Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 6 mars 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 30.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   Maître Robinson, souhaitez-vous intervenir ?

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je souhaiterais que le témoin

 10   prononce sa déclaration solennelle.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 12   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 13   LE TÉMOIN : DEAN MANNING [Assermenté]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Manning. Veuillez

 16   prendre place.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

 19   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, et bonjour.

 20   Interrogatoire principal par M. Mitchell :

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Manning.

 22   R.  Bonjour, Monsieur.

 23   Q.  Pouvez-vous décliner votre nom et prénom ?

 24   R.  Je m'appelle Dean Paul Manning, M-a-n-n-i-n-g.

 25   Q.  Quelle est votre profession à l'heure actuelle ?

 26   R.  Je fais partie de la police fédérale australienne. Je suis, à l'heure

 27   actuelle, officier de liaison, posté à Dubaï dans les Émirats arabes unis.

 28   Q.  Depuis combien de temps avez-vous fait partie de la police fédérale


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  1   australienne ?

  2   R.  C'est en 1983 que j'ai rallié les rangs de la police fédérale

  3   australienne. J'ai essentiellement en fait travaillé à Canberra ainsi

  4   qu'auprès des Nations Unies à Chypre. En 1998, j'ai travaillé ici, au

  5   Tribunal, pendant six ans, et j'ai également travaillé pour le programme

  6   des Nations Unies, "Pétrole contre nourriture," à New York, et j'ai repris

  7   donc mon service de la police en 2006.

  8   Q.  Pendant les six ans que vous étiez ici au Tribunal, vous étiez

  9   enquêteur au bureau du Procureur, n'est-ce pas ?

 10   R.  Pendant quatre ans, j'ai été enquêteur au sein de l'équipe de

 11   Srebrenica, et pendant deux ans, j'étais le chef d'équipe de l'équipe

 12   chargée des enquêtes en Croatie qui s'est essentiellement occupée de

 13   l'affaire Milosevic, ou du procès Milosevic.

 14   Q.  Pouvez-vous décrire vos fonctions et responsabilités pendant les quatre

 15   ans au cours desquels vous avez été enquêteur au sein de l'équipe de

 16   Srebrenica ?

 17   R.  J'étais donc enquêteur supérieur et je me suis, en fait, occupé de tous

 18   les aspects de l'enquête, qu'il s'agisse de la déposition des témoins, de

 19   l'interrogatoire de suspects, de témoins, de l'obtention et de la

 20   vérification d'éléments de preuve, mais essentiellement, en fait, j'ai

 21   assuré la liaison avec le projet chargé des exhumations et des autopsies

 22   pour Srebrenica.

 23   Cela se passait en Bosnie à l'époque, donc j'ai fait le lien, j'étais

 24   chargé des liens avec l'équipe chargée des autopsies et des exhumations,

 25   j'ai aidé les experts, je les ai aidés à préparer leurs rapports et lesdits

 26   rapports étaient ensuite présentés aux tribunaux, et j'ai résumé également

 27   le travail des équipes sur le terrain et présenter des moyens de preuve

 28   dans le cadre de plusieurs procès.


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  1   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire de façon un peu plus détaillée ce que

  2   vous avez fait exactement, donc vous avez assumé ce rôle, mais quels sites

  3   avez-vous visité, quels sont les objets que vous avez examinés ? Est-ce que

  4   vous pouvez évoquer cela ?

  5   R.  Madame, Messieurs les Juges, j'étais censé et je devais donc coordonner

  6   les activités des équipes d'enquête et de l'équipe chargée de l'autopsie et

  7   des exhumations. Ces équipes en fait étaient dirigées par des experts, des

  8   experts dans leur domaine, et donc j'ai fourni l'aide qui était nécessaire,

  9   ce qui signifiait que j'ai supervisé les exhumations et le travail

 10   également à la morgue.

 11   Donc je me suis rendu dans tous les sites qui ont lien avec Srebrenica,

 12   notamment je me suis rendu sur tous les lieux d'exécution, dans tous les --

 13   et je me suis rendu également sur le terrain où existaient les fosses

 14   communes, les charniers, ensuite il y a eu les exhumations. Je me suis

 15   également rendu où j'ai assisté ou participé à l'exhumation des 11

 16   charniers, et pendant une période de six ans, je me suis rendu donc

 17   régulièrement auprès de ces fosses communes, et je pense notamment, par

 18   exemple, la Commission de Bosnie chargée des Personnes portées disparues,

 19   qui exhumaient ces fosses communes.

 20   Mon rôle consistait également à examiner les éléments de preuve qui étaient

 21   obtenus. J'examinais tous les objets physiques qui ont été récupérés sur le

 22   terrain et dans les morgues. Il y avait des cartouches, des bandeaux, des

 23   liens, des papiers d'identité, ainsi que d'autres objets qui prouvaient non

 24   seulement qu'il y avait un lien avec l'identité des victimes mais un lien

 25   avec Srebrenica, avec ce qui s'était passé en 1995 avec tous ces meurtres

 26   et ces assassinats, des liens avec le Bataillon néerlandais, et puis j'ai

 27   également examiné des objets qui prouvaient non seulement l'identité des

 28   victimes mais également leur confession, qu'il s'agisse d'ailleurs de


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  1   Musulmans ou de religion musulmane.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont les catégories d'expert

  3   qui ont participé à ce processus et avec lesquels vous avez établi la

  4   liaison ?

  5   R.  L'équipe chargée des exhumations était, en général, dirigée par ce que

  6   l'on appelle en fait un anthropologue, avec une spécialité d'archéologie,

  7   et cette personne avait, dans son équipe, un certain nombre d'archéologues

  8   d'anthropologues, au niveau des différentes fosses communes. Il y a

  9   également des techniciens de la police, des photographes de la police dans

 10   la morgue. A la morgue, il y avait à nouveau des anthropologues, des

 11   dentistes médico-légaux, des radiologues, et pendant les enquêtes, nous

 12   avons également recruté des experts tels que des experts en balistique qui

 13   ont examiné les cartouches et les douilles récupérées dans les charniers

 14   primaire et secondaire. Nous avons pu donc établir les liens entre ces

 15   différents sites. J'ai également travaillé avec un expert chargé d'examiner

 16   la teneur de la terre et du sol qui examinait donc le sol dans les

 17   charniers et au niveau des différents lieux d'exécutions. Nous avions

 18   également des experts de l'ADN, des experts pour ce qui est des explosifs,

 19   ils ont examiné tout ce que nous avions récupéré dans les fosses communes

 20   ainsi ils ont comparé à ce que nous avons pu constater lors des autopsies.

 21   Il y avait également plusieurs équipes de médecins légistes qui ont examiné

 22   certains des lieux d'exécutions. Il y avait également un horloger qui a

 23   examiné les montres retrouvées sur certains corps dans les fosses communes.

 24   J'ai travaillé avec tous ces experts de concert avec eux. Je les ai aidés à

 25   obtenir non seulement le matériel et l'accès aux sites. Je les ai conduits

 26   vers ces sites. Je leur ai emmenés le matériel obtenu. Ils ont examiné les

 27   rapports d'expert et j'ai résumé ces rapports d'expert qui ont été

 28   présentés aux tribunaux.


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  1   Q.  Le programme médico-légal du TPY, lui, il a couru de 1996 à 2001,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   Q.  Combien de fosses communes ont été identifiées pendant cette période

  5   pour lesquelles on soupçonnait qu'il y avait un lien avec Srebrenica ?

  6   R.  Il y avait 43 fosses communes qui ont un lien direct avec Srebrenica et

  7   qui ont été constaté pendant cette partie de l'enquête, et je peux dire,

  8   par exemple, que -- bon, il y avait certaines fosses communes qui étaient

  9   composées de fosses communes secondaires, Glogova, est un exemple. Mais

 10   donc je dirais donc qu'il y avait 43 fosses communes en tout, et dans ce

 11   chiffre, je regroupe les fosses communes secondaires et les fosses communes

 12   primaires, mais bon ce système de numérotation est un tant soi peu

 13   arbitraire.

 14   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire combien de ces fosses communes ont

 15   été exhumées par le TPY ?

 16   R.  Nous avons exhumé toutes les fosses communes primaires, nous avons

 17   exhumé donc 13 fosses communes primaires, je pense qu'en tout nous avons

 18   exhumé 20 fosses communes, certaines avaient déjà été pillées, par exemple,

 19   la fosse commune de Cancari, par exemple --

 20   Q.  Qu'est-il advenu de ces fosses communes qui ont été identifiées et

 21   reconnues en tant que telles mais non exhumés par le TPY ?

 22   R.  En 2000, 2001, une décision a été prise. Il s'agissait en fait de

 23   transmettre la responsabilité des fosses communes non exhumées aux

 24   autorités de Bosnie et surtout à la Commission de Bosnie chargée des

 25   Personnes portées disparues. Le Tribunal ensuite leur a demandé de doter

 26   les corps des fosses, et il y a cet équipe qui a été supervisée par une

 27   commission, la Commission indépendante chargée des Personnes portées

 28   disparues, une commission internationale, j'entends, une commission, la


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  1   fameuse ICMP, qui a supervisé l'exhumation de ces fosses communes.

  2   Q.  [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez maintenant poursuivre.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Monsieur Manning, est-ce que, vous, vous avez supervisé ces exhumations

  6   qui ont été organisées par les autorités de Bosnie ?

  7   R.  Oui, tout à fait. En fait, c'est moi qui étais chargé de rédiger

  8   l'accord, l'accord permettant de mettre en œuvre le processus. C'est

  9   finalement le Procureur qui a donné son accord. Moi, j'étais présent lors

 10   de l'exhumation des fosses primaires Ravnica 1 et 2, il y avait donc

 11   également la Commission de Bosnie chargée des Personnes portées disparues,

 12   des représentants de l'ICMP une toute petite équipe du TPY. J'ai été

 13   également présent lors de l'exhumation de Cancari 11, et au cours des deux

 14   prochaines années, je vais également me rendre sur des sites dans la mesure

 15   où mes voyages me le permettent en Bosnie.

 16   Q.  Est-ce que vous savez, outre, en plus donc de ces fosses communes dont

 17   la responsabilité a été remise ou transmise aux autorités de Bosnie par le

 18   TPY. Savez-vous, disais-je, si les autorités en question ont localisé est

 19   exhumé d'autres fosses communes supplémentaires pour lesquelles on

 20   soupçonne qu'il y a un lien avec Srebrenica ?

 21   R.  Je sais, en fait, que la Commission de Bosnie et l'ICMP ont non

 22   seulement continué d'exhumer les fosses communes dont nous leur avons

 23   transmis la responsabilité mais ils en ont localisé d'autres qui ont un

 24   lien avec Srebrenica. Il y avait d'autres régions d'ailleurs, et je crois

 25   comprendre que le travail qu'ils ont effectué sur l'ADN a permis de

 26   déterminer qu'il y a des liens définitifs avec les personnes portées

 27   disparues à Srebrenica.

 28   Q.  Vous avez écrit trois rapports en 2000, 2001 et 2003, et ces rapports


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  1   résument les conclusions et constatations des différents experts recrutés

  2   par le bureau du Procureur; est-ce exact ?

  3   R.  Oui, c'est exact. Mais, Madame, Messieurs les Juges, dans ce rapport,

  4   dans ces résumés, je fais également référence à certains détails retenus

  5   par moi. Il s'agit donc du résultat de mes propres examens, examens des

  6   objets et des sites. J'ai également fait -- établi donc ou fait le résumé

  7   des différents rapports qui avaient été rédigés par les experts et qui

  8   étaient assez limités à une période de temps. Donc j'ai établi le lien

  9   entre ces rapports d'expert, et ce, depuis la première exhumation, et ce,

 10   jusqu'en 2001.

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Alors voilà les numéros 65 ter 2478, 2479,

 12   3937 et je souhaiterais demander le versement au dossier maintenant si cela

 13   m'y est autorisé.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que vous n'avez pas

 15   d'objection, Maître Robinson.

 16   M. ROBINSON : [interprétation] Si, Monsieur le Président, j'ai une

 17   objection justement.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons vous entendre, Maître

 19   Robinson.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je pense en fait que

 21   nous avons entendu --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, excusez-moi, mais est-ce qu'il

 23   s'agit d'un rapport d'expert ?

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, il s'agit en fait -- enfin on vient de

 25   dire qu'il s'agissait de rapport d'expert.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez.

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Ce que nous avançons en fait c'est que

 28   verser au dossier différents passages d'un rapport d'expert intégral


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  1   présenté par le truchement d'un autre témoin est une violation flagrante

  2   des dispositions de l'article 94 bis. Vous savez déjà en fait décidé que

  3   l'article 94 bis est une Loi spéciale eu égard au rapport. Vous avez décidé

  4   cela. Je pense que le même principe devrait être retenu.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en pensez-vous, Monsieur Mitchell ?

  6   M. MITCHELL : [interprétation] Dans un premier temps, je vous dirais que

  7   nous n'allons pas demander le versement au dossier de rapport d'expert par

  8   le truchement de M. Manning. Ce n'est pas du tout de cela dont il s'agit.

  9   M. Manning vient à utiliser deux catégories de rapports d'expert comme

 10   sources d'information pour son rapport. Il -- vous avez, dans un premier

 11   temps, les rapports des archéologues, des anthropologues et des médecins

 12   qui ont déjà témoigné en l'espèce, ici, et ces rapports ont déjà été versés

 13   au dossier.

 14   Puis, deuxièmement, il y a une deuxième catégorie de rapports

 15   effectivement, utilisés par M. Manning, et certaines de ces conclusions de

 16   ces rapports d'experts sont citées par M. Manning, et M. Manning a utilisé

 17   justement ces conclusions -- ou plutôt, ces moyens de preuve, les moyens de

 18   preuve qu'il avance se fondent sur ces conclusions, et je pense que cela

 19   peut être admissible pour trois raisons --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez être un peu

 21   plus précis, pour ce qui est de la deuxième catégorie de rapports justement

 22   ?

 23   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, oui, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous faites référence là au

 25   document 2479 ?

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Le 2479 est le rapport de M. Manning, et il

 27   cite différents rapports qu'il a utilisés, le rapport de l'expert

 28   balistique, le rapport de l'expert, de l'horloger, pour ce qui est de


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  1   l'examen de l'entrepôt de Kravica et de Pilica Dom. Vous avez également le

  2   rapport de l'analyse du sol et le rapport de la textile.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce qu'il a participé ?

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Non, il s'agit de rapports d'experts

  5   indépendants, qui parviennent à une conclusion à propos des objets qu'ils

  6   ont examinés. M. Manning cite justement cette conclusion.

  7   Il faut savoir que les rapports d'experts sont parfaitement et

  8   clairement identifiés et reconnus. Il faut savoir que cela a déjà fait

  9   l'objet d'un débat dans l'affaire Popovic, et la Chambre était d'avis que

 10   M. Manning avait tout à fait le droit d'utiliser des conclusions de

 11   rapports qui n'étaient pas présentés à la Chambre de première instance, et

 12   dans ce cas, le fait que les rapports sont versés au dossier, apporte

 13   davantage de poids à la déposition de M. Manning, aux éléments de preuve de

 14   M. Manning, et cela, vous le trouverez à la page 18 996 du compte rendu

 15   d'audience dans l'affaire Popovic.

 16   Puis j'aimerais également dire que la plupart, pour ne pas dire

 17   toutes les conclusions présentées par M. Manning ou qu'utilise M. Manning

 18   sont déjà retenues comme autant de faits déjà admis en cette affaire.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez peut-être me

 20   donner à titre d'illustration un exemple ? Parce que je crois comprendre

 21   qu'il utilise un rapport, un rapport de l'équipe, plusieurs rapports

 22   pénaux, rapports établis par la marine des Etats-Unis; est-ce que cela est

 23   exact ?

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, c'est exact.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis le bureau des Nations Unies qu'il

 26   fournit un rapport sur les armes à feu, et le tabac.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] C'est exact.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors prenons l'exemple du rapport pour


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  1   les armes et le tabac, rapport des Etats-Unis. Comment est-ce que M.

  2   Manning a utilisé cela ?

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, je peux vous l'expliquer. M. Manning en

  4   fait devait envoyer les douilles à ce bureau qui les analysait pour voir si

  5   l'on pouvait établir des correspondances. Donc, dans le rapport, ils ont

  6   indiqué qu'un certain nombre de douilles qui leur avaient été envoyées

  7   provenaient du même fusil. M. Manning donc a utilisé ces résultats, les a

  8   interprétés, et a indiqué d'où venaient les douilles en question. Donc il y

  9   a par exemple des correspondances pour ce qui est de douilles provenant de

 10   certains sites, et à partir de cela, il établit que les douilles ont donc

 11   été tirées, les balles plutôt ont été tirées par le même fusil qui se

 12   trouvait à Orahovac, ou plutôt les douilles se trouvaient à Orahovac, et

 13   puis ensuite à Hodzici, dans la route Hodzici 3, 4 et 5, et M. Manning en

 14   fait tout simplement, utilise la conclusion suivant laquelle ces douilles,

 15   pour ces douilles il y a correspondance et il interprète cela. La

 16   conclusion -- de toute façon je vous signale que cela est reconnu comme

 17   fait déjà retenu dans une autre affaire.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'attendais la fin de l'interprétation

 19   française.

 20   Donc, M. Manning a envoyé toutes ces douilles et toutes les

 21   cartouches qu'il a récupérées à cette institution et ensuite cette

 22   institution lui envoyait un rapport; c'est cela ?

 23   M. MITCHELL : [interprétation] C'est exact.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en est-il du rapport de la marine

 25   américaine, pour ce qui est de Kravica et Pilica ?

 26   M. MITCHELL : [interprétation] C'est le MCIS qui a étudié ces deux sites,

 27   en 1996. Donc, eux, ils ont pris deux tubes d'échantillonnage, dans ces

 28   deux sites, ils ont pris des prélèvements de ce que l'on soupçonnait être


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  1   des restes mortels, des restes humains, ainsi que des résidus d'explosifs.

  2   Ces échantillons ont été fournis au bureau du Procureur, ensuite ils ont

  3   été envoyés à l'institut médico-légal néerlandais pour être examiné, pour

  4   voir quels allaient être les résultats obtenus, et M. Manning justement se

  5   contente tout simplement de décrire que le MCIS a prélevé les échantillons,

  6   qu'il les a pris, qu'il les a envoyés à l'institut médico-légal

  7   néerlandais, et puis ensuite il énumère les résultats et les conclusions

  8   obtenues.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors je ne comprends pas. Le rapport

 10   médico-légal néerlandais, le rapport américain, c'est le même ?

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Ils sont différents.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi est-ce que vous me parlez du

 13   rapport néerlandais ?

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, enfin ce que je voulais dire en fait

 15   c'est qu'il y a un rapport relatif au site de Pilica Dom. Il y a un rapport

 16   à propos de l'examen et des analyses, dans l'entrepôt de Kravica, et il y a

 17   un rapport complètement séparé qui émane de l'Institut médico-légal

 18   néerlandais, et là, ils ont analysé --

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, un petit moment. Ne brûlons pas

 20   les étapes. Donc vous avez un rapport américain, le rapport de l'enquête de

 21   la marine américaine à Kravica et Pilica; c'est cela ?

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, parce que l'enquête sur le terrain a eu

 23   lieu en 1996.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Mais quel est le rapport

 25   entre le rapport médico-légal néerlandais et l'enquête, les enquêtes du

 26   TPIY ?

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Les échantillons qui ont été prélevés par le

 28   NCIS ont été donnés au bureau du Procureur, au bureau du Procureur. Le


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  1   bureau du Procureur les a ensuite envoyés à l'institut médico-légal

  2   néerlandais pour qu'il les analyse.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, excusez-moi mais là vous avez

  4   dit, qu'est-ce que vous avez dit ? Vous avez dit que le NCIS a envoyé cela

  5   au bureau du Procureur, qu'entendez-vous par cela ?

  6   M. MITCHELL : [interprétation] Le NCIS en fait c'est le service d'enquête

  7   pénale navale, alors c'est eux qui ont prélevé ces échantillons, en 1996,

  8   sur ces sites. Ensuite, ils ont remis les échantillons en question au

  9   bureau du Procureur. Il s'agissait d'échantillons physiques de résidus

 10   d'explosif et de restes mortels, de restes humains. Ensuite le bureau du

 11   Procureur a envoyé ces échantillons au bureau ou à l'institut médico-légal

 12   néerlandais, et pour ce qui est de Pilica Dom, par exemple, je pense qu'ils

 13   ont indiqué qu'il y avait 15 échantillons de résidus d'explosifs qui

 14   avaient été pris. Il y en a un qui a été envoyé par l'institut médico-légal

 15   néerlandais comme étant positif. Donc, là, vous avez deux aspects

 16   différents de l'analyse du même échantillonnage.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ce qu'il y a d'autres rapports

 18   hormis ce que je viens de mentionner, d'autres rapports qui ont été

 19   utilisés par M. Manning; est-ce qu'il y en a d'autres ?

