Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 28 septembre 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, avant de débuter

  7   aujourd'hui, nous avons une décision orale à rendre.

  8   Concernant la requête de l'accusé demandant report de la déposition du

  9   Témoin KDZ-492, requête déposée le 27 septembre 2011, les Juges de la

 10   Chambre ont examiné tant les arguments avancés dans la requête elle-même

 11   que ceux fournis oralement par l'Accusation dans la réponse qu'elle a

 12   donnée le même jour. Tout en tenant compte du fait que le témoin est déjà

 13   présent sur place, la Chambre a décidé de faire droit à la requête et a

 14   décidé de reporter la déposition de ce témoin à la semaine du 17 octobre.

 15   La Chambre a tenu compte du fait que les dépositions des Témoins KDZ-492 et

 16   KDZ-532 se recouvrent dans une certaine mesure, ce qui implique que la

 17   déposition de KDZ-532 pourrait s'avérer pertinente pour aider l'accusé à se

 18   préparer à la déposition de KDZ-492. Les Juges de la Chambre ont également

 19   pris en considération le fait que tant le Témoin KDZ-492 que le Témoin KDZ-

 20   532 sont des témoins qui donnent lieu à une communication tardive et pour

 21   lesquels des volumes de documents assez importants ont été fournis à

 22   l'accusé récemment seulement. A cet égard, il est notable que les documents

 23   concernant KDZ-532 ont été fournis à l'accusé au fur et à mesure et que,

 24   alors même que les comptes rendus de ces entretiens ont été communiqués le

 25   21 septembre, les éléments tombant sous le coup de l'article 68 n'ont été,

 26   quand à eux, communiqués qu'hier, tout comme cela a été le cas avec ceux

 27   tombant sous le coup de l'article 66(B).

 28   Alors que les Juges de la Chambre conviennent que l'accusé aurait pu


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  1   découvrir le lien existant entre ces deux témoins dès le 21 septembre,

  2   lorsque l'identité du Témoin KDZ-532 lui a été communiquée, les Juges de la

  3   Chambre tiennent également compte du fait que ce n'est pas l'ensemble des

  4   documents concernant KDZ-532 - et donc potentiellement ceux pertinents pour

  5   KDZ-492 - qui ont été communiqués à l'accusé à cette date. Pour cette

  6   raison, la Chambre a décidé de faire droit à la requête.

  7   Donc, Monsieur Tieger, compte tenu de cette décision que je viens de rendre

  8   et dans l'intérêt du bon déroulement du procès à l'avenir, l'Accusation est

  9   invitée à prévoir au calendrier la déposition des témoins faisant l'objet

 10   d'une communication tardive de façon à ce que l'accusé dispose de

 11   suffisamment de temps pour se préparer, notamment lorsque l'on est en

 12   présence de témoins dont les dépositions sont liées.

 13   Ceci étant dit, Monsieur le Témoin, veuillez vous lever et dire le texte de

 14   la déclaration solennelle.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 16   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 17   LE TÉMOIN : NUSRET SIVAC

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur. Veuillez vous asseoir.

 20   Madame Edgerton, à vous.

 21   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 22   Interrogatoire principal par Mme Edgerton :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Est-ce que vous

 24   m'entendez dans une langue que vous comprenez ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Pourriez-vous décliner votre identité dans ce cas.

 27   R.  Je suis Nusret Sivac, né le 19 août 1947 à Prijedor.

 28   Q.  Merci, Monsieur Sivac. Alors, avez-vous déjà déposé devant ce même


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  1   Tribunal dans l'affaire contre Milomir Stakic le 29, le 30 et le 31 juillet

  2   ainsi que le 1er août 2002, puis à nouveau le 13 janvier 2003 ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et en vous préparant à votre déposition d'aujourd'hui, avez-vous eu la

  5   possibilité de réécouter l'enregistrement de votre déposition en 2002 et en

  6   2003 ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Pour autant que vous vous en souveniez, est-ce que cette déposition

  9   était exacte ?

 10   R.  Oui, tout était exact dans l'ensemble.

 11   Q.  Et si aujourd'hui je vous posais les mêmes questions que celles qui

 12   vous ont été posées à l'époque, donneriez-vous les mêmes réponses ?

 13   R.  Oui, je donnerais pratiquement les mêmes réponses, à ceci près que pour

 14   certaines des questions j'apporterais sans doute des compléments.

 15   Q.  Alors, concernant ces compléments que vous venez d'évoquer, cela

 16   concerne-t-il les membres d'une délégation que vous avez décrite comme

 17   s'étant rendue visite à Omarska en pages 6 639 à 6 647 du compte rendu de

 18   votre déposition ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Très bien. Dans ce cas-là, nous allons nous pencher très rapidement sur

 21   ce point. Dans le compte rendu de votre déposition, vous décrivez la visite

 22   rendue par des représentants ou des fonctionnaires serbes à Omarska pendant

 23   que vous y étiez détenu. Vous évoquez toute une série de personnes que vous

 24   auriez reconnues au sein de cette déclaration [comme interprété] : Simo

 25   Drljaca, Milorad Vukic, Radoslav Brdjanin, Mico Kovacevic, Milomir Stakic,

 26   Srjdo Srdic, Simo Miskovic, Milan Andzic, Radmilo Zeljaja et Dusan

 27   Kovacevic [sic].

 28   Alors, outre les noms que je viens d'énumérer, avez-vous reconnu qui


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  1   que ce soit d'autre au sein de cette délégation ?

  2   R.  Oui. Lors de la déposition que j'ai faite dans le cadre de cet

  3   autre procès, j'ai répondu à une question posée par le Procureur, qui me

  4   demandait quels étaient les fonctionnaires de haut rang à s'être rendus en

  5   visite au camp d'Omarska. J'ai répondu qu'il s'agissait de Radoslav

  6   Brdjanin. Ensuite, la question suivante qui m'a été posée se concentrait

  7   sur les hommes politiques de Prijedor qui faisaient également partie de

  8   cette délégation lors de la même visite. Par conséquent, je n'ai pas eu

  9   l'occasion de dire qui était encore présent parmi cette délégation

 10   politique originaire de Banja Luka. Donc Radoslav Brdjanin était le

 11   fonctionnaire le plus haut placé à rendre visite au camp d'Omarska, et il

 12   était à la tête de la Région autonome de la Krajina de Bosnie. Il y avait

 13   Radoslav, je crois, Vukic, surnommé Rade le Monstre, qui était président du

 14   SDS.

 15   Q.  Excusez-moi, Monsieur Sivac. Je me suis contentée de vous donner

 16   ces noms. Je vais les répéter encore une fois. Il s'agit des noms que vous

 17   avez fournis dans votre déposition précédente, et je vais reformuler ma

 18   question. Dans le procès Stakic, vous avez dit avoir vu Brdjanin, Vukic,

 19   Drljaca, Kovacevic, Stakic, Srdic, Miskovic, Milan Andzic, Radmilo Zeljaja

 20   et Dusan Kovacevic [sic].

 21   Mis à part ces personnes dont je viens de donner les noms, y avait-il

 22   qui que ce soit d'autre parmi les membres de cette délégation que vous

 23   auriez reconnu ?

 24   R.  Dans la première citation que vous venez de faire, il y a une erreur.

 25   Ce n'est pas Milorad Vukic, mais Milorad Vokic. Il était constamment aux

 26   côtés de Simo Drljaca. C'est toujours consigné Vukic au compte rendu, alors

 27   que c'est Vokic. Et dans cette délégation d'hommes politiques qui venait de

 28   Banja Luka, outre Brdjanin, il y avait également Radoslav Vukic, président


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  1   du SDS à Banja Luka, je crois; il y avait Radic, président de la

  2   municipalité de Banja Luka; et Stojan Zupljanin. C'était des hommes

  3   politiques, des fonctionnaires, qui étaient arrivés directement de Banja

  4   Luka.

  5   Q.  Merci. J'ai encore seulement une autre question à vous poser concernant

  6   votre déposition dans l'affaire Stakic. En page 

  7   10 270, je vois que mon collègue vous informait d'un incident en fin

  8   juillet 1992 au cours duquel 12 cars avec des hommes à leur bord sont

  9   arrivés de la région de Brdo dans le camp d'Omarska. Est-ce que vous vous

 10   rappelez cet incident ?

 11   R.  Oui, je m'en souviens. C'était après le 20 juillet environ. On nous a

 12   informés que la rive gauche de la Sana, c'est-à-dire toute une série de

 13   villages musulmans, faisait l'objet d'un nettoyage ethnique. Dans l'ordre :

 14   Zecovi, Carakovo, Hambarine, Rizvanovici, Rankovcani, Biscani et Srdica.

 15   Et dès le jour suivant, on a commencé à voir arriver des autocars au

 16   camp d'Omarska. Puisque moi j'étais chez Burho et Mujo, dans ce local ou

 17   cette pièce, eh bien, j'ai vu que c'était contre l'un des murs de cette

 18   pièce où nous nous trouvions que ces prisonniers amenés de Brdo ont été

 19   placés. On les a fait se mettre en rang, s'aligner devant ce mur, et on les

 20   a traités avec beaucoup de brutalité. Ce mur qui n'était pas très épais,

 21   nous l'avons baptisé le mur des lamentations à Omarska. Parce que pendant

 22   cette seule journée, il a été amené au camp d'Omarska, selon les dires de

 23   Burho et de Mujo, qui avaient la possibilité de sortir de cette pièce où

 24   nous nous trouvions avec un groupe de prisonniers dans le but de nettoyer

 25   les traces de sang et les traces laissées par les mauvais traitements qui

 26   étaient laissées sur ce mur, c'était des cris terribles que nous entendions

 27   de la bouche des gardes et qui étaient adressés à ces prisonniers qui

 28   avaient été amenés de Brdo. On les traitait de façon inhumaine.


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  1   Un grand nombre de ces hommes amenés de Brdo a été tué à l'occasion de ce

  2   que les gardes appelaient l'accueil au camp, la réception. Burho et Mujo,

  3   on les a fait sortir avec un groupe de prisonniers vers la fin de la

  4   journée. Ils avaient des lances anti- incendie et ils ont essayé de

  5   nettoyer les traces qui étaient restées sur ce mur. Une douzaine d'autocars

  6   est arrivée, c'est ce qu'ils m'ont dit, il y a un grand nombre d'entre eux

  7   qui ont été tués, leurs corps sont à côté de la "maison blanche". Et l'un

  8   d'eux a amené une canne de vieillard et je lui ai demandé : "Mais qu'est-ce

  9   que tu portes là ?" Il m'a répondu : "C'est la canne de mon voisin. Il n'en

 10   aura plus besoin parce qu'il est étendu là-bas à terre à côté de la 'maison

 11   blanche'." Après seulement quelques jours --

 12   Q.  Monsieur Sivac, revenons au tout début de votre réponse, parce que j'ai

 13   quelques questions supplémentaires à vous poser. Tout d'abord, vous avez

 14   dit qu'après le 20 juillet ou environ à cette date, nous avions entendu

 15   dire qu'il y avait un nettoyage ethnique en course sur la rive gauche de la

 16   Sana où toute une série de villages musulmans se situaient. Vous avez

 17   ensuite donné beaucoup trop rapidement les noms de ces villages pour que

 18   les interprètes puissent les saisir. Est-ce que vous pourriez nous redonner

 19   les noms de ces villages ?

 20   R.  Nous appelions l'ensemble de ces villages Brdo, nous à Prijedor. Et

 21   c'était des villages qui étaient l'un à côté de l'autre. Zecovi, Carakovo,

 22   Hambarine, Rakovcani, Rizvanovici, Biscani et Sredica.

 23   Q.  Merci. Monsieur le Témoin, vous avez parlé d'autocars qui sont arrivés

 24   à Omarska et vous avez dit que des prisonniers avaient été amenés de Brdo,

 25   qu'on les avait fait s'aligner et qu'ils avaient été l'objet de mauvais

 26   traitements. Est-ce que vous pourriez nous dire, juste pour être tout à

 27   fait précis, qui se trouvait à bord de ces autocars ?

 28   R.  Eh bien, c'était des villageois originaires de ces villages dont je


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  1   viens de donner les noms qui étaient à bord de ces autobus.

  2   Q.  Comment savez-vous qu'ils se trouvaient à bord de ces autobus ?

  3   R.  Nous avons reçu cette information, y compris de la part des gardiens,

  4   mais après plusieurs jours, lorsqu'ils ont fait leur apparition parmi les

  5   groupes qui se rendaient à la distribution de vivres, nous les avons

  6   remarqués, puis nous avons également reconnu parmi eux certaines personnes

  7   qui étaient de vieilles connaissances de Prijedor.

  8   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Merci beaucoup. Je n'ai plus d'autres

  9   questions.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] En fait, excusez-moi, j'ai peut-être avancé

 11   un peu trop vite, Madame et Messieurs les Juges. Je souhaiterais demander

 12   le versement du compte rendu de la déposition de ce témoin en application

 13   de l'article 92 ter, numéro 22701 de la liste 65 ter. Une petite partie de

 14   cette déposition a été consignée à huis clos partiel. Nous avons donc

 15   préparé une version expurgée qui porte dans notre liste 65 ter le numéro

 16   22701B.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux versions seront versées au

 18   dossier.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, le

 20   document 22701 reçoit la cote P3477 et il est placé sous pli scellé. Alors

 21   que le document 22701B se voit attribuer la cote P3478 et il est versé en

 22   tant que pièce publique au dossier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous passons

 24   maintenant aux pièces connexes.

 25   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, souhaitez-vous que

 26   je donne lecture des références correspondantes ou préférez-vous que je me

 27   penche sur la question avec mon confrère ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je préfère la dernière option que vous


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  1   venez de proposer, mais j'ai une question concernant quatre documents qui

  2   sont présentés comme faisant l'objet d'une demande de versement simplement

  3   pour référence. Est-ce que vous pourriez nous préciser ce que vous voulez

  4   dire par là ?

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] Au cours de ma lecture du compte rendu de

  6   la déposition du témoin, j'ai remarqué que le Président de la Chambre dans

  7   cette autre affaire avait demandé des versions en couleur pour certaines

  8   pièces qui avaient déjà été versées précédemment, et ces versions en

  9   couleur qui, en dehors de ce détail, étaient parfaitement identiques se

 10   sont vues attribuer des cotes séparées. Je m'en remets aux Juges de la

 11   Chambre quant à la question de savoir ce qui serait préférable. Pour que le

 12   compte rendu d'audience soit tout à fait clair, je pensais qu'il serait

 13   possible d'avoir un lien vers le document approprié au lieu du numéro

 14   auquel le Président de la Chambre de l'époque se référait.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, il apparaît à la lecture du compte

 16   rendu qu'il s'agit de doublons. Nous n'avons pas besoin de les verser tous.

 17   Quant à l'une des pièces originales, le numéro 5772.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr de bien comprendre la

 20   façon dont ce document constitue une partie indissociable et indispensable

 21   du compte rendu. D'après ce dernier, le témoin s'est contenté de lire à

 22   haute voix et aucune question n'a été posée concernant cet article. La même

 23   chose semble s'appliquer au document 11740 de votre liste 65 ter. Si vous

 24   souhaitez demander le versement de ces articles, je vous suggère de les

 25   aborder vous-même avec le témoin.

 26   Mme EDGERTON : [interprétation] Puis-je le faire dès maintenant dans ce

 27   cas-là ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.


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  1   Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous afficher le document numéro

  2   05772 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pendant que le document s'affiche à

  4   l'écran, j'ai oublié de vous demander, Maître Robinson, si vous aviez des

  5   objections.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je crois que

  7   vous vous êtes chargé de cette question mieux que nous n'aurions pu le

  8   faire nous-mêmes.

  9   Mme EDGERTON : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous lisez le cyrillique ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Excusez-moi, Madame et Messieurs les Juges, j'hésite un peu. Parce

 13   qu'il y a un délai sur le canal audio que j'écoute aujourd'hui. Est-ce que

 14   vous voyez l'article et son titre sur la partie gauche de la page ?

 15   R.  Oui. Représentants de la Krajina à Prijedor est le titre.

 16   Q.  Reconnaissez-vous ce document ? L'avez-vous déjà vu par le passé ?

 17   R.  Oui. Dans le procès contre Stakic. C'était justement pour préciser la

 18   situation qui était celle de cette visite d'hommes politiques. Le Président

 19   de la Chambre m'a présenté cet article de journal issu du journal "Kozarski

 20   Vjesnik" et il y avait aussi, je crois, un autre journal, le "Banja Luka

 21   Glasnik" de Banja Luka. J'ai lu ces textes et il ressortait de ces textes

 22   l'identité de ces personnes qui appartenaient à la délégation politique

 23   tant de Prijedor que de Banja Luka. Ma première déclaration, lorsque je

 24   n'ai fait mention que de Radoslav Brdjanin, se trouvait complétée par la

 25   lecture de ces articles. Et il n'a pas été nécessaire que je répète ces

 26   noms encore une fois.

 27   Q.  Très rapidement, concernant cet article. Vous nous dites qu'il s'agit

 28   d'un article de "Kozarski Vjesnik". Est-ce que vous pourriez nous expliquer


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  1   quel type de journal ou de média était "Kozarski Vjesnik" ?

  2   R.  "Kozarski Vjesnik" c'était l'instrument principal de propagande dans la

  3   presse écrite que les politiciens et les hommes politiques serbes de

  4   Prijedor utilisaient afin d'adresser leurs communiqués et de rédiger leurs

  5   pamphlets. Le 30 avril, après la prise de contrôle aidée par les conscrits

  6   --

  7   Q.  Excusez-moi, merci. Vous avez répondu à ma question. Je voudrais passer

  8   à une autre question qui porte également sur cet article. Le nom de ce

  9   journal figure-t-il en haut à gauche de cette page en caractères majuscules

 10   gras juste devant vous ? Est-ce que vous voyez bien les mots "Kozarski

 11   Vjesnik" apparaître en haut de la page qui est devant vous ?

 12   R.  Oui, je le vois.

 13   Q.  Et nous voyons également un tampon juste au-dessous des lettres OZ.

 14   Nous ne pouvons pas très bien voir le tampon, mais j'aimerais vous demander

 15   de nous dire si vous arrivez à lire ce que ceci veut dire ce qui est écrit.

 16   R.  Je crois qu'il est indiqué qu'il s'agissait d'une édition de guerre.

 17   Car à l'époque, le "Kozarski Vjesnik", lorsqu'il sortait, on disait que

 18   c'était un exemplaire de guerre.

 19   Q.  Merci bien. Maintenant, cet article fait référence aux visites

 20   effectuées par Radoslav Brdjanin, Radoslav Vukic, Stojan Zupljanin et

 21   Predrag Radic à Prijedor le 17 juillet 1992. Du meilleur de votre souvenir,

 22   ces personnes sont-elles les mêmes personnes qui faisaient partie de la

 23   délégation qui s'était rendue au camp d'Omarska que vous avez vue ?

 24   R.  Oui. Il y avait également un groupe de journalistes de Prijedor qui

 25   accompagnaient cette délégation politique de Prijedor et de Banja Luka et

 26   ces derniers informaient le public par les médias.

 27   Q.  Merci bien.

 28   Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrait-on avoir une cote, est-ce que


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  1   cette pièce pourrait être versée au dossier en tant que pièce de

  2   l'Accusation ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, certainement.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] [hors micro] -- 79, Madame, Messieurs

  5   les Juges.

  6   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie. Pourrait-on maintenant

  7   afficher la pièce 11740 dans le prétoire électronique.

  8   Q.  Monsieur, vous voyez un autre exemplaire de "Kozarski Vjesnik" daté du

  9   26 juin 1992, et on peut lire dans la partie inférieure gauche sur la page

 10   un article qui m'intéresse. Je voudrais attirer, d'ailleurs, votre

 11   attention sur cet article intitulé "Médecin monstre". Est-ce que vous avez

 12   déjà vu cet article auparavant ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce que vous connaissez l'une quelconque des personnes de la région

 15   de Prijedor qui portait le surnom de Médecin 

 16   monstrueux ?

 17   R.  "Kozarski Vjesnik" et la Radio Prijedor étaient complètement sous le

 18   contrôle du SDS de Prijedor. Ces derniers, par le biais de leurs articles,

 19   falsifiaient les biographies de certains habitants de Prijedor et les

 20   accusaient de toutes sortes de crimes. Par contre, toutes ces personnes

 21   étaient des personnes tout à fait correctes et honnêtes, des citoyens de

 22   Prijedor exemplaires. Alors que tous ceux qui, par le biais de "Kozarski

 23   Vjesnik" et la Radio Prijedor, avaient été appelés, pour ainsi dire, que

 24   l'on mentionnait, tous ces derniers avaient été tués dans les camps de

 25   Prijedor. Ils avaient été, d'une certaine façon, identifiés de cette façon-

 26   ci. Ici, l'on parle d'un médecin qui est un médecin de Prijedor, il

 27   s'appelait Osman Mahmuljin. Et il est intéressant de savoir qu'en fait, il

 28   y avait deux médecins à Prijedor, le Dr Milomir Stakic et le Dr Mico


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  1   Kovacevic. Et à la tête de --

  2   Q.  Excusez-moi, Monsieur, je voudrais simplement vous demander une

  3   question concernant M. Mahmuljin à qui on fait référence dans cet article.

  4   Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui est arrivé à M. Mahmuljin ?

  5   R.  Avec moi, il avait été emmené au camp d'Omarska. Et c'est là que, à la

  6   fin du mois de juillet, il a été tué lorsqu'on a procédé à une exécution

  7   systématique des personnes imminentes de Prijedor.

  8   Q.  Je vous remercie.

  9   Mme EDGERTON : [interprétation] Je demanderais que cette pièce soit versée

 10   au dossier, s'il vous plaît.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Cette pièce sera versée au

 12   dossier sous la cote P3480.

 13   Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

 14   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette pièce sera donc versée au dossier.

 16   A l'exception des quatre pièces qui ont été versées au dossier en guise de

 17   référence, toutes les autres pièces seront versées au dossier et on leur

 18   attribuera une cote en temps utile.

 19   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, étant donné que ce

 21   témoin, sa déposition a été versée au dossier par le truchement de

 22   l'article 92 ter, pourquoi est-ce que vous ne demanderiez pas que le résumé

 23   du témoignage de ce témoin soit également versé au dossier ?

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, certainement.

