Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 15 octobre 2010

  2   [Audience de Règle 54 bis]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 10 heures 02.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Je vais demander à M. le Greffier de citer l'affaire inscrite au rôle.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Bonjour, Monsieur le Président,

  9   Madame, et Messieurs les Juges.

 10   Affaire IT-95-5/18-T, le Procureur contre Radovan Karadzic.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Aujourd'hui nous tenons une audience

 12   consacrée à des débats suite à une ordonnance de production forcée déposée

 13   par l'accusé le 31 août 2009, dans laquelle il demandait à la Bosnie-

 14   Herzégovine plusieurs documents dont il dit qu'ils sont pertinents pour sa

 15   cause.

 16   La procédure qui sous-tend cette requête est longue et complexe, l'accusé

 17   comme la Bosnie ont déposé plusieurs arguments à cet égard. Il n'en demeure

 18   pas moins que l'affaire a progressé lentement, et que la requête n'est

 19   toujours pas tranchée. Par conséquent, la Chambre s'est dit qu'il serait

 20   utile d'entendre les représentants de la Bosnie ainsi que l'accusé à

 21   l'occasion d'une audience.

 22   C'est la raison pour laquelle nous tenons audience aujourd'hui en présence

 23   de l'accusé, de l'Accusation, et d'un représentant de la Bosnie. Je tiens à

 24   remercier la représentante de la Bosnie, au nom de la Chambre de première

 25   instance, du fait qu'elle soit présente et prête à contribuer à cette

 26   audience.

 27   Je m'appelle O-gon Kwon, je suis le Président de la présente Chambre. J'ai,

 28   à ma droite, le Juge Howard Morrison; à ma gauche, le Juge Melville Baird;

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  1   et à ma droite, Mme le Juge Flavia Lattanzi.

  2   Je vais d'abord demander à la représentante de la Bosnie de se présenter et

  3   de dire quel est l'intitulé de sa fonction pour que ce soit acté au

  4   dossier.

  5   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Je m'appelle Miranda Sidran Kamisalic, et je suis l'ambassadeur de

  7   Bosnie-Herzégovine.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Votre Excellence.

  9   Je vais demander à la Défense de se présenter.

 10   Monsieur Karadzic, veuillez présenter les membres de votre équipe.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Volontiers, Vos Excellences.

 12   Le chef de l'équipe c'est moi, et j'ai, à mes côtés, mes conseillers

 13   juridiques, Me Peter Robinson et Me Marko Sladojevic.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 15   Je vais demander au conseil d'appoint de se présenter, s'il vous plaît.

 16   M. SINGH : [interprétation] Au nom de Richard Harvey, conseil d'appoint, je

 17   suis ici, moi-même, Me Avi Singh, ainsi que Me Eric Tully.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Je vais demander à l'Accusation

 19   de se présenter maintenant.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Bonjour

 21   à tous.

 22   Alan Tieger, Susanne Elliott et Iain Reid au nom de l'Accusation.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

 24   Nous allons bientôt vous entendre, mais auparavant il y a quelques

 25   questions de procédure à régler.

 26   Vous le savez, car il y a eu une ordonnance portant calendrier

 27   délivrée le 13 octobre 2006. A la suite de mes remarques liminaires, je

 28   vais poser plusieurs questions à l'Accusé, après quoi je poserai les mêmes

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  1   questions à Mme Sidran Kamisalic. Une fois ces questions posées, les

  2   participants auront l'occasion de soulever tout autre problème concernant

  3   l'ordonnance de production forcée, questions qui leur semble importantes à

  4   aborder au cours de l'audience.

  5   Je voudrais ensuite parler de toute demande d'audience à huis clos

  6   partiel ou complet. Etant donné que bon nombre des écritures concernées

  7   dans cette audience sont publiques et qu'il n'y a pas eu d'acte

  8   d'opposition en vertu de l'article 54 bis (F) déposé par la Bosnie, la

  9   Chambre a décidé que l'audience se tiendrait en audience publique tant

 10   qu'une question précise ne serait pas posée qui nécessiterait une audience

 11   à huis clos partiel. Il vous incombe donc, Madame, de nous dire si à votre

 12   avis ce passage à huis clos partiel s'impose, et la Chambre verra s'il est

 13   possible ou nécessaire de le faire.

 14   Madame Kamisalic, si la Chambre décide de passer à huis clos partiel,

 15   ceux qui suivent les débats dans la galerie du public n'entendront pas ce

 16   qui se dit à l'intérieur du prétoire et les débats ne seront pas non plus

 17   retransmis à l'extérieur de ce prétoire. De plus, les parties du compte

 18   rendu d'audience qui se tiennent à huis clos partiel ne seront pas mises à

 19   la disposition du public. Effectivement, seules les parties et l'Etat

 20   concerné vont recevoir un exemplaire des extraits du compte rendu

 21   d'audience qui concerne le passage à huis clos partiel.

 22   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 23   Je pense que nous sommes arrivés à ce stade, et nous pensons que l'audience

 24   à huis clos partiel n'est pas nécessaire.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame l'Ambassadeur.

 26   Autre chose.

 27   Vous savez, la Chambre a invité l'Accusation à assister à l'audience. Je ne

 28   sais pas si l'Accusé ou Mme Kamisalic demandent de discuter de tel ou tel

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  1   élément, de tel ou tel document ex parte en l'absence de l'Accusation. Si

  2   ce n'est pas le cas, l'Accusation restera présente pendant toute la durée

  3   de l'audience et pourra consulter le compte rendu de l'audience.

  4   J'aimerais savoir s'il y a des oppositions que vous voulez manifester,

  5   Madame l'Ambassadeur ou Monsieur l'Accusé, à la présence de l'Accusation.

  6   Maître Robinson.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  8   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Pas du tout.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 10   Enfin, nous allons bientôt commencer, mais auparavant j'encourage les

 11   participants à se concentrer sur les principaux points de litige plutôt que

 12   de revenir sur tous les arguments déjà présentés par écrit. Vous devez

 13   présenter tous vos arguments exposés à la Chambre de première instance, et

 14   nous donnerons à la partie concernée l'occasion de répondre en temps que de

 15   besoin.

 16   Voilà, nous allons commencer par l'Accusé.

 17   Je ne vais pas poser de questions précises, mais je vais vous demander,

 18   Monsieur Karadzic ou Maître Robinson, si vous pouvez faire une mise à jour

 19   de la question.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Volontiers, Monsieur le Président.

