Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 20 mai 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre votre interrogatoire, je vous prie.

  8   LE TÉMOIN : AERNOUT VAN LYNDEN [Reprise]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour à tous.

 11   Je demande l'affichage du document 1D0131 sur les écrans. Il me semble que

 12   ce document n'a pas encore été téléchargé dans le prétoire électronique. Je

 13   demanderais donc que l'on remette une copie papier de ce document au

 14   témoin.

 15   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] En fait, l'original existe dans le prétoire

 17   électronique mais pas encore la traduction, donc je vais lire lentement,

 18   Monsieur van Lynden.

 19   Ce document date du 8 juin 1992, et je vous rappelle que le 1er juin

 20   1992, un accord de cessez-le-feu a été signé, celui qui a été mis en œuvre

 21   le 14 juin après renouvellement.

 22   Donc, commandement du Corps de Sarajevo-Romanija, ce commandement

 23   informe fermement l'état-major principal de l'ABiH - c'était le nom qu'on

 24   donnait à cet état-major à l'époque - que : 

 25   "Pendant la journée, l'ennemi a développé une offensive depuis la

 26   ville vers la périphérie. Les tirs d'artillerie ont pris pour cible Potok

 27   Zuc, Han Zuc et Kobilja Glava. L'ennemi a réussi à s'emparer de la route S-

 28   1, qui relie Rajlovac à d'autres localités," et cetera, et cetera.

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  1   Et un peu plus loin, nous lisons :

  2   "Vojvkovici, Nedjarici, Ilidza, Rajlovac, Vrace et VP KAG ont été pris pour

  3   cible par les tirs d'artillerie. Nous nous attendons à une attaque

  4   intensive sur l'aérodrome pendant la nuit."

  5   Et au point 3, nous lisons :

  6   "La plus grande partie des maisons a été détruite dans le secteur. Pendant

  7   la journée, nous avons subi des pertes qui se montent à huit morts et 62

  8   blessés. Nous avons eu deux chars et cinq blindés transport de troupes

  9   endommagés."

 10   Est-ce que ceci ressemble pas mal à l'information fournie par Sefer

 11   Halilovic au sujet des pertes, et Sefer Halilovic les a fait connaître à la

 12   présidence ? Je parle des pertes subies par les Serbes. Ce document date du

 13   18; quant à l'autre, il datait du 18. Est-ce que vous conviendrez que ce

 14   document comporte un contenu qui ressemble beaucoup à ce qu'a dit Sefer

 15   Halilovic et que l'opinion internationale a été informée du fait que le feu

 16   a été ouvert et de l'identité des victimes ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 18   Juges, j'ai une question qui me vient après l'audition d'hier.

 19   Je ne suis pas juriste, mais pour autant que je le sache, si l'Accusation

 20   s'apprête à demander le versement au dossier d'un document, elle est

 21   contrainte de montrer ce document à la Défense au préalable. Et si la

 22   Défense veut présenter un document, c'est l'Accusation qui doit avoir

 23   communication de ce document au préalable. Quant à moi, je n'ai vu aucun de

 24   ces documents avant, et je suis sûr qu'un témoin a également des droits.

 25   Comment peut-on s'attendre à ce que je réagisse instantanément à la lecture

 26   d'un document que je n'ai jamais vu avant ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne crois pas que le Tribunal ait une

 28   règle en la matière. Les témoins doivent voir les documents qui sont

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  1   utilisés pendant un contre-interrogatoire. Mais vous ne pouvez répondre que

  2   si vous avez des connaissances sur la question qui vous est posée. Si vous

  3   n'avez rien à dire dans votre déposition, vous pouvez dire que vous n'avez

  4   rien à dire. Et si vous avez un commentaire à faire, vous pouvez le faire.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais agir dans ce sens, car je pense que

  6   les témoins doivent aussi avoir des droits par rapport aux documents.

  7   M. Karadzic m'a demandé avant l'audience, m'a posé une question sur ce

  8   document, j'ai donné mon accord. M. Karadzic aurait pu avoir la politesse

  9   de me montrer ces documents lorsque je suis allé le voir en prison.

 10   Pour répondre à votre question, Monsieur Karadzic, dans la mesure de mes

 11   capacités, d'abord, je n'étais pas au courant à l'époque de ce que seraient

 12   les documents que vous m'avez présentés hier et que vous avez présentés au

 13   Tribunal, et je ne savais pas que vous produiriez le rapport que vous êtes

 14   en train de produire cet après-midi. Or, si nous ne sommes pas informés par

 15   votre gouvernement, car nous avions à l'époque un bureau à Pale, et si nous

 16   n'étions pas non plus informés par la partie adverse qui tenait le front,

 17   autrement dit les représentants du gouvernement de Bosnie, alors

 18   manifestement, il m'était très difficile en tant que journaliste de réagir,

 19   car la situation était assez anarchique au début du mois de juin 1992. Je

 20   ne pouvais donc pas publier ces informations. Nous avons publié les

 21   informations qui nous parvenaient, dans la mesure de nos capacités. Nous

 22   avons essayé de vérifier auprès de la présidence bosnienne ainsi qu'auprès

 23   des Nations Unies, qui avaient une représentation à Sarajevo,

 24   l'authenticité de ces informations avant d'envoyer nos reportages.

 25   Mais à l'époque, si je me souviens bien, nos reportages étaient aussi

 26   précis que possible, étant donné ces contraintes. Et bien sûr, ces

 27   contraintes pouvaient affecter la précision d'un reportage dès lors qu'un

 28   journaliste travaille en situation de guerre et dans une situation

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  1   anarchique dans une ville comme Sarajevo à l'époque, en particulier. Avec

  2   les dangers qui existaient, il était très difficile de se déplacer d'un

  3   point A à un point B.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Merci. Mais voyez-vous, ceci n'est pas un document sur lequel je vous

  6   pose des questions. Il s'agit des événements, c'est de cela que nous

  7   parlons. Et vous avez rendu compte de ces événements d'une façon contraire

  8   à la réalité.

  9   A un certain moment -- enfin, il n'a jamais été dit qu'il y avait

 10   échange de tir, qu'il y avait des victimes, que la majorité des victimes

 11   étaient des Serbes, et vous n'avez jamais rendu compte de tout cela, parce

 12   qu'à entendre vos reportages, on ne fait que constater une chose, à savoir

 13   qu'il y avait des tirs à Sarajevo un peu partout. Et nous voyons dans ce

 14   document qu'il y a eu des morts et également un grand nombre de maisons

 15   endommagées, alors que d'après vos reportages on ne pouvait rien deviner de

 16   l'existence de victimes serbes et du fait que c'étaient les Musulmans qui

 17   avaient commencé à tirer.

 18   Donc vous ne faites que souligner ces événements parce qu'ils étaient

 19   au cœur de vos reportages, mais vous en rendiez compte d'une façon

 20   contraire à la réalité.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Encore une fois, Monsieur le Président,

 23   c'est peut-être une façon de présenter une thèse, mais il s'agit en réalité

 24   d'une polémique, et il n'y a pas de question. Présenter une thèse, dirais-

 25   je, consiste de façon générale à exprimer une position particulière sur un

 26   point en particulier qui est contesté par les deux parties; c'est ce que M.

 27   Karadzic a fait au sujet des questions adressées à ce témoin. Mais on ne

 28   peut pas se contenter de parler en permanence des blessures qui ont été

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  1   subies par une partie belligérante ou de sujet de ce genre, sans poser une

  2   question.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il a tiré profit de

  4   l'occasion qui lui était donnée, et le témoin est tout à fait capable de

  5   répondre à cette question, à mon avis, en tout cas, dans la mesure de ses

  6   capacités.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ferai de mon mieux, Monsieur le Président.

  8   Ma première réaction, s'agissant de ce que vous attendez de moi, c'est que

  9   d'un côté du front, d'un côté de la zone de guerre, on ne cessait d'avancer

 10   et de reculer pour déterminer quelle était la situation exacte de la partie

 11   d'en face. Il est ridicule de s'attendre qu'un correspondant de guerre dans

 12   quelque zone de guerre puisse aller partout. On rend compte à partir de ce

 13   qu'on voit et de ce qu'on apprend d'une partie et de l'autre partie.

 14   Mais, à l'époque, comme je l'ai déjà dit, nous avions une équipe présente à

 15   Pale. Nous étions en contact quotidien avec nos collaborateurs par

 16   téléphone. Ils travaillaient encore à l'époque, nous leur posions des

 17   questions. A aucun moment, Monsieur Karadzic, vous ne nous avez informé que

 18   l'équipe qui logeait à la cité olympique, avec un producteur qui parle

 19   votre langue, vous ne les avez pas informés de tous ces événements, vous

 20   n'avez pas proposé d'emmener nos collaborateurs sur place pour vérifier les

 21   faits. Ils l'ont demandé. L'autorisation leur a été refusée.

 22   Lorsqu'à un moment ultérieur à ces événements, on en a parlé hier, nous

 23   sommes allés à Pale pour essayer de filmer ce qui se passait de votre côté,

 24   nous avons à de nombreuses reprises été arrêtés. Nous n'avons jamais pu

 25   travailler. Alors ce n'était pas notre faute. C'était votre faute. Si vous

 26   étiez incapable de nous montrer la situation vue par vous en vous appuyant

 27   sur les faits, comme vous avez pu le constater, pour vous adresser au

 28   public international, vous ne pouvez pas nous reprocher d'avoir essayé et

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  1   de nous être vu opposer un refus par vous, votre gouvernement, et votre

  2   armée.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur van Lynden, on peut interpréter

  4   la question de l'accusé comme signifiant qu'à la vue des images de vos

  5   films, on ne pouvait pas conclure d'où provenaient les tirs. Que diriez-

  6   vous sur ce point ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon commentaire sur ce point consisterait à

  8   dire que dans la plupart des cas où il y avait des tirs, nous ne pouvions

  9   pas nous prononcer. Je dirais même que nous n'aurions pas eu le droit de

 10   nous prononcer sur ce que nous voyons. J'étais d'un côté d'un bâtiment, et

 11   de l'autre côté du bâtiment. Et je pouvais voir Sarajevo, toute la ville,

 12   en permanence. Mais je n'ai pas des yeux dans le dos ou à l'arrière de ma

 13   tête, Monsieur le Président. La plupart des tirs que nous avons vus

 14   provenaient des collines situées au sud de Sarajevo, et visaient Sarajevo

 15   au fond de la vallée. Par conséquent, nous avons conclu que les tirs

 16   provenaient des quartiers tenus par les Serbes de Bosnie, parce que

 17   c'étaient les Serbes de Bosnie qui tenaient les collines du sud de

 18   Sarajevo, surplombant Sarajevo au sud, donc les tirs provenaient des lignes

 19   serbes.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ajouterais encore un point.

 22   Je ne prétends pas qu'il n'y a pas eu de tir en réplique, mais pratiquement

 23   tous les tirs que nous avons vus et auxquels nous avons assisté pendant

 24   toutes ces nuits visaient Sarajevo. Je veux dire, M. Karadzic évoque des

 25   quartiers à l'ouest de la ville que nous ne pouvions pas voir. On ne peut

 26   pas tout voir en même temps. C'est une ville qui s'étend sur une grande

 27   superficie, Sarajevo, il ne faut pas perdre ce point de vue.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci beaucoup.

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  1   Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  3   Ne vous méprenez pas, Monsieur. Je ne veux, en aucun cas, vous attaquer.

  4   Lorsque nous avons montré les reportages de Delic hier, ou plutôt, de

  5   Halilovic, qui évoquaient les succès remportés contre les Serbes, vous avez

  6   estimé qu'il exagérait un peu la situation, mais à la lecture du document

  7   que nous avons à l'écran maintenant, nous voyons qu'il n'exagérait pas.

  8   J'essaie simplement de vous le montrer, de vous montrer que les médias

  9   n'ont rien dit sur toutes ces questions. Donc l'opinion publique

 10   internationale risquait d'être mal informée. Nous n'avons pas été à

 11   l'origine des tirs. Les tirs provenaient d'eux, les premiers tirs, et nous

 12   nous sommes contentés de répliquer.

 13   Je demande le versement au dossier de ce document, en attente de

 14   traduction. Ah, il a déjà été traduit. Nous avons la traduction, Monsieur

 15   le Président, mais elle n'est pas dans le prétoire électronique.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas du tout quels sont les

 17   documents qui ont été vus par le témoin et par l'Accusation. Est-ce que ce

 18   document pourrait être transmis aux Juges de la Chambre ?

 19   Oui, Monsieur Nicholls.

 20    M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, toutes mes excuses.

 21   Je ne voulais pas soulever une objection pour ralentir la procédure, mais

 22   j'ai pensé que si le document n'était pas dans le prétoire électronique, on

 23   pourrait le montrer grâce au rétroprojecteur.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais je crains fort que ce soit un

 25   document confidentiel. Est-ce que vous avez le numéro 65 ter de l'original,

 26   Monsieur Karadzic ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D1231.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document n'est pas dans le prétoire

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  1   électronique. Mais vous dites que vous êtes en possession de l'original

  2   avec le même numéro ? Non, pas encore.

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  5   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, ce n'est

  6   pas une objection.

  7   Je voudrais simplement voir la traduction anglaise. Je l'ai vue de loin,

  8   mais je voudrais m'assurer que nous parlons de la même page.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document est admis, et il sera

 10   enregistré aux fins d'identification dans l'attente de la traduction.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour répondre à la question de M. Nicholls, je

 12   dirais que les traductions sont transmises par courriel.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous sommes en possession de la

 14   traduction intégrale, mais elle n'a pas été téléchargée dans le prétoire

 15   électronique, donc nous n'avons pas pu la voir.

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc la traduction actuelle est une

 18   traduction temporaire, elle sera donc enregistrée en tant que pièce MFI,

 19   aux fins d'identification, en attente de traduction définitive.

 20   Veuillez poursuivre.¸

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

 22   pièce D195 MFI, enregistrée aux fins d'identification.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   Je demande l'affichage du document 1D18. Je suis en possession de la

 25   traduction de ce document. 

 26   Ces quelques rapports n'existent qu'en anglais car nous ne possédions pas

 27   l'original de ces documents. Et je corrige le numéro du document dont je

 28   demande l'affichage. Il s'agit du document 1D1218. 1218, sur la 65 ter.

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  1   1D1218 sur les écrans, je vous prie. Voilà, c'est bien ce document. Il

  2   serait bon de l'agrandir. Bien.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Je vais en donner lecture en anglais, et on le voit sur les écrans,

  5   n'est-ce pas ?

  6   "Commandement de la 1ère Brigade de Romanija, strictement confidentiel, la

  7   date étant celle du 11 juin 1992.

  8   "Rapports de combat. Soumis au commandement du 4e Corps."

  9   Premier paragraphe :

 10   "L'ennemi :

 11   "Pendant la journée du 11 juin 1992, dans la région du pont de Vrbanja, des

 12   activités ont été constatées de la part de PAM, situé du côté gauche du

 13   parlement, de l'autre côté du pont de Vrbanja, dans le coin où les rues

 14   Gunduliceva et Branimira Cosica se rejoignent, et des actions ont également

 15   été constatées de la part de tireurs embusqués.

 16   "Dans la région où les rues Alekse Bojovica et Milorada Pejdalica se

 17   rejoignent, une importante concentration de Bérets verts a été remarquée,

 18   et il est permis de penser que le siège des Bérets verts se trouve là

 19   également. A 13 heures 30, j'ai été informé du fait qu'à partir de la

 20   région du Muzej Zemaljski, des actions ont été observées de la part de

 21   mortiers contre nos unités, et qu'à partir de la région du conseil

 22   exécutif, une action a été constatée, menée à l'aide de Zolja et d'Osa

 23   contre les positions des unités de la 1ère Brigade de Montagne. De l'autre

 24   côté de la Loris, un nid de mitrailleuses a été observé, et derrière les

 25   tours de couleur bleu numéro 1, 2 et 3. Des tireurs embusqués ont été

 26   observés entre les rues Ivana Krndelja et Milutina Turaskovic," et cetera,

 27   et cetera.

 28   Monsieur van Lynden, vous voyez qu'il est fait état de la journée du 11

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  1   juin. Eux s'étaient engagés à divers accords de cessez-le-feu et, en dépit

  2   de cela, vous voyez le nombre d'attaques subies par l'armée serbe et par

  3   Grbavica à partir de bâtiments situés au sud du Holiday Inn, entre le

  4   Holiday Inn et la rivière Miljetska, le musée Zemaljski, le bâtiment du

  5   gouvernement, les coins de rue résidentielles, et cetera, et cetera, le

  6   parlement, et cetera. Vous était-il vraiment impossible d'être informé de

  7   tout cela et de le faire savoir ?

  8   R.  Pour autant que je le sache, le 11 juin j'avais déjà quitté Sarajevo et

  9   me trouvais à Pale. Par conséquent, si j'aurais dû être informé de cette

 10   situation, c'est vous et votre gouvernement qui auriez dû porter cette

 11   situation à ma connaissance, mais vous ne l'avez pas fait. Aucune demande

 12   de se rendre sur le front n'a été satisfaite par vous, ou votre

 13   gouvernement ou votre armée.

 14   Finalement, à la lecture de ce document que je lis pour la première

 15   fois, je vois dans ce document une ligne qui revient de façon récurrente et

 16   qui évoque la présence de Bérets verts, mais ceci n'est que simple

 17   imagination de la part des Serbes. Je n'ai jamais vu des unités d'hommes

 18   portant des bérets verts circuler dans Sarajevo en juin 1992.

 19   Voilà tout ce que je peux dire.

 20   Q.  Mais Monsieur van Lynden, c'est cela qui était précisément la raison --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vous prie. M. le Juge

 22   Morrison a une question.

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Hier, vous avez dit, Monsieur van

 24   Lynden, que vous saviez que les forces présentes à Sarajevo disposaient de

 25   mortiers de 120 millimètres.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas en juin 1992. Vous avez dit je les ai vues

 27   en mars 1994. Je ne les ai personnellement jamais vus tirer, mais je les ai

 28   vus au centre de regroupement des armes des Nations Unies en mars 1994.

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  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] C'était justement ce que je voulais

  2   vous demander. Vous n'avez personnellement jamais vu ces armes tirées ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Parce qu'en tant qu'ex-spécialiste

  5   des mortiers, vous auriez probablement remarqué la présence de ces

  6   mortiers, n'est-ce pas ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je les connaissais, mais je ne les ai pas vus,

  8   et je dirais que c'étaient des mortiers que je qualifierais de petits,

  9   c'est-à-dire de 60, 80 ou 120 millimètres. Il y en avait sans doute

 10   quelques-uns du côté bosnien. L'action se menait à une distance

 11   relativement courte. C'étaient donc des armes utilisées sur le front même.

 12   Le calibre de 120 millimètres peut être utilisé pour tirer à plus grande

 13   distance. Comme je l'ai dit, je n'ai jamais vu ces armes tirées, et je n'ai

 14   pas non plus vu de telles armes tirées du côté bosnien. Le seul moment

 15   pendant toute la guerre de Bosnie-Herzégovine où j'ai vu ces unités et ces

 16   unités en train de tirer, c'était à Vukovar en 1991.

 17   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Est-ce que cela signifie, Monsieur van Lynden, que vous auriez dû avoir

 20   la capacité de voir les deux côtés en train de tirer ou se faire tirer

 21   dessus pour en rendre compte dans vos reportages, afin de dire qui était en

 22   train de tirer ? Donc, vous avez en fait vu les canons, les tubes de ces

 23   armes ? Est-ce que vous avez vu les tubes de ces armes serbes, ou est-ce

 24   que vous faisiez des déductions quant à l'endroit où elles pouvaient se

 25   trouver sur la base de l'azimut ou d'autres facteurs, est-ce qu'elles

 26   étaient de l'autre côté ou de ce côté, est-ce que les canons, après avoir

 27   tiré, avaient de la fumée qui sortait des tubes de façon à déterminer qui

 28   avait ouvert le feu ?

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  1   R.  Oui, j'ai vu que les tirs provenaient de vos positions et plus

  2   précisément des sommets des collines, les positions que le général Mladic

  3   devait me montrer en septembre 1992. A regarder les cartes, nous avons su à

  4   ce moment-là que c'était un secteur contrôlé par vos forces, et qu'à partir

  5   de là, des roquettes étaient tirées sur Sarajevo. Ça, nous l'avons vu

  6   clairement, nous l'avons filmé, et en réalité, quelques-uns de ces tirs ont

  7   été montrés dans les documents présentés hier dans ce prétoire. Ce que vous

  8   voyez dans ces cas-là, c'est où le projectile atterrit, dans quelle

  9   direction il va, car il laisse une trace. Il était clairement visible sur

 10   les images qui ont été montrées dans les vidéos aux Juges de la Chambre

 11   hier que tel était le cas. Ce que nous avons vu dans ces premiers jours de

 12   juin 1992, c'était que dans la plupart des cas, mais pas uniquement, dans

 13   la plupart des cas, il y avait concentration importante de tirs en

 14   direction de la ville de Sarajevo. Comme je l'ai déjà dit, on a pu voir que

 15   ces tirs provenaient des collines. Il y avait des traces de projectiles, de

 16   mitrailleuses lourdes, probablement de canons antiaériens, et on a vu les

 17   roquettes. On les voit, les roquettes. Nous les avons filmées, et ces

 18   projectiles venaient d'une seule et même direction et atterrissaient sur la

 19   ville. Par conséquent, nous en avons déduit quelle était l'origine des tirs

 20   et qui était à l'origine de ces tirs.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Pourrions-nous savoir ce que veut

 22   dire le mot Zolja et Osa, en termes d'armement, car je ne connais pas ces

 23   deux mots ? Monsieur Karadzic, pouvez-vous nous aider ?