 25   M. Sivac, Musulman de Bosnie, qui jusqu'en 1989 travaillait pour le service

 26   de sécurité publique à Prijedor. En 1992, il travaillait en tant que

 27   reporter à la télévision dans la même région. Cette déposition écrite nous

 28   donne un survol de la prise armée de Prijedor en avril 1992 lorsque les


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  1   Serbes ont lancé une attaque dans la région et par la suite ont procédé à

  2   un nettoyage ethnique qui a commencé le 30 mai 1992. Il a déposé sur la

  3   persécution de non-Serbes et la destruction des bâtiments religieux non

  4   serbes et de leurs biens. Il a fait l'objet d'une arrestation par la police

  5   serbe le 10 juin 1992 et il a été emmené à Keraterm et Omarska, mais a été

  6   relâché le même jour.

  7   Il a été de nouveau arrêté le 20 juin 1992 et est retourné à Omarska.

  8   Il décrit les conditions brutales et inhumaines pour un très grand

  9   nombre de non-Serbes emprisonnés à cet endroit-là, y compris lui-même, et

 10   il y avait également des femmes et des hommes. Les prisonniers ont fait

 11   l'objet de passages à tabac, de torture et de meurtre. Ils étaient à peine

 12   nourris. Les femmes étaient abusées de façon brutale. En juillet 1992, M.

 13   Sivac a vu une délégation de représentants serbes de Bosnie qu'il a

 14   reconnue et qui était venue rendre visite au camp. Ce jour-là, il était

 15   aligné avec les autres personnes qui se trouvaient au camp et il a été

 16   contraint de chanter des chants serbes devant les visiteurs. Il a été

 17   transféré au mois d'août 1992 au camp de Trnopolje, où il est resté pendant

 18   14 jours. A la suite de ceci, lorsqu'il a été relâché, il est retourné à

 19   Prijedor, où il est resté jusqu'à ce qu'il ne puisse partir définitivement

 20   au mois de décembre 1992 après avoir renoncé à ses biens.

 21   Et juste avant de terminer, je sais que j'avais posé une question à M.

 22   Sivac, j'ai posé une question sur les membres de la délégation, mais en

 23   fait, j'ai oublié de nommer un nom. Il s'agit de Dusan Jankovic. Je voulais

 24   simplement le mentionner.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Monsieur Sivac, votre déposition qui a été faite dans l'affaire

 27   Stakic a été versée au dossier dans son ensemble. C'est maintenant au tour

 28   de l'accusé, M. Radovan Karadzic, de vous poser des questions dans le cadre


Page 19563

  1   de son contre-interrogatoire.

  2   Je vous écoute, Monsieur Karadzic. Vous avez la parole.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Excellences. Bonjour à tous et à

  4   toutes.

  5   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

  6   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Sivac.

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  Etant donné que votre déposition est assez volumineuse, j'essaierai de

  9   vous poser des questions courtes et succinctes afin de pouvoir obtenir des

 10   réponses succinctes également. Je vous demanderais aussi de ne pas oublier

 11   de ménager des pauses entre mes questions et vos réponses afin que les

 12   interprètes puissent interpréter nos propos.

 13   Première question : j'aimerais savoir si vous avez fait votre service

 14   militaire ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que vous avez suivi un cours alors que vous faisiez votre

 17   service militaire ?

 18   R.  Oui, j'ai suivi un cours. J'ai obtenu un diplôme de mécanicien radio

 19   pour l'équipement militaire radio.

 20   Q.  Très bien. Merci. Quel titre avez-vous obtenu ?

 21   R.  Eh bien, c'est un cours de mécanicien radio en temps de mobilisation

 22   militaire, c'est-à-dire que j'étais mécanicien radio et je travaillais sur

 23   les équipements radio.

 24   Q.  Très bien. Merci. Votre titre serait donc officier chargé des

 25   communications ?

 26   R.  Oui, c'est cela.

 27   Q.  Est-ce que ceci comprend également le travail sur les télé-imprimantes

 28   et sur d'autres appareils --


Page 19564

  1    [Problème technique]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Devrait-on essayer de nouveau ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne crois pas avoir dit quelque chose

  4   d'inapproprié.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Bien. Alors, veuillez répondre à la question, je vous prie.

  7   R.  Puis-je répondre, Monsieur Karadzic ?

  8   Q.  Oui.

  9   R.  Oui, alors, pour ce qui est de mon cours et de l'enseignement que j'ai

 10   eu, j'ai été opérateur chargé du téléscripteur à Sarajevo.

 11   Q.  Est-ce que vous avez travaillé pour la sécurité publique ou la sécurité

 12   d'Etat ?

 13   R.  Je travaillais dans le cadre du centre de décodage, qui faisait partie

 14   des services de sécurité publique faisant partie des nouvelles structures.

 15   Q.  Donc vous n'avez pas travaillé au sein de la sécurité d'Etat ?

 16   R.  Non, jamais. Dans certaines de mes déclarations précédentes, j'ai

 17   trouvé que c'était en fait une erreur. C'est quelque chose qui n'a pas été

 18   correctement consigné.

 19   Q.  Justement cela m'a rendu un peu perplexe, puisqu'on disait ici que vous

 20   aviez un nom de code et que vous vous occupiez de la sécurité de Tito

 21   lorsqu'il venait en Bosnie.

 22   R.  Non, je devrais expliquer. Vous savez, au centre de communication, nous

 23   avions des noms de code. Et, effectivement, dans le cadre de notre équipe,

 24   nous effectuions la sécurité de Tito lorsqu'il venait en Bosnie-

 25   Herzégovine. Nous travaillons de façon normale. Nous nous en occupions,

 26   simplement cela faisait partie de notre travail. Je ne me souviens plus de

 27   votre question.

 28   Q.  Dans votre déclaration de 1994, vous aviez déclaré que vous avez


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  1   travaillé dans les Services secrets et que vous et votre chef, vous aviez

  2   accès aux documents et que vous répondiez au secrétariat fédéral et aux

  3   cours militaires et que vous vous occupiez de la sécurité de Tito et

  4   d'autres personnalités lorsqu'ils venaient en Bosnie. C'était votre

  5   déclaration, ce qui figure à la page 3 de la déclaration de 1994. Et vous

  6   avez également déclaré qu'en tant qu'agent secret, vous aviez un nom de

  7   code : K-5 Joja; est-ce que c'est exact ?

  8   R.  Monsieur Karadzic, votre question est très complexe, mais en fait,

  9   c'est une constatation qui est la vôtre. Je crois que vous avez simplement

 10   cité des propos hors contexte.

 11   Q.  Très bien. Merci. Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que -- ou plutôt,

 12   lorsque vous avez commencé à travailler en tant que caméraman, est-ce que

 13   vous étiez encore employé par la police ?

 14   R.  Oui, pendant un certain temps, je travaillais de façon parallèle au

 15   service de la Sûreté d'Etat et je travaillais également pour la télévision

 16   de Sarajevo.

 17   Q.  Où étiez-vous réellement employé et quels étaient vos honoraires ?

 18   R.  Je travaillais au sein de la sécurité d'Etat, et c'est là que, en

 19   réalité, j'étais employé.

 20   Q.  Est-ce que, effectivement, il est vrai que vous avez pris votre

 21   retraite ou bien est-ce qu'on vous a simplement laissé partir ?

 22   R.  Eh bien, cette information n'est peut-être pas tout à fait juste. J'ai

 23   eu certains problèmes au sein de mon service et j'avais la possibilité de

 24   faire une demande pour prendre une retraite anticipée. Mais à l'époque, je

 25   travaillais déjà activement à la télévision. J'avais ce droit, et donc j'ai

 26   fait cette demande et j'ai continué à travailler à la télévision de

 27   Sarajevo en tant que correspondant pour la Krajina occidentale.

 28   Q.  En d'autres mots, en fait, vous n'avez pas été licencié, mais vous avez


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  1   plutôt pris votre retraite parce que vous aviez un autre travail ?

  2   R.  Oui. En fait, à cause de ces conflits interethniques et des tensions

  3   que l'on ressentait au sein du service, j'ai été contraint de demander une

  4   retraite anticipée.

  5   Q.  Est-ce que l'on pourrait dire -- en fait, je ne comprends pas très bien

  6   si c'est oui ou non, parce qu'il s'agit d'une question très précise. Il

  7   faut dire si vous avez été licencié ou si vous avez pris votre retraite. Il

  8   faut être un peu plus précis.

  9   R.  Je vous l'ai dit. D'après la loi qui était en vigueur à l'époque sur

 10   l'ensemble du territoire de la Yougoslavie, j'avais le droit de faire une

 11   demande pour une retraite anticipée, et c'est ce que j'ai fait. J'ai reçu

 12   également une pension temporaire, et par la suite j'ai continué à

 13   travailler pour la télévision de Sarajevo, et j'étais un correspondant de

 14   guerre.

 15   Q.  Lorsque vous avez pris votre retraite, vous a-t-on fait une évaluation

 16   médicale ? Est-ce que vous avez eu un diagnostic qui vous a aidé à obtenir

 17   votre retraite ?

 18   R.  Eh bien, ce sont des problèmes réguliers. La majeure partie des

 19   employés de service avait ce type de problèmes puisque nous travaillions

 20   trop souvent, nous avions plusieurs permanences et nous travaillions de

 21   longues heures. Nous souffrions tous de problèmes classiques, c'est-à-dire

 22   nous dormions mal, nous souffrions d'insomnie. Et, vous savez, ce sont les

 23   symptômes que l'on peut avoir lorsque, pendant plusieurs années, on

 24   travaille la nuit.

 25   Q.  Donc c'est un psychiatre qui a donné ce diagnostic. Qu'a-t-il

 26   diagnostiqué exactement ?

 27   R.  Je ne le sais pas. Je suis allé à Sarajevo accompagné d'un groupe

 28   d'hommes de Prijedor, et il y a eu une conversation. Il y a eu, donc, un


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  1   examen. Après un certain temps, des documents sont arrivés pour dire que ma

  2   demande de retraite a été acceptée.

  3   Q.  Très bien. Merci. Vous n'avez aucune objection pour que nous nous

  4   procurions cette documentation sans la communiquer ?

  5   R.  Non, je n'ai absolument aucune objection pour cela.

  6   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez recommencer, je vous prie.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai allumé mon micro. Je ne sais pas si vous

  9   m'entendez. Très bien.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Alors, ce que vous avez dit ici au compte rendu d'audience à la page 6

 12   561, à savoir que Milos Jankovic est venu au service pour la nettoyer

 13   ethniquement n'est pas exact, n'est-ce pas ? Dans le prétoire électronique,

 14   il s'agit de la page 11, alors qu'il s'agit de la page 6 561 au compte

 15   rendu d'audience.

 16   R.  Oui. Lorsque Milos Jankovic est arrivé, il a réellement procédé au

 17   nettoyage ethnique du service dans lequel je travaillais.

 18   Q.  Est-ce que vous voulez dire que le chef de la police à n'importe quel

 19   niveau avait ces compétences, les compétences à savoir de changer la

 20   structure ethnique et de licencier certaines personnes, ou est-ce que ceci

 21   pouvait et devait relever du niveau du ministère ?

 22   R.  Milos Jankovic, lorsqu'il est arrivé dans notre service, c'est en fait

 23   l'une des raisons pour ma demande de retraite anticipée.

 24   Q.  Comment êtes-vous arrivé à vous forger cette opinion ? Est-ce que c'est

 25   une opinion ou bien est-ce que c'est une impression que Milos Jankovic

 26   avait été employé pour procéder à un nettoyage ethnique au sein du service

 27   ? Est-ce que cette conclusion qui est la vôtre avait été fondée sur la base

 28   de certains documents ou bien est-ce que vous vous êtes forgé simplement


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  1   cette opinion ?

  2   R.  Oui, c'est quelque chose que je peux dire grâce aux faits. Dans mon

  3   service, on faisait réellement attention à la structure nationale. Nous

  4   étions neuf qui étaient employés et nous faisions réellement attention, à

  5   savoir pour qu'il y ait un équilibre entre les Musulmans et les Serbes.

  6   Q.  Merci. Alors, sur la base quels faits êtes-vous arrivé à la conclusion

  7   que vous avez été contraint à prendre votre retraite à cause de votre

  8   appartenance ethnique ?

  9   R.  Esad Vojnikovic était un collègue qui travaillait avec moi dans le même

 10   service, et à cause d'un incident tout à fait anodin, a malheureusement été

 11   chassé et il a dû prendre sa retraite. Et à sa place, il a été remplacé par

 12   un Serbe. Dans notre service à nous, de façon illégale, Milos Jankovic a

 13   emmené Ranko Kovacevic, qui lui, d'après toutes les règles et d'après

 14   toutes les lois qui étaient en vigueur au sein du service de Sécurité,

 15   n'était pas censé travailler au sein de notre service. Ranko Kovacevic

 16   avait déjà eu plusieurs -- enfin, il y avait eu certaines sanctions

 17   disciplinaires contre lui. C'était un simple policier. Il a dû être chassé

 18   du service de la sécurité d'Etat puisqu'il s'était livré à des activités

 19   illicites, et il a été emmené dans notre service pour travailler à nos

 20   côtés.

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous voulez dire que Milos Jankovic avait les

 22   compétences d'engager et de licencier des personnes, alors qu'il s'agissait

 23   d'un service qui était centralisé et qui bénéficiait de certaines

 24   procédures de vérification qui n'étaient pas du tout disponibles aux

 25   candidats ?

 26   R.  Eh bien, voyez-vous, justement suite à une proposition de Milos

 27   Jankovic, notre service devenait de plus en plus rempli. C'est-à-dire,

 28   c'est lui qui donnait des propositions au chef du service à savoir qui


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  1   devait être reçu dans notre service ou pas, qui devait être employé ou pas.

  2   Q.  Bien. Est-ce que vous savez qu'il existait des vérifications et qu'il y

  3   avait également une période de probation qui allait directement au

  4   ministère, c'est-à-dire que tout ceci se faisait de façon très systématique

  5   ?

  6   R.  Eh bien, ce n'est pas vrai, Monsieur Karadzic. Puisque vous savez,

  7   Ranko Kovacevic, au lieu de se faire licencier du service, il est venu

  8   travailler avec nous pour travailler -- et je ne sais plus trop pour qui,

  9   d'ailleurs. Et il effectuait des contrôles sur nous, nous les autres

 10   employés. Il est venu nous contrôler, il est venu pour nous évaluer et

 11   faire des rapports sur nous. Et, en fait, il était là pour simplement nous

 12   espionner, pour le dire ainsi. J'avais tout à fait raison lorsque j'ai

 13   déclaré dans ma première déclaration qu'un opérateur de permanence qui

 14   travaillait sur les chiffres était la seule personne qui pouvait recevoir

 15   les dépêches pendant sa permanence et les envoyer aux services compétents.

 16   Par contre --

 17   Q.  Merci. Dites-nous, s'il vous plaît, est-ce que sur la base du

 18   licenciement d'une personne, qui s'appelle donc M. Jankovic, est-ce que

 19   c'est sur la base de cet événement que vous vous êtes forgé l'impression

 20   que Milos Jankovic était venu procéder à un nettoyage ethnique du service ?

 21   Ou bien, détenez-vous d'autres informations, avez-vous d'autres preuves ?

 22   R.  Eh bien, après Esad Vojnikovic, je suis parti, moi. C'est moi qui suis

 23   parti. Et encore une fois, on m'a remplacé par un Serbe. Et donc, vers la

 24   toute fin, juste avant le début de la guerre, s'agissant de ce service, il

 25   ne restait plus qu'un Musulman.

 26   Q.  Alors, j'aimerais revenir de nouveau sur la question à savoir si vous

 27   avez pris votre retraite ou bien est-ce que vous vous êtes fait licencier.

 28   Donc c'est l'un ou l'autre.


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  1   R.  Oui. Mais, Monsieur Karadzic, vous savez, Milos Jankovic et le chef du

  2   service de Sécurité devaient trouver un remplacement pour moi, afin qu'on

  3   emmène au sein du service un Musulman qui avait la même compétence que moi

  4   afin de pouvoir faire mon travail.

  5   Q.  Très bien. Vous voulez dire qu'avant les élections multipartites, Milos

  6   Jankovic pouvait mener une politique nationaliste au sein du MUP de Bosnie-

  7   Herzégovine dans laquelle, à partir de 1967, les Musulmans et les Croates

  8   se trouvaient sur les positions les plus élevées depuis 1967 ? Vous savez

  9   qu'on disait que c'était le service de Hamdija et de Branko. Est-ce que

 10   vous voulez dire qu'ils pouvaient démettre de leurs fonctions des personnes

 11   sur la base de leur appartenance ethnique ?

 12   R.  Eh bien, cela s'est avéré comme étant la réalité. Justement c'est qu'a

 13   fait Milos Jankovic, il est basé sur l'appartenance ethnique. Mais en fait,

 14   vous tirez les choses hors contexte. En fait, je ne sais pas dans quelle

 15   mesure est-ce que vous savez le fonctionnement du service de Sécurité. Mais

 16   le service de Sécurité à Prijedor, jusqu'à une certaine période, était

 17   complètement et entièrement serbe. Après Esad Sadikovic, je crois que

 18   j'étais le troisième ou le quatrième Musulman à être employé dans ce

 19   service.

 20   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes en train de parler de la période qui a

 21   suivi immédiatement la période de la guerre, et est-ce que ceci a trait

 22   avec une participation des Musulmans au côté de l'armée des Oustachi, et

 23   est-ce que c'était la raison pour laquelle il y avait ce manque de

 24   confiance ?

 25   R.  D'après mes connaissances de l'histoire de la ville de Prijedor, je

 26   peux vous dire que s'agissant de la région de Prijedor, il n'y avait

 27   absolument pas de personne qui avait des tendances oustachi. Il y avait un

 28   tout petit nombre de personnes et ils étaient tous des combattants contre


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  1   le fascisme.

  2   Q.  Mais la personne dont nous avons parlé ne provient pas de cette région

  3   ?

  4   R.  Non. Il n'est pas de Prijedor.

  5   Q.  Mais je parle de la région.

  6   R.  Je parle seulement de la ville de Prijedor.

  7   Q.  Est-ce que vous avez travaillé dans le service du contre-renseignement

  8   et avez-vous travaillé sur des questions relatives à démanteler le

  9   nationalisme croate en 1973, comme il est indiqué dans votre déclaration ?

 10   Alors que, si je ne m'abuse, le Printemps croate a commencé en 1971 ?

 11   R.  Eh bien, non. Encore une fois, c'est une erreur. Moi j'ai parlé du

 12   moment où j'ai rejoint le service, c'est-à-dire qu'il y avait encore

 13   certaines personnes, ou certains résidus, si vous voulez, de personnes qui

 14   avaient participé à ce fameux Printemps croate. Et donc, mon service à moi,

 15   tout comme tous les autres services de Sécurité, et ce, sur le territoire

 16   de Prijedor, nous avons travaillé dans le sens à savoir qu'il fallait

 17   arrêter ces personnes. Vous savez que dans la police nous travaillons en

 18   équipes. C'est-à-dire que les services de sécurité publique et de la Sûreté

 19   d'Etat, nous travaillons tous en équipe pour lutter contre des ennemis de

 20   l'Etat, pour m'exprimer ainsi.

 21   Q.  Donc ce n'est pas vrai; vous n'avez jamais travaillé au sein du service

 22   du contre-renseignement ?

 23   R.  Non, pas du tout. Non. Je pense que c'est une erreur. Je n'ai jamais

 24   fait cette déclaration.

 25   Q.  C'est votre déclaration de 1994, page 3 débordant sur la page 4, c'est

 26   là que cela figure. Alors, est-ce qu'à cette époque, et en cette même

 27   qualité, vous avez également essayé de traquer les membres de l'Inform

 28   Bureau ? Est-ce qu'il n'était pas un peu tard de pourchasser ces membres de


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  1   l'Inform Bureau en 1973, alors que leurs activités remontaient à 1948 ?

  2   R.  Monsieur Karadzic, cette année, à Bosanska Dubica et à Prijedor, en

  3   Bosnie-Herzégovine, un groupe d'hommes de l'Inform Bureau a refait surface.

  4   Ils ont organisé des réunions. Et l'un d'entre eux était Gojko Biljajac,

  5   mon voisin le plus proche dans le bâtiment où j'habitais. Il avait déjà été

  6   condamné par le passé en tant que membre de l'Inform Bureau et avait été

  7   condamné à la prison sur l'île de Goli. Il y avait également la doctoresse,

  8   Mme Orlic, originaire de Bosanski Dubica. Et ce qui est intéressant pour ce

  9   Tribunal, c'est de savoir qu'elle était l'épouse du chef des services de la

 10   sécurité publique à Bosanski Dubica. Ils travaillaient ensemble à la

 11   réactivation de ce groupe de membres de l'Inform Bureau sur le territoire

 12   de Prijedor et sur celui de Bosanska Dubica, et c'est la raison pour

 13   laquelle ils ont été sanctionnés et condamnés à de lourdes peines de

 14   prison.

 15   Q.  Merci. Et vous, en tant qu'opérateur des transmissions, quel était

 16   votre rôle dans tout cela ?

 17   R.  En dehors de ce rôle dans les transmissions qui était le mien, au sein

 18   du centre des transmissions où j'étais employé quotidiennement,

 19   j'intervenais également dans le cadre d'un groupe d'agents sur le terrain.

 20   Ma tâche était de marquer ce suspect, Gojko Biljajac, à partir de mon

 21   bâtiment. Et j'avais également pour tâche de suivre ses déplacements et

 22   d'en informer un certain nombre de personnes qui étaient venues de Sarajevo

 23   pour s'acquitter, elles aussi, de cette mission.

 24   Q.  Il s'agissait d'hommes de la Sûreté d'Etat qui étaient venus de

 25   Sarajevo, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Soit. Mais ne vous ont-ils pas dit que d'après la loi, un employé des

 28   services de la sécurité publique ne pouvait pas travailler pour la Sûreté


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  1   d'Etat ?

  2   R.  Non, moi je ne travaillais pas pour la Sûreté d'Etat. Je n'étais pas

  3   employé par eux; je leur rendais simplement un service. A cet instant

  4   précis, ils considéraient que c'était moi qui étais le plus fiable et qui

  5   serais l'observateur, en même temps, le plus discret. Parce que si eux

  6   avaient eu à poster quelqu'un pour surveiller ce Gojko Biljajac, ç'aurait

  7   été une façon de procéder extrêmement suspecte pour lui qui faisait l'objet

  8   d'une surveillance. C'était un bâtiment de petite taille avec très peu

  9   d'habitants.

 10   Q.  Donc vous étiez un mouchard, en quelque sorte, sur place. Vous

 11   travailliez de façon officieuse et vous suiviez un certain nombre de

 12   personnes pour les besoins de la Sûreté d'Etat pendant que vous étiez

 13   employé par les services de la sécurité publique, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et vous ne saviez pas que ceci était interdit par la loi ?

