Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 30 septembre 2014

  2   [Réquisitoires]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Oui, Monsieur Tieger, vous avez un nouveau membre dans votre équipe

  8   aujourd'hui. Est-ce que vous ne pourriez pas la présenter.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Comme nous l'avons

 10   dit hier, Katrina Gustafson est venue aujourd'hui nous rejoindre.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 12   Vous pouvez poursuivre.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'avais indiqué

 14   hier que je fournirais des citations à huis clos. Ces citations ont déjà

 15   été données à la Défense, mais nous devrions passer à huis clos partiel de

 16   manière à ce que je puisse les donner à la Chambre.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passons à huis clos partiel, s'il vous

 18   plaît.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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  9   [Audience publique]

 10   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense avoir

 11   également signalé que je répondrais à une série des questions posées par la

 12   Chambre dans son écriture de vendredi. Je vais le faire maintenant. En ce

 13   qui concerne la question 5, à savoir la question de savoir quelle est

 14   raison pourquoi l'appropriation ou la confiscation ne figure pas à la note

 15   8, la réponse est non. En fait, simplement, nous ne prévalons pas de

 16   responsabilité criminelle pour ce qui est du pillage et de la confiscation

 17   dans les municipalités figurant dans cette note.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 19   M. TIEGER : [interprétation] En ce qui concerne la question 6, vous avez

 20   demandé comment l'Accusation combine les contradictions qui existent entre

 21   des faits jugés et les preuves en ce qui concerne le stade de football de

 22   Bosanski Novi. Pour nous, il n'y a pas de contradiction. Il y avait 700

 23   personnes qui ont été détenues dans ce stade, et nous avons un témoin qui a

 24   dans son témoignage dit que :

 25   "Nous n'avons pas été physiquement maltraités ni passés à tabac."

 26   P687, page 24, alors qu'un autre a témoigné, en tout cas, qu'il avait

 27   assisté à un passage à tabac.

 28   Dans des circonstances où des centaines de détenus sont retenus dans un


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  1   endroit très grand dans plusieurs endroits sur le terrain, parfois en

  2   dessous de la grande tribune, certains dans les vestiaires, pendant un mois

  3   et demi, eh bien, l'expérience d'une personne ne vaut pas l'expérience de

  4   toutes les personnes dans le stade, ce qui ne remet pas en cause la vérité

  5   des faits jugés, à savoir qui ont constaté l'existence de passages à tabac

  6   dans le stade. Et cela est corroboré par le fait qu'un des témoins a parlé

  7   de l'existence de passage à tabac.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tant que nous parlons de cela, est-ce

  9   que vous pourriez un petit peu développé. Imaginons que les preuves dans

 10   notre cas sont les mêmes preuves utilisées par la Chambre qui a abouti aux

 11   jugements dont il était question ou dont il est question, imaginons que ces

 12   preuves ne soient pas cohérentes ou soient contradictoires entre elles. Que

 13   diriez-vous dans un tel cas ?

 14   M. TIEGER : [interprétation] Tout d'abord, il se trouve que je n'ai pas

 15   envisagé le fait que les Juges de la Chambre évaluent ces faits jugés et

 16   les regardent de près ce qui sous-tend de ces faits parce que cela dépend

 17   de la manière dont nous présentons les arguments en l'espèce.

 18   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 19   M. TIEGER : [interprétation] Mais il faudrait que j'analyse ceci dans son

 20   contexte, Monsieur le Président, non pas dans ce contexte-ci, mais je ne

 21   suis pas au courant de circonstances, en tout cas, en ce qui nous concerne

 22   dans lesquelles ce scénario se présente. Vous avez identifié, par exemple,

 23   un autre événement à la question 8 à Sokolac, où vous soulevez ce scénario

 24   dans un contexte juridique -- et ce fait dans un contexte juridique. Et

 25   j'allais y venir, mais je vais en parler maintenant parce que je me

 26   concentre sur les questions qui sont liées aux faits jugés identifiés par

 27   les Juges de la Chambre et à mon sens, en fait, l'analyse ou l'hypothèse

 28   n'a pas été présentée ici, en tout cas, s'agissant de Sokolac.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc l'Accusation est contre l'idée que

  2   les Juges de la Chambre analysent les sources des conclusions précédentes

  3   des autres Chambres s'agissant de faits jugés, je veux dire, ou en tout cas

  4   de son incidence ?

