Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 24 août 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 27.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Monsieur Tieger, je ne suis pas sûr que votre collègue a déjà été présenté,

  7   pourriez-vous le présenter une nouvelle fois.

  8   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. A ma droite est

  9   assis M. Amir Zecevic [comme interprété].

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Bienvenue dans la

 11   salle.

 12   Avant de commencer l'audition du témoin suivant aujourd'hui, j'ai quelques

 13   questions de procédure à aborder.

 14   Tout d'abord, dans le but de veiller à une conduite rapide du procès,

 15   la Chambre suit le rythme de la procédure en permanence à l'aide des

 16   statistiques reçues du Greffe et relatives au temps. Fin juillet 2011,

 17   l'Accusation avait utilisé plus de 160 heures sur les 300 heures qui lui

 18   étaient allouées pour la présentation de ses moyens. Se fondant sur la

 19   liste temporaire des témoins que l'Accusation doit encore entendre,

 20   exemplaire qui lui a été communiqué hier, la Chambre remarque que

 21   l'Accusation a auditionné 93 témoins qui s'ajoutent à un témoin de la

 22   Chambre entendu jusqu'à présent, et qu'elle a encore l'intention d'entendre

 23   118 témoins.

 24   A ce stade, la Chambre aimerait, par conséquent, que l'Accusation lui

 25   envoie par écrit, et avant la fin de la journée du 26 août 2011, une lettre

 26   dans laquelle elle indiquera les conditions dans lesquelles elle pense

 27   pouvoir être en mesure d'auditionner l'ensemble des témoins qui lui reste

 28   tout en respectant la limite des 300 heures qui lui ont été imposées au


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  1   début du procès.

  2   En deuxième lieu, la Chambre se réfère à la requête de l'Accusation en vue

  3   d'autorisation de modifier sa liste de témoins et de pièces à conviction

  4   déposées confidentiellement le 21 juillet 2011, et aux écritures qui sont

  5   associées à cette requête. La Chambre demande à l'Accusation, avant la fin

  6   de la journée du 26 août 2011, encore une fois, de déposer sous pli

  7   confidentiel de nouvelles écritures dans lesquelles seront indiquées,

  8   premièrement, les raisons pour lesquelles il y a des motifs valables

  9   justifiant d'ajouter KDZ-600 à ce stade de la procédure à la liste des

 10   témoins. Répondant à cette question, l'Accusation se doit de dire si oui ou

 11   non il y a d'autres témoins qui sont déjà sur la liste des témoins et qui

 12   témoigneront sur des événements identiques ou similaires ainsi que les

 13   raisons pour lesquelles KDZ-600 est considéré comme devant présenter une

 14   déposition unique.

 15   En deuxième lieu, ces écritures devront expliquer dans un plus grand détail

 16   la façon dont le déroulement de la présentation des moyens de l'accusé,

 17   demandé par l'Accusation, soudainement, pourrait permettre de considérer

 18   que l'audition de KDZ-600 en tant que témoin est importante, et si la

 19   pertinence de sa déposition est devenue apparente uniquement depuis peu de

 20   temps.

 21   Enfin la Chambre va maintenant émettre une décision orale concernant la

 22   requête de l'accusé pour replacement de son appendice ex parte KDZ-490 et

 23   KDZ-492, eu égard aux mesures de protection les concernant, déposées le 26

 24   août 2011.

 25   La Chambre remarque que la réponse de l'Accusation déposée hier ne rejette

 26   pas cette requête. La Chambre, par conséquent, fait droit à la requête et

 27   ordonne l'appendice ex parte confidentiel à la réponse de l'Accusation à la

 28   requête de Karadzic en vue de modification de la communication retardée


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  1   pour les Témoins KDZ-490 et KDZ-492, déposée le 9 mars 2010, soit

  2   communiquée à l'accusé et reclassée en tant que document confidentiel.

  3   Enfin, la requête de l'accusé qui a demandé à ne pas siéger lundi est

  4   rejetée, et l'audience de lundi matin se déroulera donc comme prévue.

  5   A moins qu'il y ait d'autres questions à évoquer, nous allons faire entrer

  6   le témoin dans la salle.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurais une

  8   correction à apporter à la liste des pièces à  conviction, si vous le

  9   permettez. Le 22 août 2011, le document 65 ter numéro 09253 a été admis en

 10   tant que pièce P3183, à conserver sous pli scellé. Le Greffe voudrait

 11   corriger le numéro de cette pièce, qui devient pièce P3195, à conserver

 12   sous pli scellé. Je vous remercie, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 14   Monsieur Tieger, qui est votre témoin suivant ?

 15   M. TIEGER : [interprétation] Le témoin suivant est Dzevad Gusic, Monsieur

 16   le Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je vous apporter mon concours,

 19   Excellences, s'agissant du nombre de témoins ? Je crois en fait que

 20   l'Accusation a un problème, car elle n'a pas d'argument pour défendre sa

 21   cause. Donc, elle m'envoie de très nombreux documents pour faire quantité

 22   plutôt que qualité.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas le moment opportun,

 24   Monsieur Karadzic, pour ce genre de commentaire. Que l'on fasse entrer le

 25   témoin.

 26   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Gusic. Je vous

 28   prierais de bien vouloir prononcer la déclaration solennelle.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  2   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  3   LE TÉMOIN : DZEVAD GUSIC [Assermenté]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez vous asseoir,

  6   Monsieur, je vous prie.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Interrogatoire principal par M. Tieger :

 11   Q.  [interprétation] Je vous demanderais d'abord, Monsieur, de bien vouloir

 12   décliner vos nom et prénom, pour le compte rendu d'audience, je vous prie.

 13   R.  Je m'appelle Dzevad Gusic.

 14   Q.  Merci. Monsieur Gusic, est-il exact que vous avez fourni des

 15   déclarations au bureau du Procureur en date du 15 février 1999, et

 16   également en date du 2 mai 2003, et que vous avez également témoigné devant

 17   ce Tribunal les 5 et 6 mai 2003, dans l'affaire le Procureur contre

 18   Slobodan Milosevic ?

 19   R.  Oui, tout cela est exact.

 20   Q.  Monsieur Gusic, êtes-vous également au courant du fait qu'une

 21   déclaration baptisée déclaration consolidée, qui comporte un certain nombre

 22   de parties de votre déposition antérieure et des déclarations que vous avez

 23   faites, existe, et qu'elle constitue le document 65 ter numéro 90264 ?

 24   M. TIEGER : [interprétation] D'ailleurs, je demande l'affichage de ce

 25   document à l'écran.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document n'a pas encore été

 27   téléchargé, apparemment, Monsieur Tieger.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Merci.


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  1   Q.  Monsieur Gusic, je souhaitais simplement savoir si vous saviez qu'une

  2   déclaration consolidée avait été établie sur la base de votre déposition

  3   déjà faite devant ce Tribunal, ainsi que de vos deux déclarations déjà

  4   faites devant le bureau du Procureur.

  5   R.  Oui, je suis au courant.

  6   Q.  Alors, est-ce que vous avez eu la possibilité de relire vos

  7   déclarations écrites précédentes ainsi que votre déposition dans l'affaire

  8   Milosevic ?

  9   R.  Oui, j'ai eu la possibilité d'examiner tout cela.

 10   Q.  Avez-vous également eu la possibilité de lire votre déclaration

 11   consolidée ?

 12   R.  Oui, il m'a été donné la possibilité d'examiner ce document.

 13   Q.  Je crois comprendre que vous souhaitez apporter quelques précisions à

 14   cette déclaration. C'est ce que je vais aborder maintenant. Alors, parlons

 15   d'abord de votre déclaration, qui constitue le document 65 ter numéro

 16   11734, ce document 65 ter étant abordé dans votre déclaration et

 17   représentant un résumé de votre curriculum vitae. Peut-être serait-il bon

 18   de mettre ce curriculum vitae à jour, donc je vous demande si vous pourriez

 19   simplement dire aux Juges de la Chambre, rapidement, quel est votre travail

 20   actuel.

 21   R.  Je suis actuellement chef de cabinet de l'adjoint du secrétaire d'Etat

 22   chargé des finances en Bosnie-Herzégovine.

 23   Q.  Merci. En page 3 de votre déclaration consolidée, paragraphe 5, nous

 24   lisons que : "Jusqu'au 2 mars 1992, le président du SDA était Mirsad

 25   Kavazbasic." Je crois savoir que vous souhaitiez apporter une précision au

 26   sujet de cette date qui, en fait, n'est pas le 2 mars. Vous souhaitez

 27   modifier cette date, n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est exact. Il y a eu une petite erreur qui s'est glissée dans le


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  1   texte au niveau de la date. La date exacte n'est pas le 2 mars 1992, mais

  2   le 20 mars 1992. C'est ce jour-là que je suis devenu président du SDA dans

  3   la municipalité de Bratunac.

  4   Q.  Merci. Il semble s'agir, en fait, d'une simple faute de frappe, car

  5   dans votre déclaration, on trouve au moins une autre référence à cette date

  6   qui correspond à ce que vous venez de dire.

  7   Je souhaitais également appeler votre attention sur le paragraphe 12

  8   de votre déclaration consolidée, page 9, qui constitue la suite d'un propos

  9   que vous avez débuté en page 8. A cet endroit du texte, vous faites

 10   référence à ce qu'un responsable du SDA vous a dit. Cet homme vous a dit

 11   qu'un jour, Karadzic lui a indiqué ce qui suit, je cite : "Nous devrons

 12   nous diviser. Il n'y a pas d'autre moyen. Ce sera la meilleure chose à

 13   faire." Et vous identifiez l'homme qui vous a rapporté ces propos en page 9

 14   de votre déclaration consolidée comme étant Osman Brka. Je crois comprendre

 15   que vous souhaitez apporter une précision sur ce sujet en vous appuyant sur

 16   une discussion que vous avez eue après votre déposition dans l'affaire

 17   Milosevic quant au fait que M. Brka avait quelque doute s'agissant de

 18   déterminer s'il parlait avec M. Karadzic ou quelqu'un d'autre à l'époque

 19   des faits.

 20   R.  Après avoir témoigné dans l'affaire Milosevic, j'ai eu l'occasion de

 21   m'entretenir une nouvelle fois avec M. Brka, et je lui ai dit que dans ma

 22   déposition ainsi que dans mes déclarations écrites pour le Tribunal,

 23   j'avais fourni l'information selon laquelle nous avions discuté de ce

 24   sujet, autrement dit, je lui ai rappelé qu'il m'avait dit avoir parlé à

 25   Radovan Karadzic, et je lui ai rappelé ce que Karadzic avait dit à ce

 26   moment-là quant au fait que la Bosnie-Herzégovine devait être divisée, et

 27   il m'a répondu qu'il ne se rappelait pas précisément d'avoir eu une telle

 28   conversation avec Karadzic. Il m'a indiqué qu'il aurait pu s'agir d'un


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  1   autre responsable. Il n'était pas tout à fait sûr, donc j'indique ce fait,

  2   car je pense qu'il importe d'apporter une correction à ce sujet dans la

  3   déclaration consolidée.

  4   Q.  Merci, Monsieur Gusic. Ensuite, je voulais attirer votre attention sur

  5   la page 25, paragraphe 42, de votre déclaration consolidée, qui reprend des

  6   propos figurant dans votre déclaration écrite de 1999 pour le TPIY, et dans

  7   ce passage, nous lisons les mots qui suivent, je cite :

  8   "Il était très surprenant que pendant cette période, tous les responsables

  9   serbes locaux, sans exception, ont modifié du jour au lendemain leur

 10   comportement en développant une haine vis-à-vis des Musulmans."

 11   Je crois comprendre que vous souhaitiez apporter une précision sur ce

 12   point, Monsieur Gusic.

 13   R.  Je souhaitais que les choses soient claires, et donc, je voulais

 14   apporter une petite correction. Quand j'ai déclaré cela en 1999, sous

 15   l'effet des circonstances de l'époque, je crois que mon propos n'a pas été

 16   consigné correctement par écrit. Il est impossible de dire que tous les

 17   Serbes haïssaient les Musulmans. En effet, ce qui était vrai, c'est que

 18   l'attitude générale des Serbes, de façon générale vis-à-vis des Musulmans,

 19   s'est modifiée et que certains Serbes, à titre individuel, ont développé

 20   une forte haine contre les Musulmans qu'ils ne prenaient même pas la peine

 21   de dissimuler. Donc, il s'agit d'une attitude des Serbes vis-à-vis des

 22   Musulmans dont j'ai parlé sur un plan général. Leurs voisins musulmans les

 23   dérangeaient dans leur volonté d'établir une Grande-Serbie. Ils estimaient

 24   que la Serbie était une grande nation, qu'elle devait continuer à être une

 25   grande nation. Ils voulaient en faire un Etat comparable à la Russie. Ils

 26   pensaient qu'ils disposaient de Slobodan Milosevic et de son armée

 27   populaire yougoslave qui les protégeraient, et ils souhaitaient tous vivre

 28   dans un seul et même Etat. Dans le cadre de ces débats, lorsque quelqu'un


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  1   face à eux souhaitait développer des arguments contraires aux leurs en leur

  2   indiquant, par exemple, que leurs propos illustraient un débat nationaliste

  3   et que tout cela ne pouvait pas mener à grand-chose de bon, que cela ne

  4   pouvait qu'accroître les tensions ethniques et qu'il y aurait division de

  5   la population et développement de la haine, quel que soit le Musulman de

  6   Bosnie qui développait ces contre-arguments face à eux, les Serbes le

  7   caractérisaient d'ennemi du peuple serbe et le considéraient avec méfiance

  8   et beaucoup de doute.

  9   Q.  Merci, Monsieur. J'aimerais maintenant appeler votre attention sur la

 10   page 39 de votre déclaration consolidée, et en particulier sur une partie

 11   du paragraphe 73 qui est assez long. Au bas de la page 39, on vous

 12   interroge au sujet d'une période déterminée et vous répondez par les mots

 13   suivants :

 14   "Eh bien, ceci s'est fait pendant l'occupation de Bratunac, au moment où le

 15   nettoyage ethnique des villages avait lieu et où des milliers de civils ont

 16   été tués, je veux dire des milliers de civils musulmans de Bratunac."

 17   Alors, j'aimerais, à titre de précision, vous demander si ce terme de

 18   "milliers" au pluriel était une expression littérale de la vérité et si

 19   vous estimez que c'est le chiffre exact et, si oui, comment vous en êtes

 20   venu à déterminer cette qualification numérique.

 21   R.  Eh bien, le nombre total de Musulmans tués à Bratunac s'est monté à 3

 22   500 personnes en une période inférieure à deux mois. Ces Musulmans ont été

 23   tués par des formations militaires venues de l'extérieur, c'est-à-dire de

 24   Serbie, ainsi que par les forces policières locales serbes de Bratunac qui

 25   ont tué 1 000 civils musulmans en mois d'un mois. Au nombre de ces civils

 26   figuraient des femmes, des personnes âgées, des handicapés et des enfants.

 27   Donc, ce chiffre n'est pas le chiffre définitif. Selon les informations

 28   reçues jusqu'au jour d'aujourd'hui, quant au nombre total de victimes


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  1   civiles durant les premiers mois de la guerre, et là je parle d'un nombre

  2   tout à fait exact et détaillé qui prend en compte chacune des victimes

  3   identifiées à l'heure actuelle, eh bien, ce nombre se monte à 670 victimes

  4   parmi les civils. Mais comme je l'ai dit, ce n'est pas le chiffre

  5   définitif. Il y a encore de nombreuses familles qui sont à la recherche de

  6   leurs proches, à la recherche des cadavres de leurs proches, et il y a

  7   également de nombreuses personnes qui ne sont pas originaires de Bratunac,

  8   mais qui se trouvaient à Bratunac à cette époque-là, pour lesquelles nous

  9   ne disposons pas de renseignement complet. Donc, il ne s'agit d'une

 10   estimation.

 11   Q.  Je vous remercie, Monsieur Gusic. Deux corrections encore en raison de

 12   fautes de frappe apparemment. D'abord, au paragraphe 73, page 37. On a

 13   consigné vos propos comme étant les suivants :

 14   "Je suppose -- je pense qu'eu égard à ces activités il ne vaut même pas la

 15   peine d'en parler étant donné que Bratunac c'était une localité paisible,

 16   un lieu calme, qui a opposé une résistance le 17 avril."

 17   Je crois savoir que vous souhaitez modifier ce propos sur un point tout à

 18   fait évident pour que nous lisions désormais, je cite :  "Etant donné que

 19   Bratunac est un lieu qui n'a opposé aucune résistance, le 17 avril". N'est-

 20   ce pas ?

 21   R.  Le 17 avril 1992, des unités militaires étrangères venues de Serbie ont

 22   pénétré dans Bratunac et, de concert avec les forces armées et policières

 23   locales ainsi que les forces de la Défense territoriale, elles ont occupé

 24   Bratunac, ont renversé le gouvernement et le pouvoir local de Bratunac sans

 25   qu'un seul coup de feu soit tiré, et elles ont entamé le nettoyage ethnique

 26   et se sont livrées à des meurtres. Mais, le 17 avril 1992, pas un seul

 27   Musulman de Bosnie n'a tiré un seul coup de feu.

 28   Q.  Merci. Enfin, en page 44, paragraphe 77 de votre déclaration


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  1   consolidée, encore une faute de frappe, manifestement. Il est fait

  2   référence à des barrages routiers érigés dans le village de Glogova et nous

  3   lisons dans le texte dans les villages de Branca et de Pervani également.

  4   Or, je crois savoir qu'au lieu de Branca il convient de lire Hranca.

  5   R.  Oui. Le nom exact de la localité est Hranca, H-r-a-n-c-a.

  6   Q.  Je vous remercie, Monsieur Gusic. Avec ces précisions, je vous

  7   demanderais de confirmer que votre déclaration consolidée reflète bien ce

  8   que vous disiez dans vos déclarations antérieures, que ces déclarations

  9   étaient exactes et conformes à la vérité, et que si aujourd'hui vous étiez

 10   interrogé sur les mêmes questions qu'à l'époque, vous fourniriez les mêmes

 11   informations dans vos renseignements devant le Tribunal ?

 12   R.  La déclaration consolidée est exacte et, même si je devais en faire une

 13   nouvelle devant la Chambre aujourd'hui, je fournirais les mêmes réponses

 14   que celles qui figurent dans cette déclaration. Je ne formulerais pas les

 15   choses sûrement dans les mêmes termes exactement, mais sur le fond mes

 16   réponses seraient identiques.

 17   Q.  Je vous remercie, Monsieur Gusic.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier du document

 19   90264, Monsieur le Président.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.

 21   Je demanderais que le paragraphe 12 de la déclaration consolidée, qui

 22   reprend la version développée au sujet du contact avec le Dr Karadzic de la

 23   part d'Osman Brka, soit retiré du texte.

 24   Tout d'abord, je souhaite remercier le témoin pour les précisions qu'il a

 25   apportées à ce sujet. Je pense qu'il est tout à fait louable de sa part de

 26   l'avoir fait. Et j'ajouterais que cet élément n'a absolument aucune valeur

 27   probante. C'est de l'ouï-dire à n'en pas douter, puisque c'est quelque

 28   chose qu'Osman Brka a dit au témoin et, par ailleurs, cet ouï-dire est


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  1   dépourvu de la moindre source étant donné que nous ne savons pas qui est à

  2   l'origine de cette déclaration pour commencer. Je me rends bien compte que

  3   l'ouï-dire est admissible devant cette Chambre, mais il y a tout de même

  4   des limites, et je pense que là nous sommes au-delà de cette limite. Donc,

  5   je demanderais que le paragraphe 12 soit supprimé de la déclaration

  6   consolidée et que celle-ci soit versée au dossier en l'absence de cette

  7   portion du texte.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis-je vous entendre sur ce point,

  9   Monsieur Tieger.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'apprécie les

 11   compliments adressés par Me Robinson au témoin, mais je dirais, tout

 12   d'abord, que tout a été précisé autant que nécessaire grâce aux corrections

 13   apportées par le témoin et que cet élément continue à pouvoir avoir une

 14   utilité pour les Juges de la Chambre, car cette information consiste à dire

 15   qu'un représentant du SDA à l'époque a discuté avec un représentant

 16   officiel du SDS. Je vois que les Juges de la Chambre hochent du chef. Donc,

 17   je comprends que vous compreniez mon point de vue.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous aimeriez répondre,

 19   Maître Robinson. Avec des précisions, car tout cela ne nuira pas à

 20   l'accusé. Je ne vois pas quel préjudice cela pourrait constituer pour

 21   l'accusé, mais peut-être pour d'autres responsables. Pourquoi est-ce que

 22   vous souhaitez supprimer ce passage ?

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Parce que ce serait tout à fait peu sûr pour

 24   les Juges de la Chambre d'utiliser cet élément lors de votre détermination

 25   quant à la fin du procès. Comment pouvons-nous nous confronter à cet

 26   élément, à savoir qu'un responsable du SDS qui n'est pas nommé a fait une

 27   déclaration particulière ? Si vous accordez le moindre poids à un tel

 28   élément, vous seriez dans l'insécurité la plus grande. Et, par ailleurs,


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  1   étant donné que cet élément n'a aucune valeur probante, car la valeur

  2   probante est égale à zéro, je pense qu'il importe d'exclure ce passage.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Je ne pense pas que nous ayons besoin de

  4   poursuivre le débat sur ce point. Aucune valeur probante, certes. Mais il y

  5   a d'autres lieux dans la procédure où les choses peuvent être distinguées

  6   dans ce domaine. C'est un élément sur lequel les Juges peuvent se prononcer

  7   en tenant compte du climat qui régnait à l'époque et des positions prises

  8   par le SDS à l'époque.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Tieger, pourriez-vous nous

 11   aider. Nous avons des éléments venant du témoin indiquant que Brka aurait

 12   dit ne pas être sûr qu'il s'agissait de Karadzic. Vous êtes d'accord,

 13   n'est-ce pas ?

 14   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Alors, est-ce que n'est pas possible de

 16   dire que compte tenu de cela, eh bien, on se retrouve sans fondement pour

 17   cet élément ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, je n'ai pas ce point de vue-là,

 19   Monsieur le Juge. Le témoin a eu une conversation avec cette personne

 20   précise --

 21   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Soit.

