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1 Le mercredi 25 avril 2012
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin vient à la barre]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.
7 Bonjour, Monsieur Djeric.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez continuer,
10 je vous prie.
11 LE TÉMOIN : BRANKO DJERIC [Reprise]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence.
14 Bonjour à tous et à toutes.
15 Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]
16 Q. [interprétation] Bonjour, Professeur Djeric.
17 R. Bonjour.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre, ou qu'on montre
19 au témoin, le 65 ter 1118.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] [hors micro] C'est la pièce à conviction
21 P3758, Madame, Messieurs les Juges.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Vous souvenez-vous de ce document émanant de vous ?
24 Non, excusez-moi. Excusez-moi. C'est ce qu'on a montré hier, en fait.
25 Donnez-moi un petit instant.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Toutes mes excuses. C'est le 1D05608 qu'il nous
27 faut.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Je vous prie d'essayer de vous rappeler ce décret émanant de vous qui
3 réglemente l'utilisation des terres agricoles abandonnées, des
4 installations et des engins avec une sécurisation des droits des
5 propriétaires quels qu'ils soient. Alors, je vous prie de vous penchez
6 dessus. Il se peut que vous vous en souveniez encore.
7 R. Je pense en avoir un peu parlé hier. Je ne peux pas parler ou me
8 souvenir de la totalité des documents, auquel cas. Mais nous avions
9 réglementé les cas de terres agricoles abandonnées, la protection des
10 propriétés, et cetera.
11 Q. Merci.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais rappeler aux Juges de la Chambre et
13 à tous ceux qui nous écoutent qu'il y a eu un témoignage de M. Colm Doyle
14 qui a informé, à la date du 16 août 1992, du fait qu'il y avait différentes
15 attestations de délivrées concernant des cadeaux de biens de la part de
16 ceux qui voulaient s'en aller. Le 19 août, j'ai délivré un document, qui
17 était le D0101, qui dit que ces attestations faisant cadeau de biens
18 d'individus à la municipalité ou à qui sais-je étaient annulées. Et le 20,
19 le Premier ministre a réglementé la question par ce décret de l'utilisation
20 de ce qui a été abandonné tout en cherchant à protéger les droits des
21 propriétaires. Je vous renvoie donc à cette pièce D -- non, ce n'est pas ce
22 D. C'est un document daté du 19, qui comporte trois ou quatre paragraphes
23 interdisant le déplacement forcé de la population et mettant hors-la-loi
24 tout document de cette nature, c'est-à-dire document qui se rapporterait à
25 des prétendues donations.
26 Je voudrais demander un versement au dossier de ce document-là.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous n'avons aucune difficulté pour
28 ce qui est du versement au dossier de ce document, mais ce n'est pas le
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1 moment pour vous de présenter ce type d'exposé. Vous n'avez qu'à poser des
2 questions au témoin. Et vous aurez tout le temps de présenter votre
3 interprétation des éléments de preuve, tel que vous les voyez vous-même.
4 Continuons.
5 Nous allons verser ceci au dossier.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2246, Madame, Messieurs
7 les Juges.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, si l'on se réfère aux conditions
9 énoncées au 98 bis, cela ne va pas m'assurer un temps suffisant.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vous suis pas.
11 Monsieur Robinson.
12 M. ROBINSON : [interprétation] Peut-être le Dr Karadzic souhaite-t-il dire
13 que si jamais il avait du succès pour ce qui est d'un jugement
14 d'acquittement en application du 98 bis, il n'aura pas l'occasion de
15 présenter ses éléments à décharge.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah, bon.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je croyais avoir compris le sens de
18 l'humour anglais, mais je vois que je suis encore un débutant en la
19 matière. Je vous en remercie.
20 Peut-on, s'il vous plaît, nous montrer le document 1D04192. C'est déjà
21 versé au dossier, c'est 1D1671.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. J'attire votre attention sur le fait qu'il s'agit d'un document du
24 ministère de l'Intérieur daté du 17 avril. Alors, je n'avais pas encore de
25 fonctions d'Etat pour ma part. Et les instances du gouvernement ont investi
26 des efforts visant à ceci ou cela. Là, on met en garde les postes de
27 sécurité publique du fait de l'appropriation illégale de biens mobiliers et
28 immobiliers, et là il est donné ordre pour indiquer ce que le ministère est
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1 tenu de faire.
2 Vous étiez à la tête du gouvernement, et je crois que cela a
3 certainement attiré votre attention.
4 R. Je ne m'en souviens pas, parce que ça c'est un document émanant du
5 ministère. Je ne pouvais pas être au courant. Mais il y avait des
6 instructions, en effet, dans ce sens pour que le ministère gère strictement
7 tout ce qui relève des droits de l'homme, des droits des propriétaires, et
8 cetera.
9 Q. Merci. Et on dit que pour la prise de ces mesures, le ministre rend
10 responsable les chefs des postes de sécurité publique, et cetera.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez faire des pauses entre les
12 questions et les réponses, parce que les interprètes ont des difficultés à
13 vous suivre.
14 Monsieur Karadzic, veuillez répéter votre question.
15 M. KARADZIC : [interprétation]
16 Q. J'ai demandé au Pr Djeric - puisqu'il s'agit ici du 17 avril, moi je
17 n'assumais pas de fonctions d'Etat - le gouvernement a entrepris ces
18 mesures sans instruction de ma part et sans contrôle de ma part. Ca s'est
19 fait sur l'initiative propre du gouvernement, et vous confirmez, n'est-ce
20 pas ?
21 R. Ce document est un document émanant du ministère de l'Intérieur. Donc
22 c'est un document émanant du ministère et qui se trouve être conforme à la
23 Loi gérant les activités du gouvernement. Je n'ai rien à confirmer. C'est
24 un document du ministère de l'Intérieur.
25 Q. Mais c'est ainsi que les choses se sont faites ?
26 R. Oui. Nous avions été d'avis qu'il nous fallait remettre en question les
27 droits des personnes. Il fallait les protéger, ces droits.
28 Q. Merci.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander que l'on nous
2 montre le 65 ter 28. Il s'agit d'un PV d'une session du Parlement datée du
3 24 au 26 juillet 1992. On l'a déjà vu ce document. La page qui m'intéresse
4 est la page 14.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter la
6 référence de la page.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 14 en serbe, page 17 en anglais.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Ici, c'est moi qui m'adresse au Parlement. Et j'attire votre
10 attention sur le paragraphe du milieu, où il est dit :
11 "Je me dois de dire que le peuple serbe, dont la confession orthodoxe
12 a fait qu'il était éloigné de tout ce qu'il y avait d'inhumain, mais il
13 s'est trouvé des renégats, des gens qui n'étaient pas dignes du
14 qualificatif d'homme, qui avaient commis des atrocités et qui seront
15 poursuivis par la justice. Et ce, les gros délinquants et les petits
16 délinquants aussi. Ceux qui ont fait de gros délits sont plus rares, mais
17 ceux qui ont fait des petits délits sont très nombreux, comme les
18 statistiques nous le montrent. Pillage, acquisition illégale de biens. Tout
19 ceci est le résultat d'une guerre civile, la pire de toutes les guerres. En
20 fait, il ne s'agit pas d'une guerre civile, c'est une guerre interethnique
21 et une guerre religieuse. Ce que je dois dire aussi, c'est que les Serbes
22 se sont gardés de s'approprier les biens d'autrui, en particulier les biens
23 appartenant à des groupes ethniques ou minorités autres. La guerre a changé
24 les gens, et il y a des individus qui sont si portés aux biens d'autrui,
25 tant musulmans que serbes, et il y a de gros problèmes de nature politique.
26 C'est une grande atteinte au moral de nos soldats, que je dois dire être
27 exceptionnel, mais c'est de toute manière quelque chose qui leur fait mal.
28 Parce que, pendant qu'ils se battent, il y a des gens qui commettent des
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1 pillages et des délits dans leur dos…"
2 Est-ce que vous avez été au courant de ceci : ce n'est pas moi
3 seulement qui ai pensé cela, c'est la direction toute entière qui était de
4 cet avis ?
5 R. Oui. Je suis au courant de la chose, mais je ne serais pas
6 d'accord avec vous pour ce qui est de ce point de vue de la nature de la
7 guerre. C'était une guerre civile avec des éléments de combat interethnique
8 et interreligieux.
9 Q. Merci.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander à ce qu'on nous
11 montre maintenant la pièce --
12 L'INTERPRÈTE : Dont l'interprète n'a pas entendu la référence.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez besoin de faire une pause
14 entre les questions et les réponses.
15 Répéter votre question, s'il vous plaît.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] La question se situe par rapport à ce que j'ai
17 dit concernant la période du 24 au 26 juillet : est-ce que cette opinion
18 était connue du Pr Djeric non seulement comme étant mon opinion à moi, mais
19 comme étant l'opinion de la totalité de la direction serbe en Bosnie-
20 Herzégovine. Et je crois bien que le compte rendu a fait état de la réponse
21 du Pr Djeric.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, ce n'est pas cela. Une fois
23 que le Pr Djeric a répondu, vous avez posé des questions, mais ça s'est
24 recouvert avec l'interprétation de la réponse de M. Djeric.
25 Ce qui fait que cette partie-là n'a pas été consignée au compte
26 rendu.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas sûr du fait d'avoir tout
28 consigné.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Professeur, vous avez été d'accord avec ce que j'ai dit, à savoir que
3 c'était une position conjointe, exception faite de l'élément qui est votre
4 avis relatif à la nature de la guerre, n'est-ce pas ?
5 R. Oui. C'est ce que j'ai dit. J'ai dit, et je vais le répéter, ce que
6 vous avez dit, c'étaient des positions adoptées par la direction politique
7 à l'époque. Seulement je n'étais pas d'accord avec vous pour ce qui est de
8 la nature de la guerre. J'ai dit que, de mon avis, c'était une guerre
9 civile avec des éléments de guerre interethnique et interconfessionnelle.
10 Q. Merci. Est-ce que vous vouliez dire par là qu'Abdic était un Musulman
11 d'une autre nature et qu'il y avait des Musulmans dans notre armée, donc
12 que ce n'était pas primordialement la composante confessionnelle qui
13 l'emportait, mais la guerre civile était l'élément principal ?
14 R. Je crois que c'était au premier plan, la composante religieuse.
15 Q. Merci.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le 65 ter 4214. Il s'agit de la pièce D456, me
17 semble-t-il.
18 Excellences, pendant que nous attendons, avec tout le respect que je vous
19 dois, je veux vous rappeler qu'on m'avait donné quatre heures pour le
20 Témoin KDZ192, alors que ce témoin a présidé aux sessions du gouvernement
21 et il a présidé à des centaines de sessions du gouvernement, du Conseil de
22 sécurité nationale, et cetera, et il y a plus de 1 000 documents qui ont
23 été pondus pendant qu'il était en poste. Là aussi, on m'a attribué quatre
24 heures, et je crois que c'est loin d'être suffisant pour qui que ce soit
25 d'entre nous.
26 Alors je vous renvoie vers la page 17 de la version serbe et la page 15 de
27 la version anglaise.
28 M. KARADZIC : [interprétation]
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1 Q. Ça se trouve vers le milieu de la page, "Je me dois de dire que très
2 souvent…" Voilà, là où se trouvait la fléchette. C'est à peu près la
3 quinzième ligne. "Ça doit être absolument placé au service de la
4 détermination des frontières." J'ai dit qu'il s'agissait de la quinzième
5 ligne à compter du haut.
6 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
7 LE TÉMOIN : [interprétation] "Je peux dire" ?
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Non, non. "Je me dois de dire." Il faut descendre d'une dizaine de
10 lignes.
11 R. Oui. Je viens de le retrouver.
12 Q. Merci.
13 Alors il dit : "Je me dois de dire que très souvent certains responsables
14 municipaux se sont comportés de façon extrêmement illégale, et même selon
15 des modalités qui nécessiteraient des arrestations et des sanctions. C'est
16 une chose que, en notre qualité de Parlement, nous devons stigmatiser et
17 sanctionner pour trouver des modalités pour que la présidence, durant les
18 pauses entre les sessions du Parlement, sache de quelle façon il convient
19 de se comporter. En effet, nous pouvons nous estimer heureux qu'il n'y ait
20 pas eu d'exécutions jusqu'à ce jour, mais les arrestations et les sanctions
21 doivent avoir lieu parce que c'est le devoir de ce Parlement, qui est une
22 institution législative qui doit faire respecter la légalité, et il doit
23 consigner les choses, autoriser qui de droit pour entreprendre des mesures
24 aux fins de régler la situation dans certaines municipalités, et ce, de
25 façon énergique."
26 Vous vous souviendrez du fait que dans le système il y avait bien des
27 résidus du système autogestionnaire. Vous ne pouviez révoquer aucun voyou;
28 vous pouviez lancer des appels pour qu'il soit révoqué ou essayer de faire
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1 en sorte qu'il démissionne de lui-même.
2 R. Oui, je m'en souviens. J'en ai parlé hier. J'ai parlé de la puissance
3 des facteurs locaux et des conséquences qui découlaient. Dans un sens
4 positif aussi, pour ce qui est de ce système autogestionnaire. Parce que
5 quand il y a là un système de pouvoir en place, l'autogestion fournissait
6 bien des libertés. Parce que les gens pouvaient se prononcer, pouvaient
7 dire leurs opinions. C'était une période où les gens avaient commencé à
8 aimer les pouvoirs en place. Les gens aiment le pouvoir quand ils sont
9 portés sur le pouvoir, mais dans un territoire, et là je me dois de le
10 dire, malgré, mais c'est un territoire où la culture de la violence se
11 trouve être assez prononcée. Donc il faut pas mal de temps pour qu'elle
12 cède la place à la culture de la tolérance, du respect des arguments
13 d'autrui, et cetera.
14 Q. Merci.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre la page 57 de ce
16 document. Et pour ce qui est de la version anglaise, c'est la page 53.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. En attendant, je vais vous demander si vous êtes d'accord, Professeur
19 Djeric, pour dire qu'outre ces faiblesses liées à la mentalité des gens de
20 ce territoire, il y a eu une arrivée au pouvoir en 1990 de gens qui étaient
21 dans l'opposition et qui étaient en marge de la société, plutôt, et qu'il y
22 avait beaucoup d'insuffisances en matière de connaissances ou d'expériences
23 quant à l'exercice du pouvoir ?
24 R. Je peux le confirmer, en effet. Je dirais même qu'il y a eu, non pas
25 des faibles connaissances, mais des méconnaissances complètes qui se sont
26 manifestées, parce que lors de ces changements intervenus, c'est des gens
27 qui étaient plutôt courageux qui sont venus au premier plan. C'était le
28 résultat des temps que nous avons vécus. Et c'était de loin des gens qui en
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1 connaissaient long, qui en savaient long, donc c'est ici l'audace qui
2 l'emportait sur le reste.
3 Ce n'est pas caractéristique pour ce territoire-là, celui de la Bosnie-
4 Herzégovine seulement. C'étaient des temps de transition. Les dames et les
5 messieurs ici présents doivent connaître la situation à l'Azerbaïdjan
6 [phon], le Nagorno-Karabakh [phon], la Tchétchénie, l'Ossétie du Sud, du
7 Nord. Tout ceci, c'est des pays qui ont traversé des périodes de
8 transition. C'est quelque chose qui est tout à fait spécifique, de lié
9 donc, au changement de systèmes et dans des sociétés où il y avait une
10 composante de commandement prononcée que l'on a abandonnée au profit du
11 passage vers une démocratie.
12 Q. Merci.
13 J'aimerais qu'on relève un peu la page en serbe. Et en début de la ligne,
14 on dit : "Oui, et les profiteurs sont à l'œuvre, ou alors le maire ne prête
15 pas une oreille attentive."
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Relevez, s'il vous plaît, la version en langue
17 serbe. C'est la douzième ligne à partir du bas. "C'est soit les profiteurs
18 qui vont être à l'œuvre, soit les maires ne sont pas en train de prêter une
19 oreille attentive à ce qui se passe."
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. C'est un peu au-dessus de la fléchette.
22 R. Les lettres sont plutôt petites.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Essayons d'enlever la version en anglais
24 pour que le témoin puisse suivre.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Est-ce que vous pouvez voir ? C'est la dixième ou douzième ligne à
27 partir du bas.
28 R. Oui. "Soit les profiteurs sont à l'œuvre, soit les maires ne sont pas à
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1 l'écoute."
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ne vous chevauchez pas.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Les 14 et 15 septembre 1992, et ça se passe à Bijeljina, me semble-t-
6 il. Il est dit :
7 "Soit les profiteurs" - c'est moi qui parle - "Soit c'est les profiteurs
8 qui sont à l'œuvre, soit les maires ne prêtent pas une oreille attentive.
9 Qui est président de l'assemblée municipale à Bijeljina ? Est-ce qu'il est
10 là, Zlatko ? Il ne veut pas écouter. Il a reçu des instructions de la part
11 du gouvernement demandant à ce que deux émetteurs à ondes courtes soient
12 transférés vers la Yougoslavie et qu'on en garde deux ici, et on pourra
13 couvrir une majeure partie du monde. Il ne veut pas le faire. La police ne
14 veut pas arrêter. Les juges ne veulent pas juger et rendre des jugements.
15 Il n'y a pas de dépôt de plaintes. Et le père Savo a fait savoir de quoi il
16 s'agit. Sommes-nous des patrons dans cette maison ? Est-ce que nous sommes
17 des leaders responsables d'un peuple ou pas ? Nous ne pouvons plus faire
18 comme si l'on s'en fichait. Tout est important. Tout est substantiellement
19 essentiel. Il faut que nous essayions des instances centrales du pouvoir.
20 Nous devons créer une police centrale qui viendra pour mettre aux arrêts
21 les individus. On transfèrera la police de Bijeljina à Doboj, et celle de
22 Doboj vers Bijeljina."
23 Il n'était pas facile d'arrêter les gens parce qu'il y avait pleins
24 de cousins, de parents, d'amis sur le terrain qui se protégeaient les uns
25 les autres, et il y avait une absence complète d'ordre dans le
26 professionnalisme.
27 R. Oui, je m'en souviens. Je m'en souviens. C'étaient les problèmes les
28 plus prononcés que nous avions eu à constater sur le terrain local. Les
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1 choses se faisaient très lentement. La prise du pouvoir se faisait très
2 lentement.
3 Q. Merci. Vous souvenez-vous du fait qu'à la fin du mois de juillet, nous
4 devions arrêter les Guêpes jaunes ? Nous avons dû engager la brigade de la
5 police spéciale afin de procéder aux arrestations à Bijeljina et à Brcko,
6 et nous avons même demandé à Panic d'envoyer ces forces spéciales, chose
7 qu'il a faite ?
8 R. Pour ce qui est de l'emploi de la police, je ne sais pas grand-chose à
9 ce sujet. Je n'étais pas au courant, car le commandement et l'emploi des
10 forces de police relevaient de votre compétence, donc je ne peux rien dire
11 à ce sujet.
12 Pour ce qui est des Guêpes jaunes, je peux simplement dire que je me
13 souviens, d'après ce que l'on disait, car je n'étais pas présent et je ne
14 participais pas directement à cela, mais j'ai entendu dire qu'une unité
15 spéciale de la police avait été employée pour disperser les Guêpes jaunes.
16 Et la raison qui était invoquée, c'est ce que disaient d'aucuns, c'est que
17 les Guêpes jaunes avaient dépassé les limites, que les Guêpes jaunes
18 avaient arrêté un ministre, qui était le ministre Ostojic. Et ils
19 l'auraient prétendument contraint à brouter de l'herbe dans un champ. C'est
20 ce que l'on disait. Et c'est la raison pour laquelle cette unité de police
21 particulière avait été employée. C'est ce que j'ai entendu dire. Donc je ne
22 le sais pas vraiment, mais c'est ce qui est parvenu à mes oreilles.
