Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 11 novembre 2011

  2   [Audience publique]

  3   [Le témoin vient à la barre]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Bonjour à tous. Nous siégeons

  7   toujours conformément à l'article 15 bis en l'absence du Juge Kwon. Je vous

  8   demande quelques instants, Monsieur le Témoin, nous avons quelques

  9   questions d'intendance à régler au niveau de l'Accusation. Monsieur Tieger,

 10   je vais m'adresser à vous, mais en fait je ne pense pas que ce soit

 11   vraiment à vous de résoudre cela. Il y a des documents qui sont illisibles,

 12   numéros 65 ter 09163 et 16923, qui sont quasiment illisible ou

 13   partiellement illisible dans la version originale. Est-ce que vous pourriez

 14   vous assurer que l'on télécharge des versions plus claires ?

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous le ferons.

 16   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Puis la vidéo 65 ter 40108 n'a pas

 17   été téléchargée sur le système de prétoire électronique. L'Accusation

 18   pourrait peut-être s'assurer que ceci est modifié, et puis la mauvaise

 19   vidéo a été transmise aux Juges de la Chambre même si l'avis en vertu de

 20   l'article 92 ter nous dit que l'Accusation verse le document en référence

 21   65 ter 40387, en fait, le CD qui est fourni parle en fait d'une référence

 22   65 ter 40287. Peut-être que ceci pourrait être modifié.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci beaucoup.

 25   Docteur Karadzic, allez-y.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Madame,

 27   Messieurs les Juges. Bonjour, Docteur Kirudja.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Docteur Karadzic.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

  2   Juges, je voudrais vous demander quelque chose. Je suis toujours disposé à

  3   travailler d'arrache-pied si nécessaire, de façon à faciliter la tâche

  4   également pour nos témoins, mais je voulais vous demander s'il était

  5   possible de ne pas travailler le 21 novembre ou de travailler le vendredi

  6   qui suit le 21 novembre, parce qu'il s'agit d'un jour férié chrétien très

  7   important que ma famille a célébré depuis 800 ans, c'est la fête de

  8   l'Archange Michael. Est-ce qu'il serait possible donc de prendre une

  9   décision à ce sujet ?

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Donc vous nous demandez en fait de

 11   ne pas avoir d'audience le 21 mais d'avoir une audience le 25; est-ce exact

 12   ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si nécessaire, on pourrait peut-être rattraper

 14   l'audience du 21 le 25.

 15   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Le programme, comme vous le savez,

 16   est établi de longue date et, par conséquent, il risque d'y avoir des

 17   chevauchements avec d'autres personnes ou d'autres audiences qui se

 18   tiendraient le 25. Mais nous allons nous pencher sur votre demande le

 19   moment voulu.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 21   LE TÉMOIN : CHARLES KIRUDJA [Reprise]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

 24   Q.  [interprétation] Docteur Kirudja, je voudrais vérifier auprès de vous

 25   que ce que je vais dire est exact, à savoir que différents documents de

 26   nature politique ou d'autres documents de l'époque, une fois qu'ils

 27   arrivent dans ce prétoire concernant ce procès au pénal, c'est-à-dire

 28   lorsque ces documents politiques deviennent des éléments dans un procès


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  1   pénal, nécessitent d'avoir des définitions peut-être plus pointues de

  2   certains termes, il faut donc se concentrer sur les définitions de

  3   différents aspects, je vous demande donc de prendre ceci à l'esprit, et ne

  4   pensez pas qu'il s'agit d'une attaque personnelle ou d'une attaque contre

  5   les Nations Unies, si je vous demande d'où viennent les documents et si je

  6   vous demande de définir ceci très précisément. Sachez que c'est dans cet

  7   esprit-là. Est-ce que cela vous convient, Monsieur le Témoin ?

  8   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je voudrais

  9   consigner quelque chose qui est au compte rendu d'audience des six

 10   précédents procès en ce qui concerne dans ma déposition et mes déclarations

 11   également en tant que témoin ainsi que ma présence dans les prétoires. Tous

 12   les documents qui sont référencés abondamment par des notes en bas de page

 13   portent sur les documents qui sont des documents des Nations Unies.

 14   L'Accusation a eu le droit d'avoir accès à ces documents, ce n'est pas moi

 15   qui leur ait donné ce droit, ce sont les Nations Unies qui leur ont donné

 16   le droit de puiser dans les archives des Nations Unies. Ils ont sélectionné

 17   tous les documents pour arriver à leur fin dans ce procès.

 18   De plus, ils ont obtenu l'autorisation des Nations Unies de verser ces

 19   documents au dossier et en raison des sélections qu'ils ont faites ces

 20   documents portaient mon nom en tant qu'auteur, et j'étais présent pour

 21   valider ces documents. Le document que l'on appelle "La déclaration

 22   consolidée" est un document qui reprend de manière fidèle ces documents.

 23   De plus, à l'époque où ces documents ont été rédigés et comme je l'ai déjà

 24   mentionné dans les précédents procès durant lesquels j'ai déposé, à

 25   l'époque ces documents n'avaient pas pour objectif d'être présentés devant

 26   un tribunal. Ils avaient pour objectif d'envoyer des rapports le long de la

 27   chaîne hiérarchique des Nations Unies. Par conséquent, il faut également

 28   garder à l'esprit et les replacer dans ce contexte. J'espère que j'ai


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  1   précisé tout cela de manière appropriée.

  2   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci, Docteur Kirudja. Ceci est

  3   très utile et, si vous me le permettez, j'espère que ceci a fourni des

  4   précisions à l'attention du Dr Karadzic, il est évident que ceci a

  5   constitué une précision à l'attention des Juges de la Chambre. Il va donc

  6   continuer son contre-interrogatoire compte tenu de ce que vous venez de

  7   dire. Si vous rencontrez des difficultés compte tenu des activités ou des

  8   postes que vous occupiez ou des missions que vous aviez à l'époque,

  9   n'hésitez pas à nous le faire savoir.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Poursuivez, Docteur Karadzic.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Docteur Kirudja. Merci beaucoup.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Tout d'abord, je voudrais commencer par le sujet le plus sensible,

 15   c'est-à-dire devenir civils en Bosnie-Herzégovine -- ou plutôt, parler des

 16   municipalités qui faisaient partie de votre mission, tout particulièrement

 17   Bosanski Novi, et cetera. Au paragraphe 41 de votre déclaration consolidée,

 18   Monsieur le Témoin, est-ce que vous souhaitez avoir cette déclaration

 19   devant vous ? Ou peut-être qu'il serait préférable que l'on vous donne une

 20   copie papier de ce document.

 21   R.  Si cela vous convient, et si cela convient aux Juges de la Chambre, si

 22   l'accusé mentionne un paragraphe, tel que, par exemple, le paragraphe 41,

 23   qui vient d'être mentionné par l'accusé, peut-être que vous pouvez vous

 24   borner à l'afficher sur les écrans. Cela me suffira, je pense.

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Nous essayons de nous en tenir à des

 26   documents qui portent directement sur les questions posées dans le cadre

 27   d'un interrogatoire principal ou d'un contre-interrogatoire, donc je m'en

 28   remets à l'expertise du personnel dans le prétoire. Merci.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je peux fournir à

  2   M. -- enfin, je peux dire à Dr Kirudja une version papier de la déclaration

  3   consolidée du témoin, s'il souhaite l'avoir.

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Ceci sera peut-être utile durant

  5   toute la déposition du témoin. Donc s'il n'y a pas d'objection de la part

  6   de la Défense - et je pense que dans ces circonstances - il n'y en aura

  7   pas. Ceci sera très utile effectivement.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Pourrais-je vous demander de vous concentrer sur le paragraphe 41, où

 10   vous avez décrit comment le maire de Dvor vous a informé des souhaits du

 11   maire de Bosanski Novi qui vous a confirmé que les Musulmans -- ou plutôt,

 12   les gens qui souhaitaient quitter Bosanski Novi devaient le faire de

 13   manière volontaire, et nous voyons la totalité du paragraphe, n'est-ce pas

 14   ?

 15   Est-ce qu'ils vont informer qu'auparavant les autorités serbes de la

 16   Krajina de Bosnie -- ou plutôt, les municipalités avaient fait une offre à

 17   ces civils qui pouvaient donc aller plus dans les terres en direction de la

 18   Republika Srpska, et donc sortir des zones qui étaient tout particulier

 19   affectées par les combats, c'est-à-dire vers Doboj et ailleurs, alors que

 20   les négociateurs musulmans ont refusé et ont simplement demandé de partir

 21   en direction de la Croatie et de l'Europe ?

 22   R.  Le paragraphe 41 qu'a mentionné le Dr Karadzic, c'est-à-dire le

 23   paragraphe 41 est très clair, à savoir que le maire de Dvor et pour que les

 24   Juges de la Chambre comprennent bien, Dvor est une municipalité de l'autre

 25   côté de la rivière lorsqu'on est en Bosnie. Dvor faisait partie de ces

 26   municipalités qui relevaient de la responsabilité du secteur nord. D'après

 27   les Nations Unies, c'était donc une zone protégée et c'était donc un

 28   territoire qui était reconnu comme faisant partie de la Croatie, donc, il


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  1   s'agit de Dvor. Le maire en question, M. Pasic, est le maire de Bosanski

  2   Novi, c'est-à-dire de l'autre côté de la rivière, c'est-à-dire en Bosnie.

  3   Le paragraphe décrit une série d'événements qui sont arrivés à un tel stade

  4   où le maire de Dvor parlait pour le compte du maire Bosanski Novi et

  5   demandait que les réfugiés qui venaient de Bosanski Novi passent par les

  6   zones protégées des Nations Unies, et qu'on leur permette de sortir de

  7   cette zone à condition qu'ils le fassent de manière volontaire. Mais vous

  8   voyez qu'il y a le terme de manière volontaire qui est entre guillemets.

  9   Alors le Dr Karadzic me demande si j'avais été informé de quelque

 10   chose d'autre. La réponse est négative, ils m'ont dit exactement ce qui

 11   figure dans ce paragraphe, ni plus ni moins que ce qui figure dans ce

 12   paragraphe.

 13   Q.  Merci, Docteur Kirudja. Dans le paragraphe 43, vous expliquez ce

 14   qui s'est passé en décrivant les événements. Vous mentionnez que vous avez

 15   remarqué que le maire et ses associés semblaient dire, vous parlez

 16   d'événements tout à fait authentiques lorsqu'ils parlaient des aspirations

 17   des Serbes. Ils paraient donc avec autorité des aspirations des Musulmans,

 18   sans qu'un seul représentant musulman soit présent. De toute façon, on peut

 19   voir ceci dans le paragraphe.

 20   Vous voyez ensuite un peu plus bas dans le paragraphe, qu'ils ont

 21   donc appelé M. Pasic qui est donc le maire de Bosanski Novi, et ce dénommé

 22   Pasic était disposé à vous parler, mais vous n'avez pas souhaité lui

 23   parler; cependant, ils vous ont quand même encouragé à rentrer en contact

 24   avec ce dénommé Pasic. Est-ce que vous ne pensez pas que ça aurait été une

 25   bonne idée que de parler au maire de Bosanski Novi après tout ? Est-ce que

 26   ceci n'aurait pas été utile de façon à savoir exactement de quelles

 27   informations ils disposaient ?

 28   R.  Merci, Docteur Karadzic. Ce paragraphe résume les événements qui


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  1   se sont déroulés. Si vous regardez bien dans ce paragraphe, j'ai décliné de

  2   parler au maire, M. Pasic, au téléphone, Docteur Karadzic. En fait c'était

  3   le maire Borojevic qui disait : J'ai M. Pasic au téléphone, est-ce que vous

  4   souhaitez lui parler ?

  5   Alors il faut garder à l'esprit que je venais d'arriver dans les

  6   bureaux du maire Borojevic pour parler de ce que je considérais comme

  7   relevant de la responsabilité tout à fait habituelle d'une opération de

  8   maintien de la paix des Nations Unies, dans le cadre de cette zone de

  9   protection des Nations Unies. On me donne un combiné téléphonique pour

 10   parler à un maire qui ne rentre pas dans la zone de protection, dont la

 11   municipalité ne rentre pas dans la zone de protection des Nations Unies. On

 12   me demandait d'aborder une question si semblait certes très intéressante,

 13   mais qui semblait difficile à gérer, bien qu'urgente. Par conséquent, j'ai

 14   jugé qu'il n'était pas vraiment que le téléphone n'était pas le mode de

 15   communication approprié pour aborder ceci, et c'est la raison pour laquelle

 16   je n'ai pas souhaité lui parler au téléphone. Alors la question posée par

 17   le Dr Karadzic implique que je ne souhaitais pas lui parler, point barre.

 18   En fait, je considérais cette question comme très importante, mais j'ai

 19   décliné de lui parler au téléphone, et en fait le paragraphe se conclut en

 20   disant que très peu de temps après cela, nous nous sommes rencontrés,

 21   c'est-à-dire que j'ai rencontré M. Pasic.

 22   Q.  Merci. Etes-vous d'accord, Docteur Kirudja, que M. le maire Pasic

 23   avait de nombreuses raisons d'avoir peur concernant compte tenu de la

 24   concentration des populations civiles, des civils musulmans, donc, et

 25   compte tenu de la présence également d'éléments qui n'étaient pas vraiment

 26   contrôlés - je parle ici de groupes paramilitaires, et cetera - est-ce

 27   qu'il avait des raisons donc d'avoir peur que quelque chose se produise ?

 28   Est-ce que cela vous semble raisonnable de penser cela ?


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  1   R.  Si vous procédez chronologiquement, au moment où on m'a demandé

  2   de lui parler, je ne disposais pas de tous les détails qui m'auraient

  3   permis d'avoir une conversation censée avec lui. Par conséquent, je ne peux

  4   ni être d'accord ni ne pas être d'accord avec le Dr Karadzic sur les

  5   motivations de ce monsieur. Il m'a fallu des jours, voire des semaines pour

  6   vraiment me pencher sur cette question, et ceci est d'ailleurs mentionné

  7   dans les paragraphes qui suivent celui qui vient d'être mentionné. Et nous

  8   sommes arrivés à certaines conclusions sur ce qui se passait.

  9   Q.  Merci. Ai-je raison de penser qu'avant d'avoir pris vos fonctions dans

 10   les Balkans, c'est-à-dire dans la zone de protection des Nations Unies, on

 11   vous a informé sur la situation du pays dans lequel vous alliez être posté,

 12   n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, il est tout à fait raisonnable de partir du principe que nous

 14   avons été informés de la situation du pays dans lequel nous allions être

 15   postés et au sein duquel nous allions travailler.

 16   Q.  Merci. Je vous prie de m'excuser de devoir vous poser cette question,

 17   cependant, fort de notre expérience, il semble que beaucoup de personnes

 18   soient arrivées dans notre pays avec certaines idées préconçues et nous

 19   avons dû apporter des précisions à ces personnes. Durant ces séances

 20   d'information, est-ce que vous vous êtes forgé une opinion sur les

 21   événements qui se produisaient en Bosnie ?

 22   R.  Je voudrais préciser certains éléments aux Juges de la Chambre.

 23   Concernant le fait que nous avons reçu des séances -- nous avons bénéficié

 24   des séances d'information, je voudrais donc préciser ceci pour la gouverne

 25   des Juges de la Chambre.

 26   Les séances d'information, comme toujours, au sein des Nations Unies,

 27   portent sur la nature de la mission qui figure dans un document du Conseil

 28   de sécurité des Nations Unies, et par conséquent, vous devez connaître les


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  1   documents; cependant, ces documents sont limités quant aux informations

  2   qu'ils fournissent sur le contexte de la mission. Si le Dr Karadzic parle

  3   de contexte plus vaste, dans ce cas-là, bien sûr, les Nations Unies ne vont

  4   pas aller au-delà de leur mandat et de leurs intentions concernant les

  5   missions qui sont les leurs.

  6   Q.  Merci. Par conséquent, je peux partir du principe que vous ne saviez

  7   pas que la partie musulmane de Bosnie-Herzégovine, dès le mois de juin

  8   1991, avait déjà constitué son propre conseil ethnique pour la sécurité

  9   nationale ainsi qu'un sous comité pour la région de la rivière Una qui

 10   était limitrophe avec votre zone. La zone de la rivière Una est

 11   probablement à proximité de la rivière Una. Est-ce que vous saviez déjà

 12   cela au printemps 1991 ?

 13   R.  Non, Docteur Karadzic, ce détail précis je ne l'aurais pas su avant

 14   d'arriver dans la zone en question.

 15   Q.  Merci. Est-ce exact que vous avez été témoin des préparatifs de guerre

 16   et de l'appui à la guerre de la part des Musulmans qui vivaient dans toute

 17   l'Europe ? Ils se rassemblaient et ils préparaient tant du matériel que du

 18   personnel pour prêter leur soutien à ces efforts de guerre. Vous l'avez

 19   mentionné dans le paragraphe 25 de votre déclaration. Est-ce que vous

 20   pourriez, s'il vous plaît, consulter ce paragraphe 25. On vous a informé

 21   que 1 600 personnes souhaitaient revenir en direction de Velika Kladusa,

 22   Bihac, Bosanska Krupa et Otoka. Ensuite, vous mentionnez qu'ils s'étaient

 23   réunis au club de foot d'Ilovac.

 24   Est-ce que vous avez remarqué cela ? Est-ce que vous savez qu'il s'agissait

 25   d'une brigade importante, c'est-à-dire deux brigades légères qui voulaient

 26   retourner en Bosnie afin de participer aux combats ?

 27   R.  Je voudrais revenir sur deux éléments qui découlent du commentaire

 28   assez long que vient de faire le Dr Karadzic. Tout d'abord, il a parlé du


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  1   fait que j'avais "observé les préparatifs de guerre" et "l'appui à la

  2   guerre de la part de Musulmans qui vivaient dans toute l'Europe." Il est

  3   évident que je n'ai pas pu observer cela, si j'ai bien compris son

  4   commentaire, parce que c'est quelque chose qui s'est produit avant que

  5   j'arrive sur place. Par conséquent, il est évident que je n'ai pas pu

  6   observer cela.

  7   Deuxièmement, pour revenir au contenu du paragraphe 25 que l'on m'a demandé

  8   de consulter, ce paragraphe parle de différentes choses. On parle de 1 600

  9   personnes à l'extérieur de Karlovac, c'est-à-dire que ce n'est pas du tout

 10   à proximité de Bosanski Novi. Nous parlons ici de Karlovac, et nous sommes

 11   en 1992, alors que le commentaire précédent parle d'événements précédents.

 12   Si j'ai bien compris le Dr Karadzic, les personnes qui s'étaient

 13   rassemblées au club de football d'Ilovac, à Karlovac, donc, souhaitaient

 14   revenir dans la zone mentionnée par le Dr Karadzic. Effectivement, j'ai

 15   observé cela puisque je suis allé les voir et je leur ai parlé.

 16   Deuxièmement, le Dr Karadzic a raison de dire que ce ne sont pas les gens

 17   eux-mêmes qui m'ont dit cela, mais c'est le général qui était le commandant

 18   du 10e Corps, lorsque j'ai transmis la demande de ces personnes au général,

 19   celui-ci m'a dit : "Non, nous n'allons pas leur permettre de traverser la

 20   zone de protection des Nations Unies en provenance de Karlovac en direction

 21   de la Bosnie parce que ce sont des combattants qui sont entraînés et nous

 22   n'allons pas leur permettre de faire cela." Donc dans cette mesure, la

 23   déclaration est exacte.

 24   Q.  Merci. Vous venez de nous donner le contexte du paragraphe 26, par

 25   conséquent je ne vais pas m'attarder sur ce paragraphe. Saviez-vous que ce

 26   même jour, c'est-à-dire le 29 avril, le jour que vous avez mentionné dans

 27   le paragraphe 26, des achats étaient réalisés par le truchement du

 28   ministère croate mais pour le compte des Musulmans. En fait, ce n'est pas


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  1   qu'un seul ministère, ce sont différents ministères croates, c'est-à-dire

  2   ministère de la Défense, de l'Intérieur, mais également d'autres instances

  3   gouvernementales qui étaient basées à Zagreb.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour faciliter la tâche de tout le monde,

  5   pourrait-on consulter le document D041 [phon], s'il vous plaît.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Il s'agit d'un document qui émane de l'Association islamique de Croatie

  8   et de Slovénie et parle d'argent qui aurait été reçu pour l'achat d'armes

  9   qui seraient ensuite envoyées en direction de la Bosnie-Herzégovine.

 10   R.  Est-ce qu'il s'agit d'une question ?

 11   Q.  Oui, Docteur Kirudja, j'allais vous demander si vous saviez quels

 12   étaient les liens entre ces organisations, donc, je parle des organisations

 13   islamiques dans toute l'Europe, qui a été dirigé par le Dr Fatih Ali

 14   Hasanein, donc, de ces organisations d'une part, et des autres

 15   organisations qui procédaient à l'armement des populations pour les besoins

 16   de la guerre en Bosnie?

 17   R.  Non, je n'étais pas au courant de leur lien.

 18   Q.  Merci. Savez-vous que ceci pouvait arriver en Bosnie-Herzégovine en

 19   provenance de Croatie, soit par les zones de protection des Nations Unies,

 20   c'est-à-dire ou en traversant la Sava, ça pouvait également venir par la

 21   côte Adriatique ?

 22   R.  Si votre question était de savoir s'il était possible que cela se

 23   produise, bien sûr, je dois admettre que c'était une possibilité. Il est

 24   possible que cet itinéraire ait été emprunté. Mais je ne peux pas vous

 25   confirmer que je savais que cet itinéraire était emprunté. Je dois avouer

 26   que c'était une possibilité. Il en avait plusieurs.

 27   Q.  Merci. Est-ce que ceci aurait pu être utile dans vos rapports que

 28   d'avoir eu vent de cette information à l'époque, et dans des délais


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  1   raisonnables ? Est-ce que ceci aurait été utile de façon à ce que vous ayez

  2   une image complète de la situation ?

  3   R.  Je ne sais pas si j'ai le droit de poser des questions ou si je dois me

  4   borner à répondre à ces questions. Mais ma réponse à cette question aurait

  5   été une question.

  6   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Si vous avez besoin de poser des

  7   questions pour préciser le contenu d'une question qu'on vous pose, même si

  8   ce n'est pas quelque chose que nous encourageons, si cela signifie que vous

  9   êtes mieux à même de répondre à cette question, n'hésitez pas à le faire.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je lis la question posée par le Dr Karadzic,

 11   il s'agit d'une question hypothétique. On me demande si nous avions reçu

 12   des rapports à ce sujet. Mais on n'a jamais eu de rapport à ce sujet. Ils

 13   ne nous ont jamais fait rapport à ce sujet. Donc est-ce que ceci aurait

 14   fait une différence ?

 15   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] En fait, Docteur Karadzic, je

 16   suppose que vous demandez au témoin si les Nations Unies auraient bénéficié

 17   d'une connaissance ou d'une meilleure compréhension de la situation si tant

 18   est qu'ils aient reçu ces rapports. Est-ce que c'est ce que vous posiez

 19   comme question ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, effectivement.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Docteur Kirudja, la partie serbe n'était pas suffisamment douée pour

 23   informer les médias, les Nations Unies, c'est vraiment qui est au cœur de

 24   la question que je pose au témoin.

 25   R.  Je vous remercie de cette précision, Docteur Karadzic, et j'ajouterais

 26   un seul commentaire. Je ne qualifierais pas les Serbes comme manquant de

 27   talents. L'expérience que j'ai vécue dans les secteurs sous leur contrôle

 28   ou les secteurs où ils avaient le pouvoir sur la vie quotidienne des gens,


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  1   en particulier dans les zones protégées par les Nations Unies, c'est qu'ils

  2   étaient capables de sélectionner ce qu'ils souhaitaient que nous sachions

  3   et ce qu'ils souhaitaient que nous ne sachions pas. Mais ce n'est pas

  4   qu'ils manquaient de compétence.

  5   Q.  Pourriez-vous nous dire si l'obtention de renseignements opportuns, eu

  6   égard aux opérations consistant à armer les Musulmans de Bosnie grâce à de

  7   diverses organisations religieuses à l'époque de l'embargo et des

  8   sanctions; est-ce que vous pourriez nous dire si l'obtention de ces

  9   renseignements aurait pu être utile aux Nations Unies ?

 10   R.  Je ne suis pas très au clair au sujet de la question de l'embargo et

 11   des sanctions, je ne vois pas très bien comment cette question aurait pu

 12   jouer un rôle dans cette situation. Est-ce que vous pourriez m'apporter

 13   quelques précisions, Docteur Karadzic ?

 14   Q.  Si vous vous rappelez, dès 1991, il existait un embargo sur les

 15   importations de toute sorte de matériel de guerre ou d'armement dans l'une

 16   quelconque des républiques de l'ancienne Yougoslavie. Vous vous rappellerez

 17   que des mesures avaient été prises par les Nations Unies à cet égard et

 18   publiées dans une résolution.

 19   R.  Je dirais que je suis devenu conscient de tout cela un an à peu près

 20   avant la mise en place de la mission, oui, j'étais au courant.

 21   Q.  Donc, en plein embargo sur les importations d'armes, ce que je

 22   souhaiterais vous dire c'est qu'un grand nombre d'organisations

 23   internationales, qui passaient principalement par la Slovénie et la

 24   Croatie, a fait parvenir des quantités énormes d'armement, et si ce n'étais

 25   pas des armements, ces organisations transféraient d'importantes sommes

 26   d'argent pour achat d'armement à destination de la partie musulmane en

 27   Bosnie-Herzégovine; est-ce que vous étiez au courant de cela ? Dans ce

 28   cadre, est-ce qu'il leur aurait utile aux Nations Unies, de disposer en


Page 21275

  1   temps utile d'information sur ce qui était en train de se passer ?

  2   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, ayant entendu cette

  3   question, me vient le souhait de préciser à l'intention des Juges de la

  4   Chambre un certain nombre des hypothèses que nous avons -- auxquelles nous

  5   avons été confrontés s'agissant de déterminer le contexte dans laquelle se

  6   situerait notre mission, et ce, en particulier à partir du moment où le nom

  7   de FORPRONU a été donné à cette mission des Nations Unies. Il s'agissait en

  8   fait d'une mission assez inhabituelle que je pourrai aller jusqu'à

  9   qualifier d'expérimentale, si vous me permettez l'emploi de ce terme, même

 10   si les Nations Unies frémiraient en m'entendant utiliser ce terme

 11   d'expérimental. Mais, aujourd'hui, je suis à la retraite, et je peux

 12   utiliser ce terme. Les Nations Unies ont mis en place une mission destinée

 13   à mieux à comprendre les gens qui se battaient en Croatie, les zones de

 14   Croatie qui avaient été prises et qui ne l'auraient pas été sans les

 15   combats. Il n'existait pas en fait de formule magique pouvant aboutir à un

 16   règlement de la situation, donc, la mission a été mise en place pour geler

 17   en quelque sorte les combats au stade où ils en étaient arrivés, en

 18   espérant que les combattants pourraient être convaincus par la parole de ne

 19   pas se relancer dans de nouveaux combats. Donc tout cela a été fait dans

 20   l'espoir de mettre un terme aux combats.

 21   C'est sur la base de cette hypothèse ou de cet objectif même si cela peut

 22   vous paraître un peu bizarre que la mission n'a pas été installée

 23   entièrement dans la zone des combats, mais elle a été basée dans une zone

 24   que les Nations Unies pensaient être une zone pacifique. Par conséquent, le

 25   QG de la mission a été choisi et il s'est agi de Sarajevo, et les

 26   bataillons de logistique militaire de tous les endroits possibles ont été

 27   stationnés à Banja Luka. Pourquoi ? Parce que c'était un endroit

 28   "pacifique." Donc, l'hypothèse de départ c'était que cette zone était


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  1   pacifique alors que le Dr Karadzic nous dit qu'elle était en train de

  2   s'armer.

  3   Quand je suis arrivé en voiture, du secteur ouest, dans cette autre région

  4   de Bosnie, les militaires m'ont fait traversé toute la Bosnie parce que

  5   c'était plus tranquille de passer par là. Donc, l'hypothèse de départ toute

  6   entière était que la Bosnie était pacifique et que la Croatie, dans les

  7   zones qui avaient été prises, n'était pas pacifique. Donc, entendre

  8   aujourd'hui pour moi qu'en Bosnie-Herzégovine, ils préparaient la guerre,

  9   la seule chose que je peux dire à ce sujet c'est qu'il m'a fallu jusqu'au

 10   mois de mai pour découvrir qu'il y avait quelque chose qui n'était pas

 11   pacifique en Bosnie-Herzégovine, et nous l'avons découvert à travers de

 12   grandes difficultés. Je faisais partie du convoi avec le commandant de la

 13   force, le général Nambiar. Nous avons traversé Bihac et nous avons été

 14   arrêtés par des gens dans une zone que nous pensions pacifique.

 15   Alors, j'ai pris tout ce temps pour expliquer quelque chose de simple, à

 16   savoir que la région au sujet de laquelle j'entends le Dr Karadzic dire

 17   qu'elle était en train de s'armer, nous, nous pensions qu'elle était en

 18   paix et que cette paix allait durer.

 19   Q.  Merci. Est-ce que vous avez été informé que, déjà avant votre arrivée,

 20   les combats qui se déroulaient en Croatie étaient en train de s'étendre en

 21   Bosnie et qu'à partir de la partie croate, on tirait déjà sur la Bosnie et

 22   que ces tirs ont fait des victimes bosniaques très tôt dès le mois de

 23   juillet, et ce, jusqu'au début de la guerre en Bosnie en tant que telle ?

 24   R.  Juillet de quelle année, Docteur Karadzic ?

 25   Q.  1991.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions rapidement

 27   sur le document D1911. C'est un rapport de police qui date du mois de

 28   juillet 1991.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Veuillez, je vous prie, voir ce qui se dit dans ce rapport. Il est

  3   question du territoire de Bosanski Novi, et de Dubica, ainsi que de

  4   Gradiska et de Srbac, qui sont limitrophes avec la Croatie et on indique

  5   également dans ce rapport que non seulement il y a regroupement de forces

  6   armées dans ces secteurs, mais qu'on constate la présence de tirs dans ces

  7   secteurs. Les 26 et 27 juillet, peut-on lire, des armes automatiques sont

  8   introduites également dans ces secteurs à partir du territoire de Croatie

  9   et les tirs sont incessants, ils ont duré deux heures, et cetera, et

 10   cetera.

 11   Alors, est-ce que vous aviez appris, grâce aux informations qui vous

 12   avaient été fournies, que vous pouviez vous trouver face à une situation de

 13   ce genre et que la guerre était en train de déborder depuis la Croatie vers

 14   la Bosnie en traversant la frontière ?

 15   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, j'ai demandé la

 16   date exacte, on m'a répondu juillet 1991. La mission n'a été autorisée

 17   qu'un an plus tard, c'est-à-dire en avril 1992. J'ai aussi occupé votre

 18   attention, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, pour vous

 19   dire que, d'après ce que l'on pouvait savoir à cette époque-là, la guerre

 20   entre les parties ne s'était pas terminée, et pourtant le Conseil de

 21   sécurité des Nations Unies a décidé, en toute bonne foi, un peu comme s'il

 22   s'agissait d'une prière, d'un Ave Maria, donc, en toute bonne foi, que nous

 23   allions nous rendre sur place en espérant améliorer la situation ou, en

 24   tout cas, empêcher qu'elle n'empire mais notre espoir était qu'elle

 25   s'améliore. Oui, nous savions bien que la guerre n'était pas terminée, ce

 26   qui explique pourquoi une mission des Nations Unies telle que la FORPRONU

 27   était dirigée par un soldat. La plupart des missions des Nations Unies ne

 28   sont pas dirigées par un soldat. Elles sont dirigées par un civil lorsqu'il


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  1   s'agit de mettre en place ou d'appliquer une formule de paix. La mission

  2   dont nous parlons, elle, était dirigée par le général Satish Nambiar pour

  3   reconnaître le fait que les combats se poursuivaient sur place. Et

  4   d'ailleurs, j'en ai fait la meilleure expérience lorsque j'ai fait le

  5   voyage pour me rendre sur place. Il y avait des chars fumants et des canons

  6   pointés aux postes de contrôle. Oui, si les mots que l'on peut utiliser

  7   consistent à parler de combat, il est clair que chacun savait que des

  8   combats se poursuivaient encore, mais ce que j'aimerais que les Juges

  9   comprennent, c'est à la fois que les gouvernements signataires de cette

 10   mission, le gouvernement de Belgrade et le gouvernement de Zagreb étaient

 11   convenus qu'on allait mettre un terme au combat ou, en tout cas, qu'un

 12   statut quoi allait être instauré, et que donc qu'il s'agissait d'un accord.

 13   Q.  Merci. Docteur Kirudja, j'avais l'intention d'explorer, grâce à mes

 14   questions, le fait de savoir si vous aviez été informé à temps que la

 15   crise, qui avait commencé en Bosnie, avait commencé beaucoup plus tôt, bien

 16   avant le mois de mai 1992, et que pendant pratiquement une année entière,

 17   toutes les municipalités - et en particulier Bosanski Novi - avaient été

 18   exposées à des obus venant d'en face, qu'il y avait des tirs, et tout ceci

 19   même si officiellement la guerre en Bosnie-Herzégovine n'avait pas encore

 20   démarré. Est-ce que vous conviendrez de cela avec moi -- est-ce que vous

 21   saviez depuis combien de temps les tensions étaient en train de s'accroître

 22   en Bosnie ?

