Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 20 janvier 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Le témoin peut-il prononcer la déclaration solennelle, s'il vous plaît.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : MIROSLAV KVOCKA [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Kvocka. Veuillez vous

 13   asseoir confortablement.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kvocka, avant de commencer

 16   votre déposition, je dois attirer votre attention sur une Règle dans le

 17   Règlement de procédure et de preuve de ce Tribunal international; c'est

 18   l'article 90(E). D'après la disposition de cet article, vous pouvez refuser

 19   à donner une réponse aux questions de M. Karadzic, des Juges ou des

 20   Procureurs si vous croyez que cette réponse pourrait vous incriminer d'une

 21   infraction pénale. Dans ce texte, "vous incriminer" veut dire dire quelque

 22   chose qui pourrait représenter des aveux d'avoir commis une infraction

 23   pénale ou dire quelque chose qui pourrait fournir des éléments de preuve

 24   que vous auriez commis une infraction pénale. Pourtant, si vous pensez que

 25   cette réponse pourrait vous incriminer et si, par conséquent, vous refusez

 26   de répondre, je dois vous dire que le Tribunal a le pouvoir de vous obliger

 27   de répondre à cette question. Mais, dans une telle situation, le Tribunal

 28   va s'assurer que votre témoignage fourni dans de telles circonstances ne


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  1   serait utilisé dans aucune des procédures au pénal hormis la procédure pour

  2   faux témoignage. Est-ce que vous avez compris cela, Monsieur Kvocka ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai compris cela.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Monsieur Karadzic, vous avez la parole.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Kvocka.

  9   R.  Bonjour.

 10   Q.  Il faut que je vous demande que vous parliez lentement, et il faut que

 11   je me rappelle moi-même de ménager une pause entre mes questions et vos

 12   réponses pour que tout soit bien interprété.

 13   Est-ce que vous avez fait une déclaration à mon équipe de Défense ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant afficher dans le prétoire

 17   électronique 1D9688.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Est-ce qu'à l'écran qui est devant vous à gauche, vous voyez cette

 20   déclaration qui est la vôtre ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci. Est-ce que vous avez lu cette déclaration et est-ce que vous

 23   l'avez signée ?

 24   R.  Oui.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la dernière page de

 26   cette déclaration pour que le témoin puisse identifier sa signature.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que c'est votre signature ?


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  1   R.  Oui, c'est ma signature.

  2   Q.  Merci. Est-ce que dans cette déclaration vos propos ont été fidèlement

  3   consignés, ce que vous avez dit à l'équipe de Défense, est-ce que cela a

  4   été exactement consigné dans cette déclaration ?

  5   R.  Pour autant que je sache, oui, et je n'ai rien à corriger dans cette

  6   déclaration.

  7   Q.  Merci. Si aujourd'hui je vous posais les mêmes questions que les

  8   questions qui vous ont été posées par les membres de mon équipe de Défense,

  9   est-ce que vos réponses seraient essentiellement les mêmes que les réponses

 10   que vous avez fournies dans cette déclaration ?

 11   R.  Oui, les réponses seraient essentiellement les mêmes.

 12   Q.  Merci.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande que cette déclaration soit versée au

 14   dossier conformément à l'article 92 ter.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, avez-vous des

 16   objections à ce versement au dossier ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

 18   Messieurs les Juges. Non, je n'ai pas d'objection.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document sera versé au dossier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D4219.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez, Monsieur Karadzic.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, je vais lire le bref résumé de la

 23   déclaration de M. Miroslav Kvocka.

 24   Miroslav Kvocka a commencé à travailler en tant que policier à Omarska en

 25   1981, et il était chef des équipes de patrouilles dans le secteur.

 26   Lorsque le MUP a été divisé au niveau de la Bosnie-Herzégovine, les

 27   policiers musulmans ont quitté le peloton de police d'Omarska. La

 28   population musulmane avait sa propre armée, qui s'appelait les Bérets


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  1   verts. Les Serbes ont pris le pouvoir à Prijedor le 30 avril 1992. Quelques

  2   jours après la prise du pouvoir, des barrages et des points de contrôle ont

  3   commencé à apparaître, et c'est pourquoi les Serbes avaient un accès limité

  4   ou pas d'accès du tout aux villages musulmans et vice versa. De plus, des

  5   points de contrôle ont été également établis par la police militaire et par

  6   la police civile, où leur composition était mixte pour ce qui est de

  7   l'appartenance ethnique de ses membres.

  8   Il y a eu des incidents aux points de contrôle dans le village musulman de

  9   Hambarine lorsque plusieurs soldats de la JNA ont été tués et blessés.

 10   Etant donné que les responsables de Hambarine ont refusé de remettre les

 11   personnes qui étaient responsables de ces incidents, l'armée et la police

 12   ont lancé une opération de combat qui a duré pendant plusieurs jours.

 13   Quelques jours plus tard, un autre ultimatum a été lancé à l'encontre de

 14   Kozarac, où les formations armées ont été appelées à rendre leurs armes.

 15   Puisque les responsables musulmans ont refusé d'obéir à cet ultimatum, une

 16   opération militaire a été lancée.

 17   M. Kvocka est arrivé la première fois au centre de rassemblement et

 18   d'enquête d'Omarska en fin de mai 1992. Les tâches des policiers dans le

 19   camp d'Omarska étaient de prévenir les détenus de s'évader ou d'être

 20   attaqués par des personnes tierces. Les détenus ne faisaient pas l'objet de

 21   menaces dans l'intérieur du camp et les gardes n'attaquaient pas

 22   physiquement -- et ne devaient pas attaquer physiquement les personnes

 23   détenues. Zeljko Mejakic, commandant du peloton de police, a donné des

 24   instructions concrètes selon lesquelles les détenus ne devaient pas être

 25   malmenés et que les gardes ne devaient avoir que peu de contacts avec eux.

 26   Un certain nombre de mesures disciplinaires ont été prises contre les

 27   individus qui appartenaient au poste de police de M. Kvocka. Pourtant, s'il

 28   y avait des gardes qui auraient participé à des incidents, cela était


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  1   dissimulé et caché, en particulier par rapport à Mejakic.

  2   Omarska n'était pas encerclé de fils barbelés et le terrain autour de ce

  3   camp n'était pas miné. Deux ou trois jours après que le travail dans le

  4   camp d'Omarska ait commencé, la nourriture a commencé à être distribuée aux

  5   prisonniers quotidiennement. Il y avait des occasions où M. Kvocka lui-même

  6   amenait des sandwichs au bord de voitures qu'il distribuait publiquement

  7   aux détenus. Personne n'a jamais intenté de procédure contre lui parce

  8   qu'il a distribué de la nourriture et il ne lui a pas été interdit d'aider

  9   les Musulmans.

 10   Le 30 mai 1992, de nouveaux autocars au bord desquels se trouvaient des

 11   détenus sont arrivés au camp d'Omarska. Dans le camp, il y avait au total

 12   entre 15 et 18 femmes qui étaient considérées comme des détenus. Les

 13   conditions de leur hébergement et de vie étaient meilleures et elles

 14   pouvaient travailler dans la cuisine. Il y avait également quelques Serbes

 15   qui se trouvaient dans le camp d'Omarska qui étaient accusés d'avoir fait

 16   de la contrebande des armes.

 17   Pendant la première période de l'existence du camp d'Omarska, plusieurs

 18   membres de la police spéciale de Banja Luka s'y trouvaient. Il y avait des

 19   problèmes avec cette unité puisque les membres de cette unité erraient

 20   autour du centre et on disait qu'ils malmenaient des gens, leur prenaient

 21   de l'argent et des bijoux. Mejakic ne pouvait pas donner d'ordre au chef de

 22   ce groupe, mais il a réussi à faire partir cette unité d'Omarska à la mi-

 23   juin 1992. Après leur départ, la situation dans le centre s'est

 24   considérablement améliorée.

 25   Tous les détenus étaient interrogés par les enquêteurs pour établir qui

 26   avait participé dans la rébellion armée ou dans l'organisation, l'armement

 27   ou le financement de cette rébellion armée. Les enquêteurs ne pouvaient pas

 28   donner d'ordre à Mejakic, ils ne pouvaient pas non plus recevoir d'ordre de


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  1   lui. Parfois, les enquêteurs pouvaient hausser leur ton pendant les

  2   interrogatoires, mais M. Kvocka n'a jamais vu que la force ait été utilisée

  3   contre les gens qui étaient interrogés. La détention d'une personne

  4   finissait lorsque l'enquête était complétée et lorsque le suspect était

  5   blanchi de toutes les charges.

  6   M. Kvocka n'a jamais aidé à qu'un seul meurtre soit commis au camp

  7   d'Omarska, bien qu'il ait entendu des rumeurs selon lesquelles certains des

  8   détenus ont été malmenés. Lorsqu'il est arrivé dans le centre, il a vu

  9   trois ou quatre corps de prisonniers qui ont été tués au moment où ils ont

 10   essayé de s'évader du camp. De plus, il était présent lorsque, le 31 mai

 11   1992, un homme a réussi à entrer dans le centre, a ouvert le feu sur les

 12   détenus qui descendaient d'un bus, pour essayer de venger la mort de son

 13   frère qui a été tué par les Musulmans.

 14   M. Kvocka a essayé de protéger ses connaissances musulmanes ainsi que les

 15   frères de son épouse, et, en faisant cela, il a également violé les

 16   règlements de service.

 17   C'est la fin du résumé de la déclaration de M. Kvocka, et je n'ai pas de

 18   questions à lui poser pour le moment.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 20   Monsieur Kvocka, comme vous avez pu remarquer, votre interrogatoire

 21   principal est versé au dossier sous la forme écrite, sous la forme de votre

 22   déclaration écrite. Et maintenant, le représentant du bureau du Procureur

 23   va procéder au contre-interrogatoire.

 24   Madame Sutherland, vous pouvez commencer votre contre-interrogatoire.

 25   Contre-interrogatoire par Mme Sutherland :

 26   Q.  [interprétation] Monsieur Kvocka, est-ce qu'une copie de votre

 27   déclaration en B/C/S est affichée devant vous ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Vous êtes venu ici pour déposer sur votre rôle pour ce qui est du

  2   fonctionnement du camp d'Omarska en 1992. Vous avez été jugé et condamné en

  3   2001 par une Chambre de première instance de ce Tribunal d'avoir commis des

  4   crimes en 1992, des crimes contre les non-Serbes dans le camp d'Omarska,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est ce qui est écrit dans le jugement.

  7   Q.  Vous avez été condamné pour des crimes contre l'humanité et pour des

  8   crimes considérés comme la violation des lois ou coutumes de la guerre, et

  9   vous avez été condamné à une peine d'emprisonnement de sept ans, n'est-ce

 10   pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Plus concrètement, vous avez été déclaré coupable au niveau du chef 1

 13   de l'acte d'accusation, persécution, torture, passage à tabac, sévices

 14   sexuels, viol, humiliation, abus psychologique, ce sont les crimes contre

 15   l'humanité; ensuite, le chef d'accusation 5, meurtre en tant que violation

 16   des lois ou coutumes de la guerre; et chef d'accusation 9, torture en tant

 17   que violation des coutumes ou lois de la guerre, n'est-ce pas ? Ce sont les

 18   conclusions de la Chambre de première instance.

 19   R.  Je pense que pour la plupart de ces chefs d'accusation, c'est vrai,

 20   mais je pense que lors de l'appel, la Chambre a constaté que pendant ma

 21   présence au centre d'enquête, il n'y a pas eu de crimes sexuels et il n'y a

 22   pas eu d'autres chefs d'accusation concernant certains meurtres. C'est ce

 23   que ce dont je me souviens de l'arrêt.

 24   Q.  Oui, lors de la procédure en appel, la Chambre d'appel a changé votre

 25   condamnation par rapport à deux points. D'abord, pour ce qui est de deux

 26   des quatre meurtres pour lesquels vous avez été condamné et par rapport aux

 27   viols et des sévices sexuels, ils ont dit qu'il n'y avait pas eu d'élément

 28   de preuve qui aurait pu vous mettre en lien avec ces crimes, mais ils ont


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  1   affirmé la sentence concernant la peine d'emprisonnement de sept ans. Est-

  2   ce que vous vous souvenez de cet arrêt ?

  3   R.  Oui, précisément. C'est ce qui a été dit, et qu'en fait le verdict dans

  4   l'arrêt n'a pas eu d'incidence sur la peine.

  5   Q.  Et la Chambre de première instance a constaté au paragraphe 372 que

  6   vous avez participé au fonctionnement du camp, et votre fonction était

  7   équivalente à la fonction de l'adjoint du commandant des gardes et que vous

  8   aviez un certain degré d'autorité sur les gardes. C'étaient les conclusions

  9   de la Chambre, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, c'est ce qui est écrit dans le jugement.

 11   Q.  Vous avez été interviewé par un représentant du bureau du Procureur à

 12   la date du 24 et 25 juin 1998. Est-ce que vous maintenez ce que vous avez

 13   dit en répondant à des questions pendant cet entretien ?

 14   R.  Oui, principalement, oui, si tout cela a été consigné de façon correcte

 15   et si cela a été correctement traduit et interprété. Je pense qu'il y a eu

 16   des points qui n'étaient pas suffisamment clairs lors de mon affaire, et je

 17   pense qu'il y a eu des discussions là-dessus.

 18   Q.  Avant de commencer à parler de votre déclaration de témoin, j'aimerais

 19   qu'on tire un point au clair. Regardez le paragraphe 9 de votre

 20   déclaration, s'il vous plaît, il s'agit de la pièce P4219, où vous avez dit

 21   qu'après le changement au niveau des autorités à Prijedor, Drljaca, il

 22   était chef de la police en uniforme, et par la suite il est devenu chef du

 23   poste de sécurité publique ? Mais cela n'est pas vrai, n'est-ce pas,

 24   puisque Drljaca n'était pas chef du poste de police de Prijedor, la police

 25   en uniforme, avant la prise du pouvoir à Prijedor ? Il n'était pas chef de

 26   la police en uniforme avant qu'il soit devenu chef du poste de sécurité

 27   publique de Prijedor, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, oui. J'ai compris votre question. Dans ce paragraphe 9, tout a été


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  1   consigné correctement, mais peut-être que vous n'avez pas bien lu cela.

  2   Après la prise de pouvoir, le chef du poste de sécurité publique est devenu

  3   Simo Drljaca, mais auparavant il n'était pas du tout au sein de la police.

  4   Ensuite, il y a une virgule, après quoi il est dit, le chef de la police en

  5   uniforme et d'autres, dont Dusko Jankovic, il est devenu le chef de la

  6   police en uniforme, et Caca [phon] Milutin est devenu chef du poste de

  7   police Prijedor 1. Tout a été bien consigné dans ce paragraphe.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je aider. La traduction dans la

  9   déclaration n'est pas correcte. C'est pour ça qu'il y a eu un malentendu.

 10   La traduction n'est pas exacte. Au paragraphe 9, il serait peut-être mieux

 11   que les interprètes lisent et interprètent ce paragraphe 9.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic, mais je pense

 13   que M. Kvocka a déjà lu cette partie de la déclaration par rapport à la

 14   version en B/C/S.

 15   Q.  Vous avez dit, Monsieur Kvocka, que Simo Drljaca était chef du poste de

 16   police de Prijedor numéro 1. Le commandant du poste de police de Prijedor

 17   numéro 2 était Zivko Knezevic, n'est-ce pas ?

 18   R.  Knezevic.

 19   Q.  Et il faisait rapport à Simo Drljaca, n'est-ce pas ?

 20   R.  Probablement. Oui, c'était comme cela que cela devrait se passer.

 21   C'était à un niveau supérieur que cela se passait par rapport à mon poste,

 22   mais selon le règlement qui était en vigueur à l'époque, cela devait se

 23   passer ainsi.

 24   Q.  Au paragraphe 38 de votre déclaration, vous avez dit que Drljaca a

 25   donné un ordre que le centre d'enquête d'Omarska ou le camp d'Omarska soit

 26   sécurisé par les membres du peloton de police d'Omarska.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on maintenant afficher, par rapport

 28   à cela, la pièce P04260 [comme interprété].


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  1   Q.  Monsieur Kvocka, vous avez déjà vu ce document, donc le document qui

  2   sera affiché à l'écran. Il s'agit de l'ordre signé par Drljaca le 31 mai

  3   1992, et ce document vous a été montré lors de votre procès. Est-ce qu'on

  4   peut afficher la dernière page de ce document, s'il vous plaît. Vous avez

  5   témoigné que les signatures qu'on peut voir à la dernière page du document,

  6   en dessous du tampon, sont les signatures des personnes qui ont reçu cet

  7   ordre au nom du centre de sécurité, à savoir Djoko Mejakic au numéro 1, et

  8   Dusan Jankovic au numéro 2, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, il s'agit des personnes qui ont reçu cette décision concernant

 10   Mijic [phon] et concernant l'administration de la mine de fer et au nom de

 11   la sécurité, et non pas au nom du poste de sécurité publique. Donc, Zeljko

 12   [phon] a reçu cela au nom de la sécurité, du service de sécurité.

 13   Q.  Et Dusan Jankovic, mentionné ici, est la même personne que vous avez

 14   mentionnée au paragraphe 21 de votre déclaration lorsque vous avez parlé du

 15   début du fonctionnement du camp d'Omarska. C'était la personne qui vous a

 16   donné l'ordre de vous rendre là-bas, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, c'est la même personne.

 18   Q.  Donc, vous avez dit que vous étiez à Omarska au moment où Omarska a

 19   commencé à fonctionner, à savoir à peu près vers le 28 mai. Les documents

 20   serbes, et c'est la pièce D00470, il s'agit du rapport de la commission de

 21   Banja Luka du mois d'août 1992, dans ces documents il est dit que les

 22   détenus ont été transférés de Keraterm à Omarska le 27 mai 1992. Est-ce que

 23   vous admettez que vous auriez peut-être commis une erreur concernant la

 24   date du début de votre travail au camp d'Omarska d'un jour ou deux ?

 25   R.  J'accepte cela. Je pense que j'ai déjà dit lors de mon procès que je ne

 26   pouvais pas me souvenir de la date exacte, mais il s'agit de date autour du

 27   28 août -- avril.

 28   Q.  Mai, plutôt.


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  1   R.  Oui, oui, du mois de mai.

  2   Q.  Et Mejakic était dans le camp tous les jours, parfois il était absent

  3   pendant quelques heures, et très souvent il passait la nuit dans le centre.

  4   C'est ce que vous avez dit lors de votre déposition dans votre procès,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, il y était pendant un certain temps. Moi aussi, je m'y ai trouvé

  7   pendant la nuit parfois dans ce centre, et parfois pendant la journée.

  8   Excusez-moi, nous essayions d'être plus présents dans le centre, l'un ou

  9   l'autre, pour essayer d'aider à ce que les problèmes soient résolus,

 10   puisque nous avions de l'expérience.

 11   Q.  Vous avez dit dans le paragraphe 25 de votre déclaration que Mejakic a

 12   nommé trois hommes pour se relayer dans des équipes : Mladjo Radic; Momcilo

 13   Gruban, surnommé Cekalija; et Milijece Kos, surnommé Krle. Ces personnes

 14   étaient des intermédiaires entre Mejakic et les gardes, et également entre

 15   vous et les gardes lorsque ces trois équipes se relayaient, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, d'après le règlement en vigueur à l'époque, il y avait une

 17   personne qui était de permanence dans une équipe et qui devait être

 18   présente dans une pièce et qui devait jouer le rôle, pour ainsi dire,

 19   d'intermédiaire pour résoudre des problèmes, et c'est pour cela qu'on

 20   engageait des personnes qui avaient de l'expérience et qui étaient

 21   appréciées par les membres de la police de réserve.

 22   Q.  Bien, Mladjo Radic était membre de la police d'active, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui. Il avait beaucoup d'expérience.

 24   Q.  Et ces trois autres personnes pouvaient faire la tournée dans le camp.

 25   Ils n'avaient pas un poste de garde concret ?

 26   R.  Oui, c'est vrai.

 27   Q.  Pendant que vous travailliez dans le camp, selon votre estimation il y

 28   avait 2 500 personnes dans le camp, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit à l'époque, et je pense que c'était le

  2   nombre total de personnes qui passaient par le camp, parce qu'il y en a eu

  3   qui arrivait, qui partait, et cetera. Il s'agit d'un chiffre approximatif

  4   puisqu'il n'y avait pas de registre précis pour pouvoir aujourd'hui arriver

  5   à la conclusion exacte concernant le nombre de détenus dans le camp.

  6   Q.  Monsieur Kvocka, vous avez dit lors de votre déposition et vous avez

  7   également dit lors de l'entretien qui a été mené avec vous, qu'il y avait

  8   approximativement 2 500 personnes dans le camp. Vous avez également dit

  9   qu'entre 100 et 120 personnes ont été relâchées et que, d'après vos

 10   connaissances, c'étaient les seules personnes qui aient été relâchées,

 11   hormis une ou deux personnes qui ont été emmenées à bord d'une camionnette

 12   vers la fin de la journée par les enquêteurs. Donc, ce chiffre de 2 500

 13   personnes est le chiffre que vous avez avancé et c'est le chiffre de

 14   personnes qui se trouvaient au camp d'Omarska pendant que vous étiez là-

 15   bas, à savoir jusqu'au 23 juin, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, on peut dire cela.

 17   Q.  Vous avez vu deux grands groupes de personnes qui ont été emmenés au

 18   camp en autocars; c'est bien cela ? Deux groupes séparés -- deux grands

 19   groupes de personnes, mais séparément.

 20   R.  Oui, j'étais là lorsqu'on emmenait les gens au début dans les tous

 21   premiers jours.

 22   Q.  Alors le premier groupe, il est arrivé la première fois que vous êtes

 23   allé au camp après que Jankovic vous ait ordonné de vous y rendre, et

 24   ensuite le deuxième grand groupe est arrivé dans l'après-midi le lendemain

 25   de l'attaque sur Prijedor le 30 mai, ce groupe a probablement arrivé le

 26   lendemain ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et les détenus ont été emmenés au camp par des autocars du service de


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  1   la ville ou des autocars qui faisaient la navette entre plusieurs villes et

  2   provenaient de Prijedor, pour la plupart ? Je parle des autocars, les

  3   autocars venaient de la société Autotransport de Prijedor.

  4   R.  Oui, c'est la seule société de transport de passagers qui existait à

  5   Prijedor à l'époque.

  6   Q.  Et les personnes qui escortaient les détenus dans les autocars venaient

  7   de la police et de l'armée ?

  8   R.  Oui, il y avait une escorte qui avait été fournie par la police

  9   militaire et la police civile, comme on l'appelait, la police de la ville.

 10   Q.  Au paragraphe 64 de votre déclaration, vous avez dit que vous avez vu

 11   des détenus qui ont dû s'arrêter et passer par une haie d'honneur

 12   constituée de policiers de l'armée et qu'ensuite ces détenus ont été pris

 13   des autocars et qu'on les a forcés à chanter des chansons et à se frapper

 14   les uns les autres ?

 15   R.  Oui, c'est exact. C'est arrivé une fois, lorsqu'un groupe est venu. Ce

 16   n'était pas un grand nombre de personnes.

 17   Q.  Vous avez également vu dans ce groupe que les détenus avaient été roués

 18   de coups par la police et par d'autres personnes qui étaient là pour

 19   assurer l'escorte ?

 20   R.  Oui, c'est arrivé. C'est que j'allais dire. Lorsque les gens sont

 21   arrivés, ceux qui avaient été capturés, il y avait un groupe de deux ou

 22   trois policiers dans la forêt, et les détenus sortaient, les policiers les

 23   ont forcés à se frapper les uns les autres. Cela a duré 20 à 30 secondes

 24   jusqu'à leur entrée. Ils se trouvaient très, très près du bâtiment, donc la

 25   haie d'honneur devait faire 2 ou 3 mètres. Ces personnes avaient été prises

 26   dans la forêt à Kozara.

 27   Q.  Vous avez également témoigné d'un événement pendant lequel quatre ou

 28   cinq personnes ont été emmenées, ces personnes venaient du SUP de Prijedor,


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  1   donc du poste de police de Prijedor. Les policiers qui ont accueilli ces

  2   personnes ont été assez brusques lorsqu'ils les ont fouillées. Vous avez

  3   vu, entre autres, que la police a donné des coups de pied à ces détenus, a

  4   frappé ces détenus avec une arme et a giflé ces détenus, et l'une de ces

  5   personnes était Nusret Sivac. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

  6   R.  Oui, Nusret Sivac, oui.

  7   Q.  Nusret Sivac. Et vous souvenez-vous que lorsqu'on l'a emmené dans le

  8   camp, les gardes qui ont accueilli ces personnes frappaient, donnaient des

  9   coups de pied aux détenus et les frappaient avec leurs armes ?

