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1 Le lundi 28 janvier 2013
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin vient à la barre]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
7 Monsieur Karadzic, poursuivez, je vous prie.
8 Une petite seconde. Une petite seconde.
9 Oui, Maître Bourgon.
10 M. BOURGON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Avant de
11 commencer, je souhaiterais vous présenter Mme Marlene Yahya Haage qui est
12 aujourd'hui dans le prétoire, et qui se trouve à ma droite.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
14 Monsieur Karadzic.
15 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
17 Madame, Messieurs les Juges.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une petite minute.
19 Général, est-ce que vous m'entendez ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Oui, oui, tout va bien.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.
22 LE TÉMOIN : DRAGOMIR MILOSEVIC [Reprise]
23 [Le témoin répond par l'interprète]
24 Interrogatoire principal par M. Karadzic : [Suite]
25 Q. [interprétation] Bonjour, Général. Et je pense que les autres m'avaient
26 entendu.
27 R. Bonjour.
28 Q. Général, la semaine dernière, nous avons parlé de la façon dont on fait
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1 une guerre. Est-ce que les parties belligérantes ont eu recours à des
2 ruses, des pièges, des comportements perfides, ou est-ce que vous en avez
3 été informé, vous avez pu l'observer ?
4 R. Oui, ces choses se sont effectivement passées. Pour ce qui est de
5 comportements perfides et de pièges, là, moi, je vous dirais que je n'ai
6 pas d'informations à ce sujet et je n'ai pas été en mesure d'évaluer si le
7 Corps de Sarajevo-Romanija a eu recours à ce genre de chose. Mais lorsque
8 nous parlons de manipulation, de pièges, de choses qui se sont orchestrées,
9 concoctées, dans mon cas, je dirais que dans mes rapports il y avait des
10 références au 1er Corps de l'ABiH. Et je n'inclus pas là-dedans un certain
11 comportement militaire avec des ruses et des pièges parce que cela est
12 normal et autorisé.
13 Q. Est-ce que vous pourriez nous indiquer quelle est la différence ce que
14 j'appellerais les ruses militaires, les tactiques militaires qui sont
15 autorisées par le droit international, et celles qui ne le sont pas ?
16 R. Alors, là, c'est très, très clair, et lorsque je parle de "ruses
17 militaires légitimes," j'entends par là des attaques surprise, des
18 tentatives de la part de l'ennemi pour dissimuler ses mouvements et ses
19 axes de mouvement, ou des tentatives pour dissimuler ses intentions ainsi
20 que les actions dans lesquelles il a l'intention de s'engager. Bon, cela
21 n'est pas seulement autorisé, c'est nécessaire. Toutefois, à propos
22 d'actions illégitimes, justement, cela signifie des actions illégitimes à
23 l'encontre des civils, des installations et des bâtiments qui n'ont
24 absolument rien à voir avec l'armée et qui n'ont aucune finalité militaire,
25 et je ne parle pas des bâtiments, je parle également de terre et de
26 terrain. Donc, là, des actions complètement disproportionnées et aléatoires
27 ne sont pas autorisées. Elles sont considérées comme illégitimes, tout
28 comme tout comportement non régulier vis-à-vis des structures civiles.
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1 Q. La semaine dernière, vous avez fait référence à des provocations qui
2 étaient lancées pour susciter notre réaction. Alors, dans quelle catégorie
3 est-ce que vous placez des actions, par exemple, qui sont menées à bien à
4 partir d'hôpitaux, à partir de lieux qui sont très proches des bases des
5 forces des Nations Unies, et cetera ? Est-ce que vous considérez cela comme
6 des actes légitimes ou illégitimes ?
7 R. Alors, là, la réponse est tout à fait manifeste, il n'y aucune
8 ambiguïté, aucun équivoque. Tirer à partir d'hôpitaux, à partir de centres
9 de convalescence, à partir de lieux semblables, à partir également de zones
10 habitées par la population civile, en espérant qu'il ne va pas y avoir de
11 réaction, que personne ne va riposter, est considéré tout à fait comme un
12 acte illégitime, voire un acte perfide, si en plus cela est orchestré pour
13 susciter une riposte ainsi que des tirs particulièrement lourds de la part
14 du Corps de Sarajevo-Romanija.
15 Q. Et en tant que commandant, et je pense à votre unité militaire, est-ce
16 qu'il allait dans votre intérêt de vous lancer dans ce type de provocations
17 et de les engager, en quelque sorte, à livrer bataille à partir de ce type
18 de zone ?
19 R. L'engagement du Corps de Sarajevo-Romanija et son commandement, sans
20 oublier les principaux officiers, les principaux commandants et toute la
21 structure militaire du Corps de Sarajevo-Romanija, étaient tels que nous ne
22 souhaitions pas provoquer ce type d'acte ou nous lancer dans ce type
23 d'acte, tout simplement pour nous présenter comme sous une menace
24 illégitime. Toute la structure du RSK, et notamment le commandement et les
25 commandants de brigade, n'étaient intéressés que par des solutions
26 militaires sur le champ de baille, et ce, entre les parties belligérantes.
27 Et nous nous en sommes tenus strictement à ce type d'acte et nous devions
28 respecter ce genre de chose parce que -- bon, il y avait les actions
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1 militaires. En d'autres termes, il fallait que nous soyons perçus comme
2 agissant de façon chevaleresque.
3 Q. Merci. Est-ce que les Musulmans ont réussi à obtenir en quelque sorte
4 gain de cause et reconnaissance du point politique dans les médias à propos
5 de tous ces incidents lorsque vous avez riposté et lorsque vous avez tiré ?
6 R. Oui, oui. Moi, je considère cela comme superflu et exagéré, parce qu'il
7 y avait une impression qui se dégageait, qui était créée, à savoir le camp
8 des Musulmans était menacé. Alors, bien entendu, la population civile était
9 certainement menacée à la suite de nos actions, lorsque nous ouvrions le
10 feu, il était question de négligence, et cetera, et cetera. Je pense qu'ils
11 ont véritablement déployé des efforts intenses pour créer cette impression
12 avec, d'ailleurs, une aide importante fournie par certains protagonistes,
13 mais bon, je ne vais pas maintenant aborder ce genre de chose. Mais ils ont
14 véritablement beaucoup fait pour forger cette image à savoir qu'ils étaient
15 menacés par nos actions qui n'étaient pas des plus régulières et par la
16 pression exercée contre la population.
17 Q. Mais est-ce que vous étiez informé de la nature de ce comportement, de
18 leurs actes dont le but n'était pas d'opérer une percée mais bel et bien de
19 provoquer des tirs de riposte ?
20 R. Ecoutez, je m'en tiens à ce que j'ai dit. Le commandement du corps et
21 tous nos hommes savaient pertinemment ce qui se passait et étaient
22 parfaitement informés des intentions et des objectifs de l'ennemi et du
23 fait qu'ils voulaient qu'un doigt accusateur soit pointé sur le Corps de
24 Sarajevo-Romanija. Et d'ailleurs, je dirais à cet égard que nous étions
25 unis, nous faisions front, et qu'il n'y avait pas de problème entre nous
26 lorsqu'il s'agissait de se mettre d'accord à propos de cette évaluation et
27 pour nous mettre d'accord à propos d'un comportement qui les aurait
28 empêchés de créer une impression erronée à notre sujet. Alors, bien
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1 entendu, cela n'a pas été facile. Il n'a pas été facile de résister à cette
2 propagande et à ces tentatives pour créer une atmosphère qui aurait été
3 telle que nous aurions donné l'impression de nous lancer dans des actions
4 irrégulières, qui aurait donné l'impression que notre comportement n'était
5 pas des plus réguliers ou que notre comportement n'aurait pas été un
6 comportement de soldat, de militaire.
7 Q. Alors, dans de tels cas, lorsqu'il y avait des tirs qui vous visaient à
8 partir d'hôpitaux, à partir de bâtiments civils, à partir d'autres
9 installations qui n'auraient pas dû être utilisées à des fins militaires,
10 que faisiez-vous alors ? Dans quels cas est-ce que vous vous êtes contentés
11 d'essuyer les tirs et dans quels cas est-ce que vous avez dû riposter ?
12 R. Je vous ai décrit la situation, je vous ai indiqué quelle était notre
13 évaluation de la situation dans la mesure où mon commandement, moi-même et
14 mes commandants subordonnés étions informés de ces tentatives pour, en
15 quelque sorte, nous faire tomber dans le piège. Nous ne pouvions pas nous
16 contenter de procéder à une évaluation une seule fois. Il a fallu, bien
17 entendu, que constamment nous étudiions la situation au cas par cas, au vu
18 des renseignements que nous avions collectés. Je dois vous expliquer qu'il
19 y avait donc le système de déploiement des forces du Corps de Sarajevo-
20 Romanija, certes, et nous avions mis au point un système d'observation. Et
21 ce système d'observation était quelque chose que nous devions absolument
22 avoir lorsque nous nous trouvions face à l'ennemi. Nous avions donc
23 plusieurs observateurs différents pour les tirs d'artillerie, il y avait
24 des observateurs pour les actions de l'infanterie, les observateurs en cas
25 de manœuvre, et puis, bien entendu, il y avait en règle générale les
26 observateurs de l'espace aérien, mais cela ne nous concernait pas en fait.
27 Alors cette structure d'observation était telle qu'elle nous fournissait à
28 tout instant les renseignements relatifs à la situation sur le terrain,
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1 relatifs aux intentions qui commençaient à prendre forme ou à ce qui était
2 sur le point de se passer, et cetera, et ce type d'information, en fait,
3 était donné à l'officier qui commandait et qui ensuite, à partir de ces
4 renseignements, procédait à une évaluation. En règle générale, l'officier
5 devait vérifier les renseignements, bien que les observateurs fussent des
6 observateurs formés, mais il n'empêche que l'officier, le commandant,
7 devait procéder à sa propre évaluation pour déterminer si les
8 renseignements qui lui avaient été apportés étaient exacts et fiables. Il
9 s'agissait de savoir, donc, si la zone en question était dégagée avec un
10 seul véhicule de combat qui ouvrait le feu ou est-ce qu'il s'agissait d'une
11 zone, par exemple, densément peuplée où les tirs de riposte auraient pu
12 provoquer des victimes parmi la population civile.
13 Il y avait des situations qui étaient parfaitement évidentes, qui
14 étaient très claires. Par exemple, si nous voyions un bâtiment, un immeuble
15 entouré, où il y avait beaucoup de sacs de sable sur le balcon, par
16 exemple, si l'on voyait un nid de mitrailleuse entre les sacs de sable, il
17 ne fallait pas disposer de nombreux renseignements pour décider qu'il
18 s'agissait d'une cible qui devait absolument être neutralisée ou d'une
19 cible qui aurait pu provoquer des dégâts collatéraux pour les civils. Nous,
20 nous concluions que s'il y avait tir à partir de ce balcon ou de ce type de
21 balcon, cela n'avait rien à voir avec la structure civile.
22 Q. Merci.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions voir, je vous prie,
24 un rapport de combat régulier, le document 1D7503, qui nous présente
25 certains des éléments dont vous venez de parler. Donc je répète, document
26 1D7503. Il s'agit, comme je disais, d'un rapport de combat régulier, le
27 document 1D7503, qui porte la date du 8 décembre 1993. Dernière page, je
28 vous prie.
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1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Je vous renvoie, Général, au paragraphe 8. Et veuillez nous indiquer à
3 quoi ceci se rapporte.
4 En version anglaise, c'est à la page d'avant.
5 R. Oui, je vois. Ici, dans le cas qui me concerne, ce que je peux dire à
6 titre concret, dans ce cas de figure-ci, c'est précisément là les
7 tentatives qui ont été faites pour créer l'impression au terme de laquelle
8 nous serions à la recherche d'un moment propice pour perturber la vie de
9 tous les jours à Sarajevo. Et s'agissant de ces autorités civiles qui
10 s'efforçaient de faire quant à elles leur travail, alors ici, évaluation
11 est faite et conclusions ont été tirées conformément à la réglementation.
12 Pour ce qui est de la nécessité de prêter attention aux éléments qui se
13 produisent lorsqu'il est jugé que l'on fera délibérément en sorte de faire
14 quelque chose pour nous faire porter le blâme, nous avions prévu les
15 choses, senti les choses par avance et mis en garde pour que les
16 comportements sur le terrain soient conformes aux ordres que nous avons
17 donnés.
18 Q. Merci.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander le versement de ce
20 document, s'il vous plaît ?
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et quelles ont été ces propositions que
22 vous aviez faites, Général ? Parce que vous avez dit "conformément à nos
23 propositions" en version anglaise du compte rendu. De quoi s'agissait-il ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient des instructions, Monsieur le Juge,
25 des instructions données aux unités pour ce qui est de la façon dont il
26 fallait que ces unités se comportent dans différentes situations. Parce que
27 lorsque nous avons jugé qu'il fallait s'attendre à des provocations et
28 qu'on chercherait à nous faire réagir à ces provocations, il fallait que
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1 ces réactions ne soient pas faites ou ne soient pas commises avec des
2 erreurs. Il ne fallait donc pas tomber dans le piège qui nous amènerait à
3 faire des choses qui sont interdites suite à des provocations. On a donc
4 fait des évaluations disant que ce type de situation risquait de survenir
5 et il ne fallait pas que nos agissements ne soient pas réalisés de façon
6 inappropriée.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons le verser au dossier.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2804, Madame, Messieurs
9 les Juges.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Général, il est question ici de :
12 "Une décision qui est censée rester telle qu'elle, non modifiée."
13 Que vouliez-vous dire par ceci ?
14 R. Cette décision devait rester non modifiée et c'était conforme à des
15 positions qui étaient les nôtres déjà. Donc il fallait se retenir et ne pas
16 céder aux provocations pour avoir par la suite des problèmes. On savait
17 d'avant que toutes les réglementations et positions étaient déjà formulées
18 pour ce qui est de la façon de se comporter. Il fallait maintenir les
19 comportements qui éviteraient de faire quoi que ce soit d'inadmissible.
20 Q. Merci.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais à présent que l'on nous présente
22 sur nos écrans la pièce 1D1641, s'il vous plaît.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Il s'agit d'un rapport de combat régulier de votre part et vous le
25 présentez en tant que commandant adjoint. C'est daté du 9 janvier 1994. Je
26 vous prie de vous pencher sur le point 3(a). Et il est dit :
27 "Vers 9 heures, sur l'aéroport de Sarajevo, un obus de 120 millimètres est
28 tombé. Ça s'est fait lorsque l'on s'attendait à l'arrivée de l'avion de M.
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1 Akashi."
2 Et à 13 heures, on avait envisagé une visite d'Akashi à Pale.
3 Alors, de quoi cela fait-il partie, ce pilonnage de la piste à l'occasion
4 de l'expectative de la visite de M. Akashi ?
5 R. Je pense que, en termes simples, ceci montre bien qu'il y a eu
6 tentative de faire en sorte que cette arrivée de M. Akashi et les
7 événements afférents soient attribués à la partie serbe, pour dire que
8 c'est une partie qui ne respecte rien du tout, ni les éléments, ni les
9 facteurs internationaux, ni le fait que cet aéroport a été confié aux
10 représentants internationaux. Pour montrer que nous sommes prêts à nous
11 attaquer à ces personnalités, à ces représentants d'organisations de cette
12 nature, ce sont donc pour nous des choses que nous sommes tout à fait
13 disposés à entraver. Ceci montre que l'ennemi est tout à fait disposé à
14 agir de la sorte pour montrer que nous n'étions pas fiables dans quelque
15 situation que ce soit.
16 Q. Merci. Mais ces pièges, dans quelle mesure ont-ils été couronnés de
17 succès pour ce qui est des appréciations faites du comportement de la
18 partie serbe ?
19 R. Nous nous sommes efforcés de faire en sorte que face à ces facteurs
20 internationaux, nous fassions montre du fait que ces différents guet-apens
21 ou ces pièges qui étaient suivis de réaction de la FORPRONU suite à des
22 protestations de la partie adverse -- nous nous sommes donc efforcés de
23 montrer à ces médiateurs qui sont là pour voir la situation d'un côté et de
24 l'autre, pour bien leur montrer que ce n'étaient pas nos intentions ni nos
25 comportements à nous. Je sais que nous n'avons pas toujours réussi, parce
26 que nous n'avons pas pu faire en sorte que l'on nous croie lorsque nous
27 disions que nous n'étions pas portés sur ce type de chose.
28 Et si vous me le permettez, en cette occasion, je dirais qu'il y a un
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1 indice qui nous montre ceci dans mon commandement. M. Gobillard, le général
2 Gobillard, est venu dans mon commandement en affirmant que nous avions
3 détruit une maison suite à des tirs exagérés en réaction de la part de nos
4 forces à Sedrenik. Alors j'ai reçu les informations et je suis allé en
5 personne pour m'assurer de ce qui s'était passé. Mes commandants et mes
6 soldats ont dit que cette maison avait porté une masse de sacs en sable, et
7 le balcon de la maison s'est cassé, et ça a cassé une partie du mur. Et ils
8 ont dit que nous avions détruit ce bâtiment. Or, on a vu les sacs de sable
9 qui sont tombés avec le balcon; ça n'a pas été le fait de tirs de notre
10 part. Et lorsque je l'ai dit au général Gobillard, j'ai eu l'impression
11 qu'il ne m'a pas voulu croire.
12 Alors il a fallu que j'aille moi-même enquêter tout le temps, essayer de
13 s'assurer tout le temps pour voir si les informations recueillies par la
14 FORPRONU sont exactes. Et j'ai dû faire des pressions à l'égard de mon
15 personnel pour que ceci soit tout à fait exclu de la pratique. On a voulu
16 se libérer de ce type de d'hypothèque, mais ce n'était pas facile, parce
17 qu'on nous avait imposé une situation qui était celle de nous mettre en
18 accusation de comportement inapproprié.
19 Q. Mon Général, quel est le cheminement que vous avez dû effectuer du
20 commandement à Sedrenik en votre qualité de commandant en chef pour
21 vérifier les affirmations ou les allégations présentées par le général
22 Gobillard ?
23 R. Madame, Messieurs les Juges, je comprends la question. Ce n'est pas le
24 problème de savoir quel est le trajet et le cheminement que j'ai dû
25 effectuer en ma qualité de commandant en chef. Je comprends la question qui
26 est posée. Moi, ce que je suis en train d'évoquer, ce sont des efforts
27 permanents qui visaient à faire en sorte que la structure du Corps de
28 Sarajevo-Romanija ne soit plus anathémisée pour dire que nous ne sommes pas
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1 une structure qui fait la guerre de façon malhonnête. Enfin, dans ce cas
2 concret, j'ai dû faire 50 kilomètres ou plus, mais ça c'est secondaire. Je
3 voulais m'en assurer. Ce n'est pas le seul cas de figure. Il y a eu un
4 nombre X de fois où j'ai dû aller tirer les choses au clair avec les
5 commandants de la FORPRONU ou des membres du personnel qui avaient fait des
6 choses à tort et à travers.
7 Q. Merci. Il s'agit d'un rapport strictement confidentiel à l'attention de
8 l'état-major en provenance d'un poste de commandement avancé. Alors, au
9 3(a), on dit que l'on avait envisagé 27 avions, il en est arrivé quatre, il
10 y a eu un départ d'Izetbegovic et de Franjo Kuharic.
11 Et vous avez prévu une alternative pour le cas où la route de Pale
12 viendrait à être fermée en passant par Trebevic et on avait prévu une route
13 alternative pour M. Akashi. Comment pouvait-on fermer cette route, dites-
14 le-nous ?
15 R. Madame, Messieurs les Juges, là, c'est une chose tout à fait à part.
16 Pour autant que je m'en souvienne, auparavant ici j'ai déjà eu l'occasion
17 de dire, qu'il y a eu plusieurs axes qui avaient été choisis par cette
18 puissante armée de Sarajevo pour mettre en péril certains axes de
19 déplacement qui étaient les nôtres. Je ne vais pas tout répéter à nouveau,
20 mais l'axe Sarajevo-Lukavica-Pale, en passant par Trebevic, c'était un
21 territoire incessamment et constamment attaqué par des tirs très puissants,
22 très nourris, dans la tentative de faire en sorte que cette route soit
23 coupée. C'est l'axe principal, cela. Et je sais que nous avons dû choisir
24 des axes complémentaires, mais ces axes complémentaires étaient des routes
25 impraticables. Il fallait donc passer avec des bulldozers et des engins de
26 génie pour frayer des passages, si jamais l'axe de Lukavica en passant par
27 Brace [phon] et Trebevic pour aller à Pale, si cet axe-là venait à être
28 fermé.
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1 Q. Merci.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander le versement au dossier de
3 cette pièce ?
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2805, Madame, Messieurs
6 les Juges.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer le 1D1649 à
8 présent, s'il vous plaît.
9 M. KARADZIC : [interprétation]
10 Q. Nous restons sur le même sujet, Général. Je voudrais que vous disiez
11 aux Juges de la Chambre et aux parties présentes ici ce qui est dit au
12 point 8.
13 R. Etant donné que le texte dit sans ambiguïté aucune de quoi il s'agit,
14 ce paragraphe 8 dit et montre que nos décisions et nos agissements pour ce
15 qui est de nos activités, comportements à venir, ne devaient pas être
16 modifiés. Nous allons dans la même direction, nous nous conformons aux
17 mêmes principes et nous respectons la même réglementation du point de vue
18 de la mise en place de conditions pour que tout ce qui se fait conformément
19 aux mises en garde précédemment données soit maintenu à l'avenir aussi.
