Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 10 février 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tout le monde. M. le Juge

  7   Morrison ne viendra pas aujourd'hui, il est souffrant, donc nous allons

  8   siéger en vertu de l'article 15 bis. Et j'espère qu'il pourra d'ailleurs

  9   nous rejoindre le plus rapidement possible.

 10   Madame West, poursuivez.

 11   Mme WEST : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 12   Madame, Monsieur les Juges.

 13   LE TÉMOIN : MILENKO KATANIC [Reprise]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   Interrogatoire principal par Mme West : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Katanic.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Harvey.

 18   M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 19   Monsieur les Juges. C'est un grand plaisir pour moi que de vous présenter

 20   Andjela Vuckovic, qui est originaire du Monténégro et qui a rejoint notre

 21   équipe au cours des dernières semaines.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Mme WEST : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur, lorsque nous nous sommes interrompus hier, vous parliez de la

 25   très longue relation que vous avez eue avec M. Miroslav Deronjic. Et

 26   j'aimerais maintenant que nous nous intéressions aux événements de l'année

 27   1995 à Bratunac, et ce qui m'intéresse plus particulièrement c'est le mois

 28   de juillet 1995.


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  1   Au cours du mois de juillet 1995 et au cours des mois précédents, est-ce

  2   que vous travailliez pour le SDS ?

  3   R.  C'est exact. J'ai travaillé pour le SDS, j'étais leur secrétaire

  4   technique.

  5   Q.  Et quelle était la fonction de Miroslav Deronjic au sein du SDS à ce

  6   moment-là ?

  7   R.  Miroslav Deronjic était le président du parti et, en même temps, il

  8   avait d'autres fonctions pour ce qui est des autorités. Je pense qu'il

  9   était le maire.

 10   Q.  Et le 11 juillet 1995, quelle nomination a reçue M. Deronjic du

 11   president Karadzic -- ou plutôt, à quel poste est-ce que le président

 12   Karadzic l'a mis lui ?

 13   R.  Miroslav Deronjic a été nommé par le président Karadzic au poste de

 14   commissaire politique pour Srebrenica.

 15   Q.  Et comment l'avez-vous appris ?

 16   R.  A ce moment-là, j'étais soldat de deuxième classe au sein du 2e

 17   Bataillon. Lorsque les forces serbes sont entrées dans Srebrenica, Miroslav

 18   Deronjic m'a convoqué et m'a dit qu'il avait besoin de moi dans son bureau

 19   étant donné qu'il avait été nommé commissaire politique pour Srebrenica.

 20   Cela s'est passé le 11 juillet.

 21   Q.  Est-ce qu'il vous a confié une tâche précise ?

 22   R.  Lorsque nous nous sommes vus, il m'a dit d'organiser une réunion pour

 23   le soir, réunion avec les représentants des autorités de Srebrenica ainsi

 24   qu'un certain nombre de personnes qu'il voulait nommer à des postes de

 25   directeurs de sociétés, il y avait certaines sociétés qui étaient des

 26   sociétés publiques et d'autres qui étaient des sociétés privées.

 27   Q.  Et où a eu lieu cette réunion ?

 28   R.  Il était prévu que la réunion se déroule dans la grande salle de


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  1   réunion du SDS, on pouvait y avoir 50 personnes.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Petite intervention pour ce qui est du compte

  3   rendu d'audience. Je pense que les interprètes ont parlé d'un système

  4   économique plutôt particulier. En fait, il n'y avait pas de sociétés

  5   privées au sens strict du terme. Il s'agissait de sociétés d'Etat et de

  6   sociétés qu'on appelait les compagnies à propriété sociale, en fait c'est

  7   comme ça qu'on les appelait, elles appartenaient à l'Etat. Cela figure à la

  8   ligne 25, page 2. Peut-être que le témoin pourrait préciser.

  9   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 10   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ça c'est quelque chose que vous pouvez

 12   préciser lors de votre contre-interrogatoire. Qu'est-ce que nous voyons sur

 13   le compte rendu d'audience, "…il voulait en nommer certains aux postes de

 14   directeurs de sociétés ou de compagnies, certaines étaient privées et

 15   d'autres étaient publiques."

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais c'est une erreur dans le compte rendu

 17   d'audience, parce que ce n'est pas ce que le témoin a dit. Pendant mon

 18   contre-interrogatoire, je vais demander des précisions au témoin à propos

 19   de ce qu'il a dit, mais je ne dois pas, en quelque sorte, m'intéresser aux

 20   erreurs de compte rendu d'audience.

 21   Alors je vais vous expliquer. Dans notre système, il y avait des sociétés

 22   d'intérêt public, des sociétés d'Etat, puis il y avait des sociétés qu'on

 23   appelait des sociétés appartenant sous la propriété sociale comme on les

 24   appelait chez nous.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, très bien. Je demanderais à la

 26   CLSS de vérifier cela, et nous apporterons la précision plus tard.

 27   Poursuivez, Madame West.

 28   Mme WEST : [interprétation]


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  1   Q.  Combien de personnes ont assisté à cette réunion ?

  2   R.  Je n'en suis pas sûr. Je ne le sais pas exactement. Je pense qu'il y en

  3   avait plus qu'une vingtaine.

  4   Q.  Et qui a présidé la réunion ?

  5   R.  C'est M. Miroslav Deronjic qui a présidé la réunion.

  6   Q.  A un moment de la réunion, est-ce que Deronjic a quitté la salle ?

  7   R.  Lors de la réunion, Miroslav Deronjic a informé les personnes présentes

  8   de sa nomination au poste de commissaire civil pour la municipalité de

  9   Srebrenica. Pendant la réunion, la secrétaire du parti, Mme Nikolic, est

 10   arrivée dans cette grande salle de réunion et a dit à Deronjic que le

 11   président Karadzic était à l'autre bout du fil. Alors Miroslav Deronjic a

 12   quitté la salle pour répondre à cet appel téléphonique, et après un moment

 13   la secrétaire est revenue dans la salle et nous a tous invités à nous

 14   rendre dans la salle où se trouvait le téléphone. C'était un petit bureau,

 15   donc nous n'avons pas tous pu y entrer. Nous avons laissé la porte ouverte,

 16   et il y avait des personnes qui se trouvaient dans le couloir, à

 17   l'extérieur de la pièce en question.

 18   Alors Miroslav Deronjic a dit que M. Karadzic voulait dire quelque chose

 19   que nous devions tous entendre. M. Karadzic s'est adressé à toutes les

 20   personnes présentes en disant que Miroslav Deronjic était responsable vis-

 21   à-vis de lui pour toutes les affaires civiles de la municipalité de

 22   Srebrenica et qu'il en était le garant et qu'il devait y veiller autant

 23   qu'à sa vie, et les autres personnes étaient donc responsables vis-à-vis de

 24   Miroslav Deronjic pour ce qui était de leurs domaines de travail

 25   respectifs.

 26   Q.  Est-ce que vous aviez jamais entendu la voix du président Karadzic

 27   auparavant ?

 28   R.  Oui, oui. Je l'avais entendue à plusieurs reprises. J'avais déjà


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  1   entendu la voix du président Karadzic, je ne lui avais jamais parlé

  2   personnellement au téléphone. Mais je l'avais déjà entendu parler. Je

  3   l'avais entendu parler, par exemple, à des rassemblements, là, sa voix

  4   passait par des haut-parleurs, ou je l'avais entendu dans les médias.

  5   Q.  A la suite de cet appel téléphonique, qu'avez-vous compris de la

  6   relation professionnelle entre le président Karadzic et Miroslav Deronjic ?

  7   R.  Lorsque M. Karadzic s'est adressé à nous au téléphone, j'en ai conclu

  8   qu'ils avaient des liens tout à fait professionnels.

  9   Q.  Et d'après vous, qui était le supérieur de Deronjic ? Qui allait lui

 10   donner des ordres à partir de ce moment-là ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà une question directrice. Parce que dans

 12   cette question, ce qui est implicite c'est qu'il recevait des ordres. Il a

 13   été nommé. Quand est-ce que le témoin a dit qu'il recevait des ordres ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question est qui, d'après vous, était

 15   le supérieur de Deronjic ? Qui lui donnait des ordres ?

 16   Non. Nous ne sommes pas d'accord avec votre intervention.

 17   Pouvez-vous répondre à cette question, Monsieur Katanic ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre vient de rendre sa décision,

 20   ce n'est pas une question directrice.

 21   Est-ce que vous pouvez répondre à cette question, Monsieur Katanic ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Miroslav Deronjic a été nommé par le président

 23   Karadzic. Cela, donc, sur la base d'une décision écrite. Alors, du fait de

 24   cette nomination, le président Karadzic était son supérieur.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Madame West, poursuivez, je vous en prie.

 27   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 28   Q.  Lors de votre audition avec nous, vous avez dessiné un schéma ou un


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  1   croquis des bureaux du SDS, mais je souhaiterais que vous dessiniez un

  2   autre croquis sur l'écran qui se trouve devant vous.

  3   Mme WEST : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne le fassiez, Madame

  5   West, pourriez-vous demander au témoin ce qu'était un secrétaire technique

  6   et ce qu'il faisait à ce titre.

  7   Mme WEST : [interprétation]

  8   Q.  Vous avez entendu, Monsieur Katanic, la question du Président à propos

  9   de votre fonction. Que faisiez-vous en tant que secrétaire technique ?

 10   R.  Avant que Miroslav Deronjic ne soit choisi au poste de commissaire

 11   civil pour Srebrenica, j'avais la fonction de secrétaire technique. Mon

 12   travail consistait à préparer des réunions, à les organiser, à recevoir des

 13   personnes lorsque le président Deronjic était absent de son bureau, et je

 14   m'occupais également de questions techniques. Je devais également m'occuper

 15   des demandes de personnes qui venaient au bureau, enfin, si tant est que

 16   ces demandes soient fondées.

 17   Q.  Et lorsque vous nous parlez de "questions techniques", est-ce que vous

 18   pourriez étoffer un peu votre propos ? De quoi s'agissait-il ? Quelles

 19   étaient ces questions techniques dont vous vous occupiez ?

 20   R.  Comme je l'ai dit, il s'agissait de préparer les réunions, et je pense

 21   aux réunions qui avaient lieu dans les locaux du parti. Je devais également

 22   coordonner le travail du parti avec les différentes antennes, et je devais

 23   les aider également dans le cadre de leur travail.

 24   Q.  Et quand est-ce que vous avez commencé ce travail ?

 25   R.  Je ne me souviens plus de ma date d'entrée en fonction, mais je pense

 26   que c'était en 1993.

 27   Q.  Et est-ce qu'il s'agissait d'un emploi rémunéré ?

 28   R.  En fait, c'est à la suite d'une décision ministérielle que j'ai eu ce


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  1   poste, et c'était en fait une obligation de travail en ce qui me

  2   concernait.

  3   Q.  Quand est-ce que vous avez terminé ce travail ?

  4   R.  J'ai arrêté lorsque la guerre s'est terminée, mais en 1993, peu de

  5   temps après ma nomination à cette fonction, j'ai été envoyé par le

  6   commandement militaire de la municipalité de Bratunac à une autre ligne de

  7   front où j'ai passé environ deux mois, et là j'étais soldat.

  8   Q.  En juillet 1995, lorsque vous travailliez en tant que secrétaire

  9   technique dans les bureaux du SDS, pourriez-vous nous dire avec quelle

 10   fréquence vous étiez présent dans les bureaux du SDS à proprement parler ?

 11   R.  En juillet 1995, avant l'arrivée de Mladic à Bratunac, j'étais dans les

 12   bureaux aux heures normales de travail, à savoir entre 7 heures et 15

 13   heures. Lorsque Miroslav Deronjic a été nommé commissaire civil pour

 14   Srebrenica, là il n'y avait plus d'heures de travail. J'étais dans le

 15   bureau tout le temps.

 16   Q.  Bien. Alors, maintenant nous allons parler du bureau à proprement

 17   parler. Donc vous avez dessiné un croquis de ce bureau lorsque nous nous

 18   sommes parlé, mais j'aimerais maintenant que vous dessiniez sur l'écran un

 19   croquis de ce bureau, mais j'aimerais que vous incluiez la salle de

 20   conférences où vous nous dites avoir eu cette réunion le 11 juillet. Si

 21   vous pouviez donc dessiner également cette salle de conférences, ce serait

 22   très utile.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous nous avez donné la cote 65 ter ?

 24   Mme WEST : [interprétation]

 25   Q.  La cote 65 ter du croquis précédent est comme suit, 23555. Elle a

 26   maintenant une cote pour l'Accusation, une cote P. Et ce croquis sera

 27   différent. Il sera un peu plus large.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pose la question parce que nous, nous


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  1   n'avons pas de croquis.

  2   Mme WEST : [interprétation] Mais j'ai demandé au témoin d'en dessiner un

  3   nouveau.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur une page blanche.

  5   Mme WEST : [interprétation] Oui, ou sur l'écran.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je pense que cela sera possible.

  7   Fort bien.

  8   Mme WEST : [interprétation]

  9   Q.  Donc, Monsieur Katanic, vous avez l'écran qui se trouve devant vous,

 10   vous pouvez prendre le stylet et vous pouvez dessiner le croquis du SDS,

 11   mais cette fois-ci j'aimerais que vous dessiniez également la salle de

 12   conférences.

 13   R.  Fort bien.

 14   Q.  Je vous remercie, Monsieur.

 15   R.  Est-ce que cela suffit ?

 16   Q.  Oui, merci. Alors nous allons étudier ce croquis ensemble.

 17   Dans le coin supérieur droit, vous avez inscrit quelque chose, et ces mots

 18   indiquent une pièce visiblement. Alors, qu'est-ce que cela -- à quoi cela

 19   correspond ?

 20   R.  Il s'agit du "bureau du secrétaire".

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez changer de

 22   couleur de feutre, s'il vous plaît. Utilisez le bleu, peut-être. Et est-ce

 23   que vous pouvez apposer le numéro 1 à cet endroit-là afin de ne pas avoir

 24   la traduction immédiatement après.

 25   Je noterais aussi que pour ce qui est du document 65 ter 23555, un schéma

 26   que le témoin avait déjà fait, il doit être traduit.

 27   Mme WEST : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Apposez le chiffre 1 sur la pièce qui


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  1   s'appelle bureau du secrétaire, à côté de la mention écrite en B/C/S.

  2   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

  3   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  4   Mme WEST : [interprétation]

  5   Q.  Et en dessous du bureau du secrétaire, qu'est-ce qu'il y a, qu'est-ce

  6   qu'on voit ? De quel bureau s'agit-il ?

  7   R.  Il s'agit du bureau du président Deronjic.

  8   Q.  Et pouvez-vous apposer le chiffre 2 à côté de l'indication B/C/S du

  9   bureau de Deronjic.

 10   R.  [Le témoin s'exécute]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez lire ce que vous

 12   avez marqué là-dessus, s'il vous plaît, Monsieur le Témoin.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] "Bureau de Deronjic."

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 15   Mme WEST : [interprétation]

 16   Q.  Et si nous allons au-delà du numéro 1, à savoir le bureau du

 17   secrétaire, est-ce qu'il s'agit à côté d'un couloir ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et là aussi, vous avez marqué quelque chose. Dites-nous ce que vous

 20   avez indiqué là, en toutes lettres.

 21   R.  J'ai mis "couloir".

 22   Q.  Apposez le chiffre 3 à côté, s'il vous plaît.

 23   R.  [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Il y a une autre pièce sur le côté gauche de l'écran, complètement à

 25   gauche. De quoi s'agit-il ?

 26   R.  Il s'agit de la grande salle de réunion du parti SDS.

 27   Q.  Là aussi, il est marqué quelque chose. Dites-nous ce que vous avez

 28   marqué là.


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  1   R.  Là aussi, j'ai marqué "grande salle de réunion du SDS".

  2   Q.  Veuillez apposer le chiffre 4 au-dessus de cette mention, s'il vous

  3   plaît.

  4   R.  [Le témoin s'exécute]

  5   Mme WEST : [interprétation] Peut-on changer de couleur de feutre à nouveau,

  6   s'il vous plaît, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur Katanic, nous avons parlé de cette réunion qui s'est tenue le

  8   11 juillet que M. Deronjic vous a demandé d'organiser. Vous avez dit que

  9   cela a eu lieu dans le bureau du SDS et que la réunion a eu lieu dans une

 10   pièce qui pouvait contenir au moins 20 personnes. De quelle salle s'agit-il

 11   ?

 12   R.  Il s'agit de la salle 4.

 13   Q.  Et vous avez dit qu'à un certain moment donné vous avez quitté cette

 14   pièce-là pour aller écouter un appel téléphonique. Où vous êtes-vous rendu

 15   pour aller écouter cette conversation téléphonique ?

 16   R.  Non, je n'ai pas quitté la pièce. C'est M. Deronjic qui est parti,

 17   c'est lui qui avait été appelé par la secrétaire.

 18   Q.  Merci. Vous avez déposé que vous aviez entendu M. Karadzic parler au

 19   téléphone. Dans quelle pièce se trouvait le téléphone en question ?

 20   R.  Le téléphone se trouvait dans le bureau numéro 1.

 21   Q.  Donc, à un moment donné, est-ce que toutes les personnes qui se

 22   trouvaient dans le bureau numéro 4 se sont rendues dans le bureau numéro 1

 23   ?

 24   R.  Oui, exactement.

 25   Q.  Et pouvez-vous nous décrire -- vous avez parlé qu'il y avait plusieurs

 26   personnes, mais pouvez-vous nous dire où se trouvaient ces personnes quand

 27   elles étaient dans et proches du bureau numéro 1 ? Vous pouvez nous le

 28   montrer avec votre feutre, si vous le souhaitez.


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  1   R.  Certaines personnes sont rentrées dans le bureau numéro 1, d'autres

  2   sont restées dans le couloir.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez une seconde. Est-ce que vous

  4   pouvez écrire la date d'aujourd'hui, le 10 février 2012, et apposer vos

  5   initiales en bas à droite de ce schéma.

  6   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons enregistrer ce schéma tout

  8   d'abord, et nous allons le verser au dossier en tant que pièce portant une

  9   cote P.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela portera la cote P4380.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une fois que nous l'aurons enregistré,

 12   nous allons le télécharger et faire un zoom sur la pièce numéro 1.

 13   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Agrandissons la partie où il y a marqué

 15   salle numéro 1. Non, c'est un petit peu trop. Ça va ? Madame West, allez-y.

 16   Mme WEST : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce que ce que nous sommes en train de regarder maintenant est bien

 18   la salle numéro 1, à propos de laquelle vous avez dit que vous aviez

 19   entendu la voix de M. Karadzic ? Et pouvez-vous nous indiquer --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous attendre une seconde, s'il

 21   vous plaît, Madame West. Je vais envoyer l'huissier assister le témoin avec

 22   un nouveau feutre. Sans doute en noir.

 23   Mme WEST : [interprétation] Hm-hm, oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 25   Mme WEST : [interprétation]

 26   Q.  Eh bien, maintenant j'aimerais que vous nous montriez où se trouvaient

 27   toutes les personnes qui ont participé à la conférence que vous aviez

 28   organisée, où se trouvaient toutes ces personnes exactement pendant que la


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  1   conversation téléphonique a eu lieu.

  2   R.  Est-ce que je peux le marquer ?

  3   Q.  Oui, bien entendu.

  4   R.  C'est dans la partie qui est entourée de vert. C'est approximativement,

  5   disons, la zone dans laquelle les participants de la conférence se

  6   trouvaient, ceux d'entre eux qui écoutaient la conversation de M. Karadzic.

  7   Q.  Pouvez-vous nous marquer avec un X l'endroit où se trouvait le

  8   téléphone.

  9   R.  [Le témoin s'exécute]

 10   Mme WEST : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement de

 11   cette pièce également, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous, s'il vous plaît, apposer

 13   vos initiales et mettre la date d'aujourd'hui, Monsieur Katanic. Il s'agira

 14   de la pièce P4381.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je devrais mettre en place cette

 16   petite croix -- est-ce que je dois préciser qu'il s'agit du téléphone ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, ce n'est pas la peine. Simplement

 18   apposer vos initiales et la date quelque part entre le chiffre 1 et le

 19   chiffre 2, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 21   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce schéma devrait  normalement être

 23   sauvegardé.

