Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 21 janvier 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  7   Oui, Monsieur Harvey.

  8   M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  9   Messieurs les Juges. Je voudrais vous présenter Dennis Lazarus, qui est du

 10   Mexique et qui travaille pour le compte de notre équipe depuis novembre

 11   2013, et il est un diplômé des relations internationales.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 13   Bonjour, Monsieur Radetic.

 14   Allons-nous poursuivre, Madame Sutherland.

 15   LE TÉMOIN : DRAGAN RADETIC [Reprise]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   Contre-interrogatoire par Mme Sutherland : [Suite]

 18   Q.  [interprétation] Monsieur Radetic, pour ce qui est des interprètes et

 19   du sténotypiste, nous devons nous assurer de ne pas parler en même temps,

 20   et je me dois de m'excuser auprès des interprètes et du sténotypiste pour

 21   ce qui est de la rapidité de mon élocution hier et pour ce qui est des

 22   chevauchements.

 23   Alors, je voudrais tirer au clair certaines choses que vous avez dites

 24   hier. Au compte rendu d'audience, page 45 673, vous avez dit que le

 25   commandement de la 43e Brigade motorisée s'est déplacé vers le bâtiment de

 26   Kozara Putevi vers la fin mai ou juin. Et Kozara Putevi, ce bâtiment -- ou

 27   c'était plutôt une caserne qui se trouvait en face du camp de Keraterm.

 28   Alors, est-ce que vous êtes allé à cette caserne ?


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  1   R.  Le bâtiment de Kozara Putevi ? Oui, j'y suis allé à plusieurs reprises.

  2   Q.  A l'époque où vous avez travaillé dans le camp de Keraterm; c'est le

  3   cas, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je ne suis pas sûr. Je ne pense pas pouvoir affirmer que le

  5   commandement de la 43e Brigade se trouvait à Kozara Putevi. Je crois qu'ils

  6   sont allés dans le bâtiment de Kozara Putevi après.

  7   Q.  Vous nous avez dit que cette unité est restée dans la vieille caserne,

  8   Zarko Zgonjanin. Pour les besoins des Juges, je précise que l'emplacement

  9   se trouve indiqué à la pièce P03533. L'unité que vous avez mentionnée hier

 10   est une unité de la police militaire, n'est-ce pas ?

 11   R.  Si mes souvenirs sont bons, vous m'avez demandé quelque chose au sujet

 12   du commandement de la 43e Brigade pour ce qui est de son installation au

 13   bâtiment de Kozara Putevi, et je pense vous avoir répondu. Le commandement

 14   de la 43e Brigade - rien que le commandement - a été transféré vers le

 15   bâtiment de Kozara Putevi. Je ne sais pas vous parler de pourcentages, mais

 16   la majeure partie de l'unité est restée dans la caserne Zarko Zgonjanin. Je

 17   parle de la 43e Brigade, entendons-nous bien.

 18   Q.  Monsieur Radetic, nous avons beaucoup de sujets à aborder aujourd'hui

 19   dans un temps très, très limité. Je pense que ma question était claire.

 20   Vous nous avez dit hier que le commandement de la brigade a été transféré

 21   de cette caserne Zarko Zgonjanin vers le bâtiment de Kozara Putevi. Vous

 22   nous avez également dit que l'unité est restée dans la vieille caserne. Je

 23   vous ai juste demandé ce matin si, par là, quand vous parlez de "cette

 24   unité", vous parlez de l'unité de la police militaire qui est restée à la

 25   vieille caserne ?

 26   R.  Si nous parlons de la police militaire, une partie de la police

 27   militaire est restée dans la vieille caserne et une partie est passée dans

 28   le bâtiment blanc qui se trouve derrière le bâtiment de Keraterm, que je


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  1   vous ai d'ailleurs montré sur la photo lors de l'audience d'hier. Mais je

  2   ne sais pas vous parler de dates auxquelles ça s'est fait. Je n'arrive pas

  3   à m'en souvenir.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas du tout de quoi vous

  6   parlez. Vous avez une objection ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Je ne sais pas comment interpréter le 3533

  8   de l'Accusation. On voit là un bâtiment, mais on ne voit pas la corrélation

  9   entre ce bâtiment et les autres bâtiments. Et cela a été mentionné comme

 10   étant une chose tout à fait sous-entendue.

 11   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais juste

 12   faire remarquer à l'intention des Juges de la Chambre le fait que cette

 13   caserne Zarko Zgonjanin est montrée sur la pièce à conviction.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, continuons. Je crois que c'est bon.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Q.  Monsieur Radetic, au compte rendu, page 45 683, vous avez dit que Dusko

 17   Kraljevic [comme interprété] a été jugé pour crimes de guerre et qu'il est

 18   en train de purger sa peine. Vous avez connaissance du fait qu'il a été

 19   jugé en Bosnie-Herzégovine et qu'il y a eu un transfert de compétences de

 20   la part du TPIY pour ce qui est d'un acte d'accusation dressé par la cour

 21   d'Etat de Bosnie et il y a été transféré. Vous en avez connaissance ?

 22   R.  C'est la première fois que j'entends parler hier et aujourd'hui de ce

 23   nom, Dusko Kraljevic. Je ne sais pas du tout de qui vous parlez. Si

 24   j'arrive à m'en rappeler, Dusko Kraljevic n'existait pas dans la 43e

 25   Brigade, ou du moins moi je n'ai pas eu l'occasion de faire sa

 26   connaissance.

 27   Q.  Monsieur Radetic, hier, j'ai mentionné Dusko Knezevic qui a été

 28   impliqué dans des crimes --


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  1   R.  Knezevic ?

  2   Q.  Oui, et Zoran Zigic. Et vous savez qu'il a été jugé en Bosnie-

  3   Herzégovine. Ça a été la résultante d'un acte d'accusation dressé par le

  4   TPIY à l'intention de la cour d'Etat là-bas.

  5   R.  Madame, pour qu'il y ait un procès, vous m'avez d'abord demandé quelque

  6   chose au sujet d'un Dusko Kraljevic. Maintenant, vous sautez ce nom, et

  7   maintenant vous posez une question au sujet de Dusan Knezevic et de Zoran

  8   Zigic. Est-ce que nous avons encore besoin de parler de ce Dusko Kraljevic

  9   ou pas ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Radetic, c'est une question

 11   d'interprétation. Il doit y avoir eu une erreur d'interprétation. Veuillez

 12   comprendre la chose, je vous prie.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que vous êtes à même de répondre à ma question, Monsieur Radetic

 15   ?

 16   R.  La question c'était quoi, Dusan Knezevic et Zoran Zigic ?

 17   Q.  Non. Je vais aller de l'avant. Nous sommes en train de perdre notre

 18   temps.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce à

 20   conviction D14041 [comme interprété].

 21   Q.  Monsieur Radetic, je vous demande de vous concentrer sur mes questions

 22   et d'y répondre de la façon la plus succincte possible, s'il vous plaît.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous redonner la

 24   référence de la pièce à conviction, s'il vous plaît.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] D04140.

 26   Q.  Le document que vous voyez sur l'écran est une note de service signée

 27   par Dusko Sikirica, le commandant chargé de la sécurité de Keraterm, et la

 28   date est celle du 4 juillet 1992. Il y est dit : Zigic, un homme en


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  1   uniforme, armé, aux côtés du dénommé Dusko Knezevic et d'un autre dénommé

  2   Zoran Vokic et Zeljko Timarac sont venus au camp de Keraterm et ont passé à

  3   tabac des prisonniers jusqu'à épuisement. Au bout de quelques jours, les

  4   personnes tabassées sont décédées. On demande au poste de police Prijedor

  5   numéro 2 de suggérer au commandement militaire la nécessité d'empêcher ce

  6   type d'activités arbitraires. Alors, Sikirica établit par ceci le fait

  7   qu'il y a eu des crimes de commis ? Vous pouvez répondre par un oui ou par

  8   un non.

  9   R.  Ce qui découle de tout ce que vous venez de nous lire, c'est oui.

 10   Q.  Et Zigic et autres, en résultante de cette note de service, se devaient

 11   d'être mis aux arrêts, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  La police avait pour obligation d'informer le commandement militaire et

 14   le procureur de cette note de service du 4 juillet 1992 comportant une

 15   information relative à des crimes qui ont été commis, n'est-ce pas ?

 16   R.  Madame, le 4 juillet 1992, il n'y a pas eu de procureur militaire et

 17   pas de tribunal militaire non plus. Pour autant que je m'en souvienne, le

 18   tribunal militaire et le procureur militaire ont été mis en place fin

 19   septembre ou début octobre 1992.

 20   Q.  Ils auraient pu informer la police civile qui aurait informé un

 21   procureur civil, n'est-ce pas ?

 22   R.  Justement. Parce que ce dénommé Zoran Zigic, ce n'était pas un conscrit

 23   militaire, il ne faisait pas partie non plus de la 43e Brigade militaire.

 24   Q.  Il y avait une unité de la police militaire sous le commandement de

 25   l'armée, vous en étiez membre, vous-même, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Donc, la police avait pour devoir d'informer le commandement militaire

 28   de cette lettre, et il relevait de la responsabilité tant de la police que


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  1   de l'armée d'investiguer, n'est-ce pas ?

  2   R.  Madame, la police militaire avait pour mission de veiller à tout ce qui

  3   était illégal et commis par des personnes en uniforme faisant partie des

  4   forces armées. Zoran Zigic n'était pas un militaire, il n'était même pas

  5   conscrit militaire. Il ne pouvait être mobilisé, si mes souvenirs sont

  6   bons, parce qu'il y avait des raisons de santé à cela. Le récit relatif à

  7   Zoran Zigic devait avoir été terminé au niveau du ministère de l'Intérieur

  8   étant donné que c'était un civil qui commettait des délits au pénal.

  9   Q.  Et ce Dusko Knezevic, il faisait partie de l'armée ou pas ?

 10   R.  Il faisait partie d'une unité incorporée dans la 43e Brigade.

 11   Q.  Bon. Nous allons nous pencher sur un certain nombre de documents dans

 12   un instant, mais avant que de le faire, au paragraphe 35 de votre

 13   déclaration, vous avez indiqué que vous avez été transféré au bout d'un

 14   certain temps à Keraterm, vers la police judiciaire.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Un instant. Il me semble

 16   qu'il y a certains problèmes avec votre micro. Je ne suis pas du tout sûr

 17   du fait que le témoin ait entendu votre question de façon intégrale. Avez-

 18   vous compris la question ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] On m'a demandé si au bout d'un certain temps

 20   on m'a transféré vers la police judiciaire de l'armée; oui, c'est le cas.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 22   Q.  Au paragraphe 8 de votre déclaration, vous précisez que tout un chacun

 23   pour qui la police militaire aurait constaté qu'il aurait commis un crime

 24   venait à être mis aux arrêts et faisait l'objet d'un dépôt de plainte.

 25   R.  Mais ça ne veut pas forcément dire qu'il a été mis aux arrêts. La

 26   plupart --

 27   Q.  Monsieur Radetic, vous avez mentionné des pillages, des vols à main

 28   armée, des brigandages, et les victimes de ces crimes-là, c'était pour


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  1   l'essentiel des non-Serbes ?

  2   R.  La grande majorité de ces délits au pénal, ça a été commis sur le

  3   territoire où il y avait eu précédemment des conflits armés. Il n'y avait

  4   pas de population, c'est là qu'il y a eu des pillages et des vols dans 90 %

  5   des cas.

  6   Q.  Et ces endroits où il y avait eu des combats ont été abandonnés par les

  7   civils, c'est cela les secteurs dont vous êtes en train de parler,

  8   c'étaient des maisons qui appartenaient à des non-Serbes dans les secteurs

  9   de combat, et c'est là qu'il y a eu la perpétration de ces vols ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Mais qu'en est-il des crimes graves menaçant la vie d'autrui, des

 12   crimes de guerre à l'égard de la population civile ? Avez-vous enquêté au

 13   sujet de ces crimes-là ? Parce que vous avez dit que tout un chacun pour

 14   qui la police militaire avait constaté qu'ils avaient commis des crimes ont

 15   été arrêtés.

 16   R.  Oui, ils ont été poursuivis en justice. Quand on a obtenu des

 17   renseignements au sujet des délits au pénal mettant en danger la vie

 18   d'autrui, nous faisions des dossiers pour poursuite en justice. Nous avons

 19   entendu les suspects, les témoins éventuels, nous avons collecté les

 20   éléments de preuve matérielle, et tout ça, ça a été consigné.

 21   Q.  Vous vous êtes surtout concentré sur les crimes commis à l'égard des

 22   biens, mais pas des crimes qui sont des meurtres ou des crimes commis

 23   contre une population non-serbe, n'est-ce pas ?

 24   R.  Il y a eu bien plus de délits au pénal de commis du point de vue des

 25   atteintes à la propriété d'autrui que les autres, c'est du moins les

 26   informations qui étaient accessibles à la police. Nous ne savions pas qu'il

 27   y avait eu beaucoup de meurtres à l'égard de la population non-serbe, mais

 28   pour ce qui est des autres crimes, oui, nous en avons eu vent. Nous avons


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  1   reçu des informations à ce sujet-là.

  2   Q.  Monsieur Radetic, vous nous avez dit hier que vous avez informé votre

  3   commandement supérieur des crimes dont vous avez entendu parler -- non,

  4   excusez-moi. Vous avez informé votre commandement des crimes au sujet

  5   desquels vous aviez appris à titre officieux que c'est des crimes commis au

  6   camp de Keraterm une fois que vous êtes parti. La police militaire n'a pas

  7   enquêté au sujet de ces crimes, n'est-ce pas ?

  8   R.  Si.

  9   Q.  Bien. Mais qu'en est-il du massacre dans la pièce numéro 3 où il y a eu

 10   mort de plus de 150 détenus le 24 juillet 1992 au camp de Keraterm ? Est-ce

 11   que la police militaire a enquêté à ce sujet ?

 12   R.  Dans ma déclaration, celle que j'ai communiquée au Tribunal ici

 13   présent, j'ai expliqué de façon tout à fait directe que je n'étais pas à

 14   Prijedor à l'époque. J'ai été absent à titre privé parce que mon père était

 15   malade. A mon retour, quater jours plus tard, j'ai appris qu'il y a eu des

 16   meurtres de commis le 24 juillet. Pour autant que je le sache, étant donné

 17   qu'il s'agissait de civils qui étaient des victimes et de la police civile

 18   qui était chargée de sécuriser le camp, il y a eu, d'après ce que j'en

 19   sais, une enquête de diligentée par le ministère de l'Intérieur, c'est-à-

 20   dire le poste de police de Prijedor.

 21   Q.  Mais la ville entière n'a-t-elle pas su qu'il y avait une unité de la

 22   Défense territoriale qui était impliquée dans la perpétration de ce

 23   massacre ?

 24   R.  Quand je suis revenu dans la ville, j'ai été informé qu'il y a eu une

 25   tentative d'évasion au centre d'enquête de Keraterm et que ces personnes

 26   qui ont essayé de s'évader ont été abattues. C'est ce que j'ai appris, moi.

 27   Q.  Les civils non armés qui se trouvaient fermés à clé dans cette espèce

 28   d'étable, ont été abattus à la mitrailleuse, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Ecoutez, Madame, je vous ai dit ce que j'ai ouï dire dans des

  2   conversations informelles en ville. Je n'étais pas présent à ce moment-là.

  3   Q.  Passons brièvement au bureau du procureur militaire. Au paragraphe 8 de

  4   votre déclaration, vous dites que le principal problème pour ce qui est du

  5   fonctionnement de la police militaire c'est le fait qu'il n'y a pas eu de

  6   tribunal militaire de créer jusqu'à septembre ou octobre 1992, ce qui fait

  7   qu'on ne pouvait pas juger les auteurs de crimes. Nous avons des éléments

  8   de preuve présentés dans cette affaire disant que les tribunaux militaires

  9   et les procureurs militaires dans la Republika Srpska ont été mis sur pied

 10   bien avant et que cela a découlé d'une décision de M. Karadzic datée du 31

 11   mai 1992, pièce P03602. Nous avons des éléments de preuve présentés dans

 12   cette affaire disant que le tribunal militaire de Banja Luka était

 13   opérationnel et qu'il a commencé à fonctionner en août 1992, c'est ce qui

 14   se trouve à la pièce à conviction P03596.

 15   Donc, le bureau du procureur militaire a été en état de fonctionner au

 16   moins à compter de la mi-juillet ?

 17   R.  Ecoutez, mi-juillet je suis allé au parquet militaire, et là-bas il y

 18   avait un homme, qui n'avait ni bureau, qui n'avait non pas un ordinateur,

 19   il n'avait même pas de machine à écrire. Le capitaine Pisarevic, son prénom

 20   m'échappe, du matin au soir, a téléphoné pour demander des conditions

 21   minimums de travail. C'est de cela qu'avait l'air le procureur ou le

 22   parquet militaire à la date que vous indiquez en 1992, c'est-à-dire à la

 23   mi-juillet.

 24   Q.  Nous avons des éléments de preuve dans cette affaire, pièce à

 25   conviction P03608, qui montre que le journal du procureur militaire indique

 26   que ce parquet militaire était opérationnel au moins à compter du 19

 27   juillet 1992. Alors, Monsieur Radetic, vous avez travaillé pour le compte

 28   du bureau du procureur en août 1992, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Je vous ai dit que c'était fin août, début septembre. Je n'ai pas gardé

  2   en mémoire la date exacte.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait --

  4   Q.  Vous avez été un employé administratif à l'époque dans ce bureau du

  5   procureur militaire, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, j'étais un référendaire.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce 65

  8   ter 25840, s'il vous plaît.

  9   Q.  Monsieur Radetic, ceci est la page de garde d'un dossier de l'affaire

 10   au pénal reliée à Zoran Zigic, au coin supérieur à gauche on voit la date

 11   du 19 août 1992. La référence est le numéro 84/92. Si l'on se penche

 12   maintenant sur le bas de la page, y a-t-il référence de faite à vous en bas

 13   à droite ?

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et j'aimerais qu'on nous présente la page

 15   2 de la version anglaise. C'est à la page 2 en anglais.

 16   Q.  Est-ce que c'est vous qui êtes mentionné ici, Monsieur Radetic ?

 17   R.  Je suppose que oui, mais je me souviens pas de ce cas.

 18   Q.  Vous étiez la seule personne qui portait ce nom de famille Radetic qui

 19   travaillait au bureau du procureur militaire, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 22   document, Monsieur le Président.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans la version en anglais c'est combien de

 24   pages ?

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'est la page de garde, donc une page.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Deux pages ?

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Deux pages en anglais, Monsieur le

 28   Président.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Ce document sera versé au dossier.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Sous la cote P6595, Monsieur le

  3   Président.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  5   Q.  Au paragraphe 7 de votre déclaration, vous dites que les autorités

  6   civiles, la police, et l'armée ont pris des mesures relevant de leur

  7   compétence contre les personnes qui ont violé l'ordre public et qui ont

  8   commis des crimes, et au paragraphe 8, comme on l'a déjà dit, lorsque vous

  9   travailliez à la police militaire, tout le monde a été arrêté, tous ceux

 10   qui ont commis des crimes ont été arrêtés, mais il n'était pas possible

 11   d'intenter des procès au pénal contre ces personnes puisque le tribunal

 12   militaire ne fonctionnait pas. Vous avez dit au paragraphe 50 qu'il y a eu

 13   des tentatives pour que ces gens soient traduits en justice parce qu'ils

 14   ont commis des crimes. Mais le fait est, Monsieur Radetic, que le bureau du

 15   procureur et le tribunal n'ont pas lancé des poursuites au pénal contre les

 16   auteurs des crimes contre les non-Serbes ?

 17   R.  Je sais pas si vous me demandez que je vous parle des activités de la

 18   police militaire ou des activités du bureau du procureur militaire. Je sais

 19   pas comment répondre à votre question.

 20   Q.  Du bureau du procureur militaire et du tribunal.

 21   R.  Le parquet militaire, après qu'il a commencé à fonctionner conformément

 22   à la loi concernant son fonctionnement, et c'était vers la fin du mois de

 23   septembre, s'occupait des affaires qui ont été transmises au parquet des

 24   organes de la police, et c'était dans la mesure dans laquelle des plaintes

 25   au pénal ont été transmises et déposées et dans la mesure où il y avait des

 26   preuves qui ont été jointes à ces plaintes au pénal. Pourtant, le parquet

 27   militaire, étant donné que c'était la guerre, s'occupait plutôt des

 28   problèmes qui prévalaient dans les rangs de l'armée de la Republika Srpska,


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  1   qui n'ont pas permis de --

  2   Q.  Monsieur Radetic, je m'excuse de vous avoir interrompu au milieu de

  3   votre réponse, mais j'ai dit qu'ils ne se sont pas occupés des crimes qui

  4   avaient été commis contre la population non-serbe - c'était ma question -

  5   répondez par un oui ou par un non ?

  6   R.  Je ne suis pas certain de pouvoir répondre par un oui ou par un non,

  7   puisque j'aurais besoins de plus de temps pour me rappeler de tout cela. Je

  8   ne me souviens pas du nombre d'affaires qui ont été résolues et auxquelles

  9   vous avez fait référence dans votre question.

 10   Q.  J'aimerais qu'on regarde un exemple, un exemple concernant le tribunal

 11   de la municipalité de Prijedor. Vous avez travaillé au sein de ce tribunal

 12   pendant sept ans avant la guerre, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Nous savons que Zoran Zigic a été arrêté le 1er juillet et qu'il a été

 15   détenu pendant trois jours parce qu'il a commis une infraction pénale, il a

 16   accepté le pot-de-vin de 4 000 marks allemands des détenus non-serbes au

 17   camp de Keraterm.

 18   Mme SUTHERLAND : [interprétation] La référence est la pièce à conviction de

 19   la Défense D01926. Et le rapport ou la plainte au pénal est la pièce

 20   portant la cote D1925.

 21   Q.  Ensuite, le 3 juillet, il y a eu une requête provenant du procureur

 22   public de Prijedor.

 23   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Et est-ce qu'on peut maintenant afficher

 24   le document 25842, s'il vous plaît.

 25   Q.  Il s'agit d'un document émanant de l'adjoint du procureur et a été

 26   adressé au juge d'instruction du tribunal, en demandant qu'une enquête soit

 27   menée contre lui et qu'il soit mis en détention pendant un mois parce qu'il

 28   a commis une infraction pénale offrant un pot-de-vin. Il est dit que le 10


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  1   juin, il était membre d'une unité qui assurait la sécurité du centre de

  2   rassemblement de Keraterm. Plus tôt, on a déjà eu l'occasion de voir la

  3   pièce P04041, c'est la lettre du 4 juillet écrite par Dusko Sikirica,

  4   commandant du camp de Keraterm, où il est question des crimes qui ont été

  5   commis par quatre personnes dont les noms sont cités dans ce document. Est-

  6   ce que vous vous souvenez de cela ?

  7   R.  Non, je n'arrive pas à m'en souvenir.

  8   Q.  Il s'agit de la pièce qui a été montrée ce matin --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la note officielle écrite par

 10   Sikirica. Vous souvenez-vous de l'avoir vue ce matin ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument, je l'ai vue ce matin. Je

 12   pensais que vous m'aviez posé des questions pour savoir si je l'avais vue

 13   en 1992. En 1992, je ne l'ai pas vue, ou au moins je ne me souviens pas de

 14   l'avoir vue. Mais ce matin, oui, je l'ai vue.

 15   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 16   Q.  Excusez-moi, Monsieur Radetic, si j'ai semé encore la confusion dans

 17   votre esprit. Donc, M. Zigic a été arrêté puisqu'il a reçu un pot-de-vin,

 18   et c'était un crime. Le lendemain, après que cette lettre ait été écrite,

 19   la lettre dans laquelle il a été demandé qu'il soit mis en détention

 20   pendant un mois, Sikirica a écrit cette lettre pour informer le poste de

 21   police des crimes commis par M. Zigic. Et la police était obligée de

 22   transmettre cette lettre au procureur, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, au parquet civil. Je suppose que oui.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on afficher à présent le document de

 25   la liste 65 ter 25836.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez posé une question

 27   concernant cette requête du bureau du procureur ?

