Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 19 septembre 2011

  2   [Audience publique]

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Nous allons

  7   siéger pendant toute la semaine en application de l'article 15 bis, parce

  8   que le Juge Morrison sera absent du fait d'obligations qui sont les siennes

  9   dans son pays.

 10   Bonjour, Monsieur le Témoin, j'espère que vous avez eu un week-end.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Merci.

 12   LE TÉMOIN : KDZ-075 [Reprise]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, allez-y.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, merci. Bonjour, Excellences, bonjour à

 16   tous et à toutes.

 17   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 19   R.  Bonjour.

 20   Q.  Je vais vous prier de nous aider à comprendre ce qui s'est passé

 21   exactement et de quelle façon ça s'est passé. Vous ai-je bien compris ?

 22   Vous vous êtes caché pendant deux mois ? N'est-ce pas ? Dites-nous où est-

 23   ce que vous vous êtes caché ?

 24   R.  C'est exact, je me suis caché pendant presque deux mois du 10 juillet

 25   jusqu'au 10 septembre. Je me suis caché vers la fin du village dans les

 26   champs de maïs et non loin de la forêt qui se trouvait non loin du village.

 27   Et je venais ça et là dans une maison, mais pas la mienne, celle d'un

 28   cousin qui se trouvait à proximité de ce champ de maïs et de cette forêt.


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  1   Q.  Et qui se trouvait chez ce cousin ?

  2   R.  Ce cousin, il avait des fils, mais à l'époque, il avait 65, 67 ans. Et

  3   il avait aussi deux filles et sa femme.

  4   Q.  Pourquoi vous êtes-vous caché ?

  5   R.  Eh bien, voyez-vous, dans notre village, tous les hommes ayant entre 18

  6   et 60 ans ont été appréhendés, et lorsque j'ai pu voir les choses, il y en

  7   a beaucoup qui ont été tués. Pour les autres, on ne sait pas ce qu'il est

  8   advenu d'eux. Mais ce soir-là, après le 10, lorsque je suis rentré chez

  9   moi, on m'a dit qu'à plusieurs reprises, deux ou trois fois, l'armée était

 10   passée par le village et cherchait dans les maisons des armes et voir si

 11   quelqu'un était resté, donc il est normal que je ne sois pas resté chez

 12   moi. J'ai dû quitter chez moi, parce que s'ils m'avaient trouvé, ils

 13   m'auraient emmené une fois de plus.

 14   Q.  Hm-hm. Alors, vous l'avez dit à votre voisin, je ne vais pas donner son

 15   nom, et il vous a aidé à vous débrouiller ?

 16   R.  Non. Non, non, c'est ma sœur qui a établi un contact avec lui.

 17   Q.  Merci. Alors, vous êtes allé ensuite à Kljuc; combien de temps avez-

 18   vous passé à Kljuc ?

 19   R.  Sept ou huit jours.

 20   Q.  Merci. Est-ce qu'il était difficile de se faire caser sur la liste pour

 21   être transporté jusqu'à Travnik ?

 22   R.  Pour être tout à fait sincère, je ne sais pas. Mais je sais qu'une

 23   documentation devait être assurée au préalable. Il fallait avoir une carte

 24   d'identité sur soi, il fallait avoir des preuves de propriété immobilière,

 25   il fallait que les impôts soient réglés, et il fallait, bien sûr, aller à

 26   la police pour prendre un document vous permettant de vous en aller, et

 27   c'est avec ce document que l'on pouvait ensuite aller acheter son billet.

 28   Q.  Et on payait le billet pour faire partie du convoi ?


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  1   R.  Oui, il fallait donner un certain montant à une certaine personne.

  2   Q.  Merci. Est-ce que cette liste était importante, est-ce que ça changeait

  3   tout le temps ou est-ce qu'il fallait attendre ?

  4   R.  Eh bien, d'habitude il fallait attendre entre sept et dix jours, cela

  5   dépendait, parce qu'il n'y avait pas qu'un seul convoi, il y avait

  6   plusieurs convois d'organisés depuis Kljuc. Et pour être tout à fait

  7   sincère, je vous dirais que je ne suis pas allé chercher ce billet, je ne

  8   suis pas très au courant, mais je sais que les miens ont attendu trois ou

  9   quatre jours avant de pouvoir acheter leurs billets.

 10   Q.  Merci. Est-ce qu'il en allait ainsi pour tout le monde ou pour vous

 11   seulement ?

 12   R.  Pour la totalité des citoyens de Kljuc.

 13   Q.  Qui a contrôlé Kljuc à l'époque ?

 14   R.  A l'époque, c'était pour l'essentiel la police de la Republika Srpska.

 15   A l'époque, l'autorité était exercée par le groupe ethnique serbe.

 16   Q.  Merci. Mais je suis quelque peu dans la confusion. Comment se fait-il

 17   que les Serbes vous aient laissé tranquille, que ces autorités serbes vous

 18   ont laissé tranquille, or vous, vous avez survécu à un événement

 19   dramatique, un incident très grand, or votre voisin néglige ce fait, les

 20   autorités négligent ce fait, elles s'en fichent et elles vous laissent

 21   partir ? Est-ce que vous avez une explication à nous fournir ?

 22   R.  Je vous ai dit que je ne suis pas allé acheter le billet. Ce sont des

 23   amis à moi qui ont acheté deux billets. Mais c'est pour des raisons de

 24   santé qu'ils n'ont pas pu s'en aller, ces billets sont donc restés et ma

 25   sœur les a rachetés. Et quand ils envoyaient des camions, des camions

 26   remorques ou des autobus dans un convoi, moi, je suis allé monter, et on ne

 27   m'a pas demandé qui j'étais. L'essentiel c'était d'avoir cette espèce de

 28   coupon ou de ticket, et ça m'a permis de monter à bord du camion.


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  1   Q.  Merci. Mais le voisin savait que vous aviez survécu à cet événement et

  2   vous a laissé aller ?

  3   R.  S'il avait su, probablement ne m'aurait-il pas emmené du tout.

  4   Q.  Donc lui ne savait pas que vous vous trouviez à bord de cet autocar ?

  5   R.  Non, il ne le savait pas du tout.

  6   Q.  Merci. Mais les autorités de Kljuc savaient-elles que vous aviez

  7   survécu à un tel événement ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Merci. Ensuite, vous vous êtes présenté dans les rangs de l'ABiH.

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 12   R.  C'est exact.

 13   Q.  Au bout d'un certain repos, une période de repos, vous êtes allé

 14   rejoindre le rang. De quelle unité avez-vous fait partie ? Vous n'avez pas

 15   à le dire, vous n'avez pas à le dire. Dites-nous ceci --

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Nous allons expurger la

 17   ligne 18.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je m'excuse.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous avez reçu une attestation pour ce qui est de votre

 21   participation à la guerre ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci. A partir de quelle date vous a-t-on reconnu le fait que vous

 24   avez participé à la guerre ?

 25   R.  Je ne voudrais pas répondre.

 26   Q.  Nous pouvons passer à huis clos.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.


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  1   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité partiellement levée par une ordonnance de la Chambre]

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 13  Pages 19059-19062 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 20   Q.  Penchons-nous donc sur la façon dont ces gens sont énumérés sur la

 21   liste des combattants, des "sehid". Est-ce que d'abord vous pouvez nous

 22   dire ce que ça veut dire "sehid" ?

 23   R.  Pour être sincère, je vais vous dire que ces gens, c'est fait pour que

 24   leurs familles puissent recevoir des revenus pour avoir de quoi à vivre. On

 25   a fait la chose ainsi. Vous pouvez trouver sur ces listes des gens qui

 26   avaient 65 ans et on dit à leur sujet que c'est des "sehid". Mais ça c'est

 27   pour qu'ils aient droit à des allocations pour avoir de quoi vivre.

 28   Q.  Vous voulez dire qu'il y a eu une supercherie au niveau de l'Etat ?


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  1   R.  Oui, une chose de ce genre.

  2   Q.  Est-ce qu'on peut se pencher sur le D115, page 333, s'il vous plaît --

  3   oui, il est dit ici au sujet de cette tromperie de l'Etat, il n'a pas dit,

  4   non, si vous le dites, il a dit, oui, quelque chose de ce genre. C'est ce

  5   qu'il a répondu. C'est bien ce que vous avez dit, Monsieur ?

  6   R.  J'ai dit oui. Pour qu'ils puissent percevoir des allocations afin que

  7   les familles aient de quoi vivre après, parce que les pères, les parents

  8   étaient tués, et, les enfants, il fallait les scolariser, il fallait

  9   trouver des modalités pour leur faire percevoir des allocations afin qu'ils

 10   aient de quoi vivre.

 11   Q.  Bon, je crois qu'on avait vu tout à l'heure le bon texte, le 1D115,

 12   page 333, ce n'est pas le bon document. Ma question était celle-ci : est-ce

 13   que vous avez de la sorte trompé l'Etat ?

 14   R.  J'ai dit que probablement, oui.

 15   Q.  D1115 --

 16   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que l'accusé avait dit 115 et il

 17   manquait un 1.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  -- combien de gens a-t-on qualifié de "sehid", alors que ce n'était pas

 20   des "sehid" ?

 21   R.  Pour l'essentiel, tous.

 22   Q.  Ah, bon. Merci. Vous avez donc attendu sept mois pour raconter cette

 23   histoire. Mais pourquoi n'avez-vous pas raconté cela dès que vous êtes

 24   arrivé ?

 25   R.  Une fois arrivé, je ne savais pas où j'étais. Pendant deux mois, je ne

 26   suis presque pas sorti de l'appartement, une fois que je suis arrivé sur le

 27   territoire libre.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez vous pencher -- page -- je crois que c'est la


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  1   bonne, 333 ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est au prétoire électronique qu'il faut nous

  3   montrer la page 333.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Alors, est-ce que vous pouvez voir ici le nom de Domazet Fuad ? Et vous

  6   avez Cajic Smajo juste au-dessous.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Il y en a plein qui sont originaires de Kljuc. Est-ce que ce sont là

  9   des civils, tous des civils qui sont considérés comme étant des "sehid" ?

 10   R.  Je ne parle que de ceux qui sont originaires de Biljani.

 11   Q.  Penchez-vous un peu sur l'origine Kljuc ?

 12   R.  Tous ont mis Kljuc, mais ça c'est surtout des gens de Biljani. Dedic,

 13   c'est des gens originaires d'une autre localité. Mais je vous ai dit que

 14   c'était pour réaliser des droits, pour acquérir des droits.

 15   Q.  Est-ce que vous voyez en haut Cajic ?

 16   R.  Oui, oui, j'ai vu. On a vu Cajic Smajo, et cetera. Oui.

 17   Q.  Bon. Puis après il y a Cehic, puis après il y a Domazet, Domazet, et

 18   ils sont tous originaires de Kljuc. Il n'y en a pas un seul avoir été

 19   combattant ?

 20   R.  Je vous ai dit et j'ai répété qu'à Biljani, sur les 200 et quelques

 21   personnes, il n'y a pas eu un seul avoir tiré une seule balle. Ils ont tous

 22   restitué leurs armes, et ils ont été emmenés de leur plein gré à l'école,

 23   et ils sont venus à l'école primaire de Biljani.

 24   Q.  Merci. Vous n'avez pas répondu. Je vous demandais d'expliquer aux Juges

 25   de la Chambre ce que signifiait un "sehid" ?

 26   R.  Le "sehid", c'est quelqu'un qui meurt sur la route de Dieu, voilà, pour

 27   vous dire la vérité.

 28   Q.  Un saint combattant de l'Islam, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Moi, je ne parlerais pas de saint. Parce que si tu défends ton foyer,

  2   c'est la même chose, ou si tu tombes alors que tu es en chemin sur une

  3   route, c'est la même chose, tu es un "sehid".

  4   Q.  Merci. Bien, revenons maintenant à la description de l'événement en

  5   tant que tel. Vous êtes donc monté à bord de l'autobus. Combien vous étiez

  6   dans l'autobus ?

  7   R.  A peu près 70, enfin d'après mon évaluation à moi.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Est-ce que nous avons

  9   nécessité de rester à huis clos partiel ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non, je ne le pense pas.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous pensez que nous pouvons

 12   maintenant revenir en audience publique ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'il en soit ainsi.

 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre maintenant,

 17   Monsieur Karadzic.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Donc, le nombre d'entre vous qui êtes montés à bord de l'autobus et

 21   celui que vous avez indiqué, il n'y avait pas d'officier à bord de

 22   l'autobus, n'est-ce pas ?

 23   R.  Devant, simplement, il y avait le chauffeur et deux ou trois soldats.

 24   Q.  Mais dans vos déclarations, vous avez dit qu'il n'y avait pas un seul

 25   soldat.

 26   R.  Ah, vous avez peut-être raison. C'est la police militaire qui était

 27   présente dans l'autobus, pour dire les choses précisément. Mais je crois

 28   avoir déclaré que lorsque l'autobus était sur le point de partir, deux


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  1   hommes en uniforme sont montés dans l'autobus pour chercher quatre hommes

  2   environ, et à ce moment-là l'autobus a démarré et ils nous ont demandé de

  3   passer dans un autre autobus. Voilà comment les choses se sont passées.

  4   Q.  Mais lorsque vous avez démarré, il n'y avait pas à bord un seul soldat

  5   ou un seul officier, n'est-ce pas ?

  6   R.  Eh bien, je ne sais pas. Peut-être ne l'ai-je pas dit parce que

  7   personne ne m'a posé la question à ce sujet. Moi, je ne voyais pas grand-

  8   chose. J'étais assis à l'arrière de l'autobus, non loin de la porte

  9   arrière, et c'est là que je suis resté pratiquement tout le temps.

 10   Q.  Combien a duré le trajet de cet autobus jusqu'à ce que quelqu'un

 11   l'arrête ?

 12   R.  A peine une centaine de mètres, même moins que ça. Je n'en suis pas

 13   sûr.

 14   Q.  Vous vous êtes arrêtés devant la maison de qui ?

 15   R.  Devant la maison de Mehmed Hadir, enfin une vingtaine, une trentaine de

 16   mètres après, en face de la maison de Habir, en fait.

 17   Q.  Et à ce moment-là, ils ont demandé à deux ou quatre hommes de descendre

 18   de l'autobus, des hommes forts, n'est-ce pas ?

 19   R.  Eh bien, j'ai dit que la première fois que l'autobus a été arrêté

 20   c'était une dizaine de mètres plus loin, et ils ont demandé à quatre hommes

 21   forts de descendre de l'autobus. Moi, j'ai levé la tête et j'ai reconnu un

 22   (expurgé) et j'ai aussi reconnu, le nom me revient

 23   à l'instant, Mujo Ermonovic [phon] et il y avait deux autres hommes que

 24   j'ai vus descendre de l'autobus par la porte avant. Je croyais qu'ils

 25   avaient besoin d'eux pour faire un certain travail ou quelque chose comme

 26   ça.

 27   Q.  Et ensuite, vous avez démarré, vous avez couvert une centaine de

 28   mètres; c'est cela ?


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  1   R.  Oui. Après quelques instants, l'autobus a redémarré et le chauffeur

  2   avait déjà dit qu'ils ne pourraient pas aller jusqu'à Kljuc parce que

  3   l'autobus était trop plein. Donc il a couvert une centaine de mètres et

  4   nous nous sommes arrêtés une nouvelle fois.

  5   Q.  Et à ce moment-là ils ont dit qu'une partie d'entre vous devait passer

  6   dans un autre autobus; c'est cela ?

  7   R.  Oui, exact. Et il a ouvert la porte arrière demandant que cinq hommes

  8   descendent, donc la porte arrière s'est ouverte et je faisais partie de ces

  9   cinq hommes qui sont descendus. J'étais le cinquième, je crois. Le premier,

 10   c'était Fikret Balagic, suivi de Alija Avdic, Besim Avdic et Rufad. Ils

 11   nous ont emmenés à l'arrière de notre autobus, il y avait là, à une dizaine

 12   de mètres, un autre autobus. Je pensais qu'ils allaient nous faire monter

 13   par la porte arrière de cet autre autobus, mais ils ne l'ont pas fait, car

 14   quand nous sommes arrivés à la porte arrière de cet autre autobus, nous

 15   sommes passés devant la maison de Mehmed et ils nous ont emmenés derrière

 16   la maison.

 17   Q.  Merci. Est-ce que nous pouvons voir la page 329 à l'écran de cette

 18   pièce D1115, le document qui était affiché il y a un instant. Je vous

 19   prierais de bien vouloir lire le troisième tiers de cette liste, vous y

 20   verrez le nom de Balagic, par exemple, que vous avez déjà prononcé.

 21   R.  Fikret Balagic.

 22   Q.  C'est bien celui-là, celui dont vous parliez ?

 23   R.  Un instant, je vous prie.

 24   Q.  En dessous de Bajric, Sulejman.

 25   R.  Je vérifie l'âge. Elmir, non, non, il n'y est pas. Fikret était un

 26   homme plus âgé qui travaillait à la mairie, il était vice-président ou

 27   quelque chose comme ça, mais je n'en suis pas sûr.

 28   Q.  Et quel était le prénom de son père ?


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  1   R.  Je crois que son père se prénommait Arif.

  2   Q.  Mais regardez -- deux, trois, quatre, cinq, regardez.

  3   R.  Ah, oui, oui, il est là, il est là. Il est possible qu'il soit né en

  4   1940.

  5   Q.  Merci. Est-ce que vous retrouvez les autres noms que vous avez

  6   prononcés ? Ils sont tous sur cette liste en qualité de "sehid", n'est-ce

  7   pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Merci. Alors, veuillez nous expliquer la chose suivante. Une centaine

 10   de mètres après que l'autobus ait démarré, il s'est arrêté et ensuite on

 11   vous a fait descendre et on vous a emmenés jusqu'à la maison, n'est-ce pas

 12   ?

 13   R.  On nous a emmenés en direction de la maison, et à un certain moment, on

 14   nous a dit de nous arrêter. Moi, j'avais déjà un canon de fusil dans le

 15   dos, et ils m'ont poussé avec ce canon de fusil vers l'avant, et à ce

 16   moment-là j'ai remarqué un de mes parents qui était déjà allongé sur le

 17   sol, et nous avons dû passer par-dessus son corps. Je crois que Rufat, à ce

 18   moment-là, a essayé de s'enfuir. Il a commencé à courir vers la droite. Les

 19   autres hommes m'ont suivi. Moi, je courais sur la gauche, Besim me suivait

 20   et j'ai entendu leurs voix à ce moment-là qui criaient dans notre dos :

 21   "Arrêtez-vous, on va enculer vos mères balija" et ils ont commencé à tirer

 22   à ce moment-là. Nous étions déjà à une dizaine de mètres de là quand ils se

 23   sont mis à tirer. J'ai d'abord vu Besim quand je me suis arrêté devant lui,

 24   j'ai vu qu'il était en train de tomber et moi aussi je me suis jeté au sol

 25   à ce moment-là, je ne sais pas pourquoi. Quoi qu'il en soit, quand il est

 26   tombé au sol, je me suis jeté au sol aussi.

 27   Q.  Mais il y a une chose que j'ai du mal à comprendre : qu'est-il arrivé à

 28   ces personnes qui ont été emmenées une centaine de mètres plus tôt et qui


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  1   auraient été abattues ? Comment se fait-il que vous les voyiez devant vous

  2   une centaine de mètres devant ?

  3   R.  Eh bien, c'est ce que je viens de vous dire. Ils ont demandé à quatre

  4   hommes de descendre de l'autobus. Moi, on m'a fait descendre avec les

  5   autres, une centaine de mètres après que l'autobus ait démarré pour la

  6   première fois. Ils avaient probablement emmené les autres à l'intérieur de

  7   la maison.

  8   Q.  Mais comment se fait-il qu'ils pouvaient vous voir devant quand vous

  9   étiez dans l'autobus ?

 10   R.  Comme je l'ai déjà dit, quand on s'est arrêtés, quand les quatre hommes

 11   sont descendus de l'autobus, ces quatre hommes forts, le chauffeur est

 12   resté là quelques instants, puis il a dit que de toute façon nous

 13   n'arriverions pas jusqu'à Kljuc car il y avait trop de monde dans l'autobus

 14   et il a commencé à avancer, mais une dizaine de mètres plus tard il s'est à

 15   nouveau arrêté et il s'est demandé quoi faire, cela a duré à peu près cinq

 16   minutes et il avait couvert à peine une centaine de mètres.

 17   Q.  Je comprends, mais on les a emmenés à une centaine de mètres de là

 18   quand vous vous êtes arrêtés, quand l'autobus s'est arrêté, alors comment

 19   se fait-il que vous n'avez pas été plus rapide qu'eux ? Comment est-ce

 20   qu'ils ont pu vous rattraper ?

 21   R.  Mais je vous ai dit qu'ils avaient été emmenés cinq minutes plus tôt.

 22   Moi, je n'ai couvert qu'une dizaine de mètres. Si j'avais un plan, je

 23   pourrais vous le montrer. Evidemment, je n'ai pas compté le nombre de

 24   minutes qui se sont passées pendant qu'on courait. Ce sont des minutes,

 25   toute cette attente, tous ces démarrages et arrêts, c'était comme une

 26   éternité.

 27   Q.  Bien. Et à ce moment-là, vous vous êtes jeté au sol sur le corps de

 28   Besim ou à côté de Besim ?


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  1   R.  A côté de Besim.

  2   Q.  Mais dans votre première déclaration, vous avez dit que vous étiez

  3   tombé au sol sur le corps de Besim, n'est-ce pas ?

  4   R.  Il est possible que je l'aie dit, mais enfin, finalement j'étais à côté

  5   de lui, je pouvais le toucher de ma main. Enfin, je ne me rappelle plus

  6   maintenant tous les détails.

  7   Q.  Mais les 65 hommes, eux, ont continué tranquillement leur chemin

  8   jusqu'à Kljuc; c'est ça ?