20 Q. Merci. Les parties en présence peuvent voir qu'on dit qu'il n'y a pas
21 de problème avec la FORPRONU, pas plus qu'avec les convois humanitaires.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux maintenant demander le
23 versement au dossier de ce document ? Et ici, nous en sommes au 23 janvier
24 1994.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. N'est-ce pas, oui ? Peut-être pourriez-vous remonter vers le haut pour
27 qu'on voie la date.
28 R. Oui. Oui, c'est cela.
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1 Q. Mon Général, est-ce que vos effectifs, un jour avant ceci, auraient
2 ouvert des tirs à l'artillerie ou au mortier en direction d'Alipasino
3 Polje, et est-ce que vous vous souvenez du fait qu'à ce moment-là il y a
4 eu, le 22 janvier, donc le jour d'avant ce document, des tirs à l'arme
5 lourde en direction de cette agglomération d'Alipasino Polje ?
6 R. Je ne m'en souviens vraiment pas.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.
9 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est une question directrice.
10 M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Président, peut-être
11 aurais-je besoin de demander un accord pour ce qui est de ce qui constitue,
12 oui ou non, une question directrice. Quand vous dites : Est-ce que vos
13 forces ont tiré à l'artillerie lourde sur Alipasino Polje, on peut répondre
14 par oui ou par non, donc ce n'est pas une question directrice. A mon avis,
15 une question directrice c'est une question qui amène le témoin à répondre
16 d'une façon déterminée. Je ne vois pas en quoi cette question est
17 directrice.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez riposter ou répliquer,
19 Monsieur Tieger, à la place de Mme Edgerton ?
20 M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, je pense que cela impliquerait un
21 grand nombre de questions et de réponses des témoins, et je pense que M.
22 Robinson doit certainement savoir que c'est basé sur un contexte. Les
23 informations peuvent être convoyées via un contexte, et les questions qui
24 peuvent être répondues par un oui ou par un non apportent aussi des
25 informations cruciales sur une question. Cela dépend de la nature de la
26 question. Et dans le contexte des tirs ou des pilonnages -- comporte une
27 information, et la nature directrice de la question est manifeste. La
28 réponse va certainement être donnée d'une façon déterminée indépendamment
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1 du fait de pouvoir y répondre, techniquement parlant, par un oui ou par un
2 non. Il convient de prendre le contexte en considération. Je crois que le
3 Juge Morrison, dans une situation antérieur, a été fort précis pour ce qui
4 est de la façon dont cela devait se faire. Je ne me souviens plus si
5 c'étaient des interrogatoires conduits par l'Accusation ou par la Défense.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand bien même cela aurait-il été une
7 question directrice, il n'a pas réussi dans sa démarche, puisque le témoin
8 a dit qu'il ne le savait pas. Je vais consulter mes collègues.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question telle qu'elle a été
11 formulée, avec une date très précise, qui fait partie d'un des éléments
12 constituant une question directrice. Est-ce que vous me suivez, Monsieur
13 Karadzic ? Veuillez poursuivre.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Excellence. Je vais reformuler ma
15 question.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Le 22 ou le 23, avez-vous reçu une protestation de la part des Nations
18 Unies ? Et si tel était le cas, cela aurait-il figuré dans vos rapports ?
19 R. Si j'avais reçu ladite protestation, je l'aurais incluse. Je ne peux
20 pas dire que j'aie reçu une protestation. Je ne peux pas dire si oui ou non
21 il y avait quelque chose qui se passait à Alipasino Polje. Telle est ma
22 réponse. Si nous avions reçu une protestation, nous aurions vérifié la
23 situation, et dans ce cas, en étant assis ici aujourd'hui, je ne me
24 souviens pas du tout de quelque chose de ce genre. Je ne me souviens pas
25 que quelque chose comme ça se soit passé. Je sais que nous n'avons rien
26 fait qui n'était pas autorisé et que nous n'avons pas ouvert le feu sur les
27 quartiers habités par la population civile.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous verser au dossier le document,
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1 s'il vous plaît ?
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2806, Madame, Messieurs
4 les Juges.
5 M. KARADZIC : [interprétation]
6 Q. Général, lors des vérifications que vous effectuiez à cette date-là ou
7 aux environs de cette date-là, avez-vous établi que le Corps de Sarajevo-
8 Romanija avait ouvert le feu sur Alipasino Polje, provoquant des dégâts
9 illégaux ?
10 R. Quelles que soient les vérifications que j'ai faites, quelles que
11 soient les tentatives qui étaient les miennes pour établir la vérité,
12 quelles qu'aient été mes tentatives pour établir la vérité, à savoir si oui
13 ou non on avait ouvert le feu après des avertissements que nous avons reçus
14 concernant le caractère illégal de ces tirs, je vérifiais toujours. Je me
15 suis rendu aux endroits où se trouvaient les équipes et les combattants qui
16 étaient dans le secteur, car je voulais recueillir des informations
17 précises de la part de ces personnes-là en me fondant sur la confiance qui
18 existait entre eux et moi. Et ils pouvaient à tout moment me confier
19 quelque chose sur ce qui s'était passé. Je n'ai jamais reçu de réponse me
20 précisant qu'ils étaient arrogants dans leurs agissements, qu'ils aient
21 tiré sur les gens alors qu'ils n'auraient pas dû le faire. Et pendant ces
22 vérifications, j'appliquais plusieurs méthodes. Je m'entretenais avec les
23 officiers, avec les combattants, avec les observateurs, et je n'ai jamais
24 reçu d'informations indiquant que des choses irrégulières s'étaient
25 déroulées.
26 Q. Merci.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux afficher le numéro D1515. Il
28 s'agit d'une pièce de la Défense.
Page 32713
1 M. KARADZIC : [interprétation]
2 Q. Général, veuillez regarder le bas de la page.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons faire défiler le texte
4 vers le bas. Je crois qu'en anglais, cela devrait se trouver sur la page
5 suivante. La page suivante, s'il vous plaît, en anglais.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Veuillez nous lire ici ce que vous avez fait concernant le feu présumé
8 qui aurait été ouvert contre Dobrinja à la date du 4 février 1994.
9 R. Oui, oui. En rapport avec les allégations, je dois dire que toutes les
10 fois que nous recevions des informations, il fallait les vérifier. Nous
11 avons reçu des informations indiquant qu'un obus de 82 millimètres avait
12 été tiré, mais nous ne souhaitions pas prendre ça pour argent comptant.
13 Pour pouvoir vérifier cet élément d'information, nous devions vérifier ce
14 qui s'était passé. C'est pas moi qui ai fait cela. C'est le général Kosovac
15 qui a fait ça. Il a recueilli des informations précisant que le feu n'avait
16 pas été ouvert, et cela a été réfuté par les médias en Republika Srpska.
17 Q. Au niveau de la dernière phrase, on peut lire :
18 "Un convoi juif et des activités à cet égard procèdent conformément
19 au plan."
20 Vous souvenez-vous de ce convoi ? Je l'avais négocié à New York. Un des
21 témoins a établi un lien entre ces deux événements. Avez-vous remarqué
22 qu'il y avait un lien entre ces deux événements ?
23 R. Tout d'abord, je ne suis pas au courant de ces événements. Soyons tout
24 à fait clair à propos d'une chose. Je ne sais pas quelle décision a été
25 prise au niveau du convoi de Juifs qui est arrivé. Je sais ce qui est
26 arrivé après. Je sais qu'on a fait droit à leur demande, différents
27 facteurs étaient en jeu, et je sais que ces personnes étaient autorisées à
28 quitter Sarajevo d'après les plans en place et d'après leurs souhaits. Bien
Page 32714
1 évidemment -- j'essaie d'établir un lien ici. L'idée avait été de dire ceci
2 : Alors, si vous êtes d'accord avec quelque chose, dans ce cas nous allons
3 -- nous manipulions tous les éléments pour rendre tout ceci sans objet,
4 pour nous reprocher d'avoir entravé la communauté juive de Sarajevo.
5 Q. Merci.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant regarder le 1D7513.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Général, veuillez nous dire quelles actions et quels préparatifs vous
9 avez menés pour pouvoir -- vous dites ici qu'à la date du 4 février 1994,
10 vous avez mené certaines actions. Qu'a fait le corps ? Le corps a-t-il mené
11 des opérations pour se préparer à l'éventualité d'une offensive ?
12 R. Nous ne préparions pas une offensive. Nous préparions une action
13 défensive. Et pour moi, lorsqu'on parle "d'offensive", il s'agit d'attaque.
14 Mais ce n'est pas la seule chose que je souhaite dire. En outre, ici, je
15 vois au point 2, où on dit :
16 "Construire et renforcer des positions de défense.
17 "Des positions de réserve.
18 "Reconstruire des positions de défense non véritables.
19 Protéger tous les abris…," et cetera.
20 C'est une période durant laquelle le général Rose a rendu ceci possible --
21 en tout cas, c'est ainsi que j'ai perçu la situation. C'est lui qui s'est
22 assuré de l'application du cessez-le-feu entre les deux parties
23 belligérantes, et je le félicite pour ça. Ce que j'essaie de dire, c'est
24 qu'il y avait un cessez-le-feu qui était appliqué à ce moment-là, une
25 cessation des hostilités, en d'autres termes, et cela signifie que nous
26 n'avons pas ouvert le feu à l'époque. Nous renforcions nos positions. Nous
27 n'avions pas d'autres plans. Nous n'avons pas ouvert le feu. Nous n'avions
28 prévu aucune action parce que nous n'avions rien à faire malgré les
Page 32715
1 provocations.
2 Q. Veuillez nous dire ce qu'on peut lire au point 4, s'il vous plaît, où
3 un délai est mentionné.
4 R. Un délai ?
5 Q. Oui.
6 R. Je vois. Ici, un délai a été fixé pour que ces actions puisent être
7 parachevées à la date du 10 février 1994. Bien évidemment, chaque fois
8 qu'une décision est prise, il doit y avoir un délai. Il y avait toujours
9 des difficultés avec les délais et d'autres choses aussi, mais le fait de
10 prévoir les dates constituait toujours une difficulté, c'était un des
11 éléments-clés. Et dans le cas qui nous intéresse, le délai était fixé à la
12 date du 10 février, et à partir de là nous étions censés surveiller la
13 situation.
14 Q. Le Corps de Sarajevo-Romanija avait-il envisagé ou ordonné une
15 ouverture de feu à l'aide de l'artillerie lourde entre le 4 février et le
16 10 février 1994 ?
17 R. Ma réponse est négative. Nous n'avons pas ouvert le feu. Je sais, je
18 suis témoin. J'étais témoin oculaire et j'ai compris quelles étaient les
19 évolutions qui ont eu lieu à ce moment-là, à ces dates-là. Je sais comment
20 les gens percevaient la situation. Ils se réjouissaient à chaque fois qu'il
21 y avait l'occasion d'avoir une période d'accalmie, de paix. Personne ne
22 souhaitait ouvrir le feu, personne ne souhaitait provoquer l'ennemi ou
23 riposter à leurs provocations. En d'autres termes, nous n'avons rien fait.
24 C'était une période de soulagement. Nous avons renforcé nos positions, nous
25 avons réorganisé nos positions en fonction des circonstances de l'époque.
26 Nous n'avons rien fait d'autre.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux verser au dossier ce
28 document ?
Page 32716
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document aura la cote D2807, Madame,
3 Messieurs les Juges.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant regarder la
5 pièce 1D7504.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Il s'agit là d'un rapport de combat régulier qui a été signé en votre
8 nom, comme nous pouvons le voir en bas de la page, et qui date du 1er
9 juillet 1994.
10 Pouvons-nous passer à la deuxième page, qui correspond à la page 2, s'il
11 vous plaît. Merci.
12 Et maintenant, je vais vous demander de bien vouloir lire le point 8, s'il
13 vous plaît, conclusions et décisions portant sur d'autres actions.
14 Pouvons-nous faire défiler le texte vers le bas en serbe et nous montrer le
15 point 8 dans la version anglaise.
16 Peut-être que vous pourriez nous dire en quelques mots quelles étaient vos
17 estimations de la situation.
18 R. Alors, dans ce cas, nous parlons de l'année 1994, et ceci concerne le
19 mois d'août. Pour nous, cette époque-là était le moment où nous avions
20 recueilli des éléments d'information déterminants indiquant que le 1er Corps
21 de l'ABiH avait augmenté ses effectifs, ses troupes, et augmenté le nombre
22 d'armes dont elle disposait. Je crois que j'ai déjà dit qu'ils avaient
23 modifié la stratégie de l'emploi de ces éléments et que cette stratégie
24 s'expliquait par un dicton : On ne peut pas ouvrir une boite de conserve de
25 l'intérieur mais de l'extérieur. Et cela concernait Sarajevo, à savoir la
26 pratique qui consistait à mettre en branle une machine infernale et qui
27 signifiait que nous avions la nécessité de nous organiser. En réalité, ils
28 ont lancé des attaques de l'extérieur en direction de Sarajevo, mais
Page 32717
1 personne n'a réagi. Personne n'a dit que par rapport à ce type d'action, la
2 même décision devait s'appliquer au niveau d'un cessez-le-feu. Lorsqu'il
3 s'agit d'un cessez-le-feu, la seule chose qui importait, c'est ce qui se
4 passait à Sarajevo; et ce qui se passait à l'extérieur de Sarajevo n'avait
5 pas d'importance. Ils ont utilisé des forces importantes pour attaquer de
6 l'extérieur et les menacer à Sarajevo. Les tentatives qui consistaient à
7 répondre à cela ont été sources de problèmes pour nous.
8 Q. Et au paragraphe suivant, vous dites ce qui devait être fait, qu'il
9 fallait respecter le cessez-le-feu et qu'il fallait tenir les lignes
10 fermement.
11 R. Oui, bien sûr.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons verser au dossier ce
13 document, s'il vous plaît ?
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document portera la cote D2808,
16 Madame, Messieurs les Juges.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Général, je pense que la semaine dernière nous avons parlé de la façon
19 dont la 1ère Division a agi à l'intérieur de la ville et à l'extérieur de la
20 ville. Pourriez-vous nous dire quels ont été les effets des actions du 1er
21 Corps de l'ABiH, essentiellement en ce qui concerne nos troupes et les
22 civils ?
23 R. Il y a eu beaucoup d'indices qui ont confirmé qu'il y avait eu de
24 telles actions. Quand il s'agit des combattants et des unités du Corps
25 Sarajevo-Romanija, d'abord nous avions beaucoup de problèmes puisque la
26 population civile était menacée. Plus précisément, les gens qui se
27 trouvaient à Nedzarici, c'est parce qu'un soldat peut se protéger dans une
28 tranchée ou dans un bâtiment fortifié ou derrière un mur ou un obstacle.
Page 32718
1 Mais un civil ne peut pas le faire et ne sait pas le faire non plus.
2 Ensuite, il y avait Lukavica qui était menacée. Il s'agissait, plus
3 particulièrement, d'un quartier où se trouvaient beaucoup d'ouvriers dans
4 des cabanes en bois d'Energoinvest où les gens ne pouvaient pas se
5 protéger, mais ils étaient exposés aux tirs. Ensuite, le quartier de
6 Trapare, il y avait une famille qui portait le nom de Trapare là-bas, il y
7 avait un lot de maisons là-bas où ces gens étaient des pigeons en argile.
8 Vogosca était exposée aux tirs incessants de l'artillerie de la 12e
9 Division. Le quartier de Rajlovac également. Et le quartier d'Ilijas était
10 exposé aux tirs, aux tirs d'enfer. A Ilijas, tous les jours, il y avait
11 quatre morts parmi les civils et 12 soldats qui tombaient sur le front;
12 mais les civils, dans les rues ou dans leurs maisons.
13 Je ne sais pas si j'ai été suffisamment clair. Je sais qu'il s'agissait des
14 situations difficiles. Il fallait protéger ces gens et trouver des
15 solutions pour contrecarrer leurs tirs en ouvrant le feu de notre côté.
16 Q. Merci, Mon Général. Vous nous avez donc dit qu'il y avait eu 12 soldats
17 qui étaient morts et que, également à Ilijas, tous les jours, il y avait
18 quatre morts parmi les civils quotidiennement. Pouvez-vous nous rappeler
19 d'autres pertes pour ce qui est des civils, pertes en masse, dues à des
20 tirs du 1er Corps de l'ABiH dans les quartiers serbes autour de Sarajevo, et
21 pensez également à Hadzici et à Blazuj, à Ilidza, Vojkovici, ainsi qu'à
22 Rajlovac, à Vogosca et à Ilijas.
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Aux fins du compte rendu, je dois dire que
24 le Dr Karadzic a dit "le corps" et non pas "la division" de l'ABiH. C'est à
25 la ligne 25 du compte rendu.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il faut que j'explique. A Hadzici, la 14e
27 Division du 1er Corps opérait, et pour ce qui est d'Ilijas, c'était la 16e
28 Division de l'ABiH qui opérait sur Ilijas, donc tout le corps opérait
Page 32719
1 contre les quartiers de Sarajevo serbe. Et la 12e Division opérait de
2 l'intérieur de la ville.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je pense que nous
4 allons aborder les questions où il y a un certain doute pour ce qui est de
5 la pertinence de ces question ou de ces sujets. Alors que nous comprenons
6 que cela s'est passé pendant la guerre, s'il vous plaît, il faut que vous
7 soyez conscient du fait que vous avez été accusé pour des allégations
8 spécifiques. Continuez.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Je vais y penser, mais la dernière phrase
10 de la réponse du général Milosevic disant que les solutions devaient être
11 trouvées pour ouvrir le feu et contrecarrer leurs tirs et que nos tirs
12 étaient en lien direct avec leurs tirs, c'est pour cela que j'ai voulu que
13 le général Milosevic se souvienne des exemples ou des cas où il ne pouvait
14 plus ne pas riposter à leurs tirs.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais votre question était plus complexe
16 que cela. Mais continuez. Vous pouvez poser la question au général.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Est-ce que vous vous souvenez d'autres exemples pour ce qui est de nos
19 pertes qui nous imposaient des ripostes à leurs tirs ? Des exemples où on a
20 perdu beaucoup de vies ?
21 R. Pour ce qui est de ce type de situation, je peux vous dire qu'il y a en
22 eu plusieurs. Je ne peux pas me souvenir de toutes les situations de ce
23 type. Je ne peux pas les énumérer toutes. Je suppose que la demande parlait
24 de ce qui s'était passé dans la zone de Sarajevo, dans la partie urbaine de
25 la ville de Sarajevo, et je ne pense pas à Nisici et Trnovo lorsque je
26 parle de ces situations, puisque là-bas aussi il y a eu des événements
27 tragiques par rapport auxquels nous devions trouver des solutions. Je sais
28 qu'en mai 1995, les commandants des unités ont informé du fait qu'il y
Page 32720
1 avait des tirs intenses, que les positions des combattants sont exposées
2 aux tirs incessants et que le feu a été ouvert également contre les
3 quartiers civils. Ma première réaction était d'essayer de voir d'où cela
4 provenait et d'appliquer la procédure habituelle pour voir s'il a été
5 déterminé d'où provenaient des tirs, de quelles armes, et quel était le
6 risque pour nos civils si on ripostait. Pour le faire, j'ai eu besoin d'un
7 certain temps.
8 Et ensuite, j'ai dû informer la FORPRONU, puisque la FORPRONU devait
9 également être au courant de cela. Et j'ai eu besoin d'un certain temps, et
10 mes commandants ne pouvaient pas obtenir immédiatement le feu vert pour
11 riposter à leurs tirs. La FORPRONU en a été informée.
12 Et je sais que j'ai trouvé dans un document plus tard qu'un
13 observateur de la FORPRONU a dit que de son bureau il a vu quels étaient
14 les tirs, l'intensité des tirs provenant de cette division. Je ne sais pas
15 comment ils les ont traités, en tant qu'ennemi ou en tant qu'une formation
16 de la 12e Division. On a déterminé que les localités sur lesquelles on
17 pouvait riposter étaient les localités et les sites où on ne pouvait pas du
18 tout provoquer de victimes parmi les civils, mais seulement parmi ceux qui
19 ont ouvert le feu contre nous. Dans leurs rapports que j'ai vus par la
20 suite, à un moment donné ils ont dit qu'il y avait un combat de trois
21 jours, et le commandant de la 12e Division en informe son commandant là-
22 dessus et il lui demande des munitions parce qu'ils n'en avaient plus, et
23 les munitions qu'ils avaient déjà utilisées c'étaient des milliers de
24 projectiles avec une puissance destructrice importante.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant afficher 12388, c'est le
26 document de la liste 65 ter.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. L'un de vos rapports de combat régulier de 1993.
Page 32721
1 Peut-on afficher la page 2 en serbe, et il s'agit probablement de la
2 page 3 en anglais. Il nous faut le point numéro 8.
3 Mon Général, je vous prie de nous lire cette partie du
4 rapport :
5 "Vu la fréquence de cela…"
6 Vous avez signé ce document au nom du général Galic, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Pourriez-vous lire cela à voix haute, s'il vous plaît, le
9 paragraphe qui commence par les mots :
10 "Par rapport à la fréquence…"
11 R. "Vu la fréquence des tirs de l'ennemi, nous anticipons que certaines
12 unités ne pourraient pas supporter les tirs de l'ennemi et que, pour cela,
13 ces unités devront riposter à leurs tirs pour protéger leurs effectifs.
14 C'est pour cela qu'il faut, de façon énergique, protester, puisque l'ennemi
15 opère de la zone urbaine. Il est nécessaire que la FORPRONU protège
16 décidément nos unités ainsi que la population."
