez trouvé, comment
4 saviez-vous telle chose. Alors, vous dites : Il y avait mon directeur de
5 production qui a filmé cela et ça m'a permis d'avoir des informations. Donc
6 vous aviez ce type de directeur de production dans toutes les républiques,
7 et vous avez dit que c'étaient des sources d'information pour le cas où
8 vous n'étiez pas présent vous-même sur les lieux. Alors, si c'est le cas,
9 je vous demande si en plus d'eux, vous aviez d'autres sources
10 d'information; et dans l'affirmative,
11 qui ?
12 R. Mais je venais avec un producteur. On en avait un qui était permanent à
13 Belgrade, puis j'avais des producteurs de reportages -- bon, je n'étais pas
14 la seule équipe qui avait été envoyée par "Sky News" en Bosnie. Il y avait
15 toujours des producteurs de la région qui accompagnaient ces équipes. Bien
16 sûr qu'ils constituaient des sources d'information. Dans la mesure où ces
17 hommes, ces femmes, parlaient la langue, ils pouvaient parler à n'importe
18 qui, moi pas, puisque je ne parle pas le serbo-croate. D'autres sources
19 d'information, quelles étaient-elles ? Bien, les gens qu'on rencontrait par
20 hasard, à qui on parlait, que ce soit vous que j'ai rencontré à Pale, ou à
21 d'autres à qui nous avons parlé à Pale, ou le général Mladic, il nous a
22 fait un briefing, une réunion d'information avant notre interview. Et à
23 différents moments de la guerre, nous sommes allés à la caserne de
24 Lukavica, où nous avons reçu des informations en réunion d'officiers. Ça ne
25 s'est pas toujours fait devant les caméras. Donc là où nous allions, nous
26 avons parlé à des gens qui nous ont donné des informations. Ce ne sont pas
27 nécessairement des informations que nous estimions correctes, mais on
28 parlait à différentes personnes et on essayait du moins de déterminer si
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1 les informations fournies étaient justes ou pas.
2 Q. Merci. Est-ce que nous avons été d'accord pour dire que les Serbes,
3 comme vous l'avez précisé vous-même, se sont tiré une balle dans le pied.
4 Moi, j'interprète la chose comme suit : les Serbes ont perdu la guerre
5 médiatique, si on peut dire, qu'ils l'ont conduite, mais les Serbes ont été
6 pauvrement, médiocrement représentés dans les médias occidentaux. Est-ce
7 que nous sommes bien tombés d'accord sur ce fait ? Les raisons importent
8 peu, maintenant, mais en a-t-il été ainsi; oui ou non.
9 R. Est-ce que je peux vous préciser, Madame et Messieurs les Juges, que
10 M. Karadzic se rapporte à un commentaire que j'ai émis hier lorsque je suis
11 allé le voir à la prison. Je lui ai dit ceci : à mon avis, en rendant le
12 travail des médias occidentaux si difficile du côté serbe, ce qui avait été
13 le cas en 1991, puis plus tard en Bosnie, j'ai utilisé une métaphore pour
14 dire que ce faisant, les Serbes s'étaient tiré une balle dans le pied.
15 A mon avis, la cause serbe, comme vous dites, a été mal représentée
16 dans les médias serbes, parce que cette cause serbe a été mal présentée aux
17 médias occidentaux. Pourquoi ? Pourquoi, bien, la raison, il faut la
18 chercher chez les Serbes, pas dans les médias occidentaux.
19 Q. Merci. Est-ce que vous seriez d'accord pour dire que les médias, c'est
20 très important, et qu'ils influent sur l'opinion publique dans leurs pays
21 respectifs et l'opinion publique, elle, influe sur les décisions des
22 gouvernements, ou est-ce que vous pensez que c'est le gouvernement qui
23 influe sur les médias, ou alors est-ce qu'il y a influence réciproque ?
24 R. C'est complexe, à mon avis. On peut pas dire tout simplement : Oui, les
25 médias sont importants. Le degré d'influence des médias varie d'un sujet à
26 l'autre, d'une région à l'autre. Les fluctuations sont énormes. Certes, les
27 médias peuvent avoir beaucoup d'influence sur l'opinion publique mais aussi
28 sur les gouvernements. Mais parfois, ce n'est pas vrai, quels que soient
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1 les efforts déployés par les médias. Et même si l'opinion publique est
2 touchée, les gouvernements ne vont pas nécessairement bouger, la
3 problématique est complexe, et ce n'est pas si manichéen que cela.
4 Q. Merci. Est-ce que vous saviez que la partie musulmane, au niveau des
5 médias occidentaux, était représentée par une société des relations
6 publiques, Ruder and Finn ?
7 R. On ne m'a jamais mis en contact et je n'ai jamais été contacté par
8 cette société de relations publiques que vous avez mentionnée. D'ailleurs,
9 je n'ai jamais été contacté par qui que ce soit ni par une des parties aux
10 différents conflits qu'il y a eu en ex-Yougoslavie.
11 Q. Mais avez-vous entendu dire qu'il y avait un représentant pour les
12 relations publiques pour ce qui est des Musulmans, aux fins d'être
13 représentés à l'Ouest ?
14 R. Je ne me souviens pas du tout qu'on me l'ait dit, mais je n'étais pas à
15 l'Ouest. J'étais en Bosnie. Il y avait plusieurs groupes de pression de
16 diverses natures aux Nations Unies, m'a-t-on dit, et aussi à Londres, mais
17 moi, ce n'est pas là que je travaillais. Quand je n'étais pas en Bosnie,
18 j'étais chez moi à la maison, et jamais je n'ai rencontré un de ces
19 groupes.
20 Q. Est-il arrivé, comme d'autres journalistes nous l'ont raconté en
21 s'excusant, de voir leurs rédacteurs en chef modifier la tournure des
22 reportages que vous aviez rédigés ?
23 R. Mes reportages n'ont jamais été modifiés par un rédacteur en chef qui
24 se serait trouvé à Londres, et ceci est vrai pour toutes mes missions en
25 Yougoslavie. Je me souviens qu'il y a un seul cliché qui a été enlevé,
26 parce que le rédacteur en chef responsable de l'étranger a retiré cette
27 image où on voyait du sang qui dégoulinait du dos de quelqu'un, et il a
28 estimé que ce n'était pas nécessaire. J'ai protesté, je trouvais qu'il ne
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1 fallait rien changer à mon reportage, et il a remis ce cliché dans le
2 reportage. Est-ce que ça c'est arrivé à d'autres journalistes, peut-être
3 que oui, mais pas pour moi. Je ne m'en souviens pas en tout cas. En tout
4 cas, je ne peux pas faire de commentaires si ce fut le cas pour d'autres.
5 Permettez-moi de souligner autre chose. La télévision américaine et ses
6 journalistes doivent envoyer le texte écrit du reportage aux bureaux de New
7 York ou à Atlanta. Ce n'est pas fait chez nous, la télévision britannique
8 n'agit pas ainsi; ce qui veut dire que c'était vraiment mon œuvre, ce
9 reportage que j'ai envoyé à Londres, où il était diffusé. A ma
10 connaissance, personne à Londres n'a modifié un seul de mes articles ou
11 reportages.
12 Q. Merci. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire -- ou est-ce
13 qu'il vous semble raisonnable d'affirmer que, du fait des sanctions, nous
14 n'avons jamais pu engager de groupes de pression ni de groupes chargés de
15 lobbying ni de groupes de relations publiques sous forme d'agences ou
16 autre, à l'Ouest ?
17 R. Je sais qu'il y avait un groupe de pression à Londres. Est-ce qu'il a
18 dû être rémunéré ou est-ce que c'étaient des bénévoles, je ne sais pas. Je
19 n'ai jamais rencontré les membres de ce groupe de pression. Est-ce que ça
20 vous semble plausible, parce qu'en raison des sanctions, le gouvernement
21 serbe de Belgrade n'aurait pas eu les moyens de payer une société chargée
22 de la communication ? Moi, ça ne me semble pas plausible. Si Belgrade
23 l'avait voulu, ils auraient trouvé ces fonds. Ça ne coûte pas si cher que
24 ça pour un gouvernement.
25 Q. Je ne parlais pas de possibilité financière. Mais du fait des
26 sanctions. Aucune agence n'acceptait de nous représenter, parce que cela
27 constituerait une violation des sanctions mises en place, n'est-ce pas ?
28 R. Je ne suis pas expert en matière de sanctions imposées par les Nations
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1 Unies. Si vous aviez une société chargée de communications, une société
2 occidentale, et si elle avait travaillé pour vous, est-ce qu'elle aurait
3 contrevenu à ces sanctions ? Je ne sais pas.
4 Q. Merci. Mais toujours est-il qu'il en a été ainsi. Alors, vous nous avez
5 dit que vous ne saviez pas quelle était la partie en présence qui coupait
6 l'eau, l'électricité, l'acheminement des vivres, de provisions, n'est-ce
7 pas ?
8 R. Vous pensez à la conversation d'hier quand on parlait de l'interruption
9 des services d'eau, d'électricité, l'approvisionnement de Sarajevo. Je vous
10 ai répondu que la ville ne cultivait pas ses propres aliments. L'eau ne
11 sort pas toute seule des robinets. Il faut amener l'eau dans les maisons.
12 C'est vrai aussi en général pour l'électricité. Je n'ai pas de preuve
13 personnelle concluante qui montrerait que c'est votre gouvernement ou
14 quelqu'un d'autre qui aurait fait ces coupures. Mais une ville assiégée,
15 c'est clair, elle n'est plus en mesure de nourrir à elle seule ses
16 habitants. Tout ceci doit venir de l'extérieur. Et à toutes fins utiles,
17 votre gouvernement a empêché la population de Sarajevo d'avoir un accès
18 normal à toute nourriture ou à l'eau dont elle avait besoin.
19 Q. Est-ce que vous voulez dire qu'elle pouvait empêcher ou qu'elle a
20 empêché ? Parce que si vous dites empêcher ou entraver, c'est que vous
21 savez qu'il y a eu entrave de mise.