 16   R.  C'était seulement dans ce cas précis, dans le cas de Gojko Biljajac et

 17   des membres de ce groupe l'Inform Bureau.

 18   Q.  Merci. Est-ce que vous étiez communiste ?

 19   R.  Oui. Concernant votre question précédente, avec la permission des Juges

 20   de la Chambre, je voudrais apporter un complément. Il est inexact de dire

 21   que nous autres qui travaillions au sein du centre de transmission

 22   n'aurions pas eu le droit de travailler pour la Sûreté d'Etat. Au sein du

 23   SUP de Prijedor, il y avait une section de la Sûreté d'Etat dont les

 24   services centraux se trouvaient à Banja Luka. Dans notre travail à nous,

 25   nous étions amenés à intervenir très souvent pour le compte de la Sûreté

 26   d'Etat.

 27   Q.  Vous affirmez que la loi n'interdit pas un recouvrement entre ces deux

 28   services ?


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  1   R.  Vous pensez à cette séance plénière lorsque Ranko a été démis de ses

  2   fonctions. Je vais vous répéter encore une fois, Monsieur Karadzic, la

  3   chose suivante : dans mon travail, et moi je travaillais pour le centre des

  4   services de Sécurité et j'y ai travaillé pendant longtemps, je peux vous

  5   dire que c'est très fréquemment que nous avions travaillé pour le compte de

  6   la Sûreté d'Etat.

  7   Q.  Je vous remercie. Vous étiez communiste, donc ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Etiez-vous communiste par conviction profonde ?

 10   R.  Moi j'ai accepté cette idéologie parce que c'était également celle de

 11   mes parents, et vous savez pertinemment que pour se voir confier un tel

 12   poste de responsabilité, il fallait avoir sa carte de membre de la Ligue

 13   des Communistes.

 14   Q.  Merci. Une autre question : est-il exact que vous êtes parti à la

 15   retraite après que vous ayez avancé une proposition en terme de politique

 16   du personnel au sein des services de la police, proposition assez osée dans

 17   le cadre de laquelle vous avez proposé une personne appartenant au groupe

 18   ethnique musulman qui était tout à fait inappropriée pour ce poste, et que

 19   cela a été retenu contre vous?

 20   R.  J'ai participé à une conversation informelle au sein d'un groupe de

 21   collègues, d'officiers de police, et on m'a demandé : Que penses-tu ? Qui

 22   devrait arriver au poste de chef des services de la sécurité publique ? Moi

 23   j'ai répondu qu'à mon avis, il conviendrait que cette fois-ci ce soit un

 24   Musulman. Lorsque j'ai dit cela, ils m'en ont voulu d'avoir dit cela, et

 25   ils ont estimé que c'était là des propos de nationaliste.

 26   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez donné le nom d'une personne

 27   précise qui aurait été considérée comme ne remplissant pas les critères

 28   requis pour ce poste ?


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  1   R.  Non, je n'ai pas donné de nom.

  2   Q.  Merci. Donc, en 1980 et 1981 et au-delà, vous surveilliez la structure

  3   ethnique du personnel, vous suiviez son évolution à Prijedor. Est-ce que ce

  4   n'était quand même pas un peu tôt pour un communiste que de se livrer à ce

  5   type de décompte à l'époque déjà ?

  6   R.  Je ne procédais à aucun décompte sur cette base. C'était simplement un

  7   constat que j'avais fait et une impression qui était la mienne, à savoir

  8   qu'au sein des services de la sécurité publique, il y avait trop peu

  9   d'employés appartenant aux autres groupes ethniques. Je ne l'ai dit à aucun

 10   endroit et à aucun moment de façon publique.

 11   Q.  Merci. Mais il semblerait que malgré tout, à l'époque, vous ayez conçu

 12   une certaine amertume de ce fait, ou une certaine insatisfaction à tout le

 13   moins ?

 14   R.  Non, je n'ai jamais éprouvé la moindre colère à l'encontre de ce

 15   système dont j'ai été un employé fidèle, au service duquel je me suis

 16   trouvé de façon très loyale jusqu'au 1er janvier 1990.

 17   Q.  Merci. Je voudrais maintenant savoir si, en ville, il existait ou non

 18   une mission officielle ou officieuse qui était censée dire qui était un bon

 19   Musulman et qui ne l'était pas ?

 20   R.  Je ne comprends pas votre question, sincèrement.

 21   Q.  Voici ce qui m'intéresse : les qualifications que nous trouvons chez

 22   vous, dans votre déclaration et dans votre ouvrage, et qui portent sur des

 23   Musulmans, est-ce qu'il s'agit de qualifications que vous avez reprises

 24   auprès d'une instance officielle, par exemple d'une commission, ou bien

 25   s'agit-il de vos propres qualifications ?

 26   R.  Je n'avais que mes propres impressions en tant que Nusret Sivac.

 27   J'avais le droit de faire ce genre d'estimation ou d'évaluation des gens.

 28   Q.  Il y avait ce Musulman qui était marié à une Serbe. A son sujet, vous


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  1   avez dit que de votre point de vue, il s'agissait d'un Musulman de réserve,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui. Juste avant l'année 1992, avant les premières élections

  4   démocratiques, c'est un certain Sead Besic qui est arrivé à la tête des

  5   services de la sécurité publique, et c'est à son encontre que j'ai émis

  6   cette qualification, cette évaluation.

  7   Q.  Merci. Mais vous avez également cité un assez grand nombre de Musulmans

  8   dans votre ouvrage, Musulmans dont vous estimiez qu'ils étaient des

  9   traîtres parce qu'ils étaient restés aux côtés des Serbes et avaient

 10   continué à travailler à Prijedor, alors que vous, vous estimiez que ce

 11   n'était pas la chose à faire ?

 12   R.  Non, ce n'est pas exact, Monsieur Karadzic. J'ai publié une liste de

 13   Musulmans qui tuaient d'autres Musulmans.

 14   Q.  Merci. En page 243 de votre livre, vous avez écrit sous l'intitulé

 15   "Musulmans criminels contre leur propre peuple" un certain nombre de

 16   choses. Le sous-titre suivant est : "Traîtres qui ont assassiné leur propre

 17   peuple," et là vous énumérez un grand nombre de personnes. Je vais vous

 18   dire combien, au moins 15 personnes à Prijedor. Nous y trouvons Sead Besic,

 19   qui était employé par la police au sein des services de la Sûreté d'Etat;

 20   ensuite, il y a aussi Hamdija Handzic, un Musulman également, il s'agissait

 21   d'un commandant de l'artillerie serbe; ensuite, Zijad Music; Asmir Music;

 22   puis Zlatan Blazevic; puis Atko Blazevic, surnommé Lily; l'un et l'autre

 23   étant des Croates; et un certain Emso Sabic, surnommé Sabo; puis Sabahudin

 24   Zulic, surnommé Butko; Goran Egrlic. Il s'agit de Musulmans pour tous ces

 25   noms sauf les deux Croates. Puis ensuite, nous trouvons une Musulmane;

 26   Ernest Badnjevic, un musulman; Zlatan Crnalic [phon]; Muhamed Sarajlic;

 27   Said Alabegovic [phon]; et Zlatan Selimbegovic. Vous les avez donc cités

 28   comme étant des traîtres au motif qu'ils étaient restés aux côtés des


Page 19577

  1   Serbes et se trouvaient soit au sein de l'armée serbe, soit au sein des

  2   organes du pouvoir serbe, n'est-ce pas ?

  3   R.  Non. Ce n'est pas exact, Monsieur Karadzic. Je ne les ai pas placés

  4   dans cette liste de traîtres parce qu'ils servaient dans les rangs de

  5   l'armée serbe de façon fidèle, mais parce qu'en tant que membres de cette

  6   armée serbe, ils sévissaient et tuaient la population à Gradacac, à Bihac,

  7   dans le couloir et dans tous les autres endroits où les unités d'élite de

  8   Prijedor se rendaient pour faire la guerre. C'était des Musulmans qui

  9   tuaient d'autres Musulmans. Et comment les qualifier autrement qu'en

 10   parlant de traîtres ? Il n'y a qu'un mot qui convient pour ce type de

 11   comportement.

 12   Q.  Soit. Mais vous leur déniez le droit à leurs propres positions

 13   politiques. Parce que n'y avait-il pas également des Serbes qui tuaient

 14   d'autres Serbes pendant la Seconde Guerre mondiale ? Des partisans et des

 15   Chetniks qui s'entretuaient ?

 16   R.  Monsieur Karadzic, je me contente de vous parler de la période que j'ai

 17   eu moi-même à vivre. Quand au passé, c'est l'histoire qui peut nous en dire

 18   quelque chose.

 19   Q.  Je vous remercie. Mais vous dites qu'il s'agit ici de Musulmans qui

 20   tuaient d'autres Musulmans. Est-ce qu'ils se rendaient dans ces différentes

 21   localités pour se battre contre l'armée musulmane ou bien contre le peuple

 22   musulman ? Est-ce que vous disposez d'une preuve indiquant que l'une

 23   quelconque de ces personnes qui, manifestement, étaient favorables au

 24   maintien de la Yougoslavie, à une coexistence avec les Serbes, est-ce que

 25   vous avez la moindre preuve indiquant que l'une quelconque de ces personnes

 26   ait eu comme intention de tuer des personnes, de tuer la population plutôt

 27   que des membres de l'armée musulmane ?

 28   R.  Je dois vous dire que concernant ces traîtres au peuple musulman que


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  1   j'ai énumérés, je pourrais écrire toute une biographie les concernant. Pour

  2   éviter de perdre trop de temps, je ne rappellerai simplement que ceci : je

  3   l'ai déjà dit dans toutes mes déclarations précédentes. Parmi les noms que

  4   vient d'énumérer M. Karadzic se trouve également un certain nombre de

  5   marginaux, de criminels pour lesquels l'idéologie n'a aucune importance.

  6   Ils se sont vus remettre des armes par l'armée serbe et ils avaient dès

  7   lors la possibilité d'aller tuer et piller en toute légalité, et c'était là

  8   la rémunération même qu'ils recevaient en échange de ce qu'ils faisaient.

  9   Q.  Merci. Mais, Monsieur Sivac, c'est quelque chose que nous n'avons vu

 10   nulle part. Nous ne l'avons ni dans les médias, ni encore dans des

 11   documents juridiques. Si vous dites à leur sujet qu'ils sont des traîtres,

 12   que diraient-ils, eux, à votre sujet ? Que vous êtes un extrémiste musulman

 13   ?

 14   R.  J'aimerais fort que vous leur demandiez quel est leur avis sur la

 15   question.

 16   Q.  Ce Zlatan Crnalic, qui a terminé l'école de l'air, pour vous, c'est un

 17   criminel ?

 18   R.  J'ai dit certains de ceux dont les noms sont énumérés ici.

 19   Q.  Merci. Dites-nous, ce Said Hadziahmetovic est un homme, un journaliste,

 20   rédacteur à la radio; Jadranka Vejo [phon] est une Musulmane; Samija Dzafic

 21   [phon] est une Musulmane; et Muharem Hasakurtovic [phon] c'est également un

 22   Musulman. Ce sont tous des journalistes et vous les avez également placés

 23   sur cette liste noire. Qui ont-ils tué, tous ces journalistes ?

 24   R.  Il s'agissait de personnes employées à Radio Prijedor et au journal

 25   "Kozarski Vjesnik", et moi j'ai fait un constat de nature générale, à

 26   savoir que Radio Prijedor et "Kozarski Vjesnik" étaient les pires

 27   instruments de la machine de propagande du SDS, et que cette propagande à

 28   laquelle ils se livraient aurait fait pâlir de jalousie Goebbels lui-même.


Page 19579

  1   C'était par l'intermédiaire de "Kozarski Vjesnik" et de Radio Prijedor que

  2   l'on a dénoncé un grand nombre de personnes éminentes de Prijedor qui

  3   ensuite ont été tuées dans les camps de Prijedor.

  4   Q.  Merci. N'est-il pas, malgré tout, exact que vous avez tiré la

  5   conclusion suivante, à savoir que tous les Serbes, indépendamment de leur

  6   orientation politique ou de leur appartenance à tel ou tel parti, ont

  7   souscrit à la politique de réorganisation de la Bosnie et de Prijedor ?

  8   N'est-il pas exact que vous avez vous-même déclaré dans votre ouvrage et

  9   dans les différentes déclarations que vous avez données qu'il n'y avait pas

 10   de différence entre les Serbes de gauche, les Serbes de droite, les

 11   communistes et les réformistes, que tous ceux-là faisaient partie de la

 12   cellule de Crise et des services de la police, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. En ce qui concerne la municipalité de Prijedor, il n'était pas

 14   important de savoir si quelqu'un avait sa carte du parti du SDS. Tous les

 15   Serbes étaient désormais d'un seul et même côté et leur seul objectif était

 16   de procéder au nettoyage ethnique de la municipalité de Prijedor pour en

 17   écarter les non-Serbes. Ils y travaillaient tous de façon extrêmement

 18   active.

 19   Q.  Merci. Et lorsque vous dites ensuite que Radio Prijedor était un

 20   instrument de propagande du SDS, en fait, il serait plus exact de dire que

 21   Radio Prijedor était l'instrument de la propagande du peuple serbe; c'est

 22   ce que vous pensez, n'est-ce pas ?

 23   R.  On pourrait dire l'une comme l'autre. Mais "Kozarski Vjesnik" et Radio

 24   Prijedor se trouvaient sous le contrôle direct du parti démocratique serbe,

 25   du SDS.

 26   Q.  Cependant, à "Kozarski Vjesnik" tout comme à Radio Prijedor, il y avait

 27   des Musulmans qui étaient employés. Vous dites vous-même que cette personne

 28   a publié cette information selon laquelle le SDS avait pris le contrôle de


Page 19580

  1   Prijedor le 30 avril, cette Jadranka, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. Elle est issue d'un mariage mixte et elle était elle-même dans un

  3   mariage mixte. C'était une question privée qui la regardait. Mais il est

  4   exact qu'elle avait continué à travailler à Radio Prijedor, et à mon sens,

  5   elle fait bien son travail. Et elle continue d'ailleurs d'y travailler.

  6   Q.  Mais elle aussi, il faudrait lui coller cette étiquette de Musulmane de

  7   réserve, n'est-ce pas ?

  8   R.  C'est vous qui le dites. C'est quelque chose que je pourrais

  9   éventuellement lui dire si nous nous rencontrions, elle et moi, face à

 10   face.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, si cela vous

 12   convient, nous allons faire une pause de 25 minutes maintenant.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et nous reprendrons nos débats à 16

 15   heures.

 16   --- L'audience est suspendue à 15 heures 35.

 17   --- L'audience est reprise à 16 heures 03.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pourrions-nous

 20   passer à huis clos partiel, s'il vous plaît.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 22   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 19581-19582 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 11   [Audience publique]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Pouvons-nous faire revenir le

 13   témoin à présent.

 14   [Le témoin vient à la barre]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 16   Veuillez poursuivre votre contre-interrogatoire, Monsieur Karadzic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Sivac, j'estime que j'y vois maintenant un petit peu plus

 20   clair quant à cette position qui était la vôtre à l'égard de ces Musulmans.

 21   Qu'en est-il de votre position à l'égard des Serbes ? Je suis un peu

 22   confus, alors je voudrais que nous passions aux événements concrets. Avez-

 23   vous écrit que les Serbes étaient des criminels sanguinaires ?

 24   R.  Eh bien, compte tenu des événements que j'ai eu à traverser et des

 25   situations que j'ai eu à traverser également, il n'est pas exclu que dans

 26   certains de mes écrits ou dans tel ou tel article de journal j'aie pu

 27   écrire également ceci. Cependant, Monsieur Karadzic, je me rends

 28   régulièrement à Prijedor et je passe beaucoup de temps dans ma ville de


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  1   Prijedor. J'y rencontre des amis serbes avec qui je prends un café et avec

  2   qui j'ai des conversations tout à fait agréables. Je me contente de ne pas

  3   avoir d'échange avec les Serbes qui ont du sang sur les mains et qui ont

  4   commis des crimes de guerre. Par conséquent, je procède à une distinction

  5   entre ceux que je considère comme des êtres humains et ceux à qui je ne

  6   reconnais pas ce statut. Et je ne fais pas de distinction entre Croates,

  7   Serbes et Musulmans.

  8   Q.  Merci. Mais en pages 19 et 20 de votre ouvrage, vous dites en page 19

  9   qu'avant la guerre en Bosnie, les Serbes jouissaient des tirs d'aviation

 10   qui visaient la crèche et l'hôpital, et en page 20, vous dites :

 11   "Ces enfants doivent-ils faire la guerre contre les criminels sanguinaires

 12   armés jusqu'aux dents que sont les Serbes ?"

 13   Vous avez écrit cela avant la guerre, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je ne sais pas. J'aimerais pouvoir consulter ceci. Si vous en avez le

 15   compte rendu en B/C/S, j'aimerais bien pouvoir vérifier où j'aurais écrit

 16   ceci et de quelle façon.

 17   Q.  Dans votre livre, en pages 19 et 20. Avez-vous bien rédigé un ouvrage ?

 18   R.  Oui. Mais dans quel contexte, de quels événements suis-je en train de

 19   parler ? Ah, vous pensez à la guerre en Croatie et que j'ai couverte avec

 20   mon équipe de télévision ?

 21   Q.  Oui.

 22   R.  Donc il s'agit de mes impressions de Croatie.

 23   Q.  Ah, je vous remercie. Dans votre travail de reporter en Croatie, en

 24   qualité de journaliste, vous avez entièrement pris le parti de la sécession

 25   croate et vous avez pris des positions extrêmement partiales à l'égard des

 26   Serbes, n'est-ce pas ?

 27   R.  Non, pas du tout, Monsieur Karadzic. Encore une fois, vous donnez une

 28   interprétation erronée de tout ceci. Vous essayez de me qualifier d'une


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  1   certaine façon pour quelque chose dont je ne suis absolument pas

  2   responsable ni coupable. Je vais vous dire, c'était en vertu d'un accord

  3   entre la rédaction d'"Oslobodjenje" et la rédaction de la télévision de

  4   Sarajevo que j'étais toujours accompagné sur le théâtre de guerre par Boro

  5   Grubic, qui était reporter et qui est un Serbe. C'était là la position de

  6   la rédaction. C'était les termes mêmes de l'accord passé entre la

  7   télévision de Sarajevo et "Oslobodjenje" parce que cet homme était un

  8   excellent commentateur. Pendant la guerre en Croatie, je n'ai été que

  9   caméraman. Je prenais des prises de vue, et je n'ai travaillé que sur ce

 10   plan-là. Alors que tous les commentaires politiques, c'était Boro Grubic,

 11   qui était Serbe, qui en était l'auteur.

 12   Q.   Merci. Mais dans vos déclarations et dans votre livre, à aucun endroit

 13   vous ne faites état du grand nombre de réfugiés qui ont quitté la Croatie.

 14   Est-ce qu'en 1991, il y avait, tant à Prijedor qu'à Banja Luka et dans

 15   toutes les municipalités voisines, de nombreux réfugiés serbes originaires

 16   de Croatie ?

 17   R.  Dans la région de Prijedor, non, il n'y en avait pas énormément, mais

 18   effectivement, il y en avait un certain nombre. Je me souviens qu'en cette

 19   année 1991, j'ai fait un reportage avec mon collègue Grubic sur ces

 20   personnes.

 21   Q.  Merci bien. Justement j'en étais un peu perplexe puisque vous n'en

 22   parlez pas, ni dans votre livre ni dans les déclarations qui figurent au

 23   compte rendu d'audience. Mais il y a encore quelque chose qui me rend un

 24   peu perplexe. A la page 71 de votre livre, vous dites :

 25   "Seulement ça n'est propre qu'aux Serbes. Ils sont toujours extrêmes,

 26   lorsqu'il faut être communiste et lorsqu'il faut être nationaliste, ou

 27   quand il faut être athée ou fondamentaliste orthodoxe. Il leur est très

 28   facile d'adopter des idéologies complètement contraires. Ce qui leur


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  1   importe, c'est simplement le profit."

  2   Alors, dites-moi, comment avez-vous pu, Monsieur Sivac, écrire ceci ?

  3   R.  Eh bien, il s'agit d'une contestation qui est la mienne. Un très grand

  4   nombre de personnes, jusqu'à il n'y a pas très longtemps, qui étaient des

  5   communistes purs et durs, à la suite de l'arrivée des partis nationaux, ont

  6   changé de camp et sont devenus des nationalistes, et donc il est devenu

  7   très clair très rapidement que toutes les personnes qui se trouvaient sur

  8   le territoire de la municipalité de Prijedor n'allaient rien apporter de

  9   bien à personne.

 10   Q.  Bien. Donc ce n'est pas une erreur ou ce n'est pas quelque chose que

 11   vous avez dit simplement comme cela, par hasard ? Très bien. C'est ce que

 12   j'aurais espéré.

 13   Voyons un peu ce que vous dites dans votre livre s'agissant du mois de

 14   septembre. Et j'en étais un peu étonné. Vous dites que les soldats et les

 15   supérieurs, les officiers, lors d'une commémoration qui avait été organisée

 16   pour les Serbes des hameaux de Prijedor, vous parlez de ces derniers, vous

 17   dites que les officiers sont en train de manger de la viande, de boire.

 18   Est-ce que vous ne pensez pas que --

 19   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à M. Karadzic de ralentir le

 20   débit.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les interprètes ne sont pas en mesure de

 22   vous suivre, Monsieur Karadzic, cela fait déjà un certain temps. Pourriez-

 23   vous, je vous prie, répéter ce que vous avez dit.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  En page 21 de votre livre, vous dites que même avant la guerre en

 27   Bosnie --

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Donc vous dites à la page 21, vous dites qu'en date du 2 septembre

  3   1991, vous dites que vous avez participé à une cérémonie d'accueil que le

  4   peuple a organisé pour un bataillon de chars, et vous dites dans votre

  5   livre que les soldats et les officiers supérieurs mangent de la viande de

  6   barbecue, boivent de la rakija, de l'eau-de-vie, et dansent.

  7   Malheureusement, je crois que les interprètes n'arriveront jamais à

  8   traduire ceci, mais bien. Alors, est-ce que vous ne pensez pas que c'est un

  9   peu insultant de dire que ces officiers étaient en train de bouffer de la

 10   viande, comme il est écrit ici, de boire de la rakija et de chanter des

 11   chants ?