 10   R.  Oui, oui, maintenant que vous le dites, je m'en souviens. Cela se

 11   retrouve également dans ma déclaration, lorsque plusieurs ont été amenées.

 12   Je me souviens qu'il y avait entre autres Nusret Sivac, parce qu'avant, il

 13   avait travaillé au ministère de l'Intérieur. Peut-être que certains étaient

 14   révoltés contre lui et que certains ont voulu le rouer de coups, le frapper

 15   et je l'ai protégé.

 16   Q.  Monsieur Kvocka, vous avez dit que les frères de votre femme, Rizak,

 17   Nedzad et Sulalic [phon] [comme interprété], étaient là lorsque vous, vous

 18   êtes allé au camp l'après-midi du 31 mai 1992. Cela se retrouve au

 19   paragraphe 67 de votre déclaration. Vous y dites que vous les avez pris à

 20   part et qu'environ 10 minutes après, vous les avez emmenés dans un véhicule

 21   officiel et vous les avez conduits dans votre maison dans le village

 22   d'Omarska. Nous parlons là de la maison familiale de vos parents au centre

 23   du village d'Omarska ?

 24   R.  Oui, c'est exact. Adnan, Nedzad et Crnalic se trouvaient là-bas. On les

 25   a emmenés au camp, mais moi, je les ai fait sortir directement et je les ai

 26   emmenés en voiture dans ma maison.

 27   Q.  Mais lorsqu'ils ont été emmenés au camp, ils avaient été emmenés avec

 28   le groupe en autocar, groupe constitué de civils non-Serbes ?


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  1   R.  Oui. Oui, c'était le jour où l'attaque avait eu lieu. Et ce soir-là,

  2   donc le soir du jour de l'attaque sur Prijedor, deux ou trois autocars

  3   étaient arrivés, et dans l'un des autocars se trouvaient les frères de ma

  4   sœur.

  5   Q.  Monsieur Kvocka, vous n'avez pas dit dans votre déclaration pourquoi

  6   vous les avez fait sortir du camp. En fait, vous les avez fait sortir du

  7   camp parce que vous vous inquiétiez de leur bien-être ?

  8   R.  Je pense que c'était un acte à moitié manqué.

  9   Q.  Non, vous vous inquiétiez de leur bien-être ? C'est ma question. Soyez

 10   bref, s'il vous plaît.

 11   R.  Oui, c'est exact. Vous avez raison. Mais nous pourrions parler de mon

 12   état d'inquiétude.

 13   Q.  Mais à ce moment-là, donc dès les premiers jours, on vous avait déjà

 14   dit que les conditions des détenus dans ce camp étaient mauvaises ?

 15   R.  Je peux vous dire que les conditions n'étaient pas bonnes,

 16   probablement.

 17   Q.  Mais lorsque le bureau du Procureur vous a interrogé, on vous a demandé

 18   de donner quelques exemples concrets de ces mauvaises conditions. Et

 19   lorsque vous en avez parlé, vous avez déclaré que les pièces étaient trop

 20   petites pour le nombre de personnes, qu'il n'y avait pas de couchage pour

 21   les détenus, qu'ils ne pouvaient pas dormir sur quoi que ce soit, qu'il y

 22   avait plus de gens que ce que les sanitaires pouvaient accueillir, que les

 23   gens faisaient la queue. Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela ?

 24   R.  Peut-être que certains de ces termes ne sont pas exacts. Je ne me

 25   souviens pas avoir parlé de queues, mais oui, j'ai dit que les conditions

 26   n'étaient pas formidables parce qu'il y avait plus de gens que d'espace

 27   disponible. Il n'y avait pas suffisamment de toilettes par rapport au

 28   nombre de détenus, donc cela voulait dire qu'il fallait un petit peu


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  1   attendre avant de pouvoir prendre de l'eau ou pouvoir se laver. C'est cela

  2   que je voulais dire pour condition. Quoi qu'il en soit, les conditions

  3   n'étaient pas optimales.

  4   Q.  Vous vous inquiétiez également que quelque chose arrive aux frères de

  5   votre femme à cause des événements qui avaient déjà eu lieu dans le camp,

  6   et vous vous disiez que quelque chose de semblable pouvait leur arriver ?

  7   R.  Oui, précisément, et je pense qu'il en allait de ma moralité de

  8   protéger tout le monde et de faire de mon mieux pour tout le monde et

  9   encore plus pour eux. Mais je ne les ai pas épargnés pour ce qui est des

 10   interrogatoires, des procédures d'enquête, et cetera. Ils n'ont pas eu de

 11   traitement de faveur. Je les ai juste emmenés dans ma maison où ils

 12   allaient être un petit peu plus à l'aise. Mais vous savez, il y avait une

 13   pénurie d'alimentation à l'époque, donc ils n'ont pas mieux vécu dans la

 14   maison que le reste des gens. C'était un petit peu mieux, oui.

 15   Q.  Monsieur Kvocka, par rapport à cela, vous avez dit que vous ne leur

 16   aviez pas épargné l'interrogatoire, mais est-il exact qu'en fait, vous avez

 17   choisi les personnes qui allaient les interroger pour vous assurer qu'ils

 18   allaient être bien traités ?

 19   R.  Oui. Je n'ai pas particulièrement choisi n'importe qui pour leur

 20   interrogatoire. J'ai remarqué que ces personnes étaient disponibles,

 21   libres, et je les connaissais déjà d'avant dans le service. Lorsque vous

 22   faites quelque chose, vous essayez de choisir quelqu'un que vous

 23   connaissez.

 24   Q.  Au paragraphe 71 de votre déclaration, vous dites que Dusan Jankovic

 25   vous a ordonné de faire revenir vos trois beaux-frères au camp d'Omarska,

 26   et que Jankovic vous a également dit que vous ne deviez plus travailler au

 27   camp et que vous deviez aller au poste de police de Trkavi [phon] [comme

 28   interprété].


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Au paragraphe 71 également, vous dites que lorsque vous les avez

  3   ramenés au camp, vous avez vu là-bas Gruban et que vous lui avez demandé --

  4   Gruban d'ailleurs était l'un des dirigeants des postes, l'un des officiers

  5   de garde, et vous lui avez demandé de prendre soin d'eux, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, oui, c'est vrai.

  7   Q.  En fait, les trois hommes ont été placés dans un endroit qui était

  8   connu sous le nom de la verrière qui se trouvait au rez-de-chaussée du

  9   bâtiment administratif ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et pendant votre entretien avec le bureau du Procureur lorsque l'on

 12   vous a demandé si vous aviez demandé qu'on les place dans cette verrière,

 13   vous avez répondu que vous ne vous souveniez plus de ce que vous aviez

 14   demandé exactement, mais que vous aviez dit à Gruban et également à Milica

 15   Kos de prendre soin d'eux. Vous avez déclaré que vous saviez que vous

 16   alliez partir du camp, comme vous l'aviez dit, et que vous leur aviez

 17   demandé de prendre soin d'eux et que vous saviez ce que cela impliquait.

 18   Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela pendant votre entretien ?

 19   R.  Oui, je me souviens avoir dit cela, mais je ne me souviens pas de cette

 20   phrase en particulier. Cela étant, je me souviens avoir demandé à ces

 21   personnes de garder un œil sur eux, de prendre soin d'eux, et je crois que

 22   c'est tout à fait humain comme réaction, et c'est probablement eux qui ont

 23   choisi l'endroit où ils allaient être détenus, parce qu'il était plus

 24   facile de garder un œil sur eux de là-bas.

 25   Q.  Eh bien, vous aviez l'impression que cette verrière était l'une des

 26   pièces où les détenus bénéficiaient des meilleures conditions ?

 27   R.  Peut-être qu'il n'y avait pas autant de personnes là-bas, mais c'était

 28   un espace plus confiné. L'important, c'est que c'était un endroit qui était


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  1   visible, qui était toujours dans le champ visuel des officiers là-bas.

  2   Donc, d'un point de vue de la supervision, on peut dire que ceux qui se

  3   trouvaient dans cette verrière étaient plus en sécurité.

  4   Q.  Mais vous vouliez également qu'ils ne soient pas attaqués ou, pire,

  5   qu'ils ne meurent pas des suites de rouages de coups qui étaient infligés

  6   aux détenus ?

  7   R.  C'est exact. Mais je ne voulais pas que qui que ce soit soit attaqué.

  8   Et pendant toute la durée de mon travail là-bas, j'ai fait en sorte que

  9   cela soit le cas. J'ai même eu quelques dissensions avec certains officiers

 10   de police à ce propos.

 11   Q.  Et dans votre procès, vous avez dit que lorsque vous leur avez demandé

 12   de garder un œil sur vos beaux-frères, vous vouliez dire que vous ne

 13   vouliez pas que quelque chose de stupide leur arrive, et lorsqu'on vous a

 14   demandé d'expliquer ce que vous entendiez par cela, vous avez répondu : Eh

 15   bien, cela pourra être des rouages de coup. Ils auraient même pu être tués.

 16   Et vous avez déclaré que vous aviez entendu dire qu'il y avait des gardes

 17   qui avaient tendance à rouer de coup les détenus et que cela vous

 18   inquiétait. Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela pendant votre

 19   déposition dans votre procès ?

 20   R.  Oui, oui. C'est exactement ce que je vous ai dit également il y a

 21   quelques instants. J'ai eu quelques dissensions avec des officiers de

 22   police, les policiers de réserve qui venaient d'arriver et qui ne

 23   m'aimaient pas beaucoup parce que je voulais que le travail soit fait de

 24   façon professionnelle, et ce genre de policiers - je dirais qu'il y en

 25   avait deux ou trois de la sorte - m'en voulaient. Donc, il était logique

 26   que je me dise qu'ils voudraient se venger sur mes proches et d'autres

 27   personnes que j'ai voulu aider du plus profond de mon cœur, et nous avons

 28   eu quelques échanges assez musclés.


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  1   Q.  Monsieur Kvocka, au paragraphe 57 de votre déclaration, vous dites :

  2   "Je ne suis pas au courant que Zigic soit entré au centre", et nous parlons

  3   du camp d'Omarska ici. Aujourd'hui, vous savez très bien qu'il est entré

  4   dans le camp et qu'il a commis des crimes haineux contre les détenus. Et

  5   pendant votre procès, vous avez entendu plusieurs témoins qui ont déposé

  6   sur ces crimes que Zigic avait commis ainsi que d'autres qui l'avaient

  7   accompagné lorsqu'il était venu au camp, et en 1992, à l'époque, vous

  8   saviez également que vous deviez faire sortir vos trois beaux-frères de ce

  9   camp à cause de cela ?

 10   R.  Non. Non, ce n'est pas exact. J'ai entendu beaucoup de choses lors de

 11   plusieurs dépositions ici. Mais quand j'étais à Omarska, et souvenez-vous

 12   je n'y suis resté que 20 jours, vous le savez de par mon procès, j'ai été

 13   actif, entre guillemets, pendant 12 jours environ. Pendant cette période -

 14   je le répète aujourd'hui et je vous l'assure - Zigic n'est pas venu au

 15   camp, et je n'ai même pas entendu dire qu'il allait venir. J'ai travaillé

 16   dans ce camp pendant une très, très courte période de temps, quelques

 17   jours, et pendant cette période-là, Zigic n'est pas venu au camp. Mais plus

 18   tard au Tribunal, j'ai entendu que plusieurs personne avaient dit qu'il

 19   était venu au camp.

 20   Q.  Pendant la période où vous y étiez ?

 21   R.  Eh bien, pendant la période où j'y étais, je n'ai jamais vu cet homme

 22   et je le maintiens.

 23   Q.  Nous sommes en train de pinailler sur le nombre de jours, mais je crois

 24   que lors de votre procès vous aviez déclaré que vous y étiez pendant 17

 25   jours, et pas 12 jours, au total ?

 26   R.  Oui, oui, c'est vrai. C'est vrai. Au total, oui. Mais j'ai été malade

 27   pendant trois jours, j'ai également obtenu deux jours de congé pour pouvoir

 28   régler quelques problèmes, donc j'ai travaillé moins que ce chiffre-là.


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  1   Mais, oui, vous avez raison 17 jours.

  2   Q.  Vous y étiez pendant 17 jours, jusqu'au 23 juin, vous y avez travaillé.

  3   Cela déduit les jours où vous n'avez pas travaillé au début du mois de juin

  4   et à la mi-juin, au total cela fait 17 jours, vous pouvez le confirmer ?

  5   R.  Oui, c'est exact. Ce sont les conclusions de la Chambre de première

  6   instance, et je les accepte. Et je suis juste en train de vous dire que

  7   pendant quelques jours je n'ai pas travaillé, donc il faut enlever quelques

  8   jours, par exemple, lorsque j'ai eu un jour de congé, le lendemain, je n'ai

  9   pas travaillé au centre. Donc, si vous tenez compte de la façon dont les

 10   postes fonctionnaient, je dirais qu'il y a trois jours pendant lesquels je

 11   n'ai pas travaillé parce que j'ai été malade, et puis j'ai obtenu de Zeljko

 12   deux jours supplémentaires pour régler quelques problèmes personnels.

 13   Q.  Monsieur Kvocka --

 14   R.  Mais ce n'est pas un problème, disons 17 jours.

 15   Q.  Eh bien, des détenus ont fait l'objet d'abus par certains gardes du

 16   camp et par certaines personnes de l'extérieur qui, dès le début, sont

 17   arrivés au camp ?

 18   R.  Oui, il y a eu certains événements, oui.

 19   Q.  Lors de votre entretien, vous avez dit qu'après quelques jours il y a

 20   eu des événements qui ont impliqué des visiteurs de l'extérieur qui étaient

 21   venus au camp et qu'il y a eu des rouages de coup de détenus, et après

 22   quelques jours une unité est venue pour aider. Et ces personnes étaient des

 23   membres de la police spéciale de Banja Luka. Ces personnes sont arrivées

 24   cinq à dix jours après l'opération du camp. Est-ce que vous vous souvenez

 25   avoir déclaré cela ?

 26   R.  Oui, oui. Je m'en souviens.

 27   Q.  Et ces informations sont exactes ?

 28   R.  Oui, pour la plupart.


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  1   Q.  Dans votre déclaration au paragraphe 58, vous dites que vous n'avez

  2   jamais vu de meurtre commis, pas un seul. Ensuite, vous poursuivez et vous

  3   dites qu'à votre arrivée à Omarska pour la première fois, vous avez vu

  4   trois ou quatre corps morts. Vous avez vu ces corps lorsque vous êtes

  5   retourné au camp d'Omarska ce premier jour vers 8 heures du matin ?

  6   R.  Oui, parce que la première fois que je m'y étais rendu il faisait nuit.

  7   On ne voyait rien. Et j'ai pris mon poste aux environs de 8 heures du

  8   matin.

  9   Q.  Et la seule chose que vous ayez vu c'étaient de neuf à 12 autocars,

 10   certains étaient remplis de détenus et d'autres étaient vides ?

 11   R.  Oui. Oui, et c'est à ce moment-là que les prisonniers ont été emmenés.

 12   Q.  Ces trois ou quatre corps que vous avez vus ont été emmenés deux jours

 13   plus tard dans une camionnette jaune de type TAM, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, c'est exact. On m'avait dit qu'une enquête sur site allait avoir

 15   lieu, mais elle n'a jamais eu lieu, probablement à cause de la situation

 16   générale de la municipalité.

 17   Q.  Au paragraphe 24 de votre déclaration, dernière phrase, vous dites que

 18   pendant la période que vous avez passée au camp, vous étiez à mi-temps au

 19   bureau et à mi-temps à l'extérieur. Mais ces activités à mi-temps ne

 20   portent que sur les deux premiers jours que vous avez passés au camp,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Je dirais que, grosso modo, je passais la moitié du temps au bureau à

 23   l'étage, il y avait plusieurs sténos, Zeljko, et d'autres personnes qui

 24   étaient de garde, qui appartenaient au même poste et qui prenaient les

 25   déclarations, qui les donnaient aux sténotypistes, et cetera.

 26   Q.  Monsieur Kvocka --

 27   R.  Donc, si l'on parle du temps total que j'ai passé --

 28   Q.  -- terminez votre phrase, je suis désolée de vous avoir interrompu.


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  1   Donc vous vous étiez arrêté en disant :

  2   "Et par rapport au temps total que j'ai passé…"

  3   Est-ce que vous voulez dire par là que c'était moitié/moitié ?

  4   R.  Oui, c'est ce que je voulais dire.

  5   Sur les 17 jours où j'ai travaillé là-bas, la moitié du temps je le passais

  6   à l'extérieur et l'autre moitié du temps au bureau, et pas uniquement

  7   pendant ces deux à trois premiers jours.

  8   Q.  Alors, je vais vous rappeler de ce que vous avez déclaré. Vous avez dit

  9   que vous avez passé 16 à 17 heures au centre d'enquête pendant les deux

 10   premières journées, et sur cette période totale, la moitié du temps était

 11   passée au bureau. Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela dans votre

 12   déposition ?

 13   R.  C'est possible que je l'aie dit. Et c'est également vrai. .  Ces jours-

 14   là ainsi que les autres jours, j'étais à moitié à l'extérieur et à moitié

 15   au bureau.

 16   Q.  Mais le reste du temps que vous avez passé au camp, lorsque vous avez

 17   répondu aux questions de M. Reid, vous avez dit qu'en général vous passiez

 18   une à deux heures au bureau et 12 [comme interprété] heures à l'extérieur

 19   sur 12 heures de poste. Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela ?

 20   R.  Je ne me souviens pas l'avoir dit. Même si je l'avais dit, je ne me

 21   souviens pas l'avoir dit.

 22   Q.  Vous aviez dit tout à l'heure que vous vous trouviez à l'extérieur de

 23   votre bureau pendant dix heures environ de votre poste. Et je vous cite : 

 24   "On pourrait dire cela. Il ne faut pas être aussi précis."

 25   Et ensuite, M. Reid a déclaré :

 26   "Non. Pour Banja Luka, la plupart du temps de votre poste était passé à

 27   l'extérieur ?"

 28   Et vous avez répondu :


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  1   "Oui."

  2   Est-ce que cela vous rafraîchit la mémoire ?

  3   R.  Oui, oui, je l'accepte. Un jour, j'étais à l'extérieur plus longtemps,

  4   et puis le lendemain je passais plus de temps au bureau. Mais dans

  5   l'ensemble, au total, je dirais que c'était moitié-moitié. Certains jours

  6   j'étais plus souvent à l'extérieur, huit heures, et puis d'autres jours j'y

  7   étais pendant dix heures et je n'entrais au bureau que cinq minutes. C'est

  8   arrivé aussi, oui, je ne le nie pas.

  9   Q.  Au paragraphe 78 de votre déclaration, que d'après les informations

 10   dont vous disposiez, il n'y a pas eu plus de cinq morts au total à Omarska.

 11   Je souhaiterais tirer la chose au clair, que vouliez-vous dire par là ?

 12   Est-ce que vous vouliez dire qu'il n'y pas eu plus de cinq décès à Omarska

 13   à l'époque où vous, vous vous êtes trouvé là-bas ?

 14   R.  C'est à peu près cela que je voulais dire. C'est ce que j'ai appris

 15   pendant mon séjour, à savoir qu'il y a eu cinq, voire six, ou quatre morts.

 16   Je ne peux pas être tout à fait précis. Je sais qu'il a été question d'une

 17   personne qui était morte de mort naturelle. Il y avait trois ou quatre

 18   cadavres qu'on avait trouvés là-bas. Et je ne sais pas si à l'occasion d'un

 19   événement où un soldat avait tiré pour se venger, il a été dit par la suite

 20   qu'il y avait un ou deux morts. Donc, ça pourrait donner un total de six.

 21   Mais c'est à peu près le souvenir que j'en ai gardé.

 22   Q.  Et Mehmedalija Nasic, qui a été touchée par un tir de la part de Dragan

 23   Popovic, qu'on avait surnommé Pavelic, ça se situe à la date du 10 juin

 24   1992; et il y a eu un dénommé Becir [phon] [comme interprété] qui a été

 25   tabassé à mort par Zoran Zigic et Dusan Knezevic vers la mi-juin; et ça

 26   s'est passé à l'époque que vous vous trouviez là-bas, entre le 12 et le 14

 27   juin, on a tué Emir Ramic, Amir Saric et Dalija Hrnic. Ça, c'est les noms

 28   de quelques-unes des personnes tuées. Vous ne contestez donc pas que l'on


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  1   ait abattu plus de cinq personnes pendant que vous vous êtes trouvé là-bas,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est ce que j'ai dit, il se peut qu'il y ait eu d'autres meurtres

  4   encore. Mais moi, je vous parle de ce que j'ai appris à l'époque. Et au

  5   paragraphe précédent, je n'ai pas eu l'occasion de le mentionner, cette

  6   Nasic qui a été tuée par le dénommé Popovic, surnommé Pavlic, pas Pavelic.

  7   Ça, j'en ai entendu parler au matin lorsque je suis arrivé au travail, on a

  8   parlé de cet incident la nuit. Et ce Popovic a témoigné ici et il a

  9   expliqué les choses dans moult détails.

 10   Q.  Bien entendu, il y a eu quatre personnes de tuées par cette personne au

 11   camp arrivée à la date du 30 mai, Asif Muranovic, et un certain Teofik

 12   [phon] [comme interprété], dont le surnom était Sifet [phon] [comme

 13   interprété]. Est-ce que vous savez nous dire quelque chose au sujet de ces

 14   meurtres-là ?

 15   R.  Non. Il se peut que ce soit les cadavres qu'on a trouvés sur place, ou

 16   alors ce sont les personnes qui avaient précédemment été blessées puis qui

 17   sont décédées par la suite. C'est peut-être leurs noms. Mais moi, les noms

 18   ne me disent rien. Je n'ai eu aucune information à leur sujet.

 19   Q.  Non, ce n'est pas les mêmes personnes. Les trois ou quatre cadavres que

 20   vous avez vus le premier jour, ce n'est pas ça. Des témoins ont dit que

 21   presque tous les jours il y avait plusieurs cadavres que l'on pouvait voir

 22   non loin de la maison blanche - ça se trouve au paragraphe 86 - et ensuite

 23   on les chargeait à bord de ce petit camion TAM jaune, que l'on appelait

 24   Tamic, et que l'on amenait après. Ça se trouve au paragraphe 66 du

 25   jugement. Donc, ces corps étaient sortis tous les jours vers la même heure.

 26   Est-ce que vous êtes en train véritablement de nous dire dans votre

 27   témoignage que vous n'avez jamais vu d'autre cadavres qui se trouveraient

 28   ailleurs dans le camp d'Omarska pendant les 17 jours où vous y avez


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  1   travaillé, en particulier compte tenu de ce vous nous avez dit tout à

  2   l'heure au sujet du temps que vous passiez dehors ?

  3   R.  Mais vous le dites vous-même que les témoins ont dit presque tous les

  4   jours; pas tous les jours. Si vous prenez maintenant la durée de mon

  5   intervention, le nombre de jours que j'y ai passés, disons que ça fait un

  6   jour sur trois que je passais là-bas le jour, c'est logique, je vous

  7   affirme que ce que j'ai vu, je vous l'ai dit tout à fait sincèrement, et je

  8   l'ai réitéré à plusieurs reprises devant ce Tribunal, j'ai dit ce que je

  9   savais.

 10   Q.  Monsieur Kvocka, vous avez dit précédemment que vous et M. Mejakic,

 11   vous avez toujours veillé à ce que quelqu'un reste au camp. Vous avez,

 12   n'est-ce pas, aussi indiqué que vous avez effectué des relèves de 12 heures

 13   ? Au bout de ces quelques jours, puis vous êtes passé à une routine, et ces

 14   horaires de routine c'étaient des relèves de 12 heures; c'est bien cela ?

 15   R.  Oui, c'est exact. Zeljko et moi, nous étions des policiers de carrière

 16   et nous avions convenu de la chose de notre propre gré pour que les choses

 17   fonctionnent au mieux à l'égard des détenus. Nous avons convenu de

 18   fonctionner ainsi. On a peut-être fait une erreur. On n'aurait jamais dû

 19   être -- on n'aurait peut-être pas été accusés pour des responsabilités de

 20   chef hiérarchique, mais à la fin ce chef est tombé à l'eau. Mais du côté

 21   moral et humain, nous avions pour mission d'aider les prisonniers et de

 22   former les jeunes policiers. Nous n'avions pas d'autres obligations, nous

 23   n'avions pas d'autres possibilités non plus d'intervenir et nous n'avions

 24   pas non plus les compétences requises. C'est ce que nous avions convenu

 25   dans le principe. Ça ne veut pas dire que nous avons à 100 % respecté la

 26   chose, mais il est arrivé aussi que ni l'un ni l'autre n'aient été

 27   véritablement présent à un moment donné.