22 R. Je sais que ceci est un fait. Les approvisionnements en vivres des
23 Nations Unies ont souvent été arrêtés, par exemple, si cet
24 approvisionnement se faisait par avion, on tirait sur cet avion. Et
25 plusieurs fois, les Nations Unies nous ont dit que ces tirs provenaient des
26 lignes serbes et que, du coup, on avait arrêté le transport aérien de
27 marchandises. Donc je suppose que c'est une preuve claire que c'est votre
28 gouvernement, ce sont vos forces qui ont empêché l'acheminement de ces
Page 2441
1 vivres à Sarajevo.
2 Q. Bien, voyez-vous, ce n'est pas tout à fait exact. Nous avons déterminé
3 ici en interrogeant un autre témoin qu'il y a eu plus de 10 000 vols et
4 qu'il n'y a pas eu un seul incident relatif à ces vols qui ait été généré
5 par le côté serbe.
6 Mais on est bien d'accord pour dire que vous n'avez pas toujours su qui
7 est-ce qui ouvrait le feu, n'est-ce pas ? Je pense --
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voyez, c'est précisément le genre
9 de déclaration que vous ne devriez pas faire.
10 Est-ce que, Monsieur le Témoin, vous avez un commentaire à formuler ici ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de l'autre témoin et des 10
12 000 vols, Monsieur le Président ?
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais écoutez, je n'étais pas ici pour entendre
15 ce que disait cet autre témoin, je ne sais pas ce qu'il a dit. Il m'est
16 donc impossible de commenter ce qu'il aurait déclaré.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Précisément.
18 Poursuivez, Monsieur Karadzic.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Avons-nous été d'accord pour dire que vous ne saviez pas toujours qui
22 est-ce qui tirait; oui ou non ?
23 R. Bien sûr que je ne savais pas toujours. Si vous traversez une ville,
24 vous ne savez pas qui tire et sur quoi on tire, à moins que vous ne soyez
25 touché, à moins que vous n'ayez quelqu'un qui filme, et à ce moment-là, les
26 images filmées montrent d'où viennent les tirs et sur qui on tire. Mais
27 est-ce que je le savais toujours ? Non, bien sûr que non.
28 Q. Merci. Avons-nous été d'accord pour dire que l'ABiH avait des positions
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1 qu'elle tenait plus au sud de l'hôtel Holiday Inn et qu'il se peut qu'elle
2 ait disposé de tireurs isolés, de tireurs embusqués au bâtiment du
3 gouvernement, au bâtiment du musée, et cetera ? Donc vous saviez qu'ils
4 avaient des positions au sud de l'hôtel Holiday Inn et qu'ils avaient des
5 tireurs isolés aux bâtiments de l'assemblée du parlement, du gouvernement
6 et du musée.
7 R. J'ai dit qu'il était possible qu'ils aient des positions de tireurs
8 embusqués et de l'armée au sud de l'hôtel Holiday Inn. Est-ce que j'y suis
9 allé ? Je vous dirais que non. Mais j'ai dit qu'effectivement, c'est une
10 possibilité.
11 Q. Vous nous avez dit que vous n'avez pas été conscient de l'existence
12 d'une unité de Moudjahidines au sein de l'ABiH. En a-t-il été vraiment
13 ainsi ?
14 R. Je ne me souviens pas exactement. Hier vous avez fait état d'une unité
15 de Moudjahidines. Mais je savais, lorsque est arrivé la fin de la guerre,
16 qu'il y avait ce que vous appelez des unités de Moudjahidines. Si vous me
17 demandez si j'en ai vu une, je dirais que non, jusqu'après la guerre. Après
18 la guerre, j'ai effectivement vu une unité. Mais je n'ai pas vu d'unités,
19 et personne ne m'a jamais dit qu'il aurait appartenu à ce genre d'unité
20 lorsque j'ai parlé à diverses personnes pendant la guerre.
21 Q. Merci. Vous avez rendu visite à l'état-major du général Juka Prazina,
22 et vous m'avez dit que vous n'étiez pas sûr -- ou plutôt, vous avez affirmé
23 que lui n'était pas un général. C'est bien ce que vous avez dit ?
24 R. Aller à l'état-major et aller au QG ça donnerait l'impression qu'il
25 s'agissait d'une unité organisée. J'ai été dans bien des endroits qui ne
26 ressemblaient sûrement pas à ce que j'ai vu lorsque j'ai été voir Juka
27 Prazina. C'était un appartement civil tout à fait ordinaire, qui était au
28 rez-de-chaussée d'un immeuble de Sarajevo. Ce n'était pas du tout un QG.
Page 2443
1 J'ai vu d'autres immeubles plus tard, en 1992, qui avaient ce même aspect.
2 Mais peut-on les qualifier de QG, pas du tout.
3 A ma connaissance, personne ne disait "Général" en s'adressant à lui.
4 Ils l'appelaient "Juka," et moi, je ne savais pas qu'on lui avait donné ce
5 titre, pour autant qu'on le lui ait donné.
6 Q. Merci. Je vous ai posé la question et vous avez répondu que vous
7 n'étiez pas au courant de la présence d'autres généraux qui auraient
8 auparavant été des criminels, comme Celo -- enfin, il y a plusieurs Celo,
9 et même leur commandant a affirmé qu'il y en avait neuf ou 11, mais il y en
10 avait deux qui étaient notamment connus, puis Musan Topalovic, Caco, et
11 autres. Alors, est-il bien vrai que vous n'avez pas été mis au courant de
12 tout ceci, n'est-ce pas ?
13 R. Je n'ai pas connaissance de 11 Celo. Moi, j'en connaissais un. Et je
14 sais qu'il y avait d'autres personnes, mais jamais on ne m'a dit que ces
15 gens auraient le grade de général, non.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
17 Juste deux petites questions encore avant la pause, n'est-ce pas,
18 Excellence ?
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Il y a deux choses que je voudrais vous demander avant la pause, et
21 après la pause on passera à des sujets autres.
22 D'abord, vous avez dit que l'ABiH n'avait pas disposé d'artillerie à
23 l'époque, et nous parlons de juin 1992 et au-delà. Et quand est-ce que vous
24 avez pu vous rendre compte du fait qu'ils avaient de l'artillerie dans la
25 ville de Sarajevo ? Et deuxième chose que vous m'avez attribuée, mais
26 jamais personne n'a rapporté cela comme étant ma position, à savoir qu'à
27 mes yeux, les Musulmans sont des Turcs. Or, je les considère comme étant
28 des Serbes, et il semblerait que j'aurais souhaité la construction d'une
Page 2444
1 muraille dans Sarajevo. Ce sont deux choses que vous avez avancées et que
2 personne d'autre n'ont avancées. Alors, pourquoi ne l'avez pas publié,
3 parce que c'est assez drastique, c'est assez imagé. Parce que si Karadzic
4 était favorable à une muraille dans Sarajevo, tous les médias l'auraient
5 rapporté, n'est-ce pas ?
6 R. Mais ici, vous mélangez toutes sortes de choses. Il y a d'abord la
7 question de l'artillerie qu'aurait la partie musulmane de Bosnie dans
8 Sarajevo. Pendant tout le temps que j'ai passé à Sarajevo, je n'ai rien vu
9 qui ressemble à une pièce d'artillerie. En mars 1994, j'ai vu un centre de
10 rassemblement d'armes organisé par les Nations Unies, puis j'y ai vu des
11 mortiers de 120-millimètres. Ce sont des mortiers de taille considérable.
12 Mais pour moi, ce n'est pas un mortier de ce calibre une pièce
13 d'artillerie. Ça c'est une première chose. Et jamais je n'ai vu les pièces
14 d'artillerie de leur côté que j'ai vues sur cette position où j'ai
15 rencontré le général Mladic à Sarajevo.
16 Quelle était votre question suivante ?
17 R. La muraille, et j'aurais affirmé que les Musulmans c'étaient des Turcs.
18 R. Monsieur Karadzic, en fin de soirée, nous avons eu de nombreuses
19 conversations, vous et moi, à Pale en septembre 1992. Mais c'était à bâtons
20 rompus, officieux. Je n'avais pas de caméraman avec moi, ce n'étaient pas
21 des interviews, et dans les reportages que j'ai faits, je n'ai jamais
22 repris les propos que vous auriez pu avoir tenus dans ces conditions. Je me
23 rappelle qu'une option était mentionnée, ce n'était pas la seule
24 d'ailleurs, mais vous avez dit qu'il faudrait construire un mur dans
25 Sarajevo. Des enquêteurs de ce Tribunal m'ont posé la question et j'ai
26 répondu.
27 Hier, vous parliez de la solution de Bruxelles. Je n'ai pas le moindre
28 souvenir de cette description que vous auriez utilisée pendant nos
Page 2445
1 conversations de septembre 1992.
2 Dernier point que vous évoquez, vous dites que c'étaient des Turcs. C'est
3 le souvenir que j'en ai. Hier vous m'avez dit, qu'à votre avis, ce sont des
4 Serbes. Si vous pensez que ce sont des Serbes, pourquoi cette guerre,
5 n'est-ce pas bizarre de penser qu'on aurait fait cette guerre ?
6 Q. Bien, les guerres civiles ça arrive dans le cadre de nations qui sont
7 composées du même groupe ethnique. Donc il y a eu d'autres nations qui ont
8 eu des guerres civiles.
9 D'abord, dites-nous s'il était correct de ne pas vous servir de références
10 faites à l'occasion d'entretiens officieux et pourquoi pensez-vous que cela
11 doive être repris lors de vos réponses au Tribunal ?
12 M. NICHOLLS : [interprétation] Objection. La question n'est pas bien posée.
13 Elle est hors de propos, et le témoin a déjà répondu, il a expliqué
14 pourquoi il n'avait pas utilisé ces informations dans ses reportages.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas si le témoin peut
16 répondre à la question. A lui de voir.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais faire de mon mieux, Monsieur le
18 Président.
19 On m'a dit de dire toute la vérité à propos de certaines conversations que
20 j'aurais eues. Nous sommes dans un tribunal ici. Ce n'est pas la même chose
21 que quand on fait un reportage pour une chaîne de télévision. Si j'avais
22 repris vos commentaires dans un reportage, il aurait fallu que je le
23 prouve. Or, je n'avais pas de caméra avec moi. Et vous pourriez toujours
24 dire que ce que je raconte dans ce reportage n'est pas vrai.