17 Je ne sais pas ce qu'il faut que je vous dise comme commentaire là-dessus,
18 mais nous pensions que les tirs allaient devenir de plus en plus intenses
19 et nous demandions la protection, et nous devions également nous protéger
20 nous-mêmes, nos effectifs et notre population. Mais nous devions demander
21 la protection de la FORPRONU également, que la FORPRONU agisse pour
22 influencer l'autre partie, la partie opposée, pour que la partie opposée ne
23 tire plus.
24 Q. Vous demandez que l'ennemi ne tire pas de la partie urbaine. Et pour ce
25 qui est d'autres tirs, vous considériez ces autres tirs comme étant
26 légitimes ?
27 R. Il faut qu'on tire cela au clair. Il n'y a pas de tirs légitimes ou pas
28 légitimes. Pour ce qui est des tirs contre l'ennemi, on peut le faire si on
Page 32722
1 tire sur l'ennemi et sur leurs pièces d'armes. Et je ne voulais pas faire
2 respecter d'autres règles et d'autres variantes, à savoir si les dommages
3 allaient être plus conséquents ou pas. Pour ce qui est des tirs d'une arme
4 ou d'un groupe d'armes, ou pour ce qui est d'un groupe qui tire, si cela
5 pouvait être touché par nos tirs, cela allait se produire. Et je ne voulais
6 pas faire appliquer d'autres variantes. Je ne sais pas si vous m'avez
7 compris, mais je sais ce que j'ai demandé à mes hommes.
8 Q. Merci.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut verser au dossier ce document
10 ?
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, le document sera versé au dossier.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera D2809. Merci, Monsieur le
13 Président.
14 M. KARADZIC : [interprétation]
15 Q. Mon Général, pendant que vous étiez toujours au sein de la 1ère de
16 Romanija, quels étaient les ordres que vous receviez du commandement du
17 corps par rapport aux tirs en direction de la ville ? Quelle était la
18 position du commandement par rapport à cela ? Et en particulier pour ce qui
19 est de munitions de plus grands calibres.
20 R. J'ai très bien compris votre question, et j'aimerais vous donner ma
21 réponse. Ma réponse, c'est comme suit : le général Galic, qui était le
22 commandant du corps, était plus restrictif et plus rigoureux que ce que je
23 viens de dire. Et je le respectais, et je maintiens ce que j'ai déjà dit, à
24 savoir que j'ai beaucoup appris pour ce qui est des questions qui
25 concernaient des restrictions, des limites, des interdictions de la
26 conduite qui ne devait pas être permise et appliquée lors des opérations de
27 combat. Donc, en d'autres termes, lui, ou même Sipcic avant lui, il n'avait
28 pas une approche différente. Ses exigences étaient moins rigoureuses. Mais
Page 32723
1 Galic donnait des avertissements, des ordres, et il était rigoureux pour ce
2 qui est d'avertir les commandants qu'ils ne devaient pas faire certaines
3 choses. Et moi, j'ai apprécié cela et ça m'a servi, dans mon travail,
4 d'exemple. Parce que j'ai continué dans mon travail peut-être de la même
5 façon ou d'une façon un peu différente.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant afficher la pièce 1D3441.
7 Pour ce qui est de la version en anglais, c'est la bonne page. Mais pour ce
8 qui est de la version en serbe, ça concerne quelque chose d'autre. Mais la
9 date est la même, le 31 octobre 1992.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Puis-je, Mon Général, vous lire cette partie en anglais. Le 31 octobre
12 1992.
13 "A : Toutes les unités SRK.
14 "A partir du 1er Novembre 1992 et plus loin, il est strictement
15 interdit d'utiliser les calibres de plus de 12,7 millimètres sans
16 approbation ou autorisation du commandement du corps ou de son adjoint."
17 Avez-vous reçu cet ordre ? Est-ce que ça correspond à ce que vous
18 avez appris à l'époque par rapport à cela ?
19 R. Je me souviens de cet ordre, bien sûr. Je l'ai reçu, puisque je m'en
20 souviens, j'étais au courant de cet ordre. Oui, oui. Cela concerne --
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut remettre au général la copie
22 papier en serbe.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a aucun problème.
24 Je peux confirmer que ce document est exact et qu'il s'agissait d'un
25 règlement émanant du commandement du corps, et, bien entendu, il est dit
26 dans ce document qu'il est interdit d'utiliser des armes ayant un calibre
27 supérieur à 12,7 millimètres. Et ce, pour tous types de mortiers, pièces
28 d'artillerie, mitraillettes antiaériennes, canons, et cetera, et cetera.
Page 32724
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document peut être versé au
2 dossier ?
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, peut-on comprendre
4 d'après ce document que tous les obus tirés par les Serbes dont le calibre
5 était supérieur à 12,7 millimètres étaient tirés avec la permission ou
6 l'autorisation du commandant du corps, si tant est que ce type d'obus ait
7 été tiré ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, non, non, ce n'est pas
9 cela. Le commandant a indiqué clairement quel était son point de vue, sa
10 position, qui d'ailleurs a été respecté. Alors, lorsqu'il s'agissait de
11 tirs, indépendamment du fait que le combattant devait attendre
12 l'autorisation ou l'approbation du commandant ou non, de toute façon il
13 devait s'en tenir à cette décision qui était très claire et qui indiquait
14 qu'il ne fallait pas lancer ce type de munitions. Alors, dans des
15 situations où il n'y avait pas d'interdiction stricte, là le combattant
16 devait suivre la procédure à laquelle j'ai fait référence un certain nombre
17 de fois ici, qui passait par une analyse absolument complète de la
18 situation. Les commandants de brigade, à qui étaient délégués certains
19 pouvoirs compte tenu de la structure en place, pouvaient agir conformément
20 à certaines décisions qui avaient été prises préalablement si l'on
21 considérait que la menace était suffisamment importante. Ces décisions
22 étaient les mêmes que si elles avaient été reçues de la part du commandant
23 du corps.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.
25 Poursuiviez, Monsieur Karadzic.
26 Et nous allons accepter le versement au dossier de ce document.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Document qui deviendra la pièce D2810.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce que nous pouvons maintenant
Page 32725
1 demander l'affichage du document 1D7509.
2 M. KARADZIC : [interprétation]
3 Q. Général, en fait, c'est la deuxième page qui m'intéresse. Il s'agit de
4 votre document qui porte la date du 20 octobre 1993, et c'est vous en tant
5 que chef d'état-major qui signiez ce document. Regardez la deuxième page.
6 Est-ce qu'il s'agit de votre signature ?
7 R. Oui.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie, nous
9 intéresser au paragraphe 2 de la première page. Et c'est la bonne page pour
10 la version anglaise.
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Alors, qu'est-ce qu'il est indiqué dans ce paragraphe à propos des
13 lignes de défense ainsi qu'à propos des réactions en cas de tirs ennemis ?
14 R. Eh bien, la situation est clairement indiquée dans ce paragraphe. Les
15 lignes de défense ne sont pas modifiées. Il s'agit d'un rapport. Etant
16 donné qu'il y avait eu des tentatives d'attaque, notre défense n'a pas été
17 modifiée, nos forces n'ont pas été repoussées et nos lignes de défense
18 n'ont pas été changées. Mais indépendamment du niveau de protection, il a
19 été indiqué aux unités qu'elles ne devaient pas ouvrir le feu sur la partie
20 centrale de la ville de Sarajevo. Donc il était indiqué qu'il faut qu'elles
21 fassent attention aux mouvements et à ce qui se passait à Sarajevo, parce
22 que cela était important. C'est à Sarajevo également que se déroulaient
23 toutes les activités internationales. C'est la raison pour laquelle cet
24 ordre est donné, et il est indiqué qu'aucun tir ne doit être ouvert même si
25 nous sommes directement menacés.
26 Q. Mais qu'indique le document à propos de la surveillance et des
27 activités d'observation ?
28 R. La surveillance, vous le savez, c'est une profession quasiment séparée.
Page 32726
1 La surveillance, elle doit toujours exister, elle doit être en place. Tous
2 les mouvements doivent être observés. Bon, je ne pense pas que cela
3 requiert de plus amples explications, si vous comprenez ce que j'entends.
4 Q. Bien.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document pourrait être versé au
6 dossier, je vous prie ?
7 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La troisième page de la version B/C/S
9 n'a absolument rien à voir avec le début du document, et donc nous n'allons
10 accepter le versement au dossier que des deux premières pages.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2811, Monsieur le
12 Président.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste avant la pause, est-ce que nous pourrions
14 rapidement examiner le document suivant, D2567. C'est un document très,
15 très succinct.
16 M. KARADZIC : [interprétation]
17 Q. Général, il s'agit d'un ordre qui est destiné à toutes les brigades, à
18 tous les régiments et à tous les bataillons indépendants. Vous voyez que la
19 date est la date du 22 mai 1993. Il est question de conséquences, dans ce
20 document, à la suite des activités de l'autre camp; mais indépendamment de
21 cela, le général Galic - et, en fait, c'est Sladoje qui a, en son nom,
22 donné cet ordre - a empêché tous les tirs provenant d'armes ayant un
23 calibre supérieur à 12,7 millimètres, et donc tout cela doit être placé
24 sous contrôle, tous les tirs.
25 Est-ce que vous vous souvenez des conséquences auxquelles il est fait
26 référence à cette date, le 22 mai 1993 ?
27 R. Ecoutez, non, je ne peux absolument rien dire à ce sujet. A moins que
28 je ne m'abuse, l me semble qu'à ce moment-là, moi je n'étais pas au corps.
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1 En mai 1993, je n'y étais pas. Je peux toutefois confirmer qu'il s'agit
2 d'une demande ou d'une mise en garde, c'est un avertissement des plus
3 réguliers, et il y est tout simplement indiqué ce qui doit être fait. Et
4 d'après ce que je sais, je ne faisais pas encore partie du corps à ce
5 moment-là. Mais bon, cela me semble être un ordre des plus classique, où il
6 est question de certains événements qui ont précédé cet ordre.
7 Q. Mais vous, vous étiez au sein de la brigade. Il est adressé à toutes
8 les brigades. Est-ce que cela signifie que la 1ère Brigade de Romanija a
9 obtenu cet ordre également ?
10 R. Mais moi, je ne faisais pas partie de la brigade à ce moment-là non
11 plus.
12 Q. Ah, excusez-moi.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors je pense que nous pouvons maintenant
14 faire la pause, lorsque vous souhaiterez la faire.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donc faire la pause, pause
16 d'une demi-heure, et nous reprendrons exactement à 11 heures.
17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
18 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, poursuivez.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais
21 demander l'affichage d'une pièce de l'Accusation, P01641.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Général, est-ce que vous connaissez ce document ?
24 Et peut-être que nous pourrions voir la deuxième page également. Est-ce que
25 la page suivante pourrait être affichée.
26 R. Oui. Oui, oui.
27 Q. Alors j'aimerais maintenant que nous revenions à la première page. Le
28 premier paragraphe, est-ce que vous pourriez nous expliquer cette
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1 proposition de mise à l'écart de l'artillerie ? Pourquoi est-ce que vous
2 avez envoyé cette proposition et quelles furent les raisons qui ont motivé
3 votre décision ?
4 R. C'était ma proposition, certes, et d'ailleurs cela est indiqué. Alors
5 je pensais qu'il m'appartenait de faire cette proposition, alors que la
6 décision quant à elle, suite à ma proposition, la décision devait être
7 prise par l'état-major principal. Je connais ce document. De quoi est-il
8 question ? Il était question, en fait, de faire quelque chose pour essayer
9 -- ou il fallait donc envisager une manœuvre pour conserver certaines des
10 pièces d'artillerie, et je n'essaie pas de le cacher, cela. Alors c'est
11 vrai que j'ai proposé cela au vu de mon expérience jusqu'à présent, au vu
12 de l'évolution de la guerre et compte tenu de notre coopération avec la
13 FORPRONU.
14 Lorsque la décision a été prise de retirer les armes, j'en ai conclu que
15 toutes nos armes devaient être retirées et que l'utilisation de ces armes
16 devait être restreinte, alors que l'ABiH, et notamment leur 1er Corps, avait
17 tant d'armes que même en les retirant, ils pouvaient, du fait de la portée
18 de ces armes et des possibilités qui étaient les leurs, ils pouvaient les
19 utiliser contre la zone qui était censée quand même être la zone où il
20 était interdit d'utiliser des armes, et j'entends par cela la zone où le
21 Corps de Sarajevo-Romanija avait ses lignes de défense. S'ils avaient ce
22 qu'on appelaient les NORA, ces obusiers de 155 millimètres qui avaient une
23 portée qui allait aussi loin que 32 kilomètres, peu leur importait en fait
24 que ces pièces d'artillerie se trouvent dans un lieu autorisé ou dans un
25 lieu non autorisé. Peu leur importait parce que de toute façon ils
26 pouvaient toujours ouvrir le feu avec ce type de portée. Et c'est ce qui
27 m'a, en quelque sorte, motivé pour proposer à mon commandement supérieur de
28 conserver un contingent d'armes que l'on aurait pu utiliser en quelque
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1 sorte comme garde-fou, comme moyen de protection au cas où nous aurions été
2 menacés. Mais, bien entendu, je peux vous dire également que ce ne fut pas
3 la chose la plus judicieuse que j'aie proposée de ma vie.
4 Q. Alors vous avez mentionné ou vous nous avez dit que vous avez proposé
5 cela au vu de votre expérience précédente. De quelle expérience parlez-vous
6 ? Quelle fut cette expérience qui vous a poussé à proposer cela ?
7 R. Oui, oui, là, nous sommes déjà en 1994, et je dois vous dire que des
8 expériences, j'en avais eues beaucoup. Alors il n'y avait que des
9 affirmations et des mises en garde parce qu'apparemment il était dit que
10 nous, nous ouvrions le feu, alors qu'apparemment l'autre camp ne le faisait
11 pas. Mais nous savions, de par notre vécu, de par la pratique, qu'ils
12 faisaient cela, qu'ils ouvraient le feu. Puis ensuite, les armes et les
13 mesures qui étaient censées être prises n'ont pas été exécutées en quelque
14 sorte comme cela avait été envisagé par les négociateurs ou par la personne
15 qui avait accepté la décision, et nous savions que cela serait comme cela.
16 Eux, ils cachaient leurs pièces d'artillerie dans des tunnels ou dans des
17 endroits où il y avait très peu de visibilité, et la FORPRONU ne les voyait
18 pas. Je sais et je crois que la FORPRONU a vu ces armes, mais il n'y avait
19 pas de pression ou de raison suffisante pour que ces armes soient
20 véritablement déplacées, pour que leur portée soit courte ou pour qu'elles
21 cessent d'être actives.
22 Q. Et comment est-ce que le cessez-le-feu a été mis en œuvre ? Est-ce
23 qu'il y a eu des violations du cessez-le-feu avant et après cette date ?
24 R. Alors, pour ce qui est du cessez-le-feu, bon, ça c'est quelque chose de
25 -- mais avant de répondre à votre question, j'aimerais vous dire autre
26 chose : nous, nous avions décidé de consigner exactement comment le cessez-
27 le-feu était respecté par l'autre camp. Nous, nous savions ce que nous
28 faisions, bien entendu, mais nous avions décidé de ne justement pas violer
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1 le cessez-le-feu, de ne pas enfreindre le cessez-le-feu. Et pour ce qui est
2 des violations des conditions du cessez-le-feu, je vous dirais que la liste
3 est assez longue. Et je sais qu'elle existe, parce que nous l'avons
4 dressée, cette liste, et c'est une liste qui suit au jour le jour leurs
5 violations et les caractéristiques de leurs activités. Nous avons donc
6 utilisé cette liste pour indiquer en fait et pour prouver que tous les
7 accords et toutes les décisions étaient pris en vain, parce que d'un jour
8 sur l'autre ils restaient actifs et ils violaient ces accords.
9 Q. Est-ce que cet accord du 18 février, c'est-à-dire une semaine après, il
10 y a eu incorporation de cet élément dans l'accord, de cette proposition que
11 vous avez fait ? Ou cela n'a-t-il pas été le cas ?
12 R. Bien sûr que non. Mais je ne regrette rien. Je sais qu'il y a eu des
13 gens qui avaient voulu s'en tenir aux accords. Ceux qui étaient compétents
14 pour ce qui était de prendre des décisions ont respecté les décisions.
15 Toutes les armes sont parties à l'endroit de collecte convenu, Krivoglavci,
16 qui est un site, puis Poljane [phon] et autres. Et j'ai été personnellement
17 présent sur les lieux lorsque ça s'est fait. On a amené des armes lourdes,
18 et la FORPRONU a tout de suite mis une barrière pour entourer le tout, ce
19 qui fait que ces pièces [imperceptible] ne pouvaient plus être utilisées.
20 J'ai été présent aussi lorsque le général Soubirou -- et je me suis rendu
21 compte de sa détermination, c'est à respecter. Ce même général ne voulait
22 pas me dire bonjour. Je ne lui en ai pas voulu, parce que j'ai vu qu'il
23 faisait un travail honorable. Il voulait juguler cette espèce de situation,
24 faire cesser les conflits, et j'ai tiré une conclusion qui était celle
25 d'estimer que c'était ce qu'il avait décidé de faire. Mais une fois que les
26 armes ont été clôturées par ces éléments démontables, il y a eu des tirs
27 d'ouverts avec ces armes-là. Je ne sais pas qui les contrôlait, ces armes-
28 là.
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1 Q. Merci. Général, vous nous avez dit que vous avez tenu à jour un
2 registre de violations.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et je voudrais qu'on nous montre la pièce
4 1D7033. Je crois que l'autre pièce à cet effet a été déjà versée au
5 dossier. J'ai dit 1D7033.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Alors, est-ce que c'est cet aperçu des violations en question, qui
8 commence avec la date du 10 février, date à laquelle vous avez rédigé le
9 document précédent ?
10 R. Oui, c'est précisément cela. Je regrette que les lettres soient si
11 petites, mais on peut voir les dates, les lieux, les horaires pour ce qui
12 est des tirs qui ont été effectués en dépit des dispositions des accords de
13 trêve par les unités et les effectifs du 1er Corps. Ça s'est fait de façon
14 permanente, et on a suivi tout ce qui s'est passé au-delà.
15 Q. Merci. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus long pour ce qui
16 est des heures précises ? On voit 9 heures et quart, 8 heures 45. Est-ce
17 que c'était cela, la mission confiée, et est-ce que ceci reflète exactement
18 les moments où il y a eu des tirs ?
19 R. Bien sûr que quand vous voulez avoir des renseignements précis, il faut
20 que l'on indique non seulement la date, mais aussi les horaires auxquels
21 les violations se sont produites. On est allés jusqu'à la perfection pour
22 ce qui est de tout consigner. Je peux dire que nous avons été jusqu'à
23 préciser des détails qui auraient peut-être pu ne pas être consignés avec
24 autant de précision.
25 Q. Merci.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander un versement au dossier de ce
27 document ?
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous voulez verser au dossier le
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1 document entier, je voudrais vous demander de nous fournir un fondement
2 pour ce qui est de la teneur de celui-ci. Parce que la dernière partie de
3 ce document semble être dans un format différent. Peut-être aurions-nous
4 besoin de quelques explications plus détaillées.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer cette dernière
6 page, s'il vous plaît.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Mon Général, il y a des inscriptions manuscrites, 88 fois, si c'est
9 bien fois. Est-ce que vous pourriez expliquer pourquoi la structure des
10 notes se trouve être modifiée ? De quoi s'agit-il, au juste ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous pouvez zoomer un peu la version
12 en serbe pour que le témoin voie mieux.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est bon. Vous n'avez pas besoin de zoomer
14 davantage. Je ne peux pas vous répondre sur-le-champ. Je ne peux pas
15 maintenant voir en quoi consiste la différence entre le début du suivi des
16 violations des trêves et le format ici. Ce qu'on a modifié, c'est
17 l'imprimé. Les colonnes qui montrent où les événements se sont produits. Ce
18 qui manque, c'est peut-être les horaires. Mais le sens est le même, le
19 nombre d'obus, à quel endroit, quel territoire et quelle a été notre
20 riposte.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Alors, est-ce que j'ai bien compris, vous avez modifié la présentation
23 graphique des choses ?
24 R. Oui, l'imprimé a été modifié, rien d'autre. Il n'y a que les horaires
25 qui ont été changés d'endroit, mais le sens est le même, les violations, le
26 type de tir, à telle ou telle date et la façon dont nous avons réagi à ces
27 tirs.
28 Q. Mais la dernière colonne dit est-ce qu'on a riposté; c'est bien cela ?
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1 R. Oui, c'est cela, est-ce qu'on a riposté, et on voit la réponse, "non"
2 ou "oui". Ça fait savoir à celui qui le lit ce qui a été fait.
3 Q. Merci.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer la page
5 précédente, s'il vous plaît.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que je peux vous interrompre en
7 cet endroit-ci. Est-ce que nous pouvons voir la page en B/C/S 31. C'est, en
8 anglais, l'équivalent de la page 55. Il s'agit de la dernière page du
9 premier format. Alors, est-ce que vous voyez la date, Général ? On voit que
10 c'est quelque part en avril 1994 que ça se passe. Etes-vous d'accord ? On
11 dit 30 avril 1994. Et j'aimerais qu'on nous montre la page suivante en
12 B/C/S, tout en restant à la même page en version B/C/S [comme interprété].
13 Alors, d'avril, on parle d'un moment en novembre. Mais novembre de quelle
14 année aussi ? Est-ce que vous voulez qu'on vous montre une fois de plus la
15 page précédente, Monsieur ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends, ici il manque l'année, l'année.