  5   M. TIEGER : [interprétation] Je ne suis pas en train de dire que je suis en

  6   faveur ou contre, Monsieur le Président. La plupart des cas de ce genre

  7   lorsqu'ils se sont présentés, cela est vraiment à l'avantage des faits

  8   présentés. Dans le cas du stade de football, j'ai analysé cela pour essayer

  9   de comprendre ce qui avait derrière, et on parle de certains individus et

 10   de passages à tabac qui ont été passés à tabac dans le stade et une

 11   personne qui a perdu un œil, mais je ne l'ai pas cité parce que je ne

 12   pensais pas que les Juges de la Chambre allaient aborder cette question-là.

 13   Et nous avons abordé les faits correspondant à une présomption, et nous

 14   nous sommes à l'origine concentrés sur le fait de savoir si oui ou non il y

 15   a des éléments de preuve crédibles au vu de l'ensemble des éléments de

 16   preuve, mais concernant cette présomption, c'est quelque chose que nous

 17   avons pas retrouvé dans les faits évoqués à la question 6 et non plus dans

 18   la question liée au fait et au scénario de Sokolac à la question 8.

 19   Mais, bon, moi, je suis disposé à analyser ceci davantage. Il y a une

 20   question qui est soulevée et ce serait difficile pour les Juges de la

 21   Chambre, semble-t-il, même si vous connaissez les faits de l'espèce et les

 22   informations qui sont citées, je pense que la Chambre de première instance

 23   s'est fondée sur l'ensemble des éléments de preuve également. Donc, s'il

 24   s'agit d'apprécier la manière dont les différents éléments de preuve

 25   individuellement ont été appréciés et soupesés, je pense que ça serait un

 26   exercice assez difficile pour une autre Chambre.

 27   Bon, la question 8, j'y ai fait allusion à plus de deux reprises, je

 28   vais l'aborder maintenant rapidement. En fait, il s'agit des éléments de


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  1   preuve entendus à partir de l'article 92 bis et des faits énumérés dans les

  2   annexes 14.2 en relation aux éléments de preuve 92 bis qui n'ont pas été

  3   corroborés. Par rapport à l'événement de Sokolac qui est corroboré ici par

  4   une série d'éléments de preuve que nous avons évoqués ici dans les faits

  5   énumérés dans les annexes, cela se trouve dans notre tableau et comprend le

  6   témoin à décharge Dragomir Obradovic qui est confirmé dans cet incident

  7   D3175, paragraphe 21. Alors, pour ce qui est de l'emploi ou l'utilisation

  8   des éléments de preuve non corroborés en vertu de l'article 92 bis, aux

  9   fins des constatations factuelles, Mme Pack a l'intention de les aborder

 10   lors de ses arguments.

 11   Si cela vous convient, Monsieur le Président, je vais passer à la

 12   question numéro 7.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, le fait énuméré dans les annexes

 14   14.2, s'il vous plaît. Alors, il s'agit de quelle annexe ? Connaissez-vous

 15   le numéro de l'annexe, s'il vous plaît ? C'est un C, je crois ?

 16   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 17   M. TIEGER : [interprétation] Je suppose que c'est un A, mais je vais le

 18   rechercher. Nous allons vérifier et revenir vers vous avant de conclure.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est un A. C'est exact.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Oui, merci.

 21   Madame et Messieurs les Juges, à la question 7, vous avez demandé à ce que

 22   nous présentions nos arguments s'agissant des certificats de décès de

 23   Brcko. Tout d'abord, nous reconnaissons qu'il n'existe aucun élément de

 24   preuve établissant un lien entre la victime citée au P4411 et lié à

 25   l'événement B5.1. La victime qui est nommé à la pièce P4412, M. Ahmetovic -

 26   - Ahtovic [phon], pardonnez-moi, faisait partie des victimes qui ont été

 27   enterrées dans une fosse commune à Brcko, qui figure sur la liste et le

 28   rapport du 22 octobre d'Avlijas. Confer pièce P1607, page 14. Ristanic


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  1   était d'accord pour dire et il l'a dit dans sa déposition que les victimes

  2   citées dans ce rapport étaient des civils non-serbes qui avaient été tuées

  3   à Brcko, y compris au camp de Luka et dans des endroits analogues. Il a

  4   également dit dans sa déposition qu'il a dit cela à Avlijas de façon "tout

  5   à fait claire". Confer pièce P3023, paragraphes 220 à 223. Et cela

  6   reviendra aux Juges de la Chambre de déterminer si le lien est suffisant à

  7   cette fin, mais c'est, en tout cas -- voilà l'information que nous avons à

  8   vous communiquer s'agissant de la victime qui est citée à la pièce P4412.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'entends pas la traduction

 10   française.

