Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 19 novembre 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  7   Oui, Monsieur Robinson.

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je

  9   souhaiterais présenter aux Juges de la Chambre notre stagiaire en matière

 10   de droit qui intervient au côté de notre équipe. Elle est originaire des

 11   Pays-Bas.

 12   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas bien entendu le nom.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 14   Avant que de continuer, il y a un sujet que j'aimerais aborder. A

 15   l'occasion de l'évaluation de la requête de l'accusé pour ce qui est du

 16   versement au dossier de documents marqués à des fins d'identification et

 17   déposée le 7 novembre 2013, suite obtention d'une réponse de l'Accusation

 18   déposée le 18 novembre 2013, la Chambre fait remarquer que l'accusé n'a pas

 19   fourni de détails suffisants pour ce qui est de l'admission préalable de

 20   cinq conversations interceptées où on a demandé que la Chambre en prenne

 21   connaissance avec versement d'éléments déjà prouvés pour ce qui est de leur

 22   authenticité. Et la Chambre a dit par le passé, qu'il y a eu instruction à

 23   l'attention de l'accusé, de faire en sorte d'ici au 25 novembre 2013, de

 24   fournir les informations supplémentaires pour ce qui est du versement

 25   préalable des conversations interceptées, y compris les références des

 26   transcriptions avec les sous-titres et les dates de décision écrite de leur

 27   versement respectif.

 28   Monsieur Tieger, vous pouvez y aller.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   LE TÉMOIN : MOMCILO KRAJISNIK [Reprise]

  3   [Le témoin répond par l'interprète]

  4   Contre-interrogatoire par M. Tieger :

  5   Q.  [interprétation] Monsieur Krajisnik, je voudrais commencer avec une

  6   chose à laquelle vous avez fait allusion à l'occasion de votre

  7   interrogatoire au principal, à savoir votre procès et votre condamnation.

  8   On vous a jugé partant de chefs d'accusation liés à votre participation à

  9   une entreprise criminelle commune suite à quoi vous avez été condamné et

 10   vous avez été mis en accusation au côté de différentes personnes, y compris

 11   M. Karadzic et le général Mladic, pour ce qui est d'un déplacement forcé de

 12   Musulmans et de Croates de grands secteurs de Bosnie-Herzégovine, y compris

 13   35 municipalités. N'est-ce pas

 14   R.  Oui. C'est ainsi que cela a été formulé dans le premier des jugements

 15   rendu.

 16   Q.  Bien. Et parmi ces municipalités il y avait Banja Luka, Bijeljina,

 17   Bosanski Novi, Bratunac, Foca, Hadzici, Ilidza, Kljuc, Novi Grad, Novo

 18   Sarajevo, Pale, Prijedor, Rogatica, Sanski Most, Sokolac, Visegrad,

 19   Vlasenica, Vogosca, et Zvornik ? C'est les municipalités qui ont été

 20   englobées par l'acte d'accusation et par le jugement rendu, n'est-ce pas ?

 21   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, dans le premier des actes d'accusation on

 22   avait englobé les dites municipalités; dans le premier des jugements rendus

 23   certaines municipalités ont été mises de côté et dans le deuxième jugement

 24   rendu la majeure partie des municipalités a été mise de côté. On a gardé

 25   que neuf municipalités au final.

 26   Q.  Le jugement est disponible pour tout un chacun. Et d'ailleurs, je vais

 27   vous fournir une copie en serbe. Vous allez voir que le jugement rendu a

 28   englobé plus de neuf municipalités, et on va s'occuper de certaines de ces


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  1   municipalités concrètes au fil de mon contre-interrogatoire.

  2   Lors de l'évaluation de votre responsabilité, la Chambre de première

  3   instance a constaté que votre implication a été d'une importance cruciale

  4   pour ce qui est de la perpétration de crimes, c'est ce qui se trouve au

  5   paragraphe 1158 de votre jugement. Et à votre intention, Monsieur

  6   Krajisnik, je vais vous faire -- pas communiquer -- vous faire remettre une

  7   copie du jugement dans votre langue. Il s'agit du 65 ter 24274. C'est

  8   téléchargé dans les deux langues. Je fais référence au paragraphe 1158

  9   s'agissant des conclusions que je viens d'énoncer, Monsieur Krajisnik.

 10   R.  Je ne suis pas un juriste, mais si j'ai bien compris, il s'agit

 11   d'événements de neuf municipalités qui ont été retenus au titre de la

 12   condamnation, à savoir Trnovo, Sokolac, Bratunac, Zvornik, Bijeljina,

 13   Prnjavor, Banja Luka, Sanski Most et Krupa. Il n'y a pas un seul autre

 14   événement à l'extérieur de ces municipalités où au jugement j'ai été

 15   condamné. Alors j'émets ici certaines réserves. Je vous parle en ma qualité

 16   d'ex-accusé. J'ai été condamné. Il se peut que quelqu'un interprète

 17   l'ensemble sur un plan juridique de façon différente.

 18   Q.  Vous avez tout à fait l'opportunité de vous pencher sur ce paragraphe

 19   1158 et vous allez voir que les Juges de la Chambre de première instance

 20   ont constaté que votre implication dans ces événements a été cruciale pour

 21   ce qui est de la perpétration des crimes qui vous ont été reprochés et qui

 22   vous ont fait condamner.

 23   R.  Ceci est le premier des jugements rendus. Vous avez raison. Il y avait

 24   eu dans un premier jugement rendu plus de municipalités que cela. Moi, je

 25   parle du jugement final qui a écarté un certain nombre de municipalités.

 26   C'est ainsi que j'ai compris les choses. Pour ce qui est ma participation -

 27   -

 28   Q.  Excusez-moi, Monsieur Krajisnik. Pourriez-vous nous dire autre chose --


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  1   terminez votre pensée ?

  2   R.  Vous n'auriez pas dû m'interrompre alors.

  3   Q.  Monsieur Krajisnik, je vais prendre la liberté de vous interrompre

  4   lorsque vous ne répondrez pas à ma question. Vous avez commencé à suivre un

  5   fil différent, puis -- pour parler de municipalités, puis vous êtes arrivé

  6   à la question que j'ai posée. Donc, j'aimerais bien que vous répondiez à la

  7   question que je vous ai posée. Continuez avec votre participation.

  8   R.  J'ai dû répondre de la sorte. Vous vous êtes trompé. C'est pour cela.

  9   Vous m'avez dit que j'ai été accusé pour 35 [comme interprété]

 10   municipalités, alors c'est le cas pour 9. Donc, j'ai dû vous rectifier.

 11   Q.  Monsieur Krajisnik, la question était celle de dire ou de vous demander

 12   si la Chambre vous avait trouvé coupable d'implications dans des crimes et

 13   ce, de façon cruciale pour leur perpétration. Et j'attire votre attention

 14   sur le paragraphe 1158. Alors, veuillez répondre à la question.

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

 16   j'estime que M. Tieger ne devrait pas adopter ce type d'attitude à l'égard

 17   du témoin.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez fait référence aux

 19   municipalités vous-même et il est donc tout à fait équitable de voir le

 20   témoin commenter ces municipalités. Continuons.

 21   Monsieur Krajisnik, moi, je vous demanderais de répondre aux questions

 22   posées. Monsieur Tieger vous a posé une question au sujet du passage du

 23   paragraphe 1158 de votre jugement en première instance où l'on a affirmé

 24   que votre rôle avait été d'une importance cruciale. Veuillez répondre à

 25   cela, je vous prie.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Partant du jugement au final, ma participation

 27   à l'entreprise criminelle commune a été jugée comme étant importante. Et je

 28   ne le conteste pas.


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  1   M. TIEGER : [interprétation]

  2   Q.  Les Juges ont mis dans leur jugement une section particulière qui

  3   commence au paragraphe 888 où il est question de votre crédibilité ou du

  4   manque de crédibilité vous concernant, n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  En fait, vous avez témoigné à compter de avril à juin 2006 pendant 40

  7   jours et si on compte les journées d'audience, vous avez témoigné pendant

  8   deux mois et demi. Ça a été la longueur de votre témoignage devant les

  9   Juges de la Chambre, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, c'est exact.

 11   Q.  Et après avoir été entendu et vu pendant toute cette période de temps,

 12   les Juges de la Chambre de première instance ont constaté que vous étiez un

 13   témoin d'une très faible crédibilité. C'est ce qui est énoncé au paragraphe

 14   888 de votre jugement, n'est-ce pas ?

 15   R.  Monsieur le Procureur, vous êtes encore en train de parler du jugement

 16   rendu en première instance. Je vous prie de prendre en considération le

 17   jugement final. J'ai été condamné pour neuf municipalités au lieu de 30 et

 18   quelques. Et tout ce qui a été dit dans le premier jugement ne se retrouve

 19   pas dans le deuxième.

 20   Q.  Monsieur Krajisnik, vous êtes tout à fait conscient du fait que vous

 21   avez été condamné indépendamment du fait de contester le nombre de

 22   municipalités. Vous avez été condamné pour une participation à une

 23   entreprise criminelle commune que vous avez contestée et niée pendant 40

 24   jours, à savoir pendant deux mois et demi de témoignage et partant de quoi

 25   les Juges de la Chambre de première instance ont conclu que vous étiez un

 26   témoin de très faible crédibilité. La Chambre d'appel n'a pas remis en

 27   question cette constatation de la Chambre de première instance. Ils ont au

 28   contraire validé cette opinion, à savoir que vos affirmations relatives à


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  1   votre participation ou manque de participation à l'entreprise criminelle

  2   commune n'étaient pas vraies.

  3   R.  Votre constatation disant que la Chambre de première instance avait dit

  4   que ma crédibilité était faible est exacte. Ce que j'essaye de vous

  5   expliquer, c'est qu'il y a eu 28 municipalités où ma -- mon témoignage

  6   avait été exact et il s'est avéré à ce titre-là, la Chambre de première

  7   instance était dans son tort. C'est tout ce que je voulais de vous

  8   expliquer.

  9   Q.  La Chambre de première instance se penchera elle-même là-dessus. Je ne

 10   veux pas me disputer avec vous. Vous le savez, nous étions tous les deux

 11   là-bas, Monsieur Krajisnik, vous avez fondé votre Défense en affirmant que

 12   vous n'étiez pas impliqué dans l'entreprise criminelle commune et vous avez

 13   été condamné au final -- cette condamnation a été confirmée pour ce qui est

 14   d'une participation à l'entreprise criminelle commune et c'est la fin de

 15   toute chose. Vous nous avez affirmé que vous n'avez pas contribué à

 16   l'entreprise criminelle commune. Vous avez été condamné et vous avez purgé

 17   votre peine. Est-ce que vous n'êtes pas disposé à le reconnaître devant ces

 18   Juges-ci ?

 19   R.  Monsieur le Procureur, je crois qu'il serait utile de me laisser

 20   expliquer, parce que votre approche est erronée. Je vous ai dit que je ne

 21   contestais pas avoir été condamné par un jugement en première instance au

 22   début, pour ce qui est d'avoir eu une participation significative. Mais au

 23   final, j'ai été condamné pour une entreprise criminelle commune dans neuf

 24   municipalités et il y a eu donc condamnation pour ce qui est de ces

 25   municipalités en tant que membres de l'entreprise criminelle commune. Je

 26   reconnais le jugement parce que c'est final, mais je ne reconnais pas les

 27   événements. Et j'œuvre en faveur d'une révision de ce jugement, d'un

 28   réexamen.


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  1   Parce que tout point qui a été -- qui a fait l'objet d'une

  2   condamnation, je souhaite prouver que votre acte d'accusation était erroné

  3   et que la Chambre de première instance avait erré dans son jugement. Nous

  4   ne sommes pas en train de parler d'un réexamen, mais je veux faire savoir

  5   et connaître la vérité et je ne veux pas que cette vérité soit dissimulée

  6   aux Juges de cette Chambre.

  7   Q.  Eh bien, nous allons nous efforcer de déterminer la vérité dans la

  8   mesure la plus grande possible. Penchons-nous sur un certain nombre de

  9   secteurs assez nombreux où les Juges de la Chambre avaient constaté que

 10   vous étiez un témoin de faible crédibilité. Tout d'abord, la Chambre de

 11   première instance a constaté qu'à bien des opportunités ou occasions et on

 12   dit qu'il y en a plus de 20.

 13   Et je fais notamment référence au paragraphe 890 du jugement rendu en

 14   votre égard, où la Chambre de première instance a constaté que vous aviez

 15   nié avoir eu connaissance de bien des faits au sujet de crimes commis par

 16   les autorités serbes de Bosnie, en 1992. Et au 891, la Chambre de première

 17   instance indique qu'il y a un grand ensemble d'éléments de preuve prouvant

 18   directement votre intention et vos connaissances en la matière. Ça, c'est

 19   un des secteurs, nous allons nous pencher à titre plus concret de tout ceci

 20   à l'occasion du contre-interrogatoire, mais c'est l'une des conclusions

 21   adoptées par les Juges de la Chambre de première instance, n'est-ce pas ?

 22   R.  La Chambre de première instance a conclu ainsi, oui.

 23   Q.  Aux paragraphes 949 et 948, la Chambre de première instance se penche

 24   en partie sur vos allégations, vos affirmations liées à votre impuissance

 25   relative en la matière. Et, au 949, on conclut du contraire, à savoir que

 26   vous aviez eu accès direct aux leaders des Serbes de Bosnie à la tête de

 27   l'état, n'est-ce pas ? Ça a été la constatation des Juges de la Chambre de

 28   première instance. Et, à l'occasion de mon contre-interrogatoire, je me


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  1   propose d'aborder avec vous un certain nombre d'aspects liés à votre rôle

  2   au niveau des autorités des Serbes de Bosnie.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et, quelle est votre question ?

  4   M. TIEGER : [interprétation]

  5   Q.  Est-ce que vous confirmez qu'il s'agit là d'un autre aspect au sujet

  6   duquel les Juges de la Chambre de première instance ont adopté des

  7   conclusions au sujet de votre crédibilité ?

  8   R.  Pour ne plus vous fatiguer, je dirais que les Juges de la Chambre de

  9   première instance ont conclu du fait que mon témoignage a été d'une faible

 10   crédibilité, point à la ligne. C'est ce que dit le jugement rendu en

 11   première instance, et ça se trouve dans tous les paragraphes.

 12   Q.  Bien. Un autre exemple avant que de passer à des exemples concrets,

 13   Monsieur Krajisnik, que j'estime être illustratifs. Au paragraphe 1037 de

 14   votre jugement, plutôt 1036 et 1037, les Juges de la Chambre de première

 15   instance se penchent sur votre témoignage relatif aux connaissances que

 16   vous aviez eues quant à la détention de civils en 1992, et les Juges ont

 17   constaté qu'au contraire de ce que vous avez dit dans votre témoignage,

 18   bien nombre de faits relatifs à la détention de civils étaient connus de

 19   vous avant le mois d'août 1992, donc avant le moment où il y a eu une

 20   attention particulière de l'opinion internationale pour ce qui est de

 21   l'accès assuré aux journalistes à Omarska. C'est le paragraphe 1037. C'est

 22   un autre aspect de ce que les Juges de la Chambre de première instance

 23   avaient constaté au sujet de votre crédibilité pour ce qui est de votre

 24   témoignage ?

 25   R.  J'affirme même à présent que tout ceci est erroné. Il est vrai que les

 26   Juges de la Chambre ont constaté la chose ainsi.

 27   Q.  Bon. Peut-être serait-il utile plutôt que de parcourir bon nombre des

 28   parties du jugement qui reflètent les constatations des Juges de la Chambre


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  1   de première instance portant sur les affirmations faites par vous et votre

  2   crédibilité à ce sujet, peut-être vaudrait-il mieux se pencher sur un

  3   exemple concret de votre témoignage dans le procès vous concernant. Vous

  4   allez peut-être vous en souvenir, peut-être pas, Monsieur Krajisnik, mais

  5   tout ce que je souhaiterais c'est que nous revenions vers votre témoignage

  6   après avoir visionné la vidéo relative au rassemblement qui s'est tenu à

  7   Banja Luka, le 21 août 1994. Vous étiez présent, M. Karadzic, puis il y

  8   avait M. Radic, M. Kupresanin et M. Brdjanin.

  9   R.  Vous parlez d'un rassemblement, d'un meeting, vous avez dit quelle date

 10   ?

 11   Q.  21 août 1994. Je serais tout à fait disposé à vous montrer cette vidéo

 12   une fois de plus, et si vous le souhaitez, je puis vous montrer la

 13   transcription de ce que lesdites personnes ont dit, ou vous montrez ce qui

 14   a été dit à ce sujet dans votre procès à vous, et vous me direz ce qui vous

 15   arrange. Alors à l'occasion de ce meeting, M. Kupresanin et M. Brdjanin

 16   vous ont précédé à la tribune, et M. Kupresanin, lui a dit, je cite :

 17   "Sur une terre qui est de tout temps serbe, il ne saurait y avoir détail

 18   islamique. Il n'y a pas de peuple musulman, et le monde entier le sait.

 19   Dans ces régions, il n'existe qu'un peuple serbe."

 20   Ça se trouve à la pièce P00014, page 5 en anglais, et page 4 en B/C/S.

 21   Ensuite c'est M. Brdjanin qui s'adresse à l'assemblée, aux personnes

 22   présentes, et on a vu ceci hier, dans cette Chambre-ci, il a dit ceci :

 23   "Les forces de gauche qui sont en train de nous proposer une existence

 24   conjointe doivent savoir que l'obligation des Serbes au fil des 100 années

 25   à venir consiste à essuyer leur soulier de ces non chrétiens qui ont fouler

 26   et souiller la terre qui est la nôtre."

 27   Et, ensuite c'est vous qui avez pris la parole, M. Krajisnik, vous avez dit

 28   :


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  1   "Chers frères et sœurs, après avoir entendu ces magnifiques propos tenus

  2   par mes prédécesseurs, je suis fort satisfait de me trouver présent à ce

  3   rassemblement aujourd'hui."

  4   Ça se trouve à la pièce P00014, page 8 en anglais, page 7 en B/C/S, et il

  5   en a été question à votre procès, page du compte rendu d'audience 24946.

  6   Alors une fois que l'on vous a posé des questions au sujet de cette vidéo,

  7   et du fait d'avoir vanté les propos tenus par ceux qui avaient pris la

  8   parole avant vous, vous avez indiqué que vous n'avez commenté que la

  9   déclaration de Kupresanin, et ça se trouve en page 24949 de votre compte

 10   rendu du procès vous concernant. Vous souvenez-vous d'avoir formulé cette

 11   position-là, Monsieur Krajisnik ?

 12   R.  Je ne peux pas m'en souvenir, mais je peux commenter maintenant, comme

 13   si je n'avais rien dit auparavant, si cela vous intéresse.

 14   Q.  Non, moi, ce qui m'intéresse, c'est ce que vous avez dit aux Juges de

 15   la Chambre à l'époque, c'est-à-dire la première fois où on vous a fait

 16   visionner cette vidéo. Et, je voudrais que vous confirmiez ou je voudrais

 17   que vous confirmiez ou alors je vais vous montrer la transcription de ce

 18   que vous avez dit. Vous avez parlé des intervenants précédents au pluriel,

 19   et indépendamment de ce fait, le 1er août 1994, vous avez précisé aux Juges

 20   de la Chambre que vous n'avez commenté que le discours de Kupresanin. Ça,

 21   c'est une première chose. Si vous voulez voir la transcription ou si vous

 22   voulez que je vous en donne lecture, je peux le faire.

 23   R.  Mais je vous crois, vous n'avez guère besoin de me le relire.

 24   Q.  Bien. Vous avez dit ensuite que vous aviez déclaré que ces

 25   interventions étaient magnifiques, rien que pour passer du vernis par-

 26   dessus des choses avec lesquelles on n'était pas d'accord. C'est ce que

 27   vous aviez dit. Vous n'étiez pas tout à fait avec ce que Kupresanin a dit,

 28   mais vous avez dit aux personnes présentes que c'était une déclaration


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  1   magnifique pour démontrer que vous étiez en fait en désaccord. C'est ce que

  2   vous aviez dit dans votre témoignage.

  3   R.  C'est ainsi -- enfin, c'est ce que j'ai dit et même aujourd'hui, je

  4   suis en désaccord avec toute négation de la nation musulmane. Tout un

  5   chacun a le droit de se prononcer comme ça lui plait et comme il veut. Tout

  6   le reste est notoirement connu. Je n'ai pas été d'accord avec la rhétorique

  7   qui n'était pas mesurée et équilibrée et qui était erronée, parce qu'il ne

  8   convient pas de dire telle chose à un rassemblement aussi grand.

  9   D'ailleurs, cela a été précisé par d'autres intervenants aussi.

 10   Q.  Très bien. Et vous avez observé que M. Kupresanin a nié l'existence des

 11   Musulmans, que tout le monde a applaudit, ils ont applaudit à toutes sorte

 12   de balivernes. Et vous avez dit que vous vous êtes exprimé de la façon dont

 13   vous vous êtes exprimé, parce que vous ne pouviez pas dire et je cite que

 14   Kupresanin est un criminel. C'est exact, n'est-ce pas ? C'est ce que vous

 15   avez dit à la Chambre de première instance dans votre procès.

 16   R.  Eh bien, la traduction est sans doute erronée. Je n'aurais jamais dit

 17   que c'était un criminel. J'aurais préféré dire qu'il s'était trompé, qu'il

 18   faisait des choses d'une façon pas très équilibrée et donc, il doit s'agir

 19   d'une mauvaise interprétation. Je ne suis pas d'accord avec les Serbes qui

 20   ont nié aux Musulmans le fait d'avoir une nation, même si des faits

 21   existent qui prouvent que les Musulmans descendent des Serbes. Mais si ils

 22   ne souhaitent pas être des Serbes, eh bien, tel est leur souhait.

 23   Q.  Alors, à savoir si vous estimez que c'était criminel ou radical, je

 24   crois que vous avez modifié un petit peu cela un peu plus tard dans votre

 25   déposition. En fait, vous essayez d'expliquer aux Juges de la Chambre que

 26   Kupresanin a dit quelque chose et qui était vraiment contraire à votre avis

 27   et quelque chose qui n'était pas bien du tout. Vous avez essayé de

 28   l'expliquer, vous avez -- vous donniez l'impression de faire l'éloge de


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  1   Kupresanin en disant que c'était une déclaration merveilleuse, mais en

  2   réalité, vous étiez tout à fait contre. Telle était votre position lorsque

  3   vous avez vu cette vidéo pour la première fois, n'est-ce pas ?

  4   R.  Eh bien, Monsieur le Procureur, j'ai dit la même chose à l'époque et si

  5   un homme politique essaie de nier quelque chose ou d'apporter un démenti

  6   lors d'un rassemblement politique, cela doit se faire de façon souple et

  7   ensuite, on arrive au terme "mais" et ensuite, on se lance. Ceci s'est

  8   passé en temps de guerre et cela ferait du tort sur un plan politique

  9   d'aborder ce genre de choses lors d'un tel rassemblement. Et je répète, je

 10   ne pense pas que ce qu'il a dit était criminel à l'époque. Il a dit que les

 11   Musulmans n'étaient pas les mêmes que les Serbes. Mais j'ai pensé à

 12   l'époque que ce serait -- cela nous ferait du tort sur un plan politique,

 13   mais je n'étais pas d'accord.

 14   Q.  Monsieur Krajisnik, après avoir fourni cette explication aux Juges de

 15   la Chambre de première instance, explication sur les -- ce qui motivait vos

 16   commentaires et ce sur quoi vous étiez censé être en désaccord, Kupresanin

 17   -- concernant Kupresanin, on vous a ensuite confronté à cette question-là.

 18   Ce n'est pas la première fois que Kupresanin avait évoqué cette question-

 19   là. Il avait en réalité évoqué cette question déjà lors d'une réunion d'une

 20   assemblée au mois de janvier 1993 et non seulement, vous n'étiez pas en

 21   désaccord avec lui, mais vous étiez, de façon explicite, d'accord avec lui.

 22   Vous avez abordé cette question qui était à l'ordre du jour. Vous avez

 23   soutenu la question et une conclusion a été rendue indiquant que les

 24   Musulmans ne constituaient pas une nation. Ceci a été adopté lors de la 24

 25   séance de l'assemblée serbe, n'est-ce pas, de Bosnie ?

 26   R.  Vous n'interprétez pas correctement ceci. Vous avez extrait un passage,

 27   comme vous l'avez fait du reste la dernière fois. Vous ne présentez qu'un

 28   passage. Je ne veux pas dire que j'avais raison. Je parle de M. Kupresanin.


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  1   Et j'ai cité M. -- la déclaration de M. Kupresanin --

  2   L'INTERPRÈTE : Le témoin peut-il ralentir, s'il vous plaît, note de

  3   l'interprète.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez répéter votre réponse, s'il

  5   vous plaît, et veuillez parlez lentement, pour les interprètes, s'il vous

  6   plaît, et pour nous également.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi. Je vais répéter. Je vais

  8   essayer de répéter ma réponse.

  9   Monsieur le Procureur se trompe et je suis désolé de devoir le dire, car il

 10   est en droit de me critiquer, seulement je ne suis pas en droit de le

 11   critiquer lui. Je souhaite que le Procureur regarde le commentaire que j'ai

 12   fait au sujet de la réponse de M. Kupresanin. Cela n'est pas que j'avais

 13   raison, mais M. Kupresanin avait raison, car j'avais l'intention de prendre

 14   part à ce débat houleux, à savoir que Kupresanin a dit que les Musulmans

 15   n'étaient pas des Serbes, car la veille, le Club des -- à un réunion du

 16   Club des députés, certains députés ont maintenu la position suivante, à

 17   savoir que chacun avait le droit de s'opposer aux points de vue ou aux

 18   prises de position de certains individus. Et il fallait rendre une

 19   décision, même si de nombreux députés étaient contre, eh bien, il fallait

 20   dire que les Musulmans n'étaient pas des Serbes. Mais ceci n'était pas

 21   important, ceci n'était pas pertinent et c'est la raison pour laquelle j'ai

 22   dit "D'accord, je me trompe. Monsieur Kupresanin, vous, vous avez raison.