  9   R.  Cinq ou six minutes plus tard, je crois que je l'ai déjà dit dans mes

 10   déclarations antérieures, donc tout cela a duré cinq ou six minutes, et

 11   deux ou trois minutes plus tard, ils ont dit, "Revenez vite. Nous allons

 12   prendre le chemin de Kljuc. Nous partons." Il est probable, et c'est ce que

 13   disent des témoins de Gudin Ham [phon] et de Velagici, trois autobus ont

 14   pris la route, et il est vrai que trois autobus se trouvaient là, mais j'ai

 15   dit que nous sommes passés à côté de deux autobus et que je n'ai pas vu de

 16   civils. Je n'ai vu que quelques soldats à bord. Je crois l'avoir dit dans

 17   ma déclaration.

 18   Q.  Monsieur le Témoin, ces personnes qui sont montées à bord de l'autobus

 19   avec vous ont continué la route cinq minutes plus tard. Est-ce que vous

 20   pouvez nous donner des noms qui pourraient confirmer votre histoire ?

 21   R.  Comment est-ce que je pourrais vous donner des noms puisqu'ils ont tous

 22   été tués ?

 23   Q.  Mais vous avez dit qu'eux étaient restés une heure et demie, ensuite

 24   vous avez dit qu'ils sont partis dix minutes plus tard. Et aujourd'hui vous

 25   dites qu'ils sont partis cinq minutes plus tard.

 26   R.  Je ne me rappelle pas l'horaire exact. Ce que je dis, c'est que tout ce

 27   qui s'est passé depuis Biljana et jusqu'au départ, tout le processus a duré

 28   entre sept et neuf heures. Je parle de tout ce processus des personnes qui


Page 19072

  1   se sont faites tuer. Je n'ai pas pu dénombrer les minutes. Mais tout ce qui

  2   s'est passé entre l'arrivée dans l'école et le départ de l'autobus, il

  3   s'est écoulé peut-être deux heures. Je crois que je l'ai signalé dans mes

  4   déclarations antérieures.

  5   Q.  Merci. Mais cet événement, l'autobus qui démarre, puis 100 mètres plus

  6   loin, quelqu'un arrête l'autobus, est-ce que vous pourriez donner le nom de

  7   personnes ou d'une unité qui a arrêté l'autobus ?

  8   R.  Je viens de vous dire que le chauffeur lui-même avait dit qu'il ne

  9   parviendrait pas jusqu'à Kljuc parce qu'il y avait trop de monde dans

 10   l'autobus. Et une centaine de mètres plus loin, qui est-ce qui a arrêté

 11   l'autobus, qui est-ce qui a ordonné le transfert d'une partie des personnes

 12   dans un autre autobus, vous le savez sans doute mieux, parce que vous avez

 13   peut-être des listes. Moi je n'ai pas de détails plus précis que cela, je

 14   n'ai pas vu grand-chose.

 15   Q.  Alors une fois que les quatre hommes ont été tués, sur les cinq hommes

 16   qui sont descendus dans un premier temps, est-ce qu'il y a eu des gens qui

 17   sont restés vivants ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Mais vous, vous avez survécu. Tout cela a duré cinq minutes, mais dans

 20   votre déclaration faite plus tard, vous avez dit qu'ils sont resetés là

 21   encore une heure, une heure et demie, qu'ils étaient ivres, qu'ils se sont

 22   mis à chanter, et que c'est en entendant leur façon de chanter que vous

 23   avez compris qu'ils étaient ivres. Et ensuite, ils sont partis, mais dans

 24   quelle direction ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, M. Karadzic est en

 27   train de confondre deux incidents. Je crois que c'est ce que le témoin

 28   essaie d'expliquer. Quand il dit une heure et demie après, c'est une heure


Page 19073

  1   et demie après que le témoin se soit jeté au sol. Je crois c'est d'ailleurs

  2   ce que le témoin essaie d'expliquer en ce moment.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie. Veuillez

  4   poursuivre votre récit.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. J'ai dit très exactement ce

  6   qui s'est passé. Il ne s'est pas écoulé cinq minutes entre le moment où

  7   nous a fait descendre de l'autobus et le moment où l'autobus a démarré en

  8   direction de Kljuc. Moi, je suis resté à l'endroit où je me trouvais une

  9   heure, une heure et demie, encore. Et c'est pendant cette période d'une

 10   heure et demie, cinq minutes après le début de la période, que des soldats

 11   sont arrivés. Moi, je ne les ai pas vus, mais je les ai entendus. Ils sont

 12   arrivés près de la maison, il y en a même un qui est passé juste devant la

 13   maison, et qui a appelé les autres en disant : "Viens ici, il y a encore

 14   des morts." Et l'autre a répondu : "J'en ai assez." Et ils sont restés

 15   devant cette maison au moins une heure après le départ de l'autobus. Il y

 16   en a un qui criait : "On va mettre le feu à la maison", l'autre qui

 17   répondait : "Non, il ne faut pas mettre le feu parce qu'on en aura besoin."

 18   Et je me souviens très bien qu'il y en a un qui a proposé un coup à boire à

 19   l'autre, ils se sont mis à chanter. Il s'est passé toute sorte de choses.

 20   Et vers la fin, ils se sont dispersés les uns vers le haut, les autres vers

 21   le bas. Moi, je suis resté encore au sol, et même encore une dizaine, une

 22   quinzaine de minutes après le départ des soldats. D'ailleurs, je ne peux

 23   pas vous dire exactement combien de temps, parce que je répète une nouvelle

 24   fois que je n'avais pas de montre et que je ne pouvais pas compter les

 25   minutes. Mais quand j'ai fini par me calmer, quand j'ai entendu que les

 26   soldats s'étaient éloignés de la maison, j'ai pris la fuite jusqu'à la

 27   forêt la plus proche.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 19074

  1   Q.  Mais dans l'une de vos déclarations, Monsieur le Témoin, vous avez dit

  2   que vous étiez resté au sol cinq à dix minutes avant de vous relever; c'est

  3   bien cela ?

  4   R.  Eh bien, je vais vous dire comment cela se passe. Quelquefois je dis

  5   une chose, et puis il y a quelqu'un qui n'interprète pas correctement.

  6   C'est impossible que tout cela n'ait duré que cinq minutes. Quand j'ai

  7   parlé de cinq minutes, c'était le temps qu'un soldat a passé devant la

  8   maison. Mais moi, je suis resté au sol au moins une demi-heure, si ce n'est

  9   45 minutes ou même une heure ou davantage, je ne sais pas exactement

 10   combien, avant de me relever pour m'enfuir vers la forêt.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous

 12   avez d'autres questions à poser ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Excellence, mais il y a beaucoup de

 14   contradiction et je me dois de faire éclater la vérité. Je ne m'intéresse

 15   qu'à la vérité de façon à ce que nous puissions savoir ce qui s'est passé

 16   et si les choses se sont effectivement passées comme indiqué.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes arrivé au terme du temps

 18   qui vous était imparti il y a une dizaine de minutes. Je vais consulter mes

 19   collègues.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez cinq minutes pour conclure.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur le Témoin, vous avez dit qu'à la fin juin, lorsque les soldats

 25   de Palanka sont arrivés, ont ramassé un certain nombre de personnes dont

 26   les noms figuraient sur une liste, un des soldats voulait tuer toutes ces

 27   personnes, et le commandant a dit que les maisons avaient été fouillées,

 28   que toutes ces personnes étaient innocentes et qu'il fallait les relâcher,


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  1   n'est-ce pas ?

  2   R.  Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Le soldat n'avait pas envie de les

  3   tuer. Et quand il a demandé au commandant : "Qu'est-ce qu'on va faire avec

  4   ces trois hommes ?" Parce que le soldat a dit : "Moi, je ne peux pas faire

  5   cela", le commandant a dit : "Emmène les chez eux." Et ils les ont emmenés

  6   jusqu'au hameau voisin. C'est ce que j'ai dit et c'est ce qui doit figurer

  7   par écrit dans mes déclarations.

  8   Q.  Nous allons retrouver le passage, Monsieur le Témoin, de façon à voir

  9   ce que vous avez dit exactement.

 10   R.  Pas de problème, pas de problème.

 11   Q.  Est-ce que vous niez le fait qu'il y avait trois compagnies présentes à

 12   Biljani ?

 13   R.  Excusez-moi, de quelle compagnie vous parlez ?

 14   Q.  Trois compagnies de l'armée musulmane, commandées par Amir Abdic et Ale

 15   Mujezinovic ?

 16   R.  La vérité, c'est que je n'ai aucune connaissance à ce sujet, et je vous

 17   dis ici aujourd'hui qu'en 1992, pas une seule balle n'a été tirée à

 18   Biljani, et que les quelques fusils de chasse qui existaient dans le hameau

 19   ont été rendus. On peut retrouver cela dans les documents pertinents, on

 20   peut retrouver cela dans toutes les dépositions faites à la police. Pas une

 21   seule balle n'a été tirée pendant l'année 1992 à Biljani tant que les

 22   Musulmans s'y trouvaient.

 23   Q.  Est-il exact que Smail Domazet était chef de compagnie à Biljani ?

 24   R.  Ça, je ne sais pas.

 25   Q.  Et Zijad Abdic, qu'est-ce qu'il était ?

 26   R.  Je ne sais pas non plus. Je ne faisais pas partie de tout cela, je ne

 27   suis pas au courant.

 28   L'INTERPRÈTE : L'interprète française n'a pas dit le mot qui fait l'objet


Page 19076

  1   de la demande d'expurgation du compte rendu de la part de M. Karadzic à

  2   l'instant.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Lorsqu'il y a eu la fouille de Brkici, vous avez dit qu'ils n'ont pas

  5   trouvé d'armes à Brkici et qu'un soldat a voulu se venger à ce moment-là,

  6   mais il a été empêché de le faire par un officier, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, j'ai dit cela. A Biljani, devant nos maisons - c'est mon frère qui

  8   m'a raconté cela lorsqu'il est revenu - un soldat était en train d'aiguiser

  9   son couteau et a dit : "Je vais couper la gorge de celui qui a les cheveux

 10   bruns." Mais ils n'ont rien fait de tout cela. Ils sont allés dans le

 11   hameau voisin, et ensuite ils sont revenus à Domazet, avec l'accord d'un

 12   Serbe qui a dit dans sa déposition que ces hommes étaient des gens bien et

 13   de bons voisins. Ils ont pu rentrer chez eux, à leur domicile. Mladjo et

 14   Boro les ont emmenés le matin, ils ont passé toute la journée avec eux, et

 15   le soir même, ils sont rentrés chez eux.

 16   Q.  Ils les ont ramenés à bord de leurs propres voitures, n'est-ce pas ?

 17   R.  Non, ils n'ont pas osé rentrer tout seuls parce qu'il y avait des

 18   soldats et ils ont demandé qu'on les escorte jusqu'à Brkici et Domazeti.

 19   Donc, Boro et Mladjo ont marché avec eux jusqu'au hameau de Brkici.

 20   Q.  Dans votre déclaration du 3 juin 2000, au paragraphe 2, vous dites

 21   qu'une cinquantaine d'hommes à peu près ont été emmenés dans les locaux de

 22   l'école de Kljuc pour y être interrogés, et que par la suite, dix d'entre

 23   eux ont été relâchés, 40 étant envoyés à Manjaca. Est-ce que ceci est exact

 24   ?

 25   R.  C'est exact, parce que sur les dix en question, j'en connais deux ou

 26   trois qui sont rentrés tout de suite au mois de juin, et qui ont raconté ce

 27   qui s'était passé en disant qu'on les avait gardés dans l'école de Kljuc.

 28   Q.  Mais vous dites ici, en d'autres termes, que vous n'avez pas cru que


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  1   c'étaient les Bérets verts qui étaient en train d'attaquer, même si un

  2   soldat vous a dit que les Bérets verts étaient en train d'attaquer et qu'on

  3   vous plaçait dans l'école pour votre protection; c'est bien cela qu'il vous

  4   a dit ?

  5   R.  Effectivement c'est ce qu'il a dit, mais comment aurait-il pu se faire

  6   qu'il y ait des Bérets verts puisque lui il est là debout à la porte, et

  7   tout tranquille, il dit : "Ne vous en faites pas, nous allons faire ce

  8   qu'il faut et nous allons les chasser." Et ça a été la fin de son propos.

  9   Q.  Mais vous ne l'avez pas cru. Vous pensiez qu'il n'avait pas de Bérets

 10   verts ?

 11   R.  Evidemment qu'il n'y en avait pas, puisqu'à Biljani pas une seule balle

 12   n'avait été tirée. Et d'ailleurs, même dans les environs il n'y avait pas

 13   eu un seul incident. Il n'y avait que très peu de personnes, alors d'où

 14   est-ce qu'ils auraient pu venir ces Bérets verts à ce moment-là ?

 15   Q.  A plusieurs reprises, Monsieur le Témoin, vous dites que certains

 16   partent quelque part et qu'on entend à ce moment-là une rafale, n'est-ce

 17   pas ?

 18   R.  Oui, au fur et à mesure qu'ils faisaient sortir des gens de l'école,

 19   parce qu'on fait sortir quelqu'un, et deux ou trois minutes plus tard on

 20   entend une rafale. Par exemple, Omer Dervisevic est emmené, et entre-temps

 21   ils appellent le nom de Cajic Ale et chaque fois qu'on faisait sortir

 22   quelqu'un, deux ou trois minutes, ou plutôt cinq minutes plus tard -- je

 23   répète que je n'ai pas une très précise notion du temps, mais chaque fois,

 24   quelques minutes plus tard, on entendait une rafale.

 25   Q.  Mais vous n'avez pas vu ce qui se passait ?

 26   R.  Non, bien entendu. On était toujours dans la salle, on attendait, et la

 27   seule chose qu'on voyait c'étaient des soldats qui étaient sous l'arbre et

 28   des soldats sur la route.


Page 19078

  1   Q.  Merci. Est-il exact que dans votre déclaration du 3 juin 2000,

  2   paragraphes 3 et 4, pages 4 et 5, vous dites que quelqu'un a déclaré que

  3   cela n'aurait pas dû se passer de cette façon, et que ces hommes auraient

  4   dû être emmenés à Kljuc, que ces hommes n'auraient pas dû être tués, qu'ils

  5   auraient dû être emmenés à Kljuc ? Est-ce que vous avez entendu ça ? Est-ce

  6   que vous avez dit que vous aviez entendu cela ?

  7   R.  Ça, je ne peux pas vous dire. Je ne sais pas. Je ne peux pas me

  8   rappeler toutes les déclarations que j'ai faites. J'en ai faites à gauche à

  9   droite. Je ne peux pas tout me rappeler.

 10   Q.  Mais est-ce que vous avez entendu un homme dire cela ?

 11   R.  Non. Je ne l'ai pas entendu. Ce que j'ai dit, et c'était peut-être une

 12   interprétation erronée de ma part, c'est que quand j'étais dans l'autobus,

 13   à l'arrière de l'autobus, au fur et à mesure que l'autobus se remplissait,

 14   il y en a un qui a dit : "Qu'est-ce qu'on va faire avec les autres de

 15   l'école ?" Et quelqu'un a répondu en disant : "Tuez-les tous. On n'en a

 16   plus besoin." Ça, je maintiens que je l'ai entendu, parce que je l'ai

 17   effectivement entendu.

 18   Q.  Monsieur le Témoin, nous parlons ici d'un incident dont vous avez été

 19   victime. Vous dites que plus tard des soldats sont arrivés, qu'ils

 20   parlaient entre eux et qu'il y en a un qui a dit : "Mais ça, ça n'aurait

 21   jamais dû arriver."

 22   R.  Ah, oui, d'accord. Après les exécutions. Quand j'étais allongé sur le

 23   sol à côté de la maison, oui, c'est exact, ceux-là, ils racontaient tout et

 24   n'importe quoi. J'ai dit que leur conversation avait duré au moins une

 25   demi-heure, au moins. Il y en a un qui a même interdit qu'on mette le feu à

 26   la maison. Moi, j'étais au sol juste devant cette maison, et dans le même

 27   temps, il y en avait d'autres qui criaient : "Mettez le feu à tout." Il y

 28   en a un qui répond : "Non." Et un autre qui a dit : "Mais ça n'aurait


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  1   jamais dû se passer ainsi. Il aurait été préférable qu'ils soient tous

  2   emmenés à Kljuc." C'est normal. Quand vous avez un groupe avec des gens

  3   très différents, on entend toutes sortes de points de vue différents.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que vous n'allez plus me donner de

  6   temps, n'est-ce pas ?

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Merci, Monsieur le Témoin, mais votre nom figurait-il sur la liste de

  9   M. Omer Filipovic ?

 10   R.  Non. D'ailleurs, je n'avais pas connaissance de l'existence d'une

 11   quelconque liste.

 12   Q.  Merci.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, avez-vous des

 14   questions supplémentaires à poser ?

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une question de précision, Monsieur

 17   Karadzic. Je crois que c'est une pièce de l'Accusation. Nous avons vu la

 18   liste des 125 personnes décédées que nous avons versée au dossier sous la

 19   cote P3362. Est-ce que le nom "sehid" figure sur cette liste ?

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président, c'était la

 21   pièce du Dr Karadzic, le D --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'était le D1115. Est-ce que nous

 23   voyons ce nom-là sur le document ? Est-ce que nous pouvons télécharger le

 24   1115 ?

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons regarder maintenant. Nous allons

 26   regarder maintenant la première page, l'ABiH, c'est ce qu'on peut y lire.

 27   Ici, nous voyons le terme de "sehid", à moins que ce soit une question, si

 28   c'est un Serbe ou un Croate, ou un Chrétien. ABiH.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Où cela se trouve-t-il ? Vous voulez

  2   parler du titre, Vojska BiH, que vous traduisez comme "sehid" ? Où

  3   trouvons-nous le terme de "sehid" ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] "Sehid" est la manière dont c'est communément

  5   utilisé lorsqu'on parle de Musulmans. C'est un terme que l'on utilise

  6   lorsqu'on parle de Musulmans, pas de Chrétiens. Toute personne qui est tuée

  7   dans le cadre de l'armée est considérée comme un "sehid".

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous admettrez que le terme de "sehid"

  9   ne figure pas sur ce document ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, cela n'est sans doute pas sur cette liste.

 11   On peut lire ici en haut, Vojska BH, c'est-à-dire l'ABiH, et ceci n'a pas

 12   été traduit en anglais. Egalement, Excellences, cette dernière rubrique

 13   ici, où on peut lire, "tué", cela veut dire tué au combat. Et s'il y a le

 14   terme "preminvo", cela veut dire mort de mort naturel. Alors si on peut

 15   lire "ubijen", cela veut dire tué suite à un acte criminel. "Poginvo"

 16   signifie tué au combat, et "preminvo" signifie mort naturel.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie de cette précision.

 18   Monsieur le Témoin, ceci met un terme à votre déposition. Au nom des Juges

 19   de cette Chambre, ainsi que du Tribunal dans son ensemble, je souhaite vous

 20   remercier d'être venu à La Haye une nouvelle fois pour venir déposer.

 21   Vous pouvez maintenant disposer. Je vous souhaite un bon voyage de retour.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez attendre que nous descendions

 24   les stores.

 25   [Le témoin se retire]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer pendant

 27   quelques instants à huis clos partiel, s'il vous plaît ?

 28   [Audience à huis clos partiel]


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 13  Page 19081 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  9   [Audience publique]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il est nécessaire de faire une

 11   courte pause pour faire entrer le témoin suivant ? Je ne le pense pas.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président, l'Accusation

 13   souhaite citer à la barre le Témoin KDZ-052.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Faites entrer le témoin dans ce

 15   cas.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour à vous.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, prononcer la

 20   déclaration solennelle.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 22   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 23   LE TÉMOIN : KDZ-052 [Assermenté]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez vous asseoir et mettez-vous à

 26   l'aise.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, je suppose qu'on vous a déjà


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  1   parlé de ceci. Vous allez témoigner aujourd'hui avec un pseudonyme, qui est

  2   le KDZ-052, et vous allez bénéficier d'une déformation de votre visage.

  3   Autrement dit, votre nom ne sera pas cité et des éléments d'information

  4   permettant de vous identifier ne seront pas communiqués à l'extérieur.

  5   L'enregistrement audio de votre déposition comportera une déformation de

  6   votre visage. Comprenez-vous cela ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est afin de garantir votre identité et

  9   le compte rendu d'audience, qui est accessible au public, vous citera

 10   toujours en citant votre pseudonyme.

 11   Est-ce que ce régime vous convient ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Madame Sutherland ?

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Interrogatoire principal par Mme Sutherland :

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 90277,

 17   s'il vous plaît.

 18   Q.  Monsieur, vous voyez un feuillet comportant un pseudonyme devant vous.

 19   Est-ce que je peux demander à ce que ceci ne soit pas diffusé à

 20   l'extérieur. Cette feuille de papier comporte votre nom et votre date de

 21   naissance. Sans pourtant citer l'un ou l'autre, veuillez nous dire si ces

 22   coordonnées sont exactes ?

 23   R.  Oui.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'en demande le versement au dossier,

 25   s'il vous plaît.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci sera versé au dossier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document aura la cote P68 [comme

 28   interprété], sous pli scellé.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous allons devoir procéder à quelques

  2   formalités, comme nous vous l'avons indiqué par écrit. Vous avez témoigné

  3   en tant que témoin protégé dans l'affaire Brdjanin, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le feuillet comportant le pseudonyme a

  6   la cote P3363 ?

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la pièce P3368, sous pli scellé.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 10   Q.  Vous avez par la suite eu l'occasion de réentendre les enregistrements

 11   audio de cette déposition ?

 12   R.  C'est exact.

 13   Q.  Et vous souhaitez apporter deux corrections à des réponses que vous

 14   avez faites. La première se trouve à la page du compte rendu d'audience 8

 15   061, à la ligne 21. La réponse Mico Djukic et son frère Milutin, devrait

 16   être Rade Djukim [comme interprété] et son frère Rado [comme interprété],

 17   également connu sous le nom de Mico; c'est exact ?

