Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 15 décembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, à toutes et à tous.

  7   Bonjour, Monsieur Bell.

  8   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je vous en prie,

 10   veuillez continuer votre contre-interrogatoire.

 11   LE TÉMOIN : MARTIN BELL [Reprise]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   Bonjour à toutes et à tous.

 15   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Bell.

 17   R.  Bonjour.

 18   Q.  Avec votre autorisation, ce que je me proposerais de faire c'est de

 19   simplifier mes questions, de telle sorte que l'on puisse y répondre par un

 20   oui ou un non. Mais à chaque fois que vous aurez éprouvé le besoin

 21   d'apporter quelques compléments, faites-le, vous êtes d'ailleurs quelqu'un

 22   de -- un excellent orateur, quelqu'un d'un grand talent au niveau de la

 23   langue.

 24   Est-ce que vous l'acceptez ?

 25   R.  Je ferai au mieux, Docteur Karadzic.

 26   Q.  Merci. Hier, vous avez dit qu'au début de la guerre, les éléments

 27   criminels se sont manifestés et qu'ils ont saisi l'occasion d'en profiter,

 28   de profiter de la situation. Est-ce que cela concerne les trois parties en

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  1   présence ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Merci. Etes-vous d'accord pour dire que les premiers barrages début

  4   mars à Sarajevo sont dus non pas à la tenue du référendum, mais dus au fait

  5   qu'un participant à la noce serbe a été tué à Bascarsija ? En fait, le père

  6   du jeune marié.

  7   R.  Je suis au courant de cet incident. Les premiers barrages sous lesquels

  8   je suis tombé a été érigé là où se situe aujourd'hui le bureau du haut

  9   représentant.

 10   Q.  Merci. Mais vous vous souviendrez que les Serbes n'ont pas cherché à

 11   empêcher la tenue du référendum. Même là où les Serbes constituaient 80 à

 12   90 % de la population le référendum a organisé.

 13   R.  Les premières funérailles auxquelles je me suis rendu correspond,

 14   effectivement, aux funérailles de la personne tuée pendant cet incident-là.

 15   Q.  Je vous remercie. A ce moment-là, est-ce que vous avez appris que Ramiz

 16   Delalic, Celo, l'assassin de cette victime, s'est manifesté à la télévision

 17   en ce vantant publiquement de ce qu'il a fait ?

 18   R.  Je n'étais pas au courant de cela, Docteur Karadzic.

 19   Q.  Merci. Je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il y a eu des

 20   criminels des trois côtés, et à ce sujet, je souhaite savoir si vous avez

 21   appris que certains criminels de Sarajevo sont devenus généraux plus tard

 22   et que c'est uniquement à l'automne 1993 que les autorités ont entrepris

 23   quoi que ce soit contre Musa Topalovic, Caco, par exemple, a été commandant

 24   de la 9e Brigade, Ismet Bajramovic, l'un d'entre eux, Ramiz Delalic, Celo,

 25   Juka Prazina, également un général criminel; donc est-ce que vous êtes au

 26   courant de l'existence de ce groupe de criminels très en vue qui ont

 27   commandé des unités importantes ?

 28   R.  Je connaissais personnellement Juka Prazina. Je ne savais pas qu'il

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  1   avait le grade de général. Si je me souviens bien, il a changé de camp, il

  2   est rentré dans les rangs du HVO à Mostar, et la dernière fois que je l'ai

  3   vu c'était en tant que combattant pour le HVO de Mostar.

  4   Q.  Oui, c'est cela. Mais pendant une année, il a combattu à Sarajevo, et

  5   il a été liquidé en Belgique plus tard; le savez-vous ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Merci. Vous avez fait des reportages sur des conflits ethniques à

  8   Bosanski Brod le 4 mars. En fait, ils se sont produits le 3 mars et le 4

  9   mars à Bosanski Brod, où les Serbes constituaient une petite minorité et où

 10   ils ont été attaqués. Vous souvenez-vous d'un massacre survenu les 25 et 26

 11   mars à Sijekovac, près de Bosanski Brod ?

 12   R.  Je n'étais pas à Bosanski Brod à l'époque, Docteur Karadzic.

 13   Q.  Oui. Mais j'ai 0029-4185 jusqu'à 4284; est-ce que vous étiez au courant

 14   de ces conflits de Bosanski Brod, conflits ethniques ?

 15   R.  A en juger, d'après mes notes, je n'étais pas en Bosnie entre le 5 mars

 16   et le 6 avril 1992.

 17   Q.  Merci. En fait, je viens de comprendre. C'est un aperçu des programmes

 18   diffusés par la BBC, donc c'est peut-être un autre journaliste qui en est

 19   l'auteur, mais pas vous. Très bien. Merci.

 20   J'ai remarqué dans vos déclarations le fait que vous êtes au courant de

 21   l'existence de différentes alliances au cours de cette guerre entre ces

 22   trois peuples. Par exemple, vous saviez que les Serbes et les Croates ont

 23   coopéré entre Kiseljak et Ilidza, entre Vares et les municipalités

 24   voisines, Zepce et Teslic, dans la poche de Maglaj, et de temps à autres

 25   autour de Mostar, et qu'à d'autres endroits ils s'opposent les aux autres.

 26   Alors est-ce que vous reconnaissez que cela montre que le pouvoir ou le

 27   commandement central était faible ?

 28   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que l'on peut fournir une référence,

  3   s'il vous plaît : Page 3, ligne 22, le Dr Karadzic dit :

  4   "J'ai remarqué dans vos déclarations que vous connaissiez l'existence de

  5   différentes alliances pendant cette guerre entre ces trois peuples…"

  6   Puis dans la suite, il donne plusieurs exemples de ces alliances; est-ce

  7   que nous pouvons avoir une référence précise qui nous enverrait à cela ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  9   Monsieur Karadzic.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si M. Bell ne s'en souvient pas très bien, je

 11   peux renoncer à cette question. Je ne voudrais pas perdre de temps à

 12   chercher la référence. En fait, nous pouvons la trouver.

 13   Voilà. Il paraît que c'est dans le témoignage, affaire Dragomir Milosevic,

 14   témoignage du 27 avril 2007, 5 282 est le numéro de page. Il a parlé des

 15   alliances entre les Serbes et les Croates pendant la guerre, entre l'ABiH

 16   et les Croates de Bosnie centrale, et ainsi de suite.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  En est-il ainsi, Monsieur Bell ?

 19   R.  Oui, j'étais au courant de ces alliances ad hoc. Et pour répondre à

 20   votre question, je dirais que sur le plan local les commandants avaient une

 21   grande marge de manœuvre, et cela s'applique en particulier aux premiers de

 22   la guerre.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   Mme EDGERTON : [interprétation] Page 5 282, je ne vois rien du tout qui

 26   évoquerait les localités précises qui ont été énumérées par Dr Karadzic.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est possible que ces localités ne figurent

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  1   pas à cet endroit, mais je suis convaincu que M. Bell se souviendra de

  2   cela. Il ne s'agissait pas d'un phénomène généralisé sur la totalité du

  3   territoire. Les alliances étaient plutôt un phénomène local.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord, Monsieur Bell, pour dire qu'il y a eu

  6   des endroits où les Serbes, les Croates s'opposaient les uns aux autres, et

  7   qu'à d'autres endroits, ils ont créé des alliances ?

  8   R.  Vares, par exemple, pour autant que je le sache, est un exemple de

  9   l'endroit où il n'y a pas eu de combat pendant toute la guerre.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Bell, est-ce que vous êtes en

 11   mesure de confirmer l'information sur les autres endroits, on ne le voit

 12   plus à l'écran, mais Zepce, Teslic, premier exemple.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour certains d'entre eux, j'étais au courant,

 14   mais par pour les autres.

 15   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Vous avez remarqué que de temps à autre, il y a eu des combats de rue

 19   dans les villes, rue par rue, surtout au début, quasiment pour chaque

 20   maison; est-ce que cela est vrai ?

 21   R.  Oui, c'est ce que j'ai vu sur place.

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, mais ces questions

 23   sont tellement vagues, pour ce qui est du temps et de l'endroit; est-ce

 24   qu'on pourrait avoir un minimum de précision. On ne sait pas si cela

 25   concerne tous les endroits de l'ex-Yougoslavie, quelle année ?

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Edgerton, je pense que Dr

 27   Karadzic est en train d'essayer de peindre un tableau général des

 28   événements. Je suis certain que M. Bell est tout à fait capable de réagir à

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  1   cela, s'il n'est pas d'accord avec cette affirmation de nature générale.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela étant dit, Monsieur Karadzic, des

  3   commentaires de manière aussi généraux que cela ne nous sont pas très

  4   utiles. Essayez d'être aussi précis que possible.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   Je souhaitais visionner une vidéo.

  7   Mais s'agissant ce qui se passait plus précisément du côté des

  8   Serbes, M. Bell connaissait surtout la situation à Sarajevo.

  9   Donc je vais demander 1D2890. Je voudrais que l'on visionne cela.

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas reçu la transcription.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 13   "Pendant ces derniers jours, pour la première fois, il y a eu des tirs qui

 14   prenaient pour cible les forces onusiennes. 34 mortiers sont tombés sur la

 15   caserne du maréchal Tito. Il y a eu des problèmes de coordination au niveau

 16   de la FORPRONU. Il y a une escalade de violence -- 

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce que j'ai raison de dire que vous avez remarqué qu'il y a eu des

 19   tirs d'un côté comme de l'autre, et ces tirs étaient dirigés sur des

 20   installations militaires, sur la ligne de front, comme on le voit ici ?

 21   R.  Docteur Karadzic, pour une certaine partie de cela, effectivement on

 22   dirigeait sur des bâtiments militaires. Ce que l'on voie ici sur le plan

 23   des coups de feu, c'est quelque chose que j'ai vu tous les soirs, pendant

 24   quatre mois, et on prenait pour cible des positions sur la ligne de front.

 25   Mais il y a eu aussi des tireurs d'élite et des mortiers, qui ont touché

 26   des civils, qu'ils étaient pris pour cible ou non, et sur ce plan-là, les

 27   tirs étaient arbitraires.

 28   Q.  Dans votre déclaration de 1995, 1996, page 7, paragraphe 6, et plus

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  1   tard également, lorsque vous êtes venu déposer dans les affaires Milosevic

  2   et Perisic, vous avez confirmé qu'on s'est battu pour chaque maison, pour

  3   chaque rue, et que c'étaient des combats urbains typiques; c'est bien cela

  4   ?

  5   R.  Pendant ce témoignage, j'ai parlé des premières semaines de la guerre,

  6   de ces combats-là. Des moments où on commençait à établir, à fixer les

  7   lignes de confrontation.

  8   Q.  Merci. Hier, vous nous avez dit qu'il y a eu des jours où il y avait

  9   plus de tirs sortant de la ville que de tirs entrant, vers la ville. Donc

 10   je voudrais maintenant l'orientation de ces tirs; est-ce qu'il est tout à

 11   fait clair que l'on utilise les pièces lourdes pour tirer depuis la guerre

 12   ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait, s'il vous plaît, revoir

 14   juste un petit extrait ? Avez-vous la vidéo ?

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ces tirs dirigés vers le

 17   haut, en fait, viennent de la ville vers les positions serbes situées au

 18   mont Trebevic ?

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] On dirait que c'est effectivement dans cette

 21   direction-là que partent ces tirs, oui.

 22   M. KARADZIC : [interprétation] Merci.

 23   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que ce serait bien que les représentants

 24   de la communauté internationale ainsi que les représentants des médias

 25   soient au courant du déploiement des unités des bâtiments militaires, et de

 26   toutes les infrastructures militaires dans la ville, et que cela leur

 27   aurait permis peut-être d'apprécier de manière plus précise le caractère

 28   arbitraire ou pas des tirs ?

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  1   R.  Docteur Karadzic, je ne sais pas à quel moment a été filmée la vidéo

  2   que vous venez de montrer. Vous savez qu'à un moment donné, pendant la plus

  3   grande partie du mois de mai et du mois de juin, il n'y avait pas de

  4   présence onusienne à Sarajevo. Ils étaient partis.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   Un document, s'il vous plaît, est-ce que nous pouvons verser au dossier

  7   cette vidéo, s'il vous plaît ?¸

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons la date de la

  9   vidéo en question ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais cela vient avec M. Bell, on l'a eue par

 11   lui. Donc je pensais que c'était certainement de cette époque-là. Et puis,

 12   c'est un enregistrement de la BBC, je pense. Nous aurons le numéro, V000-

 13   3327-1A. Il me semble que nous avons visionné une partie de cela, hier.

 14   Nous avons le code horaire.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, par principe, Monsieur Karadzic,

 16   nous attribuerons une cote provisoire, en attendant la transcription. Donc

 17   en temps voulu, est-ce que vous pourrez, s'il vous plaît, nous fournir

 18   également la date de la vidéo ?

 19   Ce sera marqué pour une cote aux fins d'identification.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D923 MFI en attendant la

 21   transcription et la date.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, la date aussi nous la fournirions.

 23   La pièce D339 à présent, s'il vous plaît, juste pour jeter un coup d'œil.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Nous avons pu constater ici, Monsieur Bell, que c'est de manière plutôt

 26   habile que les Musulmans ont caché leurs armes des yeux des Nations Unies.

 27   Alors est-ce que vous avez pu avoir accès à leurs pièces lourdes en ville ?

 28   Est-ce que vous connaissiez les positions de leurs pièces lourdes en ville

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  1   ?

  2   R.  Je savais qu'ils avaient au moins un char dans un tunnel. Puis de temps

  3   à autres, on rencontrait leurs positions de mortier, et cela est devenu un

  4   sujet très délicat avec les gens de la sécurité, leurs agents de sécurité.

  5   Donc si on montrait leurs mortiers en train de tirer des coups de feu, nous

  6   risquions d'en subir les conséquences.

  7  Q.  Je vous invite maintenant à examiner ce document du 1er Corps de la BiH,

  8   donc c'est leur armée. La date du document est celle du 16 février 1993.

  9   Alors on restructure une brigade mixte du 1er Corps, une Brigade de

 10   Roquette, et c'est cet équipement, une batterie de mortier de 120

 11   millimètres avec son effectif complet et les moyens matériels et

 12   techniques, qui est redéployé dans la 3e Brigade motorisée. Une batterie

 13   d'obusiers de 105 millimètres, avec l'effectif au complet et les moyens

 14   techniques et matériels, est redistribué vers la 1ère Brigade. Donc nous

 15   voyons qu'ils ont une batterie d'obusiers de 122 millimètres, une autre

 16   batterie d'obusiers de 122 millimètres, et cetera. Donc de toute évidence,

 17   ils sont plutôt habiles à cacher ces armes qui se trouvent dans la ville;

 18   êtes-vous d'accord ?

 19   R.  Docteur Karadzic, nous n'avons jamais douté du fait qu'ils possédaient

 20   quelques armes lourdes, mais l'avantage en armes lourdes a été, du début

 21   jusqu'à la fin, du côté des Serbes de Bosnie, à tout moment.

 22   Q.  Merci. Nous pourrions peut-être nous mettre d'accord là-dessus, mais

 23   est-ce que vous vous souviendrez qu'une partie de ces armes serbes devaient

 24   également être tournées vers l'extérieur, et il y a eu plus de 200

 25   kilomètres de front vers Tuzla, Zenica, et cetera, l'anneau externe ? Donc

 26   vous savez que là aussi il y a eu des lignes de confrontation, et une

 27   partie de nos armes devait être orientée vers ces positions-là ?

 28   R.  Docteur Karadzic, il ne fait aucun doute qu'autour de Sarajevo, il vous

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  1   a fallut vous déployer sur une ligne de confrontation double.

  2   Q.  Merci.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors est-ce que je peux demander la pièce

  4   1D1927 dans le prétoire électronique ? 1D1927. C'est un document du 3 mars

  5   1993.

  6   Page 20, s'il vous plaît. Nous voyons ce que les Nations Unies savent de la

  7   position des pièces lourdes musulmanes et serbes. Voilà au petit A :

  8   "Toutes les armes lourdes doivent être retirées vers les endroits

  9   précisés…"

 10   Mojmilo et Dobrinja, placées sous le contrôle des Musulmans.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Vous êtes d'accord ? Lukavica, Gornji Kotorac sous le contrôle des

 13   Serbes; Vojkovici, Serbe; Hrasnica, Musulman; Sokolovic Kolonija, Musulman;

 14   Butmir, Musulman; Ilidza, Serbe; Otes, Serbe, à l'époque; Stup, Croate; et

 15   Nedzarici, Serbe; vous vous souvenez de ces endroits ?

 16   R.  Oui, je me souviens de la plupart d'entre eux. Il est clair que les

 17   Nations Unies essayaient d'obtenir un accord égal, juste.

 18   Q.  Donc est-ce que vous vous souvenez que Mojmilo était entre les mains de

 19   la BiH, que c'était la colline qui surplombait Lukavica, Ilidza et Dobrinja

 20   ? Vous vous souvenez de Mojmilo ?

 21   R.  Oui, bien sûr, Docteur Karadzic. Je suis allé à partir du moment où on

 22   avait confisqué un blindé français des casques bleus français à l'extérieur

 23   de Lukavica, et nous les avons escortés jusqu'au sommet de la colline. Nous

 24   avons pu voir depuis le haut Lukavica et les véhicules français.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons verser cela au dossier

 26   ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D924.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Vous saviez que l'intensité des combats a varié. Il y a eu des moments

  4   d'accalmie. Donc j'aimerais savoir si nous avons pu informer l'opinion

  5   internationale du contexte de ces événements. Donc, par exemple, pourquoi

  6   est-ce qu'à un moment donné il y a une intensification des combats ? Là, je

  7   pense à la fois au contexte politique et au contexte militaire de ces

  8   événements.

  9   R.  C'est en hiver 1993/1994 que je me souviens d'avoir parlé d'accalmie,

 10   et également pendant l'hiver 1994/1995, il y a eu y compris un cessez-le-

 11   feu à un moment donné. Puis je me souviens au début de l'été 1995 d'une

 12   attaque vers les pentes menées par les Unités de la BiH dans le cadre d'une

 13   tentative de s'emparer d'un tronçon de la ligne de confrontation, de la

 14   ligne de front, et là, ils y sont parvenus brièvement, et à ce moment-là,

 15   effectivement, c'était l'un de ces moments où j'ai évalué qu'il y avait

 16   davantage de tirs sortants de la ville que de tirs entrants.

 17   Q.  Je vous remercie. Nous aurons l'occasion de reparler du contexte

 18   politique. Mais je voudrais maintenant vérifier ce qu'il en est de l'aspect

 19   militaire.

 20   Est-ce que vous vous souvenez qu'en juin 1992, au moment des négociations

 21   menées à Genève, qu'une offensive a été lancée par les forces musulmanes

 22   basées à Sarajevo, et en particulier c'est à partir du 8 juin que cette

 23   offensive a été intense ?

 24   R.  Docteur Karadzic, comme je l'ai déjà dit dans le cadre de ma déposition

 25   hier, la BBC était partie pendant la deuxième semaine du mois de mai, donc

 26   n'était pas sur place les 7 ou 8 juin. Je dois dire que j'ai eu du mal à y

 27   retourner, donc je pense que je suis revenu vers le 15 ou 16. Nous avons

 28   essuyé des tirs au moment où nous avons essayé de traverser vers Lukavica,

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  1   et nous avons essuyé des tirs également sur la piste de l'aéroport.

  2   Q.  Merci. J'aimerais que nous revenions sur le paragraphe 71, si je ne me

  3   trompe, de votre déclaration consolidée. Vous avez tout à fait raison, ce

  4   n'était pas le 1e juin 1992, mais c'était au mois de juin tout de même, je

  5   cite :

  6   "Le numéro est V000-8000," et cetera.

  7   Je cite :

  8   "On m'informe de la situation à Sarajevo à la fin du mois de juin 1992.

  9   Dans cette séquence, j'ai montré le bombardement constant de la ville,

 10   puisque les Nations Unies s'étaient retirées de l'aéroport."

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, je vous prie.

 12   Monsieur Bell, est-ce que vous avez votre déclaration sous les yeux ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je vous remercie.

 15   Monsieur Karadzic, quelle est votre question ?

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  En examinant la déclaration et des reportages, Monsieur Bell, j'ai

 18   déterminé six périodes pendant lesquelles la BBC faisait état de combat qui

 19   s'intensifiait, et j'aimerais que nous replacions cette intensification des

 20   combats dans le contexte général de l'offensive, que nous voyons si cela

 21   s'est passé dans le contexte de l'offensive.

 22   Par exemple, au paragraphe 71, nous voyons qu'il est question du mois de

 23   juin 1992, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous nous pencher rapidement sur la

 26   pièce P998 ?

 27   Je demande le versement au dossier du document précédent. Est-ce qu'il est

 28   déjà versé ? Oui. Merci.

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  1   Alors maintenant, affichage de la pièce P998.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Alors voyons la première phrase, par exemple, je cite :

  4   "L'ennemi s'est lancé dans une offensive tout azimut, en engageant ses

  5   forces selon les axes:"

  6   Là, on a l'énumération des axes, dans l'intention de débloquer Sarajevo.

  7   Convenez-vous que cette intensification des combats que vous avez remarqué,

  8   dont vous avez fait état dans vos reportages, se situait dans un contexte

  9   militaire bien déterminé, qui était celui d'une offensive lancée par l'ABiH

 10   ?

 11   R.  Docteur Karadzic, il n'y a pas eu un seul jour de combat intensifié

 12   entre le mois de mai et la fin du mois de juin et, bien entendu, je n'avais

 13   pas accès aux documents internes de l'un ou l'autre des hauts

 14   commandements. Ce dont je parlais en particulier dans le paragraphe 71 de

 15   ma déclaration consolidée correspondait à ce que nous avons pu voir en

 16   images hier dans ce prétoire, à savoir toute une série d'explosions d'obus

 17   de mortier dans le centre de la ville de Sarajevo.

 18   Q.  Je vous remercie. Puis-je vous prier de vous pencher sur le paragraphe

 19   4 ? En anglais, cela devrait se situer à la page suivante.

 20   Pour que nous voyions quel est l'objectif des actions, nous voyons au

 21   milieu du paragraphe les mots "objectif des actions."

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, par rapport à la

 23   déclaration consolidée, en particulier du paragraphe 71 - et là, j'exprime

 24   mon point de vue personnel - je suis convaincu que nous avons obtenu du

 25   témoin tout ce que nous pouvions obtenir de lui sur ce paragraphe. Il ne

 26   sert à rien d'interroger le témoin sur un document qui est déjà une pièce à

 27   conviction.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Mais je voulais simplement voir si les

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  1   tirs étaient des tirs dus au caprice des Serbes ou si les Serbes n'avaient

  2   effectivement aucun intérêt à lancer une offensive à ce moment-là, aucune

  3   raison de le faire.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Au paragraphe 54, Monsieur Bell, encore une fois il fait état de ses

  6   observations au sujet de périodes d'accalmie qui sont survenues durant

  7   l'hiver et à la dégradation de la situation entre 1992 et 1995; vous êtes

  8   d'accord là-dessus, Monsieur Bell ?

  9   R.  Oui, en particulier, Monsieur le Président, des intensifications des

 10   combats pendant les étés de 1992 et 1995.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je à présent demander l'affichage de la

 12   pièce D192 qui nous permettra de voir ce qui se passait au sein de la

 13   présidence de Bosnie-Herzégovine, la présidence dirigée par M. Izetbegovic,

 14   à la date du 17 juin 1992 ?

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Ce document confirme et il vient de la présidence de Bosnie-Herzégovine

 17   donc c'est une confirmation du fait que les actions offensives de l'ABiH

 18   sont importantes au moment où vous-même vous faites état dans vos

 19   reportages d'une intensification des combats.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] A présent, je demande l'affichage de la page 6

 21   en serbe, qui, je crois, devrait correspondre aussi à la page 6, en

 22   anglais.

 23   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bon, il n'y a qu'une partie qui est traduite,

 25   donc on peut en rester à la page affichée, page 1.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Voyons ce qui est écrit au point 2, je cite :

 28   "Etat du déploiement et statut des forces de la Défense territoriale."

Page 9869

  1   C'est donc le moment où les forces se réorganisent pour devenir une

  2   véritable armée. Dernier paragraphe en anglais :

  3   "Déploiement des forces et statut des forces territoriales dans la région

  4   de Sarajevo:"

  5   Puis ensuite nous avons une énumération, je cite :

  6   "La Défense territoriale dans la région de Sarajevo se compose des éléments

  7   suivants : Quartier général régional…"

  8   Maintenant je demande l'affichage de la page suivante en anglais. Poursuite

  9   de la citation.

 10   "Deux batteries de mortier, de 120 millimètres, équipées de 12 pièces; une

 11   batterie d'obusier de 105 millimètres équipée de cinq pièces; une unité

 12   d'artillerie, pièce de 122 millimètres…"

 13   Et cetera, et cetera.

 14   Un peu plus loin, je cite :

 15   "500 pelotons indépendants, 16 quartiers généraux, 16 compagnies de la

 16   Défense territoriale, et environ 500 unités indépendantes."

 17   Est-ce que ceci est une force considérable que vous êtes parvenu à

 18   dissimuler aussi bien aux Nations Unies qu'au média ?

 19   R.  C'est une force considérable. Nous étions, bien sûr, au courant de

 20   l'existence des installations et des unités militaires dans la ville et non

 21   loin des lignes de front. Mais tous ces documents sont totalement nouveaux

 22   pour moi parce que cela ne vous surprendra pas de m'entendre vous dire que

 23   les hauts commandements ne partageaient pas leurs secrets avec nous sur le

 24   terrain. Tout ce que nous pouvions faire c'était rendre compte de ce que

 25   nous voyons et de ce que nous savions à partir des observations que nous

 26   faisions en différents points bien situés dans la ville et aux environs de

 27   la ville.

 28   Q.  Ça c'était les mots de Sefer Halilovic, qui informe son commandement

Page 9870

  1   supérieur au sujet du potentiel dont dispose l'ABiH.

  2   Je demande l'affichage de la page 12, même page à l'écran en anglais, je

  3   cite :

  4   "Dans la région de Sarajevo, la ville de Sarajevo sera défendue et des

  5   opérations actives se mèneront hors de la ville et à l'intérieur de la

  6   ville dans le but de lever le blocus sur les axes suivants : Nova Grad,

  7   Ilidza, Blazuj, Kiseljak, et le centre de Vogosca, Ilijas, Visoko, alors

  8   que dans la région de Gorazde, la route sera débloquée dans la région de la

  9   vallée de la Drina."

 10   Ça c'est donc un document des Musulmans qui date du mois de juin.

