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1 Le lundi 29 septembre 2014
2 [Réquisitoires]
3 [Audience publique]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
7 Je demande au greffier d'audience de bien vouloir citer l'affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il s'agit
9 de l'affaire IT-95-5/18-T, le Procureur contre Radovan Karadzic.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
11 La présentation des parties, s'il vous plaît. A commencer par l'Accusation.
12 M. TIEGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
13 Messieurs les Juges, toutes les personnes dans le prétoire et à l'extérieur
14 du prétoire. Alan Tieger, Hildegard Uertz-Retzlaff et Iain Reid dans le
15 prétoire pour l'Accusation. Katrina Gustafson et Melissa Pack nous
16 rejoindront au cours des présentations.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger.
18 Du côté de la Défense.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, bonjour à vous, toutes et tous. Je
20 vais présenter mes principaux conseillers juridiques, M. Peter Robinson,
21 Petronijevic et Marko Sladojevic.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a un autre conseiller juridique
23 dans le prétoire, Monsieur Karadzic, n'est-ce pas ? Pourquoi ne le
24 présentez-vous pas -- oui. Pardonnez-moi, M. Petronijevic.
25 Alors, pour ce qui est du conseil d'appoint.
26 M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, toutes les
27 personnes présentes dans le prétoire. Richard Harvey, assisté de Mirjana
28 Vukajlovic, pour le conseil d'appoint.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie
2 Nous avons entendu la déposition du premier témoin à charge il y a environ
3 quatre ans et demi, en avril 2010, et la Défense a clôturé et terminé la
4 présentation de ses moyens il y a cinq mois, au mois de mai 2014. Nous
5 sommes maintenant parvenus au stade de cette procédure où nous allons
6 entendre les plaidoiries et les réquisitoires des parties en vertu de
7 l'article 86 du Règlement de procédure et de preuve. La Chambre a ordonné
8 que l'Accusation et la Défense auront chacun dix respectivement dix heures
9 pour présenter leurs réquisitoires et plaidoiries et une heure et demie
10 pour les réplique et duplique respectivement. Avant de donner la parole à
11 l'Accusation, je souhaite déclarer au compte rendu d'audience que vendredi
12 soir les Juges de la Chambre, par l'intermédiaire de la juriste, a envoyé
13 aux parties une liste des questions et ce, par courriel. La Chambre
14 souhaitait que les parties tiennent compte de ces questions et les englobe
15 dans les arguments que les parties vont présenter au fil des prochains
16 jours. Je pense que les parties ont reçu ces questions.
17 A cet égard, je souhaite que les parties identifient les questions avant
18 d'y répondre et ce, aux fins du compte rendu d'audience. Egalement, je
19 souhaite m'excuser auprès des parties pour le fait que ces questions vous
20 aient été envoyées tardivement vendredi en fin de journée, mais les Juges
21 de la Chambre ont estimé que même envoyées si tardivement, ce serait
22 préférable que de simplement poser ces questions dans le prétoire, ce qui
23 pourrait prendre de court éventuellement les parties. Cela ne signifie pas
24 pour autant que les Juges de la Chambre n'auront pas des questions
25 supplémentaires à poser qui pourront surgir lors de la présentation des
26 réquisitoires et plaidoiries.
27 Vous avez maintenant la parole, Monsieur Tieger.
28 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Madame, Messieurs les Juges, au mois d'août 1992, lorsqu'un Musulman de
2 Bosnie ou Croate de Bosnie ou lorsque la communauté des uns et des autres
3 ont été détruits ou terrorisés, le président du CICR a expliqué ce que le
4 monde savait déjà à ce moment-là :
5 "Je vais vous dépeindre l'image triste. La population civile est
6 systématiquement harcelée. Des milliers de civils sont arrêtés dans leurs
7 maisons, brutalisés, voire même tués. Des groupes minoritaires tout entiers
8 comprenant des dizaines de milliers de civils sont systématiquement
9 transférés par la force. Des centaines de milliers de civils ont fait
10 l'objet de siège pendant plusieurs mois dans des villes comme Bihac,
11 Bosanski Brod, Derventa, Gorazde et Sarajevo. Des détenus, dont la majorité
12 sont des civils, sont détenus dans des conditions extrêmement pénibles dans
13 des lieux de détention qui sont totalement inconvenants à cette fin. Ces
14 détenus sont maltraités et des centaines d'entre eux ont été exécutés."
15 Lorsque des représentants de la communauté internationale ont confronté
16 Karadzic à ces crimes de masse, il a détourné ces critiques en parlant de
17 la victimisation des Serbes ou a avancé des prétextes pour indiquer qu'il
18 avait de bonnes intentions. Maintenant, après des centaines d'audition de
19 témoins, 50 000 pages de compte rendu d'audience, plus de 2 000 [comme
20 interprété] pièces à conviction, la politique du nettoyage ethnique est
21 clairement définie. Et Karadzic, comme cela a été découvert, en étant
22 l'élément moteur. Et l'homme qui à l'époque fanfaronnerait des mesures
23 difficiles qu'il avait prises et qu'il avait mises en œuvre, maintenant il
24 prétend que celles-ci n'ont jamais existé. Qui a prôné une histoire
25 révisionniste des événements qui nie des milliers et des milliers de
26 crimes; qui a fait l'éloge et qui a promu ceux qui ont mis en œuvre cette
27 politique criminelle et qui maintenant anticipe sur cette histoire
28 révisionniste, ce qui est incroyable, et qui fait porter la faute à ceux
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1 qui ont commis le sale travail; qui a déployé des efforts pour cacher et
2 détruire des documents incriminant; a préparé une défense qui était fondée
3 sur des mensonges et, néanmoins, des partisans qui se sont conformés à ce
4 qu'il souhaitait qu'ils disent et qui lui étaient restés fidèles. Qui a à
5 tort affirmé que l'acte d'accusation contre lui criminalise les Serbes, ce
6 qui délibérément ternit la réputation du peuple serbe pour pouvoir se
7 cacher derrière eux. On savait que c'était un menteur aux yeux de la
8 communauté internationale avec lesquels il traitait à l'époque, Akashi,
9 Owen, Rose, Smith, Vance, Cutileiro, et il continue à distiller ses faux
10 récits dans le prétoire.
11 Comme nous le savons, Karadzic a dit à la fois aux victimes et à ses
12 partisans ce qui devait arriver : des milliers ont été tués, des centaines
13 de villes détruites et des personnes massivement déplacées par la force.
14 Nous allons nous concentrer sur les crimes de masse, cependant, au risque
15 de perdre de vue les crimes individuels dont les tragédies une par une
16 relèvent de sa responsabilité. Les brefs récits qui suivent de trois
17 victimes nous rappellent simplement qu'il y avait une seule personne après
18 l'autre qui a perdu ses proches, qui ne les a jamais revus et, encore une
19 fois, dont les contributions n'ont jamais pu être réalisées à l'avenir, ou
20 de nombreuses personnes qui se battent au quotidien, qui souffrent
21 physiquement ou qui avaient peur parce qu'elles pensaient rester et ne pas
22 pouvoir partir.
23 Des personnes telles que le feu Sulejman Crncalo qui, avec sa famille
24 et d'autres non-Serbes de la municipalité de Pale, a été chassé de leur
25 maison et transféré par la force de Sarajevo au mois de juillet 1992. Lui
26 et sa famille vivaient pendant la guerre avec cette peur au ventre que l'un
27 d'eux pouvait être tué par un tireur embusqué ou un obus. Il a brûlé des
28 meubles et des livres pour pouvoir avoir chaud et a vu des gens sur
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1 lesquels on tirait sous ses yeux et des cadavres qui ne pouvaient pas être
2 ramassés en raison des tirs embusqués et des pilonnages continus. Le 28
3 octobre 1995, sa femme a réussi à se faufiler au marché pour aller chercher
4 du lait en poudre pour les enfants. Elle n'est jamais revenue, tuée par un
5 obus de mortier au fait énuméré G19 dans les annexes. Elle a été enterrée
6 la nuit même, comme c'était la coutume à Sarajevo, de façon à ce que les
7 personnes qui assistent aux obsèques pouvaient veiller leurs morts sans
8 être tués ou faire l'objet d'un pilonnage.
9 Ou un autre témoin connu ici sous le nom de KDZ069 qui, au mois de
10 juillet 1995, c'était un jeune garçon de 17 ans qui vivait avec sa famille
11 à Srebrenica. Lui et son père souhaitaient rejoindre la colonne qui fuyait
12 en direction de Tuzla et ils ont été séparés. Il n'a jamais revu son père.
13 KDZ69 et bon nombre d'autres personnes de la colonne se sont rendus. On les
14 a contraints à se rendre dans la prairie de Sandici où entre 1 000 et 2 000
15 personnes ont été capturées. KDZ69 a dû monter à bord de camions qui
16 étaient déjà bondés de monde et son corps était complètement engourdi. On
17 l'a détenu pendant la nuit. Il n'a pas pu obtenir de l'eau. Le lendemain,
18 on les a emmenés à l'école de Petkovci où ils ont été frappés et ont subi
19 des violences. Ils ont attendu, ils baignaient dans leur propre urine, ils
20 mouraient de soif, ils écoutaient les tirs, les coups de feu, alors que
21 l'on faisait sortir les hommes de l'école et qu'on les tuait. Ensuite, on
22 leur a ordonné d'enlever leur chaussures et leurs vêtements et ce, jusqu'à
23 la taille. Leurs mains étaient liées dans le dos. On les a fait monter à
24 bord d'un autre camion, serrés comme des sardines, et on les emmenés au
25 lieu d'exécution du barrage de Petkovci. Malgré la connaissance de la mort
26 les attendait, certains avaient tellement soif qu'ils ont hurlé, Donnez-
27 nous de l'eau et ensuite tuez-nous. On leur a ordonné de descendre des
28 camions, cinq à la fois, de se coucher par terre, et ensuite on les a tués.
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1 Miraculeusement, malgré le fait qu'il ait été touché à plusieurs reprises,
2 KDZ69 n'est pas mort mais a regardé les autres que l'on menait à la mort,
3 les a regardés gémissant de douleur à côté de lui parce qu'ils avaient reçu
4 un coup à la tête. Il souffrait de façon insupportable et souffrait de
5 soif. Il priait pour qu'on le tue, parce qu'il souhaitait mourir, et il a
6 pensé à sa mère qu'il ne reverrait plus. Néanmoins, il a survécu. Et une
7 fois que les soldats sont partis, il a roulé sur les corps morts jusqu'à un
8 autre survivant de façon à ce qu'ils puissent se détacher l'un l'autre.
9 Incapable de marcher au cours des quatre jours précédents [comme
10 interprété], il a réussi à atteindre le territoire musulman en rampant et
11 il a été porté à quelques fois par son co-survivant.
12 Comme tellement d'autres histoires héroïques que l'on ne peut pas
13 raconter ici, le Dr Eso Sadikovic de Prijedor, un médecin qui travaillait
14 pour les Nations Unies dans la région du Pacifique et en Afrique, qui a été
15 fait prisonnier à Omarska, c'était un homme connu et profondément humain
16 qui aidait toute personne qu'il pouvait aider. Après que tous les médecins
17 de Prijedor aient été tués, avant l'aube au début du mois d'août, le Dr
18 Sadikovic a fait l'objet d'un appel et ceci semblait menaçant. Le codétenu
19 Nusret Sivac se souvient de ces derniers moments :
20 "Le Dr Eso s'est levé. Il a pris son sac en nylon dans lequel se
21 trouvait une poignée de cigarettes que les autres prisonniers avaient
22 collectées pour lui. Il a apporté sa chemise qui était sale et il s'est
23 dirigé vers la porte. Il s'est levé. Il ne disait rien. Et ensuite, tout a
24 commencé. Les autres ont commencé à s'exprimer à voix haute, et nous avons
25 dit : Docteur Eso, merci. Merci pour tout. Il s'est simplement retourné et
26 il a dit : Merci, mes amis, et au revoir. Nous ne pouvions pas croire qu'il
27 y avait une personne aussi criminelle au monde qui puisse tuer un homme
28 comme le Dr Eso."
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1 Ce qui lie toutes ces tragédies et d'innombrables autres tragédies,
2 c'est qu'elles sont le résultat de ces quatre entreprises criminelles
3 communes ou de l'entreprise criminelle commune. L'entreprise criminelle
4 commune qui visait à déplacer par la force les Musulmans de Bosnie et les
5 Croates par l'intermédiaire de crimes qui comprenaient la persécution, la
6 torture, le meurtre, l'extermination et le génocide. Une entreprise
7 criminelle commune visant à mener une campagne de pilonnage et de tirs
8 isolés contre la population civile de Sarajevo dont le principal objectif
9 était de semer la terreur. Une entreprise criminelle commune qui visait à
10 prendre des otages pour contraindre l'OTAN à s'abstenir de lancer ses
11 frappes aériennes. Une entreprise criminelle commune qui visait à éliminer
12 les Musulmans de Bosnie à Srebrenica en tuant les garçons et les hommes et
13 de déplacer par la force les jeunes enfants et les personnes âgées. Tous
14 distincts, néanmoins, avec le même objectif qui visait à réaliser un Etat
15 serbe sur les vastes territoires à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine.
16 Ce qui lie ensemble cette entreprise criminelle commune, c'est
17 Radovan Karadzic. Je vais maintenant parler de l'entreprise criminelle
18 commune.
19 L'entreprise criminelle commune a puisé ses racines dans la
20 détermination de Karadzic à savoir que les Serbes de Bosnie ne devaient pas
21 être séparés des autres Serbes dans d'autres parties de l'ex-Yougoslavie et
22 qu'il fallait qu'il y ait des frontières à un Etat en Bosnie qui soit
23 souverain et indépendant. La Bosnie se rapprochait de son indépendance.
24 Karadzic a tenté de prévenir cela par des négociations, tout en préparant
25 de façon unilatérale et empêchant que les Serbes ne deviennent une minorité
26 dans une Bosnie souveraine si les négociations échouaient. Il a commencé à
27 prendre des mesures et a repris ce que les Serbes minoritaires avaient fait
28 en Croatie, tels que les camps d'entraînement ainsi que la régionalisation;
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1 mais au mois d'octobre 1991, Karadzic et les dirigeants serbes de Bosnie
2 avaient décidé "d'avancer" vers des solutions de facto et la création d'un
3 Etat ethniquement distinct. Au cours des prochains moins, Karadzic a dirigé
4 le SDS et a créé des organes de cet Etat et a créé sa police et son armée.
5 Lorsque les négociations ont échoué et que l'indépendance de la Bosnie
6 était à quelques jours de là, les représentants officiels de la
7 municipalité de Karadzic et la police, aidés par les collaborateurs serbes
8 de Karadzic, ont commencé une série de prises de contrôle, ce qui a permis
9 aux Bosno-Serbes de prendre le contrôle d'une part importante du territoire
10 de Bosnie. Ces prises de contrôle ont été rapidement suivies par le
11 nettoyage, voire quelquefois de la destruction, des communautés musulmanes
12 et croates de Bosnie, un processus qui a culminé en 1995 avec la
13 destruction de l'enclave de Srebrenica où s'étaient réfugiées un nombre de
14 personnes d'autres municipalités.
15 Entre-temps, à Sarajevo, sous les yeux horrifiés de la communauté
16 internationale, les forces de Karadzic ont commencé une campagne qui a duré
17 trois ans et demi de pilonnages et de tirs embusqués contre la population
18 civile. Et pour finir, Karadzic a essayé d'empêcher l'action internationale
19 qui consistait à dissuader ces crimes en prenant pour otage le personnel
20 des Nations Unies, en prenant leurs vies comme une monnaie d'échange.
21 J'ai décrit le récit de ces crimes de masse et de l'entreprise
22 criminelle commune globale. Le Dr Sadikovic et des communautés toutes
23 entières et des parties importantes et distinctes de la communauté croate
24 et musulmane de Bosnie ont été les victimes de cela. A Prijedor. Comme je
25 l'ai décrit aux paragraphes 3 et 5 du résumé concernant Prijedor, et
26 contrairement aux affirmations erronées de Karadzic, Prijedor ne relevait
27 pas de son influence et de son contrôle. Paragraphe 217, pièce de la
28 Défense FTB [phon]. Karadzic personnellement est intervenu pour s'assurer
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1 que les dirigeants du SDS s'étaient engagés à appliquer ses politiques. Les
2 autorités de Prijedor ont reçu et mis en œuvre les Variantes A et B, ont
3 reconnu que la prise de contrôle physique de la municipalité a eu lieu le
4 30 avril, que cela faisait partie de la mise en oeuvre du deuxième niveau
5 des plans A, B. Dans les efforts déployés qui visaient à prendre ses
6 distances par rapport à ce qui se passait sur le terrain, Karadzic a
7 affirmé que la prise de contrôle était une réaction de la présidence de la
8 BiH qui souhaitait commencer les opérations de combat, paragraphe 1 534
9 [comme interprété]. Ce qui est démenti non seulement par la déposition de
10 Miskovic, mais par la déposition et la préparation telle que décrite au
11 paragraphe 6 du résumé de Prijedor, y compris les instructions municipales
12 du SDS aux fins de commencer la prise de contrôle et les préparatifs avant
13 l'ordre de la présidence de la BiH. D1830.
14 Le récit de Prijedor fait froid dans le dos, donc je vais en parler de la
15 façon la plus clinique et la plus simple possible. Après la prise de
16 contrôle, la persécution des Musulmans a commencé, et comme le dit l'un des
17 témoins dans des termes très succincts, cela ressemblait à un ghetto. P677,
18 page 10. Tel que décrit au paragraphe 10 du résumé de Prijedor, les
19 Musulmans ont fait l'objet de restrictions au niveau des déplacements, ont
20 perdu leur emploi et parfois on les a contraints de porter des brassards
21 blancs pour qu'ils puissent s'identifier, qu'on sache qu'il s'agissait des
22 Musulmans. P3478, pages 25 à 26. Tel que le paragraphe 10 [comme
23 interprété] sur le résumé de Prijedor, ce qui a commencé à la fin du mois
24 de mai 1992, région après région où vivaient les Musulmans, ils ont été
25 attaqués, détruits par la VRS et le MUP, à commencer par le pilonnage de
26 Hambarine après un affrontement armé au poste de contrôle. La VRS et le MUP
27 ont ensuite tourné leur attention à une région importante de Kozarac, où
28 des milliers et des milliers de Musulmans vivaient et ont commencé le 24
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1 mai leur pilonnage pendant deux jours. Les forces serbes sont ensuite
2 entrées dans la région et ont rassemblé des milliers de personnes pour les
3 emmener dans des camps. Jusqu'à 800 personnes ont été tuées au niveau du
4 pilonnage, il y a eu une attaque par la suite, et comme je l'ai dit dans
5 le reste de ma présentation, ils ont été emmenés dans les centres de
6 détention.
7 La Défense tente de caractériser ceci comme une opération de combat
8 contre un adversaire féroce. 1 544 à -45.
9 C'est grotesque disproportionné par rapport au nombre de victimes, au
10 fait jugé 1 057.
11 De toute façon, Messieurs les Juges, les éléments de preuve montrent
12 clairement que l'attaque était dirigée contre l'ensemble de la communauté
13 de Kozarac. Sept mille Musulmans ont été détenus, dont la majorité devaient
14 être considérés comme des Bérets verts, même si on tient compte des
15 estimations un peu exagérées des chiffres de l'armée. Si on compare 5 348
16 [comme interprété] à 1 KK, le rapport des prisonniers, avec D1473 qui
17 évalue les effectifs de tous les Bérets verts entre 1 500 à 2 000.
18 Et de ces maisons qui n'ont pas été détruites par le pilonnage,
19 certaines ont été complètement dévastées au fil des mois suivants et la
20 destruction a été menée par la VRS. Dans les termes mêmes d'un témoin de la
21 Défense, les personnes ont été placées, ne pouvaient plus revenir parce
22 qu'elles n'avaient plus rien. D2265, pages 56, 57. Et les mosquées
23 également ont subi le même sort dans le même but.
24 Ensuite, on décrit ce qui s'est passé avec les mosquées de plusieurs
25 siècles d'ancienneté d'une ville de Stari Grad ont été détruites, "ça a été
26 rasé de la surface de la terre," suite à une attaque d'une heure à laquelle
27 s'est opposé un petit groupe de Musulmans armés d'armes légères. Ensuite,
28 il y a eu les attaques de Brdo et Brisevo, qui se trouvent énumérées au
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1 A10.5, 10.6, 10.9, dans la dernière partie du mois de juillet. On a parlé
2 des dégâts collatéraux, mais cela ne tient pas debout parce que les
3 rapports de cette période disent que les Bérets verts étaient une poignée
4 et qu'il y avait des quantités "insignifiantes" d'armes légères et ils se
5 sont rendus ou ont vécu dans les bois, voire dans des abris souterrains par
6 groupes de cinq à dix personnes. Chose qu'on voit dans les documents 1743 à
7 1745 [comme interprété].
8 Il est clair que cette opération de Brdo a été conçue de façon à
9 expulser la population ou "l'intimider". On peut voir cela à la note de bas
10 de page 86 pour ce qui est des résumés Prijedor. Dans l'opération de Brdo,
11 il y a eu 300 à 350 personnes de tuées, et on sait que ce n'est qu'une
12 partie du nombre total de personnes tuées. Les autres estimations disent
13 500 à 700. Les corps ont été transférés vers la mine de Tomasica. Le reste
14 des Musulmans ont été évacués de là vers Omarska, Keraterm, où bon nombre
15 ont été tués ou ont été emportés ailleurs. Il y en a d'autres qui ont été
16 tués à Brisevo. Certains ont été emmenés au stade de Ljubija, où au moins
17 15 personnes ont été tuées. Dans son résumé ou dans ses écritures, Karadzic
18 affirme qu'il y en a eu beaucoup de relâchés le même jour ou le jour après,
19 au paragraphe 1 558, mais on ne dit pas qu'au stade de Ljubija, ils ont été
20 envoyés vers Kipe, et 90 hommes ont été exécutés là, leurs corps ont été
21 jetés dans une fosse, et puis un engin de construction du génie a mis de la
22 terre par-dessus. Il s'agit de ce qui figure à l'article A 10.7.
23 J'ai mentionné les camps où il y a eu des survivants du nettoyage
24 ethnique qui ont été acheminés vers Omarska et Keraterm. Je vais parler
25 maintenant plus en détail d'Omarska.
26 Comme on le dit au paragraphe 20 du résumé de Prijedor, Omarska, ça
27 a été mis en place suite à des ordres donnés par Drljaca, le chef de la
28 police locale, et ça a été sécurisé par la VRS et la Défense territoriale
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1 du lieudit. Dans l'acte d'accusation, au C 20.2, il est dit que plusieurs
2 centaines ou milliers de prisonniers ont vécu dans des conditions
3 horribles, dans des conditions non hygiéniques, entassés les uns par-dessus
4 les autres, avec des odeurs nauséabondes qui étaient partout présentes dans
5 les pièces de détention. Les prisonniers étaient pratiquement affamés. On
6 peut voir la vidéo P6686, où on voit les prisonniers manger rapidement une
7 soupe aux haricots, et on leur a donné cela pour être filmé par les
8 journalistes. Les interrogatoires ont été conduits par le MUP, et les
9 personnes ont été battues à mort parfois, comme on le voit au T 4425 [comme
10 interprété] et 4426 [comme interprété]. Et comme le commandant du camp l'a
11 reconnu, il arrivait souvent que l'on tabasse des gens, parce qu'on
12 entendait des cris et des hurlements toute la journée.
13 Mis à part ces interrogatoires, les personnes ont été tabassées de
14 façon violente ou de façon routinière. Par exemple, lorsqu'ils voulaient
15 aller vers des toilettes nauséabondes ou aller à la cantine pour se faire
16 donner une petite portion de pain, et en particulier lorsqu'il s'agissait
17 de la "maison blanche", où les prisonniers ont été maltraités de façon
18 particulière. Il y avait à Omarska des femmes qui étaient censées nettoyer
19 le sang et les bouts de tissus humains après les passages à tabac, et la
20 nuit on les violait. De façon quotidienne à Omarska, on jetait les corps
21 dehors et on les emmenait au bord d'un camion TAM. Les prisonniers avaient
22 "toujours" peur de la mort parce qu'on ne savait pas qui allait être
23 interpellé pour ne plus jamais revenir.
24 Une fois, quelque 180 prisonniers ont été tués par des tirs d'arme à
25 feu et leurs corps ont été chargés avec une chargeuse pour être évacués de
26 là. Le commandant du camp, un témoin de la Défense, a reconnu qu'au moins
27 100 personnes ont été tuées dans ce camp ou ont été emmenées ailleurs pour
28 être liquidées. Je parle en particulier de leaders politiques musulmans et
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1 croates ou de représentants officiels de la police qui étaient
2 systématiquement liquidés ou abattus de façon organisée. Leurs corps ont
3 été retrouvés dans des fosses communes. S'agissant de Keraterm, les détenus
4 ont également été gardés là dans des conditions inhumaines, où on les
5 avaient entassés dans des entrepôts en béton, où il n'y avait pas de place
6 pour se coucher, où il n'y avait pas de ventilation, où il n'y avait pas
7 d'accès aux toilettes, et les gens avaient faim, ils allaient souffrir de
8 dysenterie, de poux, et ils étaient souvent tués.
9 Et pendant les journées du 24 et 25 juillet 1992, à peu près 150
10 détenus ont été massacrés, notamment ceux qui se trouvaient dans la pièce
11 numéro 3.
12 Les autorités serbes se sont servies de Trnopolje pour y rassembler
13 la population non serbe qui était destinée à être déportée hors de la
14 Republika Srpska vers d'autres parties de la Bosnie-Herzégovine ou pays
15 tiers. Plus de 23 000 personnes ont été détenues là-bas jusqu'à la fin du
16 mois de septembre 1992. Et bien que les conditions n'aient pas été aussi
17 barbares ou mortelles qu'à Omarska et Keraterm, les détenus ont quand même
18 été battus ou violés, comme on peut le voir à l'acte d'accusation, tableau
19 C 20.4.
20 La Défense affirme que Trnopolje avait été un centre de rassemblement où
21 les gens venaient de leur propre gré, et ceci se trouve être contredit par
22 des éléments de preuve qui sont donnés au paragraphe 23 du résumé Prijedor,
23 y compris le témoignage de la Défense M. Stakic, qui a reconnu le contraire
24 de ce qui est dit à cet égard. Page du compte rendu 45 329 [comme
25 interprété].
26 En 1993, plus de 80 % des villages serbes [comme interprété] ont été
27 détruits et pratiquement tous les lieux de culte musulmans ont été
28 détruits. Quelque 44 000 Musulmans et Croates ont été expulsés de là. La
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1 Défense affirme que les Musulmans et les Croates ont quitté Prijedor de
2 leur propre gré, et on cite les propos du Témoin KDZ26, paragraphe 1 537,
3 note de bas de page 3 463. Il s'agit d'un homme qui a quitté Prijedor
4 lorsqu'il a dû être transféré d'Omarska vers Manjaca. Karadzic met de côté
5 ou ignore le témoignage de son propre témoin Stakic qui dit qu'en 1992, les
6 Musulmans ont été expulsés de chez eux et ont été contraints de quitter par
7 peur, et il y a eu des crimes de commis par la police et par l'armée à
8 l'égard des Musulmans et Croates, y compris détentions, torture et mauvais
9 traitements, avec exécutions à la fin. Un grand nombre de Musulmans n'a pas
10 voulu s'en aller. En 1993, Drljaca a laissé savoir à la direction des
11 Serbes de Bosnie que quelque 5 000 corps de Musulmans ont été jetés à
12 Tomacisa, dans la mine, et il demandait de l'aide pour qu'on les enlève de
13 là. Il s'agit de la pièce --
14 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la référence.
15 M. TIEGER : [interprétation] Je vais parler maintenant de Sanski Most et je
16 vais vous relater ce que les éléments de preuve de la Défense nous parlent
17 au sujet de ce qui s'était passé à Sanski Most. Et pour des raisons de
18 confidentialité, je vais utiliser des lettres au lieu de donner références
19 de témoin, et ensuite, à huis clos, je donnerai la source véritable. Le SOS
20 "a réalisé des missions que la direction du SDS leur avait confiées." Il
21 s'agissait d'une "formation armée" sous le commandement du SDS. Il s'agit
22 d'une citation fournie par A. Ils ont plastiqué des biens musulmans et sont
23 restés une force paramilitaire tant qu'ils n'ont pas été placés sous le
24 commandement de l'armée, citation du Témoin B. Le désarmement n'était pas
25 dirigé à l'égard des Serbes mais à l'égard des Croates et des Musulmans,
26 c'est-à-dire "les adversaires". Vers le 11 mai, les Musulmans et les
27 Croates avaient déjà rendu leurs armes au poste de police ou au poste de
28 Défense civile, citation du Témoin C. La cellule de Crise du président
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1 Rasula a formulé un ultimatum à l'égard du SDA pour quitter le bâtiment de
2 la municipalité. Il y a eu tir d'un obus de Zolja en direction du bâtiment
3 sans savoir s'il y avait quelqu'un à l'intérieur ou pas, et plusieurs
4 bureaux ont brûlé, citation dit ce Témoin D. Les licenciements des juges
5 non serbes et des représentants ou des employés des tribunaux ont eu lieu
6 en mai 1992. Il y a eu une "différenciation" qui avait déjà été effectuée
7 au sein de la police et des autres organes. Avant le pilonnage de Mahala le
8 26 mai 1992, l'armée a informé la cellule de Crise de ce qui allait être
9 fait. On savait parfaitement bien qu'à Mahala il y avait des civils, des
10 familles entières qui y résidaient. Le commandant militaire appelé Basara
11 n'a jamais vu son attention portée sur la nécessité de faire attention aux
12 civils. Et, "bien entendu", il y a eu des personnes de tuées. En plus, la
13 destruction des bâtiments s'est faite soit par pilonnage soit par mise à
14 feu par les soins de l'armée. Les résidents n'ont plus pu revenir chez eux,
15 "les maisons, les quartiers entiers ont été détruits," je cite le Témoin F.
16 Après ce nettoyage, l'opération de "ciscenje", comme on l'appelle, à
17 Vrhpolje ou Hrustovo, il y a eu des gens qui ont été tués sur le pont ou
18 jetés à l'eau, citation du Témoin F [comme interprété]. Après cette
19 opération dirigée vers les villages musulmans, on a détruit les villages et
20 l'armée a récupéré tous les conscrits militaires pour les confier aux
21 autorités civiles pour des interrogatoires, citation du Témoin H. L'armée a
22 pris un grand nombre de personnes à Mahala, Muhici, Hrustovo et Vrhpolje.
23 Et il y a eu beaucoup de personnes d'emmenées vers les prisons et c'étaient
24 des gens qui "n'étaient pas censés être gardés là." L'armée ne faisait pas
25 la distinction entre les différentes personnes, "elle ne faisait qu'arrêter
26 les hommes en âge de combattre et les confier aux autorités civiles." Les
27 gens ont été transférés sans être jugés vers Manjaca, et "on leur mettait
28 dessus une étiquette qui était celle d'affirmer que c'étaient des
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1 prisonniers de guerre." On ne faisait aucune différence entre les gens. Je
2 cite le Témoin I. La cellule de Crise a ensuite créé Betonirka, et le
3 directeur de cette prison répondait de ce qu'il faisait auprès de la
4 cellule de Crise. Tous les éléments de l'autorité serbe, la police, les
5 autorités civiles et l'armée avaient pour mission de résoudre le problème
6 des prisonniers. Betonirka était loin d'être un endroit approprié pour
7 garder des prisonniers parce que les conditions y étaient "définitivement
8 inhumaines," je cite le Témoin J. La cellule de Crise était l'autorité
9 suprême. Rasula était président de l'assemblée municipale et, par
10 conséquent, de la cellule de Crise. Vrkes était son adjoint. Rasula allait
11 à ces réunions de la cellule de Crise de l'ARK et il "transmettait ce qui
12 avait été adopté comme conclusion." Le commandant de l'armée Basara a
13 également été présent aux réunions de la cellule de Crise, citation du
14 Témoin K. Les autorités municipales ont désigné un certain nombre de
15 personnes pour ce qui est des déménagements de population, ils ont fait des
16 listes de personnes souhaitant être déplacée. On faisait des listes de
17 transport et on décidait de l'endroit où on les emmènerait. Ces soi-disant
18 départs "volontaires" signifiaient qu'on demandait à quelqu'un de s'en
19 aller tout simplement parce que les gens ne se sentaient pas en sécurité,
20 je cite le Témoin L, et ils ne se sentaient pas en sécurité compte tenu des
21 événements que je viens de vous décrire.