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si je peux vous aider, il s'agit de lance-

 25   roquettes manuels, portables, que l'on tient à l'épaule.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'armes similaires aux RPG-7

 27   dans le langage occidental, si je ne me trompe.

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Cela fait longtemps que j'étais dans

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  1   l'armée. Nous utilisions à l'époque des mousquets.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'ouest, nous n'avons jamais utilisé des

  3   RPG-7. C'est une arme qui était développée par les Soviétiques, et je pense

  4   qu'elle a été reprise par l'industrie de l'armement yougoslave.

  5   M. KARADZIC : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Q.  Puisque nous parlons de cela, je demande l'affichage de la pièce P927

  7   du prétoire électronique afin de jeter rapidement un coup d'œil à ce

  8   rapport.

  9   En attendant l'apparition du texte sur les écrans, Monsieur van Lynden, il

 10   y a un point qui n'est pas tout à fait clair à mes yeux. A partir de

 11   l'hôpital militaire qui était impossible à voir, vous ne pouviez pas voir,

 12   n'est-ce pas, tout l'hôpital militaire, tout le secteur, et vous ne pouviez

 13   pas non plus voir la zone située devant l'hôpital militaire à partir de

 14   laquelle les tirs ont été ouverts sur Sarajevo. Puis deuxième point, quand

 15   vous dites que le 9 des roquettes ont atterri sur Sarajevo, est-ce que vous

 16   excluez la possibilité que les Serbes aient contrôlé certains secteurs,

 17   certains quartiers de Sarajevo; Nedzarici, Hrasno, Ilidza, Grbavica ? Quand

 18   vous dites que des roquettes tombaient sur Sarajevo, vous auriez dû

 19   préciser quels étaient les quartiers serbes et les quartiers musulmans de

 20   Sarajevo.

 21   R.  Monsieur Karadzic, encore une fois, vous posez plusieurs questions en

 22   même temps. Je vais essayer d'y répondre, à commencer par les dernières.

 23   J'ai simplement dit que les roquettes que nous avons filmées en train

 24   d'atterrir sur Sarajevo atterrissaient sur la partie de la ville qui était

 25   sous le contrôle du gouvernement bosnien. Ce n'était pas des quartiers

 26   musulmans, comme vous l'avez dit. Il n'y avait pas de quartiers serbes ou

 27   autres, simplement des quartiers où vivaient des Serbes et des quartiers où

 28   vivaient des Croates. Je n'ai pas vu, et nous n'avons pas filmé des

Page 2492

  1   roquettes en train de tomber sur les quartiers de Grbavica, Ilidza, Hrasno

  2   ou Nedzarici.

  3   Vous m'avez demandé si j'excluais la possibilité que les secteurs

  4   étaient contrôlés par les Serbes. Je n'ai jamais exclu aucune possibilité.

  5   En fait, même si c'était plus tard, à savoir en septembre 1992, puis encore

  6   en février 1994, pendant deux journées on m'a emmené dans certains de ces

  7   secteurs. Ce sont vos forces armées qui m'y ont emmené, et je n'ai jamais

  8   exclu la possibilité que des secteurs étaient tenus par les Serbes.

  9   Q.  Merci. Est-ce que je peux attirer votre attention sur l'image qui

 10   figure à l'affichage électronique.

 11   Est-ce qu'on peut mettre pour M. Van Lynden le bouton écran et image

 12   de l'affichage électronique. Vous n'avez pas la photo, n'est-ce pas ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Attendez, si, je pense j'ai la photo.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voudriez-vous que le témoin

 15   fasse ces annotations maintenant ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je voudrais lui demander de procéder

 17   à des marquages.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Van Lynden, partant de ce rapport dont on a donné lecture tout

 20   à l'heure, il est dit que les tirs provenaient du bâtiment du parlement.

 21   C'est au numéro 3, chez vous, n'est-ce pas ?

 22   R.  Exact.

 23   Q.  Merci. Est-ce que vous voyez où se trouve ce qu'ils ont appelé le

 24   conseil exécutif, c'est-à-dire le bâtiment du gouvernement, et est-ce que

 25   vous pouvez mettre un numéro suivant, qui serait donc le numéro 6. Le

 26   bâtiment du gouvernement de la Bosnie-Herzégovine, s'il vous plaît.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Auparavant, je pense qu'il nous faudrait

 28   utiliser un stylet de couleur bleue pour ce faire.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] En juin 1992, le seul bâtiment du gouvernement

  2   où je suis allé c'est celui de la présidence. Je pense que vous, vous

  3   faites allusion à un bâtiment auprès duquel je vais  apposer une flèche et

  4   le numéro 6, mais je ne suis jamais allé à l'intérieur de ce bâtiment.

  5   Pour ce qui est du Parlement, si je ne me trompe pas c'était sur la ligne

  6   de front. C'était une position de la ligne de front, ce bâtiment.

  7   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

  8   Q.  Vous avez bien marqué cela. C'est le conseil exécutif, c'est-à-dire le

  9   gouvernement de la République qui a été évacué à l'époque et qui a été

 10   utilisé, comme on peut le voir, pour des activités de combat.

 11   Est-ce que vous pouvez nous indiquer l'emplacement du musée national, qui

 12   est le musée principal et qui est mentionné ici comme étant un endroit à

 13   partir duquel il est tiré au mortier.

 14   R.  Vous dites que ce bâtiment a été utilisé pour mener des opérations de

 15   combat. Je ne suis pas au courant de cela.

 16   Peut-être dois-je signaler aux Juges de la Chambre que comme j'ai été

 17   basé dans le bâtiment indiqué par le chiffre 1, j'aurais eu beaucoup de mal

 18   à voir des tirs qui partaient de ce bâtiment, dont vous parlez, qui

 19   venaient vers nous.

 20   Quant à savoir quel est l'emplacement précis du musée, et soit dit en

 21   passant, je n'ai jamais visité ce musée - ce n'était pas ouvert au public à

 22   l'époque - à mon avis, ça doit se trouver du côté de l'endroit d'où est

 23   prise la photo en face du Holiday Inn, à peu près, grosso modo, ici, à

 24   l'endroit que j'indique par un trait bleu. Mais d'ici, il m'est impossible

 25   d'être précis.

 26   Puis, je dois vous dire, Madame et Messieurs les Juges, que si vous

 27   traversiez ce quartier, il fallait aller vite parce qu'on était exposé à

 28   des tirs. On ne s'arrêtait pas pour déambuler ni pour voir quel genre de

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  1   bâtiments il y avait, et je n'ai jamais non plus été emmené dans cet

  2   endroit par l'ABiH, d'où la possibilité d'être précis.

  3   Q.   Merci. Je pense que c'est encore un peu plus à gauche, juste en

  4   dessous de la pointe de la flèche du numéro "4." On voit un bel immeuble

  5   blanc. C'est là. Vous avez touché très près. J'aimerais que vous me placiez

  6   un numéro 7 à côté, s'il vous plaît.

  7   R.  [Le témoin s'exécute]

  8   Q.  Est-ce que vous pouvez ici vous souvenir de l'endroit ou de la

  9   direction que prend la rue qui va vers Vrbanja ? Là, où vous avez pensé que

 10   se trouvait le pont de Vrbanja, et ce, par rapport au bâtiment du parlement

 11   et du gouvernement ? C'est l'angle qui se trouve en bas à droite, n'est-ce

 12   pas ?

 13   R.  Vous voulez dire sur cette photo, non, on ne voit pas de pont sur cette

 14   photo.

 15   Q.  Mais je parle de la direction. Est-ce que vous pourriez nous dire dans

 16   quelle direction se trouvait le pont par rapport à la photo que nous avons

 17   ici ? Le pont de Vrbanja, c'est un peu en contrebas du cimetière juif.

 18   R.  Si c'est bien le cas, ça doit se trouver plus loin, plus à l'extérieur

 19   du côté droit de l'image, de la photo. De ce côté-ci, que j'indique par une

 20   flèche.

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez mettre un numéro 8 à cet endroit.

 22   R.  [Le témoin s'exécute]

 23   Q.  Vous voyez maintenant, Monsieur van Lynden, vous vous trouvez à

 24   l'hôpital militaire. Il y a des échanges de tirs. Toutes ces positions se

 25   trouvent au sud de l'hôtel Holiday Inn. De l'autre côté de la rivière, il y

 26   a Grbavica et le territoire serbe. La façon dont je comprends les choses,

 27   c'est si vous êtes en train d'informer les gens, vous auriez dû informer

 28   qui tire sur qui, ou au moins dire qu'il s'agit d'échange de tirs sans pour

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  1   autant qu'on sache qui tire sur qui. Parce que les impressions qui se

  2   dégageaient de vos reportages, c'étaient que les Serbes tiraient dans la

  3   ville et qu'ils tiraient depuis les collines. On va y revenir aux collines.

  4   Que pourriez-vous nous dire à ce sujet ? Comment avez-vous fait pour ne pas

  5   remarquer que devant vous, littéralement sous vos yeux, on était en train

  6   d'ouvrir le feu ?

  7   R.  Mais on a montré ces tirs. Mais je vous l'ai déjà expliqué, d'après ce

  8   que nous, nous étions en mesure de voir et de filmer, on peut dire que

  9   l'écrasante majorité des tirs venaient vers l'intérieur de la ville de

 10   Sarajevo, tenue par le gouvernement musulman de Bosnie.

 11   Je l'ai dit hier, et ceci a trait aux commentaires que je faisais à

 12   la caserne du maréchal Tito après son évacuation. Il y a eu des tirs très

 13   précis d'artillerie qui ont plu sur cette caserne après l'évacuation, et

 14   pour nous c'était là un signe du fait que vos observateurs d'artillerie

 15   avaient bien procédé au repérage des tirs et qu'il y avait eu des tirs

 16   soutenus d'artillerie à des fins militaires dirigés sur cette cible. On a

 17   supposé, sans aller à l'intérieur, que l'objectif c'était de détruire tout

 18   matériel militaire qui aurait été abandonné sur place par la JNA après ou

 19   pendant l'évacuation, ce qui rendait cette caserne une cible militaire

 20   parfaitement légitime.

 21   Pour ce qui est des autres tirs constatés dans la ville, c'étaient des tirs

 22   de nature tout à fait différente. Ce n'était pas des tirs soutenus

 23   d'artillerie dirigés sur un point précis. En général, c'est à cette fin

 24   qu'on utilise l'artillerie. Tirs qui auraient été suivis par un mouvement

 25   d'infanterie, non. Qu'est-ce qu'on avait ? On avait des tirs éparpillés sur

 26   toute la ville, d'où la difficulté de filmer. N'oubliez pas cela, Madame et

 27   Messieurs les Juges. On n'a vu qu'une infirme portion sur ces images de ce

 28   qui se passait dans toute la ville à l'époque. Ce n'était pas dirigé sur un

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  1   point précis. On n'a pas vu, par exemple, -- on vient de tracer une ligne

  2   de front, vous l'avez mentionnée, qui passe par le parlement, par le

  3   cimetière juif. On n'a pas vu de tirs dirigés précis sur ce point, parce

  4   que ça aurait été logique, parce que c'était une ligne militaire. Non, non,

  5   les tirs, ils pleuvaient sur toute la ville bien loin de la ligne de front,

  6   et c'est ce que nous avons montré dans nos reportages.

  7   Q.  Est-ce que vous saviez, Monsieur van Lynden, que Sarajevo, elle était

  8   truffée de cibles légitimes, et les forces musulmanes se sont servies de

  9   camions pour tirer vers nos positions et quitter les lieux ? Un témoin nous

 10   a expliqué, il a dit que c'était chose coutumière que de voir le mortier

 11   utilisé dans les combats urbains à partir d'un camion pour pouvoir

 12   facilement changer de position. Le saviez-vous cela ?

 13   R.  Je sais que ça s'est passé. Mais moi je n'ai pas vu de mes yeux un

 14   mortier embarqué sur un camion pendant ma présence à Sarajevo. Mais je

 15   pense, je crois connaître les conventions de Genève, je crois savoir qu'une

 16   force militaire doit être parfaitement convaincue que s'il y a des tirs de

 17   riposte sur une zone civile, au milieu d'une ville, qu'il faut être sûr

 18   qu'on prend pour cible une cible militaire. Si vous avez un camion avec

 19   quelques obus de mortier qui partent, effectivement, je le comprends, ça

 20   peut devenir une cible militaire. Mais moi, je n'ai pas vu ces camions, je

 21   sais qu'ils existaient. Je les ai vus à Beyrouth, mais pas à Sarajevo.

 22   Q.  Merci.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que cette carte -- ça a été déjà

 24   versé au dossier, mais j'aimerais qu'on la verse au dossier pour les

 25   annotations qui ont été ajoutées. Et je crois qu'on nous montre la carte

 26   qu'il a été convenu de montrer avec M. Harland, et c'est la carte en

 27   relief; le Procureur a cette carte. Elle existe dans le classeur qu'on m'a

 28   donné -- enfin il y a une cote récente depuis les marquages apposés par M.

Page 2497

  1   Harland.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous demandez le versement de cette

  3   photo annotée par M. van Lynden. Vous voulez le faire maintenant, ou est-ce

  4   que vous la supprimez ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, je ne veux pas supprimer. Je veux que ce

  6   soit versé au dossier. Et je veux qu'aussi on admette le 1218 --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais vous demander, Monsieur le

  8   Témoin, d'apposer votre signature ainsi que la date d'aujourd'hui à cette

  9   photo.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est quel jour aujourd'hui ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le 20 mai.

 12   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pièce est versée.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D196.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et vous ne vous y opposez pas, je

 16   suppose, Monsieur Nicholls, au versement du document 1D1218.

 17   M. NICHOLLS : [interprétation] Non. Mais peut-être n'ai-je pas bien suivi.

 18   Je ne sais pas pourquoi il n'y a pas l'original en B/C/S. M. Karadzic avait

 19   commencé à donner une explication, mais ça ne figurait pas au compte rendu.

 20   J'ai peut-être raté ce passage-là. Mais je ne vois pas clairement pourquoi

 21   nous n'avons pas l'original en B/C/S.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en est-il, Monsieur Karadzic ?

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans l'affaire Galic, on nous a donné les

 24   pièces à conviction mais on les a reçues ici seulement en version anglaise;

 25   et c'est de cela qu'il s'agit. Donc on n'a pas pu se procurer les orignaux.

 26   C'est ce qu'on nous a fourni depuis les dossiers de l'affaire Galic.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, vous voulez une cote

 28   provisoire pour identification, pour pouvoir examiner l'original ?

Page 2498

  1   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, je pense que si ça a été versé dans

  2   l'affaire Galic, on pourra trouver l'original. Notre commis n'a pas encore

  3   trouvé, mais je suis sûr qu'on va le trouver.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous nous en aviserez lorsque vous

  5   trouverez l'original.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une cote provisoire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D197 MFI.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais à ce qu'on nous montre cette

 10   carte-ci, mais dans la variante que nous avons coordonnée en nous

 11   concertant avec M. Harland. C'est le numéro 2 du classeur.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  En attendant qu'on nous le montre, je vais vous demander, Monsieur

 14   Harland, que des tirs viennent des collines en direction de la ville de

 15   Sarajevo. Il faut comprendre ainsi que vous êtes en train de dire que ce

 16   sont les Serbes qui sont en train de tirer sur la ville, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je ne suis pas M. Harland. Ça c'est une première chose.

 18   Q.  Je m'excuse. Je m'attendais à la carte à Harland et vous, vous êtes M.

 19   van Lynden. Excusez-moi. Je vais vous donner un coup de main.

 20   Partant de ce que vous avez dit dans vos reportages, à partir du

 21   moment où on tire depuis les collines dans la ville, ce sont forcément les

 22   Serbes qui tirent, n'est-ce pas ?

 23   R.  Lorsque nous avons vu ces tirs qui venaient des collines vers l'est et

 24   des collines vers le sud, ils devaient effectivement venir de positions

 25   serbes. C'est de ces tirs dont nous avons parlé et ce sont ceux-là que nous

 26   avons filmés. On pouvait voir les roquettes qui venaient de ces positions.

 27   C'étaient des positions commandées et utilisées par vos effectifs. Et je

 28   pense que c'est là que M. Mladic m'a emmené lorsqu'il m'a autorisé à

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  1   procéder à cette interview en septembre 1992.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, est-ce que vous avez

  3   la cote de cette carte numéro 2 du classeur ?

  4   M. NICHOLLS : [interprétation] Mais il n'y a pas eu d'accord, Monsieur le

  5   Président, s'agissant de la carte.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, je demande l'original sans

  7   annotation.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, on peut vous la fournir, cette carte.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans sa version initiale, sans

 10   annotation.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous la montrer, même s'il

 13   n'y a pas eu un ou deux points où on se serait mis d'accord, mais il y a là

 14   une carte où on a indiqué les collines.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, oui, on va pouvoir dénicher cette

 16   carte annotée par M. Harland, sans que nous nous prononcions sur la

 17   possibilité de la comprendre. Mais je ne me souviens pas de la cote.

 18   M. NICHOLLS : [interprétation] La photo ou la carte non annotée porte le

 19   numéro 11790. Je l'ai retrouvée.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et celle annotée par M. Harland ?

 21   M. NICHOLLS : [interprétation] Nous sommes toujours en train de vérifier,

 22   Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que ce serait utile que le

 24   témoin ait la carte. Moi, je peux lui montrer l'exemplaire que j'ai.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce 134, D134.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va essayer.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y en a une qui est encore meilleure que

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  1   celle-ci, mais essayons quand même.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur van Lynden, ici vous avez une vue de la vallée de Sarajevo.

  4   Est-ce que vous pouvez ici vous orienter ? Par exemple, est-ce que vous

  5   êtes à même de nous dire où se trouve l'hôpital militaire par rapport à ce

  6   que nous voyons sur cette carte ?

  7   R.  Pas vraiment, vu cette hauteur. Vous pourrez peut-être me demander où

  8   se trouve l'aéroport ? Là, je pourrais vous répondre. Vous voulez que

  9   j'annote l'emplacement de l'aéroport, on peut peut-être commencer par ça ?

 10   Q.  Soit. Mais alors utilisez une couleur rouge de préférence.

 11   R.  Est-ce que ça va marcher ? Ah, non, c'est vert ici. Ce stylet de

 12   couleur verte. Alors vous voulez que j'annote l'emplacement de l'aéroport

 13   par le numéro "1" ?

 14   Q.  Oui.

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Et --

 17   R.  Et puis vous voulez que j'indique où se trouve l'hôpital militaire, ce

 18   sera forcément approximatif. Vous voulez que je l'annote, cet emplacement ?

 19   Q.  Allez-y.

 20   R.  [Le témoin s'exécute]

 21   Q.  C'est à peu près cela. Est-ce que vous pouvez nous indiquer

 22   l'emplacement de Grbavica ?

 23   R.  [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Merci. Est-ce que vous savez où se trouve Nedzarici, cette cité serbe

 25   appelée Nedzarici ?

 26   Je vais vous aider. C'est tout à fait au nord, si l'on prend comme

 27   point de repère le numéro 1, et c'est à l'ouest de Dobrinja.

 28   R.  Oui, c'est ça. [Le témoin s'exécute]

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  1   Q.  C'est bien cela. Merci. Alors, est-ce que vous voyez cette partie entre

  2   le 4 et le 1, la cité de l'aéroport, qui est tenue par les Serbes en tant

  3   que partie intégrante de Dobrinja ?

  4   R.  Mais qui fait partie intégrante de Dobrinja, vous dites. C'est du côté

  5   du sud. Voici Dobrinja. A moins que vous ne fassiez allusion à cette zone-

  6   ci.

  7   Q.  C'est justement cela. Merci. Alors, je vais maintenant vous demander :

  8   Est-ce que vous voyez le Z avec le circonflexe inversé ? C'est bien le mont

  9   Zuc, où vous avez été, n'est-ce pas ?

 10   R.  A peu près. C'est vers le nord de la ville; au nord de la ville,

 11   effectivement.

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez mettre un numéro. Et précisez-nous,

 13   pendant que vous le faites, qui est-ce qui tenait Zuc sous son contrôle ?

 14   R.  [Le témoin s'exécute] Si je me souviens bien, en juin 1992, c'étaient

 15   vos forces qui avaient le contrôle de ce lieu, et il a été pris fin 1992

 16   par les forces de Bosnie.

 17   Q.  Merci. Alors, est-ce que vous voyez le H dans ce cercle qui se trouve à

 18   l'est du numéro 7, et de votre avis, est-ce bien le mont Hum, avec le

 19   relais radiotélévision et ce qu'on a vu dans les rapports ? C'est bien la

 20   colline Hum, cela, n'est-ce pas ?

 21   R.  Peut-être, mais je n'y suis jamais allé. Je ne sais pas.

 22   Q.  Mais on voit ce mont depuis tous les endroits possibles et imaginables

 23   à Sarajevo, n'est-ce pas ?

 24   R.  Il y avait des collines au nord de Sarajevo, mais y avait-il la colline

 25   Hum parmi celles-ci, là, je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas.

 26   Q.  Est-ce que vous vous souvenez du relais, c'était un signe de

 27   reconnaissance, on le voyait de partout à Sarajevo ? Et ce relais, il se

 28   trouvait à Hum.

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  1   R.  C'est ça, oui, oui. Oui, à peu près. Oui, oui, je vois très bien de

  2   quel bâtiment vous parlez, celui où il y avait le relais. Oui, oui,

  3   effectivement, il était visible. S'il était sur la colline Hum, alors oui,

  4   à ce moment-là, c'est à peu près là.

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez mettre un numéro 8 et nous dire qui est-ce qui

  6   avait gardé sous son contrôle le mont Hum pendant tout ce temps-là ?

  7   R.  [Le témoin s'exécute] Je pense que c'étaient les forces de Bosnie, mais

  8   jamais je n'ai été emmené sur ces lieux, donc je ne peux pas vous le dire

  9   parce que je l'aurais vu de mes propres yeux.