23 Q. Merci. Est-ce que vous êtes d'accord --
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez eu une demi-heure que nous
25 vous avons accordée aujourd'hui. Vous avez donc utilisé cinq heures et dix
26 minutes. Et compte tenu de ces circonstances, les Juges de la Chambre vont
27 vous accorder dix minutes supplémentaires. Je souhaite que vous concluiez
28 votre contre-interrogatoire dans les dix minutes qui suivent.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Excellence. J'ai passé outre
2 un certain nombre de sujets avec d'autres témoins, mais avec ce témoin-ci,
3 je dois parler de l'attitude vis-à-vis des camps de prisonniers de guerre
4 et de l'arrivée de 400 civils à Pale qui arrivaient de Bratunac, là où se
5 trouvait le siège du gouvernement. La crise entourant cette question-là --
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons pris notre décision. Vous
7 aurez dix minutes.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je serai bref.
9 M. KARADZIC : [interprétation]
10 Q. Monsieur Djeric, conviendrez-vous avec moi que les Guêpes jaunes se
11 sont retournées contre Ostojic parce que le gouvernement s'était retourné
12 contre eux, et donc ils voulaient démontrer leur force ?
13 R. Cela, je ne peux pas l'affirmer. Je ne peux pas affirmer quelque chose
14 comme ça parce que je ne le sais vraiment pas. Je veux dire, à savoir s'ils
15 se sont retournés contre les autorités, eh bien, c'est quelque chose que je
16 ne peux pas affirmer. Peut-être que vous pouvez dire cela en vous fondant
17 sur d'autres informations et connaissances. Que faisait Ostojic à cet
18 endroit-là ? C'était un ministre du gouvernement. Je n'ai aucune idée.
19 Peut-être qu'il passait par là par hasard. Peut-être qu'il était là en
20 mission officielle. Peut-être qu'il se rendait en Serbie ou bien qu'il
21 rentrait de Serbie. C'est quelque chose que je ne sais pas. Ceci n'est pas
22 tout à fait clair à mes yeux. Donc je ne peux pas être très précis à ce
23 sujet. Je ne peux vous parler que ce dont j'ai entendu parler. Il se peut
24 que quelqu'un ait transformé cet incident en quelque chose de tout à fait
25 banal. Moi, je ne peux pas vous dire autre chose. Je ne peux vous parler
26 que ce dont j'ai entendu parler.
27 Q. En route vers Belgrade, Ostojic était censé recueillir des éléments
28 d'information sur les Guêpes jaunes et me les transmettre. Ils ont appris
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1 cela, et ensuite ils l'ont maltraité. Mais bon, oublions cela.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.
3 M. TIEGER : [interprétation] Ecoutez, je ne savais pas combien de temps
4 cette question allait durer, mais je ne pense pas qu'il soit approprié que
5 M. Karadzic soit en train d'informer le témoin sur ces questions-là. Il est
6 censé recueillir des éléments d'information du témoin.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Karadzic.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai simplement dit que je souhaitais informer
9 le témoin de cette question-ci. Mais cela n'a pas d'importance.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Alors il ne me reste que peu de temps et je souhaite vous rappeler la
12 crise que vous aviez la charge de résoudre en l'absence de tout autre
13 représentant officiel. Et à cette fin, je souhaite que nous nous penchions
14 sur ce qui s'est passé dans le courant du mois de mai, au moment où 400
15 personnes ont été transportées à Pale depuis Bratunac.
16 Pouvez-vous confirmer que Deronjic ou toute autre personne ne vous a jamais
17 informé des combats qui se déroulaient à Glogova, dans ce village, et êtes-
18 vous certain à ce jour que ces personnes venaient de Glogova ?
19 R. Je confirme tout cela. J'ai dit que je n'avais aucune idée sur la
20 question et que je ne savais pas qui était Deronjic, si vous me suivez. Je
21 ne savais même pas qu'il y avait des combats qui se déroulaient à cet
22 endroit. Je ne savais absolument rien à ce sujet.
23 La première fois que j'ai été confronté à toutes ces questions était ici au
24 Tribunal, au TPIY, dans l'affaire Krajisnik, je ne savais pas qui étaient
25 ces personnes, Drenova ou ce monsieur en particulier. C'est quelque chose
26 que je ne sais pas. Je sais simplement que j'ai appris deux jours plus
27 tard, au moment où ces personnes étaient arrivées à Pale, où j'étais le
28 seul à me trouver à Pale parmi les hauts représentants officiels. On avait
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1 fait venir ces personnes deux jours auparavant, et elles avaient été
2 installées dans une ancienne coopérative agricole ou un centre culturel, je
3 ne sais pas. C'est là que ces personnes étaient retenues. Et c'est par
4 hasard -- ou, en tout cas, c'est quelque chose que j'ai appris de mon
5 chauffeur. Ils m'ont demandé. Ils m'ont dit : Monsieur le Premier ministre,
6 savez-vous que certaines personnes ont été emmenées ici depuis Bratunac,
7 que ces personnes sont retenues là-bas ? Et ils m'ont dit que ces personnes
8 étaient maltraitées, et c'était arrivé au stade où ces personnes pouvaient
9 même être tuées ou que des crimes pouvaient être commis. C'était une
10 question de secondes.
11 Q. Merci. Donc vous avez ensuite demandé à recevoir des informations,
12 chose qui a été faite. On vous a dit que ces Musulmans souhaitaient que
13 vous leur permettiez de partir à Sarajevo, et vous avez donné l'ordre à cet
14 effet que des camions avec des bâches soient mis à leur disposition de
15 façon à ce que ces personnes puissent traverser le territoire musulman en
16 direction de Visoko, qu'elles pouvaient passer dans la municipalité
17 d'Ilijas, et que la municipalité en avait été informée. Vous leur avez dit
18 de se préparer, et vous les assuriez que rien ne pouvait leur arriver et
19 que personne n'allait leur tirer dessus.
20 Est-ce exact ?
21 R. Eh bien, voyez-vous, je n'ai pas informé Ilijas. Je n'ai pas pris la
22 peine de faire cela. Ce sont les commissions qui s'en sont occupées, ainsi
23 que la police. Donc ce n'est pas moi personnellement qui ai traité de cette
24 question-là. La seule chose que j'ai faite était la suivante : je
25 souhaitais sauver ces personnes-là. C'était une question de secondes, et je
26 ne voulais pas que quelqu'un d'autre prenne la décision. Donc j'en ai
27 assumé la responsabilité et j'ai demandé personnellement et directement à
28 ce qu'on puisse se rendre auprès de ces personnes pour voir ce dont elles
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1 avaient besoin et tenir compte de ce dont elles avaient besoin. De les
2 faire rentrer chez elles n'avait pas de sens. Il fallait en assumer la
3 responsabilité. Donc j'ai demandé à ce que l'on tienne compte de leur
4 volonté et qu'il fallait sur-le-champ sauver toutes ces personnes. C'est ce
5 que je puis dire aujourd'hui.
6 Et à ce jour, ce qui s'est passé n'est pas clair pour moi, qui a agi
7 ainsi, de quoi s'agissait-il. Que ces personnes aient été emmenées au siège
8 du gouvernement démocratique, je ne comprends pas comment ceci est arrivé.
9 Je ne le comprends pas aujourd'hui. Je ne peux rien dire à ce sujet. Je
10 peux simplement dire que nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir
11 pour sauver ces personnes, mais nous avons tout simplement manqué de temps.
12 Nous n'avions pas d'autre alternative possible, nous n'avions pas le temps
13 d'y réfléchir. L'idée consistait à répondre à leurs desiderata, ils ont
14 fait leur propre choix, et c'est ainsi que les choses se sont terminées.
15 Q. Est-ce que vous conviendrez que ce serait inhumain et illégal si vous
16 les aviez renvoyés dans les zones de combat contre leur gré, combats qui se
17 déroulaient à Bratunac à l'époque ?
18 R. Eh bien, je n'aurais jamais fait cela, que ce soit aujourd'hui ou à
19 l'époque. C'eut été abusé de ces personnes, car il y avait une forte
20 probabilité que cela se passerait mal pour ces personnes-là. Quelque chose
21 comme cela ne m'a jamais traversé l'esprit. J'ai agi comme je l'ai fait
22 pour protéger la liberté et la vie de ces personnes-là. Et c'était mon
23 objectif essentiel à l'époque.
24 Q. Merci. Le dernier thème que je souhaite aborder dans le peu de temps
25 qu'il me reste, c'est l'échange des prisonniers.
26 Etes-vous d'accord pour dire que le premier jour de la guerre, un nombre
27 important de prisonniers ont été capturés de part et d'autre ? Et des
28 faveurs personnelles étaient octroyées à certaines personnes. Et peut-être
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1 que de l'argent même a été utilisé pour les échanges. Et ensuite, le 8 mai,
2 le gouvernement a rendu une décision, a mis en place une commission
3 centrale, et les municipalités disposaient de leurs propres commissions
4 également chargées de l'échange des prisonniers, différents organes, et
5 cetera.
6 Vous en souvenez-vous ?
7 R. Le gouvernement a réglementé cette question-là déjà très tôt. Le
8 gouvernement a adopté certaines instructions relatives aux échanges des
9 prisonniers et s'est occupé d'autres questions également. Pour ce qui est
10 de l'institutionnalisation de tout ceci, une commission chargée de
11 l'échange des prisonniers a été créée.
12 Cependant, il y a eu des abus à ce niveau-là. Des civils sont arrivés et se
13 faisaient passer pour des prisonniers de guerre. Ceci est arrivé plus
14 particulièrement à Sarajevo, mais ailleurs également.
15 Et c'est devenu une activité de type commercial, en quelque sorte.
16 Q. Et ceci n'avait pas reçu l'aval des autorités juridiques.
17 R. Non, effectivement.
18 Q. Et des individus, des personnes ?
19 R. Lorsque j'ai parlé d'affaires commerciales, je ne peux pas parler du
20 gouvernement. Il ne pouvait pas s'agir de l'Etat. Il ne pouvait s'agir que
21 des personnes particulières, et ces personnes-là ne devraient pas agir
22 ainsi non plus, à moins qu'il ne s'agisse d'abus.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors le P1088 est un document qui a déjà été
24 versé au dossier. Je n'ai pas le temps d'afficher ce document. Je demande
25 simplement à voir le compte rendu d'audience dans l'affaire
26 Stanisic/Zupljanin. Page 2 459. Lignes 1 à 7. Numéro 65 ter 22479. Je crois
27 que ceci ne fait pas partie de la déclaration consolidée.
28 M. KARADZIC : [interprétation]
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1 Q. Il s'agit là du sujet traité. Nos autorités faisaient-elles une
2 quelconque différence entre les poursuites pénales ou autres ? Y avait-il
3 une différence au niveau de l'appartenance des différentes personnes au
4 plan ethnique et religieux ?
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 2 549. Je vais lire ceci en anglais.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Je vais vous le lire à voix haute. Au paragraphe 2, veuillez lire
8 ceci.
9 Maintenant, cela va être lu.
10 "'La priorité pour les services nationaux et les services chargés
11 d'enquêter sur les crimes, à savoir le MUP, il s'agissait de déceler les
12 crimes de guerre, fournir des documents à l'appui et déposer des rapports
13 au pénal. Des documents sur les crimes commis par les Serbes ont également
14 été fournis.'"
15 A la ligne 6, votre réponse.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore une fois, nous n'avons pas la bonne page
17 à l'écran. 2 459.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Voici ce que vous dites -- il serait préférable d'agrandir.
20 "Aucune différence a été établie. Tous les crimes devaient être
21 poursuivis."
22 Voilà, ça c'est votre réponse, à la ligne 6.
23 Donc les autorités n'ont fait aucune discrimination eu égard à
24 l'appartenance ethnique des criminels de guerre, n'est-ce pas ?
25 R. Les autorités n'auraient pas pu agir autrement, si vous regardez le
26 texte de la constitution ou tout autre élément. Donc il n'y avait pas de
27 fondement juridique à cela, et il n'y avait pas d'autre raison pour que les
28 personnes soient traitées différemment. Chacun devait être traité
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1 conformément à la loi. Dans le cas de violation, c'eut été une violation et
2 un comportement illégal qui devrait être sanctionné. C'est ce que j'ai dit
3 à l'époque et j'ai parlé de cela longuement hier, et c'est quelque chose
4 que je réitère aujourd'hui. Je prônais à l'époque et je n'ai cessé de
5 prononcer la chose suivante : Tous ceux qui ont dépassé certaines barrières
6 devaient être punis. C'est quelque chose que l'on pouvait constater. Le
7 gouvernement a, très tôt, adopté les documents nécessaires à cet effet et
8 le gouvernement a demandé à ce que soit établi si, oui ou non, des crimes
9 avaient été commis et si la population civile avait fait l'objet de
10 traitement inhumain. Le gouvernement souhaitait que ceci soit établi et
11 qu'il y ait des sanctions si ceci était effectivement arrivé.
12 Q. [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant, il est temps de poser votre
14 dernière question.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est exactement ce que je voulais dire,
16 Excellence.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Je n'ai pas le temps, Monsieur le Professeur Djeric, de vous montrer
19 quelque chose qui est un extrait du journal officiel, une liste. Je
20 pourrais aborder cette question avec un autre témoin.
21 Le gouvernement lui-même a remis 700 textes législatifs à
22 l'assemblée. Le gouvernement, la présidence et l'assemblée, pendant ces
23 sept mois où vous avez été Premier ministre, plus de 1 000 textes
24 législatifs ont été adoptés.
25 Etes-vous d'accord, Monsieur Djeric, que pendant ces trois années et
26 demie de guerre, nous avons eu au moins cinq premiers ministres, ou cinq
27 gouvernements, et je crois que six ministres de l'Intérieur nous avons eus,
28 n'est-ce pas ?
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1 R. Eh bien, une fois que je suis parti, les affaires du gouvernement
2 m'intéressaient moins, ainsi que les changements qui s'y opéraient. A
3 savoir combien de gouvernements et combien de ministres il y a eus, avec la
4 meilleure volonté du monde, je ne peux pas m'en souvenir. C'était une
5 époque difficile, et je ne peux vraiment pas vous le dire. Je ne peux pas
6 vous dire combien de changements il y a eus. Mais il est exact qu'il y a eu
7 des remaniements du gouvernement.
8 Q. Alors, puis-je titiller votre mémoire. Après vous, c'était
9 Vladimir Lukic; ensuite, après Vladimir Lukic, il y a eu Dusko -- Dusan
10 Kozic; et après Dusan Kozic, il y a eu Rajko Kasagic; et après Rajko
11 Kasagic, il y a eu Gojko Klickovic. Cinq premiers ministres en trois ans et
12 demi, n'est-ce pas ?
13 R. Je crois qu'en réalité, le dernier a rempli deux mandats, si je
14 me souviens.
15 Q. Pardonnez-moi, Monsieur le Professeur, je regrette n'avoir pas eu
16 davantage de temps pour présenter les travaux très importants menés par le
17 gouvernement alors qu'il n'y avait pas des conditions réelles pour
18 travailler correctement. Je vous remercie de ce que vous avez fait lorsque
19 vous étiez au gouvernement, et je vous remercie pour tout.
20 R. Je souhaite remercier Mme et MM. les Juges, les messieurs de
21 l'Accusation, ainsi que vous tous --
22 M. TIEGER : [interprétation] Pardonnez-moi de vous interrompre. Vous aurez
23 l'occasion de faire cela. Je crois que les Juges de la Chambre étaient sur
24 le point de me demander si j'avais des questions supplémentaires à poser
25 suite à vos réponses aux questions de M. Karadzic, ce qui est effectivement
26 le cas.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, oui.
28 M. TIEGER : [aucune interprétation]
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1 Nouvel interrogatoire par M. Tieger :
2 Q. [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Djeric.
3 R. Bonjour.
4 Q. J'ai souhaité vous poser quelques questions en rapport avec une partie
5 de votre déposition hier. A la page du compte rendu d'audience 27 936, vous
6 avez abordé la question de la mesure dont le gouvernement était coupé de
7 toutes formes de communications.
8 Tout d'abord, une question de précision que je souhaite vous poser. Je
9 crois que vous avez indiqué que le gouvernement se trouvait en haut de la
10 colline de Jahorina. Par opposition, M. Karadzic, M. Krajisnik et M.
11 Koljevic étaient-ils en bas de la colline, à Pale, en contrebas ?
12 R. Oui. Le gouvernement se trouvait à l'hôtel Bistrica, à une altitude de
13 1 600 à 1 700 mètres environ. La montagne a une hauteur de 2 000 mètres.
14 C'est là où se trouve le haut de la montagne. Et tout le reste se trouvait
15 à Pale. Pale est à 800 mètres. La distance dont nous parlons représente 12
16 kilomètres environ.
17 Q. Je souhaitais vous poser des questions sur les différentes formes de
18 communications que vous avez citées lorsque vous avez précisé que le
19 gouvernement avait été coupé pendant un certain temps.
20 Tout d'abord, Monsieur Djeric, saviez-vous que le système de communication
21 militaire était très complexe et que ce système avait été conçu pour
22 relayer des éléments d'information du terrain aux échelons les plus élevés
23 du commandement militaire ?
24 R. Non. Pour ce qui est des transmissions militaires, c'est quelque chose
25 dont je ne savais rien. Mais ils étaient utilisés par les militaires,
26 n'est-ce pas ? Nous, nous ne pouvions pas nous reposer dessus, voyez-vous.
27 Lorsque j'ai parlé de transmissions ou de communications, j'ai
28 clairement dit hier que notre système de communication des PTT avait été
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1 interrompu par le QG de Sarajevo. Je veux parler de système de
2 télécommunications civiles, et son centre se trouvait à Sarajevo. Nous
3 étions sur le mont Jahorina et nous avons été coupés. Alors, lorsqu'il
4 s'agit des communications, voilà quelle était la situation.
5 Alors, pour ce qui est des autres formes de communications - les
6 routes, par exemple - vous savez que c'était un théâtre d'opérations, et
7 très simplement, nous ne pouvions tout simplement pas nous rendre dans
8 certains secteurs. Donc nous ne pouvions pas visiter les secteurs. Il était
9 impossible de faire cela. C'est quelque chose qui pouvait simplement avoir
10 lieu par la suite par hélicoptères, par exemple, si les hauts dirigeants
11 réussissaient à se procurer des hélicoptères, et c'étaient les militaires
12 qui les leur fournissaient. Dans ce cas, peut-être que les gens pouvaient
13 voyager, se déplacer. On pouvait se rendre en Herzégovine ou en Krajina,
14 mais c'était déjà quelques mois après le début du conflit.
15 Alors, pour ce qui est de ces hélicoptères, je me souviens du fait
16 que ces hélicoptères étaient utilisés exclusivement à la demande des hauts
17 dirigeants. Je suppose que c'étaient les membres du Parlement ou des
18 députés. Lorsque des réunions de l'assemblée devaient se tenir, dans ce cas
19 des députés étaient transportés de Banja Luka, par exemple, ou Bilica ou
20 Herzégovine, et cetera. Cependant, les organes opérationnels du
21 gouvernement ne pouvaient pas se procurer des hélicoptères ou toute autre
22 forme de communications.
23 Et c'est ce que j'entendais lorsque j'ai parlé des communications.
24 C'est cela que je voulais dire lorsque j'ai dit que les communications
25 avaient été coupées. Je ne veux pas parler de l'idée même d'être coupé sur
26 le plan des médias, par exemple, d'être coupé au niveau des journaux, et
27 cetera. Je veux parler du gouvernement. Les journalistes qui étaient là
28 étaient essentiellement des journalistes qui se trouvaient proches ou dans
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1 l'entourage des hauts dirigeants. Il était plus agréable pour eux d'être en
2 altitude plutôt que tout en hauteur où je me trouvais moi-même.
3 Q. Merci, Monsieur Djeric. Ecoutez, j'étais sur le point de vous
4 montrer toute une série de transmissions militaires, dans ce cas, entre le
5 1er Corps de Krajina et l'état-major, ou plutôt, le prédécesseur du 1er Corps
6 de Krajina, le 5e Corps, et la 2e Région militaire de Sarajevo de la mi-
7 avril à la mi-juillet --
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que vous êtes prié de répéter
9 car je n'ai reçu aucune traduction en serbe.
10 M. TIEGER : [interprétation] Est-ce mieux maintenant ?
11 M. LE JUGE KWON : [hors micro]
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, maintenant j'entends. Mais la question n'a
13 absolument pas été traduite. Je ne sais pas si le témoin a entendu quelque
14 chose.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai rien entendu. Je n'ai pas entendu
16 la question.