 28   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Président, je l'ai


Page 45699

  1   montrée au témoin pour établir la chronologie des événements -- ou, plutôt,

  2   de la création des documents qui vont suivre.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Poursuivez, s'il vous plaît.

  4   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Radetic, nous voyons à l'écran une lettre qui ne porte pas de

  6   date, bien qu'en haut à gauche il y ait un tampon de réception sur lequel

  7   figure une date, et on peut y voir que le document a été reçu le 8 août --

  8   le 8 juillet, je m'excuse, au bureau du procureur. Il s'agit d'une lettre

  9   de l'unité de reconnaissance et de sabotage, poste militaire 4777/3

 10   Prijedor, signée par le sergent Dusko Knezevic, qui a été envoyée au

 11   procureur public en demandant que le soldat Zoran Zigic soit libéré, Zoran

 12   Zigic qui a été accusé du crime conformément à l'article 230, puisque cette

 13   unité va quitter Derventa et ils ont besoin de Zigic puisqu'il est un

 14   soldat discipliné et exceptionnellement compétent pour ce qui est de la

 15   connaissance des explosifs.

 16   Quatre jours après que ce document ait été écrit, qu'on vient de voir, qui

 17   émane du bureau du procureur où il a été demandé qu'il soit mis en

 18   détention pendant un mois -- excusez-moi, où il est dit que Knezevic était

 19   membre de la sécurité de Keraterm, qui était rattachée à la police,

 20   maintenant nous voyons qu'il fait partie d'une unité militaire. Et nous

 21   voyons que son partenaire pour ce qui est des crimes commis ici, Dusko

 22   Knezevic, a écrit cette lettre pour sa libération.

 23   Ce poste militaire de l'unité de reconnaissance et de sabotage dont

 24   le numéro est 4773 [comme interprété], cela faisait partie de la brigade,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document

 28   de la liste 65 ter 25843.


Page 45700

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Si Mme le Procureur -- ou, plutôt, la Chambre

  2   me permet. Le document signé par Knezevic, Dusko est un faux que les

  3   criminels ont l'habitude de rédiger pour qu'un criminel aide un autre

  4   criminel.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document

  6   de la liste 65 ter 25843, s'il vous plaît.

  7   Q.  Il s'agit d'une décision, c'est la décision signée par Zivko Dragosevic

  8   --

  9   R.  Drago Savljevic.

 10   Q.  -- dans laquelle il est demandé que l'accusé Zoran Zigic soit libéré

 11   sans délai. Il est dit ici qu'il a avoué avoir commis des crimes, et le

 12   bureau du procureur a proposé qu'il soit relâché de la détention puisqu'il

 13   n'y a plus de raison pour le garder en détention. Ensuite, il est fait

 14   référence à la lettre écrite par Dusko Knezevic.

 15   Est-ce qu'il s'agit d'une base légitime ou d'un fondement légitime de le

 16   libérer de la détention puisque Zigic a avoué avoir commis le crime et

 17   qu'il aurait dû être traduit directement en justice ? En tout cas, le

 18   tribunal aurait dû être au courant de l'existence d'une lettre du 4 juillet

 19   1992, la lettre de Sikirica, où il est dit que Zigic avait commis un

 20   meurtre. Et si le tribunal disposait de preuve concernant la commission de

 21   ce meurtre, est-ce que le tribunal aurait dû le relâcher ?

 22   R.  En tant que professionnel, il faut que je vous dise que je n'aime pas

 23   m'exprimer sur les décisions de quelque tribunal que cela soit sans avoir

 24   accès aux détails de l'affaire. Dans cette affaire pour ce qui est de M.

 25   Zigic qui a été mis en détention et concernant la qualification des crimes

 26   qu'il avait commis et pour lesquels il avait été arrêté, d'abord, il faut

 27   que je dise qu'il ne s'agit pas d'infractions pénales graves. C'est donc

 28   demander et percevoir des pots-de-vin. Ce n'est pas un crime sérieux. Si le


Page 45701

  1   tribunal disposait de preuve concernant la commission de cette infraction

  2   pénale et qui corroborerait ses aveux qu'il s'agit de la perception de

  3   pots-de-vin, dans ce cas-là il n'y aurait pas eu de raison pour qu'il reste

  4   en détention d'après la législation en vigueur à l'époque et d'après la

  5   législation qui est en vigueur ici.

  6   Et si, comme vous le dites, le tribunal possédait la lettre écrite par

  7   Dusko Sikirica, alors il s'agit d'une décision qui est catastrophique, à

  8   savoir de libérer M. Zigic de la détention.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au niveau du compte rendu, à la ligne 20,

 10   il n'a pas été consigné "si le tribunal avait possédé," comme vous l'avez

 11   avancé, "si le tribunal avait possédé la lettre de Sikirica."

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est comme ça qu'on a compris cette

 13   réponse. Est-ce que vous confirmez cela, Monsieur Radetic ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Radetic, je veux vous montrer, vous avez dit que vous n'aimez

 18   pas vous occuper des affaires dans lesquelles vous n'étiez pas impliqué.

 19   Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il arrivait souvent que le

 20   tribunal relâchait des auteurs de crimes pour les faire retourner dans

 21   leurs unités pour qu'ils puissent partir sur la ligne de front ?

 22   R.  C'est une question difficile.

 23   Q.  Répondez par un oui ou par un non, s'il vous plaît.

 24   R.  Non.

 25   Q.  Vous avez dit que cela n'arrivait pas souvent ?

 26   R.  La notion ou l'acception de l'adverbe "souvent" est assez large. Je ne

 27   sais pas ce que Mme le Procureur veut dire par "souvent".

 28   Q.  Bien. Je vais être plus concrète. Pour ce qui est des crimes commis par


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  1   les non-Serbes -- les crimes commis par les Serbes contre la population

  2   non-serbe, dans ces cas-là, le tribunal libérait les auteurs de ces crimes

  3   et les faisait retourner dans leurs unités, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je ne me souviens pas de cela.

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] On vient de me dire que je n'ai plus de

  6   temps, mais j'ai voulu montrer à M. Radetic quatre documents, avec votre

  7   permission, Monsieur le Président. Excusez-moi, il s'agit de cinq

  8   documents.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il vous plaît, essayez d'en finir avec

 11   vos questions d'ici 11 heures.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Radetic, cinq semaines plus tard, Zigic a encore une fois été

 14   impliqué à l'extorsion de --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, j'ai voulu dire jusqu'à 10

 16   heures. Merci, Maître Robinson, pour m'avoir dit cela.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je sais que j'avais demandé une demi-

 18   heure complémentaire, puisque dans mon estimation pour le contre-

 19   interrogatoire c'était deux heures.

 20   Q.  Monsieur Radetic, cinq semaines plus tard, Zigic a été encore une fois

 21   impliqué à l'extorsion, dans un premier cas, de 2 500 marks allemands, et

 22   dans le deuxième cas, en août, il s'agissait d'une somme d'argent de --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi de vous avoir interrompue.

 24   Avez-vous voulu demander le versement de ces quatre [comme interprété]

 25   documents ?

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 28   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.


Page 45703

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, nous allons verser au dossier ces

  2   documents.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 65 ter 25836 reçoit la cote

  4   P6596; le document 25842 reçoit la cote P6597; et le document 65 ter 25843

  5   reçoit la cote P6598.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  8   Q.  Vous êtes au courant de ce cas, n'est-ce pas ? Puisque pour ce qui est

  9   de ce deuxième cas d'extorsion, ça a été le tribunal militaire de Banja

 10   Luka qui a été saisi de cette affaire. Et dans ce cas, c'était Zoran Zigic

 11   qui a essayé d'obtenir de l'argent de Husein Ganic. Est-ce que vous êtes au

 12   courant de ce cas dont je viens de parler ?

 13   R.  Je n'arrive pas à me souvenir de ce cas, de cette affaire. Je sais que

 14   M. Zigic a commis des infractions au pénal à plusieurs reprises contre les

 15   membres de la famille Ganic. Et lorsque je travaillais dans la police

 16   militaire, ces choses-là arrivaient.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher le document 65

 18   ter 25846, s'il vous plaît. Excusez-moi, le numéro est 25845.

 19   Q.  C'est la décision signée par Svetozar Davidovic, et c'est la décision

 20   par laquelle l'appel de Zigic est rejeté et il a été décidé qu'il reste en

 21   détention puisque dans les conclusions il est dit qu'il pourrait réitérer

 22   les mêmes infractions au pénal et avoir une incidence sur les témoins. Est-

 23   ce que vous vous souvenez de cette affaire ?

 24   R.  Madame le Procureur, Zoran Zigic a fait l'objet de 20 affaires

 25   puisqu'il y avait des soupçons concernant son implication à la commission

 26   d'infractions pénales. Mais moi, je n'arrive pas à me souvenir de toutes

 27   ces décisions du tribunal. Et c'était pour le mois d'août 1992.

 28   Q.  Bien.


Page 45704

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Peut-on afficher le document 65 ter

  2   25846.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que Mme le Procureur demande le

  4   versement au dossier de ce document ?

  5   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections, Maître Robinson

  7   ? Non.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote de ce document sera P6599.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 10   Q.  Ce document est la décision relative au coaccusé de Zigic, Mladen

 11   Dosen, et par cette décision il a été relâché. Et à l'avant-dernier

 12   paragraphe en page 2 en anglais, il est dit que la chambre a également pesé

 13   des éléments concernant la nécessité de son renvoi à l'unité de laquelle il

 14   était arrivé sur le front. Et, encore une fois, nous voyons les motifs

 15   fournis pour que ces gens retournent sur le front.

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher le

 17   document de la liste 65 ter qui porte le numéro --

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous demandez le versement de ce

 19   document, il faut que vous posiez la question au témoin s'il est d'accord

 20   avec ce que vous venez de dire.

 21   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que je viens de dire, qu'encore

 23   une fois c'est un autre exemple de ce processus lors duquel les tribunaux

 24   relâchaient des gens pour qu'ils puissent retourner dans leurs unités ?

 25   R.  Encore une fois, je ne peux pas m'exprimer là-dessus puisque je ne

 26   connais pas l'essentiel de cette affaire. Il s'agissait de l'une des

 27   raisons pour laquelle les soldats étaient renvoyés aux unités. Mais je ne

 28   sais pas si dans cette décision ont été prises en compte, les raisons


Page 45705

  1   légitimes pour qu'il soit relâché de la détention, et bien sûr que le

  2   tribunal doit rendre cette décision pour qu'il soit libéré de la détention.

  3   Mais si cela n'a pas été le cas, alors ce que Mme le Procureur vient de

  4   dire est correct.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser au dossier ce

  6   document.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce P6600.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher le

  9   document 65 ter qui porte le numéro 25841, s'il vous plaît.

 10   Q.  Monsieur Radetic, en attendant que le document soit affiché, dites-

 11   nous, puisque vous avez vu il y a quelques instants que Zigic a interjeté

 12   appel mais il a été quand même gardé en détention, et cela aurait été une

 13   occasion pour mener une enquête sur Zigic pour tous les crimes qu'il avait

 14   commis à Trnovo [comme interprété], Omarska, et même au camp de Trnopolje,

 15   qui étaient connus par la police et par l'armée, n'est-ce pas; est-ce vrai

 16   ?

 17   R.  La détention de M. Zigic [inaudible] avoir été l'occasion de mener des

 18   enquêtes sur d'éventuels autres crimes commis par M. Zigic, je pense que

 19   non puisque la détention a été décrétée pour une infraction pénale

 20   concrète. Le procureur et le tribunal ont déployé  beaucoup d'efforts pour

 21   prouver le fondement de l'acte d'accusation pour ce qui est des crimes déjà

 22   commis par M. Zigic.

 23   M. Zigic est apparu en tant qu'accusé dans je ne sais pas combien

 24   d'affaires devant les tribunaux militaires et les tribunaux civils.

 25   Q.  Monsieur Radetic, on a déjà constaté que si vous avez des preuves qu'un

 26   crime avait été commis, il faut qu'une enquête soit menée et en particulier

 27   s'il s'agit d'un crime de meurtre. Il a été mis en détention concernant ce

 28   chef d'accusation, c'est-à-dire le chef d'accusation concernant 25 000


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  1   dollars, et il aurait pu faire l'objet d'une enquête concernant d'autres

  2   crimes qu'il aurait commis, est-ce que vous êtes d'accord avec moi ?

  3   R.  Madame le Procureur, pour ce qui est du parquet si une plainte au pénal

  4   est déposée contre une personne par un poste de police compétent dans cette

  5   plainte au pénal, il écrit, par exemple, que Marko Markovic a commis un

  6   crime, on a la description du crime et des preuves jointes. Est-ce que vous

  7   vous attendez à ce que le parquet s'adresse à la police pour demander s'il

  8   y a d'autres indices concernant d'autres infractions pénales commises

  9   éventuellement par la même personne, est-ce que vous vous attendez à ce que

 10   le procureur s'adresse à la police pour poser cette question à la police ?

 11   Q.  Monsieur Radetic, hier vous dit qu'il y avait des crimes qui avaient

 12   été commis. Et vous avez dit que toute la ville était au courant des crimes

 13   qui avaient été commis. Dans ce cas-là, ils avaient pour obligation

 14   d'enquêter là-dessus, c'est-à-dire la police militaire, le bureau du

 15   procureur. C'est sûr, n'est-ce pas ? Et le document qui est affiché à

 16   l'écran, le document 65 ter 25841, est la décision par laquelle Vojin Zigic

 17   [comme interprété] est relâché de la détention, c'est la décision de 1992,

 18   par laquelle Zoran Zigic est relâché de la détention et cette décision a

 19   été signée par Vojin Maric.

 20   Mais M. Zigic n'a jamais été poursuivi pour ces crimes, n'est-ce pas ?

 21   R.  Je ne sais pas. Je pense qu'en fait il l'a été. Je pense qu'il a été

 22   traduit devant un tribunal civil à Prijedor. Et je pense que c'était pour

 23   meurtre qu'il était poursuivi, mais j'en suis pas sûr parce que je n'ai pas

 24   participé à cette affaire.

 25   C'est ce dont je me souviens.

 26   Q.  Mais une pièce montre qu'il n'a jamais été poursuivi pour ce crime. Il

 27   a été arrêté en juin 1993 et il a été poursuivi et condamné pour le meurtre

 28   d'une femme civile serbe qui s'appelait Danka Petkovic, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Dans la ville il a tué une femme, effectivement, et je sais qu'il y a

  2   eu un procès à ce sujet.

  3   Q.  Donc, il a été à deux reprises pour des crimes commis contre des non-

  4   Serbes, il est relâché à deux reprises, et il commet un crime contre une

  5   victime serbe, et dans ce cas-là il est poursuivi et condamné à 15 ans de

  6   prison. C'est le résumé de la situation, n'est-ce pas ?

  7   R.  Je ne peux pas vous dire quel est le résumé de la situation sur la base

  8   de trois faits que vous venez de présenter.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je n'ai pas d'autre question.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez verser le

 11   dernier document ?

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donc accepter le versement.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] P6601.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, est-ce que vous

 16   avez des questions supplémentaires ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

 18   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Alors que le document est

 20   encore sur les écrans, pourriez-vous consulter le deuxième paragraphe,

 21   l'énoncé des motifs intitulé explication, où il propose qu'il soit mis fin

 22   à sa détention, et le juge demande une expertise psychiatrique au sein du

 23   centre où les détenus avaient été traités. Pourriez-vous me dire qui a été

 24   en mesure d'intercéder auprès des juges quant à la décision pour la

 25   détention ?

 26   R.  Autant que je sache, personne.

 27   Q.  Merci. Concernant cette affaire qui est donc encore très présente dans

 28   nos esprits, est-ce que vous savez si un rapport au pénal portant la date


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  1   du 3 juillet, c'est le document 65 ter 25842, et il a maintenant une cote

  2   commençant par la lettre P, c'est un document qui a été rédigé le 3

  3   juillet. Est-ce que vous vous souvenez de ce document ?

  4   R.  Je ne m'en souviens pas. Je me souviens pas de la personne qui a rédigé

  5   ce rapport au pénal.

  6   Q.  [hors micro]

  7   R.  Vous voulez dire la demande de mise en détention ? Je pense que c'est

  8   le bureau du procureur à Prijedor qui avait rédigé ce document.

  9   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Micro de M. Karadzic n'était pas

 10   branché pour la question précédant la réponse du témoin.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Le 3 juillet ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Donc Zigic a rédigé ce rapport ?

 15   R.  Vous voulez dire Sikirica ?

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous devons être précis. Tout d'abord,

 21   je pense qu'il serait bon d'afficher le document P6596. Est-ce que vous

 22   avez parlé de ce document, Monsieur Karadzic ?

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur le Président, mais il est bon de

 24   l'avoir.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors affichons tout d'abord le document

 26   de la liste 65 ter 25482, qui a été versé au dossier sous la cote P6596.

 27   Donc votre question portait sur ce document.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce qu'il s'agit de cette demande et est-ce qu'elle a été envoyée le

  3   3 juillet ?

  4   R.  D'après le dossier, nous voyons que ce document a été établi le 3 et je

  5   pense que le cachet également de réception est également du 3 juillet 1992.

  6   Q.  Est-ce que ce document devait tout d'abord être précédé par certaines

  7   actions avant le 3 juillet ?

  8   R.  Bien sûr. L'instruction par les forces de police et la police ensuite a

  9   informé le Procureur de tous les faits qui ont été établis.

 10   Q.  Et ensuite, le 4 juillet, nous voyons qu'il y a une note officielle

 11   établie par M. Sikirica. Par quelle filière officielle cette note

 12   officielle devait-elle passer et est-ce que ceci pouvait être établi avant

 13   la demande de mise en détention ?

 14   R.  Non, ça ne pouvait pas se passer dans le sens inverse.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez ménager des pauses entre les

 16   questions et les réponses.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'excuse auprès des interprètes et des

 18   parties.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Donc, le cheminement de cette note officielle durait combien de temps

 21   et quelle est la filière pour que cette note arrive jusque sur le bureau du

 22   juge d'instruction ?

 23   R.  Eh bien, la filière normale est tout d'abord que cette note officielle

 24   par Dusko Sikirica arrive tout d'abord sur le bureau du policier le plus

 25   haut gradé à laquelle elle est envoyée. Ce policier, lorsqu'il le reçoit,

 26   le donne à la police judiciaire pour qu'elle vérifie, étant donné qu'il y a

 27   des crimes graves qui sont mentionnés. La police judiciaire, le département

 28   des enquêtes judiciaires de la police de la municipalité de Prijedor devait


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  1   mener des mesures d'instruction ou d'enquêtes en ce qui concerne les faits

  2   qui étaient reprochés, de façon à vérifier que ces faits sont avérés.

  3   Ensuite, avec un rapport au pénal contre les personnes mentionnées dans

  4   cette note officielle, c'est envoyé au bureau du procureur de Prijedor.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous vous souviendrez que la

  6   décision de relâcher M. Zigic a finalement été promulguée le 8 octobre

  7   1992.

  8   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, ça, c'était dans le cadre du

  9   tribunal militaire. En fait, dans le cas du tribunal civil, il a été

 10   relâché le 9 juillet.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le 9 juillet. Il a été à nouveau arrêté.

 12   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, il a été arrêté le 1er juillet, et il

 13   a été relâché encore une fois le 22 août.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, il a été arrêté et relâché le 8

 15   octobre.

 16   Donc, ma question est que le rapport établit par M. Sikirica aurait

 17   dû arriver avant la date du document du tribunal militaire, c'est-à-dire le

 18   8 octobre 1992, n'est-ce pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] S'il y a un malentendu quelconque concernant

 20   ce paragraphe, cette demande pour mener une enquête a été établie le 3

 21   juillet.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous parlons de la note officielle

 23   de Sikirica qui a été rédigée le 4 juillet.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 4 juillet.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est la pièce D4140. Elle va bientôt

 26   s'afficher sur votre écran.

 27   Donc, ma question, c'est que lorsqu'un tribunal militaire a décidé de

 28   relâcher Zigic, eh bien, ceci aurait pu être lié à ce document qui est


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  1   maintenant sous nos yeux.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Zigic avait déjà été relâché le 9 juillet. Il

  3   a été relâché par un tribunal civil, si j'ai la chronologie correcte, si

  4   j'ai bien compris la chronologie. Et sur la base d'une lettre qui était un

  5   faux, signé soi-disant par Dusko Knezevic.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc à ce moment, le tribunal ne

  7   disposait pas d'informations provenant de Sikirica, mais en octobre, les

  8   instances idoines auraient pu avoir ces informations, n'est-ce pas ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 10   Juges, jusqu'au 8 juillet, nous parlons du tribunal civil de Prijedor, mais

 11   en octobre, il s'agit d'un tribunal militaire. Je ne suis pas sûr que la

 12   police civile ait déposé et eu l'habitude de déposer des documents auprès

 13   du tribunal militaire également. Je n'en suis pas sûr.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 15   Monsieur Karadzic, vous pouvez reprendre.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce que l'on pourrait maintenant

 17   consulter la pièce P6595, s'il vous plaît.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Si vous regardez en bas du document, qu'est-ce que cela signifie 24

 20   août, et puis ensuite 26 août, et puis ensuite le 7 septembre ?

 21   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire ?

 22   Q.  En bas, nous voyons des dates, 24 août et puis il y a également

 23   d'autres dates qui sont rajoutée avec "enquête supplémentaire", qu'est-ce

 24   que cela signifie ?

 25   R.  Je ne sais pas, mais il s'agit de documents distincts qui ont été

 26   établis par le bureau du procureur et qui ont été envoyés à différents

 27   destinataires, et il y avait des demandes pour établir des vérifications au

 28   niveau de la police et d'autres agences de l'Etat.


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  1   Q.  Conformément à la note officielle par Sikirica, est-ce que d'après

  2   vous, M. Sikirica était en faveur de ce type de mesures ou est-ce qu'au

  3   contraire, il était contre ?

  4   R.  Il les avait caractérisés comme étant des auteurs de crimes les plus

  5   abjects. Il n'essaie certainement pas de les protéger.

  6   Q.  Donc, ces actions par Zigic et ses complices, est-ce qu'il s'agissait

  7   de règles habituelles ou plutôt d'exceptions ?

  8   R.  Il est évident que ces personnes représentaient une exception évidente

  9   par rapport à la grande majorité de la population de Prijedor.

 10   Q.  Cette libération, est-ce que cela signifiait que les poursuites

 11   cessaient ?

 12   R.  Non, pas du tout. La détention provisoire est une des mesures les plus

 13   graves pour s'assurer de la présence d'un accusé, parce que ceci va à

 14   l'encontre des droits de l'homme de base et des libertés individuelles.

 15   Maintenant, pour ce qui est des raisons qui justifiaient l'usage de ces

 16   mesures les plus strictes, eh bien, c'est le juge d'instruction qui, durant

 17   toute l'instruction, s'assure que les raisons justifiant ces mesures les

 18   plus strictes sont toujours présentes.

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à M. Karadzic de répéter la

 21   question.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous devez répéter

 23   votre question. Les interprètes ne l'ont pas saisie.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Ma question était la suivante : quels sont les motifs qui n'existent

 26   plus pour une détention préventive lorsqu'un accusé admet sa culpabilité ?

 27   R.  Eh bien, une des raisons qui n'existent plus c'est en fait un trouble à

 28   l'ordre public. Si c'est ce type de crime qui fait l'objet d'aveu, dans ce


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  1   cas-là ceci n'élimine pas les raisons pour garder quelqu'un en détention

  2   préventive.

  3   Q.  Monsieur Radetic, est-ce que vous saviez que moi, en tant que président

  4   de la république et qu'en tant que commandant suprême, je m'ingérais dans

  5   les instances judiciaires ?

  6   R.  Non, certainement pas. Si vous voulez que je sois honnête, lorsque je

  7   travaillais au bureau du procureur militaire, je reprochais au président de

  8   la république de ne pas nous donner suffisamment de ressources pour

  9   travailler plus rapidement.