 24   Madame West, poursuivez.

 25   Mme WEST : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Katanic, selon votre déposition, vous et M. Deronjic parliez

 27   très souvent le soir. Est-ce que vous pouvez nous dire une fois de plus si

 28   au mois de juillet -- ou juin/juillet, où se poursuivaient ces


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  1   conversations ?

  2   R.  Etant donné les circonstances à Bratunac à l'époque, je voyais Miroslav

  3   Deronjic peu souvent pendant nos heures de liberté; moi j'avais très peu de

  4   temps libre, et lui il en avait encore moins. Toutes nos conversations se

  5   faisaient à la sauvette dans les bureaux du SDS. Cependant, avant les

  6   événements, quand on avait du temps libre, très souvent, presque tous les

  7   jours, je voyais Miroslav Deronjic au café César, dont j'étais le

  8   propriétaire, et le soir on se racontait ce qui s'était passé pendant la

  9   journée.

 10   Q.  Au paragraphe 72 de votre déclaration, vous avez dit que vous avez été

 11   mis au courant des meurtres qui se sont produits au mois de juillet, le 13,

 12   à Kravica, dans le dépôt. Comment avez-vous appris cela ?

 13   R.  Oui, c'est exact, j'en ai entendu parler. C'est Miroslav Deronjic qui

 14   m'en a informé au bureau du SDS. Il m'a décrit ces événements alors qu'il

 15   n'en connaissait pas véritablement les détails. Lui-même avait entendu que

 16   cela s'était produit.

 17   A en juger par la façon dont il me l'a raconté, j'en ai tiré la conclusion

 18   que cela lui faisait souci.

 19   Mme WEST : [interprétation] Pouvons-nous avoir la pièce portant la cote 65

 20   ter 40246A. Il s'agit d'une vidéo. Nous allons l'écouter, et il y a

 21   également la transcription.

 22   Q.  Monsieur Katanic, il s'agit d'une vidéo que vous connaissez déjà. Ce

 23   sont des nouvelles qui ont été diffusées le 14 juillet 1995. Je vais vous

 24   poser un certain nombre de questions à ce propos.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26    Mme WEST : [interprétation]

 27   Q.  Nous allons passer en revue cet extrait. Mais je voudrais que vous

 28   puissiez identifier certaines personnes. Si vous pouvez patienter, nous


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  1   allons re-visionner cette partie.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   Mme WEST : [interprétation] Merci de faire un arrêt sur image à 1 minute, 1

  4   seconde.

  5   Q.  Il s'agit du 14 juillet, et l'annonceur vient de dire que des réfugiés

  6   serbes qui avaient quitté la région deux ans auparavant commençaient à

  7   revenir. Est-ce que vous étiez au courant du fait que des réfugiés serbes

  8   étaient en train de revenir dans la région après que le contrôle ait été

  9   pris sur Srebrenica ?

 10   R.  A l'époque, le 14 juillet, il n'y avait pas eu un retour organisé à

 11   Srebrenica. Mais un certain nombre d'habitants de Srebrenica qui désormais

 12   vivaient à Bratunac, eux sont revenus dans leurs maisons pour voir dans

 13   quel état elles étaient. Et les jours qui ont suivi, ils se sont rendus à

 14   nouveau à Srebrenica pour nettoyer leurs maisons, car il était impossible

 15   de rentrer dans Srebrenica et d'y vivre. Srebrenica avait besoin d'être, si

 16   on peut dire, mise en ordre, car les choses allaient très mal. Les

 17   conditions de vie étaient quasiment inexistantes.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Katanic, connaissez-vous la

 19   télévision SRT ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il s'agit de la radiotélévision serbe,

 21   qui était diffusée à partir de Pale.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et le titre à droite, pouvez-vous le

 23   lire ? Lisez-le, s'il vous plaît.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] "Nouvelles, télévision serbe."

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 26   Mme WEST : [interprétation]

 27   Q.  Et ce programme qui a été diffusé, est-ce que vous avez déjà eu

 28   l'occasion de voir ce programme ?


Page 24477

  1   R.  Non.

  2   Q.  Je vais être un peu plus claire. Je ne veux pas dire cette émission-là,

  3   mais est-ce que vous connaissiez le canal ? Est-ce que vous connaissiez le

  4   programme ?

  5   R.  Oui, je connaissais le canal. C'est la radiotélévision serbe, et cela

  6   avait énormément de succès parmi les Serbes. Les gens préféraient regarder

  7   ce canal, surtout les nouvelles.

  8   Q.  Continuons.

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   Mme WEST : [interprétation] Nous nous sommes arrêtés à 1 minute, 27

 11   secondes.

 12   Q.  Pouvez-vous identifier les personnes qui se trouvent sur cette image-là

 13   ?

 14   R.  La première personne à gauche c'est Miroslav Deronjic. Ensuite, à côté

 15   de lui, au milieu, il y a Dane Katanic. C'était un membre du conseil

 16   municipal du Parti démocratique serbe, et je crois qu'il était président du

 17   conseil d'administration de la municipalité de Srebrenica.

 18   Q.  Y avait-il un lien de parenté avec vous ?

 19   R.  Oui, il y a un lien de parenté entre lui et moi. Maintenant, pour ce

 20   qui est de la troisième personne, qui porte la barbe, je crois qu'il

 21   s'appelle Milenko, et Canic de son nom de famille. Je pense que lui c'était

 22   le président de l'assemblée municipale de Srebrenica.

 23   Mme WEST : [interprétation] Continuons.

 24   [Diffusion de la cassette vidéo]

 25   Mme WEST : [interprétation] Nous sommes à 1 minute, 40 secondes.

 26   Q.  Reconnaissez-vous ce monsieur ?

 27   R.  Oui, c'est Momcilo Krajisnik. C'était le président de l'assemblée

 28   populaire de la Republika Srpska.


Page 24478

  1   Q.  Et auparavant dans cette vidéo, il y avait quelqu'un qui était assis à

  2   gauche de M. Karadzic. Est-ce que vous reconnaissez cette personne-là ? Il

  3   était à la même table que M. Karadzic.

  4   R.  Je ne me souviens plus. Est-ce que c'était encore M. Momcilo Krajisnik

  5   ? Je ne me souviens pas. Si vous me le montrez à nouveau, je pourrais

  6   l'identifier.

  7   Q.  Bien entendu. Je vais le faire.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   Mme WEST : [interprétation] Nous commençons à 1 minute 20 et nous nous

 10   sommes arrêtés à 1 minute 21.

 11   Q.  La personne à droite, connaissez-vous cette personne ?

 12   R.  La personne à droite c'est Momcilo Cvjetinovic, président du parti à

 13   Srebrenica, président du Parti démocratique serbe à Srebrenica.

 14   Mme WEST : [aucune interprétation]

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   Mme WEST : [interprétation] Nous sommes à 2 minutes 25, il s'agit d'un

 17   entretien avec Deronjic, et il parle de l'état du conseil de Srebrenica.

 18   Q.  Et juste après l'attaque à Srebrenica, ou du moins au mois de juillet,

 19   est-ce que vous-même vous avez eu l'occasion de vous rendre à Srebrenica ?

 20   R.  Je me suis rendu à Srebrenica sept jours seulement après sa libération.

 21   A l'époque, Srebrenica était dans un état lamentable. Les conditions

 22   étaient si terribles que, vous pouvez me croire, je ne suis même pas sorti

 23   de la voiture.

 24   Les gens qui s'étaient déjà rendus à Srebrenica nous avaient avertis et

 25   nous avaient dit de ne pas sortir afin d'éviter d'attraper une maladie, par

 26   exemple. C'était très, très sale et il y avait des poux dans la ville, donc

 27   je me suis déplacé en voiture et puis je suis revenu à Bratunac.

 28   Q.  Et M. Deronjic dit que la ville était en ruines, qu'elle avait été


Page 24479

  1   pillée et détruite. Est-ce que cela correspond à votre souvenir également ?

  2   R.  Oui, en effet, la ville avait subi pas mal de destruction, c'est exact.

  3   De même, il y avait eu des cas de pillage, et la tâche du commissaire civil

  4   consistait - et d'ailleurs je l'ai aidé à ce faire - à empêcher de tels

  5   pillages de la façon suivante : les directeurs des institutions publiques

  6   et des services publics ont été désignés, ils faisaient l'inventaire des

  7   biens qui étaient présents. Ils ont également mis un système de tours de

  8   garde dans différents locaux, et ils ont commencé le nettoyage de ces

  9   locaux et les services publics aussi ont commencé à s'occuper du nettoyage

 10   de la ville.

 11   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 12   [Diffusion de la cassette vidéo]

 13   Mme WEST : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 14   dossier de cette séquence vidéo.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Donc il y avait des sous-titres,

 16   mais vous avez également la transcription qui est présentée en annexe dans

 17   le système e-court; c'est cela ?

 18   Mme WEST : [interprétation] Oui, c'est tout à fait cela.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons accepter le versement

 20   au dossier de cette pièce. Quelle sera la prochaine cote ?

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] P4382.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] J'ai un petit souci pour ce qui est du

 24   temps. Je sais que vous avez accordé quelque trois heures et demie à M.

 25   Karadzic pour son contre-interrogatoire, mais s'il devait commencer

 26   immédiatement il terminerait à 15 heures.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que ce témoin doit terminer

 28   sa déposition aujourd'hui ?


Page 24480

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Je n'en sais rien.

  2   Mme WEST : [interprétation] Il faudra que la question lui soit posée.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais pourquoi avez-vous cette

  4   préoccupation, Maître Robinson ?

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Parce qu'en général on essaie de terminer la

  6   déposition d'un témoin avant le début du week-end, d'où mon souci, s'il

  7   n'est pas en mesure de rester ce week-end, le témoin, je voulais juste vous

  8   rappeler le temps qui a été alloué à M. Karadzic pour le contre-

  9   interrogatoire.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais poser la question au témoin.

 11   Monsieur Katanic, est-ce que vous devez rentrer chez vous aujourd'hui, ou

 12   plus directement, est-ce que vous pouvez rester jusqu'à lundi, jusqu'à la

 13   semaine prochaine, donc ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, le Tribunal est ma priorité, mais

 15   je vous serais extrêmement reconnaissant si je pouvais rentrer chez moi

 16   dimanche, parce que c'est l'anniversaire de ma fille.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie de votre compréhension.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ma fille --

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, ma fille est jeune. Elle n'a que

 21   12 ans.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis sûr que vous lui manquerez

 23   beaucoup. Nous verrons comment la situation va évoluer.

 24   Oui, Madame West.

 25   Mme WEST : [interprétation] Je vous remercie. Document 23556 de la liste 65

 26   ter, je vous prie.

 27   Q.  Monsieur Katanic, vous avez vu ces quelques pages précédemment. C'est

 28   un document de quelque six pages, il s'agit de factures de l'hôtel Fontana.


Page 24481

  1   Regardez la première page, la page où l'on voit le cachet, qu'est-ce que

  2   vous pouvez nous dire à propos de cette feuille de papier ? Dans un premier

  3   temps, est-ce que vous l'avez déjà vue ?

  4   R.  Il s'agit d'une facture dressée par la coopérative de l'hôtel Podrinje

  5   à Bratunac. Cela avait été établi pour l'assemblée municipale de Bratunac

  6   pour les services rendus. Et j'ai vu cette facture pour la première fois

  7   lorsque l'Accusation me l'a montrée.

  8   Q.  Et est-ce que vous savez quoi que ce soit sur la façon dont les

  9   factures destinées à l'assemblée municipale de Bratunac étaient payées ?

 10   Est-ce que vous, vous connaissez le processus utilisé ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois soulever une objection. Est-ce que Mme

 12   le Procureur a demandé au témoin si la facture a été payée ? Elle a été

 13   présentée, certes, mais nous ne savons pas comment elle a été payée et

 14   comment.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je vous relis

 16   la question, voilà ce qu'elle a demandé :

 17   "Est-ce que vous savez quoi que ce soit -- comment les factures

 18   destinées à l'assemblée municipale de Bratunac étaient payées ? Est-ce que

 19   vous connaissez le processus utilisé ?"

 20   Et je ne vois pas ce qui vous préoccupe dans ces questions. Si le

 21   témoin connaît la réponse, il peut répondre à la question.

 22   Mais j'aimerais savoir si le nom de cette coopérative hôtelière était

 23   Podrinje, pour ce qui est de l'hôtel Fontana à Bratunac ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] L'hôtel Fontana faisait partie de cette

 25   compagnie.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, Monsieur

 27   Katanic, pouvez-vous répondre à la question qui vous a été posée par Mme

 28   West.


Page 24482

  1   Mme WEST : [interprétation]

  2   Q.  Et la question était comme suit : est-ce que vous savez quoi que ce

  3   soit à propos des factures envoyées à l'assemblée municipale de Bratunac,

  4   est-ce que vous savez comment elles étaient payées ? Est-ce que vous savez

  5   quoi que ce soit à propos de ce système de paiement ?

  6   R.  La municipalité de Bratunac avait un compte opérationnel. Et c'était en

  7   général le président du Conseil exécutif qui réglait ce type de factures. A

  8   l'époque, moi je ne travaillais pas à la municipalité. Comme je vous l'ai

  9   déjà dit, j'ai vu cette facture pour la première fois lorsque le Procureur

 10   me l'a montrée. Par conséquent, je ne peux rien vous dire d'autre à ce

 11   sujet.

 12   Q.  Je vous remercie, Monsieur Katanic.

 13   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 14   questions à poser au témoin.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17   Mme WEST : [interprétation] Non, non, je ne vais pas demander le versement

 18   au dossier de ce dernier document.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour. Bonjour, Madame, Messieurs les Juges,

 21   et bonjour à tout le monde.

 22   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

 23   Q.  [interprétation] Et bonjour à vous, Monsieur Katanic.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  Je souhaiterais vous demander d'apporter quelques précisions à certains

 26   éléments qui ont attiré mon attention dans le compte rendu d'audience.

 27   Premièrement, vous avez mentionné cette obligation de travail. C'est

 28   lorsque l'on donne l'ordre à quelqu'un de s'acquitter de quelque chose,


Page 24483

  1   indépendamment d'ailleurs de leurs activités professionnelles et

  2   indépendamment du fait qu'ils soient salariés ou non. Et cela devrait être

  3   fait à la place du service militaire; c'est cela ?

  4   R.  Oui, oui. Il s'agissait d'une affectation militaire.

  5   Q.  Et cela était valable pour tout le monde, y compris vous-même

  6   d'ailleurs en tant que responsable au sein du SDS, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Nous devons attendre la fin de l'interprétation.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, voilà ce que je

 10   vous propose, je pense que cela devrait être traduit comme par le passé, à

 11   savoir "travail obligatoire" plutôt qu'"obligation de travail". Parce que

 12   cela a déjà été évoqué par des témoins musulmans, et l'impression en fait

 13   c'était que cela était seulement valable pour eux. Et cela avait été

 14   traduit à l'époque par "travail obligatoire", alors que maintenant nous

 15   entendons parler d'"obligation de travail". Cela figurait à la page 6,

 16   lignes 23 et 24. Et je suggère que l'on pourrait plutôt utiliser la

 17   première traduction.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, il appartiendra au CLSS de

 19   trancher, mais je vais leur demander de se pencher sur la question.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Alors nous allons nous intéresser à cette séquence vidéo, puisque c'est

 23   l'une des dernières choses que nous avons vue. Est-ce que vous convenez

 24   qu'à l'arrêt sur image 02, M. Deronjic s'exprime et dit qu'il était

 25   également venu demander de l'aide ? Convenez-vous qu'une assistance

 26   matérielle ne pouvait être fournie que par l'assemblée et que le président

 27   de la république n'avait pas ce type de pouvoirs ? Est-ce qu'ils ne sont

 28   pas venus demander de l'aide au gouvernement ?


Page 24484

  1   R.  Est-ce que c'est une question que vous me posez ?

  2   Q.  Oui.

  3   R.  Oui, je suis d'accord.

  4   Q.  Est-ce que vous convenez qu'à partir du point horaire 2:25, M. Deronjic

  5   invite tous les anciens résidents à revenir ? Il n'a pas seulement invité

  6   les Serbes à revenir. Si vous le souhaitez, nous pouvons re-visionner cette

  7   partie de la séquence vidéo.

  8   R.  Non, ce n'est pas la peine. J'ai écouté et observé ce qu'il disait, et

  9   il est vrai qu'il invite tous les anciens résidents de Srebrenica à

 10   revenir.

 11   Q.  Merci. A la fin de la guerre, est-ce que certains Musulmans et Serbes

 12   sont revenus, et est-ce qu'il est vrai qu'ils ne sont pas tous revenus,

 13   qu'il s'agisse de Serbes ou de Musulmans d'ailleurs ?

 14   R.  Lorsque les combats ont cessé, personne n'est revenu pour séjourner à

 15   Srebrenica. Ils sont revenus un certain temps pour nettoyer leurs maisons,

 16   parce que dans la ville à proprement parler, il n'y avait ni eau ni

 17   électricité. Donc ils sont tout simplement venus pour nettoyer et préparer

 18   leurs maisons pour pouvoir y habiter à nouveau. Ce n'est que lorsque tout

 19   le système a recommencé à fonctionner qu'ils ont commencé à revenir.

 20   Q.  Mais qui est revenu ?

 21   R.  Les Serbes sont revenus dans leurs foyers. Il y avait également des

 22   réfugiés de la Bosnie centrale, essentiellement d'Ilijas, il y avait des

 23   réfugiés d'autres endroits également. Ils ont été placés dans les maisons

 24   et appartements vides. Pendant cette période, je n'ai pas entendu parler de

 25   Musulmans qui revenaient, en tout cas, je ne suis pas au courant. Et eux

 26   ils n'ont commencé à revenir qu'ultérieurement.

 27   Q.  Est-il exact que les Musulmans ont commencé à revenir lorsque les

 28   accords de paix ont été signés, et qu'avant les conditions pour eux étaient


Page 24485

  1   telles qu'ils ne pouvaient pas revenir ?

  2   R.  Il est exact qu'ils n'ont commencé à revenir qu'après la signature des

  3   accords de paix, mais pas immédiatement après.

  4   Q.  Merci. Mais est-ce que cela dépendait des autorités serbes, ce retour,

  5   ou est-ce que cela avait à voir avec la façon dont ils envisageaient leur

  6   sécurité ?

  7   R.  Non, cela dépendait seulement de s'ils se sentaient en sécurité ou non.

  8   Q.  Merci. Et à partir du moment où les accords de paix ont été signés et

  9   jusqu'à aujourd'hui, n'est-il pas exact que pour ce qui est des autorités

 10   de Srebrenica, les postes les plus importants sont des postes où l'on

 11   trouve des Musulmans ?

 12   R.  Oui, c'est exact. Le président -- ou plutôt, le chef de la municipalité

 13   de Srebrenica est Musulman. Et lorsque l'on pense à la structure politique,

 14   il faut savoir que le responsable de la municipalité est la personne qui a

 15   le plus de pouvoirs exécutifs.

 16   Q.  Mais est-ce que cela est différent du système précédent en vertu duquel

 17   le président de l'assemblée municipale détenait la plus grande autorité et

 18   le chef de la municipalité, ce qu'on appelle maintenant le maire, c'est le

 19   numéro deux de la municipalité ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Nous avons entendu M. Deronjic qui mentionne le fait que le président

 22   va être informé de la situation militaire. Est-ce que vous vous souvenez

 23   qu'après leur visite, j'ai déclaré l'état de guerre le 14 juillet à Birac

 24   et dans d'autres municipalités ?

 25   R.  Oui, ça c'est exact. Je m'en souviens.

 26   Q.  Merci. Est-ce que M. Deronjic et sa délégation avaient raison

 27   lorsqu'ils m'ont dit que le conflit n'était pas terminé et que dans les

 28   forêts il y avait un nombre assez important de soldats musulmans et qu'ils


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  1   seraient à même d'investir ou de capturer toute localité qu'ils pourraient

  2   capturer et que l'état de guerre devait être proclamé pour sauver la

  3   population et les institutions ?