17 M. TIEGER : [interprétation] Dans ce cas, je vais la répéter, Monsieur
18 Karadzic et Monsieur Djeric.
19 Q. J'étais sur le point de vous montrer toute une série de transmissions
20 militaires, dans ce cas, entre le 1er Corps de Krajina et l'état-major
21 principal, ou le prédécesseur du 1er Corps de Krajina, le 5e Corps,
22 destinées à la 2e Région militaire de la mi-avril 1992 à la mi-juillet
23 1992. Mais je suppose, d'après votre réponse, que vous n'auriez pas été
24 dans le secret de ces transmissions et que vous ne pourriez pas nous dire
25 quelque chose de particulier au sujet de ces transmissions.
26 R. Le gouvernement n'a pas utilisé les moyens de communication militaires.
27 Le chef du gouvernement n'avait aucun lien avec l'armée parce que l'armée
28 était commandée par le président. Le gouvernement n'avait rien à voir avec.
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1 Ce que je peux dire ensuite, c'est que je n'ai pas eu à connaître de tout
2 ce qui faisait partie des communications militaires. Et il faut que vous
3 ayez une chose à l'esprit, si ça peut vous être utile, c'est que jusqu'au
4 départ de l'armée, c'est-à-dire jusqu'au 20 mai à peu près, tout ce
5 territoire, à tous points de vue, était tenu par l'armée populaire
6 yougoslave jusqu'à son retrait. Une fois qu'elle s'est repliée, les choses
7 ont été reprises par le Corps de l'armée de la Republika Srpska. L'armée,
8 donc, était une sorte de mécanisme tout à fait à part, et s'agissant du
9 mécanisme en question, c'est la présidence, voire le président, qui avait à
10 voir avec le gouvernement. Non, je ne peux pas en parler donc. Ce que je
11 peux vous dire, c'est que le gouvernement était coupé du reste. Puisque la
12 situation de guerre avait, objectivement parlant, mis en place un contexte
13 et une situation de nature à vous empêcher, du fait des territoires
14 entrecoupés, des communications coupées, des coupures dans le
15 fonctionnement des médias et la diffusion des informations, vous ne pouviez
16 pas faire le maximum. Même si vous vouliez faire le maximum, les
17 circonstances, objectivement parlant, vous interdisaient ce type de chose.
18 Q. Merci, Monsieur Djeric.
19 M. TIEGER : [interprétation] Je ne vais donc pas présenter ce type de chose
20 au témoin, Monsieur le Président. Nous allons demander le versement au
21 dossier de ces documents sans le témoignage de témoin.
22 Q. Monsieur Djeric, je voulais vous poser des questions concernant
23 certaines des communications qui se déroulaient pendant cette période de
24 temps, et à cet effet, je me propose d'utiliser plusieurs documents en
25 notre possession.
26 M. TIEGER : [interprétation] Et j'aimerais qu'on nous montre deux
27 documents. Le premier serait le P03922.
28 Q. Il s'agit d'un document, comme vous pouvez le voir, Monsieur, daté du
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1 15 avril. Il s'agit d'une décision proclamant un état de guerre imminent et
2 une déclaration de mobilisation sur le territoire entier de la Bosnie-
3 Herzégovine serbe, de la TO.
4 M. TIEGER : [interprétation] Ensuite, je voudrais qu'on nous montre le 65
5 ter 17918.
6 Q. Ici, il s'agit d'une décision rendue par la cellule de Crise de la
7 Région autonome de la Krajina, et ça se rapporte à la mobilisation. Ils
8 proclament par eux-mêmes une mobilisation générale sur le territoire entier
9 de la Région autonome de la Krajina.
10 Alors, est-il exact de dire, Monsieur Djeric, que ce deuxième document
11 indique que la Région autonome de la Krajina a reçu une décision relative à
12 la mobilisation qui émane des autorités de la république ?
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il faut être équitable vis-à-vis du témoin. Il
14 faut aussi voir au bout de combien de temps il a reçu cela. Il l'a reçu au
15 bout de trois semaines, et ça aussi, il faut le montrer au témoin, 15 avril
16 et 4 mai d'autre part.
17 M. TIEGER : [interprétation] Ça se trouve vers le bas du document. Mais je
18 crois que les choses sont tout à fait claires.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette région autonome a pris la décision de
20 procéder à une mobilisation. Et ceci confirme le fait que ces autorités
21 régionales et locales n'avaient foi qu'en elles-mêmes. Ça montre que ce
22 document produit par eux a suivi un document par lequel les membres de la
23 présidence, Koljevic et Plavsic, avaient donné l'ordre de procéder à une
24 mobilisation. Les choses sont claires. Il convient de garder à l'esprit le
25 fait que ça se passe assez tôt. C'est au tout début. Et il y a eu des
26 retards de pris quand même.
27 M. TIEGER : [interprétation]
28 Q. Merci.
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1 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je voudrais
2 demander le versement au dossier.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur Robinson ?
4 M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, ça sera versé au dossier.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P4985, Madame,
7 Messieurs les Juges.
8 M. TIEGER : [interprétation]
9 Q. Je vais me pencher maintenant sur une période quelque peu postérieure à
10 ce qu'on vient de voir dans le même mois. Il s'agit de la pièce P02627.
11 M. TIEGER : [interprétation] Alors j'aimerais qu'on descende un peu vers le
12 bas de la page en anglais et en B/C/S.
13 Q. Le paragraphe 9 parle des activités des organes municipaux, des
14 autorités municipales. Les rapports d'Ostojic, et il dit Srbatic - mais je
15 suppose qu'il s'agit de Subotic - ils sont cités en référence.
16 M. TIEGER : [interprétation] Et je voudrais, à ce sujet, qu'on se penche
17 sur le 65 ter 09454.
18 Q. Il s'agit d'un document émanant du ministre Velibor Ostojic où l'on
19 informe au sujet de la Défense territoriale serbe de la région de Foca qui
20 a déployé des efforts pour nettoyer le terrain et, deuxième paragraphe, on
21 parle de la libération du secteur de Ustikolina, et il est question
22 d'informations au sujet de la situation telle qu'elle se présente sur les
23 territoires libérés. Alors, Monsieur Djeric, est-ce que ces documents
24 indiquent également qu'il y a des contacts et une transmission de
25 l'information concernant la situation et les activités des cellules de
26 Crise et des autorités au niveau de municipalités variées ?
27 R. Je peux tomber d'accord.
28 Parce qu'ici nous avons plusieurs rapports montrant comment -- enfin, je ne
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1 sais pas comment ça parvenait au secteur chargé de la sécurité nationale.
2 Mais on voit que Subotic a informé qui de droit. Il était ministre de
3 l'armée. Je suppose qu'il a dû obtenir, par des filières militaires qui
4 étaient les siennes, des rapports de cette nature.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois qu'il faut une fois de plus être
6 équitable. Subotic a parlé des conditions et circonstances liées à la
7 sécurité à Sarajevo. C'est tout près, c'est à 9 kilomètres. Il était facile
8 d'envoyer des rapports alors qu'on se trouvait à Sarajevo, et c'est dit
9 dans le document précédent.
10 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de
11 mentionner à l'attention de M. Karadzic que je me suis abstenu de faire des
12 commentaires à bien des occasions quant au texte des documents qu'il a
13 présentés lui-même. Ce texte est disponible à tout un chacun, et je vais
14 demander - puisque le premier des documents a déjà été versé au dossier -
15 de procéder au versement de ce document-ci.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4986, Madame, Messieurs
18 les Juges.
19 M. TIEGER : [interprétation]
20 Q. Nous allons maintenant nous pencher sur une période qui concerne la mi-
21 mai. Nous allons sauter des éléments. Il y a eu une tenue d'une 16e session
22 de l'assemblée à Banja Luka à la date du 12 mai, les préparatifs et
23 communications nécessaires pour ce qui est de la tenue de cette assemblée.
24 M. TIEGER : [interprétation] Et je vais demander à ce que l'on nous montre
25 le 65 ter 17225.
26 J'aimerais qu'on se penche sur le paragraphe 2. C'est en page 2 du
27 document.
28 Q. J'ai d'abord indiqué qu'il s'agit de PV de la cellule de Crise de
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1 Sipovo. Ça s'est tenu au mois de mai.
2 Le paragraphe 2 parle d'une requête du ministère de la Santé de la
3 République serbe de Bosnie-Herzégovine, ministère de la Santé et des Soins
4 sociaux, et ce, en réponse à une communication de la cellule chargée des
5 réfugiés.
6 Monsieur Djeric, cette demande a été lue à voix haute, et puis est-ce qu'on
7 pourrait considérer que c'est un exemple de communication qui existe entre
8 la cellule de Crise de la Région autonome de la Krajina et le niveau de la
9 république vers la mi-mai de l'année 1992 ?
10 R. Ces documents montrent le fait que le ministère s'était efforcé
11 d'étendre ses activités jusqu'aux régions les plus éloignées. Le ministère
12 voulait avoir des informations au sujet de la situation au niveau de la
13 santé, des besoins du secteur sanitaire et à des fins humanitaires et
14 autres. C'est ce que nous dit ce document.
15 Q. Merci, Monsieur.
16 M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
17 document, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P4987.
20 M. TIEGER : [interprétation] Deux autres documents pour ce qui est de cette
21 période de temps. Le premier document est le P03919.
22 Q. Il s'agit d'une décision relative à la mobilisation générale des forces
23 et des ressources de la république. Le premier des deux paragraphes étant
24 de la mobilisation des conscrits militaires. Et à l'article 1, on dit
25 qu'ils sont censés se présenter à tel endroit, et cetera, et la date est
26 celle du 20 mai. La signature est celle de M. Karadzic.
27 M. TIEGER : [interprétation] Et je voudrais maintenant qu'on se penche sur
28 la pièce P3537.
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1 Q. Il s'agit d'une décision de la cellule de Crise de Prijedor. La réunion
2 s'est tenue à la date du 22 mai 1992. On fait référence à une décision qui
3 est celle qu'on vient de voir, la décision relative à la mobilisation. Et
4 on peut voir que l'on énumère différentes parties de ce document, l'ordre
5 donné par M. Karadzic qui a précédé à cette décision.
6 Alors, Monsieur Djeric, est-ce que ceci est un autre exemple de la présence
7 du contact entretenu au niveau de la république et les municipalités et
8 leurs propres cellules de Crise ? Dans ce cas concret, il s'agit de
9 municipalités dans la Région autonome de la Krajina, et la cellule de Crise
10 est en train de mettre en œuvre une décision qui émane du niveau de la
11 république ?
12 R. Ceci montre le fait que l'autorité régionale là-bas est en train de
13 prendre des initiatives et des actions en matière de gestion sur la base
14 des décisions prises par les autorités centrales. On peut voir que ce qui a
15 été dit hier et aujourd'hui au sujet de ces éléments locaux qui constituent
16 un facteur à part dans l'Etat, parce qu'ici, connaissant et sachant quel a
17 été le système juridique en place, l'autorité locale n'avait pas le droit
18 de proclamer une mobilisation. Mais comme ils avaient constitué un Etat
19 dans un Etat, ils rendaient des décisions qui constituaient des doublons.
20 Et l'animosité qu'ils ressentaient vis-à-vis de l'autorité centrale a fait
21 qu'ils voulaient prendre leurs propres décisions liées à la mobilisation.
22 La décision qui a précédé, c'est celle du président ou du commandant, de
23 Karadzic, et je pense qu'il a dû prendre cette décision au moment où il est
24 devenu président. La décision auparavant a été prise par la présidence,
25 composée de deux membres, Koljevic et Plavsic. Eux, ils ont rendu cette
26 décision. Et j'imagine que pour l'autre vague de mobilisation, comme il y
27 avait eu un nouveau président de mis en place, eh bien, c'est ce président-
28 là qui a promulgué une décision liée à la mobilisation.
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1 Pour répondre à votre question, je voudrais dire qu'il y avait une
2 synchronisation, une espèce de prise de modèle sur l'autorité centrale qui
3 a rendu une décision liée à la mobilisation. Mais je pense que ces
4 autorités là-bas n'avaient pas le droit du tout de promulguer ce genre de
5 décision, parce que c'était le rôle des autorités centrales.
6 J'espère avoir répondu de façon suffisante. On voit ce phénomène
7 d'imitation, ce phénomène par lequel on a simulé le fait d'être une
8 autorité véritable. Mais le fait est aussi que c'était la seule autorité
9 sur place. Ils s'en fichaient pas mal à ce moment-là de ce que disait
10 l'autorité centrale. Parce que s'ils avaient respecté l'autorité centrale,
11 ils s'en seraient tenus et auraient respecté la totalité des dispositions
12 réglementaires. Et ils n'auraient pas, dans ce cas, passé les frontières et
13 procédé à des usurpations de pouvoir.
14 Q. Monsieur Djeric, je voudrais maintenant que nous changions de sujet, et
15 j'aimerais vous poser des questions concernant certaines sessions de
16 l'assemblée qu'a évoquées M. Karadzic avec vous hier.
17 En particulier, il vous a posé des questions au sujet de la 11e
18 session de l'assemblée des Serbes de Bosnie qui s'est tenue le 18 mars
19 1992. En particulier, il a cité des parties de PV au sujet de la mise en
20 place d'un gouvernement sur le terrain, du retrait des troupes, la
21 nécessité d'assurer la sécurité de tout un chacun, et il y a eu notamment
22 référence faite aux accords de Lisbonne.
23 Alors, pour ce qui est de ces questions posées par M. Karadzic au
24 sujet de la mise en œuvre de ces accords de Lisbonne, qui ont également été
25 appelés accords de Cutileiro, j'aimerais vous poser des questions
26 complémentaires à des fins d'apport d'éclaircissements, si vous pouvez nous
27 les apporter.
28 Tout d'abord, dites-nous s'il est exact de dire que ces accords de Lisbonne
Page 28061
1 n'ont pas été signés, et le fait que la direction des Serbes de Bosnie
2 avait souligné le fait que cela n'avait pas été signé ?
3 Vous en souvenez-vous ?
4 M. ROBINSON : [interprétation] Objection. C'est une question
5 directrice.
6 M. TIEGER : [interprétation] Je peux poser la question différemment.
7 Q. Vous souvenez-vous du fait de savoir si l'accord de Lisbonne avait été
8 signé; et vous souvenez-vous des références faites par la direction des
9 Serbes de Bosnie au sujet de la signature ou pas desdits accords ?
10 R. Pour autant que je le sache, autant que l'on m'ait communiqué ce type
11 d'information, le plan de Cutileiro a été signé. Les trois parties en
12 présence ont accepté l'accord et ont apposé leurs signatures. A posteriori,
13 c'est ce que j'en sais, la partie musulmane a retiré sa signature, la
14 signature qu'elle avait déjà apposée sur l'accord. C'est ce que j'en sais.
15 Le traité avait été signé. Il était entré en vigueur.
16 Q. Permettez-moi d'attirer votre attention sur plusieurs extraits de cette
17 session de l'assemblée qui ont été cités par le Dr Karadzic.
18 Il s'agit de la pièce P -- non, D. D00090. J'attire votre attention
19 sur la page 6 de la version anglaise et la page 7 de la version en B/C/S.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je crains fort ici qu'on cherche à
21 induire le témoin dans l'erreur. On crée de la confusion.
22 Là-bas, il a été clairement dit qu'il ne restait que des cartes, et
23 c'est la raison pour laquelle ça n'a pas été signé tout de suite, mais ça a
24 été approuvé par tout un chacun. J'ai mentionné dans mon contre-
25 interrogatoire le fait que les cartes --
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, M. Tieger n'a pas
27 encore posé sa question. On va voir ce qu'il va demander.
28 M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Président, je ne veux pas
Page 28062
1 utiliser mon temps pour répondre à des commentaires inappropriés. C'est moi
2 qui pose des questions au témoin, et ce n'est pas le moment pour M.
3 Karadzic de présenter des éléments de preuve ou d'apporter des commentaires
4 au sujet de ce qu'un témoignage doit être ou ne pas être.
5 Q. Monsieur Djeric, je voulais attirer votre attention sur deux parties de
6 ce document. D'abord, M. Karadzic dit que :
7 "Ça a été accepté comme base des négociations ultérieures. Le
8 document n'a pas été signé. Nous n'aurions jamais signé une chose que nous
9 n'aurions pas acceptée."
10 Et ensuite, en page 42 de la version anglaise, qui devrait être la
11 page 61, voire 62 ou 63, de la version B/C/S, c'est là que le Dr Karadzic
12 fait référence à un processus et à une erreur commise par un député. Il dit
13 :
14 "Nous avons entamé ce processus avec des objectifs stratégiques et nous
15 sommes en train de les effectuer phase par phase. Nous n'avons jamais signé
16 ce papier, ce document. Jamais, jamais. Il serait fou de ne pas l'accepter
17 en cette phase-ci."
18 En bas de page, il est dit qu'il y a eu réalisation d'une qualité
19 certaine, et que :
20 "Maintenant, la question de la quantité se posait. Et la quantité,
21 l'élément quantitatif, allait se réaliser conformément à des conditions
22 qu'il nous appartenait de mettre en place."
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas du tout sûr que nous en
24 soyons à la bonne page.
25 M. TIEGER : [interprétation] Il faut que vous descendiez vers le bas de la
26 page 42, Monsieur le Président. Et la suite se trouve en page 43. La
27 dernière des parties que j'ai citées, c'est le haut de la page 43 de
28 l'anglais, paragraphe numéro 3.
Page 28063
1 Q. Monsieur Djeric, est-ce que ceci rafraîchit votre mémoire pour ce qui
2 est de savoir si ce document avait été signé; et est-ce que ceci rafraîchit
3 votre mémoire pour ce qui est de savoir si la direction des Serbes de
4 Bosnie avait évoqué le fait de la signature du document ou pas ?
5 R. Je ne peux pas entrer ici plus en profondeur dans les réponses à
6 apporter à cette question, parce que moi je n'ai pas été impliqué dans ces
7 négociations. Et je dirais que je n'en savais pas long du tout.
8 Je suis en train de raconter ce qu'on nous avait raconté là-bas. On
9 nous a dit que les accords de Lisbonne étaient chose faite pratiquement,
10 que les choses étaient terminées et qu'il y avait peut-être des petits
11 détails qui nécessitaient des parachèvements pour ce qui est de la mise en
12 place des accords. Mais on nous a indiqué que la paix historique était
13 établie, que nous n'avions aucune raison d'être mécontents, et cetera, et
14 qu'il fallait nous préparer pour l'exercice de l'autorité et pour la mise
15 en œuvre de la justice. C'est tout ce que je saurais vous dire à ce sujet.
16 Mais il va sans dire que je n'ai jamais vu l'un quelconque de ces
17 accords. Je ne sais pas du tout où est-ce qu'on a gardé ces originaux -
18 l'un quelconque des originaux - pendant toute cette période. Je sais que,
19 par exemple, on ne sait pas où est l'original des accords de Dayton, sans
20 aller plus loin de ce qui s'était passé au tout début.
21 Si vous m'avez bien suivi donc, en termes simples, je ne puis que confirmer
22 le fait qu'on nous avait dit que les parties en présence avaient abouti à
23 un accord, qu'il y avait eu un accord historique d'établi.
24 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que
25 l'heure est venue. Plutôt que de poser ma question suivante, il serait
26 peut-être bon de faire notre pause.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Combien de temps pensez-vous qu'il vous
28 faille encore ?
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1 M. TIEGER : [interprétation] Il m'est difficile de le dire, mais d'ores et
2 déjà je puis dire que je n'aurais pas besoin de plus de 15 minutes.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Nous allons faire une pause
4 d'une demi-heure.
5 Nous allons reprendre à 11 heures.
6 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
7 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.
9 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
10 Q. Monsieur Djeric, compte tenu de votre réponse juste avant la pause à
11 propos de votre connaissance de l'accord ou du plan Cutileiro, je ne vais
12 pas vous demander de regarder certains extraits de la 11e session. Cette
13 session a été versée au dossier. Les parties et les Juges de la Chambre
14 peuvent examiner les points qui ont été abordés au cours de cette séance.