 20   M. MITCHELL : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, je pense que

 21   M. Manning a utilisé également le rapport du Pr Wright.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Je parle des éléments de preuve qui

 23   ne sont pas -- qui n'ont pas encore été présentés à la Chambre d'instance.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, il cite également les conclusions

 25   établies par le Pr Antony Brown, qui est l'expert chargé d'analyse du

 26   terrain, et je pense qu'il y a deux de ces rapports, il a cité également le

 27   rapport de l'institut médico-légal néerlandais à propos des résidus

 28   d'explosif prélevés à Pilica Dom et dans l'entrepôt de Kravica. Il a cité


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  1   également le rapport de l'Institut médico-légal néerlandais, pour ce qui

  2   est des échantillons sanguins  prélevés sur ces sites, ainsi que dans

  3   l'école de Grbavci. Il y a également une étude démontre, établie par M.

  4   Mark Mills, vous avez également un rapport textile de l'Institut médico-

  5   légal néerlandais sur les liens et bandeaux, vous avez également un rapport

  6   du bureau américain chargé de l'étude de l'alcool, du tabac et des armes à

  7   feu. Ça, c'est un rapport qui porte sur l'entrepôt de Kravica -- ou plutôt,

  8   excusez-moi, non, c'est un rapport en fait plutôt qui porte sur les

  9   douilles et les cartouches.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais tout cela est inclus, n'est-ce pas

 11   ?

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, les deux rapports du NCIS sur

 13   l'entrepôt de Kravica et Pilica Dom, oui, tout à fait.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 15   M. MITCHELL : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter, Monsieur le

 16   Président, que la plupart de ces conclusions ont été reconnues comme fait

 17   déjà admis.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que vous pourriez me donner

 19   un exemple de ces conclusions dont vous parlez ?

 20   M. MITCHELL : [interprétation] Alors vous avez le fait déjà admis, fait

 21   retenu, le fait 1703, qui indique que les enquêtes menées à bien, au niveau

 22   d'une fosse commune, enquête sur les cartouches a révélée que les

 23   cartouches qui se trouvaient dans la fosse commune correspondent à celles

 24   qui ont été trouvées le long de la route près de la fosse qui indique que

 25   les victimes, qui se trouvent maintenant dans la fosse commune, ont été

 26   tuées, abattues sur ce site. Il s'agit du fait déjà admis à propos de

 27   Cerska. Vous avez également le fait numéro 1717, là, il s'agit de

 28   l'entrepôt de Kravica. Le bureau du Procureur a envoyé une équipe pour


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  1   examiner l'entrepôt de Kravica le 30 septembre 1996. Les experts ont

  2   déterminé qu'il y avait présence de résidus d'explosif à la suite de tirs

  3   par balle. Ils ont découvert également des balles et des douilles ainsi que

  4   du sang humain, des os et des morceaux de chair qui se trouvaient collés

  5   aux murs et au plancher du bâtiment en question, ou du sol du bâtiment.

  6   Puis vous en avez d'autres : Le numéro 1721, le numéro 1788, 1800, 1822,

  7   1855, 1861, 1863, 1879, 1889, et 1886, 1880 et 1800 -- non, en fait je

  8   pense -- non, je m'arrête là, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Souhaitez-vous réagir, Maître Robinson ?

 11   Oui, Monsieur Mitchell, vous souhaitez ajouter quelque chose ?

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Non.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je

 14   souhaiterais réagir, mais dans un premier temps, j'aimerais attirer votre

 15   attention sur l'article 94 bis qui stipule que les conclusions et

 16   constatations d'experts sont présentées à la Chambre de première instance

 17   par l'Accusation, et lorsque la Défense conteste cela, la Défense a tout à

 18   fait le droit de mettre tout cela à l'épreuve devant la Chambre, ce qui

 19   d'ailleurs est le fondement même de l'article 92 bis, pour dire que les

 20   rapports d'experts ne peuvent pas être admis et versés au dossier si la

 21   Défense n'a pas le droit de les contester. Donc ce qui est fait en fait, en

 22   ce moment, c'est que, tout simplement, on me supprime le droit de contester

 23   ces rapports étant donné que le témoin n'a rien fait d'autre que se

 24   contenter de répéter les constatations et conclusions établies par

 25   quelqu'un d'autre. Donc nous avançons que nous devons suivre le même

 26   raisonnement et que, de ce fait, vous devriez rejeter les rapports

 27   d'experts au titre de l'article 92 bis.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, les experts 92 bis ?


Page 25816

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Parce qu'en fait, vous aviez dit que

  2   vous n'allez pas autoriser des rapports d'experts ou des témoignages

  3   d'experts, autoriser à les admettre par le truchement de l'article 92 bis.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant je comprends.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, non, je parlais de façon un peu

  6   elliptique. Mais, bon, le fait est que essentiellement en fait nous sommes

  7   en train d'avancer que l'on est en train de circonvenir à tout cela.

  8   L'article 94 bis, c'est une -- lex specialis. J'attire votre attention sur

  9   le fait que, dans l'affaire Milosevic, bon, il avait été dit que, bon,

 10   certes, il y a des informations qui sont données à des enquêteurs sur le

 11   terrain par des témoins, et c'est en fait ce qui est en train de se passer

 12   ici. Vous avez cet enquêteur qui se contente de répéter les conclusions

 13   établies par des experts, et nous pensons qu'autoriser cela serait

 14   contredire la décision retenue dans l'affaire Milosevic à propos de la

 15   déposition de Barney Kelly.

 16   Puis, à propos des faits déjà retenus dans d'autres affaires, dans un

 17   premier temps, nous nous demandons pourquoi l'Accusation doit présenter des

 18   éléments de preuve alors qu'ils ont déjà des faits admis sur ces mêmes

 19   éléments, et si vous les autorisez à le faire, il faut parler de

 20   l'admissibilité, parce que vous avez donc -- dans quelle mesure, est-ce que

 21   des éléments de preuve établis par un témoin expert peuvent être versés au

 22   dossier par le biais de la déposition d'un autre témoin ? En plus, il faut

 23   savoir que, même s'il s'agit d'éléments d'information qui ont déjà fait

 24   l'objet d'un constat judiciaire, nous ne pensons pas que cela a pertinence

 25   pour la question de l'admissibilité.

 26   M. MITCHELL : [interprétation] [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais avant de ce faire, est-ce que

 28   nous pourrions tomber d'accord sur le fait que M. Manning ne comparaît pas


Page 25817

  1   en tant que témoin expert ?

  2   M. MITCHELL : [interprétation] C'est exact. M. Manning n'est pas un expert.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell, allez-y.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Très rapidement. Je crois que, pour ce qui

  5   est de la décision dans l'affaire Milosevic, décision du 30 septembre 2002,

  6   tout est clair, à savoir que les éléments de preuve en résumé peuvent être

  7   recevables. Il est mentionné que, dans le paragraphe 21, il faut que les

  8   éléments qui font l'objet d'une synthèse ou d'un résumé doivent être eux-

  9   mêmes recevables, et ces éléments étaient clairement identifiés par M.

 10   Manning.

 11   Deuxième élément que je souhaiterais aborder, même s'il mentionne les

 12   conclusions de ces experts, l'objectif de sa déposition est d'expliquer ou

 13   de replacer dans le contexte les différentes étapes qui ont amené à ces

 14   conclusions. Par exemple, pour ce qui est des douilles, en tant qu'exemple,

 15   on essaie de déterminer d'où provenaient ces douilles et essayer de voir si

 16   les douilles correspondent à certains éléments sur certains sites qui ont

 17   fait l'objet d'une enquête, et M. Manning a fait sa propre analyse et c'est

 18   ce qu'il présente aux Juges de cette Chambre.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voudrais que tout soit bien clair.

 20   Donc, par exemple, vous ne voulez pas verser ce rapport au dossier, n'est-

 21   ce pas ? Par exemple, cette instance américaine et le rapport également du

 22   NCIS ?

 23   M. MITCHELL : [interprétation] Ils ne sont pas du tout à verser, Monsieur

 24   le Président, mais les trois rapports de M. Manning.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais il cite en conclusion.

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, il les cite en conclusion, et nous ne

 27   versons pas les rapports qui sont liés à sa conclusion.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Désolé, je parle en même temps que vous.


Page 25818

  1   Comment allez-vous faire une distinction d'après ce que Me Robinson a dit

  2   que, ce faisant, nous allons à l'encontre de l'esprit de l'article 94 bis ?

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que cet

  4   article porte sur les rapports d'experts à proprement parler. Je pense que

  5   M. Manning devrait avoir la possibilité de citer ces rapports tant que ceci

  6   est clairement identifié. Je pense que M. Manning devrait être autorisé à

  7   citer d'autres rapports tant que l'on connaît l'origine de cette citation.

  8   Je ne pense pas que ceci aille à l'encontre de l'article 94 bis étant donné

  9   que nous n'avons pas l'intention de verser les rapports d'experts par son

 10   truchement.

 11   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Mais vous pensez, Monsieur Mitchell,

 12   qu'il peut citer et se fier à des éléments du rapport ?

 13   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, il peut citer pour ses conclusions en

 14   identifiant les éléments qu'il a utilisés pour arriver à ses conclusions et

 15   également les expliquer fort de sa propre expérience et de ses propres

 16   compétences en tant qu'analyse pour savoir ce que signifie ces conclusions.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je reviens vers vous, Maître Robinson.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Je voudrais savoir en fait comment arriver à

 19   faire un [inaudible]. Par exemple, dans sa déposition, M. Manning part du

 20   principe qu'il y a une correspondance au niveau des douilles. Par

 21   conséquent, je ne vois pas comment le Procureur peut vraiment faire une

 22   distinction entre les rapports d'origine et le résultat donc de ces

 23   rapports d'experts qui, comme point de départ, sont considérés comme étant

 24   exacts, parce que, sans cela, sa déposition n'aurait aucun sens. Donc je ne

 25   demande pas [inaudible] ce que j'avançais.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par exemple, les documents de la liste

 27   65 ter 2478 et 3937 sont, d'après ce que j'ai compris, une synthèse des

 28   résultats d'une analyse légiste des docteurs Wright, Clark, Peccerelli ou


Page 25819

  1   Bayaybar, et -- mais compte tenu du caractère complexe et technique et

  2   compte tenu de la taille évidemment de ces rapports, est-ce que vous ne

  3   pensez pas que les Juges de la Chambre pourraient bénéficier des

  4   compétences de M. Manning qui nous permettraient de mieux comprendre ces

  5   rapports, d'être en mesure de les lire de manière plus rapide peut-être,

  6   car il s'agit d'éléments de preuve importants ?

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Absolument.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc vous n'êtes pas opposé à cela ?

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Etant donné que ces éléments de preuve ont

 10   déjà été versés au dossier par le truchement de ces experts, nous n'avons

 11   aucune opposition à ce que ce témoin les utilise pour permettre aux Juges

 12   de la Chambre de mieux comprendre ces éléments de preuve.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Compte tenu de l'heure, nous allons

 15   faire une pause dès maintenant, plus tôt que prévu. Nous allons faire une

 16   pause de 25 minutes et nous reprendrons à 15 heures 35.

 17   --- L'audience est suspendue à 15 heures 07.

 18   --- L'audience est reprise à 15 heures 46.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, après avoir étudié vos

 20   arguments et le fait que vous n'avez pas d'objection au versement de deux

 21   des rapports qui ont déjà été versés, à savoir les documents de la liste 65

 22   ter numéro 2478 et 2937, les Juges de la Chambre ont accepté de verser ces

 23   documents au dossier. Comme nous l'avons dit avant la pause, ils se bornent

 24   à mentionner et à faire la synthèse d'un rapport qui figure déjà comme

 25   pièce à conviction dans ce procès, et l'accusé a eu la possibilité de

 26   contester ces rapports par le biais du contre-interrogatoire de ces autres

 27   experts.

 28   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.


Page 25820

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour ce qui est du document de la liste

  2   65 ter 2479, Monsieur Mitchell, les Juges de la Chambre souhaiteraient

  3   savoir s'il y a certaines parties de ce rapport qui abordent des rapports

  4   ou des documents qui ont déjà été versés au dossier dans cette affaire.

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je crois que la

  6   grande majorité de ce rapport reprend les rapports archéologiques,

  7   anthropologiques et pathologiques qui ont déjà été versés au dossier. Il

  8   n'y a que certaines parties de ce rapport qui citent les autres rapports

  9   d'expert.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Mitchell.

 11   Dans ce cas-là les Juges de la Chambre ont décidé de ne verser au dossier

 12   que les parties de ce rapport qui se réfèrent à d'autres rapports ou

 13   d'autres documents déjà versés au dossier en l'espèce.

 14   Pour ce qui est des parties restantes, les Juges de la Chambre

 15   souhaiteraient que l'Accusation les expurgent du rapport qui sera versé.

 16   Cela, bien sûr, en espérant que ces expurgations ne rendront le reste du

 17   rapport totalement incompréhensible, si tel est le cas, l'Accusation

 18   devrait attirer l'attention aux Juges de la Chambre à ce sujet.

 19   De plus, la Chambre permettra à l'Accusation d'aborder avec le témoin les

 20   informations et les rapports cités dans le document de la liste 65 ter

 21   4279. L'Accusation pourra ensuite envisager de faire comparaître là où les

 22   personnes qui ont compilé ces informations et présentera, dans ce cas-là,

 23   les rapports y afférents. Ceci permettra à l'accusé de remettre en question

 24   certaines des éléments conformément aux Règlement de procédure et de

 25   preuve.

 26   Voilà la décision.

 27   Oui, Maître Robinson.

 28   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


Page 25821

  1   Je voudrais simplement mentionner que, dans le document qui porte la

  2   référence 65 ter 2478, aux pages 5 et 6, il y a des références portant sur

  3   le résultat d'enquête de l'institution médico-légale néerlandais ainsi que

  4   des rapports sur la balistique à la page 6. Donc je voudrais également que

  5   votre décision concernant le document 2479 s'applique également aux

  6   éléments similaires du document 2478.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Effectivement, ce sera le cas.

  8   Oui, Monsieur Mitchell.

  9   M. MITCHELL : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Manning, je voudrais très rapidement vous poser quelques

 11   questions concernant deux rapports supplémentaires, en plus des trois que

 12   nous avons déjà abordés ensemble.

 13   En 2005, vous avez examiné les documents des autorités de Bosnie

 14   ainsi que de l'Institut ICMP et vous avez rédigé deux rapports faisant la

 15   synthèse des conclusions de ces deux instances; est-ce exact ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Je ne vais pas rentrer dans les détails de ces deux rapports, mais

 18   j'aimerais que vous nous décriviez ce que vous avez fait pour examiner les

 19   activités et les conclusions des autorités de Bosnie ainsi que de

 20   l'Institut ICMP.

 21   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, on m'a demandé donc

 22   de consulter les documents liés aux exhumations réalisées par l'Institut

 23   ICMP ainsi que les analyses d'ADN réalisées par des laboratoires avec

 24   l'intention d'identifier ces différentes archives pour savoir si les

 25   personnes avaient été identifiées dans les charniers, charniers qui avaient

 26   été identifiés comme étant liés à Srebrenica. J'ai donc compilé les

 27   différents éléments, c'est-à-dire l'identification ADN, et j'ai essayé de

 28   voir s'ils étaient liés aux fosses primaires et secondaires.


Page 25822

  1   Q.  Est-ce exact que ce processus a commencé en 2005 et qu'ensuite c'est un

  2   autre enquêteur du bureau du Procureur qui a repris le flambeau pour ainsi

  3   dire ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez nous donner le nom de cet autre enquêteur ?

  6   R.  Oui. Enfin je ne me souviens pas de son nom de famille mais il

  7   s'appelait Dusan.

  8   Q.  Dusan Janc.

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Monsieur Manning, je voudrais passer à autre chose et parler maintenant

 11   des bandeaux et des liens utilisés.

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Pourrait-on avoir sur les écrans le document

 13   de la liste 65 ter 16274.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Avant de passer à autre

 15   chose, est-ce que l'on pourrait donner une cote aux trois rapports que nous

 16   avons versés au dossier.

 17   M. MITCHELL : [interprétation] Les trois rapports.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, avec, bien sûr, le bémol et la

 19   condition qu'il n'y ait pas d'objection.

 20   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors donnons des cotes.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 2478

 23   recevra la cote P4502; 2937, la cote P4503; et 2477, la cote P4504.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Vous aviez mentionné également

 25   que vous alliez verser d'autres rapports d'expert, mais maintenant vous ne

 26   l'avez pas les verser.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je les avais recensés

 28   au cas où je les utiliserais mais je n'ai pas l'intention de les verser au


Page 25823

  1   dossier.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout est maintenant très clair. Donc

  3   vous pouvez passer à un autre sujet.

  4   M. MITCHELL : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Manning, est-ce que vous pourriez nous dire qui a établi ce

  6   tableau et ce que cela signifie ?

  7   R.  Vous avez la première partie du tableau qui est lié aux liens et puis

  8   ensuite vous avez donc les corps qui ont été exhumés des charniers. En bas

  9   de ce tableau, vous pouvez voir en fait les mêmes types de liens, en raison

 10   des liens et des bandeaux que l'on avait retrouvés uniquement au niveau des

 11   exhumations mais également lorsque les corps avaient fait l'objet d'un

 12   examen. Le Pr Wright avait recensé un certain nombre de liens pour un

 13   charnier donné et il avait rappelé qu'il ne s'agissait pas en fait d'une

 14   liste exhaustive. J'ai examiné tous les liens et les bandeaux ce qui

 15   l'était ou qui aurait pu l'être ensuite j'ai essayé de retrouver les

 16   documents liés à ces bandeaux ou à ces liens, tels que, par exemple, des

 17   photos, des recueils, des rapports d'autopsie, des [inaudible] par les

 18   médecins légistes, les responsables de recherche sur les lieux, et ensuite

 19   j'ai recensé les bandeaux, où ils se trouvaient, de quel charnier ils

 20   provenaient. J'ai donc dressé ces tableaux afin de donner le nombre de

 21   bandeaux et de liens qui se trouvaient dans les charniers, à quel endroit

 22   dans les charniers ils se trouvaient et de quel charnier il s'agissait.

 23   Q.  Revenons donc aux détails spécifiques pour chaque bandeau et chaque

 24   lien. Ils se trouvent dans votre rapport, c'est-à-dire ceux de 2000, 2001

 25   et 2003, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui. Avec ces trois rapports vous aviez des annexes avec la liste des

 27   liens et des bandeaux, y compris les références des photos, les photos

 28   elles-mêmes, qu'elles étaient prises sur place, à la morgue, et vous avez


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  1   également des références aux rapports d'experts, comme par exemple les

  2   rapports d'autopsie, les rapports d'exhumation qui étaient liés à ces

  3   bandeaux et à ces liens.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre,

  5   Monsieur Mitchell, mais il y a une question administrative pour consulter

  6   les parties. En fait, on vient de nous demander si l'on pouvait avoir une

  7   audience l'après-midi plutôt que le matin.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur Manning doit prendre un avion à 14

  9   heures demain, donc ce n'est pas possible.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A moins qu'on ne puisse terminer

 11   aujourd'hui.

 12   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, peut-être que l'on pourra finir

 13   aujourd'hui. Mais, sinon, on ne pourra qu'avoir quelques heures demain

 14   matin.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Compte tenu de la déclaration que l'on

 16   vient de prendre, est-ce que à tout hasard la Défense pense qu'il serait

 17   possible de terminer le contre-interrogatoire aujourd'hui ? Mais avant de

 18   ce faire, j'aimerais savoir combien de temps vous compter encore utiliser

 19   pour votre interrogatoire principal.

 20   M. MITCHELL : [interprétation] Je crois qu'il me faudra peut-être une demi-

 21   heure ou 45 minutes.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, Monsieur Karadzic.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis désolé, mais effectivement il y a

 24   énormément de détails qui ont été révélés et nous devons donc poser des

 25   questions au témoin à ce sujet.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ceci ne nous dit pas combien de

 27   temps vous souhaitez avoir pour votre contre-interrogatoire.