17 Enfin, la personne qui a collecté le renseignement a dû sous-entendre que
18 l'année ne pouvait pas être une autre année que celle des conflits en
19 cours.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc --
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais il doit y avoir quelque part l'année
22 aussi. On dit que dans la nuit du 11 au 12 novembre 1992 -- a tiré sur
23 toutes les lignes du front en direction d'Olovo et de Kladanj.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais on était en 1994. Est-ce qu'on
25 a voulu dire par là qu'il n'y a pas eu de violation entre mai et octobre
26 pour ce qui est des trêves ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne dirais pas qu'il n'y a pas eu de
28 violation. On n'a peut-être pas recensé les renseignements, pour ce qui est
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1 des indices qui en feraient état. Enfin, je pense que quand on n'avait pas
2 les données complètes, on ne les inscrivait pas. Il a peut-être été procédé
3 selon le souvenir de celui qui en était chargé. Donc, soit on le consignait
4 le jour même, soit il ne consignait pas à un moment ultérieur s'il ne
5 l'avait pas fait tout de suite.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ayant vu une partie de ce document, est-
7 ce que vous savez nous dire qui a rédigé ce document et quand ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document a été rédigé par l'instance
9 opérationnelle du commandement du 4e Corps. Quand je dis "instance
10 opérationnelle", c'étaient des agents qui étaient des officiers chargés du
11 suivi et de la rédaction des rapports, la collecte des différents rapports
12 pour en faire part au commandant, c'est-à-dire au chef d'état-major, et ils
13 étaient chargés de procéder à des éléments d'analyse pour avoir des
14 informations pour ce qui est des contacts à établir avec la FORPRONU.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit, Général, "commandant du
16 4e Corps" ? Je ne vous suis plus.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas avoir dit 4e Corps. Je parlais
18 du Corps de Sarajevo-Romanija. Je pense avoir dit corps, tout court.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
20 Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser au dossier ce document ?
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La page 3 a déjà été versée au dossier
23 avec le témoignage du lieutenant-colonel Indjic. Est-ce que nous avons à le
24 verser au dossier dans son intégralité ?
25 Madame Edgerton.
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai aucun problème pour ce qui est de
27 le faire verser dans son intégralité, Monsieur le Président, étant donné
28 l'explication apportée par le général.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que le greffier d'audience peut
2 nous rappeler la pièce à conviction dont il s'agissait.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, il s'agissait de la pièce D2803.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
5 Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Est-ce que je peux demander
7 maintenant une pièce à conviction de l'Accusation, le P2420.
8 M. KARADZIC : [interprétation]
9 Q. Mon Général, est-ce que je peux vous demander de vous pencher sur ce
10 document et nous dire si vous vous souvenez de celui-ci ou de sa teneur.
11 Ici, c'est le lieutenant-colonel Sehovac qui transmet, littéralement, la
12 teneur d'un télégramme en provenance de l'état-major principal. Est-ce que
13 vous savez nous dire de quoi il s'agit ici ?
14 R. J'aimerais voir un peu plus bas les signatures. Voilà, c'est bon.
15 Merci. J'aurais beaucoup de choses à vous dire au sujet de ce document; il
16 me semble, toutefois, superflu d'en parler en long.
17 Car ceci constitue un renseignement qui a - je ne sais de quelle façon -
18 été communiqué au général Mladic, et lui a publié une mise en garde pour ce
19 qui est de ne pas faire ce qui est énuméré au niveau de la teneur quant au
20 plan d'intervention. Tout d'abord, sans m'aventurer plus en détail dans
21 cette problématique, je dirais que ceci ne relève pas d'un caractère qui
22 serait le mien. Je me demande d'ailleurs pourquoi le général Mladic aurait
23 envoyé un document de cette nature au lieutenant-colonel Sehovac, qui était
24 à la tête d'une brigade quant à lui. Ce qu'il cherche à interdire, à
25 entraver, c'est une chose que je reconnais de plein droit, mais il doit le
26 faire au niveau du commandant du corps et du commandement du corps. En
27 l'occurrence, je perçois les choses comme étant une volonté d'inventer des
28 choses pour les présenter au général Mladic afin que celui-ci mette
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1 quelqu'un en garde. Etait-ce là une façon de procéder pour se couvrir de la
2 part de quelqu'un ? Mais je vous affirme qu'il n'y a aucun agissement qui
3 aurait pu laisser entendre qu'une intention de ce type avait existé ou
4 qu'il y ait eu des agissements de la part du commandement du corps qui
5 auraient justifié ce type de façon de procéder.
6 Parce qu'on dit que le commandant du corps a tenu une réunion avec les
7 structures civiles. Tout d'abord, je n'ai jamais eu de réunion avec ces
8 structures. Et s'il y a eu réunion, on a parlé de compléter les effectifs.
9 Mais je n'ai jamais eu de réunion avec les structures civiles pour ce qui
10 est des activités de combat. Jamais. Pour moi, donc, ceci est superflu,
11 c'est inexact. Et ce que je vous affirme, c'est que des réunions de ce
12 type, il n'y en a absolument pas eu, du tout.
13 Q. Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire quels étaient vos ordres pour
14 ce qui est de ce sujet, c'est-à-dire des activités à déployer ? Etait-ce
15 conforme à ce qui est écrit ici ou était-ce différent ?
16 R. Que voulez-vous dire par là ? Je ne comprends pas. Les ordres qui ont
17 été donnés et les mesures qui ont mises en place, je vous les ai déjà
18 expliqués. Il n'y a pas eu de nouvelles approbations ou de changement de
19 comportement ou de délivrance d'autorisation quelle qu'elle soit pour ce
20 qui est d'activités illicites sous forme de tir en direction des citoyens
21 de Sarajevo. Je n'ai jamais donné d'instructions de ce type, et point
22 n'était nécessaire de le faire.
23 Q. Merci. Mais ici, Mladic a transmis à quelqu'un des informations disant
24 qu'il y a eu une réunion qui s'est tenue le 5 novembre 1994. Revenons d'une
25 semaine en arrière, vers le 27 octobre. Et penchons-nous sur un document à
26 vous, 65 ter 20823, s'il vous plaît.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que de le faire, Général, est-ce
28 que vous pouvez nous dire à la tête de quelle brigade se trouvait donc ce
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1 M. Sehovac ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Il était le
3 commandant de la 2e Brigade de Sarajevo. C'est la 2e Brigade légère.
4 Pourquoi légère ? Parce qu'elle avait peu d'effectifs.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Numéro 65 ter 20823.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Général, tout d'abord, pourriez-vous regarder le deuxième paragraphe.
9 "Etant donné que notre ennemi ne respecte aucune règle ou principe
10 humain, nous avons essayé jusqu'à présent de respecter toutes les
11 conventions de Genève jusqu'à présent, ainsi que de diriger nos actions sur
12 des cibles militaires exclusivement. Si l'ennemi continue de la sorte, ils
13 vont nous contraindre à riposter, à partir d'aujourd'hui, à chaque balle
14 tirée sur une localité serbe en tirant sur des cibles choisies sous le
15 contrôle musulman à Sarajevo."
16 Et ensuite :
17 "Les commandants de brigade ont immédiatement informé les
18 observateurs des Nations Unies dans votre zone de responsabilité à propos
19 de cet avertissement… ne tirez jamais les premiers."
20 Alors, veuillez nous dire ce que vous avez ordonné au niveau du
21 dernier paragraphe.
22 R. "Nous avons une très grande responsabilité pour ce qui est de sauver le
23 peuple serbe des fanatiques islamiques fous. Nous devons rester énergiques
24 et poursuivre ce but et rester humains avant tout. Avec cet objectif en
25 tête, j'interdis tout meurtre perfide, le fait de blesser ou de capturer
26 les prisonniers, ou d'autres actions qui ne sont pas conformes au droit
27 international de la guerre et des conventions de Genève."
28 Il s'agit là de positions antérieures réitérées. On déclare quels
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1 sont les points de vue. Il ne s'agit pas d'un changement radical de notre
2 comportement. Je ne suis pas en train de dire que quels que soient les
3 tirs, s'il s'agit des tirs sélectifs ou limités ou pas, de savoir si nous
4 sommes en grand danger ou pas, nous n'allons absolument pas franchir le
5 Rubicon, aucune chance pour que cela n'arrive, et nous n'allons rien faire
6 contre les règles.
7 Q. Merci.
8 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce D2812, Madame, Messieurs les Juges,
11 s'il vous plaît.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Quelle était l'attitude des commandements supérieurs, à savoir l'état-
14 major, concernant vos ordres ?
15 R. J'espère que ceci ne paraîtra pas trop superficiel, alors il faut
16 prendre ceci avec une pincée de sel. Je dois dire que vous insistiez
17 beaucoup. Mes combattants et moi-même, nous nous demandions pourquoi vous
18 nous donniez toujours ces avertissements. Nous savons cela. Nous n'avons
19 rien à voir avec d'autres structures, hormis des structures militaires,
20 l'homme qui porte un fusil et qui ouvre le feu. Eh bien, c'étaient vos
21 avertissements et les avertissements que nous recevions des hommes
22 politiques, de l'état-major. Vous avez tellement insisté qu'à la manière
23 dont j'ai compris les choses, vous souhaitiez maintenir la pression sur
24 nous pour que nous n'entreprendrions jamais quelque chose qui pourrait
25 menacer la population civile à Sarajevo. Je respecte cela. Nous recevions
26 ces avertissements de façon régulière.
27 Nous avons également reçu certains avertissements qui me plaisaient.
28 J'appréciais ces avertissements, c'était pour moi l'expression d'une
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1 attitude humaine à l'égard des événements qui se déroulaient. Nous ne
2 souhaitons détruire personne. Nous ne -- être victorieux vis-à-vis de
3 quiconque. Nous ne voulons faire du mal à personne. Et ce qui doit se
4 passer se doit de passer dans le cadre d'une joute militaire, sur le champ
5 de bataille. Je dois dire, en outre, que les commandants de brigade
6 partageaient ce sentiment et cet engagement qui était le nôtre, à savoir
7 que nous ne pouvions que nous engager dans une rivalité militaire. Tout
8 autre chose eut été pure victoire. Nous ne pouvions pas être victorieux si
9 nous ouvrions le feu sur des civils, car les civils n'étaient pas nos
10 ennemis.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher la pièce de
12 l'Accusation 5642, s'il vous plaît.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Il s'agit d'une conversation que vous avez eue avec le général Mladic
15 qui a été interceptée par l'autre partie.
16 Page 4, s'il vous plaît.
17 La date est celle du 16 juin 1995. Ce jour-là, quelle était la situation au
18 plan militaire, si vous pouvez nous le dire ?
19 R. Dans la nuit du 15 au 16 juin 1995, je me souviens que chaque personne
20 qui était là et était toujours en vie. Je me souviens qu'il y avait des
21 forces importantes qui se sont dirigées vers le Corps de Sarajevo-Romanija,
22 venant à la fois de Sarajevo et du théâtre des opérations voisin. Ils
23 avançaient dans notre direction et en direction de notre population civile.
24 C'était le début d'une offensive qui avait été planifiée par le
25 commandement Suprême et le chef de l'état-major général de l'ABiH pour,
26 comme il disait, lever le siège de Sarajevo.
27 Nous savions très bien ce qu'ils avaient préparé, nous savions quelles
28 étaient leurs forces, et dans quelle direction ils se déplaçaient, parce
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1 qu'ils avaient fait venir des forces de Fojnica et d'autres endroits
2 auparavant, et ils souhaitaient lancer cette offensive un peu plus tard.
3 Mais lorsqu'ils ont vu le trouble que cela provoquait au niveau de leurs
4 troupes, nous les entendions, nous entendions des échanges de coups de feu
5 venant de leurs secteurs. Et nous savions exactement ce qu'il fallait faire
6 et ce qu'il fallait organiser. J'ai pris une décision, avec mes commandants
7 de brigade, sur la manière dont nous devions déployer nos brigades et
8 comment nous devions nous renforcer pour repousser l'offensive.
9 Ils avaient choisi des commandants connus, le commandant Alagic, qui
10 commandait le 7e Corps, et nous avons ressenti de plein fouet l'effet de
11 leurs frappes. Ils venaient par vagues. Ils avaient envoyé un contingent
12 d'hommes dans une attaque, et lorsque ceux-ci étaient repoussés, ils
13 envoyaient une autre vague. Ils souhaitaient opérer des percées au niveau
14 de nos positions. Ils ont échoué.
15 J'en ai fait un rapport à l'état-major, au général Mladic, qui était notre
16 commandement, j'ai expliqué ce qui se préparait dans la nuit du 15 au 16,
17 et ici il demande comment les choses progressent. Et je lui dis que : Tout
18 progresse comme je vous l'ai indiqué dans mon rapport un peu plus tôt,
19 c'est le même scénario. Il était à ce moment-là informé de tout. Il n'avait
20 pas de question à poser. Il pouvait lire ses rapports écrits.
21 Q. Quelque part au milieu, il dit que :
22 "Ça c'est la méthode. Un instant. Félicitations. J'entends dire que vous
23 avez infligé d'importantes pertes sur eux."
24 Est-il exact que vous avez infligé d'importantes pertes sur eux ?
25 R. J'ai déjà dit quelles étaient les opérations qu'ils avaient organisées
26 et comment ils avaient déployé leurs unités. Et lorsqu'un contingent
27 d'hommes ne réussit pas à opérer la percée, dans ce cas ils les ramènent,
28 ces hommes sont au repos, et ensuite ils envoient une autre vague. La
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1 raison pour laquelle ils agissaient ainsi, eh bien, pourquoi ils
2 utilisaient leur personnel de cette façon, je ne le sais pas et je ne
3 souhaite pas aborder cette question; mais nous leur avons infligé des
4 pertes.
5 Q. Un peu plus bas, on peut lire Mladic dit :
6 "Ils se déplacent à tous prix."
7 Je ne sais pas si ceci a été traduit correctement.
8 "Ils se battent bec et ongles et ils devraient en subir les conséquences."
9 Ils avancent à tous prix, qu'est-ce que cela veut dire ?
10 R. Pour moi c'est clair. Il dispose d'information indiquant qu'ils
11 souhaitent opérer une percée à tous prix et, pour moi, c'est le seul sens
12 de cette phrase. Leur idée consistait à trouver une solution à la
13 situation. Ratko Mladic devait parler de la situation en Bosnie-
14 Herzégovine. Moi, je ne parlais que du secteur dans lequel se trouvaient
15 ces forces placées sous le commandement d'Alagic et les autres généraux,
16 ils avançaient en direction de notre ligne de front. Et effectivement,
17 c'est ce qu'ils faisaient, ils voulaient y aller à tous prix.
18 Q. Et un peu plus bas, il dit :
19 "Un à un, détruiser les cibles militaires uniquement."
20 Vous dites :
21 "Comment ?"
22 Mladic :
23 "Uniquement les cibles militaires…"
24 Etait-ce quelque chose de nouveau ? Y avait-il un accord entre vous et
25 l'état-major concernant les cibles militaires ?
26 R. Oui, nous étions d'accord sur tous les points. Je ne suis pas au
27 courant d'hésitations ou de doutes à l'égard des principales décisions qui
28 avaient été prises sur la manière de faire cette guerre. Il n'y a pas eu de
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1 changement de point de vue, changement d'attitude. Bien au contraire, nous
2 étions tout à fait d'accord - me semble-t-il - et c'est tout à fait clair.
3 Nous étions d'accord également sur le fait que nous ne devions prendre pour
4 cible que les cibles militaires.
5 Q. Général, cette offensive dans le secteur du Corps de Sarajevo-Romanija
6 a duré combien de temps en juin 1995, au début du mois de juin 1995 ?
7 R. Cela suivait son cours. Ils ont dû estimer la situation, voir ce qu'ils
8 avaient réussi à accomplir. Il a dû y avoir des décisions qui ont été
9 prises par la suite pour modifier les axes d'attaque, modifier leurs
10 tactiques, et cetera. Cette offensive a duré pendant toute la durée du mois
11 de juin ainsi que le mois de juillet, avec des niveaux d'intensité
12 variable, et ils essaient d'harmoniser les actions menées à Sarajevo avec
13 celles des forces qui venaient d'un territoire complètement différent, les
14 forces du 1er Corps qui étaient à l'extérieur. Ça c'était un problème
15 récurrent pour eux.
16 Voilà, telle était la situation, si vous me le permettez, Madame,
17 Messieurs les Juges, si je puis présenter la situation aux Juges de la
18 Chambre.
19 Nous étions parvenus à une conclusion, nous avons estimé la situation et
20 nous avons estimé que lorsque ces axes d'attaque ont été modifiés et
21 réorganisés, ils avaient décidé, depuis Sirokaca, ce secteur-là, qui se
22 trouve juste en dessous de Trebevic, le mont Trebevic, et du secteur de
23 Mojmilo, de la colline de Mojmilo, ils avaient décidé d'encercler Grbavica
24 et une partie de Lukavica. C'est ce que nous ressentions. Je dois ajouter -
25 et ceci est à l'intention de tout un chacun, et à mon intention en
26 particulier - que nous ne pouvions pas nous asseoir sans rien faire et nous
27 tourner les pouces. Nous devions faire quelque chose pour empêcher cela. Et
28 ce n'est que grâce à nos efforts que la population de Grbavica et d'autres
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1 secteurs pouvait être épargnée. La population s'adressait à nous
2 fréquemment par le biais de leurs délégations, envoyait des demandes, ils
3 nous suppliaient de les protéger.
4 Q. Vous avez dit quelque chose à propos de pertes subies. Quelles ont été
5 les pertes du Corps de Sarajevo-Romanija pendant la durée de cette
6 offensive nourrie et quelles ont été les victimes civiles, pour autant
7 qu'il y en ait eu ?
8 R. Lorsque le 7e Corps s'est déplacé en direction des forces de la Brigade
9 du mont Igman, les premières pertes subies sur cet axe étaient dans le
10 secteur du village de Vela, sur le territoire de la municipalité de
11 Hadzici. Et lors de cette première vague d'attaque, le commandant de leur
12 bataillon, le capitaine Bratic, a été tué. Et ensuite, à ce moment précis
13 très difficile de cette catastrophe imminente, les combattants se sont
14 levés et ne leur ont pas permis d'opérer cette percée.
15 Et le lendemain, le 17, ils avaient un choix à faire. Je ne sais pas qui
16 les a briefés, qui leur a suggéré ce qu'ils devaient faire, comment ils
17 devaient opérer une percée. Eh bien, cela faisait partie de la stratégie
18 russe, en réalité. Mais eux, ce qu'ils faisaient, c'était de choisir un axe
19 étroit et ensuite de répartir leurs positions un peu plus loin. Et ils
20 choisissaient leur axe qui se trouvait dans le quartier d'Ilijas, qui était
21 en partie encerclé et en partie attaqué de toutes parts, mais ce secteur-là
22 était une colline. Je ne pouvais pas la trouver sur une carte
23 topographique, mais je l'ai trouvée sur une autre carte. C'est une colline
24 qui s'appelle Pijesak, où ils avaient déployé plusieurs armes d'artillerie,
25 et d'autres projectiles ont atterri à cet endroit-là, plus que sur d'autres
26 villes pendant la Deuxième Guerre mondiale.
27 Lors de ces combats, il y avait des drames, et j'ai vu que la population
28 civile, les personnes âgées partaient de chez eux pour apporter des
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1 munitions pour aider les combattants. Il y avait des petits-fils qui
2 décédaient et les grands-pères essayaient de les sauver. Ensuite, le fils a
3 essayé de les sauver et a été tué. Mais le front a été maintenu. A cet
4 endroit-là, 14 combattants se sont faits tués dans les tranchées, à cette
5 localité, la localité de Pijesak. Mais leurs forces ne sont pas arrivées à
6 percer cette ligne.
7 Mais ils ont essayé une deuxième percée de Ravno [phon], mais on les
8 a rejetés. Je n'ai envoyé qu'une unité de la taille d'une section. C'était
9 tout. Je n'avais pas d'autres unités pour leur venir en aide. Mais je me
10 suis trouvé sur place.
11 Et ce jeune commandant -- je suis un peu gêné, parce que je suis ému.
12 Ce jeune commandant qui avait 28 ans, qui était capitaine, il s'appelait
13 Savic, je suis venu pour l'aider et j'ai réussi à l'aider. Et à Ilijas, à
14 ce jour-là, quatre civils se sont faits tués. Et maintenant, je ne veux
15 plus parler d'autres pertes sur d'autres axes, mais ce que j'ai vu ce jour-
16 là m'a été très difficile, mais j'ai retenu cela.
17 Q. Quelles étaient les forces de l'ABiH qui ont été engagées dans ce cas-
18 là contre le Corps de Sarajevo-Romanija ? De quel corps de l'ABiH ?
19 R. C'était le 1er Corps de l'ABiH qui était engagé avec tous les effectifs
20 qui étaient disponibles au sein du corps, à la 12e Division de Sarajevo et
21 d'autres divisions à l'extérieur de la ville. Et du 1er Corps, il y avait la
22 brigade du MUP qui y a été engagée, une brigade qui avait au total 7 000
23 personnes, les forces du MUP au total. La brigade spéciale du MUP,
24 s'appelant Bosna, y a été engagée également, ainsi que d'autres unités
25 spéciales. Puisque eux, ils les appelaient comme ça, mais je ne sais pas si
26 vraiment il s'agissait des unités spéciales. Mais on a subi, donc, les tirs
27 de ces unités.
28 Une partie du 2e Corps de l'ABiH, du Corps de Tuzla, y a participé.
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1 C'étaient les forces qui étaient en contact avec nous sur la ligne de
2 front, ensuite la 1ère Brigade d'Olovo, la Brigade glorieuse d'Olovo, ainsi
3 qu'une partie de la brigade du 2e Corps.