15 En revanche, ce que je souhaite aborder avec vous, c'est une autre
16 séance de l'assemblée sur laquelle M. Karadzic a attiré votre attention
17 hier, à savoir la 17e séance de l'assemblée, qui s'est tenue le 24 au 26
18 juillet 1992. Le numéro D00092. Je souhaite commencer par un passage que
19 vous trouverez à la page 14 de l'anglais et la page 12 du B/C/S et qui
20 précise en partie ce qui s'était produit entre la 11e séance et cette 17e
21 séance du mois de juillet.
22 Vous trouverez ceci au milieu de la page de la version anglaise. Ou
23 plutôt, vers le bas, le dernier tiers de la page. C'est le Dr Karadzic qui
24 prend la parole et qui dit :
25 "Aujourd'hui, nous contrôlons l'ensemble de nos territoires et peut-être
26 également quelques autres territoires qui seront remis aux communautés
27 nationales une fois qu'un accord sera trouvé."
28 Monsieur Djeric, est-ce que ceci coïncide avec votre souvenir de la
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1 situation où les territoires se trouvant en Bosnie-Herzégovine que les
2 forces serbes de Bosnie contrôlaient au moment où cette séance de
3 l'assemblée s'est tenue au mois de juillet 1992 ?
4 R. Je ne peux pas répondre à cette question avec précision parce que je ne
5 sais pas très bien ce que le locuteur a à l'esprit lorsqu'il parle du
6 "contrôle des territoires". Est-ce qu'il veut parler des territoires
7 contrôlés par les forces armées ? Dans ce cas, il est le seul à être au
8 courant de cela, parce que c'est lui qui commandait ces troupes-là.
9 Donc c'est ce que je puis dire à ce sujet. Car la notion même de contrôle,
10 ou de contrôle militaire, c'est une chose. Le contrôle de la part des
11 autorités opérationnelles, c'est autre chose. Alors, si vous appliquez des
12 décisions, si vous organisez la production, si vous vous assurez du cours
13 normal des choses, ceci ne doit pas forcément coïncider. Donc ce qui est à
14 la portée des armes et si vous pensez que le territoire que vous pouvez
15 atteindre avec des armes de longue portée est un territoire placé sous
16 votre contrôle, eh bien, c'est quelque chose sur lequel je ne puis rien
17 dire.
18 Donc je ne peux pas dire grand-chose avec précision, à savoir s'il s'agit
19 de territoire en application du plan Cutileiro ou le territoire qui a fait
20 l'objet de négociations.
21 Q. Seriez-vous en mesure de dire si, oui ou non, les territoires que cite
22 le Dr Karadzic dans ce document comprenaient des régions où il y avait eu
23 un nombre important de non-Serbes qui avaient vécu sur ces territoires-là ?
24 R. Eh bien, on peut constater d'après sa déclaration ce qui est dit. Donc
25 je ne vais pas commenter cela. C'est clair. Il dit qu'il y a certains
26 territoires à cet endroit qui seront remis par la suite à l'autre partie au
27 cours des négociations. C'est ainsi que je comprends la teneur de cette
28 déclaration.
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1 Q. Alors, pour ce qui est de ces territoires qui sont perçus comme étant
2 un territoire serbe, parmi ceux qui doivent être conservés, vous souvenez-
3 vous si Dr Karadzic a fait référence, ou d'autres membres des dirigeants
4 serbes de Bosnie, du fait qu'il y avait un nombre de Musulmans dans la
5 Republika Srpska et que ceux-ci pouvaient présenter une éventuelle menace ?
6 R. Eh bien, voyez-vous, il y avait des opinions divergentes. Il y avait
7 différents types de personnes, mais ceci n'était pas l'opinion qui
8 prévalait. Il y a toujours eu et il y aura toujours des nationalistes. Je
9 parle de Breivik, de l'incident qui s'est produit en Norvège. Il y avait
10 des gens qui avaient ce type d'opinions-là. Et ces opinions-là, nous
11 pouvions les entendre. Mais ce n'étaient pas les opinions qui prévalaient.
12 Q. Vous souvenez-vous d'opinions qui auraient indiqué que le nombre de
13 Musulmans ne présentait pas une menace imminente, mais que leur taux de
14 natalité pouvait présenter une menace au plan de la sécurité en très peu de
15 temps ?
16 R. Il y avait des gens qui ont pris part à ces discussions et qui avaient
17 ce type d'opinions-là. Il s'agit, pour moi, d'opinions primitives. Je ne
18 suis pas d'accord avec cela, et je n'étais pas d'accord à l'époque.
19 Hier, vous avez entendu dire que j'ai évoqué les fondements des nouveaux
20 textes de loi, et nous avons insisté sur la mise en œuvre des conventions
21 internationales, des droits en vertu de ces conventions internationales. Et
22 ceci avait été établi pour tenir compte des droits de chacun de façon à ce
23 que chacun puisse jouir de ses droits.
24 Et tel était le point de vue qui prévalait. Il y avait différents
25 participants à ces débats qui avaient des points de vue extrémistes. Cela
26 existait.
27 Q. Je vais être un petit peu plus précis avec vous dans ce cas.
28 Vous souvenez-vous si, oui ou non, le Dr Karadzic a exprimé de telles
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1 opinions, à savoir qu'en présence d'une minorité musulmane importante, il
2 pourrait y avoir des troubles et que ceci pourrait poser un problème au
3 plan de la sécurité pour l'Etat ?
4 R. Je ne me souviens pas de cela. Peut-être que ceci a été dit au cours
5 d'une conversation informelle, au cours du Club des députés, je ne sais
6 pas, où seulement lui assistait. Je ne me souviens pas qu'il ait dit ceci
7 en ma présence. Même si M. Karadzic se permettait parfois de parler avec un
8 certain lyrisme, il s'écartait du discours politique, et les hommes
9 politiques, en général, ne s'expriment pas ainsi.
10 Il y avait toutes sortes d'occasions où il disait différentes choses, et
11 plus tard je crois qu'il se rendait compte du fait que certaines de ses
12 déclarations pouvaient être interprétées de différentes manières. Mais la
13 politique, lorsqu'il s'agit de négocier ou de conclure des accords, ne
14 permet pas l'emploi d'un tel langage. Il faut être très clair lorsqu'on
15 prône certaines idées.
16 Et permettez-moi, car ceci est très important. J'ai dit un peu plus
17 tôt, et je déclare aujourd'hui, que ni moi-même ni le gouvernement avons
18 participé d'une manière ou d'une autre à la création de nouvelles
19 politiques ou à la définition d'objectifs stratégiques ou des choses de la
20 sorte. Ceci est très aisément vérifiable. Je n'étais même pas au courant de
21 ces objectifs, quoiqu'il ait été naturel que le gouvernement prépare
22 certains documents à l'intention de l'assemblée, des résolutions, des
23 déclarations, des documents à caractère stratégique, à l'instar des décrets
24 et des lois. Le gouvernement n'a jamais participé à cela. C'est le parti et
25 les dirigeants du parti qui s'étaient occupés de cela. M. Krajisnik ou je
26 ne sais pas qui formaient leurs opinions, présentaient leurs points de vue
27 à l'assemblée en s'écartant du gouvernement.
28 Q. Alors vous avez parlé du Club des députés, par exemple. Je ne vais pas
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1 vous demander de vous reporter au Club des députés, qui sont des éléments
2 qui ont déjà été versés au dossier et qui datent de 1992. Mais je vais
3 peut-être vous demander de vous reporter à une citation qui a été faite sur
4 ce thème en 1995, trois ans plus tard, ou en tout cas qui a été publiée
5 dans les médias, sous une forme publique donc.
6 M. TIEGER : [interprétation] Numéro 65 ter 12703.
7 M. ROBINSON : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, mais
8 je vais m'y opposer car il s'agit de quelque chose qui va au-delà du champ
9 du contre-interrogatoire. Et si vous estimez que cela relève du champ
10 d'application du contre-interrogatoire, je crois que ceci n'est pas
11 approprié, ce n'est pas juste, et ceci devrait permettre à M. Karadzic
12 également d'explorer le sujet.
13 Pour finir, je vais demander à ce que M. Tieger conclue en cinq minutes de
14 façon à ce que les délais qui sont appliqués aux deux parties soient les
15 mêmes, s'il vous plaît, étant donné qu'il a déjà eu énormément de temps
16 pour ses questions supplémentaires.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre ont-ils imposé
18 un délai aux questions supplémentaires de M. Tieger, Maître Robinson ?
19 M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. En réalité, vous
20 n'avez jamais imposé un seul délai à l'Accusation pendant toute la durée de
21 ce procès.
22 M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Robinson, je dois
23 intervenir. L'Accusation a un temps bien défini pour présenter sa thèse et
24 agit en fonction de ces paramètres-là.
25 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est exact. C'est vrai, Monsieur le
26 Juge Morrison.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais…
28 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, aux yeux des Juges de
2 la Chambre, ce sujet semble être un nouveau sujet étant donné qu'il porte
3 sur l'année 1995. Donc, si vous souhaitez poser cette question, les Juges
4 de la Chambre permettront à l'accusé de poser d'autres questions sur ce
5 thème.
6 Donc je m'en remets à vous, Monsieur Tieger.
7 M. TIEGER : [interprétation] Alors, si je puis répondre rapidement,
8 Monsieur le Président.
9 Ceci découle du contre-interrogatoire pour ce qui est des objectifs des
10 dirigeants et des attitudes.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous entendons bien cela. Mais si
12 vous posez cette question, ce que je dis, c'est que nous permettrons à
13 l'accusé de poser des questions supplémentaires eu égard à cette question-
14 là.
15 M. TIEGER : [interprétation] Je ne suis pas en train de contester la
16 décision prise par les Juges de la Chambre. Il ne s'agit pas d'un nouveau
17 sujet. J'aurais pu présenter un document relevant de 1992, mais je
18 souhaitais montrer la cohérence des opinions de l'époque. Il ne s'agit pas,
19 en fait, d'une nouvelle position par rapport à un nouveau sujet.
20 Il s'agit de la même question, si vous voulez.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Mais il s'agit d'une période de
22 temps différente.
23 Veuillez poursuivre, Monsieur Tieger.
24 M. TIEGER : [interprétation] Je crois que le numéro 65 ter -- pardonnez-
25 moi, je crois qu'il y a une confusion au numéro du document.
26 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
27 M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que nous pouvons essayer d'afficher le
28 01339, s'il vous plaît. Page 3 de ce document, s'il vous plaît.
Page 28070
1 Le document d'origine que j'ai cité, 12073, dispose d'une traduction
2 anglaise. Ce serait peut-être préférable. En réalité, c'est celui que j'ai
3 cité à l'origine, 12073. Est-ce que nous pouvons passer à la page 3 de
4 l'anglais, page 3 du B/C/S -- nous n'avons pas de B/C/S, donc ce n'est pas
5 nécessaire.
6 Q. En haut de l'article, en haut de la page, M. Karadzic évoque le fait
7 que les Serbes de Bosnie tiennent plus de 70 % du territoire.
8 Et ensuite, est-ce que nous pouvons descendre sur cette page, le Dr
9 Karadzic dit :
10 "Nous ne souhaitons avoir plus de territoire que ce que nous avons
11 déjà. Nous ne souhaitons pas agrandir notre Etat pour avoir simplement une
12 minorité musulmane à l'intérieur. Ceci provoquera des troubles. Dans cinq
13 ans, nous aurons notre prochaine guerre."
14 Ceci vous rafraîchit-il la mémoire, Monsieur Djeric, sur le fait de
15 savoir si, oui ou non, vous avez entendu M. Karadzic faire part de leurs
16 préoccupations et des risques au plan de la sécurité provoqués par la
17 présence des Musulmans sur le territoire de la Republika Srpska, lui, entre
18 autres, avec d'autres personnes ?
19 M. ROBINSON : [interprétation] Pardonnez-moi. Je crois que ceci
20 devrait être entendu en l'absence du témoin, parce que je ne souhaite pas
21 lui souffler une réponse. Je crois que ceci ne qualifie pas comme il se
22 doit le texte. Il y a deux façons d'interpréter le texte. Il y a une façon
23 qui correspond complètement avec ce que dit M. Karadzic depuis le début, et
24 ceci n'a rien à voir avec un risque au plan de la sécurité par la présence
25 même d'une minorité musulmane.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Demandons d'abord au témoin s'il se
27 souvient que M. Karadzic ait dit cela.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ceci doit être présenté au témoin
Page 28071
1 littéralement ? Mes propos, littéralement, doivent-ils être soumis au
2 témoin ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il n'a pas lu
4 ceci ?
5 M. TIEGER : [interprétation] Oui, je l'ai lu à voix haute. Je l'ai fait
6 déjà. Mais je n'en vois pas l'intérêt de le relire.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que nous n'avons pas de
8 traduction en B/C/S, il est important de le lire au témoin.
9 Est-ce que nous pouvons le refaire, Monsieur Tieger.
10 M. TIEGER : [interprétation] Bien sûr.
11 Q. J'ai cité auparavant les 70 % en haut de l'article que j'ai déjà
12 évoqué.
13 M. Karadzic dit, je cite :
14 "On lui a demandé s'il avait les yeux plus grands que le ventre --"
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous sommes sur la bonne page
16 ? J'essayais de retrouver le passage en question, mais je n'ai pas réussi.
17 M. TIEGER : [interprétation] Il est sous nos yeux, et nous allons y venir
18 dans quelques instants.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
20 M. TIEGER : [interprétation] Voici la citation :
21 "Nous pouvons nous départir de ces conquêtes négligeables très rapidement.
22 Nous ne souhaitons pas avoir plus de territoire que ce que nous avons déjà.
23 Nous ne souhaitons pas agrandir notre Etat pour avoir simplement une
24 minorité musulmane à l'intérieur. Ce qui provoquerait des troubles. Dans
25 cinq ans, nous aurions notre prochaine guerre."
26 Q. Est-ce que vous pouvez répondre aux questions qui vous ont été posées,
27 à savoir si vous vous souvenez, oui ou non, de ces propos tenus par M.
28 Karadzic ?
Page 28072
1 Ça, c'est ma première question, me semble-t-il.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] La traduction n'est pas exacte. Ce n'est pas
3 dans l'esprit du texte, et ceci n'est pas une traduction littérale.
4 Permettez-moi de traduire ceci pour M. Djeric de façon à ce qu'il ait ma
5 réponse telle que je l'ai dite littéralement ?
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur Karadzic.
7 M. TIEGER : [interprétation] Je --
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous comprenez l'anglais,
9 Monsieur Djeric ? Est-ce que vous lisez l'anglais ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. "A little". Un petit peu, mais à peine.
11 S'il vous plaît. Quand ceci a-t-il été déclaré par M. Karadzic -- le Dr
12 Karadzic ?
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que c'est en mai 1995.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Et moi, je suis parti en 1992. Vous l'avez
15 entendu. Ceci s'est passé en 1995. Je ne me souviens pas de ces
16 déclarations. Mais c'est quelque chose qui a été diffusé. Je ne sais pas si
17 c'est un fait ou non.
18 Je peux simplement dire ce qui suit. Aujourd'hui, à plusieurs reprises,
19 j'ai fait certaines déclarations par rapport à certaines déclarations
20 faites par M. Karadzic devant l'assemblée. Donc vous avez suivi tout ceci.
21 Vous avez compris quel était le sens de toutes ces déclarations.
22 Dans ces déclarations, à aucun moment n'a-t-il remis en cause les droits
23 des autres minorités ethniques, des autres peuples, d'avoir le droit de
24 vivre dans la Republika Srpska, de pouvoir jouir de leur liberté,
25 d'utiliser leurs biens, d'exercer leurs droits, et cetera. C'est un fait.
26 Ce sont des faits qui sont vérifiables, qui peuvent être établis, et
27 cetera.
28 Dans quelle mesure cette déclaration-ci est exacte, je ne peux pas en
Page 28073
1 juger. Je peux simplement dire que ce sont des circonstances malheureuses
2 qui ont fait que la guerre s'est poursuivie. Le plan Cutileiro était une
3 occasion idéale pour conclure la paix. Vous savez que ceci accordait
4 différents droits aux deux parties, différents territoires. Et donc, il est
5 malheureux que la paix n'ait pas été conclue. Donc il y a eu une escalade
6 de la guerre, eh bien, et les tactiques ont changé. Les différentes
7 attitudes vis-à-vis de ces changements ont changé.
8 Je ne peux tout simplement pas -- je ne peux pas vous le dire car je ne
9 suis pas au courant des déclarations qui sont les siennes. Je ne suis pas
10 d'accord avec ceci. Je ne suis pas d'accord avec le fait que le droit de
11 quiconque soit usurpé, violé. Et d'employer la force pour diminuer la
12 présence d'un groupe, eh bien, je suis contre cela.
13 A savoir ce que cette déclaration a à voir avec l'escalade de la guerre,
14 l'intensification ou la violence des combats, moi je ne peux pas en juger.
15 Ce que je veux dire, eh bien, ces déclarations, je ne les ai pas suivies,
16 et je n'avais plus l'occasion de le faire. Je ne sais même pas où j'étais à
17 ce moment-là, à l'époque où ces déclarations ont été faites. Je ne m'en
18 souviens pas. Mais si -- eh bien, si -- vous savez, moi je ne suis pas
19 d'accord avec des politiques qui revêtent des ambitions territoriales
20 particulières, moins importantes.
21 En bref, voilà ce que je veux dire.
22 M. TIEGER : [interprétation]
23 Q. Merci.
24 R. Et je veux dire, si M. Karadzic pouvait, ce qui a fait qu'il a évolué
25 de cette manière-là, à savoir des déclarations antérieures et ce qui s'est
26 passé entre ces déclarations antérieures et celles-ci. De quelles ambitions
27 politiques s'agissait-il, ou d'exigences politiques ? J'ai déjà dit que
28 j'étais en désaccord avec un nombre important de points. Je n'ai pas
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1 participé à la fixation des objectifs. A savoir si ceci avait quelque chose
2 à voir avec les partis politiques en présence ou non, il n'y a que M.
3 Karadzic qui peut le dire.
4 Moi, je ne suis pas d'accord avec des politiques qui mettent en avant une
5 revendication territoriale --
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyez-vous où ceci nous mène ?
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas à vous d'intervenir à ce
8 stade.
9 Monsieur Tieger, veuillez poursuivre.
10 M. TIEGER : [interprétation] Je vais demander le versement au dossier de ce
11 document, et j'en ai terminé avec mes questions supplémentaires.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous en demandez le versement ?
13 M. TIEGER : [aucune interprétation]
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] En ce qui me concerne, je ne vois pas
15 quel est l'intérêt de verser au dossier ce document par le truchement de ce
16 témoin.
17 M. TIEGER : [interprétation] Je peux le faire directement à l'audience, si
18 vous le souhaitez. Cela dépend des règles de recevabilité.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment pouvez-vous vérifier que M.
20 Karadzic ait effectivement dit ceci au journaliste ?
21 M. TIEGER : [interprétation] Je ne peux pas le garantir à la façon dont
22 vous me posez la question, mais ceci a trait au poids que ce document peut
23 avoir compte tenu de tous les autres éléments de preuve et déclarations qui
24 ont été présentés, et c'est important lorsque les Juges évoqueront la
25 question du poids à accorder à ce document.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez terminé vos questions
27 supplémentaires ?
28 M. TIEGER : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.
2 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je voudrais
3 attirer votre attention sur un point pour ce qui est des documents qui ont
4 été examinés pendant cette semaine, et pour ce qui est des requêtes
5 présentées par l'Accusation s'agissant des conversations interceptées qui
6 seraient à montrer au témoin lorsque l’Accusation citerait un témoin.
7 Il y a cinq conversations interceptées pour ce qui est de la requête de
8 versement direct, et il y a une deuxième requête où l'un des intervenants
9 était le Premier ministre Djeric.