 22   M. TIEGER : [interprétation] -- et il y avait un contenu à cette discussion

 23   en plus de l'élément concernant l'identité de ce représentant. Alors, a

 24   posteriori, des doutes ont été simplement exprimés quant à l'identité de ce

 25   représentant ou de ce fonctionnaire du SDS, la question de savoir s'il

 26   s'agissait de M. Karadzic ou de quelqu'un d'autre. Donc, je dirais que pour

 27   la majorité du contenu de ce qui nous intéresse ici, cela a pu être

 28   confirmé. Il n'y a que l'élément spécifique de l'identité de ce


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  1   représentant qui a dû être nuancé, conformément à ce que le témoin nous a

  2   dit. Donc, je dirais, de mon point de vue, que dans son ensemble, ce qui

  3   est affirmé ici a pu être confirmé, à ce doute près qui porte sur la

  4   question de savoir si c'était M. Karadzic ou non avec qui cette

  5   conversation a été tenue, la conversation de M. Brka. C'est indéniable

  6   qu'il y a un doute à ce sujet.

  7   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.

  8   Maître Robinson, avez-vous quelque chose à répliquer ?

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Juge.

 10   Je ne crois pas que l'Accusation souhaiterait proposer cela, mais si

 11   quelqu'un venait et vous disait : "Un ami à moi m'a dit avoir eu une

 12   conversation avec un représentant inconnu du SDS, nous ne savons pas quand

 13   ni où cette conversation s'est tenue, qui d'autre était présent, nous en

 14   ignorons également le contexte, mais voici ce qui a été dit." Je ne crois

 15   pas que ce genre d'élément serait même proposé et, encore moins, j'arrive à

 16   m'imaginer que l'on s'appuierait sur ce type d'élément. Je considère que

 17   nous avons ici une situation tout à fait similaire. A un moment, il

 18   semblait y avoir une valeur probante à ces éléments parce qu'on identifiait

 19   M. Karadzic. Ce n'est plus le cas. Et, par conséquent, je crois qu'on a

 20   affaire à des éléments de ouï-dire qui ne sont pas recevables. C'est

 21   quelque chose qui est tellement peu fiable que la Chambre ne devrait même

 22   pas l'examiner. Lorsque des éléments sont dénués de valeur probante,

 23   absolument dénués de valeur probante, ils ne devraient même pas être

 24   examinés, à mon sens.

 25   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'irons pas plus loin. Alors,

 27   d'habitude, les Juges de la Chambre ne se penchent pas sur la question de

 28   la valeur probante ou non de certains éléments dans le prétoire, mais


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  1   laissez-moi quelques instants pour consulter mes collègues.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre rendra une décision

  4   concernant la demande émise par l'accusé visant à demander l'expurgation de

  5   ce paragraphe numéro 12 de la déclaration consolidée. A cette réserve près,

  6   cette déclaration sera donc versée au dossier.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Elle reçoit la cote P3196, Madame et

  8   Messieurs les Juges.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, étant donné qu'un résumé n'a pas

 11   encore été lu, avec la permission des Juges de la Chambre, je vais

 12   maintenant donner lecture du résumé.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Je crois que c'est important, du

 14   point de vue du public également.

 15   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur Gusic, comme je vous l'ai déjà

 16   indiqué, il ne s'agit que d'un bref résumé de votre déposition, et il n'y a

 17   pas de lien direct avec -- enfin, ce n'est pas de votre déposition en elle-

 18   même qu'il s'agit. Je vais en donner lecture, et je ne prétends pas couvrir

 19   l'ensemble de ce que vous avez déclaré.

 20   Suite aux élections multipartites de 1990, le témoin a été membre de

 21   l'assemblée municipale de Bratunac où il représentait le SDA. A partir du

 22   20 mars 1992, approximativement, et jusqu'au 17 avril 1992, il a exercé la

 23   fonction de président du SDA à Bratunac, suite au départ du président

 24   d'alors. Dans cette fonction, le témoin a rencontré différents

 25   représentants politiques du SDS, à Bratunac, y compris le président du SDS

 26   local, à Bratunac, Miroslav Deronjic.

 27   Bien qu'à Bratunac le SDA ait obtenu plus de 50 % des voix, il a donné son

 28   accord aux exigences du SDS demandant qu'une majorité des deux tiers soit


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  1   requise pour les décisions à l'assemblée, ce qui donnait au SDS un contrôle

  2   plus important de ladite assemblée que celui que lui permettait logiquement

  3   le nombre de voix obtenues aux élections. Un accord a également été passé

  4   quant à un partage du pouvoir sur une base paritaire, 50/50. Et le SDA a

  5   accepté ce principe du partage à 50 % afin d'éviter le blocage des travaux

  6   de l'assemblée.

  7   Pendant 1991, lorsque les représentants serbes de l'assemblée demandaient

  8   la division de la Bosnie, le SDS de Bratunac mettait en place des

  9   structures parallèles, y compris une cellule de Crise, une assemblée

 10   séparée, et une municipalité serbe séparée. Simultanément, des positions

 11   nationalistes ainsi que des actes inspirés par le nationalisme du côté

 12   serbe devenaient de plus en plus manifestes et présents.

 13   Le témoin a également reçu des informations selon lesquelles le SDS et la

 14   JNA participaient à l'armement et à l'entraînement des civils serbes de la

 15   région. De plus, le témoin a observé que la JNA avait déployé des pièces

 16   d'artillerie lourde et de mortiers dans des localités environnant Ljubovija

 17   en Serbie, et dont les canons étaient pointés en direction des lotissements

 18   de Bratunac qui étaient habités.

 19   Début avril 1992, Miroslav Deronjic et le SDS ont convoqué une réunion au

 20   cours de laquelle Deronjic a informé le SDA de l'intention qui était celle

 21   du SDS de procéder à une division de la police en une police musulmane et

 22   une police serbe. Deronjic a indiqué que les Serbes se sentaient mis en

 23   minorité et sous la menace directe des Musulmans et que si cette exigence

 24   n'était pas remplie, les Musulmans disparaîtraient. Deronjic a dit que

 25   Radovan Karadzic exerçait des pressions sur lui afin que cette division

 26   commence à être mise en œuvre. Deronjic a parlé de réunions tenues avec

 27   Karadzic et le témoin a compris de ces propos qu'il était contrôlé par

 28   Karadzic.


Page 17797

  1   Le SDA a donné son accord à ces exigences afin de maintenir l'ordre et la

  2   paix, et la police serbe a fini par être créée. Le 17 avril 1992, le témoin

  3   a reçu des informations selon lesquelles certaines unités étaient entrées

  4   dans Bratunac. Il a remarqué qu'une unité militaire était cantonnée dans

  5   les environs de l'hôtel Fontana. Plus tard, au cours de la même journée,

  6   Deronjic a indiqué au témoin et à d'autres représentants du SDA qu'ils

  7   devaient se rendre à une réunion tenue à l'hôtel Fontana, en présence de

  8   Deronjic et d'officiers de l'armée serbe. Lors de la réunion, le témoin

  9   ainsi que d'autres se sont vus indiquer que Bratunac était une municipalité

 10   serbe et que des lois serbes s'appliqueraient. Le témoin s'est vu dire

 11   qu'il lui fallait dresser une liste des nationalistes musulmans. Compte

 12   tenu des circonstances, et au vu de ce qui s'était passé dans d'autres

 13   municipalités sur le territoire de toute la Bosnie-Herzégovine, le témoin a

 14   décidé de quitter la région dès que possible et a réussi à partir. Il a

 15   ensuite reçu des informations indiquant quel avait été le sort des

 16   Musulmans de Bratunac qui avaient été soumis à des expulsions à grande

 17   échelle, dont certains avaient été tués, et dont les mosquées avaient été

 18   détruites.

 19   Q.  Monsieur Gusic, bien que votre déclaration soit maintenant versée au

 20   dossier, j'ai quelques questions à vous poser.

 21   Je relève qu'au paragraphe 14 de votre déclaration, qui figure à la page 9,

 22   vous avez indiqué :

 23   "Afin d'illustrer la façon dont l'ambiance avait changé, que les cafés de

 24   Bratunac avaient commencé à être utilisés pour y tenir les réunions des

 25   nationalistes serbes qui chantaient des chants nationalistes. Des affiches,

 26   des slogans avaient commencé à faire leur apparition sur les murs, des

 27   slogans insultants envers les Musulmans, qui faisaient la promotion du

 28   nationalisme serbe."


Page 17798

  1   Vous poursuivez en disant que :

  2   "Dans les propos du SDS, aucune coexistence était possible et que

  3   Bratunac était une municipalité serbe."

  4   Alors je voulais juste vous demander si vous pourriez nous fournir

  5   quelques exemples à l'intention des Juges de la Chambre, donc quant à la

  6   nature et à la teneur de ces slogans et de ces affiches.

  7   R.  Après la tenue des premières élections multipartites, le SDS a

  8   intensifié sa propagande et la mise en œuvre de la politique Grand-Serbe.

  9   Ces propagandes prenaient des proportions telles que partout les activistes

 10   du SDS placardaient des slogans du SDS, slogans qui étaient

 11   particulièrement offensant pour les Musulmans et les Bosniens à l'époque.

 12   Ces slogans étaient tels que "ceci est la Serbie", "grande est la Serbie",

 13   "Musulmans, Balija, Turcs, allez-vous-en, vous serez égorgés". Puis les

 14   noms de Slobodan Milosevic, de Radovan Karadzic, des slogans tels que : "Il

 15   n'y a plus de Bosnie", et puis les noms de certains commandants chetniks de

 16   la Seconde Guerre mondiale, et cetera, et cetera.

 17   Ces slogans étaient écrits partout sur les murs des maisons, dans des

 18   lieux publics, sur les véhicules, sur les véhicules automobiles, donc sur

 19   les panneaux, dans les rues, et ailleurs également.

 20   Q.  Merci. Dans votre déclaration, il est indiqué, comme cela a déjà été

 21   indiqué précédemment, que le SDS procédait à la mise de structures

 22   parallèles en Bosnie, et que cela comprenait notamment cette exigence qui

 23   était la sienne de diviser les services de la police en avril, en une

 24   police musulmane et une police serbe. Ce qui reflète également les appels à

 25   la division de la Bosnie, en général, à l'échelon de la république. Alors

 26   je voudrais vous demander, y avait-il eu des discussions avec Deronjic ou

 27   d'autres représentants du SDS concernant une division ethnique de Bratunac

 28   ou de la république ?


Page 17799

  1   R.  Peut-être, dès la première moitié de 1991, il était fréquent que

  2   l'on entende de la bouche des représentants politiques serbes qu'ils

  3   voulaient vivre dans une Grande-Serbie, et que la Bosnie devait être

  4   partagée. A l'époque, nous avions compris cela comme une forme de

  5   rhétorique, comme une expression d'un souhait. Nous avons même été naïfs au

  6   point, imaginer qu'il s'agissait d'un fantasme. Cependant, lorsque j'ai

  7   pris mes fonctions de président du SDA pour la municipalité de Bratunac à

  8   la date du 12 mars, j'ai participé à plusieurs réunions avec le président

  9   du SDS de Bratunac, Miroslav Deronjic, ainsi qu'avec ses collaborateurs.

 10   Et, lors de ces réunions, j'ai été surpris de voir qu'ils parlaient

 11   de la division de la Bosnie et qu'ils proposaient un partage de la Bosnie.

 12   Je suis resté interdit face à l'expression de telles idées, ils proposaient

 13   concrètement que l'on partage Bratunac, et j'étais abasourdi face à de

 14   telles propositions. J'ai demandé pourquoi l'on s'engagerait sur une telle

 15   voie. Miroslav Deronjic était un homme politique habile. Il savait

 16   présenter des idées éminemment nationalistes comme normales et naturelles,

 17   comme des exigences auxquelles il convenait de répondre.

 18   Il s'est contenté de dire : "Vous savez quoi ? Les Serbes doivent

 19   préserver leur identité, leur histoire, leur tradition et leur culture. Ils

 20   doivent se séparer et vivre à part du peuple musulman. S'ils entendent

 21   préserver tout cela, ils ne peuvent le faire qu'en se séparant du peuple

 22   musulman."

 23   C'était la première fois que je prenais un peu plus au sérieux tout

 24   cela, après avoir entendu cela. Je lui ai alors répondu que j'étais

 25   abasourdi d'entendre cela et que l'on ne pouvait pas le faire tout

 26   simplement comme cela, qu'il fallait procéder à une planification et voir

 27   comment de telles idées pouvaient être mises en œuvre. Il m'a répondu qu'au

 28   sein du SDS, ils avaient un plan qui avait déjà été préparé et même des


Page 17800

  1   instructions indiquant comment il convenait de procéder en la matière.

  2   Alors puisque, pour moi, il s'agissait d'un sujet beaucoup trop

  3   important au sujet duquel je n'étais pas en mesure ni de prendre une

  4   décision ni même de m'exprimer, de prendre position, j'ai proposé que l'on

  5   convoque une vingtaine des personnalités les plus importantes, des chefs

  6   d'entreprises les plus importants, comptant dans leur rang tant des

  7   Musulmans que des Serbes, afin qu'il leur présente à eux aussi ces idées et

  8   que nous puissions entendre la position de ces gens. Il a dit : "Pourquoi

  9   pas ? Effectivement, c'est quelque chose que tout un chacun doit apprendre

 10   et savoir, nous ne faisons rien en cachette."

 11   Et nous avons organisé cette réunion en vitesse. Le jour suivant

 12   déjà, il y avait une quinzaine ou une vingtaine de directeurs d'entreprises

 13   musulmans et serbes, il a parlé lors de cette réunion, il a dit que les

 14   Serbes et les Musulmans devaient vivre séparés, qu'il y avait des plans qui

 15   existaient déjà portant sur la division de Bratunac et la division de la

 16   Bosnie et ainsi de suite.

 17   Q.  Merci, Monsieur Gusic. Alors, ceci pourra peut-être être corrigé

 18   ultérieurement dans le compte rendu, mais je voudrais juste obtenir une

 19   précision, parce qu'il a été consigné la chose suivante, il a été consigné

 20   que ce serait vous qui aurez déclaré que les Serbes devaient préserver leur

 21   identité serbe, leur histoire, et qu'ils devaient vivre séparer des

 22   Musulmans, et cetera. Mais était-ce, était-ce là vos propos ou ceux de

 23   Deronjic ?

 24   R.  Non, c'est Miroslav Deronjic qui a dit cela à l'attention des

 25   représentants du SDA et à moi-même, en tant que président local du SDA pour

 26   la municipalité de Bratunac. Peut-être que je n'ai pas été tout à fait

 27   précis.

 28   Q.  C'était peut-être juste une coquille au compte rendu d'audience, mais


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  1   maintenant c'est clair. Je vous remercie.

  2   Monsieur Gusic, en page 24 de votre déclaration, vous abordez ce que vous

  3   avez compris au sujet des rapports existants entre M. Deronjic et M.

  4   Karadzic. Vous vous fondez sur ce que vous avez entendu dire de la bouche

  5   de M. Deronjic, cela comprend également cette idée selon laquelle il aurait

  6   été contrôlé par M. Karadzic. Vous avez compris, qu'en fait, il était le

  7   bras droit de M. Karadzic, qu'il avait une grande latitude et qu'il pouvait

  8   agir au nom de Karadzic. Vous avez également compris que Karadzic lui

  9   aurait ordonné de convaincre le SDA en s'appuyant sur son talent politique.

 10   Et je voudrais juste vous demander de donner un peu plus de détails aux

 11   Juges de la Chambre sur ce que vous avez essayé d'expliquer quant aux

 12   rapports qu'entretenaient Deronjic et Karadzic; est-ce Deronjic qui vous a

 13   dit cela ou bien s'agit-il là d'éléments que vous avez pu observer vous-

 14   même et qui vous ont conduit à cette interprétation ?

 15   R.  Eh bien, je dirais pour commencer que lorsque Miroslav Deronjic a été

 16   élu président du SDS dans la seconde moitié de 1992, les Serbes de Bratunac

 17   disaient qu'il y avait de meilleurs candidats et des Serbes qui étaient

 18   davantage reconnus que Miroslav Deronjic. Il était question d'un certain

 19   Nikolic qui aurait dû être président du SDS et que c'était Radovan

 20   Karadzic, par son influence et son intervention directe, qui avait fait en

 21   sorte que Miroslav Deronjic soit élu président du SDS pour la municipalité

 22   de Bratunac. C'est ce que j'ai entendu dire par les Serbes eux-mêmes. Et

 23   c'est quelque chose dont nous avons discuté parce que nous nous

 24   intéressions vivement à la question de savoir qui allait devenir le

 25   président du SDS.

 26   Deronjic était quelqu'un d'extrêmement discipliné en tant que membre

 27   du SDS. Je parle là de l'impression qui était la mienne. Il était très

 28   fidèle à son président, Radovan Karadzic. D'après ce qu'il disait lui-même,


Page 17802

  1   Radovan Karadzic avait une grande confiance en son président local,

  2   Miroslav Deronjic. Deronjic était particulièrement actif et persévérant

  3   dans ses idées de diviser la police à Bratunac. Nous autres, du SDA,

  4   n'étions pas disposés à procéder à la division de la police. Nous lui avons

  5   dit que ce serait absurde qu'une division de la police en police serbe et

  6   police musulmane signifierait une division encore plus grande entre Serbes

  7   et Musulmans et des tensions nationales encore plus graves que cela

  8   pourraient avoir des conséquences extrêmement dommageables. Il nous a

  9   répondu qu'il pouvait nous comprendre mais que nous aussi nous devions nous

 10   efforcer de le comprendre lui, qu'il avait reçu des ordres en provenance du

 11   sommet du SDS, signés par son président Karadzic, et qu'il était obligé de

 12   mettre en avant cet accord portant sur un partage de la police. Il nous a

 13   dit que si nous n'acceptions pas de passer cet accord portant division de

 14   la police en police musulmane et police serbe, il n'était plus en mesure de

 15   garantir la paix et la sécurité dans cette région.

 16   Il nous a averti qu'à Bijeljina le SDA et le SDS n'avaient pas bien

 17   coopéré et n'avaient pas réussi à passer un accord et que des unités

 18   militaires étrangères en provenance de Serbie étaient entrées à Bijeljina,

 19   avaient occupé Bijeljina, et s'étaient livrées à un certain nombre d'actes

 20   de violence dans cette municipalité. Et il nous a indiqué qu'il ne

 21   souhaiterait pas que la même chose se produise à Bratunac. Il en a appelé à

 22   nous pour que nous nous montrions raisonnables. Alors, nous lui avons dit,

 23   en réponse : Très bien. Si nous acceptons la division de la police, est-ce

 24   que tu peux nous garantir que la paix et la sécurité seront préservées sur

 25   le territoire de la municipalité de Bratunac et qu'aucune unité militaire

 26   étrangère en provenance de Serbie ne pénétreront dans Bratunac comme elles

 27   ont pu le faire à Bijeljina. Il nous a répondu que, dans la mesure où nous

 28   procéderions à la division de la police, son président Karadzic serait


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  1   satisfait et que, dans ce cas-là, nous passerions des accords en vue de

  2   garantir la paix et la sécurité dans la municipalité de Bratunac. En tout

  3   cas, nous poursuivrions nos négociations et que lui garantissait que la

  4   paix et la sécurité dans la municipalité de Bratunac seraient préservées si

  5   nous nous montrions raisonnables et collaborions.

  6   Q.  Merci, Monsieur Gusic. Dans votre déclaration, vous décrivez également

  7   certains des éléments de contexte qui entourent votre nomination en tant

  8   que président du SDA en mars 1992, y compris l'armement et l'entraînement

  9   des Serbes, l'intention sans cesse plus importante et les intimidations

 10   croissantes, les déploiements de la JNA et de ses armes, les appels à la

 11   division. Alors, je voudrais vous demander si ces circonstances que je

 12   viens d'énumérer vous préoccupaient, et si, par conséquent, vous aviez

 13   entrepris quoi que ce soit afin de vous rendre dans des zones peuplées de

 14   Musulmans ou dans des villages musulmans dans le but d'y discuter de la

 15   possibilité d'une défense contre d'éventuelles attaques ? Et si tel est le

 16   cas, quel a été le résultat de vos démarches ?

 17   R.  Lorsque je suis devenu président du SDA pour la municipalité de

 18   Bratunac à la date du 20 mars, la JNA et le SDS ont procédé à un armement

 19   du peuple serbe à grande échelle. A l'époque, on disait qu'il y avait à

 20   Bratunac davantage d'armes que de Serbes. Et, conformément au recensement

 21   de 1991, il y avait 11 500 Serbes à Bratunac.

 22   Le SDS, sur ordres de la direction au sommet du SDS, a procédé à la

 23   constitution de la municipalité serbe de Bratunac, ainsi que de la cellule

 24   de Crise de Bratunac, cellule de Crise qui était également censée couvrir

 25   toutes les localités et les villages environnants. Nous avions des

 26   informations nous indiquant que la JNA et le SDS, dans certaines localités

 27   de la municipalité de Bratunac, procédaient à l'entraînement de civils

 28   serbes. Ces informations ont été corroborées que la population civile serbe


Page 17804

  1   était donc entraînée à l'usage et au maniement des armes et qu'elle était

  2   préparée à faire la guerre. J'étais très préoccupé par cela, et la première

  3   chose que j'ai faite lorsque je suis devenu président du SDA a été de me

  4   rendre en visite dans certaines localités où se trouvaient des Musulmans en

  5   majorité. Je voulais avoir des discussions ouvertes quant à la situation

  6   complexe sur le plan de la sécurité et quant à la menace que représentait

  7   ce nombre croissant de Serbes armés et que représentait également la JNA.

  8   J'ai donc rendu visite à plusieurs localités, j'ai discuté avec un certain

  9   nombre d'activistes du SDA et un certain nombre de civils. Alors, la

 10   première chose que j'ai constatée, c'est qu'ils avaient très peur et qu'ils

 11   étaient dans une grande incertitude et une grande préoccupation.