25 Puis j'avais bien compris le cadre de ces conversations. C'étaient
26 des conversations à bâtons rompus. Ici, nous sommes dans un tribunal. Quand
27 on enjoint à quelqu'un de dire la vérité, on doit essayer de se rapprocher
28 le plus de la vérité, et c'est ce que j'ai fait quand j'ai répondu aux
Page 2446
1 questions des enquêteurs.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Bon. Alors, nous allons retrouver cela dans vos notes, parce que vous
4 avez dû le consigner dans vos notes. C'est tellement marquant que cela
5 devrait s'y trouver. Parce que si ça n'a pas été enregistré par les
6 caméras, ça devrait figurer dans les souvenirs que vous avez couchés sur
7 papier.
8 Et soit dit en passant, je ne bois que du vin rouge.
9 R. Moi aussi d'ailleurs, mais je me souviens que ce jour-là vous aviez un
10 verre de vin blanc. Peut-être que mes souvenirs ne sont pas bien exacts. Je
11 n'ai pas écrit de mémoire, et je ne consulte pas souvent mes notes.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, c'est sur cette note que nous
13 allons procéder à une pause de 25 minutes.
14 --- L'audience est suspendue à 15 heures 24.
15 --- L'audience est reprise à 15 heures 49.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. J'aimerais vous rappeler, Monsieur van Lynden, ce que vous dites dans
20 le reportage numéro 5, lorsque vous déclarez que les tours UNIS se sont
21 désintégrées et que c'était le symbole de la dégradation de la ville. Et si
22 je ne m'abuse, vous poursuivez en déclarant que les Serbes ont signé une
23 trêve mais que ce cessez-le-feu n'a pas été respecté et qu'en conséquence
24 de cela les Musulmans ou plus précisément l'ABiH, comme vous l'appelez, qui
25 n'avait pas d'artillerie; et vous ajoutez en annexe si je ne me trompe que
26 cette ABiH s'est levée sans pièce d'artillerie mais avec des armes
27 d'infanterie de petit calibre. Alors je demande l'affichage du document
28 1D1208, grâce au prétoire électronique, je vous prie, et nous pourrons voir
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1 ce que vous affirmez dans ce reportage. Nous voyons ici le président de la
2 Bosnie-Herzégovine et chef du parti musulman, Alija Izetbegovic, ainsi que
3 le commandant de son armée, qui parlent ensemble, donc M. Izetbegovic et le
4 chef de l'état-major principal, M. Sefer Halilovic. J'aimerais que la
5 version anglaise soit affichée sur les écrans. C'est donc une réunion de la
6 présidence, une séance de la présidence de Bosnie-Herzégovine qui se tient
7 le 17 juin 1992 et nous avons ici la transcription de l'enregistrement de
8 cette séance.
9 Page 3, sur les écrans, je vous prie. Page 3 de la version serbe sur les
10 écrans, je vous prie. C'est la partie surlignée qui m'intéresse. Peut-on
11 avoir la traduction anglaise en face. Oui. Elle est là. Non, ce n'est pas
12 ça. Page 3 de la version anglaise, je vous prie. La situation à Sarajevo et
13 la situation générale dans la région de Sarajevo. Et c'est Sefer Halilovic
14 qui parle.
15 "D'après le déploiement est le suivant. Sur le territoire des municipalités
16 transversales sont stationnées les forces chetniks, donc les forces serbes
17 avec des effectifs de 300 à 400 hommes sur le territoire de la municipalité
18 de Trnovo, sont stationnés 300 à 400 hommes qui bénéficient du soutien de
19 deux ou trois chars et de deux ou trois blindés de transport de troupes
20 ainsi que de cinq à six mortiers."
21 Maintenant j'aimerais que l'on voie ce qu'il dit en page 6 du document dans
22 sa version en B/C/S. Même numéro, je suppose pour la traduction anglaise.
23 Je cite - et là, c'est Sefer Halilovic qui informe la présidence au sujet
24 de la situation sur les fronts.
25 Je cite :
26 "Au cours des deux derniers mois, l'agresseur a subi des pertes importantes
27 en particulier des pertes matérielles et techniques, près de 20 chars, 20
28 blindés de transport de troupes, six VBR, cinq obusiers, sept mortiers de
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1 120-millimètres.
2 "Un certain nombre de ces matériels ont été perdus ou
3 détruits : trois chars, six véhicules blindés, cinq obusiers de
4 155- millimètres, six mortiers, un certain nombre d'armes d'infanterie et
5 une grande quantité de munitions pour les armes d'infanterie. Donc il y a
6 eu apport de munitions. En raison de pertes importantes en matériels et en
7 roquettes d'artillerie, l'intensité des actions d'artillerie contre
8 Sarajevo a décru."
9 Alors, je vous pose la question suivante : est-ce que vous avez rendu
10 compte de ces pertes serbes ? Est-ce que vous en avez rendu compte à vos
11 téléspectateurs ? Est-ce que vous les avez informés de ces pertes serbes,
12 les gens qui vous regardent et vous écoutent ?
13 R. Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, il me semble qu'on
14 me pose ici toute une série de questions différentes en même temps, parce
15 que nous avions commencé sur quelque chose de très différent et nous sommes
16 maintenant face à ce texte du 17 juin, un document que je n'avais encore
17 jamais vu. C'est la première fois que je le vois.
18 Mais la dernière question que j'ai entendue consiste à me demander si je
19 rendais compte de tout cela à Londres. D'abord, à la date du 17 juin, je
20 crois que j'avais déjà quitté la Bosnie. Je ne me rappelle pas les dates
21 exactes des événements évoqués par M. Halilovic dans ce procès-verbal - je
22 veux dire les pertes de matériel serbe - mais lorsque nous avons quitté
23 Sarajevo après le bombardement et après ce que nous avons vu dans des
24 vidéos montrées par l'Accusation il y a peu de temps, nous sommes allés à
25 Pale et nous vous avons demandé de pouvoir travailler à Pale. Chaque fois
26 que nous sortions de la pension olympique, nous étions arrêtés. Alors,
27 comment est-ce que l'on aurait pu rendre compte de quoi que ce soit et en
28 particulier des pertes serbes ?
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1 En dehors de cela, ce que j'ai vécu pendant la guerre m'a fait
2 comprendre qu'aucune des parties en présence n'était particulièrement
3 amicale à l'égard des journalistes, au point, en tout cas, de lui dire :
4 Voilà, nous avons perdu ceci et cela. Je ne pense pas qu'un quelconque
5 gouvernement dans le monde aurait l'amabilité de dire : Nous avons fait une
6 erreur à ce niveau-là et voilà ce que nous avons perdu. Je n'ai
7 certainement pas été emmené par les Musulmans de Bosnie vers les endroits
8 perdus par eux, mais je n'ai pas non plus été emmené dans des endroits de
9 ce genre par vos forces non plus.
10 Quand j'ai rendu compte à la fin de l'année 1992 du fait que Zuc
11 avait été perdue par les forces serbes de Bosnie et que l'armée bosnienne
12 avait capturé ces lieux, c'est quelque chose qui a été vérifié par votre
13 gouvernement, et cela a entraîné une certaine colère du général Mladic à
14 mon égard - en tout cas, c'est l'une des raisons apparentes de sa colère -
15 lorsqu'il m'a rencontré en 1994. Non, non, non. A cette époque-là, je pense
16 que je n'étais plus d'ailleurs en Bosnie. Je n'ai pas rendu compte de cela.
17 Je n'étais pas au courant. Nous n'avons pas été informés par votre
18 gouvernement de ces territoires perdus et je ne me souviens pas que le
19 gouvernement bosnien m'aurait donné ce genre d'information non plus, je
20 veux dire une description détaillée des réalisations militaires et des
21 succès militaires remportés par cette armée.
22 Est-ce que nous aurions dû rendre compte de cela ? Si nous en avions
23 rendu compte, Monsieur Karadzic, le gouvernement bosnien nous avait dit que
24 les Serbes avaient perdu tout cela et vous avez dit que c'était
25 complètement ridicule, que c'était une façon partiale de rendre compte des
26 événements, mais vous n'avez pas vérifié.
27 L'un des problèmes du fait de travailler dans une zone de guerre,
28 c'est qu'on ne peut pas franchir des lignes invisibles qui empêchent de
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1 vérifier immédiatement certains événements. Donc je crois qu'il aurait été
2 très peu probable que nous ayons rendu compte de ce genre de chose, à moins
3 d'avoir confirmation directe de votre gouvernement ou de vos forces armées
4 que c'était bien le cas. Dans le cas contraire, on aurait pu dire que nous
5 faisions de la propagande au profit des Musulmans de Bosnie.
6 Q. Merci. C'était une réponse assez longue mais voyez-vous, Monsieur van
7 Lynden, le témoin qui --
8 R. La question était longue aussi, Monsieur Karadzic.
9 Q. Voyez-vous, vous pouvez répondre par oui ou par non. Ce que je
10 soutiens, c'est que vos reportages étaient particulièrement peu objectifs
11 et n'étaient pas convenablement vérifiés et que les gens qui se trouvent
12 dans cette salle actuellement, lorsqu'ils visionnent les images de vos
13 vidéos et de vos films, acquièrent l'impression que ce sont les Serbes qui
14 étaient à l'origine des tirs, que personne ne tirait sur les Serbes, et que
15 la ville était désarmée, n'avait pas d'artillerie, n'avait pas de soldats,
16 qu'aucune action ne s'y déroulait et que les Serbes, eux, ne subissaient
17 aucune perte; est-ce que c'est exact ? Est-ce que vous étiez partial, est-
18 ce que vous étiez peu objectif, est-ce que vous avez vérifié les
19 renseignements que les Musulmans vous donnaient, de la même façon que vous
20 exprimiez le désir de vérifier ce que les Serbes vous donnaient ?