10 Par exemple, le 65 ter 30688, daté du 20 avril 1992. Il s'agit d'une
11 conversion interceptée qui se passe entre le Premier ministre Djeric et
12 Momcilo Mandic, et on parle des barrages routiers qui ont été placés à
13 Ilidza. La valeur probante de cette conversation est celle de montrer le
14 fait que la direction, à savoir le Premier ministre Mandic [comme
15 interprété] -- en premier lieu, M. Mandic avait exercé un contrôle à
16 l'égard de ces barrages routiers. Je crois qu'il y a des éléments à
17 controverse, et je ne vois pas pourquoi on verserait au dossier des
18 éléments qui peuvent faire l'objet de témoignages des témoins.
19 Soit vous les montrez au témoin, soit vous les retirer de la requête de --
20 autrement dit, en direct.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais pourquoi M. Karadzic n'a-t-il pas
22 évoqué la question avec le témoin ?
23 M. ROBINSON : [interprétation] Il y a deux raisons. D'un, nous ne savons
24 pas si c'est versé au dossier et si c'est une thèse défendue par
25 l'Accusation. Et, de deux, nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour
26 le faire.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson, vous êtes en train de
28 faire référence à l'inefficacité du contre-interrogatoire bien que vous
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1 ayez pu constater vous-même la façon dont le temps imparti a été utilisé.
2 Mais on ne va pas entrer dans la considération liée au temps.
3 Monsieur Tieger, est-ce que vous avez des observations à formuler au sujet
4 des conversations interceptées ?
5 M. TIEGER : [interprétation] Oui, plusieurs, Monsieur le Président.
6 Tout d'abord, la question a été évoquée, et cela a fait déjà l'objet
7 d'une décision rendue. Je tiens à le souligner en réponse pour ce qui est
8 des commentaires formulés au sujet des documents qui ont fait l'objet d'une
9 requête de versement en direct, sans témoin. Il y a une autre occasion où
10 la Défense est en train de dédaigner les décisions rendues par les Juges de
11 la Chambre et essaye de renverser la pratique antérieurement adoptée. Et je
12 crois qu'il est clair que quand nous avons une affaire de cette envergure-
13 ci, et je crois que je l'ai déjà dit auparavant, ceci peut se rapporter
14 seulement au poids à attribuer aux éléments de preuve. Les deux parties en
15 présence ont accepté le fait que certaines questions ont été examinées plus
16 que d'autres, et les Juges de la Chambre sont donc en position de leur
17 accorder un poids plus grand qu'à certains autres éléments d'information
18 qui n'ont été cités qu'en passant, et là où on peut évaluer le poids à
19 accorder par rapport à la totalité des éléments de preuve présentés.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais la question que j'ai posée
21 n'a rien à voir avec le débat lié à la requête de versement en direct. Pour
22 dire les choses brièvement, vous n'allez pas poser de questions à M. Djeric
23 au sujet des conversations interceptées lorsque lui se trouve être l'un des
24 interlocuteurs ?
25 M. TIEGER : [interprétation] Oui. Je crois avoir mal compris la
26 question.
27 Il est exact de dire, Monsieur le Président, que je me fie aux
28 décisions rendues précédemment par les Juges de la Chambre et je ne fais
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1 qu'appuyer la position que nous avons avancée à ce sujet.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je poser trois petites questions au témoin
4 pour que lui nous réponde par un oui ou par un non ?
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, Monsieur Karadzic.
6 Ceci met un terme à votre témoignage, Monsieur Djeric. Au nom de cette
7 Chambre de première instance et du Tribunal en tant que tel, je vous
8 remercie d'être venu à La Haye pour témoigner. Vous êtes libre de vous en
9 aller à présent.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. J'avais ressenti
11 l'obligation morale de le faire, et c'est la raison pour laquelle je suis
12 venu. Je vous remercie. Et que la justice se fasse.
13 Merci.
14 [Le témoin se retire]
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] La Défense vous remercie également et
16 vous souhaite un bon voyage.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la lumière du fait que le témoin
18 suivant est un témoin protégé, nous avons besoin d'au moins cinq minutes de
19 pause pour les préparatifs à cet effet.
20 --- La pause est prise à 11 heures 35.
21 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
22 --- La pause est terminée à 11 heures 45.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais demander au témoin de nous
24 donner lecture de sa déclaration solennelle.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
27 LE TÉMOIN : KDZ320 [Assermenté]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur. Veuillez vous asseoir.
2 Oui, Monsieur Nicholls, à vous.
3 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,
4 Messieurs les Juges.
5 Interrogatoire principal par M. Nicholls :
6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
7 R. Bonjour.
8 Q. J'ai quelques questions à vous poser, mais avant que de les poser, je
9 vais vous montrer une feuille de papier.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vais demander à ce que la pièce 65 ter
11 90331 soit montrée au témoin.
12 Q. Monsieur, on vous a accordé des mesures de protection dans cette
13 affaire, cela veut dire que nous n'allons pas utiliser votre nom ou des
14 informations autres qui risqueraient de dévoiler votre identité, et à vous
15 aussi de faire attention à ne pas dire quelque chose qui permettrait de
16 vous identifier.
17 Maintenant, je vais vous montrer une feuille de papier. Celle-ci se trouve
18 sur l'écran. Veuillez juste nous dire si c'est bien votre nom, et répondez
19 par un "oui" ou par un "non".
20 R. Oui.
21 Q. Merci.
22 M. NICHOLLS : [interprétation] Je voudrais demander un versement au dossier
23 sous pli scellé, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P4988, sous pli
26 scellé, Madame, Messieurs les Juges.
27 M. NICHOLLS : [interprétation] Fort bien.
28 Q. Monsieur, je n'ai que quelques questions à vous poser au sujet du
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1 témoignage que vous avez fourni dans une affaire antérieure.
2 Vous souvenez-vous d'avoir témoigné dans l'affaire Popovic ?
3 R. Oui.
4 Q. Bon. Pouvez-vous confirmer à l'intention des Juges de cette Chambre
5 deux choses : d'abord, que vous avez relu ce témoignage, et nous dire si
6 c'est bien exact, ce qui s'y trouve; et si on vous posait les mêmes
7 questions aujourd'hui, répondriez-vous de la même façon ?
8 R. Oui.
9 Q. Merci.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je voudrais
11 demander un versement au dossier en tant que déclaration en application de
12 l'article 92 ter. Il s'agit de la pièce 22756A, et on devrait verser au
13 dossier une référence identique portant un petit B comme étant une version
14 publique expurgée.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux seront versés au dossier.
16 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agira de la pièce…
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] P4989, sous pli scellé, et de la pièce
19 4050 [comme interprété].
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
21 M. NICHOLLS : [interprétation] Eh bien, je crois qu'on pourrait peut-être
22 demander le versement au dossier d'une pièce associée qui serait la
23 référence 03453. C'est cette fiche avec le pseudonyme accordé à ce témoin
24 dans l'affaire précédente.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ce sera versé au dossier sous pli
26 scellé.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P4991, sous pli
28 scellé.
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1 M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien.
2 Je vais donner lecture d'un petit résumé de la déclaration.
3 Peu de temps après la chute de Srebrenica en juillet 1995, le témoin a été
4 présent à une opportunité au siège de la Brigade de Zvornik. Un officier de
5 la VRS s'était présenté comme étant le colonel Beara. Ce colonel Beara a
6 déclaré qu'ils avaient fait beaucoup de prisonniers et qu'ils étaient
7 gardés à bien des emplacements de la municipalité, et qu'il était très
8 difficile de contrôler le tout. Beara a dit qu'il fallait se débarrasser de
9 ces prisonniers et il a dit qu'ils avaient besoin d'aide pour ce qui est de
10 l'ensevelissement des corps. Ce colonel Beara a dit que l'ordre était donné
11 de liquider ces prisonniers et que cela venait des deux présidents.
12 Ceci met un terme à mon résumé.
13 Q. Monsieur, grand merci. Je n'ai pas de questions à vous poser à présent.
14 Je viens d'en terminer. Il se peut que j'en vienne à poser des questions
15 plus tard. Mais maintenant, ce sera M. Karadzic qui vous posera des
16 questions.
17 Merci.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, comme vous avez pu
19 le remarquer, votre témoignage fourni dans l'affaire Popovic et autres a
20 été versé au dossier dans son intégralité, vous venez de l'entendre, et
21 c'est ce qui tient lieu de témoignage de votre part dans cette affaire-ci
22 et ceci constitue votre témoignage au principal pour ce qui est donc des
23 réponses [comme interprété] que vous aurait posées le Procureur.
24 Maintenant, vous allez être contre-interrogé par M. Karadzic.
25 Le comprenez-vous ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le comprends.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
28 A vous, Monsieur Karadzic.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
2 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
4 R. Bonjour.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un petit point, Monsieur le
6 Témoin. Comme M. Nicholls vous l'a expliqué, vous bénéficiez de mesures de
7 protection. Vous avez un pseudonyme, et on ne se sert pas de votre nom.
8 Votre voix et votre visage se trouvent être déformés sur les écrans.
9 Lorsque vous penserez que vos réponses risqueraient de révéler votre
10 identité, veuillez l'indiquer et nous passerons à huis clos partiel, et les
11 réponses ne seront pas diffusées vers l'extérieur.
12 Continuez, Monsieur Karadzic.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Monsieur le Témoin, je tiens à vous exprimer ma reconnaissance pour ce
16 qui est d'avoir accepté -- ne serait-ce que par vidéoconférence, avec les
17 représentants de la Défense et de l'Accusation. Je voudrais vous demander,
18 et je tiens à me le rappeler moi-même, la nécessité de faire des pauses
19 entre les questions et les réponses que vous allez apporter, parce que les
20 interprètes risquent de ne pas nous rattraper dans notre cadence et notre
21 débit.
22 Alors je vous demande de prêter attention au compte rendu qui défile
23 sur l'écran. Une fois que ce compte rendu cessera de défiler, ça signifiera
24 qu'on a traduit ce qui s'est dit.
25 Est-ce que vous m'avez compris ?
26 R. Oui.
27 Q. Merci. Passons tout de suite à ce que le Procureur a lu en guise de
28 résumé.
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1 Est-ce que vous pouvez nous confirmer le fait de la rencontre qui
2 s'est passée à la date du 15, ou à une autre date, rencontre qui se trouve
3 être décrite dans le résumé ?
4 R. La date exacte, je ne m'en souviens pas parce que j'ai été contacté par
5 le Procureur 11 ans après ces événements-là.
6 Q. Merci. Est-il exact de dire que vous n'avez pas été convié à la
7 rencontre par votre nom et prénom, mais on a demandé quelqu'un, un
8 représentant quelconque des autorités locales ?
9 R. Etant donné que je ne me souviens pas d'avoir reçu un coup de fil
10 téléphonique direct me concernant, c'est une secrétaire qui m'a transmis le
11 fait que j'étais sollicité au niveau de la brigade, et j'en ai tiré la
12 conclusion qui est celle de penser qu'on avait demandé l'un des
13 représentants quelconques de la municipalité. Aussi suis-je allé à la
14 brigade. Je ne savais pas qui est-ce qui m'avait demandé.
15 Q. Merci. Est-il exact de dire que ce n'était pas une réunion officielle,
16 mais une rencontre qui s'est faite, comme on dirait, à brûle-pourpoint,
17 c'est-à-dire de façon impromptue ?
18 R. Oui. J'ai indiqué dans ma déclaration qu'il n'y avait pas de réunion de
19 fixée comme les procédures le demanderaient. Plutôt que d'avoir cela, on a
20 eu une rencontre dans une pièce au siège de la Brigade de Zvornik. Il y
21 avait ce monsieur-là qui était debout là-bas et les gens qui sécurisaient
22 sa personnalité, et j'étais debout moi aussi.
23 Q. Merci. Est-il exact de dire qu'on vous aurait communiqué la chose comme
24 étant un élément où vous n'étiez pas censé donner votre approbation ? On
25 vous a demandé rien que de fournir des services.
26 R. Oui.
27 Q. Merci. Est-il exact de dire que vous étiez choqué et que vous n'osiez
28 pas poser trop de questions, mis à part une phrase interrogative que vous
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1 auriez prononcée, suite à quoi le colonel en question a rétorqué que
2 c'étaient des ordres ou une approbation venant de deux présidents ?
3 R. Il n'y a pas eu de dialogue du tout. Il y a eu ce que ce colonel a
4 prononcé comme parole. Moi, je n'ai pas posé de questions. Et c'est dans le
5 même ton qu'il a enchaîné son monologue pour prononcer cette phrase-là.
6 Q. Merci. Est-ce qu'il a expliqué ou est-ce qu'on a pu tirer des
7 conclusions sans ambiguïté pour ce qui est de savoir de quels présidents il
8 était en train de parler ?
9 R. Je n'ai pas posé la question, et je n'ai pas compris non plus de qui il
10 s'agissait.
11 Q. Merci. Me connaissant, puisque vous m'aviez rencontré auparavant - on
12 en parlera plus tard - mais me connaissant, est-ce que vous aviez pensé que
13 c'était une chose que j'aurais approuvé ou ordonné, le fait d'exécuter des
14 prisonniers de guerre ?
15 R. Vous connaissant depuis plus de 20 réunions et rencontres que nous
16 avons eues, à aucun moment je ne pouvais croire que vous étiez capable de
17 donner un tel ordre.
18 Q. Merci. Nous nous étions rencontrés après cet événement-là à des
19 occasions plus ou moins officielles ou plus ou moins officieuses. Est-ce
20 que vous avez eu l'impression que j'en savais quelque chose ? Et est-ce
21 qu'il a été question de ceci ? Est-ce que quiconque aurait parlé de cela ?
22 Est-ce que quiconque m'aurait informé de cela lors de nos rencontres à nous
23 ?
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne répondiez, Monsieur le
25 Témoin, j'aimerais que nous entendions M. Nicholls.
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Ce n'est pas une objection, mais je voudrais
27 demander à ce que la question soit fragmentée en plusieurs segments.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.
Page 28084
1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Est-ce que, après cela, nous avons eu des rencontres en plusieurs
3 occasions différentes ?
4 R. Oui, nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises. Et différents
5 sujets ont été abordés.
6 Q. Merci. Durant ces rencontres, est-ce que quelqu'un a abordé ceci avec
7 moi ? Est-ce que cet incident ou cet événement qui était lié à la rencontre
8 avec ce colonel -- est-ce que, donc, ceci a été mentionné en ma présence ?
9 R. Ce sujet n'a jamais été abordé ni mentionné.
10 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez en tirer, donc, les conclusions qui
11 s'imposent quant à savoir si j'étais au courant de tout cela, compte tenu
12 des conversations que nous avons eues ?
13 R. Compte tenu de ces conversations et des problèmes que nous avons
14 abordés, on ne peut pas en déduire que vous étiez au courant de cela. Et
15 vous ne nous avez jamais posé de questions à ce sujet.
16 Q. Merci. Même si je n'étais pas présent, est-ce que c'était un sujet
17 tabou que personne ne souhaitait aborder ? Je ne parle pas uniquement de la
18 réunion, mais je parle également de tout ce qui aurait pu se passer dans
19 cette région après la chute de Srebrenica.
20 R. Il était interdit d'aborder ce sujet. Et d'ailleurs, personne ne l'a
21 mentionné, mis à part dans certaines circonstances très inusuelles. Peut-
22 être qu'une ou deux personnes dans ce cas-là l'ont mentionné en privé, mais
23 ça n'a jamais été abordé dans un cercle plus élargi. Et cet incident n'a
24 pas été analysé.
25 Q. Merci. Durant l'entretien, vous avez accepté et vous avez cru
26 comprendre que lorsque le colonel avait mentionné les deux présidents, il a
27 peut-être essayé d'impressionner l'assistance qui était présente afin de
28 s'assurer que l'on accède à sa demande.
Page 28085
1 Est-ce que vous seriez disposé à envisager cette possibilité aujourd'hui ?
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
3 M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais une citation, s'il vous plaît.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que c'est durant l'entretien
5 qui s'est tenu en visioconférence avec le témoin.
6 M. NICHOLLS : [interprétation] Ah, dans ce cas-là, je suis désolé, je
7 pensais qu'il parlait d'un entretien avec le bureau du Procureur.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président. Je
9 parle de l'entretien que j'ai eu avec le témoin.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous vous souvenez de la
11 question, Monsieur le Témoin ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Durant cet entretien que j'ai eu avec M.
13 Karadzic, j'ai dit qu'il était envisageable que les propos tenus par cette
14 personne pourraient laisser penser qu'il avait essayé d'impressionner
15 l'assistance en donnant l'impression qu'il s'agissait d'un ordre absolument
16 irrévocable.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Merci. Est-ce exact qu'il a expliqué, ou plutôt, qu'il a parlé du
19 danger de la détention d'un nombre important de prisonniers si une attaque
20 était menée à partir de Kalesija ? Est-ce qu'il a mentionné cette menace,
21 le fait qu'il avait donc des raisons et des peurs qui étaient les siennes ?
22 Et est-ce qu'il a donc expliqué pourquoi il devait se débarrasser d'eux ?
23 R. Il a dit qu'il ne pouvait pas les contrôler et que, par conséquent, il
24 devait s'en débarrasser. Alors, maintenant, quant à savoir s'il était au
25 courant du fait qu'une colonne avançait en direction de Zvornik et qu'elle
26 se concentrait de l'autre côté, c'est-à-dire en direction de Tuzla, et que
27 nous au niveau de la municipalité de Zvornik, nous avions envoyé un appel
28 pour demander que notre brigade retourne vers Zvornik parce que cette
Page 28086
1 menace était présente, je ne peux pas vraiment en tirer des conclusions.
2 Q. Vous ne pouvez pas conclure qu'il était au courant des mêmes éléments
3 que vous ?
4 R. Oui. A Zvornik, nous savions que la menace était présente. Nous savions
5 que nous étions en danger, parce que tous les soldats mobilisés se
6 trouvaient à l'extérieur du territoire de la municipalité de Zvornik. Et il
7 y avait un groupe de plusieurs milliers de Musulmans qui venaient de
8 Srebrenica et qui allaient traverser la municipalité de Zvornik, et nous ne
9 savions pas s'ils allaient vraiment en direction de Zvornik ou pas. En
10 fait, il s'est avéré qu'ils sont allés en direction du territoire de la
11 Fédération, parce que c'est là-bas qu'ils sont allés par la suite, et ils
12 sont passés par la municipalité. (expurgé)
13 (expurgé) nous avons demandé à ce que notre brigade, qui
14 à l'époque se trouvait sur le territoire de la municipalité de Zepa, nous
15 avons donc demandé que cette brigade soit renvoyée, ou que du moins une
16 partie de la brigade nous soit envoyée, afin de protéger notre ville.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que, avant de continuer, on
18 pourrait passer à huis clos partiel, s'il vous plaît.
19 [Audience à huis clos partiel]
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
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1 (expurgé)
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11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 [Audience publique]
15 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur
17 Karadzic.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur le Témoin, lorsque le colonel a dit qu'il n'était pas en
21 mesure de les contrôler, est-ce qu'il a utilisé des termes tels qu'il
22 s'agit de bêtes sauvages ou quelque chose dans ce genre ? Est-ce que vous
23 connaissez quelqu'un qui les a accompagnés ou qui a été témoin ou qui, en
24 fait, a vu que des armes étaient saisies par ces hommes ? Et est-ce que
25 vous avez été témoin de tirs qui ont été échangés ? Donc, sans mentionner
26 de nom, est-ce que vous pourriez nous dire si, d'une certaine manière, vous
27 avez pu relier certains événements à ce que vous saviez ?
28 R. Le colonel a parlé très brièvement - et je dois insister sur cela - il
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1 a dit qu'il ne pouvait pas les contrôler, qu'ils étaient dangereux, et tout
2 ce que j'ai déjà dit.
3 Pour ce qui est des événements dont j'avais appris le déroulement par
4 d'autres sources, ceci est survenu ultérieurement.
5 Q. Vous en avez donc eu vent plus tard, n'est-ce pas ?
6 Si cela vous convient mieux, on peut peut-être passer à huis clos partiel.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.
8 [Audience à huis clos partiel]
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8 [Audience publique]
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, vous pouvez
10 continuer.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. J'espère que j'en aurai terminé avant la pause. Je ne veux pas vous
14 retenir plus longtemps. Mais j'aimerais rapidement aborder certains sujets
15 avec vous, des choses qui se sont passées avant cet incident, mais
16 finissons-en avec cet incident.