 12   Dans certaines de ces localités, lorsque je leur ai demandé quelles étaient

 13   les possibilités pour nous de nous organiser et d'opposer une résistance si

 14   jamais les forces serbes lançaient une attaque ou se livraient très

 15   concrètement à des actes de violence dans tel ou tel endroit, eh bien, leur

 16   réponse consistait à dire que dans ces localités les Musulmans étaient un

 17   peuple honnête et bon, qui ne portaient préjudice à personne et qui

 18   n'avaient rien à cacher, qu'ils vivaient là-bas depuis de très longues

 19   années en bonne intelligence avec les Serbes et qu'ils ne croyaient pas que

 20   leurs voisins serbes en viendraient aux mains de façon brutale et s'en

 21   prendraient à eux.

 22   Dans d'autres localités, lorsque j'ai posé ces mêmes questions portant sur

 23   la possibilité de nous organiser et d'opposer une résistance à

 24   d'éventuelles attaques, on m'a répondu que les Serbes étaient armés et

 25   qu'ils disposaient de la JNA, de l'armée populaire yougoslave qui, à

 26   l'époque, était l'une des plus grande puissance militaire d'Europe, et

 27   qu'il serait parfaitement insensé d'opposer quelconque résistance que ce

 28   soit parce que toute tentative en ce sens serait vouée à un échec


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  1   catastrophique, que ce n'était pas avec quelques pistolets ou fusils de

  2   chasse que l'on pouvait s'opposer à la JNA.

  3   J'ai remarqué que pour la majorité des Musulmans de la municipalité de

  4   Bratunac, eh bien, il y avait une conviction. Ils étaient majoritairement

  5   convaincus qu'il n'y aurait pas de conflit à grande échelle et que, même si

  6   cela devait se produire, eh bien, nous étions à l'aube du XXIe siècle et

  7   qu'il y avait également quelque chose qui s'appelait la communauté

  8   internationale. Que cette dernière interviendrait rapidement. C'était une

  9   illusion.

 10   Il y avait également des individus dans toutes ces différentes localités

 11   qui, à titre individuel, donc, pressentaient ce qui risquait de se passer.

 12   Ces personnes-là insistaient sur la nécessité de s'organiser afin de

 13   pouvoir opposer une résistance. Ils demandaient qu'on fournisse des armes.

 14   Ils ont essayé d'œuvrer en ce sens. Cependant, le SDS, dans la municipalité

 15   de Bratunac, s'est appuyé sur ses propres infrastructures, sur ses cellules

 16   de Crise, pour la municipalité de Bratunac et toutes les localités

 17   environnantes, ainsi que sur tous les policiers serbes et les employés et

 18   représentants de la municipalité de Bratunac afin de suivre de très près

 19   l'évolution de la situation à Bratunac, si bien que toutes les activités

 20   qui allaient dans le sens que je viens de décrire en sont restées au stade

 21   de simples tentatives et que rien n'a réellement été fait.

 22   Q.  Merci, Monsieur Gusic. Je souhaite simplement attirer votre attention

 23   sur un certain nombre de documents. Je vais essayer d'en terminer aussi

 24   rapidement que possible. Alors, aussi bien dans votre déposition

 25   d'aujourd'hui que dans votre déclaration consolidée, il est fait état de la

 26   mise en place de la cellule de Crise dans la municipalité de Bratunac. Je

 27   voudrais attirer votre attention très rapidement sur trois documents. Les

 28   deux premiers portent les numéros 00590 dans la liste 65 ter pour le


Page 17806

  1   premier. Page 83 en anglais, s'il vous plaît, et pages 70 et 71 en B/C/S.

  2   Ce document ne comporte pas de date en haut, mais on peut en définir

  3   le contexte en regardant le troisième paragraphe, qui indique que "la

  4   réunion s'est tenue la nuit dernière, le 18 octobre 1991, à Sarajevo."

  5   Si je puis vous demander de porter votre attention, Monsieur Gusic,

  6   sur la page suivante -- très bien, je crois que vous le verrez. Vous verrez

  7   qu'on fait mention de l'élection de la cellule de Crise, et ceci a fait

  8   l'objet d'un accord. Ils ont convenu que seulement une partie de la cellule

  9   de Crise doit être élue ce soir. Et je vous demande de regarder ensuite la

 10   page suivante; trois documents qui sont en rapport avec ceci, page 85 de

 11   l'anglais et page 72 en B/C/S. Il s'agit du procès-verbal de la réunion du

 12   26 octobre 1991 et du procès-verbal de la première réunion de la cellule de

 13   Crise. Et je vais vous demander ensuite de vous reporter au numéro 65 ter

 14   00603, page 8 de l'anglais et page 9 en B/C/S. Il s'agit d'une réunion qui

 15   s'est tenue le 25 octobre 1991. Et si nous regardons le point 3 de l'ordre

 16   du jour :

 17   "Nomination de la cellule de Crise dans la municipalité de Bratunac

 18   ayant pour objectif la mise en place de mesures de protection destinées au

 19   peuple serbe."

 20   Et ensuite, page suivante de l'anglais, s'il vous plaît, page suivante en

 21   B/C/S.

 22   Une autre mention qui est faite de la cellule de Crise et de certains de

 23   ses membres.

 24   Monsieur Gusic, je souhaitais vous demander si ces mentions-là concordent

 25   avec les informations qui figurent dans votre déclaration consolidée et les

 26   informations que vous nous avez fournies aujourd'hui à propos de la

 27   création de la cellule de Crise du SDS dans la municipalité de Bratunac en

 28   1991 ?


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  1   R.  Pour l'essentiel, oui.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

  3   au dossier des pages qui font particulièrement mention de ces procès-

  4   verbaux et de ces réunions.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le numéro 65 ter 00509 recevra la cote

  7   P3197, et le numéro 65 ter 00603 recevra la cote P3198.

  8   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

  9   Q.  Monsieur Gusic, à une ou deux reprises aujourd'hui, vous avez mentionné

 10   l'organisation au niveau local et comment ceci était effectué au niveau

 11   local au sein de la structure du SDS. Je souhaite vous demander de vous

 12   reporter maintenant rapidement au numéro 65 ter 000590, page 68 de

 13   l'anglais et page 58 en B/C/S.

 14    Même s'il s'agit là -- pardonnez-moi. Ceci n'est pas la bonne référence.

 15   Je vous prie de bien vouloir m'excuser. Cela devrait être la page 72 de

 16   l'anglais et la page 61 en B/C/S. Merci.

 17   C'est une réunion qui s'est tenue le 8 mars 1990, même s'il s'agit de

 18   la 16e Session, nous le constaterons d'après d'autres documents, il s'agit

 19   ici sans doute de l'année 1991. Nous allons parler des autres sessions qui

 20   se sont tenues plus tôt, qui indiqueront que ceci est la chronologie juste

 21   des séances de l'assemblée. Je me rends compte que ceci, en fait, reflète

 22   ce qui est écrit ici.

 23   Monsieur Gusic, je souhaite vous demander de vous reporter à un point à

 24   l'ordre du jour, à savoir les élections. Est mentionné le fait que les

 25   membres du conseil seraient responsables de la gestion de 15 à 20 maisons,

 26   et ensuite, une décision s'ensuit sur les conseils locaux et l'association

 27   des citoyens.

 28   Etait-ce l'attitude adoptée vis-à-vis de la structure du SDS, de ses


Page 17808

  1   membres et des conseils locaux qui étaient responsables d'eux ?

  2   R.  Je n'entends pas l'interprétation.

  3   Q.  Je ne sais pas où s'est arrêtée l'interprétation, Monsieur Gusic, mais

  4   je vous demande de vous reporter au point 1 à l'ordre du jour, et si le

  5   fait que les membres des conseils sont responsables de 15 à 20 maisons est

  6   quelque chose qui concorde avec votre compréhension et observation à

  7   l'époque, et de l'organisation au niveau de cette cellule de Crise à

  8   Bratunac ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces

 12   pages, s'il vous plaît, 72 et 73 de l'anglais.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces pages seront ajoutées à la pièce

 14   P31197.

 15   M. TIEGER : [interprétation] C'est parfait.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 17   M. TIEGER : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Gusic, vous évoquez aux pages 8 et 9, vous évoquez cela et

 19   vous en avez parlé aujourd'hui, de la création des structures à Bratunac en

 20   1991 et 1992. Je vais rapidement vous demander de vous reporter au numéro

 21   65 ter 00742.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je. Compte tenu du fait que je n'ai que

 23   très peu de temps pour mon contre-interrogatoire, puis-je demander si M.

 24   Tieger s'en tient à ce qu'il dit, à savoir que le document est un document

 25   où il s'agit de 1990 ou de 1991 ? La différence est importante.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Ce que nous voyons au niveau de l'ensemble de

 27   la collection dont nous disposons est que la 14e Session de l'assemblée

 28   municipale du conseil s'est tenue le 22 janvier 1991, et la 15e Séance est


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  1   datée du mois de février. Je vais y venir, au -- le 21 février 1990. Nous

  2   avons maintenant le 8 mars 1990, et une mention qui a été faite un peu plus

  3   tôt à la 11e Session qui s'était tenue en 1990. C'est la raison pour

  4   laquelle j'ai fait ces remarques. Mais je ne peux rien présenter de plus

  5   pour l'instant, et ce document est également à la disposition de l'accusé.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que ce document a été fourni

  7   à l'accusé.

  8   M. TIEGER : [interprétation] Oui, tout à fait.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je remarque l'heure, combien de

 10   temps vous faut-il encore pour conclure votre interrogatoire principal ?

 11   M. TIEGER : [interprétation] Si vous souhaitez faire une pause

 12   maintenant, ça ne pose pas de problème. Il me faudrait encore une dizaine

 13   de minutes environ, même si c'est un chiffre conservateur.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Faisons la pause maintenant,

 15   pendant 25 minutes, et nous rependrons à 16 heures 05.

 16   --- L'audience est suspendue à  15 heures 41.

 17   --- L'audience est reprise à 16 heures 09.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Q.  Monsieur Gusic, avant la pause, nous regardions le numéro 65 ter 00742.

 21   Je vous demande de bien vouloir porter votre attention sur trois mentions

 22   de ce document, la première se trouve à la page 4 de l'anglais, et page 4

 23   en B/C/S. La page que nous voyons maintenant à l'écran fait référence à

 24   l'assemblée municipale serbe de Bratunac. Et si nous passons à la page 2,

 25   il s'agit du procès-verbal de la première assemblée serbe qui s'est tenue

 26   le 30 décembre 1991.

 27   Si nous pouvons ensuite passer à la page 3 de l'anglais et la page 6 en

 28   B/C/S. Ici, nous voyons le procès-verbal de la première assemblée


Page 17810

  1   municipale serbe régulière, qui s'est tenue à 17 heures le 13 février 1992

  2   à Bratunac. Et ensuite, si nous pouvons passer à la page 6 de l'anglais,

  3   page 10 en B/C/S, ici, nous voyons le procès-verbal de l'assemblée

  4   municipale serbe de Bratunac qui s'est tenue à 19 heures le 28 février

  5   1992.

  6   Monsieur Gusic, ces séances, ainsi que ce document, concordent-ils --

  7   pardonnez-moi, je souhaite corriger. Je crois que c'est à la page 9 en

  8   B/C/S. Je ne sais pas si le témoin a eu l'occasion de voir la date du 28

  9   février. Merci.

 10   Monsieur Gusic, je souhaitais simplement vous demander si ces mentions

 11   concordent avec votre compréhension à l'époque de la création de structures

 12   parallèles par le SDS à Bratunac dans cette municipalité, y compris la

 13   création d'une assemblée distincte.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Merci.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces

 17   mentions au document. Je crois qu'il s'agit -- je peux calculer ceci avec

 18   le greffier; 1 à 7 en anglais, et 2 à 10, environ, en B/C/S.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Ceux-ci seront versés

 20   au dossier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P3199, Madame,

 22   Messieurs les Juges.

 23   M. TIEGER : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Gusic, au cours de votre déposition d'aujourd'hui et dans

 25   votre déclaration, vous avez évoqué certains aspects des rapports entre le

 26   SDS de Bratunac et au niveau de la république, certain de ses

 27   représentants, en particulier M. Karadzic. Je vous demande de reporter

 28   votre attention à trois entrées sur le document 65 ter 00590. La première


Page 17811

  1   se trouve à la page 53 de l'anglais, page 42 en B/C/S. Il s'agit du procès-

  2   verbal de la 11e Session du conseil municipal, qui s'est tenue le 17

  3   décembre 1990. Je vous demande de vous reporter au bas de la page en

  4   anglais, et cette page ainsi que la page suivante en B/C/S, qui dit ceci --

  5   après une énumération des propos de certaines personnes, il indique que le

  6   conseil a accepté notre accord. Il y a un vote contre de la part de

  7   Cirkovic Mihajlo [phon], qui n'était pas d'accord. Si le SDA rejette cette

  8   variante également, le conseil conclura que notre conseil principal doit,

  9   de façon urgente, être informé de tout.

 10   Ensuite, si nous pouvons passer à la page 68 de l'anglais, page 58 en

 11   B/C/S. Il s'agit du procès-verbal de la 15e Session, donc quatre sessions

 12   plus tard, comme nous l'avons dit, les conseils municipaux du SDS à

 13   Bratunac. Et comme nous l'avons dit auparavant, il est indiqué ici qu'il

 14   s'agit du 21 février 1990, mais je crois que d'après le contexte, il

 15   semblerait que ce soit plutôt 1991, après la séance que nous venons de

 16   regarder. Veuillez regarder la première mention ici en B/C/S. Si vous

 17   regardez la première mention après l'énumération des points à l'ordre du

 18   jour, point 1 suivant, M. Deronjic, président du conseil municipal, a

 19   informé et communiqué les éléments d'information au conseil. Il a informé

 20   le conseil de tous les avis du président du parti, le Dr Karadzic, ainsi

 21   que le dirigeant du parti concernant la déclaration préparée par le SDS ou

 22   conçue par le SDA, et c'est à cet endroit que l'avis du parti est négatif.

 23   Ensuite, à la page 74 de l'anglais et à la page 63 en B/C/S.

 24   Il s'agit ici de la 17e Session du conseil municipal du SDS de Bratunac,

 25   qui s'est tenue le 12 avril 1991. Si nous regardons la page suivante en

 26   B/C/S, et si nous regardons le bas de la page en anglais. Suite aux

 27   discussions sur le fait de redessiner les frontières municipales effectuées

 28   à Banja Luka, et cetera, il est fait mention au fait que notre présidence


Page 17812

  1   doit rencontrer M. Karadzic de façon urgente suite à toutes ces questions.

  2   Monsieur Gusic, je souhaitais vous demander si ces mentions au fait

  3   d'informer le conseil principal et de recueillir l'avis de Karadzic et de

  4   rencontrer Karadzic concordent avec la manière dont vous avez compris la

  5   structure hiérarchique et les rapports hiérarchiques à l'époque entre la

  6   république et le SDS de Bratunac ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je poser une question. Est-ce que vous

  8   pensez que ce serait une bonne idée, peut-être que M. Tieger pourrait nous

  9   le dire, si ce témoin a assisté à ces réunions, et si c'est la personne la

 10   plus à même de commenter sur les réunions du SDS, s'il n'a pas assisté à

 11   ces réunions. Parce qu'après tout, il s'agissait de ces adversaires

 12   politiques à l'époque.

 13   Je crois qu'il serait préférable d'en discuter avec quelqu'un d'autre.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre intervention n'est pas appropriée

 15   à ce stade. Il est clair que la question posée par M. Tieger est une

 16   question qu'il pose au témoin parce qu'il souhaite recueillir une réponse.

 17   Vous pouvez poser vos questions pendant votre contre-interrogatoire.

 18   Monsieur Tieger.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 20   Q.  Monsieur Gusic, je ne sais pas si vous vous souvenez de la question, je

 21   voulais vous demander si ces mentions, j'en ai résumé certaines, concordent

 22   avec les rapports qu'il y avait ou les contacts qu'il y avait entre la

 23   république et le SDS de Bratunac, et si ces rapports hiérarchiques étaient

 24   bien cela à l'époque ?

 25   R.  Oui, ceci coïncide tout à fait avec ce que j'ai dit au sujet des liens

 26   qui existaient entre les conseils municipaux du Parti démocratique serbe et

 27   son président Deronjic, et le président Karadzic, qui était à la tête de

 28   cette structure hiérarchique.


Page 17813

  1   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces

  2   documents, s'il vous plaît, qui sont le reflet de ces réunions.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Encore une fois, nous allons l'ajouter à

  4   la pièce P3197.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   M. TIEGER : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Gusic, est-ce que nous pouvons afficher le numéro 65 ter

  8   30190. Vous avez cité dans votre déclaration consolidée à la page 19, vous

  9   avez mentionné deux événements qui se sont déroulés à Kravica au cours

 10   desquels deux Musulmans ont été tués, deux ont été blessés, et vous dites

 11   de surcroît, vous parlez dans votre déclaration de l'arrivée de

 12   représentants officiels, M. Ganic, M. Koljevic, représentants de la

 13   république. Je vous demande de regarder ce document, qui est une

 14   conversation entre Momcilo Krajisnik et Radovan Karadzic, le 4 septembre

 15   1991. Je vous demande de bien vouloir regarder plus particulièrement le bas

 16   de la page, dans les deux versions, où on peut lire :

 17   "Saviez-vous qu'il y a eu des tirs.

 18   "J'ai entendu dire qu'il y avait deux morts.

 19   "Trois. Je crois, il y en a un qui est mort. Il y en a deux qui sont

 20   grièvement blessés."

 21   Krajisnik dit : "Tous Musulmans."

 22   Karadzic : "Tous Musulmans, mais ils ont attaqué le village serbe de

 23   Kravica."

 24   Krajisnik : "Je ne sais pas si c'est vrai. Vous savez ce que j'ai dit

 25   ce matin, s'il vous plaît ?"

 26   Karadzic : "Oui ?"

 27   Krajisnik : "Cengic m'a appelé."

 28   Et ensuite le texte se poursuit. Vous avez déjà vu ce document


Page 17814

  1   auparavant, Monsieur Gusic. S'agit-il là de références aux incidents de

  2   Kravica que vous évoquez dans votre déclaration consolidée ?

  3   R.  Oui, oui. C'est la même date, il s'agit de la même action.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que je peux avoir une cote provisoire

  5   pour ce document, s'il vous plaît.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ceci sera marqué aux fins

  9   d'identification.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce MFI 3200.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 12   Q.  Et pour finir, Monsieur Gusic, est-ce que nous pouvons afficher le

 13   numéro 65 ter 07028.

 14   Monsieur Gusic, à la page 10 de votre déclaration, vous avez parlé de

 15   l'enlèvement d'armes du dépôt, de l'arsenal, que la JNA a déplacé ces armes

 16   pour les placer sous le contrôle de la JNA. Est-ce que je peux vous

 17   demander de bien vouloir regarder ce document, s'il vous plaît, qui est

 18   daté du 14 mai 1990. Il émane du général Adzic, c'est un document du

 19   secrétariat fédéral de la Défense nationale, l'état-major de la SFRJ, la

 20   République socialiste fédérative de Yougoslavie. Il s'agit d'un ordre aux

 21   fins de pouvoir conserver en toute sécurité les armes et les munitions

 22   conformément aux tâches définies par le secrétariat fédéral, et fait état

 23   de l'organisation, de la prise, de l'entreposage, et le fait de garder en

 24   un lieu sûr l'ensemble de ces armes et de ces munitions qui sont des armes

 25   de la TO, des munitions de la JNA dans des dépôts où ils se trouvent.

 26   Au point 2, on parle du fait qu'ils doivent être conservés et gardés en

 27   lieu sûr dans le dépôt de la TO, garder par les unités de la JNA et de la

 28   TO, les unités de la TO avec l'autorisation du commandant de la région


Page 17815

  1   militaire.

  2   Monsieur Gusic, ce document reflète-il ou coïncide-t-il avec le fait que

  3   les armes aient été enlevées, qu'elles aient été contrôlées par la JNA,

  4   quelque chose que vous avez mentionné dans votre déclaration ?

  5   R.  Oui, c'est bien le document dont il s'agit, et ceci coïncide avec ce

  6   que j'ai dit.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  8   document, s'il vous plaît.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce document sera versé au dossier.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P3201.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. J'en

 12   ai terminé avec mon interrogatoire principal.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et vous souhaitez demander le versement

 14   au dossier des pièces connexes, trois d'entre elles.

 15   M. TIEGER : [interprétation] C'est exact.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections ?

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tous ceux-ci seront versés au dossier.

 19   Est-ce que nous allons leur donner une cote.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le numéro 65 ter 11734 aura la cote

 21   P3203; le 11773 aura la cote P3204; le numéro 65 ter 00749 aura la cote

 22   P3205.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, à vous.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour Excellences, bonjour à tous.

 25   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Gusic.

 27   R.  Bonjour.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant de commencer, je demanderais à la Chambre


Page 17816

  1   de bien vouloir m'entendre quelques minutes.

  2   Le témoin assis devant vous est un témoin ainsi qu'un participant à des

  3   événements importants. Sa déclaration écrite compte 78 paragraphes, ainsi

  4   qu'un grand nombre de paragraphes qui concernent des événements mentionnés

  5   dans d'autres déclarations qui m'intéressent également. Ce témoin, au cours

  6   de l'interrogatoire principal, a parlé d'un grand nombre de déclarations et

  7   de documents. Pour ma part, je ne dispose même pas d'une demi-minute pour

  8   traiter de chacun de ces éléments. Sa déclaration compte presque 80

  9   paragraphes, et si je fais le compte, j'en n'ai même pas une minute par

 10   élément. Hier, je ne suis pas parvenu à soumettre au témoin le texte du

 11   jugement qui condamnait le témoin d'hier à dix ans d'emprisonnement, en

 12   raison du fait que je manquais de temps. Donc je prierais aimablement les

 13   Juges de la Chambre d'accepter que je verse au dossier sous forme de

 14   versement automatique le jugement dont je viens de parler. En effet, il est

 15   plus important pour moi de traiter des questions sur le fond plutôt que de

 16   remettre en cause la crédibilité du témoin.