 11   Conviendrez-vous avec moi que toutes ces batailles, si on les replace dans

 12   leur contexte, et si on ne perd pas de vue le potentiel réel qui était les

 13   leurs, donc tous ces combats peuvent être vus sous un angle totalement

 14   différent à partir de ces documents ?

 15   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je me limiterais à

 16   ce que je sais.

 17   Il m'est toujours apparu clairement que des tentatives seraient opérées par

 18   les forces gouvernementales dans le but de tenter de lever le siège, aussi

 19   bien à partir de l'intérieur que de l'extérieur de Sarajevo. D'ailleurs

 20   elles sont presque parvenues à le faire durant l'été 1995. De mon point de

 21   vue, il se déroulait pratiquement deux guerres différentes. Une guerre qui

 22   opposait les forces armées des deux parties sur les lignes de front; et

 23   l'autre guerre, la deuxième qui se manifestait, par le bombardement, d'une

 24   ville grandement peuplée qui abritait un grand nombre de civils.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à présent l'affichage de la pièce

 27   P1000.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 9871

  1   Q.  Est-ce que vous convenez qu'il importe de savoir si un obus, lorsqu'il

  2   est lancé, vise un quartier ou si un mortier est situé à cet endroit, à

  3   moins qu'il ne s'agisse éventuellement d'une autre pièce de

  4   l'infrastructure militaire ? Est-ce que vous conviendrez que cela pourrait

  5   nous aider de savoir, si les tirs étaient aveugles ou pas ?

  6   R.  Je sais, à partir des éléments à ma disposition, que j'ai été touché

  7   par un obus de mortier, à l'arrière de la caserne de Tito, et qu'à cet

  8   endroit, il ne se trouvait aucune arme lourde ou même aucune arme légère,

  9   autour de moi, à ce moment-là.

 10   Je pourrais peut-être envoyer les Juges de la Chambre encore une fois, au

 11   film qui a été montré hier, où l'on voyait des tirs embusqués visant des

 12   personnes qui transportaient de l'eau. Il n'y avait aucune arme dans les

 13   environs.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous viendrons à ce point plus tard.

 15   J'aimerais que l'on voie la page suivante, maintenant, la date du document

 16   est celle du 26 juin 1992.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Le commandement du Corps de Sarajevo-Romanija ordonne un certain nombre

 19   de choses à ses brigades subordonnées. Je vous prierais de bien vous

 20   pencher sur le paragraphe 9, qui se lit comme suit, je cite :

 21   "Organiser impeccablement le système de tir, et coordonner ce système de

 22   tirs par rapport aux obstacles. Les tirs ne doivent être ouverts que sur

 23   des cibles militaires."

 24   En anglais, la traduction n'est pas parfaite. On devrait voir le mot "must"

 25   au lieu du mot "should" dans le texte, parce que cet ordre des Serbes est

 26   manifestement un ordre tout à fait impératif.

 27   Je répète :

 28   "Organiser et n'ouvrir le feu que sur des cibles militaires."

Page 9872

  1   Alors je comprends, Monsieur Bell, que les commandements ne partageaient

  2   pas leur secret avec vous. Mais vous rappelez-vous qu'il y avait des

  3   mortiers qui étaient montés à bord de véhicules, et qu'ils se déplaçaient

  4   un peu partout dans la ville et ouvraient le feu à partir de divers lieux ?

  5   R.  Oui, Monsieur Karadzic, je l'ai vu de mes yeux. Mais j'ajouterais

  6   toutefois que, si la date de ce document -- et le paragraphe 9 nous

  7   montrent un ordre tout à fait respectable, la date de ce document est la

  8   même date que celle que j'ai consignée dans mes notes, pour indiquer qu'à

  9   ce moment-là, les activités se multipliaient, activités de tirs embusqués

 10   dans les environs de ce que nous connaissons sous le nom de sniper corner,

 11   le coin des tireurs embusqués. En fait j'ai fait un reportage à ce sujet,

 12   ce jour-là.

 13   Q.  Merci. J'ai remarqué, dans votre déclaration de 1995 et 1996, que,

 14   vous-même, ainsi que probablement d'autres personnes, vous vous êtes appuyé

 15   sur le sens commun pour essayer de déterminer qui tirait éventuellement.

 16   R.  Je dirais, Docteur Karadzic, que le sens commun doit jouer un rôle dans

 17   le journalisme.

 18   Q.  Mais êtes-vous d'accord pour admettre que dans le genre de guerre

 19   civile qui était la nôtre, le sens commun présentait un aspect un peu

 20   différent tout de même ?

 21   R.  Cela me fascinerait de savoir quel était cet aspect, Docteur Karadzic.

 22   Q.  Je voudrais simplement dire que, si nous nous étions appuyés sur le

 23   sens commun, cela aurait voulu dire que personne n'aurait jamais tiré sur

 24   sa propre initiative personnelle, n'est-ce pas ? Que personne n'aurait

 25   jamais tiré sur lui-même, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, je l'admets.

 27   Q.  Mais nous savions que les parties en présence ont parfois tiré sur

 28   elles-mêmes, bien sûr. J'espère que les miens n'ont jamais tiré sur eux-

Page 9873

  1   mêmes, parce que cela n'aurait aucun sens et n'aurait présenté aucun

  2   avantage. Mais l'adversaire, c'est certain, a parfois tiré sur ses propres

  3   forces.

  4   J'aimerais que nous nous penchions sur un autre document, le document

  5   1D2485. Pardon, c'est déjà une pièce de la Défense, la pièce D681. C'est un

  6   document adressé au général Rose, en date du 27 octobre 1994.

  7   J'aimerais maintenant que nous voyons à l'écran la page suivante.

  8   On voit Flag B, et le dernier tirer, je cite :

  9   "Tous les éléments de preuve corroborés d'ailleurs par les responsables de

 10   Bosnie, indiquent que les tirs venaient du territoire tenu par les

 11   Musulmans de Bosnie."

 12   Donc la partie musulmane a ouvert le feu sur son propre tramway, et vous

 13   verrez, dans les pages suivantes, pour quelle raison elle l'a fait.

 14   Est-ce que vous êtes d'accord que ceci est bien un rapport des Nations

 15   Unies ?

 16   R.  Il se présente comme un rapport des Nations Unies, oui.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage de la pièce

 19   D680. Merci. Il n'y a pas de version en serbe, nous n'avons pas besoin de

 20   deux versions d'ailleurs. La version anglaise nous suffit.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Donc ce document est un rapport des Nations Unies, qui concerne la

 23   journée du 9 septembre 1994. Le lieu est la rue de Livanjska, deux obus de

 24   82-millimètres sont évoqués.

 25   Page suivante à l'écran.

 26   Il est question de l'angle de chute qui est évalué comme se situant entre

 27   70 et 75 degrés.

 28   Page suivante à présent, pour la conclusion, je cite :

Page 9874

  1   "Il est possible de conclure que les secteurs les plus suspects se situent

  2   sous le contrôle de l'ABiH.

  3   "Pour qu'un tir provienne des positions tenues par l'ABiH, et de cette même

  4   direction entre 12 et 16 millièmes, la distance devrait être au minimum de

  5   3 700 mètres. L'angle de descente dans ce cas devrait être inférieur à 60

  6   degrés."

  7   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : "Pour que les tirs proviennent

  8   des positions tenues par l'armée des Bosno serbes, et de cette même

  9   direction - entre parenthèse - (entre 12 et 16 000), la distance aurait dû

 10   être au minimum de 3 700 mètres. L'angle de descente dans ce cas, aurait dû

 11   être inférieur à 60 degrés."

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Donc c'est un exemple supplémentaire qui montre que les Nations Unies

 14   ont conclu que cet obus avait atterri sur le territoire bosnien, donc sur

 15   territoire musulman, et avait été tiré à partir du territoire musulman.

 16   Cette information était disponible aux Nations Unies et n'a pas été

 17   partagée avec les médias; c'est bien cela ?

 18   R.  La seule fois, Docteur Karadzic, dont j'ai le souvenir cette

 19   information a été partagée avec nous, et c'est le moment où le général

 20   MacKenzie avant son départ, a organisé une conférence de presse destinée à

 21   la presse de Bosnie, dans laquelle il a déclaré qu'il serait utile que les

 22   deux parties cessent d'attaquer leur propre population. Manifestement ce

 23   document est un document que la Chambre va devoir prendre en compte. Je

 24   pense qu'elle peut aider, la Chambre, Monsieur le Président, Madame,

 25   Messieurs les Juges, si je me contente de parler de ce que je sais.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Docteur Karadzic c'est ce que je

 27   vous dis.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne montrerai pas ce document, car je crois

Page 9875

  1   qu'il relève de l'article 70 du Règlement.

  2   Je voudrais simplement dire que les gens, qui faisaient la queue pour se

  3   procurer du pain et qui ont subi l'explosion du 27 mai 1992, que cette

  4   explosion a également été estimée comme ayant été provoquée par la partie

  5   musulmane.

  6   Revenons maintenant sur un point --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

  8   Mme EDGERTON : [interprétation] C'est le Dr Karadzic qui témoigne, Monsieur

  9   le Président.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Un instant. Affichage de la pièce D230. Il

 12   faudrait que nous passions à huis clos partiel pour examiner ce document.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit que vous ne montreriez pas

 14   ce document.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est un document qui est une pièce à

 16   conviction. Mais je crois qu'il relève de l'article 70, donc il importe

 17   qu'il ne soit pas vu par le public. C'est la raison pour laquelle je

 18   demande une minute de passage à huis clos partiel.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions poursuivre en

 20   audience publique sans diffusion des images à l'extérieur ?

 21   Mme EDGERTON : [interprétation] La note que j'ai dans le prétoire

 22   électronique, et c'est le seul élément sur lequel je puis m'appuyer par

 23   rapport à ce document, c'est que sur consigne du fournisseur du document,

 24   ce document ne peut être utilisé qu'à huis clos partiel, Monsieur le

 25   Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous passerons à huis clos partiel.

 27   Mais, Monsieur Karadzic, M. Bell a dit clairement qu'il ne pouvait rien

 28   dire sur ce document dans sa déposition, puisqu'il n'avait pas connaissance

Page 9876

  1   de son existence à l'époque.  Je doute beaucoup de la validité de l'examen

  2   de ce document par conséquent.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Votre Excellence, je m'en rends bien compte,

  4   mais j'aimerais tout de même que nous examinions quelle était la situation

  5   à l'époque, ce à quoi nous étions confrontés et quelles étaient les

  6   opérations militaires en cours à l'époque, afin de ne pas transformer des

  7   actions de guerre en faits juridiques. J'aimerais aussi faire état du fait

  8   que les médias avaient des difficultés à faire connaître toute la vérité de

  9   la situation prévalente à Sarajevo.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous sommes toujours en audience

 11   publique.

 12   Vous pouvez présenter votre thèse au témoin et entendre son avis, après

 13   quoi vous pouvez, dans les stades ultérieurs de la procédure, présenter vos

 14   arguments sur la base des éléments de preuve.

 15   Mais enfin, passons à huis clos partiel pour voir ce document.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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 26   [Audience publique]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous sommes en audience

 28   publique.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Conviendrez-vous que le bombardement de

  2   Sarajevo ou, en tout cas, les tirs sur Sarajevo, après les visites de

  3   visiteurs importants, n'était, en aucun cas, à l'avantage des Serbes ? Cela

  4   ne pouvait que se faire au détriment des Serbes, n'est-ce pas ?

  5   R.  L'expérience que j'ai de la guerre, Docteur Karadzic, une expérience

  6   importante, m'a appris qu'il était très difficile de déterminer exactement

  7   quelles sont les intentions des personnes qui mettent au point des

  8   offensives militaires et qu'il peut y avoir quelques erreurs dans la

  9   détermination des effets politiques de tels actes.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous diffusions la

 12   vidéo qui constitue le document 1D2889. 2889.

 13    Ce qu'on vient de voir c'était le 2890. Moi, je demande le 2889. Merci.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "…Akashi était de retour à Sarajevo pour essayer de relancer le

 17   processus de paix totalement bloqué. Il a passé 20 minutes à la présidence

 18   bosniaque au moment où les Serbes - si c'était bien les Serbes - on donné

 19   leur réponse."

 20   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 21   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 24   "Un missile guidé a raté le bâtiment. L'objectif était d'éviter une

 25   confrontation avec les Serbes, à laquelle les Bosniens n'étaient pas

 26   préparés."

 27   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 28   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Les interprètes n'ont pas reçu de

Page 9879

  1   transcription de cette vidéo.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Donc il était suspecté que l'action n'était pas due aux Serbes, parce

  4   que ceci aurait considérablement nuit à leur position politique, la

  5   position police des Serbes. Vous êtes d'accord là-dessus ?

  6   R.  Docteur Karadzic, vous savez que je choisi les mots utilisés par moi

  7   avec un grand soin, car j'essaie toujours de rendre compte uniquement de ce

  8   que je sais, et si j'avais été sûr à 100 % que ce missile provenait de

  9   votre territoire, j'aurais employé les mots "les Serbes, s'il s'était agit

 10   des Serbes." Je pense que la réserve exprimée était tout à fait claire et

 11   qu'elle permettait d'avoir le bénéfice du doute.

 12   Q.  Merci.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que cette vidéo peut être versée au

 14   dossier ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro de cette vidéo ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] 2889. Nous fournirons les références de time

 17   code plus tard.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'était 1D2889 ?

 19   Mme EDGERTON : [interprétation] C'est un document qui a déjà été versé au

 20   dossier. Il représente la pièce P1679 me dit-on. Elle a été versée au

 21   dossier par le truchement du général Rose en tant que pièce associée à la

 22   déposition écrite du général.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Edgerton.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on affiche la pièce

 25   D217 - c'est l'ouvrage du général Mackenzie - pour que nous nous penchions

 26   sur deux phrases de cet ouvrage simplement.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Bell, ce que je souhaite faire, en ce moment, c'est de

Page 9880

  1   déterminer s'il existait les schémas de manipulation de manœuvre de guerre

  2   qui avaient pour but de ternir l'image de la partie adverse.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc D217. Page 16, s'il vous plaît, de ce

  4   document. C'est le chapitre 18.

  5   Je me suis trompé. En fait, il faut tourner la page.

  6   C'est la journée du 6 mai qui nous intéresse. Le général MacKenzie dit

  7   qu'il a rencontré ou plutôt qu'il s'est trouvé en la compagnie de M.

  8   Goulding, qu'ils ont rencontré le président Izetbegovic.

  9   Est-ce qu'on peut tourner la page ?

 10   Au début de la page, ils ont donc -- ils étaient -- avec Izetbegovic, ils

 11   ont essuyé des tirs au cœur de la vieille ville, c'était des tirs

 12   d'infanterie, et c'était une indication que c'était un des stratagèmes en

 13   fait qui cherchait à ternir l'image de la partie serbe.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  J'aimerais savoir si ce que l'on voit ici vous rappelle des choses, à

 16   savoir est-ce qu'effectivement, il y avait ce jeu qui consistait à ternir

 17   l'image de l'autre partie, en l'occurrence de la partie serbe ?

 18   R.  Je pense que, pour chacune des parties, c'était dans leur intérêt de

 19   faire en sorte que la communauté internationale soit plutôt critique vis-à-

 20   vis de l'autre partie, et je me souviens bien du général MacKenzie, je le

 21   connaissais bien. Je me suis trouvé avec li à de nombreuses reprises à des

 22   moments où des coups de feu ont commencé là où nous ne nous y attendions

 23   pas, et il disait : Ah, c'est le show qui commence, et je pense que c'est

 24   ce qu'il dit ici dans ce livre.

 25   Q.  Merci. Nous avons ou plutôt nous estimons que la directive secrète de

 26   Hasan Efendic que nous avons examinée hier, de la fin du mois d'avril 1992

 27   était un début d'une guerre secrète contre la JNA et les Serbes de Bosnie.

 28   Donc est-ce que vous vous souvenez que le 20 juin, la présidence musulmane

Page 9881

  1   de Sarajevo a déclaré la guerre aux Serbes de Bosnie, et aux Monténégro,

  2   Serbes ?

  3   R.  Le 20 juin, j'ai fait un reportage sur le retrait des forces des

  4   Nations Unies de l'aéroport, Docteur Karadzic.

  5   Q.  Voyons maintenant ce qui en est de ces types de comportement. Au

  6   paragraphe 79 de votre déclaration, vous parlez du mois d'août 1992, et

  7   vous dites :

  8   "C'était un des modèles de comportement dans cette guerre, à savoir les

  9   combats s'intensifiaient avant une conférence de paix, parce que les deux

 10   parties cherchaient à améliorer leurs positions sur le terrain."

 11   Mais hormis cette raison militaire, est-ce que vous êtes d'accord pour dire

 12   qu'il y avait cette raison de propagande, et que nous avons rencontré des

 13   problèmes sur le plan politique à cause de ces stratagèmes ?

 14   R.  Monsieur Karadzic, je dirais que dans le cas de chaque guerre on ne

 15   sert pas uniquement d'armes, en tant que telles, mais on se sert également

 16   de mots et d'images. Cela concerne avant tout les guerres, comme celle-ci,

 17   où un commandant militaire essaiera -- non n'essaie pas nécessairement

 18   d'induire en erreur l'opinion, mais plutôt essaiera de montrer clairement

 19   ce qu'il essaie de faire et pourquoi il essaie de le faire. Dans toutes les

 20   guerres que j'ai suivies, je ne trouve pas d'exemple où une guerre aurait

 21   autant dépendu de l'importance de mots et d'images que celle-ci.

 22   En même temps, lorsqu'il y avait des intensifications de combat avant une

 23   conférence, comme je le dis clairement au paragraphe 77 [comme interprété],

 24   et vous aviez d'ailleurs les cartes sous les yeux tout le temps. C'était

 25   parce que, si jamais il allait y avoir un règlement final donc sur le

 26   terrain, vous cherchiez à améliorer votre position sur le terrain, et cela

 27   concernait les deux parties.

 28   Q.  Je vous remercie.

Page 9882

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant examiner la

  2   pièce 1600 sur la liste 65 ter.

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] Ce document a été versé au dossier comme

  4   pièce D235.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Vous avez raison.

  6   Donc au tout début de ce document, je ne suis pas sûr d'ailleurs si la page

  7   anglaise correspond à cela. Oui, c'est bien le même document, mais il faut

  8   tourner la page.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  La date est celle du 3 août 1992. Vous vous souviendrez que c'est au

 11   moment de la Conférence de Carrington, pas de Vance-Owen ? La première

 12   phrase se lit comme suit :

 13   "A l'expiration du cessez-le-feu d'une durée de 14 jours l'ennemi a

 14   commencé a violé ce cessez-le-feu…"

 15   Puis dans la suite, nous voyons quelles sont les intentions de l'ennemi.

 16   Ce document vient du Grand état-major de la VRS, et il est -- on voit sa

 17   directive au cors d'armée, aux unités subalternes, et ils informent la

 18   situation à Sarajevo. Donc c'est un exemple de ce dont vous venez de

 19   parler, donc avant le début d'une conférence, on essaie de changer la

 20   situation sur le terrain, donc avant un règlement une solution à laquelle

 21   on s'attend dans le cadre de cette conférence ?

 22   R.  Oui, de manière générale, c'est ce que l'on peut dire. Mais là, très

 23   concrètement, s'agissant de ce document, je ne peux pas en parler, parce

 24   que je n'étais pas en Bosnie à l'époque.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ah, ce document est déjà versé au dossier.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Vous vous souviendrez qu'en janvier, la Conférence de Paix, qui se

 28   déroulait à Genève à ce moment-là, avait à l'ordre du jour le plan Vance-

Page 9883

  1   Owen. Dans votre paragraphe 83 de la déclaration consolidée, vous dites que

  2   vous êtes revenu à Sarajevo en janvier, pour travailler pour le programme

  3   "Panorama." Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, retrouver ce passage ?

  4   R.  Je l'ai.

  5   Q.  Merci. Ici, vous parlez également d'un extrait vidéo, vous dites qu'il

  6   constituait un extrait d'un film tourné par vous pendant la période que

  7   vous décrivez, comme étant une période de bombardement lourd, pilonnage

  8   lourd de la vieille ville, et vous dites :

  9   "A Sarajevo, les atrocités ce n'est pas uniquement quelque chose dont on a

 10   parlé, et c'est quelque chose que l'on vit au jour le jour."

 11   Vous souvenez-vous qu'à ce moment-là les Musulmans partent de

 12   Trebinje le 20 janvier 1993, donc au moment de la conférence ? Il y a un

 13   départ manifeste des Musulmans de Trebinje, en pleine conférence.

 14   R.  Je vous fais confiance là-dessus, Monsieur Karadzic. Je pense qu'à

 15   l'époque, j'étais partie pour New York pour vous interviewer au sujet du

 16   plan Vance-Owen.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] La pièce 1D1851, s'il vous plaît.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Pendant toute cette période, ce qui m'intéresse ce sont ces

 21   manipulations, ces subterfuges qui cherchent à jeter le [inaudible] sur les

 22   Serbes et qui servent de prétexte pour ternir l'image des Serbes --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, soit vous allez poser

 24   vos questions, soit vous allez arrêter de faire des déclarations.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] D471, c'est la pièce qui s'affiche.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Nous avons une instruction de parti politique SDA qui demande que l'on

 28   quitte Trebinje et que les Musulmans se rendent au Monténégro. Alors je

Page 9884

  1   suppose que vous avez eu l'occasion de vous intéresser à cela dans le cadre

  2   de vos entretiens avec le président de l'assemblée de la SAO d'Herzégovine

  3   et avec le président de la municipalité de Trebinje; vous en souvenez-vous

  4   ?

  5   R.  Il est possible que vous vous trompiez là-dessus. Si je m'étais rendu à

  6   Trebinje, à ce moment-là, je m'en serais souvenu sans aucun doute.

  7   Q.  Je vous demande, s'il vous plaît, d'examiner le premier paragraphe, où

  8   il est dit :

  9   "…en particulier depuis l'acceptation des documents de Genève par Karadzic

 10   et par ses acolytes de Pale, il est nécessaire, afin de réaliser toutes les

 11   aspirations des Musulmans, afin de préserver et renforcer notre état, à

 12   savoir la Bosnie-Herzégovine, il est nécessaire d'entreprendre des mesures

 13   comme suit…

 14   "Sur le territoire de la municipalité de Trebinje."

 15   Il est dit :

 16   "Il convient d'exercer des pressions sur ceux qui ne voudront pas quitter

 17   Trebinje."

 18   Au premier paragraphe, qu'il convient de quitter Trebinje au plus vite.

 19   Si nous tournons la page - je pense qu'il faudrait tourner la page en

 20   anglais également - il est dit qu'il y aura des compensations de versées

 21   pour les biens, et c'est Hasan Cengic qui signe le document, et c'est un

 22   des dirigeants très connus du SDA.

 23   Alors est-ce que ce genre de départ, à en juger d'après ce que vous en

 24   savez par ailleurs, est-ce que cela devait créer cette impression que

 25   c'était un nettoyage ethnique qui était en cours ?

 26   R.  Docteur Karadzic, il faut que je me limite dans le cadre de ma

 27   déposition à ce que je connais. Je ne connais pas personnellement,

 28   directement, cette situation qui prévalait à Trebinje.

Page 9885

  1   Q.  Merci.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir la pièce 1D2876,

  3   s'il vous plaît ?

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Vous vous souviendrez de cela, et vous en parlez d'ailleurs dans votre

  6   déclaration de 1995/1996. Donc vous dites que j'étais opposé aux tentatives

  7   de la Croix-Rouge, aux efforts de la Croix-Rouge d'évacuer un grand nombre

  8   de Musulmans et de Croates de la Krajina de la région de Banja Luka; vous

  9   vous en souvenez ?

 10   R.  Est-ce qu'il s'agit de la fin du mois d'août 1994 ?

 11   Q.  Oui.

 12   Il me faut la page 3393.

 13   Vous voyez l'endroit où il est dit : "La Croix-Rouge…" ?

 14   R.  Oui. Je pense qu'il s'agit ici de toute une série de reportages que

 15   j'ai faite en Bosnie centrale, près de Travnik, sur la ligne de

 16   confrontation, où il y avait des réfugiés en grand nombre, tant musulmans

 17   que croates.

 18   Q.  Merci. Là, nous avions 279. Alors nous avons la pièce qui comporte le

 19   numéro ERN 0029-5587 jusqu'à 5692, et puis 1647 jusqu'à 48.

 20   Est-ce que vous vous souvenez que la Croix-Rouge a demandé d'évacuer un

 21   grand nombre de Croates et de Musulmans dans des pays tiers et que je m'y

 22   suis opposé vigoureusement, et finalement j'ai cédé aux pressions et j'ai

 23   laissé partir cinq camions par jour à la place de 80 ? Est-ce que vous vous

 24   en souvenez ?

 25   R.  Je ne suis pas au courant de vos négociations avec le comité

 26   international de la Croix-Rouge, mais effectivement je me souviens de ces

 27   camions qui arrivaient sur les lignes de front situées dans les environs de

 28   Travnik, et il s'agissait là de camions pleins de Musulmans et de Croates.

Page 9886

  1   Q.  Très bien.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons verser au dossier ce

  3   document, s'il vous plaît ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De quoi s'agit-il ? De quel document il

  5   s'agit ici ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est un aperçu des reportages diffusés par la

  7   BBC en 1994. Nous avons ici un de ces résumés qui parle de cette

  8   évacuation, évacuation exigée par le CICR et à laquelle s'est opposé la

  9   direction des Serbes de Bosnie. Plus tard, cela a été qualifié de nettoyage

 10   ethnique. Nous verrons la déclaration de John Alstrum d'ailleurs.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est la BBC qui est à

 12   l'origine de ce résumé ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 15   Mme EDGERTON : [interprétation] C'est en fait un extrait des archives, d'un

 16   catalogue d'archive de la BBC.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis ce témoin, également.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc d'après ce que j'ai compris, il n'y

 19   a pas d'objection. Nous allons verser le document au dossier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D925. Merci.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons examiner un instant la

 22   pièce D336 ?

 23   La Défense souhaite faire constater ici les modèles de comportement pendant

 24   cette guerre, à savoir le comportement de la partie adverse, et c'était un

 25   comportement qui nous a coûté beaucoup sur le plan militaire et politique.

 26   Nous avons ici un document du 22 janvier 1993, et nous voyons que

 27   l'offensive de Sarajevo est toujours là du côté de l'armée de Bosnie-

 28   Herzégovine - c'est elle qui lance son offensive - et qu'en Bosnie centrale

Page 9887

  1   il y a des combats aussi entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Est-ce que vous arrivez à vous souvenir de cette offensive qui a eu

  4   lieu à Sarajevo en janvier 1993 ?