 28   Quelque soit le temps que nous allouerons à la Défense, nous en restons au


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  1   programme de départ, à savoir que nous aurons notre audience demain matin.

  2   Continuez, Monsieur Mitchell.

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Donc, Monsieur Manning, pour être clair : Les conclusions concernant ce

  5   tableau, ce sont des conclusions et des chiffres qui sont issus de votre

  6   raisonnement et de vos calculs, c'est-à-dire 423 liens et 448 bandeaux,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, tout à fait. Si vous prenez les rapports d'experts, notamment

  9   celui du Pr Clark, du Pr Haglund, et du Pr Wright, si vous regardez les

 10   calculs au niveau de ces bandeaux et de ces liens, ils ne sont pas

 11   similaires aux miens. Les miens sont le résultat de tous les aspects du

 12   problème, à savoir le processus d'autopsie et d'exhumation sur toute la

 13   période allant de 1996 à 2001, voire 2003.

 14   Q.  Je voudrais qu'on en revienne à votre rapport de l'an 2000. Il y a deux

 15   volumes de photographies, n'est-ce pas, qui reprennent chaque photo de

 16   chaque bandeau et de chaque lien, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais

 19   verser au dossier ces deux volumes, c'est-à-dire les documents de la liste

 20   65 ter 23631, 23632. Nous aimerions en fait qu'ils figurent sur notre liste

 21   65 ter. Mais, en fait, il s'agit d'une compilation de quatre références qui

 22   figuraient déjà sur notre liste 65 ter.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections ?

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Non.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons donc les verser au dossier.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] P4505 et P4506.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 28   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais également


Page 25826

  1   verser le tableau que nous voyons sur nos écrans.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ça deviendra la pièce P4507.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Je souhaiterais qu'on affiche sur les écrans

  5   le document de la liste 65 ter 23634, s'il vous plaît.

  6   Monsieur le Président, il s'agit également d'un récapitulatif que nous

  7   souhaiterions également rajouter sur notre liste 65 ter puisque cela

  8   reprend en fait toutes les photos de ces deux volumes ainsi que les photos

  9   des deux derniers rapports de M. Manning. Donc ces photos reprennent les

 10   trois rapports au total. Avec votre permission nous aimerions verser ce

 11   récapitulatif au dossier.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors c'est d'accord.

 15   M. MITCHELL : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez poser des questions ?

 17   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, je vais poser quelques questions.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrais-je poser une question ? Est-ce que

 20   l'on pourrait avoir un système de numérotation similaire à ceux de ces

 21   différents recueils ? Parce qu'ils n'ont pas de numéro c'est de les

 22   identifier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour l'instant, je ne vous suis pas.

 24   Mais est-ce que vous pourriez nous aider, Monsieur Mitchell ?

 25   M. MITCHELL : [interprétation] Je ne comprends pas exactement ce que

 26   demande M. Karadzic. Je voudrais savoir s'il souhaite avoir les numéros de

 27   cote des différents articles, c'est-à-dire de tous les bandeaux et des

 28   liens, c'est-à-dire 1 à 448 -- enfin, je ne sais pas.


Page 25827

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors commencez déjà par poser les

  2   questions concernant ce tableau récapitulatif de photos à M. Manning.

  3   M. MITCHELL : [interprétation]

  4   Q.  Tout d'abord, Monsieur Manning, j'aimerais savoir si c'est vous qui

  5   avez réalisé ce montage photo récapitulatif.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire d'où proviennent ces différents

  8   articles ?

  9   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, il s'agit d'un

 10   "poster" de taille zéro, qui reprend les photos de tous les liens de chaque

 11   charnier principal et secondaire. Donc vous avez, par exemple : "La ferme

 12   de Branjevo, Pilica." Vous avez, en fait, deux bandeaux que l'on a

 13   retrouvés à la ferme de Branjevo militaire, et puis vous avez également

 14   chacun des photos du charnier "Cancari road, numéro 12, et cetera, et

 15   cetera. Donc cela reprend tous les charniers principaux et secondaires.

 16   Certaines images représentent des bandeaux que l'on a retrouvés dans les

 17   charniers. Vous avez également des bandeaux que l'on a retrouvés au niveau

 18   de la tête du corps soit à la morgue soit dans un charnier, et certains

 19   également représentent des photos que l'on a retrouvées au niveau des

 20   charniers.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc il s'agit d'un tableau

 22   récapitulatif qui représente les photos qui ont déjà été versées au

 23   dossier, n'est-ce pas ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors quel serait l'intérêt d'avoir à

 26   nouveau ceci en doublon, Monsieur Mitchell ?

 27   M. MITCHELL : [interprétation] En fait, il s'agit d'un document

 28   supplémentaire. Il y a certaines images supplémentaires qui ne figurent pas


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  1   dans les livrets. Donc par exemple, vous avez Lazete 1 et Lazete 2C, qui

  2   figurent dans ce montage photos récapitulatives, mais qui ne figurent pas

  3   dans les deux recueils.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux recueils de ce rapport ?

  5   M. MITCHELL : [interprétation] C'est exact. Les deux volumes, vous avez

  6   toutes les images qui représentent le rapport 2000.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ces photos figurent dans les

  8   rapports, n'est-ce pas, qui ont déjà été versés au dossier ?

  9   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, pour la plupart d'entre eux mais je ne

 10   peux pas vous garantir que toutes ces photos figurent dans les rapports des

 11   archéologues ou des médecins légistes. Mais ces photos datent de cette

 12   époque.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous n'avez pas répondu à ma

 14   question. Pourquoi vous voulez avoir ce montage photos, quel est l'objectif

 15   ?

 16   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, en fait, ces

 17   différents bandeaux et liens, font l'objet de contestation très précise

 18   dans ce procès, et nous voudrions vous donner une représentation graphique

 19   de tous ces articles donc de ces bandeaux et de ces liens, et là, nous

 20   avons donc rassemblé les photos de tous les liens, de tous les bandeaux en

 21   un seul document.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Alors continuez, Monsieur

 23   Mitchell.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant

 25   consulter le document, de la liste 65 ter, 23635, s'il vous plaît ?

 26   Q.  Vous avez mentionné un autre montage des photos récapitulatives, n'est-

 27   ce pas, c'est ce que vous mentionnez ?

 28   R.  Oui. Il s'agit d'un montage photos similaire, en fait chaque photo


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  1   représente un lien que l'on a retrouvé dans un des charniers. Il n'y a

  2   aucun doublon.

  3   M. MITCHELL : [interprétation] J'aimerais également verser ce montage

  4   photos.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous pouvons verser ce

  8   document au dossier.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce P4508, et P4509.

 10   M. MITCHELL : [interprétation]

 11   Q.  Dans vos rapports, vous parlez de différents articles qui ont été

 12   retrouvés dans les charniers et des documents d'identification, par

 13   exemple, des pièces d'identité, ainsi que différents objets qui ont une

 14   importance religieuse. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez considéré

 15   qu'il était important de recenser ces différents objets ?

 16   R.  Les pièces d'identité, les photos, les documents, les différents objets

 17   étaient considérés comme très importants pour relier ces charniers aux

 18   événements qui ont eu lieu à Srebrenica, en juillet 1995. Ces objets et ces

 19   documents étaient également considérés comme importants pour

 20   l'identification des victimes donc dans le processus légiste, mais

 21   également pour les familles des victimes. Donc j'ai examiné ces différents

 22   objets de manière routinière, soit sur le terrain soit à la morgue, je les

 23   examinais, je regardais quel document, de quel document il s'agissait, et

 24   c'était à moi de décider si je les envoyais au TPIY pour qu'il y ait

 25   d'autres tests qui soient réalisés, comme par exemple, les douilles, les

 26   bandeaux, les liens, et les montres. Si je jugeais opportun, je renvoyais

 27   certains objets aux autorités de Bosnie, à l'organisation PHR, c'est-à-dire

 28   Médecin pour les droits de l'homme, qui souhaitait identifier différents


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  1   corps. Pour les cas d'objet à caractère religieux, je les étudiais durant

  2   ce processus qui a duré plusieurs années, et ce faisant, j'ai donc retrouvé

  3   beaucoup d'objets à caractère religieux. La seule religion que je pouvais

  4   associer à ces objets était la religion islamique. Il n'y avait aucun autre

  5   objet religieux, à caractère religieux qui pouvait les associer à d'autres

  6   confessions ou à d'autres groupes religieux.

  7   Q.  Dans différentes parties de votre rapport, vous avez décrit les

  8   différents objets qui avaient été retrouvés à Glogova, à Zeleni Jadar, 5 et

  9   6, ainsi qu'à Ravnice.  Tout d'abord, pourriez-vous nous donner plus de

 10   détail sur le charnier de Ravnice, et nous expliquer quel type d'objet vous

 11   avez retrouvé à cet endroit-là ?

 12   R.  Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, j'étais présent

 13   sur le terrain lorsque le charnier de Ravnice a été identifié pour la

 14   première fois. J'étais également présent lorsque les premières exhumations

 15   ont eu lieu à Ravnice 1, j'étais également présent l'année suivante,

 16   lorsque Ravnice 2 a fait l'objet d'exhumation. J'ai vu personnellement les

 17   objets que l'on a retrouvés dans ce charnier parmi les corps, ces objets

 18   étaient très similaires à ce que l'on avait retrouvé à l'entrepôt qui se

 19   trouve à huit kilomètres du charnier principal de Ravnice. Il y avait donc

 20   des morceaux de maçonnerie et des morceaux donc de la structure du

 21   bâtiment, de l'entrepôt. Il y avait également des morceaux de béton qui

 22   avaient été peints, des pièces de métal. Il y avait également des bouts

 23   d'une cime qui se trouvait dans l'entrepôt de Kravica. Donc, en fait, il y

 24   avait un panneau qui avait été retiré de l'entrepôt Kravica et qui avait

 25   été transporté jusqu'au charnier principal de Ravnice et qui se trouvait

 26   donc enterré parmi les corps.

 27   Q.  Qu'en est-il des objets que vous avez retrouvés ou qui ont été

 28   retrouvés à Glogova et Zeleni Jadar 5 et 6 ?


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  1   R.  Encore une fois, je n'étais pas uniquement présent à plusieurs reprises

  2   au niveau de l'entrepôt de Kravica, mais j'étais également présenté lorsque

  3   les deux charniers principaux de Glogova 2 et de Glogova 1 ont été

  4   découverts. J'étais présent lorsqu'on a procédé à l'exhumation de Zeleni

  5   Jadar 5, et j'étais présent également lorsque l'équipe a retrouvé le

  6   charnier principal de Zeleni Jadar 6, et dans chacun de ces charniers

  7   principaux ou secondaires, il y avait des objets qui étaient totalement

  8   similaires à des objets qu'on avait retrouvés à l'entrepôt de Kravica. Et

  9   d'ailleurs, il y avait des restes de l'entrepôt dans le charnier principal

 10   de Glogova, 1 et 2, il y avait également des morceaux de l'entrepôt au

 11   charnier secondaire de Zeleni Jadar 5 et 6.

 12   Q.  Pourriez-vous nous dire si compte tenu de la présence de ces objets, on

 13   peut en déduire certaines conclusions quant à ce qui s'est passé au niveau

 14   de l'entrepôt de Glogova et des deux charniers de Zeleni Jadar 5, et 6 ?

 15   R.  L'entrepôt de Kravica a été un lieu d'exécution. Il y a un nombre

 16   important de prisonniers qui y a été tué. Les corps des victimes ont

 17   ensuite été transportés depuis l'entrepôt, grâce à des machines lourdes et

 18   lorsque cela a été fait ces machines ont en fait détruit une partie de la

 19   porte, et du cadre de la porte, ainsi qu'une partie de la paroi de

 20   l'entrepôt. Donc tout cela a été transporté avec les corps. Pour l'un des

 21   groupes se retrouvant dans la fosse commune ou le charnier de Ravnice, il

 22   s'agit d'une fosse commune primaire, et puis il y a un autre groupe qui a

 23   été transporté dans les fosses communes primaires de Glogova qui se

 24   trouvent environ à huit kilomètres de l'entrepôt de Kravica. Plusieurs mois

 25   par la suite les fosses communes primaires de Glogova 1 et 2 ont été

 26   ouvertes, et les corps ont ensuite été récupérés une fois de plus par de

 27   lourdes machines et ces corps ont ensuite été transportés vers les fosses

 28   communes secondaires qui venaient d'être creusées le long de la route de


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  1   Zeleni Jadar et ils se trouvent donc dans Zeleni Jadar 5 et 6. A la suite

  2   de mon travail ou lors de mon travail avec les autorités avec la Commission

  3   de Bosnie, j'ai pu constater qu'il y avait des objets semblables dans les

  4   autres fosses communes de Zeleni Jadar, la 1, la 2, et la 4 ainsi que sur

  5   le site de Ravnice. Donc, il y a un lien qui a véritablement été établi.

  6   Dans un premier temps, vous avez [inaudible] exécution puis il y a les

  7   fosses communes primaires et ensuite les fosses communes secondaires.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir le document

  9   23633 de la liste 65 ter. C'est une autre pièce pour laquelle nous avions

 10   demandé l'ajout sur notre liste 65 ter. Il s'agit à nouveau d'un montage

 11   d'images et de cartes. Chacune de ces images ou photos et cartes figurant à

 12   titre individuel sur la liste 65 ter.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah, oui. Maître Robinson.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Non, pas d'objection.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Donc nous faisons droit à votre

 16   demande.

 17   M. MITCHELL : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Manning, avez-vous eu la possibilité de consulter et examiner

 19   toutes les photos aériennes qui se trouvent dans ce livre ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Avez-vous eu la possibilité de les examiner lors de votre enquête ?

 22   R.  Madame, Messieurs les Juges, nous avons beaucoup utilisé les photos

 23   aériennes qui nous ont été fournies par le gouvernement des Etats-Unis.

 24   Nous les avons utilisées pour identifier les fosses communes primaires et

 25   secondaires. Je les ai utilisées à de nombreuses reprises pour essayer de

 26   localiser les dites fosses communes.

 27   M. MITCHELL : [interprétation] Alors, photo numéro 20 pour ce qui est du

 28   document papier 32 pour le système e-court.


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  1   Q.  Pourriez-vous nous dire ce qui est représenté sur cette photographie

  2   aérienne ?

  3   R.  Il s'agit d'un montage de deux photos qui se chevauchent, qui ont été

  4   superposées. Moi, j'ai dû m'occuper donc de la superposition de ces photos

  5   et vous avez donc les flèches en gauche. Donc cela montre les fosses

  6   communes secondaires de Zeleni Jadar donc de 1 à 6, et pour ce qui est de

  7   Zeleni Jadar 1, en fait, il faudrait voir Zeleni Jadar 1A et puis vous avez

  8   Zeleni Jadar 1B. Moi, j'étais présent lorsque ces fosses ont été localisées

  9   et lorsque leur contenu en quelque sorte a été vérifié. Donc, en fait, il y

 10   a sept fosses communes secondaires dans la zone de la route de Zeleni

 11   Jadar.

 12   Q.  Est-ce que vous-même vous vous êtes rendu personnellement sur chacun de

 13   ces sites ?

 14   R.  Je me suis rendu dans chacun des sites. Comme je vous l'ai dit, j'étais

 15   présent lors de la localisation de la fosse commune 1B, j'étais présent

 16   lors de l'examen de la fosse Zeleni Jadar 2. J'étais présent lors de

 17   l'ouverture de Zeleni Jadar 5. J'étais présent lors -- pour ce qui est de

 18   Zeleni Jadar 3 et 4 j'ai examiné le secteur d'ailleurs autour et j'étais

 19   présent lors de l'exhumation et d'ailleurs j'ai participé à l'exhumation de

 20   Zeleni Jadar 6.

 21   Q.  Alors, page suivante, photo numéro 21 pour le document papier, et 33

 22   pour le système e-court. Et là vous avez mentionné un Zeleni Jadar 1A et un

 23   B.

 24   Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous aider et --

 25   Est-ce que vous pourriez peut-être nous décrire cette photo de façon plus

 26   détaillée et faites des annotations sur les photos si cela est nécessaire ?

 27   R.  Il s'agit d'une seule photo qui est en fait constituée de deux

 28   photographies présentées parallèlement. Ce sont des photographies qui ont


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  1   été fournies au TPY. Alors vous voyez donc que j'ai marqué donc Zeleni

  2   Jadar 1. Du côté gauche vous avez le secteur, le 7 septembre 1995, vous

  3   voyez que le 2 octobre 1995 il y en avait deux qui avaient été creusées,

  4   exhumées, donc Zeleni Jadar 1. Si vous regardez ce secteur-ci de la carte

  5   il s'agit de la fosse commune que nous avons identifiée, dont nous avons

  6   examiné le contenu et que nous avons désignée sous le nom de Zeleni Jadar2.

  7   Elle n'avait pas été examinée précédemment cette fosse commune parce que

  8   d'aucun croyait que le terrain était fortement miné donc il a fallu en fait

  9   carrément déminer une voie allant à ce secteur et examiner les fosses

 10   communes. Mais vous pouvez voir que le 7 septembre 1995, il n'y avait pas

 11   de fosse commune dans ce secteur, alors que le 2 septembre 1995 il est

 12   absolument évident que deux fosses communes ont été creusées et donc

 13   créées.

 14   Q.  Alors il y a d'autres fosses communes que l'on peut voir; est-ce

 15   qu'elles étaient fermées ou ouvertes au moment où ces photographies ont été

 16   prises ?

 17   R.  Ecoutez, moi, je ne suis pas un expert en examen de photographie. Mais

 18   si l'on utilise ces images, moi, je pense, en fait, que Zeleni Jadar 1 est

 19   ouvert, et il en va de même pour Zeleni Jadar 1B. Donc 1A et 1B. Donc après

 20   avoir examiné 1B, je dirais que c'était un tout petit secteur, c'était en

 21   fait une tranchée qui avait été creusée sur un terrain plat et cela nous

 22   montre la fosse commune telle qu'elle a été creusée et ouverte.

 23   Q.  Est-ce que vous pourriez mettre un A pour la fosse commune du haut et

 24   un B pour la fosse commune du bas, et puis vous pourriez peut-être mettre

 25   votre paraphe ainsi que la date du jour, et nous sommes le 6 mars, je vous

 26   le rappelle.

 27   R.  [Le témoin s'exécute]

 28   M. MITCHELL : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier


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  1   de cette photographie, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Oui, cette photographie sera versée

  3   au dossier comme pièce séparée.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4510, Monsieur le

  5   Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors ce n'est peut-être pas très

  7   important mais j'aimerais savoir si vous avez la date de la photographie

  8   précédente, Monsieur Mitchell, la photo 20, numéro 20 ?

  9   M. MITCHELL : [interprétation]

 10   Q.  Nous allons reprendre à la page période dans le livre. Il s'agit du

 11   montage photo que vous avez fait, Monsieur Manning. Est-ce que vous vous

 12   souvenez des dates ou de la date que l'on trouve sur ces deux photos ?

 13   R.  Ecoutez, Monsieur le Président, je sais que ces photographies ont été

 14   publiées sans pour autant qu'il n'y ait de date qui y figure, mais il

 15   s'agit essentiellement de la même ou des mêmes photos que vous avez vues

 16   sur les photos qui viennent après. En fait, il faut savoir que lorsque ces

 17   photos -- lorsque nous avons demandé cette photographie, les dates n'ont

 18   pas été incluses mais elles ont été prises d'autres photographies que vous

 19   avez vues après.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais alors est-ce que vous

 21   confirmez ce qu'a dit M. Mitchell, à savoir qu'il s'agit d'un montage de

 22   photos que vous avez fait sur la base des photographies qu vous avaient été

 23   données; c'est cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 25   M. MITCHELL : [interprétation]

 26   Q.  Reprenons la page 22, 22 pour le document papier, 34 pour le système e-

 27   court. Bon, pour l'image précédente en fait ou la photographie précédente

 28   plutôt, il s'agissait de Zeleni Jadar 1A et 1B le 7 septembre 1995 et le 2


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  1   octobre 1995.

  2   Est-ce que vous pourriez nous décrire ce que nous voyons maintenant sur

  3   cette photographie ?