 17   Donc je vous prie de lever cette restriction temporelle qui pèse sur mes

 18   contre-interrogatoires, qui entravent considérablement ma tâche. Vous avez

 19   pu constater le très grand nombre d'événements auxquels a participé ce

 20   témoin, donc je vous prie de bien vouloir m'accorder toute la journée

 21   d'aujourd'hui, au moins toute la journée d'aujourd'hui pour contre-

 22   interroger ce témoin.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, lorsqu'il est

 24   question de déterminer le temps qu'il convient de vous accorder pour le

 25   contre-interrogatoire d'un témoin, la Chambre prend en compte toutes les

 26   questions pertinentes, autrement dit un nombre très important de facteurs

 27   et, en particulier, l'importance de la déposition du témoin sur le plan du

 28   nombre d'éléments abordés, le volume de documents constituant la déposition


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  1   du témoin dans le cadre de l'application de l'article 92 ter du Règlement,

  2   le nombre de documents que l'Accusation s'apprêtent à utiliser au cours de

  3   l'interrogatoire du témoin, ainsi que les estimations de temps relatives à

  4   l'interrogatoire de l'Accusation et au contre-interrogatoire, ainsi que les

  5   demandes présentées par vous.

  6   Je ne suis pas d'accord avec vous quant au fait que vous n'ayez pas disposé

  7   de suffisamment de temps pour interroger les témoins dans le cadre de vos

  8   contre-interrogatoires. En particulier, si l'on tient compte du temps

  9   important que vous consacrez à explorer des questions dépourvues de

 10   pertinence, entièrement ou partiellement. Comme cela a déjà été dit, il

 11   importe que vous concentriez vos contre-interrogatoires sur les questions

 12   importantes en abordant d'abord les points les plus importants.

 13   Certains témoins, c'est exact, formulent parfois des déclarations

 14   générales, mais cela n'implique pas que vous soyez dans l'obligation

 15   d'explorer chacun des détails de ces déclarations lorsque vous contre-

 16   interrogez le témoin. Les contre-interrogatoires ont pour objet de mettre

 17   en exergue certains éléments des informations obtenues dans le cadre des

 18   interrogatoires principaux pour les contester. Encore une fois, je vous

 19   répète, que vous devriez vous concentrer sur la nécessité de contester la

 20   déposition du témoin dans des domaines bien particuliers en donnant la

 21   préférence aux domaines pour lesquels vous disposez de documents. Donc, je

 22   vous demanderais de ne pas faire de déclaration en indiquant que vous

 23   auriez été lésé, faute d'obtenir un temps suffisant.

 24   Avançons. La Chambre en ce moment n'a pas l'intention de vous accorder un

 25   temps supplémentaire. Donc, avançons.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Il y a une chose que je

 27   souhaiterais ajouter. Il me serait aisé de me conformer à vos instructions

 28   si le fait que je ne dispose pas d'un temps suffisant pour contester la


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  1   déposition du témoin n'avait pas pour effet d'aller à l'encontre de la base

  2   d'une condamnation. Je ne saurais effectuer une sélection si tous ces

  3   éléments n'étaient pas à la base même d'une condamnation éventuelle. C'est

  4   dans ces conditions que mes prédécesseurs se sont défendus, et je sais que

  5   nombre d'entre eux n'étaient pas coupables.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci est une remarque tout à fait

  7   inopportune en cet instant. Je vous demanderais de consulter votre

  8   conseiller juridique quant à la façon de conduire vos contre-

  9   interrogatoires dans un temps limité dont la Chambre estime qu'il devrait

 10   suffire. Je vous prie de procéder.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je tiens à vous rappeler simplement un point.

 12   L'Accusation a utilisé plus de temps que le temps qui lui avait été alloué

 13   au départ, donc je vous prierais de revenir sur votre conclusion, et ce

 14   sera mon dernier mot sur ce point.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Gusic, savez-vous que j'ai négocié avec M. Izetbegovic, et

 17   rarement avec M. Cengic ainsi qu'avec M. Brka ?

 18   R.  Oui. On m'a informé que vous aviez discuté et négocié avec M.

 19   Izetbegovic et ses collaborateurs. Quant à M. Brka, je suis ici pour venir

 20   témoigner en disant la vérité factuelle et, étant donné que lors d'une

 21   conversation avec M. Brka j'ai appris qu'il n'était pas sûr d'avoir parlé

 22   avec vous, c'est ce que j'ai annoncé ici. Brka m'a dit, en effet : "Je ne

 23   suis pas sûr d'avoir parlé avec Karadzic". C'était Kalinic, peut-être ne

 24   m'avez-vous pas suffisamment compris.

 25   Q.  Merci. Je vous pose, voyez-vous, des questions précises donc j'espère

 26   qu'une réponse par oui ou par non vous sera possible.

 27   Le premier personnage qui a commencé à parler de l'idée d'une division de

 28   la Bosnie était M. Izetbegovic. Il nous a présenté cette idée durant une


Page 17819

  1   réunion dans le but de nous convaincre qu'il convenait que la Bosnie fasse

  2   sécession.

  3   Est-ce que vous le savez ou pas ?

  4   R.  C'est la première fois que j'entends dire cela.

  5   Q.  Merci. Est-ce que vous saviez que l'idée de créer des cantons en Bosnie

  6   a été lancée pour la première fois par le journal "Vecernji List", un

  7   quotidien de Zagreb, et que la première réaction serbe est venue du Pr

  8   Plavsic. Elle a déclaré que c'était une idée intéressante qu'il convenait

  9   d'examiner de plus près. Tout cela a été repris par les médias; le savez-

 10   vous ?

 11   R.  Je ne le savais pas.

 12   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez commis un crime de guerre

 13   pendant la guerre ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Merci. Est-ce que votre nom figure sur la liste des criminels de guerre

 16   potentiels qu'il convient de poursuivre en justice ?

 17   R.  Quand je suis venu témoigner dans l'affaire Milosevic, j'ai appris ce

 18   fait, à savoir que j'étais censé être poursuivi en justice pour crime de

 19   guerre et que diverses institutions de la Republika Srpska m'accusaient de

 20   crime de guerre. C'est la première fois que j'en entendais parler. Pour ma

 21   part, officiellement, je n'ai reçu aucune annonce, ni verbal ni par écrit,

 22   d'une quelconque institution officielle m'indiquant que mon nom figurait

 23   sur une liste ou qu'il aurait été existé à mon encontre une quelconque mise

 24   en accusation. Tout cela je l'ai appris à la lecture des journaux par la

 25   suite. J'ai appris en outre que 3 000 autres Musulmans de Bosnie faisaient

 26   l'objet de mise en accusation du même genre.

 27   Q.  Sur deux millions de Musulmans, 3 000 Musulmans sont soupçonnés, et

 28   vous figurez parmi ces personnes suspectées, n'est-ce pas ?


Page 17820

  1   R.  Je ne peux m'exprimer qu'en mon nom personnel. J'ai vu ce qui était

  2   écrit dans tous ces papiers, et je dirais que c'est de la pure invention.

  3   Ceci n'a rien à voir avec la vérité.

  4   Q.  Merci. Afin d'aller plus vite, je vais maintenant vous soumettre ce que

  5   je sais, ce que j'ai découvert au sujet d'un certain nombre d'événements et

  6   de la façon dont ils ont évolué, et il devrait vous suffire de répondre par

  7   oui ou par non en disant si vous êtes d'accord ou pas. Ensuite, nous

  8   examinerons des documents dont nous pourrons discuter plus en détail.

  9   Est-il exact que le président de la municipalité était le numéro un d'une

 10   municipalité ?

 11   R.  Le président d'une municipalité en 1991, 1992, n'est-ce pas ?

 12   Q.  Oui, après les élections.

 13   R.  Eh bien, le président de la municipalité et le président du Conseil

 14   exécutif avaient des postes qui étaient un peu sur le même plan dans une

 15   municipalité.

 16   Q.  Vous voulez dire que le président de la municipalité n'était pas plus

 17   important que le président du Conseil exécutif ?

 18   R.  Enfin je ne vais pas aller jusque-là. Mais je dirais, s'agissant des

 19   postes que ces hommes occupaient, que ces deux postes étaient parallèles

 20   dans la municipalité de Bratunac.

 21   Q.  Est-ce que le chef du poste de sécurité publique et le commandant du

 22   poste de sécurité publique occupaient également deux postes parallèles

 23   s'agissant de la répartition du pouvoir ?

 24   R.  Non, ces deux postes ne sont peut-être pas parallèles. Le même poids ne

 25   peut pas être accordé sur le plan du poste qu'ils occupent à ces deux

 26   fonctions, si l'on tient compte des missions qui étaient imparties

 27   respectivement à ces deux hommes.

 28   Q.  Donc, pour ma part j'affirme que le président de la municipalité est


Page 17821

  1   plus important que le président du Conseil exécutif et que le président de

  2   la municipalité était Nijaz Dubicic, et le président du Conseil exécutif,

  3   Rodoljub Djukanovic, le premier étant Musulman, le deuxième Serbe, et que

  4   Nesim Muratovic était chef du poste de sécurité publique, c'était un

  5   Musulman, alors que le commandant du poste de police était Nikola Mandic,

  6   un Serbe, et que sur ces quatre fonctions, ces quatre postes, les deux

  7   postes les plus importants étaient occupés par des Musulmans, n'est-ce pas

  8   ?

  9   R.  Ces deux postes étaient détenus par des Musulmans, mais il faudrait

 10   parler de la répartition du pouvoir globale à cette époque-là, et des

 11   dispositions qui se sont appliquées pour aboutir à cette répartition. En

 12   effet, quand on sort quelque chose de son contexte, le fond se modifie et

 13   les choses apparaissent sous un angle un peu différent de la réalité. Je

 14   dois vous dire que lorsque nous avons eu les premières élections

 15   pluripartites, le Parti d'Action démocratique l'a emporté. Il a emporté 31

 16   sièges de députés sur 60 sièges au sein de l'assemblée municipale, et le

 17   Parti démocratique serbe a obtenu 24 sièges de l'assemblée, soit 40 % du

 18   total. Les autres partis politiques dirigés par le SDP ont obtenu 8 % des

 19   voix. Donc, à Bratunac, il y avait 21 600 habitants qui étaient

 20   d'appartenance ethnique musulmane et 11 500 Serbes. Autrement dit, deux

 21   fois plus de Musulmans que de Serbes, et le résultat des élections a été

 22   davantage en faveur des Musulmans que des autres groupes ethniques, compte

 23   tenu de la façon dont le vote avait été organisé et compte tenu d'une

 24   modification de statut qui a eu lieu par rapport à la municipalité

 25   précédente au fil du temps. Lorsque les résultats de ces élections

 26   pluripartites ont été connus, alors que l'ancienne municipalité de Bratunac

 27   prétendait vouloir changer les responsables du pouvoir local pour mettre un

 28   terme à ce qui avait cours par le passé, les militants du SDS ont réussi à


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  1   défendre leurs intérêts auprès du responsable de l'assemblée qui souhaitait

  2   que les choses changent. Jusqu'à ce moment-là, la majorité simple était

  3   nécessaire dans le cadre des votes à l'assemblée. Donc, la question de la

  4   majorité requise a été posée et placée à l'ordre du jour d'une réunion de

  5   l'assemblée, et il a été décidé qu'une majorité des deux tiers était

  6   désormais indispensable, ce qui a modifié les choses. Quand nous avons créé

  7   la nouvelle assemblée à la suite des premières élections pluripartites, un

  8   ultimatum a été posé par le SDS : soit nous acceptions un partage du

  9   pouvoir à 50/50, soit l'assemblée ne serait tout simplement pas constituée.

 10   Nous souhaitions participer à l'exercice du pouvoir après ces élections,

 11   mais nous souhaitions que la répartition se fasse à 52 % par rapport à 48

 12   %. Mais, les responsables du SDS n'ont pas été d'accord. Ils ont donc placé

 13   une condition préalable : soit nous acceptions un partage à 50/50, soit il

 14   n'y aurait pas de pouvoir municipal dans la municipalité de Bratunac.

 15   Q.  Je vous remercie. Corrigeons un point qui est inexact suite à

 16   l'interrogatoire principal. Il n'est pas exact que le SDA ait succombé aux

 17   pressions exercées par les Serbes et le SDS pour qu'une majorité des deux

 18   tiers soit imposée en tant que condition préalable au lieu d'une majorité

 19   simple. Simplement, l'ancienne assemblée municipale communiste de la

 20   municipalité de Bratunac a modifié cette règle, n'est-ce pas ?

 21   R.  C'est l'ancienne assemblée qui a modifié cette règle.

 22   Q.  Je vous remercie.

 23   R.  Mais ceci s'est fait contre les dispositions valables dans la

 24   république par le passé. Nous avons demandé une modification, mais nous

 25   avons demandé que les anciennes réglementations de la république soient

 26   toujours respectées. Je n'ai pas besoin de m'excuser de parler ainsi. Nous

 27   souhaitions que tout se fasse dans le respect des anciennes règles de la

 28   république. Cependant, ce n'était pas la volonté du SDS.


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  1   Q.  Pourquoi est-ce que le SDS aurait eu une telle volonté alors que le

  2   nouveau statut lui était plus favorable que l'ancien, après modification du

  3   statut par l'assemblée communiste de la période précédente ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Je vous remercie. Donc, c'est une inexactitude qui est corrigée.

  6   Deuxième chose, les chiffres. Est-ce que les pourcentages étaient 50 %

  7   contre 50 % ?

  8   R.  Je reviendrai sur un point que vous avez dit vouloir corriger. Comme

  9   vous l'avez dit, j'ai déclaré dans ma déclaration écrite que c'est

 10   l'ancienne assemblée qui avait modifié la situation. Je ne vois pas

 11   pourquoi on devrait parler d'inexactitude qui nécessite une correction dans

 12   ces conditions.

 13   Q.  Je vous remercie. M. Tieger a peut-être présenté de façon un peu

 14   différente vos propres propos. Il a dit que vous aviez succombé aux

 15   pressions exercées par le SDS, s'agissant de cette volonté de mettre en

 16   place une majorité des deux tiers comme condition préalable pour un vote de

 17   l'assemblée. Le SDS n'avait pas le pouvoir d'agir de cette façon. Donc, je

 18   vous demanderais simplement si l'arrangement mis en place et proposé a été

 19   un partage du pouvoir à 50/50.

 20   R.  Eh bien, vous savez comment le partage du pouvoir s'est fait. Vous

 21   savez que vous n'étiez pas prêt à partager certains postes. Un accord a été

 22   conclu, eu égard à certains postes qui ont été effectivement répartis à

 23   50/50, mais pas d'autres.

 24   Q.  Je vous remercie. S'agissant des quatre postes les plus importants de

 25   la municipalité, deux des plus importants sur les quatre ont été accordés

 26   au SDA et les deux moins importants ont été accordés au SDS, n'est-ce pas ?

 27   R.  Nous ne pouvons pas singulariser les choses de cette façon. Il faut

 28   regarder la situation dans son ensemble. Le président du Conseil exécutif


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  1   était Serbe. Le chef de la police était Musulman. Le commandant de la

  2   police était Serbe et le Conseil exécutif, à cette époque-là, comptait cinq

  3   membres, trois postes parmi ce conseil exécutif ont été accordés aux Serbes

  4   et deux aux Musulmans de Bosnie. Plus tard, on a demandé la création d'un

  5   sixième poste de façon à ce que l'équilibre 50/50 se fasse avec trois

  6   postes détenus par chaque groupe ethnique, et ceci a été accepté. Il y a eu

  7   donc un partage 50/50 au sein du Conseil exécutif. Mais si vous regardez

  8   l'ensemble, les dispositions prévoyaient un partage à 50/50.

  9   Q.  Je vous remercie. Est-ce qu'à l'époque du socialisme, le président de

 10   la municipalité était Musulman ou Serbe, et est-ce que le président du

 11   Conseil exécutif devait être issu des rangs d'un autre groupe ethnique ?

 12   Est-ce que c'était une habitude très positive qui a existé, quel que soit

 13   le système politique en vigueur ?

 14   R.  Vous savez très bien la façon dont les choses fonctionnaient. Un poste

 15   était donné à un groupe ethnique et l'autre, à un autre groupe ethnique, et

 16   c'est un troisième groupe ethnique qui se voyait accorder le troisième

 17   poste.

 18   Q.  Merci. Est-il clair que vous-même et moi-même savons très bien de quoi

 19   nous parlons, mais que nous parlons ici devant les Juges d'une Chambre de

 20   première instance qui ne connaissent pas parfaitement notre système

 21   politique et que, par conséquent, nous devons apporter des explications à

 22   ce sujet.

 23   Monsieur Gusic, je vais vous parler de ce que je sais, de ce que j'ai

 24   appris quant à ce qui s'est passé dans votre région, et vous me direz

 25   simplement si vous êtes d'accord ou pas, et ensuite nous aurons une

 26   discussion plus approfondie, le cas échéant, sur la base de documents que

 27   je vais vous soumettre. Donc, savez-vous qu'à Sarajevo, le 31 mars, une

 28   décision a été votée portant création de la Ligue patriotique, et que le 30


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  1   avril, celle-ci a été créée effectivement, Bratunac ayant un état-major

  2   municipal et une unité de la Ligue patriotique dans la localité ?

  3   R.  Le 30 mars de quelle année ?

  4   Q.  1991.

  5   R.  1991.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est impossible de vous suivre à cette

  7   vitesse. Pourquoi est-ce que vous ne parlez pas l'un après l'autre ? En

  8   effet, il y a chevauchement de vos voix et les interprètes ont du mal à

  9   vous suivre. Alors, est-ce qu'il y a eu création de la Ligue patriotique le

 10   31 mars 1991, Monsieur ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce chevauchement est dû à la vitesse qui m'est

 12   imposée, quant au manque de précision, et il est dû à la tension qui est à

 13   mienne.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ma question consistait à demander au

 15   témoin s'il savait que la Ligue patriotique avait été créée le 31 mars

 16   1991. Quant à vous, je vous demanderais de vous abstenir de commentaires de

 17   ce genre.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais vraiment pas. Je ne me souviens pas

 19   si c'était le 30 mars 1991.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Je vous remercie. Savez-vous que cette décision a été appliquée le 30

 22   avril et que la Ligue patriotique a été créée le 30 avril ?

 23   R.  Je ne sais pas. Vraiment, je ne sais pas.

 24   Q.  Merci. Savez-vous que le 10 ou le 11 juin, l'organe politique principal

 25   a été créé, à savoir le Conseil de la Défense des Musulmans au sein du SDA,

 26   que ceci s'est fait dans les locaux de la maison de la police, et que cette

 27   direction politique est restée celle de la Ligue patriotique ?

 28   R.  Je ne sais pas si c'est exact. Je sais qu'il y a eu des réunions qui


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  1   ont porté sur ce sujet, mais est-ce que les choses se sont vraiment faites

  2   ou pas, je ne le sais vraiment pas.

  3   Q.  Merci. Savez-vous que Sefer Halilovic, jusqu'à la fin de septembre

  4   1991, a créé la Ligue patriotique dans à peu près 90 municipalités sur un

  5   total de 103 ou 104, avec des états-majors de la Ligue patriotique et des

  6   états-majors régionaux de celle-ci qui ont été créés, ainsi que des unités

  7   et des détachements ?

  8   R.  Je ne saurais vraiment pas le dire, je ne le crois pas. Peut-être que

  9   ceci a été discuté. Peut-être que des discussions ont porté sur cette

 10   création des diverses instances de la Ligue patriotique et que ceci a été

 11   évoqué sur le papier, mais que ceci ait réellement existé dans la pratique,

 12   dans la réalité, je ne le crois vraiment pas. En tout cas, pas dans le

 13   secteur de Bratunac où j'étais représentant politique local à l'époque,

 14   représentant du SDA et membre du Conseil exécutif. Je n'étais pas en mesure

 15   de me rendre à toutes les réunions traitant de ce sujet, où je n'étais

 16   d'ailleurs pas invité, mais cela ne signifie pas que je ne sois pas au

 17   courant de ce qui s'est passé. Cela étant, je n'ai pas manifesté un intérêt

 18   particulier à l'époque pour certaines évolutions qui étaient en cours. Et

 19   s'agissant de cette organisation détaillée de la Ligue patriotique, eh

 20   bien, si les choses se sont passées comme vous le dites, cela n'a pu se

 21   faire que dans certaines municipalités, peut-être.

 22   Q.  Merci. Etes-vous en train de dire que la Ligue patriotique n'était pas

 23   une organisation très structurée et très solide, là où elle a existé ?

 24   R.  Peut-être que certaines personnes évoquaient dans leurs rêves la

 25   création d'une telle structure, ou que celle-ci a été évoquée dans des

 26   documents, mais je sais qu'à Bratunac rien de ce genre ne s'est fait.

 27   Q.  Je vous remercie. Qui était le commandant de la Défense territoriale à

 28   la suite des premières élections multipartites ?


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  1   R.  Le commandant de la Défense territoriale après les premières élections

  2   multipartites a été Dzemo Hodzic, je crois.

  3   Q.  Est-ce que c'était un Musulman ?

  4   R.  Bien entendu, oui.

  5   Q.  Merci. Alors, maintenant, je vais vous décrire la situation de Bratunac

  6   lorsque la localité était paisible. D'ailleurs, j'aimerais que nous

  7   revenions sur le document versé au dossier il y a un instant. Est-il exact

  8   qu'il y a un instant, un document a été soumis, qui date du 14 mai 1990 et

  9   qui concerne le fait que des armes ont été prises à la Défense territoriale

 10   dans les entrepôts de la JNA ?

 11   R.  Moi, ce qu'on m'a montré, il me semble, c'était un ordre, l'ordre de

 12   s'emparer de ces armes.

 13   Q.  Merci. Est-ce que vous savez quelles étaient mes fonctions à cette

 14   date-là ?

 15   R.  Le 14 mai 1990 ? Je ne sais pas quelles étaient vos fonctions à cette

 16   époque-là, je ne sais pas si le SDS avait déjà été créé. Vous avez bien

 17   parlé de mai 1990 ?

 18   Q.  Je parlais du 14 mai 1990, et de cet ordre dont il a été question tout

 19   à l'heure, qui concernait la prise des armes de la Défense territoriale,

 20   ordre signé par la général Adzic.