 28   Q.  Au paragraphe 54 de votre déclaration, vous dites que vous avez entendu


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  1   des cris en provenance des bureaux où les interrogatoires se passaient. Au

  2   paragraphe 62, vous avez donné un exemple disant que vous avez eu

  3   connaissance du fait que l'on avait tabassé quelqu'un lors de

  4   l'interrogatoire.

  5   R.  Oui. Je m'en souviens --

  6   Q.  Mais cet événement, vous l'avez déclaré -- et ça se trouve dans votre

  7   déclaration, point n'est nécessaire de le répéter ici. Vous avez signalé la

  8   chose aux coordinateurs des équipes d'interrogatoires ?

  9   R.  Mon intervention dans ce cas de figure était surtout liée à la

 10   nécessité de déterminer si l'un quelconque des policiers était en train de

 11   torturer quelqu'un ou d'user de la force lors des interrogatoires, parce

 12   qu'il arrivait qu'un policier soit présent lors des interrogatoires par les

 13   enquêteurs. Les enquêteurs demandaient parfois la présence d'un policier et

 14   il se peut donc que celui-ci ait été présent. Point n'était nécessaire de

 15   le leur déclarer. Nous n'avions pas l'obligation de porter ceci à la

 16   connaissance de ces coordinateurs. Ils étaient des supérieurs

 17   hiérarchiques, bien qu'ils n'aient pas pu nous donner des ordres. Les

 18   enquêteurs sont toujours plus haut placés que les policiers. Est-ce qu'ils

 19   pouvaient commander aux policiers ou pas, ça, c'est une autre question.

 20   Q.  Monsieur Kvocka, est-ce que vous vous souvenez d'avoir dit en répondant

 21   à M. Reid, qui vous a demandé :

 22   "Est-ce que vous vous étiez plaint auprès du chef des enquêteurs ?"

 23   Et vous avez dit :

 24   "Je leur ai dit la même chose. Je leur ai dit pourquoi autorisez-vous cela,

 25   vous devriez savoir que ça ne se fait pas."

 26   R.  Oui, je suis intervenu. Je ne sais pas vous dire maintenant de quel

 27   service faisait partie cet individu, sur les trois services qui sont

 28   énumérés ici. Je ne me souviens plus à qui je m'étais plaint. Mais je


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  1   m'étais entretenu avec leur chef. Ma réponse de tout à l'heure, c'était

  2   fait pour dire que je n'avais pas l'obligation de déposer une plainte à

  3   titre officiel. J'avais pour mission d'informer mon supérieur hiérarchique.

  4   C'est les règles.

  5   Q.  Monsieur Kvocka, les coordinateurs avaient pour bureau un local au bout

  6   du couloir où ces interrogatoires avaient lieu, n'est-ce pas; c'est bien

  7   cela ?

  8   R.  Oui, c'est cela.

  9   Q.  Et c'est de ce local, de ce bureau à la fin ou au bout du couloir. De

 10   là, on pouvait entendre du bruit qui venait donc des pièces où avaient lieu

 11   les interrogatoires ?

 12   R.  Ecoutez, le couloir était assez long. C'était au bout. Et le bureau en

 13   question, c'était juste en face du bureau des policiers. C'est pour cela

 14   qu'on a relevé la chose. Je ne sais pas vous dire si eux ont entendu la

 15   chose ou pas. Je ne peux pas vous en parler. Ce que j'affirme, c'est que

 16   moi j'ai entendu, je suis entré dans ce bureau, j'y suis entré pour voir ce

 17   qui se passait et j'ai vu quelqu'un qui avait les joues rouges, on lui

 18   avait probablement donné des gifles.

 19   Q.  Monsieur Kvocka --

 20   R.  Ce n'était pas chose inhabituelle dans la police communiste que nous

 21   avions à l'époque.

 22   Q.  Quand vous parlez d'une personne qui avait les joues rouges, c'est un

 23   détenu que vous évoquez ici, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, oui, c'est de ce cas de figure que je parlais.

 25   Q.  Au paragraphe 63 de votre déclaration, vous dites que lors de votre

 26   intervention à Omarska, il semblerait qu'il y ait eu d'autres cas de

 27   recours à la force.

 28   Je voudrais que vous tiriez la chose au clair, quels "autres cas de


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  1   recours à la force" aviez-vous à l'esprit ?

  2   R.  Eh bien, c'étaient soit des échanges de propos entre les gardiens, qui

  3   disaient que telles personnes avaient été tabassées. Il y a eu, donc, des

  4   informations qui ont couru pour ce qui est de tabassages. Mais ça ne s'est

  5   pas passé devant moi, je vous le répète. On ne m'a rien déclaré à titre

  6   concret. Mais on pouvait apprendre qu'il y avait eu plusieurs personnes de

  7   tabassées à l'époque où j'ai séjourné là-bas.

  8   Q.  Oui, vous avez témoigné de la chose dans votre procès et vous avez dit

  9   que vous pouviez entendre des cris de votre bureau. Et je vais citer ce que

 10   vous avez dit :

 11   "J'ai vu un homme [comme interprété], et compte tenu des conditions et de

 12   la situation, c'est des gens qui étaient en train de souffrir. Je ne sais

 13   pas comment. J'ai vu des gens qui avaient des traces de blessure."

 14   Vous souvenez-vous de cela ?

 15   R.  Oui, je m'en souviens. Il y a eu des rumeurs, mais il y a aussi eu des

 16   gens que j'ai rencontrés en allant manger et j'ai vu qu'ils portaient des

 17   blessures où leurs nez saignaient.

 18   Q.  Monsieur Kvocka, certes, vous avez donné cet exemple et vous avez dit

 19   que vous vous êtes entretenu avec des gens qui portaient des ecchymoses sur

 20   le visage, et vous avez conclu de la chose. Sefik Terzic, surnommé Kiki, le

 21   coiffeur; puis Rizak [phon] [comme interprété] Kukanovic aussi. Est-ce que

 22   vous vous souvenez de tout cela ? Vous les avez vus, ces gens, vous leur

 23   avez parlé ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens. Je me souviens de les avoir vus. Je ne sais pas,

 25   mais je crois que l'un d'entre eux avait des traces de coups sur le visage.

 26   Mais je les connaissais, ces gens-là, tous les deux, avant la guerre. Ils

 27   ne m'ont rien dit. Ils m'ont dit : Bon, ça va, ça va. C'est pas grave.

 28   C'est pas grave. Il faut pas détériorer la situation. Il faut pas aggraver


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  1   les choses. Et ils ne voulaient pas me dire ce qu'il s'était passé. C'est à

  2   peu près le souvenir que j'en ai gardé, même à présent.

  3   Q.  Le Dr Gajic du centre médical d'Omarska a témoigné dans votre procès et

  4   a dit que, d'après son diagnostic, la plupart des blessures étaient dues à

  5   des objets contondants, "par exemple, coups de poing, coups de crosse et

  6   coups de pieds avec des bottes militaires." C'est ce qui a été tiré comme

  7   conclusion par les Juges de la Chambre de première instance, et ça se

  8   trouve au paragraphe 65 du jugement rendu. Il s'agit là de blessures que

  9   vous avez qualifiées de visibles sur certains détenus, et vous les avez

 10   remarquées, ces blessures, causées par des objets contondants ou par des

 11   coups de pied avec des bottes ?

 12   R.  Oui, si le témoin a dit ça dans son témoignage, c'est qu'il y a eu ce

 13   type de cas de figure. Moi, j'ai témoigné au sujet d'un certain nombre de

 14   cas, et je dirais que dans mes déclarations antérieures j'ai été présent

 15   lorsque l'on a fait venir des détenus. Un grand nombre de ces détenus

 16   portaient des blessures avant même que d'être amenés au centre d'enquête.

 17   Les gens se faisaient arrêter dans les forêts ou avaient participé à des

 18   conflits, et c'est des gens qui portaient des traces de blessure déjà en

 19   arrivant, on ne peut pas dire qu'il n'y a que des détenus qui ont subi des

 20   coups, qui ont reçu des coups au centre de détention. Il y en a eu qui sont

 21   arrivés avec des traces de coup. Et j'ai parlé de ceux que j'ai vus à

 22   l'intérieur et des cas de figure où j'ai empêché de mauvais traitements

 23   d'infligés à des gens qui sont déjà arrivés au centre d'investigation.

 24   Q.  Au paragraphe 44 de votre déclaration, vous nous indiquez qu'il y avait

 25   eu 15 à 18 femmes à Omarska et que l'on les considérait comme étant des

 26   détenus. A l'occasion du récolement, vous nous avez dit qu'elles étaient à

 27   peu près 20 à 25, ces femmes au camp. Donc, savez-vous nous dire, au fait,

 28   qu'il y a eu au moins 36 femmes qui étaient détenues et qui n'avaient pas


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  1   la liberté de s'en aller de là-bas ?

  2   R.  Ecoutez, j'ai témoigné, je ne peux pas être précis au sujet des

  3   chiffres. A l'époque où j'y étais, elles n'étaient pas plus de 20. Il y en

  4   a peut-être eu plus ou moins après mon départ, je ne sais pas vous en

  5   parler. Je sais que quand j'y étais, elles étaient au nombre de 20. Il se

  6   peut 19 ou 21, mais je ne peux pas plus précis, j'ai dit une vingtaine.

  7   Q.  Vous avez dit que leurs conditions de vie étaient meilleures parce que

  8   c'étaient des femmes. Vous n'ignorez pas, partant de votre procès à vous,

  9   que certaines femmes ont été violées, qu'il y a eu des mauvais traitements

 10   sexuels infligés par les gardiens aussi; vous le saviez cela ?

 11   R.  Moi, je sais ce que j'ai entendu lors du jugement du procès. Mais

 12   pendant que j'étais au camp, personne ne m'en a parlé. Personne ne s'est

 13   plaint de la chose. Je n'ai rien su du tout.

 14   Nous revenons vers le jugement, et le jugement consigne bien que les choses

 15   sont considérées avoir été telles à l'époque où je me suis trouvé là-bas.

 16   Q.  Mais quand bien même vous n'aviez pas eu à savoir de la chose à

 17   l'époque, vous avez certainement eu à le savoir lorsque vous avez fait

 18   votre déclaration auprès des conseils de la Défense, vous savez que des

 19   femmes ont été soumises à de mauvais traitements ?

 20   R.  Ecoutez, moi, j'ai fait des déclarations partant de ce que je savais.

 21   Je ne pouvais pas déclarer au conseil de la Défense ce que j'ai ouï-dire

 22   lors du procès pour ce qui est des viols subis par des femmes en juillet et

 23   août, et cetera. Je crois que ce ne serait que peu correct de ma part que

 24   de parler de ce que certaines autres personnes ont raconté, je l'ai appris

 25   à mon procès, bien après mon séjour au centre de détention et je n'ai pas

 26   eu à savoir qu'il y a eu des viols à l'époque où je me suis trouvé là-bas.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu. Je me suis retenu. Il y a eu

 28   quelques erreurs. Mais ici en lignes 24 et 25, page 7, le témoin a dit :


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  1   "Je n'ai pas pu déclarer à l'équipe de la Défense ce que j'ai appris au

  2   sujet de ces viols lors du procès qui s'est déroulé ici."

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  4   Un instant.

  5   Est-ce que vous confirmez avoir dit cela, Monsieur ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que je viens de dire. J'ai dit

  7   qu'il serait peu correct de ma part de dire au conseil de la Défense des

  8   choses ou des éléments d'information dont j'ai eu à connaître en 2001

  9   lorsqu'il y a eu mon procès à moi ici.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 11   Vous pouvez continuer.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 13   Q.  Aux paragraphes 24, 42, et 66 de votre déclaration, vous faites

 14   référence à un tracé de route que vous appelez la piste, la "pista". Est-ce

 15   que c'est ce que l'on qualifie de "pista" dans le texte de votre

 16   déclaration; c'est bien cela ?

 17   R.  Il y a cette notion de piste qui -- c'est en fait un bout de route

 18   goudronnée entre deux bâtiments, et c'est là que les prisonniers pouvaient

 19   sortir assez souvent. On appelait cela la "pista".

 20   Q.  Alors, pour que les Juges de la Chambre s'y retrouvent.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce à

 22   conviction P00543, s'il vous plaît.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Cette ligne numéro 24, c'est fatal

 24   définitivement. On n'a pas -- le témoin a dit que les détenus sortaient.

 25   Ils demandaient à sortir sur la "pista", on ne les a pas contraints à

 26   sortir sur la "pista". Ce n'est pas ce qu'il a dit.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kvocka, vous êtes bien d'accord

 28   ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que je viens de dire, c'est eux qui

  2   ont demandé, qui ont supplié de les laisser sortir sur cette espèce de bout

  3   de route.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu dit qu'on faisait sortir les

  5   prisonniers. Or, le témoin lui a dit que c'est les détenus qui avaient

  6   demandé à ce qu'on les autorise à sortir.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, c'est ce que j'ai entendu moi-

  8   même.

  9   Vous pouvez continuer, Madame Sutherland.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Kvocka, vous allez maintenant voir une photo aérienne qui

 12   montre le camp d'Omarska, vous l'avez sur l'écran. L'huissier va vous aider

 13   pour ce qui est de l'utilisation d'un stylet et vous allez nous cerner ce

 14   secteur de la "pista".

 15   R.  Bien, c'est cette espace entre les deux bâtiments. Je viens maintenant

 16   de vous l'indiquer en rouge.

 17   Q.  Vous êtes en train de nous dessiner -- vous avez dessiné un rectangle

 18   entre le bâtiment administratif et le hangar; c'est bien cela ?

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   Q.  Et en premier plan, au premier plan, nous voyons ce qui était

 21   communément appelé la "maison blanche", et il y avait du gazon autour ?

 22   R.  Oui, c'est exact. Il y avait là une maison qui avait ce type de façade.

 23   Et dans mon procès, je sais qu'on avait qualifié cela la "maison blanche".

 24   Mais à l'époque où je me trouvais à Omarska, je n'ai pas entendu parler de

 25   cette maison comme étant la "maison blanche". C'était un bâtiment, une

 26   maison qui était comme tous les autres un bâtiment de ce centre.

 27   Q.  C'est là que les détenus étaient placés ?

 28   R.  Oui. Je me souviens qu'il y a eu plusieurs détenus avoir été gardés là.


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  1   Q.  Et un peu plus bas en direction du coin à droite en direction du

  2   hangar, il y a eu une bâtisse que l'on qualifiait de "maison rouge" ?

  3   R.  Oui, c'est exact. Il y a une construction de couleur rouge là-bas.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je crois

  5   nous n'avons pas besoin de garder cette photographie. Je voulais juste vous

  6   permettre de vous orienter un peu, mais au compte rendu on sait que le

  7   témoin a dessiné un rectangle.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] La Défense voudrait demander un versement au

 10   dossier avec une date et un paraphe.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en dites-vous, Madame Sutherland.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Eh bien, si ça va se produire, ça peut

 13   être versé au dossier comme une pièce à conviction de l'Accusation.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Moi, j'ai voulu économiser une référence,

 16   une cote, mais bon, ça peut devenir une cote de l'Accusation.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Certainement.

 18   Alors, veuillez mettre une date. La date d'aujourd'hui est celle du

 19   20 janvier 2014, et, Monsieur Kvocka, je vous demande de mettre votre

 20   signature dessus.

 21   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute] 

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 23   Q.  Au paragraphe 42 de votre déclaration --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, est-ce qu'on va lui donner une

 25   cote ?

 26   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation] 

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, excusez-moi. Cette pièce à

 28   conviction deviendra la pièce P0063 [comme interprété].


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  2   Q.  Au paragraphe 42, vous dites que vous aviez remarqué 50 hommes couchés

  3   sur leur ventre à cet endroit-là. Vous vouliez dire qu'ils étaient allongés

  4   face contre terre, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Lors des 17 jours que vous avez passés au camp jusqu'à la troisième

  7   semaine du mois de juin 1992, il y a eu un interrogatoire que vous avez

  8   consenti d'avoir avec M. Reid, et vous avez dit qu'il y a eu 300 à 400

  9   personnes sur la "pista" ?

 10   R.  Oui, je pense que ça doit être ce que j'ai dit.

 11   Q.  Vous souvenez-vous de l'avoir dit ?

 12   R.  Oui. Oui, je me souviens de la chose, mais je ne pouvais pas vous

 13   donner de chiffre exact. J'ai dit 300 à 400. Ils pouvaient être 250 aussi.

 14   Ils étaient en bon nombre.

 15   Q.  Monsieur Kvocka, on vous a demandé combien de gens il y avait eu à peu

 16   près sur la "pista", et vous avez répondu "300 à 400". Est-ce que ceci

 17   rafraîchit votre mémoire ? Parce que si ce n'est pas le cas, on peut vous

 18   montrer la page, et vous allez peut-être vous en rappeler.

 19   R.  Je me souviens d'avoir dit quelque chose de ce genre. Je ne me souviens

 20   pas du chiffre exact que j'ai cité, mais je sais que c'est à peu près cela.

 21   Mais j'accepte, ça ne pose pas problème. C'est ce que j'ai gardé en

 22   mémoire.

 23   Q.  Il y avait aussi une mitrailleuse qui était sur le toit du bâtiment

 24   administratif, pointé sur la "pista", n'est-ce pas ?

 25   R.  C'était le cas pendant même pas une journée entière. Donc, ce genre de

 26   sécurité n'était assuré que pendant une journée, même pas entière, comme je

 27   l'ai dit. Et on a abandonné cette idée. Quelques personnes de la Défense

 28   territoriale ont pris cette initiative, vu que la police n'était pas


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  1   présente. Ce soldat, pour ainsi dire, était là avec cette mitrailleuse

  2   parce qu'ils ont évalué qu'il était nécessaire d'assurer un poste de garde

  3   avec une mitrailleuse. Mais je vous affirme que ceci n'a pas duré une

  4   journée entière. J'en suis sûr.

  5   Q.  Des témoins et M. Mijakovic [comme interprété] pensent que la

  6   mitrailleuse était là plus qu'une journée. On vous a posé la question

  7   suivante, c'est M. Reid qui vous pose la question :

  8   "Est-ce qu'il y a eu une mitrailleuse sur le toit du bâtiment administratif

  9   pointé sur la 'pista' ?"

 10   Vous avez répondu :

 11   "Eh bien, c'est possible que cette mitrailleuse était placée sur le toit ou

 12   plutôt sur une petite terrasse qui s'y trouvait.

 13   "Question : Sur le toit ?

 14   "Réponse : Non pas vraiment sur le toit.

 15   "Question : Mais en tout cas, cette mitrailleuse était pointée sur la

 16   'pista', est-ce que vous vous souvenez ?"

 17   Et vous avez répondu :

 18   "Oui. La mitrailleuse --"

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] On a mal traduit la phrase pour le témoin,

 20   parce que dans la question, il y avait été dit -- ou plutôt, dans la

 21   réponse de M. Kvocka, on lui a dit : "Ce n'était pas vraiment sur le toit."

 22   Et ce n'est pas ce qu'on lui a traduit. On lui a traduit l'inverse.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 24   Q.  Donc, Monsieur Kvocka, vous avez dit :

 25   "Pas vraiment sur le toit."

 26   M. Reid a dit :

 27   "Bon, peut-être pas, mais en tout cas, la mitrailleuse était pointée vers

 28   la 'pista'; est-ce exact ?"


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  1   Et vous avez répondu :

  2   "Oui."

  3   Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela ?

  4   R.  Ecoutez, au bout de 15 ans, il m'est difficile de me souvenir des

  5   propos exacts que j'ai tenus à l'époque. Il est exact qu'à un moment donné

  6   une mitrailleuse était placée soit sur le toit, soit juste au-dessous du

  7   toit ou sur la terrasse. En tout cas, sur une position élevée, je ne m'en

  8   souviens pas, mais la différence en ce qui concerne l'altitude entre la

  9   position sur le toit même ou bien sur la terrasse est minime. En tout cas,

 10   cette mitrailleuse pouvait tourner sur un angle de 360 degrés, donc faire

 11   le tour, et le soldat qui était là, eh bien, c'est un soldat qui était là

 12   pour assurer la sécurité de ce centre. Il s'agissait de le protéger, de le

 13   protéger des intrusions éventuelles. Donc, j'imagine que c'est pour cela

 14   que l'on a placé la mitrailleuse à cet endroit-là et à cette altitude-là.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Traduction. Problème d'interprétation. Je ne

 16   suis pas sûr que "l'entrée" doit être vraiment traduit comme "le porche",

 17   vu que la mitrailleuse était là pour contrôler le porche, l'entrée, dans le

 18   centre.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je peux peut-être me rendre utile.

 20   Madame Sutherland, vous en avez encore ? Vous avez encore des questions ?

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, justement, je me suis dite qu'après

 22   cette question, on pourrait peut-être passer à la pause.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous en avez terminé avec ce

 24   thème-là ?

 25   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je ne comprends pas l'intervention de M.

 28   Karadzic quand il dit que "Ce n'était pas l'entrée", parce que l'anglais,


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  1   c'était tout à fait logique, enfin, surtout comparé aux réponses données

  2   par le témoin…

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  4   Nous allons prendre une pause.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je dirais plutôt "l'accès", "l'accès au

  6   centre", plutôt que "le porche", plutôt que "le porche d'entrée". Donc,

  7   c'est plutôt l'accès, tout ce qui entoure le centre pour s'y approcher.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Kvocka, qu'est-ce que vous avez dit exactement ? Est-ce que

 10   vous avez dit que la mitrailleuse a été placée là pour contrôler l'accès au

 11   centre des interrogations, ou bien le porche d'entrée du centre ?

 12   R.  Moi, j'ai dit que cette mitrailleuse était sans doute placée à une

 13   hauteur pour pouvoir contrôler tout ce qui entoure ce centre de tous les

 14   côtés, l'entrée, l'accès, la sortie. Donc tout, tout ce qui entoure le

 15   centre. C'est pour cela qu'il était placé à un endroit élevé. Vu qu'il n'y

 16   avait pas de clôture, parce qu'on avait évolué à l'époque qu'on allait

 17   peut-être essayer d'entrer par infraction dans le centre, c'est pour cela

 18   que la mitrailleuse a été placée à un endroit surélevé.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Je pense qu'il n'y avait pas de

 20   problème, qu'on avait très bien compris le contexte.

 21   Monsieur, nous allons prendre une pause qui va durer une demi-heure. Nous

 22   allons reprendre nos travaux à 11 heures 05.

 23   --- L'audience est suspendue à 10 heures 37.

 24   --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez continuer, Madame

 26   Sutherland.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Kvocka, en ce qui concerne l'eau, la Chambre de première


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  1   instance, dans le paragraphe 57, a conclu que les détenus recevaient l'eau

  2   potable mais que la quantité de l'eau donnée aux détenus n'était clairement

  3   pas suffisante.

  4   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas exactement ce qui a été constaté dans le

  5   jugement. Je pense qu'il y avait suffisamment d'eau, mais il était

  6   difficile de distribuer l'eau à tout le monde en même temps. Donc, il

  7   fallait peut-être attendre un peu. C'est comme cela que j'avais compris la

  8   situation.

  9   Q.  En ce qui concerne l'hébergement, dans le paragraphe 40 de votre

 10   déclaration, vous dites que les conditions qui prévalaient dans le hangar

 11   étaient assez agréables. C'est ce que vous avez dit, n'est-ce pas ? Vous ne

 12   vous êtes pas attardé là-dessus, n'est-ce pas -- enfin, vous n'avez pas

 13   passé beaucoup de temps dans le hangar ?

 14   R.  C'est vrai, je n'y suis entré que quelques fois pour quelques

 15   obligations qui n'étaient pas très importantes. Mais, vous savez, en ce qui

 16   concerne les conditions, vous pouvez en parler de différentes façons. Ce

 17   n'était pas très sale, donc on ne peut pas dire qu'il y avait des dégâts

 18   des eaux, qu'il faisait trop chaud. Donc, dans ce sens-là, les conditions

 19   étaient correctes. D'un autre côté, il n'y avait pas assez de lits. Et là,

 20   on pourrait dire qu'effectivement les conditions n'étaient pas adéquates.

 21   Q.  Dans votre entretien, vous avez dit que vous avez hébergé les gens sur

 22   la "pista" parce que les autres bâtiments étaient trop pleins; c'est ce que

 23   vous avez dit ?