22 Les communications ont fonctionné entre avril et décembre 1992, bien qu'il
23 y ait eu des coupures entre le 7 et le 10 mai en raison d'activités de
24 combat. Et pour finir, le SDS a exercé un pouvoir absolu qu'il a mis en
25 œuvre par le biais de différentes instances et, notamment, la cellule de
26 Crise, je cite le Témoin N.
27 "S'agissant de la ligne suivie par le SDS, s'agissant de la direction au
28 sommet de la Republika Srpska et en allant jusqu'au niveau local du SDS,
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1 c'était une politique qui a été formulée par le SDS. Ça venait du haut, ça
2 venait du président du SDS, Radovan Karadzic, jusqu'au comité local du SDS
3 à Sanski Most. A ce niveau-là, il y a eu formulation et mise en œuvre de la
4 principale composante de cette politique," citation du Témoin O.
5 Comme je viens de vous le dire, il s'agit là des éléments de preuve de la
6 Défense relatifs de Sanski Most. En sus, la totalité des éléments de preuve
7 montre que le président de la cellule de Crise, avant l'opération de
8 Mahala, a donné l'ordre que toutes personnes armées soient abattues et que
9 "les civils capturés" devaient être "utilisés à des fins d'échange." Il
10 s'agit de la pièce P3329, page 33. Voire encore l'une des catégories de
11 personnes à détenir et à expulser, c'étaient des personnes qui "n'étaient
12 pas les bienvenues à Sanski Most." P22639 [comme interprété]. Et les
13 autorités officielles de la cellule de Crise devaient faire savoir que les
14 Musulmans n'étaient pas véritablement des personnes et que les Croates
15 avaient un désir pathologique d'abattre ceux qui étaient supérieurs à eux.
16 Il convient que nous attribuions une attention particulière à une autre
17 partie de la Bosnie où le préparatif de Karadzic effectué en Bosnie, tout
18 comme par les autorités de Belgrade, voulait créer des municipalités
19 dépourvues de Musulmans. Karadzic dit qu'en 1993, il y avait 50 000
20 personnes à Zvornik mais que "c'étaient tous des Serbes." Pièce P794, page
21 4.
22 La Défense décrit Zvornik comme étant l'œuvre des paramilitaires échappant
23 au contrôle des autorités. Mais le Défense nous a bien montré qu'il
24 s'agissait d'opération coordonnée entre les paramilitaires et la direction
25 des Serbes de Bosnie et ce, en pleine coopération au niveau de la
26 république et des autorités locales qui ont réalisé ensemble des crimes
27 systématiques à l'égard de la population et des communautés non serbes de
28 Zvornik. La préparation de la prise a commencé avec la réception à Zvornik
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1 et la mise en œuvre des Variantes A et B formant une cellule de Crise.
2 Avant le conflit, Karadzic a utilisé Zvornik comme exemple de la manière
3 dont les prises de pouvoir seraient mises en œuvre. P961, page 22. Comme
4 décrit dans le résumé de Zvornik, paragraphe 6, les paramilitaires serbes
5 envoyés par les collaborateurs de Belgrade de Karadzic ont été accueillis à
6 Zvornik par les autorités locales et assignés à des brigades de Défense
7 territoriale. Brano Grujic, le président du gouvernement provisoire, a
8 confirmé que : "J'ai dit bienvenue. Rendez-vous au QG, allez voir le
9 commandant et vous allez être déployés pour aller protéger notre peuple." T
10 40384. Avec la police serbe de Bosnie, la TO et la JNA, ils ont procédé à
11 une prise du pouvoir brutale au cours de laquelle des douzaines de civils
12 ont été tués. Résumé Zvornik, paragraphe 12. Comme indiqué aux paragraphes
13 20 à 28, après la prise du pouvoir, des opérations de nettoyage
14 généralisées ont été effectuées en coordination entre les forces serbes de
15 Bosnie et les autorités civiles. Les non-Serbes ont été arrêtés et détenus
16 dans plusieurs centres de détention et ont été soumis à de mauvais
17 traitements et ont été tués. Et, ici encore, la Défense cherche à faire
18 endosser la totalité de la responsabilité aux paramilitaires en indiquant,
19 au paragraphe 1 448 de leur mémoire, que ces prisons illégales étaient
20 exploitées par ces paramilitaires. Mais en fait, les autorités de Zvornik
21 étaient impliquées dans la détention illégale de Musulmans dans ces
22 centres, en ce y compris la garde des facilités, le transfert des détenus
23 entre les différents centres et les mauvais traitements dans ces centres,
24 tout en étant pleinement au courant des crimes commis là. Par exemple, des
25 détenus musulmans à l'usine Alhos ont été abusés gravement, pas seulement
26 par les hommes d'Arkan et les Aigles blancs, mais également par la police
27 serbe. Qui plus est, le gouvernement provisoire serbe de Bosnie était basé
28 à Alhos. Voir tableau des incidents énumérés C 27.3. Les plus de 190 hommes
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1 tués par balle à l'abattoir de Gero y ont été apportés par la police à la
2 suite de laquelle les forces serbes, en ce y compris les gardes en uniforme
3 de la JNA, les ont tués. Le nettoyage des corps a reflété un niveau
4 d'organisation qui semble indiquer qu'il y avait plus qu'une simple
5 participation des paramilitaires. Voir tableau A 16.3. Comme décrit au B
6 20.3 et C 27.2, les détenus à l'école technique de Karakaj ont été détenus
7 là-bas sur ordre du commandant de la TO et gardés par la compagnie Karakaj
8 de la Brigade de Zvornik en plus de certains paramilitaires. A peu près 160
9 hommes ont été interrogés, passés à tabac et tués à l'école. Et 25 autres
10 ont disparu après avoir prétendument amenés pour les échanges de
11 prisonniers.
12 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent au Procureur de ralentir.
13 M. TIEGER : [interprétation] La Défense affirme au paragraphe 1 453 que les
14 dirigeants locaux n'étaient pas au courant des crimes commis à l'école
15 technique de Karakaj, et cette affirmation est contredite par plusieurs
16 témoins de l'Accusation et de la Défense. L'un d'entre eux parle d'un
17 secret connu de tous, un secret de Polichinelle, et un autre a reconnu que
18 c'est une rumeur qui circulait en ville. P6405, pages 4 et 5. Et tel que
19 décrit dans le tableau des fait, le Dom Kulture de Celopek était gardé par
20 des policiers de la réserve. Des détenus ont été mutilés sexuellement, ont
21 été forcés à manger des parties de corps, et 25 détenus ont été tués. Les
22 Musulmans ont été transférés entre des centres de détention à Zvornik et
23 ensuite au camp de Batkovic à la suite d'un ordre du gouvernement
24 provisoire ou de la TO accompagnée par la police.
25 Les crimes dont j'ai parlé ne visaient pas ces victimes comme
26 individus, mais plutôt toute une communauté. La restructuration
27 démographique par la force de la Bosnie que voulait entreprendre Karadzic
28 devait passer par la destruction de parties significatives des communautés
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1 musulmane et croate de Bosnie, et le seul terme que l'on peut utiliser pour
2 qualifier cela est le génocide.
3 Le génocide s'entend par un acte commis dans l'intention de détruire
4 en tout ou en partie un groupe national, ethnique, radical [comme
5 interprété] ou religieux. Donc, il doit s'agir en substance d'un acte plus
6 une intention. La jurisprudence de ce Tribunal montre que ces éléments ont
7 été établis au-delà de tout doute raisonnable dans cette affaire.
8 Premièrement, la condition de l'actus reus du génocide est réunie. Il
9 s'agit de meurtres, d'atteintes graves à l'intégrité physique et de la
10 soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant
11 entraîner sa destruction physique totale ou partielle.
12 Même si l'échelle et l'impact de ces crimes peuvent jouer un rôle
13 dans la détermination de l'intention, il n'existe aucune condition selon
14 laquelle des actes sous-jacents de génocide atteignent un niveau
15 particulier. Donc, il n'existe aucun seuil numérique pour le nombre de
16 membres du groupe qui doivent être tués, aucune condition selon laquelle
17 les atteintes graves à l'intégrité physique doivent avoir un impact
18 particulier. Et vous avez posé la question de l'article 42 C au sujet des
19 conditions de vie devant entraîner la destruction du groupe, destruction
20 physique totale ou partielle, elle constitue l'un des actes génocidaires
21 qui, combinée avec la condition d'intention, constitue le génocide.
22 Il est clair depuis le début où ces différents actes sont distingués
23 de l'intention que les termes "devant entraîner" n'ajoutent pas de
24 conditions d'intention. Il s'agit plutôt d'une définition de la nature de
25 l'acte. Donc, le fait de tuer ne requiert pas d'approfondissement
26 particulier et la nature des atteintes graves à l'intégrité physique ou
27 mentale est définie par le terme "graves". Mais des "conditions graves" ne
28 nous aident guère à définir l'acte. Donc, les rédacteurs ont identifié la
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1 nature de l'acte à son potentiel à détruire, donc suffisamment grave.
2 Pour ce qui est des constatations de la Chambre d'appel selon
3 lesquelles "les Musulmans et Croates de Bosnie ont été soumis à des
4 conditions de vie qui allaient entraîner leur destruction," eh bien, la
5 Chambre d'appel parle de la nature des conditions qui affectaient les
6 membres individuels du groupe. Et il a été dit que cela suffisait pour
7 détruire des individus, ce qui est clair compte tenu des conditions telles
8 que la faim. A la lumière de cela, des conditions susceptibles de tuer des
9 personnes, les preuves ont été suffisantes pour démontrer l'imposition de
10 conditions suffisamment graves devant entraîner la destruction physique du
11 groupe, donc suffisamment graves.
12 Qui plus est, la Chambre d'appel a décidé sur les faits et ne
13 cherchait pas à formuler une norme juridique, en particulier une norme qui
14 irait à l'encontre ou qui détournerait la "norme de la probabilité
15 objective" utilisée par la Chambre pour le procès Brdjanin au paragraphe
16 906, invoquée par la Chambre de première instance ici au T 28767 et
17 contestée par aucune des parties.
18 En l'espèce, les preuves d'acte génocidaire massif sont si
19 accablantes que l'on ne saurait contester l'existence de la condition de
20 l'actus reus en l'espèce. Donc, compte tenu de cela, nous allons à présent
21 parler de l'intention de détruire en partie ou en totalité un groupe
22 protégé.
23 Intention de détruire, cela signifie l'intention de causer la
24 disparition physique d'une communauté. La Chambre Tolimir a indiqué que "la
25 destruction physique ou biologique d'un groupe ne passe pas nécessairement
26 par la mort des membres du groupe." Paragraphe 764 en citation du jugement
27 Blagojevic, et Jokic, paragraphe 666.
28 Cela se trouve également dans la convention et le statut qui parlent
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1 du génocide en y incluant des actes autres que le meurtre des membres du
2 groupe. Si l'intention de détruire tous les membres du groupe est la
3 conception classique peut-être du génocide, ce n'est pas la plus courante
4 aujourd'hui et ce n'est pas la seule méthode et ce n'est pas la seule forme
5 aujourd'hui. Le Tribunal a identifié au fur et à mesure plusieurs facteurs
6 énumérés au paragraphe 574 de notre mémoire qui peuvent démontrer
7 l'intention génocidaire. Vous pouvez le voir à l'écran. Et ce que ces
8 facteurs ont en commun, c'est leur impact délétère sur le fondement du
9 groupe qui permet au groupe de continuer à exister. Vous avez posé une
10 question des déplacements imposés par la force. Ce n'est pas un actus reus
11 spécifiquement énuméré et ne constitue pas un génocide en soi, mais la
12 jurisprudence indique qu'il peut s'agir d'un moyen puissant supplémentaire
13 pour garantir la destruction des fondements de la vie du groupe de manière
14 à ce que le groupe ne puisse pas survivre ni se reconstituer. Vous pourrez
15 voir cela en contexte dans un instant. Etant donné que tous ces facteurs
16 doivent être examinés dans le contexte de la totalité des opérations
17 criminelles contre le groupe visé, en l'occurrence par Karadzic, par le
18 biais de sa participation à l'entreprise criminelle commune.
19 Lorsque des massacres multiples du groupe ont eu lieu, lorsqu'un grand
20 nombre, voire la totalité, des membres individuels ont été brutalisés,
21 terrorisés et traumatisés, lorsqu'un groupe a été privé simultanément de
22 ses dirigeants, lorsque ces domiciles ont été détruits, lorsque les
23 bâtiments religieux ont été détruits, lorsque les membres du groupe ont été
24 déplacés par la force, donc séparés et éparpillés physiquement, lorsque les
25 communautés familiales et le tissu historique qui liait le groupe et ses
26 symboles les plus sacrés ont été détruits, eh bien, l'on ne saurait
27 conclure que l'existence même de cette communauté a fait l'objet d'une
28 attaque intentionnelle, ce qui révèle le but de détruire les communautés
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1 non serbes lorsque cela est nécessaire qui se trouve au cœur du plan
2 criminel commun.
3 Et s'agissant de la question des Juges de la Chambre, j'espère que vous
4 pouvez voir le rôle que le déplacement forcé a joué dans la destruction des
5 fondements de la vie de ce groupe. Les expressions directes du Dr Karadzic
6 de son intention génocidaire et son intention claire selon laquelle les
7 groupes ne seraient pas capables de se reconstituer renforcent cette
8 conclusion. J'aimerais revenir à Prijedor et me concentrer là-dessus pour
9 illustrer cela et vous rappeler ce que j'ai dit tout à l'heure.
10 Jusqu'à 800 civils musulmans ont été tués dans les premières attaques.
11 Environ 350 à 700 civils musulmans supplémentaires ont été tués dans le
12 nettoyage de Brdo, plus de 150 hommes ont été assassinés à Keraterm. Plus
13 de 150 hommes détenus à Omarska suite au nettoyage de Brdo ont été exécutés
14 en une nuit. Les tueries d'Omarska étaient tellement routinières que les
15 prisonniers avaient peur à chaque seconde, de nouvelles dépouilles
16 s'amoncelaient tous les jours. Soixante-huit Croates de Bosnie ont été
17 abattus ou tués à la hache pendant une attaque sur Brisevo. Plus de 100
18 Musulmans civils ont été roués de coups, torturés. Des dirigeants
19 politiques musulmans de Bosnie et Croates de Bosnie et d'autres membres de
20 la communauté ont été ciblés. Des milliers et des milliers de personnes
21 supplémentaires ont été séparées de leurs familles à Omarska et Keraterm,
22 on les a fait mourir de faim, on leur a renié des traitements médicaux, ils
23 ont été roués de coups, ils ont subi des violences sexuelles et ont été
24 torturés. Et pendant tout ce temps, pour s'assurer que les survivants ne
25 visaient pas revenir, leurs maisons, leurs mosquées et leurs monuments
26 culturels ont été anéantis.
27 En quelques mois, des milliers de non-Serbes de Prijedor ont été
28 tués, des milliers de plus ont été brutalisés, roués de coups, torturés,
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1 soumis à des violences sexuelles et avilis. Les structures religieuses et
2 les symboles de ces groupes ont été détruits ou endommagés sévèrement. Ils
3 ont été tels des fétus de paille éparpillés dans le monde. En octobre 1992,
4 environ 38 000 membres des groupes ciblés ont été expulsés dans la
5 municipalité, un chiffre qui a été amené à 44 000 en mai 1993. Tout cela
6 pris ensemble reflète l'intention de détruire les communautés musulmane et
7 croate de Prijedor. Aucune autre conclusion ne peut être justement tirée de
8 ces ravages au sein de ces communautés. Quelquefois, on a parlé d'un effort
9 systématique pour détruire physiquement chaque membre du groupe, mais en
10 fait, c'était simplement un effort et une intention de détruire la
11 communauté toute entière, et cette intention est confirmée dans les
12 déclarations directes de Karadzic de ses intentions, lorsqu'il a menacé et
13 lorsqu'il a cautionné ces actions.
14 Sans relâche, Karadzic a dit clairement ce qu'il arriverait aux
15 Musulmans de Bosnie et aux Croates de Bosnie s'ils continuaient à
16 poursuivre leur indépendance. Pas par la force de la nature, mais par ses
17 propres forces, ils disparaîtraient, ils seraient annihilés - il s'agit là
18 de citations - ou baigneraient dans le sang jusqu'au cou. Il s'est tenu
19 devant eux et leur a dit qu'ils étaient amenés à l'extinction. Mais
20 Karadzic n'est pas quelqu'un qui donnait des conseils s'agissant de la
21 construction d'un bien immobilier, c'était lui qui était à la tête de tout
22 cela et qui leur a dit : Ne construisez pas ici ou je serai forcé de
23 détruire tout ce que vous construirez.
24 Comme nous l'expliquons dans notre mémoire au paragraphe 580, ce cri
25 de ralliement de Karadzic constituait une tentative génocidaire. Et il a
26 affirmé que ses partisans avaient le droit d'utiliser la force.
27 Après le début du conflit, Karadzic a reconnu que les Musulmans
28 étaient en train de disparaître et que le conflit était attisé par l'Europe
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1 pour éliminer les Musulmans. Pièce D92, page 86. En d'autres mots, l'Europe
2 a fait savoir son point de vue, nous devons faire ceci.
3 Dans le mémoire de la Défense au paragraphe 2 769, on cite Nedic,
4 dont le commentaire a déclenché la réponse de Karadzic. Nedic a insisté sur
5 le fait qu'il n'avait jamais provoqué l'exécution de Musulmans et il a cité
6 son commentaire :
7 "Ne tuons pas les femmes et les enfants parce qu'ils portent des
8 sarouals."
9 Laissons de côté les raisons pour lesquelles Nedic s'est senti obligé
10 de dire à l'assemblée qu'il ne fallait pas tuer les femmes et les enfants
11 ou dire à l'armée qu'il était contre le génocide, l'importance de cet
12 échange réside dans le fait que Karadzic a convenu que les Musulmans
13 étaient en train de disparaître à cause de ses forces, de l'armée, de la
14 police et des cellules de Crise.
15 Madame, Messieurs les Juges, j'aimerais à présent passer au sens de
16 la nature distincte de ces communautés après la pause, car je vois qu'il
17 est l'heure de faire la pause.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger. Nous allons
19 faire une pause de 20 minutes et nous reprendrons à 10 heures 20.
20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 00.
21 --- L'audience est reprise à 10 heures 22.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvons-nous continuer, Monsieur
23 Karadzic ?
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Il y a un nouveau
25 problème et je suis un petit confus…
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons continuer.
27 Monsieur Tieger, c'est à vous.
28 M. TIEGER : [interprétation] Comme nous l'expliquons dans notre mémoire de
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1 l'Accusation, l'intention de détruire "en partie" signifie viser et
2 détruire une partie distincte du groupe et pas une accumulation aléatoire
3 de personnes. Outre l'aspect distinct, cette partie doit être
4 substantielle, c'est-à-dire suffisamment grande pour avoir un impact sur
5 l'ensemble. L'impact sur l'ensemble fait référence à des éléments tels que
6 pouvoir démontrer la "vulnérabilité et le caractère sans défense" du groupe
7 dans son ensemble. Cet impact, à son tour, peut être grossi par "la nature
8 emblématique ou stratégique" de la partie. A savoir si le groupe
9 substantiel variera en fonction des circonstances particulières de chaque
10 cas particulier, notre jurisprudence a identifié certains facteurs non
11 exhaustifs, notamment la taille de la partie et son importance relative, à
12 la lueur d'éléments tels que sa nature emblématique.
13 En l'espèce, les communautés musulmane et croate au sein des municipalités
14 reprises au chef 1 étaient des entités distinctes jouissant d'une présence
15 de plusieurs siècles, d'une culture particulière, d'histoires liées, de
16 rattachements ou d'identités liés également.
17 S'agissant des chiffres, nous savons de l'appel Krstic que les 40 000
18 Musulmans de Srebrenica pris dans le cadre de cette nature emblématique et
19 importance significative de Srebrenica étaient considérés comme une partie
20 substantielle du groupe musulman de Bosnie. Les Musulmans de Prijedor
21 étaient au nombre de 49 000. Les Croates, 6 000, et faisaient partie d'un
22 ensemble plus petit. Comme nous l'avons fait remarquer dans notre mémoire,
23 même avant l'évaluation de la nature emblématique, ces chiffres ne peuvent
24 pas être écartés facilement. Lorsque la même proportion d'une partie d'un
25 groupe dans son ensemble s'applique à des groupes plus grands, cela nous
26 donne des chiffres qui frappent et qui ne peuvent être écarter car ils
27 seraient insuffisants si la partie était détruite. Aux Etats-Unis, cela
28 correspondrait à la ville de New York; au Royaume-Uni, à la ville de
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1 Birmingham et de Glasgow. Personne ne peut suggérer que leur destruction ne
2 servirait pas "d'exemple puissant" de la vulnérabilité du groupe pris dans
3 son ensemble, en particulier si d'autres parties étaient attaquées
4 parallèlement.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Tieger. Désolé
6 d'intervenir, mais vous avez fait référence à prouver la vulnérabilité et
7 le caractère sans défense. Est-ce que vous pourriez expliquer ce que cela
8 veut dire exactement ou est-ce que vous pourriez me donner un exemple qui
9 prouverait la vulnérabilité et le caractère sans défense en termes simples.
10 M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, je pense que la meilleure définition
11 découlerait de l'appel Krstic et l'impact sur la communauté dans son
12 ensemble qui découle de la destruction de la communauté telle que celle-ci.
13 La Chambre d'appel dans l'affaire Krstic s'est concentrée non seulement sur
14 les chiffres, mais aussi sur la situation du groupe à ce moment-là, c'est-
15 à-dire les groupes qui se trouvaient en Bosnie orientale qui étaient
16 emblématiques du groupe dans son ensemble; c'est-à-dire qu'il y a eu un
17 impact de cette destruction, l'impact était beaucoup plus grand que celui
18 qui aurait pu être évalué par les chiffres pris grosso modo pour cette
19 communauté. Et Prijedor était emblématique parce que c'était le symbole de
20 la fraternité ou de l'unité en Bosnie en particulier, et la fraternité et
21 l'unité sont des concepts qui unissent ces communautés, ces concepts qui
22 promettaient une vie commune, une cohabitation, une protection des
23 différents peuples. Et lorsque Prijedor a été détruite au début de la
24 guerre, un message puissant a été envoyé à la communauté musulmane de
25 Bosnie, message sur sa vulnérabilité, sur son caractère sans défense, ce
26 concept d'ensemble qui unissait ces groupes. Et donc, la fraternité et
27 l'unité ont été détruites et ces communautés étaient sous le joug de forces
28 plus puissantes.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
2 M. TIEGER : [interprétation] Alors, j'aimerais ajouter, Monsieur le
3 Président, que vous allez, dans les résumés sur les municipalités,
4 retrouver ces différentes communautés et la nature stratégique et
5 emblématique de ces dernières. Je me réfère au chef 1.
6 Alors, j'aimerais réaffirmer les principes que j'ai repris en renvoyant les
7 Juges de la Chambre aux origines du concept juridique de génocide et les
8 mots qui ont tout d'abord été conceptualisés et qui ont défini le crime de
9 génocide. Raphael Lemkin a déclaré :
10 "D'un point de vue général, le génocide ne veut pas dire une destruction
11 immédiate d'une nation, sauf lorsque cela s'accomplit par des meurtres en
12 masse de tous les membres d'une même nation. Il a pour intention de vouloir
13 dire un plan coordonné de différentes actions visant à la destruction des
14 fondements essentiels de la vie de groupes nationaux dans le but
15 d'annihiler les groupes eux-mêmes."
16 Et M. Lemkin a clairement défini ce qui est consacré dans notre Statut, à
17 savoir que le génocide peut avoir lieu de d'autres façons que par le
18 meurtre de ses membres et que l'essence même du génocide est la destruction
19 des fondements de la vie du groupe et pas la mort de ses membres pris
20 séparément, même si c'est clairement une méthode, mais juste une méthode de
21 destruction des fondements d'un groupe.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Encore une fois, Monsieur Tieger, on
23 vous demande de ralentir, et ce sont les interprètes qui vous le demandent.
24 Veuillez en tenir compte, s'il vous plaît.
25 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
26 Ce point de vue est consacré dans notre jurisprudence dès son début.
27 La Chambre de première instance, lors de sa décision en l'espèce relative à
28 l'article 61 du Règlement, a été claire lorsqu'elle a fait référence aux
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1 éléments d'actes destructeurs visant les fondements du groupe. Elle a
2 conclu dans le droit fil de Lemkin ce qui suit :
3 "… découle de l'effet combiné de discours ou de projets établissant les
4 fondements et justifiant les actes sur la base de la grande échelle, de
5 leur effet destructeur et de leur nature spécifique qui vise à saper ce que
6 l'on considère être le fondement de ce groupe." Je cite là la page 53 de la
7 décision relative à l'article 61 du Règlement.
8 Ce principe, comme je l'ai mis en lumière tout à l'heure, a été réitéré à
9 plusieurs reprises dans la jurisprudence et affirme la pertinence d'une
10 intention de détruire les caractéristiques essentielles du groupe, telles
11 que les structures familiales, les relations entre les membres d'un groupe,
12 les biens et les symboles religieux et la capacité du groupe de se
13 reconstruire. En conséquence, l'Accusation ne demande pas d'élargir la
14 législation sur le génocide; elle ne demande que l'application du Statut et
15 de la jurisprudence du Tribunal, qui visent à fournir une mesure de justice
16 aux communautés qui ont été la cible de destruction et une mesure de
17 protection pour celles qui le seraient à l'avenir. Une telle application
18 des faits en l'espèce ne peut que mener à la conclusion que la combinaison
19 nécessaire des actes et l'intention existe et que le Dr Karadzic est
20 responsable du crime de génocide comme cela a été établi.
21 Je vais à présent passer à la thèse de la Défense. Pendant tout le procès
22 et dans son mémoire en clôture, M. Karadzic a invoqué plusieurs allégations
23 non fondées, non pertinentes et non cohérentes pour se dédouaner de sa
24 responsabilité. Il affirme à tort ce qui suit : que sont responsables de
25 ces victimes ceux qui ont démantelé la Yougoslavie et non lui; que les
26 Musulmans ont été dirigés par des intégristes islamiques avec des
27 intentions génocidaires, qui étaient responsables de tous les crimes en
28 Bosnie, et non pas lui. Que toutes les mesures en vue d'établissement d'un
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1 Etat ethniquement distinct dont il était le président, telles que la
2 régionalisation ou Variante A et B et l'armement à propos duquel il
3 s'accordait souvent le crédit avant et pendant la guerre, il a indiqué que
4 ceci n'avait rien à voir avec lui. Que la division du MUP auquel il
5 accordait le crédit pour les premières phases de "libération" était
6 simplement la mise en œuvre du plan Cutileiro, malgré le fait que la
7 préparation d'un MUP distinct sur un plan ethnique avait commencé avant les
8 négociations de Cutileiro et que les discussions de Cutileiro ne sont
9 jamais parvenues au stade de leur mise en œuvre. Il prétend qu'il n'avait
10 pas de préoccupations particulières concernant une démographie défavorable
11 et que prétendument le taux de natalité des Musulmans explosait. Malgré les
12 rappels, il répétait à ses partisans qu'il existait un risque d'une soi-
13 disant menace. Il explique que son rôle en tant que dirigeant de parti
14 n'avait aucun sens et que le parti qu'il présidait était un parti
15 "d'idiots" qui n'écoutaient personne, une position qui est contredite par
16 des écoutes téléphoniques de l'époque, ainsi que des documents et ainsi que
17 le respect extraordinaire desdites personnes envers Karadzic lors de la
18 présentation des moyens à décharge. Il explique qu'il était incapable de
19 s'ingérer dans le travail des organes de l'Etat avant la guerre et pendant
20 la guerre, malgré les écoutes téléphoniques qui illustrent précisément une
21 telle ingérence avant la guerre et ses propres aveux pendant la guerre. Que
22 le fait de prôner une solution négociée signifie qu'il ne pouvait pas
23 préparer la guerre. Par opposition à son adversaire Izetbegovic, qui avait
24 rejeté les solutions proposées par Karadzic, ça signifie que lui désirait
25 la guerre. Qu'une fois que la guerre avait commencé, il régnait le chaos et
26 l'anarchie dans les municipalités, même si simultanément il y avait "des
27 Etats dans un Etat." Il affirme que les communications entre les
28 municipalités et les échelons de la république étaient complètement
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1 coupées, à l'exception de ses ordres qui visaient à appliquer le droit
2 international envoyés à ces hommes sur lesquels il n'avait aucun contrôle
3 et qui, d'une façon ou d'une autre, ont pu traversé cette ligne de
4 communication impénétrable. Il affirme qu'il n'y avait pas de nettoyage
5 ethnique, que les gens ont quitté leurs maisons de leur plein gré compte
6 tenu des pressions inévitables qui sont celles de la guerre civile. Que
7 Karadzic n'avait aucun pouvoir ou très peu sur son armée et qu'il
8 n'abordait que des questions logistiques avec ces derniers. Que les civils
9 n'ont pas été détenus dans des centres de détention, qu'ils n'ont pas été
10 maltraités et qu'il n'était pas informé que les civils étaient détenus ou
11 maltraités. Et il affirme qu'il n'a jamais découvert qu'il y avait un
12 quelconque problème. Et que dans le cas où il y avait un problème, une
13 enquête était tout de suite diligentée. Ces affirmations, une après
14 l'autre, sont fausses. Et même si de façon ostensible ces éléments sont
15 étayés par les éléments de preuve, ses citations déforment les éléments de
16 preuve ou renvoient à des éléments de preuve qui contredisent ses
17 affirmations et n'ont rien à voir avec les propositions susmentionnées et
18 n'étayent en général qu'un aspect insignifiant de proposition complexe ou
19 qui ne permettent pas d'étayer ladite proposition. De nombreux éléments se
20 fondent sur des dépositions qui manquent de crédibilité. L'Accusation a
21 fourni des tableaux précisant la crédibilité des témoins, et quasiment dans
22 tous les cas les témoins à décharge sont incités en partie à avancer des
23 propositions qui ne peuvent pas être étayées par des documents d'époque et
24 ne permettent pas non plus d'accorder un poids aux éléments de preuve car
25 ils font preuve de parti pris et vont à l'encontre du sens commun. Vous
26 pouvez regarder ces tableaux dans le détail. Par exemple, il est
27 intéressant de rappeler certains passages de la déposition des témoins à
28 charge [comme interprété].
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1 Momir Garic, par exemple, qui a essayé de se distancer des éléments de
2 preuve par rapport à ce qu'il a fait, a insisté qu'il ne s'est jamais
3 appelé Momo, malgré tous les éléments de preuve qui indiquent le contraire,
4 y compris que la Défense le connaissait et a établi son nom sous le nom de
5 Momo Garic. Milos Milicic, qui fièrement a affirmé que l'ensemble de sa
6 déclaration, d'après ses propres termes, a été confrontée par le fait qu'il
7 faisait l'éloge de Karadzic et a répété mot pour mot ce qu'un autre témoin
8 avait dit sa déclaration et a indiqué que "l'auteur du texte avait dû
9 fournir ses propres termes." Nikola Mijatovic a affirmé que les
10 trajectoires des bombes aériennes modifiées avaient été "déterminées à
11 l'avance et pouvaient être contrôlées." Lorsqu'on lui a demandé si cela
12 signifiait qu'une maison de civil pouvait être démolie, telle que c'est
13 indiqué au fait énuméré à l'annexe G 10, que c'était la cible que visaient
14 les bombes aériennes modifiées lancées par la Brigade d'Ilidza, il a
15 répondu "aucune maison n'a été détruite dans ce secteur. C'est un mensonge
16 de l'ennemi."
17 Dusan Jankovic, par exemple, a insisté pour dire que ce n'était pas le
18 poste de police de Prijedor en 1992, malgré le fait qu'il y ait une
19 douzaine de documents d'époque qui déclarent le contraire et qu'il y a des
20 dépositions contradictoires émanant de deux autres témoins à décharge.