 10   Q.  Merci. Comment est-ce que vous associez ces affaires avec le président

 11   de la république ? Quel est le rôle du président lorsque quelqu'un est

 12   libéré d'une détention préventive ou lorsqu'il est détenu, et cetera ?

 13   R.  Le président abuserait de son autorité, ce serait un abus de pouvoir

 14   très grave, s'il essaie de s'ingérer dans des affaires en cours qui sont

 15   gérées par les instances judiciaires.

 16   Q.  Merci. Ce Dusko Knezevic qui a écrit cette lettre --

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le document de la liste 65 ter 25836, qui

 18   a maintenant une cote commençant par la lettre P.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Mis à part sa signature, la signature de la personne qui l'envoie, est-

 21   ce que nous voyons des cachets de réception ? Est-ce que l'on peut voir

 22   quoi que ce soit qui rende ce document digne de foi ?

 23   R.  Il s'agit d'un tampon de réception du bureau du procureur, et nous

 24   voyons également qu'il y a un numéro d'archivage. J'ai consulté de nombreux

 25   documents qui décrivent tout ce que ces personnes ont fait, mais je n'ai

 26   pas vu celui-ci. C'est certainement un faux. M. Zigic n'était pas apte à

 27   officier dans l'armée. Il n'a jamais été mobilisé pour cette raison, et il

 28   est donc impossible qu'il ait fait partie de cette unité.


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  1   Q.  Est-ce qu'il s'agit de la même personne mentionnée dans la lettre de

  2   Sikirica ?

  3   R.  Oui, c'est la même personne, la même personne qui a été impliquée avec

  4   lui dans ces crimes.

  5   Q.  Mais il y a eu une certaine confusion en ce qui concerne l'emplacement

  6   du commandement et l'endroit où se trouvait l'unité. Dites-moi, la caserne

  7   Zarko Zgonjanin est à quelle distance de l'unité ?

  8   R.  C'est dans une autre partie de la ville, à 3 ou 4 kilomètres. C'est sur

  9   la route principale qui va de Banja Luka à Prijedor, et la caserne se

 10   trouve sur la route entre Prijedor et Dubica.

 11   Q.  Merci, Monsieur Radetic, pour votre déposition.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ceci, donc, met un terme à

 14   votre déposition, Monsieur Radetic. Au nom de la Chambre de première

 15   instance, je vous remercie d'être venu à La Haye. Vous pouvez maintenant

 16   disposer.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 18   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 19   [Le témoin se retire]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin suivant est M. Torbica ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons donc entendre sa déposition

 23   après la pause. Mais avant de faire la pause, la Chambre va rendre une

 24   décision orale.

 25   La Chambre va donc rendre une décision orale sur la "requête de l'accusé de

 26   requalifier le statut des pièces interceptées" déposée le 17 janvier 2014,

 27   requête dans laquelle l'accusé demande à ce que la Chambre donne un nouveau

 28   statut à 20 interceptions qui étaient tout d'abord "considérées comme


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  1   n'ayant pas été versées au dossier" par la Chambre parce que la Chambre

  2   n'était pas convaincue de leur authenticité à l'époque. L'accusé avance que

  3   ça a été la pratique de la Chambre de donner des cotes provisoires aux fins

  4   d'identification en attendant que "des responsables des gouvernements

  5   croate et de Bosnie" vérifient leur authenticité, et il a l'intention de

  6   faire comparaître ces responsables en février 2014; par conséquent, pour

  7   garantir la cohérence et éviter toute confusion, il avance que ces pièces

  8   interceptées devraient avoir le nouveau statut de pièces MFI.

  9   L'Accusation a répondu le 20 janvier 2014, en déclarant qu'elle ne prend

 10   pas de position concernant la requête de l'accusé. Cependant, la

 11   modification du statut de ces interceptions à ce stade dans le procès n'est

 12   pas nécessaire étant donné que leur statut actuel n'empêche pas à l'accusé

 13   de présenter des éléments de preuve supplémentaires qui pourraient ensuite

 14   permettre leur versement.

 15   La Chambre de première instance fait tout d'abord remarquer que l'accusé

 16   inclut les documents D1787 et D2029 dans la requête; cependant, les deux

 17   pièces susmentionnées ont été versées au dossier. Le document D2029 a été

 18   versé au dossier par le truchement du Témoin Vladimir Lukic le 23 mai 2013.

 19   La Chambre fait également remarquer que le document D1787 n'a jamais été

 20   identifié comme n'étant pas versé au dossier, et comme ceci a été mentionné

 21   par l'Accusation, l'accusé semble faire référence au document D1747 plutôt

 22   que le document D1787. Ainsi, la Chambre de première instance va se pencher

 23   sur la requête de l'accusé d'accepter le versement du document D1747 et non

 24   D1787.

 25   La Chambre fait remarquer que dans sa décision des 7 décembre 2012 et 7

 26   août 2013, elle a considéré ces interceptions comme n'étant pas versées au

 27   dossier parce qu'il s'agissait d'une "catégorie spéciale" d'éléments de

 28   preuve, et, par conséquent, ces interceptions ne peuvent être versées au


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  1   dossier que si la Chambre est convaincue de leur authenticité, soit après

  2   avoir entendu des dépositions des personnes qui ont procédé à

  3   l'interception ou des participants en conversation ou après qu'un constat

  4   judiciaire ait été rendu quant à l'authenticité, et l'accusé n'a pas prouvé

  5   ce critère concernant ces interceptions téléphoniques. La Chambre considère

  6   que le statut actuel, c'est-à-dire document ayant reçu une référence "n'est

  7   pas versé au dossier", n'empêche pas l'accusé de présenter des arguments

  8   supplémentaires pour prouver l'authenticité de ces interceptions. Et à ce

  9   stade, si la Chambre est convaincue, elle pourra accepter le versement

 10   plein et entier de ces éléments de preuve. La Chambre de première instance

 11   ne considère donc pas nécessaire de changer le statut de ces interceptions

 12   et, par conséquent, ne fait pas droit à cette requête.

 13   Nous allons faire une pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 11

 14   heures moins cinq.

 15   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin pourrait-il prononcer sa

 19   déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 21   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 22   LE TÉMOIN : ZDRAVKO TORBICA [Assermenté]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Torbica.

 25   Veuillez prendre place, je vous prie, et soyez bien à l'aise.

 26   Monsieur Torbica, avant de commencer votre déposition, je voudrais attirer

 27   votre attention sur un article, qui est l'article 90(E), du Règlement du

 28   Tribunal. En vertu de cet article, vous pouvez soulever une objection quant


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  1   à la réponse à une question posée par M. Karadzic, le Procureur ou même les

  2   Juges si vous croyez que cette réponse pourrait vous incriminer. Dans ce

  3   contexte-là, "vous incriminer" voudrait dire que vous pourriez dire quelque

  4   chose qui pourrait représenter un aveu ou que vous pourriez dire quelque

  5   chose qui pourrait fournir un élément de preuve selon lequel on pourrait

  6   croire que vous avez commis un délit. Toutefois, si vous refusez de

  7   répondre à la question qui vous est posée, je dois vous informer que le

  8   Tribunal a le pouvoir de vous contraindre à répondre à la question qui vous

  9   est posée. Mais dans ce cas-là, le Tribunal s'assurerait que votre

 10   déposition obtenue de telle manière ne serait pas utilisée par la suite

 11   comme élément de preuve contre vous hormis le cas de poursuite pour faux

 12   témoignage. Est-ce que vous m'avez compris, Monsieur ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Oui, Monsieur Karadzic, vous pouvez commencer.

 16   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Torbica. J'aimerais vous demander de

 18   bien faire attention de parler lentement et de ménager une pause entre les

 19   questions que je vais vous poser et les réponses que vous donnerez, et, en

 20   fait, je me fais la même réflexion à moi-même. Alors, je voudrais tout

 21   d'abord vous dire bonjour, Monsieur.

 22   R.  Bonjour.

 23   Q.  Avez-vous fait une déclaration auprès des membres de l'équipe de

 24   Défense qui me représente ?

 25   R.  Oui.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin le

 27   document 1D9662 dans le prétoire électronique.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Voyez-vous cette déclaration à l'écran, Monsieur Torbica ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Merci bien. Avez-vous lu cette même déclaration et l'avez-vous ignée ?

  4   R.  Oui.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin la

  6   dernière page afin qu'il puisse identifier sa signature.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ma signature.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Je vous remercie. Dites-nous si cette déclaration a repris fidèlement

 10   vos propos lors de l'entretien avec les membres de l'équipe de la Défense,

 11   ou souhaiteriez-vous apporter quelque modification ? Y a-t-il des erreurs ?

 12   R.  Non. Tout ce que j'ai dit a été fidèlement repris dans cette

 13   déclaration.

 14   Q.  Très bien. Merci. Si je vous posais aujourd'hui les mêmes questions que

 15   les membres de l'équipe de la Défense vous ont posées, vos réponses

 16   seraient-elles les mêmes dans le fond que les réponses figurant dans la

 17   déclaration ?

 18   R.  Oui, dans le fond, dans leur ensemble, les réponses seraient absolument

 19   les mêmes.

 20   Q.  Je vous remercie.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais donc que cette déclaration soit

 22   versée au dossier en vertu de l'article 92 ter.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez une objection,

 24   Monsieur Zec ?

 25   M. ZEC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Non, aucune

 26   objection.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Sous la cote D4228, Monsieur le


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  1   Président, Madame, Messieurs les Juges.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous prie de poursuivre, Monsieur

  3   Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Je vais maintenant donner

  5   lecture en langue anglaise d'un résumé très bref de la déclaration de la M.

  6   Zdravko Torbica.

  7   Zdravko Torbica était membre du SJB de Prijedor. Il a pris part à la guerre

  8   à partir du début, en assurant la sécurité de la ligne ferroviaire et en

  9   menant des vérifications de la circulation automobile dans les zones

 10   frontalières. Il a remarqué que fin 1991 et au début de 1992, il y a eu un

 11   nombre croissant d'autobus transportant des non-Serbes de Prijedor en

 12   direction de la Croatie et de la Slovénie. Il a donc été conscient que

 13   quelque chose était en train de se passer mais il ne savait pas ce qui

 14   était en train de se passer car il n'y avait pas de preuve d'armes.

 15   Toutefois, Zdravko Torbica a découvert les points de contrôle lorsqu'il a

 16   été demandé d'accompagner des soldats qui étaient à bord d'une ambulance

 17   car les Bérets verts avaient bloqué les routes.

 18   Zdravko Torbica était de service au sein du SJB le 29 mai 1992, lorsque la

 19   ville de Prijedor et le SJB ont fait l'objet d'une attaque. L'attaque a

 20   commencé avec une explosion provenant de l'école secondaire et il a entendu

 21   des bruits de tir d'infanterie. Mais il n'était pas tout à fait certain,

 22   les officiers n'étaient pas sûrs de la situation non plus, et ils avaient

 23   reçu l'ordre de ne pas riposter. Les lignes téléphoniques étaient

 24   interrompues et les seules communications qu'ils avaient étaient par le

 25   biais de la radio qui leur permettait de communiquer avec le poste de

 26   police d'Urije. Le lendemain les soldats sont été informés que la ville a

 27   fait l'objet d'une attaque et qu'il y a eu une tentative de prendre le

 28   bâtiment de la municipalité ainsi que le SJB; lorsque la situation a été


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  1   établie, l'ordre a été donné pour défendre le bâtiment.

  2   En raison du manque de communication, les officiers n'étaient pas en mesure

  3   d'avertir leurs collègues qui venaient travailler pour commencer le quart

  4   de travail suivant et il y a donc eu un certain nombre de blessés à la

  5   suite de tirs. Et l'un des officiers a fait l'objet -- depuis sa maison

  6   tout près de la station et il a été tué. Et en raison des tirs nourris, les

  7   officiers n'étaient pas en mesure d'aider leurs collègues.

  8   Le périmètre du MUP souhaitait arrêter les membres des forces opposées à

  9   entrer dans le bâtiment. L'aide a été fournie par le poste de police à

 10   Urije; toutefois, le véhicule dans lequel ils se déplaçaient avait

 11   également fait l'objet de tirs nourris et un officier de police a été

 12   blessé. La police militaire est arrivée afin de prêter main-forte mais ils

 13   n'étaient pas en mesure d'entrer dans le bâtiment. Les tirs ont commencé

 14   seulement lorsqu'un char est arrivé et lorsqu'il s'est immobilisé devant le

 15   bâtiment.

 16   Cinq policiers ont été tués, l'un d'eux a été blessé, et huit soldats ont

 17   également été tués.

 18   A partir du mois d'avril, du 29 avril au 1er juin 1992, 19 membres du poste

 19   de police serbe et de l'armée ont été tués et 29 blessés par les forces

 20   musulmanes.

 21   Je voudrais maintenant apporter quelques précisions en posant des questions

 22   à M. Torbica de vive voix.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Torbica, après la guerre, avez-vous obtenu un certificat vous

 25   permettant de continuer votre travail dans la police ?

 26   R.  Après la fin de la guerre, je suis resté au sein du poste de police

 27   assurant la circulation de Prijedor et j'y suis resté jusqu'en 2005 lorsque

 28   j'ai souhaité prendre ma retraite, car je remplissais toutes les conditions


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  1   pour prendre ma retraite, et c'était à ma demande que j'ai cessé d'y

  2   travailler.

  3   Q.  Très bien. Après la guerre, qui vérifiait, qui émettait si vous voulez

  4   des certificats ?

  5   R.  Après la fin de la guerre en 1997, des membres des forces

  6   internationales se sont présentés dans mon poste de police où ils sont

  7   restés jusqu'à l'année de ma retraite, en fait. Ils sont restés pour agir

  8   en tant que mentor dans notre poste de police et ils vérifiaient le travail

  9   des individus pour voir s'ils arrivaient à satisfaire aux conditions du

 10   travail.

 11   Q.  En tant que membre de la police chargée de la circulation, avez-vous eu

 12   l'occasion d'effectuer l'escorte de convois ? Est-ce que vous pouviez

 13   suivre les convois civils de nationalité serbe et non-serbe ? Pourriez-vous

 14   nous dire ce que vous avez vu lors de votre travail et qu'est-ce que vous

 15   avez fait ?

 16   R.  En 1991, le poste de police chargé de la sûreté de la circulation était

 17   de suivre les véhicules, dont les véhicules militaires donc hors taille, de

 18   grande taille, qui se déplaçaient sur le territoire que couvrait mon poste

 19   de police pour assurer la sécurité routière. En 1991, il était fréquent que

 20   nos membres du ressort civil de la police suivent ces véhicules militaires

 21   de taille irrégulière. Lorsque je parle de taille irrégulière ou de grande

 22   taille, je pense aux véhicules qui dépassaient la longueur, la hauteur et

 23   la largeur. Et ces véhicules étaient toujours suivis par ou escortés par

 24   les membres de la police civile, et ce, en raison de la sécurité des autres

 25   participants à la circulation routière.

 26   Q.  Quels étaient les axes qu'empruntaient ces véhicules militaires ? Tout

 27   d'abord, dites-nous s'il s'agissait de véhicules militaires et dans quelles

 28   directions allaient-ils ?


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  1   R.  J'ignore la raison du déplacement de ces véhicules. Nous recevions la

  2   mission nous disant d'escorter ces véhicules dans la région que nous

  3   couvrions, Prijedor. Maintenant, je ne sais pas si ces véhicules se

  4   déplaçaient ailleurs à Banja Luka, en Croatie. Je ne sais pas ce qui se

  5   passait plus tard lorsqu'ils allaient plus loin, mais nous les escortions

  6   lorsqu'ils étaient dans notre région. Donc, je ne sais pas du tout s'il

  7   s'agissait pour la plupart des véhicules militaires, mais cela faisait

  8   partie de notre travail d'escorter sous la loi ces véhicules militaires

  9   hors norme. Et il faut également ajouter que nous effectuions également

 10   l'escorte des convois qui se déplaçaient en diverses directions.

 11   Q.  Pourriez-vous nous dire de quel type de convois il s'agissait ? Est-ce

 12   que c'étaient des convois de civils, et est-ce que vous savez quelque chose

 13   sur l'arrivée des réfugiés en Croatie, est-ce que vous savez quelque chose

 14   sur le départ de Prijedor ?

 15   R.  Eh bien, tout d'abord, tout ceci s'est passé en 1991. S'agissant de mon

 16   poste de police, vous avez dit que j'assurais la sécurité du chemin de fer,

 17   car nous avions reçu des informations que des groupes de sabotage allaient

 18   se livrer à l'explosion des rails de chemin de fer. Et donc, nous sommes

 19   allés sur le pont enjambant la Save et la Una, je crois que cet endroit

 20   s'appelle Jasenovac, nous sommes restés à cet endroit-là jusqu'à ce que le

 21   pont ne soit soufflé par les forces croates, et par la suite nous sommes

 22   allés plus en profondeur dans la Republika Srpska, et nous sommes restés

 23   sur ce point pendant une période assez prolongée. Je me souviens pas de la

 24   date exacte. Maintenant, notre rôle sur ces points de contrôle était

 25   essentiellement d'effectuer la situation du déplacement des personnes. Nous

 26   ne prenions aucune action particulière. Tout ce que nous devions faire

 27   c'était de faire des notes de service et d'informer les autorités, les

 28   supérieurs sur ce qui se passait s'il y avait quelque chose qui était


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  1   particulièrement intéressant, ou particulièrement qu'il fallait noter.

  2   Maintenant, s'agissant de ma participation, j'ai participé à une colonne

  3   antichar qui se déplaçait de la direction de Banja Luka, Prijedor. Et je

  4   dois dire qu'il y avait également un aéroport sportif à Prijedor. Qui est

  5   resté à la destination, n'est-ce pas, et cette -- ceci est resté pendant

  6   une période de temps dans cette région et la colonne n'était pas

  7   satisfaite, il y avait un certain nombre de citoyens appartenant à une

  8   autre nationalité à Prijedor qui n'était pas satisfait. Maintenant, je sais

  9   qu'il y a également eu un certain nombre de citoyens qui causaient des

 10   problèmes au poste de police, donc qui empêchaient les organes d'Etat

 11   d'effectuer leur travail. Des plaintes au pénal avaient également été

 12   prises contre ces derniers, et cela incluait quelques officiers de police

 13   également. Maintenant, je ne sais pas comment tout ceci s'est terminé, mais

 14   je sais qu'il y a eu des plaintes au pénal qui ont été déposées contre le

 15   président de la municipalité, certains officiers de police à Prijedor, mais

 16   je ne sais pas comment tout ceci s'est terminé.

 17   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir ralentir votre débit afin de

 18   permettre aux interprètes d'interpréter l'intégralité de vos propos.

 19   Bien, maintenant, pourriez-vous nous dire que s'est-il passé

 20   s'agissant du président et de la municipalité ? Vous avez dit qu'il a pris

 21   part aux incidents selon lesquels il a empêché les militaires de passer ?

 22   De quoi s'agit-il et était-ce légitime ?

 23   R.  Je crois que ce n'était pas légitime, c'était en 1991. Pendant que mes

 24   collègues du département du service criminologique ont déposé, puisque eux

 25   ils ont décidé de faire une plainte au pénal, j'imagine que son

 26   comportement n'était pas légitime.

 27   Q.  Très bien. Penchons-nous maintenant sur l'année 1992. Est-ce que vous

 28   pourriez nous dire si vous saviez si les civils non-serbes ou serbes,


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  1   c'est-à-dire des civils de nationalité serbe et croates se sont déplacés,

  2   et si votre poste, si votre service qui effectuait le contrôle de la

  3   circulation a joué un rôle dans tout ceci ? Avez-vous prêté main-forte ?

  4   Avez-vous aidé le déplacement de ces personnes ?

  5   R.  Chaque fois qu'il s'agissait officiellement et inofficiellement [phon]

  6   de poser des questions, de me demander de venir en aide, nous le faisions.

  7   Chaque fois que quelqu'un avait demandé à la police chargée de la

  8   circulation de les aider, nous le faisions. Maintenant, quand j'ai parlé du

  9   travail sur le point de contrôle, notre rôle essentiel consistait à

 10   effectuer un contrôle régulier et de contrôler des personnes qui avaient un

 11   intérêt particulier pour notre service. Et tout ceci, bien sûr, était

 12   transmis par le truchement des notes officielles. Mais nous ne prenions pas

 13   d'autres actions.

 14   Q.  Très bien, merci. Je vais maintenant demander une question quant à la

 15   police. Pas la vôtre, puisque vous effectuiez le contrôle de la

 16   circulation, mais est-ce que vous pouvez nous dire si la police participait

 17   aux déplacements de convois, si elle escortait des convois qui se

 18   déplaçaient en direction de la Croatie, de la Slovénie ou de la Bosnie

 19   centrale, d'après ce que vous savez, bien évidemment ?

 20   R.  Je ne sais pas de qui provenaient les demandes. Le matin, lorsque nous

 21   venions travailler, nous avions des tâches particulières qui nous étaient

 22   confiées dans le cadre de nos patrouilles. Maintenant, je dois vous dire

 23   que s'agissant de la police chargée de la circulation, je ne sais pas si

 24   notre service ait pu avoir une incidence quelconque sur un comportement

 25   négatif envers les personnes appartenant à d'autres nationalités, car nos

 26   patrouilles étaient mixtes encore à l'époque, c'est-à-dire jusqu'à ce que

 27   le pouvoir n'ait été pris, donc cinq ou six jours plus tard, au sein de

 28   chaque patrouille il y avait un Serbe et un Musulman, c'est-à-dire il


Page 45726

  1   s'agissait de patrouilles mixtes.

  2   Q.  Bien. Dites-nous si en 1992, lorsque la guerre faisait déjà rage, est-

  3   ce que votre service effectuait des escortes ? Qui se trouvait dans les

  4   convois et en quelles directions allaient-ils ?

  5   R.  Oui, mon poste de police effectuait l'escorte des convois dans toutes

  6   les directions. Maintenant, qui disait -- qui donnait les instructions pour

  7   les directions, qui établissait les directions, je ne le sais pas. A mon

  8   avis, ceci a dû être fait par les autorités civiles de la ville de

  9   Prijedor.

 10   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez eu l'occasion d'aider des civils

 11   croates provenant d'autres parties de la Bosnie à traverser un certain

 12   territoire ?

 13   R.  Oui, tout à fait. C'était une dépêche qui provenait -- selon vos

 14   ordres, le ministère avait donné cet ordre à mon poste de police et j'avais

 15   moi-même accepté -- ou plutôt, je n'étais pas accepté, mais j'ai été choisi

 16   pour escorter le convoi avec des civils. Et ce convoi était composé de

 17   citoyens, de femmes, d'enfants, de personnes blessées et était également

 18   composé d'autres personnes originaires du territoire de Vares. Ce

 19   territoire a été placé sous le contrôle des forces croates et musulmanes.

 20   Ceci a eu lieu en 1993 lorsqu'il y a eu conflit entre les forces musulmanes

 21   et croates. Maintenant, je ne sais pas comment -- c'était vous, en fait,

 22   qui avez donné cet ordre pour que ce convoi composé de civils, de femmes et

 23   d'enfants passe par l'ensemble de la Republika Srpska, car il s'agissait

 24   d'une longueur de 860 kilomètres, jusqu'à Livno.

 25   Lors de ce trajet, je dois vous dire qu'il y a eu des événements tristes,

 26   et toutes sortes de choses que l'on peut vivre dans la vie se sont passées,

 27   mais je suis fier d'avoir aujourd'hui fait mon travail et 2 700 civils sont

 28   arrivés à leur destination sans qu'un seul événement négatif n'ait lieu.