  5   R.  En janvier 1993, je me trouvais en Bosnie centrale. Je faisais des

  6   reportages sur la guerre qui opposait les Musulmans et les Croates. Non --

  7   excusez-moi, non, c'est une erreur, je n'étais pas là-bas.

  8   Je vois qu'il est question dans ce document de l'offensive de l'armée

  9   de Bosnie-Herzégovine, à Sarajevo, qui apparemment ne s'était pas encore

 10   déclenchée, du moins c'était l'opinion des Nations Unies. Et je dois dire

 11   que je n'étais pas en Bosnie en janvier 1993, si ce n'est pendant ce

 12   travail pour "Panorama."

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la troisième

 14   page, s'il vous plaît ?

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Dans le paragraphe 11, il est question d'une offensive que s'apprête à

 17   lancer l'ABiH, sans aide apportée par les Croates, et puis, au paragraphe

 18   13, nous voyons l'énumération de nos objectifs, A, B, C, D. Au petit (d),

 19   lancer une offensive à Sarajevo, et cela pour améliorer leur opposition

 20   dans le cadre des négociations; puis au petit (c), ils vont continuer à

 21   armer et à renforcer leur force  pour continuer la guerre, et pour acquérir

 22   un certain avantage sur le plan des positions acquises.

 23   Donc j'aimerais savoir si cela correspond à ce que vous avez

 24   remarqué.

 25   R.  Il me semble que, là, c'est une appréciation raisonnable des

 26   intentions de l'époque, sauf qu'au mois de janvier, ce serait un peu

 27   inhabituel de lancer une offensive pour des raisons tout à fait claires, de

 28   conditions atmosphériques.

Page 9888

  1   Q.  Très bien.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons verser ce document ?

  3   Non, il est déjà dans le dossier -- excusez-moi, oui, c'est bien la pièce

  4   336.

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, avant de changer de

  6   sujet, page 30, lignes 8 à 11, est-ce que je peux me référer à cet endroit-

  7   là où Dr Karadzic a dit à M. Bell :

  8   "Dans votre déclaration de 1995, 1996, vous dites que je me suis

  9   opposé aux efforts déployés par la Croix-Rouge, visant à évacuer un grand

 10   nombre de Musulmans et de Croates de la région de Banja Luka."

 11   J'ai regardé la totalité de la déclaration du témoin, je n'ai pas pu

 12   trouver de "Croix-Rouge" dans sa déclaration. Peut-être que je me trompe.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je pense que les médias en ont

 14   parlé, les médias ont bien dit que c'était une action lancée par la Croix-

 15   Rouge.

 16   Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais il s'est immédiatement référé

 18   à l'extrait de la BBC.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, tout à fait.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous la parole, Monsieur Karadzic.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  De retour à Sarajevo, donc après votre séjour en Bosnie centrale, fin

 23   septembre 1993, vous dites que vous avez remarqué un changement

 24   considérable sur le plan politique à Sarajevo. Vous dites que Sarajevo

 25   s'islamise pour ce qui est de son assemblée et de sa vie politique; vous en

 26   souvenez-vous ? Vous avez remarqué que les Musulmans convoquaient des

 27   réunions, que c'étaient eux qui ont décidé de l'ordre du jour, que

 28   c'étaient eux l'instance, la seule instance qui prenait des décisions

Page 9889

  1   lorsqu'il s'agissait de trouver des solutions à tel ou tel problème, et que

  2   les Croates étaient marginalisés ?

  3   R.  Oui, je pense que c'est effectivement une manière assez exacte de

  4   représenter la situation politique de l'époque. Les Croates avaient la

  5   sensation effectivement qu'ils étaient exclus. Et d'ailleurs c'est ce

  6   qu'ils pensent encore.

  7   Q.  C'est la déclaration de 1995, 1996, premier paragraphe, page 13. Donc

  8   êtes-vous d'accord pour dire que les Croates sont encore en train de

  9   rechercher de meilleures solutions pour eux, et qu'ils ne sont toujours pas

 10   d'accord avec leur situation ?

 11   R.  Je ne pense pas que c'est un sujet dont il convient de parler ici.

 12   Mais, effectivement, ils se sentent dans une position d'infériorité

 13   politiquement.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le moment est-il venu pour faire une pause ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 16   Le moment est pratiquement venu. Si cela vous arrange, nous  ferons une

 17   pause pendant 30 minutes. Nous reprendrons à 10 heures 57.

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 19   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 20    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, vous avez la

 21   parole.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Bell, vous avez suivi les événements de Zvornik au tout début

 25   du mois d'avril, et vous avez pu constater que, dans un premier temps, les

 26   Serbes ont pris la fuit, ont quitté Zvornik, puis par la suite les hommes

 27   sont revenus et les combats se sont déclenchés; est-ce que c'est bien cela

 28   ?

Page 9890

  1   R.  Oui. Tout d'abord, ce sont les Serbes qui sont partis de Zvornik, en

  2   traversant la rivière, si je ne me trompe pas, et je suppose qu'un certain

  3   nombre d'entre eux sont revenus. Mais je dois dire que les forces

  4   combattantes que nous avons vues sur la vidéo, que ces combattants étaient

  5   des hommes du commandant Arkan.

  6   Q.  Ecoutez, je vais me permettre de rappeler la chronologie des

  7   événements. Le 3 mars, se déclenche la crise à Bosanski Brod. Les 25 et le

  8   26 mars, massacre de Sijekovac -- crise à Sijekovac, le 1er avril, la crise

  9   qui se déclenche à Bijeljina le 1er et le 2 avril. Le 3 avril, attaque sur

 10   Kupres; le 8 ou le 9 avril, Zvornik. Donc êtes-vous d'accord pour confirmer

 11   que ce sont des événements très rapprochés dans le temps et puis il ne

 12   s'agit pas non plus d'un territoire très important surtout si l'on tient

 13   compte du fait qu'il s'agit de Bosanski Brod, de Bijeljina et de Zvornik

 14   qui sont près l'un de l'autre ? Donc est-ce que cela, à votre avis, aurait

 15   encouragé les Serbes à prendre la fuite et à partir en traversant la

 16   rivière ?

 17   R.  Je dirais qu'à ce moment-là, c'était la plus grande instabilité qui

 18   régnait, Docteur Karadzic, toute cette période qui se situe après le

 19   référendum du mois de mars.

 20   Q.  Merci. Est-ce que vous avez appris que de nombreuses unités

 21   paramilitaires musulmanes étaient actives à Zvornik, les Cobras et les

 22   Pigeons de Mosquée, ainsi appelés du moins, étaient les plus dangereux ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vu que vous avez posé une question à

 24   tiroir, nous n'avons rien entendu de cette enchaînement chronologique

 25   d'événements.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne dirais pas

 27   nécessairement que c'était un enchaînement d'événements. Il y a une série

 28   d'événements qui se sont produits, mais il n'est pas clair quel était le

Page 9891

  1   lien entre eux, et de toute façon, moi, je n'ai pas été participant à

  2   aucun, je n'ai participé à aucun d'entre eux, donc je ne peux pas vraiment

  3   vous être utile là-dessus.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce que vous avez appris quoi que ce soit sur ceux qui s'étaient

  7   enfuis de Zvornik ? Est-ce que vous avez appris qu'il y avait de nombreuses

  8   unités paramilitaires musulmanes en activité là sur place, et que les

  9   Cobras et les Pigeons de Mosquée étaient les unités les plus redoutables

 10   parmi elles ?

 11   R.  Ce sont les éléments dont vous disposez, mais pas moi, Docteur

 12   Karadzic. Tout ce que je savais c'est qu'un ou deux jours avant les combats

 13   de Zvornik, les Serbes effectivement s'étaient enfuis, et qu'ils s'étaient

 14   enfuis parce qu'ils avaient peur.

 15   Q.  Très bien. Nous avons des preuves que nous pouvons présenter, nous ne

 16   le ferons pas maintenant, nous savons que c'est sous le commandement des

 17   généraux Karavelic et Halilovic, que ces unités agissaient et qu'ils

 18   s'apprêtaient à faire sauter les ponts sur la Drina; le savez-vous ?

 19   R.  Je n'étais pas au courant de cela.

 20   Q.  Merci. Nous allons reparler des réfugiés, et nous avons pu voir dans

 21   votre reportage les réfugiés se déplacer sur la route. Mais dans votre

 22   déclaration de 1995/1996, page 7, vous avez raison, au paragraphe 5, de

 23   dire qu'il y a des réfugiés qui sont partis avant que les Serbes ne

 24   s'emparent de la ville de Zvornik, et avant que les Serbes ne les chassent

 25   de là-bas; c'est bien cela ?

 26   R.  Mais il y a un modus operandi, et je suis certain que ce n'est pas

 27   uniquement à Zvornik que ce type d'événement s'est produit de cette

 28   manière. Les gens s'attendaient à ce que la guerre éclate. Les Serbes se

Page 9892

  1   sont enfuis. Les paramilitaires serbes sont entrés dans la ville, et puis

  2   les Musulmans ont pris la fuite.

  3   Q.  D'accord. Mais ce qui m'intéresse le plus dans ce que vous dites c'est

  4   qu'en fait vous estimez qu'ils n'ont pas attendu l'arrivée des Serbes, donc

  5   c'était plutôt des réfugiés, ce n'était pas vraiment des personnes chassées

  6   de force ou expulsées.

  7   Votre déclaration correspond à la pièce D921, est-ce que l'on peut

  8   l'afficher, page 7 de cette déclaration, s'il vous plaît. Page 7, ce sera

  9   le cinquième paragraphe, en langue serbe. Est-ce que nous pouvons avoir

 10   cette page en serbe. En anglais, ce sera le premier paragraphe, le 10

 11   avril, et en serbe ce sera la cinquième paragraphe.

 12   Donc nous pouvons interpréter cela de deux façons. Soit, ils sont partis

 13   avant l'arrivée des Serbes dans la ville, soit, ils sont partis en suivant

 14   les instructions données, comme celles données à Trebinje. Donc vous êtes

 15   arrivé au fait qu'il s'agit de réfugiés, et que ce ne sont pas des gens qui

 16   ont été chassés :

 17   "C'était des gens qui sont partis en se disant que les Serbes allaient

 18   arriver."

 19   R.  Les images vidéo que nous avons vues hier nous permettent de penser et

 20   en fait nous avons entendu des canons tirer des coups de feu dans le

 21   lointain, donc pendant que ces gens étaient là, et bien que ces gens

 22   avaient pris la fuite. Je suppose qu'il y en a qui sont partis avant

 23   l'attaque lancée par Arkan, mais d'autres sont partis à cause de cette

 24   attaque.

 25   Q.  Merci. Vous vous souvenez de la crise qui a éclaté dans la localité de

 26   Kravica - c'est un village - et le jour de la Pâques orthodoxe de 1993, un

 27   massacre y a été commis contre les Serbes ?

 28   R.  Effectivement, j'en ai parlé dans mon reportage pour "Panorama" parce

Page 9893

  1   que j'ai trouvé que c'était un événement important, et j'ai trouvé qu'il

  2   était important de montrer que les Serbes étaient non seulement des auteurs

  3   mais aussi des victimes de ces événements. Dans le même esprit, nous avons

  4   réussi à nous faire transporter par la JNA à Kupres le 13 avril 1992, et

  5   puis là, nous sommes allés à l'enterrement de certaines victimes serbes qui

  6   ont été tués dans cette attaque lancée par les Croates.

  7   Q.  Merci. Pendant les premier journées de la guerre et peu avant la

  8   guerre, en fait, c'était les Serbes qui étaient des victimes des

  9   événements, et ce, à Kupres, Malovani, en passant par Sijekovac, la vallée

 10   de la Neretva, Mostar, donc les premières victimes étaient Serbes, n'est-ce

 11   pas, et c'est ce qui a contribué à attiser leur peur. Vous vous souviendrez

 12   que c'est le 7 janvier 1993, le jour de la Noël orthodoxe, qu'il y a eu le

 13   massacre de Kravica ? Les Serbes étaient en train de fêter leur Noël, et

 14   ils ne se sont pas méfiés.

 15   R.  Mais Docteur Karadzic, c'est justement à cause de cela que j'ai pensé

 16   qu'il était important que mon auditoire le connaisse, le public auquel je

 17   m'adresse soit au courant. Donc ce sont des images plutôt controversées,

 18   mais je les ai incluses dans mon reportage. Elles étaient très crues, je

 19   dois dire, très parlantes. On m'a critiqué, enfin j'ai dû essuyer des

 20   critiques chez moi à cause de cela.

 21   Q.  Vous avez fait l'objet de pression qui se sont exercées sur vous, non,

 22   par le "Times," à l'époque, parce que vous avez parlé de victimes serbes ?

 23   R.  J'ai été attaqué par l'éditorialiste du "Times." Il a rédigé un édito

 24   en attirant l'attention sur cet extrait de Kravica, en particulier, et en

 25   m'accusant de me livrer à une pornographie de la violence. J'ai rejeté ces

 26   critiques parce que j'estime que nous avons à relayer ce que nous voyons,

 27   mais je n'ai pas été critiqué par ma rédaction, à cause de cela.

 28   Q.  Oui, on peut imaginer comment des journalistes plus jeunes ou plus

Page 9894

  1   inexpérimentés se seraient pliés à ce type de critique; êtes-vous d'accord

  2   avec moi ?

  3   R.  Je dois dire que, malheureusement, je ne suis plus ni jeune ni

  4   inexpérimenté. En fait, le mieux ce serait une tête expérimentée sur un

  5   corps jeune.

  6   Q.  Est-ce que vous savez que nous avons ordonné que l'on ne se livre pas à

  7   des activités de combat pendant les êtes catholiques ou musulmanes, et que

  8   j'ai personnellement encouragé les pèlerins à se rendre à la Mecque ?

  9   R.  Je m'en félicite, Monsieur Karadzic, si c'est le cas.

 10   Q.  Très bien. Alors nous avons ces preuves mais nous les présenterons à un

 11   autre moment.

 12   Puis je voudrais que l'on reparle du mois de mars 1993. C'est la crise de

 13   Cerska; vous en souvenez-vous ?

 14   R.  Oui. Il nous a été très difficile de nous rendre là-bas, mais

 15   effectivement nous étions au courant de la crise.

 16   Q.  Ai-je raison de dire qu'une campagne violente a été déclenchée au sujet

 17   de Cerska, disant que les Serbes y avaient commis un massacre, que c'était

 18   un bain de sang généralisé, et que c'est ce qu'on pensait jusqu'à ce que le

 19   général Morillon ne se rende à Cerska ?

 20   R.  Je n'ai pas fait de reportage là-dessus, parce que je n'étais pas sur

 21   place. Et d'ailleurs, je ne parlais pas dans mes reportages du dire. Je ne

 22   les reprenais pas dans mes reportages. Donc je ne reprenais que ce qui

 23   m'était dit par les Nations Unies, en particulier par ceux à qui je faisais

 24   confiance parmi les Casques bleus.

 25   Q.  Nous avons une vidéo du 13 mars qui montre l'arrivée du général

 26   Morillon à Srebrenica, et il dit qu'il a l'intention de rester à

 27   Srebrenica; vous vous en souvenez ?

 28   R.  Oui, je me souviens de cela. C'est un des moments les plus remarqués de

Page 9895

  1   cette longue guerre.

  2   Q.  Je vous remercie. En 1993, vous avez passé beaucoup de temps en Bosnie

  3   centrale, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui, c'est exact.

  5   Q.  Ai-je raison de dire, donc sans juger de l'exactitude de ces

  6   appréciations, que les Serbes et les Croates, les uns comme les autres,

  7   avaient la sensation que vous étiez plutôt favorable aux Musulmans, mais en

  8   fait, vous étiez attaqué par les trois parties ?

  9   R.  Cela ne m'aurait pas gêné pas de me faire attaquer par les trois

 10   parties. Mais je dois dire que pendant la plus grande partie de cette

 11   année, nous étions basés dans la vallée de Lasva, qui était entre les mains

 12   du HVO, et je dois dire que j'entretenais de bonnes relations avec le HVO,

 13   plus particulièrement avec le commandant, avec le colonel Blaskic.

 14   Q.  Mais indépendamment de cette image, les Serbes vous portaient une

 15   grande estime, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, c'est vrai. J'ai expliqué cela hier. Aux barrages routiers, il

 17   m'est arrivé de rencontrer des problèmes considérables, mais le terme

 18   qu'ils utilisaient pour me décrire était que j'étais quelqu'un de correct,

 19   autrement dit que je faisais attention à respecter les faits. Je leur en

 20   étais reconnaissant, parce qu'on n'a pas besoin de multiplier les ennemis.

 21   Q.  Je suis tenté de raconter une anecdote, mais j'ai peur de perdre du

 22   temps. Chez nous, dans les Balkans, lorsqu'on voue une haine plus grande

 23   que d'habitude à quelqu'un, c'est là que l'on est considéré comme étant

 24   chauvinisme, chauvin.

 25   R.  J'aime bien ça.

 26   Q.  Parlons maintenant du 10 avril 1994, et la période qui suit, c'est le

 27   pilonnage de Gorazde, et la crise de Gorazde.

 28   R.  Oui, mais je ne suis jamais rentré dans Gorazde. Je suis resté sur les

Page 9896

  1   pentes qui étaient entre les mains des Serbes, et qui donnent une vue sur

  2   Gorazde, et c'était en fait votre fille qui m'a permis de m'y rendre.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la pièce

  4   1D2877.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Vous vous souviendrez que vous avez été en contact avec le général

  7   Rose, je suppose que c'était au moment de son retour. Est-ce que vous

  8   pouvez, s'il vous plaît, examiner la partie 36. Je pense que cela fait

  9   partie de quelque chose dont vous avez parlé dans vos reportages ?

 10   R.  Oui, je pense que c'était au moment de la visite très controversée du

 11   général Rose, à Gorazde. Je n'y suis pas allé avec lui, mais un caméraman

 12   militaire a enregistré cet événement.

 13   Q.  Vous vous souvenez qu'on a parlé des centaines, voire des milliers de

 14   morts, et que le général Rose a donné l'ordre qu'on pilonne les chars

 15   serbes et les positions serbes, et que lors d'une conférence de presse

 16   qu'il a donnée, le 12 avril, il a déclaré que ces forces ont pris pour

 17   cible les chars et les canons serbes; vous vous en souvenez ?

 18   R.  Oui. Cependant, je me souviens qu'un seul char a été pris pour cible et

 19   un seul char a été touché. Apparemment, c'était une manière juste de

 20   montrer que les Nations Unies étaient déterminées. Ce n'était certainement

 21   pas une attaque aérienne importante, quelque chose qui s'est produit plus

 22   tard dans cette guerre.

 23   Q.  Oui, c'était un char, une ambulance, et puis lors de la conférence de

 24   presse, le général Rose a déclaré que ces militaires ont réglé les tirs

 25   pour que la cible puisse être touchée. 0029-5578 jusqu'à 5692, page 1 484,

 26   page du compte rendu d'audience. Le 27 avril, il semblerait que le général

 27   Rose est en colère parce qu'il s'est fait leurrer par la BiH, qu'il s'est

 28   fait tromper sur la portée des dégâts à Gorazde; est-ce que vous êtes

Page 9897

  1   d'accord là-dessus ?

  2   R.  Oui, je me souviens du moment où il est reparti. Il pensait que les

  3   forces de la BiH auraient pu mieux se défendre. En fait, ce qu'il a dit

  4   était plutôt controversé. Si j'avais été soldat, je pense qu'il m'aurait

  5   traduit devant les tribunaux pour avoir diffusé cela.

  6   A l'époque, nous savions qu'on exagérait le nombre des victimes. Il était

  7   très difficile, Docteur Karadzic. Nous étions basés à Sarajevo, nous ne

  8   pouvions pas rentrer là-dedans, donc en principe on se fondait sur ce que

  9   diffusaient les radios des enclaves sur les choses atroces qui s'y

 10   passaient. Donc il nous était très difficile de les confirmer ou de les

 11   infirmer, donc, moi, j'essayais de ne parler que de ceux dont j'étais sûr.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser ce document au

 13   dossier ?

 14   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D926. Merci.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Au début du mois d'août 1994, le plan du Groupe de contact a été

 18   rejeté, et vous avez parlé d'un début de l'isolement total des Serbes de

 19   Bosnie.

 20   R.  Oui. C'était la dernière fois que nous avons pu faire un reportage

 21   depuis la Republika Srpska. Effectivement, c'est la raison pour laquelle je

 22   m'en souviens très bien.

 23   Q.  Par la suite, la crise s'est déclenchée à Sarajevo. Il y a eu

 24   l'offensive musulmane, les armes serbes ont été retirées, et puis de

 25   nouveau nous avons été pilonnés; Vous vous en souvenez ?

 26   R.  Je sais qu'à ce moment-là, vous vous sentiez abandonné ou isolé, mais

 27   je pense aussi que vous pensiez que cela faisait partie de votre histoire.

 28   Je devrais peut-être ajouter que puisqu'à en juger d'après les notes que

Page 9898

  1   j'ai ici, vous avez rejeté le plan du Groupe de contact le 27 août 1994,

  2   que d'une certaine manière, vous vous êtes vous-même de votre propre chef

  3   mis à l'écart.

  4   Q.  Mais vous vous souviendrez que, dès le 4 août, le président Milosevic

  5   nous a imposé des sanctions. A partir du 4 août, la Drina a été

  6   complètement bouclée, et je pense que nous avons rejeté le plan lors du

  7   référendum fin août -- non, vous avez raison, le 27 août. En fait,

  8   l'assemblée l'a rejeté avant, et c'est le 4 août qu'on nous a imposé les

  9   sanctions.

 10   R.  Oui. Mais je me souviens qu'un référendum a eu lieu et que les Serbes

 11   se sont exprimés lors de ce référendum.

 12   Q.  Très bien. Juste la visite rendue par le Pape, est-ce que vous vous

 13   souvenez qu'on a essayé d'organiser une visite pour le Pape, pour qu'il se

 14   rende à Sarajevo en septembre 1994, et notre position était mal représentée

 15   dans les médias ? Nous avons proposé que Sa Sainteté se rende par

 16   hélicoptère jusqu'à Kiseljak et que, par la suite, l'on garantisse la

 17   sécurité par voie terrestre jusqu'à Sarajevo, parce que nous avions peur

 18   qu'on abatte son avion. Vous vous en souvenez ?

 19   R.  Oui, Monsieur Karadzic, je m'en souviens. Je me souviens qu'une

 20   déclaration a été publiée disant que s'il venait, vous ne seriez pas en

 21   mesure de garantir sa sécurité, et ceci a été compris à Sarajevo comme

 22   étant une menace que vous formuliez. Ça ne veut pas nécessairement être

 23   vous qui l'a prononciez; ça aurait pu être le fait de n'importe qui. Mais

 24   rappelez-vous, à cette date, vous étiez isolé, esseulé, et je suis désolé

 25   que vous pensiez qu'on ait déformé vos propos dans les médias, parce que si

 26   on avait pu vous parler, vous auriez pu vous défendre.

 27   Q.  Je suis tout à fait d'accord avec vous. Mais rappelez-vous, en 1996, le

 28   Pape a bien effectué une visite et la police musulmane a dévoilé un complot

Page 9899

  1   qui avait été tramé pour l'assassiner et a découvert un engin explosif le

  2   long de la route.

  3   R.  Je ne le savais pas. Mais si ça s'est passé, manifestement, c'est ce

  4   qui s'est passé.

  5   Q.  Au cours de notre entretien, vous aviez dit que vous n'étiez pas tout à

  6   fait informé de la structure militaire qu'il y avait à Sarajevo. Vous

  7   n'étiez pas, en particulier, au courant de l'existence d'usines; est-ce que

  8   vous seriez surpris si je vous disais qu'il y avait quelques dizaines

  9   d'usines qui fabriquaient des armes et des munitions à Sarajevo ?

 10   R.  Je ne serais pas étonné d'apprendre que l'armée du gouvernement de

 11   Bosnie avait quelques installations, et si ces installations ont été

 12   touchées par vos forces, je pense qu'on en aurait entendu parler. Je sais

 13   qu'il y a eu sans nul doute des attaques menées à la bombe aérienne

 14   modifiée du côté de la tour de télévision, mais c'était une tour qui

 15   n'avait pas de bâtiments adjacents et il n'y avait aucune usine autour.

 16   Q.  Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D2900. Peut-on afficher ce document ?

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Dans vos reportages, vous avez parlé des victimes qu'il y avait eu

 20   parmi la file de gens qui allaient chercher de l'eau près de la brasserie.

 21   Première question : Est-ce que vous savez que M. Cuny, de la fondation

 22   Soros de New York, avait informé cette fondation du fait que le

 23   gouvernement musulman s'opposait à la réparation des conduites d'eau et

 24   qu'il y avait des gens par exemple qui empêchaient la réparation, la

 25   réfection et l'exécution des travaux tout près de la brasserie notamment ?

 26   R.  Non, je ne le savais pas, Monsieur Karadzic.

 27   Q.  Merci. Ici, nous avons les éléments d'information venant des services

 28   du Renseignement militaire du RSK. Il nous parle de lieux où sont fabriqués

Page 9900

  1   du matériel militaire et des munitions. Par exemple, il y a la faculté de

  2   Génie mécanique, il y a la manufacture de tabac, il y a l'usine Vase Miskin

  3   Crni, près de la tour de télévision, et la brasserie de Sarajevo.

  4   Voyons le texte. Faisons-le défiler.

  5   Vous voyez, il y a la brasserie de Sarajevo, et là, on fabriquait des armes

  6   aussi. Même si nous n'avons pas établi qui avait tiré sur les gens qui

  7   faisaient la file pour aller chercher de l'eau à proximité de la brasserie,

  8   il est certain qu'on fabriquait des armes à la brasserie. Etes-vous

  9   d'accord pour dire que c'est bien ce que dit ce document ?

 10   R.  Mais, écoutez, c'est tout ce que je peux faire, parce que les gens qui

 11   ont été tués et qui faisaient la file pour aller chercher de l'eau, à ma

 12   connaissance, ce n'était pas des militaires; c'étaient des civils.

 13   Q.  Là, je suis d'accord avec vous, mais il aurait fallu mener une enquête

 14   pour découvrir les auteurs. Ça n'allait pas de soi que c'était les Serbes

 15   qui avaient tiré, mais il est certain que la brasserie était un lieu où on

 16   fabriquait des armes, n'est-ce pas ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement du document.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que M. Bell a véritablement

 19   commenté ce document ? Je me le demande au fond, et nous n'avons pas de

 20   traduction en anglais, non plus.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais nous avons un rapport faisant état des

 22   blessés et des victimes se trouvant parmi les gens qui faisaient la file

 23   pour aller chercher de l'eau, et il y a ce rapport Cuny qui aussi fait état

 24   de la façon dont on a manipulé l'arrivée d'eau à Sarajevo, et ici, vous

 25   avez un rapport du renseignement militaire qui précise qu'à la brasserie on

 26   fabriquait, en fait, des armes.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en pensez-vous, Madame Edgerton ?