 18   R.  C'est exact.

 19   Q.  A la page du compte rendu d'audience 8 070, à la première ligne, la

 20   réponse : "Au début, les soldats serbes. Environ 15 jours plus tard, la

 21   police est venue," devrait être : "Au début, des soldats serbes sont

 22   arrivés. Sept jours plus tard, la police est venue" ? Est-ce exact ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Pouvez-vous confirmer qu'en tenant compte de ces deux corrections,

 25   l'enregistrement audio est le reflet exact de votre déposition à l'époque ?

 26   R.  Oui, c'est exact.

 27   Q.  Et si on devait vous poser les mêmes questions aujourd'hui, et si on

 28   vous posait une question sur les mêmes questions qui ont fait l'objet de


Page 19085

  1   votre déposition dans l'affaire Brdjanin, fourniriez-vous les mêmes

  2   éléments d'information aux Juges de la Chambre, même si vous ne pouviez pas

  3   exprimer cela de la même manière, vos réponses seraient pour l'essentiel

  4   identiques ?

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  7   versement au dossier du numéro 65 ter 22087, sous pli scellé, et le 22087A,

  8   qui est une version expurgée de la déposition du témoin, s'il vous plaît.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux documents seront versés au

 10   dossier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le numéro 65 ter 22087 aura la cote

 12   P3369, et le document 22087A aura la cote P3370.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Avec votre permission, je vais lire un

 15   résumé de ce témoin. Le Témoin KDZ-052 est né et a grandi dans la

 16   municipalité de Sanski Most. Il a déposé à propos des postes de contrôle

 17   qui ont été établis en 1992 dans la zone où il habitait et le fait que des

 18   non-Serbes étaient arrêtés et fouillés.

 19   Il a également dit dans sa déposition qu'il a entendu à la radio à la fin

 20   du mois de mai en 1992 un appel lancé en direction des Musulmans pour

 21   qu'ils rendent leurs armes. Le témoin a témoigné à propos du pilonnage et

 22   de l'attaque de Hrustovo et de Vrhpolje menés par la 6e Brigade de Krajina,

 23   qui a commencé à la fin du mois de mai 1992. Il parle de meurtres et de

 24   pillages et d'incendies des maisons. Le témoin témoigne dans sa déposition

 25   et parle du fait que les troupes ont encerclé le village de Kenjari le 27

 26   juin 1992. Les habitants du village ont été rassemblés et ont été séparés

 27   des femmes. Un nombre d'hommes a été escorté à des maisons dont un Croate

 28   était propriétaire, Marko Juric, et Vlado Vrkes leur a rendu visite. Le


Page 19086

  1   lendemain, les hommes ont été emmenés dans l'ancienne maison de Dujo

  2   Banovic, dans le hameau de Blazevici. Le témoin et quelques jeunes hommes

  3   sont entrés dans la maison. Les hommes âgés sont restés devant la maison.

  4   Le témoin a dit dans sa déposition qu'une bombe a ensuite lancée contre la

  5   maison.

  6   A ce stade, le témoin et un autre homme ont sauté par la fenêtre ouverte à

  7   l'arrière de la maison. L'autre homme s'est enfui. Le témoin s'est caché

  8   dans un trou profond à quelques mètres de la maison. Le témoin a entendu

  9   les hommes que l'on jetait à l'extérieur de la maison et une salve de tirs

 10   a été dirigée contre ces hommes, et cette salve a duré deux minutes.

 11   Le témoin est resté à l'abri dans le trou. Les hommes tués ont été emmenés

 12   dans la maison, et la maison a ensuite été incendiée. Dix-huit personnes

 13   sont mortes ce jour-là. Le témoin est resté dans ce trou profond jusqu'à

 14   l'aube, et à ce moment-là il est rentré dans son village. Il a remarqué que

 15   toutes les maisons avaient été incendiées. Le témoin a dit dans sa

 16   déposition qu'il s'est ensuite rendu à Tomina, où il a rejoint d'autres

 17   Musulmans qui avaient été déplacés de Hrustovo et de Vrhpolje. Les Serbes

 18   ont emmené ce groupe de réfugiés à l'installation de Krings à Sanski Most.

 19   Annexe à l'acte d'accusation C, 22.4

 20   Le témoin a été détenu à Krings pendant un mois. Krings a d'abord été gardé

 21   par des militaires, et ensuite sept jours par la police. Il y avait environ

 22   600 personnes qui étaient détenues à cet endroit-là. Le témoin a décrit les

 23   conditions inhumaines dans le camp, y compris des installations sanitaires

 24   insuffisantes, un manque de place, de la nourriture insuffisante et pas

 25   d'installations médicales. Il a parlé dans sa déposition de passages à

 26   tabac qui ont commencé, faits par la police et les gardiens. Les détenus

 27   ont été frappés à l'aide de bottes, de matraques et de crosses de fusils.

 28   Il a dit dans sa déposition, qu'un détenu, Ejup Masic, est mort suite à un


Page 19087

  1   passage à tabac dont il a fait l'objet. Le témoin a été remis en liberté de

  2   ce centre de Krings le 4 août 1992. Il a quitté Sanski Most le 18 août 1992

  3   lorsqu'il a fait partie d'un convoi qui est parti en direction de Travnik.

  4   Ceci met un terme au résumé du témoin.

  5   Q.  Je n'ai que très peu de questions, Monsieur le Témoin, que je souhaite

  6   vous poser. Tout d'abord, je souhaite vous montrer trois photographies. La

  7   première est le numéro 65 ter 05205.

  8   Monsieur, reconnaissez-vous ce que vous voyez sur cette photo ?

  9   R.  Oui. Il s'agit du centre de Krings.

 10   Q.  Lequel de ces bâtiments, le bâtiment rouge ? De quel bâtiment s'agit-il

 11   ?

 12   R.  Oui, nous avons été détenus dans ce grand bâtiment rouge. Il n'y avait

 13   rien à cet endroit, à l'exception d'un petit peu d'équipement et les restes

 14   d'une vieille machine.

 15   Q.  Et le bâtiment qui se trouve en haut de la photographie, savez-vous de

 16   quoi il s'agit ?

 17   R.  On nous a fait venir dans ce bâtiment une seule fois. Je crois qu'il y

 18   avait des bureaux à cet endroit. Peut-être qu'il y avait les bureaux où il

 19   y avait des directeurs de cette société.

 20   Q.  Pourquoi vous a-t-on emmenés dans ce bâtiment ?

 21   R.  On nous a emmenés dans ce bâtiment pour être interrogés par la police.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande le versement au dossier de

 23   cette photographie, s'il vous plaît.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3371, Madame, Messieurs

 26   les Juges.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 05402

 28   [comme interprété], s'il vous plaît.


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  1   Q.  Reconnaissez-vous ce qui figure sur cette photographie ?

  2   R.  Oui, c'est l'intérieur de ce centre Krings.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande le versement au dossier de

  4   cette photographie, s'il vous plaît.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3372, Madame, Messieurs

  7   les Juges.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à huis

  9   clos partiel, s'il vous plaît ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 19089-19090 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  8   [Audience publique]

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous avons maintenant une photographie à

 10   l'écran, qui est le 05207. Je n'allais pas évoquer cette photographie.

 11   Q.  C'est, Monsieur le Témoin, le bâtiment que vous avez reconnu comme

 12   étant le bâtiment où on vous a emmené pour être interrogé; c'est exact ?

 13   C'est le bâtiment de Krings.

 14   R.  C'est exact.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 16   document, le 05207.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce P3375.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 05209,

 19   s'il vous plaît. Est-ce que nous pouvons passer à la page 7 de l'anglais et

 20   la page 7 en B/C/S, s'il vous plaît ?

 21   Q.  Monsieur, reconnaissez-vous les noms qui figurent sur cette liste, de 1

 22   à 18 ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  S'agit-il des noms -- veuillez dire aux Juges de la Chambre qui sont

 25   ces personnes, s'il vous plaît.

 26   R.  Ces personnes sont les personnes qui ont été tuées et j'étais avec

 27   elles dans le village de Kenjar. Elles ont été tuées. Les personnes ont été

 28   emmenées et tuées.


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  1   Q.  Dans le village de Blazevici ?

  2   R.  Oui, oui.

  3   Q.  Quel âge avait la personne la plus jeune ce jour-là ?

  4   R.  Je crois que la personne la plus jeune avait 14 ou 15 ans, Husein

  5   Kenjar, le fils de Hasan.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Monsieur le Président. Ceci fait

  7   partie d'un rapport plus important fourni par le ministère fédéral des

  8   Affaires intérieures de Sarajevo concernant les exhumations faites à

  9   Hrustovo et Vrhpolje en 1996. Je ne sais pas -- je souhaite demander le

 10   versement au dossier de cette pièce, uniquement la page 7 en anglais et en

 11   B/C/S, mais nous allons par la suite demander le versement au dossier de

 12   l'ensemble du document directement dans le prétoire.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Je vous remercie. Ceci

 14   sera versé au dossier sous la cote P3376.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 16   Q.  Et pour finir, j'ai une dernière question à vous poser, Monsieur.

 17   Combien de parents proches ou d'amis de la municipalité de Sanski Most ont

 18   été tués en 1992 ou sont portés disparus depuis 1992 ?

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 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrions-nous passer à huis clos

 22   partiel, s'il vous plaît.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 24   Oui, nous sommes à huis clos partiel.

 25   [Audience à huis clos partiel]

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 16   [Audience publique]

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur, est-ce que vous pouvez dire aux Juges de la Chambre le nombre

 19   de personnes ou de parents, amis, qui auraient été tués ou qui seraient

 20   considérés comme étant disparus depuis 1992 ?

 21   R.  S'agissant des parents, il y en a eu trois ou quatre de proches que

 22   j'ai perdus. Pour ce qui est des amis et des voisins, je crois qu'il y en a

 23   trop.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions à poser.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, nous allons nous pencher maintenant

 26   sur les pièces à conviction auxiliaires. Je crois qu'on en a abordé une

 27   déjà. Il en reste trois autres. Est-ce que nous nous sommes penchés sur

 28   votre demande de rajout de pièce auxiliaire à la liste 65 ter qui se trouve


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  1   au 65 ter 23455 ?

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je demande à

  3   ce que ce soit fait. Et c'est mentionné dans la transcription du témoin.

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous n'avons

  5   rien contre le rajout, mais nous faisons objection pour ce qui est de

  6   l'acceptation de cette pièce à conviction parce que nous ne pensons pas que

  7   ceci soit une partie indispensable du compte rendu puisqu'il s'agit d'un

  8   rapport d'enquête et le témoin, quand bien même aurait-il vu le rapport,

  9   n'a fait que commenter des noms qui soient impliqués, mais il n'a pas parlé

 10   de la teneur en tant que telle. Nous ne pensons pas que cela suffit comme

 11   fondement pour ce qui est d'un versement au dossier.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous n'avez pas d'objection pour ce

 13   qui est des deux autres documents, le 19921 et le 19922 ?

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Non.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux autres seront versés au

 16   dossier. Et la façon la plus simple pour Mme Sutherland d'aborder ce

 17   document-ci est d'en parler avec le témoin ici présent.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je voudrais

 19   qu'on nous montre le 65 ter référence 23…

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] 23455 ?

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je puis, avant que nous ne fassions

 23   la pause, dire quelque chose ? Nous avons ici plus de 70 pages de

 24   transcription, et, d'après l'expérience qui est la mienne, ça constitue le

 25   témoignage de toute une journée; 90 pages, c'est une journée entière. Je

 26   vous demande une fois de plus de vous pencher sur le temps que vous allez

 27   m'accorder.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes alors en train de demander


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  1   huit heures; c'est cela ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas ce que j'ai demandé, mais j'ai

  3   besoin d'au moins trois ou quatre heures parce qu'il est impossible d'aller

  4   plus vite. J'ai un témoignage qui a duré une journée, et vous voulez que je

  5   contre-interroge et que je conteste en l'espace d'une heure. Je ne peux

  6   pas.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

  8   le témoin a commencé son témoignage à 4 heures moins le quart dans un

  9   après-midi - je ne vais pas dire dans quelle journée - puis il a terminé

 10   son témoignage à 6 heures 22.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il a commencé à 4 heures 2

 12   minutes.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, la transcription

 14   dit que la pause a été prise à 3 heures 40 dans l'après-midi, et -- ah oui,

 15   vous avez raison, 4 heures 2 minutes, et ça s'est terminé à 6 heures 30.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais nous avons un autre témoignage. Et il y a

 17   une autre transcription qui a été versée au dossier.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui. L'article 92 ter, c'est un paquet en

 20   application du 92 ter accompagnant le témoin, c'est dans l'affaire Brdjanin

 21   qu'il y a eu un témoignage.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné l'heure, nous allons faire

 23   une pause. Les bandes sont en train de se terminer.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous allons

 25   nous pencher sur la question après la pause parce que j'ai une autre

 26   question que je voudrais tirer au clair. Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons reprendre à 11 heures 10.

 28   --- L'audience est suspendue à 10 heures 38.


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  1   --- L'audience est reprise à 11 heures 10.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland. Oui, finissez.

  3   Finissez votre interrogatoire principal.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais que

  5   nous passions à huis clos partiel, s'il vous plaît.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Certes.

  7   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

 20   Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Sutherland.

 22   Monsieur, vous allez être contre-interrogé par l'accusé à l'occasion de son

 23   contre-interrogatoire.

 24   Monsieur Karadzic, la Chambre s'est penchée sur votre requête. Toutefois,

 25   nous estimons qu'une heure pour le contre-interrogatoire de ce témoin

 26   serait plus que suffisante. Veuillez commencer, je vous prie, le contre-

 27   interrogatoire.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Pour les besoins du compte


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  1   rendu, je me dois de dire -- est-ce que nous sommes en audience publique,

  2   tout d'abord ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu d'audience, je

  5   dois dire que nous avons ici vu un certain nombre de témoins que la Défense

  6   considère comme non contre-interrogés. Le témoin de tout à l'heure n'a pas

  7   été contre-interrogé sur bon nombre de circonstances. Vos Excellences, il

  8   n'est pas possible de faire mieux, parce que les déclarations faites par

  9   l'Accusation sont ambitieusement faites. Parce que chaque témoin ne parle

 10   pas que d'un seul incident, c'est tout un historique qui est donné. S'il

 11   n'y avait qu'un incident pour lequel on citait un témoin, la Défense aurait

 12   un travail plus aisé à faire. Mais chaque témoin répète la totalité du

 13   récit. Or, vous avez pu voir que les Procureurs ont dit que ça n'a pas été

 14   contesté par l'accusé, l'accusé ne l'a pas contesté. Comment voulez-vous

 15   que je conteste alors que je n'ai pas le temps de le faire ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous prie de ne pas gaspiller votre

 17   temps. L'avis de la Chambre a été rendu clair à plusieurs reprises. Je ne

 18   vais plus la répéter, cette position. Veuillez commencer votre contre-

 19   interrogatoire.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 22   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez été mis au

 23   courant des événements politiques en Bosnie et dans votre municipalité à

 24   vous ?

 25   R.  Je n'ai pas vaqué à des activités politiques. Cela ne m'intéressait

 26   guère.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous avez quand même eu à savoir qu'il y a eu des

 28   négociations au sujet de la façon dont se présenterait la Bosnie-


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  1   Herzégovine et de quoi aurait l'air votre municipalité au cas où il y

  2   aurait une indépendance de proclamée en Bosnie ?

  3   R.  Non.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si vous allez

  5   continuer à vous plaindre de votre manque de temps, je vais intervenir. En

  6   quoi les négociations qui se sont produites ont une pertinence quelconque

  7   au sujet du témoignage de ce témoin ? Nous sommes ici en train de parler de

  8   ce qu'il a vécu en tant que victime.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, il n'est pas question de cela, Excellence.

 10   Il a dit que les Musulmans ont été expulsés du poste de police. Ça lui a

 11   été raconté par un cousin à lui. Or, moi, ce que je veux déterminer, c'est

 12   allons-nous parler de choses qu'il ne sait pas ou est-ce que je vais passer

 13   à l'incident directement. C'est pour ça que c'est pertinent. Est-ce que

 14   vous étiez au courant des prévisions disant qu'il devait y avoir deux

 15   postes de police, et c'est la raison pour laquelle ça a été créé. Les

 16   Musulmans n'ont pas été expulsés.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Le saviez-vous ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Alors pourquoi en avez-vous parlé ? La déclaration est bourrée de

 21   généralités dont vous ne savez rien.

 22   R.  Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas fait de politique, je ne sais pas

 23   comment la situation se présentait, je sais seulement que les policiers --

 24   enfin, on nous a dit qu'ils ont été expulsés. Ils sont allés dans le

 25   bâtiment de la municipalité à Sanski Most, et au bout de quelques jours,

 26   ils ont été expulsés de là-bas, puis on leur a tiré dessus aussi, autant

 27   que je sache.

 28   Q.  Monsieur le Témoin, le problème c'est que vous êtes en train de nous


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  1   parler de choses que vous ne savez pas. Est-ce qu'ils pouvaient travailler

  2   aussi dans le poste de police à condition de signer ?

  3   R.  Oui, un acte d'allégeance.

  4   Q.  C'est clair, un acte d'allégeance à l'égard de la Republika Srpska --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Madame Sutherland ?

  6   L'INTERPRÈTE : Le témoin a dit en réponse qu'il ne savait pas.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] M. Karadzic peut-il baisser le ton de sa

  8   voix pour ce qui est de laisser au témoin le temps de répondre ?

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle référence êtes-vous en train de

 10   nous donner ?

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je fournis une référence pour ce qui est

 12   des pages et des déclarations qui ont été faites pour ce qui est de ce qui

 13   a été cité tout à l'heure au témoin.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous êtes

 15   en train de suivre les questions qui vous sont posées ? Etes-vous en mesure

 16   de répondre ?

 17   L'INTERPRÈTE : Signe affirmatif.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Mais je n'ai pas de références et je ne suis pas en train de crier,

 20   mais ce n'est pas à l'égard du témoin que je suis en train de le faire, je

 21   le fais pour ce qui est de l'Accusation parce qu'il y a des déclarations

 22   qui sont fort ambitieuses.

 23   Parce qu'on a dit au témoin qu'ils ont été expulsés et on leur a dit

 24   qu'ils ne pouvaient plus travailler à moins de signer une déclaration

 25   d'allégeance; c'est bien cela ?

 26   R.  Je ne le sais pas, c'est exact.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je répète : Les

 28   témoins sont différents. Il y en a qui ont plus de difficulté que d'autres.


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  1   Même un avocat expérimenté, pour ce qui est de conduire un contre-

  2   interrogatoire, doit aborder les différents témoins de façons différents

  3   parce qu'il y a des déclarations générales. Il est difficile de procéder

  4   autrement. En quoi vous devriez explorer chacune des déclarations dans ses

  5   généralités -- Et comme je l'ai déjà dit, prenez dans votre contre-

  6   interrogatoire les parties du témoignage qui ont été évoquées au principal

  7   pour les contester. Vous pouvez vous centrer sur la nécessité de contester

  8   le témoignage d'un témoin dans certains secteurs plutôt que d'avoir à le

  9   faire sur le tout. Je crois que c'est une meilleure façon de procéder.

 10   Veuillez garder la chose à l'esprit. Et cessez donc de parler du fait

 11   d'avoir été désavantagé du fait d'avoir à traiter le problème. Chaque

 12   avocat a ce type de difficulté dans les procès en général. Veuillez

 13   continuer.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] L'interprétation n'a peut-être pas été bonne.

 15   Je n'ai pas dit que le témoin était quelqu'un de difficile pour ce qui

 16   était de mon travail à moi. Je n'ai pas le temps pour parler de la totalité

 17   des allégations faites au niveau des déclarations recueillies auprès des

 18   témoins. Parce que si je ne peux pas contester et si après on me dit que je

 19   n'ai pas contesté, est-ce que je vais être condamné de ce fait ? Parce

 20   qu'on me ligote les mains et je ne peux pas contre-interroger sur la

 21   totalité des éléments qui sont contenus dans une déclaration.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland ?

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, les déclarations

 24   ne font pas partie du témoignage de ce témoin. C'est le témoignage dans

 25   l'affaire Brdjanin.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Merci, Madame Sutherland. Veuillez

 27   passer à votre contre-interrogatoire.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste un mot encore. J'imagine avoir le droit


Page 19102

  1   de contester la crédibilité du témoin et je ne peux pas le faire seulement

  2   sur la base d'une seule déclaration de sa part.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur le Témoin, vous avez indiqué qu'en 1991 il y a eu des postes

  5   de contrôle de créés. Est-il exact de dire que vous avez traversé ces

  6   postes de contrôle ou ces passages routiers à plusieurs reprises ?

  7   R.  J'ai dit pour l'année 1992 qu'il y a eu des postes de contrôle, et je

  8   passais en 1992 par ces postes de contrôle, mais je l'ai fait en 1992

  9   plusieurs fois.

 10   Q.  Bon. Et on a vu qui vous étiez, on a examiné votre véhicule, il n'y

 11   avait rien de suspect et vous avez pu passer, n'est-ce pas ?

 12   R.  C'est exact.

 13   Q.  Vous êtes conscient, n'est-ce pas, du fait que les Musulmans et les

 14   Croates n'ont pas été dans la JNA ni pour faire partie des effectifs

 15   réguliers ni pour ce qui est de faire partie des réservistes alors que les

 16   Serbes y sont allés, n'est-ce pas ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Vous avez conscience aussi du fait que les Serbes qui, comme vous

 19   l'avez dit, avaient été des civils, tout à coup, du fait de la

 20   mobilisation, ont rejoint les rangs de la 6e Brigade de la Krajina, c'est

 21   bien cela ?

 22   R.  Exact.

 23   Q.  Puis, vous dites que jusqu'au 27 juin de l'an 1992, il n'y a pas eu de

 24   problèmes pour ce qui est de votre village ?

