Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 10 janvier 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 47.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  6   Alors nous sommes à nouveau de retour en ce prétoire avec une

  7   nouvelle installation technique qui, j'espère, fonctionne. Nous avons

  8   commencé avec un certain retard aujourd'hui du fait de l'arrivée tardive de

  9   M. Karadzic.

 10   Monsieur Karadzic, pouvez-vous nous indiquer quelle en est la cause ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour,

 12   Madame, Messieurs les Juges, et bonne année à vous.

 13   En fait, je vous dirais qu'il y a eu une certaine confusion qui

 14   régnait du fait des activités au quartier pénitentiaire. On m'a dit qu'il

 15   fallait que je descende à 8 heures et demie, mais entre-temps, à 8 heures,

 16   les autres sont allés faire leur promenade alors que nous, nous étions

 17   toujours enfermés, et là, je n'avais aucun recours parce qu'ils n'avaient

 18   pas suffisamment de gardes pour en laisser un à chaque étage, donc je n'ai

 19   pas pu, donc, me préparer à temps emmener mes affaires, d'où ce retard dont

 20   je viens d'expliquer les raisons.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie de cette précision,

 22   Monsieur Karadzic, et je vois -- je vois que -- ah, finalement, finalement,

 23   le compte rendu d'audience semble fonctionner.

 24   J'aimerais, avant de commencer aujourd'hui, vous faire part de

 25   certaines questions à huis clos partiel. Donc je souhaiterais que nous

 26   puissions passer à huis clos partiel.

 27   [Audience à huis clos partiel]

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  6   [Audience à huis clos]

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 16   [Audience publique]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous rester assis ? La Chambre

 18   va faire une pause de 10 minutes pour que nous puissions préparer les

 19   mesures de protection.

 20   --- La pause est prise à 10 heures 09.

 21   --- La pause est terminée à 10 heures 22.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin est invité à prononcer sa

 23   déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 25   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Je vous en

 27   prie, installez-vous. Asseyez-vous.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell, vous avez la

  2   parole.

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   LE TÉMOIN : KDZ045 [Assermenté]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   Interrogatoire principal par M. Mitchell :

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  8   R.  Bonjour.

  9   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 10   9065 et je demande que le document ne soit pas diffusé à l'extérieur.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, vous bénéficiez de mesures de protection, comme

 12   vous le savez. Un pseudonyme vous a été octroyé. Donc, ne prononcez pas

 13   votre nom, s'il vous plaît, mais confirmez, si vous pouvez, si le nom que

 14   l'on voit s'afficher est bien votre nom.

 15   R.  Oui, je m'appelle comme ça. C'est mon nom.

 16   Q.  Merci.

 17   M. MITCHELL : [interprétation] J'en demande le versement.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, le document est versé au dossier.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction P4089 sous

 20   pli scellé.

 21   M. MITCHELL : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur le Témoin, vous souvenez-vous d'avoir déposé dans l'affaire

 23   contre Radoslav Krstic le 14 avril de l'an 2000 ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens.

 25   Q.  Avez-vous relu ou réentendu cette déposition ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous souhaitiez apporter trois corrections à cette déposition d'après

 28   ce que j'en sais ? Donc, j'aimerais que l'on en parle maintenant.


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  1   Premièrement, page du compte rendu d'audience 20 -- 2 942 à 2 943,

  2   vous avez déposé en disant qu'en juillet 1995, vous n'étiez pas membre de

  3   l'armée de Bosnie. Est-il exact de dire que vous avez été démobilisé de la

  4   Défense territoriale en juin 1992, après avoir été blessé et que vous avez

  5   été remobilisé de --- donc, mobilisé de nouveau le 5 juillet 1995, après

  6   l'attaque sur l'enclave ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Un deuxième point de correction, page du compte rendu d'audience 2945,

  9   ligne 8. Vous auriez déclaré dans votre déposition que la distance qui vous

 10   séparait du territoire libre était de l'ordre de 7 200 kilomètres, mais en

 11   fait, vous avez précisé, vous avez dit qu'il ne s'agissait que d'à peu près

 12   100 kilomètres. Donc, la distance qui sépare Srebrenica de Tuzla, exact ?

 13   R.  Oui, c'est à peu près 100 kilomètres.

 14   Q.  Puis la troisième correction, ligne 24 de la page 2 950 du compte rendu

 15   d'audience. Vous avez dit qu'il y avait à peu près 2 500 voire 3 000

 16   Musulmans détenus sur le terrain de sport de Nova Kasaba le 13 juillet

 17   1995. Alors, après avoir examiné votre première déclaration du 19 juillet

 18   1995, vous avez déclaré que le chiffre plus précis serait estimé à environ

 19   2 000 à 2 500 hommes. Exact ?

 20   R.  Oui, c'est exact. Je pense que c'est plus précis de dire 2 000 à 2 500.

 21   Q.  Maintenant que ces trois corrections ont été apportées, est-ce que vous

 22   pouvez confirmer que votre déposition dans l'affaire Krstic est exacte ?

 23   R.  Oui, tout ce que j'ai dit est exact.

 24   Q.  Si l'on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vous

 25   répondiez de la même façon ?

 26   R.  Oui, mes réponses seraient exactement les mêmes.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 28   versement de la déposition du témoin dans l'affaire Krstic. 65 ter 22710.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, le document sera accepté.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4090.

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Soit six pièces connexes font également

  4   l'objet de documents que je souhaite verser au dossier. C'est le 2902. --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les six… y a-t-il une objection du côté

  6   de la défense ? Maître Robinson ?

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces documents seront versés au dossier

  9   et une cote leur sera attribuée en temps voulu, Monsieur Mitchell.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Je me propose de donner lecture du résumé de la déclaration du témoin.

 12   Le 11 juillet 1995, après la chute de Srebrenica, les femmes et les enfants

 13   musulmans se sont rendus à la base de la FORPRONU de Potocari. Le témoin a

 14   déclaré dans sa déposition que les hommes n'ont pas osé aller à Potocari

 15   parce qu'ils ne faisaient pas confiance aux Serbes. Plutôt, environ 13 à 15

 16   mille hommes et jeunes garçons, ainsi que 200 à 300 femmes sont allés au

 17   village de Susnjari où ils ont constitué une grande colonne et ont commencé

 18   à avancer à travers les bois vers le territoire entre les mains des

 19   Musulmans. Environ un tiers de la colonne était armé, mais le témoin lui-

 20   même n'avait pas d'arme.

 21   Dans la matinée du 13 juillet, la colonne a subi un bombardement intense et

 22   le témoin a entendu, par mégaphone, des forces serbes les inviter à se

 23   rendre en garantissant aux Musulmans qu'ils seraient échangés conformément

 24   aux conventions de Genève. Le témoin et environ 30 hommes qui étaient là

 25   avec lui à ce moment-là ont décidé de se rendre.

 26   Quand les hommes se sont rendus, on les a emmenés brièvement à Konjevic

 27   Polje, puis au terrain de sport de Nova Kasaba, rempli de Musulmans –

 28   quelque 2 000 à 2 500 d'après la nouvelle évaluation corrigée et confirmée


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  1   par le témoin ce matin. Au moins 100 soldats Serbes de Bosnie étaient

  2   également présents sur ce terrain de sport.

  3   Environ 15 à 20 minutes après l'arrivée du témoin à Nova Kasaba, le général

  4   Ratko Mladic est arrivé et il s'est adressé aux prisonniers. Ensuite, on

  5   leur a donné l'ordre de remonter dans les camions qui attendaient sur la

  6   route. Le camion du témoin, dans lequel il y avait 119 prisonniers, est

  7   parti vers Bratunac et s'est arrêté près du supermarché du village de

  8   Kravica. Le témoin a vu au moins deux autres camions derrière le sien.

  9   Durant toute la nuit, le témoin a entendu des cris, des gémissements, des

 10   appels à l'aide et des rafales de tirs. Certains prisonniers du camion ont

 11   reçu des coups de crosse de fusil, tandis que cinq d'entre eux ont été

 12   sortis du camion et ne sont plus revenus. Les prisonniers n'ont reçu aucune

 13   nourriture et ils ont reçu un seul seau d'eau pendant ce temps, tandis

 14   qu'il faisait si chaud et étouffant que certains prisonniers ont bu leur

 15   propre urine.

 16   Vers 2 ou 3 heures, du 14 juillet, 2 ou 3 heures de l'après-midi, les

 17   prisonniers ont été emmenés à l'école de Petkovci. Là, ils ont donné, ils

 18   ont reçu l'ordre de placer leurs mains derrière leur tête, et de courir

 19   vers l'école entre deux haies de soldats serbes. Ils ont couru vers

 20   l'école, et pendant ce déplacement on leur donnait des coups de pied, des

 21   gifles, des coups de cross. Ils devaient prononcer des phrases telles "l'on

 22   vit à la République serbe, Srebrenica est serbe."

 23   Une fois dans l'école, le témoin est emmené dans une salle de classe

 24   du deuxième étage, où il a vu deux hommes qui avaient été roués de coups,

 25   et couverts de sang. Le témoin a estimé qu'environ 200 prisonniers étaient

 26   dans la salle de classe quand elle était pleine. De temps à autres, on

 27   sortait les prisonniers, et le témoin a pu entendre des coups de feu. Au

 28   bout d'un certain moment, le prisonnier a été sorti dans le hall où il a vu


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  1   entasser des vêtements et des pièces d'identité. On lui a donné l'ordre

  2   d'enlever ses chaussures et d'enlever tous ses vêtements jusqu'à la taille.

  3   Puis ses mains ont été attachées au dos -- à son dos, et puis il a été

  4   placé dans une autre salle de classe. 

  5   Peu de temps après, le témoin, un groupe d'autres prisonniers ont été mis à

  6   bord d'un camion, et au moment où il est monté sur le camion qui était garé

  7   dos à l'école, il faisait noir déjà dehors. Lorsque le camion était rempli

  8   d'hommes musulmans, il est parti, c'était au bout de 10 ou 15 minutes. Le

  9   témoin a entendu des coups de feu, des cris, il a vu un champ recouvert de

 10   corps de prisonniers morts qui étaient attachés, qui gisaient par terre, à

 11   plat ventre.

 12   Le témoin a donné -- a reçu l'ordre de descendre avec un groupe d'autres

 13   prisonniers. Ils ont dû constituer un alignement, le soldat donnait l'ordre

 14   aux prisonniers de s'allonger par terre, et pendant qu'ils ont commencé à

 15   s'exécuter, les soldats leur ont tiré dessus, de très près. Le témoin est

 16   tombé sur d'autres corps de prisonniers déjà et il a essayé de cacher sa

 17   tête entre les jambes des cadavres. Et pendant qu'il gisait, le témoin a

 18   entendu des rafales, pendant que les soldats tiraient dans les têtes des

 19   prisonniers blessés. Puis à un moment donné le soldat s'est approché, lui a

 20   donné un coup de pied de sa botte, et dit : "Il est mort."

 21   Au bout d'un certain temps, avec un autre survivant qui était blessé, ils

 22   ont réussi à ramper -- ensemble il a réussi à libérer les mains de cet

 23   autre survivant. Ils ont traversé la pile, l'entassement de corps, ils se

 24   sont abrités dans un béton en canal, les deux se sont cachés jusqu'à la

 25   soirée du 15 dans ce canal en béton. Ils ont commencé à se déplacer vers

 26   Tuzla, à ce moment-là, ils ont atteint le territoire libre le 18 juillet

 27   1995.

 28   Q.  Monsieur le Témoin, je voudrais maintenant vous montrer quatre


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  1   photographies, et vous demander de nous décrire ce que vous y voyez.

  2   M. MITCHELL : [interprétation] 65 ter, 14096, s'il vous plaît, dans le

  3   prétoire électronique.

  4   Q.  Monsieur le Témoin, reconnaissez-vous ce qui est représenté sur cette

  5   photographie ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que vous pouvez nous décrire l'image ?

  8   R.  Justement, nous voyons ce terrain de sport devant cette école, où nous

  9   avons été emmenés dans la soirée, cette école de Petkovci.

 10   Q.  L'huissier pourrait peut-être vous aider pour que vous annotiez cette

 11   photographie.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Alors tout d'abord, est-ce que vous pouvez nous indiquer par un S où se

 14   situe l'école.

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire où étaient les camions, et où se sont

 17   trouvés les haies, double haie de soldats serbes que vous avez dû

 18   traverser.

 19   R.  Oui, je vais vous expliquer ça. Donc tout de suite ici, au tout début,

 20   il y avait ces camions. Les soldats étaient par là. Donc il a fallu qu'on

 21   descende de ces camions et qu'on passe entre les soldats et qu'on rentre

 22   dans cette école.

 23   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Est-ce que vous voulez inscrire le chiffre

 24   1, à côté de l'endroit où étaient garés les camions.

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Le 2, là où il y avait la double haie de soldats.

 27   R.  Voilà, ce serait ici, le 2.

 28   Q.  Puis le chiffre 3, à côté de ce signe que vous avez écrit, que vous


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  1   avez mis là où vous vous êtes entré dans l'école.

  2   R.  Oui, ce serait ici.

  3   Q.  Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, inscrire votre code de Témoin,

  4   045, s'il vous plaît, en bas.

  5   R.  [Le témoin s'exécute]

  6   Q.  Et la date d'aujourd'hui, le 9 janvier --

  7   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  8   M. MITCHELL : [interprétation]

  9   Q.  Excusez-moi, le 10 janvier.

 10    LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que j'ai -- j'écris l'année aussi ?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, s'il vous plaît. 2012.

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande le versement.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ce sera la pièce P4090…

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4097.

 15   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir l'affichage du

 16   document 00214 -- de la pièce P002014 -- 214 dans le prétoire électronique.

 17   Q.  Monsieur le Témoin, reconnaissez-vous cette photographie ? Et que

 18   représente-t-elle ?

 19   R.  Oui, je -- je reconnais tout à fait.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, pourriez-vous répéter votre

 21   réponse, s'il vous plaît ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je -- je connais bien ce que l'on voit

 23   ici. C'est l'école. Ce sont les salles de classe et le couloir qui mène

 24   vers les salles de classe. C'est par là qu'on est passés.

 25   M. MITCHELL : [interprétation]

 26   Q.  Je souhaite que Mme l'Huissière vous aide de nouveau. Je voudrais que

 27   vous annotiez quelque chose. Les salles de classe, s'il vous plaît, que

 28   vous venez de mentionner, est-ce que vous pouvez nous indiquer où elles se


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  1   situent sur cette photographie ?

  2   R.  Oui, oui, on voit que les -- les portes, en fait, de ces salles de

  3   classe -- la première ici et la deuxième. Puis, on ne -- on ne voit que le

  4   -- que très peu de la porte ici, la troisième.

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez inscrire les chiffres 1, 2 et 3, s'il vous plaît

  6   ?

  7   R.  Oui. [Le témoin s'exécute]

  8   Q.  Est-ce que vous pouvez voir, ici, à quel endroit vous avez vu ce -- cet

  9   emplacement de -- de vêtements et de pièces d'identité ? Est-ce que vous

 10   pouvez inscrire la lettre P ?

 11   R.  Oui, oui. On voit parfaitement. C'est juste à côté de cette rambarde en

 12   métal, ici.

 13   [Le témoin s'exécute]

 14   Q.  Juste une question au sujet des pièces d'identité. A un moment donné

 15   après votre reddition à Konjevic Polje ou à Nova Kasaba, à Kravica, à

 16   l'école de Petkovci, est-ce qu'il est arrivé un moment où vos

 17   renseignements personnels vous ont été demandés ? Est-ce que les soldats

 18   serbes vous ont demandé votre nom, votre -- votre date de naissance ?

 19   R.  Non. Jamais personne ne nous l'a demandé, et ça, c'était la quatrième

 20   fois qu'on nous fouille et qu'on nous prenne nos documents. Mais jamais

 21   personne ne nous a enregistrés ni ne nous a posé aucune question.

 22   Q.  Puis, une dernière chose que je souhaiterais que vous annotiez ici.

 23   Lorsque les soldats serbes vous ont attaché les mains, où étiez-vous ?

 24   R.  A côté de cette lettre P que j'ai écrit, parce qu'il y avait ici ce tas

 25   très important de documents, de pièces d'identité, de carnets de santé et

 26   puis quelques pièces de vêtements.

 27   Q.  Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, inscrire de nouveau le code

 28   qui correspond à vous en tant que Témoin 045 en bas, de nouveau. Est-ce que


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  1   vous pouvez écrire la date d'aujourd'hui ?

  2   R.  [Le témoin s'exécute]

  3   M. MITCHELL : [interprétation] J'en demande le versement, Monsieur le

  4   Président.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce sera versé au dossier. Ce sera

  6   la pièce P4098.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce P002016

  8   et je demande que l'on affiche la version non annotée.

  9   Q.  Monsieur, est-ce que vous reconnaissez ce que nous pouvons voir sur

 10   cette photographie ?

 11   R.  Oui. Oui, oui. Je peux tout à fait reconnaître ceci. Il s'agit du

 12   barrage à Petkovci où nous avons été exécutés, donc près du barrage, près

 13   du -- sur le plateau, en fait, qui se trouve près du barrage.

 14   Q.  Et je souhaiterais à nouveau que vous annotiez certaines choses sur

 15   cette photographie.

 16   R.  Oui, oui, tout à fait.

 17   Q.  Premièrement, est-ce que vous pourriez nous indiquer où se trouve

 18   l'endroit -- où se trouvaient les corps, en fait, sur cette photographie ?

 19   R.  [Le témoin s'exécute]

 20   Toute la surface de ce plateau était recouverte de cadavres. Est-ce

 21   que je dois vous indiquer toute la surface ?

 22   Q.  Non. Indiquez-nous peut-être, je ne sais pas, le pourtour, le périmètre

 23   qui correspond à l'endroit où se trouvaient les corps.

 24   R.  Oui, oui. [Le témoin s'exécute]

 25   Q.  Est-ce que vous vous souvenez l'endroit où vous vous trouviez lorsqu'on

 26   vous a tiré dessus ? Si vous vous en souvenez, est-ce que vous pourriez,

 27   donc, nous indiquer, de façon approximative où se trouve cet endroit et

 28   veuillez mettre la lettre A à côté.


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  1   R.  Ecoutez, c'était plus ou moins là. Voilà. Voilà. En fait, voilà. Je

  2   vais l'annoter avec un A.

  3   Q.  Une toute dernière chose. Est-ce que vous pouvez voir le canal en béton

  4   sur cette photographie ? Le canal en béton où vous vous êtes caché, et si

  5   vous ne pouvez pas véritablement le voir sur la photographie, est-ce que

  6   vous pouvez, à l'aide d'une flèche, nous indiquer la direction de ce canal

  7   en béton ?

  8   R.  Non, on ne peut pas voir le canal directement à partir de ce plateau.

  9   Mais je peux effectivement faire une flèche pour vous indiquer, donc, par

 10   où nous sommes passés pour sortir de cet endroit. Voilà. [Le témoin

 11   s'exécute]

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez mettre le numéro qui vous correspond,

 13   donc 045, en tant que témoin ? Est-ce que vous pourriez également mettre la

 14   date en bas de la photographie ?

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander le versement

 17   au dossier de ce document, Monsieur le Président ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela deviendra la pièce P4099.

 19   M. MITCHELL : [interprétation]

 20   Q.  J'aimerais vous montrer maintenant une dernière photographie, il s'agit

 21   du document 2913 de la liste 65 ter.

 22   Est-ce que vous reconnaissez ce qui figure sur cette photographie ?

 23   R.  Oui, oui. Oui, oui, tout à fait. Il s'agit du canal dont nous venons de

 24   parler, le canal où nous nous sommes réfugiés par la suite.