 23   R.  En fait, moi, je comprends la question du Dr Karadzic d'une façon

 24   différente. Ma responsabilité se situait dans un secteur particulier,

 25   puisqu'il s'agissait du secteur qui était limitrophe de ces municipalités

 26   bosniaques dont nous parlons, et la difficulté que je vivais, et

 27   d'ailleurs, dans ma déposition écrite vous en trouverez mention, c'est que

 28   mon quartier général était convaincu de la justesse de son hypothèse à lui,


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  1   à savoir que cette région était pacifique. Ma tâche à moi consistait à dire

  2   à ces responsables de la mission que quelque chose, qu'ils n'avaient pas

  3   prévu et très franchement dont ils ne souhaitaient pas être informés, était

  4   en train de se passer, à savoir qu'il y avait des troubles importants sur

  5   place. Je ne me souviens plus dans quel paragraphe mais enfin le

  6   représentant du bureau du Procureur pourra nous indiquer ce paragraphe

  7   montre qu'à un certain moment, j'ai été ramené à l'ordre puisqu'on m'a dit

  8   que je consacrais trop de temps de parler de cette région.

  9   Il nous a fallu très peu de temps pour découvrir qu'il y avait des troubles

 10   sur place mais je souhaiterais également être très clair devant les Juges

 11   de la Chambre, ces troubles n'étaient pas identiques dans toutes les

 12   localités. Il s'agissait de trouble qui affectait de façon sélective

 13   certaines localités le long de la frontière en raison de la nature

 14   particulière de ces municipalités dont vient de parler le Dr Karadzic. Dans

 15   le rapport que j'ai à l'écran devant moi, il est question des objectifs

 16   assignés qui consistaient à expliquer à la population ce dont nous rendions

 17   compte dans nos rapports, et a cet égard, nous avions divisé la frontière

 18   en deux parties. Une partie dans laquelle les municipalités étaient

 19   contrôlées par les Serbes

 20   des deux côtés. Je veux parler des municipalités de Kostajnica de la zone

 21   protégée par les Nations Unies, de Dvor, ou de l'autre côté, la

 22   municipalité de Bosanski Novi et les autres municipalités où les Serbes

 23   étaient aux manettes des deux côtés. Là, il n'y avait pas de trouble. Il

 24   n'y avait pas de difficultés.

 25   Mais les troubles et les difficultés commencent quand on arrive à Velika

 26   Kladusa, Bosanska Krupa, Prijedor, donc en Bosnie où les Musulmans étaient

 27   aux manettes d'un côté et où il y avait une zone protégée par les Nations

 28   Unies de l'autre côté sous contrôle serbe. Voilà où se trouvaient les


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  1   difficultés. Donc les difficultés n'étaient pas les mêmes partout, il y

  2   avait une sélectivité des lieux où les difficultés se faisaient à jour.

  3   Q.  J'espère que vous comprendrez que je m'interromps quelques instants

  4   pour écouter les interprètes. Je tiens à vous remercier, Docteur Kirudja,

  5   pour les précisions que vous venez d'apporter. Mais indépendamment du fait

  6   que vous étiez mandaté par les Nations Unies dans les zones sous protection

  7   des Nations Unies, l'Accusation espère que, grâce à vos connaissances et à

  8   vos rapports, elle sera en mesure d'apporter la preuve de certains

  9   événements qui se sont passés du côté bosniaque. C'est la raison pour

 10   laquelle je vous interroge à ce sujet.

 11   J'aimerais vous montrer maintenant une conversation interceptée bien

 12   avant votre arrivée sur les lieux.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 14   numéro 30177 [phon].

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Vous verrez à la lecture de la transcription de cette écoute que le 31

 17   août 1991 des Serbes ont été tués à Bosanski Novi par un tireur embusqué

 18   qui se trouvait physiquement du côté de la Croatie, et mon intention est de

 19   démontrer que la crise a grossi peu à peu en Bosnie. Je voudrais également

 20   donc démontrer qu'elle n'a pas éclaté du jour au lendemain, mais que tout

 21   cela s'est fait sous la très grande influence de la guerre qui se déroulait

 22   à côté.

 23   Alors nous verrons cette écoute dans quelques instants. Je montrerai que le

 24   31 août il y avait des tirs à Bosanski Novi et que des gens s'y sont fait

 25   tuer. Je vous demande si qui que ce soit vous aurait dit que la guerre

 26   était en train de déborder depuis la Croatie vers la Bosnie et qu'il y

 27   avait de nombreux tirs qui visaient la Bosnie à ce moment-là ?

 28   R.  Nous n'en sommes arrivés à cette conclusion qui est la vôtre, à savoir


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  1   que la guerre était en train de s'étendre, non pas à ce moment précis,

  2   Docteur Karadzic, au moment où vous situez votre référence, mais après

  3   notre arrivée sur les lieux, et une partie conséquente de mon rapport avait

  4   pour but de mettre par écrit cette réalité bien précise, à savoir que la

  5   guerre était en train de s'étendre dans des zonez où les Nations Unies

  6   voyaient leur mandat en train de se modifier et essayaient donc d'établir

  7   un nouveau mandat. Nous avons déployé des efforts très conscients pour

  8   mettre par écrit ce fait, au risque d'ailleurs de nous faire taper sur les

  9   doigts. Mais, bon, je ne trouve pas de meilleur mot ou de meilleure

 10   expression que se faire taper sur les doigts pour indiquer que nous avons

 11   reçu des avertissements, des avertissements consistants à nous dire que les

 12   Nations Unies n'avaient pas mandat, à ce moment-là, d'intervenir dans ces

 13   régions. Mais je n'avais pas le choix, et je n'étais pas le seul, les

 14   autres non plus n'avaient pas de choix, et j'ai dit dans les termes les

 15   plus fermes qui soient ce que j'avais à dire à des gens au quartier général

 16   qui ne souhaitaient pas entendre ce que j'avais à dire. Les gens qui

 17   venaient nous voir cherchaient un abri et ils n'avaient rien à voir avec

 18   l'existence ou la non existence d'un mandat. Il y avait un drapeau, un

 19   drapeau bleu, qui battait l'air dans les endroits où se trouvaient ces

 20   populations et ces populations ont pris le chemin le plus court pour

 21   arriver jusqu'à nous. Ils nous ont raconté leur histoire, et nous avions le

 22   devoir de répercuter cette histoire. Mais je suis d'accord avec le Dr

 23   Karadzic pour que nous discutions des dates exactes où tout cela a

 24   commencé, étant entendu, bien sûr, qu'il s'agissait de dates dont je ne

 25   pouvais pas attester de l'exactitude au moment où je suis arrivé sur les

 26   lieux.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez vous pencher sur la partie inférieure

 28   du texte à l'écran où les propos de Krajisnik sont repris. Il s'adresse à


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  1   moi et il me dit que deux hommes ont été tués dans un café par un tireur

  2   embusqué physiquement situé de l'autre côté de la rivière, c'est-à-dire du

  3   côté croate. Lorsque vous aurez trouvé cette partie du texte, dites-le-moi.

  4   Ah, elle n'est plus à l'écran.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je demande le versement au dossier

  6   de ce document dans les mêmes conditions que celles qui concernent toutes

  7   les conversations interceptées déjà versées au dossier jusqu'à présent.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce que vous conviendrez, Docteur Kirudja, que nous voyons dans ce

 10   texte qu'il est question de meurtre de sang froid perpétré depuis l'autre

 11   côté de la rivière et que ceci en dit long sur l'état d'esprit et

 12   l'évolution de l'état d'esprit à Bosanski Novi bien avant que la guerre n'y

 13   éclate ?

 14   R.  Malheureusement, Docteur Karadzic, les mots que vous utilisez sont

 15   beaucoup trop forts pour moi. Vous parlez de meurtre de sang froid, ce qui

 16   est l'expression d'un jugement, donc je ne peux pas corroborer cette façon

 17   de s'exprimer puisque ce que je vois dans ce texte c'est que quelque chose

 18   s'est passé, c'est tout.

 19   Q.  Merci. Dans la troisième fenêtre à partir du bas, je dis qu'il s'agit

 20   de meurtre de sang froid parce que c'est ainsi que nous avons considéré

 21   l'événement. Mais il a eu lieu bien avant le début de la guerre en Bosnie.

 22   Mais enfin, bon.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Excellence, je demande le versement au

 24   dossier de ce document.

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] C'est une écoute. Vous demandez que

 26   ce document soit enregistré aux fins d'identification ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, comme je l'ai fait avec les autres écoutes

 28   déjà versées au dossier.


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  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Le document est admis.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce D1915 MFI, Monsieur

  3   le Président, Madame, Messieurs les Juges.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Docteur Kirudja, vous avez témoigné dans l'affaire Milosevic, document

  6   65 ter numéro 22681 dont je demande l'affichage. En page 15 550 du compte

  7   rendu d'audience, à la date du 4 février 2003, vous avez confirmé que les

  8   forces croates ont violé le plan Vance en attaquant Miljevac, le plateau de

  9   Miljevac; est-ce que vous vous rappelez avoir dit cela ? Dans ce même

 10   document, deux pages plus loin, vous qualifiez les Croates comme étant

 11   l'agresseur contre des zones protégées par les Nations Unies, et vous dites

 12   qu'ils n'avaient pas le droit d'agir ainsi; êtes-vous d'accord aujourd'hui

 13   avec cette déclaration faite par vous en 2003 ?

 14   R.  Monsieur le Président, il me serait très utile de voir l'intégralité de

 15   la déclaration plutôt que ces simples extraits. Par ailleurs, je réponds

 16   oui, j'ai un souvenir précis de la localité dont il est question dans ces

 17   passages et, bien sûr, j'ai témoigné au sujet d'un certain nombre

 18   d'événements au cours des six procès où j'ai été entendu comme témoin mais

 19   il me serait très utile de revoir le contexte général d'où sont tirées ces

 20   références.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, cela pourrait être utile.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'y a pas de traduction serbe, donc,

 23   pouvons-nous nous contenter pour le moment sur les écrans simplement du

 24   texte anglais ? Page 15 550 du compte rendu d'audience de cette affaire, et

 25   ensuite 15 556 et 15 557. J'en demande l'agrandissement à l'écran. Ce qu'on

 26   voie maintenant à l'écran, c'est la page 14 550, et nous avons besoin de la

 27   page 15 550.

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ce qui est à l'écran actuellement


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  1   concerne l'affaire Brdjanin et pas l'affaire Milosevic. Je vois que c'est

  2   Mme Korner qui procède à l'interrogatoire.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une page plus loin encore, est-ce qu'on peut

  4   voir le haut de la page, affiché actuellement ? Maintenant, un peu plus

  5   bas, est-ce qu'on peut voir la réponse du Dr Kirudja ? Pourrait-on

  6   également consulter la page suivante, s'il vous plaît ?

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce que vous vous souvenez qu'il s'agissait d'une crise et que les

  9   zones de protection des Nations Unies faisaient l'objet d'attaque, en

 10   septembre 1992, et est-ce que vous vous souvenez également qu'à Banja Luka,

 11   il y a eu une rébellion armée, ce que l'on peut appeler une mutinerie, dans

 12   ma propre armée ?

 13   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, j'aimerais que l'on

 14   replace dans son contexte ce que j'ai dit concernant une violation. Il est

 15   évident que nous parlions d'un rapport du Conseil de sécurité, qui avait

 16   tiré cette conclusion, ce n'était pas ma propre conclusion. Comme vous le

 17   voyez, à la ligne 9, M. Milosevic me posait des questions sur ce rapport.

 18   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Le rapport est un rapport du Conseil

 19   de sécurité des Nations Unies, il doit être donc considéré de manière

 20   indépendante. Comme tout autre fonctionnaire des Nations Unies, vous

 21   receviez les rapports du Conseil de sécurité, n'est-ce pas ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation] D'accord.

 25   Q.  Est-ce que vous vous souvenez de la crise que nous avons vécue à Banja

 26   Luka, il y a eu une mutinerie au sein d'une unité, et cette crise à Banja

 27   Luka a duré une dizaine de jours.

 28   R.  Docteur Karadzic, est-ce que vous vous souvenez durant quel mois et en


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  1   quelle année a eu lieu cette crise ?

  2   Q.  Le 9 septembre 1993, c'est-à-dire du 9 septembre au 17 septembre 1993,

  3   il y a eu donc cette mutinerie. La ville a été paralysée. Je crois que vous

  4   avez dû observer cela ou vous avez dû en entendre parler par vos collègues

  5   ou par le biais de rapport émanant de collègues.

  6   R.  Merci, Docteur Karadzic. La manière, dont nous couvrons des événements

  7   qui se produisent dans une zone où vous avez des forces des Nations Unies

  8   qui sont déployées, est la suivante : Nous avions quelqu'un qui était donc

  9   sous mon autorité, il s'appelait Viktor Andreev, et c'est celui-ci qui

 10   aurait, donc, qui m'aurait fait rapport et qui aurait fait rapport à

 11   Sarajevo de ce qui s'était produit. Mais je n'aurais pas été à l'origine de

 12   ces rapports. Ces rapports ne seraient pas passés par mon truchement. 

 13   Q.  [aucune interprétation] 

 14   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Le compte rendu est visiblement --

 15   ah, non, voilà, il a été modifié, merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant consulter

 17   le document D192, très rapidement ? Voyons comment la situation a évolué à

 18   Bosanski Novi, à la mi-avril 1992.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Docteur Kirudja, est-ce que vous saviez qu'à l'époque -- ou plutôt,

 21   durant la période qui a précédé le plan Vance pour la Croatie, il y a eu

 22   des sièges et des attaques qui ont été menées contre des casernes de la

 23   JNA, en Croatie, n'est-ce pas ?

 24   R.  J'ai compris les événements de manière différente de cela, et le

 25   rapport d'ailleurs en parle. Lorsque nous sommes arrivés, en vertu du plan

 26   Vance, on nous avait en fait donné des informations concernant notre rôle

 27   qui pouvait être divisé en trois parties. Vous avez la première partie qui

 28   est le volet militaire. Nous devions en fait prendre la suite de ce qui


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  1   s'était passé au niveau des parties belligérantes, les obliger à baisser

  2   les armes, procéder à la démobilisation et prendre le contrôle militaire. A

  3   l'époque, ma zone de responsabilité tombait dans la zone de responsabilité

  4   du 10e Corps de la JNA, commandée par le général Spiro Ninkovic, et il nous

  5   a donné une bonne idée des combats qui avaient eu lieu avant notre arrivée.

  6   Quand vous avez des combats, bien sûr, il y a des coups qui sont échangés

  7   de chaque côté.

  8   Mais, si vous voulez, les combats ont ensuite évolué en faveur du 10e

  9   Corps, et ils avaient également décidé d'aller au-delà de la rivière Kupa,

 10   mais ne pas aller jusqu'à Karlovac. Donc d'après ce que j'ai pu comprendre,

 11   les combats étaient quand même beaucoup plus en faveur d'une partie plutôt

 12   que de l'autre, et ce général l'a confirmé, lui-même.

 13   Q.  Merci, Docteur Kirudja. Ce serait intéressant d'avoir plus de

 14   temps pour entendre vos opinions concernant cette situation; cependant,

 15   j'aimerais donner lecture d'un paragraphe, parce que je voudrais que l'on

 16   puisse tous bien comprendre quels étaient les éléments, qui étaient en

 17   possession de M. Pasic avant qu'il vous demande de l'aide. Donc je vous

 18   demande un peu de patience. Il s'agit d'un rapport de la police du 16 avril

 19   1992, et le paragraphe dont je vais donner lecture commence ainsi :

 20   "Cependant, avec l'escalade des conflits, l'agression constante contre les

 21   unités et les casernes de la JNA en République de Bosnie-Herzégovine ainsi

 22   que la présence de forces paramilitaires croates, le HOS et ainsi que ZNG,

 23   dans des zones éloignées -- plus éloignées des grandes agglomérations dans

 24   toute la région, et l'absence d'un sentiment de sécurité personnelle et de

 25   sûreté pour les citoyens et pour leur bien mobilier et immobilier ainsi

 26   qu'une situation économique avaient créé des conditions qui amèneraient

 27   certainement à un conflit interethnique avec des conséquences

 28   catastrophiques."


Page 21287

  1   La phrase, qui précède le paragraphe dont j'ai donné lecture, déclare qu'il

  2   s'agit en fait d'une description de la situation en Bosanski Novi.

  3   Donc voilà ma question, Docteur Kirudja : Est-ce que vous acceptez que le

  4   maire de Bosanski Novi, M. Pasic, devait porter tout ceci comme un fardeau,

  5   en juin 1991 jusqu'en septembre 1991, avec des tirs embusqués, des

  6   bombardements, des meurtres de civils, et ensuite il est mentionné que de

  7   nombreuses personnes mobilisées qui s'étaient battues en Slavonie

  8   revenaient ?

  9   Je vais vous donner lecture d'un autre paragraphe :

 10   "Cette absence d'équilibre dans la situation est également exacerbée par la

 11   cessation des conflits militaires ainsi que l'arrivée d'officiers de

 12   maintien de la paix des Nations Unies dans les zones de la Slavonie

 13   occidentale, où de nombreux citoyens mobilisés des zones de Bosanski Novi

 14   étaient cantonnés dans les unités de la JNA."

 15   Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'avant l'arrivée des Nations

 16   Unies et avant que la crise n'éclate à Bosanski Novi, il y avait beaucoup

 17   de choses qui se produisaient, en même temps, et qui avait pour ainsi dire

 18   était les signes précurseurs de cette crise ?

 19   R.  Il est évident, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, que

 20   ce que le maire de Bosanski Novi a dû supporter en 1999 [comme interprété]

 21   avant notre arrivée était peut-être le fardeau qu'a décrit le Dr Karadzic.

 22   Mais je ne pourrais pas le confirmer puisque je n'en ai pas été témoin.

 23   C'est tout à fait possible mais, encore une fois, je ne peux ni le

 24   confirmer ni l'infirmer. Ce que je peux dire c'est qu'à notre arrivée, et

 25   lorsqu'il est entré en contact avec moi, il a commencé à me raconter ce qui

 26   s'était passé -- il a donc commencé à me raconter ce qui s'était passé mais

 27   d'une certaine manière il y avait certains éléments qui ne semblaient pas

 28   coller avec les autres, et je lui avais dit donc vous nous dites qu'il y a


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  1   5 000 personnes qui sont dans une ville, dans la ville dont vous êtes le

  2   maire et que ces personnes souhaitent quitter volontairement, donc, de leur

  3   propre chef cette zone. C'est la question que je lui ai posée, Pourquoi

  4   souhaiteraient-ils partir maintenant ? Pourquoi souhaitent-ils partir et

  5   quitter leurs maisons où ils devraient se sentir à l'aise ? Pourquoi

  6   souhaitent-ils trouver refuge ailleurs ? Pourquoi parlez-vous en leur nom

  7   sans que nous puissions entendre des représentants ? Il faut vous souvenir

  8   que nous ne remettions pas ces propos en question, nous ne connaissions pas

  9   la situation. Donc nous vous [inaudible] des allégations ne semble pas

 10   tenir mais nous a dit, en fait, la situation est différente. Nous lui avons

 11   dit : Dans quelle mesure est-elle différente ? Il a répondu, il s'agit --

 12   il y a un nouveau pays qui s'appelle la Republika Srpska de Bosnie-

 13   Herzégovine, et nous lui avons demandé : Mais quand est-ce que ce pays a

 14   commencé à voir le jour ? Il a répondu : Je ne sais pas. Il a dit : Donc

 15   les Musulmans ne vont pas plaider à l'allégeance. Donc, je lui ai dit :

 16   Donc vous viviez en bon voisinage et d'un seul coup, vous vouliez qu'ils

 17   plaident à l'allégeance à une nouvelle instance ou à une nouvelle entité.

 18   Il a dit : Oui, parce que c'est la règle. Je lui ai dit : Quelle règle Il a

 19   dit : Eh bien, je ne sais pas. Mais c'est ainsi -- c'est ce qui s'est

 20   passé. Il a dit" : Nous voulons qu'ils rendent leurs armes. Je lui ai dit :

 21   Mais vous voulez qu'ils rendent leurs armes, mais pourquoi est-ce qu'ils

 22   souhaiteraient être armés si tout est pacifique ici ? Il a dit qu'il y

 23   avait également des groupuscules qui n'étaient pas -- qui n'appartenaient

 24   pas à une armée régulière, et je lui ai dit : Est-ce qu'il s'agit des

 25   Musulmans ou des Serbes ? Il a dit" : Non. Il y a également des Serbes. Et

 26   il a continué à nous expliquer comme cela, donc, il n'a pas dit qu'il y

 27   avait eu des combats.

 28   Il a simplement dit qu'ils ne voulaient pas rendre les armes et


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  1   qu'ils ne souhaitaient pas plaider à l'allégeance à une nouvelle entité ou

  2   à une nouvelle réalité. Donc, il a dit qu'ils ne voulaient pas en fait

  3   partir de leur propre chef ou de manière volontaire. Il a été tombé -- il

  4   est tombé d'accord avec moi, il a dit : Effectivement. Donc je lui ai dit :

  5   Pourquoi des gens, qui ne veulent pas plaider à l'allégeance, ne souhaitent

  6   pas rendre les armes ? Il m'a dit : D'un point de vue militaire, ils sont

  7   faibles, ils ne peuvent pas vraiment combattre, et ne veulent pas aller

  8   dans l'autre partie de la Bosnie qui est contrôlée par le gouvernement

  9   d'Izetbegovic. Donc ces explications nous ont été données à ce moment-là,

 10   mais n'est jamais revenu aux tensions qui avaient fait rage auparavant, ils

 11   n'ont pas voulu en parler de ces tensions.

 12   Q.  Merci, Docteur Kirudja. J'aimerais que nous nous concentrions

 13   maintenant sur le paragraphe 48 de votre déclaration consolidée. Vous

 14   parlez ici du reste de votre conversation avec M. Pasic. Selon M. Pasic,

 15   ils ne voulaient pas aller plus dans les terres en Republika Srpska;

 16   cependant, il vous a informé qu'un policier serbe avait été tué, qu'une

 17   patrouille de police avait fait l'objet d'une attaque, et qu'ils ne

 18   voulaient pas simplement partir en direction d'une autre partie de la

 19   Bosnie, ils voulaient aller en Europe de l'ouest. Ils ne voulaient pas

 20   aller dans une autre partie de la Bosnie que cette partie de la Bosnie soit

 21   sous contrôle serbe ou sous contrôle musulmane.

 22   Est-ce que l'on vous a informé du fait qu'ils souhaitaient quitter la

 23   Bosnie ?

 24   R.  Oui, mais ce sont les Serbes qui nous ont informés des souhaits des

 25   musulmans. Ce ne sont pas les Musulmans qui m'ont informé de leur souhait.

 26   C'est les Serbes qui m'ont dit : Voilà ce que veulent les Musulmans. Je

 27   veux que ceci soit bien compris.

 28   Q.  Merci. Au paragraphe 50, vous avez dit que vous leur avez demandé ce


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  1   qui avait changé à Bosanski Novi et je remarque que personne ne vous avait

  2   informé de la durée de la crise, personne ne vous avait informé du début de

  3   la crise et personne ne vous avait expliqué quelles étaient les tensions

  4   qui avaient fait rage à Bosanski Novi. Donc je vous pose la question

  5   maintenant : Est-ce que vous saviez que la partie musulmane, à compter

  6   d'avril 1991 et jusqu'au début d'avril 1992, avait plus de 150 000 hommes

  7   armés dans la Ligue patriotique. Ils avaient également des états-majors,

  8   neuf états-majors régionaux et 103 états-majors municipaux, et ils se

  9   préparaient activement pour une guerre contre les Serbes ?

 10   R.  Je ne le savais pas à l'époque et je ne le sais toujours pas

 11   aujourd'hui.

 12   Q.  Merci. Je vous prie de m'excuser mais j'aimerais que vous répondiez

 13   succinctement à mes questions parce que, sinon, nous devrons vous garder à

 14   La Haye jusqu'à la semaine prochaine et ce n'est pas ce que nous

 15   souhaitions. Mais je comprends que c'était notre erreur également de ne pas

 16   vous avoir suffisamment informé; cependant, est-ce que vous acceptez pour

 17   dire que, d'après ce que savait M. Pasic et jusqu'à votre rencontre avec

 18   lui le 27 mai, donc que M. Pasic était au courant de nombreux problèmes qui

 19   n'avaient pas été portés à votre attention, n'est-ce pas ?

 20   R.  Je n'étais pas au courant de tous ses problèmes lorsqu'il est venu me

 21   parler, mais il est venu me parler de doléances très précises comme, par

 22   exemple, le départ de ces 5 000 personnes.

 23   Q.  Vous savez, il faut essayer de préciser tout ceci d'un point de vue du

 24   droit pénal.

 25   Donc, dans le paragraphe 77 de votre déclaration, vous avez parlé du 6

 26   juillet, date à laquelle M. Pasic vous a envoyé une lettre. Je vous demande

 27   de consulter ce paragraphe. M. Pasic a signé cette lettre et il a dit que

 28   les Musulmans et les personnes issues d'autres groupes ethniques partaient


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  1   volontairement de chez eux et demandaient de l'aide pour quitter la

  2   municipalité.

  3   Docteur Kirudja, j'aimerais vous poser la question suivante : Est-ce que

  4   vous êtes d'accord qu'aucune armée du monde ne pourrait tolérer qu'on lui

  5   tire dans le dos et surtout que ces tirs proviennent de leur propre peuple

  6   ?

  7   R.  Je suis tout à fait d'accord. Les autorités au pouvoir ont une

  8   responsabilité, et notamment de garantir l'état de droit dans le territoire

  9   que ces autorités contrôlent. C'était, bien sûr, le propos à ce moment-là.

 10   Je comprends tout cela, bien sûr.

 11   Q.  Au paragraphe 46, vous parlez de votre dilemme et vous essayez de

 12   comprendre pourquoi ces gens veulent quitter leurs maisons, et vous nous

 13   parlez de ce que M. Pasic vous a mentionné. Donc pour que nous ayons une

 14   compréhension complète de la situation, les lignes de front sont loin de

 15   Bosanski Novi, n'est-ce pas, et vous savez comment fonctionnait la ligne de

 16   front ou de confrontation en Bosnie ? Cependant, dans les villages de

 17   Bosanski Novi il y avait une organisation militaire de Musulmans qui

 18   attaquait et qui tuait des petites patrouilles de police. Ceci a mené à une

 19   réaction. Pas du point de vue des autorités dûment constituées, mais de la

 20   part d'organes ou des groupes qui n'étaient pas vraiment contrôlés par les

 21   autorités centrales. Ils se sont faits venger, si l'on peut dire, ou ils

 22   ont riposté et ils ont fait pression contre les Musulmans. Est-ce que vous

 23   comprenez ceci ? Est-ce que c'est ce que M. Pasic vous a dit exactement ?

 24   R.  Non, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je ne pouvais

 25   pas comprendre cela ni à l'époque ni maintenant. Il y a trop d'informations

 26   conflictuelles qui m'ont été transmises par le maire à l'époque. Dans le

 27   paragraphe mentionné précédemment, le paragraphe 77, le Dr Karadzic

 28   mentionne que malgré tous ces échanges, malgré toutes ces discussions afin


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  1   que je puisse comprendre ce qui se passait, et même si en ma présence il

  2   avait accepté qu'ils ne voulaient pas quitter cette zone de leur propre

  3   chef, il a quand même décidé d'écrire cette lettre en avançant que ces

  4   personnes partaient volontairement ou de leur propre chef. Par conséquent,

  5   non, rien n'était compréhensible tel que c'était décrit. Mais une chose

  6   était claire, c'est qu'on les avait forcés à le faire. Ils voulaient le

  7   faire et si je constituais un obstacle, ils me demandaient : "Qui est votre

  8   supérieur, étant donné que nous ne pouvons pas passer par votre truchement

  9   ?"

 10   Q.  Donc pour être précis, Docteur Kirudja, lorsqu'on oblige quelqu'un à

 11   partir même s'il ne souhaite pas partir mais décide cependant de quitter

 12   une zone, je voudrais que l'on comprenne ceci beaucoup mieux. Est-ce que

 13   des événements ont forcé les Musulmans à le faire en plus qu'une pression

 14   qui émanait de groupes qui n'étaient pas contrôlés ou est-ce que ceci a été

 15   le fait de M. Pasic ? Au paragraphe 77 et au paragraphe 46, est-ce que l'on

 16   ne voit pas clairement que les forces régulières n'avaient rien à voir avec

 17   tout cela et que personne ne voulait exercer une pression sur les Musulmans

 18   mais que la pression venait d'événements qui se produisaient ? Par

 19   conséquent, ce ne sont pas les autorités dûment constituées qui les ont

 20   forcés à partir mais ce sont les événements qui se sont déroulés qui les

 21   ont forcés à partir ?

 22   R.  Docteur Karadzic, nous avons tout à fait bien compris cela, nous

 23   l'avons mentionné dans cette déclaration consolidée. Il y a un passage qui

 24   mentionne bien qu'il ne s'agit pas de forces dûment constituées ou

 25   contrôlées par les autorités qui étaient à l'origine de cela. Mais ces

 26   forces irrégulières étaient dans une zone qui était sa responsabilité. Donc

 27   lorsque vous représentez une autorité dûment constituée, vous ne faites pas

 28   de distinguo entre des citoyens qui font des choses régulières et d'autres


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  1   qui font des choses irrégulières, vous devez vous concentrer sur les

  2   victimes des actions de ces forces irrégulières. Et c'est la raison pour

  3   laquelle les implications de ces actions restent entières.

  4   Q.  Mais, Docteur Kirudja, le fait qu'il s'agissait de forces irrégulières

  5   et que M. Pasic donnait des ordres à la Défense territoriale dûment

  6   constituée, donc à une instance régulière, de façon à procéder à une

  7   resubordination de ces forces irrégulières afin de les désarmer, afin de

  8   s'assurer de leur dissolution, ceci montre bien que ces forces n'étaient

  9   pas sous son contrôle. Il s'agit donc bien de forces irrégulières

 10   puisqu'elles n'ont pas de commandement au-dessus d'elles. Mais vous avez

 11   d'un autre côté la police régulière, les forces régulières qui étaient

 12   présentes dans ces villages ou qui se rendaient dans ces villages et qui

 13   armaient les policiers musulmans et qui les chargeaient de protéger ces

 14   populations. Donc la police régulière et les forces régulières étaient sous

 15   le contrôle de Pasic, alors que les forces irrégulières n'étaient pas

 16   contrôlées par qui que ce soit. Est-ce que vous êtes d'accord que la notion

 17   de ne pas être sous le contrôle de qui que ce soit signifie que donc

 18   personne ne peut les contrôler ?

 19   R.  En fait, si c'est cela que voulait vous expliquer le Dr Karadzic, il y

 20   aurait une autre façon de comprendre les choses. Il ne demandait pas aux

 21   irréguliers de se désarmer, il ne demandait pas aux irréguliers de prêter

 22   allégeance par rapport à son pouvoir à lui et d'agir correctement. Il

 23   disait : Je me vois contraint de demander aux irréguliers de prêter serment

 24   par quelque chose qui se trouve à l'autre bout de la ligne, par une autre

 25   autorité, par un autre pouvoir qui désormais porte le nom de réalité. Si

 26   c'est cela que le Dr Karadzic explique, eh bien, à ce moment-là, on aurait

 27   pu lui poser la question de savoir est-ce qu'il était vraiment capable de

 28   faire quelque chose à ce sujet. Nous n'avons jamais discuté de cela. Ce


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  1   dont il parlait c'était ce qu'ils ne souhaitaient pas faire, ce qui leur

  2   aurait été imposé, avec quoi ils étaient obligés de vivre, et ce qui

  3   poussait les gens à partir. Une fois qu'on a compris qu'on ne peut plus

  4   vivre ensemble et c'est repris dans les documents, les Serbes et les

  5   Musulmans lorsqu'ils ont compris cela, tout aurait résolu. Mais il n'était

  6   pas question d'application de la loi, d'irrégulier ou de régulier et même

  7   de crise qui éclate.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Nous allons maintenant faire une

  9   pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 11 h.

 10   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 11   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 12   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, poursuivez, Docteur Karadzic.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Docteur Kirudja, je vais vous demander d'être aussi bref que possible

 16   lorsque vous répondez parce que nous n'avons pas beaucoup de temps et nous

 17   devons passer en revue toute une série de document.

 18   En ce qui concerne votre dernier réponse, cette réponse que vous avez

 19   donnée et votre position à ce sujet, j'aimerais savoir si ceci est lié au

 20   fait, que Pasic n'a pas donné l'ordre de désarmer ou de procéder à la

 21   dissolution d'unités paramilitaires, d'unités paramilitaires serbes.

 22   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je comprends

 23   pourquoi le Dr Karadzic souhaite que je sois bref, et je m'efforcerais de

 24   rester bref. Mais les questions du Dr Karadzic sont plutôt complexes, et si

 25   elles étaient plus simples je pourrais peut-être répondre également de

 26   manière plus succincte.