 23   Les Musulmans ne sont pas des Serbes. Passons à autre chose." Cela ne

 24   signifie pas pour autant que mon avis ou mon opinion consistait à dire que

 25   M. Kupresanin avait raison. Si vous lisez les conclusions, vous ne

 26   retrouverez ceci nulle part, simplement pour -- pour une simple de question

 27   de rhétorique, je lui ai dit "Monsieur Kupresanin, je concède que vous avez

 28   raisons; passons à autre chose." Voilà le sens de mes mots.


Page 43744

  1   Monsieur le Procureur, veuillez m'indiquer à quel endroit j'ai dit que

  2   j'avais tort et que M. Kupresanin avait raison.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, alors, nous allons

  4   revenir à l'allocution délivrée lors du rassemblement politique pour mieux

  5   comprendre le contexte qui nous intéresse ici dans lequel M. Krajisnik a

  6   dit "des termes merveilleux tenus par mes prédécesseurs", les Juges de la

  7   Chambre de première instance doivent lire ce qui suit, les parties -- les

  8   passages restant de la déclaration de M. Krajisnik ce jour-là. Mais je

  9   remarque que ces passages-là ont été expurgés.

 10   M. TIEGER : [interprétation] A l'origine, j'avais proposé l'intégralité de

 11   la séquence vidéo. Je suis donc disposé à --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 13   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, je crois que les Juges de la

 15   Chambre doivent dont lire le reste de l'allocution de M. Krajisnik pour

 16   qu'il puisse bien comprendre le contexte.

 17   Y a-t-il des objections ?

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas, il s'agit des pages 8, 9,

 20   10, 11, 12. Je ne sais pas jusqu'à quelle partie, en fait, correspond aux

 21   propos tenus par M. Krajisnik. En tout cas, les Juges de la Chambre

 22   souhaitent voir le reste de l'allocution de M. Krajisnik ce jour-là. Cela

 23   étant dit, veuillez poursuivre, Monsieur Tieger.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 25   Q.  Monsieur Krajisnik, vous avez dit que le Procureur --

 26   -- Procureur le droit de vous critiquer, mais en réalité vous reprenez ces

 27   droits-là lors de votre procès, et lors de ce procès-ci -- et vous avez

 28   critiqué Momcilo Krajisnik. Donc lorsque vous avez entendu et vu les propos


Page 43745

  1   que vous avez tenus à cette date-là qui contredisent ce que vous dites

  2   aujourd'hui, je souhaite simplement signaler un passage concernant les

  3   propos que vous avez tenus où vous avez dit :

  4   "Je vais vous expliquer pourquoi ceci n'est pas bien. Ils souhaitent que

  5   nous disions que nous sommes tous les mêmes. Ils souhaitent démontrer une

  6   seule et même nation. Ils sont tous les mêmes, sauf qu'ils sont de religion

  7   différente, et nous devons dire que nous sommes différents." Ceci est aux

  8   pages 24966 et 67 du compte rendu d'audience dans votre procès.

  9   "Il s'agit d'un groupe qui a tendance turque, de toute façon, si nous

 10   acceptons qu'il s'agit d'un groupe de Turcs ou quelle que ce soit ces gens,

 11   nous leur donnons accès à nos terres pour qu'elles puissent devenir une

 12   nation indépendante. Ils seront plus que ravis de prétendre qui sont

 13   d'origine turque de même que les Siptar qui ont avancé des théories en

 14   indiquant qu'ils étaient d'origine Illyrique. Nous devrions leur dire qui

 15   ils sont vraiment, ce sont des infidèles, une nation qui n'est pas une

 16   nation, c'est-à-dire une nation qui souhaite être une nation, mais qui n'a

 17   aucun argument à présenter pour être une telle nation."

 18   Ensuite, on vous a posé une question, et vos commentaires en guise de

 19   réponse aux commentaires de M. Kupresanin en 1994, à savoir si dans votre

 20   déposition précédente, lors de ce rassemblement politique vous aviez tort,

 21   parce que en réalité, vous avez dit que vous n'aviez pas d'accord avec

 22   Kupresanin, vous n'avez pas nié le fait que les Musulmans avaient le droit

 23   de créer une nation. Ceci est faux, parce que votre prise de position lors

 24   de l'assemblée était différente, deux années auparavant. C'est ce que vous

 25   avez à la page 24967 :

 26   "Ceci est exact. Ceci n'a pas de sens que dit M. Momcilo Krajisnik,

 27   ceci porte préjudice. Je dois dire que je n'ai jamais pensé les choses

 28   ainsi. Si je dois prendre une distance par rapport à ce Momcilo Krajisnik,


Page 43746

  1   je le ferais."

  2   Vous souvenez-vous de cela ? Vous souvenez-vous avoir parlé de ça,

  3   d'avoir été gêné parce que vous avez appelé ou dit, vous avez dit que

  4   Momcilo Krajisnik et ce qu'il a dit était faux ?

  5   R.  D'après mes souvenirs, ce commentaire faisait référence à une de

  6   mes déclarations, et c'était à savoir que les Turcs avaient occupé mon

  7   village. Et, j'étais fou de rage, et donc j'ai employé ce terme de "Turcs"

  8   même si cela n'est pas un terme péjoratif, mais cela peut sembler péjoratif

  9   dans ce contexte-ci. Sans avoir une quelconque idée du fait que cela a été

 10   provoqué par cet événement-ci.

 11   Q.  Alors je vais placer ceci dans son contexte. En fait, vous avez

 12   dit dans votre déposition n'avoir jamais utilisé le terme péjoratif de

 13   "Turcs". Et, ensuite on vous a soumis dans deux cas, me semble-t-il des

 14   exemples où vous aviez effectivement dit cela. Une autre occasion au cours

 15   de la quelle vous avez essayé de prendre vos distances par rapport à ce

 16   Momcilo Krajisnik, par rapport à cet autre Momcilo Krajisnik, je me trompe

 17   ou pas ?

 18   R.  D'après mes souvenirs, il n'y a eu qu'une seule fois où j'ai pris

 19   mes distances par rapport à Momcilo Krajisnik, et ça, c'était lorsqu'il y a

 20   eu cette confrontation que vous avez organisée, lorsque j'ai dit que je ne

 21   me souvenais pas d'avoir utilisé le terme "Turks". Ce n'est pas un terme

 22   que j'emploie, je parle de ce qui s'est passé à l'époque. Et, ensuite, le

 23   président de la Chambre, M. le Juge Orie a demandé que vous me posiez la

 24   question, et j'ai répondu que les Turks avaient occupé mon village. Ceci

 25   comprend peut-être l'événement qui s'est déroulé le 12 mai. Et, ensuite

 26   j'ai dit que sans que vous m'en informiez, et sans que vous m'ayez dit

 27   qu'il s'agissait bien de cet événement-là, j'ai dit que j'avais pris mes

 28   distances par rapport à Momcilo Krajisnik. Et, je le répète aujourd'hui


Page 43747

  1   devant les Juges de cette Chambre, le terme de "Turcs" n'est pas employé

  2   par moi ni aucun autre terme péjoratif, et toutes les personnes en Bosnie-

  3   Herzégovine peuvent confirmer cela. Je ne suis pas en train de dire que je

  4   suis différent d'autres personnes, mais tout simplement parce que ceci

  5   n'est pas juste. Et, si vous analysez le contexte dans son ensemble, vous

  6   constaterez que ceci a été provoqué par cette confrontation qui était

  7   censée vérifier si oui ou non, je n'avais jamais utilisé le terme de

  8   "Turcs". Je l'ai utilisé une fois lorsque l'armée musulmane a occupé mon

  9   village, et a commis d'épouvantables crimes, et j'ai dit cela lorsque

 10   j'étais en colère, et c'est la raison pour laquelle j'ai employé ce terme-

 11   là. Mais je ne me souviens pas d'avoir abordé ceci dans le cadre de ce

 12   discours avec M. Kupresanin.

 13   Q.  Alors je vais maintenant citer un extrait du compte rendu d'audience

 14   24967 --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous allez citer un passage, veuillez

 16   le télécharger, s'il vous plaît.

 17   Monsieur Karadzic.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Lors de la dernière réponse du témoin, il n'a

 19   pas été consigné au compte rendu d'audience que le témoin a dit : Même si

 20   j'ai dit cela, et j'ai dit que mon village avait été occupé, et que des

 21   crimes avaient été commis, je ne suis pas satisfait d'avoir dit cela.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 23   Alors nous allons revenir sur le rassemblement politique de 1994, je crois

 24   que les Juges de la Chambre ont besoin d'avoir la déclaration de Kupresanin

 25   dans son intégralité.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Soit.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il nous faut également avoir

 28   la séquence vidéo correspondante.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Oui, tout à fait.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si c'est court, allez-y.

  3   M. TIEGER : [interprétation] C'est le numéro 65 ter 25522. Alors ce qui

  4   nous intéresse c'est la page 24967. Et, en attendant, je peux également

  5   dire que la séance de l'assemblée qui a été citée correspond au P921, et

  6   les pages particulières qui ont été citées se trouvent à la page 94 de

  7   l'anglais à 96, et en B/C/S, 64 à 66. Et, bien évidemment, Madame,

  8   Messieurs les Juges, l'intégralité de cette séance a été versée au dossier.

  9   Q.  Encore une fois, Monsieur Krajisnik, la question que l'on vous a posée

 10   était la suivante :

 11   "En parlant de vos commentaires lorsque vous avez répondu aux commentaires

 12   de M. Kupresanin en 1994, vous avez dit que vous n'étiez pas d'accord avec

 13   lui, et vous n'avez pas nié aux Musulmans l'existence d'une nation. C'était

 14   tout simplement faux, n'est-ce pas ?

 15   Vous avez répondu : "Oui, c'est exact. Ceci n'a aucun sens, ce qu'a dit

 16   Momcilo Krajisnik, ceci est au détriment de tout cela, et je n'ai jamais

 17   pensé ainsi. Si j'avais pu prendre mes distances par rapport à ce Momcilo

 18   Krajisnik, je l'aurais fait …"

 19   Alors, si vous regardez le bas de la page, vous dites :

 20   "… que la question est tout à fait authentique, et je suis désolé que ce

 21   Momcilo Krajisnik ait tenu ces propos-là."

 22   Et, sur la page suivante, vous dites :

 23   "… je sais ce qu'a dit Kupresanin, mais je ne me suis pas exprimé de façon

 24   appropriée, parce qu'il y a aucune raison pour que quelqu'un ne puisse pas

 25   être Musulman, Croate ou Serbe, ce qui leur plait…"

 26   Donc, effectivement, il s'agissait là encore d'une autre occasion au

 27   cours de laquelle vous avez pris vos distances par rapport à cet autre

 28   Momcilo Krajisnik lorsque vous avez dû répondre et que l'on vous a


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  1   confronté avec vos propres contradictions par rapport à ce que vous aviez

  2   dit aux Juges de la Chambre à l'époque.

  3   R.  Je dois vous dire que ceci me surprend beaucoup. Je me souviens que

  4   d'avoir importé un commentaire là-dessus, simplement parce qu'il y avait eu

  5   cet événement au cours duquel les forces musulmanes ont fait irruption dans

  6   ce village et qu'ils l'ont occupé. Pour ce qui est de mon commentaire, il

  7   est sans doute lié à cela, sinon, je n'aurais pas pris mes distances par

  8   rapport à ce Momcilo Krajisnik lors de mon allocution. Il se trouve que

  9   j'ai soutenu M. Kupresanin, alors que je ne l'ai pas fait -- je ne sais pas

 10   comment ceci a pu se passer. Je n'avais aucune raison de dire tout cela. Ce

 11   n'est pas moi qui ai employé ce terme de "Turc", c'est M. Kupresanin. Donc,

 12   j'ai du mal à comprendre, d'autant que c'est en anglais, à savoir si je

 13   prends mes distances par rapport à M. Kupresanin ou si je prends mes

 14   distances par rapport à moi-même. Je n'ai aucune raison de prendre mes

 15   distances par rapport à moi-même, parce que je ne l'ai pas dit. Et je n'ai

 16   rien dit qui ne soit pas correct ou qui ne soit pas bien dans mon

 17   allocution.

 18   Q.  Alors, maintenant, vous dites que vous n'avez aucune raison de le

 19   faire, mais Monsieur Krajisnik, c'est -- le compte rendu d'audience est

 20   tout à fait clair.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Et je souhaite en demander le versement au

 22   dossier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela [inaudible] tous les passages qui

 24   se trouvent sur ce document indiquent, M. -- le -- que M. le Juge Orie a

 25   demandé à M. Krajisnik d'emporter ce document avec lui au quartier

 26   pénitentiaire pour qu'il puisse analyser le document et apporter ses

 27   commentaires par la suite. Savez-vous ce qui s'est passé par la suite ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Et je suis tout à


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  1   fait disposé à verser au dossier tous ces documents. Ce qui s'est passé,

  2   c'est que M. Krajisnik a pris cette position et c'est la même qu'il prend

  3   pour l'essentiel aujourd'hui.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, demandons d'abord au témoin s'il

  5   s'en souvient, s'il se souvient de ce qu'il a fait et quelles étaient le --

  6   quelles étaient les conclusions de cet examen. Vous en souvenez-vous,

  7   Monsieur Krajisnik ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Non, je ne m'en souviens pas. Je ne me

  9   souviens pas de cette -- de cette chronologie des événements. Je n'avais

 10   aucune raison de prendre mes distances par rapport à cela. Je n'aurais pu

 11   prendre mes distances que par rapport à M. Kupresanin, mais dans ce premier

 12   cas, j'avais une bonne raison d'agir ainsi et qui était due à l'occupation

 13   de mon village. Et il y a sans doute une confusion -- certaine confusion

 14   qui règne ici. Je ne comprends vraiment pas pourquoi j'aurais pris mes

 15   distances par rapport à cette locution si je n'avais rien qui ne soit pas

 16   approprié.

 17   M. TIEGER : [interprétation]

 18   Q.  Alors, je souhaite avancer pour répondre aux questions des Juges de la

 19   Chambre. Pouvez-vous confirmer ceci ? Vous êtes revenu, donc, devant les

 20   Juges de la Chambre le lendemain et vous avez suggéré qu'après avoir lu

 21   tout cela, vous n'avez que répété les propos d'autres personnes, vous

 22   n'avez fait que répété les propos d'autres personnes et ensuite, la Chambre

 23   de première instance s'est penchée sur certaines des termes précédemment

 24   employés, y compris M. Crlic [phon] qui a dit que nous savons que les

 25   Musulmans ne constituaient pas une nation. Je crois qu'il faut insister sur

 26   -- là-dessus lors des négociations. Il ne s'agit pas d'une communauté

 27   ethnique. Ils sont dégénérés; ce sont des parias. Page 24984 du compte

 28   rendu d'audience. Vous souvenez-vous, vous avez lu ce passage, mais vous


Page 43751

  1   avez omis de lire cette partie qui portait sur le fait qu'ils étaient

  2   dégénérés.

  3   R.  Monsieur le Président, vous êtes en train de semer la confusion dans

  4   mon esprit. Vous m'avez soumis trois questions en même temps. La première

  5   est une allocution qui a été faite à Banja Luka et si nous parlons de mes

  6   excuses à l'égard de ce discours, je n'avais aucune raison de m'excuser

  7   pour le discours que j'ai prononcé. Le deuxième point, c'est la séance de

  8   l'assemblée au cours de laquelle des conclusions ont été adoptées et qui

  9   ont précisé que les Musulmans n'étaient -- ne constituaient pas une nation.

 10   Le troisième point, c'est le fait que j'ai pris mes distances par rapport à

 11   Krajisnik. Au moment où j'ai employé le terme de "Turcs", parce qu'ils ont

 12   occupé mon village. Alors, je vous demande de bien vouloir vous abstenir de

 13   me poser ce genre de questions, car ceci va prouver que -- ou prouvera que

 14   je ne suis pas un témoin fiable.

 15   Alors, pour ce qui est de la séance de l'assemblée de M. Corda, je ne fais

 16   que répéter les propos tenus par les différents participants à ces débats,

 17   à la fois au sein du Club de députés et lors de la séance de l'assemblée,

 18   pour leur permettre de parvenir à ces conclusions de façon à ce que nous

 19   puissions passer à autre chose. Et je n'ai pas pris de distances par

 20   rapport à moi-même et j'ai pris mes distances par rapport aux personnes qui

 21   ont réagit de la sorte.

 22   Q.  Bon, écoutez, moi, j'ai demandé le versement au dossier de ces pages en

 23   question encore une fois, pour que ceci soit utile aux Juges de la Chambre.

 24   Vous poursuivez en disant que vous souhaitiez que ceci soit soumis au vote,

 25   que l'assemblée n'était pas compétente et ne pouvais pas décider du fait

 26   que les Musulmans constituaient une nation ou pas et que vous n'étiez pas

 27   le premier à avoir prononcé de tels termes. Et la Chambre de première

 28   instance a conclu qu'il était important de savoir si vous aviez prononcé


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  1   ces termes et non pas si vous étiez le premier à avoir prononcé ces termes.

  2   Et ensuite, vous avez dit que l'assemblée disposait de la compétence

  3   nécessaire pour agir de la façon dont elle a agit. Et ensuite, la Chambre

  4   de première instance a dit que vous aviez engagé une discussion avec un

  5   interlocuteur inconnu, page du compte rendu d'audience 24988 à 89.

  6   Pouvez-vous confirmer cela ? Ou est-il préférable de permettre aux

  7   Juges de la Chambre de constater par eux-mêmes les propos que vous avez

  8   tenus lors de vos procès après avoir examiné le compte rendu d'audience ?

  9   R.  Je sais exactement ce que j'ai dit lors de mon procès et quel était mon

 10   point de vue à l'égard de l'assemblée. Si vous vous en souvenez, au début,

 11   on a présenté le discours prononcé par M. Kupresanin, le premier discours à

 12   Banja Luka. Ensuite, ma réaction qui a été -- qui découlait de l'occupation

 13   dans mon village. Ensuite, pour ce qui est de l'assemblée, il y a eu une

 14   discussion assez longue sur cette question, à la fois au sein du Club de

 15   députés la veille et le jour même, où beaucoup de gens ont dit des choses

 16   très laides. Et je suis parvenu à la conclusion que rien de tout ceci

 17   n'avait de sens. Et j'ai dit sans pour autant répéter les propos qu'ils ont

 18   tenus, j'ai dit ce qu'ils ont fait au cours de toute cette période, une

 19   conclusion a été rendue et cette conclusion n'était pas pertinente. C'est

 20   ce que j'ai dit alors et je maintiens cela aujourd'hui et c'est ce qui est

 21   consigné au compte rendu et je m'en souviens bien. Il y avait trois choses

 22   qui se sont passées simultanément, ce qui a sans doute donné lieu à cette

 23   confusion. Et ceci a eu un effet sur vous également.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous demandez le versement de quelle

 25   page, Monsieur Tieger ?

 26   M. TIEGER : [interprétation] En fait, les pages qui ont précédemment été

 27   identifiées, Monsieur le Président, ainsi que les pages 24983 et les pages

 28   où ces discussions commencent, 24990.


Page 43753

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce numéro 65 ter 25522, je ne vois

  2   pas ces pages de compte rendu d'audience, 24983 ou 24990, ni 24000 -- 4 --

  3   84 ou 88, 89.

  4   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : page du compte rendu

  5   d'audience.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Bien. Mais évidemment, il y a eu de très

  7   nombreux jours de déposition. Je ne sais pas comment ceci a été téléchargé.

  8   Je croyais que tout ceci avait été téléchargé sous la même cote 65 ter.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, la page du compte rendu

 10   d'audience 24980 -- 24980 qui correspond à la page du prétoire électronique

 11   19 -- 1903, et qui vient après la page 24992, donc il manque 20 pages.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections, Maître Robinson

 13   ?

 14   M. ROBINSON : [interprétation] En réalité, je souhaite regarder cela mais

 15   je souhaite en fait regarder cela et revenir vers vous.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous n'avez pas d'objection à cet

 17   égard, le fait que soient versées au dossier les deux premières pages de

 18   24967 à 24968 ?

 19   M. ROBINSON : [aucune interprétation]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons les admettre, et

 21   si vous avez des objections, soulevez-les devant la Chambre de première

 22   instance aussi rapidement que possible. Nous allons les admettre.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6516.

 24   M. TIEGER : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Krajisnik, je voudrais aborder un autre aspect des conclusions

 26   de la Chambre de première instance portant sur votre crédibilité. Au

 27   paragraphe 1005 de votre jugement, les Juges de la Chambre de première

 28   instance ont examiné une partie de vos affirmations portant sur les liens


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  1   qui existaient entre la direction des Bosno-serbes et la VRS, et vous

  2   affirmiez que cela se situe uniquement sur le plan de la logistique, qu'il

  3   n'y avait rien à voir avec des questions opérationnelles, militaires et

  4   vous avez, et la Chambre a constaté que "cela constituait une autre

  5   tentative de la part de l'accusé d'induire la Chambre en erreur -- question

  6   de crédibilité portant sur des questions militaires.

  7   R.  Je voudrais que vous me posiez une question spécifique, et par la suite

  8   la Chambre verra de quoi il s'agit.

  9   Q.  Mais ça a été un procès long, Monsieur Krajisnik, comme je viens de le

 10   dire. Je vous pose une question au sujet des conclusions de la Chambre.

 11   Donc je vous demande de confirmer d'emblée qu'il s'agit bien là de

 12   conclusions de la Chambre de première instance ou bien je peux demander que

 13   soit versé au dossier cette partie du jugement, si vous le contestez.

 14   R.  Mais qu'est-ce que je conteste ici, je ne comprends pas, qu'est-ce que

 15   j'ai contesté parmi les choses qui figurent ici ? C'est peut-être un

 16   malentendu, parce que vous êtes en train de conclure des choses que je ne

 17   comprends pas. Je ne conteste rien de ce qui est écrit dans ce jugement.

 18   Tout ce que vous êtes en train de lire, moi, j'ai dit que c'est bien exact.

 19   Je ne vois pas ce que j'ai pu contester parmi les affirmations qui figurent

 20   ici.

 21   Q.  Voyons de manière plus précise, certaines des choses que vous avez

 22   dites précédemment dans votre déposition, ici également devant cette

 23   Chambre.

 24   Premièrement, en 2006, dans le cadre de votre procès, vous avez dit

 25   concrètement, page du compte rendu d'audience 25619 que les réunions avec

 26   les militaires, revenaient à ce que les militaires ne voient dans les

 27   autorités civiles qu'un moyen d'obtenir un soutien logistique, et qu'il n'y

 28   avait pas de questions opérationnelles militaires qui auraient été


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  1   abordées." Donc ça a été votre opinion en 2006; exact ?

  2   R.  J'affirme encore aujourd'hui que quasiment toutes les questions de la

  3   part de militaires revenaient à poser des questions de ravitaillement et de

  4   logistique. Je ne peux pas dire qu'on n'a jamais, jamais abordé autre

  5   chose, mais il n'y a pas eu d'information sur les crimes. C'est la raison

  6   pour laquelle j'ai expliqué à l'époque, et je l'explique encore une fois

  7   aujourd'hui, je répète, l'armée a toujours demandé ce qu'il en était de la

  8   logistique, elle voulait du ravitaillement pour pouvoir faire la guerre.

  9   Et, c'était cela qu'elle demandait aux autorités civiles. Les informations

 10   qu'on recevait lors de ces réunions étaient d'ordre général, et je n'ai

 11   jamais entendu l'armée, oui, je les ai entendu critiquer les instances

 12   civiles, mais je ne les ai jamais entendu parler de ces crimes ni des

 13   endroits où ils se seraient produits. Je n'ai jamais entendu rien à ce

 14   sujet, je ne l'ai appris que plus tard, devant ce Tribunal donc c'est une

 15   réponse tout à fait véridique à cette question, et je l'avais apportée à

 16   l'époque également.

 17   Q.  Vous avez mentionné plusieurs choses, vous avez mentionné des réunions,

 18   vous avez mentionné certaines réunions en 2006, en particulier plusieurs

 19   réunions avec le général Mladic. Vous avez dit à la page 25619 du compte

 20   rendu d'audience que vous n'avez jamais été présent ou plutôt que vous

 21   n'avez pas été présent lors de nombreuses réunions de ce type-là, avec le

 22   général Mladic; exact ?

 23   R.  Ecoutez, il se peut que ça ait été le général Mladic et quelqu'un

 24   d'autre en plus. D'après ce que j'ai appris dans ce document sur les

 25   réunions de la présidence, là où il est dit que général Mladic était

 26   présent, ça, c'est exact. Il y a eu plusieurs réunions d'information, deux

 27   ou trois, ça c'est exact également. Il y a eu toute une série de réunions

 28   avec lui où je n'ai pas été présent, et je n'ai pas été informé de cela. Il


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  1   faudra me citer précisément telle ou telle réunion pour que je vous dise si

  2   j'y étais ou pas.

  3   Q.  Vous semblez dire de manière générale s'agissant de ces réunions avec

  4   le général Mladic qu'elles n'étaient pas nombreuses, et auxquelles vous

  5   étiez présent, vous avez mentionné deux réunions de la présidence, page du

  6   compte rendu d'audience 25736. Et, vous avez également mentionné deux

  7   consultations avec des militaires à Bijeljina, et à Pale, 25684, pour ce

  8   qui est de la référence. Donc nous avons là quatre réunions où était

  9   présent le général Mladic. Quatre réunions que vous avez mentionnées

 10   lorsque vous avez dit que vous n'aviez pas souvent été à des réunions avec

 11   le général Mladic présent. Est-ce que c'est ce que vous affirmiez

 12   aujourd'hui devant cette Chambre de première instance, que c'était à peu

 13   près le nombre de réunions que vous avez lorsque le général était présent

 14   lui aussi ?