 25   Q.  Ce n'est pas la peine que vous annotiez quoi que ce soit sur cette

 26   photographie, mais pourriez-vous peut-être nous décrire ce que nous voyons

 27   en haut de la photographie ? Vous voyez il y a deux cercles rouges. Dans un

 28   premier temps, il y a un grand cercle rouge qui entoure deux bâtiments là;


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  1   est-ce que vous pouvez nous dire à quoi cela correspond ?

  2   R.  Ecoutez, je pense qu'il s'agissait d'une petite maison, enfin peut-être

  3   d'un bâtiment administratif, que sais-je, parce que nous y avons vu un

  4   soldat qui se trouvait donc devant cette maison qui avait un fusil, et nous

  5   y avons vu des machines également. Donc c'était visiblement une maison qui

  6   se trouvait là avant la guerre. Peut-être que cela avait quelque chose à

  7   voir avec le barrage, peut-être qu'ils assuraient la sécurité du barrage.

  8   Mais nous, nous avons vu un soldat qui se trouvait devant cette maison.

  9   Nous, en fait, nous sommes partis en traversant le plateau et puis nous

 10   sommes descendus vers le canal. Il n'a pas pu nous voir de l'endroit où il

 11   se trouvait.

 12   Q.  Lorsque nous dites "nous," et surtout ne mentionnez le nom de personne,

 13   mais est-ce que vous pouvez nous dire quand même à qui vous faites

 14   référence lorsque vous dites "nous" ?

 15   R.  Ecoutez, je fais référence directement à l'homme qui s'est échappé avec

 16   moi, qui a réussi également à sauver sa peau.

 17   Q.  Est-ce que vous pouvez également décrire ce qui se trouve à l'intérieur

 18   du plus petit cercle rouge qui se trouve dans le coin supérieur droit de la

 19   photographie ?

 20   R.  Ça il s'agit de lampes très très fortes, très puissantes plutôt, qui se

 21   trouvaient positionnées en haut des réverbères.

 22   Q.  Je vous remercie, Monsieur. Je n'ai plus de questions à vous poser pour

 23   le moment.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous allez demander le

 25   versement au dossier de cette photographie ?

 26   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, cela a déjà été versé

 28   au dossier en tant que pièce connexe.


Page 22651

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah, merci.

  2   Monsieur, comme cela a été indiqué, votre déposition dans l'affaire

  3   précédente a été versée au dossier au lieu ou à la place de votre

  4   interrogatoire principal dans cette affaire, et vous allez maintenant

  5   répondre aux questions du contre-interrogatoire de M. Karadzic.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je vous en prie.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 10   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur le Témoin.

 11   R.  Bonjour.

 12   Q.  Je souhaiterais vous demander quelques précisions à propos de certaines

 13   choses qui ne sont pas très claires pour moi. Je vais essayer de vous poser

 14   des questions aussi simples que possible et cela vous permettra donc de

 15   répondre tout simplement par un oui ou par un non. Premièrement, voilà ce

 16   que j'aimerais savoir : Vous êtes originaire d'un groupe de villages et de

 17   hameaux, n'est-ce pas, c'est cela ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Quel est le nom de cette zone et quel est le nom de votre hameau ? Si

 20   cela met en danger ou permettra de divulguer votre identité, nous pouvons

 21   tout à fait passer à huis clos partiel.

 22   R.  Non, je ne peux pas répondre parce que mon identité serait ainsi

 23   révélée.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Est-ce que nous allons pouvoir passer à

 25   huis clos partiel ?

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, nous allons passer rapidement à

 27   huis clos partiel. Mais entre-temps, j'aimerais vous rappeler de ménager un

 28   temps d'arrêt entre les questions de l'Accusé et les réponses que vous


Page 22652

  1   apportez pour que les interprètes puissent suivre. Merci.

  2   Nous sommes maintenant à huis clos partiel.

  3   [Audience à huis clos partiel]

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

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 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


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  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

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  9  (expurgé)

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 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16   [Audience publique]

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23   Q.  Merci. Après cela, ce groupe, cette formation est devenue la 281e

 24   Brigade, n'est-ce pas ?

 25   R.  Ecoutez, je n'en sais rien. Je n'en suis plus partie à ce moment-là.

 26   Bon, cela correspond probablement à la situation, mais je ne m'en souviens

 27   pas.

 28   Q.  Alors, pour ce qui est de votre participation à la guerre, est-ce


Page 22654

  1   qu'elle a été reconnue, est-ce qu'elle a été confirmée ou certifiée ?

  2   R.  Ecoutez, je n'en sais rien.

  3   Q.  Mais avez-vous reçu des certificats de privatisation, et ce, du fait

  4   que vous aviez participé à la guerre ?

  5   R.  Ecoutez, je ne sais pas ce qu'il est advenu ultérieurement. Il se peut

  6   qu'ils nous aient donné cela après la chute. Mais je ne peux pas répondre à

  7   cette question.

  8   Q.  Vous êtes en train de nous dire que vous ne savez pas si vous avez reçu

  9   des certificats qui étaient remis aux combattants et aux membres de l'armée

 10   de la BiH et que vous n'en connaissez pas le nombre ?

 11   R.  C'est exact. Je n'en connais pas le nombre.

 12   Q.  Mais combien de certificats est-ce que vous avez reçus ? Quelle est la

 13   période qui a été reconnues pour ce qui est la période de votre

 14   participation à la guerre ?

 15   R.  Ecoutez, je ne comprends pas véritablement votre question.

 16   Q.  Bien. Vous avez obtenu un certificat pour -- quelle était la période,

 17   le nombre de mois qui était couvert par ce certificat et qu'est-ce que vous

 18   avez obtenu pour avoir participé à la guerre ?

 19   R.  Ecoutez, moi, je ne sais pas comment ils ont remis ces certificats.

 20   Cela a peut-être été reconnu par la suite, mais pas à ce moment-là -- ou

 21   plutôt, à ce moment-là, moi, je n'étais plus membre de cette formation,

 22   donc je ne sais pas combien j'ai reçu. Je ne m'en souviens pas.

 23   Q.  Qu'auriez-vous à me dire si je vous disais que vous avez reçu ceci pour

 24   tous les mois de la guerre ?

 25   R.  Je peux vous dire que j'ai à nouveau rallié les rangs le 5 juin 1995.

 26   Q.  Merci. Mais entre-temps, est-ce que vous aviez des liens avec l'armée

 27   et la brigade ? Est-ce que vous aviez des contacts avec eux ?

 28   R.  Non. Moi, personnellement, non.


Page 22655

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  Qui était le commandant ?

  4   R.  Je n'en sais rien.

  5   Q.  Qui vous transmettait les ordres ?

  6   R.  Je ne peux pas vous le confirmer directement, parce que, bon, je ne

  7   participais pas ou je n'avais pas grand-chose à voir avec ce genre de

  8   chose. La Défense territoriale, elle protégeait nos villages, nos enfants,

  9   nos familles. C'est ce que nous faisions.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comme vous pouvez le remarquer au compte

 11   rendu d'audience, il y a votre réponse précédente et les -- votre question

 12   précédente, plutôt, et les réponses du témoin qui n'ont pas été consignées

 13   au compte rendu d'audience. Donc, si cela est nécessaire, à votre avis,

 14   est-ce que vous pourriez répéter la question ? Les interprètes indiquent

 15   qu'ils ont eu quelques problèmes techniques avec leurs microphones.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Alors, après -- voilà quelle était ma question. Après votre

 18   démobilisation -- ou après la démobilisation, plutôt, est-ce que le témoin

 19   -- le nom du témoin apparaît comme membre de l'unité ? Est-ce qu'il avait

 20   des liens en tant que agent administratif ou personne chargée du dossier ?

 21   Voilà quelle était la question.

 22   R.  Non, non, non. Moi, je travaillais pour une structure civile. Ce n'est

 23   absolument pas moi qui consignais les procès-verbaux et les comptes rendus

 24   dans l'unité.

 25   Q.  Merci. Alors, je ne sais pas ce qui figurait au compte rendu

 26   d'audience, mais est-ce que vous pourriez confirmer que vous n'avez pas

 27   reçu de certificat reconnaissait votre participation à la guerre ou est-ce

 28   que vous avez reçu ce certificat ?


Page 22656

  1   R.  Non. J'ai reçu un certificat. Je ne me souviens pas quelle est la

  2   période prise en considération par ce certificat. Je ne me souviens pas, en

  3   fait, comment cela se passait au début.

  4   Q.  Merci. Vous avez dit que jusqu'au cinq juin -- ou 15 juin, plutôt, vous

  5   faisiez partie de la Défense territoriale. Est-ce bien exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce qu'il est possible que, pendant cette période, le commandant de

  8   cette unité soit Becirovic ?

  9   R.  Ecoutez, je ne m'en souviens pas et, de toute façon, je vous l'ai déjà

 10   dit, je ne me souviens pas de cet homme. Je n'en ai aucun souvenir

 11   personnel.

 12   Q.  Mais vous avez vécu là-bas pendant cette période. Après, d'ailleurs, le

 13   nom du commandant était Zulfo Tursunovic.

 14   R.  Oui, je le pense, et comme je vous l'ai déjà dit, je n'avais absolument

 15   rien à voir avec lui.

 16   Q.  Très bien. Nous allons donc maintenant nous intéresser à ceci. Jusqu'au

 17   15 juin, est-ce que vous avez participé à des actions effectuées par cette

 18   unité ?

 19   R.  Moi, je n'ai jamais participé à aucune action. Il n'y a eu aucune

 20   action à l'époque. Tout ce que nous faisions, c'était monter la garde

 21   auprès -- autour de nos villages. Nous assurions la protection des

 22   villages.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Pour que tout soit bien clair sur -- au

 25   compte rendu d'audience, est-ce que M. Karadzic pourrait faire référence

 26   aux années lorsqu'il évoque des dates ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous remercie, Monsieur

 28   Mitchell.


Page 22657

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si j'ai bien compris le témoin et si j'ai bien

  2   compris les questions posées par M. Mitchell lors de l'interrogatoire

  3   principal, le témoin faisait partie de cette unité et a appartenu à cette

  4   unité entre la mi-avril et la mi-juin 1992.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce bien exact ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Fort bien. Où avez-vous été blessé ?

  9   R.  J'ai été blessé par un éclat d'obus au niveau du coude gauche, lorsque

 10   cet obus est tombé sur notre village, et je peux le prouver cela. J'ai été

 11   donc blessé par un éclat d'obus.

 12   Q.  Merci. Est-ce qu'il y avait des Serbes dans votre village ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Donc vous nous dites ne pas avoir participé à la guerre et vous nous

 15   dites que lorsque vous vous trouviez là-bas, vous nous avez dit que l'unité

 16   n'a participé à aucune action.

 17   R.  Ecoutez, moi personnellement, je n'ai participé à aucune action.

 18   Q.  Bien.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que le document 1D4961, dans le e-court,

 20   pourrait être affiché, je vous prie ?

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  J'aimerais savoir si vos connaissances, les Serbes, savaient que vous

 23   apparteniez à cette unité ?

 24   R.  Je ne comprends pas votre propos. Qu'entendez-vous par connaissance ?

 25   Q.  Mais est-ce que vous aviez des connaissances parmi les Serbes ?

 26   R.  Oui, oui. J'en avais de nombreuses. Je travaillais avec eux. J'en

 27   connaissais beaucoup. Et d'ailleurs, si je peux m'exprimer, je vous dirais

 28   qu'avant la guerre, c'étaient de bons amis. Nous avons travaillé ensemble


Page 22658

  1   avant la guerre.

  2   Q.  Mais est-ce qu'ils savaient que vous, vous faisiez partie de cette

  3   unité ? Est-ce qu'ils connaissaient votre poste dans cette unité ?

  4   R.  Je ne sais pas s'ils le savaient ou non, d'ailleurs. Je n'ai jamais eu

  5   de contact avec qui que ce soit.

  6   Q.  Alors, regardez. Il s'agit de notes relatives à l'histoire de l'armée

  7   de Bosnie-Herzégovine. Cela a été rédigé par des membres de la 28e

  8   Division, donc en fonction des différentes unités. Voilà votre unité, la

  9   Défense territoriale qui ensuite est devenue ou a fini par former la 281e

 10   Brigade légère. Si vous regardez les actions de cette brigade, regardez --

 11   regardez les offensives.

 12   Le 1er mai : sabotage dans le secteur de Zutica. Puis le 15 mai :

 13   participation à la libération du territoire compris entre Osredak,

 14   Orahovica, Viogor, Bojna, Zeleni Jadar, avec l'Unité à Potocari et à

 15   Srebrenica. Puis, le 16 juin -- le 16 mai : une attaque chetnik a été

 16   repoussée. Puis le 22 : sabotage positif dans le secteur de Zutica avec

 17   pertes des forces et pertes de matériel pour l'ennemi. Puis il y a eu cette

 18   attaque d'infanterie dans le secteur de Bijelo Polje, le 24 mai. Le 27 :

 19   autre opération de sabotage au niveau des lignes électriques de l'ennemi.

 20   Le 29 mai : participation aux combats dans le secteur de Jasikovaca et

 21   Manovici. Puis vous avez le 7 juin : autre opération de sabotage réussie

 22   dans le secteur de Rupovo Brdo, et le 10 juin, vous avez capture

 23   temporairement --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 25   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais obtenir

 26   quelques explications à propos de ce document. Alors je vois qu'il y a un

 27   numéro ERN sur la deuxième et troisième page, ce qui n'est pas le cas pour

 28   la première page. Peut-être que M. Karadzic pourrait nous expliquer sur


Page 22659

  1   quoi il se base pour utiliser ce document avant que le témoin ne réponde

  2   aux questions.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, premièrement, avez-vous

  4   confirmé que vous apparteniez à la 281e Brigade légère de la Bosnie

  5   orientale ? Est-ce qu'il s'agissait bien de votre unité ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Au début, il s'agissait de la Défense

  7   territoriale. Ce n'était pas la 281e Brigade. Par la suite, elle a été

  8   rebaptisée 280 -- 200 -- 281e Brigade légère.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, voyez-vous, ce qui me trouble

 10   c'est que vous avez présenté un premier document au témoin, et Monsieur

 11   Karadzic, il s'agit d'un document qui n'a pas été traduit alors que nous

 12   avons quand même eu une longue période de vacances judiciaires.

 13   Monsieur Mitchell.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] M. Reid vient de vérifier, en fait, donc

 15   vous avez la première page à laquelle correspond le numéro ERN précédent.

 16   Mais, bon, c'est un document qui provient de notre jeu de documents.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous n'avez pas de traduction pour

 18   ce document, n'est-ce pas ?

 19   M. MITCHELL : [interprétation] Non.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je ne savais pas

 21   que cela allait faire l'objet d'un litige.

 22   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Est-ce que vous étiez oui ou non membre

 25   d'un de la 281e Brigade légère ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, lorsqu'elle a été formée. Par la

 27   suite, en fait, je ne sais pas en fait pendant quelle année. Ce que je veux

 28   dire c'est qu'à partir de l'année 1995, c'était la 281e Brigade légère.


Page 22660

  1   C'est là, c'est là en fait que j'ai rallié leur rang. Mais à partir de la

  2   mi-avril, au début de la guerre en 1992, j'entends jusqu'au 15 juin 1992,

  3   ce n'était pas la 281e Brigade. C'était une unité qui s'appelait la Défense

  4   territoriale de la municipalité de Srebrenica.

  5   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je vous remercie.

  6   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur, est-ce que vous convenez qu'au deuxième paragraphe il est

  9   indiqué qu'elle a été formée à partir ou avec les éléments de l'unité

 10   précédente de la Défense territoriale de Suceska -- ou plutôt, donc, de la

 11   Brigade de Suceska, et de la Compagnie de Lipovac ainsi que de la Compagnie

 12   de Kutuzero, qui appartenait au Bataillon de Zeleni Jadar. Donc vous, vous

 13   faisiez partie de la Défense territoriale, mais c'est cette Défense

 14   territoriale qui par la suite a formé cette brigade, n'est-ce pas ?

 15   R.  [aucune interprétation]

 16   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 17   M. KARADZIC : [aucune interprétation]

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les interprètes n'ont pas entendu votre

 20   réponse, la réponse précédente. Est-ce que vous avez répondu par

 21   l'affirmative, Monsieur ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je faisais partie de la Défense

 23   territoriale, comme je vous l'ai déjà dit, et j'en ai fait partie jusqu'au

 24   15 juin 1992.

 25   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 22661

  1   Q.  Le 7 juin, il y a eu différentes opérations de sabotage dans le secteur

  2   de Rupovo Brdo. Le 10 juin, Rupovo Brdo a été capturé provisoirement, le 14

  3   juin, autre opération de sabotage réussie menée contre l'ennemi à Bijela

  4   Stijena. Bon, je ne vais pas vous donner lecture de tout cela, mais nous

  5   voyons qu'à partir du 15 juin, bon cela ne vous concerne plus.

  6   Mais est-ce que vous saviez qu'il y avait eu autant d'opérations de

  7   sabotage réussies menées contre les Serbes, sur le territoire dans

  8   l'endroit où vous vous trouviez qui ont été effectuées par votre Défense ou

  9   en tout cas par votre unité de la Défense territoriale, par la Brigade de

 10   Suceska, de Lipovac, et cetera.

 11   R.  Ecoutez, il y en a beaucoup que je ne connaissais pas. Il

 12   s'agissait essentiellement de villages musulmans, donc c'est l'inverse en

 13   fait qui s'est produit.

 14   Q.  Est-ce que vous êtes en train de nous dire que votre unité effectuait

 15   des opérations de sabotage contre les Musulmans ?

 16   R.  Non, non, non, vous ne m'avez pas compris. Mais ici, de quoi est-il

 17   question. Il s'agit en fait du fait que Suceska était quasiment,

 18   exclusivement un territoire musulman. Donc il s'agit de défense mais je ne

 19   peux pas vous confirmer d'une façon ou d'une autre.

 20   Q.  Ecoutez, regardez, il est question d'action de sabotage réussie avec

 21   des pertes, des pertes en vie humaine, des pertes de matériel pour les

 22   Serbes. Vous le voyez ?

 23   R.  Ecoutez, je ne peux pas vous le confirmer cela. Moi, je n'avais rien à

 24   voir avec le commandement, et je ne suis pas informé de cela.

 25   Q.  Bien, merci. Quelle est votre profession ?

 26   R.  J'ai suivi l'école secondaire, et puis ensuite je suis allé dans une

 27   école du génie, l'école des mines en fait.

 28   Q.  Mais quelle est votre profession ?


Page 22662

  1   R.  Je suis technicien spécialisé dans les mines, (expurgé)

  2  (expurgé)

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir le document 1D497

  4   ?0

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce que vous avez entendu dire --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, je m'adresse à vous.

  8   Dites-nous si, à votre avis, il faut procéder à une expurgation.

  9   Mais entre-temps, nous allons poursuivre bien entendu.

 10   Oui, Monsieur Mitchell.

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, pour ce qui est de la deuxième partie

 12   de cette phrase.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Monsieur, nous sommes en audience

 14   publique, Monsieur, donc si, dans le cadre de votre déposition, il y a des

 15   éléments qui permettraient de révéler votre identité, il faudra que cela

 16   soit fait à huis clos partiel, et n'hésitez pas à demander que nous

 17   passions à huis clos partiel, si cela est nécessaire.

 18   Oui, Monsieur Karadzic.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons, je vous prie, ne pas

 20   diffuser ce document ? Il s'agit du document 1D4947 [comme interprété]. Il

 21   en existe une version serbe et anglaise.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, je vois l'heure, Monsieur

 23   Karadzic, et le moment est venu de faire la pause maintenant. Nous allons

 24   faire une pause, une pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 11 h 45.

