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1 Le mardi 21 février 2012
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.
6 La Chambre rendra à présent sa décision relative à la requête déposée par
7 l'accusé requête faite oralement par Me Robinson le 16 février 2012,
8 demandant d'exclure certaines parties de la déclaration de Robert Block. Il
9 s'agit du témoignage qui concerne le fait que M. Block a entendu de deux
10 sources différentes que l'accusé était en colère parce que Zoran Petrovic
11 aurait rendu public l'enregistrement relatif à Srebrenica et que l'accusé
12 aurait demandé que cet enregistrement soit récupéré ou confisqué. A en
13 juger d'après la déclaration de Block, les deux sources étaient Petrovic
14 lui-même et un chauffeur non identifié quelqu'un avec qui M. Block a
15 travaillé à l'époque. L'accusé affirme qu'il s'agit d'éléments qui ne sont
16 pas suffisamment fiables pour être versés au dossier parce qu'il s'agit au
17 minimum d'un triple ouï-dire. Par ailleurs, il ajoute les articles de
18 journaux, qui ont été rédigés à l'époque par Block ainsi que par un autre
19 journaliste, qui était présent au moment où Petrovic aurait dit à Block que
20 l'accusé était en colère, ne font pas état ou ne mentionnent pas ce que --
21 l'accusé. Qui plus est, l'accusé constate que l'autre journaliste,
22 lorsqu'elle [comme interprété] a été interviewé par l'Accusation, n'a
23 jamais mentionné l'accusé dans ce contexte et que Petrovic-Pirocanac n'en a
24 pas fait non plus.
25 En fin, à l'appui de sa requête demandant d'exclure ces éléments
26 d'évidence, l'accusé s'appuie sur deux décisions rendues dans l'affaire
27 Milutinovic dans laquelle la Chambre de première instance a refusé de
28 verser au dossier certains éléments sur la base du fait qu'il s'agissait du
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1 ouï-dire.
2 En réponse, l'Accusation affirme que le témoignage de Robert Block est
3 suffisamment probant et fiable pour être versé au dossier puisqu'il s'est
4 adressé directement à Petrovic qui lui a dit que l'accusé était en colère
5 contre lui. L'Accusation aussi fait valoir que Petrovic était en contact
6 direct avec l'accusé en 1995 et que l'accusé a critiqué publiquement les
7 Serbes qui fournissaient aux agences étrangères, aux médias étrangers des
8 enregistrements ou des images relatives au conflit.
9 La Chambre s'est penchée attentivement sur les arguments des deux parties
10 et s'est penchée sur la jurisprudence de la Chambre d'appel relative à ouï-
11 dire, ainsi étaient également examinées les décisions de l'affaire
12 Milutinovic sur lesquelles s'appuie l'accusé. A cet égard, la Chambre
13 rappelle la jurisprudence bien établie de la Chambre d'appel que l'ouï-dire
14 est admissible et que sa fiabilité dépend des circonstances dans lesquelles
15 l'ouï-dire a été présenté, ainsi que sur son contenu. Cela étant dit, la
16 Chambre a décidé de rejeter la requête déposée par l'accusé d'autoriser
17 l'Accusation de présenter des éléments en question. La Chambre se fonde
18 dans cette décision sur le fait que cette partie du témoignage de Robert
19 Block se fonde sur son contact direct avec Petrovic et en tant que tel ne
20 peut pas être comparée au témoignage qui a été refusé par la Chambre de
21 première instance dans l'affaire Milutinovic, à savoir les rapports des ONG
22 sur des crimes allégués fondés sur des entretiens avec des sources
23 identifiées et non identifiées et versées au dossier devant le Tribunal par
24 l'entremise des personnes qui n'avaient pas elles-mêmes mené ces
25 entretiens. La Chambre constate également que le fait qu'il s'agisse d'un
26 triple ouï-dire est quelque chose qui concernera le poids de ce témoignage
27 et c'est quelque chose sur quoi l'accusé peut contre-interroger Block.
28 Cela étant dit, toutefois, la Chambre préfère entendre cette partie du
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1 témoignage de Block viva voce dans sa totalité. Par conséquent, la Chambre
2 ordonne à l'Accusation d'expurger la dernière phrase du paragraphe 25,
3 ainsi que la totalité du paragraphe 26 de la déclaration de M. Robert Block
4 et demande qu'un interrogatoire soit mené sur ces éléments, in vivo.
5 La Chambre s'est penchée également sur le fait que les dépositions de Milan
6 Lesic et Obradovic devaient être présentées in voce, viva voce :
7 S'agissant de Milan Lesic, la Chambre constate qu'il a été demandé que la
8 déposition en application de 92 ter devait être versée par ce témoin --
9 qu'il devait être versé par le biais de ce témoin comporte des éléments
10 très considérables parlant de l'aide que le témoin a fourni -- une aide
11 financière à la direction de la RS après 1995 et sur ses contacts avec
12 l'accusé Ratko Mladic en 2001. La Chambre constate qu'une partie très
13 importante des éléments écrits concerne les explications que donne le
14 témoin de photographies et d'enregistrement. La Chambre, par conséquent,
15 estime qu'il est dans l'intérêt de la justice de faire droit à la requête
16 de l'accusé demandant d'interroger viva voce Milan Lesic et ordonne à
17 l'Accusation de se focaliser sur les parties du témoignage qui sont
18 pertinentes au regard de l'acte d'accusation.
19 La Chambre décide par ailleurs que le contre-interrogatoire de l'accusé ne
20 dépassera pas le temps qui aura été pris par l'Accusation pendant
21 l'interrogatoire principal.
22 Pour ce qui est de Ljubomir Obradovic, la Chambre rendra son ordonnance au
23 cours de la journée.
24 S'il n'y a pas autres choses, nous pourrons faire rentrer le témoin.
25 Oui, Maître Robinson.
26 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je voudrais
27 simplement faire consigner au compte rendu d'audience, avant l'entrée de M.
28 Block, que nous maintenons notre objection. Nous ne souhaitons pas entendre
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1 les dépositions des correspondants de guerre sans avoir la possibilité
2 d'avoir été entendu sur la pleine jouissance de nos droits. Je n'ai rien
3 d'autre à ajouter.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Faisons entrer le témoin.
5 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
7 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez prononcer la déclaration
9 solennelle, s'il vous plaît.
10 L'INTERPRÈTE : Le témoin inaudible.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre microphone n'était pas branché.
12 Répétez, s'il vous plaît.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
16 LE TÉMOIN : ROBERT JEFFREY BLOCK [Assermenté]
17 [Le témoin répond par l'interprète]
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] M'entendez-vous ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, je vous entends.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, vous avez la parole.
21 M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Interrogatoire principal par M. Mitchell :
23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
24 R. Bonjour.
25 Q. Est-ce que vous pouvez décliner votre identité, s'il vous plaît ?
26 R. Robert Jeffrey Block.
27 Q. Quelle est votre profession ?
28 R. Pour l'instant, je suis cadre dans une compagnie aérienne.
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1 Q. Avant d'exercer cette profession-là ?
2 R. Pendant 30 ans, à peu près, j'ai été journaliste et pour la plupart de
3 ce temps, j'ai été correspondant de guerre pour différentes agences de
4 presse.
5 Q. Est-ce que vous pouvez nous parler un peu plus en détail pour qui vous
6 avez travaillé pendant cette période ?
7 R. J'ai commencer pour reporter pour de -- des -- pour la presse de
8 Floride où je suis originaire, des journaux qui ne sont pas très
9 importants. Est-ce que je devrais entendre quelque chose dans mon casque ?
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que vous vous entendez.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je m'entends.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et ça doit être très fort. L'huissier
13 pourrait peut-être aider.
14 Monsieur Karadzic, est-ce que vous pourriez dire quelque chose en B/C/S
15 pour voir si le témoin peut entendre la traduction ?
16 L'ACCUSÉ : [interprétation]
17 Bonjour Excellences. Bonjour à tous.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends rien.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour. Bonjour à toutes et à tous.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant j'entends, mais je m'entends moi-
21 même aussi.
22 Donc, comme j'étais en train de dire, j'ai travaillé pour des
23 journaux de petits tirages de Floride d'où je suis originaire, et puis par
24 la suite, je suis allé à Mexico City. Là, j'ai commencé à travailler pour
25 Reuters basé en Grande-Bretagne. C'était une organisation internationale.
26 J'ai -- j'y suis resté pendant 10 ans pratiquement avec eux, et ensuite
27 j'ai commencé à travailler pour un journal indépendant de Londres -- pour
28 "The Independent" --
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1 L'INTERPRÈTE : -- se corrige l'interprète.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, j'ai été assistant et ensuite, j'ai
3 été chef à -- de -- chargé des affaires internationales -- plutôt des
4 correspondants étrangers. Après, j'ai travaillé brièvement pour Sunday
5 Times, à Londres et puis pour The Wall Street Journal. J'étais
6 correspondant basé en Afrique pour -- d'abord, et puis ensuite, en Europe
7 centrale et au Proche-orient. Et puis lorsque M. Murdoch a acheté le
8 journal, je suis parti. J'ai commencé à travailler pour The Orlando
9 Sentinel, de nouveau en Floride, et puis enfin, je suis arrivé là où je
10 suis maintenant.
11 M. MITCHELL : [interprétation]
12 Q. Vous étiez grand reporter pour "The Independent;" est-ce que vous
13 pouvez nous parler de quoi vous avez -- vous vous êtes occupé pendant cette
14 période-là ?
15 R. Je -- j'ai travaillé à des endroits très intéressants par des
16 événements horribles qui se sont passés. Je -- j'étais à Londres, mais
17 ensuite, on m'envoyait ailleurs, au Proche-Orient si -- si -- si quelque
18 chose -- si la situation se détériorait ou s'il y avait quelque chose
19 d'inattendu : la -- le démantèlement de l'ex-Yougoslavie, l'Afrique très
20 souvent, le génocide au Rwanda, partout où les gens se comportaient mal
21 vis-à-vis d'autrui, on finissait par m'y envoyer.
22 Q. Plus précisément, est-ce que vous pouvez nous parler de l'ex-
23 Yougoslavie, du conflit en ex-Yougoslavie ? Comment vous y êtes arrivé pour
24 la première fois, et comment est-ce que vous avez commencé à travailler
25 dessus ?
26 R. C'était après la première guerre du Golfe. J'étais en train de rédiger
27 une -- un livre sur la Palestine, sur les Palestiniens et sur ce qui leur
28 est arrivé au Koweït et ce -- ce livre, finalement, n'a jamais été publié.
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1 Puis, la guerre a éclaté en Yougoslavie. J'ai abandonné ce travail sur le
2 livre et je suis revenu à "The Independent" et quasiment immédiatement, on
3 m'a dit de partir pour la Yougoslavie, donc je me suis trouvé à différents
4 endroits en Yougoslavie pour "The Independent." Ils étaient d'accord avec
5 mon approche, donc j'avais la sensation qu'il y avait plein, plein de monde
6 à Sarajevo qui étaient au cœur de l'intérêt des médias. Donc -- et puis, il
7 y en avait beaucoup à Zagreb qui s'intéressaient à la guerre du point de
8 vue des Nations Unies et des agences humanitaires. Donc, j'ai -- je me suis
9 dit qu'il fallait que je me déplace, que j'aille ailleurs pour voir ce qui
10 se passait là où -- où -- aux endroits qui n'étaient pas à la une.
11 Q. Pendant cette période, vous -- est-ce que vous êtes allé en Bosnie
12 orientale, Zvornik, Bratunac, Srebrenica ?
13 R. Je suis arrivé à Belgrade. Je pense que c'est le premier endroit où je
14 me suis rendu en 1993, me semble-t-il, et le premier endroit où, d'après ce
15 qu'on m'a dit, il y avait des choses à voir, c'était dans la Vallée de la
16 Drina. Donc, nous sommes partis en voiture le long de la rivière qui, en
17 fait, trace la frontière entre la Serbie et la Bosnie et nous sommes passés
18 par Ljubovija. Je pense que c'est -- c'est -- il s'appelle encore
19 Ljubovija, ce village, et nous avons pu, depuis la Yougoslavie, voir les
20 soldats musulmans de Bosnie incendier un petit village serbe, Bjelovac.
21 J'ai vu cela, avec des gens du côté de la route en Serbie, une femme de
22 Bjelovac également et nous étions là à voir ce village être détruit.
23 Q. Est-ce que vous parlez serbo-croate ?
24 R. Suffisamment pour me causer des soucis.
25 Q. Alors vous avez donné une déclaration au bureau du Procureur le 4
26 septembre 1995.
27 R. Oui, je pense que c'est exact.
28 Q. Et vous avez donné une déclaration supplémentaire au bureau du
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1 Procureur le 20 novembre 2009.
2 R. C'est exact.
3 M. MITCHELL : [interprétation] 65 ter 90314A, s'il vous plaît. Est-ce qu'on
4 peut l'afficher dans le système électronique ?
5 Q. Le 14 février 2012, Monsieur Block, vous avez signé une déclaration
6 consolidée qui reprend vos déclarations de 1995 et de 2009 avec quelques
7 éléments supplémentaires que vous avez fournis au bureau du Procureur;
8 exact ?
9 R. Exact.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons lui montrer le
11 bas de la page ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ma signature.
13 M. MITCHELL : [interprétation]
14 Q. Est-ce que vous pouvez confirmer, s'il vous plaît, que cette
15 déclaration consolidée reflète l'ensemble des éléments pris dans vos
16 déclarations précédentes ?
17 R. Oui.
18 Q. Si l'on vous posait des questions aujourd'hui sur ces mêmes éléments
19 qui sont contenus dans la déclaration, est-ce que vous fournirez --
20 fourniriez les mêmes informations ?
21 R. Oui.
22 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le
23 versement de la déclaration. Nous avons une version expurgée et nous avons
24 une version sous pli scellé, parce qu'un document dont il est question au
25 paragraphe 41(A) a été fourni à condition de ne pas être divulgué
26 publiquement.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons verser au dossier
28 les deux versions et l'expurgation qui a été demandée par la Chambre sera
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1 exécutée en temps voulu, je suppose. Donc accordez-nous les cotes, s'il
2 vous plaît.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] 65 ter 90314 devient pièce -- la pièce
4 4329 [comme interprété] sous pli scellé et 65 ter 09314A [comme interprété]
5 devient la pièce P4393.
6 M. MITCHELL : [interprétation] Le -- et je demande le versement des pièces
7 connexes, cinq pièces --
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il va y avoir des objections
9 ?
10 M. ROBINSON : [interprétation] Non, pas d'objection.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'autorisation vous est accordée
12 d'ajouter ces pièces. Deux points, Monsieur Mitchell, il s'agissait du 65
13 ter 23615 et 23617 qui font l'objet du paragraphe que vous venez de
14 mentionner, paragraphe 41. Le témoin dit : Je pense que je peux m'exprimer
15 en audience publique. Je pense que Resid Halilovic est le même homme que
16 Resid Sinanovic, dans ces deux documents. Je ne sais pas comment il arrive
17 à cette conclusion. Donc je voudrais que vous l'interrogiez directement là-
18 dessus.
19 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, tout à fait.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur ces documents-là; sinon, les huit
21 autres documents seront versés au dossier, et les cotes seront attribuées
22 en temps voulu.
23 M. MITCHELL : [interprétation] Je me propose de donner lecture de la
24 déclaration de M. Block.
25 Le 15 juillet 1995, M. Block est arrivé à Belgrade pour faire un reportage
26 sur la chute de Srebrenica. Il a rencontré un collègue, Dragan Cicic, qui
27 lui a parlé d'un documentaire qui aurait été diffusé le même jour par la
28 chaîne de télévision Studio B de Belgrade. M. Cicic a déclaré que ce
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1 documentaire contenait des images frappantes qui ont été tournées dans
2 Srebrenica et dans le secteur de Srebrenica.
3 Le 16 juillet, M. Block et M. Cicic, se sont rendus au Studio B. Ils ont
4 regardé le documentaire qui avait été diffusé la veille ainsi que des
5 roches à partir desquelles on a monté le documentaire. L'enregistrement a
6 été fait dans la zone de Srebrenica les 13 et 14 juillet 1995, par un
7 journaliste serbe, à savoir Zoran Petrovic-Pirocanac. Parmi ces
8 enregistrements, M. Block a vu un extrait bref qui semblait représenter 20
9 à 25 corps d'homme qui semblaient avoir été tués, abattus. Il a également
10 vu des images d'un détenu sur un balcon d'une "maison blanche," et des
11 hommes qu'on faisait sortir de cette "maison blanche" sous la menace de
12 fusil.
13 Ce jour-là, au Studio B, M. Block a également vu un enregistrement de
14 Bratunac le 14 juillet 1995, tourné par une chaîne de télévision de Bosnie.
15 On y voyait des centaines d'hommes sur un stade de foot qu'on forçait à se
16 mettre debout et se rasseoir.
17 M. Block n'a plus jamais revu les images de Petrovic, de ces hommes qui
18 quittaient la "maison blanche" qui étaient menacés avec des fusils, il n'a
19 pas non plus vu l'enregistrement de la télévision serbe de Bosnie, des
20 hommes, des Musulmans sur un stade de foot, qu'on forçait à se mettre
21 debout et se rasseoir.
22 Sur la base des images qu'il a vues au Studio B, M. Block a rédigé un
23 article intitulé : "Les corps s'entassent dans l'horreur de Srebrenica;" il
24 a été publié par "The Independent" le 17 juillet 1995.
25 Le 17 juillet 1995, M. Block est revenu dans les bureaux du Studio B pour
26 constater qu'il y avait eu confiscation de ces enregistrements. Il a
27 entendu de deux sources que Dr Karadzic s'était mis très en colère au sujet
28 de cet enregistrement et qu'il a demandé qu'on le reprenne. Après avoir
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1 appris que ces images avaient disparu, M. Block a voulu trouver d'autres
2 informations. Lui et Dragan Cicic ont essayé d'avoir l'autorisation d'aller
3 à Pale, mais on leur a dit qu'on les arrêterait s'ils essayaient. Ils sont
4 allés à Ljubovija. On ne leur pas donné l'autorisation de passer à
5 Bratunac, les Serbes l'ont refusé cette autorisation. Ils ont garé la
6 voiture auprès du pont de Ljubovija, Bratunac, et ils se sont adressés aux
7 Serbes qui traversaient le pont Bratunac. M. Block a appris de ces hommes
8 que des milliers de Musulmans étaient exécutés par des Serbes de Bosnie. Il
9 se rappelle une femme en particulier qui a dit quelque chose comme, mais
10 comment se fait que vous ne savez pas ce qui se passe là-bas ? Tout le
11 monde sait ce qui s'y passe.
12 Pendant les deux jours qui ont suivi, M. Block a essayé de corroborer cette
13 information. Dans la soirée du jeudi 20 juillet, il avait la sensation
14 qu'il avait suffisamment d'éléments pour corroborer cette histoire, et pour
15 la publier dans "The Independent." Le vendredi 21 juillet 1995, dans un
16 article intitulé : "Massacre dans un champ bosniaque, on a du sang
17 jusqu'aux genoux," à ce moment-là, M. Block est arrivé à la conclusion que
18 l'exécution des Musulmans était connue de tout le monde, des deux côtés de
19 la Drina -- de la rivière Drina et dans la Région de Bratunac, et de
20 Ljubovija.
21 Au cours des jours qui ont suivi, M. Block est retourné dans les secteurs
22 de Bratunac, Ljubovija et Loznica, où il a continué à entendre des récits
23 relatifs à l'exécution des milliers d'hommes musulmans. Il a notamment
24 entendu parler d'un récit concernant la rive de la Drina. M. Block s'y est
25 rendu et a parlé avec des gens qui lui ont dit qu'ils avaient vu de la rive
26 serbe de la Drina, des gens qui étaient poussés hors de camion, et tués par
27 balle. Ils ont également décrit la présence d'engin de terrassement qui
28 poussait de la terre sur les cadavres pour les dissimuler.
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1 Cette information était publiée dans "The Independent," le 25 juillet
2 1995, dans un article rédigé par M. Block, et intitulé : "Les meurtres au
3 bord de la rivière font la lumière sur l'étendue de l'horreur après la
4 chute de Srebrenica."
5 Au cours de cette période, M. Block a également entendu parler d'un
6 avocat musulman de Srebrenica qui a été sauvé dans le secteur de la Drina,
7 après avoir reçu plusieurs balles et qui ensuite était soigné au sanatorium
8 de Banja Koviljaca et l'hôpital de Loznica, avant de repartir vers le MUP
9 de la Republika Srpska, à Bijeljina. M. Block a publié cette information
10 dans son article du 25 juillet 1995, intitulé : "Assassinat près de la
11 rivière, il jette de la lumière sur l'étendue de l'horreur après la chute
12 de Srebrenica."
13 Q. Monsieur Block, j'aurais quelques questions supplémentaires à propos
14 d'un certain nombre de questions, et j'aimerais commencer par revenir à la
15 question soulevée par le Président, tout à l'heure.
16 M. MITCHELL : [interprétation] Je demanderais à ce que la pièce 90314 soit
17 affichée à l'écran, et j'entends par là la version sous pli scellé. De
18 façon à en éviter la diffusion, je demanderais à ce que l'on examine la
19 page 10.
20 Q. Je vous demanderais de bien vouloir vous pencher sur le paragraphe 41,
21 Monsieur Block.
22 R. Oui.
23 Q. Vous souvenez-vous avoir vu ces deux qui vous ont été présentés lors
24 d'une séance de récolement, la semaine dernière ?
25 R. Oui.
26 Q. Au paragraphe 41, vous dites : "Je pense que l'homme dont je parle dans
27 mon article" - c'est-à-dire l'article du 25 juillet 1995 - "dont je parle
28 dans mon article en tant que Resid Halilovic est le même homme appelé Resid
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1 Sinanovic et Resid Sinanovic respectivement dans les deux documents qui
2 sont évoqués par la suite. Pouvez-vous nous expliquer comment vous êtes
3 parvenu à cette conclusion ?
4 R. Puis-je également parler du troisième document de la troisième partie ?
5 Q. Sentez-vous libre d'expliquer tous les éléments nécessaires à la
6 Chambre.
7 R. Il était tout à fait courant de rencontrer des difficultés lorsque nous
8 devons, en ex-Yougoslavie, vérifier des noms ou les chiffres, et l'on
9 entendait souvent qu'une personne était appelée de différentes manières
10 mais qu'en fait il s'agissait d'une seule et même personne. C'était quelque
11 chose qui arrivait souvent.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, je me
13 permets de vous interrompre. Je voudrais savoir si le document 23615, de la
14 liste 65 ter a été chargé dans le système ? Oui, ça y est, maintenant c'est
15 bon.
16 Monsieur Block, veuillez poursuivre.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il s'agissait là d'un événement très
18 précis qui m'avait été décrit par des personnes qui se trouvaient le long
19 de la rivière, ce jour-là, à l'extérieur de Banja Koviljaca, ils avaient vu
20 cet homme. Ils avaient été à sa rescousse, et ils l'avaient amené à Banja
21 Koviljaca puis Loznica. C'était un avocat. Son prénom était Resid. Un autre
22 document je crois un rapport de renseignement des Serbes de Bosnie faisait
23 état d'un avocat blessé qui avait été retrouvé dans le même secteur. Il m'a
24 paru tout à fait évident que les trois documents, les deux dont je parle
25 ici ainsi que le troisième dont je parle de manière beaucoup plus brève
26 ailleurs que ces trois documents faisaient référence à un seul et même
27 homme. La coïncidence eut été trop flagrante, trop forte.