 15   R.  Je pense que ce n'était pas la seule réunion, il y avait une réunion

 16   avec M. Carter une fois à Crna Rijeka, il y avait aussi M. Mladic. Mais

 17   toutes ces réunions que vous avez mentionnées, elles ont fait l'objet de

 18   débat et de mon procès, et j'ai dit que c'était vrai. Mais s'il y a

 19   d'autres réunions que j'ai pas mentionnées, c'est peut-être parce que

 20   personne ne m'a posé la question, donc je peux vous en parler. D'autres

 21   personnes ont pu rencontrer le général Mladic sans que je sois présent. Il

 22   y avait le président du comité chargé de la coopération avec la FORPRONU,

 23   c'était M. Koljevic, il y avait Mme Plavsic, donc il y a eu telle ou telle

 24   réunion qui s'est tenue sans que je sois présent.

 25   Q.  D'accord, très bien. Je veux juste savoir si lorsque vous parlez du

 26   fait qu'il n'y a pas eu beaucoup de réunions, et lorsque vous dites

 27   précisément qu'il y a eu deux réunions de la présidence, deux

 28   consultations, je voulais simplement savoir si c'était cela que vous aviez


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  1   à l'esprit lorsque vous avez dit que vous n'avez pas eu beaucoup de

  2   réunions ou bien est-ce que après votre déposition, vous vous êtes rappelé

  3   des dizaines d'autres réunions ?

  4   R.  Je ne m'en suis pas rappelé, Monsieur le Procureur. J'ai dit qu'il y a

  5   eu très peu de réunions entre M. Mladic et la direction, et que j'ai été

  6   présent; c'est ça que j'ai dit. Et ces réunions qui ont été qualifiées de

  7   réunions de la présidence dans une composition élargie, j'ai dit que

  8   j'étais présent à ces réunions. Mais quand il a eu d'autres réunions avec

  9   d'autres membres de la direction, je n'étais pas présent. Il est possible

 10   que j'aie été présent ailleurs et sans qu'une trace en soit gardée ou sans

 11   qu'on en parle ici. Jamais personne peut-être ne m'a posée la question :

 12   Etiez-vous à cette réunion ou pas ?

 13   Q.  D'accord. Très bien. Mais vous expliquez aussi que vous saviez

 14   pratiquement rien des questions militaires. A titre d'exemple, vous ne

 15   saviez pas quels étaient les objectifs que devaient atteindre les

 16   militaires. Je cite pour référence la page du compte rendu d'audience 25

 17   595. Exact ?

 18   R.  L'armée menait la guerre. Comment elle le faisait ? Quels étaient ses

 19   objectifs concrets ? Ça, je ne le savais pas. Est-ce qu'il fallait

 20   s'emparer de telles ou telles localités, cela relevait du ressort de

 21   l'armée. Je savais que l'armée avait deux ou trois objectifs : de protéger

 22   le peuple serbe pour qu'il ne subisse pas un génocide comme pendant la

 23   Seconde Guerre mondiale, mais qu'elle protège militairement les lignes qui

 24   étaient tenues depuis le départ par le peuple armé.

 25   Q.  On vous a demandé si vous vous souveniez d'avoir jamais posé la

 26   question lors de ces quelques réunions, vous étiez présent, quels étaient

 27   les objectifs qui étaient fixés à l'armée, et vous avez répondu à la page

 28   25 619 :


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  1   "Je ne me souviens pas de ce que j'ai fait. Je ne me souviens pas d'avoir

  2   posé une telle question."

  3   C'est ce que vous avez dit dans votre déposition en 2006; exact ?

  4   R.  Je ne sais pas si j'ai posé cette question, je ne sais pas si j'ai dit

  5   cela en 2006, il y a longtemps de cela, vraiment. Mais si ça a été écrit

  6   dans le compte rendu d'audience, je suppose qu'il en est ainsi.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Soit j'en demanderai, soit en le fera en

  8   faisant consigné uniquement ce qui a été lu.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons ajouter ces pages. Mais il

 10   faudra nous donner précisément la pagination qui vous concerne.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Il s'agit des pages 25 619 et 26 595.

 12   Q.  Vous avez dit que vous n'étiez pas au courant des intentions d'émettre

 13   des directives et que c'était le cas parce que cela ne relevait pas de "vos

 14   intérêts ou de votre compétence". Je parle de directives militaires. Exact

 15   ?

 16   R.  J'étais un observateur, au marginal, j'aurais pu porter un intérêt

 17   particulier à une affaire, mais je ne savais pas comment les directives

 18   étaient rédigées ni comment elles étaient signées. Cela relevait de la

 19   compétence d'autres que moi. J'aurais pu m'intéresser au hasard à une telle

 20   ou telle directive, mais cela n'a jamais relevé de mes compétences.

 21   Q.  Lorsque le Juge Hanoteau vous avez posé une question concrète, il vous

 22   a demandé si vous avez profité de la présence de ces militaires pour

 23   demander ce qui était en train de se passer, vous avez répondu, je vous

 24   cite :

 25   "Pour ce qui est de leurs intentions de donner des directives, je n'ai

 26   jamais posé de questions là-dessus parce que ce n'était pas de mon

 27   ressort." Pages 25 703 à 704 du compte rendu d'audience.

 28   R.  Il faudra peut-être être un peu plus clair. Encore une fois, je le


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  1   répète, je n'étais pas au courant lorsqu'on les a rédigées, je ne savais

  2   pas non plus ce qui en était lorsqu'elles étaient données, ce n'était pas

  3   de mon ressort. C'était peut-être au hasard qu'il me soit arrivé que

  4   quelqu'un vienne de l'extérieur et qu'il soit présent à une de ces réunions

  5   et que la question soit posée.

  6   Q.  Je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire lorsque vous dites

  7   poser une question au hasard ou de manière sporadique. Mais je constate

  8   qu'en 2006, vous avez dit que vous n'aviez jamais posé de questions là-

  9   dessus puisque cela n'était pas de votre ressort. Est-ce que le compte

 10   rendu d'audience reflète correctement ce que vous avez dit devant la

 11   Chambre de première instance en 2006 ?

 12   R.  Mais je voudrais être tout à fait précis. Et je vous dis ce n'était

 13   certainement pas de mon ressort. Et je ne m'intéressais pas à cela. Ce que

 14   je vous dis aujourd'hui, c'est que j'aurais pu au hasard poser une question

 15   ici ou là lors d'une réunion, mais c'était un peu comme si vous, vous-même,

 16   vous aviez été présent à cette réunion, pas moi. C'était pas quelque chose

 17   de particulièrement important. Donc, personne ne n'a jamais rendu compte

 18   là-dessus.

 19   Q.  Et cela correspond à ce que vous avez dit en 2006, plus tard, on vous a

 20   demandé ce qui en était des militaires, est-ce qu'il a informé les

 21   autorités militaires des opérations qui allaient se produire, et vous avez

 22   dit :

 23   "Je ne me souviens pas que quoi que ce soit m'ait informé des actions de ce

 24   type-là avant qu'elles ne se produisent. Est-ce que ces documents ont été

 25   envoyées en copie à quelqu'un d'autre, je ne sais pas."

 26   C'est la page 25 608 à 609 du compte rendu d'audience. Donc, ce sont vos

 27   propos en 2006 dans le cadre de votre témoignage; c'est bien cela ?

 28   R.  J'affirme que l'état-major principal n'avait ni le besoin ni


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  1   l'obligation de m'informer. Il est possible que telle ou telle information

  2   a été envoyée, mais tout ce que j'ai pu lire par la suite, a posteriori,

  3   c'était un peu comme lorsque vous avez un présentateur à la télévision qui

  4   lit quelque chose, pas question de crimes ni de quelque chose de

  5   particulièrement alarmant ou important, rien d'important pour ce Tribunal

  6   surtout. Donc, je suis convaincu que je n'étais pas informé. Mais je

  7   n'exclus pas que de manière exceptionnelle une information me soit

  8   parvenue.

  9   Q.  Je ne voudrais pas qu'on devienne ambigu ou pas du tout clair, à savoir

 10   d'après ce que j'ai compris, vous aviez affirmé que vous n'aviez jamais

 11   reçu une information portant sur des crimes, aucune information de ce type

 12   ne vous serait parvenue, mais est-ce que vous comprenez que je vous

 13   intéresse maintenant au sujet du fait qu'on vous ait informé des opérations

 14   militaires avant ou après qu'elles aient eu lieu ? Donc, c'est la question

 15   qui vous a été posée en 2006, et par la suite je vous ai demandé si vous

 16   pouviez le confirmer ou est-ce que vous le contestez.

 17   Donc, est-ce que vous répondez à cette question en bloc, de manière

 18   générale, pour tout ce qui concerne les opérations, ou bien vous vous

 19   limitez à des informations qui portent sur des crimes ?

 20   R.  Les informations parvenues de la part de l'état-major principal,

 21   écoutez, ça n'a pu se produire qu'à titre exceptionnel que je sois informé.

 22   De manière régulière ou que je sois informé, comme ils étaient tenus

 23   d'informer d'autres instances, non, non. J'affirme que ce n'était pas comme

 24   ça que ça a fonctionné, que ce n'était pas une obligation de l'état-major

 25   principal pour procéder ainsi. Ça n'a pu être qu'un cas isolé, ça pu se

 26   produire quelques fois seulement, mais sur des contenus bénins, qui est

 27   sans importance. J'en étais davantage informé en regardant la télévision

 28   que ce n'était en recevant des informations de la part de l'armée.


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  1   Q.  Donc, vous affirmez que si vous êtes un qui arrivait d'être informé

  2   d'une opération militaire avant qu'elle ne soit menée ou après celle-ci ou

  3   pendant celle-ci, que c'était uniquement accidentelle, ce n'était pas une

  4   pratique régulière ?

  5   R.  Monsieur le Procureur, je dois affirmer devant ces Juges que l'armée

  6   était organisée de telle sorte qu'ils n'étaient pas tenus d'informer ni

  7   l'assemblée, ni moi-même, que ce soit du début des opérations ou de leur

  8   fin. Et peut-être qu'il y a eu des informations qui me sont parvenues, mais

  9   ce n'était pas une obligation de l'état-major principal de me l'envoyer.

 10   Donc je dois vous dire que les informations ne me parvenaient pas

 11   lorsqu'ils décrivaient, par exemple, qu'ils allaient s'emparer d'un

 12   territoire ou qu'ils allaient expulser quelqu'un, ou quoi que ce soit

 13   d'important. Ce type d'information ne me parvenait pas.

 14   Q.  Très bien. Alors, je vais probablement demander que ce soit verser au

 15   dossier, mais pour finir sur ce sujet. Monsieur Krajisnik, je ne vous

 16   demande pas si c'était une responsabilité de droit de la part de la VRS de

 17   vous en informer. Ce que je vous demande, c'est la chose suivante : en

 18   2006, on vous a demandé si les autorités politiques étaient informées des

 19   opérations qui allaient se produire ou qui étaient en train de se dérouler,

 20   et je vous demande donc la même chose. Comme je vous ai déjà présenté votre

 21   témoignage à ce moment-là, lorsque vous avez dit que vous ne vous souveniez

 22   pas que qui que ce soit vous ai informé des actions avant qu'elles ne se

 23   produisent, mais vous ne saviez pas si une copie d'information était

 24   envoyée à quelqu'un d'autre.

 25   Donc, en 2006, vous avez dit que de mémoire, vous pensiez que vous

 26   n'étiez pas informé de ces opérations militaires avant qu'elles se

 27   produisent ou après ? Quelle que soit la question de la responsabilité de

 28   droit ou pas.


Page 43763

  1   R.  Oui, je confirme cela. Et j'ai ajouté aujourd'hui qu'il est possible

  2   qu'un document me soit parvenu, mais ce serait un document insignifiant. Il

  3   faudrait me présenter ce document pour que je vous commenter pourquoi je

  4   n'en ai gardé aucun souvenir.

  5   Q.  A la lumière de ce que vous avez dit dans votre déposition dans le

  6   cadre de votre propre procès, à savoir que vous n'étiez pas informé des

  7   affaires militaires, vous avez à plusieurs reprises dit à la Chambre de

  8   première instance que s'ils voulaient savoir ce qu'il en était de ces

  9   choses-là, il fallait poser la question à M. Karadzic. Par exemple, un

 10   extrait vous a été montré d'un rapport portant sur l'aptitude au combat -

 11   il s'agit du document D325 qui a été versé au dossier, page 159 en anglais,

 12   page 138 en B/C/S - un extrait où il est explicitement dit que l'armée

 13   cherchait à atteindre des objectifs fixés par la direction politique. Vous

 14   avez dit que vous n'avez émis aucun ordre et vous avez dit :

 15   "Je ne suis pas au courant de ce qui a été communiqué; M. Karadzic le

 16   sait."

 17   Page 21 669 du compte rendu d'audience. C'est ce que vous avez dit dans

 18   votre procès; exact ?

 19   R.  M. Karadzic avait un cabinet de guerre, et il est possible qu'il ait

 20   reçu ce type d'information. C'est la raison pour laquelle j'ai dit --

 21   Q.  Monsieur Krajisnik, tout d'abord, est-ce que vous l'avez dit ? Est-ce

 22   que vous l'avez dit dans votre procès ? Vous l'avez dit; exact ?

 23   R.  Si c'est ce qui a été consigné dans le compte rendu d'audience, et il

 24   n'y a pas eu d'objection, je suppose que oui. Je ne peux pas me rappeler

 25   exactement de mes propos maintenant.

 26   Q.  En fait, c'est ce que vous avez dit dans l'affaire Popovic dans votre

 27   déposition. Je ne sais pas si cela vous aide à vous rappeler que vous avez

 28   dit cela.


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  1   R.  C'est ce que je pense aujourd'hui, mais je ne sais pas si c'est ce que

  2   j'ai dit. Mais aujourd'hui, c'est ce que je pense, en effet, que ce n'était

  3   pas de ma compétence et que personne n'était tenu de m'en informer. C'est

  4   ce que je pense aujourd'hui.

  5   Q.  Et de manière comparable, dans l'affaire Popovic, au sujet de ce

  6   rapport d'aptitude au combat, un autre extrait de celui-ci -- et il s'agit

  7   du document 25523 de la liste 65 ter. On vous interroge sur un extrait de

  8   ce rapport portant sur l'aptitude au combat où il est dit que les objectifs

  9   stratégiques de la guerre ont été fixés correctement et qu'ils servaient de

 10   lignes directrices et que l'état-major principal les transmettaient à des

 11   niveaux opérationnels et tactiques, et cetera. Donc l'armée ne cherchait-

 12   elle pas à atteindre les objectifs qui avaient été fixés par la direction

 13   politique ? C'était ça, la question. Et vous avez répondu, page 21 668 du

 14   compte rendu d'audience :

 15   "Eh bien, je n'étais pas le commandant suprême. Ce n'est pas moi qui

 16   rédigeais les rapports," et c'est comme cela que ça a été consigné, "je ne

 17   peux pas vous aider." Et vous avez dit qu'il fallait poser cette question à

 18   Gvero ou à d'autres généraux ou "à M. Karadzic lorsqu'il sera amené ici."

 19   Donc, encore une fois, dans l'affaire Popovic, on vous a interrogé sur les

 20   objectifs fixés à l'armée et sur les questions d'opérations militaires, et

 21   vous avez suggéré que la Chambre de première instance devait poser cette

 22   question à M. Karadzic ?

 23   R.  Vous voulez que je me dispute avec Karadzic. C'est ça, votre intention.

 24   Vous interprétez de manière erronée les choses. Je ne parlais pas de M.

 25   Karadzic comme de quelqu'un qui aurait été coupable ou responsable de cela.

 26   C'était lui le commandant suprême, donc il était le mieux placé pour

 27   interpréter une directive qu'il a signée ou si quelqu'un lui avait rendu

 28   compte. Donc, c'est ce que je vous répète encore aujourd'hui.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Très bien. Je demande que ces deux extraits

  2   soient versés au dossier, Monsieur le Président, à partir de 25523.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Deux extraits ?

  4   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Il s'agira de 21668 et 21669.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection. Aussi, Monsieur le

  7   Président, j'ai pu vérifier ce qu'il en était de mon propre exemplaire de

  8   ces pages, 24 983 à 24 990, du procès de M. Krajisnik, et je n'ai pas

  9   d'objection à ce qu'on les ajoute.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait faire une pause ?

 11   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On fera une pause de 30 minutes et on

 13   reprendra à 11 heures. Un instant. Une cote pour le compte rendu d'audience

 14   de l'affaire Popovic.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira donc du document 25523 de la

 16   liste 65 ter qui devient la pièce P6517.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.

 19   --- L'audience est reprise à 11 heures 05.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais

 22   vous présenter Svetlana Atanasova, de Bulgarie, qui est notre stagiaire et

 23   qui nous a rejoints. Merci.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 25   Veuillez continuer, Monsieur Tieger.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 27   Pour qu'il n'y ait pas d'erreur, j'aimerais m'assurer que nous avons bien

 28   demandé le versement de deux pages du document 25523 de la liste 65 ter.


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  1   D'après le compte rendu, il semble que c'est l'intégralité du document qui

  2   ait été admis. Mais je voulais consigner au compte rendu que j'avais

  3   demandé le versement de quelques pages uniquement.

  4   Q.  Revenons à la question de vos connaissances des opérations militaires,

  5   Monsieur Krajisnik. D'après vos affirmations selon lesquelles vous en

  6   saviez très, très peu sur la planification ou la réalisation d'opérations

  7   militaires, vous avez néanmoins affirmé qu'il n'y avait pas de

  8   planification d'opérations militaires. Par exemple, comme vous l'avez

  9   déclaré aux Juges de cette Chambre, page du compte rendu 44 302, vous avez

 10   dit, je cite :

 11   "Chaque unité ethnique a tenu ses frontières ethniques à quelques

 12   corrections près. L'armée ne s'est contentée que de corriger quelques

 13   éléments ou a perdu quelques territoires et a donné une carte légèrement

 14   différente."

 15   A la page 25 705 de votre déposition en 2006, vous avez déclaré s'agissant

 16   des directives, je cite :

 17   "Toutes ont été délivrées et aucune n'a été mise en œuvre. Tout

 18   dépendait des évolutions sur le terrain.

 19   "Il n'y avait pas de planification longtemps à l'avance. On perdait

 20   un territoire et puis on en gagnait un. Il n'y avait pas de plan."

 21   La dernière citation reflète fidèlement ce que vous avez dit aux Juges de

 22   la Chambre dans votre procès en 2006, à savoir qu'il n'y avait pas beaucoup

 23   de planification à l'avance et que les choses se passaient ?

 24   R.  Je suppose que l'armée opérait quelque planification, mais les

 25   dirigeants civils qui participaient à la planification de quelques

 26   opérations, eh bien, ça, je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de

 27   ce genre de planification, et je maintiens ce que j'ai dit à l'époque pour

 28   ce qui est des autorités civiles.


Page 43767

  1   Q.  J'aimerais juste savoir si vous confirmez ou si vous infirmez vos

  2   propos de 2006 à propos des évolutions sur le terrain, à savoir que c'est

  3   la situation sur le terrain qui conditionnait les activités de l'armée, et

  4   je cite :

  5   "Il n'y avait pas beaucoup de planification à l'avance. On perdait des

  6   territoires ou on en gagnait. Il n'y avait pas de plan."

  7   Je cite là la page 25 705.

  8   Vous avez dit qu'outre le fait qu'en ce qui vous concernait les opérations

  9   militaires n'avaient rien à voir avec les autorités civiles, vous avez

 10   également déclaré que vous ne saviez pas qu'il y avait des plans

 11   d'opération militaire élaborés à l'avance, et que tout cela dépendait des

 12   évolutions sur le terrain ?

 13   R.  Peut-être qu'il y a une erreur dans l'interprétation. Je vais vous

 14   répéter quoi qu'il en soit ce que je pensais à l'époque et ce que je pense

 15   encore aujourd'hui. La plupart du territoire de Republika Srpska a été

 16   libéré le début de la guerre telle que les Serbes l'avaient définie, parce

 17   que c'était leur secteur ethnique. Ensuite, l'armée a été créée. Plus tard,

 18   quelques opérations de grande envergure ont eu lieu, mais la plupart de ces

 19   opérations ont connu quelques modifications mineures. Donc, à l'époque, je

 20   pensais la chose suivante : Toutes les communautés ethniques s'en sont

 21   tenues au début de la guerre à leur frontière naturelle en fonction de

 22   l'appartenance ethnique et pendant la guerre, il y a eu quelques légères

 23   modifications qui n'ont pas considérablement été changées jusqu'à la fin de

 24   la guerre lorsque nous avons perdu beaucoup de nos territoires et lorsque

 25   le côté musulman a perdu certains territoires et que le côté croate a perdu

 26   certains territoires aussi.

 27   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais demander le versement du document

 28   25705 -- ou plutôt, de la page 25705.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons l'ajouter. Cela vient du

  2   procès Popovic ?

  3   M. TIEGER : [interprétation] Non, du procès Krajisnik.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Du procès Krajisnik, merci.

  5   M. TIEGER : [interprétation]

  6   Q.  Dans votre propre procès, en réponse à une question du président, vous

  7   avez déclaré que vous n'aviez aucune idée d'où l'armée irait, si c'était en

  8   Bosnie ou en Italie. Et vous avez déclaré, je cite :

  9   "Les soldats n'avaient qu'un seul objectif, tenir la ligne de front et les

 10   actions dans les secteurs dépendaient de la situation."

 11   Et puis, vous poursuivez et je cite : "C'est le seul objectif dont j'avais

 12   connaissance."

 13   Et je cite là les pages 600 -- 25619 à 25620.

 14   Est-ce exact ? Vous voyez encore une fois les pages du compte rendu,

 15   mais j'aimerais savoir si vous pouvez confirmer ou infirmer ces propos-là

 16   lors de votre procès devant la Chambre de première instance.

 17   R.  J'ai déclaré cela aux Juges de la Chambre de première instance, mais

 18   j'aimerais ajouter quelque chose. Les trois camps étaient constitués de

 19   personnes armées des trois côtés et chacun défendait son camp, son

 20   territoire ethnique où ces personnes avaient vécu et parfois, certains

 21   prenaient plus que ce à quoi ils avaient droit. Mais il s'agit là de

 22   détails. La population locale a toujours désiré prendre une partie du

 23   territoire de l'autre camp, parce que partout en Bosnie-Herzégovine, la

 24   population le voulait. Et puis, nous ne voulions pas élargir le territoire

 25   parce qu'on pensait que l'on avait le droit de le faire. Les gens qui l'on

 26   fait voulaient rejoindre leurs compatriotes qui étaient restés de l'autre

 27   côté sur leur territoire. D'autre part, l'armée serbe qui a constitué le

 28   peuple armé avec pour objectif de préserver le front, parce que


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  1   l'intégralité de la Bosnie-Herzégovine était une ligne de front. C'était la

  2   plus longue partie en Bosnie-Herzégovine entre les deux camps -- entre les

  3   trois camps. C'est ce que j'ai dit et je maintiens ce que j'ai dit.

  4   Q.  Mais outre cela, malgré vos affirmations sur vos connaissances limités

  5   d'opérations militaires, pendant votre déposition, vous avez insisté sur le

  6   fait et je parle de la déposition dans votre procès, mais vous avez dit la

  7   même chose aujourd'hui, vous avez insisté sur le fait que les objectifs

  8   stratégiques annoncés à la 16e séance de l'assemblée le 12 mai par le Dr

  9   Karadzic n'étaient pas des missions militaires de l'armée. Pouvez-vous le

 10   confirmer ?

 11   R.  J'ai indubitablement affirmé cela et je le maintien aujourd'hui.

 12   Q.  En fait, pendant votre déposition dans l'affaire Krajisnik, vous avez

 13   déclaré que les objectifs stratégiques étaient principalement couchés sur

 14   papier sans pour autant être proposé à Cutileiro.

 15   R.  C'est exact. Mais j'aimerais ajouter quelque chose à cela. La vallée de

 16   la Neretva a été placée dans les objectifs stratégiques sur la base des

 17   pourparlers qui avaient eu lieu entre la délégation serbe et la délégation

 18   croate à Graz. Pour le reste, on a copié les parties de la carte que nous

 19   avions fournie à M. Cutileiro avant le Plan Cutileiro. S'agissant du

 20   corridor maintenant et je voudrais aussi préciser cela, des pourparlers ont

 21   également eu lieu avec le camp croate à Graz. Je crois, si ma mémoire est

 22   bonne, qui c'était le 7 mai 1992.

 23   Q.  Très bien. Donc, dans l'affaire Krajisnik, vous avez déclaré que les

 24   objectifs stratégiques avaient été couchés sur papier et qu'il y avait une

 25   proposition qui avait été faite à Cutileiro. Mais à présent, vous êtes en

 26   train de nous expliquer que l'objectif stratégique numéro 4 ou du moins une

 27   partie de cet objectif stratégique porte -- qui portait sur la Neretva ne

 28   faisait pas partie de la proposition Cutileiro. Donc, l'objectif


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  1   stratégique numéro 4 n'a pas fait partie du Plan Cutileiro ou de la

  2   proposition Cutileiro. Commençons par cela. Vous le confirmez ?

  3   R.  J'ai dit que les objectifs stratégiques, à notre demande, avaient été

  4   envoyés à M. Cutileiro. Nous avons dit à M. Cutileiro que nous désirions

  5   avoir des territoires contigus en ce qui concerne le corridor. Nous avions

  6   dit que nous avions besoin de la vallée du fleuve Neretva. Cela étant, nos

  7   objectifs stratégiques ont découlé des pourparlers qui ont eu lieu avec le

  8   camp croate. Et pour ces deux objectifs, un accord préliminaire avait été

  9   obtenu portant particulièrement sur l'échange de territoires. Nous avons

 10   fait des concessions. A certains moments, les Croates avaient besoin de

 11   quelque chose et vice versa. Donc, le Plan Cutileiro existait, mais il a

 12   été renforcé et il a été étoffé à notre demande et nous y avons ajouté des

 13   éléments après les pourparlers avec les Croates.

 14   Q.  Donc, là, vous parlez de l'objectif stratégique numéro 4 qui porte sur

 15   la vallée du Neretva et de l'objectif stratégique numéro 2, sur le corridor

 16   de Posavina, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui. Oui, vous avez raison.

 18   Q.  Dans votre déposition dans l'affaire Krajisnik, vous avez également

 19   expliqué que l'objectif stratégique numéro 6, à savoir l'accès à la mer

 20   était un élément séparé qui n'était pas repris dans le plan Cutileiro. Je

 21   parle de la page 24200 du compte rendu dans cette affaire.