 27   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, je crois que le Dr

 28   Kirudja a raison.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour revenir à la demande de M. Pasic, en

  2   fait, ce n'était pas, ça ne rimait pas en fait à essayer de lui faire

  3   quelque chose, de ne pas lui faire faire quelque chose, nous voulions

  4   simplement comprendre le Dr Karadzic, c'est tout aussi simplement que cela.

  5   Nous voulions savoir ce qu'il souhaitait que l'on fasse.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Mais Docteur Kirudja, nous avons montré aux Juges de la Chambre par le

  8   truchement d'autres témoins, différents ordres qui provenaient de M. Pasic,

  9   des ordres à l'attention des forces régulières pour prendre des mesures

 10   contre les forces irrégulières; est-ce que vous étiez au courant de cela ?

 11   R.  Oui, nous savions que M. Pasic avait d'autres interlocuteurs. Mais

 12   nous, nous n'étions pas toujours censés connaître ces interlocuteurs.

 13   Q.  Docteur Kirudja, mais il s'agissait d'ordres qui émanaient de M. Pasic,

 14   ainsi que d'ordres provenant de l'assemblée municipale, du parlement, et du

 15   Parti démocratique serbe, visant à prendre des mesures très strictes, et

 16   visant à procéder à la dissolution de ces unités. Il s'agissait d'un ordre,

 17   est-ce que vous étiez au courant de cela, parce que avant la pause, vous

 18   avez répondu en insinuant que M. Pasic aurait dû s'occuper plutôt des

 19   victimes que des unités paramilitaires; est-ce que vous étiez au courant

 20   que M. Pasic avait pris des mesures très sévères contre les unités

 21   paramilitaires ?

 22   R.  Je savais que M. Pasic n'hésitait pas à me dire ce qu'il avait à

 23   l'esprit. Il s'est entretenu avec moi durant toute une période en me

 24   parlant d'un objectif très clair. J'en ai parlé donc dans la déclaration

 25   consolidée. A aucun moment ---

 26   Q.  Avec tout le respect que je vous dois, Docteur Kirudja, je voudrais

 27   juste vous poser la question suivante, et je vous pose la question compte

 28   tenu de la réponse que vous m'avez donnée avant la pause. Je voulais savoir


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  1   si vous saviez que M. Pasic et les autorités municipales avaient donné des

  2   ordres à la Défense territoriale pour procéder à la dissolution des unités

  3   paramilitaires et pour constituer un obstacle à leurs opérations et à leur

  4   fonctionnement ? Est-ce que vous pouvez répondre à cette question ?

  5   R.  Oui, je peux, il ne m'en a jamais parlé.

  6   Q.  Merci. saviez-vous qu'en plus des unités paramilitaires serbes, dans la

  7   municipalité de Novi Grad et dans les villages en question, il existait

  8   également des unités militaire musulmanes secrètes qui étaient dotées

  9   d'énormément d'armes ?

 10   R.  Non, je ne le savais pas.

 11   Q.  Saviez-vous qu'un train avait été affrété pour ces Musulmans afin que

 12   ceux-ci puissent être acheminés des zones dangereuses en direction de Banja

 13   Luka, mais ils ont refusé et ils sont retournés dans leurs villages, ils

 14   sont restés pendant 17 jours supplémentaires?

 15   R.  Je crois que ceci est mentionné dans un des paragraphes de ma

 16   déclaration consolidée.

 17   Q.  Merci

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on demander l'affichage du document de

 19   la liste 65 ter, 23028, s'il vous plaît. Nous n'avons pas besoin de la

 20   version en serbe.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord qu'il s'agit d'un fax du Haut-

 23   commissariat pour les Réfugiés des Nations Unies, faisant état d'un

 24   incident qui s'est produit durant la soirée du 7 juillet, où ils ont reçu

 25   des informations concernant 79 réfugiés qui étaient à l'extérieur du poste

 26   de police et qui demandaient de l'aide pour traverser la rivière et passer

 27   en Croatie. Au deuxième paragraphe, il est mentionné qu'ils ont quitté le

 28   poste de police et qui sont rentrés à Bosanski Novi. Au paragraphe 4, nous


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  1   voyons qu'ils ont rencontré pour la deuxième fois les Musulmans, que cette

  2   réunion a duré trois heures, et qu'ils ont pu poser des questions des

  3   représentants de ces Musulmans.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page

  5   suivante, s'il vous plaît ?

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Au paragraphe 7, vous voyez que le comité de crise de Bosanski Novi a

  8   envoyé une lettre au bureau des Affaires civiles du secteur nord, c'était

  9   votre service, n'est-ce pas ? On vous a informé que 1 233 personnes avaient

 10   demandé aux autorités, la possibilité de quitter la zone, et il était

 11   mentionné que ceux qui n'avaient pas les moyens de transport approprié,

 12   seraient pris en charge par la municipalité. Ceux qui avaient leur propre

 13   véhicule, pourraient utiliser ces véhicules pour quitter la région. Puis,

 14   au paragraphe 8, nous voyons qu'il y avait une réunion entre -- avec le

 15   maire et en bas, il est mentionné que ces 1 300 familles qui remplissaient

 16   les critères ne sont pas les mêmes personnes que ces 5 000 Musulmans qui

 17   ont quitté la zone à bord d'un convoi à la fin du mois de mai, et qui sont

 18   arrivés à s'enfuir, et cetera, et cetera, et les itinéraires qu'ils avaient

 19   empruntés, n'étaient plus empruntables.

 20   Savez-vous Docteur Kirudja, que pas un seul certificat de changement de

 21   propriété n'a été entériné ?

 22   R.  Non, je ne le savais pas.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page

 25   suivante, s'il vous plaît, paragraphe --

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Le paragraphe 10 mentionne que l'adjoint au maire ne fera rien au sujet

 28   de la FORPRONU. Ensuite, regardez ce qui semble être attribué à M. Pasic :


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  1   "Donc les maires de Bosanski Novi et de Banja Luka étaient apparus à la

  2   télévision de Banja Luka, mentionnant que des Musulmans et des Serbes ne

  3   pouvaient plus vivre ensemble. Ils ont dit que ce n'était pas le maire mais

  4   le chef du comité de crise à Banja Luka, M. Radoslav Brdjanin."

  5   Est-ce que vous vous souvenez avoir entendu que c'était M. Pasic qui

  6   avait dit qu'ils ne pouvaient vivre ensemble ? Est-ce que vous êtes

  7   conscient de cette précision que l'on avait prêtée ces propos à M. Pasic,

  8   mais qu'en fait ce n'était pas M. Pasic qui avait prononcé cette phrase ?

  9   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, j'ai l'impression

 10   que, par le biais de ma déposition, on essaie d'affirmer ce qui figure dans

 11   la déclaration consolidée et que quelque part on aurait mentionné quelque

 12   chose concernant M. Pasic. Je ne suis pas au courant de cela mais si on me

 13   demande de faire un commentaire, il faudrait qu'on me précise de quel

 14   paragraphe il s'agit.

 15   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit du

 17   paragraphe 84 qui est mentionné ici, paragraphe 84, donc, de la déclaration

 18   consolidée du Dr Kirudja, et c'est également une pièce associée.

 19   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P3840.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit de la note en bas de page

 22   numéro 211.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Docteur Kirudja, étant donné que nous avons toujours le document devant

 25   nous, est-ce que vous acceptez de convenir avec moi qu'il y a une

 26   différence entre ce que dirait le président de la municipalité où il dit

 27   que tous les groupes ethniques doivent pouvoir vivre ensemble d'une part,

 28   et d'autre part, lorsqu'il s'agit d'un membre du parlement, donc d'un


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  1   député qui parle de toute la population de Bosnie-Herzégovine; s'il s'agit

  2   de Brdjanin, il parle en fait du processus de transformation dans toute la

  3   république, mais s'il s'agit des propos de Pasic, dans ce cas-là, votre

  4   interprétation serait exacte.

  5   Q.  Pour être plus précis, j'aimerais savoir si vous étiez au courant du

  6   fait qu'il y a eu une conférence avant le début de la guerre concernant la

  7   transformation de la Bosnie pour qu'elle devienne une entité composée de

  8   trois républiques.

  9   R.  Non, je n'étais pas au courant de cette conférence.

 10   Q.  Voilà ce que je vais vous présenter comme thèse. Nous acceptions que la

 11   Bosnie-Herzégovine quitte la Yougoslavie en vertu de conditions qui avaient

 12   également été acceptées par la Communauté européenne, et Brdjanin était un

 13   député et il pouvait donc accepter cette proposition. Est-ce que vous

 14   saviez que cette proposition avait été acceptée par l'assemblée et que

 15   cette proposition officielle émanant de l'Union européenne avait également

 16   été acceptée ?

 17   R.  Non, je ne le savais pas.

 18   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Désolée de vous interrompre, mais je

 20   voulais qu'on soit très clairs au niveau du compte rendu d'audience. Page

 21   34, ligne 21, M. Karadzic dit, dans le cadre de la question qu'il pose :

 22   "Je vous demande que vous regardiez les propos que vous aviez prêtés à M.

 23   Pasic vers la fin du paragraphe 11," mais le témoin n'est pas l'auteur du

 24   document que nous avons à l'écran.

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Effectivement, non.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président, mais le Dr

 27   Kirudja a répondu aujourd'hui mais ce n'est pas dans son rapport, en

 28   d'autres termes, que M. Pasic lui avait dit qu'ils ne pouvaient plus vivre


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  1   ensemble. Il est mentionné dans un document du HCR des Nations Unies qu'il

  2   y avait des rumeurs mais on a précisé que ces propos n'avaient pas été

  3   prononcés par M. Pasic mais par M. Brdjanin, et j'ai demandé si le Dr

  4   Kirudja était au courant du fait qu'une conférence avait eu lieu et que M.

  5   Brdjanin était impliqué dans cette conférence et que cette conférence avait

  6   pour objectif de créer trois républiques, et M. Brdjanin était habilité à

  7   parler de tout cela alors que M. Pasic ne l'était pas. Maintenant, je

  8   voudrais verser ce document au dossier, s'il vous plaît.

  9   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] D'accord.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela fait partie des pièces associées, et

 11   porte la cote P3840.

 12   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, Monsieur le Témoin.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, quelquefois, compte tenu de la

 15   manière dont fonctionnent les débats dans ce prétoire, vous affichez un

 16   document émanant d'une autre personne et je ne le connais pas. Donc ce

 17   document émane du HCR des Nations Unies, et je le connais très bien, parce

 18   que l'auteur de ce document avait un bureau dans mes locaux, et il figure

 19   également en note en bas de page comme un document de l'Accusation. Donc je

 20   voudrais apporter cette précision. Vous avez la déclaration consolidée qui

 21   constitue une synthèse, mais il faut également garder à l'esprit les

 22   documents d'origine, qui ne sont pas complètement repris dans la

 23   déclaration consolidée.

 24   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci pour cette précision, Docteur

 25   Kirudja.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Docteur Kirudja, vous saviez que certaines unités de paramilitaires

 28   serbes avaient été désarmées, n'est-ce pas ?


Page 21301

  1   R.  Oui.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant afficher le

  3   document de la liste 65 ter 23027, s'il vous plaît ?

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P3819, cela fait

  5   partie des pièces associées.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on avoir la page suivante ?

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce qu'il s'agit d'un de vos documents ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on revenir à la première page, s'il

 10   vous plaît.  Nous n'avons pas besoin de la version serbe, mais il nous

 11   faudrait la première page, s'il vous plaît.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Ai-je raison de penser que ce document émanant du HCR des Nations Unies

 14   a été transmis par votre truchement à l'attention d'autres instances et

 15   portait sur les 5 000 habitants de Bosanski Novi ?

 16   R.  Effectivement, je reconnais le document qui est à l'écran, qui porte

 17   mon nom, donc, je reconnais ce document, effectivement.

 18   Q.  Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on maintenant passer à la page 3, s'il

 20   vous plaît ?

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Je voudrais que l'on se concentre sur la deuxième partie du premier

 23   paragraphe. Il est mentionné que vous avez participé à une réunion avec le

 24   maire de Dvor. Il est également mentionné qu'il y avait d'autres membres

 25   des instances gouvernementales locales et que le 28 mai le maire de

 26   Bosanski Novi, Radomir Pasic, ainsi qu'un de ses collaborateurs Palija sont

 27   venus vous voir, et que au paragraphe 3 il est mentionné que cette demande

 28   émanant de Bosanski Novi était une proposition consistant à demander à la


Page 21302

  1   police de Krajina de fournir une escorte au groupe de 5 000 personnes, de 5

  2   000 Musulmans, donc, en direction de la frontière avec la Croatie et

  3   ensuite,la FORPRONU les escorterait jusqu'à la frontière avec la Slavonie

  4   et ensuite en direction de l'Autriche et de l'Allemagne.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, regardons maintenant le paragraphe 6.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que vous reconnaissez cela ?

  8   R.  Je reconnais le document comme provenant de la même source que j'ai

  9   mentionnée précédemment.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer maintenant au

 12   paragraphe 6, s'il vous plaît ? Ce n'est pas la bonne page. Peut-on voir la

 13   page précédente, s'il vous plaît ? Ça c'est le chapitre 6, ce n'est pas le

 14   paragraphe 6, peut-on donc revenir au paragraphe 6, s'il vous plaît.

 15   Pourrait-on afficher la totalité du paragraphe, s'il vous plaît ?

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Voyez ce qu'a mentionné Rade Palija, à savoir qu'ils ne se sentaient

 18   pas en sécurité, qu'ils ont demandé de l'aide aux autorités. Ils ont

 19   demandé aux autorités de les aider à quitter la région et puis vous avez un

 20   convoi composé de 5 000 personnes qui a été constitué, et qui voulait

 21   partir en direction de l'Allemagne ou de l'Autriche où ils avaient des

 22   parents et afin de les aider la police de Bosanski Novi et la police de

 23   Krajina a accepté de les escorter.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on passe à la page suivante,

 25   s'il vous plaît.

 26   Mais, en attendant, je voudrais savoir, Docteur Kirudja, si vous étiez au

 27   courant qu'un accord avait été signé le 22 mai 1992, un accord entre les

 28   trois parties belligérantes en Bosnie sous l'égide du HCR des Nations


Page 21303

  1   Unies, et d'après cet accord, les trois parties belligérantes devaient

  2   assurer la sécurité des populations qui souhaitaient quitter une zone et

  3   qui voulaient passer de l'autre côté d'une frontière pour s'installer sur

  4   un autre territoire ?

  5   R.  Je ne me souviens pas ou je ne suis pas au courant de cet accord

  6   tripartites, non.

  7   Q.  Merci. Est-ce que vous voyez qu'il est mentionné que les autorités de

  8   Bosanski Novi avaient proposé à ces gens de se rendre dans d'autres parties

  9   de Bosnie-Herzégovine où ils étaient en majorité mais ils ont refusé ils

 10   avaient peur d'être mobilisés et pour la même raison ils ne voulaient pas

 11   entrer seul donc sans escorte à la Croatie. De plus on leur a proposé

 12   d'aller à Banja Luka où à Doboj, on leur a également proposé de traverser

 13   la frontière pour se rendre sur un territoire musulman mais ils ont décliné

 14   ces offres et ils voulaient quitter totalement la Bosnie-Herzégovine. Est-

 15   ce que vous étiez au courant de cela ?

 16   R.  Je n'étais pas seulement au courant, ceci est mentionné à plusieurs

 17   reprises dans la déclaration consolidée dont vous disposez, dans cette

 18   déclaration donc vous retrouverez ces éléments.

 19   Q.  Merci. Peut-on maintenant passer au paragraphe suivant ? Il est

 20   mentionné que la guerre était arrivée jusqu'à Bosanski Novi, cette guerre

 21   qui avait commencé en Bosnie le 7 avril, et il est mentionné qu'au cours

 22   des dix ou 15 derniers jours, le conflit en Bosnie-Herzégovine était arrivé

 23   jusqu'à Bosanski Novi, et qu'il y avait une certaine pression émanant de

 24   groupes serbes non contrôlés.

 25   R.  Je vous prie de m'excuser. Vous parlez de quel paragraphe ?

 26   Q.  Le même paragraphe juste au-dessus du paragraphe 5, ça commence par :

 27   "… within the last 15, 20 days … " donc, "au cours des 15 ou 20

 28   derniers jours."


Page 21304

  1   R.  Ah, oui, d'accord, je l'ai retrouvé.

  2   Q.  Merci. Si on va un peu plus bas, on voit :

  3   "… le maire voulait souligner la protection serbe de ces Musulmans,

  4   certains avaient été envoyés dans des maisons serbes pour être protégés

  5   dans des villages serbes. La sécurité à Blagaj était considérée comme étant

  6   fournie par la police civile et par la police militaire de l'ABiH serbe,"

  7   et cetera, et cetera.

  8   Est-ce que vous saviez que les autorités serbes officiels avaient fait tout

  9   ce qui était en leur pouvoir pour protéger ces Musulmans et si vous

 10   regardez le paragraphe 6, vous verrez que des réunions avaient également

 11   été organisées entre le SDA et le SDS, vous le voyez dans ce paragraphe, et

 12   à l'issue de ces réunions un accord avait été conclu consistant à désarmer

 13   tous les groupes paramilitaires, et cetera, et cetera. Est-ce que c'est

 14   quelque chose dont vous aviez eu vent ?

 15   R.  Les Juges de la Chambre remarqueront que la déclaration consolidée

 16   rappelle exactement cela. Ce n'est pas qu'il n'y avait pas de sécurité

 17   était fournie n'était pas fournie. Il était mentionné : "On vous dit que

 18   des mesures de sécurité avaient été prises." Nous ne disons pas dans cette

 19   déclaration consolidée que des mesures de sécurité avaient été prises. On

 20   dit on nous a informés que des mesures de sécurité avaient été prises, et

 21   ce sont deux choses différentes.

 22   Q.  Mais c'était suffisant que vous disposiez de ces informations, Docteur

 23   Kirudja ?

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer maintenant à la

 25   page suivante, s'il vous plaît ?

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  En haut de cette page, nous voyons qu'on vous avait informé que

 28   certains groupes paramilitaires serbes avaient été désarmés; est-ce exact ?


Page 21305

  1   R.  Je prends acte.

  2   Q.  Merci.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant passer au point 9 ?

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Où vous essayez de savoir quels sont les représentants -- qui seraient

  6   les représentants légitimes des Musulmans ? On vous a fourni deux noms de

  7   personnes que vous pouviez contacter ? Est-ce que vous savez que Sifet

  8   Barjaktarevic était un dirigeant et était à l'origine d'une organisation

  9   paramilitaire de Musulmans ?

 10   R.  Je n'aurais pas pu le savoir, parce que je ne les ai jamais rencontrés.

 11   Ceci est mentionné dans ma déclaration consolidée, et ce n'est pas

 12   mentionné dans ma déclaration consolidée que je ne les ai pas rencontrés.

 13   Q.  Merci. Quoi qu'il en soit, les Serbes ont recommandé que vous parliez à

 14   ces deux personnes, n'est-ce pas ?

 15   R.  C'est exact, et j'ai refusé parce que j'avais appris en fait que les

 16   Serbes les avaient incarcérés tous les deux.

 17   Q.  Mais est-ce que vous n'auriez dû justement pas dû leur parler de ce

 18   fait ?

 19   R.  Non, non, parce que, moi, je voulais connaître les véritables

 20   intentions des Musulmans, et de ce fait, je devais pouvoir prendre contact

 21   avec une source sans qu'il n'y ait d'obstacle d'une façon ou d'une autre

 22   pour véritablement connaître les intentions des Musulmans. Je ne pense pas

 23   que ces deux personnes me les auraient indiqués.

 24   Q.  Bien.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Document de la liste 65 ter 2303, je vous prie.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pourriez-vous répéter la cote, Monsieur

 27   Karadzic ?

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] 23030.


Page 21306

  1   M. KARADZIC : [interprétation] 

  2   Q.  Convenez-vous qu'il s'agit d'une lettre, une lettre du HCR qui est

  3   adressée à M. Pasic ? Donc nous voyons avec qui ils ont pris contact et qui

  4   a envoyé des représentants. Dans le troisième paragraphe de la lettre, nous

  5   voyons qu'à nouveau, les Serbes mentionnent les noms de Sifet Barjaktarevic

  6   et Fikret Hamzic, comme étant les personnes, les porte-parole, qui

  7   pourraient s'exprimer au nom de la communauté musulmane, donc, il est

  8   demandé au maire d'organiser une réunion avec Muhamedagic ainsi qu'avec un

  9   représentant de la Croix-Rouge ou de Merhamet. Il est indiqué que le HCR

 10   n'est pas disposé à voir arriver une nouvelle vague de réfugiés et à

 11   participer à cela.

 12   R.  Oui, je reconnais cette lettre. Je sais dans quel contexte elle a été

 13   écrite, dans quelles circonstances également elle a été écrite, et je

 14   connais également l'intention de la lettre.

 15   Q.  Il demande ensuite de pouvoir rencontrer M. Muhamedagic; est-ce que

 16   vous savez comment ils ont appris ce nom ?

 17   R.  Je me répète, et je vous dirais que cette lettre provient de la même

 18   source dans mon bureau. Il y avait le mandat du HCR, et c'était une source

 19   qui était toujours la bienvenue à mes réunions. C'est une personne qui

 20   savait beaucoup de choses, pour ne pas dire tout. Il était au courant de ce

 21   qui s'était passé plus tôt, il connaissait ces deux noms, mais il y avait

 22   une division du mandat et des responsabilités, donc, lui, il avait son

 23   point de vue, il en parlait avec moi, et à la suite de cette discussion --

 24   ou plutôt, la discussion a abouti à la rédaction de cette lettre.

 25   Q.  Merci. Alors, Docteur Kirudja, j'aimerais vous poser une autre question

 26   à propos de cette lettre : Est-il exact que vous avez présumé qu'à Bosanski

 27   Novi la situation était calme, donc, vous avez supposé que la situation

 28   était calme et que les autorités contrôlaient la situation ? Est-ce que


Page 21307

  1   vous avez présumé, supposé que les autorités avaient ce territoire sous

  2   leur contrôle ?

  3   R.  Alors, si l'on prend la chronologie des événements, cette lettre, elle

  4   est arrivée vers la fin -- vers la fin des événements, je pense. Au premier

  5   jour où nous nous sommes rencontrés à Dvor, il avait été demandé que nous

  6   participions à ce transfert ou ce passage des 5 000 personnes. Nous avons

  7   refusé d'y participer. La lettre, en fait, elle arrive à la fin de ce

  8   processus, donc, ce que l'on pouvait présumer, à l'époque, c'était

  9   justement que la situation était plutôt tendue et qu'il y avait une

 10   possibilité que 5 000 personnes se voient -- que l'on demande à 5 000

 11   personnes de quitter leurs foyers. Donc, non, nous ne pouvions pas présumer

 12   que la situation était calme.

 13   Q.  Mais, Docteur Kirudja, avez-vous des preuves qu'on leur a demandé de

 14   faire ceci, ou est-ce que c'est plutôt la façon dont je me suis exprimé, à

 15   savoir qu'ils avaient demandé la permission aux autorités de pouvoir partir

 16   ? Est-ce que vous pouvez véritablement prouver que ce sont les autorités

 17   qui leurs ont demandé de partir, ou est-ce que c'est le contraire qui s'est

 18   passé ?

 19   R.  Dans ma déclaration consolidée je fais référence à la chronologie des

 20   événements de façon très simple. A la fin de la semaine en question, il est

 21   indiqué, dans la déclaration consolidée, que la conclusion incontournable

 22   était que les personnes ne partaient pas de leur plein gré. Ce n'était pas

 23   nous qui confirmions ceci, c'était les gens de Bosanski Novi qui sont venus

 24   me trouver dans mon bureau, qui sont allés dans d'autres bureaux, à qui

 25   l'on a posé des questions et qui ont fini par admettre qu'ils ne partaient

 26   pas de leur plein gré, et ils ont fourni des raisons qui figurent dans la

 27   déclaration consolidée.

 28   Q.  Mais qui vous a dit cela ?


Page 21308

  1   R.  Est-ce que vous voulez que je reprenne ce que je viens de vous relater,

  2   que je reprenne à la case départ ?

  3   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, le témoin vous a

  4   déjà fourni des explications. Donc je ne pense pas qu'il soit utile qu'il

  5   les réitère.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors nous allons nous intéresser au paragraphe

  7   44, Docteur Kirudja.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Il s'agit de votre conclusion, n'est-ce pas ? C'est la conclusion que

 10   vous avez tirée. Vous dites :

 11   "Après la réunion j'ai conclu …"

 12   Voilà vos propos. Donc personne ne vous a dit que les autorités leurs

 13   avaient demandé de partir. Or, ils sont partis à la suite des événements,

 14   ils avaient ce sentiment d'insécurité. Mais où est-ce que vous avez indiqué

 15   que les autorités avaient accepté ce point de vue, à savoir qu'ils

 16   demandaient aux personnes de partir ? Parce que c'est une de vos

 17   conclusions, n'est-ce pas ?

 18   R.  Non, ce n'est pas une de mes conclusions. Non, dans le paragraphe qui

 19   précède cette conclusion vous trouvez des réponses à certaines questions

 20   bien précises qui avaient été posées aux autorités de Bosanski Novi et nous

 21   trouvons leur réponse qui se trouve entre guillemets. Ce ne sont pas nos

 22   conclusions, il s'agit de déclarations directes qui ont été reprises.

 23   Alors, certes, nous admettons qu'ils ne partent pas de leur plein gré.

 24   Pourquoi ? Parce qu'ils ne veulent pas signer cette allégeance, parce

 25   qu'ils ne veulent pas déposer ou rendre les armes. Puis nous avons ensuite

 26   dans un autre paragraphe la suite des événements pour indiquer ce que nous

 27   avons fait exactement entre le 6 et le 11 mai. Vous avez tous les détails

 28   qui se trouvent là, et le Dr Karadzic a tout à fait raison lorsqu'il lit


Page 21309

  1   que j'ai indiqué que la seule conclusion que l'on pouvait tirer était que

  2   ces personnes ne partaient pas volontairement, ne partaient pas de leur

  3   plein gré. Il ne s'agit pas d'une conclusion. En fait, c'est une conclusion

  4   parce que c'est l'aboutissement de tous ces événements. C'est la conclusion

  5   que l'on tire lorsque l'on prend en considération tous les événements tels

  6   qu'ils se sont déroulés chronologiquement.

  7   Q.  Docteur Kirudja, j'aimerais vous rappeler ce qui suit : La question de

  8   la signature des serments d'allégeance ou de loyauté ne visait que les

  9   policiers qui avaient la possibilité de travailler pour le MUP de la

 10   Republika Srpska. Etant donné que la Republika Srpska était un état qui

 11   venait d'être créé, tout le monde devait signer ce serment d'allégeance,

 12   tout le monde y compris les Serbes, les Musulmans et les Croates, parce

 13   qu'ils devaient en fait déclarer qu'ils allaient respecter le droit dans le

 14   cadre de leurs activités professionnelles. En d'autres termes, les autres

 15   citoyens ne devaient pas signer ce genre de serment d'allégeance; n'est-ce

 16   pas exact ?

 17   R.  Je vous ferais remarquer qu'il s'agit d'une observation du Dr Karadzic.

 18   Ce n'est pas mon observation et ce n'est pas non plus la conclusion que

 19   j'ai tirée.

 20   Q.  Est-ce que vous êtes en train de nous dire donc que l'on s'attendait

 21   que les civils signent ces serments d'allégeance ou de loyauté ?

 22   R.  Oui, et nous les rencontrions au quotidien alors qu'ils fuyaient cette

 23   zone. Il ne s'agissait pas de Serbes, il s'agissait de non-Serbes.

 24    Q.  En d'autres termes, votre source d'information provenait des réfugiés

 25   musulmans, n'est-ce pas ?

 26   R.  En partie, oui, et puis il y avait également les officiels -- les

 27   personnalités officielles qui sont venues nous voir.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez nous montrer où il vous a été confirmé que la


Page 21310

  1   population civile devait également signer ou prononcer ce serment

  2   d'allégeance et le signer ? Où est-ce que cela se trouve dans votre

  3   déclaration ? Est-ce que vous avez un document qui pourrait confirmer que

  4   les civils qui n'étaient pas des fonctionnaires de l'état devaient

  5   également signer ce serment de loyauté ?

  6   R.  Vous savez, il s'agit d'une déposition très longue -- ou plutôt, de

  7   dépositions très longues qui ont été données, de témoignages qui ont été

  8   donnés pendant une longue période de temps. Il s'agissait donc de réfugiés

  9   qui venaient nous trouver dans notre bureau, qui nous apportaient des

 10   éléments d'information. Alors, pour ce qui est de savoir maintenant où est-

 11   ce que tous ces éléments se trouvent maintenant, je ne peux pas vous le

 12   dire exactement, mais les éléments d'information, ils existent. Je peux

 13   vous le dire, cela.

 14   Q.  Docteur Kirudja, soyons précis. Est-ce que ces réfugiés ont accepté de

 15   revenir en Bosnie ou est-ce qu'ils souhaitaient aller dans d'autres pays en

 16   Europe ?

 17   R.  Nous avons obtenu différentes réponses en fonction des différents êtres

 18   humains. Vous savez, les gens se rendent là où ils savent, d'abord ils se

 19   rendent dans des pays qu'ils connaissent, ou alors certains nous disaient

 20   qu'ils avaient des membres de leurs familles dans certains pays, qu'ils

 21   avaient des amis, les réponses fluctuaient, mais ils partaient. Ce qui est

 22   important en fait, c'est que certains nous ont véritablement surpris, parce

 23   que certains ont signé en indiquant qu'ils ne reviendraient pas. Il fallait

 24   signer en indiquant que vous ne reviendriez pas dans votre foyer. C'était

 25   une des conditions.

 26   Q.  Mais hormis ce que vous ont dit les réfugiés qui ne souhaitaient pas

 27   être rapatriés chez eux; est-ce que vous pouvez nous donner d'autres

 28   exemples pour apporter foi à cela ?


Page 21311

  1   R.  Madame, Messieurs les Juges, je reviens à ce que j'ai dit au début de

  2   ma déposition. Vous savez, ma déposition, ce n'est pas une déclaration

  3   officielle auprès de ce Tribunal. Ma déposition est composée, correspond

  4   plutôt à une compilation d'événements qui se sont produits à un moment

  5   donné pendant plusieurs périodes de temps, dans des buts différents. Le

  6   Procureur a jugé opportun de mettre dans un seul et même document toutes

  7   ces informations, et ce n'est pas, enfin le Dr Karadzic même son contre-

  8   interrogatoire en prenant pas en considération cela.

  9   Q.  Je vous remercie, Docteur Kirudja. Toutefois, bon, il s'agit quand même

 10   d'un procès, et je souhaiterais être précis dans les moindres détails. Ce

 11   que j'avance en fait, c'est que ce qui vous a été dit, vous a été dit par

 12   des réfugiés et que leurs déclarations, les déclarations qu'ils vous ont

 13   faites, ont été faites parce qu'ils ne souhaitaient pas être rapatriés;

 14   est-ce que cela n'est pas le cas ? Est-ce que vous pouvez envisager cette

 15   possibilité ?

 16   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Ecoutez, c'est une question fort

 17   difficile, Docteur Karadzic. Vous demandez au témoin de nous indiquer à

 18   quoi pensaient les personnes. Alors il peut vous dire ce qu'on lui a dit,

 19   il peut vous dire si cela lui a été dit par un membre important de

 20   personnes. Ce qui fait qu'il y a cru. Mais lui demander de vous indiquer ce

 21   à quoi pensaient ces personnes, ce qu'ils avaient présent à l'esprit,

 22   écoutez, c'est plutôt une question destinée non pas à un juriste ou un

 23   avocat, mais à un psychiatre.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge. Alors nous

 25   allons maintenant prendre en considération le paragraphe 79.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Dans ce paragraphe, vous répondez à une question qui vous ait posé par

 28   M. le juge El Mahdi, à propos du SDS, et voilà ce que vous dites à la fin


Page 21312

  1   du paragraphe, je cite :

  2   "Même avec cette mise en garde, il ne semblait pas vouloir ou être disposé

  3   à mettre un terme à ce processus. En d'autres termes, ils semblaient

  4   présenter tout, signer tous les indices suivant lesquels on était en train

  5   de les mettre à la porte. En fait, à mon avis, ils pouvaient être expulsés,

  6   il y avait des personnes qui agissaient suivant des consignes conformément

  7   à une politique qui avait été mise au point par d'aucuns, et étant donné

  8   qu'ils s'identifiaient comme SDS ou membres du SDS ou membres de la milice

  9   - pour utiliser cette formule - il s'agissait d'une nouvelle réalité. Cette

 10   nouvelle réalité s'appelait la République de Serbie, et en fait, pour moi,

 11   il était absolument évident, et je ne pouvais que conclure qu'ils

 12   agissaient en fonction d'une politique ou de consigne."

 13   Premièrement, un petit détail-là, je pense que vous faisiez référence non

 14   pas à la République de Serbie mais à la Republika Srpska ?