21 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, c'est un
22 commentaire et trois ou quatre questions en même temps. Vous n'obtiendrez
23 jamais une réponse par oui ou par non à ce genre de propos que vous tenez
24 au témoin. Si vous souhaitez une réponse par oui ou par non, une réponse
25 brève, il faudra poser une question directe, concise et bien définie. Le
26 témoin ne peut pas répondre à tout ce que vous lui demandez ici, sauf à
27 fournir une réponse particulièrement longue, ce qu'il peut éventuellement
28 ne pas souhaiter faire ici.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que j'étais partial ou
2 pas ? Je laisserai les Juges de la Chambre en décider. Je ne crois pas que
3 j'étais partial dans mes reportages. Je dirais que j'avais un sentiment
4 négatif à l'égard de la guerre de façon générale après avoir été pendant
5 près de 25 ans correspondant de guerre.
6 Est-ce que nous vérifiions ? Oui, nous essayions toujours de vérifier
7 très précisément auprès des Nations Unies. Les Nations Unies étaient à
8 Sarajevo en mai et juin 1992, même s'ils leurs effectifs n'étaient pas
9 aussi importants que par la suite, mais nous avons essayé de vérifier
10 auprès des Nations Unies. Nous nous efforcions de vérifier auprès des deux
11 parties en présence chaque fois que la chose était possible, mais souvent,
12 c'était impossible. Nous n'obtenions tout simplement aucune réponse.
13 Je pense que la voie que j'ai utilisée, à savoir m'adresser à vous
14 personnellement, vous donne amplement la possibilité de confirmer ce que je
15 dis. L'une des raisons pour laquelle je n'ai pas demandé une interview
16 officielle auprès de vous à Pale en septembre 1992, c'est que nous nous
17 étions entendus et que "Sky News" avait accepté que parce que vous parlez
18 anglais, "Sky News" puisse vous interviewer directement depuis Londres, et
19 de nombreuses interviews ont été recueillies auprès de vous suite à cela.
20 Mais si on nous demandait des renseignements précis de la nature des
21 renseignements qui sont évoqués ici comme, par exemple, une réaction
22 personnelle, on ne l'obtenait pas. On ne l'obtenait d'ailleurs d'aucune des
23 parties en présence, je dois le dire, sur les deux fronts.
24 Alors, je vais relire votre question.
25 Non, je ne pense pas que j'ai donné l'impression que la ville était
26 désarmée. En fait, nous avons filmé des soldats et des policiers, comme les
27 Juges l'ont vu aujourd'hui, qui utilisaient des armes de petit calibre.
28 Notre impression générale à l'époque, renforcée par ceux à qui nous
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1 parlions aux Nations Unies et que nous considérions comme des gens
2 objectifs auxquels nous pouvions nous adresser, bien, ils nous ont tous dit
3 que les armes lourdes étaient pratiquement toutes de votre côté. Je ne dis
4 pas que eux n'avaient peut-être pas quelques mortiers lourds. En fait, j'ai
5 vu des mortiers lourds chez eux, comme je l'ai déjà dit dans ma déposition.
6 Je n'ai pas vu à Sarajevo de pièces d'artillerie lourde. Il y avait, c'est
7 certain, au début, un grand nombre de soldats en guenille. Il n'y avait pas
8 d'armée de Bosnie au moment où la guerre a éclaté. Il y avait des forces de
9 la Défense territoriale, des forces de police, puis les unités se sont
10 créées, un certain nombre d'entre elles sous la conduite de criminels,
11 comme je l'ai signalé dans ma déposition, Jusuf Prazina étant l'un de ces
12 criminels que j'ai connu personnellement. Vous avez parlé d'autres
13 criminels. Je sais qu'ils ont existé et je sais aussi que nous en avons
14 parlé sur les ondes donc je ne pense pas que ceci soit un exemple de façon
15 de rendre compte qui soit particulièrement peu objective.
16 J'espère avoir répondu à votre question.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Je conviens que mes questions sont plutôt complexes, mais je suis sous
19 la contrainte du temps. Si nous avions suffisamment de temps, la situation
20 serait différente. Mais précisons un point, Monsieur van Lynden.
21 Jusqu'en septembre, est-ce que vous étiez à Pale, jusqu'au mois de
22 septembre, ou est-ce que vous n'y êtes pas resté jusqu'au mois de juin ? Je
23 veux dire, à Sarajevo, pas à Pale. A Sarajevo. Vous avez dit il y a un
24 instant qu'au mois de juin, à ce moment particulier, vous n'étiez plus à
25 Sarajevo. Mais dans vos reportages, on voit que vous y êtes resté jusqu'en
26 septembre, et qu'ensuite vous y êtes revenu en octobre. Ceci figure en page
27 11 du compte rendu d'aujourd'hui. Page 11 du compte rendu d'aujourd'hui,
28 vous dites que vous y êtes resté jusqu'en septembre.
Page 2454
1 R. Non, je n'ai pas dit que j'y étais resté jusqu'en septembre. Je suis
2 arrivé vers la fin mai, je suis parti un moment en juin pour Pale, parce
3 que c'était la seule façon de faire partir nos reportages, donc ensuite j'y
4 suis resté. Je suis rentré à Sarajevo et je m'y suis trouvé à partir de la
5 fin de juin, pendant tout le mois de juillet jusqu'au début du mois d'août.
6 A ce moment-là, je suis reparti pour rentrer dans ma famille, je suis resté
7 à Londres pendant la conférence de Londres, nous nous y sommes rencontrés
8 vous et moi. Ensuite, nous nous sommes rencontrés à Belgrade et j'ai passé
9 trois ou quatre semaines à Pale par la suite. Donc je n'affirme pas que
10 j'étais à Sarajevo pendant toute cette période.
11 Q. Merci. Mais le Procureur a donné lecture d'un texte où il est écrit que
12 vous étiez arrivé à Sarajevo à la fin mai 1992 et que vous y étiez resté
13 jusqu'en septembre, Pale étant une municipalité de Sarajevo. Donc lorsque
14 vous étiez à Pale, vous étiez aussi à Sarajevo. Mais enfin, continuons.
15 Peut-on faire défiler la page à l'écran pour que l'on voie ce que dit le
16 général Sefer Halilovic au sujet des équipements dont ils disposaient à
17 Sarajevo.
18 Q. Il dit, je cite :
19 "Le déploiement des forces de la défense territoriale dans la région de
20 Sarajevo --"
21 Est-ce que la version anglaise peut être affichée aussi, c'est le dernier
22 paragraphe qui m'intéresse.
23 Je cite :
24 "La situation et l'état des forces territoriales à Sarajevo…"
25 Maintenant, affichage de la page suivante en anglais, je vous prie.
26 Je cite :
27 "…sont composés de ce qui suit : l'état-major régional de la défense
28 territoriale, deux batteries de lanceurs de 120-millimètres avec 12 armes,
Page 2455
1 une batterie d'obusiers de 105-millimètres avec cinq armes, une unité
2 d'artillerie de 122-millimètres, trois armes, une unité mécanique blindée,
3 un groupe composé de cinq véhicules et 16 centres de la défense
4 territoriale municipale, 16 compagnies de la défense territoriale, environ
5 500 unités ou pelotons indépendants, et près de 450 groupes autonomes ou
6 compagnies autonomes, avec aussi 100 unités d'antisabotage."
7 Alors, est-il possible que vous ne vous rendiez pas compte que cette
8 importante force armée se trouvait à Sarajevo, est-il possible que cela
9 vous ait échappé, Monsieur van Lynden ? Est-ce que vous avez été conscient
10 de la présence militaire importante qu'ils avaient à Sarajevo, comme on
11 peut le lire dans ce document ?
12 R. Non, je n'étais pas conscient de cela. J'étais conscient de la présence
13 d'un grand nombre d'hommes en armes, portant des kalachnikov, comme je l'ai
14 déjà dit dans ma déposition, mais je ne savais pas qu'ils possédaient une
15 batterie d'obusiers de
16 105-millimètres. "Avec cinq armes," je ne sais pas exactement quel est le
17 sens à donner à cette phrase, est-ce que c'est un canon ou une arme à feu,
18 mais je ne me rappelle pas qu'il y ait eu un très grand nombre d'hommes
19 portant des fusils. Mais ce genre d'armement est pratiquement insignifiant
20 si on le compare à l'armement lourd que possédaient vos forces. Mais non,
21 je n'étais pas conscient de cela, non. Je n'ai pas vu de pièces
22 d'artillerie. J'ai dit dans ma déposition que je n'avais pas vu de pièces
23 d'artillerie à Sarajevo pendant mon séjour dans cette ville en dehors de
24 mortiers de
25 120-millimètres.
26 Q. Un peu plus bas, il déclare qu'au total, il disposait de 190 000
27 soldats, dont 45 % à peu près étaient armés. Donc vous avez raison, tout le
28 monde n'était pas armé. Mais puisque les armes restaient sur le front,
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1 elles suffisaient pour armer les relèves qui se faisaient sur le front.
2 Puis nous lisons : 500 pelotons indépendants, 450 compagnies indépendantes
3 et 100 pelotons ou unités antisabotage. C'est vraiment une force d'armée
4 gigantesque à Sarajevo. Sarajevo était une ville fortifiée, une forteresse
5 fourmillant d'armes et de soldats, et vous semblez vouloir la présenter
6 dans vos reportages comme une espèce d'école maternelle ou de crèche
7 attaquée par les sauvages qui étaient les Serbes.
8 Alors, les Serbes avaient bien des raisons d'être aigris par des reportages
9 de cette nature, et mécontents ?
10 R. Je ne saurais dire ce que les Serbes pensaient de mes reportages et
11 s'ils en étaient contents ou pas.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Passons maintenant à la page 7, dont je
13 demande l'affichage.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Vous avez dit aujourd'hui, ainsi que dans vos reportages, que d'après
16 vous, les personnes tuées et blessées étaient des civils parce que les
17 soldats portent des uniformes, alors que les civils n'en portent pas. Et
18 c'est donc le critère que vous dites avoir utilisé pour distinguer entre un
19 civil et un soldat.