 25   --- L'audience est suspendue à 11 heures 15.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 47.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie, Monsieur Karadzic.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


Page 22663

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur le Témoin, vous avez entendu parler de la Société

  3   internationale des Peuples en danger ?

  4   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

  5   Q.  Avez-vous eu des contacts avec eux ? Est-ce que vous leur avez accordé

  6   un entretien ? Est-ce que vous avez répondu officiellement à des questions

  7   posées par eux ?

  8   R.  Il me semble que si, mais je ne sais pas quand.

  9   Q.  Quelle a été la langue de l'entretien ?

 10   R.  Je pense que ça s'est passé en bosnien.

 11   Q.  Merci. Je demande l'affichage du document 1D4947, mais ne l'affichez

 12   pas à l'extérieur du prétoire, s'il vous plaît. La version serbe,

 13   également, s'il vous plaît. Est-ce que l'on peut, s'il vous plaît, placer

 14   la version serbe sur le rétroprojecteur, parce que je vois qu'elle est en

 15   retard ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'allons pas diffuser le document,

 17   donc vous pouvez simplement le remettre au témoin. 

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais tout de même afficher la deuxième,

 19   parce qu'il y a peut-être différence de traduction.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Donc, c'est votre entretien avec cette dame. Je ne vais pas citer son

 22   nom. Première page. Vous voyez bien le nom de cette dame qui a eu cet

 23   entretien ? Nous voyons la date, le 26, et cetera. C'est bien ça ?

 24   R.  Je n'ai aucun souvenir de ce nom. Il est -- j'ai eu un entretien, mais,

 25   là, je ne me souviens pas du tout cela.

 26   Q.  Très bien.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, est-ce que l'on peut nous afficher la

 28   deuxième page, s'il vous plaît ? La version serbe, elle, placez-là sur le


Page 22664

  1   rétroprojecteur, donc cette même page, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Oui, faites cela.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Cela me suffit.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Alors, dites aux Juges, s'il vous plaît, si vous pouvez donner lecture

  6   de ce qui est dit ici sous profession, diplômes, et cetera, et si vous avez

  7   besoin que l'on passe à huis clos partiel, on le fera.

  8   R.  Oui, c'est ce que je souhaite.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passons à huis clos partiel, s'il vous

 10   plaît.

 11   [Audience à huis clos partiel]

 12  (expurgé)

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  9   [Audience publique]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous devons revenir en

 11   audience à huis clos partiel, Monsieur le Témoin ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Je voudrais que ce soit tiré au

 13   clair, ce terme, cette expression, pour qu'on comprenne bien de quoi il

 14   s'agit. Je voudrais que l'on le fasse à huis clos partiel.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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 27   [Audience publique]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.


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  1   M. MITCHELL : [interprétation] C'est une traduction qui a été faite à

  2   partir de l'anglais par le CLSS. Donc, nous allons vérifier.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  4   Monsieur Karadzic, vous n'avez pas demandé le versement du document

  5   précédent ? Le texte qui concernait la 281e Brigade légère de Bosnie

  6   orientale ? Est-ce que vous auriez souhaité en demander le versement ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Merci. Excusez-moi. Je ne pensais pas que

  8   l'on allait contester ce texte. Ce n'est qui -- qui n'a pas été traduit --

  9   en fait, il n'a pas été traduit, parce que je ne m'attendais pas à ce qu'on

 10   s'y oppose, mais ce document, on en demandera le versement dans sa

 11   totalité.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Que le témoin s'oppose ou non à un

 13   document, il faut le faire traduire. Donc, nous allons lui attribuer une

 14   cote MFI.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document D1987 MFI sous pli

 16   scellé.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc, à partir du mois de juin 1992 jusqu'en juillet 1995, vous n'avez

 20   pas fait partie de la brigade.

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Pour quelle raison n'a-t-on pas fait appel à vous ? D'après vous, il

 23   n'y avait pas lieu ?

 24   R.  Mais je viens de vous dire que j'ai été blessé, donc j'ai été intégré à

 25   des structures civiles.

 26   Q.  D'accord, mais en 1994, 13 et 15, avant juillet, vous étiez pendant

 27   tout ce temps-là membre des structures civiles. Pourquoi est-ce qu'on vous

 28   a appelé en juillet 1995 ?


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  1   R.  Je pense qu'il s'agissait de faire appel à tout le monde pour protéger

  2   nos vies et la vie de nos proches, de nos enfants, de l'ensemble du

  3   territoire. Il a fallu mobiliser tout le monde.

  4   Q.  Donc le 5 juillet 1995, le besoin se fait sentir de vous enrôler dans

  5   cette brigade. A ce moment-là, étiez-vous un réserviste ? Faisiez-vous

  6   partie de la réserve de cette brigade ?

  7   R.  Non, non, tout un chacun a pris part dans toute la mesure du possible

  8   pour pouvoir se sauver, si possible. On ne savait pas exactement ce que les

  9   autres faisaient. C'était un effort conjoint. Il y a eu des bombardements

 10   et des attaques tout le temps.

 11   Q.  J'attends la traduction, excusez-moi, et je voudrais que vous

 12   l'attendiez également.

 13   Quelle était la distance entre votre village et la ligne de séparation ?

 14   R.  Trois à quatre kilomètres peut-être.

 15   Q.  Merci. Est-ce que vous étiez en mesure de voir de vos yeux les Serbes

 16   de l'autre côté ?

 17   R.  Oui, oui, très bien. Ils avaient des obusiers très puissants, des

 18   Praga, des chars. Ils nous ont bombardés tous les jours. Ma maison

 19   familiale a été bombardée sept ou huit fois.

 20   Q.  Je voudrais savoir quelle est la distance entre votre village et le

 21   centre de Srebrenica ?

 22   R.  Ecoutez, je voudrais que l'on revienne à huis clos partiel pour

 23   répondre à cette question.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 26   [Audience à huis clos partiel]

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  5   [Audience publique]

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Saviez-vous quelles ont été les activités, les actions lancées par la

  8   Défense territoriale, voire plus tard la 281e Brigade, actions sur le

  9   territoire serbe ?

 10   R.  Non, je n'étais pas au courant de cela.

 11   Q.  Merci. Saviez-vous que cette brigade, c'est-à-dire la Défense

 12   territoriale, a pris part à la défense sur Kravica, le village serbe de

 13   Kravica ? C'était au moment de la Noël orthodoxe du 7 janvier 1993.

 14   R.  J'en ai entendu parler, mais il ne fait aucun que je n'en ai pas fait

 15   partie.

 16   Q.  Mais est-ce qu'on vous a relaté après ce qui s'est passé ? Est-ce qu'on

 17   vous a dit combien de Serbes ont été tués à ce moment-là ?

 18   R.  Non, je ne sais pas combien et je ne m'en souviens pas.

 19   Q.  Merci. Pendant toute la guerre, et surtout après la proclamation de

 20   cette zone de sécurité, quelles ont été les actions déployées par cette

 21   brigade commandée par Zulfo Tursunovic ?

 22   R.  Je ne sais pas quelles ont été ses actions, et je n'avais rien à voir

 23   avec tout cela.

 24   Q.  Pendant cette période-là, est-ce qu'il y a eu des enterrements ? Est-ce

 25   qu'il y a eu des morts dans les rangs de cette brigade avant le mois de

 26   juillet 1995 ?

 27   R.  Quasiment tous les jours nous avons eu des civils de tués, des femmes,

 28   des enfants, parce qu'on nous bombardés tous les jours, donc il y avait des


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  1   obus qui tombaient. Je vous affirme cela en toute sécurité, que les soldats

  2   serbes ne faisaient pas aucune distraction, aucune intention. Tuer un

  3   homme, une femme, un enfant, un animal, tous les jours il y avait des

  4   civils de tués.

  5   Q.  Merci. Nous allons poser cette question aux observateurs, par exemple,

  6   aux membres du Bataillon néerlandais. Maintenant, je vous demande ce qui en

  7   est des combattants de la 281e Brigade. Pendant ces deux ans et demie de

  8   l'existence de la zone de sécurité, quelles ont été les pertes de cette

  9   brigade ? Vous avez dû aller aux enterrements.

 10    R.  Ecoutez, je ne le sais pas et je ne m'en souviens pas.

 11   Q.  Mais est-ce qu'il y a eu des tombés ?

 12   R.  Je suppose que oui.

 13   Q.  Mais où est-ce qu'ils ont péri ?

 14   R.  Je ne peux pas vous le confirmer. Je sais, dans mon village natal,

 15   quelles sont les victimes des bombardements, des bombardements lancés par

 16   l'armée serbe.

 17   Q.  D'accord. Mais avant le mois de juillet, on n'a pas fait appel à vous,

 18   il n'y avait pas lieu parce que les Serbes n'ont pas tenté de pénétrer dans

 19   l'enclave de votre côté.

 20   R.  Si, si, je peux vous affirmer en toute sécurité qu'ils ont essayé

 21   beaucoup de fois, mais, moi, je faisais partie des structures civiles.

 22   Q.  D'accord. Mais dites-moi, jusqu'en juillet 1995, avant le mois de

 23   juillet 1995, la 28e Division a eu plus de 2 000 combattants de tombés; le

 24   savez-vous ?

 25   R.  Ça je ne sais pas, je ne peux pas vous le confirmer. Mais j'ai entendu

 26   parler de ces chiffres, mais je ne peux pas vous les garantir moi.

 27   Q.  Mais savez-vous que pratiquement tous les combattants de la 28e

 28   Division ont perdu la vie dans les villages serbes, tout comme les


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  1   combattants serbes ont perdu leurs vies dans les villages serbes ?

  2   R.  Ecoutez, ça je ne peux pas vous le confirmer, et je pense que ce n'est

  3   pas exact.

  4   Q.  Savez-vous que Zulfo Tursunovic a reçu la médaille du lys d'or, qu'il a

  5   été décoré ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Savez-vous que Zulfo Tursunovic n'a fait que quatre années d'école

  8   primaire et que ça ne l'a pas empêché de devenir commandant de brigade et

  9   de faire une très rapide et belle carrière ?

 10   R.  Non, ça je ne le sais pas, non.

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 14   R.  Oui, c'est ce que je demande.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous sommes à huis clos partiel.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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  5  (expurgé)

  6   [Audience publique]

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Donc vous avez dit à cette occasion que dans un premier temps, l'aide

  9   humanitaire parvenait de manière régulière, et qu'on la distribuait à la

 10   population civile, tandis que l'armée recevait l'aide humanitaire par

 11   d'autres moyens. Quels sont ces autres moyens, s'il vous plaît ?

 12   R.  Je ne sais pas comment ils recevaient l'aide humanitaire, et d'ailleurs

 13   je n'avais pas accès à leurs documents.

 14   Q.  Vous avez également entendu dire qu'il y a eu des abus sur le plan de

 15   l'aide humanitaire; on en a parlé, n'est-ce pas ?

 16   R.  Ça, je ne le sais pas.

 17   Q.  Mais l'avez-vous déclaré, avez-vous déclaré quelque chose de cet ordre

 18   ?

 19   R.  Je ne m'en souviens pas.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous voir le document précédent, s'il

 21   vous plaît, la page 1 du 1D4943. La date est celle du 19 juillet 1995.

 22   Je demande à ce que ceci ne soit pas diffusé à l'extérieur, s'il vous

 23   plaît. Pourrions-nous avoir la page suivante, s'il vous plaît.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Lorsque vous avez parlé de malentendus entre les structures civiles et

 26   militaires, est-ce quelque chose dont vous avez parlé ?

 27   R.  Je ne m'en souviens pas. Cela remonte à un certain nombre d'années,

 28   maintenant.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous revenir à la première page en

  2   serbe, et je ne sais pas à quelle page cela se trouve en anglais.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Veuillez regarder le bas de la page. On peut lire :

  5   "J'ai entendu dire -- j'ai entendu dire qu'il y avait des abus eu égard à

  6   la distribution, mais qui était à l'origine de cela, je ne le sais pas. Des

  7   conflits entre des structures militaires et civiles, entre les autorités

  8   militaires et civiles (expurgé)

  9   R.  Pardonnez-moi, Madame, Messieurs les Juges. Vous lisez ceci, et par

 10   voie de conséquence vous divulguez mon identité.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que la question qui vous

 12   a été posée jusqu'à présent ne permet pas de divulguer votre identité.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, mais il lit ceci dans

 14   le prétoire et indique l'endroit d'où je suis originaire. Je ne souhaite

 15   pas que ceci soit communiqué.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons caviarder le nom du hameau

 17   qui a été cité, qui est le hameau dont vous êtes originaire, mais je ne

 18   pense pas qu'il ait lu le nom du village en question.

 19   Avez-vous lu ce passage-là et pourriez-vous répondre à la question, s'il

 20   vous plaît. Quelle était la question, Monsieur Karadzic ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voici la question que j'ai posée : le témoin se

 22   souvient-il d'avoir entendu parler de cas d'abus. Et en premier lieu, j'ai

 23   demandé comment l'armée recevait l'aide humanitaire, parce que c'est ce que

 24   le témoin a dit. Il a dit qu'ils avaient reçu de l'aide humanitaire d'une

 25   manière ou d'une autre. J'ai demandé s'il y avait eu des abus à cet égard,

 26   et on peut lire ici qu'il en avait entendu parler mais qu'il ne sait pas

 27   qui était impliqué dans cela et qui avait commis cela.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] J'affirme encore une fois que je ne sais pas


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  1   qui c'était. Il se peut qu'il y ait eu quelque chose de ce genre, mais je

  2   ne sais rien à ce sujet.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que nous

  5   pourrions caviarder la page 43, s'il vous plaît, ligne 22, ce dernier terme

  6   qui figure sur cette ligne.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Oui.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Nous allons maintenant passer à l'événement principal parce que nous

 11   n'avons pas beaucoup de temps, Monsieur le Témoin, mais il est clair que

 12   vous avez oublié les propos que vous avez prononcés à l'époque.

 13   R.  Je n'ai certainement pas oublié.

 14   Q.  On vous a mobilisé au début du mois de juillet. Etiez-vous la seule

 15   personne à être mobilisée au début du mois de juillet, ou est-ce que

 16   l'ancienne Défense territoriale a été mobilisée dans son ensemble ?

 17   R.  Je crois que tout le monde a été démobilisé.

 18   Q.  Vous voulez dire "mobilisé" ?

 19   R.  Oui, mobilisé. C'est ce que je voulais dire, pour protéger la

 20   population et pour assurer notre propre défense.

 21   Q.  Vous êtes allé renforcer les lignes. Quel est le nom de cette région

 22   par ailleurs ? S'agit-il de triangle de Bandera ? Vous n'êtes pas la seule

 23   personne qui est originaire de cet endroit. Il y avait 5 à 6 000 personnes

 24   qui étaient originaires de cet endroit-là, donc ceci ne permet pas de

 25   connaître votre identité.

 26   R.  Je n'ai jamais été à cet endroit-là. Nous avions d'autres choses à

 27   faire.

 28   Q.  Est-ce là que les lignes ont été rompues pour la première fois, ou est-


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  1   ce que ceci s'est passé à un autre endroit ?

  2   R.  Je crois que ceci s'est passé à un autre endroit. C'était près de

  3   Zeleni Jadar. C'est à ce moment-là que les lignes sont tombées.

  4   Q.  Donc vous étiez sur le front au moment où vous avez entendu que les

  5   lignes sont tombées et que les Serbes sont entrés à Srebrenica. Quel jour

  6   était-ce ?

  7   R.  Le 11, dans la soirée -- dans l'après-midi, ce mardi-là.

  8   Q.  Un ordre avait été donné aux fins de quitter le village. Qui a donné

  9   cet ordre qui enjoignait la population de quitter le village ?

 10   R.  Je ne sais pas qui a donné l'ordre, mais les nouvelles circulaient

 11   rapidement, et la ville dans sa totalité était tombée. Nous devions nous

 12   déplacer et nous rendre vers Tuzla.

 13   Q.  Et est-ce qu'une différence a été marquée à ce moment-là au niveau de

 14   cet ordre entre la population civile et les militaires ? Un ordre a-t-il

 15   été donné à la population civile ?

 16   R.  Je crois qu'il y a eu aucun ordre à l'intention de qui que ce soit.

 17   Q.  Est-il exact de dire que l'ordre avait été donné de quitter le village

 18   ?

 19   R.  Oui, on m'a dit que nous devions partir, que nous ne pouvions pas

 20   rester, que Srebrenica était tombée, et il était clair que nous devions

 21   partir.

 22   Q.  Merci. A-t-il été précisé à ce moment-là où les civils devaient se

 23   rendre et où les soldats devaient se rendre, les hommes valides ?

 24   R.  Je ne peux pas prétendre que quelqu'un a dit cela, mais je sais que

 25   tous les hommes valides, comme je l'ai déjà dit, se sont rendus dans les

 26   bois, en direction de Susnjari, alors que les femmes et les enfants se sont

 27   rendus à Potocari en direction de la FORPRONU. Ils pensaient que la

 28   FORPRONU pouvait les protéger.


Page 22678

  1   Q.  Merci. Saviez-vous que les autorités civiles avaient accepté la chute

  2   de l'enclave, et que les armes devaient être rendues et que tout un chacun

  3   était censé agir conformément aux décisions prises par les autorités

  4   civiles ?

  5   R.  Veuillez répéter cela, s'il vous plaît. Est-ce que vous faites allusion

  6   à 1993, lorsque la démilitarisation a été adoptée ?

  7   Q.  Le 11 juillet 1995, les autorités civiles sont arrivées et ont accepté

  8   la chute de l'enclave et ils sont parvenus à un accord avec le général

  9   Mladic.

 10   R.  Veuillez m'expliquer ceci, s'il vous plaît. De quel type d'autorités

 11   civiles s'agissait-il ? Maintenant vous m'avez bousculé. Cela n'est pas

 12   vrai et je ne pourrai jamais être d'accord avec ce que vous venez de dire,

 13   que quelqu'un avait accepté cela, que quiconque ou qu'une seule personne

 14   des autorités civiles avait accepté cela. Ces négociations qui ont été

 15   menées avec le général Mladic ont été menées sous la contrainte et

 16   uniquement sous la contrainte.

 17   Q.  Avant que vous ne quittiez votre village, est-ce que des soldats serbes

 18   sont entrés dans votre village ?

 19   R.  Oui, c'est exact. Un certain nombre d'entre eux dans mon secteur -- il

 20   y a des endroits qui avaient été brûlés. Ils sont entrés dans le village,

 21   il y avait des balles et des obus qui volaient dans tous les sens. C'était

 22   incroyable.

 23   Q.   Est-ce que vous parlez du nord-ouest les unités serbes sont entrées

 24   dans l'enclave le 11 juillet ?

 25   R.  Oui, c'est exact, le 11 juillet, en direction de Buca, et les villages

 26   suivants ont été brûlés --

 27   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise n'a pas entendu les noms

 28   des villages en question.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Mais ils ne sont pas rentrés dans votre village alors que vous y étiez,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui. Comme je vous l'ai dit, nous n'allions pas attendre à cet endroit

  5   pour être massacrés comme les autres personnes avaient été massacrées. Les

  6   gens se retiraient des villages à ce moment-là. C'est quelque chose que

  7   nous pouvions voir à 500 mètres de chez nous. Nous voyions que le village

  8   était en train de brûler.

  9   Q.  Est-ce que nous pourrions regarder cette déclaration que vous avez

 10   donnée aux enquêteurs de La Haye. Voyons quel est le numéro de cette

 11   déclaration. Dans le premier entretien que vous avez eu avec les

 12   enquêteurs, vous avez dit qu'un ordre avait été donné à l'intention des

 13   civils pour qu'ils se rendent à Potocari et que les soldats devaient se

 14   rendre vers Jagici et Susnjari. Est-ce bien ce que vous avez déclaré, ou

 15   est-ce que nous devrions afficher votre déclaration ?