28 M. MITCHELL : [interprétation] Je vous remercie. Je demanderais maintenant
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1 à ce que l'on affiche le document 13264 de la liste 65 ter, s'il vous
2 plaît.
3 Q. Il s'agit de votre article du 17 juillet intitulé : "Les corps
4 s'entassent dans l'horreur de Srebrenica."
5 R. Oui.
6 Q. J'aimerais que vous reveniez brièvement avec nous sur cette expérience
7 que vous avez vécue alors que vous vous trouviez à Studio B et que vous
8 avez visionné ces images pour la première fois.
9 R. On nous a remis des cassettes vidéo et on nous a fourni une brève
10 explication sur la manière dont il fallait utiliser les bandes montages là
11 où nous visionnions les cassettes, nous ne savions pas dans quel ordre les
12 cassettes se trouvaient. Nous avons vu le documentaire qui avait déjà été
13 monté et nous avons notamment vu une brève séquence qui semblait avoir été
14 tournée d'un véhicule en mouvement. On voit donc la caméra qui parcourt ce
15 qui semble être un mur avec deux grandes portes de garage en métal, et la
16 caméra montre le bas du mur où l'on aperçoit des vêtements, et j'aurais
17 laissé passer si la voix, le commentateur n'avait pas dit qu'il y avait de
18 nombreux cadavres de soldats musulmans.
19 Nous avons donc demandé au technicien de revenir en arrière et de nous
20 passer la cassette, image par image, pour bien voir ce qui s'y trouvait, et
21 nous nous sommes rendus compte qu'il ne s'agissait pas de tas de vêtements
22 ou d'effets personnels, mais de cadavres entassés. Les images n'étaient pas
23 très claires, mais elles n'en étaient pas moins choquant es, et nous avons
24 eu beaucoup de mal à en croire nos yeux. Nous sommes revenus en arrière à
25 plusieurs reprises, et nous avons fait défiler les images plusieurs fois
26 pour vérifier que ce n'était pas une illusion optique, et que notre cerveau
27 n'était pas en train de nous jouer des tours. Puis nous nous sommes bien
28 rendus compte qu'il y avait entre 20 et 25 corps. Il y avait un homme
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1 devant qui portait un tee-shirt blanc. Un autre avec un tee-shirt sombre,
2 et ça ne ressemblait à rien de ce que j'avais vu en dépit de mon expérience
3 de 20 ans en tant que correspondant de guerre.
4 M. MITCHELL : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant la pièce
5 4269 à l'écran, s'il vous plaît.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, en attendant
7 l'affichage de ce document, vous avez demandé le versement, me semble-t-il,
8 au dossier du document 65 ter 23615 ainsi que le versement du document
9 23617.
10 M. MITCHELL : [aucune interprétation]
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas accepté officiellement
12 le versement au dossier de ces pièces. Nous le faisons mais ces pièces
13 doivent-elles être versées sous pli scellé.
14 M. MITCHELL : [interprétation] Seule la pièce 23615, le document 23617
15 n'exige pas le versement sous pli scellé.
16 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Le document 23615 deviendra la
18 pièce P4402, sous pli scellé, le document 13617 [comme interprété] de la
19 liste 65 ter deviendra la pièce P4403.
20 M. MITCHELL : [interprétation] Merci.
21 Q. Monsieur Block, reconnaissez-vous l'image que vous voyez à l'écran
22 devant vous ?
23 R. Oui, tout à fait, c'est une scène tirée du document qui a été diffusé
24 par Studio B.
25 Q. J'aimerais vous demander d'y apposer quelques annotations --
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous comprenez que cela est une image
27 composée, n'est-ce pas ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, bien sûr, nous n'aurions pas été en
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1 mesure évidemment de voir les choses sur l'écran si cela n'avait pas été le
2 cas, en tout cas, pas de cette manière.
3 M. MITCHELL : [interprétation] Je demanderais l'aide de l'huissier.
4 Q. Vous dites au paragraphe 3 de votre article du 17 juillet que l'on voit
5 le corps alerte, si je puis dire, d'un jeune homme qui porte un tee-shirt
6 blanc. Pouvez-vous l'entourer d'un cercle.
7 R. Oui, il est juste ici.
8 Q. Vous avez également parlé de taches brunes à rouges sur le mur et de
9 taches sombres sur les portes du garage derrière les cadavres.
10 R. On ne le voit pas très bien ici pas aussi bien que sur les images que
11 nous avons visionnées. Je -- on voyait ici sur les portes. Puis il y avait
12 aussi des impacts de balle dont j'ai parlé également, mais sur les images
13 vidéo, on voyait cela beaucoup plus clairement. On voyait les impacts de
14 balle ici sur la porte de derrière.
15 Q. Pouvez-vous mettre le chiffre 1 à côté du corps portant un tee-shirt
16 blanc ?
17 R. Oui. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Un 2 à côté de cette annotation que vous avez apposée sur les portes ?
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 Q. Pour le compte rendu, les annotations à gauche et à droite marquent des
21 impacts de balle, pourriez-vous parapher ce document et placer la date
22 d'aujourd'hui sur cette photo également ?
23 R. Nous sommes le 21, n'est-ce pas ?
24 Q. Oui, en effet.
25 R. [Le témoin s'exécute]
26 Q. Ce que vous avez vu le 16 juillet, était-ce de meilleure qualité que
27 les images affichées à l'écran que cette photo composite ?
28 R. Oui, c'était la première génération, c'était le documentaire proprement
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1 dit -- ou plutôt, la deuxième mais, en tout cas, oui, les images étaient
2 plus claires, et puis j'ai vu les rushes d'un grand nombre de scènes que
3 l'on voit dans le documentaire, les rushes qui ont été utilisées pour
4 monter le documentaire.
5 Q. Après avoir visionné ces images le 16 juillet et vous vous êtes rendu
6 compte que ces images avaient été confisquées, avez-vous pris des mesures,
7 entamé des démarches pour essayer de déterminer quel avait été le sort de
8 ces images ?
9 R. Je reviens quelque peu en arrière. Au moment où nous avons visionné ces
10 images et au moment où nous avons décidé d'écrire à leur sujet, j'ai eu le
11 sentiment, un sentiment instinctif peut-être que ces images allaient
12 disparaître tôt ou tard et plus tôt que tard. Le soir même où j'ai rédigé
13 cet article, c'était le 16, j'ai appelé des collègues de la télévision, la
14 BBC notamment, en leur disant ce qui se trouvait sur cette cassette et en
15 essayant de les convaincre d'obtenir ces images avant qu'elles ne
16 disparaissent, comme j'étais convaincu qu'elles le feraient, et
17 effectivement, ils m'ont dit le lendemain que ces images n'étaient plus.
18 Alors, évidemment c'est une situation un peu inconfortable pour un
19 journaliste. Il y a deux règles dans la profession, l'une c'est que l'on ne
20 veut pas arriver après tout le monde, et l'autre c'est que l'on ne veut pas
21 être le premier sans avoir d'éléments permettant de corroborer ce que vous
22 avancez. Par conséquent, j'avais tout intérêt à ce que d'autres visionnent
23 également ces mêmes images, vous savez, nous nous sommes toujours accusés
24 de propagande, d'être plus favorables à un camp plutôt qu'à un autre, et en
25 quelque sorte c'était le seul élément -- j'étais le seul témoin oculaire de
26 l'existence de ces images et il était important que d'autres les voient
27 afin de valider mes écrits.
28 Nous avons donc essayé de déterminer quel avait été le sort de cette
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1 cassette de façon à ce qu'elle puisse être utilisée en tant qu'élément de
2 corroboration de mon article, et nous avons entendu -- je crois que j'ai
3 écrit, à l'époque, que des autorités serbes de Bosnie avaient fait
4 confisquer la cassette et plus précisément que des représentants militaires
5 serbes de Bosnie l'avaient confisquée personnellement. Mais il faut que
6 vous compreniez bien que le sort de cette cassette, finalement, me
7 préoccupait moins dans la mesure où juste après d'avoir rédigé l'article et
8 après avoir essayé d'obtenir la cassette. Nous, nous sommes allés à
9 Ljubovija et nous avons entendu dire, à ce moment-là, que des milliers de
10 personnes avaient été exécutées, des chiffres considérables en Yougoslavie.
11 On entendait souvent parler de dizaines, de centaines de personnes qui
12 avaient été tuées. Ceci, bien sûr, provoquait des véritables tollés. Or,
13 ici, on parlait de milliers, de 4 000 précisément et ce, en quelques jours
14 seulement. Des chiffres considérables, donc. Nous essayions à l'époque de
15 déterminer si ce chiffre était véridique ou s'il s'agissait simplement d'un
16 effort de propagande.
17 Donc, à ce moment-là, nous ne donnions pas la priorité au sort de la
18 cassette en question, et puis, je ne pouvais faire grand-chose d'autre que
19 de parler de la matière de ce reportage. Ce que j'avais entendu dire d'un
20 ami, à moins qu'il se trouvait à Pale, qui était interprète et chauffeur,
21 avec qui j'avais travaillé pendant des années, avec qui j'étais en contact
22 étroit. Quelque chose que j'avais entendu également de Zoran Petrovic,
23 c'est que les autorités étaient furieuses et qu'apparemment, le président
24 de la Republika Srpska, le Dr Karadzic, l'était tout autant furieux de
25 l'existence de cette -- de ces images. Ça ne semblait pas être impossible,
26 mais la priorité, à ce moment-là, c'était de déterminer si, oui ou non, ce
27 que nous avions entendu, sur la rive de la rivière à Ljubovija, était vrai
28 quant à l'existence de milliers de victimes.
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1 Q. Vous avez dit avoir entendu certaines choses de Zoran Petrovic. Dans
2 quel contexte vous a-t-il dit cela ?
3 R. Dragan et moi étions allés lui rendre visite pour essayer de déterminer
4 ce qui était arrivé à cette cassette. Il avait l'air mécontent. Il avait
5 appelé avant cela pour dire qu'il était mécontent que j'aie écrit un
6 article à propos de cette cassette, puisque cela lui paraissait déplacé et
7 j'ai eu le sentiment en lui parlant qu'il était sous pression, une pression
8 qu'un certain nombre de personnes exerçaient sur lui, des personnes qui
9 l'avaient sans doute aidé à mettre la main sur ces images.
10 Q. Vous souvenez-vous quand vous êtes allé voir ou quand vous avez
11 rencontré Zoran Petrovic ?
12 R. Sans doute le lendemain, le 15, samedi 15, je suis arrivé le 16. Nous
13 avons visionné la cassette le 17. Nous nous sommes rendus compte qu'elle
14 avait été confisquée, mais nous sommes partis à Ljubovija, et le 18, qui
15 était un mardi, je crois, nous sommes revenus pour essayer de voir si
16 d'autres gens à Belgrade avaient obtenu des informations correspondant à
17 celles que nous avions obtenues et également pour parler à Petrovic,
18 puisqu'à ce moment-là, la cassette relevait peut-être une importance encore
19 plus importante compte tenu des récits que nous avions entendus à propos de
20 milliers de personnes tuées.
21 M. MITCHELL : [interprétation] Président, j'ai oublié de demandé le
22 versement de la pièce annotée tout à l'heure.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Elle est versée au dossier.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P4404.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Block, qui était Dragan ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Dragan Cicic était écrivain ou journaliste
27 pour Nin et il s'est proposé de m'aider. Il avait un sens de l'humour
28 formidable qui rendait l'insupportable supportable.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
2 M. MITCHELL : [interprétation]
3 Q. Parlons un peu de votre déplacement à Ljubovija le 17 juillet 1995.
4 M. MITCHELL : [interprétation] Je demanderais à ce qu'on l'affiche à
5 l'écran le document 65 ter 23510, page 10. Je demanderais à ce que l'on
6 agrandisse cette image et que …
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bon, je vois.
8 M. MITCHELL : [interprétation]
9 Q. Monsieur Block, voyez-vous le pont Bratunac-Ljubovija sur cette carte ?
10 R. Oui.
11 Q. Je demanderais à l'huissier de bien vouloir vous aider à entourer ce
12 pont d'un cercle sur la carte.
13 R. Le voici.
14 Q. Je vous demanderais de bien vouloir mettre un B à côté de Bratunac et
15 un L à côté de Ljubovija, ainsi qu'une croix à l'endroit où Dragan Cicic et
16 vous-mêmes vous êtes garés ce jour-là.
17 R. Nous nous sommes garés au sud du pont. Le coffre de la voiture était --
18 était dissimulé dans les buissons, hors de vue des gardes qui se trouvaient
19 du côté serbe.
20 Q. Pouvez-vous nous -- nous décrire les allées et venues -- vos allées et
21 venues de ce jour-là ?
22 R. C'est moi qui conduisais. Nous avons trouvé une voiture et nous sommes
23 allés sur place. Je conduisais. Nous nous sommes demandé si nous devions
24 traverser le pont, mais les soldats du côté yougoslave, du côté serbe de la
25 Yougoslavie nous ont dit que nous ne serions pas autorisés à traverser.
26 Alors nous avons décider de garer la voiture hors de la vue des -- des
27 gardes. Dragan est resté dans la voiture et moi, je me suis assis à
28 l'extérieur avec une radio. Je crois que j'écoutais le service
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1 international de la BBC. Je regardais le pont et j'essayais de voir si
2 quelqu'un pouvait le traverser. Les premières personnes que j'ai vues
3 étaient deux jeunes femmes, je crois. J'ai dit à Dragan : "Il y a deux
4 personnes qui viennent." Je suis entré dans la voiture; Dragan en est sorti
5 et il leur a demandé si elles voulaient qu'on les emmène quelque part et
6 elles ont dit : "Nous allons à Ljubovija." Vous le voyez sur la carte.
7 C'était à environ 1 kilomètre du village.
8 Dragan a entamé la conversation en demandant d'où elles venaient, ce
9 qu'elles faisaient et l'une a répondu que son mari faisait partie des
10 forces serbes de Bosnie, que c'était le bazar et nous avons commencé à leur
11 demander ce qui se passait et c'est à ce moment-là qu'elles ont répondu :
12 "Comment ça, qu'est-ce qui s'y passe ? Comment n'êtes-vous pas au courant
13 de ce qui se passe ?" Alors nous avons insisté en disant que nous n'étions
14 pas au courant et elle a eu l'air surprise.
15 Ensuite, elle a commencé à dire certaines choses en disant que -- en
16 disant des choses que l'on a beaucoup entendues par la suite au cours des
17 journées qui ont suivi, en parlant de gens dans des hangars, dans des cours
18 d'écoles, sur des stades, dans des hangars surtout, que des hommes y
19 étaient amenés pour y être tués par balle surtout, qu'on leur coupait la
20 gorge, que manifestement tout cela était organisé, qu'on appelait ceux qui
21 souhaitaient se venger à aller le faire sur des hommes de Srebrenica. On
22 voyait bien que tous ces gens, finalement, n'étaient pas contents qu'ils
23 étaient choqués et qu'ils étaient frappés d'une certaine manière par le
24 fait que toutes ces informations ne soient pas connues.
25 Q. Vous avez dit, évidemment, quand on est journaliste, on ne veut pas
26 être le dernier à être au courant de quelque chose, ni le premier sans
27 disposer d'élément de nature à corroborer ce que vous avancez. Alors aviez-
28 vous besoin d'autres éléments avant de pouvoir publier un article à propos
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1 de ce que vous entendiez ?
2 R. Nous nous sommes arrêtés sur le bord de la route. Une fois que les
3 jeunes filles étaient sorties de la voiture, nous nous sommes enfoncés dans
4 nos sièges, et nous nous sommes fixés longtemps sans rien dire. J'ai dit :
5 Merde, nous nous sommes dit que ce chiffre de 4 000 personnes étaient
6 énormes. En était-on certain, 4 000, c'est énorme. Nous nous sommes dit, à
7 ce moment-là, que nous devions revenir sur place, et parler à d'autres
8 personnes, ce que nous avons fait. Une fois que nous en avions suffisamment
9 entendu que la même histoire revenait, nous nous sommes dit que nous
10 devions savoir déterminer, de manière plus certaine, si c'était là une
11 exagération, nous sommes retournés à Belgrade.
12 Donc nous avons fait un demi-tour, nous sommes repartis à Belgrade, et nous
13 souhaitions nous la source d'ambassade, notamment à l'ambassade
14 néerlandaise, qui avait des hommes sur place pour savoir ce qu'eux
15 entendaient, ce que les organisations onusiennes entendaient, et le CICR,
16 et les groupes serbes, avaient-ils des informations à ce sujet. C'est ce
17 que nous nous sommes dit que nous devions faire.
18 Donc nous sommes rentrés à Belgrade, et nous avons commencé à contacter des
19 amis, avec lesquels Dragan et moi-même avions travaillé par le passé, y
20 compris Nikola, le père de Dragan, des personnes de confiance en somme.
21 Nous avons demandé à tous ces gens s'ils accepteraient d'aller sur place
22 avec du matériel d'enregistrement, de prendre des notes, de ce qu'ils
23 auraient vu, de ce qu'ils auraient entendu, nous leur avons dit quel type
24 de questions qu'ils devaient poser dans certains contextes, et en même
25 temps, d'autres gens qui vivaient dans la vallée qui avaient des parents à
26 Bratunac ou qui étaient originaires de Bratunac, ou qui arrivaient
27 récemment de Bratunac. Ils nous ont dit certaines choses et nous avons donc
28 décidé de repartir sur place et de trouver davantage de gens originaires du
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1 secteur, pour vérifier ce qu'ils auraient entendu dire ou vu de leurs
2 propres yeux. Ceci a nous a pris une semaine supplémentaire. Nous avons
3 passé les premiers jours à corroborer l'information selon laquelle un
4 nombre important d'hommes avait été tué, et puis nous avons entendu
5 également des récits d'exécution s'étant déroulés plus loin du secteur
6 Bratunac Srebrenica, toujours le long de la Drina.
7 Q. Lorsque vous avez publié votre article, pour la première fois le 21
8 juillet, à ce moment-là, pensiez-vous que votre information était solide ou
9 que vous preniez un risque ?
10 R. Vous savez, sans avoir été le témoin oculaire des événements, et même
11 lorsqu'on est témoin oculaire d'ailleurs, on est qu'un témoin partiel des
12 événements. Mais je savais qu'il y avait eu différents sites, lieux
13 d'exécution, où des groupes d'hommes importants étaient tués. D'après les
14 récits que nous entendions, je savais qu'il était question de plus de 1 000
15 hommes. Cela étant, j'étais le seul à ce moment-là, à disposer de ces
16 informations. Aucun de mes collègues pour des raisons que j'ignore, aucun
17 de mes collègues n'a tenté de faire ce que nous avons fait à Ljubovija. Je
18 crois que "Le Times de Londres" l'a tenté, mais je ne l'ai appris que bien
19 plus tard. Quoi qu'il en soit, globalement j'étais le seul à disposer de
20 cette information. J'ai été accusé de fraude, de propagande par des groupes
21 proserbes, et on m'a accusé bien sûr d'être antiserbe.
22 M. MITCHELL : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on affiche le
23 document 65 ter --
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voulez-vous demander le versement au
25 dossier de cette carte annotée.
26 M. MITCHELL : [interprétation] En effet.
27 Q. Monsieur Block, je demanderais à ce que vous paraphiez et datiez cette
28 carte.
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1 R. [Le témoin s'exécute]
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la prochaine pièce de
3 l'Accusation.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 4405.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pardon.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] P4405.
7 M. MITCHELL : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je tiens à
8 préciser que cette pièce ne figure pas sur notre liste, la pièce 3214, mais
9 c'est une carte de meilleure qualité. La meilleure qualité de la carte 24,
10 dans notre recueil de cartes, dans notre atlas.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
12 M. MITCHELL : [interprétation]
13 Q. Monsieur Block, ne tenez pas compte des annotations sur la gauche.
14 R. Est-ce que l'on peut nous montrer le bas, après Banja Koviljaca, merci.
15 Q. Dans votre déclaration, vous parlez de ce qui se passait pendant les
16 journées qui ont suivi le moment où vous avez eu ces premières
17 informations, à Ljubovija. Donc vous vous êtes rendu dans le secteur de
18 Banja Koviljaca, vous avez parlé aux gens qui ont entendu parler de ou qui
19 ont vu des exécutions de l'autre côté de la rivière; est-ce que vous pouvez
20 indiquer cela ?
21 R. Oui. Alors nous sommes allés à Loznica, tout d'abord, ici, et nous
22 avons commencé à nous adresser aux gens qui nous disaient que souvent ils
23 se rendaient sur la rivière pour pêcher ou juste pour passer du temps sur
24 la rivière, et qu'ils ont commencé à voir des corps qui descendaient le
25 cours de la rivière, et que tout le monde en parle, et que certains ont dit
26 qu'ils se sont trouvés dans les parages, et puis que des gens de Banja
27 Koviljaca ont vu des gens abattus, et quelqu'un qui était abattu était
28 apporté à l'hôpital.
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1 Donc nous sommes allés à Banja Koviljaca. Vous pouvez remonter la carte.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Il nous
3 faudra annoter de nouveau.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. C'est bien. Donc nous sommes allés à
5 Loznica --
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant d'annoter, il faut appuyer sur le
7 bouton, mais M. l'Huissier peut aider.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est très bien.
9 Nous Donc tout d'abord nous sommes allés à Loznica, puis à Banja Koviljaca,
10 avec un groupe de personnes qui était en train de faire une randonnée ce
11 jour-là. Il y avait un homme âgé, et puis un couple, puis il nous a amenés
12 là, où il y a des collines. Ils nous ont emmenés un peu à l'extérieur de
13 Banja Koviljaca, et on leur a demandé ce qu'ils ont vu, ils nous ont dit
14 qu'ils ont vu des gens poussés, descendre de camion, et des gens tués. On
15 leur a demandé où est-ce que vous avez vu cela, et puis ils nous ont montré
16 directement de l'autre côté de la rivière.
17 M. MITCHELL : [interprétation]
18 Q. Pour le compte rendu d'audience, vous avez placé un X ou une croix, là
19 où vous vous êtes rendu avec ces gens.
20 R. Oui, plus ou moins.
21 Q. Alors est-ce que vous pouvez inscrire un A pour indiquer l'endroit
22 qu'il vous montrait ?
23 R. Il nous indiquait l'endroit de l'autre côté de la rivière, de ce côté-
24 là, c'était vraiment dramatique mais c'était -- de toute évidence, c'était
25 précisément l'endroit qu'il nous indiquait, il savait exactement ce qu'il
26 nous montrait.