 10   Q.  Merci. Alors, est-ce que vous voyez là-haut le G, et est-ce que vous

 11   êtes d'accord avec moi pour dire qu'il s'agit du mont Grdonj, qui surplombe

 12   le nord-est et la vieille ville ? Est-ce que cela aussi était tenu sous

 13   contrôle musulman ?

 14   R.  Je le répète, je ne le sais pas parce que je n'y suis jamais allé.

 15   Q.  Mais si je vous dis que Grdonj, c'est la cote 901, et que pendant toute

 16   la durée de ce temps-là, c'étaient les Musulmans qui avaient exercé le

 17   contrôle à son égard ?

 18   R.  Je ne peux pas dire oui ou non, parce que je ne sais pas.

 19   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous voyez le J, tout à fait à l'est ?

 20   Est-ce que c'est la caserne appelée Jajce ? Ça, vous êtes censé le savoir,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Pourquoi est-ce que je suis censé le savoir ?

 23   Q.  Mais c'est un immeuble très reconnaissable, et puis en plus c'est un

 24   site militaire. Et puis là, il y avait des quantités d'armement

 25   considérables.

 26   R.  On ne m'a pas emmené dans cet édifice, je n'y ai pas vu d'armes. Mais à

 27   ma connaissance, effectivement, il s'y trouvait là une caserne.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez apposer un numéro 9. Comme Grdonj, vous ne

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  1   l'avez pas reconnu; donc on l'oublie.

  2   R.  [Le témoin s'exécute]

  3   Q.  Alors maintenant, nous allons passer aux collines qui se trouvent au

  4   sud. Est-ce que vous voyez ces lignes rouges et bleues ? Est-ce que vous

  5   savez nous indiquer le site appelé Colina Kapa ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Est-ce que vous savez où se trouve Bistrik Kula ?

  8   R.  Est-ce que c'est là qu'il y avait aussi une prison, à Kula ?

  9   Q.  Non, non. La prison, c'était à Lukavica. Ici, je parle des collines du

 10   versant sud. Donc, ce sont les pentes de Trebevic. Est-ce que vous savez

 11   nous dire où se trouve Debelo Brdo ?

 12   R.  Je me souviens du nom sans pouvoir le prononcer, mais je ne pourrais

 13   pas vous dire exactement quel était son emplacement. On appelait un lieu

 14   mont Trebevic, effectivement. C'est de cette façon-là qu'on l'appelait, cet

 15   endroit, cette colline au sud, mais je ne connais pas son nom précis. Non,

 16   et je me tromperais peut-être.

 17   Q.  Oui, vous avez raison. La montagne, c'est Trebevic, mais les différents

 18   monts, les différents pics de Trebevic, tout ce que vous appelez par

 19   Trebevic, oui, vous le faites à très juste titre, mais il y a plusieurs

 20   pics qui sont contrôlés par les Musulmans, et ces pics se trouvent plus

 21   près de la ville. Et ils se trouvent à être à une altitude entre 700 et 900

 22   mètres au-dessus du niveau de la mer. Est-ce que vous le saviez cela ?

 23   R.  Mais ils se trouvent au nord, n'est-ce pas, pas au sud. Et pendant mon

 24   audition, j'ai parlé des collines qui se trouvent au sud comme à l'est de

 25   la ville.

 26   Q.  Mais Grdonj, la caserne de Jajce et ces collines des flans de Trebevic,

 27   ça se trouve à l'est et au sud de la ville, n'est-ce pas ?

 28   R.  Trebevic, au fond, ça se trouve au sud. Grdonj, que vous venez

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  1   d'indiquer, que je ne connaissais pas, ça se trouve au nord par rapport à

  2   la ville. Quant à Jajce, disons que c'est plutôt vers l'est, mais tout en

  3   restant à une altitude assez faible, à proximité des rives de la rivière

  4   dans la vallée.

  5   Q.  Alors maintenant, nous avons toute une série de pics sur les flans nord

  6   de Trebevic. Ça se trouve au sud de la ville. C'est toute une série de pics

  7   contrôlés par la partie musulmane. Et il y a des canons, des mortiers et

  8   autres pièces d'artillerie. Alors, est-ce que vous excluez ceci comme

  9   possibilité ?

 10   R.  Vous parlez de quelles positions de l'ABiH à Trebevic ? Moi, je ne les

 11   connais pas, ces positions.

 12   Q.  Vous affirmez qu'à Trebevic, les Musulmans n'avaient rien du tout et

 13   que c'était tout contrôlé par les Serbes. C'est ce que vous dites ?

 14   R.  Si on suit la ligne rouge, on voit que les collines s'élèvent depuis

 15   là. Et ça, c'était du territoire tenu par les Serbes, si je ne m'abuse. Je

 16   sais que les Musulmans de Bosnie tenaient des collines au nord de Sarajevo,

 17   mais je n'ai pas connaissance de positions se trouvant dans les hauteurs

 18   qui auraient été tenues par l'ABiH sur le mont Trebevic, non.

 19   Q.  Merci, Monsieur van Lynden. Maintenant, les choses sont bien plus

 20   aisées pour moi. Je vois que vous n'étiez pas partial, mais vous étiez mal

 21   informé. Les effets catastrophiques pour nous sont les mêmes, mais je vois

 22   que ce n'était pas malintentionné de votre part.

 23   Alors, je vais vous dire, Monsieur van Lynden, quels sont les sommets tenus

 24   par les Musulmans du côté de Trebevic. Colina Kapa, 966 mètres d'altitude.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Vous dites que vous allez dire au

 27   témoin quelque chose. Ça ne sert pas à grand-chose, cela. Il vous faut

 28   d'abord établir l'existence des positions par des moyens de preuve. Ce que

Page 2505

  1   vous dites au témoin ne devient pas un élément de preuve, et dans la même

  2   veine la question que vous posez ne devient pas un élément de preuve, non

  3   plus, du dossier. Ce sont les réponses qui deviennent des éléments de

  4   preuve. Il faut que le témoin réponde. Il n'a pas à recevoir des

  5   informations de votre part.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux quand même être satisfait. Parce que le

  7   témoin a dit que du côté sud à Trebevic, les collines étaient tenues par

  8   les Serbes et que les tirs venant de là, c'étaient des tirs serbes. Or, il

  9   n'en est pas ainsi. Il y a eu plus de collines tenues par les Musulmans que

 10   par les Serbes.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, arrêtez de faire des

 12   discours. Posez une question au témoin.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous pensez que vous auriez dû être mis au courant du fait

 16   de savoir qui contrôlait Trebevic, puisque vous étiez censé être au courant

 17   de qui tenait quelle position ?

 18   R.  Dans une zone de guerre quelle qu'elle soit, les forces en présence ne

 19   vous disent jamais précisément où ses forces se trouvent, où ses lignes de

 20   front se trouvent. Ce sont vos forces qui m'ont emmené sur le mont

 21   Trebevic. Ce sont vos forces qui m'ont montré leurs positions qui se

 22   trouvaient sur les montagnes surplombant Sarajevo. Jamais vos forces ne

 23   m'ont dit ceci : Regardez, c'est là que se trouve l'ABiH; du coup, nous

 24   sommes en danger, ou on tire depuis ces positions établies sur le mont

 25   Trebevic. Jamais on ne nous a dit cela. Nous sommes souvent allés à la

 26   caserne de Lukavica, nous sommes souvent allés à Pale --

 27   Q.  Merci.

 28   R.  -- en passant par le mont Trebevic. Nous avons vu des positions qui y

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  1   se sont trouvées. On nous y a emmenés plus tard. Jamais, jamais au grand

  2   jamais, on ne m'a dit, tout du moins à moi, qu'il y avait des positions de

  3   l'ABiH à cet endroit-là.

  4   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez faire encore une annotation ? Est-ce que

  5   vous pouvez nous montrer sur cette carte où est-ce que Mladic vous a emmené

  6   voir ? Et ce serait le numéro 9 ou 10, je pense.

  7   R.  Je pense que ce serait le numéro 10. Mais je ne sais pas si on la voit,

  8   cette position, sur cette carte. Elle se situe à l'est par rapport à la

  9   ville. Manifestement, à l'intérieur de vos lignes, c'était au sommet d'une

 10   montagne, et de là on voyait toute la ville. Je vous fais une annotation

 11   approximative, et j'y ajoute le numéro 10.

 12   Q.  Merci. Oui, c'est Hresa. Est-ce que vous pourriez parapher, s'il vous

 13   plaît, pour que cette carte soit versée au dossier et pour qu'on aille de

 14   l'avant. La date aussi à côté de votre paraphe.

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit d'une carte annotée par le

 17   témoin qui est désormais versée au dossier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D198.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 20   Maintenant, je voudrais le 1219. C'est un document qui existe au

 21   prétoire électronique. Cette carte, on peut l'enlever.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  En attendant qu'on nous le montre, Monsieur van Lynden, veuillez nous

 24   dire quel est l'hôtel de Sarajevo, parce que vous avez dit hier qu'il y a

 25   des hôtels qui ont brûlé ? Quels sont les hôtels qui ont brûlé lorsque vous

 26   êtes arrivé au mois de juin ? Quels sont ces hôtels qui ont été mis à feu

 27   et qui ont brûlé ?

 28   R.  Je n'y suis pas descendu, pour une raison manifeste c'est parce que cet

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  1   hôtel -- je pense qu'il y avait un hôtel qui s'appelait l'hôtel Bristol,

  2   mais je n'en suis plus tout à fait sûr. Lorsque nous sommes entrés dans la

  3   ville, le correspondant de Sky News, Dan Damon, qui nous avait précédés à

  4   Sarajevo, nous avait dit qu'il n'était plus possible de descendre dans un

  5   hôtel de la ville. Lui, je crois qu'il avait occupé un appartement avec

  6   d'autres, tout simplement. Je crois que l'hôtel qui s'appelait Bristol, je

  7   ne me souviens plus, avait été incendié. Vous savez, ça s'est passé il y a

  8   18 ans, et moi, je ne suis pas allé parce qu'on m'avait dit qu'il avait été

  9   incendié. Donc à quoi, vous savez, c'était inutile, je le savais

 10   d'expérience.

 11   Q.  On va démontrer qu'il n'a pas été tout à fait ainsi. Mais on va voir

 12   d'abord un document. Le document est sur nos écrans. Il s'agit d'un

 13   "Rapport du 16 juin".

 14   Donc, le 14 juin, il y a un renforcement ou confirmation du cessez-le-feu,

 15   mais on dit maintenant le rapport de combat pour le commandement du corps :

 16   "L'ennemi, pendant la journée, a tiré depuis la direction de l'assemblée,

 17   de l'hôtel Bristol, de la place Pera Kosoric, et pendant la nuit il y a eu

 18   des tirs de positions de canons antiaériens tirés depuis l'assemblée, deux

 19   étages de l'immeuble ont été incendiés du côté droit de la rue Zagreb vers

 20   le pont de Vrbanja. Il y a eu intervention immédiate en urgence de nos

 21   forces qui ont réussi à localiser l'incendie."

 22   Vous voyez que cette nuit-là -- ou, plutôt, ce jour-là, il y a eu des tirs,

 23   et ils ont incendié un immeuble dans la rue de Zagreb, Grbavica, et c'est

 24   assez marquant. Est-ce que vous avez fait un reportage à ce sujet ?

 25   R.  Je vous l'ai déjà dit, je n'étais plus à Sarajevo à ce moment-là.

 26   J'étais à Pale.

 27   Q.  Oui, alors la page 11 du compte rendu d'hier dit que vous étiez à

 28   Sarajevo à ce moment-là. On peut vérifier.

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  1   R.  Non, je --

  2   Q.  Le Procureur vous a interrogé à ce sujet.

  3   R.  Non.

  4   Q.  Lors du récolement, vous nous avez dit que vous étiez resté à Sarajevo

  5   jusqu'en septembre à l'hôpital de Kosevo, puis à l'hôpital militaire, et

  6   ainsi de suite.

  7   R.  Je suis arrivé à Sarajevo fin mai, tout à fait à la fin du mois. Je ne

  8   sais plus exactement à quelle date je suis parti de Sarajevo. Mais au

  9   quotidien il fallait transporter nos cassettes à Ilidza, où venait les

 10   chercher le producteur de Pale. Puis nous rentrions en ville, il fallait

 11   donc franchir tous les jours la ligne de front, et c'est lui qui emmenait

 12   les cassettes à Pale pour qu'elles soient mises en forme et pour qu'il y

 13   ait transmission des images à Londres.

 14   Q.  Merci.

 15   R.  Vers le 7 ou 8 juin, peut-être le 9 juin, nous sommes allés en voiture

 16   à Ilidza, mais à ce moment-là le producteur ne parvenait plus à assurer la

 17   jonction avec nous, il a fallu prendre une décision. On s'est dit qu'il

 18   fallait envoyer nos reportages à Londres, et nous avons décidé d'aller

 19   nous-mêmes d'Ilidza, en passant par l'aéroport, en passant par la caserne

 20   de Lukavica, et Trebevic, pour aller à Pale. Nous sommes restés quelques

 21   jours. On nous a ramenés à Londres. On était rappelés à Londres. C'est

 22   seulement vers la fin du mois de juin que je suis revenu à Sarajevo.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Nous n'avons pas disposé de ce

 24   renseignement ni dans votre déclaration ni du fait des conversations qu'on

 25   a eues lors de votre récolement dans la prison.

 26   Alors, j'aimerais que ce document soit versé au dossier. De même ça vient

 27   de l'affaire Galic, mais nous n'avons que la version anglaise de ce

 28   document.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'on va faire la même chose de

  2   ce qu'on a fait auparavant ?

  3   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, mais apparemment maintenant notre

  4   commis a trouvé l'original de la pièce.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Vous avez la cote de l'original,

  6   Monsieur Nicholls ?

  7   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pièce est versée.

  9   M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne sais pas si c'était une pièce ou s'il

 10   y avait une cote à cette pièce, mais nous avons le texte original.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D199.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez.

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, maintenant j'ai la cote de

 14   l'affaire Galic. Je pense que c'était la pièce D241.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. C'est acté au dossier.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   Je voudrais qu'on nous montre le 1D01098. Ça nous en dira plus loin

 18   au sujet des hôtels.

 19   Oui. Il devrait y avoir une traduction de ce document aussi. Vous pouvez

 20   enlever la version en serbe. J'ai la version en serbe et je vais donner

 21   lecture à partir de la version en serbe.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Van Lynden, --

 24   L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils souhaiteraient avoir la

 25   version serbe.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Il s'agit d'un rapport daté du 20 avril 1992, il s'agit d'une note de

 28   service. A la date du 20 avril 1992, par information opérationnelle, nous

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  1   nous sommes procurés du renseignement au sujet des hôtels situés dans la

  2   ville de Sarajevo.

  3   "C'est ainsi qu'il s'avère que les membres des Bérets verts," que

  4   vous affirmez être le fruit de notre imagination, "à la date du 19 avril

  5   1992, ont fait irruption dans l'hôtel Europa et Stari Grad. Lorsqu'ils sont

  6   rentrés dans l'hôtel Europa, le directeur de l'hôtel, M. Ilija Macanovic, a

  7   eu dix minutes pour prendre tout le personnel du groupe ethnique serbe et

  8   quitter l'hôtel sous menace d'armes. D'après les informations non

  9   vérifiées, il y a à présent l'un des principaux QG des Bérets verts dans

 10   cet hôtel.

 11   "Nous nous sommes également procurés du renseignement disant qu'à la

 12   date du 19 avril 1992, les Bérets verts sont entrés dans l'hôtel Zagreb, à

 13   partir de quoi, sous la menace de leurs armes, ils ont chassé de là tous

 14   les employés du groupe ethnique serbe. Aux côtés des Serbes, les Musulmans

 15   ont quitté aussi l'hôtel parce qu'ils avaient redouté des attaques lancées

 16   en direction de l'hôtel."

 17   Alors, Monsieur Van Lynden, il n'y en a pas un seul avoir été brûlé

 18   d'hôtel. Ils ont tous été pris par les forces armées, oui ou non ?

 19   R.  Je n'étais pas à Sarajevo en avril 1992. Je n'ai pas été témoin de la

 20   prise de contrôle d'un hôtel par des forces armées. Le seul hôtel où je ne

 21   sois jamais allé à Sarajevo, sans y séjourner, sans y descendre, ça a été

 22   l'Intercontinental au cœur même de la ville. Je n'en ai pas vu d'autres. Je

 23   n'ai jamais séjourné dans un hôtel à Sarajevo. J'ai toujours séjourné à

 24   l'hôpital militaire, ou encore dans le bâtiment qu'on utilisait pour

 25   accueillir des personnalités. Je vous l'ai dit hier. Donc, je n'ai pas

 26   connaissance de ceci, mais j'ajouterais que jamais, par exemple, l'armée de

 27   Bosnie ne m'a jamais emmené pour une conversation, pour rencontrer un

 28   commandant, par exemple, dans un hôtel. Alors, je ne sais pas si jamais

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  1   j'ai fait un reportage sur la façon dont les hôtels de Sarajevo ont dû être

  2   fermés ou ils ont été incendiés.

  3   Q.  En page 16 du compte rendu d'hier, vous avez dit que vous n'étiez pas

  4   allé vers ces hôtels pour des raisons déterminées. Vous n'avez pas laissé

  5   planer de doute. Or, sans rancune, moi, je me dois d'être précis. Si on

  6   laisse dans les propos ou dans le compte rendu que les hôtels ont brûlé par

  7   la faute des Serbes, et que vous n'avez pas pu y aller et descendre là-bas,

  8   ça vous donne une image déterminée de Sarajevo. Maintenant, on voit que

  9   vous avez dit tout à fait autre chose, et la preuve est qu'il n'en a pas

 10   été ainsi. On a chassé les Serbes qui y travaillaient, et on s'est emparé

 11   de ces hôtels, et ça s'est passé à un mois avant votre arrivée, et ces

 12   hôtels ont été contrôlés par les Bérets verts. Ce n'est pas le fruit de

 13   notre imagination. C'étaient des gens qui tuaient réellement d'autres

 14   personnes. Ça, vous étiez censé le savoir, n'est-ce pas ?

 15   R.  Avant d'arriver à Sarajevo, on m'a dit qu'aucun hôtel n'était ouvert à

 16   Sarajevo. Les circonstances dans lesquelles ces hôtels avaient été fermés

 17   ou incendiés, c'était quelque chose que je n'avais pas à ma connaissance.

 18   Je vous l'ai indiqué hier. Je ne sais pas, puisque je n'étais pas là en

 19   avril 1992. Je ne sais pas s'il s'agit ici d'un document authentique ou

 20   pas. Sans doute est-ce un document rédigé par quelqu'un qui n'était pas à

 21   Sarajevo non plus, qui était plutôt à Ilidza. Je ne connais pas non plus la

 22   source de ces informations, dont l'auteur de ce document a bénéficié.

 23   Impossible de vous dire s'il s'agit ici d'une preuve ou pas.

 24   Pour revenir à la question des Bérets verts, jamais dans l'ABiH je n'ai

 25   rencontré quelqu'un qui se serait décrit comme étant un Béret vert. Plus

 26   tard, j'ai rencontré des gens qui disaient qu'ils étaient membres des

 27   Cygnes noirs, ou de Tigres, mais je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui se

 28   serait dit être un Béret vert. Je sais qu'à Pale il y avait des soldats

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  1   serbes de Bosnie qui disaient de leur adversaire que c'étaient des Bérets

  2   verts. Ce que je veux dire c'est que jamais je n'ai vu un béret vert sur la

  3   tête de quelqu'un appartenant à une unité, ni rencontrer quelqu'un qui se

  4   serait dit être un Béret vert.

  5   Q.  Mais est-ce que vous voulez bien croire Rasim Delic et Sefer Halilovic

  6   lorsque eux présentent des rapports et disent de quelles forces ils

  7   disposent et, entre autres, ils parlent de tel et tel nombre de Bérets

  8   verts. Ça ne veut pas dire qu'ils portent tous des bérets verts, mais ils

  9   sont appelés ainsi en tant que formation, n'est-ce pas ?

 10   R.  Ni M. Delic ni M. Halilovic ne m'ont jamais parlé de Bérets verts dans

 11   les conversations que j'ai eues avec l'un comme avec l'autre. Je n'ai pas

 12   vu ces documents avant de les voir hier, la première fois ici à l'audience,

 13   lorsque vous les avez montrés aux Juges.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document, il a été procuré par le bureau du

 15   Procureur, et c'est un document des services secrets. Ils ne vont pas dire

 16   qui est-ce qui est venu de la ville pour leur dire ce qui s'est passé à

 17   l'intérieur.

 18   Est-ce qu'on peut faire verser au dossier ce document, s'il vous plaît.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 20   M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 21   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce D200, est-ce cela,

 25   Monsieur le Greffier ?

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous n'avons plus de temps ? C'est

 28   l'heure de la pause, n'est-ce pas ? Si on a encore le temps, volontiers.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le moment se prête peut-être à une pause

  2   de 25 minutes.

  3   --- L'audience est suspendue à 15 heures 33.

  4   --- L'audience est reprise à 16 heures 03.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons bientôt recommencer, mais

  6   Maître Harvey, je pense que je ne vous ai pas donné l'occasion de présenter

  7   le membre de votre équipe aux Juges.

  8   M. HARVEY : [interprétation] Je pensais l'avoir déjà fait auparavant, mais

  9   si je l'ai omis, je m'en excuse, et je m'en excuse aussi après de M. Eric

 10   Tully, qui est notre commis.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi. Merci.

 12   Poursuivez, Monsieur Karadzic.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   Je voudrais qu'on nous montre dans le prétoire électronique le 1220,

 15   s'il vous plaît. Alors, quelques documents que nous montrerons brièvement

 16   et de façon rapide pour compléter l'image de ce qui se passait là-bas. Une

 17   fois de plus, ça vient de l'affaire Galic, si je ne me trompe. Alors, vous

 18   l'avez sous les yeux, et je vais donner lecture en langue anglaise.