 21   R.  Je ne sais pas quelles étaient vos fonctions le 14 mai 1990. Vraiment,

 22   je ne le sais pas. Je ne sais même pas exactement à quelle date le SDS a

 23   été créé, donc comment est-ce que je pourrais savoir quelles étaient vos

 24   fonctions à cette époque-là ?

 25   Q.  Merci. Donc, à cette époque-là, vous n'aviez pas entendu parler de moi

 26   ?

 27   R.  Je ne sais pas exactement. Vous savez, il y a beaucoup de choses qu'il

 28   faut se rappeler. Est-ce que vous imaginez le nombre d'années qui se sont


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  1   écoulées depuis 1990 jusqu'à 2011 ? Onze ans se sont écoulés.

  2   Q.  Merci. Monsieur Gusic, le Parti démocratique serbe a été créé -- enfin,

  3   l'annonce de sa création a eu lieu le 3 juillet, et sa création effective a

  4   eu lieu le 12 juillet. Or, l'ordre dont nous parlons remonte à deux mois

  5   avant, et le Parti démocratique serbe n'a eu aucune part à la prise de ces

  6   armes parce qu'il n'existait pas encore; exact ou pas ?

  7   R.  Bien entendu, il n'existait pas, il n'a donc pas pu contribuer à cette

  8   action. Cela ne signifie pas qu'il n'était pas prévu que cette prise des

  9   armes se fasse à l'avenir.

 10   Q.  Savez-vous cela, ou est-ce une conjecture de votre part ?

 11   R.  Très honnêtement, étant donné tout ce qui s'est passé et si l'on

 12   regarde les événements avec la sagesse que l'on acquière par la suite, je

 13   crois que rien de ce qui s'est passé ne s'est passé par accident,

 14   absolument rien. Et si l'on remet ensemble les pièces du puzzle, on ne peut

 15   que conclure avec un degré assez élevé de certitudes ce que j'ai conclu

 16   moi-même s'agissant de la prise de ces armes dans les entrepôts de la JNA

 17   et de la Défense territoriale. Vous voyez ce qui m'intéresse, c'est

 18   d'analyser quelles sont les municipalités qui ont choisi de reprendre les

 19   armes des dépôts de la JNA et de la Défense territoriale.

 20   Q.  Est-ce que vous savez que le 14 mai 1990, le HDZ existait déjà en

 21   Croatie et que Tudjman était déjà au pouvoir ? Il l'était depuis avril.

 22   R.  Je ne sais vraiment pas. Je ne sais pas exactement quel mois de quelle

 23   année ce parti a été créé.

 24   Q.  Le 27 mars 1990, la création du SDA a été annoncée et il a été créé

 25   effectivement un peu plus tard, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et le 27 mars 1990, Izetbegovic a tenu une conférence de presse pour

 28   annoncer la création du parti.


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  1   R.  Je ne connais pas la date exacte, mais je suppose que c'est bien cela.

  2   Si le parti a été créé fin mai, l'annonce de sa création a dû avoir lieu un

  3   peu plus tôt. Donc cela semble logique.

  4   Q.  Merci. Monsieur Gusic, est-ce c'est le SDS et la JNA qui avaient

  5   planifié de s'emparer des armes de la Défense territoriale, ou est-ce que

  6   ces plans existaient déjà de la part du SDA et du HDZ, et est-ce que ce

  7   sont ces plans du SDA et du HDZ qui ont contraint le SDS à agir ?

  8   R.  Vous me posez une question directrice. Je ne sais vraiment pas. Vous

  9   essayez de me faire répondre de la façon qui vous convient, mais moi je

 10   suis ici pour parler des choses que je sais, de ce que j'ai vu en essayant

 11   d'expliquer le détail de ce qui s'est passé de façon réelle.

 12   A l'époque, nous disposions de certains renseignements. Il y avait des gens

 13   qui disaient que la Serbie et l'armée populaire yougoslave avaient le grand

 14   projet de créer la Grande-Serbie.

 15   Q.  Monsieur, nous n'avons pas le temps pour un débat politique.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gusic, l'accusé, au cours de

 17   son contre-interrogatoire, a le droit de vous poser une question

 18   directrice. Mais vous êtes libre d'y répondre de la façon qui vous convient

 19   le mieux.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Nous laissons maintenant ce sujet. Alors, compte tenu du fait que M.

 24   Tieger aujourd'hui a confirmé en votre nom que Bratunac était calme et

 25   paisible et qu'il n'y avait pas de problème jusqu'au moment où les Serbes

 26   ont commencé à s'agiter, alors est-il exact de dire qu'en juillet 1991, des

 27   extrémistes musulmans ont incendié, ont brûlé des drapeaux serbes sur

 28   lesquels ils ont déféqué, et qu'ils les ont utilisés comme du papier


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  1   toilette ?

  2   R.  Vous voulez dire en 1991 ?

  3   Q.  Oui, juillet 1991. Enfin, répondez ce qui vous semble être vrai.

  4   R.  Et bien, je ne pense pas que cela ait été le cas. J'en aurais été mis

  5   au courant. On aurait discuté de cela à toutes sortes de réunions si jamais

  6   cela s'était passé. Des débats publics auraient été organisés.

  7   Q.  Est-il exact qu'un représentant de la JNA est arrivé, fin août, afin de

  8   prendre les dossiers qui consignaient la liste des conscrits militaires ?

  9   Il s'est vu opposer une fin de non recevoir, en fait, à la mi-août, une

 10   unité était arrivée pour accomplir la même tâche, mais les Musulmans SE

 11   sont rassemblés du bâtiment municipal et ont empêché à la JNA d'emporter

 12   ces documents, n'est-ce pas ?

 13   R.  Tout d'abord, le secrétariat de la Défense populaire et le président

 14   Deronjic du SDS qui s'y était rendu conjointement avec des représentants du

 15   parti avaient demandé ces documents. Bien entendu, il s'agissait de

 16   documents très importants et le secrétaire à la Défense nationale n'avait

 17   pas autorité pour remettre des documents aussi importants au président du

 18   SDS ou au parti du SDS. Il a été menacé par le SDS, ils lui ont dit qu'ils

 19   le jetteraient par la fenêtre. Nous avons appelé la police, et la police a

 20   posté des hommes pour garder son bureau. Le SDS, par l'intermédiaire de ses

 21   activistes, ensuite a organisé un meeting. Ils ont rassemblé beaucoup de

 22   monde.

 23   Q.  Un instant, nous y viendrons. Vous voulez dire que ce n'était pas un

 24   représentant de la JNA, mais Deronjic qui est venu ? Alors dites simplement

 25   ce que vous pensez être le cas.

 26   R.  Il faut replacer les choses dans le contexte des événements. Je parle

 27   de cette journée où une unité de la JNA est arrivée pour prendre ces

 28   documents. Il me semble que vous, vous parlez de la journée précédente


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  1   lorsque vous dites un officier de la JNA serait venu et qu'il aurait

  2   demandé ces documents.

  3   Q.  Quelques jours auparavant, un représentant de la JNA est venu prendre

  4   ce qui appartenait au secrétariat fédéral de la Défense populaire. Or,

  5   toute la documentation militaire appartenait au ministère fédéral de la

  6   Défense, n'est-ce pas ?

  7   R.  Eh bien, je ne sais pas exactement si quelqu'un était venu quelques

  8   jours plus tôt pour demander ces documents. Je suppose que oui. Le

  9   secrétaire du secrétariat à la Défense populaire a une responsabilité

 10   directe, et c'est le commandement de Tuzla qui était son supérieur direct.

 11   Or, personne de ce commandement de Tuzla ne s'était rendu auprès de lui

 12   pour lui demander ces documents. Il ne pouvait les fournir à personne

 13   d'autre qui serait venu d'une autre région sans consulter au préalable son

 14   commandement supérieur, le commandement qui lui était hiérarchiquement

 15   supérieur.

 16   Q.  Voulez-vous dire qu'il ne s'agissait pas d'un représentant de la JNA

 17   venant du Corps de Tuzla ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Le secrétaire à la Défense nationale, était-il un Musulman ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et le commandant de la Défense territoriale aussi, était-il un Musulman

 22   ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Merci. Est-il exact de dire que peu de temps après, un drapeau du SDS a

 25   été brûlé, encore une fois, et que les Serbes de Kravica ont été menacés,

 26   on les a menacés d'incendier leurs maisons, on a vu passer des véhicules

 27   dans Kravica, d'où l'on pouvait voir sorties par les fenêtres des armes à

 28   canon long, de façon ostensible ?


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  1   R.  Je ne pense pas que ce soit exact, et surtout pas qu'on ait fait

  2   défiler ces véhicules dans Kravica avec des armes à canons longs qui

  3   dépassaient les fenêtres. Je ne crois absolument pas que les Musulmans

  4   aient pu faire quoi que ce soit de tel.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Je crois qu'il s'agit d'une question qui a

  7   induit en erreur le témoin. Parce qu'il s'agit de dire qu'un drapeau serbe,

  8   de nouveau, a été brûlé, alors que le témoin a infirmé la première

  9   affirmation en parlant de drapeau brûlé. Donc le Dr Karadzic essaie de

 10   revenir par une porte dérobée, par l'intermédiaire de cette question, en

 11   espérant que cela passera inaperçu.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Cela ne vous a pas échappé,

 13   en tout cas, et une réponse a été apportée.

 14   Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce qu'une crise majeure a éclaté début septembre, avec des morts ?

 18   R.  Lorsque les activistes du SDS dans le village ou le hameau de Kravica

 19   ont dressé une embuscade et qu'ils ont tiré dans la soirée sur un véhicule

 20   où quatre Bosniens se trouvaient à bord, qu'ils ont tué deux Bosniens à

 21   cette occasion, alors que deux autres ont été gravement blessés, bien

 22   entendu, qu'une crise est apparue, qu'il y a eu beaucoup de préoccupations

 23   et de tensions, et cetera.

 24   Q.  Merci. Nous allons maintenant revenir sur une partie des sujets que

 25   nous avons énumérés. Je voudrais que l'on affiche maintenant le document

 26   1D3876.

 27   Alors, Monsieur Gusic, nous avons ici le commandement du 17e Corps,

 28   l'organe chargé de la sécurité, qui a son siège à Tuzla, à la date du 30


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  1   décembre 1991. Il est indiqué, je cite : "Vu de l'organisation

  2   paramilitaire au sud du fleuve Sava dans la zone de responsabilité du 7e

  3   Corps." Est-ce que vous voyez cette date, ce corps avait une zone de

  4   responsabilité qui s'étendait jusqu'en Croatie ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Alors nous n'allons pas perdre de temps. Voyons la page 4. En fait,

  7   peut-on d'abord afficher la page 3, puis la page 4. Nous allons voir que

  8   tant les Croates, que les Serbes et les Musulmans sont observés par eux, et

  9   qu'on prend bonne note de ces observations.

 10   Alors en page 3, s'il vous plaît, de version serbe, donc pour le territoire

 11   de Derventa, ici on note que les formations paramilitaires du HDZ sont les

 12   plus représentées, les plus présentes. Pouvons-nous maintenant avoir la

 13   page 4. Il est dit ici qu'il n'y a pas de données concernant le SDA à

 14   Derventa, qu'ils n'en ont pas, mais que dans le village de Bosanski

 15   Dubocac, le HDZ qui distribue des armes. Quant aux Serbes, il est indiqué

 16   qui met en place quoi et qui s'arme. Il n'y a absolument aucun parti pris.

 17   Tous sont observés, les premiers comme les seconds, comme les troisièmes.

 18   Alors je vous prie maintenant d'afficher la page 16 en serbe, où figure

 19   votre municipalité.

 20   Il est indiqué ici : Formations paramilitaires du SDA dans les

 21   municipalités de Kozluk, Kamenica, et cetera, on indique des unités de

 22   petites tailles d'équivalent à des compagnies sont constituées, à Glogova,

 23   Konjevic Polje, Repovac, ont été constituées des unités de volontaires du

 24   SDA. Ensuite, il est question de Srebrenica, ce n'est pas important. Le

 25   paragraphe suivant. Il est dit, d'après le plan des structures centrales du

 26   SDA de Sarajevo, il a été prévu que la cellule de Crise militaire pour la

 27   Bosnie du nord-est sur le territoire de chacune des municipalités citées

 28   constitue --


Page 17834

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, il est extrêmement

  2   difficile de retrouver les passages dont vous êtes en train de donner

  3   lecture.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Sur le territoire de Zvornik, de Bratunac, de

  5   Srebrenica. En serbe, c'est la page numéro 16, mais en anglais,

  6   probablement la page 15 ou 17.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La version anglaise ne comporte que cinq

  8   pages.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc le document n'a pas été traduit dans son

 10   intégralité, excusez-moi. Alors nous allons passer sur Brcko, essayons de

 11   retrouver Zvornik, Bratunac, Srebrenica, page suivante. Ça a été

 12   partiellement traduit. Je voudrais que l'on retrouve en anglais le

 13   paragraphe qui concerne Zvornik, Bratunac et Srebrenica.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'y a que deux pages de texte et

 15   trois pages de schéma. Et je n'arrive pas à retrouver ce passage.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur le Témoin, s'il vous plaît, est-ce que vous arrivez à voir

 18   qu'il s'agit ici de bataillons, et qu'il y a 500 hommes dans chaque

 19   municipalité, ou plutôt qu'on n'a pas encore atteint cet effectif. Par

 20   conséquent, qu'on travaille en hâte à l'armement des membres de ces

 21   bataillons du SDA qui vont intégrer les effectifs d'unités plus importantes

 22   de l'ordre de la brigade et que, pour ce qui est de la division de la Drina

 23   --

 24   R.  Il faudra peut-être que je puisse lire l'intégralité du document avant

 25   de pouvoir donner un commentaire de bonne qualité. Ce que vous faites,

 26   c'est que vous retirez des éléments de leur contexte et cela vous permet

 27   effectivement de donner l'interprétation que vous avancez. Mais, compte

 28   tenu du fait que ce document date ou en tout cas porte la date du 30


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  1   décembre 1991, nous sommes trois à quatre mois, tout au plus, après

  2   l'agression lancée contre la Bosnie-Herzégovine et l'occupation de la

  3   municipalité. Les Serbes étaient armés jusqu'aux dents.

  4   Q.  Nous y viendrons.

  5   R.  Et la JNA était tellement surpuissante à ce moment-là que, eh bien, je

  6   crois que ce document pour moi ressemble plutôt à quelque chose que l'armée

  7   a élaboré pour essayer de justifier une partie de ses actions.

  8   Q.  Et vous allez voir qu'ils n'ont pas épargné les Serbes non plus. Ce que

  9   je vous demande c'est de me dire si l'armée n'a pas fait une évaluation ici

 10   en découvrant que le SDA, au niveau central, avait l'intention de mettre en

 11   place dans chaque municipalité un bataillon de 500 hommes, et que tous

 12   allaient être réunis au sein d'une division appelée la Division de la

 13   Drina. Au numéro 4, nous voyons que chaque municipalité avait constitué des

 14   forces de police musulmanes illégales avec un effectif de 30 hommes en

 15   recourant aux membres démobilisés des postes de police également.

 16   R.  Je crois qu'il faut être précis. Vous voyez le numéro 2, le territoire

 17   de Bratunac et Srebrenica, il est dit qu'il s'agit des villages de Glogova,

 18   Konjevic Polje, Repovac, que des unités volontaires du SDA y auraient été

 19   mises en place. Alors, moi, je peux vous garantir qu'aucune unité du SDA

 20   n'a été mise en place.

 21   Q.  Merci. Voyez ce qui est dit pour les villages de Podgradac, Kravica,

 22   Kajici, Mali Borici, Bljeceva, Grabovacka Rejeka, et Polum [phon],

 23   concernant les formations paramilitaires du SDS, il est dit qu'à Bratunac

 24   aussi des unités armées de volontaires ont été constituées sur la base de

 25   locaux à orientation pro-Chetnik. Peut-on avoir la page suivante, numéro

 26   18. Le point numéro 2 dit Skelani, Lijesce, Podravanje, des unités de

 27   volontaires pro-Chetniks ont été constituées aux effectifs inconnus.

 28   Est-ce que vous savez, Monsieur le Témoin, que toutes les formations serbes


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  1   se sont subordonnées à la JNA et se sont fait connaître en tant qu'unités

  2   de volontaires et que la JNA a objecté à leur orientation idéologique qu'il

  3   s'agissait-là des seules unités de volontaires serbes ? Le saviez-vous ?

  4   R.  Je ne connais pas. Je n'ai pas connaissance de cela. Ce que je peux

  5   dire en toute responsabilité au sujet de Bratunac, à savoir que le SDS a

  6   constitué des cellules de Crise pour la municipalité de Bratunac et toutes

  7   les localités de cette municipalité.

  8   Q.  Nous y viendrons.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page 18.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler de Nurif Rizvanovic ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Voilà. Au point numéro 2 ce que dit la JNA de Nurif Rizvanovic : ancien

 14   jeune officier, agent de la BND qui a été jugé. Le BND, ce sont le service

 15   secret de l'Allemagne fédérale. A présent, participant à présent à

 16   l'armement et à la constitution des formations armées de la SDS sur les

 17   territoires des municipalités de Bratunac et de Srebrenica. Alors, est-ce

 18   que vous savez que c'était un commandant de la Division de la Drina, il

 19   était censé l'être en tout cas ?

 20   R.  Eh bien, concernant Nurif Rizvanoic, j'ai entendu parler de lui,

 21   c'était un ancien officier de la JNA, il a terminé sa carrière au sein de

 22   la JNA. En fait, il est natif de Glogova, il y est né. C'est un village

 23   dans la municipalité de Bratunac, à quelque 6 kilomètres du centre. Et,

 24   vers l'été de 1991, il est venu dans son village de Glogova, il est arrivé

 25   avec certaines informations concernant la JNA dont il était officier. Il

 26   disait avoir des informations selon lesquelles la JNA et la Serbie avaient

 27   l'intention de créer une Grande-Serbie au détriment de la Bosnie. Et il

 28   disait que les Bosniens devaient se tenir prêts à faire face à cela s'ils


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  1   souhaitaient éviter que de telles intentions puissent être menées à leur

  2   terme.

  3   Alors, il a essayé de mettre en place un conseil. Je crois que

  4   c'était le Conseil musulman. Il a réussi à rassembler quelques personnes

  5   dans son village de Glogova, et peut-être encore dans quelques communautés

  6   locales. Mais je ne crois pas qu'il ait réussi à rassembler plus de 15 ou

  7   20 habitants. A l'époque, je crois que certains médias de Belgrade ont

  8   écrit un feuilleton à son sujet en indiquant qu'il était un agent triple,

  9   collaborateur du Kosovo, qu'il travaillait également pour les services

 10   secrets allemand et italien. Et donc, à Bratunac, lorsqu'on a appris ces

 11   informations, on ne l'a pas cru. Ces tentatives se sont soldées par un

 12   échec. Et les autorités légales de Bratunac ont interdit ces activités, si

 13   bien que Rizvanovic a dû quitter ce territoire, et je crois que c'était

 14   début septembre ou mi-septembre 1991. Voilà pour ce qui concerne Nurif

 15   Rizvanovic, dans cette période de temps dont nous sommes en train de

 16   parler.

 17   Q.  Merci. N'est-il exact que Nurif Rizvanovic exerçait le commandement des

 18   unités qui étaient liées à Konjevic Polje, Cerska, en fait, à cette

 19   intersection ou ce croisement entre Vlasenica, Bratunac et Zvornik, et que

 20   Naser Oric l'a dénoncé comme traître ?

 21   R.  Avant de répondre à cette question, et j'y répondrai, je suis au

 22   courant partiellement de cela. Et peut-être cela serait-il utile aux Juges

 23   de la Chambre. Mais je viens de me rappeler une chose, et vous, vous saurez

 24   nous dire si c'est la vérité ou non. Ce Nurif Rizvanovic est venu nous voir

 25   un jour dans notre bureau. Je me suis trouvé être présent et j'ai dit que

 26   j'avais une réunion avec Radovan Karadzic et Fikret Abdic lorsque cette

 27   personne du SDA et lui-même m'ont demandé où j'allais. Radovan Karadzic et

 28   Fikret Abdic -- donc j'avais l'impression qu'ils vous connaissaient


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  1   vraiment ainsi que Abdic ainsi que de nombreuses personnes importantes à

  2   Sarajevo. Alors, probablement que vous en savez beaucoup à son sujet. Il y

  3   a un certain nombre de choses que je voudrais dire. Lorsque Bratunac a été

  4   occupée, lorsque plus de 20 000 Musulmans de Bratunac ont été exterminés

  5   sur place, lorsque près de 1 000 civils ont été tués et que tous ces camps

  6   ont été mis en place et qu'une torture particulièrement cruelle a été mise

  7   en place, il y a eu ensuite des échanges. Mais en tout cas, après ces deux

  8   mois, une fois que tous ces Bosniens ont été expulsés, ils ont tout d'abord

  9   été placés dans la région de Srebrenik, Lukavac, Zivinice, Tuzla, et

 10   Rizvanovic a fait son apparition alors pour essayer d'organiser les gens

 11   qui avaient été expulsés pour constituer sur cette base une brigade et

 12   essayer de revenir sur le territoire de la municipalité de Srebrenica. Il a

 13   réussi à rassembler près de 600 volontaires qui, à l'époque, étaient

 14   véritablement prêts et motivés à essayer de revenir compte tenu de ce

 15   qu'ils avaient eu à traverser. Il a réussi à les armer au maximum, à les

 16   équiper de moyens matériels et techniques, et il a réussi à contourner les

 17   lignes de front telles qu'elles étaient établies, donc à partir de

 18   Kalesija, pour gagner l'intérieur du territoire de la municipalité de

 19   Konjevic Polje, Bratunac et Srebrenica. Donc, ces quelque 400 combattants

 20   armés, disposant de grands moyens matériels et techniques, ont été

 21   infiltrés sur ces territoires et ont poursuivi les combats que vous

 22   évoquez.

 23   Q.  Les moyens matériels et techniques ou le MTS c'est du matériel

 24   militaire, n'est-ce pas ? Je dis ça pour les interprètes.