Page 45727

  1   Et je dois vous dire que j'ai eu certains problèmes avec certaines

  2   personnes qui n'étaient pas du tout placées ni sous le contrôle de l'armée,

  3   ni sous le contrôle de l'armée de la Republika Srpska, ni sous le contrôle

  4   du MUP. Ceci s'est passé à Romanija, lorsque moi-même et un de mes

  5   policiers, nous devions protéger ces personnes pour ne pas tomber entre les

  6   mains de ces personnes incontrôlées, qui n'étaient pas placées sous le

  7   contrôle de personne. Et je me souviens que le chef de ce groupe qui m'a

  8   arrêté m'a dit : Qu'est-ce que c'est, de quoi il s'agit, qui sont-ils. Et

  9   moi, j'ai répondu que c'était fait sous l'ordre du président de l'Etat, de

 10   la république. Il m'a demandé : Quelle république ? Et moi, je lui ai dit :

 11   Eh bien, ma république à moi, mon Etat à moi, mon pays qui est le mien et

 12   le tien. Malheureusement, cette personne m'a dit que vous n'étiez pas son

 13   président et que vous ne pouvez pas donner d'ordres sur le territoire sur

 14   lequel il commandait. A ce moment-là, il y a eu un règlement de compte

 15   physique entre la police que je commandais et ce groupe qui, d'après moi,

 16   en fait, voulait probablement piller, se livrer à un vol de ce convoi et,

 17   donc, ce n'est pas arrivé. C'était mon évaluation dans tous les cas. Ils

 18   n'ont pas réussi, mais j'ai été blessé. Et après, j'ai réussi à négocier et

 19   à passer avec ce convoi l'ensemble de la Romanija, arriver à Sokolac où le

 20   commandant du chef du poste de police qui assurait la sécurité routière à

 21   Sokolac m'a attendu et je lui ai expliqué ce qui s'est passé et il m'a

 22   expliqué que s'agissant de ces groupes sur le territoire de la Romanija, il

 23   y en avait beaucoup et que personne ne pouvait assurer leur contrôle, ni

 24   l'armée, ni la police.

 25   Par la suite, une autre chose est arrivée à Milici. Nous avions une colonne

 26   de 72 véhicules. C'étaient des autocars, des camions, et il y a eu des

 27   obstacles sur la route, ce qui fait que le convoi a dû s'arrêter. Sur l'axe

 28   de mon déplacement, vers la droite de la route, là il y avait un autre


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  1   convoi d'arrêté qui transportait des soldats de la Republika Srpska pour

  2   l'accomplissement d'une mission quelconque, et j'ai vécu quelque chose

  3   d'assez agréable. Les soldats de ce convoi, et je les avais redoutés, moi,

  4   parce qu'à l'époque c'était difficile et risqué que de faire ce genre de

  5   travail. Les soldats en question ont distribué des vivres aux femmes et

  6   enfants dans le convoi. Pour ce qui est des vivres et des médicaments

  7   disponibles dans le convoi, c'était plutôt restreint. Mes policiers m'ont

  8   fait savoir qu'ils avaient beaucoup de problèmes parce que les gens avaient

  9   faim. Pour ce qui est de l'eau, on se débrouillait quand même.

 10   Et lorsque nous sommes arrivés à Banja Luka, à l'entrée de Banja

 11   Luka, j'ai pu avoir un contact radio avec mon commandement supérieur, aussi

 12   ai-je demandé à ce que l'on résolve de quelle que façon que ce soit le

 13   problème des vivres et des médicaments à l'intention de ces gens. Les

 14   services de permanence opérationnelle à Banja Luka m'ont informé du fait

 15   qu'eux allaient contacter la Croix-Rouge de Banja Luka et j'ai été aussi

 16   prié par le chef de la permanence opérationnelle de m'adresser directement

 17   à M. Franjo Komarica dans Banja Luka même. Je l'ai fait. J'ai laissé mon

 18   adjoint en poste et je suis allé à l'église de Banja Luka. Je me suis

 19   adressé à M. Komarica, et je lui ai expliqué dans quelle situation se

 20   trouvaient les gens en question et le convoi dans son ensemble.

 21   Au bout de dix à 15 minutes, j'ai vu quelque chose de vraiment

 22   merveilleux. La Croix-Rouge avec Caritas de Banja Luka est venue vers ces

 23   gens pour leur apporter des vivres, des médicaments et de l'eau, et ils

 24   étaient venus de la ligne de démarcation entre Grahovo et Livno.

 25   Et donc, quand on est arrivés à cette ligne de démarcation, je dirais

 26   qu'avec les membres du HVO, j'ai procédé à la prise en charge de ces gens

 27   et du convoi par les gens du HVO, et j'ai eu plus de félicitations de leur

 28   part que de la part de mes amis les plus proches, et j'en suis fier. Et je


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  1   dirais que c'est conformément à vos ordres que je l'ai fait, moi avec mes

  2   hommes, Monsieur Karadzic. Et de nos jours encore, on mentionne ce fait-là

  3   comme étant un acte humanitaire de grande taille. Il y a donc pas mal

  4   d'enclaves croates qui, lorsqu'il y a eu des conflits, ont vu les gens

  5   partir dans différentes directions. Mais d'après les collègues à moi, je

  6   dirais qu'il n'y en a peu à avoir connu le sort que j'ai connu moi-même

  7   lorsque j'ai escorté ce convoi.

  8   Q.  Petite réponse à trois questions : qui était ces civils de par

  9   leur appartenance ethnique --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Monsieur Karadzic, veuillez

 11   répéter.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Je vous prie de nous répondre brièvement à trois petites questions :

 14   quelle était l'appartenance ethnique de ces civils; combien de temps a duré

 15   ce voyage; et qu'est-ce qu'était ce M. Franjo Komarica en fait ?

 16   R.  Il ne s'agissait que, je dirais à 100 %, de civils du groupe

 17   ethnique croate. Franjo Komarica était évêque dans l'évêché de Banja Luka.

 18   Et d'après mes connaissances en la matière, c'était lui l'homme numéro un

 19   pour ce qui est de l'évêché de Banja Luka. Et vous m'aviez demandé autre

 20   chose encore ?

 21   Q.  Combien de temps.

 22   R.  Ah oui. Combien de temps ça avait duré ?

 23   Q.  Oui, le voyage.

 24   R.  Eh bien, à partir du moment où on a pris ces véhicules à Livno, par le

 25   passage de Republika Srpska jusqu'à Vares, l'aller-retour a duré plus de 15

 26   jours.

 27   Q.  Merci, Monsieur Torbica. Je n'ai plus de questions pour vous.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.


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  1   Oui, Monsieur Zec.

  2   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Contre-interrogatoire par M. Zec :

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Torbica. Permettez-moi de vous poser

  5   des questions au sujet de votre contexte politique. Vous avez été membre du

  6   SDS, n'est-ce pas ?

  7   R.  Suite à la fin de mon service professionnel -- parce qu'à l'époque où

  8   j'étais dans le ministère de l'Intérieur, je ne pouvais pas avoir

  9   d'engagement politique. Et je vous ai précisé qu'en 2004, j'ai été mis à la

 10   retraite, j'ai quitté les rangs du service. Et à partir de 2007, j'ai été

 11   impliqué dans la vie politique.

 12   Q.  En 1995, M. Karadzic vous a décoré d'une médaille en or pour votre

 13   courage et les efforts que vous aviez déployés tout au long de la guerre;

 14   est-ce bien exact ?

 15   R.  Oui. Dans --

 16   Q.  Monsieur Torbica, je vous saurais gré de nous apporter des réponses

 17   brèves. Un "oui" suffit. Et je vais vous montrer un document pour vous

 18   poser des questions au sujet de ce décernement.

 19   M. ZEC : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche le 65 ter 25824.

 20   Q.  Ce que vous allez voir sur l'écran, c'est un décret émanant de M.

 21   Karadzic portant décoration à faire distribuer aux membres du ministère de

 22   l'Intérieur. Et il est dit :

 23   "A l'intention de ceux qui ont fait leur preuve, preuve d'héroïsme," et

 24   cetera, "dans les conflits armés…"

 25   M. ZEC : [interprétation] Et j'aimerais maintenant qu'on nous affiche la

 26   page 5 [comme interprété].

 27   Q.  Ici, nous allons voir l'intitulé pour ce qui est de ce décernement :

 28   Médaille d'or pour courage dont l'intéressé a fait preuve.


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  1   M. ZEC : [interprétation] Et il nous faut la page suivante en B/C/S. Il

  2   s'agira de la page 10 en anglais.

  3   Q.  Si vous vous penchez sur l'alinéa 49, vous allez y retrouver votre nom;

  4   est-ce bien exact ?

  5   R.  Moi, je ne peux pas répondre par un oui ou un non, et je vais vous dire

  6   pourquoi --

  7   Q.  Non, non. Mais est-ce que vous voyez votre nom sur cette liste,

  8   Monsieur, au numéro 49 ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci.

 11   M. ZEC : [interprétation] Je vais demander un versement au dossier de ce

 12   document, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelles sont les pages pertinentes ?

 14   Page 1 et -- ah, cette page-ci et la page de tout à l'heure. Les trois

 15   pages suffiraient ?

 16   M. ZEC : [interprétation] Si vous préférez un extrait, c'est bon. Mais je

 17   crois qu'il serait peut-être préférable d'avoir la totalité du document.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser au dossier ces trois

 19   pages pour le moment.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6602, Madame, Messieurs

 21   les Juges.

 22   M. ZEC : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Torbica, vous avez déjà témoigné devant la cour d'Etat de

 24   Bosnie-Herzégovine dans deux affaires pour ce qui est des événements de

 25   Koricanske Stijene. Dans les deux cas de figure, vous avez été témoin de la

 26   défense, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et vous avez dit la vérité à la chambre, n'est-ce pas ?


Page 45732

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Nous allons maintenant nous pencher sur l'année 1992. Le SDS et les

  3   représentants officiels serbes ont organisé et mis en œuvre la prise du

  4   pouvoir à Prijedor fin 1992; est-ce bien exact ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  L'une des mesures prises par les autorités serbes lors des préparatifs

  7   de la prise du pouvoir a consisté en l'organisation de la police serbe,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est un poste de police de réserve. Je n'y ai pas pris part moi-même.

 10   M. ZEC : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche le 65 ter 18336,

 11   s'il vous plaît.

 12   Q.  Il s'agit d'une dépêche qui a été envoyée par le poste de police de

 13   Prijedor à l'intention du CSB de Banja Luka au mois de mai 1992. On y

 14   fournit des informations relatives à la structure de votre poste de police.

 15   Si vous vous penchez sur le tout dernier paragraphe, il y est dit :

 16   "La nouvelle structure de guerre, qui est en train de fonctionner, a été

 17   mise en place lors des préparatifs de la prise du pouvoir pour répondre à

 18   ses obligations."

 19   Alors, Monsieur Torbica, la prise du pouvoir et cette structure nouvelle de

 20   ce poste de police, c'est une chose qui a été préparée par avance et dans

 21   le secret, n'est-ce pas ?

 22   R.  Non. Mon poste de police, là où j'ai travaillé, n'a pas participé à la

 23   prise du pouvoir. Il se trouvait là où il se trouvait comme les autres

 24   postes de police, mais il n'a pas pris part à la prise du pouvoir. C'est

 25   resté pareil comme avant la guerre, exception faite du fait que les

 26   policiers qui ont quitté le poste ont été remplacés par des réservistes

 27   pour pouvoir répondre aux obligations du poste de police à titre

 28   professionnel.


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  1   M. ZEC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  2   document, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6603, Madame,

  5   Messieurs les Juges.

  6   M. ZEC : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche à présent le

  7   P02968.

  8   Q.  Pour ce qui est de votre déclaration et de ce que vous nous avez

  9   raconté quant à la non-participation de la police à la prise du pouvoir, je

 10   me propose de vous montrer le rapport du SJB de Prijedor portant sur les

 11   neuf mois d'activité de 1992.

 12   M. ZEC : [interprétation] Alors, ce qu'il nous faut, c'est la page 2,

 13   paragraphe 2.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il faudrait être précis. Le témoin a parlé du

 15   poste chargé du contrôle du trafic routier. Je voudrais qu'il n'y ait pas

 16   de confusion de ce point de vue. Ce poste-là est un poste tout à fait à

 17   part.

 18   M. ZEC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Torbica, votre département chargé du contrôle de la

 20   circulation routière, ça se trouvait à l'intérieur du poste de police de

 21   Prijedor, c'était dans le même bâtiment ?

 22   R.  Ce n'était pas un département. C'était un poste de police chargé de la

 23   sécurité de la circulation placé sous le contrôle des services de sécurité

 24   publique de Banja Luka. Le siège, lui, se trouvait au poste de sécurité

 25   publique de Prijedor.

 26   Q.  Et vous étiez placé sous le commandement direct du chef de poste à

 27   l'époque, n'est-ce pas ? Je suis en train de parler de la période qui a

 28   suivi la prise du pouvoir. C'était donc sous l'autorité de Simo Drljaca;


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  1   non ?

  2   R.  Peut-être pendant les quelques premières journées de la période de

  3   transition. Mais jamais Simo Drljaca ni le poste de sécurité publique

  4   n'avaient aucune compétence à l'égard de ce poste chargé de la sécurité de

  5   la circulation routière, parce que nous tombions directement sous

  6   l'autorité des services de sécurité publique de Banja Luka. La création du

  7   centre des services de sécurité à Prijedor en 1993 a fait que mon poste de

  8   police est tombé sous le commandement direct des services de sécurité de

  9   Prijedor cette fois-ci. Mais à l'époque où il y avait un poste de sécurité

 10   publique à Prijedor, mon poste à moi était placé sous contrôle direct du

 11   centre des services de sécurité publique à Banja Luka.

 12   Q.  Donc, de la part de qui receviez-vous vos ordres, de la part de Drljaca

 13   du poste de police de Prijedor ou de la part de quelqu'un de Banja Luka ?

 14   R.  Depuis la création du centre des services de sécurité à Prijedor, tous

 15   les ordres étaient donnés par M. Drljaca. Mais avant cela, tous les ordres

 16   pour ce qui est de la sécurité de la circulation publique, ça venait du

 17   centre des services de sécurité de Banja Luka, département de la

 18   circulation routière.

 19   Q.  Dans le document de tout à l'heure - si on peut se pencher dessus - il

 20   peut être vu que Drljaca dit que c'est notre poste de police, c'est nos

 21   structures à nous, et il fournit l'information à la section chargée de la

 22   circulation. Alors, si vous voulez, on peut réafficher le document.

 23   M. ZEC : [interprétation] Il s'agit du document 65 ter 18336. Le point qui

 24   nous intéresse c'est le point numéro 5.

 25   Q.  Il dit que "La police" -- je cite : "Il existe un poste de police

 26   chargé du contrôle et de la sécurité de la circulation routière."

 27   Dans le cadre du poste de police de Prijedor. Ceci se rapporte à

 28   vous, n'est-ce pas ?


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  1   R.  On dit ici ce que je vous ai dit moi-même. A Prijedor, il y a un poste

  2   chargé de la sécurité routière. Ce n'est pas une section. Et ici, on

  3   indique que cela existe dans Prijedor. Mais je ne vois nulle part dans ce

  4   document que c'est lui qui assure le commandement à l'égard de ce poste-là.

  5   Q.  Nous avons bon nombre de documents autres portant sur la structure de

  6   la police. Mais laissez-moi vous demander ceci : indépendamment de votre

  7   section, les autres policiers serbes ont pris part à la prise du pouvoir à

  8   Prijedor, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, sauf le poste de police chargé de circulation routière. Et si vous

 10   voulez, je peux m'étendre sur le rôle qui a été le sien.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr de vous

 12   avoir suivi, Monsieur Torbica. Penchez-vous sur le point 8 de ce document.

 13   Il est dit :

 14   "La nouvelle structure de guerre prévoit 13 postes de police plus un poste

 15   de police chargé de la sécurité et le contrôle de la circulation routière."

 16   Donc, il est question d'un total de 14 postes de police. Ces postes de

 17   police n'ont-ils pas été placés sous le commandement de Drljaca à l'époque

 18   ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon poste de police, celui qui est chargé du

 20   contrôle de la circulation routière, parce que lui, il évoque 13 postes

 21   plus un quatorzième qui est chargé de la circulation routière. Ce que je

 22   vous ai dit, c'est la vérité. Ce que M. Drljaca avait souhaité ou pensé

 23   lorsqu'il a rédigé ceci -- mais je vous dis que ce que je vous ai raconté

 24   est la vérité du point de vue de l'organisation du système.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 26   Veuillez continuer, Monsieur Zec.

 27   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Vous nous avez déjà parlé du rôle de votre section en 1992, l'une des


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  1   missions de cette section c'était les postes de contrôle placés dans

  2   Prijedor où vous avez été présent au côté des effectifs militaires, n'est-

  3   ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous avez aussi dit qu'à l'époque il y a des gens qui ont été déportés

  6   de la municipalité ou déplacés et votre poste a participé à cette

  7   déportation ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Quand le témoin a-t-il fait mention de

  9   déportation ? Moi, j'aimerais bien qu'on me l'indique cela.

 10   M. ZEC : [interprétation] Le témoin a parlé de convois. Toujours est-il que

 11   c'est la question que je pose au témoin, je lui parle de déportation. Il

 12   peut répondre.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le cadre temporel que vous

 14   évoquez ?

 15   M. ZEC : [interprétation] Je parle de l'année 1992.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas au courant de déportations, ce

 18   qui est exact c'est que mon poste de police - et je l'ai dit à plusieurs

 19   reprises - a fourni les services de sécurisation du transport. Entendons-

 20   nous bien, qu'entend-on par sécuriser un transport routier ? Il convient de

 21   distinguer la sécurisation physique et la sécurisation routière. La

 22   sécurisation routière signifie qu'en tête de colonne où il y a, par

 23   exemple, 20 ou 30 véhicules, il y a une voiture de la police qui fait

 24   savoir aux autres participants au trafic qu'il y a une colonne qui arrive

 25   et que cela risque de perturber le trafic. Ça, c'est la circulation

 26   routière. Deuxièmement, il s'agissait d'escorter en toute sécurité la

 27   colonne, pour ce qui est de la vitesse, pour ce qui est des temps de pause,

 28   et le reste. C'est cela qu'on entend par la sécurisation de la circulation


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  1   routière et c'est de cela que nous avons été chargés nous-mêmes.

  2   M. ZEC : [interprétation]

  3   Q.  Alors, s'agissant de cette sécurisation physique du convoi, c'étaient

  4   les autres effectifs du poste de police de Prijedor ?

  5   R.  Oui. La sécurisation physique c'était les postes généraux, c'est le

  6   poste de sécurité publique de Prijedor qui s'en est chargé, exception faite

  7   du convoi dont je vous ai parlé tout à l'heure où la sécurisation physique

  8   et celle de la circulation routière a été prise en charge par le poste

  9   chargé de la sécurité routière à Prijedor.

 10   Q.  Il est une autre des missions vous incombant, c'était la fouille du

 11   terrain pour ce qui est de la recherche de groupes armés, n'est-ce pas ?

 12   R.  Non, non, je ne suis pas du tout au courant de telle chose.

 13   M. ZEC : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche le document 65 ter

 14   25812, s'il vous plaît.

 15   Q.  Il s'agit ici d'un rapport du SJB de Prijedor relatif à une fouille du

 16   terrain. Vous voyez le nom de celui qui a présenté le rapport, et on voit

 17   votre nom. C'est bien votre nom qu'on voit là; non ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il est dit que l'opération a été réalisée avec 30 policiers et quelque

 20   20 membres de la VRS. Vous avez participé à cette opération, n'est-ce pas ?

 21   R.  Moi, ce que je vois sur ce document, on a inscrit le nom de Zdravko

 22   Torbica à la machine, mais je vois que le rapport a été, pour ce qu'il

 23   concerne, a été rédigé par des chefs de secteur. J'ai été chef d'un

 24   secteur, en effet, et chef d'un secteur ça signifie un espace. Et vous avez

 25   des voies routières locales ou régionales et vous avez aussi les rues de la

 26   ville de Prijedor. Alors, je n'ai pas lu la totalité de ce document. Si

 27   vous le permettez, j'aimerais le lire afin de pouvoir vous le commenter.

 28   Q.  Mais c'est très simple. Il s'agit d'un rapport relatif à une fouille du


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  1   terrain, vous l'avez rédigé, et il est dit, entre autres, que les policiers

  2   et des membres de la VRS y ont participé. Ce que je dis, c'est qu'on voit

  3   votre nom ici et cela signifie que vous y avez pris part ?

  4   R.  Je reconnais cette partie de mon rapport. Il est exact de dire que j'ai

  5   escorté un groupe, pas d'un groupe, des policiers en passant par Ljubija

  6   pour leur montrer la route afin qu'ils accèdent à ce secteur, donc j'ai été

  7   dans ce secteur, je n'ai pas participé à la fouille du terrain. Nous avons

  8   fait une prestation de service.

  9   Q.  Merci, Monsieur Torbica.

 10   M. ZEC : [interprétation] Je vais demander un versement au dossier de ce

 11   document, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6604, Madame,

 14   Monsieur le Juge.

 15   M. ZEC : [interprétation]

 16   Q.  Suite à la prise du pouvoir, Monsieur Torbica, bon nombre de non-Serbes

 17   ont été acheminés vers le poste de police pour des interrogatoires, n'est-

 18   ce pas ?

 19   R.  Non. On a emmené personne pour des interrogatoires à mon poste de

 20   police. On les a emmenés au poste de sécurité publique.

 21   Q.  Je comprends que vous vous efforciez de faire une distinction entre la

 22   section chargée du contrôle routier et de la police portant uniforme, mais

 23   c'est dans le même bâtiment. Vous avez vu des gens emmenés au poste de

 24   police, n'est-ce pas ?

 25   R.  Monsieur le Procureur, je n'essaie rien du tout. Je vous dis la vérité,

 26   je vous fais une distinction entre le poste de sécurité chargé de la

 27   sécurité routière et le poste de sécurité publique. Mon bureau se trouvait

 28   au troisième étage et c'était tourné vers le nord, et la porte d'entrée se


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  1   trouvait au milieu du bâtiment, et il y avait une voie auxiliaire au sud.

  2   Ce qui fait que je ne pouvais physiquement pas voir ce qui se faisait à

  3   l'étage inférieur, et en sus de toutes les obligations qui étaient les

  4   miennes quand j'étais au bureau, eh bien, je les accomplissais dans mon

  5   bureau, et n'allais pas dans les bureaux des autres.

  6   Q.  Cette Chambre de première instance a vu des moyens de preuve disant que

  7   les non-Serbes étaient emmenés au poste de police où ils ont été passés à

  8   tabac et interrogés, et par la suite transférés à Omarska.

  9   M. ZEC : [interprétation] Il s'agit des pièces P2095, P3478, et P3528.

 10   Q.  Vous étiez au courant de cela, Monsieur Torbica, n'est-ce pas, à savoir

 11   que les gens ont été emmenés au poste de police pour y être interrogés et

 12   passés à tabac, n'est-ce pas ?

 13   R.  Que les gens étaient emmenés au poste de police, ça c'est vrai. Mais je

 14   ne sais pas pour quelle raison. Dans aucun des cas je n'ai participé à des

 15   passages à tabac de ces gens, et en particulier je n'ai pas participé à

 16   cela puisque je n'ai resté que peu de temps dans le local où des gens

 17   étaient emmenés et interrogés puisque cela ne relevait pas de ma compétence

 18   ni de la compétence de mes collègues policiers chargés du contrôle routier

 19   du poste de police de Prijedor.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au niveau du compte rendu.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la ligne 24, il a été consigné comme si le

 23   témoin avait dit "Je ne sais pas pourquoi", mais le témoin a dit "Je sais

 24   pas pour quelle raison, sur quelle base." Il ne s'agit pas peut-être d'une

 25   grande différence entre les deux formulations, et il est plus professionnel

 26   de dire qu'il ne savait pas pour quelle raison ou sur quelle base ces gens

 27   ont été emmenés au poste de police.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, nous avons compris cela.


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  1   Continuez, Monsieur Zec.

  2   M. ZEC : [interprétation] Peut-on afficher maintenant le document 65 ter

  3   25823, s'il vous plaît.