 12   R.  Eh bien, c'est écrit comme cela, Monsieur Karadzic. Parce que, vous

 13   savez, ce sont des expressions du cru qui sont particulières pour ce type

 14   de comportement. Lorsque j'ai rédigé ces lignes, j'étais très déçu par le

 15   comportement de l'armée yougoslave qui était arrivée sur le territoire de

 16   Prijedor et qui était arrivée du territoire de la Croatie et qui avait

 17   tourné tous ses potentiels d'artillerie, son potentiel militaire, contre

 18   les hameaux peuplés par des Musulmans, cette armée dont je faisais partie à

 19   une époque, à laquelle j'étais fidèle. A un certain moment, cette armée

 20   s'est tellement comportée comme j'ai décrit lors de cette assemblée que je

 21   l'ai écrit dans mon livre.

 22   Q.  Oui. Mais en ce 2 septembre, vous ne pouviez pas remarquer que la JNA

 23   avait tourné ses canons contre les hameaux musulmans, n'est-ce pas ?

 24   R.  Eh bien, déjà après le retrait de l'ex-JNA, en fait, de la JNA qui

 25   s'était retirée de la Slovénie et de la Croatie, ou un peu plus tard, j'ai

 26   déjà dit qu'un très grand nombre d'unités de chars et d'artillerie

 27   s'étaient cantonnées sur le territoire de Prijedor.

 28   Q.  Très bien. Mais dites-nous si la Croatie, en date du 30 mai, faisait


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  1   encore partie de la Yougoslavie ?

  2   R.  Oui, d'accord, vous avez raison, mais ce qui était fait en Croatie,

  3   c'est quelque chose que je pouvais suivre car j'ai suivi la guerre en

  4   Croatie pendant toute cette période, et cette ancienne JNA était devenue

  5   une armée uninationale [phon]. Elle ne défendait que les intérêts en

  6   Croatie, les intérêts des Serbes insurgés, pour les appeler ainsi, et

  7   participait activement à la construction de ce qui est appelé Krajina de

  8   Knin.

  9   Q.  Est-ce que vous vous souvenez qu'au mois de juillet et en août 1991, un

 10   accord musulmano-serbe avait été placé sur la table, initié par Muhamed

 11   Filipovic et Adil Zulfikarpasic, soutenu par Alija Izetbegovic et adopté

 12   par le côté serbe ? Ceci a duré environ deux mois, et ce, jusqu'à la fin du

 13   mois d'août; vous en souvenez-vous ?

 14   R.  Eh bien, voyez-vous, ces plans, ces accords portant sur la Bosnie-

 15   Herzégovine, il n'y en avait énormément, et ces conférences de paix

 16   également il y en avait énormément, mais je peux vous dire une chose : il

 17   était absolument impossible de réconcilier des parties qui étaient

 18   diamétralement opposées. Les Serbes de Bosnie demandaient que l'ensemble de

 19   la Bosnie ou que certaines parties de la Bosnie restent dans cette

 20   Yougoslavie tronquée, alors que les autres non-Serbes, les Musulmans et les

 21   Croates, étaient contre cet ultimatum qui était le leur, étaient contre le

 22   fait que la Bosnie-Herzégovine devienne un pays indépendant et souverain,

 23   ce que, d'ailleurs, la Commission Badinter a accepté ultérieurement, et

 24   donc la Bosnie, comme vous le savez, avait été reconnue internationalement

 25   et a été acceptée au sein de l'ONU le 22 mai 1992.

 26   Q.  Oui, vous avez tout à fait raison lorsque vous dites cela, mais est-ce

 27   que les Serbes n'ont pas révisé leur point de vue, n'ont pas changé leur

 28   point de vue ? Ou, pour être plus précis, n'ont-ils pas accepté que la


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  1   Bosnie sorte de la Yougoslavie sous les conditions proposées par la

  2   Communauté européenne, c'est-à-dire n'ont-ils pas accepté la cantonisation

  3   de la Bosnie ?

  4   R.  C'était simplement pour gagner du temps que vous aviez fait ces

  5   demandes-là, pour que le climat soit approprié pour ce qui allait se passer

  6   à partir du mois d'avril 1992, à savoir vous vouliez vous emparer d'une

  7   très grande partie du territoire de Bosnie-Herzégovine et l'annexer à la

  8   Grande-Serbie. C'est ce que vous vouliez.

  9   Q.  Sur quoi fondez-vous cette opinion ? Qu'est-ce qui vous permet de dire

 10   ceci ? Parce qu'il faudrait qu'il s'agisse d'un fait, non pas d'une opinion

 11   ? Est-ce qu'il s'agit d'un fait, et sur quoi basez-vous ces conclusions ?

 12   R.  Je base toutes ces conclusions sur les événements qui se sont déroulés

 13   par la suite. Je vais vous parler de ma municipalité de Prijedor, la

 14   municipalité dans laquelle je vivais.

 15   Q.  Très bien. Nous allons y arriver. Nous sommes encore en 1991. Eh bien,

 16   dites-nous, est-il exact que dans votre livre, à la page 18, vous avez

 17   écrit et dit que Muhamed Cehajic, qui était le président de la

 18   municipalité, et le Dr Mirza Mujadzic, qui était le président du SDA, vers

 19   la mi-août, sont sortis et ont essayé d'empêcher le passage de la JNA dans

 20   la municipalité de Prijedor ?

 21   R.  Oui. Cet incident a été également publié dans le "Kozarski Vjesnik" et

 22   il a également fait l'objet d'une annonce à la Radio Prijedor. C'est-à-dire

 23   que lors de l'arrivée d'une unité de char qui était arrivée à Prijedor et

 24   qui s'était positionnée à un certain endroit, les représentants de la

 25   municipalité de Prijedor, qui étaient légalement choisis, ils n'avaient pas

 26   été informés de ce fait, alors que d'après toutes les règles, le

 27   commandement militaire devait absolument informer les représentants de la

 28   municipalité que ceci allait se passer. Donc, sous le coup d'une révolte,


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  1   ils ne pouvaient pas croire que ceci allait se passer. Muhamed Cehajic,

  2   c'était un professeur, il était le représentant de la municipalité. Ils ont

  3   essayé de s'interposer. Ils ont essayé de manifester également, car ils

  4   étaient indignés, mais des Serbes très bien armés sont sortis des maisons

  5   avoisinantes, et M. Cehajic et M. Mirza Mujadzic se sont retirés. Le

  6   lendemain, par le biais des médias, le commandement militaire de Prijedor a

  7   fait une annonce dans laquelle il disait de façon très claire qu'ils

  8   étaient arrivés sur le territoire de Prijedor à la suite d'un appel par le

  9   SDS et suite à l'appel du peuple serbe.

 10   Q.  Je vous demanderais, Monsieur Sivac, de bien vouloir nous produire ce

 11   communiqué témoignant de l'amour qui existait entre le SDS et la JNA. Bien.

 12   Existe-t-il un seul pays au monde où il est possible que les autorités

 13   municipales s'interposent, sortent dans la rue comme ça ?

 14   R.  C'est arrivé à Prijedor justement, car à Prijedor, à l'époque, des

 15   choses bien étranges se passaient. En 1991, vers la fin de cette année-là,

 16   nous avions reçu des informations selon lesquelles à Urije, donc c'est une

 17   partie de Prijedor qui est peuplée par la population serbe, que des

 18   représentants des autorités se rassemblaient, de nationalité serbe, élus

 19   donc légalement, et qu'ils étaient en train de faire des projets selon

 20   lesquels ils allaient s'emparer du pouvoir dans la municipalité de

 21   Prijedor.

 22   Q.  Très bien. Nous allons arriver à cela, Monsieur Sivac, un peu plus

 23   tard. Mais pour l'instant, j'aimerais vous demander de nous dire si vous

 24   savez si la JNA était une armée légitime et légale jusqu'au 19 mai 1992, et

 25   qu'Izetbegovic, Kljuic et moi-même, qu'en décembre, le 23 décembre 1991,

 26   nous avions organisé une réunion et nous leur avions demandé de rester et

 27   d'empêcher que les conflits interethniques n'éclatent ? Et que ceci avait

 28   été justement publié et annoncé dans les médias.


Page 19591

  1   R.  Oui, je me souviens de cela. Mais cet incident est un incident spontané

  2   organisé par le Pr Cehajic et Mujadzic. Ces derniers pensaient qu'ils

  3   devaient sortir et faire ce qu'ils ont fait, et ils ont fait cela.

  4   Q.  Très bien. Donc, est-ce que vous pensez que le président d'un parti et

  5   le président d'une municipalité, que ces derniers étaient en mesure de

  6   sortir de façon spontanée et d'empêcher une armée ? Je trouve cela un peu

  7   étrange. Mais bien, laissons cela de côté. Est-il exact de dire que la

  8   police a bloqué les représentants militaires de ne plus communiquer la

  9   documentation militaire dont ils avaient besoin pour appeler les recrues à

 10   la mobilisation ?

 11   R.  Il y avait un lieu qui était traditionnel jusqu'à ce moment-là. Pour la

 12   première fois, un Musulman était arrivé, et c'était un poste qui était

 13   toujours occupé par un Musulman, alors que là c'était un Serbe. Le

 14   commandement militaire, outre les autorités qui étaient élues de façon

 15   légale, avait procédé à la mobilisation. Les Serbes allaient à la caserne

 16   de façon volontaire où ils s'armaient, se préparaient pour aller sur le

 17   théâtre des opérations en Croatie. Et il est arrivé une fois que s'agissant

 18   du SUP, de la sécurité d'Etat, où il y avait des locaux militaires, la

 19   police militaire était arrivée, et ces derniers ont essayé de prendre les

 20   documents des conscrits militaires et les dossiers des conscrits

 21   militaires. Il y a eu un petit incident. Je ne sais pas de quelle façon les

 22   choses se sont déroulées par la suite, mais je peux vous dire qu'un très

 23   grand nombre de Serbes ont répondu à la mobilisation pour aller sur le

 24   théâtre des opérations en Croatie.

 25   Q.  Merci. Est-il exact de dire qu'outre les appels à la mobilisation, il y

 26   avait également des appels à la mobilisation complètement publics publiés

 27   dans les médias ?

 28   R.  Oui.


Page 19592

  1   Q.  Est-il exact également que l'ensemble de l'infrastructure militaire et

  2   tous les documents appartiennent au secrétariat fédéral de la Défense

  3   nationale et qu'une personne employée à la municipalité, en fait, est une

  4   personne qui est employée par le ministère de la Défense ?

  5   R.  Je ne sais pas vraiment quelle est la configuration juridique. Je ne

  6   sais pas exactement. Je ne peux pas répondre à votre question, mais je sais

  7   qu'après l'arrivée au pouvoir de ces partis nationalistes, Becir

  8   Medunjanin, qui était un membre du SDA, on l'a placé au poste de chef du

  9   département militaire de Prijedor. Donc je ne sais pas à qui il rendait

 10   compte. Mais je crois que c'était quand même à l'état-major républicain de

 11   la Défense territoriale. C'est à eux qu'il devait sans doute rendre compte,

 12   ou il devait sans doute rendre compte à quelqu'un à Sarajevo, quelqu'un qui

 13   se trouvait au sein du commandement, quelqu'un qui se trouvait au sein du

 14   district militaire.

 15   Q.  Très bien. Donc il avait des contacts avec la JNA et avec la TO de la

 16   République de Bosnie-Herzégovine, à la tête de laquelle se trouvait le

 17   général Vukosavljevic, n'est-ce pas, qui était un Serbe ?

 18   R.  Je l'ignore. Je ne sais pas qui se trouvait à la tête à ce moment-là.

 19   Q.  Est-ce que vous connaissez bien M. Becir Medunjanin ?

 20   R.  Non. D'ailleurs, je l'ai vu pour la première fois lorsque le SDA a

 21   remporté les élections et lorsqu'il a été nommé à ce poste.

 22   Q.  Bien. Merci. Comment s'appelaient ses fils ?

 23   R.  Je pense que l'un s'appelle Hanis [phon], et l'autre qui a été tué, je

 24   ne sais plus exactement. Non, je ne sais pas. J'ignore son nom.

 25   Q.  Savez-vous si l'un de ses fils vit en Amérique, aux Etats-Unis

 26   d'Amérique ?

 27   R.  Je ne sais pas s'il vit aux Etats-Unis, mais j'ai fait sa connaissance

 28   alors qu'il était très jeune, qu'il était petit garçon.


Page 19593

  1   Q.  Hanis et Adis ?

  2   R.  Non, je ne le sais pas. C'est vous qui le dites. Je sais que j'ai fait

  3   la connaissance de Hanis, qui était le fils aîné, et j'ai fait sa

  4   connaissance quelque part en Bosnie.

  5   Q.  Est-ce que vous savez si Adis Medunjanin s'est fait arrêté aux Etats-

  6   Unis pour avoir été terroriste islamiste ?

  7   R.  Je ne sais pas. Je l'entends dire pour la première fois de votre

  8   bouche.

  9   Q.  Est-ce que vous savez si Becir Mudanjanin appelait les Musulmans de se

 10   lancer au combat ? Il a participé également à l'armement de ces derniers

 11   afin qu'ils puissent aller faire la 

 12   guerre ?

 13   R.  Eh bien, c'est vous qui le dites, mais je crois qu'il y a beaucoup de

 14   non-vérité là-dedans.

 15   Q.  Bien. Merci. Vous dites ici dans votre livre, à la page 21, le SDA qui

 16   était au pouvoir de Prijedor ne permettait pas à la commission de

 17   recrutement l'accès aux listes de conscrits, aux dossiers. Est-ce que vous

 18   pourriez nous dire si le SDA était le seul parti de pouvoir à Prijedor ou

 19   existait-il une coalisation, avec le SDS ?

 20   R.  Oui. Le SDA, qui avait remporté la victoire, et le SDS, qui était le

 21   premier parti serbe juste derrière eux, en fait, ils partageaient le

 22   pouvoir dans la municipalité de Prijedor. C'était à 50 %. Moitié-moitié.

 23   Q.  Vous dites qu'on comptait 49 454 Musulmans en 1994, alors que pour les

 24   Serbes, vous dites que le nombre remontait à 47 745 ?

 25   R.  Je ne sais pas. Ces informations ont été prises dans des textes qui

 26   avaient été publiés un peu plus tôt. Mais je pourrais vous dire que le

 27   pourcentage entre les Serbes et les Musulmans était 2 % à la faveur des

 28   Musulmans.


Page 19594

  1   Q.  Très bien. Merci. Et qu'en est-il des 6 000 et plus qui sont désignés

  2   comme étant des Yougoslaves ?

  3   R.  Non, je n'ai rien dit sur eux, ce sont des personnes qui s'étaient

  4   déclarées être Yougoslaves.

  5   Q.  Sommes-nous d'accord pour dire qu'en 1991, la Yougoslavie et le fait

  6   d'être Yougoslave n'était pas -- à cette époque-là, il n'y avait pas

  7   réellement de Musulmans ou de Croates et, en réalité, la majorité était des

  8   Serbes ?

  9   R.  Eh bien, c'est vous qui le dites. Mais il y avait un très grand nombre

 10   de Musulmans dans la municipalité de Prijedor qui se sont déclarés comme

 11   Yougoslaves.

 12   Q.  Est-ce que vous pourriez être d'accord que notre système électoral, en

 13   fait, était organisé de la façon suivante, c'est-à-dire qu'il y avait un

 14   système pour le conseil des citoyens et un système majoritaire pour le

 15   conseil des municipalités ?

 16   R.  Je ne peux pas faire de commentaire là-dessus au niveau de la

 17   république.

 18   Q.  Bien. Merci. Mais est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire

 19   qu'il existait un conseil des municipalités dans l'assemblée bosnienne ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous vous souvenez qu'à Prijedor, dans ce système

 22   d'assemblée, la personne qui avait remporté la victoire était un Musulman ?

 23   R.  Je ne me souviens pas non plus de cette personne que vous mentionnez.

 24   Q.  Merci. Mais c'était un député. Mais est-il exact de dire que dans la

 25   ville même, la ville de Prijedor, il y avait plus de Serbes, alors que pour

 26   les Musulmans, il y en avait environ 7 000 de plus.

 27   R.  Ce sont des estimations à vous. La statistique, elle, montre autre

 28   chose.


Page 19595

  1   Q.  Moi je maintiens ce que je suis en train de vous dire. Au total pour la

  2   ville, 34 627. Les Croates sont 1 756; les Musulmans, 13 752; les Serbes,

  3   13 969.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez ralentir

  5   quand vous donnez des chiffres. J'aimerais que vous répétiez, s'il vous

  6   plaît.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'excuse.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Au total, dans la ville, 34 627. Au total, Croates, 1 756; Musulmans,

 10   13 372; Serbes, 13 969; Yougoslaves, 4 279. Et le reste, les autres, c'est

 11   des Ukrainiens, Tchèques, Italiens, et ils sont au total 1 251; est-ce bien

 12   cela ?

 13   R.  Je ne sais pas. C'est la première fois que j'entends parler de tout

 14   ceci, de ces données-là.

 15   Q.  Merci. Bon, alors, à Prijedor, nous sommes d'accord pour le dire, que

 16   c'est une municipalité conjointe, commune ? Et il n'y a pas de majorité de

 17   personnes, les Serbes sont un peu plus nombreux, mais c'est à tout le

 18   monde.

 19   R.  Jusqu'en 1992, c'était une municipalité commune à toutes les nations,

 20   et toutes les minorités ethniques y vivaient.

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous vous souvenez du fait que quand il y a eu la

 22   crise relative à Kozarac, Radio Prijedor a publié l'information disant que

 23   les civils de Kozarac dans la zone des activités de combat devaient se

 24   retirer vers Prijedor; or, vous, vous décrivez la chose en disant qu'il y a

 25   un grand groupe de civils d'arrivé à Prijedor et qu'à Prijedor tous les

 26   citoyens étaient en train d'aider ceux qui s'étaient réfugiés des zones de

 27   combat. Est-ce bien exact ?

 28   R.  Non, ce n'est pas exact. Le 24 mai 1992, Radmilo Zeljaja, qui était


Page 19596

  1   devenu fou, si je puis le dire, commandant de cette unité d'élite serbe --

  2   Q.  Attendez. On y arrivera. On y arrivera.

  3   R.  Mais non, ce n'est pas ainsi.

  4   Q.  Attendez. On ne va pas raconter toute l'histoire. Est-ce que la radio a

  5   dit qu'il fallait venir et est-ce que les Serbes ont convié les civils

  6   musulmans de Kozarac pour leur dire de venir à la ville même pour qu'ils

  7   soient plus en sécurité ? Est-ce que vous le dites dans votre livre ?

  8   R.  Je ne sais pas comment les gens de Kozarac sont venus, mais ils sont

  9   venus après le début des pilonnages de Kozarac. Pendant peu de temps, ils

 10   ont séjourné là-bas devant la salle de sport à Prijedor pour être ramassés

 11   à bord de camions et d'autobus pour être acheminés vers Trnopolje. 

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous voulez dire par là qu'à Prijedor, dans la ville

 13   où il y avait une majorité serbe et yougoslave, et parmi ces Yougoslaves il

 14   y a des civils qui ont fui Kozarac parce que là-bas des combats étaient en

 15   train d'avoir lieu ?

 16   R.  Ils sont arrivés jusqu'à Prijedor en demandant refuge à Prijedor, chez

 17   des parents et des amis. Mais rien qu'un tout petit nombre des personnes de

 18   Kozarac qui avaient été chassées ont trouvé le salut chez des parents et

 19   des voisins et des amis. La majeure partie de ces gens finira par être

 20   transportée vers le camp de Trnopolje.

 21   Q.  Merci. Essayons de tirer au clair les choses. Qui sont les gens qui les

 22   ont accueillis à Prijedor, sont-ce des Serbes ou des Musulmans ?

 23   R.  Pour l'essentiel, les gens de Kozarac qui étaient expulsés ont trouvé

 24   abri à Prijedor dans le quartier appelé Puharska, et Puharska était habité

 25   essentiellement par une population musulmane.

 26   Q.  Moi je vous demande de répondre directement. Les gens de Kozarac, qui

 27   ont été expulsés, dites-vous, mais il faut des réserves qui devraient être

 28   exprimés par la Défense. Les civils de Kozarac qui ont - on verra s'ils ont


Page 19597

  1   été chassés ou s'ils ont fui les combats - ont trouvé abri et refuge chez

  2   des civils en ville, et chez qui ?

  3   R.  Une toute petite partie a été accueillie à Puharska chez des amis

  4   musulmans. Je viens de vous le dire.

  5   Q.  Donc les Musulmans qui ont accueilli ces gens étaient en sécurité à

  6   Prijedor, et les gens qui étaient venus de Kozarac ont fui vers eux, n'est-

  7   ce pas ?

  8   R.  Rien qu'à ce moment-là.

  9   Q.  Merci. Je devrais -- vous m'avez incité à en parler. J'ai trouvé cela

 10   dans la page 26. Vous dites que les Serbes ont détruit le pont de Bosanska

 11   Dubica, et puis, dans un autre paragraphe, vous dites que ce pont était

 12   plus détruit du côté croate. Alors, comment les Serbes ont-il pu traverser

 13   vers le côté croate pour détruire le pont ? Vous le dites pour tous les

 14   ponts de la Sava, vous dites que les Serbes qui les ont plastiqués.

 15   R.  Je vais vous dire, Monsieur Karadzic, Madame, Messieurs les Juges. Avec

 16   mon équipe, je suis allé tourner un reportage en personne sur ce pont.

 17   Q.  Bien. Et comment le savez-vous ? Comment savez-vous qui est-ce qui l'a

 18   détruit ? Laissez le reportage de côté. Comment savez-vous qui est-ce qui

 19   l'a détruit ?

 20   R.  Je vous prie d'avoir un peu de patience. La zone où j'ai suivi les

 21   choses, c'est la vallée de l'Una. Et j'ai filmé la façon dont les Serbes de

 22   la Krajina de Knin nettoyaient ethniquement la vallée.

 23   Q.  Mais moi, ce n'est pas la question que je vous pose. On y arrivera. Moi

 24   je vous pose la question, maintenant, au sujet des ponts. Comment pouvez-

 25   vous affirmer dans votre livre que les Serbes vivant d'un côté de la Sava

 26   ont détruit des ponts de l'autre côté de Sava ?

 27   R.  Parce que Jasenovac avait été occupée par des soldats de Martic et des

 28   soldats de la Krajina serbe. Dès qu'ils sont entrés dans Jasenovac, ils ont


Page 19598

  1   mis le feu à un grand hôtel.