  4   R.  Oui. Pour ce qui est du territoire, lorsque l'on pense à Srebrenica,

  5   Srebrenica est justement l'une des municipalités les plus vastes de l'ex-

  6   Bosnie-Herzégovine. Srebrenica s'étend sur une superficie importante. Pour

  7   ce qui est des groupes de Musulmans qui ne voulaient pas se rendre ou qui

  8   ne voulaient pas aller à Tuzla avec le groupe qui s'est rendu lui à Tuzla,

  9   ils sont restés cachés et ils sont restés cachés pendant un certain temps,

 10   ils étaient cachés donc dans la zone de la municipalité de Srebrenica.

 11   Q.  Je vous remercie. Convenez-vous que l'on m'a dit qu'on ne pouvait pas

 12   encore proclamer la victoire, même s'ils sont entrés dans Srebrenica le 11

 13   ? Il m'a également été dit qu'il fallait proclamer l'état de guerre. Est-il

 14   exact qu'à Bratunac à proprement parler la population avait peur parce

 15   qu'il n'y avait pas de soldats serbes à Bratunac ?

 16   Mme WEST : [interprétation] Là, trois questions viennent d'être posées en

 17   même temps. Donc je pense qu'il faudrait peut-être poser les questions

 18   l'une après l'autre.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pourriez peut-être faire ceci,

 20   poser les questions l'une après l'autre.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais tout simplement que M. Katanic

 22   puisse rentrer à temps pour l'anniversaire de sa fille.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Katanic, je vais essayer de poser des questions auxquelles

 25   vous pouvez répondre tout simplement par un oui ou par un non, mais vous

 26   pouvez développer si vous le souhaitez.

 27   Est-il exact -- est-il exact, disais-je, que les Musulmans pouvaient entrer

 28   dans n'importe quelle ville serbe de la zone ?


Page 24487

  1   R.  Ecoutez, je ne suis pas très sûr d'avoir compris votre question. A

  2   quelle période pensez-vous lorsque vous dites qu'ils pouvaient entrer dans

  3   n'importe quelle ville ? Vous voulez parler de la période qui précède le 12

  4   juillet ou de la période qui suit le 12 juillet ?

  5   Q.  Moi, je fais référence aux forces musulmanes qui se trouvaient

  6   disséminées dans les bois et forêts. Est-il exact qu'à Bratunac, et cela

  7   d'ailleurs fait l'objet du paragraphe 79 de votre déclaration, vous dites

  8   que les forces musulmanes étaient disséminées, alors que dans les villes il

  9   n'y avait que des adolescents et des personnes ayant plus que 70 ans, et

 10   que la Brigade de Bratunac s'était déplacée vers Zepa. Donc est-il exact

 11   qu'à Bratunac personne ne pouvait assurer la défense de Bratunac à ce

 12   moment-là ?

 13   R.  Certes, à Bratunac il y avait très peu de personnes en âge de porter

 14   les armes à l'époque, et il est vrai que j'avais exprimé cette crainte qui

 15   était mienne, mais cela c'était une référence à quelque chose de différent.

 16   C'était une référence que je faisais à l'époque où les prisonniers se

 17   trouvaient dans cette ville, ils se trouvaient dans différentes rues. Ils

 18   étaient un peu partout en fait dans cette ville, et ils représentaient une

 19   menace pour la ville.

 20   Mais pour ce qui est de votre question, et vous m'avez posé une question à

 21   propos des groupes qui étaient disséminées ici et là dans la municipalité

 22   de Srebrenica et qui soit ne voulaient pas se rendre, soit ne voulaient pas

 23   rejoindre le convoi qui allait à Tuzla, alors eux ils pouvaient représenter

 24   une menace en ce sens qu'ils auraient pu commettre un crime ou une atrocité

 25   quelque part. Ils auraient pu également piller une ou deux maisons, mais

 26   vous savez, il ne s'agissait pas de grands groupes homogènes, il ne

 27   s'agissait pas de groupes qui auraient pu représenter une menace pour la

 28   ville à proprement parler.


Page 24488

  1   Q.  Est-ce que nous pourrions, je vous prie, examiner un document pour voir

  2   quel était le point de vue de la Sûreté d'Etat de la DB.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions voir le document de

  4   la liste 65 ter 1959. Je pense que nous avons communiqué cette information

  5   à l'Accusation, je pense que nous avons dit à l'Accusation que nous allions

  6   utiliser le document. Et si tel n'est pas le cas, je prie l'Accusation de

  7   m'excuser.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce que vous pourriez lire le paragraphe où il est indiqué que dans

 10   la zone de Pobudje et municipalités de Bratunac, il y a encore un groupe de

 11   5 000 hommes dont 500 sont armés, puis il est indiqué qu'ils prévoyaient

 12   une percée le soir suivant sur la route Milici-Konjevic Polje-Drinjaca, et

 13   cetera, donc route allant vers Tuzla. Est-ce que vous convenez qu'il s'agit

 14   d'un rapport qui a été envoyé par le département de la Sûreté d'Etat,

 15   rapport qui a été envoyé au ministère de l'Intérieur de Sarajevo ? Nous

 16   voyons que c'est un document signé par le responsable de la Sûreté d'Etat.

 17   Vous êtes d'accord ?

 18   R.  Oui, oui, je suis d'accord avec ceci. Car dans ce rapport, la référence

 19   qui est faite concerne le groupe qui se déplaçait vers Tuzla. C'était le

 20   groupe qui avait été observé, mais il y a un moment de cela j'ai fait

 21   référence à de plus petits groupes qui n'étaient pas organisés et qui sont

 22   restés même après la signature des accords de paix, et ils sont restés

 23   disséminées ici et là sur le territoire de Srebrenica.

 24   Alors pour ce qui est maintenant de cette référence à ce groupe qui se

 25   déplaçait de Srebrenica vers Tuzla. Il s'agissait d'hommes en âge de porter

 26   les armes, il s'agissait d'hommes armés, il y avait un groupe de civils qui

 27   les a rejoints, c'est un groupe de civils qui refusait d'aller à Potocari.

 28   Q.  Je vous remercie.


Page 24489

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

  2   dossier de cette pièce.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela sera accepté.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2058.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  On vous a posé une question à propos de la chaîne de télévision, alors

  8   est-il exact qu'il s'agissait de la télévision publique, qu'il y avait donc

  9   une partie qui correspondait au studio de Sarajevo, puis vous aviez l'autre

 10   partie sur l'écran qui correspondait au studio de Banja Luka ? Nous l'avons

 11   vu au tout début, nous avons vu qu'il y avait deux plans sur l'image.

 12   R.  Oui. C'est probablement exact. Je regardais de temps à autre la

 13   télévision serbe, parce que nous ne pouvions pas recevoir d'autres chaînes

 14   de télévision à Bratunac, et je sais que cela était diffusé depuis Pale.

 15   Q.  Merci. Ça, c'est la toute dernière chose que vous avez vue. Donc

 16   probablement que le 11, vous auriez pu entendre ma voix ?

 17   Est-ce que vous savez qu'il y a eu une conversation entre moi-même et

 18   M. Deronjic ce jour-là, mais étant donné que les lignes téléphoniques ont

 19   été coupées, cette conversation est passée par un intermédiaire, une partie

 20   tierce ? Est-ce que vous étiez présent pendant cette conversation ?

 21   R.  Non, non, je ne l'étais pas, mais je sais qu'il était possible que

 22   vous-même et Deronjic communiquiez.

 23   Q.  Merci. Pendant cette conversation, et je pense à la conversation que

 24   vous avez écoutée, est-ce que Deronjic a reçu des consignes ou est-ce qu'il

 25   a été encouragé d'une façon ou d'une autre à faire quoi que ce soit qui

 26   aurait été illicite ou illégal dans le cadre de ses fonctions en tant que

 27   commissaire civil ?

 28   R.  Deronjic, en tant que commissaire civil, avait une obligation très,


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  1   très stricte, il devait s'occuper des civils, de leurs biens et propriétés,

  2   et il devait également gérer toutes les affaires civiles à Srebrenica.

  3   Hormis cela, il n'avait pas de pouvoirs.

  4   Q.  Merci. Convenez-vous que dans une ville où il n'y a pas de gouvernement

  5   organisé il y avait une autre option, l'autre option ça aurait été le

  6   contrôle militaire, et cela aurait été la façon normale d'établir

  7   l'autorité dans un territoire venant d'être capturé, et en nommant

  8   Deronjic, j'ai essayé d'éviter le rôle de militaire ?

  9   R.  [aucune interprétation]

 10   Q.  Mais Mme West a indiqué de façon implicite aujourd'hui en vous posant

 11   l'une de ses questions -- en fait, je vais vous dire la question qu'elle a

 12   posée. Elle vous a demandé qui était le supérieur de Deronjic et qui vous

 13   donnait des ordres. Est-ce que vous, vous avez jamais appris qui donnait

 14   des ordres à Deronjic, est-ce que vous saviez si quelqu'un lui donnait des

 15   ordres ou est-ce qu'il agissait en fonction de la situation et de

 16   l'évolution de la situation ?

 17   R.  Lorsqu'il a été nommé commissaire civil, Deronjic avait le pouvoir et

 18   était en droit d'exécuter des actions compte tenu de ses prérogatives. A

 19   part cela, je ne suis pas au courant que des pressions aient été exercées

 20   sur lui.

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous savez s'il recevait des ordres quotidiennement

 22   ou hebdomadairement, est-ce qu'il recevait des ordres qui, en fait,

 23   n'auraient pas correspondu à la structure juridique par rapport à laquelle

 24   il pouvait travailler avec les autorités de Srebrenica ?

 25   R.  Non, je ne suis pas au courant de cela.

 26   Q.  Merci.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vois l'heure qu'il est. Est-ce que le moment

 28   est venu de faire la pause ?


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous allons faire une pause d'une

  2   demi-heure, et nous reprendrons à 11 heures.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

  5   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Madame West.

  7   Mme WEST : [interprétation] Oui. Je voudrais simplement que quelque chose

  8   soit clarifié pour le compte rendu d'audience. Juste avant la pause, M.

  9   Karadzic était en train de poser la question au témoin concernant une

 10   conversation. Je pense que c'est affiché à l'écran. Page 26, et ça commence

 11   à la ligne 18. Le témoin parlait de la séquence vidéo, et à 21, M. Karadzic

 12   dit :

 13   "Et ça c'était la dernière chose que vous avez vue, donc sans doute

 14   le 11, vous auriez pu entendre ma voix.

 15   "Savez-vous qu'il y a eu une conversation entre moi et M. Deronjic ce

 16   jour-là, mais comme les communications avaient été coupées, cela a été fait

 17   par l'intermédiaire d'un médiateur."

 18   Donc, voilà la clarification que je recherche : M. Karadzic a dit "ce

 19   jour-là", et il parle d'une conversation entre un médiateur, et il parle

 20   d'une conversation concernant le 13, car il y a des moyens selon lesquels

 21   M. Karadzic avait eu une conversation avec M. Deronjic le 14 [comme

 22   interprété]. Et il y a seulement deux jours, M. Karadzic a posé à (expurgé)

 23   certaines questions à ce propos aussi, au transcript 24 257, en parlant du

 24   11. (expurgé) donne sa réponse. Et à la ligne 14, M. Karadzic dit :

 25   "Nous avons des preuves que cela s'est fait au travers d'un

 26   intermédiaire."

 27   Donc le résultat de tout ceci c'est qu'aujourd'hui, quand M. Karadzic

 28   a dit ce "jour-là", j'ai besoin de savoir s'il s'agit bien du 13.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel était le jour où on a entendu

  2   la voix de M. Karadzic concernant la nomination de M. Deronjic ?

  3   Mme WEST : [interprétation] C'était le 11.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le 11.

  5   Mme WEST : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de parler de ma façon de

  7   comprendre les choses, est-ce que je peux savoir votre opinion, Monsieur

  8   Karadzic ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien sûr. Je pense que ce que j'ai dit n'a pas

 10   été enregistré dans le compte rendu. Est-ce que vous avez également entendu

 11   la conversation que j'ai eue le 13 par l'intermédiaire d'un médiateur ? Et

 12   j'ai dit que : Vous avez probablement entendu ma voix le 11, mais étiez-

 13   vous présent pendant la conversation que j'ai eue au travers d'un

 14   intermédiaire le 13 ? Il est indubitable que cette conversation-là a eu

 15   lieu le 13. Je pense que c'est le 14 que Deronjic est venu me voir, et il

 16   n'y a pas eu d'autre occasion de lui parler parce qu'il a quitté Bratunac.

 17   Donc il y a une partie qui manque, où il est dit que : Vous avez

 18   probablement entendu ma voix le 11, mais est-ce que vous vous souvenez

 19   qu'il y a eu également cette conversation par le truchement d'un

 20   intermédiaire le 13 ?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   Vous êtes satisfaite, Madame West ?

 23   Mme WEST : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Faites entrer le témoin.

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Katanic. Prenez place.

 27   Continuez, Monsieur Karadzic.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Nous avons parlé de la conversation que vous avez entendue, que vous

  3   avez écoutée. Avez-vous compris que Deronjic voulait que vous entendiez

  4   qu'il avait été nommé à ce poste, ce qui faisait qu'il avait les

  5   compétences et les pouvoirs qu'il fallait pour s'occuper de ces fonctions ?

  6   R.  Eh bien, oui, on pourrait l'interpréter de cette façon-là.

  7   Q.  Merci. C'est vous qui avez préparé cette réunion, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, c'est moi.

  9   Q.  Et c'est vous qui avez invité tous les anciens membres, les

 10   responsables serbes, de même que les responsables serbes qui avaient existé

 11   dans la municipalité serbe de Srebrenica qui a duré quelque temps ? En

 12   d'autres termes, les personnes qui appartenaient aux autorités locales par

 13   le passé et qui s'étaient enfuies.

 14   R.  Oui, en effet. Des gens qui étaient à la tête des sociétés publiques et

 15   des institutions de l'Etat.

 16   Q.  Merci. Donc la tâche de Deronjic, sa mission, consistait à assurer la

 17   continuité du gouvernement; en d'autres termes, à s'assurer qu'une autorité

 18   locale au sein de la municipalité serbe de Srebrenica ? 

 19   R.  Oui, c'est ça.

 20   Q.  Est-il exact de dire qu'à l'époque nous ne savions pas, à savoir le 11

 21   au soir, que tous les Musulmans allaient partir ? Mais avant cela, est-ce

 22   que vous êtes d'accord pour dire que l'on pouvait s'attendre à ce que les

 23   personnes qui ne venaient pas de Srebrenica 

 24   -- eh bien, que ce serait normal de s'attendre à ce que ces personnes-là

 25   quittent Srebrenica, ces gens qui venaient de Cerska ou d'autres endroits ?

 26   R.  Eh bien, à l'époque à Srebrenica, la population avait grossi

 27   considérablement parce que des gens sont venus d'autres municipalités et se

 28   sont rendus à Srebrenica. On ne pouvait pas s'attendre avec certitude à ce


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  1   que toute la population de Srebrenica allait quitter Srebrenica.

  2   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que cela est devenu évident à

  3   partir seulement du 12 juillet, après une série de réunions avec la

  4   FORPRONU, avec Mladic et des représentants Musulmans ?

  5   R.  C'était une décision que le peuple musulman a prise, et ils ont exprimé

  6   cette décision au travers de leurs représentants qui ont participé à la

  7   réunion de l'hôtel Fontana.

  8   Q.  Merci. On va y revenir plus tard. Autre question : est-ce qu'il y a eu

  9   un quelconque dilemme concernant le fait que Deronjic était responsable,

 10   qu'on lui avait donné des attributions concernant l'établissement d'une

 11   autorité civile à Srebrenica, mais qu'aucune de ces compétences ne

 12   s'appliquait à Srebrenica ? En d'autres termes, qu'il n'avait aucune

 13   autorité pour ce qui était de Srebrenica ?

 14   R.  Deronjic a été nommé commissaire civil de la municipalité de

 15   Srebrenica, et cela s'appliquait à Srebrenica seulement.

 16   Q.  Donc, à Bratunac, les autorités légales ont continué à fonctionner, et

 17   Deronjic n'avait aucune autorité pour ce qui était de ces gens-là ?

 18   R.  En tant que commissaire civil à la municipalité de Srebrenica, il

 19   n'avait pas de compétences particulières pour ce qui était de la

 20   municipalité de Bratunac.

 21   Q.  Merci. Maintenant, on vous a posé la question de savoir -- d'ailleurs

 22   vous avez dit au paragraphe 71 de votre déclaration consolidée, et je ne

 23   sais pas si vous l'avez en version B/C/S, mais en tout cas on vous a posé

 24   la question de savoir si Deronjic aurait pu me parler à partir d'un autre

 25   endroit, et vous avez dit qu'une telle possibilité existait, mais il y a eu

 26   autre chose. On vous a demandé si vous saviez si Deronjic m'avait informé,

 27   moi, de l'incident de Kravica le 13 juillet quand il m'a rendu visite le 14

 28   juillet. Vous avez dit que vous ne le saviez pas, que vous n'étiez pas au


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  1   courant de cela, mais que, pour autant que vous le sachiez et tel que vous

  2   le connaissiez, c'était possible car certains d'entre eux étaient civils et

  3   d'autres étaient des combattants.

  4   Donc je vais vous poser une autre question : avant qu'il ne soit parti pour

  5   Pale très tôt le matin le 14, est-ce qu'il y a eu une autre affaire que

  6   Deronjic -- disons, est-ce qu'il y a eu d'autres incidents dramatiques ou

  7   des meurtres que Deronjic aurait pu vouloir me tenir au courant ?

  8   R.  Je ne sais pas. Non, je n'en connais pas.

  9   Q.  Merci. Le 14, après votre arrivée au travail le 14, vous avez appris

 10   qu'il y avait eu des cadavres trouvés dans les locaux de l'école, n'est-ce

 11   pas ?

 12   R.  Oui. C'est ma famille qui me l'a appris, car ma maison se trouvait

 13   proche des locaux de l'école, et c'est ainsi que nous avons appris qu'un

 14   certain nombre de personnes y avaient été tuées.

 15   Q.  Merci. Et aux paragraphes 72 et suivants, vous parlez -- par exemple,

 16   82, je vais vous lire le paragraphe en anglais :

 17   "Le jour suivant, les prisonniers musulmans ont été emmenés de Bratunac. Je

 18   ne les ai pas vus partir. J'ai entendu à partir des médias publics que la

 19   plupart des prisonniers avaient été emmenés à la municipalité de Zvornik.

 20   Probablement, certains d'entre eux ont été emmenés ailleurs. Je ne pense

 21   pas que qui que ce soit de Bratunac pourrait les aider. Miroslav Deronjic a

 22   essayé d'empêcher que certaines personnes soient emprisonnées ici."

 23   Mme WEST : [interprétation] Pour le procès-verbal, il s'agit du paragraphe

 24   83.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Donc vous avez vu de vous-même que Deronjic ne voulait pas que les

 28   prisonniers restent sur place, et à l'époque personne n'était au courant


Page 24497

  1   des meurtres ?

  2   R.  Si vous me le permettez, je voudrais me référer au résumé de ma

  3   déclaration qui avait été lu par le bureau du Procureur, où elle a dit

  4   quelque chose qui ressemble à ça, ces personnes ayant été assassinées. Mais

  5   dans toutes mes déclarations jusqu'ici, j'ai toujours dit que dans ce cas

  6   particulier, la question était la suivante, à savoir le fait qu'on fasse

  7   prisonnières ces personnes à Bratunac, car tous ces prisonniers avaient été

  8   arrêtés dans différentes municipalités et ensuite avaient été ramenés à

  9   Bratunac et seulement à Bratunac. Moi, j'ai dit que je pensais que M.

 10   Karadzic avait aidé Deronjic parce que ces prisonniers n'avaient pas été

 11   mis en détention à Bratunac, ou ne devraient pas être mis en détention à

 12   Bratunac, mais plutôt répartis dans différentes municipalités, car

 13   autrement ce serait un très gros fardeau pour la municipalité de Bratunac,

 14   qui avait déjà une grosse charge financière à supporter.