 19   "13 juillet 1992, rapport de combat régulier envoyé au commandement du

 20   Corps Sarajevo-Romanija.

 21   "Pendant la journée, à certains moments de cette journée, l'ennemi a

 22   effectué des missions de reconnaissance concernant nos forces, en petits

 23   groupes, et ces petits groupes ont ouvert des tirs de tireurs embusqués des

 24   zones de la faculté de génie mécanique et du Parlement et de l'hôtel

 25   Bristol. Nous avons constaté qu'il y avait une plus grosse concentration

 26   des forces ennemies dans les locaux de l'école technique, dans le sous-sol

 27   de la caserne du maréchal Tito. Des transporteurs ennemis et des chars

 28   ennemis ont été observés dans la zone de Velesici, à proximité du tunnel,

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  1   et au-dessus du poste de police, trois transporteurs ont été positionnés en

  2   même temps que deux Pinzgauer."

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Donc, Monsieur van Lynden, on voit ici un rapport où l'on voit

  5   que ce n'est pas le feu qui prédomine, mais c'est les activités de leur

  6   part qui prédominent. Et on voit de quoi ils disposent. Alors, est-ce que

  7   vous êtes bien d'accord avec ce qui est dit ici, ou plutôt, est-ce que vous

  8   voyez bien qu'à Velisici, il y avait un blindé de transport de troupes, un

  9   char et ainsi de suite ?

 10   R.  Je le vois dans le document. Il est question de transporteurs des

 11   forces ennemies, donc je suppose qu'il s'agit de transporteurs de camions

 12   ou de chars, je ne sais pas. Et on fait état aussi de chars, mais

 13   impossible de vérifier s'il s'agit ici d'information exacte ou pas. Je n'ai

 14   pas vu tout cela. Enfin, j'ai fait de mon mieux, mais j'étais à Sarajevo ce

 15   jour-là, le 13 juillet 1992. Pourtant, je n'ai rien vu de tout ceci et, en

 16   plus, à ma connaissance, il s'agit ici d'un document établi par votre armée

 17   à vous. Ce n'est pas un document qu'aurait produit une entité extérieure,

 18   par exemple, les forces des Nations Unies.

 19   Q.  Mais Monsieur van Lynden, ça, c'est un secret militaire, c'est

 20   strictement confidentiel. Le commandement d'une brigade informe le

 21   commandement du corps. C'est un document, on ne peut plus original. Il n'y

 22   a pas d'exagération. Il ne mentionne pas que les tirs de tireurs embusqués,

 23   mais il y a aussi les autres mouvements. Donc, les Serbes devaient avoir

 24   là-bas Christiane Amanpour pour qu'on leur fasse confiance.

 25   Je voudrais que ce document soit versé au dossier.

 26   R.  M'autorisez-vous à faire un commentaire suite à ce commentaire ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous tendez la perche au témoin,

 28   vous l'invitez à un commentaire. Arrêtez de faire des commentaires,

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  1   Monsieur Karadzic.

  2   Oui, Monsieur le Témoin.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] A ma connaissance, il faudrait que des experts

  4   se prononcent sur l'authenticité du document. Je n'en suis pas un.

  5   Impossible, par conséquent, de savoir s'il s'agit ici d'un document

  6   authentique ou pas.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Une fois de plus, Monsieur le Président, je

  9   ne sais pas trop pourquoi on n'a qu'une traduction partielle dont on

 10   demande le versement, parce que notre commis a trouvé une traduction

 11   complète du document; or, il en manque ici les paragraphes 2 et 3. Le 3 dit

 12   que la situation sur le territoire de la zone de responsabilité n'a pas

 13   changé et que les unités contrôlent parfaitement la zone. Au paragraphe 5,

 14   on dit que le moral des troupes est bon, qu'il n'y a pas eu de changement

 15   majeur. Paragraphe 6, il est question d'absence de difficultés d'ordre

 16   logistique. Paragraphe 2, il parle de tirs du Corps de Romanija dirigés sur

 17   le côté musulman de Bosnie.

 18   Pas d'objection au versement du document, mais il faut qu'il soit versé

 19   dans son intégralité.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous l'avez dans son intégralité ?

 21   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et quelle en est la cote ?

 23   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est un autre document de la Défense Galic.

 24   Ce n'est pas devenu une pièce. Nous avons un numéro ERN, c'est tout. M.

 25   Reid, notre commis, a pu le trouver.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons accorder une cote

 27   provisoire, en attendant d'avoir la copie complète.

 28   M. NICHOLLS : [interprétation] J'en fournirai copie. Je ne sais pas s'il y

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  1   a eu des modifications apportées par M. Karadzic ici, mais apparemment, il

  2   n'y a pas de numéro ERN. Or, dans la traduction que moi j'ai, il y a un

  3   numéro ERN. Je suis donc perplexe.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous êtes d'accord avec ce

  5   que propose M. Nicholls ? Si c'est O.K., on versera le tout.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] La Défense ne s'y oppose pas, mais ce n'est pas

  7   nous qui avons réduit le document à cela. Ça a été présenté dans l'affaire

  8   Galic de la sorte pour des raisons d'économicité, j'imagine, pour ne pas

  9   surcharger, surplomber le dossier. Donc ils ont pris juste les points 1 à

 10   4. Mais nous n'avons aucune objection pour ce qui est du versement du

 11   document en entier.

 12   Je voudrais maintenant qu'on nous montre le 1D1221.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document 1220 est versé. Avec quelle

 14   cote, Monsieur le Greffier ?

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote D201.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce qui est très possible, c'est que ce document

 18   aussi ait été versé au dossier dans sa version réduite, mais ce n'est pas

 19   par nos soins. C'est l'affaire Galic qui a fait de la sorte.

 20   Alors, on dit : "Le 19 juillet à 17 heures --" Je vais donner lecture de la

 21   version anglaise.

 22   "Rapport de combat régulier envoyé au commandement du Corps de Sarajevo-

 23   Romanija.

 24   "Pendant la journée, il y a eu intensification des activités de tirs

 25   embusqués de l'ennemi, surtout à partir des lieux suivants : la place Para

 26   Kosoric, l'hôtel Bristol, l'entreprise Eletropriveda, Socijalno [phon], la

 27   faculté de génie mécanique, la fabrique de tabac, de l'assemblée et aussi

 28   du pont de Vrbanja. Il y a eu des tirs au mortier sur la zone de défense de

Page 2518

  1   la 2e Brigade d'infanterie, autour du pont de Vrbanja et de Grbavica II,

  2   qui se sont intensifiés. On a observé un regroupement des forces ennemies

  3   dans les zones d'où venaient ces tirs de tireurs embusqués. On a tiré des

  4   grenades venant de fusils et aussi à l'arme d'infanterie depuis Sirokaca

  5   sur la caserne Bosut."

  6   Si quelqu'un a amenuisé ce document - c'est probablement le cas, parce

  7   qu'on ne voit que le numéro 1, ici - alors on peut le verser en entier,

  8   mais cela a été effectué dans l'affaire Galic, pas par nous.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Alors, est-ce que vous voyez que ces activités déployées à la date du

 11   19 juillet se présentaient telles quelles, Monsieur van Lynden ? Etiez-vous

 12   conscient du fait que la partie bosnienne, la partie musulmane était si

 13   active que cela ?

 14   R.  Ce que je sais, c'est qu'il y a des tirs qui sont venus de positions de

 15   l'ABiH, et ceci, pendant toute la durée de la guerre, sauf pendant la zone

 16   de cessez-le-feu en mars 1994. Effectivement, ils ont tiré. Est-ce que je

 17   connais cet incident-ci dont il est question dans ce document ? Je vous

 18   réponds que non.

 19   Q.  Est-ce que vous étiez au courant du fait que ces sites civils nombreux,

 20   écoles, usines, l'institut de l'assistance sociale, c'était un

 21   établissement de l'Etat, donc c'était utilisé comme installations

 22   militaires, et c'est à partir de là qu'on ouvrait le feu eu direction des

 23   banlieues et quartiers serbes et positions serbes ?

 24   R.  Oui, effectivement, j'étais au courant du fait que -- sans avoir été

 25   emmené à ces endroits, mais je savais qu'il était probable qu'il y avait à

 26   la faculté de génie mécanique des positions de l'ABiH. Vous voyez, je ne me

 27   suis pas trompé pour ce qui est de l'hôtel Bristol; j'avais bien retrouvé

 28   ce nom mais, je n'y suis pas allé non plus, et je pense qu'il avait déjà

Page 2519

  1   été incendié. Pour ce qui est de l'assemblée, je suppose qu'on parle des

  2   locaux du parlement. Et là, nous savions qu'il y avait sans doute des

  3   positions de l'ABiH au parlement.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut verser au dossier ce

  6   document, je vous prie.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avec une cote provisoire éventuellement

  8   dans l'attente du document complet ou la traduction complète ?

  9   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je pense que

 10   c'est nécessaire. Il faut voir le contexte pour voir s'il y a vraiment un

 11   lien aussi entre ce que sait le témoin et ce texte qui est assez réduit à

 12   sa portion congrue. Est-ce que ce document ne montre que les actions des

 13   forces ennemies ou autre chose ? Il faudra le voir.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D202 MFI.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   Je voudrais maintenant le 65 ter 11557. C'est une cote d'un document

 18   de l'Accusation.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  En attendant qu'on nous le montre, Monsieur van Lynden, je tiens à vous

 21   rappeler qu'il s'agit d'un reportage de vous, émanant de vous, daté du 15

 22   septembre 1992, et ça se rapporte à Otes. Là, on voit en première ligne van

 23   Lynden, et il est dit, en version anglaise :

 24   "Otes brûle. Quatre jours après le déclenchement par les Serbes de leur

 25   offensive, les faubourgs de l'ouest de Sarajevo tombent aux mains des

 26   Serbes."

 27   C'est ainsi que vous avez rapporté de la chose, n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est vrai.

Page 2520

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  2   Je voudrais maintenant que ceci soit versé au dossier, et qu'on nous montre

  3   maintenant -- Ah, non, c'est déjà versé au dossier comme pièce à conviction

  4   de l'Accusation, n'est-ce pas ?

  5   Qu'on nous montre donc le 01194 maintenant, pour déterminer ensemble,

  6   Monsieur van Lynden, ce qui s'est véritablement passé. 1D01194, maintenant,

  7   donc que nous déterminions ce qui s'est véritablement passé au sujet de

  8   Otes.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Auparavant, je voudrais la cote de ce

 10   document.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P937.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] P937.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Il devrait y avoir une traduction de

 14   ceci. Oui, on l'a. On a les deux versions maintenant. Qu'on les garde

 15   toutes les deux.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  C'est daté du 1er décembre, et votre reportage c'est du 5 décembre.

 18   Alors ça, c'est du 1er décembre. Il s'agit d'un "rapport de combat

 19   régulier", avec un relevé de situation à 18 heures, communiqué par le

 20   commandement du Corps Romanija-Sarajevo à l'attention de l'état-major

 21   principal de l'armée de la Republika Srpska.

 22   Paragraphe 1 :

 23   "L'ennemi, pendant les heures de l'après-midi, a continué à attaquer en

 24   puissance vers le secteur, au sens large du terme, d'Ilidza et Rajlovac.

 25   Depuis le secteur d'Igman et le village de Kovaci, l'ennemi a tiré à

 26   l'artillerie de façon intense, et depuis la localité d'Otes par des tirs

 27   d'artillerie en direction d'Ilidza. Sur le secteur Sokolje centre de

 28   distribution, avec un appui de l'artillerie de l'ennemi, Sokolje a attaqué

Page 2521

  1   à l'infanterie sans succès dans le secteur de Rajlovac.

  2   "Les unités de la Brigade d'Ilidza ont riposté à l'attaque de l'ennemi et

  3   dans une contre-attaque ont réussi à maîtriser la ligne Azici-Nedzarici, et

  4   s'emparer du centre Otes.

  5   "Il y a eu continuation des combats dans l'objectif de maîtriser Otes à

  6   titre définitif et de faire une jonction de force sur l'axe Tupska [phon],

  7   Brijeska [phon], et Bresko Brdo [phon]."

  8   Alors, Monsieur van Lynden, est-ce que nous sommes bien d'accord pour dire

  9   qu'il s'agissait d'une contre-offensive serbe alors que l'offensive, elle,

 10   avait été lancée par les Musulmans ?

 11   R.  Ce n'est pas comme ça que j'avais compris les choses à l'époque. Nous

 12   sommes allés voir les Nations Unies, et ce que nous avons rapporté s'est

 13   fondé sur ce que les Nations Unies ont dit.

 14   J'ajouterais pour les Juges que moi, je n'ai pas été à Otes, mais les

 15   informations dont nous avons rendu compte provenaient des Nations Unies. Je

 16   ne dirais rien de plus.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. On y viendra aussi.

 18   Est-ce qu'on peut verser ce document au dossier, je vous prie, et qu'on

 19   nous montre le 0195 maintenant. 01195, correction.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, à moins qu'il n'y ait une objection

 21   de l'Accusation, ce document 1D1194 sera versé au dossier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D203, Monsieur le

 23   Président.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant qu'on nous montre le

 25   1D1195. Alors, ça y est.

 26   On voit la date du 5, c'est la date où vous envoyez votre reportage. Le

 27   commandement du Corps Romanija-Sarajevo, la date est du 5 décembre 1992,

 28   rapport de combat régulier, à l'attention de l'état-major principal de la

Page 2522

  1   VRS.

  2   Alors premièrement :

  3   "L'ennemi a déployé les activités suivantes :

  4   "A 8 heures, ils ont tiré à l'artillerie sur le secteur Orlic-Smiljevici-

  5   Mijatovic, avec 50 obus en tirant ou en s'attaquant à l'infanterie en même

  6   temps vers le secteur Skravnik."

  7   Je pense que les interprètes me ralentissent, mais sur l'écran il y a une

  8   traduction.

  9   "Vers 11 heures il y a eu tentative d'une attaque à l'infanterie vers

 10   Hadzici.

 11   "A 11 heures 35…" - donc c'est tout à fait précis - "A 11 heures 35, depuis

 12   le secteur de la colline de Brijesce, avec des obusiers de 122-millimètres,

 13   ils ont tiré en direction du secteur de Vogosca et d'Ilidza quelque 30

 14   obus.

 15   "A 12 heures 15 minutes, une nouvelle attaque a été lancée en direction

 16   d'Orlic, avec utilisation de poisons de combat projetés par obus

 17   d'artillerie.

 18   "Depuis le secteur de Kovac, il y a eu tirs au mortier et à l'arme

 19   d'infanterie en direction de Vojkovici."

 20   Et deuxièmement :

 21   "La Brigade d'Ilidza, en coopération avec la Brigade d'Igman, a conduit

 22   avec succès des activités à Otes."

 23   Alors, un à un, plusieurs questions pour vous; plusieurs points pour vous.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Est-ce que vous avez véritablement omis de constater que 50 obus ont

 26   été tirés d'Orlic, et 30 en direction d'Ilidza à 11 heures 35 ? Et est-ce

 27   que c'est là une information de premier ordre, une information

 28   sensationnelle, si vous aviez pu informer qu'on était en train de tirer

Page 2523

  1   vers nos positions avec des poisons de combat ?

  2   R.  Est-ce qu'on ne s'en est pas rendu compte ? Non, non, on a fait un

  3   reportage sur des activités de combat. Mais vous savez, quand on est sur un

  4   immeuble on ne peut pas faire le décompte des obus qui passent, on n'est

  5   pas une organisation internationale. Il y a un reporter, il y a un

  6   cameraman et un producteur. On a fait ce qu'on pouvait de mieux pendant la

  7   journée. Dans l'après-midi, on allait vers la chaîne de télévision, et vous

  8   avez vu ces images hier après-midi. Nous savions qu'il y avait des tirs

  9   dans plusieurs quartiers de la ville. Là où nous étions, il nous a été

 10   impossible de voir s'il y avait des obus qui tombaient sur Olevci [phon],

 11   mais c'est certain qu'il y avait des combats en cours. Pour répondre à la

 12   première chose.

 13   Pour ce qui est des armes chimiques, les produits toxiques, c'est la

 14   première fois que j'entends parler de l'utilisation d'armes chimiques, et

 15   ça me ramène à la question que je vous ai déjà posée. Si vous le saviez à

 16   l'époque, ceci, pourquoi est-ce que vous n'avez pas demandé à des

 17   journalistes occidentaux de venir sur les lieux pour le voir ? Mais ça ne

 18   s'est jamais passé. On a posé la question, on n'a jamais reçu sur le plan

 19   de l'information. On ne nous a jamais emmenés dans cet endroit. C'est la

 20   première fois que j'entends parler de ce genre de chose. Jamais ce n'était

 21   mentionné pendant la guerre en Bosnie.

 22   Q.  Merci. Je reconnais que nous n'avons pas été très habiles pour ce qui

 23   est de la guerre médiatique, et on n'en a pas eu de guerre médiatique du

 24   tout d'ailleurs, mais on avait pensé qu'on en informerait qui de droit

 25   comme on informait ce qui se passait pour ce qui est de la partie adverse.

 26   Mais quand vous informez, vous dites Otes brûle, quatre jours après le

 27   début de l'offensive serbe. Alors en quelque sorte, tous vos reportages, et

 28   reportages de bon nombre de vos collègues, ne laissent planer aucune espèce

Page 2524

  1   de doute pour dire que ce sont les Serbes qui ont commencé, que ce sont les

  2   Serbes qui sont coupables, et que ça brûle parce que les Serbes ont mis le

  3   feu. C'est mon observation. Donc était-ce par manque d'information ou est-

  4   ce que parce que vous étiez mal intentionné ou est-ce que le rédacteur a

  5   corrigé les choses pour présenter les éléments ainsi ? Mais toujours est-il

  6   que cela s'est fait à notre détriment, ça nous apportait préjudice.

  7   R.  Vu les circonstances difficiles qui prévalaient en situation de guerre,

  8   nous avons fait de notre mieux dans nos reportages. Toujours nous avons

  9   essayé de vérifier les informations que nous obtenions auprès des Nations

 10   Unies, à l'extérieur. Nous avons bien compris que les informations que nous

 11   donnait le gouvernement de Bosnie pouvaient être entachées de partialité,

 12   comme pouvaient l'être les vôtres. Nous avons fait de notre mieux, alors

 13   que nous étions face à des situations très difficiles, à une ville très

 14   dangereuse. C'est tout ce que je peux vous dire à ce propos. 

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut verser ce document au

 17   dossier, s'il vous plaît ? Et j'aimerais qu'on nous montre le suivant, qui

 18   est un film qui nous montrera comment les Italiens s'étaient débrouillés

 19   dans les mêmes circonstances que vous, et quelles sont les choses dont ils

 20   ont informé, eux.

 21   Est-ce qu'on peut d'abord procéder au versement du document

 22   précédent, s'il vous plaît ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce D204.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que la transcription de ce qui est

 26   dit dans le film soit distribué au témoin et aux autres.

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils souhaiteraient aussi avoir

 28   une transcription. Ils l'ont peut-être reçue, semble-t-il.

Page 2525

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce film nous montre les mêmes événements. Ça

  2   parle de la même période. Il y a une transcription. On entendra de

  3   l'italien, mais il y a le sous-titre qui est en serbe.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Si vous

  5   avez la transcription, il faudra la donner aussi aux Juges.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je croyais que vous l'aviez déjà reçue. C'était

  7   censé être remis aux Juges déjà.

  8   L'INTERPRÈTE : [hors micro]

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut mettre sur le rétroprojecteur la

 10   transcription.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas si on peut voir deux

 12   choses simultanément.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà mon exemplaire à moi.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis sûr que Mme le Juge Lattanzi

 15   n'aura aucune difficulté à comprendre ce qui va se dire.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 18   "Sarajevo est sur le choc. Otes est tombé dans les mains des Serbes après

 19   l'attaque. Aujourd'hui, notre équipe de télévision s'est trouvée entre deux

 20   tirs. Elle a essayé de s'en tirer. Le technicien nous a parlé par ligne

 21   téléphonique directe, M. Eno Moreni [phon].

 22   "D'abord, comment ça se passe Canavicco ?

 23    "Canavicco a été touché par des tirs de mitrailleuse, par le côté gauche.

 24   Il a été touché au bras gauche et il a reçu une assistance et nous nous

 25   efforçons maintenant d'arriver à Split.

 26   "Où est-ce que vous vous trouvez maintenant ? Vous n'êtes pas à Sarajevo ?

 27   "Non, nous sommes à l'extérieur de la zone contrôlée par les Serbes.

 28   "Pouvez-vous nous décrire la situation ces jours-ci à Sarajevo ?

Page 2526

  1   "C'est assez dramatique. Nous avons essayé de parvenir jusqu'à Otes. Nous

  2   avons quitté la zone serbe pour arriver à Sarajevo, et nous nous sommes

  3   trouvés en plein milieu d'un vrai combat âpre. Notre véhicule a essuyé des

  4   tirs. Il y a eu moins dix balles qui nous ont touchés. On nous a percé la

  5   coque. Nous avons eu de la chance, compte tenu de tout ce qui se passait

  6   autour. Il n'y a eu qu'un membre de notre équipe qui a été blessé."

  7   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord, Monsieur van Lynden, pour dire que le

 11   reporter italien est en train de parler de combat âpre qui se produit à

 12   Otes ? On a vu que les Musulmans ont lancé l'offensive et les Serbes ont

 13   riposté par une contre offensive.