 22   R.  L'accès à la mer a fait l'objet de toutes les négociations avec M.

 23   Cutileiro et avec les représentants de la communauté internationale, par la

 24   suite avec le camp croate et plus tard, lors de conférences. Nous

 25   demandions que la Bosnie-Herzégovine ait un accès à la mer et si la Bosnie-

 26   Herzégovine devait être transformée en trois entités ethniques, il faudrait

 27   un accès à la mer, des combinaisons ont également été proposée par la suite

 28   pour que notre droit dans le secteur de Neum serait remplacé par un échange


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  1   de territoire dans la région de Molunat et Prevlaka.

  2   Q.  Pour que les choses soient claires, ces discussions sur les échanges de

  3   territoires, étaient-ce des discussions -- question bilatérale avec les

  4   Croates, c'est-à-dire entre le Dr Karadzic et M. Boban ?

  5   R.  A toutes les conférences et par la suite également, sous l'égide de la

  6   communauté internationale, une proposition a été rédigée donnant la

  7   modalité de ces échanges de territoires, et cet accord partiel a également

  8   été obtenu à Dayton. Cela étant, les participants aux parlers ont oublié,

  9   je ne sais pas comment le dire, d'insérer cela, mais cela existait. Une

 10   carte existait à ce propos, il y a un document écrit quant à la mise en

 11   œuvre. Cela n'a jamais été un secret, tout le monde savait qu'il y aurait

 12   un triple échange de territoires, et tout le monde savait que les Serbes

 13   devraient avoir accès à la mer.

 14   Q.  Alors il y a deux choses là. Tout d'abord, vous avez expliqué à

 15   plusieurs reprises dans la déposition de l'affaire Krajisnik que l'échange

 16   de territoires envisagé était quelque chose que, et je cite, "nous avions

 17   convenu à Graz". Je parle de la page 25598. Donc vous avez expliqué qu'il y

 18   avait eu anticipation sur la possibilité d'obtenir le corridor suite à un

 19   échange de territoires, et c'était cela l'accord à Graz. Je voudrais

 20   commencer par cela, est-ce que vous pouvez nous confirmer que c'est bien ce

 21   que vous avez déclaré lors de la déposition dans l'affaire Krajisnik, la

 22   page 25598 ?

 23   R.  Oui, c'est exact, parce que le plan Cutileiro permettait cela,

 24   envisageait cela, c'est-à-dire que les parties à la négociation avaient le

 25   droit de s'accorder sur des échanges de territoires. S'agissant du

 26   corridor, nous étions censés céder une partie du territoire autour de

 27   Kupres pour que les parties croates du territoire qui faisait du corridor

 28   deviennent un territoire serbe.


Page 43772

  1   Q.  Et cette discussion a eu principalement entre le Dr Karadzic et M.

  2   Boban, et tout autre représentant des Serbes et des Croates, mais c'est

  3   resté une discussion entre les Serbes et les Croates, n'est-ce pas ?

  4   R.  A Graz deux délégations ont participé aux pourparlers. Après la fin

  5   d'une conférence qui s'est soldée par un échec, M. Cutileiro a proposé de

  6   passer par des négociations bilatérales et des accords bilatéraux. Nous

  7   avons saisi cette occasion, et nous sommes rentrés à Sarajevo. Donc ce

  8   n'était pas uniquement M. Karadzic et M. Boban, il y avait deux délégations

  9   qui se sont rencontrées, qui ont discuté de toutes ces questions, y compris

 10   l'échange des territoires. Les Serbes cédaient quelque chose aux Croates,

 11   les Croates cédaient quelque chose aux Serbes, et cela se fondait sur un

 12   accord qui avait été obtenu avant dans la carte Cutileiro. C'étaient les

 13   territoires qui appartenaient soit aux Serbes, soit aux Croates, et il n'y

 14   avait pas de contentieux là-dessus.

 15   Q.  La carte Cutileiro, c'est la carte que vous avez présentée, une carte

 16   couleur écrite en cyrillique que vous avez présentée lors de votre

 17   interrogatoire principal par M. Karadzic; c'est cela que vous appelez la

 18   carte Cutileiro ?

 19   R.  En fait, c'est une photocopie d'un journal, d'un quotidien politique

 20   daté du 18 mars ou du 17 mars, qui s'agit d'un quotidien qui s'appelle

 21   "Politika". La Défense peut retrouver cette carte, et c'est cette carte qui

 22   est la carte Cutileiro à laquelle j'ai fait référence l'autre fois. Elle

 23   est en couleur, et c'est comme cela que vous pourrez déterminer les parties

 24   du territoire qui étaient censées être échangées après les pourparlers.

 25   Q.  Nous allons revenir aux discussions Cutileiro et à la carte Cutileiro,

 26   Monsieur Krajisnik. Mais parlons tout d'abord des opérations militaires.

 27   Pendant votre déposition dans l'affaire Krajisnik, vous avez également

 28   affirmé ou vous avez expliqué les objectifs stratégiques et le sens de ces


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  1   objectifs stratégiques. Par exemple, pour l'objectif stratégique numéro 3,

  2   vous avez expliqué, et il portait sur la Drina, vous avez expliqué qu'en

  3   fait l'objectif était "d'éliminer", et je cite, "une frontière

  4   psychologique grâce à des contrôles plus doux aux frontières". Je cite les

  5   pages 24158 et 24159 du compte rendu. Vous pouvez le confirmer ? Je

  6   poursuis la citation :

  7   "Notre objectif consistait à ce que cette frontière psychologique sur la

  8   Drina n'existe plus pour les Serbes …"

  9   Donc, là, je parle de la page 24158. Ensuite vous avez parlé de ce qui est

 10   mis en anglais comme étant entre guillemets, "la soft border" à la page

 11   24159, "la frontière plus douce", c'est-à-dire une frontière qui serait

 12   facile de traverser, et pour laquelle il n'y aurait pas besoin de visa,

 13   page 24158. Donc pour vous, c'était bien cela, l'objectif stratégique

 14   numéro 3 ?

 15   R.  Oui, et je le confirme aujourd'hui. Vous avez fait référence au livre

 16   de M. Izetbegovic à l'époque, à ses mémoires, c'est ce qu'il avait écrit

 17   noir sur blanc dans son livre. Il disait que les Serbes ne devaient pas

 18   avoir le sentiment qu'ils étaient confinés au sein de frontières, qu'il ne

 19   faudrait plus de passeport et cetera, et qu'il fallait -- et je pense que

 20   vous pouvez trouver cela facilement dans les éléments de preuve que j'ai

 21   fournis pendant la déposition.

 22   Q.  Vous avez participé à la formulation de ces objectifs stratégiques,

 23   n'est-ce pas, et c'est ce que vous avez également déclaré aux Juges de la

 24   Chambre dans l'affaire Krajisnik ?

 25   R.  J'ai même dit que je crois que c'est moi qui avais fait ces

 26   propositions ou M. Karadzic, je ne me souviens plus qui de nous deux l'a

 27   fait exactement. Mais lors d'une réunion, c'était soit M. Karadzic soit

 28   moi-même qui avais fait cette proposition ou même les deux, mais elle a été


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  1   formulée, et j'ai participé à sa formulation.

  2   Q.  Pendant que vous avez témoigné, on vous a présenté les commentaires

  3   faits par le général Mladic à l'occasion de la 16e session de l'assemblée,

  4   où lui a dit qu'il avait participé également à la formulation des objectifs

  5   stratégiques. Vous en souvenez-vous ?

  6   R.  Je suppose que oui. Je ne me souviens pas de cette citation. Je

  7   n'exclus pas que cela ait été dit, et je n'exclus pas non plus qu'il ait

  8   été présent lorsqu'il y a eu formulation de ces objectifs stratégiques, je

  9   n'exclus pas.

 10   Q.  Non, la question n'est pas celle de savoir s'il avait été présent. Pour

 11   être tout à fait clair à ce sujet, ce que vous avez dit dans le procès

 12   Krajisnik, et c'est ce que vous venez de nous confirmer à l'instant, c'est

 13   qu'à votre avis, c'est vous qui avez eu l'idée de le faire, et peut-être

 14   consignez aussi ce qui a été dit à Cutileiro, mettons-le noir sur blanc

 15   afin que nos gens sachent de quoi il s'agit. Et, ensuite les gens qui ont

 16   participé aux pourparlers avec Cutileiro ont aidé à la rédaction dudit

 17   document, n'est-ce pas ? Et, c'est ce que vous nous avez dit dans votre

 18   témoignage dans l'affaire Krajisnik, page 2413 à 24125, n'est-ce pas ?

 19   R.  Je suis presque certain de l'avoir formulé moi-même. J'ai exprimé des

 20   réserves, j'ai dit qu'il était possible que ce soit Karadzic, mais je sais

 21   que j'ai pris une part active, et j'ai participé à la formulation des

 22   objectifs, oui, c'est exact.

 23   Q.  Bien. Et donc, le général Mladic, à l'occasion de cette 16e session,

 24   s'est levé et a dit qu'il avait énuméré les objectifs qui pouvaient être

 25   réalisés.

 26   "J'ai dit ceci devant le sommet de la direction à Nevesinje et, même

 27   avant cela, devant la direction politique de Belgrade."

 28   Ça se trouve à la pièce P56956 [comme interprété], en anglais page 35


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  1   et page 26 en B/C/S. Et il en a été question auprès de vous en page du

  2   compte rendu 25 531. Puis ensuite, en page 36 de la version anglaise et à

  3   la page 27 en B/C/S, il a dit que :

  4   "Il en a été question au cercle le plus restreint des camarades qui

  5   ont convenu des objectifs stratégiques et de leur importance. Cela ne

  6   signifiait pas que ça ne pouvait pas être meilleur, enrichi ou plus en

  7   conformité avec la puissance qui était la nôtre au moment même."

  8   Alors, cela semble être le reflet de ce que le général Mladic semble

  9   dire, à savoir qu'il avait participé à la formulation, aux discussions et

 10   la détermination de la façon dont ça devrait être formulé pour ce qui est

 11   des objectifs. Il n'était pas un expert à avoir pris part à ces pourparlers

 12   avec M. Cutileiro, comme cela a été le cas pour vous, Monsieur Krajisnik ?

 13   R.  M. Mladic n'a pas participé aux pourparlers avec M. Cutileiro. Et je

 14   suis presque sûr du fait que M. Mladic n'avait pas pris part à la

 15   formulation des objectifs stratégiques. Nous avions appelé cela le Conseil

 16   de la sécurité nationale, et c'est là qu'on en a parlé, et c'est là qu'il y

 17   a eu formulation des objectifs stratégiques.

 18   Maintenant, pour ce qui est du fait de mentionner Nevesinje, je dirais que

 19   juste avant tout cela, et vous verrez cela à la session de l'assemblée, M.

 20   Mladic était avec M. Ostojic en visite à Nevesinje. Et bien que nous

 21   n'ayons pas été ensemble, il y a eu M. Koljevic, M. Karadzic et moi-même à

 22   avoir visité Nevesinje, mais nous ne nous sommes pas rencontrés là-bas. Et

 23   nous n'avons parlé ensemble d'aucun objectif stratégique avec les gens de

 24   l'Herzégovine.

 25   Q.  Et à la lumière du fait que ces objectifs stratégiques, d'après vous,

 26   se trouvaient être de nature strictement politique, il n'y avait aucune

 27   raison pour que le général Mladic, comme indiqué à la 16e session,

 28   participe à leur formulation, en particulier s'il ne savait rien du tout au


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  1   sujet des pourparlers qui avaient eu avec M. Cutileiro, n'est-ce pas ?

  2   R.  M. Mladic, avant de partir à cette session, pouvait prendre

  3   connaissance de ces objectifs. Ce n'était pas un secret. La liste des

  4   objectifs a été présentée à la session, elle a été présentée aux députés

  5   par les soins de M. Karadzic. Il a présenté aux députés quels étaient les

  6   objectifs en faveur desquels nous nous employions à l'occasion desdits

  7   pourparlers.

  8   Q.  Bien. Mais d'après vous, ça n'avait rien à voir avec le général Mladic;

  9   c'était strictement politique comme question, et son travail à lui c'était

 10   le domaine militaire, n'est-ce pas ?

 11   R.  J'affirme que M. Mladic n'a pas formulé ces objectifs. Ça a été formulé

 12   soit par Karadzic, voire par Krajisnik, et ça a été adopté par les

 13   personnes qui étaient présentes. Je n'exclus pas qu'à l'occasion d'une

 14   réunion préparative [comme interprété], il y a eu Mladic de présent pour en

 15   prendre connaissance, mais la probabilité est faible parce que Mladic

 16   n'était pas encore commandant, il était membre de l'armée populaire

 17   yougoslave. Il a pu être informé à une autre réunion, et il n'a pas

 18   participé à la formulation de ces objectifs.

 19   Q.  -- il manque un peu d'interprétation --

 20   Alors, vous nous avez dit cela dans l'affaire Krajisnik, n'est-ce pas

 21   ?

 22   R.  J'ai vu plusieurs documents à cet effet, mais je vous donnerais la même

 23   réponse aujourd'hui que celle que j'avais donnée à l'époque

 24   Q.  Bien. Alors, votre réponse c'est que vous ne vous souvenez pas de cette

 25   réunion, comme vous le dites. Et vous dites l'avoir rencontré, vous dites

 26   que vous ne lui avez pas parlé de stratégie ou d'objectifs ?

 27   R.  Je répète, il est possible qu'il y ait eu un premier jet de ces

 28   objectifs stratégiques, que quelqu'un en ait informé M. Mladic et que cela


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  1   n'ait pas impliqué une nécessité d'en discuter. Parce qu'on avait informé

  2   le parlement de nos positions, mais lui n'avait pas encore été commandant

  3   de l'armée de la Republika Srpska, donc il n'y avait aucune nécessité de

  4   lui en parler.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Fort bien. Je demande le versement au dossier

  6   de ces pages, Monsieur le Président, donc les pages 25 531 à 25 532.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. On versera au dossier ces pages-

  8   là.

  9   M. TIEGER : [interprétation]

 10   Q.  M. Karadzic vous a interrogé au sujet d'une citation de M. Milovanovic

 11   à l'occasion d'une interview - et ça se trouve en pages du compte rendu

 12   d'audience 43 302 à 43 303 - et on y reprend les propos de Milovanovic qui

 13   a dit quelque chose d'à peu près similaire aux objectifs stratégiques qui

 14   consistaient à protéger le peuple serbe de contre toute destruction pour

 15   faire en sorte qu'ils restent en Yougoslavie ou, alternativement, pour leur

 16   permettre d'avoir un Etat à eux. Alors, c'est assez vague, et vous serez

 17   d'accord avec moi pour dire que ceci n'est pas tout à fait l'articulation

 18   d'un objectif militaire concret, n'est-ce pas ?

 19   R.  Les objectifs stratégiques exacts indiqués par M. Milovanovic découlent

 20   de la directive. Ça diffère des objectifs stratégiques. Il n'y a que

 21   l'appellation qui coïncide. Mais pour répondre à ce que vous venez de dire,

 22   oui, je répondrais par l'affirmative.

 23   Q.  Penchons-nous brièvement sur la pièce D2149, je vous prie. Il est

 24   question d'un document versé au dossier par M. Karadzic dans cette affaire-

 25   ci et il s'agit d'extraits de carnets de notes tenus à jour par le général

 26   Milovanovic à l'occasion de rencontres avec M. Karadzic. Il s'agit de la

 27   page 27 en anglais et de la page 18 et 19 en B/C/S. Ces notes se rapportent

 28   à :


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  1   "A la date du 25 juillet, où l'état-major principal m'a donné l'ordre

  2   de présenter les résultats de notre deuxième phase des opérations

  3   offensives, Lukavac 93. Il y a eu un briefing à l'intention du commandement

  4   Suprême."

  5   Et ensuite, on continue par dire ceci :

  6   "J'ai dit que la VRS avaient réalisé cinq sur un total de six

  7   objectifs stratégiques et qu'il y avait encore la nécessité d'assurer à la

  8   RS un accès la mer qu'il ne convenait pas de réaliser par des moyens

  9   militaires, mais plutôt par des moyens politiques et juridiques."

 10   A la différence de ces vagues formulations, qui ont été présentées par M.

 11   Karadzic à l'occasion de son interrogatoire au principal, ceci reflète la

 12   façon dont le général Milovanovic avait compris à l'époque le rôle des

 13   militaires pour ce qui est de la mise en œuvre des six objectifs

 14   stratégiques, y compris l'accès à la mer, qui est l'objectif stratégique

 15   numéro 6, qui était difficile de réaliser.

 16   R.  Je ne sais pas quelle a été l'interprétation de M. Milovanovic. Ça, il

 17   faut lui poser la question à lui. Ce que je peux vous dire, moi, c'est que

 18   la formulation des objectifs stratégiques à la date du 12 mai, ça a été une

 19   formulation de la plateforme que nous avions établie pour négocier avec M.

 20   Cutileiro. Ce qui est contradictoire ici, c'est que le fait d'accéder à la

 21   mer était, militairement parlant, la chose la plus aisée à faire, parce que

 22   si l'armée avait voulu le faire, elle l'aurait fait. Parce que la JNA se

 23   trouvait à Prevlaka, elle pouvait juste échanger certains territoires et

 24   prendre des territoires pour le compte de l'armée de la Republika Srpska.

 25   Il est évident que ce n'était pas l'objectif et qu'on n'avait pas voulu

 26   faire cela de la sorte. On avait voulu réaliser cet objectif par des moyens

 27   politiques, vous pouvez le voir dans les documents que vous avez.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] La traduction de ce document n'est pas bonne


Page 43779

  1   non plus. Rien que sur cette page-ci, il y a plusieurs erreurs.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voudrais que ce soit abordé de façon

  3   distincte pour ce qui est du document que nous venons de verser au dossier.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Si je puis le préciser, le document a été

  5   versé au dossier par l'accusé lui-même.

  6   Q.  Nous avons vu dans cet extrait le fait que le général Milovanovic avait

  7   parlé de la réalisation de ces objectifs dans une grande mesure. C'est

  8   ainsi qu'il s'est exprimé. En fait, l'armée, la VRS, avait été utilisée de

  9   façon active pour mettre en place une situation factuelle permettant

 10   d'améliorer la position aux négociations qui devaient, au final, résoudre

 11   le conflit, n'est-ce pas ?

 12   R.  Ça, ça a été la logique, mais selon cette logique, il y a aussi depuis

 13   le 18 juin une opposition ferme. MM. Karadzic et Koljevic sont allés à

 14   Londres et ils ont signé une déclaration avec le ministre des Affaires

 15   étrangères, M. Hurd, qui disait que la partie serbe s'engageait, en cas de

 16   solution pacifique, de restituer une partie des territoires pris. Alors,

 17   pourquoi voulez-vous qu'on s'empare d'un territoire, que l'on agrandisse

 18   les territoires tenus par nous pour avoir à en restituer davantage ?

 19   C'était contradictoire en soi. Donc nous voulions aboutir à une carte, non

 20   pas sur le champ de bataille, mais à une table de négociations.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est la date de ce briefing, c'est

 22   l'année 1993, Monsieur Tieger ?

 23   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 24   Q.  Monsieur Krajisnik, est-ce que vous souhaitez dire que la direction des

 25   Serbes de Bosnie n'a jamais affirmé qu'une réalité nouvelle mise en place

 26   du fait des modification démographiques constituerait, ne serait-ce qu'en

 27   partie, une solution qui ferait que les territoires réclamés par les Serbes

 28   se fonderaient sur une sorte de droit découlant des réalités nouvelles ?


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  1   R.  Il n'y a pas eu qu'une seule opinion. Il y a eu beaucoup d'opinions.

  2   Tous étaient des généraux et tous étaient des hommes politiques. Les

  3   politiques aussi utilisaient ce type de rhétorique pour apaiser certains

  4   tons que l'on pouvait entendre çà et là. Je vous parle de ce qui a été pris

  5   comme engagement et ce qui a été réalisé au final. Nous étions toujours

  6   disposés à céder une grande partie des territoires pour arriver à des

  7   solutions pacifiques. Penchez-vous sur la carte de M. Owen, parce que vous

  8   avez des territoires en noir et blanc, et en noir, c'est les 30 % que nous

  9   devions restituer à ce moment-là pour arriver à un accord --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez parlé trop vite. Est-ce que

 11   vous pouvez répéter ce que vous avez dit après avoir affirmé que vous étiez

 12   toujours "disposés à céder une grosse partie des territoires" ? Qu'avez-

 13   vous dit ensuite ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse de parler vite. Je suis très

 15   inspiré par le parler rapide quand je suis interrogé par M. Tieger, qui est

 16   une vieille connaissance pour moi.

 17   La partie serbe a toujours été disposée à céder une partie de ses

 18   territoires pour aboutir à une solution pacifique. Cette politique est

 19   reprise dans toute une série de documents officiels. Et l'un de ces

 20   documents officiels comporte une carte qui a été publiée dans le livre de

 21   M. Owen que j'ai montré devant ce Tribunal, où il y avait 30 % des

 22   territoires libérés ou pris à l'époque par l'armée serbe que nous étions

 23   disposés à restitués. Et c'est la raison pour laquelle je dis, Madame,

 24   Messieurs les Juges, qu'il n'est pas logique de donner une mission à notre

 25   armée de s'emparer de plus de territoires pour avoir plus à restituer. Et

 26   l'année 1993 était l'année où notre armée avait réalisé le plus de succès

 27   jusque-là.

 28   M. TIEGER : [interprétation]


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  1   Q.  Nous avons vu des exemples où vous avez évoqué le fait que tout un

  2   chacun avait son opinion, et tous voulaient être des généraux ou des hommes

  3   politiques. On a vu des exemples où le Dr Karadzic a affirmé s'être adressé

  4   à la communauté internationale en disant, quand on lui a demandé : Qui est-

  5   ce qui vous a accordé un droit à Zvornik, parce qu'avant les conflits,

  6   c'était une municipalité à majorité musulmane ? Il disait :

  7   "Ce droit découle d'une réalité nouvelle," ça se trouve au texte de la 46e

  8   session. "Et expliquez-nous, alors, si vous voulez donner Zvornik aux

  9   Musulmans, il faudrait avoir une nouvelle guerre pour faire revenir les

 10   Serbes à Zenica. Nous avons demandé, donc, Zvornik en vertu de ce droit."

 11   Alors, ça vous a été présenté à l'occasion de votre procès, en page

 12   du compte rendu d'audience 24 932. Vous savez que le Dr Karadzic l'avait

 13   dit, puisque vous avez présent à 46e assemblée. Il en a été question à

 14   l'occasion de votre procès à vous ?

 15   R.  Ça, ça a été mentionné à mon procès.

 16   Q.  Le Dr Karadzic n'était pas le seul à parler de situation factuelle et

 17   de l'impact des réalisations militaires. Le général Mladic a dit à

 18   l'occasion de la 34e session de l'assemblée que l'armée et le peuple

 19   avaient d'abord réalisé la majeure partie des missions et objectifs

 20   stratégiques confiés. Et ensuite : "On est partis pour les positions les

 21   plus favorables possibles vers Genève, parce que vous aviez des résultats

 22   militaires entre les mains. Vous, le peuple, l'armée et les forces du MUP

 23   avez réalisé cela."

 24   Donc, le général Mladic a pris position pour dire que la VRS, par ses

 25   opérations militaires, avait mis en place une position des plus favorables

 26   qui se devait d'être exploitée à l'occasion des négociations.

 27   R.  Il y a une grosse différence entre ce que M. Mladic a dit et ce que M.

 28   Karadzic a dit. M. Karadzic voulait apaiser les Serbes qui étaient restés à


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  1   l'intérieur de la fédération. Zenica et autres secteurs, ou Sarajevo, même

  2   -- au centre de Sarajevo. Ils y étaient beaucoup plus nombreux que dans la

  3   Bosnie-Herzégovine de l'est. Et il a dit que c'était une situation

  4   factuelle. Et il disait que l'on ne pouvait pas faire en sorte que Zvornik

  5   appartienne aux Musulmans parce que les Serbes n'y retourneraient pas, ce

  6   seraient des réfugiés, donc, et ce serait injuste.

  7   Pour ce qui est de M. Mladic, nous ne pouvions pas nous attendre de la part

  8   d'un général qui a pour profession la guerre, pour lui, il est normal de

  9   parler de son rendement, de son travail, de ce qu'il fait, il ne va pas le

 10   dénigrer. Donc, il dit que la tradition et l'histoire disaient que ce qui a

 11   été conquis, ça vous appartenait. Mais penchez-vous sur les autres extraits

 12   de propos tenus par Karadzic. Il a dit qu'il fallait que nous restituions

 13   des territoires et que nous étions disposés à le faire pour aboutir à une

 14   solution finale. Est-ce dans ce procès-verbal ou un autre, je ne le sais,

 15   mais il y a une différence entre les propos d'un soldat qui vante ses

 16   mérites et l'homme politique qui veut apaiser les tensions, et notamment

 17   auprès des gens qui, sur les cartes, voyaient bien qu'ils restaient au sein

 18   d'une fédération.

 19   Et c'est la déposition que nous avons défendue avec les gens de la

 20   communauté internationale, notamment M. Owen. Il a été question d'une

 21   situation factuelle de créée. Donc, il faudrait qu'il y ait de nouveaux

 22   crimes de commis pour forcer les gens, les Serbes, à rentrer dans la

 23   fédération qu'ils venaient de quitter et ramener des Musulmans ici. Donc,

 24   il fallait attendre la fin de la guerre pour que chacun ait le droit de

 25   retourner chez soi comme il l'entendait. Et, Madame, Messieurs les Juges,

 26   nous avons toujours été d'avis que c'était la libre volonté des citoyens

 27   qui devait permettre un départ et un retour chez eux après la fin des

 28   opérations de combat.


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  1   Q.  Donc, le général Mladic est venu dire cela de son propre chef,

  2   indépendamment des commentaires faits par le Dr Karadzic à la 46e Session ?