4 Ensuite, les unités du 3e Corps, commandées par le général Mahmuljin. Pour
5 ce qui est de ce 3e Corps, il y avait à peu près, entre 12- et 18 000
6 personnes, et un détachement de Moudjahidines qui comptait 800 combattants.
7 Ensuite, le corps suivant, qui était commandé par le célèbre général - je
8 l'ai mentionné tout à l'heure - oui, le général Alagic, qui a commandé le
9 7e Corps qu'il a fait venir dans la zone plus large de Visoko, de Godusa,
10 de Fojnicka Reka, et il a eu l'intention de faire une percée vers Sarajevo
11 par le mont Igman, vers Trnovo.
12 Ensuite, le 4e Corps, certaines parties du 4e Corps, de Konjic, et ces
13 effectifs du 4e Corps, qui se trouvaient liés directement avec les restes
14 du 2e Corps qui se trouvaient sur les monts Igman, Bijelasnica et dans la
15 zone de Pazaric. C'étaient les forces qui partaient pour détruire.
16 Q. Vous venez de mentionnez le détachement de Moudjahidines qui comptait
17 800 Moudjahidines. Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par
18 "Moudjahidine" ?
19 R. Je ne sais pas exactement ce que cela veut dire. Je sais ce que c'est
20 un Moudjahidine, mais je pense que tout le monde sait de quoi il s'agit.
21 Cela est clair. Il s'agissait des ressortissants de pays étrangers, des
22 mercenaires, mais il ne s'agissait pas d'une unité de la Bosnie-
23 Herzégovine. Il s'agissait des personnes qui étaient venues de certains
24 pays à l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine et de l'Europe. Il faut ajouter
25 qu'il s'agissait des pays islamiques. Je n'ai pas vérifié d'où ils étaient
26 venus, mais je sais de qui il s'agissait. Mais la population a eu peur
27 lorsqu'elle entendait. Peut-être que cela était exagéré. Donc, lorsque la
28 population entendait qu'il s'agissait des bourreaux, qu'ils ne respectaient
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1 rien, qu'ils étaient prêts à tout, donc il fallait, dans ce cas-là, apaiser
2 la situation et que la population n'obtienne pas cette information. Mais
3 cette information arrivait jusqu'à la population, l'information qui disait
4 qu'il s'agissait des personnes qui étaient prêtes à tout.
5 Q. Quel était le nombre de membres de la 2e Brigade légère de Sarajevo que
6 vous avez mentionnée tout à l'heure ?
7 R. La 2e Brigade de Sarajevo était une petite brigade. Cette brigade
8 comptait au total à peu près 1 200 personnes. Et pour ce qui est de son
9 utilisation, il s'agissait entre 800 à 1 000 personnes qui étaient
10 utilisées au sein de la 2e Brigade de Sarajevo.
11 Q. Quel était le nombre de personnes qui pouvaient se trouver au sein du
12 corps en juin 1992 ? Le nombre de personnes qui pouvaient être engagées
13 dans les combats ?
14 R. Pour ce qui est du corps, c'étaient tous les effectifs qui étaient à la
15 disposition, qui étaient engagés, à savoir au maximum -- c'est-à-dire tous
16 les effectifs qui existaient à l'époque, y compris les organes du
17 commandement, les personnes qui étaient en charge des transmissions, le
18 personnel de la logistique et d'autre personnel auxiliaire. A peu près 18
19 000 personnes.
20 Q. Merci. Puisque vous avez été exposé aux attaques des unités de
21 plusieurs corps, dites-nous quelle était la situation dans les corps serbes
22 avoisinants ? Est-ce qu'ils pouvaient venir vous apporter de l'aide ? Par
23 exemple, le Corps de la Drina, à l'époque, est-ce qu'il pouvait vous aider
24 à l'époque ?
25 R. S'il vous plaît, ne m'en voulez pas. Mais moi, je ne sais pas
26 exactement dans quel état se trouvaient ces corps à l'époque, non pas parce
27 que je ne me suis pas intéressé à le savoir, mais parce que - il faut que
28 vous me compreniez - moi j'étais préoccupé de la situation dans mon corps.
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1 Mais j'ai demandé des renforts, et je savais que le Corps de la Drina --
2 mais là, c'était une chose différente. Mais si vous le voulez, je peux vous
3 dire que le 2e Corps de l'ABiH est parti pour récupérer leurs morts lors de
4 l'offensive, au moment où la situation de Srebrenica était d'actualité. Et
5 je sais que les corps avaient des difficultés dans leurs zones de
6 responsabilité et leurs problèmes dans ces zones de responsabilité. Je sais
7 également que le général Talic, dans un entretien privé par la suite, m'a
8 dit : "Oui, Mon Général, je sais que le Corps Sarajevo-Romanija se trouvait
9 dans une situation difficile en juin, juillet et en août, mais n'oublie pas
10 que je me trouvais dans la même situation." Et je lui ai dit : "Je respecte
11 cela, mais je ne sais pas en quoi ces deux situations étaient identiques.
12 Mais je te crois sur parole."
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on afficher 1D7510 pour voir quelle était
14 la situation en début août de la même année, quelle était la situation pour
15 ce qui est de l'état-major principal, parce que l'état-major principal
16 envoyait l'ordre à ce moment-là. 1D7510.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, avant de continuer,
19 j'aimerais attirer votre attention sur la page 39 du compte rendu, ligne 8.
20 Parce qu'à la place de "puric", il faut qu'il y figure en anglais
21 "pyrrhic", p-y-r-r-h-i-c.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
23 M. KARADZIC : [interprétation]
24 Q. Il est dit ici que le chef de l'état-major doit rédiger notre ordre,
25 c'est manuscrit.
26 R. Je ne vois plus cela à l'écran.
27 Q. Cette partie qui est manuscrite.
28 R. Ah, maintenant je peux le lire, ce passage.
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1 Q. Pour ce qui est du point 2 - il faut pas que vous le lisiez - dites-
2 nous ce que l'état-major principal a demandé au corps.
3 R. S'il vous plaît, permettez-moi de lire ce passage pour moi. Ici, il est
4 écrit qu'il y avait d'autres avertissements et d'autres ordres qui disaient
5 la même chose. Je n'ai pas une raison particulière pour commenter cela.
6 Cela concerne certains avertissements, certains ordres et décisions
7 également selon lesquels il ne fallait pas agir hors des limites des cibles
8 militaires.
9 Q. Ici, il est dit qu'il faut ouvrir le feu des pièces d'artillerie et de
10 mortiers pour obtenir le plus d'effets avec moins de munitions. Il faut
11 interdire, donc, les tirs contre les cibles qui ne sont pas observées.
12 R. Je vais répéter la règle qu'on respectait à l'époque, même sans avoir
13 été averti là-dessus. Il s'agissait d'une nécessité de la respecter. Parce
14 que personne ne pouvait faire quoi que ce soit à l'aveuglette, sans avoir
15 eu des informations, des données. Donc, dans aucune situation on ne pouvait
16 opérer de cette façon-là, sans avoir eu d'informations particulières. Tous
17 mes hommes devaient comprendre qu'il fallait qu'on tire pour atteindre les
18 cibles, parce que les projectiles qui tombaient sur les rues ne
19 signifiaient rien. Cela pouvait tuer un homme qui se serait trouvé par
20 hasard dans cette rue. Mais les hommes devaient comprendre qu'ouvrir le feu
21 à l'aveuglette ne produisait aucun effet.
22 Moi, j'ai parlé de cela à mes hommes au village d'Ostojic, je leur
23 ai parlé en personne, c'est au pied de la montagne Treskavica. C'est un
24 village où une batterie du 1er Corps, une batterie de pièces d'artillerie de
25 105-millimètres, a tiré sur ce village pendant toute la journée, et là je
26 n'exagère pas. Je m'y trouvais et, à tous ces combattants, j'ai dit par la
27 suite qu'il n'y avait aucun résultat, aucun effet, pour ce qui est de ces
28 tirs. Les combattants qui ont fait ces tirs ne savaient pas que le résultat
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1 allait être nul. Et je savais que si on voulait avoir du succès et si on
2 voulait riposter à leurs tirs, on devait tirer seulement sur les cibles
3 directes. Et ce système d'observation était en fonction tout le temps, et
4 ces règles étaient en vigueur sans interruption.
5 Q. Et comment, d'après vous, par rapport à cela dans l'acte
6 d'accusation il y a des allégations selon lesquelles on a tiré sur la ville
7 de façon arbitraire et qu'on ripostait de façon disproportionnée ?
8 R. Je connais cette catégorie d'interprétation. D'abord, je vais parler de
9 ces ripostes qui n'étaient pas proportionnées. Pour que le Corps de
10 Sarajevo-Romanija ou n'importe qui d'autre riposte de façon proportionnée
11 sur une cible observée, il faut d'abord appliquer une règle comment le
12 faire. S'il y a une cible observée pour une batterie de pièces
13 d'artillerie, il s'agit d'une section de défense. Il faut, soit neutraliser
14 la cible observée, soit la détruire. Il y a une grande différence entre les
15 deux cas de figure pour ce qui est de la quantité des munitions utilisées.
16 Et pour ce qui est de ces règles, il n'existe pas la règle qu'il faut
17 détruire qui que ce soit. Il ne faut pas avoir tendance à détruire qui que
18 ce soit. Cela ne peut pas être fait, surtout dans une zone qui est bien
19 protégée.
20 Donc, lorsqu'on donnait le feu vert pour une quantité de munitions
21 déterminée, on distribuait à nos unités cette quantité de munitions, et les
22 commandants de brigade m'ont demandé sans cesse pourquoi il n'y avait pas
23 de munitions. Il faut que vous me compreniez de façon correcte. Je ne
24 pouvais pas leur donner la réponse à cette question puisque je n'avais pas
25 de munitions suffisantes. C'étaient des quantités très limitées, et les
26 commandants devaient trouver d'autres solutions et ils ont compris cette
27 situation. Donc vous fixiez une limite pour ce qui était de la quantité de
28 munitions, et ensuite ils ne pouvaient pas tirer de façon excessive ou il
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1 fallait que les tirs restent à un certain niveau. Ils ne pouvaient tirer
2 que lorsqu'ils étaient absolument sûrs et certains qu'ils allaient pouvoir
3 toucher la cible.
4 Q. Bien.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce document pourrait être versé au
6 dossier ?
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2813, Madame, Messieurs
9 les Juges.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Général, alors, en matière de neutralisation ou de destruction, quand
12 est-ce que vous étiez en quelque sorte satisfait ? Ou, plutôt, quelle est
13 la différence pour ce qui est de
14 l'utilisation ? Comment est-ce que vous savez, par exemple, que la cible en
15 question avait été détruite ?
16 R. Vous savez, tout peut être déterminé. Tout était bien connu. Dans un
17 premier temps, il ne s'agissait pas de personnes non chevronnées qui
18 s'étaient lancées dans la guerre ou d'amateurs qui ne savaient pas ce
19 qu'ils faisaient. Tout devait être connu et tout devait être précisément
20 évalué. Si une cible était touchée, elle était également neutralisée, ce
21 qui ne signifie pas pour autant qu'elle était complètement détruite, ladite
22 cible. La chose importante, c'était que la cible soit touchée. Vous savez,
23 la cible, elle peut aussi rester en vie, parce que très souvent les gens ne
24 meurent pas seulement si vous leur tirez une balle dessus. Il faut parfois
25 de nombreuses balles. Et toute personne qui a fait la guerre le sait
26 pertinemment. Ils savaient ce qui nous arrivait. Nous, nous savions ce qui
27 leur arrivait. Et, en fait, on dit que toute balle tirée ne touche pas
28 forcément la cible. Bon, ce n'est pas tellement logique que de dire cela.
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1 Ce qui est plus logique, c'est de dire que tout obus tiré ne tombe pas
2 forcément sur la cible.
3 Qu'est-ce que je pourrais vous dire d'autre à propos de ce terme de
4 "neutralisation" ? La mesure de destruction est quelque chose qui est
5 absolument impossible d'évaluer, que nous ne pouvons pas effectuer. La
6 neutralisation signifie que la cible en question n'est plus active de par
7 notre activité.
8 Q. Et si cela est obtenu après un ou deux obus, par exemple, est-ce que
9 l'on continue à tirer, Général ?
10 R. Non, non, on ne continue pas à tirer.
11 Q. Merci. Ecoutez, je ne peux pas vous donner la référence de la page
12 exacte, c'était un témoin, un observateur, et je lui avait demandé comment
13 est-ce qu'il savait ce qui était terreur et ce qui n'était pas terreur. Il
14 a dit en fait qu'un ou deux obus pouvaient équivaloir à la terreur
15 lorsqu'il y a une grande campagne de bombardement qui est justifiée du
16 point de vue militaire. Qu'avez-vous à dire à ce sujet ?
17 R. Ecoutez, tout dépend de la cible, parce que vous pouvez justement
18 toucher un groupe de personnes qui n'a absolument rien à voir avec les
19 combats à l'aide d'un obus. Alors, pour eux, si cet obus les touche, pour
20 eux, cela constitue même plus que la terreur. Je ne vous parle pas de ça.
21 Je ne peux pas véritablement abonder dans le sens de cette thèse expliquée
22 par ce témoin parce que lorsque l'on pense à l'utilisation des biens, je ne
23 vous parle pas de cela. Moi, ce que je vous dis, toutefois, c'est que
24 lorsqu'une cible est frappée directement, cela ne constitue pas forcément
25 un acte de terreur. Au contraire, d'ailleurs. J'ai oublié de vous indiquer
26 qu'à un moment donné pendant le mois de mai, mes commandants ont essuyé des
27 tirs et ils ont voulu que nous diluions leurs tirs d'artillerie. Nous
28 n'avons pas réagi à leurs tirs d'artillerie. Nous avons procédé à des
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1 frappes directes, et la chaîne de télévision CNN nous a filmés en train de
2 cibler leurs bunkers, mais d'ailleurs cela n'a jamais été diffusé ou
3 montré. Parce qu'il y avait certaines personnes qui regardaient cela et
4 certaines personnes qui ont vu cette diffusion et qui se seraient demandé
5 comment est-ce que l'on peut utiliser ce type de frappes directes afin
6 d'empêcher qu'ils nous tirent dessus. Nous, nous l'avons fait parce que
7 cela correspondait à une nécessité. Par la suite, les gens ont indiqué que
8 ces campagnes, c'étaient des campagnes pour -- enfin, c'était notre
9 campagne de bombardement de la ville. Mais en guise de conclusion, je vous
10 dirais que lorsque vous frappez une cible, lorsque vous la touchez, cela ne
11 constitue pas un acte de terreur.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Document 1D7512.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Donc vous étiez hospitalisé à l'époque, le 19 août; toutefois, votre
15 chef d'état-major était présent. Alors cela m'intéresse parce que je
16 voudrais comprendre ou savoir quelle était la politique suivie par le corps
17 et son point de vue. Regardez l'alinéa numéro 1, où il est indiqué qu'il
18 était sur les postes d'observation, il est question des bataillons
19 d'artillerie, des patrouilles de reconnaissance. Mais j'aimerais savoir
20 comment est-ce que cela correspond à la politique et à la position du Corps
21 de Sarajevo-Romanija et à ses tactiques ?
22 R. Cela correspond très bien d'ailleurs. Je vous ai déjà dit que j'étais
23 d'avis que la guerre ne peut pas être menée par des gens souffrant de
24 cécité. Tous les officiers et tous les commandements savaient comment ils
25 pouvaient organiser leur système de Défense, comment ils pouvaient exécuter
26 leurs tactiques de guerre. Et je suis ravi de voir que cela est indiqué
27 très, très clairement. Je vois qu'il est indiqué très clairement qu'il y a
28 eu continuité. Cela a commencé par le commandant du corps, qui était Galic
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1 en l'occurrence, jusqu'à moi-même. Nous pouvons voir que le colonel
2 Sladoje, qui était responsable des forces, dans un premier temps, savait
3 particulièrement bien et très bien ce qu'il fallait faire; puis
4 deuxièmement, il utilise exactement les mêmes méthodes, les mêmes
5 pratiques, et il exigeait de la part de son unité, la même chose. Il n'y a
6 pas eu de rupture de continuité, en quelque sorte. Il n'y a pas eu de
7 changement de politique. Il n'y a pas eu de modification de comportement.
8 Personne n'a baissé la garde.
9 Q. Merci. Alors, il dit ici que les tirs devaient être planifiés. Et vous
10 voyez qu'au numéro 3, il est indiqué :
11 "Dans toutes les unités, assurez que les tirs sont ouverts conformément au
12 plan, et que les unités, les unités adjacentes, et la population soient
13 informées préalablement afin d'éviter des pertes inutiles lorsque l'ennemi
14 ripostera à nos tirs."
15 Est-ce que vous pourriez nous dire quelles étaient vos obligations, quel
16 était votre comportement et, surtout, ce que signifie cet alinéa numéro 3
17 dont je viens de vous donner lecture ?
18 R. Alors je ne vais pas vous dire que nous avons toujours été dans la
19 perfection absolue, que tout ce que nous faisions était absolument parfait.
20 Toutefois, les mesures de protection pour les civils ont été mises en
21 œuvre, la mesure fondamentale consistait à ne pas autoriser les civils à
22 rester dans la zone où il y avait des pièces d'artillerie et des positions
23 de combat.
24 Que tout soit bien clair entre nous. Les civils n'ont jamais même
25 essayé de se retrouver dans ce type de secteur ou de zone. Alors bien
26 entendu, il y avait des exceptions telles que ceux qui portaient des
27 munitions, ceux qui se déplaçaient avec les colonnes. Ce n'est pas eux qui
28 sont visés par là, lorsque je parle d'empêcher la présence de civils. Moi,
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1 je vous parle de l'exclusion de la population civile de ces zones. Nous ne
2 pouvions pas en fait déplacer physiquement les gens des zones où il y avait
3 des activités de combat. Nous pourrions, bien entendu, les mettre en garde,
4 les avertir. Et moi, j'assume la responsabilité pour ces personnes qui se
5 trouvaient dans la maison des travailleurs, ou dans cette cabane qui se
6 trouvait près du bâtiment Energoinvest, et qui se trouvaient également dans
7 l'école du génie électrique. Là, il y avait des gens mais il n'y avait pas
8 de pièces d'artillerie, mais ces personnes, néanmoins, ont quand même été
9 tuées. Il s'agissait d'hommes, de femmes et d'enfants qui ont été tués par
10 des tirs d'artillerie, particulièrement durant cette offensive. Je n'ai pas
11 pris de décision pour que ces personnes soient déplacées, parce qu'il n'y
12 avait pas de pièces d'artillerie à cet endroit. Pour être très franc, je
13 n'ai rien fait parce que je ne m'attendais absolument pas à ce qu'ils
14 soient ciblés. Mais malheureusement, ils ont été tués.
15 Q. Est-ce que nous pourrions regarder l'alinéa numéro 7. Voyons, en
16 fait, quel fut l'ordre du colonel Sladoje. Alors, vous voyez qu'au
17 paragraphe 7, il est indiqué :
18 "Informez la population et utilisez les forces de police pour
19 empêcher les civils de se déplacer dans la zone, et arrêter complètement le
20 déplacement des civils." Et puis, il est question d'informer la population
21 par les présidences de Guerre des municipalités, préparer la population
22 pour qu'elle s'en aille et qu'elle aille dans des refuges.
23 Donc, est-ce que cela correspondait aux obligations du commandant
24 vis-à-vis de la population civile ?
25 R. Oui, oui, cela se passe d'explication, d'ailleurs. Parce que cela
26 montre très clairement ce qu'il a fait en tant que commandant. Il n'y a
27 aucune ambiguïté. C'est quelque chose qu'il devait faire et qu'il a fait.
28 Il y a des faits qui démontrent que tout le monde savait ce qui devait être
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1 fait pour protéger la population. C'est excellent, cela. Je pense qu'il a
2 très, très bien agi là.
3 Q. Mais quelles étaient les obligations des officiers de l'autre camp, eu
4 égard à leurs propres civils, et comment est-ce qu'ils ont respecté ces
5 obligations ?
6 R. Voilà quelle sera ma réponse : je ne vais pas parler de leurs
7 obligations. Je pense que leurs obligations, elles étaient très claires.
8 Ils auraient dû savoir ce qu'ils étaient censés faire, justement. Car si
9 vous pensez à la totalité des obligations, nous ne sommes pas en train
10 d'essayer de nous justifier. Nous ne pouvons pas dire qu'ils devaient
11 protéger la zone à partir de laquelle ils tiraient, pour déplacer, pour
12 faire partir la population. Nous, notre tâche consistait à déterminer si la
13 zone en question était encore habitée par des civils, et s'il y avait
14 présence de civils, nous ne devrions pas ouvrir le feu sur ces zones, et
15 nous ne l'avons pas fait. Si la zone n'était pas entièrement dégagée, nous
16 utilisions la procédure que j'ai déjà mentionnée à plusieurs reprises.
17 Premièrement, il y avait observation, il y avait les renseignements qui
18 nous étaient fournis à propos du résultat des observations, avec le type
19 d'effets militaires qui s'y trouvaient, et ensuite l'officier indiquait
20 quelle était leur menace, ou la menace venant d'eux, et après, soit nous
21 utilisions les pièces que nous avons à notre disposition ou nous empêchions
22 qu'elles soient utilisées. Ce qui était normal c'est qu'ils étaient quand
23 même censés protéger leur propre population. Ils n'auraient pas dû les
24 laisser rester dans cette localité où les activités de combat avaient eu
25 lieu.
26 Q. Merci.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au
28 dossier de ce document ?