 11   L'INTERPRÈTE : Est-ce que vous m'entendez maintenant ? Est-ce que vous

 12   m'entendez ? Oui. Je vous prie de m'excuser.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il semblerait que ce soit résolu

 14   maintenant.

 15   Veuillez poursuivre. Un instant, s'il vous plaît.

 16   Alors, je souhaite savoir si la Défense a des observations à faire

 17   concernant cette question 7, à savoir si vous êtes d'accord avec le lien

 18   qui est établi ?

 19   M. ROBINSON : [interprétation] Il faudrait que nous vérifions cela

 20   concernant le deuxième témoin qui est cité, nous allons l'aborder lors de

 21   la présentation de nos arguments.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Et finalement, Monsieur le Président, les

 24   Juges de la Chambre ont posé une question à la page 13 si l'Accusation a

 25   des arguments à faire valoir concernant l'éventuel caractère atténuant de

 26   l'accord Holbrooke concernant la fixation de la peine à l'égard de

 27   l'accusé. Et je souhaite rappeler aux Juges de la Chambre quels ont été nos

 28   arguments le 15 janvier 2014 portant sur l'accord Holbrooke dans lequel


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  1   l'Accusation a précisé qu'alors que l'accusé s'est volontairement écarté de

  2   la vie publique et que cela pouvait constituer un élément atténuant,

  3   néanmoins, la gravité des accusations en l'espèce sont importants. Le fait

  4   que ceci aurait été conditionné au fait qu'il en aurait tiré un avantage

  5   personnel, un avantage personnel, à savoir toute immunité contre des

  6   poursuites minimise à mon sens tout facteur atténuant dans ce cadre-là.

  7   Donc, j'en ai terminé eu égard à la présentation de mes arguments et des

  8   questions des Juges posées par les Juges de la Chambre, et Mme Pack [comme

  9   interprété] va aborder les questions des Juges de la Chambre en rapport

 10   avec la campagne de terreur à Sarajevo.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 12   Bonjour, Madame Gustafson.

 13   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Alors, dès le début de l'année 1992 et

 14   jusqu'à la fin de l'année 1995, le monde a observé, alors que la population

 15   civile de Sarajevo essuie des tirs tous les jours, terrorisée par une

 16   campagne de pilonnages et de tirs embusqués lancée et poursuivie par

 17   Karadzic et les forces qu'il commandait et contrôlait.

 18   Les risques d'être touché par une balle ou un obus ont transformé les

 19   décisions de chaque jour en décision de vie ou de mort, comme l'a dit l'un

 20   des civils de Sarajevo, Sabina Sabanic :

 21   "C'était un risque de se déplacer à pied, de prendre le tram, de

 22   rester chez soi. Dans tous les cas, il fallait tous les jours prendre des

 23   risques." La page P4492 [comme interprété], page 10.

 24   Le 23 novembre 1994, elle a été touchée en prenant ce risque, à

 25   savoir en prenant le tram pour rentrer chez elle pour rentrer du travail.

 26   Les civils cherchant à se soustraire aux balles des tireurs sont

 27   devenus l'image emblématique de Sarajevo. Vous pouvez voir ici des images

 28   qui montrent les civils qui risquent leur vie, tout simplement à mettre


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  1   leur vie en jeu en tout simplement cherchant à traverser la rue.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  4   "A Sarajevo, les carrefours peuvent être mortels, il faut les

  5   emprunter rapidement, car ils offrent une ligne de feu aux tireurs

  6   embusqués dans les collines aux alentours. Ce sont des cibles mouvantes et

  7   des infirmes et les personnes âgées sont obligées de l'accepter…"

  8   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Et même lorsqu'ils n'étaient pas dans la

 10   ligne de feu des tireurs embusqués, les civils étaient exposés aux

 11   pilonnages. Des obus pouvaient frapper à tout moment, à tout endroit, comme

 12   on peut le voir ici au P2005, qui montre un obus qui tombe sur l'artère

 13   commerciale la plus importante en juin 1992.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Un obus est tombé. Malgré cela, les civils sont dans les rues et les

 17   mortiers tuent aléatoirement autour d'eux…"

 18   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est une illustration parfaite de ce que

 20   le KDZ185 décrit comme étant "des obus qui peuvent tomber n'importe où, le

 21   but étant de maintenir un état de terreur". P6060, paragraphe 8.