 16   R.  Cela est sans doute la façon dont je l'ai dit dans cette déclaration;

 17   cependant, je ne sais pas qui a donné l'ordre.

 18   Q.  Les unités ont été rassemblées à Susnjari, n'est-ce pas ?

 19   R.  Personne ne peut rassembler quelque 14 000 à 15 000 troupes. C'était

 20   simplement un certain nombre de personnes qui avaient formé des groupes

 21   pour pouvoir se déplacer plus rapidement. Donc, de petits groupes avaient

 22   été formés, une colonne.

 23   Q.  Ce regroupement était quelque chose qui avait été fait conformément à

 24   l'organisation d'une brigade, parce qu'il y avait des brigades dans votre

 25   secteur, n'est-ce pas ?

 26   R.  Ecoutez, je ne sais rien à ce sujet.

 27   Q.  Est-ce que vous vous êtes regroupés avec des combattants de la 281ième

 28   ou de la 220e ou de la 284e Brigade ?


Page 22680

  1   R.  Encore une fois, je dois vous dire que la situation était à ce moment-

  2   là de fort chaotique. Tout brûlait. Il y avait des munitions qui volaient

  3   dans tous les sens. Imaginez la situation, 14 000 à 15 000 personnes

  4   devaient se regrouper. Je ne sais rien à ce sujet.

  5   Q.  Qui a été votre commandant depuis Susnjari, qui assurait le

  6   commandement ?

  7   R.  Je ne sais pas. Je ne pense pas qu'il y ait eu un quelconque

  8   commandement.

  9   Q.  Dans votre déclaration, celle du 16 août 1995 --

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Numéro 65 ter 3246, 3246, est-ce que nous

 11   pouvons regarder ce document pendant quelques instants, s'il vous plaît ?

 12   Je vous demande de bien vouloir ne pas le diffuser à l'extérieur.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  C'est sur cette page que vous dites que vous pensez que le commandement

 15   de Srebrenica a donné l'ordre en question, et qu'à Lehovici, les femmes et

 16   les enfants ont été séparés des hommes. Est-ce bien ce que vous avez dit ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons regarder la page

 18   suivante, s'il vous plaît ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela n'aurait pas pu se produire à Lehovici.

 20   Je ne sais pas comment ceci a été traduit, mais la séparation s'est faite

 21   sur la colline, dans les bois au-dessus de Lehovici. Mais au niveau de la

 22   traduction, on dit que cela s'est passé à Lehovici.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Regardons ce que dit ce document au niveau du deuxième paragraphe.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Veuillez ne pas diffuser ce document à

 26   l'extérieur, s'il vous plaît.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  "Un ordre avait été donné aux fins de se rendre à Susnjari. Les femmes


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  1   devaient se rendre à Potocari. Je crois que l'ordre émanait du gouvernement

  2   de Bosnie qui assurait le commandement à Srebrenica. Les femmes et les

  3   hommes ont marché ensemble jusqu'à ce que nous arrivions au village de

  4   Lehovici, où nous nous sommes séparés."

  5   Est-ce que constitution exact ?

  6   R.  Oui, c'est exact. Nous nous sommes séparés après ce village-là. Je ne

  7   sais rien au sujet de ce commandement, et je ne peux vraiment rien dire à

  8   ce sujet.

  9   Q.  Vous dites qu'il y avait 13 000 à 14 000 hommes qui se trouvaient là,

 10   dont un tiers étaient armés; est-il exact de dire qu'à l'avant de la

 11   colonne, il y avait les hommes qui étaient armés ? Est-ce exact ?

 12   R.  Je ne sais pas. Je n'ai vu personne. C'est sans doute ainsi que cela

 13   s'est passé. Je me trouvais à l'arrière de la colonne.

 14   Q.  Savez-vous que vous avez déclaré qu'un tiers de ces hommes étaient

 15   armés ?

 16   R.  Je crois que oui.

 17   Q.  Avez-vous dit que les sapeurs-pompiers marchaient devant -- à l'avant

 18   de la colonne ? Vous avez dit cela, n'est-ce pas ?

 19   R.  Je ne me souviens pas d'avoir dit cela.

 20   Q.  Merci. Il y avait d'autres colonnes qui étaient là également. Il n'y

 21   avait pas seulement cette colonne-là qui s'était formée à Susnjari ?

 22   R.  Ecoutez, je ne peux rien confirmer. Imaginez une masse de 15 000

 23   personnes et chaque personne essayant d'avoir la vie sauve. Je ne sais pas

 24   s'il y avait d'autres colonnes. Nous avons simplement avancé en masse pour

 25   essayer de passer.

 26   Q.  Il n'y avait aucun -- personne n'assurait un rôle de commandement ou de

 27   chef ?

 28   R.  Je ne sais rien à ce sujet.


Page 22682

  1   Q.  Avez-vous déclaré qu'Ejub Golic a assumé certaines fonctions par

  2   rapport à la colonne ?

  3   R.  Tout ce que je puis dire, c'est qu'après l'embuscade importante qui a

  4   eu lieu dans la nuit du 12 au 13, il y avait quelque 50 à 80 personnes qui

  5   ont été blessées dans ce ravin. Je ne l'ai pas entendu dire de sa bouche.

  6   Je ne l'ai pas vu moi-même, mais j'ai entendu certaines personnes dire que

  7   ce Golic avait donné l'ordre que les blessés soient transportés jusqu'au

  8   haut de la colline. Il y avait quelque 40 à 50 personnes, certainement, qui

  9   étaient sur cette colline et qui avaient été grièvement blessées. Ceci

 10   s'est passé pendant la nuit. Je les ai vues. Je l'ai vu sur cette colline

 11   de Kamenicko.

 12   Q.  Merci. Saviez-vous que le commandant de la 281e Brigade, Zulfo

 13   Tursunovic, se trouvait dans la colonne ?

 14   R.  Sans doute, mais je ne l'ai pas vu.

 15   Q.  S'agissait-il d'attaques importantes menées contre la colonne par

 16   l'armée serbe ?

 17   R.  Ces attaques étaient toutes sérieuses au cours de cette période. Il y

 18   avait un pilonnage, des obusiers qui tiraient sur le secteur de Kravica,

 19   sur la route goudronnée, et tout ceci pendant la journée et pendant toute

 20   la nuit.

 21   Q.  Comment cela se fait-il ? Y a-t-il eu des victimes ?

 22   R.  Il y a eu un nombre important de victimes. Comme je viens de dire, dans

 23   la simple nuit du 12 au 13, j'ai vu 30 à 40 personnes qui ont été

 24   grièvement blessées sur cette colline -- qui ont été transportées sur cette

 25   colline. Je ne sais pas ce qu'il est advenu de ces personnes par la suite.

 26   Ça n'est pas quelque chose qui m'a été rapporté, mais ces personnes n'ont

 27   jamais été revues après cela.

 28   Q.  Ces personnes étaient-elles simplement blessées ? Personne n'a été tué


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  1   ?

  2   R.  Il y avait tellement de morts qu'on ne pouvait les faire sortir de ce

  3   ravin. Personne ne pouvait sauver ces personnes. Il y avait un nombre très

  4   important d'hommes qui ont été tués.

  5   Q.  Merci. Est-il exact de dire que malgré cela, vous saviez qu'une partie

  6   de la 281e Brigade, qui comptait 1 000 combattants environ et 500 civils --

  7   c'est ce que vous avez dit dans votre déclaration 1D4943, page 2.

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise n'a pas saisi la date.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Avez-vous enterré les personnes qui avaient été tuées aux combats à

 11   Potoci.

 12   R.  C'est une question un peu bête, si vous me le permettez. Comment

 13   pensez-vous que nous aurions eu le temps d'enterrer des morts alors que

 14   vous ne saviez même pas ce qui allait advenir de vous dans la seconde qui

 15   suivait ? Nous n'avions même pas le temps de regarder les hommes qui

 16   étaient là.

 17   Q.  Qui a inhumé ces hommes ?

 18   R.  Personne ne l'a jamais fait, à moins qu'ils n'aient été retrouvés plus

 19   tard lorsque les Serbes les ont rassemblés et les ont jetés dans des fosses

 20   communes. Tous les autres corps sont encore là dans ces bois.

 21   Q.  Merci. Il s'agit là de la triste conséquence d'une guerre civile, mais

 22   il est important d'établir la vérité.

 23   R.  Je ne pourrais jamais être d'accord avec vous pour dire qu'il s'agit

 24   d'une guerre civile. Cela n'a jamais été une guerre civile. C'était une

 25   attaque contre la population musulmane.

 26   Q.  Bien. Alors, voyons, vous avez dit que la brigade comprenait quelque 1

 27   000 soldats et 500 civils. Ceci se trouve dans le deuxième paragraphe,

 28   lignes 10 à 12 à partir du haut; est-ce 


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  1   exact ?

  2   "Nous avons été mis en rang, nous avons rassemblé les brigades. Moi, je

  3   faisais partie de la 281e, qui comprenait 1 000 soldats et 500 civils…"

  4   Vous nous dites que vous n'aviez rien à voir avec la brigade, alors que

  5   dans cette déclaration-ci, déclaration que vous avez donnée en 1991, vous

  6   avez dit que vous vous étiez rassemblés en même temps que votre brigade, et

  7   les autres hommes étaient sans doute également en rang au sein de leurs

  8   propres brigades.

  9   R.  Cela remonte à 17 ou 18 ans environ. Je ne peux pas me souvenir de tout

 10   ce que j'ai dit, mais je dis et je répète encore une fois : essayez

 11   d'imaginer une masse de 15 000 hommes et comment il serait possible de les

 12   mettre en rang. Je ne dis pas qu'ils n'ont pas formé des groupes, mais ceci

 13   ne s'est pas fait comme d'habitude.

 14   Q.  Donc vous étiez avec les hommes de la 281e Brigade, vous avez constitué

 15   un groupe avec eux. Peut-être que vous ne vous êtes pas mis en rang, mais

 16   quelqu'un assurait le commandement de cette brigade, parce qu'il y a eu une

 17   percée militaire.

 18   R.  Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Il n'y avait personne qui

 19   assurait le commandement. Bien sûr que nous nous sommes regroupés. Il y

 20   avait mes hommes, il y avait mes proches, mes voisins. Nous nous sommes

 21   regroupés ensemble, comme ça, et nous avons formé des brigades de cette

 22   forme-là. Il n'y avait pas de commandement, et je ne sais rien à ce sujet.

 23   Q.  Alors, un peu plus bas dans le texte, vous dites que Golic était le

 24   commandant du bataillon, et plus tard il a été dit qu'il était l'adjoint de

 25   Naser et qu'il s'est occupé du retrait des blessés et que les morts n'ont

 26   pas été déplacés du tout.

 27   R.  Je n'ai pas parlé de l'enlèvement des morts à Potok. J'ai simplement

 28   dit que les blessés avaient été emmenés et que Golic -- que les blessés ont


Page 22685

  1   été emmenés sur la colline et que Golic s'est occupé de tout cela.

  2   Personnellement, je ne le connaissais pas.

  3   Q.  Merci. Dans votre groupe, au sein de votre propre brigade, vous

  4   couvriez quel territoire ? Combien de kilomètres en l'espace de deux jours

  5   ?

  6   R.  Alors, si nous disons que nous sommes partis le 11 au soir, une

  7   quarantaine de kilomètres, me semble-t-il, le 13. Donc le 11, le 12 et le

  8   13 au matin, 30 environ. Je ne sais pas exactement. Entre 30 et 40

  9   kilomètres environ, en traversant des terrains différents.

 10   Q.  Lorsque vous avez parcouru ces 40 kilomètres, à combien de reprises

 11   avez-vous fait l'objet d'attaques ?

 12   R.  Il nous faut préciser quelque chose, en fait. Cette section de

 13   Susnjari, qui représente quelque 15 ou 20 kilomètres, cela représentait le

 14   territoire libre de Susnjari à Konjevic Polje -- ou plutôt, à Kravica. Nous

 15   avons été soumis aux attaques pendant toute la durée de notre traversée. Et

 16   lorsque nous sommes parvenus sur cette route, nous avons fait l'objet de

 17   pilonnages et d'attaques. L'embuscade la plus importante s'est déroulée le

 18   12 au soir, au moment où la nuit tombait, vers 8 heures peut-être.

 19   Q.  Merci. Donc il s'agissait là de combat direct, d'embuscade, avec usage

 20   d'armes à feu, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, nous avons été attaqués. Nous avons été pilonnés. C'était la nuit.

 22   Les obus ont commencé à tomber. Je ne savais pas exactement ce qui était en

 23   train de se passer.

 24   Q.  Merci. Vous dites ici que ceux qui ont été tués ou des personnes

 25   portées disparues originaires de votre village --

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions pendant quelques

 27   instants passer à huis clos partiel, s'il vous plaît.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.


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  1   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 22687 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  1  (expurgé)

  2   [Audience publique]

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Quand vous êtes-vous rendu, au juste ?

  5   R.  Le 13 au matin -- non, excusez-moi, pas au matin. Je ne sais pas trop.

  6   Il devait être entre 11 heures et midi. C'était un jeudi.

  7   Q.  Merci. Est-ce que vous avez été alors transporté à bord d'un camion

  8   vers Kravica; c'est bien cela ?

  9   R.  Etant donné qu'il y avait ce parent - dont je ne vais pas donner le nom

 10   - il a été grièvement blessé à la tête, au matin du 13, pendant toute la

 11   matinée, il y a eu des pilonnages de la forêt, et on a entendu pendant tout

 12   le temps des gens nous appeler à nous rendre. Et il y avait tout le temps

 13   un blindé de transport des troupes entre Bratunac et Konjevic Polje de

 14   couleur blanche avec un drapeau des Nations Unies, et on entendait de là-

 15   bas une voix demandant à ce que nous nous rendions et que nous allions être

 16   échangés en application des conventions de Genève, et c'est ce que nous

 17   avons fait. Donc, dès que les soldats serbes nous ont pris en charge, on a

 18   été d'abord tabassés, on nous a dépossédés de tout ce que nous avions eu

 19   comme documents et il n'est resté que des pièces d'identité de moindre

 20   importance à être restées à Zvornik. De là, on nous a transportés au sein

 21   d'une colonne qui nous a pris vers Konjevic Polje.

 22   Pour ce qui est de ce parent-là, je n'ai plus su ce qu'il est advenu

 23   de lui. On l'a laissé sur la route à Sandici. Puis on l'a retrouvé et il a

 24   été identifié -- ses restes ont été identifiés en 1998.

 25   Q.  Merci. Mais avant cela, vous avez vu que des gens s'étaient tués. Il y

 26   avait eu 40 corps de retrouvés. C'étaient des gens qui s'étaient suicidés

 27   dans un état de panique.

 28   R.  J'en ai vu. Je ne suis pas sûr du nombre. Il y avait eu 40 corps --


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  1   enfin, des personnes mortes et des personnes grièvement blessées vers le

  2   ruisseau. Mais je ne sais pas ce qui s'est passé avec eux.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre le 3246 de la

  4   liste 65 ter, sans pour autant le diffuser vers l'extérieur. Page 4.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Vous avez vu des suicides, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non. Je pense avoir vu une fois des gens se suicider, mais rien de

  8   plus.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Compte rendu, correction, page 57, ligne 1,

 11   les quatre premiers mots ne traduisent pas ce que le témoin a dit au juste.

 12   Peut-être pourrions-nous demander un éclaircissement de sa part.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais attendez. Comment se fait-il que ce soit

 14   au compte rendu comme une question alors que c'est une partie de la

 15   réponse, en réalité ?

 16    M. MITCHELL : [interprétation] J'ai entendu l'interprète dire que "c'est

 17   de là que les voix venaient."

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, je crois que c'est bien le cas, ça

 19   sera corrigé plus tard. Continuez.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 4.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Ce que vous avez dit au sujet de ces suicides. Vous avez dit :

 23   "Qu'ils mettaient des grenades à main entre eux, et qu'ils les

 24   activaient pour se tuer, et qu'il y avait des corps partout, des corps de

 25   personnes mortes partout."

 26   Alors premier paragraphe :

 27   "Il y a deux qui ont activé une grenade et ils sont entretués avec un

 28   fusil automatique. Ils ont pointé un fusil vers la tête de l'autre, ils ont


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  1   tiré en même temps. Ils sont tombés à terre, certains ont jeté des grenades

  2   à main. Un groupe de quatre ou cinq hommes s'était pris par les mains et

  3   ont activé une grenade. Il y avait beaucoup de corps et de sang, ce qui

  4   fait que tous les cinq mètres, il y avait un cadavre. Il faisait

  5   terriblement chaud, et les mouches se rassemblaient sur les cadavres. Ça

  6   puait terriblement. Je ne pouvais plus regarder ces corps. J'en ai vu au

  7   total une quarantaine à l'endroit immédiat, là où je me trouvais."

  8   C'est bien ce que vous avez dit ?

  9   R.  Je crois que c'est le cas. Mais de là, à dire que c'est autant de

 10   suicides, je ne sais pas. J'ai ouï-dire qu'il y a eu des soldats serbes qui

 11   s'en étaient mêlés, et ils portaient des insignes particuliers et ils ont

 12   fait ce genre de chose.

 13   Q.  Vous avez déclaré qu'un état de panique s'était installé lorsque la

 14   rumeur a couru, disant que des soldats serbes s'étaient infiltrés dans la

 15   colonne.

 16   R.  Oui, il y a eu une grande panique. Je crois qu'ils avaient jeté des

 17   lacrymogènes, et il y avait eu une grosse panique à s'installer.

 18   Q.  Bon, mais est-ce que vous ne savez pas que c'étaient des rumeurs et que

 19   les soldats serbes ne se sont pas mêlés à la colonne. Alors comment avez-

 20   vous pu permettre qu'une telle panique vous prenne rien que du fait d'une

 21   rumeur ?

 22   R.  Je vous affirme que ce n'était pas qu'une rumeur. Il y a eu des soldats

 23   serbes qui s'étaient infiltrés dans notre colonne. Parce qu'on a été coupé,

 24   c'était vers la partie arrière de la colonne. On a été coupé de la grosse

 25   colonne, et je vous affirme, en toute responsabilité, que c'est ce que j'ai

 26   ouï-dire à savoir que des soldats serbes s'étaient infiltrés au sein de

 27   notre groupe à nous.

 28   Q.  Combien de combattants à votre avis avaient réussi à se frayer un


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  1   passage jusqu'à Tuzla ?

  2   R.  Je ne l'ai jamais su le vrai chiffre.

  3   Q.  Que diriez-vous si je vous disais que la Sûreté de l'Etat de Tuzla

  4   bosniaque donc musulmane, a dit qu'il y a eu 10 000 combattants de la 28e

  5   Division à être sortis, et qu'il en arrivait encore ?

  6   R.  Je vous affirme en toute responsabilité ça n'a jamais été exact, et ça

  7   ne pouvait pas être ce chiffre de loin, de loin, ça ne pouvait pas être ce

  8   chiffre.

  9   Q.  Comment pouvez-vous le savoir si vous n'êtes pas arrivé ?

 10   R.  Je n'ai pas compris. Qu'entendez-vous par arriver à Tuzla ?

 11   Q.  Moi, je vous dis que 10 000 combattants de la 28e Division s'étaient

 12   frayés un passage jusqu'à Tuzla. La Sûreté de l'Etat informe de ce chiffre

 13   et elle dit qu'il y en arrivait encore. Comment le savez-vous si vous

 14   n'avez jamais vu ?

 15   R.  Moi, j'aimerais bien voir cette liste de 10 000 hommes. Je vous affirme

 16   en toute responsabilité que ce document n'est pas exact.