17 Vous nous avez dit que vous n'aviez pas été impliqué personnellement d'une
18 manière ou d'une autre, et vous ne savez pas si qui que ce soit a agi suite
19 aux ordres qui avaient été donnés par ce colonel ?
20 R. Je n'ai pas participé à quoi que ce soit d'autre au sujet de cet
21 incident, et de toute façon je n'étais pas sur le territoire de la
22 municipalité de Zvornik. Par conséquent, je ne sais pas comment les choses
23 se sont terminées, et je ne sais pas, d'ailleurs, si qui que ce soit a
24 obtempéré à ces ordres ou à ces exigences.
25 Q. Très bien. Maintenant, je voudrais revenir rapidement à 1992, et je
26 vais essayer de vous demander de répondre par oui ou par non de façon à ce
27 que nous puissions terminer avant la pause.
28 Maintenant, j'aimerais savoir s'il est exact de dire que la vie avant les
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1 premières élections multipartites était normale, plus ou moins, jusqu'à ce
2 que le SDA décide de procéder au démantèlement de la Yougoslavie ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce exact que vous étiez présent, et d'ailleurs vous étiez très
5 proche de moi, durant une convention qui s'est tenue durant l'été 1992. Il
6 y avait donc une pièce qui était bondée, et M. Adil Zulfikarpasic et moi-
7 même, nous nous sommes adressés à l'assistance, qui était composée d'une
8 population mixte, je veux dire par là, donc, à la fois des Serbes et des
9 Musulmans, et nous avons donc expliqué quelle était la signification de cet
10 accord historique serbo-musulman ?
11 R. Oui, je me souviens de cette réunion. Il s'agissait d'une réunion qui
12 s'est tenue dans le palais des sports de Zvornik. J'étais un des membres de
13 la sécurité, même si la réunion s'est déroulée sans aucun problème, et nous
14 avons effectivement considéré qu'il s'agissait d'une tentative historique
15 de réconciliation, ou plutôt, une tentative visant à garantir la survie de
16 la Bosnie-Herzégovine comme partie intégrante de la Yougoslavie. Et
17 l'assistance, c'est-à-dire les personnes qui étaient sur place, était ravie
18 que l'on puisse se rencontrer et que nous ayons pu adopter une position
19 commune avec les Bosno-Musulmans.
20 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez quand cet accord a été rejeté par
21 le SDA et quand il a été décidé que la municipalité de Zvornik devrait être
22 divisée en deux municipalités, avec une qui serait à prédominance serbe et
23 une autre qui serait majoritairement musulmane ?
24 R. Monsieur, après les élections locales, les autorités ont été
25 constituées à Zvornik et, donc, ont été divisées entre les Serbes et les
26 Musulmans. Tous les responsables ont conservé leurs postes, et les hommes
27 politiques des différents partis ont mené des négociations quasiment 24
28 heures sur 24 pour la division de la municipalité de Zvornik en deux
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1 parties, une partie serbe et une partie musulmane. Et je peux vous dire que
2 les nouvelles frontières entre ces deux nouvelles municipalités ont suscité
3 des opinions diamétralement opposées.
4 Q. Merci. Est-ce exact que le SDA a miné ces négociations et qu'entre-
5 temps ils avaient constitué les Bérets verts et la Ligue des Patriotes, à
6 savoir deux formations paramilitaires qui étaient présentes dans votre
7 municipalité ?
8 R. La position des représentants du SDS était que la municipalité devait
9 être divisée géographiquement et que la ville de Zvornik devait également
10 être divisée en deux. La partie nord devait appartenir aux Serbes et la
11 partie sud devait être donnée aux Musulmans. D'un autre côté, les
12 représentants du SDA avaient exigé que la ligne de séparation devait être
13 tracée de telle manière que même la localité la plus petite peuplée de
14 Bosno-Musulmans fasse partie du nouveau territoire musulman, et c'est là où
15 des opinions diamétralement opposées se sont fait voix.
16 Quant aux armes, nous avions des informations. Il y avait des rumeurs qui
17 circulaient consistant à dire qu'ils s'étaient armés par le biais du
18 ministère de l'Intérieur. Et il y avait donc ces formations paramilitaires,
19 à savoir les Bérets verts et la Ligue des Patriotes, qui étaient cantonnées
20 dans les environs et qui organisaient des séances d'entraînement. Et nous
21 avions reçu des informations concernant les activités qui avaient lieu à
22 Rastosnica et à Boskovici. Par conséquent, la situation était tendue et on
23 risquait l'incident à tout moment.
24 Q. Merci.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on passer quelques instants à huis clos
26 partiel, s'il vous plaît.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.
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22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous y sommes. Continuez, Monsieur
24 Karadzic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs
26 les Juges, j'ai péché par optimisme. J'aurais besoin d'une quinzaine de
27 minutes après la pause pour terminer le contre-interrogatoire, mais mon
28 contre-interrogatoire durera moins de temps que prévu au départ.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Par conséquent, vous pensez que ce
2 serait le bon moment de faire la pause ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je crois. Je ne voudrais pas me
4 lancer dans un autre sujet parce que je ne pourrai pas conclure ce sujet
5 avant la pause.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
7 Nous allons faire notre pause maintenant et nous reprendrons à 13
8 heures 30.
9 [Le témoin quitte la barre]
10 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 27.
11 --- L'audience est reprise à 13 heures 37.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] M. le Juge Morrison n'assistera pas à ce
13 qui reste de l'audience d'aujourd'hui et n'assistera pas non plus à la
14 première partie de l'audience de demain en raison d'obligations officielles
15 qui l'empêchent de siéger en application de l'article 15 bis du Règlement.
16 Monsieur Karadzic, c'est à vous.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Vous avez parlé des unités de la JNA, et en particulier de cette unité
20 qui est arrivée tout près de Zvornik.
21 Est-ce que, en vous fondant sur votre expérience, vous diriez qu'à
22 cette époque-là, la JNA avait une attitude également hostile à l'égard des
23 Musulmans du SDA que l'attitude hostile qu'elle pouvait avoir vis-à-vis
24 d'autres partis ? Puisque vous avez dit au cours de l'entretien auquel vous
25 avez participé qu'ils ne s'appréciaient pas les uns les autres, qu'ils
26 n'avaient pas une très haute opinion de nous, ou quelque chose de cet
27 ordre-là ?
28 R. La JNA défendait fermement la multiethnicité à cette époque-là. Mais
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1 ceux qui répondaient aux appels à la conscription étaient principalement
2 des Serbes, et je dois remarquer qu'il y (expurgé)
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6 (expurgé) Et comme
7 chacun le sait, la JNA était, par nature, communiste sur le plan de sa
8 doctrine, et il existait un certain nombre de partis politiques orientés
9 sur base nationale, y compris d'ailleurs le SDS.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.
11 M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que nous pourrions passer à huis clos
12 partiel pendant un instant.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
14 [Audience à huis clos partiel]
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22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Est-il exact, dans ces conditions, qu'assez rapidement la JNA s'est
27 rendue compte qu'elle ne pouvait se sentir en sécurité que dans les zones
28 serbes ?
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1 R. Eh bien, finalement, personne n'avait répondu favorablement à l'appel à
2 conscription parmi les Bosno-Musulmans. Il est donc probable que la JNA se
3 sentait davantage en sécurité sur un territoire serbe, puisque la JNA était
4 principalement composée de forces serbes.
5 Q. Merci. Je vous ai posé cette question parce que j'aimerais savoir si
6 vous êtes d'accord, ou en tout cas si vous étiez au courant du fait que le
7 5 avril, à Sapna, il y avait une colonne de la JNA qui avait pris la
8 direction de la Yougoslavie, et que ce jour-là, le 5 avril, des tirs ont eu
9 lieu contre cette colonne, et un jeune lieutenant a été tué à ce moment-là.
10 Est-ce que vous vous rappelez cet incident ?
11 R. Oui, je me souviens. C'était un événement très marquant à cette époque-
12 là, une époque où les officiers de la JNA circulaient librement sur le
13 territoire de la Bosnie-Herzégovine. Et donc, pour nous, cela a été une
14 très grande surprise d'entendre que quelqu'un avait tué un officier. Cela a
15 provoqué une révolte très importante du côté serbe.
16 Q. Merci. En ce qui concerne les unités que vous connaissiez, est-ce que
17 cet événement a également été vécu comme un choc
18 important ?
19 R. Cela a été un des incidents les plus marquants de cette période. Et ce
20 qui m'est resté gravé dans la mémoire, c'est que suite à cet événement, un
21 grand nombre de Serbes aptes à porter les armes sont venus se faire
22 connaître auprès de notre unité. Ils demandaient à ce qu'on leur donne un
23 uniforme et des armes et se sont mis volontairement à la disposition des
24 unités de la JNA.
25 Q. Est-ce que cela signifie qu'il n'y avait personne d'autre à qui ils
26 auraient pu s'adresser à ce moment-là ? Est-ce que cela signifie qu'à ce
27 moment-là, c'est-à-dire le 5 avril, il n'y avait pas de formations
28 paramilitaires d'origine serbe auprès desquelles ils auraient pu se faire
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1 connaître ?
2 R. La population serbe avait une très grande confiance dans l'armée
3 populaire yougoslave. Et à cette époque-là, il n'existait même pas d'unités
4 de la Défense territoriale dans le village, donc la réaction de la
5 population a très normalement consisté à demander à l'armée populaire
6 yougoslave de la protéger et de lui donner des armes.
7 Q. Merci. Avant de conclure mon contre-interrogatoire, voici une question
8 que j'aimerais vous poser : est-ce que j'ai raison de dire que l'idée de
9 Zulfikarpasic et de Filipovic quant au fait qu'un accord aurait pu être
10 conclu entre les Serbes et les Musulmans prévalait à cette époque-là ? Est-
11 ce que votre unité, qui était encore unie à l'époque, et est-ce que la
12 Bosnie dans son ensemble, encore unie à l'époque, auraient pu, grâce à un
13 tel accord, demeurer au sein de la Yougoslavie, et est-ce qu'aucun habitant
14 ne serait parti pour d'autre lieu de résidence ?
15 Est-ce que c'était cela le concept qui était envisagé, une solution
16 pacifique permettant la poursuite de la coexistence ?
17 R. La seule condition imposée par la population serbe, et dans le cadre de
18 notre politique à cette époque-là, c'était que la Bosnie-Herzégovine reste
19 partie prenante intégrée à la Yougoslavie.
20 Q. Merci.
21 R. Et le concept de Zulfikarpasic, à ce moment-là, ne faisait que
22 confirmer cette volonté.
23 Q. Je vous remercie. Est-ce que j'ai raison de dire ce qui suit : lorsque
24 nous avons constaté qu'eux voulaient la sécession, et lorsque les
25 pourparlers portant sur la division de la municipalité en deux
26 municipalités distinctes ont commencé, est-ce que j'ai raison de dire que
27 même dans ce cas-là personne encore n'avait quitté Zvornik, à part le fait
28 que les Musulmans s'étaient déplacés du quartier serbe de la ville vers la
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1 municipalité musulmane, mais en dehors de toute persécution les concernant
2 ? Est-ce que l'idée d'assurer la sécurité de chacun et de tous prévalait
3 encore afin que chacun puisse jouir des droits qui étaient les siens au
4 sein de sa propre municipalité ?
5 R. Eh bien, je suis convaincu qu'il n'y aurait eu aucun affrontement
6 interethnique si la Bosnie était demeurée au sein de la Yougoslavie et si
7 le référendum relatif à la sécession n'avait pas été organisé par la
8 communauté internationale, et j'ajoute au passage que dans le cadre de
9 l'organisation de ce référendum, on ne reconnaissait plus la décision de la
10 population serbe de demeurer au sein de la Yougoslavie.
11 Q. Est-ce que vous pourriez me dire si ce concept de deux municipalités
12 distinctes impliquait une quelconque expulsion de population ou un
13 quelconque déplacement de population, ou est-ce que toute la population
14 était censée rester sur le territoire de
15 Zvornik ?
16 R. Ce concept de deux municipalités impliquait la division et était
17 contraire à la volonté d'éviter la division de la Bosnie. Par conséquent,
18 il avait pour but d'essayer d'empêcher le conflit.
19 Q. Quelques questions supplémentaires maintenant, même si vous n'étiez pas
20 dans la ville à ce moment-là, mais vous y étiez peut-être un peu plus tard.
21 Est-ce que vous avez appris quoi que ce soit au sujet des événements
22 qui se sont déroulés jusqu'au 8 avril et par la suite ? Ou, pour être plus
23 précis, qui se sont déroulés après le meurtre de cet officier dont je viens
24 de parler. Est-ce que les formations paramilitaires musulmanes ont contrôlé
25 Zvornik, alors que la population serbe avait traversé la rivière pour se
26 diriger vers la Serbie ? Et est-ce que les hommes étaient partis, et les
27 femmes et les enfants étaient restés à Zvornik, ou peut-être à Karakaj et
28 dans d'autres quartiers majoritairement serbes de la municipalité ?
Page 28099
1 R. Nous, nous étions à Celopek, à 35 kilomètres de Zvornik, et ce n'était
2 pas une très bonne idée à l'époque d'aller en ville à Zvornik revêtu de son
3 uniforme de la JNA. On nous avait avertis de ne pas le faire. C'était un
4 fait bien connu, puisqu'il n'y avait qu'un pont sur la Drina à traverser,
5 que les hommes serbes allaient passer la nuit en Serbie en traversant le
6 pont et que le matin ils rentraient à Zvornik pour travailler pendant les
7 jours de travail de la semaine.
8 Q. Est-ce que vous avez été témoin du fait que les premiers réfugiés qui
9 sont arrivés après le début du conflit étaient des Serbes venus de Bosnie
10 centrale, et qu'à Zvornik, au début, ils étaient logés dans une salle de
11 sport et dans les villages, et qu'ils arrivaient parfois dans certains
12 villages où ils investissaient des maisons musulmanes, pas de façon
13 particulièrement violente, mais pas non plus de façon tout à fait pacifique
14 ?
15 Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre quelques mots
16 au sujet de l'arrivée des réfugiés en ville et de leur lieu d'hébergement
17 dans la salle de sport, ainsi que de l'arrivée de réfugiés dans les
18 villages musulmans ?
19 R. Nous avons vécu un afflux important de réfugiés venus de Tuzla et de
20 Kladanj à Zvornik. Un jour en particulier, plusieurs milliers de réfugiés
21 sont arrivés et ils ont été installés dans la salle de sport. Ils
22 sortaient, toutefois, comme ils le souhaitaient de façon organisée pour se
23 rendre dans les villages environnants qui étaient habités par des
24 Musulmans, et étant donné les pressions qui s'exerçaient, ils
25 investissaient des maisons ou parfois quittaient les maisons en emportant
26 avec eux un certain nombre d'objets, et ils prenaient à ce moment-là la
27 direction de la Fédération, à moins qu'ils ne franchissent le pont pour se
28 rendre en Serbie.
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1 Q. Est-il exact que les autorités locales n'ont pas participé à tout cela
2 et que très souvent elles n'étaient informées que plus tard de ce qui
3 s'était déjà passé ?
4 R. Les autorités locales, pendant les premiers jours ou le premier mois,
5 n'avaient pratiquement aucun pouvoir parce que les paramilitaires étaient
6 en train de se constituer un peu partout, et que la situation générale
7 était marquée par un mépris de la loi, de sorte que personne ne réussissait
8 à coordonner l'accueil de ces réfugiés ou l'organisation de leur logement.
9 Tout semblait hors de contrôle à ce moment-là.
10 Q. Je vous remercie. Vous avez parlé des paramilitaires serbes à
11 l'instant. Est-ce que vous pourriez énumérer quelques-uns de ces groupes et
12 dire aux Juges de la Chambre qui détenait le pouvoir à Zvornik à cette
13 époque-là ? Est-il exact que votre unité a été menacée, que des soldats ont
14 été menacés, on leur a dit qu'ils seraient abattus par un peloton
15 d'exécution, et que cela donnait une idée du mépris de la loi qui régnait à
16 l'époque à Zvornik ?
17 R. Comme tout système où il n'y a plus aucune discipline, où il n'y a plus
18 aucune autorité, c'étaient les armes qui faisaient la loi. Pendant les
19 premiers jours, les volontaires d'Arkan qui ont libéré Zvornik se sont
20 imposés en tant que détenteurs uniques du pouvoir. D'autres volontaires
21 arrivaient tous les jours. Ils rejoignaient les unités de la JNA. Il y
22 avait aussi des unités paramilitaires composées d'individus qui revenaient
23 du front en Croatie. C'étaient des hommes qui avaient de l'expérience, qui
24 savaient comment intimider les populations. C'étaient des hommes qui
25 utilisaient toutes sortes de noms pour glorifier leur propre pouvoir et
26 semer la peur parmi la population. Ils obligeaient parfois à certains
27 habitants à se dénuder - je veux dire, certains habitants serbes - et ils
28 les pourchassaient dans le village, tout nu, pour qu'ils servent d'exemples
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1 s'ils avaient refusé, par exemple, de répondre affirmativement à un appel à
2 la mobilisation et s'ils avaient fait preuve de désobéissance. Il y a eu
3 plusieurs incidents de ce genre où des habitants ont été roués de coups, où
4 des adultes ont été contraints de circuler nus à travers Celopek de façon à
5 être vus par leurs familles. Et donc, le niveau global de sécurité était
6 très bas. Et croyez-moi, même si j'avais une certaine expérience - puisque
7 je faisais partie de l'armée depuis six mois - je n'avais pas suffisamment
8 de courage pour me rendre à Zvornik, en particulier le soir, ou même de me
9 mettre au volant de ma propre voiture parce qu'elle risquait d'être
10 confisquée. Ils volaient. Personne ne se sentait en sécurité à l'époque.
11 Q. Je vous remercie. Est-il exact que nombreux d'entre eux venaient
12 régulièrement en qualité de volontaires, ce qui était approuvé par des
13 décrets, par la loi, et que très rapidement certains d'entre eux sont
14 devenus des hors-la-loi ? Ils refusaient de rester sur les lignes de front
15 où ils auraient dû se tenir, et au lieu de cela, ils retournaient en ville
16 pour se livrer à toutes sortes d'exactions que vous venez de décrire à
17 notre attention, n'est-ce
18 pas ?
19 R. Les formations paramilitaires étaient stationnées en ville. Pendant la
20 journée, ces hommes allaient sur le terrain défendre le territoire, et ils
21 dormaient toujours en ville. Et leur pouvoir venait du fait que personne ne
22 pouvait le contester, ce pouvoir.
23 Q. Est-ce qu'ils avaient une force constituée, telle qu'une force
24 militaire ou policière, à Zvornik qui aurait pu résoudre le problème, qui
25 aurait pu arrêter ces hommes ou les expulser ? Je veux dire, donc, une
26 force sur place, locale.
27 R. Non. Au début, aucune force existant sur place n'aurait pu résoudre le
28 problème posé par ces paramilitaires. D'ailleurs, personne n'a essayé. Et
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1 plus tard, lorsque l'armée de la Republika Srpska a été créée, un certain
2 ordre a été réinstauré, et les hommes dont nous parlons avaient leurs
3 propres unités, mais ont refusé de placer ces unités sous un commandement
4 de l'armée.
5 Q. Merci. Est-ce que vous vous rappelez cette très grande opération
6 organisée et planifiée qui a été menée par la police spéciale de Pale avec
7 l'aide de la police de Serbie et du régiment de protection, le 65e Régiment
8 de Protection, et qu'à la fin du mois de juillet ces unités ont été
9 liquidées et chassées ?
10 R. Oui, je m'en souviens. Ça a été une surprise de voir arriver les unités
11 spéciales de Pale. Et d'ailleurs aussi, mais je ne me souviens pas d'où,
12 ces unités étaient dirigées par l'officier Karisik, et ils ont interpellé
13 et arrêté les membres de cette formation qu'on appelait les Guêpes jaunes.
14 C'était l'une des unités les plus connues de ce genre à Zvornik.
15 Q. Merci, Monsieur le Témoin. D'habitude je n'agis pas ainsi, mais
16 j'aimerais vous donner la possibilité de dire quelques mots si vous estimez
17 n'avoir pas dit tout ce que vous considériez comme pouvant être important
18 dans le cadre de mon procès.