 22   Même chez eux, les gens n'étaient pas en sécurité. Ziba Subo décrit

 23   l'attaque G10 à la bombe aérienne modifiée qui a détruit sa maison et tué

 24   son cousin ou sa cousine.

 25   "Tout à coup, mes fenêtres se sont obscurcies, comme si une éclipse était

 26   tombée. J'ai levé la tête et des objets me tombaient dessus, des briques,

 27   du plâtre. La maison s'écroulait. J'ai senti tout simplement la douleur de

 28   l'impact des objets et j'étais enterré sous les décombres. Et j'ai entendu


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  1   les enfants qui m'appelaient et qui pleuraient. Je leur ai crié de s'enfuir

  2   et de se mettre en sécurité." P488, pages 7 à 8.

  3   Il s'agit de l'attaque qui a été présentée à Karadzic par l'état-major

  4   principal comme étant une riposte adéquate à "des activités ennemies".

  5   P5943, page 5.

  6   Et l'image ici, P1526, montre l'hôpital d'Etat de Sarajevo qui est

  7   dévastée, ce qui montre qu'il n'y avait aucun endroit sûr à Sarajevo. Asida

  8   Fazlic a expliqué les blessures atroces qu'elle a subies lorsqu'un obus a

  9   explosé au troisième étage de ce même hôpital où elle se trouvait, P470.

 10   Cette attaque a eu lieu dans la nuit du 28 à 29 mai 1992 lors du

 11   bombardement de la ville, commandé personnellement par Mladic et soutenu

 12   par Karadzic. Pour les détails, veuillez vous reporter à notre mémoire en

 13   clôture, paragraphe 727.

 14   Ceux qui ont connu cette campagne ont expliqué que son message était clair

 15   : Vous n'êtes jamais en sécurité à aucun moment, à aucun endroit. Par

 16   exemple, KDZ079, P480, paragraphes 21, 22; Bell P1996, paragraphe 71; Mole

 17   P1426, paragraphe 9. En d'autres termes, la terreur. Et tous les témoins,

 18   les uns après les autres, des militaires des Nations Unies chevronnés et du

 19   personnel civil ont observé la campagne jour après jour et ont pu expliquer

 20   que son but était de répandre la terreur parmi la population civile de

 21   Sarajevo. Et je me réfère ici aux paragraphes 608 et 784 de notre mémoire

 22   en clôture.

 23   Karadzic a supervisé cette campagne de terreur, et avec d'autres, tels que

 24   Mladic, Galic et Dragomir Milosevic, a utilisé la terreur comme outil

 25   stratégique pour influencer les négociations, riposter à des événements

 26   jugés défavorables, intensifier, relâcher les pressions politiques, et

 27   punir la population.

 28   Comme Anthony Banbury l'a expliqué :


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  1   "Mladic et Karadzic avaient toute possibilité de moduler le niveau de

  2   terreur. Ils pouvaient améliorer les conditions, par exemple, en ouvrant

  3   l'aéroport, en autorisant l'approvisionnement d'articles commerciaux, en

  4   fournissant du gaz, en mettant fin aux tirs embusqués, aux pilonnages, et

  5   ils pouvaient également empirer la situation en faisant le contraire. Ces

  6   hommes ont montré qu'ils détenaient ces pouvoirs en les utilisant pour

  7   influencer les négociations". P2451, paragraphe 200.

  8   Les témoins, les uns après les autres, ont également fait état de cette

  9   observation, paragraphes 608, 609 de notre mémoire en clôture, et d'autres

 10   détails relatifs à cette campagne sont également décrits dans notre mémoire

 11   en clôture.

 12   Dans ce contexte, je voulais à présent répondre à certains des arguments

 13   avancés par la Défense dans son mémoire en clôture. Je voulais commencer

 14   par répondre aux arguments de la Défense en ce qui concerne la

 15   responsabilité de l'accusé vis-à-vis des crimes de la campagne. Ensuite, je

 16   parlerai des arguments de la Défense au sujet de la nature de la campagne,

 17   pour conclure en répondant à certains arguments de la Défense en ce qui

 18   concerne les faits énumérés dans les annexes.