 17   Q.  On vous retrouvera ce document, Monsieur le Témoin. Il s'agit d'un

 18   rapport relatif aux arrivées de combattants.

 19   Revenons maintenant vers autre chose. Alors on vous a fait monter à bord de

 20   plusieurs camions. Combien de camions au juste ?

 21   R.  Je n'ai pas pu compter les camions. J'ai vu deux camions à Konjevic

 22   Polje, où il y a eu un embarquement pour transport jusqu'à Kasaba.

 23   Q.  Merci. Combien de gens pouvait-on faire monter à bord d'un camion ?

 24   R.  Je ne sais pas combien il y en avait dans les autres camions. Ce que je

 25   sais, c'est quand nous, on est revenu, lorsque Ratko Mladic nous a dit à

 26   Kasaba qu'il fallait qu'on monte et quand on est arrivé à Kravica,

 27   quelqu'un nous a dit qu'il fallait que nous comptions combien on était. A

 28   ce paraît, il y avait à bord de ce camion, 119 hommes. Pour les autres


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  1   camions, je l'ignore.

  2   Q.  On vous a emmené tous, et vous êtes resté tous là-bas pendant la nuit ?

  3   R.  Ils nous ont provoqués tout de suite, on posait des questions, on nous

  4   assénait des coups avec leur cross. C'étaient des camions bâchés, ce qui

  5   fait que les gens dans notre camion demandaient de l'eau. Il y a eu des

  6   gens paniqués. Imaginez un peu cette température.

  7   Q.  Attendez, on y viendra. Est-ce que vous êtes resté à bord du même

  8   camion toute la nuit ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Les autres aussi, n'est-ce pas ?

 11   R.  Non. Je crois qu'on a fait descendre cinq hommes de notre camion

 12   pendant la nuit.

 13   Q.  Mais les autres camions étaient là pour faire rester les gens toute la

 14   nuit là-bas ?

 15   R.  Je ne peux pas vous confirmer combien de personnes on a fait descendre

 16   des autres camions. Ce que j'ai pu voir un peu, j'ai vu un peu en dessous

 17   de la bâche, parce que j'étais au bout, enfin en queue de camion, qu'il y

 18   avait encore deux camions derrière le nôtre.

 19   Q.  Bon, merci. Alors il -- vous avez déclaré qu'ils avaient demandé des

 20   individus concrets, et vous avez reconnu un certain Grujic.

 21   R.  Excusez-moi, Monsieur le Président, mais je demanderais un huis clos.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Certes.

 23   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre affirmation au terme de laquelle

 17   vous n'avez pas eu suffisamment de temps n'est pas du tout acceptable, une

 18   fois que vous avez dépensé une heure sur des questions secondaires. Alors

 19   j'étais en train de me poser des questions au sujet de la pertinence, et

 20   j'allais d'ailleurs poser la question à M. Robinson. Vous avez cinq minutes

 21   exactement. Les Juges en ont parlé entre eux et n'ont pas l'intention de

 22   vous prolonger le temps imparti.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne puis que regretter et constater que le

 24   témoin n'a pas été contre-interrogé de façon appropriée.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Alors vous avez dit -- vous avez parlé d'un certain Simo qui avait

 27   demandé quelqu'un; alors est-ce qu'il voulait les sauver ou est-ce qu'il

 28   voulait se venger ? Comment avez-vous compris ces interpellations ?


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  1   R.  Je pense qu'il les demandait pour se venger en quelque sorte, mais je

  2   n'en sais rien en réalité.

  3   Q.  Merci. Lors de votre emprisonnement, vous dites qu'il n'y a pas eu de

  4   liste d'établie. Mais on vous a pris vos documents, c'est bien cela ?

  5   R.  Nous, on sortait nos pièces d'identité de nos poches pour jeter le tout

  6   sur un tas énorme. Il n'y a pas eu de liste d'établie du tout.

  7   Q.  Ce qui prête à confusion.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre le P0408 -- 4098.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Quelles étaient ces classes qui étaient -- ces salles de classe qui se

 11   trouvaient -- enfin, dont les portes ne faisaient qu'un mètre et demi --

 12   qui se trouvaient à un mètre et demi de distance ? 4098. Comment se peut-il

 13   qu'on puisse considérer que ceci est une porte de salle de classe ?

 14   R.  Je vous affirme en toute responsabilité qu'il s'agit là de classe. Je

 15   ne sais pas quelle est la largeur de ces portes, je n'ai pas pu mesurer. Je

 16   me posais des questions au sujet de ce qu'il va advenir de nous. Mais je

 17   vous dis que c'est une école et que ce sont des salles de classe.

 18   Q.  Mais ça devrait alors faire des salles assez étroites, de 100 mètres de

 19   long.

 20   R.  Je ne sais pas vous dire pourquoi. Je sais vous dire que c'est une

 21   école et des salles de classe.

 22   Q.  Alors pour ce qui est du moment des exécutions, vous avez dit que

 23   depuis vos camions vous avez marché. Alors combien avez-vous marché, sur

 24   quelle distance, entre le camion et le lieu des exécutions ?

 25   R.  Nous ne sommes pas allés à pied étant descendus du camion. Une fois

 26   qu'on a été emmenés et quand on nous a donné l'ordre de descendre et de

 27   nous aligner, il y a eu peut-être cinq à dix mètres. Et il y a eu des

 28   groupes qui venaient derrière les morts qui ont été déjà exécutés. On n'a


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  1   pas eu à marcher.

  2   Q.  Mais quelle était la taille des groupes ? Par cinq, n'est-ce pas ? Vous

  3   avez dit par cinq ?

  4   R.  J'ai ouï-dire que c'était ce qu'ils avaient dit. Ils disaient "que cinq

  5   descentes," et ils tiraient tout de suite.

  6   Q.  Mais c'était quoi comme camion ?

  7   R.  Là, vraiment, vous m'en demandez trop. Je ne vous dis pas la peur que

  8   j'ai vécue. Le camion était tourné par sa partie arrière, enfin la bâche

  9   était relevée jusqu'aux marches, et je vous affirme que c'était des camions

 10   militaires, des Dietz, comme on les appelle. Il faisait nuit et on nous

 11   tirait dessus à tout instant. Je crois que c'était des camions militaires.

 12   Q.  Bon, alors s'ils sont entrés par ce petit sentier vers l'école - je

 13   n'ai pas le temps de montrer la pièce - ça devait forcément être des

 14   camions de petite taille pour pouvoir accéder au terrain de jeu. Ils ne

 15   pouvaient pas passer par ce sentier si c'étaient des gros camions.

 16   R.  Je ne serais pas d'accord avec vous sur ce point. Je ne sais pas. Je ne

 17   sais pas quelle était la taille des camions, mais à 90 pour cent de

 18   certitude je vous affirme que c'étaient des camions militaires de la JNA.

 19   Q.  Bon. Alors les hommes étaient par cinq. Combien de temps cela a-t-il

 20   duré ? Une fois qu'on faisait descendre cinq hommes, combien de temps ça

 21   durait ? Ils faisaient dix mètres et puis on les exécutait. C'est bien ce

 22   que vous avez dit ?

 23   R.  Là, vous me bouleversez. Quand vous voyez un tas de mille hommes

 24   alignés sur un plateau, allongés -- j'étais dans un état semi conscient.

 25   J'ai été blessé moi aussi. Je ne sais pas combien de temps je suis resté

 26   allongé là et je ne sais pas combien de temps les exécutions ont duré.

 27   Q.  Ne m'en voulez pas, je ne m'attaque pas à vous. Je m'attaque à des

 28   imprécisions. Je voudrais savoir quelles sont les choses qui se sont


Page 22696

  1   passées. Parce que s'il a fallut autant de temps pour exécuter cinq hommes

  2   par cinq hommes et que les autres étaient restés à bord de camions, il y a

  3   des choses qui me semblent peu convaincantes. Vous savez, si à bord d'un

  4   camion il y a 100 hommes, ça fait 20 groupes de cinq hommes. Combien de

  5   temps faut-il ?

  6   R.  Ecoutez, Monsieur, ne me posez pas ce type de question. Moi, je vous

  7   dis que c'était alternatif. On tirait tout le temps. Je ne sais pas combien

  8   de temps ça a duré, peut-être la nuit entière. Je ne peux pas vous

  9   répondre. Moi, j'aurais honte de poser ce type de question quand on sait

 10   qu'il y a un millier de personnes d'allongées là-bas.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, je sais qu'il y a eu des victimes. Je ne sais pas

 12   si vous avez été parmi ces victimes. Il y a eu beaucoup de contradictions

 13   dans ce que vous avez dit, et si j'avais plus de temps, on aurait parlé des

 14   contradictions plus en détail.

 15   Vous nous avez dit que de loin vous avez vu un barrage, des soldats, un

 16   certain nombre de personnes lorsque vous vous êtes éloigné en direction

 17   d'une colline.

 18   R.  Oui, j'ai vu ça. Ce n'est pas une grosse distance, c'est 200 mètres

 19   seulement.

 20   Q.  Cependant --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, posez donc votre

 22   dernière question.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Dernière question. Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez, et est-ce

 25   que l'Accusation, en votre nom, a pu disposer des échanges de courrier avec

 26   la Hollande et un autre pays, qui avait pour objectif de sécuriser la

 27   prolongation de votre séjour, c'est-à-dire empêcher le rapatriement de

 28   vous-même et de votre famille assez nombreuse ? Est-ce qu'il y a eu des


Page 22697

  1   courriers de votre part et à l'initiative du bureau du Procureur à

  2   l'intention de deux pays, et dans l'un des deux, vous avez réussi à

  3   arranger la continuation de votre séjour pour vous-même et pour votre

  4   famille ?

  5   R.  Je ne sais pas. Il y en a peut-être eues, mais je ne peux pas

  6   confirmer.

  7   Q.  Mais avez-vous demandé vous-même ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les interprètes n'ont pas entendu votre

  9   réponse. Est-ce que vous pouvez répéter ?

 10   L'INTERPRÈTE : La cabine française précise qu'on entend très mal le témoin.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai peut-être demandé.

 12   L'INTERPRÈTE : Maintenant la cabine française n'a pas entendu ce que le

 13   témoin a dit.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Alors vous avez demandé et il y a eu des choses de faites à leur suite,

 16   à une initiative de leur part. Il y a eu une vingtaine de courriers ?

 17   R.  Je ne serais peut-être pas d'accord, mais je ne suis pas au courant.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, moi, je voudrais vous présenter

 19   tout ce recueil de courriers.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que M.

 22   Karadzic pourrait se pencher sur ces courriers. Il y a deux personnes qui

 23   portent le même nom mais avec des dates de naissance différentes, et je

 24   crois qu'il a fait une combinaison des deux pour totaliser une vingtaine de

 25   courriers.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est le bureau du Procureur qui m'a

 27   communiqué ces documents au sujet de l'arrivée de ce témoin. Je n'ai pas

 28   vérifié les dates de naissance, mais il est certain qu'une partie de ces


Page 22698

  1   lettres se rapporte à ce témoin-ci. Je demanderais aux Juges de la Chambre

  2   de m'autoriser à demander un versement au dossier une fois qu'on aura trié

  3   par date de naissance et par nom du père, comme ça au saura à qui les

  4   courriers se rapportent.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, puis-je demander un huis clos

  6   partiel.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.

  8   Et quelle est la référence 65 ter pour ceci, Monsieur Karadzic ?

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 10   [Audience à huis clos partiel]

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 22699

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3   [Audience publique]

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Puis-je tirer une chose au clair ? Est-ce que vous avez eu une jumelle

  6   -- enfin des jumelles quand vous avez regardé et compté les gens sur le

  7   barrage ?

  8   R.  Je m'excuse une fois, ça c'est une offense.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Un instant.

 10   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] Vous n'avez pas besoin de répondre,

 11   Monsieur le Témoin.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence --

 13   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] -- mais qu'on explique -- que je vous explique

 15   seulement pourquoi.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il y a des questions à aborder au

 17   sujet de ce témoin et qui sont restées en suspens ou en souffrance c'est de

 18   votre faute, Monsieur Karadzic. Vous êtes interrompu dans votre contre-

 19   interrogatoire.

 20   Monsieur Mitchell, est-ce que vous avez des questions complémentaires ?

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux expliquer pourquoi j'ai posé

 24   cette question ? Parce que M. Ruez, en sa qualité d'enquêteur, ne pouvait

 25   pas s'en jumelles --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pouvez faire des

 27   requêtes écrites ultérieurement.

 28   Monsieur, ceci met un terme à votre témoignage. Et au nom de cette Chambre


Page 22700

  1   et du Tribunal dans son ensemble, je tiens à vous remercier d'être venu à

  2   La Haye, une fois de plus, pour fournir votre témoignage. Vous êtes libre

  3   de vous en aller.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander à ce que ce document de la

  6   Sûreté de l'Etat au sujet des personnes arrivant à Tuzla une fois que

  7   j'aurais retrouvé le document ?

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Nous allons lever l'audience

  9   en somme, parce que c'est l'heure de la pause de toute façon.

 10   LE GREFFIER : [interprétation] Levez-vous, je vous prie.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel document de la Sûreté de l'Etat

 12   venez-vous d'évoquer, Monsieur Karadzic ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] La Sûreté de l'Etat de Tuzla a informé suite à

 14   arrivée de la colonne, une fois que celle-ci a opéré une percée, a informé

 15   de l'arrivée de 10 000 soldats, et je voulais que ce document soit versé au

 16   dossier.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez avoir une autre occasion de

 18   verser ceci au dossier.

 19   Nous allons faire une pause d'une heure maintenant et nous allons reprendre

 20   à 2 heures et quart.

 21   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 13 heures 11.

 22   [Le témoin se retire]

 23   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 24   --- L'audience est reprise à 14 heures 18.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je demande au témoin de bien vouloir

 26   prononcer la déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 28   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.


Page 22701

  1   LE TÉMOIN : JOHN CHALMERS CLARK [Assermenté]

  2   [Le témoin répond par l'interprète]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur.

  4   Oui, Monsieur Mitchell. C'est à vous.

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Interrogatoire principal par M. Mitchell :

  7   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur le Professeur.

  8   R.  Bonjour à vous.

  9   Q.  Veuillez donner vos nom et prénom, s'il vous plaît.

 10   R.  John Clark.

 11   Q.  Avant de commencer, veuillez nous parler en quelques mots de ces

 12   documents que vous avez sous les yeux.

 13   R.  Il s'agit de rapports que j'ai préparés dans le cadre de mes travaux en

 14   Bosnie et en Croatie. Je peux en énumérer la liste, si vous le souhaitez.

 15   Ils ont trait aux fosses de Srebrenica, Ivan Polje, Vlasenica, et --

 16   L'INTERPRÈTE : un troisième, inaudible.

 17   M. MITCHELL : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur le Professeur, quel est le métier que vous exercez

 19   actuellement ?

 20   R.  Je suis un pathologiste légiste et je travaille à l'Université de

 21   Glasgow, en Ecosse. Cela fait 25 ans que je suis pathologiste légiste.

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Puis-je avoir le numéro 65 ter 11139 dans le

 23   prétoire électronique, s'il vous plaît.

 24   Q.  Monsieur le Professeur, hier, vous avez remis au bureau du Procureur

 25   une version mise à jour de votre curriculum vitae. Pourriez-vous confirmer

 26   qu'il s'agit bien de votre curriculum vitae mis à jour que vous avez sous

 27   les yeux ?

 28   R.  Oui.


Page 22702

  1   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

  2   versement au dossier de ce curriculum vitae, s'il vous plaît.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le P41 [comme interprété],

  5   Madame, Messieurs les Juges.

  6   M. MITCHELL : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur le Professeur, vous étiez le pathologiste légiste en chef du

  8   bureau du Procureur en 1999 et l'an 2000 et 2001; est-ce exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Pourriez-vous, en quelques mots, nous décrire le rôle que vous joué en

 11   tant que pathologiste en chef ?

 12   R.  J'étais la personne qui était responsable, en réalité, de la morgue, et

 13   j'analysais les restes humains qui avaient été exhumés des fosses communes.

 14   En cette qualité-là, je m'occupais plus particulièrement avec d'autres

 15   pathologistes, et également, je dirigeais les autres personnes qui

 16   travaillaient dans la morgue. J'ai dû recruter les différentes équipes, et

 17   j'avais une autre casquette également parce que j'ai dû mener un certain

 18   nombre d'autopsies moi-même, mais à la fin de ces travaux, je devais

 19   rassembler tous les rapports individuels qui avaient été préparés. Tel

 20   était mon rôle, et je devais en faire une compilation pour que les rapports

 21   qui soient remis soient des documents qui aient un sens pour les tribunaux,

 22   tels que les documents que j'ai ici sous les yeux.

 23   Q.  Alors, je souhaite vous poser des questions à propos de six de ces

 24   rapports que vous avez rédigés. Il y a trois rapports que vous avez rédigés

 25   sur l'analyse des restes humains à Srebrenica; est-ce exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous avez également écrit des rapports de pathologiste légiste sur

 28   Vlasenica, Ivan Polje, et --


Page 22703

  1   L'INTERPRÈTE : Troisième nom inaudible.

  2   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Je souhaite, Monsieur le Président, demander

  4   le versement au dossier de ces trois rapports à ce stade de la procédure.

  5   Le rapport de Vlasenica, qui est le numéro 65 ter 11138, devrait être versé

  6   sous pli scellé, car il existe une version expurgée qui comporte le numéro

  7   65 ter 11138A qui peut être versée au dossier et de façon publique. La

  8   raison en est, c'est que la version non expurgée fait état d'un témoin qui

  9   a bénéficié de mesures de protection dans le cadre de cette affaire et qui

 10   parle de son témoignage dans les détails. Donc il serait très facile de

 11   faire le lien entre ce qui est dit dans le rapport du Dr Clark et la

 12   déposition de ce témoin.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections ?

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Non, pas d'objection, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Afin de donner la cote qui correspond,

 16   dans quel ordre souhaitez-vous verser au dossier ce rapport ?

 17   M. MITCHELL : [interprétation] Le premier est le rapport de 1999 de

 18   Srebrenica, qui est le numéro 65 ter 2407.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Procédons pas à pas. Donc, ceci sera

 20   versé sous la cote … ?

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce 4103, Madame, Messieurs les Juges.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 23   M. MITCHELL : [interprétation] Ensuite, le rapport du Dr Clark de l'an

 24   2000, numéro 65 ter 2430.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la pièce P4104.

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Le rapport de Srebrenica, daté de 2001, du

 27   Dr Clark, qui est le numéro 65 ter 03445.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la cote P4105.


Page 22704

  1   M. MITCHELL : [interprétation] La grotte de Paklenik et Ivan Polje, numéro

  2   65 ter 11135.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pièce 4106.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] La grotte de Paklenik et Ivan Polje, rapport

  5   complémentaire, numéro 65 ter 11136.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pièce 4107.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] Et pour finir, le rapport de Vlasenica,

  8   11138, la version sous pli scellé --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La version confidentielle sera versée

 10   sous la cote P4108, et la version publique caviardée recevra la cote P4109.

 11   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française précise qu'il est

 12   extrêmement difficile d'entendre à la fois le témoin et le greffier

 13   d'audience.

 14   M. MITCHELL : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur le Professeur, vous souvenez-vous avoir témoigné au sujet de

 16   votre rapport sur Srebrenica de 1999 dans l'affaire Krstic les 30 et 31 mai

 17   de l'an 2000 ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Avez-vous eu l'occasion de revoir votre déposition ?

 20   R.  [aucune interprétation]

 21   Q.  Confirmez-vous que ceci est le reflet exact de votre déposition ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et si on devait vous poser les mêmes questions aujourd'hui, vos

 24   réponses seraient-elles analogues ?