20 Alors, j'aimerais que nous portions notre attention sur le passage
21 anglais du texte où on peut lire, qui commence par le mot "during" en
22 anglais. C'est toujours Sefer Halilovic qui parle.
23 Page 7 :
24 "La phase précédente est la suivante, le personnel est habillé en civil.
25 Donc les hommes sont habillés en civil."
26 Et je poursuis la lecture :
27 "Elle n'est absolument pas protégée contre les variations de la météo."
28 Ensuite, le passage qui m'intéresse est un peu plus bas, je cite :
Page 2457
1 "Nonobstant les problèmes qui se posaient, les unités de la défense
2 territoriale de la ville de Sarajevo ont défendu avec succès les faubourgs
3 de la ville. Elles ont empêché une attaque de la ville et ont en même temps
4 engagé des actions selon un certain nombre d'axes. Pendant le début de
5 l'attaque, d'importantes forces chetniks ont été brisées dans le secteur de
6 Pofalice et de Zuc, le mont Mojmilo, le front s'étendant jusqu'à Stari
7 Grad, le mont Mojmilo, et dans les quelques derniers jours notre artillerie
8 a joué un rôle particulièrement important, elle a réussi à provoquer des
9 pertes importantes aux soldats ennemis ainsi que des pertes en matériel et
10 en équipement technique dans la région de Pofalice, de Zuc, du mont Mojmilo
11 et dans le village de Mrkovici. A en juger par le rapport des forces, les
12 unités de la défense territoriale peuvent conserver les positions qu'elles
13 tiennent et grâce à des actions offensives, elles peuvent même étendre plus
14 loin les lignes de défense."
15 Voici maintenant ma question, Monsieur van Lynden. Ceci est un reportage
16 qui provient du commandant de l'armée musulmane et qui est adressé à la
17 présidence musulmane, ou quel que soit le nom que vous lui donnez, et on
18 lit dans ce document que les tirs des Serbes ont remporté davantage de
19 succès que les tirs musulmans -- ont permis de remporter davantage de
20 succès que les tirs serbes et que les serbes ont subi des pertes, mais que
21 leurs attaques d'artillerie ont été couronnées de succès. Alors à la
22 lecture de vos reportages, peut-on conclure que Sefer Halilovic dit bien
23 cela dans son rapport à la présidence ?
24 R. D'abord, il faudrait que vous posiez la question à M. Halilovic, et je
25 doute qu'il vous réponde d'une façon identique à ce que j'écrivais dans mes
26 reportages, parce que ce que je décrivais ne se passait pas sur le front.
27 Les pilonnages se faisaient un peu partout sur la ville. Il parle lui
28 d'attaques qui se déroulent sur le front. Moi, je n'ai jamais vu ce
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1 document avant aujourd'hui. Je ne connais pas M. Halilovic, et je ne sais
2 pas ce qu'il a écrit par ailleurs.
3 Mais d'abord, j'aimerais répondre précisément à votre question. Au début de
4 l'attaque, dit-il, les soldats étaient en uniforme ou n'étaient pas en
5 uniforme. Dans un reportage qui n'a pas été montré devant cette Chambre,
6 mais que j'ai tourné dans les premiers jours du mois de juin, je dis très
7 clairement qu'il n'y a pas correspondance numérique avec les forces armées
8 musulmanes de Bosnie. Certains hommes sont en uniforme, beaucoup n'en ont
9 pas. Ils n'avaient pas tous un uniforme à ce moment-là de la guerre, et
10 nous l'avons dit clairement.
11 Lorsque nous rencontrions des blessés, et dans un reportage qui a été
12 montré devant ce Tribunal cet après-midi, après les pilonnages intensifs,
13 il y a eu des combats, nous avons dit clairement que les blessés étaient
14 des membres armés de l'armée bosnienne qui étaient en train de lancer une
15 contre-offensive. Nous n'avons pas dit que c'était des civils. Nous avons
16 dit qu'il s'agissait de membres des forces armées.
17 Bien entendu, lorsqu'un homme se trouve dans une zone de guerre et
18 qu'il a moins de 60 ans et qu'il porte des vêtements civils, on peut dire :
19 Bien, il était dans l'armée. Et si quelqu'un d'autre dit que c'était un
20 civil qu'est-ce qu'on répond ? Globalement, je pense que nous avons dit
21 clairement qui étaient les civils, et à nos yeux, c'était clair qui étaient
22 les forces armées. Et je crois que nous avons été clairs dans nos
23 reportages montrés cet après-midi devant cette Chambre.
24 Quant aux attaques, comme je crois comprendre ce que dit M. Halilovic
25 à sa présidence, il dit que des actions armées sont entreprises par les
26 forces bosniennes sur les fronts. C'est-à-dire en marge. Il ne parle pas de
27 combats dans le centre de la ville à Grbavica. Et les pilonnages que nous
28 avons montrés et filmés ces jours-là au début du mois de juin, c'étaient
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1 des pilonnages dont les obus atterrissaient un peu partout dans Sarajevo.
2 C'est très différent.
3 Q. Merci. Mais tirons les choses au clair. Il s'agit d'une session de la
4 présidence du 17 juin. Halilovic informe qui de droit pour la semaine qui
5 s'est passée. Donc il informe des mêmes événements que ceux qui sont pris
6 en considération par votre reportage. Mais au milieu du paragraphe ici -
7 regardez, s'il vous plaît - il parle d'Osmice, Stari Grad, vieille ville,
8 Ophodzi, Vasin Han. Ce sont des parties de la ville qu'ils tiennent et à
9 partir des quelles ils ouvrent des tirs. Alors Stari Grad c'est la vieille
10 ville, et vous savez que le centre de la vieille ville c'est
11 Velesici ? Est-ce que vous voyez l'endroit où il est question de Stari Grad
12 ? On dit Osmice-Stari Grad.
13 R. Oui, je sais qu'Osmice c'est "Stari Grad." Je le vois. Mais je ne vois
14 pas qu'il est en train de nous dire qu'il y a eu des attaques depuis Stari
15 Grad en direction de vos lignes à vous. D'après ce que je puis voir ici, il
16 est en train de dire que de fortes forces chetniks ont été brisées dans
17 Pofalice, Zuc et Mojmilo Brdo. Ce n'est pas Stari Grad, ce n'est pas le
18 centre.
19 Q. Mais attendez. Prenez, Monsieur, la phrase.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
21 Monsieur Nicholls.
22 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, pour que les choses
23 soient tout à fait claires, je suis en train de me pencher sur la
24 traduction fournie par la Défense. Nous sommes en train de parler de la
25 page 7, et ici il est question "des cinq à six jours écoulés," et non pas
26 "des deux ou trois semaines écoulées." Soit c'est une erreur, soit c'est un
27 problème de traduction, ou alors peut-être un passage différent.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous indiquer
Page 2460
1 exactement où cela se trouve ?
2 M. NICHOLLS : [interprétation] Je suis en train de me pencher sur le milieu
3 de ce qui est annoté comme étant la page 7 dans la traduction anglaise.
4 C'est la page 2 de la version anglaise en affichage électronique,
5 paragraphe 3, qui commence par : "En sus des problèmes énumérés…"
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, on voit "pendant les cinq ou six
7 jours écoulés."
8 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est justement le passage qui a été porté à
9 l'attention du témoin par M. Karadzic.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, si vous vous penchez sur la page 6,
11 paragraphe premier, on dit : "Au fil des activités déployées pendant les
12 deux mois écoulés, l'agresseur a subi" telle et telle pertes. Mais il ne
13 s'est pas porté des pertes lui-même ? Il y a eu des pertes de notre côté du
14 fait des activités déployées par eux au fil des deux mois écoulés. Et on
15 voit que le 14, il y a une session, puis une deuxième session le 17. Lui,
16 il parle de la période écoulée. Certaines activités ont été déployées au
17 fil de ces six ou sept derniers jours. Mais le rapport, lui, concerne toute
18 cette période. Et il dit par où passe la ligne de front, et à partir des
19 lignes de front, on tire et on tire vis-à-vis de l'autre ligne qui se
20 trouve juste à l'opposé.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. N'est-ce pas ?
23 R. Mais à qui fait-on référence ?
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est cela votre question ? Allons de
25 l'avant.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.
27 Passons à la page 138 en version serbe. Voyons un peu ce que ça nous
28 donne en version anglaise. Huitième -- non, c'est page 11, page 11, version
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1 serbe. Oui, on la voit.
2 Alors, il est dit dans la phrase en haut :
3 "De la phase à venir, pendant les dix à 15 jours à venir, la Défense
4 territoriale de la RBiH va déployer les activités qui suivent," puis il
5 énumère. Et pour la région de Sarajevo, il dit :
6 "Dans la région de Sarajevo, on défendra la ville de Sarajevo par des
7 opérations actives à l'extérieur de la ville et à l'intérieur de la ville
8 pour procéder au déblocage sur les axes Novi Grad-Ilidza- Blazuj-Kiseljak-
9 Centar-Vogosca-Ilijas-Visoko, et dans la région de Gorazde, il convient de
10 débloquer l'axe routier dans la vallée de la rivière Drina."
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Monsieur, est-ce que vous avez obtenu des informations concernant les
13 plans établis, et vous pouvez voir qu'il est planifié des activités
14 offensives depuis la ville ainsi que dans les environs de la ville ?
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls ?
16 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, une fois de plus,
17 est-ce qu'on peut scinder la question en plusieurs parties, le témoin aura
18 plus de facilité à répondre. Parce qu'ici :
19 "Est-ce que vous avez obtenu cette information ?"
20 Enfin, il y a trois questions dans une seule.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Posez des questions plus simples,
22 Monsieur Karadzic.
23 Monsieur van Lynden, est-ce que vous êtes à même de répondre à cette
24 question ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] La question fondamentale qui semble faire
26 référence à ce qui est dit opérations actives déployées par l'armée de
27 Bosnie - à l'intention donc du commandement de Bosnie, alors ça s'adresse
28 au président - et dans d'autres secteurs. Est-ce que j'ai obtenu ces
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1 informations ? Non. Aucune armée ne m'a parlé de ces opérations à venir à
2 l'attention de journalistes étrangers ? Ma réponse est non.