 24   R.  Oui, c'est tout à fait possible qu'on les ait placés sur la "pista",

 25   surtout au moment où il y a eu de grandes arrivées en attendant qu'on

 26   héberge tout le monde. Mais, avec le temps, on a réussi à héberger tout le

 27   monde à l'intérieur de sorte que personne n'a passé la nuit sur la "pista".

 28   Après, il est arrivé que l'on fasse sortir les gens sur la "pista". Et là,


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  1   le souvenir me vient; par exemple, il y a eu des rotations, et parfois les

  2   gens du hangar étaient sortis sur la "pista", et puis d'autres fois on

  3   faisait sortir les gens hébergés ailleurs pour qu'ils passent un peu de

  4   temps quand même à l'air libre, pour respirer de l'air frais.

  5   Q.  Parce que dans le hangar où ils étaient il y avait beaucoup trop de

  6   monde et on pouvait à peine respirer, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, on peut le dire comme cela. Quand vous avez beaucoup de gens dans

  8   un endroit -- bon, évidemment, il y avait des grandes fenêtres, on pouvait

  9   les ouvrir. Alors, est-ce qu'on pouvait respirer ou non, est-ce que la

 10   qualité de l'air était bonne, écoutez, ne me posez pas des questions comme

 11   cela. Je vous dis que les conditions n'étaient pas idéales, mais ce n'était

 12   pas terrible quand même, pas insupportable.

 13   Q.  Vous avez dit qu'il y avait deux toilettes dans le hangar; est-ce exact

 14   ?

 15   R.  Si mes souvenirs sont exacts, oui, il y avait deux ou trois toilettes à

 16   l'entrée du hangar. Donc, à partir du moment où vous êtes déjà entré dans

 17   le hangar, il y avait un petit couloir avec deux ou trois toilettes d'un

 18   côté, deux ou trois de l'autre. Je pense qu'il y avait même deux pièces

 19   avec des détenus aussi à ce niveau-là. Mais il y en avait deux au moins sur

 20   chaque côté du couloir.

 21   Q.  Et donc, des milliers de détenus devaient utiliser cette quantité

 22   limitée de toilettes, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, sans doute qu'ils devaient tous utiliser ces toilettes, oui.

 24   Q.  Il y avait des détenus que l'on a tout simplement placés sur la "pista"

 25   et on les a lavés avec un tuyau d'arrosage ?

 26   R.  Ecoutez, moi, j'ai vu une seule fois que les détenus se soient lavés

 27   sur la "pista", mais ils ont fait cela de leur propre gré. C'est-à-dire

 28   qu'il y avait plusieurs fontaines sur la "pista" où l'eau coulait sans


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  1   arrêt, et je les ai vus se déshabiller jusqu'à la taille et ensuite se

  2   laver avec cette eau. Et puis, autour du bâtiment, il y avait aussi des

  3   réservoirs d'eau utilisés par les pompiers, et je sais que les détenus ont

  4   demandé à utiliser cela pour se laver. Ils s'assoyaient sur l'herbe. Et ils

  5   étaient hébergés aux alentours de ces réservoirs.

  6   Q.  Vous avez dit que les conditions sanitaires à Omarska n'étaient pas

  7   adéquates, pas acceptables ?

  8   R.  Eh bien, pour une situation de paix, une situation normale,

  9   effectivement, ces conditions n'étaient pas acceptables. Mais quand vous

 10   avez une situation de guerre où on ne sait pas qui fait quoi, je ne sais

 11   pas si ces conditions étaient acceptables ou non. Mais en temps normal,

 12   non, ce n'était pas acceptable.

 13   Q.  Vous avez aussi dit que la nourriture fournie aux détenus n'était pas

 14   satisfaisante car ils ne recevaient qu'un repas par jour, et vous avez dit

 15   que la qualité de ce repas n'était pas correcte. Vous en avez parlé, n'est-

 16   ce pas ?

 17   R.  Oui, il n'y avait pas assez de nourriture. Pendant les dix premiers

 18   jours, je pense qu'ils recevaient deux repas par jour. Mais ensuite, on a

 19   été à court de denrées alimentaires de sorte que l'on ne leur donnait qu'un

 20   repas par jour. Je ne sais pas jusqu'à quel moment cela a duré. De toute

 21   façon, il y a eu constante pénurie de nourriture. Vous savez, même les

 22   gardiens, ils pouvaient manger une moitié de bourek par jour, parce que

 23   même eux, ils ne recevaient pas suffisamment de nourriture. Parce que les

 24   territoires autour de Prijedor étaient encerclés, bloqués, de sorte qu'on

 25   n'avait tout simplement suffisamment de nourriture dans la région.

 26   Q.  Vous avez aussi entendu parler de cas de détenus trop malades ou trop

 27   blessés à cause des passages à tabac pour se rendre à la cantine, pour y

 28   prendre un repas. Vous avez été informé de cela, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas d'un cas précis, mais j'ai déjà dit

  2   qu'il y a eu des blessés, qu'il y a eu des malades. J'en ai déjà parlé.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'est peut-être pas très important, mais le

  5   témoin a dit qu'il y a eu la pénurie généralisée de nourriture à l'époque.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. On va continuer.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Kvocka, en ce qui concerne les soins médicaux qui étaient

  9   disponibles, les Juges de la Chambre sont arrivés à la conclusion, au

 10   niveau du paragraphe 63 du jugement, que l'aide fournie par l'équipe

 11   médicale aux milliers de détenus n'était tout simplement pas adéquate.

 12   C'est exact, n'est-ce pas ?

 13   R.  Eh bien, c'est la constatation des Juges de la Chambre, je ne souhaite

 14   pas la juger. Je sais que l'équipe médicale existait, sans doute qu'il n'y

 15   a pas eu suffisamment de personnel au sein de cette équipe. Mais je sais

 16   que le personnel médical venait du centre médical d'Omarska, et il y avait

 17   même un médecin de Prijedor qui venait de temps en temps. Et puis, un

 18   technicien médical venait tous les jours, il apportait des médicaments.

 19   Etait-ce assez ou non…

 20   Q.  Donc, il y a eu des gens qui tombaient malades dans le camp et il y

 21   avait des gens qui avaient besoin de recevoir des soins suite aux passages

 22   à tabac. Tout cela demandait la présence d'un médecin, n'est-ce pas, ou des

 23   soins médicaux ?

 24   R.  Oui, c'est vrai qu'il y a eu des gens qui devaient être soignés. Vous

 25   aviez aussi des gens blessés qui avaient été amenés dans le camp alors

 26   qu'ils avaient été blessés au cours de combats, et puis des gens qui ont

 27   été blessés dans le camp même suite aux incidents que nous avons

 28   mentionnés.


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  1   Q.  Dans le paragraphe 27 de votre déclaration, vous dites, et là je vous

  2   cite :

  3   "En ce qui concerne les conventions de Genève, j'ai reçu une information

  4   par rapport à cela au cours de ma formation dans le cadre de la police."

  5   Mais, en réalité, vous n'avez jamais été formé pour apprendre quelles

  6   étaient les conventions de Genève dans le cadre de l'académie de police ou

  7   ailleurs ?

  8   R.  Oui, c'est vrai que je n'ai jamais été formé particulièrement aux

  9   conventions de Genève. J'ai été formé pour devenir policier, mais je sais

 10   que l'on disait toujours, déjà à l'époque avant la guerre, on disait que

 11   nos lois étaient conformes aux conventions de Genève. Dans ce sens, toutes

 12   les règles en vigueur dans la police étaient conformes aux conventions de

 13   Genève, ce que l'on pensait.

 14   Q.  Vous avez dit que vous n'avez pas reçu de formation particulière. Mais

 15   vous n'avez pas reçu de formation, tout court. Est-ce que vous vous

 16   souvenez de la fin de votre entretien avec M. Reid, parce qu'il vous a

 17   demandé si vous souhaitiez ajouter quoi que ce soit, et vous avez lu une

 18   déclaration préparée à l'avance, et vous avez dit ce qui suit :

 19   "Quatrièmement…," parce que c'était le quatrième paragraphe que vous

 20   avez lu, "…dans l'académie de police comme au cours des autres formations

 21   que j'ai suivies par la suite, nous n'avons pas été formés aux conventions

 22   de Genève. Il n'y avait pas d'obligation pour les policiers de suivre les

 23   conventions de Genève vu que nous travaillions dans des circonstances

 24   complètement différentes."

 25   Donc, là, c'est quelque chose que vous avez lu spontanément, une

 26   déclaration que vous avez préparée à l'avance, et personne ne vous a forcé

 27   à dire cela ?

 28   R.  Mais je viens de vous dire exactement la même chose, nous n'avons pas


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  1   eu de formation particulière aux conventions de Genève, moi comme d'autres

  2   policiers, personne n'a jamais suivi de telle formation. Cela étant dit,

  3   l'on nous a toujours dit que les règles en vigueur pour la police étaient

  4   conformes aux conventions de Genève, de sorte qu'il n'était pas nécessaire

  5   de nous former particulièrement aux conventions de Genève. Donc, je vous

  6   réponds de la même façon que la façon dont j'ai répondu à M. Reid, et je

  7   vous ai déjà répondu comme cela tout à l'heure.

  8   Q.  Mais vous avez dit dans votre déposition que vous pensiez que les

  9   règles des conventions de Genève étaient bien violées et que cela

 10   concernait surtout les conditions de détention. Vous avez dit qu'il était

 11   clair que les conditions n'étaient pas telles qu'elles justifiaient le

 12   traitement reçu. Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela au cours de

 13   votre déposition ?

 14   R.  Sans doute que je l'ai dit. Parce que si l'on pense que chaque détenu -

 15   - que chaque prisonnier, qu'il s'agisse de situation de guerre ou d'un

 16   conflit, doit disposer d'un lit, et nous, nous ne pouvions pas leur fournir

 17   le lit à tous, eh bien, sans doute que certaines règles n'étaient pas

 18   respectées. S'il fallait leur fournir suffisamment de nourriture, et nous,

 19   on ne pouvait pas leur fournir suffisamment de nourriture, eh bien, sans

 20   doute que l'on a violé certaines règles, certaines lois. C'est comme cela

 21   que j'ai regardé la chose.

 22   Q.  Vous avez dit dans le paragraphe 28 de votre déclaration que vous ne

 23   saviez pas si le juge d'instruction avait décidé de libérer les gens du

 24   camp d'Omarska ou bien de les garder. Vous savez que le président de la

 25   cellule de Crise avait donné un ordre interdisant la libération des détenus

 26   de Trnopolje, d'Omarska et Keraterm. Et cela fait partie de la pièce P0215

 27   [comme interprété].

 28   R.  Ecoutez, tout ce que je peux vous dire, c'est qu'au début, après


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  1   l'interrogatoire, l'on a fait partir un groupe de détenus. Après, peut-être

  2   qu'il y a eu encore quelques cas individuels où l'on a libéré des

  3   prisonniers. Puis, après, on a cessé de les libérer. Alors, peut-être que

  4   cela est arrivé par la suite alors que je n'étais plus là. En tout cas,

  5   moi, je n'ai jamais vu cet ordre. On ne me l'a jamais présenté, je ne l'ai

  6   jamais vu, je ne le connais pas.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible de demander au témoin de voir

  8   cet ordre ?

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous répéter, Monsieur Karadzic ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible de demander au témoin de voir

 11   cet ordre ? Concernant Omarska.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je ne pense pas que ceci soit nécessaire.

 13   C'est un ordre du 2 juillet 1992, et j'ai voulu tout simplement voir si le

 14   témoin savait que la présidence de la cellule de Crise avait émis un tel

 15   ordre.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Vous pouvez poursuivre.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 18   Q.  Les Juges de la Chambre de première instance, concernant les

 19   connaissances que vous aviez au sujet des crimes commis, en est arrivé à la

 20   conclusion suivante : vous ne pouvez pas ne pas savoir -- c'est quelque

 21   chose qui figure au paragraphe 384 de votre jugement, qu'un grand nombre de

 22   crimes très différents ont été commis et que les détenus du camp ont subi

 23   des sévices physiques et psychiques de façon systématique. Dans le

 24   paragraphe 385, il est dit que : Les moyens de preuve présentés démontrent

 25   que Kvocka avait des connaissances profondes et détaillées des conditions

 26   qui prévalaient de ces pratiques, des abus, des mauvais traitements, et

 27   qu'il savait que des crimes sérieux étaient commis de façon régulière dans

 28   le camp d'Omarska. Ensuite, au paragraphe 399 [comme interprété] : Il est


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  1   indiscutable qu'il était présent pendant que ces crimes étaient commis. Il

  2   s'agissait de crimes extrêmement violents du point de vue physique et

  3   psychique. Et les victimes de ces crimes étaient la population non-serbe

  4   emprisonnée à Omarska. Il s'agissait de violences de routine. Et en dépit

  5   de ses connaissances, il a continué à travailler au moins 17 jours dans le

  6   camp, et sans se plaindre.

  7   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  8   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me demande s'il est possible vraiment de

 11   répondre à cette question, parce que c'est une question extrêmement

 12   complexe, extrêmement longue. Comment voulez-vous qu'il réponde à cette

 13   question ? Peut-être qu'on pourrait vraiment couper la question en

 14   plusieurs questions ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, je ne suis pas sûr que le

 16   témoin a du mal à comprendre ou répondre à la question, parce qu'il s'agit

 17   tout simplement du résumé du jugement le concernant.

 18   Monsieur Kvocka, est-ce que vous êtes en mesure de répondre à la question

 19   posée ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer. Donc, là, vous citez le

 21   jugement me concernant. Que voulez-vous que je dise à ce sujet ? Je n'ai

 22   rien à dire. Mais j'ai raconté à M. Reid tout ce que j'ai fait. Je l'ai

 23   raconté à M. Reid, je l'ai raconté lors de ma déposition qui a duré six,

 24   sept jours. J'ai toujours dit la même chose. J'ai toujours donné la même

 25   version des événements. Comment voulez-vous que je fasse des commentaires

 26   au sujet de la décision des Juges ? Est-ce qu'ils m'ont cru à 100 % ou bien

 27   est-ce qu'ils ont cru d'autres témoins qui ont dit autre chose ? Moi, je

 28   peux vous dire que je ne suis pas d'accord avec la conclusion, que j'ai


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  1   fait cela de mon propre gré, sciemment.

  2   D'ailleurs, j'ai dit même une fois que j'aurais agi à nouveau

  3   exactement de la même façon, parce qu'il est impossible de vous faire

  4   comprendre à quel point j'ai fourni des efforts pour aider ces gens. Donc,

  5   j'ai agi en toute conscience et je réagirais de la même façon à nouveau si

  6   je me trouvais dans la même situation. Vous avez lu le jugement vous-même,

  7   vous savez ce qui y figure. Je ne peux pas faire de commentaires à ce

  8   sujet.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Kvocka, dans le paragraphe 32 de votre déclaration, vous avez

 11   dit que vous savez qu'il y a eu un certain nombre de mesures disciplinaires

 12   qui ont été entreprises contre des personnes faisant partie du poste de

 13   police d'Omarska. Est-ce que vous pouvez me donner le nom de cette personne

 14   ?

 15   R.  Je sais qu'il y avait deux ou trois cas où Zeljko a essayé d'intenter

 16   une procédure disciplinaire, mais lui, il n'avait pas de pouvoir ni

 17   d'autorité de lancer une procédure disciplinaire.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. Je ne pense pas qu'on

 19   reçoit l'interprétation en anglais. Pourriez-vous répéter votre réponse,

 20   Monsieur Kvocka ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de cette question, je sais

 22   qu'il y avait plusieurs procédures disciplinaires, puisque je sais qu'il y

 23   avait certaines personnes qui ne venaient pas au travail pendant plusieurs

 24   jours puisqu'ils devaient donner des déclarations devant une commission

 25   interne de la police. Je sais que M. Popovic était absent pendant six ou

 26   sept jours. Il ne venait pas au travail pendant cette période de temps-là

 27   en raison de cette procédure disciplinaire. C'est tout ce dont je me

 28   souviens maintenant.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Kvocka, la personne que vous avez mentionnée, M. Popovic,

  3   c'est la personne qui a tué Mehmedalija Nasic, et vous dites qu'une mesure

  4   disciplinaire a été prise, à savoir qu'il était tenu en dehors du camp

  5   pendant quelques jours. C'est ce que vous voulez nous dire, ce que c'était

  6   une mesure disciplinaire pour le meurtre ?

  7   R.  Non. Je sais qu'après cet incident il était absent du camp, et que

  8   Zeljko ou une autre personne a dit qu'une procédure disciplinaire a été

  9   intentée à son encontre, mais je ne sais pas quelle était l'issue de cette

 10   procédure disciplinaire. Et je ne sais pas si la sanction disciplinaire

 11   prononcée était cette absence du camp. Je n'en sais rien.

 12   Q.  Vous avez déposé que vous n'avez jamais entendu parler et que vous

 13   n'avez jamais appris qu'une enquête officielle ait été lancée pour

 14   apprendre ce qui s'est passé dans le camp d'Omarksa. C'est ce que vous avez

 15   dit dans votre témoignage, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui. J'ai dit que jamais je n'ai appris l'issue d'une procédure qui

 17   aurait été menée par rapport à cela, parce que personne n'avait pour

 18   obligation de m'en informer. Et moi, je n'avais même pas le droit à poser

 19   des questions là-dessus.

 20   Q.  Vous avez également dit au paragraphe 33 de votre déclaration que vous

 21   savez que deux ou trois gardes ont été licenciés. Il faut que nous sachions

 22   leurs noms. Pouvez-vous nous dire les noms de gardes qui ont été démis de

 23   leurs fonctions ou licenciés ?

 24   R.  Je ne peux pas me souvenir à présent de leurs noms. Si j'ai dit à

 25   l'époque certains noms lors de ma déposition, ce sont ces personnes-là.

 26   Mais aujourd'hui, je n'arrive pas à me souvenir de leurs noms, puisqu'il y

 27   a eu du changement pour ce qui est du personnel de la police. Il y avait

 28   quelques membres de la Défense territoriale qui aidaient pendant les


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  1   premiers jours et quelques membres d'autres unités.

  2   Q.  Monsieur Kvocka, les autorités serbes n'ont jamais dressé d'actes

  3   d'accusation à l'encontre des personnes qui ont commis des meurtres, des

  4   passages à tabac, des crimes sexuels contre les civils détenus dans le camp

  5   d'Omarska, n'est-ce pas ?

  6   R.  Je ne le sais pas. Je ne sais pas si des procédures ont été lancées à

  7   l'encontre de ces personnes, puisque moi, je ne faisais pas partie du

  8   parquet ou d'un tribunal ou d'un service d'enquête au pénal. Je suis

  9   policier, et c'est tout, et je n'avais pas accès à ces choses-là.

 10   Q.  J'aimerais maintenant qu'on parle du camp de Keraterm. Le massacre qui

 11   a eu lieu dans la nuit du 24 juillet 1992 ou à peu près cette date-là, lors

 12   duquel au moins 150 personnes non-serbes ont été tuées, c'est quelque chose

 13   dont on a beaucoup parlé à Prijedor, n'est-ce pas ? Vous n'avez rien

 14   entendu dire de concret là-dessus, mais vous avez entendu les gens parler

 15   de cela. Cela a été consigné lors de votre entretien ?

 16   R.  Oui. Si j'ai dit cela à l'époque, cela veut dire que j'étais au courant

 17   de cela à l'époque, et je maintiens ce que j'ai dit à l'époque.

 18   Q.  Maintenant, j'aimerais qu'on parle du désarmement de la population non-

 19   serbe. Vous avez entendu à la Radio Prijedor l'ultimatum qui a été lancé

 20   par les autorités serbes pour que les non-Serbes rendent leurs armes,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, pour savoir si j'ai entendu cela à la radio, je ne sais pas. Mais

 23   il y avait des appels qui ont été lancés pour que les armes soient rendues,

 24   et c'était au moment où il était certain que le conflit allait éclater.

 25   Q.  Donc, vous n'avez rien entendu de similaire par rapport à la population

 26   serbe ?

 27   R.  Non. Non, parce que je pense qu'il y avait déjà la prise de pouvoir ou

 28   quelque chose comme cela pour ce qui est de notre région. Concrètement,


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  1   non, non, je n'ai rien entendu comme cela.

  2   Q.  Vous n'avez jamais donné d'ordre de désarmer la population au village

  3   d'Omarska ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Et comme vous avez dit, dans la région où vous viviez à Prijedor, il

  6   n'y avait pas d'appels lancés à la population serbe pour rendre leurs armes

  7   dans cette région-là ?

  8   R.  Non, non, il n'y avait pas d'appels dans ce sens-là.

  9   Q.  Vous avez déjà dit aujourd'hui qu'il y avait des échauffourées et que

 10   des gens étaient blessés lors de ces affrontements armés. Au paragraphe 18

 11   dans votre déclaration, par rapport à l'incident qui a eu lieu au point de

 12   contrôle à Hambarine, vous avez dit que la police a essayé de trouver une

 13   solution et que la police a demandé qu'Oliskovic [phon] soit rendu. Et un

 14   jour ou deux après cet incident, des affrontements ont eu lieu dans ce

 15   village. Pourtant, lorsque ces soi-disant auteurs d'incident n'ont pas été

 16   rendus par la population du village de Hambarine, le village a été attaqué

 17   et pilonné pendant toute la journée et des maisons ont été détruites. Mais

 18   vous avez dit qu'il n'y a pas eu de conflits armés, d'affrontements armés,

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  Je ne sais pas quelle est votre perception des choses. Je sais qu'un

 21   incident a eu lieu, c'est ce que j'ai appris, mais je n'étais pas

 22   participant à cet incident. A Hambarine, un véhicule militaire a été

 23   attaqué, et je pense qu'un soldat ou deux soldats ont été --

 24   Q.  Monsieur Kvocka, vous avez parlé de cela, et ensuite vous avez dit

 25   qu'après cet incident -- c'est cet incident-là pour lequel vous avez dit

 26   qu'il a été demandé à la population de Hambarine qu'ils rendent Oliskovic,

 27   et puisque cela n'est pas arrivé, un jour ou deux après l'incident, il y

 28   avait eu des affrontements dans ce village. Je vous dis que les


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  1   affrontements dont vous parlez étaient une attaque militaire contre le

  2   village, et le pilonnage a duré une journée. Il y avait des pilonnages. Il

  3   s'agissait d'une attaque militaire qui a été exécutée par les autorités

  4   serbes contre le village de Hambarine.

  5   R.  Je sais qu'une action a été lancée par, je pense, même la police et

  6   l'armée de concert - je pense qu'il s'agissait d'une action de ces deux

  7   forces - pour capturer les auteurs de cette attaque et pour les arrêter. Je

  8   ne sais pas quelle était l'intensité de ces conflits, ou je ne sais pas non

  9   plus s'il y a eu un affrontement puisque je n'ai pas participé à cela. On

 10   disait que les gens se retiraient vers Kurevo [phon] ou vers une région

 11   dans les montagnes. Mais je ne sais pas, je ne connais pas les détails de

 12   ce conflit, et je ne sais pas d'ailleurs comment l'appeler, conflit,

 13   affrontement. Je ne sais que l'action a été lancée pour arrêter les auteurs

 14   de l'incident qui ne se sont pas rendus après que l'ultimatum ait été

 15   décrété.

 16   Q.  Ensuite, au paragraphe 19 dans votre déclaration, vous parlez de

 17   Kozarac et vous dites qu'un conflit s'est produit là-bas. Et, encore une

 18   fois, après cet incident sur la route reliant Banja Luka à Prijedor, une

 19   attaque militaire planifiée a été lancée contre le village de Kozarac, qui

 20   était déjà pilonné depuis deux jours. Après quoi, la population musulmane a

 21   été rassemblée, des hommes, des enfants et des femmes -- des femmes, des

 22   enfants et des personnes âgées ont été séparés des hommes et ont été amenés

 23   à Trnopolje, et les hommes à Omarska. N'est-ce pas ?

 24   R.  Je ne sais pas s'ils ont été amenés tout de suite au camp d'Omarska de

 25   cet endroit-là. Mais je pense qu'à l'époque où l'attaque contre Kozarac a

 26   été lancée, le centre d'enquête n'existait même pas. Mais, encore une fois,

 27   je vous dis que je n'ai pas participé à cette action et je ne peux pas

 28   parler de cela. Je sais qu'il n'y a pas eu de conflit, mais il y avait une


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  1   action militaire. Il y avait un affrontement au point de contrôle établi

  2   par l'armée musulmane s'appelant les Bérets verts pour arrêter une colonne

  3   militaire qui partait de Banja Luka ou vers Banja Luka, je n'en sais rien.

  4   Et je sais qu'une action a été lancée, et il y avait des

  5   affrontements probablement, puisqu'il y avait des victimes.