 15   Q.  Merci. D'ailleurs, dans le paragraphe suivant, vous le mentionnez. Est-

 16   ce que vous vous souvenez que M. Deronjic était en colère avec M. Dukic car

 17   les prisonniers qui avaient été arrêtés dans sa municipalité avaient été

 18   envoyés à Bratunac ?

 19   C'est au paragraphe 94, vous en faites mention. Vous ne parlez pas de

 20   Dukic, mais de Milici. Est-ce que vous vous souvenez que c'était la raison

 21   pour laquelle il était en colère, pourquoi ils n'avaient pas été tenus dans

 22   leur propre municipalité mais plutôt envoyés à Bratunac ?

 23   R.  Oui, c'est exactement ce que j'essayais de dire il y a quelques

 24   instants.

 25   Q.  Merci. Est-ce que vous étiez au courant, par hasard, du fait qu'il y

 26   avait eu un ordre -- ou plutôt, un message selon lequel 1 000 personnes

 27   allaient devoir être reçues à Batkovic et qu'à Rogatica il fallait

 28   également préparer des locaux pour que des prisonniers puissent y être


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  1   reçus ?

  2   R.  Je ne suis pas au courant. Cependant, Miroslav Deronjic m'a dit qu'il

  3   rencontrait des problèmes majeurs avec le lieutenant-colonel Beara. Il ne

  4   voulait pas qu'ils soient mis en détention sur le territoire de la

  5   municipalité de Bratunac, et quand on les a emmenés de Bratunac en autobus,

  6   j'ai dit que je pensais que M. Karadzic l'avait aidé pour convaincre Beara

  7   de les envoyer ailleurs.

  8   Q.  Est-ce que Deronjic vous a dit que pendant cette conversation, il lui a

  9   dit qu'il irait à Pale le lendemain pour parler au président de tout ceci

 10   et que c'est ainsi que Beara a  finalement été convaincu qu'il fallait ne

 11   plus réceptionner les prisonniers dans l'usine de briques ou ailleurs ?

 12   R.  Oui, plus ou moins. Oui.

 13   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que Batkovic était le seul camp de

 14   prisonniers de guerre, le seul qui soit bien connu, en même temps que

 15   Manjaca, et qu'il y a eu des échanges à partir de ce camp ?

 16   R.  Non, je ne suis pas au courant.

 17   Q.  Nous avons fait allusion à ceci précédemment. Vous avez dit que les

 18   gens à Bratunac étaient bouleversés par la présence de tous ces

 19   prisonniers, qu'ils n'étaient pas à l'aise. Est-il exact de dire que ceux

 20   qui n'étaient pas aptes au combat montaient la garde sur ces prisonniers

 21   afin de les protéger de ceux qui voudraient se venger, mais en même temps

 22   ils étaient là pour préserver la ville vis-à-vis des prisonniers à

 23   proprement parler, eux-mêmes ?

 24   R.  Oui, c'est exact. J'étais au bureau au moment où certains citoyens très

 25   préoccupés sont rentrés. Ils se faisaient du souci pour leur sécurité, car

 26   il y avait énormément de prisonniers dans la ville, dans les autobus, dans

 27   les cars et sur les camions, et il n'y avait pas de gardes suffisant, il

 28   n'y avait pas un système pour les garder convenable. J'en ai informé le


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  1   poste de police, et ensuite ils ont pris l'initiative de rajouter des

  2   moyens de sécurité. L'armée avait continué en direction de Zepa.

  3   Q.  Est-il exact de dire qu'il y avait un très petit nombre de personnes

  4   qui gardaient les prisonniers ? Je recherche un paragraphe précis. Là où

  5   vous dites que s'ils avaient su à quel point Bratunac était peu sûre, eh

  6   bien, ils se seraient rebellés.

  7   R.  Oui, c'est exact. Des gardes supplémentaires ont été fournis par ce

  8   qu'on appelle la troisième série de personnes appelées, qui autrement,

  9   normalement, n'étaient pas aptes au service militaire et en général

 10   n'étaient pas appelées.

 11   Q.  Est-ce que vous avez remarqué que la protection civile de Bratunac a

 12   pris des mesures pour s'occuper de la sécurité des personnes, des civils, à

 13   Potocari, de même que de fournir de l'eau aux prisonniers qui étaient dans

 14   les cars ? Est-ce que vous avez quelque chose à dire à ce propos ?

 15   R.  Les autorités municipales ont mis en oeuvre certaines mesures au

 16   travers de leurs services de façon à ce que les prisonniers reçoivent ou

 17   voient leurs besoins élémentaires satisfaits, y compris ceux qui étaient

 18   dans les autocars et ceux qui étaient à Potocari. En d'autres termes, ils

 19   leur donnaient de la nourriture et de l'eau.

 20   Q.  Je vais vous poser une autre question : à quel moment vous êtes-vous

 21   rendu compte que quelque chose se passait autour de Srebrenica ? Est-ce

 22   qu'il est exact de dire que vous vous en êtes rendu compte seulement une

 23   fois que vous ayez vu l'arrivée en force de l'armée ?

 24   R.  Je ne me rendais pas compte qu'il allait y avoir quelque chose autour

 25   de Srebrenica pendant pas mal de temps. D'ailleurs, je crois que

 26   l'opération était déjà bien enclenchée au moment où on pouvait s'en rendre

 27   compte, se rendre compte que l'objectif était Srebrenica.

 28   Quelques jours avant qu'ils ne rentrent à Srebrenica, Miroslav


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  1   Deronjic a quitté la ville sans en informer personne. Personne au sein du

  2   parti n'en a été informé. Il s'est rendu au poste de commandement avancé de

  3   Pribicevac. Il a passé trois jours là-bas sans revenir à Bratunac. Ce n'est

  4   qu'à son retour qu'il m'a dit qu'une opération était en cours autour de

  5   Srebrenica.

  6   A ce moment environ, le général Mladic est arrivé à Bratunac également.

  7   Tous les hommes en âge de porter les armes qui étaient, en quelque sorte,

  8   inclus dans ce programme d'obligation de travail sont venus se présenter au

  9   lieu d'aller se présenter en cas d'affectation de guerre. Moi aussi, par

 10   exemple, je suis allé au 2e Bataillon. On savait du général Mladic à quel

 11   point il détestait voir en ville des hommes en âge et en état de porter les

 12   armes.

 13   Donc, lorsque le général Mladic est arrivé à Bratunac, à ce moment-là et

 14   seulement à ce moment-là, je me suis dit et je me suis rendu compte qu'ils

 15   allaient s'occuper de Srebrenica.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame West.

 17   Mme WEST : [interprétation] Excusez-moi pour l'interruption. Mais à la page

 18   29, lignes 5 à 7 du compte rendu d'audience, est-ce que nous pourrions

 19   avoir une expurgation de ces lignes. Donc, lignes 5 et 7.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Merci.

 21   Vous pouvez reprendre votre contre-interrogatoire, Monsieur Karadzic.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. Je n'ai pas très bien saisi, en fait.

 23   Je ne sais pas de quoi il s'agit, mais bon, je ne vais pas soulever

 24   d'objection à propos d'une expurgation si elle est nécessaire.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Moi, je voulais plutôt attirer votre attention sur le paragraphe 93,

 27   dont je vais vous donner lecture en anglais :

 28   "Deronjic a déclaré qu'à ce moment-là Beara était à la recherche d'un


Page 24501

  1   endroit, probablement pour tuer les prisonniers, là à Bratunac. Je pense

  2   que Karadzic a aidé Deronjic, ce qui fait que ces prisonniers ont été

  3   transportés hors de Bratunac et n'ont pas été tués à Bratunac. Je pense

  4   qu'il y avait d'un côté une direction militaire à Bratunac représentée par

  5   Mladic et son officier haut gradé Beara et, par ailleurs, il y avait

  6   également le représentant civil, à savoir Deronjic. Et je pense que

  7   Deronjic tout seul ne pouvait pas se défendre et a imposé sa volonté à un

  8   colonel de l'état-major principal de la VRS."

  9   Donc j'aimerais vous demander une précision à ce sujet. Vous avez formulé

 10   cette phrase de la sorte parce que vous avez appris par la suite que ces

 11   personnes avaient été tuées, ou est-ce que vous saviez à ce moment-là que

 12   Beara avait demandé que ces prisonniers soient soit tués sur-le-champ ou

 13   emprisonnés là-bas ?

 14   R.  C'est une question que vous me posez à moi ?

 15   Q.  Oui.

 16   R.  Eh bien, j'ai fait référence au résumé de ma déclaration présentée par

 17   Mme le Procureur. Et ce que j'avais dit, c'est que je ne l'avais pas dit

 18   auparavant. Ce sont des éléments que l'on a trouvés dans la version

 19   abrégée. Car j'ai toujours dit que le fond du problème, c'était

 20   l'emprisonnement. Parce qu'à ce moment-là, à l'époque, on ne savait pas que

 21   ces personnes allaient être tuées.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi est-ce que nous n'avons pas

 23   affiché la déclaration consolidée ? Page 18 pour ce qui est du document

 24   papier, paragraphe 93.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Paragraphes 91, 92 et 93.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un petit moment, je vous prie.

 27   Au paragraphe 92, voilà quelle est la première phrase, Monsieur Katanic :

 28   "Deronjic avait dit que Beara avait envoyé des gens pour trouver des


Page 24502

  1   endroits où ils auraient pu emprisonner des prisonniers musulmans dans la

  2   briquerie et dans les mines de Sase."

  3   Et au paragraphe 93, voilà ce que nous voyons, je vais vous en donner

  4   lecture :

  5   "Deronjic a déclaré qu'à ce moment-là, Beara était en train de chercher un

  6   endroit, probablement pour tuer les prisonniers à Bratunac. Et je pense que

  7   Karadzic a été aidé par Deronjic pour que ces prisonniers soient

  8   transportés hors de Bratunac et n'ont pas été tués à Bratunac."

  9   M. Karadzic vous a posé une question à propos de ce paragraphe 93.

 10   Monsieur Karadzic, vous pouvez reposer votre question au témoin.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Au paragraphe 93 ainsi qu'au paragraphe 92 d'ailleurs, vous dites qu'à

 14   ce moment-là il avait été demandé aux autorités civiles de chercher un

 15   endroit pour y placer tous ces prisonniers pour que ces personnes puissent

 16   être emprisonnées, et tout à coup au paragraphe 93 nous avons cette

 17   référence à ce lieu qui serait utilisé probablement pour tuer les

 18   prisonniers.

 19   Donc est-ce qu'il était clair à ce moment-là que ces personnes allaient

 20   être tuées, ou est-ce que cet élément se retrouve dans le paragraphe parce

 21   que vous avez appris par la suite que ces personnes avaient été tuées ?

 22   R.  Moi je ne me souviens pas avoir déclaré cela au paragraphe 93. J'ai

 23   signé certes le document, mais je dois vous dire que j'ai bien sûr signé le

 24   document, mais j'ai signé le document alors que je ne disposais pas d'une

 25   version serbe du document.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Katanic --

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- là vous faites référence au fait que


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  1   des personnes ont été tuées, et je vois qu'il y a une citation, une

  2   référence à une note en bas de page, et là la référence c'est votre

  3   audition. Donc est-ce que vous souhaiteriez peut-être revoir cela, vous

  4   avez un enregistrement ?

  5   Mme WEST : [interprétation] Oui, tout à fait. Je pense que oui, cela émane

  6   directement de l'audition. Je pense que nous l'avons en B/C/S, mais les

  7   notes en bas de page renvoient effectivement à des citations de l'audition.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. C'est pour cela que j'ai demandé à

  9   M. Katanic s'il souhaiterait voir la transcription de cette audition avec

 10   le bureau du Procureur. C'est bien le bureau du Procureur, Madame West,

 11   n'est-ce pas ?

 12   Mme WEST : [interprétation] Oui.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas la peine. Je fais confiance

 14   à ce qui a été écrit. Mais peut-être que la question m'a été posée de façon

 15   si directrice que j'ai répondu comme je l'ai fait sans pour autant penser

 16   véritablement au poids de mes propos, et maintenant je me rends compte de

 17   ce que cela signifie.

 18   Mais le fait est que cela s'est passé. Ces personnes ont bel et bien été

 19   tuées. Mais à ce moment-là, comme nous pouvons le voir dans le paragraphe

 20   précédent, je ne parle absolument pas de ces assassinats, parce que je ne

 21   m'attendais pas à ce que les prisonniers soient tués.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais m'abstenir de poser une

 23   question, mais une fois de plus je me vois dans l'obligation d'intervenir.

 24   Regardez le paragraphe 83 qui figure à la page précédente. A la fin du

 25   paragraphe, Monsieur Katanic, voilà ce que vous dites :

 26   "Miroslav Deronjic a essayé de préserver l'honneur de Bratunac pour éviter

 27   qu'ils soient emprisonnés là-bas."

 28   Donc j'aimerais poser une question, Monsieur Katanic : pourquoi est-ce que


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  1   Bratunac aurait été déshonorée si à Bratunac devaient être emprisonnés les

  2   prisonniers ? Je comprendrais si la phrase était si les prisonniers

  3   allaient être tués à Bratunac, je comprends là le déshonneur pour la ville

  4   de Bratunac, ou je pourrais comprendre que ces prisonniers auraient

  5   représenté un fardeau, que le fait de les emprisonner aurait été un

  6   fardeau, mais là je dois vous dire qu'il est quand même un tant soit peu

  7   difficile de comprendre pourquoi le fait d'emprisonner ces prisonniers

  8   allait être une source de déshonneur pour Bratunac.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, Monsieur le Président, les

 10   prisonniers étaient ces personnes qui s'étaient rendues de façon tout à

 11   fait volontaire parce que la police à l'aide de haut-parleurs demandait à

 12   la population qui se déplaçait de Srebrenica vers Tuzla, et s'adressait à

 13   cette population, on leur demandait de se rendre en disant que leur

 14   sécurité allait absolument être garantie et préservée, que l'armée serbe

 15   garantissait leur sécurité et que de ce fait, rien ne leur arriverait.

 16   Et dans les colonnes où se trouvaient les personnes qui se sont

 17   rendues, il y avait un nombre assez important de civils, il s'agissait

 18   probablement de personnes qui ne méritaient pas en quelque sorte d'être

 19   traitées comme prisonniers de guerre. Et je pense que c'est une explication

 20   pour comprendre l'honneur, cette notion d'honneur.

 21   Il est possible que lors de cette audition, ce qui s'était passé

 22   était vraiment de notoriété publique, à ce moment-là nous savions tout, il

 23   faut savoir quand même que cela s'est passé quasiment 20 ans après les

 24   événements, l'audition j'entends. Et lorsque l'on savait pertinemment que

 25   ces prisonniers avaient été tués, c'est peut-être dans ce contexte que la

 26   déclaration a été faite.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Katanic.

 28   Monsieur Karadzic, je vous en prie, poursuivez.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  A ce sujet, je vais poser une autre question : est-ce qu'il y avait

  3   suffisamment d'infrastructures à Bratunac pour pouvoir légalement prendre

  4   en charge un si grand nombre de prisonniers ?

  5   R.  Bratunac comportait des infrastructures, mais pas suffisamment. Même

  6   les critères les plus basiques n'auraient pas été  satisfaits.

  7   Q.  Merci. Vous avez mentionné le fait qu'il s'agissait peut-être d'une

  8   question directrice. Mais je vais poser la question suivante : comment vos

  9   réponses ont-elles été formulées ? Est-ce qu'elles ont été retranscrites

 10   directement depuis l'enregistrement, ou est-ce que quelqu'un vous a aidé à

 11   formuler les réponses que vous avez données pendant cette audition ?

 12   R.  Mon audition a été enregistrée, un enregistrement audio en a été fait.

 13   Ensuite on a retranscrit son contenu, un des enquêteurs l'a écrite à la

 14   machine à écrire en anglais. Après l'audition, on m'a remis ce document

 15   afin de le signer.

 16   Q.  Parlez-vous anglais ?

 17   R.  On pourrait dire que non, car je connais quelques mots seulement.

 18   Disons que ce n'est même pas suffisant pour pouvoir se comprendre dans un

 19   hôtel.

 20   Q.  Bien. Au paragraphe -- non, en fait, à la page -- disons, les

 21   paragraphes 83, 84 et suivants. Vous prenez comme hypothèse que mon

 22   autorité avait aidé, car vous pensiez que Deronjic ne pourrait pas

 23   s'opposer à un membre de l'état-major tout seul. Vous avez également

 24   confirmé que Deronjic ne vous en avait pas informé, mais qu'il avait réussi

 25   à empêcher que cela ne se passe à Bratunac, cette détention, et vous

 26   imaginez que cela s'est produit de cette façon-là parce qu'il a parlé de

 27   moi, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, j'ai imaginé que vous lui aviez prêté main-forte pour obtenir ce


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  1   résultat.

  2   Q.  Bien, merci. C'est le paragraphe 93 qui porte là-dessus, n'est-ce pas ?

  3   "Deronjic a été assisté par Karadzic de façon à ce que les

  4   prisonniers ont pu être transférés hors de Bratunac et n'ont pas été tués à

  5   Bratunac. Je ne sais pas si Deronjic a parlé de ce sujet avec Karadzic. Si

  6   Karadzic a dit à Deronjic que tous les Musulmans devraient être tués, comme

  7   je l'ai lu dans un journal, c'est un petit peu bizarre qu'il ne me tienne

  8   pas au courant."

  9   En êtes-vous convaincu de ce que vous avez dit, à savoir que si

 10   j'avais dit à Deronjic qu'ils devraient être tués, Deronjic vous aurait

 11   sans doute répété cela ?

 12   R.  Eh bien, c'est un petit peu bizarre étant donné le personnage de

 13   Deronjic, lui il aimait dire : J'étais aujourd'hui avec Karadzic, ou,

 14   aujourd'hui j'ai parlé avec M. Karadzic, car cela lui donnait le sentiment

 15   d'être important également. Après tout, tout le monde n'avait pas la

 16   possibilité de parler avec M. Karadzic personnellement. Et quand il disait

 17   j'ai parlé avec M. Karadzic, il en tirait le sentiment d'avoir un certain

 18   poids. Et c'est pour cela que j'ai déclaré que lui, en tant que personne

 19   qui aimait à faire savoir qu'il avait parlé avec M. Karadzic, ne m'a jamais

 20   dit cela et n'a jamais dit cela à qui que ce soit.

 21   Q.  Merci. Si j'avais su que nous allions parler de ce sujet, j'aurais

 22   apporté quelque chose.

 23   Est-ce que vous savez que feu Pr Koljevic, en fait que son agenda a

 24   été publié après sa mort : "La création de la Republika Srpska," deux

 25   volumes ?

 26   R.  Non, je ne suis pas au courant.

 27   Q.  Si je devais vous dire que Koljevic lui aussi a écrit qu'il s'était

 28   rencontré avec notre commissaire civil au bout d'un mois ou un mois et demi


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  1   et lui a demandé qu'est-ce qui s'est passé véritablement à Srebrenica, et

  2   il a dit que Deronjic lui a répondu : Professeur, rien ne s'est passé. Est-

  3   ce que c'est compréhensible, selon vous ? Est-ce que c'est conforme avec ce

  4   que vous-même avez dit à propos de ce qu'il était enclin à dire ou pas

  5   enclin à dire ?

  6   R.  Pour ce qui est de cette conversation avec M. Koljevic, je n'étais pas

  7   au courant, et cela n'a pas beaucoup de sens pour moi.

  8   Q.  Est-ce que vous vous attendiez normalement à ce que M. Deronjic dise

  9   une telle chose ? Est-ce que c'est conforme à votre connaissance de ce que

 10   Deronjic aurait pu dire ?

 11   Mme WEST : [interprétation] Objection. Il a déjà répondu à la question.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Continuez.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] A ce moment-là, je demande le versement de ce

 14   journal.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Dans un de ces paragraphes, vous dites que ces autocars qui contenaient

 17   les prisonniers étaient en train de prendre le départ et que personne ne

 18   connaissait leur destination et leur destinée. C'est au paragraphe 91. Vous

 19   dites que même Miroslav ne savait pas quel sort leur était réservé.