21 Slobodan Avlijas, qui a affirmé que les autorités centrales ne
22 communiquaient pas avec Foca jusqu'en décembre 1992, malgré une visite au
23 mois de juin 1992 par les membres d'un groupe de travail dont il faisait
24 partie. Bozidar Vucurevic, par exemple, qui a affirmé qu'aucun bien
25 musulman n'avait été détruit à Trebinje, et lorsqu'il a été confronté à ce
26 fait, il a avoué que les mosquées de Trebinje ont été détruites, il a dit
27 que "c'était l'armée". Srdo Srbic, qui a nié toute connaissance des plans A
28 et B malgré sa présence à cinq réunions différentes où ceci a été abordé.
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1 Svetozar Stanic, le dirigeant de la municipalité, qui a affirmé qu'il ne
2 savait jamais que le bunker avait été utilisé comme centre de détention
3 dans sa municipalité. Peu de temps après, Avlijas a expliqué comment lui et
4 Stanic étaient à quelques mètres du bunker et aussi près de la barre du
5 témoin que la porte du prétoire. Il a indiqué que c'était tellement
6 épouvantable que le témoin s'en rappelle encore 20 ans plus tard.
7 Momcilo Krajisnik, sur lequel nous avons fondé nos arguments dans notre
8 mémoire, ses propositions étaient nombreuses. Il a dit avoir assisté à
9 quelques réunions avec Mladic alors que le carnet de Mladic illustre qu'il
10 y avait 30 réunions simplement en 1992. Qui a affirmé qu'il ne savait pas
11 quelles tâches ou quelles missions avaient été confiées à l'armée mais a
12 montré qu'il était présent et actif lors des réunions auxquelles Karadzic a
13 assigné des tâches à l'armée et qui étaient intégrées aux directives. Il a
14 dit n'avoir jamais communiqué avec Mladic au sujet des objectifs
15 stratégiques mais qui, avec Karadzic, a clairement et explicitement défini
16 les objectifs, les a expliqués à Mladic lors de deux réunions distinctes
17 pendant une semaine avant l'annonce même des objectifs stratégiques. Qui
18 affirme que les dirigeants serbes de Bosnie n'ont jamais ordonné à l'armée
19 de conquérir une majorité de régions non serbes et qui expressément a dit à
20 Mladic lors d'une réunion qu'une des tâches les plus urgentes pour l'armée
21 était de nettoyer ou de ratisser Orasje, une municipalité majoritairement
22 croate, ce qui est inclus dans la directive numéro 4. Qui affirme que les
23 Variantes A et B n'avaient aucun sens et qu'il ne savait pas que ceci avait
24 été diffusé, malgré le fait que ceci a été répété à de nombreuses reprises
25 et a été discuté en sa présence, y compris sa conversation avec Karadzic le
26 jour où les directives ont été communiquées, car il s'agissait de savoir
27 qui allait contrôler la mise en œuvre, et lors d'une séance de l'assemblée
28 au cours de laquelle un représentant de la municipalité lui a rappelé
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1 comment Krajisnik et Karadzic leur avaient donné des conseils au sujet de
2 la mise en œuvre desdits problèmes. Et la liste se poursuit.
3 Nous avons constaté également de façon répétée que de nombreux
4 témoins ont réagi très favorablement aux questions directrices de Karadzic
5 qui étaient tenues présentes également dans les déclarations de témoin. Les
6 réponses en conformité permettaient de définir la stratégie de défense
7 qu'il avait élaborée il y a huit ans déjà. S'agissant, par exemple, de
8 1998, lorsque les enquêtes ont commencé, Karadzic surveillant à distance
9 l'élimination systématique faite par son institution. Un de ses
10 collaborateurs, Vukasinovic, a écrit en février 1998 au sujet de la
11 stratégie de défense qui existait déjà :
12 "Peut-être que je suis peureux de nature; cependant, je crois que
13 toutes les déclarations sont vraiment favorables [comme interprété]…"
14 Il déclare à titre d'exemple :
15 "En mai 1992, vous dites qu'il y a bien du travail et des lois en Republika
16 Srpska et que tout était normal et que dans la partie musulmane régnait le
17 chaos; cependant, notre stratégie de défense pour cette période-là consiste
18 à dire que le chaos régnait là." P6489.
19 Il présageait ainsi la défense qu'a présentée Karadzic 16 ans plus tard ici
20 dans le prétoire. Il identifie également les problèmes comme étant quelque
21 chose qu'il a annoncé, ce qui démontre qu'il s'agissait véritablement d'un
22 mensonge. Cette lettre a été écrite après d'autres lettres qui insistaient
23 auprès de Karadzic pour dire que "des déclarations défavorables ont été
24 cachées des enquêteurs." A cet égard, je vous enjoins de lire P3932, P3933,
25 P9334 [comme interprété] et P3935. Après l'avoir reçue, Karadzic a renvoyé
26 des instructions.
27 Après avoir remercié ses collaborateurs, il les a enjoints de
28 continuer :
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1 "Je crois que vous avez personnellement déjà fait beaucoup. S'il
2 s'agissait d'enlever ce qui est nécessaire, c'est déjà beaucoup. Continuez
3 dans cette direction-là, s'il vous plaît. Ne permettez pas à une telle
4 erreur d'être répétée que celle qui a été faite à la télévision. Vous
5 devriez analyser chaque partie qui leur sera proposée et choisissez les
6 éléments qui nous sont favorables et qui sont au détriment des Musulmans.
7 Rien d'autre n'existe parce que les archives ont été déplacées, détruites,"
8 et cetera.
9 "Vous avez tout à fait raison s'agissant du SDS également. Veuillez dire à
10 Vrkes que vous m'avez consulté et que je vous ai demandé de leur donner des
11 instructions s'agissant de ce qu'ils doivent faire. Le mieux serait si les
12 archives n'existaient pas du tout parce que le parti a été gelé pendant un
13 an. Les cellules de Crise ont été organisées par les organes municipaux.
14 Souvenez-vous de cela et insistez beaucoup là-dessus. Ce sont les organes
15 des municipalités qui ont été élus en 1990 et non pas le parti."
16 Et ensuite, il dit à Vukasinovic montrez à Vrkes la lettre et il lui
17 demande de tout faire, "Fais en sorte que les archives des municipalités
18 soient vidées," de façon à ce qu'ils ne puissent pas "gâcher le travail sur
19 lequel nous avons déjà travaillé."
20 Pendant toute la durée du procès, le même effort a été déployé en vue de
21 dissimuler et d'induire en erreur tous les éléments visibles, et ses
22 partisans loyaux ont cherché à l'aider en suivant la ligne du parti même
23 lorsqu'il s'agissait de stratégies de défense indéfendables qui avaient été
24 élaborées il y a de nombreuses années.
25 Karadzic avance au paragraphe 1 348 de son mémoire en appel qu'il est
26 "ridicule d'arguer en se fondant sur de la fumée et des miroirs" qu'il a
27 caché des éléments de preuve, dévoilant ainsi que le mensonge est important
28 car son indignation est grande. Comme l'a dit le général Rose :
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1 "Lorsque Karadzic est sous pression, il pouvait mentir comme un
2 arracheur de dents et, néanmoins, avoir l'air tout à fait innocent."
3 Je parle de ces affirmations erronées. Première affirmation erronée,
4 la tentative visant à déplacer la responsabilité et à faire porter cette
5 responsabilité à ceux qui ont soi-disant démantelé la Yougoslavie.
6 Paragraphes 28 à 42. Comme les Juges de cette présente de Chambre l'ont
7 indiqué à de nombreuses reprises, le Dr Karadzic en l'espèce n'est pas
8 celui qui a commencé la guerre, jus ad bellum. Néanmoins, son affirmation
9 est tout à fait instructive parce qu'elle illustre la position qui est la
10 suivante : le démantèlement de la Yougoslavie serait suivi d'une force
11 destructrice en Bosnie. Ou Karadzic, comme il l'a dit en des termes plus
12 crus, "baisez toute la Yougoslavie et faites en sorte que la Bosnie demeure
13 vierge."
14 L'effort de Karadzic pour déplacer la responsabilité continue
15 lorsqu'il dépeint, en fait, ses adversaires politiques, essentiellement
16 Izetbegovic et le SDA, les intégristes musulmans qui dominent la guerre
17 fratricide, le fait de répandre la terreur. Paragraphes 39 à 42 de son
18 mémoire en appel. Encore une fois, la Chambre de première instance a
19 souligné à maintes reprises que ces affirmations ne sont pas pertinentes ou
20 marginales parce qu'elles exposent peut-être par inadvertance le mobile.
21 Mais quoi qu'il en soit, et cela est peu surprenant, cela ne permet pas
22 d'étayer sa description bien diabolique. Le fondateur du SDS en Croatie,
23 Jovan Raskovic, qui déplorait son propre rôle s'agissant de la création du
24 SDS en Bosnie, a déclaré :
25 "On ne doit pas craindre la souveraineté de la Bosnie. Peut-être
26 que…"
27 Page [comme interprété] 6617, page 2.
28 Même si Krajisnik a dit, Les idées d'Izetbegovic sont "une parodie"
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1 de la déclaration islamique, T 4314 [comme interprété]. En lieu et place de
2 cela, c'était un homme tout à fait pragmatique, un "homme agréable", qui
3 était contre la diabolisation et le portrait qu'on faisait de lui. P1940.
4 Les efforts désespérés de Karadzic sont illustrés par le fait qu'il se
5 reposait sur ce qu'il dépeint comme un système nazi pour décrire le sort
6 des Serbes dans une république islamique future. Paragraphe 47 de son
7 mémoire où il cite une partie du texte et énumère les restrictions et les
8 menaces qui leur sont imposées mais ne cite pas le début de l'article qui
9 révèle que la liste est longue et qu'elle est satirique, qu'on parle d'une
10 soi-disant création de république islamique qui aurait été manipulée par
11 des personnes inconnues et qu'il y aurait eu un pamphlet à cet égard qui
12 aurait été publié dans son magazine et qui le condamne.
13 Karadzic, de même, dépeint Izetbegovic et le SDA comme quelqu'un qui
14 recherchait la guerre et qui souhaitait que les Musulmans souffrent. Il
15 cite Donia pour étayer son affirmation, paragraphe 43, T 3268, alors que
16 Donia dit tout à fait le contraire dans son rapport : "Il ne dit pas ce que
17 vous dites qu'il a dit, au contraire, qu'il ait opté pour la guerre. Il
18 parle des préparatifs pour la guerre et non pas du fait qu'il opte de façon
19 consciente pour la guerre. C'est une déformation de la citation." T 3267 à
20 3268. Karadzic a déformé dans le prétoire ce qu'il dit et ce qui figure
21 dans son mémoire en clôture.
22 La réalité est que Karadzic avait insisté longtemps pour qu'il y ait une
23 Bosnie souveraine et indépendante mais que ceci soit contrecarré par la
24 force, et il a dit à Okun en décembre 1991 : A moins que les Serbes de
25 Bosnie n'obtiennent ce qu'ils veulent, il y aura la guerre. Page [comme
26 interprété] 776, pages 38 à 39.
27 Pour ce qui est de la suggestion de Karadzic sur les souffrances des
28 Musulmans que c'était la responsabilité d'Izetbegovic parce que Izetbegovic
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1 le souhaitait, il suffit de regarder la pièce D3716. Lors d'une séance de
2 la présidence de Bosnie au mois de juin au cours de laquelle Izetbegovic
3 est à l'agonie parce qu'il est confronté au dilemme du nettoyage des Bosno-
4 Serbes :
5 "Si nous n'acceptons pas l'ultimatum, ces personnes vont périr. Et si nous
6 l'acceptons, nous allons légaliser la division le long des lignes
7 ethniques, ce qui va modifier la situation au plan démographique en Bosnie-
8 Herzégovine, la création d'un Etat serbe en quelque sorte, c'est comme le
9 système nerveux de la Bosnie-Herzégovine, et finalement la question de
10 l'échange - est-ce juste et est-ce qu'on peut faire cela ?"
11 Tout en dépeignant Izetbegovic comme un homme qui recherchait activement la
12 guerre et ce, à tort, Karadzic se dépeint comme un homme qui recherchait la
13 paix, ce que montrent de nombreuses pages de son mémoire et différentes
14 déclarations de sa part, paragraphes 238, 260, 265, 285, et "à chaque
15 occasion il ne cesse de prôner la paix."
16 Bien entendu, l'Accusation n'affirme pas que Karadzic avait souhaité la
17 guerre pour la guerre et n'affirme pas qu'il n'aurait pas accepté une
18 solution de paix sous des conditions à lui, mais il a été explicite pour
19 dire qu'il n'accepterait pas une Bosnie souveraine et indépendante et il
20 était disposé à aller en guerre pour l'empêcher. Et bien que ses efforts de
21 départ visaient à garder la Bosnie au sein de la Yougoslavie, lorsqu'il est
22 devenu clair que la chose ne se produirait pas, il a changé de cap et il
23 s'est orienté vers la mise en place d'une entité distincte pour les Serbes
24 en Bosnie. Et quand il ne pouvait pas obtenir quelque chose par des
25 négociations, il aurait même accepté d'en prendre moins. Mais quand la
26 chose ne passait pas, il optait pour la force et il souhaitait qu'il
27 fallait obtenir pour les Serbes ce qu'ils avaient le droit d'obtenir. Et
28 comme Mandic l'avait dit à un interlocuteur qui a fait remarquer que suite
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1 aux attaques serbes de Sarajevo, il y avait peu de chose à rester aux
2 Musulmans, et il a répondu :
3 "Qu'ils aillent se faire foutre. Ils n'ont pas voulu passer par les
4 négociations, ils n'auront donc rien." Pièce P1103, page 8.
5 Et cet Etat serbe, comme Karadzic l'a laissé entendre de façon claire,
6 devait réaliser la "création du rêve séculaire de la création d'un Etat
7 propre face aux nombreux ennemis internes." P1477, page 258.
8 Et il a expliqué ceci à une assemblée serbe, il a dit que :
9 "Ceci avait constitué la désillusion, la perte des illusions du peuple
10 serbe, qui veillerait à ne pas pouvoir être attaqué de l'intérieur à
11 l'avenir." P1343, page 58.
12 Et lorsqu'il y a eu publication des objectifs stratégiques, Karadzic a dit
13 qu'il fallait "se séparer de tous ceux qui étaient nos ennemis qui ont
14 profité de chaque opportunité, dans ce siècle-ci notamment, pour s'attaquer
15 à nous et qui continueraient avec ces pratiques si on restait ensemble dans
16 le même Etat." Page -- plutôt, pièce P956, page 9.
17 Ces ennemis, c'étaient les Musulmans de Bosnie et les Croates. Et bien
18 qu'il ait présenté des exposés pour ce qui est de la menace musulmane à la
19 lumière de la prédominance démographique, il a répété à plusieurs reprises
20 aux représentants internationaux qu'on ne pouvait pas vivre avec les
21 Musulmans. Il décrit au paragraphe 28 que Karadzic a souligné que "On ne
22 vivait ensemble que sous l'occupation ou sous la dictature." Les Musulmans
23 et les Serbes, c'est comme l'eau et l'huile, comme le chat et le chien;
24 l'un à côté de l'autre, si vous les mettez ensemble dans une marmite, la
25 soupe ne sera pas bonne. Alors, il a souligné également que "l'expérience
26 serbe disait que l'Islam, son expérience de cinq siècles," avait permis de
27 "reconnaître un danger de longue date qui constituait un espèce d'octopode
28 destructif islamique qui est irréconciliable avec le peuple serbe et ses
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1 intérêts."
2 Et dans la description qu'il a faite de ses démarches prétendument en
3 faveur de la paix, Karadzic fait état des renseignements démographiques
4 liés aux Musulmans et il affirme qu'il est préoccupé par les efforts
5 déployés "de façon artificielle" visant à modifier la structure
6 démographique. On a présenté de façon erronée, semble-t-il, son obsession
7 vis-à-vis des taux de naissance chez les Musulmans et de leur croissance
8 démographique et des implications que cela allait constituer. Et il en
9 parle au paragraphe 29. Il a insisté auprès des représentants
10 internationaux tels que Cutileiro pour dire que les Musulmans avaient
11 l'intention de mettre à profit ce haut taux de croissance démographique
12 pour exercer le contrôle en Bosnie grâce à cette croissance démographique.
13 Pièce P776, pages du compte rendu 4163 à -64.
14 Et même avant la guerre, s'agissant de ceux qui l'ont suivi, il a dit
15 que "On allait se servir d'astuces avec les croissances démographiques," et
16 que les Serbes et les Croates ne pouvaient pas contrôler la percée de
17 l'Islam en Europe parce que dans cinq ou six années les Musulmans allaient
18 constituer 58 % [comme interprété] de la population. Et il a dit les choses
19 clairement, il a dit que cela avait influé sur le pourcentage des Musulmans
20 qu'on avait envisagés pour la République serbe, et même un pourcentage
21 assez peu dangereux ne le remplissait pas d'aise. Il dit que :
22 "23 % allaient devenir vite 24 % au bout de quelques jours, et puis
23 que ça allait être au-delà de 24 %," et cetera.
24 Donc, Karadzic le dit à la 37e assemblée, pièce P1385, pages 108 à
25 109.
26 Il parle de l'influence toxique de la menace musulmane et de leur
27 croissance démographique. On dit que les Serbes de Bosnie ne pouvaient
28 prétendre à exercer leur autorité que sur des territoires où les Musulmans
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1 n'étaient que très peu nombreux. Mais au contraire. Les ambitions étaient
2 bien plus grandes et on cherchait à justifier la chose. Par exemple, on
3 avait dit que c'étaient des secteurs où les Serbes avaient été majoritaires
4 avant le génocide de la Deuxième Guerre mondiale et que c'était le droit
5 des Serbes de reprendre contrôle ou de reprendre possession de ces
6 territoires. Et ceci figure dans des documents officiels, tels que le
7 document P6444, qui est une déclaration au sujet de la constitution de
8 l'Etat; pièce P776, pages 32, 33; et pièce 227. S'agissant du plébiscite
9 qui a été organisé en novembre 1991, il s'avère que :
10 "Les résultats où les Serbes ont participé au référendum, et
11 indépendamment du fait de savoir s'ils faisaient 5 ou 55 % de la
12 population, ils étaient un élément constitutif de la ville ou de la
13 république et que cette partie-là devait rester en Yougoslavie si on en
14 décidait ainsi." D86, page 38.
15 Karadzic a également affirmé que les Serbes avaient droit à quelque
16 65 % des territoires étant donné que c'était "en leur possession", "en leur
17 propriété", et même Slobodan Milosevic a rit de cette affirmation, alors
18 qu'il avait été celui qui avait fait beaucoup de bien à l'égard de
19 Karadzic, mais il était frustré par son avidité :
20 "On savait que les prés, les terres, les montagnes, étaient en
21 propriété sociale. De quels propriétaires parlez-vous ? Si les deux tiers
22 de la population pouvaient être casés sur deux tiers du territoire et s'il
23 n'y avait que 30 % pour le reste de la population, est-ce que cela serait
24 humain et équitable ?" Pièce P2604, pages 6 à 9.
25 Alors, indépendamment des justificatifs et de l'importance
26 stratégique à accorder à des territoires où vivaient des Musulmans et des
27 Croates, on affirmait qu'on avait droit à ces territoires. On parle des
28 endroits que l'on a "édifiés pour soi-même", et on parle des territoires où
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1 les Serbes n'avaient constitué que 30 % de la population. Et Karadzic a dit
2 :
3 "N'en parlez pas trop, mais souvenez-vous du nombre qu'on avait
4 constitué à Bratunac, à Srebrenica, à Visegrad, Rogatica, Vlasenica,
5 Zvornik, et cetera. Etant donné l'importance stratégique de ces lieudits,
6 cela doit nous appartenir et pratiquement personne ne doit remettre la
7 chose en question."
8 Pièce P988, pages 68 à 69.
9 Dans ce contexte, Karadzic demande aux Juges de la Chambre de prêter
10 une oreille attentive aux affirmations disant qu'il n'avait pas été
11 impliqué dans les mesures de séparation aux termes de la Variante A et B et
12 de la régionalisation, indépendamment de l'abondance de la documentation
13 contemporaine qui reflète fort bien le rôle permanent qu'il a joué dans ce
14 processus. Et s'agissant de la régionalisation, il reconnaît que cela a
15 constitué une "façon de se battre contre l'Etat Alija." Il en parle au
16 paragraphe 205 pour être plus précis encore et dire qu'il s'agissait de
17 "détruire l'Etat d'Alija." Il dit qu'il s'agissait d'un processus légal qui
18 n'était pas monoethnique, que ça n'avait rien à voir avec l'ARK et qu'il
19 s'agissait de la création d'une entité qui serait complètement indépendante
20 de Karadzic. Mais toutes les autres parties en présence ont parfaitement
21 bien compris ce que signifiait la régionalisation, création de régions où
22 les Serbes seraient majoritaires, en se servant de justificatifs
23 économiques pour dissimuler "l'objectif de la création d'un état pour une
24 nation," comme l'a reconnu un témoin de la Défense, le Témoin Jaksic, page
25 du compte rendu 46 173. Dans sa tentative de fuir les responsabilités qui
26 sont les siennes en matière de régionalisation, Karadzic, de façon
27 explicite, tourne le dos à ce qu'il a affirmé lui-même le 11 janvier 1992,
28 disant que c'est lui qui avait inventé la notion de régionalisation.
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1 Paragraphe 202. Et il essaie de prendre des distances vis-à-vis de ses
2 propres propos pour indiquer que Karadzic, à plusieurs reprises, avait
3 affirmé lui-même qu'il avait assumé la responsabilité pour ce qui est de
4 cette notion de régionalisation. Paragraphe 112 du mémoire de l'Accusation.
5 La régionalisation a, en fait, été l'une des mesures prises par
6 Karadzic pour expliquer la façon dont on pourrait remettre les choses en
7 place lorsque le moment serait venu.
8 "Nous avions eu une liste d'opérations et des démarches qu'il fallait
9 faire et nous nous attendions à ce que les Musulmans fassent des erreurs et
10 en profiteraient pour créer des communautés de municipalités, de régions
11 autonomes serbes et, pour finir, des régions entières pour créer une
12 assemblée et, au final, une république." Pièce P953, page 3.
13 Et pour ce qui est de la Variante A et B, Karadzic a fait venir toute une
14 série de témoins qui ont nié l'existence ou la véritable signification des
15 Variantes A et B, et, entre autres, son proche collaborateur Krajisnik, qui
16 a également mentionné les Variantes A et B. D'autres témoins ont également
17 parlé de la documentation assez vaste pour ce qui est de la mise en œuvre
18 de ces Variantes A et B, mais leurs témoignages ont été conformes aux
19 fausses affirmations de Karadzic au début du procès qui disaient que les
20 Variantes A et B n'avaient pas été mises en place, n'avaient pas été
21 discutées, n'avaient pas été adoptées par le SDS. Or, ça se trouve être
22 cohérent avec le faux témoignage de Vukasinovic qui dit que :
23 "Il faut souligner à leur intention que les instances municipales
24 élues en 1990 ont constitué des entités en 1990 déjà." Pièce P6490.
25 Et quand on établit un lien avec la fausse défense qui vise à
26 dissocier Karadzic de ce que ses compagnons avaient réalisé pour ce qui est
27 de la "libération de territoires pour créer un Etat." Je me réfère à la
28 pièce P970, page 316.
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1 Et à l'époque de la Variante A et B, Karadzic avait dit :
2 "Vous souvenez-vous ce qu'on avait fait avant la guerre ? Tout était
3 clair là où nous étions majoritaires et là où on était minoritaires. Vous
4 souvenez-vous de l'instruction A et B ? Il y avait des cellules de Crise,
5 et on avait compris clairement que c'était là l'autorité en place. Ils
6 pouvaient faire des erreurs, mais c'était l'autorité. Le peuple n'était pas
7 resté sans autorité et il y avait toujours une cellule de Crise pour
8 répondre aux attentes."
9 Je parle de la pièce P1403, page 347.
10 Maintenant, Karadzic, ici, dans son mémoire en clôture, affirme que les
11 cellules de Crise ont été créées parce qu'il y avait eu crise et il n'y
12 avait pas eu d'autorité en place. De même, au paragraphe 964, il n'y avait
13 pas de loi en place, de législation en place. Et ceci reflète une fois de
14 plus cette défense factice qui a commencé à s'être disséminée en 1998 pour
15 dire que les cellules de Crise ont été créées une fois que la guerre a
16 commencé.
17 Contrairement à ce qu'affirme Karadzic, à l'époque le système ne
18 s'était pas "effondré" et on ne peut pas dire que "aucun système organisé
19 n'était en place." Cependant, à l'époque, l'indépendance de la Bosnie
20 inquiétait beaucoup les dirigeants serbes de Bosnie, comme l'indique le
21 préambule de la Variante A et B. De ce fait, Karadzic a pris des mesures
22 nécessaires pour créer des organes qui exécuteraient la séparation ethnique
23 en Bosnie. Ces organes étaient dirigés par ses fonctionnaires, dont les
24 capacités à effecteur une séparation ethnique étaient surveillées par lui-
25 même et ses émissaires tels que Cizmovic. Voir au paragraphe 130 de notre
26 mémoire. Comme Karadzic l'a déclaré en février 1992, au sujet en l'espèce
27 de la Krajina, il n'y avait aucune municipalité qui ne suivait pas sa
28 "ligne politique". D88, page 44.
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1 En bref, comme l'a dit Kupresanin en 2001, il existait une ligne
2 hiérarchique des présidents des municipalités jusqu'à Karadzic. P6510, page
3 7.
4 Le cas échéant, Karadzic intervenait en faveur de ses protégés et les
5 favorisait par rapport à des politiciens moins fidèles, comme ce fut le cas
6 à Ilidza, Novo Sarajevo et Trebinje. Il suivait de près la composition des
7 autorités locales dans les autres municipalités. Voir P3200, page 3; ou
8 P5783, page 2.
9 Karadzic était clair :
10 "Celui qui commet une erreur, je le suspendrai et l'expulserai du
11 parti. Je m'en fous.
12 "Une signature de moi, ils seront finis." P2556.
13 Lorsque les gens sur le terrain dans les municipalités ignoraient ou
14 transgressaient les ordres de Pale, certains étaient immédiatement mis à
15 pied et d'autres étaient soumis à une procédure disciplinaire que l'on
16 appelait familièrement "le repassage" et qui faisait changer d'avis aux
17 fonctionnaires. P1, pages 93 à 94.
18 Le dernier argument de Karadzic pour étayer son affirmation selon laquelle
19 il n'exerçait aucun contrôle sur les autorités locales est une citation
20 extraite d'une conversation interceptée qui reflète l'attitude des
21 dirigeants de Prijedor vis-à-vis de Karadzic.
22 "On s'en fiche de Karadzic. On fera ce que nous voulons. Il ne peut
23 pas nous imposer sa volonté."
24 P2571. Cette citation est prise hors contexte, ce qui en inverse le
25 sens. Ce que ne nous dit pas le mémoire de Karadzic, c'est que cette
26 conversation, en fait, lui avait été rapportée avec un seul fonctionnaire
27 lui rapportait les propos de certains mécontents. Karadzic s'est exprimé
28 clairement :
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1 "Qu'ils baisent leurs mères. Qu'ils créent leur parti. Ceux qui
2 refusent d'obéir à Sarajevo devront démissionner."
3 Il a pris les mesures nécessaires en plaçant un homme au pouvoir.
4 Peu après, Cizmovic a informé Karadzic qu'il n'y avait plus de
5 problème à Prijedor.
6 "Prijedor est résolu."
7 P2552.
8 Ce qu'a confirmé le Témoin de la Défense Miskovic, cette conversation
9 interceptée parlait sur le respect de la hiérarchie du parti, de la
10 politique du parti. T 45357 à 4359 [comme interprété]. Comme c'est le cas
11 pour une grande partie du mémoire de clôture de Défense, il faut gratter un
12 petit peu pour que la réalité apparaisse au grand jour. Dès le début du
13 conflit, il était clair que les municipalités subordonnées à Karadzic lui
14 étaient loyales. Donc, peu après le début du conflit, la cellule de Crise
15 de Rogatica a informé Karadzic que "conformément à nos instructions," la
16 "séparation de fait sur le terrain devrait et a été mise en place," et a
17 manifesté ses inquiétudes quant au fait que d'autres ne se coordonnaient
18 pas assez avec le niveau de la république. P6105.
19 Les fonctionnaires des municipalités reproduisaient constamment les
20 politiques de Karadzic sur le terrain, parfois l'invoquaient directement.
21 Par exemple, à Kljuc, le président de la cellule de Crise, Banjac, au début
22 juillet 1992 :
23 "Je pense que la vie quotidienne doit faire l'objet d'une démarcation
24 ethnique claire et les zones débarrassées par purification ethnique de ceux
25 qui ne peuvent y vivre avec nous." P6552, page 2.
26 Ou Gruic, le président de Zvornik, P6417 :
27 "Les Turcs ont détruit l'église serbe qui se trouvait ici à leur
28 arrivée à Zvornik en 1463. A présent, nous reconstruisons l'église et
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1 revendiquons ce territoire qui sera à jamais un territoire serbe. C'était
2 une ville serbe avant l'arrivée de l'Islam dans les Balkans."
3 Ou Koprivica, cadre officiel du SDS de Vogosca, qui a déclaré que si
4 les Musulmans ne quittent pas les territoires serbes, ils seraient détruits
5 et "allaient tout simplement disparaître." P2344, paragraphes 59 et 60.
6 Ou le président Deronjic de Bratunac, dont nous parlera Mme Pack, qui
7 a dit à des représentants SDA réticents à adopter la séparation que
8 Karadzic lui soumettait une pression intense et le menace que si des
9 Musulmans ne cédaient pas à cette exigence, ils "disparaîtraient". P3916,
10 paragraphes 31 à 32.
11 Et on constate la même chose dans la pièce P965, où le partisan de
12 Karadzic, Jovan Tintor, explique qu'une séparation est imminente, que les
13 Musulmans soient d'accord ou non, et qu'ils n'en obtiendraient que quelques
14 "îles" en Bosnie, alors que les Serbes seraient intégralement reliés
15 géographiquement et de toute autre manière. Comme précisé au paragraphe 79
16 [comme interprété] du mémoire de l'Accusation, l'objectif commun était mis
17 en œuvre dans les municipalités dirigées par les hommes de Karadzic. Ils
18 coordonnaient les rafles, détentions et expulsions avec les soldats de
19 Karadzic, de la police et les autres municipalités.
20 Une autre affirmation mensongère de Karadzic est que partout sur le
21 terrain régnaient l'anarchie et le chaos. Mémoire de la Défense, paragraphe
22 455. Toutefois, le fait que Karadzic ait félicité les autorités locales
23 pour avoir sécurisé, consolidé les municipalités revendiquées par les
24 Serbes reflète une unité autour de l'objectif et une coordination dans
25 l'exécution. Karadzic a manifesté sa satisfaction vis-à-vis des résultats
26 et de la garantie de leur pérennité. Par exemple :
27 "Il y a deux ans, nous étions un groupe en Bosnie-Herzégovine avec quelques
28 droits. Aujourd'hui, nous sommes l'Etat, et ce que nous tenons est 100 % à
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1 nous. Foca est extrêmement important pour eux mais ne leur appartiendra
2 plus jamais." P1385, page 110.
3 Comme Krajisnik l'a dit au sujet de Foca, lorsqu'il parlait à un
4 rassemblement là-bas, qui dans l'intervalle avait été rebaptisé Srbinja :
5 "Rien ne sera plus comme avant. Je vois à présent une authentique ville
6 serbe et vous portez fièrement votre nom serbe. Vous êtes un exemple pour
7 chaque Serbe."
8 Karadzic a félicité tous ses fonctionnaires pour avoir mis en place la
9 séparation ethnique par rapport aux Musulmans et Croates.
10 "C'est le SDS qui a organisé le peuple et a créé l'armée. C'était une
11 armée. Avec la police, ils constituaient les forces armées de la République
12 serbe de la Bosnie-Herzégovine et ont libéré et créé le territoire." P970,
13 pages 323 à 324.
14 En plus des félicitations adressées aux fonctionnaires locaux pour avoir
15 réalisé les objectifs des dirigeants serbes de Bosnie, les très nombreux
16 documents, décisions, conclusions, rapports produits par les municipalités
17 au cours de cette période, en tout cas ceux que l'on a pu retrouver,
18 attestent également de l'impossibilité d'un état d'anarchie. Il suffit de
19 voir les résumés sur les municipalités pour voir la quantité de documents
20 qui a été produite.