  2   Q.  Bon. Je ne vous ai pas posé cette question. Mais est-ce que Jasenovac

  3   c'est de l'autre côté de Dubica ?

  4   R.  Oui, ça a été occupé par les Serbes de Knin.

  5   Q.  Merci. Alors, les Serbes se trouvent donc à la rive gauche et à la rive

  6   droite de la Sava et ils détruisent un pont; c'est bien ce que vous dites ?

  7   R.  C'est ce qu'on nous a donné comme information sur place.

  8   Q.  Qui vous a donné ces informations ?

  9   R.  Des gens qui séjournaient dans la région.

 10   Q.  Mais n'est-il pas exact de dire que votre relation, Milenko Tubica

 11   [phon], un haut responsable de la municipalité de Bosanska Dubica, s'était

 12   plaint du fait que ce pont, sa destruction a amené à l'isolement des Serbes

 13   de Bosanska Dubica, donc un Serbe de la rive droite dit qu'il y a une

 14   coupure dans les communications routières entre eux et les Serbes de

 15   l'autre côté, et vous avez donc quand même cru à l'information disant que

 16   les Serbes ont plastiqué un pont qui permettait d'établir un contact entre

 17   les Serbes d'un côté et de l'autre ?

 18   R.  Moi, c'est un Serbe, Boro Grubic, qui me l'a dit. J'ai transmis les

 19   informations telles servies par lui.

 20   Q.  Merci. Vous dites dans votre livre en page 32 que des communistes

 21   sont arrivés, Mico Sarjevic [phon] et un certain Jaksic de la Chambre

 22   économique. Nous sommes bien d'accord pour dire que ni l'un ni l'autre

 23   n'étaient des membres du SDS ?

 24   R.  Je ne sais pas de quel parti ils étaient membres. Je sais qu'ils sont

 25   arrivés au théâtre de Prijedor pour tenir une tribune où ils ont, tout à

 26   fait ouvertement, convié la population de Prijedor à accéder à cette région

 27   serbe nouvellement créée de la Krajina de Bosnie. Parce que, prétendument,

 28   Prijedor était liée avec Banja Luka par des liens d'amitié traditionnels,


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  1   sur le plan économique, culturel, au niveau des transports, et cetera.

  2   Q.  Bon. Alors, ils ont avancé des raisons économiques, des raisons liées à

  3   des ressources plus riches, la nécessité de devenir autonome vis-à-vis de

  4   Sarajevo, et Nedim Kadiric [phon], un Musulman, a fait partir les gens ?

  5   R.  Non. Il a posé plusieurs questions concrètes où les autres ne pouvaient

  6   pas apporter de réponse, et ils se sont retirés. Ils ont vu qu'ils étaient

  7   donc arrivés à Prijedor sans pouvoir rien y faire.

  8   Q.  Merci. Mais est-ce que Prijedor ça se trouve à 30 ou 32 kilomètres de

  9   Banja Luka ?

 10   R.  Non. Il y a 55 kilomètres entre Prijedor et Banja Luka.

 11   Q.  Merci. Peut-être par la route, mais moi j'ai parlé de la distance à vol

 12   d'oiseau. Alors, vous avez dit, avec beaucoup de mauvaise volonté,

 13   d'ailleurs, et de mauvaise foi, vous avez parlé de la reconstruction des

 14   églises; c'est bien cela ? Et vous dites que c'est avec beaucoup de

 15   difficulté et avec pas mal de problèmes que vous avez filmé des reportages

 16   pour ce qui est de la reconstruction de certaines églises.

 17   R.  Oui. Ce que j'ai dit se rapporte au village de Nisevic, non loin

 18   d'Omarska.

 19   Q.  Merci. Mais un peu plus loin, vous dites que les Serbes ont une

 20   attitude morbide vis-à-vis de tout ce qui est non serbe. Vous le dites --

 21   L'INTERPRÈTE : En une page que l'interprète n'a pas saisie. Page 37.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  -- alors, il y a des éléments de preuve de meurtre commandé qui sont

 24   publiés par des chaînes de télévision en Yougoslavie, à Banja Luka,

 25   Belgrade, et cetera. Est-ce que vous pouvez expliqué un peu quelle est

 26   cette attitude morbide de la part des Serbes vis-à-vis de tout ce qui est

 27   non serbe ?

 28   R.  Rade Mucic [phon], le journaliste le plus radical, a fait des


Page 19600

  1   reportages qui nous ont été rapportés des champs de bataille en Croatie.

  2   Ces gens ont tourné des scènes où des soldats serbes ont demandé à filmer

  3   lorsqu'ils étaient en train de tirer des obus en direction de bâtiments. Et

  4   ils ont copié ces cassettes pour les vendre dans Prijedor. Mais n'est-ce

  5   pas là quelque chose de morbide, demander à ce que soient détruites des

  6   maisons de Croates rien que pour que l'on puisse filmer la chose à des fins

  7   de reportage ?

  8   Q.  Monsieur Sivac, vous n'avez pas dit deux individus. Vous avez dit des

  9   Serbes. Pourquoi ne les avez-vous pas mis en accusation, ces individus ?

 10   Ils auraient pu se défendre. Mais vous, vous avez attribué la chose aux

 11   Serbes ?

 12   R.  Mais parce que les Serbes à Prijedor achetaient cela en masse et ils

 13   semblaient s'y plaire à voir ces scènes.

 14   Q.  Est-il vrai que vous m'avez appelé à un moment donné et vous m'avez

 15   traité de loup sanguinaire du mont Dermiter [phon] ?

 16   R.  C'est possible. J'ai peut-être paraphrasé. J'ai repris des termes qui

 17   étaient utilisés dans un journal Sarajevo.

 18   Q.  Moi j'ai dit "vukovlak [phon]", ça veut dire le psychiatre, le loup-

 19   garou, le loup-garou du mont Dermiter et psychiatre. Il a fait entendre des

 20   menaces à l'égard de Sarajevo et il dit que les Musulmans allaient

 21   disparaître. Alors, est-ce que vous faites référence à un discours que j'ai

 22   fait en 1991 ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Mais est-ce que votre attitude à mon égard ne semble pas vous

 25   disqualifier comme témoin ? Est-ce que vous êtes de cet avis ?

 26   R.  Non, je ne pense pas que ce soit le cas. Ces qualificatifs ont été

 27   formulés lorsque ceci a commencé sur le territoire de la Bosnie-

 28   Herzégovine, au niveau des autres groupes ethniques. Et bon nombre des


Page 19601

  1   individus appartenant aux autres groupes ethniques avaient pensé la même

  2   chose de vous.

  3   Q.  Mais ne saviez-vous pas qu'avec les Croates nous avions établi et signé

  4   un cessez-le-feu, que les Musulmans nous ont fait savoir tout ce qu'il

  5   fallait et que les informations principales nous étaient communiquées par

  6   des Musulmans, donc nous avons eu de très bonnes relations, nous avons eu

  7   des unités entières composées de Musulmans dans notre armée, et vous dites

  8   que bon nombre de Musulmans avaient trahi la politique du SDA.

  9   R.  Je ne sais pas quelle est votre question.

 10   Q.  Ne savez-vous pas que dès le 6 mai 1992, nous avions eu une trêve de

 11   signée avec les Croates, chose qui a permis de sauver des dizaines de

 12   milliers de vies. Il y a eu encore quelques combats çà et là, mais les

 13   combats avaient cessé pour l'essentiel, et avec Avdic nous avions également

 14   signé la paix. On ne s'était pas battus. On l'avait même aidé à rester sur

 15   place. Ne savez-vous pas que bon nombre de Musulmans depuis Sarajevo nous

 16   envoyaient des informations au quotidien ?

 17   R.  Je ne sais pas ce que faisait cette cuisine de Sarajevo, mais je sais

 18   que toutes vos trêves, tous ces cessez-le-feu ad hoc ont duré fort peu de

 19   temps.

 20   Q.  Savez-vous que lorsque l'on a révoqué le général Vukosavljevic de ses

 21   fonctions de chef et de commandant de la Défense territoriale à la date du

 22   8 avril, que le 12 avril le nouveau commandant, Hasan Efendic, a donné des

 23   ordres pour lancer des attaques contre les Serbes de Bosnie et la JNA ? Le

 24   12 avril et le 13 avril, ça, ça se trouvait sur mon bureau, sur ma table,

 25   et ça a été reconnu par l'ABiH. Le 13 avril, j'ai obtenu de la part des

 26   Musulmans la chose, je l'ai eu sur mon bureau, ce document, ces directives,

 27   et je l'ai fait publié tout de suite. Avez-vous entendu parler de ces

 28   directives ?


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  1   R.  Non, je n'ai pas entendu parler de ces directives. J'apprends la chose

  2   pour la première fois. J'ai entendu parler d'une dépêche envoyée par Jerko

  3   Doko, ministre de la Défense.

  4   Q.  Oui, mais ça, c'est fin avril, n'est-ce pas ?

  5   R.  A peu près, oui. Et à Prijedor, cette dépêche a fait bouger les Serbes

  6   et les a incités à s'emparer du pouvoir à Prijedor.

  7   Q.  Bon, on va passer du 12 avril vers la fin du mois d'avril. Une deuxième

  8   dépêche qui a été envoyée en version plus élaborée par Delimustafic, en sa

  9   qualité de ministre de l'Intérieur, et Jerko Doko, en sa qualité de

 10   ministre de la Défense. C'est arrivé à Prijedor et dans chacune des

 11   municipalités, et on y disait que la JNA et les Serbes de Bosnie devaient

 12   être attaqués avec toutes les forces qu'on avait à disposition.

 13   R.  Oui, mais ça a été déjà démenti, Monsieur Karadzic. C'était une dépêche

 14   falsifiée que quelqu'un a fait circuler autour.

 15   Q.  Non, non, il n'y a pas d'erreur là, Monsieur Sivac. On va vous le

 16   montrer. Dites-moi ceci : est-il exact de dire que le 29 et le 30 avril, la

 17   partie serbe s'est emparée du pouvoir à Prijedor parce qu'on avait préparé

 18   une attaque contre la JNA et les Serbes à Prijedor ? Vous venez de le

 19   confirmer tout à l'heure, n'est-ce pas ?

 20   R.  Non, je n'ai pas confirmé cela. On ne préparait aucune espèce d'attaque

 21   contre les Serbes.

 22   Q.  Bon. Saviez-vous qu'à ce moment-là, et par la suite aussi, il y a sur

 23   la table une offre disant que Prijedor devait constituer deux

 24   municipalités, que la municipalité serbe devait être composée de la partie

 25   serbe de la ville et des villages serbes et que la partie musulmane devrait

 26   être constituée par Puharska, le centre de la vieille ville et les villages

 27   musulmans dans les collines ? Est-ce que vous ne saviez pas que c'était une

 28   offre qui était présentée et qui était restée sur la table jusqu'au 30 mai


Page 19603

  1   ?

  2   R.  C'était faux. Ça a été publié par le "Vjesnik de Kozarac", et en raison

  3   de cette carte, les Serbes s'étaient plaints aussi parce que sur la carte

  4   qu'on avait publiée, plus de 70 % de la région de Prijedor étaient censés

  5   appartenir aux Serbes, avec l'essentiel des infrastructures, avec les

  6   entreprises économiques, avec le parc national. Enfin, tout ceci était

  7   censé appartenir aux Serbes. Les Musulmans ne gardaient qu'une toute petite

  8   partie dans la ville de Prijedor où ils étaient majoritaires, et presque

  9   rien de tout ce qui constituait les ressources économiques. Les Serbes eux-

 10   mêmes qui vivaient dans le vieux centre de la ville et qui, d'après cette

 11   carte, devaient faire partie de la municipalité musulmane avaient protesté,

 12   ils avaient appelé la radio pour participer directement aux émissions

 13   diffusées à Radio Prijedor, pour protester justement à l'égard de celui qui

 14   avait proposé cette carte.

 15   Q.  Merci. Mais à chaque fois, il y aura quelqu'un qui protestera pour son

 16   village ou sa partie de sa municipalité, mais votre livre ne dit-il pas que

 17   vous étiez conscient du fait que les entreprises allaient être départagées

 18   et qu'indépendamment de l'emplacement de l'entreprise, il y aurait partage,

 19   et vous dites que vous aviez sous-entendu que les infrastructures

 20   municipales allaient appartenir aux deux ? Est-ce que c'est la seule ville

 21   de l'ex-Yougoslavie qui avait disposé de plusieurs municipalités ?

 22   R.  Non, moi je n'ai rien écrit de ce genre. Vous êtes en train de

 23   paraphraser ou d'arracher les choses de leur contexte.

 24   Q.  Je vais vous retrouver le passage du livre où il est question du

 25   partage des entreprises.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, faites donc une

 27   pause. Allez-y.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'excuse.


Page 19604

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Vous dites ici qu'il allait y avoir un partage.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'aimerais qu'on nous montre dans le

  4   prétoire électronique le 1D4275 pour que l'on puisse voir de quoi devait

  5   avoir l'air cette municipalité de Prijedor. 1D4275. Et ce qui m'intéresse,

  6   c'est le coin en haut à gauche, le nord-ouest, qui m'intéresse. Pouvez-vous

  7   zoomer. Merci.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Alors, on voit où se trouve Prijedor. C'est le coin en haut à gauche.

 10   J'aimerais qu'on zoome le nord-ouest et que ce soit placé au centre de

 11   l'écran. Dans votre livre, ça se trouve en page 57. Vous êtes parfaitement

 12   conscient du fait qu'il y avait une demande de partage des entreprises, des

 13   écoles et des autres biens immobiliers qui ont été construits par les

 14   travailleurs de la région, comme si les travailleurs de la région, ce

 15   n'était pas aussi des Serbes.

 16   R.  Oui, de façon générale, les Serbes, mais aussi les Croates et les

 17   Musulmans, n'étaient pas favorables au partage.

 18   Q.  Mais ils étaient favorables au partage de la Yougoslavie que les Serbes

 19   étaient contraints d'accepter ?

 20   R.  Mais laissez de côté la Yougoslavie, Monsieur Karadzic.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter votre

 22   question, Monsieur Karadzic.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Vous avez dit que les Croates et les Musulmans dans la municipalité de

 25   Prijedor n'étaient pas favorables à des partages. Mais ils ont été

 26   favorables à un partage de la Yougoslavie, et il fallait sortir les Serbes

 27   de la Yougoslavie pour en faire des minorités nationales.

 28   R.  Ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est vous qui le dites.


Page 19605

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous aussi, Monsieur Karadzic, vous avez

  2   besoin de faire une pause entre la réponse et votre question. Vous devriez

  3   déjà être familiarisé avec cette nécessité. Veuillez continuer.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je sais, Excellence. Je m'excuse auprès des

  5   Juges et des interprètes. J'essaie de gagner du temps.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Vous devez certainement connaître les différentes parties des villages

  8   en vert, en orangé. Vous connaissez ces villages ?

  9   R.  A peu près.

 10   Q.  Est-ce que vous savez, Monsieur Sivac, qu'à Sarajevo, il y avait dix

 11   municipalités, et dans cinq municipalités il y avait une partie qui

 12   s'étendait vers le centre et vers une banlieue rurale ? Est-ce que ce n'est

 13   pas le même cas de Prijedor ?

 14   R.  Je ne sais pas pour Sarajevo. Je ne peux que vous répondre à des

 15   questions qui se rapporteraient à Prijedor.

 16   Q.  Mais saviez-vous combien une municipalité comptait de personnes ? Entre

 17   1 000 et 1 500. En Grèce, c'est 8 000. Et en Yougoslavie et en Union

 18   soviétique, c'était 40 000 habitants. La Yougoslavie et l'Union soviétique

 19   ont été désintégrées. Et à Prijedor, il y en avait plus de 100 000, et vous

 20   étiez contre toute division et partage ?

 21   R.  Oui. Mais tout ce que vous avez fait, c'était pour gagner du temps. Au

 22   niveau de la république, sur un plan global, vous aviez compris les choses

 23   et vous avez décidé de faire en sorte que la municipalité de Prijedor soit

 24   entièrement adjointe à la Région autonome de la Krajina de Bosnie, alors

 25   que les gens s'étaient déjà prononcés de façon explicite en faveur d'une

 26   ex-Yougoslavie ou d'une Yougoslavie tronquée. Par conséquent, tous ces jeux

 27   relatifs à la municipalité de Prijedor à l'époque, au mois d'avril,

 28   visaient à vous faire gagner du temps.


Page 19606

  1   Q.  Bon. Alors, maintenant, Monsieur Sivac, vous êtes en train d'attribuer

  2   aux Serbes des intentions. Mais n'est-il pas vrai de dire que le 13 février

  3   déjà, nous avions définitivement accepté de ne plus faire partie de la

  4   Yougoslavie et nous avons accepté les conditions énoncées par la Communauté

  5   européenne en disant que nous resterions en Bosnie ? Le 13 février pour la

  6   première fois déjà. Ne le saviez-vous pas ? C'était publié.

  7   R.  Peut-être vous êtes-vous prononcé en faveur de cela de façon

  8   déclarative, mais vous avez tout fait pour qu'il n'y ait pas de Bosnie-

  9   Herzégovine.

 10   Q.  Mais vous, vous dites dans vos textes - et je vais vous retrouver le

 11   passage - le 22 février, vous dites que nous étions revenus de Lisbonne.

 12   Page 54, voilà, je l'ai trouvé. Il y a eu un premier débat sur la Bosnie-

 13   Herzégovine à Lisbonne, ce qui s'est terminé sans résultat. Le SDA avait

 14   demandé la proclamation d'une Bosnie-Herzégovine indépendante, alors que le

 15   SDS avait suggéré une confédération. Ne saviez-vous pas qu'il y avait une

 16   proposition de faire en sorte que la Bosnie reste en tant que telle, mais

 17   en tant que confédération de trois entités, chose qui avait été d'ailleurs

 18   proposée par la Communauté européenne ?

 19   R.  Ecoutez, je ne sais pas beaucoup de choses au sujet de ce qui s'est

 20   discuté au niveau politique au niveau de la république. Vous, vous étiez un

 21   homme politique de haute voltige, et c'est vous qui négociiez avec les

 22   hommes politiques à Sarajevo et au niveau de la communauté internationale.

 23   Moi je ne peux parler que de la municipalité de Prijedor.

 24   Q.  Mais vous, vous parlez aussi de Lisbonne. Vous citez de façon erronée

 25   le fait que le 22 février, rien n'a été réalisé. Mais si, on avait fait un

 26   pas en avant le 22, puis ensuite un deuxième pas, et le 18 mars un accord

 27   avait été accepté pour ce qui était de transformer la Bosnie en trois Etats

 28   constitutifs avec des autorités centralisées, comme cela est le cas après


Page 19607

  1   Dayton, sauf qu'il n'y a pas trois entités, mais deux entités. Etiez-vous

  2   au courant de ces choses ?

  3   R.  Je n'étais pas au courant. J'ai repris ces informations dans ce qui a

  4   été publié dans les médias de Sarajevo.

  5   Q.  Comment pouvez-vous alors dire et estimer que les exigences visant à

  6   transformer Prijedor, c'était des manœuvres de notre part ? Parce que si

  7   vous, les Musulmans, vous aviez exercé le pouvoir dans tous vos

  8   territoires, et les Serbes, et dans tous nos territoires, si nous avions eu

  9   des instances conjointes, comme cela est le cas à présent.

 10   R.  Mais quelle est votre question, Docteur Karadzic ?

 11   Q.  Comment pouvez-vous affirmer que c'est des jeux joués par les Serbes

 12   alors qu'il était prévu que vous exerciez le pouvoir dans vos parties du

 13   territoire et que vous vaquiez à vos propres affaires et que vous vous

 14   occupiez de vos affaires ?

 15   R.  Ça, c'était déclaratif, ce que vous aviez proposé. Les temps qui vont

 16   suivre et les événements qui vont suivre vont montrer le vrai visage des

 17   intentions qui vous animaient.

 18   Q.  Merci. Ne saviez-vous pas que Cehajic et les représentants musulmans

 19   avaient accepté la chose, et ils sont passés sur la rive gauche de la Sana

 20   pour construire une municipalité à eux avec un poste de police ?

 21   R.  Ça, ce n'est pas vrai. Si c'était arrivé, je serais probablement l'un

 22   de ceux à en avoir été informé.

 23   Q.  Vous affirmez que ça ne s'est pas passé ?

 24   R.  Oui, j'affirme que cela ne s'est pas passé. Ça ne s'est pas produit.

 25   Q.  Dites-nous s'il y a eu ceci : il est resté des armes chez les Musulmans

 26   dans toutes les parties en vert ici ? Est-ce que ces Musulmans avaient des

 27   postes de contrôle à l'entrée de chaque agglomération jusqu'au 23 mai ?

 28   R.  Monsieur Karadzic, quand vous posez des questions, je vous prie de


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  1   donner une période et les dates auxquelles vous faites référence dans votre

  2   question.

  3   Q.  Fort bien. A partir du 30 avril, lorsque les Serbes ont pris le pouvoir

  4   à Prijedor pour empêcher, comme vous le dites vous-même, enfin que vous le

  5   croyez ou pas, peu importe, mais pour empêcher qu'il y ait des attaques

  6   contre l'armée et contre les Serbes, entre ce 30 avril et le 23 mai, est-ce

  7   que la totalité des Musulmans dans leurs localités avaient des armes et

  8   avaient des postes de contrôle, et personne ne leur a demandé qu'ils

  9   rendent leurs armes ?

 10   R.  Ce n'est pas vrai, Monsieur Karadzic. Dès qu'il y a eu prise du

 11   pouvoir, il y a eu publication d'un appel à la mobilisation où l'on visait

 12   à compléter les potentiels militaires et policiers afin de les armer. La

 13   deuxième des choses de faites par cette autorité nouvelle à Prijedor,

 14   c'était d'établir un contrôle des médias, de placer les médias sous son

 15   contrôle. Le 12 mai, ils m'ont arrêté, moi, et un certain nombre d'amateurs

 16   radio qui avaient des émetteurs-récepteurs privés et qui avaient des permis

 17   de se servir de ces émetteurs-récepteurs. On a commencé à boucler

 18   hermétiquement la municipalité de Prijedor vis-à-vis du reste du public.

 19   Pour ce qui est de l'appel à la mobilisation, la totalité des Serbes y a

 20   répondu présent. En parallèle avec l'appel à la mobilisation, il y a eu un

 21   appel publique de lancé à l'intention de tous les non-Serbes sur le

 22   territoire de la municipalité de Prijedor demandant de restituer des armes.