 14   R.  D'après le document que vous avez aviez montré auparavant, c'est ça,

 15   mais je n'ai vu aucune autre preuve que c'étaient bien les Musulmans qui

 16   avaient lancé l'attaque au départ. Ce reportage du correspondant italien ne

 17   le dit pas non plus, d'ailleurs.

 18   Franchement, je ne sais pas qui a commencé cet engagement particulier à

 19   Otes en décembre 1992. Il y a eu des combats intenses. Nous en avons parlé

 20   dans le reportage, et nous avons dit aussi que c'était tombé aux mains,

 21   sous le contrôle des forces serbes de Bosnie, ce qui semble être exact.

 22   D'après la façon dont je comprends les choses, les journalistes italiens

 23   étaient plutôt du côté que vous occupiez, sur la ligne de front. Ils

 24   essayaient de parvenir à Sarajevo. Je ne sais pas exactement où ils se

 25   trouvaient, ces journalistes, mais apparemment ils sont pris entre deux

 26   feux, en plein milieu d'une bataille au moment où le producteur est blessé

 27   au bras par balle. Je suppose qu'ici la balle aurait pu venir d'un côté ou

 28   de l'autre. C'est tout ce que je comprends.

Page 2527

  1   Q.  Oui, mais dans votre reportage qu'on a montré, il est dit qu'Otes est

  2   tombé entre les mains des Serbes quatre jours après que les Serbes ont

  3   entamé une offensive. Or, ça nous porte préjudice, parce que ce n'est pas

  4   vrai.

  5   R.  Mais nous avons fait ce reportage partant des informations fournies par

  6   la FORPRONU se trouvant à Sarajevo à l'époque. C'était la source

  7   d'information indépendante que nous avions à l'époque, à notre disposition

  8   à Sarajevo.

  9   Q.  Mais est-ce que vous pouvez être un peu plus concret. Qui est-ce qui

 10   vous a informé de la sorte ?

 11   R.  Je ne sais plus exactement qui c'était, mais on allait au QG de la

 12   FORPRONU pour parler à un des porte-parole. Mais cette fois-là, il se peut

 13   que nous ayons parlé à un officier militaire. Je ne me souviens pas, parce

 14   que nous avons passé deux mois là-bas, vous savez. Alors, vous me demandez

 15   maintenant de me souvenir de chacune des conversations 18 ans après les

 16   faits, je suis désolé, je n'en ai plus un souvenir précis. Mais je me

 17   souviens que nous sommes allés voir la FORPRONU, parce que nous le faisions

 18   quotidiennement, pour recevoir des informations sur les renseignements que

 19   la FORPRONU avait, car il y avait beaucoup plus de personnes à la FORPRONU

 20   qui travaillaient que nous.

 21   Q.  Est-ce que vous croyez que le commandant du Corps de Sarajevo-Romanija

 22   avait le droit de faire une chose pareille que d'envoyer un faux rapport à

 23   l'état-major, au général Mladic ? Pensez-vous qu'un officier de son rang

 24   aurait eu le droit et aurait osé de faire une chose pareille ? Il

 25   s'agissait d'une information confidentielle. Ce n'était pas destiné aux

 26   journaux.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne crois pas qu'il revienne au témoin

 28   de formuler des commentaires à ce sujet.

Page 2528

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux absolument pas commenter les

  2   actions qui ont été celles d'un commandant serbe.

  3   Est-ce qu'il est possible, peut-être, de modifier l'affichage de l'écran

  4   pour que je puisse voir ce qui est écrit.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

  6   Nous allons nous pencher sur le rapport des Nations Unies, qui était

  7   quotidien ou hebdomadaire, et nous verrons ce qu'il en était.

  8   Mais pour le moment, peut-on verser l'extrait vidéo avec la transcription,

  9   s'il vous plaît.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote D205. J'ai

 12   également une correction au compte rendu. La pièce P737 n'a pas lieu

 13   d'être. La pièce P737 est remplacée par la pièce D206 pour le document 65

 14   ter numéro 11557.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   Je demande maintenant l'affichage du document 1D01207.

 18   Pendant qu'il est affiché à l'écran, je voudrais juste vous informer que

 19   cela concerne l'unité de Zlatko Lagumdzjia, la 1ère Brigade motorisée à

 20   Sarajevo. Il s'agit d'un homme politique connu, le dirigeant du parti qui a

 21   hérité, en fait, de la Ligue des Communistes de Bosnie-Herzégovine, qui

 22   s'inscrit dans la droite ligne de cette Ligue des Communistes de

 23   Yougoslavie. Pour dire toute la vérité, il n'a pas signé en personne. C'est

 24   quelqu'un qui a signé pour lui. Vous allez voir maintenant ce que recouvre

 25   cette mission, ce qui est ordonné à cette unité.

 26   Est-ce qu'on a maintenant ce document qui s'affiche ? Voilà.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Ensuite, nous voyons Zlatko Lagumdzjia, nous voyons qu'il s'agit de la

Page 2529

  1   signature de quelqu'un d'autre, mais c'est bien de son unité qu'il s'agit.

  2   Pouvons-nous maintenant avoir l'affichage de la page 2, s'il vous plaît. Il

  3   s'agit de la date du 31 décembre 1992. Nous allons passer à la partie

  4   intitulée : "Mission".

  5   "Mission. Occuper la région par la droite. Transit par la gauche, le pont

  6   près d'Electropriveda. Effectuer l'attaque selon l'axe 11 Bleu, partie sud

  7   du stade de Grbavica, la palme, shopping, et 'strojerad', quatre hauts

  8   bâtiments, avec pour objectif de briser les effectifs ennemis sur les axes

  9   précisés et de prendre le contrôle des installations les plus importantes."

 10   En page 3, il est dit, je cite :

 11   "Numéro 6. Soutien. L'artillerie fournira un soutien dans la profondeur du

 12   territoire contrôlé par l'ennemi."

 13   Ensuite, en page numéro 4, et c'est la page suivante de la version anglaise

 14   dont il s'agit, le paragraphe intitulé : "Moral." Et le dernier sous-

 15   paragraphe, donc nous avons le moral est bon, et cetera, mais les dernières

 16   quelques phrases, ce qui est encadré en rouge, je cite :

 17   "Puisque la prise d'une localité ainsi fortifiée est impossible sans

 18   détruire et mettre le feu à certains bâtiments, qui simultanément

 19   représentent des points de fortification importants, tout détruire et

 20   mettre le feu à tout afin d'assurer la sécurité et le bon déroulement de

 21   l'opération. En raison de l'absence de principes et de l'arrogance bien

 22   connue que ceux-ci manifestent, n'accorder foi à aucun prisonnier, et

 23   notamment à ceux qui sont porteurs d'armes."

 24   Alors, Monsieur van Lynden, il est donné ordre de tout détruire et de tout

 25   incendier. Et ceux qui sont fait prisonniers, il est donné ordre de ne pas

 26   leur faire confiance, notamment à ceux qui sont porteurs d'armes. Donc, il

 27   est sous-entendu qu'on donne ordre également de faire prisonniers certains

 28   qui ne sont pas porteurs d'armes. Or, "ne pas faire confiance", qu'est-ce

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  1   que cela signifie ? Cela signifie liquider, n'est-ce pas, en raison de

  2   l'arrogance, de l'absence de principes ? Alors, comment un prisonnier peut-

  3   il faire preuve d'une absence de principes ?

  4   Est-ce que vous êtes au fait de cette façon de procéder au sein des

  5   forces armées musulmanes ?

  6   R.  Je n'ai jamais vu ce document précédemment. Je n'ai pas connaissance de

  7   sa teneur, et je ne peux pas formuler de commentaire à son sujet.

  8   Q.  Mais vous reconnaissez qu'il s'agit d'un document émanant des forces

  9   armées musulmanes, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je l'ignore, Monsieur Karadzic. Comment serais-je censé le savoir ? Je

 11   ne suis pas un expert en matière de documents de ce type.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous peut-être encore voir la

 13   page numéro 2 de l'original de ce document ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, bien sûr. L'affichage ne dépend pas de

 15   moi. Nous avons le paragraphe numéro 2, intitulé "Mission". Le numéro 1 est

 16   intitulé : "Informations concernant l'ennemi". L'ennemi, c'est nous, ce

 17   sont les forces serbes, et le numéro 2, c'est la mission qui leur incombe à

 18   eux.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je relève que la

 20   typographie est différente entre les paragraphes numéro 1 et numéro 2. Il y

 21   a une différence importante. Pourriez-vous expliquer pourquoi.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Parce qu'une couleur jaune a été utilisée, qui

 23   est probablement impossible à discerner, mais on a voulu mettre en valeur

 24   la partie du texte correspondante. La police de caractères utilisée est la

 25   même, mais c'est le contraste qui est différent. Cependant, c'est

 26   l'Accusation qui a récupéré ce document auprès des forces armées

 27   musulmanes. Il ne s'agit pas d'un document de la Défense.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Veuillez poursuivre.

Page 2531

  1   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

  2   Q.  En tant que témoin qui a été présent sur les faits, Monsieur le Témoin,

  3   vous auriez certainement dû constater les  destructions de Hrasnica,

  4   Grbavica, et d'autres localités serbes, tout comme vous auriez dû être au

  5   courant des combats de rue qui étaient menés pratiquement pour chaque

  6   bâtiment. Est-ce que vous le saviez ?

  7   R.  Lorsque j'ai été emmené à Grbavica par vos propres forces au mois de

  8   septembre 1992, et de nouveau en février 1994, bien entendu qu'il y avait

  9   des signes indiquant cela. A mon sens, je dirais que les destructions là-

 10   bas étaient bien moins importantes qu'elles ne l'étaient de l'autre côté de

 11   la ligne de front, mais c'est mon opinion personnelle. Donc, j'étais bien

 12   au courant de combats. Mais je ne peux pas commenter ce document, Monsieur

 13   Karadzic. Il y avait des signes clairs à Sarajevo indiquant que des combats

 14   se déroulaient autour de certains bâtiments.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 16   Je voudrais qu'on puisse verser ce document.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 18   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais le

 19   témoin a indiqué qu'il n'était pas en mesure de formuler de commentaire sur

 20   ce document, donc je souhaiterais soulever une objection. Comme Mme et MM.

 21   les Juges l'auront noté, la présentation même de ce document est quelque

 22   peu étrange, mais je crois qu'il est inadéquat de présenter ce document au

 23   témoin. Alors, bien sûr, nous disposons également des instructions qui ont

 24   été fournies par la Chambre, mais même au terme de ces instructions, ce

 25   document n'est pas conforme.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous en convenons, Monsieur

 27   Nicholls. Le témoin a indiqué qu'il n'était pas en mesure de formuler le

 28   moindre commentaire concernant ce document, et pour le moment nous ne

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  1   sommes absolument pas sûrs qu'il ait la moindre pertinence. Donc nous ne le

  2   verserons pas pour le moment, mais ça ne signifie pas que vous n'aurez pas

  3   la possibilité ultérieurement de redemander le versement de ce document par

  4   l'intermédiaire d'un autre témoin qui pourra en étayer l'authenticité.

  5   Alors, veuillez poursuivre.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais simplement dire très rapidement que

  7   lorsqu'on surligne un texte en couleur jaune, cela apparaît ensuite

  8   invisible lorsque le texte est photocopié et, en fait, ce qui a été fait,

  9   c'est une simple mise en valeur de l'extrait correspondant. Tout cela nous

 10   vient, par ailleurs, de l'Accusation, comme j'ai dit. Alors, nous l'avons

 11   récupéré par l'intermédiaire du système électronique.

 12   Je voudrais maintenant que l'on affiche un autre document.

 13   L'INTERPRÈTE : La cabine française n'a pas entendu non plus le numéro du

 14   document.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez répéter la cote.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] 11874. P11874.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Alors, ce rapport n'émane certes pas de vous, mais il vient d'un de vos

 19   collègues qui se trouvait à Belgrade. Et depuis Belgrade, il rend compte

 20   des événements survenus à Sarajevo pour le compte de "The Independent", de

 21   la même façon. Il dit, je cite :

 22   "Après que Sarajevo ait connu la pire nuit de bombardements du fait des

 23   forces serbes au cours de cette guerre civile de deux mois en Bosnie, les

 24   chaînes de télévision locales ont émis hier des conversations interceptées

 25   par radio entre un général serbe et ses officiers, le général encourageant

 26   ces derniers à se livrer à un bombardement sans merci de la ville."

 27   Alors, vous voyez, notre objection ici consiste à dire que de nombreux

 28   correspondants étaient tranquillement assis, fort loin des événements, et

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  1   faisaient circuler ce type d'histoires. En fait, ils ajoutaient du crédit

  2   aux versions qui étaient véhiculées par l'autre partie.

  3   Donc, Monsieur van Lynden, au sujet de cette conversation interceptée qui

  4   est bien connue en tant qu'ordre allégué émanant de Mladic --

  5   Je voudrais demander le document qui porte le numéro 30824 sur la

  6   liste 65 ter. Nous en avons la transcription, nous pouvons écouter cette

  7   conversation, et puis nous pourrons demander le versement des deux

  8   conjointement. Si nous pouvons peut-être obtenir ce document.

  9   Alors, ce que nous avions sous les yeux, c'était le 30 mai, alors que

 10   le 29 mai, vous, vous êtes déjà sur place, et la conversation se tient

 11   entre Ratko Mladic et Potpara, puis ensuite entre Ratko Mladic et Varos.

 12   Alors, je voudrais juste vous informer du fait qu'il s'agit d'officiers qui

 13   sont encerclés et se trouvent dans la caserne du maréchal Tito, donc la

 14   caserne complètement encerclée par les forces musulmanes à cet instant

 15   précis. Voilà.

 16   Je voudrais commencer à la ligne numéro 5 avec les propos tenus par

 17   Potpara, je cite :

 18   "Pour le moment, la situation est calme, mais sinon, depuis 17 heures 20,

 19   les actions sont permanentes, six obus sont tombés et un conscrit a été

 20   légèrement blessé."

 21   Mladic confirme cela. Et ensuite, plusieurs lignes plus bas, je cite Mladic

 22   :

 23   "Est-ce qu'il y a des opérations en cours ?"

 24   Potpara répond :

 25   "Non, pas pour le moment. La situation est calme.

 26   "Mladic : Soyez extrêmement prudents. Ils essaient de vous provoquer."

 27   Ensuite, quelques lignes plus bas, je cite : 

 28   "Ratko Mladic : Eh bien, voilà, ils souhaitent provoquer une réponse

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  1   de notre part visant la ville par les attaques qu'ils mènent contre la

  2   caserne."

  3   Je crois qu'il faut passer à la page suivante dans la version anglaise, la

  4   page 2.

  5   Potpara, je cite : "Oui, très bien."

  6   "Mladic : Dites cela aux hommes pour qu'ils le sachent."

  7   Alors, passons maintenant à la page suivante, aussi bien en serbe qu'en

  8   anglais, s'il vous plaît.

  9    Potpara dit : "Oui."

 10   Ensuite, Ratko Mladic : "Soyez extrêmement prudents, et ne vous précipitez

 11   pas."

 12   Ensuite, environ dix lignes plus bas, je cite Ratko Mladic :

 13   "Deuxièmement, ils s'efforcent, par des attaques visant la caserne et par

 14   des attaques visant les unités, de provoquer une action de notre part

 15   visant la ville."

 16   Ensuite, Varos répond : "Oui."

 17   En anglais, c'est la page suivante, et en serbe également, s'il vous plaît.

 18   Donc en anglais et en serbe, c'est de la page suivante dont nous avons

 19   besoin.

 20   Ratko Mladic, je cite :

 21   "Alors toi, prépare-toi. Fais en sorte que nous ne soyons pas ridiculisés

 22   comme dans le cas de la caserne Jusuf Djonlic."

 23   Varos répond : "Oui."

 24   "Mladic : Nous leur avons laissé là-bas toutes les armes lourdes et ils ont

 25   quand même attaqué les colonnes, et vous, ils vous auraient massacrés. Ne

 26   te fais pas de soucis. Vous allez tous vous en sortir. Contentez-vous de

 27   tenir comme il faut et il n'y aura aucun problème.

 28   "Varos : Très bien."

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  1   Ensuite, quelques lignes plus bas, Mladic dit, je cite :

  2   "Evitez de vous précipiter. Nous avons laissé là-bas tout l'armement dans

  3   la caserne Jusuf Djonlic."

  4   Potpara répond : "Oui, oui."

  5   Alors, page suivante en anglais, s'il vous plaît.

  6   Ratko Mladic, je cite :

  7   "Dans la mesure où ils sont prêts à se conformer au plan, ils ont reçu le

  8   premier contingent d'armes qui appartenaient à ces quatre municipalités."

  9   Donc, il informe que les Musulmans ont reçu ce qui leur revient.

 10   Potpara répond : "Ah oui, ah oui.

 11   "Mladic : Ils devaient également évacuer pacifiquement la caserne Viktor

 12   Bubanj avant ces casernes Djonlic et Pazaric."

 13   Alors, page suivante en anglais, nous avons une partie un peu plus longue

 14   de la réponse de Mladic, je cite :

 15   "Moi aussi, j'ai le même point de vue. "

 16   Potpara dit qu'il ne veut pas risquer la vie de ses hommes, et Mladic

 17   lui répond, je cite :

 18   "Moi aussi, j'ai le même point de vue. S'ils veulent la paix, ils

 19   l'auront. Moi, j'ai donné l'ordre hier, dès que je suis arrivé, un ordre

 20   allant en ce sens. Il y a eu également cette attaque massive visant aussi

 21   bien les unités que vous-même. Ces tirs, les hommes qui étaient à leur

 22   origine, j'ai réussi à les apaiser, d'une façon ou d'une autre. J'ai réussi

 23   à placer cela sous contrôle afin que l'on interrompe ces activités. Ce qui

 24   est en train d'être provoqué est probablement le fait de certains pantins

 25   ou d'imitateurs qu'ils ont et qui sont même capables d'imiter ma voix, ta

 26   voix, et la voix de n'importe qui."

 27   Et ensuite, Mladic :

 28   "On dirait qu'ils ont en train de se livrer à une véritable comédie,

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  1   qu'ils sont en train de tromper leur propre peuple. Il n'y a absolument

  2   aucun ordre de ma part."

  3   Ensuite, Ratko Mladic :

  4   "Très bien. Qu'ils jouent la comédie, qu'ils trompent leur propre

  5   peuple. Toi, fais passer de soldat en soldat la consigne. Ne vous hasardez

  6   surtout pas à prendre des risques, à mettre en jeu vos propres vies.

  7   Personne n'a une seconde vie en réserve. Nous ne pilonnerons pas la ville

  8   dans la mesure où ils n'enfreindront pas les accords, dans la mesure où ils

  9   ne vous mettront pas en danger. Mais soyez extrêmement prudents. Ne leur

 10   accordez pas la moindre confiance."

 11   Voilà la conversation dont il s'agit, Monsieur van Lynden. Est-ce qu'il est

 12   possible, sur la base de cette conversation, de conclure que le général

 13   Mladic aurait donné l'ordre de pilonner le centre de la vieille ville ainsi

 14   que les médias occidentaux en font état ?

 15   R.  Je n'étais pas au fait de cette conversation interceptée. Je n'ai

 16   informé personne. C'est la première fois que je vois ce document, et je ne

 17   veux pas faire le moindre commentaire à son sujet. C'est Marcus Tanner qui

 18   a rendu compte de cela pour le compte de "The independent."

 19   Q.  Mais est-ce qu'on voit bien ici que la nuit précédente il y a eu une

 20   attaque de grande envergure lancée contre la caserne du maréchal Tito, et

 21   que le jour même, à vrai dire, un conscrit qui faisait ses études à

 22   l'académie militaire a été légèrement blessé ? C'est quelque chose dont

 23   vous auriez pu faire état, parce que le 29 mai vous étiez déjà sur place,

 24   n'est-ce pas ?

 25   R.  Au moment où je suis arrivé à Sarajevo - encore une fois, je ne me

 26   rappelle pas exactement la date à laquelle je suis arrivé - effectivement,

 27   nous sommes allés à l'ancien hôpital militaire et nous avons filmé un

 28   conscrit qui recevait des soins et qui avait été blessé dans la caserne du

Page 2537

  1   maréchal Tito. C'était mon premier ou mon second rapport envoyé de Sarajevo

  2   à l'époque.

  3   Q.  Merci.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous verser cette transcription de la

  5   conversation interceptée sous la cote 30824. C'est une cote de la liste 65

  6   ter de l'Accusation.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et qu'en est-il du rapport de presse du

  8   journal "The Independent" ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, il ne nous intéresse pas.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Procureur.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Non, pas d'objection pour cette conversation

 12   interceptée.

 13   Ce à quoi le témoin se réfère porte sur la 65 ter le numéro 40264B.

 14   C'est relatif au soldat blessé de la caserne.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. La conversation interceptée est

 16   versée au dossier.

 17   Juste un instant, je voudrais consulter mes collègues.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre est d'avis que cette

 20   conversation interceptée peut être versée dans son intégralité. Mais, en

 21   fait, sur la base des instructions que nous avons fournies, nous avons

 22   plutôt estimé qu'il convenait de verser cette conversation interceptée sous

 23   un numéro de pièce à conviction aux fins d'identification.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote D207 aux fins

 25   d'identification.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ma position, si je puis me permettre, est la

 27   suivante : Toutes les conversations interceptées dans lesquelles la partie

 28   musulmane écoutait de façon illégale la partie serbe ont fait l'objet de

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  1   remise en question. En fait, tout cela a été examiné et cela montre

  2   l'iniquité dont a fait preuve la partie musulmane, parce que tout cela a

  3   été avant la guerre; alors qu'en temps de guerre, au contraire, les deux

  4   parties ont le droit de s'écouter l'une ou l'autre.

  5   Alors je voudrais que l'on affiche le suivant document.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est la cote du document

  7   suivant ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D01128.