21 Karadzic cherche à nier tout lien qu'il avait avec ses subordonnés en
22 invoquant que les autorités de la RAK étaient "manifestement
23 indépendantes". Des autorités centrales, c'est une affirmation clairement
24 mensongère. La RAK était dirigée par de fidèles partisans de Karadzic comme
25 "l'obéissant" Brdjanin, qui cherche à flatter Karadzic en lui disant qu'il
26 avait une cote de popularité de 300 % et qui consultait à Karadzic pour les
27 questions les plus insignifiantes, à tel point que Karadzic lui a rétorqué
28 : Je ne suis pas ta nounou. Page [comme interprété] 2, page 61; D285 [comme
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1 interprété]; P2549.
2 Tous les différends entre la RAK et les dirigeants centraux portaient sur
3 la chronologie et la technique de la création d'un Etat ethnique serbe -
4 D277, P5619 - et pas sur leur objectif principal commun, comme le prouve
5 l'exécution effective du plan criminel commun au sein de la RAK,. Voir
6 notre mémoire, paragraphes 312 à 321.
7 Comme indiqué aux paragraphes 309 à 310 de notre mémoire, Karadzic a
8 rapidement coupé court à un Etat de la Krajina en février 1992. Comme le
9 Témoin de la Défense Dodik l'a déclaré, Karadzic :
10 "Est allé à Banja Luka pour mettre au pas l'organisation de Banja Luka, et
11 ensuite l'organisation a été placée sous le contrôle direct des hauts
12 dirigeants de Pale."
13 T 36888 jusqu'à 36889.
14 Comme l'a dit Karadzic en parlant de la position de la politique du parti
15 de Prijedor :
16 "C'est un parti avec son sommet et sa base, et personne ne déconnera en
17 notre nom." P2571.
18 L'autorité incontestée de Karadzic est résumée par les propos tenus par
19 Kukanjac en avril 1992 :
20 "Nous attendons le retour de Karadzic d'Europe. Nous ferons tout ce qu'il
21 nous dira… Nous avons notre commandant. C'est lui. Nous devons lui obéir."
22 P987, page 2.
23 Le mémoire de l'Accusation expose en détail le fonctionnement des
24 communications, l'exécution par la RAK des politiques et décisions au
25 niveau de la république et la mise en œuvre du plan criminel commun dans la
26 RAK. Aux paragraphes 312 à 321, 506 à 509, la RAK n'était pas un Etat dans
27 l'Etat. Contrairement à ce qu'affirme la Défense aux paragraphes 1 161 à 1
28 165, les cellules de Crise municipales étaient subordonnées à la cellule de
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1 Crise de la RAK. Selon Brdjanin :
2 "Tout à la RAK se fait au niveau de la cellule de Crise."
3 La Défense donne Prijedor comme exemple de municipalité que ne contrôlait
4 sans doute prétendument pas la RAK, mais la mise en œuvre par la cellule de
5 Crise de Prijedor de décisions de la RAK et de la république sur la
6 mobilisation des armements, l'expulsion des non-Serbes et leur déménagement
7 prouvent le contraire.
8 Les dirigeants de la RAK ont travaillé avec les dirigeants de la
9 république pour mettre en œuvre le plan commun. Lors d'une réunion de juin
10 1992 entre Karadzic, Mladic et des dirigeants civils et militaires de la
11 RAK, Brdjanin a informé Karadzic et Mladic du "problème de la Krajina", 14
12 500 Musulmans, et a demandé un poste au plus haut niveau en ce qui concerne
13 les prisonniers et les réfugiés. P1478, pages 55 à 56.
14 La Défense déclare sans aucun fondement que cette demande était faite
15 "parce que beaucoup de ceux qui ont participé à la guerre ne connaissaient
16 pas très bien les conventions de Genève." Paragraphe 1 150. Brdjanin
17 voulait des instructions de la république et pas des textes de loi. Cela
18 est encore rendu plus clair par le fait que la Défense a reconnu que les 14
19 500 Musulmans étaient des prisonniers au sujet desquels Brdjanin demandait
20 un poste, ce qui revient à dire que la Défense reconnaît que Brdjanin a
21 menti en audience lorsqu'il a nié que ce chiffre représentait le
22 pourcentage de Musulmans à Banja Luka au début de la guerre. L'absurdité de
23 cette affirmation au sujet des conventions de Genève est prouvée par le
24 fait que ces conventions étaient ignorées par les autorités civiles et
25 militaires par la RAK pendant des mois après cette discussion.
26 De la même manière, l'affirmation de la Défense selon laquelle
27 Brdjanin a parlé de prisonniers de guerre ignore tous les documents et les
28 aveux des témoins de la Défense selon lesquels des civils étaient détenus
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1 en masse, et vous voyez le mémoire de l'Accusation 194, la pièce P3720,
2 P3746, 3723, KW-609 et D4246, pages 178 à 180.
3 A la grande satisfaction des fonctionnaires de la RAK, lorsque le 15
4 juin [comme interprété] 1992, la cellule de Crise de la RAK, en ce y
5 compris Zupljanin et Brdjanin se sont rendus au centre de rassemblement de
6 Prijedor, Brdjanin a félicité dans le public les autorités de "s'être bien
7 acquittées de leurs tâches." P11, page 2.
8 La politique de la RAK sur l'expulsion des Musulmans reflétait également
9 une politique au niveau de la RAK, à commencer par le fait que Karadzic a
10 confié des pouvoirs à la RAK à Brdjanin, dont les positions extrêmes
11 étaient très connues, et donc à qui l'on pouvait faire confiance pour
12 mettre en œuvre l'objectif commun. Tout comme l'explique le paragraphe 319
13 de notre mémoire, lors d'une réunion sous-régionale des municipalités de la
14 RAK du 7 juin, il était clair que les Musulmans et les Croates "devaient
15 quitter nos municipalités pour arriver à un niveau où les autorités serbes
16 peuvent être maintenues et mises en œuvre dans leur propre territoire dans
17 chacune des municipalités." Il y avait également une demande de la mise en
18 place d'un corridor pour les expulser. Cette conclusion a été envoyée aux
19 dirigeants de la Republika Srpska et à la cellule de Crise de la RAK. Et au
20 contraire de la Défense et leur déclaration selon laquelle le 8 juin la
21 cellule de Crise "a rejeté la demande des Musulmans et des Croates de s'en
22 aller parce que cela allait à l'encontre de notre politique," le compte
23 rendu de la réunion intermunicipale sous-régionale suivante indique que "la
24 plupart des suggestions ont été acceptées et ont été intégrées à la
25 position officielle de la cellule de Crise lors de la réunion du 9 juin."
26 P6437, page 2.
27 Et les positions de la cellule de Crise ont été de créer une "agence"
28 pour le déménagement de la population avec "un représentant responsable des
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1 déplacements et de l'échange de populations et de prisonniers" pour chaque
2 municipalité. P2606 et 2732. Lorsque nous reviendrons, Monsieur le
3 Président, je parlerai des autres organes.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de faire la pause, Monsieur
5 Tieger, vous avez déclaré pendant ce volet d'audience, et je cite là la
6 page 37 du compte rendu provisoire, page 37, ligne 12, je cite :
7 "Bien sûr, l'Accusation n'a pas pour thèse que Karadzic désirait une guerre
8 comme un but en soi ou qu'il n'aurait pas accepté une résolution pacifique
9 selon ses termes."
10 A cet égard, l'un des arguments de la Défense semble dire que le fait que
11 les Serbes aient accepté le plan Cutileiro annule l'existence d'une
12 entreprise criminelle commune principale. En fait, je vais être plus
13 précis.
14 Dans le mémoire en clôture de la Défense, le paragraphe 109 nous dit
15 :
16 "Ceux qui ont accepté l'accord Cutileiro qui envisageait la protection,
17 l'existence et l'égalité des minorités, et le Dr Karadzic faisait partie
18 des partisans de cet accord, il était impossible qu'ils forment une
19 entreprise criminelle commune ayant pour objectif de créer une unité serbe
20 pure d'un point de vue ethnique au sein de la Bosnie-Herzégovine."
21 Je me demande si l'Accusation a abordé cette question-là suffisamment dans
22 son mémoire en clôture.
23 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais dire deux
24 choses, si vous me le permettez, à cet égard. Tout d'abord, comme les Juges
25 de la Chambre le savent, les éléments de preuve sont clairs, ils nous
26 montrent que le plan Cutileiro n'a jamais été en accord -- c'était un
27 accord de principe. Et lorsque cet accord a été atteint le 18 mars,
28 Karadzic a déclaré à cette assemblée : Nous n'accepterons jamais - et je
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1 cite là ses propos - Nous n'accepterons jamais ces termes et ce document.
2 Donc, cela a bloqué toute étape supplémentaire. Donc, cet accord de
3 principe ne pouvait pas être mis en œuvre pour la création d'un Etat comme
4 vous le dites. Et le même jour, Krajisnik a déclaré à l'assemblée : Cela ne
5 va peut-être pas être juste, mais commençons la séparation ethnique sur le
6 terrain, quoi qu'ils aient dit aux autres partisans. Il n'y a pas encore
7 d'accord et il n'y en aura pas jusqu'à ce que nous le disions.
8 Deuxièmement, même si l'accord avait préjugé des dispositions pour un
9 traitement équitable des minorités et une libre circulation, Karadzic a
10 établi clairement pendant et après ce nettoyage ethnique que les
11 dispositions étaient nulles, et j'aborderai cette question-là, sur la
12 question de la protection de la communauté musulmane, plus tard.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, est-ce que vous êtes en train de
14 nous dire que le Dr Karadzic n'était pas sincère lorsqu'il a signé le plan
15 Cutileiro ?
16 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, le plan Cutileiro
17 n'était qu'un accord de principe. Tout d'abord, il n'a pas été signé, et il
18 l'a dit le 18 mars 1992 à la séance de l'assemblée des Serbes de Bosnie. Il
19 a mis l'accent dessus. Et, en fait, c'était un prétexte pour opérer une
20 séparation sur le terrain de facto. Donc, il n'a jamais accepté le plan
21 Cutileiro. En fait, vous pouvez voir aussi au PV de la séance de la réunion
22 du conseil du 21 janvier 1993 que Jovanovic dit à Karadzic : Nous sommes
23 bien où nous sommes. On peut arriver à une homogénéisation sans nettoyage
24 ethnique à ce stade-ci. Et Karadzic lui a répondu : Très bien. Avant, nous
25 étions à 50-50. Maintenant, tout est à nous. Et, en fait, ce qu'il veut
26 dire par là, c'est mettre la pression sur la population de façon beaucoup
27 plus subtile pour la faire partir. Et dans tous les documents, sauf ceux
28 qui ont été montés de toutes pièces pour faire croire à la communauté
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1 internationale qu'on la suivait, le Dr Karadzic s'engage dans une
2 séparation et s'engage également dans ce nettoyage ethnique.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
4 Nous allons faire une pause de 20 minutes et nous reprendrons à midi
5 moins dix.
6 --- L'audience est suspendue à 11 heures 27.
7 --- L'audience est reprise à 11 heures 52.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Tieger.
9 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 J'aimerais brièvement aborder la thèse de la Défense s'agissant de
11 l'assemblée et du gouvernement. Karadzic fait valoir que l'assemblée
12 n'était pas en partie mais était très indépendante en esprit et que tous
13 les députés de tous les partis jouissaient d'une liberté de parole égale.
14 Mémoire de la Défense, paragraphes 900 à 901. En fait, l'assemblée a été
15 fondée par le SDS. Malgré la référence à "tous les partis", le fait est que
16 seuls six députés n'étaient pas du SDS. Pièce P2536, page 151. Et la
17 déférence au président du parti, le Dr Karadzic, était apparente à chaque
18 séance lorsqu'il était l'intervenant principal. Comme un député l'a fait
19 remarquer un jour dans le contexte d'une assemblée régionale anticipée :
20 "Je sais que Karadzic, en qualité de président du SDS, est le
21 symbole dirigeant du peuple serbe et il suffit de cinq phrases de sa bouche
22 pour modifier le déroulement tout entier de la séance."
23 Je cite là la pièce D88, page 65.
24 L'assemblée a mené ses pouvoirs législatifs conformément à la politique
25 établie par les dirigeants du parti. Comme l'a fait remarquer un député en
26 1994 :
27 "Ces deux dernières années, je ne me souviens pas d'un seul cas où
28 toute l'assemblée des estimés députés se soit opposée à quoi que ce soit
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1 que nos dirigeants politiques et étatiques aient ciblé comme quelque chose
2 à respecter." Pièce P5525, page 25.
3 Karadzic se fonde sur les allégations de Krajisnik selon lesquelles, (a),
4 les députés étaient très indépendants; (b), les dirigeants serbes de Bosnie
5 quelquefois intervenaient pour atténuer les déclarations extrémistes; et
6 (c), que les dirigeants serbes de Bosnie étaient incapables d'imposer leurs
7 points de vue sur ces personnes indépendantes. Toutes ces allégations d'une
8 source qui n'est pas digne de foi sont niées par un seul exemple, celui où
9 Krajisnik fait une pensée extrémiste des résultats législatifs comme bon
10 lui semble. A la 24e assemblée en janvier 1993, après qu'un député ait
11 mentionné que "nous avons mis les Turcs dehors," il s'agit d'un pays serbe
12 et la horde de Musulmans n'est pas une nation du tout, Krajisnik a dit à
13 l'assemblée :
14 "Nous devrions nous prononcer sur le fait de savoir si les Musulmans
15 sont une nation… Nous devrions leur dire ceux qu'ils sont véritablement. Ce
16 sont de non-croyants, une nation mais pas une nation… Sortons les Musulmans
17 de la Serbitude à jamais. Nous n'acceptons pas cette nation artificielle."
18 Krajisnik, ensuite, a mis ces conclusions au vote et il a déclaré
19 ensuite :
20 "Messieurs, merci d'avoir adopté les conclusions à l'unanimité."
21 Pièce P921, pages 94 à 97. Tout cela en l'espace de trois minutes environ.
22 Krajisnik a menti sous serment lorsqu'on lui a posé une question à cet
23 égard. Lorsqu'on lui a montré le PV, il a déclaré :
24 "Si je pouvais me tenir à l'écart de ce Momcilo Krajisnik, je le
25 ferais."
26 Je cite là les pages du compte rendu 43 739 à 43 751. Voilà pour
27 cette assemblée indépendante.
28 S'agissant du gouvernement, Karadzic remet en question le fait que les
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1 gouvernements dirigés par Djeric, Lukic ou Kozic, particulièrement les
2 ministres les plus puissants du gouvernement en 1992, étaient soumis à
3 l'autorité de Karadzic et de Krajisnik. Paragraphe 904. Karadzic fait
4 valoir que les "souvenirs" de l'ancien premier ministre Djeric selon
5 lesquels ses souvenirs étaient inexacts sont arrivés plusieurs années après
6 les faits. Cette fausse affirmation se fonde sur des citations de Djeric au
7 moment de sa démission. Karadzic omet que Djeric a déclaré à l'assemblée en
8 novembre 1992, "il avait les mains liées," et quelqu'un d'autre "insiste
9 sur la nomination de certains ministres." Il a ensuite fait savoir
10 clairement que le quelqu'un d'autre en question était Karadzic et Krajisnik
11 :
12 "Lorsque nous nous occupons du ministère [comme interprété] de la Justice,
13 du ministre de l'Intérieur, eh bien, ce ne sont même pas des membres du
14 gouvernement. Ils ne participent pas à des réunions du gouvernement. Ils
15 rencontrent le président de la république et le président de l'assemblée.
16 Et pas un seul d'entre eux n'est apparu devant la population ou à la
17 télévision ou a déclaré qu'il était responsable de son travail ou de ce
18 qu'il faisait.
19 Pièce P1105, pages 11 à 12.
20 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à M. Tieger de bien vouloir
21 ralentir.
22 M. TIEGER : [interprétation] Il y avait donc un problème avec les souvenirs
23 de M. Djeric lorsqu'il a expliqué ces circonstances-là à la Chambre de
24 première instance.
25 Lors de la même séance, le premier ministre adjoint Trbojevic a
26 confirmé que Stanisic avait déclaré [comme interprété] que Karadzic plutôt
27 que Djeric, alors que Stanisic reconnaissait le point de vue selon lequel
28 il était l'homme de Radovan. Page 17. Il a confirmé fièrement que "moi, en
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1 tant qu'homme," j'ai toujours suivi les politiques de la présidence du SDS.
2 Page 15.
3 Karadzic se fonde également sur l'allégation de Lukic selon laquelle
4 il "n'a jamais eu de problème avec le Dr Karadzic s'agissant de mon
5 indépendance ou de l'indépendance du gouvernement." Pièce D3563, paragraphe
6 27.
7 En partie, l'absence de désaccord peut résulter du point de vue de
8 Lukic sur la façon de gérer les non-Serbes, un point de vue qui est reflété
9 dans ce conseil aux représentants de RFY de nettoyer d'un point de vue
10 ethnique et de tuer les Musulmans dès que possible parce qu'on ne peut pas
11 leur faire confiance. Pages du compte rendu 34 543 à 34 544.
12 En fait, Lukic savait que le désaccord était impossible parce qu'il
13 savait qui était le patron. En 1993, lorsqu'il a tenté de mettre sur pied
14 une commission du personnel, le SDS lui a rappelé fermement que sa mission
15 était de "mettre en œuvre la politique du parti SDS." Pièce P6337.
16 Lorsqu'on lui a montré un document du SDS reflétant l'approbation de
17 Karadzic ou les instructions s'agissant de nominations, Lukic a convenu que
18 le rôle de Karadzic, "en qualité de président du SDS et de président de la
19 Republika Srpska," était "au plus haut niveau absolument." Pages du compte
20 rendu d'audience 38 762 à -63.
21 Comme l'a expliqué Djeric : "La structure du parti primait sur l'état
22 de droit dans l'Etat. Les ministres étaient dans le cercle du président du
23 parti. Et tout se passait là-bas." Pièce P4982, paragraphe 14.
24 Ou comme Karadzic l'a dit lui-même :
25 "Croyez-moi, le gouvernement est à moi. Je suis responsable de son
26 fonctionnement." Pièce P1379, page 255.
27 Passons à présent aux municipalités qui ne sont pas reprises dans
28 l'acte d'accusation. Karadzic rejette l'expulsion systématique des non-
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1 Serbes parce que les municipalités, d'après lui, choisies par le bureau du
2 Procureur ne seraient pas un échantillon représentatif et que les
3 politiques poursuivies par les autres municipalités reflètent plus
4 précisément la politique de Karadzic. Outre le fait que cela reconnaît un
5 contrôle des municipalités et sa position dans la structure hiérarchique,
6 l'argument illustre mal les éléments de preuve s'agissant des autres
7 municipalités, qui décèle également des éléments sur cet objectif commun.
8 Par exemple, Karadzic a appelé Milincic de la municipalité de Srbac pour
9 qu'il lui montre la politique réelle de tolérance et de protection des non-
10 Serbes. Tel que discuté au paragraphe 189 du mémoire de l'Accusation, Srbac
11 était une municipalité composée à plusieurs de 95 % de Serbes -- en fait, à
12 plus de 99 %, pour être précis. Et même les partisans les plus virulents du
13 nettoyage ethnique, tels que Brdjanin, permettaient qu'il y ait entre 3 et
14 5 % de non-Serbes. Comme Karadzic l'a dit aux autorités de Srbac : Si les
15 21 000 Serbes de Srbac s'inquiétaient de leur 1 000 non-Serbes, "vous
16 n'êtes que des conards." Page du compte rendu 44 947.
17 Mais même à Srbac, les crimes contre les Musulmans n'étaient pas
18 punis comme ils le devaient et ont donné lieu à davantage de crimes contre
19 les Musulmans, une situation que Milincic a mal expliquée dans l'affaire
20 Krajisnik lorsqu'il a déposé. Pages 44 962 à -67 du compte rendu.
21 Plus important encore, même s'il ne fallait pas faire grand-chose à
22 Srbac, Milincic a admis qu'il était au courant du fait que dans les
23 municipalités avoisinantes, la population musulmane était réduite au moyen
24 d'expulsions forcées en masse.
25 D'autres municipalités qui ne sont pas reprises par l'acte
26 d'accusation ont reflété de même la mise en œuvre générale de cet objectif
27 commun.
28 Lorsque Karadzic a annoncé les objectifs stratégiques en mai 1992, le
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1 président du SDS de Bosanska Krupa, Vjestica, a expliqué que tous les
2 Musulmans de la rive droite de l'Una avaient été évacués et a déclaré
3 ensuite : Auraient-ils un endroit où vivre pour retourner ? Je pense que
4 cela n'est pas probable après la déclaration de notre président disant que
5 la rive droit de l'Una est la frontière. Page du compte rendu 46 868. Au
6 plus profond de la guerre, Vjestica s'est opposé à proposer un plan de paix
7 qui voulait que les Musulmans reviennent et, en conséquence, "nous devrons
8 les dédommager de tout ce que nous avons détruit, et nous avons incendié 17
9 mosquées."
10 Le Témoin à décharge Klickovic de Bosanska Krupa a essayé de défendre ses
11 ordres selon lesquels il fallait retirer de façon sélective les Musulmans
12 d'une zone mixte composée de Musulmans et de Serbes comme une mesure
13 temporaire pour leur propre sécurité. Cette fausse tentative a été exposée
14 par sa déclaration à la télévision à Banja Luka mettant l'accent sur le
15 fait que :
16 "Le fleuve Una est la frontière de l'Etat serbe, et que l'arrivée des
17 Musulmans dans cette région n'est plus une possibilité. Il n'y a même plus
18 une possibilité de cohabitation."
19 Pièce P6665. Klickovic a admis que cela reflétait son point de vue à
20 l'époque. Pages du compte rendu 46 876 à -877.
21 Klickovic en a également appelé à l'armée pour "détruire un maximum de
22 résidences et d'autres bâtiments" - pages du compte rendu 46 872 et -73 et
23 la pièce 2616 - afin d'établir une frontière permanente sur le fleuve Una
24 conformément aux objectifs stratégiques.
25 De même, Bozidar Vucurevic de Trebinje a été cité à la barre pour
26 prouver qu'il n'y avait pas de modèle ni de politique de nettoyage, et ses
27 éléments de preuve ont également montré le contraire. La police serbe de
28 Bosnie et l'armée étaient actives pour intimider et opérer des actes de
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1 violence contre les Musulmans. Les mosquées de Trebinje ont été détruites
2 par l'armée et Vucurevic a permis aux Musulmans terrifiés de quitter la
3 zone à condition qu'ils cèdent tous leurs droits de propriété. Comme des
4 représentants d'un groupe international l'ont conclu :
5 "L'exode des Musulmans de Trebinje doit se voir comme un nettoyage
6 ethnique et doit être traité de la sorte."
7 Pièce P6223.
8 Kovacevic de Celinac, une autre municipalité qui n'est pas reprises dans
9 l'acte d'accusation qui se compose d'une partie minoritaire de non-Serbes,
10 8 % de Musulmans, qui a dit que les non-Serbes posaient une menace à la
11 sécurité des Serbes de Celinac. Page du compte rendu 45 142.Si l'on tient
12 compte de cet aveu, l'ordre de Celinac octroyant aux Musulmans un "statut
13 spécial" vous en dit beaucoup sur la politique de la Republika Srpska vis-
14 à-vis des non-Serbes. Comme vous le voyez, conformément à ce statut
15 spécial, les Musulmans de Celinac se voient interdire d'opérer des actes
16 subversifs, tels que traîner dans des lieux publics ou se baigner dans le
17 fleuve, chasser, pêcher ou utiliser des véhicules. Pièce P2638.
18 Enfin, Karadzic affirme au paragraphe 967 de son mémoire que Predrag Radic
19 de Banja Luka "a essayé constamment et a fait tout son possible pour
20 protéger la population non serbe." Ce que Karadzic ne vous dit pas, c'est
21 ce qu'il est advenu de Radic pour l'avoir fait. En toile de fond, Radic
22 avait vu que les non-Serbes avaient été expulsés des municipalités en
23 charrettes et savait qu'ils avaient été expulsés de municipalités telles
24 que Prijedor, Kljuc et Sanski Most, assassinés à grande échelle pendant des
25 opérations menées par la police serbe et les forces armées et détenus dans
26 des camps de concentration. Pièce P1, pages 75 et 76.
27 Radic a également déclaré que toute reconnaissance publique d'aide apportée
28 aux non-Serbes remettait en question son travail et son bien-être physique.
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1 Pièce P1, page 94, 95 et 98. Il a donné l'exemple d'un officier de police
2 qui a été démis de ses fonctions et remplacé parce qu'il essayait de
3 minimiser les expulsions des non-Serbes. Pièce P1, page 105.
4 Karadzic voudrait vous faire croire que les efforts de Radic de protéger
5 les non-Serbes reflètent les politiques de Karadzic. En vérité, c'est le
6 contraire. Radic a déposé et a dit que Karadzic avait critiqué Radic et lui
7 avait jeté la pierre pour ne pas avoir expulsé les non-Serbes, tout comme
8 les Serbes avaient expulsés d'autres territoires les non-Serbes. Pièce P1,
9 page 131. En outre, Radic a été critiqué pour avoir permis de ne pas
10 détruire les mosquées en 1993. Radic a déposé que les critiques venaient
11 "des plus hautes autorités du plus haut de la pyramide jusqu'au plus bas."
12 Et alors que Karadzic et Krajisnik étaient "suffisamment sages de ne pas le
13 dire tout haut," ils avaient leurs "émissaires qui ne cessaient de le
14 répéter," notamment Velibor Ostojic, le ministre de l'Information de
15 Republika Srpska, qui était "particulièrement persistant". Pièce P1, page
16 111.
17 La Défense fait valoir que les autorités n'ont pas persécuté les non-Serbes
18 au moyen de la destruction de leurs lieux de culte, et cela est également
19 faux car cela ne tient pas compte des éléments de preuve irréfutables de la
20 destruction, municipalité après municipalité, en Republika Srpska. Pièces
21 P4068, 4069, 4070, 4071, les résumés reprenant les municipalités et les
22 tableaux reprenant les événements référencés.
23 Comme décrit dans le paragraphe 185 du mémoire de l'Accusation, dans
24 plusieurs localités, les mosquées et les églises n'étaient pas seulement
25 détruites, mais leurs ruines étaient rasées. Les sites ont été anéantis et
26 désacralisés, et les ruines ont été déposées dans des décharges. Ces faits
27 seuls mettent à mal les informations de la Défense selon lesquelles la
28 destruction résultait d'actes aléatoires de revanche ou l'utilisation de
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1 certains bâtiments à des fins militaires ou des allégations selon
2 lesquelles les autorités ont fait leur possible pour protéger ces lieux de
3 culte et empêcher leur destruction. Cependant, les Juges de la Chambre ne
4 doivent pas se reposer sur ces faits seulement. Des représentants des
5 municipalités ont également déposé sur les raisons qui sous-tendent ces
6 destructions. Radic a déposé et a dit qu'en 1992, les mosquées étaient
7 détruites pour les mêmes raisons que les églises étaient détruites dans les
8 municipalités en Krajina, à savoir :
9 "Balayer du revers de la main l'existence de ces peuples à qui
10 appartenaient ces églises." Pièce P1, pages 105 à 107. Le président de la
11 cellule de Crise de Sokolac, Milan Tupajic, lorsqu'il a expliqué pourquoi
12 les mosquées de Sokolac avaient été détruites par la VRS, a déclaré que :
13 "On pense parmi les Serbes que s'il n'y a plus de mosquées, il n'y a
14 plus de Musulmans, et qu'en détruisant les mosquées, les Musulmans n'auront
15 plus de raison de rentrer dans leurs villages."
16 Pièce P5238, page 109.
17 Un autre représentant de la municipalité a déposé et a déclaré que
18 "la destruction des mosquées visait à annihiler toutes les traces
19 d'influence musulmane dans cette région pour intimider les Musulmans qui
20 restaient dans la zone. Le nettoyage ethnique était la raison de la
21 destruction des mosquées. Cela veut dire qu'une fois qu'on les avait
22 retirés, ils ne voulaient plus donner aux Musulmans aucune raison de
23 revenir. Voir note de bas de page 565 du mémoire confidentiel.
24 Les propos de Mladic devant l'assemblée en octobre 1993 expriment
25 clairement cette intention :
26 "Nous ne pouvons pas laisser les mosquées avec deux minarets. Nous
27 devons trouver une solution parce que nos enfants ont péri. Nous devons
28 leur enseigner de ne jamais empiéter sur nos filles, nos sœurs, nos frères
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1 et nos mères." Confer P1379, page 72.
2 Contrairement à la fausse affirmation de Karadzic, la destruction
3 systématique des lieux de culte musulmans et croates constituait une partie
4 intégrale de l'objectif commun pour s'assurer que les communautés non
5 serbes recherchées par les dirigeants serbes de Bosnie ne contiennent plus
6 de Musulmans. Et les Musulmans et les Croates ne sont jamais retournés.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, étant donné que nous
8 parlons des mosquées, quel est l'argument de l'Accusation concernant la
9 suggestion de l'accusé à savoir que l'emploi de mosquées à des fins
10 militaires dans certains cas fait qu'il s'agissait dans ce cas de cibles
11 militaires légitimes ?
12 M. TIEGER : [interprétation] J'ai essayé d'expliquer cela il y a quelques
13 instants, Monsieur le Président. Ceci est démenti par la destruction
14 systématique des mosquées, par la déposition de témoins qui ont identifié
15 les objectifs sous-jacents de cette destruction et par le traitement des
16 mosquées après la destruction initiale, à savoir il y a eu éradication
17 totale de toute existence. Et donc, si vous mettez tous ces faits ensemble,
18 y compris le caractère général de cette destruction, il ne peut y avoir
19 qu'une seule conclusion. A savoir si, oui ou non, il y a eu des événements
20 particuliers à propos desquels nous n'avons que très peu d'éléments de
21 preuve des mosquées dans des municipalités utilisées à cette fin, la
22 destruction systématique après le départ des Musulmans, après qu'il n'y
23 avait plus de menace, comme je l'ai dit, dément toute affirmation que telle
24 était la conséquence d'une action militaire légitime.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez poursuivre.
26 M. TIEGER : [interprétation] Alors, nous allons maintenant parler des
27 paramilitaires, Monsieur le Président.
28 Karadzic affirme que les unités paramilitaires -- et c'est une question qui
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1 a été posée par les Juges de la Chambre et nous allons y répondre dans les
2 minutes qui vont suivre.
3 Il affirme que les unités paramilitaires de Serbie et d'ailleurs
4 "étaient venues" en RS et avaient pris le contrôle de villes telles que
5 Zvornik, Bijeljina et Brcko et que les autorités locales étaient
6 impuissantes et ne pouvaient les contrôler. Il s'agit d'une inversion de la
7 réalité. Les paramilitaires n'ont pas surgi de nulle part pour écraser les
8 pauvres autorités municipales. En lieu et place de cela, ils sont venus à
9 leur demande pour travailler en collaboration avec eux et réaliser les
10 prises de contrôle et les nettoyages. A l'époque, Karadzic a reçu des
11 rapports de ses représentants municipaux illustrant cette collaboration
12 rapportant qu'Arkan, par exemple, "a contribué de façon significative" -
13 P2888, page 4 - et "réussissait de façon exceptionnelle" - P1478, page 252.
14 Que ce soit à l'échelon de la république ou à l'échelon local, les
15 paramilitaires étaient les bienvenus parce qu'ils devaient faire ce qui
16 devait être fait, nonobstant le fait qu'ils avaient des tendances
17 criminelles et génocidaires, tel que cela est explicité dans le document
18 Tolimir du 21 juillet 1992, et partaient des directions indésirables. Une
19 attention particulière dans le mémoire de la Défense consacrée à Arkan vous
20 ferait croire, en fait, que c'est un homme qui respectait la loi, qui ne
21 prêtait pas attention aux divisions ethniques et qui n'avait rien à voir
22 avec Karadzic, ou très peu en tout cas. Avant d'arriver en Bosnie, Arkan
23 était connu comme étant le leader d'un groupe paramilitaire
24 particulièrement brutal qui avait été actif pendant la guerre en Croatie.