 20   R.  Je pense que les citoyens de Bratunac et ceux qui ont participé en tant

 21   qu'escortes au déplacement des autobus jusqu'à leur destination n'étaient

 22   pas au courant du destin des prisonniers.

 23   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que c'était normal pour

 24   eux de se rendre en direction de Zvornik et Bijeljina, car Batkovic se

 25   trouve à côté de Bijeljina ?

 26   R.  A ce moment précis, je ne connaissais pas leur destination.

 27   Q.  Merci. Je ne sais pas si vous avez abordé ceci. Est-ce que vous avez

 28   été au courant de la raison qui était à l'origine de ces tueries à la


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  1   coopérative de Kravica le 13 juillet 1995 ? Est-ce que vous avez entendu

  2   parler de la façon dont ça s'est passé ? Est-ce que ça avait été projeté et

  3   préparé ou est-ce qu'il s'est produit quelque chose ?

  4   R.  Pour ce qui s'est passé à Kravica, c'est Deronjic qui m'en a informé le

  5   même soir, simplement sous forme de transmission d'informations, parce que

  6   lui-même n'était pas au courant des détails. Plus tard, j'ai découvert qu'à

  7   l'origine de cette tuerie il y a eu un incident, un incident qui a pris

  8   plus ou moins la forme suivante : l'un des prisonniers s'est emparé d'un

  9   fusil automatique tenu par un garde et a tué un autre garde. C'est pour

 10   cette raison que les choses se sont produites de la façon dont elles se

 11   sont produites.

 12   Et savoir si, oui ou non, cela aurait pu être empêché ou contrôlé, ça

 13   je ne le sais pas.

 14   Q.  Merci. Avez-vous eu connaissance du nombre de gardes qui s'occupaient

 15   de garder ces personnes à Kravica, à la coopérative, au moment où cet homme

 16   a osé s'emparer d'un fusil et de tirer des coups de feu ?

 17   R.  Non, je n'ai pas de connaissance à propos de ce qui s'est passé avant

 18   ou après quant au nombre de gardes présents.

 19   Q.  Aviez-vous connaissance du fait qu'il s'agissait de personnes qui

 20   avaient été faites prisonnières dans la zone de Sandici pendant la journée,

 21   ou est-ce que quelqu'un vous a donné un chiffre fiable pour estimer le

 22   nombre de personnes présentes ?

 23   R.  Non, je n'avais aucune connaissance à ce propos.

 24   Q.  Merci. Avez-vous appris -- non, en fait, parmi les attributions de la

 25   protection civile, est-ce qu'il y avait également la tâche d'enterrer les

 26   cadavres, et est-ce que vous avez entendu parler du fait que ces personnes

 27   qui avaient été tuées avaient été enterrées aussi ?

 28   R.  La protection civile, oui, en effet, devait s'occuper de


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  1   l'assainissement du terrain. Je ne sais pas s'ils ont été enterrés, et si

  2   c'est le cas, je ne sais pas où.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on afficher la pièce 1D4098 dans le

  4   prétoire électronique, s'il vous plaît.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Est-il exact de dire qu'en 1992, le président du gouvernement municipal

  7   -- c'est-à-dire, du Conseil exécutif municipal était M. Rodoljub Djukanovic

  8   ?

  9   R.  Oui, c'est vrai.

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez vous intéresser maintenant à ce texte. C'est

 11   bien le 25 juin 1992 que cet ordre a été donné, et il concerne l'endroit

 12   qui va devoir être désigné pour enterrer les restes des personnes qui ont

 13   perdu la vie pendant la guerre dans la ville de Bratunac et dans les

 14   parages, c'est-à-dire sur le territoire de la municipalité de Bratunac ?

 15   R.  Oui, c'est exact.

 16   Q.  Et vous êtes d'accord pour confirmer qu'il est dit ici qu'après

 17   identification, l'on procédera à l'ensevelissement, soit conformément au

 18   souhait des proches, soit -- est-ce que je peux peut-être vous donner un

 19   peu de temps pour que vous puissiez le lire ?

 20   R.  C'est bon, je l'ai lu. Cet ordre concerne le fait que les cadavres

 21   identifiés comme Musulmans sont enterrés au cimetière musulman; et quant

 22   aux cadavres orthodoxes, ils seront enterrés au cimetière serbe orthodoxe.

 23   Q.  Mais il y a eu tant de morts que l'on n'a pas pu respecter cela ?

 24   R.  Oui, c'est vrai.

 25   Q.  Merci.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on examine la page suivante,

 27   s'il vous plaît.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'anglais aussi, s'il vous plaît.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  C'est un document type émanant du gouvernement municipal, n'est-ce pas

  3   ?

  4   R.  Oui.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'en demande le versement.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pertinence, Monsieur Karadzic ? En

  7   quoi est-ce que ce document est pertinent ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, de toute évidence, les autorités

  9   municipales de Bratunac veillaient aussi, à partir du moment où on a vu

 10   qu'il allait y avoir la guerre, ils veillaient aussi à la question de

 11   l'enterrement des morts. Cela nous donne des informations sur les activités

 12   du gouvernement et sur l'attitude adoptée par le gouvernement.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Le document est versé

 14   au dossier.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document D2059.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Je pense qu'après la pause nous aurons l'occasion de reparler des

 19   événements de 1995. Mais pour le moment, je vais plutôt m'intéresser au

 20   début de la crise, aux événements qui se sont produits entre 1990 et 1992.

 21   Donc je vais vous demander la chose suivante : est-il exact --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pour que l'on puisse

 23   s'organiser, je tiens à dire que nous aurons une pause de 15 [comme

 24   interprété] minutes uniquement, donc la prochaine pause. Et je remercie le

 25   personnel d'accepter cela.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, après nous travaillerons jusqu'à 15

 27   heures; c'est bien ça ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après la pause. Mais, s'il vous plaît,


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  1   parler de l'année 1995 le plus rapidement possible.

  2   Oui, Maître Robinson.

  3   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, justement. Je me félicitais de voir M.

  4   Karadzic suivre mon conseil pour une fois. Je lui ai dit de s'intéresser

  5   tout d'abord aux choses les plus importantes, donc nous avons déjà épuisé

  6   la plupart des questions concernant l'année 1995.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Robinson.

  8   Veuillez continuer.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. S'il reste encore des questions

 10   concernant 1995, j'y reviendrai après la pause. J'espère que nous aurons la

 11   possibilité de tout voir aujourd'hui avec ce témoin, qui répond très

 12   aimablement à toutes mes questions.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Donc, Monsieur Katanic, est-ce que vous acceptez le fait que le système

 15   précédent était un système unipartite, et dans le cadre de celui-ci les

 16   Serbes et les Musulmans se partageaient le pouvoir à Bratunac mais sous

 17   l'égide de la Ligue des Communistes ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-il exact de dire --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, les interprètes n'ont

 21   pas entendu la fin de votre question.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ils se sont partagés le pouvoir, ou plutôt, ils

 23   partageaient le pouvoir sur le plan local, mais ils étaient placés sous

 24   l'égide de la Ligue des Communistes, c'est ce que j'ai demandé. La Ligue

 25   des Communistes était le seul parti en place à l'époque. Et le témoin a

 26   répondu oui à cette question.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Est-il exact de dire que ce qui se constituait dans un premier temps,

  2   c'était le Parti de l'Action démocratique, que ce soit au niveau de la

  3   république ou au niveau municipal à Bratunac, et puis que c'est par la

  4   suite qu'a vu le jour le SDS, le Parti démocrate serbe ?

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Est-il exact de dire, et d'ailleurs vous en parlez dans un de vos

  7   paragraphes, est-il exact que ceux qui sont devenus membres du SDS

  8   c'étaient pour l'essentiel ceux qui pendant longtemps avaient été dans

  9   l'opposition, des dissidents; de toutes les manières, c'étaient des gens

 10   qui étaient anticommunismes par leur orientation politique ?

 11   R.  Ce que je peux vous dire en réponse, c'est que moi-même et Miroslav

 12   Deronjic, nous étions ceux qui n'avaient déployé aucune activité politique

 13   avant la création du Parti démocrate serbe. Je peux également déclarer que

 14   dans un premier temps, il y a eu beaucoup de gens qui ont rejoint le Parti

 15   démocrate serbe parmi ceux qui, également, n'avaient eu aucune activité

 16   politique avant ce moment-là.

 17   Q.  Merci. Est-il exact que M. Deronjic, même avant la création des partis

 18   politiques, avait été quelqu'un qu'on respectait à Bratunac ?

 19   R.  Miroslav Deronjic, c'était un professeur. Il enseignait la littérature

 20   dans une école dans une municipalité de Srebrenica, et il a aussi travaillé

 21   à la bibliothèque de l'école. C'était quelqu'un de très respecté dans la

 22   municipalité de Bratunac.

 23   Q.  Merci. Est-il exact de dire que même avant la création des partis

 24   politiques, il a pris la parole une fois lors d'un rassemblement - organisé

 25   par les communistes - et que, par ce discours, il s'est fait remarqué parce

 26   que c'est de manière très déterminée qu'il s'est exprimé et s'est opposé à

 27   toute manipulation lancée par les communistes, tout ce qu'ils ont essayé de

 28   faire pour se maintenir au pouvoir ?


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  1   R.  Je ne présenterais pas les choses de cette manière-là.

  2   Q.  Alors, exprimez-vous par vos propres mots, s'il vous plaît.

  3   R.  La Ligue des Communistes, avant les premières élections législatives

  4   pluripartites, a organisé une table ronde à Bratunac, et le sujet

  5   m'échappe, mais je peux vous dire que Miroslav Deronjic et moi-même avons

  6   participé à cette table ronde. On a invité à ce moment-là des intervenants

  7   de Sarajevo qui étaient sur la droite ligne du parti à l'époque. Ils ont

  8   parlé pendant deux heures environ, et c'est quelque chose qui a agressé

  9   Miroslav Deronjic. Il est monté sur la tribune, et en trois mots, il a pu

 10   dire beaucoup plus que tout ce qui avait été dit précédemment par

 11   l'ensemble des intervenants.

 12   Quant à moi, j'ai été très impressionné par cela, parce que Miroslav

 13   Deronjic n'était pas quelqu'un que je connaissais, ou plutôt, je ne l'avais

 14   jamais vu sous cet angle-là. Je suppose que dans le public, il y a eu

 15   d'autres personnes qui ont eu la même impression que moi. C'est ce que je

 16   suppose.

 17   Q.  Donc, est-ce que c'est à cause de cela que Deronjic a été élu

 18   localement chef du SDS par la suite ? Et au paragraphe 11, vous dites que

 19   vous n'êtes pas sûr que Radovan Karadzic connaissait Deronjic. Est-ce que

 20   vous maintenez cela ?

 21   R.  Je ne pense pas que M. Deronjic était quelqu'un que M. Karadzic

 22   connaissait à l'époque. Mais à l'époque, on avait déjà le SDA et le HDZ au

 23   niveau de la république. Ces deux partis politiques ont déjà été créés à ce

 24   moment-là. Et dans la ville, il y avait des commentaires disant que le

 25   peuple serbe doit commencer à s'organiser sur le plan politique, qu'il

 26   était temps qu'ils le fassent. Donc on s'organisait pour se rencontrer, et

 27   lors de ces rencontres, on voulait se mettre d'accord sur la création d'un

 28   comité d'initiative qui allait se charger de créer le Parti démocrate serbe


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  1   de Bratunac.

  2   Un jour, lorsqu'on jouait aux cartes au motel sur la Drina, puisque j'avais

  3   eu vent d'une telle rencontre ou réunion qui allait s'organiser, j'ai dit à

  4   Miroslav qu'on pourrait s'y rendre tous les deux pour voir de quoi il

  5   s'agissait. Il a accepté. Et à partir de ce moment-là, son avenir allait se

  6   dérouler au sein du Parti démocrate serbe.

  7   Q.  Je vais à présent vous présenter les choses de manière résumée, et vous

  8   allez pouvoir me répondre par un oui ou un non, si vous êtes d'accord.

  9   Alors l'initiative consistant à vouloir créer le SDS, c'était une

 10   initiative qui était motivée aussi par le sentiment qu'il était nécessaire

 11   que les Serbes fassent la même chose que les Croates et les Musulmans,

 12   quelque chose que les autres avaient déjà fait, et que c'est quelque chose

 13   qui est issu de Bratunac même, que ce n'est pas quelque chose qui soit venu

 14   du haut ?

 15   R.  Oui. A Bratunac, oui.

 16   Q.  Merci. Est-ce qu'il exact de dire qu'ils n'ont pas réussi à s'assurer

 17   de ma présence pour l'assemblée constituante à Bratunac, que je n'ai pas pu

 18   venir et que ça s'est passé en mon absence ?

 19   R.  Oui. Et nous l'avons beaucoup regretté.

 20   Q.  Et au niveau central de la république, est-ce qu'il est exact de dire

 21   que personne ne s'est ingéré à des questions d'élection de membres du

 22   conseil municipal ou de différents comités municipaux, voire du président

 23   municipal ? Est-ce qu'il est exact de dire qu'il n'y a eu aucune ingérence

 24   venue d'en haut ?

 25   R.  Oui, c'est vrai. Nous nous sommes organisés sans aucune aide ou

 26   assistance venue du niveau de la république.

 27   Q.  Merci. Au paragraphe 12, vous dites que vous aviez la sensation que

 28   l'on ne comprenait pas très bien ce que vous vous apprêtiez à faire au


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  1   niveau de la république, on ne le comprenait pas bien, et ce, par rapport à

  2   l'aide ou l'assistance que vous auriez pu recevoir du niveau républicain ou

  3   central ?

  4   R.  Nous avons été aidés par M. Micevic - je pense que c'était ça son nom

  5   de famille - il nous a donné quelques petits drapeaux, des badges, du

  6   matériel de propagande, mais pas en grande quantité. Mais mis à part cela,

  7   du niveau central, nous n'avons reçu aucune aide.

  8   Q.  Merci. Donc on peut dire que vous vous êtes organisés tous seuls, vous

  9   avez créé le parti et vous l'avez emporté aux élections tous seuls ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous dites que la situation était idyllique, c'est le terme que vous

 12   employez. Donc, êtes-vous d'accord pour confirmer que les Serbes et les

 13   Musulmans se sont partagés le pouvoir dans un premier temps et que la Ligue

 14   des Communistes n'y a plus participé, que dans un premier temps c'était

 15   dans une ambiance de coopération, de bonne relation, et que ce partage du

 16   pouvoir s'est bien passé ?

 17   R.  Après les élections, le Parti démocrate serbe et le SDA, donc les

 18   partis qui avaient remporté les élections, ont partagé le pouvoir au sein

 19   du gouvernement local. On peut dire que nous étions des partenaires dans

 20   une coalition et que tout se passait normalement. Notre opposant sur le

 21   plan idéologique à tous les deux était la Ligue des Communistes, ou tel

 22   qu'on l'a dénommée par la suite, le SDP.

 23   Q.  Merci. Est-il exact que le pouvoir était partagé conformément aux

 24   bonnes coutumes ? C'est-à-dire, si le président de la municipalité était un

 25   Musulman, alors le président du Conseil exécutif serait un Serbe. Si le

 26   chef de la police était un Musulman, alors le commandant de la police était

 27   un Serbe. Et est-ce qu'on avait cela à tous les niveaux de tous les postes

 28   élus ?


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  1   R.  Le partage du pouvoir se déroulait de la façon suivante : tous les

  2   différents postes figuraient sur une liste, l'une des parties choisissait

  3   un poste donné, et ensuite l'autre partie avait le droit de s'attribuer un

  4   autre poste. Et cela continuait ainsi tant que l'on n'avait pas attribué

  5   tous les postes.

  6   Q.  Merci. Est-il exact que tout cela a bien fonctionné, plus ou moins,

  7   jusqu'à ce que la Slovénie et la Croatie organisent leurs propres

  8   référendums et lorsque des tensions se sont fait sentir dans la partie

  9   occidentale du pays ?

 10   R.  Oui, c'est à peu près comme cela que ça s'est passé. La raison était

 11   qu'il y a eu des départs organisés de Musulmans qui ont quitté Bratunac. Le

 12   SDA a organisé leurs voyages sur la Croatie, où ils ont rejoint le ZNG et

 13   ont ensuite combattu contre le peuple serbe. Il n'y a pas eu un seul cas

 14   d'un représentant musulman du peuple qui se soit aligné avec la partie

 15   serbe.

 16   Q.  Ou du côté de la Yougoslavie.

 17   R.  Oui, du côté de la Yougoslavie. On peut dire ainsi. Ceci a perturbé les

 18   relations qui existaient entre les deux partenaires de la coalition.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce D387.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Vous souvenez-vous que le chef de la police à Bratunac était Senad

 23   Hodzic, qui était donc avec le SDA ? Il était Musulman et il représentait

 24   le SDA.

 25   R.  Je sais que Senad Hodzic était le chef.

 26   Q.  Je vais vous demander d'examiner ce document. Le deuxième paragraphe se

 27   lit comme suit :

 28   "En conséquence, dans une lettre adressée au secrétariat municipal de la


Page 24517

  1   Défense nationale de Bratunac, nous avons demandé une liste des appelés

  2   libres conformément aux communes locales, dans le respect de la structure

  3   ethnique."

  4   Dans le paragraphe, on a prévu une augmentation de la force de police. Est-

  5   ce que ceci a causé ou engendré une certaine suspicion parmi les Serbes ?

  6   R.  Je n'en ai pas le souvenir.

  7   Q.  Dans le deuxième paragraphe, on demande aux militaires de dire qui il y

  8   avait de libre parmi les appelés, et ensuite il est dit :

  9   "Ayant reçu la liste demandée, nous avons commencé à faire des

 10   vérifications et nous avons obtenu des informations de cette liste, y

 11   compris les appelés militaires qui ont passé un certain temps en Croatie et

 12   avec une partie d'entraînement effectuée auprès du MUP de la Croatie. Nous

 13   ne savons pas sur les ordres de qui ou sur la recommandation de qui cela a

 14   été fait, mais nous pensons que les citoyens serbes n'ont pas suffisamment

 15   confiance dans les membres futurs de la force de police de réserve," et

 16   ainsi de suite.

 17   Est-ce que vous pensez que le chef de la police musulman a agi de façon

 18   professionnelle, qu'il n'a pas envoyé ces personnes car il estimait que

 19   ceci aurait pu être un préjudice des relations à Bratunac ?

 20   R.  A l'époque, on croyait toujours que la coexistence pacifique était

 21   possible à Bratunac. Je comprends le chef de la sécurité publique lorsqu'il

 22   a fait cette évaluation.

 23   Q.  Je vous remercie. Est-il exact que dans la ville de Bratunac, dans la

 24   ville même, les relations étaient civilisées et tout à fait correctes,

 25   alors que dans les villages l'extrémisme commençait à se développer et que

 26   c'était beaucoup moins le cas en ville ?

 27   R.  Oui, c'était ainsi. Et je pense pouvoir dire que c'était vrai à la fois

 28   pour les Serbes et pour les Musulmans. En ville, ce n'était pas le cas, ou,


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  1   si ça l'était, c'était beaucoup moins important. Des groupes ou des

  2   personnes qui avaient des points de vue plus radicaux, selon des lignes

  3   ethniques, étaient toutes des personnes issues du milieu rural. On a même

  4   vu des cas où on a cherché à imposer ces idées dans la ville, et ceci, par

  5   la violence.

  6   Dans une telle situation, un groupe d'extrémistes, des nationalistes

  7   extrémistes de Voljavica, ont pénétré dans la ville en scandant : Ici, nous

  8   sommes en Bosnie. Ils tiraient leurs armes en l'air, intimidant les Serbes

  9   et les Musulmans.