  3   Et la direction des Serbes de Bosnie ne lui a pas laissé entendre que ce

  4   serait une bonne idée que de renforcer la situation factuelle telle que

  5   créée aux fins d'avoir une position meilleure pour les Serbes dans les

  6   négociations ?

  7   R.  Ecoutez, vous pouvez aisément constater le fait que ce n'était pas

  8   vrai. Nous tenions 80 % des territoires. Fallait-il avoir 90 % et demander

  9   50 % pour avoir une meilleure position aux négociations ? Pourquoi voulez-

 10   vous que, ayant déjà 70 %, nous en demandions 90 ?

 11   Q.  Excusez-moi, Monsieur Krajisnik. Je ne vous demande pas de déterminer

 12   cela suivant une logique. Je m'adresse à vous en votre qualité de

 13   participant à ces événements, et je voudrais, indépendamment de ce que vous

 14   dites être logique dans cette situation, savoir si la direction des Serbes

 15   de Bosnie s'est entretenue avec le général Mladic pour renforcer la

 16   situation factuelle au travers d'opérations militaires ?

 17   R.  Non, ce n'est pas exact. Si vous avez des territoires plus importants,

 18   votre position est meilleure. Mais personne ne lui a demandé de s'emparer

 19   de nouveaux territoires pour que la position soit meilleure encore. C'est

 20   ce que je voulais vous dire.

 21   Q.  On vient de voir qu'à la 34e Session, le général Mladic a déclaré que

 22   l'armée avait réalisé la plupart de ses missions et objectifs stratégiques

 23   qui lui ont été confiés. En d'autres termes, il exprime une opinion qui est

 24   celle de dire que ce qu'il faisait était la réalisation des objectifs

 25   confiés à lui par la direction politique.

 26   Et à la 50e Session de l'assemblée, pièce P970, on voit, aux pages 21 à 22

 27   en anglais et pages 17 à 18 en B/C/S, que le général Mladic, dans un assez

 28   long discours, parle d'objectifs militaires, et il dit :


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  1   "Entre autres, les objectifs fondamentaux de toutes ces opérations telles

  2   que mentionnées visent à détruire et démanteler le plus possible des forces

  3   des adversaires et imposer par les armes une solution finale à la guerre,

  4   l'imposer à l'ennemi et faire en sorte que la communauté internationale

  5   soit amenée en position d'être contrainte à reconnaître la situation

  6   factuelle pour mettre un terme à la guerre, et donc, pour assurer les

  7   conditions les meilleures possibles en faveur de la direction politique

  8   s'agissant de négociations de paix pour aboutir aux objectifs stratégiques

  9   de la guerre."

 10   Et il continue :

 11   "Les" -- non, excusez-moi, "la mission de l'armée dans cette guerre découle

 12   des six objectifs stratégiques adoptés par notre assemblée qui n'ont pas

 13   été réalisés dans leur intégralité du fait de carences en matière de

 14   soutien matériel et autre."

 15   Donc, il apparaît clairement que de façon non ambiguë, le général Mladic

 16   dit de façon explicite que l'armée avait pour mission la mise en œuvre des

 17   objectifs stratégiques et qu'il lui incombait l'obligation d'en réaliser le

 18   plus possible afin d'améliorer la situation factuelle sur le terrain pour

 19   aboutir aussi au résultat final de l'amélioration de la position des Serbes

 20   de Bosnie et des hommes politiques aux négociations.

 21   Alors, vous dites que la direction des Serbes de Bosnie n'avait rien avec,

 22   et est-ce donc encore la perception que vous avez des propos du général

 23   Mladic ? Ce qu'ils disaient n'avait rien à voir avec les objectifs

 24   stratégiques, ils ne l'ont pas encouragé à améliorer la situation factuelle

 25   par le biais d'opérations militaires; c'est bien ce que vous nous dites ?

 26   R.  Monsieur le Procureur, je vous dis et je vous affirme, et je répète,

 27   nous n'avons pas -- à l'époque où Mladic tenait tout ce territoire-là, nous

 28   avions 70 % des territoires. Il n'y avait aucune raison de voir la


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  1   direction civile confier des missions à l'armée qui consisteraient à

  2   prendre de nouveaux territoires pour avoir une solution meilleure. Elle

  3   était déjà bonne, notre position. La position des hommes politiques était

  4   celle d'aboutir par des négociations à des solutions. Alors, la situation

  5   factuelle, était-ce un atout entre nos mains ? Oui, c'était certainement le

  6   cas, mais ce n'était pas un impératif pour Mladic que de le créer encore.

  7   Il l'avait déjà. Nous avions une situation bien meilleure que si nous

  8   avions été des perdants, mais la direction politique ne lui a pas confié

  9   pour mission d'en faire plus afin d'avoir une position meilleure aux

 10   négociations.

 11   Q.  Il n'avait pas pour tâche la mise en œuvre des objectifs stratégiques

 12   et les dirigeants politiques bosno-serbes ne l'ont pas encouragé à mettre

 13   en œuvre les objectifs stratégiques, et de façon, ont répété, le lui ont

 14   rappelé que ces objectifs stratégiques existaient dans le contexte d'une

 15   opération militaire future. C'est ça votre point de vue ?

 16   R.  Les objectifs stratégiques constituaient une -- un programme en vue de

 17   nos négociations et tout le monde était au courant des objectifs

 18   stratégiques, Mladic également. Il pouvait très certainement contribuer à

 19   la mise en œuvre des objectifs stratégiques à sa manière, mais l'objectif

 20   de ces objectifs ne consistait pas à prendre le contrôle de territoires par

 21   la force et d'imposer une solution à quelqu'un. Nous ne le pouvions pas et

 22   nous ne le souhaitions pas. Nous ne pouvions pas parce que la communauté

 23   internationale servait de médiateur ou était un médiateur et nous ne le

 24   souhaitions pas parce que nous savions qu'en Bosnie, quelque soit le type

 25   de guerre que nous avions, la paix devait être signée par les trois parties

 26   en présence. Sans cet accord des trois parties, ces objectifs ne pouvaient

 27   être mis en œuvre.

 28   Q.  Et vous-même -- nous avons vu ce qu'a dit le Dr Karadzic, nous avons vu


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  1   ce qu'a fait M. Mladic à plusieurs reprises et vous-mêmes, vous avez dit

  2   que l'objectif serbe d'un état unique et unifié est quelque chose qui

  3   devait être réalisé et que vous aviez un plan qui serait réalisé par des

  4   moyens politiques et militaires et d'autres moyens, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je dois dire que l'interprétation est -- prête à confusion. Je ne me

  6   plains pas des interprètes, mais je crains que je puisse vous induire en

  7   erreur.

  8   Alors, si l'objectif de Mladic était de réaliser les objectifs

  9   stratégiques, dans ce cas, il aurait pris le contrôle de Sarajevo et la

 10   vallée de la Neretva et il serait parvenu jusqu'à la mer. Et aucun des

 11   objectifs que nous avons déclaré, eh bien, il n'a pas réalisé ces

 12   objectifs-là à l'exception du corridor. Je veux parler de Mladic. Et

 13   certains de ces éléments ont été mis en œuvre de façon spontanée. Certaines

 14   régions ont été libérées qui n'avaient rien à voir avec l'objectif de ces

 15   stratégies.

 16   Q.  Dans votre propre procès, Monsieur Krajisnik, on vous a confronté avec

 17   des remarques que vous avez faites lors de la 18e séance en 1992, au moment

 18   où vous avez dit et je cite :

 19   "Il n'y a pas un seul serbe qui ne souhaite pas vivre dans un Etat unique

 20   et unifié. Il est impossible -- cela est impossible sur le plan politique

 21   actuellement, mais nous devons réaliser cela. Nous avons notre propre plan

 22   que nous allons réaliser par des moyens politiques, militaires et d'autres

 23   moyens en fonction de la situation."

 24   Et cette question vous a été soumise à la page du compte rendu d'audience

 25   25519 à 25520. Et vous avez répondu en disant que :

 26   "Eh bien, nous étions en guerre, donc bien évidemment, je devais parler de

 27   la guerre, mais je ne pensais pas que nous devions faire cela par des

 28   moyens militaires."


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  1   Et vous avez dit :

  2   "Telle n'est pas la situation -- et la situation factuelle n'est pas

  3   importante."

  4   C'est exact ? C'était votre point de vue lors de votre procès et c'est ce

  5   que vous avez dit aux Juges de la Chambre, en l'espèce, vous avez dit que

  6   la situation factuelle n'était pas importante et vous avez parlé de moyens

  7   militaires pour réaliser ce plan et cela n'était le cas que parce que la

  8   guerre était en cours.

  9   R.  Il n'y a pas un seul Serbe aujourd'hui dans la Republika Srpska, ou

 10   plutôt 90 % des Serbes souhaitaient et souhaitent toujours vivrent ensemble

 11   avec la Serbie. Cela a toujours été le cas. C'est le cas aujourd'hui.

 12   Alors, la Bosnie-Herzégovine telle qu'elle existe aujourd'hui est un

 13   compromis. Ces dirigeants ont essayé de mettre ne œuvre des politiques

 14   réalistes pour parvenir à un compromis. Et à juste titre, j'ai dit à

 15   l'époque "Il est vrai que les Serbes souhaitent vivre avec les Serbes de

 16   Serbie." C'était quelque chose comme un plébiscite, mais il ne s'agissait

 17   pas là d'une politique réaliste et les dirigeants ne souhaitent pas

 18   appliquer des politiques qui ne sont pas réalistes et imposer leur volonté

 19   à d'autres -- aux deux autres groupes ethniques et la communauté

 20   internationale. Nous le savions, nous avions des connaissances

 21   particulières et donc, il s'agissait d'un compromis plutôt que ce qui

 22   correspondait au desiderata dans notre peuple.

 23   Q.  Monsieur Krajisnik, je vous parle d'une situation factuelle et vous

 24   prétendez que cela n'était pas important. Référence explicite, parce que

 25   vous avez évoqué le fait de réaliser ce plan par des moyens militaires et

 26   vous avez dit que ça avait -- vous avez cela que parce qu'il y avait une

 27   guerre. Et votre -- lors de votre réponse, vous avez parlé de l'objectif.

 28   Moi, ce qui m'intéresse, c'est le moyen de parvenir à ces objectifs.


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  1   C'est bien ce que vous avez dit, c'est que la situation factuelle

  2   n'était pas importante pour vous, les dirigeants bosno-serbes, c'est bien

  3   ce que vous avez dit aux Juges de la Chambre ?

  4   R.  Je dois vous dire que je ne comprends pas la question, parce que vous

  5   citez -- ce que vous citez, eh bien, ceci a été traduit deux fois. Je vais

  6   vous dire ce que je voulais dire et vous pouvez le mettre là où vous le

  7   souhaitez. Alors, la guerre, il y a de nombreux députés, de nombreuses

  8   personnes qui pensaient que l'on pouvait arriver à quelque chose par le

  9   biais de la guerre. Il s'agit en fait de l'équilibre des pouvoirs et de

 10   relations de par le monde. Il y a d'autres peuples qui existent. On ne peut

 11   rien réaliser par la force, mais il fallait le faire par le biais de

 12   négociations, c'est la seule chose. C'est -- Tel était là notre politique

 13   et rien d'autre.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier du 25520 et

 15   du 25521.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ces deux documents seront ajoutés.

 17   M. TIEGER : [interprétation]

 18   Q.  Compte tenu de vos commentaires au sujet du rôle des stratégiques --

 19   des objectifs stratégiques de la situation factuelle, et de votre

 20   connaissance des opérations militaires, je crois qu'il serait tout à fait

 21   instructif de nous pencher sur un document d'époque, un récit d'époque qui

 22   est en réalité un journal de réunion, au compte rendu d'audience de

 23   réunions qui ont lieu entre les dirigeants politiques et militaires de

 24   l'époque.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Je souhaite afficher maintenant le 14000 -- ou

 26   le 1477. Il s'agit là d'un des carnets de guerre consignés par M. Mladic

 27   entre 1992 et 1995 et je souhaite regarder en premier lieu une réunion qui

 28   s'est déroulée le 6 mai, quelques jours avant cette 16e séance de


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  1   l'assemblée où ont été énoncées ces stratégies que je -- objectifs

  2   stratégiques. Il s'agit ici de la page 256. Nous allons passer à 262 dans

  3   la version en serbe.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions, je

  5   souhaite que les parties abordent avec le Greffier la question des pages

  6   exactes qui font l'objet d'un versement au dossier.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Pardonnez-moi --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la fin de sa déposition.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Bien sûr.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas maintenant.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Alors, il s'agit maintenant du P1477.

 12   Q.  Et ceci illustre des pourparlers avec M. Karadzic, avec moi-même

 13   [comme interprété], le général Adzic, et cetera. Et nous constatons que M.

 14   Karadzic prend la parole en premier, ce qui semble constituer une

 15   déclaration assez longue, mais la partie qui m'intéresse, et je souhaite

 16   que vous tourniez votre attention là-dessus, en particulier, il s'agit du

 17   passage qui se trouve en bas de la page 258. Accessoirement, après qu'il y

 18   ait dit :

 19   "Nous étions à Graz aujourd'hui pour les négociations avec les Croates."

 20   Et il dit :

 21   "Il serait bien de mener à bien la démarcation, et (b) de constituer un

 22   corridor, et (c) pour que la Drina ne constitue pas une frontière, et (d)

 23   de parvenir jusqu'à la côte ou d'atteindre la côte."

 24   Donc lors d'une réunion avec le général Mladic et le général Adzic, et un

 25   groupe de généraux avec vous, le Dr Karadzic énonce la plupart des

 26   objectifs stratégiques qui seront clairement exposés au parlement bosno-

 27   serbe dans quelques jours, et, il explique de façon très claire à ces

 28   généraux quels seront ces quatre objectifs stratégiques.


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  1   R.  Il s'agit là d'un exemple où le Dr Karadzic présente les objectifs

  2   stratégiques futurs, il nous en informe, une partie seulement, pas tous les

  3   objectifs. Et, cela est arrivé après les pourparlers avec les Croates,

  4   comme je viens de le dire dans ma déposition à Graz.

  5   Q.  Et, il explique aux militaires ce qu'il serait bon de faire, comment

  6   mener à bien la démarcation. C'est ce qu'il leur explique, n'est-ce pas ?

  7   R.  Lors de la réunion avec les Croates, nous nous sommes mis d'accord sur

  8   la manière dont il fallait mettre en œuvre cette démarcation entre eux et

  9   nous, nous nous sommes mis d'accord là-dessus. Donc cela ne revenait pas à

 10   l'armée. Et ensuite, nous avons parlé aux Croates, et il a présenté ce sur

 11   quoi nous nous sommes mis d'accord avec les Croates, cette démarcation

 12   entre les Croates et nous, après ces pourparlers, après un échange de

 13   territoires, et dans la vallée de la Neretva. Nous avons clairement indiqué

 14   à quel endroit il fallait dessiner cette ligne de démarcation entre eux et

 15   nous, les Croates et les Serbes.

 16   Q.  Ceci n'avait rien à voir avec les remarques du général Mladic lors de

 17   la 34 et 50e assemblées et ailleurs, à savoir que les objectifs

 18   stratégiques avaient été présentés à l'armée, et que c'est eux qui ont mis

 19   en œuvre la plupart de ces objectifs stratégiques de façon à placer les

 20   dirigeants bosno-serbes dans une position de négociateurs des plus

 21   favorables ?

 22   R.  Mais ils n'ont pas réalisé la plupart de ces objectifs. Sarajevo, la

 23   vallée de la Neretva, et le fait d'atteindre la mer, c'est quelque chose

 24   qu'ils n'ont pas réussi à atteindre. Mais il n'est pas vrai les

 25   représentants étaient présents à l'assemblée. Ils ont entendu l'énonciation

 26   des objectifs. On les a annoncés, chacun était au courant de notre

 27   programme pour les négociations. Il n'y avait rien de secret au sujet de

 28   cela. Vous vous souvenez certainement du fait que dans le processus


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  1   Popovic, j'ai présenté la genèse de ces objectifs stratégiques, comment ils

  2   ont vu le jour. Chose que j'ai présentée au Tribunal, et comment ces

  3   objectifs stratégiques au nombre de six ont vu le jour.

  4   Q.  Alors nous avons compris comment ces six objectifs stratégiques ont vu

  5   le jour. Maintenant, nous sommes en train de nous pencher sur le rôle de

  6   ces objectifs dans le cadre d'opération militaire. Alors pour ce qui est de

  7   la réalité des choses, dès le départ comme nous pouvons le constater dans

  8   ce document-ci, les dirigeants bosno-serbes ont dit à l'armée de quel

  9   objectif il s'agissait, et à maintes et maintes reprises, ils ont rappelé

 10   aux militaires que tels étaient les objectifs dans le cadre d'opérations

 11   militaires à venir, opérations militaires qui avaient déjà eu lieu ?

 12   R.  L'armée ne visait pas la réalisation des objectifs stratégiques sur les

 13   six objectifs stratégiques, ils n'en ont même pas réalisé trois. Lors de

 14   cette même réunion, cette 16e séance de l'assemblée, M. Karadzic a dit :

 15   "Que nous avons envisagé certaines enclaves dans la partie orientale de la

 16   Bosnie-Herzégovine. Donc lorsque l'armée pouvait libérer des territoires,

 17   elle a libéré des territoires. Vous ne pouvez pas attendre de soldats

 18   qu'ils ne favorisent pas cela, cela faisait partie de leur métier, et ils

 19   s'en vantaient, ils disaient qu'il s'agissait d'accomplir des objectifs

 20   mais ils ne les réalisaient pas ces objectifs, ils n'ont même jamais essayé

 21   de réaliser ces objectifs.

 22   Q.  Et, vous dites dans votre déposition qu'ils ne font que se vanter

 23   d'objectif qu'ils ont tiré de leur propre chapeau. Ce n'est pas quelque

 24   chose qui leur a été présenté par les dirigeants bosno-serbes, c'est cela

 25   que vous dites ?

 26   R.  Les six objectifs stratégiques ont été lus en public par le Dr Karadzic

 27   lors de la 16e séance de l'assemblée. Le 9 juin, M. Mladic était présent,

 28   il s'agissait d'une réunion de la présidence. Et, ensuite, il a dit que les


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  1   objectifs stratégiques devaient être transmis aux représentants de la

  2   communauté internationale, les médiateurs, ainsi que notre carte, et qu'il

  3   fallait publier tout cela. Donc il n'y avait rien de secret à cela. Bien

  4   évidemment, Mladic était au courant des six objectifs stratégiques. Mais ce

  5   que je vous dis plus particulièrement, il a libéré des territoires qu'il

  6   pouvait libérer, mais il n'a pas tenu compte des objectifs stratégiques, et

  7   ces objectifs ne constituaient aucune obligation pour lui.

  8   Q.  Alors regardons maintenant une réunion qui s'est tenue le lendemain, le

  9   7 mai, et penchons-nous particulièrement sur votre déposition dans

 10   l'affaire Krajisnik, à savoir que vous ne vous souveniez pas d'avoir

 11   rencontré le général Mladic, et si tel était le cas, vous n'avez

 12   certainement pas abordé avec lui la question des objectifs stratégiques.

 13   Abordons maintenant donc la page 260, pardon la page 262 dans la pièce 1477

 14   dans les deux langues, s'il vous plaît. Une fois à une autre réunion avec

 15   vous et le Dr Karadzic et le général Mladic. Et dans ce document,

 16   pardonnez-moi, en B/C/S, c'est à la page 270. En général, les pages

 17   coïncident dans les deux langues.

 18   Réunion du 7 mai, à 16 h, n'est-ce pas. Lors de cette réunion, Monsieur

 19   Krajisnik, vous avez énoncé dans leur totalité les objectifs stratégiques

 20   devant le général Mladic, de séparer les Croates et les Musulmans pour

 21   toujours, d'établir un corridor entre la Krajina et la Serbie, d'établir un

 22   lien avec la Serbie sur la Drina, de couper la liaison avec les Musulmans,

 23   d'avoir une frontière naturelle avec les Croates le long de la Neretva, une

 24   partie de Sarajevo doit nous appartenir. Les Musulmans peuvent avoir leur

 25   quartier dans la ville, et il faut établir un lien avec leur territoire, et

 26   avoir une ouverture sur la mer.

 27   Donc pendant deux jours, vous et le Dr Karadzic, vous avez rencontré le

 28   général Mladic, et pendant ces deux jours, vous êtes bien assurés que vous


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  1   compreniez bien les objectifs stratégiques, n'est-ce pas ?

  2   R.  Eh bien, vous oubliez que j'ai dit ici que nous ne souhaitions pas

  3   vivre seuls. Je ne sais pas si j'ai mentionné cela, mais cela est exact --

  4   cela est exact. Ce que je veux dire, c'est que je souhaite confirmer que ce

  5   que je lis ici est exact. Alors, à savoir s'il s'agit simplement de ce

  6   qu'il a écrit, je ne le sais pas. Il dit que Krajisnik a énuméré les

  7   objectifs stratégiques qui sont au nombre de sept ici, comme dans un avenir

  8   proche, nous devons -- je ne sais pas ce qui vient après cela. Et lors de

  9   ma déposition ici, j'ai dit que peut-être moi ou le Dr Karadzic, nous avons

 10   peut-être formulé cela, mais vous pouvez constater d'après ce qui a été dit

 11   la veille que le Dr Karadzic a énuméré un certain nombre d'objectifs. Donc

 12   il se peut qu'il me les ait attribués et qu'il se soit agi d'un accord

 13   commun, ou alors, il a assisté à une réunion où les objectifs stratégiques

 14   ont été préparés pour qu'ils soient présentés à une séance de l'assemblée,

 15   et la séance de l'assemblée devait donc se tenir dans les jours d'après.

 16   Q.  Tout d'abord, Monsieur Krajisnik, il n'y a pas sept objectifs

 17   stratégiques qui ont été énumérés. Vous voyez bien une ligne ici qui

 18   indique qu'il y a dix objectifs, ensuite il poursuit, et il y a un

 19   astérisque qui parle de leur conversation : Nous ne souhaitons pas vivre

 20   seuls à l'avenir. Et vous lui avez dit : Nous souhaitons établir des liens

 21   avec la RSK. Ses propos étant rapportés comme étant les vôtres. Ce dernier

 22   point est donc la suite d'une question qui intéressait les dirigeants

 23   bosno-serbes, à savoir d'être unifiés à la Republika Srpska.

 24   En réalité, Monsieur Krajisnik, cette mention précise ce qui est tout

 25   à fait évident, à savoir que le général Mladic, et il est sur le point

 26   d'assumer ses responsabilités, on lui explique quels sont ses objectifs ?

 27   Encore une chose -- non, répondez, puis je vous poserai ma question après.

 28   R.  Il ne s'agit pas de confier des tâches ou des missions au général


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  1   Mladic ou de formuler des objectifs pour lui parce qu'il n'était pas encore

  2   commandant. Sans doute, mais je ne le sais pas, une conversation avec un

  3   certain nombre de participants où les objectifs stratégiques ont été conçus

  4   comme un programme pour que nous puissions avoir des pourparlers, un

  5   programme que nous allions prôner, mettre en avant, quelque chose à propos

  6   duquel nous ferions une annonce lors de la séance de l'assemblée. Il ne

  7   s'agit pas de missions confiées au général Mladic. Il n'était pas encore

  8   commandant. Il s'agissait de pourparlers. Les pourparlers auraient pu être

  9   tenus avec toutes autres personnes à ces dates-là.

 10   Q.  Donc ceci aurait pu être n'importe qui. Le fait qu'il s'agisse du

 11   général Mladic n'est absolument pas pertinent, ou en tout cas, c'est une

 12   coïncidence. C'est ce que vous dites; c'est exact ?

 13   R.  Eh bien, la réunion précédente s'est tenue avec les généraux de Bosnie-

 14   Herzégovine et M. Adzic, donc nous leur avons confié des missions

 15   également. Ils n'avaient rien à voir avec Mladic et ni la future armée de

 16   la Republika Srpska. Moi, je vous dis une chose : il s'agissait des

 17   objectifs politiques qui ont été énoncés ici. Peut-être que Mladic était au

 18   courant, peut-être qu'il savait de quoi il s'agissait. Mais il ne s'agit

 19   pas de missions ni d'ordres qui lui ont été donnés.

 20   Q.  Et vous n'avez pas dit au général Mladic le 7 mai, concernant

 21   l'objectif stratégique numéro 3, que : Notre objectif consiste à établir un

 22   poste de contrôle frontalier le long de la Drina qui ne va pas demander que

 23   l'on montre des passeports, mais on acceptera des visas ? Il s'agit pas là

 24   de la manière dont vous avez articulé votre troisième objectif stratégique

 25   à la date du 7 mai ?

 26   R.  Pouvez-vous faire revenir ce document où on parle des objectifs

 27   stratégiques pour que je puisse voir comment ce troisième objectif a été

 28   énoncé ?


Page 43796

  1   M. TIEGER : [interprétation] Page 270, me semble-t-il, en B/C/S et page 260

  2   -- pardonnez-moi, 262 en anglais.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons toujours prôné le fait que la Drina

  4   ne devait pas constituer une frontière pour laquelle il fallait montrer des

  5   passeports. Je cite ce qu'a dit M. Izetbegovic. Nous avons toujours demandé

  6   cela, et les représentants de la communauté internationale ont toujours

  7   accepté cela, à savoir d'avoir des relations parallèles et particulières.

  8   Ceci existe encore aujourd'hui. Inutile de montrer un passeport, simplement

  9   une pièce d'identité. Tel était l'objectif. Nous ne souhaitions pas avoir

 10   un pays unifié entre la Republika Srpska et la Serbie, mais il fallait

 11   avoir une frontière souple de façon à ce que les gens puissent passer la

 12   frontière facilement comme on le fait aujourd'hui au sein de l'Union

 13   européenne.

 14   M. TIEGER : [interprétation]

 15   Q.  Mais vous n'avez pas dit cela au général Mladic le 7 mai. Vous n'avez

 16   pas dit : Il fallait avoir une frontière souple qu'il était facile de

 17   traverser. Vous dites que vous vouliez couper les liens des Musulmans avec

 18   Sandzak et établir un lien avec la Serbie sur la Drina. Donc, une frontière

 19   souple, Monsieur Krajisnik, permettrait-elle de couper les liens avec

 20   Sandzak ? A mon sens, c'est plutôt l'inverse, cela renforcerait cette

 21   frontière.