25 Il était subordonné au MUP de Serbie. Confer notre mémoire en clôture,
26 paragraphe 463. Et pendant toute l'année 1991, alors que la Bosnie avançait
27 à grands pas vers son indépendance, Karadzic a collaboré avec Milosevic et
28 le chef de la SDB, Jovica Stanisic, et a donc dirigé cette structure
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1 parallèle, y compris les paramilitaires en Croatie. Mémoire, paragraphes
2 103 à 104.
3 Donc, il n'est pas surprenant de dire qu'Arkan n'est pas apparu seul
4 en Bosnie orientale au début du mois d'avril; ceci a été autorisé par
5 Belgrade. Vous avez entendu ceci de la bouche de Seselj. Même à l'époque
6 tout le monde était au courant. Lorsque Vance a confronté Milosevic à cette
7 question, et Milosevic au départ a dit qu'Arkan était "à Bijeljina à titre
8 personnel" pour se rétracter par la suite lorsque, confronté à cela par
9 Vance, il a avoué que : "Cela était seulement au début…" Pages du compte
10 rendu d'audience 1 513 et -14, déposition d'Okun.
11 Karadzic, de même, a tenté de se distancer d'Arkan et il a nié devant
12 Vance avoir jamais vu Arkan - P780, page 38 - une affirmation contredite
13 par les rapports des services de sûreté serbe d'Arkan et Karadzic se
14 livrant à des jeux d'argent ensemble à Belgrade en mars 1992. Pages du
15 compte rendu d'audience 33 610 à 33 612, 33 618 et 33 619. Et il affirme
16 également que quelqu'un avait invité Arkan parce qu'un Serbe avait causé un
17 problème dans un café alors que le même jour, 16 avril 1992, un
18 représentant du MUP de la RS s'est entretenu avec Arkan au téléphone,
19 conversation au cours de laquelle Arkan a expliqué qu'il avait quitté
20 Zvornik, qu'il était au contrôle de crise bosno-serbe et qu'il avait parlé
21 à Mico Stanisic et qu'il avait tous les numéros de téléphone de Pale.
22 P1109, pages 3 à 6 et 8.
23 Une fois qu'Arkan était en Bosnie, il s'est rendu de municipalité en
24 municipalité, il était invité par les dirigeants locaux ainsi que les
25 dirigeants bosno-serbes. Souvenez-vous, par exemple, de la demande de
26 Plavsic au téléphone qu'Arkan vienne à Sarajevo. P1106. Et le fait que
27 Karadzic ait dit à Davidovic que les dirigeants bosno-serbes avaient
28 organisé sa venue. Mémoire en clôture de l'Accusation, paragraphe 467.
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1 Arkan est resté à la disposition de Karadzic, tel qu'illustré par sa
2 lettre du 16 avril 1994. P2854. Il ne s'agit pas de 1992, comme cela a été
3 précisé de façon erronée au paragraphe 111 du résumé de Bratunac. Il a été
4 convoqué par Karadzic en 1995 et ensuite fêté par Karadzic pour ce qu'il
5 avait réalisé. Notre mémoire, paragraphe 474. La Défense fait valoir au
6 paragraphe 1 085 de leur mémoire qu'il n'existe aucun élément de preuve
7 indiquant que Karadzic était au courant de crimes commis par Arkan avant la
8 cérémonie de 1995, mais ceci est tout simplement faux. Mladic, par exemple,
9 a dit à Karadzic qu'Arkan avait liquidé des Musulmans loyaux. P3056, page
10 2.
11 La Défense indique également ou parle de la manière dont que Karadzic
12 s'est occupé des Guêpes jaunes comme une illustration de son opposition aux
13 paramilitaires. Notre mémoire, 1090. La Défense voudrait faire croire aux
14 Juges de la Chambre que les Guêpes jaunes n'ont pas été arrêtées avant août
15 1992, après avoir commis les crimes épouvantables, parce que le MUP n'avait
16 pas la possibilité de les gérer.
17 Cette affirmation trompeuse à deux égards. Tout d'abord, cette
18 affirmation tente d'ignorer le travail d'équipe qui consistait à dire qu'il
19 existait entre les représentants officiels de Karadzic et les Guêpes jaunes
20 une expression de violence et que cela n'était plus utile. Contrairement à
21 ce qu'affirme la Défense, et tel que c'est précisé aux paragraphes 16 à 19
22 du résumé de Zvornik, les paramilitaires faisaient partie de la structure
23 civile et militaire de Zvornik. Dès le début, les Guêpes jaunes étaient
24 considérées comme une unité de la TO. Ils recevaient leurs salaires et leur
25 appui logistique des autorités. Les membres de l'unité rapportaient à la
26 cellule de Crise au quotidien. Le commandant de la TO, Marko Pavlovic,
27 avait des relations étroites avec le commandant de l'unité Zuco. Les deux
28 avaient des bureaux dans le QG de la cellule de Crise. Ensuite, les Guêpes
Page 47627
1 jaunes ont été intégrées à la VRS, armées, ont reçu des tâches et ont été
2 rémunérées par la Brigade de Zvornik. Subotic a confirmé que toutes les
3 personnes qui ont reçu les ordres de la Brigade de Zvornik, y compris
4 l'unité de Zuco, faisaient partie de l'armée régulière de la VRS. Il a
5 reconnu également que Zuco est venu lui rendre visite à Pale dans la
6 deuxième moitié du mois de juillet. D3695, paragraphe 205. Longtemps après
7 que les dirigeants bosno-serbes aient été informés des crimes commis à
8 Zvornik et après le moment où Karadzic lui-même était au courant des
9 pillages des Guêpes jaunes. P6414, page 7; et P1478, page 270.
10 Deuxièmement, même si Karadzic affirme s'accorder le crédit pour
11 l'arrestation des Guêpes jaunes, il ignore le fait que ce n'est pas sa
12 participation active au nettoyage de la municipalité qui a déclenché
13 l'action contre eux, mais c'est plutôt le fait qu'ils aient "dépassé les
14 limites" avec Ostojic, tel que cela est abordé au paragraphe 478 de notre
15 mémoire en clôture.
16 Le document accusatoire du 8 août 1992 contre les Guêpes jaunes et
17 leurs membres, y compris le commandant de l'unité Zuco, précise qu'ils
18 avaient "participé à la libération de la municipalité de Zvornik" et qu'ils
19 ont "tous participé à la défense des terres serbes dans la région au sens
20 large de Zvornik." Les combats ont duré jusqu'au 28 juin 1992, après quoi
21 "ils ne se sont pas placés sous le commandement militaire conjoint des
22 forces armées serbes de la SRBiH, mais en lieu et place de cela, ils ont
23 créé un poste de contrôle dans le village de Karakaj dans la municipalité
24 de Zvornik à leur propre initiative. P2882, page 3. Après avoir réalisé
25 avec succès leurs tâches de nettoyage, ils ont commencé à attirer
26 l'attention des uns et des autres mais de façon négative pour les activités
27 qui étaient les leurs au poste de contrôle, ce qui a déclenché les
28 accusations. Confer paragraphe 39 du résumé Zvornik.
Page 47628
1 La Défense ignore également que les sanctions contre les paramilitaires
2 étaient inadéquates. L'incapacité à sanctionner Zuco pour les crimes commis
3 contre les Musulmans et l'intégration de nombreux paramilitaire au sein de
4 la VRS, tels que décrits au paragraphe 478 de notre mémoire en clôture,
5 paragraphe 39 du résumé de Zvornik.
6 Je vais maintenant parler de l'organe officiel de la Republika Srpska, la
7 VRS. Après avoir insisté à l'époque auprès de ses partisans et devant le
8 monde entier qu'il était le commandant suprême et responsable de l'armée,
9 et après avoir fait montre de peu de retenue s'agissant de son autorité et
10 de commandement dans différents contextes. Par exemple, "Et je donnerai à
11 qui déconne une foutue leçon." P5792. Karadzic, maintenant, se réfugie
12 derrière l'image de quelqu'un qui est impuissant, empoté et qui ne mérite
13 pas le titre qui est le sien, dans la mesure où un témoin a dit qu'il ne
14 pouvait même pas contrôler sa propre femme. Page du compte rendu d'audience
15 42 454. Ceci se fonde sur quatre prémisses fausses : premièrement, les
16 objectifs stratégiques étaient purement politiques et ne devaient pas être
17 mis en œuvre militairement parlant; deuxièmement, que Karadzic ne donnait
18 pas des ordres à la VRS par l'intermédiaire des directives; troisièmement,
19 qu'il n'a jamais été informé de ce que faisait l'armée parce que l'armée ne
20 lui parlait que de questions logistiques; et quatrièmement, il ne
21 contrôlait aucunement le général Mladic qui agissait de façon indépendante
22 par rapport à Karadzic.
23 Tout d'abord, l'affirmation en vertu de laquelle les objectifs stratégiques
24 ne consistaient pas en des tâches militaires. Tout le monde savait que ceci
25 n'était pas vrai. Karadzic, Krajisnik, Mladic, Milovanovic, les membres de
26 l'assemblée, tout le monde. Tel que précisé au paragraphe 152 du mémoire en
27 clôture de l'Accusation, les objectifs stratégiques ont été formulés à une
28 époque qui a précédé la création de la VRS et la nomination de Mladic. Dans
Page 47629
1 la semaine qui a précédé la nomination officielle de Mladic, Karadzic et
2 Krajisnik l'ont rencontré à deux reprises pour définir de façon précise les
3 objectifs stratégiques à ces deux occasions. Mladic a accepté son poste
4 lors de la 16e assemblée, il a parlé de sa participation à la formulation
5 des objectifs. P956, page 32. Il n'a pas parlé de son rôle et même si cela
6 eût été possible, comme l'a affirmé Krajisnik, il s'agissait d'une
7 expression claire des positions Cutileiro. Krajisnik T 43769 et -70.
8 Par la suite, Mladic a confirmé à l'assemblée que :
9 "Les missions de l'armée au sein de cette guerre découlent des six
10 objectifs stratégiques connus adoptés par notre assemblée." P970, page 22.
11 Les membres de l'assemblée. Lors de la 17e session - D92, page 70 -
12 Kupresanin a dit :
13 "Lors de la dernière séance à Banja Luka, nous avons dit que la
14 frontière nord de la République serbe de la BiH était la rive droite de la
15 Sava. Nous avons donné des ordres à l'armée pour qu'elle réalise cet
16 objectif."
17 Regardez simplement le rapport d'état de préparation au combat de la VRS,
18 D325, P159 [comme interprété], où il est dit :
19 "Les objectifs stratégiques de notre guerre qui ont été définis sans
20 attendre et présentés à l'état-major principal de l'armée de la RS, ses
21 commandements et ses unités, nous ont servi de lignes directrices pour
22 planifier les opérations et les batailles concertées."
23 Karadzic a ensuite confié oralement un certain nombre de missions
24 "d'intérêt général et vital."
25 Karadzic cite Milovanovic pour dire qu'il ne s'agissait pas de missions
26 militaires parce que Milovanovic a parlé de l'ambition plus large de la
27 protection des Serbes du génocide. Mais Milovanovic dit de façon explicite
28 que les six objectifs stratégiques constituaient les objectifs militaires
Page 47630
1 de la VRS - D825, page 13 - renvoyant aux objectifs stratégiques militaires
2 issus de la session du 12 mai - D2149, page 27 - qui renvoient à la
3 réalisation de cinq ou six objectifs militaires, c'est-à-dire l'accès à la
4 mer s'agissant des objectifs restants, identifiant ainsi les objectifs
5 stratégiques adoptés lors de la 16e session.
6 Comme nous allons le voir, on rappelle de façon répétée à Mladic les
7 objectifs stratégiques, et c'est Karadzic et Krajisnik qui les lui
8 rappellent s'agissant des opérations futures.
9 Karadzic affirme qu'il ne s'agissait que "d'une forme générale de
10 communication au niveau du commandement." Et il suggère qu'il n'avait que
11 très peu de choses à voir avec cela car ceux qu'il a créés et signés ne
12 traitaient que des questions humanitaires. Quoi qu'il en soit, il affirme
13 qu'il n'y avait rien de mal ou d'illégal à leur sujet. En réalité, comme le
14 montrent clairement les éléments de preuve, les directives révèlent non
15 seulement qu'il y avait un objectif commun qui visait à chasser par la
16 force les non-Serbes mais qu'il y avait un contrôle effectif et sur le
17 terrain de l'armée dont il était fier à une époque. Tout d'abord, un bref
18 rappel. Tel qu'évoqué au paragraphe 409 [comme interprété] de notre
19 mémoire, les directives constituent les principaux documents permettant de
20 réglementer le recours à la force. Sept directives fondamentales des
21 opérations de la VRS. En 1995, Karadzic reconnaît sa responsabilité pour
22 ces directives et il reconnaît avoir "signé et approuvé sept directives,"
23 mais il se distance de la huitième.
24 La Défense s'efforce d'éviter à faire trop entendre à ce sujet parce
25 que Karadzic, qui en a signé deux, a essayé de faire plus joli et, en fait,
26 il a approuvé les directives et Mladic a confirmé celles-ci lors d'une
27 réunion du commandement Suprême qui a été tenue de façon confidentielle. Et
28 on a dit que :
Page 47631
1 "Ces directives ont été analysées en sa présence."
2 Et je me réfère à la pièce P3149, page 24. Tout ceci indique que
3 Karadzic affirme les choses à tort et à travers, parce que si l'on se
4 penche sur le rôle de Karadzic dans les directives, cela nous révèle qu'il
5 y a fausse déclaration pour ce qui est du fait de dire que l'armée ne
6 s'adressait à lui que pour des logistiques et qu'il n'avait pas exercé de
7 contrôle à l'égard de Mladic.
8 Aux paragraphes 408 à 428 du mémoire de l'Accusation, il est précisé
9 la façon dont les directives avaient assuré la réalisation des objectifs
10 stratégiques et autres mesures et pas stratégiques et tactiques suites aux
11 demandes formulées par Karadzic. Je vais brièvement me pencher dessus et
12 puis je répondrai aux questions posées par les Juges de la Chambre
13 s'agissant des directives 4 et 7, du moins pour ce qui est de la première
14 partie de la question.
15 La directive numéro 1 dit que le 1er juin 1992, l'état-major principal
16 de l'armée de la Republika Srpska, conformément à la décision rendue par la
17 présidence de la Republika Srpska, a demandé à ce que se tienne une réunion
18 de la direction politique et militaire de la Republika Srpska à Pale le 3
19 juin 1992. Les commandants de corps d'armée étaient censés préparer des
20 cartes pour ce qui est de la disposition des troupes, la situation des
21 unités, la composition, le déploiement et les intentions de l'armée pour ce
22 qui est des activités à l'avenir, et les problèmes ainsi que
23 revendications. Chaque commandant était censé intervenir pendant dix à 15
24 minutes. Deux jours plus tard, Karadzic [comme interprété] rencontre
25 Karadzic et la direction des Serbes de Bosnie. Karadzic s'est concentré sur
26 "la question relative aux objectifs liés à Sarajevo," et il dit à Mladic
27 que "Sarajevo doit être tranchée de façon politique alors que, en douce, il
28 faut y aller au pas à pas pour nettoyer Butmir, Hrasnica, Dutmir [phon],
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1 Sokolovic Kolonija, ainsi que la ville de Hrasno dans la direction du mont
2 Mojmilo."
3 Le jour d'après, Karadzic et Krajisnik ont rencontré Mladic. Karadzic
4 a réitéré les objectifs stratégiques et a dit :
5 "La naissance d'un Etat et la création de frontières ne se résolvent
6 pas sans guerre."
7 Krajisnik a dit ensuite à Mladic :
8 "A partir de demain, il faut que nous prenions ce qui est à nous et
9 il faut que nous soyons prêts à défendre notre Etat."
10 Le même jour, on a rendu publique la directive numéro 1, et conformément à
11 ce que Karadzic a souligné, on a incorporé à l'intérieur les objectifs
12 opérationnels qui découlent des objectifs stratégiques. Sécuriser certaines
13 parties de Sarajevo. Ouvrir un corridor entre la Semberija et le reste,
14 l'objectif numéro 2. Communication entre Sarajevo-Kalinovik, et c'est
15 l'objectif 4 et 5. Alors, l'objectif numéro 1 englobe de fait les
16 instructions de Karadzic qui se rapportent à la RSK, c'est-à-dire nettoyer
17 Butmir, Sokolovic, Kolonija et Zlatiste.
18 La directive numéro 3 est datée du 3 août 1992. Le jour d'avant,
19 Mladic a présenté un rapport auprès de la présidence pour décrire la
20 situation au niveau de chaque secteur de combat et pour parler des missions
21 au combat. Karadzic a demandé à ce que la VRS "prenne" le plus possible de
22 territoire avant la prochaine Conférence de paix qui était censée se tenir
23 le 24 août afin qu'il ait quelque chose "à proposer en échange." Et il a
24 dit à Mladic, "La Communauté européenne va accepter la situation factuelle
25 des choses," donc il n'y aura pas de concessions militaires.
26 Et, une fois de plus, conformément aux instructions explicites
27 formulées par Karadzic, la directive numéro 3 prévoyait :
28 "Avant la conférence sur la Bosnie-Herzégovine, déboucher sur la rive
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1 gauche de la Neretva, la rive droite de la Sava, et les territoires
2 extérieurs délimitant les territoires serbes, s'emparer de Jajce et
3 Gorazde, s'emparer des côtes prédominantes et avoir les meilleures
4 positions possibles pour ce qui est des lignes de démarcation avec la
5 coalition croato-musulmane. L'opération doit être conduite en deux phases,
6 censée durer entre dix et 15 jours.
7 Afin de répondre à la date butoir du 24 août. Et le 14 [comme
8 interprété] août 1992, Mladic rencontre la présidence une fois de plus, et
9 à l'occasion de cette réunion, "la directive a été acceptée sans objections
10 de formulées."
11 La directive numéro 4, qui a été abordée aux paragraphes 414 à 419, date du
12 19 novembre 1992. On donne ordre au Corps de la Drina d'épuiser l'ennemi,
13 de lui infliger les pires pertes possibles et l'obliger à quitter Bihac,
14 Zepa et Gorazde, qui sont des secteurs habités par une population
15 musulmane. Karadzic affirme que l'objectif de la directive n'avait pas été
16 celui de forcer la population musulmane à s'en aller de Cerska, Zepa,
17 Srebrenica et Gorazde, mais plutôt de forcer l'ABiH à quitter ces lieux
18 pour protéger la population serbe. Et même Krajisnik a reconnu à son propre
19 procès qu'il s'agissait là d'une directive qui porte le numéro 4 et qui
20 était du "nettoyage ethnique". Il a d'abord essayé de défendre de façon
21 erronée ce qui était mauvais dans cette directive, et puis il s'est avéré
22 par la suite que l'expression de "nettoyage ethnique" avait été utilisée
23 une fois que la directive numéro 4 lui a été montrée. Et lorsque les Juges
24 de la Chambre lui a posé la question de savoir s'il s'agissait d'un ordre
25 relatif à un nettoyage ethnique, il a répondu "absolument".
26 Krajisnik a ensuite essayé de laisser entendre - et Karadzic, lui,
27 essaye de faire entendre la même chose - que c'étaient des profanes qui
28 n'avaient rien à voir avec les affaires militaires et que cette opinion
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1 devait être mise de côté et ne devrait pas, donc, faire l'objet d'une
2 attention particulière. Mais personne n'avait une position meilleure pour
3 ce qui est de savoir s'il s'agissait d'un ordre relatif à un nettoyage
4 ethnique de Krajisnik. Parce que Krajisnik, à une réunion avant la
5 directive numéro 4, a articulé au nom de la direction des Serbes de Bosnie
6 la nécessité de nettoyer le secteur de la Drina.
7 Et le 8 novembre 1992, il s'est tenu une réunion où les commandants
8 du corps, y compris le commandant du Corps de la Drina récemment formé, le
9 colonel Zivanovic, ont présenté des rapports opérationnels et
10 situationnels. Alors, on dit dans ces rapports que les "missions pour les
11 actions futures sont telles et telles." Karadzic fait remarquer qu'il
12 serait "une bonne chose que de résoudre la question de la Drina." Krajisnik
13 a été, lui, encore plus détaillé. Il a d'abord exprimé son admiration vis-
14 à-vis des succès réalisés par la VRS jusqu'à ce jour parce qu'il était
15 "très dangereux de les voir s'emparer de leur territoire." Et il a exprimé
16 des critiques. Il a dit qu'il y avait un "engagement disproportionné de
17 l'armée par rapport aux objectifs stratégiques." Ils en ont réalisé trois,
18 mais trois autres ne sont pas réalisés, et notamment celui de Podrinje, qui
19 avait été l'objectif stratégique numéro 3. Et je cite Krajisnik, qui a dit
20 que :
21 "L'objectif le plus important est celui de Zivanovic, qui consiste à
22 nettoyer la région de la Drina."
23 Deux jours plus tard, Milovanovic dit à Karadzic que très bientôt il
24 allait y avoir une directive numéro 4 pour ce qui est de réglementer les
25 activités du nouveau Corps de la Drina. Et les jours d'après, Karadzic a
26 approuvé verbalement la directive qui a été rendue, et il a parlé d'un
27 séminaire relatif au Corps de la Drina qui devait être tenu le 23 novembre
28 1992. Et il était censé présider aux activités en personne. A l'occasion de
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1 ce séminaire, Karadzic a fait un discours d'ouverture, et puis ensuite le
2 commandant Zivanovic, le commandant du corps, a parlé de "la situation, des
3 résultats, des missions à venir et des potentiels du Corps de la Drina."
4 Les notes de Karadzic concernant le rapport à Zivanovic :
5 "Missions : Vitinica, Sapna, Teocak, Cerska, Zepa, Gorazde."
6 Le jour d'après, Zivanovic a donné un autre ordre au commandement du
7 Corps de la Drina "partant de la quatrième directive et de l'évaluation de
8 la situation." On confirme ici les ordres donnés par le commandant suprême
9 qui consistent à chasser la population musulmane et les responsabilités de
10 la VRS pour ce qui était de réaliser cette stratégie. Zivanovic a donné des
11 ordres pour ce qui était "d'infliger à l'ennemi le plus possible de pertes,
12 les épuiser, les briser et les forcer à se rendre et forcer la population
13 musulmane à quitter le secteur de Cerska, Zepa, Srebrenica et Gorazde."
14 Et c'est ce qui s'est passé. Et comme l'assistant du général Morillon
15 l'a expliqué, les Musulmans étaient nettoyés d'un village à l'autre "comme
16 avec un balai pour balayer la poussière devant chez soi." Page du compte
17 rendu 23 201. La VRS s'est arrêtée à Srebrenica suite à une pression énorme
18 de la communauté internationale, et cette communauté internationale a été
19 stupéfaite de "cette situation désespérée qu'on avait créée à Srebrenica"
20 du fait de la campagne de "nettoyage ethnique". P2284, paragraphes 37 à 38.
21 Karadzic dit maintenant que son ordre envers la VRS était de
22 s'arrêter, de ne pas entrer dans Srebrenica, et faciliter le passage des
23 convois humanitaires - D43, daté du 16 avril 1993 - et il nie les
24 allégations de l'Accusation pour ce qui est des attaques attaquées [comme
25 interprété] contre la population civile. En d'autres termes, étant donné
26 que le nettoyage ethnique qu'il a ordonné lui-même a provoqué une
27 révolution si grande au niveau de l'opinion publique mondiale et une
28 condamnation, avec des menaces d'intervention, il dit qu'il n'avait pas
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1 l'intention de le faire. C'est dénué de sens. Parce que le fait est
2 qu'avant l'ordre du 16 avril, la VRS avait planifié le nettoyage de
3 Srebrenica. Et le même jour qu'il a eu l'adoption d'une résolution des
4 Nations Unies, une conversation entre Mladic et le colonel du Corps de la
5 Drina montre ce qui allait se passer lorsque la VRS entrerait à Srebrenica
6 : Tuer tout le monde, les civils et les blessés devaient être évacués de
7 là. Pièce P4795.
8 L'ordre de Karadzic disant qu'il fallait mettre un terme aux
9 opérations pour permettre l'arrivée des convois dans la ville, ce n'était
10 pas motivé par des raisons humanitaires mais par des circonstances, et il a
11 dû reconnaître devant l'assemblée en juillet 1993, et je me réfère à la
12 pièce P1377, page 31. Et vous verrez les détails de ce qu'il a dit au sujet
13 du résumé Podrinje, avenant A, paragraphes 7 à 9.
14 Karadzic s'appuie également sur une conversation interceptée entre
15 lui et Lukic en mars 1993, où Karadzic affirmerait qu'il exprimait ses
16 propres opinions au sujet des civils musulmans disant qu'ils pouvaient
17 rester là ou ils pouvaient s'en aller où ils voulaient. D3571, pages 2 à 5.
18 D'abord, penchons-nous sur le timing de cette conversation. On ne peut pas
19 dire qu'il n'est pas question d'une intention qui sous-tendrait la teneur
20 de la directive 4. Mais ce qui est important, c'est la portion de la
21 conversation, et on dit que c'est arraché au contexte et que cela laisse
22 entendre ce qu'il ne fallait pas laisser entendre. La conversation, elle,
23 se rapporte à la couverture internationale des activités des Serbes de
24 Bosnie. Et Karadzic explique ce qu'il a dit à Mladic :
25 "Oui, j'ai dit à Mladic qu'il fallait dire demain que tous les civils
26 musulmans pourraient rester là où ils étaient ou s'en aller où ils
27 voulaient, mais les groupes armés devaient déposer les armes."
28 Mais cette déclaration a été un écran de fumée pour dissimuler la campagne
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1 de nettoyage ethnique qui, de cette façon aussi défavorable, avait attiré
2 l'attention de la communauté internationale. Mais cela n'a pas trompé la
3 communauté internationale qui a identifié de façon explicite le fait que
4 Karadzic et ses effectifs étaient en train de procéder à un nettoyage
5 ethnique. Pièce D3571. Et Karadzic, maintenant, s'efforce de nous faire
6 gober la chose.
7 La Défense s'appuie sur les interprétations contradictoires de deux
8 officiers à lui qui essaient de prendre des distances vis-à-vis du crime
9 terrible qui a été commis. On s'appuie d'abord sur le témoignage de
10 Milovanovic, qui dit que la directive 4 avait anticipé des déplacements de
11 la population civile devant l'armée et que l'objectif était de faire en
12 sorte que l'armée s'en aille avec eux. Mais en même temps, Karadzic
13 s'appuie sur le témoignage de Zivanovic qui dit le contraire, à savoir que
14 la directive 4 avait véritablement eu pour objectif l'expulsion des
15 Musulmans, mais on parle de civils musulmans qui "de façon illégale avaient
16 occupé des villages serbes et des fermes appartenant aux Serbes." Pièce
17 D3932, paragraphe 15, et page du compte rendu 4 946 [comme interprété].
18 Mis à part ces interprétations contradictoires qui sont en train de
19 constituer un écran de fumée, on oublie de dire qu'il y a la nécessité de
20 faire partie de la population musulmane de ces zones-là.
21 La directive 5, elle, est datée du 25 juin 1993 et elle fait état des
22 détails de l'opération Lukavac 93. Un mois plus tard, Karadzic avait
23 contacté Milovanovic et l'avait confié à Pale, et Milovanovic a expliqué à
24 Karadzic et Krajisnik le planning de l'état-major principal de la VRS pour
25 ce qui est de l'opération Lukavac 93, dont l'intention était d'établir un
26 lien entre l'Herzégovine avec les autres territoires de la RS. Et cette
27 opération a été planifiée en juin. La directive numéro 6, telle que
28 discutée aux paragraphes 421 à -25 de notre mémoire, et avec son avenant,
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1 se rapporte aux instructions concrètes données par Karadzic pour ce qui est
2 de la mise en œuvre et les conséquences de la mise en œuvre des objectifs
3 stratégiques.
4 La directive 7, comme je l'ai expliqué tout à l'heure, en avril 1993,
5 les pressions internationales ont fait que Karadzic a cédé aux pressions
6 internationales pour ce qui est des opérations contre Srebrenica. Et une
7 fois que la première vague des attaques a été stoppée, entre 1993 et 1995,
8 la VRS sous le commandement de Karadzic a restreint l'arrivée de l'aide
9 humanitaire à Srebrenica et aux autres enclaves dans l'est, ce qui s'est
10 soldé par des conditions humanitaires regrettables et, comme expliqué aux
11 paragraphes 176 à 178 dans notre mémoire, qui avait consisté à faire partir
12 les Musulmans et les Croates des différentes enclaves autour de la Drina,
13 était encore en cours. En avril 1994, les forces des Serbes de Bosnie se
14 sont attaquées à Gorazde, et Mladic a obéi à ces ordres en disant qu'il
15 fallait "continuer énergiquement et poursuivre avec les opérations pour que
16 les Turcs disparaissent de ces secteurs."
17 Et Karadzic a vanté cette opération comme étant une opération
18 "réussie et brillamment conduite." En juillet 1994, Mladic a signalé que
19 "nous sommes en passe de nettoyer les enclaves" et a ordonné pour
20 Srebrenica que "l'enclave ne devait pas subsister mais disparaître."
21 Il était fâché que "les Turcs" dans Podrinje avaient été protégés par
22 une intervention des Nations Unies. Il a déclaré en août 1994 :
23 "A Podrinje, nous avons écrasé les Turcs. Si les Américains, les
24 Anglais, les Ukrainiens et Canadiens à Srebrenica, et puis maintenant ce
25 sont les Néerlandais, ne les protégeaient pas, ils auraient disparu de
26 cette région depuis belle lurette."
27 La tentative, pour reprendre le terme de Karadzic, de "purification"
28 de la Drina - P988, page 68 - a trouvé son apogée dans la directive 7 de
Page 47639
1 mars 1995. Cette directive constitue un autre ordre manifestement criminel.
2 Elle stipule notamment :
3 "A l'aide d'opérations de combat bien préparées, créez une situation
4 intolérable d'insécurité totale sans aucun espoir de vie et de survie pour
5 les habitants de Srebrenica et de Zepa."
6 Elle stipule également, page 14 -- et c'était la page 10 que je
7 citais auparavant :
8 "Les organes responsables de l'Etat et de l'armée qui travaillent
9 avec la FORPRONU et des organisations humanitaires délivreront les permis
10 de manière restrictive, et ce discrètement, afin de réduire et limiter le
11 soutien logistique apporté par la FORPRONU aux enclaves et la fourniture de
12 ressources matérielles à la population musulmane et nous les soumettre à
13 notre bon vouloir tout en évitant d'être condamnés par la communauté et
14 l'opinion publique internationales."
15 Ce document a été signé par Karadzic. Après avoir convoqué des
16 témoins lors du procès pour faire croire qu'il ne l'avait pas signé ou que
17 ce document avait été mystérieusement modifié par la suite, il prétend à
18 présent qu'il n'avait pas lu ce passage criminel. Il prétend que ce passage
19 criminel était "enterré dans la liste des missions d'un des six corps de la
20 VRS" dans le document de "24 pages" et de la liste des tâches. Paragraphes
21 3 309, 3 310 et 3 314 de son mémoire.
22 Alors, supposons à titre théorique que nous puissions faire
23 abstraction du fait que ce document ne comporte pas 24 pages mais bien 11.
24 Et faisons également abstraction du fait que cet ordre d'éliminer 40 000
25 personnes n'est pas vraiment "enterré" dans le document mais constitue la
26 toute première tâche confiée au Corps de la Drina, il apparaît clairement
27 au beau milieu de la page. A moins qu'il n'ait pas eu de projet pour la
28 Drina, c'est-à-dire pas de projet pour Srebrenica, il aurait été quasiment
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1 impossible de passer à côté. Mais il avait des plans pour Srebrenica, comme
2 il s'en est d'ailleurs vanté plus tard.
3 "Le moment était venu, je citais la directive 7 pour prendre Teocak,
4 Srebrenica, Zepa et Gorazde. La directive a été signée et nous nous y
5 sommes attelés… J'étais en faveur de toutes les décisions que nous avions
6 prises et je les soutiens. Toutes les décisions sont enregistrées au
7 commandement Suprême, et j'ai ordonné oralement et par écrit d'avancer sur
8 Zepa et Srebrenica…" P412, page 75.
9 Je vais conclure, Monsieur le Président, ensuite nous allons marquer
10 une pause.