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 19103

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12   R.  Trois kilomètres, peut-être quatre, à mon avis.

 13   Q.  Merci. Est-ce que vous saviez qu'à Hrustovo et Vrhpolje, il y avait

 14   déjà à Hrustovo 300 Musulmans d'armés en formation avec un commandement, et

 15   qu'au total, dans ces trois villages, il y avait quelque 900 combattants ?

 16   R.  Je pense que ce n'est pas vrai.

 17   Q.  Merci. Est-ce que vous saviez que des combats avaient commencé à

 18   Prijedor, qui se trouve à 20 kilomètres de Sanski Most, et que là, déjà, il

 19   y a eu des combats le 23 mai ?

 20   R.  Je ne suis pas au courant.

 21   Q.  Est-ce que vous saviez que dans toute la vallée de la Sana, Kljuc,

 22   Sanski Most, Prijedor, Bosanski Novi, à compter du 25 jusqu'au 27 mai, il y

 23   a eu toute une série d'attaques de lancées par la Ligue patriotique et les

 24   Bérets verts contre des militaires serbes et des villages serbes ?

 25   R.  Je ne suis pas au courant.

 26   Q.  Saviez-vous que c'est ainsi que des combats avaient commencé à la fin

 27   mai; 23 mai jusqu'au 31 mai ? Il y a eu de gros combats entre les Serbes et

 28   les Musulmans dans la vallée de la Sana.


Page 19104

  1   R.  A la fin du mois de mai, je me trouvais à Hrustovo. Je ne l'ai pas

  2   quitté, je ne pouvais plus aller à Sanski Most. Je n'osais pas y aller pour

  3   des problèmes de sécurité. Les tensions étaient déjà trop grandes. Pour ce

  4   qui est des événements de Prijedor, Bosanski Novi ou de Kljuc, je ne sais

  5   rien vous dire à ce sujet.

  6   Q.  Est-il exact de dire que vous avez déclaré que vous vous trouviez à

  7   Hrustovo à la fin du mois de mai ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et est-ce qu'à la fin du mois de mai, à Hrustovo, il y a eu de gros

 10   combats ?

 11   R.  Au moment où je me trouvais à Hrustovo, les combats étaient déjà

 12   commencés.

 13   Q.  Et ces combats opposaient qui à qui ?

 14   R.  Les Musulmans aux Serbes.

 15   Q.  Quelles étaient les formations qui représentaient les Serbes et quelles

 16   étaient les formations qui représentaient les Musulmans ?

 17   R.  Pour les Serbes, je ne sais pas, mais dans le village de Hrustovo, il y

 18   avait un certain nombre de personnes qui était resté sur place, qui n'était

 19   pas parti, mais je n'ai pas connaissance de l'existence d'une quelconque

 20   formation armée. Je n'en ai vue aucune là-bas.

 21   Q.  Merci. Combien de temps ont duré les combats à Hrustovo ?

 22   R.  Quand les combats ont commencé, je suis resté encore deux jours, peut-

 23   être, à Hrustovo. Et le troisième jour, j'ai quitté Hrustovo pour me rendre

 24   dans (expurgé).

 25   Q.  Et vous avez passé quelques jours chez ce parent à vous dont nous

 26   n'allons pas prononcer le nom. Pourquoi est-ce que vous n'êtes pas rentré

 27   chez vous, mais vous êtes allé chez votre parent ?

 28   R.  Eh bien parce que c'est lui qui avait fait appel à moi pour que j'amène


Page 19105

  1   chez lui sa mère, qui était également en visite à Hrustovo à cette époque-

  2   là. Elle était en visite chez sa fille, mais lui a pensé qu'il serait peut-

  3   être préférable qu'elle vienne dans sa maison à lui plutôt qu'à Hrustovo.

  4   Q.  Et pourquoi est-ce que sa maison devait être plus sûre que la vôtre ?

  5   R.  Parce qu'il avait des voisins serbes avec lesquels il avait sans doute

  6   discuté de la situation et conclu qu'il y avait plus de sécurité chez lui.

  7   Il n'y avait pas de combats non plus, alors qu'à Hrustovo, il y avait des

  8   combats.

  9   Q.  Merci. Donc, un mois entier après les combats de Hrustovo, personne n'a

 10   (expurgé)

 11   R.  C'est exact, personne (expurgé) jusqu'au 27 juin.

 12   Q.  Vous avez dit --

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Madame Sutherland ?

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande une expurgation du compte

 15   rendu d'audience, Monsieur le Président, page 48, lignes 13 et 25, et je me

 16   pose des questions sur la page 50, ligne 17 où un nom de village figure.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Poursuivons, Monsieur

 18   Karadzic.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Excusez-moi, j'ajouterais également la

 20   page 51, ligne 3.

 21   M. KARADZIC : [interprétation] Merci. A l'Avenir, je désignerai ces

 22   villages par les mots de "vos villages". Sommes-nous en audience publique ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Vous avez déclaré qu'avant le début des combats et au moment où les

 26   combats ont éclaté, vous avez vu un certain nombre de formations militaires

 27   dans votre village et des hommes qui portaient des uniformes très

 28   différents. Pouvez-vous nous dire quels étaient ces uniformes ? Pouvez-vous


Page 19106

  1   les décrire et nous dire quels étaient les emblèmes et insignes

  2   qu'arboraient ces hommes ?

  3   R.  Vous pensez à Sanski Most ?

  4   Q.  Oui.

  5   R.  Eh bien à Sanski Most, j'ai vu pas mal de soldats d'active, mais aussi

  6   de réserve, des membres de la police militaire, des représentants également

  7   de la police civile d'active et de réserve.

  8   Q.  S'agissant de l'armée, les membres de l'armée portent tous le même

  9   uniforme, et pour ce qui est de la police, les représentants de la police

 10   portent tous le même uniforme, mais vous, vous avez dit que vous aviez vu

 11   des uniformes très divers. Est-ce que vous avez vu d'autres uniformes en

 12   dehors de ceux que je viens d'évoquer, d'autres uniformes qui étaient

 13   accompagnés d'insignes différents ? Vous avez dit cela au début de votre

 14   déposition dans le procès, la déposition qui a été versée au dossier dans

 15   un autre procès.

 16   R.  J'ai vu des uniformes de camouflage et j'ai vu aussi des uniformes de

 17   l'armée régulière, couleur vert olive grisâtre, et puis j'ai vu les

 18   insignes tricolores serbes et je ne suis pas sûr d'avoir vu l'insigne qui

 19   comporte le blason avec les quatre S cyrilliques. Mais je pense que j'ai vu

 20   cet insigne-là aussi.

 21   Q.  Dans votre déposition, numéro de page ERN se terminant par 081, vous

 22   avez dit que vous n'aviez vu aucun insigne.

 23   R.  Je ne suis pas au courant.

 24   Q.  Page 8 081, ce sont les derniers numéros ERN dans le compte rendu

 25   d'audience fait par vous dans une autre affaire. Est-il vrai que vous ayez

 26   déclaré que vous aviez conscience du fait que le 28 mai les Serbes avaient

 27   annoncé à la radio que tous les Musulmans devaient remettre leurs armes et

 28   que ceux qui remettraient leurs armes seraient autorisés à se rendre à


Page 19107

  1   Palanka, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Est-il vrai, Monsieur le Témoin, que des soldats serbes ont emmené des

  4   civils de Hrustovo et de Vrhpolje vers Palanka pour la durée des combats ?

  5   R.  A ce moment-là je n'étais pas à Hrustovo, donc je ne peux pas confirmer

  6   ce que vous venez de dire, mais je l'ai entendu raconter plus tard par des

  7   personnes qui avaient été emmenées à Hrustovo à Palanka.

  8   Q.  Mais vers la fin du mois de mai, vous étiez à Hrustovo, et pourquoi ?

  9   R.  J'y habitais.

 10   Q.  Donc vous n'habitiez pas dans votre village; c'est cela ?

 11   R.  Peut-être y a-t-il un malentendu entre nous. Moi, je résidais dans mon

 12   village, celui dont le nom a été prononcé. Et ensuite, je suis allé dans un

 13   autre village chez un parent à moi, c'est un autre village d'où est

 14   originaire ma famille.

 15   Q.  Je vous pose une question très ouvertement, Monsieur le Témoin : est-ce

 16   qu'après les combats de Hrustovo, vous avez trouvé abri chez ce membre de

 17   votre famille plutôt que dans votre maison ?

 18   R.  Les combats ont duré deux jours, et ensuite lui m'a invité à venir chez

 19   lui, et c'est ce que j'ai fait. Mais les combats ont continué encore.

 20   Q.  Merci. Je propose le document P716, admis au dossier en application de

 21   l'article 92 bis, pour lecture par les personnes présentes dans ce

 22   prétoire. C'est une femme qui témoigne, et dans sa déclaration sur laquelle

 23   j'appelle l'attention de chacun, elle dit qu'une unité serbe s'est occupée

 24   toute une journée d'un groupe de civils avant de transférer ces civils

 25   jusqu'à Tomina. Est-ce que ceci se trouve également dans votre

 26   municipalité, cette localité ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland ?

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Les commentaires de M. Karadzic sont


Page 19108

  1   inadaptés, et il serait préférable qu'il pose des questions au témoin.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais s'il y a une question dans ce qu'il

  3   a dit jusqu'à présent par rapport à la déclaration de ce témoin, c'est

  4   simplement une demande de confirmation du nom d'une localité, Tomina.

  5   J'attends encore une autre question, Monsieur Karadzic.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Tomina se trouve également dans votre municipalité et c'était un

  8   village mixte musulmano-serbe, n'est-ce pas ?

  9   R.  Tomina est un village qui fait partie de la municipalité de Sanski

 10   Most, mais qui n'était pas si mixte que cela. C'était plutôt un village

 11   séparé en deux parties. Palanka, par exemple, était exclusivement musulman,

 12   et l'autre partie était exclusivement serbe.

 13   Q.  Vous parlez d'un seul et même village qui est divisé en deux hameaux,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Exact.

 16   Q.  Et quand vous y êtes arrivé, vous avez été logé dans une maison

 17   musulmane, et la mosquée était toujours debout, et il n'y avait pas de

 18   combat à Tomina, n'est-ce pas ?

 19   R.  La mosquée était toujours debout, je pense, et il n'y avait pas de

 20   combat.

 21   Q.  Je vous remercie. Et puis vous avez été emmené ensuite à Krings, n'est-

 22   ce pas ?

 23   R.  Exact.

 24   Q.  Alors, Monsieur le Témoin, il y a un point qui m'intéresse. Je me

 25   demande comment le pouvoir a pu admettre de laisser partir un témoin aussi

 26   capital. D'ailleurs, je commencerais par vous demander si les autorités

 27   étaient au courant de l'incident qui a eu lieu et si elles savaient que

 28   vous y aviez été impliqué ?


Page 19109

  1   R.  Je pense que les policiers qui m'ont interrogé n'avaient pas

  2   connaissance de l'incident. Et si je leur en avais parlé en leur disant que

  3   j'y avais survécu, je suis certain que je ne serais pas assis ici

  4   aujourd'hui.

  5   Q.  Donc ils n'étaient pas au courant. Est-ce que d'autres autorités

  6   étaient au courant ?

  7   R.  Je ne sais pas. Il faudra leur poser la question.

  8   Q.  Merci. Donc vous êtes resté un certain temps à Sanski Most. Etait-il

  9   difficile de voir son nom inscrit sur la liste pour obtenir un transport ?

 10   R.  Vous voulez dire pour quitter Sanski Most ?

 11   Q.  Oui.

 12   R.  Il n'y avait pas de liste, je crois. Simplement on disait à la radio

 13   que toute personne souhaitant quitter Sanski Most devait se poster sur la

 14   grand-route, que des autobus seraient mis à disposition, et que, d'une

 15   certaine façon, nous serions transportés ailleurs. Mais il n'y avait pas

 16   besoin de se faire connaître ou de s'enregistrer où que ce soit.

 17   Q.  Est-ce qu'on vous a demandé de l'argent pour payer un billet ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Est-ce qu'il vous fallait produire un certificat quelconque indiquant

 20   que vous aviez payé vos impôts ou quelque chose de ce genre ? Est-ce qu'il

 21   y avait des papiers administratifs à fournir ?

 22   R.  Je ne pense pas.

 23   Q.  Et vous êtes allé où ?

 24   R.  Après Sanski Most ?

 25   Q.  Oui.

 26   R.  A Travnik.

 27   Q.  Et là vous vous êtes présenté à l'armée, n'est-ce pas ?

 28   R.  Non. Certainement pas. J'ai saisi la première occasion pour quitter la


Page 19110

  1   Bosnie-Herzégovine.

  2   Q.  Et quand est-ce que vous avez fourni votre première déclaration au

  3   sujet de ces événements ?

  4   R.  Après la libération de Sanski Most.

  5   Q.  Mais comment se fait-il qu'au sujet d'un incident aussi grave vous ne

  6   donniez pas une déposition immédiatement, dès votre arrivée à Travnik ?

  7   R.  Je ne savais même pas à qui m'adresser à Travnik. Là-bas aussi, le plus

  8   grand chaos régnait.

  9   Q.  Merci. Nous allons reparler maintenant de l'incident. Mais voyons

 10   d'abord ceci : tout cela veut dire qu'ils cherchaient des armes et ils les

 11   demandaient à tous les habitants des villages de la région, le village où

 12   vous aviez votre domicile, le village où habitait le membre de votre

 13   famille et tous ces villages ? Est-ce qu'à eux aussi on a demandé de

 14   remettre leurs armes ?

 15   R.  Ils ont dit que toute personne ayant une arme devait la remettre et que

 16   ceux qui avaient un permis de port d'armes, pour un fusil de chasse ou un

 17   revolver, devaient le rendre également.

 18   Q.  Est-ce qu'il y avait sur place des fusils automatiques ou des armes que

 19   certains possédaient illégalement ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Est-ce que vous avez remis d'autres armes qu'un ami à vous est allé

 22   porter aux Serbes ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et quelle arme avez-vous remise ?

 25   R.  Un fusil automatique.

 26   Q.  Bon. Je vous demande une seconde. Il y a eu une discussion entre vous

 27   pour savoir s'il fallait ou pas remettre les armes, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, en effet.


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  1   Q.  Quand avez-vous remis vos armes, à quelle date à peu près ?

  2   R.  Je ne me rappelle pas la date exacte. Mais deux jours, peut-être, après

  3   le début des coups de feu.

  4   Q.  Merci. Donc si c'était le 27, 28 mai, après tout cela, pendant 27

  5   jours, vous n'avez pas eu le moindre problème, n'est-ce pas ?

  6   R.  En effet.

  7   Q.  Et c'est à ce moment-là que M. Karanovic est arrivé - c'est le nom que

  8   vous citez - accompagné de soldats. Ils sont arrivés dans ce village et se

  9   sont mis à fouiller les maisons; c'est bien cela ?

 10   R.  C'est cela.

 11   Q.  Et cette recherche d'armement a duré jusqu'au 27 juin, n'est-ce pas ?

 12   R.  Est-ce que vous pourriez me répéter la date que vous citez pour le

 13   début de tout cela ? Parce qu'ils ont commencé un matin à fouiller les

 14   maisons, ils l'ont fait pendant à peu près deux heures, et ils nous ont

 15   emmenés.

 16   Q.  Et ils vous ont donné l'ordre à ce moment-là de vous regrouper au

 17   niveau d'un carrefour, n'est-ce pas ?

 18   R.  C'est cela, c'est cela.

 19   Q.  Vous avez décrit ces hommes comme étant des membres de la réserve

 20   locale. Quels étaient les insignes qu'ils arboraient ?

 21   R.  Je ne me rappelle plus aujourd'hui. Enfin, tous ces hommes, c'étaient

 22   des hommes qui habitaient dans le coin. Ils portaient l'uniforme, certains

 23   n'avaient pas un uniforme complet. Il y en avait qui n'avaient que le haut,

 24   d'autres qui n'avaient que le bas de l'uniforme. Certains d'entre eux

 25   étaient armés sans avoir un uniforme sur le dos.

 26   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire s'ils faisaient partie d'une unité, ou

 27   s'il n'y avait pas d'unité organisée, en tout cas, sous le commandement de

 28   qui ils étaient ?


Page 19112

  1   R.  Sur aucun de ces points je ne peux vous répondre.

  2   Q.  Et donc, depuis ce carrefour où vous vous trouviez, on vous emmène

  3   jusqu'à la maison Blazevic, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui, ils nous ont dit que nous allions subir un interrogatoire car ils

  5   suspectaient que certains étaient encore en possession d'armes. Ils nous

  6   ont dit que nous allions d'abord jusqu'à l'école, et quand nous sommes

  7   arrivés à l'école, ils ont poursuivi leur chemin sans même s'arrêter au

  8   niveau de l'école, et nous avons fini par arriver jusqu'à la maison de

  9   Marko Juric, où nous y avons passé une journée entière. L'homme qui était

 10   là nous a dit qu'il allait chercher à contacter le commandement, parce

 11   qu'autour de cette maison il n'y avait personne. C'était le matin. Nous y

 12   avons passé toute la journée. Et il n'a pas réapparu.

 13   Q.  Vous parlez de ce Karanovic, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, je parle de Karanovic.

 15   Q.  Merci. Vous dites que le 28 juin, Vlado Vrkes est arrivé, qu'il a été

 16   surpris et qu'il a demandé ce que vous faisiez là ?

 17   R.  Oui, ce jour-là, un homme que nous ne connaissions pas est arrivé, mais

 18   il s'est présenté en disant qu'il s'appelait Vlado Vrkes, et qu'il était

 19   président du SDS de Sanski Most. Il nous a dit : Qu'est-ce que vous faites

 20   là ? Nous avons répondu que des interrogatoires avaient commencé et qu'on

 21   nous avait emmenés, et lui a rétorqué en nous disant qu'il ne fallait pas

 22   nous faire de soucis, car le plus vraisemblablement nous serions échangés

 23   contre des Serbes d'autres parties de la Bosnie.

 24   Q.  Et vous ne l'avez pas reconnu ?

 25   R.  Je ne le connaissais pas. Je ne m'occupais pas de politique.

 26   Q.  Mais ce qui me perturbe un peu c'est que votre déclaration date de

 27   1996, et je parle du document 65 ter numéro 22086, dans lequel en page 2,

 28   vous dites que vous l'avez reconnu dès qu'il est apparu.


Page 19113

  1   R.  C'est sans doute une erreur. Moi, je ne le connaissais pas. Il s'est

  2   présenté en disant quels étaient ses noms et prénoms.

  3   Q.  Et c'est lui qui vous a dit que vous ne deviez pas vous faire de

  4   soucis, car vous seriez sans doute concerné par un échange; c'est bien cela

  5   ?

  6   R.  C'est cela.

  7   Q.  Et ensuite, il est parti.

  8   R.  Oui, il est resté très peu de temps avant de repartir.

  9   Q.  Merci. Puis Karanovic est arrivé dans l'après-midi, et à ce moment-là

 10   ils vous ont emmenés où ?

 11   R.  Quand Karanovic est arrivé, il a dit qu'il fallait que nous fassions

 12   nos bagages car nous partions pour Blazevici, que c'est là que se trouvait

 13   le commandement et que c'est là que nous serions interrogés.

 14   Q.  Et deux hommes vous ont escortés. Vous n'aviez pas les mains ligotées,

 15   n'est-ce pas ?

 16   R.  Ils ne nous ont pas attaché les mains. Ils nous ont escortés sur le

 17   chemin. Nous avons passé un petit hameau qui s'appelait Djukici, après quoi

 18   la route s'enfonçait dans la forêt, et deux soldats ont surgi à ce niveau-

 19   là. J'ai demandé à mes cousins qui étaient ces soldats. Ils ont répondu que

 20   c'étaient des frères de Djukici, qui habitaient à Djukici.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document 65 ter

 22   numéro 22086, page 2. Il faudrait que l'on remette la version serbe.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on vérifier si la diffusion peut se

 24   faire ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que c'est vous qui avez fait cette déclaration dans notre langue

 28   et qui l'avez signée ?


Page 19114

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Eh bien, regardez ce qui est écrit, je cite :

  3   "Entre-temps, le 28 juin, vers midi, Vlado Vrkes est arrivé.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas entendu la réponse du

  5   témoin à votre question précédente. Qu'avez-vous répondu, Monsieur ? Est-ce

  6   que c'est vous qui avez fait cette déclaration dans votre langue ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Dans ce document, vous dites que vous ne connaissiez pas les deux

 11   hommes venus avec Vrkes, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je ne connaissais pas Vrkes et je ne connaissais pas les deux autres.

 13   Q.  Et nous lisons, je cite :

 14   "Vrkes portait un uniforme militaire et je l'ai reconnu dès son

 15   arrivée."

 16   R.  Je ne sais pas. C'est certainement une erreur car moi, je ne

 17   connaissais pas ce Vrkes. Peut-être que je n'ai pas fait attention quand

 18   j'ai relu le texte avant de le signer. Mais ce qui est un fait, c'est que

 19   je ne le connaissais pas.

 20   Q.  Donc n'importe qui aurait pu dire : "Je m'appelle Vrkes", et vous

 21   l'auriez admis parce que vous ne le connaissiez pas, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci. Donc ensuite, on vous emmène, d'après ce que vous avez dit, vous

 24   avez été escorté par deux criminels; c'est bien cela ?

 25   R.  Je n'ai pas dit deux criminels. C'étaient deux Serbes qui vivaient

 26   aussi dans ce village, et quand nous avons atteint la petite forêt, il y a

 27   deux autres hommes qui ont surgi, donc au total, ils étaient quatre.

 28   Q.  Je demande l'affichage de la page 2 de cette déclaration faite par vous


Page 19115

  1   en 1996, pour que nous voyions ce passage où vous les qualifiez de

  2   criminels.