  6   Q.  Monsieur Kvocka, ce n'était pas au point de contrôle à Kozarac ou près

  7   de Kozarac. C'était sur la route près de Jakupovici. Et, en réponse,

  8   c'était le pilonnage du village de Kozarac.

  9   R.  Il ne faut pas qu'on soit aussi précis. La route près de Jakupovici --

 10   Jakupovici, c'est un hameau qui fait partie d'une région ou d'un village

 11   qui s'appelle Kozarac. Ce hameau se trouve à une distance de 3 kilomètres

 12   du centre de Kozarac. J'ai entendu parler de cela. Il ne faut pas que vous

 13   me posiez des questions portant sur les détails de tout cela parce que vous

 14   allez conclure que je ne vous dis pas la vérité.

 15   Q.  Donc --

 16   R.  Il y avait ce conflit, il y avait cette action militaire et il y avait

 17   les prisonniers.

 18   Q.  Donc, n'essayons pas de retrouver des personnes qui auraient pu être

 19   impliquées à l'incident qui s'est produit au hameau de Jakupovici, mais

 20   parlons et appelons cela attaque armée planifiée contre une agglomération

 21   civile.

 22   R.  Je ne peux pas confirmer cela. C'est peut-être votre constatation. Mais

 23   je ne sais pas si cela a été planifié ou pas, je ne sais pas si c'était

 24   l'attaque contre les civils ou les Bérets verts, je n'en sais rien. Je ne

 25   crois pas que qui que ce soit aurait attaqué la population civile sans

 26   aucune raison. Mais je vous dis encore une fois, je n'ai pas participé à

 27   ces événements et je n'ai pas disposé d'information importante là-dessus ou

 28   directe.


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  1   Q.  Bien. Je veux maintenant qu'on parle du nettoyage d'une autre localité

  2   en juillet 1992. Par rapport à cette opération qui a eu lieu dans la région

  3   de Brdo, qui est au sud de Prijedor. Donc, par rapport à cette opération du

  4   nettoyage des non-Serbes, la police militaire et ainsi qu'un peloton

  5   d'intervention de la police ont pris part à cette opération, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est ce qu'on disait. On disait qu'une action était lancée pour

  7   arrêter les personnes qui avaient participé à l'incident de Hambarine et

  8   qui se sont retirées dans la région de Brdo. Mais tout cela, c'est Brdo. Il

  9   y a également un endroit qui s'appelle Brdo Kurevo. Hambarine appartient à

 10   cette région également. Et je me souviens qu'on parlait de cette action

 11   dont le but était d'arrêter des personnes qui ont lancé l'attaque, parce

 12   que je pense que lors de la première action les assaillants n'ont pas été

 13   arrêtés.

 14   Q.  Au paragraphe 39 dans votre déclaration, vous avez mentionné Fikret

 15   Kadiric, qui est ancien commandant du poste de police de Prijedor. Et vous

 16   dites que lorsque vous vous êtes rendu au travail, vous avez vu deux

 17   policiers qui l'ont fait monter dans une voiture, et vous pensez qu'il a

 18   été arrêté à ce moment-là, mais vous avez dit également que vous ne saviez

 19   pas pourquoi ils l'ont amené et où.

 20   Maintenant, je ne veux pas que vous relatiez à nouveau l'incident tout

 21   entier, mais il est vrai, n'est-ce pas, que vous étiez là-bas au moment où

 22   deux hommes, Ranko Kovacevic et un autre qui s'appelle Brane Cvijic, ont

 23   arrêté cet homme, et ils l'ont emmené à bord d'une voiture au poste de

 24   police de Prijedor, n'est-ce pas ? Vous êtes parti avec eux à bord de la

 25   même voiture, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, c'est vrai.

 27   Q.  Vers la fin de l'année 1992, pendant vos activités quotidiennes à votre

 28   poste de policier, vous ne voyiez plus de Musulmans à Prijedor, n'est-ce


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  1   pas ?

  2   R.  On ne peut pas dire ainsi, puisqu'il y avait des Musulmans à Prijedor,

  3   il y en a même aujourd'hui et pendant toute cette période-là pendant

  4   laquelle je vis à Prijedor. Donc, la période de temps à laquelle vous avez

  5   fait référence, pendant cette période de temps-là, je voyais beaucoup de

  6   Musulmans à Prijedor. Je les fréquentais. Je les aidais lorsqu'ils

  7   n'osaient pas sortir pour aller dans un café. Ils me rappelaient pour leur

  8   faire accompagner.

  9   Q.  Monsieur Kvocka, M. Reid vous a dit lors de l'entretien :

 10   "Mais pendant vos activités quotidiennes en tant que policier, est-ce que

 11   vous avez continué à voir les Musulmans dans la ville de Prijedor ?"

 12   Et on parle là de la fin de l'année 1992. Il vous a demandé de donner votre

 13   estimation du nombre de Musulmans dans la municipalité de Prijedor, et vous

 14   avez dit que vous ne saviez pas quel était le nombre de la population

 15   musulmane. Ensuite, il vous a dit :

 16   "Pour ce qui est de vos activités quotidiennes, pouvez-vous nous dire si,

 17   pendant cette période de temps-là, vous avez continué à voir les Musulmans

 18   dans Prijedor ?"

 19   Vous avez répondu :

 20   "Non, il y avait des départs des Musulmans à l'époque organisés par la

 21   Croix-Rouge. Il n'y avait pas de problèmes là-dessus. C'était évident."

 22   Et M. Reid vous a posé la question suivante :

 23   "Il s'agissait des départs des Musulmans de la municipalité de Prijedor

 24   [comme interprété]."

 25   Votre réponse :

 26   "Oui."

 27   Question de M. Reid :

 28   "Pourquoi partaient-ils ?"


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  1   Vous avez dit en répondant à cette question :

  2   "Il n'y avait aucune chance ou aucun avenir pour eux. Pas d'emploi. Rien.

  3   Ils n'étaient pas sûrs non plus d'être en sécurité, et d'autres raisons

  4   similaires, les raisons similaires que j'ai mentionnées."

  5   Maintenant, est-ce que vous vous souvenez d'avoir dit cela lors de cet

  6   entretien ?

  7   R.  Oui, c'est ce que j'ai probablement dit, ce qui n'est pas en

  8   discordance avec la phrase précédente. Je voyais les Musulmans, et le fait

  9   qu'il y en a eu qui partaient avec l'aide de la Croix-Rouge vers les pays à

 10   l'ouest, c'était tout à fait humain. Ils n'osaient pas sortir dans les rues

 11   de la ville, et c'est pour cela qu'on ne les voyait pas beaucoup. Mais il

 12   n'est pas vrai, ce que vous venez de dire, qu'il n'y ait pas eu du tout de

 13   Musulmans dans la ville, ou beaucoup.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que j'ai

 15   utilisé le temps qui m'a été imparti. J'aimerais, si c'est possible,

 16   obtenir quelques minutes de plus pour poser des questions portant sur un

 17   autre sujet.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De combien de temps vous avez encore

 19   besoin ?

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Juste quelques minutes, Monsieur le

 21   Président. J'aimerais poser des questions concernant deux sujets distincts.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Vous avez cinq minutes.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Kvocka, au paragraphe 10 de votre déclaration, vous avez dit

 25   qu'étant donné que les voies de communication étaient coupées et que le

 26   corridor a été établi seulement vers la fin de 1992, il n'y avait plus de

 27   contact entre le centre de rassemblement et d'enquête et le MUP de la RS.

 28   Vous n'êtes pas expert en communication, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Je ne suis pas expert en communication, mais je sais que je ne pouvais

  2   pas partir de Banja Luka nulle part, ou je ne pouvais aller jusqu'à Sanski

  3   Most seulement.

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   R.  Je ne pouvais pas me rendre à Belgrade, par exemple. Quand j'ai dit

  6   cela, j'ai fait référence à ces problèmes-là, mais je ne suis pas expert en

  7   communication.

  8   Q.  Mais il y avait des communications entre le CSB de Banja Luka et le MUP

  9   de la RS, puisque la Chambre de première instance a entendu des éléments de

 10   preuve là-dessus.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais attirer votre attention sur la

 12   pièce P2743, paragraphe 10. Le témoin, qui était expert en communication, a

 13   dit qu'il y avait toujours une sorte de communication, dans la pièce P2760,

 14   et c'est le rapport du MUP de la RS du 29 juin 1992 pour la période allant

 15   du mois d'avril jusqu'au mois de juin 1992, où il est dit que le ministère

 16   de l'Intérieur --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. De temps en temps,

 18   j'ai l'impression qu'il y a trop de références et que l'attention du témoin

 19   est attirée sur ce nombre excessif de références. Pourquoi ne pas poser la

 20   question au témoin pour savoir s'il y a eu des communications ?

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous savez qu'il y avait des communications entre le CSB de

 23   Banja Luka et le MUP de la Republika Srpska ?

 24   R.  Non, non, entre Banja Luka et la RS ? Je n'en sais rien. J'ai parlé des

 25   communications allant de Prijedor vers Banja Luka. Donc, cette route était

 26   accessible. Il n'y avait aucun obstacle et les lignes téléphoniques étaient

 27   en fonction parfois lorsqu'il y avait de l'électricité. Mais il y avait

 28   rarement de l'électricité à l'époque. J'ai parlé de ces communications.


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  1   Pour ce qui est d'aller de Banja Luka à ailleurs, je sais que,

  2   physiquement, on ne pouvait pas se rendre ailleurs. Mais je ne sais pas si

  3   d'autres types de communication pouvaient être établis à l'époque.

  4   Q.  Et finalement, Monsieur Kvocka, vous avez dit au paragraphe 73 dans

  5   votre déclaration, que Drljaca a été démis de ses fonctions en 1993, et

  6   ceci pour des raisons politiques. Vous savez, n'est-ce pas, qu'il a été

  7   nommé conseiller du ministre au MUP de la RS, et peu de temps après cela,

  8   il est devenu adjoint au ministre dans le MUP de la RS. Est-ce que vous le

  9   savez ?

 10   R.  Je ne sais que, et c'était probablement en 1993, qu'il y avait donc des

 11   tensions politiques et que Simo Drljaca était démis de ses fonctions au

 12   poste du chef du poste de sécurité publique. Et là, j'entends la première

 13   fois qu'il a été nommé conseiller du ministre. Je sais que je le voyais

 14   souvent et je n'avais pas l'impression qu'il travaillait quelque part.

 15   C'était mon impression. J'entends la première fois ici qu'il était

 16   conseiller au ministère à l'époque, et je sais qu'après la formation du

 17   centre du service de sécurité en 1994 ou 1995, il a été à nouveau nommé

 18   chef du centre. C'est tout ce que je sais pour ce qui est de la carrière de

 19   Simo à l'époque.

 20   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

 21   Président. Merci beaucoup.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 23   Monsieur Karadzic, avez-vous des questions supplémentaires à poser à ce

 24   témoin ?

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci.

 26   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 27   Q.  [interprétation] Monsieur Kvocka, à la page 55 il a été dit qu'il

 28   s'agissait d'une attaque contre une agglomération civile. Est-ce que


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  1   Kozarac était une zone complètement démilitarisée, est-ce qu'il s'agissait

  2   d'une agglomération civile, d'une zone civile ?

  3   R.  Lorsque je parlais de cette attaque, et il s'agit probablement de ce

  4   que j'ai dit à l'époque en utilisant ces mots, il était question de

  5   l'ultimatum. Il y avait probablement un ultimatum pour reddition des armes.

  6   Mais auparavant, à Kozarac, il y avait des unités et j'ai vu des listes

  7   lors de mon procès, des listes des membres des Bérets verts et de la

  8   Défense territoriale, et cetera. Il y avait des vidéos montrant des

  9   pharmacies souterraines, des casemates, et cetera. Donc, il y avait une

 10   force armée, je ne sais pas de quelle taille, petite, moyenne ou grande,

 11   mais je sais qu'il y avait des policiers d'appartenance ethnique musulmane

 12   qui étaient partis d'autres postes de police qui faisaient partie de cette

 13   force armée. C'est tout ce que j'en sais.

 14   Q.  Merci. A la page 52 et à la page 53, il a été avancé qu'il ne

 15   s'agissait pas de conflit, mais plutôt d'une attaque unilatérale de

 16   l'armée. Est-ce que les Serbes, pendant ces attaques de l'armée, essuyaient

 17   des pertes dans leurs effectifs ?

 18   R.  Je n'ai pas participé directement à cela, mais je sais qu'on disait

 19   qu'il y avait des soldats qui avaient été blessés du côté serbe et même

 20   parmi les membres de la JNA qui se retiraient à l'époque.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher le

 22   document de la liste 65 ter, qui porte le numéro 17760. C'est peut-être la

 23   page suivante. Puisque moi je ne dispose pas de cette page. 65 ter 17760,

 24   c'est le numéro du document. Oui, c'est cela.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Il s'agit d'une dépêche émanant du poste de sécurité publique de

 27   Prijedor, qui porte la date du 26 mai. Dites-nous s'il est dit ici que

 28   Banja Luka est informé du fait qu'à Prijedor il y a toujours des activités


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  1   de guerre, et ensuite, il est expliqué quelles actions ont été lancées dans

  2   quelles communautés, Kozarac, Kozarusa, Kamicani et Trnopolje, et trois

  3   membres de l'armée de la Republika Srpska ont péri dans ces attaques, et

  4   cetera ?

  5   R.  C'est ce qui est écrit dans le rapport de Simo Drljaca envoyé au chef

  6   du centre de service de sécurité portant sur l'action qui était toujours en

  7   cours au moment de l'envoi du rapport.

  8   Q.  Merci. Est-ce que dans ce moment-là Omarska existait ?

  9   R.  Je pense que non. Non. Non, Omarska n'existait pas à ce moment-là. Il y

 10   avait peut-être des personnes capturées lors de cette action qui, quelques

 11   jours plus tard, ont été emmenées à Omarska, qui était en formation.

 12   Q.  Ensuite, il est dit qu'il y a des informations concernant le massacre

 13   perpétré sur la population musulmane innocente. Qui était la population

 14   musulmane là-bas aux alentours de Prijedor ? Des Croates, des Ukrainiens,

 15   et qui d'autres ?

 16   R.  Il y avait des Croates et des Ukrainiens dans cette zone, des Roms, des

 17   Musulmans. Cela veut dire les Musulmans. Il y avait peut-être d'autres

 18   personnes, mais il s'agissait des Croates et des Musulmans qui n'étaient

 19   pas non-serbes à Prijedor et qui faisaient donc la plus grande partie de la

 20   population, et les autres étaient des minorités.

 21   Q.  Merci. Regardez la fin du troisième paragraphe où il est dit qu'il y a

 22   700 réfugiés et 168 capturés. Pouvez-vous nous dire quelle est la

 23   différence entre 168 personnes capturées et 700 personnes réfugiées ?

 24   R.  Ces personnes ont été capturées lors de cette action, lors de ce

 25   conflit, et ces autres personnes, on les a donc hébergées. J'ai

 26   l'impression que ces civils sont arrivés devant la salle à Prijedor. Et mon

 27   épouse, avec d'autres collègues du travail, est allée là-bas pour amener

 28   quelques-unes de ces personnes chez moi, dans notre appartement.


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  1   Q.  Ensuite, on voit que 600 fusils ont été saisis, et cetera. Pouvez-vous

  2   nous dire, pour ce qui est de ce conflit qui a commencé le 24, où partaient

  3   les civils de Kozarac ?

  4   R.  Pendant la première attaque, je sais que les civils influaient devant

  5   le bâtiment où se trouvait la salle de sport de leur propre gré. Et plus

  6   tard, vers Trnopolje. Le plus grand nombre de civils se rendaient vers

  7   Trnopolje.

  8   Q.  Comment expliquez-vous que les civils musulmans de la zone des combats

  9   se sauvaient pour arriver à Prijedor ?

 10   Qui tenait le pouvoir dans la ville de Prijedor ?

 11   R.  Les Serbes ont pris le pouvoir ou les membres du SDS. Je ne sais pas

 12   comment formuler cela. Mais le 30 avril, il y a eu la prise de pouvoir à

 13   Prijedor, donc un mois auparavant, donc à Prijedor à ce moment-là, c'était

 14   les Serbes qui tenaient le pouvoir.

 15   Q.  Et les civils de la zone des combats, y compris ces 700 personnes et

 16   les personnes de Kozarac, se sont rendus à Prijedor pour trouver refuge

 17   dans la ville de Prijedor, où les Serbes tenaient le pouvoir ?

 18   R.  Oui, c'est le fait, ils sont arrivés à Prijedor.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut verser au dossier ce document

 20   ?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, qu'est-ce que vous en

 22   dites ?

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pas d'objection.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons l'admettre.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce D4220, Madame,

 26   Messieurs les Juges.

 27   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine anglaise : le témoin et

 28   l'accusé peuvent-ils ralentir et ménager une pause entre les questions et


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  1   réponses, s'il vous plaît. Merci.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Quelle a été l'attitude de la police vis-à-vis des paramilitaires ?

  4   Est-ce que le côté serbe avait des paramilitaires à Prijedor ?

  5   R.  Je dirais qu'il y avait des renégats qui n'étaient pas sous le contrôle

  6   de la police régulière et des formations militaires. C'étaient des groupes

  7   assez restreints ou des personnes, mais en fait ils étaient constamment en

  8   conflit avec les autres. Je pense que les organes militaires avaient essayé

  9   de régler cela d'une façon ou d'une autre. Il y a eu plusieurs activités à

 10   cet égard.

 11   Q.  Merci. Et qu'en est-il des Serbes qui possédaient des armes

 12   illégalement ou qui faisaient le commerce d'armes illégalement ? Comment

 13   les a-t-on traités ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'y a pas d'objection de la part de

 15   l'Accusation, mais je ne suis pas sûr que cette question a été abordée.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je me suis levée, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Très bien.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Nous n'avons pas non plus parlé des

 19   paramilitaires.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passez à un autre sujet, s'il vous

 21   plaît, Monsieur Karadzic.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  A la page 51 du compte rendu d'aujourd'hui, on vous a suggéré que seule

 24   la population non-serbe avait dû remettre ces armes, et on a demandé au

 25   témoin si cet appel avait également été lancé aux Serbes. Ce que j'essaie

 26   de déterminer ici c'est de savoir si cela impliquait les armes qui étaient

 27   possédées de façon légale ou illégale, et si les Serbes possédaient des

 28   armes illégalement, si c'est le cas, comment a-t-on traité ces Serbes ? Je


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  1   pense que cette question a été abordée lors du contre-interrogatoire.

  2   Donc, d'un point de vue plus général, Monsieur Kvocka, est-ce que vous

  3   pourriez nous dire pourquoi des Serbes étaient détenus à Omarska ?

  4   R.  Tout d'abord, lorsque l'on parle d'appels à remettre ces armes, il ne

  5   s'agissait pas de remise d'armes en tant que telle. En fait, il y avait des

  6   Serbes qui avaient participé au commerce illégal d'armes et qui avaient été

  7   arrêtés. J'en ai parlé tout à l'heure, on les a détenus là-bas à Omarska

  8   parce qu'il n'y avait pas d'autre endroit pour les emprisonner. Quand j'y

  9   étais, j'y ai vu une femme et deux hommes. Je ne sais pas ce qui s'est

 10   passé par la suite.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on montrer la pièce D1481 au témoin, s'il

 12   vous plaît.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que les Musulmans et les Serbes ont répondu à ces appels, appels

 15   lancés par la Défense territoriale et l'armée ? En d'autres mots, qui avait

 16   des militaires et qui avait des paramilitaires ?

 17   R.  D'un point de vue général, l'armée musulmane était constituée de

 18   paramilitaires, et l'armée serbe était une armée légale pendant cette

 19   période.

 20   Q.  Je vous prie de regarder ce rapport qui a été rédigé le 18 mai 1992.

 21   Pourriez-vous nous expliquer ce qu'il y est dit s'agissant de l'existence

 22   d'unités armées à Ljubija, Donja Ljubija, Carakovo, Kozarac et Kovecka

 23   [phon]. En quoi ces informations correspondent-elles à ce que vous saviez

 24   et pourquoi a-t-on demandé à ces groupes de se désarmer ?

 25   R.  Les communes locales à majorité croate ou musulmane avaient organisé

 26   leurs propres unités militaires qui n'étaient pas légales. Comme Mme le

 27   Procureur l'a dit, un ultimatum a été lancé, ultimatum pour remettre les

 28   armes. Les armes ont ensuite été saisies. Et certaines personnes ont rendu


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  1   leurs armes. Je me souviens de quelques détails de cette remise des armes

  2   plutôt dans des villes que dans des villages, parce que les villages n'ont

  3   pas rendu leurs armes facilement.

  4   Q.  Merci. Qu'est-il arrivé aux personnes qui ont rendu de façon volontaire

  5   leurs armes ?

  6   R.  Elles ont reçu un récépissé, et les armes ont été stockées dans le

  7   bâtiment du commissariat.

  8   Q.  On a aussi posé des questions sur les autorités, ou, plutôt, la police

  9   et son comportement vis-à-vis de ceux qui n'avaient pas respecté la loi ou

 10   qui avaient enfreint les règles de discipline.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 18996. Nous

 12   n'avons pas de traduction, mais nous allons demander au témoin de nous

 13   aider à comprendre ce document.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je préfèrerais que M. Karadzic pose une

 16   question avant de montrer le document.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, effectivement.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que je l'ai déjà fait.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Je voulais savoir quelle était l'attitude de la police officielle, et

 21   vous êtes un policier professionnel, de métier, donc quelle était

 22   l'attitude de la police officielle vis-à-vis des officiers de police qui ne

 23   respectaient pas les règles et 

 24   règlements ?

 25   R.  Officiellement, le point de vue de la police était toujours le même,

 26   c'est-à-dire qu'il n'y avait aucune infraction à la discipline qui était

 27   permise et les règles du service devaient être respectées. Et ça a toujours

 28   été le point de vue qui prévalait pendant toutes les discussions. Ces


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  1   règles ont été répétées également aux nouvelles recrues qui avaient rejoint

  2   la police sans avoir suivi une instruction particulière.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons le document 18296 de la liste 65 ter

  4   à présent.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de voir ce document, est-ce que

  6   vous pouvez poser une question précise au témoin, s'il vous plaît ?

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Alors, je vais essayer. Est-ce que la police dans son organisation

  9   permettait des infractions aux règles de discipline et des violations des

 10   règles de service de ses membres ? Quel était le point de vue de la police

 11   à cet égard ?

 12   R.  Je pense qu'il n'a jamais été permis ce genre de chose, même pendant

 13   les périodes de trouble. Et ceux qui ont violé les règles ont été

 14   poursuivis. Je ne peux pas vous donner davantage de détails parce que je

 15   n'ai pas participé à ces questions-là. Mais, en ce qui me concerne, je ne

 16   pense pas que qui que ce soit ait jamais dit qu'il était permis

 17   d'enfreindre les règles. On a toujours répété qu'il fallait respecter les

 18   lois, les règles qui prévalaient, c'est-à-dire nos propres règles au sein

 19   de la police.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, votre question était

 23   de savoir si la police, dans sa structure, dans son organisation,

 24   permettait des violations des règles de service et des infractions à la

 25   discipline, et cetera, et le témoin vous a répondu non. Pourquoi avons-nous

 26   besoin d'un document ? Je ne vois pas en quoi nous avons besoin d'un

 27   document à présenter au témoin. Quel est le fondement ?

 28   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, cela veut-il dire


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  1   qu'il y a des problèmes liés à la crédibilité du témoin --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non. J'ai demandé à M. Karadzic de

  3   poser quelque question supplémentaire sur le document qu'il voudrait

  4   présenter.

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, s'il est établi que

  6   les autorités n'avaient pas de politique disant qu'il n'était pas toléré de

  7   violer ces règles et qu'ensuite il présente un document qui explique quelle

  8   était la politique, quel est le problème --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre, je

 10   comprends tout à fait ce que vous voulez dire, mais ce que je demande à M.

 11   Karadzic, c'est de poser des questions plus précises sur le contenu du

 12   document qu'il veut montrer, pour savoir si le témoin peut répondre à la

 13   question ou pas, et ensuite nous pouvons montrer le document au témoin.

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Je pense que nous sommes désavantagés à la

 15   fois par le fait que le document n'a pas été traduit, donc nous ne

 16   connaissons pas son contenu précisément. Mais d'après ce que j'ai vu de la

 17   description du document, il semble qu'il s'agisse d'une déclaration de la

 18   police ou des autorités. Il s'agit d'une directive, je crois.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vu les circonstances, je vais permettre

 20   à l'accusé de continuer. Mais pouvez-vous lui conseiller qu'à l'avenir il y

 21   a une procédure à suivre.