 23   Au cas où ça ne serait pas fait, on a précisé qu'il y aurait des sanctions

 24   et des conséquences de subies. Ça a duré jusqu'au 22 ou 23 mai, lorsqu'il

 25   s'est produit l'incident de Hambarinsko Polje.

 26   Q.  Merci. Est-il exact de dire que le général Talic était venu et que le

 27   20 mai, il y a eu des négociations avec des gens de Kozarac pour qu'eux

 28   prennent soin du maintien de la paix et de l'ordre publics dans


Page 19609

  1   l'agglomération sans aller combattre ?

  2   R.  Je dois vous dire qu'après la prise de contrôle de la municipalité de

  3   Prijedor, Kozarac, qui était à 90 % habitée par des Musulmans, a posé un

  4   gros problème aux nouvelles autorités serbes de Prijedor. Différents

  5   émissaires se sont rendus à Kozarac pour tenter de convaincre les habitants

  6   d'accepter les nouvelles autorités nouvellement mises en place, et mises en

  7   place par la force, mais les habitants n'ont pas accepté cela. Ils ont

  8   exprimé le souhait de rester en Bosnie-Herzégovine et nulle part ailleurs.

  9   Q.  Est-ce que vous n'êtes pas en train de vous contredire ? Vous avez dit

 10   qu'ils tentaient de convaincre ces personnes par la force. Et on force, en

 11   général, à l'aide de chars, alors que dans le cas dont nous parlons il

 12   s'agit de pourparlers.

 13   R.  Non, vous ne m'avez pas compris. Ils sont allés parler, mais les gens

 14   de Kozarac ne souhaitaient pas accepter la prise de contrôle par la force

 15   de la ville de Prijedor parce qu'ils pensaient, à juste titre, que

 16   lorsqu'il y avait un contrôle par la force, que ceci ne pouvait rien avoir

 17   à faire avec la démocratie.

 18   Q.  Les Serbes qui étaient au pouvoir à Prijedor n'étaient pas ceux qui

 19   avaient préparé les attaques contre la JNA et les Musulmans. C'était les

 20   Musulmans qui avaient préparé les attaques contre la JNA et les Serbes.

 21   R.  Ecoutez, laissez-moi vous dire que les Musulmans de Prijedor n'avaient

 22   aucun moyen et n'avaient pas de ressources leur permettant de faire la

 23   guerre. Quand bien même c'eut été le cas, ils se sont arrogés le droit

 24   moral de le faire le 30 avril, lorsque les Serbes ont pris le contrôle par

 25   la force et qu'ils ont désarmé les Musulmans et les policiers croates. Ils

 26   avaient le droit de réagir pour empêcher cela. Cependant, les Musulmans

 27   s'étaient rendus compte depuis longtemps déjà qu'ils ne pouvaient pas

 28   défendre Prijedor si les Serbes avaient décidé de prendre la ville par la


Page 19610

  1   force. D'importants contingents, des arsenaux importants d'armes étaient à

  2   Prijedor et aux alentours de Prijedor. C'était des armes en provenance de

  3   Croatie, tout le matériel de l'ex-JNA, et j'insiste sur le fait qu'il

  4   s'agit du matériel de l'ex-JNA.

  5   Q.  Dans ce cas, qui a eu la bonne idée de se lancer contre les Serbes qui

  6   étaient si bien armés ? Qui a opté pour la guerre ? N'est-il pas exact que

  7   vous vous êtes rendu à Kozarac et à Medunjanin et vous avez prôné la

  8   résistance de Kozarac, n'est-ce pas ?

  9   R.  Ecoutez, je ne sais pas d'où vous vient cela. Nous avons entendu ça aux

 10   informations. Je ne me suis pas rendu moi-même à Kozarac. Avec Boro Grubic,

 11   mon collègue et journaliste, nous faisions des reportages là-dessus, mais

 12   nous avions cessé parce que le centre informatique de Banja Luka avait été

 13   saisi par le Parti démocratique serbe et nous n'arrivions plus à entrer en

 14   contact avec notre siège. Les gens de Prijedor n'ont jamais été en faveur

 15   d'une quelconque alternative militaire.

 16   Q.  Merci. Est-il exact que vous avez dit dans votre livre à la page 109

 17   qu'Alija Izetbegovic avait envoyé un message et a indiqué qu'il ne fallait

 18   pas abandonner les armes ?

 19   R.  Alija Izetbegovic envoyait sans cesse toutes sortes de messages. Peut-

 20   être qu'il a dit cela également. Si j'ai écrit cela, cela a dû être le cas.

 21   Q.  Est-il exact que dans ce même ouvrage, vous qualifiez le SDA de partie

 22   prenante la guerre, et à la page 91 :

 23   "On poussait les gens à la guerre et ils les ont incités à la guerre,

 24   mais on ne les a trouvés nulle part. Ils ont laissé leur peuple dans la

 25   panade à la veille d'une grande bataille historique. Ils ont complètement

 26   perdu la face."

 27   Donc vous saviez qu'ils étaient en faveur de la guerre et qu'ils

 28   défiaient les propositions faites par les Serbes aux fins de maintenir la


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  1   paix à Prijedor, et c'était les dirigeants du SDA qui faisaient cela, Mirza

  2   Mujadzic et Hilmo Popovac [phon], et vous avez cité les noms des autres

  3   personnes qui ont d'abord incité le peuple à la guerre et qui se sont

  4   ensuite enfuies.

  5   R.  Ecoutez, si vous citez mon livre, cela a dû être écrit dans mon livre,

  6   mais dans un contexte différent. Il s'agissait d'une branche radicale du

  7   SDA qui, avec l'aide de quelques amis, serbes après la prise de contrôle,

  8   s'est enfuie quelque part à l'extérieur de Prijedor. Ses activités

  9   politiques ont cessé. La ville de Prijedor et la municipalité de Prijedor

 10   devaient s'organiser elles-mêmes.

 11   Il y avait ensuite vous, qui étiez bien formé avec vos unités et vous

 12   aviez l'expérience du combat en Croatie; et de l'autre côté, il y avait

 13   également des Musulmans et des Croates qui n'avaient quasiment pas d'armes,

 14   outre quelques pièces d'équipement ou de matériel qu'ils s'étaient

 15   procurées des Serbes ou qui avaient fait l'objet de contrebande, ces gens-

 16   là revenant de la guerre en Croatie.

 17   Q.  Saviez-vous, Monsieur Sivac, que nous ne pouvions absolument pas

 18   communiquer avec le siège de Prijedor ? C'est quelque chose que vous

 19   trouverez dans mon journal ainsi que dans l'allocution de Srdjo Srdic

 20   devant l'assemblée. Ils ne nous ont rien demandé car ils ne pouvaient rien

 21   nous demander. Il n'y avait tout simplement pas de communication possible.

 22   R.  Je parlais en fait de liaisons téléphoniques et de liaisons radio,

 23   parce que le téléphone fonctionnait sans cesse. Pour ce qui est de Srdjo

 24   Srdic, après le 12 mai, un de mes collègues est venu nous rendre visite, et

 25   c'est lui qui m'a tenu informé de tout. Il m'a dit qu'à cette fameuse

 26   séance à l'assemblée qui s'était tenue à Banja Luka le 12 mai, vous avez eu

 27   une brève rencontre avec les hommes politiques de Prijedor, à la tête

 28   desquels il y avait Srdjo Srdic. Vous les avez loués pour avoir pris le


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  1   contrôle de Prijedor sans qu'une seule balle ne soit tirée. Bien sûr, il

  2   faut penser à l'avenir. Je suis en train de paraphraser. Je demande comment

  3   vous entendiez cela, président ? Et vous avez dit : Si à l'avenir nous

  4   souhaitons rattacher la municipalité de Prijedor pour qu'elle devienne

  5   partie intégrante de ce nouvel Etat serbe, la communauté internationale

  6   exigera sans doute que la population, étant donné qu'elle est mixte,

  7   exprime son souhait, à savoir si les habitants le souhaitent ou pas. Etant

  8   donné que les non-Serbes sont majoritaires, ils ne souhaitent sans doute

  9   pas vivre dans un nouvel Etat serbe. Ensuite, Srdjan Srdic a dit : Il faut

 10   vous assurer que la population non serbe soit réduite à un nombre

 11   raisonnable.

 12   Q.  Veuillez me dire, Monsieur Sivac, si c'est vous qui avez inventé cela

 13   de toutes pièces ou si -- c'est vous qui l'avez inventé de toutes pièces ?

 14   Avez-vous la moindre preuve qui vous permet de justifier cela ?

 15   R.  Monsieur Karadzic, cela me vient d'un ami très proche qui a assisté à

 16   cette réunion-là, et je le crois.

 17   Q.  Veuillez nous donner maintenant son nom, car la Défense est en droit de

 18   vérifier. Quel est son nom ?

 19   R.  Je ne donnerai pas son nom. Je suis sûr que j'ai le droit de garder le

 20   silence. Malheureusement, cet homme n'est plus en vie, mais sa famille est

 21   toujours à Prijedor.

 22   Q.  Autrement dit, c'est un Serbe ?

 23   R.  Bien sûr.

 24   Q.  Il n'est pas en vie et vous faites des affirmations tout à fait

 25   incroyables. Comme c'est commode. Comment avez-vous pu imaginer que j'étais

 26   un parent de Srdjo Srdic ?

 27   R.  Il s'en vantait à Prijedor. Il n'a pas, en réalité, dit que vous étiez

 28   un de ses parents proches. Il a dit que sa seconde femme était d'une


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  1   manière ou d'une autre un de vos parents proches.

  2   Q.  Bien. Alors, vous entendez quelque chose et vous inscrivez cela dans

  3   votre livre comme s'il s'agissait d'une parole d'évangile. Est-ce que vous

  4   maintenez ce que vous avez dit dans votre livre et dans votre déposition ?

  5   R.  Les choses se sont passées ainsi. Vous avez procédé au nettoyage

  6   ethnique de Prijedor. Vous avez fait en sorte que les non-Serbes

  7   disparaissent de Prijedor.

  8   Q.  Laissez ceci entre les mains des Juges de la Chambre. Lorsque tous les

  9   éléments de preuve auront été rassemblés, les Juges de la Chambre tireront

 10   leurs propres conclusions sur ce qui s'est passé à Prijedor. Comment avez-

 11   vous dit que j'avais un lien familial avec sa deuxième femme, à Srdjo

 12   Srdic, et que moi-même je dormais avec mon entourage composé de 12

 13   policiers dans un appartement plutôt que dans un hôtel ?

 14   R.  Je n'ai jamais dit que vous aviez passé la nuit avec 12 policiers.

 15   Srdjo Srdic s'en vantait. Il avait dit que lui était en très bons termes

 16   avec vous, et l'autre homme, le journaliste, il s'en vantait parce que vous

 17   préfériez toujours passer la nuit à cet endroit-là, à l'endroit où habitait

 18   sa femme, parce que d'une manière ou d'une autre, vous aviez des liens de

 19   sang. Et c'était votre principal associé politique à Prijedor.

 20   Q.  Vous savez, Monsieur Sivac, que tous les dirigeants, en particulier les

 21   dirigeants de grands partis politiques, ont des escortes officielles du

 22   MUP, ils ont les hommes chargés de leur sécurité qui les accompagnent, et

 23   ils ne peuvent jamais passer une nuit à un endroit différent de ce qui a

 24   été organisé à l'avance ?

 25   R.  Parce que j'ai travaillé dans les services de Sécurité à un moment

 26   donné, je sais comment étaient traités les hommes politiques et je sais

 27   comment tout ceci était organisé. Je ne sais rien de plus à ce sujet, mais

 28   j'ai entendu dire que les membres du parti étaient à Prijedor avec Srdjo


Page 19614

  1   Srdic.

  2   Q.  Qui a mis le feu à l'hôtel de Prijedor, Monsieur Sivac ?

  3   R.  Quel hôtel, Monsieur Karadzic ? Il y en avait deux. Voulez-vous parler

  4   de l'année 1992 ?

  5   Q.  Oui.

  6   R.  Je vous repose la question : veuillez nous donner l'heure et la date

  7   par rapport à la question que je vous ai posée.

  8   Q.  Est-il exact, et est-ce que cela ne fait pas l'ombre d'un doute, et

  9   c'est quelque chose que vous avez confirmé dans votre livre, que des

 10   Musulmans ont attaqué Prijedor le l3 mai depuis différentes directions ?

 11   R.  Monsieur Karadzic, cet élément d'information-là est quelque chose qui a

 12   été repris par "Kozarski Vjesnik", qui avait publié un récit dont plusieurs

 13   numéros reconstituant l'attaque menée contre Prijedor. Et moi j'ai intitulé

 14   cela : Une tentative aux fins de libérer Prijedor.

 15   Q.  Admettons que cela soit vrai. Cette tentative aux fins de libérer

 16   Prijedor a-t-elle eu lieu dans la nuit du 29 mai ?

 17   R.  Un groupe officieux, qui comprenait Slavko Ecimovic et quelques hommes

 18   qui, après la prise de contrôle, devaient s'enfuir de Prijedor parce que

 19   les Serbes --

 20   Q.  Je ne vous pose pas de questions sur les éléments de contexte. La seule

 21   question que je vous pose, c'est est-ce qu'il est vrai qu'il y a eu une

 22   tentative de faite aux fins de libérer Prijedor avec recours aux armes

 23   depuis différentes positions et directions le 30 mai à l'aube ? Avez-vous

 24   entendu les tirs ? Est-ce que vous avez remarqué quelque chose de votre

 25   fenêtre ?

 26   R.  Oui. Parce que j'ai lu l'article portant sur la reconstitution de cette

 27   attaque dans le journal "Kozarski Vjesnik", qui est très bien documenté et

 28   qui a falsifié certains détails.


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  1   Q.  Vous dites qu'il y avait un groupe officieux. Ces balles et ces

  2   roquettes tirées de Zolja, qui sont des lance-roquettes à main, est-ce

  3   qu'il s'agissait de matériel qui était contrôlé par quelqu'un ?

  4   R.  Ils n'appartenaient à personne et n'étaient contrôlés par personne. Ils

  5   n'appartenaient ni au HDZ, ni au SDA. Il s'agissait simplement d'un groupe

  6   de personnes désespérées qui tentaient simplement de rentrer chez eux à

  7   Prijedor.

  8   Q.  Laissons ça de côté. Et revenons un instant au poste de contrôle de

  9   Hambarine. Le 22 mai, une voiture a été arrêtée. A l'intérieur, il y avait

 10   quatre Serbes et deux réservistes croates, donc six jeunes hommes au total.

 11   Deux ont été tués, deux ont été grièvement blessés et deux ont été

 12   légèrement blessés. La police a retenu Aziz Aliskovic en tant que suspect

 13   au cours de cet incident ?

 14   R.  Oui. Vous avez omis de dire qu'au même poste de contrôle, un homme a

 15   été tué et que deux ont été grièvement blessés.

 16   Q.  Il y avait un Musulman qui avait été blessé ?

 17   R.  Non, cela n'est pas exact. Un soldat a été blessé et deux ont été

 18   grièvement blessés. Ce Ferid Sikiric a été emmené à l'hôpital et il a été

 19   liquidé par la police serbe après un interrogatoire.

 20   Q.  Avez-vous une quelconque preuve de cela ?

 21   R.  Oui, il y a des preuves à l'appui de cela. J'ai présenté énormément de

 22   documents et de cassettes vidéo à ce Tribunal. Dans une cassette vidéo,

 23   Ferid Sikiric fait sa dernière déclaration, et il a été retrouvé dans une

 24   des fosses communes à l'extérieur de Prijedor.

 25   Q.  Maintenant, il a été retrouvé dans une fosse commune, mais vous avez

 26   dit qu'il a été liquidé par la police ?

 27   R.  Oui, ils l'ont emmené. Ils l'ont tué et ils ont jeté son corps dans une

 28   des fosses communes.


Page 19616

  1   Q.  Comment savez-vous cela ?

  2   R.  Je le sais parce que j'ai fait des recherches là-dessus. Ce cas-là

  3   m'intéressait, et je connaissais l'homme fort bien, ce Ferid Sikiric.

  4   Q.  Est-ce que ces travaux de recherche sont des éléments que vous pouvez

  5   nous communiquer ? Quand et comment avez-vous enquêté là-dessus ?

  6   R.  Ce n'est pas moi qui ai enquêté là-dessus. La télévision serbe de

  7   Prijedor a diffusé un reportage là-dessus. Le reportage a été préparé par

  8   Rade Mucic et un autre collègue musulman.

  9   Q.  Vous venez de nous dire que vous avez fait des recherches là-dessus.

 10   R.  Après cet événement, le sort de ce Ferid Sikiric m'a intéressé.

 11   Q.  Après avoir été relâché du camp, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui. J'ai beaucoup travaillé et j'ai tenté de rassembler énormément de

 13   documents sur les événements qui se sont produits en 1991 et 1992.

 14   Q.  Dans votre livre, à la page 113, vous dites que le --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous passez à un autre sujet, je

 16   pense qu'il est l'heure de faire une pause.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, nous pouvons avoir la pause maintenant,

 18   mais je suis toujours sur le sujet du mois de mai 1992.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, par rapport à ce que

 20   nous avons abordé à huis clos partiel pendant quelques instants, concernant

 21   votre demande, nous n'allons pas siéger demain. Mais qui allons-nous

 22   entendre en premier lieu vendredi ?

 23   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 25   M. TIEGER : [interprétation] Oui, j'entends bien, Monsieur le Président.

 26   J'espère que nous pourrons terminer ce témoin-ci aujourd'hui. Peut-être une

 27   ou deux permutations, mais il est préférable que j'évoque la question de la

 28   vidéoconférence avec la greffière d'audience.


Page 19617

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je soulève la question dans un souci

  2   d'efficacité : qui va témoigner par vidéoconférence vendredi.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Je suppose que la greffière d'audience fera de

  4   même, et à ma connaissance, il n'y a pas de circonstances particulières qui

  5   entraveraient cela.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que la Défense suit ce qui se

  7   passe.

  8   Nous allons faire une pause et reprendre à 18 heures.

  9   --- L'audience est suspendue à 17 heures 32.

 10   --- L'audience est reprise à 18 heures 01.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant que de ne

 13   continuer, j'aimerais évoquer une question rapidement. Comme les Juges de

 14   la Chambre doivent le savoir, nous ne nous mêlons d'habitude pas des

 15   contre-interrogatoires, mais il y a une question qui a été évoquée et j'ai

 16   ressenti la nécessité d'en parler.

 17   Les Juges de la Chambre sont conscients du fait qu'il convient

 18   d'avoir un fondement de bonne foi pour présenter des allégations au cours

 19   du procès. M. Karadzic a laissé entendre, en pages 39 et 40, que le fils

 20   d'un certain Becir avait été arrêté aux Etats-Unis en tant que terroriste,

 21   et il demande au témoin s'il est au courant de la chose.

 22   Or, Monsieur le Président, ceci est une chose que vous pouvez voir en

 23   consultant l'Internet, et vous pouvez constater que cette personne arrêtée

 24   aux Etats-Unis s'appelait autrement et qu'il a 20 ans de moins, 20 ans de

 25   moins que le fils de Becir Medunjanin, qui est allé à l'école aux Etats-

 26   Unis. C'est toute une série d'éléments différents qui auraient pu être

 27   vérifiés par consultation sur Internet, et il n'y aurait pas allégation de

 28   faite dans ce type de contre-interrogatoire. C'est quelque chose qui vise


Page 19618

  1   en fait le fils de M. Medunjanin, et j'estime qu'il ne convient pas de

  2   l'évoquer ici. Je regrette d'avoir eu à en parler. Nous ne pensons pas

  3   qu'il puisse être permis de faire des allégations contre quelqu'un qui a

  4   déjà été une victime et qu'on n'a pas pu avoir de présent ici.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Est-ce que vous voulez répondre -

  6   - je voudrais aussi que vous preniez en considération ce que M. Tieger

  7   vient de dire s'agissant des questions que vous allez poser à l'avenir au

  8   contre-interrogatoire.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si les fils s'appellent Adis et Anis [phon],

 10   c'est Anis qui a été arrêté. Il y a eu un Adis Medunjanin d'arrêté en

 11   Amérique comme terroriste. Et Adis, c'est l'un des prénoms des deux fils à

 12   Medunjanin. Et c'est la raison pour laquelle j'avais considéré que c'était

 13   intéressant, mais nous allons tirer la chose au clair.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que vous avez connu Nagib, Suljo [phon], Beco, Kanjula [phon],

 16   Medic, est-ce que ce sont des gens avec qui vous vous êtes entretenu au

 17   sujet de la thématique liée à Kozarac ?

 18   R.  Je ne sais pas de quelles personnes vous êtes en train de parler

 19   maintenant.

 20   Q.  Beco c'est Becir, non ?

 21   R.  Becir Medunjanin, oui. Je ne me suis jamais entretenu avec lui, ni sur

 22   autre chose, ni au sujet de Kozarac.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer au prétoire

 24   électronique le 1D04348.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que vous avez connu ce Cirkin ?

 27   R.  Sead Cirkin c'est quelqu'un que j'ai connu après les conflits en 1995,

 28   à Sanski Most. C'est là que j'ai fait sa connaissance.


Page 19619

  1   Q.  Est-ce qu'un autre Sivac était un militant de pointe ?

  2   R.  Vous parlez de Sefik Sivac ?

  3   Q.  Attendez. Ici, on a à la date du 2 mai une réunion où l'on se penche

  4   sur la situation à Kozarac. Enfin, ce n'est pas nécessairement à Kozarac

  5   que ça se passe, mais on évoque un certain Sivac et ces gens-là. Est-ce que

  6   vous auriez été présent à cette réunion ?

  7   R.  Monsieur Karadzic, ce document, c'est la première fois que je le vois.

  8   Et je n'ai été présent à aucune réunion, et encore moins le 2 mai 1992.

  9   Q.  Bon. Alors, je ne vais pas approfondir plus en avant. Je vous remercie.

 10   Nous allons essayer de vérifier les choses autrement.

 11   Dans votre livre, vous dites quels sont les axes depuis où il y a eu

 12   des attaques de lancées contre Prijedor, n'est-ce pas ?

 13   R.  Moi j'énumère des groupes tels qu'identifiés par Rade Mutic et Zivko

 14   Jakic, journalistes.

 15   Q.  Est-ce que ça a été confirmé par Mirzet, dont le journal est cité par

 16   vous ou paraphrasé par vous, mais c'est surtout des citations que vous en

 17   faites dans votre livre ?