 19   En tant que président de la RS et commandant suprême de ses forces armées,

 20   Karadzic a mené une campagne de terreur pendant trois ans et demi, tout en

 21   détournant le flux incessant des protestations. Son intention des crimes de

 22   terreur, meurtres et attaques illégales, et sa responsabilité comme que

 23   participant à l'entreprise criminelle commune relative à ces crimes découle

 24   de son rôle central dans cette campagne. Et je renvoie à nos arguments à ce

 25   sujet, par exemple, les paragraphes 614 à 652 et 797 de notre mémoire en

 26   clôture. Aujourd'hui, comme je l'ai dit, je me concentrerai sur certains

 27   des arguments avancés par la Défense en ce qui concerne le rôle de Karadzic

 28   dans cette campagne et l'intention vis-à-vis des crimes.


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  1   La Défense, en dépit des preuves accablantes démontrant le contraire,

  2   avance que Karadzic n'était pas au courant de cette campagne de pilonnage

  3   et de tireurs embusqués qui se déroulait tout près de son QG à Pale. Nous

  4   avons décrit les protestations internationales dans notre mémoire qui ont

  5   été adressées à Karadzic, paragraphes 644 à 649 dans notre mémoire. Et aux

  6   paragraphes 2 306 à 2 314 de son mémoire, la Défense semble dire que ces

  7   protestions ont été si peu fiables, voire erronées, qu'elles n'informaient

  8   pas Karadzic des crimes et que, de ce fait, il pouvait les ignorer.

  9   Toutefois, les preuves invoquées par la Défense pour étayer cette

 10   affirmation prouvent tout le contraire.

 11   Par exemple, au paragraphe 2 307, la Défense dit que :

 12   "Plusieurs incidents démontrent l'incapacité des forces internationales à

 13   dresser des rapports adéquats de la situation telle qu'elle était à

 14   l'époque."

 15   La Défense invoque deux incidents. Notamment, elle dit que lors de son

 16   témoignage sur le pilonnage de la télévision en avril 1992, Colm Doyle ne

 17   savait pas où les unités militaires étaient déployées. Cela, selon la

 18   Défense, "est une indication claire des défaillances des procédures

 19   d'établissement des rapports."

 20   Cela trahit le témoignage de Doyle, parce qu'à la page 2 721 du compte

 21   rendu d'audience, à une question de savoir à quelle partie appartenait un

 22   groupe paramilitaire donné, il a répondu que savoir cela ne faisait pas

 23   partie de son rôle. Mais il n'a pas dit cela. Il n'a pas dit qu'il ne

 24   savait pas où les unités militaires se trouvaient. Plus important, la

 25   Défense fait abstraction du fait que Karadzic a admis devant Doyle que les

 26   soldats avaient attaqué la télévision, et ensuite, il a dit qu'ils

 27   l'avaient fait sans sa permission, P917, paragraphes 77 et 78. Et donc,

 28   même s'il avait été vrai que Doyle ne savait pas où se trouvaient les


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  1   unités militaires, cela ne porte en rien atteinte à la crédibilité ou la

  2   fiabilité des protestations adressées à Karadzic.

  3   D'autres cas de rapport non fiable, c'est qu'en juillet [comme interprété]

  4   Wilson n'a pas pu observer des positions à partir desquelles les tirs

  5   étaient faits, un jour particulier en mai 1992. Mais il faut dire que cette

  6   preuve ne fait état ou ne permet de faire apparaître aucun défaut

  7   systémique dans les rapports internationaux. Il s'est rendu dans des zones

  8   autour de Sarajevo, P1029, paragraphe 49. Wilson a décrit la procédure

  9   détaillée suivie par les observateurs internationaux pour faire en sorte

 10   que les informations étaient exactes.

 11   Et c'était le cas avec Doyle, Wilson explique que lorsqu'il a parlé à

 12   Karadzic du pilonnage aléatoire de Sarajevo par les forces serbes, que le

 13   général Wilson avait observé lui-même, Karadzic n'a pas nié cela. Il a

 14   simplement dit que c'était justifié. Il disait :

 15   "Ils défendaient le territoire serbe."