 22   R.  Tout d'abord, la Drina n'est pas la frontière au niveau de Sandzak. La

 23   Drina constitue la frontière au niveau de la Serbie. Mladic aurait pu

 24   comprendre cela comme il le souhaitait. Peut-être qu'il avait certains

 25   souvenirs à l'esprit. Je ne sais pas comment ceci est décrit ici -- eh

 26   bien, ce que nous avons négocié avec les Musulmans, les pourparlers que

 27   nous avons eus avec eux et avec les représentants de la communauté

 28   internationale, à savoir il fallait avoir une frontière où il n'y aurait


Page 43797

  1   pas des postes frontaliers où il fallait exiger des passeports, simplement

  2   des papiers d'identité, mais une frontière qu'il était facile de traverser

  3   et ceci existe encore aujourd'hui.

  4   Q.  Monsieur Krajisnik --

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience, si vous me le

  6   permettez. A la ligne 12, même si je vois que ceci a été noté, en fait, on

  7   parle de ses "souvenirs", qui n'ont pas été consignés ici, cette partie-là

  8   de sa réponse.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Je peux poursuivre, Monsieur le Président,

 11   mais il semblerait qu'en regardant l'heure --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.

 13   Nous arrivons au moment de faire la pause. Nous allons faire une pause de

 14   45 minutes et reprendre à 13 heures 15.

 15   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 29.

 16   --- L'audience est reprise à 13 heures 19.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mlle Milica

 19   Milicevic, originaire de Serbie, mais qui a grandi au Royaume-Uni et qui

 20   fait ses études actuellement aux Pays-Bas, est ici avec nous en tant que

 21   stagiaire judiciaire. Je voulais la présenter.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Avant de poursuivre, dans la semaine du 9 décembre, et j'évoque une

 24   question de planning, est-ce que cela vous poserait problème si l'on

 25   travaillait de mardi à vendredi, et non pas de lundi à jeudi ? Il a été

 26   prévu de travailler du 9 au 12, et j'aimerais que l'on travaille plutôt du

 27   10 au 13.

 28   M. TIEGER : [interprétation] De par le passé, ce genre de demandes n'ont


Page 43798

  1   jamais posé de problème, donc nous allons vérifier et nous allons vous

  2   apporter une réponse rapidement.

  3   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Ce ne sera pas un problème pour nous.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Monsieur Tieger.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8    Q.  A présent, Monsieur Krajisnik, je voudrais que l'on aborder quelques

  9   directives. Elles ont été données avant les opérations militaires. Et comme

 10   nous avons entendu ici dans ce procès, une directive constitue un document

 11   qui émane du haut commandement et qui porte sur des questions larges de

 12   préparation et d'exécution d'opérations militaires pendant une période

 13   prolongée. Des objectifs et des missions y sont fixées. Alors, je voudrais

 14   commencer par la première directive qui porte la date du 6 juin 1992, D232.

 15   Abordons la deuxième page en anglais, sous objectifs de l'action, tout de

 16   suite après le point 4. Voyez, c'est en bas de votre page et puis, ça se

 17   poursuit sur la page suivante en B/C/S. Le texte dit :

 18   "Sécuriser des parties de Sarajevo avec la population majoritairement serbe

 19   afin de "ocistiti", nettoyer une zone plus large de l'aéroport de Sarajevo

 20   et "ocistiti", nettoyer ces zones plus larges de groupes et d'individus qui

 21   y restent qui font partie des -- qui appartiennent à l'ennemi …"

 22   Et dans le -- si -- dans la suite, si l'on se penche sur le texte après le

 23   point (D), nous avons -- nous voyons que la directive prévoit -- sur -- sur

 24   le -- prévoit des actions d'offensives afin de "ocistiti", nettoyer un

 25   secteur plus large autour de l'aéroport de Sarajevo, Dobrinja, Butmir,

 26   Sokolovic, Kolonija et dans la suite, une deuxième étape, de 4 à 6 jours,

 27   ouvrir un couloir entre Semberija et la Krajina de Bosnie et puis, plus

 28   loin --


Page 43799

  1   L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend. Plus haut. Dobrinja, Butmir,

  2   Sokolovic, Kolonija, ouvrir les communications. Sarajevo, Trnovo. Et

  3   regrouper les forces afin d'ouvrir le couloir entre Semberija et la Krajina

  4   de Bosnie.

  5   M. TIEGER : [interprétation]

  6   Q.  Et puis dans la suite :

  7   "Dans une deuxième étape de 4 à 6 jours, créer un couleur entre Semberija

  8   et la Krajina de Bosnie, rejeter les -- ou repousser les forces ennemies,

  9   les écarter des communications et pendant la période à venir, élargir le

 10   corridor pour assurer des -- pour garantir une circulation sur ce

 11   corridor."

 12   Et ensuite, nous avons ici le "ocistiti" et en anglais, il se traduit

 13   de deux manières possibles en fonction du contexte dans lequel il se

 14   retrouve. Je vous renvoie aux pages du compte rendu d'audience 14572

 15   jusqu'à 15575 pour les références. Ce terme apparaît aussi dans un contexte

 16   militaire. Il signifie nettoyer le terrain dans ce contexte, terme

 17   militaire pour des étapes finales d'une opération. Il peut signifier

 18   nettoyer dans le sens d'écarter, enlever une population d'un certain

 19   territoire. Donc, dans ce document, dans la traduction anglaise, les deux

 20   possibilités nous sont proposées et nous avons l'original en serbe qui

 21   figure dans la traduction anglaise.

 22   Mais s'agissant des points que je vous ai signalés, est-ce que dans

 23   la première directive et pour la première étape de la participation de la

 24   VRS au conflit, est-ce que nous voyons effectivement le reflet de deux des

 25   objectifs stratégiques cherchant à créer une situation de fait qui pourrait

 26   constituer une manière d'étayer les différentes exigences qui sont

 27   formulées dans le cas des négociations ?

 28   R.  Je ne suis pas un expert militaire et il m'est donc difficile


Page 43800

  1   d'expliquer cela. Tout ce que je pourrais vous dire manquerait de qualité

  2   et ne m'engagerais que moi. Ce que je peux vous dire maintenant en tant que

  3   profane, c'est que dans un premier temps, sur le plan ethnique, nos

  4   territoires étaient discontinues, sans lien entre eux et que certainement,

  5   cette situation sur le terrain exigeait qu'on établisse des liens, des

  6   communications entre ces territoires. Ici, il est question uniquement des

  7   zones ethniques dans les environs de Sarajevo. C'est là qu'il y avait une

  8   population majoritairement serbe et où il s'agissait justement d'établir

  9   des voies de communication. Mais je ne pourrais pas dire que là, il y a un

 10   lien entre ce qui est dit ici et cet objectif stratégique ou l'un

 11   quelconque objectif stratégique. C'était simplement la situation qui

 12   imposait que dans -- qu'on établisse un lien dans la partie est.

 13   Et puis, pour le couloir qui est mentionné, vous savez que toute la

 14   partie ouest de la Krajina serbe était coupée et c'était un problème

 15   surtout à cause de l'approvisionnement en aide humanitaire. Vous avez

 16   aujourd'hui cet exemple de 12 bébés qui sont décédés à défaut de pouvoir

 17   recevoir l'oxygène. Et à ce moment-là, il y a eu des pressions pour que ce

 18   couloir humanitaire soit ouvert vers la partie occidentale de la Republika

 19   Srpska. D'ailleurs, c'est ce qui se fait par la suite.

 20   Donc, je ne vois ici rien d'inhabituel, rien d'étonnant dans un

 21   document militaire. Et en tant que profane, encore une fois, ce nettoyage

 22   qui est mentionné, c'est un nettoyage de forces ennemies. Forces ennemies,

 23   ce sont des soldats ennemis de la partie adverse.

 24   Q.  Ces actions qui sont évoquées dans la directive résultent de réunions

 25   avec la direction politique bosno-serbe, y compris vous-même, exact ?

 26   R.  Si cela se situe à la date du 6 juin, de mémoire, la première réunion

 27   de la présidence élargie a eu lieu en fait le 9 juin, donc un peu plus

 28   tard. Je ne sais pas si il y aurait eu une autre réunion informelle peut-


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  1   être dont on n'aurait pas gardé la trace avant. Mais la première réunion de

  2   mémoire avec M. Mladic, c'était le 9 juin, trois jours après que ces

  3   directives ne soient données.

  4   Q.  Prenez la pièce P1478, page 92. Et il s'agit d'une réunion du 5 juin

  5   1992. Général Mladic, vous-même, Konjevic, Plavsic, Djeric, parmi les

  6   personnes présentes.

  7   R.  Je ne vois pas la date. Pourriez-vous m'indiquer où se trouve la date ?

  8   Q.  Cette réunion a lieu à 16 heures et la date figure sur les pages

  9   précédentes du document. On peut le voir. Si vous voulez, on peut

 10   feuilleter le document. Sinon, vous pouvez me faire confiance, mais la date

 11   suivante est celle du 6 juin. On le verra dans un instant. Donc, vous

 12   verrez que ça commence à 16 heures et ça se poursuit jusqu'au 6 juin. C'est

 13   la mention suivante.

 14   C'est le général Mladic qui note des exigences à l'issue de sa réunion avec

 15   la direction politique :

 16   "Libérer la route jusqu'à Zlatiste;

 17   "D'occuper la frontière et la ville et renforcer;

 18   "Notre objectif à Sarajevo, Sarajevo doit être résolu politiquement,

 19   il faut agir calmement pouce par pouce" --

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Oui, la page suivante, s'il vous plaît.

 22   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Occuper la frontière dans la

 23   ville, et la renforcer.

 24   M. TIEGER : [interprétation]

 25   Q.  "A nettoyer Butmir, Hrasnica et Dobrinja, et Sokolovic Kolonija, ainsi

 26   que la ville de Hrasno dans la direction du mont Mojmilo."

 27   Donc Monsieur Krajisnik, nous avons ici ces exigences comme cela est dit à

 28   l'issue de la réunion avec la direction de l'état, la direction politique,


Page 43802

  1   et en particulier il s'agit de vous et de M. Karadzic afin de faire

  2   précisément ce qui sera fait dans la directive numéro 1 du 6 juin; exact ?

  3   R.  Ecoutez, mais justement il s'agit d'une confirmation comme quoi ces

  4   pourparlers portent sur des questions de communication. Je ne savais pas

  5   qu'une directive allait suivre, je n'exclus pas qu'il y ait eu cette

  6   réunion d'ailleurs où on en a parlé. Je ne me souviens pas de cette

  7   réunion, était-ce une réunion à la présidence ou autre. Je n'exclus pas

  8   qu'on ait évoqué ce genre de problème justement, parce qu'il fallait

  9   résoudre, oui, comme cela est dit ici politiquement la question de

 10   Sarajevo. Et puis à Zlatiste, on avait coupé la route, puis aussi autour de

 11   l'aéroport où ils tiraient sur l'approvisionnement de l'aide humanitaire,

 12   puis la route vers Trnovo, tout ça, ça porte sur des questions de voies de

 13   communication. Alors qu'il y ait une ligne directive par la suite, je ne

 14   sais pas à quel moment mais c'est tout à fait naturel qu'il y ait une

 15   directive après des entretiens. Je ne vois rien d'étonnant ici. J'admets

 16   que effectivement peut-être une telle réunion se soit tenue.

 17   Q.  Nous allons vérifier le compte rendu d'audience, peut-être que je vous

 18   ai mal compris précédemment. A un moment, vous auriez répété à plusieurs

 19   reprises qu'aux Juges de cette Chambre que les opérations de la VRS

 20   n'avaient rien à voir avec la direction politique. Donc maintenant d'après

 21   ce que je comprends de ce que vous dites, c'est que c'est tout à fait

 22   naturel que des opérations militaires concrètes et des directives

 23   militaires s'inscrivent dans la continuité de réunions avec la direction

 24   politique et fondées sur ce que la direction politique aurait affirmé comme

 25   constituant les impératifs ou ce qui devait se produire.

 26   R.  Ecoutez, je ne comprends pas ce que vous ne comprenez pas. Je vais

 27   essayer tout de même de vous l'expliquer. Si cela ne cadre pas ce que j'ai

 28   dit, vous allez pouvoir affirmer que mon discours n'est pas cohérent. Alors


Page 43803

  1   j'ai dit --

  2   Q.  Ce que je veux savoir de votre part, c'est concrètement maintenant si

  3   oui ou non vous estimez que les opérations militaires constituaient un

  4   résultat de réunions qui avaient eu lieu avec la direction politique bosno-

  5   serbe, et si elles étaient le résultat des instructions obtenues de cela ?

  6   R.  Mais Monsieur le Procureur, vous venez de vous livrer à des jeux de

  7   mots pour obtenir une réponse de ma part. Je suis en train de vous dire que

  8   vous aurez une réponse erronée si vous poursuivez ainsi, et je vais vous

  9   expliquer pourquoi. Il y a eu très peu de réunions avec l'armée, et pour

 10   l'essentiel, on a parlé de logistique. Il y a eu des informations, c'est

 11   normal, on a aussi discuté d'un certain nombre de problèmes, normal, mais

 12   ce n'était pas des obligations, ce n'était pas des ordres à l'intention de

 13   l'armée. Depuis le terrain, on recevait des souhaits, des exigences, non,

 14   mais ce n'était pas des exigences des autorités civiles. L'armée, elle

 15   agissait de manière autonome, personne ne leur disait s'ils allaient se

 16   charger de tel ou tel problème parce qu'ils pouvaient voir quelle était la

 17   situation sur le terrain, concrètement ici.

 18   S'il y a eu cet entretien, je suppose que oui, eh bien, c'est normal

 19   qu'on ait discuté avec Mladic les problèmes qui se posaient à Sarajevo.

 20   Voilà, on a énuméré les problèmes, un, deux, trois, ensuite est-ce qu'il

 21   allait agir, comment allait-il agir, eh bien, ça, ce n'était pas suite à

 22   des exigences formulées par nous. C'était en fonction de la situation sur

 23   le terrain. Donc si vous ne m'avez toujours pas compris, vous pouvez me

 24   poser d'autres questions pour que je vous réponde. Cette réunion n'était

 25   pas nécessairement quelque chose qui a entraîné une directive, mais cela

 26   aurait pu l'être. Puis, il y a eu une autre réunion, par exemple, le 9

 27   juin, je ne sais pas qu'il y ait eu une directive par la suite.

 28   Q.  Alors voyons ce qu'il en est de la réunion qui s'est tenue le


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  1   lendemain, le 6 juin. Consultation sur la situation politique et militaire,

  2   la date où la directive a été émise, c'est ça. Et puis au point 4 :

  3   "Doctrine politique et militaire pour les objectifs de la guerre à

  4   venir."

  5   Dr Karadzic exprime, et vers le bas de la page, il aurait réitéré des

  6   objectifs stratégiques avec des commentaires et des explications."

  7   Et à la fin, il dit :

  8   "Il nous faut défendre nos territoires militairement."

  9   Alors pour la quatrième fois, donc nous avons eu déjà le 6 mai, le 7

 10   mai, le 12 mai, et maintenant le 6 juin, la direction politique bosno-serbe

 11   souligne les objectifs stratégiques à l'intention du général Mladic, et

 12   cette fois-ci dans un contexte concret de débat sur la doctrine politique

 13   et militaire des objectifs de la guerre à venir.

 14   R.  Ecoutez, on est en train de mener à bien une consultation des

 15   soldats, et bien sûr que les hommes politiques sont présents. C'est

 16   l'assemblée qui a adopté les objectifs politiques, et c'est M. Karadzic qui

 17   les relaie. Je ne sais pas si ce que M. Mladic a dit est ici consigné de

 18   manière exacte, verbatim. Il a dit que l'armée était censée protéger nos

 19   territoires. Je ne vois pas qu'il ait dit : Prenons les territoires qui

 20   appartiennent à quelqu'un d'autre. Bien sûr, que nous avons besoin d'armée

 21   pour protéger nos territoires, sinon qui le fera ?

 22   Q.  Donc vous ne voyez pas ici une référence à Dr Karadzic disant :

 23   Emparons-nous des territoires de quelques autre ou allons conquérir les

 24   territoires qui appartiennent à quelqu'un d'autre. C'est ce que vous êtes

 25   en train de dire, c'est comme ça que vous nous présentez le contenu de

 26   cette réunion ?

 27   R.  Ecoutez, je ne sais pas ce qui a été consigné par Mladic. Je sais que

 28   lors de ce type de consultation, on évoque des sujets particuliers. Et ici,


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  1   il dit, il nous faut protéger nos territoires, notre situation est très

  2   mauvaise. C'est un grand désavantage pour nous. Je ne sais pas exactement

  3   comment il a noté ce qui a été dit, mais je vous dis que c'est ce que je

  4   suis en train de lire maintenant.

  5   Q.  Alors voyons qui a affirmé ce qui devait se produire, à savoir

  6   que ce qui devait se produire était que l'armée devait conquérir ce qui

  7   était considéré comme appartenant aux Bosno-serbes. M. TIEGER :

  8   [interprétation] Et, je voudrais la page 108, s'il vous plaît.

  9   Q.  Cette page reprend votre contribution à la réunion, vers la fin de la

 10   réunion, et vous dites la chose suivante, et je cite :

 11   "L'objectif était de former et d'unifier les secteurs de Birac-Romanija.

 12   "Délimiter les frontières de ce secteur et y inclure : Hadzici, Ilidza,

 13   Vojkovici, et Novo Sarajevo.

 14   "Dobrinja, si nous arrivons à le prendre.

 15   "Ceux qui ont libéré Hadzici, Vogosca … cela doit être défendu, ce sera à

 16   nous.

 17   "La frontière doit être défendue et tenue."

 18   Passons à la page suivante. Suite de la citation :

 19   "A partir de demain nous devons conquérir ce qui est à nous et être prêts à

 20   défendre notre Etat …"

 21   C'est ce que les dirigeants des Serbes de Bosnie ont dit à la VRS, et cela

 22   concorde avec la délivrance de la directive numéro 6 ?

 23   R.  Je vous répéterais la même chose qu'à l'époque, tous ces secteurs sont

 24   des secteurs serbes, et je n'ai jamais dit qu'un seul pouce du territoire

 25   musulman devrait être pris. J'ai dit que notre territoire devrait être

 26   protégé, et c'est le point de vue de participants lors d'une réunion

 27   précise. Il serait particulièrement naïf de penser que Momcilo Krajisnik à

 28   ce moment-là a donné des consignes, et des ordres à l'armée. J'étais un


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  1   participant, et en tant que tel j'ai dit ce qui nous appartenait autour de

  2   Sarajevo. Notre territoire, prendre des lignes et les défendre. Je n'ai pas

  3   dit qu'il faudrait prendre Bascarsija. Je n'ai pas dit qu'il faudrait

  4   prendre Butmir. Je n'ai jamais dit que le centre-ville de Sarajevo devrait

  5   être pris. J'ai seulement dit qu'il fallait garder ce qui appartenait au

  6   peuple serbe. J'ai suivi cette ligne, nous avions déjà délimité nos

  7   secteurs avec M. Cutileiro sur les cartes. Il ne s'agit pas d'une

  8   directive, c'est une population; c'est l'avis d'un participant, le

  9   président de l'assemblée, qui s'adresse à des participants et à une

 10   audience plus large.

 11   Q.  Vos propos consistaient à dire lorsque vous avez dit : "A partir de

 12   demain nous devons conquérir ce qui nous appartient," vous vouliez dire par

 13   là qu'il fallait prendre ou libérer le territoire qui n'était pas tenu par

 14   les Serbes de Bosnie à ce moment-là, vous ne parliez pas des territoires

 15   qui étaient déjà en votre possession. Vous parliez de la conquête des

 16   territoires qui étaient tenus par les Musulmans, et pour vous les Serbes

 17   avaient droit à ce territoire; c'est bien cela ?

 18   R.  Non, ce n'est pas cela. Lisez mes propos. Je ne sais pas d'où vous avez

 19   tiré ces mots, mais ce qui est écrit ici nous dit "nos territoires" et je

 20   cite, "nos territoires" ils sont également repris dans la liste. Je n'ai

 21   pas parlé de "notre Butmir." Je n'ai pas parlé de "notre Bascarsija." Cela

 22   voudrait dire que nous voulions reprendre quelque chose aux Musulmans et

 23   que cette chose leur appartenait. Ce que je dis c'est que le côté musulman

 24   tenait certains territoires à nous, et la référence ici est de dire que les

 25   territoires devaient être libérés. Parce que d'après les cartes ces

 26   territoires appartenaient aux Serbes à nous, et ce, sur la base des accords

 27   de Dayton.

 28   Maintenant s'agissant du mot "conquer," "les conquérir" je ne sais pas


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  1   pourquoi ce mot a été utilisé. Peut-être que c'est lui qui l'a noté comme

  2   cela c'est un terme militaire. J'ai peut-être utilisé le mort "osloboditi"

  3   qui veut dire libérer, mais pourquoi aurais-je dit "conquérir" ?

  4   Q.  Là encore d'après vos termes, désire -- vous désiriez, vous souhaitiez

  5   que les dirigeants des Serbes de Bosnie reflètent dans les directives des

  6   lignes directrices données aux opérations militaires.

  7   R.  J'aurais été honoré si on suivait mes desideratas, quels qu'ils soient.

  8   Nous étions plusieurs participants à cette réunion -- ce qui est repris ici

  9   ne veut pas dire que ce que Krajisnik a déclaré à ce moment-là sera intégré

 10   dans la directive et puis nous passerons à autre chose. J'ai peut-être en

 11   passant mentionner quelque chose que je ne dirais plus aujourd'hui. J'ai

 12   peut-être dit que nous devions libérer les secteurs serbes, qu'il fallait

 13   être liés et reliés entre eux, parce qu'on avait occupé ces secteurs. Ces

 14   secteurs étaient occupés. Je n'ai pas dit que ces territoires devaient être

 15   nettoyés, j'ai dit qu'il fallait qu'on les libère parce qu'ils ont été

 16   occupés par quelqu'un et c'est tout à fait logique.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Passons à la directive numéro 3 délivrée au

 18   mois d'août. C'est la pièce D235. Avant de regarder ce document en détail,

 19   j'aimerais aborder deux documents qui nous indiquerons ce qui s'est passé

 20   entre la directive numéro 1 du 6 juin 1992, et la directive numéro 3 du 3

 21   août 1992. Passons à la directive numéro 2 -- la pièce D593. Toutes mes

 22   excuses au Greffe pour passer d'un document à un autre.

 23   Q.  Ce document est daté du 22 juillet 1992, et il indique dans la partie

 24   informative de la directive au début du document l'un des deux points le

 25   point numéroté numéro 1, mais il y a deux numéros un, c'est le deuxième que

 26   je voudrais vous citer :

 27   "Nous avons libéré les territoires que nous considérons être les nôtres et

 28   nous avons créé les conditions pour une direction politique et militaire de


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  1   la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine, pour qu'ils ne mènent pas toutes

  2   les activités et les négociations quant à l'Etat à venir de Bosnie-

  3   Herzégovine du point de vue du plus fort sur ce territoire."

  4   Point numéro 4 à présent :

  5   "Nous avons percé grâce à des corridors en Bosnie orientale et en Bosanska

  6   Posavina les lignes et donc nous avons fait une réalité de cette aspiration

  7   de plusieurs siècles du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine et de la

  8   République serbe de Krajina de rejoindre ces deux territoires avec leur

  9   mère patrie - la Serbie."

 10   Et le point 7 :

 11   "Nous avons créé les conditions pour faire avancer davantage notre armée et

 12   notre Etat dans ce territoire."

 13   Donc ce document dans la dernière partie ou à la fin du mois de juillet

 14   1992, reprend la directive numéro 2, qui détaille tout d'abord l'obtention

 15   et la création des corridors en Bosnie orientale et en Bosanska Posavina,

 16   il s'agit de deux objectifs stratégiques qui ont été expliqués au général

 17   Mladic quatre fois auparavant au cours de la première semaine du mois de

 18   juin, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, le corridor en Posavina était l'un des objectifs stratégiques et

 20   reliait le secteur le long de la Drina en était un autre.

 21   Q.  Et cela reprend le point de vue militaire selon laquelle la libération

 22   des territoires que nous considérons être les nôtres, c'est-à-dire celle

 23   des Serbes de Bosnie, a créé les conditions pour que la direction politique

 24   et militaire puissent mener toutes les activités portant sur l'Etat futur

 25   et soient et la main haute sur le territoire, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, je crois que c'est comme cela que l'armée l'a compris, comme le

 27   reprend cette directive. Bien sûr l'armée connaissait bien ces objectifs et

 28   les a interprétés comme elle le voulait. Personne ne lui a explicitement


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  1   dit comment faire cela. Toute la nation était en faveur de l'ouverture de

  2   la Krajina afin d'obtenir des médicaments, un approvisionnement pour les

  3   hôpitaux, et pour empêcher que des bébés ne meurent. Il n'a rien fallu lui

  4   dire. Si quelqu'un lui avait dit quelque chose, je pense que cela aurait

  5   été cohérent avec la réalité. Cela n'a rien à voir avec les objectifs. Cela

  6   était dicté par la situation qui prévalait.

  7   Q.  Très bien. J'aimerais à présent passer à la directive numéro 3 qui

  8   était le numéro précédent, le document 00 -- D00235. Nous avons à présent

  9   un contexte pour mieux comprendre ce qui s'est passé dans l'intervalle. Et

 10   dans la directive numéro 3, nous voyons tout d'abord quelques éléments de

 11   contexte politique et généraux repris au paragraphe 1. Et à la page 2 du

 12   document, on nous explique que l'armé a obtenu des résultats significatifs

 13   en protégeant le peuple serbe et leur mère patrie séculaire. Regardons à

 14   présent les objectifs à venir, les missions qui sont reprises dans la

 15   directive numéro 3.

 16   Tout d'abord, elle vise à maintenir un blocus fort de Sarajevo et empêcher

 17   une percée. Elle rappelle -- je parle de page 3 dans les deux versions.