  4   Q.  Il s'agit des notes de l'entretien avec un témoin qui était victime.

  5   M. ZEC : [interprétation] Il faut afficher la page 2, le paragraphe numéro

  6   2.

  7   Q.  Le témoin a dit qu'il a été arrêté dans son appartement et qu'il a été

  8   amené au poste de police. Il a dit :

  9   "Lorsque je suis arrivé, un policier qui s'appelait Tomo a enregistré mes

 10   données personnelles. L'un des policiers, Zdravko Torbica m'a demandé ce

 11   que je faisais là-bas et m'a donné des coups de pied dans la tête et dans

 12   l'abdomen. Ils n'ont jamais dit pourquoi j'ai été arrêté. On m'a mis dans

 13   une cellule, et là-bas j'ai vu Bato Deomic. Bato et moi-même, nous avons

 14   été transférés à Omarska de cette cellule."

 15   Donc, Monsieur Torbica, il est vrai, n'est-ce pas, que vous avez été

 16   impliqué au passage à tabac des prisonniers, n'est-ce pas ?

 17   R.  Ce n'est pas vrai. Monsieur, Tomo, que vous avez mentionné ici était un

 18   membre du poste de police chargé du contrôle routier, de sécurité routière,

 19   mais je ne me souviens pas d'avoir participé à cet événement. J'aimerais

 20   que ce document soit agrandi pour que je puisse le lire, parce que je

 21   n'arrive pas à le lire avec ces lunettes, et là, je pourrais peut-être me

 22   souvenir de certaines choses concernant ce document.

 23   Q.  Donc, vous niez avoir battu qui que ce soit dans le poste de police ?

 24   R.  Il n'y a pas de citoyen, il n'y a aucun citoyen dans la municipalité de

 25   Prijedor qui pourrait confirmer la teneur de ce document. J'assume toute la

 26   responsabilité pour le dire, puisque je suis un policier professionnel, qui

 27   a été formé pour être policier professionnel, je n'ai jamais participé à

 28   des passages à tabac, et surtout pas des personnes qui n'avaient rien à


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  1   voir avec ce que je faisais à l'époque, avec les activités qui faisaient

  2   parties de mes tâches professionnelles à l'époque. Pour ce qui est de cette

  3   personne qui a parlé de cela, je ne la connais pas, et je ne sais pas ce

  4   qu'il faisait.

  5   Q.  Parlons de votre tâche qui consistait à escorter des convois. Vous avez

  6   parlé d'escorte de convois militaires. Par exemple, si un convoi

  7   transportait des marchandises qui étaient des marchandises d'une certaine

  8   catégorie délicate à votre zone de responsabilité, vous et votre section

  9   deviez porter assistance pour que ce transport se fasse ?

 10   R.  J'ai dit au début que nous escortions des convois qui transportaient

 11   des marchandises de valeur, et tout ce qu'on nous a demandé était d'assurer

 12   la sécurité du trajet de ces convois. Nous exécutions tous ces ordres.

 13   Q.  Par exemple, si sur un site de crime il y avait pas mal de cadavres qui

 14   devaient être récupérés et transportés au site d'inhumation, si des corps

 15   humains étaient transportés, cela représentait des marchandises ou plutôt

 16   le transport sensible, délicat. Et dans ce cas-là, votre section devait

 17   aider à ce que cela se fasse ?

 18   R.  Je n'ai pas participé à de telles choses, et je n'ai jamais entendu

 19   dire que le poste de police chargé pour la sécurité routière de Prijedor

 20   n'ait jamais aidé à ce type de transport.

 21   Q.  Tomasica est un site minier dans la zone de Prijedor, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, c'est vrai.

 23   Q.  La mine de Tomasica a été utilisée comme site d'enterrement pour des

 24   centaines de corps de Musulmans et de Croates qui avaient été tués dans la

 25   zone de Prijedor en 1992; est-ce vrai ?

 26   R.  J'ai appris cela seulement au moment où la fosse commune a été

 27   découverte à Tomasica.

 28   Q.  Votre section a apporté de l'assistance pour ce qui est des escortes de


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  1   ces transports à Tomasica ?

  2   R.  Je ne suis pas au courant de cela, je n'ai pas participé à ces

  3   escortes. Et, pour autant que je sache, mon poste de police n'a pas été

  4   impliqué à l'escorte de ce type de transport.

  5   M. ZEC : [interprétation] Peut-on afficher à présent le document de la

  6   liste 65 ter qui porte le numéro 25860.

  7   Q.  Il s'agit d'un article qui a été publié dans le journal "Blic", en

  8   Serbie, en novembre 2013. Vous avez déjà parlé de la mine de Tomasica et

  9   l'exhumation qui a été faite au niveau de cette mine. Vous allez voir à

 10   l'écran l'un des nombreux articles qui ont été publiés concernant les

 11   exhumations qui sont en cours à Tomasica.

 12   R.  Est-ce qu'on peut agrandir cette page pour que je puisse la lire, s'il

 13   vous plaît ?

 14   Q.  Peut-être pourrait-on agrandir la partie en gras, et par la suite la

 15   partie du texte qui se trouve en bas de la page. Je pense que vous allez

 16   pouvoir voir qu'au niveau du premier paragraphe, il est question de 430

 17   dépouilles qui avaient été exhumés jusqu'ici, dont 275 cadavres complets.

 18   Au dernier paragraphe à la page de votre langue maternelle, et dans la

 19   version en anglais, en deuxième page, il est dit que parmi les documents

 20   retrouvés, sont les documents appartenant aux gens qui avaient été tués à

 21   Biscani le 20 juillet 1992.

 22   Donc, Monsieur Torbica, vous savez que ce site a été découvert et que des

 23   corps ont été exhumés comme cela est écrit dans cet article, n'est-ce pas ?

 24   R.  Je vous ai déjà dit comment j'ai appris l'existence du site de

 25   Tomasica, c'est au moment où cela a été découvert et lorsque dans les

 26   médias cela a été publié, c'est à ce moment-là que j'ai appris l'existence

 27   de ce site.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que le Procureur précise si 430

  3   personnes ont été à Biscani ou si cela concerne uniquement cette famille ?

  4   Puisqu'on a des propos d'un membre d'une famille qui a été interviewé dans

  5   cet article.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question était comme suit :

  7   "…dans le document il est dit que parmi les documents retrouvés, il y avait

  8   des documents qui appartenaient aux gens tués à Biscani."

  9   Je pense que cela suffit. Vous pouvez, si vous le voulez et si cela est

 10   nécessaire poser des questions supplémentaires là-dessus plus tard.

 11   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous voulez tirer ce point au clair,

 13   vous pouvez le faire absolument.

 14   Vous pouvez continuer, Monsieur Zec.

 15   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Vous avez raison,

 16   je n'ai fait référence qu'à ce qui est écrit dans l'article. Je n'ai pas

 17   dit que 430 personnes tuées étaient de Biscani. J'ai dit seulement que cela

 18   est indiqué dans l'article, le nombre de dépouilles exhumées jusqu'ici.

 19   Q.  Monsieur Torbica, devant cette Chambre de première instance ont été

 20   présentés des moyens de preuve concernant la conversation que votre chef

 21   Simo Drljaca a eue avec les officiers de la VRS en 1993. Et pendant cette

 22   conversation, ils ont parlé de la mine Tomasica, où 5 000 Musulmans ont été

 23   enterrés, et l'opinion publique a appris cela de prisonniers relâchés.

 24   M. ZEC : [interprétation] C'est la pièce P1483, pages 154 et 155.

 25   Q.  Après vous avoir rappelé les proportions de cet enterrement clandestin

 26   sur le site que j'ai mentionné, il s'agissait des cadavres des non-Serbes,

 27   est-ce que vous maintenez toujours qu'en tant que responsable du processus

 28   du déplacement et du transfert des transports sensibles, d'une certaine


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  1   façon, vous étiez au courant des centaines et des milliers de cadavres

  2   enterrés à Tomasica, ou bien cela peut vous rafraîchir la mémoire ?

  3   R.  Monsieur le Procureur, je n'ai jamais dit que j'étais la personne

  4   responsable pour ce type d'activité. Je ne sais pas d'où vous tenez cela.

  5   Je n'ai jamais été en charge de m'occuper de ce type d'activité sur aucun

  6   ordre. Moi, en personne, je n'ai jamais été en charge de cela et je n'ai

  7   jamais pris part à ce type d'activité, à ces escortes. Je n'avais pas non

  8   plus été au courant de cela, puisqu'à l'époque je n'occupais pas le poste

  9   qui m'aurait permis d'être présent à des réunions auxquelles a participé

 10   Drljaca, Simo et autres. J'étais à la quatrième position sur la hiérarchie

 11   de mon poste de police. Avant moi, il y avait donc l'assistant du

 12   commandant, ensuite l'adjoint du commandant et, au somment, le commandant.

 13   Q.  Est-ce que vous nous dites que vous n'avez pas pris part à cela mais

 14   que votre section aurait pu prendre part à cette activité ? Est-ce que

 15   c'est ce que vous avez dit tout à l'heure ?

 16   R.  Je ne le sais pas. Je n'en sais rien.

 17   Q.  Monsieur Torbica, vous avez longuement parlé des convois et des

 18   escortes des convois, de l'armée, des gens, des marchandises sensibles. Et

 19   maintenant, nous parlons des enterrements en masse des cadavres, des

 20   centaines, des milliers de cadavres dans des charniers, et soudainement

 21   vous dites que vous n'en savez rien.

 22   R.  Je n'ai parlé que de ce que je faisais et des choses auxquelles j'ai

 23   pris part directement ou des documents que je rédigeais, des ordres que je

 24   recevais et qui explicitaient des tâches concrètes que je devais exécuter

 25   et que je recevais du commandant du poste de police. C'est ce dont je parle

 26   là.

 27   Q.  Et vos collègues dans d'autres secteurs de la police ou peut-être dans

 28   votre secteur ont participé à ces activités; c'est ce que vous dites dans


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  1   votre déposition ?

  2   R.  Si je déclare quelque chose ici, je devrais avoir des informations là-

  3   dessus. Mais je vous dis que je n'en savais rien. Si je vous dis si j'en

  4   sais quelque chose - et je n'en sais rien - puisque je suis policier

  5   professionnel, je sais que lorsque je réponds à des questions, pour chaque

  6   mot prononcé, il faut que j'aie des preuves, il faut que je corrobore ce

  7   que je dis. Je ne sais pas si cela s'est passé. Je ne sais vraiment pas.

  8   Mais moi, je n'ai pas fait cela. Je n'ai pas fait ce type d'activité.

  9   M. ZEC : [interprétation] Je demande le versement de cet article.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Le témoin

 11   n'a confirmé quoi que ce soit concernant l'article. Il n'a fait que dire

 12   qu'il a lu un article dans la presse concernant cet événement en 2013, et

 13   ce n'est pas le fondement approprié pour que ce document soit admis puisque

 14   ce document est important pour le Procureur. Si ce document revêt une telle

 15   importance pour le Procureur, le Procureur peut demander que la

 16   présentation des moyens à charge soit rouverte et que cela soit présenté de

 17   façon appropriée.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voudriez-vous ajouter quoi que ce soit,

 19   Monsieur Zec ?

 20   M. ZEC : [interprétation] J'ai une question simple concernant des

 21   connaissances du témoin par rapport à Tomasica et la mine de Tomasica. Il a

 22   dit qu'il a appris l'existence de ce site dans les médias. Et je lui ai

 23   présenté l'un des articles publiés à l'époque concernant cela et il a

 24   confirmé comment il a appris l'existence de ce site. Donc, il a confirmé la

 25   teneur de l'article.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre est d'accord avec l'objection

 28   de Me Robinson, et, par conséquent, je suppose que vous avez atteint votre


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  1   objectif par rapport au compte rendu.

  2   Est-ce que nous allons continuer ? Nous allons donc admettre [comme

  3   interprété] cela.

  4   M. ZEC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Torbica, concernant l'incident du 30 mai 1992, vous avez dit

  6   qu'il n'y avait pas de communication hormis la communication radio. Vous

  7   avez dit à la page 3 de votre déclaration que les lignes téléphoniques

  8   étaient coupées.

  9   M. ZEC : [interprétation] Peut-on afficher le document 65 ter 25822, s'il

 10   vous plaît.

 11   Q.  Il s'agit d'un article qui a été publié au journal "Kozarski Vjesnik"

 12   et qui porte sur cet événement.

 13   M. ZEC : [interprétation] Il faut afficher la page 3 dans la version en

 14   anglais.

 15   Q.  Et dans la version en B/C/S, Monsieur Torbica, je vous invite à

 16   regarder la partie qui se trouve au-dessus du paragraphe au milieu, il

 17   s'agit du contenu de la conversation entre Savo Golubovic et Cvetjko Rendic

 18   concernant cet événement.

 19   M. ZEC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant faire défiler la

 20   version en B/C/S pour qu'on puisse voir le haut de la version en B/C/S.

 21   Encore un peu. Il faut afficher la partie qui se trouve à peu près au

 22   milieu de la page où se trouve la photographie.

 23   Q.  Donc, Monsieur Torbica, au-dessus des photographies du côté gauche à

 24   l'écran, vous allez voir ce qui suit. Je cite :

 25   "'Est-ce qu'il y a un appareil téléphonique là-bas,' Rendic a demandé en

 26   montrant Ribar.

 27   "'Oui, mais c'est fermé,' a répondu Savo.

 28   "Ces deux personnes ont réussi à courir jusqu'à Ribar, à ouvrir avec


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  1   effraction la porte et à y pénétrer et appeler le SUP."

  2   "'Nous sommes attaqués. Envoyez-nous des munitions,' Rendic a dit.

  3   "'Il n'y a pas de possibilité, puisque nous sommes attaqués ici,' que

  4   l'officier de permanence l'informe."

  5   Monsieur Torbica, Ribar est un restaurant à Prijedor, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui. M. Rendic était -- est-ce que je puis continuer ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Entendons le témoin. Continuez, Monsieur

  8   le Témoin.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] M. Rendic travaillait au poste de contrôle

 10   entre l'hôtel Prijedor et le restaurant Ribar, et par rapport au poste de

 11   police il y avait une distance d'à peu près 800 mètres. Je ne sais pas de

 12   quelle heure de la matinée il s'agissait, mais au moment où nous avons

 13   voulu informer nos collègues qui devaient venir pour nous relayer au poste

 14   de police chargé du contrôle routier pour les prévenir de la sécurité, nous

 15   ne pouvions pas les informer puisque les lignes étaient coupées. Là, je

 16   parle du moment où nous avons voulu informer nos collègues pour leur sauver

 17   la vie. Nous n'avons pas réussi à les informer, et tous les quatre -- ou,

 18   plutôt, cinq collègues se sont faits tuer au moment où ils sont venus nous

 19   aider et nous relayer.

 20   M. ZEC : [interprétation]

 21   Q.  [hors micro]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Microphone.

 23   M. ZEC : [interprétation]

 24   Q.  Donc, les lignes téléphoniques fonctionnaient, Monsieur Torbica, et

 25   Savo est parti pour téléphoner au SUP.

 26   R.  Je vous dis que nous ne pouvions pas informer nos collègues par

 27   téléphone là-dessus. Et si on avait réussi à les informer là-dessus, ces

 28   gens seraient vivants aujourd'hui. Je ne sais pas comment Rendic a réussi à


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  1   informer le poste de sécurité publique. Mais en fin de compte, il s'agit

  2   d'un article de presse. Il ne s'agit pas d'un rapport. Je ne sais pas ce

  3   que ce journaliste a voulu dire là-dessus. Je ne sais pas ce que Rendic a

  4   dit à ce journaliste. Je ne sais pas si cela est vrai, je ne le sais

  5   vraiment pas.

  6   M. ZEC : [hors micro]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Microphone, s'il vous plaît.

  8   M. ZEC : [interprétation] Je demande le versement de cet article.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puisque la Défense n'a pas d'objection

 13   là-dessus, ce document sera versé au dossier.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et la cote sera P6605.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous encore des questions à poser ?

 16   M. ZEC : [interprétation] Non.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 18   Monsieur Karadzic, avez-vous des questions supplémentaires à poser à ce

 19   témoin ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au compte rendu, il faut qu'il soit

 22   consigné : "Puisque la Défense n'a pas d'objection" à la ligne 22.

 23   Monsieur Torbica, ceci met un terme à votre déposition. Au nom de la

 24   Chambre de première instance, j'aimerais vous remercier d'être venu à La

 25   Haye pour témoigner. Maintenant, vous pouvez quitter le prétoire. Nous

 26   allons faire une pause de 45 minutes, et nous allons reprendre à 13 heures

 27   05.

 28   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 21.


Page 45750

  1   [Le témoin se retire]

  2   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  3   --- L'audience est reprise à 13 heures 08.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on demander au témoin de prononcer

  5   la déclaration solennelle.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux parler ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mandic, est-ce que vous nous

  8   entendez dans votre langue ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Pouvez-vous prononcer la

 11   déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 13   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 14   LE TÉMOIN : BOSKO MANDIC [Assermenté]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Mandic. Veuillez vous

 17   asseoir et installez-vous.

 18   Avant de déposer, Monsieur Mandic, je voudrais attirer votre attention sur

 19   un article du Règlement de procédure et de preuve; il s'agit de l'article

 20   90(E). En vertu de cet article, vous pouvez refuser de répondre à une

 21   question posée par M. Karadzic, par le Procureur, voire par les Juges, si

 22   vous pensez que votre réponse pourrait vous incriminer au pénal. Dans ce

 23   contexte, le concept "d'incrimination" signifie que vous diriez quelque

 24   chose qui pourrait constituer un aveu de culpabilité au pénal ou dire

 25   quelque chose qui pourrait fournir des éléments de preuve laissant penser

 26   que vous auriez commis un délit au pénal ou un crime au pénal. Cependant,

 27   si vous pensez qu'une réponse pourrait vous incriminer et, par conséquent,

 28   vous refusez de répondre à cette question, je dois vous informer que le


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  1   Tribunal est habilité à vous forcer à répondre à cette question. Cependant,

  2   dans ces circonstances, un témoignage obtenu de la sorte ne pourra être

  3   utilisé par la suite comme élément de preuve contre vous hormis le cas de

  4   poursuite pour faux témoignage. Est-ce que vous comprenez bien, Monsieur

  5   Mandic ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  8   Monsieur Karadzic, vous pouvez commencer.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 10   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Mandic.

 12   R.  Bonjour, Monsieur le président.

 13   Q.  Je vais vous demander, et ceci me permet également de me le rappeler à

 14   moi-même, que nous devons parler lentement et que nous devons également

 15   ménager des pauses entre nos interventions de façon à ce que tout ce que

 16   nous disons soit consigné au compte rendu d'audience, et que nous évitions

 17   également de perdre du temps. Et ainsi, le compte rendu d'audience sera

 18   plus clair.

 19   Est-ce que vous avez fourni une déclaration à mon équipe de la Défense ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Merci.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin le

 23   document 1D9661.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Je vous demande de vous concentrer sur la partie gauche de l'écran.

 26   Est-ce que vous voyez votre déclaration en serbe ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Et maintenant ?


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  1   R.  Oui, maintenant je peux la voir.

  2   Q.  Merci. Maintenant, est-ce que vous pourriez nous dire si vous avez lu

  3   cette déclaration et si vous l'avez signée ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  J'attends la fin de l'interprétation, et je vous demande de faire la

  6   même chose.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin la

  8   dernière page, où on peut voir sa signature.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez nous confirmer qu'il s'agit bien de votre

 11   signature ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reflète fidèlement ce que vous avez

 14   dit à mon équipe de la Défense ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Si je vous posais les mêmes questions aujourd'hui dans ce prétoire,

 17   est-ce que vos réponses, sur le fond, seraient les mêmes que dans cette

 18   déclaration ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Merci.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais donc maintenant verser cette

 22   déclaration conformément à l'article 92 ter.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections, Madame Gustafson ?

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 25   Messieurs les Juges.

 26   Pas d'objection. Je voudrais simplement consigner au compte rendu

 27   d'audience le caractère directeur des questions qui ont été posées. Par

 28   exemple, la question numéro 11, là où on demande au témoin, après l'attaque


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  1   avortée sur la ville de Prijedor :

  2   "Pourquoi les Musulmans souhaitaient-ils partir ?"

  3   Alors que les expulsions constituent une partie essentielle de ces

  4   allégations, il est évident que cette question est directrice et que ce

  5   n'est pas approprié. Les questions 18 et 19 sont également, de la même

  6   manière, problématiques. Et ceci, donc, signifie qu'il faudra accorder un

  7   poids différent aux réponses qui ont été données. Et compte tenu du fait

  8   que ces problèmes semblent se répéter, il faudra également réfléchir au

  9   poids que l'on accordera aux déclarations de la Défense conformément à

 10   l'article 92 ter.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons accepter le versement de

 12   ceci.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] D4922 [comme interprété].

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez, Monsieur Karadzic.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais maintenant donner lecture d'un bref

 16   résumé de la déposition de Bosko Mandic.

 17   Bosko Mandic était membre de la cellule de Crise de la municipalité de

 18   Prijedor en 1992. Le 16 avril 1992, il a été nommé président adjoint du

 19   Comité exécutif de l'assemblée municipale de Prijedor.

 20   Après la sécession de la Slovénie et de la Croatie de la RSFY et

 21   après le plébiscite pour la Bosnie-Herzégovine et la constitution du HDZ et

 22   du SDA, le peuple serbe s'est rendu compte qu'il devait s'organiser

 23   politiquement afin d'éviter les souffrances qu'il avait subies durant la

 24   Deuxième Guerre mondiale. Après le 9 janvier 1992 et la constitution de

 25   l'assemblée de la Republika Srpska, l'assemblée serbe de Prijedor a été

 26   créée. Suite à la prise de contrôle pacifique à Prijedor le 30 mai 1992, le

 27   Conseil de Défense nationale a pris une décision consistant à créer la

 28   cellule de Crise afin de mieux surmonter la nouvelle situation politique et


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  1   en matière de sécurité, qui était plus complexe, sur le territoire de la

  2   municipalité de Prijedor.

  3   Personne au sein des autorités à l'époque n'a organisé ni n'a été à

  4   l'origine du départ des populations non-serbes. Cependant, une partie

  5   importante de la population non-serbe se sentait en insécurité économique,

  6   financière et de manière générale après que la situation politique en

  7   matière de sécurité en Bosnie-Herzégovine soit devenue plus complexe, et a

  8   commencé à quitter la municipalité. Les personnes qui sont parties étaient

  9   principalement des femmes, des enfants et des personnes âgées, alors que

 10   les hommes en âge de porter des armes sont restés sur place.

 11   Le premier incident sur le territoire de la municipalité de Prijedor

 12   s'est produit le 22 mai 1992 lorsque les soldats croates et serbes ont été

 13   arrêtés et tués à un poste de contrôle à Hambarine par des forces

 14   paramilitaires musulmanes. Après plusieurs tentatives infructueuses de

 15   résoudre de manière pacifique la situation, la cellule de Crise de Prijedor

 16   a promulgué un ordre à l'intention des forces armées et de la police pour

 17   démanteler le poste de contrôle de Hambarine et afin de traduire devant les

 18   tribunaux les meurtriers des soldats. En même temps, les dirigeants

 19   militaires et politiques de la municipalité de Prijedor ont commencé des

 20   négociations avec les représentants de la TO de Kozarac afin de constituer

 21   une circulation normale sur la route entre Prijedor et Banja Luka.

 22   Les civils qui ne souhaitaient pas participer au conflit avec les

 23   Serbes ont été acceptés et ont été hébergés au camp de Trnopolje pour leur

 24   propre sécurité jusqu'à ce qu'une décision soit prise sur la question de

 25   savoir s'ils devaient partir ou s'ils pouvaient rester. En même temps, les

 26   forces paramilitaires musulmanes se sont enfuies dans les bois de Kozara,

 27   et des incursions occasionnelles organisées sur des villages avoisinants de

 28   Bozici, de Lamovita et de Babici ont eu lieu durant lesquelles ils ont


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  1   massacré les Serbes dans ces villages.