27 Q. Vous avez également entendu cette histoire parlant d'eux --
28 R. Oui, nous sommes allés à Banja Koviljaca et nous avons entendu parler
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1 d'histoire de gens qui auraient entendu que quelqu'un était blessé,
2 quelqu'un aurait été dans la rivière, il appelait à l'aide, et des gens
3 sont allés aider et nous avons dit où est-ce qu'ils les ont emmenés et on
4 nous a dit dans le sanatorium. Alors nous avons fait demi-tour, nous sommes
5 allés au sanatorium, et là, nous avons constaté que l'homme ne s'y trouvait
6 pas qu'il avait été trop grièvement blessé et qu'il a fallu l'emmener à
7 l'hôpital de Loznica. Donc c'est comme ça que nous avons décidé d'aller à
8 Loznica.
9 Q. Je sais que c'est quelque chose que vous racontez dans votre
10 déclaration mais, brièvement, est-ce que vous pouvez nous dire ce qui s'est
11 passé à Loznica à l'hôpital ?
12 R. C'était tout à fait clair que nous étions vraiment les derniers qu'ils
13 avaient envie de voir, et ils n'avaient absolument pas envie de répondre à
14 nos questions. Premièrement, ils ont nié qu'il y a eu qui que ce soit qui
15 aurait été apporté, puis nous avons pris le registre et nous avons vu
16 effectivement qu'il y avait quelqu'un et qu'il y avait un nom de docteur et
17 nous avons demandé de voir ce docteur. Puis ils ont dit qu'ils n'arrivaient
18 pas à le retrouver, puis finalement, ils ont rassemblée quelques docteurs
19 avec qui nous nous sommes installés pour parler et on leur a demandé ce qui
20 s'était passé et on nous a dit que rien ne s'était passé. Puis on les a
21 interrogés en disant que nous avons vu des choses dans le registre, que
22 nous avons entendu parler des gens qui auraient placé cet homme dans leur
23 voiture pour l'emmener et puis soudain ils se seraient rappelés, Oui, ça
24 aurait été un avocat, mais ce n'était pas vraiment des blessures très
25 graves, juste des écorchures, et puis nous on ne s'est pas occupé de lui et
26 c'est lui qui s'est occupé de lui n'est pas ici. Puis je me souviens qu'ils
27 n'étaient pas très à l'aise, puis ils ont dit que cet homme a été envoyé à
28 Bijeljina sous escorte et qu'il aurait été remis aux autorités serbes de
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1 Bosnie, et après sa trace se perd, à ce moment-là, et c'est la fin de cette
2 histoire.
3 La seule chose dont je me souviens que les médecins de l'hôpital de Loznica
4 ne voulaient absolument pas reconnaître qu'ils savaient quoi que ce soit ou
5 que cela ait eu une importance quelconque, et ils semblaient aussi estimer
6 que quoi que ce soit qui lui soit arrivé, que c'était mérité.
7 Q. Est-ce que vous pouvez parapher et dater ?
8 R. [Le témoin s'exécute]
9 M. MITCHELL : [interprétation] Je vais demander le versement de cette
10 carte.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P4406.
13 M. MITCHELL : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus de questions.
14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passons brièvement à huis clos partiel.
16 Oui, merci.
17 [Audience à huis clos partiel]
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 [Audience publique]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Block, votre déposition pour ce
2 qui est de l'interrogatoire principal a été surtout versée au dossier sous
3 forme écrite, à la place de votre déposition viva voce, maintenant vous
4 serez contre-interrogé par M. Karadzic.
5 Monsieur Karadzic, vous avez la parole.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Bonjour à tous.
7 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Block. Ceci ne serait pas qu'une
9 simple répétition. C'est pour de vrai.
10 Donc je tiens à vous remercier d'avoir eu la gentillesse de rencontrer la
11 Défense, Me Robinson. J'espère que cela nous permettra d'être très efficace
12 et productif dans ce contre-interrogatoire.
13 Vous avez dit qu'un chauffeur vous aurait parlé de certaines choses. Vous
14 ne connaissez pas son nom ou vous ne souhaitez pas le révéler.
15 R. C'est exact. Je n'ai pas eu l'occasion de lui parler, donc je ne
16 voudrais pas citer son nom sans qu'il le sache, mais je le connais très
17 bien.
18 Q. Merci. Est-ce qu'il vous a dit de qui il a appris ce qu'il vous a dit à
19 vous, à savoir que j'aurais été en colère ?
20 R. Je ne me souviens pas de lui avoir posé la question. Lui, il s'est
21 trouvé à Pale. Pale est une petite localité, et il m'a dit qu'il a entendu
22 dire que vous aviez été en colère et que les autorités serbes, de manière
23 générale, n'étaient pas contentes. Je suppose que c'était simplement
24 quelque chose que tout le monde savait à Pale.
25 Q. Vous pensez donc qu'à Pale tout le monde pouvait savoir ce que je
26 pensais ou entendre ce que je disais. Si je ne le disais pas publiquement,
27 c'était quelque chose qui était connu du commun des mortels de la rue.
28 Comment est-ce qu'il aurait pu savoir cela si les médias ne l'ont pas
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1 relayé ? Est-ce que vous avez enquêté un petit peu là-dessus ? Comment --
2 qu'est-ce qui lui a permis de savoir quelle était mon attitude à ce sujet ?
3 R. Non, je n'ai pas fait de recherche. Comme je l'ai déjà dit, qui aurait
4 pu ordonner la confiscation de la vidéo, à l'époque, ce n'était pas quelque
5 chose qui me préoccupait au premier chef. C'est quelque chose qui arrive,
6 vous savez, que ce soit à Pale ou à Belgrade, beaucoup de gens étaient au
7 courant des conversations privées qui avaient lieu. Donc je n'y ai pas
8 accordé énormément d'importance. Mais, en même temps, je ne me suis pas dit
9 que c'était faux; en même temps, je me suis dit qu'il fallait que je me
10 concentre sur autre chose. C'était juste des informations contextuelles, et
11 je pense que Zoran avait l'intention d'utiliser cette vidéo pour montrer
12 que l'occupation de Srebrenica s'est passée de manière correcte pour la
13 montrer dans une lumière positive, et évidemment c'était complètement autre
14 chose le résultat de ces images, et je pense que pour tous ceux qui l'ont
15 vue ont compris que des autorités de la Republika Srpska seraient très
16 gênées si cela venait à être diffusé à l'étranger.
17 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que, vu mon poste, vu mes
18 fonctions, j'attirais l'attention des journalistes et que je pouvais -- je
19 ne pouvais guerre sortir de mon bureau et encore moins m'exprimer
20 publiquement sans que les journalistes me le remettent ?
21 R. Oui, mais vous n'étiez pas nécessairement joignable à tout moment. Je -
22 - les journalistes étrangers, il fallait prendre certaines dispositions
23 pour pouvoir entrer en contact avec vous. Mais, oui, c'est vrai, vous étiez
24 au cœur de l'attention, à ce moment-là, c'est évident.
25 Q. Vous avez également dit -- ou plutôt, je voudrais revenir à quelque
26 chose que vous avez dit aujourd'hui quand nous nous sommes rencontré qu'à
27 ce moment-là, vous ne pensiez pas que ce soit très important pour voir de
28 savoir, à ce moment-là, quelle a été ma réaction -- ou plutôt, de savoir si
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1 c'était exact que j'ai réagi ainsi et que cela n'était pas aussi important
2 que l'importance qu'on accorde à cela aujourd'hui.
3 R. C'était juste quelque chose -- quelque chose que j'ai entendu. Il était
4 clair que l'enregistrement n'était plus là. Il était clair que des
5 consignes, de toute évidence, ont été donnés par quelqu'un qui était plus
6 haut placé et qui a pris la peine de prendre cela à Belgrade, et je pense
7 qu'il y a eu des enregistrements comparables à télévision de la Republika
8 Srpska. Donc cela m'a suffit. J'ai compris qu'on ne pouvait plus avoir
9 accès à l'enregistrement et c'était la seule chose qui était importante, à
10 ce moment-là. Quant à savoir exactement qui a donné l'ordre à ce moment, ce
11 n'était pas ça qui était important, et aujourd'hui, on lui accorde toute
12 cette importance à cause du contexte dans lequel nous nous exprimons.
13 Q. Merci. Mais cette remarque concernait-elle la chaîne qui a fait le
14 montage et qui a diffusé l'enregistrement ? Est-ce que la critique
15 concernait Studio B et convenez-vous que Studio B était notre opposant
16 politique, à l'époque, comme aujourd'hui, d'ailleurs ?
17 R. Je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question sur l'objet -- sur
18 l'objection de la critique. Mais, oui, Studio B était, en fait, un
19 caméléon. Ils n'étaient pas pro-Milosevic, mais ils étaient pro-Serbes et
20 cela m'a surpris légèrement que ce documentaire a été donné à Studio B et
21 qu'il a été diffusé par Studio B. Mais quand on travaille -- quand on
22 travaille en ex-Yougoslavie, on était -- on devait être toujours prêt à ce
23 genre de surprise.
24 Mais je pense que Zoran Petrovic avait l'intention initialement de
25 montrer quelque chose de position sur la reconquête, la reprise de
26 Srebrenica. Je ne pense pas que son intention, l'intention de Studio B,
27 était autre chose, et je ne pense pas qu'ils se rendaient compte de ce
28 qu'ils avaient entre les mains. D'après ce que j'ai compris, c'est très
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1 rapidement qu'ils ont monté le documentaire, donc, là encore, l'impression
2 que j'ai eue est qu'ils avaient monté quelque chose qui était pro-Serbe,
3 même si ce n'était pas de la propagande, et ils ne se sont pas rendus
4 compte des conséquences néfastes que cela pouvait avoir.
5 Q. Merci. Ce qui m'intéressait, c'était de savoir si vous avez entendu
6 dire qu'il y a eu des remarques comme quoi un reporter aurait été -- aurait
7 pu accéder à Srebrenica avec le feu vert des autorités de la Republika
8 Srpska et que, par la suite, cela a été diffusé par une chaîne qui ne nous
9 était pas favorable, qui au contraire nous a toujours été hostile. Est-ce
10 que c'était ça l'angle sous lequel ces remarques se sont -- ont été
11 formulées, ce que vous avez entendu ?
12 R. D'après ce dont je me souviens, non, rien, rien de ce sens. Dragan et
13 moi sommes allés au Studio B. On est -- on a trouvé ça un peu étrange que
14 ce soit le Studio B qui l'ait, mais nous sommes allés sur place. C'était un
15 dimanche. Ils n'avaient pas beaucoup de personnels. Ils nous ont donné les
16 bandes; nous avons pu les regarder tous seuls et lorsque nous avons eu des
17 problèmes avec le matériel, ils nous ont aidés. Je veux dire, personne n'a
18 rien dit au sujet du fait que ce documentaire risquait d'être
19 problématique.
20 Aussi, les journalistes avaient -- entretenaient des relations avec des
21 chaînes, avec des éditeurs, avec des producteurs, et je pensais que -- et
22 que cela montrait que Petrovic avait des liens avec eux. Je suis sûr que,
23 s'il avait eu les contacts ailleurs avec une autre chaîne, ils l'auraient
24 envoyé ailleurs. Donc c'était surprenant, comme je l'ai déjà dit, mais je
25 n'ai pas vraiment réfléchi à cela. Cette haine n'était pas pro-Republika
26 Srpska, mais c'était néanmoins une chaîne proserbes au sens plus large du
27 terme.
28 Q. Merci. Je ne pense pas qu'ils soient d'accord avec vous là-dessus, mais
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1 bon. Vous avez dit que M. Pirocanac vous a conforté dans cette opinion;
2 est-ce que c'était au sujet du fait qu'il aurait -- est-ce qu'il y a eu des
3 commentaires quand à sa présence là-bas ou est-ce qu'il y a eu des
4 critiques quant au fait que ce soit le Studio B qui diffuse cela ?
5 R. Tout ce dont je me souviens de l'époque, c'est que Zoran était très
6 nerveux. Très évidemment, il était sous pression, et j'ai l'impression
7 qu'il a été surpris par ces critiques et ces pressions qui s'exerçaient,
8 qu'il ne savait pas comment répondre. On en a parlé. C'est -- la position
9 était une position de très grande frustration, donc parce qu'il avait
10 effectivement réussi cet exploit phénoménal d'avoir ces images de très
11 grande valeur, et en même temps, on le prenait pour un traître. Donc c'est
12 à cela qu'il pensait à ce moment-là. Donc, nous avons pu voir ces images en
13 en somme. On les a regardées sans qu'il nous en donne l'autorisation. Il a
14 été très en colère à cause de cela. On ne lui a pas parlé et ces chefs
15 yougoslaves -- ces chefs puis les militaires yougoslaves, Serbes de Bosnie
16 aussi, étaient très en colère contre lui et je -- enfin, c'était ça,
17 surtout la chose la plus importante. Je ne me rendais -- il ne m'était pas
18 rendu compte, en fait, dans quel pétrin de je l'avais mis.
19 Q. Qui le soutenait ? C'est la première fois que j'entends parler de ses
20 chefs ou de quelqu'un sous l'égide de qui il aurait fonctionné. J'ai
21 toujours pensé que c'était un journaliste indépendant. Mais qui aurait pu
22 exercer une pression sur lui ? Qui était son employeur ?
23 R. Les journalistes ne subissent pas uniquement les pressions de leurs
24 employeurs mais aussi de leurs sources et des gens qui vous garantissent,
25 par exemple, peuvent vous garantir accès à quelque chose pour vous dire, Je
26 ne veux pas que ça me cause de problème. Je pense que tout simplement il a
27 eu des problèmes avec des gens qui lui avaient permis de se rendre dans ce
28 secteur. Je ne pense pas que ce sont ses chefs qui lui posaient problème.
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1 D'une certaine manière, les journalistes peuvent toujours se débrouiller
2 lorsqu'ils ont des problèmes avec leurs chefs.
3 Mais ce sont des sources dont on dépend qui nous sont beaucoup plus
4 importantes, parce que nous essayons de les avoir toujours à nos côtés,
5 parce que c'est ça qui nous permet de fonctionner, en comptant sur la
6 confiance des gens. Si nous faisons bien notre travail, nous pouvons les
7 protéger et nous pouvons utiliser l'information qu'ils nous fournissent ou
8 l'accès dont ils nous ont permis de bénéficier sans qu'ils soient
9 impliqués, sans qu'ils en subissent de mauvaises conséquences, et je pense
10 que c'est là qu'il se sentait sous pression.
11 Q. Il était auteur, et pourtant vous ne lui avez pas demandé
12 l'autorisation de diffuser ses images ? Est-ce que c'est quelque chose qui
13 est habituel, que les auteurs se protègent ? Est-ce que vous avez peut-être
14 compris que ce qui lui a déplu, c'est que vous utilisez son matériel, ses
15 images pour travailler dessus sans son autorisation, ou bien est-ce que, là
16 aussi, c'était inhabituel ?
17 R. Sans aucun doute, il a eu cette sensation-là, que c'était effectivement
18 ça qui s'était produit mais, à ce moment-là, le documentaire relevait du
19 domaine public. Donc est-ce le Studio B qui me l'a remis, ou est-ce que je
20 l'aurais vu à la télévision le jour en question -ou le soir en question;
21 là, ces arguments ne tenaient plus, n'avaient plus aucune valeur. Le fait
22 que le Studio B nous a donné des rushes à visionner, c'était un problème
23 qui se posait entre lui et le studio B, et non pas entre lui et moi.
24 Puis enfin, j'ai dit que je n'avais pas besoin de son commentaire parce
25 que, d'une certaine manière, ce que la caméra nous montrait ça suffisait,
26 je ne comprenais pas pourquoi j'aurais besoin de son autorisation pour voir
27 quelque chose qui avait déjà été diffusé mais, lui, ce n'est pas comme ça
28 qu'il a compris les choses. Pour lui, il s'agissait de la propriété
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1 intellectuelle et je n'avais aucun droit d'accès à ce document mais, là
2 encore, j'avais la sensation qu'il n'était pas content, parce que mon
3 article, lui a causé des problèmes parce que c'était très gênant pour les
4 autorités serbes de Bosnie. Cela montrait des hommes qui pouvaient être
5 identifiés entre les mains des autorités serbes de Bosnie, et par la suite,
6 on voyait que ces gens-là n'étaient plus en vie et qu'à partir de là, il
7 faudra bien que quelqu'un fournisse des explications sur ce qui s'était
8 produit. Donc j'ai pensé que c'était très naïf de sa part de penser que ce
9 n'était pas un document explosif mais, lui, il ne le voyait pas de cet œil-
10 là.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] si le moment s'y prête, Monsieur
12 Karadzic, pouvons-nous prendre une pause ? Une pause d'une demi-heure ?
13 Oui, Monsieur Tieger.
14 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaitais
15 m'exprimer très rapidement sur une question de procédure qui a trait à
16 l'annonce de la Chambre à propos d'une décision qui sera rendue vis-à-vis
17 de la requête déposée par Me Robinson concernant la déposition Obradovic.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.
19 M. TIEGER : [interprétation] Je voulais très rapidement vous rappeler que
20 Me Robinson a envoyé deux courriers électroniques indiquant qu'il avait
21 l'intention de déposer une requête à ce sujet. La Chambre a rendu sa
22 décision sur le premier aspect concernant M. Lesic sans avoir entendu
23 l'Accusation. Nous n'y faisons pas d'objection formelle ni ne contestons la
24 décision de la Cour. Toutefois, avant que la Chambre rende sa décision sur
25 le deuxième aspect de la requête de la Défense, nous aimerions entre
26 entendus. De manière générale à l'avenir, nous aimerions lorsque Me
27 Robinson fait savoir qu'il a l'intention de déposer une requête orale en
28 audience, apprécierions donc qu'il le fasse avant que la décision ne soit
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1 rendue, de façon à ce que l'Accusation puisse présenter ses arguments.
2 Merci, Monsieur le Président.
3 C'est Mme Edgerton qui se chargera de l'interrogatoire principal de M.
4 Obradovic. Il sera là au début de la séance prochaine si vous souhaitez
5 entendre des arguments de notre part à ce sujet.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ne vous avons pas encore entendus ?
7 Les choses ne sont pas claires.
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, Madame Edgerton, vous pouvez tout
10 à fait vous exprimer en présence de M. Block. Je n'y vois pas d'objection.
11 M. TIEGER : [interprétation] Je suis d'accord.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, je n'y verrais pas d'inconvénient,
13 toutefois, étant donné l'heure qu'il est et étant donné le fait qu'il me
14 faudra quelques minutes, je propose de le faire après la pause.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, effectivement, il ne s'agirait pas
16 d'empiéter sur le temps réservé à la pause.
17 M. LE JUGE BAIRD : [aucune interprétation]
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pense qu'il me faudrait entre cinq et
19 dix minutes, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous vous entendrons après la
21 pause dans ce cas. Nous reprendrons à 11 heures.
22 [Le témoin quitte la barre]
23 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.
24 --- L'audience est reprise à 11 heures 04.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qui commence, Monsieur Mitchell ?
26 M. MITCHELL : [interprétation] Très brièvement, si vous me le permettez,
27 Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur la notification concernant M.
28 Block. Après avoir lu les restrictions s'appliquant à ce document, à savoir
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1 ce document ne doit pas être cité publiquement, diffusé au public, ni
2 communiqué à d'autres institutions, mais se limiter à la mention de son
3 titre, pardon se limiter à la mention de son titre dans la notification
4 devrait suffire. Je pense que ce document peut rester public.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
6 Madame Edgerton -- pardon, Monsieur Tieger.
7 M. TIEGER : [interprétation] Oui. Me Robinson m'a fait savoir qu'il
8 souhaitait que sa requête figure au compte rendu avant la présentation des
9 arguments Mme Edgerton. Je ne sais pas s'il avait cela à l'esprit, je ne
10 veux pas anticiper sur ce qu'il a à dire, mais je voulais savoir si ceci
11 demeure son intention.
12 M. ROBINSON : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.
14 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je remercie la
15 Chambre de son efficacité eu égard à ma requête, mais j'ai toujours
16 l'intention de notifier la Chambre des questions qui devraient faire
17 l'objet de notre part, d'objection ou de requête, de façon à ce que vous ne
18 soyez pas pris par surprise et que l'Accusation ne se sente pas prise en
19 embuscade. Mais si vous me le permettez, je consacrerai une minute à faire
20 figure au compte rendu les raisons pour lesquelles nous objectons à
21 l'ensemble des documents 92 ter, concernant M. Obradovic.
22 Tout d'abord, nous pensons que l'Accusation, lorsqu'ils bénéficient
23 d'article 92 ter et de ses dispositions, devait faciliter la vie des autres
24 parties y compris de la Chambre et de la Défense. Bien entendu, nous
25 procéderons de la même manière lorsque notre tour viendra, et nous pensons
26 que nous noyer, sous 290 pages de compte rendu, nous met dans une situation
27 difficile. Il nous a fallu, il m'a fallu près de quatre heures pour en lire
28 le contenu, et nous avons trouvé énormément de choses qui ne concernent pas
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1 véritablement cette affaire, notamment tout ce qui a trait au commandement
2 et à la hiérarchie de l'état-major principal, des questions qui concernent
3 davantage M. Tolimir ainsi que des informations sur Zepa et des
4 informations préjudiciables sur l'usage envisagé d'arme chimique par le
5 général Tolimir. L'Accusation aurait dû préparer une déclaration de ce
6 témoin plus ciblée sur l'affaire Karadzic. Je pense que la moitié des
7 éléments que nous trouvons dans ces pages ne concerne pas cette affaire, et
8 d'une certaine manière, pouvait porter préjudice à l'accusé. Nous pensons
9 donc que ce témoin devrait être entendu viva voce. Je vous remercie.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, bonjour.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci beaucoup. Excusez-moi de vous forcer
12 à vous tourner vers moi, si vous souhaitez me regarder pendant que je
13 m'exprime.
14 Pour répondre au courrier électronique de M. Robinson, et à sa requête
15 d'aujourd'hui, j'aborderais deux thèmes principaux. D'abord, le volume des
16 documents 92 ter pour ce témoin-ci, Me Robinson, dans son courrier, le
17 premier courrier électronique nous dit que ce volume est extrêmement
18 important et encombrant. Cela correspond à trois jours de déposition dans
19 l'affaire Tolimir, ce qui me semble est assez gérable pour un témoin de
20 cette nature, mais ceci ne devrait jamais être la seule raison justifiant
21 une décision de versement d'une déclaration 92 ter. La taille d'un dossier,
22 des documents, ne doit pas être un obstacle automatique au versement du
23 dossier en question. Me Robinson dit également qu'un certain nombre
24 d'éléments ne présentent aucune pertinence en l'occurrence, et que ces
25 aspects concernent davantage l'affaire Tolimir.