  4   R.  Une fois de plus, il s'agit donc de photos. Alors vous voyez, donc,

  5   vous avez dans un premier temps le 18 octobre 1995 et le 20 octobre, si

  6   vous regardez le 18 octobre 1995 sur la gauche, sur la partie gauche de la

  7   photographie, vous pouvez voir, en tout cas, sur le document papier, que

  8   les fosses n'ont pas encore été recouvertes, remplies, elles sont ouvertes

  9   encore. Alors que du côté droit - et là, nous sommes le 20 octobre 1995 -

 10   vous pouvez constater que les fosses ont été couvertes et, d'après l'examen

 11   des photographies précédentes, enfin vous pouvez voir des traces de

 12   véhicules sur le terrain. Vous voyez donc que des machines très lourdes ont

 13   nivelé les fosses et les ont, en quelque sorte, scellées, et ça, à la fois

 14   pour Zeleni Jadar 1A et 1B.

 15   Q.  Qu'est-ce que vous pouvez nous dire à propos de Zeleni Jadar 2 ? Est-ce

 16   que vous avez quoi que ce soit de particulier à nous indiquer à propos de

 17   cette fosse commune ?

 18   R.  Zeleni Jadar 2 a été creusée tout près d'un petit ruisseau. D'ailleurs

 19   c'est vraiment sur la rive.

 20   Q.  Non, excusez-moi. Peut-être que nous pourrions afficher la page

 21   précédente et -- donc page 23 pour le document papier et 35 pour le système

 22   e-court. Excusez-moi. Excusez-moi de vous avoir interrompu d'ailleurs.

 23   Poursuivez, je vous en prie.

 24   R.  Je disais donc lorsque vous voyez cette photographie, vous pouvez voir

 25   que la bande blanche qui traverse les deux photographies correspond à un

 26   chemin de terre. Alors les fosses communes pouvaient être vues très

 27   facilement du côté droit, sur la photographie droite. Regardez le bout de

 28   la flèche, c'est là justement où coule ce petit ruisseau. Cette fosse


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  1   commune, elle se trouve dans un secteur que j'avais vu inondé, et lorsque

  2   le Pr Wright l'a examinée, il a estimé ou il a conclu qu'il y avait des

  3   restes humains dissimulés dans cette fosse commune. Moi, je me suis rendu

  4   sur ce site avec le Pr Wright, et il m'a dit que d'après lui cette fosse

  5   commune avait été pillée et volée, à savoir les corps avaient été enlevés,

  6   et cela indiquait donc qu'il y avait quelque part une fosse commune

  7   tertiaire où se trouvaient donc ces corps.

  8   Q.  Est-ce que nous pouvons maintenant passer à l'image 31 pour le document

  9   papier et 44 pour le système e-court ?

 10   M. NICHOLLS : [interprétation] Veuillez nous expliquer ce que nous voyons

 11   sur cette image.

 12   R.  Une fois de plus, il s'agit d'un montage de photos dont je suis

 13   l'auteur. Il y a trois photographies qui y sont superposées. On y voit la

 14   route de Hodzici, ou la zone que nous appelions la route de Hodzici, et les

 15   fosses communes de 1 à 7. Il s'agit des fosses communes secondaires.

 16   Q.  Est-ce que vous avez visité les sept sites ?

 17   R.  Oui. J'étais là à un moment donné lorsque la commission bosniaque

 18   procédait à l'exhumation de Hodzici 7. Je me suis rendu sur chacun des

 19   sites avec le Dr Wright et avec les autres membres de l'équipe, et en

 20   particulier nous avons examiné Hodzici 1, et le Pr Wright pensait que

 21   c'était en fait une fosse commune secondaire et n'avait pas vraiment été

 22   utilisée comme en tant que fosse.

 23   Q.  Le Pr Wright a procédé à l'exhumation intégrale de Hodzici 3, 4 et 5,

 24   est-ce exact ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous savez quels ont été les résultats des autres examens du

 27   secteur de la route de Hodzici ?

 28   R.  Je crois comprendre que la Commission bosniaque et l'ICMP ont procédé à


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  1   un examen et ont trouvé plusieurs corps dans cette fosse. La fosse n'avait

  2   pas été complètement remplie, mais ils ont trouvé plusieurs corps, corps

  3   qui étaient liés à Srebrenica dans ces fosses communes.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Je vous demanderais de vous reporter à

  5   l'image 42 dans la version papier et 56 dans le système e-court.

  6   Q.  Pour que ce soit clair pour le compte rendu d'audience, nous examinons

  7   maintenant une image résumée des fosses communes pour chacune des fosses

  8   contenues dans ce volume. Il y a une série de photos qui se rapportent à

  9   chacune des fosses; est-ce exact ?

 10   R.  Oui. Pour chaque zone de fosses, j'ai essayé de produire un document

 11   similaire qui donne non seulement l'image mais également une représentation

 12   de la zone autour de la fosse. Dans ce cas, il s'agit de la route de Liplje

 13   et de fosses communes secondaires. Liplje était reliée au barrage à

 14   Petkovci, et à ma connaissance, trois autres fosses communes liées à

 15   Srebrenica ont été trouvées dans ce secteur, et en fait, par la Commission

 16   bosniaque pour les Personnes manquantes, en fait, j'étais présent lorsque

 17   nous avons examiné une zone avez la commission qui après s'est avérée être

 18   une fosse commune.

 19   Q.  Est-ce qu'il s'agit de Liplje 1, qui est liée au barrage de l'autre

 20   côté ?

 21   R.  Non, Liplje 2.

 22   Q.  Nous pouvons passer à l'image 48 dans la version papier et à l'image 63

 23   dans le système e-court.

 24   Je vous demanderais de bien vouloir expliquer ce que nous voyons ici.

 25   R.  Pareillement. J'ai essayé de montrer pour la cour les images de la zone

 26   qui montrent bien les fosses communes secondaires. C'est moi qui suis

 27   l'auteur de ces images en jaune, qui étaient dans le document; l'image en

 28   rouge n'a pas été placée par moi-même. Je sais qu'il y a une troisième


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  1   fosse commune, qui a été identifiée sur la route de Cancari et est

  2   numérotée route Cancari 13, et est plus près de la route Cancari 1. Je sais

  3   également que, lorsque la Commission bosniaque a procédé à l'exhumation de

  4   ces fosses communes, ils les ont numérotées, d'une façon différente que

  5   nous-mêmes, donc, lorsque je les ai nommées, je leur ai donné le nom de

  6   Kamenica et ainsi de suite, c'est-à-dire l'appellation qui avait été

  7   utilisée par la Commission bosniaque.

  8   Q.  Bien. Nous allons prendre un exemple précis que la Chambre connaît

  9   bien. Il s'agit de la route de Cancari 12, et je vous demanderais de bien

 10   vouloir afficher l'image 18 dans la version papier, 29 dans le système e-

 11   court.

 12   Je voudrais donner quelques informations générales ici. Dans votre rapport

 13   de l'année 2000, à la page 16, vous dites que la vue aérienne de la ferme

 14   de Branjevo a été divulguée pour la première fois le 21 mars 1996; est-ce

 15   exact ?

 16   R.  Oui, cela est exact.

 17   Q.  La fosse commune a été exhumée plus tard la même année par le Dr

 18   Haglund ?

 19   R.  Oui, c'est cela. C'est le Dr Haglund et son équipe de PHR, qui ont

 20   procédé à l'exhumation de plusieurs corps de cette fosse commune primaire.

 21   Q.  Si vous pouvez brièvement nous donner une description de ce que nous

 22   voyons ici à l'image 18.

 23   R.  Messieurs les Juges, je me suis rendu sur cette ferme militaire à

 24   plusieurs reprises. Je vous demanderais de regarder la ligne verticale qui

 25   passe vers le tiers supérieur du document et qui rejoint un groupe de

 26   bâtiments aux routes. C'est maintenant détruit. A l'époque, c'était une

 27   exploitation agricole, et je crois même que c'était une porcherie avec

 28   plusieurs bâtiments. Si vous regardez vers la gauche de l'image, vous


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  1   verrez des pistes et on voit également des traces de véhicules, et la zone,

  2   qui est indiquée "zone de fosses," est en fait la fosse commune qui a été

  3   exhumée par le Pr Haglund sur la ferme de Branjevo.

  4   Q.  Cette désignation a été faite par une autre personne; est-ce exact ?

  5   R.  Oui, c'est exact. Ça n'a pas été fait par le Tribunal pénal.

  6   Q.  Maintenant nous avons une date du 21 septembre 1995. Je vous

  7   demanderais de passer à la page suivante, page 19, version papier; page 30,

  8   dans le système e-court.

  9   Il s'agit donc d'une image en date du 27 septembre 1995. Veuillez nous

 10   décrire ce que nous voyons.

 11   R.  Il s'agit de la même zone. On voit plus clairement les bâtiments qui

 12   appartiennent à l'exploitation agricole. Si vous suivez les traces que l'on

 13   voie autour, ces traces sont plus définies sur cette image, et suite à mon

 14   examen de cette image, je pense pouvoir dire que le titre indique que cette

 15   fosse commune a bien été remuée, à savoir qu'elle a été ouverte et qu'en

 16   fait on procède au pillage de cette fosse commune.

 17   Q.  Une fois de plus, ces marques en blanc sont la conclusion de celui qui

 18   a fourni cette image ?

 19   R.  Oui, cela est exact, et je ne vois pas d'excavatrice ici. Je vois une

 20   marque, ce que nous avons utilisé pour cette image c'était pour retrouver

 21   la zone de fosse commune et le point d'exécution.

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Nous allons maintenant passer à l'image 71,

 23   version papier, image 96, dans le système e-court.

 24   Q.  Qu'est-ce qui est important ici, pouvez-vous nous dire dans quel

 25   secteur nous nous situons ?

 26   R.  C'est la photographie d'avant de fosses communes secondaire de Cancari

 27   12. Vous voyez une ligne qui passe vers le haut, et vers la droite. A côté

 28   de cela, il y a des fosses communes qui sont créées, mais vous voyez que le


Page 25842

  1   7 septembre 1995 que cette fosse commune n'existait pas encore.

  2   M. MITCHELL : [interprétation] Nous allons passer à la page suivante. Il

  3   s'agit d'une image en date du 27 septembre 1995, c'est-à-dire à la même

  4   date que l'image de la ferme militaire de Branjevo.

  5   Q.  Veuillez nous décrire ce que nous voyons ici, et peut-être que

  6   l'Huissier peut vous aider, et indiquer sur l'image les faits saillants,

  7   les caractéristiques importantes.

  8   R.  Une chose à remarquer, c'est que, sur cette image, vous voyez toujours

  9   les traces des véhicules. Mais si vous suivez cette ligne-ci et cette

 10   ligne-ci, vous voyez quelles sont les traces des véhicules. Lorsque nous

 11   avons examiné ces fosses communes, on a trouvé que ces traces étaient dans

 12   le sol, c'est-à-dire qu'on a trouvé des traces qui correspondaient à

 13   l'image. Maintenant, si vous prenez cette zone, ce secteur particulier, on

 14   voit ce qui semblait être une fosse ouverte, et c'est exactement

 15   l'emplacement de la fosse commune secondaire de Cancari 12. Il semble ici

 16   qu'elle soit exposée, c'est-à-dire elle n'est pas encore remplie, elle

 17   n'est pas remplie de corps.

 18   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir afficher CR12 ou d'inscrire CR12

 19   dans ce rectangle, et de bien vouloir le parapher et le signer.

 20   R.  [Le témoin s'exécute]

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Je voudrais que ce soit versé au dossier.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Ce sera versé séparément.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P4511.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Nous allons passer maintenant à la page

 25   suivante : 73, version papier, et 88 dans le système e-court.

 26   Q.  Il s'agit maintenant d'une image en date du 2 octobre 1995. Veuillez

 27   nous décrire ce que nous voyons.

 28   R.  Vous pouvez voir très clairement que la masse -- la fosse commune --


Page 25843

  1   pardon, la fosse commune a été remplie. On voit les traces des véhicules,

  2   on les reconnaît de l'image précédente. Elles sont autour de la fosse

  3   commune. On voit qu'il y a des traces d'un véhicule lourd qui en fait

  4   nivelait autour de la fosse commune, et vous voyez ces traces qui partent

  5   de la fosse commune même. Donc c'est après que la fosse a été remplie ou

  6   que les corps ont été placés dans la fosse et qu'elle a été recouverte. On

  7   utilise cette image pour identifier le site, et ensuite on a pu ouvrir les

  8   fosses communes exhumer les corps.

  9   Q.  Cette fosse, Cancari 12, a été exhumé par le Pr Richard Wright en 1998;

 10   est-ce exact ?

 11   R.  En 1998, c'est exact.

 12   Q.  Pouvons-nous dire qu'est-ce qu'on a trouvé au site de la route de

 13   Cancari 12 ? Y avait-il des restes humains ?

 14   R.  Oui, j'étais présent à la mortuaire lorsque ces corps ont été examinés,

 15   et j'ai pu examiner certains objets. Il y avait des restes humains complets

 16   et partiels dans ces fosses communes secondaires. Il y avait des objets qui

 17   ont permis l'identification et qui ont permis d'établir le lien avec

 18   Srebrenica, et juillet 1995 ainsi des documents indiquant des personnes

 19   disparues de Srebrenica.

 20   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que ce

 21   volume soit versé au dossier intégralement.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote P4512.

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Merci. Je n'ai pas d'autres questions.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Puisque nous avons déjà fait une pause, nous envisageons de faire une

 27   deuxième pause à 17 heures 10, donc j'invite M. Karadzic a continué.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour à tous. Bonjour, Messieurs et


Page 25844

  1   Madame les Juges. Bonjour à tous.

  2   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

  3   Q.  [interprétation] [aucune interprétation]

  4   R.  [aucune interprétation]

  5   Q.  Puisque nous avons toujours la page 19 présente à l'esprit, j'aimerais

  6   y revenir pour qu'on puisse y apposer une mention. Je crois qu'il s'agit du

  7   document 26633, mais je ne sais pas quel est le numéro de la page dans le

  8   système e-court. Nous venons de voir cette image. Ce document vient d'être

  9   versé au dossier, il a reçu un nouveau document P, alors l'ancien numéro

 10   dans la liste 65 ter, est 23633, page 19.

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Je crois qu'il s'agit de la page 30

 12   dans le système e-court.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel était le numéro de cette

 14   version annotée ?  C'était sans doute P4510.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on voir un agrandissement, s'il vous

 16   plaît ?

 17   Q.  [interprétation] Monsieur Manning, vous dites que vous savez où les

 18   personnes ont été inhumées et où l'exécution a eu lieu; pouvez-vous

 19   indiquer le lieu de l'exécution ?

 20   R.  J'ai marqué la zone en rouge.

 21   Q.  Et l'inhumation ?

 22   R.  C'est l'encadré qui se trouve à gauche.

 23   Q.  Merci. Vous avez cité que vous connaissez le témoignage de Drazen

 24   Erdemovic. Savez-vous qu'il a corrigé son témoignage récemment dans cette

 25   Chambre, et il a dit qu'il est arrivé à Branjevo à 11 heures, et qu'à ce

 26   moment-là, il n'y avait ni prisonniers ni fosse commune; est-ce que vous

 27   avez vu ce témoignage ? Est-ce que l'Accusation vous l'a montré ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr qu'il l'ait corrigé


Page 25845

  1   son témoignage en ce qui concerne son heure d'arrivée. Quelle est votre

  2   question ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, et un autre témoin ont indiqué un autre

  4   lieu comme étant le lieu d'exécution.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'évoquais à l'instant l'heure. Alors

  6   soyez précis, s'il vous plaît, en posant vos questions.

  7   Monsieur Robinson.

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, la page 2 374 du

  9   compte rendu d'audience, il dit être arrivé vers 11 heures, même s'il

 10   n'était pas absolument certain de l'heure.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci porte une cotation un peu

 12   différente. M. Karadzic a dit qu'il avait corrigé son témoignage récemment

 13   et en ce qui concerne son arrivée à Branjevo à 11 heures. Mais je ne suis

 14   pas sûr que tout cela soit nécessaire.

 15   Quelle est votre question ? Est-ce que vous voulez que l'on conserve cette

 16   image maintenant ? Est-ce que nous allons demander au témoin de parapher et

 17   d'apposer une date sur ce document ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas tout de suite.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Vous y étiez informé et vous l'avez dit dans le résumé légiste de 2000

 21   à la page 9 qu'Erdemovic avait dit que les exécutions ont eu lieu environ

 22   entre dix heures et 15 heures et qu'environ 1 200 personnes ont été tuées.

 23   Maintenant nous voyons qu'il est arrivé à 11 heures. Combien de restes

 24   humains ont été trouvés correspondant à combien de corps ont été trouvés

 25   sur ce site ?

 26   R.  Il faudrait que je me reporte au rapport car je ne m'en souviens pas

 27   exactement et je veux pouvoir dire quelque chose d'exact. Mais le nombre de

 28   victimes est décrit, de façon beaucoup plus précise, par le résultat d'ADN


Page 25846

  1   car il y avait des restes humains. Il faudrait que je puisse vérifier mon

  2   rapport de 2000, 2001, parce que ce chiffre a ensuite été changé suite à

  3   l'analyse de l'ADN.

  4   Q.  Merci. Etes-vous d'accord avec le fait que -- ou avez-vous appris

  5   qu'avant les exécutions alléguées aucune fosse commune n'avait été exhumée

  6   ?

  7   R.  Je crois comprendre votre question. Avant juillet 1995, les vues

  8   aériennes montrent qu'il n'y avait pas de fosse dans cette zone, et suite à

  9   l'exhumation de cette fosse le Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie a

 10   trouvé une fosse commune dans ce secteur.

 11   Q.  Merci. Monsieur Manning, avez-vous travaillé dans le contexte d'autres

 12   guerres civiles, et si oui, lequel ?

 13   R.  Non, je n'ai pas participé à des enquêtes pour crimes de guerre avant

 14   mon arrivée au Tribunal et avant que je ne commence à travailler sur

 15   l'affaire de Srebrenica.

 16   Q.  Merci. Je vous informe que Erdemovic a témoigné en tant qu'un des

 17   auteurs allégués. Il a dit qu'entre 11 heures et 14 heures ou 15 heures, en

 18   prenant les personnes, dix personnes à la fois de l'autobus les ont

 19   emmenées, il y a environ 200 mètres, les ont exécutées et ensuite sont

 20   revenues prendre le groupe suivant les dix personnes, et ils ont unité 1

 21   200 personnes sur cette intervalle de temps. Pouvez-vous imaginer cette

 22   scène et le nombre de victimes que cela représente ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr que --

 24   Monsieur Mitchell.

 25   M. MITCHELL : [interprétation] Je suis d'accord que M. Erdemovic a dit 11

 26   heures, mais j'aimerais que l'on cite précisément où il a été dit que

 27   c'était jusqu'à 14 ou 15 heures, parce que dans mon souvenir, il a dit : 15

 28   heures ou 16 heures. Donc si M. Karadzic veut avancer ce scénario, il faut


Page 25847

  1   que cela repose sur des faits et des faits exacts.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Entendu.

  3   Monsieur Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans cette même déclaration, il a dit : Entre

  5   14 heures et 15 heures, alors qu'à d'autres occasions, il a dit : Entre 15

  6   heures et 16 heures. Mais peut-être c'est comme M. Mitchell semble le dire.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faut être précis, mais je ne vois pas

  8   pourquoi il faut faire référence à cela. Soyez précis ou donnez des

  9   références extrêmement précises quand vous évoquez le témoignage de M.

 10   Erdemovic ou lorsque vous citez des parties du témoignage de M. Erdemovic

 11   pour ce témoin.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  J'aimerais savoir -- poser la question suivante à ce témoin : Est-ce

 14   qu'il a accepté ce que M. Erdemovic a dit ou peut-il accepter que, pendant

 15   cette période, 1 200 personnes ont été tuées, dix à la fois, et s'il y

 16   avait 1 200 corps qui ont été trouvés dans cette fosse commune ?

 17   R.  J'ai entendu le témoignage de M. Erdemovic à plusieurs reprises. Mon

 18   travail, en tant qu'enquêteur, est de soit affirmer ou confirmer de telles

 19   déclarations. Ce processus que nous avons suivi pour les exhumations. La

 20   fosse commune a l'expression militaire de Branjevo avait été pillée et

 21   plusieurs corps avaient été enlevés. Mais il y avait encore beaucoup de

 22   corps. Je ne veux pas me tromper de chiffres mais il y avait bien plus de

 23   100 corps, et je peux tout à fait imaginer que 1 200 jeunes hommes et

 24   garçons aient été tués à la ferme, et je peux me fonder sur l'examen de la

 25   fosse commune et l'examen du nombre de corps et des parties de corps dans

 26   les fosses communes secondaires. Qu'il s'agissait de 1 000 ou de 1 200

 27   corps, je peux tout à fait accepter qu'il s'agissait d'un point d'exécution

 28   important, que la fosse commune était remplie de corps et que ces corps ont


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  1   ensuite été pillés et ont été enlevés pour être placés dans des fosses

  2   communes secondaires le long de la route de Cancari, c'est-à-dire la route

  3   de Cancari 12, 11, 10 et ainsi de suite.