  9   Pendant que le document s'affiche, je voudrais juste vous informer qu'il

 10   s'agit du 23 avril 1992, donc peu de temps avant votre arrivé.

 11   Il s'agit, cependant, encore de la JNA. Nous avons un rapport émanant

 12   de la JNA concernant les événements de Sarajevo. C'est le commandement de

 13   la 17e Brigade des Partisans. Cela est transmis comme secret militaire. Une

 14   information fournie au commandement A/A. Le paragraphe qui nous intéresse,

 15   je cite :

 16   "La situation, d'un point de vue politique et du point de vue de la

 17   sécurité, dans la zone de responsabilité de la 2e Région militaire, et de

 18   ce fait également dans la zone du 17e Corps de la 38e Division, devient

 19   rapidement de plus en plus complexe et plus grave, ce qui conduit à une

 20   recrudescence des affrontements dans l'ensemble du territoire de la BiH.

 21   "Les installations militaires, les installations de l'industrie

 22   militaire et les entrepôts, ainsi que les installations isolées, les points

 23   de commandement et les postes des unités sont particulièrement menacés.

 24   L'instigateur de ces attaques est le MUP de la BiH et la Défense

 25   territoriale, alors que les auteurs en sont les formations paramilitaires

 26   du SDA et du HDZ."

 27   Ensuite deux paragraphes plus bas, je cite :

 28   "Le 17 et le 18 avril 1992, les Bérets verts et les forces spéciales du MUP

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  1   de la Bosnie-Herzégovine se sont livrés à une attaque visant l'usine Pretis

  2   située à Vogosca." Au passage, c'est une usine qui est également une usine

  3   militaire.

  4   "Au cours de la nuit, entre 3 heures et 5 heures du matin, lorsque

  5   cinq hommes sont décédés et 20 autres ont été blessés alors que neuf ont

  6   été fait prisonniers parmi les attaquants, sept camions dont deux étaient

  7   chargés de munitions ont été emmenés, 100 véhicules de marque Volkswagen

  8   modèle Golf ont été volés; ce sont des véhicules utilisés par les Bérets

  9   verts. Par l'intervention judicieuse des unités de la JNA, on a empêché une

 10   catastrophe de grande envergure.

 11   "Le 18 et le 19 avril 1992, l'installation industrielle militaire

 12   Igman, près de Konjic, a été prise aux Bérets verts; elle a été bloquée, et

 13   on a débranché les lignes téléphoniques afin d'empêcher une réaction

 14   militaire."

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Est-ce que vous étiez au courant de telles attaques lancées contre la

 17   JNA à l'époque où elle était encore la seule force armée légitime présente

 18   sur le terrain ?

 19   R.  En avril 1992, je ne me trouvais pas en Bosnie, et je n'avais pas

 20   connaissance des événements rapportés dans ce document que je vois ici même

 21   pour la première fois, lui aussi.

 22   Q.  Mais lorsque vous deviez aller dans une région où vous allez faire un

 23   reportage, est-ce que vous avez essayé d'obtenir des informations

 24   concernant la situation qui s'y présentait dans cette région ? Je suppose

 25   que quand on vous envoyait quelque part, vous connaissiez les événements

 26   qui s'y passaient. Est-ce que vous avez reçu des observations, des

 27   renseignements, sur la zone où vous avez fait le reportage ?

 28   R.  Mais ça va de soi. On essaie d'obtenir un maximum d'information, de

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  1   renseignement de la part des personnes qui se trouvent déjà sur place.

  2   Lorsqu'on arrive sur les lieux, comme je suis arrivé à Sarajevo, j'ai

  3   d'abord été au QG des Nations Unies, de la FORPRONU, pour recevoir des

  4   informations lors d'une réunion d'information sur ce qui se passait à

  5   l'époque. Pour ce qui est des informations contenues dans ce document que

  6   nous avons sous les yeux, je n'en ai pas connaissance, je ne m'en souviens

  7   pas. Peut-être que j'ai entendu parler quand j'étais encore à Londres, mais

  8   je vous le répète, je ne m'en souviens plus. 

  9   Q.  Est-ce que vous receviez également des informations de la part de vos

 10   confrères de la télévision de Sarajevo, par exemple, des  journalistes

 11   locaux, en tout cas ?

 12   R.  Je ne me souviens pas si j'ai été dans les locaux de la télévision de

 13   Sarajevo, la première fois j'étais là. J'y suis bien allé par la suite,

 14   lors d'autres missions, mais nous étions prudents. Si l'une ou l'autre

 15   partie au conflit nous donnait des informations, nous étions

 16   particulièrement prudents. Puis vu ma formation, je sais que si je n'ai pas

 17   vu quelque chose moi-même ou si ça n'a pas été vu par un autre journaliste,

 18   il faut faire preuve d'une grande prudence, ça je le sais pertinemment, à

 19   moins et encore si ce reporter, ce journaliste, je le connais bien et je

 20   connais la qualité de son travail.

 21   Mais pour répondre à votre question par rapport à TV Sarajevo, c'est plus

 22   tard en 1992 que nous sommes allés à TV Sarajevo, qu'on a parlé à des gens.

 23   Enfin, nous avons parlé à des gens, mais toujours avec vraiment beaucoup de

 24   circonspection.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir maintenant à l'écran la page

 27   numéro 2 de ce même document. Je rappelle qu'ici nous avons un rapport de

 28   la JNA par ses propres voies hiérarchiques concernant les événements

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  1   survenus à Sarajevo.

  2   Dernier paragraphe, je cite :

  3   "Dans le bâtiment de la télévision de Sarajevo règne l'insatisfaction,

  4   insatisfaction éprouvée par un grand nombre de journalistes en raison de la

  5   présence permanente de formations paramilitaires armées qui sont présentes

  6   au sein du bâtiment de la télévision et accompagnent également les

  7   correspondants originaires de différentes villes. En raison de leur

  8   présence, les rapports sont partiaux et tendancieux, parce qu'ils sont

  9   toujours rédigés sous la menace des armes."

 10   Peut-être que nous pourrons voir également un autre document, d'autres

 11   documents que je montrerais et qui, comme on le verra, confirment que les

 12   Bérets verts avaient pris le contrôle des lieux avant même l'éclatement du

 13   conflit.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous étiez au courant du contrôle exercé sur ces locaux par

 16   les Bérets verts, en d'autres termes par des unités paramilitaires ?

 17   R.  La première fois où je suis allé dans les locaux de la télévision de

 18   Sarajevo, il y avait des gardes, et vous en trouvez partout dans le monde,

 19   devant les bâtiments, les bureaux d'une chaîne de télévision. Mais je n'ai

 20   pas vu d'unités paramilitaires, ces mots que vous avez utilisés. Peu

 21   importe quand j'y suis allé, je n'ai jamais vu. Peut-être qu'il y en avait

 22   avant, je l'ai dit -- peut-être que c'est vrai ce qui est indiqué dans ce

 23   document, mais impossible pour moi de le vérifier.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous verser ce document, s'il vous

 26   plaît.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, qu'en pensez-vous ?

 28   M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons délibérer sur le siège. 

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre dans vos

  4   réflexions. De toute façon, nous n'avons pas la traduction du texte. Donc,

  5   en tout état de cause, ce sera une cote provisoire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin n'a pu apporter de commentaire

  7   sur aucun des points de ce document. Dès lors, nous avons certains doutes

  8   quant à la valeur probante dudit document. Par conséquent, il est rejeté et

  9   n'est pas versé au dossier.

 10   Monsieur Karadzic, je parle de ce document-ci, mais du précédent aussi,

 11   c'est pour nous un exemple d'une pure perte de temps. Vous pourriez faire

 12   plus simple; vous pourriez poser une question directement au témoin plutôt

 13   que de donner lecture de tous ces documents.

 14   Je vois l'heure qu'il est, mais étant donné qu'il y a un problème de

 15   logistique, je vais vous demander quelles sont vos intentions ? Vous auriez

 16   besoin de combien de temps pour le reste du contre-interrogatoire ? Si je

 17   vous pose la question, c'est en raison des contraintes du témoin puis de la

 18   pertinence des questions que vous posez au témoin.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyez-vous quelle est la position de la Défense

 20   : je pense que nous avons encore une session aujourd'hui et une autre

 21   demain, et je crois bien que nous allons demander à M. van Lynden de

 22   revenir une autre fois. Pourquoi est-ce que je présente tout ceci ? Parce

 23   que M. Van Lynden et tous les médias en général ont créé une image de

 24   Sarajevo. Cette image est strictement à notre détriment. Les cartes et le

 25   terrain ne confirment pas ce qu'il dit. On aurait pu tirer des conclusions

 26   entre tous les documents. D'autres sources confidentielles, militaires,

 27   renseignements, montrent bien que c'est tendancieux et que c'est faux comme

 28   information. Si ce n'est pas tendancieux, alors c'est du manque

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  1   d'information tout court.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est vous qui devez décider de la

  3   façon dont vous voulez présenter votre cause et procéder au contre-

  4   interrogatoire. Mais si vous posez des questions ou présentez un document

  5   qui concerne une période antérieure à l'arrivée du témoin à Sarajevo, ce

  6   n'est pas très utile. Vous pourriez faire preuve d'une bien plus grande

  7   efficacité.

  8   Avancez.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. 1D01224 maintenant, s'il vous plaît.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  En attendant qu'on nous le montre, Monsieur van Lynden, je tiens à dire

 12   que vous avez interviewé le général Juka Prazina, ça sonne bien, et vous

 13   avez été à son état-major, puis vous avez jugé de façon tout à fait

 14   correcte qu'il s'agissait d'un criminel. Alors voyons un peu ce que le

 15   ministère de la Défense de l'armée musulmane de Bosnie-Herzégovine, c'est-

 16   à-dire la partie musulmano-croate donne, en guise d'information à la date

 17   du 1er juin 1992, au sujet de Juka Prazina.

 18   Je vous renvoie au deuxième paragraphe où on a mis du rouge :

 19   "Dans cette partie, j'ai contacté les effectifs de réserve de la police,

 20   Stela, qui se trouvaient à la salle de sport d'Alipasina Polje, et qui

 21   s'étaient trouvés sous le commandement de Prazina Juka." "Les effectifs de

 22   réserve de la police," ce n'étaient pas des paramilitaires. C'étaient des

 23   réservistes de la police.

 24   Donc, une instance de l'Etat sous le commandement d'un criminel

 25   notoirement connu ? Est-ce que vous êtes d'accord avec moi là-dessus ?

 26   R.  Première chose, lorsque j'ai interviewé, lorsque j'ai vu Juka Prazina,

 27   jamais il ne m'a dit qu'il était général, et je ne me souviens pas non plus

 28   qu'il aurait dit qu'il faisait partie -- que ce faisait partie d'une unité

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  1   de police. Ses hommes et lui s'appelaient les défenseurs de Sarajevo. Vous

  2   l'avez dit vous-même, et j'ai dit aussi hier, dans mon reportage j'ai bien

  3   indiqué que c'était un homme qui avait un casier judiciaire. C'est tout ce

  4   que je peux dire à ce propos. Je répète que ce document-ci, je ne l'ai

  5   jamais vu auparavant.

  6   Q.  Merci. Mais ici, il est question du ministère de la Défense de Bosnie-

  7   Herzégovine. C'est les forces d'Alija Izetbegovic.

  8   R.  Mais si on ne me le montre pas, comment voulez-vous que je fasse un

  9   commentaire ?

 10   Q.  Merci. Le paragraphe suivant, maintenant, c'est celui qui informe, qui

 11   dit :

 12   "J'affirme que l'on continue à enfreindre les ordres de l'état-major de la

 13   Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine, pour ce qui est des fouilles

 14   d'appartements. On envoie des jeunes gens qui n'ont pas d'expérience pour

 15   fouiller, et il y a des cas où l'on dépossède les gens d'objets qui ne sont

 16   pas du tout la cible de confiscations envisagées, ce qui crée du

 17   mécontentement auprès des citoyens et auprès des gens tout à fait

 18   honnêtes."

 19   En page suivante, et en version anglaise c'est toujours la même page, mais

 20   c'est la page suivante en version serbe.

 21   "Je réaffirme en toute responsabilité qu'il y a eu bon nombre d'obus qui,

 22   sur ce secteur, a atterri depuis des sites où se trouvait l'agresseur, à

 23   savoir la route de Lukavica et le foyer des enfants aveugles de Nedzarici,

 24   et il y a un grand nombre d'appartements et d'immeubles d'habitation qui

 25   ont été touchés, et bon nombre de personnes ont été blessées ou tuées, des

 26   citoyens, en raison de ces jeunes incontrôlés qui tiraient sans nécessité

 27   et qui provoquaient l'agresseur, sans nécessité aucune, lorsque cela

 28   n'était nullement nécessaire et parce que, compte tenu de l'éloignement, on

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  1   ne pouvait pas leur porter de dégâts au niveau des moyens de combat ou au

  2   niveau de leurs effectifs. Ces tirs incontrôlés ont toujours connu des

  3   ripostes avec des obus.

  4   "Un autre exemple," un peu plus bas, "qui est le plus frais pour confirmer

  5   ce que j'ai dit jusqu'à présent : hier soir, c'est-à-dire vers 22 heures,

  6   ces hommes à Juka ont monté un PAM sur une espèce de Pinzgauer confisqué

  7   chez quelqu'un, et en plein jour ils ont ouvert le feu en direction de la

  8   cité de Nedzarici, alors que dans cette cité il y avait beaucoup de

  9   citoyens qui se promenaient, des femmes, des enfants et des hommes. Ils

 10   l'ont recommencé à 22 heures en tirant vers des équipages de chars sur

 11   l'installation d'approvisionnement en eau potable à Mojmilo, et il y a eu

 12   riposte à la mitrailleuse, et il y a eu sept ou huit obus de tirés depuis

 13   la route de Lukavica, et ça a généré des dégâts sur les installations alors

 14   que des milliers de gens ont dû descendre dans leurs caves."

 15   Est-ce que ceci complète l'image des événements à Sarajevo, et je précise

 16   qu'il s'agit du 1er juin 1992, où Juka Prazina et ses hommes, comme les

 17   qualifie le journaliste de façon assez gentille, qui provoquent et qui

 18   suscitent des ripostes qui génèrent des dégâts d'un côté et de l'autre ?

 19   R.  Non, je ne dirais absolument pas que ceci décrit parfaitement ce qui

 20   s'est passé à Sarajevo. Ici, on parle de ce qui s'est passé dans un

 21   endroit, et rien de plus. Je n'étais pas au courant de cet incident et on

 22   ne m'en a pas parlé, d'ailleurs. J'étais à Sarajevo à l'époque, mais

 23   lorsque j'ai rencontré Jusuf Prazina, j'ai rencontré aussi un certain

 24   nombre de ses hommes, et aucun n'était des garçons. Mais je ne peux pas

 25   parler de leur entraînement. Je ne sais pas vraiment ce qu'il était. Ils ne

 26   m'ont jamais emmené sur une de leurs positions d'où ils tiraient. Ça, je

 27   n'ai jamais assisté à cela, donc je ne peux pas vraiment ni infirmer ni

 28   confirmer cette déclaration. C'est peut-être vrai, c'est tout ce que je

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  1   peux dire, mais en tout cas, ce qui est certain, c'est que ça ne reflète

  2   pas parfaitement ce qui se passait à Sarajevo. C'est uniquement un incident

  3   qui a eu lieu à un moment dans un quartier de Sarajevo.

  4   Q.  Peut-être que l'interprétation est erronée. J'ai dit que je voulais

  5   compléter l'image pour voir ce que leur ministère à eux a dit au sujet de

  6   leur futur général ? Mais je pense que vous avez raison, à ce moment il

  7   n'était pas général.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document émanant du ministère musulman, est-

  9   ce qu'on peut le faire verser au dossier, s'il vous plaît.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ceci ne complète pas l'image que j'ai

 11   faite de Sarajevo. Je pense qu'il faudrait que j'apprenne encore beaucoup

 12   de choses pour savoir parfaitement ce qui s'est passé à Sarajevo.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document sera admis. Mais je remarque

 16   que nous n'avons pas de traduction complète de ce document. Nous allons

 17   donc attendre d'avoir une traduction complète, et en attendant, ce document

 18   recevra une cote MFI.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote D208 MFI.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux poser encore une question.

 21   Alors, le 1D01129, dans ce cas.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Dans l'attente de ce document, je tiens à informer M. van Lynden et les

 24   autres participants ici qu'il s'agit ici d'une initiative en vue d'entamer

 25   une procédure de promotion -- le 1129, j'ai demandé. Alors, promotion

 26   d'Adnan Solakovic. Il s'agit du ministère de la Défense de l'ABiH, une fois

 27   de plus, ABiH, et ça se trouve dans le cadre du ministère de la Défense. On

 28   est au 11 septembre 1992. Cela signifie que vous étiez là-bas.

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  1   Est-ce qu'on nous l'a montré ? Oui, le voilà.

  2   On dit :

  3   "Je propose," au milieu," que Prazina, fils d'Edhem, Jusuf appelé Juka,

  4   membre de l'état-major principal des forces armées de la République de

  5   Bosnie-Herzégovine, et commandant des unités spéciales des forces armées de

  6   la République de Bosnie-Herzégovine, soit promu au grade de général."

  7   Puis après, à la page suivante, on dit que ses unités à Sarajevo ont

  8   augmenté à tel point qu'elles ont constitué une brigade qui en impose. Puis

  9   on dit ensuite, les visions de Juka, au niveau de ses formations, ont reçu

 10   le nom honorable et la mission honorable de constitution des unités

 11   spéciales des forces armées de Bosnie-Herzégovine.

 12   Page d'après, pour ce qui est de la version serbe, c'est la page 3, et on

 13   dit, du fait -- page 3 en version serbe :

 14   "En raison de cette manifestation patriotique d'aptitude au combat, Juka

 15   s'est avéré être le seul combattant de guerre découlant de la résistance

 16   populaire qui a été nommé par la présidence de la République de Bosnie-

 17   Herzégovine," je note, présidence de la République de Bosnie-Herzégovine,

 18   "pour faire partie de l'état-major principal des forces armées de la

 19   République de Bosnie-Herzégovine et être commandant des unités spéciales.

 20   Il découle de tout ceci que Jusuf Prazina, par son manque d'engagement

 21   personnel, a contribué à la préparation, organisation, contrôle et

 22   commandement des unités des forces armées."

 23   Et c'est signé par Adnan Solakovic.

 24   Suite à cela, et partant de cette décision, il a obtenu un grade de

 25   général.

 26   Alors est-ce que ceci vous dit quoi que ce soit au sujet du fait de savoir

 27   qui est-ce qui se trouvait face à nous, Monsieur van Lynden ?

 28   R.  Tout d'abord, je tiens à dire qu'en haut de ce document la date que

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  1   nous avons en anglais n'est pas identique à celle qui est en serbo-croate.

  2   Un document dit qu'il est de "septembre", alors que dans la version

  3   anglaise on dit que c'est en "novembre".

  4   Maintenant en ce qui concerne ce que vous avez dit, si j'étais là : Sachez,

  5   qu'en septembre 1992, j'étais à Pale, et non à Sarajevo. Je ne connais pas

  6   ce document. Je ne l'avais jamais vu. Et comme je l'ai déjà dit, je n'étais

  7   pas du tout au courant de la promotion au grade de général de ce Jusuf

  8   Prazina. On ne m'en a jamais parlé.

  9   Après ma visite à l'été 1992 à Sarajevo, je ne l'ai plus jamais revu. Il me

 10   semble qu'il a quitté Sarajevo, et que je crois on l'a retrouvé mort en

 11   Belgique, en 1993, si je me souviens bien.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 13   Je m'excuse. La traduction a fait une erreur. Le traducteur a fait une

 14   erreur au niveau de la version anglaise. La bonne date c'est le 11

 15   septembre.

 16   Avant le 11 septembre, Juka Prazina se trouvait être membre de l'état-major

 17   principal des forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine. Membre

 18   de l'état-major principal, un criminel qui tuait des civils, qui les jetait

 19   par la fenêtre, qui confisquait des logements aux autres, et on sait encore

 20   tout ce qu'il a fait.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Je soulève une objection sur la base de la

 23   pertinence. Je considère que ce document n'a pratiquement aucune

 24   pertinence, on a épuisé le sujet, on est en train en fait de perdre son

 25   temps. M. le Témoin a dit que Juka Prazina était un criminel, très bien,

 26   c'est au compte rendu. Et maintenant on poursuit le sujet, ceci n'est pas

 27   contesté par le témoin pourtant. Le témoin a très clairement expliqué qu'il

 28   ne peut rien dire à propos de ces documents. Et en ce qui concerne la

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  1   dernière question : Est-ce que cela vous explique un petit peu à quoi

  2   ressemblait notre ennemi ? Non. Ceci n'est pas quelque chose qui vient de

  3   toute façon de l'interrogatoire principal. Donc il y a manque de

  4   pertinence.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, avant que vous ne rendiez une

  6   décision je peux dire quelque chose.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici je ne parle pas du tout de Juka Prazina.

  9   Juka Prazina c'est un symptôme. Moi, je parle de la présidence qui l'a

 10   nommé pour qu'il fasse partie de l'état-major principal des forces armées

 11   de la République de Bosnie-Herzégovine, tout en sachant de qui il

 12   s'agissait. Et on verra bon nombre de documents qui diront qu'ils savaient

 13   parfaitement bien de qui il s'agissait.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. C'est à vous de montrer ces

 15   éléments de preuve, mais ce n'est pas au témoin de commenter sur ces

 16   documents. C'est pour cela que nous allons devoir nous pencher sur la

 17   pertinence même de ce document.