26 Il est quasiment absurde de dire le fonctionnement de l'état-major
27 principal de la VRS ne concerne pas cette affaire, pas contraire. Le Dr
28 Karadzic était le commandant suprême de l'armée serbe de Bosnie, l'armée
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1 lui était subordonné de par la loi, ainsi que dans la pratique le gros de
2 l'armée et les Serbes de Bosnie auraient appliqué les politiques et
3 poursuivi les objectifs du Dr Karadzic, et des autres dirigeants serbes de
4 Bosnie.
5 Alors la structure, le fonctionnement effectif, le fonctionnement
6 donc les principes de commandement, les processus de recrutement, les
7 modalités de communication de l'information de cette armée, telle que
8 décrit par ce témoin vont au cœur de l'affaire qui concerne le Dr Karadzic,
9 et pour que les choses soient tout à fait claires, je vous renvois à notre
10 mémoire préalable au procès, paragraphes 70, 119 et 125. Pour vous donner
11 un exemple, l'Accusation a dit que le Dr Karadzic et l'état-major principal
12 et les dirigeants civils s'étaient vus communiquer des informations
13 précises en temps voulu sur des événements survenant sur le terrain, et
14 affirmait également que les rapports, émanant des corps et adressés à
15 l'état-major principal, étaient présentées de manière orale ainsi que par
16 écrit et que des rapports spéciaux étaient également présentés contenant
17 des informations sur les forces ennemies, la préparation au combat des
18 unités du corps, la situation sur le terrain, et cetera. L'on constate à la
19 lumière de cet exemple que les éléments apportés par le général Obradovic
20 corroborent un certain nombre de ces assertions et ne présentent aucune
21 pertinence directe en l'espèce.
22 Dire que les événements à Zepa sont dépourvus de pertinence me paraît
23 absurde. Ceci renvoie d'ailleurs à une décision déjà prise par la Chambre,
24 s'agissant des événements de Gorazde et de Cerska, autres secteurs de
25 l'enclave orientale.
26 Le Dr Karadzic n'est pas accusé de quoi que ce soit, eu égard aux
27 événements de Zepa, en 1995. Toutefois, les éléments de preuve relatifs à
28 ces événements tel qu'évoqués, dans le cadre de la déposition de ce témoin
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1 dans l'affaire Tolimir, présente une pertinence pour un certain nombre de
2 raisons. D'abord, pour démontrer l'existence d'une entreprise criminelle
3 commune consistante à expulser des non-Serbes de territoire revendiqué par
4 les Serbes de Bosnie, entre 1991 et 1995. Ces éléments sont pertinents, car
5 ils montrent l'existence d'une conduite répétée. Alors même s'ils ne
6 concernent pas la période couverte par l'acte d'accusation proprement dit,
7 les éléments de preuve relatifs à l'existence de politique systématique
8 menée par les dirigeants serbes de Bosnie, politique de blocus, de
9 restriction de circulation et d'envoi et d'attaque contre l'enclave de
10 Zepa, présentent une pertinence puisque l'on constate les mêmes pratiques
11 dans le secteur de Srebrenica et d'autres secteurs des enclaves. On
12 constate qu'il y a eu des opérations militaires poursuivies qui visaient à
13 mettre en œuvre le troisième objectif stratégique.
14 Les éléments de preuve concernant Zepa sont pertinents, car ils
15 montrent le commandement exercé par M. Karadzic, sur l'armée des Serbes de
16 Bosnie. Ces éléments sont pertinents, car ils appuient l'argument selon
17 lequel l'armée serbe de Bosnie agissait sous les instructions, sous la
18 direction du Dr Karadzic. Ils montrent également que le système de
19 communication fonctionnait au sein de l'armée des Serbes de Bosnie, et puis
20 ils montrent également que les crimes ont été commis à Srebrenica, en 1995.
21 Ces éléments confirment et corroborent la déposition de David Harland, et
22 notamment sa déclaration enregistrée sous la cote P820, paragraphes 225 et
23 228, où il parle de son rôle dans les négociations complexes relatives aux
24 échanges des prisonniers qui ont duré pendant plus de dix ans.
25 Il parle des Serbes et du fait qu'il a, par la suite, encouragé les
26 échanges de la totalité des prisonniers, et il dit, et je le cite:
27 "Avec le recul, il semblerait que c'était parce que Mladic savait
28 qu'une fois que les Bosniaques apprendraient ce qui s'était passé, à
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1 Srebrenica, et il n'y avait aucune chance qu'ils récupèrent ces
2 prisonniers."
3 Les éléments relatifs à Zepa confirment et corroborent très exemple
4 la description fournie par M. Harland, en disant qu'effectivement, une fois
5 les événements de Srebrenica connus, il n'y aurait plus aucune chance de
6 récupérer les prisonniers, et nous avons vu d'ailleurs ce qui s'est passé
7 en prenant connaissance des documents dont on a parlé le témoin dans
8 l'affaire Tolimir.
9 Pour ce qui est de ce que Me Robinson appelle l'usage d'arme
10 chimique, après interrogatoire principal et contre-interrogatoire à ce
11 sujet, l'on voit bien que les parties, dans l'affaire Tolimir, ont compris
12 que le document où il est question de ces armes chimiques faisait référence
13 en fait à des moyens chimiques, à savoir du gaz lacrymogène et grenades de
14 ce type. Ces éléments sont pertinents parce qu'ils montrent que ce matériel
15 était entre les mains de l'armée serbe de Bosnie, que ce matériel a été
16 fourni au Corps de la Drina et au 65e Régiment de protection, et ceci
17 corrobore le témoignage récent de M. Nikolic, qui a confirmé que des
18 membres de son régiment étaient rattachés à l'état-major principal de la
19 VRS et qu'il s'était trouvé à Potocari pour séparer les membres de la
20 population. Ces éléments de preuve confirment également la déposition faite
21 devant cette Chambre par KDZ045, un témoin qui a survécu aux exécutions de
22 Srebrenica et qui a parlé de grenades et de gaz lacrymogènes qui avaient
23 été jetés vers les Bosniaques et vers la colonne s'échappant vers Tuzla.
24 Voilà donc autant d'arguments qui montent que la déposition du témoin est
25 tout à fait recevable en vertu de l'article 92 ter et qu'elle est tout à
26 fait pertinente vu le contexte général. Je m'en tiendrais là. Je vous
27 remercie.
28 M. ROBINSON : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le
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1 Président, j'aimerais pouvoir répondre brièvement. Les arguments présentés
2 par Mme Edgerton montrent que cette question revêt une -- une importance
3 qui va au-delà de la simple question de savoir si l'on doit entendre un
4 témoin viva voce où si l'on doit accepter des éléments de preuve par écrit,
5 en application de l'article 92 ter. Le général Tolimir a été jugé pour des
6 événements survenus à Zepa. C'est de cela dont il a été accusé. Les -- la
7 déposition du témoin dont nous parlons était donc très large et il n'eut le
8 besoin d'y faire objection. Je crois que c'est encore là une meilleure
9 raison pour que la Chambre entendre la déposition de ce témoin viva voce de
10 façon à ce que l'on puisse évaluer les éléments relatifs à Zepa qui doivent
11 être versés au dossier de cette affaire, si toutefois l'on doit en verser.
12 Je vous remercie.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci à vous, Madame
14 Edgerton. Merci à vous, Maître Robinson. La Chambre étudiera les arguments
15 qui viennent de leur être présentés et rendra sa décision après la
16 prochaine pause.
17 Je demanderais à ce que l'on fasse rentrer le témoin dans le
18 prétoire.
19 [Le témoin est vient à la barre]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
21 Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Les choses sont un peu plus claires pour moi. M. Pirocanac a fait
25 l'objet de pressions, non pas seulement parce que son documentaire a été
26 diffusé, mais du fait également de l'interprétation que vous avez faite de
27 son reportage.
28 R. C'est l'hypothèse que j'ai formulée ou, en tout cas, que la situation
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1 l'avait mise dans une situation délicate par rapport à ceux qui lui avaient
2 donné accès à l'information. En tout cas, c'était quelque chose d'important
3 pour lui. Enfin, je ne sais pas. Evidemment, il m'est difficile de
4 déterminer très exactement ce qui se passait, mais je ne pense pas qu'il
5 ait été satisfait de sentir cette -- ce fardeau posé sur lui.
6 Q. Vous avez dit aujourd'hui, en page 36, ligne 14 : "C'est mon article
7 qui l'a mis dans le pétrin," n'est-ce pas ? Nous pouvons revenir à la page
8 en question si vous le souhaitez. Donc cet article a été publié -- ou
9 plutôt, le reportage a été monté puis diffusé par une chaîne qui ne nous
10 aimait pas beaucoup. Mais ce n'est pas cela véritablement qui a mis M.
11 Pirocanac sous pression. Il a été victime de pressions une fois que vous
12 avez publié votre article, votre interprétation de son reportage. C'est
13 bien ce que vous dites en substance en page 36 ?
14 R. Oui.
15 Q. Merci. Conviendriez-vous que vous n'auriez pas autorisé quelqu'un à
16 analyser vos propres notes, notes sur la base desquelles vous auriez rédigé
17 un article ? Vous publiez votre article, un point c'est tout. Vos notes ne
18 sont pas censées faire l'objet d'une analyse par d'autres, car vous ne
19 l'autoriseriez pas, n'est-ce pas ?
20 R. En effet, mais je ne laisserais pas traîner mes notes pour éviter que
21 d'autres les utilisent ou en prennent connaissance.
22 Q. Mais il a laissé son reportage à la Station B [phon]. L'idée, ce
23 n'était pas véritablement de rendre ce document accessible à d'autres,
24 accessibles aux membres du public.
25 R. Je pense que c'est exact. Certains éléments ne faisaient pas partie du
26 document qui a été diffusé, mais cela ne me concernait pas. Je suis allé à
27 Studio B. Je leur ai demandé de me présenter quelque chose et ils m'ont
28 remis ces cassettes. J'ai dit : "Qu'est-ce que c'est ?" Ils m'ont dit :
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1 "Voilà, il s'agit des rushes et du documentaire." Alors je n'allais pas
2 faire au difficile.
3 Q. Merci. Vous avez parlé de notes. Pendant l'entretien, vous avez dit que
4 chez vous, aux Etats-Unis, il se peut que vous disposiez encore de
5 certaines notes remontant à cette époque. Auriez-vous l'amabilité de les
6 chercher pour nous ? Nous respecterions bien entendu toute demande de ne
7 pas publier certains noms, notamment.
8 R. Oui, je pourrais tout à fait rechercher mes notes, mais je ne serais
9 pas disposé à les remettre pour un certain nombre de raisons dont
10 particulièrement le risque que cela pourrait faire courir à certaines de
11 mes sources. Je pense également que cela ne serait pas une bonne chose à
12 faire, pour la raison dont vous parliez, eu égard à M. Pirocanac. Nous
13 prenons une déclaration quant à l'importance de tel ou tel événement au
14 moment où nous écrivons nos articles.
15 Puis une autre raison peut-être plus subsidiaire, c'est que je ne
16 suis pas certain que vous seriez en mesure de les déchiffrer.
17 M. ROBINSON : [interprétation] J'aimerais intervenir et être un peu plus
18 précis peut-être dans les questions que nous souhaitons adresser à M.
19 Block. Nous nous demandions s'il serait prêt à rechercher les notes
20 correspondant à sa rencontrer avec M. Petrovic-Pirocanac le -- du 18
21 juillet 1995. S'il existe des notes reprenant la teneur de cette
22 conversation, nous aimerions que M. Block photocopie ces notes et qu'il les
23 communique à la Chambre de première instance de façon -- de façon, pardon,
24 à ce que nous puissions déterminer si, oui ou non, une référence a été
25 faite au Dr Karadzic au cours de la conversation.
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. L'argument est valable. Pouvez-vous
28 répondre à la question, Monsieur Block ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas être prêt à aller si loin et
2 je vais vous dire pourquoi. Dans le monde du journalisme, nombre de mes
3 collègues rechignent à aider une institution telle que celle-ci au motif
4 que ceci risque de les exposer à un plus grand danger encore, qu'en venant
5 témoigner dans un procès de cette nature, il risque d'être considérés comme
6 disons partial. Je ne partage pas pleinement cette analyse. J'estime que
7 nous sommes au service de notre profession, de notre journalisme et que
8 nous faisons l'information que nous publions. Mais le processus est
9 complexe, il renvoie souvent à l'expérience de chacun, et je ne pense pas
10 qu'il serait bon que je présente des notes brutes de décoffrages ceci me
11 ferait franchir un seuil que je ne suis pas prêt à franchir.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Meri.
13 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, serait-il
14 possible d'être entendu sur une question d'écoulant de cette déclaration,
15 peut-être pourrait-on demander au témoin de sortir ou maintenant ou plus
16 tard, sachant que ceci risque d'avoir une incidence sur la nature de sa
17 déposition et j'aimerais être entendu sur ce point à un moment donné ou à
18 un autre.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous vous entendrons ultérieurement à ce
21 sujet, Maître Robinson.
22 Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Avez-vous pris des notes lorsque vous vous êtes entretenu avec les gens
26 ordinaires avec lesquels vous avez parlé -- ou plutôt, auxquels vous faites
27 référence dans vos publications.
28 R. Je ne suis pas sûr de bien comprendre la question. J'ai essayé d'y
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1 réfléchir lorsque vous m'avez demandé si j'avais pris des notes lors de ma
2 conversation avec Pirocanac. Pour être tout à fait honnête, je n'en suis
3 pas certain parce qu'il s'agissait d'une simple conversation. Dans certains
4 cas, des notes étaient prises sans entendre au moment ou, par exemple, vous
5 étiez assis en face de quelqu'un et que vous notiez la teneur de la
6 conversation. Puis parfois, il s'agissait d'une simple conversation et vous
7 notiez peut-être l'essentiel de ce qui se disait ou vous vous tâchiez de
8 vous le remémorer de l'inscrire dans votre mémoire, et puis parfois, il y
9 a, bien sûr, des petits enregistreurs où lorsque vous êtes avec un autre
10 journaliste, vous essayez de voir si vous vous souvenez de la même chose.
11 Parfois un carnet de notes, cela peut rendre les gens nerveux ou les mettre
12 mal à l'aise.
13 Dans un pays tel que la Yougoslavie avec son passé socialiste, je me
14 suis rendu compte que me trouver devant quelqu'un avec un carnet de notes à
15 la main ne servait pas toujours mes intérêts. Cela donnait l'impression à
16 ceux qui me parlaient qu'ils étaient interrogés par la police.
17 Alors, oui, dans certains cas, j'ai pris des notes dans mes
18 conversations avec certaines personnes, et puis, parfois, je rédigeais mes
19 notes par la suite, donc encore une fois, je ne suis pas certain de
20 comprendre la question, mais, oui, effectivement, il m'est arrivé de
21 prendre des notes lorsque je m'entretenais avec ces personnes, ces gens
22 ordinaires dont vous parlez, et puis parfois, je ne le faisais pas.
23 Q. Je vais vous poser des questions qui vous permettront de répondre
24 facilement par un oui ou un non, parce que, sinon, nous n'aurons pas
25 suffisamment de temps pour tout couvrir.
26 Etes-vous d'accord sur un fait, à savoir pendant que vous étiez sur le
27 terrain en juillet 1995, nous n'avions pas de relation avec la Serbie ni
28 avec le président Milosevic ? Il y avait eu une brouille entre nous, et
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1 l'embargo était encore en place, imposé à nos frontières ?
2 R. Je ne peux pas vous répondre tout simplement par un oui ou un non. Oui,
3 effectivement, il y a eu des tensions entre les deux entités sur le plan
4 officiel, mais il y avait encore énormément de soutien qui était fourni et
5 il y avait beaucoup de contrebandes les autorités faisaient mine de ne pas
6 être au courant, et il y avait aussi énormément d'éléments qui nous
7 permettaient de penser qu'indépendamment du fait ou malgré le fait que M.
8 Milosevic ne semblait pas vous apprécier, que lorsqu'il s'agissait de
9 fournir un soutien pour faire le nécessaire pour qu'il n'y ait pas
10 d'effondrement du projet de la Republika Srpska, qu'il faisait en sorte que
11 vous ayez ce dont vous aviez besoin.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.
13 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, j'allais opposer une objection aux
14 caractères imprécis de la question, par rapport aux liens sur lesquels on
15 interrogeait, mais je vois que le témoin a su répondre de manière
16 satisfaisante.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Mais sommes-nous d'accord sur le fait suivant la Serbie exigeait que
21 l'on accepte le plan du Groupe de contact et seule l'aide humanitaire
22 passait, mais la direction politique, à ce moment-là, a coupé tout contact
23 ? Il n'y avait pas de contact entre nous donc dans la mesure où vous êtes
24 au courant; est-ce que vous pouvez nous répondre à cette question ?
25 R. Là encore, oui, il est vrai que Milosevic a apporté son soutien au plan
26 du Groupe de contact en apparence, mais je pense que les deux parties
27 étaient en mesure de communiquer lorsque cela était nécessaire.
28 Par exemple, souvent lorsque j'étais à Belgrade il savait exactement ce qui
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1 se passait à Pale et dans d'autres régions de Republika Srpska, et ce sont
2 des informations que j'obtenais souvent par des filières politiques proches
3 du président Milosevic, et l'information que j'obtenais à ce moment-là
4 était corroborée par la suite. Donc je ne pense pas ou j'ai l'impression
5 que, pendant que vous peut-être n'étiez pas en contact direct, qu'il était
6 possible d'échanger des messages lorsque c'était nécessaire.
7 Q. Mais le service secret serbe opérait en Republika Srpska à mon insu;
8 est-ce que vous excluez cela ?
9 R. Oui, c'est vrai.
10 Q. Aujourd'hui, page 18, ligne 20, vous avez déclaré que non seulement
11 vous avez entendu dire que la direction serbe était très en colère, mais
12 que les autorités des Serbes de Bosnie avaient confisqué cet
13 enregistrement.
14 Croyez-vous que compte tenu de la situation où nous étions brouillés avec
15 la Belgrade officielle, que nous pouvions confisquer véritablement une
16 cassette qui avait été diffusée par une chaîne de télévision de Belgrade
17 qui nous était hostile ?
18 M. MITCHELL : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Oui.
20 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le
21 témoin est invité à se lancer dans des conjectures sur les moyens dont
22 disposait le gouvernement de la Republika Srpska, ce qui lui aurait permis
23 de se procurer l'enregistrement, la cassette. Je ne pense pas que le témoin
24 le sache.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il pourrait répondre dans la mesure où
26 il connaît la situation.
27 Allez-y, Monsieur Block.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je peux dire, c'est que la Republika
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1 Srpska avait des représentants officiels de son gouvernement à Belgrade, y
2 compris un bureau de presse et des responsables du renseignement, par
3 exemple, avaient accès aux informations de leurs confrères, camarades. Donc
4 je ne pense pas que c'était au-delà de leur moyen de demander
5 l'autorisation de confisquer ces bandes pour la Republika Srpska. En même
6 temps, effectivement, ces enregistrements n'étaient pas -- ne
7 représentaient le gouvernement de Belgrade, ou M. Milosevic, sous une
8 lumière très positive. Donc je pense que tout un chacun avait intérêt à ce
9 que ces enregistrements disparaissent, et là encore, si Dr Karadzic me
10 demande si ces bandes auraient pu être confisquées d'une chaîne de la
11 télévision de Belgrade sans l'autorisation de M. Milosevic ou sans
12 l'autorisation du renseignement yougoslave, je pense qu'il a raison. Mais,
13 effectivement, c'est très peu probable, mais je pense qu'en l'occurrence,
14 il serait d'accord sur le fait, les deux parties seraient d'accord sur le
15 fait qu'il valait mieux que ces enregistrements disparaissent.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je ne sais pas si
17 c'est un problème d'interprétation qui se pose. Votre question, vous avez
18 dit, page 18, ligne 20, M. Block a déclaré le gouvernement des Serbes de
19 Bosnie a confisqué cette cassette. Mais je ne pense pas que ce soit ce que
20 M. Block a dit. Il a dit : Les autorités serbes de Bosnie ont confisqué
21 cela, et après c'était la direction militaire.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'ai peut-être mal traduit, mais je
23 voulais parler d'autorité, et là, il s'agit du gouvernement, quoi qu'il en
24 soit.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Monsieur Block, je ne conteste pas que vous ayez entendu une
27 information. Moi, ce que je conteste c'est la source, la source qui vous a
28 dit que c'était possible qu'en plein Belgrade, au Studio B, qui nous était
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1 hostile, qui aurait diffusé. Je pense qu'ils auraient diffusé tout cela
2 même si Milosevic s'était interposé; est-ce que vous êtes d'accord là-
3 dessus ? Ils l'auraient diffusé quand même.
4 R. Je l'ai déjà dit, le Studio B était une salle de caméléon. Ils
5 critiquaient quand cela leur convenait, et puis à d'autres moments, ils
6 changeaient de camp. Ils se rangeaient aux côtés du gouvernement. Donc,
7 dans quel état d'esprit, ils étaient, à ce moment-là, ce n'était pas
8 quelque chose qui m'importait le plus. On nous a dit que des autorités
9 serbes sont venues prendre la bande, c'est ce qu'on nous a dit au Studio B.
10 Je n'ai pas douté de la véracité de cette information, et ils connaissaient
11 bien la différence entre les autorités yougoslaves et puis des autorités
12 qui venaient d'ailleurs, et donc je les ai cru.
13 Q. Est-ce que vous vous souvenez que M. Pirocanac était là avec le plein
14 aval des autorités, et aussi d'un policier haut placé ?
15 R. Oui, je pense que c'est ce qu'il a dit.
16 Q. Merci. Savez-vous, je vous en ai parlé pendant notre entretien, je ne
17 sais pas si vous avez eu le temps de vérifier. Mais est-ce que vous savez
18 j'ai personnellement donné mon accord à un journaliste pour qu'il suive les
19 événements de Zepa, sur place, directement avec sa caméra, Peter Arnett, un
20 journaliste connu, et qu'effectivement, il l'a fait.
21 R. Oui, j'ai vérifié, et effectivement, c'est ce qui s'est passé.
22 Q. Merci. Pirocanac, que vous a-t-il dit au sujet de moi ?
23 R. Je me souviens simplement qu'il a dit qu'il a compris, qu'il a entendu
24 dire que vous étiez en colère, en colère à cause de la diffusion de son
25 documentaire.
26 Q. Merci. Savez-vous que le Procureur a eu un entretien avec M. Pirocanac,
27 et que ces enregistrements ont été analysés quasiment image par image,
28 seconde par seconde, en 2006 ?
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1 R. Je sais que les enquêteurs ont eu un entretien avec M. Pirocanac, au
2 sujet d'extraits manquants dans cet enregistrement, mais je ne sais pas
3 exactement de quoi ils ont parlé ou ce qu'ils ont fait.
4 Q. Avez-vous appris qu'un enquêteur a déposé ici, disant que peut-être 20
5 secondes ont été effacées par erreur pendant l'entretien, et que c'était ça
6 qui manquait, et que Pirocanac a commenté avec eux l'ensemble de ces
7 images, tout l'enregistrement, et que nous avons cela ici, dans sa
8 totalité, ce qui a été diffusé par Studio B ?
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.
10 M. MITCHELL : [interprétation] Je voudrais simplement que l'on nous donne
11 la référence, où est-ce que l'enquêteur aurait témoigné qu'il manquait 20
12 secondes.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est M. Blaszcyk qui a déposé ici et il a dit
14 qu'il a vu, à quel moment, le bouton a été appuyé par erreur. On a appuyé
15 par erreur sur ce bouton, et que l'on a effacé tout au plus 20 secondes.
16 C'est assez récemment qu'il est venu déposer ici.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell, est-ce que cela vous
18 suffit comme précision ?
19 M. MITCHELL : [interprétation] Je voudrais une référence précise, si
20 possible.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puisque vous contestez la durée de ce
22 segment.