3 Les opérations dont nous avons été mis au courant, pendant que ça se
4 passait dans Sarajevo et pour lesquelles ils ont reconnu que c'étaient des
5 opérations organisées par eux, nous, on pouvait aller vers l'extérieur de
6 la ville pour filmer, mais on pouvait filmer les gens qui sont revenus de
7 l'opération pour aller à l'hôpital. Et on a dit que c'était une opération
8 conduite par les Bosniens. On nous l'avait dit, on l'a présenté de la
9 sorte.
10 Comment dirais-je maintenant : les commandants militaire vont dire à des
11 dirigeants politiques bien des choses. Je sais fort bien que les choses ne
12 se passent pas toujours ainsi. Il y a eu des opérations conduites par les
13 forces bosniennes pendant la guerre en Bosnie en vue d'essayer de briser le
14 siège de Sarajevo. Mais pour autant que je le sache, ces opérations n'ont
15 pas été couronnées de succès. Je n'ai pas été au courant d'une opération
16 quelle qu'elle soit qui aurait été par avance annoncée à des journalistes
17 occidentaux et, par exemple, en été 1995, l'armée bosniaque avait refusé de
18 confirmer que telle opération était en train de se produire.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Merci.
20 Je voudrais qu'on nous montre brièvement la P934. Il s'agit d'une carte de
21 l'Accusation.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Je demanderais au Procureur et aux Juges, parce que je pense que vous
24 devez certainement le savoir cela.
25 Alors, je ne dirais pas que vous n'avez pas été impartial, mais non
26 informé. Le résultat est, toujours est-il, le même.
27 Monsieur van Lynden, est-ce que vous pouvez nous indiquer ici qu'est-
28 ce qui se trouve autour de cette zone serbe ? Là où vous avez apposé cette
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1 flèche ? Puis au nord, à l'ouest, qui est-ce qui se trouve autour de nous ?
2 On voit "HVO," n'est-ce pas ? Alors, est-ce que vous pouvez nous le marquer
3 --
4 R. Mais indiquer quoi ?
5 Q. Bien, marquer qui se trouve où. Par exemple, la ligne bleue c'est la
6 ligne musulmano-croate, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Et la ligne rouge c'est serbe, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Et à l'extérieur, c'est les forces du gouvernement musulman, à gauche
11 et au nord de la ligne bleue, et plus au sud de cette ligne bleue, donc à
12 l'extérieur de ce qui est englobé par la ligne bleue ?
13 R. Oui, c'est normalement le territoire contrôlé par l'ABiH ou le HVO; le
14 reste du territoire étant contrôlé par vos forces à vous.
15 Q. Donc ce qui est à l'intérieur de la ligne rouge c'est sous le contrôle
16 des forces serbes, et ce qui est à l'extérieur de la ligne bleue c'est
17 contrôlé par les forces musulmano-croates, n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que lorsque Halilovic est en
20 train de parler des activités offensives déployées par lui à l'extérieur et
21 à l'intérieur, de son avis, l'idée est de procéder au déblocage de Sarajevo
22 en attaquant de la Bosnie centrale et depuis Sarajevo même, n'est-ce pas ?
23 R. Oui, en tout cas je pense que ça a été tenté, mais ça a échoué au cours
24 de l'été 1995. Et manifestement, ça avait été essayé et ça avait aussi
25 échoué à d'autres moments de la guerre. Je vous l'ai déjà dit que le siège
26 n'avait jamais été levé.
27 Q. Est-ce que vous pouvez, sur cette carte, nous indiquer où se trouve
28 Ilijas ? Est-ce que vous savez où se trouve Ilijas ? C'est le long de la
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1 route et le long de la rivière en allant vers le nord, n'est-ce pas ?
2 R. Ilidza, normalement, ça doit se trouver dans cette zone-ci [Le témoin
3 s'exécute].
4 Q. Ce serait Rajlovac et Nedzarici. Il y a d'abord Nedzarici, puis
5 Rajlovac, et Ilijas c'est tout à fait au nord.
6 R. Si c'est vous qui vous le dites. Mais je ne pense pas que j'ai été à
7 Ilijas, sauf peut-être en mars 1994.
8 Q. Monsieur van Lynden, Ilijas c'est une localité où il est tombé le plus
9 d'obus pendant cette guerre-là, et c'est la localité qui a perdu,
10 proportionnellement parlant, le plus d'habitants, tant civils que soldats.
11 Ilijas c'est une municipalité dans Sarajevo. Ça a échappé complètement à
12 votre attention, cela ?
13 R. Mais, Monsieur Karadzic, si c'est bien vrai, pourquoi est-ce que votre
14 gouvernement ou votre armée ne nous a pas emmenés à Ilijas ? Si on ne nous
15 dit pas tout ça, comment voulez-vous qu'on le sache ? Il n'est pas possible
16 d'avoir des correspondants qui circulent librement dans une zone de guerre,
17 qui se rendent en toute liberté sur une ligne de front. Si vous ne nous
18 montrez pas, comment voulez-vous que le reste du monde soit informé ?
19 Jamais votre gouvernement ni votre armée ne m'a envoyé là-bas.
20 Q. Ça c'est une chose qui a été publiée partout. Mais merci. Je voulais
21 seulement que les Juges de la Chambre se rendent compte du fait que nous
22 étions encerclés. Ils nous avaient encerclés, et on --
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous aurez l'occasion
24 de présenter des conclusions juridiques. Le moment maintenant est venu de
25 poser des questions.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Voilà ma question : est-ce que nous sommes à demi encerclés par eux
28 comme eux se trouvent être à demi encerclés par nous ?
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1 R. La ville de Sarajevo n'était pas à moitié encerclée. Elle était
2 complètement encerclée, elle était assiégée. Vous parlez d'un encerclement
3 qui vous concernait, et c'est vrai que dans une certaine mesure ça a été
4 vrai à un moment donné. Mais on ne peut pas comparer les deux.
5 Q. Un officier de la FORPRONU a dit que c'était un encerclement, non pas
6 un siège, un blocus, mais on y viendra à cela.
7 Merci pour cette carte. Je voudrais revenir au document de tout à l'heure,
8 à la page 12. Si tout à l'heure on avait vu la page 11, maintenant on passe
9 à la page 12.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
11 M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'ai pas fait d'objection, Monsieur le
12 Président, pas vraiment aujourd'hui, mais nous avons ici un commentaire
13 supposé d'un officier de la FORPRONU. C'est une perte de temps, parce qu'en
14 général M. Karadzic promet de revenir à ces dires précis, mais il ne le
15 fait pas et se contente de présenter des arguments.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout à fait. Est-ce qu'on peut afficher
17 une fois de plus le document 1D1208.
18 Vous avez compris ce que voulait dire M. Nicholls, Monsieur Karadzic ? Vous
19 devez vous abstenir de faire de telles déclarations.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais M. Nicholls sait parfaitement bien de qui
21 je suis en train de parler. Ils ont le document en question.
22 Est-ce qu'on peut nous montrer, s'il vous plaît, la page 12.
23 On a maintenant sous les yeux la page 12. M. Izetbegovic pose la question :
24 "Quand on fait l'addition de l'utilisation des forces armées de l'ennemi,
25 combien cela nous donne-t-il, à proximité de Sarajevo, qui tient la ville
26 encerclée," et Izetbegovic dit : "Est-ce que c'est plus en profondeur ou
27 moins en profondeur ? Comment sont-ils ?"
28 Alors, Halilovic répond :
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1 "Ils sont 6 000 dans la ville de Sarajevo, et c'est ce qui tient la ville
2 encerclée. Pour ce qui est des effectifs en personnel, je pense que
3 l'estimation est assez réaliste, et il y en a 70 000 sur le territoire
4 entier de la République de Bosnie-Herzégovine."
5 Donc Halilovic procède à une évaluation de l'armée de la Republika Srpska
6 et dit que c'est environ 80 000 dans toute la Bosnie.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, c'était la page 13. Excusez-moi. Excusez-
9 moi, on vient de nous le montrer.
10 Alors, Halilovic répond :
11 "Face à la ville, ils sont 6 000," les Serbes, et Bosnie centrale, il
12 n'avait pas compté, mais il dit, d'après leurs évaluations, il y a en
13 Bosnie-Herzégovine quelque 80 000 hommes dans la Republika Srpska :
14 "Or, pour prendre la ville de Sarajevo tout entière, il faut des effectifs
15 plus forts que l'ennemi en a. Objectivement, cela ne peut se faire dans un
16 avenir proche, à moins qu'il n'y ait des bouleversements radicaux. Mais ils
17 essaieront de réaliser leur objectif, à savoir de procéder à une percée
18 pour ce qui est de la ville de Sarajevo et passer par Rajlovac, Stup et
19 Lukavica pour arriver à Pale. Et ils disent qu'ils disposent des forces
20 nécessaires, et cela affaiblirait la défense sur d'autres axes, ce qui fait
21 qu'il n'est pas réaliste de penser que cela pourrait être fait."
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Monsieur van Lynden, il évalue ses propres effectifs à 500 bataillons
24 autonomes, 500 pelotons, 400 compagnies, et je ne sais combien de milliers
25 de soldats. En face, il y a 6 000 Serbes et
26 80 000 Serbes dans toute la Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous étiez au
27 courant de cette disproportion énorme du point de vue des effectifs humains
28 ?
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1 R. Tout d'abord, revenons à la question du nombre de bataillons et
2 d'unités indépendantes qu'aurait eus à sa disposition M. Halilovic à
3 l'intérieur de Sarajevo. Moi, je suis issu d'une armée où, en général, il y
4 a 700 hommes dans un bataillon. J'ai trouvé dans d'autres pays des
5 bataillons qui ne comptent que 100 hommes. M. Halilovic ne donne pas de
6 chiffres exacts sur le nombre précis d'hommes que compte une compagnie, un
7 bataillon, donc je ne sais pas combien d'hommes il a à Sarajevo.