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Pouvons-nous voir la dernière page de ce document. Est-ce que vous

 27   voyez ce qui concerne ici la Bosnie du nord-est, donc cellule de crise,

 28   cellule politique de Bosnie-Herzégovine, et ensuite, du côté droit, on voit


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  1   état-major militaire pour la Bosnie du nord-est. Et ensuite, on voit ce qui

  2   correspond à la municipalité de Bratunac. Alors, cet organigramme a fini

  3   d'être mis en place en 1991, Monsieur Gusic. Est-il possible que vous, en

  4   tant que membre éminent du SDA et plus tard en tant qu'officier de l'ABiH,

  5   vous ayez été exclu de ces préparatifs ?

  6   R.  Très franchement, vous trouveriez sans doute un interlocuteur plus

  7   approprié concernant un tel organigramme en vous adressant à quelqu'un qui

  8   avait vraiment à voir avec cet organigramme. Maintenant, concernant le fait

  9   d'être exclu ou de ne pas être exclu, je peux en parler pour la

 10   municipalité de Bratunac et pour rien d'autre.

 11   Au début, lors de l'interrogatoire mené par M. le Procureur, j'ai

 12   apporté des précisions sur l'époque à laquelle je suis devenu président du

 13   parti et quelles étaient les circonstances également, le fait qu'il y avait

 14   plus d'armes aux mains des Serbes qu'il n'y avait de Serbes à Bratunac, le

 15   fait que le JNA et le SDS entraînaient les civils au maniement des armes,

 16   et cetera. A cette époque, moi aussi, j'ai essayé de voir quel était le

 17   niveau de préparation de la population musulmane en termes de défense, si

 18   jamais des incursions ou des tentatives d'occupation de Bratunac se

 19   produisaient.

 20   Et, avant que je n'arrive à ce poste, il a été question à l'échelon

 21   de la municipalité de Bratunac de la nécessité d'organiser quelque chose,

 22   puisque nous avions des informations de cette nature. Il a été dit que nous

 23   devions nous défendre et nous organiser et que nous ne devions pas nous

 24   abandonner au hasard, que nous devions nous organiser pour nous défendre.

 25   Alors, je ne sais pas quand. C'était peut-être janvier ou février. Je n'en

 26   suis pas tout à fait sûr.

 27   Mais le comité municipal du SDA à Bratunac a adopté une décision ou une

 28   conclusion, je crois, au terme de laquelle il était question de mettre en


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  1   place -- alors, je ne suis pas sûr si c'était une cellule de Crise. Nous

  2   l'avons appelée, je crois, état-major de la défense de Bratunac. Et il y

  3   avait un commandant de cet état-major qui avait été nommé. Tout cela

  4   existait, en tout cas, sur le papier. Et cette personnalité s'était vue

  5   confier la mission de se rendre en visite sur le terrain dans toutes les

  6   localités où les Musulmans étaient majoritaires. Il devait trouver une

  7   personne de la localité en question qui serait capable de prendre en charge

  8   la tâche consistant à constituer une unité et à organiser les membres de

  9   cette unité en vue d'une éventuelle attaque, afin qu'ils puissent se

 10   défendre.

 11   Je pense qu'au début de ces activités, il avait désigné, effectivement, un

 12   certain nombre d'individus à cet effet, mais une dizaine de jours avant

 13   l'occupation de Bratunac, tous ces activistes ou en tout cas la plupart

 14   d'entre eux ont compris quel danger les menaçait, ils ont compris ce qui

 15   s'était passé à Bijeljina, si bien que --

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   R.  Laissez-moi finir, s'il vous plaît. Si bien qu'ils sont tous partis.

 18   Ils ont tous déserté, en quelque sorte, jusqu'au dernier, y compris celui

 19   qui était censé les commander tous. Si bien que le 17 avril, à Bratunac,

 20   personne n'a opposé la moindre résistance à ces unités qui ont fait

 21   irruption depuis la Serbie, et personne ne s'est trouvé là pour tirer le

 22   moindre coup de feu contre eux.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 24   document avant que nous ne passions à la suite pour que je puisse vous

 25   montrer qu'il n'en a pas été ainsi.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 27   M. TIEGER : [interprétation] J'ai essayé de voir dans quelle mesure le

 28   témoin a ou n'a pas apporté un éclairage concernant ce document -- enfin,


Page 17841

  1   dans la mesure où il serait présenté pour essayer de remettre en question

  2   tel ou tel élément avancé par le témoin. Et je dois dire que je suis assez

  3   perplexe et que je le suis d'autant plus que je n'ai pas été en mesure

  4   d'examiner l'intégralité du document, puisqu'il n'a pas été traduit. Cela

  5   n'est pas d'une portée telle qu'en temps normal je serais amené à soulever

  6   une objection, mais il y a également le problème du défaut du manque d'une

  7   traduction qui est épatant, ne serait-ce qu'en comparant ce dont on dispose

  8   à la taille du document dans l'original. Donc, je laisse cela entre les

  9   mains des Juges de la Chambre. Je ne veux pas trop insister mais, à mon

 10   sens, il y a un problème. Peut-être que Me Robinson peut éclairer notre

 11   lanterne quant à la finalité du versement de ce document.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, je me demande également si le

 13   témoin a confirmé quoi que ce soit concernant ce document.

 14   Maître Robinson.

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je laisserai M.

 16   Karadzic s'expliquer. Je dirais simplement qu'il a été discuté suffisamment

 17   en détail de ce document pour que l'on puisse le verser aux fins d'éclairer

 18   le contexte. Mais quant à sa pertinence réelle, je laisse M. Karadzic qui

 19   est mieux placé sur ce point, vous l'expliquer.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Ce document émane de la JNA

 22   et montre une approche impartiale qui est celle de la JNA, dénuée de toute

 23   idéologie quelle qu'elle soit à l'égard de toutes parties présentes en

 24   Bosnie. On voit la JNA enregistrer et consigner le comportement de chacune

 25   des parties, les tentatives d'armement et d'organisation. Alors, jusqu'à

 26   présent, on a essayé d'affirmer que seuls les Serbes étaient armés et

 27   organisés alors qu'ici on voit que toutes les trois parties s'armaient et

 28   s'organisaient et que la différence c'est en fait que seuls les Serbes se


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  1   considèrent comme étant des volontaires et se placent sous le commandement

  2   de la JNA, alors que les Croates et les Musulmans disposent de leurs

  3   propres commandements. Je crois que ceci est pertinent parce que, entre

  4   autres, cela a à voir avec la Bosnie du nord-est, y compris Bratunac et les

  5   villages environnants.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que rien de tout cela n'a été

  8   présenté sous l'angle du lien que ce document pourrait avoir avec le

  9   témoin. Dans mon sens, il s'agit quasiment d'une demande de versement

 10   direct à l'audience. Et si tel avait été le cas, l'Accusation aurait eu,

 11   normalement, la possibilité de retrouver d'autres documents et d'autres

 12   éléments de preuve connexes concernant cette neutralité idéologique

 13   alléguée de la JNA. Je dirais que nous avons là encore un exemple de ce que

 14   j'ai déjà avancé précédemment, à savoir que nous ne nous sommes pas trouvés

 15   en mesure de répondre ou de répliquer parce que nous n'avons pas la

 16   traduction de ce document dont nous devrions bénéficier de la traduction,

 17   parce que lorsque l'Accusation ou l'autre partie, d'ailleurs, se trouve à

 18   demander le versement d'un document d'une façon qui revient en fait à une

 19   demande de versement direct à l'audience, eh bien, l'autre partie devrait

 20   avoir la possibilité également de consulter la documentation, de voir si la

 21   traduction est disponible ou non.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin n'a rien confirmé au sujet de

 24   ce document. Les Juges de la Chambre estiment qu'il n'est ni nécessaire ni

 25   pertinent de comprendre le contexte de la déposition du témoin. Nous

 26   n'allons pas verser au dossier ce document, et nous allons faire une pause

 27   de 25 minutes et reprendre à 17 heures 55.

 28   --- L'audience est suspendue à 17 heures 29.


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  1   --- L'audience est reprise à 17 heures 57.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Puis-je demander au représentant du

  4   Greffe de placer, non pas la Juriste mais plutôt l'Huissier, de placer le

  5   document sur le rétroprojecteur. Et l'Accusation va sans doute me poser la

  6   question de l'origine de ce document, il s'agit d'une page extraite d'un

  7   livre qu'ils nous ont communiqué, numéro ERN 0389586.

  8   C'est cela, la page qui comporte le numéro. C'est cette page-là qu'il

  9   nous faut. Maintenant nous n'avons pas de temps pour voir le reste.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Gusic, je vais maintenant vous lire un passage, ceci n'a pas

 12   été traduit. Je ne savais pas que vous alliez contester tout ceci.

 13   L'agence du SDA à Bratunac a envoyé sa délégation à l'assemblée

 14   fondatrice de la Ligue patriotique dans la région de Tuzla le 11 janvier

 15   1992, dans la municipalité de Kalesija, il y avait les membres de la

 16   délégation comme suit : Nijaz Dubicic, le président de la municipalité, et

 17   d'une autre personne --

 18   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 19   M. KARADZIC : [interprétation] -- de Bratunac. A la réunion, à la

 20   demande de la délégation de Bratunac, une décision a été rendue aux fins

 21   d'envoyer à Bratunac Samir Nistovic pour qu'il coordonne des travaux de la

 22   Ligue patriotique de Bratunac et qu'il participe à la rédaction des plans

 23   de défense pour la municipalité de Bratunac. La délégation de Bratunac a

 24   proposé que Nedzib Husic de Bratunac soit nommé commandant de la Ligue

 25   patriotique pour la sous-région (Bratunac, Zvornik, et Vlasenica), qui

 26   avait le grade de commandant de la Défense territoriale de Bratunac, et sa

 27   proposition a été acceptée.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quoi qu'il en soit, de quoi s'agit-il


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  1   ici ? Vous devez nous dire de quel livre il s'agit, et quelle est la

  2   pertinence de ces questions ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, si vous me le permettez, je vais

  4   attirer votre attention sur le milieu de la page où vous voyez le nom de ce

  5   témoin, Dzevad Gusic. Cela se trouve environ à la ligne 20. Dzevad Gusic et

  6   ainsi que tous les autres participants à ces préparatifs, et on peut lire

  7   que le SDA de Bratunac a créé la Ligue patriotique en 1991, ou, plutôt, a

  8   prévu de le faire, et a mis ses plans à exécution en 1992. Et ceci

  9   contredit ce que dit le témoin. Et, deuxièmement, ceci indique qu'il a été

 10   impliqué. Et, troisième point, si vous ne m'autorisez pas à remettre en

 11   cause la crédibilité de ce témoin et ses allégations, dans ce cas je perds

 12   mon temps.

 13   L'Accusation a fourni ce document, mais une seule page seulement.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 15   M. TIEGER : [interprétation] La seule chose que je souhaitais évoquer,

 16   Monsieur le Président, c'est que M. Karadzic a fait un commentaire dans le

 17   sens où il fait placer ce document sur le rétroprojecteur maintenant,

 18   seulement parce qu'il ne savait pas qu'il devait remettre en cause. Et en

 19   mon sens, ceci n'est absolument fondé compte tenu de l'existence de la

 20   déclaration consolidée en possession de l'accusé depuis un certain temps

 21   déjà. Cette question a été évoquée et il aurait pu, s'il l'avait souhaité,

 22   décider de la contester.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous confirmez que c'est

 24   l'Accusation qui a fourni ce document d'une page à l'accusé ?

 25   M. TIEGER : [interprétation] Nous sommes en train de vérifier. Ce document

 26   nous a été présenté. Dès que l'accusé a fait ses commentaires, nous avons

 27   commencé à faire des recherches sur la provenance du document.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Vous avez entendu ce qu'a dit


Page 17845

  1   l'accusé. Vous avez lu ce passage, Monsieur Gusic. Pouvez-vous confirmer

  2   cela ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, avant de répondre à la question,

  4   je dois parler de ce qu'a dit l'accusé, à savoir que j'ai nié quelque chose

  5   et maintenant il tente de remettre en cause ce que j'ai nié. Autrement dit,

  6   le livre est exact, et ce que j'ai dit est inexact. Dans ce contexte-là,

  7   dans le contexte qui est celui du livre et que vient de lire l'accusé, si

  8   je témoigne ici, ai-je le droit de l'appeler l'accusé ? Et il faudrait lire

  9   l'intégralité du livre. Je connais ce livre. Je sais ce que dit ce livre.

 10   Si on lit l'ensemble du livre, l'impression est tout autre. L'accusé lui-

 11   même a remarqué que l'état-major militaire avait été créé en 1992, et je

 12   crois que c'est quelque chose que j'ai évoqué dans mes réponses précédentes

 13   lorsque j'ai dit que le Conseil exécutif, au mois de janvier ou février

 14   1992, avait pris la décision de créer, de mettre en place cet état-major de

 15   défense à Bratunac, parce que j'ai déjà abordé les menaces qui pesaient sur

 16   la municipalité de Bratunac.

 17   Que dit ce livre est exact, cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Samir

 18   Nistrovic, lui-même, est venu, comme Nuric avait l'habitude de venir en

 19   1991. Je ne me souviens pas du mois, c'était le mois de septembre ou

 20   octobre, peut-être, de l'année 1991, et pour parler de ces projets

 21   qu'avaient la Serbie et la JNA à propos de la division de la Bosnie et de

 22   la possibilité que la Bosnie soit attaquée ou l'éventualité que la Bosnie

 23   soit attaquée, les gens se sont organisés. Et ensuite quelque chose a été

 24   créé, je crois que ça s'appelait le Conseil de l'initiative de la Ligue

 25   patriotique, mais tout ceci n'existait que sur papier. Rien ne s'est

 26   véritablement produit dans la réalité.

 27   Pour ce qui est de Nedzib Husic, vous trouverez plus d'informations sur lui

 28   dans le livre. Cet homme est resté à ce poste pendant sept à dix jours


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  1   seulement, ensuite il s'est rendu compte que c'était chose impossible.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc connaissez-vous l'auteur de ce

  3   livre et le titre de ce livre ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais que ce livre s'intitule "La vérité à

  5   propos de Bratunac." L'auteur est Nijaz Masic, un professeur d'histoire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, veuillez

  7   poursuivre.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  On peut lire ici que le SDA de Bratunac a créé la Ligue patriotique en

 10   1991 et sa structure militaire en 1992.

 11   R.  C'est ce que dit ce texte.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux avoir une cote provisoire

 13   pour ce document ? Si c'est véritablement la vérité au sujet de Bratunac,

 14   nous pourrons regarder le livre dans son intégralité, et ce serait

 15   intéressant aussi.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci sera marqué aux fins

 17   d'identification.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le numéro D1567 [comme

 19   interprété], marqué aux fins d'identification, Madame, Messieurs les Juges.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Gusic, veuillez ne pas m'en tenir rigueur, parfois je vous

 23   appelle "Monsieur le Témoin." Parce que les témoins défilent ici. Et je ne

 24   me souviens pas toujours de leurs noms.

 25   R.  Ecoutez, j'ai vécu beaucoup de choses. Et cela ne me touche pas.

 26   Q.  Pobudje, est-ce un village de Bratunac ?

 27   R.  Je crois que oui.

 28   Q.  Connaissez-vous la population de cette localité ?


Page 17847

  1   R.  Je ne sais pas exactement. Une centaine peut-être. Je ne suis pas tout

  2   à fait sûr.

  3   Q.  Est-ce que nous pouvons voir le 1D4083 dans le prétoire électronique.

  4   Il s'agit d'une liste des membres de la Défense territoriale de Pobudje

  5   datée du mois d'avril 1992; 434 hommes, quasiment tous originaires de

  6   Pobudje. Il y en a un qui vient de Sebjocine qui était en visite, ou

  7   c'était un réfugié. Veuillez regarder la première page, et ensuite, nous

  8   pourrons regarder la dernière page, la cellule de Crise de Pobudje. On peut

  9   voir qu'en avril 1991, ils étaient tous déjà là, et il y en a très peu qui

 10   sont devenus membres à la fin du mois de juin. Alors, vous dites que cela

 11   vous a beaucoup surpris. Mais en réalité, Pobudje avait une population de

 12   500 habitants. Et la JNA, dans son rapport, avait indiqué que d'après leurs

 13   projets, chaque municipalité devait être dotée d'un bataillon de 500

 14   hommes. Ici, nous voyons un village qui en a combien ?

 15   R.  Il s'agit de quelle liste ici ? D'où sont extraites ces listes ? De

 16   quel document s'agit-il ?

 17   Q.  Il s'agit de la République de Bosnie-Herzégovine, Défense territoriale

 18   BH, TO Pobudje, liste des membres de la Défense territoriale de Pobudje, un

 19   document qui a été saisi lors d'une incursion. On peut lire ici le titre

 20   "cellule de Crise". Tous les noms sont énumérés, et on peut vérifier chaque

 21   nom, y compris les dates de naissance, les dates où ces personnes sont

 22   devenues membres, et la plupart sont devenues membres au mois d'avril.

 23   R.  Je peux lire la date de juillet 1992. Est-ce en juillet que quelqu'un a

 24   compilé cette liste ?

 25   Q.  Avdo Omerovic a compilé cette liste a mois de juillet.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 27   M. TIEGER : [interprétation] C'est une question appropriée.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne montrez-vous pas la


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  1   quatrième page ainsi que l'intitulé.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Vous pouvez demander quelle est la provenance

  3   de ce document plutôt que de supposer ou de présenter une conclusion par

  4   anticipation. Il doit y avoir des informations sur ce document. On doit

  5   pouvoir savoir d'où il vient et ce que ce document est censé être.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Regardons la première page, en

  7   particulier l'intitulé ici, et est-ce que nous pouvons agrandir ce

  8   document.

  9   Pouvez-vous lire la première partie, Monsieur Gusic, l'intitulé du document

 10   ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'arrive pas à distinguer cela. C'est

 12   lisible, mais permettez-moi de dire ceci : cette liste a été compilée par

 13   Avdo Omerovic en juillet 1992. Ce qui veut dire qu'entre le mois d'avril et

 14   le mois de juillet 1992, l'ensemble de la municipalité de Bratunac, à

 15   l'exception de ces villages de Prvojace [phon] et de Konjevic Polje, a été

 16   purifié ethniquement, purgé, ce village de Pobudje ainsi que d'autres

 17   villages, tel que Konjevic Polje, lorsqu'ils ont vu ce qui était arrivé à

 18   Bratunac et dans les villages aux alentours avaient réussi à s'organiser

 19   d'une manière ou d'une autre et avaient opposé une résistance dans cette

 20   partie de la municipalité de Bratunac, et ils ont pu compiler cette liste

 21   et établir des listes eux-mêmes. Je souhaite insister sur le fait que cette

 22   date qui est indiquée ici, celle du 4 avril, à savoir que ces hommes

 23   auraient rejoint la Défense territoriale ce jour-là, eh bien, je ne pense

 24   pas que ceci soit exact. J'en suis tout à fait certain. Je suis même sûr

 25   que cela n'est pas exact.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gusic, avez-vous dit que ce

 27   document avait été rédigé ou compilé par Omerovic, Avdo ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que dit ce document, au bas du


Page 17849

  1   document.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne montrez-vous pas la dernière

  3   page.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais vraiment pas.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez raison, il ne s'agit pas d'une liste

  6   de combattants d'Omerovic. Ceci a été signé par la cellule de Crise de

  7   Pobudje. Donc, il y en a d'autres. Et si nous regardons la première page,

  8   nous constatons qu'il s'agit d'un ensemble de documents. Nous avons ici

  9   l'annexe 17A. Cela fait partie d'un ensemble de documents d'une instance

 10   étatique de la Republika Srpska, pour pouvoir rassembler des éléments de

 11   preuve. Ceci a été saisi, me semble-t-il, lors d'une descente de la police.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette liste ne comprend pas les

 13   combattants. C'est ce qu'on semblerait -- semble ne pas inclure les

 14   combattants de Pobudje à Kamenica dirigés par Avdo Omerovic. C'est en tout

 15   cas ce que dit la traduction anglaise.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais vraiment pas. Je suppose -- eh

 17   bien, voyez-vous, je pense qu'il s'agit ici de combattants qui avaient

 18   réussi à s'organiser après l'occupation de Bratunac. Ces autres localités,

 19   comme Kamenica, qui sont évoquées ici, ne se trouvent pas du tout dans la

 20   municipalité de Bratunac, mais se trouvent dans la municipalité de Zvornik.

 21   Mais c'était l'enclave qui avait été encerclée à l'époque. Donc, je ne peux

 22   vraiment pas faire de commentaire ni dire quoi que ce soit au sujet de

 23   cette liste. Tout ce que je sais avec certitude, c'est qu'à la date du 4

 24   avril 1992, ils n'avaient aucune unité, car à l'époque j'ai visité et fait

 25   le tour de la municipalité de Bratunac, et ce que j'ai pu constater de mes

 26   propres yeux, c'est que personne n'était prêt, aucune aptitude au combat ou

 27   à la défense à l'époque.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


Page 17850

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre, Monsieur

  2   Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document peut-il être versé au dossier ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois pas qu'il y ait un quelconque

  5   fondement pour faire verser ce document.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  7   Est-ce que nous pouvons maintenant regarder le 1D4084.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Brezovica, est-il proche de chez vous ?

 10   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la réponse.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment avez-vous répondu à la question,

 12   Monsieur Gusic ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je ne sais

 14   rien à propos de Brezovica. S'agit-il d'un hameau ou d'un petit village ?

 15   Je ne pense pas que cela se situe dans la municipalité de Bratunac. Ce nom

 16   ne m'est pas familier.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Et deuxième question, est-ce qu'Avdic Fahrudin, est-ce que c'est

 19   quelqu'un que vous connaissez ?

 20   R.  Je connais un certain Avdic Fahrudin, mais il vient de Srebrenica, me

 21   semble-t-il.

 22   Q.  Ces villages qui ont été attaqués par cette compagnie de Brezovica,

 23   s'agit-il de villages serbes ? Cette compagnie de Brezovica a-t-elle

 24   attaqué des villages à Bratunac ?