 15   Q.  Oui, c'est exact.

 16   Q.  Deuxièmement, là encore, vous dégagez une conclusion; est-ce que vous

 17   n'avez jamais participé ou assisté, en tout cas, à une réunion du SDS, ou

 18   est-ce que vous n'avez jamais vu un document qui vous permet justement de

 19   parvenir à cette conclusion bien précise ? Vous pouvez répondre tout

 20   simplement par oui ou par non, ce dont je vous serais extrêmement

 21   reconnaissant.

 22   R.  Vous savez, oui, je souhaiterais véritablement pouvoir répondre par un

 23   oui ou par non. Mais, au vu de la façon dont vous avez formulé votre

 24   question, je ne peux pas répondre juste par l'affirmative ou par la

 25   négative. Alors je vais vous dire, dans un premier temps, que non, je n'ai

 26   jamais assisté à une réunion du SDS, mais par contre que oui, j'ai vu des

 27   documents, et j'ai écouté des personnes, des personnes qui m'ont parlé. Au

 28   vu de tous ces éléments, la conclusion, elle était incontournable, et je


Page 21313

  1   m'en tiens à cette conclusion.

  2   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner la référence d'un document SDS qui

  3   vous a permis de parvenir à cette conclusion ?

  4   R.  Je n'ai pas fait référence à un document ou à des documents du SDS. Il

  5   y avait un document, un document d'ailleurs fort étrange, qui avait été un

  6   document rédigé par M. Pasic, et vous y avez fait référence, Monsieur

  7   Karadzic, aujourd'hui. Bon, j'ai oublié en fait le paragraphe en question.

  8   Il avait été signé, le document, par la cellule de Crise, et ce document,

  9   en fait, est l'aboutissement de nombreuses réunions, et en dépit de ce

 10   qu'il m'avait dit, il écrit à l'intention -- il écrit, dans des fins ou

 11   dans un but officiel, quelque chose avec lequel il n'était pas d'accord.

 12   Cela, je le sais, il fait référence au caractère volontaire de

 13   l'évacuation, pour ne vous donner en exemple qu'un seul document

 14   d'ailleurs.

 15   Q.  Nous reviendrons là-dessus. Mais, Docteur Kirudja, est-ce que vous

 16   savez que ce genre de choses ne se sont pas passées dans les municipalités

 17   suivantes : Srbac, Gradiska, Bosanska Dubica, Prnjavor, Sipovo, ainsi que

 18   d'autres, il y a un certain nombre de témoins musulmans qui l'ont indiqué.

 19   Est-ce que vous savez pourquoi cela ne s'est pas passé dans ces

 20   municipalités, s'il s'agissait bel et bien de consignes centrales ? Et

 21   d'autres termes, si vous êtes dans le vrai, pourquoi est-ce que cela n'a

 22   pas été mis en œuvre de façon générale, et ce, à partir du 6 avril ?

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Ecoutez, Docteur Karadzic, il s'agit

 24   d'une question particulièrement complexe, et je suppose que, si la question

 25   est posée de la sorte, le Dr Kirudja va être obligé d'y répondre de façon

 26   complexe, en utilisant différentes phrases. Est-ce que vous souhaiteriez

 27   peut-être préciser et mieux définir la question ?

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, tout à fait.


Page 21314

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Docteur Kirudja, est-ce que vous savez -- ou plutôt, est-ce que vous

  3   convenez que la crise à Bosanski Novi s'est produite, voire deux mois et

  4   demi plus tard, après donc que des affrontements ont eu lieu dans toute

  5   cette municipalité ?

  6   R.  Non, je ne le savais pas.

  7   Q.  Est-ce que vous savez que ce type d'événement ne s'est absolument pas

  8   produit dans d'autres municipalités, où les Musulmans étaient restés et

  9   continuaient à cohabiter avec les Serbes, ce qui a été le cas de nombreuses

 10   municipalités de la Krajina de Bosnie ?

 11   R.  Ecoutez, je ne peux pas véritablement authentifier vos propos, parce

 12   que je ne le sais pas.

 13   Q.  Mais est-ce que vous pourriez alors confirmer que vous ne savez pas

 14   qu'il y a eu des municipalités où cela ne s'est pas produit ?

 15   R.  Non, Docteur Karadzic, car dans la déclaration consolidée, il est

 16   question d'une réunion. Lors de cette réunion, mon bureau était -- dans mon

 17   bureau, il y avait de nombreux officiels bosniaques de Bosanski -- de

 18   Sanski Most, de Bosanska Krupa, de Bosanski Novi, de Prijedor, et d'autres

 19   municipalités. Ils m'ont fourni des chiffres, des noms, des listes, et j'y

 20   fais référence dans la déclaration consolidée. Il s'agit en fait d'une

 21   fiche informatique où nous trouvons la liste de personnes qu'ils voulaient

 22   expulser et, bon, il y a 7 782 noms à commencer par -- donc de 1 à 7 782,

 23   donc, je ne suis absolument pas d'accord avec l'argument que vous venez

 24   d'avancer lorsque vous me dites que nous ne l'avons entendu nulle part

 25   ailleurs.

 26   Q.  Merci. Docteur Kirudja, répondez à cette question, je vous prie : Est-

 27   ce que vous saviez que, dans la Krajina de Bosnie, il y avait des

 28   municipalités où des Musulmans et des Serbes ont continué à vivre, à


Page 21315

  1   résider et rien ne s'est passé ? Est-ce que vous le savez, oui ou non ?

  2   Est-ce que vous savez qu'il y a un certain nombre de municipalités, dans ce

  3   cas ?

  4   R.  Ecoutez, je ne peux pas vous répondre par oui ou par non parce que vous

  5   avez utilisé les termes de "Bosanska Krajina." Alors Bosanska Krajina c'est

  6   un nom qui englobe de nombreuses opstina dont je vous ai donné les noms

  7   d'ailleurs. Il y en a cinq, Bosanski Most, Cazin, Sanski Most -- plutôt,

  8   Krupa, et d'autres, donc lorsque vous faites référence à un terme

  9   collectif, je répondrais de la même façon que je l'ai fait un peu plus tôt,

 10   parce que nous en entendions exactement la même chose en provenance de ces

 11   zones.

 12   Q.  Alors je vais peut-être m'exprimer de la sorte, Docteur Kirudja. Est-ce

 13   que vous saviez qu'il y avait une formation de demi-Etat qui s'appelait la

 14   Région autonome de la Krajina et qui comprenait quelque -- enfin, une

 15   vingtaine de municipalités ?

 16   R.  Oui, oui, mais dans un premier contexte tout à fait différent.

 17   Q.  Mais est-ce que vous savez que les municipalités que vous avez

 18   énumérées à l'exception de Cazin faisaient partie de cette Région autonome

 19   de la Krajina, donc, de l'ARK ?

 20   R.  Ecoutez, je n'étais pas au courant de tous les détails, et je ne

 21   souhaiterais pas donc vous donner une réponse trop longue, mais je vous

 22   dirais que là le contexte était tout à fait différent.

 23   Q.  Docteur Kirudja, écoutez, cela a trait à ce que vous avez dit au

 24   paragraphe 79, parce que, dans ce paragraphe, vous indiquez, de façon

 25   implicite, qu'il y avait un plan qui avait été concocté à un niveau

 26   supérieur, un plan avec une politique et des consignes. Ce qui fait que je

 27   vous pose la question suivante : Est-ce que vous connaissiez la structure

 28   de la RS à l'époque ? Est-ce que vous savez ou est-ce que vous étiez au


Page 21316

  1   courant de l'existence de la ARK donc qui comprenait quelque 20 -- une

  2   vingtaine de municipalités et que, dans certaines de ces municipalités, il

  3   n'y avait pas ce genre de problème ?

  4   R.  Ecoutez, j'aimerais, pour répondre, revenir au paragraphe 70, le

  5   contexte dans lequel ce paragraphe a été rédigé. Vous savez, il s'agissait

  6   d'une séance avec les Juges il y a un Juge qui m'a posé une question, c'est

  7   une question fort simple, mais il s'agissait d'une question de M. le Juge

  8   El Mahdi, et je pensais qu'il voulait savoir quel était en fait le rôle

  9   joué par le SDS dans les événements que j'étais en train de leur relater.

 10   La réponse, elle se passe d'explication, parce qu'il y a des gens qui sont

 11   arrivés, et qui se sont identifiées, et qui nous ont indiqué ce qu'ils

 12   souhaitaient. Bon, je ne vais pas -- je ne souhaiterais surtout pas répéter

 13   à nouveau la réponse. Mais voilà le contexte dans lequel cette réponse a

 14   été apportée.

 15   Q.  Par conséquent, vous, vous en avez conclu qu'il y avait une

 16   conversation absolument incontournable, à savoir ces personnes agissaient

 17   en fonction d'une politique, en fonction de consigne qui leur avait été

 18   donnée par une autorité supérieure, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. Oui. Ce n'était pas eux-mêmes qui avaient décidé cela, parce

 20   qu'ils répétaient la même chose. Nous leur parlions -- nous leur demandions

 21   quelque chose et -- bon, nous leur disions que nous ne pouvions pas faire

 22   ceci. Ils demandaient qui étaient nos supérieurs. Nous leur indiquions,

 23   nous leur disions de prendre contact avec le secrétaire général et nous

 24   leur disions qu'ils n'obtiendraient pas une réponse différente, à savoir

 25   qu'on ne pouvait pas forcer et contraindre les personnes à quitter leurs

 26   foyers. Alors nous en avons parlé [inaudible] et la conclusion était que

 27   ces personnes faisaient référence à une politique -- qui avait donc cette

 28   politique qui leur demandait de faire quelque chose, quelque chose qu'il ne


Page 21317

  1   souhaitait peut-être pas faire eux personnellement.

  2   Q.  Docteur Kirudja, alors soyons un peu précis, je vous prie. Comment se

  3   fait-il que votre centre a abouti à cette conclusion suivant laquelle une

  4   politique avait été mise œuvre ?

  5   R.  Ecoutez, dans ma réponse, vous trouverez la réponse que vous me

  6   demandez, Docteur Karadzic. Je vous ai parlé de quelqu'un, pas de quelqu'un

  7   que je connaissais. Mais, bon, il y avait donc -- ce que je veux dire c'est

  8   que cela ne signifie pas pour autant que je savais qui était cette

  9   personne, et je ne suis pas en train de vous dire que je sais qui est cette

 10   personne, parce que je ne le sais pas.

 11   Q.  Merci. Puisque nous parlons maintenant dans le contexte du SDS, est-ce

 12   que vous saviez que dès le mois d'avril dès le début de la guerre sur une

 13   demande émanant du premier ministre, le SDS a gelé ces activités, et ce,

 14   jusqu'au mois de février 1993 ? Je voudrais simplement savoir si oui ou non

 15   vous le saviez ?

 16   R.  Non, Docteur Karadzic, je ne savais pas.

 17   Q.  Merci. Saviez-vous que la partie est de la Republika Srpska, Pale, la

 18   Sarajevo serbe n'avait des communications par téléphone coupé avec l'ouest

 19   avec Banja Luka, Bosanski Novi et les municipalités voisines, et ce,

 20   jusqu'au mois de septembre 1992 ?

 21   R.  En septembre 1992 ?

 22  Q.  Oui, tout à fait. Que le corridor ou le couloir a été fermé jusqu'au 1er

 23   juillet 1992, et il n'est redevenu -- enfin, la sécurité n'a été rétablie

 24   dans le couloir qu'en septembre, et les communications par téléphone entre

 25   l'est ou l'ouest de la Republika Srpska -- enfin, c'est ça -- c'est ça que

 26   je veux dire, jusqu'en septembre 1992.

 27   R.  Non, je n'étais pas au courant de ces détails.

 28   Q.  [aucune interprétation]


Page 21318

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite que l'on affiche à présent le

  2   document 65 ter 6688. Normalement, il faudrait qu'il y ait une traduction.

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, nous avons une traduction.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Je voudrais que vous vous concentriez sur ce document. Le 18 juin 1992,

  7   l'assemblée municipale a déjà eu une réunion et la cellule de Crise est un

  8   organe des autorités dûment constituées, n'est-ce pas ? Regardez ce qui est

  9   mentionné, ici, au paragraphe 2 :

 10   "Concernant les populations musulmans de la municipalité de Bosanski

 11   Novi, les positions suivantes du conseil municipal du SDS ont été adoptées

 12   :

 13   "Tout d'abord, des citoyens d'appartenance ethnique musulmane peuvent

 14   quitter la municipalité de Bosanski Novi de manière organisée et civilisée.

 15   "Deuxièmement, les activités visant à expulser de manière arbitraire

 16   les populations sont interdites," et cetera, et cetera.

 17   Puis, au point 4, il est mentionné :

 18   "Le poste de sécurité publique de Bosanski Novi ainsi que le

 19   commandement de la police militaire ont reçu des instructions visant à

 20   rétablir le calme et à garantir l'état de droit à Bosanski Novi et de

 21   garantir la sécurité de ses habitants."

 22   Le paragraphe 4 semble laisser penser que, jusqu'à présent, la

 23   sécurité des citoyens à Bosanski Novi n'était pas assurée, n'est-ce pas ?

 24   R.  Ce que je remarque sur cette circulaire c'est la date. Ce document date

 25   de juin 1992. Les discussions, que nous avons eues avec le maire, M. Pasic,

 26   remontent à une date antérieure, c'est-à-dire au mois de mai. Cette lettre

 27   était un avertissement. Nous avions averti M. Pasic que ce qui se faisait

 28   sur sa municipalité pouvait être considéré comme un crime contre


Page 21319

  1   l'humanité. J'ai oublié la date. Est-ce que je pourrais avoir la date, s'il

  2   vous plaît ?

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit d'une lettre qui date du 20

  4   juin 1992.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc 20 juin 1992. Alors que la lettre qui est

  6   sur l'écran est du mois de juin, mais de quelle date ?

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Le 18 juin, donc, deux jours avant votre lettre.

  9   R.  Donc deux jours avant, nous avions déjà passé tout ceci en revue. Nous

 10   avions déjà mis en demeure toutes les personnes à qui nous parlions ou avec

 11   qui nous étions en contact que ça n'allait pas recueillir les faveurs de la

 12   communauté internationale. A chaque fois que nous avons fait cela - et

 13   c'est bien montré dans la déclaration consolidée - ils confirmaient par des

 14   déclarations telles que celle-ci, en disant : "Nous faisons tout ce qui est

 15   nécessaire de faire." "Nous représentons toute la population en tant que

 16   maire." Ceci montre bien que la situation changeait et c'est donc

 17   l'impression qui se dégage de ces documents. Pourquoi ? Parce que certaines

 18   choses qui sont mentionnées dans cette lettre n'ont jamais été mentionnées

 19   lorsque nous avons rencontré M. Pasic.

 20   Q.  Merci, Docteur Kirudja. Cette réponse me convient. Mais, en même temps,

 21   je vous demande de revenir sur les conclusions que vous avez tirées sans

 22   que vous ayez une idée complète de la situation. Vous voyez, Docteur

 23   Kirudja, il s'agit d'un document du 18 juin, il s'agit d'une conclusion,

 24   une conclusion qui devait ensuite constituer un document à force

 25   contraignante émanant d'une autorité étatique et découlant d'une séance qui

 26   s'est tenue le 16 juin. Le Parti démocratique serbe a commencé les

 27   discussions à ce sujet et ensuite ceci a été adopté par l'assemblée

 28   municipale.


Page 21320

  1   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  2   M. KARADZIC : [interprétation] 

  3   Q.  Docteur Kirudja, j'aimerais vous poser une question. Au paragraphe 79,

  4   vous avez dit -- vous avez parlé de la "milicija." Est-ce que vous parlez

  5   de "milicija," de la "militia," ou de la "milice" ? Parce que vous savez

  6   que la police régulière s'appelait "milicija." Donc, est-ce que vous

  7   parliez de la "milicija" ou de la "milice" ?

  8   R.  Désolé, Docteur Karadzic. Vous dites que le paragraphe 69 [phon] fait

  9   référence à la "milice ?"

 10   Q.  Oui. Il est mentionné : "ou des membres de la milice," "militia," en

 11   anglais, avec un "t."

 12   R.  Oui. Merci, Docteur Karadzic. Je comprends très bien le terme de

 13   "milicija" dans le contexte que vous expliquez. Il s'agit d'une

 14   transcription de ce que j'avais dit. Par conséquent, j'ai prononcé ce mot

 15   et il est possible qu'il n'ait pas été retranscrit de manière exacte. Comme

 16   vous voyez, ce n'est pas un document. Ce sont des propos que j'ai

 17   prononcés.

 18   Q.  Donc vous ne parliez pas de la milice d'un parti comme, par exemple, la

 19   milice du SDS ? Vous parliez en fait des forces de police régulière, que

 20   l'on appelait "milicija," C-I-J-A ?

 21   R.  C'est exact.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser cette pièce au dossier ?

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Alors nous pouvons accepter le

 26   versement de cette pièce au dossier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce à décharge D1916.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 21321

  1   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il est mentionné ici dans ce

  2   document que la population devrait quitter la zone de manière civilisée et

  3   organisée, et la même formulation est utilisée dans l'accord du 22 mai et

  4   les trois partis devaient se tenir à cet accord et devaient agir en

  5   connaissance de cause ?

  6   R.  Je me borne à confirmer ce que vous venez de dire. Effectivement, ce

  7   qui est mentionné dans le document correspond à ce que vous venez de dire,

  8   Docteur Karadzic.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on maintenant demander l'affichage du

 11   document de la liste 65 ter 6705, s'il vous plaît.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Dans ce document du HCR des Nations Unies on parle de la Croix-Rouge.

 14   J'aimerais que l'on consulte un document de la Croix-Rouge basée à Bosanski

 15   Novi qui porte la date du 7 juin 1992. Vous voyez donc les informations qui

 16   figurent dans ce document. Il s'agit d'une description de ce qui se passait

 17   à Bosanski Novi où il y avait des opérations militaires qui avaient lieu

 18   contre des extrémistes musulmans. Il y a une concentration importante de

 19   Musulmans à Blagaj. Leur hébergement à Blagaj est temporaire parce que les

 20   représentants des Musulmans déplacés avaient demandé d'être réinstallés

 21   volontairement en Croatie. Puis il est ensuite mentionné un peu plus tard

 22   que :

 23   "Des opérations étaient en cours pour nettoyer la zone aux environs

 24   de Blagaj d'extrémistes musulmans qui se cachaient dans les zones boisées

 25   environnantes. On propose que l'opération de réinstallation volontaire à

 26   Banja Luka continue en utilisant tous les moyens de transport ou que le

 27   transport soit organisé par la cellule de Crise."

 28   Ensuite, il est mentionné qu'il était nécessaire que les convois


Page 21322

  1   puissent partir au plus tard à telle date et qu'ils fassent l'objet d'une

  2   escorte par la police militaire. L'évacuation de la population de Bosanski

  3   Novi et de Republika Srpska en direction de Banja Luka, est-ce que vous

  4   appelleriez ceci du nettoyage ethnique ?

  5   R.  Docteur Karadzic, vous venez de faire une longue déclaration et vous

  6   demandez, dans la dernière partie de cette question : Est-ce que vous

  7   appelleriez ceci ou cela du nettoyage ethnique ? J'aimerais savoir ce que

  8   vous appelez le "ceci" ou le "cela" dans la dernière partie de votre

  9   question; à quoi cela se réfère-t-il ?

 10   Q.  Je vais procéder par étape. Est-ce que vous savez que, dans notre Loi

 11   sur la Défense, les différentes autorités se doivent d'évacuer les civils

 12   de zones de combat et de les envoyer dans des zones où il n'y a pas de

 13   combat; que ces populations souhaitent partir ou pas, il faut procéder à

 14   l'évacuation comme, par exemple, aux Etats-Unis lorsqu'il y a une

 15   catastrophe naturelle.

 16   R.  Docteur Karadzic, nous savons, vous et moi, ce que disent vos textes

 17   normatifs concernant cette question précise.

 18   Q.  Merci. Alors passons maintenant au deuxième volet de ma question : Si

 19   on demande à la population de partir pour leur propre sécurité et de passer

 20   d'une municipalité serbe vers une autre municipalité serbe, est-ce qu'il

 21   s'agit de nettoyage ethnique ?

 22   R.  Ceci serait évident si on les faisait partir pour des raisons de

 23   sécurité, qu'ils allaient d'une partie du territoire contrôlé par les

 24   Serbes vers une autre partie du territoire toujours contrôlé par les

 25   Serbes, et dans ce cas-là, ce serait tellement évident qu'il n'y aurait pas

 26   besoin de se défendre de ces actes.

 27   Q.  Mais vous n'appellerez pas ça du nettoyage ethnique ?

 28   R.  Pas si des gens qui peuvent être victimes d'une catastrophe naturelle


Page 21323

  1   doivent partir pour être mis à l'abri à un autre endroit.

  2   Q.  Est-ce que vous considérez que la guerre est une catastrophe naturelle

  3   ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Maintenant, si je vous dis que nos lois stipulent que les civils

  6   doivent être évacués des zones en guerre, est-ce que vous acceptez que ce

  7   soit aux autorités d'agir en toute connaissance de cause, même s'il ne

  8   s'agit catastrophe non naturelle ?

  9   R.  Tout dépend où est-ce que vous les envoyez. Si on les faisant déménager

 10   vous traverser une frontière, et que vous passez dans un autre pays dans ce

 11   cas-là votre loi ne s'applique plus.

 12   Q.  Mais, dans ce cas précis, en Republika Srpska, s'ils passent d'une

 13   municipalité à une autre municipalité, est-ce que c'est du nettoyage

 14   ethnique ou est-ce que c'est conforme à la loi ?

 15   R.  Nous tournons en rond, Docteur Karadzic.

 16   Q.  Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut accepter le versement de

 18   ce document au dossier, s'il vous plaît ?

 19   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pas d'objection.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Fort bien. Nous pouvons donc

 22   accepter le versement de ce document.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce D1917.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait rapidement demander

 25   l'affichage de la pièce P2737, s'il vous plaît.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Vous avez également mentionné Bosanska Krupa, vous aviez également des

 28   réfugiés de Bosanska Krupa, n'est-ce pas ?


Page 21324

  1   R.  J'ai effectivement mentionné que l'on m'avait averti que les réfugiés

  2   venaient de Bosanska Krupa, effectivement.

  3   Q.  Je voudrais que vous lisiez cet ordre. Le président de la présidence de

  4   Guerre de la municipalité serbe de Bosanska Krupa. En fait, je vais vous

  5   poser une question, Docteur Kirudja : Est-ce que vous saviez que -- pour ce

  6   qui est de Bosanska Krupa, on parlait des municipalités serbes : Est-ce que

  7   vous savez s'il s'agissait d'une proposition émanant des Serbes, ces

  8   grandes municipalités auraient été divisées en deux ou trois municipalités

  9   et que la municipalité serbe de Bosanska Krupa, cela ne signifie que la

 10   partie serbe de la municipalité ?

 11   R.  Dans le document que vous me montrez, Docteur Karadzic, ou de manière

 12   générale ?

 13   Q.  De manière général, Docteur Kirudja, est-ce que vous saviez, quand il y

 14   avait une municipalité serbe, cela signifiait que vous aviez une partie

 15   serbe et une partie musulmane et une partie croate ou simplement une

 16   municipalité croate et municipalité musulmane ? Donc lorsqu'on parle d'une

 17   municipalité "serbe," ça ne fait référence qu'à la partie de la

 18   municipalité qui avait une population à majorité serbe ?

 19   R.  Je ne peux pas faire de commentaire mis à part pour les zones qui

 20   étaient du ressort de la zone de protection des Nations Unies, et si vous

 21   posez la question concernant ces zones en question, dans ce cas-là la

 22   réponse est négative, une municipalité est une municipalité qui incorporait

 23   tous les citoyens qui vivaient dans cette municipalité, le fait de savoir

 24   s'il s'agissait de Serbe ou si ça appartenait à un autre peuple ceci était

 25   le résultat des combats et c'est une des raisons pour laquelle nous avons

 26   dû intervenir là-bas.

 27   Q.  Merci. Je suis d'accord avec la Croatie -- ou plutôt, la Krajina de

 28   Serbie, mais ici vous déposez concernant la Bosnie, et je vous pose la


Page 21325

  1   question suivante : Enfin, je ne vous attaque pas ou je ne vous critique

  2   pas parce que vous ne savez pas, mais je voulais simplement savoir si vous

  3   connaissiez la signification de la municipalité serbe de Bosanska Krupa.

  4   Cela ne s'appliquait pas à la totalité de la municipalité de Bosanska

  5   Krupa, amis simplement de la partie serbe de la municipalité, c'est-à-dire

  6   la rive droite de la rivière Una.

  7   R.  J'accepte la manière dont vous expliquez tout cela, effectivement.

  8   Q.  Merci. Alors revenons à cet ordre, qui est à l'attention des

  9   commandants des 2e, 4e et 5e Bataillons de la 1ère Brigade de Podgrmec, qui

 10   devait évacuer la population musulmane du territoire sous leur contrôle en

 11   direction de Budimlic Japra, de Kamengrd et de Fajtevci; est-ce que vous

 12   saviez qu'il y avait également des parties de Sanski Most qui étaient sous

 13   leur contrôle ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais maintenant que l'on consulte le

 17   document de la liste 65 ter 3733 [phon].

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Vous voyez qu'il s'agit de l'assemblée municipale de Bosanski Novi et

 20   la cellule de Crise est un organe de l'assemblée municipale -- ou plutôt,

 21   remplace l'assemblée municipale, et il s'agit d'un rapport sur les

 22   activités de la cellule de Crise durant cette période. Je vous demande de

 23   vous concentrer sur le deuxième paragraphe, où il est mentionné : "D'autres

 24   questions importantes."

 25   A ce moment-là, il n'était pas facile de leur répondre alors et de

 26   savoir où nous amenions les politiques d'Alija Izetbegovic, et il est

 27   mentionné que nos positions et notre politique doivent être conjointes et

 28   nous ne devrions pas avoir différents mouvements, des mouvements plus


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  1   tranchés, des mouvements plus libéraux, et cetera, et cetera.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je pourrais passer à la page

  3   suivante, s'il vous plaît ?

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Est-ce que vous étiez au courant de cette analyse, Monsieur le Témoin ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Alors regardez cette partie du document. Il est mentionné, au début du

  8   mois de mai, le 4 mai 1992, des pourparlers ont eu lieu avec le SDA, en ce

  9   qui concerne la situation de sécurité. Etes-vous d'accord pour dire que

 10   cela faisait déjà un mois que la guerre faisait rage en Bosnie-Herzégovine,

 11   à partir du 6 avril. Donc cela faisait déjà un mois que la guerre faisait

 12   rage en Bosnie-Herzégovine, alors qu'à Bosanski Novi, la guerre n'était pas

 13   encore arrivée.

 14   R.  Je ne le savais pas.

 15   Q.  Merci. Vous voyez sur ce document que l'on mentionne les thèmes, les

 16   discussions entre le SDS et le SDA, et notamment la participation du SDA

 17   dans l'armement des populations musulmanes. Ils réfutent ces allégations,

 18   ceci n'a donc pas été accepté. Un peu plus bas, on peut voir qu'un couvre-

 19   feu était en place de 22 h à 5 h du matin, et que toutes les formations

 20   paramilitaires et les personnes armées devaient remettre leurs armes au

 21   plus tard le 11 mai. Un peu plus bas, on voit qu'il y avait un problème au

 22   niveau du fonctionnement du comité exécutif, parce que le président était

 23   en congé maladie, et cetera, et cetera, puis il a donné sa démission, alors

 24   que les membres, les candidats du SDA avaient empêché au comité de

 25   travailler. Vous voyez que, déjà à ce moment-là, c'est-à-dire le 4 mai, un

 26   ordre avait été publié pour désarmer ceux  qui s'étaient armés

 27   illégalement.

 28   R.  J'ai déjà confirmé, dans mes dépositions et la déclaration consolidée,


Page 21327

  1   le mentionne également, le résumé des événements jusqu'au 11 mai par le

  2   maire M. Pasic, effectivement, j'étais informé pas par le biais de cette

  3   source, mais suite à une réunion que j'ai eue avec le maire de Bosanski

  4   Novi.

  5   Q.  Merci.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page

  7   suivante ?

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

 10   les Juges, peut-être que l'on pourrait éviter que M. Karadzic continue à

 11   donner de lecture de longs passages de ce document, on pourrait peut-être

 12   donner au Dr Kirudja la traduction anglaise faire la pause de déjeuner un

 13   peu avant, de façon à ce qu'il ait la possibilité de consulter ce document,

 14   et ensuite on pourra poser des questions supplémentaires au Dr Kirudja. Il

 15   s'agit donc de la pièce P2637 [comme interprété], et document précédent,

 16   qui a été présenté au Dr Kirudja, est le document de la liste 65 ter,

 17   numéro 6724 est en fait la pièce P2737.

 18   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je suis sûr que ça aiderait le Dr

 19   Kirudja; est-ce que ça vous aiderait également, Docteur Karadzic ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, cela nous aiderait. Mais je me pose une

 21   autre question, parce qu'il y a énormément de documents qui portent sur la

 22   mission du Dr Kirudja et de son supérieur hiérarchique, M. Thornberry. Même

 23   si je crois qu'il ne viendra, probablement pas même si on nous a averti

 24   qu'il viendrait déposer. Est-ce que l'on pourrait donc demander au Dr

 25   Kirudja de consulter une série de documents afin de confirmer leur

 26   authenticité, et on pourrait ensuite en demander leur versement direct ?

 27   Est-ce que cela serait possible de cette manière ? Cela faciliterait les

 28   choses mais, en même temps, ceci ne permettrait pas au Dr Kirudja d'avoir


Page 21328

  1   une pause déjeuner. On peut également parler de tout cela plus tard.

  2   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Kirudja, je ne veux pas vous

  3   empêcher de vous sustenter  --

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Si cela vous convient, les déjeuners ne sont

  5   pas une partie importante de ma vie quotidienne. Mais si d'autres sont

  6   d'opinion différente, parce que, bien sûr, je ne suis pas le seul qui a

  7   besoin d'une pause déjeuner.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Il est possible également de manger,

  9   et de lire en même temps. Ceci me semblerait peut-être judicieux que de

 10   suivre la proposition de l'Accusation, et ça nous permettra de gagner du

 11   temps.

 12   Madame Sutherland.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas

 14   s'il y a des problèmes d'authenticité, en ce qui concerne les documents de

 15   la FORPRONU. Donc je me demande quelle est l'utilité de cet exercice ?

 16   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je pensais qu'il y aurait de toute

 17   façon des considérations en matière d'authenticité, compte tenu des

 18   questions qui ont déjà été posées par le Dr Karadzic.

 19   Est-ce exact, Docteur Karadzic ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président. Je

 21   n'avais pas souhaité présenter de nombreux documents du département des

 22   Affaires civiles des Nations Unies, parce que je pensais que M. Thornberry

 23   allait venir en tant que témoin, mais il n'est plus sur la liste des

 24   témoins, et j'ai donc perdu la possibilité également de verser ces

 25   documents par le truchement d'un témoin précédent.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Bien sûr, il y a une différence

 27   entre l'authenticité d'un document et le fait d'être d'accord avec le

 28   contenu de ce document. Je ne parle pas donc au nom du Dr Kirudja. Il ne va


Page 21329

  1   pas remettre en question l'authenticité du document, mais il ne sera peut-

  2   être pas d'accord avec le contenu ou vice versa. Mais si cela semble avoir

  3   une utilité quelconque et si ceci vous permettra de ne pas présenter les

  4   documents au Dr Kirudja durant la déposition, cela s'avéra peut-être un

  5   exercice utile qui vaut le coup d'être mené.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas-là -- je vais, dans ce cas-là,

  7   préparer tous les documents.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Tieger.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Etant donné que le témoin est d'accord, la

 10   seule chose qui me préoccupe, c'est de semer la confusion sur ce qui s'est

 11   passé, comme Mme Sutherland l'a mentionné. Il n'y en a pas eu de par le

 12   passé, il n'y a pas eu de par le passé des remises en question de

 13   l'authenticité des documents des Nations Unies, et nous ne pensions pas que

 14   cela se produirait dans le cas de ce témoin-ci. Mais cela ne change pas les

 15   critères nécessaires pour versement direct de pièces. Mais, comme les Juges

 16   de la Chambre l'ont mentionné, et l'ont remarqué, il y a certains aspects

 17   qui n'ont pas été abordés, et ce serait peut-être facile -- plus facile si

 18   le témoin avait le temps de passer en revue certains des documents. Nous

 19   n'avons pas d'objection. Je pense que ce sera -- c'est très difficile de

 20   comparaître ici en tant que témoin, tout le monde souhaite faire une pause,

 21   et je pense qu'on devait permettre au moins également au témoin d'avoir une

 22   brève pause de façon à ce qu'il puisse également continuer à être

 23   pleinement à même de répondre aux questions lorsque nous reprendrons

 24   l'audience.

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Mais il semble que le Dr Kirudja a

 26   beaucoup d'endurance et je ne vois pas exactement l'utilité, mais si ceci

 27   nous permet de faire gagner du temps à terme, peut-être que l'on pourra

 28   demander au Dr Kirudja de se charger de cela. Nous allons faire la pause


Page 21330

  1   maintenant et nous reprendrons à 13 heures 35.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être que je pourrais proposer que, durant

  3   les audiences, on présente des copies papier au Dr Kirudja et il peut nous

  4   dire si, effectivement, ce document reflète bien ce qu'il a observé en tant

  5   que responsable des affaires civiles. Il n'est peut-être pas nécessaire de

  6   lui demander de faire cela pendant toute la pause déjeuner. Je dois dire

  7   que je suis maintenant très gêné d'avoir proposé cela parce que --

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je ne pense pas que vous ayez des

  9   raisons d'être gêné compte tenu de ce que le Dr Kirudja vient de nous dire.