  2   Après l'attaque de Prijedor le 30 mai 1992, la majorité des

  3   extrémistes musulmans a décidé de s'enfuir vers d'autres pays. Tous les

  4   non-Serbes qui n'avaient pas enfreint la loi et qui ne possédaient pas

  5   d'armes ont également décidé de quitter la ville de Prijedor et ont été

  6   aidés en cela par les autorités locales durant ce processus. Leur départ a

  7   été rendu possible et organisé par le biais de la Croix-Rouge à Prijedor et

  8   la Croix-Rouge internationale. Ceux qui ont participé au combat ou qui

  9   avaient été capturés avec des armes ont été acheminés au centre d'enquête

 10   d'Omarska et leur responsabilité pénale a été déterminée. En même temps, un

 11   nombre important de réfugiés serbes provenant de Croatie et provenant

 12   d'autres villes en Bosnie-Herzégovine sont arrivés à Prijedor et

 13   cherchaient à être hébergés. La cellule de Crise de Prijedor, par le biais

 14   de son état-major régional, a accepté et a consigné sur des registres les

 15   réfugiés et les a hébergés temporairement dans des maisons et appartements

 16   abandonnés.

 17   Les formations paramilitaires qui appartenaient aux forces musulmanes

 18   et croates ont occasionné des conflits et des incidents sur le territoire

 19   de la municipalité de Prijedor. Certains des villages serbes ont été pris

 20   d'assaut, les maisons ont été incendiées et des civils ont été tués. A

 21   l'instar des formations paramilitaires du côté serbe, toutes les personnes

 22   qui étaient exemptées du service militaire ou déclarées inaptes au service

 23   militaire devaient rendre leurs armes.

 24   Il y avait des problèmes de communication avec les autorités

 25   centrales et avec les systèmes qui étaient en panne pendant une période de

 26   temps importante. La guerre civile qui a éclaté en Bosnie-Herzégovine a été

 27   le résultat d'une animosité remontant à plusieurs siècles de haine et

 28   d'esprit de revanche, et si des meurtres ou des incidents sont survenus,


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  1   ils ne pouvaient être commis que par des personnes ou des groupes que les

  2   autorités n'étaient pas en mesure de placer sous un certain contrôle.

  3   Et, à ce stade, je n'ai pas de questions à poser à M. Mandic.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  5   Monsieur Mandic, comme vous l'avez remarqué, votre déposition à décharge a

  6   été versée au dossier par écrit par le biais de cette déclaration écrite.

  7   Et maintenant, vous allez répondre aux questions d'un représentant du

  8   bureau du Procureur dans le cadre de son contre-interrogatoire.

  9   C'est à vous, Madame Gustafson.

 10   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Contre-interrogatoire par Mme Gustafson :

 12   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Mandic.

 13   R.  Bonjour.

 14   Q.  Au paragraphe 7 de votre déclaration, vous parlez de la prise de

 15   contrôle de Prijedor et vous mentionnez que ceci s'est produit le 30 mai

 16   1992. Mais, en fait, il semblerait d'après les éléments de preuve que nous

 17   avons entendus, que cette prise de contrôle ait eu lieu le 30 avril 1992.

 18   Est-ce que vous acceptez que cette prise de contrôle a en fait eu lieu le

 19   30 avril ?

 20   R.  Oui. Et une autre chose, si vous le permettez.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mandic.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Au paragraphe 5, on peut lire que M. Karadzic

 23   avait dit le vice-président du Comité exécutif, alors qu'en fait M.

 24   Karadzic avait dit "le président adjoint". Je voulais corriger cela. Il

 25   s'agit de deux choses différentes. Je ne souhaite pas qu'il y ait de

 26   malentendu. C'est à la page 1, paragraphe 5. M. Karadzic a dit que j'étais

 27   le président adjoint, parce que le président adjoint est en fait un concept

 28   différent du vice-président.


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  1   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  2   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète dans la cabine française : M. Karadzic

  3   a commencé à parler en anglais alors que l'interprétation en anglais était

  4   encore en train d'être réalisée, donc nous n'avons pas saisi l'intervention

  5   de M. Karadzic.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr de suivre. Mais je

  7   m'en remets aux parties pour obtenir des précisions.

  8   Madame Gustafson.

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 10   Q.  Une question de suivi, Monsieur Mandic, vous confirmez que le

 11   paragraphe est exact, c'est-à-dire que vous étiez le vice-président du

 12   Comité exécutif --

 13   R.  Oui.

 14   Q.  -- de la municipalité ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Maintenant, je voudrais revenir au 30 avril, à la prise de contrôle. Au

 17   paragraphe 23, vous décrivez cette prise de contrôle comme une réaction à

 18   un télégramme que vous avez reçu le 29 avril. Mais, en fait, il est vrai,

 19   n'est-ce pas, que les autorités serbes de Prijedor s'étaient préparées à

 20   cette prise de contrôle bien avant le 29 avril et que ce télex était

 21   simplement un élément déclencheur qui avait accéléré les événements qui

 22   avaient été préparés longtemps à l'avance, n'est-ce pas ?

 23   R.  Est-ce que je dois répondre ?

 24   Q.  Oui.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous connaissions la conjoncture. Nous nous

 27   souvenions de notre histoire, et nous savions que les représentants du

 28   parti du SDA avaient décidé de prendre le contrôle de la totalité de la


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  1   Bosnie-Herzégovine et nous savions que ce qui s'était produit, ce qu'il

  2   était advenu du peuple serbe durant la Deuxième Guerre mondiale allait à

  3   nouveau se produire dans une nouvelle guerre. Ceux qui étaient nés et qui,

  4   dans leurs familles, avaient des oncles ou des pères qui en avaient payé de

  5   leur vie, eh bien, nous voulions éviter que cela se reproduise. Nous

  6   voulions le faire, mais sans qu'il n'y ait de sang versé ni de nouveaux

  7   événements traumatisants.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

  9   Q.  Donc, vous êtes d'accord, n'est-ce pas, que les autorités du SDS de

 10   Prijedor avaient préparé cette prise de contrôle de Prijedor bien avant

 11   avoir reçu ce télex du 29 avril, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je vais l'expliquer de cette manière suivante : nous devions nous

 13   organiser d'une manière ou d'une autre par le biais de réunions, de

 14   pourparlers et de négociations, mais ceci a été fait dans une moindre

 15   mesure que ce que faisait le SDA et les terroristes qui étaient préparés à

 16   tout faire, prêts à tout faire. Et on peut le voir au moment où il y a eu

 17   cette prise de pouvoir, que personne ne voulait quoi que ce soit, que rien

 18   de mal ne s'est produit.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait afficher la pièce

 20   P2986 [comme interprété], s'il vous plaît.

 21   Q.  Monsieur Mandic, il s'agit d'un rapport du SJB de Prijedor, des neuf

 22   derniers mois de 1992.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à la page

 24   2 dans les deux langues, s'il vous plaît.

 25   Q.  Et, dans le deuxième paragraphe, le rapport parle tout d'abord des

 26   circonstances où il est mentionné et avancé que des cartes avec les

 27   répartitions ethniques étaient établies, ce qui signifiait que Prijedor se

 28   trouvait dans la Krajina de Cazin. Les activités étaient menées également


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  1   pour préparer à une prise de contrôle de force, et on peut le voir

  2   également que :

  3   "Suite aux événements de la nuit du 29 au 30 avril 1992, suite à des

  4   préparations très détaillées et conformément à la décision du Comité

  5   exécutif de la municipalité des Serbes de Prijedor, une prise de contrôle

  6   organisée a été lancée."

  7   Et ensuite, le rapport parle du rôle de 400 policiers qui ont mené à

  8   bien cette prise de contrôle.

  9   Comme on peut le voir dans ce rapport de police, cette prise de contrôle

 10   par le SDS était prévue bien avant la réception de ce télex le 29 avril,

 11   n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, mais ce n'était pas la seule raison. Je parle de la Krajina de

 13   Cazin.

 14   Q.  Vous parlez dans votre déclaration des événements à Hambarine à la fin

 15   du mois de mai. C'est le paragraphe 10 de votre déclaration. Je voudrais

 16   revenir à ce fait mentionné concernant l'incident ou l'événement du poste

 17   de contrôle à Hambarine. Vous avez dit que la cellule de Crise de Prijedor

 18   avait demandé aux extrémistes musulmans de remettre les corps des soldats

 19   tués, et cetera, et cetera.

 20   Mais, en fait, Monsieur Mandic, cet appel provenant de la cellule de

 21   Crise était en fait un ultimatum, n'est-ce pas, c'est-à-dire que la cellule

 22   de Crise a donné l'ordre à la population de Hambarine de leur remettre les

 23   auteurs, et c'était un ultimatum parce que si cela ne se faisait pas, la

 24   cellule de Crise n'était plus disposée ou à même de garantir la sécurité de

 25   la population civile, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, c'est ainsi que les choses se sont passées. Ce n'était en fait pas

 27   un ultimatum parce que beaucoup de temps était nécessaire pour remettre les

 28   corps et remettre également aux autorités les extrémistes qui étaient les


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  1   auteurs de ces crimes. Vous savez, le meurtre d'un homme est quelque chose

  2   de grave, et à Radio Prijedor, il était mentionné que les enfants et les

  3   personnes âgées devaient essayer de retrouver refuge, parce que nous étions

  4   prêts à mener des mesures qui nous permettraient de récupérer les corps, et

  5   également d'appréhender les personnes qui avaient commis ce crime. Et, ceci

  6   n'était pas fait le jour où cet incident s'est produit, mais le lendemain,

  7   parce que ce n'était pas simplement des soldats serbes, mais il y avait

  8   également des soldats de la JNA. Ce n'était pas seulement des Serbes, mais

  9   il y avait également des Croates qui ont été tués. Donc, ce n'était pas un

 10   seul groupe ethnique qui était ciblé.

 11   Q.  Monsieur Mandic, je ne vous ai pas demandé de faire de commentaire

 12   concernant les différents groupes ethniques, et je n'ai pas beaucoup de

 13   temps, donc je vous demande de vous concentrer sur les questions précises.

 14   Vous avez dit en répondant à ma question, oui, c'est ainsi que les choses

 15   se sont passées, et puis vous avez dit que ce n'était pas un ultimatum.

 16   Vous étiez d'accord, n'est-ce pas, pour dire que la cellule de Crise avait

 17   demandé aux habitants de remettre aux autorités les responsables de ce

 18   meurtre, sinon la cellule de Crise ne serait plus à même ni disposée à

 19   garantir la sécurité de la population ? Est-ce que vous êtes d'accord avec

 20   cela ?

 21   R.  Nous avons demandé à ceux qui avaient commis ces crimes de se rendre.

 22   Nous n'avons pas demandé à la population de les remettre aux autorités.

 23   C'est ceux qui avaient commis les crimes qui devaient se rendre. Il y avait

 24   notamment Mirza Mujadzic.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je ne suis pas sûre que nous ayons eu une

 26   interprétation de la dernière partie de la réponse.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter votre

 28   dernière phrase ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Les auteurs de ces crimes, c'est-à-dire ceux

  2   qui avaient participé à ce crime devaient être traduits devant les

  3   tribunaux. Ils devaient être poursuivis pour répondre de leurs actes.

  4   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait demander

  5   l'affichage de la pièce P3485, s'il vous plaît.

  6   Q.  Monsieur Mandic, en haut à droite de cet article, il y a un certain

  7   nombre de déclarations par la cellule de Crise qui sont reprises. Dans cet

  8   article de "Kozarski Vjesnik", je voudrais donc attirer votre attention sur

  9   cette déclaration de la cellule de Crise du 23 mai 1992. Et puis les deux

 10   derniers paragraphes de cette déclaration, on peut lire : La cellule de

 11   Crise donne l'ordre à la population de Hambarine et des autres communes

 12   locales de remettre aux autorités les auteurs de ce crime. Ils parlent donc

 13   de cet événement qui s'est produit au poste de contrôle, et ceci avant

 14   midi, le jour même. Et ensuite il est mentionné :

 15   "La cellule de Crise n'est plus en mesure, elle ne sera pas à même de

 16   garantir la sécurité de la population des villages et des zones

 17   susmentionnées."

 18   C'était le message de la cellule de Crise de Prijedor à la population de

 19   Hambarine, n'est-ce pas ?

 20   R.  Si c'est le texte qui provient de la cellule de Crise, cela signifie

 21   que c'était une mesure de dernier ressort et que la cellule de Crise

 22   souhaitait mettre un terme à cet événement et que les auteurs répondent de

 23   leurs actes devant la justice. Et il est évident que la population avait

 24   fait corps avec ses héros et qu'elle ne voulait pas prendre quelle que

 25   mesure que ce soit pour remettre ces personnes aux autorités. Cependant, la

 26   même population avait déjà quitté Hambarine. Ils n'ont pas l'armée ni la

 27   police, seulement les extrémistes.

 28   Q.  Mais vous avez dit que le 23 mai, la police et l'armée avaient mené une


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  1   opération à Hambarine et que dans la soirée l'opération était terminée. Et

  2   vous avez dit qu'il y avait une résistance importante contre ces actions

  3   par les extrémistes musulmans. En fait, l'armée n'a essuyé aucune perte

  4   dans cette opération, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne sais pas, croyez-moi. Je ne sais pas qui a essuyé des pertes ou

  6   pas. Je n'ai pas eu accès à ces informations et je ne sais pas ce qui s'est

  7   passé.

  8   Q.  Très bien. Nous allons rester sur ce document, et nous allons passer à

  9   la page suivante en anglais. Et nous restons à la même page en B/C/S, un

 10   peu plus bas sur cette même page.

 11   Ce qui m'intéresse, c'est la déclaration de la cellule de Crise du 24 mai

 12   1992 que vous voyez dans cet encadré --

 13   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Voilà.

 14   Q.  Voici donc une déclaration de la cellule de Crise le lendemain, le 24

 15   mai. Le paragraphe suivant en anglais, la cellule de Crise a discuté de la

 16   situation dans la municipalité lors de la session matinale, et on peut y

 17   lire :

 18   "Les opérations d'hier par l'armée visaient à désarmer les formations

 19   paramilitaires. La situation s'était calmée pendant la nuit. La cellule de

 20   Crise a évalué que l'opération a été couronnée de succès. L'armée n'a

 21   essuyé aucune perte au cours de ces activités de combat. Un membre de

 22   l'armée a été blessé."

 23   Il y a quelques instants, vous avez dit, Monsieur, que vous n'aviez pas de

 24   ce type d'information. Mais est-ce que ceci vous rappelle qu'en réalité la

 25   cellule de Crise savait le lendemain que l'armée n'avait pas du tout essuyé

 26   de pertes dans le cadre de l'opération Hambarine ?

 27   R.  Je ne me souviens réellement pas du tout de cela. Vous savez, plus de

 28   20 ans se sont écoulés depuis. Je ne sais pas s'il y a eu des blessés ou


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  1   pas. Je ne me souviens absolument plus. Je n'étais peut-être pas présent à

  2   cette réunion.

  3   Q.  Très bien. Dans votre déclaration, vous parlez de cette opération, vous

  4   dites qu'elle a été entreprise afin d'enlever le point de contrôle de

  5   Hambarine et de trouver les auteurs allégués qui ont pris part à l'incident

  6   du point de contrôle. Mais le fait est, Monsieur Mandic, que l'ensemble du

  7   village a été bombardé, n'est-ce pas ? C'était la réponse de l'armée

  8   concernant l'incident du point de contrôle; il s'agissait de bombarder le

  9   village, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je ne sais pas. Non, je n'ai pas cette information. Je ne me souviens

 11   pas des détails. Moi, je n'ai pas pris part à ces attaques. Si j'avais pris

 12   part aux attaques, j'aurais pu vous donner une réponse, mais comme je n'ai

 13   pas pris part aux attaques, je ne peux pas répondre à cette question.

 14   Q.  Et qu'en est-il du bombardement de Kozarac, bombardement qui a duré

 15   deux jours, vous souvenez-vous de cela ? Quelques jours après Hambarine.

 16   R.  Croyez-moi lorsque je vous dis qu'une partie de mon travail ne se

 17   rapportait pas du tout ni à la police ni à l'armée. Ce fut peut-être le

 18   cas, mais je ne sais pas. Si vous trouvez un texte, vous pourriez me le

 19   montrer. C'est peut-être indiqué à cet endroit-là, je ne sais pas. Mais je

 20   n'ai vraiment pas pris part à ces activités. Oui, effectivement, j'ai été

 21   membre de la cellule de Crise, mais je ne me suis pas occupé de ce que

 22   faisait l'armée. Je ne savais pas ce que faisait l'armée.

 23   Q.  Est-ce que vous ne vous êtes jamais déplacé le long de l'axe principal

 24   entre Prijedor et Banja Luka, le long de la route, où vous auriez pu voir

 25   la destruction des maisons à Kozarac ? Est-ce que vous avez vu les maisons

 26   détruites ?

 27   R.  Non. En fait, je n'ai pas du tout voyagé à l'époque. Je suis peut-être

 28   allé deux fois à Banja Luka jusqu'à ces événements. Mais lorsque


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  1   l'opération s'est terminée, je suis allée à Banja Luka. Vous savez, ce

  2   n'était pas moi qui entreprenais des voyages. C'était le président de la

  3   municipalité et d'autres qui étaient censés coopérer avec la Région

  4   autonome de la Krajina. Donc, moi, je ne m'occupais pas de ce genre

  5   d'activités, et donc je n'avais pas à me déplacer.

  6   Q.  Au paragraphe 10, vous dites que Trnopolje a été établi et que les

  7   civils y avaient été placés, gardés pour leur propre sécurité jusqu'à ce

  8   qu'une décision n'ait été prise, à savoir s'ils allaient partir ou rester

  9   ou jusqu'à ce qu'ils n'obtiennent des documents pour aller vers des pays

 10   tiers. Mais les civils qui se trouvaient à Trnopolje n'y étaient pas par

 11   choix, n'est-ce pas ? Ils avaient été détenus par la police et par l'armée

 12   et, en réalité, ils étaient détenus à Trnopolje en qualité de détenus,

 13   n'est-ce pas ?

 14   R.  Mais non, pas du tout. Je crois que ces civils étaient beaucoup mieux à

 15   Trnopolje sous la protection de la police que de se trouver dans la rue.

 16   N'importe quel imbécile en uniforme aurait pu se présenter et leur causer

 17   des problèmes. Vous savez, ils pouvaient entrer à Trnopolje et sortir de

 18   Trnopolje. Mais ces derniers avaient demandé une protection. Ils

 19   demandaient qu'on leur assure une protection pendant la nuit à Trnopolje

 20   afin qu'ils puissent s'y rendre, dans le fond, dans la nuit, et la journée

 21   ils partaient, ils rentraient chez eux. L'objectif était réellement de les

 22   protéger, parce que moi-même, en tant que Serbe, j'avais peur. J'avais peur

 23   de ces personnes avec les armes. Je n'avais pas peur des Musulmans ou des

 24   Croates. J'étais simplement effrayé. Je fais référence à ceux qui tiraient

 25   comme ça au hasard et qui se saoulaient et qui faisaient des problèmes à

 26   Prijedor.

 27   Puis-je poursuivre ?

 28   Q.  Non, Monsieur Mandic, vous avez répondu à ma question.


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  1   Mais j'aimerais savoir ceci : il n'y avait pas de Serbes qui cherchaient

  2   refuge à Trnopolje, n'est-ce pas ? C'étaient les Musulmans et les Croates.

  3   Il n'y avait qu'eux, n'est-ce pas ? Puisque vous avez dit que vous-même, en

  4   tant que Serbe, vous aviez peur.

  5   R.  Eh bien, je ne sais pas s'il y avait des Serbes. Je n'ai pas effectué

  6   de tri, donc je n'ai pas ce détail. Mais je peux vous dire que moi, en tant

  7   que Serbe qui y vivait, qui y travaillait, j'avais peur des gens qui

  8   tiraient au hasard, qui se saoulaient. Et donc, ce dernier, le saoul qui

  9   veut tirer sur quelqu'un, pouvait très bien pointer son arme sur moi,

 10   indépendamment du fait que je sois Serbe ou Musulman. Donc, il était

 11   beaucoup mieux d'assurer la sécurité de ces personnes que de les laisser

 12   libres, à la proie de ces personnes qui se livraient à ce genre d'activité

 13   incontrôlée. Vous savez, la guerre se poursuivait.

 14   Q.  Très bien.

 15   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche P2915,

 16   s'il vous plaît.

 17   Q.  Voici une liste qui nous résume les conclusions adoptées par le Comité

 18   exécutif et la cellule de Crise. Cette liste, ces conclusions ont été

 19   adoptées par la cellule de Crise.

 20   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Alors, c'est la page 3 dans les deux

 21   langues, s'il vous plaît. Vers le milieu de la page, vers les deux tiers à

 22   partir du haut en anglais. Deuxième entrée en B/C/S.

 23   Q.  L'on fait référence à la conclusion de la cellule de Crise du 2 juillet

 24   1992 interdisant une libération individuelle des personnes de Trnopolje,

 25   Omarska et Keraterm. Il ressort clairement du titre de cette décision que

 26   les personnes à Trnopolje y étaient détenues, n'est-ce pas ?

 27   R.  Je crois que c'était temporaire. Justement pour que ces derniers ne

 28   puissent pas sortir et revenir, parce qu'il y avait une possibilité que le


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  1   terrain soit nettoyé des extrémistes, pour ne pas que ces personnes passent

  2   la nuit dans une maison et qu'elles périssent. C'était donc l'objectif,

  3   donc de faire en sorte que les personnes ne rentrent pas chez elles à la

  4   maison parce qu'elles auraient pu se faire tuer, non pas par l'armée ou la

  5   police, mais bien par les personnes qui se trouvaient sur place, qui

  6   étaient là qui n'avaient pas été enfermées, détenues, arrêtées, et qui

  7   possédaient des armes, et jusqu'à ce que l'on voie de quelle manière ces

  8   personnes pouvaient être transférées vers des pays tiers en lieu sûr, parce

  9   que c'était elles-mêmes qui avaient demandé cela. C'était leur volonté.

 10   Q.  Au paragraphe numéro 12, vous parlez d'Omarska et vous dites que les

 11   personnes ayant pris part aux opérations de combat ou qui avaient été

 12   capturées avec des armes ont été emmenées à Omarska où une enquête avait

 13   été menée et une responsabilité pénale a été déterminée. Vous répétez cela

 14   de nouveau au paragraphe 20.

 15   Mais il est vrai, n'est-ce pas, Monsieur, qu'il y avait un très grand

 16   nombre de non-Serbes qui n'avaient absolument rien à voir avec des

 17   opérations de combat ou avec la possession d'armes, n'est-ce 

 18   pas ? Donc, Omarska était bondé de ces non-Serbes-là ?

 19   R.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter quel est le paragraphe en

 20   question ?

 21   Q.  Vous avez déclaré ceci à deux reprises dans votre déclaration, une

 22   première fois au paragraphe 12 et une deuxième fois au paragraphe 20 de

 23   votre déclaration.

 24   R.  Oui. Je vais vous expliquer pourquoi ceci a été fait. Eh bien, c'est

 25   parce qu'un très grand nombre de personnes sur le terrain à Omarska -- il y

 26   avait un très grand nombre de personnes. La population était nombreuse, et

 27   il fallait les échanger contre les personnes qui n'avaient pas d'armes.

 28   Donc, on donne quelques armes. Donc, une personne reste derrière la


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  1   première personne pour qu'elle puisse avoir une arme, si jamais la première

  2   personne trouvait la mort. Et moi, en fait, je n'avais pas été à Omarska.

  3   Cela ne faisait pas partie de mon champ de compétence, mais je présume que

  4   toutes les personnes devaient passer par une sélection, parce qu'il y avait

  5   des organes qui posaient des questions pour savoir si quelqu'un possédait

  6   des armes, si les personnes avaient participé aux opérations de combat, si

  7   les personnes ont été libérées ou transférées dans un centre de Trnopolje.