 25   R.  Oui.

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Je souhaite maintenant demander le versement

 27   au dossier de la déposition du Dr Clark dans l'affaire Krstic, numéro 65

 28   ter 03223.


Page 22705

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas d'objection, Maître Robinson ?

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  4   Ceci sera versé au dossier.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4110, Madame, Messieurs

  6   les Juges.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Il existe 23 pièces connexes, numéro 65 ter

  9   03224 --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai noté ça. Y a-t-il des objections,

 11   Maître Robinson ?

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ils seront donc tous versés au dossier.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Je souhaite maintenant lire un résumé de la déclaration de Dr Clark.

 16   En 1999, le Pr Clark a dirigé l'équipe chargée d'analyser les restes

 17   humains examinés à Srebrenica et les fosses communes de Srebrenica à

 18   Kozluk, Nova Kasaba, Konjevic Polje et Glogova. Il décrit la procédure

 19   appliquée à la morgue et explique comment son équipe s'est occupée des

 20   quatre questions suivantes qui ont fait l'objet de leurs analyses. Il

 21   s'agissait de savoir si les lésions au niveau des restes humains s'étaient

 22   produites avant ou après la mort. Le Pr Clark a dit dans sa déposition que

 23   les lésions avaient été provoquées par des blessures par balle, et, en

 24   général, s'étaient produites au moment où les personnes étaient en vie, et

 25   avait constaté un nombre très important de blessures par balle, et on ne

 26   pouvait pas croire que ces personnes étaient décédées dans des conditions

 27   indéterminées et obscures et avaient été systématiquement tuées -- avaient

 28   fait l'objet de tirs tout de suite après la mort.


Page 22706

  1   La deuxième question posée, c'est l'attente qu'il y avait eu égard à

  2   ces corps, parce qu'il y avait des lésions constatées au niveau de

  3   l'autopsie parce que les corps avaient été empilés les uns sur les autres

  4   et compactés dans des fosses. Le Pr Clark a dit dans sa déposition que ceci

  5   était dû à des blessures par écrasement, tel que des fractures au niveau

  6   des côtes et du bassin, qu'en général on pouvait interpréter ceci comme

  7   s'étant produit après la mort. Il a accepté la supposition que ceci aurait

  8   pu être dû à une force brute utilisée et ayant provoqué ces blessures avant

  9   la mort.

 10   La troisième question était de prouver que ces lésions au niveau des

 11   os étaient dues à une blessure par balle et non pas à autre chose. Les

 12   blessures par balle ont pu être prouvées, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une

 13   blessure d'entrée de la balle au niveau de l'os, qui est une organisation

 14   des fractures assez typique lorsqu'il y a des blessures par balle au niveau

 15   de l'os, lorsqu'une balle ou une partie de balle se trouve dans le corps.

 16   Le Dr Clark a témoigné que suite à cela, et en se reposant sur ces trois

 17   catégories, le nombre de blessures par balle a sans doute été sous-estimé.

 18   Le troisième [comme interprété] point porte sur la détermination de la

 19   cause du décès au niveau des restes squelettonisés. Par exemple, il y a eu

 20   des preuves que les blessures par balle au niveau de la tête ou de la

 21   poitrine, le Dr Clark a témoigné qu'il était raisonnable d'en déduire que

 22   les blessures par balle étaient la cause du décès. Cependant, lorsqu'il n'y

 23   avait qu'une trace de blessure par balle au niveau du bras ou de la jambe,

 24   une telle blessure n'était pas forcément fatale et n'aurait pas pu

 25   provoquer la mort, et donc ceci reste indéterminé.

 26   Le Dr Clark a ensuite résumé les conclusions de son équipe pour

 27   l'année 1999 comme suit : pour ce qui est du site de Kozluk, 292 corps et

 28   233 parties de corps ont été examinés. Il s'agissait uniquement d'un nombre


Page 22707

  1   important de corps comportant des infirmités ou des traces de maladie

  2   chronique. Des bandeaux ont été associés à 44 corps, des ligatures à 140

  3   corps. Des blessures par balle nettes présentent sur 89 % de ces corps.

  4   Pour ce qui est du site de Nova Kasaba, 55 corps et deux parties de

  5   corps ont été examinés. Les victimes étaient tous des hommes et la plupart

  6   ont fait l'objet de blessures par balle dans 87 % des cas. Pour ce qui est

  7   du site de Konjevic Polje, 12 corps ont été examinés. Un corps était une

  8   femme et les autres semblaient être des hommes. Tous ont présenté des

  9   traces de blessure par balle. Sur le site de Glogova, fausses secondaires 2

 10   à 6, 90 corps et 154 parties de corps ont été examinés. Ils étaient tous

 11   des hommes et ils ont tous fait l'objet de tirs. Egalement des preuves

 12   indiquant qu'il y avait au moins une personne qui est décédée en raison

 13   d'un objet pointu qui avait traversé son crâne.

 14   Et pour finir, le Dr Clark a déclaré que la possibilité existait que

 15   l'on ne pouvait pas exclure le fait que ces corps n'ont pas été victimes au

 16   combat. Il a remarqué la présence de ligatures, de bandeaux, et le fait que

 17   certains corps comportaient des infirmités, et les structures des blessures

 18   par balle au niveau du dos et des tirs uniques au niveau de la tête,

 19   l'absence d'un nombre important de personnes blessées, ce, à quoi on serait

 20   en droit de s'attendre lorsqu'il y a ces personnes sont décédées au combat.

 21   En réalité, la plupart des blessures qui ont été observées étaient dues à

 22   des blessures par balle, et étudiées de plus près ont montré que la plupart

 23   des blessures au niveau des combats avaient été provoquées par des éclats

 24   d'obus et autres projectiles.

 25   Q.  Professeur Clark, j'ai quelques questions supplémentaires à vous poser.

 26   Dans l'affaire Krstic, vous avez témoigné dans le détail, vous avez parlé

 27   des procédures appliquées à la morgue en 1999.

 28   R.  Oui.


Page 22708

  1   Q.  Et quelques-unes de ces procédures appliquées à la morgue sont

  2   également utilisées en 2000 et 2001 ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Vous avez parlé de quatre questions où de limites de ces preuves

  5   fournies par le pathologiste en 1999. Encore, il y a des limites à cela en

  6   2000 et 2001, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, nous les avons appliquées pour ce qui est de ces deux dates.

  8   Q.  Vous avez observé qu'il y avait des corps que vous avez examinés en

  9   1999 et qu'il s'agissait de personnes mortes au combat, n'est-ce pas ? Est-

 10   ce que ces observations s'appliquent aux corps que vous avez examinés en

 11   2000 et 2001 ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Maintenant, un certain nombre de questions précises à propos des

 14   blessures que vous avez observées au niveau des corps. Dans votre

 15   déposition dans l'affaire Krstic, vous avez parlé de trois différentes

 16   catégories de blessures par balle. Donc la blessure par balle est tout à

 17   fait nette, ou un orifice peut être vu, et ceci est dû à la balle en

 18   question, et à une organisation des fractures, ou la présence d'une balle

 19   ou d'une partie de balle. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre

 20   comment une blessure par éclat d'obus est différente de ces trois

 21   catégories qui viennent d'être énumérées plus haut, à savoir les blessures

 22   par balle, en particulier lorsqu'il y a une blessure par balle et que ceci

 23   a été constaté en raison d'une structure de fracture qui peut être observée

 24   au niveau de l'os.

 25   R.  Oui. Une blessure par balle est une balle à très grande vélocité qui

 26   traverse l'os et qui creuse un trou, qui brise l'os tout autour, et dans un

 27   bon nombre de cas, c'est ce que nous avons pu constaté. Des éclats d'obus

 28   ont tendance à provoquer beaucoup plus de lésons irrégulières au niveau de


Page 22709

  1   l'os, et peut-être sur une zone plus grande parce qu'au niveau de la jambe

  2   inférieure ou peut-être au niveau du bassin. Ces blessures sont beaucoup

  3   plus régulières. Nous avons également fondé nos constatations sur ce que

  4   nous avons trouvé et les fragments de balle -- pas seulement des fragments

  5   de balle mais des fragments d'éclats d'obus. Donc dans bon nombre de cas

  6   nous avons constaté qu'il y avait des éclats d'obus et nous avons trouvé

  7   que ceci avait provoqué des lésions très irrégulières au niveau de l'os et

  8   nous avons interprété cela en indiquant qu'il s'agissait de lésions dues à

  9   des éclats d'obus.

 10   Q.  Et pour ce qui est des sites en particulier que vous avez pu observer

 11   au niveau de ces lésions provoquées par des éclats d'obus au niveau des

 12   corps ?

 13   R.  Vous voulez parler des fosses communes ?

 14   Q.  Oui.

 15   R.  Alors n'avons examiné que Glogova, les sites de Glogova, Zeleni Jadar,

 16   et nous avons constaté qu'il y avait des éclats d'obus au niveau de la

 17   grotte de Paklenik.

 18   Q.  Et Zeleni Jadar numéro 6 ?

 19   R.  Oui. Mais dans aucun des autres sites, Kozluk, Ravnice, Lazete, nous

 20   n'avons pas constaté qu'il y avait présence d'éclat d'obus.

 21   Q.  Ma deuxième question porte maintenant sur ce que vous avez écrit en

 22   l'an 2000 et le rapport sur Srebrenica. Je n'ai pas besoin d'en parler

 23   maintenant, mais à la page 1 206 de votre rapport, vous avez parlé de

 24   l'effet dévastateur provoqué par une cavitation. Pourriez-vous expliquer

 25   cela ?

 26   R.  Ecoutez, en général cela provoque un trou au niveau des tissus, c'est-

 27   à-dire l'orifice que cela provoque lorsqu'il y a cavitation, c'est

 28   simplement au niveau physique. La balle traverse le cœur ou le cerveau et


Page 22710

  1   provoque des lésions sur sa trajectoire. Lorsqu'il y a les armes à très

  2   haute vélocité, ces armes circulent ou voyagent avec une très grande

  3   vitesse, et lorsqu'elles atteignent quelque chose au niveau du corps, ces

  4   armes ralentissent et l'énergie est transférée au tissu et à l'os. Et non

  5   seulement vous avez l'orifice, le trou physique, mais vous avez cette

  6   grande quantité d'énergie qui touche les tissus, qui atteint les tissus, et

  7   qui provoque la rupture des tissus. Et ceci s'appelle la cavitation.

  8   Q.  Et ceci endommage les os ainsi que --

  9   R.  Oui, ceci endommage les os ainsi que les autres tissus.

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Vous pouvez

 12   maintenant poursuivre.

 13   M. MITCHELL : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Professeur, je souhaite simplement vous poser quelques

 15   questions au sujet de vos conclusions à propos de la grotte Paklenik.

 16   M. MITCHELL : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage du rapport

 17   numéro 65 ter 11135, s'il vous plaît. Je crois que c'était le P4106. Est-ce

 18   que nous pouvons regarder, s'il vous plaît, la page 11, à la fois en

 19   anglais et en B/C/S, me semble-t-il. Le passage en B/C/S qui évoque "La

 20   cause du décès --"

 21   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 22   M. MITCHELL : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur le Professeur, pourriez-vous, en quelques mots, nous expliquer

 24   vos conclusions pour ce qui est de la cause du décès de ces 73 hommes que

 25   vous avez examinés sur ce site.

 26   R.  La cause du décès est indiquée ici. Le nombre le plus important

 27   correspond au chiffre de 27, dû aux blessures par balle au niveau du tronc.

 28   Et ensuite, les 19 blessures par balle au niveau de la tête. Ensuite,


Page 22711

  1   blessures par balle retrouvées sur plusieurs endroits du corps au nombre de

  2   six. Ensuite, au niveau des membres du corps au nombre de deux. Et ensuite,

  3   blessures au niveau de la tête, soit blessures par balle, qu'il était

  4   difficile de prouver, ou, en fait, dues à de la force brute. Et 15

  5   indéterminées, nous n'avons pas pu déterminé la cause du décès.

  6   Q.  Très bien. Alors, est-ce que nous pouvons maintenant afficher 4107,

  7   votre rapport complémentaire qui correspond au site de la grotte de

  8   Paklenik.

  9   L'INTERPRÈTE : Paklenica [phon], précision de l'interprète.

 10   M. MITCHELL : [interprétation]

 11   -- numéro 65 ter, 11136.

 12    Monsieur le Professeur, pourriez-vous nous expliquer à quoi correspond ce

 13   rapport complémentaire et de quelle façon ceci est lié aux conclusions sur

 14   les causes du décès dans votre rapport sur la cave de Paklenik ?

 15   R.  Dans la morgue, voici les éléments de contexte. Nous traitions des

 16   corps entiers, mais il y avait également un nombre important de parties de

 17   corps, petites parties de corps. Nous avons examiné tous ces éléments les

 18   uns après les autres, mais nous ne disposions pas des installations

 19   nécessaires ni du temps, ni de la place nécessaire pour essayer de faire

 20   correspondre des parties de corps à des parties de corps plus importantes.

 21   Donc parfois à un corps, il manquait une tête, et dans un autre endroit, il

 22   y avait un crâne, mais nous n'avions pas les installations nécessaires pour

 23   nous permettre de faire correspondre ces éléments, et les causes du décès

 24   ont été déterminées sur cette base-là.

 25   Après nos travaux, les corps ont été remis à la commission de Bosnie sur

 26   les personnes portées disparues dont les principaux travaux consistaient à

 27   identifier les corps dans la mesure du possible. Ensuite, ils pouvaient y

 28   consacrer un certain temps et examiner les restes humains, tel était leur


Page 22712

  1   rôle, et ils ont ensuite pu affirmer que ce crâne pris isolément, d'après

  2   nous, correspond aux restes humains de ce corps-là, et correspond à cette

  3   jambe-là.

  4   Ceci a été porté à mon attention. J'ai examiné tous ces éléments, les

  5   uns après les autres, et j'ai passé ceci en revue avec eux, et nous nous

  6   sommes mis d'accord sur ces liens qui avaient été établis.

  7   Q.  Est-ce que je peux vous arrêter quelques instants.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Je souhaite maintenant passer à la

  9   deuxième page de ce rapport, s'il vous plaît.

 10   Q.  Ensuite, Monsieur le Professeur, est-ce que vous pourriez

 11   continuer à nous expliquer cela en faisant référence à un tableau qui

 12   figure à la deuxième page de ce rapport ?

 13   R.  Donc, après avoir pu associer un crâne avec le reste du corps, et

 14   quelquefois le reste du corps lorsque nous l'avions observé pour la

 15   première fois ne comportait aucune trace de blessure par balle, et nous

 16   avions donc estimé que la cause du décès était indéterminée. Maintenant,

 17   que nous avons le crâne qui a été associé à ce corps, et ce crâne qui

 18   comporte une blessure par balle, à ce moment-là, nous avons pu établir que

 19   la personne a été décédée suite à une blessure par balle. C'est ce que j'ai

 20   consigné dans mon tableau, et c'est ainsi que nous avons établi la

 21   concordance entre ces éléments.

 22   Q.  Qu'en est-il de la première partie de corps, ici que nous avons PK/020B

 23   ? S'agit-il ici d'un cas isolé différent ?

 24   R.  Oui, j'allais y venir. Effectivement, c'est quelque chose que j'ai fait

 25   moi-même, lorsque j'ai passé en revue les différents cas, lorsque ceci

 26   devait être consigné dans mon rapport bien après les travaux effectués à la

 27   morgue. Je suis tombé sur ce cas-ci en particulier qui avait été examiné

 28   par un autre pathologiste. C'est lui qui avait établi que la cause du décès


Page 22713

  1   était indéterminée. Je me suis penché sur les premiers éléments de preuve,

  2   sa première description qui figurait dans le rapport, et en réalité, il

  3   décrit un orifice du par une blessure par balle au niveau des cotes, et par

  4   moi-même, j'ai déclaré que c'était cela la cause du décès. C'est dans ce

  5   seul cas-là que j'ai agi ainsi, parce que j'ai estimé que c'était justifié,

  6   parce qu'il avait parlé de cet orifice au niveau de la poitrine, mais pour

  7   une raison que j'ignore, il avait décidé que la cause du décès était

  8   indéterminée. Je ne sais pas exactement pourquoi, mais ceci fait référence

  9   à cela.

 10   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. Je n'ai pas d'autres questions à vous

 11   poser à ce stade.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Mitchell.

 13   Monsieur Karadzic, à vous.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence.

 15   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur. Tout d'abord, je tiens à vous dire

 17   toute ma reconnaissance pour ce qui est d'avoir voulu aimablement

 18   rencontrer les représentants de la Défense. J'espère que ceci va nous aider

 19   pour ce qui est de faire en sorte que le contre-interrogatoire se fasse

 20   sans heurt et de façon agréable. Merci encore.

 21   Alors je voudrais que nous confirmions le plus rapidement possible et le

 22   plus brièvement possible, ce qui a fait l'objet d'un accord et d'un

 23   consentement à l'occasion de notre récolement. Je fais référence à votre

 24   rapport de 1999, les fosses communes de Srebrenica. En page 3, il est

 25   question de la limitation, des limites imposées pour ce qui est des

 26   éléments de preuve en matière médico-légale. Alors vous nous dites, du

 27   point de vue du médecin pathologiste, la finalité principale d'une autopsie

 28   c'était d'examiner les corps pour déterminer les lésions éventuelles et là


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  1   où cela est possible, constater la cause du décès. Puis vous parlez du

  2   temps qui s'est écoulé, que le corps a passé sous terre, et cetera.

  3   Alors est-ce que nous sommes d'accord pour dire qu'un médecin légiste, un

  4   pathologiste, en sus de ce qui est dit dans la première phrase, ne pouvait

  5   pas déterminer avec certitude la façon dont quelqu'un a été tué, le moment

  6   où cette personne a été tuée, le moment de l'enterrement et le temps qui

  7   s'est passé entre le décès et l'enterrement, et aussi l'éloignement ou la

  8   distance à partir de laquelle un coup de feu est parti ?

  9   R.  Ça fait beaucoup de questions. Je pense que je pourrais répondre en

 10   résumant comme suit. Vous avez raison de dire que s'agissant des corps

 11   sortis d'une fosse commune, je ne pouvais pas être capable de dire si ces

 12   gens étaient morts il y a trois, quatre ou cinq ans. Tout ce que je

 13   pourrais faire, c'était de constater clairement que c'étaient des personnes

 14   qui étaient mortes depuis longtemps puisque les corps étaient déjà

 15   décomposés. Mais il était difficile d'être plus concret que cela, et il se

 16   peut qu'il y ait eu des corps retrouvés dans une fosse commune aient été

 17   des victimes de périodes différentes dans le temps. Ça aussi, c'est une

 18   possibilité. J'essaie de me rappeler les autres questions que vous avez

 19   posées, ah oui, la façon dont la mort est survenue. Ce n'est pas une phrase

 20   que j'utiliserais, il appartient aux tribunaux d'en décider. Moi, je

 21   détermine la cause du décès, je dis que c'est un décès par arme à feu,

 22   blessure à la tête ou autre chose. Alors la façon dont ceci s'est produit,

 23   c'est une chose dont doivent juger les autres. Nous parlons de la cause du

 24   décès, et on a parlé du moment de l'enfouissement, mais le dernier point

 25   que vous évoquez est quelque peu différent, mais je vais y répondre.

 26   La distance à partir de laquelle les coups de feu ont été tirés, ça, c'est

 27   une chose qu'il est très difficile de dire puisque enfin il est difficile

 28   de le constater partant d'un corps décomposé. Mais dans ces situations


Page 22715

  1   normales, où le cadavre est encore si je puis dire frais, nous pouvons

  2   déterminer la distance du point de tir, et ce, partant des traces de suit,

  3   de combustion au niveau du tissu cutané. Or, nous n'avons pas eu de tissu

  4   cutané, donc il est difficile de tissu cutané, donc il est difficile, il

  5   est impossible de dire si on a tiré de deux pas ou de 200 pas. Je crois

  6   avoir répondu à la plupart de vos questions.