 22   Continuons.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Désolée, Monsieur le Président, j'ai des

 24   traductions de ce document.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces traductions ne se retrouvent pas

 26   dans le prétoire électronique.

 27   Mme SUTHERLAND : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mettons-le sur le rétroprojecteur alors.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur l'Huissier.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuons.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] La version serbe se trouve dans le prétoire

  4   électronique. Peut-on afficher la version serbe, s'il vous plaît, il s'agit

  5   du document 18296 de la liste 65 ter. Nous n'avons pas besoin de deux

  6   versions en serbe; une suffira.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Ce document a été délivré par le poste de sécurité publique à Prijedor

  9   le 11 mai. Il explique ce qu'il est arrivé à Banja Luka le 6 mai lors d'une

 10   réunion du conseil du centre des services de Sécurité; vous pouvez le

 11   confirmer ?

 12   R.  Oui. Oui, je le vois dans l'en-tête.

 13   Q.  Très bien. Je vais sauter les premiers paragraphes et me concentrer sur

 14   le paragraphe 9, où l'on dit :

 15   "Les travailleurs qui participent à des activités illégales au sein du

 16   poste de sécurité publique, s'ils existent, seront exclus de leur travail

 17   et seront poursuivis."

 18   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine anglaise : M. Karadzic

 19   peut-il répéter sa question, s'il vous plaît, qui n'a pas été entendue.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Pouvez-vous répéter votre

 21   réponse.

 22   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine anglaise : M. Karadzic

 23   peut-il répéter sa question.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avons-nous besoin de cette question ?

 25   Oui, effectivement, Monsieur Karadzic, après avoir donné lecture de

 26   cette phrase, quelle était votre question ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Peut-être que j'allais trop vite.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Je vais répéter ma question : est-ce que vous étiez au courant du point

  2   de vue du MUP dans votre région sur le comportement criminel des membres du

  3   MUP ?

  4   R.  Oui, j'avais commencé à répondre et je vous disais que ce point de vue

  5   était bien connu. Je voudrais ajouter qu'on nous avait dit cela même avant

  6   que cette conclusion soit couchée sur papier, même avant cette réunion,

  7   même avant que ces discussions n'aient eu lieu à la réunion. Je pense qu'on

  8   nous l'a dit à plusieurs reprises lors de rencontres, qu'il fallait mettre

  9   le doigt sur ce genre de comportements, l'interdire et poursuivre les

 10   auteurs, et que s'il y avait la moindre faille dans le travail de la

 11   police, il fallait l'empêcher, en particulier si des membres de la police

 12   avaient participé à des activités criminelles.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons à présent le paragraphe 25, qui se

 15   trouve à la page suivante.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous l'avez en anglais, le

 17   paragraphe 25 ?

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Il y est dit : S'agissant du désarmement sur le territoire du service

 20   de la sécurité publique, aucune mesure ne sera prise jusqu'à nouvel ordre.

 21   Monsieur Kvocka, est-ce que cela veut dire que le 11 mai, votre poste de

 22   sécurité publique était encore en train d'essayer de procéder au

 23   désarmement ?

 24   R.  Oui, c'est ce qu'on dit ici. Il n'y avait pas d'activité sur le terrain

 25   s'agissant du désarmement, que je sache.

 26   Q.  Pourquoi et quand le besoin s'est-il fait sentir de procéder au

 27   désarmement ?

 28   R.  Eh bien, il y a eu quelques incidents, quelques événements. Des


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  1   attaques, en fait, sur des membres de la police et de l'armée, et c'est à

  2   ce moment-là que des ultimatums ont été lancés. C'est comme cela que la

  3   chronologie des événements a eu lieu.

  4   Q.  Merci.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je suis sûre qu'il

  7   s'agit déjà d'une pièce à conviction. J'essaie de retrouver la cote. Je

  8   crois que c'est une pièce à charge.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Mais nous parlons des deux

 10   premières pages, étant donné que sous cette cote nous avons plusieurs

 11   documents séparés.

 12   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lui assigner une cote

 14   provisoire, pièce de la Défense, pour les deux premières pages.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce D4221.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je crois que nous n'avons plus besoin du

 18   rétroprojecteur.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Kvocka, vous avez dit que le 11 mai, et nous l'avons vu dans

 21   le document, il n'y avait pas cette intention de la part des autorités, et

 22   vous dites que le besoin de désarmer la population s'est fait sentir après

 23   les événements.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on montre au témoin le

 25   document 18320 de la liste 65 ter.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Il y a quelques instants, vous avez dit que plusieurs personnes avaient

 28   remis leurs armes et qu'il n'y a pas eu de problèmes pour ces gens-là. Dans


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  1   quels villages cela a-t-il eu lieu ?

  2   R.  Je sais que la plupart du temps c'étaient des gens qui habitaient dans

  3   des zones urbaines et que la remise des armes s'est faite de façon

  4   volontaire. Maintenant, je n'en suis pas sûr à 100 %, mais je pense que

  5   dans un village qui s'appelait Cela, il y a également eu remise des armes

  6   de façon organisée une fois que la procédure de remise avait commencé. Je

  7   ne pense pas qu'il y ait eu de conflits. En tout cas, pour ce village, je

  8   sais qu'il n'y a pas eu de morts ni quoi que ce soit.

  9   Q.  Merci. Regardons ce document à présent, il est daté du 5 juillet 1992.

 10   C'est Prijedor qui fait rapport à Banja Luka sur le plan de désarmement.

 11   Après les événements du 22, on nous dit dans le document qu'il y a eu un

 12   conflit. Au paragraphe 3, il est dit :

 13   "Une fois que la situation s'est calmée, la police et la police militaire

 14   ont mené des opérations conjointes de nettoyage à Trnopolje, Suhi Brod,

 15   Cela, Gomjenica, Donja et Gornja Puharska. Pendant ces opérations, les

 16   citoyens ont réuni des armes de leur propre gré et ils les ont remises à

 17   l'armée et à la police."

 18   Alors, les endroits qui sont mentionnés au paragraphe 3, ont-ils été

 19   attaqués ?

 20   R.  Ces endroits dont on parle ici n'ont pas été attaqués. Mais il y a deux

 21   Gomjenica, une Gomjenica serbe -- et je vois qu'il n'y avait pas de conflit

 22   armé là-bas, mais il n'y avait pas eu de désarmement qui ait eu lieu là-bas

 23   non plus, ni quoi que ce soit.

 24   Q.  Merci. Ensuite, une liste est dressée dans ce document reprenant les

 25   types d'armes qui ont été remises, c'est au point 7. On nous dit :

 26   "Notre poste a enregistré les armes suivantes et les munitions suivantes

 27   qui ont été saisies et rassemblées."

 28   Donc, là, nous avons le nombre total de villages autour de Prijedor qui


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  1   étaient en guerre. Nous voyons aussi que certains villages n'étaient pas du

  2   tout en guerre. J'aimerais savoir combien de villages étaient en guerre

  3   contre les Serbes ? Est-ce que vous pourriez les citer ?

  4   R.  Je pense que ce n'était que dans la région de Kozarac et dans la région

  5   de Brdo que cela a eu lieu. Cela concerne deux ou trois villages. Je ne

  6   peux pas être plus précis. Hambarine. Il y a aussi un autre village qui

  7   faisait partie de Brdo. Mais je ne suis pas au courant de conflits dans

  8   d'autres villages musulmans, c'est-à-dire à l'exception de Kozarac et la

  9   région de Brdo.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement du document.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections ?

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons l'admettre.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce devient D4222, Madame, Messieurs les

 15   Juges.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Alors, nous étions en train de parler d'attaques ou de conflits. Donc,

 18   je voudrais savoir si du côté serbe il y a eu des pertes, et si oui, quand

 19   ? Par exemple, est-ce que vous vous souvenez de collègues à vous qui

 20   auraient été victimes du conflit ?

 21   R.  C'était il y a longtemps, et je n'ai pas de document sous les yeux,

 22   donc il serait un petit peu difficile de vous répondre. Je sais que pendant

 23   l'attaque sur Prijedor, lorsque l'armée musulmane a attaqué, il y a eu

 24   quelques pertes du côté serbe, et c'étaient tous des membres des forces de

 25   police à l'époque, 18, 19 personnes, je pense. Je crois qu'il y a des

 26   listes des personnes qui ont été tuées au combat qui ont été dressées. Mais

 27   c'étaient des personnes qui travaillaient à sécuriser différents bâtiments.

 28   Q.  Merci.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D16017 à

  2   présent. Nous ne l'avons pas dans le prétoire électronique. Peut-on montrer

  3   sur le rétroprojecteur la version en serbe tout d'abord et puis la version

  4   anglaise. Je crois que l'on peut remettre une copie de la version serbe au

  5   témoin également et peut-être afficher sur le rétroprojecteur la version

  6   anglaise.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous nous expliquer en quoi

  8   cela découle du contre-interrogatoire, Monsieur Karadzic ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Eh bien, l'Accusation a suggéré que ces

 10   attaques n'avaient été menées que d'un côté et qu'elles avaient été menées

 11   sur des zones civiles, et le témoin, quant à lui, a déclaré qu'il y avait

 12   des conflits, des heurts. Je voudrais voir, avec document à l'appui, quand

 13   les Serbes ont été des victimes pour la première fois. Seules des forces de

 14   police étaient impliquées.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être qu'il y a eu d'autres combattants par

 17   la suite, mais pour l'instant, je ne parle que des forces de police. Peut-

 18   on montrer le document ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà, le document est affiché.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous pourriez lire le document, Radenko ?

 23   R.  Djapa.

 24   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler de ce cas de cet officier de police

 25   serbe qui a été victime le 9 et puis un autre le 24 ? Est-ce que vous avez

 26   entendu parler de ces cas-là ?

 27   R.  Oui, je connais certains de ces collègues personnellement, la plupart

 28   d'entre eux. Et ce sont des cas bien connus, oui. Radenko Djapa a été, en


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  1   fait, le premier policier qui est tombé après la création du gouvernement

  2   serbe.

  3   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Donc nous voyons les pertes ici, en date du 24, du 25, du 26 et du 30

  6   mai. Est-ce que vous connaissez les personnes énumérées ?

  7   R.  Oui, je les connais. C'étaient des victimes isolées, comme je l'ai déjà

  8   dit, jusqu'au 30 mai, et puis cette nuit-là, la nuit du 30 mai, il y a eu

  9   17 victimes d'un coup. Toutes étaient des membres de la force de police

 10   d'active ou de réserve qui étaient chargés d'assurer la sécurité de

 11   certains bâtiments pendant cette nuit-là.

 12   Q.  Donc on a eu le 30 mai, le 1er juin, le 4 juin. Vous avez entendu

 13   parler de tout cela ?

 14   R.  Oui, oui. Oui, nous avons là les personnes qui ont été tuées à ces

 15   dates-là.

 16   Q.  Est-ce que vous connaissez ces cas ? La liste va jusqu'au 17 juin. Il y

 17   a une troisième page aussi.

 18   R.  Oui. Oui, j'ai tout juste qu'au 20 juin dans ma version.

 19   Q.  Mais ce que vous voyez là, jusqu'au 17 juin, est-ce que vous en aviez

 20   entendu parler ?

 21   R.  Oui, oui.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il faut afficher la troisième page de la

 23   version anglaise.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Et qu'en est-il de ces personnes-là, est-ce que vous les connaissiez ?

 26   R.  Radenko Grbic, oui, Drago Aleksic, oui, oui. Oui, ceux sont tous des

 27   victimes des membres de l'unité qui restait à Kozarac. Ils sont arrivés par

 28   la route. C'est ce dont je me souviens.


Page 45648

  1   Q.  Donc du 22 mai jusqu'au 20 juin, plus de 50 personnes se sont faites

  2   tuer ?

  3   R.  Oui, si l'on additionne toutes les dates, tous les lieux, je n'ai pas

  4   fait le calcul, je connais juste les chiffres pour la nuit du 18 au 19,

  5   comme je l'ai déjà dit --

  6   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : nous n'avons pas entendu la question

  7   de M. Karadzic.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Répétez votre question, s'il vous plaît,

  9   Monsieur Karadzic.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  En pourcentage, combien cela fait-il -- ou, plutôt, en proportion, ne

 12   nous donnez pas un chiffre exact, mais proportionnellement, donnez-nous une

 13   idée ?

 14   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 15   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez ménager une pause. Vous avez

 17   commencé à répondre à la question de M. Karadzic, alors que nous attendions

 18   encore l'interprétation de la question de M. Karadzic. Allez-y.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Pouvez-vous répondre ?

 21   R.  Il m'est difficile de vous donner des pourcentages parce que je ne sais

 22   pas à 100 % quels étaient les effectifs de la police d'active et de

 23   réserve, mais c'est à l'époque quelque 50 %, compte tenu de la totalité des

 24   policiers dans la région de Prijedor et --

 25   L'INTERPRÈTE : L'interprète se corrige : Il a cru entendre 50 %. Le témoin

 26   a dit 10 %.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et c'est peut-être même plus de 10 %.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Monsieur Kvocka, comment voyez-vous les choses, étant donné que ce

  2   n'est pas la ligne de front ? Nous sommes en profondeur du territoire.

  3   Comment voyez-vous les pertes de cette taille-là, comment les voyez-vous ?

  4   R.  Ecoutez, c'est terrible. Ce sont des gens qui ont péri de la main de

  5   forces illégales. Mettons de côté l'attaque de Prijedor, c'étaient des

  6   unités musulmans qui avaient tenté de s'emparer de la ville; mais ça, ce

  7   sont des cas isolés. On peut considérer cela comme étant du terrorisme, ou

  8   comment le définir à présent. Parce que Djapa Radenko, qui a été tué en

  9   premier, c'était quelqu'un qui a péri dans la rue. Quelqu'un est sorti d'un

 10   coin et lui a tiré dessus. C'est ces terroristes. Ou alors, des gens de

 11   Kozarac qui ont péri sur un tracteur qu'on a mis à feu et on a confisqué le

 12   tracteur. Mais enfin, il y a eu des actes terroristes qui devraient être

 13   considérés comme tels.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander un versement au dossier de ce

 16   document.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lui attribuer une cote à des

 18   fins d'identification. Oui, excusez-moi, mais on l'a déjà également en

 19   anglais. Bon, ce sera versé au dossier, donc.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D4232 [comme

 21   interprété], Madame, Messieurs les Juges.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Vous avez été interrogé au sujet des départs de certaines personnes. Y

 24   a-t-il eu des départs de Musulmans seulement et de Croates seulement, ou

 25   est-ce qu'il y avait aussi des Serbes à s'en aller ? Et quand est-ce que la

 26   population a commencé à quitter la municipalité de Prijedor ? Est-ce qu'il

 27   y a eu des départs avant la guerre ?

 28   R.  Il y a eu des départs individuels même avant la guerre, chez nous, en


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  1   Bosnie. A compter des années '90, il y a eu des troubles politiques et les

  2   gens ont supposé que cela risquait de se solder par des conflits, peut-être

  3   pas, mais il y a eu des individus qui sont partis bien avant le début des

  4   conflits, et il y a eu les uns et les autres et les tiers à s'en aller,

  5   autant que je le sache.

  6   Q.  Merci. Est-ce que les membres de la police de Prijedor ont expulsé des

  7   Musulmans de Prijedor ? Est-ce que de façon active il y a eu des expulsions

  8   ?

  9   R.  Je n'ai pas ce sentiment. Ce n'est pas du tout de la sorte que j'ai

 10   perçu les choses. Il n'y a pas eu de participation active à des expulsions,

 11   on n'a pas pris des mesures pour contraindre quelqu'un à s'en aller. Je

 12   n'ai ni remarqué, ni entendu dire, ni vu.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on montre au témoin le 18427,

 15   qui est une pièce de la liste 65 ter. Excellences, est-ce que nous pouvons

 16   poursuivre un peu plus parce que j'ai commencé quelque peu plus tard et

 17   peut-être pourrais-je en terminer avec mes questions ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, continuez.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Ceci est une pièce du 5 juillet. Vous pouvez vous pencher dessus. Est-

 21   ce qu'à l'époque il y a eu tant que cela de réfugiés venus de Croatie, et

 22   est-ce que ces allées et venues coïncident avec ce que vous avez pu

 23   apprendre ?

 24   R.  Il s'agit là de Serbes qui sont venus d'autres républiques, là où les

 25   conflits avaient déjà commencé, et ils venaient sur le territoire de la

 26   Republika Srpska.

 27   Q.  Bon, pouvez-vous nous dire maintenant - parce qu'ici, des fois, nous

 28   avons des problèmes linguistiques - on dit qu'il y a eu des pressions


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  1   d'exercées pour que les gens s'en aillent. Est-ce que les autorités ont

  2   exercé des pressions à l'égard des non-Serbes pour qu'ils s'en aillent, ou

  3   est-ce que c'était l'inverse ? Est-ce que les non-Serbes et même les Serbes

  4   avaient exercé des pressions à l'égard des autorités pour avoir

  5   l'autorisation de quitter Prijedor pour de bon ?

  6   R.  Je vous ai déjà dit que je n'ai pas pu remarquer la chose, je n'ai pas

  7   remarqué de méthodes qui auraient été celles des autorités pour contraindre

  8   les Serbes ou les non-Serbes à s'en aller. Et il est probable qu'ils

  9   n'auraient pas expulsé des Serbes. Mais les gens demandaient, parce que moi

 10   je le sais d'expérience, ma famille est une famille mixte, je sais que des

 11   parents à ma femme ont demandé à s'en aller. Et il y a eu un centre de

 12   rassemblement à Trnopolje qui s'est occupé de départs organisés vers

 13   l'étranger par l'entremise de la Croix-Rouge. Les gens venaient de leur

 14   plein gré. Et même ceux qui n'avaient pas de moyen de transport de Prijedor

 15   allaient à pied à Trnopolje pour y passer quelques jours afin d'être

 16   recensés par la Croix-Rouge pour partir vers l'étranger. Pour ce qui est

 17   des motifs et des raisons qui les ont animés, il est difficile d'en parler.

 18   Vous savez, il y a eu une certaine incertitude, c'est certain, sur le

 19   territoire entier de l'ex-Yougoslavie. C'était le cas en Croatie, en

 20   Slovénie, c'était grandement le cas déjà. Pour ce qui est donc des motifs

 21   des départs, je ne peux pas en parler, mais je sais que je n'ai ni lu ni

 22   entendu dire qu'il y ait eu une proclamation ou un décret quelconque qui

 23   dirait que les non-Serbes devaient tous s'en aller.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander un versement au dossier de

 26   cette pièce.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction D4224,


Page 45652

  1   Madame, Messieurs les Juges.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Vous avez dit au contre-interrogatoire que vous n'étiez pas satisfait

  4   du comportement de ce détachement spécial de la police de Banja Luka qui

  5   était venu vous aider. Quelle était la position adoptée par Mejakic et

  6   autres pour ce qui est de ce détachement, et savez-vous nous dire quelle a

  7   été la position adoptée par le centre des services de sécurité de Banja

  8   Luka s'agissant, une fois de plus, de ce détachement ?

  9   R.  Bien, nous, les policiers du cru, qui travaillions là-bas, nous avons

 10   eu des problèmes avec, nous n'étions pas contents. Et pendant les quelques

 11   jours où ils ont été là, on s'est penchés sur les modalités de trouver des

 12   solutions. Zeljko Mejakic est passé par Simo Drljaca pour faire en sorte

 13   que cette unité se retire, et ça s'est soldé par leur départ au bout de

 14   quelques jours.

 15   Q.  Merci. Est-ce que cela signifie que le centre des services de sécurité

 16   de Banja Luka a tenu compte de l'intervention de M. Mejakic ?

 17   R.  Eux, ils ont reçu l'ordre de se retirer d'urgence. Je pense avoir été

 18   présent lorsque cet ordre a été véhiculé.

 19   Q.  Merci. Est-ce qu'ils faisaient partie des effectifs d'active, ces

 20   policiers, ou comment étaient-ils constitués ?

 21   R.  C'étaient des gens qui étaient venus d'ailleurs, donc je ne peux pas

 22   être sûr. Mais d'après leur comportement et la façon dont ils nous

 23   abordaient, il est certain qu'il n'y avait pas un seul à avoir été un

 24   policier de profession.

 25   Q.  Mais est-ce que vous avez ouï dire quel a été leur comportement a

 26   l'extérieur du camp, à d'autres endroits ?

 27   R.  Je n'ai pas appris grand-chose. Tout ce que je sais, c'est que cette

 28   unité a été démantelée très rapidement. Quelqu'un de Banja Luka nous a fait


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  1   savoir la chose pour dire que ça avait été un succès de notre part.

  2   Q.  Merci.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on montre le 65 ter 5505 au

  4   témoin, s'il vous plaît.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Alors, je vous demande de prêter attention à la date, 24 juin, après

  7   leur séjour à Omarska. C'est le poste de sécurité publique qui demande au

  8   centre des services de sécurité pour porter plainte contre ce détachement

  9   et dire que leur comportement était inapproprié. Et on donne des exemples,

 10   même, pour réclamer des mesures de la compétence de M. Zupljanin. On

 11   énumère aussi des noms. Vous pouvez voir cela aux premier et deuxième

 12   paragraphes.

 13   R.  Je le vois, oui.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous afficher la page

 16   d'après, s'il vous plaît.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce que vous connaissiez ce Zoran Janjetovic du deuxième paragraphe,

 19   celui qui a été tabassé ?

 20   R.  Je n'arrive pas à m'en souvenir.

 21   Q.  Mais de quelle appartenance ethnique est-il, celui-là ?

 22   R.  Il est Serbe.

 23   Q.  Merci. Ou c'était peut-être éventuellement un Croate.

 24   R.  D'après ce que j'en sais, c'était un Serbe.

 25   Q.  Regardez le dernier, M. Tutus, qui s'adresse à M. Zupljanin, et il lui

 26   dit :

 27   "Comptant sur votre détermination pour ce qui est du fonctionnement,

 28   conforme au règlement dans les instances chargées de l'intérieur…," et


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  1   cetera, "nous espérons que vous allez prendre des mesures relevant de vos

  2   compétences afin que ce type de situation indésirable cesse."

  3   Est-ce que ça a cessé ?

  4   R.  Je pense que oui, dans une grande mesure. Je n'ai pas eu à connaître

  5   qu'il y ait eu des incidents par la suite. Pour ce qui est de ladite unité,

  6   d'après mes informations, elle a été démantelée.

  7   Q.  Merci.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous devons maintenant interrompre cette

  9   audience, Monsieur Karadzic.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander un versement au

 11   dossier ? J'en ai pour cinq minutes encore, mais on pourra le faire après

 12   la pause. Est-ce que je peux demander un versement au dossier de ce

 13   document ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons reprendre après la pause.

 15   Nous allons reprendre à 1 heure et demie.

 16   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 44.

 17   --- L'audience est reprise à 13 heures 32.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 19   Oui, avant cela, je voulais juste vous dire que nous allons siéger pour le

 20   reste de l'audience sans la présence de la Juge Lattanzi en application du

 21   15 bis. Elle n'a pas pu être des nôtres pour des raisons personnelles

 22   urgentes.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Kvocka --

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Excellences, au fait, ce document, on ne

 27   lui a pas attribué une cote. Est-ce que je peux demander son versement au

 28   dossier ?


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet, oui.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D4225, Messieurs les

  3   Juges.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Kvocka, on vous a posé des questions au sujet de passages à

  7   tabac de détenus. Est-ce que le tabassage des prisonniers c'était une règle

  8   ou une exception ?

  9   R.  Je pense avoir déjà répondu à l'époque. C'étaient des incidents

 10   survenant ça et là. On ne peut pas dire que ça ne s'est pas passé, mais on

 11   est loin de pouvoir affirmer que c'était une règle, une situation

 12   habituelle. Enfin, je parle pour ce qui est de la période où j'ai été

 13   présent moi-même.

 14   Q.  Merci. Pouvez-vous, je vous prie, nous dire sur les 2 500 personnes qui

 15   se trouvaient là-bas, combien au total ont été passées à tabac ?

 16   R.  C'est difficile à dire. J'ai parlé d'incidents auxquels cas j'ai appris

 17   aussi qu'on avait remarqué la présence d'un certain nombre de personnes,

 18   mais ce n'était pas un nombre très important, peut-être une dizaine de

 19   personnes tabassées, en sus des incidents dont j'ai parlé plus en détail.

 20   Donc, je pourrais dire qu'au plus il y en a eu une dizaine par surcroît à

 21   avoir été tabassées.