  8   Je ne sais pas. Je ne suis pas au fait de ces détails, mais la raison est

  9   qu'un très grand nombre de personnes en uniforme et avec des armes s'y

 10   trouvaient. Mais, même sans cela, il fallait effectuer un tri, une

 11   sélection. Vous ne pouviez pas déterminer sur le terrain si vous alliez

 12   tirer sur quelqu'un ou pas.

 13   Q.  Le SJB de Prijedor a reconnu de manière officielle qu'il y avait des

 14   personnes à Omarska qui "étaient capturées parce qu'elles n'ont pas pris

 15   part aux opérations de combat" et des personnes "pour lesquelles il n'y

 16   avait pas de preuve prépondérante quant à leur participation à une

 17   rébellion armée de quelle que manière que ce soit."

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il s'agit de D470, à la page 30.

 19   Q.  J'aimerais savoir, Monsieur, si vous êtes au courant de cette

 20   évaluation faite par le SJB de Prijedor, à savoir que ces personnes-là

 21   étaient des détenus ?

 22   R.  Eh bien, oui, alors si c'est ainsi qu'ils ont présenté les choses,

 23   c'était ainsi. Bon, vous savez, il y avait des Serbes là-bas aussi; je me

 24   souviens d'Igor Kondic, il était Serbe. Je ne sais pas de quelle manière et

 25   pourquoi il s'est trouvé à cet endroit-là, je ne sais pas. Je n'ai pas

 26   procédé au processus de sélection. Je n'ai pas posé de questions à

 27   personne.

 28   Q.  Au paragraphe 28 de votre déclaration, Monsieur Mandic, vous faites


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  1   certains commentaires sur des faits admis, comme par exemple le renvoi de

  2   non-Serbes, et surtout ceux qui occupaient des positions de direction à

  3   Prijedor. Et vous dites que le fait de quitter une position d'autorité

  4   dépendait de son respect pour la constitution et les lois, et non pas sur

  5   sa nationalité. Si une personne était d'une nationalité quelconque mais

  6   qu'elle était loyale à l'Etat, cette personne pouvait garder son poste.

  7   La cellule de Crise, Monsieur Mandic, de Prijedor a délivré un ordre

  8   demandant que certains postes considérés comme étant importants pouvaient

  9   être tenus seulement par des Serbes, n'est-ce pas ?

 10   R.  Eh bien, je ne sais réellement pas, croyez-moi. Les postes importants,

 11   par exemple, au sein du poste de sécurité publique de Prijedor, il y avait

 12   un Musulman qui occupait un poste important. Au bureau de poste, il y avait

 13   également des Musulmans, des Serbes et des Croates, et il y avait aussi des

 14   directeurs -- des personnes qui se trouvaient, donc, assises dans la chaise

 15   de directeur dans une entreprise, comme par exemple Mrakovica, et c'était

 16   M. Bilo Begovic, il était le directeur de cette entreprise. Et personne ne

 17   l'a démis de ses fonctions, personne ne lui a rien fait. Enfin, je ne sais

 18   pas. Il n'a pas collaboré avec les extrémistes et il s'avérait être un

 19   citoyen loyal.

 20   Q.  Monsieur Mandic, vous n'avez pas réellement répondu à ma question. Vous

 21   étiez un membre de la cellule de Crise de Prijedor, n'est-ce pas ? La

 22   cellule de Crise a délivré un ordre selon lequel seuls les Serbes pouvaient

 23   occuper des postes estimés être importants. Oui ou non ?

 24   R.  Non. Non, non, je ne crois pas que ce soit cela. Non, non. Je crois

 25   qu'il faut être citoyen loyal d'après la constitution.

 26   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais que l'on prenne maintenant le

 27   document P2740, s'il vous plaît.

 28   Q.  Monsieur Mandic, vous pouvez voir qu'il s'agit d'une décision de la


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  1   cellule de Crise de la RAK du 22 juin 1992. Et au point numéro 1, vous

  2   pouvez voir que la décision exige que seul le personnel d'origine ethnique

  3   serbe puisse occuper des postes exécutifs et des postes qui gèrent les

  4   biens qui appartiennent à l'Etat; des postes d'importance pour le

  5   fonctionnement des entités ethniques [comme interprété]. Et on peut y lire

  6   que ceci inclut toutes les entreprises d'Etat, les entreprises publiques,

  7   le MUP, l'armée, et cetera.

  8   Maintenant, la cellule de Crise de Prijedor a reçu cette décision qui lui a

  9   été envoyée afin que l'on la mette en œuvre, n'est-ce pas ?

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent au témoin de reprendre sa réponse,

 12   de répéter.

 13   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas dû accepter, c'est-à-dire je

 15   n'étais pas dans l'obligation d'accepter. S'il s'agissait de personnes

 16   loyales, si c'étaient des Musulmans ou des Croates mais que ces personnes

 17   étaient loyales, nous n'avions pas à rendre des décisions sur leur sort, en

 18   vertu de la décision de l'AR Krajina. Mais si cette information définit ces

 19   entreprises qui étaient importantes, eh bien, cela a dû être comme d'après

 20   la décision. Mais lorsque nous avions évalué qu'il n'était pas nécessaire

 21   de les démettre de leurs fonctions, de les remplacer, eh bien, à ce moment-

 22   là, nous les laissions là où elles sont, ces personnes, qui occupaient des

 23   postes importants.

 24   Mme GUSTAFSON : [aucune interprétation]

 25   Q.  Donc, vous vous rappelez avoir reçu cette décision, Monsieur Mandic ?

 26   R.  Non, non, non, pas du tout. Je n'avais pas de contact avec la AR

 27   Krajina. Nous n'avions pas reçu de décisions au niveau individuel.

 28   Q.  A la page 2 [comme interprété] du document, on peut voir que le


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  1   président de la municipalité, le Dr Stakic, envoie cette décision de la RAK

  2   afin qu'on puisse la mettre en œuvre, et ceci a été fait le lendemain,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  A qui l'envoie-t-il, excusez-moi ?

  5   Q.  Prenons P2637. Je vais vous poser une question plus précise quant à la

  6   mise en œuvre de cette décision. Comme vous pouvez le voir, il s'agit d'un

  7   document du SJB de Prijedor en date du 1er juillet 1992. Le document est

  8   envoyé à la cellule de Crise de Prijedor. On énumère un certain nombre de

  9   conclusions que la SJB est en train de mettre en œuvre. Et à la dernière

 10   entrée qui se trouve à la deuxième page dans les deux langues, on peut y

 11   lire :

 12   "La décision de la cellule de Crise de la RAK de Banja Luka en date du 22

 13   juin 1992", et je peux vous dire que c'est le numéro et la date de la

 14   décision de la cellule de Crise de la RAK, "sur les postes importants

 15   occupés par des personnes", et on peut lire ici que cet ordre a été mis en

 16   œuvre par ce poste de sécurité publique SJB.

 17   Alors, Monsieur Mandic, la cellule de Crise de Prijedor a envoyé la

 18   décision de la cellule de Crise de la RAK ou tout du moins à la SJB et la

 19   SJB répond à la cellule de Crise de Prijedor pour les informer que la

 20   décision a été mise en œuvre, n'est-ce pas ?

 21   R.  Clairement, oui, mais qui a été remplacé, comment, pourquoi. Il y a

 22   également des cadres qui sont partis de leur propre chef des postes qu'ils

 23   ont occupés préalablement et, donc, il fallait les remplacer, mais ici, il

 24   n'est pas indiqué qui a quitté ces postes. Ici, il est dit que cela a été

 25   fait, mais on ne sait pas qui a été remplacé.

 26   Q.  Au paragraphe 22 de votre déclaration, vous dites qu'au cours des

 27   premiers mois de la guerre, vous n'aviez pas de contact avec les autorités

 28   à Pale et que vous aviez pris toutes vos décisions de manière indépendante.


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  1   J'aimerais maintenant que vous nous précisiez le contexte temporel ou la

  2   période pendant laquelle vous n'aviez pas de contact avec les autorités de

  3   Pale.

  4   R.  Personnellement, je n'ai pas du tout eu de contacts avec eux. Mais je

  5   crois que c'était jusqu'à ce que le corridor ne soit percé en direction de

  6   Bijeljina. Je crois que pendant cette période, nous n'avions pas de

  7   possibilité de recevoir d'ordres, et nous ne pouvions pas recevoir

  8   d'indications à savoir comment nous comporter dans des moments complexes.

  9   Q.  Donc, à partir du début de la guerre jusqu'à ce que le corridor ne soit

 10   formé qui, selon les preuves, était à la fin du mois de juin 1992, donc

 11   vous êtes en train de nous dire qu'au cours du mois de mai 1992, les

 12   autorités de Prijedor n'avaient absolument pas de contact avec les

 13   autorités de Pale; est-ce que c'est exact ?

 14   R.  Je ne peux réellement pas répondre à votre question, car je ne me

 15   souviens réellement pas de cela. Je n'ai pas eu de contact, et donc je ne

 16   peux pas m'en souvenir. S'il est indiqué qu'il y a eu des contacts, il y en

 17   a eu. Sinon, eh bien, je ne peux vraiment pas m'en souvenir. Je ne suis pas

 18   allé à Pale. Je ne suis pas allé à Banja Luka non plus. Je n'ai pas fait

 19   cette partie-là du travail. Je n'ai pas pu convoquer des sessions du Comité

 20   exécutif, par exemple je n'avais pas du tout ce genre de fonctions-là. Je

 21   n'occupais pas de ce genre de fonctions et je n'avais pas les capacités de

 22   le faire non plus.

 23   Q.  Monsieur Mandic, votre déclaration dans cette affaire est très

 24   catégorique. Vous dites :

 25   "Après le début de la guerre, au cours des premiers mois, nous, à

 26   Prijedor, nous n'avions pas de contact avec les autorités de Pale. Nous

 27   prenions toutes nos décisions de manière indépendantes."

 28   Alors que votre dernière réponse semble nier cela. Vous dites : Je n'ai pas


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  1   eu de contact. Je ne me souviens pas si l'on peut voir quelque part par

  2   écrit qu'il y a eu des contacts, d'accord. Mais je ne me souviens vraiment

  3   pas de tout cela. Alors, qu'est-ce que vous êtes en train de nous dire ?

  4   Est-ce que c'est ce que vous dites dans votre déclaration ou bien est-ce

  5   que vous êtes en train de nous dire que vous ne vous en souvenez pas et,

  6   donc, vous ne pouvez pas répondre du tout à cette question ?

  7   R.  Je crois que je n'ai pas eu de contact.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais demander l'affichage de P3919,

  9   s'il vous plaît.

 10   Q.  Monsieur Mandic, vous pouvez voir qu'il s'agit d'une décision de la

 11   mobilisation des forces et des ressources générales du 28 mai 1992,

 12   décision rendue par la présidence de la RS et signée par le Dr Karadzic. La

 13   cellule de Crise de Prijedor a reçu et a mis en œuvre cet ordre, n'est-ce

 14   pas ? En fait, il s'agit d'une décision, je m'en excuse.

 15   R.  Oui, cela est clair, mais comme je vous dis, je ne recevais pas de

 16   documents, donc je suis vraiment désolé. Je présente mes excuses aux Juges

 17   de la Chambre, mais je ne me souviens pas de cela, parce que les documents

 18   ne venaient pas à moi. Je n'ai jamais tenu ce document entre les mains.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pourrait-on prendre P3537, s'il vous

 20   plaît.

 21   Q.  Monsieur Mandic, nous avons là une décision de la cellule de Crise de

 22   Prijedor. Dans le préambule, on peut lire :

 23   "Conformément à la décision de la République serbe de Bosnie-Herzégovine

 24   sur la mobilisation générale du publique des forces et du matériel dans la

 25   république, la cellule de Crise de la municipalité de Prijedor, compte tenu

 26   de la situation actuelle et des conditions, à la réunion tenue le 22 mai

 27   1992, a rendu cette décision sur la mobilisation et cette décision sur la

 28   mobilisation suit."


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  1   Alors, lorsque je vous ai montré la décision relative à la mobilisation

  2   émanant de la présidence, vous avez dit que vous ne vous souvenez pas de

  3   cela, vous dites que les documents ne vous avaient jamais été remis, et que

  4   vous n'avez jamais tenu ce document entre les mains ou les documents entre

  5   les mains.

  6   Mais est-ce que vous seriez d'accord pour dire maintenant, après

  7   avoir entendu ce que je viens de vous lire, que les cellules de Crise

  8   avaient discuté de la mise en œuvre de la désignation de la présidence lors

  9   de cette réunion du 22 mai 1992 ?

 10   R.  Mais il est clair que la décision a été prise, mais comme je n'ai

 11   mobilisé personne, je ne pouvais pas me souvenir de ce qui s'était passé à

 12   ce moment-là. Comme je vous l'ai dit, plus de 20 ans se sont écoulés

 13   depuis. Maintenant, je vois que c'est effectivement cela.

 14   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais demander l'affichage du

 15   document P6589, s'il vous plaît.

 16   Q.  Monsieur Mandic, il s'agit du PV de la réunion qui s'est déroulée le 18

 17   mai 1992, conseil municipal de Prijedor, réunion du SDS plutôt du conseil

 18   municipal de Prijedor. Alors on peut y lire au point 2 au texte, un rapport

 19   sur la session de l'assemblée a été présenté par le président Miskovic, et

 20   ensuite il y a certaines notes qui disent qu'il y a des points à l'ordre du

 21   jour, on a identifié un certain nombre de choses, le commandant de l'armée

 22   a été nommé, le commandant de l'armée, état-major suprême a été nommé, les

 23   membres de la présidence de la république a été élu, et cetera. Et ensuite,

 24   l'on peut y lire que l'adjoint de l'assemblée, Svetozar Timarac, a présenté

 25   des informations supplémentaires lors de cette session.

 26   Est-ce que vous vous souvenez de cette réunion où M. Miskovic et M. Timarac

 27   ont présenté au SDS de Prijedor les décisions qui ont été prises, et est-ce

 28   que vous vous souvenez des échanges qui se sont déroulés à l'occasion de la


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  1   session de cette assemblée de la Republika Srpska à quelques jours avant

  2   cela, c'est-à-dire le 12 mai 1992 ?

  3   R.  Non, je n'arrive pas à m'en souvenir. Il y a eu beaucoup de sessions de

  4   l'assemblée, vous savez, je ne peux vraiment pas m'en rappeler. Il y avait

  5   eu les assemblées de la Republika Srpska, des comités municipaux, des

  6   différents QG, ce qui fait que je n'arrive vraiment pas à me souvenir. Il

  7   se peut qu'il y ait eu une information de communiquée concernant l'élection

  8   du commandant ou l'élection d'une présidence de la république, et ainsi de

  9   suite. Il y a eu beaucoup de sujets abordés, ce qui fait que je ne sais

 10   plus. Ceci a été une information de communiquée.

 11   Q.  Monsieur Mandic, vous serez d'accord avec moi pour dire que vous avez

 12   été présent à l'occasion de cette session du 18 mai du comité municipal de

 13   Prijedor. On voit que vous avez pris part aux débats, au point 3.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Mais vous ne vous souvenez pas d'un briefing ?

 16   R.  Il y a eu un débat au sujet des plates-formes du SDS. S'il y a avait eu

 17   un débat pour ce qui est du point précédent, cela aurait été consigné. Il

 18   n'y a que les propos du président du parti qui ont été consignés. Personne

 19   n'a demandé à ce qu'il soit débattu les différents points à l'ordre du jour

 20   de cette assemblée.

 21   Q.  Bon. Vous êtes d'accord pour dire que vous avez été présent à cette

 22   session, session du 18 mai ?

 23   R.  Oui, certainement. C'est consigné. Mais je n'ai pas pris la parole.

 24   Q.  L'un des points que M. Miskovic a intégré dans son rapport du 12 mai,

 25   dit qu'il s'agit de lignes directrices en provenance de la session de

 26   l'assemblée du 12 mai, et qu'il a dit que c'était relatif aux activités à

 27   venir. Alors, il me semble que l'on fait état des objectifs stratégiques

 28   que le Dr Karadzic avait annoncés à l'occasion de la session de l'assemblée


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  1   du 12 mai. Est-ce que vous souvenez que M. Miskovic ait communiqué au SDS

  2   de Prijedor la teneur de ces objectifs stratégiques lors de la session du

  3   SDS ?

  4   R.  Il est certain qu'il en a parlé. Qu'en a-t-il dit, je ne m'en souviens

  5   pas. Il a dû évoquer certains objectifs stratégiques. Je crois qu'il a dû

  6   parler des différents points qui figurent dans le texte de cette plate-

  7   forme.

  8   Q.  Au paragraphe 13 de votre déclaration, vous dites que la cellule de

  9   Crise de Prijedor a créé des cellules de Crise régionales pour enregistrer

 10   ou consigner les biens abandonnés pour y installer des réfugiés à titre

 11   temporaire. Alors, vous parlez là de la nécessité de consigner ces biens

 12   abandonnés. Alors, en fait, en août 1992, les autorités municipales de

 13   Prijedor ont pris une décision disant que les biens immobiliers abandonnés

 14   ont été considérés comme faisant, voire partie des biens de la

 15   municipalité, n'est-ce pas, donc les biens de ceux qui sont partis sont

 16   devenus des biens appartenant à l'Etat, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui. Il fallait bien que quelqu'un mette ces biens à l'abri. L'objectif

 18   poursuivi était de protéger ces biens, voir donc quelles étaient les

 19   maisons qui ont été vidées, qui ont été abandonnées, les consigner, voir

 20   les appartements qui ont été libérés aussi afin de les protéger, de les

 21   mettre à l'abri parce qu'on avait déjà 6 000 réfugiés venus de Zenica,

 22   venus de Bosanska Brna [phon], à Prijedor, et ces gens-là, il fallait bien

 23   les loger quelque part. Si la population qui aimait rendre visite à ces

 24   maisons pour prendre possession des biens abandonnés, ce n'est pas une

 25   chose qu'il convenait de laisser faire, parce que si quelqu'un enlève le

 26   toit d'une maison, les biens vont être endommagés. Il fallait donc protéger

 27   tout ceci, mettre à l'abri, parce que les appartements qui étaient en

 28   propriété des entreprises, ce n'était pas la propriété de ceux qui y


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  1   habitaient, c'était une propriété sociale. C'était non pas une propriété

  2   individuelle, c'était la propriété de la société tout entière. La loi

  3   disait ainsi chez nous à l'époque, ceux qui avaient acheté leur

  4   appartement, en étaient eux, propriétaires, et le reste était en propriété

  5   de la société.

  6   Q.  Tout d'abord, dans cette décision, il n'y a aucune distinction de faite

  7   entre les biens en propriété de la société et les biens privés. Il est tout

  8   simplement dit que les biens abandonnés allaient devenir propriété de

  9   l'Etat ?

 10   R.  De la société, et ce, pour protéger ces biens, non pas pour aliéner,

 11   revendre à autrui ou quelque chose de ce genre. L'objectif était celui de

 12   mettre cela à l'abri.

 13   Q.  Bon. Mais la municipalité n'avait pas à prendre propriété de ces biens

 14   ? On pouvait juste consigner ces biens, l'enregistrer dans des livres, et

 15   autoriser une installation temporaire de réfugiés ou autres personnes dans

 16   ces bâtiments-là ? Parce que proclamer ceci propriété de l'Etat, ce n'était

 17   pas la bonne façon de protéger les choses ? 

 18   R.  Je ne pense pas que la loi -- enfin, je ne connais pas la loi

 19   exactement. Je ne suis pas juriste. J'imagine que celui qui a proposé les

 20   choses de la sorte savait ce qu'il faisait. Je ne suis pas un juriste. Et

 21   je ne peux pas entrer dans la substantifique moelle de cet aspect du

 22   problème.

 23   Q.  Mais ce processus ne se rapportait pas seulement à l'installation des

 24   réfugiés. On s'est appropriés des commerces ou les entreprises ou biens qui

 25   étaient en propriété de Musulmans ou Croates pour laisser les Serbes s'en

 26   servir ?

 27   R.  Ecoutez, il y a eu des entreprises. Je pense qu'il avait une société

 28   qui s'appelait Hidrofleks, dont le propriétaire était un Croate, mais il a


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  1   fait un contrat avec quelqu'un de Prijedor, et je crois qu'il y a eu vente

  2   et achat de ce bien. Je ne sais trop. Et je ne connais pas de cas

  3   particulier, je ne peux pas dire si on a donné à un Serbe plutôt qu'à un

  4   autre. Je sais qu'il y a eu ce contrat de vente et achat, mais je n'avais

  5   pas d'attribution pour ce qui était d'enquêter et établir s'il en était

  6   véritablement ainsi ou pas.

  7   Q.  Bon. Vous n'avez pas su s'il y a eu des commerces ou entreprises qui

  8   auraient été en propriété de Musulmans ou Croates où la municipalité aurait

  9   saisi les biens en question pour les confier 

 10   à quelqu'un d'autre ? Vous ne pouvez pas nous en donner un seul exemple ?

 11   R.  Je vous ai donné l'exemple de Hidrofleks. Mais si vous aviez une liste,

 12   je pourrais vous dire : Un tel, oui; un tel, non. Comme ça, de tête, je

 13   n'arrive pas à m'en souvenir parce qu'en substance, je n'ai pas été dans la

 14   politique. Jusqu'à un an avant cela, j'ai séjourné en Allemagne. J'ai été

 15   directeur commercial dans un combinat qui fabriquait des objets en

 16   céramique. Et ça ne m'intéressait pas de savoir qui était propriétaire de

 17   telle société. Je ne suis pas ce type d'homme. Si vous aviez une liste à me

 18   présenter, je pourrais vous dire : Ça, ça été pris par un tel; ça, ça a été

 19   pris par un tel autre. Mais comme cela, de tête, je ne sais pas.

 20   Q.  Pour que les choses soient tout à fait clairement dites, Monsieur

 21   Mandic, vous ne pouvez pas vous souvenir d'un seul exemple où la

 22   municipalité de Prijedor se serait appropriée un commerce ou une société

 23   qui aurait été abandonné par un Musulman ou Croate pour laisser quelqu'un

 24   d'autre l'utiliser ?

 25   R.  Si, je m'en souviens maintenant. Il y avait un certain Cuko, un

 26   Musulman, son commerce a été repris par Dusko Knezevic. Je crois que c'est

 27   quelqu'un qui a par la suite été mis en accusation. Mais ce genre de

 28   personne, on ne pouvait pas les empêcher. Ils ne demandaient l'autorisation


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  1   de personne. Lui et ce type de gens se sont emparés par eux-mêmes de

  2   certains biens.

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche le document

  4   65 ter 25827, s'il vous plaît.

  5   Q.  Il s'agit ici d'une conclusion émanant du Conseil exécutif de Prijedor.

  6   C'est daté du 14 mai 1993. A l'époque, Monsieur Mandic, vous étiez

  7   président de ce Conseil exécutif, n'est-ce pas ?

  8   R.  J'ai été vice-président. Mais je me souviens de la liste, et la liste

  9   est bonne. Maintenant je m'en souviens, oui.

 10   Q.  Alors, nous sommes en mai 1993, Monsieur Mandic, vous étiez président

 11   du Conseil exécutif ? On est en 1993.

 12   R.  Ah oui, oui, en effet. Je croyais que vous parliez encore de 1992.

 13   J'étais, oui, président du Conseil exécutif.

 14   Q.  Bien.

 15   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'aimerais qu'on se penche pendant

 16   quelques instants sur la page numéro 2.

 17   Q.  Je pense que vous allez reconnaître là votre signature.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il s'agit ici d'une décision que vous avez rendue et signée vous-même,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Revenons maintenant vers la page numéro 1.