  3   R.  Je ne vois pas le passage.

  4   Q.  Il faudrait que ce soit la page 2. Mais est-ce que c'est la même

  5   numérotation dans le prétoire électronique ? Je vous demande un instant.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous parlez de deux Chetniks de la

  7   région ?

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est ce que je m'apprêtais à demander

  9   moi-même, Monsieur le Président.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Donc, vous parlez d'eux comme de deux Chetniks de la région; c'est bien

 12   cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Qu'entendiez-vous par là ?

 15   R.  Eh bien, pour moi, le Chetnik c'est un soldat serbe qui arbore une

 16   cocarde sur son couvre-chef.

 17   Q.  Ils arboraient la cocarde ?

 18   R.  Il y en avait un qui arborait la cocarde, et l'autre, l'insigne du

 19   drapeau tricolore.

 20   Q.  Mais vous n'avez jamais mentionné ce drapeau tricolore jusqu'à présent,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  C'est possible.

 23   Q.  Et donc, deux autres Chetniks les rejoignent, deux Chetniks de Djukici

 24   que vous appelez aussi des Chetniks, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, l'un d'entre eux arborait la cocarde.

 26   Q.  Donc au départ, il y en a deux, et ensuite il y en a deux de plus, et

 27   ces quatre hommes vous emmènent jusqu'à la maison de Dujo Banovic; c'est

 28   bien cela ?


Page 19116

  1   R.  C'est cela.

  2   Q.  Est-ce que Dujo Banovic était un Serbe ?

  3   R.  Je ne connaissais pas cet homme-là. D'ailleurs, il n'habitait pas à ce

  4   moment-là dans cette maison, mais je crois que c'était un Catholique.

  5   Q.  C'est un peu difficile qu'un Dusan Banovic soit un Catholique, n'est-ce

  6   pas ? Ce sont un nom et un prénom serbes.

  7   R.  Je n'ai pas parlé de Dusan, j'ai parlé de Dujo.

  8   Q.  Et Dujo, ce n'est pas le diminutif de Dusan ?

  9   R.  Je ne le sais pas. La seule chose que je sais, c'est que cet homme

 10   s'appelait Dujo. Et là, il y avait encore une autre maison tout près où

 11   habitait un homme dont je ne me rappelle pas le patronyme, mais ce que je

 12   sais, c'est que tous les deux étaient des Catholiques.

 13   Q.  Bien. Mais alors dites-moi, je vous prie, quel est le nombre d'entre

 14   vous, plus jeunes, qui sont entrés dans la maison et combien de personnes

 15   plus âgées sont restées dehors ?

 16   R.  Cinq jeunes, sans doute, sont entrés dans la maison, et à l'extérieur

 17   sont restés des hommes plus âgés.

 18   Q.  Ils sont restés assis dehors, d'après ce que vous avez dit.

 19   R.  Ils étaient toujours dehors. Ils nous ont dit que nous devions rentrer

 20   dans la maison et ils armaient leurs fusils - enfin, je ne sais pas quel

 21   est le mot le plus précis pour décrire ce qu'ils faisaient - mais en tout

 22   cas, ils les ont armés et pointés sur nous et ils ont dit qu'il fallait

 23   qu'on rentre dans la maison. Moi, je faisais partie des premiers qui sont

 24   rentrés à l'intérieur alors que d'autres sont restés à l'extérieur, sans

 25   doute pour guider ceux qui arrivaient encore. Si on veut nous interroger,

 26   on peut le faire dehors aussi. Ce n'était pas indispensable de rentrer à

 27   l'intérieur.

 28   Q.  Vous dites que les jeunes sont entrés alors que les autres qui sont


Page 19117

  1   restés dehors étaient plus âgés et sont restés assis là et qu'ils ont

  2   essayé de convaincre Rado, Djukic et Mico de rester dehors; c'est bien cela

  3   ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  La discussion sur cette question de rester dehors ou pas a eu lieu,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  Quand je suis rentré à l'intérieur, je ne pouvais plus savoir s'ils

  8   étaient toujours assis dehors ou pas, mais ils nous ont dit de rentrer dans

  9   la maison, et à ce moment-là ils étaient encore assis, et ils nous ont dit

 10   qu'il fallait qu'on rentre à l'intérieur alors qu'eux restaient dehors et

 11   nous, nous sommes rentrés à l'intérieur. Je ne sais plus ce qu'ils ont fait

 12   dehors.

 13   Q.  A quel moment est-ce que quelqu'un a crié : "Attention, grenade" ?

 14   R.  Sans doute deux ou trois minutes plus tard.

 15   Q.  Et la grenade venait d'où ?

 16   R.  Je ne sais pas d'où. Sans doute de l'extérieur, parce qu'on l'a

 17   entendue frapper les planches en bois, donc elle venait sans doute de la

 18   porte d'entrée.

 19   Q.  Et qui est-ce qui a crié : "Attention, grenade" ?

 20   R.  Sans doute ceux qui étaient à côté de la porte.

 21   Q.  Mais la grenade venait des mains de qui?

 22   R.  Probablement des mains des Serbes qui l'avaient apportée.

 23   Q.  Elle n'aurait pas pu être entre les mains d'un Musulman ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Comment le savez-vous ?

 26   R.  Parce que personne n'avait de grenade.

 27   Q.  Est-ce que vous avez fouillé tout le monde et déterminé que personne

 28   n'avait une grenade ?


Page 19118

  1   R.  Non, je ne l'ai pas fait.

  2   Q.  Et vous dites que vous avez bondi avant que la grenade n'explose,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Trois d'entre vous se sont enfuis également ?

  6   R.  Je sais que moi j'ai bondi sur mes pieds et que d'autres l'ont fait,

  7   mais je ne sais pas exactement combien. Plus tard, je pense qu'il y a eu un

  8   autre homme, mais je n'en suis pas sûr.

  9   Q.  Je ne sais pas si je peux prononcer le nom de cet homme dont vous dites

 10   qu'il s'est jeté au sol, mais ce que vous dites, en tout cas, c'est que

 11   vous vous êtes jeté au sol après lui ?

 12   R.  Oui. Une fois qu'on est sortis de la maison, deux ou trois mètres plus

 13   loin, les Serbes ont commencé à tirer sur nous -- en tout cas, un des

 14   Serbes qui se trouvaient là. Alors, je me suis caché derrière un petit abri

 15   qui se trouvait à l'arrière de la maison et quand il a commencé à tirer, je

 16   me suis mis à courir pour me diriger vers le fond de la vallée. Il y avait

 17   beaucoup de buissons, des épines, et il nous poursuivait en courant. Et à

 18   un moment, il a trébuché. Moi, j'ai trébuché par-dessus lui et je suis

 19   tombé, mais c'est lui qui est tombé au sol le premier.

 20   Q.  Combien de temps vous avez couru ?

 21   R.  Eh bien, 10 à 15 mètres à peu près, c'est le diamètre de cette vallée.

 22   Q.  Mais c'est une distance qu'on peut couvrir en deux bonds, Monsieur le

 23   Témoin, donc comment est-ce que vous avez réussi à trébucher et à tomber

 24   l'un sur l'autre à plusieurs reprises ?

 25   R.  Eh bien, c'est ce qui se passe quand le ciel est clair et qu'on y voit,

 26   mais j'ai déjà dit qu'il y avait beaucoup de buissons et d'épines et que ce

 27   n'était pas une route. C'était une forêt, Monsieur.

 28   Q.  Et à ce moment-la vous avez quitté la vallée et vous êtes allé où ?


Page 19119

  1   R.  Quand je suis sorti de la vallée, ce Muharem, il avait déjà commencé à

  2   courir, il est sorti de la vallée, et il y avait une clairière d'environ

  3   200 mètres de diamètre où il n'y avait pas d'arbres. Il s'est mis à courir,

  4   et à ce moment-là, j'ai vu qu'un Serbe traversait la vallée. Il faisait

  5   clair. Il a fait le tour et il a commencé à tirer sur l'homme qui avait

  6   pris la fuite. Je pensais que je pourrais fuir aussi, mais à ce moment-là,

  7   j'ai réfléchi que je n'avais pas la moindre chance de m'enfuir parce qu'ils

  8   allaient me prendre. Il a vidé son chargeur, et moi j'ai de nouveau bondi

  9   pour me mettre à courir dans la vallée.

 10   Q.  Et vous dites que vous avez entendu ce qui se passait dans la maison,

 11   n'est-ce pas ? Vous avez fui dans la direction opposée à la porte; c'est

 12   bien cela ?

 13   R.  La porte n'était pas exactement de l'autre côté. Elle était sur le

 14   côté, latéralement par rapport à l'endroit où je me trouvais dans la allée.

 15   Q.  Mais qu'est-ce que vous avez entendu à ce moment-là, qu'est-ce que

 16   Karanovic leur a dit ?

 17   R.  Ce n'était pas seulement Karanovic qui était là.

 18   Q.  Ils étaient quatre ?

 19   R.  Ces quatre hommes les ont fait sortir et ils leur disaient de s'aligner

 20   le long du mur avec les mains en l'air.

 21   Q.  Mais ce qui me trouble un petit peu, Monsieur le Témoin, c'est la chose

 22   suivante : comment est-ce qu'ils ont réussi à les faire sortir alors qu'ils

 23   étaient déjà dehors ?

 24   R.  Mais pas tous. Tout le monde n'était pas dehors. J'ai déjà dit que cinq

 25   d'entre nous étions dans une pièce. Il y en avait qui étaient debout à la

 26   porte et d'autres qui étaient à l'extérieur. Est-ce qu'ils sont rentrés

 27   aussi, je le ne sais pas. Je n'avais pas le moindre moyen de voir ce qui se

 28   passait.


Page 19120

  1   Q.  Très bien. Est-ce que cela signifie qu'ils auraient dû rentrer dans la

  2   pièce où la grenade avait explosé ?

  3   R.  Il est possible qu'ils aient pénétré dans la pièce où je m'étais

  4   trouvé, ces personnes qui étaient à côté de la porte. Peut-être ces hommes

  5   qui étaient dehors sont-ils rentrés à l'intérieur une fois que la grenade a

  6   explosé.

  7   Q.  Et que s'est-il passé à ce moment-là ? Est-ce que quelqu'un avait été

  8   blessé par l'explosion de la grenade ?

  9   R.  Ça, je ne sais pas.

 10   Q.  Et vous les avez entendus, vous avez entendu qu'on faisait sortir les

 11   hommes, vous les avez entendus tirer, et puis les ramener à l'intérieur

 12   dans la maison, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, je les ai entendus dire : "C'est trop difficile, celui-là est trop

 14   lourd. Il pèse 100 kilos." Des choses comme ça.

 15   Q.  Monsieur le Témoin, comment pouvez-vous prétendre que cette grenade n'a

 16   pas été jetée par un Musulman, ce qui a conduit à la catastrophe ?

 17   R.  Vous voulez dire qu'on voulait se tuer soi-même ?

 18   Q.  Je ne dis pas que vous vouliez vous tuer vous-mêmes, mais que quelqu'un

 19   voulait tuer ces quatre Chetniks, et ça, pas à l'intérieur de la pièce mais

 20   depuis l'extérieur. Vous avez dit que la grenade venait de l'extérieur,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, depuis la porte d'entrée. Je crois que c'est par là qu'elle est

 23   rentrée. Et il n'y avait pas d'autre possibilité cette maison était barrée

 24   par des planches. C'était une vieille construction qui servait à abriter

 25   les moutons, et tout au fond il y avait une petite espace où l'homme dont

 26   je parle, le propriétaire, habitait.

 27   Q.  Et ensuite, vous vous êtes rendu à Tomina. Après Tomina, vous avez

 28   passé un mois à Krings, n'est-ce pas ?


Page 19121

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Ces quatre hommes s'en sont-ils vantés ? Est-ce qu'ils ont informé

  3   quiconque à ce sujet ?

  4   R.  Que voulez-vous vous dire ? Qui auraient-ils informé ?

  5   Q.  Ces personnes qui vous ont emmené à Krings, est-ce qu'ils ont informé

  6   quelqu'un de cela ? Est-ce qu'ils ont parlé à quelqu'un de ce qu'ils

  7   avaient fait ?

  8   R.  Cela, je ne le sais pas.

  9   Q.  Avez-vous informé les autorités sur ce qui s'était passé ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Ce Muharem est cité par rapport à cette exhumation également.

 12   Cependant, vous savez qu'il s'est enfui et vous avez entendu dire qu'il

 13   avait été arrêté par la suite, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Comment se fait-il que son nom figure sur la liste des personnes

 16   exhumées ?

 17   R.  Il faudra poser la question à la personne qui a établi cette liste,

 18   étant donné qu'il y a une plaque commémorative à cet endroit qui a été

 19   placée là par les parents des victimes. Son nom a figuré là-dessus

 20   également. A savoir si cette personne a établi la liste sur la base de

 21   cette plaque commémorative, si les noms émanent de cette plaque

 22   commémorative, cela est possible.

 23   Q.  Est-ce que nous pouvons avoir la page 4 de cette déclaration, s'il vous

 24   plaît ? Celle que nous avons maintenant.

 25   Lorsqu'il y a une exhumation, est-ce que l'on inscrit les noms que

 26   l'on trouve sur la liste ? Est-ce qu'on inscrit les noms des personnes qui

 27   ont été identifiées ? Comment sait-on que cette liste ne comprend pas le

 28   nom d'un homme qui n'a pas été tué à cet endroit ? Je crois que c'est la


Page 19122

  1   page précédente qui m'intéresse. Peut-être que c'est la bonne page en

  2   anglais, mais en serbe il nous faut la page précédente. Comment pouvez-vous

  3   expliquer cela ? Comment expliquez-vous le fait que sur la liste des

  4   personnes exhumées, vous trouvez les noms d'un homme qui n'a pas perdu la

  5   vie ?

  6   R.  Je ne sais pas qui a établi cette liste.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Maître

  8   Sutherland.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je souhaite faire remarquer que ce n'est

 10   pas au témoin de commenter sur les raisons pour lesquelles quelqu'un écrit

 11   quelque chose dans un rapport d'exhumation.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais il parle de la déclaration du

 13   témoin.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pardonnez-moi, j'ai mal compris.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Voyez-vous cela, ici où on voit le nom de cet homme qui est cité ici ?

 17   Je ne souhaite pas citer son nom.

 18   R.  Sur cette page ici ?

 19   Q.  Dans cette déclaration, avez-vous dit qu'il s'était enfui, qu'il n'y

 20   avait pas perdu la vie ?

 21   R.  Il faudrait que je relise la déclaration pour voir si j'ai déclaré

 22   qu'il s'était enfui de cet endroit. C'est ce que je n'ai cessé de dire

 23   parce que c'est la vérité. Il s'est enfui de cet endroit, l'endroit où se

 24   trouve cette maison, il s'est enfui de cet endroit-là.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vérifions cela, à savoir s'il est enfui

 26   à ce moment-là. Pouvez-vous confirmer que son nom figure ici parce qu'il a

 27   été tué et brûlé à cet endroit ? Voyez-vous son nom ou non ? Nous pouvons

 28   reprendre la page anglaise et agrandir la version B/C/S. Je crois que son


Page 19123

  1   nom figure à la sixième ligne à partir du bas ou aux alentours de cette

  2   ligne-là.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Veuillez diminuer, s'il vous plaît, la largeur

  4   de la page.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Madame Sutherland ?

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, d'après ce que

  7   j'ai compris, il s'agit d'un autre Muharem.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. C'est quelque chose que devrait

  9   nous dire le témoin. L'avez-vous trouvé ?

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Cela se trouve à la sixième à partir du bas.

 12   R.  Oui, je vois son nom ici. Oui, c'est Muharem Kenjar. C'est possible

 13   qu'il soit né en 1966, mais comme vous pouvez le constater, la plupart de

 14   ces noms [sic] avait des noms semblables; Muharem, Mehmed, fils de cet

 15   homme. Donc, cela prêtait toujours à confusion.

 16   Q.  Quel était le nom de l'homme qui s'était enfui ?

 17   R.  Safet.

 18   Q.  Voyez-vous sous le tampon qu'on peut lire, fils de Safet?

 19   R.  Je n'arrive pas vraiment à discerner cela.

 20   Q.  Vous n'arrivez pas à discerner le S et le A ? Et le F ? Pourrions-nous

 21   agrandir le tampon, en tant que tel, le tampon du Tribunal ? Voilà. C'est

 22   cela. Pouvez-vous distinguer les lettres SAF ?

 23   R.  Eh bien, je vois le S, mais les autres lettres, je n'en suis pas sûr.

 24   C'est possible que ce soit effectivement ce que dit ce texte. Il peut

 25   s'agir d'une erreur, mais ce que je dis -- je maintiens que ce Muharem

 26   s'est enfui et qu'on l'a vu par la suite à Sanski Most. Et après cela, on a

 27   perdu toute trace de lui.

 28   Q.  Cette maison de Blazevic se trouvait à quelle distance de Kijevci ?


Page 19124

  1   R.  De l'endroit où nous étions, à 4 kilomètres environ, peut-être.

  2   Q.  Et est-ce que vous avez réussi à parcourir cette distance à pied, et si

  3   oui, en combien de temps ?

  4   R.  On nous y emmenés un jour et nous avons réussi à atteindre la maison de

  5   Juric en 30 minutes. Nous y sommes restés pendant toute la journée et le

  6   lendemain, nous nous sommes mis en route à pied pendant une demi-heure,

  7   voire peut-être moins.

  8   Q.  Merci. Nous n'avons plus besoin de ce document.

  9   Monsieur le Témoin, lorsque vous étiez à Tomina, vous avez dit qu'il y

 10   avait deux types d'hommes. Il y avait un groupe qui était composé de

 11   prisonniers de guerre et les autres étaient des réfugiés; c'est exact ?

 12   R.  Eh bien, je ne comprends pas votre question. Je n'ai jamais rien dit de

 13   la sorte. Je n'ai pas parlé de prisonniers de guerre.

 14   Q.  Alors comment avez-vous été traité et comment les autres ont-ils été

 15   traités ?

 16   R.  Eh bien, nous qui venions de ces deux villages qui ont été cités plus

 17   tôt, qui sommes arrivés à Tomina, nous étions des réfugiés. Pour ce qui est

 18   des autres personnes, c'étaient des gens de la région, des hôtes.

 19   Q.  Vous avez dit avoir passé la nuit dans la maison d'un Musulman, je ne

 20   souhaite pas citer son nom, que vous avez trouvé votre mère à cet endroit -

 21   - ou plutôt, sa mère à cet endroit, qu'ils vous ont nourri ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et ils vous ont dit que des réfugiés musulmans de Hrustovo et Vrhpolje

 24   avaient été hébergés à cet endroit et qu'il y avait des hommes parmi eux ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Et ensuite, vous parlez de Chetniks qui sont arrivés et ils vous ont

 27   emmené ?

 28   R.  Oui, c'est exact. Il y avait des policiers et il y avait des militaires


Page 19125

  1   qui sont arrivés. Ils se sont servis d'un porte-voix, ils ont dit que tout

  2   réfugié devait sortir et se rendre sur la route principale et attendre.

  3   Q.  Et ensuite, les hommes qui d'après eux étaient des combattants, ils les

  4   ont emmenés à Krings ?

  5   R.  Non, nous avons tous êtes emmenés à Krings. Les hommes, les femmes, les

  6   adultes, tout le monde.

  7   Q.  Et quand les femmes et les enfants ont-ils été libérés ?

  8   R.  Ils ont été transportés le matin à bord d'autobus et de camions. J'ai

  9   appris par la suite que ces derniers avaient été emmenés à Gracanica. Vous

 10   savez où cela se situe en Bosnie centrale, près de Doboj, ou à un endroit

 11   comme cela.

 12   Q.  Et vous avez été interrogé par qui à Krings ?

 13   R.  Par un policier.

 14   Q.  Il vous a interrogé sur quoi ?

 15   R.  Eh bien, il m'a demandé de tout lui dire à partir du moment où le

 16   conflit avait éclaté et jusqu'à ce jour-là. Il fallait que je lui dise où

 17   j'habitais, ce que j'ai fait, si je disposais d'armes, et cetera, et si je

 18   savais qui avait des armes.

 19   Q.  Combien de fois avez-vous été interrogé ?

 20   R.  Une fois.

 21   Q.  Est-ce qu'il consignait quelque chose par écrit ?

 22   R.  Je crois que oui.

 23   Q.  Et sur la base de ce que vous lui avez dit, vous avez été libéré le 4

 24   août; c'est exact ?

 25   R.  Je crois que oui.

 26   Q.  Alors que certains étaient envoyés à Manjaca ?

 27   R.  Certains ont été emmenés à Manjaca dès notre arrivée à cet endroit-là.

 28   Le matin même, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les


Page 19126

  1   invalides ou les handicapés ont été transférés. Ils ont été emmenés alors

  2   que le groupe a été envoyé à Manjaca le jour même ou le lendemain, je n'en

  3   suis pas très sûr.

  4   Q.  Merci. Y a-t-il deux juges à Sanski Most qui répondent au nom d'Adil

  5   Draganovic, ou est-ce qu'il n'y a qu'un seul homme qui porte ce nom-là ?

  6   R.  Je crois qu'il n'y a qu'un seul homme.

  7   Q.  Savez-vous dans quelle mesure il a participé aux préparatifs pour le

  8   conflit armé à Sanski Most ?

  9   R.  J'ai vu M. Draganovic pour la première fois le jour où j'ai fait ma

 10   déclaration. Ce qu'il a fait avant cela, je ne le sais pas.

 11   Q.  Est-ce que vous trouvez étrange le fait qu'il enquête sur des questions

 12   auxquelles il a participé lui-même ?

 13   R.  Je ne sais pas ce que vous voulez dire. Il n'a pas participé aux

 14   événements auxquels j'ai participé moi-même parce qu'il n'était pas là.

 15   Q.  Merci. Dans votre déclaration que vous lui avez fournie en 1996, on

 16   peut lire que vous êtes arrivé à cet endroit-là de votre plein gré sans y

 17   avoir été convoqué. Comment se fait-il que vous ayez abordé ces questions-

 18   là pour la première fois à ce moment-là ?