11 Et s'il n'avait pas lu les missions du Corps de la Drina, si d'une
12 certaine façon il était passé à côté de cette première mission du Corps de
13 la Drina, de quoi se vantait-il auprès de Boban Djordjevic lorsqu'il lui a
14 dit que les attaques de Srebrenica et Zepa étaient une partie de "mon ordre
15 numéro 7" ? Page [comme interprété] 4512. Disait-il à Djordjevic que les
16 attaques reflétaient son ordre de consolider les deux ponts de Krupa à Una,
17 ou était-ce destiné à empêcher la levée du siège de Sarajevo ? Il est
18 indéniable que Karadzic parlait précisément de son ordre adressé au Corps
19 de la Drina.
20 Je vois l'heure qu'il est, Monsieur le Président, et nous allons
21 rester là pour reprendre ensuite et poursuivre l'examen de la directive
22 numéro 7.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.
24 Nous allons faire une pause d'une heure et nous reprendrons à 13
25 heures 50.
26 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 51.
27 --- L'audience est reprise à 13 heures 51.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître Tieger.
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1 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
2 Avant de lever l'audience, j'expliquais comment M. Karadzic parlait de "mon
3 ordre numéro 7" dans des circonstances où son affirmation selon laquelle il
4 ne savait pas ce que faisait le Corps de la Drina n'était pas fondée. En
5 outre, Karadzic a expliqué à Djordjevic que l'objectif de "ma directive
6 numéro 7" avait été de "augmenter la température jusqu'au point
7 d'ébullition," et je cite ici T 25907 à -08, -910 et -11, une description
8 fidèle mais macabre du passage de la directive 7 qui avait pour but de
9 rendre la vie insupportable.
10 Karadzic prétend également que la directive 7 ne limitait pas l'aide
11 humanitaire aux non-Serbes. Si la population non serbe ne recevait pas
12 cette aide, c'est parce qu'elle était détournée par l'armée musulmane.
13 L'affirmation mensongère selon laquelle la directive 7 n'a jamais été mise
14 en pratique invoque une série limitée de documents qui figurent dans la
15 note de bas de page 2783. Ces documents n'étayent guère cette affirmation.
16 Dans plusieurs cas, ces documents eux-mêmes font référence aux
17 restrictions. D2125, D2115. Et parfois, on ne traite pas du tout des
18 convois. En réalité, comme tout le monde peut très bien s'en rendre compte,
19 l'enclave était étranglée et affamée. Harland a relevé que ce but
20 d'étranglement des enclaves dans la directive 7 "correspondait parfaitement
21 avec nos observations." T 2202 et -03. De la même manière, le général
22 Smith, parlant de la directive 7 et du paragraphe décrivant la méthode
23 d'étranglement de l'enclave, a expliqué que cela correspondait aux
24 constatations de la FORPRONU en mars et avril. T 11320 à -321. Comme
25 Franken l'a dit, il s'agissait d'une "terrorisation [phon] des convois".
26 P4175, paragraphe 26.
27 Pour ce qui est du détournement par l'ABiH, les deux documents évoqués par
28 Karadzic, D3313 et D3956, portent sur une période antérieure à la directive
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1 7 et ne permettent pas vraiment de comprendre l'étranglement consécutif à
2 la directive numéro 7. Les documents évoqués qui concernent la période
3 pertinente ne confirment guère plus le fait que des convois alimentaires
4 pour les enclaves étaient également consommés par les soldats, ce qui est
5 la seule option possible pour une ville assiégée. C'est évoqué dans le
6 document D3308. Qui plus est, les quantités évoquées par le document sont
7 relativement limitées; par exemple, 18 tonnes sur 300 de farine, 70 litres
8 de carburant, et jamais à une échelle telle que cela ait été la cause
9 principale des souffrances de la population musulmane. Cette réalité est
10 décrite dans la pièce P4142, qui évoque la situation horrible à Srebrenica
11 au début juillet 1995, où seuls des 25 % de besoins étaient couverts à
12 cause du "refus persistant des autorités serbes de Bosnie" d'autoriser
13 l'entrée de convois dans l'enclave.
14 Vous avez posé la question de savoir comment les directives 4 et 7 sont
15 liées à l'entreprise criminelle commune générale. La réponse se trouve dans
16 la première note de bas de page au résumé de Podrinje. La réponse, donc, se
17 trouve dans la première note de bas de page du résumé de Podrinje, dans
18 l'annexe A de notre mémoire, qui indique que les faits décrits comprennent
19 persécution, déportation et transfert forcé, tels qu'évoqués dans les
20 paragraphes 52, 56 à 57, 69 et 72 à 74 de l'acte d'accusation. Ces
21 paragraphes de l'acte d'accusation reflètent précisément les faits que j'ai
22 décrits et allèguent, premièrement, que l'entreprise criminelle commune
23 générale a donné lieu aux prises de pouvoir dans les municipalités en 1992,
24 mais Srebrenica n'a été prise qu'en 1995, paragraphe 52; que même si la
25 majorité des Croates et Musulmans de Bosnie des municipalités avaient été
26 expulsés par la force à la fin de 1992, des actes de déplacement forcé se
27 sont poursuivis avec les attaques contre Cerska et Konjevic Polje entre
28 janvier et mars 1993, paragraphe 72; qu'à la suite du nettoyage, un nombre
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1 important de Musulmans de Bosnie se sont rendus à Srebrenica pour fuir ce
2 qui était déclaré une zone sûre, paragraphe 73; et qu'au début mars 1995,
3 dans le cadre d'un objectif commun, un plan a été conçu pour prendre
4 l'enclave et transférer par la force ou déporter par la force, expulser par
5 la force la population musulmane de Bosnie, tel qu'énoncé au paragraphe 74.
6 Je voudrais à présent passer à un sujet connexe, la VRS --
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez aborder la deuxième question.
8 Donc, l'interaction sera invoquée séparément, n'est-ce pas ?
9 M. TIEGER : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président.
10 C'est Mme Pack qui va en parler.
11 Et comme indiqué dans notre mémoire préalable, Karadzic a cherché à se
12 dissocier tout au long du procès des crimes commis par la VRS de façon
13 mensongère, invoquant une rupture spectaculaire, contraire aux preuves
14 qu'importent les déclarations publiques et privées selon lesquelles, en
15 dépit des tensions, Mladic continuait à respecter la hiérarchie. Karadzic
16 se distancie des actions de la VRS alors qu'il s'en était attribué le
17 mérite en invoquant le fait, premièrement, qu'il n'y avait pas d'accord
18 entre eux; deuxièmement, qu'ils ne contrôlaient pas Mladic.
19 En ce qui concerne la première affirmation, si Karadzic et Mladic
20 n'étaient parfois pas d'accord pour des problèmes opérationnels, en ce y
21 compris l'idée de Karadzic selon laquelle les partisans et les proches de
22 Karadzic étaient corrompus, il existe incontestablement un point d'accord
23 entre eux, à savoir le risque posé par un nombre trop important de
24 Musulmans et la nécessité d'en réduire le nombre. Pour étayer l'affirmation
25 corollaire selon laquelle Karadzic ne contrôlait pas Mladic, le mémoire de
26 la Défense évoque des témoins dont la déposition contient de grandes
27 généralisations et clairement partiales ou prouvent tout le contraire. Par
28 exemple, Krajisnik est évoqué pour soutenir l'affirmation selon laquelle
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1 Mladic ne faisait que fournir des informations au sujet des problèmes
2 logistiques et se soustrayait au contrôle. C'est également un mensonge
3 éhonté, comme le montrent très clairement les comptes rendus des réunions
4 qui ont précédé les directives. Karadzic et Krajisnik disaient à l'armée ce
5 qu'il fallait faire et ceux-ci le faisaient.
6 Subotic est cité comme quelqu'un qui a déposé au sujet d'un "nombre
7 important de désobéissances militaires." Et que ce soit vrai ou non, les
8 exemples de Subotic ne portent pas sur des opérations militaires et
9 certainement pas des opérations de nettoyage, mais sur différentes
10 questions d'organisation. Lorsqu'il y a une question du Juge Président dans
11 l'affaire Krajisnik et qu'il était invité à identifier une opération dans
12 laquelle Mladic en a fait davantage que ce que lui demandaient les
13 dirigeants politiques, Subotic a été incapable d'en mentionné une.
14 Mladic est cité mais ne peux pas identifier des opérations militaires
15 où Mladic a outrepassé ses pouvoirs, ce qui n'est pas surprenant compte
16 tenu de l'aveu de Mladic selon lequel il ne connaissait pas le mode de
17 fonctionnement des militaires en ce qui concerne l'envoi de rapports.
18 Ninkovic a affirmé que Mladic a annulé un ordre basé sur une décision
19 du commandement Suprême, et il s'agit là d'un autre mensonge dans la
20 réponse. Il s'avère que c'était une question marginale et que Mladic n'a
21 pas annulé cet ordre mais que c'est Ninkovic lui-même qui est revenu dessus
22 après avoir parlé avec Mladic.
23 La Défense invoque également l'affirmation selon laquelle Milosevic
24 aurait qualifié Karadzic de "docteur fou" ou "d'aliéné de Pale" et aurait
25 dit à Mladic que l'état-major principal de la VRS devait suivre des
26 décisions de Belgrade et pas de Pale, ce que Mladic aurait accepté. C'est
27 un autre mensonge. Milosevic a effectivement dit que Karadzic était un fou,
28 pris dans des fantasmes historiques épiques, qui cherchait à prendre et
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1 conserver des territoires qui n'avaient jamais appartenu aux Serbes par
2 rapport au territoire plus limité que Milosevic l'avait aidé à saisir. Et
3 lorsque Milosevic a essayé de se retourner contre Karadzic, Mladic a
4 procrastiné en expliquant que les tentatives de diviser les Serbes en
5 Bosnie en partisans de Mladic et Karadzic, si elles n'étaient pas
6 contrecarrées, pourraient donner lieu à des divisions supplémentaires.
7 Mladic a souligné qu'il n'avait pas d'ambitions politiques, qu'il voulait
8 servir en tant que soldat et qu'il devait être vu uniquement dans cette
9 perspective. P2567, page 2.
10 Enfin, et c'est encore plus étonnant, Karadzic cite que Milovanovic
11 pour étayer une information répétée selon laquelle la structure de l'état-
12 major principal avait pour conséquence que le commandant suprême n'était
13 pas vraiment aux manettes en ce qui concerne l'armée. En fait, Karadzic a
14 soumis la question à Milanovic, qui lui a dit qu'il avait tort :
15 "Le commandement et le contrôle de l'armée lors de la guerre n'était
16 pas bicéphale, pour ainsi dire. Nous sommes restés sous votre commandement
17 personnel." T 25632. Comme Milovanovic l'a dit :
18 "La guerre est trop sérieuse pour que les généraux s'en chargent. Ce
19 sont les politiques qui doivent s'impliquer. Les politiques mènent les
20 guerres." T 25494.
21 La Défense évoque également la commission d'échange des prisonniers, et
22 l'Accusation en parle également dans son mémoire aux paragraphes 243 à 251,
23 522 à 524, et il s'agit de l'origine et des fonctions de la commission
24 d'échange qui avait déjà envisagé en avril de s'occuper des nombres
25 importants de non-Serbes qui étaient déjà incarcérés et visait les civils,
26 comme l'ont reconnu tant Mladic que Subotic. Cette commission est entrée en
27 service une semaine après sa création officielle le 8 mai 1992, comme
28 l'indique l'expulsion de 400 Musulmans de Bratunac vers des territoires
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1 musulmans via Pale, et a continué à fonctionner comme mécanisme d'expulsion
2 des civils tout au long de la période couverte par l'acte d'accusation.
3 Karadzic affirme que "la commission d'échange n'était pas utilisée comme
4 véhicule pour l'expulsion des non-Serbes car elle interdisait explicitement
5 l'échange de civils" et que les civils musulmans étaient libérés sans
6 condition. Paragraphes 1 026 et 1 034 de son mémoire. La première
7 affirmation est basée sur un passage de l'ordre du 6 juin 1992 donné par
8 le président de la commission d'échange qui prévoit que les femmes, les
9 enfants, les personnes âgées et les personnes vulnérables "devraient être
10 libérés immédiatement sans condition ni échange."
11 Alors, reconnaissant ce problème dans sa formulation limitée, le
12 mémoire de la Défense affirme, sans étayer aucunement cela, que ne pas
13 mentionner des hommes ne veut pas dire que les civils hommes étaient censés
14 rester sous bonne garde; mais d'après le ministre de la Justice de
15 l'époque, Mandic, c'est précisément ce que cela veut dire, c'est-à-dire que
16 les dispositions expresses sur la libération de femmes, enfants et
17 personnes âgées civiles ne s'appliquent pas aux hommes. Voire pièce C 2,
18 page 159 et 160.
19 En outre, comme nous l'avons expliqué au paragraphe 248 de notre mémoire,
20 même l'ordre de libérer immédiatement les femmes, les enfants et les
21 personnes âgées n'avait pas pour objectif d'être mis en œuvre à la lumière
22 des termes contradictoires de l'ordre lui-même. Et le fait que des milliers
23 de femmes, d'enfants et de personnes âgées ont continué à être expulsées
24 sous l'égide de la communauté internationale le montre également.
25 Effectivement, c'étaient l'emprisonnement et l'échange de prisonniers tels
26 que des adolescentes et des hommes âgés qui ont poussé un témoin à décharge
27 et un gardien de la prison de Kula, M. Skiljevic, de se plaindre auprès du
28 ministre de la Justice pour lui dire que ce processus s'appliquait à des
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1 civils, plainte que le ministre a ignorée. Pages 36 931 à 36 932 [comme
2 interprété] du compte rendu.
3 Cette dernière affirmation à savoir que les civils musulmans étaient
4 libérés sans condition se fonde sur deux éléments. Premièrement, un seul
5 échange qui a eu lieu en juin 1992 de 17 Musulmans et un plus grand nombre
6 de Serbes, cela ne montre rien de plus qu'un simple échange en contraste à
7 un programme complet de libération et, quoi qu'il en soit, semble refléter
8 un aveu que c'étaient des filles civiles qui étaient détenues. Deuxième
9 fondement à cela, les civils musulmans étaient libérés sans condition
10 d'après Slobodan Avlijas. Mais, en fait, un point de vue plus précis du
11 point de vue des dirigeants serbes de Bosnie vis-à-vis de la détention ou
12 de l'expulsion de civils peut se retrouver dans le mépris persistant de
13 Avlijas quant au statut des prisonniers.
14 Lorsque Avlijas, qui d'après le membre du ministère de la Justice
15 chargé de l'échange s'est rendu à Vogosca et Ilijas en juillet 1992 à cause
16 des pressions de la communauté internationale, il a constaté une situation
17 "véritablement horrifiante" à Vogosca et dans un entrepôt à Ilijas "plein à
18 craquer" de Musulmans habillés en civil. Beaucoup l'ont reconnu et l'ont
19 supplié de les aider à sortir de "cet enfer", comme il l'a reconnu. Il n'a
20 consenti aucun effort pour déterminer s'il s'agissait là d'un fondement
21 véritable pour justifier leur détention, et au lieu de cela, il leur a dit
22 qu'il pouvait partir grâce à un échange tous pour tous.
23 De même, lorsqu'il s'est rendu à Hadzici au mois d'octobre, il a trouvé là-
24 bas des Musulmans qui avaient été "maltraités de façon vicieuse" lorsqu'ils
25 ont été faits prisonniers en mai et qui étaient toujours incarcérés à cause
26 d'un échange qui n'avait pas réussi. Il savait qu'il ne s'agissait pas
27 d'extrémistes parce que ces personnes étaient ses voisins. Le meilleur ami
28 de son fils était parmi eux. Ils le suppliaient de l'aider. On ne lui a pas
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1 dit que c'étaient des soldats mais plutôt des personnes qui avaient été
2 ramassées dans des zones où des combats avaient lieu. Mais lorsqu'on lui a
3 demandé en audience ce qu'il a fait pour les faire libérer directement,
4 Avlijas a déclaré :
5 "Vous savez, à l'époque, si quelqu'un disait quelque chose, leur sort
6 était scellé. Il fallait être très intelligent pour sauver sa peau." Page
7 du compte rendu 35 181.
8 Etant donné que c'était un homme qui savait ce qu'il fallait faire pour
9 sauver sa peau, il a été chargé de deux des trois enquêtes du gouvernement
10 dans des camps après le tollé de la communauté internationale suite à la
11 négociation d'Omarska. Et aucune de ces deux enquêtes, il n'a rien fait mis
12 à part parler à ceux qui se sont enfuis des camps et déterminer combien de
13 personnes étaient détenues. Par exemple, son rapport sur le camp de Susica
14 à Vlasenica où les civils étaient maltraités brutalement a été résumé de la
15 façon suivante :
16 "Au début des activités des combat, plusieurs personnes de nationalité
17 musulmane ont été isolées à cet endroit-là et ont été transférées plus tard
18 à d'autres endroits (c'est-à-dire à Batkovic) ou échangées contre des
19 personnes de nationalité serbe." Pièce P1607, page 2.
20 Avlijas a également déposé qu'une grande partie de la population de Hadzici
21 avait été emprisonnée à Kula, que "des résidents de Dobrinje et de Grbavica
22 avaient également été emmenés là-bas" et que le pont de Vrbanja était
23 "l'endroit où les civils étaient en général libérés et échangés."
24 Bref, par rapport à cette allégation mensongère de la Défense, les
25 éléments de preuve apportés par Avlijas montrent clairement que l'échange
26 de civils faisait partie intégrante du processus d'expulsion.
27 J'aimerais à présent passer à l'allégation fallacieuse de manque de
28 communication. Le mémoire de l'Accusation aux paragraphes 483 à 503 reprend
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1 en détail le réseau de communication complet disponible à Karadzic,
2 notamment le centre de communication de la république, les communications
3 du MUP de RS, les communications VRS, les communications PTT, des
4 estafettes, la sécurité d'Etat et les visites officielles et officieuses.
5 Les résumés sur les municipalités montrent également les communications qui
6 existaient entre la république et les niveaux locaux. La consignation de
7 contacts entre le niveau républicain et le terrain a confirmé l'adéquation
8 de ce système et l'existence de communications en cours avant et pendant la
9 guerre. Je vous renvoie là aux paragraphes 504 à 509 de notre mémoire.
10 Dans cette toile de fond, la Défense avance que le système ne
11 fonctionnait "pas bien" ou difficilement, sans préciser, et ce constamment,
12 la période particulière, la durée ou l'étendue de ces difficultés. Il
13 s'agit là d'allégations fallacieuses qui ne tiennent pas la route elles-
14 mêmes. Bizarre. Par exemple, le mémoire affirme que les communications
15 étaient tellement mauvaises que même les municipalités de Sarajevo ne
16 pouvaient pas entrer en communication avec Pale. Paragraphe 510. Sur quoi
17 se fonde la Défense pour cela ? Eh bien, une conversation pendant laquelle
18 un représentant officiel de Sarajevo demande aux dirigeants de Pale de lui
19 parler. Et lorsqu'on lui dit, Impossible de communiquer avec Pale, il
20 répond qu'il les a contactés la veille. Pièce D3750. De même, Karadzic
21 affirme au paragraphe 538 que seulement 24 télégrammes ont été échangés
22 entre Sarajevo et les régions en dehors de Sarajevo entre avril et novembre
23 1992, un niveau de communication piteux, semble-t-il. Le seul problème avec
24 cette affirmation, c'est que le document cité ne reprend que quelques
25 conversations interceptées et reprises dans le carnet de télégrammes
26 d'avril à novembre, ce qui ne reflète que quelques jours du carnet, c'est-
27 à-dire trois jours en juin et six jours en juillet, et on ne reprend pas
28 les communications jusqu'au mois de novembre.
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1 En fait, le mémoire de la Défense admet ces communications grâce à ces
2 allégations contradictoires portant sur les communications et des ordres
3 supposément exculpatoires qui quelquefois apparaissent dans des paragraphes
4 qui se suivent. Par exemple, au paragraphe 2 951, on allègue que la
5 communication entre Rogatica et Pale n'existait pas, et au paragraphe
6 suivant il est dit : Suite à plusieurs messages du président Karadzic sur
7 l'importance du respect du droit international humanitaire, les autorités
8 municipales, c'est-à-dire celles de Rogatica, ont pris des mesures pour
9 améliorer des conditions de vie de la population.
10 Cela juxtapose des allégations qui sont ridicules et risibles, à
11 savoir que les communications ont été coupées. Autre exemple, au paragraphe
12 2 838, il est dit que la rupture de la communication à Vlasenica découle de
13 la destruction des lignes téléphoniques. Et puis, au même paragraphe, on
14 ajoute : le peu de communications reçues par les autorités municipales à
15 Vlasenica met l'accent sur la nécessité de respecter les droits de l'homme
16 et les conventions internationales. De même, au paragraphe 2 945, la
17 communication entre Foca et le reste du monde a été coupée en avril et ce,
18 jusqu'à septembre 1992 ou même plus tard. Et puis, le gros des
19 communications reçues à Foca était des instructions, des avertissements de
20 Karadzic sur l'importance du respect des conventions de Genève.
21 L'absurdité patente de ce dernier exemple n'est que renforcé par
22 l'affirmation dans le mémoire de la Défense selon laquelle Foca était en
23 contact avec le reste du monde, et particulièrement à Pale : au paragraphe
24 570, Ostojic a informé le gouvernement de la situation à Foca le 30 avril;
25 ou paragraphe 462, le ministère de la Justice a envoyé une délégation à
26 Foca le 24 juin 1992 qui a fait rapport au ministère. Ces efforts
27 désespérés de la Défense pour remettre en question l'existence et le
28 caractère idoine des communications multiples ne fait que renforcer la
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1 véracité des éléments avancés par l'Accusation.
2 J'aimerais à présent passer à un sujet qui a été abordé par le Juge
3 Président, à savoir les ordres qui ont été délivrés par Karadzic en
4 respectant le droit international, et je pense qu'il s'est appesanti dessus
5 dans son mémoire. Il est clair que tout l'effort sincère de la part de
6 Karadzic pour arrêter la criminalité rampante menée par les organes
7 officiels de la Republika Srpska, notamment le MUP et la VRS, on voit
8 nécessité de sa part de prendre des mesures concrètes et ciblées pour
9 identifier, arrêter et punir des violations particulières. Comme nous
10 l'avons dit, la Défense se fonde sur plusieurs ordres et autres documents
11 rédigés par Karadzic et d'autres membres des dirigeants serbes de Bosnie
12 qui, en surface du moins, suggèrent que ces dirigeants désapprouvent ces
13 crimes. Cependant, leurs contestations et le contexte dans lequel ces
14 ordres ont été délivrés prouvent que ces documents ne reflètent que des
15 efforts pour créer de fausses traces écrites, pour dissimuler le rôle des
16 dirigeants dans ces crimes. Ils n'ont jamais eu pour but d'être mis en
17 œuvre, ni de refléter une tentative sincère d'arrêter cette campagne
18 criminelle contre les non-Serbes.
19 Alors, deux questions préliminaires. Comme je l'ai dit, tout d'abord,
20 ces deux éléments se contredisent et contredisent les arguments de la
21 Défense sur la communication et le contrôle. Premièrement, les éléments
22 proposés se contredisent et dans plusieurs cas attestent des communications
23 respectives sur le terrain et de la part du terrain.
24 Deuxièmement, la suggestion de la Défense selon laquelle des ordres
25 ou même des libellés génériques ont été donnés pour respecter le droit
26 international démontre que l'intention criminelle se contredit par la
27 logique et la jurisprudence du Tribunal. La Chambre de première instance a
28 le loisir de conclure que les ordres d'un accusé pour empêcher ou punir des
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1 crimes ne sont pas sincères et, même, ne nie pas une intention directe ou
2 une responsabilité d'entreprise criminelle commune pour ces crimes. Je vous
3 renvoie au jugement Milutinovic et consorts.
4 Et en l'espèce, comme nous l'avons décrit dans notre mémoire, c'est
5 la seule conclusion étayée par les faits en l'espèce.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Tieger, avant de
7 continuer. A quelle question de la Chambre avez-vous fait référence ?
8 M. TIEGER : [interprétation] Oui, excusez-moi, si cela n'était pas clair.
9 Tout à l'heure, vous m'avez posé une question sur le plan Cutileiro et les
10 dispositions qui visaient à faire respecter le droit international et qui
11 étaient reprises dans l'accord. Et, en fait, dans ma réponse, je fais
12 référence plus généralement à un accord déguisé reprenant ces dispositions.
13 En fait, vous avez posé une question bien particulière sur Cutileiro, et
14 j'ai élargi ma réponse à ce genre d'ordres.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
16 Effectivement, ma question se concentrait sur l'accord Cutileiro.
17 Veuillez continuer.
18 M. TIEGER : [interprétation] Le fait que Karadzic délivrait d'une part des
19 instructions, des appels ou des ordres pour pouvoir respecter les normes
20 internationales s'agissant des prisonniers, des civils ou des prisonniers
21 de guerre, et d'autre part, alors qu'il diffusait une politique de non-
22 punition qui encourageait des violations répétées, suffit en soi à écarter
23 ces ordres et instructions, car tout d'abord il s'agit d'exercices de
24 maquillage non essentiels, et deuxièmement, il s'agit d'instructions
25 générales et délibérément inefficaces. Tout cela peut se résumer en une
26 action intentionnelle face aux crimes de masse qui étaient commis par ses
27 subordonnés.
28 Je vais passer à quelques exemples. Tout d'abord, le communiqué de presse
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1 du 8 juin. Par exemple, au paragraphe 644 de son mémoire, la Défense se
2 fonde sur la pièce D426, un document du 8 juin 1992. Il s'agit d'un appel
3 urgent exigeant que tous les prisonniers soient traités de façon humaine et
4 rappelant l'appel du CICR pour protéger les civils et les prisonniers. Ce
5 document n'est même pas un ordre, en fait, c'est un communiqué de presse
6 qui est lié à des réunions avec des représentants internationaux. Il n'y a
7 pas d'instructions réelles sur les subordonnés de Karadzic qui ont une
8 responsabilité sur les prisonniers et les civils, et on n'a rien non plus
9 sur les moyens de supervision ou d'assurer la mise en œuvre.
10 Dans ce document, Karadzic fait avancer le fait que "nous ne sommes
11 pas poussés par la haine mais par l'amour" et que "la justice est de notre
12 côté." Cette remarque d'autosatisfaction devrait se voir à la lumière du
13 fait qu'à ce moment-là Karadzic et les dirigeants serbes de Bosnie avaient
14 déjà été accusés de plusieurs crimes de la part de sources internationales,
15 notamment des allégations de "détention de civils à grande échelle." Pièce
16 P1029, paragraphes 101 et 102. Ce qui correspond aux rapports que le
17 gouvernement avait fourni "quotidiennement" à la présidence sur les
18 irrégularités et le traitement inhumain dans des centres de détention.
19 Pièce C2, page 278.
20 Donc, ce document qui unit des félicitations pour comportement qu'il savait
21 criminel et un appel public creux n'est qu'un exercice de relations
22 publiques. De même, plusieurs ordres ont été délivrés simultanément en
23 anglais et en B/C/S. Par exemple, la pièce D1754, la pièce D109 et la pièce
24 D983, ou on a mené à l'attention directe de la communauté internationale,
25 D4720, on ciblait clairement un public bien précis.
26 Egalement, la présidence de la RS du 11 juillet [comme interprété] 1992,
27 dans son annonce aux citoyens de la République serbe de Bosnie-Herzégovine,
28 déclare que l'émigration doit être volontaire, doublée d'un faux démenti
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1 que les autorités de la RS se livraient à un nettoyage ethnique, tel
2 qu'abordé aux paragraphes 652 et 653, n'était bien évidemment qu'une
3 façade. Effectivement, le même jour lors d'une réunion avec des officiels,
4 des représentants haut gradés du MUP, Zupljanin a remarqué que l'armée et
5 la cellule de Crise avaient exigé le rassemblement du plus grand nombre de
6 civils musulmans possible qui étaient détenus dans des camps dans des
7 mauvaises conditions et gardés par le MUP. Comme l'admet la Défense dans
8 son mémoire au paragraphe 666, cette information est parvenue aux oreilles
9 de la présidence et par le truchement de Stanisic et son rapport daté du 17
10 juillet qui indique clairement que l'on avait rassemblé les civils.
11 Karadzic déclare que lors des instructions données le 13 juin, il
12 fallait se conformer à ce que disait l'armée et le MUP concernant le droit
13 international de la guerre - D434 - que cela illustrait le fait qu'il
14 prenait "toutes les mesures possibles" pour empêcher les crimes contre les
15 non-Serbes. Etant donné la connaissance qu'avait Karadzic des critères
16 énoncés dans ces documents qui étaient systématiquement violés, il est
17 clair que lorsque des instructions générales ont été données sans pour
18 autant prendre des mesures concrètes pour mettre un terme à ces violations,
19 ça constituait un geste vide de sens. La Défense s'appuie sur l'affirmation
20 de Subotic pour dire que ces instructions ou des instructions analogues ont
21 été rapidement diffusées à différents organes sur l'ensemble de la RS, et
22 ce qui est en contredit, encore une fois, une affirmation de la Défense qui
23 prétend que le chaos et le manque de communication régnaient à l'époque.
24 Même à supposer que la preuve ou les éléments de preuve proposés par
25 Subotic infondée sur ce point soit fiable, les efforts déployés par Subotic
26 pour diffuser de telles instructions contrastaient avec le manque d'efforts
27 de la part des autorités de la RS pour les mettre en œuvre et reflètent
28 encore une fois le fait que les autorités souhaitaient surtout qu'il y est
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1 une trace écrite plutôt qu'une réaction forte aux crimes de masse qui
2 étaient commis. Le fait que Karadzic ait à nouveau donné ces instructions
3 le 19 août, sous la forme d'un ordre à l'état-major et au MUP indique
4 clairement qu'il s'agissait d'une réponse prévisible à ces instructions
5 initiales.
6 La Défense se fonde également sur le D95, ordre du 14 juillet donné
7 par Karadzic aux présidents des municipalités dans le secteur de Gorazde,
8 déclarant que les villages où les populations croates et musulmanes
9 devaient rendre leurs armes et ne devaient pas avoir l'intention de se
10 battre. Ceux-ci doivent être protégés en ajoutant que "la responsabilité
11 doit être endossée par les présidents des municipalités."
12 Cependant, la Défense ne mentionne pas dans le télégramme le
13 président de Sokolac, Tupajic - P6236 - dans lequel télégramme Tupajic
14 rappelle à Karadzic que l'homme à la tête du MUP et de la hiérarchie du
15 VRS, que toutes les activités dans la région de la municipalité s'agissant
16 des questions de sécurité sont menées par le SJB qui était responsable
17 envers le MUP et par la 2e Brigade Motorisée de Romanija qui devait
18 répondre à son commandement supérieur, et que ces activités-là se
19 trouvaient en dehors de la connaissance de Tupajic et de ceux de ses plus
20 proches collaborateurs, et que la SJB et la 2e Brigade de Romanija devaient
21 protéger la population musulmane car "dans les conditions dans lesquelles
22 ces personnes se trouvent maintenant, je ne peux pas prendre la
23 responsabilité de leur sécurité."
24 Cette réponse de Tupajic révèle la nature fourbe de l'ordre de
25 Karadzic qui souhaitait tenir les présidents des municipalités responsables
26 de la protection des Musulmans et des Croates des crimes commis par les
27 organes sur lesquels Karadzic lui-même exerçait son autorité en définitive.
28 La Défense avance que le rapport de Stanisic envoyé à Karadzic
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1 déclare que l'armée et les cellules de Crise rassemblaient les civils
2 musulmans en masse et à l'aune à laquelle doit être mesurée l'intention de
3 Karadzic qui affirme que ses actions sont importantes s'agissant de sa
4 connaissance des crimes et que cet élément est vital pour établir sa mens
5 rea.
6 Alors, Karadzic disposait d'énormément d'informations sur les
7 irrégularités avant même le 17 juillet et ce, pour le cadre de ses
8 arguments. A ce moment-là, si Karadzic avait véritablement l'intention de
9 garantir la conformité de ses subordonnés avec la loi et la protection des
10 civils musulmans et croates en RS, il aurait réagi tout de suite en
11 utilisant tout de suite des instruments de pouvoir dont il disposait à
12 l'égard de l'armée et des autorités civiles et du MUP pour mettre un terme
13 à cette activité criminelle systémique menée par l'armée et les cellules de
14 Crise et le MUP. Karadzic n'a pas agi de la sorte, mais à l'inverse.
15 D'après la Défense, au paragraphe 675, à l'inverse, sa prochaine décision
16 consistait à donner son ordre du 23 juillet 1992. D96. Cependant, cet ordre
17 n'est adressé à personne, déclare de façon expresse qu'il a été délivré
18 "conformément aux obligations adoptées lors de la conférence de Londres,"
19 ne reconnaît pas l'existence de quelconque activité criminelle et encore
20 moins le rassemblement d'un nombre important de civils musulmans, ne
21 contient aucune mensure visant à surveiller ou à mettre en œuvre lesdites
22 décisions, et il n'y a aucun élément de preuve important sur les crimes de
23 masse commis et que ceci n'a pas été mis en œuvre.