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce D2814.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Général, vous avez mentionné ce que vous avez appelé la rentabilité
5 d'une cible et le fait que l'on accepte les dégâts collatéraux. Alors,
6 comment est-ce que ces concepts, ces notions vous ont orienté lors de vos
7 actions ? Est-ce que ce sont des principes que vous avez utilisés ou
8 considérés comme principes directeurs et qui vous ont orienté ?
9 R. Oui, cela était très important dans le cadre de toute campagne de
10 bombardement, parce que si nous étions d'avis qu'il allait y avoir de
11 nombreuses victimes dans notre camp, la seule chose que nous faisions
12 c'était d'effectuer l'évaluation nécessaire pour pouvoir obtenir justement
13 certaines informations, certains renseignements. Et même s'il y avait la
14 possibilité que certaines personnes risquaient d'être tuées alors qu'elles
15 ne participaient pas directement au combat, il fallait envisager de
16 minimiser les dégâts collatéraux, et cela était tout à fait différent par
17 rapport aux dégâts que nous avons dû supporter et dont nous avons pâti à la
18 suite de leur tir. Car s'il allait y avoir des pertes à cause de tir lourd
19 dans la zone en question, la localité était ciblée seulement s'il avait été
20 déterminé qu'il y aurait dégâts collatéraux minima parmi la population
21 civile, à savoir une ou deux personnes.
22 Q. Merci.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions examiner le document
24 1D8012.
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. Vous venez de nous dire que le nombre d'obus n'a rien à voir avec le
27 nombre de victimes. Alors quel est l'obus qui est le plus dangereux ?
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton.
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1 Mme EDGERTON : [interprétation] Je viens d'écouter plusieurs canaux
2 d'interprétation. Alors, je me demande si M. Karadzic et le général
3 Milosevic pourraient être encouragés à ne pas aller trop vite lorsqu'il
4 pose des questions et lorsqu'il répond pour que nos collègues puissent ne
5 pas trop prendre de retard.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Edgerton.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Donc, il faudra que nous fassions des temps d'arrêt, mais moi, je
9 voulais pouvoir faire le plus de travail possible avant la pause déjeuner.
10 Donc, vous avez indiqué que le nombre de victimes n'était pas tributaire du
11 nombre d'obus qui tombaient. Alors que se passe-t-il après le premier et le
12 deuxième obus, après qu'ils sont tombés ? Quel est l'obus qui est le plus
13 dangereux pour les effectifs, et je pense à la façon dont ils sont tirés ?
14 R. Alors, que tout soit bien clair. Lorsque j'ai dit que le nombre d'obus
15 n'était pas la mesure idoine, moi, je parlais de nos positions militaires.
16 Je ne suis pas en train de vous dire qu'un obus, deux obus ou une centaine
17 d'obus sont dangereux si aucun ne tombe sur la cible. Moi, je sais très
18 bien ce que j'essaie de vous faire comprendre et de dire, mais je ne sais
19 pas si je suis très clair, si vous comprenez. Ce que j'essaie de vous dire,
20 c'est que tous les obus ne tuent pas toujours. Les obus ne tuent pas les
21 personnes qui sont protégées. Voilà ce que je voulais dire. Je voulais, en
22 fait, transmettre ce message à mes artilleurs. Je ne voulais pas qu'ils
23 pensent que lorsqu'ils lançaient un grand nombre d'obus, c'est ceux-là qui
24 allaient être efficaces. C'est efficace seulement si la cible que l'on vise
25 est touchée. C'est la règle, en fait, et c'est le message que j'ai essayé
26 de relayer à mes artilleurs.
27 Et lorsque nous parlons d'obus qui ratent leurs cibles, personne, dans ce
28 cas d'espèce, ne sait quels sont les dégâts collatéraux et personne ne sait
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1 lequel de ces obus parmi toute la suite d'obus sera le plus dangereux. Le
2 premier, c'est l'obus qui, en quelque sorte, met en alerte les gens, et
3 après, chaque obus qui tombe est un obus dangereux. Mais le premier est le
4 plus dangereux, parce qu'après le premier obus, que se passe-t-il ? Tout le
5 monde essaye de trouver un refuge, et cela est particulièrement dangereux
6 si la cible a été touchée.
7 Q. Est-ce que vous pourriez regarder ce que votre chef d'état-major a
8 écrit le 30 août, alors que vous étiez vous-même en congé de maladie ?
9 Qu'a-t-il dit, donc ? Il dit qu'il y a eu des frappes aériennes qui ont
10 commencé. Qu'est-ce qu'il a dit, donc, après le soi-disant massacre de la
11 part des Serbes pour les civils à Markale ? Il a dit que les frappes
12 aériennes avaient commencé, et au troisième paragraphe, il a dit que
13 plusieurs milliers de projectiles étaient tombés, qu'il y avait eu les
14 dégâts civils à Hadzici, Ilidza, dans le secteur général de Lukavica.
15 Lorsque vous êtes revenu de congé de maladie, est-ce que vous avez été
16 informé des conséquences de la campagne de bombardement ?
17 R. Oui. Je suis revenu au corps le 9 ou le 10 septembre. Ça veut dire, en
18 l'occurrence, dix jours après ce qui est évoqué dans ce document. Il est
19 normal de voir les gens me dire ce qui s'était passé entre-temps. Entre
20 autres, le commandement du corps a dû déménager. Il ne s'est plus trouvé
21 sur le site où je l'avais laissé, parce que ce poste avait été directement
22 exposé à des tirs, mais très sophistiqué et très précis, de la part des
23 forces d'intervention rapide qui se trouvaient sur le mont Igman. Nous ne
24 sommes plus en train de parler de ses activités, parce que c'est tout à
25 fait particulier. Les activités de l'OTAN, de l'aviation, se manifestaient
26 et, bien sûr, qu'on me relatait tout ceci, mais une partie de ces
27 activités-là, j'en étais la cible aussi, parce qu'il y a eu des obus à
28 tomber au-dessus de Lukavica. Et je sais pourquoi cela s'est fait. Parce
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1 que là, il y avait à l'époque une base, c'est-à-dire un endroit qu'on
2 appelait Kanponjeri [phon]. C'était là que se trouvait le 247e Régiment de
3 lance-missiles, mais il a été déménagé de là en 1992 déjà, ce régiment, et
4 il est passé à Novi Sad. Mais on a gardé l'appellation Kanponjeri, et là,
5 les gens s'étaient abrités. Et l'aviation de l'OTAN a fait qu'ils ont
6 déchargé des fardeaux de bombes sur ce territoire-là. Quand je suis arrivé
7 là, les bombardements en question duraient encore.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai besoin de deux minutes encore, Excellence.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais pourquoi ne s'arrêtons-nous
11 pas, parce que quelle est la pertinence de ce type d'information ?
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai besoin de deux minutes, Excellence. Vous
13 allez voir, suite aux questions que je lui poserai à présent, que cela
14 deviendra pertinent.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Deux minutes. Veuillez continuer.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Général, est-ce que vous avez demandé à vos collaborateurs d'être
19 informé des événements du 28 août, et quelles sont les informations que
20 vous avez obtenues concernant l'origine de cet obus ?
21 R. Je ne l'ai pas exigée, et ici, je dois me prononcer de façon claire :
22 je n'ai pas du tout été mis au courant de cet événement. Alors, comme vous
23 n'êtes pas au courant, vous ne pouvez pas demander l'information.
24 Néanmoins, ils m'ont communiqué l'information relative à ce qui s'est passé
25 le 28 août au sujet du site appelé Markale. Il est normal que ces gens-là
26 soient venus à moi pour me le raconter. Ils ont dit qu'on a été
27 anathémisés, et on a dit que c'était le Corps de Sarajevo-Romanija qui
28 avait fait cela et que c'étaient ses mortiers qui étaient à l'origine de ce
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1 tir. Mais ils m'ont dit que ce jour-là, les mortiers et ce type de tir
2 n'ont pas du tout été utilisés. Et pour moi, à mes yeux, c'était une
3 information qui était la bonne, puisque j'ai prêté l'oreille à ce que
4 disaient Sladojevic, le colonel Lugonja et d'autres colonels qui faisaient
5 partie du commandement restreint.
6 Q. Merci. Et alors, à la page d'après, au paragraphe 4, il est dit :
7 "Ne pas tirer sur la ville avec l'artillerie, ni sur les postes occupés par
8 la FORPRONU."
9 Est-ce que c'était une continuation de la politique que vous aviez adoptée
10 ?
11 R. Oui, c'était dans la continuité de ce que nous avions eu coutume de
12 faire.
13 Q. Merci.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander le versement au dossier de
15 cette pièce et demander à ce que cette pause soit faite à présent ?
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2815, Madame, Messieurs
18 les Juges.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Nous allons faire une pause
20 de 45 minutes, et nous allons reprendre à 1 heure 22.
21 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 37.
22 --- L'audience est reprise à 13 heures 22.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur
24 Karadzic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
26 M. KARADZIC : [interprétation]
27 Q. Mon Général, vous avez mentionné la procédure de prise de décision.
28 Est-ce que vous pouvez nous dire quelle a été cette procédure de prise de
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1 décision pour ce qui est de savoir si on allait tirer ou pas, avec de gros
2 calibres, je veux dire ? On arrive donc sur le terrain, où est-ce que ça va
3 comme proposition et qui est-ce qui décide au final ?
4 R. Le préalable numéro un qu'il convient de satisfaire, c'est d'abord de
5 trouver la cible. Il faut l'identifier, il faut qu'elle existe. Non
6 seulement savoir si on vous a tiré dessus ou s'il y a eu des activités de
7 déployées à partir d'un endroit, mais il faut que l'on ait identifié le
8 secteur rapproché et les alentours immédiats, donc quel est le site précis.
9 Ça, c'est l'une des choses. Deuxièmement, c'est le type d'activité ou le
10 type d'arme. Pour ce qui est du nombre de pièces d'artillerie, une, deux,
11 trois, quatre, cinq. Ensuite, il faut que l'on sache quels sont les
12 calibres dont on a besoin.
13 Q. Excusez-moi. Je voudrais que vous précisiez de quelle pièce
14 d'artillerie vous êtes en train de parler ici ?
15 R. J'ai cru que c'était sous-entendu. Si nous sommes en train de parler
16 des activités déployées par le 1er Corps, leurs pièces d'artillerie, leurs
17 moyens de tir et leurs cibles et objectifs militaires, je parle d'eux. Je
18 croyais que c'était clair.
19 Q. Oui. Moi, je voulais qu'on précise pour que tout un chacun sache de
20 quoi il est question.
21 R. Une fois ceci fait, on allait plus loin. Il faut faire les choses assez
22 vite, parce que ça peut être complètement dénué de sens et inutile si vous
23 ne le faites pas au moment voulu. Je tiens à ajouter que personne n'avait
24 d'ordinateur en tête. Personne n'était une machine pour avoir besoin de
25 conditions particulières et tout faire vite. Il fallait qu'il y ait une
26 procédure quand même. Et la chose suivante, c'était de déterminer quel est
27 le danger qui vous menace à partir d'endroits qui ne sont pas une cible
28 militaire, c'est-à-dire les bâtiments, les individus ou installations
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1 variées. Une fois que l'on a donc tout évalué, soupesé et obtenu les
2 informations nécessaires - cela venait d'ailleurs des individus qui
3 fournissaient l'information - l'officier, lui, était censé tout vérifier et
4 se rendre compte par lui même si c'était bien ainsi que les choses se
5 présentaient. Il ne suffisait pas de se reposer, de se fier à l'expérience
6 de quelqu'un qui n'a peut-être pas suffisamment l'esprit de précision pour
7 présenter la situation telle qu'elle l'était vraiment.
8 Alors, après cela, s'il s'agissait d'une cible dangereuse pour les unités
9 du Corps de Sarajevo-Romanija, on allait lui tirer dessus avec les armes
10 disponibles, c'est-à-dire les armes les plus efficaces, tels les mortiers,
11 voire éventuellement des moyens plus puissants qui sont susceptibles
12 d'empêcher l'installation en question de vous nuire à l'avenir.
13 Alors vous m'avez demandé qui prend la décision. La décision est prise par
14 le commandant de la brigade ou alors par moi-même, si je suis sur place. Si
15 je ne suis pas là, c'est celui qui voit ces unités menacées qui décide des
16 tirs.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'au compte rendu, à la ligne 8,
18 il convient de consigner le fait que le général a dit que les effectifs
19 étaient grandement menacés, et lorsque les effectifs étaient "grandement
20 menacés", que c'est là que l'on ouvrait le tir. Si vous réécoutez la
21 réponse, vous entendrez qu'il a parlé de "grand péril" ou de "grand
22 danger".
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous confirmez cela, Monsieur
24 Milosevic ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
27 M. KARADZIC : [interprétation]
28 Q. Je comprends que vous pouviez, en votre qualité de chef d'état-major ou
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1 de commandant, vous pouviez donner l'ordre. Mais quel est le grade le moins
2 élevé qui pouvait décider de l'ouverture des tirs ?
3 R. Pas un grade en dessous de celui de commandant de brigade.
4 Q. Merci.
5 R. Excusez-moi, si vous le permettez, je voudrais étoffer ce que j'étais
6 en train de dire. Toute cette situation, c'est en territoire urbanisé. Sur
7 d'autres types de territoires, il est clair qu'il n'y a pas eu de problèmes
8 à rien qu'à un endroit précis. Nous avions eu des problèmes dans la région
9 de Sarajevo, au sens large du terme. Donc, tout ce qui était à l'extérieur
10 de la ville, des parties urbanisées, ça pouvait être pris comme décision
11 par même un commandant ou chef de compagnie.
12 Q. Si on parle d'armes lourdes et d'autorisation d'utiliser des armes
13 lourdes, quels sont les effectifs dont disposait la brigade et quels
14 étaient ceux des bataillons et du corps d'armée pour ce qui est des gros
15 calibres, et quels sont aussi les ordres que vous aviez donnés en ce sens ?
16 R. Tout d'abord, j'espère que tout un chacun a bien compris ceci. Peut-
17 être certaines explications sont-elles superflues, mais je vais quand même
18 les donner. Les moyens fondamentaux qui ont été utilisés pour tirer sur des
19 cibles dont nous avons déjà parlé, ce sont des ressources qui sont confiées
20 au commandement de la brigade. Ça peut être des obusiers de 100, 105
21 millimètres, des mortiers de 120, et ce sont donc des pièces un peu plus
22 puissantes. Les autres pièces d'artillerie n'étaient pas mises à leur
23 disposition. L'artillerie du corps d'armée, elle, possédait des pièces
24 d'artillerie qui étaient plus puissantes mais qui n'ont pas été utilisées;
25 pour être concret, des obusiers de 155 millimètres. Ça a été éliminé tout
26 de suite, dès le début, et je vais vous dire en 1994 exactement, lorsqu'on
27 les a déplacées et placées sous le contrôle de la FORPRONU.
28 Q. Les groupes d'artillerie étaient regroupés comment ? Il y en avait au
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1 niveau de la brigade, au niveau du bataillon et au niveau du corps. Les
2 compagnies n'en avaient pas, n'est-ce pas ?
3 R. Non, les compagnies ne disposaient que de mortiers de 60 et 82
4 millimètres, mais toutes les compagnies n'en disposaient pas parce qu'elles
5 devaient être dispersées sur une zone importante et chaque commandant de
6 compagnie ne pouvait avoir son appui d'artillerie.
7 Q. Et qu'en est-il des lignes de défense avancées à l'extérieur, celles
8 qui étaient en face des 2e et 7e Corps et devant les 14e et la 16e Divisions
9 ? Comment la ligne se dessinait-elle lorsqu'elle traversait des zones
10 peuplées ? Y avait-il des restrictions qui étaient imposées par rapport à
11 l'emploi de l'artillerie ?
12 R. La plupart de ces régions n'étaient pas peuplées -- essentiellement des
13 régions non peuplées. En particulier, dans le secteur où la Brigade
14 d'Ilijas se battait contre la 16e Division, près de Breza et Visoko, ils
15 étaient en contact avec une zone urbaine. C'est bien que vous me rappeliez
16 ceci. Si un obus tombait à Visoko, ce n'était pas un problème, mais
17 lorsqu'un obus tombait sur Sarajevo, le monde entier en était le témoin et
18 on disait que c'était un usage indiscriminé de l'artillerie. Ils ne
19 répondaient pas aux actions qui étaient menées sur un terrain plus élevé.
20 Et on se concentrait toujours sur Sarajevo, c'était la ville en danger. Et
21 Visoko, à l'époque, était une ville comme Sarajevo.
22 Q. Combien d'obus musulmans sont tombés sur Ilijas, une zone urbaine de
23 Sarajevo, en moyenne pendant la guerre ? Avez-vous conservé des dossiers
24 là-dessus ?
25 R. Je n'ai rien conservé. Je n'ai pas conservé ce genre d'informations. Et
26 je dirais aujourd'hui qu'il y avait trop de tirs de ce genre, mais nous
27 n'avons pas compté les obus. C'est la raison pour laquelle je ne peux pas
28 vous donner de chiffre exact. Mais je puis vous dire qu'Ilijas était
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1 constamment soumis au feu, et pas seulement au tir d'artillerie, mais
2 soumis à des tirs de 12,7 millimètres, car c'était une zone très compacte,
3 très dense. A Ilijas et aux alentours d'Ilijas, il y avait toutes sortes de
4 forces dans cette région soumises sans cesse au tir de mortier.
5 Q. Des quartiers comme Visoko, Breza, Zupca, une concentration importante
6 de la population musulmane, pouvaient-ils être touchés par l'artillerie du
7 SRK ? Est-ce que vous les avez pris pour cible et est-ce que vous les avez
8 rasés jusqu'au sol ?
9 R. Ce n'était pas impossible d'atteindre cela, de tirer là-dessus. Je veux
10 parler de Visoko. Et pour ce qui est de Breza, cet endroit était
11 suffisamment loin et était hors de notre portée.
12 Q. Qu'en est-il de Zupca, ce n'était pas loin, n'est-ce pas ?
13 R. En réalité, c'est Zupca. Si je me souviens bien, c'est un village. Ce
14 n'était pas très loin, mais ce n'était pas soumis au tir.
15 Q. Merci. Pourriez-vous nous rappeler, s'il vous plaît, quelle relation
16 laRepublika Srpska entretenait avec la Yougoslavie en 1995 au moment de
17 cette offensive, quand trois ou quatre corps ont lancé contre le Corps de
18 Sarajevo-Romanija ? Je ne veux pas parler des liens politiques. Je veux
19 parler des relations commerciales.
20 R. J'entends bien. J'entends bien. Pour ce qui est du détail de tout ceci,
21 je sais qu'une décision a été prise aux fins d'imposer un embargo sur
22 l'importation de moyens militaires. Cet embargo avait été imposé par la
23 Serbie et avait interdit la livraison de tout matériel, denrées
24 alimentaires, carburant et autres choses à la Republika Srpska. Et j'essaie
25 de vous dire à vous, ainsi qu'à vous, Madame, Messieurs les Juges, que je
26 suis au courant de tout ceci parce que j'ai lu des choses dessus, mais je
27 n'ai pas participé directement à cela.
28 Q. Et où fabriquions-nous des obus dans votre zone de responsabilité ?
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1 R. Alors ces obus étaient fabriqués à l'usine Pretis à Vogosca.
2 Q. Et où obtenions-nous l'acier pour ces obus ?
3 R. Quelqu'un d'autre connaît peut-être la réponse à cette question. La
4 situation se présentait comme suit : le directeur de cette usine se
5 plaignait à moi en me disant qu'il n'avait rien lui permettant de produire
6 quelque chose. Et c'était par pure coïncidence que je me suis rendu à
7 Ilijas pour autre chose et j'ai vu les aciéries à cet endroit, l'ancienne
8 usine d'Ilijas, et derrière une usine j'ai vu un gros tas d'acier. Et je
9 leur aurais dit que s'ils n'en avaient pas besoin, qu'ils donnent ceci à
10 Pretis, et on m'a répondu que ce n'est pas le type d'acier dont ils ont
11 besoin. Donc j'ignorais tellement ces choses-là que je ne pouvais pas faire
12 de différence entre ce qui convient pour une fabrication militaire et ce
13 qui n'est pas une fabrication militaire. Et je me trompais simplement de
14 cible.
15 Q. J'essayais d'éviter les questions directrices. Veuillez nous dire si
16 cet embargo imposé par la Yougoslavie était en 1994 ? Ceci s'appliquait-il
17 également à l'acier aux aciéries de Niksic au Monténégro ?
18 R. Oui, cela, je le sais. Ça, c'était le produit phare. Et avec le recul
19 du temps, je me rends compte aujourd'hui que nous avions besoin davantage
20 de l'acier que de la nourriture.
21 Q. Alors, passons aux bombes aériennes maintenant, et c'est la raison pour
22 laquelle j'ai parlé de la situation en termes logistiques en RSK à
23 l'époque. Savez-vous si la partie musulmane disposait ou utilisait les
24 bombes aériennes ?
25 R. D'après ce que je sais, et j'affirme qu'ils disposaient de bombes
26 aériennes. Et pour être plus précis, vers le 18, voire peut-être même le 22
27 avril 1992, les forces spéciales du MUP commandées par Dragan Vikic sont
28 entrées dans l'usine Pretis, et ils ont commencé à enlever des quantités de
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1 munitions et ils ont même pris le stock de bombes aériennes qu'il y avait
2 dans les entrepôts. Il y a eu un conflit, une confrontation, une
3 escarmouche entre ceux qui protégeaient l'usine et ces hommes-là. Et une
4 fois que c'était terminé, ces moyens ont été enlevés. Ce qui ne fait que
5 confirmer qu'ils disposaient d'une certaine quantité de bombes aériennes.