19 R. Je ne sais pas que dire de plus. J'aimerais que vous ayez à répondre de
20 vos actes si vous êtes coupable, que vous soyez libéré si vous êtes
21 innocent, et il appartient à cette Chambre de première instance de le
22 déterminer. Je vous souhaite bonne chance.
23 (expurgé)
24 (expurgé) quelle est votre opinion ?
25 R. Eh bien, je suppose que cela se comprend aisément. Si l'on a bien
26 écouté ma déposition, je ne peux même pas imaginer que vous ayez participé
27 à ces actes.
28 Q. Merci, Monsieur le Témoin.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.
2 M. NICHOLLS : [interprétation] Je demande un instant que nous passions à
3 huis clos partiel.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
5 [Audience à huis clos partiel]
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15 [Audience publique]
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, est-ce que vous avez
17 des questions supplémentaires pour le témoin ?
18 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, quelques-unes, très rapidement.
19 Nouvel interrogatoire par M. Nicholls :
20 Q. [interprétation] Vous avez parlé d'Arkan en quelques termes durant le
21 contre-interrogatoire. Est-ce que vous le définiriez comme le dirigeant
22 d'une formation paramilitaire ?
23 R. Quelquefois oui, quelquefois non.
24 Q. Et alors, dans quel cas vous le qualifieriez de dirigeant et dans quel
25 cas vous ne le qualifieriez pas de dirigeant, dirigeant, bien sûr,
26 paramilitaire, il s'entend ?
27 R. Je dirais non en termes de discipline et de dispositifs de guerre. Mais
28 je dirais oui, compte tenu de ce qui était réalisé après l'issue d'une
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1 opération.
2 Plus tard, ils avaient tendance à réaliser des pillages comme tout
3 autre groupe paramilitaire. Mais pendant l'action, ils étaient très
4 disciplinés et ils obéissaient à leurs supérieurs.
5 Q. D'accord. Je crois comprendre ce que vous voulez dire, mais je vais
6 essayer d'obtenir des précisions pour en être sûr.
7 Donc, par exemple, en avril 1992, lorsque les hommes d'Arkan, comme vous
8 l'avez dit, ont libéré Zvornik, d'un point de vue militaire, ils étaient
9 professionnels, mais ensuite les troupes ont commis des crimes comme, par
10 exemple, nettoyage ethnique, pillage, et cetera ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne pense pas qu'on puisse mentionner le
12 concept de nettoyage ethnique. Dans ce cas, je me devrai de faire une
13 objection. Parce qu'en fait, on prête des propos au témoin, propos que le
14 témoin n'a pas prononcés.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
16 Je vous demande de reformuler votre question, Monsieur Nicholls.
17 M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien. Je vais reformuler ma question.
18 Q. Si je vous ai bien compris, vous avez dit que durant les opérations de
19 combat ils étaient très disciplinés, pour libérer Zvornik par exemple, et
20 vous considériez donc que les hommes d'Arkan étaient de bons soldats, mais
21 ensuite ils ont commis des crimes ?
22 R. Non. Ils n'ont pas vraiment commis de crimes. Mais comme tout groupe
23 paramilitaire, ils avaient tendance à s'adonner à des pillages et à
24 commettre des vols.
25 Q. Et vous ne considérez pas ça comme un crime ?
26 R. C'est une sorte de crime, ou une sorte de délit peut-être, mais moi je
27 ne suis pas avocat. Par conséquent, je ne peux pas vraiment me prononcer.
28 Si quelqu'un vole quelque chose à la tire, par exemple, c'est probablement
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1 un crime.
2 Q. Est-ce que vous savez qui est Dragan Bezejovic [phon] ?
3 R. Oui.
4 L'INTERPRÈTE : Le début de la question n'a pas été saisi étant donné que M.
5 Nicholls a pris la parole avant la fin de l'interprétation.
6 M. NICHOLLS : [interprétation]
7 Q. -- en avril 1992, à Zvornik ?
8 R. Commandant de police.
9 Q. Et pendant qu'il était commandant de police, est-ce qu'il était associé
10 d'une manière ou d'une autre aux hommes d'Arkan qui venaient à Zvornik ?
11 Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
12 R. A plusieurs reprises, il a dit que c'était grâce à lui, en d'autres
13 termes, que c'était lui qui avait fait venir Arkan à Zvornik.
14 Q. D'accord. Et après leur séjour à Zvornik, après la libération de la
15 localité, est-ce que, d'après vous, il était évident --
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît. J'aimerais
17 savoir si le micro est branché.
18 Monsieur Karadzic, est-ce que vous entendez l'interprétation ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, continuez.
21 M. NICHOLLS : [interprétation]
22 Q. Après la libération de Zvornik, est-ce que, d'après vous et d'après
23 d'autres personnes, il était évident que les hommes d'Arkan avaient été
24 responsables ou pouvaient être tenus responsables des pillages et des vols,
25 ainsi que d'autres exactions commises que vous avez mentionnées ?
26 R. A cette époque, pour nous, c'étaient des héros. A l'époque, nous avions
27 énormément peur de la population musulmane et de l'armée musulmane parce
28 que nous nous trouvions en infériorité numérique, et nous n'avions jamais
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1 eu le courage de nous lancer dans la libération de Zvornik. Quand je dis
2 "nous", je parle des unités composées de population locale de Zvornik.
3 Q. D'accord. Mais je vous pose la question par la suite. Une fois que ces
4 groupes avaient terminé les combats, vous avez mentionné qu'ils pillaient
5 ou qu'ils volaient. Est-ce qu'Arkan était l'un de ces groupes ?
6 R. Oui. Ils s'étaient appropriés des camions, des remorques qui étaient la
7 propriété de la société en général. Ils se sont appropriés également des
8 véhicules particuliers, et cetera. Cependant, nous n'avons pas considéré
9 que ceci était une perte. C'était beaucoup plus important d'avoir récupéré
10 notre liberté et d'être en sécurité, en sécurité contre les attaques de
11 l'ennemi.
12 Vous savez, lorsque vous êtes dans une situation de vie ou de mort,
13 il est préférable de survivre que de conserver certaines acquisitions
14 matérielles. Et si quelqu'un vous aide à survivre, c'est plus important que
15 quoi que ce soit d'autre. Il est difficile d'expliquer cela à des personnes
16 qui n'ont pas vécu cette situation.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me dois d'intervenir. Le témoin n'a pas dit
18 que c'était difficile à expliquer à quelqu'un qui n'avait pas participé à
19 ces événements. Le témoin a dit que c'était difficile pour quelqu'un qui
20 n'a pas participé à ces événements de comprendre cela.
21 M. NICHOLLS : [interprétation]
22 Q. Savez-vous également si les hommes d'Arkan ont commis des crimes contre
23 la population musulmane durant la libération ?
24 Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
25 R. Je n'entends pas l'interprétation.
26 Q. Est-ce que vous m'entendez ?
27 R. Je vous entends, mais je n'entends pas l'interprétation. Je n'entends
28 pas l'interprétation en B/C/S.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Notre huissier va vérifier les
2 écouteurs.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pendant un moment, moi non plus je n'entendais
4 rien, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez maintenant
6 dans une langue que vous comprenez, Monsieur le Témoin ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Monsieur Nicholls, je vous
9 suggère de répéter la question que vous venez déjà de poser au témoin.
10 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Très rapidement. La question que vous n'avez pas entendue est la
12 suivante : est-ce que vous savez si les hommes d'Arkan ont également commis
13 des crimes contre la population musulmane durant la libération de la
14 localité de Zvornik ?
15 Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
16 R. Durant la libération de Zvornik, avec mon unité, je me trouvais sur la
17 colline de droite, celle à partir de laquelle on peut observer la localité
18 de Zvornik. Mais je n'ai pas participé à la libération de Zvornik
19 directement et, par conséquent, je n'ai pas été observateur ou témoin
20 oculaire de quelque crime qui aurait été commis comme, par exemple, des
21 personnes innocentes qui auraient été tuées. Par conséquent, je ne suis pas
22 vraiment la personne idoine pour vous fournir les informations.
23 Q. Est-ce que vous avez entendu que des crimes ou des délits avaient été
24 commis contre la population musulmane, soit à Zvornik, soit à Bijeljina,
25 puisque c'est dans cette autre localité qu'ils se trouvaient avant
26 d'arriver à Zvornik ?
27 R. Il m'est difficile de répondre à cette question, car durant cette
28 période, certaines choses se sont passées, mais depuis on a lu les
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1 journaux, on a suivi certains procès, beaucoup de choses ont été écrites à
2 ce sujet. Durant d'autres procès, des arguments pour et contre ont été
3 présentés concernant leurs actions à Bijeljina et à Zvornik, donc je ne
4 peux pas vraiment vous donner une réponse qui vous satisferait. Je peux
5 simplement vous dire qu'ils étaient considérés comme des héros au sein de
6 la population parce que c'est grâce à eux qu'ils avaient surmonté leurs
7 peurs et qu'ils se sentaient à nouveau en sécurité.
8 Maintenant, de là à savoir s'ils avaient commis des crimes ou des délits,
9 je ne peux vous donner que des informations de seconde main, c'est-à-dire
10 que j'ai entendu parler du fait que quelqu'un avait été tué quelque part,
11 mais même moi je n'ai pas parlé à des témoins oculaire. Donc tout ceci m'a
12 été relaté par la suite.
13 Q. Je voudrais m'assurer que je vous comprends bien. Est-ce que, pour
14 vous, Arkan est un héros ?
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que le témoin a dit que c'était la
16 population qui le considérait comme un héros. Il n'a pas parlé de son
17 opinion à lui.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que ce n'est pas à vous
19 d'intervenir à ce stade, Monsieur Karadzic.
20 Pouvez-vous répondre à la question, Monsieur le Témoin ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'à l'époque, durant ces opérations,
22 les gens avaient peur, et qu'Arkan était considéré comme un héros par la
23 population locale.
24 Moi, je faisais partie d'une unité militaire qui servait notre peuple. Mais
25 si Arkan a commis des crimes ou des délits, ce n'est pas un héros.
26 Maintenant, je ne peux pas vous dire à 100 % qu'Arkan a personnellement
27 participé à la libération de Zvornik, parce qu'il y avait également le
28 commandant Pejic qui dirigeait l'unité à l'époque.
Page 28109
1 M. NICHOLLS : [interprétation]
2 Q. Oui, c'était son commandant en second. Maintenant, nous avons entendu
3 dans ce procès des dépositions faisant état du fait que la VRS avait dû
4 expulser les hommes d'Arkan de Zvornik.
5 Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
6 R. Je n'ai pas bien compris.
7 Q. Est-ce que les hommes d'Arkan étaient un des groupes paramilitaires que
8 la VRS avait dû chasser de Zvornik pour rétablir l'ordre public ?
9 R. Non. Ils sont partis après quatre ou cinq jours. De leur propre chef.
10 Sans qu'on leur demande. Et ils n'ont pas laissé le désordre derrière eux.
11 Ils ont fait quitter toutes les forces serbes du territoire de Zvornik. Ils
12 sont montés à bord de leurs véhicules et ils sont partis en Serbie. A
13 partir de ce moment-là, la ville de Zvornik était une ville totalement vide
14 du point de vue militaire, c'est-à-dire qu'il ne restait plus un seul
15 soldat pour défendre la localité, et la population civile n'était pas
16 revenue.
17 Donc les hommes d'Arkan n'ont séjourné sur place que pendant un court laps
18 de temps.
19 Q. Vous nous avez parlé de M. Karadzic et de ce que vous saviez de lui à
20 l'époque. Est-ce que vous savez qu'il avait invité les troupes d'Arkan à
21 revenir en Republika Srpska en 1995 ?
22 Est-ce que vous étiez au courant de cela ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait demander au Procureur
24 de fournir une référence ? Quand ai-je invité Arkan ? Et quel document
25 confirme cela ?
26 M. NICHOLLS : [interprétation] Ceci est clair d'après la déposition de M.
27 Milovanovic. Je ne peux pas vraiment citer le moment exact où il mentionne
28 ceci. C'était le général Milovanovic. J'aurais dû l'appeler général, et non
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1 M. Milovanovic.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le général Milovanovic s'est corrigé.
3 Il a donc été cité de manière erronée.
4 M. NICHOLLS : [interprétation]
5 Q. Monsieur le Témoin, je vais vous poser la question
6 suivante : est-ce que vous savez si M. Karadzic avait invité les hommes
7 d'Arkan à revenir en Republika Srpska en 1995 ?
8 R. Je n'avais pas de poste suffisamment élevé au niveau de l'Etat pour
9 être au courant de cela.
10 Q. Et quels étaient les liens de M. Karadzic avec Arkan et les autres
11 paramilitaires ? Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
12 R. Non.
13 Q. Nous avons vu une vidéo en septembre 1995 où Arkan salue le président
14 Karadzic à Bijeljina avant qu'il ne reparte en direction de la Serbie. Est-
15 ce que vous avez vu cela ?
16 R. Non.
17 Q. Merci.
18 M. NICHOLLS : [aucune interprétation]
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourrait-on passer rapidement à huis
21 clos partiel.
22 [Audience à huis clos partiel]
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
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1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
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5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 [Audience publique]
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, durant votre
15 déposition, vous avez mentionné que vous connaissiez le conducteur du bus
16 qui avait acheminé les prisonniers en direction de l'entrepôt de Kravica,
17 et il avait été témoin du meurtre de ces personnes.
18 Est-ce que vous pourriez répéter ce que le conducteur de ce bus vous
19 a dit ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Le conducteur conduisait un bus rempli de
21 prisonniers, et la sécurité était assurée par un ou deux policiers dotés
22 d'armes automatiques.
23 A un moment donné, certains prisonniers se sont emparés des armes des
24 policiers et ont commencé à ouvrir le feu. Les forces de police et les
25 unités militaires qui se trouvaient à l'extérieur du bus ont ouvert le feu
26 en direction du bus, puis ils ont fait sortir tous les occupants du bus, y
27 compris le conducteur. Quelqu'un a reconnu le conducteur et l'a isolé des
28 autres prisonniers, et tous les prisonniers de ce bus ont été exécutés.
Page 28112
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'après lui, qu'a-t-il fait après cet
2 incident ? Est-ce qu'il est remonté à bord du bus ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est seulement dix jours après cet incident
4 qu'il a pu refaire fonctionner le bus. Il n'a pas pu reprendre la route car
5 le bus était en panne.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'après lui, combien de temps est-il
7 resté devant l'entrepôt de Kravica ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'est pas rentré de deux ou trois jours, ou
9 trois ou quatre jours même. Il a donc dormi là-bas.
10 Maintenant, je ne sais pas s'il a dormi à Kravica, s'il a dormi à
11 bord du bus, ou s'il a dormi chez un habitant du coin. Ça, je ne sais
12 vraiment pas.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il vous a également dit qu'il
14 avait été témoin de personnes qui auraient été exécutées à l'intérieur de
15 l'entrepôt de Kravica ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il n'a parlé que de cet incident où des
17 personnes qui étaient à bord du bus avaient été débarquées puis exécutées.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
19 Monsieur Nicholls, est-ce que vous avez le numéro de la liste 65 ter du
20 premier entretien que vous avez eu avec le témoin où il mentionne cet
21 incident ?
22 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui. Il s'agit du document 03459, pages 24 à
23 25. En fait, c'est pages 23 à 25 de la version en anglais.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
26 M. ROBINSON : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur le
27 Président.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.
Page 28113
1 M. ROBINSON : [interprétation] Tout d'abord, je voudrais vous remercier de
2 vous être assurés que sa déposition puisse être entendue en audience
3 publique. Je vous en remercie énormément.
4 Il y a un autre aspect qui a été mentionné à huis clos partiel et
5 qui, je crois devrait également être rendu public, à savoir que le témoin a
6 dit qu'il y avait des prisonniers qui s'étaient emparés des fusils des
7 gardes et que c'est après cela que les gardes ont commencé à ouvrir le feu.
8 Donc je voudrais que le témoin confirme cela tant que nous sommes en
9 audience publique.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous venez d'entendre ce que Me Robinson
11 a dit. Me Robinson est le conseiller juridique de M. Karadzic.
12 M. NICHOLLS : [interprétation] Il vient de le dire en audience publique.
13 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
14 M. NICHOLLS : [interprétation] Page 80, ligne 8.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, je pense que cela se
16 passe de commentaire dans ce cas-là. Enfin, par excès de prudence…
17 Vous venez d'entendre ce qu'ont dit Me Robinson et M. Nicholls. Est-
18 ce que vous pouvez confirmer tout cela, Monsieur le Témoin ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement. L'incident s'est produit
20 lorsque les prisonniers se sont emparés des armes que détenaient les
21 officiers de police et qu'ils ont commencé à les utiliser.
22 La réaction a été la suivante, c'est-à-dire que les personnes qui se
23 trouvaient à l'extérieur du bus ont ouvert le feu en direction du bus. Et
24 cetera, et cetera.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Ceci met un terme à votre
26 déposition, Monsieur le Témoin. Au nom des Juges de cette Chambre et du
27 Tribunal dans son ensemble, je tiens à vous remercier d'être venu à La Haye
28 pour déposer dans cette affaire. Et vous pouvez maintenant vaquer à vos
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1 occupations.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je vous demande
4 d'attendre encore quelques instants de façon à ce que vous puissiez partir
5 en toute sécurité. Nous allons donc baisser les stores qui sont derrière
6 vous.
7 [Le témoin se retire]
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.
9 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin suivant est
10 disponible. Il va nous falloir quelques minutes pour changer de place et
11 nous procurer tous les documents nécessaires.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On peut faire une pause de cinq minutes
13 dans ce cas-là ?
14 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, ce serait judicieux.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allons-y. Nous allons faire une pause de
16 cinq minutes.
17 --- La pause est prise à 14 heures 27.
18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
19 --- La pause est terminée à 14 heures 34.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Madame West.
21 Mme WEST : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
22 Monsieur les Juges.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je demanderais au témoin de bien vouloir
24 prononcer la déclaration solennelle.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
27 LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Assermentée]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
Page 28115
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Tabeau.
2 Veuillez vous asseoir.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous
5 pouvez présenter votre expert, je vous prie.
6 M. KARADZIC : [interprétation] Oui, Excellences. C'est avec plaisir que je
7 vous présente M. Stevo Pasalic, qui est un expert de la Défense pour toutes
8 les questions liées à la démographie et à l'évolution de la démographie
9 pendant la guerre en Bosnie.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Pasalic.
11 Oui, Madame West.
12 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais
13 également présenter M. Jason File, qui est un nouveau juriste au sein de
14 l'équipe Karadzic.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur File.
16 Oui.
17 Interrogatoire principal par Mme West :
18 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Tabeau.
19 R. Bonjour.
20 Q. Comme les membres de la Chambre de première instance le savent, vous
21 avez travaillé ici même au sein du bureau du Procureur par le passé. Mais
22 où travaillez-vous aujourd'hui ?
23 R. [hors micro]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis désolé, mais je ne crois que
25 votre micro -- ah, maintenant il est activé.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je travaille aujourd'hui dans un institut de
27 recherche qui s'appelle l'Institut d'agriculteurs économiques, qui fait
28 partie de l'Université de Wageningen, où j'ai été engagée en septembre de
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1 l'année dernière.
2 Mme WEST : [interprétation]
3 Q. Quel est le sujet de votre travail dans cet institut ?
4 R. Je participe à la réalisation de deux projets, dont l'un concerne la
5 sécurité alimentaire, et le deuxième concerne l'économie fondée sur la
6 biologie.
7 Mme WEST : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter
8 04103, je vous prie.
9 Q. Madame Tabeau, nous savons donc que vous avez travaillé pour le bureau
10 du Procureur entre 2000 et 2007. Quel était votre rôle au bureau du
11 Procureur ?
12 R. J'ai fait pas mal de recherches portant sur les victimes de guerre qui
13 ont eu lieu dans les années 1990 dans l'ex-Yougoslavie.
14 Q. Je crois savoir que vous avez également un diplôme de mathématiques
15 appliquées à la démographie, et que c'est le sujet qui était au cœur de
16 votre travail au bureau du Procureur, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, absolument. J'ai fait des études qui sont pertinentes pour le
18 genre de travail que je faisais au bureau du Procureur.