  7   Q.  Merci, Docteur Clark. Donc ce que vous voulez nous dire, n'est-ce pas,

  8   c'est que sans les tissus cutanés, il n'est pas possible de déterminer la

  9   réaction vitale d'un organe ou d'un corps à une lésion pour constater si la

 10   lésion est portée avant le décès ou si cette lésion est portée après le

 11   décès, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, c'est tout à fait ça. Comme vous le savez vous-même, les traces

 13   d'une blessure sur un corps sont des renflements, des rougeurs, des

 14   hémorragies. Alors ça, ce sont des choses qui sont manifestes du vivant, et

 15   ça, on peut le voir sur le tissu cutané. Or, quand il n'y a pas de tissu

 16   cutané, toutes ces traces disparaissent. Donc, nous avons fondé nos examens

 17   sur les os. Or, il n'y a ni sang, ni œdème, ni traces autres, ce qui fait

 18   que nous n'avons pas l'avantage de la possibilité de se servir de tissu

 19   cutané pour parler de ce qui s'est passé avant ou après le décès. Mais je

 20   crois que nous avons déjà couvert le sujet.

 21   Q.  Merci. Hier, à l'occasion de notre récolement, vous avez constaté que

 22   vous avez disposé de certaines informations venant d'enquêteurs qui se sont

 23   occupé des cadavres avant que ces cadavres ne soient acheminés vers une

 24   morgue, et à ce moment-là, nous avons constaté que vous n'avez pas disposé

 25   d'informations suffisantes. Vous avez disposé de l'élémentaire. Aussi vous

 26   demanderai-je de nous dire si vous êtes d'accord pour dire que vous n'avez

 27   pas eu d'informations au sujet de combats qui ont duré pendant 44 mois et

 28   la possibilité qu'il y avait eu pour quelqu'un de se faire tuer au combat,


Page 22716

  1   ou la possibilité d'avoir été tué entre avril 1992 et juillet 1995. C'est

  2   bien cela ?

  3   R.  Je n'ai pas eu connaissance de ce fait concret. Vous avez raison de

  4   dire que nos informations ont été limitées. On nous a fourni des

  5   informations limitées pour ce qui est des corps dans des fosses communes,

  6   mais ça a un avantage aussi, parce que nous avons pu faire des

  7   constatations objectives sans avoir d'éléments biaisés pour ce qui est de

  8   penser qu'on devrait trouver telle chose ou telle autre chose. Dans une

  9   certaine mesure, c'est que l'on peut dire que c'était des corps retrouvés

 10   dans des fosses communes et qu'il y a une corrélation entre ces corps et

 11   les événements de Srebrenica. Mais nous avons reçu fort peu de détails

 12   autres. Alors, si on me dit : est-ce que ces corps peuvent être placés en

 13   corrélation avec le massacre de Srebrenica à une période de temps donnée,

 14   je pourrais dire oui. De façon identique, si on me posait la question de

 15   savoir si au moins certains de ces corps étaient datés d'incidents

 16   antérieurs pour être placés dans une fosse identique, je ne pourrais pas

 17   exclure non plus cette possibilité-là. Je pense avoir répondu à votre

 18   question.

 19   Mais je vais revenir à une chose. Vous avez précisé que les enquêteurs

 20   avaient vu ces corps avant que ces corps ne soient transférés vers la

 21   morgue. Or, je ne suis pas sûr du fait de savoir si c'est bien vrai. Les

 22   enquêteurs ont été sur le site de la fosse commune, mais je ne pense pas

 23   qu'il y ait eu y avoir un examen détaillé de ces cadavres de leur part.

 24   Q.  Tout à fait. Je suis d'accord avec vous sur ce point. Mais ils ont vu

 25   la disposition des corps, ils ont vu la fosse commune, le charnier, ils ont

 26   procédé à des activités d'investigation qui ont précédé à ce que vous avez

 27   fait en votre qualité de pathologiste dans la morgue, n'est-ce pas ?

 28   R.  Excusez-moi. Est-ce que vous voulez dire -- enfin, exact, au sujet des


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  1   enquêteurs ou au sujet de la répartition des corps ? Est-ce que vous voulez

  2   dire -- vous voulez me demander comment les corps étaient disposés ? Non,

  3   je ne l'ai pas fait.

  4   Q.  Je n'ai peut-être pas été clair. Vous n'avez pas été présent à

  5   l'occasion des exhumations. C'est les enquêteurs qui se sont occupés de

  6   cela. Or, ils ont -- ils vous ont communiqué certains des éléments de cette

  7   nature, n'est-ce pas ?

  8   R.  A l'occasion, je me rendais au site d'exhumation moi-même pour y jeter

  9   un coup d'œil, mais je n'ai pas examiné le détail des cadavres sous les

 10   yeux, et à ce moment-là, les enquêteurs ne pouvaient me fournir aucune

 11   espèce d'information détaillée.

 12   Q.  Merci. Alors, si vous n'étiez pas informé, vous n'étiez pas informé de

 13   44 mois de combats antérieurement à cela. On est parti d'une supposition, à

 14   savoir que toutes ces victimes étaient placées en corrélation avec les

 15   événements de juillet 1995. Est-ce que c'est bien exact ?

 16   R.  Oui, je crois qu'il serait juste de le dire, en effet. Je n'ai pas reçu

 17   d'informations au sujet de combats qui auraient eu lieu avant l'incident en

 18   tant que tel.

 19   Q.  Merci. Vos hôtes ne vous ont pas non plus informé de nos obligations

 20   légales au sujet de ce que nous appelons assainissement du terrain après

 21   les combats. C'est, en anglais, "mopping up", nettoyage du terrain pour ce

 22   qui est de tous les restes de corps d'animaux ou d'êtres humains, et on

 23   enterre, bien sûr, à des sites différents, les uns et les autres. Mais

 24   personne ne vous a dit qu'il y avait eu obligation de le faire pendant

 25   toute la durée de la guerre ?

 26   R.  C'est exact. Je ne le savais pas.

 27   Q.  Merci. Personne ne vous a demandé d'essayer de faire une distinction au

 28   niveau des personnes tuées au fil des 44 mois avant juillet 1995 et celles


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  1   qui ont été tuées en juillet 1995, c'est bien cela ?

  2   R.  C'est exact, oui.

  3   Q.  De même, s'agissant des victimes qui ont péri en juillet 1995, on ne

  4   vous a pas demandé d'essayer de déterminer si différences il y avait au

  5   sujet des causes de la mort, était-ce des exécutions ou était-ce des

  6   personnes tuées au combat.

  7   R.  Cette question a déjà été posée à moi dans des tribunaux, et ceci se

  8   trouve être couvert dans mes témoignages antérieurs, pour ce qui est de

  9   savoir si éventuellement ces personnes pouvaient avoir été tuées au combat.

 10   Pour répondre brièvement, je dirai qu'il est possible que certaines de ces

 11   victimes aient péri dans une situation de combat si par combat, nous

 12   parlons de deux groupes d'hommes qui se battent les uns contre les autres,

 13   l'arme à la main. Cette éventualité est tout à fait possible.

 14   Q.  Merci. Les liens, les mains ligotées que vous avez constatées dans un

 15   certain nombre de cas, dans des charniers où il y avait eu des gens qui

 16   étaient attachés les uns aux autres, où il y avait les poignets ligotés, ça

 17   exclut le combat. Pour ce qui est du reste, on doit accepter la possibilité

 18   -- les possibilités, qui étaient celles donc de l'une des éventualités ou

 19   de l'autre, comme je l'ai dit. Contexte de combat.

 20   R.  Oui, ce sont là certains des facteurs. Il y a un certain nombre de

 21   facteurs qui contredisent l'idée du combat ou des victimes au combat, parce

 22   qu'il est difficile d'imaginer que les gens qui avaient eu les mains

 23   ligotées étaient des soldats en train de combattre. On a trouvé un certain

 24   nombre de personnes avec des bandeaux sur les yeux dans un certain nombre

 25   de charniers, notamment deux charniers concrets. Alors, ce sont là deux

 26   éléments qui contredisent l'éventualité d'une situation de combat. Il y en

 27   a eu d'autres. Si vous voulez, nous pouvons en parler.

 28   Q.  Merci. J'espère que nous aurons le temps d'y arriver.


Page 22719

  1   Mais pendant le récolement, je pense que vous avez été d'accord avec

  2   moi pour dire qu'il était difficile de comprendre pourquoi quelqu'un qui

  3   n'a pas les mains ligotées mais qui a un bandeau sur les yeux n'aurait pas

  4   enlevé le bandeau. Pourquoi supporterait-il, autrement, un bandeau sur ses

  5   yeux ?

  6   R.  Physiquement parlant, la chose aurait été possible si les mains

  7   n'étaient pas liées, donc enlever ce bandeau de ses yeux. Ils ont peut-être

  8   été exposés à d'autres contraintes pour les empêcher de le faire, bien

  9   entendu.

 10   Q.  Est-ce que vos hôtes vous avaient informé d'une coutume au niveau des

 11   combattants islamiques ? Ils portaient un bandeau en tissu autour de la

 12   tête pour montrer qu'ils étaient fidèles à leur foi et à leur dieu. On peut

 13   montrer un film. On l'a déjà montré ici, et c'est versé au dossier, c'est

 14   une pièce à conviction. Bon nombre de ces combattants portaient des

 15   bandeaux sur la tête au moment où ils ont péri.

 16   R.  Ceci ne m'a jamais été dit auparavant -- avant la journée d'hier, je

 17   veux dire. Il doit être dit, s'agissant de ces bandeaux sur les yeux -

 18   parce que je les appelle ainsi encore - la majorité des gens avaient ceci

 19   autour des yeux, et c'était remarquablement similaire d'une personne à

 20   l'autre pour ce qui est du tissu, de la façon dont c'était attaché et pour

 21   ce qui est de la taille des bandeaux. Dans un certain nombre de cas de

 22   figure, il y avait une trace de balle, un trou de balle, au niveau du

 23   bandeau qui était au-dessus des yeux -- enfin, sur les yeux. Donc cela

 24   voulait dire que ces personnes portaient le bandeau lorsqu'on leur a tiré

 25   dans la tête, et ce, dans le secteur des yeux.

 26   Q.  Si on m'a bien traduit les choses, est-ce que vous avez dit "dans un

 27   grand nombre" ou "dans un certain nombre" ? Parce que si j'ai gardé bon

 28   souvenir de vos constatations, des trous dans le tissu qui correspondraient


Page 22720

  1   à l'emplacement des yeux, ça s'est avéré être le cas dans un certain

  2   nombre, seulement, de cas de figure. Ce n'était pas si fréquent que cela.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vois que M. Mitchell est debout.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Avant que vous ne répondiez,

  5   Docteur Clark.

  6   Monsieur Mitchell.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] J'ai gardé le souvenir de cette vidéo. Je

  8   crois qu'on a montré la vidéo au Dr Lorens [phon], et ça n'a pas été versé

  9   au dossier parce que la question était posée de savoir quelle était

 10   l'origine de la vidéo. Je ne sais pas si M. Karadzic se trompe ou s'il

 11   souhaite montrer cette vidéo à ce témoin-ci, mais je voulais que les choses

 12   soient dites clairement.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 14   On va laisser le choix à l'accusé d'en décider.

 15   Alors, vous souvenez-vous de la question ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'allais répondre.

 17   Je n'arrive pas à me souvenir du nombre exact, mais je crois qu'il y a eu

 18   moins de dix ou 12 cas de figure de ce type, pour ce qui est donc d'avoir

 19   vu une balle être passée par le bandeau au niveau des yeux.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Merci. Il y a eu un certain nombre de dilemmes pour ce qui est des

 22   conclusions à adopter, dû au fait que les suppositions étaient plutôt

 23   restrictives. Les suppositions allaient dans le sens de dire que toutes les

 24   victimes étaient de juillet 1995, et ces suppositions ne font que rendre

 25   plus difficile l'adoption de conclusions pour ce qui est du degré de

 26   dégradation des corps ou de décomposition des corps et autres éléments. Ce

 27   qui a constitué problème pour ce qui était de faire concorder les

 28   différents éléments de preuve, s'agissant des pathologistes, bien sûr.


Page 22721

  1   R.  Oui, je serais d'accord avec vous pour dire qu'il y a eu une

  2   supposition générale de faite disant que la totalité des corps étaient

  3   placés en corrélation avec les mêmes incidents. Alors, si maintenant vous

  4   me posez la question - or, ça ne m'a jamais été avancé du tout auparavant -

  5   à savoir que certains corps pouvaient provenir d'autres incidents

  6   antérieurs à Srebrenica, je dirais que la chose est possible.

  7   Nous nous sommes basés sur le fait que différents corps dans un même

  8   charnier montraient différents degrés de décomposition. Nous l'avions placé

  9   en corrélation avec des facteurs locaux du charnier en tant que tel. Par

 10   exemple, certains corps étaient plus près d'une partie humide, d'autres

 11   étaient entassés ensemble dans la partie centrale. Et c'était ce type de

 12   questions que nous avions considérées comme étant partie constituante de

 13   l'explication. C'est peut-être vrai, mais ça peut également être le

 14   contraire. Je veux bien accepter qu'il y ait eu des personnes de placées

 15   dans ce charnier qui avaient été des victimes d'une période antérieure.

 16   Q.  Merci. Est-ce que les hôtes vous ont -- enfin, si les hôtes vous

 17   avaient informé des 44 mois de combats antérieurs à cela, peut-être les

 18   pathologistes auraient-ils eu plus de facilité pour ce qui est de trancher

 19   certains dilemmes, n'est-ce pas ?

 20   R.  Eh bien, je ne pense pas que la question aurait pu être tranchée.

 21   J'aurais maintenu ceci comme possibilité, mais cela n'aurait pas

 22   nécessairement été la bonne réponse.

 23   Q.  Merci. Nous avons été aussi d'accord, lors de notre récolement, sur le

 24   fait que vous n'aviez pas été informé des caractéristiques religieuses et

 25   culturelles pour ce qui est des enterrements. Par exemple, les Musulmans

 26   n'enterrent pas leurs morts dans un cercueil, mais ils l'enveloppent dans

 27   un tissu blanc, un drap blanc. S'il n'y a pas de drap blanc, on prend

 28   quelque chose, enfin autre chose, d'approprié.


Page 22722

  1   Or, dans certaines fosses communes, vous avez pu retrouver des corps

  2   enveloppés dans une espèce de drap; c'est bien cela ?

  3   R.  Il y a eu -- enfin, ce n'est pas exact. Parce que sur le site de

  4   Srebrenica, il n'y a pas eu un seul corps enveloppé dans des draps ou

  5   couvertures. Vous avez raison de dire qu'en 1999, nous avons trouvé des

  6   corps enveloppés dans des couvertures, mais ça venait de Prijedor. Ça

  7   n'avait rien à voir du tout avec le site de Srebrenica. Aucun des cadavres

  8   des sites liés à Srebrenica n'avait été enveloppé dans des draps ou quoi

  9   que ce soit de similaire.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, j'ai vu que vous vous

 11   êtes mis debout tout à l'heure. Vous vouliez une référence ?

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais les choses ont été tirées au clair

 14   ?

 15   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, en effet. Merci.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   Moi, ce qui m'a guidé, c'est une première notification, et j'ai

 19   préparé les 11 rapports présentés par le Dr Clark, chaque document qu'il a

 20   rédigé, ce qui fait que je me suis préparé aussi avec les rapports de

 21   Prijedor et de Sanski Most. Ça devient superflu maintenant. Je m'excuse de

 22   la confusion qui a pu se manifester. Mais nous sommes d'accord pour dire

 23   que cela avait fort bien pu être le cas là-bas, dans la Krajina.

 24   Alors, pour ce qui est de parler des changements post mortem sur les

 25   squelettes, les parties brisées, vous avez pris en considération le fait

 26   que bon nombre de ces lésions post mortem pouvaient provenir du fait du

 27   poids des autres corps, du fait du passage d'engins lourds, et cetera.

 28   Alors, si maintenant nous prenons en guise de possibilité les


Page 22723

  1   activités du complètement de certaines fosses à l'occasion des

  2   assainissements plutôt de la création de nouveaux charniers, est-ce que le

  3   fait d'ouvrir des charniers et de les compléter à l'occasion d'activités

  4   d'assainement [phon], cela a bien pu contribuer aux lésions survenues sur

  5   des ossements et squelettes de dates plus anciennes ?

  6   R.  Oui, cela pourrait être vrai car il y a un grand nombre de lésions qui

  7   ne sont pas causées par les armes à feu. C'étaient des lésions post mortem.

  8   Et c'est ainsi que nous avons interprété un certain nombre de fractures.

  9   Nous n'avons pas considéré que c'étaient des fractures survenues du vivant

 10   de ces personnes. Nous avons peut-être omis de constater certaines

 11   fractures d'origine, mais il était préférable d'éviter ce type d'erreur et

 12   d'attribuer ces lésions à du post mortem.

 13   Vous avez raison pour ce qui est de dire que la réouverture de

 14   certaines fosses communes a pu endommager les squelettes qui se trouvaient

 15   déjà ensevelis dans une fosse commune.

 16   Q.  Merci.

 17   Il me semble aussi que nous avons été d'accord tous les deux pour

 18   dire qu'un grand nombre de cas figurent. On n'a pas pu déterminer au-delà

 19   du doute raisonnable, du point de vue de la pathologie, j'entends, qu'il

 20   s'agissait d'exécutions ou pas; c'est bien vrai ?

 21   R.  Eh bien, ça dépend de ce que vous entendez par "exécution".

 22   Certaines personnes considèreraient par exécution le fait d'avoir

 23   abattu quelqu'un de très près, en tirant dans sa nuque ou dans sa tempe.

 24   C'est une interprétation du mot "exécution".

 25   Moi, ce que je dirais, c'est qu'un groupe de personnes, à une

 26   certaine distance, à plusieurs pas de distance, quand on leur tire dessus,

 27   ça peut également tomber sous la définition du mot "exécution". Il est

 28   certain que certaines constatations, ou bon nombre de constatations,


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  1   dirais-je, de cas de figure de cadavres retrouvés dans les charniers

  2   correspondent à ce type de situation. Nous avons trouvé bon nombre de

  3   cadavres où l'on a pu retrouver une blessure de balle dans la nuque. Cela

  4   laissait entendre qu'on leur a tiré dessus de très près.

  5   Mais comme je l'ai déjà indiqué, la situation où il y aurait un

  6   groupe de personnes qui ne serait pas libre et sur qui on tirerait depuis

  7   une distance déterminée peut expliquer un grand nombre de constatations,

  8   d'éléments identifiés sur un grand nombre de cadavres.

  9   Q.  Merci.

 10   Au ERN 2840091284 [phon], c'est un constat que vous avez établi en

 11   1999, quand vous parlez du fait d'avoir retrouvé un certain nombre de

 12   couches de vêtements - trois pantalons, deux ou trois vestons sur certains

 13   cadavres, pour ce qui était d'un cadavre - il y a eu plusieurs cas de

 14   figure dans certaines fosses où il y a eu des gens bien vêtus. Quand je dis

 15   "bien," c'est-à-dire avec plusieurs couches de vêtements. C'est bien vrai ?

 16   R.  C'est exact. Je ne me souviens pas du fait qu'il se serait agi d'un

 17   grand nombre, mais il y a certainement eu plusieurs cadavres où il y avait

 18   eu sur eux beaucoup de vêtements.