 10   Q.  Merci. Est-ce que Voljavica est un village musulman ?

 11   R.  Voljavica est un village entièrement musulman.

 12   Q.  Merci. Est-il exact que déjà à la fin du mois d'août ou en septembre,

 13   au 1er septembre, il y a eu une crise quand la JNA a voulu reprendre ses

 14   archives du département militaire de la municipalité, et environ 10 000

 15   Musulmans se sont rassemblés et les ont empêchés de ce faire ?

 16   R.  Je l'aurais décrit de cette façon : c'était l'un des moments-clés qui a

 17   perturbé le gouvernement de coalition rassemblant le SDS et le SDA, et cela

 18   a également perturbé les relations entre les deux groupes ethniques.

 19   Q.  Merci. A cette époque-là, est-ce que les tensions se faisaient sentir à

 20   Bratunac, des tensions qui étaient liées à ce qui se passait sur la scène

 21   politique, surtout du fait des efforts déployés par le SDA et les autres

 22   partis musulmans pour faire en sorte que la Bosnie se sépare du reste de la

 23   Yougoslavie ?

 24   R.  A l'époque, il y avait d'autres voies possibles, et on croyait que la

 25   Bosnie continuerait de faire partie de la Yougoslavie.

 26   Q.  Merci. Vous souvenez-vous que tout au long des mois de juillet et

 27   d'août, il y avait un débat public connu de tous et qu'il y avait un accord

 28   entre les Musulmans et les Serbes ? Adil Zulfikarpasic et Filipovic


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  1   parlaient pour les Musulmans, et c'était un accord historique entre les

  2   Serbes et les Musulmans, parce que c'était comme ça que l'on envisageait le

  3   fait que la Bosnie allait rester dans la Yougoslavie.

  4   R.  C'est exactement ce que je voulais dire. J'avais connaissance de cet

  5   accord et j'y croyais. Je croyais que nous continuerions de faire partie

  6   d'un Etat unique.

  7   Q.  Est-il exact que nous avons lâché du lest et que nous avons permis la

  8   possibilité de la sécession de la Bosnie à condition de ne pas perdre des

  9   voix, et que c'est dans ce contexte qu'on a envisagé d'établir deux

 10   municipalités à Bratunac ?

 11   R.  C'est exact. Je sais qu'en ce qui concerne la municipalité de Bratunac,

 12   avec l'accord du SDA et du SDS, une commission s'est mise à l'œuvre pour

 13   répartir le territoire de la municipalité de Bratunac pour voir où se

 14   situait la majorité musulmane et où se situait la majorité serbe. Dans

 15   notre zone, les villages avaient soit une majorité musulmane ou une

 16   majorité serbe; alors que dans la ville même il y avait à peu près moitié-

 17   moitié entre les deux ethnies.

 18   Q.  Est-il exact que les négociations ont bien avancé et que dans la partie

 19   serbe de la ville, dans les villages serbes, les Serbes auraient leurs

 20   propres autorités, et dans les villages musulmans, dans la partie musulmane

 21   de la ville, les Musulmans auraient leurs propres autorités ?

 22   R.  C'est le genre de répartition que l'on voit aujourd'hui. C'est-à-dire,

 23   il y a des villes avec plusieurs autorités municipales.

 24   Q.  Merci. Donc ça veut dire qu'une partie importante de l'infrastructure

 25   de la ville serait toujours partagée, et cela marcherait comme si vous

 26   aviez une ville avec plusieurs municipalités; c'est exact ?

 27   R.  Oui.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pièce 1D1405. Pouvons-nous afficher ce document


Page 24520

  1   à l'écran.

  2   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, ce document a déjà été

  3   versé au dossier avec la cote D293 [comme interprété], accompagné d'une

  4   traduction.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci pour la Défense également.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Vous disposez de la version serbe en cyrillique, manuscrite. Je vous

  9   demanderais de revenir en arrière pour que nous puissions voir le bas de la

 10   page où se trouve un cachet, je me réfère à la version serbe.

 11   Etes-vous d'accord que ce qui est aguillé ici c'est la République

 12   serbe de la Bosnie-Herzégovine, municipalité serbe de Bratunac ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Etes-vous d'accord quant au fait que lorsqu'une municipalité était

 15   précédée du préfixe "Serbe", cela voulait dire que dans cette ville il y

 16   avait sans doute une municipalité musulmane et peut-être même une

 17   municipalité croate, et que ça ne veut pas dire que toute la ville de

 18   Bratunac est une municipalité serbe, mais uniquement une partie de la ville

 19   ?

 20   R.  Je ne peux pas répondre à cette question avec certitude. Il s'agit bien

 21   du cachet de la municipalité serbe de Bratunac au moment où on pensait que

 22   la ville allait être divisée sur le plan administratif en deux

 23   municipalités, parce qu'il y avait deux groupes ethniques.

 24   Q.  Merci. Passons donc à la page suivante pour voir quelles sont les

 25   conclusions qui furent tirées.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de la dernière page. Voyons

 27   donc la page 1 en B/C/S.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 24521

  1   Q.  Est-il dit ici au paragraphe 1 que les représentants des deux

  2   populations acceptent de fait que cette division est un fait inévitable et

  3   peut être effectuée de façon démocratique et pacifique ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Plus loin, il est dit que l'établissement d'une station de sécurité

  6   publique serbe à Bratunac et la division des services de sécurité est le

  7   premier pas dans cette direction.

  8   Est-il exact que la police musulmane est restée dans les bâtiments

  9   existants et que la police serbe a choisi de s'installer dans un autre

 10   bâtiment à titre temporaire ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Je ne veux pas donner lecture de tout ceci. Mais tout doit se faire de

 13   façon démocratique, les écoles doivent reprendre leur fonctionnement et les

 14   habitants doivent revenir. Est-ce que cela signifie qu'il y a eu conflit et

 15   que la population est partie, des personnes des deux confessions ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que ces personnes ont été expulsées par qui que ce soit ou est-

 18   ce que ces personnes étaient craintives en raison de l'évolution des choses

 19   ?

 20   R.  Elles partaient pour des raisons de sécurité tout simplement, parce que

 21   la situation sécuritaire se dégradait.

 22   Q.  Merci.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons la page suivante maintenant en serbe.

 24   Paragraphe 11 dans la version en anglais. A la page suivante. Donc au

 25   paragraphe 11.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Il dit :

 28   "Des quantités en nombre égal côtés musulman et serbe de la police doivent


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  1   être engagées."

  2   S'agissait-il d'une mesure visant à faire face à la tension et à la

  3   suspicion ?

  4   R.  Oui. Pour qu'il y ait une parité, pour que personne ne se sente menacé.

  5   S'il y avait, par exemple, deux fois plus de policiers d'un groupe ethnique

  6   ou l'autre.

  7   Q.  Plus loin il est dit au paragraphe 13 que les plans et les missions

  8   doivent être coordonnés par les deux chefs et que des enquêtes, sur place,

  9   conjointes doivent être menées, et ainsi de suite.

 10   Au dernier paragraphe il est dit que les différends et les problèmes

 11   doivent être résolus de façon pacifique et démocratique; est-ce exact ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Dites-nous, est-ce que la partie serbe était enthousiaste face à la

 14   perspective d'établir deux municipalités ?

 15   R.  La partie serbe était principalement motivée par le souci d'éviter des

 16   conflits et voulait que les problèmes soient réglés de façon pacifique.

 17   L'une des façons pour arriver à un règlement pacifique des différends était

 18   ce que nous avons vu, c'est-à-dire cette division, cette création de deux

 19   entités administratives.

 20   Q.  Merci. Avait-on envisagé et était-il même possible de faire en sorte

 21   que les Musulmans puissent être expulsés de Bratunac ?

 22   R.  Non. Non, cela ne marcherait pas, ça ne pouvait pas être fait.

 23   Q.  Ils allaient recevoir la même chose que les Serbes, c'est-à-dire leur

 24   propre police, leur propre administration, et ainsi de suite ?

 25   R.  Oui, cela est exact.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je vois que

 27   l'heure avance.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 50


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  1   minutes. Nous reprendrons à 13 heures 30.

  2   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 42.

  3   --- L'audience est reprise à 13 heures 37.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous avez la parole.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Katanic, je vais essayer de parcourir le plus rapidement

  8   possible les événements de 1991 et du début de l'année 1992.

  9   Aux paragraphes 11 -- c'est-à-dire 13, plutôt, 13 à 16, vous parlez

 10   des cellules de Crise, cellules de Crise du parti politique. Alors, est-ce

 11   qu'on est bien d'accord qu'il existe une différence entre la cellule de

 12   Crise du parti et la cellule de Crise 

 13   municipale ? La cellule de Crise du parti ne peut qu'informer des choses,

 14   et l'autre représente une instance de pouvoir ?

 15   R.  Oui, je suis d'accord.

 16   Q.  Au paragraphe 16, vous dites que vous ne saviez pas sur quel critère

 17   c'était fondé, mais que c'était en suivant les instructions données que

 18   l'on a constitué la cellule de Crise et :

 19   "Certains sont devenus membre de la cellule de Crise en fonction des

 20   postes qu'ils occupaient déjà."

 21   Donc on parlera plus tard des variantes A et B.

 22   Alors, dites-nous, est-ce que c'est quelque chose que nous faisons

 23   généralement chez nous, à savoir qu'à chaque fois qu'il y a une situation

 24   de crise qui se déclenche, l'on crée des instances qui sont appelées des

 25   cellules de Crise, qui sont appelées à gérer la crise, donc quand il y a

 26   une inondation, des intempéries, des chutes de neige, une coupure

 27   d'électricité, donc une situation de crise ? Est-ce qu'à ce moment-là les

 28   instances de pouvoir s'organisent sous forme de cellule de Crise à ce


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  1   moment-là ?

  2   R.  C'est exact, à chaque fois qu'une situation d'exception se présente. Et

  3   je suis venu ici ces jours-ci précisément à un moment où, à cause des

  4   chutes de neige, on a déclaré cette situation d'exception chez nous. Eh

  5   bien, on crée à ce moment-là des cellules de Crise qui fonctionnent tant

  6   que la situation n'est pas normalisée.

  7   Q.  D'accord. Merci. Pendant 20 ans, jusqu'en 2011, vous avez été convaincu

  8   que la réunion du conseil municipal du SDS du 23 décembre 1991 a été

  9   convoquée à cause de quelque chose qui s'inscrivait dans la suite logique

 10   d'un accord avec Izetbegovic, et puis vous avez appris que cette réunion a

 11   été convoquée à cause des documents A et B. Quelqu'un vous a évoqué cette

 12   possibilité-là ?

 13   R.  Ecoutez, je dois vous dire que je ne m'en souviens pas. C'est comme ça

 14   que je vais vous répondre. Parce que j'ai reçu un document, un document

 15   authentique issu de la réunion du comité municipal et qui constitue un

 16   procès-verbal de ce qui s'est dit lors de cette réunion. On y voit l'ordre

 17   du jour. Et j'ai plus ou moins confirmé l'authenticité de ce document. On a

 18   pu voir dans ce document ce qui a fait l'objet des discussions lors de la

 19   réunion en question.

 20   Q.  Vous avez organisé sur le plan technique différentes réunions. Est-ce

 21   qu'en vous fondant sur votre expérience, vous pouvez nous dire qu'on a

 22   l'habitude d'inscrire au point 1 de l'ordre du jour ce qui doit absolument

 23   être discuté, puis après c'est l'ordre décroissant des priorités ?

 24   R.  Oui. Et le dernier point, c'est le point "divers".

 25   Q.  Alors, voyons maintenant ce qui constitue le premier point à l'ordre du

 26   jour de cette réunion.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que ce document soit affiché. C'est

 28   la réunion du 23 décembre 1991.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de la pièce P2598,

  2   paragraphe 15 ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'essaie de le retrouver. Oui, c'est bien ça.

  4   P2598.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous avons le paragraphe 15 qui

  6   s'affiche, procès-verbal de la réunion du 23 décembre.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Justement, dans ce paragraphe -- je vais en donner lecture en anglais

 10   parce que ce sera mieux interprété : 

 11   "L'on m'a montré le procès-verbal du 23 décembre 1991 et l'on m'a demandé

 12   de quoi je me souvenais des instructions ou des consignes qui ont été

 13   présentées au conseil. Ce procès-verbal est exact, pour autant que je

 14   puisse m'en souvenir. Et l'on m'a montré également un document intitulé :

 15   'Instructions afin d'organiser et déployer des activités des organes du

 16   peuple serbe de Bosnie-Herzégovine dans une situation d'urgence,' du 19

 17   décembre 1991."

 18   Et un peu plus loin, vous dites :

 19   "Lorsqu'on m'a demandé pour la première fois ce qui en est de ces

 20   instructions en mai 2011, j'ai pensé que cela avait à voir avec un accord

 21   entre Karadzic et Izetbegovic. Maintenant que j'ai relu cela et que je me

 22   suis rafraîchi la mémoire, il est clair que ces instructions ne se fondent

 23   sur aucun accord passé entre Karadzic et Izetbegovic. Il s'agit plutôt

 24   d'instructions émanant de la direction du parti SDS sur la manière d'agir

 25   dans certaines circonstances qui se sont présentées à l'époque."

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de D00086 à présent,

 27   s'il vous plaît, pour voir -- ou, d'ailleurs, on voit ici le premier point

 28   à l'ordre du jour. 


Page 24527

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Une décision a été prise, la décision de créer la BiH serbe. Donc c'est

  3   ça le premier point, la décision est prise de la créer ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que ce n'est pas le 19 lors d'une réunion

  6   du parti que l'on a pris cette décision, mais que c'est le 21 que l'on a

  7   pris cette décision ?

  8   R.  Je ne me souviens pas de la date, mais c'est à l'assemblée que l'on a

  9   pris la décision de créer la Bosnie-Herzégovine serbe.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage du D00086. Ce

 12   sera la page 28 en serbe. Page 14 en anglais. Une page plus loin en serbe.

 13   Page 14 en anglais.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Première page, donc :

 16   "La 4e Session de l'assemblée du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine

 17   le 21 décembre 1991."

 18   C'est bien cela ?

 19   R.  Oui.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 14 en anglais et la page suivante en

 21   serbe, s'il vous plaît. Vers la fin de la page. Je veux que l'on montre le

 22   même endroit en anglais.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  "En se fondant sur le droit constitutionnel des peuples à

 25   l'autodétermination et à l'auto-organisation, l'assemblée du peuple serbe

 26   de Bosnie-Herzégovine, lors de sa réunion du 21 décembre 1991, décide

 27   d'amorcer la création de la République serbe de Bosnie-Herzégovine."

 28   Et vous voyez la même chose en anglais.


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  1   Donc, est-ce que vous comprenez mieux maintenant que cette réunion du 23 a

  2   été convoquée par rapport à cela, et non pas suite à ce qui s'était produit

  3   le 19 ? Est-ce que cela vous paraît plus logique que c'était ça qui a

  4   déclenché cette convocation, et non pas la réunion du 19 ?

  5   R.  Si c'est à moi que vous posez la question, je ne m'en souviens pas,

  6   mais il est possible que c'était ça la raison, si on tient compte du point

  7   de l'ordre du jour que nous avons vu, cette décision de créer la République

  8   serbe de Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Merci. Est-ce qu'il est probable que pendant cette réunion on a discuté

 10   des variantes A et B ? Est-ce que vous avez vu une signature, un cachet, un

 11   numéro d'enregistrement sur le document portant les variantes A et B ?

 12   R.  Je ne m'en souviens pas. Je me souviens d'instructions, et je me

 13   souviens de variantes où il était prévu que là où le peuple serbe était

 14   minoritaire, il se passe une chose, et puis là où il était majoritaire,

 15   qu'il se passe une autre chose. Donc nous, nous étions dans le cas de

 16   figure où nous étions minoritaires, parce qu'à l'époque il y avait moins de

 17   Serbes sur le territoire de la municipalité de Bratunac. Donc, pour nous,

 18   c'était ce cas de figure-là qui s'appliquait.

 19   Q.  La cellule de Crise du parti a été créée un peu plus tôt, n'est-ce pas,

 20   au début de l'année 1992, je crois, et ce n'est que le 3 ou 4 avril qu'elle

 21   a été créée au niveau municipal, lorsqu'il est devenu clair que la guerre

 22   allait éclater. Vous êtes d'accord ?

 23   R.  La cellule de Crise de la municipalité de Bratunac a été créée après la

 24   cellule de Crise du parti politique, ça c'est sûr.

 25   Q.  Merci. Pendant que nous parlons encore de ce texte, au paragraphe 18,

 26   il est question d'une réunion du 24 février 1992, réunion du parti

 27   politique. Je donne lecture en anglais pour que ce soit mieux traduit.

 28   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas le texte.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  "Au départ, je n'ai pas pu me rappeler cette réunion, mais maintenant

  3   que j'ai lu ce document, ces événements de l'époque commencent à me

  4   revenir. L'issue de cette réunion et les mesures qui ont été discutées à la

  5   réunion, à savoir la mise en œuvre des mesures du deuxième niveau des

  6   instructions, ce n'était pas quelque chose qui s'appliquait typiquement

  7   uniquement à Bratunac. Plutôt, l'issue de cette réunion était en substance

  8   le résultat de la situation dans toute la Bosnie-Herzégovine simplement sur

  9   le territoire de Bratunac."

 10   Donc c'est ce document-là qu'ils vous ont montré, mais est-ce que vous vous

 11   souvenez de l'évolution de la situation ? Le SDA, est-ce qu'il n'a pas

 12   négocié tout en se préparant à la guerre, et cette solution n'était-elle

 13   pas indispensable à titre préventif justement, pour se prévenir contre une

 14   attaque qu'allaient lancer les

 15   Musulmans ?

 16   R.  Si mes souvenirs sont bons, notre première mesure appliquée était

 17   uniquement d'organiser des permanences et d'informer les gens de la

 18   situation sur le plan de la sécurité dans la municipalité. Quand il y a eu

 19   aggravation de la situation, le président Deronjic a convoqué une réunion,

 20   la réunion dont nous sommes en train de parler, et c'est là qu'on a mis en

 21   œuvre la deuxième mesure. Celle-ci concernait la sécurité à l'époque, à

 22   savoir la détérioration de la situation sur le plan de la sécurité.

 23   Et pour pouvoir surmonter ces difficultés, on a décidé de mettre sur

 24   place des patrouilles ou des gardes, et il y a eu aussi une idée qui était

 25   de constituer des réserves de vivres pour la population.

 26   Q.  Merci. Est-il exact de dire que les Musulmans et les Serbes ont monté

 27   la garde ensemble devant les bâtiments de logements; et dans les villages,

 28   c'était différent, ils étaient séparés, les Serbes et les Musulmans ?


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  1   R.  C'est exact. Pour le début.

  2   Q.  Savez-vous que la phase 2 ne s'est pas appliquée au même moment dans

  3   les différentes municipalités, que cela dépendait de l'appréciation de la

  4   situation qu'on faisait localement ? Est-ce que vous vous souvenez d'avoir

  5   reçu des instructions vous demandant de faire ceci ou cela à différents

  6   moments ?

  7   R.  Il n'y a pas eu de telles instructions.

  8   Q.  Merci. Est-ce qu'il y a eu un contrôle, est-ce qu'on est venu vérifier

  9   du niveau central si vous mettiez bien en œuvre ces instructions ?

 10   R.  Non, il n'y a pas eu de contrôle quant à la mise en œuvre de ces

 11   mesures.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'entendons pas l'interprétation.

 13   Est-ce que vous pouvez répéter votre -- nous n'avons pas entendu la réponse

 14   précédente, Monsieur Katanic.

 15   Monsieur Katanic, est-ce que vous voulez, s'il vous plaît, répondre de

 16   nouveau à la question qui vous a été posée :

 17   "Est-ce que vous avez reçu des instructions à cet effet, à savoir à

 18   quel moment vous deviez mettre en œuvre telle ou telle instruction ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a eu qu'une seule instruction, la seule

 20   que nous ayons reçue et que nous ayons appliquée. Par la suite, d'autres

 21   instructions ou des contrôles pour vérifier si on avait bien mis en œuvre

 22   l'instruction, non, il n'y en a pas eu.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Merci. Alors, dans l'ordre des paragraphes, j'aimerais que l'on examine

 25   le paragraphe 19. On vous a montré le procès-verbal d'une réunion qui s'est

 26   tenue le 1er février 1993 - 65 ter 00593 est le numéro du document - et

 27   c'est là que nous voyons l'intégralité des propos tenus.