  4   Q.  Merci. Toutefois, dans l'affaire Krstic, à la page 3 618, du 26 mai

  5   2000, vous avez dit que le Procureur a envoyé des enquêteurs sur les lieux

  6   indiqués par M. Erdemovic et que 100 Musulmans avaient été exécutés sur ce

  7   site le 16 juillet 1995.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous répéter ce que vous avez dit

  9   en anglais ? Quand vous passez à l'anglais, veuillez faire une pause pour

 10   que nous puissions tout entendre.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais lire, en citant directement la version

 12   en anglais, à la page 3 618 du 26 mai 2000, dans l'affaire Krstic.

 13   "Le bureau du Procureur a envoyé des enquêteurs sur ce site après

 14   qu'Erdemovic ait informé le Procureur qu'environ 500 Musulmans avaient été

 15   exécutés sur ces lieux le 16 juillet 1995."

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une fois de plus, je n'ai pas tout à

 17   fait saisi le début de ce que vous avez dit en anglais. "Le bureau du

 18   Procureur a envoyé …"

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] "… enquêteurs sur ce site après que Drazen

 20   Erdemovic ait informé le Procureur qu'environ 500 Musulmans avaient été

 21   exécutés sur ce site le 16 juillet 1995."

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur

 23   Karadzic ?

 24   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je vous prie de

 25   m'excuser d'interrompre. La façon dont cette question est formulée peut

 26   induire en erreur. La question qu'on avait demandée auparavant à M. Manning

 27   est : … photographié de Pilica Dom à l'arrière de ce bâtiment où se trouve

 28   le point d'exécution ?


Page 25849

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

  2   M. MITCHELL : [interprétation] Nous parlons d'un site complètement

  3   différent.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons faire afficher cette

  5   page de nouveau.

  6   Monsieur Karadzic, je vous ai demandé si vous vouliez que l'on

  7   conserve cette image à l'écran. Souhaitez-vous conserver cette image ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Veuillez parapher et indiquer une

 10   date. Nous pourrons à nouveau afficher ce document si nécessaire. Donc ce

 11   document est versé au dossier comme pièce pour la Défense.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote 2188.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel était le numéro dans la liste 65

 14   ter dans le compte rendu d'audience de l'affaire Krstic ?

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D5177, page 77.

 16   Q.  Toutefois, Monsieur Manning, dans le résumé légiste de 2007, vous dites

 17   que l'ICMP a identifié 104 victimes de Srebrenica dans cette fosse commune;

 18   est-ce exact ? Je me réfère à la page 5 de ce résumé.

 19   R.  Sans vérifier le rapport, je peux vous dire que j'accepte ces

 20   informations.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit donc qu'il existe 100

 22   corps ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, j'ai bien dit que c'était bien le nombre

 24   de corps identifiés de cette fosse commune, et pas le nombre de corps

 25   trouvés dans la fosse commune. Donc c'était les résultats des examens

 26   auxquels ils ont procédé. Il faut se rappeler qu'on trouve dans cette fosse

 27   commune des parties de corps démembrés et qui ne sont pas entiers, et donc,

 28   vous pouvez trouver, par exemple, juste un pied ou bien une jambe


Page 25850

  1   appartenant à un corps, mais ceci représente toujours et encore un individu

  2   présent dans cette fosse.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous voyons la page sous nos yeux,

  4   Monsieur Karadzic; est-ce bien la page dont vous parlez ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Mais, moi, je parlais du résumé, du résumé

  6   des médecins légistes de 2007, et cela là que l'on dit que la commission

  7   pour les personnes portées disparues avait identifié 104 personnes.

  8   Q.  Pourquoi, Monsieur Manning, d'après vous, l'on a identifié que 104

  9   personnes sur les chiffres allégués de 1 200 personnes tuées ou enterrées ?

 10   R.  Oui, je peux bien imaginer qu'il y a eu autant de personnes enterrées.

 11   Mais la fosse commune primaire qui se trouvait au départ dans la ferme

 12   militaire de Branjevo a été pillée, les corps ont été déplacés, et ensuite

 13   il y a eu le processus d'identification de restes humains, et ce processus

 14   est toujours en cours. Donc on a réussi à identifier à peu près 100

 15   victimes venues de cette fosse primaire, et pour moi, ce numéro est

 16   significatif et indique bien que des corps ont été déplacés de cette fosse

 17   commune primaire, à savoir la fosse de Cancari.

 18   Q.  Est-ce que quelqu'un a pu établir le nombre de victimes de la ferme de

 19   Branjevo ? Est-ce que vous avez accepté ce nombre ?

 20   R.  Ce nombre se trouve dans le rapport de M. Janc. On y trouve donc le

 21   nombre définitif de victimes venues de cette fosse commune, de ce site

 22   d'exécution identifié donc de la fosse primaire de Branjevo. Ensuite

 23   d'autres victimes ont été identifiées dans la fosse secondaire de la route

 24   de Cancari. Donc, si vous prenez les chiffres les plus récents et si vous

 25   les additionnez et si vous les comparez donc avec les fosses primaires et

 26   secondaires, vous allez arriver au chiffre exactement correspondant au

 27   nombre de personnes tuées.

 28   Q.  Bien. Savez-vous que dans cette zone, dans cette région, la guerre a


Page 25851

  1   duré à peu près 45 mois. Est-ce que vous avez été informé du fait qu'il

  2   fallait bien faire la différence entre les personnes tuées pendant les mois

  3   en question et les personnes tuées au mois de juin au cours de combat et

  4   puis aussi qu'il fallait identifier les personnes qui ne sont pas mortes au

  5   cours de combats mais qui ont été tuées de façon illégale ? Est-ce que l'on

  6   vous a bien dit qu'il y a eu différentes périodes au cours desquelles ces

  7   personnes ont pu être tuées ou mortes et enterrées par la suite ?

  8   R.  Je sais que ce conflit a duré pendant une période assez longue. Cela

  9   étant dit, je ne pense pas qu'il y a eu un conflit dans la zone de la ferme

 10   militaire de Branjevo. En tout cas, je n'ai pas d'éléments pour prouver que

 11   les corps autres que les corps des personnes tuées pendant la chute de

 12   Srebrenica exécutés à la ferme de Branjevo ont été placés dans cette fosse

 13   commune et ensuite déplacés vers d'autres tombes secondaires. Donc les

 14   experts se sont penchés sur la question, il s'agissait pour eux

 15   d'identifier que les corps se trouvant dans la fosse étaient bien liés à la

 16   chute de Srebrenica et ensuite il s'agissait de prouver qu'il y avait donc

 17   des liens avec d'autres fosses utilisées au cours des années. C'est quelque

 18   chose qui est noté, qui est dit par les experts pour chacune des fosses

 19   identifiées et examinées.

 20   Q.  Est-ce que, dans les déclarations préalables ou les déclarations tout

 21   court de Drazen Erdemovic, vous avez trouvé l'information qu'il avait été

 22   informé des gardiens, ce jour-là, que même avant il y avait eu des

 23   enterrements, et j'utilise bien le pluriel, avant cette date-là ?

 24   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas avoir entendu M. Erdemovic dire cela,

 25   lui ou qui que ce soit d'autre d'ailleurs.

 26   Q.  M. Erdemovic l'a bien dit et il l'a confirmé ici même, dans ce

 27   prétoire. Il a dit que les gardiens lui avaient dit que avant cela il y

 28   avait eu des enterrements dans cette région. Mais bien, passons.


Page 25852

  1   Savez-vous, Monsieur Manning, quelles étaient les circonstances, la

  2   situation à Srebrenica au cours de ces trois années et demie ? Est-ce que

  3   vous êtes d'accord avec moi qu'il n'y avait pas de circulation vraiment

  4   routière en cours, qui fonctionnait, et que les banques ne fonctionnaient

  5   pas, par exemple, dans la région ?

  6   R.  Monsieur le Président, moi, je connais les circonstances de Srebrenica

  7   après avoir entendu des témoins, après avoir vu des enregistrements, je

  8   sais que la situation était particulièrement difficile. Il y a eu des

  9   éléments qui indiquent que la population était pratiquement affamée que le

 10   gouvernement n'était pratiquement pas en mesure de contrôler la situation

 11   et qu'il fonctionnait à peine.

 12   Q.  A un moment donné, vous avez dit et je peux le trouver, si vous le

 13   souhaitiez, qu'il y avait beaucoup d'éléments qui ont rendu les enquêtes

 14   plus compliquées. Pourriez-vous nous dire quels sont ces éléments qui ont

 15   rendu votre travail plus difficile, à savoir le travail qui consistait à

 16   établir la vérité dans le cas de Srebrenica ?

 17   R.  Tout simplement, le nombre -- le pur nombre des exécutions qui ont

 18   fait, que cette enquête a duré très longtemps. Peut-être parlez-vous du

 19   fait que les fosses communes primaires ont été remuées, et si nous avions

 20   tout simplement examiné des fosses communes qui n'avaient pas été remuées,

 21   on aurait eu affaire à des corps entiers qu'on aurait pu identifier plus

 22   rapidement. Mais quand ils ont essayé de cacher ces fosses en pillant ces

 23   fosses, en les remuant, en déchirant les corps, ceci a rendu le travail

 24   bien plus difficile, l'identification est devenue plus difficile mais aussi

 25   le nombre de sites qu'il s'agissait d'examiner est devenu plus grand. S'il

 26   n'y avait pas eu de remuage, si on n'avait pas touché à ces fosses

 27   communes, ce travail aurait duré bien moins longtemps, et on aurait pu

 28   travailler sur la base des autopsies effectuées dans les fosses primaires.


Page 25853

  1   Q.  Mis à part cela, saviez-vous que des experts avaient des remarques

  2   importantes quant au procès même d'enquête. Par exemple, même Haglund avait

  3   dit que les enquêtes faites en 1996 étaient des enquêtes qui correspondent

  4   à un cirque tout simplement. Donc il y avait vraiment des objections très

  5   sérieuses par rapport au travail de M. Haglund ?

  6   R.  Je sais qu'il y a eu des objections quant au travail du Dr Haglund, et

  7   d'ailleurs, on s'en est occupé avant que je n'arrive au Tribunal. Moi, je

  8   n'ai pas pris part à cela mais, moi, je n'ai pas remarqué des critiques

  9   sérieuses du travail du Dr Haglund, en tout cas, de rapport qu'il a soumis

 10   aux Juges, ainsi que le rapport d'autres experts, à savoir le Pr Wright, M.

 11   Baraybar, Dr Clark, et cetera. Je n'ai pas de connaissance de première main

 12   des problèmes qu'a dû rencontrer le Dr Haglund, en tout cas, je sais qu'il

 13   y n'en a pas eu par rapport aux rapports d'exhumation des autopsies et à la

 14   façon dont cela a été fait.

 15   Q.  Je voudrais vous informer que M. Haglund, dans l'affaire Popovic, aux

 16   pages 19 065 à 68, a dit que ces enquêtes jusqu'en 1996 étaient vraiment,

 17   ressemblaient à un cirque, rien d'autre. Mais savez-vous que le Dr Snow,

 18   qui est un anthropologiste très connu dans le monde, et un médecin légiste,

 19   a dit que la façon dont a procédé aux exhumations en 1996 n'était pas très

 20   rigoureuse; au contraire, que c'était vraiment de l'à peu près ?

 21   R.  Je ne me rappelle pas de cela précisément. Je sais qu'il y a eu des

 22   allégations au sujet du Dr Haglund mais, en tout cas, on en a parlé avant

 23   que je n'arrive au Tribunal. Moi, je ne me suis pas vraiment penché là-

 24   dessus, et je ne saurai faire des commentaires à ce sujet, mis à part le

 25   fait que, moi, quand j'ai examiné les documents en l'espèce, je n'ai pas vu

 26   de document, venu du Dr Haglund et de son équipe, qui ne paraissait pas

 27   irrégulier mais, en tout cas, moi, je ne suis pas anthropologiste et je ne

 28   suis pas un médecin légiste.


Page 25854

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le moment est venu pour prendre la

  2   pause.

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Deux petits points, s'il vous plaît ?

  4   Tout d'abord, le Procureur tout simplement n'a pas été informé de l'expert

  5   de la Défense pour la déposition de M. Butler, et puis aussi, je voudrais

  6   vous rappeler que M. Djurdjevic devrait finir sa déposition demain.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, si j'ai bien compris, il pouvait

  8   rester encore mercredi.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, mais c'est demain, mercredi.

 10   J'en parle parce que, si M. Manning doit terminer demain, je veux bien,

 11   mais M. Djurdjevic aussi doit terminer demain sa déposition.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il ne peut pas terminer sa déposition

 13   demain, il devra revenir.

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Très bien.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons prendre une pause de 25

 16   minutes et nous allons reprendre nos travaux à 15 heures 40.

 17   --- L'audience est suspendue à 17 heures 13.

 18   -- L'audience est reprise à 17 heures 43.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, les problèmes de

 20   logistique ne devraient pas influer sur le temps alloué pour le contre-

 21   interrogatoire. Nous allons faire tout ce qui est possible pour essayer de

 22   comprendre la situation des témoins mais, si nécessaire, nous allons

 23   poursuivre la session d'aujourd'hui jusqu'à 7 heures 20 ou 7 heures 30;

 24   cela dépend de la situation. Puis, demain, nous allons peut-être siéger

 25   aussi plus longtemps, par exemple, entre 9 heures et 3 heures, et ceci va

 26   résoudre la situation, je l'espère.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pouvez


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  1   poursuivre.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] La Défense va répondre aux besoins de la Cour.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Mais, Monsieur Manning, vous ne devez pas -- vous vous sentez agressé

  5   mais je ne vous agresse pas. Je n'agresse personne. Tout ce que j'essaie de

  6   tirer les choses au clair, et je vais vous présenter ma thèse. Voici quelle

  7   est ma thèse.

  8   Je considère qu'il s'agissait d'un foyer de guerre qui a duré presque 45

  9   mois. Les gens se sont faits tuer sur ces foyers de guerre, et les

 10   personnes décédées de l'autre côté étaient enterrées dans des fosses

 11   communes alors que leur propre mort était enterrée dans leur tombe

 12   familiale.

 13   Est-ce que vous êtes au courant de cela ? Est-ce que vous savez que les

 14   gens qui ont perdu leur vie au cours des opérations de combat ont été

 15   enterrées dans des fosses communes ?

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell. 

 18   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi de vous

 19   interrompre, mais je voudrais qu'il y ait quelque chose au clair. Des gens

 20   ont perdu leur vie là-bas, mais M. Karadzic avait la possibilité

 21   d'interroger M. Erdemovic, la semaine dernière, et il ne lui a jamais

 22   présenté cette thèse. Nous avons essayé d'établir quels étaient ses

 23   arguments, quelle a été sa thèse, la semaine dernière, et à aucun moment,

 24   il n'a dit à M. Erdemovic que les corps retrouvés dans aucune de ces

 25   tombes, ou particulièrement de la tombe ou de la fosse de la ferme de

 26   Branjevo, étaient des corps de personnes tuées au combat. Il ne l'a pas dit

 27   à ce témoin, à l'époque.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous avez entendu M.


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  1   Mitchell. Monsieur Karadzic, essayez de poser la question de façon plus

  2   précise ou bien poser une question à la fois.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais répondre, Monsieur le Président. La

  4   dernière fois, je n'ai pas voulu avouer quelque chose que M. Mitchell

  5   voulait obtenir de moi, parce qu'il veut prouver et c'est à lui de prouver.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, posez la question à

  7   la dois, une question à la fois, et poursuivez.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Savez-vous, Monsieur, qu'il y a eu des morts pendant ces 45 mois ? Des

 10   gens se sont faits tués, et les personnes tuées appartenant au camp de

 11   l'ennemi étaient enterrées au cours du processus d'assainissement du

 12   terrain dans les fosses communes.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Là, vous parlez de la ferme de Branjevo,

 14   n'est-ce pas ? Vous parlez de ce site-là ?

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, je parle de toute la zone, de la région,

 16   toute la région qui comprenait donc le théâtre de guerre.

 17   R.  Monsieur le Président, j'accepte que de nombreuses personnes ont été

 18   tuées et certaines ont été enterrées dans ces fosses communes. Nous n'avons

 19   pas vu de preuves qu'il y avait dans les fosses de Srebrenica des corps

 20   d'une période précédente. Nous n'avons pas trouvé de preuve que les corps

 21   se trouvant dans les fosses communes n'étaient pas les corps des personnes

 22   exécutées. Ils étaient placés dans ces fosses communes et ensuite cachés.

 23   D'après moi, il ne s'agissait pas des corps trouvés au cours des opérations

 24   d'assainissement de terrain. Il s'agissait des fosses creusées de façon

 25   clandestine où on a placé des corps des victimes qui souvent avaient les

 26   yeux bandés et des mains ligotées. Ensuite ils étaient tués.

 27   Q.  Monsieur Manning, est-ce que vous avez vu ou entendu parler des

 28   victimes des éclats d'obus, des personnes tuées par des éclats d'obus ?


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  1   R.  Notre archéologue principal, le Dr Wright; ainsi que l'anthropologue,

  2   le Dr Chris Lawrence; ainsi que le Dr Clark ont dit que certains corps,

  3   surtout les corps de Glogova 1 et 2, Ravnice et Zeleni Jadar, présentaient

  4   des blessures provoquées par des éclats d'obus. Il s'agissait des corps

  5   aussi qui ont été parfaitement démembrés, défigurés par des explosions, et

  6   il y avait des preuves indiquant qu'il y a eu des explosions à Pilica Dom

  7   et dans le dépôt de Kravica.

  8   Q.  Monsieur Manning, vous avez dit que vous n'avez pas trouvé d'objets de

  9   culte autre que ceux propres à la religion musulmane. Donc vous n'avez pas

 10   trouvé d'objets de culte appartenant à la religion chrétienne; mais est-ce

 11   qu'il y avait des chrétiens dans ces fosses ?

 12   R.  Nous n'avons pas trouvé d'éléments corroborant une autre religion, mis

 13   à part l'Islam, donc nous n'avons pas trouvé d'objets près de corps ou bien

 14   dans les fosses.

 15   Q.  Je voudrais vous montrer une pièce à conviction. Il s'agit de la pièce

 16   65 ter 2478, et je vais vous montrer un exemple. Vous allez voir qu'un

 17   Serbe avait été enterré là-bas; pourriez-vous nous expliquer comment un

 18   Serbe pouvait se trouver enterrer dans une fosse commune, mis à part par le

 19   biais de l'assainissement ? Est-ce que vous avez une explication pour cela

 20   ? Comment se trouve-t-il qu'un Serbe se voit enterrer dans une fosse

 21   commune ? Quelle autre explication pouvez-vous nous donner mis à part une

 22   opération d'assainissement du terrain, les Serbes ne l'auraient pas reconnu

 23   tout simplement ?

 24   R.  Moi, je pensais que vous alliez me montrer quelque chose mais, de toute

 25   façon, je ne sais pas, je ne suis pas au courant d'une victime serbe

 26   retrouvée dans une fosse commune liée à Srebrenica.

 27   Q.  Est-il possible de voir la classe 1, page 17 -- Lazete 1, page 17 ?

 28   Veuillez examiner le numéro 523. Vous avez Nusret Zimic, il avait ici le


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  1   document pour un véhicule, et au-dessous, on voit le numéro de 523, Gojko

  2   Polic, c'est juste au-dessous. Clairement, c'est une personne qui n'a pas

  3   été reconnue et qui a été enterrée pendant l'assainissement du terrain;

  4   est-ce que vous pouvez nous donner une explication ? Pourquoi voulez-vous

  5   qu'on exécute un Serbe, qu'on l'enterre dans une fosse commune ? Est-ce

  6   qu'il y avait des Serbes parmi les soldats des Unités de Srebrenica ?