 18   Elle parle d'avancer sur la rive gauche du fleuve Neretva, sur la rive

 19   droite du fleuve Sava et sur les régions frontalières du territoire serbe,

 20   de capturer Jajce et Gorazde, de prendre des points en hauteur et d'assurer

 21   une position la plus favorable possible lors des pourparlers avec

 22   l'alliance croato-musulmane à propos de la démarcation.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la page suivante en anglais.

 24   M. TIEGER : [interprétation]

 25   Q.  Et puis, nous -- le document poursuit en donnait des missions bien

 26   particulières à plusieurs corps pour poursuivre cet objectif.

 27   Là encore, Monsieur Krajisnik, cette directive fait référence au Neretva,

 28   au Sava, à la libération de la partie restante du territoire serbe, des


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  1   réflexions sur l'objectif stratégique numéro 4, sur le numéro 2, sur le

  2   numéro 1, sur la séparation en général, sur les lignes directrices et les

  3   documents reprenant ces lignes directrices s'appliquant aux opérations

  4   militaires que la VRS devait nommer, n'est-ce pas ?

  5   R.  Ce n'est pas exact et je vais vous expliquer pourquoi. Les objectifs

  6   stratégiques ne sont pas sortis de nulle part. Ils se fondaient sur des

  7   éléments réalistes sur ce à quoi nous avions droit. Nous avions droit à

  8   chacun de ces objectifs stratégiques. Donc, s'il y a bien quelque chose de

  9   réaliste et si aucun de ces objectifs n'avaient été adopté, l'armée serbe

 10   aurait eu le droit de libérer le secteur où les Serbes vivaient. Je ne sais

 11   pas comment les choses ont continué par la suite, comme ces directives ont

 12   été formulés, mais je puis vous dire que les six objectifs stratégiques

 13   constituaient un document politique que tout le monde connaissait, y

 14   compris l'armée. Et chacun était libre d'invoquer ces objectifs. Tout le

 15   monde avait le droit de se défendre. Il n'y a pas un seul objectif qui

 16   aspire à reprendre le territoire de quelqu'un d'autre. Cela n'a pas été

 17   intégré dans nos objectifs. Nous n'avons voulu que ce à quoi nous avions

 18   droit : l'accès la amer, la vallée du Neretva là où les Serbes vivaient et

 19   avaient été soumis au génocide. Nous ne voulions que ce que le Plan

 20   Cutileiro permettait.

 21   Et il était tout à fait logique que l'armée soit au courant des

 22   objectifs et que l'armée sache ce qu'elle était censée faire dans le cadre

 23   de sa mission. Mais ce n'est pas -- ce ne sont pas les dirigeants qui ont

 24   dit, "Voilà, agissons d'un point de vue militaire même si nous n'avons pas

 25   le droit de le faire pour pouvoir avoir le dessus lors de négociations."

 26   Notre point de vue était très favorable et nous avons poursuivi les

 27   négociations. Le 7 août précisément, M. Karadzic et M. Koljevic ont signé

 28   une déclaration avec M. Hurd dans laquelle -- à Londres dans laquelle on


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  1   disait que tous les secteurs qui ont été pris par la force étaient --

  2   constituaient des actions auxquelles nous nous opposions et que ces

  3   territoires devaient être rendus.

  4   Avant, cela était interprété différemment, à savoir que nous essayons

  5   d'occuper des territoires pour améliorer notre position politique. Nous

  6   avons constamment œuvré pour une solution politique et les décideurs

  7   politiques ont déclaré que nous voulions ce à quoi nous avions droit. Les

  8   Serbes pouvaient prétendre à 65 % du territoire, la plupart de ce

  9   territoire était en zone rurale et pas urbaine et tout le monde le savait.

 10   C'était de notoriété publique. Cependant, nous n'avons rien obtenu parce

 11   que les accords de Dayton proposaient une autre solution et ce n'était pas

 12   faisable.

 13   Q.  Monsieur Krajisnik, vous avez dit : "Je ne sais pas du tout comment la

 14   directive s'est poursuivie par la suite, comment elles ont été formulées".

 15   Et puis vous nous avez donné une longue explication sur les objectifs

 16   stratégiques. Mais à propos justement de cette directive et de sa création,

 17   je voudrais vous inviter à regarder le document P3068, qui est une réunion

 18   de la présidence la veille de la délivrance de la directive numéro 3. Et

 19   nous voyons que le deuxième point à l'ordre du jour était "évaluation de la

 20   situation militaire".

 21   Passons à la page suivante. Nous y voyons que le général Mladic a donné des

 22   informations aux personnes présentes sur la situation militaire en Bosnie-

 23   Herzégovine serbe et a décrit la situation dans chaque secteur de combat,

 24   les missions nécessaires et les liens qui devaient être établis entre les

 25   ressources financières, le potentiel matériel et le besoin d'adopter une

 26   décision relative à la mobilisation générale. Pour des raisons de sécurité

 27   et étant donnée de la nature détaillée des informations, les conclusions et

 28   les alternatives qui ont été adoptées n'ont pas été consignées. Il s'agit


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  1   là d'une autre réunion avec le général Mladic à laquelle vous avez

  2   participé que nous ne voyons dans les notes reprenant le présent.

  3   Comme le document le dit, il s'agit d'une réunion d'information sur la

  4   situation dans chaque secteur détaillant ce qu'il fallait faire par la

  5   suite. Vous pouvez le confirmer ?

  6   R.  C'est exactement ce que je n'ais pas arrêté de vous dire. Regardez en

  7   détail ce point-là. Le général Ratko Mladic a donné des informations aux

  8   personnes présentes sur l'évaluation de la situation militaire sur le

  9   terrain, et nous l'avons tous appris à la télévision. Ensuite il a parlé de

 10   l'appui militaire c'était nécessaire pour que l'armée soit capable de

 11   combattre, et c'était un objectif de toute réunion à laquelle j'ai

 12   participée et à laquelle M. Mladic était également présent. Il n'y a pas eu

 13   une seule réunion où on a parlé d'autres points. Ce dont ils ont parlé je

 14   l'ai vu à la télévision également. J'en ai entendu parler à la télévision.

 15   Bien sûr il a donné des explications plus détaillées et il a déclaré que

 16   pour que nous puissions continuer nos activités, et pour que chaque soldat

 17   soit fier de ce qu'il fait : Il a demandé des munitions, des vivres, des

 18   uniformes, et cetera, et cetera. Donc c'était notre activité. Et même si

 19   ces réunions n'ont été que sporadiques, à chaque fois que j'étais présent

 20   et que Mladic était présent il a parlé de ce genre de chose.

 21   Q.  Donc ce que vous saviez -- que vous avez appris par la télévision ne

 22   devait pas être consigné pour des raisons de sécurité; ça c'est une

 23   première question ? En tout cas, c'est ce que le procès-verbal de la

 24   réunion nous dit, mais vous dites que tout le monde voyait à la télévision

 25   des choses qui n'étaient pas consignées dans le PV d'une réunion pour des

 26   raisons de sécurité ?

 27   R.  Monsieur Tieger, nous avons tous fait notre service militaire. A chaque

 28   fois qu'une armée voulait faire quelque chose de poids, l'armée disait :


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  1   Qu'il s'agissait d'un secret militaire. Un Secret d'Etat. Pour que les

  2   personnes présentes ne répètent pas ce qu'elles ont eu entendu. Je n'ai

  3   jamais rien entendu lors des réunions quoi que ce soit qui pouvait être

  4   considéré comme un secret militaire. Beaucoup de gens savaient ce qu'il se

  5   passait sur le terrain pendant la guerre, et je suis en train de vous dire

  6   que c'est la vérité et qu'il serait erroné de se dire que quelqu'un faisait

  7   tout un mystère de la situation. Bien sûr, les soldats constituent le

  8   facteur le plus important dans une guerre et, bien sûr, ils essaient de se

  9   donner plus d'importance, mais je suis convaincu et j'espère vous avoir

 10   convaincu également que je n'ai jamais rien entendu de top secret, par

 11   exemple, qu'un crime avait été commis et que l'on essayait de le

 12   dissimuler. Tous ceux d'entre nous qui faisions partie de l'armée savons

 13   que c'était la vérité. L'armée essaie toujours de dire qu'il y a quelque

 14   chose de très important et qu'il ne faut pas le divulguer à la population

 15   et qu'il faut le faire en fonction des besoins.

 16   Q.  Passons à une autre réflexion reprise dans la réunion du 2 août --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, Monsieur Krajisnik, il ne s'agit

 18   pas d'un document militaire ? Il s'agit du PV d'une réunion de la

 19   présidence, probablement que les notes ont été prises par un civil.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, on dit ici ce que l'on

 21   dit -- ce qui a dit à l'époque. Peut-être que M. Mladic a dit : N'écrivez

 22   pas cela dans le document, mais si quelque chose d'important a été dit - et

 23   moi, je ne m'en souviens pas - ce n'était pas suffisamment important pour

 24   que cela soit consigné. Il y a tellement de choses reprises dans les PV et

 25   ces choses-là étaient plus importantes que ce que l'on n'a pas repris.

 26   Plusieurs questions de sécurité ont été traitées pendant la guerre. Cette

 27   culture de la conscience de la sécurité n'existait pas tellement parmi nous

 28   parce qu'il est possible si que tout n'ait pas été consigné, parce qu'il y


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  1   a eu omission, ou parce que ce n'était pas suffisamment important.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Tieger.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Passons à la pièce P1479, pages 16 à 23 en anglais, et même chose

  5   pour le B/C/S.

  6   Q.  Il s'agit là d'information sur une réunion qui a eu lieu le 2 août

  7   1992, avec la présidence, comme le reprend le carnet du général Mladic.

  8   Nous voyons le même ordre du jour en gros :

  9   "Des informations sur les pourparlers à Londres et c'est (Karadzic) qui est

 10   repris là.

 11   "Evaluation de la situation militaire.

 12   "Plan des activités à venir."

 13   C'était les points 2 et 3 de l'ordre du jour et numéro 1 également.

 14   Passons à la page suivante. Là, nous voyons plusieurs points. A la fin nous

 15   voyons quelque chose qui est repris dans un autre document. M. Koljevic

 16   s'exprime et dit:

 17   "Prendre Sarajevo.

 18   "Lancer une opération de sabotage," je parle de la page 23, et je continue

 19   la citation, "éliminer les dirigeants politiques."

 20   Donc à la fin de la discussion sur l'évaluation du plan de l'évaluation de

 21   la situation militaire pour les activités à venir, M. Koljevic nous donne

 22   cette contribution-ci. Et avant cela à la page 22, passons d'abord à la

 23   page 21, le bas de la page. Vous vous exprimez et vous dites :

 24   "Nous devons soulever la question de notre accès à la mer …"

 25   Et la page suivante, la page 22 continue et là nous voyons que c'est le Dr

 26   Karadzic qui s'exprime et il dit :

 27   "La Communauté européenne acceptera l'état actuel des choses, et c'est la

 28   raison pour laquelle nous ne devons pas céder d'un pouce d'un point de vue


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  1   militaire."

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. C'est M. Karadzic ou M.

  3   Krajisnik qui s'explique ?

  4   M. TIEGER : [interprétation] Je comprends la confusion, Monsieur le

  5   Président, mais regardez en haut à droite de la page, on voit que le nom de

  6   Karadzic est repris et dans la version serbe c'est plus clair, parce que le

  7   nom est aligné sur le reste du texte.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Merci.

  9   M. TIEGER : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Krajisnik, ceci est encore un cas de figure où la direction

 11   des Serbes de Bosnie est en train de dire à l'attention du général Mladic

 12   exactement ce qu'il avait évoqué à la 34e session de l'assemblée puis la 50e

 13   Session de l'assemblée et toute une série de directives militaires qu'on a

 14   eu l'occasion de voir, et il a donc compris que le rôle des militaires ne

 15   serait-ce qu'en partie consistait à préserver la situation factuelle sur le

 16   réunion aux fins d'aider aux négociations ?

 17   R.  Très souvent les informations en provenance de l'Occident, s'agissant

 18   de nos conférences à nous, disaient que nous ne pouvions pas aboutir à un

 19   accord, et on disait que les représentants de la communauté internationale

 20   demandaient à ce que certains secteurs appartiennent à l'autre ou à un

 21   autre groupe ethnique, et il y avait une situation chaotique nous avions

 22   des espaces entiers qui se vidaient de leur population. Pourquoi voulez-

 23   vous qu'on fasse la guerre si jamais on allait transférer cela à une table

 24   de négociations à un groupe ethnique autre ? Alors pour répondre, ou

 25   plutôt, pour dissuader les gens de la véracité de cette propagande, très

 26   souvent la direction politique et le leader du parti, M. Karadzic, essayait

 27   de dire que ce que nous avions pris, c'est un situation factuelle que

 28   quelqu'un devrait prendre en considération. Nous avions une partie de


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  1   Gorazde qui était serbe, et quelqu'un avait affirmé que Gorazde finirait

  2   par appartenir aux Musulmans et il y en a beaucoup qui sont partis. Il y en

  3   a beaucoup qui ont été tués et égorgés. Et vous voyez trois ou quatre jours

  4   après, et même avant, on voit que M. Karadzic a signé un document qui a dit

  5   que nous étions disposés à faire des concessions territoriales, et nous

  6   l'avons dit, pour aboutir à une solution politique, une fois qu'il le dit

  7   de façon publique devant la communauté internationale, à une réunion

  8   internationale, la population se dit : Ils sont en train de négocier,

  9   pourquoi voulez-vous qu'on défende ces terres ? Parce qu'au final, ça va

 10   tout de même revenir à la partie adverse.

 11   Alors il est normal dans la guerre, au cours d'une guerre qu'il y ait

 12   des réunions avec les militaires, qu'on discute. Si ce n'est pas moi, c'est

 13   quelqu'un d'autre qui le ferait, mais ce n'était pas des directives, ce

 14   n'était pas des ordres ou instructions. C'étaient des débats au sujet de ce

 15   qui était discuté par tous les civils. L'armée fait son travail partant de

 16   cette situation factuelle sur le terrain. Si on peut libérer quelque chose,

 17   on le libère, si on ne peut pas, on ne peut pas. Alors je viens de vous

 18   dire, on n'a pas pris la vallée de la Neretva, on n'a pas pris Sarajevo, on

 19   aurait pu dire cent fois prenez Sarajevo, ce n'était pas l'objectif, et on

 20   ne l'aurait pas pris. Donc c'était pas possible ou alors ils ont évalué que

 21   ce n'était pas possible, mais ils ont pris Jajce, alors qu'on avait dit que

 22   ça ne nous reviendrait pas. Là-bas, il y avait des Serbes, mais c'était au

 23   final, c'est revenu à la Fédération musulmano-croate.

 24   Moi, je comprends ce que vous essayez de prouver, la direction

 25   politique à l'occasion des réunions auxquelles j'ai assisté a discuté de

 26   problèmes, et le seul véritable problème c'était la guerre, ces morts, ces

 27   réfugiés, et tout cela, on en a parlé, mais ça n'a pas été des

 28   instructions. C'étaient des souhaits, des entretiens ou des suggestions à


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  1   l'armée qui conduisait la guerre de façon autonome, et cela dans des

  2   situations sur le terrain, elle aboutissait à des succès ou à des échecs.

  3   Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu des directives données par le commandant

  4   suprême en consultation avec son état-major, mais moi, je ne sais pas du

  5   tout s'il y a eu une directive de réalisée. Il y a bien des choses qui sont

  6   passées de façon chaotique sur le terrain. Je peux vous donner une centaine

  7   d'exemples au sujet de la façon dont certaines choses se sont passées, et

  8   nous-mêmes avons été surpris. C'était le rapport des forces au niveau des

  9   différentes municipalités. Excusez-moi, je finis. Les gens qui étaient sur,

 10   qui vivaient dans ce terrain ont participé à la réalisation des opérations.

 11   C'étaient des gens du cru.

 12   Q.  Monsieur Krajisnik, penchons-nous donc sur deux documents encore, où il

 13   nous sera possible de voir combien spontanée ou chaotique cette directive a

 14   été. Penchons-nous d'abord sur la pièce P3069, une autre session de la

 15   présidence, datée de deux jours plus tard, à savoir, du 4 août.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Intervention au compte rendu.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans la réponse précédente faite par M. le

 19   témoin, il est dit, il avait parlé des municipalités et de leurs armées

 20   respectives. Ça, c'est la ligne 8 et au-delà.

 21   M. TIEGER : [interprétation]

 22   Q.  Bien. Alors on voit le 4, cette présidence prend en considération, et

 23   c'est une réunion à laquelle vous étiez présent, vous y avez assisté. On

 24   voit cela d'indiqué au début. Alors le document dit également que la

 25   présidence s'est penchée sur la situation au niveau du front, et a procédé

 26   à des consultations s'agissant déploiement d'activités au niveau du front.

 27   Alors ces activités au niveau du front, cela sous entend la directive

 28   numéro 3, c'est ce qui a été pris en considération par la présidence, c'est


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  1   ce qu'elle a approuvé, n'est-ce pas ?

  2   R.  Moi, je ne vois pas ici mention faite de la directive 3. Pouvez-vous me

  3   dire où est-ce qu'on voit mention faite de directive 3 ?

  4   Q.  Mais, Monsieur Krajisnik, vous étiez présent à cette session, c'est moi

  5   qui vous pose la question. Quand on voit référence faite à ce que la

  6   présidence a pris en considération à l'occasion de ladite réunion, je vous

  7   demande de confirmer que ce qui a été pris en considération, c'était lié à

  8   la directive 3, et que la présidence avait approuvé cette directive 3 ?

  9   R.  Monsieur Tieger, je n'ai jamais ouï-dire à la présidence que j'étais

 10   censé approuver une directive. Ça, je ne m'en souviens pas.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Penchons-nous sur la pièce P1479, page 24 en

 12   anglais.

 13   Q.  Et, il s'agit ici d'une autre entrée de faite par le général Mladic

 14   dans ses carnets. On y parle de la réunion avec la présidence qui s'est

 15   tenue le 4 août 1992. Et, comme on peut voir au tout début, on procède à

 16   l'approbation de la directive.

 17   "Il n'y a pas d'observation, à l'exception faite de Koljevic qui dit la

 18   chose suivante :

 19   "(a)"Et, c'est exactement ce dont il avait parlé le 2 août, "action de

 20   sabotage à Sarajevo.

 21   "(b) et prise de Sarajevo."

 22   R.  Moi, je ne me souviens pas que cela ait été présenté de la sorte, et

 23   qu'on ait fait mention de la directive. Il y a eu une réunion, on s'est

 24   entretenu, mais est-ce que quelqu'un a dit : Adoptons une directive, non,

 25   ça je ne l'ai jamais entendu dire.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'on peut se pencher sur le

 27   document précédent. Est-ce que Mladic se trouve être mentionné comme étant

 28   l'un des participants ?


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Je ne pense pas qu'il soit sur la liste des

  2   participants à cette réunion concrète, mais je vais poser la question à M.

  3   Krajisnik, juste le temps de retrouver la page du compte rendu d'audience

  4   qui y correspond. Non, il n'est pas sur la liste des personnes présentes à

  5   cette réunion concrète. Je vais retrouver la référence appropriée pour

  6   poser à M. Krajisnik la question sur ceci. Alors à l'occasion d'un

  7   témoignage précédent, il a fait remarquer que dans les PV des sessions de

  8   la présidence, on n'avait pas toujours listé la totalité des participants.

  9   Q.  Et, j'aimerais, Monsieur Krajisnik, nous pencher à présent sur la

 10   directive 4, il s'agit du mois novembre 1992, 19 novembre 1992, et la pièce

 11   en question est le P00976. Et, j'aimerais qu'on se penche dessus avant que

 12   de passer à d'autres réunions.

 13   Si nous nous penchons sur la page 2, dans les deux versions, dans les deux

 14   langues, on pourra voir entre autres que le 1er Corps de la Krajina a

 15   préservé et étendu les frontières de la Republika Srpska. A l'alinéa 6, on

 16   parle de la création du Corps de la Drina. En page 3 de la version

 17   anglaise, on dit plus loin quelles sont les tâches émanant de la directive

 18   3, et qui n'ont pas encore été réalisées. Il est question des villes de

 19   Gorazde, Gradacac, Maglaj, Bugojno, Olovo et Orasje qui n'ont toujours pas

 20   été libérés. On dit aussi que le corridor de la Posavina n'a pas encore été

 21   élargi de façon substantielle. On parle des groupes ennemis dans le secteur

 22   de Gorazde, Zepa, Srebrenica et Cerska qui n'ont pas encore été maîtrisés.

 23   "Le Corps de l'Herzégovine n'est pas encore sorti sur la rive gauche

 24   de la rivière Neretva pour assurer un accès à la mer …"

 25   Et en dessous, au point 4, on voit qu'instruction est donnée à des

 26   fins de, je cite :

 27   "Créer les conditions pour la direction de l'Etat de la Republika

 28   Srpska afin que celle-ci participe sur un pied d'égalité à la solution de


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  1   la crise en Bosnie-Herzégovine aux côtés des intervenants internationaux."

  2   On s'est brièvement penchés sur ces petites parties de la directive

  3   numéro 4, mais une fois de plus, on voit que l'on centre les choses sur le

  4   corridor de la Posavina, la rivière Neretva, l'accès à la mer, et c'est,

  5   entre autres, les différents objectifs stratégiques qui sont énumérés,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  Ici, vous avez pu voir que l'on énumère un grand nombre de villes,

  8   Orasje, Bugojno, et cetera. Aucune de ces villes n'a fait partie des

  9   objectifs stratégiques. Et ce n'est pas habité par des Serbes, du reste.

 10   L'armée, en termes simples, selon le terrain là où elle se trouvait, elle

 11   l'avait placé elle-même dans la directive. Les objectifs stratégiques, le

 12   corridor, l'accès à la mer et la Neretva, c'étaient des objectifs

 13   politiques auxquels nous avions droit. C'était connu de tout un chacun. Et

 14   il est normal que l'armée les mentionne. Je n'y vois rien d'inhabituel,

 15   mais aucun d'entre eux n'a été réalisé. Le corridor, oui; mais il n'a pas

 16   été élargi à plus de 3 kilomètres. C'est resté 3 kilomètres pendant toute

 17   cette période.

 18   Q.  Monsieur Krajisnik, n'a-t-on pas vu la direction des Serbes de Bosnie

 19   avant les actions de cette directive - et quand je dis direction, je pense

 20   à M. Karadzic et à vous-même - n'a-t-elle pas, donc, rappelé au général

 21   Mladic et à la VRS les objectifs stratégiques qui étaient les vôtres ?

 22   R.  Oui -- excusez-moi. Est-ce que je peux répondre ?

 23   Q.  Et je pense ici que tout ceci doit être placé dans le contexte des

 24   opérations militaires à venir.

 25   R.  Il est tout à fait possible que dans certaines conversations on ait

 26   évoqué des objectifs stratégiques, à des réunions ou à l'assemblée. C'était

 27   notoirement connu. C'étaient des objectifs politiques qui étaient censés

 28   avoir force d'obligation pour tout un chacun parce que, politiquement


Page 43822

  1   parlant, nous allions avoir plus de poids en négociant dans les

  2   pourparlers, et cetera. Mais toute armée avait pour objectif et souhait de

  3   libérer des parties de territoire où il y avait des concitoyens. Personne

  4   ne l'interdisait s'ils avaient la force et le pouvoir de le faire. Bien

  5   sûr, l'objectif politique consistait à ne pas s'emparer des territoires

  6   d'autrui mais d'aller vers les territoires qui ethniquement parlant

  7   appartenaient aux Serbes si on pouvait procéder à des interventions de

  8   nature mineure. Il est donc possible qu'il y ait eu des mentions de faites,

  9   mais ce n'était ni instruction, ni ordre, ni menace à l'égard des

 10   militaires pour leur dire, Si vous ne le faites pas, vous allez être soumis

 11   à des sanctions, ou, Vous êtes de mauvais militaires parce que vous n'êtes

 12   pas capables de faire ceci. Non, ce n'est absolument pas vrai.

 13   Q.  Je ne suis pas en train de parler d'un incident ou d'une mention faite

 14   à titre périphérique quant à ces objectifs stratégiques. Je parle de

 15   l'accent mis sur l'utilisation des ressources militaires pour les placer au

 16   service de la réalisation des objectifs stratégiques -- d'objectifs

 17   stratégiques très déterminés, à l'opposé d'autres objectifs. C'est ce que

 18   la direction des Serbes de Bosnie a fait, n'est-ce pas ?

 19   R.  Il a été 100 fois question de sortir sur les rives de la Neretva. Il a

 20   100 fois été question d'un accès à la mer. On a 100 fois dit qu'il fallait

 21   qu'on obtienne une partie de Sarajevo. C'était un objectif politique.

 22   Personne n'a dit : Prenons toute la ville de Sarajevo. Où sont les

 23   frontières de la Neretva ? Emparons-nous de toute la ville de Neum. Non.

 24   Nous avons évoqué ce qui a été évoqué auprès de la communauté

 25   internationale. Et c'est normal, on a parlé de ceci. On a dit que c'était

 26   ça, les objectifs stratégiques. Ce n'est pas Gradacac ou Tuzla, qui ne nous

 27   appartiennent pas. Les objectifs stratégiques, c'est là où il y a des

 28   Serbes. Donc il y avait une compréhension au niveau des interlocuteurs de


Page 43823

  1   la communauté internationale lors des pourparlers. Et là est la vérité

  2   vraie. Et l'armée, elle, s'agissant des lignes qui ont été atteintes et les

  3   secteurs libérés, il fallait les garder, parce qu'on n'aboutissait pas à

  4   une solution. Nous étions disposés à restituer 30 % des territoires tout de

  5   suite. Vous avez des documents qui le disent. Je ne vous parle pas de tête.

  6   Q.  Bien.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Prenons le point 5(d) de la directive. C'est

  8   l'avant-dernière page en serbe.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je n'y vois rien. Est-ce que vous pouvez

 10   descendre un peu, s'il vous plaît.