19 Q. Avant l'an 2000, où travailliez-vous ?
20 R. Je travaillais ici aux Pays-Bas, dans un autre institut de recherche,
21 l'Institut national démographique des Pays-Bas. J'y ai travaillé pendant
22 neuf ans, de 1991 à août 2000, si je ne me trompe.
23 Q. [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vous prie.
25 J'attendais la fin de l'interprétation.
26 Vous pouvez maintenant poser votre question suivante au témoin,
27 Madame West.
28 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais
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1 ralentir un peu.
2 Q. Pendant que vous travailliez pour cette institut, j'aimerais que vous
3 nous disiez quelle était la nature du travail que vous y faisiez.
4 R. Je faisais des recherches scientifiques liées à la mortalité et aux
5 causes de décès. J'ai participé à la réalisation d'un projet de
6 modélisation de la mortalité en Europe occidentale, en particulier aux
7 Pays-Bas, ainsi que dans d'autres pays de l'Europe occidentale. J'ai
8 également étudié la mortalité et les causes de mortalité en Europe centrale
9 et en Europe de l'Est. Et j'ai travaillé sur des sujets liés à l'espérance
10 de vie en particulier.
11 Q. Entre mai et septembre 2009, est-ce que vous avez travaillé pour le
12 Tribunal du Cambodge ?
13 R. Oui. J'ai participé à un projet qui a duré cinq mois en 2009. A la fin
14 de ce projet, j'ai élaboré un rapport d'expert sur les victimes du régime
15 de Khmer Rouge au Cambodge.
16 Q. Nous voyons votre curriculum vitae à l'écran, en tout cas la première
17 page de ce CV, et j'aimerais voir si un certain nombre de publications dont
18 vous êtes l'auteur figurent bien dans ce CV.
19 R. Oui. Vous trouverez dans mon curriculum vitae une liste sélective des
20 publications dont je suis l'auteur, mais ce n'est pas une liste complète de
21 tous les articles que j'ai publiés. Il s'agit simplement des articles les
22 plus récents et les plus pertinents probablement.
23 Q. Est-ce que vous avez témoigné ici par le passé en tant que témoin
24 expert ?
25 R. Oui. J'ai témoigné au total à 17 reprises dans plusieurs affaires, et
26 en particulier dans des affaires impliquant des personnalités importantes,
27 telles que les procès de Slobodan Milosevic, de Vojislav Seselj, de
28 Krajisnik -- ou plutôt, excusez-moi, je n'ai pas témoigné dans l'affaire
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1 Krajisnik. Mais j'ai témoigné dans des affaires liées à Sarajevo, c'est-à-
2 dire l'affaire du général Galic et de Dragomir Milosevic, ainsi que les
3 affaires liées à Srebrenica, à savoir les affaires Tolimir et Popovic.
4 Q. Merci.
5 Mme WEST : [interprétation] Je demande le versement au dossier du document
6 65 ter numéro 04013.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P4992.
9 Mme WEST : [interprétation]
10 Q. Vous avez rédigé des rapports sur trois éléments dans la présente
11 affaire, et le premier élément dont nous allons maintenant parler, c'est
12 l'élément relatif aux municipalités. Pouvez-vous dire de façon générale aux
13 Juges de la Chambre quelle était la mission qui vous a été confiée en ce
14 qui concerne les municipalités ?
15 R. S'agissant d'expliquer clairement ce qu'est cet élément lié aux
16 municipalités, j'aimerais renvoyer chacun à la lecture de mon rapport
17 d'expert sur le sujet. Il s'agit du document --
18 Mme WEST : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, j'indique
19 qu'il s'agit du document 65 ter numéro 10723.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Le titre de ce rapport est le suivant :
21 "Composition ethnique ainsi que personnes déplacées et réfugiées dans 27
22 municipalités de Bosnie-Herzégovine entre 1991 et 1997." Dans ce rapport
23 sont résumées les modifications de la composition ethnique et les divers
24 déplacements de population à l'intérieur du pays ou à l'extérieur du pays,
25 qui sont tous en relation avec la guerre qui a fait rage entre 1992 et 1995
26 en Bosnie-Herzégovine.
27 Q. J'aimerais que nous parlions des sources de façon à arriver ensuite aux
28 conclusions. Tout d'abord, est-ce que vous pourriez nous donner une idée
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1 générale de ce que les démographes utilisent en général pour obtenir les
2 chiffres qui concernent les modifications de population ?
3 R. Eh bien, je pense que la meilleure source que l'on puisse utiliser dans
4 ce type de travail, c'est le recensement de la population. Je choisirais
5 sans aucun doute deux recensements, le premier datant d'avant le conflit et
6 l'autre datant d'après le conflit, et je comparerais des informations
7 issues de ces deux recensements afin d'aboutir à des conclusions relatives
8 à la composition ethnique et des déplacements de population.
9 J'examinerais également les sources de migration, que sont les registres
10 dans lesquels figurent les déplacements de population. Les registres de
11 migration suivent très fréquemment les déplacements de population et sont
12 extrêmement dynamiques dans des situations de conflit. Il est difficile
13 d'enregistrer ce genre d'information, cela dit.
14 Q. Et s'agissant des rapports que vous avez rédigés en l'espèce, est-ce
15 que ce genre de source était disponible pour vous ?
16 R. Eh bien, partiellement. D'une part, nous avons utilisé le recensement
17 de population pour la Bosnie-Herzégovine à partir de mars 1991, qui est un
18 recensement décrivant l'état de la population au début du conflit. Et parce
19 qu'il ne semble pas devoir y avoir un recensement suivant celui-là, à ce
20 moment-là le recensement suivant pour la Bosnie n'a pas été mené à bien.
21 Nous avons recherché des sources que nous pouvions utiliser en tant que
22 remplacement fiable. Et ce remplacement fiable du recensement ultérieur au
23 conflit, cela a été les registres des électeurs, les listes électorales
24 tirées des élections municipales de 1997 et des élections législatives et
25 présidentielles de 1998 en Bosnie-Herzégovine.
26 Mme WEST : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter
27 numéro 11218.
28 Q. Dans une partie de votre rapport, vous ajoutez une annexe à un rapport
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1 antérieur dont vous êtes l'auteur, et nous avons maintenant cette annexe
2 sous les yeux à l'écran. C'est une annexe au rapport que vous avez rédigé
3 dans le cadre de l'affaire Milosevic.
4 Est-ce que vous faites référence à cette annexe dans le rapport
5 rédigé par vous pour l'affaire Karadzic ?
6 R. Oui. Le rapport dont nous parlons en ce moment est le document que l'on
7 appelle l'addendum au rapport relatif à Slobodan Milosevic qui a été
8 produit en 2003. Donc le mot "addendum" est utilisé uniquement pour
9 signifier que nous l'utilisons à présent dans l'affaire Karadzic, mais que
10 les sources sont les mêmes et que la même méthodologie que celle qui a été
11 utilisée pour la rédaction du rapport Milosevic est utilisée ici.
12 Q. Et ce que nous voyons devant nous en annexe B, un résumé des sources,
13 c'est ce qui est applicable au rapport relatif aux municipalités dans
14 l'affaire Karadzic, n'est-ce pas ?
15 R. Oui. C'est l'annexe pertinente dans laquelle on parle de sources. Je
16 n'ai pas évoqué une source qui s'ajoute au recensement de 1991 et qui est à
17 la liste électorale que j'ai également utilisée, à savoir le registre de
18 personnes déplacées à l'intérieur du pays ainsi que le registre de réfugiés
19 venus de Bosnie-Herzégovine, listes qui ont été établies par le HCR et le
20 gouvernement dans le pays.
21 Q. Nous parlerons de ces sources dans le détail, mais j'aimerais que nous
22 commencions par le recensement.
23 Quand a eu lieu le recensement ?
24 R. Le recensement a eu lieu en 1991. Il s'est déroulé concrètement entre
25 le 1er et le 15 avril 1991 et fait état de la situation des familles des
26 personnes interrogées à partir du 31 mars de cette année, 1991, bien sûr.
27 Q. Est-ce que ce recensement impliquait ou concernait toute la population
28 du pays ?
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1 R. Oui. Le recensement c'est la source la plus complète, c'est l'étude la
2 plus vaste, qui recouvre l'intégralité de la population.
3 Q. Comment se menaient les entretiens, les interviews ?
4 R. Ces interviews étaient menées en tête-à-tête avec les chefs de famille
5 dans tous les foyers de Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait de personnes qui
6 étaient entraînées aux entretiens qui interrogeaient donc les chefs de ces
7 familles.
8 Q. Est-ce que ces entretiens se faisaient face-à-face ?
9 R. Oui. C'étaient des entretiens face-à-face sur la base d'un
10 questionnaire standard qui avait été mis au point par des statisticiens
11 professionnels.
12 Q. Dites-nous quelles étaient les données qui étaient recueillies auprès
13 de chaque personne.
14 R. C'était un recensement qui décrivait l'état de la population de Bosnie-
15 Herzégovine, mais également les conditions de logement et les conditions de
16 travail dans les fermes. Donc trois groupes de questions avaient été mis au
17 point, qui étaient posées selon les cas. Ce qui concernait les personnes
18 était une composante essentielle de ces questionnaires. On recueillait les
19 noms; les dates de naissance;les numéros d'indentification personnels, que
20 l'on appelle le JMBG là-bas; la religion; l'état civil; le nombre d'enfants
21 nés; le niveau d'éducation; le type d'emploi; le niveau d'évolution
22 professionnelle, et cetera, et cetera. Donc, des informations très
23 détaillées au sujet des personnes.
24 Q. Est-ce qu'il s'agit d'informations qui sont recueillies de façon
25 typique dans le cadre d'un recensement ?
26 R. Oui, absolument. Le questionnaire était un questionnaire standard qui
27 répond aux règles générales du genre.
28 Q. Vous avez parlé de numéro d'identification permanent, le numéro JMBG.
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1 Est-ce que c'est un numéro tout à fait unique ?
2 R. Oui, c'est un numéro unique. Il a commencé à être utilisé en 1980 dans
3 l'ex-Yougoslavie. Normalement, les nouveaux-nés se voient affecter ce
4 numéro à leur naissance.
5 Q. Quelle est la signification de ce numéro et quelle a été son importance
6 dans le cadre de vos recherches ?
7 R. Ce numéro a eu une grande importance parce qu'il est unique et parce
8 qu'il figure également dans les sources dont je dispose sur l'état de la
9 population après la guerre, les listes électorales. Et donc, la possession
10 d'un tel numéro associé à chaque personne, sur la base des deux sources que
11 j'ai étudiées, me donnait la possibilité de tirer les conclusions que l'on
12 trouve dans le rapport.
13 Q. Je crois que vous avez également dit --
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
15 Etant donné la nature assez technique du propos, il faut peut-être un
16 peu plus de temps aux interprètes, en particulier aux interprètes anglais
17 et français. Donc je vous demanderais de bien vouloir ménager une pause
18 entre les questions et les réponses.
19 Veuillez poursuivre.
20 Mme WEST : [interprétation]
21 Q. Madame Tabeau, je crois vous avoir entendu parler d'ethnicité.
22 R. Oui. L'ethnicité a été étudiée dans le recensement, ou l'appartenance
23 ethnique.
24 Q. Pourriez-vous nous dire quel a été le processus suivi pour rendre
25 compte de l'appartenance ethnique.
26 R. Dans les questions posées au cours du recensement de 1991,
27 l'appartenance ethnique était décrite à l'aide de questions très vastes.
28 Autrement dit, aucune catégorie particulière n'avait été prédéterminée dans
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1 le cadre des questions posées à ces personnes qui pouvaient choisir le
2 groupe ethnique qu'elles souhaitaient mentionner s'agissant de dire
3 qu'elles en faisaient partie.
4 Q. En ce qui concerne les personnes qui procédaient aux interrogatoires,
5 c'étaient des personnes dont c'était le travail d'interroger les habitants,
6 n'est-ce pas ? Quelle était la source des informations en ce qui concerne
7 leur numéro d'identification personnel, JMBG ?
8 R. En ce qui concerne les personnes employées, le questionnaire à remplir
9 par la personne interrogée était une forme de questionnaire, et il y avait
10 d'autres renseignements qui étaient recueillis pendant le recensement
11 auprès des employeurs. Donc les employeurs fournissaient des informations
12 sur un certain nombre d'aspects relatifs à l'employé, y compris son numéro
13 JMBG, qui est ce numéro tout à fait unique octroyé à la naissance, une fois
14 que les questionnaires étaient remplis.
15 Q. Parlez-nous des autorités qui ont fait l'objet de ce recensement.
16 R. Les autorités constituent un groupe très important dans le recensement
17 de la population, car la Bosnie-Herzégovine était un pays qui avait, en
18 1991, à peu près 4,4 millions d'habitants. Donc le nombre de questionnaires
19 à mettre en place a été très important, il a fallu le faire à l'aide de
20 l'électronique. Des documents ont d'abord été scannés pour constituer des
21 dossiers informatiques. Bien entendu, le scannage a pu commencer avant
22 l'élaboration des questionnaires. Des codes particuliers ont été utilisés
23 pour répertorier les réponses aux questions du questionnaire, et ces codes
24 ont plus tard été inclus dans les fichiers informatiques. Pour saisir les
25 données, on a utilisé une méthode de scannage optique.
26 Q. Et finalement, quel a été le contrôle qualité imposé aux données
27 recueillies ?
28 R. Eh bien, évidemment, le contrôle qualité commence dès que l'on aborde
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1 la première municipalité. Des commissions municipales ont été mises en
2 place. Elles étaient responsables de garantir et de vérifier l'exactitude
3 du recensement une fois toutes les données recueillies. Donc ce sont ces
4 commissions qui ont été les premières à vérifier l'exhaustivité et
5 l'exactitude des chiffres recueillis dans le cadre du recensement. Elles
6 ont compté les questionnaires. Donc elles ont accompli un travail aussi
7 important. Et par la suite, elles ont continué ce travail au sein du bureau
8 central des statistiques de Sarajevo, qui avait la possibilité de mettre un
9 point final aux vérifications de la population dans le cadre du
10 recensement. Mais les vérifications concernant les agriculteurs et les
11 conditions de logement n'ont pas été terminées complètement.
12 Q. Donc, est-ce que c'est la seule partie du recensement --
13 R. Je voudrais corriger ce qui est au compte rendu d'audience. Ce n'est
14 pas le mot "households" qui doit être écrit, mais "housing", donc les
15 conditions de logement.
16 Q. Donc je reprends ma question : est-ce que la partie liée à la
17 population dans le recensement a été complètement terminée avant le début
18 de la guerre ?
19 R. Oui.
20 Q. J'aimerais que nous parlions maintenant de la deuxième source
21 mentionnée par vous, à savoir les listes électorales.
22 Est-ce que vous connaissez l'organisation dont le nom est
23 OSCE ?
24 R. Oui. Il s'agit de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en
25 Europe. C'est une organisation qui est chargée de suivre et d'apporter son
26 aide à l'organisation et la mise en œuvre d'élections, en particulier dans
27 des pays comme la Bosnie-Herzégovine qui ont vécu un conflit. L'OSCE a joué
28 un rôle important en Bosnie-Herzégovine pour veiller à ce que les élections
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1 se déroulent de façon régulière. En l'absence de toute fraude.
2 Q. Est-ce que vous avez écrit des articles au sujet de cette source en
3 annexe B de votre rapport ?
4 R. Oui. On y trouve une description des listes électorales entre 1971 et
5 1998 ainsi que du rôle de l'OSCE dans l'organisation des élections.
6 Q. Parlez-nous des circonstances dans lesquelles l'OSCE s'est trouvée en
7 Bosnie-Herzégovine.
8 R. Eh bien, sa présence est survenue juste après la fin du conflit, alors
9 que la situation dans le pays était encore très instable. Il y avait des
10 tensions au niveau politique, au niveau social, ainsi que de nombreux
11 problèmes économiques, et il convenait de veiller à ce qu'aucune partie
12 impliquée ne puisse se servir des élections -- ou plutôt, faire un mauvais
13 usage des élections pour obtenir les résultats que cette partie souhaitait.
14 Donc l'OSCE a eu pour rôle de veiller à ce que les élections se
15 déroulent de la façon la plus équitable et la plus régulière qui soit.
16 Q. Est-ce que le rôle de l'OSCE incluait l'enregistrement des électeurs ?
17 R. Oui. L'OSCE a mis en place des procédures destinées à enregistrer les
18 électeurs. Bien entendu, ce n'est pas la seule procédure mise en place par
19 l'OSCE, mais l'OSCE était également chargée de veiller à ce que les
20 procédures soient bien respectées. Donc un système d'enregistrement a été
21 mis en place dans un certain nombre de centres dispersés dans tout le pays.
22 Les centres d'enregistrement couvraient des secteurs très denses de Bosnie-
23 Herzégovine, de sorte que les électeurs éventuels aient toute facilité pour
24 s'y rendre et que le nombre de votants soit le plus élevé possible dans le
25 cadre des élections. L'OSCE a également participé à l'élaboration de listes
26 des personnes aptes à voter, et ces listes étaient présentes dans les
27 centres d'enregistrement sous forme d'exemplaire papier ainsi que d'une
28 base de données informatique.
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1 Q. Donc, tout d'abord, est-ce que vous savez si des conditions préalables
2 étaient imposées à la population pour s'enregistrer dans le but de voter ?
3 R. Pour pouvoir voter, une personne devait avoir 18 ans au moins au moment
4 des élections. Et puis, deuxième condition, cette personne devait figurer
5 dans le recensement de 1991. Voilà, il y avait deux conditions préalables.
6 Q. Pour s'assurer que cette personne était mentionnée dans le recensement
7 de 1991, qu'a fait l'OSCE ?
8 R. Eh bien, pour apporter la preuve que cette personne avait bien son nom
9 dans le recensement, l'OSCE a demandé aux autorités chargées des
10 statistiques un exemplaire du recensement. Enfin, pas du recensement
11 entier, mais d'une partie du recensement. La partie dans laquelle on trouve
12 les noms et prénoms, dates de naissance et numéros JMBG, qui a été utilisée
13 comme base pour permettre ensuite l'enregistrement des personnes sur les
14 listes électorales.
15 Q. Est-ce que cet acte d'enregistrement en vue de voter était volontaire ?
16 R. Bien entendu, volontaire. Bien sûr.
17 Q. Et, par conséquent, est-ce qu'il y avait plusieurs groupes ou plusieurs
18 catégories d'individus qui n'ont pas été enregistrés en vue de voter ?
19 R. Bien sûr. Il y a des gens qui étaient trop âgés, par exemple, ou trop
20 malades, ou qu'ils n'avaient pas le désir d'aller voter. Ces personnes
21 n'étaient pas enregistrées. Seules étaient enregistrées les personnes aptes
22 à voter et qui souhaitaient s'enregistrer pour avoir leurs noms sur les
23 listes électorales et pouvoir voter.
24 Q. Puisque l'enregistrement des inscrits n'avait pas été terminé, mais que
25 vous n'aviez qu'un échantillon, vos recherches en ont-elles été affectées;
26 et si oui, comment ?
27 R. Eh bien, nous avions un échantillon de toute la population d'électeurs
28 potentiels. Mais c'était un échantillon très vaste. La mauvaise
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1 participation aux élections en 1997 nous a donné 88 %, donc pratiquement 90
2 % comme résultat sur 4,4 millions d'individus, et un demi-million
3 enregistrés aux fins de voter. Si on compare cela à la population de 1991,
4 telle que rapportée dans le recensement, 4,4 millions d'habitants, on
5 constate que l'échantillon est de 2,5 millions et qu'il est extrêmement
6 vaste.
7 Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je suis sur le point de
8 passer à un autre sujet. Je me disais que nous pourrions peut-être
9 suspendre.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
11 Nous allons suspendre pour aujourd'hui et reprendrons nos débats demain
12 matin à 9 heures.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
14 [Le témoin quitte la barre]
15 --- L'audience est levée à 15 heures 00 et reprendra le jeudi 26 avril
16 2012, à 9 heures 00.
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