 10   Vous pouvez donner donc ces documents au Dr Kirudja, vous donner donc les

 11   documents qui selon vous seront utiles, et nous reviendrons après notre

 12   pause déjeuner à 13 heures 35.

 13   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 34.

 14   --- L'audience est reprise à 13 heures 38.

 15   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, toutes nos excuses

 16   pour ce début retardé de quelques minutes, mais maintenant nous sommes sur

 17   les rails et vous pourrez avoir un échange utile avec le témoin qui a pu

 18   prendre connaissance d'un certain nombre de documents pendant la période;

 19   c'est cela ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Excellence. Nous avons

 21   compulsé les documents que nous sommes parvenus à imprimer et je crois que

 22   le Dr Kirudja est informé de l'ensemble de ces documents que nous avons

 23   l'intention d'utiliser plus tard. Le Dr Kirudja pourrait peut-être nous

 24   dire s'il est satisfait de ce qu'il a pu voir afin de confirmer

 25   l'authenticité de ces documents.

 26   Entre-temps j'aimerais demander le versement au dossier du document 23030

 27   qui a déjà été utilisé avec ce témoin. Il s'agit de la lettre du HCR

 28   adressé à M. Pasic. Nous avons utilisé ce document avant le déjeuner.


Page 21331

  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, ce document est admis au

  2   dossier.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce D1918.

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Kirudja, merci de votre aide

  5   pendant la pause déjeuner, est-ce que vous pouvez ajouter un commentaire ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas

  7   exactement comment vous souhaitez que nous procédions avec les documents

  8   mais en tout cas j'ai reçu ces documents et je n'éprouve aucune difficulté

  9   à en valider l'authenticité. Certains d'entre eux ont été rédigés il y a

 10   très longtemps et leur contenu me reviendra progressivement en mémoire si

 11   la nécessité en devient pertinente. Mais après les avoir examinés je

 12   n'éprouve aucune difficulté à en authentifier l'authenticité.

 13   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons

 14   laisser l'abri libre au Dr Karadzic quant à la façon dont il souhaite

 15   procéder avec vous s'agissant de la présentation de ces documents. Je vous

 16   remercie.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je demande l'affichage du document 65

 18   ter numéro 6732.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Docteur Kirudja, je suis désolé que vous n'ayez pas pu prendre

 21   connaissance de l'ensemble des documents émis par les autorités à Bosanski

 22   Novi à l'époque des faits. Vous auriez été convaincu si tel avait été le

 23   cas probablement que le plus grand chaos régnait à l'époque dans cet

 24   endroit, et qu'une guerre civile y faisait rage, comme vous l'avez dit

 25   vous-même, Bosanski Novi était un lieu où une guerre était en cours qui

 26   affectait un grand nombre de localités sur le territoire de cette

 27   municipalité, vous l'avez dit, n'est-ce pas ?

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, un instant, Madame Sutherland.


Page 21332

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Désolé d'interrompre, le Dr Kirudja, qui

  2   était prêt à répondre à la question. Mais je souhaitais simplement informer

  3   les personnes présentes que le document 65 ter, numéro 6732, fait partie

  4   déjà des pièces de la Défense. Il s'agit de la pièce D00470.

  5   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Encore une fois, toutes mes excuses pour

  7   cette interruption de l'échange entre la question et la réponse.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, Docteur Kirudja.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Docteur Karadzic du commentaire que

 10   vous avez fait au sujet de ce que j'ai pu conclure à l'époque et de ce que

 11   je n'ai pas pu conclure à l'époque, sur la base des documents que j'avais

 12   eus sous les yeux. J'ai vu certains documents internes provenant des

 13   responsables de la Republika Srpska, de la République serbe de Bosnie-

 14   Herzégovine, et je ne sais pas très bien ce que l'on attend de moi par

 15   rapport à l'interprétation de ces documents. Donc j'en resterai là de mes

 16   commentaires pour le moment, et si cela devient nécessaire, je pourrais

 17   peut-être ajouter plus tard l'expression d'une autre conclusion ou d'un

 18   nouveau commentaire.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Merci. Veuillez, je vous prie vous pencher sur la ligne 10, dans

 21   laquelle il est fait mention de 15 h. On y décrit l'activité de restitution

 22   volontaire des armements. Il est indiqué que la police militaire a fait

 23   rapport à ce sujet en déclarant avoir été attaquée, et que le 24 mai, toute

 24   la population des villages de la vallée de Japra a été relogée dans la

 25   partie centrale de Blagaj. Il est indiqué également que le 2 juin, les

 26   forces de l'état-major de la municipalité de Bosanski Novi, état-major de

 27   la Défense territoriale, ont réagi à la situation, et que des citoyens non-

 28   serbes ont été emmenés dans le stade de Mlakve par les autorités serbes. Il


Page 21333

  1   est également indiqué selon les informations disponibles que l'assemblée

  2   municipale de la Défense territoriale a mené à bien cette action dans le

  3   but de mettre un terme à l'activité de groupe échappant à tout contrôle et

  4   d'individus échappant à tout contrôle, qui en dehors d'actes de

  5   représailles contre la population commettaient également des actes de

  6   destruction aveugles en s'attaquant à l'ensemble des bâtiments. Par

  7   ailleurs, en page suivante, il est indiqué que ces groupes ont été

  8   démantelés le 5 juin, c'est-à-dire trois jours -- que cette instance a été

  9   démantelée le 3 [comme interprété] juin, c'est-à-dire trois jours après sa

 10   création.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante à l'écran, je vous prie.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Donc tout le monde est rentré à son domicile, sauf 17 personnes qui

 14   sont restés sur les lieux de la garde de la police militaire. Il est

 15   également indiqué dans ce document que les citoyens pouvaient disposer des

 16   installations sportives et autres, et en particulier du bâtiment du club de

 17   football, et qu'ils recevaient régulièrement à boire et à manger. Un peu

 18   plus loin dans le texte, il est indiqué que le 24 mai, aux environs --

 19   environ 4 000 habitants -- oui, voilà, je retrouve le passage, mais je

 20   crois que la traduction n'est vraiment pas d'une très bonne qualité. Donc,

 21   le 24 mai, près de 4 000 habitants ont quitté leur domicile et se sont

 22   transformés en réfugiés. Ils se sont rendus au centre du village de Blagaj,

 23   et le 9 juin, il a été convenu qu'ils se dirigeraient vers la gare

 24   ferroviaire et monteraient à bord de 22 wagons de train pour être

 25   transportés vers Doboj.

 26   Est-ce que vous saviez que la première fois, ils ont refusé de se rendre à

 27   Doboj, et que la deuxième fois, ils l'ont finalement accepté ? Il y a eu

 28   entre les deux événements, 17 jours qui se sont écoulés. Les réfugiés ont


Page 21334

  1   donc -- ces personnes ont d'abord refusé d'être emmenés à Doboj, elles sont

  2   rentrées chez elles, et 17 jours plus tard, elles ont accepté de se rendre

  3   à Doboj.

  4   R.  Docteur Karadzic, est-ce que vous me demandez de confirmer ce que vous

  5   dites que ces personnes ont fait ?

  6   Q.  Non, non, je voulais savoir si vous saviez qu'il a été proposé à ces

  7   personnes, et d'ailleurs un train a été amené sur les lieux, et ces

  8   personnes ont d'abord refusé de monter à bord du train. Elles sont rentrées

  9   chez elles, parce que leur souhait était d'aller en Croatie. Est-ce que

 10   vous saviez que la première fois, ces personnes ont refusé le moyen de

 11   transport qui pouvait les emmener à Doboj, parce qu'elles souhaitaient

 12   aller en Croatie. Elles ont refusé d'aller d'abord à Doboj et à Banja Luka,

 13   et ensuite il s'est écoulé 17 jours pendant lesquels ces personnes étaient

 14   chez elles à leur domicile, et ces personnes ont finalement décidé

 15   d'accepter d'être transportées jusqu'à Doboj.

 16   R.  Je ne connais pas ce détail particulier que le Dr Karadzic vient de

 17   décrire aux Juges. Mais pour ma part, j'aimerais pouvoir ajouter une

 18   précision. A peu près à la période dont vient de parler le Dr Karadzic, ces

 19   personnes nous présentaient un récit différent. Selon ce que ces personnes

 20   nous ont dit, elles ont créé pour commencer un SOS sur le terrain, qui

 21   était donc observé par les observateurs militaires danois, et ceci a donc

 22   appelé notre attention, car par la suite, leur récit, leur récit de ces

 23   personnes nous a été communiqué. Ce qui ne veut pas dire que je sais ou ne

 24   sais pas ce que le Dr Karadzic vient d'évoquer. Je souhaiterais que le Dr

 25   Karadzic se rende compte qu'à ce moment-là, nous examinions également le

 26   développement de la situation, et nous recevions des rapports qui étaient

 27   assez différents.

 28   Q.  Merci. Nous viendrons à ce sujet plus tard. Je souhaitais simplement


Page 21335

  1   savoir si vous étiez au courant du fait que ces personnes avaient d'abord

  2   refusé d'être transportées vers l'intérieur du territoire de la Republika

  3   Srpska, parce qu'elles souhaitaient se rendre en Croatie. Si vous ne savez

  4   pas cela, ce n'est pas capital, vous ne le saviez pas n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne savais pas ce que ces personnes refusaient de faire d'après ce

  6   que vous dites, parce que lorsqu'elles nous ont parlé à nous, elles nous

  7   disaient qu'elles refusaient autre chose. Il est possible qu'elles aient

  8   refusé ce que vous dites, mais lorsqu'elles parlaient avec nous, ces

  9   personnes nous disaient qu'elles refusaient autre chose.

 10   Q.  Merci. Dans vos diverses dépositions, vous avez également confirmé que

 11   les raisons de la migration de ces populations, étaient à rechercher dans

 12   la guerre civile et dans le chaos qui régnait à l'époque, dans la région,

 13   n'est-ce pas ? Vous avez également confirmé que la population civile, dans

 14   ces conditions souffrait grandement et a continué à souffrir à cause des

 15   circonstances caractéristiques de la situation, et ce en dépit des cessez-

 16   le-feu. Vous l'avez dit par exemple dans l'affaire Brdjanin, et le 10

 17   février 2003, page 14508 du compte rendu d'audience, je vais vous rappeler

 18   vos propos. Je vais donc les lire en anglais, ce jour-là vous avez expliqué

 19   qu'un grand nombre de personnes déplacées étaient le résultat de la guerre

 20   en Croatie, pour commencer, et également le résultat de la guerre en

 21   Bosnie-Herzégovine par la suite, et qu'il y avait parmi les réfugiés un

 22   grand nombre de Serbes également, n'est-ce pas ?

 23   R.  Docteur Karadzic, la dernière partie de ce que vous venez de dire est

 24   exact, si l'on s'entend bien sur le fait que ce que vous venez de dire à

 25   l'instant était impliqué, était implicite dans ma déposition. Mais ce que

 26   vous avez dit au début de votre propos, à savoir que dans ma déposition

 27   j'ai confirmé que la cause de la migration de la population était à

 28   rechercher dans la guerre civile et dans le chaos qui régnait suprêmement


Page 21336

  1   dans la région à l'époque, est inexact. Ce n'est pas une bonne façon de

  2   décrire ma déposition. Dans ma déposition, On m'a demandé de déterminer

  3   pour quelles raisons ces personnes s'étaient déplacées, et je n'ai pas mis

  4   un nom sur ces causes. On m'a demandé de déterminer d'où les pressions

  5   étaient venues mais pas pourquoi ces personnes souhaitaient se déplacer. Ça

  6   c'est une description un peu inexacte de ma déposition.

  7   Q.  Mais n'avez-vous pas dit, dans l'affaire Brdjanin en page 14584 du

  8   compte rendu d'audience, qu'il est assez inhabituel en l'absence d'un

  9   conflit que des personnes n'éprouvent pas le désir de se rendre dans une

 10   zone où il n'y a pas de conflit comme, par exemple, l'Autriche ou

 11   l'Allemagne, pour peu que ces personnes aient de la famille dans ces

 12   endroits; n'est-ce pas ce que vous avez dit ?

 13   R.  Monsieur le Président, j'aurais besoin d'une référence exacte de

 14   l'endroit où j'ai dit cela car j'ai l'impression qu'il manque quelque chose

 15   au résumé de mes propos.

 16   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland, je vois que vous

 17   venez de vous lever.

 18   Est-ce que vous disposez, Docteur Karadzic, d'une référence exacte ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela se trouve en page 14 584 du compte rendu

 20   d'audience de l'affaire Brdjanin, à la date du 13 février 2003, et dans le

 21   prétoire électronique le numéro est 6522681.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Il est question dans ce passage du compte rendu d'audience d'un rapport

 24   des Nations Unies datant de 1991 dans lequel il est indiqué que ce n'est

 25   pas quelque chose d'inhabituel.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, si le Dr Karadzic

 27   ne demande pas l'affichage de la page dans le prétoire électronique,

 28   j'indique que le Dr Kirudja s'est vu soumettre un document au cours du


Page 21337

  1   contre-interrogatoire et qu'il a répondu que "c'était bien ce qu'indiquait

  2   ce rapport." C'est la seule réponse qu'il a fournie en page 14584.

  3   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui. Je ne pense pas que ceci puisse

  4   aider grandement le témoin.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à cause de cela que j'ai eu le sentiment

  6   qu'il manquait quelque chose dans la description qui vient d'être faite des

  7   propos que j'ai tenus dans ma déposition dans l'affaire Brdjanin.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bon.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Mais conviendrez-vous avec moi que c'est bien ce qui était indiqué dans

 11   le rapport des Nations Unies, et que vous avez répondu que si quelque chose

 12   se trouvait en plein milieu d'un conflit armé il n'aurait pas été étonnant

 13   de voir cette personne souhaiter se rendre dans un lieu où aucun conflit ne

 14   faisait rage tel que, par exemple, l'Autriche ou l'Allemagne ? C'est bien

 15   ce que vous avez dit, n'est-ce pas ?

 16   R.  Si ma déposition se présente dans les termes exacts que vous venez de

 17   reproduire, moi ce qui me surprendrait c'est que j'ai parlé de l'Allemagne

 18   ou de l'Autriche alors que je m'exprimais de façon générale. Il est humain

 19   d'essayer de fuir le danger. C'est le résumé de ce que j'ai pu dire, si

 20   vous souhaitez que je le résume en quelques mots.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois,

 23   c'est une question qui était posée par la Défense. La Défense a soumis une

 24   proposition, et la réponse du Dr Kirudja a été de considérer -- a été de

 25   demander s'il s'agissait d'une question générale, après quoi la réponse a

 26   été "Oui." Puis ensuite, le Dr Kirudja a dit : "Non, cela ne serait pas

 27   étonnant." Donc je pense que M. Karadzic a la nécessité de présenter la

 28   citation exacte et de faire apparaître la page à l'écran, s'il veut ajouter


Page 21338

  1   d'autres questions à celles qui ont déjà été posées au témoin.

  2   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, en effet, vous ne

  3   pouvez pas poser une question au témoin si lui ne reprend pas la totalité

  4   de la question dans sa réponse. Vous ne pouvez pas lui poser une question

  5   partielle, ce serait tout à fait inéquitable.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Nous allons laisser ce sujet de côté

  7   pour le moment.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Est-il exact que les représentants musulmans vous ont dit qu'ils

 10   souhaitaient se rendre dans des pays étrangers pour diverses raisons, à

 11   cause des combats, pour des raisons économiques, à cause de la présence

 12   d'individus échappant à tout contrôle que les autorités serbes essayaient

 13   de placer sous leur contrôle, ce en quoi d'ailleurs elles ont échoué,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Il n'est pas exact que les représentants musulmans nous ont dit la

 16   suite de votre phrase. J'ai consacré pas mal de temps à dire à plusieurs

 17   reprises que les intérêts des Musulmans m'étaient relayés par les Serbes et

 18   pas par les Musulmans eux-mêmes. Les Musulmans ne sont pas venus me dire

 19   nous voulons ceci ou cela, sauf les réfugiés qui découvraient qu'ils

 20   pouvaient éventuellement partir vers la sécurité, et avant leur départ nous

 21   les interrogions sur ce qui était en train de se passer et sur l'endroit où

 22   ils souhaitaient se rendre. Avec cette précision, comme certains

 23   l'appelleront, ils répondaient que certains voulaient se rendre en Europe

 24   ou en d'autres lieux dont ils donnaient les noms. Mais pas un seul

 25   représentant musulman ne nous a dit qu'il souhaitait se rendre en Allemagne

 26   ou en Autriche. C'est cela que je tenais à préciser.

 27   Q.  Est-ce qu'ils vous ont dit qu'ils souhaitaient partir pour des raisons

 28   économiques, en raison des difficultés économiques, autrement dit, de leur


Page 21339

  1   pauvreté ? Est-ce qu'ils vous ont dit également qu'ils avaient peur des

  2   représailles de tous les Serbes qui avaient dans leur famille des morts sur

  3   le front ? Est-ce qu'ils vous ont dit que, jusqu'à ce moment-là, les

  4   autorités serbes avaient réussi à empêcher toute tentative de représailles

  5   et que leur départ ne devait pas être considéré comme du nettoyage ethnique

  6   mais placé dans le contexte différent des menaces qui mettaient leur vie en

  7   danger ?

  8   R.  Merci, Docteur Karadzic. Je pense que vous parlez d'un rapport très

  9   précis dans lequel il est indiqué qu'un représentant musulman quelque part

 10   à Kostajnica m'a rencontré moi et mes collègues. C'était un ingénieur de

 11   profession, et il avait été choisi par les Serbes pour nous rencontrer et

 12   il s'est exprimé d'une façon assez différente au sujet des Serbes par

 13   rapport à ce que vous dites au début de votre déclaration. Ils ont parlé,

 14   j'ai pris note de leurs propos, et dans ce cas bien précis, ce que le Dr

 15   Karadzic dit est exact. Ils disaient : "Nous devons partir pour des raisons

 16   économiques. Nous n'avons pas besoin d'être ici en cas de combat. Aussi

 17   longtemps que les Serbes se feront tuer, nous craignons les répercussions

 18   possibles de tels actes."

 19   Si c'est à cela que le Dr Karadzic fait référence alors, oui, ceci apparaît

 20   bien dans ma déposition, mais dans le contexte précis que je viens de

 21   définir.

 22   Q.  Vous avez dit cela, au paragraphe 105 de votre déclaration écrite, vous

 23   parlez de l'ingénieur Savic. Au paragraphe 109, vous dites qu'un certain

 24   représentant musulman a ensuite ajouté que les Musulmans craignaient des

 25   représailles chaque fois que des Serbes se faisaient tuer sur la ligne de

 26   front, et il est indiqué également que s'agissant des autorités serbes,

 27   jusqu'à ce moment-là, elles avaient réussi à empêcher de telles

 28   représailles. Est-ce que vous avez entendu cela de la bouche du même


Page 21340

  1   Musulman ou d'un autre Musulman ?

  2   R.  Merci, Docteur Karadzic, je ne me rappelais pas exactement les

  3   paragraphes où figurait ce récit. Oui, c'est dans ce contexte que ce récit

  4   m'a été fait. Mais, non, à ce moment-là, je ne me souviens plus exactement

  5   si c'est une seule personne qui m'a dit les deux choses ou si plusieurs

  6   personnes ont répondu à mes questions. Si c'était quelqu'un d'autre qui a

  7   répondu à la deuxième question, il aurait pu situer les choses dans un

  8   contexte un peu différent. C'est tout à fait possible. Mais je tiens à

  9   répéter qu'il y avait des gens qui nous étaient présentés par les autorités

 10   serbes et qui essayaient d'être sélectifs, d'être précis et de nous

 11   présenter l'intégralité de la situation sous tous ces aspects divers.

 12   Q.  Donc vous diriez que c'était une situation artificielle et que vous

 13   n'aviez pas totalement confiance dans ces Musulmans; vous ne faisiez pas

 14   entièrement foi à leur récit; est-ce que c'est cela ?

 15   R.  Absolument pas, Docteur Karadzic. Quand les gens ont peur, cela n'a

 16   rien d'artificiel. Je croyais que ces gens-là disaient. Mais cela ne

 17   signifie pas que ce qu'ils disaient correspondait à l'ensemble des désirs

 18   des Musulmans.

 19   Q.  Merci. Mais au paragraphe 113, par exemple, un certain nombre

 20   Islamcevic vous dit qu'il aurait apprécié que la FORPRONU soit autorisée à

 21   escorter le convoi, et vous dites :

 22   "Les gens, qui faisaient l'objet de cette évacuation, ne souhaitaient

 23   pas se rendre dans une partie de la Bosnie-Herzégovine pour être ensuite

 24   déplacée vers une autre. Ils avaient des garanties provenant de leurs

 25   proches qui les assuraient de leur soutien. Les autorités serbes leur

 26   avaient garanti qu'elles les traiteraient avec équité et qu'elle souhaitait

 27   que personne ne sorte du convoi avant l'arrivée à Karlovac."

 28   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit dans ma déposition et c'est tout à fait


Page 21341

  1   exact. Mais je sais que ce genre de demande m'a été présenté que ces

  2   personnes soient en présence de Serbes ou pas. Tant que ces personnes se

  3   trouvaient sur le territoire sous contrôle serbe elles ne pouvaient pas

  4   pousser le moindre soupir de soulagement. Elles faisaient attention aux

  5   mots qu'elles prononçaient, à ce qu'elles disaient. Elles ne savaient pas

  6   qui pouvait les écouter et qui pouvait ensuite dire quoi au sujet de ce que

  7   ces personnes nous racontaient. Donc dans ma déposition je dis que nous

  8   avons écouté ce que ces personnes nous racontaient. C'est ce qui se passait

  9   et ces personnes le décrivaient. Maintenant, ce que cela signifiait pour

 10   nous peut être différent. La plupart du temps ces personnes étaient sous la

 11   garde de la police jusqu'à leur départ. C'est d'ailleurs l'une des raisons

 12   qui justifiaient la crainte qu'elles éprouvaient pour leur vie.

 13   Q.  Mais, Docteur Kirudja, la façon dont vous avez compris les choses est

 14   très subjectif. Cela dépendait de votre volonté à accorder foi à une

 15   version ou à une autre, par exemple, les gens ne croient en Dieu que s'ils

 16   le souhaitent. Si vous souhaitez croire que telle ou telle chose correspond

 17   à ce qu'on vous dit, vous le croyez. Mais, moi, ce que je vous soumets

 18   c'est que quelqu'un vous a dit qu'il ne souhaitait pas partir pour une

 19   autre partie de la Bosnie mais souhaitait obtenir des garanties de sa

 20   famille pour pouvoir la rejoindre à un autre endroit. Est-ce que vous niez

 21   cela ? Est-ce que cela ne signifie pas que ces personnes demandaient à se

 22   rendre quelque part en dehors de la Bosnie alors que vous venez de nous

 23   dire que ces personnes n'avaient pas exprimé le désir d'être transférées à

 24   l'étranger ?

 25   R.  Je crois que vous ne m'avez pas bien compris, Docteur Karadzic, je n'ai

 26   pas dit cela. J'ai dit que je croyais ce que ces personnes nous disaient

 27   souhaiter et si elles souhaitaient un sauf-conduit nous fournissions ce

 28   sauf-conduit. Je ne dis pas qu'elles ne souhaitaient pas aller là où elles


Page 21342

  1   disaient souhaitaient aller. Ce que je dis devant les Juges de la Chambre

  2   et ce que dit également le Dr Karadzic c'est qu'il s'agissait uniquement du

  3   désir général des Musulmans, d'après le Dr Karadzic alors qu moi je diverge

  4   un peu sur ce point. Je ne pense pas que c'était l'expression du désir de

  5   tous les Musulmans.

  6   Q.  Sauf votre respect, Docteur Kirudja, j'ai distingué entre votre

  7   impression subjective et la réalité objective des faits. C'est une absolue

  8   nécessité dans un procès pénal. Je vous soumets que lorsque les gens

  9   quittaient la Bosnie ils ne souhaitaient pas être rapatriés. Et si l'on ne

 10   perd pas de vue cet objectif ces personnes pouvaient dire n'importe quoi.

 11   Elles pouvaient dire que les conditions n'étaient pas réunies pour leur

 12   rapatriement.

 13   R.  Je pense que j'ai déjà répondu à cette question.

 14   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, là encore, vous

 15   demandez au témoin de se lancer dans des conjectures sur ce qui aurait été

 16   effectivement les intentions des gens par opposition à ce que les gens lui

 17   ont dit. Tout ce que le témoin peut dire aux Juges de la Chambre et c'est

 18   qu'effectivement ces gens lui ont dit à l'époque, et je pense que nous

 19   avons épuisé ce point.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges. C'est le

 21   témoin qui m'encourage sur cette voie, parce que c'est lui qui se lance

 22   dans des hypothèses sur les intentions des Musulmans, donc si on se lance

 23   dans ce genre de conjecture, on peut se laisser embarquer dans les autres

 24   également. Bon.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors, Monsieur, ne pouvez-vous pas nous confirmer maintenant, Docteur

 27   Kirudja, qu'il n'y a pas un seul endroit en Bosnie où il ne soit pas resté

 28   des Musulmans donc il y a des endroits où les Musulmans sont restés vivre


Page 21343

  1   tranquillement jusqu'à la fin de la guerre ?

  2   R.  Je ne serais pas en mesure de dire cela.

  3   Q.  Toutefois, vous pouvez dire si vous savez ou si vous ne le savez pas.

  4   Donc ne savez-vous pas que, dans toutes les localités de Republika Srpska,

  5   il est resté un nombre considérable de Musulmans qui ne sont partis nulle

  6   part ? Je ne dis pas que cela n'a pas été le cas; je vous demande si vous

  7   êtes au courant de cela.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Excusez-nous, Monsieur Karadzic,

  9   cette question est très bizarre. Quelle est sa logique ? Je ne vois pas

 10   comment on pourrait répondre à cette question.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Docteur Kirudja, savez-vous que sur le territoire de la Fédération de

 14   Bosnie-Herzégovine pas un seul village serbe n'est resté, tandis que dans

 15   la Republika Srpska de nombreux villages musulmans et croates sont restés

 16   sans que qui que ce soit s'en prenne à eux ?

 17   R.  Je vous réponds en vous apportant la même réponse. Je ne serai pas en

 18   mesure de vous le dire. Je ne pourrais jamais déclarer en m'engageant à

 19   dire la vérité qu'il n'y a pas un seul endroit dans ce cas.

 20   Q.  Monsieur Kirudja, vous êtes un homme qui défend un certain nombre de

 21   positions, qui a des opinions, qui a rédigé des rapports. J'aimerais savoir

 22   si vous étiez au courant de cela; est-ce que c'est quelque chose que vous

 23   saviez ?

 24   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Mme Sutherland.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le témoin a déjà répondu.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, Docteur Karadzic, le témoin a

 27   déjà répondu, faites attention. Vous apportez une affirmation et vous la

 28   traitez comme si c'était un fait établi, et par la suite, vous posez la


Page 21344

  1   question au témoin vous lui demandez s'il savait -- s'il était au courant

  2   de cela mais ce n'est pas une question valable. Tout d'abord, cela suppose

  3   que la partie effectivement directrice de la question comporte des faits

  4   véridiques, et deuxièmement, si le témoin réfute, c'est la fin de la chose.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis qu'un laïc dans le domaine

  6   juridique, mais je vais essayer de démontrer et je vais y parvenir que

  7   Srbac, Sipovo et d'autres villages sont restés intacts, et ce sont des

  8   Musulmans qui peuvent nous le confirmer. Donc j'ai des fondements, j'ai des

  9   bases pour -- ou plutôt, je tiens à vérifier ce que j'interprète, s'il y a

 10   des fondements sur lesquels se base M. Kirudja pour avancer ses

 11   conclusions.

 12   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] M. Kirudja ne tire pas des

 13   conclusions. Il vous dit qu'il ne peut pas vous répondre, il ne peut pas

 14   confirmer quelque chose qu'il ne connaît pas. Il ne sait pas si c'est vrai

 15   ou non. Si vous allez présenter d'autres éléments à l'avenir, ça c'est une

 16   toute autre chose. Mais cela ne peut pas faire l'objet du contre-

 17   interrogatoire de ce témoin.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, avec tout mon respect, ce que je

 19   veux savoir c'est ce qui permet à Dr Kirudja de penser ce qu'il pense. Est-

 20   ce que c'est sur la base d'une connaissance générale, une connaissance

 21   partiale de la situation. Dr Kirudja lui-même est conscient du fait qu'il y

 22   a beaucoup de choses qu'il ne savait pas.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Donc je vous demande, Docteur Kirudja. Saviez-vous que les dignitaires

 25   catholiques et musulmans se trouvent dans la Republika Srpska aujourd'hui

 26   alors que le même n'est pas vrai pour la fédération, qu'il n'y a pas de

 27   dignitaires orthodoxes de l'église orthodoxe ?

 28   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande qu'on remplace "laïque" par "profane."


Page 21345

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Là encore je ne vais pas pouvoir vous

  2   répondre. Ecoutez, je vais être très précis. Il faudrait que j'aie été

  3   partout, omniprésent, pour vous répondre à votre question. Je ne me suis

  4   jamais trouvé partout, donc je ne vois pas comment je pourrais vous

  5   répondre.

  6   Q.  Très bien. Mais est-ce que vous savez que nous avons toujours accepté

  7   les initiatives qui venaient des autres, à savoir nous souhaitions que

  8   toutes les parties s'engagent à ce que tous les réfugiés, toutes les

  9   personnes déplacées puissent retourner à leur foyer une fois que la paix

 10   aurait été rétablie ?

 11   R.  C'est la première fois que je l'entends de votre bouche. Donc c'est la

 12   première fois que j'entends cette affirmation. Je ne le savais pas avant

 13   cela.

 14   Q.  D'accord. Mais est-ce que vous êtes d'accord pour dire que cela ne

 15   relevait pas des instances municipales mais du pouvoir central de la

 16   Republika Srpska, qui lui a négocié avec la communauté internationale et

 17   avec les deux autres parties au conflit ?

 18   R.  Non, non, non, je ne pouvais pas savoir quelle était la situation entre

 19   les autorités locales et le pouvoir central.

 20   Q.  Peut-être n'ai-je pas été clair. Non, non, je ne vous interroge pas sur

 21   les relations entre les autorités municipales et le pouvoir central. Est-ce

 22   que vous savez que c'est au niveau des instances centrales des trois

 23   parties belligérantes que l'on a négocié et non pas au niveau des

 24   municipalités ? Est-ce que vous savez que c'est là qu'on a négocié le

 25   retour des gens ?

 26   R.  Non, je ne le sais pas.

 27   Q.  Vous dites que c'est à Topusko que vous avez reçu, avec le HCR, une

 28   délégation de Serbes et de Musulmans de Sanski Most. Vous dites cela au


Page 21346

  1   paragraphe 111. Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, vous reporter à ce

  2   paragraphe, donc, de Prijedor ? Vous dites que vous avez parlé avec Vlado

  3   Vrkes et avec Dragan Majkic, le chef de la police de Sanski Most, avec

  4   Besim Islamsevic, le représentant des Musulmans et des Croates qui

  5   souhaitaient quitter Sanski Most. M. Esad Hasanovic était lui aussi un

  6   représentant -- en fait, il se trouve maintenant à Sanski Most, alors que

  7   c'est en fait quelqu'un qui est venu de Krupa, de Bosanska Krupa. Donc est-

  8   ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il s'est enfuit de Sanski Most à

  9   Bosanska Krupa, qui se trouve en Republika Srpska ?

 10   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que l'on change. Donc c'est quelqu'un

 11   qui a fuit Bosanska Krupa pour se rendre à Sanski Most.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne pouvais pas connaître tous ces

 13   détails sur lui.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Puis il est question de M. Esad Hasanovic, qui est donc le représentant

 16   des Musulmans et des Croates, qui est basé à Sanski Most, des Musulmans et

 17   des Croates qui sont prêts à quitter Bosanska Krupa. Donc il est basé dans

 18   une municipalité serbe; c'est bien cela ?

 19   R.  Si vous le dites, Monsieur Karadzic.

 20   Q.  C'est le paragraphe 111 de votre déclaration. Puis, au paragraphe 112,

 21   vous dites que la délégation a essayé de persuader les Nations Unies de

 22   changer de politique face aux évacuations en masse qui étaient en relation

 23   avec le nettoyage ethnique et d'aider à ce qu'on organise un autre convoi

 24   dans le secteur nord, qui permettrait d'évacuer jusqu'à 11 000 Musulmans,

 25   surtout Musulmans qui ont demandé d'être évacués de Sanski Most, et puis

 26   les 8 000 de Prijedor. Donc nous avons une délégation mixte, ce sont des

 27   Musulmans, ce sont leurs représentants habiletés ensemble avec les Serbes,

 28   donc, ce sont les deux parties qui vous affirment cela.