 23   Q.  Il y est dit : Dans l'objectif de la mise en œuvre des conclusions du

 24   Conseil exécutif datées du 22 décembre 1992, qui déterminent que les

 25   membres de la famille directe des soldats tués au combat et familles de

 26   vétérans et invalides se voient attribuer dix établissements de commerce

 27   tels que sélectionnés à cette fin. Et on donne une liste de locaux ou de

 28   fonds de commerce et on donne le nom du propriétaire précédent. D'abord, il


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  1   y avait Dzevad Mujanovic, une espèce d'épicerie, et autres. Alors, les dix

  2   individus qui ont été identifiés comme étant les propriétaires précédents

  3   de ces locaux commerciaux, c'étaient des Musulmans et des Croates, ça

  4   n'avait pas été des Serbes, n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Et ces fonds de commerce -- au point 3, page 2, il est dit que toute

  7   personne sélectionnée pour ce qui a été déterminé par l'association des

  8   combattants se voit attribuer des contrats par la municipalité de Prijedor.

  9   Donc, il apparaît clairement que c'est la municipalité qui s'est appropriée

 10   ces fonds de commerce et c'est les membres des familles de soldats tués ou

 11   vétérans qui ne sont plus aptes au combat qui sont entrés en contrat de

 12   [inaudible] avec la municipalité à leur propre profit, n'est-ce pas ?

 13   R.  C'est exact.

 14   Q.  Mais il y a quelques instants de cela à peine, vous nous avez dit que

 15   vous ne pouviez pas vous souvenir d'un seul exemple où la municipalité de

 16   Prijedor se serait appropriée des fonds de commerce ayant appartenus aux

 17   Musulmans ou Croates et qui auraient été confiés à quelqu'un d'autre,

 18   exception faite de l'exemple où ce criminel, Dusko Knezevic, "s'était

 19   approprié sans l'autorisation de personne ce qu'il voulait." En fait,

 20   Monsieur Mandic, le Conseil exécutif de l'assemblée municipale de Prijedor

 21   a fait exactement la même chose que M. Knezevic, il s'est approprié de

 22   certains fonds de commerce ou sociétés qui étaient en possession de non-

 23   Serbes pour les donner à des Serbes, n'est-ce pas ?

 24   R.  On ne peut pas dire que c'est la même chose. Ça, ça a été fait par les

 25   autorités, et l'autre cas de figure c'était un individu. Un individu n'est

 26   pas une autorité. On a dit qu'une société en propriété sociale devait être

 27   protégée. Ça devait être des fonds de commerce qui se trouvaient dans le

 28   centre de la ville. Suite à des demandes formées par des associations


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  1   d'invalides ou de combattants ou vétérans de la guerre, on leur a cédé des

  2   locaux pour qu'ils y travaillent et pour qu'ils soient préservés. Personne

  3   d'entre eux n'a pu préserver et garder ces locaux commerciaux à leur propre

  4   profit. Ils ont dû être restitués, et donc le contrat de location a été

  5   annulé. La chose a été faite de façon légale. Mais Dusko Knezevic n'était

  6   pas ni l'Etat ni l'autorité quelconque faisant partie des instances de

  7   l'Etat, donc il ne pouvait pas le faire par lui-même.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  9   document.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, on le versera au dossier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6606, Madame, Messieurs

 12   les Juges.

 13   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 14   Q.  Au paragraphe 15, Monsieur Mandic, vous faites référence à des crimes

 15   que l'on a reprochés au peuple serbe, et vous dites :

 16   "On sait de façon générale qu'il y a eu des meurtres commis à titre

 17   individuel et que les instances de police et le bureau du procureur de la

 18   municipalité de Prijedor ont diligenté des enquêtes et déposé des plaintes

 19   au pénal contre des auteurs tant connus que non connus."

 20   Alors, quels sont ces meurtres individuels, tels que vous les qualifiez en

 21   1992, où les victimes ont été non-Serbes, qui avaient été portés à votre

 22   connaissance ?

 23   R.  Je vais vous donner un exemple, celui de la famille Rizvanovic. Il

 24   s'agissait d'un mécanicien auto. Et il y avait une autre famille qui, me

 25   semble-t-il, portait le nom de famille Dosen qui a commis un meurtre dans

 26   la nuit. Je ne sais pas trop vous en parler, mais je sais que dans Prijedor

 27   la peur s'est installée. On connaissait ces individus comme cela, mais

 28   quand ils avaient bu, ce n'étaient plus les mêmes personnes du tout. Et il


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  1   s'est passé ce qui s'est passé. Je pense que le poste de sécurité publique

  2   a été faire un constat des lieux et on a identifié l'auteur ou les auteurs.

  3   Q.  Et qui a été l'auteur de ce meurtre ?

  4   R.  Je crois que c'était quelqu'un qu'on appelait Djole. Je n'ai pas eu de

  5   documents sous la main à cet effet, mais je pense que c'est la rumeur qui a

  6   couru.

  7   Q.  Bien. Est-ce que cette personne, par rapport à laquelle vous ne savez

  8   que son surnom, a fait l'objet de poursuites au pénal par les autorités de

  9   la Republika Srpska à l'époque ?

 10   R.  Je ne le sais pas. C'était quelque chose qui relevait de la compétence

 11   du bureau du procureur et de la police --

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander une clarification ?

 13   Je ne suis pas sûr que le témoin ne connaisse que le surnom de cette

 14   personne. Je pense qu'il a mentionné également son nom de famille.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que son nom de famille était Dosen.

 16   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce que vous êtes au courant d'autres cas que vous avez appelés

 18   meurtres individuels de non-Serbes en 1992 ?

 19   R.  C'était au cours des activités de guerre, au cours des combats, lors de

 20   l'attaque contre Prijedor, et cetera. J'espère que cela a été enregistré et

 21   qu'on a appris quels en étaient les auteurs, il s'agissait de non-Serbes.

 22   Q.  Vous n'avez mentionné qu'un seul cas de meurtre individuel dont vous

 23   êtes au courant. Vous dites que vous ne savez pas si l'auteur de ce crime a

 24   été traduit en justice, et vous dites :

 25   "Je suppose que tout cela a été documenté et que les auteurs de ces crimes

 26   sont connus…"

 27   Et dans votre déclaration, vous avez dit que les organes de la police et le

 28   bureau du procureur de la municipalité de Prijedor ont diligenté diverses


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  1   enquêtes pour découvrir les auteurs. Mais sur quoi exactement vous vous

  2   êtes appuyé lorsque vous avez dit que vous ne connaissiez qu'un seul cas

  3   d'incident concernant un meurtre si vous ne savez même pas si l'auteur de

  4   ce crime a été poursuivi en 

  5   justice ?

  6   R.  Eh bien, je suppose que tout le monde a fait ce qu'ils étaient censés

  7   faire, les tribunaux, les procureurs ainsi que la police. Et on ne pouvait

  8   pas fermer les yeux devant les événements qui se sont passés, et je suppose

  9   que des documents ont été rassemblés, également pour traduire en justice

 10   ces auteurs.

 11   Q.  Vous avez dit qu'on ne pouvait pas fermer les yeux devant les

 12   événements qui se sont passé parce que, justement, ces événements se sont

 13   passés. En 1992, vous étiez membre de la cellule de Crise et vous étiez

 14   vice-président du Conseil exécutif. En 1993, vous étiez président du

 15   Conseil exécutif. Est-ce que ces organes, la cellule de Crise ou le Conseil

 16   exécutif, ont pris des mesures pour que les enquêtes soient menées ou pour

 17   rassembler les informations concernant les crimes commis contre les

 18   Musulmans et contre les Croates en 1992 alors que vous étiez membre de ces

 19   organes ?

 20   R.  Je crois que oui. Je crois que cela a été fait et que ce qui s'est

 21   passé à Keraterm a fait l'objet de poursuites au pénal. A savoir, les

 22   auteurs des infractions pénales commises à Keraterm ont fait l'objet de

 23   poursuites au pénal. Je suppose qu'il y a des procès-verbaux également

 24   faits par la police et des constats sur les lieux, mais je ne peux parler

 25   que de mes suppositions puisque je n'ai jamais vu ces documents. Mais si

 26   c'était leur travail, si cela relevait de leurs compétences, ils auraient

 27   dû documenter cela et arrêter les auteurs de ces crimes.

 28   Q.  Monsieur Mandic, excusez-moi, vous n'avez peut-être pas bien compris ma


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  1   question. Je vous ai posé la question concernant les organes dont vous

  2   faisiez partie : la cellule de Crise et le Conseil exécutif de Prijedor.

  3   Est-ce que ces deux organes ont pris des mesures pour rassembler des

  4   informations concernant les crimes commis contre les Musulmans et les

  5   Croates en 1992 ?

  6   R.  Le Conseil exécutif a fonctionné pendant les premiers dix jours à la

  7   suite de la prise de pouvoir, et plus tard c'était la cellule de Crise qui

  8   s'occupait de tout. Et lorsque la cellule de Crise a été démantelée, le

  9   Conseil exécutif a continué à fonctionner. Je crois que lors d'une séance,

 10   d'une réunion, on a pris la décision de mener des enquêtes par rapport aux

 11   crimes commis contre le peuple serbe dans la municipalité de Prijedor et

 12   que nous avons pris contact avec le ministre Toholj - je pense qu'il

 13   s'appelait Toholj - et ainsi qu'avec M. Bolajic, qui vivait à Belgrade et

 14   qui travaillait pour les Nations Unies et était chargé d'enquête concernant

 15   des crimes commis. Et à l'époque où j'étais président du Conseil exécutif,

 16   on a essayé de lancer des enquêtes concernant les crimes commis contre les

 17   Serbes dans la municipalité de Prijedor. Et concernant l'autre partie de

 18   votre question, je n'en sais rien. Je pense que lorsque j'étais le

 19   président du Conseil exécutif, nous n'avons pas mené d'enquête là-dessus.

 20   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document de

 21   la liste 65 ter qui porte le numéro 25829.

 22   Q.  Dans votre dernière réponse, vous avez parlé de la décision prise par

 23   le Conseil exécutif portant sur des enquêtes qu'il fallait diligenter pour

 24   ce qui est crimes commis contre la population serbe, et vous avez mentionné

 25   le ministre Toholj et les contacts pris avec lui. Vous voyez une lettre

 26   dont l'auteur est le ministre Toholj du 7 mai 1993, et vous voyez que la

 27   commission a été formée pour enquêter sur les crimes de génocide commis

 28   contre le peuple serbe sur le territoire de notre municipalité. Et il y


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  1   avait des efforts déployés pour obtenir des documents, et on a demandé au

  2   ministre de faciliter les efforts de la commission pour rassembler des

  3   documents et des informations et que cela devait être fait par le ministre

  4   de la Défense et le ministère de l'Intérieur.

  5   Cette lettre, donc, reflète les efforts que vous avez mentionnés tout à

  6   l'heure déployés par le Conseil exécutif de Prijedor pour enquêter sur les

  7   crimes commis contre les Serbes dans la municipalité de Prijedor, n'est-ce

  8   pas ?

  9   R.  Oui.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection à soulever.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que Mme le Procureur peut nous expliquer

 13   si le rassemblement des documents, selon elle, peut être assimilé à une

 14   enquête ?

 15   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'étaient les propos de ce témoin dans sa

 16   réponse précédente.

 17   Je demande le versement de ce document et je n'ai plus de questions à poser

 18   à ce témoin.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Ce document sera versé au

 20   dossier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce P6607.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous

 23   voulez commencer à poser des questions supplémentaires.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous devons

 25   continuer à travailler demain, il vaudrait mieux que je commence demain.

 26   J'ai encore cinq minutes, mais je peux commencer à poser mes questions

 27   supplémentaires si vous le voulez.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Demain. Mais demain on va commencer avec


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  1   la déposition de M. Beara, si j'ai bien compris.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, il vaut mieux ne pas commencer

  3   maintenant puisque nous allons être interrompus à plusieurs reprises.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela veut dire que vous avez besoin de

  5   plus de dix ou 15 minutes pour les questions supplémentaires pour ce témoin

  6   ?

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas plus de 15 minutes.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais consulter mes collègues. Si vous

  9   pouvez en finir avec vos questions supplémentaires en 15 minutes, alors

 10   nous pouvons continuer.

 11   Mais d'abord il faut que je consulte mes collègues.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que nous avons commencé

 14   l'audience plus tôt que prévu ce volet de l'audience, si les interprètes

 15   sont d'accord, nous pouvons continuer à travailler un peu plus longtemps.

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez finir avec vos

 18   questions supplémentaires avant 14 heures 55 ? Donc, en 15 minutes ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je l'espère.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je l'espère.

 22   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 23   Q.  [interprétation] Monsieur Mandic, ici il s'agit d'un document où on

 24   peut lire : "Le rassemblement du matériel documentaire." A la page 96, on

 25   vous a posé la question pour savoir si la cellule de Crise et plus tard le

 26   Conseil exécutif ont pris des mesures pour enquêter sur les crimes commis.

 27   Pouvez-vous nous dire si le Conseil exécutif ou la cellule de Crise

 28   disposent des organes d'enquête hormis les organes d'enquête réguliers ?


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  1   R.  Non, la cellule de Crise et le Conseil exécutif ne disposent pas

  2   d'organes d'enquête. Ils auraient dû les former. Mais c'était plutôt les

  3   organes judiciaires qui devaient mener des enquêtes, ainsi que la police.

  4   Q.  Merci. Est-ce que la cellule de Crise ou le Conseil exécutif avait

  5   l'autorité sur les instances judiciaires ? Est-ce qu'à Prijedor la division

  6   des pouvoirs a été respectée ?

  7   R.  Les tribunaux faisaient ce que les tribunaux devaient faire, la police

  8   également, donc cette division de pouvoir était appliquée.

  9   Q.  A la page 95, on vous a posé la question pour savoir pourquoi vous vous

 10   êtes souvenu uniquement d'un cas de meurtre. Pouvez-vous nous dire pourquoi

 11   dans la ville à l'extérieur de la zone de combat il y avait plus de

 12   meurtres de non-Serbes ou de civils en général ?

 13   R.  Oui. Je pense qu'il y en a eu, mais --

 14   Q.  Pouvez-vous vous souvenir du nombre de cas comme celui-ci ?

 15   R.  Pas beaucoup. Il y en a eu, mais je ne me souviens pas du nombre exact.

 16   C'est parce que je vis dans la ville et j'ai pu me souvenir de cet incident

 17   concret.

 18   Q.  Merci. A la page 92 du compte rendu, vous avez parlé de la prise de

 19   pouvoir dans la municipalité. Pouvez-vous nous dire si la disposition des

 20   biens équivaut au fait de s'approprier des biens ? Et quel était le nombre

 21   d'appartements ou de maisons dont les propriétaires ont changé de façon

 22   illicite à Prijedor ?

 23   R.  Il est difficile de répondre à cette question puisque des gens

 24   entraient tout simplement dans des maisons et faisaient ce qu'ils

 25   voulaient. Mais d'une certaine façon, il était nécessaire que les organes

 26   de pouvoir contrôlent cela pour savoir si quelqu'un est entré dans une

 27   maison, qu'il est vraiment rentré dans cette maison, et pour devoir de

 28   préserver ces biens. Dans ce sens-là, une décision a été prise pour que des


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  1   commissions soient créées pour enregistrer des biens abandonnés et pour que

  2   la municipalité puisse s'occuper de façon légale de ces biens et, par

  3   conséquent, de mettre à la disposition des gens ces biens abandonnés, bien

  4   sûr, avec l'aide de la commission qui était en charge de cela.

  5   Q.  Merci. Pour ce qui est de la disposition des biens en temps de guerre,

  6   est-ce que cela équivaut à la situation où l'Etat a commencé à s'occuper de

  7   ces biens en les enregistrant en tant que biens de l'Etat ?

  8   R.  Non, ce n'était pas le cas. L'Etat n'a pas fait enregistrer ces biens,

  9   par exemple, dans le cadastre ou registre foncier. Les propriétaires

 10   restaient les mêmes, mais il fallait protéger ces biens et c'est pour cela

 11   que l'Etat a fait cela. C'est l'Etat qui s'est occupé de ces biens puisque

 12   ces biens étaient abandonnés. L'Etat a essayé de protéger ces biens

 13   abandonnés. Il n'existait pas de registre des biens abandonnés, cela a été

 14   fait uniquement pendant ces quelques dernières années. Ces cadastres ou

 15   registres fonciers ont été établis, mais avant c'était chaotique. Et les

 16   biens devaient être protégés.

 17   Q.  Merci. Si une entreprise me donne un appartement, et si je quitte cette

 18   entreprise, comment ça se passe pour ce qui est du titre de propriété sur

 19   cet appartement ?

 20   R.  Cet appartement reste à être la propriété de l'entreprise, et l'employé

 21   de l'entreprise qui quitte l'entreprise doit restituer cet appartement à

 22   l'entreprise. Cet appartement ne lui appartient pas. C'était d'après la

 23   législation en vigueur à l'époque.

 24   Q.  Mis à part des fonds de commence privés, est-ce que les entreprises

 25   d'Etat -- en fait, pouvez-vous nous dire à qui appartenaient ces

 26   entreprises qui étaient la "propriété sociale" ou de l'Etat ?

 27   R.  C'était la propriété de la société en général. Donc, personne ne

 28   pouvait dire qu'une entreprise lui appartenait. Il s'agissait des


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  1   entreprises qui appartenaient à la société tout entière. Et c'était

  2   conformément à la législation qui régissait le système de propriété à

  3   l'époque dans l'ancienne Yougoslavie.

  4   Q.  On vous a posé la question également par rapport aux communications.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Et, à cet effet, j'aimerais qu'on affiche la

  6   pièce D01832.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit auparavant, à savoir que

  9   les communications n'étaient pas établies ou étaient compromises ?

 10   R.  Oui, bien sûr.

 11   Q.  Il s'agit ici d'un membre de la Sûreté de l'Etat, il nous est connu

 12   sous le nom de code. Pouvez-vous nous lire ce qui est écrit ici en serbe ?

 13   R.  Que je lise cela ?

 14   Q.  Oui.

 15   R.  "La situation est difficile. Les liens sont coupés. A Prijedor, hier,

 16   un policier de réserve, un Serbe, a été tué du dos, après quoi un cousin de

 17   celui-ci a tué quatre Musulmans."

 18   Q.  Est-ce que cela correspond à ce que vous saviez de Prijedor à l'époque

 19   ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Merci. A la page 73 du compte rendu d'aujourd'hui -- votre réponse n'a

 22   pas été consignée au compte rendu, non plus ma question. Je vous ai posé la

 23   question si cela correspond à votre expérience concernant la situation à

 24   Prijedor à l'époque pour ce qui est des communications, de cette vengeance

 25   et de ces meurtres ?

 26   R.  Oui, oui. Je vous ai répondu de façon affirmative. J'ai dit "oui".

 27   Q.  Merci. A la page 73 -- je vais lire en anglais :

 28   "Suite aux événements de la nuit du 29 au 30 avril 1992, suite aux


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  1   préparatifs très détaillés conformément aux décisions pertinentes du Comité

  2   exécutif pour la municipalité serbe de Prijedor, une prise de contrôle

  3   organisée du pouvoir a été lancée."

  4   Et ensuite, on peut lire :

  5   "Et comme ceci est clair dans le rapport de la police, cette prise de

  6   contrôle par le SDS était planifiée longtemps à l'avance, bien avant que ce

  7   télex ait été reçu…," et cetera.

  8   Et votre réponse était la suivante :

  9   "Ce n'était pas la seule raison."

 10   Pourriez-vous nous dire quelles étaient les autres raisons ? Qu'est-ce qui

 11   a motivé ces préparatifs de la part des autorités ?

 12   R.  Je n'avais pas compris si vous citiez le télégramme par le ministère de

 13   l'Intérieur, qui a été l'élément déclencheur de cette prise de contrôle.

 14   Q.  On vous a posé une question concernant une prise de contrôle. On a

 15   donné lecture d'un passage d'un rapport du MUP mentionnant que ces

 16   préparatifs avaient été menés au préalable et que ce télégramme n'avait

 17   fait qu'accélérer la prise de contrôle. D'après la Loi sur la Défense

 18   populaire généralisée et pour des raisons pratiques, est-ce que ces

 19   autorités font toujours des préparatifs d'urgence ?

 20   R.  Vous avez dit que ce n'est pas uniquement en Krajina --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Gustafson.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Il n'a pas obtenu la réponse qu'il

 23   souhaitait lors de la première tentative, et maintenant il essaie d'obtenir

 24   une réponse d'une manière directrice incroyable.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a dit qu'il n'avait pas compris.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que je n'avais pas compris.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est parce que vous n'avez pas cité

 28   suffisamment pour que le témoin puisse comprendre quelle était la teneur de


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  1   votre question.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est parce que je me dépêche.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Mais ici, on vous a présenté un rapport de police disant que des

  5   préparatifs d'urgence avaient été faits précédemment --

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, non. Le rapport ne mentionne pas

  7   ceci.

  8   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Le rapport dit que :

 10   "Des activités ont été menées pour une prise de contrôle par la

 11   force."

 12   Il ne parle pas de préparatifs d'urgence. Et le rapport mentionne

 13   également la Krajina de Cazin.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, je vais donner lecture de la

 15   partie question et réponse de ce rapport. La question est la suivante :

 16   "Maintenant, comme ceci est clair dans ce rapport de police, cette prise de

 17   contrôle par le SDS à Prijedor était prévue bien avant que le télex ait été

 18   reçu le 29 avril, n'est-ce pas ?"

 19   Et voilà votre réponse :

 20   "Oui. Mais ce n'était pas la seule raison. Je veux dire, la Krajina de

 21   Cazin."

 22   Donc, M. Karadzic vous demandait quelles étaient les autres raisons que

 23   vous aviez à l'esprit. Est-ce que vous pouvez répondre à cette question ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Les dirigeants du SDS étaient impliqués dans

 25   des négociations intensives avec les dirigeants du SDA concernant une

 26   solution pacifique à toutes les questions interethniques à Prijedor. Le SDS

 27   souhaitait ardemment trouver une solution pacifique, pour maintenir la

 28   paix, et ils souhaitaient qu'au sein du SDA il n'y ait plus d'extrémistes,


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  1   des personnes qui étaient déjà connues à Prijedor, telles qu'un dénommé

  2   Hadzija et un autre dénommé Ecimovic, et nous avions des informations selon

  3   lesquelles ils distribuaient déjà des armes dans les villages. Je vivais

  4   dans une localité à proximité d'un village musulman et je pouvais le voir

  5   de mes propres yeux, je voyais comment ils parcouraient les collines. Donc,

  6   il fallait protéger le peuple serbe, mais pas seulement le peuple serbe, le

  7   peuple musulman également. Et Dieu nous garde si les Musulmans avaient pris

  8   le contrôle à Prijedor. Nous avions eu une mauvaise expérience durant la

  9   Deuxième Guerre mondiale. Mais sous l'ancien système dans lequel nous

 10   étions administrés, il était interdit de parler de tout cela. Cependant,

 11   après la mort de Tito et après les changements démocratiques, les gens ont

 12   appris beaucoup plus ce qu'il s'était passé, qui avait fait quoi et qui

 13   faisait quoi. Et donc, nous avons essayé de manière pacifique, et je parle

 14   de nous, le peuple serbe, je pense que nous sommes arrivés à sauver de

 15   nombreuses autres vies.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, la Chambre de

 17   première instance ne veut pas vous obliger à conclure vos questions

 18   supplémentaires avec une pression au niveau du temps. Donc, nous pourrons

 19   continuer demain, si vous le souhaitez.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'il est préférable de continuer

 21   demain, dans ce cas-là, parce que nous avons perdu du temps avec ces

 22   malentendus.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mandic, nous allons continuer

 24   demain. Malheureusement, nous ne sommes pas en mesure de terminer votre

 25   déposition aujourd'hui. Mais demain, nous commencerons avec le contre-

 26   interrogatoire de M. Beara. Je ne sais pas combien de temps cela va durer

 27   pour terminer sa déposition. Et donc vous serez entendu à la fin de la

 28   déposition de M. Beara. Vous avez bien compris cela ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie pour votre

  3   compréhension.

  4   Et ne veuillez parler à personne de votre déposition. La séance est levée.

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  6   [Le témoin quitte la barre]

  7   --- L'audience est levée à 14 heures 58 et reprendra le mercredi, 22

  8   janvier 2014, à 9 heures 00.

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