 16   Donc ces deux exemples de la Défense sont deux exemples où, si vous

 17   voulez, dès le début du conflit Karadzic a répondu aux protestations

 18   internationales en reconnaissant la responsabilité serbe. Cela est

 19   suffisant pour rejeter tout l'argument de la Défense selon lequel Karadzic

 20   n'était pas suffisamment informé des crimes par les observateurs

 21   internationaux.

 22   Comme le montrent les exemples aux paragraphes 628 à 635 de notre

 23   mémoire, Karadzic répondait aux protestions régulières des observateurs

 24   internationaux avec des reconnaissances, mais également de fausses

 25   promesses, des justifications, ainsi que des démentis et des menaces, selon

 26   les circonstances. La nature trompeuse de telles réponses est également

 27   illustrée par sa réaction au général Morillon le 30 mai 1992, lorsque le

 28   général Morillon lui demande de cesser le bombardement de Sarajevo.


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  1   Karadzic commence par justifier ce pilonnage par une réaction excessive de

  2   forces insuffisamment préparées qui n'étaient pas sous le contrôle des

  3   supérieurs.

  4   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à l'oratrice de ralentir le compte

  5   rendu n'arrive pas à suivre.

  6   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Dans notre effort pour réfuter le nombre

  7   très important de preuves, de protestations adressées à Karadzic. Aux

  8   paragraphes 2 308 à 2 313, Karadzic déclare que les observateurs déjà

  9   étaient soit des victimes, soit étaient partis au conflit. 

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un moment. Vous avez entendu la demande

 11   des interprètes. Examinez la page 13, ligne 9 du compte rendu d'audience :

 12   "La nature mensongère de ces réponses est illustrée par sa réaction vis-à-

 13   vis du général Morillon lorsque Morillon lui a fait part de l'appel du

 14   secrétaire général pour mettre fin aux bombardements de Sarajevo. Ensuite,

 15   il s'est contredit en…"

 16   Et puis, il a quelque chose qui manque dans le compte rendu d'audience.

 17   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Ensuite, il s'est contredit en disant

 18   qu'il était en mesure de faire cesser le bombardement et il a contacté

 19   Mladic à cet effet.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous ne m'avez pas dit que ce

 21   n'était pas une réaction professionnelle ou quelque chose comme ça ?

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Et les preuves selon lesquelles Karadzic

 23   avait soutenu la proposition de Mladic de réaliser ce bombardement, que

 24   Mladic l'avait commandé. Paragraphe 727 de note mémoire.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. Je vous prie de continuer,

 26   mais vous savez que vous devriez ralentir.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci. Et la

 28   dernière ligne : Cela confirme que l'affirmation au sujet de forces


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  1   inexpérimentées était tout à fait fausse.

  2   Au paragraphe 2 308 [comme interprété], la Défense invoque les preuves du

  3   général Rose pour dire que "la fausse image présentée par les Musulmans

  4   étaient un facteur qui contribuait à un manque d'objectif de la FORPRONU."

  5   Le généralement n'a pas dit cela. Il a seulement confirmé que c'était le

  6   point de vue des Serbes de Bosnie, page 7 290. La Défense continue et

  7   trahit grossièrement le témoignage du général Rose en disant qu'il soutient

  8   l'affirmation selon laquelle "la FORPRONU a facilité, a participé à

  9   l'acheminement clandestin d'armes ou d'équipement militaire des Musulmans

 10   de Bosnie."

 11   Comme vous pouvez le voir ici dans le témoignage invoqué, Rose a

 12   catégoriquement nié cette thèse : 

 13   "Premièrement, je démens formellement que les Nations Unies aient facilité,

 14   voire participé à l'acheminement clandestin d'armes ou d'équipement

 15   militaire vers l'autre partie."

 16   Et quelle était la position effective de Rose en ce qui concerne

 17   l'objectivité des Nations Unies, ce que l'on ne trouve pas, d'ailleurs,

 18   dans le mémoire de la Défense ?

 19   "Nous avons agi de manière correcte et impartiale et dire autre chose

 20   rendrait vain les sacrifices de ceux qui sont morts lors de la mission de

 21   maintien de la paix des Nations Unies, et ce ne serait pas opportun."