 19   R.  Parce que je n'étais pas en Bosnie-Herzégovine.

 20   Q.  Quelle a été l'issue de ce combat à Hrustovo qui a duré deux à trois

 21   jours ? Savez-vous combien il y a eu de morts de part et d'autre ?

 22   R.  A l'époque, je ne le savais pas. Je l'ai appris par la suite.

 23   Q.  Et qu'avez-vous appris ?

 24   R.  Qu'il y a eu des pertes en hommes importantes. Il y a beaucoup de

 25   civils qui ont été tués à Hrustovo et Vrhpolje. Un ou deux soldats serbes

 26   ont été tués.

 27   Q.  C'est ce que vous avez appris ?

 28   R.  Oui.


Page 19127

  1   Q.  Vous n'avez pas été frappé à Krings par quiconque ?

  2   R.  Non, je n'ai pas été frappé.

  3   Q.  Et vous dites que vous n'avez pas été frappé durement, que vous n'avez

  4   pas été beaucoup frappé ?

  5   R.  Oui, par rapport aux autres prisonniers, je n'ai pas été trop

  6   maltraité.

  7   Q.  Au début, aviez-vous le droit de recevoir des visites et est-ce que vos

  8   proches pouvaient vous apporter de la nourriture ? Ces visites n'ont-elles

  9   été interdites que par la suite ? Vous pouviez encore recevoir de la

 10   nourriture -- on pouvait vous apporter de la nourriture de l'extérieur

 11   encore à ce moment-là ?

 12   R.  Oui, c'est exact.

 13   Q.  Veuillez m'accorder quelques instants, s'il vous plaît. Je dois opérer

 14   une sélection de ce que je vais omettre.

 15   Que saviez-vous à propos des unités paramilitaires ? Vous avez parlé de

 16   forces de défense serbes. Saviez-vous quelque chose à propos des forces

 17   paramilitaires à Sanski Most ?

 18   R.  Je ne sais pas exactement de quelles formations paramilitaires vous

 19   voulez parler.

 20   Q.  Que saviez-vous des unités militaires qui se trouvaient à cet endroit-

 21   là ?

 22   R.  Je savais qu'il y avait beaucoup de réservistes et qu'il y avait

 23   beaucoup de soldats armés serbes, rien d'autre.

 24   Q.  Il s'agissait de réservistes jusqu'au jour où l'armée de la Republika

 25   Srpska a été établie, n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est possible.

 27   Q.  C'étaient les réservistes de la JNA ?

 28   R.  C'est possible. Je sais qu'ils étaient là. La JNA n'existait même plus


Page 19128

  1   à l'époque. Cette JNA avait été abolie, d'après ce que je sais.

  2   Q.  Et la JNA a quitté la Bosnie le 19 mai, vous en souvenez-vous ?

  3   R.  La JA, l'armée yougoslave, peut-être, mais la NA, non.

  4   Q.  Conviendrez-vous, dans ce cas, que l'armée de la Republika Srpska

  5   existait déjà à la date du 20 mai et que ces réservistes de l'armée

  6   yougoslave ou de la JNA avaient cessé d'être des réservistes de la JNA

  7   puisqu'il s'agissait de réservistes de la VJ dans ce cas-là ?

  8   R.  Vous voulez parler d'à partir du 20 mai ?

  9   Q.  Oui.

 10   R.  Eh bien, je crois que ces unités faisaient partie de l'armée serbe

 11   depuis longtemps déjà, parce que cette armée ne comprenait dans leurs rangs

 12   aucun Musulman et aucun Catholique. Il n'y avait que des Serbes.

 13   Q.  Vous parlez des forces serbes, vous voulez parler de la composition de

 14   l'armée, mais est-ce que l'armée de la Republika Srpska existait avant le

 15   20 mai ?

 16   R.  Cela, je ne le sais pas.

 17   Q.  Merci.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour pouvoir nous organiser, je suppose

 19   que vous n'avez pas beaucoup de questions à poser dans le cadre des

 20   questions supplémentaires, Madame Sutherland ?

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Moins de cinq minutes, je pense.

 22   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, votre temps était

 25   écoulé il y a cinq minutes. Veuillez conclure en cinq minutes.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur le Témoin, saviez-vous que la police de Sanski Most, la police


Page 19129

  1   serbe de Sanski Most, a fourni des documents à l'appui de chaque incident,

  2   les a poursuivis pendant la guerre, et si cela n'avait pas été possible

  3   pendant la guerre, ceci a été fait après la guerre ? Toutes ces personnes

  4   ont fait l'objet de poursuite en application d'enquêtes qui ont été menées

  5   par des Serbes pendant la guerre ?

  6   R.  Je ne sais rien à ce sujet.

  7   Q.  Savez-vous que M. Draganovic a trouvé au moins 30 criminels qui ont été

  8   poursuivis pour avoir commis des actes contre des Musulmans ?

  9   R.  Je ne le savais pas.

 10   Q.  Monsieur le Témoin, n'aurait-il pas été approprié de faire un rapport

 11   sur ce qui s'était passé dans la maison de Banovic, de façon à ce que ceci

 12   puisse faire l'objet d'enquêtes, et documents à l'appui de ces enquêtes ?

 13   R.  Ecoutez, je ne sais pas si cela aurait été approprié. Je crois que

 14   Muharem s'était enfui. Je crois que lui aurait pu peut-être dire quelque

 15   chose à la police et expliquer tout cela. Si moi, j'avais tenté de le

 16   faire, je pense que le même sort m'aurait été réservé.

 17   Q.  Nous disposons de nombreux documents que nous ne pouvons pas montrer

 18   aujourd'hui, dans lesquels nous constatons que les Musulmans pouvaient se

 19   déplacer librement, aller devant les tribunaux pour déposer leur plainte au

 20   pénal et que ces personnes font toujours l'objet de poursuites à ce jour;

 21   saviez-vous cela ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Bon. Etant donné que je manque de temps, je n'ai pas d'autres questions

 24   à poser. Je vous remercie.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Karadzic.

 26   Madame Sutherland ?

 27   Nouvel interrogatoire par Mme Sutherland :

 28   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, un peu plus tôt aujourd'hui, M.


Page 19130

  1   Karadzic vous a posé une question, et vous a dit : Après les combats de

  2   Hrustovo, avez-vous pu vous mettre à l'abri, et a poursuivi, et ensuite,

  3   vous avez dit c'était au cours de la deuxième journée des combats que l'on

  4   vous a demandé de vous rendre à un certain endroit.

  5   Et ensuite, il y a quelques instants, M. Karadzic vous a également posé une

  6   question. Il a parlé des combats à Hrustovo. Vous souvenez-vous de ces deux

  7   questions qui vous ont été posées par M. Karadzic ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Vous souvenez-vous du moment où vous avez déposé dans l'affaire

 10   Brdjanin, à la page du compte rendu d'audience 8 053 et 8 054, lorsqu'on

 11   vous a posé une question concernant tout d'abord -- une annonce avait été

 12   faite pour que les armes soient rendues et ensuite, à un moment donné au

 13   mois de mai, est-ce que Hrustovo a été pilonné. Vous avez dit oui. Etait-ce

 14   avant ou après cette annonce indiquant qu'il fallait rendre les armes. Vous

 15   avez indiqué que c'était peu de temps avant que cette annonce soit faite et

 16   ensuite cela s'est poursuivi après. Vous souvenez-vous de votre déposition

 17   dans l'affaire Brdjanin et de la réponse que vous avez donnée ?

 18   R.  Je peux vous dire ceci : je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas

 19   de ce que j'ai dit dans l'autre affaire, mais je peux vous parler des

 20   événements tels que je m'en souviens. Tout d'abord, les combats ont éclaté,

 21   ensuite le pilonnage de Hrustovo a commencé. Et un ou deux jours après, il

 22   y a eu cette annonce à la radio, à savoir qu'il fallait rendre les armes et

 23   que toute personne qui disposait d'une arme devait la rendre et serait

 24   autorisée à quitter la ville. Autrement dit, que cette personne pourrait

 25   s'échapper ou s'enfuir de la zone des combats.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Un instant, Monsieur le Président, s'il

 27   vous plaît.

 28   [Le conseil de l'Accusation se concerte]


Page 19131

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  2   Q.  Lorsque vous avez parlé de la poursuite des combats, vous vouliez

  3   parler de quoi ? Vous vouliez parler des combats, du pilonnage, qui se

  4   poursuivait ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une question directrice, et vous mettez

  6   le témoin sous pression. Le témoin a déjà répondu. Peut-être pas à la

  7   manière dont vous souhaitiez qu'il vous réponde, mais inutile de lui

  8   demander de vous fournir une autre réponse.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons lui poser la question de

 10   cette manière. Vous avez dit qu'après les combats à Hrustovo, vous vous

 11   êtes mis à l'abri chez un de vos parents. Qu'est-ce que vous entendiez par

 12   "combat" ? Nous pouvons dire cela en audience publique, et vous avez dit

 13   dans votre réponse c'était lors du deuxième jour des combats que vous vous

 14   êtes mis à l'abri. Vous avez dit que les combats se sont poursuivis par la

 15   suite. Qu'est-ce que vous entendiez par là, par ce terme de "combat" ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous voulez dire après mon départ

 17   de Hrustovo ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'en remets à vous. Veuillez

 19   poursuivre.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 21   Q.  Non, avant, lorsque vous avez dit que vous vous êtes rendu chez vos

 22   parents proches à Hrustovo, après les combats. Ma question était celle-ci :

 23   est-ce que vous vouliez parler d'eux, est-ce que vous voulez parler des

 24   combats ? Lorsque vous dites "combat", est-ce que vous voulez parler du

 25   pilonnage à Hrustovo évoqué dans votre déposition antérieure ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir une référence,

 27   s'il vous plaît ? Est-ce que nous pourrions demander au Procureur de

 28   s'abstenir de poser des questions directrices ?


Page 19132

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La page du compte rendu d'audience 8 053.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, c'est moi qui posais la

  3   question. Je lui ai demandé de préciser le sens qu'il donnait au terme de

  4   "combat". Donc, c'était avant votre départ. Qu'entendiez-vous par "combat"

  5   ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, ce que je voulais dire, je voulais

  7   dire que les Musulmans ont tiré d'un côté, les Serbes tiraient de l'autre.

  8   C'est ainsi que les choses se sont passées au début. Et au début, c'était

  9   avec des armes légères, peut-être qu'il y avait un ou deux ou trois obus

 10   qui ont atterri, je ne sais pas qui les a tirés, mais une demi-journée

 11   après cela environ, le pilonnage de Hrustovo a commencé. Et c'était l'armée

 12   serbe qui pilonnait la ville. Ce pilonnage s'est poursuivi pendant toute la

 13   journée, et le lendemain, vers midi, il y a eu une accalmie. Cette annonce

 14   a été entendue à la radio, à savoir que toutes les armes devaient être

 15   rendues. Et cet après-midi-là, il n'y a pas eu de pilonnage. Il n'y a plus

 16   eu de pilonnage, en d'autres termes. C'était cet après-midi-là que je me

 17   suis mis à l'abri chez les membres de ma famille. A ce moment-là, il n'y

 18   avait pas de pilonnage. Mais quelques jours plus tard, les choses ont

 19   empiré. Je ne sais rien ou pas grand-chose à ce sujet. Je pouvais

 20   simplement entendre les rafales de tirs ou les explosions, je ne sais pas

 21   quelle était l'ampleur du pilonnage. Tout ce que je sais, c'est qu'il n'y

 22   avait pas d'armes lourdes à Hrustovo, et si quelqu'un en possédait, c'était

 23   simplement des armes légères, des armes personnelles. Outre cela, au-dessus

 24   du village de Tomina, je pouvais le voir, et c'est là qu'il y avait des

 25   positions serbes. Je pouvais voir les obus que l'on tirait depuis cet

 26   endroit-là. Il y avait l'artillerie et nous pouvions apercevoir les éclairs

 27   des canons depuis ces positions-là, et quelques minutes après cela, nous

 28   entendions l'obus qui tombait sur Hrustovo.


Page 19133

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur -- merci.

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de deux pièces connexes

  5   auxquelles il faut donner des cotes. Le premier document 65 ter est 1922

  6   [comme interprété] qui aura la cote P3377, sous pli scellé. Le deuxième

  7   document, qui est le 1921 [comme interprété], aura la cote P3378, sous pli

  8   scellé.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci conclut votre déposition, Monsieur

 10   le Témoin. Au nom des Juges de la Chambre et de ce Tribunal, je vous

 11   remercie d'être venu une nouvelle fois témoigner à La Haye.

 12   Vous êtes libre de partir, et je vous enjoins d'avoir un bon retour chez

 13   vous.

 14   Nous allons faire une pause pendant une demi-heure et reprendre --

 15   pardonnez-moi, nous allons faire une pause d'une heure, et reprendre à 13

 16   heures 40.

 17   [Le témoin se retire]

 18   --- L'audience est suspendue à 12 heures 37.

 19   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 20   --- L'audience est reprise à 13 heures 43.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je vous demande de

 22   bien vouloir prononcer la déclaration solennelle.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 24   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 25   LE TÉMOIN : PETKO PANIC [Assermenté]

 26   [Le témoin répond par l'interprète]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, et veuillez prendre

 28   place. Madame Elliott, je vous en prie.


Page 19134

  1   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander l'affichage

  2   du document 65 ter 22584, page 36 pour le prétoire électronique.

  3   Interrogatoire principal par Mme Elliott :

  4   Q.  [interprétation] Alors, Monsieur Panic, nous allons voir à l'écran le

  5   compte rendu de votre déposition dans l'affaire Stanisic et Zupljanin du 11

  6   au 13 novembre 2009. Il s'agit de la page 2 902 du compte rendu d'audience,

  7   et à la ligne 21 il est question de M. "Milan Radic". Or, je crois

  8   comprendre qu'il faudrait corriger cela et remplacer ce nom par Milan

  9   Radovic; est-ce bien exact ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Monsieur Panic, vous avez entendu votre témoignage dans votre langue.

 12   J'aimerais savoir si les informations que vous avez transmises à la Chambre

 13   sont exactes, et si les mêmes questions venaient à vous être posées

 14   aujourd'hui, est-ce que vous fourniriez les mêmes informations ?

 15   R.  Oui.

 16   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que le compte rendu d'audience

 17   pourrait être versé au dossier ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Il sera versé au dossier.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3380.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je poser une question ? Pourquoi est-ce

 21   que la pratique qui est généralement retenue n'a pas été suivie et a été

 22   abandonnée ? Je pense à la présentation d'une déclaration consolidée. Est-

 23   ce que le bureau du Procureur a également des problèmes de temps ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas qu'il y ait infraction

 25   ou illogisme si l'on déclare recevable une déclaration et qu'on la verse au

 26   dossier. En fait, il avait été demandé au bureau du Procureur s'il avait

 27   l'intention de verser au dossier plusieurs déclarations, d'en faire une

 28   seule et même déclaration consolidée. Toutefois, en l'occurrence ils vont


Page 19135

  1   verser au dossier juste un compte rendu d'audience d'une déposition du

  2   témoin.

  3   Poursuivez, Maître Elliott.

  4   Mme ELLIOTT : [interprétation] Je vais maintenant vous donner lecture du

  5   résumé 92 ter.

  6   M. Panic était le commandant assistant pour le poste de police de réserve à

  7   Zvornik en 1992. Le 6 avril 1992, sur l'ordre du commandant de police

  8   Dragan Spasojevic, la police serbe à Zvornik a été séparée de la force de

  9   police multiethnique. Lorsqu'ils sont arrivés au bâtiment Alhos à Karakaj,

 10   Dragan Spasojevic, Brano Grujic, ainsi que des hommes d'Arkan et de Seselj

 11   se trouvaient déjà dans cet endroit.

 12   Le 8 avril 1992 a commencé le début de l'action pour s'emparer de Zvornik.

 13   L'unité d'Arkan dirigeait cette action et la police a reçu l'ordre de

 14   les suivre et de monter la garde auprès de certains bâtiments. Il n'y a pas

 15   véritablement eu de résistance importante de la part du camp musulman.

 16   Pendant cette opération, M. Panic a vu environ cinq corps habillés en

 17   civil.

 18   Différentes unités paramilitaires opérant à Zvornik, notamment des

 19   unités placées sous les commandements de Zuca, Crni, Niski, Pivarski,

 20   Milorad Gogic et Simo Chetnik, ainsi que les Aigles blancs. Parmi ces

 21   unités, plusieurs ont chassé les femmes et les enfants des villages

 22   musulmans et ont détenu les hommes.

 23   Certaines unités paramilitaires étaient payées par la municipalité ou par

 24   le MUP.

 25   Le 1er juin 1992, le commandant de police de Zvornik de l'époque, Marinko

 26   Vasilic, a donné l'ordre à M. Panic ainsi qu'à d'autres officiers de police

 27   de se rendre à Bijeli Potok où ils ont aidé des unités de la VRS à faire

 28   monter des Musulmans de la zone de Klisa dans des camions et des autocars.


Page 19136

  1   Environ 5 000 à 6 000 femmes, enfants et vieillards ont été placés dans des

  2   autocars et sont partis de cette zone alors qu'environ 700 hommes étaient

  3   conduits à l'école technique de Karakaj.

  4   Ladite école technique de Karakaj était gardée par la compagnie de

  5   Karakaj. Quelques jours plus tard, M. Panic a entendu dire que les hommes

  6   de l'école technique étaient exécutés à l'abattoir de Gero.

  7   Le responsable de la police qui dirigeait le poste de police de

  8   réserve à Celopek a indiqué à M. Panic dans un rapport que des Musulmans de

  9   Divic étaient détenus à la maison de la culture de Celopek et qu'ils y

 10   avaient été tués et qu'ils avaient subi des sévices de la part d'un groupe

 11   dirigé par Repic. Les centres de détention à Zvornik, notamment la ferme

 12   Ekonomija, Ciglana, ainsi que le hall de la culture Celopek étaient gardées

 13   par la police de Zvornik.

 14   J'en ai terminé avec mon résumé, Monsieur le Président.

 15    J'aimerais que le document 00669 de la liste 65 ter soit affiché. Première

 16   page pour la version en B/C/S et troisième pour la version anglaise.

 17   Q.  En attendant que cela ne soit affiché à l'écran, j'aimerais vous poser

 18   une question, Monsieur Panic. Cela figure d'ailleurs à la page 2 872 du

 19   compte rendu d'audience. Vous avez donné les noms de la cellule de Crise de

 20   Zvornik. Je ne vais vous demander de nous redonner ces noms, mais

 21   j'aimerais savoir si à ce moment-là ces membres de la cellule de Crise

 22   avaient adhéré à un parti politique ?

 23   R.  Oui, à ce moment-là, en ce qui concernait les Serbes, pour ceux qui

 24   étaient des Serbes, il n'y avait que le Parti démocratique serbe.

 25   Q.  Regardez votre écran, et j'aimerais savoir en fait si vous étiez au

 26   courant de la création d'un gouvernement provisoire à Zvornik à cette

 27   époque-là ?

 28   R.  J'en avais entendu parler.


Page 19137

  1   Q.  Est-ce qu'il y avait de nombreux membres qui appartenaient au SDS ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Page 2 pour la version en B/C/S, je vous prie, et page 5 pour la

  4   version anglaise. Monsieur Panic, j'aimerais que vous vous intéressiez à

  5   l'ordre portant sur la mobilisation générale et j'aimerais vous poser une

  6   question. J'aimerais en fait savoir si cette mobilisation générale a bel et

  7   bien eu lieu.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Quelles sont les mesures qui furent prises pour mettre en vigueur ou en

 10   application l'ordre de mobilisation générale ?

 11   R.  Les gens qui ne répondaient pas à l'appel, à la mobilisation générale,

 12   étaient placés en détention par la police civile et la police militaire. Et

 13   parfois, même les paramilitaires les emmenaient en détention sous la

 14   contrainte. C'étaient Pivarski et Niskic qui avaient détenu des personnes

 15   dans le village.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je corriger le compte rendu d'audience, je

 17   vous prie ? Je pense que le témoin a dit quelque chose du style : "Ils ont

 18   fait sortir des gens." Qu'est-ce que cela signifie ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non, non. Ils ont déshabillé des

 20   personnes, les ont fait marcher dans des villages, et ensuite ils les ont

 21   emmenées dans des centres de détention.

 22   Mme ELLIOTT : [interprétation] Merci. Est-ce que cela pourrait être versé

 23   au dossier ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3381.

 26   Mme ELLIOTT : [interprétation] J'aimerais que nous utilisions le système

 27   Sanction, et j'aimerais que l'on diffuse sans le son la pièce P20002.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]


Page 19138

  1   Mme ELLIOTT : [interprétation] Non, il ne s'agit pas de la pièce que

  2   j'avais demandée.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   Mme ELLIOTT: [interprétation]

  5   Q.  Oui. Cela se trouvait à l'arrêt sur image à 11 secondes, mais est-ce

  6   que vous reconnaissez cet endroit, Monsieur Panic ?

  7   R.  Il s'agit d'un hameau qui s'appelle Hrid, à Zvornik. Il est en fait en

  8   amont de Jedrinje. De l'autre côté de la rivière, vous avez Mali Zvornik.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'arrêt sur image n'a pas été fait à 11

 10   secondes, mais à .000516.6. Vous pourriez confirmer cela.

 11   Mme ELLIOTT : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. C'est un extrait

 12   d'une vidéo beaucoup plus longue, mais je peux tout à fait utiliser la

 13   correction que vous avez faite.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 15   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Dans la réponse précédente,

 16   après le mot "Zvornik" le témoin a dit, "Et en contrebas vous voyez le

 17   fleuve de la Drina."

 18   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que nous pouvons continuer à diffuser

 19   la vidéo.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   Mme ELLIOTT : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Panic, est-ce que vous reconnaissez ces personnes ou certaines

 23   de ces personnes ?