 28   Mme EDGERTON : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, M. Bell ne

Page 9901

  1   lit pas -- il ne sait pas lire le document, il ne sait rien des

  2   renseignements que lui présentent M. Karadzic, tout ce qu'il a pu faire

  3   c'est dire que M. Karadzic a peut-être fait une lecture exacte du document;

  4   à mon avis, ça ne suffit pas pour autoriser le versement du document, et

  5   j'essaie de voir si quelque chose qui aurait produit par M. Cuny aurait été

  6   versé au dossier qui allait dans le sens de ce qu'affirme M. Karadzic.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout d'abord.

  8   Ce document ne sera pas déclaré admissible par le truchement du témoin ici

  9   présent.

 10   N'oubliez pas que votre temps est limité.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Bell, au cours de l'automne 1994, avant ce qu'on a appelé le

 14   cessez-le-feu de Carter, vous avez bien remarqué que l'armée musulmane

 15   s'était emparée de plusieurs centaines de kilomètres carrés de territoire

 16   serbe en partant de Bihac. Il y a une offensive qui a été lancée depuis

 17   Bihac; vous vous en souvenez ?

 18   R.  Je me souviens de l'offensive de Bihac. Mais c'était un des secteurs du

 19   pays où il nous était absolument impossible de pénétrer.

 20   Q.  Vous vous souvenez qu'on a lancé une contre-offensive et qu'on a

 21   récupéré ce territoire. Lorsque nous nous sommes approchés de Bihac, tout

 22   le monde a eu l'air de se souvenir, à ce moment-là, que c'était une zone

 23   protégée, et on a bombardé nos positions à proximité de Bihac parce que

 24   soi-disant on était en train d'attaquer une zone protégée ?

 25   R.  Le seul reportage que j'ai envoyé de Bihac, je l'ai envoyé -- où je

 26   l'envoyais à propos de Bihac c'était en novembre 1994, et je n'avais comme

 27   sources d'information que le porte parole de la FORPRONU, les seules images

 28   que nous avions avaient été filmées par des caméramans bosno-serbes, et ces

Page 9902

  1   images étaient passées à la télévision bosno-serbe.

  2   Q.  Merci. Permettez-moi d'attirer votre attention sur la page 15 de la

  3   déclaration que vous avez fournie en 1995 et 1996. On y trouve vos

  4   observations et votre analyse de la situation telle qu'elle se présente à

  5   la fin de la guerre.

  6   R.  Je n'ai pas ce document sous les yeux, ni à l'écran.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut l'afficher. Je donne le numéro D922 --

  8   non, D921. C'est une pièce du dossier.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Vous voyez, c'est la première page, c'est bien votre signature en bas

 11   de page, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 15, s'il vous plaît. Je pense qu'en serbe,

 15   c'est la page 15, oui, on a la bonne à l'écran. Mais je ne sais pas si

 16   c'est la page 15 en anglais. Normalement ça devrait l'être. Mais peut-être

 17   que c'est celle d'avant en anglais.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Auriez-vous l'obligeance de commenter le deuxième paragraphe, ainsi que

 20   les paragraphes 3 et 5 ? Parce qu'ici nous avons les observations que vous

 21   faites vers la fin de la guerre.

 22   R.  Paragraphe 2, Monsieur Karadzic, nous nous sommes rendus compte, vous

 23   le savez mieux moi sans doute, nous nous sommes rendus compte qu'il y avait

 24   des tensions entre les éléments politiques et les éléments militaires en

 25   Bosnie, dans la partie bosno-serbe, et ceci aux échelons les plus élevés.

 26   Mais vous le savez sans doute mieux que moi.

 27   Q.  Merci. Paragraphe 3. Ici vous répétez qu'à nos yeux, Sarajevo nous

 28   appartenait et que nos foyers y avaient été détruits.

Page 9903

  1   R.  C'est vrai. Je ne pense pas que vous contestiez cela aujourd'hui, non

  2   plus.

  3   Q.  Regardez le paragraphe 5 et surtout la dernière phrase. Tout ce

  4   paragraphe relate vos observations et montre comment à votre avis l'ABiH a

  5   traité les Serbes ?

  6   R.  Oui, Monsieur Karadzic, je l'ai cru aussi. Dans mon livre, j'avais le

  7   sentiment, et c'est assez ironique que vous fussiez désavantagé du fait de

  8   votre supériorité s'agissant des armes lourdes, parce que l'ABiH allait

  9   lancer une attaque de faible envergure sur une partie de la ligne de front.

 10   Vous, vous ripostiez à l'arme lourde, et en moins de temps qu'il faut pour

 11   le dire, vous aviez M. Silajdzic à la télévision qui vous accusait de

 12   crimes de guerre. C'est comme ça que ça s'est passé, en général.

 13   Q.  Merci. Vous saviez qu'il y avait un cessez-le-feu, qu'avait réussi à

 14   obtenir le président Carter. Les Musulmans le voulaient ce cessez-le-feu

 15   parce qu'ils étaient en difficulté du côté de Bihac.

 16   R.  Oui, j'étais au courant de l'existence de ce cessez-le-feu.

 17   Q.  Est-ce que vous vous souvenez que ça a duré ? Je ne dirais pas un mois

 18   mais, en tout cas, que ça a duré tout un temps ? Elle est restée --

 19   l'application, elle est restée en vigueur pendant presque un mois, mis à

 20   part l'une ou l'autre violation de moindre importance, ou d'autres l'étant

 21   plus ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Un rapport ou un reportage concernant l'utilisation d'une bombe

 24   aérienne modifiée dans la zone de Hrasnica, vous étiez au courant, n'est-ce

 25   pas ?

 26   R.  Oui. A l'époque, j'étais à Sarajevo.

 27   Q.  Conviendrez-vous avez moi pour dire que la 104e -- ou plutôt, la 4e

 28   Brigade de Montagne était cantonnée à Hrasnica -- non, c'est plutôt la 4e

Page 9904

  1   Brigade motorisée qu'avait établi Fikret Prevljak, brigade qui comptait à

  2   peu près 4 100 combattants, et notamment aussi une unité d'Intervention ?

  3   R.  Oui, parce que, normalement, en raison de la position, il y avait des

  4   Unités de l'armée bosnienne à Hrasnica. Je ne connaissais pas l'ordre de

  5   bataille, je ne savais pas combien d'unités il y avait. Mais, forcément, si

  6   on était dans une ville telle que Sarajevo, le conflit allait se

  7   militariser.

  8   Q.  Merci. Hrasnica, ce n'est pas bien grand comme territoire, et si on a 5

  9   000 soldats, leur QG, des bataillons, des compagnies, des bases logistiques

 10   entre autres infrastructures, que ça représente sur un tel territoire

 11   beaucoup de cibles militaires ?

 12   R.  Je ne pense pas pouvoir vous donner de commentaires utiles sur des

 13   détails militaires, que j'ignorais.

 14   Q.  Merci. La BBC - je ne sais pas si c'est votre caméraman qui l'a filmé

 15   ce reportage - mais je pense que la BBC disposait d'une vidéo qui montrait

 16   l'entraînement d'une Unité de police spéciale à Hrasnica dont le QG se

 17   trouvait dans une école de Hrasnica; vous vous en souvenez ?

 18   R.  Je me souviens avoir fait un reportage sur une manœuvre militaire sur

 19   les hauteurs derrière la tour de télévision, et j'ai trouvé ça vraiment

 20   bizarre qu'on fasse des manœuvres en pleine guerre. Mais c'était

 21   effectivement -- il y avait à proximité une -- ces soldats étaient basés

 22   dans une école près de la vieille ville.

 23   Q.  Nous avons vu deux ordres donnés par le général Milosevic. Ces ordres

 24   portaient sur le pilonnage de Hrasnica -- ou plutôt, l'utilisation d'une

 25   bombe aérienne. Le 6 avril 1995, le général Milosevic donne l'ordre de bien

 26   sélectionner les cibles. Il faut, dit-il, que ce soit les cibles les plus

 27   utiles qui soient retenues, celles qui vont infliger le plus de dégâts

 28   matériels. Mais notre équipe de la Défense a trouvé un ordre donné par ce

Page 9905

  1   même général envoyé à la même personne à la même date, le 4 avril, et là,

  2   il dit très précisément quelles sont ses cibles. Or, deux jours plus tard,

  3   apparemment, il ne donne qu'un ordre d'exécution, d'application de l'ordre

  4   précédent.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir cette pièce ?

  6   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  7   Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être que je me suis levée un peu trop

  8   vite. Peut-être que la pièce D782 est le document dont je voulais avoir la

  9   cote.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous aussi.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je parle du 782. C'est ce même commandant,

 12   le général Milosevic, qui donne l'ordre ici à la même personne, mais le 4

 13   avril cette fois, et il énumère dans cet ordre toutes les cibles.

 14   Est-ce qu'on peut voir la page d'après, s'il vous plaît ? Oui, et en

 15   anglais aussi.

 16   Regardez, ici sont énumérées toutes les cibles, dont celles se trouvant à

 17   Hrasnica.

 18   Ensuite on a l'ordre du 6 avril dans lequel le général Milosevic dit qu'il

 19   faut cibler le centre d'Hrasnica.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  A votre avis, que pensez-vous ? Est-ce qu'ici, il n'y a pas un lien que

 22   ces deux ordres portent, bien sûr, une seule et même chose et qu'ils

 23   forment un tout ? Si vous me le permettez, j'aimerais appeler votre

 24   attention sur le milieu :

 25   "Neutraliser l'activité des mortiers et de l'artillerie ennemie."

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, M. Karadzic

 28   est en train de poser une question à M. Bell sur un détail précis sur un

Page 9906

  1   document du 6 avril 1995. Le témoin n'a pas lu ce document et il lui

  2   demande s'il y a un lien, un lien de causalité ou, en tout cas, un lien

  3   consécutif. Je pense qu'il faut montrer l'autre document au témoin, n'est-

  4   ce pas ?

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle question vouliez-vous poser,

  6   Monsieur Karadzic ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je voulais demander à M. Bell s'il

  8   convenait avec moi du fait que cet ordre, donné deux jours avant celui du

  9   6, précise les cibles à rechercher. Il est dit notamment ici, à la ligne 2,

 10   qu'il faut empêcher l'entrée en action de l'infanterie ennemie :

 11   "Neutraliser les mortiers ennemis et l'artillerie ennemie."

 12   Puis il y la des corrections à apporter à l'aide de matériel précis.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que ce ne sont pas ici des références très précises concernant

 15   des objectifs militaires, et en aucun cas civils ?

 16   R.  Ici, il fait nettement référence à des objectifs militaires. Si je me

 17   souviens bien, ces bombes aériennes modifiées sont tombées sur des biens

 18   civils, ont tué des civils, en ont blessés.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, on pourra afficher cet ordre de ce

 20   même général adressé à la même personne, celui du 6 avril, mais c'est une

 21   perte de temps.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que cet obus est tombé à 50 mètres de

 24   l'école, qui était le QG de cette Unité de Combat spéciale ? Etes-vous

 25   d'accord aussi pour dire que, dans les décombres, il y avait une personne

 26   qui était en uniforme militaire ?

 27   R.  Je ne sais pas à quelle distance de l'unité militaire cette bombe est

 28   tombée mais, manifestement, elle a raté sa cible.

Page 9907

  1   Q.  Merci. Si vous saviez quelle est la hauteur de l'immeuble, je peux vous

  2   dire que, vraiment, la bombe a raté sa cible de quelques centimètres à

  3   peine au grand maximum.

  4   Est-ce que vous vous souvenez qu'en 1995 se préparaient des offensives,

  5   vers le milieu du mois d'avril, avant ce qu'on a appelé -- avant le moment

  6   où allait se terminer ce qu'on appelait l'accord de cessez-le-feu Carter ?

  7   Vous en avez parlé le 27 avril lorsque vous avez témoigné dans le procès

  8   intenté au général Milosevic. Ce sont les pages 5 313 et 5 314 du compte

  9   rendu d'audience.

 10   Vous avez ici une lettre envoyée par Rasim Delic à Izetbegovic. Il affirme

 11   qu'il faut qu'ils se défendent, qu'ils planifient une offensive pour briser

 12   le siège, que son armée s'y prépare; vous vous en souvenez ?

 13   R.  Nous savions, à ce moment-là, lorsque le cessez-le-feu était en train

 14   de s'effriter, de s'effondrer, nous savions que des offensives se

 15   préparaient effectivement.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on avoir la pièce 1D1073 ?

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Regardez cet ordre. C'est la 12e Division qui est basée dans la ville

 19   même, et elle est accompagnée d'une carte bien précise.

 20   Au deuxième paragraphe, vous voyez la mission confiée à la division :

 21   "Lancer une attaque depuis la zone de défense de notre division, en suivant

 22   des axes propices sur des cibles utiles, afin d'infliger à l'ennemi le plus

 23   de perte possible en homme et en moyen matériel…"

 24   Et cetera.

 25   Là, nous sommes déjà le 20 mars 1995. Nous sommes là dans la deuxième

 26   partie de la période couverte par l'accord de cessez-le-feu Carter ?

 27   R.  Manifestement, je n'ai jamais vu ce document, mais nous nous attendions

 28   à une offensive qui aurait cherché à briser le siège.

Page 9908

  1   Q.  Merci. Convenez-vous que ce libellé-ci, "d'infliger le plus de perte en

  2   homme possible à l'ennemi," c'est un libellé identique à celui utilisé par

  3   le général Milosevic, quand il parlait d'Hrasnica. Il s'agit là de jargon

  4   militaire classique quand on dit, "d'infliger le plus grand nombre de

  5   pertes possibles."

  6   R.  Oui, c'est le jargon militaire usuel.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardez la page 3.

  8   Page 3, "Forces d'appui."

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Examinez, si vous le voulez, bien ce paragraphe. Voyons de quel moyen

 11   ils déposaient et comment ils allaient appuyer, soutenir cette offensive.

 12   Vous avez le 3e Régiment d'Artillerie mixte, composé de batteries,

 13   d'obusiers de 122-millimètres, de canons sans recul, d'une batterie

 14   d'obusier de 105-milimètres, et une batterie de roquette, se composant de

 15   trois lance-roquettes, un escadron de char et puis voyez, Mojmilo Brdo,

 16   Brijesce Brdo, Zmajevac et l'usine Zica.

 17   Vous savez que cette dernière se trouve tout juste à côté de la tour de

 18   division, cette tour, ce complexe industriel ?

 19   R.  Oui, si ce n'est que la tour de télévision, c'est une tour. Elle n'a

 20   aucun document attenant, et si on touche, si on frappe la tour avec tout le

 21   professionnalisme qu'on a à sa disposition, je suppose qu'on a pris pour

 22   cible la tour de télévision.

 23   Q.  Mais l'OTAN, ce n'est pas ce qu'il pensait. Parce que, pour l'OTAN,

 24   Belgrade, c'était une cible légitime; vous en souvenez bien ?

 25   R.  Oui, je m'en souviens, et quand j'étais député au parlement, je l'ai

 26   dit ouvertement au parlement. Je me suis opposé à ce qu'on prenne pour

 27   cible une tour de télévision.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Posez votre question, Monsieur Karadzic.

Page 9909

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant ou plus tard, nous allons examiner

  2   un document. Mais voyons qui a tiré sur la tour de la télévision.

  3   Voyons la page suivante.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, Monsieur Karadzic, vous avez fait

  5   la lecture intégrale de tous ces longs paragraphes, et que vous avez posé

  6   une seule question, celle de savoir s'il y avait cette usine près de la

  7   tour. C'est un document déjà versé au dossier. Vous savez, vous êtes en

  8   train de perdre votre temps. C'est un document qui a été versé par le

  9   truchement du témoin Harland.

 10   N'est-ce pas la pièce D182.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez raison, d'accord.

 12   Je voulais simplement vous demander ceci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que le poste de commandement à

 15   Dobrovoljacka, le numéro, ça se trouve cette rue de Dobrovoljacka, elle se

 16   trouve bien au centre-ville ?

 17   R.  Le contraire m'aurait surpris. Je m'attendais à ce qu'il y ait des

 18   postes de commandement au centre de la ville.

 19   Q.  Si nous savons que le poste de commandement se trouve dans une zone

 20   d'habitation, au centre de la ville; conviendrez-vous aussi que des

 21   mortiers, des chars, des canons ne sont pas positionnés sur la ligne de

 22   front mais qu'on les garde dans la ville même, dans le cœur de la ville, et

 23   si on tire sur la ville même, ça ne veut pas dire nécessairement qu'on

 24   prend pour cible une zone civile mais qu'on cible des objectifs militaires

 25   qui se situent à l'intérieur d'une zone civile, une zone habitée par les

 26   civils ?

 27   R.  Je ne conçois aucune circonstance qui justifie qu'une ville à forte

 28   densité de population devienne une zone où on peut tirer comme on veut.

Page 9910

  1   Q.  Mais seriez-vous d'accord pour dire qu'une zone civile habitée ne doit

  2   pas être utilisée abusivement par des gens qui poseraient des armes, qui

  3   installeraient des canons, ce genre de chose ?

  4   R.  Là, je suis d'accord.

  5   Q.  Merci. 

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyons un document qui remonte au mois d'avril

  7   1995, qui donne un ordre précis, un ordre d'offensive, qui est intervenu

  8   plus tard, en mai et en juin, et qui s'est poursuivi jusqu'au milieu du

  9   mois de juillet. Il s'agit du document 1D2839. 1D2839.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Je vous prierais de prendre note du fait qu'il s'agit d'un document

 12   datant du 14 avril 1995, et qu'il s'agit d'un ordre qui est donné par le

 13   commandement de la division sur la base d'information, au sujet de

 14   l'ennemi, à savoir les Serbes.

 15   Page suivante, je vous prie.

 16   Et je lis dans cette page, je cite :

 17   "Je décide par la présente : Dans le cadre d'une action coordonnée avec les

 18   Unités des 14e et 16e Divisions…"

 19  Est-ce que vous saviez que ces 14e et 16e Divisions, qui faisaient partie du

 20  1er Corps d'armée, étaient stationnées à Tarcin, c'est-à-dire sur le plateau

 21   de Niksic, sur la périphérie de nos positions ?

 22   R.  Je ne connaissais pas le nom des unités précises qui étaient

 23   stationnées à cet endroit, mais je savais qu'il s'agissait de forces

 24   gouvernementales bosniaques qui se trouvaient en périphérie de votre ligne

 25   de front, oui. 

 26   Q.  Donc ici, le commandant a décidé de défendre l'intérieur de la ville,

 27   et dans le même temps, je cite; je ne vais pas tout citer, je vais citer

 28   simplement les passages importants.

Page 9911

  1   Paragraphe 5.1, il est question donc de créer des conditions pour organiser

  2   des combats et au point 5.1, on voit qu'il est question de la 101e Brigade.

  3   Là, c'est donc la définition de la zone de responsabilité, qui s'étend

  4   jusqu'à d'Alipasino Polje, qui s'étend sur une certaine profondeur et sur

  5   une certaine largeur, et on voit que les limites -- les frontières sont

  6   définies, et l'une des frontières c'est le mont Debelo, ainsi que la

  7   faculté, la gare ferroviaire, et cetera.

  8   Je ne vais pas tout lire.

  9   Passons à la page suivante.

 10   Je voudrais simplement montrer que toute la ville était militarisée, comme

 11   vous avez pu le constater vous-même. Voyons donc où étaient stationnées

 12   toutes ces unités présentes dans la ville.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez poser votre

 14   question, Monsieur le Témoin, ou faire une observation --

 15   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- quant a cette affirmation selon

 17   laquelle toute la ville était militarisée ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'une ville moderne, une ville

 19   industrialisée qui a été prise au cœur d'une guerre. Ceci n'excusait pas

 20   les attaques sur les civils. Je ne pouvais, bien sûr, consulter aucun de

 21   ces documents à partir. Mais lorsque les offensives ont eu lieu, à savoir

 22   au mois de mai et puis ensuite à nouveau au mois de juin, j'ai rendu compte

 23   de ces offensives en disant qu'il s'agissait de tentative de lever le siège

 24   à partir de l'intérieur et de l'extérieur de la ville.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Bell.

 26   C'est donc ce que peut nous dire le témoin à ce sujet.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 9912

  1   Q.  Conviendrez-vous que ces brigades existaient, les 101e, 115e, qui

  2   chacune avait sa zone de responsabilité à partir de la Miljacka jusqu'au

  3   mont Trebevic et jusqu'à nos positions, la 157e, la 105e, la 11e, la 112e,

  4   la 102e, la 155e, et la 143e Brigade, les trois dernières étant mentionnées

  5   à la page suivante par rapport à celle qui est affichée à l'écran ? Est-ce

  6   que vous conviendrez que tout cela représente une force absolument énorme

  7   pour une ville aussi petite que Sarajevo ?

  8   R.  Docteur Karadzic, l'un des éléments que j'ai affirmé dans l'un de mes

  9   derniers reportages vers la fin de la guerre consistait à dire que les

 10   forces gouvernementales bosniaques ont pu attaquer grâce à des effectifs

 11   plus nombreux et mieux équipés, et que le rapport de force était en train

 12   de changer, et je pense que c'était vrai.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 15   document, aux fins d'identification. La date figure sur la traduction et le

 16   document a été soumis pour traduction.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je ne vois aucun

 18   fondement permettant d'admettre ce document par le truchement du témoignage

 19   de M. Bell.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais M. Belle s'est exprimé sur les effectifs

 21   et la puissance de ces unités stationnées à l'intérieur de la ville ainsi

 22   que sur leurs puissances de feu et sur les offensives qui ont duré

 23   plusieurs mois durant cette année-là.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous aurez une autre

 25   occasion de verser ce document au dossier par le biais d'un autre témoin.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Je demande maintenant l'affichage du document 1D1063.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]

Page 9913

  1   Q.  Monsieur Bell, vous avez remarqué qu'il y a eu des moments où les tirs

  2   étaient plus nourris vers l'extérieur de la ville qu'à partir de

  3   l'extérieur vers l'intérieur de la ville. Je voudrais vous montrer ce qu'il

  4   en est des utilisations pour une seule journée de munition de gros calibre.

  5   Veuillez, je vous prie, vous pencher sur le paragraphe 6 et jusqu'au bas de

  6   la page, on voit qu'il est fait état de l'utilisation de roquettes, d'obus

  7   de mortier, d'obus d'artillerie, d'obus d'obusier, de lance-roquettes

  8   multiples et de mortiers. Cette division évoquée dans ce document, en cette

  9   seule journée, du 24 mai 1995, a tiré 1 610 projectiles explosifs. Sans

 10   compter d'ailleurs les autres munitions qui n'ont pas explosé.

 11   Alors conviendrez-vous que ceci représente un nombre tout à fait important

 12   et que nombre de ces obus ressemblaient ou pouvaient faire penser à des

 13   obus serbes s'agissant des journalistes ?

 14   R.  Il était clair à mes yeux, Docteur Karadzic, lorsque ces offensives ont

 15   commencé, et d'ailleurs il y en a eu une le 16 mai, qu'elle constituait une

 16   tentative de la part des forces stationnées à l'intérieur de la ville de se

 17   libérer du siège. J'ai déjà souligné, il y a quelques instants pendant ma

 18   déposition, qu'une guerre faisait rage, une guerre opposant deux forces

 19   armées sur un front, donc rien de tout cela ne me surprend. Etant présent

 20   sur place, plongé au milieu de tout cela, ce qui m'intéressait c'est de

 21   savoir les nombres de tir tirés, mais je ne suis pas surpris de tout cela.

 22   Q.  Je vous remercie, Monsieur Bell. Vous étiez sur place. Mais étant donné

 23   notre incapacité à défendre notre image dans cette guerre médiatique,

 24   l'impression a été créée que ces attaques étaient unilatérales, et que

 25   toutes les explosions étaient causées par ces attaques et que les Serbes

 26   étaient en train d'attaquer une ville sans défense. Est-ce que vous

 27   admettez que ceci était, en fait, une perception, que ce n'était pas la

 28   réalité de la guerre, mais que c'était simplement une perception que

Page 9914

  1   c'était les Serbes qui attaquaient ?

  2   R.  Encore une fois, le 27 mai, Docteur Karadzic, j'ai rendu compte des

  3   tentatives réalisées par les forces gouvernementales bosniaques pour briser

  4   leur encerclement. Je n'ai pas rendu compte de cela comme étant une attaque

  5   sur les civils. Mais là où il y a eu des attaques sur les civils, j'en ai

  6   rendu compte comme étant des attaques sur les civils. J'ai essayé d'être

  7   aussi équitable que je le pouvais, et toute en sachant que je faisais mes

  8   reportages dans un véritable brouillard dû à la guerre, qui, comme vous le

  9   savez, est une tâche très difficile.

 10   Q.  Je vous remercie.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document peut être versé au

 12   dossier ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] J'ai vérifié le compte rendu d'audience

 15   relatif à la discussion sur ce document, et je n'ai pas trouvé un seul

 16   commentaire du témoin portant sur ce document.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je crois que lorsqu'il a parlé du

 18   contexte, le témoin a confirmé qu'il s'agissait d'une guerre et que dans

 19   cette guerre il y a eu des tirs.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. On peut partir du principe qu'il a

 21   effectivement confirmé cela de façon générale. Il n'était pas surpris par

 22   cela. Donc sur cette base, nous pouvons admettre ce document.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

 24   les Juges, ce document devient la pièce D927. Je vous remercie.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous examinions encore

 26   rapidement le document 1D2841, pour voir rapidement ce qui s'est passé le

 27   31 mai. 1D2841.

 28   Ce document est également un télégramme, qui apporte des informations, il

Page 9915

  1  émane du général Karavelic, commandant du 1er Corps d'armée. Qui rend compte

  2   au sujet des dépenses de munition.

  3   Nous pouvons maintenant passer à la page suivante sur les écrans. En

  4   anglais, les pages qui m'intéressent sont les pages 2 et 3.

  5   Dans ce cas-ci, nous voyons que 800 obus de 82 millimètres ont été

  6   utilisés, ainsi que 150 obus de 120 millimètres des grenades, et cetera, et

  7   qu'au total, le nombre des explosions a été de 2 055 pour cette journée-là.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Conviendrez-vous qu'il s'agit d'une puissance de feu férocement

 10   importante contre les villages et positions serbes à Sarajevo ?