 11   M. TIEGER : [interprétation]

 12   Q.  C'est le paragraphe qui commence par "Le Corps de la Drina…"

 13   R.  Si quelqu'un peut me le lire, parce que moi je n'arrive pas du tout à

 14   lire ce qui est écrit.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] On n'est pas à la bonne page en version serbe.

 16   M. TIEGER : [interprétation] On vient de me dire qu'il y a une version plus

 17   lisible, meilleure que celle-ci --

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, essayons d'abord de retrouver la

 19   bonne page.

 20   Oui, Monsieur Tieger.

 21   M. TIEGER : [interprétation] On me dit que si l'on se penche sur la

 22   troisième page à compter de la fin du document entier, que la version qu'on

 23   peut y lire est plus lisible. Oui, je crois que maintenant ça y est. Merci.

 24   Q.  Alors, cette partie-là de la directive numéro 4 dit ce qui suit :

 25   "Le Corps de la Drina : A partir de ses positions actuelles et le gros de

 26   ses forces, il convient de défendre Visegrad, Zvornik et le corridor. Les

 27   autres effectifs sur le secteur de Podrinje doivent épuiser l'ennemi, lui

 28   porter le plus possible de pertes et l'obliger à quitter avec la population


Page 43824

  1   musulmane les secteurs de Bihac, Zepa et Gorazde…"

  2   Alors, ceci est un ordre criminel, n'est-ce pas, Monsieur Krajisnik ?

  3   R.  Vous m'avez posé ce type de question lors de mon procès, et je vous

  4   l'ai confirmé à la lecture. Mais par la suite, j'ai discuté avec l'auteur

  5   cette directive, M. Miletic, qui a dit que lui-même ne savait pas comment

  6   une telle erreur ait pu être faite. Et j'ai estimé qu'il n'était pas décent

  7   de ma part d'interpréter les pensées d'autrui. Il y a des gens qui sont à

  8   même d'interpréter ce qu'ils ont rédigé. J'ai pu constater que des fois, il

  9   y a eu omission de certaines mots et interprétation différente des choses.

 10   Et quand vous m'avez laissé entendre ou quand vous m'avez demandé est-ce

 11   que c'est bien ce que cela signifie, nettoyer le territoire de la présence

 12   de quelqu'un, oui, c'est criminel. Mais je ne sais pas si c'est ce que M.

 13   Miletic ou quelqu'un d'autre avait voulu dire. Et il m'a dit qu'il était

 14   lui-même surpris de voir ceci rédigé comme ceci. Je lui ai posé la question

 15   dans la prison, et à l'occasion de mon procès j'ai dit la même chose

 16   lorsque M. Tieger m'a présenté la chose de façon aussi véhémente.

 17   Q.  En réalité, Monsieur Krajisnik, c'est M. le Juge Orie qui vous a posé

 18   la question. Et ce qui s'est passé, c'est qu'aux pages 

 19   25 605 à 607, vous avez lu cette partie-là de la directive numéro 4 et vous

 20   dites avoir été tout à fait contre le nettoyage ethnique. Et à ce moment-

 21   là, le Président Orie vous a dit :

 22   "N'estimez-vous pas qu'il s'agit là de nettoyage ethnique ?"

 23   Et vous avez dit :

 24   "Oui, tout à fait. Absolument."

 25   Donc la manière dont vous qualifiez ou interprétez cette directive ne

 26   relève pas d'une idée que je vous ai soumise. Cela relève d'une question

 27   posée par le Juge, compte tenu de vos affirmations à l'égard du nettoyage

 28   ethnique. C'est bien ce qui s'est passé, n'est-ce pas ?


Page 43825

  1   R.  Pardonnez-moi si je vous ai fait porter la faute, et vous n'avez pas à

  2   porter la faute car il s'avère que dans mon procès le Procureur était

  3   responsable. Mais ma réponse serait la même. Et je dois m'opposer à ce qu'a

  4   dit M. le Juge Orie.

  5   Je m'oppose à ce qui est écrit ici. Plus tard, je me suis entretenu

  6   avec M. Miletic et j'ai interprété quelque chose et je me suis trompé car

  7   j'ai pris cela au pied de la lettre. Cela est arrivé dans d'autres cas

  8   également où vous me soumettez quelque chose qui doit correspondre à un

  9   extrait, je suppose, et ensuite la personne qui a répondu n'a pas répondu

 10   correctement parce que cette personne n'a pas interprété cela correctement.

 11   Et la personne qui a écrit cela devrait l'interpréter. Il est indécent de

 12   dire que les choses sont de telle ou telle façon, et dans mon procès j'ai

 13   dit : Oui, vous avez raison à ce niveau-là.

 14   Q.  Alors, la directive numéro 4, et en particulier les passages de la

 15   directive numéro 4 qui comprennent ces instructions à l'attention du Corps

 16   de la Drina, ne sont pas quelque chose qui sont sorties d'un chapeau et

 17   dont a été informé le général Mladic. Cela est venu une fois qu'ils lui

 18   aient rappelé de façon répétée, et ce sont les dirigeants serbes de Bosnie

 19   qui lui ont rappelé la nécessité d'avoir une séparation des Musulmans, en

 20   courant le risque, sinon, que les Musulmans deviennent majoritaires, et en

 21   insistant sur le fait que la région de la Drina constituait la tâche la

 22   plus importante. Ça, c'est le cas, n'est-ce pas, la réalité de la situation

 23   ?

 24   R.  M. Mladic n'a jamais reçu de demande émanant de nous aux fins de

 25   nettoyer ethniquement la Drina et cette région, ceci n'est pas exact. Vous

 26   avez un certain nombre de déclarations publiques qui précisent que ces

 27   hommes se sont opposés au nettoyage ethnique. Et nous avons admis que

 28   chacun devait pouvoir revenir à la maison. Et le 27 mars, avant la guerre,


Page 43826

  1   M. Karadzic a dit : Nous devons permettre aux enclaves musulmanes dans la

  2   partie orientale de Bosnie-Herzégovine d'exister, et notre politique

  3   consistait à dire que nous devions établir notre propre Republika Srpska.

  4   Et en vertu du plan Cutileiro, cela signifiait qu'il y aurait une

  5   démarcation interne au sein de la Bosnie-Herzégovine aux fins de former

  6   trois unités ethniques constitutives.

  7   Q.  Je sais que vous souhaitez parler de ce qui a été dit publiquement. Ce

  8   qui m'intéresse pour l'heure, c'est ce qui a été dit au général Mladic lors

  9   de réunions auxquelles le public n'avait pas accès. Donc je vous demande si

 10   cela n'était pas été le cas, que l'on a rappelé au général Mladic la

 11   nécessité qu'il y avait à être séparé des Musulmans, que cela posait un

 12   risque puisque sinon les Musulmans pouvaient devenir majoritaires, si la

 13   séparation n'avait pas lieu. On le lui a rappelé, et, effectivement, la

 14   position des dirigeants politiques bosno-serbes consistait à dire qu'il

 15   fallait ratisser la région de la Drina, qu'il s'agissait là d'une des

 16   tâches les plus importantes à venir, et ceci n'a pas été dit publiquement.

 17   R.  A la manière dont je le comprends, il y a plusieurs questions que vous

 18   me posez. Je vais essayer de vous répondre compte tenu de ma compréhension

 19   de la situation. Le nettoyage ethnique n'a pas fait partie de notre

 20   politique. Personne n'a demandé à Mladic de nettoyer ethniquement la Bosnie

 21   orientale. Alors, pour ce qui est de la séparation, la séparation constitue

 22   un des éléments centraux ou des principes essentiels du plan Cutileiro et

 23   autres plans, il s'agissait de créer des unités constitutives. Et c'était

 24   normal. Et troisièmement, il y avait un plan ou une obligation qui revenait

 25   à toutes les parties, y compris la partie serbe, concernant la question des

 26   réfugiés qui avaient quitté leurs régions, leurs foyers, ces personnes

 27   devaient être autorisées à revenir chez elles. Et nous sommes opposés à

 28   l'idée que les territoires contrôlés par la force constituaient une


Page 43827

  1   solution définitive, c'est quelque chose que nous n'admettions pas. Vous

  2   pouvez vous reporter au programme daté du 22 avril 1992 délivré par M.

  3   Karadzic. A d'autres occasions également, ceci a été dit publiquement.

  4   Alors, je ne sais pas si c'était secret. Je ne sais pas s'il y a eu une

  5   réunion, une réunion secrète au cours de laquelle quelqu'un aurait dit : Eh

  6   bien, chassons maintenant ces gens de telle et telle région. Je ne sais

  7   pas. Vous avez vu combien de conversations téléphoniques ont été

  8   enregistrées. Cela a certainement dû être mentionné dans des conversations

  9   téléphoniques si quelque chose d'illégal avait été fait ou si Momcilo

 10   Krajisnik ou Radovan Karadzic aurait dit : Chassons quelqu'un. Et quelqu'un

 11   serait en colère parce que c'est une question de tempérament, nous sommes

 12   des gens comme cela. Mais vous ne trouvez trace de cela nulle part. Voilà

 13   donc ma façon de répondre à votre question telle qu'elle est libellée.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Passons maintenant au P01479, page 131, s'il

 15   vous plaît.

 16   Q.  Je souhaite regarder deux réunions qui précèdent la publication ou

 17   l'adoption de la directive numéro 4.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu d'audience.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce qui manque à la ligne 19, c'est que ceci

 21   doit faire partie de notre politique.

 22   On ne retrouve cela nulle part.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 24   M. TIEGER : [interprétation]

 25   Q.  Alors, il s'agit ici d'une consultation politico-militaire qui s'est

 26   tenue le 2 septembre 1992, réunion consultative, avec une réunion

 27   d'information de la part des commandants de corps, différents corps sont

 28   présents. Et en parcourant le document, page 132, nous constatons qu'un des


Page 43828

  1   commandants de corps parle des armes; réunion d'information, le 2e Corps de

  2   Krajina, page 134; Corps de Bosnie orientale, page 135; Corps d'Herzégovine

  3   à la page 136. Et en haut de la page 140, c'est vous qui prenez la parole.

  4   D'abord, vous exprimez votre inquiétude compte tenu des critiques du SDS,

  5   le mouvement rassembleur comme vous l'appelez. Et ensuite, vous poursuivez

  6   à la page 143 et vous expliquez :

  7   "Notre but consiste à nous diviser par rapport aux Musulmans. Si les

  8   Musulmans venaient à capituler, dans ce cas nous resterions avec eux. S'ils

  9   restent avec nous, dans ce cas-là ils seraient très rapidement

 10   majoritaires."

 11   Encore une fois, à la page suivante, vous rappelez à la VRS, aux

 12   commandants de corps, au général Mladic, des objectifs stratégiques :

 13   Premièrement, "opérer une division par rapport aux Croates et aux

 14   Musulmans."

 15   Numéro 2, "corridor."

 16   Numéro 3, "division de Sarajevo."

 17   Numéro 4, "les Serbes dans la vallée de la Drina."

 18   Et 5, "la frontière de la Neretva et ouverture sur la mer."

 19   Donc, encore une fois, dans le cadre d'une réunion à caractère

 20   militaire à laquelle ont assisté les commandants de corps qui expliquaient

 21   quelle était la situation dans leurs secteurs, vous avez encore une fois

 22   décidé de leur rappeler quels étaient les objectifs stratégiques, n'est-ce

 23   pas ?

 24   R.  Monsieur le Procureur, ce serait bien si les choses s'étaient passées

 25   ainsi car je me souviens que nous ne devions pas prendre Tuzla, Gradacac ou

 26   Bugojno --

 27   Q.  Je ne veux pas savoir si vous l'auriez fait ou si vous ne l'auriez pas

 28   fait. Ce que je veux savoir, c'est si vous contestez cela. Est-ce que, oui


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  1   ou non, vous avez décrit -- ou donné une définition des objectifs

  2   stratégiques aux représentants de l'armée à la date du 2 septembre, ou

  3   pouvez-vous confirmer que vous avez effectivement fait cela ?

  4   R.  Je ne sais pas, mais je pense que je l'ai fait. Je ne le sais pas

  5   aujourd'hui mais je crois que oui. Je crois qu'il n'y a rien de mal à cela.

  6   Je n'ai pas divulgué de secret. Tout le monde était au courant de cela car

  7   les objectifs stratégiques étaient de notoriété publique. On en avait fait

  8   une annonce publique, les soldats étaient au courant et la communauté

  9   internationale était au courant, et donc, ne faites pas ceci ou cela. Ils

 10   souhaitaient prendre le contrôle des villes qui n'étaient pas les nôtres.

 11   Tels étaient les objectifs et pas cette autre chose. La Republika Srpska

 12   doit être divisée, le corridor, tout ça, il s'agissait d'objectifs auxquels

 13   nous avions droit. Je ne vois pas pourquoi je n'aurais pas dit cela lors

 14   d'une réunion.

 15   M. TIEGER : [interprétation] Alors, je vais passer rapidement à la pièce 65

 16   ter 06305, 37 à 41 en anglais, 33 à 37 en B/C/S.  Il s'agit d'un extrait du

 17   journal de guerre du général Simic entre le mois d'août 1992 et mois de

 18   décembre 1995. Et son entrée qui correspond à la même date. Pouvons-nous

 19   continuer à parcourir le document, s'il vous plaît. Page suivante, s'il

 20   vous plaît. Pardonnez-moi, je souhaite que ce soit difficile de montrer les

 21   deux pages dans les deux versions. Je souhaite que l'on voie l'intégralité

 22   de la page en anglais, s'il vous plaît.

 23   Q.  Ici, les mêmes informations que l'on retrouve dans les carnets du

 24   général Mladic. Vous exprimez votre préoccupation quant aux critiques

 25   contre le SDS et votre défense du SDS, et ensuite, vous annoncez les

 26   objectifs stratégiques. Donc, c'est le 2 septembre, lors de cette réunion

 27   en présence des militaires, Monsieur Krajisnik, encore une fois, il est

 28   manifeste que les dirigeants bosno-serbes, par votre intermédiaire, cette


Page 43830

  1   fois-ci, ont rappelé aux militaires la teneur de ces objectifs ?

  2   R.  J'essaie de comprendre votre question. Les objectifs stratégiques ont

  3   été utilisés une centaine de fois pendant la guerre parce que c'était un

  4   document public, c'était notre plateforme politique pour les pourparlers

  5   avec les étrangers. Et à cette occasion-là, je me souviens précisément

  6   qu'il y a eu des débats houleux entre les civils, les dirigeants civils,

  7   appelons-les ainsi, et l'armée, et le Parti démocratique serbe a été

  8   critiqué, les autorités municipales locales ont également été critiquées,

  9   une centaines d'objectifs et de plaintes avaient été portés contre les

 10   civils. Ils ont demandé quels étaient les plans sur la division de la

 11   Bosnie et ils ont dit qu'il faudrait appliquer le principe suivant : la

 12   moitié de la Bosnie devrait devenir serbe et l'autre moitié croate, et

 13   Tuzla devrait appartenir aux Serbes. Ensuite, nous, nous avons dit :

 14   attendez, les objectifs stratégiques dont nous disposons nous disent que

 15   les trois parties ont le droit à ceci, ceci et cela en Bosnie. La Bosnie

 16   n'est pas uniquement serbe. Et ce que l'on dit ici, en fait, c'est ce que

 17   les communistes ont dit. Ils ont idéalisé la situation. Ils voulaient créer

 18   une nouvelle Yougoslavie qui était complètement irréaliste.

 19   Donc, quoi que j'aie dit, je puis vous dire que je me souviens que

 20   leurs objectifs étaient plutôt mégalos et que la politique a été rejetée.

 21   C'était cela l'objectif. Nous ne voulions pas établir comme objectif

 22   d'entrer en guerre et de prendre les territoires musulmans. Chaque objectif

 23   stratégique était quelque chose qui était notre droit. Donc, conformément à

 24   l'accord avec Cutileiro et avec tout le monde --

 25   Q.  Monsieur Krajisnik, j'aimerais passer à présent au 8 novembre. Il

 26   s'agit d'une autre réunion qui a eu lieu avant la délivrance de la

 27   directive.

 28   M. TIEGER : [interprétation] La pièce P1481 --


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  1   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que vous voulez

  2   demander le versement de cette partie --

  3   M. TIEGER : [interprétation] Oui, merci, Maître Robinson, de me le

  4   rappeler.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Nous ne soulevons pas d'objection aux pages

  6   37 à 40 pour cette réunion en particulier.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P6518.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que le général Simic a déposé

 10   dans cette affaire ?

 11   M. TIEGER : [interprétation] Non.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Malheureusement, il est décédé. Nous aurions

 13   voulu appliquer l'article 92 quater du Règlement mais nous ne l'avons pas

 14   demandé.

 15   M. TIEGER : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Krajisnik, il s'agit d'une réunion du 8 novembre avec les

 17   commandants de corps, et les différents commandants de corps, comme nous le

 18   voyons ici, ont soumis tout d'abord leurs rapports. Donc, c'est une réunion

 19   d'information d'ordre militaire. Le général Talic a commencé, c'est le

 20   commandant du 1er Corps de la Krajina; ensuite, le colonel Boric, le

 21   commandant du 2e Corps de la Drina; le colonel Lisica; suivi du colonel

 22   Simic; le colonel Zivanovic, et cetera. Et à la page 145, le Dr Karadzic

 23   déclare, et je cite, que :

 24   "L'armée et nos officiers courageux ont contribué énormément aux résultats

 25   que nous avons obtenus jusqu'à aujourd'hui."

 26   A la page suivante -- non, la page 146, il fait remarquer qu'il existe des

 27   préoccupations politiques quant aux opérations et que l'occident trouve que

 28   la chute des villes est quelque chose d'effrayant, mais il relève ensuite,


Page 43832

  1   je cite :

  2   "Peut-être qu'il serait bon de résoudre la question de la Drina."

  3   Ensuite, vous prenez la parole, Monsieur Krajisnik, et vous dites, je cite

  4   :

  5   "J'admire les succès militaires.

  6   Il serait très dangereux de saisir ces territoires.

  7   La Drina et la Neretva …"

  8   Et puis, vous déclarez, je cite :

  9   "Nous" - et vous parlez des Serbes de Bosnie, les autorités politiques et

 10   militaires;  je continue la citation - "disposons d'un engagement

 11   disproportionné de l'armée par rapport aux objectifs stratégiques."

 12   Et à la page suivante, vous poursuivez, je cite :

 13   "Nous n'avons pas obtenu la Neretva, la mer et le secteur de Podrinje."

 14   Et vous remarquez, je cite :

 15   "Nous avons obtenu :

 16   Le corridor, la séparation d'avec les Musulmans."

 17   Vous poursuivez, et je cite toujours :

 18   "La chose-là est de nettoyer Orasje et ensuite de résoudre le problème du

 19   secteur de Podrinje et de la vallée de la Neretva dès que possible.

 20   "Les Musulmans ne doivent pas rester avec nous, il ne faut pas leur donner

 21   quelle que sorte d'autonomie que ce soit.

 22   "L'objectif le plus important c'est la mission confiée à Zivanovic, le

 23   ciscenje de la Drina.

 24   "Le point le plus important, la mission la plus importante, c'est de nous

 25   séparer des Musulmans."

 26   R.  Revenez d'une page en arrière, à la page précédente, s'il vous plaît,

 27   juste la version en serbe. Il s'agit d'une confirmation de ce que je vous

 28   ai dit, il y a un instant. Je cite :


Page 43833

  1   "Il est très dangereux de prendre leurs territoires."

  2   Et puis, j'ai parlé de la Drina, de la Neretva, c'est probablement notre

  3   objectif stratégique. Et j'ai dit que :

  4   "Nous avons d'un engagement disproportionné de l'armée par rapport aux

  5   objectifs stratégiques."

  6   Revenons encore à la page précédente, non, la page suivante.

  7   Et là encore, et le dis :

  8   "L'objectif le plus important est de mettre fin à la guerre", je l'ai

  9   vu quelque part, voilà. Je dis, et je cite mes propos : "Nous devons mettre

 10   un terme à la guerre". C'est comme cela que la situation se présentait,

 11   mais ce n'est pas écrit ici. Les soldats ont sûrement présenté d'autres

 12   propositions, et j'en ai mentionné certaines, c'est-à-dire que Tuzla devait

 13   faire partie de la Republika Srpska. Il y a quelques instants, vous avez vu

 14   Gradacac, Bugojno, et cetera. Mais je le répète, j'ai répondu à ces soldats

 15   : Messieurs, il existe des objectifs politiques, vous ne pouvez pas prendre

 16   quelque chose qui n'est pas à vous, il faut mettre un terme à la guerre le

 17   plus tôt possible. Ce n'était pas mon avis personnel, c'était l'avis des

 18   dirigeants politiques.

 19   Et ce dont on parle ici, la séparation, c'est en fait la création de

 20   notre propre unité constitutive. Nous avions l'objectif suivant : Si nous

 21   ne pouvions pas rester en Yougoslavie, si quelqu'un nous expulsait de

 22   Yougoslavie, eh bien, nous aurions pu atteindre ce compromis avec la

 23   communauté internationale. Vous obtiendrez votre unité constitutive au sein

 24   de la Bosnie-Herzégovine, et une homogénéité nationale devrait s'appliquer

 25   plutôt qu'une clé de répartition en fonction de l'appartenance ethnique

 26   pour créer cette unité constitutive. Donc c'était un objectif fondateur.

 27   Nous avons perdu notre état, nous avons obtenu notre unité constitutive.

 28   C'est l'objectif de base. C'est ce que je souligne ici.


Page 43834

  1   Je ne sais pas comment cela a été interprété, mais nous voyons là

  2   exactement la voie qui a été tracée par les dirigeants politiques pendant

  3   la guerre pour atteindre une paix le plus tôt possible même en concédant

  4   nos territoires, mais pas en prenant les territoires d'autres personnes.

  5   Un grand territoire a été libéré par notre armée, c'est-à-dire 5 ou 6 % de

  6   plus que ce dont nous disposions d'après nos registres fonciers. Et, cela a

  7   créé des problèmes pendant les négociations. Vous savez, aucun accord, vous

  8   ne savez pas quel territoire il faudrait, et tout le monde au niveau local

  9   voulait récupérer ces territoires, et ce n'était pas leurs territoires

 10   d'origine. Donc, nous, nous étions désavantagés, et 70 % du territoire pour

 11   nous, c'était un problème. Il fallait le réduire à 49 %, et cela c'était le

 12   point épineux.

 13   Q.  Mais pour réduire le territoire, d'après vous, vous, vous avez dit,

 14   voilà ce que nous avons obtenu jusqu'à présent, le corridor, c'est l'armée

 15   qui l'a obtenu via l'opération corridor. C'était bien un succès militaire,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  J'ai déjà dit que nous avions convenu avec les Croates de résoudre cela

 18   d'un point de vue politique. Bien sûr, lorsqu'il n'est pas possible de

 19   résoudre quelque chose d'un point de vue politique et que le peuple

 20   continue de mourir parce qu'il y a eu catastrophe humanitaire, alors

 21   l'armée a créé ce corridor très étroit, trois kilomètres pas plus pour que

 22   des camions puissent passer. L'armée n'a pas pris Orasje, n'a pas pris

 23   Gradacac, n'a pas pris un grand territoire, même si elle a quitté le

 24   territoire serbe de l'autre côté. C'était vraiment une nécessité

 25   humanitaire, l'armée devait le faire. Il ne fallait pas une mission pour ce

 26   faire. Si 12 bébés mourraient dans une maternité, bien sûr que la

 27   population se disait qu'il fallait percer ce corridor pour que l'aide

 28   humanitaire arrive là-bas. Et,  pour la Neretva, nous n'y sommes pas


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  1   arrivés. Notre armée se trouvait sur la Neretva, et lorsque la JNA y était,

  2   lorsque la JNA est partie, elle était là-bas. Mais en fait, ils se sont

  3   retirés dans un secteur qui était à nous.

  4   Q.  Trois des quatre objectifs stratégiques obtenus à ce moment-là, étaient

  5   : l'objectif concernant la Neretva, l'accès à la mer, et le secteur de

  6   Podrinje. Vous avez parlé d'une répartition disproportionnée des ressources

  7   militaires par rapport aux objectifs stratégiques globaux, et vous avez dit

  8   à présent la mission la plus importante est celle qui a été assignée à

  9   Zivanovic, le commandant du Corps de la Drina, et cela consiste en le

 10   "ciscenje" de toute la Drina, et cet objectif se retrouve dans la directive

 11   numéro 4 qui a été délivrée le 19 novembre. C'est bien ce qui s'est passé.

 12   R.  Ma participation à la discussion n'avait rien à voir avec la directive.

 13   Je ne sais pas quel genre de directive avait été passé, et je n'ai pas cité

 14   ces directives. J'ai juste dit à cette réunion, je me souviens très bien de

 15   cette réunion, la situation était tendue, et les civils et les

 16   représentants militaires n'étaient pas d'accord. Ils avaient des idées

 17   différentes, leurs propres idées sur ce qu'il fallait faire. J'ai essayé

 18   justement de canaliser les choses, et de dire que notre objectif politique

 19   n'était pas de nettoyer la Drina. Bien sûr, il y a eu beaucoup d'hostilité,

 20   là-bas, et beaucoup de sang a été versé dans les deux camps. Donc je disais

 21   juste quel était l'objectif stratégique, et l'objectif stratégique c'était

 22   ce corridor.

 23   Vous avez vu notre carte, un territoire contigu, un corridor, et puis les

 24   enclaves qui devaient rester dans la partie orientale de la Republika

 25   Srpska. Bien sûr, dans la partie occidentale, le territoire serbe devait

 26   rester. Donc nous avons perdu cela par la suite, mais pour la solution qui

 27   a été proposée au bout du compte, nous n'avons pas obtenu une population à

 28   majorité serbe, et ce n'était pas notre objectif pendant l'intégralité de


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  1   la guerre.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Les dernières lignes ont été perdues lors de

  3   l'interprétation. Le témoin a dit qu'il avait perdu quelque chose qui était

  4   purement serbe, et cela a été oublié.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  6   Nous allons continuer demain, Monsieur Tieger.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Très bien.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'audience est levée.

  9   --- L'audience est levée à 15 heures 00 et reprendra le mercredi 20

 10   novembre 2013, à 9 heures 00.

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