 21   Est-ce que -- si M. Karadzic me le demande, je pourrais en parler.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Nous avons commencé cette longue épopée,

 24   cette odyssée qui cherchait à obtenir des documents de la Bosnie-

 25   Herzégovine en juin 2009, lorsque nous avons demandé la production de

 26   documents concernant la contrebande d'armes de Tuzla en mars et février

 27   1995. Pourquoi ? Parce qu'en février 1995, un soldat du Bataillon norvégien

 28   était cantonné à Tuzla. Il travaillait pour la FORPRONU. Il a constaté

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  1   qu'il y avait une livraison venant d'un transporteur C-130 de l'aéroport de

  2   Tuzla, et des gens ont été envoyés par la FORPRONU, ont rencontré des

  3   hommes de l'armée de Bosnie qui ont refusé que ces hommes puissent aller

  4   voir l'endroit où cette livraison avait eu lieu. Puis il y a eu des

  5   entretiens, une enquête des Nations Unies qui a montré qu'il y avait eu

  6   livraison clandestine faite ainsi à cette époque. Il y avait interdiction

  7   de vol. Il y avait un embargo sur les armes qui avait été ignoré, ce qui

  8   veut dire que cette livraison pouvait parvenir à l'armée musulmane.

  9   Nous voulons savoir qui a fourni cet équipement à l'armée de Bosnie-

 10   Herzégovine. C'est la raison pour laquelle nous avons fait cette demande.

 11   Elle est restée sans réponse. Nous avons demandé au bureau du Haut

 12   commissaire d'utiliser ses pouvoirs pour encourager le gouvernement de

 13   Bosnie à produire ces documents. C'est resté sans réponse, ce qui fait que

 14   nous avons déposé une requête aux fins d'ordonnance de protection forcée en

 15   août 2009.

 16   Vous connaissez l'historique de la procédure. Il est difficile de

 17   démêler les chevaux des diverses réponses données par le gouvernement de

 18   Bosnie. Nous avons essayé de le faire. Mais s'agissant des documents

 19   sollicités concernant Tuzla, ça revient à dire ceci : le ministère de la

 20   Défense a déclaré qu'il pouvait trouver trois documents concernant une de

 21   nos six requêtes, mais n'a rien trouvé s'agissant des quatre autres

 22   requêtes et qu'aucune recherche n'avait été faite sur deux de nos requêtes

 23   disant qu'il était fort probable que ces objets étaient en possession

 24   d'autres organes du gouvernement. Apparemment, jusqu'à présent, rien n'a

 25   été fait en guise de recherche après ces deux requêtes.

 26   Nous avons aussi des raisons de croire que les perquisitions ou les

 27   recherches effectuées par le ministère de la Défense étaient approfondies,

 28   complètes, parce qu'ils ont dit qu'il y avait deux éléments qui ont -- dont

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  1   ils disaient qu'ils n'étaient pas en leur possession. Ils ont été reçus par

  2   l'Accusation, ce qui veut dire que le gouvernement avait ces documents dans

  3   ses archives, l'a donné à l'Accusation alors qu'ils nous ont dit ne pas les

  4   avoir en réponse à notre demande.

  5   A ce stade, je pense qu'il faut une ordonnance de production forcée car

  6   nous avons fait tous les efforts possibles en vue d'obtenir la coopération

  7   du gouvernement de Bosnie. Nous avons demandé des choses très précises, des

  8   éléments qui sont pertinents, nécessaires à notre défense.

  9   Je soulève que s'agissant de la même requête pour l'Allemagne, il y a

 10   déjà eu décision de votre part. en tout cas, il y a eu une décision

 11   majoritaire en faveur de la délivrance d'une ordonnance de production

 12   forcée.

 13   Il y a donc cinq éléments en souffrance qui devraient, à notre avis,

 14   faire l'objet d'une telle ordonnance et le gouvernement serait ainsi forcé

 15   de fournir ces éléments, devrait les chercher et devrait être tenu

 16   responsable en cas de défaut de production.

 17   Nous avons envoyé une lettre en janvier 2010 demandant cinq éléments

 18   supplémentaires dans l'espoir que la coopération qu'on pouvait escompter

 19   suffirait pour permettre la production de ces documents sans qu'il soit

 20   nécessaire de faire une demande aux fins de production forcée. S'agissant

 21   de ces documents, la correspondance avec la police semble indiquer qu'une

 22   recherche n'a jamais été effectuée pour trouver ces documents. A ce stade

 23   de la procédure, nous ne demandons pas à la Chambre de faire quoi que ce

 24   soit, car ce n'est pas là l'objet de notre demande de production forcée,

 25   mais nous allons conclure que nous n'avons obtenu de plein gré la

 26   coopération du gouvernement et nous allons sans doute déposer une requête

 27   aux fins de production forcée.

 28   Je répondrai volontiers à vos questions, mais voilà la mise au point

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  1   en ce qui concerne ce dossier.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit que la Chambre est

  3   désormais saisie d'une requête de production forcée s'agissant de ces --

  4   n'est pas saisie de cette demande pour des documents supplémentaires.

  5   Pourriez-vous, Maître Robinson, nous expliquer de quelle façon ces

  6   documents s'intègrent dans votre requête et répondre aux conditions posées

  7   par le 54 bis ?

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Mais je vais demander à M. Karadzic de

  9   répondre à ceci, car nous en avons discuté avant l'audience. Je crois qu'il

 10   est mieux placé que moi pour y répondre.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous vous sentez mieux,

 12   Monsieur Karadzic ? J'espère que c'est le cas.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais jusqu'à un certain point, oui, enfin,

 14   assez bien pour participer à l'audience d'aujourd'hui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous présenter

 16   vos arguments sur ce point ? J'espère que j'ai bien compris; vous avez

 17   compris la question posée, n'est-ce pas ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, merci, Excellence.

 19   Voici comment les choses se présentent. Le fait est : Quand Bosnie-

 20   Herzégovine, et plus précisément Sarajevo, il y a eu de très nombreux

 21   événements qui sont inexplicablement liés, soit une cause soit un effet.