23 M. MITCHELL : [interprétation] Pour commencer, je ne pense pas que M.
24 Blaszcyk aurait pu voir le moment où on a effacé cet enregistrement dont
25 ont parle maintenant. Donc je voudrais voir exactement de quelle portion du
26 compte rendu d'audience il s'agit, de la déposition de M. Blaszcyk.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Alors entre-temps, nous
28 allons continuer. Quelle a été votre question, Monsieur Karadzic ?
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Donc laissons cela de côté, on y reviendra à partir du moment où on
3 aura retrouvé la page correspondant du compte rendu d'audience. Mais je
4 voulais savoir ou plutôt je voulais montrer ce que M. Pirocanac a dit à mon
5 sujet.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] 65 ter, 4561 [phon], s'il vous plaît, sur la
7 liste 65 ter. C'est l'entretien de M. Blaszczyk, M. Nicholls, avec M. Zoran
8 Petrovic-Pirocanac. Entre-temps, il a soutenu sa thèse de doctorat, et il
9 fait de la recherche.
10 C'est la première page. Je demanderais à ce que l'on affiche la page 112 en
11 anglais, s'il vous plaît. Peut-être pourrons-nous nous passer de la version
12 en B/C/S, sauf peut-être si cela peut être utile au public.
13 Commençons à la ligne 23 et suivantes. Je ne crois pas que ce soit la même
14 page que j'ai moi, peut-être qu'il y a une erreur. Voyons la partie où il
15 est question de "Krajisnik." Je vois. Il faut avancer de trois pages. Page
16 115, c'est celle-là dont nous avons besoin.
17 Voyez ce qui est écrit ici, examinez la partie qui commence en ligne 16,
18 voyez la réponse apportée par M. Pirocanac. Puis voyez la ligne 20, il est
19 dit que :
20 "Les dirigeants des Serbes de Bosnie, Krajisnik et d'autres ont demandé à
21 studio B et m'ont demandé à moi de leur envoyer un exemplaire. Le
22 lendemain, il a été diffusé. Je me souviens, et je connais le type, il
23 s'appelle Zoran. Il est maintenant à Politika. Il pourrait le confirmer que
24 nous avons envoyé, par autocar, un exemplaire à Pale. Ils étaient encore
25 ensemble. Je ne sais pas si Karadzic l'a vu, mais la plupart d'entre eux
26 l'ont vu. Si vous demandiez à Krajisnik s'il s'en souvient, vous verrez que
27 tout a été très bien fait. Ma conclusion est la suivante : C'est à ce
28 moment-là que --"
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1 Ensuite on n'entend pas.
2 "Et s'ils avaient entendu ce qui se passait, ils auraient pu faire
3 les choses différemment et éviter ce qui s'est passé par la suite," et
4 cetera.
5 En bref, Pirocanac dispose d'informations selon lesquelles la partie
6 serbe a demandé un exemplaire de cette cassette, et non pas l'originale.
7 L'exemplaire leur a été transmis, et les dirigeants serbes ont estimé que
8 ce reportage avait été très bien fait.
9 R. Si tel était le cas, je ne comprends pas pourquoi il était si agité
10 lorsque je l'ai rencontré deux jours plus tard.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vois que M. Mitchell s'est levé, mais
12 j'aimerais que l'on examine une partie de cette déposition qui commence
13 trois pages plus loin. Puis-je poser ma question au témoin ?
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, un instant.
15 Monsieur Mitchell.
16 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais revenir à
17 cela, à la question du Dr Karadzic qui se trouve en page 53, ligne 17. Il
18 dit au témoin si M. Blaszczyk a témoigné et a dit qu'il l'avait vu que l'on
19 avait effacé par accident 20 secondes tout au plus en appuyant sur le
20 mauvais bouton. Il en a parlé récemment dans sa déposition. Or, M.
21 Blaszczyk témoignait très précisément des images relatives à l'entrepôt de
22 Kravica, sur la durée de ces images-là, et il n'a rien dit sur le fait
23 qu'il aurait vu un bouton sur lequel on aurait appuyé par erreur et qui
24 aurait eu, pour conséquence, d'effacer une certaine partie des images.
25 Alors je ne sais pas s'il y a une erreur de traduction ou un malentendu,
26 mais je crois qu'en fait les informations présentées au témoin ne sont pas
27 tout à fait exactes.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Mitchell.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'aimerais que l'on examine la partie
2 qui commence trois pages plus loin.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. En attendant, Monsieur Block, j'aimerais savoir si vos collègues,
5 lorsque du matériel est acheté ou fourni ou vendu, si vos collègues
6 participent à la négociation de ces prix, ou bien si le prix est augmenté,
7 et cetera.
8 R. Oui, parfois, effectivement, dans le monde de la télévision -- de
9 l'image, lorsque vous avez des images uniques, effectivement, oui, chacun y
10 va de son offre et ces images sont souvent remises au plus offrant. Parfois
11 un journaliste de télévision peut vendre un premier accès exclusif à
12 quelqu'un sachant que par la suite les images seront vendues à d'autres
13 moins cher. Les différentes chaînes de télévision tentent d'obtenir la
14 première les images filmées. Ça change d'un marché à l'autre, mais
15 évidemment la première diffusion est la plus chère. Par exemple, aux Etats-
16 Unis, un pays riche et un gros marché, le prix demandé sera plus élevé
17 qu'aux Pays-Bas, par exemple. Mais si vous voulez être le premier à
18 diffuser certaines images uniques, exceptionnelles, il y a des chances pour
19 que vous puissiez en obtenir le prix fort.
20 Q. Merci. Compte tenu de tous les éléments, M. Pirocanac a-t-il pu faire
21 augmenter la valeur de son travail en disant combien cela lui avait coûté
22 et quel type de pression était exercé sur lui ? Pouvez-vous nous fournir
23 une explication, puisque vous voyez bien ce qu'il dit ici ?
24 R. Je ne suis pas moi-même dans le monde de la télévision même si je
25 comprends bien comment les choses fonctionnent, j'ai eu l'impression que
26 l'un des raisons pour lesquelles il était irrité à mon égard c'est parce
27 qu'il avait le sentiment que d'une certaine manière nous avions diffusé la
28 cassette par écrit, si vous voulez, sans le moindre type de compensation ou
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1 de commission. Je crois que cela faisait partie du problème.
2 Alors vous parlez des parties manquantes, je ne sais pas si vous m'avez
3 posé la question plus tôt, mais je crois que, oui, si j'étais au courant du
4 fait que certaines parties manquaient. En fait, j'ai été au courant de la
5 partie manquante quasiment instantanément parce que très peu de temps par
6 la suite, la cassette a disparu. Zoran concluait des accords avec les
7 chaînes de télévision pour que ces images soient diffusées, e les images
8 qu'il leur vendait, effectivement, comportaient un certain nombre de
9 parties manquantes. Je n'ai jamais revu les images que j'ai vues ce jour-là
10 à Belgrade avant de nombreuses années, lorsque par la suite, je crois
11 qu'une chaîne de télévision néerlandaise a réussi à déterrer un exemplaire
12 et m'a demandé si c'était exactement ce que j'avais vu à l'époque.
13 Donc, oui, je crois, et c'est aussi ce que m'ont dit des amis que je
14 partage avec Zoran, je crois qu'il disposait en fait d'une mine d'or
15 journalistique. Il disposait d'images que tout le monde voulait diffuser.
16 Il avait aussi des images qui semblaient le mettre un peu en porte-à-faux
17 avec ses sources et ses bienfaiteurs au sein de la structure militaire
18 yougoslave et les Serbes de Bosnie, donc il devait trouver un moyen de
19 tirer parti de cette mine d'or journalistique qui était entrée en sa
20 possession.
21 Le résultat, nous le connaissons tous, c'est une cassette avec un
22 certain nombre de parties manquantes, et je pense qu'il savait tout à fait
23 ce qu'il faisait en vendant ces informations. Maintenant, pourquoi ces
24 parties manquent-elles ? On ne peut se livrer qu'à des conjectures, mais je
25 crois que, dans son esprit, ce reportage, sans les parties en question, lui
26 poserait moins de difficultés vis-à-vis de ses sources.
27 Q. Merci. Examinons la page précédente. L'impression n'est pas très
28 bonne.
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1 Mais je vous demande d'examiner la partie qui commence à la ligne 18.
2 Je cite :
3 "Il est certain qu'ils ont été contactés et ils ont envoyé un exemplaire.
4 Et quelqu'un m'a dit que le reportage avait été très bien fait, de manière
5 très honnête et très objective, professionnelle. Il est intéressant
6 aujourd'hui de voir toutes ces personnes d'alors et leurs positions. Alors,
7 peut-être est-il utile que vous demandiez à quelqu'un d'autre."
8 Saviez-vous que j'étais encore en bons termes avec M. Pirocanac et qu'après
9 cet événement, je lui ai accordé un long entretien, et c'était également le
10 cas pendant la guerre avant cet événement ?
11 R. Je ne le savais pas. En tout cas, je ne le savais pas avant que vous ne
12 me le disiez l'autre jour.
13 Q. Merci. Vous avez parlé des autorités civiles, mais aussi des autorités
14 militaires. Vous conviendrez que cette conversation a eu lieu ici même dans
15 ce bâtiment et non pas au quartier pénitentiaire ?
16 R. Oui, oui. Nous nous sommes réunis ici, à deux pas, la semaine dernière.
17 Q. Savez-vous pourquoi nous nous sommes rencontrés ici même et non pas au
18 quartier pénitentiaire ?
19 R. Je suppose que c'est parce que vous aviez terminé l'audience du jour et
20 qu'il était plus commode de se rencontrer ici.
21 Q. Mais ce n'est pas la raison pour laquelle nous nous sommes rencontrés
22 ici. C'est parce que, au quartier pénitentiaire, les journalistes ne sont
23 pas autorisés.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'interroge quant à la pertinence de
25 cette déclaration.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a parlé de l'armée. Si le quartier
27 pénitentiaire n'accepte pas les journalistes, comment se fait-il que
28 l'armée sur la ligne de front accepte des journalistes ? Je voulais donc
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1 lui poser la question suivante, à savoir : quelqu'un d'autre comme
2 Pirocanac aurait-il pu se trouver sur la ligne de
3 front ? L'armée avait une position particulière à l'égard de ces
4 différentes questions. Les autorités civiles en avaient une autre.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Conviendrez-vous donc que Pirocanac disposait d'une autorisation des
7 forces de police et que Peter Arnett avait une autorisation que j'avais
8 émise, que les autorités, en d'autres termes, n'imposaient pas de
9 restrictions même dans un tel contexte, mais que lorsque l'on parle de
10 l'armée, la situation est toute
11 autre ?
12 R. Je pense que ce que vous me demandez c'était de savoir si j'étais
13 conscient que les militaires imposaient des restrictions aux journalistes.
14 Oui, absolument. Et est-ce que les autorités civiles étaient à même de
15 passer outre ces restrictions ? Est-ce que c'est cela, la question que vous
16 me posez ?
17 Oui. Les militaires imposaient des restrictions aux journalistes, et
18 souvent, de mon expérience, si on avait obtenu l'autorisation des autorités
19 civiles, ils ne transmettaient pas toujours des ordres militaires aux
20 militaires sur le terrain, et ce n'était pas nécessairement à haut niveau.
21 Vous pouviez avoir des officiers de bas grade qui, en fait, n'acceptaient
22 pas de donner suite à un document, ou bien quelqu'un qui avait été envoyé
23 pour vous accompagner se voyait rejeté. Alors, souvent c'était parce qu'ils
24 n'étaient pas informés, parce qu'ils n'avaient pas reçu l'ordre directement
25 de leur supérieur et parce qu'ils ne souhaitaient pas commettre d'erreur.
26 En toute honnêteté, je dois dire qu'on peut avoir des problèmes si on
27 autorisait un journaliste à venir. Mais on n'aurait jamais de problèmes si
28 on n'autorisait pas les journalistes à avoir accès.
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1 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Block, vous venez de
2 mentionner l'enregistrement avec les lacunes.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.
4 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Mais est-ce que vous pouvez nous dire
5 de combien étaient ces lacunes ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais, pour ma part, chronométré ces
7 lacunes, mais je me souviens du commentaire qui accompagnait une de ces
8 bandes. Il y avait une petite lacune où je crois que quelqu'un parlait à
9 des enfants ou il y avait des jeux d'enfants, on entendait des voix
10 d'enfants. Dans une autre section, on entendait Zoran ou quelqu'un,
11 apparemment, qui parlait d'une bombe au sol, et ça, ça a duré un peu plus
12 longtemps.
13 Tout ce dont je me souviens, c'est qu'il était clair que certaines choses
14 avaient clairement été coupées dans ce qui était disponible aux
15 journalistes. Il y avait les scènes devant le hangar à Kravica et les
16 scènes devant la "maison blanche" où il y avait des images d'hommes
17 bosniaques -- serbes de Srebrenica qui étaient détenus.
18 Alors je sais qu'il y a eu beaucoup d'enregistrements que j'avais vus qui
19 étaient de l'enregistrement brut que je n'ai jamais vu reproduit nulle
20 part. Mais la bande dont je me souviens qu'il m'avait mise à disposition,
21 c'étaient là les deux sections dont je me souviens qu'elles manquaient.
22 S'agissant de la longueur de ces extraits, je ne m'en souviens pas.
23 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci beaucoup.
24 Oui, Monsieur Karadzic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'attendais les interprètes.
26 Pouvons-nous regarder la transcription, page 23 575, des lignes 9 à 11.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. M. Blaszczyk dit :
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1 "Cet enregistrement, ce n'est pas dans -- ça ne figure pas parmi ce qu'il
2 nous a été remis, et si on compare le déroulement dans le temps, on voit
3 qu'il manque à peu près 11 secondes d'enregistrement."
4 Donc ce qu'il manque, c'est à peu près 11 secondes, tel que cela a
5 été constaté par les enquêteurs, et c'est la seule différence entre ceci et
6 la matière première qu'ils avaient reçue; est-ce que vous acceptez la
7 parole des enquêteurs à ce sujet ?
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ça, c'est par rapport à l'enregistrement
9 spécifique.
10 Monsieur Mitchell.
11 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, c'était là ma remarque. Il y a un
12 certain nombre de sections qui manquent, et là, on se réfère à une section
13 particulière, et pas une combinaison de toutes les sections manquantes.
14 Donc M. Karadzic doit être tout à fait au clair lorsqu'il pose ses
15 questions à M. Block pour qu'on détermine la pertinence de ces questions.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Mitchell.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. A la page suivante, il y a une référence à une section de 24 secondes
19 qui manque. C'est apparemment le temps que j'avais noté. Non, ce n'est pas
20 à la page suivante, mais à la page 23 609, et on lit :
21 "C'était la partie de 24 secondes par-dessus laquelle on a enregistré où
22 l'on voit le ratio 'package' et la partie effacée."
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Il y a une chose qui m'intéresse beaucoup. Etiez-vous à même de
27 vérifier vos sources, ce que vous entendiez de la part de vos sources ?
28 Est-ce que vous avez pu le vérifier, et est-ce que vous avez,
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1 effectivement, vérifié la précision de ce que l'on vous avait dit ?
2 R. S'agissant du nombre de personnes qui avaient été tuées ?
3 Q. Non. Tout d'abord, et surtout en ce qui me concerne moi, sur le fait
4 que j'étais en colère et que les autorités des Serbes de Bosnie avaient
5 confisqué l'enregistrement. En fait, vous avez dit aujourd'hui que ce
6 n'était pas vraiment important pour vous, mais sinon, par ailleurs, avez-
7 vous eu la possibilité de vérifier la pertinence de ce que vous aviez
8 entendu de la part de quelqu'un d'autre, parce que parfois c'est des ouï-
9 dire de deuxième ou de troisième niveau, des choses que vous n'avez pas pu
10 observer vous-même ?
11 R. Dans le cas des rumeurs, comme vous l'avez dit, je n'ai jamais essayé
12 de les faire corroborer. Ça n'a jamais fait l'objet d'un rapport de ma
13 part.
14 S'agissant de valider la confiscation des bandes sous l'autorité des
15 autorités des Serbes de Bosnie, oui, j'ai validé cela. Et j'ai trouvé qu'il
16 était extrêmement intéressant de regarder la déposition de M. Petrovic, en
17 particulier sa déposition là où il dit que des copies ont été exigées.
18 Alors la langue est quelque chose de très intéressant en ex-Yougoslavie. La
19 demande qui émane d'une personne va se traduire comme l'exigence de
20 confiscation par une autre. En fait, ce qui s'est passé, c'est que les
21 bandes ont été envoyées à Pale à la demande ou sur l'ordre - ça dépend de
22 la façon dont on regarde cela - des autorités serbes de Bosnie et, en fait,
23 c'est là qu'on les a envoyées, et ces bandes n'ont jamais été revues pour
24 autant que je le sache. Et j'ai effectivement validé le fait que les ordres
25 venaient des autorités serbes de Bosnie. Et le fait que j'avais entendu que
26 vous étiez fâché, non, ça je n'ai pas consacré d'énergie à valider cette
27 information-là.
28 Q. Saviez-vous que l'armée aussi avait une caméra in situ et que, sur ces
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1 enregistrements militaires, nous pouvons voir la caméra de Pirocanac ?
2 Donc, en fait, savez-vous qu'il y avait deux personnes qui étaient en train
3 d'enregistrer ce genre d'événements, certains des événements de Srebrenica
4 ?
5 R. Oui. J'avais compris que non seulement l'armée enregistrait, mais que
6 certaines unités avaient leurs propres caméras et que la télévision de la
7 Republika Srpska, un des journalistes, était également venue dans cette
8 région de Bratunac et filmait également.
9 Q. Merci. Est-ce que nous pourrions maintenant nous concentrer sur
10 d'autres sujets. Vous avez publié un article, et je vais demander que cet
11 article soit affiché. C'était le 14 juillet.
12 Est-ce que vous pourriez nous dire comment un article est créé et ensuite
13 expédié ?
14 R. Il n'y a pas de réponse unique à cela. De fait, des articles peuvent
15 être écrits à la demande d'un rédacteur en chef ou d'un éditeur. Mais
16 parfois, si un journaliste a une expertise particulière, on s'attend à ce
17 que ce journaliste ou cette journaliste couvre ce domaine au mieux de ses
18 capacités pour fournir un flux continu d'informations et d'éléments.
19 J'étais particulièrement au fait de la partie orientale de Bosnie le long
20 de la rivière Drina. En fait, j'étais en Yougoslavie, dans l'ex-
21 Yougoslavie, juste avant l'attaque de Srebrenica. Je m'y étais rendu en
22 avion et je travaillais pour essayer d'avoir une interview avec le général
23 Ratko Mladic, et une fois que j'avais pu obtenir cette interview et que
24 j'avais publié mon interview, j'ai décidé de rentrer chez moi pour aller
25 voir ma famille pour découvrir quelques jours après qu'il y avait une
26 concentration militaire qui était en train de commencer, au moment où je
27 suis parti, dans la partie orientale.
28 L'attaque a commencé quelques jours après mon retour, je crois, et au
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1 moment de la chute de Srebrenica, mes éditeurs m'ont demandé si je pouvais
2 contacter des sources et des autorités et des centres de presse à Belgrade
3 et à Pale et m'entretenir avec des agences d'aide humanitaire par le biais
4 des contacts que j'avais à Zagreb, à Tuzla ainsi qu'à Belgrade, et essayer
5 d'obtenir un peu plus d'information sur ce que l'on obtenait par la plupart
6 des agences de presse auxquelles les stations de radio et de télévision
7 s'en remettent lorsqu'ils ne disposent pas d'envoyés spéciaux dans la
8 région.
9 Alors j'ai lu les rapports qui étaient envoyés par les agences de presse,
10 les communiqués, puis j'ai passé quelques coups de téléphone dans la zone
11 et j'ai dit : Voilà ce que Reuters dit, voilà ce que l'AP dit, voilà ce que
12 l'on lit dans le "New York Times." Est-ce que c'est correct ? Est-ce que
13 c'est précis ? Comme tout le reste, on soupèse l'information, on se demande
14 s'ils ont été fiables dans le passé, on regarde le niveau de détail qu'ils
15 ont et la façon dont leur histoire est rédigée, et ensuite on la rédige.
16 Une fois que ceci est rédigé, il faut que cela soit conforme à l'espace qui
17 vous est dévolu soit sur la page écrite ou dans le temps d'édition dans un
18 journal télévisé, alors ça signifie qu'il va falloir couper certaines
19 choses, et parfois, un rédacteur en chef va vous contacter et dire que vous
20 avez telle chose qui -- une simple allégation, que vous n'avez pas
21 d'élément pour soutenir cela, et donc on va vous demander de trouver plus
22 d'information pour soutenir ce que vous dites ou bien de le couper purement
23 et simplement.
24 Et souvent, les disputes entre le rédacteur en chef et le
25 journaliste, c'est l'espace qu'on lui accorde pour publier son histoire et
26 ce qu'il convient de couper dans ce genre d'histoire.
27 Alors, souvent, lorsque je n'étais pas sur les lieux, on ne
28 m'accordait pas beaucoup d'espace que si j'étais sur place. Mais enfin, ça,
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1 c'est simplement un instantané de la situation et du processus.
2 Q. Merci.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la pièce P4396, qui a été
4 versée aujourd'hui.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous l'avons maintenant.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Je voulais vous poser la question suivante : est-ce que vous avez été à
8 même d'observer que les différents côtés étaient en train d'essayer de se
9 noircir mutuellement et que, donc, ils n'étaient pas objectifs quant aux
10 activités les uns des autres ? Est-ce que vous avez pu le constater ?
11 R. Oui, tout à fait. Il semblait y avoir une tendance, on pourrait même
12 dire une obsession, dans l'ex-Yougoslavie. Chacun essayait de se montrer en
13 victime, et tout ce qui se passait était immédiatement annoncé et était
14 amplifié. Souvent, les massacres étaient amplifiés, les atrocités étaient
15 exagérées. C'était quelque chose d'extrêmement répandu, et cela rendait
16 notre travail plus difficile parce que parfois il fallait des mois pour
17 démêler les différents fils de l'écheveau de l'histoire. Mais nous le
18 savions tous chez les journalistes : pour quiconque qui couvrait l'ex-
19 Yougoslavie et qui essayait de présenter sa cause dans la -- que les
20 différentes parties essayaient de présenter les choses sous un jour
21 meilleur pour eux et essayaient toujours de se présenter comme les victimes
22 réelles. La victimisation était ce qui était utilisé comme justification
23 par les différentes parties pour justifier le traitement qu'ils
24 infligeaient aux autres. Donc chacun souhaitait avoir ses victimes et les
25 présenter de la façon, souvent, la plus macabre possible.
26 Q. Merci. Dans ce contexte, êtes-vous d'accord avec moi que dans le
27 premier paragraphe vous attribuez à quelqu'un le terme de déporté. Vous
28 dites que cette personne était déportée. Et dans le paragraphe suivant,
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1 vous dites qu'apparemment 40 000 personnes ont été emmenées en camion.
2 Avez-vous pu obtenir des renseignements sur les rencontres entre le général
3 Mladic et les représentants des Musulmans qui demandaient à pouvoir partir,
4 et avez-vous reçu l'information que c'étaient les Nations Unies qui ont
5 demandé que l'on autorise les civils à partir ? C'était là quelque chose
6 qui se passait au moment de cet article. Ou, en fait, avant cet article,
7 puisque les événements auxquels vous vous référez se sont produits les 11
8 et 12.