 11   R.  Il n'était pas toujours possible de connaître les sources des tirs. Je

 12   me rappelle avoir réfléchi à cela à l'époque et m'être dit qu'il s'agissait

 13   de la bataille la plus intensive dans laquelle je me sois jamais trouvé,

 14   pris durant toute ma vie.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je demande le versement au dossier de ce

 16   document.

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Aucun fondement justifiant de

 19   verser ce document au dossier par le biais de ce truchement, Monsieur

 20   Karadzic. Je crois que c'est la troisième fois que je vous recommande de

 21   vous concentrer sur les questions qui sont les plus pertinentes et les plus

 22   importantes pour vous.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin a donné son opinion sur la

 25   consommation de munitions. Il n'y a aucune nécessité pour vous de lui

 26   soumettre encore d'autres documents sur ce sujet.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je suis d'accord, c'est un document qui

 28   concernait la dépense de munitions, mais je crois que le témoin a déclaré

Page 9916

  1   que ces combats ont été les plus féroces qu'il n'ait jamais vu par le

  2   passé. Or, il a été témoin de nombreuses guerres, et ceci me suffit.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Conviendrez-vous, Monsieur Bell, que, dans l'affaire intentée au

  5   général Perisic, en date du 4 février 2009, page 3 233 du compte rendu

  6   d'audience, vous avez déclaré que le général Smith avait finalement évalué

  7   le rapport de force, donc ce que l'une ou l'autre des parties possédaient,

  8   et qu'il s'était rendu compte qu'il pouvait -- donc ce dont lui même et les

  9   Serbes disposaient et qu'il s'était rendu compte qu'il pouvait finalement

 10   pousser son avantage et utiliser une force susceptible de tout changer ?

 11   Est-ce que vous vous rappelez de cela ?

 12   R.  Je me rappelle de cela, Docteur Karadzic, mais il n'a pas dit cela or

 13   du contexte. Si me souviens bien, c'était à peu près l'époque où les

 14   observateurs militaires des Nations Unies ont été faits prisonniers et

 15   transformés en otages.

 16   Q.  Je crois tout d'abord que c'était le moment où les Nations Unies et

 17   l'OTAN ont été impliqués dans la guerre. Nous les avions avertis de ne pas

 18   le faire, en leur disant que s'ils le faisaient ils deviendraient une

 19   partie belligérante.  Vous vous rappelez -- ou plutôt, vous rappelez-vous

 20   que les commandants de la FORPRONU, en personne, ont demandé à leur

 21   supérieur de ne pas les transformer en partie belligérante ?

 22   R.  Je me rappelle les discussions dans ce sens. Je me rappelle aussi que

 23   c'est la seule fois où le général Smith a organisé une conférence de

 24   presse, et qu'il l'a fait dans le but de vous adresser un ultimatum, à

 25   vous, à votre camp.

 26   Mme EDGERTON : [interprétation] Je pourrais peut-être dire, Monsieur le

 27   Président, Madame, Messieurs les Juges, que le numéro de la page est 3 233,

 28   dans le témoignage de Perisic - c'est ce qu'a dit l'accusé - mais, en fait,

Page 9917

  1   c'est les pages 3 223 et 3 224.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je suis désolé pour les numéros de

  4   pages.

  5   Je demande l'affichage du document 1D2874, à présent.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Nous pouvons convenir qu'au mois de mai, l'offensive a déjà commencé

  8   depuis quelque temps, que de grandes quantités de munitions ont déjà été

  9   dépensées comme nous l'avons vu, n'est-ce pas ? Nous allons maintenant voir

 10   quelles sont les réactions des Nations Unies.

 11   Donc ceci est une annexe jointe à un rapport de situation, des Nations

 12   Unies qui date du 29 mai 1995. Admettez-vous que la zone d'exclusion totale

 13   par rapport à l'emploi d'armes lourdes aurait dû être imposé également à la

 14   partie musulmane, à Sarajevo ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  A la lecture des documents précédemment montrés, nous avons constaté

 17   que la partie musulmane utilisait, en toute tranquillité, d'esprit une très

 18   forte puissance de feu contre nous, et que personne ne les a bombardés, les

 19   Musulmans; alors que nous, lorsque dans le respect de l'accord conclu avec

 20   les Nations Unies, nous nous sommes saisis de nos armes pour nous défendre,

 21   et nous avons été bombardés. Vous vous rappelez le début du bombardement, à

 22   la fin du mois de mai, n'est-ce pas ?

 23   R.  Je me rappelle les frappes aériennes.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais maintenant le bas de la

 26   quatrième page de ce document, sur les écrans, je vous prie.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Nous nous sommes rendus compte qu'il y avait là collaboration dans les

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  1   actions. D'ailleurs, la partie musulmane a dit qu'elle collaborait avec la

  2   FORPRONU dans l'utilisation des forces, et dans ces conditions, je vous

  3   demande de voir ce qu'écrivent les Nations Unies, à savoir que l'ABiH tire

  4   profit de la préoccupation ressentie par les Serbes et que préoccupation

  5   ressentie par rapport aux pressions exercées par les Nations Unies et

  6   l'OTAN, qui souhaitaient obtenir de nouveaux acquis et nous vaincre. Est-ce

  7   que vous vous rappelez qu'à cette époque-là, nous avons été bombardés par

  8   l'OTAN en même temps que nous essayons de contrer les attaques de l'ABiH ?

  9   R.  Comme je l'ai déjà dit, j'ai ressenti que le rapport de forces était en

 10   train de changer à votre désavantage, et je l'ai dit -- je l'avais dit à

 11   l'un de vos conseillers deux ans auparavant déjà.

 12   Q.  Je vous remercie. 

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on diffuse les

 14   images d'une vidéo, où nous constaterons que nous n'avons pas considéré les

 15   observateurs militaires armés des Nations Unies, soldats et canonniers

 16   comme des otages, nonobstant l'action de ces hommes, mais que nous les

 17   avons considérés comme une partie belligérante.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Pendant que l'on attend que la diffusion des images commence, je vous

 20   demanderais si vous vous rappeler que le général Smith a pris l'utilisation

 21   du recours à la force en tirant profit de l'absence du général Janvier, qui

 22   comme vous le savez assistait à un mariage ?

 23   R.  J'ai écrit un article à ce sujet dans mon ouvrage sur la guerre de

 24   Bosnie, en effet.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande donc l'affichage du document 1D2901.

 26   C'est une séquence vidéo dont je demande la diffusion des images dans le

 27   créneau horaire qui se termine à 1 heure 39:35 --

 28   L'INTERPRÈTE : Mais l'interprète n'a pas noté le time code du début de la

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  1   diffusion.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] -- Et la cassette vidéo et le document V000-

  3   0458-A-1. Donc le créneau horaire demandé pour la diffusion va de 1:35:51 à

  4   1:39:35.

  5   [Diffusion de la cassette vidéo]

  6   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  7   "M. Karadzic considère les représentants des Nations Unies comme des

  8   prisonniers de guerre. Le Conseil de sécurité des Nations Unies est, en ce

  9   moment même, en train de se réunir à New York, pour envisager l'avenir de

 10   son opération de maintien de la paix."

 11   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord sur le fait qu'ici, la position présentée

 14   -- qu'il ne s'agit pas du tout d'otages de guerre, mais de prisonniers de

 15   guerre, c'est-à-dire de participants à une opération militaire, et que ce

 16   qui a été la source de tout cela, ce n'est pas seulement le fait que le

 17   général Smith ainsi que les soldats des forces terrestres aient pris pour

 18   cible nos positions, mais que cela y a contribué ?

 19   R.  Docteur Karadzic, je sais que vous les considérez comme des prisonniers

 20   de guerre. Tout ce que je dirais c'est qu'il n'est pas de très bonne

 21   pratique sur le plan militaire que d'enchaîner des prisonniers de guerre à

 22   des installations militaires.

 23   Q.  Mais est-ce que vous vous rappelez que les Nations Unies étaient

 24   présentes là-bas avec notre accord et dans le cadre d'un mandat dont les

 25   termes étaient strictement définis, bien sûr, nous pourrions à ce sujet

 26   discuter du fait de savoir si les Nations Unies n'avaient pas

 27   unilatéralement modifié le mandat de la FORPRONU ?

 28   R.  Je me souviens d'un Canadien, d'un Polonais, et d'un Czech [phon], qui

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  1   étaient des soldats désarmés quoi qu'il en soit.

  2   Q.  Merci.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande la diffusion d'un court extrait à

  4   partir de 1:39:35.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord que le pointeur au laser qui visait nos

  7   positions et nos pièces d'artillerie était également une arme lourde ?

  8   R.  Si, effectivement, ces soldats possédaient -- parce qu'à ma

  9   connaissance, ce n'était pas des contrôleurs aériens avancés.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande la diffusion des images.

 12   [Diffusion de la cassette vidéo]

 13   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 14   "Karadzic : Nous ne les considérons pas comme otages, mais comme

 15   prisonniers de guerre."

 16   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je demande le versement au dossier de

 18   ces deux extraits vidéo ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.

 20   Madame Edgerton, il y a quelques instants vous avez parlé de l'absence de

 21   transcription écrite des bandes son, et dans l'intérêt des interprètes et

 22   des sténotypistes, nous avons toujours eu, dans cette Chambre de première

 23   instance, pour pratique de produire les transcriptions écrites à l'avance,

 24   mais eu égard à l'admission de documents au dossier, notamment pour des

 25   transcriptions aussi courte, je vous demande si nous avons vraiment besoin

 26   de la transcription pour ce faire ?

 27   Mme EDGERTON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela fait également partie de notre

Page 9921

  1   pratique, n'est-ce pas ?

  2   Donc sur cette base, nous admettons ces deux extraits vidéo au dossier.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  4   Je crois que la traduction a été consignée au compte rendu d'audience, et

  5   que cela devrait suffire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons d'abord affecter un numéro

  7   de pièce à conviction à cette conséquence-ci, puis nous parlerons de la

  8   précédente --

  9   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous allons donner deux

 11   numéros de pièce à conviction à ces deux extraits ou un seul et même numéro

 12   ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Les "times" codes sont 1:35:51 et 1:39:35. Vous

 14   pouvez faire ce que vous voulez, étant donné que les "time" codes sont

 15   indiqués, donc une seule pièce ou deux pièces différentes.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur

 17   les Juges, ce document recevra le numéro pièce à conviction D928. Je vous

 18   remercie.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous allez demander le

 20   versement au dossier du document précédent dont vous avez dit qu'il

 21   s'agissait d'une annexe à un autre document ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 24   L'INTERPRÈTE : Signe de la tête de Mme Edgerton.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous admettons donc ce document en tant

 26   que pièce à conviction, et ce document devient la pièce D729 [comme

 27   interprété].

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'en ai plus pour très longtemps, et je suis

Page 9922

  1   véritablement reconnaissant pour l'effort que vous avez consenti.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Mais, Monsieur Bell, il y a une chose qui me trouble, ce qui me trouble

  4   c'est de constater qu'en présence d'incidents mineurs, les caméras de

  5   télévision ne faisaient jamais leur apparition, alors que pour d'autres

  6   incidents, dont nous soutenons qu'il s'agissait d'incidents orchestrés de

  7   toutes pièces, les caméras de télévision apparaissaient immédiatement. Est-

  8   ce que vous avez le souvenir de certains incidents de grande importante où

  9   les caméras de télévision sont arrivées trop tard ? Je vais essayer de vous

 10   rappeler les choses. S'agissant de l'incident de cette queue d'habitants

 11   qui faisaient la queue pour se procurer du pain, les caméras étaient

 12   présentes dès l'évacuation des blessés et des morts. Les caméras étaient

 13   présentes pour enregistrer les images de l'incident relatif aux gens qui

 14   faisaient la queue pour se procurer de l'eau, relatif au match de football,

 15   relatif aux gens qui faisaient la queue pour obtenir de l'aide humanitaire,

 16   elles étaient présentes sur les lieux dans le cas de tous les incidents

 17   majeurs qui ont reçu une couverture très importante à notre avis, et nous

 18   soutenons par ailleurs, nous avons des éléments qui le prouvent, que tous

 19   ces incidents majeurs ont été orchestrés par la police et l'ABiH, et

 20   d'ailleurs davantage par la police que par l'armée.

 21   Est-ce que vous auriez connaissance d'un seul incident majeur où les

 22   caméras ne sont pas arrivées à temps ?

 23   R.  Le secteur dans lequel les caméras ont fonctionné pendant toute la

 24   guerre, Monsieur Karadzic, était d'une étendue relativement limité. Je suis

 25   convaincu à 100 %, sur la base des incidents majeurs dont j'ai été le

 26   témoin, par exemple, Markale II, que ces incidents n'ont pas été orchestrés

 27   de toutes pièces et n'auraient pas pu l'être. En fait, je me rappelle

 28   m'être dit à de nombreuses reprises pendant la guerre, en regardant autour

Page 9923

  1   de moi tous ces dégâts et tout ce malheur, je me rappelle avoir pensé,

  2   Personne n'aura la capacité de reconstituer tous ces événements même dans

  3   le but d'en faire un film. Que de tels incidents aient pu être orchestrés

  4   en quelques minutes à peine je trouve cela incroyable.

  5   Q.  Peut-être n'ai-je pas été suffisamment clair, Monsieur Bell. Nous

  6   affirmons qu'à Markale I, des corps sans vie ont été placés sur les lieux.

  7   Pour Markale II, ils n'ont pas osé faire la même chose. Une explosion s'est

  8   bien produite à Markale II, et de véritables personnes sont mortes, mais

  9   l'explosion a été provoquée à présent la partie musulmane, et pas par la

 10   partie serbe. Dans ce sens, c'est également une façon d'orchestrer les

 11   choses de toutes pièces. A Markale I, cependant, c'est toute la scène qui a

 12   été montée de toutes pièces, avec installation sur les lieux de corps qui

 13   étaient déjà des cadavres sans vie. C'est ce que nous affirmons, et à

 14   Markale I, l'explosion était censée avoir été provoquée par un obus serbe.

 15   Mais comment est-il possible que les caméras ne tardent pas plus que cinq

 16   minutes pour arriver sur les lieux, elles étaient sur place pour

 17   enregistrer les effusions de sang et toute cette souffrance humaine ? Est-

 18   ce que vous vous rappelez un seul incident où les caméras ne sont pas

 19   arrivées à temps ?

 20   R.  Il y a eu ce terrible bombardement à Tuzla, en mai 1995, et il est

 21   certain que les caméras ne sont pas arrivées immédiatement. Je veux dire,

 22   je suis surpris de l'idée que ce genre de choses puisse être orchestré de

 23   toutes pièces, même s'il peut exister quelqu'un qui aurait pu avoir le

 24   désir d'orchestrer de telle chose. Mais je ne pense pas que cela ait été

 25   possible même de loin.

 26   Q.  Je vous remercie, Monsieur Bell. Mais, encore une fois, vous utilisez

 27   le sens commun, qui n'était pas appliqué à Sarajevo dans les mêmes

 28   conditions pendant cette guerre.

Page 9924

  1   Je vous remercie de votre témoignage.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.

  4   Madame Edgerton, est-ce que nous pouvons faire la pause ?

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] J'ai tendance à être conservatrice dans mes

  6   appréciations, mais je pense que j'aurais besoin de 30 minutes pour mes

  7   questions supplémentaires.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donc faire une pause d'une

  9   demi-heure et reprendrons nos débats à 13 heures.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 01.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, vous pouvez commencer.

 13   Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais auparavant, avant de vous donner la

 15   parole pour vos questions supplémentaires, le Juge Baird voudrait poser une

 16   question au témoin.

 17   Questions de la Cour : 

 18   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Pourriez-vous nous aider sur ce point,

 19   Monsieur Bell ? On vous a montré une séquence, je pense que c'était 1D2809,

 20   et là, ici je vous résume ce que vous disait M. Karadzic, qu'il était

 21   certain que certains des tirs étaient dirigés sur des installations

 22   militaires, et sur lui, on a tiré de toutes parts-là, j'insiste sur d'une

 23   part comme d'une autre, et que c'était uniquement sur les lignes de front

 24   elles-mêmes qu'il y avait ces installations militaires comme on le voyait

 25   sur les images, et là, vous avez répondu et je résume votre réponse. Vous

 26   avez dit qu'il était certain qu'il y avait effectivement eu des tirs sur

 27   des installations militaires et vous avez dit :

 28   "Chaque soir, chaque nuit pendant quatre mois, nous avons vu qu'il y

Page 9925

  1   avait des tirs dirigés sur les positions des lignes de front mais qu'il y

  2   avait aussi des tireurs embusqués et des tirs de mortier qui ont été

  3   utilisés. Est-ce que des civils ont été ciblés ou pas ? Quoi qu'il en soit,

  4   il y a des blessés. Il y a eu des blessés civils et les tirs étaient

  5   aveugles dans cette mesure-là."

  6   Vous vous en souvenez ?

  7   R.  Oui, Monsieur le Juge.

  8   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Nous aimerions votre aide sur ceci. Ces

  9   tirs aveugles, indiscriminés, est-ce que toutes les factions les tiraient ?

 10   R.  Il est certain qu'il y a eu des tirs de tireurs embusqués ciblant des

 11   civils à Grbavica. Grbavica était tenue par les Serbes. L'essentiel des

 12   tirs sur les civils -- qui s'est fait sur des civils, se trouvait du côté

 13   tenu par le gouvernement de Bosnie-Herzégovine, et il y a beaucoup de tirs

 14   d'armes lourdes que j'ai vus pendant quatre mois qui étaient en grande

 15   partie dirigés sur les positions se trouvant au cimetière juif, qui était

 16   juste sur la ligne de front. Hier, vous avez vu une séquence vidéo de tirs

 17   embusqués dirigés sur des gens qui apportaient de l'eau dans un sous-sol.

 18   C'était des tirs ciblés. Ce n'était pas des gens qui ont été pris entre

 19   deux feux, non. On a tiré sur cet homme. Le bon sens le dit. Manifestement,

 20   c'était un tir délibéré.

 21   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci. Une dernière question. Avant la

 22   pause, on vous a posé une question un peu complexe, à tiroirs, et là, il me

 23   faut une fois de plus résumer la question de M. Karadzic. On a vu que les

 24   Musulmans se sentaient avoir toute latitude d'utiliser une puissance de feu

 25   considérable contre nous sans qu'ils soient victimes de frappes aériennes,

 26   et nous, qui étions en accord avec les Nations Unies, nous avons pris nos

 27   armes pour nous défendre et c'est à ce moment-là que les frappes ont

 28   commencé contre nous. A ce moment-là, sa question était ceci :

Page 9926

  1   "Est-ce que vous vous souvenez de ces frappes aériennes intervenues fin mai

  2   ?"

  3   Vous avez répondu par l'affirmative. En répondant de la sorte, nous faut-il

  4   comprendre que vous étiez d'accord avec ce que disait M. Karadzic, à savoir

  5   que les Musulmans se sentaient parfaitement libres d'utiliser leur

  6   puissance de feu considérable contre nous sans qu'ils soient victimes de

  7   frappes aériennes mais que les Serbes qui se défendaient, eux, ont été

  8   bombardés, ou est-ce que votre réponse affirmative concernait uniquement la

  9   question des frappes aériennes ?

 10   R.  Votre question est tout à fait justifiée. Voici comment j'y réponds. Si

 11   du côté du gouvernement de Bosnie on avait pris en otage des soldats des

 12   Nations Unies, si on les avait pour ainsi dire enlevés, ils se seraient

 13   soumis aux mêmes représailles que l'OTAN a imposées aux autres parties au

 14   nom des Nations Unies.

 15   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le Juge Morrison voudrait vous poser une

 17   question.

 18   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Quand vous étiez à Sarajevo, quel

 19   est le degré d'autonomie que vous aviez, à votre avis, sachant que vous

 20   aviez une limitation de vos mouvements à cause du fait de se trouve en zone

 21   de guerre ? D'après votre sentiment, est-ce que vous pouviez aller où vous

 22   vouliez, quand vous voulez, pour voir ce qui vous intéressait ?

 23   R.  Je dirais que plus la guerre s'est prolongée, moindre fut notre

 24   autonomie. A partir d'août 1994, nous n'avons plus du tout pu aller du côté

 25   serbe, et du côté du gouvernement de Bosnie, là aussi, on a introduit des

 26   restrictions très rigoureuses au nom de la sécurité du terrain. Là non

 27   plus, nous avions très peu d'autonomie au cours des derniers mois.

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Question supplémentaire : donc, vous

Page 9927

  1   aviez trop peu d'autonomie, pensiez-vous. Est-ce que ça vous a empêché, à

  2   votre avis, de vous faire une idée que vous auriez peut-être [inaudible] --

  3   vouloir avoir pour mieux rapporter les événements ?

  4   R.  J'aurais voulu pouvoir faire des reportages sur les offensives autour

  5   de Tuzla, qui se sont produites à ce moment-là. Nous n'avons pas été

  6   autorisés à y aller car la zone nous a été interdite. Il était difficile de

  7   faire un reportage équitable et équilibré quand il n'était pas possible

  8   d'aller du côté des Serbes.

  9   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci.

 10   C'est une observation pour une petite allée ou un détour judiciaire.

 11   J'espère qu'elle n'est pas trop sombre. C'est simplement pour voir si vous

 12   aviez de bons pouvoirs d'observation.

 13   Est-ce que vous portez une cravate du Régiment de Royal Suffolk ?

 14   R.  Nous n'étions pas des membres de la famille royale mais il se fait

 15   qu'effectivement, c'est quelque chose que nous avons depuis plusieurs

 16   siècles dans la famille.

 17   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.

 19   Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

 20   Nouvel interrogatoire par Mme Edgerton :

 21   Q.  [interprétation] Hier, M. Karadzic a discuté de beaucoup d'éléments

 22   mais aussi, parmi ceux-ci, du contrôle des forces serbes au cours de la

 23   période précédant la date du 20 mai 1992. J'ai quelques questions à vous

 24   poser à ce propos.

 25   A la page du compte rendu 9 807, à partir de la ligne 23, il vous demandait

 26   ceci hier :

 27   "Etes-vous d'accord pour dire que jusqu'au 20 mai, date à laquelle la JNA

 28   s'est retirée, la Défense territoriale était en place ainsi que des groupes

Page 9928

  1   autonomes sans contrôle centralisé ni commandement centralisé ?"

  2   Vous avez répondu ceci :

  3   "Oui, je serais d'accord avec vous sur ce point."

  4   Vous vous souvenez de cet échange ?

  5   R.  Oui. Oui, j'aurais dû étoffer mon propos, me semble-t-il.

  6   Q.  De quelle faire ?

  7   R.  Pour dire que la donne était différente suivant la région, car dès le

  8   mois d'avril, et vous avez vu ces images hier, les soldats étaient en place

  9   et ces positions au surplomb de Sarajevo, ils les contrôlaient.

 10   Manifestement, c'est vrai pour une partie du cœur du pays mais vous l'avez

 11   vu pour Zvornik, début avril, là, ce n'était sûrement pas le cas.

 12   Q.  Je poursuis, par conséquent, sur la question que je posais qui avait

 13   trait à la Défense territoriale. Je viens de vous la répéter et j'espère

 14   que nous pourrons parler sous peu de Zvornik aussi.

 15   Une simple vérification. Quand vous travailliez en Bosnie, et vous y avez

 16   fait allusion aujourd'hui, est-ce que vous avez eu connaissance de

 17   communications internes, de documents de la Défense territoriale bosno-

 18   serbe ou d'organes bosno-serbes, que ce soit l'assemblée, l'armée des

 19   Serbes de Bosnie, la VRS, le Conseil national de Défense ?

 20   R.  Les documents du haut commandement, de part et d'autres, d'ailleurs, ne

 21   m'ont jamais été montrés, pas plus que les documents de l'ONU. Sans doute

 22   ai-je assisté à quelques réunions de l'assemblée bosno-serbe. Mais je

 23   dirais que non, effectivement, pratiquement tous les documents que j'ai vus

 24   aujourd'hui, à l'exception du livre écrit par M. le général MacKenzie,

 25   étaient tous nouveaux pour moi.

 26   Q.  J'aimerais vous montrer un document, et je comprends bien que vous

 27   n'ayez eu aucune raison de le voir auparavant mais j'aimerais vous montrer

 28   quelques documents pour savoir si à votre avis, ils correspondent bien avec

Page 9929

  1   cette idée que je viens d'évoquer, à savoir qu'avant le 20 mai, il n'y

  2   avait pas de contrôle ni de commandement centralisé de la Défense

  3   territoriale.

  4   Premier document, D304, dans le système du prétoire électronique ce sera la

  5   page 20 en anglais. Je précise pour que ce soit acté au dossier, c'est la

  6   page 31, en B/C/S.

  7   Monsieur Bell, nous avons ici la transcription de la 14e Séance de

  8   l'assemblée bosno-serbe qui s'est tenue le 27 mars 1992. Regardons le texte

  9   anglais, et plus exactement l'avant-dernier paragraphe qui dit ceci - c'est

 10   le Dr Karadzic qui intervient - il dit ceci :

 11   "Une guerre en Bosnie-Herzégovine ne résoudra rien. Si une guerre éclate,

 12   vous en obtiendrez les plans. Mais je vous exhorte à organiser la

 13   population sans tarder en unités de Défense territoriale. Mettez à leur

 14   tête des officiers de réserve, constituez des sections, des pelotons, des

 15   escadrons, des cellules de Crise, et engagez des officiers à la retraite.

 16   Faites-le partout dans nos terres.

 17   "Les présidents de municipalités et des conseils exécutifs occuperont les

 18   échelons les plus élevés dans les cellules de Crise, en plus des officiers

 19   de réserve."

 20   C'était le premier document que je voulais vous montrer, qui reprend un

 21   extrait d'un discours prononcé par M. Karadzic.

 22   Avec votre permission, j'aimerais qu'on affiche la pièce D325, c'est un

 23   document qui vient de l'état-major principal de la VRS, il s'intitule :

 24   "Analyse de l'aptitude au combat et des activités menées par la VRS en

 25   1992;" ce document porte la date du mois d'avril 1993.

 26   Mme EDGERTON : [interprétation] Page 152, s'il vous plaît, en anglais, ce

 27   sera la page 132 en serbe.

 28   Q.  Ce document est signé et est approuvé par le général Ratko Mladic, à la

Page 9930

  1   page 152 en anglais, il y a une partie qui s'appelle : "Observations en

  2   guise de conclusion."

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] Prenons la page 153 en anglais, ce sera la

  4   page 133 en serbe.

  5   Q.  Vous allez le voir, c'est un document qu'a signé aussi le commandant

  6   suprême des forces armées de la Republika Srpska, l'accusé, en

  7   l'occurrence, M. Karadzic, l'avalisant ainsi. Vous voyez ?