 22   Beaucoup d'informations ont été dissimulées aux fins de mener une

 23   propagande guerrière, mais puisqu'il y a maintenant procès, ces

 24   informations, ces renseignements doivent être dévoilés, mis à notre

 25   disposition.

 26   A Sarajevo, il y avait deux Unités de la Police spéciale qui ont, tout le

 27   temps, participé à des combats. Il y a l'Unité Laste et l'Unité Bosna. Les

 28   documents de l'armée musulmane - je parle ici de l'ABiH - nous montrent

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  1   clairement que ces unités ont été constamment engagées dans des combats et

  2   étaient attachées au 1er Corps d'armée. Parallèlement, ces unités et surtout

  3   l'Unité Laste a liquidé des Serbes et des Musulmans à Sarajevo. Un de ces

  4   groupes a tenté d'assassiner Sefer Halilovic, qui était le commandant en

  5   chef de l'ABiH, a tué sa femme, son frère. Ceci a été attribué à un obus

  6   tiré par les Serbes. Mais il se fait que Halilovic a survécu et il a

  7   démenti le fait que ceci aurait été exécuté par les Serbes. Il a dit que

  8   c'était ce groupe qui était l'auteur de ce fait.

  9   Il y avait trois hommes dans l'unité Laste qui ont connu une fin tragique :

 10   le major Herenda et le major Dukan [phon], qui est le commandant qui ont

 11   créé l'unité. Ils ont quitté, ils se sont torturés, finalement ils se sont

 12   liquidés. Il y a aussi Galaplija.

 13   Ce qui veut dire que si nous demandons, à savoir ce qu'a fait l'Unité

 14   Laste à tous ces compatriotes, à tous ces concitoyens quelle que ce soit

 15   leur appartenance ethnique, il faut que la Bosnie-Herzégovine coopère. Car

 16   ces documents vont nous montrer que de façon très fréquente, il y a eu des

 17   incidents attribués aux Serbes mais qui avaient été commis par quelqu'un

 18   d'autre.

 19   Excellence, si nous n'avons pas la moindre évidence qui montre qu'à

 20   Srebrenica, à partir d'avril 1992 jusqu'en juillet 1995, personne n'est

 21   mort de mort naturelle. Mais si on dit que toutes les victimes sont les

 22   victimes des Serbes, je pense que nous avons le droit de demander à avoir

 23   le registre des naissances et des décès, ainsi que les certificats de décès

 24   qui montrent qui a trouvé la mort et dans quelle circonstance il a trouvé

 25   la mort. Jusqu'en juillet 1995, la municipalité de Srebrenica avait son

 26   siège à Srebrenica, alors Bratunac, Vlasenica et d'autres avaient leur

 27   siège à Tuzla.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous interromps, nous allons

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  1   revenir sur ces questions un peu plus tard.

  2   Mais voyons d'abord maintenant la première catégorie dont vous avez

  3   fait état. Ma question était de savoir, comment ces documents, ces

  4   événements vont intervenir de façon pertinente dans votre cause ou au

  5   regard des charges retenues contre vous dans l'acte d'accusation ? Est-ce

  6   que vous pourriez être plus précis à ce propos?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  8   De nombreux incidents, des cas d'assassinat individuels à Sarajevo

  9   mais aussi des meurtres collectifs n'ont jamais été attribués à ces

 10   groupes-là. Toujours, ils l'ont été aux Serbes. Mais ces groupes étaient

 11   très actifs et on les respectait, on leur faisait fête dans la ville, dans

 12   la ville de Sarajevo. Ce qui veut dire que lorsque des enquêtes ont

 13   commencé, il y a des traces dans les archives qui montrent ce à quoi ils se

 14   sont livrés. Or, beaucoup de ces actes nous sont attribués et on les

 15   retrouve dans mon acte d'accusation.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous donner un

 17   exemple de victime, de cas isolé où il y a eu des victimes qu'on trouve

 18   dans votre acte d'accusation ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne peux parler que de façon générale, car je

 20   n'ai pas cet élément d'information à ma disposition maintenant, mais c'est

 21   un fait. Ces groupes ont assassiné, liquidé des gens dans la rue. Ils ont

 22   pilonné, bombardé des bâtiments, c'est un fait. L'idée générale qu'on a de

 23   cette terreur infligée à la population de Sarajevo prend un aspect tout à

 24   fait différent quand on tient compte de ce facteur. Il n'y a pas d'incident

 25   de tir isolé contre des civils du côté serbe, et on verra ce que la police

 26   musulmane a établi s'agissant des activités menées dans ces deux groupes.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 28   Pour ce qui est de la deuxième catégorie de documents, par exemple, copie

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  1   de toutes les décisions judiciaires de la Bosnie-Herzégovine, les

  2   certificats concernant des personnes portées disparues, des personnes

  3   déclarées mortes, ou exemplaires ou copies de certificat de décès ou copies

  4   de toute liste de soldats tués. La Chambre pense, Monsieur Karadzic, que ce

  5   genre de documents, c'est un genre de documents que l'Accusation a peut-

  6   être. Un exemple, copie de certificat de décès, venant de diverses

  7   municipalités, utilisé peut-être par les experts ou l'expert de

  8   l'Accusation en matière de démographie, est-ce que vous avez essayé de

  9   communiquer avec l'Accusation pour savoir si elle a certains de ces

 10   documents ? Dans l'affirmatif, quelle fut l'issue de cette communication ?

 11   Pourriez-vous en parler, Maître Robinson ? 

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Oui.

 13   Je pense que nous avons une demande en application de l'article 66 (B).

 14   S'agissant de ce document, nous avons reçu certains de ces éléments venant

 15   de la commission internationale des personnes portées disparues, peut-être

 16   pas sous cette forme, je le crois, mais corrigez-moi si je me trompe,

 17   Monsieur Tieger. Je pense qu'il y a effectivement -- nous allons faire une

 18   demande en application du 66(B) s'agissant de personnes décédées dans la

 19   zone de Srebrenica.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, quelles seraient vos

 21   observations eu égard à cet argument ?

 22   M. TIEGER : [interprétation] Quelques observations.

 23   Tout d'abord, je dirais que aucune demande de ce genre n'a été formulée.

 24   Nous n'en avons jamais reçu. Je dirais aussi qu'il y a beaucoup

 25   d'éléments portant sur la mort de victimes, ont été effectivement fournis à

 26   la Défense dans le cadre de la communication s'agissant de témoins experts.