9 R. Il s'agissait d'un rapport initial de la ligne de front qui était en
10 réaction aux rapports des agences et ce qui était ressorti d'informations
11 du Haut-commissaire des Réfugiés des Nations Unies à Tuzla. Ce qui sous-
12 tendait tout cela n'était pas clair pour qui que ce soit à l'époque, je
13 crois.
14 Q. Merci. L'article a probablement été rédigé le 13 s'il a été publié le
15 14 ?
16 R. Oui, correct.
17 Q. Merci. A la ligne 4 -- vous l'avez mis entre guillemets, mais
18 apparemment il y avait des nouvelles alarmantes sur deux jeunes filles qui
19 ont été séparées par l'armée des Serbes de Bosnie. Est-ce que vous avez
20 essayé de vérifier ce qui s'est passé ? En fait, c'est au paragraphe 4 du
21 texte. Sans doute que c'est les deux jeunes filles enlevées par l'armée des
22 Serbes de Bosnie.
23 R. Non. En fait, j'ai simplement fait rapport de ce qui m'avait été dit
24 par des fonctionnaires de la commission du HCR des Nations Unies. Et à
25 l'époque, j'étais à Londres, donc il aurait été très difficile pour moi de
26 faire plus que de procéder à de rapides interviews. Comme je l'ai dit en
27 réaction à la question que vous m'avez posée tout à l'heure, vous aurez
28 remarqué que cet article n'est pas très long. Mais en fait, c'était une
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1 réaction à des événements dont nous avions entendu parler, et nous avons
2 essayé de vérifier rapidement et de donner un aperçu des informations qui
3 étaient publiées. En fait, c'est immédiatement après avoir rédigé cet
4 article que j'ai été renvoyé chez moi pour faire mes valises pour me
5 préparer à aller à Budapest, où j'allais être accueilli pour être emmené à
6 Belgrade. Donc j'ai écrit cet article et je suis rentré en vitesse chez moi
7 pour me préparer pour aller en Yougoslavie pour fournir plus de contexte et
8 plus de compréhension à ces rapports initiaux.
9 Q. Merci. Donc il faut tenir compte du fait que de tels initiaux devaient
10 être plus brefs et incomplets ?
11 R. Je ne sais pas si je les qualifierais d'"incomplets", mais il est
12 certain que la portée de l'information dont on disposait était nettement
13 plus limitée par le simple fait que l'on parlait par communications
14 téléphoniques, qui souvent étaient de très mauvaise qualité, on ne
15 parvenait pas à obtenir en ligne les personnes à qui on souhaitait parler.
16 Donc il n'y a rien qui remplace la présence sur place ou être aussi proche
17 que possible du lieu où les choses se passent. Et dans les circonstances,
18 je crois que c'était le meilleur travail ou le travail le plus complet que
19 nous pouvions faire, et compte tenu de cela, mes supérieurs et moi-même
20 étions tombés d'accord que je devais retourner séance tenante à Belgrade et
21 essayer d'aller sur place pour essayer de voir ce qui était rumeur et ce
22 qui était des faits avérés.
23 Q. Merci.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous avoir le 65 ter 21961, qui
25 maintenant, peut-être, a déjà reçu une cote P. Pièce P4398.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Est-ce que vous avez le nom de la femme à qui vous vous êtes adressé
28 pour obtenir cette information ?
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1 R. Oui. Il y en a deux, et nous avons obtenu leurs noms à l'époque.
2 Q. Merci. Est-ce que nous pourrions disposer de ces noms, de sorte que
3 nous puissions vérifier l'information dont vous disposiez à l'époque ?
4 R. Si j'avais voulu que leurs noms soient connus, je les aurais publiés à
5 l'époque.
6 Q. Aujourd'hui, vous avez mentionné des exagérations. Est-ce que vous avez
7 pu confirmer par des recherches postérieures l'information contenue au
8 paragraphe 3, au sujet du champ à Bratunac où l'on était jusqu'aux genoux
9 dans le sang ?
10 C'est la page 11, ligne 20, dans le compte rendu de séance.
11 Est-ce qu'il s'agit d'une exagération, ou est-ce que vous pouvez
12 effectivement confirmer qu'il y a eu des assassinats dans ce champ et que
13 l'on était jusqu'aux genoux dans le sang ?
14 R. Permettez-moi de regarder le reste de l'article pour voir si je peux
15 retrouver quelque chose qui me semble extrêmement important. Je crois que
16 ça figure à la page suivante. Est-ce qu'il y a une deuxième page à cet
17 article ? Très bien.
18 Tout d'abord, si vous lisez l'article, vous allez également voir que je
19 m'accorde une certaine marge parce qu'il est très difficile de valider les
20 nombres dans ces circonstances. Il y avait suffisamment d'information pour
21 valider qu'il s'agissait de nombres importants, et donc je disais : Si les
22 chiffres sont corrects. Mais ce que je voulais voir, c'était les deux
23 paragraphes suivants, et là nous disions qu'il y avait des nouvelles sur :
24 "Les nouvelles qui ont émergé des témoignages des réfugiés, ceux qui
25 ont quitté Srebrenica, et qu'il y a 10 000 personnes que l'on ne retrouve
26 pas.
27 "Mais les horreurs, maintenant, viennent des Serbes, pas des Musulmans, et
28 se réfèrent à des hommes qui se sont rendus ou qui ont été pris
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1 prisonniers. Il sera difficile pour les autorités serbes de Bosnie
2 d'ignorer ces rapports comme de la propagande ennemie."
3 La raison pour laquelle je fais cela -- en fait, quand j'étais avec
4 Dragan dans la voiture et que nous sommes dit : Merde, mais de quoi s'agit-
5 il, parce que l'on parlait des tueries et des nombres qui étaient
6 impliqués, c'est parce que l'exagération émanait à chaque fois de part et
7 d'autre. Les Croates étaient toujours heureux de se référer au nombre de
8 Croates qui étaient morts dans un instant et d'exagérer les chiffres, et
9 les Musulmans et les Serbes faisaient exactement la même chose.
10 Ce qui était inhabituel ici, c'est qu'il ne s'agissait pas des
11 victimes qui parlaient d'elles-mêmes. Ce dont il s'agissait ici, c'étaient
12 en fait les Serbes eux-mêmes parlant des personnes qu'ils étaient censés
13 tuer. C'est cela qui était extraordinaire, parce que je ne l'avais jamais
14 vu auparavant. Et c'est la raison pour laquelle j'ai été tellement choqué
15 et c'est la raison pour laquelle nous sommes retournés en vitesse à
16 Belgrade, parce que nous nous sommes dit que si ces nouvelles étaient
17 connues en Serbie également, et si c'était effectivement de notoriété
18 publique comme ces gens le disaient, alors il y avait des personnes qui le
19 savaient et qui avaient plus de visibilité dans la zone que moi. C'est la
20 raison pour laquelle je suis revenu.
21 Alors la réponse, tout d'abord, c'est que l'exagération ne
22 s'appliquait pas au même niveau dans ce cas, parce que des Serbes de
23 Bosnie, pourquoi voudraient-ils exagérer le fait qu'ils tuaient autant de
24 personnes ? La pratique usuelle aurait plutôt été de minimiser le nombre de
25 personnes que l'on tuait pour justifier -- ou plutôt, pour contrer la
26 propagande de l'ennemi qui disait qu'il y avait autant de personnes qui
27 avaient été tuées. Donc ça, c'est une première chose.
28 Pour répondre à votre question, ce que nous avons pu valider, comme
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1 je l'ai dit dans ma déposition précédente, c'est que le terrain de jeu et
2 le hangar étaient des choses qui revenaient continuellement dans ce que
3 disaient les personnes avec qui nous nous étions entretenus, et
4 l'expression "jusqu'aux genoux dans le sang," c'était l'expression que
5 j'avais entendue pour la première fois dans ce contexte et je l'ai entendue
6 répétée à maintes reprises. Alors je ne sais pas si c'était une figure de
7 rhétorique ou pas, mais c'était quelque chose qui était souvent utilisé, et
8 c'est une allégation qui ressortait continuellement. Et de nouveau,
9 c'étaient les Serbes de Serbie qui avaient accès à la région pour des
10 raisons de famille ou parce qu'ils étaient venus voir ce qui se passait, et
11 pour les Serbes de Bosnie qui soient s'étaient enfuis ou qui étaient
12 revenus dans la région parce qu'ils s'étaient enfuis auparavant et avaient
13 voulu revenir pour s'informer de ce qui se passait. Donc ce n'était pas
14 quelque chose que l'on m'avait dit simplement à une reprise, mais c'est
15 quelque chose que j'ai entendu à maintes reprises.
16 Q. Merci. Il serait bien que nous ayons plus de temps. Vos réponses sont
17 longues. Malheureusement, je dois vous demander de répondre de façon plus
18 courte parce que nous manquons de temps.
19 Au paragraphe suivant, vous dites :
20 "Pour ce qui est des brutalités qui ont fait l'objet des rapportages, il
21 faut se souvenir de la première année de la guerre lorsque des soldats
22 musulmans de Bosnie ont réussi à rompre le siège de la ville et ont rasé
23 plusieurs villages serbes qui se trouvaient à côté, en tuant de nombreux
24 civils serbes pendant cela."L'enclave de Srebrenica a été assaillie. Les
25 Serbes de Bosnie souhaitent la vengeance."
26 Vous avez écrit à propos de Bjelovac et de l'incendie de Bjelovac. Nous
27 allons regarder ceci un peu plus tard.
28 Etes-vous d'accord pour dire que les Serbes autour de Srebrenica étaient
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1 très en colère contre Oric et les Serbes, et autour de Trebinje, étaient
2 très en colère contre quelqu'un d'autre ? Est-ce que c'est quelque chose
3 que vous avez constaté vous-même; autrement dit, cette animosité était le
4 résultat de meurtres réciproques, et c'était tout à fait local et prenait
5 pour cible des personnes bien particulières et des régions bien
6 particulières ?
7 Il ne s'agissait pas de Bijeljina, mais de Bjelovac. Il y a une erreur au
8 niveau du compte rendu d'audience.
9 R. Oui. La population serbe autour de Srebrenica était extrêmement hostile
10 à l'égard des habitants de Srebrenica et à l'égard des commandants
11 militaires, et en particulier de Naser Oric qui les commandait. C'était un
12 secret de Polichinelle, et je crois que la colère et la haine étaient peut-
13 être encore plus violentes dans cette région précisément parce qu'Oric
14 réussissait ce qu'il faisait, peut-être plus que dans d'autres régions de
15 Bosnie. Il avait réussi à repousser les attaques serbes de Bosnie et
16 semblait pouvoir attaquer comme bon lui semblait les villages serbes dans
17 le secteur.
18 Donc, aux yeux de la plupart des Serbes, et en particulier des Serbes
19 de Bosnie qui étaient de la région, mais au sens plus large du terme,
20 Srebrenica représentait un drapeau rouge. C'était une blessure non
21 cicatrisée qui les rendait furieux. Il y avait beaucoup de haine, beaucoup
22 de préjugés dans de nombreuses régions, mais ça l'était davantage dans la
23 région de Srebrenica.
24 Q. Merci. Si vous ne souhaitez pas nous donner le nom de cette femme,
25 pourriez-vous nous dire si c'était quelqu'un qui exerçait une quelconque
26 position d'autorité ou était-ce une femme ordinaire, cette personne qui
27 vous a donné ce chiffre ?
28 R. C'était la femme d'un officier serbe de Bosnie, en tout cas c'est comme
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1 ça qu'elle s'est présentée.
2 Q. Merci.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, veuillez me dire quand il faut
4 faire la pause.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause, si cela
6 vous convient. Nous allons faire une pause d'une heure et reprendre à 13
7 heures 35.
8 --- L'audience est suspendue à 12 heures 35.
9 --- L'audience est reprise à 13 heures 38.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions, la
11 Chambre de première instance va rendre une décision orale sur la demande de
12 l'accusé concernant que Ljubomir Obradovic soit entendu viva voce. Les
13 Juges de la Chambre notent que, dans le compte rendu d'audience de 190
14 [comme interprété] pages de l'affaire Tolimir dont le versement au dossier
15 a été demandé conformément à l'article 92 ter, le témoin donne des éléments
16 de preuve détaillés sur la structure et le fonctionnement de l'état-major
17 principal. Les Juges de la Chambre estiment que, contrairement à l'argument
18 avancé par l'accusé, ces éléments de preuve sont pertinents eu égard aux
19 chefs d'inculpation de l'acte d'accusation. Les Juges de la Chambre notent
20 de surcroît que le témoin fournit énormément d'éléments de preuve sur les
21 événements qui se sont déroulés à Zepa après le mois de juillet 1995 qui ne
22 figurent pas dans l'acte d'accusation. La Chambre de première instance
23 n'estime pas que les éléments de preuve concernant Zepa ne sont pas
24 pertinents, car ces éléments permettront peut-être de mieux comprendre ce
25 qui s'est passé après la chute de Srebrenica et les événements allégués
26 depuis de juillet 1995, ainsi que de l'entreprise criminelle commune
27 primordiale.
28 Cependant, si l'ensemble du compte rendu d'audience dans l'affaire Tolimir
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1 doit être versé au dossier, il sera peut-être difficile à l'accusé de
2 comprendre dans quelle mesure l'Accusation se repose sur les éléments de
3 preuve se rapportant à Zepa et comment il doit procéder pour contre-
4 interroger le témoin sur de tels éléments de preuve.
5 Pour conclure, la Chambre de première instance ne fait valoir aucun motif
6 pour rendre une ordonnance indiquant que ce témoin doit être entendu viva
7 voce et, par conséquent, estime que les éléments de preuve concernant ce
8 témoin peuvent être versés au dossier en vertu de l'article 92 ter et
9 ordonne que l'Accusation caviarde du compte rendu d'audience les éléments
10 de preuve se rapportant à Zepa et qu'elle présente ces éléments de preuve
11 viva voce, dans la mesure où elle estime que c'est nécessaire dans le
12 contexte de ces débats.
13 Cela étant dit, poursuivons.
14 Monsieur Karadzic, c'est à vous.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellences.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Veuillez maintenant regarder, s'il vous plaît, ce document qui a été
18 rédigé par votre collègue, le 1D5113. Vous savez certainement que M. Cicic
19 a rédigé des articles également, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Merci. Est-ce que nous pouvons agrandir ceci un petit peu, s'il vous
22 plaît ?
23 Donc voici ce qu'il a écrit, son texte -- ou plutôt, son article, où il
24 travaillait pour AIM de Belgrade.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons faire défiler ce
26 document vers le bas un petit peu, s'il vous plaît ?
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. "Les représentants des Nations Unies," est-ce que vous voyez le
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1 paragraphe qui commence par, "Les représentants des Nations Unies" ? M.
2 Cicic parle du fait qu'il "faut célébrer la victoire" et que "tous les tirs
3 ne constituent pas des tirs." On parle de "senluk," qui constitue des tirs
4 lancés en guise de célébration. Est-ce que vous êtes au courant de cela,
5 que l'on tirait pas mal dans ce contexte-là ?
6 R. Oui, et je crois que nous avions envoyé quelqu'un sur place qui nous
7 avait rapporté qu'effectivement il s'agissait de tirs en guise de
8 célébration.
9 Q. Merci. Dans ce paragraphe, nous constatons également qu'il y a
10 confirmation de ce que vous nous avez dit aujourd'hui, autrement dit que la
11 vengeance a joué un jeu primordial. M. Cicic dit qu'il y a eu des meurtres
12 sans exécution -- sans Peloton d'Exécution et que les personnes qui
13 souhaitaient se venger de quelqu'un devaient se présenter. Certaines
14 personnes ont accepté cela, d'autres, non.
15 Est-ce que c'est ce que vous avez constaté ?
16 R. C'est ce que nous avons entendu dire. Je crois que ma conclusion était
17 quelque peu différente de celle de Dragan, autrement dit que c'était un peu
18 plus méthodique que ce qui est décrit par lui ici.
19 Q. Merci. Oui, on parle ici du stade en bas, on dit que :
20 "Il s'agit d'un endroit qui pouvait éventuellement être un centre de
21 détention nous permettant d'aller à Pale après que les Serbes aient pris le
22 contrôle de Srebrenica, on leur a dit qu'ils pouvaient passer par Visegrad
23 uniquement. Il était tout à fait impossible d'atteindre la Région de
24 Srebrenica et de Bratunac en empruntant cette route-ci."
25 D'après vous, les combats dans les bois se sont poursuivis pour bien
26 plus longtemps et que les routes n'étaient pas sûres ?
27 R. On nous a dit - et je crois que c'était le général Mladic qui a déclaré
28 cela - il a dit qu'il y avait des personnes qui tentaient de quitter le
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1 secteur et qu'il craignait que les gens ne soient tués; cependant, ceci ne
2 nous est pas apparu très clairement. Au début, nous ne savions pas où se
3 déroulaient les combats et nous ne savions pas quelle était la violence des
4 combats. Mais nous savions qu'il y avait des combats qui se déroulaient là,
5 et que certains hommes avaient été faits prisonniers, au cours de ces
6 actions de combats, et ces personnes s'étaient rendues et avaient été
7 faites prisonnières.
8 Q. Merci. Alors veuillez regarder le dernier paragraphe maintenant, s'il
9 vous plaît.
10 "Ils ont réussi à photographier les prisonniers qui se trouvaient au
11 stade, mais ce film a été confisqué par les autorités militaires. Aucune
12 violence contre les hommes confinés ne pouvait être constatée sur ces
13 images."
14 Est-ce bien ce dont vous avez entendu parler, ou est-ce bien ce que
15 vous avez appris, autrement dit que la télévision serbe de la Republika
16 Srpska avait tourné un film qui leur a été confisqué par notre armée ?
17 R. Oui, tout à fait. Je crois que ce que Dragan mentionne ici, en fait, il
18 parle des mêmes images que celles que nous avons vues au stade de football,
19 où les prisonniers devaient se mettre debout et se rasseoir, et se mettre
20 debout, et se rasseoir. Donc il n'y avait pas de violences, mais ces hommes
21 étaient sur le terrain et on leur donnait des ordres.
22 Q. Merci.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir la page suivante
24 de ce document, s'il vous plaît, le dernier paragraphe, s'il vous plaît ?
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Connaissez-vous ce document ? Est-ce que vous me croyez si je vous dis
27 qu'il n'y a aucune mention de ma part indiquant qu'il faut cacher quelque
28 chose des médias -- mais je peux lire le texte dans son intégralité ?
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1 R. Je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire par le dernier
2 paragraphe, vous voulez parler du "sort des soldats musulmans blessés" ?
3 Q. Je parle des "dirigeants de Pale qui étaient d'accord pour autoriser
4 l'évacuation à l'hôpital de Tuzla par l'intermédiaire de la Croix-Rouge."
5 Ici, on fait état des blessés, mais je vous pose une question sur
6 l'ensemble du texte. Est-ce que vous souhaitez lire l'intégralité du
7 document, ou est-ce que vous allez pouvoir me faire confiance, car outre
8 cette confiscation faite par l'armée et vis-à-vis de notre propre
9 télévision, on ne parle d'aucune ingérence de ma part ? Est-ce que vous me
10 faite confiance ?
11 R. Non, écoutez, j'ai lu ce texte lorsque vous me l'avez présenté la
12 semaine dernière, oui.
13 Q. Merci.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement au
15 dossier de ce document, s'il vous plaît ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D2084, Madame,
18 Messieurs les Juges.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D5116. Est-ce que nous pouvons afficher ce
20 document, s'il vous plaît ?
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Mon conseiller juridique, Me Robinson, a envoyé un message électronique
23 à M. Cicic et je souhaite vous montrer ceci. La lettre de Me Robinson se
24 trouve, comme à l'accoutumée en bas de la page, et en haut de la page, nous
25 voyons la réponse de M. Cicic.
26 Me Robinson pose des questions à propos de la réunion avec Pirocanac, et il
27 demande s'il a évoqué la colère qui était la mienne. Les questions sont
28 moins importantes, mais voici les réponses :
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1 "Je me souviens que M. Petrovic-Pirocanac a dit qu'il a eu des soucis avec
2 les autorités de la Republika Srpska à cause de ces images. Je ne me
3 souviens pas si, oui ou non, il a précisément mentionné le Dr Karadzic et
4 son nom, mais j'ai supposé, à ce moment-là, que lorsqu'il a fait mention à
5 cela, il voulait parler de toutes les personnes qui faisaient partie de
6 l'équipe dirigeante de la Republika Srpska.
7 "J'espère avoir répondu à votre question.
8 "Bien à vous, Dragan Cicic."
9 Donc êtes-vous d'accord pour dire que pour ce qui est de M. Cicic que ce
10 n'était pas quelque chose digne d'être noté parce que sinon il s'en sera
11 souvenu, n'est-ce pas ?
12 R. Comme je l'ai dit dans ma réponse précédente à certaines de vos
13 questions, je ne pense pas qu'à l'époque c'était pertinent. Il était clair
14 que les autorités de la Republika Srpska avaient donné l'ordre. Cette
15 information a pu être confirmée ou validée par nous, et je m'en suis tenu à
16 cela. Je me souviens que Pirocanac disait que vous étiez très en colère; et
17 Dragan. Mais encore une fois, ce n'est pas quelque chose que nous allions
18 confirmer ou valider. Ceci ne revêtait pas une importance particulière à
19 nos yeux à l'époque outre le fait que les autorités avaient dit, Nous avons
20 besoin de cette bande. Cette bande a été remise et nous ne l'avons jamais
21 revue.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ligne 22, 1D05116. Ce serait le bon numéro.
23 Merci.
24 Alors je souhaite maintenant vous montrer votre article qui date de 1994.
25 En réalité, est-ce que je peux demander le versement au dossier de ce
26 document-là, correspondance électronique, s'il vous plaît ?
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas si cela est nécessaire
28 compte tenu du fait que vous avez lu l'ensemble du message. Alors nous
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1 allons adopter notre pratique. Nous n'allons pas verser ceci au dossier.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Donc le 1D05117, s'il vous plaît.
3 Merci.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Vous souvenez-vous de cet article qui parle de la contrebande d'armes
6 en direction de la Bosnie à l'époque, et ce document est-il exact ?
7 R. Oui. Je crois que l'histoire a démontré que ce que dit ce texte était
8 juste.
9 Q. Merci. Est-ce que nous pouvons voir le bas de la page également, mais
10 je suis sûr que vous connaissez l'intégralité de cet article.
11 Est-ce que nous pouvons avoir la page suivante, s'il vous plaît.
12 "Ceci contraste beaucoup avec la réaction des Etats-Unis en septembre 1992,
13 lorsqu'un avion semblable iranien atterrit à Zagreb avec un personnel
14 militaire, des munitions et des mitrailleuses. Les Américains n'ont pas
15 seulement averti tout un chacun dans l'avion, mais le gouvernement croate à
16 l'époque, qui n'était pas favorable parce qu'il était allié aux Musulmans
17 de Bosnie à l'époque, qu'ils souhaitaient intercepter l'avion et le
18 renvoyer."