6 Deuxièmement, je sais, même si je ne sais pas dans quelle mesure ils les
7 ont utilisées, qu'ils disposaient également d'un arsenal d'armes
8 antiaériennes -- pardonnez-moi, non, d'armes létales antiariennes. Et le
9 dépôt principal se trouvait à Busovaca, qui se trouvait sur le territoire
10 de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. En fait, il s'agissait de
11 territoires croates. A savoir comment ils ont partagé le butin de Busovaca,
12 je ne sais pas; mais en tout cas, ils avaient les moyens d'accepter ou de
13 pouvoir stocker ces bombes aériennes. En particulier, ils avaient, outre
14 ces moyens létaux, des bombes aériennes également à cet endroit. Je le sais
15 parce que j'utilisais le commandement du Bataillon de la Police militaire,
16 et je savais quelle était la situation au sein de chaque entrepôt. Et ce
17 qui était entreposé à cet endroit, cela avait été mis de côté par la JNA en
18 temps de paix. Je m'en tiens à mon affirmation pour dire que
19 potentiellement ils pouvaient s'en servir. Je ne sais pas si tout ceci
20 avait été gardé à jour comme il faut.
21 Ce que je sais aussi, c'est qu'à l'endroit où il y avait un parc
22 national à Vrace, et il y a certains monuments à cet endroit-là aussi, il y
23 avait trois bombes aériennes qui ont été larguées mais qui n'ont pas
24 explosé. Le colonel Cedo Sladoje m'a appelé, il était surpris, il
25 souhaitait me le montrer. Il souhaitait me montrer quelque chose qui était
26 un moyen militaire dangereux, mais nous étions très heureux que ceci n'ait
27 pas explosé. Parce qu'il y en a un qui a atterri dans le jardin d'un civil
28 et les deux autres ont atterri dans le parc. Nous étions très heureux de
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1 constater que ces bombes aériennes n'aient pas explosé. Ce qui en dit long
2 sur le fait qu'ils étaient en possession de cela. Alors, s'ils ont réussi à
3 nous faire tomber cela sur la tête, ils devaient certainement l'avoir.
4 Q. Et vous souvenez-vous de la manière dont ils lançaient ces bombes
5 aériennes et comment ces bombes ont pu atterrir à Vrace ?
6 R. Je ne sais pas comment ils les larguaient. Je ne peux rien dire de
7 plus. Nous savons tous comment ils auraient pu les larguer, comme nous les
8 larguions. Ils ont affirmé que les bombes présumées venaient de notre côté
9 et que celles-ci sont tombées sur la Miljacka, et ils ont dit qu'ils les
10 ont extraites de la rivière et qu'ils ont utilisé les munitions pour leurs
11 grenades à fusil. Je crains qu'ils aient fait tomber ces bombes construites
12 de cette façon-là pour nous attaquer.
13 Autre chose que je souhaite dire aux Juges de la Chambre. Je disposais
14 d'informations précisant que la personne qui avait été à l'origine de ces
15 moyens militaires qui devaient être lancés par eux était M. Berko Zecevic,
16 qui travaillait dans l'usine Pretis, et il prônait l'emploi de tels moyens
17 militaires même avant cette date. Je vous fais part simplement des
18 informations dont je disposais à l'époque, même si je prétends rien du
19 tout. Je sais qu'il avait essayé de fabriquer de tels moyens militaires
20 lorsqu'il avait travaillé dans l'usine Pretis. Il était un homme compétent
21 et intelligent, qui était capable de faire cela. Il pouvait concevoir une
22 telle chose, qui avait une puissance suffisamment importante.
23 Et il fallait un certain savoir-faire technique avant de pouvoir les
24 larguer également.
25 Q. Nous allons y venir, Général. Je vous demanderais autre chose sur ce
26 sujet. Y avait-il des armes typiques de la JNA dont disposaient le SRK ou
27 la VRS dont ne disposait pas l'ABiH ?
28 R. Bon, c'était dans le sens inverse, cela dépendait du type d'arme. Je ne
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1 parle pas de la VRS dans son ensemble. Je ne vais parler que du SRK
2 maintenant. Nous n'avions pas les obusiers NORA, alors que le 1er Corps de
3 la BiH en avait. Et le 1er Corps le fabriquait dans l'usine Bratstvo et ne
4 cessait de le faire évoluer pendant la guerre. Nous ne disposions pas de ce
5 type de moyen militaire. Alors, pour ce qui est des autres choses que nous
6 avions, ils avaient la même chose, et tout ceci provenait de nos forces
7 armées. Les deux forces armées sont nées de la même façon, avaient la même
8 origine et disposaient des mêmes moyens militaires.
9 Q. Outre les obusiers NORA, est-ce qu'ils disposaient de canons de 133
10 millimètres ? Est-ce qu'ils avaient cela sur le mont Igman ?
11 R. En réalité, oui, ils avaient des fusils de 130 millimètres. Le canon
12 est long et le calibre est de 130. Pas aussi grand que ce que vous avez
13 dit, vous, parce que je ne pense pas qu'ils auraient pu gérer des armes
14 d'un calibre aussi important. En tant que professionnel ou militaire de
15 carrière, à mon sens, je n'ai pas connaissance de ce type de calibre.
16 Q. Merci.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le 1D7031,
18 s'il vous plaît. Il s'agit ici d'un enregistrement audio qui est daté du 10
19 août 1995, séance de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine.
20 Est-ce que nous pouvons avoir la page 7 en anglais et la page 8 -- 10 -- 8
21 à 10 en serbe.
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. Général, avez-vous subi les conséquences des attaques produites
24 par ces bombes aériennes avant la date du 10 avril ?
25 R. Je vous ai dit que nous n'avons eu à subir aucune conséquence. Je me
26 suis simplement rendu compte du fait qu'ils en avaient. Le problème qui se
27 posait à nous, c'est que c'était la dynamique des événements. Il m'a été
28 rapporté qu'un système d'une sorte ou d'une autre avait atterri à Nedzarici
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1 avec un pouvoir apparemment assez destructeur. Et, à vrai dire, je n'avais
2 pas le temps d'aller vérifier car les combats étaient si violents que nous
3 ne pouvions établir que les dégâts provoqués à Nedzarici, et cela devait
4 être fait pour permettre une percée de leur part ou non; et si la réponse
5 était négative, nous ne nous en occupions plus. Il semble qu'il y ait
6 quelque chose, un engin, qui ait atterri à Ilijas également. A l'époque,
7 nous ne pouvions pas se rendre sur place pour faire une enquête et préparer
8 un compte rendu, mais devions continuer avec nos combats.
9 Q. Merci. A la ligne 13, il figure, comme vous l'avez dit, "Nous étions
10 conscients du fait que nous les avions," mais vous avez dit que vous étiez
11 conscients du fait qu'eux, ils les avaient. Vous étiez conscients du fait
12 que les Musulmans disposaient de bombes aériennes ?
13 R. Oui, oui, j'ai pensé à cela.
14 Q. Permettez-moi de lire ce que Silajdzic a répliqué.
15 C'est la dernière phrase avant la prise de parole du président. Je cite :
16 "Et on parle de 26 avions qui étaient arrivés ces derniers jours.
17 S'il s'agit 10 000 lance-roquettes multiples, de 10 000 autres roquettes,
18 800 bombes aériennes, et cetera, alors je peux dire s'il s'agit de tout
19 cela que, entre autres, c'est…"
20 Et le président dit :
21 "Cela n'est toujours pas arrivé. On les attend."
22 Et Silajdzic continue :
23 "Lorsque j'ai parlé de quatre vols, il s'agissait des avions qui
24 étaient déjà partis. Cela veut dire que cela arrivait. S'il s'agit de cela,
25 je peux vous dire que cela était fourni par ma sœur ambassadrice au
26 Pakistan qui a démissionné. Pour ce qui est de l'argent, je me suis occupé
27 de cela. Donc cela avait déjà été payé par Brunei et Malaisie. Je ne sais
28 pas comment cela s'est passé."
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1 Saviez-vous qu'eux, ils achetaient ces moyens dans ces pays lointains
2 ?
3 R. Je savais que ces roquettes dont il est question dans ce document
4 avaient été utilisées contre les forces et les unités du Corps de Sarajevo-
5 Romanija. Pour ce qui est de la procédure appliquée par eux pour les
6 obtenir et les contacts qu'ils avaient utilisés pour le faire, je n'en
7 savais rien puisque cela ne relevait pas de ma compétence. Et moi, après
8 cela, dans la deuxième moitié de 1994 et en 1995, il y avait cette deuxième
9 phase de l'armement.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que la page en anglais ne correspond
11 pas à la page en serbe.
12 Peut-on verser au dossier ce document ?
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Permettez-moi de vérifier si on dispose
14 de la bonne version en anglais.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce sont les pages 7, 8 en anglais. C'est la
16 page précédente -- c'est le bas de la page précédente en anglais. Oui, on
17 peut y lire "800 bombes aériennes," et cetera. Et cela continue en haut de
18 la page 8.
19 Monsieur le Président, je proposerai que toute la transcription soit
20 versée au dossier parce qu'on a déjà versé des comptes rendus des séances
21 de l'assemblée, et cetera, on les a versés au dossier en bloc.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de la séance de l'assemblée.
23 Je ne suis pas certain s'il nous faut les verser tous. On va verser au
24 dossier les pages 7 et 8 de la version en anglais.
25 Oui, Madame Edgerton.
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, après avoir lu tout
27 le document, je pense que pour être davantage en mesure de comprendre le
28 contexte pour ce qui est des remarques en pages 7 et 8, il vaut mieux que
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1 cela soit versé en bloc.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si cela est nécessaire, cela peut être
3 versé au dossier en bloc.
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera versé sous la cote D2816.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
7 Puis-je poser la question suivante : les documents des autorités
8 musulmanes peuvent-ils être traités de la même façon que les documents
9 serbes, à savoir les verser au dossier dans leur intégralité pour pouvoir
10 s'appuyer sur ces documents lors des réquisitoires et plaidoiries ?
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez, Monsieur Karadzic.
12 M. KARADZIC : [interprétation]
13 Q. Disposions-nous de bombes aériennes ? Et pourquoi et comment on les
14 utilisait ?
15 R. Oui, nous avions des bombes aériennes. Et c'était le moyen dont nous
16 avions besoin puisque nous étions dans la situation où nous devions avoir
17 les moyens plus mortels, avec une puissance plus létale, vu les
18 circonstances qui étaient les nôtres, puisque nous ne pouvions pas utiliser
19 d'autres moyens avec une puissance moindre pour répondre à ce type de
20 situation.
21 Q. Aviez-vous suffisamment d'obus de différents calibres que vous
22 produisiez dans l'usine Pretis et qui avait une puissance plus grande ?
23 R. L'armée de la Republika Srpska est quelque chose qui est plus large par
24 rapport au Corps de Sarajevo-Romanija, on obtenait un certain nombre de ces
25 moyens de Pretis, mais cela ne suffisait pas. Et ce que j'ai déjà dit,
26 Pretis ne pouvait pas produire suffisamment de moyens de ce type parce
27 qu'il n'y avait pas de matières premières pour le faire. Et, en fait, nous
28 nous disposions pas de suffisamment de moyens pour organiser notre défense
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1 de façon satisfaisante.
2 Q. Merci. Lorsque dans les documents de l'Accusation on appelle ces bombes
3 "bombes aériennes modifiées", pouvez-vous nous dire si une bombe aérienne a
4 été modifiée, ou bien ces bombes avaient le mode de lancement modifié ?
5 Qu'est-ce qui a été modifié pour ce qui est de ces bombes aériennes ?
6 R. Il n'y a pas eu du tout de modifications sur les bombes aériennes pour
7 ce qui est du mode d'explosion, ou de puissance. Les bombes restaient les
8 bombes classiques. Pour ce qui est des modifications, on a utilisé cet
9 adjectif modifié puisque le mode de lancement était altéré. Nous
10 n'appelions pas ces bombes les bombes aériennes modifiées. Mais c'était
11 quelqu'un d'autre qui les a baptisées ainsi. Ce qui a été modifié, c'était
12 le mode de lancement, et ces bombes étaient lancées à partir du sol et non
13 pas de l'air. Une plateforme de lancement a été utilisé.
14 Q. Pouvez-vous nous dire comment ces bombes étaient lancées ? Et quel
15 était le carburant qui a été utilisé pour leur lancement ?
16 R. Si vous me le permettez, j'aimerais proférer une constatation. Pour ce
17 qui est de toutes ces phases de procès qui était le mien, j'ai pu entendre
18 la constatation que le Corps de Sarajevo-Romanija a conçu cette bombe, et
19 que c'était le Corps de Sarajevo-Romanija qui a utilisé le premier cette
20 bombe. J'ai appris une autre chose et j'ai obtenu d'autres informations par
21 rapport à cela.
22 Déjà en 1981 ou 1982, en tant que commandant du bataillon, j'ai bénéficié
23 d'une formation puisqu'une nouvelle arme a été introduite s'appelant Strela
24 1, Flèche 1, une arme antiaérienne. Et c'était en Slovénie, les commandants
25 de bataillon ont été formés pour ce qui est de l'utilisation de ces Strela
26 1. Et j'ai vu alors qu'il avait une plateforme de lancement. La maquette de
27 cette bombe était la maquette qui montrait la bombe aérienne de type Strela
28 1 en tant que bombe antiaérienne. Et moi j'ai étudié cette bombe Strela 1
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1 et non pas le mode de lancement et la plateforme de lancement. Mais plus
2 tard, je me suis rendu compte du fait que cela démontre que quelqu'un du
3 Corps de Sarajevo-Romanija n'avait aucunement pu conçu cela et que cela
4 avait été conçu ailleurs, à savoir que cette bombe soit utilisée et lancée
5 à partir d'une plateforme de lancement au sol.
6 Q. Pouvez-vous nous dire quel était le carburant utilisé ou l'engin
7 utilisé pour lancer ces bombes ? Pouvez-vous nous dire quelque chose de la
8 nature de ces engins ou de ce carburant ? Et la précision également ?
9 R. Je peux tout vous dire là-dessus en vous expliquant la chose suivante.
10 Au commandement du corps, on s'est mis d'accord pour que le lieutenant-
11 colonel Ugresic Milan soit engagé pour qu'il soit ce lien entre. Mais avant
12 cela, je dois dire, je dois vous faire comprendre que la région de
13 Sarajevo, les usines se trouvant à Sarajevo produisaient des produits à des
14 fins spéciales Pretis, Orao, [inaudible] et cetera. Il s'agissait de la
15 zone où il y avait des usines où travaillaient beaucoup d'ingénieurs et
16 d'experts pour les armes, et ils voulaient peaufiner certaines choses pour
17 nos besoins, les perfectionner, et nous ne pouvions pas nous appuyer sur
18 ces gens puisqu'ils avaient peut-être d'autres idées. C'est pour ça que le
19 lieutenant-colonel Ugresic devait jouer le rôle de quelqu'un qui reliait
20 ceux qui montaient des moteurs sur cette rampe de lancement. Et l'homme --
21 c'était l'homme, quelqu'un qui était expert dans ce domaine-là, qui était
22 très consciencieux, et il surveillait leur travail pour pouvoir nous dire
23 si cela pouvait être utilisé ou pas. Et il nous a informés que ces experts
24 travaillaient sur le perfectionnement de cette arme, et il se trouvait en
25 personne sur le terrain, où il y avait des tests de ce type d'arme, et nous
26 avons obtenu un moyen, une arme qu'on pouvait utiliser dans les combats.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous nous dire le nom de ce
28 lieutenant-colonel, vous aviez dit que son prénom était Milan.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Ugresic, Milan Ugresic.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
4 M. KARADZIC : [interprétation]
5 Q. Quelles étaient les roquettes, ou plutôt les moteurs utilisés et montés
6 sur les bombes aériennes ? Etiez-vous au courant de cela ? Connaissiez-vous
7 les données techniques de ces moteurs ?
8 R. Je vous ai donné la réponse là-dessus, je vous ai dit qui était en
9 charge de cela, de surveiller ce processus, et cette personne m'en a
10 informé, bien sûr. Maintenant, je ne peux pas vous parler de détails pour
11 ce qui est de sa description de ces moteurs, je ne peux pas vous parler de
12 la construction de ces moteurs et de leur utilisation. Pour autant que je
13 sache, il s'agissait des moteurs, puisque je n'en connais qu'une partie de
14 ces données techniques, ces moteurs étaient les moteurs de lance-roquettes
15 multiples. Je ne connais pas l'appellation exacte de ce moteur. C'était le
16 moteur qui était utilisé pour lancer des roquettes, des lance-roquettes
17 multiples.
18 Q. Merci. KDZ838, un témoin protégé, a témoigné qu'il y avait des
19 informations selon lesquelles avant l'utilisation de cette bombe, ces
20 bombes ont été testées sur Zuc ou à Zuc. Saviez-vous qu'il y avait des
21 tests de ces bombes avant leur utilisation ?
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.
23 Madame Edgerton, vous avez la parole.
24 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais que Dr Karadzic nous éclaircisse
25 pour ce qui est de cette citation. Je pense que c'est erroné, et c'est une
26 question directrice.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro du témoin ?
28 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pense que cela n'existe pas. Dans le
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1 compte rendu il figure qu'il s'agit du "Témoin 3093". C'est ce que j'ai
2 entendu du Dr Karadzic.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est pour cela que je vous ai posé
4 cette question.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit "383". Je n'ai pas dit 0. Je ne pense
6 pas qu'il ait été protégé, mais --
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois pas ce numéro. Madame
8 Edgerton, pouvez-vous dire le nom du témoin, s'il n'était pas un témoin
9 protégé.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Permettez-moi de vérifier cela.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, avez-vous le numéro ?
12 M. ROBINSON : [interprétation] Je pense à quelqu'un, mais je ne suis pas
13 sûr qu'il s'agisse de la même personne. Je pense qu'il faudrait prendre le
14 numéro fourni par l'Accusation.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'il n'a pas été protégé, ce témoin.
16 S'il a été protégé, il faut expurger cela.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, il n'a pas été protégé.
18 M. ROBINSON : [interprétation] Il avait le numéro 383.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci.
20 Avez-vous vérifié ce point, cette référence par rapport à l'objection
21 de Mme Edgerton ?
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Sladojevic est en train de chercher cela.
23 Nous allons confirmer cela plus tard.
24 M. KARADZIC : [interprétation]
25 Q. Mon Général, est-ce que vous avez été informé pour ce qui est de la
26 précision de ces moyens et de la façon à laquelle cela a été déterminé ?
27 R. Oui. Milan Ugresic avait indiqué que les experts qui avaient travaillé
28 sur ces moyens militaires avaient pratiquement -- en fait, les avait
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1 tellement peaufinés qu'ils les avaient peaufinés jusqu'à en faire un moyen
2 militaire extrêmement précis. Si la cible était visible, si les calculs
3 étaient bien faits, alors l'arme en question pouvait toucher la cible.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Page du compte rendu d'audience 7 217, ligne 16
5 à 20, il s'agit du Témoin Soja.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Alors, est-ce qu'il vous a informé de l'endroit où ces tests ont été
8 faits ?
9 R. Sur le polygone d'entraînement, le polygone de tir de Kalinovik. En
10 fait, c'est un espace tout à fait ouvert en direction du mont Zelengora.
11 Q. Merci. Et ces bombes, d'où elles ont été tirées, et dans quelle mesure
12 est-ce que leur précision était importante pour vous et vos forces ?
13 R. Alors, ils tiraient ces armes à partir de la zone de responsabilité du
14 Corps de Sarajevo-Romanija. Cette zone ou ce secteur se trouve derrière les
15 lignes des unités qui, elles-mêmes, se trouvaient dans leurs tranchées, et
16 s'il y avait des zones résidentielles le long de cet axe, ces bombes
17 traversaient alors ces zones. Mais bon, ce sont des situations qui ont
18 quasiment, la plupart du temps, qui ont été évitées et ils choisissaient
19 les localités où les bombes aériennes pouvaient survoler seulement nos
20 unités. Alors, du fait de ces circonstances, du fait de ces conditions, il
21 fallait être extrêmement prudent. Je dois vous dire qu'il fallait
22 véritablement que tout cela soit précis parce que sinon, la bombe aurait pu
23 atterrir ou tomber sur mes forces.
24 Et que quelque chose soit bien clair. Je sais que lorsque nous
25 parlons de Soja, il a effectivement parlé d'examens, de tests ou d'essais
26 qui avaient été faits et que la bombe aérienne était tombée sur un hangar.
27 Alors, il s'agit du territoire qui était placé sous le contrôle de la VRS.
28 Moi, je ne sais rien à propos de cette période. Quand la bombe est tombée
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1 là-bas, il faut savoir que tout notre travail a été abandonné jusqu'à ce
2 que les conditions existent pour que l'on puisse perfectionner le matériel
3 électronique.
4 Q. Merci. Et combien de bombes aériennes ont été utilisées au poste de
5 défense avancé ou dans la partie avancée de la défense au niveau de la
6 périphérie extérieure, et combien sont tombées dans la ville de Sarajevo à
7 proprement parler ?
8 R. Alors, en matière de bombes aériennes, voilà quels sont les éléments
9 qu'il faut prendre en considération. Nous avons utilisé deux bombes
10 aériennes, une à Nisici et l'autre à Trnovo, en direction de Treskavica.