Page 21347

  1   R.  C'est exact. C'est ce dont je fais état.

  2   Q.  Puis, au paragraphe 116, Vrkes vous dit que 25 000 personnes déplacées.

  3   Je suppose que ce sont des Musulmans, qui sont arrivées de Bosanska Krupa

  4   et vivent à présent à Sanski Most, et il dit :

  5   "Seul Sanski Most s'occupe des trois nationalités, des trois groupes

  6   ethniques."

  7   Mais c'est ce qu'il vous dit devant les représentants musulmans qui

  8   sont présents ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous avez confirmé, dans ce même paragraphe, qu'avant l'arrivée de

 11   cette population musulmane de Bosanska Krupa, Sanski Most avait 50/50 de

 12   Musulmans et de Serbes, et qu'avec les 20 000 Musulmans qui étaient arrivés

 13   de Bosanska Krupa, le rapport n'est plus le même. Mais Vrkes ne se plaint

 14   pas. En revanche, ils apportent leur assistance et disent qu'ils n'ont

 15   jamais eu la sensation que ces Musulmans ou ces Croates auraient constitué

 16   un danger pour les Serbes; c'est bien cela ?

 17   R.  A une correction près. Les pourcentages des Musulmans et des Serbes ne

 18   viennent pas de moi. C'est M. Vrkes qui les donne. Je ne peux pas confirmer

 19   cela.

 20   Q.  Merci. Mais c'est une délégation mixte qui vous informe de cela, vous

 21   et le HCR, et cela se passe le 19 [phon] août ?

 22   R.  Oui, c'est exact.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Prenons 1D4828 très rapidement, s'il vous

 24   plaît.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que vous savez, connaissez la signification du mot Merhamet ?

 27   Savez-vous que Merhamet signifie une -- est le nom -- constitue le nom

 28   d'une organisation charitable musulmane ?


Page 21348

  1   R.  Non.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] 4828. 1D4828. Il y a peut-être une erreur. S'il

  3   vous plaît, 29, excusez-moi.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Donc je vais vous le dire maintenant. Merhamet c'est une organisation

  6   humanitaire musulmane pendant tout ce temps-là elle a pu déployer ses

  7   activités en Republika Srpska, apporter de l'aide aux Musulmans, que ce

  8   soit la population civile ou les personnes capturées, elle s'est même

  9   livrée à l'espionnage, pas tous ces membres mais certains, et pendant tout

 10   ce temps-là elle eu l'autorisation de travailler, tout comme Caritas son

 11   homologue catholique. Donc est-ce que vous savez que ces deux organisations

 12   humanitaires ont pu travailler librement en Republika Srpska ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Bien. Alors voyez maintenant ce document. C'est un aperçu des

 15   connaissances sur les activités de l'organisation humanitaire musulmane.

 16   Merhamet à Novi Grad qui est une nouvelle appellation de Bosanski Novi. Je

 17   ne sais pas si nous avons la traduction de ce texte mais je vous en donne

 18   lecture.

 19   "A en juger d'après les chiffres qui sont à notre disposition

 20   l'organisation humanitaire musulmane a jusqu'à présent reçu de l'aide pour

 21   2 880 citoyens l'aide humanitaire, et cela pour 2 300 Musulmans et pour 500

 22   personnes environ issues de mariage mixte ou qui sont des cas sociaux."

 23   Alors essayons de voir la date. Donc c'est en 1994 pendant toute la guerre

 24   Merhamet peut déployer activement -- peut agir à fournir l'aide humanitaire

 25   aux citoyens de Novi Grad, et puis est-ce que vous savez que même, à ce

 26   moment-là. 2 300 Musulmans vivent dans Novi Grad ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Nous allons voir la date. Est-ce que vous savez que seuls les


Page 21349

  1   Musulmans, vivant dans les villages au combat, sont partis, alors que les

  2   Musulmans sont restés dans la ville même ?

  3   R.  Non, je ne pourrais pas confirmer cela.

  4   Q.  Mais vous voyez bien la date de ce rapport c'est le 25 mai 1994 ?

  5   R.  Je vois bien la date effectivement, c'est la date que vous êtes en

  6   train de citer.

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Le Dr Kirudja n'a rien confirmé de ce

 11   document si ce n'est la date qui figure sur celui-ci.

 12   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vois mal comment ce document va

 13   nous être utile par rapport à ce témoin, Docteur Karadzic. Comme le dit Mme

 14   Sutherland, le témoin n'a rien confirmé de ce document. Je ne vois pas pour

 15   le moment comment est-ce qu'on pourrait le verser au dossier, en quoi est-

 16   ce que cela serait adéquat ou utile.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, mais je vais vous donner lecture

 18   d'un paragraphe qu'on a du mal à voir en bas :

 19   "Dans la pharmacie où il y a entre autres des Serbes, on a délivré environ

 20   5 000 médicaments sur demande du Merhamet. Du 11 mai 1994, le ministère de

 21   la Défense populaire en son département de Bosanski Novi a autorisé

 22   l'affectation au travail pour 16 Musulmans, dont cinq hommes," et cetera.

 23   Donc est-ce que vous acceptez qu'en 1994, au mois de mai, il y a au

 24   moins 2 300 Musulmans là-bas et que leur organisation humanitaire est libre

 25   d'agir ?

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je ne vois pas en quoi cela

 27   est utile. Est-ce que cela constitue une question qui s'adresse au témoin ?

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est un témoin qui défend une position,


Page 21350

  1   qui n'est pas favorable aux Serbes; est-ce qu'il a tenu compte de

  2   l'ensemble de la situation dans la municipalité sur laquelle porte son

  3   témoignage ?

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Ce document porte la date du mois de mai

  6   1994. Mais quelle est la pertinence de cela par rapport à la déposition du

  7   Dr Kirudja qui porte sur les événements de Bosanski Novi en 1992 et puis la

  8   question de 1995 était une question séparée la question des otages, donc je

  9   ne vois pas de pertinence.

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, nous ne voyons pas en quoi cela

 11   pourrait être utile. Docteur Kirudja, est-ce que vous pouvez nous confirmer

 12   l'exactitude du contenu de ce document, au moins en partie ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ignore totalement la teneur de ce document.

 14   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Karadzic, c'est un document

 15   qu'il va falloir utiliser avec un autre témoin, pour le moment cela n'est

 16   pas utile il faut que le document nous soit utile.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Mais nous avons le document

 18   23030. C'est un document où se réfère à Merhamet, où on a demandé des

 19   documents relatifs à Merhamet, il m'a semblé que cela constituait un lien

 20   entre ce que je viens de demander. J'ai voulu démontrer que ces conclusions

 21   ne se fondent pas nécessairement sur toute la connaissance exhaustive de la

 22   situation, qu'elle n'avait pas tous les éléments en main.

 23   Prenons maintenant le document D1680, s'il vous plaît.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Ce document --

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Excusez-moi, Docteur Karadzic, je

 27   voulais simplement parce que je viens de le remarquer, lignes 13 et 14 de

 28   cette partie du compte rendu d'audience en anglais, qu'il est écrit :


Page 21351

  1   "There is no utility," mais la phrase exacte est : "There is utility," mais

  2   enfin ceci peut être corrigé plus tard.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je croyais que ce qui était écrit, c'était :

  4   "There is utility." En tout cas, sur LiveNote, c'est ce que je lis.

  5   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Peut-être est-ce un problème qui

  6   affecte uniquement mon écran ? Enfin, avançons.

  7   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  8   Mme LE JUGE LATTANZI : [interprétation]

  9   Q.  Il s'agit de la réunion du conseil exécutif de la municipalité de

 10   Sanski Most à la date du 14 août. C'est donc un procès-verbal.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous passions maintenant sur les

 12   écrans à la page 4 de ce document. Peut-être page 3 en anglais. Kalacun ?

 13   Kalacun ? Voilà, je le trouve, qui dit ce qui suit, je cite :

 14   "J'aimerais demander au président du comité exécutif de nous informer au

 15   sujet de la position générale du gouvernement de la Région autonome de

 16   Krajina au sujet de l'exode à partir de l'Etat serbe."

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  A ce moment-là, le président de la municipalité, le Dr Rasula, dit

 19   qu'il n'existe pas des élections générales qu'il n'y a pas d'instructions

 20   particulières, que personne ne peut être contraint à l'exil, que le

 21   principe de base consiste à dire que les citoyens doivent décider eux-mêmes

 22   l'endroit où ils veulent habiter, et cetera, je cite :

 23   "S'ils souhaitent partir, ils doivent être autorisés à partir, avec un

 24   certain degré de supervision et de protection. Ceux qui désirent rester

 25   dans la municipalité, seront autorisés à y rester, uniquement s'ils n'ont

 26   pas participé à aucune activité répréhensible. Ceux qui souhaitent partir

 27   seront tenus d'acquitter le coup de leur voyage, car nous n'avons pas de

 28   moyen financier à leur intention."


Page 21352

  1   Est-ce que vous êtes d'accord que le président de la municipalité informe,

  2   dans ce passage de l'absence complète d'instruction, et ajoute que le

  3   principe de base c'est que les citoyens doivent se déterminer, se prononcer

  4   eux-mêmes ?

  5   R.  Je remarque ce que vous dites, Docteur Karadzic, mais je ne parviens

  6   pas à concilier vos propos avec ce qu'eux m'ont dit dans mon bureau, et

  7   ceci est présenté dans le paragraphe 112 de ma déclaration, à savoir que

  8   600 personnes ont finalement quitté Bosanska Krupa.

  9   Q.  Merci. Mais prenez en compte l'ensemble de ce paragraphe dans lequel

 10   vous dites, je cite :

 11   "La délégation" - et il s'agit d'une délégation mixte de Serbes, de

 12   Musulmans et de Croates, je reprends la citation - "la délégation est

 13   parvenue à convaincre les Nations Unies de modifier sa police opposée aux

 14   évacuations de masse, qu'elle associait au nettoyage ethnique pour aider à

 15   organiser un autre convoi …" et cetera, et cetera.

 16   Je vous rappelle Docteur Kirudja, qu'en vertu de notre loi, il existe une

 17   obligation dans des lieux où un conflit armé fait rage, de permettre le

 18   déplacement -- d'organiser le déplacement des civils, qui doivent pouvoir

 19   se rendre à l'endroit de leur choix. Ici, c'est ce qui est demandé, n'est-

 20   ce pas, c'est bien ce qu'ils vous disent ?

 21   R.  Encore une fois, Monsieur le Président, nous sommes en présence d'une

 22   contradiction. On nous dit, en vertu de la loi en vigueur chez nous, ils

 23   doivent partir. Mais ils ne doivent pas être poussés à partir, car chaque

 24   citoyen a le droit de décider par lui-même. C'est ce que j'entends d'un

 25   côté, mais c'est maintenant seulement que je l'entends de l'autre côté.

 26   Dans ma déposition, je ne suis pas entré dans ces arguments, j'ai

 27   simplement indiqué que 600 souhaitaient partir. C'était une déposition très

 28   simple qui ne faisait pas l'objet d'une argumentation quelconque, c'était


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  1   une description de la réalité.

  2   Q.  Docteur Kirudja, j'ai peut-être été imprécis. Ce que j'essaie de dire,

  3   c'est qu'en dépit de cette obligation légale, ces personnes ont fait appel

  4   à vous, alors que de toute façon les autorités avaient obligation de

  5   déplacer cette population. Je parle des civils pour qu'ils échappent aux

  6   zones de combat. Ici, ils ne demandent pas à ce que la loi soit respectée,

  7   ils font appel à vous, dans le cadre de cette délégation mixte. Ils font

  8   appel à vous, pour que vous aidiez à organiser leur évacuation, n'est-ce

  9   pas ?

 10   R.  Exact, c'est ce qu'ils demandent, et ils ont également reçu une

 11   réponse.

 12   Q.  Merci. Est-ce que nous pourrions maintenant voir ce que vous dites au

 13   sujet du stade de football. Est-ce que vous admettez ce que je vais dire

 14   maintenant, à savoir que des civils sont venus dans le stade de foot, où

 15   ils ont été retenus deux jours et demi. Le troisième jour, la plupart

 16   d'entre eux ont été autorisés à rentrer chez eux, à l'exception de 120

 17   personnes qui ont rejoint les rangs de notre armée, et de 17 qui sont

 18   restés, retenus au stade, et détenus par la police militaire pour des

 19   raisons de sécurité ?

 20   R.  Docteur Karadzic, pour que tout soit précis, il y a deux stades dans

 21   lesquels les personnes ont été regroupées. Un stade à Karlovac, et un autre

 22   à Bosanski Novi. Donc, pour que tout soit clair dans mon esprit, est-ce que

 23   vous parlez de celui de Bosanski Nova ou de Karlovac ?

 24   Q.  Je vous demande de confirmer que Karlovac se trouve en Croatie, loin de

 25   la rivière et de la frontière, et que à Karlovac, les Croates ont accueilli

 26   1 600 Musulmans qui étaient en chemin pour rentrer en Bosnie; exact ?

 27   R.  Oui, ils les ont retenus sur le stade de football étant donné que leur

 28   nombre était très important. Si on peut accueillir dans cette situation. Je


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  1   tiens à le dire très clairement.

  2   Q.  Merci. Alors qu'ici, dans ce document, il est question du stade de

  3   Bosanski Novi, où ont été installés des civils qui venaient de la vallée de

  4   la Japra. Donc nous parlons de l'autre stade, et au paragraphe 55 de votre

  5   déclaration, vous évoquez ce stade, et vous dites, qu'un Danois qui faisait

  6   partie de la patrouille danoise a apporté son aide, dans tout cela et qu'il

  7   a pu observer le stade de Bosanski Novi à la jumelle, et donc rendre compte

  8   de ce qui se passait dans ce stade, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Au paragraphe 56 de votre déclaration, vous dites que 350

 11   personnes déplacées sont arrivées en provenance de Kostajnica, ah non, non,

 12   non, que la compagnie danoise de Kostajnica fait savoir que 350 personnes

 13   déplacées ont été regroupées au stade de Bosanski Novi. Et le 8 juin, vous

 14   informez dans un mémorandum le Dr Thornberry, des événements qui se sont

 15   déroulés entre le 26 mai et le 8 juin, et vous dites, je cite :

 16   "… ces événements sont décrits dans le contexte des mandats des Nations

 17   Unies, j'ai expliqué précisément que selon les sources de la CIVPOL pendant

 18   la guerre, les personnes qui ont été retenues au stade au départ étaient

 19   tous des hommes. Les femmes qui y ont été, probablement qui ont été vues

 20   par la suite, étaient sans doute là pour apporter de l'eau et d'autres

 21   produits de première nécessité à ces hommes."

 22   Donc vous rédigez ce rapport sur la base d'autres rapports que vous

 23   receviez de tierce personne, n'est-ce pas ?

 24   R.  L'élaboration de ce rapport a été faite par les Danois, mais une fois

 25   qu'ils ont rassemblé ces éléments, ils se sont arrêtés là, et ces éléments

 26   m'ont été transmis. Ils n'ont pas élaboré ce rapport pour eux-mêmes, ils

 27   l'ont élaboré pour me le transmettre.

 28   Q.  Merci. Au paragraphe 71, vous dites, je cite :


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  1   "Il a été rapporté que les personnes qui se trouvaient au stade de football

  2   agitaient régulièrement des drapeaux blancs et lançaient des SOS lumineux

  3   pour attirer l'attention. Le lendemain, j'ai transmis une nouvelle fois ce

  4   renseignement dans un mémorandum à qui de droit avec une lettre en annexe."

  5   Un peu plus bas, nous lisons, je cite :

  6   "Le dernier paragraphe avait pour but de renforcer un message qui avait été

  7   transmis oralement précédemment à cet homme et à ses collègues à Dvor, par

  8   le HCR et par moi-même."

  9   L'homme dont il est question est M. Pasic. Alors je vous pose d'abord la

 10   question suivante : Est-ce que vous croyez que ces villageois savaient

 11   comment lancer des SOS en agitant des drapeaux blancs ? Pourriez-vous peut-

 12   être nous dire comment cela se fait ?

 13   R.  Je crois que les soldats sont très doués pour lire des signaux dès lors

 14   qu'ils ont été entraînés à le faire. Ils sont en haut d'une tour, ils

 15   observent la situation, ils voient ces signaux et la situation ne peut pas

 16   être qualifiée de militaire. Donc la première chose qu'il faut dire, c'est

 17   que nous voyons des SOS, nous ne savons pas ce que cela signifie et tout le

 18   monde attend. C'est tout ce que je peux dire à ce sujet-là. Je le dis en

 19   tant que fait, je ne cherche pas à savoir comment cela s'est fait, qui l'a

 20   fait, mais cela a été fait.

 21   Q.  On vous a fait rapport que ceci se produisait et vous ne savez rien

 22   d'autre à ce sujet en dehors du fait qu'une personne vous a rapporté avoir

 23   vu une autre personne agiter un drapeau blanc pour envoyer des signaux;

 24   c'est bien cela ?

 25   R.  Oui, Docteur Karadzic, ce quelqu'un c'était un homme qui était en

 26   service et qui était chargé de la responsabilité de faire quelque chose de

 27   bien précis. Ce n'était pas simplement une personne vaquant à telle ou

 28   telle occupation et qui regardait les choses par curiosité.


Page 21356

  1   Q.  Avez-vous été informé du fait qu'un drapeau blanc hissé sur le toit

  2   d'une maison ou porté à l'épaule signifie que la personne qui porte ce

  3   drapeau ou le groupe qui arbore ce drapeau est une personne qui ne

  4   participe à aucun combat, d'un côté ou de l'autre ? Le port de ce drapeau

  5   ou le fait qu'un drapeau était agité avait pour but d'empêcher que l'on

  6   tire sur ces personnes. C'est ce qu'on voit au quotidien. Quand quelqu'un

  7   agite un drapeau ou un tissu blanc c'est pour empêcher qu'on tire sur lui

  8   ou sur sa maison.

  9   R.  Pas de commentaire.

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, je remarque au

 11   paragraphe 71 que les mots anglais sont "flashing SOS," et pour moi il me

 12   semble qu'il y a une différence entre lancer un signal SOS en agitant un

 13   drapeau et utiliser un objet qui clignote pour lancer un message SOS, donc

 14   j'aurais davantage pensé au fait que le message SOS était transmis en

 15   morse. En tout cas, c'est ma déduction personnelle, et je suppose que ce

 16   sera également celle d'autres personnes.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Mais Docteur Kirudja, vous vous êtes contenté de transmettre ce

 20   rapport, n'est-ce pas ? Ce n'était pas votre conclusion personnelle, vous

 21   transmettiez simplement cette information, n'est-ce pas ?

 22   R.  En fait, ce paragraphe porte sur un certain nombre de choses qu'il

 23   serait très malaisé de résumer par le mot "simplement." Ce qui avait lieu à

 24   ce moment-là était une confrontation énorme, que mon QG en ait été informé

 25   à l'époque des faits ou pas. On disait que j'aurais dû être informé avant.

 26   C'est de cela qu'il est question dans ce paragraphe, pourquoi est-ce que

 27   nous n'avons pas su avant ce que vous nous dites. C'est de cela que traite

 28   ce paragraphe.


Page 21357

  1   Q.  Je vous remercie. Penchons-nous sur un point particulier. Vous parlez

  2   du stade de Bosanski Novi. Est-ce que vous saviez qu'il se situait dans le

  3   sud de la ville à une altitude de 121 mètres ?

  4   R.  Non, Docteur Karadzic, je ne le savais pas.

  5   Q.  Merci. Le Bataillon danois était stationné à Dvor, et le poste

  6   d'observation de ce bataillon était situé à une altitude de 126 mètres;

  7   est-ce que vous admettez cela ?

  8   R.  Je ne le savais pas parce que je ne me suis pas renseigné à ce sujet.

  9   Q.  Est-ce que vous saviez que les bases d'observation des Nations Unies se

 10   trouvaient à Divusi, qui se trouve à 12 kilomètres du stade à Kostajnica,

 11   qui se trouve à 25 kilomètres du stade, et à Dvor ? Je vous prierais de

 12   bien vouloir nous dire quelle était la distance séparant le poste

 13   d'observation des Nations Unies de Dvor et le stade ?

 14   R.  Je suis désolé, Docteur Karadzic, je ne peux pas vous dire cela. La

 15   seule chose que je peux vous dire c'est que l'observation n'était pas faite

 16   à Kostajnica. Elle était faite à Dvor, au bord de la rivière. Enfin, pas

 17   juste à côté de la rivière, mais à quelques mètres de la rive.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions sur le

 19   document 1D4827.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Dans la déposition que vous avez faite dans l'affaire Brdjanin vous

 22   avez dit que les observateurs réalisaient leurs observations à partir d'une

 23   tour d'observation de l'autre côté de la rivière, et que ces observations

 24   se faisaient à la jumelle. Conviendrez-vous que l'image que l'on voit à

 25   l'écran représente la localité de Dvor en haut, et en bas, le stade de

 26   Bosanski Novi ?

 27   R.  Cela semble vaguement exact. Mais je n'avais jamais regardé ces lieux

 28   sous cet angle par le passé.


Page 21358

  1   Q.  Dans ce cas, conviendrez-vous que l'endroit où était située la tour

  2   d'observation est à 5,18 kilomètres du stade ?

  3   R.  Je ne sais pas, je ne peux pas le déterminer en regardant simplement

  4   cette image.

  5   Q.  Conviendrez-vous que Google Earth effectue des calculs automatiques et

  6   ne peut pas se tromper, que ce système évalue les distances de façon

  7   automatique ?

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, ceci consiste à

  9   demander au témoin de convenir de quelque chose qui, à moins d'être expert

 10   de Google Earth, ne peut pas faire l'objet d'un acquiescement automatique

 11   de sa part.

 12   Ce que vous dites c'est la chose suivante : Que les distances qui sont

 13   inscrites sur les photographies aériennes sont exactes, 1.6 et 5.18

 14   kilomètres respectivement, et vous essayez de dire qu'il serait difficile,

 15   sinon impossible, pour les soldats danois de voir ce qu'ils disent avoir vu

 16   à de telles distances. Est-ce que c'est l'objet de cet exercice ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cette remarque

 18   concerne aussi bien la distance que le fait qu'ils étaient en altitude

 19   parce qu'ils étaient à 121 mètres et 126 mètres respectivement au-dessus de

 20   la mer lorsqu'ils ont effectué leurs observations.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Kirudja, est-ce que vous

 22   êtes en mesure de commenter cela ou est-ce que ceci échappe à vos

 23   connaissances ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Un commentaire très simple, Monsieur le

 25   Président, simplement. Je reviens à cet élément de ma déposition, qui n'a

 26   pas été contesté. Les Danois n'étaient pas chargés d'indiquer ce qu'ils

 27   voyaient ou ne voyaient pas. Les Danois sont des militaires très évolués et

 28   on ne leur a pas demandé quel genre de matériel ils utilisaient pour leurs


Page 21359

  1   observations. En dehors de cela, je ne sais pas ce dont parle le Dr

  2   Karadzic.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, référence au

  4   transcript, je vous prie, pour la déposition Brdjanin.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Déposition du 12 février 2003, pages 14 474 et

  6   14 475.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Docteur Kirudja, est-ce que vous saviez de quel côté se trouvait la

  9   tribune principale ? Est-ce que vous saviez qu'elle se trouvait du côté

 10   ouest dans la direction de Dvor, au bord de la Una, c'est là que se

 11   trouvait la tribune qui avait une hauteur de 25 mètres; est-ce que vous le

 12   saviez ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Merci. Je me dois maintenant de m'intéresser aux déclarations que vous

 15   receviez des Musulmans qui partaient. Dans le paragraphe 74 de votre

 16   déclaration, vous dites que vous avez envoyé un rapport au QG de la

 17   FORPRONU à Zagreb, intitulé : "Aide humanitaire" qui traitait de la

 18   situation à Bosanski Novi dans d'autres lieux de détention situés au nord-

 19   ouest de la Bosnie. Dans ce rapport, j'ai déclaré, dites-vous, je cite :

 20   "Nous pensons que les détenus du stade de football ne sont pas que le

 21   sommet de l'iceberg s'agissant d'une action concertée de la part des

 22   autorités serbes locales de Bosnie-Herzégovine, visant à établir une

 23   République de Bosnie-Herzégovine qui n'abriterait plus de Musulmans. Dans

 24   le cadre de ce processus, les maires, la milicija, entre parenthèses la

 25   police et le TDF de Bosanski Novi ont agi de concert avec leurs homologues,

 26   non seulement au sein de l'UNPA, à Dvor et à Kostajnica mais également avec

 27   -- au sein d'autres autorités bosno-serbes à Bosanska Dubica, Banja Luka,

 28   Prijedor, Sanski Most et Kljuc.


Page 21360

  1   "Les Serbes semblent être engagés dans un processus déterminé de

  2   désarmement sous la contrainte des Musulmans dans les endroits où ces

  3   derniers représentent manifestement une minorité encerclée comme à Bosanski

  4   Novi, où à assiéger la ville dans son ensemble comme c'est le cas à Bihac.

  5   Apparemment le terrain de football de Bosanski Novi est le lieu où sont

  6   retenu les groupes musulmans placés en détention pendant que leurs maisons

  7   font l'objet de perquisition. Les hommes étant isolés et transportés vers

  8   des camps de concentration. Le représentant du HCR et des affaires civiles

  9   ont réuni divers rapports provenant des Musulmans qui ont trouvé refuse

 10   récemment sous protection de la FORPRONU à Dvor et à Kostajnica. Ils

 11   rendent compte de l'existence de camps de concentration dans les localités

 12   suivantes: "

 13   Ensuite, vous énumérez ces localités, nous y viendrons dans quelques

 14   instants. Donc vous dites avec précision que vous pensez que tout cela se

 15   passait comme vous le décrivez au paragraphe 79 de votre déclaration. Est-

 16   ce que vous avez acquis cette conviction sur la base de ce que vous

 17   disaient les réfugiés musulmans ou est-ce que vous disposiez d'autres

 18   preuves ?

 19   R.  Monsieur le Président, je n'ai pas la date de ce mémorandum qui a

 20   été transmis avec ma signature. Je ne vois pas de date sur ce document. Il

 21   serait pour moi utile de connaître la date en raison de ce que je vais dire

 22   maintenant. Nous avions eu à rédiger un nombre très considérable de

 23   rapports destinés au QG, au fil de l'arrivée fréquente de très grand nombre

 24   de personnes. La nuit en question, alors que nous avons rédigé ce

 25   mémorandum, nous avions passé près de 24 heures aux côtés d'un groupe très

 26   nombreux mais nous voulions vraiment que ces personnes nous apportent les

 27   informations dont elles disposaient. Et je répète que ce groupe n'était pas

 28   un petit groupe. Nous ne voulions pas que ces personnes partent avant


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  1   d'avoir pu nous transmettre les informations dont elles disposaient.

  2   Donc alors que nous interrogions ces personnes, et je répète que ce

  3   groupe n'était vraiment pas un groupe restreint, ces informations ont été

  4   reprises à de nombreuses reprises, pas par une personne, pas par dix

  5   personnes, mais par des centaines de personnes. Lorsque nous avons élaboré

  6   ce document, parce qu'à ce moment-là, je me rendais tout à fait bien compte

  7   que notre quartier général ne prêtait pas attention à ce que je disais, il

  8   y a eu une fuite de ce document, celui que vous avez sous les yeux en ce

  9   moment. Qui était responsable de cette fuite, je ne sais pas. Parce que je

 10   l'ai envoyé en copie au HCR et au CICR également, et tout ceci a créé un

 11   tel brouhaha que nous étions assiégés par une trentaine de journalistes par

 12   jour à mon bureau à cause de cela. A ce moment-là, toute cette question a

 13   bloqué le Conseil de sécurité, et ce document a été considéré comme une

 14   pièce importante par le Conseil de sécurité. Je l'ai écrit de façon très

 15   concise, comme le point culminant de l'ensemble des rapports envoyés déjà

 16   jusqu'à ce moment-là, sur la base des informations dont nous pouvions

 17   disposer. C'était le point culminant de tous les rapports qui nous

 18   arrivaient par -- que nous envoyions chaque nuit, sur la base des

 19   renseignements recueillis auprès de plusieurs centaines personnes.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons

 21   maintenant faire une pause jusqu'à 15 h 30.

 22   Madame Sutherland, est-ce que vous aurez, pensez-vous des questions

 23   supplémentaires à poser au Dr Kirudja ?

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Quelques instants, peut-être,

 25   Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Très bien. Nous disposons

 27   jusqu'à 17 h 30, au maximum, ce qui nous laisse une heure et demie, Docteur

 28   Kirudja, je crois que votre vol est prévu demain; c'est bien cela ?


Page 21362

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'apprécie

  2   les efforts que vous avez déployés dans mon intérêt et j'ai vraiment de

  3   nombreuses choses à faire à mon retour à Seattle.

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] C'est ce que je pensais. Voilà

  5   Docteur Karadzic, nous devons terminer l'interrogatoire du Dr Kirudja. Vous

  6   avez déjà disposé d'une heure et demie supplémentaire par rapport au temps

  7   qui vous avait été imparti au départ, donc je vous demanderais d'en

  8   terminer à 17 h 15 au plus tard.

  9   Nous reprendrons nos débats à 15 h 30.

 10   --- L'audience est suspendue à 15 heures 01.

 11   --- L'audience est reprise à 15 heures 32.

 12   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Avant la pause, j'ai oublié de tenir

 13   compte des besoins des interprètes. J'aurais dû le faire. Alors voici ce

 14   que nous allons faire. Nous ferons une pause d'un quart d'heure, vers 4

 15   heures 30, et puis nous poursuivrons jusqu'à 17 heures 30.

 16   Vous avez demandé si nous allions siéger le 23 novembre -- ou le 21

 17   novembre. Ce n'est pas exclu, mais pour ne pas perdre de siège, nous allons

 18   siéger l'après-midi du 28 novembre, ce qui veut dire que nous siégerons

 19   cinq jours de cette semaine-là. J'espère que ceci ne portera pas atteinte

 20   aux intentions de la Défense, qui avait peut-être d'autres projets.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous voulez dire que nous n'allons pas siéger

 22   le 21 ?

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Exactement, donc pas le 21, mais

 24   nous allons tenir audience dans l'après-midi du 28.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous suis infiniment reconnaissant.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 27   M. TIEGER : [interprétation] J'espère, Monsieur le Président, que vous

 28   apportiez ainsi une précision à la demande de M. Karadzic. Nous avons


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  1   essayé de voir si ceci allait avoir un effet sur le calendrier d'agencement

  2   de la venue des témoins partant du postulat selon lequel nous allons avoir

  3   quatre jours d'audience dans la semaine du 21. Je comprends maintenant

  4   qu'il va y avoir un jour de plus de perdu, le 21, donc qu'il sera repris le

  5   28. Nous allons voir quel sera l'effet de la perte du 21 novembre sur la

  6   venue des témoins, parce que vous savez ça fait déjà un certain temps que

  7   des témoins sont prévus pour tel ou tel jour et donc qu'il y a des

  8   aménagements qui ont été réalisés pour leur déplacement. On examine la

  9   question. Bien sûr, nous essaierons de faire preuve de souplesse, mais il

 10   faut voir quel sera l'effet de cette décision sur les témoins qui devaient

 11   respecter le calendrier précédent.

 12   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Bien entendu. Je suis sûr que ceci

 13   sera pris en compte si je me suis trompé. Je croyais que ça avait déjà été

 14   fait, mais enfin vous nous direz si ça pose problème ou pas. Merci

 15   d'avance.

 16   Poursuivez, Monsieur Karadzic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Examinons rapidement une pièce à charge,

 18   la pièce P3842.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous avez déjà vu ce document qui fut rédigé par un de vos

 21   collaborateurs ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] On n'a pas besoin de la version en serbe. Il

 23   s'agissait de M. Raffone. Il suffit d'avoir la version en anglais à

 24   l'écran. La date est celle du 13 juillet 1992. Peut-on afficher la page

 25   suivante ?

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que vous connaissez ce document, ce mémo ? Il a été envoyé par

 28   Paolo Raffone, un de vos collaborateurs, ou plutôt votre assistant.


Page 21364

  1   R.  Oui, Madame et Messieurs les Juges.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît. Numéro 3, s'il

  3   vous plaît. Voyons la totalité du paragraphe.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  N'est-il pas dit ici que le HCR est passé à Bosanski Novi et a

  6   rencontré des représentants de la population musulmane qui voulaient partir

  7   et s'y préparaient ?

  8   "En dépit de toutes les explications, leur attitude n'a pas changé,

  9   c'est-à-dire que la seule possibilité qu'ils avaient c'était de partir de

 10   la Krajina de Bosna pour partir en Croatie, en Slovénie, ou en Europe

 11   occidentale."

 12   R.  Oui, je lis ce texte.

 13   Q.  C'est ce qu'on vous a dit, or ici ce n'est pas une source serbe qui le

 14   dit, ce sont des représentants musulmans qui vous ont informé vous et ont

 15   informé le HCR de leurs intentions. Apparemment, ces intentions c'était de

 16   partir de la Bosnie-Herzégovine, de s'en éloigner, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Avant la pause, vous avez dit que vous aviez envoyé plusieurs rapports

 19   à Zagreb, à l'état-major de Zagreb, mais que ceci n'avait pas été pris au

 20   sérieux. Vous avez également parlé de ce problème dans l'affaire Brdjanin

 21   le 10 février 2003. Page du compte rendu 14 488. Oui, vous avez dit qu'il

 22   n'y avait pas eu de demande d'enquête, personne n'avait tenu compte des

 23   mémos que vous aviez envoyés, avez-vous dit à l'époque; est-ce exact ?