  8   R.  Oui.

  9   Mme EDGERTON : [interprétation] Voyons la page 69 en anglais, ce sera la

 10   page 62 en serbe.

 11   Q.  Vous avez comme en-tête ici : "Organisation et établissement,"

 12   regardez, s'il vous plaît, et lisez les trois premiers paragraphes, les

 13   premiers mots sont les suivants :

 14   "L'organisation de l'armée de la Republika Srpska est marquée par deux

 15   périodes…"

 16   Est-ce que vous en feriez une lecture à voix haute ?

 17   R.  "L'organisation de l'armée de la Republika Srpska se caractérise par

 18   deux périodes : l'une qui va jusqu'au 20 mai ou 15 juin 1992, et l'autre

 19   qui est constitutive à la date du 15 juin 1992.

 20   "La première période est significative, dans la mesure où sur le territoire

 21   de l'ancienne République de Bosnie-Herzégovine jusqu'au 19 mai, il existait

 22   et il fonctionnait des unités régulières de l'ancienne JNA, les deux qui

 23   avaient été formées aussi bien à celles qui avaient été formées pendant la

 24   mobilisation et le développement opérationnel et celles qui vue les

 25   événements survenus dans les républiques de Slovénie et de Croatie avaient

 26   été retirées de ses territoires pour être envoyées en territoire de

 27   l'ancienne république de Bosnie-Herzégovine."

 28   Je poursuive ?

Page 9931

  1   Q.  Le troisième paragraphe.

  2   R.  "Parallèlement, sur le territoire de la Republika Srpska, qui faisait

  3   partie de l'ancienne République de Bosnie-Herzégovine, il y a aussi des

  4   Unités de la Défense territoriale serbe, qui ont été formées à l'initiative

  5   et sous la direction du SDS, en tant que forme d'auto-organisation du

  6   peuple serbe pour se défendre face aux intentions profascistes des Oustacha

  7   et des organisations musulmanes ainsi que de leurs formations militaires."

  8   Q.  Merci. Ici on a deux déclarations faites par l'accusé, et son

  9   commandant militaire, est-ce que cette déclaration cadre avec l'accord que

 10   vous avez exprimé, à savoir que jusqu'au 20 mai 1992, la Défense

 11   territoriale était en place, mais "n'avait pas de commandement centralisé"

 12   ?

 13   R.  J'ai changé ma réponse suite à votre question. Vous savez, une armée ne

 14   se forme pas et ne s'organise pas du jour au lendemain. Il serait difficile

 15   de trop exagérer le degré de pagailles, de chaos et d'anarchie qui

 16   régnaient dans les premières semaines du mois d'avril 1992. Ce que j'ai vu

 17   sur le terrain c'était des bandes d'hommes armés de part et d'autre. Très

 18   souvent, ils approvisaient [comme interprété], manifestement, ils

 19   manquaient de discipline. Mais je serais d'accord pour dire que, lorsque

 20   arrive le début du mois de mai, il y avait dans une certaine mesure un

 21   degré de commandement et de contrôle dans certaines zones, mais une armée

 22   ne se forme pas, ne s'organise pas du jour au lendemain - je le répète -

 23   même pas en temps guerre, ou surtout pas en temps de guerre, parce qu'il

 24   est difficile notamment de communiquer quand on est en guerre.

 25   Q.  Au début de ces questions supplémentaires, vous avez parlé de Zvornik.

 26   Je voudrais que nous parlions du contrôle et de la connaissance qu'on

 27   pouvait avoir des événements survenant en Bosnie centrale. C'est un sujet

 28   que vous avez abordé hier parmi d'autres avec M. Karadzic. Vous allez le

Page 9932

  1   trouver dans le compte rendu d'hier page 9 808, à partir de la ligne 25. M.

  2   Karadzic vous demandait ceci :

  3   "Convenez-vous que jusqu'au 20 mai et plus tard, il n'y avait pas assez de

  4   possibilités de vraiment comprendre, encore moins de contrôler l'évolution

  5   de la situation sur le terrain, je pense, surtout aux événements de Zvornik

  6   ? Est-il vrai qu'on était à peine en mesure de savoir ce qui se passait sur

  7   le terrain, donc encore moins a fortiori de les contrôler ces événements ?"

  8   Vous avez répondu ceci :

  9   "Mais c'était le tout début. Il n'y avait pas d'armée bosno-serbe qui

 10   existait à l'époque."

 11   Vous avez dit que ça caractérisait l'anarchie qui régnait au début de la

 12   guerre.

 13   J'aimerais vous montrer plusieurs documents. Je suppose que vous les aurez

 14   jamais vus ou vous n'aviez pas de raison non plus, mais je voulais voir si

 15   ceci correspondait bien à ce qu'avait dit M. Karadzic, à savoir qu'il ne

 16   connaissait pas les événements survenants à Zvornik, et qu'il ne les

 17   contrôlait pas, et vous, vous disiez -- vous conveniez que tout ceci était

 18   intervenu dans une période où il y avait de l'anarchie.

 19   Mme EDGERTON : [interprétation] Nous avons d'abord le document P901 [comme

 20   interprété], nous avons ici l'Assemblée bosno-serbe qui se réunit le 24

 21   mars 1992. Page 21 du prétoire électronique en anglais, s'il vous plaît, ce

 22   sera la page 38 en B/C/S, me semble-t-il, c'était la 12e Séance de cette

 23   assemblée. Je vous demande un instant, Madame et Messieurs les Juges, vous

 24   le voyez ici en bas de page, tout en bas de page en anglais, et c'est après

 25   le premier tiers en serbe, ici M. Karadzic commence son intervention.

 26   Il poursuit son intervention à la page suivante, pouvons-nous

 27   l'avoir.

 28   Un instant, s'il vous plaît.

Page 9933

  1   Q.  Monsieur Bell, ce qui nous intéresse c'est le quatrième paragraphe

  2   entier. Vous le voyez, M. Karadzic, dit ceci :

  3   "Au moment souhaitable, sous peu, nous pourrons former ce que nous

  4   voulons, et il y a bonne raison pour que tout ceci se passe dans deux ou

  5   trois jours. C'est ce qu'on prévoie. Mais je ne peux pas vous dire pourquoi

  6   maintenant. C'est alors que toutes les municipalités serbes, les anciennes

  7   comme celles qui viennent d'être créées vont littéralement prendre le

  8   contrôle de la totalité du territoire de la municipalité concernée. La

  9   municipalité de Zvornik va contrôler, prendre le contrôle de tout ce qui

 10   constitue la municipalité serbe de Bosnie. Puis à un moment précis, au

 11   cours des trois ou quatre jours qui vont suivre, une seule et même méthode

 12   sera utilisée, que vous pourrez utiliser dans les municipalités que vous

 13   représentez, aussi bien ce qu'il faut faire que comment faire ce qu'il faut

 14   faire. Comment séparer les forces de police, comment prendre les biens et

 15   ressources appartenant au peuple serbe, et comment prendre le

 16   commandement."

 17   Avant de passer au document suivant, je vous demande ceci : hier,

 18   lorsque vous parliez dans votre reportage de Zvornik, le 7 avril, deux

 19   semaines après la date à laquelle M. Karadzic fait ce discours, vous dites

 20   :

 21   "Les forces de police ont été séparées, divisées et les lignes de

 22   front ont été établies comme elles l'avaient été deux mois plus tôt en

 23   Croatie" ?

 24   R.  Oui, je me souviens de cela.

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux dire quelque chose ?  Je

 27   pense que ce serait preuve d'équité envers le témoin que de lui dire que

 28   ceci se dit dans le contexte de la conférence, où nous avons eu le droit de

Page 9934

  1   constituer une force de police, et la garde nationale; sinon, le témoin va

  2   être induit en erreur, parce qu'il n'a pas lu les comptes rendus de toutes

  3   les séances de l'assemblée. Parce que ceci se passe après le 18 mars,

  4   lorsque Cutileiro nous a fait une proposition, à savoir que les peuples

  5   constitutifs disposeraient de leurs forces de police et de leur garde

  6   nationale respective.

  7   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.

 10   Poursuivez, Madame Edgerton.

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Document suivant 00661, c'est le numéro de la liste 65 ter. C'est un

 13   document émanant de la République du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine,

 14   plus exactement de sa cellule de Crise. La date est celle est du 9 avril

 15   1992, et c'est le commandant de la cellule de Crise, Branko Grujic qui

 16   signe ce document.

 17   Q.  Ça devance de quelques jours le rapport ou le reportage que vous avez

 18   fait. On parle ici notamment au point 1, la mise en œuvre de l'effort de

 19   mobilisation de toutes les Unités de la TO, de la municipalité serbe de

 20   Zvornik; vous voyez ce passage ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Document suivant numéro 00654, de la liste

 24   65 ter, page 20 en anglais; dans le prétoire électronique, ce sera la page

 25   17 en B/C/S.

 26   Rapport du ministère de l'Intérieur de la RS, portant sur le travail

 27   effectué par le centre des services de Sécurité de Zvornik, en 1992. Ce

 28   document a été rédigé en janvier 1993.

Page 9935

  1   Un instant, s'il vous plaît.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai du mal à lire, c'est pourquoi la police

  3   de caractère est trop petite.

  4   Mme EDGERTON : [interprétation] M. Karadzic, est-ce que ça vous dérange si

  5   on enlève la version serbe, on pourra ainsi agrandir le texte en anglais ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, faisons-le, pour ce document.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est mieux, je vois mieux là.

  8   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

  9   Première page, premier paragraphe, il dit ceci :

 10   "A compter du début du mois de janvier 1992, un groupe de six

 11   fonctionnaires du SJB, a été en contact permanent avec le comité du recteur

 12   du Parti démocratique serbe, afin de préparer le détachement du SJB, si le

 13   territoire municipal venait à être divisé pour former une partie serbe et

 14   une partie musulmane."

 15   Voyons maintenant la page 21 du prétoire électronique, en anglais.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je crains que si l'on sort des phrases du

 17   contexte complet, ce serait être injuste envers le témoin. Comment voulez-

 18   vous qu'il commente un document de la police, s'il ne l'a pas lu dans son

 19   intégralité.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voyons comment le témoin va répondre, et

 21   en tant que de besoin, je vous redonnerais la parole.

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 23   Bas de page, petit (b), vous voyez ceci à partir du bas :

 24   "Le 4 avril 1992, le chef et le chef en second du SJB, entre parenthèses

 25   (Serbes) se sont rendus à une réunion de la cellule de Crise, à Ugljevik,

 26   pour prendre des dispositions permettant des activités futures."

 27   Puis bas de page 22, en anglais, la voici, merci.

 28   Troisième paragraphe, à partir du haut, il dit ceci :

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  1   "Le personnel du SJB agissant avec les forces de la Défense territoriale

  2   serbe est entré dans Zvornik, et s'est emparé des installations clé de la

  3   ville, le 8 avril 1992."

  4   Un dernier document sur ce point. Il s'agit de la pièce P956. C'est le

  5   procès-verbal de la 16e Séance de travail de l'assemblée des Serbes de

  6   Bosnie, qui s'est tenue le 12 mai 1992. Page du compte rendu -- page du

  7   prétoire électronique 3, en anglais, 3 en serbe. Bas de page, ici, on voit

  8   une intervention de M. Karadzic, c'est donc un extrait d'un discours fait

  9   par M. Karadzic.

 10    Page 8 en anglais, s'il vous plaît, ce sera toujours la page 7 en B/C/S.

 11   On voit M. Karadzic qui poursuit son intervention.

 12   Bas de ce paragraphe, par ailleurs très long. Si vous me donnez un

 13   instant, je vais essayer de repérer le bon endroit. 11 lignes à partir du

 14   bas, nous lisons ce qui suit, je cite:

 15   "Le Dr Karadzic déclare, je ne dis pas que nous faisons tout très

 16   bien, étant donné les forces que nous avons à notre disposition, nous

 17   tenons relativement bien les positions que nous détenons. Nous tenons

 18   toutes les municipalités, tous les villages autour de Sarajevo, tous les

 19   secteurs et nous -- et je dois dire à présent, que nous tenons nos ennemis

 20   dans un encerclement complet de sorte qu'ils ne peuvent pas recevoir d'aide

 21   militaire que ce soit en effectif humain ou en armes. Certes, il y a des

 22   conflits de guerre qui éclatent ici et là, à Doboj, ils ont duré peu de

 23   temps, et se sont achevés par un succès pour la partie serbe. Le long de la

 24   Drina, ils se sont achevés avec succès, à Foca, Zvornik et Visegrad."

 25   Q.  Alors voici ma question, Monsieur Bell, par rapport à ces quatre

 26   documents. Je vous demande si, en m'ayant écouté et ayant vu les extraits

 27   de ces documents, vous avez de nouvelles observations à faire au sujet de

 28   l'affirmation du Dr Karadzic, selon laquelle il n'avait pas d'information

Page 9937

  1   ou de contrôle sur les événements à Zvornik, par exemple.

  2   R.  Madame Edgerton, j'ai été frappé, depuis que j'ai commencé mon

  3   témoignage hier, par la différence qu'il peut y avoir entre le contenu de

  4   certains documents émanant des deux parties et la réalité de ce qui se

  5   passait sur le terrain. Bien sûr, je ne pouvais pas consulter ces

  6   documents, mais je voyais ce qui se passait sur le terrain et j'aurais été

  7   surpris s'il n'y avait pas eu davantage de plans constitutifs et de plans

  8   de mobilisation élaborés au mois de mars, au moment où il était tout à fait

  9   certain que la guerre était prévisible. Je pense que la question qui se

 10   pose est la suivante : quelle était l'efficacité de cette mobilisation ?

 11   Combien de contrôle est-ce que les deux parties avaient effectivement ?

 12   Comme vous le savez, j'ai traversé Zvornik le 7, au moment où elle

 13   n'avait pas encore été prise par les Serbes, et j'y suis revenu le 9 ou le

 14   10. Je pense que si tout s'était sait selon le plan prévu avec les

 15   autorités municipales s'agissant de la prise de la ville, je ne pense pas

 16   qu'il aurait été nécessaire pour M. Arkan et ses volontaires de venir sur

 17   place. Ils y sont, d'une certaine façon, arrivés, et ce dont je suis

 18   pratiquement sûr, c'est qu'ils n'ont jamais été très populaires auprès du

 19   Dr Karadzic ou même auprès de la JNA.

 20   Donc, ma réponse assez générale sera la suivante : je trouve ces

 21   documents absolument fascinants. J'aurais souhaité en avoir connaissance, à

 22   l'époque, des faits mais je ne suis pas sûr qu'ils aient suffisamment tenu

 23   compte de ce brouillard de la guerre.

 24   Q.  Passons au dernier secteur. Ma question découle de votre témoignage

 25   d'aujourd'hui. Le Dr Karadzic vous a à nouveau interrogé au sujet dans

 26   événements de Zvornik et vous avez dit en page 37 du compte rendu

 27   d'aujourd'hui, lignes 2 à 5, qu'il y avait un schéma de comportement. Je ne

 28   suis pas sûr que cela concernait, d'ailleurs, uniquement Zvornik, mais que

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  1   les gens attendaient la guerre, que les Serbes ont fui et que les

  2   paramilitaires serbes ont ensuite pénétré dans la ville et qu'ensuite, les

  3   Musulmans avaient fui la ville."

  4   Vous vous rappelez cela ?

  5   R.  Oui.

  6   Mme EDGERTON : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

  7   numéro 04199.

  8   Il s'agit d'un ordre qui date du 28 mai 1992 et qui est destiné à la

  9   Défense territoriale de Zvornik, adressé par un certain Svetozar Andric,

 10   commandant de la Brigade de Bihac, et c'est un ordre émis après un autre

 11   ordre relatif l'organisation de la défense, qui datait du 15 mai 1992.

 12   Q.  Donc, j'aimerais vous demander de vous pencher sur le paragraphe 6, qui

 13   se lit comme suit, je cite :

 14   "Le déplacement de la population musulmane doit être organisé et coordonné

 15   avec les municipalités à partir desquelles ces déplacements vont se faire.

 16   Seuls les femmes et les enfants sont autorisés à circuler alors que les

 17   hommes aptes au service militaire doivent être placés dans des camps en vue

 18   d'un échange."

 19   Alors, Monsieur Bell, je crois comprendre, comme vous l'avez indiqué à

 20   l'instant, que vous n'aviez aucune raison de consulter des documents comme

 21   celui-ci à l'époque où vous vous êtes forgé votre point de vue au sujet de

 22   la situation et des événements en Bosnie orientale, mais au vu de ce

 23   document, est-ce que vous avez de nouvelles observations à faire quant à

 24   l'identité du ou des responsables de la fuite des Musulmans hors de Zvornik

 25   au début du conflit ?

 26   R.  Je ne peux vous transmettre que les impressions qui étaient les miennes

 27   à l'époque. Comme vous l'aurez constaté à la vue des images de la vidéo,

 28   j'étais en compagnie d'un grand nombre de réfugiés, des centaines, même des

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  1   milliers de réfugiés qui se sont regroupés pendant la journée, et

  2   l'histoire selon laquelle ils auraient tous fui la violence de la guerre

  3   était ce que l'on entendait. Aucun de ces réfugiés n'a avancé une

  4   quelconque allégation relative à un nettoyage ethnique au sens de dire que

  5   c'était les Serbes qui les avaient fait partir. Je serais surpris qu'il y

  6   en ait eu qui soient restés. Nous ne savons pas quels étaient les nombres

  7   dont il est question dans ce document.

  8   Mais la vue de ces femmes qui tremblaient de peur quand on entend le

  9   bruit des canons à l'arrière-plan, et puis ces personnes étaient des

 10   réfugiés, ce n'était pas ce que les Nations Unies appellent des personnes

 11   déplacées. Je veux dire, voilà le sentiment que je me suis fait à l'époque

 12   et aucun de ces documents ne modifie mon sentiment de l'époque.

 13   Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais que nous regardions un dernier

 14   document -- ou plutôt, c'est un extrait des minutes d'une réunion de

 15   l'assemblée. Il provient de la 53e Séance de l'assemblée de la Republika

 16   Srpska qui a commencé le 28 août 1995. Il s'agit de la pièce P00988, et

 17   j'aimerais que nous voyions la page 69 en anglais, le haut de la page 69 en

 18   anglais. C'est un nouvel extrait d'un discours prononcé par le Dr Karadzic

 19   devant cette assemblée.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que la Défense se verra accorder le

 21   droit de dire quelques mots.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A quel sujet, Monsieur Karadzic ?

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce témoin --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au sujet des documents précédents ?

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ainsi que sur l'ensemble de ces questions

 26   supplémentaires. Ce sont des documents qui sont absolument sortis de leur

 27   contexte.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai dit que je vous entendrais à la fin

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  1   des questions supplémentaires.

  2   Oui, Madame Edgerton.

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

  4   Monsieur le Greffier, pourriez-vous, je vous prie, vous rendre en page 68,

  5   au bas de la page 68. Je me suis rendu compte qu'en parlant de la page 69,

  6   j'avais oublié de tenir compte de la toute dernière partie de la page 68.

  7   Q.  Alors je l'ai déjà dit qu'il s'agit d'un nouvel extrait d'un discours

  8   prononcé par le Dr Karadzic, et la dernière ligne de la page 68 se lit

  9   comme suit, je cite :

 10   "Pour dire la vérité, il y a des villes dont nous nous sommes emparés pour

 11   nous-mêmes…"

 12   Maintenant, passons à la page 69. Suite de la citation, je cite :

 13   "…et nous n'étions que 30 %. Je peux nommer autant de villes de ce genre

 14   que vous le voulez, mais nous ne pouvons pas abandonner les villes qui nous

 15   ont donné 70 % du territoire. Ne laissez par circuler cela mais rappelez-

 16   vous le nombre d'entre nous qui se trouvaient à Bratunac, à Srebrenica, à

 17   Visegrad, à Rogatica, à Vlasenica, à Zvornik, et cetera. Etant donné

 18   l'importance stratégique de ces villes, elles devaient devenir nôtres, et

 19   personne, pratiquement, ne remet plus cela en cause."

 20   Alors, Monsieur Bell, le Dr Karadzic fait remarquer ici que Zvornik et

 21   d'autres localités de Bosnie orientale ont été prises en raison de leur

 22   importance stratégique, même s'il ne s'y trouvait, comme le Dr Karadzic le

 23   dit lui-même, que "30 % d'entre nous", et ceci nous amène à d'éventuelles

 24   observations complémentaires au sujet de l'affirmation qu'il vous a soumise

 25   au cours du contre-interrogatoire selon laquelle il n'avait aucune

 26   connaissance ou aucun contrôle sur les événements de Zvornik et de Bosnie

 27   orientale, au cas où vous auriez de telles observations à faire.

 28   R.  Je ne pense pas que dans ce discours, et j'aurais aimé avoir

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  1   connaissance de ce discours il y a quelques années, parce que quand il dit

  2   "nous nous sommes emparés," or, nous parlions du commandement et du

  3   contrôle lorsque ces questions supplémentaires ont commencé, et les Serbes

  4   se sont emparés d'un certain nombre de localités pour eux-mêmes. Ceci est

  5   tout à fait clair à mes yeux. Ça l'était même à l'époque, à savoir que,

  6   dans de nombreuses localités dont ils se sont emparés, ils constituaient,

  7   en fait, une minorité, mais ils étaient mieux armés et mieux organisés en

  8   tant que minorité. Donc je ne pense pas que ces propos concernent

  9   véritablement le sujet du commandement et du contrôle mais sur le plan

 10   politique, il ne fait aucun doute qu'ils sont très éclairants, à savoir

 11   qu'ils se sont emparés de ces lieux dans leur intérêt, et c'est toujours ce

 12   que j'ai pensé qu'ils avaient fait. Je veux dire, cela ne me surprend pas

 13   du tout.

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Je n'ai plus de questions, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 16   Juges.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Edgerton.

 18   Ne je suis pas sûr, étant donné les réponses du témoin, que vous ayez

 19   besoin de parler aux Juges de la Chambre, mais je vous entendrai, Monsieur

 20   Karadzic.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaitais simplement dire que ce discours

 22   prononcé devant l'assemblée et qui portait sur la garde nationale sur la

 23   police découle de l'offre qui avait été faite par l'Union européenne qui

 24   nous proposait que notre unité constitutive possède une Garde nationale

 25   éventuellement et je disais simplement que nous n'avions pas besoin de la

 26   créer immédiatement, que cela pouvait attendre. Ce témoin ne connaissait

 27   pas les détails de la Conférence du 18 mars, et je crois que vous n'étiez

 28   même pas à Sarajevo lorsque l'accord de Lisbonne a été conclu. Ça c'est un

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  1   point.

  2   Le deuxième point --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.

  4   Est-ce que vous souhaitez poser des questions précises, au sujet des

  5   documents que le témoin vient de voir ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous faites référence à quels documents

  8   ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Par exemple, celui qui est encore affiché à

 10   l'écran en ce moment.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Bell, admettez-vous --

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, non. Vous interrogez le témoin

 14   sur ce seul document ou sur d'autres éventuellement, et dans ce cas,

 15   lesquels ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'interrogerais le témoin sur deux ou trois

 17   documents, si vous me le permettez. Mais puisque le dernier document est

 18   encore à l'écran, je voulais simplement faire préciser au témoin s'il

 19   savait dans quel contexte ce discours avaient été prononcé.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous vous autoriserons à

 23   poser quelques questions au sujet de ces documents pour obtenir une idée

 24   plus précise du contexte; rien de plus, Monsieur Karadzic.

 25   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Karadzic :

 26   Q.  [interprétation] Dès lors que nous parlons de ce discours, Monsieur

 27   Bell, admettez-vous qu'il s'agit d'un discours politique prononcé devant

 28   l'Assemblée, dont le but et de justifier la perte de Grahovo et de Glamoc,

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  1   qui a eu lieu et que vous avez remarqué ? C'est dans cette période, que

  2   Grahovo et d'autres municipalités serbes, comme Drvar, par exemple, ont été

  3   perdues, et donc nous étions tenus de prononcer un discours politique, pour

  4   excuser la perte de ces localités serbes, afin de faire avaler, si je puis

  5   me permettre ce mot, plus facilement la perte des municipalités serbes ?

  6   R.  Docteur Karadzic, dès que je lis ceci, je comprends immédiatement dans

  7   quel contexte cela se situe, à savoir la perte de Grahovo et de Glamoc, et

  8   je me souviens que vous avez prononcé des déclarations publiques à l'époque

  9   à ce sujet, en disant : Nous ne devons plus perdre d'autres municipalités.

 10   Donc, oui, c'est un discours politique, bien sûr.

 11   Q.  Merci. La question du déplacement organisé des populations, dont parle

 12   le colonel Andric le 28 mai, je vous demande si vous savez que nos

 13   représentants ont signé, le 22 mai, avec la médiation du Haut-Commissaire

 14   chargé des réfugiés, Mme Ogata, nos représentants ont donc signé un texte à

 15   ce sujet dans lequel ils s'engageaient à fournir une escorte organisée pour

 16   les civils qui souhaitaient certains territoires afin d'échapper au combat

 17   ? Si vous saviez cela, est-ce que vous auriez fait une lecture différente

 18   de ce document ?

 19   R.  Je conclus sur la base de ma propre expérience, Docteur Karadzic, que

 20   nous sommes là dans une espèce de zone grise entre la contrainte exercée

 21   sur des populations pour qu'elles fuient leurs domiciles et le fait de

 22   fournir à ces populations une escorte au cas où elles souhaiteraient

 23   partie. Il est possible de contracter les deux situations en disant que ces

 24   populations ne souhaitaient pas nécessairement partir, et je ne parle pas

 25   simplement de ce conflit, mais de bien d'autres encore.

 26   Q.  Je vous remercie. S'agissant de la Défense territoriale des

 27   municipalités, vous rappelez-vous que la loi sur la Défense territoriale

 28   dans les municipalités octroyaient un rôle dirigeant au président de la

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  1   municipalité du point de vue du commandement et du contrôle sur les unités

  2   territoriales présentes sur son territoire, et que chaque municipalité

  3   possédait sa propre unité de défense territoriale, dont le président de la

  4   municipalité était le président puisqu'il présidait le Conseil de Défense

  5   nationale ?

  6   R.  Oui, j'ai compris que tel était le cas.

  7   Q.  Merci. Avez-vous remarqué que Branko Grujic appelle, à la mobilisation

  8   générale de la Défense territoriale dans la municipalité de Zvornik, à la

  9   date du 5 avril, mais qu'Alija Izetbegovic a décrété la mobilisation

 10   générale en Bosnie-Herzégovine à la date du 4 avril, c'est-à-dire la veille

 11   ? Vous étiez à Kupres, mais cette proclamation était connue de tous,

 12   proclamation faite par Alija Izetbegovic.