 25   R.  Vous voulez parler de quelle Brezovica ?

 26   Q.  Eh bien, vous prétendez que toute cette enclave jusqu'à Kamenica et

 27   Srebrenica, comme vous l'appelez le territoire libre, ce territoire était

 28   unifié, est-ce que les unités de Srebrenica ont attaqué Kravica, par


Page 17851

  1   exemple, le jour de Noël en 1993 ?

  2   R.  Je ne me trouvais pas sur ce territoire contrôlé par l'ABiH, mais je

  3   dispose de quelques connaissances et informations. Il y avait des combats

  4   impliquant les deux parties, des attaques menées par l'ABiH et des attaques

  5   menées par la VRS. Je dispose d'information là-dessus, il y avait des

  6   combats. Et pour ce qui est de Kravica, Kravica a été évoquée dans le

  7   procès de Naser Oric, me semble-t-il, la Défense a prouvé dans cette

  8   affaire-là que c'est une opération militaire, et je ne pense pas que Naser

  9   Oric ait été condamné en ce qui concerne les charges qui pesaient contre

 10   lui à propos de Kravica.

 11   Q.  Dans ce cas, nous allons laisser ceci de côté parce que nous ne pouvons

 12   pas recueillir de réponse, en tout cas pas une réponse courte.

 13   Est-ce que nous pouvons maintenant voir le document 1D4087.

 14   Monsieur Gusic, est-il exact que le président de la municipalité a obtenu

 15   un poste tout de suite après avoir été nommé, et le chef du poste de police

 16   a également pris ses fonctions tout de suite ?

 17   R.  Voulez-vous dire après qu'ils aient été élus ?

 18   Q.  Je vais vous poser la question de cette façon. Les Musulmans ont occupé

 19   leurs postes tout de suite, alors que le commandant serbe du poste de

 20   police n'a pas pu prendre ses fonctions avant une année. C'est la raison

 21   pour laquelle il y avait toutes ces tensions.

 22   R.  Je ne me souviens pas du fait que le commandant du poste de police ait

 23   pris ses fonctions tout de suite, mais je ne me souviens pas pourquoi.

 24   Q.  C'est ainsi que les postes avaient été répartis, le président de la

 25   municipalité, le secrétaire du secrétariat chargé des questions économiques

 26   et des affaires sociales et secrétaire chargé du secrétariat de la Défense

 27   nationale, membre du Conseil exécutif, commandant de l'état-major de la TO,

 28   et il n'y a aucun commandant du poste de police qui figure ici. Il est


Page 17852

  1   clair que le SDA a obtenu ce poste.

  2   R.  Pour ce qui est du poste de police, nous avions quelques difficultés

  3   après cette embuscade à Kravica en 1991. Je crois que l'ensemble du

  4   personnel de ce poste de police a été remplacé, y compris le chef et le

  5   commandant, parce qu'il y avait des problèmes.

  6   Q.  Vous n'étiez pas ceux qui avaient des problèmes. C'était les Serbes qui

  7   avaient des problèmes, c'est ainsi que les postes importants ont été

  8   répartis.

  9   R.  Ecoutez, je ne sais pas à propos de ce délit.

 10   Q.  Il y a eu quelqu'un qui a été nommé au poste des impôts municipaux,

 11   directeur de la direction municipale chargée des enquêtes, vice-président

 12   de l'assemblée municipale, et cetera.

 13   R.  D'après ce que je vois, le SDS a obtenu six postes.

 14   Q.  Oui, mais l'un dans l'autre, des postes insignifiants, n'est-ce pas ?

 15   R.  Ecoutez, je ne dirais pas qu'il s'agissait-là de postes insignifiants.

 16   Il y avait votre président du SDS. Miroslav Deronjic était un homme

 17   politique très astucieux, vous le savez mieux que moi. Et je pense que les

 18   Serbes étaient très contents avec cette répartition et ils l'ont acceptée.

 19   Nous n'étions pas contents. Nous avions 52 %, c'était le résultat des

 20   élections, et c'est ainsi que le pouvoir devait être partagé. Le SDS avait

 21   40 % et les autres parties avaient 8 %. Et, donc, c'était à notre

 22   détriment.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement de ce

 24   document, s'il vous plaît.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1658, Madame, Messieurs

 27   les Juges.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 17853

  1   Q.  Est-ce que nous pouvons maintenant afficher le numéro 65 ter 742, s'il

  2   vous plaît. Page 8 maintenant, s'il vous plaît, en réalité page 7, de façon

  3   à ce que nous puissions voir la date, 6 en réalité, 0083594, c'est le

  4   numéro ERN. Nous souhaitons établir qu'il s'agit là d'une séance de

  5   l'assemblée municipalité de Bratunac qui s'est tenue le 13 février 1992.

  6   C'est bien ce qui est écrit ici ?

  7   Monsieur Gusic, est-ce qu'on peut lire dans ce texte la date du 13

  8   février 1992 ?

  9   R.  Oui, c'est ce qui est écrit ici. Mais je ne savais pas que vous me

 10   posiez la question à moi.

 11   Q.  Page 3 maintenant, s'il vous plaît, en serbe, numéro ERN 16. Il s'agit

 12   là des deux derniers chiffres de ce numéro, 16.

 13   En bas ici, à gauche on peut lire qu'au point 5, à l'ordre du jour, le

 14   point 5 à l'ordre du jour a été abordé. Miroslav Deronjic s'est étendu sur

 15   ce point à l'ordre du jour. Autrement dit, la nomination du commandant du

 16   poste de sécurité publique. Il a dit qu'ils avaient --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons la page qui

 18   convient, la page 3 en anglais, mais je ne sais pas où se trouve cette page

 19   en B/C/S.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] En serbe, passons à la page de gauche pendant

 21   quelques instants, ensuite nous reviendrons à ce que nous voyons à l'écran

 22   maintenant.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Voyez-vous cela, Monsieur Gusic ? Vers le bas de la page, M. Miroslav

 25   Deronjic qui s'est étendu sur ce point à l'ordre du jour, qui est à la

 26   nomination du commandant du poste de police, et ceci est censé revenir aux

 27   Serbes.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page suivante.


Page 17854

  1   M. TIEGER : [interprétation] Page 5, en anglais, qui se termine par le

  2   numéro ERN 0613.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Je vais vous le lire maintenant.

  5   "M. Miroslav Deronjic a développé ce point à l'ordre du jour, il a nommé le

  6   commandant du SJB. Il a dit qu'ils retardaient la nomination du commandant

  7   du poste de police et c'était intentionnel. Et ils proposent que nous ne

  8   nommions personne non plus à certains postes avant que la question de…"

  9   Passons à la page suivante.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etes-vous sûr que le témoin suit.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Merci, c'est le haut de la page. "…jusqu'à ce que cette question ne

 13   soit résolue, à savoir la nomination du commandant, la décision de Deronjic

 14   a été adoptée à l'unanimité."

 15   Constatez-vous que pendant une année entière, les Serbes n'ont pas réussi à

 16   nommer leur propre personnel, leurs propres hommes dans un domaine aussi

 17   sensible que celui de la sécurité ?

 18   R.  Faisons la distinction.

 19   Q.  A-t-il été nommé ou n'a-t-il pas été nommé ?

 20   R.  Ecoutez, ce n'est pas une façon de parler. Vous parlez de la date du 13

 21   février et vous parlez de l'assemblée municipale serbe. Il s'agit là d'une

 22   entité illégale qui a été créée, me semble-t-il, au début du moins de

 23   janvier 1992. Il s'agit d'une instance illégale.

 24   Q.  Monsieur Gusic, je répondrai à vos questions. A ce moment-là, c'était

 25   un poste de police conjoint, n'est-ce pas ?

 26   R.  S'il vous plaît, s'il vous plaît, écoutez essayons de préciser

 27   certaines choses. Pour les Juges de la Chambre et pour le public, je vous

 28   demande de faire preuve de patience. Moi, je suis patient, moi je vous


Page 17855

  1   écoute jusqu'au bout, j'essaie de suivre ce qui se passe ici --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On vous demande pourquoi certains postes

  3   au sein du poste de police n'ont pas été remplis, à savoir si l'assemblée

  4   serbe était légale ou illégale. Il s'agit là d'une question distincte et,

  5   si nécessaire, l'Accusation ou les Juges de la Chambre reprendront la fin

  6   de la question, le cas échéant.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] S'il vous plaît, en deux phrases. A

  8   l'assemblée légale de la municipalité de Bratunac, lorsqu'il y a eu la

  9   répartition des postes et que tous ces postes ont été remplis, le chef de

 10   police, le commandant, les membres du Conseil exécutif du SDS et du SDA, et

 11   cetera. J'essayais d'expliquer tout ceci avant d'être interrompu.

 12   Il y avait certains problèmes en septembre 1991. Il y a eu à Kravica une

 13   embuscade au cours de laquelle deux Musulmans de Bosnie ont été tués et

 14   deux Musulmans de Bosnie ont été blessés. La situation était alors très

 15   tendue. Les tensions interethniques ne cessaient de croître. Les dirigeants

 16   de la république -- M. Ganic intervenait, ainsi que M. Koljevic, des

 17   membres de la présidence -- ils étaient membres de la présidence, tous les

 18   deux. Et, ensuite, le député adjoint de la police, je crois qu'il

 19   s'appelait Vitomir Zepinic, il était Serbe, avec son conseiller, Avdo

 20   Hebib, Saric, et un autre homme. Et, à l'époque, ils ont été remplacés, et

 21   ensuite, le chef ainsi que le commandant de la police ont donné leur

 22   démission. Il y avait quelqu'un de Tuzla qui a été nommé soit chef, soit

 23   commandant de la police, quelqu'un du poste de sécurité publique à cet

 24   endroit-là, et pendant un ou deux mois, il a occupé ce poste, à savoir de

 25   septembre 1991 à, disons, la fin de l'année 1991 ou le début de l'année

 26   1992. Donc, ce que dit l'accusé n'est pas exact, à savoir que pendant un

 27   an, voire plus d'un an, les Musulmans ont entravé la nomination du

 28   commandant de police.


Page 17856

  1   Et il se peut qu'il y a eu peut-être une entrave à partir du mois de

  2   janvier 1992, lorsque cette instance serbe illégale a été créée. Peut-être

  3   qu'il y a eu des malentendus et des confrontations à ce moment-là. Peut-

  4   être que notre côté n'était plus d'accord pour nommer le chef de la police

  5   ou plutôt le commandant de police, et nous n'étions peut-être plus d'accord

  6   pour le nommer à partir du mois de septembre.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Entre le mois de septembre 1991 et jusqu'au début de la guerre,

  9   n'était-ce pas les Musulmans qui occupaient les deux postes, à savoir

 10   commandant et chef du poste de police ?

 11   R.  Septembre 1991, avez-vous dit ?

 12   Q.  La crise à Kravica.

 13   R.  Ecoutez, je ne sais vraiment pas. Je crois qu'une personne a été nommée

 14   du poste de sécurité publique -- du centre de sécurité publique de Tuzla,

 15   et sa mission consistait à résoudre les problèmes à cet endroit pour

 16   alléger la situation et, par la suite, un commandant a été nommé.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement au

 18   dossier de ce document, s'il vous plaît.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Ce document a déjà été versé au dossier.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai été informé que ceci fait partie

 21   d'une pièce qui a déjà été versée au dossier. Est-ce que vous pourriez nous

 22   donner le numéro, s'il vous plaît.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la pièce P3199, Madame, Messieurs

 24   les Juges.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce que nous pouvons rapidement voir

 26   le D381 pour voir ce que M. Zepinic et moi-même nous disions au téléphone,

 27   à la date du 10 février 1992.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 17857

  1   Q.  Les interlocuteurs sont Karadzic et Zepinic, qui est un assistant du

  2   ministre, et regardez ce que dit Karadzic. Il dit :

  3   "Ah, mais je vous en prie, maintenant, on reçoit la monnaie de notre pièce,

  4   Vito, et ce, parce que nous n'avons pas nommé un Serbe au poste de

  5   commandant. Eux, ils ont créé une frontière vers la Serbie et ils érigent

  6   des barricades et empêchent l'accès."

  7   Page suivante en serbe. Alors, vous voyez, Zepinic dit :

  8   "Nous avons pris la décision que nous avons prise. Ce matin, la proposition

  9   de solution pour les cadres -- pour tous les postes, depuis le simple

 10   collaborateurs à l'assistant, a été balayé."

 11   Et un peu plus loin, Karadzic dit :

 12   "Mais enfin, je vous en prie, il va falloir que nous créions notre police

 13   là-bas."

 14   Et Zepinic rétorque :

 15   "Le problème pour nous, c'est Bratunac. Srebrenica est un problème pour

 16   nous. Jajce est un problème pour nous. Les Croates contestent quelque chose

 17   et les Musulmans refusent aux Croates l'Herzégovine occidentale. Les

 18   Croates veulent faire des concessions, aussi bien vis-à-vis des Musulmans

 19   que vis-à-vis de l'Occident."

 20   Et Karadzic, un peu plus loin, dit : "Où est-ce qu'ils érigent des

 21   barricades ?"

 22   Et un peu plus bas dans le texte, nous lisons : "Ils érigent des barricades

 23   et ils n'autorisent pas les Serbes à pénétrer à partir de la Serbie. Ils

 24   font obstruction à la liberté de circulation."

 25   Est-ce que vous êtes au courant ?

 26   R.  Tout d'abord, ce n'est pas exact. Il n'y avait pas de barrage. Et,

 27   deuxièmement, là où il est dit que quelqu'un ne laisse pas les Serbes

 28   pénétrer à Bratunac à partir de la Serbie, c'est également inexact. Je ne


Page 17858

  1   sais pas si vous vous souvenez qu'à un certain moment dans cette période, à

  2   la fin de 1991 et au début 1992, la Serbie a adopté une décision

  3   interdisant l'exportation des produits. Les Musulmans en ont subi des

  4   conséquences très négatives. C'est un policier du MUP de Serbie qui a été

  5   interrogé à ce sujet.

  6   Q.  Monsieur Gusic, la Serbie n'a pas autorisé l'exportation de blé vers la

  7   Bosnie. Nous, les Bosniaques, nous en consommions cinq fois plus sur le

  8   plan quantitatif mais, en fait, nous passions en contrebande la frontière

  9   de la Serbie avec ce blé, donc ne créons pas de confusion sur les problèmes

 10   dont nous parlons.

 11   R.  Mais ce n'était pas seulement le blé. C'était tous les produits.

 12   Q.  Nous allons prouver que c'est le blé et d'autres produits stratégiques

 13   qui étaient concernés. Nous, les Bosniaques, nous consommions cinq fois

 14   plus que les quantités exportées. Quant à la Serbie, à cause de nous, elle

 15   a manqué de blé. Alors, voyons le document 3086. C'est le numéro 65 ter.

 16   Voyons ce qui se passait à Kravica.

 17   30186. C'est le numéro exact sur la liste 65 ter. Il s'agit d'une

 18   conversation entre M. Zvonko Bajagic et moi-même. Le 4 septembre 1992,

 19   c'est la date de cette conversation. Regardez la deuxième moitié de la

 20   page. Bajagic me demande si je suis au courant de ce qui est en train de se

 21   passer et de ce qui se passe depuis vendredi, et je dis que je sais qu'ils

 22   ont tiré sur le président du Conseil exécutif et que l'homme responsable a

 23   été arrêté puis relâché, et Zvonko me dit oui. Et à ce moment-là, je

 24   réponds que les Musulmans ont été dirigés vers le village de Kravica. Est-

 25   ce que c'était l'intention d'attaquer ou quoi ? Zvonko me répond non, et je

 26   lui dis : "Mais…" et Zvonko apporte une explication.

 27   Ensuite, page suivante à l'écran, je vous prie. Il y avait des

 28   tensions, il y avait des désordres, et le SUP a envoyé la police à Kravica.


Page 17859

  1   Seuls les Serbes y sont allés et, dans d'autres lieux, il y a eu des

  2   patrouilles conjointes.

  3   Et, un peu plus bas, nous lisons qu'après les premiers tirs sur le

  4   président du Conseil exécutif, et à ce moment-là, Karadzic dit : Bon, cela

  5   signifie que j'en ai entendu parler. Cela ne signifie pas que je savais

  6   déjà qu'il avait été abattu.

  7   Bajagic dit : Mais ils ont été blessés et qu'est-ce qu'ils ont fait là-haut

  8   à Han Pijesak ? C'est un prétexte au sujet duquel des informations ont déjà

  9   été envoyées.

 10   Et moi je dis qu'il y a eu deux hommes blessés.

 11   Bajagic dit : Après qu'ils ont été blessés, encore une fois, il y a

 12   eu tentative d'assassinat du président du Conseil exécutif.

 13   Karadzic dit : C'est un Serbe sur lequel, une nouvelle fois, on a

 14   tiré.

 15   Et Bajagic dit : Mais écoute, il faudrait que tu le saches ce qui se passe

 16   là-bas, sans parler de ce qui arrive au président du Conseil exécutif. Tu

 17   sais qu'ils ont essayé de le tuer.

 18   Et je réponds que ce président est un Serbe, n'est-ce pas ?

 19   Il me répond, Oui.

 20   Et Karadzic à ce moment-là dit : Ces gens de Han Pijesak sont des

 21   Serbes qui ont été blessés.

 22   Karadzic dit : Bon.

 23   Je demande l'affichage de la page suivante à l'écran.

 24   La nuit dernière ces quatre personnes sont montées à bord d'une voiture et

 25   ont traversé Kravica. C'est un lieu très stratégique pour la JNA et c'était

 26   une provocation avec cette voiture à bord desquelles il y avait trois

 27   hommes, et il me répond : Oui, oui, oui.

 28   Je poursuis en disant : Ils ont traversé deux fois Kravica.


Page 17860

  1   Et à ce moment-là un peu plus bas, nous lisons : Ils sont passés deux

  2   fois par Kravica et ils sont allés ensuite à Konjevic Polje, et Konjevic

  3   Polje c'est un village musulman.

  4   Karadzic dit : Donc c'était une espèce de provocation.

  5   Il dit : Oui, ils allaient là-bas toutes vitres de la voiture

  6   ouvertes avec les canons de leurs armes automatiques qui sortaient des

  7   fenêtres. Et un peu plus bas, il est indiqué qu'il y avait là-bas des

  8   patrouilles policières. Ils n'ont pas voulu les arrêter. Et un peu plus

  9   bas, nous lisons qu'à la sortie de Kravica dans la direction de Bratunac,

 10   des Serbes tiennent la frontière. Les Serbes ont leurs propres gardes là-

 11   bas.

 12   Page suivante à l'écran, je vous prie :

 13   Chacun des participants dans cette salle peut lire le texte par lui-

 14   même.

 15   Donc il est dit qu'un membre du MUP va arriver par hélicoptère.

 16   Bajagic dit : Ils ont tué deux Musulmans. Mais ils n'ont pas tué le numéro

 17   un. Et un peu plus bas, vers la fin de la page, nous lisons que des gens de

 18   Kravica tiennent leurs positions. Ils ne laissent pas passer un seul

 19   policier du MUP pour entrer sur leur territoire.

 20   Page suivante.

 21   Il est dit que des gens de Kravica maintiennent fermement leurs

 22   positions. Ils ne bougent pas. La police musulmane souhaite entrer sur les

 23   lieux.

 24   Karadzic dit : Est-ce que ces hommes sont armés ?

 25   Bajagic répond : Oui, ils le sont.

 26   Karadzic demande si quelqu'un a pris contact avec les volontaires

 27   avec Han Pijesak à la caserne.

 28   Vous savez qu'il y avait une caserne à Han Pijesak, n'est-ce pas ?


Page 17861

  1   R.  Je ne sais pas.

  2   Q.  M. Karadzic dit : Non, personne n'a pris contact à ce sujet.

  3   A ce moment-là Bajagic dit : Quoi qu'il en soit, tu devrais savoir

  4   que c'est une question très urgente. Quelqu'un devrait monter là-haut

  5   immédiatement. Il y aura de gros problèmes, sinon.

  6   Karadzic dit : Qui ?

  7   Son interlocuteur lui répond : Un représentant du SDA et du SDS.

  8   Karadzic dit : Pour faire quoi ?

  9   Et Bajagic dit : Eh bien, l'armée est la seule qui peut se rendre là-bas.

 10   Ils n'ont pas confiance dans le MUP.

 11   Page suivante à l'écran, je vous prie.

 12   Dernier tiers de la page, le reste, les gens peuvent en prendre

 13   connaissance eux-mêmes.

 14   Je dis : Je ne suis pas informé. Je ne savais qu'une chose, c'est que ces

 15   deux hommes avaient été tués. Je ne savais pas s'il s'agissait d'une

 16   provocation ou d'une attaque sur Kravica. Moi, j'étais avec Izetbegovic

 17   jusqu'à il y a dix minutes, et nous avons conclu qu'il fallait attendre

 18   pour obtenir de bonnes informations. Zepinic et Hebib sont là-haut, Zepinic

 19   ne m'a pas encore appelé, et cetera. Et un peu plus loin, je dis : Il faut

 20   qu'il m'appelle pour que je lui dise que dans les villages serbes il ne

 21   faut pas qu'il envoie le MUP.

 22   Page suivante à l'écran.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Page 6 à l'écran.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Regardez, Karadzic s'exprime : Et à ton avis, qui est-ce qui est

 26   coupable ?

 27   Et l'autre répond : C'est eux qui sont coupables. Ils ont refusé de

 28   s'arrêter au moment où leur ont ordonné deux patrouilles de la police. Ils


Page 17862

  1   ont continué à nous viser avec leurs fusils par la fenêtre. Ils criaient et

  2   proféraient des provocations.

  3   Bon, je ne vais pas lire tout le texte.

  4   Karadzic un peu plus loin dit : Et pourquoi cet homme a tiré sur le

  5   président du Conseil exécutif ?

  6   L'autre répond : Il est certain qu'il l'a fait sur commande. C'était un

  7   attentat contre cet homme.

  8   Karadzic dit : Mais alors le sang a coulé. Ils veulent se battre contre les

  9   Serbes.

 10   Et Bajagic répond : Radovan, vous savez ce qui se passe aussi. C'est

 11   l'instance suprême du SDA qui est derrière tout cela, parce que je ne pense

 12   pas que dans la municipalité ils aient la volonté de lancer des

 13   provocations entre Serbes et Musulmans. Surtout pas dans la municipalité de

 14   Bratunac.

 15   Et Karadzic dit : S'ils ont sacrifié des Musulmans pour provoquer, et

 16   cetera, et cetera.