 24   R.  Oui, grosso modo c'est exact.

 25   Q.  Merci. Un peu plus loin, vous l'avez dit alors et vous l'avez confirmé

 26   aujourd'hui, ces rapports ont eu un effet considérable car s'y trouvaient

 27   des termes tels que ceux de "camp de concentration" et de "atrocités

 28   abominables," et vous avez dit que ceci aurait dû provoquer des réactions -


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  1   - en tout cas, des actions de la part de ceux qui [inaudible], pourtant,

  2   personne de l'état-major au QG n'en a tenu compte.

  3   R.  Ce n'est pas exact. On dit, dans ce texte, que jusqu'à ce moment-là,

  4   personne n'y faisait attention. Puis aussi, le mot ou les termes de "camp

  5   de concentration" sont placés entre guillemets parce que c'est devenu le

  6   centre de toutes les attentions. Le terme que j'ai utilisé en guise

  7   d'introduction au mémo ne méritait pas l'attention qu'ont suscité les mots

  8   ou termes "camp de concentration." Pourtant, ce sont des mots qui n'ont eu

  9   de cesse d'être répétés et repris par les gens qui s'en échappaient, qui

 10   essayaient d'y fuir. Les interprètes, tout comme ceux que nous entendons et

 11   que nous utilisons maintenant, ont interprété ces mots comme étant camp de

 12   concentration, et ça a suscité de telles inquiétudes qu'au moment où on a

 13   commencé à tenir compte de ces mémos, le général Nambiar m'a appelé et il

 14   m'a demandé s'il avait raison de s'inquiéter et si ces termes utilisés

 15   étaient les bons termes à employer.

 16   Q.  Merci. La seule source d'information dont vous disposiez, la seule

 17   chose sur laquelle vous vous appuyez pour utiliser ces termes dans ce

 18   mémorandum c'est ce que vous ont rapporté les Musulmans qui avaient fuit la

 19   Bosnie ?

 20   R.  Non, pas seulement ça, mais en tout cas une partie importante de ce qui

 21   m'a été dit. Parce que vous dites que c'est la "seule" source. Moi, je ne

 22   dirais pas que c'était la seule source mais que c'était une source

 23   importante, mais ce n'était pas la seule.

 24   Q.  Est-ce que vous avez jamais essayé de vérifier ce que vous disaient les

 25   réfugiés ?

 26   R.  En toute conscience nous avons essayé de vérifier les informations que

 27   nous recevions. Nous savions qu'il n'y avait pas beaucoup de sources dignes

 28   de foi portant sur les sujets qui faisaient l'objet de nos recherches, de


Page 21366

  1   nos rapports. S'il était possible de trouver des sources qui étayaient ce

  2   qui nous avait été rapporté, nous le disions. Mais rappelez-vous ce que je

  3   vous disais auparavant en début d'après-midi. Nous étions supposés de

  4   présenter les rapports, le plus vite possible, sous 48 [comme interprété]

  5   heures. On n'avait pas le luxe de dresser des rapports complets,

  6   exhaustifs. On relayait les informations au fur et à mesure qu'on les

  7   recevait.

  8   Q.  Première question : Quelles furent les autres sources ? Nous pourrions

  9   peut-être les vérifier. Si voulez les communiquer et les présenter aux

 10   Juges de la Chambre, à l'exception de ces entretiens que vous avez eus avec

 11   des réfugiés, qu'est-ce que vous avez utilisé comme votre source ?

 12   R.  Permettez-moi d'attirer votre attention, Madame et Messieurs les Juges

 13   sur le récit complet de ce qui est intitulé : "Compte rendu des

 14   responsabilités et les sources." C'est au paragraphe -- ça commence au

 15   paragraphe 13 et se poursuit jusqu'au paragraphe 16, et là, j'énumère mes

 16   sources.

 17   Q.  Monsieur Kirudja, est-ce qu'il y a, parmi ces sources, des gens qui

 18   avaient des connaissances précises sur les affirmations que vous présentiez

 19   ? Dites-nous si ces sources existent, quelles elles sont, car nous

 20   aimerions les vérifier.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Deux choses, tout d'abord, je ne

 22   sais pas s'il est exact de dire que le témoin fait des affirmations

 23   précises, s'agissant des comptes rendus et l'obligation de rapport, et

 24   deuxièmement, vous avez ici les sources qui sont indiquées dans ces

 25   paragraphes.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'ai une autre question.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Qui attendait de vous des rapports, des comptes rendus, aussi


Page 21367

  1   rapidement ?

  2   R.  C'était une opération de maintien de la paix des Nations Unies. Nous

  3   avons dit comment elle était organisée, au début de cette déclaration. Elle

  4   avait à sa tête le général Nambiar qui recevait les conseils de M. Cedric

  5   Thornberry, qui était le civil le plus haut placé au QG. Sur le terrain,

  6   dans les secteurs on avait la même disposition, la même structure. Il y

  7   avait un commandant de secteur c'était un officier militaire, qui rendait

  8   compte au général Nambiar, et il y avait un fonctionnaire, un haut

  9   fonctionnaire civil au secteur nord par exemple, c'était moi, qui rendait

 10   compte au QG à Cedric Thornberry. Cedric et Nambiar, quant à eux rendaient

 11   compte directement au secrétaire général, en passant par le sous-secrétaire

 12   chargé des affaires de maintien de la paix, Marrack Goulding à l'époque.

 13   C'est ainsi que se présentait la hiérarchie, la chaîne de transmission des

 14   informations -- Marrack Goulding. 

 15   Q.  Ce qui veut dire que votre supérieur hiérarchique immédiat, c'était M.

 16   Cedric Thornberry, qui attendait ces rapports rapides de votre part ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Merci. Toutefois, voyons ce que vous dites ou ce que vous avez déclaré

 19   le 3 février 2003 dans le procès Milosevic. Page 15 431. Vous dites alors

 20   que Cedric Thornberry vous a envoyé un message disant qu'il ne fallait pas

 21   vous mêler de ce qui se passait à Bosanski Novi, car disait-il le mandat du

 22   Conseil de sécurité ne dépassait pas la frontière, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, et c'est répété dans cette déclaration consolidée, je ne sais plus

 24   à quel paragraphe c'est dit.

 25   Q.  Ça se trouve peut-être au paragraphe 61, non, là, on parle de quelque

 26   chose de carrément différent. Dans le procès Brdjanin, page 1 415 du compte

 27   rendu d'audience Brdjanin, vous avez dit que vos supérieurs n'ont pas pris

 28   au sérieux vos rapports. Après quoi, vous utilisez le terme de "camp de


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  1   concentration" et c'est seulement à ce moment-là, à partir de ce moment-là,

  2   que vos supérieurs ont commencé à vous prendre au sérieux, non ?

  3   R.  Pas du tout. La phrase, "camp de concentration" captait leur attention.

  4   Je l'ai déjà dit aujourd'hui lorsqu'il y a eu une fuite de la totalité du

  5   mémo à la presse. On en a parlé à la radio, à la télévision, et à ce

  6   moment-là, la question a été soumise au Conseil de sécurité. Et c'est à ce

  7   moment-là que Marrack Goulding a dû venir en avion à Topusko pour en

  8   parler. 

  9   Q.  Puis vous dites -- au paragraphe 74, vous précisez votre pensée, vous

 10   dites à quel camp de concentration vous parlez. Vous parlez de Keraterm, de

 11   Trnopolje, que c'était un camp de réfugiés pour femmes, enfants, personnes

 12   âgées et hommes âgés, mais vous parlez aussi de Manjaca et d'Omarska. Est-

 13   ce que pour vous, ces lieux étaient des camps de concentration ?

 14   R.  J'ai dit que les personnes qui nous avaient parlé de l'existence de ces

 15   lieux, les ont donc qualifiés comme je l'ai dit dans le texte, et aussi

 16   dans ce mémo.

 17   Q.  Merci. Serait-il raisonnable de supposer que Thornberry a reçu de vous

 18   et des personnes qui occupaient le même poste que vous dans d'autres

 19   secteurs plus d'informations, donc il avait plus de renseignements que

 20   vous, et que le numéro 1 de la voie hiérarchique, le général Nambiar

 21   disposait d'encore plus de renseignements que vous-même ou même que Cedric

 22   Thornberry ou de vous deux ?

 23   R.  C'est logique, on pourrait faire cette supposition, mais ce n'est pas

 24   toujours vrai. Ils recevaient des informations du terrain. Ces informations

 25   remontaient, donc vous dites c'est logique, on peut penser que la somme

 26   dans renseignements reçus est supérieure aux renseignements que nous avions

 27   sur tel ou tel sujet. Mais ça ne veut pas dire nécessairement qu'ils

 28   savaient tout de la moindre des problématiques. Ils recevaient une version


Page 21369

  1   condensée, une synthèse des problèmes.

  2   Q.  Je vous remercie. Vous venez de répéter ce que vous disiez déjà dans le

  3   procès Brdjanin, à la page 1 416 -- 14 606, à savoir que le général Nambiar

  4   ne voulait pas qu'on utilise les termes de "camp de concentration" leur

  5   préféré les termes "camp de détention," n'est-ce pas ?

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Désolée d'interrompre ces échanges, mais

  7   les références du procès Brdjanin ne sont pas justes, parce qu'elles ne

  8   contenaient que quatre chiffres alors qu'il en faut cinq. Excusez-moi, une

  9   fois de plus d'avoir interrompu le débat.

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Nous avons besoin de bonnes

 11   références comme vous. 

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il se peut que j'ai parlé trop vite. Je donne

 13   les références de nouveau, la page c'était 14 616. Maintenant, en fait,

 14   c'est 14 493.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Pendant que Mme Sutherland cherche la page, je demande ceci au témoin :

 17   N'est-il pas vrai que vous n'avez jamais été dans un seul de ces camps,

 18   dans une seule prison, dans une unité de détention, mais que vous n'aviez

 19   que faire -- tirer des déductions des dire d'autrui, de tiers ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Merci. Paragraphe 61 de votre déclaration consolidée, vous parlez du

 22   message que vous avez envoyé le 5 juin à M. Thornberry ? Vous dites que

 23   deux personnes qui s'étaient échappées de Bosanski Novi décrivent une

 24   attaque menée par les Serbes de Bosnie et disent que les villageois avaient

 25   été emmenés sur un terrain de football pendant que leurs maisons étaient

 26   fouillées, et qu'après, les maisons ont été pilonnées au canon et au

 27   mortier à partir des villages serbes environnants, et ainsi de suite.

 28   Vous trouvez cette partie du paragraphe 61 ?


Page 21370

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Comment s'appellent ces deux hommes qui vous ont raconté tout cela ?

  3   R.  Je ne connais pas ces noms, mais vous allez le voir, d'autres noms sont

  4   fournis lorsque je relate des incidents de ce genre. Si on a jamais couché

  5   sur papier le nom de ces personnes c'était pour les protéger vu le côté

  6   sensible du sujet. Je me souviens que certains se sont présentés à notre

  7   police civile, surtout à Dvor, et après nous avoir parlé, ces personnes ont

  8   disparu. La police civile qui maintenant avait réceptionné ces rapports a

  9   beaucoup hésité avant de divulguer l'identité de certaines personnes. Je ne

 10   sais pas si c'est ça qui s'est passé ici en l'occurrence, mais je remarque

 11   et je fais remarquer qu'il est rare que je ne donne pas de noms de

 12   personnes. Ce n'est pas quelque chose que je fais en général.

 13   Q.  Si je vous dis qu'un Musulman venu de ces villages est venu témoigner

 14   ici il y a quelques jours et nous a dit avoir passé trois jours dans un

 15   stade et qu'après la plupart des personnes avaient été relâchées et avaient

 16   pu rentrer chez elles, et même 17 jours après avoir quitté ces villages,

 17   les villages sont restés intacts. Alors est-ce que ce n'est pas contraire à

 18   ce que vous avez rapporté ? Vous avez dit que leurs maisons avaient été

 19   pilonnées alors que ces personnes se trouvaient encore au stade.

 20   R.  C'est tout à fait possible. Il se peut que certaines maisons soient

 21   restées debout même après avoir été pilonnées.

 22   Q.  Je vous respecte énormément, Monsieur, mais le témoin a dit que toutes

 23   les maisons étaient restées intactes après leur départ du village. Mais

 24   enfin, n'insistons pas. Dites-nous, cependant : comment vous avez pu

 25   communiquer avec ces deux Musulmans ? Quelle fut la langue utilisée ?

 26   R.  Comme ce fut le cas avec tous mes interlocuteurs de la région, bien

 27   sûr, ils parlaient leur langue et j'ai eu des interprètes qui m'ont

 28   rapporté leurs propos.


Page 21371

  1   Q.  Mais donnez-nous le nom des interprètes.

  2   R.  Non. Vous savez que, d'abord, il y a tellement longtemps que ça s'est

  3   passé que je ne pourrais pas vous donner. Même quand j'essaie de ne pas

  4   oublier, j'oublie. Mais nous avons utilisé beaucoup d'interprètes. Sauf le

  5   respect que je leur dois, je ne me souviens pas nécessairement de leurs

  6   noms.

  7   M. LE JUGE MORRISON : [aucune interprétation]

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] M. Karadzic soumet des faits erronés au

  9   témoin.

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je crois qu'il a déjà abandonné ce

 11   sujet mais, de toute façon, ça a été constaté et acté.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis désolé, mais je n'ai pas réalisé cela.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Kirudja, lorsque vous avez témoigné dans le procès intenté au

 15   président Milosevic, page du compte rendu 15 611, il a été suggéré que

 16   toutes les parties au conflit avaient tendance à exagérer bien des choses

 17   dans le cadre des communications qu'elles ont eues avec vous. Est-ce que

 18   vous acceptez cette idée ?

 19   R.  J'ai un vague souvenir, effectivement, que c'est bien comme ça que ça

 20   avait été dit, même si je ne sais plus exactement dans quel contexte ce fut

 21   dit. Mais c'est vrai qu'on a souvent exagéré. Il y a eu des exagérations de

 22   toutes parts. La question avait été posée précédemment, et j'y réponds de

 23   nouveau. En raison de ces exagérations, nous avons toujours voulu vérifier

 24   ce qui nous était dit.

 25   Q.  Merci. Vous n'avez pas toujours la même attitude envers toutes les

 26   parties au conflit, je le crains fort. Regardez, il y a les meurtres

 27   présumés de plusieurs membres serbes de la Défense territoriale commis par

 28   des Musulmans et vous parlez du massacre présumé dans le village de


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  1   Corkovaca. Ce que j'essaie de dire, que lorsqu'il s'agit de victimes

  2   serbes, vous avez tendance à parler de meurtres "présumés." Mais lorsque

  3   vous avez un Musulman qui relate ses souffrances, là vous n'utilisez pas le

  4   qualificatif de "présumé."

  5   R.  C'est vrai que ce paragraphe se prête à ce genre d'interprétation, il

  6   en donne l'apparence. Mais donnez-moi un instant, s'il vous plaît, pour

  7   faire comprendre ce qu'il en est aux Juges de la Chambre. Ici, on ne parle

  8   pas de la Bosnie dans ce paragraphe. On parle de l'UNPA, de la zone de

  9   protection des Nations Unies. Nous avons expliqué que selon notre mandat il

 10   fallait observer les autorités qui contrôlaient la zone en question. Le

 11   contrôle de cette zone c'est ça l'objet de ce paragraphe, et l'autorité là

 12   elle était celle des Serbes. Maintenant, on présente -- ces autorités

 13   présentent les allégations mais sans les étayer par des preuves, or ce sont

 14   les autorités en place. M. Karadzic a raison de faire remarquer qu'il y a

 15   une différence, que ce n'est pas la même chose s'il s'agit de minorités qui

 16   prennent la fuite, car ce ne sont pas des personnes investies de l'autorité

 17   publique. Ce sont des gens qui racontent ce qu'ils ont vécu. Or, ici c'est

 18   quelque chose qui nous est rapporté par les autorités. Si celles-ci sont

 19   incapables d'apporter des preuves, si on dit que des gens ont été tués,

 20   moi, je peux vous dire que si on nous dit ça nous allons aussitôt aisément

 21   sur les lieux. Mais ceci ne nous a jamais été présenté. Donc, on entend

 22   qu'il s'est passé quelque chose, ce n'est pas rapporté, ou alors on nous

 23   rapporte cela sans ajouter plus d'information que ce que nous dit le

 24   paragraphe. Et c'est vrai qu'à la réflexion, ce paragraphe se prête à la

 25   qualification que lui donne aujourd'hui M. Karadzic.

 26   Q.  Merci. Convenez-vous que dans votre déposition du 4 février de l'an

 27   2003 dans l'affaire Milosevic, 15 571 est la référence de la page du compte

 28   rendu d'audience, que vous avez déclaré, et je vais vous citer :


Page 21373

  1   "Indépendamment de savoir si nous avions le mandat de le faire, nous avions

  2   une responsabilité morale nous engageant à faire en sorte que le monde

  3   entier entende le récit qui nous était rapporté par les personnes qui

  4   prenaient la fuite, qui s'enfuyaient de cette partie de la Bosnie."

  5   R.  Oui, le paragraphe 92 de la déclaration reprend cette même chose.

  6   Q.  Je vous remercie. Mais êtes-vous d'accord sur le fait que l'opinion

  7   publique internationale ne prête pas attention à la source de

  8   l'information, à celui qui parle, mais à la signature, à celui qui signe ?

  9   Donc c'est cela qui confère le poids à quelque chose même s'il s'agit d'un

 10   récit qui n'a pas été vérifié.

 11   R.  Dr Karadzic, vous vous référez à quel document à présent, s'il vous

 12   plaît ?

 13   Q.  Je cite votre déclaration dans l'affaire Milosevic. Vous avez dit

 14   qu'indépendamment de votre mandat, vous aviez cette responsabilité morale

 15   de rapporter ce qui vous était dit par les réfugiés arrivés de Bosnie.

 16   Maintenant, je vous dis la chose suivante : Est-ce que vous prenez bien

 17   conscience du fait que ces récits unilatéraux sont des récits qui étaient

 18   entendus par l'opinion publique internationale, d'après celui qui les

 19   apportait et non pas d'après leur origine ? Donc on considérait l'opinion

 20   publique internationale les a pris pour de l'argent comptant, parce que

 21   cela venait de vous, même si c'étaient des récits non vérifiés.

 22   R.  Tout d'abord, Docteur Karadzic, bien entendu, je n'admets pas, je

 23   n'accepte pas qu'il s'agisse de récits unilatéraux. Et d'autre part, ce

 24   n'était pas comme vous le dites des récits sans auteurs, sans sources. On

 25   connaissait le contexte dans lequel les déclarations ont été faites, les

 26   récits ont été rapportés, et c'est ce qui a été dit dans l'affaire

 27   Milosevic.

 28   Q.  Docteur Kirudja, peut-être que ne suis-je pas clair. Ce que je tiens a


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  1   vous dire c'est la chose suivante : Vous avez rapporté des récits

  2   unilatéraux qui venaient des réfugiés musulmans, et c'est quelque chose qui

  3   nous a apporté un préjudice terrible, parce que l'opinion internationale

  4   prêtait attention uniquement aux signataires de ces récits, à celui qui les

  5   transmettait non pas à la source. Donc, vous, vous vous êtes contenté de

  6   transmettre ces récits comme s'ils avaient été vérifiés, comme s'ils

  7   avaient été confirmés dans leur exactitude.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] C'est une déclaration ce n'est pas

  9   une question, Docteur Karadzic. Docteur Kirudja, lorsque vous rédigiez vos

 10   rapports, est-ce que c'étaient des rapports qui étaient internes aux

 11   Nations Unies ou est-ce qu'ils étaient destinés à la presse ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était des rapports internes aux Nations

 13   Unies, et le Procureur avait les pouvoirs qui lui permettaient d'y accéder,

 14   du pouvoir spécifique.

 15   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je vous remercie.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Mais vos supérieurs n'acceptaient pas ces -- ne prenaient pas pour

 18   l'argent comptant ces rapports, n'est-ce pas, que ce soit le général

 19   Nambiar ou Cedric Thornberry, ils ont proféré des critiques face à ces

 20   rapports, n'est-ce pas ?

 21   R.  Vous ne représentez pas de manière exacte ce que j'ai déclaré lorsque

 22   j'ai parlé de M. Nambiar. Ce n'est pas qu'il se soit opposé à ce que j'ai

 23   dit, il m'a appelé pour me demander des précisions sur l'emploi des termes

 24   "camp de concentration". Je me souviens très clairement de cela, et il en a

 25   été question dans l'affaire Milosevic. Je pense que quelqu'un a même

 26   diffusé une vidéo, M. Nambiar essayait d'évaluer dans quel contexte on a

 27   employé ce terme. Et puis, la question qu'il a posée était de savoir s'il

 28   ne vaudrait pas mieux employer le terme "détention." Je lui ai expliqué,


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  1   j'ai expliqué à la Chambre que c'était moi qui lui en ai parlé, que ce

  2   terme venait des victimes, c'est comme ça qu'ils avaient appelé l'endroit.

  3   Après, on a vu les images de ces prisonniers émaciés. Alors, Docteur

  4   Karadzic, lorsque la presse parle de moi ou de vous, écoutez, c'est quelque

  5   chose qu'il faut bien avoir à l'esprit, c'est ce que ce ne sont pas nous

  6   qui dirigeons l'histoire une fois qu'elle est entre leurs mains. Cette

  7   information ne leur a pas été donnée de la manière dont Dr Karadzic le sous

  8   entend. On n'a pas diffusé l'information de cette manière-là sur le plan

  9   international, c'était resté une information interne aux Nations Unies

 10   jusqu'à ce qu'elle n'atteigne le Procureur.

 11   Q.  Docteur Kirudja, si je vous disais que la photographie que vous

 12   êtes en train de mentionner, et qui nous a coûté d'innombrables bombes et

 13   des victimes, eh bien, que cette photo a été prise à Trnopolje qui d'après

 14   vous est un camp de réfugiés, alors comment réagirez-vous à cela ? La

 15   photographie, est-ce qu'elle n'était pas présentée comme elle venait d'un

 16   camp de concentration ? Vous-même qui est très critique à l'égard des

 17   Serbes, vous-même, vous avez parlé d'un camp de réfugiés dans ce cas-là;

 18   donc, est-ce que vous voyez deux contrevérités peuvent causer un impact

 19   énorme sur l'opinion internationale ?

 20   R.  Toute cette déclaration Docteur Karadzic n'est pas exacte.

 21   Premièrement, je ne me suis pas référé à une photographie moi-même. C'est

 22   si quelque chose s'est montré deux jours plus tard, ce n'était pas une

 23   photographie qui pouvait être rattachée à ma déposition, à ma déclaration.

 24   Deuxièmement, que j'ai appelé ça un camp de réfugiés, non, ce n'est pas le

 25   terme que j'ai utilisé dans ma déclaration. Enfin, pour autant que je

 26   sache, il n'y a pas de lien que l'on puisse établir entre ce qui s'est

 27   passé et cet événement-là, donc, il n'y a pas de lien de la manière dont M.

 28   Karadzic l'établit ici.


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  1   Q.  Mais paragraphe 74, Docteur Kirudja, après Keraterm, vous parlez

  2   de Trnopolje, camp de réfugiés pour femmes, enfants et personnes âgées. Là,

  3   les Juges de la Chambre ont pu voir de quelle nature était ce camp, d'où

  4   les gens étaient libres de circuler pour aller chercher la nourriture, ils

  5   rentraient, ils sortaient, et cetera. C'est dans ce camp de réfugiés qu'on

  6   a pris la photo que vous veniez de mentionner, à mon insu.

  7   R. Pas à la photographie.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Là encore, le Dr Karadzic ne représente

 10   pas la manière fidèle la déposition. Peut-être quelques personnes.

 11   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, je m'exprime en

 12   mon nom propre, il me semble effectivement inutile d'établir ce lien direct

 13   entre la photographie et ce témoin. Il a mentionné simplement en passant,

 14   il ne parle pas explicitement de cette photographie. Il ne se l'approprie

 15   pas de quelle manière que ce soit.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, avec tout le respect que je vous

 17   dois, il me semble que le témoin a évoqué cette photographie comme venant

 18   étayer son rapport, sa position, et ce que je suis en train de dire, c'est

 19   qu'il y a eu deux rapports inexacts qui ont causé des dégâts terribles à la

 20   partie serbe. Mais, enfin, passons.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Kirudja, est-il exact de dire que selon vous, en ex-

 23   Yougoslavie où que ce soit, vous n'avez jamais éprouvé de quelle

 24   discrimination que ce soit à votre encontre, et que vous l'avez déclaré,

 25   page 15489, dans l'affaire Milosevic ?

 26   R. Oui, Docteur Karadzic. Mais lorsque je parle de l'ex-Yougoslavie, cela

 27   signifie que je parle de l'endroit où j'étais basé. C'est la zone qui était

 28   contrôlée par les Serbes. Je me suis senti à l'aise, très à l'aise, j'ai


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  1   fait beaucoup, je me suis fait beaucoup d'amis, et le réitère aujourd'hui.

  2   Jamais je n'ai éprouvé de sentiment discriminatoire où que ce soit où j'ai

  3   travaillé et résidé entouré de Serbes.

  4   Q.  Très bien. Mais est-ce que vous savez que dans mes contacts avec les

  5   représentants de l'ONU, j'ai officiellement préféré des forces venues

  6   d'Afrique et d'Asie. Lorsque nous avons demandé aux pays de l'OTAN de

  7   déployer des forces, nous avons demandé que ce soit des militaires venus

  8   d'Asie et d'Afrique.

  9   Est-ce que vous avez vu cela dans certains rapports ?

 10   R.  C'est un point très délicat, effectivement, pour moi, puisque je viens

 11   de la région que vous êtes en train de mentionner, et deux bataillons de

 12   troupes africaines étaient déployés dans mon secteur, dans le secteur nord.

 13   Il n'y avait pas une préférence unanime à leur égard, je dois dire, même si

 14   du côté serbe je peux effectivement confirmer, je n'ai jamais entendu ce

 15   que Dr Karadzic a dit précédemment, mais j'ai entendu des sentiments

 16   analogues exprimés par d'autres Serbes de la région.

 17   Q.  Je vous remercie. Je voudrais attirer votre attention sur le paragraphe

 18   64 de votre déclaration. Ce qui m'intéresse maintenant c'est la chose

 19   suivante : Vous avez mentionné aujourd'hui le fait que vos équipes ont été

 20   arrêtées par des hommes armés à Bihac. Est-ce que vous savez qui a contrôlé

 21   Bihac pendant toute la guerre ?

 22   R.  Lorsque vous parlez de "toute la guerre," vous ne précisez pas la

 23   période. Je sais uniquement ce qui s'est passé pendant la période où

 24   j'étais là. Je sais à qui j'avais à faire, je sais qui était en place.

 25   Q.  Merci. Alors voyez ce paragraphe 64 où vous dites que vous avez informé

 26   le QG de Zagreb de la catastrophe humanitaire qui est en train de se

 27   répandre à Bihac et tout le long de la frontière bosniaque. Et vous dites

 28   que vous souhaitiez jeter un maximum de lumière sur cela à l'attention du


Page 21378

  1   QG, le besoin urgent de lancer des opérations humanitaires à Bihac, et puis

  2   vous dites :

  3   "J'ai fait part de ma peur que derrière la frontière dans les montagnes et

  4   dans les forêts des atrocités indescriptibles pourraient être en train de

  5   se produire. Les histoires provenant de Bihac et des municipalités se

  6   situant alentour de Velika Kladusa, Cazin, Bosanski Novi et Bosanska Krupa

  7   nous donnent une image très sombre comparable à la situation qui règne dans

  8   Sarajevo et autour de Sarajevo et Mostar en même temps."

  9   En plus, vous dites :

 10   "J'ai remarqué que j'étais d'avis que les histoires serbes d'atrocités

 11   commises par les Musulmans telles que la mort de 40 Serbes sur une période

 12   de deux jours faisait partie d'un effort concerté des dirigeants serbes des

 13   deux côtés de la frontière souhaitant nous présenter la zone musulmane

 14   comme dangereuse."

 15   Alors, Docteur Kirudja, savez-vous que les Serbes n'avaient absolument pas

 16   accès à Velika Kladusa ni à Cazin et que s'il y a eu des atrocités commises

 17   dans ces endroits-là, cela ne pouvait être que des méfaits commis par des

 18   Musulmans contre les Musulmans ?

 19   R.  Je regrette, cela n'est pas vrai. C'est la région où j'ai vécu, où j'ai

 20   travaillé, et j'ai des expériences de première main de là-bas. Il y a eu

 21   beaucoup de combats là-bas. A titre d'exemple, il y a eu des groupes de

 22   Serbes de l'UNPA avec à leur tête quelqu'un qui est arrivé en Bosnie un

 23   jour, qui s'est emparé d'une très grande enclave là-bas, qui ne voulait pas

 24   repartir jusqu'à ce que nous n'ayons trouvé un moyen de mettre fin à ces

 25   combats. Et c'était une zone unique où il y a eu quatre parties au conflit.

 26   Ce n'était pas le cas ailleurs en Bosnie. Il y avait là des Serbes et des

 27   Croates qui se sont opposés, ensuite un conflit qui a opposé les Serbes aux

 28   Musulmans, ensuite un conflit entre les Musulmans de part et d'autres.


Page 21379

  1   C'était une zone très explosive. Beaucoup de choses s'y sont passées. Il

  2   n'est pas vrai de dire que rien n'y s'est passé. Il s'y est passé beaucoup

  3   de choses.

  4   Q.  Je vous demande la chose suivante : Etes-vous en train d'accuser les

  5   Serbes de Bosnie dans mon pays, le pays dont j'ai été le président ? Est-ce

  6   qu'ils sont venus à Kladusa, à Cazin, voire même à Bihac pour s'y livrer à

  7   des crimes ?

  8   R.  Je vois que vous avez légèrement modifié votre question parce que ce

  9   paragraphe parlait de Serbes, lorsque vous avez commencé votre question,

 10   Docteur Karadzic. Je vois que maintenant vous parlez de personnes de votre

 11   pays et je suppose qu'il s'agit du reste de la Bosnie. Non, je n'ai jamais

 12   fait de rapport là-dessus et je n'aurais pas pu le faire puisque je n'étais

 13   pas au courant de cela.

 14   Q.  Je vous remercie. Cependant, vous n'avez pas pu croire que dans la

 15   poche de Bihac on ait commis des atrocités sur des Serbes ?

 16   R.  Il ne s'agit pas de croire ou de ne pas croire. J'ai fait des rapports

 17   sur ce qui s'y produisait. Nous avions tenu nombre de réunions de

 18   réconciliation entre les gens qui se sont opposés là-bas et qui s'y sont

 19   opposés au quotidien. Ce n'était pas une croyance, c'était un rapport sur

 20   les événements qui s'y produisaient.

 21   Q.  Je vous remercie. Etes-vous d'accord pour dire que le 5e Corps de

 22   l'armée de Bosnie-Herzégovine était stationné à Bihac et qu'il s'agissait

 23   d'un ensemble d'unités militaires très puissant ?

 24   R.  Oui, et j'ai rencontré à plusieurs reprises le commandant de ce corps,

 25   et comme vous le dites c'était une force très importante.

 26   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que dans

 27   cette guerre qui a opposé les Musulmans de part et d'autre que les Serbes

 28   ont tissé une alliance avec Fikret Abdic qui, à leurs yeux, était un


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  1   Musulman pro-européen ?

  2   R.  Il y a eu plusieurs tours de combat, Monsieur, et sauf vers la fin, il

  3   serait inexact de dire avec quelle partie les Serbes ont-ils tissé des

  4   liens. Donc ça ne serait pas vrai pour le début des combats. A la fin, les

  5   deux groupes se sont scindés. Il y avait le 5e Corps de Bihac d'un côté,

  6   puis Abdic, de ce côté-là, et de l'autre côté, il y avait le groupe qui a

  7   reçu le soutien de Sarajevo, et ce sont eux qui l'ont emporté, le groupe de

  8   Sarajevo.

  9   Q.  Est-ce que vous savez que j'ai signé la paix avec M. Abdic très tôt

 10   pendant la guerre, en 1993, et qu'à partir de ce moment-là, il n'y a plus

 11   eu de combat entre nous et les forces d'Abdic ?

 12   R.  Madame, Messieurs les Juges, j'ai entendu beaucoup de discussions avec

 13   Fikret Abdic et en partie cela concernait ce qu'il aurait signé avec M.

 14   Karadzic. Donc j'en suis au courant, parce qu'effectivement, j'ai eu

 15   beaucoup de conversations et de contacts avec Fikret Abdic là-dessus.