 18   Mais maintenant les Juges vont conférer.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je attirer l'attention de la personne qui

 20   fait le compte rendu je n'ai pas dit que Zuka Prazina était semblable à

 21   moi. J'ai parlé du symptôme.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant que vous ne disiez votre décision, je

 24   veux vous indiquer aussi pourquoi nous faisons tout cela. Je peux vous le

 25   dire ?

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voici notre opinion, Monsieur Karadzic :

 27   Nous ne sommes pas d'accord avec l'observation de M. Nicholls selon

 28   laquelle votre question que vous avez posée ne découle pas de

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  1   l'interrogatoire principal, nous considérons en effet que vous avez épuisé

  2   ce sujet avec le témoin. Donc la Chambre de première instance vous demande

  3   de passer à autre chose maintenant.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Certes, j'irai de l'avant.

  5   Ce que je voulais juste c'était attirer aux Juges de la Chambre l'attention

  6   sur un état qui n'en est pas un. Cet Etat a demandé à ce que nous nous

  7   subordonnions à un système d'état et un système juridique où un Juka

  8   Prazina pouvait devenir général.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pourrez présenter vos arguments en

 10   temps et heures. Vous aurez le temps, mais maintenant vous devez poser des

 11   questions au témoin. Vous êtes là pour ça. Ne perdez pas votre temps.

 12   Je remarque l'heure qui passe. Nous devons maintenant faire une pause de 25

 13   minutes.

 14   --- L'audience est suspendue à 17 heures 31.

 15   --- L'audience est reprise à 17 heures 58.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais aviser les parties de notre

 17   décision. Nous commencerons demain à 8 heures et demie, pour avoir un peu

 18   plus de temps, et je remercie d'avance tout le personnel concerné par cette

 19   décision.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] La Défense vous en suis gré, Monsieur le

 21   Président, car nous avons bien besoin du temps supplémentaire qui nous est

 22   donné.

 23   Peut-on maintenant afficher le document 1D01223. Il s'agit du livre écrit

 24   par Rasim Delic, qui s'intitule "A la tête de l'armée en temps de guerre et

 25   de paix". Merci. Page 100, s'il vous plaît, et puis la page 101 aussi.

 26   Elles vont de pair.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur van Lynden, savez-vous qui avait le contrôle d'Igman depuis le

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  1   début jusqu'à la fin ? Je parle de cette partie qui surplombe Hrasnica, qui

  2   avait le contrôle de cette zone ? Le savez-vous ?

  3   R.  L'ABiH.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans le livre, c'est la page 100, et il y a

  6   aussi la page 101, la page d'après.

  7   Non, ici, on a la page 200 ainsi que la page 201. Moi, je veux la page 100

  8   et la page 101.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Mais est-ce que je peux déjà vous informer en attendant l'affichage,

 11   vous donner ces informations. Nous avons vu ici qu'à ce stade, c'est la

 12   Défense territoriale, et Sefer Halilovic nous a dit ce qu'il y avait dans

 13   la région, dans la zone de Sarajevo. C'était devenu depuis l'ABiH; ce

 14   n'était plus la Défense territoriale.

 15   Et ici à la page 100 du livre -- Rasim Delic est aujourd'hui décédé, bien

 16   entendu, mais voici ce qu'il disait dans son livre.

 17   Il disait qu'il y avait en ville 12 brigades. Attendez, nous allons

 18   trouver le passage pertinent.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce vraiment

 20   nécessaire de donner lecture de tout ces passages. Résumez le sens et

 21   présentez-le au témoin sous forme de question pour avoir sa réponse.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Page 100, il est question de 12 brigades se trouvant dans la ville de

 24   Sarajevo. Répondez par oui ou par non, ça me suffira.

 25   Regardez, je vais vous le lire. C'est au milieu de la page, milieu du

 26   premier paragraphe de la page 100.

 27   "En cette opération, il a compté sur l'engagement de trois groupes

 28   tactiques, Igman et Drina, notamment, et Visoko, qui représentaient 10 000

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  1   combattants et 12 brigades de la ville qui allaient être engagées et partir

  2   de l'intérieur. Et puis, en plus, il y a la police et la brigade croate

  3   Herceg Stjepan, en plus de tous ces effectifs."

  4   Acceptez-vous le fait qu'il y avait 12 brigades dans la ville même de

  5   Sarajevo ?

  6   R.  Ecoutez, c'est la première fois que je vois le livre écrit par Rasim

  7   Delic. Je ne savais même pas qu'il avait écrit un livre, Madame et

  8   Messieurs les Juges. Je ne sais pas, c'est ce qu'il écrit dans son livre.

  9   Moi, je ne sais pas. Je ne sais pas non plus de quelle période on parle. Ça

 10   ne semble pas dire qu'il y a 10 000 combattants. On parle de brigades, mais

 11   je ne sais pas combien d'hommes il y avait dans une brigade de l'ABiH.

 12   Q.  Ecoutez, ça ne faisait pas 5 000 hommes; ça c'est certain, mais ça

 13   représentait de trois à cinq bataillons, je peux vous le dire, avec chacun

 14   500 hommes. Donc ça vous donne environ 2 500 seulement. Peu importe, si

 15   vous ne savez pas ceci, nous allons passer.

 16   Mais est-ce que vous savez que depuis le mont Igman il y a eu des

 17   tirs très intensifs sur la ville de Sarajevo, surtout sur ses quartiers

 18   serbes, mais il y a eu peut-être aussi des balles perdues qui sont arrivées

 19   dans d'autres quartiers ? Est-ce que vous avez connaissance de la poursuite

 20   des tirs d'artillerie sur Sarajevo depuis le mont Igman ?

 21   R.  Moi, je n'ai jamais vu de tirs d'artillerie depuis le mont Igman

 22   dirigés sur Sarajevo. Et de là où nous étions, à l'hôpital militaire, quand

 23   nous y étions, s'il y avait eu des tirs partant du mont Igman, nous

 24   n'aurions pas pu filmer, parce que c'était trop à l'ouest par rapport à

 25   l'endroit où nous étions.

 26   Q.  Merci.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut revoir la page 101. Je

 28   voulais simplement donner lecture d'un bref passage qui vous donnera une

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  1   idée de l'intensité des tirs provenant du mont Igman. C'est vers la fin de

  2   la deuxième page.

  3   "Ainsi, Jusuf Prazina…" là, je cite, "…qui tirait depuis le mont

  4   Igman en l'espace d'un seul jour a tiré quelque 300 obus de 130

  5   millimètres." Ça c'est un canon qu'on utilise là, n'est-ce pas, contre des

  6   installations adverses qu'on aurait pu cibler avec des mortiers de 82-

  7   millimètres. Pendant l'espace de deux ou trois jours, pendant ces seules

  8   journées, plusieurs milliers d'obus de 120-millimètres ont été tirés depuis

  9   le mont Igman, deux fois plus que ce qu'on aurait pu donner à des unités de

 10   l'armée."

 11   Il critique donc l'utilisation excessive, à son avis, des munitions

 12   de mortier d'artillerie contre la Sarajevo serbe. Comment se fait-il que

 13   l'opinion internationale, l'opinion mondiale, n'en ait pas été informée,

 14   alors qu'il y avait tellement de correspondants à Sarajevo ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 16   M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection, mais pourrait-on donner une

 17   date, situer ceci dans le temps ? Car on ne voit pas ici de quelle date il

 18   s'agit.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais impossible de le savoir, si on

 20   n'a pas la traduction du texte.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être que je peux vous aider. Moi, je vois

 22   24 "octobra". Je pense que ça veut dire 24 octobre, qu'on trouve juste

 23   avant la mention des projectiles. Mais peut-être que M. Karadzic me

 24   corrigera, si je me trompe.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, et un peu plus bas, il est question

 26   du 14 décembre. Donc on est déjà à ce moment-là dans le deuxième semestre

 27   de l'année 1992.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant ainsi informé, est-ce que vous

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  1   pourrez répondre à la question, Monsieur le Témoin ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le

  3   Président. J'aimerais relire ce passage.

  4   Je ne savais pas que M. Delic avait critiqué le recours qu'il jugeait

  5   excessif à l'artillerie. C'est seulement l'année d'après que j'ai rencontré

  6   le général Delic ou même plus tard; c'était tout au début de l'année 1995,

  7   si je me souviens bien. Comme il ne nous l'a pas dit, je ne savais pas

  8   qu'il y avait des commandants de l'ABiH qui trouvaient qu'il y avait une

  9   utilisation excessive de munitions, d'obus de mortier, d'artillerie, à

 10   partir du mont Igman, dirigés contre la Sarajevo serbe. Et je ne sais pas

 11   s'il y avait d'autres correspondants. Moi, je n'étais pas en octobre à

 12   Sarajevo, mais j'y étais en décembre, et je n'ai pas eu connaissance de ces

 13   critiques formulées par un commandant de l'ABiH quant à l'utilisation, à

 14   son avis, excessive d'artillerie depuis le mont Igman.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Mais ce que je veux dire, c'est qu'il y a eu 300 projectiles d'obusiers

 17   et plusieurs centaines d'obus de 120-millimètres. Ce qui m'intéresse, ce

 18   n'est pas le fait qu'on regrette l'usage excessif de ces munitions, mais

 19   plutôt que ceci cause la perte de vies serbes. Et je vous demande pourquoi

 20   l'opinion publique internationale n'en a pas été informée alors qu'il y

 21   avait autant de journalistes, de correspondants, à Sarajevo ? Le fait est

 22   que ce n'était pas connu, que le Tribunal ne le savait pas non plus jusqu'à

 23   présent.

 24   Mais enfin, passons et prenons la page 104.

 25   R.  Mais un instant, Monsieur Karadzic, vous me posez une question. Et pour

 26   ce qui est de la critique formulée par M. Delic, moi, je peux vous dire que

 27   nous ne savions pas qu'il avait fourni cette critique. Donc j'ai répondu à

 28   votre question. C'était la question que vous m'aviez posée. J'ai répondu.

Page 2556

  1   Maintenant si vous posez une autre question pour demander pourquoi nous

  2   n'en avons pas fait état dans nos reportages, nous journalistes, nous avons

  3   dit qu'il y avait des tirs venant des deux parties au conflit. Je ne me

  4   souviens pas exactement de ceci, de ces 300 obus qui font l'objet d'une

  5   observation faite par M. Delic dans son livre.

  6   Q.  Merci. Moi, j'ai dit que grâce à cette critique qui vient de cette

  7   source même, de la partie adversaire, nous avons des informations.

  8   Mais laissons ce livre de côté. Je demande le versement de cette page.

  9   Mais est-ce que vous saviez que l'ABiH, l'armée musulmane, avait des

 10   contacts permanents avec l'Iran et le Pakistan ? Est-ce que vous en avez

 11   parlé ? Est-ce que vous avez informé l'opinion publique internationale de

 12   cela ? 

 13   R.  Non, je n'ai pas fait de reportage là-dessus, parce que je n'avais pas

 14   connaissance de la moindre forme de coopération entre l'ABiH, l'Iran ou le

 15   Pakistan.

 16   Q.  Fort bien. Nous avons fourni des renseignements à cet effet, mais nous

 17   n'avons pas été pris au sérieux.

 18   Laissons ce sujet de côté puisque vous n'avez pas aucune connaissance à ce

 19   propos. Prenons maintenant le document dont je vais demander l'affichage,

 20   il porte le numéro 1D01180.

 21   Il va bientôt s'afficher, mais je vous dis déjà qu'il s'agit ici du 6

 22   décembre 1992. Voyez l'exactitude qui caractérise les rapports du Corps de

 23   Sarajevo Romanija.

 24   On n'a pas encore de traduction, donc je vais vous en donner lecture. Il y

 25   a une copie papier, si quelqu'un en veut une, mais je peux en faire

 26   lecture.

 27   6 décembre 1992 :

 28   "Pendant toute la journée, à partir de 2 heures jusqu'à 17 heures, il y a

Page 2557

  1   eu des activités de l'artillerie ennemie depuis Igman et Hrasnica, dirigées

  2   contre Ilidza, Hadzici, Vojkovici, Lukavica, la caserne Prince Slobodan

  3   Seljo [phon] et les positions des 1er et 2e Brigades de Sarajevo. Plus de

  4   300 obus sont tombés, et des dégâts considérables ont été ainsi

  5   occasionnés."

  6   Et puis je prendrai le dernier paragraphe, le paragraphe 7, que je lise :

  7   "Deux combattants ont été tués et neuf blessés. Il y a parmi eux deux

  8   blessés graves. Quinze femmes et enfants ont été blessés à Ilidza."

  9   Il est fait ici, une fois de plus, référence à 300 obus, comme l'a souligné

 10   ici le commandant musulman, M. Delic. Mais ici, il est aussi question de

 11   perte, 15 femmes et enfants serbes à Ilidza. Est-ce que ça méritait

 12   l'attention des médiats internationaux ? Le 5, vous avez fait un reportage

 13   sur Otes. Ici, nous sommes le 6 décembre.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que ça mérite l'attention des médias internationaux ? Et

 16   pourtant vous n'en avez pas parlé dans vos reportages. 

 17   R.  Tout d'abord, je vous dirai que je me ne souviens pas d'avoir été

 18   informé de ceci. J'étais dans la partie contrôlée à Sarajevo par l'ABiH à

 19   ce moment-là, et je ne pouvais plus aller à Ilidza, comme j'avais pu le

 20   faire en juin 1992. C'était devenu beaucoup plus compliqué. Je ne me

 21   souviens pas non plus en avoir été informé par Londres. Je suppose que ces

 22   renseignements ont été envoyés à Londres par votre gouvernement. Je ne me

 23   souviens pas non plus avoir appris cela à Sarajevo. Ça s'est passé de

 24   l'autre côté des lignes de front. Quand on était d'un côté de la ligne de

 25   front, on faisait des reportages sur ce qu'on y voyait de ce côté-là. Mais

 26   si je m'étais trouvé à Ilidza, il est certain que ceci aurait tout à fait

 27   mérité un reportage.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

Page 2558

  1   Je demande le versement du document.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  3   M. NICHOLLS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Le témoin

  4   n'est pas en mesure d'en parler. Il a dit clairement qu'il ne peut pas le

  5   commenter, ce document, qu'il n'était pas au centre de Sarajevo, qu'il n'a

  6   pas été informé de la survenue de l'incident, qu'il n'a pas été emmené sur

  7   les lieux, et qu'il lui aurait été impossible de se trouver sur ces lieux à

  8   ce moment-là.

  9   [La Chambre de première instance se concerte] 

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La même règle va s'appliquer ici, le

 11   témoin n'étant pas en mesure d'apporter un commentaire sur ce document. Le

 12   document n'est pas déclaré recevable; en tout cas, pas par le truchement du

 13   présent témoin.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 15   Peut-on afficher le document 1D1222, juste le temps de vous présenter un

 16   paragraphe du document. Je lis : "Instruction sur la façon de traiter les

 17   journalistes et le personnel de la FORPRONU." 12 septembre 1992, c'est la

 18   date de rédaction du document. Page 3 du document, point 18, général Galic

 19   et colonel Krsmanovic. Général Galic : 

 20   "Le rapport avec le personnel de la FORPRONU et les rapports avec les

 21   journalistes doivent se caractériser par le plus de corrections et de

 22   courtoisie possible. Nous pourrons ainsi nous faire valoir sur notre

 23   meilleur jour."

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Si je vous disais que les correspondants étrangers ne s'intéressaient

 26   pas du tout à la version des événements qu'avaient les Serbes, que

 27   répondez-vous ?

 28   R.  Que vous dites des sornettes. Nous sommes allés à Pale. Nous avons

Page 2559

  1   demandé à travailler à Pale. Nous y étions en septembre 1992. Et dans une

  2   certaine mesure, nous avons pu y travailler.

  3   Mais je reviens au document précédent, Monsieur Karadzic, si vous

  4   voulez bien arrêter de bavarder avec votre collègue. En septembre, nous

  5   avons été emmenés sur une position tenue par les Serbes à l'extérieur de

  6   Hadzici. Nous avons fait l'objet de tirs. Nous avons filmé. Nous avons fait

  7   un reportage. Si on nous emmène quelque part, on fait un reportage. Mais si

  8   on n'est pas emmené quelque part, comment voulez-vous travailler ? Ce n'est

  9   pas possible.

 10   De plus, sur ce point plus général, je vous dirais et je dirais aux

 11   Juges de la Chambre qu'en avril 1994, pour des raisons qui n'ont jamais été

 12   communiquées, j'ai été interdit, à vie, de travailler par les autorités

 13   serbes, et ceci a été confirmé par les autorités serbes de Bosnie. Comment

 14   voulez-vous que nous rendions compte de votre version des faits vus sur

 15   votre ligne de front dans ces conditions-là ?

 16   Q.  Vous avez dit à plusieurs reprises, vous avez parlé d'arrestation. Mais

 17   quand avez-vous été appréhendé, quand avez-vous donné des renseignements à

 18   ce propos, et quand est-ce que vous nous avez informé de ces arrestations ?

 19   Je demande d'abord le versement du document.

 20   R.  Mais je n'ai pas commenté ce document.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, il n'est pas déclaré recevable.

 22   C'est la même règle qui s'applique, Monsieur Karadzic. Vous n'avez pas

 23   beaucoup posé de questions sur ce document, et le témoin n'a apporté aucun

 24   commentaire.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais ici ce sont des instructions fournies

 26   par un chef de corps d'armée qui dit comment il faut traiter les

 27   journalistes. C'est un lien direct avec les propos de M. van Lynden qui a

 28   dit que nous avions maltraité ou traité les journalistes de mauvaise façon.

Page 2560

  1   C'est le contraire. Ce sont les journalistes qui nous ont maltraités, et

  2   c'est pour ça que nous avons répondu sur le terrain de cette façon-là.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  C'est bien vrai, n'est-ce pas ? Nous avons été frustrés par l'attitude

  5   des médias internationaux; après quoi, nous avons réagi.  

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, nous avons rendu une décision.

  7   Passez à la question suivante.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on afficher un document sur le

  9   rétroprojecteur.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

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  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

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 13   Vous voyez maintenant la première page, "Déclaration concernant la Bosnie",

 14   est-il dit, donc la conférence portait sur toute la Yougoslavie mais ce

 15   document-ci ne concerne que la Bosnie.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  N'est-ce pas, Monsieur le Témoin ? Nous sommes ici à la fin du mois

 18   d'août 1992. A cette date-là, Vance et Owen ont succédé à Carrington,

 19   n'est-ce pas ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 21   Monsieur Nicholls, oui.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer quelques

 23   instants à huis clos partiel, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. NICHOLLS : [interprétation] Je vérifie, mais il me semble --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 27   Oui, nous sommes maintenant à huis clos partiel.

 28   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 2562-2564 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  6  (expurgé)

  7   [Audience publique]

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement d'un

  9   document -- ou plutôt, d'une phrase, qui montre que Rasim Delic s'était

 10   opposé à la démilitarisation de Sarajevo ? Je voudrais qu'on place ce

 11   document sur le rétroprojecteur, une fois de plus. Et demain, nous allons

 12   montrer ce que le général Rose dit à ce sujet.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est encore un document qui n'est pas

 15   traduit, et il ne nous a pas été fourni.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais on vous a averti que ce document

 17   allait être employé ?

 18   M. NICHOLLS : [interprétation] Non.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pouvez-vous vous

 20   expliquer sur ce fait ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, c'est un document qui fait partie

 22   des pièces d'une autre Défense, et ça a déjà été versé au dossier là-bas,

 23   dans l'autre affaire. Etant donné que le Procureur a des objections pour ce

 24   qui est du caractère cumulatif des éléments de preuve que nous montrons,

 25   nous ne sommes pas d'accord avec eux, mais une déclaration a été prise à

 26   cet effet, alors nous sommes en train de démontrer ce qui s'est passé à

 27   Sarajevo, et ceci, par opposition à ce qui a été repris par les médias et,

 28   notamment Sky News, en l'occurrence. Et j'ai été contraint de montrer que

Page 2566

  1   la partie adverse était contre la démilitarisation.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, ce n'est pas ce que

  3   j'ai dit. Moi, je parle juste de procédure, nous étions d'accord sur les

  4   règles.

  5   Vous devez avertir l'Accusation des documents que vous allez utiliser dans

  6   le cadre de votre contre-interrogatoire, soit à l'avance soit au moins au

  7   début du contre-interrogatoire; et fournir les traductions en plus. Or,

  8   vous n'avez pas informé les parties de l'utilisation de ce document,

  9   surtout pas l'Accusation et, en plus, il n'y a même pas de traduction.

 10   Donc, je vous demandais des explications à propos de cela uniquement.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'ai dit, parce que nous avions renoncé à

 12   bon nombre de documents que nous avions voulu montrer, parce que le

 13   Procureur avait fait objection en parlant du caractère cumulatif. Alors,

 14   j'ai voulu tirer au clair un aspect que je n'avais pas du tout l'intention

 15   de tirer au clair avec le témoin, mais il en a été question à l'occasion de

 16   notre session de récolement. Si cela n'est pas possible, nous allons

 17   retirer ce document, et je demanderai à ce qu'on nous en montre un autre.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, soulevez-vous une

 19   objection au fait d'utiliser ce document ?

 20   M. NICHOLLS : [interprétation] Non, pas parce que nous avons été avertis

 21   très tardivement de son utilisation, mais j'espère que ça ne va pas se

 22   poursuivre et que ça ne va pas perdurer, car ça semble vraiment être un

 23   schéma maintenant.

 24   Il y a aussi le problème de la traduction, mais M. Reid, fort

 25   heureusement, a trouvé une traduction pour ce document que nous pouvons

 26   fournir à la Chambre.

 27   En ce qui concerne la pertinence, en revanche, alors là, je ne sais

 28   absolument pas où M. Karadzic veut en venir, mais cela dit, je ne soulève

Page 2567

  1   pas d'objection parce que ceci a été fourni tardivement.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  3   Posez votre question, Monsieur Karadzic.