19 Donc, au fil de la guerre, les Musulmans avaient de plus en plus de marge
20 de manœuvre pour faire entrer des armes, n'est-ce pas ?
21 R. Oui, il y a également des combattants qui sont venus de l'extérieur
22 dans la région.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce que ceci peut être versé au
24 dossier, s'il vous plaît ?
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D2085, Madame,
27 Messieurs les Juges.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Le 1D05118, s'il vous plaît, est-ce que
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1 nous pouvons afficher ce document.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Avant même de voir ce texte, vous connaissiez le contexte qui était
4 celui de la guerre ainsi que l'armement ? Vous souvenez-vous de ce document
5 que vous avez écrit conjointement avec Leonard Doyle ?
6 R. Oui, c'était le correspondant de "The Independent," à l'époque, à New
7 York.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer ce document au
9 témoin, s'il vous plaît ?
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Veuillez nous dire à quel moment vous souhaitez voir la page suivante,
12 s'il vous plaît.
13 R. D'accord.
14 Q. Est-ce que ceci a été confirmé par la suite, les éléments concernant la
15 mafia albanaise qui jouait un rôle de chef de file dans la contrebande de
16 l'héroïne en Europe ?
17 R. A l'époque, il me semblait que c'était effectivement le cas. Ce que je
18 ne sais pas, en revanche, parce que ces éléments se fondaient sur ce que
19 soupçonnaient les policiers à l'époque. Je me demande si de nombreuses les
20 années plus tard, lorsque le conflit au Kosovo a éclaté avec la
21 Yougoslavie, à savoir si les armes avaient été entreposées à leur fin
22 personnelle, mais, bon, c'était une question personnelle que j'avais à
23 l'époque. Il n'y a pas l'ombre d'un doute que la mafia albanaise a été très
24 impliquée dans la contrebande d'héroïne, de drogues, d'armes et de
25 cigarettes.
26 Q. Merci. La Bosnie, comme nous pouvons le constater au niveau du premier
27 paragraphe, a également été impliquée dans ces armements illégaux, n'est-ce
28 pas ?
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1 R. Sans l'ombre d'un doute, les Musulmans de Bosnie cherchaient des
2 sources ou des endroits où se procurer des armes, quelles qu'elles soient,
3 effectivement.
4 Q. Merci.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement au
6 dossier de ce document, s'il vous plaît ?
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 2086, Madame, Messieurs
9 les Juges.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Alors, 1D05112, est-ce que vous pouvez
11 afficher ce document, s'il vous plaît ?
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Vous souvenez-vous de ce texte ? Il date de 1995, juste avant la fin de
14 la guerre.
15 R. Fort bien.
16 Q. Merci. Est-ce que nous pouvons faire défiler ce document vers le bas un
17 petit peu, s'il vous plaît ?
18 Est-ce qu'il y a eu un trop plein d'enthousiasme dans ce document ? Est-ce
19 que vous avez exagéré un petit peu ?
20 R. Que voulez-vous dire par exagération ? Vous voulez dire que je me
21 concentrais trop sur le général Mladic ou que la réaction de la foule était
22 exagérée ?
23 Q. Tout d'abord, le diagnostic psychiatrique. Vous n'êtes pas psychiatre,
24 vous-même ?
25 R. Non. Nous sommes d'humbles journalistes. Ce n'est pas nous qui écrivons
26 les manchettes des journaux. C'est les rédacteurs en chef qui ont ce
27 privilège et qui peuvent exceller au niveau des manchettes des journaux. Je
28 ne suis pas psychiatre.
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1 Q. Merci.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement au
3 dossier de ce document, s'il vous plaît ? Est-ce que nous pouvons nous
4 tourner vers la page 9 ?
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. C'est là où vous me mentionnez également. Dans le contexte des
7 mésententes avec les militaires.
8 Vous souvenez-vous des éléments qui sont repris sur cette
9 page ?
10 R. Oui, je m'en souviens très bien.
11 Q. Merci.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document peut-il être versé ?
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la pièce D2087.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. Vous aviez mentionné que Sonja, ma fille qui était responsable du
17 centre de presse, avait dit que vous seriez en danger si vous veniez en
18 Republika Srpska; est-ce correct ?
19 R. On nous a dit que nous serions arrêtés, c'était là le message.
20 Q. Merci. Pendant l'interview, vous avez confirmé que vous saviez qu'elle
21 n'était pas la personne qui arrêtait les gens, et vous avez confirmé que
22 vous compreniez que lorsque vous demandiez une accréditation au centre de
23 presse, elle devait demander à son tour aux services de sécurité, services
24 de Sûreté de l'Etat et Services de sécurité militaire, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, c'est correct, mais j'ai interprété a déclaration qu'elle n'allait
26 pas nous défendre et qu'elle n'avait pas au souhait de nous voir là non
27 plus. Dragan et moi, on ne nous aimait pas beaucoup, surtout après
28 l'histoire de la vidéo de Petrocanac [sic], et même avant cela.
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1 Q. Merci.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D05111, est-ce que nous pouvons afficher cette
3 pièce ?
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Je crois que c'était une mise en garde amicale, peut-être que vous ne
6 l'interprétez pas ainsi. Mais voyons sur quelle base Sonja vous a dit de ne
7 pas venir.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] La traduction de ce document -- est-ce que l'on
9 pourrait nous afficher la traduction de ce document ? Oui, nous avons
10 attendu pendant à peu près une heure pour que cela soit téléchargé, mais
11 nous avons la traduction. On pourrait peut-être la mettre sur le
12 rétroprojecteur.
13 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Il s'agit du service de Sûreté de l'état. Ils vous avaient déjà repéré
16 dès le mois de janvier, et ils font rapport du fait qu'ils ont remarqué que
17 vous vous étiez rendu dans les endroits à problème et qu'ils ne concevaient
18 pas toutes vos activités comme des activités de journalisme, mais comme
19 vous l'avez dit, souvent on considérait les journalistes comme étant des
20 espions. Est-ce que vous pourriez regarder ce texte ?
21 R. Pourriez-vous mettre le texte en plus clair ? Il est difficile de lire.
22 Q. Je ne vous accuse pas. J'indique simplement ce sur quoi se fondait ma
23 fille lorsqu'elle vous a refusé l'accès. Ce n'est pas quelque chose qu'elle
24 a inventé.
25 R. [aucune interprétation]
26 Q. Quelqu'un pourrait vous féliciter pour votre travail, mais notre
27 service de sécurité de l'Etat était plutôt alarmé et nous disait que vos
28 activités devraient être suivies de près puisqu'elles avaient un impact sur
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1 la capacité qu'avait le pays de se défendre, comme d'ailleurs c'est dit
2 dans ce document.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais verser ce document.
4 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2088, Monsieur le
6 Président.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous voir la pièce 1D5122 ? Pardon,
8 05122. La traduction n'est pas encore disponible. Je voulais simplement
9 vous présenter le document.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. C'est également un document qui émane de la sécurité de l'Etat de Banja
12 Luka, alors que le document précédent émanait du chef de la sécurité de
13 l'Etat. Ils font rapport de la Krajina, disant que Robert Block, un
14 journaliste travaillant pour "The Independent," ainsi que Frank Westerman
15 et Adrian Brown, de la BBC, avaient traversé la frontière près de Gradiska
16 et étaient entrés en Republika Srpska afin de rendre visite au centre de
17 presse du 1er Corps. Après avoir visité le centre de presse et sur sa
18 recommandation, ils avaient contacté le président municipal à Banja Luka et
19 Louis Gentille, la responsable de la mission du HCR des Nations Unies, et
20 cetera. Est-ce qu'on pourrait passer à la page suivante ?
21 Est-ce qu'effectivement, vous avez traversé la frontière entre la Croatie
22 et la Republika Srpska le 23 janvier ?
23 R. Oui, oui. Moi, j'ai utilisé tous les trucs possibles et imaginables
24 pour traverser la frontière partout où c'était possible.
25 Q. Merci. Gentille, apparemment, a dit qu'on a mis de la pression sur la
26 délégation du HCR des Nations Unies, et dans ce contexte, on a démoli un
27 kiosque, un magasin privé.
28 Ensuite, on mentionne le fait que vous vous êtes rendu dans un centre de
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1 rassemblement des Serbes au Kosovo; est-ce que c'est correct ?
2 R. C'est possible. Je préférerais voir la traduction, mais pour autant que
3 je me souvienne, cela semble être correct.
4 Q. Merci. La dernière page, s'il vous plaît, dont je vais vous donner
5 lecture.
6 Le responsable du centre CSB à Banja Luka dit la chose
7 suivante :
8 "Le problème de l'entrée des journalistes en Republika Srpska en suivant
9 ces lignes décrites s'est produit depuis un certain temps, et nous vous en
10 avons informés à diverses occasions mais n'avons pas reçu d'information de
11 votre part. Nous tenons à souligner encore une fois que nous pensons que,
12 du fait d'une réaction au bon moment, ce type d'étrangers devraient être
13 contactés par le ministère concerné pour leur rappeler la position à
14 prendre."
15 Etes-vous d'accord qu'il y a eu une correspondance assez volumineuse sur
16 votre présence là-bas et que notre service de Sécurité a estimé que vous
17 étiez hyperactif, trop actif, surtout pour ce qui concernait les questions
18 militaires et que ce n'était pas l'évaluation du centre de presse ?
19 R. Il y avait une guerre en cours. Bien sûr, j'étais actif sur le terrain
20 dans la zone que je couvrais et, oui, effectivement, j'étais peut-être très
21 actif, hyperactif, et j'avais tendance à irriter les services de Sécurité
22 des différents gouvernements pour les articles que je rédigeais. C'est une
23 sorte de médaille d'honneur que j'aime afficher et porter.
24 Q. Merci.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ceci peut-il être versé au dossier en attendant
26 la traduction ?
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous allons le marquer pour
28 identification comme D2089. Mais, entre-temps, Monsieur Karadzic, il est
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1 temps que vous parveniez à votre conclusion.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaitais présenter un dernier document,
3 qui est le 1D05123, qui se rapporte au même sujet. Il porte la date du 10
4 février 1994.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Il semble que vous étiez observé d'une heure à l'autre, et ceci, sur
7 une base quotidienne ?
8 R. Oui. Je crois que vos services de Sécurité auraient failli à leur tâche
9 s'ils n'avaient pas fait cela.
10 Q. Merci.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous prendre la dernière page de ce
12 document où il est dit -- en fait, ceci ne doit pas être diffusé. Je dois
13 protéger la source.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. On se réfère ici à votre rencontre avec le lieutenant-colonel
16 Milutinovic qui s'était plaint du fait que l'on accordait l'accès à la
17 Republika Srpska à tous les journalistes sans aucune vérification et qu'on
18 les lui envoyait pour interview. Il s'est plaint que le comportement de
19 certaines des institutions impliquées n'était pas équitable et il a demandé
20 au gouvernement de la RS que le statut soit effectivement réexaminé à la
21 lumière de leurs droits. Il s'est également plaint du fait qu'il y avait
22 des rapports secrets publiés sur une base annuelle par cette institution et
23 que vous-même et Frank Westerman aviez pu vous procurer ces documents.
24 Etes-vous d'accord qu'effectivement, vous avez eu des contacts avec
25 l'institution dont vous pouvez voir l'abréviation au troisième paragraphe
26 de ce document ?
27 Pardon. Le quatrième paragraphe, deuxième ligne, vous voyez
28 l'abréviation.
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1 R. Je ne sais pas de qui il s'agit. Si l'implication est que j'étais en
2 contact avec des forces de renseignement de l'étranger et que j'agissais en
3 leur nom, c'est un non-sens absolu.
4 Q. [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer en
6 session à huis clos partiel ? Parce que sans traduction pour nous, c'est
7 très difficile à suivre.
8 [Audience à huis clos partiel]
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22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous sommes en audience publique.
24 Monsieur Karadzic.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Vous vous étiez familiarisé avec le travail du HCR et les objections
27 qu'il y avait eu de la part du lieutenant-colonel Milutinovic au sujet de
28 la présence des journalistes et du fait que le HCR et des journalistes
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1 étaient partiales. Nous -- est-ce que vous avez entendu ce type
2 d'objections ?
3 R. Oui, tout le temps. C'étaient des accusations faites quotidiennement
4 contre les journalistes étrangers, en particulier pour les journalistes
5 venant des Etats-Unis et du Royaume-Uni, ainsi qu'à l'encontre du HCR. On
6 disait qu'on était anti-Serbe ou pro-Croate, pro-Musulman. C'était quelque
7 chose qui est devenu une sorte de toile de fond du conflit. Moi, j'ai fait
8 mon travail et j'ai estimé que tant que j'avais des informations précises
9 et que je donnais la même attention de part et d'autre, je faisais mon
10 travail.
11 Q. Merci. Le dernier sujet, Monsieur Block. Vous avez pu observer qu'à
12 Bijeljina, il y avait Janja, puis ensuite il y avait toute une série de
13 villages musulmans qui n'ont pas été affectés, Bosanski Kobas également.
14 Est-ce que vous êtes d'accord ?
15 R. Il y a eu des moments où on a vu qu'effectivement certains villages
16 étaient -- qui existaient, on les autorisait à rester en vie, puis ensuite
17 on détruisait la mosquée, puis ça entraînait la fuite des gens. Mais c'est
18 vrai qu'il y avait des zones où des Musulmans vivaient. Ils étaient
19 nerveux. On pouvait comprendre le pourquoi d'ailleurs, mais oui
20 effectivement.
21 Q. Saviez-vous qu'il y avait des douzaines de villages qui sont restés
22 sans avoir été touchés et qu'ils ont vécu en paix jusqu'à la fin de la
23 guerre ? Mais d'autre part, est-ce que vous savez s'il y a un seul village
24 serbe qui soit resté inaffecté jusqu'en septembre 1995 ?
25 R. Je ne sais pas la réponse. Je sais qu'il y avait beaucoup de villages
26 où il y avait des Musulmans, et on ne savait peut-être pas quel était
27 l'état de la population à la fin de la guerre. Mais du côté des villages
28 serbes, du côté musulman, il y avait des Serbes dans les villes qui étaient
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1 sous le contrôle de la Bosnie. Ils ne se sentaient peut-être pas très à
2 l'aise, un peu comme les Musulmans dans les autres villages.
3 Alors je ne sais pas. Dans la région qui entourait Srebrenica, les villages
4 serbes ont été nettoyés, mais c'était une situation qui était extrêmement
5 confuse, et il n'était pas toujours clair, il n'était pas facile de voir
6 comment les choses avaient évoluées et à quel moment. C'est vrai qu'il y
7 avait des moments où on nous a montré des villages, et souvent quand on
8 nous montrait ces villages, on avait le sentiment que c'était de la
9 propagande. Mais c'est vrai qu'il y avait des exceptions à la rège de part
10 et d'autre, pour autant que je sache.
11 Q. Merci, Monsieur Block. Je n'ai plus de questions à vous poser.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons marquer le dernier document
13 pour identification.
14 Monsieur Mitchell, avez-vous des questions encore à poser pour le contre-
15 interrogatoire [comme interprété] ?
16 M. MITCHELL : [aucune interprétation]
17 Nouvel interrogatoire par M. Mitchell :
18 Q. [interprétation] Monsieur Block, à la page 52, M. Karadzic vous a
19 demandé pour que Peter Arnett aille à Zepa et suive les événements. Puis
20 ensuite, à la page 60, il vous a encore posé des questions au sujet des
21 restrictions militaires imposées aux journalistes et civils et si les
22 autorités civiles avaient été à même d'y faire face, alors j'ai quelques
23 questions à poser sur ce sujet des restrictions au mouvement des
24 journalistes.
25 M. MITCHELL : [interprétation] Le premier document que je vais prendre
26 c'est le document 65 ter 1905.
27 Q. Il s'agit d'un ordre de l'état-major VRS datant du 13 juillet 1995
28 signé par le général Ratko Mladic, et je voudrais me concentrer sur les
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1 paragraphes 4 et 5, où l'on dit :
2 "Au niveau des opérations de combat dans les zones de Srebrenica, empêcher
3 l'entrée de tout journaliste, sauf les journalistes de l'état-major VRS."
4 Ensuite, le paragraphe 5 :
5 "Interdire et empêcher le fait que des informations, des déclarations
6 soient faites aux médias s'agissant du déroulement de la situation et des
7 résultats des opérations de combat dans cette zone et des activités en
8 général dans ce domaine, en particulier pour ce qui est des prisonniers de
9 guerre, de l'évacuation des civils et des personnes ayant fui," et cetera.
10 Ma question est très simple. Etiez-vous conscient en juillet 1995 que le
11 général Mladic avait donné l'ordre clair qu'il ne fallait pas autoriser
12 l'accès aux journalistes à la zone de Srebrenica ?
13 R. Je n'en étais pas conscient, mais il était clair qu'il n'y avait pas de
14 journalistes étrangers. Donc on peut supposer que ceci était la suite d'un
15 ordre qui avait été donné par quelqu'un qui avait une certaine autorité.
16 Q. Ensuite à la page 75, M. Karadzic vous a donné lecture d'un paragraphe
17 au sujet de Cicic et il a dit que :
18 "Peu de journalistes avaient eu l'autorisation d'aller à Pale après la
19 conquête de Srebrenica par les Serbes, ont entendu qu'ils ne pouvaient que
20 prendre la route par Visegrad, or il est très difficile d'atteindre
21 l'objectif en prenant cette route."
22 Alors je voudrais vous présenter un document qui montre les mouvements de
23 journalistes pour aller à Pale le 16 juillet.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez verser cette
25 pièce au dossier, Monsieur Mitchell ?
26 M. MITCHELL : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson.
28 M. ROBINSON : [interprétation] Le témoin n'a rien confirmé quant au
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1 document, donc nous faisons objection.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il n'a pas confirmé dans une
3 certaine mesure ? Il a dit qu'il n'y avait pas présence de journalistes
4 étrangers, donc est-ce que ce n'était pas pertinent, dans ce contexte est-
5 ce qu'on ne peut pas considérer que c'est pertinent ?
6 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est pertinent, certes. Mais quant à
7 savoir si c'est un ordre de l'état-major VRS qui avait empêché la venue des
8 journalistes, il a dit qu'il ne le savait pas lui-même, donc c'est pour
9 cela que je trouve que ce document n'est pas pertinent.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous ne remettez pas en question
11 l'authenticité de ce document.
12 M. ROBINSON : [interprétation] En effet, c'est correct.
13 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
14 M. MITCHELL : [interprétation] Je crois que c'est suffisamment fondé. Le
15 témoin a effectivement témoigné qu'il y avait une interdiction et qu'il
16 peut dire que cette interdiction avait donné ces effets, donc je crois que
17 cela donne une base suffisante pour que cette pièce soit versée au dossier.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous sommes d'accord avec vous, Monsieur
20 Mitchell. Cette pièce sera versée au dossier.
21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Comme pièce P4407.
22 M. MITCHELL : [interprétation]
23 Q. Monsieur Block, pensons à cette déclaration de Dragan Cicic disait que
24 très peu de journalistes avaient le droit et on leur disait explicitement
25 qu'ils ne pouvaient prendre que la route par le biais de Visegrad, je
26 voudrais vous montrer le document 65 ter 7981.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Mitchell. Pourrait-il
28 également nous montrer le paragraphe 2 où la route à suivre est mentionnée
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1 et c'était l'armée qui avait défini cette itinéraire par Visegrad ?
2 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
3 M. MITCHELL : [interprétation] Nous sommes sur le point d'avoir le texte
4 qui donne effectivement l'itinéraire.
5 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
6 M. MITCHELL : [interprétation]
7 Q. Vous pouvez le voir ici. C'est un autre document de l'état-major du VRS
8 daté du 16 juillet, qui dit et qui est envoyé au commandant de la 1ère
9 Brigade d'Infanterie légère et le Corps de la Drina.
10 Avant de vous poser une question, Monsieur Block, est-ce que vous savez où
11 se trouve Dobrun ?
12 R. [aucune interprétation]
13 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire où est situé Dobrun ? Il faudrait --
14 R. Il faudrait me montrer une carte, mais Dobrun se trouvait au milieu --
15 Q. Est-ce que c'était le site dont parlait Dragan Cicic, nous pouvons vous
16 montrer une carte si cela vous aide.
17 R. [aucune interprétation]
18 M. MITCHELL : [interprétation] On pourrait prendre le 65 ter 23519.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit d'une interprétation erronée. Ce
20 n'est pas le même itinéraire, et si c'était l'itinéraire le plus court pour
21 aller à Pale, pas pour aller à Srebrenica.
22 M. MITCHELL : [interprétation] Peut-être que je peux éviter la carte si
23 effectivement M. Karadzic accepte que Dobrun est le croisement des routes
24 pour Visegrad et --
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, en effet, Monsieur le Juge, c'était la
26 route la plus courte pour aller à Pale et ça n'avait rien à voir avec
27 Srebrenica. J'ai simplement autorisé CNN à aller à Pale.
28 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
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1 M. MITCHELL : [interprétation] Je vais continuer, Monsieur le Président.
2 Q. Vous voyez dans le premier paragraphe, Monsieur Block, on nous dit que
3 :
4 "Conformément à un ordre oral du président de la RS la VRS a approuvé
5 le déplacement d'une équipe de journalistes des stations suivantes, CNN,
6 neuf membres, et David Paradine télévision, (sept membres) sur l'itinéraire
7 Dobrun-Pale, en date --"
8 Alors c'est une erreur de traduction, ça doit être le 17 juillet 1995
9 et non pas le 15 juillet 1995.
10 En bas on voit : `
11 "Il n'est pas autorisé d'arrêter, d'empêcher le fait de filmer les
12 équipements militaires et le fait de prendre des dépositions des membres de
13 l'armée. Donc ceci est interdit pendant qu'on -- il est interdit de
14 s'arrêter et de filmer."
15 Est-ce que, Monsieur Block, vous pouvez confirmer qu'il était usuel que M.
16 Karadzic soit personnellement impliqué dans l'approbation des déplacements
17 des journalistes et l'itinéraire que ces journalistes avaient le droit de
18 prendre ?
19 R. Je n'ai pas d'expérience, je ne le savais pas, je n'en étais pas
20 conscient. Mais quiconque en position de pouvoir avait ces journalistes
21 favoris et donc ils leur donnaient certaines autorisations en fonction de
22 ce qui leur convenait, mais à ce moment-là, je n'étais pas informé de cela
23 et je ne me souviens pas d'un précédent dans ce sens moi-même.
24 Q. Monsieur Block, je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez retiré votre
26 question, à savoir si cette route Dobrun-Pale correspond à ce qu'a dit M.