 24   R.  Oui, je pense que l'homme qui porte la veste en mouton retourné est

 25   Milan Radovic, qui travaillait en fait pour une entreprise de services

 26   publics. En fait, il conduisait un camion et il récupérait des cadavres.

 27   Mme ELLIOTT : [interprétation] Je me suis arrêté à 531.8.

 28   Est-ce que nous pourrions poursuivre, je vous prie ?


Page 19139

  1   [Diffusion de la cassette vidéo]

  2   Mme ELLIOTT : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Panic, est-ce que vous reconnaissez ce bâtiment ?

  4   R.  Oui, il s'agit du bâtiment du SUP à Zvornik.

  5   Q.  Et qu'en est-il de la personne que nous voyons sur cette photo, est-ce

  6   que vous êtes en mesure de nous dire quoi que ce soit sur cette personne ?

  7   R.  A en juger d'après son uniforme, je dirais qu'il s'agissait d'un des

  8   hommes d'Arkan. Et si vous regardez son dos, sa carrure, il se peut même

  9   d'ailleurs que ce soit Arkan.

 10   Q.  Et est-ce que vous savez ce qui se passe sur cette image, qu'est-ce que

 11   l'on montre ?

 12   R.  L'unité d'Arkan est d'abord allée à Zvornik avec les autres. Ils ont

 13   investi le bâtiment du SUP et je suppose que -- enfin là, ils hissent le

 14   drapeau, je suppose pour fêter la libération, je n'en sais rien.

 15   Mme ELLIOTT : [interprétation] Je n'ai plus besoin de ce document. Nous

 16   avons fait un arrêt sur image à cinq minutes 43.4.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais cette image, elle fait partie

 18   de quoi exactement ?

 19   Mme ELLIOTT : [interprétation] Il s'agit en fait d'un film qui a été

 20   filmé par  --

 21   L'INTERPRÈTE : Quelqu'un dont l'interprète n'a pas saisi le nom.

 22   Mme ELLIOTT : [interprétation] -- et qui en fait a été présenté par le

 23   truchement de Martin Bell.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc la première partie que nous

 25   avons c'est Sarajevo ?

 26   Mme ELLIOTT : [interprétation] Non, non, je pense que nous avons la

 27   première partie, le premier film, ce n'était pas ce que je voulais montrer

 28   --


Page 19140

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, moi, je vous parlais justement

  2   de ce que vous ne vouliez pas montrer.

  3   Mme ELLIOTT : [interprétation] Non, moi, je ne sais pas à quoi cela

  4   correspondait, mais ce que nous venons de voir correspond à la pièce P2202.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc cela fait partie d'une vidéo qui a

  6   déjà été versée au dossier; c'est cela ?

  7   Mme ELLIOTT : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Mme ELLIOTT : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Panic, justement, pour enchaîner à propos d'Arkan, est-ce que

 11   vous avez des informations, ou plutôt est-ce que vous savez comment il se

 12   fait qu'il ait participé à ce que vous avez décrit comme étant la

 13   libération de Zvornik ?

 14   R.  Son unité était arrivée plus tôt, et elle avait été hébergée ou logée

 15   dans les environs de Zvornik. Il s'agissait en quelque sorte d'un centre de

 16   cure qui s'appelait Radaljska Banja. Et par la suite, j'ai entendu dire que

 17   Dragan Spasojevic avait dit que quelque 300 000 marks allemands avaient été

 18   payés pour l'arrivée de cette unité. Donc, il est venu avec cette unité, il

 19   y est resté dans ce centre de Radaljska Banja. Et pendant l'attaque menée

 20   contre Zvornik, le 8 ou 9 avril, cette unité était dirigée par un homme qui

 21   répondait au nom de Pejo, parce qu'Arkan à proprement parler n'était pas là

 22   à ce moment-là. Il est venu par la suite.

 23   Q.  Et pour ce qui est d'Arkan ou plutôt des hommes d'Arkan, quelle était

 24   leur réputation à l'époque, qu'est-ce que vous saviez à l'époque ?

 25   R.  Il avait la réputation d'être un homme qui était toujours de fort

 26   mauvaise humeur. Le simple fait de prononcer son nom faisait trembler les

 27   gens de peur. Parce qu'il avait déjà participé à la guerre en Croatie, il

 28   avait été de toutes les perturbations et problèmes dans des matchs de


Page 19141

  1   footballs, ici et là et ailleurs.

  2   Q.  Et qu'en est-il des autres groupes paramilitaires qui opéraient à

  3   Zvornik ? Est-ce que vous savez s'ils avaient été invités par les autorités

  4   serbes ou si, en tout cas, ils avaient un soutien des autorités serbes ?

  5   R.  Eh bien, pour ce qui est de savoir s'ils étaient invités ou non, je

  6   n'en sais absolument rien. Mais ce que je sais, c'est que les hommes de

  7   Gogic avaient été appelés pour revenir au mois de mai, et là, ils portaient

  8   des uniformes de police. Au début, ils étaient payés par la municipalité.

  9   Par la suite, ils ont été payés par la police. Alors que les hommes de

 10   Zuca, quant à eux, étaient payés par la municipalité. Mais je ne sais pas

 11   qui a été invité et qui ne l'a pas été.

 12   Q.  Document 00635 de la liste 65 ter, je vous prie. Monsieur Panic,

 13   regardez l'écran, je vous prie. De quelle formation s'agit-il ?

 14   R.  Là, il s'agit de l'unité de Gogic, mais de toute façon, elle avait été

 15   appelée, en quelque sorte, même avant le début du conflit, et vous pouvez

 16   voir d'après ce document que c'était la municipalité qui les rémunérait,

 17   plus précisément l'état-major chargé de la Défense nationale. Toutefois, au

 18   mois de mai, ils ont été payés par le poste de police de Zvornik.

 19   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander le versement

 20   au dossier de ce document.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela sera fait.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3382.

 23   Mme ELLIOTT : [interprétation] J'aimerais que le document 07693 soit

 24   affiché, et je souhaiterais que les pages numéro 2 soient affichées dans

 25   les deux versions.

 26   Q.  Monsieur Panic est-ce que vous connaissez cette unité et est-ce que

 27   vous reconnaissez les signatures qui figurent sur ce document ?

 28   R.  Il s'agit d'une unité de reconnaissance dirigée par Zoran Alexic qui


Page 19142

  1   était originaire de Brasina, municipalité de Zvornik. En dessous, et c'est

  2   écrit à la main, il est écrit : "Pour les comptes, payer 100 000, approuvé

  3   par le commandant."

  4   Et puis il y a la signature de quelqu'un. Il me semble d'ailleurs que

  5   c'est la signature de Grujic. Brano Grujic.

  6   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que ce document pourrait être versé

  7   au dossier, je vous prie ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous souhaitez verser au dossier la

  9   totalité du document. Je suppose que vous n'avez pas d'objection ? Bien, le

 10   document sera versé au dossier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3383.

 12   Mme ELLIOTT : [interprétation] Je souhaiterais que le document 15660 de la

 13   liste 65 ter soit affiché à l'écran, je vous prie.

 14   Q.  Monsieur Panic, est-ce que vous saviez que ce groupe se trouvait à

 15   Zvornik et que la municipalité serbe l'aidait ?

 16   R.  J'avais entendu dire que les Aigles blancs avaient été logés dans le

 17   village de Snagovo, qui se trouve également dans la municipalité de

 18   Zvornik. Mais non, je n'étais pas au courant de ce certificat.

 19   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que ce document pourrait être versé

 20   au dossier ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Au vu de ce que vient de répondre le témoin,

 22   je ne pense pas que nous ayons suffisamment de base pour verser le document

 23   en question au dossier.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que vous êtes en mesure de

 25   reconnaître la signature de M. Grujic, Monsieur Panic ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est écrit à la machine Branko Grujic, mais

 27   pour autant que j'arrive à distinguer, c'est quelqu'un d'autre qui a signé

 28   pour lui. Je crois que je distingue Lazarevic, comme signature.


Page 19143

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous savez de qui il s'agissait ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne sais pas de quel Lazarevic il

  3   s'agit.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous aurez une autre occasion pour

  6   demander le versement au dossier de ce document.

  7   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que le document 13934 de la liste 65

  8   ter pourrait être affiché à l'écran.

  9   Q.  En attendant que ce document ne soit affiché, Monsieur Panic, je

 10   voulais vous demander une précision, et cela concerne votre déposition

 11   précédente. Car vous avez décrit un homme qui appartenait à l'unité de

 12   Seselj et vous décrivez comment il roue de coups un de vos collègues de la

 13   police parce que vous et votre collègue portiez la casquette de la JNA avec

 14   l'étoile à cinq pointes. J'aimerais vous poser la question suivante : est-

 15   ce que les unités paramilitaires portaient cette casquette de la JNA ? Et

 16   si tel n'était pas le cas, à votre connaissance, pourquoi est-ce que cela

 17   leur posait problème ?

 18   R.  Les unités paramilitaires ne portaient pas l'étoile à cinq pointes.

 19   Dans l'ancien Etat de la Yougoslavie, cette étoile à cinq pointes était

 20   portée par l'armée de métier et par la police. Les paramilitaires ne

 21   portaient pas cela. Ils avaient des emblèmes avec l'aigle serbe, ces

 22   emblèmes étaient placés sur des casquettes. Et il faut savoir que lorsque

 23   nous les avons enlevés, nous les avons remplacé par l'étoile à cinq

 24   étoiles, et là, il était si courroucé, si amer, qu'il a voulu en fait

 25   frapper avec sa matraque ce collègue qui lui, avait remis sur sa casquette

 26   l'étoile à cinq pointes.

 27   Q.  Alors j'aimerais vous demander de vous intéresser au document qui se

 28   trouve à l'écran, il s'agit d'un rapport du commandement du Corps de la


Page 19144

  1   Bosnie orientale. Il s'agit en fait d'un rapport sur les problèmes du

  2   centre de formation du capitaine Dragan en date du 7 juin 1992. J'aimerais

  3   savoir, Monsieur Panic, si vous êtes en mesure de nous fournir des

  4   observations à propos de la création de ce centre de formation du capitaine

  5   Dragan à Divic ?

  6   R.  Le capitaine Dragan est arrivé à la fin du mois de mai. C'est à ce

  7   moment-là qu'il est arrivé à Zvornik. En mai 1992. Pour ce qui est de cette

  8   décision, moi, je n'étais pas au courant, mais ce que je savais, c'est

  9   qu'il avait voulu créer un centre à Divic, dans un hôtel. Mais les

 10   autorités municipales, en fait, n'ont pas donné leur approbation, elles

 11   n'étaient pas d'accord. L'armée, quant à elle, était d'accord, donc il a

 12   ouvert ce centre pendant un ou deux mois. C'est là qu'il y a eu cet

 13   entraînement ou ces formations qui ont été organisées à Divic.

 14   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander le versement

 15   au dossier de ce document ?

 16   M. ROBINSON : [interprétation] Le témoin nous a dit ce qu'il savait du

 17   capitaine Dragan, mais je ne pense pas que les informations qu'il nous a

 18   données sont suffisantes pour demander le versement au dossier de ce

 19   document. Regardez ce qui est indiqué dans le document; que le capitaine

 20   Dragan avait déclaré qu'il avait l'appui du président de la présidence, M.

 21   Radovan Karadzic, ainsi que d'autres ministres du gouvernement de la

 22   République serbe de Bosnie-Herzégovine. Vous avez donc ce type

 23   d'affirmation. Le témoin n'a été en mesure de nous dire que le capitaine

 24   Dragan se trouvait à un certain lieu, c'est tout. Je ne pense pas que, de

 25   ce fait, au vu de cette déclaration dans le document, nous pouvons verser

 26   le document au dossier.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez quoi que ce soit à

 28   nous dire, Madame Elliot ?


Page 19145

  1   Mme ELLIOTT : [interprétation] Je pense que le témoin a fait plus que

  2   confirmer l'existence du centre. Il nous a indiqué que le centre avait bel

  3   et bien été mis sur pied contre les desideratas des autorités municipales.

  4   Je pense qu'il y a un lien qui a été établi et qui est suffisant avec ce

  5   document. Et justement, à propos de la référence à M. Karadzic, nous sommes

  6   sur le point de voir un autre document qui a déjà été versé au dossier et

  7   dans lequel figurent des renseignements tout à fait semblables. Donc, je ne

  8   pense pas que cela devrait être un obstacle au versement au dossier de ce

  9   document.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que les Juges de la Chambre

 12   disposent d'un fondement suffisant pour permettre le versement au dossier

 13   de ce document à la lumière de la confirmation du témoin sur l'existence du

 14   centre d'entraînement et son rapport avec le Corps de Bosnie orientale,

 15   mais en ce qui concerne le passage en question, les Juges de la Chambre

 16   insistent sur le fait que nous n'allons accorder aucun poids à cela en

 17   l'absence d'éléments de preuve permettant de corroborer cela pour

 18   l'instant. Et c'est sur ce fondement-là que nous allons verser ce document

 19   au dossier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3384, Madame, Messieurs

 21   les Juges.

 22   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le P1478,

 23   qui est un passage des carnets de Mladic. Je souhaite avoir le compte rendu

 24   d'audience en B/C/S affiché, s'il vous plaît, et non pas le carnet

 25   manuscrit. Page du compte rendu d'audience dans le prétoire électronique

 26   268, et page 270 en anglais.

 27   Q.  Monsieur Panic, ce qui va surgir à l'écran dans quelques instants est

 28   le compte rendu d'audience du 30 juin 1992 que nous avons regardé il y a


Page 19146

  1   quelques jours. Et puisque nous sommes sur le sujet du centre

  2   d'entraînement, je vais vous demander de porter votre attention aux

  3   commentaires qui sont attribués à M. Karadzic, et ensuite nous allons

  4   revenir au début de cette mention. Encore une fois, page 268 en B/C/S et

  5   270 en anglais. Je vous demande de bien vouloir regarder les commentaires

  6   de M. Karadzic indiquant qu'il serait dommage de fermer ce centre. Voici la

  7   question que j'ai pour vous, Monsieur Panic : est-ce que le capitaine

  8   Dragan continuait à faire fonctionner ce centre d'entraînement après cette

  9   date, le 30 juin 1992 ? Et si tel est le cas, jusqu'à quand ?

 10   R.  Je ne sais pas jusqu'à quand il avait ce centre, mais je vois ici

 11   qu'une personne appelée Crni est citée. Cet homme venait de Teslic et était

 12   rattaché au poste de police de Zvornik, et par la suite, il s'est rendu à

 13   Divic avec le capitaine Dragan. Je ne sais pas exactement à quelle date ce

 14   centre a été fermé.

 15   Q.  Savez-vous s'il fonctionnait après le 30 juin 1992 ?

 16   R.  Non. Je l'ai déjà dit, j'ai dit que je ne connaissais pas la date ou

 17   jusqu'à quand ce centre a continué à fonctionner.

 18   Q.  Je ne vous demande pas la date exacte, je vous demande de me donner une

 19   indication de la date à laquelle ce centre a continué à fonctionner à peu

 20   près ?

 21   R.  Si je me souviens bien, le capitaine Dragan est resté environ deux

 22   mois, voire deux mois et demi. Il est venu à la fin du mois de mai après

 23   que Slavko Eric ait été tué. Je crois qu'il a continué à travailler, mais

 24   je ne sais pas jusqu'à quand.

 25   Q.  Je vous remercie. Est-ce que nous pouvons voir la page en B/C/S, la

 26   page 244, et anglais la page 246. Monsieur Panic, reconnaissez-vous les

 27   noms de l'un quelconque des participants à cette réunion ?

 28   R.  Le numéro 13, Jovo Mijatovic. Numéro 14, Radosav Peric.


Page 19147

  1   Q.  Quelles étaient leurs fonctions à Zvornik ?

  2   R.  Jovo Mijatovic était un député. Il travaillait à Glinica avant la

  3   guerre. Radosav Peric était le directeur de l'école. Par la suite, il est

  4   devenu premier ministre à Zvornik, au début de la guerre. Et Vasilic,

  5   Slobodan, il était commandant adjoint de la Brigade de Zvornik.

  6   Q.  Est-ce que nous pouvons passer à la page suivante dans les deux

  7   langues, s'il vous plaît ? En regard du chiffre 18, nous voyons d'autres

  8   noms qui sont énumérés ici. Reconnaissez-vous l'un quelconque de ces

  9   individus ?

 10   R.  Marko Pavlovic. C'est ainsi qu'il s'est présenté à cet endroit. Il

 11   était commandant de l'état-major de la Défense territoriale. Cependant, par

 12   la suite, après qu'il ait été jugé ainsi que le groupe de Zvornik, cela ne

 13   correspond pas à son nom; Gordan Jovanovic, un avocat de Zvornik, il

 14   travaillait dans la municipalité avant cela; Slavoljub Tomasevic

 15   travaillait à Glinica; et Grujic, Branko, c'est le président de la

 16   municipalité et le président du parti; et Dragan Jokic est un militaire, je

 17   crois qu'il était capitaine ou quelque chose. Cela correspond sans doute à

 18   la composition de l'état-major de la Défense territoriale parce qu'on voit

 19   le terme de chef utilisé ici en regard du nom de Marko Pavlovic.

 20   Q.  Est-ce qu'en B/C/S, je peux avoir la page 247, et en anglais la page

 21   249, s'il vous plaît ? Je crois que nous avons le texte anglais sur les

 22   deux parties de l'écran. Est-ce que je peux avoir la page en B/C/S, la page

 23   249 également, s'il vous plaît ? Pardonnez-moi, mais ceci ne correspond pas

 24   à la bonne page en B/C/S. C'est 247 en B/C/S, pardonnez-moi. Merci. Je vous

 25   demande de vous reporter, Monsieur Panic, à l'endroit où nous parlons de M.

 26   Grujic, au point 4, qui fait un rapport sur l'application couronnée de

 27   succès de la décision du président. Ma première question : qu'est-il arrivé

 28   aux habitants de Divic et Kozluk ?


Page 19148

  1   R.  La plupart des habitants ont été réinstallés, parce qu'à Luka [phon]

  2   c'est la municipalité où ont été emmenés la plupart des gens de Divic et

  3   Gornji Sepak en Serbie, et Subotica en Serbie, ensuite à Hongrie.

  4   Q.  Et qu'en est-il des habitants de Kozluk ?

  5   R.  J'ai déjà dit que les habitants de Kozluk ont été emmenés en Serbie.

  6   Ils sont restés à Subotica, c'est ce que j'ai entendu dire, et ils sont

  7   ensuite allés à Hongrie.

  8   Q.  Les habitants de Divic et de Kozluk, était-ce des Musulmans ?

  9   R.  Ces endroits sont habités majoritairement par les Musulmans.

 10   Q.  Et après la réinstallation des Musulmans, qui s'est installé à Divic et

 11   Kozluk ?

 12   R.  Des personnes d'appartenance ethnique serbe qui avaient fui Vogosca,

 13   Zenica, et ailleurs, l'endroit où ils habitaient.

 14   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que je peux avoir la page 249 en

 15   B/C/S et la page 251 en anglais ?

 16   Q.  Je vous montre simplement cette page, Monsieur Panic, pour vous montrer

 17   que nous avons Marko Pavlovic qui prend la parole ici, et vous nous avez

 18   déjà parlé de lui.

 19   Mme ELLIOTT : [interprétation] Donc, puis-je avoir la page 251 en B/C/S et

 20   253 en anglais ? C'est la suite de ses commentaires.

 21   Q.  Je vous demande de bien vouloir regarder le bas de cette page où M.

 22   Pavlovic aurait dit :

 23   "Nous avons été très efficaces pour ce qui est de chasser les

 24   Musulmans."

 25   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page

 26   suivante dans les deux langues, s'il vous plaît.

 27   Q.  Et nous poursuivons à la page suivante :

 28   "Nous avons apporté la paix à Sepak, Divic et Kozluk. Certaines


Page 19149

  1   personnes souhaitaient quitter l'endroit, alors que nous l'exigions. Nous

  2   devions chasser certaines personnes en raison de nos héros qui avaient fui

  3   Kovacevici."

  4   Ma première question : vous avez parlé de Divic et de Kozluk. Qu'est-

  5   il arrivé aux habitants de Sepak ?

  6   R.  Il y a trois Sepak : Donji, Gornji et Srednji. Gornji et une partie de

  7   Srednji étaient majoritairement habités par des Musulmans. Je ne sais pas

  8   où ils sont allés après cela.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me demande si la traduction est exacte

 10   ici, puisqu'en anglais on utile le terme de "evict", "chasser certaines

 11   personnes" ou "des personnes."

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la page

 13   précédente, s'il vous plaît, pour que je puisse retrouver le passage en

 14   question moi-même.

 15   Mme ELLIOTT : [interprétation] C'est en bas de la page précédente.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela ne se trouve pas au bas de la page,

 17   mais en haut de la page.

 18   Mme ELLIOTT : [interprétation] La mention qui est faite de "chasser", c'est

 19   le dernier endroit où il y a un astérisque.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors ceci n'est pas une bonne traduction non

 21   plus. On ne peut justifier l'anglais avec de l'anglais.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, c'est quelque chose qu'il

 23   faudra reprendre à un autre moment, pas maintenant.

 24   Poursuivons, Maître Elliott.

 25   Mme ELLIOTT : [interprétation]

 26   Q.  La question suivante que j'ai à vous poser, Monsieur Panic, êtes-vous

 27   en mesure de commenter la mention qui est faite par M. Pavlovic des "héros"

 28   de Kovacevici ? Savez-vous ce qu'il voulait dire ?


Page 19150

  1   R.  Eh bien, il voulait sans doute parler de personnes d'appartenance

  2   ethnique serbe qui avaient fui les Musulmans de Kovacevici, et qu'ils

  3   allaient s'installer dans ces secteurs-là parce que Kovacevici était

  4   majoritairement musulman.