 13   R.  Oui, tout ceci s'est passé -- en fait, je n'étais pas en Bosnie les 3

 14   et 4. J'y suis arrivé le 5 ou le 6.

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation]

 17   Je n'ai plus de questions.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Ceci met un point final à votre déposition, Monsieur Bell, et au nom de la

 21   Chambre de première instance ainsi qu'au nom du Tribunal, je tiens à vous

 22   remercier d'être venu témoigner. Vous êtes maintenant libre de vous

 23   retirer.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Ceci

 25   a été une expérience particulièrement intéressante.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Je vous souhaite un bon voyage de retour chez vous.

 28   [Le témoin se retire]

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  1   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame,

  2   Messieurs les Juges, vous m'avez beaucoup vue ces dernières deux semaines,

  3   mais avec votre autorisation, j'aimerais maintenant vous demander de

  4   pouvoir me retirer. Je me demandais si nous pouvions peut-être accorder

  5   quelques minutes à Mme Sutherland pour qu'elle reprenne mon siège.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  8   J'aimerais également me voir accorder quelques minutes pour traiter de

  9   certains problèmes relatifs au témoin suivant, problèmes liés à la durée et

 10   à l'horaire de sa déposition. Je ne sais pas si chacun peut circuler

 11   tranquillement pendant que je parle, ou si nous devrions faire une pause

 12   avant ou après, mais j'aimerais être entendu avant l'entrée du témoin dans

 13   le prétoire.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que cela vous gênerait que nous

 15   entendions le conseil de la Défense maintenant, Madame Sutherland ?

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je préférerais

 17   parler la première, et quant à lui, il pourra ensuite se concentrer sur son

 18   propos très convenablement.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Nous allons faire une pause de

 20   cinq minutes.

 21   --- La pause est prise à 13 heures 50.

 22   --- La pause est terminée à 13 heures 58.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson. Vous avez la

 24   parole.

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Monsieur le Président, si j'interviens, c'est pour demander que la

 27   déposition de ce témoin concernant Velesici ne soit pas retenue, en tout

 28   cas, que sa déposition soit limitée.

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  1   N'oublions pas que c'est un témoin ajouté par voie de requête et par voie

  2   de décision du 18 mai 2010 à la liste des témoins. Quand il a été ajouté,

  3   on a dit qu'il ne parlerait que de l'incident de Markale et que des

  4   conclusions concernant la prothèse de son père. Ça s'est passé au mois de

  5   mai.

  6   Mais c'est en novembre 2010 seulement que le lot de documents 92 ter a été

  7   déposé et nous avons appris qu'il allait parler aussi du pilonnage de la

  8   cité de Velesici, et ceci ne fait pas partie des raisons pour lesquelles on

  9   a autorisé l'ajout de ce témoin à la liste des témoins. Jusqu'alors, tout

 10   ce qu'on savait à propos de ce témoin et Velesici, c'était le paragraphe 13

 11   de la déclaration préalable du témoin qui dit :

 12   "Notre maison familiale se trouvait dans la cité de Velesici, qui a été

 13   plusieurs fois pilonnée. La fameuse écoute de Ratko Mladic par laquelle il

 14   ordonne le pilonnage de cette cité, et notre maison familiale a subi des

 15   dégâts à cause de cela."

 16   Jusqu'à hier, c'est tout ce qu'on savait du témoin, en tout cas, de ce que

 17   semblait savoir ce témoin, de ce dont il pourrait parler.

 18   Hier soir, je ne pense pas que M. Karadzic l'aura reçu avant ce

 19   matin, nous avons reçu quatre pages de la déclaration du témoin où le

 20   témoin revient une fois de plus sur ce qu'il dit de Velesici. Il parlait

 21   des dégâts occasionnés à un répétiteur de télévision, à des [inaudible]

 22   dans la zone. Nous estimons ne pas avoir été suffisamment avisés de ces

 23   sujets et ceci sort de la portée du témoignage pour lequel le témoin a été

 24   autorisé. Donc on ne parle pas de Velesici mais si la Chambre autorise

 25   qu'il en parle, le témoin ne pourrait parler que de ce qu'il avait déjà dit

 26   dans sa déclaration préalable que nous avions jusqu'à hier soir. Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en dites-vous, Madame Sutherland ?

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Il est inexact que Me Robinson

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  1   dise que c'est par la notification du 12 novembre que la Défense a appris

  2   l'ajout de ce témoin. Il y avait en plus de la requête d'ajout du témoin

  3   une Annexe A qui faisait le résumé 92 ter de l'objet du témoignage, et il

  4   était dit qu'il allait parler du pilonnage de Velesici, qui correspond à

  5   l'incident repris dans les annexes en G1. Vous avez rendu une décision

  6   orale autorisant la comparution de ce témoin. Ce faisant, vous aviez

  7   manifestement en tête cette annexe et vous n'avez pas limité la portée de

  8   sa déposition. Nous avons déposé la notification le 12 novembre. Une fois

  9   de plus, nous faisons nos résumés de 92 ter et nous avons ajouté une pièce

 10   associée qui était l'écoute Mladic. Il est un peu tard, me semble-t-il,

 11   pour dire maintenant, donc plus de quatre semaines plus tard, qu'on fait

 12   objection Me Robinson, ou l'accusé aurait pu déposer des écritures à cet

 13   effet bien plus tôt.

 14   S'agissant de la déposition évoquée par Me Robinson, ça représente

 15   trois paragraphes dans la déclaration que j'ai recueillie hier du témoin.

 16   Vous le savez ou vous ne le savez peut-être pas. Il devait venir dimanche,

 17   mais la neige aidant, c'est seulement lundi soir très tard dans la nuit,

 18   vers minuit, qu'il est arrivé. Il a très mal dormi, ce qui fait que nous

 19   avons reporté le récolement et il n'a pu avoir lieu qu'hier après-midi,

 20   après quoi nous avons dactylographié la déclaration.

 21   Dans ces trois paragraphes dont parle Me Robinson, il parle de la

 22   municipalité dans laquelle se trouve la cité où il habitait, et il parle du

 23   pilonnage qui étoffe ce que le témoin avait dit dans sa première

 24   déclaration au paragraphe 13.

 25   A mon avis, je devrais être autorisé à poser des questions sur

 26   Velesici ainsi que sur la composition ethnique de cette cité. Les propos du

 27   témoin le montrent clairement. C'est dit au paragraphe 3 et au paragraphe

 28   13. Rien de neuf dès lors. La seule phrase dont n'a pas été avisée la

Page 9948

  1   Défense c'est une seule phrase qui parle du répétiteur qui se trouvait au-

  2   dessus d'une maison familiale.

  3   Je pense que la Défense n'est pas lésée par la déclaration qui lui a

  4   d'ailleurs été communiquée hier soir.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  6   [La Chambre de première instance se concerte]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lorsque nous autorisons l'ajout d'un

  8   témoin à la liste visée par l'article 65 ter, la Chambre n'a pas l'habitude

  9   de limiter la portée de la déposition qu'il va faire ou, en tout cas, cela,

 10   l'Accusation a informé la Défense. Par conséquent, nous estimons qu'il ne

 11   convient pas de limiter la portée de l'interrogatoire principal à un

 12   territoire donné. Cependant, étant donné le caractère tardif de la

 13   communication et sur tout ce qui a été communiqué ce matin même, la Chambre

 14   va demander à l'Accusation de poser des questions à l'audience sur ces

 15   parties-là qui ont été communiquées aujourd'hui - excusez-moi si je

 16   prononce mal ce lieu - Velesici, parce que ceci n'est pas repris dans

 17   l'article 65 ter, ce qui permettra à la Défense de mieux suivre la

 18   déposition du témoin.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Je vais demander l'affichage du document 20302 de la liste 65 ter, et là,

 21   je pense qu'il faudra expurger les paragraphes 18 et 20 et présenter

 22   directement à l'audience ces éléments en posant des questions au témoin.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Faisons entrer le témoin.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, on voit

 25   ici "20302." En fait, je me suis trompée, c'est le numéro 90203, c'est ce

 26   numéro de la liste 65 ter qui contient les deux déclarations, vous allez le

 27   voir sous peu.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

Page 9949

  1   Maître Robinson.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Objection. Je m'oppose à ce que la

  3   déclaration d'hier soir soit utilisée. D'abord, d'après l'article 92 ter il

  4   faut une notification sous 24 heures. Je comprends bien qu'on puisse poser

  5   des questions supplémentaires, mais je ne pense pas que ce document doit

  6   être versé au dossier.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'après moi, c'est une correction

  8   simplement. Si nous sommes saisis d'éléments présentés à l'audience

  9   concernant Velesici, je ne pense pas qu'il y aura une véritable objection

 10   de la part de la Défense.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Mais c'est une question de coutume et de

 12   procédure. Lorsqu'on reçoit le matin même de l'audition d'un témoin des

 13   documents, je ne pense pas qu'il soit juste de verser le document alors

 14   qu'on l'a reçu le matin même. Si on demandait correction, il faut tout

 15   faire à l'audience en direct.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, la Chambre est d'accord avec vous.

 17   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Begic.

 19   Je vais vous demander de prononcer la déclaration solennelle.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 21   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 22   LE TÉMOIN : ALMIR BEGIC [Assermenté]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 25   Veuillez vous asseoir, Monsieur. Mettez-vous à l'aise.

 26   Vous avez compris ce que je voulais dire, je suppose, Madame.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 28   Les corrections, les précisions apportées à la déclaration doivent être

Page 9950

  1   présentées directement à l'audience, ce qui va nécessiter un temps

  2   supplémentaire considérable, je voulais vous en avertir, Monsieur le

  3   Président, Madame, Messieurs les Juges.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

  5   Interrogatoire principal par Mme Sutherland :

  6   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. Veuillez décliner votre identité.

  7   R.  Je m'appelle Almir Begic.

  8   Q.  Monsieur Begic, vous souvenez-vous avoir fourni une déclaration déposée

  9   au bureau du Procureur du TPIY en début d'année ?

 10   R.  Oui, je m'en souviens.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on afficher le document 90203 de la

 12   liste 65 ter ?

 13   Q.  Vous reconnaissez cette déclaration ?

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on voir la fin de la déclaration, la

 15   dernière page.

 16   Q.  Est-ce bien votre signature qu'on voit au bas de la déclaration ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Vous avez relu cette déclaration hier, n'est-ce pas, c'est-à-dire

 19   qu'elle vous a été relue, et vous avez souhaité apporter plusieurs

 20   corrections et précisions ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Une courte déclaration supplémentaire a été ainsi recueillie, qui

 23   contient ces corrections et ces précisions, n'est-ce pas ?

 24   R.  Exact.

 25   Q.  Je vais poser des questions directement ici à l'audience pour que

 26   soient précisées toutes ces corrections, je vous demande de faire preuve de

 27   patience.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande cependant que soit affichée la

Page 9951

  1   deuxième page, ainsi que la troisième, ainsi que le bas de la page 4. Très

  2   bien.

  3   Voilà, cette nouvelle déclaration fait quatre pages, nous l'avons vu.

  4   Revenons au début.

  5   Q.  Vous vouliez corriger la date à laquelle a eu lieu l'entretien, sur la

  6   première page. Parce qu'on voit indiquée la date du "15 mars 2010." Lorsque

  7   vous avez relu cette déclaration, vous avez dit que vous l'aviez signée et

  8   datée le 15 avril; est-ce bien cela ? Vous vouliez donc que soit corrigée

  9   la date à laquelle s'est déroulée cet entretien à la première page ?

 10   Oui, vous me faites un signe de tête, mais vous devez le dire pour

 11   que ce soit acté au compte rendu d'audience.

 12   Est-ce exact ?

 13   R.  Exact.

 14   Q. L'orthographe utilisée pour le nom de votre père présente quelques

 15   différences. Je pense qu'on utilise la mauvaise diacritique. Est-ce que son

 16   nom c'est bien C-a-m-i-l - et comment dire - avec le "ch," ce son plus

 17   mouillé que ce qui est indiqué ici par le C avec l'accent aigu ?

 18   R.  Exact.

 19   Q.  Au paragraphe 2, on a mal épelé le nom de "Jablanica." Vous avez voulu

 20   que ce soit corrigé. C'est bien J-a-b-l-a-n-i-c-a ?

 21   R.  Exact.

 22   Q.  Une phrase dit ceci :

 23   "En 1961," au paragraphe 2 de la déclaration pour être précise, "il est

 24   arrivé en retard au travail," et là en anglais, on dit : "au moment où," -

 25   c'est un "at," a-t, au lieu de a-s, "au moment où il essayait de sauter

 26   dans le train, il s'est coincé la cheville, et c'est ainsi qu'il a perdu

 27   son pied droit…"

 28   Donc vous vouliez dire qu'en fait :

Page 9952

  1   "Son pied s'étant coincé dans le train, il a perdu quelques orteils.

  2   Et plus tard, son pied a été amputé à l'hôpital."

  3   C'est ce que vous vouliez dire, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Begic, est-ce que vous

  6   comprenez l'anglais ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, hélas.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais vous demander d'enlever quelques

  9   instants vos écouteurs. Je vous remercie.

 10   Avant d'entendre votre objection, Maître Robinson, je n'avais pas lu la

 11   totalité de la dernière déclaration en date, la déclaration supplémentaire.

 12   Mais maintenant que j'écoute et que j'entends ces corrections, je me

 13   demande s'il faut vraiment que ces questions soient posées directement à

 14   l'audience. Est-ce que nous n'avons pas pris pour habitude d'autoriser que

 15   soient faites des corrections, que soient versées au dossier des notes de

 16   récolement ?

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, oui. Je ne pensais pas aux fautes

 18   d'orthographes. Je pensais aux modifications de fond.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais quelles seraient les différences au

 20   niveau du sens qu'il faut relever ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Paragraphe 16, paragraphe 17, paragraphe 13,

 22   paragraphes 18 à 20, ainsi que les paragraphes 9 et 10, le paragraphe 7. Ce

 23   sont vraiment les modifications de fond auxquelles je pensais.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc 7, 9, 10, 13, 16 à 20 ?

 25   M. ROBINSON : [interprétation] A vous de juger, bien sûr, mais oui, je ne

 26   voulais pas ici simplement des corrections de croquis, typographiques.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Sinon, vous êtes d'accord pour

 28   que la déclaration soit versée ?

Page 9953

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, suivons cette idée. Adoptons-la,

  3   Madame Sutherland.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je souhaite bien comprendre, Monsieur le

  5   Président. La déclaration recueillie hier sera versée à l'exception des

  6   paragraphes dont vous venez de donner les numéros ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Prenons la page 6 du document 90203.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faudra que le témoin rechausse ses

 10   écouteurs, qu'il les remette.

 11   Monsieur Begic, voilà, la gestuelle peut nous aider à nous comprendre. Il a

 12   maintenant remis ses écouteurs.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que vous avez à l'écran la déclaration que vous avez fournie

 15   hier ? Est-ce que vous y voyez votre signature à la première page ainsi que

 16   la date de la journée d'hier ?

 17   R.  Oui.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Les pages 2 et 3, et les pages suivantes.

 19   La page 4. La page 5. Merci. A la page 6 il y a uniquement la confirmation,

 20   la certification apportée par l'interprète.

 21   Q.  Je vais maintenant vous poser quelques questions directes concernant

 22   certaines modifications ou précisions que vous souhaitiez apporter.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ça veut dire que la totalité de cette

 24   déclaration que vous avez faite ne va pas être versée au dossier.

 25   J'attendrai donc la fin de l'audience pour demander le versement de la

 26   déclaration.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Permettez-moi de lire un bref résumé de

Page 9954

  1   la déposition du témoin.

  2   Le témoin habite Sarajevo - et ceci, bien sûr, part du postulat selon

  3   lequel la première déclaration va être versée au dossier.

  4   Ce témoin habite Sarajevo. Il est le fils du Camil Begic, qui a succombé à

  5   ses blessures subies lors de l'incident de Markale le 5 avril [comme

  6   interprété] 1994. Il avait une prothèse qu'on voit dans les images de la

  7   vidéo diffusée par l'accusé pendant son propos liminaire le 1er mars 2010,

  8   et il portait cette prothèse au moment où il a été tué. Le témoin dit qu'il

  9   a cherché son père après l'explosion et qu'il a retrouvé la prothèse que

 10   portait son père. Il parlera aussi d'autres victimes de l'incident G8

 11   mentionné dans l'acte d'accusation.

 12   M. Begic parlera aussi du pilonnage de la cité de Velesici au mois de mai

 13   1992, qui fait partie de l'incident G1.

 14   Q.  Monsieur Begic, j'ai quelques questions à vous poser à propos de

 15   Velesici.

 16   Paragraphe 13 de votre déclaration d'avril 2010, vous dites que la

 17   maison familiale où vous habitiez se trouvait dans la cité de Velesici et

 18   qu'elle a subi des dégâts suite à un pilonnage.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on afficher le document 13657

 20   [comme interprété] de la liste 65 ter. C'est la carte 8 de l'atlas de

 21   Sarajevo. Voyons de plus près le coin supérieur droit.

 22   Q.  Est-ce que vous pourriez montrer aux Juges où se trouve cette

 23   cité, ce lotissement de Velesici ?

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Faisons un plan plus rapproché.

 25   Q.  Pourriez-vous montrer aux Juges s'il y a des repères topographiques à

 26   proximité. Ça pourra les aider.

 27   R.  Je vois très mal la carte.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on faire un plan encore plus

Page 9955

  1   rapproché ?

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez qu'on vous montre le plan de

  3   plus près ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, c'est bon.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à peu près ici que se trouve mon

  7   quartier --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez que Mme l'Huissière vienne vous

  9   aider.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah oui, maintenant je vois où c'est. Voilà.

 11   C'est ici que se trouve mon quartier.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci.

 13   Q.  Vous venez d'entourer d'un cercle le lotissement de Velesici qui se

 14   trouve juste à gauche du stade de Kosevo; c'est ça ?

 15   R.  Oui.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Je n'ai plus besoin de cette

 17   carte.

 18   Je ne demande pas son versement. Je voulais simplement vous aider à

 19   voir où se trouvait ce quartier.

 20   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle était la composition ethnique de votre

 21   quartier ?

 22   R.  Je pense que 60 % des habitants étaient musulmans et 30 à 40 % étaient

 23   serbes -- enfin, ou le reste.

 24   Q.  Quand le pilonnage de Velesici a-t-il commencé, d'après les souvenirs

 25   que vous en avez ?

 26   R.  Je pense que ça s'est passé dès le début de la guerre. Peut-être que ça

 27   s'est passé en mai.

 28   Q.  En mai 1992 ?

Page 9956

  1   R.  Oui, oui, en mai 1992.

  2   Q.  Pourriez-vous décrire les dégâts occasionnés aux immeubles et bâtiments

  3   ?

  4   R.  Dans mon quartier, la plupart des maisons ont été endommagées,

  5   certaines par des tirs directs, d'autres par des éclats d'obus. Par

  6   exemple, ma maison n'a pas subi de tirs directs, mais elle a subi -- elle a

  7   été endommagée par des éclats d'obus.

  8   Q.  Pourriez-vous décrire l'intensité du pilonnage ?

  9   R.  Ça a été très violent.

 10   Q.  Pourriez-vous nous dire quel genre de bâtiments ou d'immeubles ont été

 11   endommagés pendant le pilonnage ?

 12   R.  Velesici se compose de maisons individuelles. Pour l'essentiel, il y a

 13   quelques bâtiments publics, mais la plupart des maisons sont des maisons

 14   appartenant à des particuliers.

 15   Q.  Paragraphe 13, vous parlez de cette fameuse écoute téléphonique de

 16   Ratko Mladic.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on diffuser le document 30810 ?

 18   C'est la pièce P01518. Est-ce que nous avons la transcription à l'écran,

 19   pourrait-on l'afficher ?

 20   Q.  Monsieur Begic, est-ce que vous voyez la transcription, un document à

 21   l'écran ? Est-ce que vous pourriez lire ce document ?

 22   R.  Oui, je le vois et je peux le lire.

 23   Voilà, j'ai terminé.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on afficher la page 2 en B/C/S ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai terminé la lecture.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que ceci correspond bien à l'écoute téléphonique dont vous

 28   parlez au paragraphe 13 de votre déclaration ?

Page 9957

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Comment avez-vous eu connaissance de cette écoute téléphonique ?

  3   R.  Mais on en a parlé dans les médias, à la radio, à la télévision, dans

  4   les journaux.

  5   Q.  Est-ce que vous en avez entendu parler à la radio ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  On parle du moment auquel s'est effectué le pilonnage de Velesici, où

  8   est-ce que ceci se situe dans le temps par rapport à la date de cette

  9   conversation qui a été interceptée, dont vous avez entendu parler à la

 10   radio.

 11   R.  Il m'est impossible de répondre avec certitude à votre question.

 12   Q.  Il y a quelques instants, vous avez dit que le pilonnage de Velesici

 13   avait commencé en mai 1992. Pourriez-vous nous dire combien de temps a duré

 14   ce pilonnage du quartier ?

 15   R.  Ça a commencé au tout début de la guerre, et ça a duré toute la durée

 16   de la guerre, jusqu'à la fin. Je ne sais pas si je peux vous dire s'il y a

 17   eu un seul jour sans pilonnage. Il y a eu au moins deux, trois ou cinq obus

 18   qui sont tombés sur Velesici tous les jours. 

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Je n'ai plus besoin de cette

 20   pièce, de ce document.

 21   Q.  Parlons du mois de février 1994.

 22   Où travaillait votre père, Camil Begic ?

 23   R.  Il travaillait dans une entreprise qui s'appelait Duhanpromet, qui

 24   employait uniquement des invalides de la guerre précédente. De 85 à 90 % de

 25   tous les employés étaient des handicapés.

 26   Q.  Dans votre question écrite, vous déclarez que votre père était

 27   également handicapé. Pouvez-vous rapidement décrire son handicap ?

 28   R.  Oui. Mon père a été handicapé du pied droit. Il n'avait pas de talon,

Page 9958

  1   et sa prothèse allait jusqu'aux genoux. Mais en fait ce qui manquait

  2   c'était le talon.

  3   Q.  Votre père était-il membre de l'armée ?

  4   R.  Non. Il ne pouvait pas être membre de l'armée, il était handicapé.

  5   Q.  Quand est-ce que vous avez vu votre père en vie pour la dernière fois ?

  6   R.  Le 5 février, ce jour tragique. Dans la matinée, vers 9 heures du

  7   matin, il a quitté la maison et c'est le moment où nous nous sommes vus

  8   pour la dernière fois.

  9   Q.  Il allait où ?

 10   R.  Il allait dans son entreprise de Duhanpromet qui se trouvait à

 11   Skenderija. Ce jour-là, l'entreprise devait déménager, donc un certain

 12   nombre de salariés s'était mis d'accord pour aller à l'entreprise et

 13   empêcher ce déménagement, qui était en fait une expulsion.

 14   Q.  Avez-vous découvert par la suite à quel endroit il s'est rendu

 15   lorsqu'il a quitté son lieu de travail, le 5 février ?

 16   R.  J'ai appris qu'il avait été tué au marché. Senad, le voisin est venu me

 17   voir la maison, il m'a dit que mon père avait été gravement blessé; c'est à

 18   ce moment-là que j'ai appris qu'il était allé au marché.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais qu'on diffuse un document de

 20   la Défense, document 1D --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, puis-je vous demander

 22   de combien de temps vous aurez encore besoin pour votre interrogatoire

 23   principal ?

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Au moins une demi-heure, Monsieur le

 25   Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, nous allons suspendre pour

 27   aujourd'hui.

 28   Mme UERTZ-RETZLAFF : [aucune interprétation]

Page 9959

  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, Madame Uertz-Retzlaff.

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, j'avais cru

  3   comprendre que l'audience d'aujourd'hui pouvait être prolongée un peu.

  4   C'est peut-être un malentendu, mais j'avais compris que c'était une

  5   possibilité.

  6   Je suis un peu inquiète à cause de la visioconférence. Etant donné le temps

  7   nécessaire pour le contre-interrogatoire, il ne devra pas y avoir de

  8   problème, mais on ne peut jamais prévoir tous les problèmes techniques qui

  9   risquent de se poser. Donc je me demandais si nous ne pourrions pas

 10   continuer encore un peu, de façon à conclure l'interrogatoire principal

 11   aujourd'hui. C'est simplement une préoccupation, une inquiétude que je

 12   voulais exprimer.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon argument peut-être.

 14   Pourrait-on faire une brève pause, puisque pour les cassettes, on a besoin

 15   de suspendre de toute façon quelque temps. Donc une pause de 15 minutes, et

 16   nous reprendrons à 14 heures 50, si cela convient à tout le monde.

 17   Simplement pour conclure l'interrogatoire principal, est-ce qu'on

 18   commence l'audition du témoin suivant demain ou est-ce qu'on continue avec

 19   l'audition de ce témoin ?

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, s'il est

 21   possible de tout faire aujourd'hui, pendant une heure et demie, nous

 22   pourrions terminer le principal et le contre-interrogatoire de M. Begic

 23   aujourd'hui.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, un des

 25   problèmes c'est que nous n'avons pas été prévenus suffisamment à temps au

 26   sujet de tout cela pour que le contre-interrogatoire commence aujourd'hui.

 27   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : Les interprètes ne sont pas non plus

 28   une substance malléable, étirable à l'infini. Le nombre d'interprètes en

Page 9960

  1   cabine est déterminé par la durée des audiences.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Selon les calculs de la Chambre, nous

  3   avions pensé pouvoir terminer l'audition de ce témoin demain. Mais étant

  4   donné qu'il y a un peu de glissement demain, puisque l'audition de ce

  5   témoin, si elle n'est pas terminée, mais enfin, faisons cela. Nous allons

  6   donc terminer uniquement l'interrogatoire principal aujourd'hui, et le

  7   contre-interrogatoire de ce témoin se fera demain.

  8   Pause de 15 minutes. Reprise des débats à 14 heures 50.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'apprécie la compréhension de la part

 10   de tous les membres du personnel impliqué.

 11   --- L'audience est suspendue à 14 heures 38.

 12   --- L'audience est reprise à 14 heures 53.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lorsque la décision fut prise lorsqu'il

 14   a été décidé qu'il n'était pas possible de siéger dans la matinée du 8

 15   décembre, parce que nous avions une réunion plénière, nous nous étions dit

 16   que nous allions peut-être prolonger l'audience d'aujourd'hui, mais j'ai

 17   l'impression que la décision n'a pas été véritablement communiquée aux

 18   membres du personnel. Que je remercie d'ailleurs pour leur ouverture

 19   d'esprit et leur bonne volonté.