 27   Il y a quelques demandes visées par l'article 66(B) mais je ne me souviens.

 28   Pas Il nous vient pas d'une telle requête du genre que celle que vient

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  1   d'évoquer Me Robinson, en ce qui concerne Srebrenica, mais je vais vérifier

  2   une fois de plus.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors est-ce qu'il y a une requête visée

  4   par l'article 66(B) ou pas ? Quel que ce soit le cas, essayez d'examiner la

  5   question, et puis voyez si vous pouvez aider la Défense à obtenir ces

  6   documents.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Je veux que tout soit clair. Je suis sûr que

  8   j'ai dit qu'il n'y avait pas eu de demande de ce genre. Mais je suis aussi

  9   certain que l'Accusation n'aura pas chacun des certificats de décès

 10   délivrés par toutes les municipalités, pour cette période non plus qui va

 11   de 1992 à 1995. Elle n'aura pas chaque certificat de personne décédée dans

 12   ces municipalités.

 13   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Parlons maintenant de la Bosnie. Je vous

 16   l'ai déjà dit, en ce qui concerne la demande de production forcée déposée

 17   par l'accusé, les choses ont peu avancé, très peu avancé même. La Chambre

 18   pense que c'est sans doute dû en grande partie au manque de coopération de

 19   la Bosnie, que ce soit avec la Chambre ou avec l'accusé. La Bosnie dépose

 20   des requêtes, mais la plupart du temps, elle le fait tardivement -- des

 21   réponses, elle le fait tardivement. Souvent ces réponses sont très peu

 22   claires, sèment la confusion, sont ambiguës. Ce qui veut dire que la

 23   Chambre comme l'accusé ne peuvent pas poursuivre l'examen, et ceci ne fait

 24   que retarder la procédure.

 25   Je constate également qu'apparemment, il y a plusieurs instances publiques

 26   qui n'ont pas bien communiqué, ou n'ont pas suffisamment communiqué entre

 27   elles. Plusieurs services ou ministères, ce qui donne l'impression que les

 28   autorités de Bosnie ne prennent pas la chose au sérieux, ou bien si on s'en

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  1   occupe, c'est de façon désorganisée, voire bureaucratique.

  2   Je note, par exemple, que d'après les écritures dont nous avons été saisis,

  3   la présidence n'a jamais reconnu à fortiori, encore moins, pris des mesures

  4   suite à la recommandation faite par le Conseil des ministres qui était de

  5   désigner une personne chargée des relations avec le Tribunal sur ces

  6   questions.

  7   Madame l'Ambassadeur, Madame Kamisalic, est-ce que vous auriez l'obligeance

  8   de commenter suite à ces observations ?

  9   Mme KAMISALIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Si vous me le permettez, j'aimerais lire la déclaration en langue

 11   bosniaque.

 12   D'emblée, je tiens à dire combien la Bosnie-Herzégovine est prête à

 13   travailler aux côtés de votre Tribunal, qui s'occupe de l'ex-Yougoslavie.

 14   Nous ferons tout ce qui est avant tout dans l'intérêt de la justice, de la

 15   justice internationale et ce, dans l'intérêt de la communauté

 16   internationale. Nous sommes tout à fait conscients du fait que nous

 17   agissons en application de l'article 99 [comme interprété]  du Règlement de

 18   procédure et de preuve, du TPY, qui dans ces conditions, entraîne

 19   l'engagement complet de mon gouvernement pour coopérer avec ce Tribunal.

 20   Mon gouvernement n'a aucune raison de ne pas coopérer.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, mais ce que vous dites doit

 22   être interprété dans les langues de travail du Tribunal. Donc vous êtes

 23   invitée à ralentir un peu votre lecture.

 24   Pourriez-vous donc reprendre au passage où vous dites que votre pays est

 25   totalement engagé à coopérer pleinement.

 26   Mme KAMISALIC : [interprétation] Notre gouvernement a donc les plus grandes

 27   motivations pour fournir toutes les informations, tous les documents

 28   indispensables et prendre toutes les mesures nécessaires pour matérialiser

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  1   cette coopération. Encore une fois, je le répète, dans l'intérêt suprême de

  2   la justice. 

  3   Nous souhaitons donc coopérer activement avec le Tribunal, et considérons

  4   que jusqu'au jour d'aujourd'hui, nous avons fait tout ce qui était en notre

  5   pouvoir à cette fin.

  6   Il arrive parfois que l'imprécision des demandes de l'accusé, nous rende

  7   plus difficiles les recherches documentaires demandées. En effet, il lui

  8   arrive souvent d'exiger des documents en nombre très important et d'une

  9   ampleur très vaste. Ce qui, bien entendu, rend difficile la recherche de

 10   documents dans nos archives, et même parfois dans d'en déterminer la

 11   pertinence.

 12   Il apparaît parfois que l'accusé ait des informations déterminées que

 13   le gouvernement et les autorités de Bosnie-Herzégovine n'ont pas. Il

 14   importe que les demandes soient précisées de façon très précise afin que

 15   chacun puisse s'adresser aux institutions précisément concernées au sein

 16   des autorités gouvernementales.

 17   La Bosnie-Herzégovine n'a absolument aucune intention d'éviter ou

 18   d'échapper à son obligation de coopération avec le Tribunal pénal

 19   international, et ne nier dans aucun cas ses responsabilités en matière de

 20   production et de recherche de documents éventuellement découverts par des

 21   institutions internationales. Au sein de notre gouvernement, au sein du

 22   Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine, des groupes compétents étaient

 23   mis en place et il y a également dans notre pays d'autres institutions

 24   compétentes qui s'occupent de recherche documentaire dans le but de

 25   répondre de façon satisfaisante aux demandes de l'accusé et de faciliter le

 26   travail de la Chambre de première instance, en l'espèce.

 27   Au sein du ministère de la Défense, une équipe a été mise en place,

 28   qui a été chargée de rechercher les documents demandés dans toutes les

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  1   archives, et l'a fait. Le nombre très important de documents demandés se

  2   trouve déjà d'après nous, dans les archives de ce Tribunal car ce sont des

  3   documents qui ont déjà été demandés, ont déjà servi dans le cadre d'autres

  4   procès. Eu égard à des demandes antérieurement déposées par l'accusé auprès

  5   du gouvernement de Bosnie-Herzégovine, nous avons déjà répondu

  6   partiellement à ces demandes en produisant un certain nombre des documents

  7   demandés.