 22   Q.  S'agissant de M. Civac qui a travaillé au ministère de l'Intérieur --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Kvocka. Vous avez

 24   dit que pas plus de dix personnes n'ont été tabassées sur les 2 500 détenus

 25   à l'époque. Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de nous dire ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est ce que j'ai dit. D'après

 27   l'impression que j'ai eue, en sus des incidents dont je vous ai déjà parlé

 28   dans le détail, il y en a eu une dizaine en plus pendant mon séjour au camp


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  1   et pendant la totalité de mon séjour au centre d'enquête.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que c'est cohérent avec ce que

  3   vous avez ouï dire pendant votre procès à vous ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Pendant mon procès, j'ai appris qu'après

  5   mon départ il y a eu d'autres incidents et d'autres personnes passées à

  6   tabac d'après les témoignages qui ont été présentés ici.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, d'après vous, Monsieur Kvocka, où

  8   est la vérité ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas juger de la vérité qui s'est

 10   créée après mon départ. Ce que je suis en train de dire, c'est la vérité

 11   pour mon séjour et pour ce que j'ai eu l'occasion d'apprendre. Peut-être

 12   que mes connaissances ne sont pas des plus précises. Il y en a peut-être eu

 13   d'autres de tabassés, mais je n'en sais rien. Je n'ai pas eu l'impression

 14   d'en avoir vu plus.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, où est-ce que ces moins de dix

 16   personnes se casent-elles ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vous ai pas bien compris.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous ne pouvez pas porter de jugement

 19   à présent, sur la base de quoi pouvez-vous dire qu'il y en aurait eu moins

 20   de dix à avoir été passés à tabac à l'époque ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit que j'avais l'impression, à

 22   l'époque où j'y ai séjourné, d'après les rumeurs qui ont couru parmi les

 23   détenus ou parmi les gardiens, qu'il y en avait eu à peu près une dizaine

 24   de ces cas de figure où des personnes auraient été passées à tabac ou

 25   malmenées d'une certaine façon physiquement parlant. C'est ce que j'ai

 26   appris pendant que j'étais au centre d'enquête. En sus des incidents

 27   concrets dont j'ai parlé plus en détail.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous vous êtes fait cette


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  1   impression sur la base de quoi, Monsieur Kvocka ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, sur la base des observation

  3   personnelles, j'ai pu voir des personnes avoir des blessures, ou quelqu'un

  4   m'a peut-être dit au sujet d'autrui qu'il y a eu des individus de passés à

  5   tabac.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  7   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Pour ce qui est du passage à tabac de M. Civac, qui était membre de la

 11   police, vous avez dit qu'il y a eu une vengeance individuelle. Est-ce que

 12   vous savez nous dire quels avaient été les motifs de ceux qui avaient passé

 13   à tabac des personnes ?

 14   R.  Il est difficile d'en parler pour ce qui est des motifs véritables.

 15   Probablement a-t-on pensé que c'était un collègue qui avait travaillé avec

 16   vous et puis qui, tout à coup, se trouve du côté opposé, dans le camp

 17   opposé. C'est peut-être l'un des motifs. Il y a eu des incidents antérieurs

 18   qui sont dus au fait que telle personne a eu une victime parmi les siens,

 19   et puis ce serait une forme de vengeance. Ça pourrait être l'un des motifs

 20   aussi.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au compte rendu, on n'a pas consigné cette

 22   forme de vengeance.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Vous avez dit, me semble-t-il, que ce n'était pas acceptable, mais que

 25   ça pouvait être un motif ?

 26   R.  J'ai dit, oui, que ce n'était pas acceptable, la vengeance comme motif.

 27   Mais au vu des incidents survenus, il se peut qu'il y ait eu ce motif; si,

 28   par exemple, un membre de la famille s'est fait tuer ou un collègue s'est


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  1   fait tuer, on voit un gardien essayer de se venger d'une façon ou d'une

  2   autre.

  3   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire, parmi les gardiens, combien il

  4   y avait d'individus qui auraient été portés à ce type de comportement ?

  5   Vous n'avez pas à nous donner de noms. Est-ce que sur le total vous pouvez

  6   nous donner un chiffre ?

  7   R.  Deux ou trois gardiens étaient de cette nature-là. Je n'arrive pas

  8   maintenant à me souvenir de la totalité des noms. Je n'ai pas de problème

  9   pour ce qui est de dire des noms, mais maintenant, je n'arrive pas à me

 10   souvenir de ces noms. Je sais qu'on avait parlé de deux ou trois gardiens

 11   qui se faisaient remarquer par cette façon de se comporter.

 12   Q.  Merci. Mais les chefs d'équipe, comment voyaient-ils la chose, d'après

 13   ce que vous en savez ?

 14   R.  Je crois qu'ils ont fait des efforts pour entraver ce type de choses.

 15   Q.  Merci. En page 17 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, s'agissant

 16   du paragraphe 52 de votre déclaration, il est dit que M. Gruban a dit que

 17   l'un des trois de vos beaux-frères avait été préoccupé pour dire qu'il

 18   pourrait tomber dans la catégorie de personnes à envoyer à Manjaca. Alors,

 19   de quoi ça dépendait d'être envoyé à Manjaca ou être relâché chez soi ?

 20   R.  D'après ce que j'en sais, d'après mon séjour au centre d'enquête, ces

 21   catégories ont été établies en fonction des individus selon le fait d'avoir

 22   aidé aux combats ou participé aux combats, soit avoir été ou ne pas avoir

 23   été. J'ai par exemple appris, et je l'ai appris par la suite de la part de

 24   l'un de mes beaux-frères, qu'il faisait partie de cette catégorie

 25   d'assistants, et donc c'étaient des gens qui tombaient dans la catégorie à

 26   ne pas être libérés. Mais c'est avec des relations à lui qu'il a réussi

 27   quand même à ne pas être envoyé là-bas.

 28   Q.  Merci. En page 51, on vous a demandé s'il y avait eu des civils de


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  1   détenus à Omarska. Est-ce que vous pouvez dire aux Juges de la Chambre dans

  2   quelles circonstances et conditions un civil peut être considéré comme

  3   étant une partie enfreignant la loi ? Est-ce qu'ils ont été détenus en tant

  4   que civils ou est-ce qu'il y a eu une raison autre pour ces détentions ?

  5   R.  Eh bien, en ce qui me concerne, c'est tout à fait relatif. Les civils,

  6   c'est des gens qu'on reconnaît par la façon dont ils étaient vêtus, mais la

  7   plupart ressemblaient à des civils d'après leur façon de s'habiller. Mais

  8   il y a bien des choses qui ont montré qu'ils avaient des blessures de

  9   combat, qu'ils avaient participé aux conflits, donc il était difficile de

 10   préciser les choses. On pouvait à première vue parler de civils. Il se peut

 11   qu'il y ait eu au départ des gens qui ont été relâchés qui ont été pour

 12   commencer des civils mais qui ont fait partie des rangs ou des effectifs

 13   d'unités quelconques. Ils étaient peut-être peu nombreux, mais je ne peux

 14   pas en juger. Je n'ai pas participé à ces enquêtes. Et, pour l'essentiel,

 15   je ne pense pas qu'il puisse être dit que c'étaient des civils dans le sens

 16   classique du terme. Parce que quand on est vêtus de vêtements civils, on

 17   peut quand même participer à une insurrection armée, d'après ce que j'en

 18   sais. Un civil peut donc être aussi un prisonnier de guerre.

 19   Q.  Merci. Et ma dernière question, Monsieur Kvocka, est-ce que vous

 20   connaissiez mon point de vue, généralement parlant, concernant le respect

 21   de la législation en vigueur ainsi que de la loi et des coutumes de la

 22   guerre ?

 23   R.  Pour autant que je me souvienne, à plusieurs reprises à la télévision,

 24   et peut-être dans la presse, même si on ne pouvait pas avoir accès à la

 25   presse tout le temps, plusieurs fois il y avait des déclarations disant

 26   qu'il fallait respecter les organisations humanitaires internationales, la

 27   population civile dans la ville, les prisonniers de guerre, et cetera. Je

 28   pense que la police a reçu des ordres des autorités, et vos ordres


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  1   également. Et d'après ce qui a été publié, votre point de vue, votre

  2   position était qu'il fallait procéder en conformité avec les conventions et

  3   respecter les principes de base concernant les prisonniers.

  4   Q.  Merci, Monsieur Kvocka. Je n'ai plus de questions pour vous.

  5   Questions de la Cour : 

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pendant le contre-interrogatoire,

  7   Monsieur Kvocka, dans le compte rendu à la page 32, vous avez dit, je cite

  8   :

  9   "Je pense qu'il ne serait pas correct que je dise à l'équipe de la Défense

 10   de M. Karadzic ce que j'ai entendu pendant le procès qui a eu lieu en

 11   2001."

 12   Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ce procédé ne serait pas correct de

 13   votre part, à savoir de dire à l'équipe de Défense de M. Karadzic ce que

 14   vous avez appris pendant votre procès ?

 15   R.  J'ai déjà oublié de quels événements il s'agissait concernant la

 16   question posée, mais je pense que l'enquêteur qui m'a contacté

 17   s'intéressait à savoir ce que je connaissais exactement, et ce que j'ai

 18   appris par la suite. J'ai considéré que cela n'était pas à 100 % exact. Je

 19   ne peux pas confirmer l'exactitude absolue de ce que j'ai appris. Et c'est

 20   pour cela que j'ai dit ce que j'ai dit à l'époque, puisque je me

 21   concentrais uniquement sur ce que j'ai pu remarquer de mes propres yeux, ce

 22   que j'ai pu entendre personnellement.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ceci met un terme à votre

 24   déposition, Monsieur Kvocka. Au nom des Juges de la Chambre, j'aimerais

 25   vous remercier d'être venu à La Haye pour témoigner. Vous pouvez maintenant

 26   quitter le prétoire.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je vous remercie, et je suis content si

 28   j'ai pu vous être utile.


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  1   [Le témoin se retire]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que le témoin suivant est

  3   prêt ?

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est Dragan

  5   Radetic.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, c'est vous qui

  7   poserez des questions à M. Radetic, le témoin suivant ? Pourriez-vous nous

  8   expliquer pourquoi il faut l'avertissement conformément à l'article 90 (E)

  9   pour ce témoin ?

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est parce que ce témoin a été un membre

 11   de l'équipe travaillant au centre d'enquête à Keraterm, et il est également

 12   adjoint du procureur militaire après avoir fini ses activités à Keraterm.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que le témoin peut

 15   prononcer la déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

 17   la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN : DRAGAN RADETIC [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Radetic, vous pouvez

 21   vous asseoir.

 22   Merci. Je suppose que vous savez cela très bien, mais avant de commencer

 23   votre déposition, Monsieur Radetic, je dois attirer votre attention sur une

 24   Règle dans le Règlement de procédure et de preuve qui est contenu dans

 25   l'article 90 (E). D'après cet article, vous pouvez refuser de répondre à

 26   des questions de M. Karadzic, M. le Procureur ou Mme le Procureur, ou même

 27   les Juges, si vous considérez que cette réponse pourrait vous incriminer

 28   pour une infraction au pénal. Dans ce contexte, "vous incriminez" veut dire


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  1   prononcer quelque chose qui pourrait présenter des aveux d'une infraction

  2   pénale ou prononcer quelque chose qui pourrait être retenu comme des

  3   éléments de preuve pour avoir commis une infraction au pénal. Pourtant, si

  4   vous pensez que cette réponse pourrait vous incriminer, et par conséquent

  5   vous refusez d'y répondre, je dois vous dire que le Tribunal a le pouvoir

  6   de vous obliger à répondre à cette question. Mais dans une telle situation,

  7   le Tribunal va s'assurer que votre déposition faite dans de telles

  8   circonstances ne pourra être utilisée dans d'autres procès à votre encontre

  9   hormis des poursuites pour faux témoignage. Est-ce que vous avez compris

 10   cela, Monsieur Radetic ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous avez la parole.

 13   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 14   Q.  [interprétation] Monsieur Radetic, bonjour.

 15   R.  Bonjour.

 16   Q.  Je vous prie, puisque nous parlons tous les deux très vite, de

 17   prononcer vos phrases lentement et de ménager une pause entre mes questions

 18   et vos réponses pour éviter de répéter questions et réponses, pour que tout

 19   soit correctement consigné au compte rendu.

 20   Est-ce que vous avez fait une déclaration à mon équipe de Défense ?

 21   R.  Oui.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on afficher maintenant la pièce 1D9660.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Je vous prie de nous dire si vous voyez à gauche à l'écran votre

 25   déclaration en serbe. Maintenant, on voit la version en anglais également

 26   affichée à l'écran.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Merci. Est-ce que vous avez lu cette déclaration, et est-ce que vous


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  1   avez l'avez signée ?

  2   R.  Oui.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher à présent la

  4   dernière page de ce document pour que le témoin identifie sa signature.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ma signature.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Merci. Est-ce que dans cette déclaration les propos que vous avez dits

  8   à mon équipe de Défense sont consignés de façon fidèle et correcte ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Si je vous posais les mêmes questions que les questions que mon

 11   équipe de Défense vous a posées à l'époque, vos réponses seraient-elles

 12   essentiellement les mêmes ?

 13   R.  Oui, absolument les mêmes.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande que cette déclaration soit versée au

 15   dossier conformément à l'article 92 ter. C'est seulement un document.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous des objections, Madame

 17   Sutherland ?

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette déclaration 92 ter sera versée au

 20   dossier ainsi qu'une pièce connexe.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration portera la cote D4226, et

 22   la pièce connexe qui porte le numéro 1D16016 [comme interprété] portera la

 23   cote D4227.

 24   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant je vais lire en anglais le bref

 26   résumé de la déclaration pour M. Dragan Radetic.

 27   Dragan Radetic est juriste de par sa profession. Il a travaillé au bureau

 28   du procureur de Prijedor jusqu'en 1990. Il a été mobilisé en 1991 en tant


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  1   que membre de la police militaire, et plus tard il a été muté au tribunal

  2   militaire et au bureau du procureur à Banja Luka.

  3   La situation dans la municipalité de Prijedor était calme jusqu'à ce

  4   que les extrémistes musulmans dans le village de Hambarine n'aient attaqué

  5   un véhicule à bord duquel se trouvaient quatre soldats. Suite à cet

  6   incident, les citoyens de Hambarine, du hameau de Hambarine ont été appelés

  7   à rendre leurs armes et à identifier les personnes qui ont tué ces soldats

  8   au point de contrôle. Etant donné qu'ils n'ont pas fait cela, les autorités

  9   légales ont dû intervenir.

 10   Concernant les points de contrôle à Kozarac, les extrémistes

 11   musulmans les ont établis sur les routes principales Banja Luka-Prijedor

 12   et, par conséquent, il était impossible d'approvisionner en nourriture et

 13   en eau les unités armées dans le secteur de Kozarac. Le 24 mai 1992, la 43e

 14   Brigade Motorisée a essayé de rendre cette route utilisable mais cela a eu

 15   comme conséquence l'affrontement avec les extrémistes musulmans. Après que

 16   les combats ont éclaté à Kozarac, beaucoup de groupes armés des extrémistes

 17   musulmans ont fui et se sont cachés dans les hameaux se trouvant sur les

 18   pentes de la montagne Kozarac. Ils présentaient une grande menace pour les

 19   citoyens de Prijedor et ont commis les crimes contre les soldats et contre

 20   les civils.

 21   Pendant une certaine période de temps la situation dans la

 22   municipalité de Prijedor est devenue chaotique. Toutes les lignes

 23   téléphoniques étaient coupées, il n'y avait pas d'électricité, il n'avait

 24   pas d'eau, et les routes étaient fermées ainsi que le corridor vers la

 25   Serbie. Il avait une pénurie de médicaments et des vivres. Dans cette

 26   situation chaotique dans la municipalité de Prijedor, certains groupes et

 27   individus ont essayé de provoquer plus de chaos et de semer la panique

 28   parmi la population civile à ses propres fins. Il y avait des cas où des


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  1   civils ont été tués, où des maisons ont été incendiées et/où des biens ont

  2   été pillés, des biens non seulement des Musulmans et des Croates mais

  3   également des Serbes.

  4   M. Radetic n'a jamais entendu ou vu qui que ce soit des responsables

  5   politiques, militaires ou policiers serbes d'avoir planifié le nettoyage

  6   ethnique de la population non-serbe. Après l'éclatement de la guerre,

  7   beaucoup de civils, et non seulement des Musulmans et des Croates mais

  8   également des Serbes, ont voulu quitter la municipalité de Prijedor pour

  9   une simple raison, à savoir que des conditions de base de vie n'existaient

 10   pas.

 11   Après que le système de communication a été rétabli, les autorités

 12   ont essayé de rétablir également le système de sécurité le plus tôt

 13   possible pour protéger tout le monde. Les autorités civiles, la police

 14   ainsi que l'armée ont pris des mesures, qui relevaient de leur compétence,

 15   contre les personnes qui ont violé les lois et l'ordre public et qui ont

 16   commis des crimes. Le problème majeur dans le travail de la police

 17   militaire était le fait que le tribunal militaire n'avait pas été établi

 18   jusqu'au mois de septembre ou octobre 1992. Donc, il était impossible

 19   d'intenter des procès au pénal contre les auteurs de crimes. Par

 20   conséquent, d'après le Code pénal et le Code de procédure pénale, les

 21   organes de la police étaient obligés de relâcher des gens qui étaient en

 22   détention, après le délai de 72 heures, bien que certaines de ces auteurs

 23   qui ont commis des crimes sérieux parfois étaient détenus plus longtemps.

 24   En tant que résultat de cette situation chaotique, l'existence des

 25   formations paramilitaires et la situation d'insécurité, était que beaucoup

 26   de civils musulmans se sont rendus au camp de Trnopolje de leur propre gré.

 27   Les centres de détention dans la municipalité de Prijedor hébergeaient ceux

 28   qui étaient capturés ou détenus par les forces des Serbes de Bosnie, et


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  1   parmi ces personnes étaient également ceux qui n'ont jamais participé à des

  2   affrontements armés. Par conséquent, il était important de faire une

  3   distinction entre les civils armés et non armés pendant ces opérations de

  4   combat.

  5   Vers la fin du mois de mai 1992, M. Radetic a reçu l'ordre de faire

  6   rapport à Keraterm et de se présenter au Keraterm pour être membre de l'une

  7   des commissions qui procédait à des enquêtes concernant des gens en

  8   détention. Sa tâche était d'être présent pendant le travail de cette

  9   commission et de voir si dans des déclarations de certaines personnes il y

 10   avait des éléments de crime commis contre les forces armées. Pendant 15

 11   jours pendant lesquels il travaillait là-bas, la commission n'a décelé

 12   d'éléments concernant des crimes commis contre les forces armées. Pendant

 13   ce temps-là, il y avait des entretiens avec 50 personnes, et ces 50

 14   personnes étaient des hommes adultes qui ont été interrogés de façon

 15   individuelle, qui ont été traités de façon appropriée, il n'y avait pas de

 16   cas de torture verbale ou physique.

 17   Pendant qu'il était à Keraterm, M. Radetic n'a jamais vu qui que ce

 18   soit passé à tabac dès leur arrivée ou pendant ces entretiens. Il y a eu un

 19   problème sérieux concernant l'approvisionnement en électricité à Keraterm

 20   et dans toute la ville de Prijedor, et il y avait des restrictions

 21   d'approvisionnement en électricité tout le temps, et des pompes pour l'eau

 22   ne fonctionnaient pas ni pour les Musulmans ni pour les Serbes. De

 23   surcroît, il y avait une pénurie de vivres pour tout le monde. Après 15

 24   jours, M. Radetic a été muté au département de lutte contre le crime de la

 25   police militaire, où il s'est occupé des crimes contre les biens. Dans plus

 26   de 90 % des cas, les suspects étaient des Serbes et des ordres ont été

 27   donnés pour que ces gens soient mis en détention.

 28   Pendant la guerre et pendant le travail aux organes de la police et


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  1   aux organes judiciaires militaires, M. Radetic avait beaucoup de problèmes

  2   avec les gens qui ont abusé de la population musulmane et la population

  3   serbe. Et à plusieurs reprises, il a été essayé d'intenter des procès au

  4   pénal contre ces personnes. Mais à cause de cela, M. Radetic a été passé à

  5   tabac par un groupe de ces personnes au printemps 1995 [comme interprété] à

  6   Prijedor. Il s'agissait des Serbes.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Il s'agissait du mois d'août

  8   1992.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être que j'ai dit autre chose. Mais,

 10   effectivement, il s'agit de l'année 1992, effectivement.

 11   Donc voilà c'était donc le résumé de ce témoin, de sa déposition. Et à

 12   présent je n'ai pas d'autre question pour ce témoin.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Radetic, comme vous avez pu le

 14   remarquer, votre déposition en l'espèce a été versée par le biais de votre

 15   déclaration écrite en l'espèce. Et maintenant, c'est le bureau du Procureur

 16   qui va vous interroger.

 17   Allez-y, Madame Sutherland.

 18   Contre-interrogatoire par Mme Sutherland :

 19   Q.  [interprétation] Monsieur Radetic, vers la fin du mois de mai, vous

 20   avez pour mission de travailler en tant qu'interrogateur dans le camp de

 21   Keraterm ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  C'est le lieutenant-colonel Mistrovic qui vous a affecté à cette tâche,

 24   et lui, c'était donc l'organe de sécurité, le chef de l'organe de sécurité

 25   de la 43e Brigade Motorisée ?

 26   R.  Effectivement.

 27   Q.  Et donc, vous avez travaillé dans le camp, vous savez quel était le

 28   plan du camp ?


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  1   R.  Non. Pouvez-vous être plus précise ?

  2   Q.  Eh bien, vous saviez où il fallait mener à bien ces interrogatoires ?

  3   R.  Il s'agit d'un bâtiment immense, l'enceinte de ces bâtiments est aussi

  4   immense. Les interrogateurs entraient toujours d'un côté de l'immeuble

  5   alors que le camp, les détenus se trouvaient complètement à l'autre bout de

  6   l'immeuble, qui était immense en soi. Donc, moi, je n'ai jamais vu ces

  7   endroits, là, où les gens étaient détenus, car nous étions complètement de

  8   l'autre côté. On entrait de l'autre côté, on était du côté opposé de

  9   l'immeuble. Et je pense que les autres gardiens, les autres interrogateurs,

 10   l'enquêteur, ne les ont jamais vus non plus. Je suppose que les gardiens,

 11   en revanche, faisaient venir les détenus pour subir les interrogatoires en

 12   passant par les couloirs qui se trouvaient de l'autre côté ou par un autre

 13   escalier. En tout cas, je ne sais pas par où ils passaient.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience n'est pas très

 15   précis.

 16   Le témoin a dit à la ligne 7 : "Je vous dis que moi, je ne les ai pas

 17   rencontrés, je ne les ai pas vus, et je suppose que les autres enquêteurs

 18   n'y sont pas allés non plus."

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, moi, je n'y suis jamais allé.

 20   Et donc, je peux vous dire qu'en est-il de moi. Peut-être que les autres

 21   personnes y sont allées de leur propre gré.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Radetic, faites une pause, s'il

 23   vous plaît, avant de dire quelque chose après M. Karadzic. Parce que vous

 24   étiez en train de parler alors qu'on était toujours en train d'entendre

 25   l'interprétation. Donc, essayez de faire attention à cela.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Radetic, je voudrais vous montrer une photo et je voudrais

 28   vous demander d'annoter cette photo de façon aussi efficace et rapide que


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  1   possible.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Donc, je vais demander à voir le document

  3   65 ter P00541.

  4   Q.  Reconnaissez-vous Keraterm sur cette photo ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Avec l'aide de l'huissier, je vais vous demander de montrer de quelle

  7   direction vous êtes arrivé --

  8   R.  Ce n'est pas quelque chose qu'on voit sur la photo. Donc, il faut

  9   montrer le flanc droit de l'immeuble, parce qu'on n'est jamais entré par ce

 10   côté-ci.

 11   Q.  Non, non, vous ne pouvez pas voir la porte d'entrée. Moi, je vais vous

 12   demander de montrer la porte par laquelle vous êtes entré dans l'immeuble

 13   pour mener à bien les interrogatoires.

 14   R.  Eh bien, on ne voit pas cette entrée sur la photo parce qu'on était de

 15   l'autre côté de l'immeuble, à l'opposé. Donc, si je puis dire, ça c'est la

 16   façade de l'immeuble. Eh bien, si c'était la façade de l'immeuble, nous, on

 17   entrait dans l'immeuble de l'autre côté, de l'arrière de l'immeuble.

 18   Q.  Sur la droite de la photo, voyez-vous ces bâtiments qui sont moins

 19   élevés et qui vont jusqu'à la moitié du bâtiment 

 20   principal ?