27 Cicic ?
28 M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que M.
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1 Karadzic était d'accord pour dire qu'il s'agissait de la même route. Je
2 peux éviter la carte si M. Karadzic confirme qu'il s'agit de la route qui
3 passe par Dobrun en croisement à Visegrad. Il a dit oui --
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas, en fait, s'il était
5 d'accord avec vous, parce que nous avons parlé de l'itinéraire dont parlait
6 M. Cicic. Je ne sais pas s'il s'agit de la même chose.
7 M. MITCHELL : [interprétation] Peut-être que j'ai mal compris, mais, en
8 tout cas, ce que j'ai compris, Monsieur le Président, que le croisement à
9 Dobrun -- ou plutôt, à Visegrad. On peut afficher une carte pour le
10 confirmer, à moins que M. Karadzic soit d'accord.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux dire que je suis d'accord c'était le
12 chemin le plus court entre la Serbie et Pale, mais ceci n'avait rien à voir
13 avec Srebrenica et Bratunac. Il y avait d'autres endroits où on pouvait
14 passer la frontière Skelani, Ljubovija, et Zvornik. Si on devait se rendre
15 à Pale, il fallait passer par Visegrad, ce qui n'avait rien à voir avec
16 Srebrenica. C'est tout ce que j'avais à dire.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors nous allons nous en tenir à cela.
18 M. MITCHELL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Dans ce cas, ceci met un terme à
20 votre déposition, à moins que mes collègues n'aient des questions à vous
21 poser.
22 Oui, Maître Robinson.
23 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite évoquer
24 la question de ses notes, et je souhaite que vous m'entendiez en son
25 absence, je ne sais pas si vous souhaitez que je le fasse par écrit et que
26 vous puissiez rendre une ordonnance par la suite, ou est-ce que -- tant
27 qu'il est encore ici.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous avons besoin de lui
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1 demander de rester ?
2 M. ROBINSON : [interprétation] Je pense que c'est une bonne idée parce que
3 je vais lui demander de remettre ces notes, donc il serait plus simple s'il
4 reste et vous pourriez le lui demander.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A-t-il confirmé avoir rédigé des notes ?
6 M. ROBINSON : [aucune interprétation]
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il parlait de l'interview de Pirocanac.
8 Ecoutez, je ne pense pas avoir rédigé les notes parce que je ne souhaite
9 pas être difficile parce qu'il a eu cette interview.
10 M. ROBINSON : [interprétation] Je souhaite que M. Block regarde ses notes
11 qui correspondent à cette époque-là, et s'il découvre des notes qui
12 évoquent ses contacts du 18 juillet avec M. Pirocanac, je souhaite qu'il en
13 avertisse les Juges de la Chambre, et s'il dit que ceci n'existe pas je
14 souhaite qu'il le notifie aux Juges de la Chambre et nous pouvons à ce
15 moment-là procéder ainsi si c'est ce qu'il préfère.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous des observations à faire,
18 Monsieur Mitchell, sur ce point ?
19 M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, en quelques
20 mots. Je ne pense pas que la question des notes change de quelque manière
21 que ce soit la décision que vous avez rendue et concernant la déposition de
22 M. Block sur cette conversation qu'il a eue avec M. Petrovic. Bien
23 évidemment, M. Karadzic cherche à établir que son nom n'apparaît pas dans
24 ces notes, pour autant que ces notes existent, même si c'était le cas, je
25 ferais valoir ou je fais valoir que ceci ne minimise en rien l'exactitude
26 ses souvenirs, à savoir de ce que M. Pirocanac a dit. Donc même si des
27 notes existent et même si ces notes montrent ce que le Dr Karadzic souhaite
28 que ces notes montrent, ceci ne minimise en rien la recevabilité de la
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1 déposition de M. Block. Donc dans ces circonstances-là, je fais valoir que
2 ceci ne peut pas être dans l'intérêt de la justice que d'utiliser le
3 pouvoir coercitif des Juges de la Chambre aux fins qu'il remette ses notes
4 sur un entretien et conversation sur lequel M. Block a parlé dans sa
5 déposition et qui ne pourra pas être minimisé quand bien même ses notes
6 existes et même s'il y a toute absence de références à cela dans ces notes.
7 Que le dernier point que je souhaite évoquer, c'est celui-ci : au mieux, si
8 M. Block retrouve ces notes et qu'il n'y a pas de référence au Dr Karadzic,
9 c'est une question qui porterait sur le poids à accorder à sa déposition
10 orale et de façon tout à fait secondaire, mais ceci ne constitue pas en
11 fait une question de recevabilité de sa déposition orale, comme le laissait
12 entendre Me Robinson un peu plus tôt.
13 M. ROBINSON : [interprétation] Puis-je répondre ? Je souhaite -- je ne
14 parle pas du tout de la question de la recevabilité. Je souhaite simplement
15 qu'il y ait une ordonnance rendue pour qu'il remette ses notes, en fait. Je
16 crois qu'il faut être très vigilants. Ceci concerne l'élément de mens rea
17 et la responsabilité du Dr Karadzic pour ce crime. Si ce que dit ce témoin
18 est quelque chose sur lequel les Juges se fondent, ceci pourrait avoir des
19 conséquences très lourdes sur la décision prise par les Juges de la Chambre
20 si vous retenez sa déposition. Très peu d'éléments de preuve sur la
21 participation personnelle du Dr Karadzic lorsqu'il s'agit de Srebrenica,
22 lorsque nous entendons des éléments de preuve ainsi, je crois qu'il faut
23 rendre cette décision. Il faut être tout à fait sûr, il faut que ce soit
24 tout à fait exact. Il s'agit d'éléments de preuve tout à fait contestables.
25 En fait, il s'agit de ouï-dire au troisième degré. Il faut tout vérifier.
26 Il faut vérifier si, oui ou non, il s'agit d'éléments de preuve sur
27 lesquels vous devriez vous fonder lorsque vous allez rendre votre jugement.
28 Peut-être que cela n'arrange personne que M. Block parcoure toutes ses
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1 notes pour voir s'il existe quelque chose qui correspond à cette
2 conversation, mais c'est le moins qu'il puisse faire pour que justice soit
3 rendue, et je pense que c'est ce que vous pouvez faire pour le moins si
4 cela s'avère nécessaire, et vous pouvez rendre une ordonnance à cet effet.
5 Merci.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions, Monsieur
8 Block, puis-je vous demander si vous êtes disposé à coopérer avec la
9 Défense. Est-ce que vous êtes prêt à vous pencher sur la question à savoir
10 si de telles notes existent ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, du point de vue d'un journaliste et de
12 ma profession, c'est une pente glissante sur laquelle vous me demandez
13 d'aller. Comme nous pensons lorsqu'on cite des sources, c'est quelque chose
14 que l'on ne peut pas faire, et dans une certaine mesure, j'estime qu'il
15 s'agit de la même chose ici. Un précédent, en fait, qui porterait sur des
16 notes d'un journaliste, des notes qui sont pour le journaliste en question,
17 qui peut-être donneront lieu à des observations qui sont pertinentes à
18 l'époque. Mais c'est l'article lui-même qui est compilé, qui est rédigé et
19 qui reste et qui, à terme, correspond à ce qui sera utilisé après, et c'est
20 la raison pour laquelle je suis ici aujourd'hui, je suis au service de cet
21 article.
22 Dans la mesure où l'on parle des souvenirs que j'ai des conversations avec
23 Zoran Petrovic à ces dates-là, premièrement, je ne pense pas avoir pris des
24 notes ces jours-là car il n'y avait rien sur lequel prendre des notes. Nous
25 souhaitions savoir ce qui était advenu du film, s'il existait des copies du
26 film et ce qu'il avait fait. Et comme j'ai dit dans ma déposition, ce n'est
27 pas quelque chose sur lequel j'ai dirigé des ressources dont nous
28 disposons, nous les journalistes.
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1 Je ne sais pas quelle est la définition d'outrage au tribunal ici dans
2 cette institution, mais pour moi, il me serait très difficile. Car je n'ai
3 aucun mal à parcourir mes notes pour essayer de me souvenir d'un certain
4 nombre de choses avant de venir déposer, mais si on me contraint à regarder
5 mes notes pour chercher quelque chose qui va au-delà de la matière qui est
6 celle sur laquelle ont porté mes recherches lorsque j'étais journaliste,
7 comme je l'ai dit dans l'entretien que j'ai eu avec la Défense, il
8 s'agissant vraiment de ouï-dire, et je ne peux pas ne pas être d'accord
9 avec cela.
10 Donc je ne vois pas quel en est l'intérêt, et si on me demande de le faire,
11 je crois que ceci peut compromettre ce que je suis en train d'essayer de
12 faire aujourd'hui, à savoir de trouver le moyen dont des correspondants
13 étrangers, en particulier des correspondants américains, peuvent se sentir
14 à l'aise dans le cadre d'une coopération avec une institution comme ce
15 Tribunal.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Les Juges de la
17 Chambre vont se pencher sur la question et nous y reviendrons.
18 Je vous remercie encore une fois -- je vous remercie d'être venu à La Haye
19 pour venir déposer. C'est quelque chose pour lequel nous sommes
20 reconnaissants. Et nous vous souhaitons un bon voyage de retour.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
22 [Le témoin se retire]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.
24 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, avant de faire entrer
25 le témoin suivant, je souhaite soulever une autre question, si vous me le
26 permettez. C'est le Dr Karadzic qui m'a demandé de présenter cet élément
27 aux Juges de la Chambre. C'est important pour lui et pour les membres de
28 l'équipe de sa défense. Un des témoins à charge, Mira Mihajlovic, qui a
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1 témoigné il y a quelques mois, qui est à Sarajevo, a fait l'objet
2 d'articles de presse, et la presse à Sarajevo a demandé à ce qu'elle soit
3 démise du poste qu'elle occupe actuellement parce que son témoignage était
4 en faveur du Dr Karadzic concernant sa personnalité. Le Dr Karadzic est
5 inquiet, compte tenu du fait qu'on souhaite citer un certain nombre de
6 témoins à la barre. Et pour ce qui est de la thèse de la Défense, ceci peut
7 avoir un effet tout à fait négatif ou peut refroidir les éventuels témoins
8 disposés à venir témoigner pour le Dr Karadzic.
9 Donc je ne demande pas aux Juges de la Chambre de faire quoi que ce soit à
10 ce stade. Je souhaite simplement apporter ceci à votre attention et, à
11 l'avenir, si c'est quelque chose qui se présente et qui devient un
12 problème, peut-être demander aux Juges de la Chambre d'agir ou de faire
13 quelque chose, parce que le Dr Karadzic m'a demandé de porter ceci à votre
14 attention, et c'est ce que je fais. Merci.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Robinson.
16 Bonjour, Madame West. Donc votre témoin à venir est M. Lesic.
17 Mme WEST : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que le témoin est en route.
19 Mme WEST : [interprétation] Je crois que oui.
20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour à vous.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez prononcer la déclaration
24 solennelle, je vous prie.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Que Dieu me vienne en aide.
27 LE TÉMOIN : MILAN LESIC [Assermenté]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
2 C'est à vous, Madame West.
3 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Interrogatoire principal par Mme West :
5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
6 R. Bonjour à vous.
7 Q. Comment vous appelez-vous ?
8 R. Milan Lesic.
9 Q. Où êtes-vous né ?
10 R. A Cazin, en Bosnie-Herzégovine.
11 Q. Où vivez-vous actuellement ?
12 R. Au Canada.
13 Q. Quand vous êtes-vous installé au Canada ?
14 R. En 1958.
15 Q. Pourquoi vous êtes-vous installé au Canada ?
16 R. Je me suis enfui de l'ex-Yougoslavie et je suis allé en Autriche, et
17 après l'Autriche, j'ai émigré au Canada.
18 Q. Y avait-il une raison pour laquelle vous êtes parti ?
19 R. Oui. J'étais jeune et je n'aimais pas le régime communiste.
20 Q. Que faites-vous dans la vie ?
21 R. Je suis promoteur immobilier, et je suis indépendant.
22 Q. En 1993, étiez-vous un membre fondateur d'une organisation caritative
23 canadienne, l'Organisation publique serbe humanitaire ?
24 R. Oui, tout à fait.
25 Q. Pourquoi avez-vous fait cela ?
26 R. La guerre avait commencé en 1991-1992, donc nous nous sommes rassemblés
27 près de Toronto --
28 L'INTERPRÈTE : [hors micro]
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi. En 1992, nous nous sommes
2 réunis et nous avons parlé de ce qui arrivait dans notre ancien pays. Nous
3 nous sommes réunis à nouveau et nous avons rempli des formulaires, et nous
4 avons été immatriculés en tant qu'organisation caritative humanitaire.
5 Q. Est-ce que vous souhaitiez lever des fonds ?
6 R. Oui, nous souhaitions lever des fonds pour les nécessités, pour pouvoir
7 remettre certaines choses à la Croix-Rouge et aux personnes qui en avaient
8 besoin.
9 Q. Outre la Croix-Rouge, qui étaient les destinataires de votre projet ?
10 R. Il y avait les délégués de notre comité au Canada, qui nous avaient
11 remis une lettre, moi, je me suis rendu à plusieurs reprises, et nous avons
12 pris des échantillons dans nos valises, nous avons pris de l'argent et nous
13 avons aidé les nécessiteux, et une fois arrivés sur place, il nous a été
14 suggéré l'idée suivante : à qui donner cette aide. Donc il y avait deux ou
15 trois destinataires à certains moments, des hôpitaux, et cetera.
16 Q. Alors repartons un petit peu en arrière. Quels étaient les
17 destinataires de cette aide, quelle était leur appartenance
18 ethnique ?
19 R. Vous voulez parler d'appartenance ethnique ? Vous voulez dire --
20 Q. Etaient-ce des Serbes, des Musulmans ou des Croates ?
21 R. Chacun aidait son propre groupe ethnique. Les gens s'aidaient.
22 Q. Etes-vous Serbe, Monsieur ?
23 R. Oui, effectivement.
24 Q. Alors, dans le cadre de votre participation à cette organisation, vous
25 êtes-vous rendu dans la région à plusieurs reprises, à commencer par
26 l'année 1992 ?
27 R. Oui, effectivement. Je m'y suis rendu dix fois environ entre 1992 et
28 1995.
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1 Q. Avant votre premier séjour en 1992, aviez-vous pris des dispositions
2 préalables pour rencontrer quelqu'un par rapport à l'aide que vous
3 souhaitiez distribuer ?
4 R. Non. Nous sommes simplement allés sur place, nous sommes allés à
5 Belgrade et nous sommes arrivés dans les maisons des Musulmans de Bosnie.
6 Nous avons rencontré des gens et nous avons rencontré l'évêque, et nous
7 avons été transportés par hélicoptère jusqu'à Pale.
8 Q. Retournons en arrière. Votre premier voyage était en décembre 1992 ?
9 R. Oui, tout à fait.
10 Q. Où vous êtes-vous rendu en avion ?
11 R. Nous sommes allés de Toronto à Sofia, me semble-t-il, et de Sofia, on
12 est venu nous chercher en voiture, et nous sommes allés jusqu'à Belgrade.
13 Q. Avec qui êtes-vous parti ?
14 R. Ned Krajisnik.
15 Q. Une fois arrivés à Belgrade, où vous êtes-vous rendus en premier lieu ?
16 R. A un endroit qui s'appelait la maison bosniaque, Bosanska Vila. Là,
17 nous avons rencontré un évêque de Chicago que nous connaissions, donc nous
18 avons voyagé avec l'évêque jusqu'à Pale.
19 Q. Comment êtes-vous allé de Belgrade à Pale ?
20 R. Par hélicoptère, un hélicoptère de l'armée.
21 Q. Qui avait organisé cela ?
22 R. Je crois que c'était Peter Salapura.
23 Q. Qu'est-ce qui vous a fait croire cela ?
24 R. J'ai appris par la suite que quelqu'un avait dû prendre les
25 dispositions nécessaires, et l'évêque nous a accompagnés aussi.
26 Q. Vous dites y être allé au moins dix fois ?
27 R. [aucune interprétation]
28 Q. Lorsque vous y êtes allé avez-vous pris un caméscope et une caméra
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1 également ?
2 R. Oui, j'avais mon appareil photo Sony. Je voulais prendre des photos et
3 faire des films lorsque nous distribuions l'aide que nous avions de notre
4 organisation humanitaire de Toronto de façon à ce que je puisse revenir à
5 Toronto et montrer au groupe que l'argent avait bien atteint les
6 destinataires qui avaient été prévus.
7 Q. Donc vous avez utilisé des images, des films et les appareils photo
8 pour montrer qui vous avez, en réalité, donné l'argent ?
9 R. Oui.
10 Q. Bien. Donc vous avez été interviewé par le bureau du Procureur en août
11 2009; est-ce que vous vous souvenez de cela ?
12 R. Oui.
13 Q. Au cours de l'entretien, avez-vous remis quatre bandes vidéo et
14 plusieurs photos au bureau du Procureur ?
15 R. J'ai reçu une ordonnance. C'est le tribunal du Canada qui m'a demandé
16 d'apporter toutes les bandes, toutes les images, tous mes passeports et
17 tout ce que j'avais depuis 1992 jusqu'aujourd'hui.
18 Q. C'est ce que vous avez fait ?
19 R. Oui.
20 Q. Donc ceci comprenait quatre bandes vidéo ?
21 R. Oui.
22 Q. Bien. Alors revenons en décembre 1992, lorsque vous êtes montés à bord
23 de l'hélicoptère pour vous rendre à Pale. Lorsque vous êtes arrivés à Pale,
24 où vous êtes-vous rendus ?
25 R. Oui, nous sommes allés à l'assemblée -- nous avons pris un café et nous
26 avons attendu que l'assemblée se réunisse. Nous avons attendu que l'évêque
27 nous présente et nous avons apporté l'argent destiné au gouvernement au
28 pays.
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1 Q. Bien.
2 Mme WEST : [interprétation] Puis-je avoir le P01364 ?
3 Q. Vous dites avoir attendu la séance de l'assemblée. Avez-vous assisté à
4 une séance de l'assemblée ?
5 R. Tout à fait. J'étais assis derrière, Ned et moi-même.
6 Q. Nous allons vous montrer un procès-verbal d'une séance de l'assemblée
7 qui est daté du 17 décembre 1992.
8 Mme WEST : [interprétation] Puis-je avoir la page 77 de l'anglais et la
9 page correspondante, 71, en B/C/S ? Merci.
10 Q. Monsieur Lesic, c'est quelque chose que je vous ai montré l'autre jour,
11 donc je sais que vous connaissez ce document.
12 R. [aucune interprétation]
13 Q. Le paragraphe du milieu vers la fin, on voit Ned Krajisnik qui prend la
14 parole. Veuillez nous dire qui est Ned ?
15 R. Ned Krajisnik est -- que je connais depuis 1972. Il vit à Kitchener, et
16 moi, j'habite dans une autre ville, à Guelph.
17 Q. C'est quelque chose [comme interprété] qui vous a aidé à créer cette
18 organisation ?
19 R. C'était le président du comité, et il y en avait un autre, qui était
20 Ranko Rakanovic. Moi j'étais le trésorier adjoint depuis le début, et après
21 j'ai été trésorier.
22 Q. Bien. Donc, ici, nous voyons M. Krajisnik qui s'adresse à l'assemblée.
23 Nous n'allons pas lire l'intégralité du paragraphe, mais il parle de votre
24 organisation et de la manière dont vous l'avez créée. Au milieu du
25 paragraphe, il dit :
26 "Mon collègue ici, Milan Lesic, est le très révérant métropolite s'est
27 adressé à nous et il a donné beaucoup de son argent, il est très méritant,
28 et ensuite, nous avons décidé de venir ici pour aider dans la mesure du
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1 possible. Milan Lesic a remis 15 000 dollars ici pour les médias et la
2 propagande, parce que je crois que nous avons perdu la guerre dans cette
3 région, et nos ennemis ont beaucoup réussi grâce à cela -- ont réussi dans
4 ce sens."
5 Donc vous avez assisté à cette allocution -- à ce discours ?
6 R. Oui.
7 Q. Lorsque votre ami, Ned, parle des médias de la propagande, pourriez-
8 vous nous parler des inquiétudes qu'il y avait à l'égard des médias à ce
9 moment-là ?
10 R. Oui. Alors nous tous Serbes au Canada, vu que nous étions enfermés par
11 les médias et la publicité qu'ils faisaient, les médias n'étaient pas de
12 notre côté, donc nous avons estimé que nous avions besoin d'aide et
13 d'appui, et c'est ce que nous avons fait. Nous souhaitions que les médias
14 soient entre les deux parties quelque part.
15 Q. Votre inquiétude à l'égard des médias, est-ce quelque chose que vous
16 avez abordée avec les gens que vous avez rencontrés à Pale ?
17 R. Oui, je leur en ai parlé et ils étaient d'accord avec moi à l'époque.
18 Nous étions d'accord.
19 Q. Donc cette inquiétude que vous aviez était partagée par les personnes
20 que vous avez rencontrées à Pale ?
21 R. Oui.
22 Q. Cette inquiétude était la suivante : vous craigniez que les médias
23 étaient anti-serbes ?
24 R. C'est ce que nous pensions, tout allait contre les Serbes.
25 Q. Avez-vous abordé cette question-là à cette date-là, ou à d'autres dates
26 avec M. Mladic ou M. Karadzic à propos de cette question-ci ?
27 R. Alors après avoir remis notre aide que nous avions apportée avec nous,
28 nous nous sommes rendus dans une pièce et nous avons pris un verre, nous
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1 avons parlé, nous avons parlé des médias, comment pouvons-nous aider, et il
2 y avait un représentant des médias, à l'époque, qui était là. Le président
3 Karadzic a dit : Oui, nous devons améliorer cela. Il y avait le général
4 Mladic, et nous étions d'accord avec eux deux. Il y avait Biljana Plavsic
5 qui était là aussi.
6 Q. Monsieur, au Canada, quelle était votre source d'informations sur la
7 région ?
8 R. Lorsque nous regardions CNN, il y avait toujours une femme, Amanpour,
9 qui était contre les Serbes : Les Serbes ont fait ceci, les Serbes ont fait
10 cela. Les Serbes avaient tout fait. Je ne pouvais pas le croire, je ne
11 pouvais pas croire que nous puissions être dépeints de cette manière-là.
12 Donc nous sommes allés rencontrer les représentants officiels, le général
13 Mladic et le Dr Karadzic, Krajisnik, Momcilo Krajisnik, et nous sommes
14 allés les voir pour leur dire : Que se passe-t-il ? Il ne s'agit que de
15 mensonges ? Mais c'est comme ça.
16 Q. D'après ce que j'ai compris, une partie de vos sources, les médias,
17 provenait de CNN. Est-ce que vous receviez les reportages de stations dans
18 la région ?
19 R. Oui, mais c'était très court. Alors ce que j'ai fait personnellement
20 dans ma maison, nous avons installé une antenne parabolique en 1992, et
21 cette antenne nous permettait de recevoir toute l'actualité de la région,
22 et ceci nous a beaucoup aidés à savoir ce qui se passait dans la région.
23 Q. Je vous remercie, Monsieur.
24 Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je vais passer à un
25 autre sujet. Est-ce qu'il serait peut-être opportun de faire la pause ?
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lever l'audience.
27 Nous poursuivrons demain, Monsieur Lesic, à 9 heures. Dans
28 l'intervalle, il serait peut-être -- ou c'est peut-être quelque chose dont
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1 vous avez déjà entendu parler, vous n'êtes pas censé aborder votre
2 déposition avec quiconque.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, Monsieur.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. L'audience est levée.
5 --- L'audience est levée à 15 heures 01 et reprendra le mercredi 22 février
6 2012, à 9 heures 00.
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