  8   Pour ne pas faire perdre de temps à la Chambre de première instance, je ne

  9   vais pas vous redonner la liste complète de tous ces documents, car nous

 10   voyons ces documents ici. Tous ces documents sont fournis sous forme de

 11   copie certifiée conforme à l'original.

 12   Le ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine, à la date du 15 février

 13   2010, a transmis des renseignements indiquant que tous les documents

 14   pertinents qui étaient à sa disposition ont déjà été communiqués suite à

 15   une demande de novembre 2009, et ont correspondu point par point à la liste

 16   des documents reçus par le ministère de la Défense, en provenance du

 17   ministère de la Justice; tout document étant des documents qui par le

 18   passé, se trouvaient dans les archives de l'ABiH.

 19   Il y a eu plus tard deux autres lettres que vous venez d'évoquer

 20   d'ailleurs. Nous avons reçu ces lettres à l'ambassade de Bosnie-

 21   Herzégovine, de La Haye, et nous y avons répondu par une note diplomatique

 22   adressée au TPY. Dans cette réponse, nous faisions connaître la position du

 23   ministère de la Défense et du ministère de la Justice de Bosnie-

 24   Herzégovine, qui ont fait savoir qu'il importait de porter à la

 25   connaissance de l'accusé -- qu'il importait de lui indiquer que les

 26   éléments de preuve demandés à la Bosnie-Herzégovine par le TPY avaient déjà

 27   été produits. Le ministère de la Justice dans son document du 12 février

 28   2010, a fait savoir qu'il avait agi très rapidement à toute demande

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  1   documentaire reçue par lui, et qu'il avait demandé à toutes les autorités

  2   compétentes une réalisation efficace et rapide des procédures demandées

  3   dans le cadre de ces requêtes. A partir du mois de mars de cette année,

  4   l'Accusé demande que de nouvelles requêtes soient proposées et soumises au

  5   gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Ces informations ont été traitées

  6   immédiatement par le gouvernement et indiquent quelles sont les mesures

  7   concrètes qui ont été prises par le ministère de la Défense de Bosnie-

  8   Herzégovine à l'époque dans le cadre de la nécessité de satisfaire à cette

  9   demande. En effet, il était demandé à l'état-major de l'armée de Bosnie-

 10   Herzégovine de rechercher les documents demandés au sein de ses propres

 11   archives et de procéder à une recherche très approfondie.

 12   S'agissant des actions entreprises et de leur résultat, j'indique

 13   qu'à la date du 16 avril 2010 le ministère de la Défense a envoyé une note

 14   d'information au ministère des Affaires étrangères et, par la voie

 15   diplomatique, au TPY, en particulier s'agissant d'un document de l'état-

 16   major conjoint des forces armées de Bosnie-Herzégovine et d'un document du

 17   secteur chargé de la sécurité et de l'information au sein de l'armée de

 18   Bosnie-Herzégovine. Après une recherche approfondie dans les archives de

 19   l'état-major général de la République de Bosnie-Herzégovine, sur laquelle

 20   repose la charge de retrouver ces documents puisqu'elle est responsable du

 21   dépôt militaire de l'armée de Bosnie-Herzégovine pour l'armée de la

 22   Fédération, il a été établi que les documents demandés ne se trouvaient pas

 23   dans ces archives.

 24   En avril 2010 également, le ministère chargé de la Sécurité en

 25   Bosnie-Herzégovine a répondu au ministère des Affaires intérieures de la

 26   fédération de Bosnie-Herzégovine, qui est l'autorité compétente responsable

 27   de la conservation des documents relevant de la période passée. Le MUP de

 28   la fédération a fait savoir que ces archives ne contenaient aucun des

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  1   documents demandés. Toutes ces actions concrètes ont été précédées par une

  2   longue série d'actions entreprises par le ministère.

  3   La Direction de la Police de la Fédération, c'est-à-dire le MUP de la

  4   Fédération, a également entrepris un certain nombre de mesures. Des

  5   réunions se sont tenues avec des représentants et des responsables du TPY

  6   sur le terrain à Sarajevo. Et à partir des renseignements des institutions

  7   chargées du Renseignement et de la Sécurité en Bosnie-Herzégovine, à partir

  8   des représentations ministérielles du ministère de l'Intérieur au niveau

  9   des cantons jusqu'au secteur chargé de la police au niveau de la

 10   Fédération, donc au niveau du MUP fédéral, il a été établi que des

 11   documents, demandés comme pouvant être d'une certaine aide à la Chambre de

 12   première instance ou à l'Accusé, devaient, s'ils existaient, être fournis

 13   en urgence, mais n'avaient pas encore été trouvés.

 14   Le 29 avril 2010, le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine a

 15   tenu sa 120e réunion, où les diverses actions entreprises par le ministère

 16   de la Justice ont été discutées, actions entreprises dans le cadre

 17   spécifique du procès intenté à Radovan Karadzic. Il a été conclu que le

 18   ministère de la Justice et le bureau du Procureur de la Bosnie-Herzégovine

 19   devaient être chargés de rechercher les documents demandés, et le ministère

 20   des Affaires étrangères a également reçu mission d'apporter son aide aux

 21   représentations ministérielles de la Bosnie-Herzégovine à l'étranger en

 22   donnant toutes les explications nécessaires, le cas échéant. Donc le

 23   ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Justice, le ministère

 24   de la Défense de Bosnie-Herzégovine ont été -- se sont vus rappelés la

 25   nécessité de transmettre les documents nécessaires en leur possession au

 26   TPY. Je rappelle que cette obligation a été abondamment discutée durant la

 27   120e réunion du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine.  Egalement à

 28   la demande de l'ambassade de Bosnie-Herzégovine aux Pays-Bas, des

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  1   explications complémentaires et des précisions ont été apportées.

  2   Le ministère de la Justice est donc désormais chargé de fournir tous

  3   les documents nécessaires, tous les rapports nécessaires et d'entreprendre

  4   toutes les mesures nécessaires en Bosnie-Herzégovine pour apporter son aide

  5   au Tribunal international et à l'ambassade de Bosnie-Herzégovine aux Pays-

  6   Bas.

  7    Ces conclusions ont permis de préciser à quelles institutions a été

  8   demandé un effort supplémentaire de rechercher, de production des documents

  9   par le truchement du ministère de la Justice.