24 Et cet ordre avait été donné pour que la communauté internationale
25 puisse en prendre connaissance et pour avoir une trace écrite, ce qui
26 pouvait maintenant être démenti de manière plausible, ce qu'a tenté
27 d'exploiter Karadzic. La réponse de Karadzic au rapport du 17 juillet de
28 Stanisic faisait état de crimes de masse graves contre les civils
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1 musulmans, et ceci reflète véritablement l'intention à l'égard de ces
2 crimes, ce qui sera répété pendant trois ans encore.
3 La Défense indique également différentes déclarations dans lesquelles
4 Karadzic aurait exprimé sa condamnation des crimes contre les non-Serbes.
5 Si on regarde ceci de plus près, ces déclarations n'étayent pas ses
6 arguments. Par exemple, la Défense signale deux extraits des deux
7 allocutions de Karadzic devant la 17e assemblée le 24 et 26 juillet - D92 -
8 ainsi que des commentaires qui expriment "ses critiques et sa condamnation
9 des crimes." Les remarques sur lesquelles la Défense s'appuie, y compris
10 les commentaires de Karadzic sur le fait de convaincre les Musulmans à Pale
11 de rester en affirmant que l'Etat est "assez grand pour tous", doivent être
12 analysées à la lumière de ces informations lors de la même séance que,
13 premièrement, les Serbes ne peuvent pas autoriser un Etat dans lequel ils
14 constituent une minorité nationale; deuxièmement, nous ne pouvons pas vivre
15 ensemble, il n'y a pas de tolérance, ils vont quadrupler le taux de
16 naissance, et nous, les Serbes, nous ne pouvons pas réaliser cela; et il
17 reconnaît que le conflit avait été créé pour éliminer les Musulmans qui, en
18 réalité, étaient en train de disparaître; et le fait qu'à ce moment-là les
19 forces de Karadzic avaient nettoyé ethniquement une partie très importante
20 du territoire revendiquée par les Serbes. Son semblant de tolérance envers
21 les minorités lors de cette séance était fait dans le contexte suivant : un
22 progrès important avait été fait déjà pour éliminer les menaces
23 démographiques soulignées par Karadzic lors de cette séance.
24 Au paragraphe 1 352, la Défense avance que Karadzic a déclaré lors de
25 la réunion du mois de juin 1992, en même temps que Mladic, que "nous ne
26 devons pas exercer de pression pour que les personnes soient déplacées."
27 Comme nous pouvons constater, cependant, et si nous regardons cette entrée
28 dans le journal de Mladic, ce commentaire a été fait lors d'une discussion
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1 que Karadzic se préoccupait de la démographie et des minorités, ce que l'on
2 trouve abordé lors de la 17e séance lorsqu'il parle du fait de 33 % des
3 non-Serbes rendent la Serbie instable. Il parle également de la Neretva et
4 de la préoccupation de Karadzic que si la Neretva ne constitue pas la
5 frontière, les Serbes ressentiront la pression pour qu'ils partent.
6 De même, paragraphe 1 224, la Défense indique que la déclaration de
7 Karadzic au mois de juillet 1992, en présence de Mladic et des dirigeants
8 civils de la RS, que "nous allons construire un Etat qui sera propre
9 ethniquement et qui respectera la loi." Cependant, il est clair d'après le
10 contexte de ce commentaire que ceci porte sur une discussion et du point de
11 vue de la communauté internationale sur la Bosnie. "Nous sommes intrigués
12 par l'idée qu'il y aura peut-être un monde dans lequel la Bosnie sera
13 divisée en deux. L'Occident ne souhaite pas voir la création d'un mini Etat
14 islamique…" Et la position qui doit être prise publiquement par la RS est
15 exprimée par Koljevic :
16 "Nous devons prendre position et parler d'un Etat qui respecte la loi
17 par opposition à un Etat national et nous devons diffuser notre politique,"
18 après quoi cette position a été adoptée. "Etat qui respecte la loi."
19 Toute affirmation du contraire que les dirigeants serbes de Bosnie
20 souhaitaient véritablement créer un Etat qui respecte la loi est minimisée
21 par leur échec constant car ils n'ont pas pu empêcher ni punir la
22 commission de crimes systématiques et généralisés commis contre les non-
23 Serbes, crimes dont ils avaient parfaitement connaissance.
24 Aux paragraphes 628 à 629, la Défense tente de rejeter les rapports au
25 pénal de différentes sources étrangères comme étant non fiables, tout en
26 affirmant que les autorités de la république "réagissaient immédiatement" à
27 de telles informations. Les deux allégations ne sont pas conformes à la
28 vérité. Karadzic et les dirigeants de Bosnie ont reçu des rapports précis
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1 de différentes sources internationales dès le mois d'avril, ce qu'ils ont
2 rejeté et écarté. Par exemple, tout de suite après la prise de contrôle
3 brutale de Zvornik, cela a été suivi par un afflux massif de réfugiés
4 musulmans. Karadzic a été informé de ces événements par deux représentants
5 internationaux séparés. Karadzic n'a pas contesté ces rapports et était
6 d'accord pour dire que de terribles choses étaient en train de se passer
7 tout en affirmant que les Serbes subissaient les mêmes actes de violence et
8 a nié avoir un quelconque contrôle sur les paramilitaires de Zvornik.
9 De façon plus générale, comme l'explique Okun, lui et le secrétaire
10 Vance ont informé de façon répétée les dirigeants serbes de Bosnie qu'ils
11 étaient au courant de ce nettoyage ethnique généralisé. P776, pages 50, 52.
12 Comme l'a dit Okun :
13 "En réalité, dans toutes les conversations au sujet du nettoyage
14 ethnique avec les dirigeants serbes de Bosnie, il est tout à fait
15 inhabituel, voire même jamais, qu'ils le nient. La réponse,
16 immanquablement, consiste à dire : Regardez ce qu'ils font à notre peuple."
17 Un autre exemple est celui des représentants de Bosnie qui reconnaissent et
18 nient à la fois le nettoyage ethnique, alors que les représentants
19 officiels ont personnellement informé Karadzic, Koljevic et Plavsic des
20 expulsions en masse des Musulmans de Bosanski Novi le 23 juin 1992. Ils ont
21 réagi en déclarant que c'était une guerre très cruelle et que chacun
22 commettait des crimes avant de changer leur fusil d'épaule en affirmant que
23 les Musulmans souhaitaient quitter de façon volontaire et signer les
24 documents pour échanger leurs biens. Voir le résumé Bosanski Novi,
25 paragraphe 13. Ceci minimise l'affirmation de la Défense en vertu de quoi
26 Karadzic et les dirigeants de Bosnie "ont réagi immédiatement" aux
27 informations au sujet des crimes mais également que Karadzic a démenti que
28 les expulsions à Bosanski Novi avaient été portées à son attention.
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1 Paragraphe 2 808.
2 La raison pour laquelle Karadzic et les dirigeants n'ont pas répondu à de
3 tels rapports qui émanaient de représentants officiels avec des remèdes
4 concrets n'est pas due au fait qu'ils n'exerçaient aucun contrôle ou ne
5 pouvaient pas influer sur les auteurs ou qu'ils avaient été "coupés" du
6 terrain ou tout autre prétexte avancé par la Défense. Les dirigeants de la
7 Republika Srpska, le fait qu'ils ne réagissent pas était le résultat que
8 ces crimes cadraient parfaitement avec l'objectif criminel commun de
9 chasser à jamais les Musulmans et les Croates des territoires qu'ils
10 revendiquaient.
11 Pour confirmer cela, il suffit de regarder la manière dont ils
12 s'autocongratulaient lorsque les crimes avaient été rapportés par Karadzic
13 et d'autres membres des dirigeants par leurs subordonnés et partisans
14 fidèles qui mettaient en place l'objectif commun sur le terrain.
15 Par exemple, comme évoqué plus tôt, Karadzic a annoncé les objectifs
16 stratégiques le 12 mai, qui comprenaient l'Una qui constituerait la
17 frontière, Vjestica ne pouvait pas cacher sa joie à l'annonce de cette
18 bonne nouvelle, ce qui signifiait que les Musulmans avaient été "évacués"
19 de la rive droite de l'Una et qu'ils n'auraient pas d'endroit où revenir.
20 P956, pages 24, 26. De même, le 30 juin, à Zvornik, Pavlovic se vantait
21 devant Karadzic et Mladic que "nous avons été très efficaces s'agissant de
22 chasser les Musulmans." P1478, P [comme interprété] 253.
23 Quelques semaines plus tard, lors de séance de l'assemblée au mois de
24 juillet, Prstojevic, qui avait participé aux expulsions, était parvenu au
25 sommet de la hiérarchie mais ceci avait provoqué des réactions délétères et
26 leur avait fait une publicité négative comme Mandic lui a expliqué au mois
27 de juin. Très fièrement, il a rapporté que les Serbes de Sarajevo, que
28 "ceci était encourageant, qu'ils avaient chassé les Musulmans de
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1 territoires où ils avaient, en réalité, été majoritaires." D92, P [comme
2 interprété] 66.
3 En même temps, lors d'un comité exécutif du SDS, le président Rajko Dukic a
4 exprimé l'espoir que le nombre de Musulmans à Birac avait été diminué de
5 moitié. D92, P [comme interprété] 73. Birac était une région qui se trouve
6 à l'est de la Bosnie et qui comprenait à la fois Zvornik et Bratunac.
7 Zvornik, où se trouvaient les autorités locales, avait déjà informé
8 Karadzic de l'éviction forcée des Musulmans à Bratunac et des centaines de
9 Musulmans avaient été chassés à Pale au mois de mai, à propos de laquelle
10 Karadzic, Mladic et Koljevic ont été informés le 6 juin lorsqu'il ne
11 restait plus aucun musulman et que ceux-ci avaient été "libérés". P1478, P
12 [comme interprété] 101.
13 Par opposition, les réactions de Karadzic aux rapports des crimes qui leur
14 provenaient de la communauté internationale, lorsque Vjestica s'est plaint
15 du fait que l'accord proposé signifierait qu'il y aurait un dédommagement
16 pour "tout ce qui avait été détruit et brûlé et les 17 mosquées qui avaient
17 été rasées," ont rassuré les députés que ceci n'était pas le cas et qu'il y
18 aurait des barbelés au niveau des frontières pendant longtemps.
19 Lorsque les ordres génériques de Karadzic et les appels lancés pour
20 se conformer au droit international marquent un contraste important avec
21 son acceptation des rapports de ses subordonnés au sujet de leurs propres
22 crimes et le fait qu'il s'écarte de cela et qu'il nie les rapports sur ces
23 crimes émanant de la communauté internationale, il est clair qu'il
24 s'agissait d'une campagne criminelle que Karadzic lui-même contrôlait.
25 Cependant, cet effort s'est avéré dénué de succès. Il est "clair" que les
26 conclusions qu'on pouvait tirer du cours des événements - ce sont les
27 propos tenus par deux représentants internationaux différents - à savoir
28 que le nettoyage ethnique avait constitué une politique d'Etat. Il s'agit
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1 de Banbury à la page 1 331 [comme interprété] et Kirudja.
2 Et en fin d'été, lorsque Karadzic avait essayé de convaincre Vance et M.
3 Owen qu'il n'y avait pas eu de nettoyage ethnique en cours, le fait du
4 nettoyage ethnique à ce moment déjà était considéré comme quelque chose
5 d'indéniable, comme on l'explique à la page 10 096 et -98 par M. Owen.
6 Lorsque Karadzic cite les commentaires de Lord Owen au paragraphe 628
7 pour étayer ses affirmations disant qu'il y avait de faux rapports dans les
8 médias, Lord Owen a expliqué que la réaction de Karadzic au sujet des
9 protestations internationales concernant le nettoyage ethnique avait fourni
10 des prétextes, des excuses, en disant qu'on entreprendrait quelque chose et
11 on avait dit qu'on suivrait les informations et qu'en fait, c'était "une
12 tactique assez rusée pour faire en sorte que nous pensions que nos
13 représentants avaient encore une influence quelconque."
14 Karadzic n'a pas fait objection pour ce qui est des droits de
15 l'homme, mais il s'assurait des positions de négociation par la suite.
16 "Tout ceci avait constitué, en fait, une façade pour dissimuler une
17 conviction profondément enracinée disant que les Serbes ne devaient pas
18 vivre aux côtés des Musulmans et qu'il fallait réaliser un programme de
19 nettoyage ethnique, et on le faisait de façon déshonorable, à une échelle
20 très élevée, très grande, et il n'y avait aucune trace de l'impossibilité
21 d'apprendre la vérité." P799, Odyssée des Balkans de Lord Owen, page 14.
22 Alors, si on passe maintenant à la direction des Serbes de Bosnie et
23 autres membres de cette direction des Serbes de Bosnie, aux paragraphes
24 677, 687, la Défense a également souligné qu'il y avait des représentants
25 officiels du MUP qui, fin juillet, avaient répondu aux demandes de Stanisic
26 le 17 juillet 1992. Et ce sont des rapports qui ne servent qu'à cette fin.
27 Il s'agit des affirmations de Mandic, compte rendu d'audience --
28 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi la référence.
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1 M. TIEGER : [interprétation] Rien ne laissait entendre qu'on avait
2 véritablement pris des mesures pour que les civils soient relâchés et pour
3 que soient punis ceux qui avaient été coupables de leur mise en détention
4 et traitement inhumain. En attendant, on a poursuivi cette pratique de mise
5 en détention, de mauvais traitement, d'exécution et autre.
6 Ce qui est clair, c'est qu'à ce niveau et autres niveaux dans la
7 Republika Srpska, au niveau du MUP et autres instances dirigeantes, tout le
8 monde savait qu'il y avait des crimes de commis, que cela était en train
9 d'être fait, alors que ceux qui étaient chargés de contrôler les choses ne
10 faisaient rien de concret pour empêcher ce type de comportement. Ce n'est
11 qu'une fois que les journalistes de la communauté internationale ont
12 découvert les camps de détention et que Zupljanin avait officiellement fait
13 état d'un grand nombre de civils musulmans détenus, il a été pris des
14 mesures pour améliorer quelque peu la situation en disant que les civils
15 devaient être relâchés. Mais d'ici à ce moment-là, un grand nombre de ces
16 détenus étaient dans une situation qui disait que la population allait être
17 expulsée. Quand bien même on leur disait qu'ils pouvaient revenir chez eux,
18 mais comme ils ont été attaqués, détenus et malmenés, ils ne voulaient pas
19 le faire, et c'était l'œuvre de ceux qui étaient chargés de les défendre.
20 Donc, la seule option qu'ils avaient, c'était de quitter la Republika
21 Srpska.
22 Un autre ministre du gouvernement de la Republika Srpska auquel fait
23 des références la Défense, c'est M. Mandic qui a parlé des réactions aux
24 rapports de crimes commis contre les non-Serbes à Ilidza, et on parle de
25 Prstojevic.
26 Au paragraphe 702, on parle de conversations interceptées "qui
27 permettent d'apprendre qu'il y avait des ultimatums de formulés à l'égard
28 de Turcs, les gens sont expulsés de certaines agglomérations et la réaction
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1 de la population est mauvaise. Ne le faites pas. Nous ne pouvons pas
2 ethniquement nettoyer Ilidza ou un autre endroit. Et ce n'est pas là
3 l'attitude officielle du gouvernement ou de la direction politique."
4 Mais si l'on met de côté le fait que le ministre de la Justice parle
5 de l'expulsion des Musulmans de Bosnie en les qualifiant de Turcs, c'est
6 une citation qui est destinée à nous conduire sur une mauvaise voie. Parce
7 qu'on voit que Mandic est préoccupé par la mauvaise publicité du fait de
8 l'expulsion des Musulmans, mais pas les expulsions en tant que telles de
9 Musulmans. Donc, on parle "d'abus" des médias pour ce qui est des évictions
10 de personnes de chez eux et que c'était "une mauvaise publicité," dit-on,
11 "pour nous." Il dit par la suite que "c'est arrivé jusqu'au haut niveau, et
12 le fait que dans certaines agglomérations on ne donnait que 24 heures aux
13 gens pour s'en aller et ce, en leur disant qu'on n'allait assumer aucune
14 responsabilité pour leur sécurité."
15 Quelle a été la réponse de Prstojevic ? Il ne l'a pas dit dans le
16 public, il ne l'a pas formulée par écrit. Mandic a donné instruction à
17 Prstojevic de s'entretenir avec un juge musulman pour "placer deux ou trois
18 musulmans quelque part pour dire que l'on employait des Musulmans, des
19 Croates et des Serbes, indépendamment de leur appartenance ethnique, pour
20 autant qu'ils soient loyaux à l'égard de l'Etat serbe." Ce type de réaction
21 de la direction pour ce qui est de l'information relative au nettoyage
22 ethnique de Prstojevic avait porté sur des plaintes à l'égard de Prstojevic
23 pour ce qui est de l'expulsion des "Turcs". Et on s'est concentré sur la
24 nature des crimes en disant qu'on en avait abusé pour en informer les
25 médias. L'instruction avait été donnée d'employer plusieurs ressortissants
26 des groupes ethniques différents pour donner l'illusion, mais rien n'a été
27 fait pour punir Prstojevic ou pour le révoquer de ses fonctions du fait de
28 ses crimes.
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1 La Défense a affirmé que l'affirmation aux termes de laquelle
2 Prstojevic était en train d'expulser des Turcs, cela étonne parce que
3 Prstojevic était un extrémiste de grande renommée et ses activités
4 criminelles étaient claires à partir des conversations interceptées de
5 l'époque et partant de ce qu'il a fait comme déclaration devant
6 l'assemblée. On peut voir la pièce P1086, pages 2 à 3; et P515, pages 1 et
7 2.
8 Et pour finir, pour ce qui est de ce sujet des ordres de nature
9 cosmétique, la Défense a affirmé que les formulations génériques et
10 générales dans les propos de Djeric du 26 avril et les instructions données
11 aux cellules de Crise pour "agir de façon aimable et humaine à l'égard des
12 civils," cela se trouve aller à l'encontre des affirmations avancées par le
13 bureau du Procureur, mais on peut voir d'après le contexte si ça avait été
14 véritablement des instructions relatives à des mesures préventives qui
15 pourraient être attribuées à l'accusé.
16 Et si vous le permettez, je vais présenter ce contexte et puis nous
17 allons faire la pause. Le contexte a été fourni par le témoignage de Djeric
18 disant que la politique à Karadzic au terme de laquelle les crimes commis
19 par les Serbes ne devraient pas être punis et que les enquêtes et les
20 punitions afférentes, "on s'en occuperait plus tard." Et Djeric a expliqué
21 que deux ministres-clés, celui de la Justice et de l'Intérieur, ces deux
22 ministères, donc, à la tête desquels se trouvaient Mandic et Stanisic,
23 avaient formulé des positions identiques à celles de Karadzic. Et vous
24 allez voir ceci dans notre mémoire au paragraphe 549.
25 Indépendamment de la politique qui a englobé les crimes pour
26 l'aboutissement à une pureté ethnique sur certains territoires,
27 indépendamment, donc, de la politique mise en œuvre ou pas, il est n'est
28 pas nécessaire de souligner qu'il y a eu des crimes à grande échelle de
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1 commis et que le président de l'Etat, le ministre de l'Intérieur et le
2 ministre de la Justice avaient propagé une politique que par la suite on a
3 voulu faire endosser à quelqu'un d'autre. Et donc, les instructions données
4 à Djeric n'ont pas eu grand effet.
5 Monsieur le Président, je crois comprendre que l'heure est venue de
6 faire la pause.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La traduction française vient de se
8 terminer à peine.
9 Nous allons faire une pause et reprendrons dans 20 minutes, à 3
10 heures 10.
11 --- L'audience est suspendue à 14 heures 50.
12 --- L'audience est reprise à 15 heures 12.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Monsieur Tieger.
14 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Avant de lever l'audience, j'avais mis en regard les affirmations selon
16 lesquelles il y avait des instructions en ce qui concerne le traitement des
17 Croates et Musulmans et la politique d'impunité. Et le résultat de cette
18 politique dictée par Karadzic et ses ministres était l'absence de
19 poursuites contre les Serbes coupables de crimes de masse contre les
20 Musulmans et les Croates. Et cela est évoqué aux paragraphes 535 à 566 du
21 mémoire de l'Accusation.
22 Cette absence d'action existait à tous les niveaux. Au niveau local, en
23 tant que chef de la SJB de Kljuc, Vinko Kondic [comme interprété] a
24 présenté un rapport au CSB de Banja Luka sur l'inaction de la SJB par
25 rapport à des "crimes monstrueux" contre des non-Serbes. "La raison c'est
26 que si ces crimes étaient révélés au grand public, compte tenu du contexte
27 politique international, il existe une pression, et si ces crimes devaient
28 être rendus publics, il existerait une pression importante de la communauté
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1 internationale, et à un moment totalement inopportun."
2 La politique de Karadzic créait un environnement d'impunité qui
3 encourageait la mise en œuvre de l'objectif criminel commun. Selon Djeric :
4 "Si vous aviez puni ceux qu'il fallait punir dès le début, eh bien, plus
5 tard des choses ne se seraient pas produites, des choses plus graves." Et
6 ça, ce sont les propos de Djeric en s'adressant à l'accusé au Tribunal,
7 T27999.
8 La Défense estime que l'absence de poursuites de Serbes pour des crimes
9 contre les non-Serbes était le résultat des difficultés extrêmes de la
10 justice militaire, qu'il n'y avait pas de discrimination ethnique, que le
11 système judiciaire était impartial et indépendant, qu'il n'y avait pas de
12 pression, ni individuelle, ni du fait de la politique de l'Etat. Aucune de
13 ces affirmations ne résiste à l'examen.
14 Premièrement, d'une manière générale, à part ou exception faite d'une
15 approche ethnique sélective vis-à-vis des auteurs individuels et des
16 victimes, l'absence de volonté systémique de poursuivre des crimes massifs
17 contre les non-Serbes par la VRS est reflétée par la suspension des
18 dispositions ou par l'ignorance totale et le non-respect total des
19 dispositions habituelles lorsqu'il s'agit de tels crimes, sauf lorsqu'il
20 s'agissait des non-Serbes.
21 Le Témoin de la Défense Todorovic a reconnu cela lorsqu'il a été
22 interrogé, après avoir dans un premier temps dit le contraire, il n'y a pas
23 eu d'affaires dans lesquelles des tribunaux militaires de la VRS ont
24 poursuivi des soldats de la VRS pour des crimes de guerre contre les civils
25 en vertu de l'article 142 - T34076 - en dépit du fait que de telles
26 poursuites aient été engagées contre des non-Serbes. P3607, page 21, 23,
27 38.
28 Selon Karadzic :
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1 "Nous [inaudible] pas notre armée en utilisant des mesures
2 disciplinaires ou des punitions draconiennes, car chacun de nos soldats
3 s'imposait la discipline seul, en cherchant à mettre en place un Etat, ce
4 qui lui donnait de l'enthousiasme."
5 En dépit du fait que la Défense dise qu'il existait "des conditions
6 de difficulté extrême" dans la justice militaire, la Défense accepte que
7 les tribunaux militaires ont reçu 33 000 affaires et en ont clôturé 12 000.
8 En d'autres termes, le système judiciaire militaire fonctionnait.
9 La Défense évoque le rapport de Todorovic de 1995 et dit que la
10 politique était de poursuivre "avec rigueur" les auteurs de crimes
11 appartenant à la VRS; toutefois, le rapport indique clairement qu'il s'agit
12 de Serbes qui tuaient des Serbes. Et les références qui ont été omises par
13 la Défense révèlent la vraie préoccupation qui a un effet négatif sur la
14 préparation au combat causé par le fait que tant les auteurs que les
15 personnes tuées ou blessées ne peuvent plus participer aux activités de
16 combat. Et les préoccupations sont également liées au fait que des armes
17 soient substituées à la VRS. D2987, page 16.
18 Donc, la Défense dit qu'en ce qui concerne les enquêtes sur les
19 crimes de guerre, que de la même manière, l'affirmation de la Défense selon
20 laquelle en ce qui concerne les enquêtes sur les crimes de guerre ne
21 possédaient aucun biais ethnique en ce qui concerne l'identité des auteurs
22 et des victimes, eh bien, cette affirmation est contredite par un nombre
23 important de preuves qui montrent que les autorités se concentraient
24 surtout sur les crimes contre les Serbes. Dans son rapport d'avril à
25 décembre, par exemple, la RS du MUP a déclaré que :
26 "L'accent mis par le travail opérationnel dans les CSB et CJB était
27 de détecter les membres de l'armée ennemie qui avaient commis des actes de
28 génocide contre les Serbes."
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1 Cela est un thème récurrent dans les documents du MUP tout au long de
2 cette période. Voir les pièces suivantes : P2715, page 3; P2640, page 3;
3 P2759, page 1; D1616; P3302, pages 6 et 7; P6384. Et cette approche est
4 également mise en lumière par la création par la présidence de la Republika
5 Srpska sur l'enquête sur les crimes de guerre commis contre les Serbes en
6 Bosnie-Herzégovine.
7 Et cette démarche s'est poursuivie pendant tout le conflit. En
8 novembre 1995, quatre mois après l'exécution sommaire d'hommes et de jeunes
9 garçons dans la région de Zvornik, Goran Macar, responsable de
10 l'administration pénale de la SJB de Bijeljina, a ordonné au SJB de Zvornik
11 de "intensifier les activités en ce qui concerne la préparation des
12 dossiers pénaux contre les auteurs de crimes de guerre contre les Serbes."
13 L'argument de la Défense est également mis en échec par la faiblesse
14 des éléments de preuve évoqués. Par exemple, au paragraphe 787, la Défense
15 déclare que des "poursuites ont été engagées contre des membres de la VRS
16 pour des crimes commis contre les non-Serbes ou des prisonniers de guerre."
17 Quelles sont les preuves évoquées ? Un rapport du tribunal militaire de la
18 Republika Srpska de septembre 1994 de Todorovic décrivant un incident dans
19 lequel un soldat de la réserve a tué un prisonnier, un Musulman, et qui
20 indique : "La détention a été recommandée, mais l'accusé n'a pas encore été
21 interrogé." D29995, pages 5.
22 Si la Défense cite une poignée de poursuites engagées contre des
23 Serbes au pénal et dans les juridictions civiles et militaires contre des
24 non-Serbes, la Défense ne parle pas des crimes de masse contre les non-
25 Serbes qui se sont produits lors de la purification ethnique et qui sont
26 restés impunis. L'absence totale de poursuites à la suite des crimes commis
27 en masse tant dans les tribunaux civils que dans les tribunaux militaires,
28 tant après et pendant la guerre, réfute l'argument de la Défense.
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1 Pour défendre l'argument selon lequel il n'existait pas de climat
2 d'impunité pour les crimes commis contre les non-Serbes, la Défense défend
3 les propos tenus par Karadzic. Elle invoque d'abord sa déclaration devant
4 l'assemblée de 1994 [comme interprété], mais elle ne précise pas qu'elle a
5 été faite dans le contexte d'un débat sur des véhicules Golf volés et le
6 marché noir. Le mémoire de la Défense énumère les mesures proposées par
7 Karadzic en 1995 afin d'intensifier la répression des délits pénaux, sans
8 préciser une fois encore qu'aucune de plus 2 000 condamnations figurant
9 dans le document ne portait sur des crimes de masse contre les non-Serbes,
10 ce qui n'est guère surprenant compte tenu du fait que ce qui intéressait
11 surtout Karadzic, c'étaient les crimes commis contre les forces armées et
12 le fait de l'impunité sur la préparation au combat. Voir D1427, page 1.
13 Au paragraphe 850, la Défense affirme que le procès de Stankovic à
14 lui tout seul est suffisant pour réfuter l'allégation de l'Accusation selon
15 laquelle les non-Serbes se voient refuser l'accès du système judiciaire de
16 la Republika Srpska. Donc, que s'est-il passé à l'occasion du procès de
17 Stankovic ? Après avoir tué l'un des notables de la communauté musulmane et
18 avoir été libéré, comme cela est décrit dans le mémoire de l'Accusation, au
19 paragraphe 564, Stankovic a avoué avoir tué deux civils musulmans
20 supplémentaires et a tenté d'en tuer deux autres en août 1992 mais a été
21 libéré avant son procès en février 1995 [comme interprété]. Après, malgré
22 sa condamnation en octobre 1993, il n'a dû exécuter sa peine qu'après avoir
23 tiré par accident sur deux enfants serbes en septembre 1994, une situation
24 que le Témoin Todorovic était bien en peine de concilier avec son
25 affirmation de l'égalité de traitement. Compte rendu d'audience 34 086 à -
26 87.
27 La Défense cite Todorovic pour étayer la thèse selon laquelle la libération
28 de l'accusé ne signifie pas la fin des poursuites. D2986, paragraphe 14.
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1 Mais au même paragraphe, Todorovic déclare :
2 "Toutefois, les personnes accusées de crimes graves qui représentent
3 une menace contre la société, tels que le meurtre, restent en préventive
4 jusqu'à la fin du procès."
5 Comme indiqué dans le mémoire de l'Accusation au paragraphe 565, si les
6 charges contre certains Serbes libérés subsistaient, même des criminels
7 récidivistes, tels que Stankovic qui avouait avoir tué des non-Serbes,
8 étaient libérés. Ces circonstances reflètent une nette discrimination basée
9 sur la nationalité des victimes et que cela caractérisait ce système.
10 De la même manière, la Défense affirme que le corps judiciaire était
11 indépendant et n'était soumis à aucune ingérence, mais cet argument est mis
12 en échec par l'ingérence de Karadzic dans le travail des tribunaux civils
13 et militaires, en ce y compris ses ordres au tribunal militaire suprême,
14 que l'on peut voir aux paragraphes 773 à 777 [comme interprété], paragraphe
15 794 [comme interprété] également. Et donc, cet argument est également mis à
16 mal par le fait que la Défense elle-même insiste sur les interventions de
17 Karadzic et de ses ordres. Et pour ce qui est des amnisties accordées par
18 Karadzic aux "membres d'associations à des buts hostiles" invoquées par la
19 Défense au paragraphe 784, celles-ci ne font que confirmer que les
20 poursuites et l'emprisonnement étaient dès le départ sans fondement.
21 En ce qui concerne la pression exercée sur le pouvoir judiciaire,
22 contrairement à ce qu'affirme la Défense, selon laquelle la pression
23 exercée sur les tribunaux judiciaires ne venait que des parents et amis des
24 accusés ou des camarades de combat, les pressions routinières exercées sur
25 les autorités et l'influence exercée sur la justice ont démontré par les
26 observations factuelles d'un auteur de crimes, la lettre de Kajtez à Vrkes
27 en avril 1994 qui indique que ses co-détenus "qui ont également tué des
28 balija et des Oustachi sont acquittés et aidés par les municipalités."
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1 Le fait qu'une personne ayant elle-même avoué des crimes en masse de
2 non-Serbes s'attende à ce que les autorités prennent sa défense démontre
3 combien de telles pratiques étaient répandues.
4 Un autre exemple d'ingérence officielle dans les poursuites est la
5 suspension des poursuites contre des soldats de la VRS soupçonnés d'avoir
6 tué des dizaines de civils musulmans à l'école de Velagici "en raison de
7 l'intervention du vice-premier ministre de la Republika Srpska et du
8 président de l'exécutif de la municipalité de Kljuc." P3616.
9 L'affirmation de la Défense selon laquelle cette intervention était "un cas
10 clair de force majeure" dans lequel un état d'anarchie menaçait des
11 autorités affaiblies - paragraphe 846 - est mise en échec par des preuves
12 attestant tout le contraire, à savoir des autorités civiles fortes et
13 fonctionnant bien et coopérant avec les militaires. Cela se trouve dans le
14 résumé relatif à Kljuc dans notre mémoire. Et il y a un autre fait, le fait
15 que jusqu'à présent aucun des accusés de Velagici n'ait fait l'objet de
16 poursuite jusqu'à présent.