  5   Mme ELLIOTT : [interprétation] Puis-je afficher le numéro 65 ter 17273,

  6   s'il vous plaît ?

  7   Q.  Et en attendant son affichage, Monsieur Panic, pourriez-vous nous

  8   donner une estimation du moment où le déplacement des Musulmans de la

  9   municipalité serbe de Zvornik s'est terminé ?

 10   R.  Eh bien, je ne peux pas vous donner de date, mais c'était au tout

 11   début, et c'était à la fin du mois de juin. Je ne peux pas vous donner la

 12   date exacte.

 13   Q.  Au vu du document que vous avez sous les yeux, saviez-vous qu'il y

 14   avait eu des propriétés abandonnées qui avaient été saisies par le

 15   gouvernement provisoire de Zvornik ?

 16   R.  Oui. Les biens immobiliers de Musulmans d'appartenance ethnique

 17   musulmane qui étaient partis ont été donnés à des personnes qui étaient

 18   d'appartenance ethnique serbe et qui étaient arrivées d'autres régions.

 19   C'est une commission qui a procédé à cela.

 20   Mme ELLIOTT : [interprétation] Le document que nous avons sous les yeux à

 21   l'écran n'est pas le document exact. La page n'est pas exacte. Nous avons

 22   la première page en B/C/S et en anglais du document 17273 ? Je souhaiterais

 23   que soit agrandie la partie droite de l'écran -- ou les documents qui se

 24   trouvent sur cet écran. Et compte tenu de la déposition du témoin, je

 25   demande à ce que ce document soit versé au dossier en tant que document

 26   suivant.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P3385, Madame, Messieurs


Page 19151

  1   les Juges.

  2   Mme ELLIOTT : [interprétation] Puis-je demander l'affichage du document

  3   P3187 ?

  4   Q.  Il s'agit de la carte que vous avez regardée. C'est une carte agrandie

  5   que vous avez vue élargie lorsque nous nous sommes rencontrés. Je vais

  6   passer à un autre sujet maintenant qui porte sur le centre de détention que

  7   vous décrivez dans votre déclaration préalable.

  8   Monsieur Panic, cette carte coïncide-t-elle avec les photographies et est-

  9   ce qu'elles dépeignent de façon fidèle les installations que nous y voyons

 10   ?

 11   R.  Oui. A l'exception du fait qu'il y a Novi Izvor qui est ici, et ensuite

 12   il y avait le bâtiment de l'administration et le tribunal correctionnel,

 13   outre tous ces endroits-ci.

 14   Q.  Pour préciser, ce que vous avez cité en qualifiant de Ciglana est ce

 15   qui correspond à la société Novi Izvor; c'est exact ?

 16   R.  Novi Izvor Ciglana est une usine où sont fabriquées des tuiles et des

 17   briques. Novi Izvor est une société qui se trouve à Karakaj, mais les

 18   principaux bâtiments, là où se trouvaient l'administration et la direction,

 19   se trouvaient à Zvornik.

 20   Q.  Alors, ce que vous appelez Ciglana, est-ce que vous voyez ici une image

 21   de Ciglana sur cette carte ?

 22   R.  Oui, oui. La première photographie, en haut ici.

 23   Mme ELLIOTT : [interprétation] Peut-être que nous pourrions agrandir la

 24   photographie qui représente ce qui est appelé la société Novi Izvor.

 25   Q.  S'agit-il là de la photographie que vous venez d'évoquer et qui porte

 26   le numéro 0040-6537 ?

 27   R.  Oui. Ça, c'est la société Novi Izvor, Ciglana. C'est une usine.

 28   C'est une briqueterie qui fabrique des briques et des tuiles, donc il ne


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  1   s'agit pas de bâtiment administratif. Il s'agit de l'usine en tant que

  2   telle.

  3   Q.  Et donc, le bâtiment de l'administration, de la direction ou ce

  4   tribunal correctionnel, constitue un bâtiment distinct qui n'est pas

  5   représenté sur cette carte; c'est exact ?

  6   R.  Il s'agit effectivement d'un bâtiment distinct qui se trouve à

  7   Zvornik. C'est la police qui en assurait la sécurité, alors qu'à l'usine

  8   Ciglana, la police n'assurait pas la sécurité. Ce camp avait été créé par

  9   une unité paramilitaire, qui ensuite a été abolie ou fermée. La police

 10   assurait la sécurité du bâtiment administratif, là où se trouvait la

 11   direction à Zvornik.

 12   Q.  Merci.

 13   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le numéro

 14   65 ter 14642, s'il vous plaît ?

 15   Q.  Monsieur Panic, est-ce que vous saviez qu'il y avait à Ekonomija, au

 16   moment où ce document a été établi, le commandement de la Défense

 17   territoriale ?

 18   R.  Je sais que pendant un certain temps il y avait non pas le commandement

 19   mais une unité de la Défense territoriale qui était dirigée par Miladin

 20   Mijatovic, qui était capitaine de l'armée, qui était capitaine de réserve,

 21   et je sais que, là, cette unité était cantonnée là-bas, oui.

 22   Mme ELLIOTT : [interprétation] Est-ce que ce document pourra être versé au

 23   dossier ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson ?

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Je me demande si le témoin a donné

 28   suffisamment d'éléments d'information pour justifier le versement au


Page 19153

  1   dossier de ce document. Il a tout simplement indiqué qu'il y avait une

  2   unité qui se trouvait à un lieu donné, c'est tout.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au vu de ce qu'a indiqué le témoin, la

  5   Chambre est d'avis que nous pouvons tout à fait verser le document au

  6   dossier, à moins que vous ne remettiez en cause l'authenticité du document.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Ecoutez, nous remarquons quand même que le

  8   document n'était pas complet, puisque nous n'y voyons pas les signatures

  9   des gens qui ont reçu le document, mais nous ne contestons pas

 10   l'authenticité à proprement parler du document en tant que tel.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons donc lui donner une

 12   cote.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document P3386.

 14   Mme ELLIOTT : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Panic, j'en viens maintenant à vous poser quelques questions à

 16   propos de l'école technique et Karakaj, car lors de votre déposition

 17   précédente, vous avez parlé de l'exécution des personnes qui se trouvaient

 18   dans l'école technique, qui ont été exécutées dans l'abattoir. J'aimerais

 19   d'abord, dans un premier temps, savoir comment vous avez entendu cela ? Où

 20   avez-vous obtenu cette information ?

 21   R.  J'ai entendu parler de cela lors d'une conversation avec l'officier de

 22   police, Petar Tanic, qui en fait assurait la sécurité de la commission

 23   chargée du nettoyage des terrains, et il m'a dit une fois qu'il devait se

 24   rendre ou qu'il devait aller à l'abattoir afin donc de s'occuper des

 25   cadavres ou des corps de Musulmans qui avaient été détenus à l'école

 26   technique et qui avaient été exécutés. Mais de toute façon, on en parlait

 27   beaucoup. Il y avait des rumeurs, des bruits qui courraient à ce sujet dans

 28   la ville.


Page 19154

  1   Q.  Mais qu'en est-il de l'école à proprement parler ? Est-ce que vous avez

  2   entendu dire, est-ce que vous savez s'il y a eu des personnes qui ont été

  3   tuées à l'école technique de Karakaj ?

  4   R.  Ecoutez, les bruits qui couraient, c'était que les unités

  5   paramilitaires de Pivarski, de Repic, étaient venues à l'école technique et

  6   y avaient véritablement frappé des personnes, leur avaient fait subir des

  7   sévices, mais je ne sais pas s'ils les ont tuées ou non. De toute façon,

  8   cela, je ne suis pas en mesure de le savoir, parce que moi-même je ne suis

  9   pas allé à l'école technique. Il y avait ce genre de bruit qui courait,

 10   mais je ne peux pas vous dire davantage que cela.

 11   Q.  Mais est-ce que vous avez jamais vu Milan Radovic dans l'enceinte ou

 12   autour de l'enceinte de l'école technique de Karakaj pendant le mois de

 13   juin 1992 ?

 14   R.  Oui, oui. Il y avait une fois où moi, je passais, en fait Karakaj, et

 15   j'ai vu qu'il y avait un camion municipal que conduisait à ce moment-là

 16   Milan Radovic, et j'ai vu que le camion partait des lieux. Alors

 17   maintenant, pour ce qui est de savoir ce qu'il transportait, ce camion, ça,

 18   je ne le sais pas, je ne l'ai pas vu.

 19   Q.  Et je vais maintenant aborder mon tout dernier sujet. Lors de votre

 20   déposition précédente, vous avez fait référence à sept policiers qui ont

 21   été condamnés à Sarajevo du fait de ces événements qui se sont déroulés

 22   pendant la guerre. Et je vous donne la référence de la page au compte

 23   rendu, il s'agit de la page 2 934. Quand est-ce que cela s'est passé ?

 24   R.  Je pense qu'ils ont été condamnés l'année dernière, et ils sont en

 25   train de purger leurs peines. Ces personnes avaient été des gardes au

 26   bâtiment administratif à Novi Zvornik pendant la guerre.

 27   Q.  Et à l'époque, et lorsque je dis époque j'entends l'année 1992, est-ce

 28   que vous avez participé ou est-ce que vous avez été au courant d'enquête


Page 19155

  1   qui aurait été menée à bien à propos des sévices subis dans les différents

  2   lieux de détention à Zvornik ?

  3   R.  Alors, au tout début des opérations de guerre, je ne pense pas qu'il y

  4   ait eu d'enquête diligentée. Tout ce que je sais, c'est que des médecins et

  5   des médecins légistes sont venus pour faire des examens, et puis par la

  6   suite, je sais que dans un rapport qui a été présenté par le chef de la

  7   police --

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi le nom.

  9   R.  -- j'ai vu qu'il y avait trois plaintes au pénal qui ont été

 10   diligentées contre trois personnes pour crimes de guerre et une plainte au

 11   pénal pour viol. Alors, ce rapport, en fait, il avait été rédigé soit le 7

 12   soit le 9 janvier 1993, et le rapport faisait référence à l'année 1992.

 13   Q.  Est-ce que vous-même, vous avez participé personnellement à ces

 14   enquêtes ?

 15   R.  Non.

 16   Q.  Merci.

 17   Mme ELLIOTT : [interprétation] J'en ai maintenant terminé avec mon

 18   interrogatoire principal.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous allons pouvoir nous

 20   intéresser aux pièces à conviction connexes que vous souhaitez verser au

 21   dossier.

 22   Mme ELLIOTT : [interprétation] Il y en a sept seulement, puisqu'un certain

 23   nombre a déjà été versé au dossier.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Avez-vous des objections ?

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour ce qui est du document 18479 de la

 27   liste 65 ter, il est fait référence à ce document à la page 2 935. Est-ce

 28   que vous pourriez l'examiner, je vous prie ? Car j'aimerais que vous


Page 19156

  1   m'expliquiez comment il se fait qu'il fasse partie de ce compte rendu

  2   d'audience et qu'il en soit inséparable ?

  3   Mme ELLIOTT : [interprétation] Je pense que le témoin avait dit qu'il

  4   connaissait l'auteur de ce document, il connaissait sa fonction, et il a

  5   dit qu'il savait également que Zuco avait été mis en liberté.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il a identifié l'auteur et

  7   c'est tout. Peut-être que nous pourrions nous intéresser à ce document, si

  8   vous souhaitez en demander le versement au dossier.

  9   Mme ELLIOTT : [interprétation] Oui, tout à fait. Document 18479, je vous

 10   prie.

 11   Q.  Monsieur, premièrement, vous voyez le document qui est maintenant

 12   affiché sur votre écran, et j'aimerais savoir si vous saviez que Zuco avait

 13   été désarmé le 29 juillet 1992 ?

 14   R.  Oui. A ce moment-là, la police spéciale est arrivée et non seulement

 15   elle l'a désarmée, l'unité de Zuco, mais elle l'a également arrêtée. Et la

 16   veille, le 27 et le 28, nous avions réussi à chasser Gogic et ses hommes et

 17   à leur faire franchir le pont vers Mali Zvornik.

 18   Q.  Vous avez mentionné l'arrestation de Zuco, mais est-ce que vous savez

 19   ce qu'il est advenu de Zuco après son arrestation ?

 20   R.  Ils ont tous été escortés jusqu'à Bijeljina, mais je ne sais pas ce qui

 21   s'est passé par la suite. Je l'ai vu, par la suite. Il avait épousé une

 22   femme originaire de Celopek, et il venait, donc j'ai eu l'occasion de le

 23   voir là-bas, mais je ne sais pas ce qu'il en a été en matière de poursuite

 24   ou de procès.

 25   Q.  Mais est-ce que vous saviez ou est-ce que vous avez entendu dire à un

 26   moment donné qu'il avait été libéré ?

 27   R.  Oui. Oui, oui, il a été libéré. Parce que je l'ai vu à plusieurs

 28   reprises par la suite. Il venait dans notre secteur, il s'y déplaçait.


Page 19157

  1   Puis, par la suite il a également été arrêté à Belgrade à une ou deux

  2   reprises, et j'ai entendu dire qu'à Belgrade également il a été libéré.

  3   Mme ELLIOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si ce

  4   sont des informations qui vous suffisent.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je pense que les bases, maintenant,

  6   ont été jetées. Tout à fait, Madame Elliott. Nous allons verser au dossier

  7   les sept pièces à conviction connexes, y compris cette partie, et des cotes

  8   leur seront octroyées en temps voulu. Je vous remercie, Madame Elliott. Il

  9   nous reste quelque dix minutes, Monsieur Karadzic. Est-ce que vous pouvez

 10   commencer ? Maître Robinson.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, si vous pouviez m'accorder une ou deux

 12   minutes, car j'aimerais répondre oralement à la requête présentée par

 13   l'Accusation aux fins d'autorisation de réponse à un document relatif à la

 14   Commission internationale des personnes portées disparues, et ce, avant

 15   nous ne levions l'audience. J'ai besoin de deux minutes pour répondre.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, tout à fait.

 17   Monsieur Karadzic, je vous en prie.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 19   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Panic.

 21   R.  Bonjour.

 22   Q.  Je souhaiterais préciser certains des propos que vous avez tenus

 23   aujourd'hui. Nous n'avons pas beaucoup de temps à notre disposition, mais

 24   j'aimerais l'utiliser pour ce faire. Lorsque vous avez dit que Zuco avait

 25   été libéré, est-ce que cela signifiait que les poursuites diligentées à son

 26   encontre étaient terminées, ou est-ce que cela signifiait qu'il avait purgé

 27   sa peine et qu'ensuite, il avait été libéré ?

 28   R.  Je n'en sais rien. Il a été libéré, certes, mais pour ce qui est des


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  1   poursuites engagées contre lui, je ne sais pas si elles étaient encore en

  2   cours ou -- je n'en sais rien, en fait.

  3   Q.  Bien. Non, là il y a eu un problème d'interprétation. Donc, cela ne

  4   signifie pas que les poursuites ont été suspendues, mais qu'il a été

  5   probablement libéré. Pour ce qui est des poursuites diligentées à son

  6   encontre, pour ce qui est de savoir si elles étaient encore en cours, je

  7   n'en sais rien. C'est bien ce que vous avez dit, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Panic, vous vous exprimez dans

 10   la même langue, donc je vous demanderais de marquer un temps d'arrêt entre

 11   la question et la réponse. Et ne l'oubliez demain non plus. Poursuivez,

 12   Monsieur Karadzic.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends tout à fait.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Nous avons vu cet extrait vidéo, nous avons vu le moment où ces deux

 17   corps ont été transportés, sortis de l'endroit où ils se trouvaient. Alors,

 18   convenez-vous qu'il serait difficile de déterminer, du fait de leurs tenues

 19   vestimentaires, quelle était l'appartenance ethnique de ces deux hommes, et

 20   la femme était probablement une femme serbe; c'est cela ?

 21   R.  Je ne comprends pas à quels hommes vous faites référence. Est-ce que

 22   vous êtes en train de faire référence aux deux hommes qui transportaient le

 23   corps --

 24   Q.  Non, non, non, les deux corps. Ils étaient en train de porter le corps

 25   d'un homme, mais convenez-vous qu'il est difficile de déterminer son

 26   appartenance ethnique, mais pour ce qui est de la femme, à en juger par sa

 27   tenue vestimentaire, elle était probablement Serbe ? Et je fais référence

 28   aux corps que nous avons vus.


Page 19159

  1   R.  Je ne peux pas véritablement déterminer l'appartenance ethnique de

  2   quelqu'un au vu de sa tenue vestimentaire.

  3   Q.  Merci. Avez-vous jamais entendu dire que certains des propriétaires de

  4   l'usine Glinica de Serbie étaient préoccupés par leurs investissements, que

  5   cette usine avait une production qui s'élevait à quasiment 1 million par

  6   jour et qu'ils ont dû faire quelque chose pour assurer le paiement pour la

  7   protection de Glinica ?

  8   R.  Je sais que Subotic, l'ancien dirigeant, l'ancien directeur de Glinica,

  9   il est venu à un moment pour une raison quelconque à Glinica, mais

 10   pourquoi, je n'en sais rien.

 11   Q.  Est-ce que la municipalité avait à sa disposition 300 000 marks

 12   allemands pour pouvoir payer Arkan ?

 13   R.  Je pense que la municipalité ne disposait pas de ces fonds, mais je ne

 14   sais pas où la municipalité a réussi à les obtenir.

 15   Q.  Bien. A la page 67 qui vous a été montrée un peu plus tôt, il

 16   s'agissait du capitaine Dragan, il est indiqué qu'il a aidé à la formation

 17   et qu'il a fourni une aide pour ce qui est du matériel. Dites-nous, je vous

 18   prie, si jusqu'à ce moment-là, le capitaine Dragan avait participé à des

 19   combats ou est-ce qu'il formait seulement des hommes; les hommes auxquels

 20   il est fait référence et qui étaient des hommes de la brigade ? Avant cela,

 21   est-ce qu'il ne faisait que participer à des exercices de formation ou

 22   d'entraînement et avez-vous jamais entendu parler de crime qu'il aurait

 23   commis avant cela ?

 24   R.  Je sais qu'il n'a pas participé au combat. Il est arrivé là-bas après

 25   le 25 mai, et d'après ce que j'avais entendu, il allait se rendre au

 26   village de Kamenica pour y récupérer les corps d'hommes qui avaient été

 27   tués là-bas. Ceci étant dit, il est allé à Zvornik, on l'a vu se déplacer

 28   dans Zvornik. Ensuite, il a mis sur pied ce centre, mais je ne sais pas


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  1   s'il a participé à des combats.

  2   Q.  Vous ne savez pas non plus s'il a commis des crimes ?

  3   R.  Non, non, je ne le sais pas véritablement. Peut-être qu'il a participé

  4   à des cambriolages, mais je n'en suis pas sûr.

  5   Q.  Merci.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons mettre un terme à ce

  7   contre-interrogatoire ou est-ce que je devrais continuer ? Il ne nous reste

  8   que trois minutes.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non nous allons mettre un terme à

 10   ceci.

 11   Monsieur Panic, nous reprendrons demain à 9 heures. Je pense que vous aviez

 12   été prévenu. Mais vous n'êtes pas censé parler de votre témoignage, vous ne

 13   devez en parler à personne. Vous le comprenez cela ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Vous pouvez quitter ce prétoire

 16   maintenant. Je vous souhaite une bonne soirée.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, je suppose qu'il va

 20   falloir que nous passions à huis clos partiel, n'est-ce pas ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Non, non, je pense que je peux m'exprimer en

 22   audience publique.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, ce matin, le bureau

 25   du Procureur a déposé une requête aux fins d'avoir la possibilité de

 26   répondre à la réponse du Procureur. Il s'agit en fait d'ordonnances eu

 27   égard à l'ICMP, la Commission internationale pour les personnes portées

 28   disparues.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a deux éléments; c'est cela ?

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est exact. Et je peux répondre

  3   maintenant pour que vous puissiez en temps voulu rendre une décision. Cela

  4   ne va prendre qu'une minute. Normalement, nous n'avons pas d'objection.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Normalement, je disais que nous n'avions pas

  7   d'objection à ce genre de requête. Nous pensons que les parties devraient

  8   avoir toute latitude pour pouvoir réagir, mais j'aimerais juste remarquer

  9   que bien que n'ayons pas d'objection à la demande présentée par le bureau

 10   du Procureur, puisqu'en fait, dans la réponse, il semblait qu'il s'agissait

 11   d'ergoter à propos de certains faits, qui ne sont pas particulièrement

 12   utiles d'ailleurs à la Chambre. Donc, nous nous opposons à cette demande

 13   qui a été faite pour avoir le droit de décider et d'aller de l'avant. Il

 14   vous appartiendra d'en --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Monsieur Tieger.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Evidemment, maintenant que cela a été

 18   dit, je ne vais absolument pas faire de tentative, parce qu'on cataloguera

 19   cela encore d'ergotage, mais ce n'est pas le cas. Nous pensons que

 20   l'Accusation doit bien savoir exactement comment les choses vont se passer

 21   sur la base d'informations très, très précises et exactes. Nous nous

 22   efforçons de le faire, et c'est tout ce que nous avons fait, Monsieur le

 23   Président. Nous voulons nous assurer que tout soit bien indiqué de façon

 24   exacte pour que la Chambre de première instance puisse prendre les

 25   décisions les plus appropriées au vu des informations les plus exactes.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Maître Harvey, vous voulez présenter ou un des membres de votre

 28   équipe ?


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  1   M. HARVEY : [interprétation] Oui, tout à fait. Je m'excuse de ne pas

  2   l'avoir fait plus tôt. Il s'agit de Mme Sarah Codde, qui est assistante

  3   juridique, qui travaille pro bono et qui travaille maintenant dans notre

  4   équipe. Je vous remercie.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Bienvenue à vous, Madame Codde.

  6   Nous reprendrons demain à 9 heures.

  7   --- L'audience est levée à 15 heures 00 et reprendra le mardi 20 septembre

  8   2011, à 9 heures 00.

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