 10   Le ministère de la Justice de Bosnie-Herzégovine, agissant à la demande du

 11   Tribunal, et après conclusion du Conseil des ministres de Bosnie-

 12   Herzégovine, a demandés aux institutions compétentes de fournir les

 13   renseignements nécessaires et a reçu les réponses suivantes :

 14   A. Le ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine, dans son document

 15   numéro 13-4-02871-12608, met l'accent sur le fait que les actions

 16   nécessaires sur certains éléments en date du 5 novembre ont été entreprises

 17   et qu'aucune autre mesure ne pouvait être appliquée.

 18   B. Le procureur de la Bosnie-Herzégovine a transmis au ministère de la

 19   Justice le document A-378/10 du 20 mai 2010, dans lequel il indique qu'il

 20   ne possède pas, il n'a aucun renseignement au sujet des documents demandés.

 21   C. Le ministère chargé de la Sécurité en Bosnie-Herzégovine a recueilli un

 22   certain nombre de documents qu'il n'a pas transmis au ministère de la

 23   Justice mais, le 18 juin 2010, ce ministère a reçu une copie du document

 24   par lequel le ministère de la Sécurité transmettait au ministère des

 25   Affaires étrangères une réponse directe du ministère de l'Intérieur et des

 26   institutions publiques chargées des recherches et des investigations. A la

 27   lecture de cette réponse, on constate que le MUP fédéral a entrepris un

 28   certain nombre de mesures bien concrètes destinées à trouver les documents

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  1   demandés, mais que les institutions d'Etat concernés ne savent pas quels

  2   sont ces documents.

  3   Le ministère de la Justice, en date du 13 juillet 2010, a une nouvelle fois

  4   demandé au ministère chargé de la sécurité d'investir un effort

  5   supplémentaire et de transmettre des informations relatives à la collecte

  6   de documents demandés dans le but de répondre aux documents envoyés par le

  7   Tribunal pénal international. A cette demande, une réponse est encore

  8   attendue.

  9   Le ministère de la Justice, en date du 14 juin 2010, a établi un rapport

 10   concernant toutes les actions entreprises, qui montre qu'un certain nombre

 11   de documents ont été envoyés au ministère de la Justice et au bureau du

 12   procureur de Bosnie-Herzégovine dans le cadre des demandes présentées par

 13   le Tribunal.

 14   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je pense que ce rapport

 15   de toutes nos activités, activités qui sont toujours en cours, apporte une

 16   réponse satisfaisante aux questions posées par vous.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous prierais d'apporter une

 18   précision, Madame l'Ambassadeur, si vous voulez bien. Vous venez d'énumérer

 19   un certain nombre d'efforts qui apparemment portent tous sur la première

 20   demande de documents déposée le 31 août 2009 par l'accusé. Mais, eu égard à

 21   la deuxième série de documents évoqués dans la requête du 7 janvier 2010,

 22   j'aimerais savoir si cette deuxième série de documents a été couverte par

 23   les recherches et les diverses activités des divers organes gouvernementaux

 24   que vous venez de citer.

 25   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Votre dernière question porte sur

 26   les documents demandés dans la lettre du 7 janvier; c'est bien cela ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme

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  1   je l'ai déjà dit, nous avons reçu ces deux lettres, l'une donc portant la

  2   date du 7 janvier 2010, et l'autre datant du 22 février 2010, nous avons

  3   reçu ces deux lettres par le truchement du représentant de la Défense, et

  4   j'ai fait savoir que le ministère de la Justice de Bosnie-Herzégovine avait

  5   donné instruction à notre ambassade à La Haye d'informer le Tribunal, ce

  6   que nous avons fait en envoyant une note verbale au Tribunal pour lui faire

  7   connaître la position du ministère de la Justice, à savoir que la Défense

  8   devrait communiquer avec l'ambassade par le truchement de ce Tribunal.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci. Vous avez dit

 10   clairement, dans votre exposé, que tous ces documents devraient être

 11   fournis par le truchement du TPY et que ce fait devait être porté à la

 12   connaissance de l'accusé, à savoir le fait que le bureau du Procureur

 13   dispose d'une collection d'éléments de preuve provenant de Bosnie-

 14   Herzégovine.

 15   Mais, Madame l'Ambassadeur, la pratique de cette Chambre de première

 16   instance ou même du Tribunal tout entier doit être appliqué en dernier

 17   recours. Tant que ce dernier recours n'est pas engagé, nous invitons les

 18   autorités publiques à coopérer volontairement, soit, avec le bureau du

 19   Procureur, soit, avec la Défense. Donc c'est la raison pour laquelle nous

 20   venons d'appuyer la lettre envoyée aux instances gouvernementales par la

 21   Défense. Donc si vous pouviez transmettre aux autorités compétentes de

 22   votre pays le fait que la Chambre s'attend à une coopération volontaires ce

 23   serait une bonne chose.

 24   Je suppose que, par rapport à la deuxième série de documents, aucune

 25   recherche n'a été faite et aucun document n'a été trouvé. Si je me trompe,

 26   veuillez me le faire savoir, Madame l'Ambassadeur.

 27   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] C'est exact.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   Et j'aimerais être tout à fait clair, au sujet du sort de la première série

  2   de documents, certaines recherches sont encore en cours, mais pour

  3   l'essentiel le gros des recherches a déjà été effectué, et il n'existe

  4   aucun document à communiquer. Est-ce que c'est j'ai bien compris, Madame

  5   l'Ambassadeur ?

  6   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] En effet, c'est exact, Monsieur le

  7   Président.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ajouterais la question suivante : Est-

  9   ce qu'il y a eu la moindre réponse de la Présidence quant à la nécessité de

 10   nommer une personnalité responsable de ces questions ?

 11   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Monsieur le Président, jusqu'au

 12   jour d'hier, ce n'était pas le cas.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame l'Ambassadeur, à votre avis, que

 14   conviendrait-il de faire pour que cette nomination se réalise, s'effectue ?

 15   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis

 16   convaincue que la Présidence va très prochainement prendre cette décision.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 18   Je vous demanderais un instant de patience.