 28   Donc, parce que simplement la police n'avait pas réussi à préserver


Page 24531

  1   l'ordre public, empêcher des pillages, l'on me demande d'accepter que la

  2   question de confiance soit posée à l'assemblée ?

  3   R.  Je ne me souviens pas qu'il y ait eu une telle demande, que la question

  4   de confiance soit posée, mais je me souviens de cette réunion. Je l'ai

  5   organisée, et l'on y a convoqué aussi un certain nombre de personnalités

  6   extérieures, des invités, des députés de l'assemblée. Parce qu'entre

  7   autres, il s'agissait d'un vote de confiance au conseil municipal et aux

  8   instances de pouvoir de la municipalité de Bratunac.

  9   Q.  Merci. Donc le parti voulait vérifier si ceux qu'il avait délégués pour

 10   le représenter s'acquittaient toujours correctement de leurs tâches et

 11   bénéficiaient de la confiance des autres ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Donc, est-ce qu'on peut considérer que là on se vante un petit peu, on

 14   exagère les choses, on se prépare aux élections pour justifier les actions

 15   de ceux qui sont remis en question ? Est-ce que c'est ça qu'on trouve dans

 16   ce texte aussi ?

 17   R.  Le premier à prendre la parole a été M. Deronjic à titre

 18   d'introduction, et on pourrait dire effectivement qu'il s'y vante. Mais

 19   cela n'a rien d'étonnant, c'est ce à quoi on peut s'attendre s'il va y

 20   avoir un vote de confiance.

 21   Q.  Lorsque ce vote de confiance a eu lieu, est-ce que certaines personnes

 22   ont pu conservé leurs postes et est-ce que d'autres personnes ont dû donner

 23   leur démission ?

 24   R.  Tout le monde a été approuvé, sauf pour le chef de la police, M. Luka,

 25   qui lui a été rejeté car on avait découvert que dans la période précédente

 26   beaucoup de crimes avaient été commis et qu'on aurait pu prévenir ces

 27   crimes si on avait déployé davantage d'efforts.

 28   Q.  Merci. Et donc, après ceci, il a dû donner sa démission; est-ce exact ?


Page 24532

  1   R.  Il a été remplacé par Ljubisa Borovcanin. Quant à celui-ci, je ne sais

  2   pas s'il a démissionné ou s'il a été simplement démis de ses fonctions.

  3   Q.  Est-il exact que vous avez connu des situations où les formations

  4   musulmanes, c'est-à-dire la Ligue patriotique et les Bérets verts, ont créé

  5   une atmosphère d'insécurité en raison des incidents qui ont eu lieu juste à

  6   la veille de la guerre et qui ont contribué à la crise ? Il y a eu des

  7   incidents, des personnes ont été tuées. Vous vous en souvenez ?

  8   R.  Oui, j'ai déjà parlé de cela. J'ai parlé de la situation où un groupe

  9   de Musulmans de Voljavica sont venus dans la ville et ont procédé à

 10   intimider la population.

 11   Q.  Merci. Vous souvenez-vous qu'à partir du 21 mars, il y a eu plusieurs

 12   attaques du fait des forces musulmanes : le 24 mars à Buljim, le 25 mars à

 13   Orahovac, et le 25 mars à Zeleni Jadar où apparemment dix Chetniks ont été

 14   tués ? Vous vous souvenez qu'à Zeleni Jadar, avant le mois d'avril, des

 15   ouvriers sylvicoles avaient été tués ?

 16   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

 17   Q.  Merci. Vous souvenez-vous qu'avant le 15 avril, il y a eu une offensive

 18   contre Konjevic Polje ? Vous souvenez-vous que le 3 avril, un dépôt d'armes

 19   de la JNA a explosé, un dépôt de la JNA à Nova Kasaba ?

 20   C'était une situation de crise, et avant le 17 avril, y avait-il eu une

 21   telle initiative ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 23   Mme WEST : [interprétation] Je suis désolée de vous interrompre, mais je

 24   crois qu'il y a quatre ou cinq questions. Et je pense qu'il est très

 25   difficile pour le témoin de maintenir cette cadence. Moi, je ne peux pas

 26   maintenir cette cadence.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Entendu.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Bien. Je n'ai pas besoin de réponse à ces questions sur ces incidents

  2   individuels.

  3   Maintenant, êtes-vous avec moi qu'à ce moment-là, c'est le Parti de

  4   l'Action démocratique qui était responsable de cette situation de crise

  5   avec la survenue de tous ces incidents ?

  6   R.  Je me souviens de certaines situations où des éléments musulmans

  7   radicaux ont intimidé la population serbe.

  8   Q.  Merci. Le 17 avril, est-il exact que des sauveurs sont apparus, c'est-

  9   à-dire des membres d'un groupe paramilitaire qui ont pris le contrôle de

 10   Bratunac, qu'ils ont tout simplement mis fin aux activités de l'assemblée

 11   et qu'ils ont repris les choses en main ?

 12   R.  Cette information est exacte.

 13   Q.  Sont-ils d'abord intervenus en tant que volontaires et ensuite ils

 14   étaient en fait renégats de la JNA, que ces éléments se trouvaient dans les

 15   villages et dans les villes, mais pas dans les bois ?

 16   R.  Lorsqu'ils sont venus pour la première fois en ville, ils se sont

 17   présentés comme étant des volontaires du peuple serbe venus pour aider. Ils

 18   sont venus armer, et tout groupe qui disposait d'armes constituait une

 19   force armée et voulait s'emparer du pouvoir, ce qui a créé de grosses

 20   difficultés pour les autorités municipales.

 21   Q.  Je vous remercie. Vous avez confirmé, et c'est une chose que vous avez

 22   dite dans votre déclaration et dans l'entrevue, vous avez donc confirmé que

 23   les autorités ont immédiatement cherché à se débarrasser de ces

 24   volontaires, que les gens ont été inquiets et angoissés, surtout les

 25   femmes, parce que les hommes avaient déjà rejoint l'armée, parce que ces

 26   personnes craignaient d'être menacées à cause de la présence des

 27   volontaires, menacées par des extrémistes musulmans; est-ce exact ?

 28   R.  Oui, c'est exact. Il y a même eu une manifestation pour protester


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  1   devant le bâtiment de la municipalité, et ces femmes ont attaqué le

  2   président du comité exécutif, Radoljub Djukanovic.

  3   Q.  Il était membre du SDS, et il était contre ces groupes paramilitaires,

  4   n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. Et la décision a été prise lors de la réunion de la cellule de

  6   Crise, une décision comme quoi ces volontaires n'étaient plus les

  7   bienvenus.

  8   Q.  Je vous remercie. Pendant votre entrevue, vous avez dit que les

  9   autorités se seraient débarrassées de ces volontaires et leur auraient fait

 10   opposition s'ils en auraient eu la force et qu'à Bratunac, un groupe de

 11   cinq à dix personnes armées constituait déjà une force armée en ce qui

 12   concerne les autorités.

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Merci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre question, s'il

 16   vous plaît.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Je vais vous donner lecture de ceci en anglais, car nous ne sommes pas

 19   satisfaits de la façon dont ce que le témoin a dit a été traduit. Donc :

 20   "…ces volontaires n'étaient plus les bienvenus."

 21   Est-ce que ces volontaires avaient été bienvenus auparavant ?

 22   R.  Au début, on les avait accueillis. Ils étaient les bienvenus parce que

 23   les Serbes étaient déjà craintifs du fait des extrémistes musulmans qui se

 24   manifestaient de temps à autre venant des zones rurales.

 25   Q.  Ai-je raison de dire qu'on les accueillait dès lors qu'ils disaient

 26   qu'ils étaient des volontaires de la JNA, mais qu'ils n'étaient plus les

 27   bienvenus dès lors qu'ils n'étaient plus des volontaires de la JNA, c'est-

 28   à-dire lorsqu'ils ont opéré une scission vis-à-vis de la JNA et qu'ils se


Page 24535

  1   sont constitués en tant que force armée indépendante ?

  2   R.  Pour nous, tous les volontaires étaient les bienvenus s'ils étaient à

  3   disposition de la JNA lorsque celle-ci se trouvait à Bratunac ou lorsqu'ils

  4   ont rejoint la Brigade de Bratunac, qui a été mise sur pied par la suite.

  5   Tous ceux qui sont venus de leur propre chef et qui agissaient pour leurs

  6   propres intérêts n'étaient pas les bienvenus.

  7   Q.  Merci. Au paragraphe 24, il est question du désarmement, et il est dit

  8   que cela a été fait par la JNA. Sommes-nous d'accord sur le fait que la JNA

  9   était une force légitime jusqu'au 19 mai 1992, alors que dans ce

 10   paragraphe, la date citée est celle du 19 avril 1992 ?

 11   R.  Je n'ai plus le souvenir de la date jusqu'à laquelle on a considéré que

 12   la JNA était une force légitime en Bosnie-Herzégovine, mais ceci figure

 13   dans les documents, et c'est un fait.

 14   Q.  Merci. Dans ce paragraphe, vous parlez de certaines parties du Corps de

 15   Novi Sad qui étaient stationnées sur leur chemin de retour de la Bosnie-

 16   Herzégovine, que le commandant était un certain capitaine Reljic, et que

 17   cette unité avait rassemblé les armes détenues par les civils.

 18   Donc sommes-nous d'accord que dans notre système, conformément à la

 19   doctrine de Tito, la doctrine d'une population armée, que tout ouvrier,

 20   toute usine pouvait être armée, pouvait porter des armes ?

 21   R.  C'est exact. La doctrine voulait que la population toute entière était

 22   l'armée. C'était la doctrine de l'ex-Yougoslavie.

 23   Q.  Merci. Dans ce paragraphe, vous dites que les armes étaient réunies au

 24   sein des collectivités locales, et dans la dernière phrase, il est dit :

 25   "Tous les Musulmans étaient en train d'être désarmés."

 26   Maintenant j'aimerais vous poser la question suivante, et j'aimerais

 27   que vous me disiez quelle est votre position : est-ce que la chose

 28   déterminante était leur confession ou le fait qu'ils refusaient de répondre


Page 24536

  1   présents à l'appel de l'armée ?

  2   R.  L'appartenance religieuse n'avait rien à voir avec cela. En 1991, le

  3   SDA a fait une tentative pour empêcher la JNA de réunir les livrets

  4   militaires de tous les appelés de la municipalité de Bratunac.

  5   Q.  Ceci signifiait pour la JNA que la population de Bratunac ne s'était

  6   pas réunie spontanée mais qu'on les avait organisées.

  7   R.  Précisément ils étaient organisés. Le SDA invitait aux Musulmans de ne

  8   pas répondre présents à l'appel de mobilisation de la JNA.

  9   Q.  Est-ce que j'ai raison de dire que la cellule de Crise de Bratunac est

 10   également contre la formation et l'armement de formations paramilitaires,

 11   et ceci sans tenir compte de l'appartenance religieuse ou la confession.

 12   Et j'aimerais que l'on affiche la pièce 1D4904, qui est un document

 13   émanant de cette cellule de Crise.

 14   Donc il n'y avait aucune distinction faite selon des lignes ethniques

 15   ou d'appartenance religieuse. Toute personne qui faisait partie d'une TO ou

 16   d'une unité de la JNA faisait partie d'une force armée légitime, et les

 17   autres, non. Il s'agit bien du document 1D4094.

 18   Ai-je raison ?

 19   R.  Oui, vous avez raison.

 20   Q.  Voici la page de garde. On y lit :

 21   "Ordre interdisant à toutes les formations paramilitaires de mener

 22   des activités dans la zone de Bratunac."

 23   La seconde page est vierge, on peut passer à la troisième page.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons regarder de plus près, je voudrais

 25   que l'on agrandisse dans les deux langues, s'il vous plaît.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Est-il exact que dès le 1er mai, la cellule de Crise utilisait une

 28   machine à dactylographier cyrillique ? C'est-à-dire que la municipalité


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  1   serbe avait interdit la formation de toutes formations paramilitaires de

  2   Bratunac ? Est-ce que c'est le sens du document ?

  3   R.  Oui, pas seulement des formations paramilitaires mais également pour

  4   des personnes individuelles, c'est-à-dire que des personnes qui avaient des

  5   armes illicites et qui agissaient de leur propre chef.

  6   Q.  Merci.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que ce document soit versé au

  8   dossier.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira donc de la pièce D2060.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] 2060.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Est-il exact que le 3 ou le 4 mai à Hranca, un convoi de la JNA a été

 14   arrêté alors qu'il se retirait de la Yougoslavie, qu'il a fait l'objet

 15   d'une attaque et qu'il y a eu mort de plusieurs jeunes soldats ? Est-ce que

 16   Hranca se trouve dans les immédiats de Bratunac ?

 17   R.  Hranca se trouve à 2 kilomètres de Bratunac. Il y a eu un incident aux

 18   environs de cette date, mais je n'en ai plus le souvenir. Je ne sais pas

 19   exactement ce qui s'est passé.

 20   Q.  Merci. Est-il exact que le juge Zekic a été tué le 8 mai ? Et pour

 21   reprendre votre propre description, il avait occupé un poste important,

 22   c'est-à-dire une personnalité, vous l'avez dit au paragraphe 27, il était

 23   juge et député au sein de l'assemblée. Il a été tué le 8 mai.

 24   R.  C'est exact. Goran Zekic avait la confiance de la population serbe, et

 25   pas uniquement à Srebrenica, parce qu'il était lui-même originaire de

 26   Srebrenica, mais d'ailleurs la population toute entière dans la région lui

 27   faisait confiance. Comme vous le savez sans doute, il était député au sein

 28   de l'assemblée de la Bosnie-Herzégovine.


Page 24538

  1   Q.  Vous nous avez informés, et je signale le paragraphe 26, où vous nous

  2   avez signalé que vous n'avez pas apprécié la manière d'appeler cette action

  3   de Glogova, une attaque. Vous avez dit que d'après vous, l'objectif de

  4   l'action était de désarmer les gens suite à cette série d'incidents armés

  5   qui a précédé donc; est-ce exact ?

  6   R.  Je vais devoir utiliser plusieurs phrases pour vous répondre là. Je ne

  7   peux pas répondre par un oui ou un nom.

  8   Q.  Je vous en prie.

  9   R.  J'ai pris part à cette action en tant que membre de la TO. M. Miroslav

 10   Deronjic était là, lui aussi. Il était en civil lui aussi, et il était là

 11   en tant que membre de la Défense territoriale, tout comme moi. Et l'on nous

 12   a expliqué que notre mission était de protéger cette zone vers Srebrenica,

 13   autour de Glogova, pour empêcher qu'il y ait des gens qui prennent la fuite

 14   en emportant des armes en direction de Srebrenica. Cela ne me serait jamais

 15   venu à l'esprit, que c'était en fait une attaque lancée sur Glogova, car au

 16   début d'une attaque, vous avez toujours l'artillerie qui ouvre le feu, puis

 17   ensuite c'est l'infanterie qui suit. Nous n'étions absolument pas préparés

 18   à cela, nous n'étions pas entraînés, ni formés. Tout simplement, on y est

 19   allés parce qu'on nous a confié cette mission de garder la ligne, et

 20   d'éviter qu'il y ait des gens qui s'enfuient avec les armes.

 21   Quant à la JNA, eh bien, le peuple serbe lui faisait confiance. Elle

 22   est entrée dans Glogova par la route en bitume. Elle est arrivée au centre

 23   de Glogova pour désarmer les gens, donc pour désarmer tous ceux qui

 24   n'avaient pas encore rendu leur arme. Parce qu'on a estimé qu'il y avait

 25   pas mal d'armes à Glogova à ce moment-là.

 26   Q.  Merci. Donc à ce moment-là, vous ne saviez pas qu'il allait y avoir des

 27   assassinats, et même pendant quelque temps vous ne l'avez pas su, même par

 28   la suite ?


Page 24539

  1   R.  Oui, c'est ce que je peux vous dire.

  2   Q.  Paragraphes 37, 38 et 39 de votre déclaration. Et vous dites au

  3   paragraphe 38 :

  4   "On m'a dit que ce qu'avait déclaré Deronjic, ce qui fait l'objet de

  5   son plaidoyer de culpabilité, c'est que l'objectif de l'opération de

  6   Glogova était de chasser la population musulmane de Glogova, de la

  7   municipalité de Bratunac. C'est la conclusion à laquelle je suis arrivé

  8   moi-même après l'opération, mais ce n'est pas quelque chose que je savais

  9   pendant l'opération."

 10   Puis au paragraphe 37, une dernière phrase, vous dites :

 11   "A l'époque, j'ai supposé que l'objectif de l'opération était de rassembler

 12   les gens, et non pas de les expulser."

 13   A votre avis, lorsque M. Deronjic plaide coupable, est-ce que la substance

 14   de ce qu'il affirme, de ce qu'il reconnaît est différente de manière

 15   considérable de ce que vous saviez à l'époque ?

 16   R.  Mais je ne savais pas que l'objectif était de chasser la population

 17   musulmane de Glogova. Alors, c'est ce qui a été avoué par M. Deronjic.

 18   Q.  Est-ce que vous l'avez entendu pour la première fois lorsqu'il a plaidé

 19   coupable ici, ou est-ce qu'il vous l'a dit avant le Tribunal ?

 20   R.  Je l'ai appris lorsqu'il a reconnu sa culpabilité ici devant le

 21   Tribunal.

 22   Q.  Merci. Par la suite il y a eu un homme appelé Macédonien, le

 23   Macédonien, c'était au début de la guerre également ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Ils ont roué de coups les gens, asséné des gifles, entraîné les gens

 26   attachés dans la ville ?

 27   R.  Non, ce n'est pas exact. Ce n'était pas le groupe du Macédonien qui

 28   s'est livré à cela. C'était le groupe dont Mijovic allait faire partie mais


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  1   plus tard.

  2   Q.  Donc c'est le deuxième groupe. Donc eux aussi ils ont semé la peur;

  3   vous êtes bien d'accord ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Est-il exact que vous avez escorté M. Deronjic au moment où il est venu

  6   à Zvornik assisté à une réunion ? Il est venu me demander d'appuyer son

  7   action, donc il voulait chasser ce groupe de Bratunac, et il m'a demandé à

  8   moi et à d'autres de le soutenir ?

  9   R.  Oui, c'est exact. C'était après les arrestations qui ont eu lieu dans

 10   leurs locaux. Ils ont arrêté non seulement de simples citoyens mais

 11   également des représentants des autorités militaires et civiles. Ils se

 12   sont livrés à des arrestations, et puis ils les malmenaient physiquement

 13   lorsqu'ils les avaient là. Il est arrivé même que M. Deronjic soit arrêté

 14   et qu'il subisse de mauvais traitements physiques. Moi-même ça m'est arrivé

 15   aussi.

 16   Q.  Merci. Au paragraphe 53, vous dites qu'ils vous ont menacé pointant un

 17   fusil contre votre front, votre tête, et que vous avez eu peur, vous avez

 18   pensé qu'ils allaient vous tuer effectivement ?

 19   R.  Non, non. Ce n'est pas ce groupe-là, ce n'est pas le groupe commandé

 20   par Mijovic. Il a menacé M. Deronjic, et il lui a dit qu'il allait le

 21   liquider. Il l'a emmené au bord de la Drina en le menaçant, mais

 22   apparemment ce n'était que dans le cadre des intimidations auxquelles il

 23   s'est livré. Moi, c'était le groupe du Macédonien qui m'a menacé. C'était

 24   lorsque j'ai essayé d'évacuer de Bratunac plusieurs familles musulmanes,

 25   Edhem Grahovac, mon "kum" faisait partie de ces gens-là.

 26   Q.  Est-il exact de dire qu'à l'époque les Serbes de Bratunac ont essayé de

 27   protéger les Musulmans de Bratunac face à ces éléments, et que c'était très

 28   dangereux ?