11 Alors, ça, c'était à une époque où l'offensive suivait son cours. Ils n'ont
12 pas réagi, ils n'ont pas dit qu'ils avaient été touchés par quelque chose,
13 mais le fait est que leur progression a été arrêtée. Et de toute façon,
14 personne n'était véritablement intéressé à ce que la bombe soit utilisée
15 contre ces localités. Il était considéré que les bombes aériennes étaient
16 des bombes qui n'étaient pas dangereuses, et puis après, elles sont
17 devenues la chose à craindre pour les zones urbaines. Elles ont été
18 utilisées dans les deux zones, mais pas de la même façon. Soudainement,
19 quelqu'un a indiqué que cette bombe avait été véritablement ce qui
20 expliquait le plus grand coupable des meurtres subis par la population.
21 Q. Et quelle a été sa précision à Nisici et Trnovo ? Est-ce que vous
22 pourriez dire aux Juges de la Chambre quelle est la distance qui sépare ses
23 deux lieux de la ville et dans quelle direction ?
24 R. Oui, oui, tout à fait. Alors, pour ce qui est de la localité de Nisici
25 et de tous les secteurs qui l'entourent, je dirais qu'ils sont à quelque 40
26 à 42 kilomètres de la ville. Et d'ailleurs, c'est à peu près la même
27 distance, peut-être un peu moins lorsque l'on pense à la distance entre
28 Trnovo et Treskavica, lorsque les bombes étaient tirées depuis Trnovo sur
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1 Treskavica. Bon, je ne peux pas véritablement en parler avec beaucoup de
2 précision, à l'exception du fait que je vous dirais que leurs attaques ont
3 été arrêtées, se sont arrêtées, ce qui signifie que notre bombe aérienne
4 nous avait permis de parvenir à notre but.
5 Q. Mais quand est-ce que ces bombes ont commencé à être utilisées dans la
6 ville de Sarajevo ?
7 R. Nous avons évalué les périodes pour voir le type d'opérations de combat
8 qui nous attendaient. Alors, je vous ai déjà parlé à plusieurs reprises de
9 ces évaluations qui étaient effectuées, et nous avons décidé d'opter pour
10 une nouvelle stratégie. Nous avons décidé de demander des renforts. Nous
11 avons pu constater qu'ils avaient ouvert le feu depuis l'extérieur de la
12 ville parce qu'ils avaient, en quelque sorte, conclu qu'ils obtiendraient
13 moins de succès en essayant d'opérer une percée à partir de la ville. Et
14 c'est la raison pour laquelle nous avons commencé à demander des renforts,
15 pour essayer de mettre un terme à ce massacre sur ces axes.
16 La situation avait bien été évaluée; toutefois, la suite des événements ne
17 s'explique pas seulement par ces évaluations. Lorsqu'ils ont obtenu des
18 renforts et pendant les offensives, ils sont devenus particulièrement
19 efficaces, et ils pouvaient opérer des percées à partir de la ville de
20 Sarajevo. La 12e Division avait grandi en effectifs et en matériel
21 également d'ailleurs, ce qui fait que nous nous sommes rendu compte que
22 nous devions véritablement ouvrir le feu sur ces forces qui opéraient des
23 percées à partir de ces zones.
24 Q. Dans mon acte d'accusation, ils me reprochaient un événement qui s'est
25 déroulé le 24 mai 1995. Alors, il s'agit de la rue Safeta Zajke, une bombe
26 serait tombée à quelque 100 mètres d'un complexe industriel, complexe qui
27 s'appelait Zica [phon]. Il a été dit que deux personnes ont été tuées. Vous
28 souvenez-vous des circonstances de ce jour-là ? Donc, il s'agissait du 24
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1 mai, et de cet événement, de cet événement dans la rue Safet Zajko [phon],
2 et je pense qu'avant elle s'appelait Drinska.
3 R. S'il s'agit d'opérations militaires et d'évolutions de la situation
4 lors de cette période, je me souviens de tout, notamment pour ce qui est de
5 cette localité. Alors lorsque nous avons obtenu des renseignements suivant
6 lesquels ils avaient concentré ou qu'ils avaient rassemblé des armes,
7 notamment des mortiers de 120-millimètres, parce que n'oublions pas que ce
8 dont nous parlons maintenant, c'étaient leurs tentatives de couper notre
9 route de Lukavica jusqu'à Pale, en passant par Trebevic, et dans un endroit
10 qui s'appelle Zlatiste. Et ils ont agi de façon si coordonnée qu'ils
11 attaquaient sur un axe avec des armes, et dans une autre zone, dans un
12 autre secteur, ils préparaient leur percée vers Nedzarici.
13 Alors, pour ce qui est de cet incident, de cet événement dans la rue Safet
14 Zajke --
15 Q. Oui.
16 R. -- il y avait des armes de 126-millimètres, et ils avaient couvert le
17 secteur de Nedzarici et une partie d'Ilidza par des tirs d'artillerie
18 nourris. Ils ont transféré leurs effectifs vers le territoire ou le secteur
19 de Stupsko Brdo, et une fois les tirs d'artillerie effectués, ou terminés,
20 l'infanterie était censée opérer une percée. Alors, nous les avions stoppés
21 à Safet Zajke avec cette bombe aérienne, et il y avait eu, si mes souvenirs
22 sont bons, six mortiers à la rue de Safet Zajke.
23 Q. Mais quelles étaient, le 24 mai et autour du 24 mai, les opérations qui
24 ont été conduites, si vous vous en souvenez ?
25 R. Il y a eu des tentatives de lancer des activités offensives, mais leurs
26 efforts ou leurs activités -, je ne peux pas les qualifier de leur vrai
27 nom, pour bien rendre les choses précises - mais ça nous a fait comprendre,
28 à nous autres, qu'ils s'efforçaient de trancher le résultat de la guerre ou
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1 d'aboutir à un résultat dans la guerre en opérant cette percée. Notre
2 riposte à tout ceci, c'est-à-dire à ces activités très nourries, a été
3 interprété comme si nous voulions mettre en péril Sarajevo, et très
4 rapidement il y a eu des frappes aériennes de l'OTAN sur les territoires se
5 trouvant aux alentours de Sarajevo.
6 Q. Vous parlez des activités de l'OTAN du mois de mai, non pas celles du
7 mois d'août, n'est-ce pas, du 25 mai ?
8 R. Oui, oui. Non, on n'a pas parlé du mois d'août du tout à présent.
9 Q. Merci. Dans le même acte d'accusation, s'agissant de la même journée,
10 celle du 24 mai, on me reproche la rue Majdanska, où, dans une zone
11 d'habitation, il est arrivé une bombe aérienne avec deux morts et six
12 blessés, comme résultat. Alors, est-ce que vous pouvez nous dire si cette
13 rue faisait partie du secteur englobé par l'offensive, et quelles étaient
14 les activités déployées à cet endroit-là ?
15 R. Oui, tout ça, ça fait partie de ce site. Ça fait partie de Novo
16 Sarajevo, et c'est de là que viennent, que sont lancées leurs offensives,
17 mais ce site concret de la rue Majdanska, il fait partie de la 101e Brigade
18 de Montagne, du point de vue territorial. Cela fait que leurs effectifs et
19 leur axe de déplacement, ou tentatives d'opérer des percées se faisaient
20 par la rue Ozrenska, qui est, d'ailleurs, très connue, parce qu'il y a une
21 espèce de pic de monticule du haut d'Ozrenska d'où on voit la rue
22 Majdanska. Et ils avaient apporté un soutien de tir à des effectifs à eux
23 qui ont essayé de couper la rue Ozrenska, mais la rue Ozrenska, c'est comme
24 le tranchant d'un couteau. Ceux qui passeraient du côté sud pouvaient dire
25 qu'ils avaient réussi, et notre pouvoir de les stopper n'aurait plus
26 existé. Donc, partant de ce site, ils avaient ouvert des tirs au mortier.
27 Ce que je sais c'est que cette bombe aérienne est tombée à un endroit donné
28 sans tuer personne. Je le sais partant d'information à eux. Et à l'acte
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1 d'accusation on dit qu'il y a eu des morts. Mais je ne sais pas vous en
2 dire plus.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, le G-11 à l'acte
4 d'accusation fait référence à un missile. Est-ce que dans les chefs
5 d'accusation, présentés par l'Accusation, on dit qu'une bombe serait tombée
6 dans le secteur de Safeta Zajke, et que c'est une bombe aérienne modifiée
7 qui est tombée le 24 mai ?
8 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est le cas.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
10 Veuillez continuer, Monsieur Karadzic, s'il vous plaît.
11 M. KARADZIC : [interprétation]
12 Q. Général, je n'ai peut-être pas été tout à fait clair. Dans la rue de
13 Majdanska, la bombe a touché un poste de transformation d'électricité, et
14 c'est à 130 mètres de là que se trouvait la zone résidentielle la plus
15 proche. Est-ce que vous pensez que ceci était admissible, compte tenu du
16 degré de précision qu'on pouvait obtenir d'une bombe aérienne ?
17 R. Je ne veux affirmer rien du tout. Je ne sais pas comment mes
18 affirmations seront comprises par les Juges de la Chambre. Ce que je sais,
19 c'est que si nous avions voulu tirer vers un site qui était considéré comme
20 dangereux par nous, et j'estime que c'était justifié que de faire stopper
21 leur tir. Pour ce qui est maintenant de la distance de 130 mètres ou de 140
22 mètres vis-à-vis des zones résidentielles, ce que je maintiens c'est que
23 dans cette zone résidentielle, rien ne pouvait porter atteinte à cette zone
24 du fait de ces tirs. Bien entendu, ça a généré du mécontentement, mais pour
25 ce qui est des résultats, pour ce qui est des morts, des destructions ou du
26 nombre de blessés, non, ça n'a rien fait du tout.
27 Q. Merci. Le 26 mai, dites-on à l'acte d'accusation, dans la rue Safet
28 Hadzic [phon], il est tombé une bombe, et il y a eu deux personnes de
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1 grièvement blessées et 12 blessés légers. Alors, est-ce que vous savez nous
2 dire quel a été l'objectif poursuivi par ce tir, par le tir de ce
3 projectile ? Est-ce qu'à ce moment-là, il y avait encore une offensive de
4 l'armée musulmane en cours ?
5 R. Pour répondre d'abord au sujet de l'offensive. J'exclus, parce qu'il
6 est impossible de nous voir tirer si c'était calme et que si personne ne
7 nous attaquait. Ce que je sais, et pour autant que je m'en souvienne,
8 d'après les rapports qui me sont parvenus aussi, on avait amené là des
9 effectifs nouveaux, des effectifs frais sur cette zone d'attaque, parce que
10 avec certaines forces, et j'essaie là de vous démontrer qu'il y avait une
11 intention de passer par Nedzarici pour rejoindre la 104e Brigade et opérer
12 donc une jonction de cette façon, et les renforts qu'ils ont fait venir là,
13 c'étaient des renforts de la taille d'un bataillon qui étaient dans un
14 secteur d'attente. Et on voit que l'intention est celle de venir en aide
15 pour lancer l'attaque, et c'est là qu'il y a eu des tirs de faits, parce
16 qu'on sait qu'un bataillon a été amené là pour attendre, et ils étaient au
17 nombre de 600, environ.
18 Q. Merci. Alors, Général, dites-nous, pour le 16 juin, quelle était la
19 situation au niveau du théâtre des combats à la date du 16 juin 1995 ?
20 R. Dans ce secteur, et on a déjà parlé, d'ailleurs, de la date en
21 question, il y a eu ce contact d'opéré avec le général Mladic. J'ai fourni
22 une information et une explication disant que leur célèbre offensive avait
23 commencé, le Tehber, ça avait commencé, mais peu importe. Ce qui importe
24 c'est qu'à ce moment-là il y a une situation de générée où il nous faut
25 trouver une voie de sortie, une issue. Cette date du 16 juin, je dirais que
26 toutes ces situations, j'en ai eu connaissance, mais le 16 juin, pour ce
27 qui est de la bombe aérienne que l'on dit avoir été tirée en direction de
28 la rue Dositejeva au centre de Sarajevo, moi, ce que je sais vous dire,
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1 c'est que ce n'est pas l'œuvre du Corps de Sarajevo-Romanija, ce n'est pas
2 sa bombe, si tant est que bombe a été tirée. Il en va de même pour ce qui
3 est de la rue qui n'est pas mentionnée dans votre acte d'accusation, la rue
4 Cobanija. Cette rue Cobanija, c'est l'ex-rue Masarykova, la rue de Masaryk.
5 On affirme qu'une bombe à nous est tombée, une bombe aérienne qui est
6 tombée là, qui a endommagé une installation de chauffage.
7 Pour ce qui est de la rue Dositejeva, ça a endommage des toilettes. Et il y
8 a eu, dit-on, cinq entreprises de détruites. Mais c'est le strict centre-
9 ville de Sarajevo, cela. On dit qu'il y a eu cinq entreprises là alors
10 qu'il n'y en existait aucune. Il y avait peut-être des bureaux, mais pas
11 cinq entreprises en tant que telles. Ce que je maintiens, donc, c'est que
12 le Corps de Sarajevo-Romanija n'a pas tiré cela, ces deux bombes. Pour ce
13 qui est des autres, oui.
14 Q. Aviez-vous connaissance de cibles militaires dans la rue Dositejeva,
15 indépendamment du fait de savoir si c'était le Corps de Sarajevo-Romanija
16 qui avait tiré ou non et de savoir s'il y avait une bombe, s'il y avait des
17 cibles militaires à cet endroit ?
18 R. J'ai déjà dit auparavant que j'étais au courant de tout, mais bien sûr,
19 il y avait peut-être des choses que je ne savais pas. J'étais au courant de
20 ce qui s'était passé sur la rue Dositejeva et que le 1er Corps avait son
21 commandement dans le voisinage. Je savais qu'il y avait des gens -- que
22 l'équipe de l'escouade de ce ceux qui coupaient les têtes, j'ai reçu un
23 rapport à ce sujet puisqu'ils avaient élu domicile à cet endroit, mais je
24 ne suis pas y allé pour vérifier.
25 Q. L'acte d'accusation allègue que trois personnes ont été légèrement
26 blessées. Alors, à quel type de dégâts vous attendriez-vous si cet endroit
27 avait été touché par une bombe aérienne ?
28 R. Eh bien, c'est ce que je dis, si cela était effectivement tombé à cet
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1 endroit, cela aurait certainement provoqué des dégâts plus importants. Et
2 si cela n'a provoqué aucun dégât, eh bien, je me demande de quoi il s'agit.
3 Cet incident a été cité au cours de mon procès également. Il n'y a pas un
4 seul témoin qui est venu déposer à la barre au sujet de ces incidents pour
5 dire oui ou non. M. Berko Zecevic en a parlé.
6 Une des premières allégations de l'équipe des enquêteurs était de dire que
7 la bombe aérienne avait été lancée depuis Pionirska Dolina, ce quartier-là,
8 et si vous tiriez quelque chose de cet endroit, eh bien, vous attendriez
9 plusieurs tours avant d'atteindre Dositejeva. Mais Berko Zecevic vient dire
10 que : non, ceci a été tiré depuis l'usine Pretis. Donc, il y a différentes
11 versions. A mon sens, ce n'était ni l'un ni l'autre.
12 Q. Le 16 juin, l'acte d'accusation déclare que la bombe aérienne a touché
13 la Place de l'amitié internationale - je vais dire plus tard dans quelle
14 zone de la brigade cela se situait - en blessant légèrement sept personnes.
15 Cela faisait partie de quelle opération militaire, tout ceci, et c'était
16 dans la zone de responsabilité de qui, cette Place de l'amitié
17 internationale ?
18 R. Je suis certain que c'était dans la zone de responsabilité de la 102e
19 Brigade de Montagne, qui était en contact directement avec -- et qui
20 attaquait notre bataillon à Nedzarici, encore une tentative visant à mettre
21 un terme à leur attaque.
22 Q. Je comprends que vous ayez des réserves quant au nombre de victimes à
23 propos de cet incident. Même l'acte d'accusation précise que le nombre
24 total de victimes, le nombre de personnes tuées par cette bombe aérienne,
25 était de cinq. Comment entendez-vous cela et comment percevez-vous cela en
26 termes de droit international de la guerre ? Quand bien même nous aurions
27 agi ainsi, quand bien même nous aurions été responsables, que répondez-vous
28 lorsqu'on dit qu'il y a eu cinq victimes au total ?
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1 R. Alors, en termes de droit, je ne dis pas que cinq personnes tuées, cela
2 n'est rien. C'est beaucoup. Ça c'est une chose. Deuxièmement, s'ils
3 donnaient cette image d'une arme extrêmement destructive, dans ce cas, ce
4 chiffre semblerait indiquer que ce n'était pas le cas. Mais en choisissant
5 bien les cibles et en tirant de manière précise, c'est possible d'éviter
6 des pertes de victimes civiles si on ne prend pour cible que des
7 militaires.
8 Q. Une offensive de grande ampleur était-elle lancée au moment de ces
9 incidents ?
10 R. Oui. Manifestement, l'ennemi avait engagé des forces très importantes
11 pour trouver une solution à leur problème, et leur problème consistait à
12 faire rejoindre ces troupes et intégrer davantage l'unification de la
13 Bosnie, comme ils le percevaient sous leur contrôle. Moi, je ne souhaitais
14 pas aborder les questions à savoir si leurs plans étaient réalistes ou pas.
15 Mais dans le Corps de Sarajevo-Romanija, toute personne jusqu'au dernier
16 homme était déterminée à protéger son foyer et son quartier. Finalement,
17 ils ont dû partir et ont été chassés mais, néanmoins, ils étaient heureux
18 de voir qu'ils n'avaient pas été vaincus, militairement parlant.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors quel est le numéro de l'annexe sur
20 ce qui s'est passé le 16 juin à la Place de l'amitié internationale ?
21 Madame Edgerton, s'il vous plaît.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est G-15, et pour ce qui est du nombre de
23 victimes, c'est sept personnes légèrement blessées et non pas cinq.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a eu des personnes tuées
25 ?
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Non.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agissait de cinq personnes tuées, pour ce
28 qui est de tous les incidents, et je n'ai pas calculé le nombre de
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1 personnes blessées.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant j'ai compris.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Et finalement, pour ce qui est de la première utilisation de la bombe
5 aérienne dans la zone du Corps de Sarajevo-Romanija, et non pas sur la zone
6 urbaine restreinte, a eu lieu le 7 avril 1995.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et pour cela, j'aimerais qu'on affiche P01201.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je me demande si le
9 Dr Karadzic pourrait reformuler cette question --
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous ne pouvez pas
11 témoigner ici.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'interprète mon acte d'accusation. Cet
13 incident est mentionné dans l'acte d'accusation, avec cette date-là,
14 puisque maintenant je voudrais en parler de cette accusation en mon
15 encontre. Mais si vous le voulez, nous pourrons continuer demain.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] De quel paragraphe s'agit-il ?
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agit du paragraphe G-10.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voulez-vous poser la dernière question
19 pour ce qui est de l'audience d'aujourd'hui ?
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.
21 M. KARADZIC : [interprétation]
22 Q. Reconnaissez-vous ce document ? Pouvez-vous nous dire pourquoi vous
23 avez donné cet ordre et dans quelles circonstances, parce que cela ne
24 concerne pas l'offensive dont on a parlé ?
25 R. Il me semble que j'ai fait comprendre durant ma déposition quels
26 étaient les événements, les activités et les circonstances qui prévalaient
27 dans le quartier de Hrasnica, dans le quartier de Sokolovic Kolonija et
28 dans le quartier de Butmir. La Brigade d'Ilidza, et la zone que cette
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1 brigade défendait, se trouvait sous le feu des forces se trouvant à
2 Hrasnica, à tel point qu'il serait agi de l'extermination des combattants
3 et la population également. Et pour ce qui est de la zone où la défense
4 était organisée par la 2e Brigade de Sarajevo, à savoir le village de
5 Grlica, de Vojkovici, et la zone en direction de Lukavica, était exposée
6 aux tirs plus intenses encore. Et je suis prêt à vous décrire cela, et je
7 suis prêt à vous dire ce que ces gens ont fait. Toutes les armes qui
8 devaient entrer dans la ville étaient arrêtées là, puisque cela arrivait
9 via le mont Igman. Et la 104e Brigade motorisée était bien armée, et cette
10 brigade était la brigade qui ne respectait personne, même pas leur
11 commandement. Et il s'agissait des comportements qui pouvaient être
12 assimilés à des conduites extrêmes et non pas des conduites ressemblant à
13 une percée.
14 Et pour ce qui est de ces armes, ces armes étaient déployées à
15 Niksici et à Trnovo. Il s'agissait d'une zone militaire dans laquelle
16 étaient déployées des forces en grand nombre qui lançaient des attaques
17 contre l'usine de moteurs, et cetera. Et lorsque mes officiers m'ont
18 informé du fait qu'il était insupportable de se défendre par rapport aux
19 tirs qui provenaient de Hrasnica - des projectiles de canons de type ZIS du
20 calibre 76 millimètres - ils m'ont proposé d'utiliser une bombe aérienne.
21 J'ai décidé de l'utiliser. J'ai leur ai demandé de choisir une cible pour
22 que l'ennemi soit un peu arrêté dans ses attaques.
23 Q. C'est de quoi parle le premier paragraphe, où on peut lire depuis trois
24 jours ils attaquent; c'est ça, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
26 Q. Et de la zone de l'usine Famos, également ?
27 R. Oui.
28 Q. Merci.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, cela a été déjà versé au
2 dossier comme étant la pièce à conviction de l'Accusation. Je peux
3 m'arrêter là.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
5 Nous allons reprendre demain matin à 9 heures. L'audience est levée.
6 --- L'audience est levée à 14 heures 48 et reprendra le mardi, 29 janvier
7 2013, à 9 heures 00.
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