 19   [La Chambre de première instance se concerte]

 20   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Madame l'Ambassadeur, vous avez parlé

 21   de votre rapport qui concerne les actions entreprises par vous, et vous

 22   avez dit dans votre exposé, que vous pensiez que ce rapport qui indiquait

 23   que ces actions étaient toujours en cours répondaient aux questions de la

 24   Chambre. Pourriez-vous aider la Chambre en lui indiquant quand ce rapport

 25   sera disponible ?

 26   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Bien, le rapport que nous venons de faire ici même aujourd'hui est un

 28   rapport qui porte sur nos actions jusqu'au jour d'aujourd'hui. Et tant que

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  1   nos actions ne seront pas achevées, et nous pensons que ces actions,

  2   sachez, vont dans un délai raisonnable, et bien, lorsque ces actions seront

  3   achevées, nous le ferons savoir à la Chambre.

  4   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] "Dans un délai raisonnable." Est-ce que

  5   quiconque pourrait déterminer la durée de ce délai raisonnable ?

  6   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Monsieur le Juge, un délai

  7   raisonnable peut être considéré comme étant d'un mois à partir

  8   d'aujourd'hui, je suppose.

  9   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci beaucoup.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame l'Ambassadeur, depuis que j'ai

 11   cessé de parler, je suis parvenu à déterrer la décision de la Chambre

 12   relative à la deuxième série de documents qui invitait donc une réponse de

 13   la part de la Bosnie-Herzégovine, décision de la Chambre qui a été rendu le

 14   1er mars 2010 et qui, je crois, a été signifiée à votre ambassade à votre

 15   gouvernement. Dans cette décision, nous invitions le gouvernement de la

 16   Bosnie-Herzégovine d'apporter son aide au Tribunal en lui fournissant les

 17   documents demandés avant le 22 mars 2010. Puis la Chambre demandait

 18   également une réponse de la part de la Bosnie-Herzégovine à la lettre de

 19   l'accusé et une réponse aux questions énumérées en annexe A à cette

 20   invitation.

 21   Alors un certain nombre de questions supplémentaires se posent.

 22   S'agissant des documents qui ont déjà été communiqués à l'accusé, la

 23   Bosnie-Herzégovine a indiqué, dans sa correspondance, que ces documents

 24   étaient confidentiels. Pourriez-vous préciser aux Juges de la Chambre quel

 25   est le sens exact à accorder à cette confidentialité ? En effet, pour

 26   utiliser le jargon du TPY, la Chambre aimerait savoir si la Bosnie-

 27   Herzégovine estime que les dispositions de l'article 70 du Règlement de

 28   procédure et de preuve du TPY s'applique à ces documents.

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  1   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

  2   Président.

  3   Oui, Monsieur le Président, nous estimons que ces documents, qui sont

  4   enregistrés en tant que confidentiel, proviennent des pouvoirs compétents

  5   de mon pays, et en tant que tel, relèvent des dispositions de l'article 70

  6   du Règlement.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc en évoquant les dispositions de

  8   l'article 70, quelles sont celles que le gouvernement de Bosnie-Herzégovine

  9   a l'esprit en particulier en rapport avec ces documents ?

 10   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Monsieur le Président, ceci ne m'a

 11   pas été indiqué précisément.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc si vous pouviez nous le faire

 13   savoir en temps utile après la fin de l'audience, par écrit, par exemple,

 14   ce serait une bonne chose.

 15   Autre question : Est-ce que la Bosnie-Herzégovine a quelque observation que

 16   ce soit sur les contraintes évoquées à l'article 54 bis du Règlement de

 17   procédure et de preuve, s'agissant de savoir si les requêtes de l'accusé

 18   satisfont à cet article, aussi bien du point de vue des documents demandés

 19   dans la requête que des documents demandés dans les requêtes subséquentes.

 20   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

 21   Président.

 22   Nous n'avons aucune autre demande spécifique.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci concerne les exigences juridiques

 24   prévues à l'article 54 bis du Règlement, à savoir les dispositions

 25   relatives aux ordonnances de production forcées.

 26   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc le fait de savoir si ces documents

 28   sont pertinents et s'il est nécessaire d'en disposer en l'espèce, et

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  1   cetera, et cetera. Ma question consiste à demander si le gouvernement de

  2   Bosnie-Herzégovine a des observations à faire par rapport à ces exigences.

  3   Donc si vous pouviez vous pencher sur la question et revenir devant nous,

  4   par écrit, par exemple, ce serait une bonne chose.

  5   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  6   Merci beaucoup de votre proposition. C'est ce que nous allons faire.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je demanderais à la Juriste hors classe

  8   de la Chambre de s'approcher.

  9   [La Chambre de première instance et la Juriste se concertent]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me demandais si vous étiez en mesure

 11   de dire à la Chambre si le MUP de la Fédération et la Direction fédérale de

 12   la Police avaient fourni de nouvelles réponses sur cette question.

 13   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai

 14   communiqué avec ces instances pour la dernière fois hier, et jusqu'à hier,

 15   nous n'avons rien reçu de nouveau en la matière.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 17   Y a-t-il d'autres questions à traiter ? Maître Robinson.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 19   Si vous me le permettez j'aimerais revenir sur certaines questions que Mme

 20   l'Ambassadeur a abordé aux réponses à ses propos, la Chambre m'y autorise-

 21   t-elle ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson, veuillez procéder.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Avant tout, je tiens à remercier Mme l'Ambassadeur. Car je crois qu'un

 25   certain nombre de questions ont été précisées par ses propos ainsi que par

 26   les questions que vous lui avez posées, nous sommes donc dans une situation

 27   bien meilleure suite à notre participation à la présente audience

 28   désormais.

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  1   J'aimerais également revenir sur les cinq séries de documents qui manquent

  2   encore à la Défense, j'ai déjà dit que de l'avis de la Défense le ministère

  3   de la Défense n'avait jamais recherché ces éléments qui sont des procès-

  4   verbaux des notes ou des memoranda rédigés à la suite de réunion entre

  5   représentant du gouvernement de Bosnie-Herzégovine et représentant du

  6   gouvernement des Etats-Unis, de Turquie, ou avec des particuliers ou

  7   organisations américaines, qui tous portent sur des livraisons d'armes, de

  8   munition, ou d'équipement militaire livrés à Tuzla et qui ont été discutés

  9   pendant la période allant du 1er janvier au 31 mars 1995. Il y a également

 10   des rapports photographies, ou dossiers de livraison livrés à Tuzla par le

 11   transport C-130 pendant les mois de février et mars 1995. Et le ministère

 12   de la Défense estime que ces dossiers ne sont pas en sa possession, donc il

 13   ne les a pas cherchés, mais rien ne prouve que les instances éventuellement

 14   en possession de ces dossiers les aient recherchés. Il appartient au

 15   ministère des Affaires étrangères et à la Présidence, qui sont les entités

 16   qui ont probablement négocié la livraison de ces armes de rechercher ces

 17   documents.