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  1   R.  Il est exact de dire que c'était très dangereux. Mais malgré cela, il y

  2   a eu beaucoup de Serbes qui ont secouru leurs voisins, leurs concitoyens.

  3   Q.  Vous-même ou un de vos proches avait réussi à sauver plusieurs

  4   personnes, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui, on pourrait en énumérer beaucoup, beaucoup d'exemples de ce type-

  6   là. Je vais vous en citer un. Le commandant de la Défense de Kravica avait

  7   mis dans le coffre de sa voiture un homme surnommé Ahmic. Je pense que son

  8   sobriquet était Siledzija. Il a pu sortir à Kravica comme ça.

  9   Q.  Dans un village serbe.

 10   R.  Oui, dans un village serbe. Mais le lendemain, il a pu l'emmener sur le

 11   territoire placé sous le contrôle des forces musulmanes.

 12   Q.  Merci. Au paragraphe 41, vous dites que l'on vous a demandé s'ils

 13   étaient contraints de quitter la municipalité de Bratunac, les Musulmans,

 14   et vous dites qu'ils n'avaient pas le choix, parce qu'ils auraient

 15   probablement subi de mauvais traitements, voire ils auraient été tués s'ils

 16   étaient restés.

 17   Alors, est-ce que nous pouvons convenir d'une chose que c'est la peur qui

 18   les a faits fuir, ou bien est-ce que ce sont les autorités locales qui sont

 19   venues frapper à leurs portes en leur disant il vous faut partir ?

 20   R.  Le mieux peut-être, en réponse à cette question, serait de vous dire

 21   que si j'avais été Musulman, je pense que je serais très probablement

 22   parti, parce que les Musulmans n'étaient pas en sécurité dans la ville à

 23   l'époque, et les autorités n'avaient pas moyens de les protéger.

 24   Q.  Merci. Et vous dites quelque chose d'analogue pour l'année 1995 à

 25   Srebrenica, je vais retrouver cela, vous dites que personne ne leur a dit

 26   de partir, qu'on leur a laissé le choix, la possibilité de rester. En fait

 27   c'est ce qui découle de cela, est-ce que ce sont eux-mêmes qui sont arrivés

 28   à la conclusion qu'on n'allait pas pouvoir les protéger ou est-ce qu'on


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  1   leur a dit qu'on n'allait pas pouvoir le faire ?

  2   R.  C'était la décision prise par le représentant du peuple musulman. Je

  3   suppose qu'il a recueilli l'avis de son peuple et que c'est suite à cela

  4   qu'il a pris cette décision de quitter Srebrenica, bien qu'on leur aurait

  5   laissé la possibilité de rester.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de 1D4104. Nous y avons

  7   un aperçu des décisions les plus importantes prises à Bratunac par la

  8   cellule de Crise et la présidence de Guerre.

  9   Q.  Document du 29 août 1992. Je suppose que cela a dû faire partie d'un

 10   rapport soumis au gouvernement. 4104. 1D4104. Non, non, ce n'est pas ça.

 11   Veuillez afficher la page suivante, s'il vous plaît. Je voudrais vérifier

 12   si vous vous souvenez de ces décisions prises par les autorités locales.

 13   Prenons la troisième décision à commencer du haut : "Décision de

 14   désarmer les citoyens qui sont en possession d'armes et qui résident sur le

 15   territoire de la municipalité de Bratunac." Mais cela concerne davantage

 16   les Serbes que les Musulmans, n'est-ce pas, en septembre 1992 ?

 17   R.  Oui, c'est cela.

 18   Q.  Page suivante, s'il vous plaît. "Décision que toutes les unités

 19   paramilitaires doivent quitter le territoire municipal de Bratunac," le 6

 20   mai 1992, deux jours avant que Zekic ne soit tué, n'est-ce pas ?

 21   R.  Si, c'est cela.

 22   Q.  Oui, je passe une décision, puis la suivante décision est de prendre en

 23   charge les réfugiés qui sont venus de la région de Srebrenica et

 24   d'ailleurs, et donc nous sommes maintenant en date du 8 mai.

 25   Alors, dites-nous, quel était l'afflux de réfugiés à Bratunac et quel

 26   impact est-ce que cela a eu sur la sécurité tant des Serbes que des

 27   Musulmans ?

 28   R.  Il y a eu cet afflux de réfugiés -- ils sont arrivés par vagues, en


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  1   fait. Pas tous en même temps.

  2   Q.  Merci. Est-ce qu'il est exact de dire qu'il est dit dans le texte que

  3   c'est à titre provisoire qu'on allait prendre en charge les gens dans les

  4   maisons abandonnées et qu'il fallait préserver l'ensemble de ces biens

  5   immobiliers, avec tous les biens meubles qui leur appartiennent ?

  6   R.  Oui, oui, oui. On a scellé l'ensemble des maisons. C'est la

  7   municipalité qui l'a fait. Après, on a mis ces logements à la disposition

  8   des réfugiés, et d'après cette déclaration, effectivement, cela se passait

  9   à titre provisoire, temporaire, et il fallait qu'ils prennent bien soin des

 10   biens qui leur étaient confiés.

 11   Q.  Merci. Page suivante, s'il vous plaît. Vers le bas de la page dans la

 12   version serbe, nous voyons un ordre visant à interdire l'opération de toute

 13   unité paramilitaire dans la municipalité. Cette décision a été prise le 1er

 14   mai 1992, et nous l'avons déjà vue.

 15   Passons à la page suivante, s'il vous plaît. Est-il exact que pendant cette

 16   période, il était impossible de se rendre de Bratunac à Pale ? La seule

 17   route ouverte menait en Serbie.

 18   R.  C'était possible d'aller à Pale, mais c'était dangereux.

 19   Q.  Merci. Examinons ce document. Il s'agit d'un ordre qui interdit la

 20   vente et l'utilisation d'alcool dans la municipalité de Bratunac; un ordre

 21   qui interdit le pillage, la contrebande et la corruption; un ordre

 22   concernant l'utilisation temporaire de bâtisses abandonnées; et ensuite, en

 23   bas, un ordre interdisant le fait d'amener de l'alcool dans le territoire.

 24   Est-ce que toutes ces décisions étaient prises pour améliorer la sécurité

 25   et la sûreté des citoyens ?

 26   R.  Oui, c'est exact. Comme je vous l'ai déjà dit, j'étais propriétaire du

 27   café César. A l'époque, il était interdit de servir des spiritueux, des

 28   boissons alcoolisées.


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  1   Q.  Merci.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais verser ce document au dossier.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ce document sera versé et aura la

  4   cote 2061. Entre-temps, Monsieur Karadzic, j'aimerais savoir combien de

  5   temps vous voulez encore disposer ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que je pourrais avoir terminé d'ici 15

  7   heures 10, voire avant.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il y aura des questions

  9   supplémentaires, Madame West.

 10   Mme WEST : [interprétation] Oui. Je pense que j'en ai pour environ dix

 11   minutes, mais en tout état de cause, ce sera relativement bref.

 12   M. TIEGER : [interprétation] Et j'aurais besoin, moi, de quelques instants,

 13   vraiment de quelques minutes, pour pouvoir traiter une question à huis clos

 14   partiel.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Je demanderais au Greffe de

 16   bien vouloir s'approcher.

 17   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous trouverons une solution. Entre-

 19   temps, veuillez continuer, Monsieur Karadzic, vous avez la parole.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Au paragraphe 77, vous parlez -- et je vais vous donner lecture du

 23   passage en question. Il s'agit de la troisième ligne :

 24   "Je suis convaincu qu'il y avait une volonté de la part des organes de la

 25   police de protéger la population musulmane qui aurait décidé de rester à

 26   Srebrenica, mais malgré cette volonté, je ne pense pas que la police aurait

 27   été en mesure de garantir la sécurité de la population musulmane."

 28   On ne leur a pas dit : Restez, on ne peut pas garantir de sécurité.


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  1   Votre conclusion c'est que la police n'était pas en position de force; est-

  2   ce exact ?

  3   R.  C'est exact. La police avait une réelle force, mais la situation était

  4   telle que je ne pense pas que les forces de police auraient pu empêcher

  5   d'éventuels actes de vengeance.

  6   Q.  Merci. Vous parlez d'éventuels actes de vengeance à cause de ce qui

  7   s'était passé au cours des trois années précédentes; est-ce exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Les Musulmans eux-mêmes craignaient-ils que cela puisse arriver, même

 10   pour ceux qui n'avaient pas commis de crimes ou d'atrocités ?

 11   R.  Je pense que c'est l'une des raisons principales lorsque la décision

 12   fut prise de quitter Srebrenica. Je pense que c'était vraiment là la raison

 13   essentielle.

 14   Q.  Merci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, nous allons

 16   poursuivre jusqu'à 15 heures, et si nécessaire, nous poursuivrons pour un

 17   quart d'heure encore, mais après une pause d'un quart d'heure.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Je ferai tout mon possible pour terminer

 19   pour 15 heures.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  J'aimerais maintenant vous poser une question concernant un incident en

 23   1995, ou plutôt, sur les événements qui se sont déroulés dans l'école. Il

 24   apparaît ici, et j'aimerais savoir si vous savez quelque chose à ce propos,

 25   donc il est dit ici qu'après le 14, c'est-à-dire après que les prisonniers

 26   aient été évacués de l'école, on avait trouvé les corps dans toutes les 16

 27   salles de classe avec un, deux, jusqu'à trois corps dans chaque salle.

 28   Autrement dit, qu'il y avait jusqu'à 60 corps. Savez-vous si les personnes


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  1   ont été tuées après l'évacuation de la plupart des prisonniers ou est-ce

  2   que ces personnes ont été tuées pendant la détention ?

  3   R.  J'ai entendu parler des événements qui se sont déroulés dans l'école.

  4   J'en ai entendu parler par les membres de ma famille, parce que nous vivons

  5   pas loin de l'école même. Je ne savais pas quelle était l'ampleur de

  6   l'incident et des crimes qui se sont déroulés là dans l'école, mais j'ai

  7   demandé autour de moi. J'ai demandé aux personnes qui étaient au courant,

  8   et j'ai appris qu'il y avait environ 30 personnes qui avaient été tuées.

  9   Q.  Avez-vous eu des informations quant au fait que ces personnes avaient

 10   été tuées pendant qu'elles étaient incarcérées, ou est-ce que ces personnes

 11   avaient été amenées dans la nuit et ensuite tuées une, deux ou trois

 12   personnes par salle de classe ? Parce que si on les avait tuées, pourquoi

 13   est-ce qu'on l'aurait fait dans différentes salles de classe si on les

 14   avait réunies au sein d'un même bâtiment ?

 15   R.  Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a eu un incident,

 16   qu'un groupe avait cherché à s'évader.

 17   Q.  Merci. Est-il possible que ces personnes aient été tuées alors qu'elles

 18   cherchaient à s'évader, et ensuite qu'on ait ramené leurs corps et qu'on

 19   les ait placés dans ces salles de cours ?

 20   R.  C'est possible.

 21   Q.  Au paragraphe 56, vous rappelez que j'ai visité Srebrenica le 4 août

 22   1995. Vous souvenez-vous s'il s'agissait d'un événement religieux et que je

 23   ne m'étais pas rendu aux bâtiments municipaux, que je ne suis allé nulle

 24   part d'ailleurs ?

 25   R.  Oui, je me souviens de cet événement. M. Deronjic m'avait demandé de

 26   faire de la place dans un bureau du centre culturel afin de vous recevoir.

 27   Q.  Merci. Vous dites que nous nous sommes rendus à pied à l'église. Dans

 28   quel état se trouvait l'église à Srebrenica quand nous sommes arrivés sur


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  1   place ?

  2   R.  Je ne vous ai pas accompagné jusqu'à l'église et je ne sais pas dans

  3   quel état se trouvait l'église. Je sais qu'elle avait été gravement

  4   atteinte, mais je ne sais pas vraiment dans quel état elle était. Je suis

  5   retourné à Bratunac lorsque vous avez participé à une manifestation

  6   religieuse - je ne sais pas très bien comment s'appelle cette cérémonie -

  7   mais c'était parce qu'il y avait une femme très religieuse sur place qui

  8   avait eu une vision et qui avait dit qu'une croix devait être érigée dans

  9   la vieille ville et que cette croix devait être placée en direction d'une

 10   autre ville, conférant ainsi à cette zone et au peuple serbe une

 11   protection.

 12   Q.  Merci. S'agissait-il de la levée de la croix qui est une tradition qui

 13   remonte à l'empereur Constantin et sa mère ?

 14   R.  Je ne sais rien du tout à ce propos, mais je sais que ça s'est déroulé

 15   comme je l'ai décrit.

 16   Q.  Maintenant, au paragraphe 98, vous parlez des procédures de ré-

 17   ensevelissement, et on vous a demandé en octobre -- en septembre et en

 18   octobre 1995, on vous a demandé si vous aviez, en fait, donné l'ordre de

 19   donner du carburant pour que soient ré-ensevelis des corps. Et je vais lire

 20   en anglais :

 21   "En tant que citoyen, comme beaucoup d'autres citoyens, j'ai pu constater

 22   que ces corps avaient été déplacés et qu'auparavant ils étaient à Glogova."

 23   Donc, ai-je raison de dire que quelque part à Glogova, et vous ne savez pas

 24   quel est l'emplacement exact, les personnes qui avaient été tuées à Glogova

 25   avaient été enterrées en mai 1992 et qu'en juillet 1995, toutes les

 26   personnes qui ont été tuées à ce moment-là ont été ensevelies à Glogova, y

 27   compris des victimes à Kravica ?

 28   R.  On peut supposer qu'il y a eu des victimes à Glogova en 1992 et en


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  1   1995.

  2   Q.  Etes-vous d'accord quant au fait que la protection civile avait pour

  3   responsabilité d'assainir le terrain pendant la guerre, et que suite à

  4   chaque bataille, les unités de protection civile devaient ensevelir, non

  5   seulement nos soldats, mais les soldats ennemis ? Pas dans les bois, mais

  6   dans les villes.

  7   R.  C'était bien leur responsabilité.

  8   Q.  Avez-vous eu l'impression que ceux qui ont perpétré ces crimes s'en

  9   vantaient ouvertement ou est-ce que vous avez eu l'impression qu'ils

 10   essayaient de dissimuler ça auprès des autorités, c'est-à-dire qu'ils ont

 11   vraiment cherché à dissimuler leurs actes ?

 12   R.  L'incident dont il est question ici, c'est-à-dire le fait d'avoir

 13   déplacé ces corps, ce n'est pas une chose que j'ai vue moi-même. Je n'ai

 14   pas vu des corps à bord des camions, mais j'ai vu les camions, et j'ai eu

 15   des commentaires de mes concitoyens disant que des corps avaient été

 16   rapatriés de Glogova.

 17   Q.  Ma question était plus générale, concernant tous les crimes. Est-ce que

 18   les auteurs des crimes se déplaçaient librement et se vantaient de leurs

 19   actes ou ils essayaient de se dissimuler vis-à-vis des autorités ?

 20   R.  Personne ne voudrait se vanter des crimes qu'ils auraient commis.

 21   Q.  Donc les autorités, la police et le commandement militaire, ne le

 22   savaient pas parce que ça n'avait pas été porté à leur connaissance; est-ce

 23   exact ?

 24   R.  Si quelqu'un avait commis un crime, je sais qu'il ne pouvait pas, de

 25   façon publique, s'en vanter.

 26   Q.  Merci, Monsieur Katanic. Je fais tout mon possible pour que vous

 27   puissiez rentrer chez vous avant l'anniversaire de votre fille. J'aimerais

 28   vous remercier de votre témoignage, et je transmets mes salutations --


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  1   R.  Merci.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West.

  3   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Nouvel interrogatoire par Mme West :

  5   Q.  [interprétation] On vient de vous poser une question concernant cette

  6   visite à Srebrenica le 4 août par M. Karadzic. Vous vous en souvenez ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que le général Krstic était à Srebrenica lors de cette visite ?

  9   R.  Je ne pense pas. Je ne l'ai pas vu.

 10   Mme WEST : [interprétation] L'autre question que je voulais poser, Monsieur

 11   le Président, c'est concernant le compte rendu d'audience, les pages 39 et

 12   40, lorsqu'il était question des paragraphes 82 [comme interprété] et 93 de

 13   la déclaration du témoin. On voulait savoir si c'est une question

 14   directrice qui a été posée lors de l'entrevue.

 15   Je dispose des deux pages du compte rendu d'audience pour pouvoir les

 16   verser au dossier. C'est ce que je voudrais que l'on verse. Il faudrait que

 17   je fasse rejouer la version audio, si la Défense n'a aucune objection à

 18   soulever quant au fait de verser ceci au dossier.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Non, nous n'avons aucune objection à cela.

 21   Mme WEST : [interprétation] Merci. Il s'agit du 65 ter 23612, deux pages.

 22   Merci, j'ai terminé.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. C'est versé au dossier.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P4384.

 25   Questions de la Cour :  

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Katanic, vous avez parlé de

 27   l'usine de fabrication de briques, vous avez dit que M. Beara et M.

 28   Deronjic s'y sont rendus ensemble et il a été question de savoir si les


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  1   prisonniers pouvaient y être incarcérés ou non. N'avez-vous jamais été dans

  2   ces lieux ?

  3   R.  Oui.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous décrire l'apparence de

  5   cette usine, quelle en est la taille ?

  6   R.  Pour ce qui est de la surface, c'est assez grand, assez étendu. Quant

  7   aux bâtiments eux-mêmes, il n'y a pas de structures en tant que telle avec

  8   des toits. Il y a uniquement le bâtiment administratif et ensuite l'usine

  9   même.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dites-nous, quelle est la taille du

 11   bâtiment administratif et de l'usine ou de l'atelier. Et combien de gens y

 12   travaillent, combien de pièces ou de bureaux y a-t-il ?

 13   R.  Dans le bâtiment administratif ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Oui. Vous avez dit que c'est le

 15   seul bâtiment qui aurait un toit.

 16   R.  Oui. Il s'agit d'un petit bâtiment. Pour ce qui est de sa taille, je

 17   pense qu'il peut accueillir jusqu'à dix employés.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous connaissez la mine de

 19   Sase ?

 20   R.  Oui, mais je n'ai pas été à l'usine de briques pendant la guerre ni à

 21   la mine de Sase non plus. J'ai vu ces endroits avant et après la guerre.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Pouvez-vous m'expliquer ce qu'il

 23   y a à la mine de Sase, qu'est-ce qu'il y a comme édifice, de quelle taille

 24   sont-ils.

 25   R.  La mine de Sase comporte des bâtiments beaucoup plus grands que ceux à

 26   l'usine de briques à Bratunac, mais je ne peux pas vous dire avec certitude

 27   quelles étaient les dimensions de ces bâtiments.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous venez de me dire que vous pensez


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  1   que dix employés pouvaient travailler au bâtiment administratif de la

  2   briqueterie et dans les mines de Sase, si vous compariez ?

  3   R.  C'est beaucoup plus grand.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pourrais aider ? Le témoin a dit dix bureaux

  5   et non pas dix salariés parce que dix salariés, vous pouvez les placer dans

  6   un bureau.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non. Excusez-moi. J'ai bien dit le

  8   bâtiment administratif de l'usine de briques de Bratunac c'est un petit

  9   bâtiment. En temps normal, pas plus de dix personnes ne peuvent y

 10   travailler. Il y a peut-être trois ou quatre pièces.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 12   A moins que des collègues aient des questions à poser au témoin, votre

 13   déposition est terminée, Monsieur Katanic. Je vous remercie au nom de cette

 14   Chambre de première instance et au nom du Tribunal. Merci d'être venu à La

 15   Haye. Vous pouvez partir maintenant.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et nous allons tous partir en même

 18   temps.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   Vous pouvez partir. Merci.

 22   [Le témoin se retire]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel

 24   brièvement.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous y sommes.

 27   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 24552 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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 20   [Audience publique]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons reprendre

 22   à 9 heures du matin lundi.

 23   --- L'audience est levée à 15 heures 07 et reprendra le lundi 13 février

 24   2012, à 9 heures 00.

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