  4   M. KARADZIC : [interprétation] Bien.

  5   Q.  Ma question, Monsieur van Lynden, c'est que lors du récolement, vous

  6   aviez indiqué que vous jugiez que notre disposition et notre disponibilité

  7   pour la démilitarisation de Sarajevo n'avait jamais été prise véritablement

  8   au sérieux. Et pour contester la chose, j'ai proposé le document précédent,

  9   parce qu'à la Conférence de Londres, nous avions accepté de négocier au

 10   sujet de la démilitarisation, et ce document, je le montre --

 11   Alors, le compte rendu dit "a été pris au sérieux". Or, moi, j'ai dit

 12   qu'elle n'a pas été considérée comme sérieuse, notre proposition.

 13   Nous avions proposé à Londres que ça fasse l'objet de négociations,

 14   et ici, on parle de la démilitarisation de Sarajevo, qui est complètement

 15   exclue pour les raisons suivantes, puis on énumère des raisons.

 16   Alors, j'aimerais qu'on nous montre le bas de la page pour que l'on

 17   voie bien que cela a été signé par Rasim Delic.

 18   Donc, est-ce que, Monsieur van Lynden, il est possible de voir que

 19   c'est la partie musulmane qui ne veut pas de démilitarisation de Sarajevo ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez la traduction ?

 21   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, en effet. Peut-être pouvons-nous

 22   laisser le témoin lire la traduction.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mettons la traduction en anglais

 24   sur le rétroprojecteur.

 25   M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais que le témoin puisse prendre

 26   connaissance de ce document.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un document assez complexe et on me

 28   demande d'y réagir à brûle-pourpoint.

Page 2568

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais la question qui vous a été

  2   posée était la suivante : c'est le côté musulman qui ne voulait pas la

  3   démilitarisation de Sarajevo.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un document qui date d'avril 1995, et

  5   absolument pas de la conférence d'août 1992, donc déjà là, il y a un

  6   hiatus. Ensuite, c'est un document qui porte sur les événements qui se

  7   trouvent à Bihac à l'époque, en Bosnie du Nord. Alors, je ne vois

  8   absolument pas le lien avec le document précédent, qui datait de la

  9   conférence d'août. Monsieur Karadzic, où est le lien ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si vous me le permettez, j'aimerais -- parce

 11   qu'on n'a pas encore dans l'affichage électronique le livre du général

 12   Rose. On l'aura demain. Mais entre 1992 et 1995, pendant les années 1993 et

 13   1994, le général Rose explique les raisons pour lesquelles la partie

 14   musulmane rejette les propositions serbes visant à faire démilitariser

 15   Sarajevo. Mais vous avez dit ce que vous avez su nous dire.

 16   Est-ce qu'on peut demander le versement de ce document au dossier ?

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au vu du document, la Chambre est

 19   convaincue que ce document est pertinent et que ce document a une valeur

 20   probante. Il sera donc admis.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il sera admis sous la cote D209.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 23   Est-ce qu'on peut nous montrer le 1D01141.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Et en attendant l'affichage, je vous rappelle que vous aviez précisé

 26   que vous êtes allé à Hadzici. Alors, est-ce que ça s'est passé début

 27   septembre 1992, si je ne m'abuse, non ?

 28   R.  La fin du mois de septembre 1992, à l'extérieur de Hadzici, dans les

Page 2569

  1   bois.

  2   Q.  Merci. Alors, voici un document qui nous parle de ce qui nous arrivait

  3   le 7 septembre de 1992. Alors, c'est un rapport du commandement du Corps de

  4   Sarajevo-Romanija qui est adressé à l'état-major principal.

  5   Premièrement :

  6   "A l'occasion de la période de présentation de rapports écoulée, l'ennemi a

  7   renforcé l'intensité de ses activités par des attaques combinées à

  8   l'artillerie et l'infanterie, et pratiquement sur toutes les lignes de la

  9   défense.

 10   "Nous avons noté :

 11   "Une attaque d'infanterie de l'ennemi dans la rue Ozrenska. L'attaque

 12   a été repoussée. Deux conscrits légèrement blessés."

 13   Alors, est-ce que vous saviez où ça se trouvait la rue Ozrenska ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Merci. Je vous pose la question parce que c'est au quotidien qu'il y a

 16   eu des combats là-bas.

 17   Alors, deuxième paragraphe :

 18   "Attaque à l'artillerie puissante sur le secteur de Vojkovici. Attaque à

 19   l'infanterie sur le secteur Krtelj et Krupac. Et l'artillerie a intensément

 20   tiré sur les premières lignes de la défense et en profondeur du territoire.

 21   Trois conscrits blessés et un ouvrage quelconque endommagé."

 22   Puis on dit en tiret suivant :

 23   "Activité puissante de l'artillerie ennemie en direction de Ilinjaca."

 24   Mais je voudrais vous parler de ce qui est dit au sujet des civils.

 25   "Dans le secteur d'Ilidza, nous avons noté de fortes attaques

 26   d'artillerie de l'ennemi et de l'infanterie de l'ennemi au centre d'Ilidza.

 27   Il y a la poste qui a été touchée, gros dégâts matériels, trois conscrits

 28   blessés. L'artillerie ennemie a tiré également de Kodzani [phon] vers

Page 2570

  1   Hadzici. Il est tombé 25 obus. Il n'y a pas eu de perte humaine, mais les

  2   dégâts matériels sont considérables."

  3   Et au troisième, on dit :

  4   "La situation sur le territoire dans la zone de responsabilité du Corps de

  5   Romanija-Sarajevo est complexe. L'artillerie de l'ennemi tire en direction

  6   des installations civiles. Et cela, en sus des dégâts matériels, ne fait

  7   que rendre la situation plus grave encore."

  8   Il a été tué 14 conscrits et endommagés dix moyens techniques et une

  9   arme appelée Praga.

 10   Alors, tout le mois de septembre, vous étiez là-bas, dans la deuxième

 11   moitié, mais dans la première moitié, il y a déjà des tirs intensifs en

 12   direction des secteurs serbes de Sarajevo. Etes-vous d'accord avec moi ?

 13   R.  Je ne sais pas s'il y a eu un pilonnage violent de cette partie de

 14   Sarajevo au début septembre. J'étais à Pale à ce moment-là. Ça ne m'a pas

 15   été mentionné à l'époque, et je n'ai pas été emmené sur place pour que l'on

 16   me montre ce qui s'était passé, ni par des personnes venant de votre

 17   gouvernement ni de personne de votre armée, pour voir ce qui s'était passé.

 18   J'étais à Pale. Nous sommes allés à Grbavica. Mais lorsque j'étais de votre

 19   côté, sur vos propres lignes de front, je n'ai jamais assisté à un

 20   pilonnage intensif. J'ai assisté en fait à un tir qui avait été tiré sur

 21   Grbavica depuis le côté musulman, mais la riposte s'est faite à la

 22   mitrailleuse. Nous avons filmé cela, et c'est vrai que nous l'avons

 23   diffusé. Mais je ne peux rien vous dire de plus.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, mes collègues vous

 25   ont expliqué comment bien utiliser votre temps dans le cadre du contre-

 26   interrogatoire, et comment exactement contre-interroger le témoin. Et ceci

 27   est un exemple parfait, à mon avis, d'une perte de temps. Vous avez lu tout

 28   ce document, ou l'essentiel du document et le témoin n'a répondu que par

Page 2571

  1   "Je ne sais pas." Donc le fait que vous ayez lu quelque chose, ce n'est pas

  2   un élément de preuve. Il faut poser une question en résumant le document le

  3   plus simplement possible. Si le témoin répond "Je ne sais pas", il faut

  4   présenter ce document à un autre témoin plus tard. Et ensuite la Chambre

  5   pourra évaluer la crédibilité de ce qui s'est vraiment passé ou ce qui ne

  6   s'est pas passé. Mais lire un document in extenso, ce n'est pas une bonne

  7   façon de procéder à un contre-interrogatoire.

  8   Passons à autre chose.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Où vous trouviez-vous le 31 décembre 1992, Monsieur ?

 12   R.  Chez moi.

 13   Q.  Pas à Sarajevo, n'est-ce pas ?

 14   R.  Non, je n'étais pas à Sarajevo. J'ai quitté Sarajevo vers la fin

 15   décembre pour me rendre à Belgrade, parce que des élections se tenaient à

 16   Belgrade.

 17   Q.  Revenons alors vers une chose que vous avez dite au sujet des convois,

 18   et c'est en corrélation avec Srebrenica.

 19   Je voudrais qu'on nous montre le document 1D00271.

 20   On y dit, ou, plutôt, dans la déclaration du 25, 26 février 2010,

 21   page 0674-9991 vous avez dit -- c'est la même teneur de la déclaration sur

 22   plusieurs pages et vous avez indiqué que vous étiez présent à Srebrenica et

 23   que vous avez rejoint un convoi de la FORPRONU. Cependant, le convoi n'a

 24   pas eu l'autorisation de passer les barrages routiers à Bratunac, et puis

 25   on a dit et on a organisé des protestations simulées.

 26   "De fausses protestations donc se seraient produites pour le compte

 27   des médias mondiaux qui étaient présents --"

 28   R.  Je vous arrête tout de suite, Monsieur Karadzic, parce que vous vous

Page 2572

  1   trompez. Je n'étais pas à Srebrenica. Je suis allé avec le convoi des

  2   Nations Unies depuis Sarajevo jusqu'en Serbie, et j'étais avec eux

  3   lorsqu'ils ont essayé de rentrer dans l'enclave de Srebrenica. Mais je

  4   n'étais pas avant seul à Srebrenica, j'y suis allé avec le convoi de la

  5   FORPRONU.

  6   Q.  Merci. Mais toujours est-il que vous dites que cette protestation a été

  7   simulée, que c'était un simulacre, et que l'événement s'est produit dans

  8   l'intérêt des médias mondiaux qui se trouvaient être présents sur les

  9   lieux. Et puis vous laissez entendre que la partie serbe avait voulu que le

 10   monde soit informé du fait que les Serbes empêchaient les gens de passer.

 11   Alors, en quoi avez-vous estimé qu'il y avait eu là un simulacre, tel que

 12   vous le laissez entendre ?

 13   R.  La FORPRONU et l'UNCHR avaient conclu un accord avec votre gouvernement

 14   selon lequel ce convoi, un jour bien précis, pouvait - si je me souviens

 15   bien c'était en novembre 1992 - traverser depuis la Serbie, passer par les

 16   territoires contrôlés par vos forces pour rentrer dans l'enclave de

 17   Srebrenica. Lorsqu'ils ont essayé de faire cela, ils ont été arrêtés par

 18   les militaires et ils se sont entendus dire qu'ils ne pourraient pas

 19   passer. Ensuite nous avons été emmenés à une manifestation où les seules

 20   bannières de protestation étaient en anglais, en fait, et non pas en serbo-

 21   croate. Une fois que j'ai vu ça, c'était en Irak en 1990 [comme

 22   interprété], lorsque l'Irak était gouverné par Saddam Hussein; et moi-même

 23   avec d'autres journalistes internationaux sommes allés jusqu'au Kurdistan

 24   irakien, et tout ce que l'on voyait c'était des mots écrits en anglais, ce

 25   qui montrait bien que ceci avait été préparé pour les médias internationaux

 26   et non pas pour les locaux. On n'a rencontré absolument personne qui

 27   parlait anglais d'ailleurs, lorsqu'on leur a posé la question.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre le 1D00271

Page 2573

  1   maintenant -- oui, alors c'est que nous montre. Oui, excusez-moi.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Alors, Monsieur van Lynden, penchez-vous dessus. C'est un document qui

  4   dit que cela a été intégré dans un document émanant de l'état-major

  5   principal. C'est daté du 28 novembre, et il dit qu'une colonne de la

  6   FORPRONU est arrivée sans être annoncée. Il y avait 19 véhicules avec de

  7   l'aide humanitaire destinée aux habitants de Srebrenica. Il y avait six

  8   véhicules et trois véhicules de Bratunac.  

  9   Alors, Monsieur van Lynden, sans annoncer un convoi, un soldat ne peut pas

 10   le laisser passer, parce que le soldat n'a pas la liberté d'improvisation

 11   qu'on voudrait lui prêter ?

 12   R.  Si je me souviens bien ce n'était pas un soldat. C'était un officier.

 13   Je ne suis pas certain de son grade. Enfin, il me semble que c'était un

 14   commandant. Mais peut-être un lieutenant-colonel, Potpukovnik.

 15   D'après nos informations qui venaient de la FORPRONU - puisqu'il y

 16   avait un détachement de la FORPRONU avec la colonne - et les informations

 17   du HCR, qui était en charge de ce convoi de vivres, ceci n'avait pas

 18   uniquement été annoncé, mais avait fait l'objet d'un accord avec votre

 19   gouvernement. Ce jour-là, le convoi avait l'autorisation de rentrer dans

 20   l'enclave de Srebrenica. Il se peut, certes, que l'officier concerné

 21   n'avait pas été informé par votre gouvernement de la chose et n'a pas

 22   permis au convoi de passer parce qu'il n'avait pas été informé. Cela se

 23   peut. Mais le convoi a attendu plusieurs jours avant de pouvoir rentrer

 24   dans Srebrenica. Or, il ne fallait quand même pas plus plusieurs jours pour

 25   informer quelqu'un que votre gouvernement avait consenti à laisser passer

 26   ce convoi de vivres dans Srebrenica, accord qui avait été signé avec le HCR

 27   et la FORPRONU.

 28   Q.  Le général Talic informe qui de droit que ce n'était pas annoncé, et

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  1   quand bien même c'était un général, s'il n'avait pas obtenu une annonce de

  2   la part du comité d'Etat chargé de la coopération, il ne pouvait pas

  3   laisser passer qui que ce soit.

  4   Et voilà ce qui est dit, l'état-major principal de l'armée de la

  5   Republika Srpska, et compte tenu de l'influence exercée par le président de

  6   la présidence, M. Radovan Karadzic :

  7   "Les citoyens et les autorités des localités ont compris la

  8   situation. Après inspection, la colonne est passée et est arrivée le même

  9   jour à Srebrenica."

 10   Donc ça s'est passé le même jour, ça n'a pas pris plusieurs jours.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de répondre, Monsieur van Lynden,

 12   je vois que M. Nicholls a une objection.

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Ce n'est pas une objection.

 14   Je voudrais juste un éclaircissement. Il ne s'agit pas d'un rapport

 15   du général Talic, le commandant du 1 KK. D'après la traduction, il s'agit

 16   d'information qui a été relayée au général Talic. Or, la façon dont la

 17   question était formulée semblait indiquer que le général Talic était

 18   impliqué dans cet incident et faisait rapport de ce qui s'était passé. Or,

 19   ce n'est pas ce qui s'est passé. Le général Talic, qui était à la tête du 1

 20   KK à Banja Luka, était totalement de l'autre côté. Donc je tenais juste à

 21   mettre cela au compte rendu.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la fin du document, il est quand même

 23   écrit "Momir Talic, Général," n'est-ce pas ?

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux vous expliquer.

 25   M. NICHOLLS : [interprétation] En effet, mais en fait M. Talic ne fait que

 26   relayer les informations qu'il a obtenues de la part de l'état-major

 27   principal.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Talic a obtenu cette information de

  2   l'état-major, et il la transmet en guise d'information. Il la transmet

  3   telle que obtenue de la part de l'état-major principal.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous souvenez-vous de la question,

  5   Monsieur le Témoin ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Une partie de la question, à savoir si cela

  7   s'est passé en un seul jour. Je tiens à dire que non. On est restés là sur

  8   place plusieurs jours. On est restés en Serbie plusieurs jours avant que le

  9   convoi ne soit finalement autorisé à passer. Donc, à ma connaissance,

 10   c'était le premier convoi du HCR qui était autorisé à rentrer dans

 11   Srebrenica.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle était votre question

 13   exacte, Monsieur Karadzic, à propos de l'influence du président Karadzic ?

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  L'armée informe ici du fait que l'état-major principal et le président

 16   de la présidence ont joué de leur influence à l'égard de la population pour

 17   que celle-ci accepte le passage du convoi. Et ce n'est pas le tout premier

 18   convoi, c'est un énième convoi, mais ça c'est une chose facile à prouver.

 19   Donc ici, il s'agit d'une allégation de votre part disant que c'était

 20   une espèce de révolte simulée de la part de la population. Mais le document

 21   est confidentiel et était échangé entre différents commandements de l'armée

 22   serbe disant qu'il a fallu investir des efforts pour convaincre la

 23   population de la nécessité de laisser passer le convoi. Alors ma question

 24   c'était celle : pourquoi avez-vous dit que c'était tout du simulacre, alors

 25   qu'on voit bien que ça n'en est pas un ?

 26   R.  Je crois que j'ai déjà répondu à cette question. Notre impression était

 27   que tout ceci avait été monté de toutes pièces. C'était une manifestation

 28   simulée. Lorsque le convoi a eu le feu vert, donné par vos forces armées,

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  1   on n'a plus vu de manifestants.

  2   Q.  Si je puis dire très brièvement. Ça, vous l'avez répété plusieurs fois,

  3   alors aujourd'hui vous dites que vous avez eu l'impression. Alors c'est une

  4   impression. Je vous prie de préciser que c'est une impression. On se

  5   débrouillera plus facilement quand il s'agit de vos impressions en

  6   comparaison avec des faits, parce que vous l'avez dit à plusieurs reprises

  7   aujourd'hui, cela, n'est-ce pas.

  8   Au niveau de Galic, de Milosevic, ceux-là ont récolté des jugements

  9   assez graves et on s'est basé sur des impressions ?

 10   R.  Je ne savais pas que M. Milosevic avait été condamné à quoi que ce

 11   soit. Et en ce qui concerne la peine infligée à M. Galic, c'est le Tribunal

 12   qui lui a infligé cette peine et non pas moi.

 13   Ce que nous avons vu à Bratunac, c'était une manifestation où les

 14   seules banderoles tenues étaient en anglais uniquement, dans aucune autre

 15   langue. Nous en avons conclu que c'étaient des banderoles pour les médias

 16   internationaux et que, de ce fait, la manifestation avait été organisée de

 17   toutes pièces.

 18   Q.  Non, moi j'ai parlé du général Milosevic et non pas du président

 19   Milosevic. Hélas, il y a bon nombre de Milosevic ici.

 20   Ce que je voulais dire, Monsieur van Lynden, si ça avait été organisé, ça a

 21   été organisé par la population qui savait que vous n'informiez pas les

 22   médias comme il fallait. Ce n'est pas par les autorités. Les autorités se

 23   sont employées en faveur du passage de ces convois, parce qu'on le voit

 24   dans ces informations confidentielles échangées entre les différentes

 25   autorités.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que ce document soit versé au

 27   dossier.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

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  1   M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, et pour des raisons de

  3   pertinence, nous admettrons ce document.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote D210.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons en profiter pour lever la

  6   séance.

  7   Mais le Juge Morrison a quelque chose à dire.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] J'ai deux petits points à vous

  9   demander.

 10   Dans votre déclaration, vous parlez très souvent de balles incendiaires.

 11   Vous voulez dire des balles traçantes, ou est-ce que vous faites une

 12   différence entre les balles traçantes et les balles incendiaires ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, je parle bien des balles

 14   incendiaires, pas de balles traçantes, des balles incendiaires. Je pense

 15   qu'il y a une différence.

 16   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] En effet, il y a une  différence,

 17   Monsieur, mais je voulais m'assurer que vous connaissiez bien la

 18   différence, vous aussi.

 19   Deuxièmement, c'est plutôt pour vous, Monsieur Karadzic. Je ne vais pas

 20   vous y obliger, certes, mais j'ai l'impression que nous n'aurons pas

 21   beaucoup de temps demain, donc sachez que s'il y a des documents très

 22   volumineux que vous aimeriez présenter à M. van Lynden demain, il serait

 23   peut-être utile de nous le dire après que cette séance soit levée et nous

 24   en donner des exemplaires. Je pense que M. van Lynden va m'en vouloir de

 25   lui avoir donné lecture plus passionnante ce soir, mais cela pourrait être

 26   très utile, en revanche, pour être plus efficace demain en prétoire. C'est

 27   une possibilité, bien sûr. Je ne vous oblige à rien.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Donc demain --

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux dire un mot, s'il vous plaît

  2   ?

  3   Etant donné qu'il y a un bon nombre de documents à caractère

  4   cumulatif, j'ai envisagé moi-même la proposition d'un versement de ces

  5   documents en bloc, en direct, et s'agissant de M. van Lynden, j'aurais

  6   souhaité lui présenter des reportages d'autres médias, des journaux

  7   mondialement connus. Peut-être pourrais-je lui proposer cela ce soir, et on

  8   montrerait le livre à M. Rose demain et on en parlera demain. Et du

  9   sentiment de la Défense, M. van Lynden a dit avec pas mal d'aisance

 10   certaines choses. Donc, je ne veux pas accuser M. van Lynden d'une façon

 11   délibérée de procéder, mais les imprécisions et les impressions, c'est

 12   quelque chose qui porte préjudice à la Défense, et nous voulons que les

 13   choses soient dites de façon tout à fait précise.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Mais nous allons donc lever la séance et nous reprendrons demain à 8 heures

 16   30. Nous poursuivrons jusqu'à 11 heures, après quoi M. van Lynden devra

 17   nous quitter. Ensuite, lors des deux premières séances, nous aurons une

 18   pause de 15 minutes, et après la déposition de M. van Lynden, nous aurons

 19   une autre pause de 15 minutes et nous entendrons ensuite le témoin suivant,

 20   et nous poursuivrons jusqu'à 13 heures 30.

 21   [Le témoin quitte la barre]

 22   --- L'audience est levée à 19 heures 06 et reprendra le vendredi 21 mai

 23   2010, à 8 heures 30.

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