  7   R.  Monsieur le Président, le document que M. Karadzic --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- donc c'est le document Lazete 1, le

  9   numéro 523.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un document que j'ai présenté, et ici,

 11   on voit qu'un corps a été retrouvé dans Lazete 1, le numéro 523, et on a

 12   trouvé sur lui une pièce d'identité, et le nom de cette pièce d'identité,

 13   il indiquait qu'il s'agissait de Gojko Polic. Cela ne veut pas dire

 14   forcément que cet individu était dans la fosse commune. Ceci indique tout

 15   simplement que cet individu possédait ces pièces d'identité.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Mais pourquoi voulez-vous que cette personne possède ces documents

 18   d'identité, surtout s'il s'agit là de pièce appartenant à un véhicule

 19   immatriculé à Tuzla ?

 20   R.  Je ne sais pas pourquoi cette personne avait sur elle ce document.

 21   L'INTERPRÈTE : L'interprète pense qu'il s'agit de la carte grise d'un

 22   véhicule immatriculé à Tuzla.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Sans vérifier les numéros, ceci peut tout de

 24   même signifier que le corps identifié sous le numéro 523 avait ce document

 25   et que ce document a été près du corps, peut-être pas forcément sur le

 26   corps, et je devrais le vérifier. Mais ce document, j'ai l'impression, a

 27   été trouvé dans Lazette 2.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais pourquoi vous pensez cela ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'il y a des caractères qui sont

  2   surlignés.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Pouvez-vous nous expliquer cela ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas vraiment sûr de cela, il

  5   faudrait que je vérifie.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voyez qu'il y a des numéros qui

  7   sont surlignés, et ici, on voit donc : "Le numéro surligné, qui indique le

  8   nom trouvé dans la liste des personnes portées disparues de Srebrenica."

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant je m'en souviens. Effectivement, il

 10   s'agit là des listes des personnes portées disparues de l'ICRC, donc des

 11   personnes portées disparues de Srebrenica, et c'est le nom le plus proche

 12   du nom de la personne disparue.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Manning, pourriez-vous regarder le numéro 3, Husein Lenjinac,

 16   il a une carte d'identité mais aussi un carnet de chèques. Est-ce que les

 17   banques fonctionnaient à Srebrenica au cours des trois dernières années de

 18   la guerre ? Est-ce que l'on pouvait, à l'époque, payer par chèque ?

 19   R.  Je ne sais pas, mais je pense que non.

 20   Q.  Merci. Veuillez examiner le numéro 514; là aussi, nous avons un

 21   certificat bancaire.

 22   R.  Oui, en effet.

 23   Q.  Merci. 567, il a un carnet de santé, une carte d'assurance maladie;

 24   cependant, l'assurance, le système d'assurance maladie ne fonctionnait pas

 25   Srebrenica. Il fallait payer en cash les médecins.

 26   R.  Je pense que M. Karadzic ici évoque le 582, et là encore, je suis

 27   d'accord. Si vous me le permettez, j'ai examiné ce document et j'ai pu voir

 28   que ces documents se rapportent à des périodes qui ont précédé de loin la


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  1   chute de Srebrenica. Certains de ces documents remontaient jusqu'aux

  2   grands-parents de la personne en question. Je présume que cette personne

  3   qui est née -- alors j'ai constaté qu'il y avait des personnes très âgées

  4   dans la fosse et que je me souviens également que certains des documents

  5   avaient déjà dix, 20, 30, même 40 ans.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le numéro 567 comportait également une

  7   carte d'assurance maladie, Monsieur Manning ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Veuillez regarder ce que l'on trouve au numéro 634. Une carte

 12   d'identification de Rogatica. C'est un homme de Rogatica qui a pris au

 13   combat, qui est mort et qui a été enterré pendant l'opération de

 14   l'assainissement du terrain. Est-ce que vous avez une preuve à l'appui pour

 15   prouver autre chose, parce que les gens de Rogatica n'avaient rien à voir

 16   avec Srebrenica ?

 17   R.  Je ne peux pas dire quoi que ce soit sur cela. Outre le fait de dire

 18   que cette personne était dans une fosse commune, que nous avions clairement

 19   identifiée comme étant liée à la chute de Srebrenica et qui contenaient les

 20   corps de personnes qui étaient ligotées, dans certains cas, bandés et

 21   exécutés.

 22   Q.  Merci. Savez-vous, Monsieur Manning, que les prisonniers de guerre ne

 23   pouvaient pas garder leurs passeports ? La dernière personne sur cette

 24   page, eh bien, on la voit munie d'un passeport. Attendez. 641. Chez moi, la

 25   page se termine là. Donc c'est le numéro 641, les passeports, et on voit le

 26   numéro du passeport 25, et cetera. C'est à peu près la huitième ligne

 27   partant d'en bas du tableau en anglais.

 28   R.  Oui, je vois cette mention. J'ai examiné ces éléments. La majorité des


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  1   corps que nous avons trouvés dans les fosses portaient une pièce d'identité

  2   ou une autre. D'habitude des portefeuilles, des porte-monnaie, c'était très

  3   souvent le cas.

  4   Q.  Juste au-dessous, nous avons une personne qui est munie donc d'une

  5   carte d'identité mais aussi d'un carnet d'identité militaire. C'est le

  6   numéro 637; est-ce exact ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Merci. On n'a pas besoin de tourner la page. Mais, moi, je suis déjà à

  9   la page suivante. Attendez un instant. 648. Là, nous trouvons un rapport

 10   médical. Il faudrait voir la date. Il faudrait voir le nom du médecin. Est-

 11   ce qu'on a gardé ce document ?

 12   R.  Je ne peux répondre à cette question. C'est au Tribunal pénal pour

 13   l'ex-Yougoslavie d'y répondre. Dans la fosse commune de Lazete, beaucoup de

 14   ces documents ont été donnés à l'organisation PHR, Médecins pour les Droits

 15   de l'homme, et c'est eux qui ont beaucoup travaillé pour identifier des

 16   victimes. Il faut le demander au TPY s'ils ont toujours cette liste. Il y a

 17   une photographie.

 18   Q.  Merci. Vous avez confirmé avoir trouvé auprès d'une victime un journal

 19   hollandais datant du mois d'avril 1995; est-ce exact ?

 20   R.  Oui, c'est exact. Nous avons trouvé plusieurs objets qui étaient liés

 21   au Bataillon néerlandais.

 22   Q.  Merci. Pourriez-vous nous donner une raison pour laquelle quelqu'un

 23   garderait une publication, un journal hollandais pendant trois mois, trois

 24   mois et demie ? Pourquoi il prendrait ce journal en prison ? Quelle est

 25   l'explication pour cela ? Quelle logique cela suit ?

 26   R.  Madame et Messieurs les Juges, à ma connaissance, certains de ces

 27   journaux étaient découpés à petits carrés. On a supposé qu'on les utilisait

 28   pour rouler des cigarettes et que les photos en question montreraient bien


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  1   qu'il s'agissait de petits morceaux de papier journal. Pourquoi est-ce

  2   qu'ils les gardaient, les conservaient, je ne peux pas répondre à cette

  3   question.

  4   Q.  Merci. Mais vous n'avez pas écrit ici qu'il s'agissait de coupures de

  5   journaux. Vous avez dit tout simplement qu'on a trouvé un journal

  6   hollandais datant du mois d'avril. Vous avez vu la date, le mois, donc il

  7   s'agissait d'un journal entier, n'est-ce pas ?

  8   R.  Non, ce n'est pas exact. Ce n'est pas à dire qu'il n'y avait pas une

  9   page intégrale parmi les dizaines de milliers d'objets. Mais j'ai le

 10   souvenir précis d'un journal hollandais découpé en des petits morceaux de

 11   nature à pouvoir être roulés en cigarettes.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourriez-vous nous montrer la page 19, s'il

 13   vous plaît ? Les objets, ayant trait à la religion, c'est le tableau qui

 14   est un tout petit peu plus bas. Veuillez voir ce qui est écrit, par

 15   exemple, au 471, une boite à tabac, gravée en argent, couleur argent. Vous

 16   avez trouvé aussi des montres argentées ou en argent, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, c'est exact.

 18   Q.  Merci. Voyons voir ce que vous avez inclus dans ces objets liés au

 19   culte. Tout d'abord, on voit un sachet en forme de triangle en coton; est-

 20   ce que vous savez à quoi cela sert ? Est-ce qu'en Bosnie, on vous a informé

 21   de nos coutumes de guerre ?

 22   R.  Je ne suis pas sûr de comprendre la question.

 23   Q.  Vous a-t-on dit ce qu'un guerrier musulman fait, ce qu'il porte sur

 24   lui, ce qu'un guerrier serbe porte sur lui; est-ce qu'ils vous ont expliqué

 25   ces coutumes ? Donc des différents objets liés à la religion, différentes

 26   inscriptions ou bien des amulettes, et cetera.

 27   R.  Je ne suis pas sûr d'en avoir parlé longuement, mais je fais des

 28   recherches pour essayer de comprendre quels étaient ces objets qu'on avait


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  1   trouvés. J'ai découvert ce qu'était un [inaudible] et que ces articles qui

  2   étaient des petites reproductions du Coran ou des paragraphes du Coran,

  3   étaient souvent portés par des personnes de confession musulmane; et j'ai

  4   vu ce type de document et ces bouts de tissus dans les fosses communes.

  5   Q.  Donc, ici, nous voyons donc des chapelets, mais les chapelets

  6   appartiennent à toutes les religions. Toutes les religions ont des objets

  7   ressemblant à un chapelet, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, je suis d'accord quant au fait que les chrétiens et les Musulmans

  9   ont des chapelets pour prier.

 10   Q.  Merci. Voilà on voit aussi des sachets; est-ce que vous savez que dans

 11   ces sachets l'on place des objets des cultes, des inscriptions religieuses,

 12   des amulettes, et cetera ?

 13   R.  Oui, en effet, et là, on pouvait identifier le texte, on l'a noté.

 14   Comme je l'ai déjà dit, la seule religion, nous avons pu confirmer la

 15   présence, sur ces objets, est la religion musulmane.

 16   Q.  Merci.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Tournez la page, s'il vous plaît. Je ne suis

 18   pas sûr de la page; est-ce que bien la page 20 que l'on voit sur l'écran ?

 19   Tout à l'heure, on a parlé de Coran, des reproductions de Coran; quel est

 20   le numéro de page ici ?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la page précédente; si vous

 22   évoquez ici le Coran en miniature dans une boite en plastic rouge, c'était

 23   à la page précédente.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Donc, maintenant, il me faudrait la page

 25   20. Il faudrait donc tourner la page vers la page suivante. La page

 26   suivante encore, s'il vous plaît. Montrez-moi le numéro ERN, s'il vous

 27   plaît, de la page.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous la version en B/C/S, Monsieur


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  1   Karadzic ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'ai la version en B/C/S.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons les afficher tous les deux.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible de voir la page 20 en serbe,

  5   s'il vous plaît ? C'est le 471 qui m'intéresse.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  On a trouvé une montre sur une chaînette de couleur argentée.

  8   R.  Je vois la version en B/C/S, mais je me souviens de la version

  9   anglaise, oui, c'était gravé avec le nom et la date du : "5/3/1991, le

 10   tunnel de Krizevci."

 11   Q.  Oui, c'est la page 19 en anglais.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est la page où nous sommes

 13   actuellement.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà, la page suivante, s'il vous plaît.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Veuillez voir --

 17   Pourriez-vous nous montrer la page suivante en serbe, s'il vous plaît

 18   ? Voilà.

 19   Regardez le nombre de passeports trouvés auprès de ces personnes, des

 20   lettres, des permis de conduire, et trois passeports. Je vois au moins

 21   trois passeports, il y a un nouveau des documents venu de la banque

 22   Priverana [phon] de Sarajevo, et cetera, et cetera.

 23   Saviez-vous, Monsieur Manning, que les prisonniers de guerre ne

 24   pouvaient pas avoir, sur eux, leur passeport ? Ici, non plus dans le

 25   quartier pénitentiaire, nous n'avons pas le droit de garder nos passeports;

 26   le saviez-vous ?

 27   R.  Oui, je suis d'accord. Toutefois, dans le cas de notre enquête et les

 28   déclarations des témoins, le travail d'exhumation a montré que ces


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  1   personnes avaient été capturées et exécutées toujours en possession de ces

  2   documents. alors je ne sais pas pourquoi ces documents n'ont pas été

  3   enlevés, mais on en a vu que dans toutes les fosses communes, la majorité

  4   des victimes portaient une forme d'identification ou une autre ou quelques

  5   objets personnels de petite taille. Je crois que Nova Kasaba 99, et la

  6   seule fosse commune où nous avons trouvé des effets personnels assez

  7   importants, à savoir des sacs. Mais pour l'essentiel, les victimes

  8   portaient uniquement ce qu'ils avaient sur leur personne.

  9   Q.  Merci. Savez-vous qu'ici, l'on a accusé les soldats serbes, les

 10   policiers serbes, les individus d'avoir pris les passeports, les objets de

 11   valeur des personnes arrêtées et placées en détention. Comme voulez-vous

 12   réconcilier les deux affirmations ? Il y en a une qui ne tient pas la

 13   route. Comment vous pouvez affirmer que ces mêmes prisonniers ont gardé ces

 14   objets de valeur et leur passeport même ?

 15   R.  Madame et Messieurs les Juges, si je peux vous donner un exemple de

 16   l'entrepôt de Kravica, le survivant, qui a peut-être déposé ici devant la

 17   Chambre, a dit qu'il avait été capturé ou qu'il s'était rendu. Il a été

 18   détenu dans la prairie de Sandici, il a ensuite été transporté à l'entrepôt

 19   de Kravica à un kilomètre de là où l'exécution a eu lieu. Il n'a pas dit

 20   dans mon souvenir qu'il a fait l'objet d'une fouille approfondie. D'autres

 21   récits de survivants indiquent la même chose, et je comprends que les

 22   récits en temps de guerre indiquent que les prisonniers et les autres,

 23   normalement, se voient ôter leurs effets personnels. Dans ce cas précis,

 24   les corps ont été trouvés avec des documents d'identification et avec des

 25   petits objets sur leur personne, et ceci dans la majorité des cas.

 26   Q.  Merci. Mais je voudrais vous poser une question. Est-ce que vous avez

 27   appris ? Est-ce que vous êtes d'accord que le meurtre à Kravica a fait

 28   suite à un incident, que l'on n'a pas noté les noms des gens, on n'a pas


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  1   noté les objets trouvés, on a tout simplement gardé ces prisonniers et

  2   après l'incident il y a eu cette tuerie ? Etiez-vous au courant de cela ?

  3   R.  Je sais que ces hommes ont été transportés dans l'entrepôt, vers

  4   l'entrepôt, qu'ils ont été détenus là et qu'ils ont été exécutés en masse,

  5   et je sais -- même si je n'ai pas fait partie de cette enquête-là, donc

  6   j'ai connaissance d'une personne qui, et j'essaie de me souvenir exactement

  7   de ce qui s'est passé, qui avait essayé de s'emparer d'une arme et que

  8   c'est à ce moment-là que les exécutions ont commencé. Mais je n'ai pas

  9   participé à cette partie-là de l'enquête parce que cela s'est produit après

 10   mon départ.

 11   Q.  Merci. Pour votre information, il s'est emparé d'une arme en

 12   s'approchant -- sous prétexte de s'approcher pour allumer une cigarette, et

 13   ensuite il a tué avec cette arme, et donc ces gens n'étaient même pas

 14   traités comme des prisonniers de guerre. Ils étaient tout simplement

 15   gardés. C'est pour cela que les choses se sont passées ensuite ainsi. Mais

 16   voyons voir la page suivante. Est-ce que vous saviez, Monsieur Manning, que

 17   les combattants musulmans portent des bandeaux autour de leur tête ? Ce

 18   sont des bandeaux rituels, les combattants islamiques, mais aussi les

 19   combattants serbes, et vous pouvez avoir la broderie de la mère du

 20   combattant qui brode quelque chose sur ce bandeau, ça s'appelle le halal de

 21   la mère, qui fait cela pour son fils avant qu'il ne s'en aille en guerre, à

 22   la guerre, et puis il peut aussi y avoir des inscriptions du Coran; étiez-

 23   vous au courant de cela ?

 24   R.  Non, je ne le savais pas.

 25   Q.  Je vous pose la question justement pour savoir si l'on vous informait

 26   de tout là-bas sur le terrain. Parce que voyons voir comment ces bandeaux

 27   s'appellent ici, parce que parfois on dit bandeaux, des bandeaux ayant

 28   servi à bander les yeux, ou parfois vous dites probablement un bandeau et


Page 25868

  1   ont servi à bander les yeux. Essayons de voir de quoi cela ressemble. Donc,

  2   ici, on voit que le bord est irrégulier, orné, et ensuite on en voit une

  3   qui est de couleur rose et puis une autre qui ressemble à un ruban servant

  4   à parer un chapeau. Est-ce que vous pouvez imaginer quelqu'un qui essaie

  5   d'exécuter quelqu'un et qui préparer ces rubans pour bander les yeux de

  6   quelqu'un ? Donc on bande les yeux de quelqu'un sans pour autant lui

  7   ligoter les mains, dans la plupart des cas en tout cas.

  8   R.  Les objets évoqués par M. Karadzic sont des objets que j'ai examinés

  9   tous autant qu'il sont. Je pense que ces objets en question sont des

 10   bandeaux qui étaient utilisés pour bander les yeux de ces personnes.

 11   Pourquoi n'est-il pas dit qu'il y avait un texte, une inscription du Coran

 12   sur ces bandeaux ou avaient été produits par des femmes ? La plupart de ces

 13   bandeaux étaient du tissu -- des bouts de tissus qui avaient tout l'air

 14   d'avoir été utilisé de façon industrielle, peut-être pour couvrir des

 15   meubles, et dans bien des cas, aient été noués autour de la tête des

 16   personnes. Je n'ai rien vu qui m'aurait donné à penser ou qui aurait donné

 17   à penser aux experts qui ont examiné ces bandeaux qu'il s'agissait de

 18   quelque façon que ce soit d'objets à signification religieuse ou qui

 19   étaient utilisés comme couvre-chef. Il s'agissait de bouts de tissu qui

 20   n'étaient pas ce que j'aurais pu pense être quelque chose qui aurait été

 21   préparé par les mères de ces soldats, et ils étaient noués avec bien sûr de

 22   force autour de la tête des individus, et dans bien des cas, j'ai trouvé

 23   des bouts de cheveux qui étaient pris, qui étaient arrachés dans le nœud.

 24   Ici, je fais référence également au témoignage des survivants, par exemple,

 25   d'Orahovac, qui ont dit avoir les yeux bandés, et je crois également, de

 26   mémoire, au barrage de Petkovci et certainement de Rovac [phon], mais je ne

 27   sais pas si vous avez déjà entendu ce témoin.

 28   Q.  Les cheveux de qui devraient se trouver dans le nœud d'un ruban porté


Page 25869

  1   par un guerrier, d'après vous ?

  2   R.  Dans les cas que j'ai vus, j'ai vu des corps dans certaines des fosses

  3   qui avaient encore des cheveux sur les crânes et on voyait que les cheveux

  4   avaient été pris dans le nœud du bandeau utilisé pour leur bander les yeux.

  5   Je ne suis pas un expert de la chevelure humaine, mais quand j'ai examiné

  6   ces bandeaux, j'ai vu ce que je pense avoir été effectivement des cheveux

  7   pris dans ces nœuds, et j'imagine que c'est les cheveux de la tête de la

  8   personne avec qui on avait bandé les yeux grâce à ce bandeau.

  9   Q.  Est-il exact qu'il y avait aussi des bandeaux en velours, en satin,

 10   faits de tissu très précieux et chers ? Le Dr Christopher Lawrence nous a

 11   dit qu'il s'agissait d'un tissu assez cher, assez coûteux. Est-ce que vous

 12   disposez de cette information ?

 13   M. MITCHELL : [interprétation] J'aimerais que l'on cite une pièce à

 14   conviction. Je ne me souviens pas avoir entendu dire de la bouche de M.

 15   Lawrence cela.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] On va le trouver si vous ne vous en souvenez

 17   pas. Vous savez, moi je connais très bien cette affaire, mais je crois bien

 18   que vous la connaissez encore mieux que moi. Il l'a dit, il l'a bien dit.

 19   Il l'a confirmé ici.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Est-ce qu'il est vrai qu'il y avait des tissus en satin, des tissus qui

 22   avaient un aspect soyeux, ou du tissu de velours ?