 17   Et un peu plus bas, nous lisons : Là les gens sont tous mélangés. Ils

 18   parlent des Serbes de l'autre côté de la Drina. Il y a ici des coups et des

 19   membres de la famille. Personne ne va attendre qu'on lui donne ce qu'il lui

 20   faut. Ils vont se battre pour défendre.

 21   Et un peu plus bas, il est dit : Les Serbes vont faire irruption en Bosnie,

 22   et cetera, et cetera.

 23   Et un peu plus loin, page suivante.

 24   Karadzic dit : Dites aux Musulmans autour de vous qu'ils sont sacrifiés et

 25   qu'il ne faudrait pas qu'ils se retournent contre les Serbes, parce que

 26   nous, nous pouvons nous défendre dans toute la Bosnie-Herzégovine. Nulle

 27   part ils ne peuvent nous neutraliser. Nulle part.

 28   Et un peu plus bas dans le texte, nous lisons : Mais eux ce sont des fous.


Page 17863

  1   Rajko sait bien ce que sont les habitants de Kravica. Ils parlent des

  2   Serbes de Kravica. Ils ne parlent pas des Musulmans.

  3   Donc il dit : Ils sont fous. Est-ce que des gens ont pris contact avec le

  4   bureau principal ? Est-ce que vous avez pris contact avec le siège du SDS ?

  5   Bajagic dit : Non. Et personne n'a réagi. Je suis venu t'informer de mon

  6   propre gré.

  7   Et ensuite Karadzic --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous avez passé dix

  9   minutes à lire cette conversation interceptée sans poser une seule question

 10   au témoin.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] La question arrive.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Gusic, est-ce qu'à la lecture de ce texte vous voyez que je

 14   n'avais pas la moindre idée de ce que vous là-bas, les habitants de votre

 15   municipalité, qu'ils soient Serbes ou Musulmans, étaient en train de faire

 16   et que je me contentais de poser des questions pour m'informer et qu'il est

 17   impossible d'imaginer que le siège du parti ait eu le moindre contrôle sur

 18   tout cela ?

 19   R.  Est-ce que je peux simplement demander qui est Bajagic ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, ne parlez pas ensemble.

 21   Monsieur le Témoin, vous avez demandé à l'accusé qui était M. Bajagic.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  M. Bajagic est membre du SDS à Vlasenica. Donc il observe la situation.

 24   Il demande : "Est-ce que vous avez rendu compte de tout cela au SDS ?" Et

 25   la réponse est non, parce que cet homme dit qu'il est venu de son propre

 26   gré pour m'informer.

 27   R.  Mais dites-moi une chose encore. Sur quel président de Conseil exécutif

 28   ils ont tiré ?


Page 17864

  1   Q.  Dans le passage du texte suivant, nous voyons que nous ne connaissons

  2   même pas son nom. Un certain Djuka. Et il s'avère qu'il s'agit de Rodoljub

  3   Djukanovic. Un peu plus bas il est qualifié de responsable du parti. Et un

  4   peu plus bas nous lisons Vlado Djukanovic dans la conversation interceptée

  5   suivante.

  6   R.  Alors, maintenant je peux répondre à votre question. Eu égard au

  7   président du Conseil exécutif, Radoljub Djukanovic, président du Conseil

  8   exécutif de Bratunac, je peux dire avec une certitude pleine et entière que

  9   personne n'a jamais tiré sur lui. L'enquête qui a été menée a démontré

 10   ultérieurement que les hommes responsables de l'assassinat était Marko

 11   Markovic de Ljubovija en Serbie, et un certain Milanovic, également connu

 12   sous le surnom de Mali Raso, qui ont participé à cet acte, et il existe des

 13   éléments qui indique que des policiers serbes ont également participé à cet

 14   acte. Donc vos allégations ne correspondent pas à la vérité.

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier -- ou plutôt

 17   l'enregistrement aux fins d'identification de ce document.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas de fondement -- pas par

 19   le biais de ce témoin. D'ailleurs on me dit que ce document a déjà été

 20   enregistré aux fins d'identification.

 21   Monsieur Karadzic, vous êtes arrivé à la fin du temps qui vous était

 22   imparti, mais étant donné que pratiquement il est impossible d'aujourd'hui

 23   de commencer l'audition du témoin suivant, je vais vous accorder le reste

 24   de la journée moins le temps dont l'Accusation aura besoin pour des

 25   questions supplémentaires. De combien de temps avez-vous besoin, Monsieur

 26   Tieger ?

 27   M. TIEGER : [interprétation] Je n'ai pas prévu de poser des questions

 28   supplémentaires au témoin pour le moment, Monsieur le Président. Mais


Page 17865

  1   j'aurais une chose à dire au sujet de cette écoute téléphonique. Nous avons

  2   déjà traité du problème de l'admissibilité pleine et entière par rapport à

  3   l'admission de documents enregistrés aux fins d'identification. Je sais

  4   qu'à un certain moment il va falloir donc que ces documents soient

  5   réexaminés au moment où leur demande de versement au dossier définitive

  6   sera faite. Il faudra que nous parlions de l'objet du document, mais étant

  7   donné les règles en vigueur, je pense que M. Karadzic devrait s'abstenir de

  8   faire des commentaires personnels au milieu d'une lecture de conversation

  9   interceptée car, ce faisant, il donne ses propres explications sur le texte

 10   qu'il est en train de lire.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Karadzic,

 12   vous devriez tenir compte de cette remarque.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je tiens à m'exprimer clairement, c'est

 14   la raison pour laquelle pour gagner du temps je fais des commentaires, mais

 15   apparemment cela ne fait que perdre du temps.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Je demande l'affichage du document 1D4088. Monsieur Gusic, vous

 18   constaterez que nous avons ici un document qui émane du Centre de

 19   documentation de l'Etat Republika Srpska. C'est une liste de criminels de

 20   guerre connus auprès du commandant de la 1ère Brigade d'infanterie légère,

 21   et qui ont commis des crimes de guerre dans la région de Bratunac,

 22   Srebrenica, Milici, Vlasenica et Skelani, dans toutes ces municipalités,

 23   dont on pense qu'ils se trouvent dans le secteur de Srebrenica.

 24   Alors voyez le nombre d'habitants de Bratunac dont les noms figurent sur

 25   cette liste; 70 % de ces noms sont ceux de personnes venant de Bratunac, ou

 26   en tout cas 50 %, mais enfin au regard du numéro 15, nous trouvons bien

 27   votre nom, n'est-ce pas ?

 28   R.  On voit dans l'en-tête de ce document qu'il s'agit d'une liste de


Page 17866

  1   criminels de guerre connus du commandement, et cetera, donc responsables de

  2   crimes de guerre dans la région de Bratunac, Srebrenica et Milici,

  3   Vlasenica et Skelani, dans toutes ces municipalités et dont on estime

  4   qu'ils se trouvent dans la région de Srebrenica.

  5   Or, à partir du 17 avril 1992, je n'étais plus à Srebrenica, et je ne

  6   me suis plus trouvé à Srebrenica jusqu'à la fin de la guerre. Je suis

  7   revenu pour la première fois à Srebrenica en 1997 ou 1998. Donc je suis en

  8   position de dire que cette liste est totalement fausse, pas seulement en ce

  9   qui me concerne, mais en ce qui concerne également bien d'autres personnes

 10   dont les noms figurent ici et qui n'ont rien à voir avec le moindre crime

 11   de guerre.

 12   Q.  Affichage de la dernière page, je vous prie, pour vous montrer que sur

 13   un total de 387 noms, 129, sont les noms de personnes habitant Bratunac. Je

 14   tiens à vous montrer aussi qu'il n'est pas dit de façon ferme et définitive

 15   que toutes ces personnes sont à Srebrenica. Donc vous contestez simplement

 16   Srebrenica et pas le reste ?

 17   R.  Ce document propose un certain nombre d'allégations diverses. La presse

 18   a publié l'intégralité de cette liste et je connais beaucoup de personnes

 19   dont les noms figurent sur cette liste qui n'ont jamais tenu à la main un

 20   fusil, et qui avaient quitté la Bosnie-Herzégovine depuis longtemps. Or,

 21   leur nom figure toujours sur cette liste, c'est pourquoi je dis que tous

 22   ces noms devraient être analysés et vérifiés de plus près. Il faudrait

 23   vraiment vérifier si la chose est possible.

 24   Q.  Il y aura des témoins de la Défense qui en parleront dans cette salle,

 25   donc nous reviendrons sur ce point.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cette

 27   liste.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger ?


Page 17867

  1   M. TIEGER : [interprétation] Non, pas de fondement, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis d'accord, Monsieur Tieger.

  3   Monsieur Karadzic, il n'y a aucun fondement qui permette le versement au

  4   dossier de cette liste par le truchement de ce témoin.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Peut-on afficher le document 1D4089, s'il vous plaît. Est-ce que ce qui

  8   est écrit ici est exact, Monsieur Gusic ? Veuillez dire aux Juges de la

  9   Chambre de quoi il s'agit, parce que la traduction n'est pas encore

 10   affichée.

 11   R.  Vous pourriez peut-être me laisser le temps de lire, je n'ai pas encore

 12   pu lire de quoi il s'agit.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Il n'y a encore une fois pas de traduction de

 15   ce document. Alors, Monsieur le Président, j'essaie sur la base du contexte

 16   de voir de quoi il s'agit, mais c'est extrêmement difficile. Alors je

 17   voudrais demander que l'on m'indique quelle est la source, la provenance de

 18   ce document.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous éclairer ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une collection de fax et de télégrammes

 21   que la Défense s'est procurée, il s'agit de documents émanant de l'ABiH.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Est-il indiqué ici que pendant toute cette période le SDA a maintenu la

 24   continuité dans ses travaux et dans son action dans l'organisation du

 25   pouvoir, tant sur le plan militaire que politique. Dzevad Gusic, en tant

 26   que président, se trouve dès le premier jour parmi les combattants, puis il

 27   est devenu assistant du commandant de la 1ère Brigade de Podrinje; est-ce

 28   exact ?


Page 17868

  1   R.  Est-ce que je peux commenter ce document ou plutôt son contenu ? Les

  2   informations qui sont évoquées ici sont, je pense, exactes. J'ai été membre

  3   de l'ABiH dans ce contexte, dans cette période, je peux vous indiquer

  4   exactement où je me suis trouvé et quelles ont été mes tâches, quel poste

  5   que j'ai occupé, et cetera, si j'en ai le temps toutefois. Je ne vois ici

  6   rien de controversé. Je crois qu'il ne s'agit que d'une correspondance

  7   entre quelqu'un qui est là-bas, dans cette petite partie du territoire qui

  8   s'appelle Bljeceva, je crois, l'un de nos hommes de Bratunac qui là-bas

  9   organisait quelque chose, alors je suppose que c'est l'année 1994. Quelle

 10   est l'année ? Je ne la vois pas.

 11   Q.  Il est indiqué 1994, là haut, janvier 1994, en haut de page. Il est

 12   indiqué que vous êtes assistant du commandant à partir du 26 mars 1993,

 13   après vous êtes assistant du commandant chargé du moral, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, j'ai été adjoint du commandant de la compagnie, puis ensuite j'ai

 15   été assistant du commandant chargé du moral, et j'ai été basé à Kladanj,

 16   qui comme vous le savez se trouve dans la Fédération. Donc je n'ai rien à

 17   voir avec les événements qui se passent là-haut. Il s'agit d'une simple

 18   correspondance, une communication entre les gens qui sont là-bas, qui sont

 19   encerclés et d'autre part nous, qui avons réussi à nous organiser.

 20   Q.  Merci.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous verser ce document ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois toujours pas quelle est la

 23   provenance de ce document, quelle en est la provenance, notamment compte

 24   tenu du fait que les signes diacritiques n'apparaissent pas correctement,

 25   mais compte tenu de la réponse du témoin, nous allons le verser aux fins

 26   d'identification ce document.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote D1659, aux fins

 28   d'identification, Madame et Messieurs les Juges.


Page 17869

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre dernière question.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais pouvoir présenter encore deux

  3   documents, l'un d'eux très brièvement, qui permettra de montrer que M. le

  4   Témoin ne sait absolument rien quant aux rapports qui prévalent au sein du

  5   SDS. Alors le premier est le numéro 603 de la liste 65 ter 603, page 13 sur

  6   19.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est l'intérêt, Monsieur Karadzic,

  8   de présenter un document au sujet duquel le témoin ignore tout, dont il

  9   ignore tout ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour prouver précisément que le témoin n'y

 11   connaît rien et que ce qu'il a dit est faux. On voit sur la base de ce

 12   document que Deronjic et moi-même étions des adversaires politiques et que

 13   nos rapports étaient tous, sauf bons. Moi, j'ai pris acte des résultats des

 14   élections locales, mais --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous aurez d'autres occasions de

 16   présenter ceci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ceci remet en question directement ce que le

 18   témoin a dit. Mais dans ce cas-là, permettez-moi de présenter un document

 19   émanant d'acteurs internationaux. Pouvons-nous avoir le 1D4092 et, après,

 20   je dirai ce que je pense de la possibilité même qu'il y a d'assurer ma

 21   défense. 1D4092. Il s'agit ici d'un document --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Simplement ce document, dans ce cas.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Nous avons donc la première page. Il s'agit d'un membre du Parlement

 27   européen, un député européen. Il est indiqué Christine Oddy. Elle s'adresse

 28   à M. Petrovski et au Tribunal pour les crimes en Yougoslavie. Bratunac,


Page 17870

  1   Srebrenica et Skelani figurent à la page suivante. Nous allons ensuite

  2   passer quelques pages pour avancer jusqu'à la page qui porte le numéro

  3   0974831, numéro ERN.

  4   Alors, il semblerait que dans le système e-court, ce soit la page

  5   numéro 6.

  6   Je peux vous en donner lecture. Je dois le faire, à vrai dire. Je

  7   cite :

  8   "Nous avons également indiqué que les Serbes n'avaient pas encore été

  9   expulsés des deux centres de Bratunac et Skelani, les centres de villes qui

 10   sont situées sur les rives de la -- sur le nombre total de 11 500 Serbes

 11   dans la municipalité de Bratunac, 5 391, soit 47 % sont toujours présents."

 12   Monsieur Gusic, est-ce que vous connaissez un seul village serbe qui soit

 13   resté sous le contrôle des Musulmans et qui n'ait pas été incendié ?

 14   R.  Tous les combats dont vous parlez se sont déroulés après mon départ,

 15   après le 17 avril, et à un moment où vous aviez exterminé pratiquement tous

 16   les Musulmans sur le territoire de la municipalité de Bratunac.

 17   Q.  Monsieur le Témoin, il s'agit là de clichés qui nous demanderons de

 18   vous garder dans ce prétoire pendant encore une semaine. Répondez à la

 19   question.

 20   R.  Non, ce ne sont pas des clichés. Ensuite, il y a eu organisation sur

 21   place et des combats ont été menés de part et d'autre. Vous le savez

 22   pertinemment, tout comme moi. Et, dans ces combats, il y a eu des victimes

 23   de toutes parts. Il n'y a là rien de controversé et tout est clair. Alors,

 24   bien entendu, je suppose et je ne doute pas que des villages serbes ont

 25   également connu des victimes, que des soldats et des civils serbes sont

 26   également tombés et qu'il n'y a là rien de controversé.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous afficher la page 37.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 17871

  1   Q.  Je suis dans la précipitation et je vais vous présenter ce document qui

  2   vous montrera --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, quelle est la

  4   pertinence de ceci ? En quoi ceci ne relève-t-il pas d'une défense de type

  5   tu quoque ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'est pas du tu quoque. Moi, je suis en

  7   train de prouver que les choses ne se sont pas passées comme ça, que les

  8   Serbes n'ont pas attaqué mais qu'ils sont attaqués. Ce sont les Serbes qui

  9   ont eu 3 500 tués dans cette région, et non pas les Musulmans. Tout cela,

 10   ce sont des mensonges, Monsieur le Président, des mensonges. Ici, c'est un

 11   combattant de l'ABiH qui parle, qui a été désigné comme criminel de guerre

 12   dans une liste et, moi, je conteste tout ce qu'il a dit. C'est de cela

 13   qu'il s'agit. Et j'ai des documents à l'appui. Or, on ne me donne pas la

 14   possibilité de me défendre. Je n'en ai pas la possibilité.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre dernière question, maintenant,

 16   Monsieur Karadzic.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Savez-vous, Monsieur Gusic, que dans cette région, c'est par dizaine

 19   que l'on a retrouvé des charniers, que le général Morillon a participé à

 20   cela, que presque tous les combattants serbes sont tombés dans des villages

 21   serbes, tout comme les combattants musulmans, d'ailleurs, en très grande

 22   majorité. Est-ce que vous savez que la très grande majorité des combattants

 23   serbes, tout comme des combattants musulmans, sont tombés dans des villages

 24   serbes ?

 25   R.  Je l'ignore.

 26   Q.  Mais comment l'expliquez-vous en tant que soldat ?

 27   R.  Je ne sais pas. Si vous voulez obtenir des éclaircissements, il faut

 28   interroger des membres des forces armées d'un côté comme de l'autre.


Page 17872

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois dire aux Juges de la Chambre que ceci

  2   ne peut pas être considéré comme une défense et qu'il est impossible de

  3   continuer de cette façon, et je vais devoir me poser la question de savoir

  4   quelles mesures je peux prendre. Parce que de cette façon, il est

  5   impossible de se défendre, en interrogeant un propagandiste politique de

  6   l'ABiH dont les propos sont ici présentés comme étant des éléments de

  7   preuve.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] C'est aux Juges de la Chambre,

  9   Docteur Karadzic, d'évaluer ce témoin. Le contre-interrogatoire ne veut pas

 10   dire la même chose que de présenter ses moyens à décharge, et ce, de façon

 11   détaillée. Le contre-interrogatoire est un art qui consiste à procéder de

 12   façon discrète, où vous pouvez faire passer les éléments essentiels et ceux

 13   avec lesquels vous êtes en désaccord avec l'essentiel de la déposition du

 14   témoin. Sauf votre respect, vous êtes en train de confondre le contre-

 15   interrogatoire avec la présentation de vos moyens à décharge. Il me semble

 16   qu'il y a une superposition ici.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Pour ce qui est des documents, Monsieur le

 19   Président, vous --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non --

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que mes commentaires -- Monsieur le

 22   Président, vous avez anticipé sur mes commentaires. Je souhaitais

 23   simplement répondre à ce qui, à mes yeux, était une attaque inappropriée du

 24   témoin.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite ajouter quelque chose. A la page

 26   865, au chapitre intitulé "Organisateur du crime", ce membre du Parlement

 27   européen a indiqué que ce témoin était à la cinquième ou sixième place sur

 28   la liste. Alors, si cela n'est pas pertinent à vos yeux et si ceci ne


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  1   récuse pas le témoin, je ne vois pas comment quiconque puisse assurer sa

  2   défense.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Montrez-moi cela.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons cela maintenant. Il s'agit du 098465.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit du même document ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre réponse, votre commentaire,

  8   Monsieur le Témoin.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas de commentaire à faire. Il

 10   s'agit là de quelque chose à propos duquel je ne souhaite rien dire,

 11   quelque chose qui pourrait être perçu comme étant mal élevé. Et, même si

 12   l'accusé mérite cela en ce qui concerne les dernières minutes, parce que

 13   tout ceci est monté de toutes pièces.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, pour ce qui est de la

 15   recevabilité de ce document ?

 16   M. TIEGER : [interprétation] Ecoutez, il me semble en tout cas, en prenant

 17   le critère le moins élevé, alors, je vais aborder cette question. L'accusé

 18   tente de faire passer ce document comme un document émanant des enquêtes de

 19   la communauté internationale. Il s'agit très clairement d'une disposition

 20   prise par un de ses membres de l'organisation -- d'un membre de la

 21   communauté internationale. Des documents qui ont été présentés par les

 22   autorité serbes, si on regarde la page 37 qui a été montrée à l'accusé,

 23   c'est bien ce que cela indique. La manière dont le document est formulé, la

 24   page du document tout ceci est très clair, ceci a été rédigé par les

 25   représentants officiels, les Bosno-Serbes.

 26   Alors, si on prend le critère le plus bas, je souhaite invoquer ici un

 27   commentaire et une observation qui a été faite par Me Robinson l'autre

 28   jour, à savoir qu'on ne peut en tout cas envisager autre chose que le


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  1   versement au dossier de ces quelques pages qui font partie d'un document

  2   qui est beaucoup plus important, et d'essayer de faire croire qu'il s'agit

  3   de pages qui ont été rédigées de façon indépendante par des membres de la

  4   communauté internationale et remises par les autorités bosno-serbes, je

  5   crois que c'est quelque chose sur lequel il faut se pencher.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, nous allons réserver la décision

  7   sur la recevabilité de ce document pour demain.

  8   Et nous entendrons les arguments, pour autant qu'il y en ait, demain, il

  9   nous faut lever l'audience.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite simplement préciser qu'il est pas

 11   autorisé de laisser de côté ce qu'a fait un membre du Parlement européen il

 12   y a fort longtemps en 1993. Nous pouvons ne pas tenir compte de ce que dit

 13   un membre du Parlement européen mais nous ne pouvons pas faire cela à un

 14   membre de l'armée de bosno-serbe.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit là d'une question distincte, à

 16   savoir si nous allons verser cela au dossier ou non par le truchement de ce

 17   témoin.

 18   Quoi qu'il en soit, Monsieur Gusic, ceci met un terme à votre déposition et

 19   au nom des Juges de la Chambre, je souhaite vous remercier d'être venu à La

 20   Haye pour déposer. Je vous souhaite un bon voyage de retour.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je souhaite vous remercier vivement également.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous poursuivrons demain à 14 heures 15.

 23   Je souhaite remercier les personnes qui nous assistent dans ce prétoire.

 24   [Le témoin se retire]

 25   --- L'audience est levée à 19 heures 12 et reprendra le jeudi 25 août 2011,

 26   à 14 heures 15.

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