 16   Q.  Je vous remercie. Au paragraphe 65, vous parlez de 200 personnes, voire

 17   même 850 qui seraient arrivées de Sanski Most. Est-ce que vous savez que

 18   ces gens-là de Sanski Most, cette brigade a capturé sept de nos militaires

 19   pour nous faire du chantage pour qu'on les fasse passer par notre

 20   territoire, voire même qu'on les mette à bord de nos autocars pour les

 21   emmener dans la poche de Bihac ? Donc est-ce que vous étiez au courant de

 22   cela ? C'est sur leur demande que nous les avons transférés armés vers la

 23   poche de Bihac à bord de notre autocar. C'était des combattants qui étaient

 24   vraiment des hommes farouches.

 25   R.  Non, je n'étais au courant de ce détail.

 26   Q.  Je vous remercie. Donc ils ont présenté Manjaca comme étant un camp de

 27   concentration, comme cela se lit au paragraphe 65, c'est bien cela ?

 28   R.  Ce groupe, le groupe dont il est question au paragraphe 65 ?


Page 21381

  1   Q.  Oui, si j'ai bien compris.

  2   R.  Non, ça, je ne le pense pas. Parce qu'au paragraphe 74, j'ai déjà

  3   informé les Juges de la Chambre du fait qu'il y avait un très grand nombre

  4   de réfugiés, et de ce que nous avons fait suite à l'apparition de ces

  5   réfugiés. Donc certains d'entre eux ont fait partie de ce groupe, cela est

  6   tout à fait possible, mais ce n'était pas des combattants. C'est un groupe

  7   de réfugiés qui sont arrivés et avant qu'on les escorte, qu'on les

  8   raccompagne, il a fallu les débriefer pour comprendre ce qui s'était passé

  9   et pourquoi ils prenaient la fuite.

 10   Q.  Merci. Au paragraphe 53, vous dites que M. Kupresanin aurait appelé le

 11   bureau des affaires civiles, M. Paolo Raffone, et qu'il aurait exigé ou

 12   recommandé qu'on apporte de l'aide aux pouvoirs locaux pour protéger la

 13   population musulmane dans les municipalités de Bosanski Novi, Prijedor,

 14   Kljuc, Dubica, Sanski Most et Banja Luka; c'est bien cela ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et un peu plus loin, vous dites :

 17   "Il a également demandé à la FORPRONU, aux pays occidentaux de trouver un

 18   moyen pour protéger la population civile musulmane."

 19   C'est ça ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Savez-vous que M. Kupresanin a reçu une demande ma part pour se rendre

 22   à Manjaca, dans les villages musulmans, et que c'était lui le représentant

 23   le plus haut placé des autorités. Donc il était président du parlement de

 24   la RAK de Krajina, jusqu'à ce qu'il soit démantelé ?

 25   R.  Non, je n'étais pas au courant de ce détail.

 26   Q.  Saviez-vous que M. Kupresanin était à la tête de la liste électorale du

 27   SDS, pour la circonscription de Banja Luka, pour le parlement de Bosnie-

 28   Herzégovine, donc le parlement républicain ?


Page 21382

  1   R.  Non, je ne connaissais pas ce détail.

  2   Q.  Convenez-vous que vous seriez utile à partir du moment où vous évaluez

  3   le SDS, eh bien, que ce serait utile pour vous de savoir quelle était la

  4   position de M. Kupresanin, quelles étaient ses fonctions, et quand il

  5   déployait ses efforts humanitaires, au nom de qui agissait-il ? Ne serait-

  6   il pas bien pour vous de savoir que c'était le numéro 1 des autorités

  7   civiles de la RAK ?

  8   R.  Nous avons fait tout ce qui était possible pour nous -- pour identifier

  9   nos interlocuteurs et pour savoir qui ils représentaient et ce qu'ils

 10   souhaitaient. Nous avons cherché à nous renseigner en posant toutes les

 11   questions possibles pour mieux comprendre la situation. Cela ne veut pas

 12   dire que nous avons toujours eu des réponses. Cela ne veut pas dire que je

 13   lui ai demandé s'il travaillait avec M. Karadzic, qu'il m'aurait répondu

 14   par l'affirmative. Dans ces situations-là, les gens mettaient longtemps à

 15   comprendre qui étaient leurs interlocuteurs. Enfin, il a téléphoné à mon

 16   bureau, et vous savez parfaitement que ce n'est pas au téléphone qu'on est

 17   le mieux placé pour se déclarer, pour s'identifier, parce qu'on ne savait

 18   pas qui vous avez au bout, à l'autre bout. Mais il avait un message

 19   important au sujet des réfugiés. Cela a été entendu et enregistré.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Nous allons faire une pause d'un

 21   quart d'heure maintenant. Docteur Karadzic, même si nous avons accordé du

 22   temps, vous avez plus d'une heure de plus que qu'est-ce qui vous a été

 23   initialement accordé. Donc ce serait bien si vous pouviez terminer votre

 24   contre-interrogatoire avant l'expiration du temps prévu. Je pense que nous

 25   allons tous apprécier, et ça a été une longue journée pour le témoin

 26   également.

 27   --- L'audience est suspendue à 16 heures 29.

 28   --- L'audience est reprise à 16 heures 47.


Page 21383

  1   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

  2   Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Docteur Kirudja, encore une précision, vous ne doutiez pas du fait que

  6   M. Kupresanin était un fonctionnaire, que c'était un homme politique et

  7   qu'il occupait un poste de pouvoir, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je n'avais pas besoin de le faire, vu les sujets dont il parlait ou le

  9   sujet, le sujet dont il parlait.

 10   Q.  Mais Raffone, est-ce qu'il n'a pas cru que M. Brdjanin était maire de

 11   Banja Luka ? Vous en avez parlé le 10 février, page 14 592 du compte rendu

 12   Brdjanin.

 13   R.  Il est apparu plus tard. Au plus tard, on a compris qu'il n'était pas

 14   maire de Banja Luka. Je le répète, M. Raffone avait eu une conversation

 15   téléphonique, par le truchement d'un interprète, avec lui. Vous savez la

 16   difficulté qu'il y a à parler à quelqu'un au téléphone en se servant d'un

 17   interprète; ça donne lieu souvent à bien des méprises, et ce fut le cas

 18   ici.

 19   Q.  Mais, Docteur Kirudja, si un citoyen vous passe un coup de fil ou si

 20   c'est un haut commis de l'état qui le fait, est-ce que ça a une importance,

 21   une différence quelconque ? Est-ce que vous dites -- vous affirmez qu'il

 22   n'était pas maire ? Est-ce que vous ne trouviez pas important de déterminer

 23   quel poste il occupait, quelle fonction il exerçait ?

 24   R.  Je l'ai déjà dit, j'ai chargé M. Raffone de faire ce travail, et il est

 25   venu au bureau avec une note qu'il avait préparée, contenant les

 26   informations. Je l'ai écouté, et puis j'autorisais la transmission de

 27   l'information. Je n'ai pas eu de doute quant au fait qu'il avait posé

 28   toutes les questions nécessaires pour permettre d'identifier son


Page 21384

  1   interlocuteur, et pour lui formuler cette demande, d'autant que c'était un

  2   homme chevronné en matière civile, qu'il s'est bien acquitté de sa tâche.

  3   Q.  Mais je dois revenir à mon argument principal. Est-ce que vous ne

  4   trouviez pas important que vous ayez été appelé par le chef politique le

  5   plus haut placé en Bosnie-Herzégovine, et qu'il vous avait demandé de

  6   protéger les Musulmans. Ne pensez-vous pas que c'était là un fait important

  7   dont vous auriez dû tenir compte ?

  8   R.  J'ai déjà dit, et il s'est contenté de parler des réfugiés, le fait

  9   qu'on lui attribue un rôle erroné, ça se passe de commentaire. Je ne pense

 10   pas qu'il se soit présenté comme étant le représentant le haut placé. S'il

 11   avait dit qu'il représentait M. Karadzic, vous saviez, il aurait une petite

 12   sonnette d'alarme qui aurait retenti dans mon esprit. Mais il se pouvait

 13   qu'effectivement que l'information soit importante, quel que ce soit son

 14   titre.

 15   Q.  Mais pourquoi ne vous êtes-vous pas intéressé à déterminer l'identité

 16   de celui qui vous appelait ? Et si vous aviez appris qu'il était l'homme

 17   politique le plus important de Bosnie-Herzégovine, est-ce que ceci n'aurait

 18   pas été important dans la façon dont vous avez jaugé le SDS ? Comment se

 19   fait-il que vous ayez omis ce fait, dans votre analyse de la situation ?

 20   R.  Vous vous méprisez totalement lorsque vous dites que ça ne m'a pas

 21   intéressé. J'ai chargé quelqu'un d'autre du dossier, et si je l'ai fait,

 22   c'est parce qu'il n'y a que 24 heures en une journée, et je ne pouvais pas

 23   tout faire. Donc j'ai délégué des responsabilités, c'est vrai. Mais je

 24   connais ce sujet, parce que mon personnel venait m'informer, et je peux

 25   vous dire que je me suis intéressé vivement d'ailleurs à la question.

 26   Q.  Donc vous vous intéressez au poste occupé par M. Kupresanin, vous avez

 27   essayé de savoir pourquoi il vous appelait à l'aide, pour demander votre

 28   assistance, au nom de quelle autorité il le faisait ? Est-ce que vous avez


Page 21385

  1   cherché à le savoir ?

  2   R.  Apparemment, vous parlez de ces rapports avec vous, et de leur

  3   importance, il parlait de 15 000 personnes. Ça, c'est la substance. Alors

  4   vous parlez d'autant de personnes dans une telle situation. Bon, ça, bien

  5   sûr, c'était notre travail, même quand il n'y aurait que trois ou deux, on

  6   se serait intéressé, à la question. Mais, ici, il y en avait 15 000, et

  7   c'est ça qui est intéressé, pas le fait qu'il était votre représentant le

  8   plus haut placé. Nous, on ne le savait pas, excusez-nous. Mais nous ne

  9   sommes pas intéressés à ce fait, parce qu'il vous représentait au plus

 10   niveau, mais en raison de ces chiffres.

 11   Q.  Ecoutez, je suis désolé, Monsieur Kirudja, mais au paragraphe 111, vous

 12   relevez que Ragusa [phon] était président d'un petit conseil municipal.

 13   Alors que vous n'avez pas remarqué qu'il était de la Province autonome de

 14   Krajina, poste politique éminent. Donc c'est pour cela, je crois que vous

 15   avez été vraiment très sélectif, que vous étiez entaché de parti pris,

 16   parce que vous saviez exactement qui était le président d'un petit poste au

 17   niveau municipal, un poste bien inférieur à celui occupé alors par M.

 18   Kupresanin.

 19   R.  Je vous assure, Monsieur Karadzic, que s'il s'était présenté comme ça,

 20   plutôt, que vous -- de la façon dont vous le représentez, on aurait fait

 21   attention.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La question a déjà été posée, a reçu

 23   réponse.

 24   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui. Je pense que la dernière

 25   réponse fournie par le témoin devrait suffire.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Eh bien, si c'est comme ça, passons à autre chose. Alors qu'est-ce que

 28   vous avez compris quand vous avez entendu parler de ces 15 000 hommes. D'où


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  1   venaient-ils à votre avis, venaient-ils des municipalités qu'il vous a

  2   mentionnées ?

  3   R.  Cette déclaration a été modifiée au paragraphe et je vais ainsi vous

  4   expliquer la raison principale de notre intérêt.

  5   "Il avait estimé qu'il y avait quelque 15 000 personnes qui étaient déjà

  6   parties de leur lieu habituel de résidence, et étaient parties en direction

  7   de Dvor."

  8   A Dvor se trouvait la UNPA, la zone de protection des Nations Unies,

  9   et là, c'était vraiment un lieu dont nous étions responsables au quotidien.

 10   Alors ça suffisait qu'il mentionne ce nombre de personnes pour que nous y

 11   prêtions attention.

 12   Q.  Mais vous n'avez pas pensé qu'ils étaient simplement de Bosanski Novi,

 13   ils venaient aussi de Prijedor, de Kljuc, de Sanski Most, de Banja Luka,

 14   entre autres, n'est-ce pas ?

 15   R.  Il a bien essayé de dire d'où venaient ces personnes. Mais replaçons

 16   ceci dans son contexte. Auparavant, avant ce jour-là, nous avions eu 4 000

 17   personnes dont on avait dit qu'elles étaient passées par la zone de

 18   protection des Nations Unies. En fait, il y en avait 9 000, et ce fut une

 19   opération énorme qu'il a durée jusqu'à minuit. Alors maintenant on donnait

 20   un chiffre trois fois supérieur, qui apparemment se dirige vers nous. C'est

 21   tellement important que c'est pour ça que je vous dis, nous avons fait

 22   attention, et comment.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Examinons le document 1D4844.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  En attendant que s'affiche le document, donc dites-nous ceci : est-ce

 26   que, dans vos rapports, vous avez fait état du conflit, de discorde entre

 27   Belgrade et Pale, et pour être plus précis, des tentatives qu'avait

 28   entreprises M. Milosevic de démettre de leurs fonctions ceux qui étaient au


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  1   pouvoir en Republika Srpska ? 

  2   R.  Effectivement, il y a eu quelques rapports sur ce sujet, même si vous

  3   parlez ici en terme de "démettre de leurs fonctions," là ce terme me paraît

  4   -- c'est la première fois qu'on en parle de cette façon.

  5   Q.  Fort bien.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons la page suivante.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce bien la page de la lettre de garde que avez envoyée avec le mémo

  9   de votre collaborateur ? Est-il vrai qu'il y a là des allégations à propos

 10   de l'arrestation et de la mise en détention de 42 Musulmans à l'école, et

 11   est-ce que vous avez vérifié ces allégations ?

 12   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise pour ce qui est de la réponse

 13   précédente que dire, Milosevic a voulu renverser les personnes au pouvoir à

 14   Pale, c'est la première fois que j'entends ce terme.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   "-- ça a été limité par le fait que les autorités locales

 17   manifestement se déplaçaient sans avoir de direction spéciale."

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir la page suivante ?

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Ici, vous dites que la CIVPOL et POLBAT expriment leur satisfaction, vu

 21   les résultats et espèrent que cette coopération va se renouveler.

 22   S'agissant de l'arrestation de 42 Musulmans, est-ce que vous vérifier ces

 23   récits ? Est-ce que vous avez découvert qu'ils n'étaient pas exacts ?

 24   R.  Ici, Madame et Messieurs les Juges, on fait référence à une zone qui se

 25   trouve à l'intérieur de l'UNPA, qui se trouvait à peu près à 30 minutes en

 26   voiture de mon bureau, et là, effectivement, se trouvait le bâtiment -- le

 27   Bataillon polonais, et là, il était facile de vérifier ce qui se passait.

 28   Donc je suppose que ce n'était pas difficile effectivement, ici de vraiment


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  1   tout vérifier, par rapport à ce qui avait été dit.

  2   Q.  Cette fois-ci, vous avez vérifié, mais est-ce que ça veut dire que vous

  3   n'avez pas eu l'occasion de vous rendre en Bosnie, de franchir la frontière

  4   pour voir ce qu'il en était de récits similaires que vous aviez entendus

  5   communiquer ?

  6   R.  Mais, vous savez, les récits venant de Bosnie, ils venaient vers moi,

  7   parce qu'ils venaient accompagnant les personnes qui les rapportaient. Je

  8   n'avais pas à me rendre en Bosnie. C'est la différence entre ce qu'on vous

  9   rapporte de quelque chose qui se serait produit à Slunj. Ici, c'est le lieu

 10   concerné par ce rapport. Ici, il faut se mettre en route toute une journée

 11   pour faire ce que demandait le plan Vance. De toute façon, nous n'avions

 12   pas de mandat de l'ONU. Si vous avez une responsabilité envers des

 13   effectifs onusiens, vous n'allez pas les déployer quand vous êtes privé de

 14   mandat pour le faire. Mais vous entendiez ce qui s'était passé parce qu'on

 15   vous rapportait ce qui était arrivé, ça venait par les gens qui venaient de

 16   là, non pas que nous ne voulions pas nous rendre dans ces lieux, ni même

 17   qu'on n'avait pas de moyens logistiques. On avait les voitures, des avions

 18   mais il n'était pas possible, pas autorisé de déployer ces effectifs dans

 19   des zones qui n'étaient pas couverts par le mandat, et nous avions ce

 20   mandat à respecter. Alors cette zone se trouvait à l'intérieur de la zone

 21   couverte par le mandat.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

 23   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Qu'en dites-vous, Madame Sutherland

 24   ?

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Ce document sera versé.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1919.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyons maintenant le document de la liste 65


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  1   ter, 6757.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Nous pouvons rapidement examiner ce document, et je vous demande de

  4   confirmer que c'est bien votre rapport ? La date est celle du 8 octobre, et

  5   vous êtes l'auteur de ce rapport ?

  6   R.  Je crois reconnaître ma signature, qui se trouve sur la page de garde

  7   d'un rapport. C'est une page introductive d'un rapport.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons regarder la page suivante.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Au paragraphe 4, fin de paragraphe, ne dites-vous pas que le

 11   gouvernement croate s'est opposé à l'ouverture des frontières, permettant

 12   qui aurait permis d'accueillir des réfugiés musulmans. Vous dites aussi que

 13   les Musulmans ont recours à tout sorte de tentatives dangereuses pour eux,

 14   pour essayer de lever ce blocus, et pour parvenir à passer dans un

 15   territoire, dont vous aviez, vous, la responsabilité, n'est-ce pas ?

 16   R.  Est-ce qu'il y a un autre paragraphe à la page suivante.

 17   Q.  Oui, c'est le numéro 5, voilà c'est bien ça, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, effectivement c'est ce qu'évoque ce paragraphe.

 19   Q.  Merci. Voyons le bas de la page, au paragraphe 8, ne dites-vous pas que

 20   la plupart des activités de déstabilisation des événements survenus le long

 21   de la Cazinska Krajina, découle des tentatives entreprises par les

 22   Musulmans pour essayer de sortir de l'enclave à tout prix, par tous les

 23   moyens.

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Puis, au petit (a), vous évoquez deux cas d'infiltration clandestine.

 26   Regardez le (b), vous établissez que les Musulmans se livraient au

 27   nettoyage ethnique d'une zone qui se trouvait au nord des rivières Prosinja

 28   et Bonja, jusqu'à la frontière avec la Krajina serbe. S'agissant de la


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  1   population serbe qui se trouvait là à l'origine, vous dites plus de 28 000

  2   -- 6 000 -- 600 Serbes y vivaient dans cette zone, et apparemment, il y

  3   aurait moins de 7 000 qui vivrait encore aujourd'hui dans cette enclave

  4   musulmane. Donc ça veut dire que 21 000 personnes avaient été nettoyées,

  5   c'est-à-dire qu'on avait nettoyé le terrain de 21 000 personnes déjà à

  6   cette date ?

  7   R.  Mais est-ce que les Juges devraient replacer cet événement à

  8   l'intérieur de la zone de protection des Nations Unies, pour mieux

  9   comprendre ce dont parle ce rapport. On ne parle plus des événements qui se

 10   produisent de l'autre côté de la frontière, on parle d'événements qui se

 11   produisent à l'intérieur de la zone. L'infiltration, elle se fait à

 12   l'intérieur de la UNPA. L'absence de membres d'un groupe ethnique, de tout

 13   groupe ethnique dans cette zone était un fait qui existait avant la

 14   création de la zone de protection. Parce qu'on avait surtout nettoyé la

 15   zone de ces Croates, dans la zone de protection, mais on avait aussi fait

 16   partir des Musulmans. Si vous voulez bien comprendre ce rapport, il faut

 17   examiner le mandat donné par le plan Vance. C'est différent d'une situation

 18   où vous auriez eu des gens qui venaient de la Bosnie vers la zone.

 19   Q.  Des Musulmans venant d'autres régions de la Bosnie et de la poche de

 20   Bihac sont arrivés dans votre zone, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alinéas (c) et (d) -- sous paragraphes(c) et

 23   (d), je cite :

 24   "Fortification militaire du fief musulman, les autorités serbes

 25   affirment qu'on assure l'approvisionnement aérien de la Cazinska Krajina,

 26   grâce à une piste d'atterrissage se trouvant à Cazin et que la zone

 27   l'entourant a été la cible de tirs."

 28   Puis vous dites aussi que -- vous dites aussi que les commandants musulmans


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  1   accueillent les prisonniers musulmans relâchés par les Serbes, parce qu'ils

  2   peuvent ainsi être de nouveau mobilisés?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Merci. Paragraphe 10, jusqu'alors, les Serbes des zones protégées ont

  5   toléré les réfugiés musulmans, mais la question est de savoir combien de

  6   temps ils vont le faire. Ça se trouve à la fin du 10e paragraphe.

  7   R.  Oui, oui, Madame et Messieurs les Juges, vous commencerez peut-être à

  8   mieux comprendre le commentaire que je faisais. Je vous ai dit que c'est là

  9   que se trouvait la zone compliquée. On combattait dans les quatre sens. Il

 10   y avait les Serbes, les Croates, contre -- et puis les Serbes, les Croates

 11   et les Musulmans, contre les Musulmans. Si je voulais pleinement respecter

 12   le mandat que m'avaient donné les Nations Unies, je devais présenter des

 13   rapports, et ceci commence à vous dire que cette situation s'esquisse dans

 14   la zone. Le plan Vance nécessitait un statu quo qui serait maintenu en

 15   attendant une solution qui serait venue de Genève. Les gens que ce soit des

 16   Musulmans, des Serbes, des Croates devaient être déplacés. L'accord de

 17   Belgrade et de Zagreb, c'était de dire que tout le monde devait rester là

 18   où ils étaient et au mieux que les gens devaient rentrer là, d'où ils

 19   venaient.

 20   Donc quand il se passait quelque chose à l'intérieur du UNPA ou s'il

 21   y avait un rapport, il y avait différentes dimensions. Il s'agissait

 22   d'informer, d'apporter des précisions et aussi d'avertir les autorités de

 23   ce qui pouvait se passer.

 24   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Il vous reste encore cinq

 25   minutes, Monsieur Karadzic.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement du document.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Kirudja, veuillez confirmer que ce sont des choses que vous


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  1   avez observées, que vous avez décrites et qui se passaient dans votre zone.

  2   Il y avait des réfugiés musulmans, des réfugiés serbes; le confirmez-vous ?

  3   R.  Oui, je suis en mesure d'authentifier ce rapport, j'en suis l'auteur.

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] A propos, ce dernier document, vous

  6   m'avez demandé si j'avais une objection, j'ai dit non. C'est devenu la

  7   pièce D1919. Je n'ai pas fait d'objection parce que le témoin en est

  8   l'auteur, mais il n'a rien à voir avec l'acte d'accusation, parce que ça se

  9   trouve, le lieu se trouve dans la UNPA, et, en fait, M. Karadzic a donné

 10   lecture des passages qui l'intéressaient, donc c'est acté au dossier.

 11   J'aurais dû faire objection quand vous m'avez posé la question, désolée de

 12   ne pas l'avoir fait. 

 13   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Attendez, vous m'avez un peu perdu

 14   là. De toute façon quand un document est admis, ça ne veut pas dire qu'on

 15   lui a nécessairement donné une valeur probante. Ce sont deux questions

 16   distinctes, que celle de l'admission et de son appréciation.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce actuelle est la pièce P3860, ça

 18   fait partie des documents des pièces connexes.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Examinons le document 1D4841. Excusez-

 20   nous, mais nous avons une toute petite équipe, et j'ai du mal à assurer un

 21   parfait suivi. Je ne veux pas perdre mon temps à examiner des documents

 22   déjà versés au dossier.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  C'est aussi votre signature, n'est-ce pas, qu'on voie ici à ce

 25   document, et vous en êtes l'auteur ?

 26   R.  C'est une page de garde.

 27   Q.  Merci.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer


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  1   directement à l'examen de la page 5 ?

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Vous dites, n'est-ce pas, que, dans la zone, il y a 15 000

  4   réfugiés et personnes déplacées serbes, qui sont logées dans plusieurs

  5   maisons que vous avez ou qui sont chez des amis ?

  6   R.  Je le répète, de nouveau, ce document porte sur la UNPA. On fait

  7   référence à la protection des minorités qui se trouvaient là avant notre

  8   arrivée alors vous auriez pu avoir des minoritaires, de n'importe lequel

  9   groupe que ce soit des Croates ou des Musulmans. Il faut bien le comprendre

 10   ce document relève de la même catégorie que l'autre, parce qu'on discutait

 11   de ça dans le cadre du plan Vance, et de l'UNPA, de la zone de protection

 12   des Nations Unies.

 13   Q.  Mais, Docteur Kirudja, ces 15 000 réfugiés ce sont des réfugiés arrivés

 14   de Bosnie, de toute évidence, parce que le processus s'est terminé là-bas

 15   et la paix est établie, n'est-ce pas ?

 16   R.  Au paragraphe 26 ce qui est dit, dit ces 15 000 réfugiés vivent dans le

 17   secteur nord donc ils se sont déjà installés en tant que réfugiés là-bas.

 18   Le plan Vance-Owen exige que le statu quo soit maintenu, et qu'il n'y ait

 19   pas de nouveau déplacement de population.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Docteur Karadzic, ce sera votre

 21   dernière question.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser ce document au

 23   dossier.

 24   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui. Le témoin s'est exprimé à son

 25   sujet.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document D1920.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le dernier document à présent, s'il vous plaît.

 28   Je souhaite savoir si les documents que vous avez eu la gentillesse


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  1   d'examiner ce sont des documents authentiques.

  2   A présent, je demande l'affichage du document 65 ter 5618 [phon].

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  C'est votre rapport. Première page segment serbe musulman vous dites

  5   qu'il y a eu une évacuation médicale, des convois humanitaires qui sont

  6   passés sans entrave sur le territoire du secteur en question, et ils ont

  7   utilisé les postes-frontières ou les passages établis.

  8   R.  Oui, je reconnais ce document.

  9   Q.  Page suivante, s'il vous plaît, juste très rapidement, puis page 3 un

 10   chapitre. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les Serbes, de part

 11   et d'autre de la rivière, ne souhaitent pas que le pont entre les deux, qui

 12   sépare les deux, qu'on le fasse sauter ? Le chapitre s'intitule : "La

 13   partie de la frontière qui est entièrement serbe."

 14   R.  Il s'agit de quel paragraphe ?

 15   Q.  C'est le paragraphe 9. Vous êtes pleinement conscient du fait que les

 16   Serbes vivent de part et d'autre de la frontière Bosanska Kostajnica,

 17   Kostajnica Croate, Dvor Uni [phon], Bosanski Novi. Donc puisqu'il s'agit de

 18   population serbe des deux côtés, vous dites qu'ils ne souhaitent pas que

 19   l'on fasse sauter ce pont, que l'on détruise le pont entre les deux ?

 20   R.  Premièrement, il y avait plus d'un pont, Madame, Messieurs les Juges,

 21   sur cette partie-là de la frontière nous sommes en train de parler. Puis,

 22   deuxièmement, oui, dans une certaine mesure, effectivement, ce qu'affirme

 23   Dr Karadzic est vrai, mais uniquement dans une certaine mesure, à savoir

 24   s'il y avait une attaque lancée par les Croates, ce qui s'est effectivement

 25   produit; à partir de ce moment-là, cette affirmation n'est plus vraie.

 26   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Karadzic, le temps passe --

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je voulais simplement que l'on

 28   attire l'attention du témoin sur la ligne 6.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Bosanska Dubica, comment pouvez-vous y parler de nettoyage ethnique

  3   puisque les Musulmans eux-mêmes évoquent plusieurs municipalités dont

  4   Bosanska Dubica où ils disent qu'il n'y a pas eu de nettoyage ?

  5   R.  Je voudrais voir le paragraphe 6, s'il vous plaît.

  6   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] C'était plutôt la ligne 6.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ma déclaration.

  8   M. LE JUGE MORRISON : [aucune interprétation]

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Non, dans ce document. Paragraphe 9, ligne 6. Alors, là aussi, vous

 11   vous basez sur des récits qui viennent des réfugiés, n'est-ce pas, ou est-

 12   ce que vous aviez une preuve pour étayer cela ? Vous aviez vérifié cela ?

 13   R.  Un certain nombre de personnes ont traversé la frontière. Je me

 14   souviens bien d'un groupe, un groupe qui est arrivé de Dubica. A l'époque,

 15   j'ai reçu un appel des observateurs militaires danois qui avaient la

 16   responsabilité dans cette zone disons que ce groupe de personnes avaient

 17   été entourées de Serbes qui leur ont demandé de ne pas partir et qui se

 18   sont retrouvés dans une situation dangereuse en fait qu'il y avait le

 19   risque plutôt que l'on les présente comme terroristes et non pas comme

 20   réfugiés. Là, nous sommes allés sur place pour les débriefer, pour savoir

 21   exactement d'où ils sont venus. Et nous avons compris que ces zones avaient

 22   été nettoyées de non-Serbes à en juger d'après ce qu'ils nous ont dit. Les

 23   autorités serbes ont fait preuve de coopération n'ont pas demandé qu'on les

 24   emprisonne mais on a accepté qu'ils restent entre les mains des affaires

 25   civiles et les ont renvoyés. Donc il y a beaucoup, beaucoup d'histoires qui

 26   sont venues de ces gens qui avaient des choses à raconter.

 27   En fin, nous ne pouvions pas déployer nos militaires, nous ne pouvions pas

 28   non plus déployer notre police civile de l'autre côté de la frontière à


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  1   Dubica, mais nous avions néanmoins un accord, un accord obtenu avec les

  2   deux parties qui nous autorisaient à déployer les observateurs militaires.

  3   Donc il ne s'agit pas d'unités. C'était simplement des observateurs

  4   militaires à titre individuel. Donc les deux parties de cette frontière,

  5   que ce soit du côté serbe ou non étaient des zones où nous avions déployé

  6   les observateurs militaires. Et nous avions également les ONG et nous

  7   avions les observateurs européens, donc il s'agit des acteurs qui pouvaient

  8   tous entendre les récits de ces gens qui arrivaient, savoir d'où ils

  9   venaient.

 10   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Madame Sutherland, est-ce que vous

 11   aurez des questions supplémentaires ?

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non. Pendant la pause, j'ai revu le

 13   compte rendu d'audience et je me suis rendue compte qu'il était très clair.

 14   Il n'y a pas besoin de questions supplémentaires.

 15   M. LE JUGE MORRISON : [aucune interprétation]

 16   M. ROBINSON : [interprétation] Question d'intendance. Le document de la

 17   liste 65 ter 06732 qui devait d'après l'Accusation fait partie de la pièce

 18   D470 mais ne l'est pas donc nous demandons le versement de ce document en

 19   tant que pièce à décharge.

 20   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, on me l'a dit, nous allons

 21   avoir une cote distincte.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1921.

 23   M. LE JUGE MORRISON : [aucune interprétation]

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais savoir si Dr Kirudja croit que les

 25   Serbes ont chassé les Musulmans d'un côté de la frontière sans en informer

 26   les Serbes de l'autre côté de la rivière ? Mais comment est-ce que vous

 27   avez pu admettre cela puisque --

 28   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Karadzic, vous


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  1   avez entendu la décision de la Chambre, vous avez bénéficié d'énormément de

  2   temps, vous aviez eu vraiment, vous aviez eu une grande marge de manœuvre.

  3   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

  4   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Oui, Monsieur le Témoin.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je veux comprendre ce qu'il en est d'un

  6   document précis, qu'on m'a demandé d'examiner, que M. Karadzic m'a demandé

  7   d'examiner. C'est un document daté du 29 avril 1995, il s'agit la d'un

  8   document très personnel, très confidentiel, qui n'a rien à voir avec ce qui

  9   fait l'objet d'un procès pénal. Est-ce que je peux vous demander d'expurger

 10   ceci, parce que, là, vous avez un document très personnel.

 11   [La Chambre de première et le Greffier instance se concertent] 

 12   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Je ne pense pas qu'on en ait demandé

 13   le versement d'ailleurs. Monsieur Tieger.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Oui, il serait utile d'expliquer  au témoin

 15   que même si on lui a demandé d'examiner certains documents, je suppose que

 16   c'est un des documents qu'il devait revoir pendant la pause déjeuner. On ne

 17   lui a demandé d'examiner ces documents, mais le seul versé au dossier ou

 18   les seuls, ce sont ceux qui lui ont été présentés en audience, donc le fait

 19   qu'il a lu ce document ne signifie pas pour autant que ce document ait été

 20   versé au dossier de l'espèce.

 21   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] J'espère que ceci peut vous

 22   rasséréner.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Puis-je obtenir ces assurances par

 24   rapport à un document présenté par M. Karadzic ?

 25   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Faites confiance à M. Karadzic.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Merci, Monsieur Kirudja, d'être venu

 28   déposer devant la présente Chambre, et merci surtout d'avoir fait preuve de


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  1   beaucoup de patience, ce fut une journée très longue. Je remercie les

  2   interprètes et tout le personnel du Greffe, et toutes les personnes qui

  3   contribuent au bon fonctionnement de ce procès.

  4   L'INTERPRÈTE : Donc quelques mots sont prononcés dans une langue inconnue

  5   des interprètes.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, que vous ayez -- je vous remercie

  7   d'avoir été en mesure de le voir, je me sens un peu mieux. Je me sens un

  8   peu mieux chez moi.

  9   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Fort bien. Nous reprendrons mercredi

 10   prochain à midi.

 11   L'audience est levée.

 12   --- L'audience est levée à 17 heures 27 et reprendra le mercredi 16

 13   novembre 2011, à 12 heures 00.

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