 23   R.  Je n'ai pas le souvenir de velours et je ne dirais pas qu'il s'agissait

 24   d'un satin. L'un des experts, qui a décrit les tissus, a dit que le tissu

 25   était légèrement brillant. Ça, je peux l'accepter. Mais comme je l'ai dit

 26   tout à l'heure, le tissu que l'on pouvait décrire comme étant brillant

 27   était tel qu'on voyait très bien qu'il avait été découpé dans un carré de

 28   tissu, et que l'autre partie du tissu avait été utilisé pour autre chose et


Page 25870

  1   le rebord découpé de ce bout de tissu montrait bien que le milieu de ce

  2   carré de tissu avait été découpé. Donc autrement dit, ce tissu brillant

  3   était simplement un reste -- une chute d'un autre bout de tissu qui avait

  4   été découpé.

  5   Q.  Veuillez examiner le numéro 470. Donc on voit un tissu rose rassemblant

  6   à du satin avec un motif, et puis souvent vous avez des bords en zigzag.

  7   Est-ce que cela veut dire d'après vous ? Est-ce que vous savez ce que cela

  8   signifie ?

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de répondre, Monsieur Mitchell.

 10   M. MITCHELL : [interprétation] Dr Lawrence a dit qu'on lui avait posé des

 11   questions sur un morceau précis de tissu et il a répondu.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vois.

 13   M. MITCHELL : [interprétation] Il s'agit du 22474.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je l'ai trouvé.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le bord découpé c'est ainsi qu'on l'a

 16   découpé. Mais c'était une découpe assez grossière. Ce n'était pas cousu.

 17   C'est comme si on prenait un mouchoir et on le plaçait sur un verre et on

 18   découpait le tissu, le bout de tissu avec lequel on se retrouverait aurait

 19   des bords irréguliers, là où le tissu avait été en fait recoupé. C'est

 20   exactement ce qu'on a vu des tissus qui avaient ces bords irréguliers. Ils

 21   n'étaient pas brodés et ce n'était pas des bouts de tissus finis il

 22   s'agissait de chute.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  On va tout simplement vérifier ce qui est écrit au niveau du 470. Est-

 25   il exact qu'ici, on peut lire qu'il s'agit bien d'un bout de tissu rose

 26   ressemblant à du satin avec un motif ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Y avait-il des bouts de tissu ou des tissus qui étaient -- qui avaient


Page 25871

  1   -- qui étaient brodés ?

  2   R.  Certains de ces bandeaux utilisés pour bander les yeux avaient une

  3   petite fleur brodée. Bon, c'était une broderie machine faite sur le tissu,

  4   et je crois même qu'il y avait des trous dans la fleur et ce motif était

  5   répété surtout le tissu. Là encore, la plupart de ces bouts de tissu

  6   semblent avoir été les chutes issues d'un processus industriel. Vraiment,

  7   les chutes restaient après la découpe d'un tissu utilisé à une fin

  8   industrielle.

  9   Q.  Comment vous en êtes arrivé à cette conclusion-là ? Vous avez passé si

 10   longtemps dans ce pays comment vous en êtes arrivé à cette conclusion-là ?

 11   R.  Si on regarde les bandeaux qui ont été utilisés pour bander les yeux,

 12   il y a des photographies dans mon rapport ainsi que dans votre rapport,

 13   lorsqu'on a examiné ces bandeaux au mortuaire ces bandeaux étaient

 14   nettoyés, photographiés. Dans certains cas, on les étirait et on voyait que

 15   c'était un carré de tissu et on voyait très clairement que c'était une

 16   chute.

 17   On a examiné le tissu même des bandeaux, c'est le Dr Maljaars qui

 18   examiné ces bandeaux, et on voit des photographies qui montrent les

 19   bandeaux dans ce cadre avec, disons, la partie intérieure qui manque.

 20   Q.  Monsieur Manning, savez-vous qu'un guerrier porte sur lui un cadeau

 21   venu d'un membre féminin de sa famille, de sa sœur, de sa mère ? Je vais

 22   vous demander d'examiner le document 65 ter 23632, la photographie numéro

 23   4.

 24   Savez-vous que vous avez la coutume de porter un objet donné par la

 25   mère, un cadeau, un don de la mère, parce qu'un guerrier qui porte sur lui

 26   au moment de sa mort un don de sa mère, il va directement au Paradis.

 27   R.  Non, pas précisément.

 28   Q.  Donc je vais vous demander de voir cette photo, la photo numéro 4,


Page 25872

  1   23632 c'est un document 65 ter. Le volume numéro 2. Le numéro ERN 0705-

  2   2817. C'est la page 9 dans le système de prétoire électronique.

  3   Regardez. Est-ce que vous voulez dire qu'un soldat serbe avait ce type de

  4   foulard dans son équipement et qu'il a utilisé quand le besoin s'est

  5   présenté ?

  6   R.  Non. Je dis que c'était un bandeau utilisé pour bander les yeux, et

  7   qu'il a été utilisé pour bander les yeux de la victime avant de l'exécuter.

  8   C'est l'un des bouts de tissu qu'on a trouvé et qu'on a identifié comme un

  9   bandeau, ou pour lier les mains, ligoter les mains, mais je pense que c'est

 10   un bandeau.

 11   Q.  Est-ce que vous connaissez la coutume musulmane et serbe ? Ces

 12   couleurs, ce motif, est-ce que vous l'attribuerez plutôt aux Serbes ou aux

 13   Musulmans ?

 14   R.  Je ne vois rien qui semble indiquer une quelconque association

 15   religieuse.

 16   Q.  Merci. Est-ce que vous savez quelles sont les couleurs arborées par les

 17   femmes serbes, quelles sont les couleurs arborées à présent les femmes

 18   musulmanes, et puis pourquoi voulez-vous qu'un soldat serbe porte ou

 19   possède un objet pareil ?

 20   R.  Je ne sais pas quelles sont les couleurs que portent les femmes serbes

 21   à la différence des femmes musulmanes, et je ne savais pas ou je ne sais

 22   pas que ce bandeau était porté pour un soldat serbe.

 23   Q.  Est-il possible d'examiner la photo 61, cette photo se trouve sur la

 24   page 64 dans l'exemplaire papier. Le numéro ERN c'est 2874. La photo numéro

 25   61.

 26   Avez-vous vu des images des combattants, de guerriers arborant des bandeaux

 27   autour de leurs têtes ou bien des foulards autour de leurs têtes ou des

 28   rubans ?


Page 25873

  1   R.  S'il s'agit du conflit en Bosnie, oui, et je pense que certains membres

  2   des forces serbes qui sont allées à Srebrenica avaient des couvre-chefs

  3   noirs ou quelque chose sur la tête, noir. Je pense que cette personne dont

  4   l'image vient de la fosse commune Lazete 2, et nous voyons en fait un

  5   bandeau qu'il a sur la tête.

  6   Q.  Est-ce un soldat, qu'est-ce qu'il a autour de sa ceinture, ou bien à

  7   travers de sa poitrine ?

  8   R.  Je ne sais pas si c'est un soldat. Je pense qu'il est d'âge militaire.

  9   Peut-être qu'il s'agissait d'un soldat, mais sans vérifier le rapport

 10   d'autopsie, je ne veux pas le dire précisément. Il semble effectivement

 11   qu'il s'agisse de vêtement, de pantalon. S'il s'agissait d'un uniforme

 12   militaire ou de matériel militaire, ceci aurait été noté sur le rapport

 13   d'autopsie.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous demander à présent d'examiner la

 16   page 94, c'est la photo 91 qui m'intéresse.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  En attendant de voir cette photo, est-ce que vous avez trouvé une

 19   explication pour expliquer comment les soldats serbes ont trouvé tous ces

 20   objets que vous, vous dites être des bandeaux servant à bander les yeux ?

 21   Page 94, voilà, nous y sommes.

 22   Savez-vous si là c'est un objet qui serait utilisé plutôt par une Serbe ou

 23   bien par une femme musulman; est-ce qu'une femme musulmane donnerait cet

 24   objet à son guerrier ou bien une femme serbe?

 25   R.  Je ne veux pas répondre à cette question à part le fait de dire que cet

 26   objet a été trouvé dans une fosse commune. Je pense qu'il s'agit d'un

 27   bandeau qui a été utilisé pour bander les yeux.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, votre question est :


Page 25874

  1   Est-ce que le témoin est en mesure d'expliquer comment se fait-il qu'un

  2   soldat serbe porte ces objets ? Est-il vrai que les soldats serbes

  3   portaient toujours avec eux un objet qui pouvait être utilisé en fait pour

  4   bander les yeux mais pas de cette couleur ?

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'affirme qu'il ne portait jamais cet

  6   objet-là, parce que ce n'est pas la coutume serbe que de porter cela sur

  7   soi.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Manning, est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi ces

 10   prétendus bandeaux se sont retrouvés au moins l'une d'entre eux dans la

 11   poche d'une des victimes ?

 12   R.  Je ne peux pas vous dire cela. Je suppose, et il y a certaines

 13   informations de la part des survivants qui nous ont ôté leur bandeau, et je

 14   suppose que c'est comme cela que ça s'est passé. Mais je ne peux pas

 15   répondre sans avoir une référence spécifique, je ne peux pas répondre à

 16   cette question.

 17   Q.  Est-ce que vous voulez que l'on recherche cela ? Est-ce que vous vous

 18   souvenez avoir dit qu'un bandeau a été retrouvé dans une poche d'une des

 19   victimes ?

 20   R.  Je ne m'en souviens pas, mais je peux l'accepter, et une fois de plus,

 21   je répète que je ne peux qu'émettre une supposition quant à pourquoi.

 22   Q.  Si je vous disais qu'on n'a pas le droit de montrer les objets

 23   religieux aux non fidèles, et qu'on n'a pas le droit de mettre les pieds

 24   sur un objet religieux, est-ce que vous pouvez me dire si vous étiez au

 25   courant de cela ?

 26   R.  Je travaille actuellement au Moyen-Orient. Je connais bien les

 27   populations locales, surtout les populations de confession musulmane. Dans

 28   certains cas, cette règle religieuse est respectée à l'époque où j'étais en


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  1   Bosnie et ce n'est pas pour manquer de respect, mais je n'ai pas pu

  2   constater que les Musulmans de Bosnie étaient fervents en la matière. Mais,

  3   là encore, je ne suis pas un expert en ce qui concerne la Bosnie et les

  4   pratiques musulmanes en Bosnie.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pour ce qui est de

  6   notre programmation, j'aimerais vous demander de combien de temps vous

  7   souhaitez disposer pour pouvoir terminer votre contre-interrogatoire.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crains d'avoir besoin d'encore une heure.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, nous allons faire une pause

 10   pendant cinq minutes, nous reprendrons à 18 h 50.

 11   --- L'audience est suspendue à 18 heures 43.

 12   --- L'audience est reprise à 18 heures 50.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons continuer en vertu de

 14   l'article 15 bis pour le reste de la journée.

 15   Monsieur Karadzic, nous allons pouvoir continuer jusqu'à 19 heures 20 ou 19

 16   heures 30 mais, moi, je voudrais que vous terminiez plus tôt que cela.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais faire tout ce qui est possible,

 18   Monsieur le Président.

 19   Q.  Je voudrais vous montrer encore une photo. La page 3, s'il vous plaît -

 20   - la page 103 et l'image 100, est-il possible d'agrandir cela ?

 21   Est-ce que vous voyez ces bouts effilochés ? C'est vraiment régulier, et

 22   comment avez-vous expliqué cela ? Comment autrement qu'en disant qu'il

 23   s'agissait là d'un lieu de culte -- d'un objet de culte ? Est-il possible

 24   d'agrandir ? Vous voyez que c'est parfaitement régulier, vous voyez les

 25   franges qui sont régulières. Comment avez-vous expliqué cela ?

 26   R.  Monsieur le Président, nous avons parlé de cela. La plupart des

 27   bandeaux ressemblaient exactement à cela en différentes couleurs. Moi, j'ai

 28   toujours pensé qu'il s'agissait de tissus, de chutes de tissus qui venaient


Page 25876

  1   de la même source. Vous pouvez voir qu'il s'agissait là d'un tissu découpé,

  2   il n'y avait pas de bord, il n'y avait pas de couture, il n'y avait pas de

  3   broderie. Vous avez donc une pièce carrée de tissu, et le tissu qui était

  4   au milieu de ce morceau de tissu était découpé. Si vous aviez retrouvé ce

  5   morceau de tissu, vous auriez trouvé que cela correspond parfaitement à la

  6   pièce découpée, et la plupart des pièces de tissus, des chutes, que nous

  7   avons trouvées ressemblaient à cela justement.

  8   Q.  Mais comment le savez-vous, Monsieur Manning ? Est-ce la seule

  9   explication possible ? Est-ce que vous permettez d'autres explications ?

 10   R.  J'ai physiquement examiné chacun de ces objets, j'ai vu leur forme. Si

 11   vous aviez étalé ce tissu, ces bandeaux, vous auriez vu la même forme qui

 12   est la forme retrouvée aussi dans le rapport du Dr Maljaars. J'ai présenté

 13   des photos de cela, et de nombreux autres morceaux de tissus utilisés comme

 14   des bandeaux avaient exactement la même forme. Ils étaient noués autour des

 15   têtes des individus qui ont été exécutés par la suite, et parfois ils

 16   étaient utilisés pour ligoter les mains.

 17   Q.  Mais on va y venir. Est-ce que vous voulez dire, Monsieur Manning, que

 18   ce que l'on voit ici, ces bords, qu'il ne s'agit pas donc d'un bord

 19   régulier, qu'il ne s'agit pas donc d'un motif régulier, mais qu'il s'agit,

 20   pour vous, là, d'un hasard -- que c'est le fruit d'un hasard ? Mais est-ce

 21   que vous êtes d'accord avec moi pour dire que la distance entre ce que l'on

 22   voit ici comme des irrégularités sont régulières, les mêmes ?

 23   R.  Non. Je vous ai déjà dit que c'était pour moi des chutes de tissu. Il

 24   s'agissait donc d'un bout de tissu dont on a enlevé une partie importante,

 25   et ce que l'on a utilisé ici ce sont les chutes. D'après moi, il ne s'agit

 26   pas d'objets réguliers. Ici, vous avez des tissus qui étaient souvent

 27   roses, bleus, je ne sais pas s'il y avait d'autres couleurs, mais il n'y

 28   avait pas de vert, qui est caractéristique pour la religion musulmane, et


Page 25877

  1   il n'y avait pas d'inscriptions islamiques, il n'y avait pas d'écritures

  2   quelconque, de symboles quelconque sur ces tissus.

  3   Q.  Monsieur Manning, si vous êtes au Moyen Orient à présent, est-ce que

  4   là-bas vous avez pu remarquer que les Chrétiens et les Juifs préfèrent

  5   arborer des couleurs sombres, sans motif, alors que les Musulmans préfèrent

  6   porter des tissus et des couleurs plus claires avec des motifs donc surtout

  7   les femmes musulmanes ?

  8   R.  Je ne pense pas que je puisse parler bien de cela. Les femmes arabes

  9   que j'aie pu voir dans la région portent du noir en général. Parfois vous

 10   avez des hommes qui portent du blanc d'autres qui portent des couleurs. Il

 11   y en a qui porte des vêtements différents tout simplement. Ils sont comme

 12   nous. Différents gens portent des vêtements différents.

 13   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que vous avez

 14   trouvé des bandeaux allégués qui n'avaient pas de nœud ?

 15   R.  Certains bandeaux étaient endommagés, déchirés. Si je n'étais pas en

 16   mesure d'affirmer qu'il s'agissait d'un bandeau, s'il s'agissait d'un tissu

 17   qui avait la forme de la tête ou bien une forme ronde, s'il ne s'agissait

 18   pas d'un tissu qui avait la forme d'un bandeau, je ne disais pas qu'il

 19   s'agissait d'un bandeau. Dans ce cas, nous essayons de les examiner dans

 20   notre laboratoire. A la morgue, on les nettoyait, photographiait, on

 21   enlevait le nom pour montrer la similarité éventuelle avec d'autres

 22   morceaux de tissu.

 23   Q.  [aucune interprétation] 

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] A présent, je vais demander que l'on examine la

 25   pièce 65 ter 2478. C'est un document qui comporte un numéro P. Moi, je ne

 26   veux pas poursuivre avec ces photos parce que je n'ai pas suffisamment de

 27   temps. Je veux vous demander donc la page 24 dans l'exemplaire papier. En

 28   anglais c'est peut-être un autre numéro de page. Montrez-moi la page serbe


Page 25878

  1   24 et peut-être que cela va nous aider pour nous retrouver.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Montrez-moi le haut de la page 596. On voit donc un morceau de tissu

  4   blanchi ou bien avec des couleurs fades sans nœud. Alors comment se fait-il

  5   qu'il n'y avait pas de noeud ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est deux pages plus loin. Donc on peut

  7   lire "un morceau de tissu sans nœud." C'est en bas de la page. C'est peut-

  8   être cela.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de l'objet 596.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Alors qu'est-ce que c'est exactement ? Vous dites donc qu'il s'agit

 12   d'un rond, un tissu qui forme un rond. Alors comment on a formé ce rond

 13   s'il n'y a pas de nœud ? Est-ce que cela a été cousu ?

 14   R.  Il faudrait que je vérifie le rapport d'autopsie et la photo. Moi, je

 15   dis que c'est quelque chose qui était autour de la tête de l'individu.

 16   Peut-être que le nœud est tombé. Peut-être qu'il se trouve dans le sac du

 17   corps ou bien peut-être qu'il a pourri tout simplement. En tout cas, dans

 18   ce document, à chaque fois je disais où exactement on avait trouvé ce

 19   morceau de tissu servant à bander les yeux ou ligoter les mains, et il y a

 20   une photo qui accompagnait cela. Ici, moi, je dis que c'est quelque chose

 21   qui a été retrouvé dans la tombe. Donc, ici, nous avons un bandeau sans

 22   nœud. Un parmi des centaines qui était autour de la tête de quelqu'un. A

 23   nouveau, la photo m'aiderait à établir exactement de quoi il s'agit, ou

 24   bien le rapport d'autopsie.

 25   Q.  Est-il possible de voir la page suivante en anglais. Mais essayez de

 26   voir toutes sortes de tissus que l'on voit ici. Donc vous voyez donc des

 27   morceaux de tissus brodés avec des fleurs brodées, avec un motif brodé,

 28   avec un motif fleuri brodé, et puis il y a qui sont de couleurs vertes. Il


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  1   y en a qui ont un aspect soyeux. Regardez ce que vous avez écrit vous-même.

  2   Comment avez-vous pu exclure une possibilité dont vous n'étiez même

  3   pas informé, à savoir qu'il s'agissait de cadeaux à caractères religieux

  4   virtuels ? Pourquoi voulez-vous que les soldats serbes possèdent autant de

  5   tissus brodés ?

  6   R.  Je pense que les bandeaux et les tissus utilisés pour ligoter et qui

  7   étaient les mêmes, semblent être issus d'un processus industriel. Je ne

  8   sais pas, et je pense que si j'avais l'intention de mettre les bandeaux sur

  9   les yeux d'un grand nombre de personnes, je m'adresserais à une usine

 10   textile, et je m'emparerais de tissus pour en faire des bandeaux pour

 11   bander les yeux. Je sais que certains des articles ont été listés ici ont

 12   été utilisés de façon opportune, c'est-à-dire un morceau de tissu, un

 13   mouchoir, un pantalon, et j'ai indiqué, sur ce document dans quel état

 14   étaient ces articles, et chose plus importante, où ils étaient situés. Si

 15   j'identifie un objet comme étant un bandeau utilisé pour bander les yeux,

 16   c'est parce qu'il y a une photographie de cet article sur un corps, et un

 17   rapport d'autopsie qui indique où que le bandeau se trouve dans la fosse

 18   commune et de telle taille et de telle composition identique et comporte

 19   également des cheveux humains que la conclusion était qu'il s'agissait d'un

 20   bandeau.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Le LZ01-596, ce bandeau, ce bout de

 23   tissu décoloré sans le nœud, nous avons une photo et sur cette photo on

 24   peut le montrer.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voulez-vous voir cette photo, Monsieur

 26   Karadzic ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.


Page 25880

  1   M. MITCHELL : [interprétation] On va donner au témoin la version papier.

  2   Parce que celui dans le prétoire électronique n'est pas d'une très bonne

  3   résolution.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ne voyons aucune objection à

  5   ce que l'on remette la version papier au témoin. Mais je pense qu'on peut

  6   simplement l'afficher à l'écran pendant qu'on y est. Quel est le numéro

  7   dans le prétoire électronique ?

  8   M. MITCHELL : [interprétation] C'est la pièce 4508. Dans la colonne tout à

  9   fait à droite, septième photo à partir du haut.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] 4508.