 18   Donc nous ne croyons pas, eu égard à ces éléments qu'ils aient été

 19   recherchés, autrement dit que des recherches approfondies et complètes

 20   aient été effectuées, et nous encourageons le gouvernement de Bosnie-

 21   Herzégovine à agir en la matière avant de rédiger son rapport définitif ou

 22   sa réponse définitive à l'attention de la Chambre.

 23   Eu égard aux éléments qui n'ont pas été examinés, je pense que dans le

 24   cadre des efforts de contacts extérieurs du Tribunal, qui sont

 25   considérables en Bosnie-Herzégovine, quelqu'un doit pouvoir expliquer la

 26   doctrine de l'égalité des armes aux gouvernement bosniaque, parce que ce

 27   gouvernement fournit des documents à l'Accusation, sans la moindre

 28   contrainte, sans aucune intervention de la Chambre de première instance,

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  1   tout en refusant de fournir ou d'appliquer le même comportement vis-à-vis

  2   de la Défense. Ceci est simplement une erreur, et j'espère que quelqu'un

  3   pourrait éduquer ce gouvernement de façon à ce qu'il corrige son attitude à

  4   l'avenir.

  5   En deuxième lieu, je tiens à vous faire remarquer, comme déjà indiqué, que

  6   le gouvernement de Bosnie-Herzégovine a été invité par le Tribunal à

  7   rechercher ces documents évoqués dans votre lettre, et qu'il ne l'a jamais

  8   fait. Donc je ne pense pas que la coopération du gouvernement de Bosnie-

  9   Herzégovine ait été satisfaisante jusqu'à l'heure actuelle, et j'espère que

 10   la présente audience aura pour effet de la rendre plus satisfaisante à

 11   l'avenir de façon à ce que nous puissions recevoir les documents que nous

 12   sommes en droit de recevoir.

 13   En fin, nous pensons qu'il importe que la question de l'injonction à

 14   produire émanant de la Chambre de première instance, même face à la

 15   déclaration selon laquelle aucun dossier, n'a été retrouvé, ne s'arrêtera

 16   pas là, et que les documents demandés qui ont existé par le passé seront

 17   retrouvés - nous avons l'intention de poursuivre nos investigations et de

 18   continuer à chercher - car quelqu'un doit être responsable de la

 19   présentation de ces documents, et le mécanisme impliqué dans l'article 7

 20   bis du Règlement et peut-être dans l'article 77 de celui-ci peut être mis

 21   en œuvre efficacement contre des individus, membres du gouvernement de

 22   Bosnie-Herzégovine en l'espèce s'il est déterminé qu'ils n'ont pas

 23   suffisamment recherché les documents demandés et, en tout cas, ne les ont

 24   pas produits.

 25   En fin, Monsieur le Président, si je pouvais aborder un autre point, c'est

 26   un point juridique, qui porte sur la pertinence et la nécessité de

 27   documents relatifs au trafic d'armes à Tuzla. Je le fais dans l'espoir de

 28   transmettre à chacun ici le point de vue partagé par vos collègues eu égard

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  1   à la demande adressée à l'Allemagne. Dans votre opinion dissidente, vous

  2   avez dit que vous ne voyez pas comment établir que des représentants des

  3   Nations Unies avaient participé à des trafics d'armes à destination de la

  4   Bosnie comment ils pouvaient être considérés comme participants aux

  5   hostilités, et vous avez convenu avec l'Accusation que vous estimiez que ce

  6   point était pertinent puisqu'il y avait des soldats de la paix des Nations

  7   Unies qui avaient été pris en otage et qui peut-être avaient le statut de

  8   combattants. Je vous demanderais simplement de réfléchir, par exemple, à la

  9   même question de savoir si, parmi les parties belligérantes, l'une ou

 10   l'autre d'entre elles avait pu représenter un moment ou à un autre un

 11   groupe d'hommes en uniforme qui pouvaient être pris pour combattants par la

 12   partie adverse, et puisqu'ils ont pu être pris comme otages ou comme

 13   prisonniers de guerre, quel que soit le nom que l'on donne à leur statut,

 14   on peut se demander si à un moment ou à un autre ils ne peuvent pas être

 15   considérés comme ayant participé aux hostilités.

 16   Je vous prierais donc de bien vouloir réfléchir à cette question de statut

 17   de combattant éventuelles pour éventuellement mettre un terme à vos

 18   réserves, aux réserves que vous aviez à l'époque sur la question de la

 19   pertinence et de la nécessité de ces documents relatifs au trafic d'armes.

 20   Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Robinson.

 22   Madame Sidran Kamisalic, voulez-vous répondre ?

 23   Mme SIDRAN KAMISALIC : [interprétation] Je vous remercie.

 24   J'ai bien noté les remarques qui viennent d'être faites, mais pour

 25   l'instant, je préfère ne faire aucun commentaire.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie beaucoup d'être venu

 28   assister à cette audience.

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  1   La Chambre de première instance tient donc à remercier toutes les

  2   parties pour leurs arguments, et la Chambre, bien sûr, prendra en compte

  3   tous ces arguments avant de décider de la voie à suivre en ce qui concerne

  4   cette requête, et nous attendons, bien sûr, le rapport de la Bosnie-

  5   Herzégovine le plus rapidement possible.

  6   Donc cette audience concernant l'ordonnance de production forcée au titre

  7   de l'article 54 bis est donc maintenant levée.

  8   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc l'audience est levée, mais nous

 10   reprendrons en audience régulière dans une demi-heure pour aborder d'autres

 11   points. Donc nous reprendrons à 11 heures 35, afin de savoir s'il convient

 12   de poursuivre l'audience ou non.

 13   --- L'audience de Règle 54 bis est levée à 11 heures 08.

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