8 Mais vous posez une question d'une portée plus vaste, vous dites
9 qu'il n'y avait que 80 000 soldats serbes en Bosnie-Herzégovine, mais en
10 septembre 1992, il est apparu clairement que s'agissant des effectifs, les
11 forces musulmanes de Bosnie avaient une supériorité numérique. Mais pour ce
12 qui est du matériel, de l'armement, vous étiez de loin supérieur en tout
13 domaine, que ce soit le type de pièces d'artillerie, de chars, de véhicules
14 blindés transporteurs de troupes. L'ABiH n'avait pas ce matériel, donc un
15 aspect compensait l'autre. Donc il y avait moins d'hommes du côté serbe,
16 mais vous aviez 80 000 hommes parfaitement équipés, soutenus par un
17 armement lourd que n'avait pas la partie bosniaque.
18 Q. Merci. Il le dit bien ici à la page de tout à l'heure, page 7, où il
19 dit qu'il avait 91 000 personnes, et je ne sais combien de compagnies, 400
20 bataillons, mais peu importe. Nous sommes d'accord sur une chose, Monsieur
21 van Lynden, nous avions face à nous -- si nous étions, par exemple, 1,5
22 millions et nous avions face à nous 3 millions. Et pour ce qui est de la
23 base de mobilisation, il y avait un ratio de 2:1 qui était plus avantageux
24 pour la Fédération bosno-hezégovienne que pour nous, n'est-ce pas ?
25 R. Pour ce qui est des ressources humaines, c'est vrai dans une certaine
26 mesure, mais ces effectifs étaient répartis entre les forces musulmanes de
27 Bosnie et les forces croates. Vous pouvez avoir des hommes, mais s'ils
28 n'ont pas d'armes, à quoi vous servent-ils ?
Page 2469
1 Q. Maintenant, vous me provoquez, vous voulez que je fasse référence à des
2 renseignements donnés par le secrétaire général des Nations Unies qui
3 affirme que les carences du point de vue des armes pour ce qui est des
4 Musulmans, ce n'était plus un problème.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je voudrais que d'abord ce document, qui
6 est un PV de la session de la présidence de Bosnie-Herzégovine daté du 17
7 juin, soit versé au dossier. Et je voudrais maintenant qu'on nous montre le
8 1D11130 au prétoire électronique.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président. Je
11 relève simplement qu'à certaines pages, il n'y a qu'une phrase qui est
12 traduite. Pas d'objection pour ce qui est de la totalité du document, mais
13 nous espérons avoir tôt ou tard une traduction complète qui nous permettra
14 de lire le reste, et pas seulement cette seule phrase.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Ce sera versé avec une cote
16 provisoire.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D192 MFI
18 provisoire.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que ce qui a été utilisé par la
20 Défense a été traduit, donc on peut le verser au dossier. Si le Procureur
21 veut une traduction, il n'a qu'à la faire faire.
22 J'ai demandé le 1D01130.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par exemple, vous avez donné lecture
24 d'une partie de la page 3, mais seule une ligne de cette phrase avait été
25 traduite. Et si on n'a pas une traduction complète, il est difficile de
26 comprendre ces parties-là. Il y a donc une cote provisoire dans l'attente
27 de la traduction des parties qui ne sont pas encore traduites.
28 Avançons.
Page 2470
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
2 Malheureusement, ici, nous n'avons pas de traduction du tout, pas encore.
3 Mais je vais donner lecture de ce qui est dit.
4 Il s'agit du service de la Sûreté de l'Etat de la Republika Srpska.
5 C'est daté du 20 juillet 1992.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Alors, Monsieur van Lynden, ce sont des renseignements portant
8 sur les sites que vous aviez présentés dans vos reportages. L'intitulé
9 c'est "Information." On dit :
10 "Dans l'ex-caserne du maréchal Tito, ainsi qu'à la faculté de génie civil
11 et d'architecture, il est procédé à des entraînements de membres de ce
12 qu'il est convenu d'appeler Défense territoriale de la Bosnie-Herzégovine.
13 D'après ces mêmes renseignements, dans la caserne, il y a également un
14 centre d'entraînement des membres de ce qui est convenu TO BiH destiné aux
15 interventions rapides, et ces stages d'entraînement durent 25 jours. Dans
16 le tunnel de Velesici, il y a un char, et devant le bâtiment de ce qui est
17 convenu d'appeler la TO de la BiH, il y a un blindé transporteur de troupes
18 et un char de garés."
19 Alors, le saviez-vous, cela ?
20 R. Vous voulez parler du document ?
21 Q. Non, je ne parle pas du document. Je parle du déploiement de ces
22 effectifs. Parce que vous nous avez dit que la caserne du maréchal Tito
23 était en flammes, et on avait envie de pleurer à entendre cela, mais la
24 caserne du maréchal Tito c'était une cible légitime. Ne saviez-vous pas
25 qu'il y avait là des structures militaires de déployées ?
26 R. Je n'ai pas dit que c'était une cible qui n'était pas légitime aussitôt
27 après l'évacuation des effectifs de l'armée yougoslave. A ma connaissance,
28 on n'utilise pas ce bâtiment parce qu'il servirait de centre
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1 d'entraînement. Il n'a pas servi de centre d'entraînement à cette époque.
2 Personne n'y est allé. Je suppose qu'il y a des unités de l'armée qui sont
3 allées voir ce qu'elles pouvaient y trouver dès après l'évacuation des
4 effectifs de la JNA. Est-ce que l'ABiH a utilisé ce bâtiment, sans doute,
5 c'est tout à fait possible, mais c'est après le pilonnage qu'elle l'aurait
6 fait. Moi, je n'y suis pas allé après.
7 En juillet, il y a eu un incident qui a fait l'objet de questions posées
8 par l'Accusation en début d'audience, où nous avons vu trois personnes qui
9 avaient été touchées sur la route et où on a vu des flammes qui se
10 dégageaient des restes de la caserne du maréchal Tito, ou plutôt, c'étaient
11 des tirs de couverture. Donc sans doute y avait-il des soldats à
12 l'intérieur en juillet 1992. Mais au cours de cette période qui a fait
13 l'objet de nombreux reportages montrés ici aujourd'hui, il n'y avait pas
14 d'unités de l'ABiH dans la caserne. Ça aurait été bête de s'y trouver étant
15 donné qu'il y avait des tirs soutenus qui étaient concentrés sur ce
16 bâtiment, encore moins pour l'utiliser comme centre d'entraînement. C'est
17 bien possible que ça ait été utilisé à ces fins après, mais pas au moment
18 où nous avons réalisé ces reportages.
19 Q. Alors, pour ce qui est de ce char à Velesici, vous ne savez rien nous
20 dire à son sujet, n'est-ce pas, puisque vous ne l'avez pas vu, et vous
21 n'aviez pas eu d'abord de connaissance du fait qu'ils avaient disposé de
22 chars aussi, non ?
23 R. Jamais je n'ai vu de char à l'intérieur de la partie de Sarajevo que
24 contrôlaient les forces de Bosnie-Herzégovine.
25 Q. Dans la deuxième phrase, au paragraphe suivant, il est dit :
26 "L'état-major de ce qui est convenu d'appeler TO BiH pour cette région, ça
27 se trouve dans les locaux de l'école de transport, alors que le poste de
28 police se trouve dans la communauté locale de Velesici."
Page 2472
1 Alors, je voudrais avant cela vous demander : est-ce que vous savez où se
2 trouvait la gare routière de Sarajevo.
3 R. La gare routière principale, je pense qu'elle se trouvait dans la
4 nouvelle ville de Sarajevo, du côté de la partie ouest de la ville. Je
5 crois qu'il y en avait une autre, je m'en souviens vaguement. Il faudrait
6 que je me rappelle où elle était. Tout au début, on m'a montré une
7 photographie qui me permettrait peut-être de me souvenir de son
8 emplacement. Mais il est certain qu'il y avait un arrêt de tramway à
9 l'ouest de la ville. Alors, sans doute y avait-il aussi des bus. Mais quand
10 j'étais à Sarajevo, aucun bus, aucun tram ne circulait. Donc je n'ai pas
11 essayé de savoir ce qui arrivait aux bus.
12 Q. Permettez-moi de vous aider, de rafraîchir votre mémoire. Est-ce que la
13 gare routière se trouve entre la caserne du maréchal Tito et la gare
14 ferroviaire ? Donc juste à côté du mur de la caserne du maréchal Tito, puis
15 il y a la gare routière, et juste après vient la gare ferroviaire ? Vous en
16 souvenez-vous maintenant ? Si ce n'est pas le cas, on montrera une carte
17 demain.
18 Allons de l'avant donc pour ce qui est de ce document. Passez-nous la
19 page suivante, s'il vous plaît.
20 Il est dit :
21 "Les armes d'artillerie sont déployées sur le mont Hum sous le relais de ce
22 qu'il est convenu d'appeler la radiotélévision de Bosnie-Herzégovine et à
23 Velesici, et non loin du tunnel Mont Kosevo. Nous avons remarqué des
24 déplacements de chars autour de la station routière et ils ont tiré depuis
25 là pour se retirer tout de suite après."
26 Ce que je veux dire ici, Monsieur Van Lynden, c'est que Hum et le contrebas
27 de Hum, cette localité de Velesici, je pense que c'est Mladic qui l'avait
28 mentionné, le mont Velesici et le tunnel ainsi que la gare routière, à ce
Page 2473
1 moment-là, c'étaient des cibles légitimes, n'est-ce pas ?
2 R. Vous attendez de moi que je vous dise oui ou non ? Enfin, je n'y ai pas
3 vu de force militaire. Comment voulez-vous que je détermine si c'était des
4 cibles militaires légitimes ? Moi, je n'ai pas vu ces chars dont vous
5 parlez à cet endroit. Comment voulez-vous que je dise si c'était des cibles
6 légitimes ou pas ?
7 Q. Mais supposons que cela s'y soit trouvé. Est-ce que cela ferait de ces
8 sites-là des cibles légitimes ?