 22   Compte rendu d'audience de page 7 532.

 23   Au paragraphe 2 312, la Défense invoque Fraser, Thomas, Mole et Wilson pour

 24   défendre la thèse selon laquelle l'ABiH tirait depuis des zones civiles

 25   afin de provoquer une riposte de la SRK que l'on pouvait ensuite reprocher

 26   aux Serbes. Ces témoins ont clairement reconnu que cela s'est produit, et

 27   ça a été condamné par les Nations Unies. Mais, toutefois, ces témoins ont

 28   également décrit la riposte indiscriminée des Serbes à de tels tirs, qui


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  1   reflètent clairement une intention de cibler les civils et les objectifs

  2   civils. Mole, par exemple, a décrit cette réponse comme étant "inutile et

  3   dépassant de très loin ce qui eut été nécessaire pour détruire la cible

  4   avec des tirs limités à la source des tirs et une durée telle qu'il

  5   subsistait peu de chance que les unités ennemies soient toujours au même

  6   endroit." Compte rendu d'audience page 5 892 à 5 893.

  7   Le général Fraser a parlé d'un cas où les Serbes ont tiré plus de 20 obus

  8   au hasard dans la ville en riposte à quelques tirs de l'ABiH sur la caserne

  9   de Lukavica; page 8 006 à 8 007 du compte rendu d'audience. Et Wilson a

 10   observé les Serbes riposter aux trois tirs de mortier de l'ABiH en tirant

 11   200 obus sur une large zone urbaine, incendiant des appartements, une

 12   riposte décrite par lui comme étant "entièrement disproportionnée", et

 13   "typique de ce qui s'est passé à l'époque". Pages 4 132 à 4 133 du compte

 14   rendu d'audience.

 15   La Défense a passé sous silence ces preuves, ces preuves qui montrent que

 16   les observateurs internationaux à Sarajevo n'étaient pas dupes, ni dupes

 17   des tirs de l'ABiH visant à provoquer la riposte de la SRK pas plus qu'ils

 18   n'étaient dupes de l'utilisation par la SRK de ces tirs comme prétexte pour

 19   terroriser la population à l'aide de pilonnages au hasard et inutile.

 20   Compte tenu de la masse de protestation adressée directement à Karadzic et

 21   ses collaborateurs leurs de la campagne, paragraphes 644 à 649, Karadzic

 22   affirme aux paragraphes 2 962 à 2 966, qu'il n'est pas informé de par le

 23   biais de la chaîne hiérarchique de la SRK d'actes de terreur ou d'attaques

 24   illégales. Donc, cette affirmation ne l'aide pas à soutenir la thèse selon

 25   laquelle il n'était pas au courant de la nature de la campagne de terreur.

 26   Au contraire, l'absence de rapports, compte tenu du fait que d'une part le

 27   système de communication militaire fonctionnait bien et était complexe, et

 28   compte tenu également des preuves accablantes selon lesquelles la SRK


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  1   pilonnait et tirait sur les civils tous les jours pendant quatre ans, eh

  2   bien, donc, cette absence démontre que ces attaques étaient tout simplement

  3   considérées comme routinières et acceptées à tous les niveaux de la chaîne

  4   hiérarchique.

  5   Les efforts et tentatives de la Défense, au paragraphe 2 962, 2 963

  6   de faire valoir le fait que les communications de la SRK étaient

  7   détériorées au point qu'on pouvait parler de "chaos" se fonde sur des

  8   exagérations grossières et des exactitudes. Par exemple, au paragraphe 2

  9   963, il est indiqué que des "problèmes au sein du système de commandement

 10   et de contrôle ont subsisté jusqu'à la fin de la guerre." La Défense avait

 11   deux preuves; premièrement D5841 [comme interprété], un avertissement du

 12   commandant de la SRK au sujet de l'absence de rapports mensuels sur le

 13   moral des troupes. En d'autres termes, elle se concentre sur une

 14   défaillance mineure, ce qui indique que le système fonctionnait bien.

 15   Deuxième preuve, le témoignage de Dragomir Milosevic au sujet de ce

 16   document, et ce témoignage confirme la même chose. A la page 32 879, il a

 17   déclaré :

 18   "Je sais que le système était en place et pouvait garantir notre

 19   fonctionnement normal, et tout type d'intervention de cette nature était

 20   tout simplement une expression de la nécessité d'améliorer ou d'en éliminer

 21   les défauts. Comme je sais où a abouti toute la situation, je sais que le

 22   système, à la fin, fonctionnait parfaitement."