 18   R.  Ce n'est qu'en partie qu'il a confirmé ce qui a été rédigé dans le

 19   "Vjesnik de Kozarac". Et il a dit que dans ces groupes, au total, il y

 20   avait quelque 60 personnes désespérées de Prijedor qui avaient un peu de

 21   fusils. Et en majeure partie, ils n'étaient armés que de pistolets. Ils ont

 22   essayé d'entrer dans Prijedor pour voir ce qu'ils pourraient y faire.

 23   Q.  Et ils sont arrivés jusqu'aux tours rouges de Prijedor, au centre, et

 24   ils ont presque pris la radio.

 25   R.  Non, c'était un piège. Ils ont utilisé ce subterfuge. On avait préparé

 26   les militaires, une unité d'élite commandée par Zoran Karlica, on avait

 27   prévu des policiers. Mais, Monsieur Karadzic, pour ce qui est de cette

 28   prétendue attaque - et moi j'appelle ça tentative de libération de Prijedor


Page 19620

  1   - il y a bon nombre de choses contradictoires. En recueillant des documents

  2   sur cela, j'ai trouvé un grand nombre de documents qui prouvent que cette

  3   attaque avait presque été convenue d'avance. On avait fait semblant de

  4   lancer une attaque pour avoir un justificatif relatif au nettoyage ethnique

  5   du noyau urbain de la ville de Prijedor.

  6   Q.  Donc c'est les Serbes qui ont convenu de la chose avec les Bérets verts

  7   et Slavko Ecimovic, leur chef; c'est cela ?

  8   R.  Non, Monsieur Karadzic. Vous êtes en train d'arracher les choses de

  9   leur contexte. Ce n'était pas des Bérets verts. Ils disaient d'eux-mêmes

 10   que c'était des gars de Kurevo. Ils n'appartenaient à aucun parti

 11   politique. Et ils ne faisaient partie d'aucune option politique.

 12   Q.  Mais n'avez-vous pas dit dans votre livre que lorsque les Serbes sont

 13   venus négocier à Kozarac, ils ont été encerclés par des Bérets verts ?

 14   R.  Mais, Monsieur Karadzic, ça, ça se passe juste avant le nettoyage

 15   ethnique de Kozarac. Vous avez dit vous-même que le 22 mai, la Bosnie-

 16   Herzégovine a été reçue aux Nations Unies, et le symbole officiel de cette

 17   reconnaissance de Bosnie-Herzégovine c'était les fleurs de lys. Les gens de

 18   Kozarac avaient à juste titre porté des insignes de l'Etat dont ils étaient

 19   des ressortissants.

 20   Q.  Mais sur des Bérets verts, n'est-ce pas ?

 21   R.  Sur des Bérets verts et sur des Bérets bleus, ils portaient cet insigne

 22   de la fleur de lys qui était le symbole officiel de cet Etat

 23   internationalement reconnu de Bosnie-Herzégovine.

 24   Q.  Mais cet insigne internationalement reconnu, Bérets verts ou Bérets

 25   bleus, vous ne le mentionnez pas dans votre livre. Est-ce que c'était

 26   accepté par les Serbes et les Croates comme insigne ?

 27   R.  Je ne sais pas. Je vous dis ce que la population de Kozarac avait

 28   accepté. Pour ce qui est des Serbes et des Croates à Kozarac, il n'y en


Page 19621

  1   avait pas eu. Les Musulmans étaient 97 % de la population. Il y avait un

  2   nombre insignificatif [phon] de Serbes. Et vous le savez, à Trnopolje

  3   c'était des minorités nationales, des Ukrainiens, des Tchèques, des

  4   Italiens et que sais-je encore.

  5   Q.  Est-il exact de dire que dans votre livre, vous reprenez des parties de

  6   journal de ce Mirzet pour confirmer que ces combattants ou terroristes ou

  7   libérateurs s'étaient mêlés à la population à Prijedor ? Vous le dites en

  8   page 128 de votre livre : Ils sont mêlés à la population, certains ont fui

  9   vers les forêts et d'autres se sont mêlés à la population dans la ville

 10   même; c'est bien cela ?

 11   R.  Non, ce n'est pas cela. Moi j'aimerais bien voir cette page. Je n'ai

 12   jamais rédigé ceci. La résistance de ce groupe qui avait essayé de libérer

 13   Prijedor a été brisée dans l'espace de deux heures. La plupart des gens

 14   faisant partie du groupe ont été capturés. Dix-huit hommes de ce groupe ont

 15   été liquidés, tués. Et seul un tout petit nombre a réussi à traverser en

 16   nageant la rivière Sana pour fuir vers des banlieues de Prijedor.

 17   Q.  Mais vous dites que ça a été des mises en scène et vous vantez Slavko

 18   Ecimovic et les libérateurs de Prijedor dans ce livre. Pourquoi n'avez-vous

 19   pas dit que c'était une mise en scène, que les Serbes avaient commandité,

 20   en réalité, cette attaque ?

 21   R.  Monsieur Karadzic --

 22   Q.  Nous nous excusons auprès des interprètes, tant en votre nom qu'en mon

 23   nom à moi.

 24   Q.  Monsieur Karadzic, lors de la rédaction de ce livre, j'ai voulu vanter

 25   les mérites de ces jeunes hommes parce qu'ils ont essayé de sauver

 26   l'honneur et la dignité des Musulmans et des Croates à Prijedor. Leur seul

 27   souhait était celui de montrer aux Serbes que Prijedor, ça appartenait

 28   aussi à d'autres ethnies. Slavko Ecimovic, c'était un ingénieur. Slavko


Page 19622

  1   Ecimovic, il a été capturé vivant et il a été tué, mais en représailles on

  2   a tué toute sa famille, son père a été tué, sa mère aussi.

  3   Q.  Ça, on va le déterminer. Vous ne pouvez pas en parler parce que vous ne

  4   l'avez pas vu. Dites-nous plutôt ceci : vous les avez donc loués dans votre

  5   livre parce que vous savez qu'ils ont participé à une prétendue attaque

  6   faussement lancée contre Prijedor, ou est-ce que vous dites que ce que vous

  7   avez dit dans votre livre n'est pas vrai ?

  8   R.  Non, Monsieur Karadzic. Vous sortez les choses de leur contexte. Ce

  9   n'est pas moi qui ai décrit cette attaque. C'est dans le "Kozarski Vjesnik"

 10   que Zelko Kesmucic [phon] a écrit la chose. Moi je n'ai fait que reprendre

 11   les propos.

 12   Q.  Je ne sais pas si c'est vous ou Mirzet. En page 129, vous avez repris

 13   les propos de Mirzet. Lui, dans son journal, a dit que : "Le plan visait à

 14   s'organiser et organiser des actions de sabotage pour mettre en péril les

 15   Serbes qui avaient occupé la ville," et cetera, et cetera. Puis, vous dites

 16   : "Le premier groupe dans le secteur de Ljuba avait Bakir Mualjagic [phon];

 17   deuxième groupe dans le secteur de Zegari avec Slavkovic, Muco [phon];

 18   troisième groupe 

 19   --" C'est la page 129 du livre, "Le troisième groupe dans le secteur de

 20   Hasrahanovic [phon], de Hambarine, de Biscani --"

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, attendez un instant. Attendez.

 22   C'est impossible de suivre et c'est impossible pour les Juges aussi.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'excuse. Mais je suis en train de paniquer

 24   en raison du manque de temps. Ce témoin a longuement témoigné et il a fait

 25   beaucoup de déclarations très générales. La Défense veut revenir à des

 26   choses concrètes, elle veut parler des faits et rien que des faits. C'est

 27   la raison pour laquelle il me faut plus de temps.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 19623

  1   Q.  Est-ce que dans votre livre à la page 129 il y a une description d'au

  2   moins quatre groupes venus de quatre directions pour attaquer ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Est-ce que nous l'avons, ce

  4   livre, dans notre prétoire électronique, Monsieur Robinson ?

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Je ne le sais pas, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ça a été communiqué aux

  7   parties, c'est-à-dire à l'Accusation ? Pour ce qui est de ma liste de

  8   documents qui seraient utilisés avec ce témoin, il n'y a pas de note à cet

  9   effet.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Non, ça n'a pas été fait.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit d'un livre qui compte presque 300

 12   pages. Il n'a pas été traduit. J'ai voulu profiter de la présence du témoin

 13   pour que les choses soient confirmées ou infirmées.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Une autre question pour M.

 15   Robinson : la filière de questions dans ce sens c'est pour tester la

 16   crédibilité du témoin, parce que le livre n'a pas été versé au dossier en

 17   tant que pièce à conviction dans cette affaire ?

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je vais laisser le Dr Karadzic en

 19   parler parce qu'il a une bien meilleure idée de ce qu'il avait eu

 20   l'intention de faire avec.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Alors, Monsieur Karadzic, vous avez

 22   passé plus de deux heures rien que sur ce livre, qui n'est pas une pièce à

 23   conviction dans ce procès. Allez-y.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoignage de ce témoin est un élément de

 25   preuve. Il a dit bien des choses dans son témoignage dans l'affaire Stakic,

 26   et ça diffère de ce qu'il a rédigé dans le calme dans son livre. Dans ce

 27   livre, il y a des éléments de preuve disant qu'il y a eu des attaques,

 28   qu'il avait été au courant de bien des choses. Donc ce livre se trouve être


Page 19624

  1   pertinent contrairement à ce qu'il a raconté jusqu'à présent, et il y a

  2   aussi un élément de crédibilité. Vous avez pu voir quelle est l'attitude

  3   vis-à-vis des Serbes et des Musulmans qui avaient voulu rester vivre avec

  4   les Serbes. Vous avez vu l'attitude à mon égard, il a dit que j'étais un

  5   loup-garou. Et ça, c'est pertinent. C'est une œuvre d'auteur dont l'auteur

  6   est le témoin. On peut imprimer le livre pour le témoin s'il veut se

  7   pencher, mais je crois qu'il doit connaître son livre par cœur.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que l'Accusation a reçu au

  9   moins une copie de ce livre, ne serait-ce que cela ?

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Le livre se trouvait à l'origine dans nos

 11   dossiers à nous, ce qui fait que oui.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, je vois ce qui a

 14   été dit, mais vous auriez pu réaliser le même objectif en prenant cinq ou

 15   six éléments cruciaux en guise d'illustration. Vous n'aviez pas besoin de

 16   parcourir la totalité du livre.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Je crois bien que ce qui se

 18   manifeste c'est mon manque d'expérience. Moi, ce qui m'inquiète, c'est de

 19   savoir ce qu'il adviendra de ce que je n'aurais pas élucidé. Je pense en

 20   avoir dit assez pour indiquer la nature de ce témoignage, mais je ne suis

 21   pas certain du fait de voir les Juges de la Chambre penser la même chose.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous avez gardé le souvenir de ce que vous avez décrit au

 24   sujet des quatre groupes en page 129 ?

 25   R.  Monsieur Karadzic, j'ai repris les propos dans le "Kozarski Vjesnik".

 26   C'était des gens qui étaient au courant des enquêtes qui ont suivi cette

 27   tentative échouée. Ils ont décrit les événements, y compris l'existence des

 28   groupes. Et moi, c'est la première fois que j'ai appris de l'existence de


Page 19625

  1   ces groupes.

  2   Q.  Mais vous avez cité ici Mirzet, et non pas Rade Mutic ?

  3   R.  Oui. Une fois que je suis parti en 1993 à Zagreb, j'ai rencontré

  4   Mirzet, que je connaissais déjà assez bien. On s'est entretenu lui et moi

  5   au sujet des circonstances qui s'étaient produites dans la nuit du 30 mai à

  6   Prijedor. Il m'a jeté de la lumière sur ces événements, et il m'a dit

  7   justement que l'un d'entre eux, de façon délibérée, avait reçu des

  8   instructions à la caserne de Prijedor, avait incité Slavko Ecimovic et les

  9   autres à y aller ensemble pour libérer Prijedor, en disant qu'à Prijedor il

 10   y aurait 500 citoyens bien armés qui les attendraient. Et deux jours avant,

 11   la télévision serbe avait diffusé un clip au journal télévisé pour montrer

 12   que des habitants musulmans au centre de Prijedor, originaires de Puharska

 13   et aussi de Biscani, étaient en train de restituer de leur plein gré les

 14   armes qui étaient en leur possession à la caserne de Prijedor.

 15   Q.  Bon. Mais en page 129, au final, vous citez Mirzet, n'est-ce pas ?

 16   R.  Ecoutez, c'est possible, je ne sais pas. Enfin, je ne connais pas le

 17   livre par cœur, mais vous êtes en train de paraphraser certaines choses.

 18   Vous n'êtes pas en train de le citer tel que rédigé.

 19   Q.  Merci. Est-ce qu'en page 132 vous avez aussi fait état de l'information

 20   qu'il vous a communiquée disant que c'était eux qui avaient incendié

 21   l'hôtel à Prijedor avec un Zolja, un 

 22   lance-roquettes ?

 23   R.  Ils ne possédaient que deux lance-roquettes Zolja. Et ils en ont acheté

 24   deux autres à des marchands serbes, mais ça ne marchait pas, c'était

 25   défectueux. Et ils ont touché l'hôtel de Prijedor où l'on avait fait venir

 26   une unité d'élite qui était arrivée de la Krajina de Knin et qui a assisté

 27   ceux de Prijedor à prendre le pouvoir.

 28   Q.  Et ils ont sauté par les fenêtres lorsque l'hôtel a pris feu; c'est


Page 19626

  1   bien cela ?

  2   R.  D'après les propos de Mirzet, c'est ainsi que ça s'est passé.

  3   Q.  Merci.

  4   R.  Mais personne n'a été tué cette fois-là.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer le 1D4347, s'il

  6   vous plaît, au prétoire électronique. Et en attendant, Excellences, je

  7   voudrais vous expliquer pourquoi je suis le livre. C'est parallèle au

  8   témoignage. Ça parle des mêmes choses, mais de façon tout à fait

  9   différente, et c'est la raison pour laquelle ce livre m'intéresse. Il parle

 10   des mêmes choses que ce qui a fait partie du témoignage, mais c'est énoncé

 11   différemment. Et c'est la raison pour laquelle je suis le livre.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous voyez, Monsieur Sivac, qu'il s'agit ici du centre des

 14   services de Sécurité de Prijedor, c'est daté du 22 juin. Il y a une plainte

 15   au pénal de déposer auprès du parquet, et on dit quels sont les

 16   participants et on les énumère. J'aimerais qu'on montre la page suivante en

 17   version anglaise, s'il vous plaît. On peut feuilleter, et ils sont au total

 18   28 -- non, pas 28. Ils sont au total 172, et vous, vous dites une vingtaine

 19   ou une trentaine. Donc 172 personnes qui ont été identifiées et qui ont

 20   fait l'objet d'une plainte au pénal.

 21   R.  Quelle est votre question, Monsieur Karadzic ?

 22   Q.  Est-ce que vous maintenez vos propos, en affirmant que Prijedor a été

 23   attaquée par 20 ou 30 personnes, et non pas les gens qui sont énumérés à

 24   l'intention du parquet ?

 25   R.  Moi j'ai dit qu'avec Slavko Ecimovic, ils ont été une vingtaine. Avec

 26   Kemo Divjak, il y en avait une autre vingtaine. Ils s'étaient organisés par

 27   groupes, et leur objectif était de se rassembler afin d'essayer d'arriver

 28   sur le territoire de la Krajina de Bosnie, qui était sous le contrôle de


Page 19627

  1   l'ABiH. C'est-à-dire Bihac et Bosanska Krupa. Il est exact de dire qu'ils

  2   étaient à peu près 80. Le chiffre que vous donnez ici n'est pas exact.

  3   C'est encore un chiffre inventé de toutes pièces. Si vous le souhaitez, je

  4   peux vous dire quels sont ceux que j'ai connus parmi eux. Cette plainte a

  5   été déposée le 22 juin 1992. Mais Babic, Nedzad, déjà à ce moment-là, avait

  6   été liquidé. Muhic, Asmir aussi liquidé.

  7   Q.  Monsieur, nous ne pouvons pas vous croire sur parole. Il faut nous

  8   donner des preuves.

  9   Qu'on nous donne, je vous prie, la page 7 en serbe et la page 13 en version

 10   anglaise pour qu'on voie de quoi ils sont accusés. Vous dites que personne

 11   n'a été tué parmi les Serbes ?

 12   R.  A l'occasion de cette opération, il y a eu plusieurs Serbes de tués. Je

 13   n'ai pas dit autre chose. J'accepte votre thèse disant qu'il y a eu

 14   plusieurs Serbes de tués. J'ai dit qu'au niveau de l'hôtel, personne

 15   n'avait été tué, si mes souvenirs sont bons.

 16   Q.  Penchez-vous maintenant sur l'énoncé des motifs. Une fois qu'ils ont

 17   procédé à la totalité des préparatifs et l'évaluation de la situation en

 18   général, à la date du 30 mai 1992, les personnes faisant l'objet de la

 19   plainte ont attaqué l'arme à la main Prijedor, et ils sont arrivés jusqu'à

 20   Prijedor ensemble puis se sont séparés en quatre groupes. Le premier groupe

 21   avait pour objectif d'attaquer et de s'emparer de l'immeuble de l'assemblée

 22   municipale et du poste de sécurité publique; l'autre, de s'emparer de

 23   l'hôtel Prijedor et de la station radio; le troisième groupe voulait

 24   contrôler le secteur du pont et se rattacher avec le troisième groupe

 25   préparé d'avance --

 26   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'en version anglaise, ce n'est

 27   la bonne page.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, ce n'est pas la bonne page.


Page 19628

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Alors, ici, on donne le descriptif des quatre groupes et :

  3   "On visait à interdire la sortie des soldats de la garnison pour

  4   défendre la ville."

  5   Alors, ils ont tué 18 et blessé 15 hommes; est-ce bien cela ?

  6   R.  Non. Il y a eu bien moins de personnes tuées. Les médias serbes ont

  7   publié une information relative à 11 morts et peut-être 15 blessés.

  8   Q.  Alors, les médias c'est une chose. Mais ça, c'est un document, un

  9   document officiel, un dépôt de plainte auprès du procureur. Est-ce que vous

 10   pensez que la police se permettrait d'envoyer des renseignements erronés au

 11   ministère public ?

 12   R.  Je ne sais pas s'ils peuvent ou pas le faire. Mais j'estime que cette

 13   liste a été complétée par des noms de personnes qui n'ont pas du tout fait

 14   partie de ce groupe ou de ces groupes. Parce que ce sont des gens que je

 15   connaissais personnellement.

 16   Q.  Merci. Mais comment pouvez-vous expliquer que les Serbes ont fait une

 17   mise en scène pour faire tuer 11 Serbes ? En quoi ont-ils monté de toutes

 18   pièces la création de quatre groupes pour que tous ces Serbes soient tués

 19   et blessés ?

 20   R.  Je crois que les Serbes qui sont morts ont constitué des dégâts

 21   collatéraux. J'ai eu l'occasion de lire des documents où Simo Drljaca avait

 22   demandé à ce qu'à des niveaux en surélévation, on retire les tireurs

 23   d'élite qui pouvaient contrôler les accès de Prijedor. Donc, par

 24   conséquent, en conformité avec des déclarations faites par d'autres

 25   personnes, je suis convaincu que cette attaque ou cette libération a été

 26   une mise en scène. Il n'en demeure pas moins qu'un grand nombre d'individus

 27   énumérés sur cette liste, c'est des gens qui n'ont pas participé à

 28   l'attaque lancée contre Prijedor ou à cette libération. On en a rajouté


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  1   pour que ce soit plus massif encore, pour faire croire qu'il y en avait

  2   beaucoup plus.

  3   Q.  Je voudrais qu'on nous montre la page d'avant pour qu'on voie le numéro

  4   172 de la liste de ceux qui ont participé au combat. C'est la page d'avant.

  5   R.  Moi j'aimerais voir la liste complète, Monsieur.

  6   Q.  Allez-y. Est-ce que vous connaissez ces gens ?

  7   R.  Attendez, chez moi, ça va du 156 à 172.

  8   Q.  Mais penchez-vous sur cela. On ne peut pas mettre tous les noms sur la

  9   même page.

 10   R.  Mais qu'on me montre le début. Je ne peux pas juger de la chose à

 11   partir de ces quelques noms.

 12   Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être que nous pouvons nous rendre

 13   utiles. Nous pourrions remettre ce document au témoin pour qu'il puisse

 14   regarder cette liste de noms.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ce n'est qu'un document de 13

 16   pages.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y a encore moins de pages dans la version

 18   serbe.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais parler de la version en

 20   B/C/S.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Vous avez peut-être raison sur un point, à savoir que les numéros dans

 23   la version serbe sont différents parce que différentes personnes ont figuré

 24   sur la liste. Comme vous avez dit dans votre livre, votre neveu avait

 25   décidé de conserver les armes et d'aller se battre ?

 26   R.  Non, c'était un parent proche. Il s'appelait Adnan. Il a fait partie

 27   des réservistes de la police. C'était un ami proche de Slavko Ecimovic.

 28   Q.  Ils étaient témoins de mariage, à leurs mariages respectifs, n'est-ce


Page 19630

  1   pas ?

  2   R.  Et ils étaient amis de classe également.

  3   Q.  Slavko Ecimovic est la personne qui a dirigé l'opération de Prijedor,

  4   et ceci, en guise de rappel à l'intention des Juges de la Chambre ?

  5   R.  Oui, il était ingénieur.

  6   Q.  Est-il exact que dans les villages musulmans autour de Prijedor, il y

  7   avait des unités dans chaque village. Ils avaient des tranchées, ils

  8   disposaient de radios. Quoi qu'il en soit, est-il exact qu'ils avaient des

  9   tranchées et qu'ils sont restés à cet endroit-là pendant un certain temps ?

 10   R.  Ceci n'est pas exact. Il s'agit encore une fois d'informations

 11   virtuelles qui sont les seules dont vous semblez disposer.

 12   Q.  Est-ce quelque chose que vous avez évoqué dans votre livre lorsque vous

 13   avez parlé d'équipement radio important ?

 14   R.  Eh bien, il s'agissait de rumeurs serbes qui visaient à accuser les

 15   Musulmans de quelque chose dont ils n'étaient pas coupables.

 16   Q.  Et à quelle distance se trouvait le front de Prijedor, je veux parler

 17   de n'importe quel front, en direction du corridor ou en direction de Bihac

 18   ?