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Oui.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. J'aimerais la

 13   référence au numéro du corps, LZ-2.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] LZ01 --

 15   M. MITCHELL : [interprétation] 596.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] La flèche montre le bandeau en place.

 17   Normalement on aurait vérifié le rapport d'autopsie mais, normalement, la

 18   flèche indiquerait le trou d'une balle qui correspondrait donc au trou dans

 19   le bandeau. Dans ce cas, vous voyez que le bandeau adhère encore à la tête

 20   de la victime et couvre ses yeux.

 21   Voyez où se trouve le curseur.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est ce dont il s'agit ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Vous pouvez voir que c'est une image qui

 24   a été prise à la morgue, c'est-à-dire le blanc en dessous du corps est un

 25   sac qui a été utilisé pour transporter le corps. Ces photos ont été prises

 26   à la morgue avant que les cadavres n'aient été nettoyés. L'expert examine

 27   le corps, examine le bandeau, et fait un rapport sur le bandeau lors de

 28   l'examen ainsi que les blessures au niveau du crâne.


Page 25881

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Montrez-moi la photo, où on voit 596 [comme interprété] ? Est-il

  3   possible de montrer cela, de l'identifier ?

  4   R.  [Le témoin s'exécute]

  5   Q.  Il n'y a pas de flèche. Vous avez parlé d'une flèche, mais moi je ne

  6   vois pas de flèche. Est-ce bien un bandeau qui n'est pas noué mais qui a

  7   été cousu ou bien tricoté ?

  8   R.  J'ai fait un cercle autour de la flèche sur cette photographie, et sans

  9   examiner le bandeau nettoyé, je ne peux pas vous en dire quelle était la

 10   composition.

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Lazete 1 fait partie du premier ou du

 12   deuxième rapport [comme interprété] de M. Manning. Celui-ci n'est pas

 13   contenu dans les deux tomes.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si cela est nécessaire, on peut

 15   retrouver la photographie d'origine.

 16   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, en effet, si c'est nécessaire.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ou du moins le divulguer pour le témoin,

 18   la Défense devrait l'avoir.

 19   M. MITCHELL : [aucune interprétation]

 20   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, nous devons l'avoir et nous pouvons le

 22   verser au dossier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Veuillez le parapher et le

 24   dater.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce suivante pour la

 27   Défense.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cote D2189.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Vous avez dit aujourd'hui à un moment donné que le Procureur -- ou

  3   plutôt, l'enquêteur du bureau du Procureur était d'accord avec ce que l'on

  4   a trouvé. Est-ce que la Défense, ou bien le côté serbe, a donné son accord

  5   avec un quelconque élément de cette enquête ?

  6   R.  Si j'ai bien compris la dernière partie de votre question, le processus

  7   d'exhumation et d'autopsie a été réalisé principalement par le TPIY. Nous

  8   avons à dessein exclu tout ressortissant des entités concernées. Nous

  9   n'avions aucun Serbe ou Musulman de Bosnie participant au processus

 10   d'exhumation et d'autopsie, et je crois que l'ICMP avait des personnels des

 11   autres entités, mais les officiels judiciaires serbes et bosniaques ainsi

 12   que les enquêteurs ont été exclus du site d'exhumation et du processus

 13   d'examen et d'autopsie.

 14   Q.  Après cela, est-ce que vous, le Tribunal ou le bureau du Procureur,

 15   est-ce que vous avez confié les enquêtes, les exhumations, et cetera aux

 16   Musulmans à partir de 2001, je pense ?

 17   R.  Oui. Nous avons transmis la responsabilité des fosses communes à la

 18   commission bosniaque des personnes disparues, et ceux qui ont continué avec

 19   le travail de recouvrement des corps, et la cour bosniaque mène les

 20   enquêtes sur Srebrenica. Le bureau du Procureur a donc procédé à la remise

 21   des dossiers d'enquête.

 22   Q.  Est-ce que vous savez que l'on conteste fortement le travail de cette

 23   institution bosnienne ? Est-ce que vous savez que les Serbes contestent

 24   cela parce qu'il est dans l'intérêt des Musulmans de représenter le plus

 25   grand nombre possible de victimes ?

 26   R.  Je sais qu'il y a un conflit, le nombre de disparus de Srebrenica est

 27   défini par la commission indépendante internationale des personnes

 28   disparues, mais je ne suis pas tout à fait au fait des conflits entre les


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  1   différentes entités.

  2   Q.  Merci. Est-il exact que vous avez remarqué que dans chacune des fosses

  3   l'avancement, la dégradation des corps qui ont été trouvés dans les fosses

  4   étaient différents ?

  5   R.  Oui. Dans la plupart des fosses, on a vu différents degrés de

  6   décomposition. Peut-être un peu moins à Orahovac 1, mais ceci c'est dû à la

  7   condition de la fosse commune, alors que dans d'autres fosses nous n'avons

  8   trouvé que des squelettes alors que d'autres n'étaient pas encore au niveau

  9   de restes osseux.

 10   Q.  Dans le même groupe ?

 11   R.  Par exemple, dans la fosse commune de Kozluk, les corps qui étaient

 12   plus loin des autres étaient à l'état de squelette, et ceux qui se

 13   retrouvaient dans la masse des corps avaient encore des lambeaux de chair.

 14   Je ne suis pas un expert, mais je comprends pourquoi. On l'a vu dans

 15   différentes fosses. Si un corps était plus près de la surface, c'est-à-dire

 16   avait accès à de l'oxygène ou les conditions du sol étaient telles que les

 17   corps se décomposaient de façon différente.

 18   Q.  Je veux bien vous croire quand vous dites que vous n'êtes pas un expert

 19   dans la matière, mais est-ce bien la seule explication ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Mais voyez, ici les experts ont dit que ce n'était pas la seule

 22   explication, qu'il y avait d'autres explications possibles.

 23   Quand je vous pose la question au sujet des bandeaux par exemple, est-ce

 24   que vous excluez toute autre explication, est-ce que vous pensez que votre

 25   explication est la seule, la meilleure ?

 26   R.  Si vous me le permettez, vous m'avez demandé si c'était la seule

 27   explication. Ceci sachant quelles étaient toutes les indications qu'on

 28   avait, était-ce la seule explication ? Est-ce que -- si les corps étaient


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  1   arrivés à différents moments dans la fosse ou étaient restés en surface et

  2   s'étaient décomposés à la surface, il y aurait des indications. Si on

  3   prenait les corps dans une fosse commune, et certains étaient à l'état de

  4   squelette et d'autres avaient encore des lambeaux de chair, ils étaient

  5   dans la même fosse commune et sans aucune indication qu'ils étaient

  6   ensevelis à des époques différentes, à des mois d'écart ou à des années

  7   d'écart.

  8   Quand à mon examen des bandeaux utilisés pour bander les yeux, tous les

  9   bandeaux que j'ai identifiés avaient déjà été identifiés par l'un des

 10   experts, archéologues et anthropologues, comme étant des bandeaux, et j'ai

 11   cherché à confirmer cela. C'était documenté, c'était cohérent, et si j'ai

 12   trouvé un bandeau qui n'avait pas une photographie, le montrant utilisé

 13   comme bandeau ou sans qu'il y ait un dossier associé, je l'excluais, parce

 14   que je voulais délibérément inclure uniquement des articles pour lesquels

 15   on pouvait absolument, avec certitude, prouver le processus et

 16   l'emplacement.

 17   Q.  Comment avez-vous pu arriver à la conclusion qu'il n'y avait pas de

 18   preuve que l'on a procédé aux enterrements par étape, et est-ce que vous

 19   avez reçu une explication au sujet des personnes enterrées au cours de ces

 20   45 mois ?

 21   R.  Je ne suis pas archéologue et je ne suis pas expert, mais les experts

 22   avec lesquels j'ai parlé m'ont décrit les fosses communes et m'ont montré

 23   comment ces fosses étaient faites. Ils m'ont montré comment on pouvait voir

 24   qu'une fosse avait été remuée ou retournée, et c'est pour ça qu'on a pu,

 25   par exemple, définir qu'une fosse primaire avait été pillée, mais même,

 26   moi, en tant que non-expert, je pouvais voir cela. S'il y avait des

 27   indications montrant qu'il y avait eu plusieurs ensevelissements, ceci

 28   aurait été évident dans le sol, la construction même de la fosse, dans la


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  1   position des corps. Dans le sol et dans la végétation qui a été récupérée

  2   avec les corps, il y aurait eu des indications. Dans certains cas, on a

  3   trouvé de la végétation avec les corps qui correspond tout à fait à la mi-

  4   été dans la région. Si ces personnes avaient été tuées à une autre époque

  5   de l'année, on en aurait vu des indications. S'il y avait eu une

  6   infestation d'insectes, car les corps ont été -- resté à la surface, on en

  7   verrait des indications. Vous avez parlé aux experts. C'est comme cela

  8   qu'ils s'y sont pris, et moi, en tant que non-expert, je l'ai vu moi-même

  9   dans les fosses.

 10   Q.  Merci. Donc, là, vous nous faites part de ce que l'on vous a dit -- ce

 11   que l'on vous a raconté. Vous n'êtes pas en train de nous exposer vos

 12   convictions de professionnel.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il a confirmé qu'il n'est pas un

 14   expert et vous posez quand même des questions, et vous l'invitez donc à

 15   dire ce que lui a entendu dire d'experts.

 16   Monsieur Karadzic, le moment est venu de terminer.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais essayer de terminer le plus rapidement

 18   possible.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Dites-nous, s'il vous plaît, Monsieur, est-ce que vous savez que les

 21   combattants portaient des bandeaux au niveau de leur bras, donc ils

 22   portaient des brassières sur leur bas gauche ou droit, donc des bras ou

 23   bien des bandeaux, des rubans que vous avez vus autour d'une main, c'était

 24   peut-être tout simplement un ruban servant à marquer un soldat et pas

 25   vraiment un ruban servant à ligoter.

 26   R.  Oui, je sais vaguement qu'il y a de telles pratiques. Je ne savais pas

 27   que ça avait été utilisé surtout en Bosnie. Les tissus utilisés pour lier

 28   les poignets des individus étaient en tissu et en forme de 8, donc ils


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  1   liaient les mains de l'individu et l'individu ne pouvait pas bouger ses

  2   bras. Je ne pense pas qu'il s'agissait de bandeaux pour que l'on porte au

  3   bras.

  4   Q.  Et bien, on a vu sur la photo, Monsieur Manning, des rubans que l'on

  5   portait aux différents niveaux d'un bras. On peut le voir. Tout le monde a

  6   pu le voir. N'est-il pas exact qu'on a pu établir des restes des rubans aux

  7   différents niveaux d'un bras, par exemple ?

  8   R.  Non. Nous n'avons pas trouvé ce que l'on pourrait décrire comme étant

  9   des rubans autour du bras ou de l'avant-bras. Nous avons trouvé des bouts

 10   de tissus qui étaient utilisés pour ligoter les deux mains, ou du fil

 11   utilisé pour ligoter les mains, ou un tissu en forme de 8 autour d'une main

 12   où les deux mains, en fait, avaient été ligotées ensemble avec in tissu en

 13   forme de 8.

 14   Q.  Dites-moi - c'est ma dernière question - est-ce que vous connaissez des

 15   gens qui travaillent au niveau de l'ICMP, Rifet Kasetovic, Zlatan

 16   Sabanovic, par exemple ?

 17   R.  Je pense que Rifet Kasetovic est une personne que je connais peut-être.

 18   Je ne reconnais pas l'autre nom que vous avez cité, mais comme je l'ai dit

 19   avant, il y a des personnes originaires de Bosnie, de Serbie et de Croatie

 20   qui travaillent pour l'ICMP.

 21   Q.  Mais, là, nous avons quelqu'un qui est le directeur de cette

 22   institution, et Zlatan Sabanovic, c'est un fonctionnaire de cette

 23   institution. Edin Jasaragic, est-ce que vous le connaissez ? Il est

 24   directeur aussi.

 25   R.  Non, ça ne me rappelle rien, mais je peux accepter que M. Kasetovic

 26   était directeur - c'est vaguement familier - sans doute, la Commission

 27   bosnienne, plutôt que la Commission internationale pour les personnes

 28   disparues.


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  1   Q.  Je n'ai pas de temps pour pouvoir vous poser des questions au sujet

  2   d'autres Musulmans en vue faisant partie de cette institution, mais est-ce

  3   que vous savez qu'il y a peu de temps, ils ont fait des corrigendum de

  4   leurs chiffres disant que finalement, 500 personnes sont encore en vie, et

  5   puis que 70 personnes avaient été inclues dans la liste alors que

  6   finalement, ce n'étaient pas des victimes, et puis il y avait même des cas

  7   de victimes se trouvant sur des listes alors qu'entre-temps, on a trouvé

  8   que c'était des personnes encore en vie, des amputés, apparemment ?

  9   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, avant de répondre,

 10   j'ai trois objections. D'abord, cela suppose beaucoup de choses qui ne sont

 11   pas au dossier. Si la référence à 500 est une référence à [inaudible], ça

 12   n'a rien à voir avec l'ICMP. Troisièmement, cette référence à ce qui s'est

 13   passé depuis une semaine ou deux avec la nouvelle thèse, ceci n'est pas

 14   fondé, et si M. Karadzic veut avancer ceci vis-à-vis du témoin, il doit en

 15   présenter les prémices, ou alors il peut choisir de le présenter lors du

 16   témoignage du Dr Parsons, qui sera ici dans deux semaines environ.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît,

 18   poser une question, une seule fois -- une seule question à la fois en étant

 19   précis et en donnant une référence précise ?

 20   L'INTERPRÈTE : Micro pour M. Karadzic.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Savez-vous, Monsieur Manning, que l'on n'a toujours pas établi le

 23   nombre de victimes et qu'au fur et à mesure que le temps avance, ce chiffre

 24   ou ce nombre devient de plus en plus petit ?

 25   R.  Non. Si je comprends que vous parliez de l'analyse ADN de l'ICMP, je

 26   pense qu'au contraire, il y a une augmentation, et je pense qu'il y aura

 27   une augmentation au fur et à mesure qu'ils continuent avec leur enquête.

 28   Mais j'aimerais répondre à une question préalable. J'ai à dessein choisi de


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  1   ne pas regarder les comptes rendus d'audience et les témoignages avant de

  2   témoigner, donc je ne sais pas -- je n'ai pas du tout connaissance des

  3   revendications contre l'ICMP ou contre la Commission bosnienne.

  4   Q.  Est-ce que vous avez entendu dire que la Commission bosnienne a informé

  5   du fait qu'un certain nombre de personnes amputées étaient comptées parmi

  6   les victimes alors qu'elles étaient encore en vie ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Comment expliquez-vous le fait que dans les fosses communes ou les

  9   lieux d'enterrement on a trouvé des centaines, des milliers d'éclats d'obus

 10   ou restes d'obus, qu'il s'agissait donc sans doute des positions de tir ou

 11   même des tranchées ?

 12   R.  Non, dans la majorité des cas, il n'y a pas d'indication comme quoi des

 13   combats ont eu lieu dans ces zones isolées où ces exécutions ont eu lieu,

 14   et les preuves fournies par les experts, que j'aie vues moi-même, c'est que

 15   les tireurs ont tiré sur les victimes et les balles se sont trouvées soit

 16   dans la fosse ont pu être réunies lorsque la fosse a été creusée ou lorsque

 17   la fosse a été pillée.

 18   Q.  Est-ce que vous avez trouvé dans les fosses ou à proximité des fosses

 19   donc de restes d'obus ou des éclats d'obus et il s'agissait d'obus d'un

 20   calibre important ?

 21   R.  Nous avons surtout trouvé du calibre 7,62, des éléments d'armes de

 22   petit calibre. On a trouvé un reste d'obus associé avec un Nova Kasaba 99

 23   faisant partie des grenades, et ce que nous pensons a été une partie d'une

 24   grenade propulsée par roquette, et ceci dans plusieurs des fosses.

 25   Q.  Comment expliquez-vous cela ? Comment expliquez-vous qu'il y ait donc

 26   des parties de grenades d'un calibre important justement dans les fosses

 27   communes ? Est-ce que vous n'êtes pas arrivé à la conclusion qu'il

 28   s'agissait là d'une position de tir à partir de laquelle on était en train


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  1   de tirer sur une cible ?

  2   R.  Il y avait un reste de munition d'une arme anti-air solaire avec l'un

  3   des corps dans une fosse peu profonde et nous avons pensé qu'il s'agissait

  4   en fait d'un emplacement d'artillerie. C'est le seul cas dont je me

  5   souvienne.

  6   Les autres restes de mission que j'ai vus -- et pour lesquels j'ai vu

  7   des indications c'est qu'après qu'on ait tiré avec une arme  un AK-47 va

  8   éjecter dans une seule direction. Lorsqu'on a examiné cela, cela indiquait

  9   que les tireurs se trouvaient dans une certaine location et les douilles se

 10   retrouveraient éjectées dans une certaine direction, et ensuite on trouvait

 11   des douilles parmi les corps dans la fosse dans les vêtements dans les

 12   remblais sans doute qui ont été réensevellies grâce à du matériel lourd et

 13   ensuite transportés d'un site de la fosse primaire au point d'exécution à

 14   la fosse secondaire.

 15   Q.  Ma dernière question. Dans le résumé de la médecine légale élaboré au

 16   mois de mai 2000, page 67, il a été dit que l'on a trouvé 1 031 douilles de

 17   grenade et qu'à de nombreux endroits, on en a trouvé des dizaines, des

 18   quinzaines. Vous avez trouvé plus de douilles que de balles dans ces

 19   fosses. Vous avez trouvé 19, 18 balles, alors que vous avez trouvé bien

 20   davantage de douilles, et moi, j'affirme que là c'étaient des positions de

 21   tir à partir duquel on tirait avec des obus à gros calibre sur des

 22   objectifs, et on a aussi utilisé ces endroits comme des tranchées pour

 23   s'abriter au moment des tirs.

 24   R.  Les douilles dont il est question étaient surtout pour les munitions de

 25   7,62, c'est donc des munitions de petit calibre et, sans doute, lorsque

 26   l'on appelle de douilles plus importantes, ce serait pour des munitions

 27   anti-air ou anti-char. Ce n'est pas du tout ce que nous avons trouvé. Ce

 28   n'est pas ce que je suis en train de décrire. Et l'archéologue vous dirait


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  1   que c'était une fosse rectangulaire avec une rampe qui avait été construite

  2   ou façonnée par une machine lourde. Ce n'était pas du tout une tranchée de

  3   combat et ce serait très clair. Je n'ai pas entendu dire ou vu qu'il

  4   pourrait s'agir des tranchées défensives.

  5   Q.  [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si c'est absolument nécessaire, nous

  7   pouvons continuer mais à en juger d'après la façon dont vous poursuivez

  8   votre contre-interrogatoire, je crois que vous avez terminé avec ce sujet.

  9   Monsieur Mitchell, questions complémentaires. 

 10   Mais je ne veux pas être responsable de devoir faire -- de contraindre le

 11   témoin à rester la nuit.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons nous arrêter maintenant. Je

 13   pense que vu les transports --

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Si nous devons terminer ici, je n'ai rien à

 15   demander.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ou nous pouvons continuer encore demain

 17   pendant dix minutes.

 18   M. MITCHELL : [interprétation] Non, plus rien.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous aviez une dernière question. Je

 20   crois que nous devons nous arrêter.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  J'ai tout simplement demandé pourquoi on parle des douilles de grenade

 23   alors que le témoin parle des douilles de balles d'arme d'infanterie.

 24   R.  Peut-être qu'un expert en balistique utilisera un terme différent.

 25   Quand on parle d'un douille, c'est une petite munition, c'est en fait ce

 26   qui reste c'est l'étui qui reste. La balle c'est la tête de la munition. La

 27   douille ou l'étui et ce qui contient la munition c'était toujours exact

 28   d'utiliser le terme de douille ou d'étui.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci à tous, et surtout merci à vous,

  3   Monsieur Manning.

  4   M. ROBINSON : [interprétation] J'aimerais tout particulièrement remercier

  5   le Juge Lattanzi, qui avait une très longue journée.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Manning, d'être venu à

  7   La Haye et de votre témoignage, et je remercie tout le personnel d'être

  8   resté aussi tard.

  9   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc nous reprendrons demain à 9 heures.

 11   [Le témoin se retire]

 12   --- L'audience est levée à 19 heures 36 et reprendra le mercredi 7 mars

 13   2012, à 9 heures 00.

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