9 R. Vous savez, on m'a appris en journalisme de ne jamais faire de
10 suppositions.
11 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Et c'est vrai en droit. LE TÉMOIN :
12 [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Mais de façon générale, en principe,
14 s'il s'agit d'opérations militaires et s'il se trouve à un certain endroit
15 des chars, des pièces d'artillerie, puisque vous avez une longue expérience
16 de reporter de guerre, est-ce que c'est une cible militaire légitime ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, à condition qu'en application des lois et
18 coutumes de la guerre, les combats en zone urbaine et les forces des armées
19 concernées doivent faire preuve d'une grande prudence, de façon à ne pas
20 provoquer de morts dans la population -- ou de blessés dans la population
21 civile. Ça fait partie des conventions de Genève. Je suis sûr que vous le
22 savez mieux que moi. Par conséquent, c'est un facteur que les forces
23 militaires en présence doivent toujours prendre en compte, mais en
24 principe, logiquement, ce serait des cibles militaires légitimes.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Merci. Alors, on énumère dans ce document la totalité des sites où il y
27 a des cibles légitimes. Une fois que ce sera traduit, on s'en resservira à
28 une autre occasion.
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1 Maintenant, j'attire votre attention sur la page 3, pour ce qui est
2 de ce bâtiment ou immeuble UNIS. Dans cette rue, Omer Masic [comme
3 interprété], il y a le QG de ce qu'il est convenu d'appeler TO de Bosnie-
4 Herzégovine, département de Novo Sarajevo. Dans la rue Omer Masic, bâtiment
5 UNIS, il y a le QG de ce qu'il est convenu d'appeler TO de Bosnie-
6 Herzégovine pour le secteur Novo Sarajevo. Nous disposons de renseignements
7 disant que dans Cengic Vila et Miljaska [phon], il y a un mortier qui tire
8 alors qu'il est monté sur un camion. Le QG de la TO de BiH à Cengic Vila se
9 trouve dans un magasin de vente de meubles, et il y a là-bas une forte
10 concentration de militaires, quelque 1 000 hommes," et ainsi de suite.
11 Ma question pour vous : dans un reportage à vous, vous avez bien indiqué
12 que des appartements et des locaux commerciaux avaient été transformés en
13 sites à partir desquels on ouvrait le feu. On l'a quelque part de consigné.
14 On a donc transformé cela en sites à partir desquels on tirait au fusil,
15 fusil à lunette, et cetera, et on voit que la police secrète fait des
16 rapports pour confirmer que ces locaux commerciaux, UNIS, Treska, Vraniska
17 [phon], et ainsi de suite, ont été utilisés à des fins militaires. Est-ce
18 qu'en l'occurrence ce sont là des cibles militaires légitimes ?
19 R. Vous faites allusion à un reportage que nous avons fait sur une ligne
20 de front. En situation de guerre en zone urbaine -- en milieu urbain, par
21 définition, ce qui avant avait été le bureau ou la maison de quelqu'un,
22 lorsque cet endroit se trouve sur une ligne de front, s'est transformé en
23 bastion. C'est ce qui se passe lorsqu'on a une guerre urbaine. Alors, est-
24 ce que cette tour UNIS a été utilisée à cette fin, je ne sais pas. On m'a
25 emmené sur plusieurs lieux de la Défense territoriale. Faites bien
26 attention, je dis Défense territoriale, ce n'était pas une armée. C'est
27 tout à fait différent d'une armée. Et j'ai vu plusieurs QG de cette Défense
28 territoriale à Sarajevo, mais je n'en ai vu aucun à la tour UNIS.
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1 Plus tard, pendant la guerre, j'ai visité plusieurs locaux commerciaux, des
2 bureaux qui étaient utilisés comme bases ou comme bureaux de diverses
3 unités de l'ABiH. Manifestement, il fallait bien qu'ils aillent quelque
4 part, ces hommes. Avant, c'était des lieux à usage privé civil, et c'était
5 devenu des lieux utilisés par l'armée ou par des forces militaires.
6 Donc je ne savais ce qu'il en était pour les tours UNIS. On n'y était
7 pas allé. Et au cours de cette visite que nous avons faite, nous n'avons vu
8 personne de la Défense territoriale. Pour moi, ce n'était pas une cible
9 logique. Me permettez-vous d'être complet, demanderais-je ? Est-ce qu'on me
10 dit tout du côté bosniaque ? Non. Il y a toujours une possibilité, bien
11 sûr. Mais nous avons été dans ce bâtiment et nous n'avons rien trouvé.
12 Mais je ne peux rien vous dire des autres lieux parce que je n'ai pas
13 été partout. Je ne sais pas, tout simplement.
14 Nous ne savons pas s'il s'agit ici d'un document authentique. Moi, à
15 première vue, rien ne me dit que c'est un document authentique.
16 Apparemment, il vient des Services secrets. Moi, j'ai déjà vu des documents
17 produits par des Services secrets qui étaient loin d'être exacts.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Nicholls.
19 M. NICHOLLS : [interprétation] Désolé d'interrompre les débats.
20 Je ne vois pas d'objection. Mais je me trompe peut-être, mais je pense que
21 ça commençait à la ligne 94, ligne 15, la date de ce document, c'était le
22 "19 juin 1992." Est-ce une coquille ? Je pense que la date de rédaction de
23 ce document, c'est le 20 juillet. Il faudra apporter une correction, si je
24 ne me trompe pas.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est exact, on voit la date, c'est
26 celle du 20 --
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais une cote à des fins
28 d'identification avec la rectification.
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1 Mais à titre d'information - ce n'est pas une question - c'est un document
2 qui a été saisi par les enquêteurs du bureau du Procureur. C'est eux qui se
3 sont procuré ce document, ce n'est pas moi qui l'ai apporté ici.
4 M. TIEGER : [interprétation] Je me dois d'intervenir parce que le
5 commentaire du témoin portait sur la source et pas sur les autorités qui
6 ont saisi le document.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'étais sur le point de demander l'avis
8 du bureau du Procureur sur ce document car apparemment, M. Karadzic demande
9 le versement du document. Qu'en pensez-vous, Monsieur Tieger, Monsieur
10 Nicholls ?
11 M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection. Vous avez dit que vous
12 alliez attribuer une cote provisoire en attente de la traduction. Pas
13 d'objection.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Cote provisoire pour
15 identification en attente de traduction.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D193 MFI
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je voudrais qu'on nous montre maintenant
18 le 1D361.
19 Q. En attendant, Monsieur Van Lynden, je précise qu'il s'agit d'un
20 document émanant du ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine, la
21 partie musulmane, c'est-à-dire la partie musulmano-croate, et ici, en
22 version anglaise, on voit que c'est le 14 juin 1992 que Hasan Efendic, très
23 connu commandant de la Défense territoriale, donc confirme qu'il y a un
24 cessez-le-feu de déclaré à la date du 1er juin 1992. Donc le 1er juin 1992,
25 les parties en présence ont signé un accord de cessez-le-feu. A partir du
26 1er juin jusqu'au 15 juin 1992, on a vu quelles sont les activités
27 offensives lancées par l'ABiH et quelles sont les pertes terribles
28 matérielles et humaines qu'elles ont portées aux forces de l'armée de la
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1 Republika Srpska. Et le 14 juillet, il réaffirme son attachement au cessez-
2 le-feu, qu'il n'avait pas respecté.
3 Donc étiez-vous au courant de l'existence d'un cessez-le-feu lorsque vous
4 êtes arrivé, le premier jour, là-bas ?
5 R. Je suis arrivé fin mai, et je ne savais pas qu'il y avait alors un
6 cessez-le-feu en vigueur. On nous a dit qu'un accord de cessez-le-feu a été
7 signé et des membres des Nations Unies nous ont dit que l'accord avait été
8 pratiquement aussitôt violé. Quand on a demandé par qui, on a répondu :
9 Bien, on ne peut pas dire au départ. Mais nous avons parlé à un colonel
10 australien, je crois que je le mentionne dans un de mes reportages, c'était
11 un négociateur au nom des Nations Unies, et il m'a dit qu'il y avait eu des
12 violations multiples de l'accord de cessez-le-feu, manifestement, c'était
13 vrai, et il en attribuait la faute aux Serbes de Bosnie.
14 Vous dites aussi qu'au cours de cette période, votre peuple a subi
15 lourdement les conséquences des combats. Moi, je n'étais pas de votre côté
16 de la ligne de front. Moi, j'étais à l'intérieur de Sarajevo. Et tout ce
17 que je peux vous dire ici, c'est ce que j'ai vu, c'est ce qui a été filmé.
18 C'était un carnage, ni plus ni moins, dans la partie tenue par les
19 Musulmans de Bosnie de Sarajevo.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Mais on a entendu dire Sefer Halilovic,
21 le commandant de l'ABiH, quelles ont été nos pertes, et il affirme qu'il
22 s'agissait d'opérations offensives de la part de son armée à lui.
23 Je voudrais que ce document soit versé au dossier.
24 M. NICHOLLS : [interprétation] Je m'oppose à ce qu'on présente un argument
25 sans poser de question ou en faisant semblant de poser une question.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez pour coutume de terminer vos
27 questions et les réponses qui sont données par un commentaire. Essayez de
28 vous déshabituer de cela.
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1 Je suppose que vous ne vous opposez pas au versement du document, Monsieur
2 Nicholls.
3 M. NICHOLLS : [interprétation] Non.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est versé.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D194. Merci.
6 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je m'excuse, mais ma question était
8 celle de savoir est-ce qu'on a juste lu à l'instant que le commandant de
9 l'armée musulmane a informé qui de droit des pertes serbes; oui ou non. On
10 l'a vu à l'instant, et il s'agit de la date du 17 juin.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous avons entendu la
12 réponse fournie par le témoin.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
14 J'aimerais qu'on nous montre le 1D01231.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Regardons l'heure, Monsieur Karadzic. Je
16 pense que nous devons lever l'audience. Elle reprendra demain à 14 heures
17 15. L'audience est suspendue.
18 [Le témoin se retire]
19 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le jeudi 20 mai 2010,
20 à 14 heures 15.
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