 21   R.  Non, je ne vois pas cela.

 22   Q.  Voilà, je vous montre la photo. Est-ce que vous reconnaissez ceci, là

 23   où on voit les parties blanches du mur ?

 24   R.  C'est le même bâtiment, sauf que la partie basse du mur est peinte en

 25   blanc.

 26   Q.  Est-ce que vous savez que les détenus étaient détenus précisément à cet

 27   endroit-là, dans les quatre pièces qui s'y trouvaient ?

 28   R.  Officiellement, non. Mais je sais qu'à plusieurs reprises je suis allé


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  1   de Prijedor à Banja Luka en passant par la route principale. Depuis cette

  2   route principale, j'ai réussi à voir un grand nombre de personnes devant ce

  3   côté-là de l'immeuble.

  4   Q.  Et pendant toute la période que vous avez passée dans le camp de

  5   Keraterm, vous n'êtes jamais passé par l'endroit qui se trouve devant ces

  6   pièces, les pièces que l'on voit ici sur la droite de la photo ?

  7   R.  Non, je ne suis jamais passé par là. Je répète --

  8   Q.  Non. Vous avez déjà dit que vous ne passiez pas par là pour entrer dans

  9   Keraterm pour mener à bien vos interrogatoires. Mais à aucun moment, donc,

 10   pendant que vous travailliez dans le camp de Keraterm vous n'êtes pas passé

 11   par ce côté-là de l'immeuble ?

 12   R.  Non, jamais je ne suis passé par là. Parce que ma sortie se trouvait de

 13   l'autre côté de l'immeuble, et à la fin de ma journée de travail, eh bien,

 14   je me dépêchais à chaque fois, soit de rentrer chez moi, soit de me

 15   consacrer à des autres activités, car je travaillais en tant que policier

 16   militaire dans la police militaire et aussi dans la caserne.

 17   Q.  Et donc, quand vous vous rendiez à la caserne, vous travailliez dans le

 18   cadre de votre deuxième travail après avoir travaillé au camp de Keraterm

 19   pendant la journée. Pourriez-vous nous dire où se trouve ce bâtiment ?

 20   R.  Ce bâtiment se trouve sur la route régionale en direction de Dubica, et

 21   il s'agit de la caserne Zarko Zrenjanin.

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais demander à avoir le document 65

 23   ter 25830, s'il vous plaît. Excusez-moi. Avant que l'on enlève la photo en

 24   question.

 25   Q.  Les pièces consacrées -- ou où se déroulaient les interrogatoires se

 26   trouvaient au premier étage sur le côté gauche de l'immeuble que l'on voit;

 27   est-ce exact ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Merci.

  2   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je vais demander à présent le document 65

  3   ter 25830.

  4   Q.  Ici, on voit une vue aérienne. Etes-vous en mesure de reconnaître le

  5   camp de Keraterm ?

  6   R.  J'ai du mal.

  7   Q.  Eh bien, vous pouvez vous emparer du stylet, et ensuite l'huissier va

  8   vous aider. Est-ce que vous voyez la route principale déjà sur la photo ?

  9   Au milieu de la photo.

 10   R.  Oui, c'est bien cela, la rue principale. Je vais le marquer.

 11   Q.  Voilà, c'est bien cela.

 12   R.  Donc, du côté gauche, le bâtiment gris. Du côté gauche, je suppose que

 13   c'est bien cela. Je vais le montrer. Vous me dites si j'ai raison ou non.

 14   Voilà. Est-ce bien Keraterm ?

 15   Q.  C'est sur la droite. Le gros bâtiment gris.

 16   R.  C'est cela. Donc, la route principale. Si Banja Luka est en haut et

 17   Prijedor en bas, Keraterm devait se trouver sur le côté gauche de la route.

 18   Où se trouve Banja Luka ? Où se trouve Prijedor ?

 19   Q.  Prijedor est au nord. Banja Luka est au sud.

 20   R.  Oui, oui. Alors, c'est bien ici.

 21   Q.  Pourriez-vous apposer la lettre X à l'endroit où se trouvait la pièce

 22   où se déroulaient les interrogatoires ?

 23   R.  [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Je viens de vous montrer la pièce P541 et vous m'avez montré que la

 25   pièce consacrée aux interrogatoires se trouvait sur la gauche de

 26   l'immeuble, donc ça veut dire qu'elle se trouvait dans le coin à gauche ?

 27   R.  Ecoutez, je ne sais pas si cela représente l'angle du bâtiment. D'après

 28   moi, non, mais bon. En tout cas, je ne me souviens pas de la pièce exacte


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  1   parce que cela fait très longtemps, 22 années plus précisément depuis que

  2   je suis allé.

  3   Q.  Très bien. On ne va plus parler de Keraterm et de ces bâtiments. La

  4   caserne Kozara Putevi, qui était juste en face du camp de Keraterm,

  5   pourriez-vous encercler ce bâtiment-là, s'il vous plaît ? Là où était la

  6   caserne, donc, militaire ?

  7   R.  C'est en face de Keraterm. Le bâtiment qui est en face. Juste en face

  8   de Keraterm.

  9   Q.  Avec un toit rouge ?

 10   R.  Je ne peux pas le garantir. Je ne peux que supposer que c'est peut-être

 11   ce bâtiment-là.

 12   Q.  Vous avez encerclé le camp de Keraterm. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

 13   apposer la lettre A sur le cercle que vous avez dessiné autour de Keraterm

 14   ?

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Et maintenant, vous avez écrit la lettre A par-dessus l'endroit qui,

 17   d'après vous, correspondait à la pièce où se déroulaient les

 18   interrogatoires.

 19   R.  A peu près.

 20   Q.  En tant que policier militaire, vous n'êtes pas en mesure -- où se

 21   trouve la caserne qui était juste en face du camp de Keraterm, de l'autre

 22   côté de la route ?

 23   R.  Ecoutez, je ne suis pas sûr des dates. Mais vers la fin du mois de

 24   juin, à la fin du mois de mai, au mois de juin, le commandement de la 43e

 25   Brigade motorisée est passé à Kozara Putevi, alors que l'unité est restée

 26   dans la caserne ancienne, Zarko Zrenjanin. Donc, les seuls éléments qui ont

 27   déménagé, c'est le commandement. Et je pense que c'était au mois de juin.

 28   Q.  Donc, ce que l'on voit encercler de l'autre côté de la route, ce n'est


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  1   pas la caserne, n'est-ce pas ?

  2   R.  Vu que vous ne m'avez pas donné des explications suffisamment précises

  3   au départ, j'ai supposé que Banja Luka était au nord et Prijedor au sud. Et

  4   vu que je me suis trompé de direction, j'ai mal annoté la carte en pensant

  5   que Keraterm se trouvait là où il ne se trouve pas, finalement.

  6   Q.  Et vous, vous entriez de quelle direction, maintenant que vous vous

  7   retrouvez sur la carte ?

  8   R.  L'entrée était là. Donc, c'est de ce côté-là que l'on entrait dans le

  9   bâtiment, et ensuite, on se rendait dans la pièce qui était réservée pour

 10   nous. Parce qu'il y avait deux entrées à deux endroits différents. Cette

 11   entrée-là était utilisée exclusivement par les gens chargés des

 12   interrogatoires.

 13   Q.  Pourriez-vous apposer la lettre B au niveau de l'entrée ?

 14   R.  [Le témoin s'exécute]

 15   Q.  Donc quand vous êtes arrivé dans le camp, vous ne passiez pas devant le

 16   petit pont-bascule ? Donc quand vous êtes entré dans le camp de Keraterm,

 17   vous n'êtes pas passé par le pont-bascule, ou plutôt --

 18   R.  Eh bien, si j'arrivais de la ville, je passais donc sous une route,

 19   mais quand j'arrivais de la caserne, eh bien, je ne passais pas par là. Je

 20   ne devais pas passer par là.

 21   Q.  Monsieur Radetic, ce pont-bascule était à l'intérieur du camp de

 22   Keraterm. On le voit devant le bâtiment gris que vous venez d'encercler

 23   avec la lettre A. Est-ce que c'est par là que vous êtes passé ?

 24   R.  C'est encore le problème du pont-bascule qui se pose, parce que je ne

 25   me souviens pas qu'il y avait un pont-bascule quelconque, mais on peut en

 26   parler plus tard, si vous voulez. Ce qui est exact, c'est que la police

 27   militaire a utilisé le petit bâtiment blanc qui est juste derrière.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez marquer cela avec la lettre C.


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  1   R.  [Le témoin s'exécute]

  2   Q.  Vous avez parfois posé des questions ou interrogé les détenus

  3   dans le bâtiment marqué par la lettre C, n'est-ce pas ?

  4   R.  Non. Je ne les ai interrogés que dans le bâtiment marqué par la lettre

  5   A.

  6   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, mettre une date à cet endroit.

  7   Aujourd'hui, on est le 20 janvier.

  8   R.  [Le témoin s'exécute]

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je voudrais verser ceci au dossier,

 10   Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien, nous allons le verser.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P6594.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Vous pouvez enlever cela de l'écran pour

 14   l'instant.

 15   Q.  Monsieur Radetic, c'est le poste de police 2 de Prijedor qui assurait

 16   la sécurité du camp, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je sais que la sécurité était assurée par la police civile, mais je ne

 18   sais pas de quel poste de police ils venaient. Je n'ai jamais posé de

 19   questions, ils ne me l'ont jamais dit.

 20   Q.  Donc au moment où vous avez mené à bien vos interrogatoires à Keraterm,

 21   vous étiez là en tant que membre de la police militaire. Et dans un

 22   paragraphe, vous en parlez -- enfin, c'est vrai, n'est-ce pas, vous avez

 23   été nommé en tant que membre de la police militaire ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  C'est dans le paragraphe 28 de votre déclaration, vous avez dit que

 26   vous étiez là pour contrôler si au cours des interviews, des déclarations

 27   il apparaît des éléments de crime commis contre les forces armées, ceci

 28   correspondait au Code pénal de la RSFY, articles 17 et 19. Donc, pour que


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  1   les choses soient bien claires, vous saviez que la date butoir pour le

  2   départ de la JNA était le 19 mai, et ça a été donc avant la création du

  3   camp de Keraterm. Donc, les forces armées dont vous parlez étaient

  4   finalement la VRS et le MUP de la RS ?

  5   R.  Oui, précisément.

  6   Q.  Donc, votre seule mission, c'était de contrôler s'il y a eu des

  7   éléments de crime de découverts, perpétrés contre la JNA avant le 19 bien

  8   ou bien contre la VRS et le MUP de la RS ?

  9   R.  Il s'agissait de détecter des crimes commis contre l'armée,

 10   exclusivement contre l'armée, à l'époque c'étaient la VRS et l'armée de la

 11   Republika Srpska. Il n'était pas nécessaire pour nous de contrôler des

 12   crimes éventuels commis contre le MUP, vu que les membres du MUP étaient

 13   avec nous dans cette même commission.

 14   Q.  Vous parlez de la commission --

 15   R.  Je parle de cette commission d'enquête.

 16   Q.  Vous aviez trois personnes au niveau de chaque d'équipe d'enquêteurs,

 17   une personne qui venait de l'armée, une qui venait de la sécurité d'Etat,

 18   et l'autre qui venait de la sûreté d'Etat ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Donc, vous dites que votre fonction s'est limitée uniquement aux crimes

 21   perpétrés contre la JNA avant le 19 mai ou contre la VRS et que les deux

 22   autres personnes qui faisaient partie, donc, de votre commission

 23   s'occupaient de l'aspect policier de l'interrogatoire; est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Donc, il y avait trois équipes d'enquêteurs à Keraterm ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et qui était le représentant de la VRS avec Grozdin Mijetic [phon] de

 28   la sûreté de l'Etat, la DB, et Gostimir Modic de la SJB ?


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  1   R.  Non, non, non. Il n'a pas très bien compris. Modic venait de la

  2   sécurité de l'Etat. Je le connaissais.

  3   Q.  C'est exactement ce que j'ai dit. La SJB. Donc, c'était votre équipe;

  4   vous étiez trois ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   R.  Je ne le connaissais pas personnellement, et je n'ai pas retenu son

  8   nom. Cela fait longtemps. Il n'était pas membre du service de Sécurité. Je

  9   ne connais pas son nom.

 10   Q.  Brane Siljeg.

 11   R.  Possible.

 12   Q.  Laissez-moi terminer la question. Donc, Brane Siljeg et Ranko Rukolo

 13   [comme interprété] étaient le représentant de la VRS au niveau de la

 14   deuxième équipe, n'est-ce pas ?

 15   R.  Ecoutez, je ne sais pas. Vraiment, je ne le sais pas. Je connais

 16   personnellement personne de ces gens. Peut-être qu'ils ne venaient pas

 17   ensemble à Keraterm, ils ne partaient pas ensemble.

 18   Q.  Est-ce que vous connaissiez Radomir Rodic et Marko Radisic ?

 19   R.  Je connais le nom de Ranko Radisic, mais c'est la première fois que

 20   j'entends parler de Radomir Rodic.

 21   Q.  [aucune interprétation].

 22   R.  Marko, Marko avez raison.

 23   Q.  Quels étaient les deux autres membres de la VRS qui travaillaient dans

 24   l'équipe du Keraterm ?

 25   R.  Je ne les connaissais pas.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience. Je pense qu'à la

 27   ligne 11, il y a une erreur. Le témoin a dit que cet homme était membre de

 28   la sûreté de l'Etat.


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  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  2   Q.  On parle d'un Brane. On disait que Brane faisait partie de la réserve.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'était pas un membre d'active mais un

  4   réserviste.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je connais Marko Radetic, et je puis vous dire

  6   en toute certitude que c'était un réserviste, parce qu'il avait travaillé

  7   dans la mine qui se trouvait de l'autre côté de la rue, donc je le

  8   connaissais personnellement. S'agissant de Brano Siljeg, je ne sais pas ce

  9   qu'il faisait à Keraterm. Je sais que c'était un employé du SUP. Et

 10   troisièmement, l'homme de la Sûreté de l'Etat qui était avec moi, eh bien,

 11   j'ai dit que c'était un réserviste, je ne le connaissais pas. Il

 12   n'appartenait pas au rang des policiers d'active.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Radetic, est-ce que vous avez travaillé avec M. Modic dans le

 15   camp d'Omarska pendant une période de temps très, très brève à la fin du

 16   mois de mai ?

 17   R.  Non, non.

 18   Q.  Est-ce que vous avez un surnom ?

 19   R.  Parfois on m'appelle Draja, c'est un surnom. Qu'est-ce que c'est dans

 20   le compte rendu, "Darko Kraljevic" ?

 21   Q.  Oui, mais on vous surnommait aussi Draja, D-r-a-j-a, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous avez dit que vous n'aviez pas travaillé avec Gostimir Modic dans

 24   le camp d'Omarska, est-ce que vous ne vous êtes jamais rendu au camp

 25   d'Omarska quand c'était un centre de détention ?

 26   R.  Je m'y suis rendu une fois, dix minutes, sur les ordres du lieutenant-

 27   colonel Majstorovic.

 28   Q.  Je vous pose cette question parce que le Témoin J a déposé dans


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  1   l'affaire Kvocka, et il a dit qu'il vous avait vu avec d'autres enquêteurs

  2   là-bas.

  3   R.  Non. Un rapport avait été rédigé à propos d'une grande quantité d'armes

  4   qui avait été vendue, et le suspect, un Serbe présumé, était détenu là-bas.

  5   Q.  Monsieur Radetic, vous avez dit que vous vous étiez rendu au camp

  6   d'Omarska une fois; c'est bien cela ?

  7   R.  Non, vous avez mal compris. Je ne me suis rendu à Omarska dans le cadre

  8   d'une visite, j'y suis allé officiellement pour interroger quelqu'un qui y

  9   était détenu. Et l'homme, dès le début, m'a dit qu'il ne savait rien de

 10   cette histoire d'armes, et donc je suis reparti.

 11   Q.  Revenons à Keraterm. J'aimerais attirer votre attention sur les

 12   conditions de traitement des détenus. En l'espèce, des éléments de preuve

 13   montrent que les détenus qui étaient emmenés pour interrogatoire par les

 14   inspecteurs et les agents opérationnels ont fait l'objet de sévices pendant

 15   leurs interrogatoires.

 16   R.  Au sein de la commission où moi j'ai travaillé, il n'y avait pas

 17   d'insultes prononcées, encore moins de coups qui étaient portés. Je n'ai

 18   jamais vu quiconque porter les traces de blessure ou qui ait été attaqué,

 19   non.

 20   Q.  Et vous n'avez vu personne sortir des pièces d'interrogatoire en sang

 21   ou grièvement blessé ou même légèrement blessé ?

 22   R.  Alors, si je vous ai dit que dans la commission où moi je travaillais

 23   personne n'a été attaqué même verbalement, donc il est impossible que j'ai

 24   vu quelqu'un se faire blesser lorsqu'il sortait de ces pièces.

 25   Q.  Et vous n'avez entendu aucun bruit, vous n'avez pas entendu de voix,

 26   des gens crier provenant de ces pièces ?

 27   R.  Alors, maintenant s'agissant des bruits et des voix, je n'ai pas envie

 28   de commettre d'erreur après autant de temps, maintenant, si quelqu'un a


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  1   crié, après 20 ans, je ne pourrais pas vous le confirmer, vous le dire à

  2   100 %.

  3   Q.  Mais vous savez qu'à partir de la fin du mois de mai jusqu'à un moment

  4   au mois de juin, un problème est survenu, celui de personnes qui n'étaient

  5   pas habilitées à se trouver dans le camp et qui s'y rendaient pour passer à

  6   tabac des détenus ?

  7   R.  J'ai entendu parler de cela mais de façon officieuse. Des informations

  8   officieuses ont dit qu'après notre départ de Keraterm, certains gardes

  9   avaient violé le règlement et s'étaient mal comportés vis-à-vis des

 10   prisonniers. J'ai transmis ces informations officieuses à mon commandement

 11   supérieur et j'ai donc rempli mon obligation. Cela étant, ce problème

 12   concernait le membre de la commission qui faisait partie du MUP, parce que

 13   par le truchement de leur supérieur au sein de la police, c'étaient eux qui

 14   pouvaient gérer ce genre de problème et le régler.

 15   Q.  Alors, vous avez dit plusieurs choses. Vous avez dit que vous avez

 16   passé ou transmis de façon officieuse ces informations. J'aimerais savoir

 17   comment vous avez obtenu ces informations officieuses ? Quelles étaient vos

 18   sources ?

 19   R.  Je crains que 22 ans plus tard je ne peux pas vous répondre. J'en ai

 20   entendu parler, il y avait des rumeurs qui circulaient selon lesquelles

 21   certains gardes - pas tous les gardes, hein, juste quelques gardes -

 22   avaient maltraité physiquement des détenus, de nuit. Personne ne m'a donné

 23   de noms bien précis des gardes qui avaient commis ces actes. Mais on a

 24   juste attiré mon attention là-dessus.

 25   Q.  Qui vous a donné ces informations ? Est-ce que c'étaient des personnes

 26   chargées des interrogatoires qui vous l'ont dit ? Est-ce que c'était le

 27   commandant du camp qui vous l'a dit ? Est-ce que c'étaient les personnes

 28   chargées des postes ? Quel organe vous a transmis ce genre d'information ?


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  1   R.  Je ne m'en souviens vraiment pas maintenant, on me l'a dit en passant.

  2   Ce n'est pas comme si quelqu'un avait rédigé un rapport officiel verbal ou

  3   oral. C'est quelque chose que l'on m'a dit en passant, on m'a dit que

  4   c'était l'un des problèmes de Keraterm.

  5   Q.  Ces crimes ont été commis non seulement pendant la nuit mais aussi

  6   pendant la journée; vous le savez ?

  7   R.  Non, je n'en sais rien. Moi, j'ai entendu parler des événements de

  8   nuit.

  9   Q.  Vous avez dit que vous aviez transmis ces informations à votre

 10   commandement supérieur. A qui avez-vous transmis ces informations

 11   exactement ?

 12   R.  Si ma mémoire est bonne, je n'en suis pas complètement sûr, c'est au

 13   chef de la sécurité, au lieutenant-colonel Majstorovic, que j'ai transmis

 14   ces informations lorsque je lui ai fait rapport.

 15   Q.  Vous avez dit que c'était à la police de gérer cela. Est-ce que je peux

 16   en déduire par là que vous ne parlez que des gardes du camp de Keraterm qui

 17   faisaient partie du service de sécurité de la police et que seulement eux

 18   avaient commis ces attaques, ces mauvais traitements graves, de nuit ?

 19   R.  Ecoutez, je pense que nous sommes d'accord pour dire que les gardes de

 20   Keraterm dépendaient de la force de la police civile. Ils venaient tous des

 21   rangs de la police civile. Si ces personnes ont agi illégalement vis-à-vis

 22   des prisonniers, il serait logique que leurs supérieurs au sein de la

 23   police règlent ce problème.

 24   Q.  Et qu'en est-il de Dusko Knezevic alors ? Est-ce qu'il s'est rendu au

 25   camp pour commettre des crimes ?

 26   R.  Que je sache, Dusko Knezevic a été jugé pour crimes de guerre et il est

 27   en train de purger sa peine. Il a essayé de me tuer en août 1992. Et après

 28   tout ce temps, malgré cela, je ne peux toujours pas vous affirmer si Dusko


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  1   Knezevic a agi seul ou de concert avec d'autres personnes.

  2   Q.  Monsieur Radetic --

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que vous dites qu'à l'époque où vous avez travaillé dans le camp

  5   de Keraterm, vous ne saviez pas qu'il y avait là aussi

  6   Zoran Zigic, Dusko Knezevic, Timarac, Janjic, Saponja, donc vous ne saviez

  7   pas que ces gens se rendaient dans le camp la nuit et qu'ils blessaient

  8   gravement les détenus ?

  9   R.  Eh bien, toute la ville avait des problèmes avec les personnes que vous

 10   venez de nommer.

 11   Q.  Monsieur Radetic, vous n'avez pas répondu à la question que je vous ai

 12   posée.

 13   R.  Ils ont fait beaucoup de crimes.

 14   Q.  Je vous ai posé une question très précise : à l'époque où vous avez

 15   travaillé dans le camp, est-ce que vous dites que vous ne saviez pas que

 16   ces gens-là se rendaient dans le camp et qu'ils commettaient des crimes

 17   graves contre les détenus non-serbes ?

 18   R.  Eh bien, pendant ces 12 jours, je dis en toute responsabilité que je

 19   n'ai pas reçu de telles informations, mais je peux, en revanche, vous

 20   donnez des informations que j'ai reçues.

 21   Q.  Non, dans votre déclaration vous dites que vous êtes resté 15 jours; 12

 22   ou 15 jours ?

 23   R.  Quand j'ai fait la déclaration pour l'équipe de la Défense, je leur ai

 24   dit que je ne me rappelais pas exactement. Mais, en tout cas, je n'ai pas

 25   pu rester plus de 15 jours, sans doute moins que cela.

 26   Q.  Donc, il n'y a pas eu de la part de la police militaire ni de quiconque

 27   d'autres au niveau des autorités serbes de Prijedor à faire preuve de

 28   volonté d'empêcher ces gens d'accéder au camp pour commettre des meurtres


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  1   ou pour tabasser les gens; est-ce bien exact ?

  2   R.  Eh bien, je vais vous dire, vous essayez de mettre dans ma bouche des

  3   choses pour lesquelles j'ai dit tout à l'heure que je ne m'en souvenais

  4   pas. Pendant ces 12 jours, Dusko Knezevic et les autres énumérés par vous

  5   ne sont pas venus, et pendant cette période de 12, 13 ou 15 jours, personne

  6   ne m'a dit qu'ils venaient pour faire telles choses. Ce que je sais, c'est

  7   qu'il y a eu des délits au pénal en masse commis par ces individus-là sur

  8   le territoire de la ville et ils ont essayé personnellement de me tuer,

  9   moi, en août 1992.

 10   Q.  A un moment donné, M. Zigic a été arrêté, début juillet. Le 4 juillet,

 11   le dénommé Sikirica, qui était commandant du camp de Keraterm, a décidé

 12   d'écrire à l'intention de ses supérieurs hiérarchiques.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et j'aimerais à ce titre qu'on nous

 14   affiche la pièce D140 [comme interprété].

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et si l'on continuait demain, Madame

 16   Sutherland ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, si vous le

 18   préférez, en effet.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Radetic, nous allons continuer

 20   demain matin à 9 heures. Je pense que vous devez certainement le savoir,

 21   mais je vous prie de ne discuter avec personne au sujet de votre

 22   témoignage.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'audience est levée.

 25   --- L'audience est levée à 14 heures 49, et reprendra le mardi, 21 janvier

 26   2014, à 9 heures 00.

 27  

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