17 Le fait que les tribunaux cédaient quasi-systématiquement à la
18 pression pour ce qui est des poursuites relatives à des crimes contre des
19 non-Serbes est une autre expression du fait que l'on effectue la politique
20 d'impunité des Serbes pour des crimes édictée par Karadzic.
21 Et pour la suite, il faut que nous passions à huis clos partiel.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons passer à huis clos partiel.
23 Monsieur le Greffier -- oui, nous sommes à huis clos partiel.
24 [Audience à huis clos partiel]
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28 [Audience publique]
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1 M. TIEGER : [interprétation] Aux paragraphes 889 à 895, la Défense pose la
2 question suivante : "Que savait le président Karadzic au sujet des affaires
3 criminelles relatives à des crimes contre les non-Serbes ?" Mais sa réponse
4 est silencieuse en ce qui concerne les crimes massifs contre les non-Serbes
5 dont Karadzic était informé et qui sont restés impunis.
6 Par exemple, quatre exemples de crimes bien connus dont avait
7 connaissance Karadzic et qui ont été impunis sont : les expulsions et les
8 meurtres à Zvornik, le massacre à Koricanske Stijene, les expulsions de
9 Vojkan à Bijeljina et la détention de Musulmans et Croates dans toute la
10 Republika Srpska.
11 Zvornik. Premièrement, la Défense affirme qu'il n'y avait "aucune preuve"
12 selon laquelle le président Karadzic était informé des mauvais traitements
13 ou des meurtres des Musulmans de Bosnie à Zvornik. Paragraphe 2 843. Cette
14 affirmation mensongère ignore des preuves claires selon lesquelles Karadzic
15 était informé au sujet des crimes de Zvornik dès qu'ils sont survenus,
16 puisqu'il a réagi en disant que des choses terribles se produisaient en
17 Bosnie et que tout le monde était coupable. Voir paragraphes 31 à 33 du
18 résumé de Zvornik.
19 La Défense ne s'arrête pas à cette affirmation mensongère et indique que
20 Karadzic avait été mis au courant des bruits selon lesquels les Musulmans à
21 Kozluk avaient été expulsés à la fin du mois de juin et a immédiatement
22 demandé une enquête. Son enquête a déterminé que les Musulmans avaient
23 quitté les lieux de manière volontaire, ce qui disculpait les
24 fonctionnaires locaux, et ce qui montrerait qu'il s'est acquitté de son
25 devoir de punir les auteurs. Ce qui est vrai, c'est qu'un examen approfondi
26 de cet événement, qui va plus loin qu'expose le mémoire de la Défense,
27 parle éloquemment des enquêtes et de la répression des crimes contre les
28 non-Serbes.
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1 Les Musulmans de Kozluk ont été expulsés le 26 juin, ce qui a déclenché des
2 inquiétudes au niveau international et une enquête. Quatre jours plus tard,
3 Karadzic a participé à une réunion à Zvornik pendant laquelle des
4 représentants officiels de Zvornik lui ont fait savoir qu'ils avaient
5 expulsé les Musulmans de Kozluk et avaient mis en œuvre de façon réussie
6 l'ordre de Karadzic de repeupler Kozluk "avec nos enfants." Karadzic a
7 ensuite déclaré qu'il avait enquêté sur la question et avait déterminé que
8 les Musulmans étaient partis de façon volontaire.
9 Comme je l'ai dit, cela vous montre tout ce que vous devez savoir sur son
10 comportement vis-à-vis des enquêtes sur les crimes et les poursuites pour
11 crimes contre des non-Serbes, ainsi que ses mensonges éhontés. Mais il y a
12 plus encore.
13 Koricanske Stijene. Comme nous l'avons décrit au paragraphe 521 de
14 notre mémoire, au matin du 23 août, des nouvelles du massacre de Koricanske
15 Stijene qui avait eu lieu deux jours auparavant sont arrivés à Karadzic à
16 Londres. Et je me réfère maintenant aux paragraphes 554 et 555 de notre
17 mémoire. Karadzic a envoyé le ministre de la Défense Subotic à Banja Luka,
18 qui a coordonné le maquillage, qui a présidé les réunions avec les
19 représentants officiels pertinents, qui s'est rendu sur les lieux pour
20 superviser les efforts pour détruire toutes les traces du crime et qui a
21 fait rapport à Karadzic.
22 Les représentants officiels de la RAK et de la Republika Srpska ont
23 donné des ordres standard d'enquêter qui n'ont jamais été mis en œuvre. La
24 section d'intervention de la police a été démantelée et ses membres sont
25 envoyés en mission de combat à Han Pijesak, alors que le chef de la police
26 de Prijedor, Drljaca, a clamé haut et fort qu'il ne pouvait plus les
27 atteindre, les contacter, pour leur poser des questions. Les autorités de
28 la police, de l'armée, du judiciaire et des municipalités ont refusé de
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1 prendre la responsabilité pour cette enquête. Drljaca a été promu par les
2 autorités de la république et a été récompensé par Karadzic comme d'autres
3 qui ont participé aux meurtres et à la dissimulation. Plus d'enquête n'a
4 été demandée, en tout cas pas avant 1999. Les autorités de la Republika
5 Srpska n'ont tenu personne responsable.
6 D'après Avlijas qui a participé à la réunion de Republika Srpska où étaient
7 présents des hauts représentants officiels ainsi que ceux cde Banja Luka,
8 notamment Subotic, par rapport à Koricanske Stijene :
9 "Toute la RS sait que ce sont des membres du SJB de Prijedor qui ont
10 fait cela, commandés par Simo Drljaca, et on le savait le jour de la
11 réunion. Si l'Etat avait bien fonctionné, Simo Drljaca aurait dû être
12 enfermé. S'il y a une responsabilité de supérieur hiérarchique dans un Etat
13 qui fonctionne bien, cela ne fait aucun doute." Compte rendu 35 187 à -88.
14 Regardons à présent un autre moment où Karadzic a assuré prétendument à la
15 communauté internationale qu'il enquêtait sur les crimes alors qu'en fait,
16 il les soutenait et il fermait les yeux à leur égard.
17 Comme nous le décrivons aux paragraphes 531 à 533 de notre mémoire,
18 en 1993 et 1994, M. Akashi, le HCR et le CICR ont soulevé la question des
19 expulsions à Bijeljina à plusieurs reprises et directement, et le Conseil
20 de sécurité de l'ONU a exprimé ses préoccupations graves "quant à la
21 campagne de terreur persistante et systématique perpétrée par les forces
22 serbes de Bosnie à Banja Luka, Bijeljina et dans d'autres régions." Et il a
23 exigé "que les autorités serbes de Bosnie cessent immédiatement leur
24 campagne de nettoyage ethnique."
25 Plus précisément, comme nous le décrivons aux paragraphes 556 et 557 de
26 notre mémoire, ils ont remis en question Karadzic sur les crimes de Vojkan
27 qui a expulsé de force des milliers de Musulmans, des civils, du secteur de
28 Bijeljina. Pièce P5423, page 2.
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1 Et lorsqu'ils l'ont fait, Karadzic a répondu que ces inquiétudes répétées
2 n'étaient que de fausses assurances. Karadzic a répondu à la pression
3 exercée par les Nations Unies qu'il avait pris des mesures pour identifier,
4 arrêter et poursuivre les responsables. Cependant, plusieurs semaines après
5 ces propos, Vojkan était toujours en action, et les expulsions
6 continuaient. Comme Akashi l'a fait remarquer le 20 septembre [comme
7 interprété] : "Bientôt il n'y aura plus personne à déraciner de force."
8 Lors d'une réunion de mars 1995 du commandement Suprême - dans le
9 mémoire de l'Accusation, nous avons référencé cela à tort comme ayant eu
10 lieu au mois d'août au paragraphe 558 - Karadzic a expliqué clairement
11 pourquoi Vojkan n'avait pas été arrêté ni puni. Après avoir expliqué que
12 "les Musulmans qui restent sont une catastrophe pour nous," et que "notre
13 politique vise à ce qu'il y ait une séparation des peuples, des cultures,
14 des mondes, qui se ressemble s'assemble." Il a fait remarquer que ce que
15 Vojkan faisait, "si cela était mené par une institution étatique, nous
16 serions accusés de nettoyage ethnique." Voilà pourquoi, a-t-il expliqué,
17 "nous fermons les yeux sur une agence privée qui opère des arrangements
18 privés. Lorsqu'une agence privée s'arrange pour que les Musulmans se
19 rendent en Allemagne, personne ne peut nous accuser." Comme Milovanovic l'a
20 expliqué, les remarques de Karadzic reflétaient son point de vue selon
21 lequel "il serait bien d'avoir aussi peu de Musulmans que possible en
22 Bosnie-Herzégovine." Pages 25 543 à -545 du compte rendu.
23 Vojkan continuait d'expulser les Musulmans de Bijeljina en juillet
24 1995, et au lieu d'être puni pour ce crime, il a été remercié publiquement
25 par Karadzic. Pages 15 712, -713, -715 du compte rendu d'audience.
26 Et enfin, les enquêtes sur les camps.
27 Karadzic cite trois "commissions" qui ont été créées en août 1992
28 pour voir ce qu'il se passait dans les centres de détention pour prouver
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1 qu'il avait pris des actions fermes et responsables pour protéger les
2 citoyens d'une "différente nationalité". Paragraphes 586 et suivants. En
3 fait, il ne mentionne pas que malgré de nombreuses informations montrant
4 l'incarcération et le traitement de civils non serbes avant cela, ces
5 commissions n'ont pas été créées avant que les crimes des camps n'aient été
6 révélés au monde la première semaine du mois d'août 1992.
7 La Défense affirme au paragraphe 614 que ces rapports "ont façonné l'état
8 d'esprit des autorités républicaines" et que leurs réactions étaient
9 "l'élément matériel". Ces rapports peuvent dire énormément de choses sur
10 l'état d'esprit et peuvent en soi constituer un élément matériel, parce que
11 face à cette conscience qui existait depuis longtemps et qui montrait que
12 les civils étaient incarcérés dans des conditions déplorables mais
13 déclenchées par le fait qu'ils aient été pris la main dans le sac, ces
14 rapports montrent que Karadzic n'a pas essayé du tout d'identifier les
15 auteurs de ces crimes mais, en fait, qu'il avait maintenu ce climat
16 d'impunité pour les crimes contre les non-Serbes et que, donc, il illustre
17 encore une fois son intention partagée de commettre ces crimes.
18 Le rapport de la commission du CSB du 18 août - pièce D470 - produit en
19 trois jours résume les rapports des chefs locaux du SJB, les auteurs des
20 crimes ou de la commission qui était censée enquêter. Par exemple, Drljaca
21 à Prijedor, pièce D470, pages 27 à 33; Vucinic à Sanski Most, pièce D470,
22 pages 14 à 16. Et, effectivement, la commission composée de quatre hommes
23 incluait un représentant du CSB de Banja Luka qui avait aidé à mettre sur
24 pied des équipes d'interrogatoire qui opéraient à Omarska et deux personnes
25 qui travaillaient à Omarska, l'un qui supervisait et l'autre qui menait les
26 interrogatoires, Mijic et Rodic. Voir pièce P2640, page 1; et pièce P6536,
27 page 3. Rappelez-vous qu'il s'agit là du camp où le commandant avait admis
28 qu'il avait entendu les hurlements des détenus qui étaient en train d'être
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1 roués de coups pendant les interrogatoires quotidiens. Compte rendu pages
2 44 225 et -241. Cela ne ressemble même pas de loin à une enquête
3 indépendante que les autorités responsables entreprendraient. Le rapport de
4 la commission gouvernementale du 19 août - pièce P3549 - comprend huit
5 pages quitteraient à la hâte de six centres de détention. Les conclusions
6 sont tellement divergentes des informations déjà à disposition des
7 dirigeants des Serbes de Bosnie découlant de sources internes et externes
8 que son objectif unique et évident était de servir de mise en scène.
9 S'agissant du troisième rapport de la commission de la fin août - pièce
10 D3109 - on n'essaie même pas là de montrer qu'il y a une enquête sincère,
11 comme le voyez, en jetant un œil à ce rapport qui a été produit par
12 Avlijas. Le voici. Le voici. C'est le rapport sur les crimes dans les
13 camps.
14 Entre-temps, les survivants d'Omarska ont été transférés à Trnopolje pour
15 expulsion imminente ou transférés au camp de Manjaca. Et lorsque les
16 représentants officiels de Manjaca ont remarqué le grand nombre de détenus
17 qui étaient simplement des civils et la pression du CICR pour entrer dans
18 le camp, Karadzic leur a dit : Prenez les types qui sont trop malades, cela
19 attirera l'attention de la communauté internationale, et évacuez-les. Vous
20 retrouvez cela au paragraphe 536 du mémoire de l'Accusation, dans le résumé
21 sur Banja Luka, paragraphe 9. Et les autres périssaient pendant ce temps-
22 là.
23 Autre indicateur de l'intention partagée de Karadzic, la promotion et la
24 récompense des auteurs des crimes qui ont participé au plan commun. La
25 Défense affirme que "il n'y a pas de preuve montrant que Karadzic savait
26 qu'un crime était commis et il a promu, félicité ou récompensé l'auteur."
27 En fait, le président Karadzic savait à peine qui il promouvait. Paragraphe
28 1 335. Cette allégation fallacieuse ignore, entre autres, les éléments de
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1 preuve attestant des promotions multiples ou félicitations de la part de
2 Karadzic ou de personnes dont les agissements criminels étaient bien
3 connus. Ces personnes étaient Vojkan, Drljaca ainsi qu'Arkan. Les
4 agissements criminels notoires d'Arkan et de ses hommes ont été confirmés
5 par des témoins à charge et à décharge. Page 34 700 du compte rendu, par
6 exemple, ou encore 1 513 et 46 386. Comme nous en avons discuté tout à
7 l'heure, lorsque Karadzic a ramené Arkan en Bosnie-Herzégovine en 1995,
8 Mladic l'a informé qu'Arkan avait "liquidé un certain nombre de citoyens
9 musulmans fidèles." Cependant, Arkan et ses hommes se sont alliés devant
10 l'hôtel de ville à Bijeljina, et Karadzic leur a remis un prix pour leur
11 réussite. Il leur a dit :
12 "Je suis extrêmement reconnaissant et je vous félicite. Vous aurez
13 toujours une place dans le cœur de ceux que vous avez défendus." Pièce
14 2858.
15 Juste un an après le massacre de Koricanske Stijene et son maquillage
16 ultérieur, Drljaca a été promu et ses subordonnés ont reçu des
17 félicitations de Karadzic, qui était représenté par Subotic lors de la
18 cérémonie. Pièce P4261.Tel que discuté ou mentionné au paragraphe 568 de
19 notre mémoire, face aux éléments de preuve écrasants des crimes commis par
20 l'armée et les autorités civiles lors d'une séance de l'assemblée en
21 janvier 1994, Karadzic a annoncé :
22 "Contrairement à tous les mensonges et les calomnies de la communauté
23 internationale, l'armée serbe a maintenu son caractère chevaleresque et son
24 honneur militaire." Pièce 5525, page 10. Et il a continué en décernant des
25 prix à des personnes qui avaient participé à la mise en œuvre du plan
26 commun. Ces personnes incluaient notamment Stanislav Galic, Radislav
27 Krstic, Rajko Kusic, Svetozar Andric, Milenko Zivanovic, Nedjeljko Rasula,
28 les Panthères de Mauzer, Miroslav Deronjic, Radoslav Brdjanin. Tout cela
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1 est repris aux paragraphes 567 et 568 du mémoire de l'Accusation. Pour
2 illustrer plus avant l'intention partagée de Karadzic, il a continué à se
3 reposer sur ces personnes pour effectuer ses politiques. Voir paragraphe
4 569 de notre mémoire. La Défense avance au paragraphe 1 339 que :
5 "Le président Karadzic n'aurait pas ordonné une application stricte
6 des règles du droit international des lois de la guerre mais aurait
7 sanctionné des personnes qui avaient violé ces règles et parallèlement
8 décorer les auteurs de crimes. En fait, comme nous l'avons vu, les
9 personnes qui ont violé le droit international n'étaient pas soumises à des
10 sanctions de la part de Karadzic ou les membres de l'entreprise criminelle
11 commune, ce qui montre la nature superficielle de ses ordres pour pouvoir
12 répondre aux normes du droit international et militaire. Au lieu de punir,
13 il a félicité, récompensé les auteurs, ce qui prouve son intention par
14 rapport à ces crimes."
15 J'aimerais à présent, Monsieur le Président, passer à un autre sujet,
16 la prise d'otage, le chef 11.
17 Tel que décrit aux paragraphes 1 102 à 1 107 de notre mémoire, du 26
18 mai 1995 au 19 juin 1995, Karadzic et d'autres membres des dirigeants
19 serbes de Bosnie ont pris en otage plus de 200 membres du personnel des
20 Nations Unies pour empêcher les frappes aériennes de l'OTAN de continuer.
21 Et, en fait, la Défense pensait que Karadzic avait convenu que le personnel
22 des Nations Unies devrait être détenu à l'aube des frappes aériennes.
23 Paragraphe 3 354. Cependant, la Défense fait valoir, et cela est inné, que
24 Karadzic n'avait jamais convenu que ces menaces devraient être faites à
25 l'encontre du personnel des Nations Unies détenu. Paragraphe 3 354. Il
26 s'agit d'un exemple clair du révisionnisme de Karadzic. Le jour où le
27 personnel des Nations Unies a été capturé, Mladic a menacé le commandant
28 Rupert Smith de la FORPRONU de les abattre à la télévision sauf si les
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1 attaques de l'OTAN cessaient. Pièce P2286, page 4. La FORPRONU s'est
2 entendue dire qu'un observateur des Nations Unies serait abattu pour chaque
3 bombardement supplémentaire de l'OTAN. Sur les ordres de Karadzic, ils ont
4 été utilisés comme boucliers humains, menottés dans des sites cibles, et
5 des images ont été diffusées au monde entier. Je cite là la pièce P2268,
6 page 4; la pièce P5013, page 2. Nous pouvons revenir sur certains propos
7 qui ont été mentionnés lors de ces séquences vidéo, je parle de la pièce
8 P2024.
9 L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : Les interprètes n'ont pas reçu la
10 retranscription de cette séquence vidéo.
11 [Diffusion de la cassette vidéo]
12 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
13 "Aujourd'hui, nos observateurs des Nations Unies ont vu des avions de
14 l'OTAN bombarder plusieurs cibles civiles et que plusieurs civils ont été
15 tués. Cela est très mal, c'est un crime contre l'humanité. Nous,
16 observateurs des Nations Unies, en appelons à l'OTAN, en particulier Rupert
17 Smith, pour qu'il sache que nos vies sont en vie [comme interprété].
18 Trois officiers des Nations Unies ont été attachés et menottés à des
19 poteaux dans le dépôt d'armes que l'OTAN a attaqué. Ils les ont utilisés
20 comme boucliers humains. Six autres observateurs militaires sont détenus
21 dans des circonstances similaires.
22 Nous confirmons que nous attendons le général Smith et sa
23 confirmation du fait que le bombardement s'arrêtera.
24 Observateur des Nations Unies : Si le bombardement reprend, j'ai reçu
25 instruction de vous dire que nous mourrons pour la cause de l'OTAN.
26 Soldat serbe de Bosnie : Il s'agit ici d'un soldat serbe de Bosnie à
27 l'appareil. Trois observateurs des Nations Unies se trouvent sur le site de
28 l'entrepôt. S'il y a d'autres bombardements, ce seront les premiers à
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1 partir."
2 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
3 M. TIEGER : [interprétation] Nous avons entendu les otages qui ont fait des
4 déclarations forcées. Nous avons entendu deux de ces otages. Pièce P2525,
5 page 8, pages du compte rendu 11 126 à -33. Il s'agit là, Madame, Messieurs
6 les Juges, d'une prise d'otage classique, purement et simplement. Le 3
7 juin, Vinkovic et Krajisnik ont discuté de l'objection qui sous-tendait
8 cette prise d'otage. Krajisnik a confirmé : "Oui, nous le faisons, nous
9 avons une méthode excellente. Nous avons toujours un atout dans notre
10 manche."
11 Karadzic était non seulement conscient et complice de la menace vis-
12 à-vis des otages, il a participé directement aux risques encourus par les
13 otages. L'affirmation de la Défense en vertu de laquelle Karadzic "pensait
14 et ordonnait au personnel des Nations Unies qui étaient des combattants
15 qu'ils seraient détenus de façon légitime comme des prisonniers de guerre
16 et non pas maltraités alors qu'ils étaient en détention" - paragraphe 3 665
17 - est manifestement indéfendable à la lumière du fait, premièrement, que
18 Karadzic a personnellement approuvé l'emploi des otages en tant que
19 boucliers humains -, P2137, page 2 - et en plaçant délibérément les otages
20 et les médecins en danger alors que les frappes aériennes se poursuivaient
21 encore. Le conseiller de Karadzic et son porte-parole, Zametica, à propos
22 duquel Karadzic a dit "il parle en mon nom" - P5607, page 7 - et qui a été
23 cité par la Défense pour étayer la proposition suivante : aucune menace à
24 l'encontre du personnel des Nations Unies n'avait été envisagé, a été cité
25 par Reuters en disant le 26 mai, le jour où les premiers otages ont été
26 pris, que "si l'alliance de l'OTAN souhaite continuer ses frappes
27 aériennes, dans ce cas il va falloir tuer les troupes onusiennes ici sur le
28 terrain." P6474. Le même jour, Zametica s'est rendu au mont Jahorina, au
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1 dôme qui abritait le radar, où Rechner et d'autres otages ont été menottés.
2 Alors que Rechner lui a demandé d'expliquer aux observateurs militaires des
3 Nations Unies les mauvais traitements, Zametica a répondu : "Ecoutez, les
4 temps ont changé." P2170, paragraphe 47.
5 Plus tard ce jour-là, Zametica a déclaré à la radio bosno-serbe que
6 dans le cas où il y aurait des attaques aériennes quelque part en RS, la RS
7 "traiterait l'ensemble de la FORPRONU, tout son personnel, comme des
8 ennemis." Et que même si jusqu'à présent les Bosno-Serbes ont fait preuve
9 d'une "certaine retenue", si les attaques se poursuivent, nous irons plus
10 loin. D1055 [comme interprété], page 5.
11 En outre, la Défense fait valoir que Karadzic n'a pas fait en sorte
12 que la poursuite de la détention du personnel des Nations Unies dépende de
13 la cessation des frappes aériennes, ce qui a été démontré est faux.
14 Paragraphe 3 359. Comme l'admet la Défense au paragraphe 2 722, avant la
15 prise d'otage, Karadzic a menacé l'OTAN que si elle poursuivait ses frappes
16 aériennes, "les forces onusiennes seraient attaquées ou, en tout cas,
17 détenues." P2265, page 3. Le 25 mai, Karadzic a ordonné à Milovanovic
18 d'activer ses décisions du commandement Suprême des années précédentes
19 "d'arrêter tout élément étranger sur le territoire de la RS et de le
20 traiter comme du personnel militaire et considérer qu'il s'agissait de
21 prisonniers de guerre et qu'il fallait les détenir en tant qu'otages
22 jusqu'à la fin de la guerre." D2149, pages 56 à 57.
23 Après avoir ordonné au personnel pris en otage, suite à une publicité
24 très importante entourant l'utilisation des otages comme boucliers humains
25 et des menaces contre eux, le 29 mai, Karadzic, de façon explicite, a
26 déclaré que la remise en liberté était "hors de question" à moins que le
27 Conseil de sécurité "n'abolisse le recours à la force." P5626, page 2. Le
28 même jour, Karadzic a écrit au secrétaire général en exposant ses
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1 exigences, et s'il s'agissait d'empêcher toute escalade à l'avenir, cela
2 signifiait que les Nations Unies devaient fournir des garanties et que les
3 Nations Unies et l'OTAN n'allaient plus recourir à la force. P5015. Dans
4 une conversation interceptée le lendemain - P5607 - Karadzic était d'accord
5 pour dire que sa décision consistait à détenir les otages "jusqu'à ce
6 qu'une solution finale soit trouvée." Le 1er juin, encore une fois, il avait
7 lancé en public qu'il y aurait une escalade et des représailles serbes si
8 les Nations Unies ordonnait davantage de frappes aériennes de l'OTAN.
9 D1056, page 2. L'objectif manifeste de la détention était de contraindre
10 l'OTAN de s'abstenir de la poursuite des frappes aériennes. Tel que décrit
11 au paragraphe 1 108 du mémoire en clôture de l'Accusation, Karadzic a
12 participé de près à la prise d'otage du début à la fin. Il a ordonné la
13 prise d'otage, il a publiquement déclaré qu'il les changeait d'endroits,
14 qu'il changeait souvent le lieu de détention des prisonniers et a averti
15 que toute tentative consistant à vouloir libérer les otages par la force
16 "constituerait un massacre et qu'il n'y aurait qu'une résolution politique
17 à cette question." Il a approuvé un ordre de la VRS de placer les otages à
18 des endroits qui constituaient des cibles potentielles pour prévenir toute
19 frappe aérienne et à contrôler la libération des otages en donnant des
20 ordres sur leur libération à différentes étapes. Etant donné la
21 participation de près de Karadzic dans l'ensemble de ce processus, il n'est
22 pas crédible d'imaginer qu'il n'était pas au courant ou qu'il n'appuyait
23 pas ces menaces qui étaient proférées par ses subordonnés au sein de la RS.
24 Effectivement, il a confirmé sa participation et son soutien aux actions de
25 la VRS après cette vidéo sur les otages. P5026.
26 L'INTERPRÈTE : La partie de la vidéo n'a pas été précisée par M. Tieger.
27 [Diffusion de la cassette vidéo]
28 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
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1 "Avec le recul, c'était certainement une très grave erreur que
2 d'avoir permis à notre peuple de capturer les soldats des Nations Unies,
3 que l'ensemble du monde puisse voir ces hommes enchaînés, masqués, et
4 d'autres hommes qui pointaient leurs fusils sur leurs têtes. C'était une
5 chose terrible. N'est-ce pas que c'était une erreur, très grande erreur ?
6 Karadzic : Effectivement. Une erreur donne lieu à une autre erreur. Et une
7 décision drastique provoque une autre réaction drastique. Il faut
8 comprendre qu'il s'agissait d'une réaction et non pas d'une action, que
9 nous étions sans espoir et impuissants. Nous devions faire quelque chose de
10 très drastique pour empêcher toute attaque à l'avenir et pour montrer à la
11 communauté internationale que nous étions coincés et près à nous défendre
12 par tous les moyens."
13 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
14 M. TIEGER : [interprétation] Karadzic a poursuivi dans son interview, il
15 insistait pour dire qu'il était en charge du commandement Suprême et qu'il
16 était derrière tout ce que faisait l'armée. Après avoir fièrement indiqué à
17 l'époque que ses forces étaient prêtes à se défendre "par tous les moyens"
18 et qu'il fallait prendre des mesures "très drastiques", ces propos lui
19 étaient attribués, et Karadzic, encore une fois, tente de façon fallacieuse
20 d'écarter sa responsabilité.
21 Messieurs les Juges, avant de conclure au titre du chef 11, je souhaite
22 faire quelques commentaires sur les questions de droit.
23 Au paragraphe 2 737 --
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Je vais demander au greffier
25 si nous pouvons encore poursuivre aujourd'hui.
26 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons poursuivre pendant dix
28 minutes encore aujourd'hui.
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1 M. TIEGER : [interprétation] Aux paragraphes 2 737 à 2 742, Karadzic répète
2 ses arguments qui ont été régulièrement rejetés par cette Chambre et
3 récemment par la Chambre d'appel, aux paragraphes 19 à 20 concernant la
4 décision au titre de l'article 98 bis. Karadzic reconditionne simplement
5 son argument en indiquant que les détenus n'étaient pas protégés parce
6 qu'il s'agissait de prisonniers de guerre, ignore le fait qu'ils ont été
7 menacés de mort ou pouvaient être blessés. A la question numéro 12, Madame,
8 Messieurs les Juges, vous avez demandé à l'Accusation de répondre à
9 l'affirmation de la Défense indiquant qu'il n'y a aucune source de droit
10 permettant de dire qu'une violation préalable du droit justifie une
11 représailles et qu'il doit s'agir dans ce cas-là d'une violation de jus in
12 bello, et que, deuxièmement, les représailles ne signifient pas qu'il y a
13 eu des actes commis contre les personnes détenues. Messieurs les Juges,
14 l'affirmation de la Défense est une erreur. Le premier élément de
15 représailles exercé par des belligérants a été énoncé par la Chambre
16 d'appel dans l'affaire Martic, paragraphe 263, ceci exige une violation
17 préalable du droit international et militaire. L'argument de Karadzic au
18 paragraphe 2 750 reflète un malentendu des termes employés en droit
19 international et le rapport entre ces termes. Les trois termes de lois du
20 conflit armé, de droit international humanitaire et jus in bello sont
21 interchangeables. Lorsque Karadzic fait remarquer au paragraphe 2750 que le
22 libellé des éléments présentés dans les affaires Martic et Kupreskic
23 s'applique aux violations antérieures du droit du conflit armé, il ne
24 comprend pas que ceci signifie également qu'il y a violation préalable du
25 droit humanitaire international ou jus in bello. Ce qui est différent en
26 termes de droit -- du recours à la force et jus ad bellum. Donc, il y a un
27 malentendu au niveau terminologique, il faut le corriger, et dans ce cas
28 les prémisses de Karadzic s'effondrent.
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1 En outre, l'accusé n'a pas clairement défini sur quoi il se fonde lorsqu'il
2 présente sa défense en parlant de représailles contre violation de jus ad
3 bellum. Par exemple, lorsqu'il place dans son contexte et qu'il cite les
4 manuels militaires sur lesquels se repose l'accusé, ceci ne permet pas de
5 trouver un fondement pour des représailles en réponse à jus ad bellum
6 lorsqu'il y a violation, en d'autres termes, de représailles en guise de
7 défense. Et dans certains cas, les interdire de façon explicite. De toute
8 façon, s'il y a des représailles à titre défensif, il doit y avoir un
9 fondement juridique permettant de dire qu'il y a violation de jus in bello
10 et que cela n'est pas pertinent face à l'accusation de prise d'otage dans
11 ce cas, parce que les conventions de Genève et le droit international
12 coutumier interdisent les représailles contre toute personne détenue. Le
13 principe fondamental qui sous-tend le droit de la est celui de la
14 distinction. Les conventions de Genève de 1929, articles 13 et 33, et les
15 troisième et quatrième conventions de Genève et l'article commun numéro 3
16 interdisent les représailles contre toute personne hors de combat. L'étude
17 du droit international coutumier du CICR, volume I, pages 519 à 520,
18 interdit toutes représailles de quelque forme que ce soit contre les
19 personnes hors de combat. L'absence d'une interdiction générale au niveau
20 du protocole additionnel I n'est pas pertinente. Pour autoriser des
21 représailles contre les personnes pour quelque raison que ce soit, cela
22 sape l'ensemble de la structure ou du fondement même du droit international
23 humanitaire. Même si on admet l'affirmation de Karadzic en vertu de
24 laquelle le personnel des Nations Unies était des prisonniers de guerre, ce
25 que n'accepte l'Accusation, l'article 13 des conventions de Genève déclare
26 de façon expresse que "les mesures de représailles contre des prisonniers
27 de guerre sont interdites."
28 Le droit sur ce point est tout à fait clair. Les représailles sont
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1 interdites contre les détenus.
2 En conclusion, la prise d'otage effrontée par Karadzic lorsqu'il a pris en
3 otage les membres des Nations Unies, lui et tous les autres de l'entreprise
4 criminelle commune, en les menottant et en les plaçant à des endroits où
5 ils constituaient des cibles potentielles et des boucliers humains, les
6 soumettant à des violences, sont des éléments qui permettent de prouver
7 qu'en mai 1995 Karadzic et les autres membres des dirigeants bosno-serbes
8 estimaient qu'ils étaient au-dessus de la loi.
9 Monsieur le Président, je vois que nous sommes à l'heure où il nous faut
10 terminer. Je suis disposé à répondre à certaines de vos questions, si vous
11 le souhaitez.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
13 Nous allons poursuivre demain matin à 9 heures.
14 --- L'audience est levée à 16 heures 07 et reprendra le mardi 30 septembre
15 2014, à 9 heures 00.
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