 19   Q.  Merci. Pour autant que vous vous en souveniez, le mois de juillet, et

 20   vous nous l'avez confirmé au récolement, le mois de juillet chez nous,

 21   c'est très chaud, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui. J'ai expliqué cela.

 23   Q.  Merci. Vos hôtes vous ont-ils informé de la coutume suivante, à savoir

 24   d'apposer un signe sur les soldats en guise de protection contre des tirs

 25   amis avec un bandeau autour du bras ou autour de la jambe ?

 26   R.  Non. Je n'étais pas au courant de cela.

 27   Q.  Dans quasiment toutes vos conclusions, en ce qui concerne certaines

 28   personnes, des papiers d'identité, des objets de valeur, des montres,


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  1   l'argent, des bijoux en argent, ont été retrouvés; alors que rien n'a été

  2   retrouvé sur les corps qui avaient les membres liés, par exemple. Est-ce

  3   que vous avez remarqué cette différence ?

  4   R.  Il est exact que nous avons découvert sur ces corps un certain nombre

  5   d'objets que vous venez d'énumérer. Pas dans tous les cas, et loin de là.

  6   Sur un certain nombre de personnes, nous n'avons trouvé aucun objet. Je

  7   pense que vous voulez parler des corps qui étaient ligotés dans un des

  8   sites de Glogova. Il y avait 12 hommes qui étaient ligotés ensemble et qui

  9   ne possédaient aucun objet de valeur sur eux ou sur elles. Ils ne

 10   possédaient donc rien. Certaines personnes avaient des objets de valeur sur

 11   elles, certaines personnes qui n'étaient pas dans cette fosse-là, et

 12   certaines personnes n'avaient rien du tout. Je ne sais pas comment

 13   interpréter cela. En d'autres termes, les personnes retrouvées dans la

 14   fosse, elle, de Glogova ne constituaient pas les seuls corps qui ne

 15   possédaient aucun objet de valeur.

 16   Q.  Merci. Monsieur le Professeur, nous disposons de beaucoup

 17   d'informations et nous avons entendu nombre de témoignages, surtout de

 18   victimes, à savoir qu'une personne qui avait été faite prisonnière

 19   disposerait de ses papiers d'identité -- ou, en tout cas, se serait fait

 20   enlever sa pièce d'identité et ses objets de valeur. En tout cas, c'est la

 21   coutume en temps de paix. Dans certains cas, des rasoirs, des briquets ont

 22   été retrouvés.

 23   R.  Ecoutez, je ne suis particulièrement au courant de cela, et je ne pense

 24   pas que je sois bien placé pour faire des commentaires sur ces sujets. Je

 25   ne suis pas au courant de cela, je ne savais pas que les objets de valeur

 26   avaient été retirés de ces personnes. Je suis prêt à le croire, si la

 27   question m'est posée. Je suis prêt à l'admettre.

 28   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète : Rasoirs, briquets et montres ont


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  1   été retrouvés.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Merci. Je souhaite maintenant aborder brièvement un autre sujet. La

  4   question que vous nous avez soumise, autrement dit, vous avez parlé de ces

  5   neuf ou de cette neuvième partie, onzième partie en tout cas qui avait

  6   trait au volume de ces corps. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la

  7   Chambre quelle partie de corps correspond a à 1/9 au niveau du corps humain

  8   ?

  9   R.  Ecoutez, je n'avais pas compris tout de suite le sens de votre

 10   question, mais je crois que j'ai compris maintenant. C'est quelque chose

 11   que nous avons abordé hier. Il s'agissait vraiment, en tout cas, c'est

 12   ainsi qu'on arrive à évaluer la taille d'une partie de corps, et c'est ce

 13   qui est communément appliqué lorsque les corps ont été calcinés. Pour

 14   estimer la partie du corps qui a été brûlée, cela s'appelle la règle des

 15   neuf, et divise le corps en onze, neuf pour cent. Et c'est ainsi que nous

 16   arrivons à ces chiffres. Alors la tête correspond à neuf pour cent, chaque

 17   bras correspond à neuf pour cent, le haut du tronc correspond à 2/9,

 18   l'arrière, 2/9, le dos, 2/9, et chaque jambe correspond à 2/9, et le total

 19   correspond à 99 pour cent. C'est des moyens qui permettent d'évaluer

 20   l'ampleur des lésions et des brûlures au niveau du corps, et de la surface

 21   du corps, et on peut constater ainsi qu'est-ce qui souffre le plus, le plus

 22   endommagé c'est le tronc, le cou, le bassin et ensuite ce sont les jambes

 23   qui sont le plus touchées.

 24   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. Ce n'est pas seulement sur des victimes,

 25   objet de brûlure, je suppose que l'on peut appliquer la même règle, et vous

 26   l'avez appliquée pour comprendre la répartition des blessures par balle sur

 27   le corps, à commencer par le corps, le tronc, les bras, les jambes et

 28   ensuite le côté d'où le tir a été constaté, côté sur lequel le tir a été


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  1   constaté.

  2   R.  Je crois que si on tire sur quelqu'un de façon aléatoire, dans ce cas,

  3   il y a une forte probabilité pour que la partie la plus vraisemblablement

  4   touchée soit le tronc, et ensuite les bras. Parce que encore une fois,

  5   c'est ce qui correspond à la grande partie, à cette grande partie du corps.

  6   Dans bon nombre de cas, et dans un très grand nombre de cas que nous avons

  7   observés, les blessures par balle étaient réparties de façon assez égale

  8   sur le corps, de cette manière-là, et dans certains sites cependant cela

  9   n'était pas le cas. Et la plupart des tirs avaient visé le tronc, il y en

 10   avait très peu de blessures par balles au niveau des jambes. Ce qui va à

 11   l'encontre d'une répartition aléatoire. Ça, c'est une de mes observations.

 12   Nous avons parlé de la provenance des tirs, il s'agit là de la position

 13   relative du tireur et de la victime. Même s'il est assez difficile au

 14   niveau de corps squelettique de constater cela, nous pouvons estimer que

 15   cela, parce que lorsqu'une balle traverse un os, le point d'entrée comporte

 16   une structure assez typique. Lorsque la balle ressort du corps de l'autre

 17   côté, le point de sortie est assez caractéristique. Et ceci peut être bien

 18   constaté de façon claire au niveau du crâne. Donc de façon générale et dans

 19   la majorité des cas, nous avons pu constater que si quelqu'un avait une

 20   blessure par balle au niveau de la tête, nous savions ou nous pouvions

 21   déterminer si cela venait de l'arrière, du côté ou du côté du front. Cela

 22   s'est avéré, cependant, plus difficile au niveau du tronc tout simplement

 23   en raison de la disposition des os au niveau du tronc, et il était

 24   également assez difficile de constater cela au niveau des membres du corps,

 25   des bras et des jambes. Au vu de tout cela, et avec ces restrictions, je

 26   dois dire que la plupart des tirs ou des blessures infligées à ces victimes

 27   étaient des blessures infligées par l'arrière au niveau de la tête. La

 28   plupart constituaient des blessures par balle ou des tirs qui avaient été


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  1   tirés dans le dos.

  2   Q.  Merci. Nous nous sommes mis d'accord hier pour dire que si une des

  3   parties s'enfuit, il est plus vraisemblable que la partie qui s'enfuit sera

  4   touchée dans le dos, n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Ce que vous venez de dire à propos de la hiérarchie des parties de

  7   corps, à Kozluk, vous avez retrouvé exactement la même chose, 23 pour cent

  8   au niveau des blessures au niveau de la tête, 37 au niveau du tronc, et

  9   ensuite 11 pour cent ont été touchés aux jambes, et cetera, le tronc, les

 10   jambes, la tête, les bras; est-ce que ceci correspond à des tirs aléatoires

 11   ? La répartition des blessures au niveau des corps correspond-elle à des

 12   tirs aléatoires ?

 13   R.  Oui, certainement. La tête est sans doute surreprésentée. Mais au

 14   niveau du tronc et des jambes, en général, ceci correspond à des tirs

 15   aléatoires.

 16   Q.  Merci. Ici, dans un des paragraphes, vous dites que vous avez été

 17   surpris de ce que vous avez vu au niveau des jambes, que davantage de

 18   victimes comportaient des traces, des blessures au niveau des jambes par

 19   opposition à la tête; 27 % par rapport à 23; c'est exact ? Deuxième

 20   paragraphe juste en dessous du tableau.

 21   R.  Oui, oui.

 22   Q.  Merci. La provenance de la balle est plus facile à déterminée lorsque

 23   vous êtes en présence d'une blessure par balle au niveau de la tête, n'est-

 24   ce pas, par opposition à d'autres parties du corps ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Est-il possible de déterminer la distance à partir de laquelle la balle

 27   a été tirée ?

 28   R.  Non, j'ai déjà expliqué cela, c'est quasiment impossible. Il nous est


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  1   impossible de déterminer si une balle a été tirée à bout portant ou si une

  2   balle a été tirée à 100 mètres.

  3   Q.  Merci. J'ai remarqué c'est quelque chose que nous avons évoqué hier, au

  4   cours de notre entretien, que vos pathologistes avaient du mal à expliquer

  5   pourquoi il y a un nombre très important de balles qui étaient encore

  6   logées dans un certain nombre de corps, alors que les armes en question

  7   disposaient de projectile à très grande villosité, et que les balles ont

  8   été tirées à bout portant et que ceci portait sur le mois de juillet, donc,

  9   il a été conclu que cette première balle avait traversé un premier corps,

 10   et ensuite un deuxième corps. Si la balle provenait de 300 mètres, pensez-

 11   vous qu'il une plus grande probabilité pour que la balle reste logée dans

 12   le corps par opposition à une distance moindre ?

 13   R.  Encore une fois, je crois qu'il y a différents commentaires que vous me

 14   soumettez-là, commentaires et questions. Ce que nous avons constaté sur un

 15   grand nombre de corps, c'était des balles fragmentées. C'est ce à quoi on

 16   s'attend lorsqu'une balle atteint le corps. Elle touche un os ou quelque

 17   chose, et donc, se fragmente, ce qui est une réaction tout à fait normale.

 18   Et nous avons effectivement constaté que ces fragments de balles étaient

 19   logés dans un nombre important de corps. Dans une proportion moindre,

 20   quelques fois, outre les fragments, nous avons retrouvé une balle entière

 21   intacte. En général, une balle à très grande vélocité, si elle ne frappe

 22   pas un os, va traverser le corps de part en part et sortir intacte. Donc,

 23   il était inhabituel de retrouver des balles tout à fait intactes sur

 24   certains de ces corps. L'explication pourrait être la suivante, à savoir

 25   que les tirs provenaient d'une certaine distance, et c'est la raison pour

 26   laquelle la balle, dans sa trajectoire, a perdu de son énergie, et donc,

 27   lorsqu'elle a atteint le corps, n'avait plus la possibilité d'aller plus

 28   loin. C'est pour ça que nous avons évoqué la possibilité d'une centaine de


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  1   mètres. L'autre possibilité, c'est que la balle a été tirée de plus près

  2   mais avant d'entrer dans le corps de cette victime-là, elle avait perdu

  3   beaucoup de son énergie et elle est restée logée dans le corps, tout

  4   simplement. Peut-être parce que cela avait été tiré, avait traversé le

  5   corps d'une autre peut-être, peut-être avait atteint les tissus mous d'une

  6   autre personne et perdu une partie de son énergie et n'a pas pu aller plus

  7   loin. Donc, il est difficile d'établir ce lien et de comprendre pourquoi

  8   ceci serait passé -- la balle n'aurait pas nécessairement traversé un autre

  9   corps mais aurait traversé d'autres tissus et perdu une partie de son

 10   énergie avant de pénétrer cet autre corps, tout simplement. Parce qu'une

 11   balle a été retrouvée au niveau d'un corps ne signifie pas automatiquement

 12   que cette balle était toujours associée à ce corps-là, parce que dans une

 13   fosse, les corps peuvent être déplacés et une balle peut tomber d'un corps

 14   à l'autre, et c'est une possibilité. Ceci ne s'est pas produit dans un

 15   grand nombre de cas, sans aucun doute, mais c'est une possibilité. Et je ne

 16   sais -- je n'ai pas l'explication complète à vous fournir. Je ne sais pas

 17   pourquoi nous avons retrouvé des balles intactes au niveau de certains

 18   corps ou sur certains corps et s'il y a des explications que nous pouvons

 19   fournir à ce propos.

 20   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. Alors, si nous nous penchons sur ce

 21   passage de votre rapport et Kozluk et la répartition au niveau des corps

 22   qui correspond au tir aléatoire de nombreux tirs constatés au niveau des

 23   jambes, dans la plupart des cas au niveau des troncs, et le deuxième point

 24   d'impact sont les jambes ainsi que de nombreux cas où vous avez retrouvé

 25   des balles intactes dans les corps même si cette balle avait traversé un

 26   autre corps auparavant, ce qui conduirait à limiter leur vélocité. Est-ce

 27   que nous pouvons exclure totalement la possibilité -- le fait que des

 28   victimes aient été -- aient fait l'objet de tirs à une distance de plus de


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  1   300 mètres, ou est-ce que cette possibilité existe ?

  2   R.  Oui, je crois que cette possibilité existe. Je ne peux pas être trop

  3   précis au niveau de ces 300 mètres, mais hormis cela, bon, c'est en tout

  4   cas quelque chose qui est tout à fait envisageable.

  5   Q.  Merci. Dans un certain nombre de cas, vous avez constaté que les

  6   blessures retrouvées étaient des blessures antérieures au niveau de

  7   fractures qui étaient très anciennes et qui étaient complètement

  8   cicatrisées, et également des blessures qui avaient été traitées par une

  9   mobilisation, blessures qui correspondaient à quelques instants avant

 10   l'heure du décès.

 11   R.  Alors, je vais prendre chaque élément de voter question pas à pas. Il

 12   est vrai qu'au niveau de certains corps, nous avons trouvé des traces de

 13   fractures anciennes de bras, de jambes cassées, un bon nombre d'années

 14   auparavant. Donc, ces fractures n'étaient plus et les os s'étaient remis.

 15   Donc, rien à voir avec cela. Pour ce qui est des blessures plus récentes,

 16   je ne me souviens que de deux cas où nous avons retrouvé des traces d'une

 17   blessure qui avait été entourée d'un bandage, blessure par balle au niveau

 18   des jambes. La jambe avait été brisée et un bandage avait été placé sur la

 19   jambe, ce qui indiquait que la blessure remontait à quelques jours avant le

 20   décès. Mais je crois qu'il n'y a eu que deux cas de ce genre, et je crois

 21   que cela concernait Nova Kasaba. Donc, ce n'était certainement pas une

 22   caractéristique commune que de retrouver des personnes comportant des

 23   traces de blessures récentes ou de blessures ayant cicatrisé ou comportant

 24   des bandages. Dans la grande majorité des cas, les victimes portaient des

 25   traces de tirs qui les avaient tués et pas d'indications ou de traces de

 26   blessures ayant précédé leur mort de quelques jours.

 27   Q.  Merci. Dans ces deux cas, nous devons donc conclure que les victimes

 28   avaient été soumises à des tirs pendant un certain temps avant leur mort et


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  1   que dans l'intervalle, quelqu'un les avait soignées.

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Est-ce que le nombre de ces fractures anciennes -- était-ce inhabituel

  4   pour ce type de population ?

  5   R.  Sans doute que non. Je pense que si vous analysez n'importe quelle

  6   population, en tenant compte de différentes tranches d'âge, vous

  7   constaterez qu'il y a un certain nombre de personnes qui ont des blessures

  8   anciennes. Je ne pense pas qu'il s'agissait là de cas particuliers. Nous

  9   parlons de blessures très anciennes, de fractures anciennes.

 10   Q.  Est-ce qu'une fracture qui remonte à deux ou trois ans peut être

 11   considérée comme une fracture ancienne ?

 12   R.  Oui. Toute fracture ancienne, lorsque les deux bouts de l'os se sont

 13   remis et que la personne peut se remettre à marcher, à ce moment-là,

 14   j'estime que la personne est remise sur pied et que tout est normal.

 15   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que le qualuste [comme

 16   interprété], qui est la masse osseuse qui peut être réparée, n'a pas une

 17   apparence distincte et ne permet pas de déterminer si oui ou non l'os a été

 18   fracturé dû à une explosion, à un projectile, ou d'une autre manière ?

 19   R.  Le qualuste représente en fait le processus de guérison, de réparation

 20   d'un os. Lorsqu'il y a une fracture d'un os du vivant d'une personne il y a

 21   les cellules, il y a les fluides, il y a les tissus qui se reconstruisent

 22   autour les jours suivants et les semaines suivantes et progressivement ces

 23   tissus deviennent plus durs et reforment de nouveaux os c'est ce qu'on

 24   appelle le calus, et ensuite ceci disparaît et tout ce qui reste c'est un

 25   os qui comporte peut-être un petit angle sur le côté qui est le signe d'une

 26   ancienne fracture. Et donc voilà ce que veut dire qualuste. C'est cette

 27   cicatrisation, cette réparation. Lorsqu'il y a une -- nous sommes en

 28   présence d'une fracture ancienne il est difficile de savoir quelle en a été


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  1   la cause, un accident de la route, une chute ou autre chose. Il serait très

  2   difficile de déterminer cela.

  3   Q.  Mais une ancienne blessure de guerre ne peut pas être exclu non plus,

  4   par exemple, une blessure qui remonte à deux ou trois ans sans les tissus

  5   mous il est très difficile d'exclure cette éventualité-là ?

  6   R.  Lorsqu'il s'agit d'une blessure de guerre, une blessure par balle dans

  7   ce cas la fracture sera sans doute beaucoup plus irrégulière parce que l'os

  8   aurait été plus fortement endommagé. Il serait encore difficile de faire la

  9   distinction entre une mauvaise fracture lors d'un accident de la route ou

 10   lors d'un autre type d'accident. Donc il se peut que les anciennes

 11   fractures assez importantes auraient pu correspondre à des blessures de

 12   guerre mais cela n'était pas très courant ou n'était pas au courant du

 13   tout.

 14   Q.  Merci. A Nova Kasaba, 419, 62 et 7.1, et ensuite 8 et une partie de

 15   corps, en réalité, vous avez déjà répondu à ces questions-là. Savez-vous

 16   qu'il y avait de lourds combats autour de la région de Nova Kasaba à six

 17   reprises environ ce village est tombé entre les mains de l'une ou l'autre

 18   partie. Ceci vous aurait-il aidé, à savoir si vous saviez que Nova Kasaba

 19   revêtait une importance stratégique bien particulière aux yeux des deux

 20   parties et qu'il y a eu par conséquent des combats bien particuliers dans

 21   ce secteur ?

 22   R.  Je n'étais pas au courant de cela mais je pense que cela n'aurait en

 23   rien changé nos conclusions. Nous enregistrions nos conclusions, et si on

 24   me posait la question et si on me disait que ces décès auraient pu avoir

 25   été provoqués six mois avant la chute de Srebrenica, je pouvais répondre,

 26   oui. Si tout ceci aurait pu correspondre au massacre de Srebrenica, je

 27   dirais également, oui, cela se peut. Je crois que, si nous avions su cela

 28   au préalable, je crois que cela n'aurait en rien changé nos conclusions.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je regarde l'heure, Madame, Messieurs les

  2   Juges; est-ce qu'il nous faut terminer maintenant ?

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. C'est une journée assez longue que

  5   la nôtre aujourd'hui, le premier jour d'audience pour nous. Si vous avez

  6   d'autres questions, nous pouvons reprendre demain.Nous levons l'audience

  7   pour aujourd'hui et nous reprendrons demain matin à 9 heures.

  8   --- L'audience est levée à 15 heures 44 et reprendra le mercredi 11 janvier

  9   2012, à 9 heures 00.

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