 20   Ceci étant dit, poursuivez, Madame Sutherland.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  C'était une précision que vous vouliez apporter au paragraphe 3, dans

 23   la déclaration du 5 février. Vous avez dit que votre père ne voulait pas

 24   quitter la maison avec Muhamed Borovina, mais qu'il était parti seul et

 25   qu'il avait rencontré Borovina dans les bureaux de l'entreprise; est-ce

 26   exact ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Dans quelle condition avez-vous fait la connaissance de Borovina, et

Page 9961

  1   comment saviez-vous qu'il était au bureau à

  2   Duhanpromet ?

  3   R.  Parce qu'il me l'a dit au moment où il partait. Il m'a dit qu'il allait

  4   rencontrer Muhamed Borovina et qu'ils allaient aller ensemble sur leur lieu

  5   de travail.

  6   Q.  Est-ce que par la suite vous avez parlé à quelqu'un qui avait vu votre

  7   père en compagnie de Borovina au marché ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Qui était-ce ?

 10   R.  Enko Sanderovic [phon].

 11   Q.  Vous-même, vous étiez où ce matin-là ?

 12   R.  Je suis aussi allé au marché et j'en suis parti quelques minutes avant

 13   Enko pour me rendre à la flamme éternelle. J'étais à la flamme éternelle

 14   lorsque l'obus est tombé à Markale.

 15   Q.  A quelle distance est-ce que le marché se trouve ? Quelle est la

 16   distance qui sépare les deux marchés, le marché où vous êtes allé vous-même

 17   le matin et le marché de Markale ?

 18   R.  Markale est un marché et là où je suis allé ce n'était pas le marché,

 19   c'était le centre commercial qui se trouve à quelques centaines de mètres

 20   du marché de Markale.

 21   Q.  Est-ce que le 5 février était un jour normal pour le marché, dans votre

 22   souvenir ?

 23   R.  Oui, en général, beaucoup de monde allait au marché, parce qu'étant

 24   donné les conditions de vie de l'époque, on pouvait acheter un peu tout ce

 25   dont on avait besoin au marché. On pouvait aussi échanger des produits

 26   contre d'autres produits. Donc le marché était le seul endroit où on

 27   parvenait à survivre à Sarajevo à l'époque.

 28   Q.  Vous avez dit que vous étiez en train de rentrer chez vous à pied, au

Page 9962

  1   paragraphe 4 de votre déclaration, vous dites que vous avez entendu une

  2   explosion, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   Q.  Alors que vous étiez en train de rentrer chez vous à pied, est-ce que

  5   vous avez pris conscience du fait que c'était le marché de Markale qui

  6   avait été pilonné ?

  7   R.  Je ne l'ai pas su tout de suite. Au moment où je m'approchais de la

  8   maison, je pense que le bulletin d'information était déjà diffusé à la

  9   télévision et c'est donc en passant devant la fenêtre de mes voisins que

 10   j'ai entendu qu'il y avait eu un massacre important au marché de Markale.

 11   Q.  Mais ça, ça s'est passé avant que vous ne pénétriez à votre domicile,

 12   quelqu'un vous l'a dit ?

 13   R.  Oui, quand j'étais en chemin vers la maison, un habitant qui avait

 14   entendu cela aux informations me l'a dit, et la nouvelle s'est répandue

 15   très rapidement à Sarajevo. Les nouvelles à l'époque se répandaient très

 16   vite.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on diffuse la

 18   vidéo. 1D01031. C'est une séquence du propos préliminaire de M. Karadzic.

 19   Q.  Monsieur Begic, je vous demanderais de bien vouloir regarder les images

 20   de cette séquence vidéo. La prothèse avant l'explosion -- la prothèse après

 21   l'explosion.

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Begic, vous rappelez-vous à quel moment vous avez vu cette

 25   séquence vidéo pour la première fois ?

 26   R.  Oui, je m'en souviens. Tout de suite après, peut-être le lendemain ou

 27   peut-être deux jours après l'explosion. Je ne saurais pas vous le dire avec

 28   certitude mais cette vidéo circule déjà depuis 16 ans.

Page 9963

  1   Q.  Au premier paragraphe de votre déclaration écrite vous dites que M.

  2   Djogo a tourné des images au marché de Markale, vous rappelez-vous avoir

  3   dit cela dans votre déclaration ?

  4   R.  Oui, je m'en souviens.

  5   Q.  Vous rappelez-vous également qu'au paragraphe 10 de votre déclaration,

  6   vous dites avoir regardé avec un sentiment d'horreur et en état de choc la

  7   déclaration préliminaire de Radovan Karadzic le 1er mars 2010 ?

  8   R.  Oui, je m'en souviens.

  9   Q.  Vous rappelez-vous aujourd'hui avoir vu les images qui viennent d'être

 10   diffusées dans le cadre du propos liminaire de M. Karadzic ?

 11   R.  Oui, je m'en souviens.

 12   Q.  La prothèse qu'on voit sur ces images vidéo, la reconnaissez-vous ?

 13   R.  Oui, je la reconnais. C'est la prothèse de mon père.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

 15   les Juges, je demande le versement au dossier de la séquence vidéo.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette vidéo a déjà été enregistrée aux

 17   fins d'identification en tant que pièce D894. Elle a été versée au dossier

 18   par le truchement de M. Sead Besic, le 9 décembre.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   J'indique le code horaire de la séquence dont j'ai demandé la diffusion à

 21   l'instant, elle va de 00:00:08 à 00:001:01.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage du

 24   document 65 ter numéro 23025.

 25   Non, ce n'est pas la bonne pièce, j'ai demandé la 23035. Toutes mes excuses

 26   pour avoir cité le mauvais numéro du document 65 ter.

 27   Q.  Monsieur Begic, est-ce que vous reconnaissez ce que l'on voit à l'écran

 28   comme étant un cliché tiré à partir d'un arrêt sur image de la séquence

Page 9964

  1   vidéo qui vient d'être diffusée ?

  2   R.  Oui.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  4   versement au dossier de cette photographie.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voulez montrer au témoin

  6   la page suivante ?

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, mais j'ai

  8   espéré qu'il y avait deux pages, et je vois, qu'en fait, il n'y en a qu'une

  9   à l'écran.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a une deuxième page.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Begic, encore une fois, est-ce que vous reconnaissez ce cliché

 13   tiré de la vidéo ?

 14   R.  Oui.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces

 16   deux clichés sur un arrêt sur image.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ils sont admis.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ces deux clichés

 19   deviennent la pièce P0426 [phon]. Je vous remercie.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

 21   les Juges, je voudrais maintenant demander la diffusion de trois brèves

 22   séquences du document 65 ter numéro 40109. Il s'agit de quatre séquences

 23   vidéo, en fait, qui ont été versées au dossier par le truchement du témoin

 24   Besic vendredi au cours de questions supplémentaires. Mais j'aimerais

 25   montrer quelques secondes de chacune de ces séquences, qui ont déjà été

 26   montrées à M. Besic, au témoin présent devant vous actuellement pour situer

 27   le témoignage de ce témoin dans son contexte.

 28   Donc la première séquence vidéo dont je demande la diffusion va du code

Page 9965

  1   horaire 00:03:30 à 00:03:50, et nous devrions le diffuser grâce au système

  2   Sanction, Monsieur le Président.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Faites un arrêt sur image.

  5   Q.  Monsieur Begic, est-ce que vous reconnaissez ce qui se trouve au milieu

  6   de l'image. Le code horaire est 00:03:49.3.

  7   R.  Oui, je reconnais cet objet, c'est la prothèse de mon père.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La version suivante est

  9   00:08:00 à 00:08:13.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] L'arrêt est au code horaire 00:08:10.3.

 12   Q.  Est-ce que vous reconnaissez l'objet qu'on voit à l'image ?

 13   R.  Oui, je le reconnais.

 14   Q.  Qu'est-ce que c'est ?

 15   R.  C'est la prothèse de mon père.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Troisième séquence qui se trouve du code

 17   horaire 00:10:17 à 00:10:32.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 20   Q.  Une fois de plus, vous voyez le code horaire, 00:10:28.5. Reconnaissez-

 21   vous ce qu'on voit à l'image ?

 22   R.  Oui, c'est la prothèse de mon père.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Dernière séquence qui va de 00:24:24 à

 24   00:25:10.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 27   "L'obus est tombé sur le marché a tué un grand nombre des habitants et en a

 28   blessé d'autres.

Page 9966

  1   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Begic, est-ce que vous reconnaissez ici aussi ce que l'on

  4   vient de voir dans cette brève séquence ?

  5   R.  Oui, j'ai reconnu la prothèse de mon père.

  6   Q.  Vous dites que votre voisin, Senad Kunovac, vous avait dit que votre

  7   père avait été blessé. Est-ce que vous savez où il était au moment où on

  8   vous l'a dit ?

  9   R.  Oui, il m'a dit que c'était sa sœur qui l'avait appelé de l'hôpital de

 10   Kosevo, qui lui avait dit que mon père avait été blessé, et qu'il avait été

 11   transporté à l'hôpital de la FORPRONU, à l'hôpital français qui se trouvait

 12   à Stup, dans le bâtiment des PTT.

 13   Q.  Et est-ce que vous êtes allé dans cet hôpital français, vous êtes allé

 14   à l'hôpital ?

 15   R.  Oui, dans la soirée entre 18 et 20 heures. Je sais que la nuit était

 16   tombée, qu'il a été très difficile d'entrer dans l'hôpital. Quand je suis

 17   parvenu à entrer, mon père avait déjà perdu la vie.

 18   Q.  A quelle heure êtes-vous arrivé à l'hôpital ?

 19   R.  Je ne me souviens plus précisément de l'heure. Mais il devait être

 20   entre 18 heures et 20 heures.

 21   Q.  Est-ce que vous avez vu le corps inanimé de votre père à l'hôpital ?

 22   R.  Non. Je ne l'ai pas vu à l'hôpital de la FORPRONU. C'est seulement à la

 23   morgue de l'hôpital Kosevo que je l'ai vu.

 24   Q.  Pourriez-vous nous relater ce qui s'est passé et ce que vous avez vu à

 25   la morgue une fois arrivé à l'hôpital Kosevo ?

 26   R.  La morgue était remplie de cadavres. Ça a été particulièrement pénible

 27   d'assister à tout cela. J'ai passé peut-être six minutes à l'intérieur j'ai

 28   vu mon père et les blessures qu'il avait subies.

Page 9967

  1   Q.  Quelles sont les blessures que vous avez constatées sur lui ?

  2   R.  Mais il avait été blessé aux jambes et il avait une blessure aussi sur

  3   le côté droit, près des reins.

  4   Q.  Est-ce qu'il portait encore sa prothèse ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Est-ce que vous avez vu le corps de Muhamed Borovina à la morgue ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Est-ce que vous avez appris quel genre de blessures il avait subies ?

  9   R.  Oui. C'est ses frères qui me l'ont dit, il était en très mauvais état.

 10   Il avait été déchiré littéralement par des éclats d'obus.

 11   Q.  Paragraphe 6 de votre déclaration, vous y dites, que le corps de

 12   Muhamed avait dû en partie protéger le corps de votre père. Est-ce que vous

 13   pourriez nous expliquer comment vous en êtes arrivé à cette conclusion ?

 14   R.  C'est ce que j'ai supposé parce qu'ils étaient ensemble à ce moment-là.

 15   Mon père a reçu beaucoup moins d'éclats d'obus que Muhamed. C'est pour cela

 16   que je me suis dit que Muhamed devait se tenir debout près de lui et que

 17   c'est lui qui a essuyé le plus grand nombre de fragments d'éclats d'obus.

 18   C'est ainsi qu'il a été littéralement déchiré.

 19   Q.  Vous dites que vous avez enterré votre père le lendemain, quand

 20   exactement, à quelle heure ?

 21   R.  Le lendemain, à 17 heures, à Budakovici. La plupart des enterrements se

 22   sont faits la nuit parce que sinon ça pilonnait.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous avoir la pièce 65 ter

 24   23007 à l'écran, s'il vous plaît ?

 25   Q.  Monsieur Gasi, reconnaissez-vous le document qui est à l'écran ?

 26   S'agit-il d'un document que l'on vous aurait montré en avril 2010 ?

 27   R.  Oui, je reconnais.

 28   Q.  Vous avez étudié cette liste et vous avez identifié un certain nombre

Page 9968

  1   de personnes qui ont été tuées ou blessées; c'est bien cela ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Le premier donc Nura Odzak. Que faisait cette femme Nura Odzak quel

  4   était son métier ?

  5   R.  Nura Odzak, c'est une femme. Je ne sais pas ce quelle était sa

  6   profession, mais j'ai connu son fils, et à chaque fois que c'est

  7   l'anniversaire du massacre de Markale, je vois ce jeune homme. Mme Nura,

  8   moi, je ne l'ai pas connue. Mais je sais que c'était la mère de ce jeune

  9   homme dont j'ai fait la connaissance.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je tiens à dire pour l'accusé, que ceci

 11   est mentionné au paragraphe 7 de la déclaration de 2010.

 12   Q.  Une autre personne que vous avez identifiée est Ruzdija Trbic, dans

 13   votre déclaration le nom de "Ruzdija" est mal orthographié, il faudrait

 14   qu'il y ait un "zh," plutôt qu'un S. Quel est le sexe de cette personne ?

 15   R.  Ruzdija Trbic c'est un homme. C'était un homme. C'était le père de mon

 16   ami, Mustafa Trbic.

 17   Q.  Vous ne savez pas quel était son métier ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Quant à Muhamed Borovina vous avez déclaré qu'il s'agissait d'une

 20   personne qui travaillait avec votre père dans cette entreprise qui

 21   employait des handicapés ?

 22   R.  Oui, c'est exact. Muhamed Borovina c'était un ami de la famille, et mon

 23   père l'a fréquenté pendant de très longues années.

 24   Q.  Vous avez aussi identifié un blessé un dénommé Muradif Celik ainsi que

 25   Kenan Suvalija, n'est-ce pas ?

 26   R.  Ça c'est exact, oui. On m'a donné cette liste pour que je voie si je me

 27   peux me souvenir de quelqu'un. Muradif c'était de la famille à ma femme, je

 28   me suis donc souvenu de ce nom, et Suvalija Kenan, je me souviens du fait

Page 9969

  1   que son père était le directeur de mon école primaire. C'est la raison pour

  2   laquelle je m'en suis souvenu.

  3   Q.  Paragraphe 7 de votre déclaration vous dites qu'il est maintenant

  4   invalide à 70 %; c'est bien cela ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Connaissiez-vous le métier de Muradif Celik ?

  7   R.  C'était un policier à la retraite. Il a longtemps travaillé à la

  8   police. Puis il a été grièvement blessé et il a été mis à la retraite

  9   depuis déjà un bon nombre d'années.

 10   Q.  J'aimerais maintenant que nous parlions de la façon dont vous avez

 11   récupéré la jambe artificielle, la prothèse. Pouvez-vous nous expliquer

 12   comment vous y êtes pris ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voulez-vous demander le versement au

 14   dossier de cette pièce avant de poser cette question ?

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Tout à fait.

 16   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P2047.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Begic, pourriez-vous nous expliquer rapidement comment vous

 21   avez réussi à récupérer la jambe artificielle de votre père ?

 22   R.  Oui, bien sûr. Au bout de quelques jours, je ne me souviens pas au

 23   juste trois ou quatre jours, disons, après ce massacre, je suis allé au

 24   marché. J'ai trouvé un homme qui travaillait pour le marché, l'entreprise

 25   gérant le marché, et j'avais dit que je voulais retrouver des effets

 26   personnels de mon père, et je voulais récupérer la prothèse que j'avais vue

 27   à la télévision. Cet homme m'a fait entré dans une petite pièce, où il y

 28   avait beaucoup de choses, beaucoup d'objets, c'était les objets qu'on avait

Page 9970

  1   ramassés au marché de Markale après le massacre. J'ai reconnu la prothèse

  2   de mon père, je l'ai prise, et j'ai trouvé aussi un petit carnet de notes

  3   de feu mon père, que j'ai sur moi.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous avoir, s'il vous plaît, à

  5   l'écran la pièce 23057.

  6   Q.  Monsieur Begic, je vais vous montrer trois photographies; pourriez-vous

  7   nous dire si vous reconnaissez quoi que ce soit dans ces photographies ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] M. Reid me demande de passer plutôt sur

  9   Sanction.

 10   Q. Monsieur Begic, reconnaissez-vous ce que l'on voie sur cette

 11   photographie qui porte la cote 23057.

 12   R.  Oui, je reconnais c'est la prothèse que j'ai amenée au département du

 13   Tribunal de La Haye, situé à Sarajevo.

 14   Q.  Vous souvenez-vous à quel moment cette photo a été prise ?

 15   R.  Oui, il y a une quinzaine de jours à peu près.

 16   Q.  Qui a pris cette photographie ?

 17   R.  Un monsieur travaillant pour le bureau du Tribunal, à La Haye, Paul

 18   Grade.

 19   Q.  Paul Grady ?

 20   R.  Oui, c'est de lui que je voulais parler.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous avoir la pièce suivante

 22   qui porte la cote 23058, sur la liste 65 ter.

 23   Q.  Reconnaissez-vous ce que l'on voie à l'image ?

 24   R.  Oui, bien sûr.

 25   Q.  De quoi s'agit-il ? Pourriez-vous nous le décrire ?

 26   R.  C'est la même prothèse, celle dont on parle tout le temps. Là, on voit

 27   des traces d'éclat d'obus.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Dernière pièce, s'il vous plaît, 23060.

Page 9971

  1   Q.  Pourriez-vous, pour le compte rendu, Monsieur Begic, nous confirmer

  2   qu'il s'agit de la même prothèse mais vu sous un autre angle ?

  3   R.  Oui, c'est la même prothèse.

  4   Q.  Pouvez-vous nous expliquer les inscriptions en bleu en bas de la

  5   prothèse ?

  6   R.  Certes. C'est M. Paul qui a écrit au feutre quelque chose. J'imagine

  7   que c'est pour vous, au Tribunal, qu'il l'a fait.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je crois qu'on voie la date, "20 novembre

  9   2010."

 10   Comment voulez-vous que je verse cette pièce au dossier, en tant qu'élément

 11   composé de plusieurs pièces, ou voulez-vous que je verse chaque

 12   photographie l'une après l'autre ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, faites au plus rapide, et au

 14   plus efficace. Le mieux ce serait sans doute de les verser ensemble sous

 15   une seule cote.

 16   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 18   Q.  Il s'agit donc de la prothèse que vous avez récupérée dans le marché de

 19   Markale, qui appartenait à votre père; c'est bien cela ?

 20   R.  Oui, c'est cela.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces pièces sont versées au dossier et

 22   reçoivent la cote P2048 --

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] En effet, je répète cette pièce sera

 24   versée au dossier sous la cote P2048.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir à gauche

 26   de l'écran, la pièce 23035, ainsi que la pièce 23057, c'est-à-dire cette

 27   photographie qui fait maintenant partie de la pièce P2048 ? Non, il s'agit

 28   de la pièce P23060 de la pièce composée P2048.

Page 9972

  1   Q.  Voyez-vous ce qui est à l'écran ?

  2   R.  Oui, je vois.

  3   Q.  Ces deux photographies montrent-elles la même prothèse de jambes qui

  4   appartenaient à votre père ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Comment savez-vous qu'il s'agit de la même prothèse de jambes ?

  7   R.  Et bien, écoutez, regardez la photo de gauche, on dit prothèse avant

  8   l'explosion, ce qui est un mensonge. Parce que vous pouvez voir un trou, je

  9   ne sais pas si c'est visible ici. Vous n'avez qu'à comparer le trou qu'il y

 10   a au niveau de la prothèse avec le trou que vous voyez à droite, enfin sur

 11   la photo de droite. Vous n'avez qu'à comparer les deux.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais demander au témoin d'annoter

 13   les photographies à l'aide d'un stylet. Non, ce n'est pas possible

 14   visiblement.

 15   Donc je demande plutôt le versement de ces deux photographies cote à cote,

 16   mais sous une seule cote, si possible.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que possible ?

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] M. Reid va accomplir cela.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ça recevra donc la cote

 20   P2049.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 22   Q.  Soyons bien clair, Monsieur le Témoin, la séquence vidéo qu'on a vue

 23   précédemment, et que vous avez reconnue comme étant la séquence vidéo qui a

 24   été montrée lors des propos liminaires de M. Karadzic, ainsi que les quatre

 25   séquences vidéo que nous avons vues où l'on voit donc les jambes

 26   artificielles de votre père. Vous avez bel et bien reconnu où tout ceci se

 27   passait, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, bien sûr.

Page 9973

  1   Q.  C'était où ?

  2   R.  Au marché aussi. Je ne sais pas si je vous ai bien compris. Vous me

  3   demandez quel est le lieu de sa mort, c'est cela ?

  4   Q.  Oui.

  5   R.  Je ne vois pas la photo, tout de suite, mais la photo de tout à l'heure

  6   où l'on voit la prothèse à même le sol, et bien, c'est l'endroit où mon

  7   père est mort.

  8   Q.  Mais la photo qui est à gauche de l'écran à l'heure actuelle, il s'agit

  9   bien du marché de Markale, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, bien sûr, c'est le marché de Markale. Et je crois que c'est une

 11   photo prise après l'explosion de l'obus.

 12   Q.  Ma dernière question maintenant : Pourriez-vous nous décrire l'impact

 13   psychologique qu'a eu ce pilonnage du marché de Markale sur vous, sur votre

 14   famille et sur tous vos amis, rapidement ?

 15   R.  Ce sont des moments extrêmement difficiles. Pendant la guerre, ce que

 16   vous avez à l'esprit c'est votre préoccupation de rester vivant.

 17   Psychiquement, bien sûr, ça influe et il y avait la famine dans Sarajevo

 18   aussi. Donc l'objectif principal c'était de survivre. Enfin que vous dire,

 19   je ne sais pas comment expliquer, c'était très, très pénible. Pénible que

 20   d'être citoyen de Sarajevo pendant la guerre.

 21   Q.  Je vous remercie. 

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'ai encore une petite formalité à

 23   accomplir. Etant donné que votre déposition précédente va être versée au

 24   dossier, j'aimerais besoin de vous poser quelques questions, à ce propos.

 25   Tout d'abord, la déclaration d'avril 2001 avec les corrections que vous y

 26   avez portées hier ainsi que la déposition que vous avez fait aujourd'hui

 27   pour corriger et clarifier certains éléments de votre déclaration de 2001 -

 28   - je suis désolée, je me suis trompée, j'ai dit "avril 2001;" je voulais

Page 9974

  1   dire avril 2010. J'aimerais savoir si telle que cette déposition -- telle

  2   que cette déclaration est faite témoin avec ces corrections et les ajouts

  3   de votre déposition; est-ce que ça reflète bien ce que vous vouliez dire ?

  4   R.  Je vais vous dire, je pense qu'il y a eu beaucoup d'erreurs dans la

  5   déclaration du 15 avril 2010. Je vous l'ai d'ailleurs dit hier. Je ne sais

  6   pas si c'est dû à une mauvaise traduction ou interprétation, ou que sais-

  7   je, mais étant donné que je ne parle pas l'anglais, je pense, qu'il y a eu

  8   pas mal de carences pour ce qui est de la déclaration recueillie à

  9   Sarajevo, la différence de la déclaration que j'ai faite hier.

 10   Q.  Avec les corrections que vous avez apportées à la déclaration hier et

 11   les clarifications et corrections que vous avez apportées aujourd'hui au

 12   cours de votre déposition, pouvez-vous nous dire si cette déclaration

 13   maintenant reflète fidèlement les événements, tels que vous vous en

 14   souvenez ?

 15   R.  Oui, bien sûr.

 16   Q.  Si on vous posait à nouveau les mêmes questions que celles dont vous a

 17   déjà posées dans le cadre de la déclaration, répondriez-vous de la même

 18   façon ?

 19   R.  Oui, bien sûr.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vous remercie.

 21   Je demande le versement de la pièce 90203 de la liste 65 ter, il s'agit de

 22   la déclaration du témoin d'avril 2010, ainsi que la déclaration du 14

 23   septembre [comme interprété] 2010, avec les expurgations qui s'imposent.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Les deux documents seront

 25   admis.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ils recevront les cotes P2050 et P2051.

 27   Respectivement.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Etant donné qu'un document clarifie

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  1   l'autre, il serait peut-être plus utile de les admettre ensemble sous une

  2   même cote ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, ils ont été admis sous deux

  4   cotes différentes, ça suffit.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est bien. J'en ai terminé.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a quelques pièces jointes qui

  7   doivent être versées me semble-t-il ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Tout à fait.

  9   Un document, une notification le 92 ter, déposée le 12 novembre 2010,

 10   l'annexe A, je demande donc que ce document soit versé au dossier.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons déjà admis la pièce 23007,

 12   nous allons aussi admettre la pièce 23006, et puis il y a -- tous les

 13   documents allaient 23004 au 23012, certificat d'inhumation, certificat de

 14   décès, ces pièces n'ont pas été abordées dans le cadre de la déclaration.

 15   Mais si la Défense ne conteste pas ces documents, nous allons les admettre

 16   au dossier.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc ces documents seront versés au

 19   dossier et recevront une cote et M. le Greffier d'audience vous avisera des

 20   cotes données.

 21   Nous pouvons maintenant lever la séance, et nous reprendrons donc à 9

 22   heures demain matin avec ce témoin.

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Un petit problème qui m'inquiète.

 24   La Chambre de première instance a donné une heure de contre-interrogatoire

 25   pour ce témoin, mais il y a maintenant plusieurs sujets qui ont été

 26   abordés, sujets différents donc. Si -- j'aimerais savoir si les choses vont

 27   changer en ce qui concerne la programmation du contre-interrogatoire, ce

 28   qui m'inquiète en fait c'est la conférencevidéo est prévue et il serait

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  1   peut-être bon d'avoir d'abord la conférencevidéo avec le témoin, et ensuite

  2   les questions supplémentaires ou le contre-interrogatoire.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De toute façon, une heure suffira pour

  4   contre-interroger ce témoin.

  5   Donc, Monsieur Begic, nous poursuivrons à 9 heures demain matin.

  6   Dans l'intervalle, vous ne devez parler à personne de la déposition que

  7   vous avez faite jusqu'à présent et que vous vous apprêtez à faire.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien entendu.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous souhaite un bon après-midi.

 10   [Le témoin quitte la barre]

 11   --- L'audience est levée à 15 heures 38 et reprendra le jeudi 16

 12   décembre 2010, à 9 heures 00.

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