 19   R.  Il n'y avait pas de front à Prijedor. Il n'y avait pas d'affrontement.

 20   Il n'y avait pas de guerre. Et pour ce qui est d'autres lignes de front, eh

 21   bien, tout dépend du cadre temporel dont vous souhaitez parler, des dates.

 22   Vous voulez parler de 1992 ?

 23   Q.  Oui, le 30 mai. C'est ce que vous avez dit dans votre livre. Le front

 24   se trouvait-il à des centaines de kilomètres à ce moment-là ?

 25   R.  Eh bien, oui.  

 26   Q.  Pourquoi les Serbes avaient-ils des fortifications autour de leurs

 27   maisons à Prijedor ainsi que des sacs de sable ? C'est quelque chose que

 28   vous évoquez dans votre livre également.


Page 19631

  1   R.  Parce que les Serbes de Prijedor entendaient sans cesse à la radio de

  2   Prijedor qu'à côté de la ville, ou dans les environs, il y avait des

  3   milliers de Moudjahidines et un nombre de mercenaires étrangers. On leur

  4   avait expliqué qu'il y avait des unités d'élite qui encerclaient Prijedor

  5   et qui étaient prêtes à commettre des massacres à Prijedor et dans ses

  6   environs.

  7   Q.  Mais à l'intérieur du territoire, Monsieur Sivac, à des centaines de

  8   kilomètres de l'endroit où se trouvait la Brigade de Prijedor, n'y avait-il

  9   pas effectivement des groupes qui tuaient des agriculteurs qui étaient en

 10   train de travailler, qui étaient dans les tranchées et qui communiquaient

 11   entre eux ?

 12   R.  Il n'y avait pas d'unité paramilitaire musulmano-croate dans le secteur

 13   de Prijedor.

 14   Q.  Bien. Alors, nous allons en parler davantage.

 15   Le HOS ou le HVO étaient-ils à Prijedor ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Et si je devais vous dire que nous disposions de conversations

 18   téléphoniques interceptées par des Croates ? Ils ont écouté nos

 19   conversations et ils expliquent dans le détail la bataille de Kozorac et de

 20   Prijedor et parlent de 3 000 soldats musulmans qui ont été faits

 21   prisonniers. Qu'auriez-vous à répondre à cela ?

 22   R.  Ecoutez, c'est ce que vous dites. Je n'ai jamais entendu d'un

 23   quelconque membre du HOS ou du HVO à Prijedor. Encore quelque chose que

 24   vous montez de toutes pièces pour justifier ce qui est arrivé dans la

 25   municipalité de Prijedor.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier de

 27   ce document, s'il vous plaît.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Monsieur le Témoin, veuillez regarder les noms qui figurent sur ce

  2   document dans l'intervalle.

  3   R.  Je sais que certaines de ces personnes ont été tuées lors de la

  4   tentative de libération de Prijedor. Certaines personnes ont été emmenées à

  5   des camps, et voilà, c'est tout. Le 30 mai, le groupe a été neutralisé en

  6   moins de deux heures, après quoi il y a eu une destruction généralisée de

  7   Prijedor. L'entrée du groupe de Slavko était un prétexte pour procéder au

  8   nettoyage ethnique de la ville de Prijedor.

  9   Q.  Vous parlez de nettoyage ethnique alors qu'il y avait des Musulmans des

 10   villages voisins qui affluaient à Prijedor. Comment arrivez-vous à

 11   concilier cela ?

 12   R.  Vous déformez tout. Au moment où le nettoyage ethnique a commencé à

 13   Kozarac, il n'y avait qu'un petit nombre de personnes de Kozarac qui sont

 14   arrivées à Prijedor. Ces personnes ont été hébergées chez leurs amis à

 15   Puharska. Après un court laps de temps, un ultimatum a été lancé par les

 16   autorités afin que même ces personnes soient évacuées et envoyées à

 17   Trnopolje tout de suite. Dans le secteur de Prijedor, lorsque le nettoyage

 18   a commencé --

 19   Q.  Veuillez ne pas aborder cela. Comment arrivez-vous à expliquer ce que

 20   vous venez de dire ? Que signifie nettoyage 

 21   ethnique ?

 22   R.  Le nettoyage ethnique c'est ceci : lorsqu'un groupe utilise ou a

 23   recours à la pression, la force ou la police pour détruire d'autres groupes

 24   ethniques, des personnes qui ont d'autres croyances, d'autres cultures et

 25   qui prient d'autres dieux.

 26   Q.  Vous dites, n'est-ce pas, dans votre livre que les personnes ont quitté

 27   Prijedor avant même le début de la guerre et avant la crise, et que ces

 28   personnes souhaitaient que leurs noms figurent sur la liste pour qu'elles


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  1   puissent acheter un billet d'avion même si les personnes étaient contre et

  2   que certains membres de la famille voulaient les convaincre du contraire ?

  3   R.  Un certain nombre d'habitants de Prijedor qui ne supportaient plus la

  4   situation --

  5   Q.  Je ne vous demande pas de me fournir des explications. Je vous pose

  6   cette question-ci : à la page 221 de votre livre, n'avez-vous pas dit que

  7   Lejla, Alma et Sena, des membres de la famille de votre frère, souhaitaient

  8   partir ? Leurs amis, membres de leurs familles et voisins souhaitaient les

  9   dissuader, mais ils étaient déterminés. N'avez-vous pas dit dans votre

 10   livre que chacun souhaitait acheter un billet d'avion pour se rendre à

 11   Belgrade et pour ensuite se rendre en Europe ?

 12   R.  Encore une fois, vous déformez les faits, et encore une fois, vous me

 13   posez plusieurs questions à la fois. Tout d'abord, il y a les personnes qui

 14   souhaitaient acheter des billets d'avion pour aller à Belgrade pour pouvoir

 15   voyager plus loin et aller dans d'autres pays du monde. C'était avant le

 16   nettoyage ethnique.

 17   Q.  Je ne demande pas de me lancer des mots. Je vous demande de me répondre

 18   au sujet d'événements. Je ne vous demande pas de parler de nettoyage

 19   ethnique. Ne qualifiez pas tout ceci avec des termes. Je ne vais pas vous

 20   permettre cela, pas comme on vous l'a autorisé dans l'affaire Stakic. Je

 21   vous demande d'être très précis et de laisser de côté la question du

 22   nettoyage ethnique.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soyez précis lorsque vous posez votre

 24   question aussi, Monsieur Karadzic.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande au témoin de ne pas qualifier les

 26   différents événements. C'est aux Juges de la Chambre de qualifier les

 27   différents événements.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour poser ce type de question, il faut


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  1   que vous présentiez le livre au témoin.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Avez-vous écrit ceci : Ils ont tenté de les dissuader, mais ils étaient

  4   déterminés. Il y a de nombreuses personnes qui étaient déterminées à

  5   Prijedor ?

  6   R.  Monsieur Karadzic, il y a deux questions en une. La question que vous

  7   venez de me poser porte sur le mois de septembre 1992. C'est la raison pour

  8   laquelle je vous demande de bien vouloir me donner les lieux et les dates

  9   de ces événements. En septembre 1992, lorsque les convois de Musulmans de

 10   Bosnie ont commencé à quitter Prijedor, Alma et Sena, qui étaient membres

 11   de ma famille du côté de mon cousin Omer, savaient qu'Omer et Adnan avaient

 12   été tués à Omarska. Il s'agissait de deux membres de leur famille. C'est à

 13   ce moment-là que ces personnes ont décidé de rejoindre un convoi pour se

 14   diriger vers la Bosnie centrale vers le territoire contrôlé par l'ABiH.

 15   Je vais revenir maintenant à votre première question. Votre première

 16   question était la suivante : vous m'avez demandé si les gens ont quitté

 17   Prijedor en avion. Non, parce que Prijedor ne dispose pas d'un aéroport.

 18   Les gens de Prijedor se rendaient à Banja Luka d'abord, et ensuite ces

 19   départs en avion ont eu lieu avant le mois d'avril, aux mois de mars et

 20   avril 1992.

 21   Q.  Et lorsque les conflits ont éclaté, est-ce que les différentes

 22   personnes souhaitaient toujours partir ?

 23   R.  Lorsque les conflits ont éclaté, plus personne ne pouvait bouger et

 24   plus personne ne pouvait quitter Prijedor.

 25   Q.  A moins qu'il n'y ait eu un accord et que l'on puisse organiser un

 26   convoi ?

 27   R.  Ce n'est que plus tard, vers la fin du mois d'août, que les premières

 28   personnes ont commencé à quitter la ville au moyen de convois organisés par


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  1   la Croix-Rouge de Prijedor.

  2   Q.  Merci. Dans votre déposition, mais non pas dans votre livre, vous

  3   prétendez que les biens immobiliers personnels ont été repris et que les

  4   titres de propriété ont été échangés. Veuillez nous donner un exemple, s'il

  5   vous plaît, pour illustrer comment ces titres de propriété ont été échangés

  6   de façon illégale. Veuillez nous donner un exemple de la cession d'un bien

  7   immobilier parce que c'est quelque chose qui était interdit pendant la

  8   guerre ?

  9   R.  C'était respecter la loi du bout des lèvres. A Prijedor, des choses

 10   étranges se sont produites. De nombreux biens immobiliers ont été détournés

 11   par les Serbes parce que le tribunal et les services en charge n'ont pas

 12   tout à fait respecté les règles. Heureusement, après les accords de Dayton

 13   et après que les gens soient revenus à Prijedor, ils ont pu récupérer leurs

 14   biens qui leur avaient été enlevés de façon illégale. Il y a encore des

 15   gens aujourd'hui à Prijedor qui n'ont pas pu récupérer leurs biens

 16   personnels.

 17   Q.  Et si un réfugié se trouve dans une région musulmane de Bosnie, je suis

 18   sûr que cela peut poser des problèmes. Veuillez simplement donner un

 19   exemple d'un bien immobilier qui ferait l'objet d'un abus.

 20   R.  Je peux vous citer le cas d'un de mes collègues. Je ne sais pas si j'ai

 21   le droit de citer son nom. C'était une des personnes les plus riches de

 22   Prijedor.

 23   Q.  C'est à vous d'en décider, si vous souhaitez citer son nom ou pas.

 24   Qu'est-ce qu'on lui a enlevé et qui était-ce ?

 25   R.  C'était un citoyen fort riche de Prijedor et son bien a été repris par

 26   un de ses anciens collègues. C'est lui qui dirigeait la société, il était

 27   propriétaire de la société, et l'autre personne a simplement immatriculé la

 28   société en son nom. Après 1995, après que le propriétaire d'origine soit


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  1   revenu à Prijedor après la guerre, il a dû trouver des témoins et a dû se

  2   tourner vers certaines instances juridiques pour prouver qu'il s'agissait

  3   de son bien et non pas de la personne qui avait abusé de son bien.

  4   Q.  Est-ce que vous dites que quelqu'un a abusé des biens qui étaient les

  5   siens ?

  6   R.  Oui, tout à fait. Mon collègue était dans un camp, et lorsqu'il a été

  7   transféré du camp à un pays tiers, un collègue du tribunal de Prijedor a

  8   falsifié ses documents et a quasiment abusé de ses biens, de ses actifs.

  9   Q.  Ne parlons pas d'individus qui ont falsifié des documents. Je souhaite

 10   savoir ce que faisait l'Etat à l'époque. Est-ce que c'est l'état qui,

 11   automatiquement, abusait des biens des habitants ?

 12   R.  Vous m'avez demandé de vous citer un exemple. Il est vrai que l'Etat

 13   était engagé dans ce type de choses également, à savoir abuser. C'était un

 14   abus de biens personnels. Ma famille, par exemple, devait quitter Prijedor.

 15   Nous avons dû signer 15 documents différents et nous devions renoncer à nos

 16   droits concernant nos biens immobiliers pour obtenir le certificat

 17   définitif nous permettant de quitter Prijedor.

 18   Q.  Et qu'en est-il des 14 autres documents ?

 19   R.  Pour ce qui est de ces autres documents, c'était une façon de retirer

 20   de l'argent aux Croates et aux Musulmans de Bosnie qui souhaitaient quitter

 21   Prijedor. Il fallait remettre 14 documents pour pouvoir obtenir le

 22   certificat définitif permettant de partir de Prijedor. Ceux-ci étaient des

 23   justificatifs du versement de tous les montants dus, les factures

 24   d'électricité, d'eau, et la voiture était déposée au SUP comme s'il

 25   s'agissait d'un butin de guerre. Je ne me souviens pas de tous les

 26   documents, mais il fallait les fournir, ils devaient être rassemblés, et

 27   ensuite il fallait se rendre au département militaire pour obtenir le

 28   certificat définitif justifiant du versement de toutes les sommes dues et


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  1   permettant le départ de la Republika Srpska. Ma femme a dû se rendre au

  2   département militaire pour obtenir tous ces certificats. A l'époque, mon

  3   fils avait 6 ans et ma fille en avait 11, au moment où nous avons décidé de

  4   partir.

  5   Q.  Autrement dit, vous avez dû surmonter énormément d'obstacles avant de

  6   pouvoir partir ?

  7   R.  Ces obstacles existaient, bien sûr, mais ces obstacles avaient été

  8   conçus pour extorquer le peu d'argent qui nous restait encore, parce qu'il

  9   fallait payer pour tous ces documents. Je vais vous donner un exemple un

 10   petit peu futile, parce qu'il fallait, par exemple, régler les factures

 11   d'électricité et il fallait régler à l'avance la consommation

 12   d'électricité. Ces personnes dont les maisons avaient brûlé, avaient été

 13   détruites, c'était la même chose. Pourquoi fallait-il payer sa facture

 14   d'électricité une année à l'avance lorsque la maison n'existait plus ?

 15   Q.  Alors, il y avait beaucoup d'obstacles qui rendaient difficile

 16   l'obtention de ces documents ?

 17   R.  Non, ce n'était pas en raison de la situation politique. Parce qu'ils

 18   tentaient de nous extorquer le peu d'argent qu'il nous restait.

 19   Q.  Veuillez envoyer tous ces documents et certificats que vous venez de

 20   nous décrire au bureau du Procureur.

 21   R.  Monsieur Karadzic, ce que je vous dis, c'est ceci : Pour obtenir le

 22   dernier certificat, il fallait remettre tous ces documents. Ce certificat,

 23   je l'ai encore. Cela correspondait à l'époque où mon fils qui avait 6 ans

 24   et ma fille qui avait 11 ans. Ceci a été délivré par le département

 25   militaire. Qu'est-ce que le département militaire avait à voir avec mes

 26   enfants qui étaient mineurs ? Mais j'ai gardé ces certificats.

 27   Q.  Moi je vous parle des 14 documents; je ne vous parle pas des

 28   certificats définitifs. Moi je vous parle des 14 documents que vous deviez


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  1   allez chercher. Est-ce que vous pourriez nous remettre ces documents ? Est-

  2   ce que vous pouvez nous dire si votre bien a été repris ou pas ? Je

  3   souhaite parler de vos actifs.

  4   R.  Tous les documents devaient être remis au département militaire. Peut-

  5   être que vous devriez demander à vos collaborateurs de remettre la main sur

  6   ces documents qui ont sans doute été archivés au département militaire.

  7   Nous avions juste un dernier certificat dont nous avions besoin pour

  8   pouvoir partir.

  9   Q.  Quelle est la taille du poste de sécurité publique de Prijedor ? La

 10   superficie totale ?

 11   R.  C'est sur deux étages d'un côté, trois étages de l'autre, un bâtiment

 12   qui a été rajouté par la suite et deux ailes. Alors, de quel cadre temporel

 13   souhaitez-vous parler ?

 14   Q.  Du mois de mai 1992.

 15   R.  Je n'ai pas entendu votre question.

 16   Q.  En mai 1992, quelle était la taille du poste de police ?

 17   R.  Je ne l'ai pas mesuré. C'était un bâtiment assez typique correspondant

 18   aux postes de police qu'il y avait partout à Prijedor, à Brcko et ailleurs.

 19   Q.  Dans l'unité de détention, combien de personnes pouvaient être détenues

 20   en une seule et même fois ?

 21   R.  Cela dépendait. Entre dix et 15 personnes. C'était une pièce assez

 22   petite parce que les services de Sûreté de Prijedor ne disposaient pas de

 23   prison. C'était juste un lieu de détention, un centre de détention, et

 24   après le prononcé de la peine devant un tribunal correctionnel, les détenus

 25   étaient emmenés à la prison de Banja Luka. Il y avait une prison à Banja

 26   Luka, et c'est là qu'étaient emmenés les détenus de Prijedor.

 27   Q.  Merci. Le 10 juin, vous avez été placé en garde-à-vue par erreur parce

 28   qu'on a confondu votre nom avec celui de quelqu'un d'autre. Ils ont


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  1   recherché Nusret, et ensuite ils vous ont fait venir, et vous êtes rentré à

  2   la maison parce qu'on avait remarqué qu'il s'était agi d'une erreur ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Ensuite, vous avez été de nouveau placé en garde-à-vue le 20 juin. Vous

  5   en avez parlé et vous avez écrit à ce sujet. Vous souvenez-vous de cela,

  6   que les personnes étaient amenées à cet  endroit progressivement, petit à

  7   petit ? Par exemple, il y a un homme que l'on fait venir, et ensuite

  8   quelqu'un d'autre, après un certain temps, un homme qui appartient au même

  9   cercle ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  Vous souvenez-vous si on vous a dit que vous seriez à Keraterm ou à

 12   Omarska pendant un court laps de temps seulement, que vous seriez interrogé

 13   et qu'ensuite on vous renverrait soit à la maison, soit ailleurs ?

 14   R.  Personne ne m'a jamais dit cela.

 15   Q.  Et vous a-t-on dit lorsque vous avez été placé en détention pour la

 16   première fois, en garde-à-vue, que vous n'alliez pas rester longtemps ?

 17   R.  Personne ne nous avait dit cela.

 18   Q.  Je vais retrouver cela et vous dire qui vous a dit cela. Je suis en

 19   mesure de vous le dire. On vous a fait venir à Keraterm une seule fois,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et à Omarska, qui a interrogé les prisonniers à Omarska ?

 23   R.  Il y avait des hommes chargés de cela que je connaissais. Il s'agissait

 24   d'inspecteurs de service de la Sûreté de Prijedor, et c'était des hommes

 25   qui avaient travaillé au détachement de la Sûreté de l'Etat de Prijedor. Il

 26   y avait également des hommes qui avaient fait partie du monde des affaires,

 27   des réservistes qui faisaient partie des services de Sûreté et deux

 28   inspecteurs qui sont arrivés directement de service de Sûreté de Banja


Page 19640

  1   Luka. C'est eux qui nous ont interrogés.

  2   Q.  Merci.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je note l'heure et je propose que nous

  4   levions l'audience pour aujourd'hui.

  5   Monsieur Sivac, je dois vous demander si, par rapport à notre calendrier,

  6   lorsque nous siégeons dans la cadre de ces débats et compte tenu de

  7   l'ampleur des éléments de cette affaire, il y a énormément de choses qui se

  8   produisent. Et compte tenu de la situation, nous ne sommes pas en mesure de

  9   siéger demain, mais vendredi, et le témoin que nous allons entendre par

 10   vidéoconférence a été fixé pour ce jour-là. Donc je vous demande si cela

 11   vous poserait de grandes difficultés si nous devions vous demander de

 12   poursuivre le reste de votre déposition lundi de la semaine prochaine ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette question me surprend un petit peu. Cela

 14   fait un certain temps que je suis là, mais je m'en remets à vous, Madame,

 15   Messieurs les Juges. Je ferai ce que vous me demandez de faire.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Tieger, avez-

 17   vous un commentaire à faire ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je crois que nous

 19   avons échangé des messages électroniques avec la Défense par

 20   l'intermédiaire d'un représentant du Greffe, et nous avons fourni les

 21   observations quant aux circonstances qui nous intéressent ici. Nous sommes

 22   optimistes, voire peut-être trop optimistes, mais nous espérons pouvoir

 23   terminer la déposition vendredi. Nous comprenons tout à fait qu'il y ait

 24   cette possibilité à savoir qu'il faille poursuivre la déposition lundi. Je

 25   crois que les parties sont d'accord pour demain et sur le fait que le

 26   témoin qui va être entendu par vidéoconférence constitue une propriété pour

 27   vendredi.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si la représentante du Greffe peut se


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  1   rapprocher de la tribune, s'il vous plaît.

  2   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier de

  4   ce dernier document, Votre Excellence, le dernier document qui vient juste

  5   d'être affiché.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton ? Le document du SJB de

  7   Prijedor ?

  8   M. TIEGER : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Juge, et

  9   j'imagine que cela vous a déjà été communiqué, j'ai proposé quelques petits

 10   conseils pratiques qui pourraient nous venir en aide afin que les choses ne

 11   débordent pas trop lundi. Encore une fois, cela, bien sûr, dépend d'un

 12   grand nombre de facteurs, mais si la Chambre est en mesure de mettre en

 13   œuvre cette proposition, j'en serais fort heureux.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai demandé au juriste de la Chambre

 15   d'entrer en contact avec le témoin par le truchement de la Section chargée

 16   des Victimes et des Témoins afin de pouvoir voir qu'est-ce qui convient le

 17   mieux pour le témoin, et ce qui est certain c'est ce que nous allons

 18   commencer par le témoignage vendredi par vidéoconférence.

 19   Est-ce que vous avez quelque objection que ce soit pour que ce document

 20   soit admis ?

 21   Mme EDGERTON : [interprétation] Non.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Très bien, le document sera versé

 23   au dossier.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, avant de --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'abord, il faudrait attribuer une cote

 26   au document.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 28   Juges, Madame le Juge, il s'agira de la pièce 65 ter 1D4347, et cette pièce


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  1   recevra la cote 1D1741 [comme interprété], je vous remercie.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Oui, Monsieur Robinson, je vous

  3   écoute ?

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, avant que nous

  5   ne levions l'audience, je souhaite simplement remercier le témoin pour

  6   s'être montré aussi accommodant par rapport à notre calendrier.

  7   Deuxièmement, je souhaite m'excuser auprès de l'Accusation et des Juges de

  8   la Chambre de ne pas avoir notifié l'existence de cet ouvrage avant, parce

  9   que ceci aurait dû être fait.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord sur ce

 12   point et je me joins à vous. Je pense que nous partageons le même sentiment

 13   et nous apprécions le fait que le témoin ait fait preuve de souplesse,

 14   qu'il se soit montré aussi arrangeant.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Sivac, la Chambre apprécie

 16   vraiment la compréhension dont vous avez fait preuve.

 17   L'audience est levée.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le vendredi 30

 20   septembre 2011, à 14 heures 15.

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