 23   Voici un nouvel exemple où les preuves de la Défense contredisent la

 24   thèse même qu'elles sont censées étayer. Et comme le montrent les preuves

 25   aux paragraphes 676 à 697 de notre mémoire, la SRK bénéficiait de

 26   communication, de contrôle, et commandement excellent pendant toute la

 27   durée de la campagne.

 28   Karadzic a utilisé ce système de commandement, de contrôle, et de


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  1   communications pour contrôler directement l'intensité de la campagne de

  2   pilonnage et de tirs embusqués pour réaliser ses objectifs stratégiques.

  3   Par exemple, le 7 février 1994, Karadzic a promulgué cet ordre, P3053,

  4   destiné à l'état-major principal, au commandant de la SRK, et aux brigades

  5   de SRK. Dans le préambule, Karadzic explique les circonstances sont telles

  6   que l'existence même de l'Etat serbe est menacée. Point 2 du préambule. De

  7   ce fait, il ordonne un contrôle strict des ripostes. Il ordonne de ne viser

  8   que des cibles militaires et d'empêcher le pilonnage non-contrôlé. Karadzic

  9   a donné cet ordre pour répondre à la menace de frappes aériennes de l'OTAN

 10   à la suite du massacre de Markale I qui a généré une indignation

 11   internationale.

 12   Le jour même où Karadzic a donné cet ordre, Akashi lui avait dit avec

 13   fermeté que s'il n'accepte pas un cessez-le-feu, les Nations Unies

 14   cèderaient à la pression internationale et consentiraient à des frappes

 15   aériennes de l'OTAN.

 16   Milovanovic a immédiatement exécuté l'ordre Karadzic au P4493, qui a été

 17   promulgué le jour même.

 18   Deux jours plus tard, le 9 février, le jour où l'OTAN a exigé que les

 19   Serbes de Bosnie retirent leurs armements lourds ou s'exposent à une

 20   intervention militaire de l'OTAN, les Serbes de Bosnie ont consenti un

 21   cessez-le-feu le lendemain, en soi compris un accord de retrait des

 22   armements lourds. P826, pages 2 et 4. Comme Krajisnik l'a dit à l'époque : 

 23   "Nous allons faire n'importe quoi pour éviter les frappes aériennes, sauf

 24   capituler." P827, page 6.

 25   Et le cessez-le-feu a également été immédiatement mis en œuvre, comme le

 26   montre cet ordre du SRK du 10 février, P1642.

 27   Elle porte mise en œuvre explicite du cessez-le-feu et ordre à toutes les

 28   unités de la SRK de cesser les tirs d'artillerie, de chars d'infanterie et


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  1   de tireurs embusqués à 12 heures le 10 février 1994. Et l'efficacité de cet

  2   ordre était tangible. Sept jours plus tard, la FORPRONU a indiqué dans un

  3   rapport :

  4   "Sarajevo est calme. Le cessez-le-feu est le plus efficace.

  5   "Pour la première fois depuis le début de la guerre, Sarajevo est

  6   calme, et elle l'a été depuis que l'OTAN a menacé d'utiliser les frappes

  7   aériennes contre les armements lourds autour de la ville." P827, pages 1 à

  8   2.

  9   Comme tous ces documents le démontrent, lorsque Karadzic était le dos

 10   au mur, lorsqu'une intervention militaire occidentale était imminente, il

 11   ne disait plus qu'il ne pouvait plus contrôler ses artilleurs rebelles ou

 12   se soustraire aux critiques avec de fausses promesses ou ni avancer des

 13   justifications. Il n'était plus gêné par des routes en mauvais état, ou de

 14   mauvaises lignes téléphoniques, ou des coupures de courant. Lui, le

 15   commandant suprême, utilisait son autorité et son contrôle pour mettre fin

 16   de manière provisoire à cette campagne de terreur.

 17   Au paragraphe 2 982 de son mémoire, la Défense évoque l'ordre après

 18   Markale de Karadzic visant à mettre fin ou faire cesser le pilonnage. Selon

 19   la Défense, cet ordre montre que Karadzic ordonnait le respect du droit

 20   international et la protection des civils. Mais, au contraire, cet ordre et

 21   toutes les preuves y afférentes montre que Karadzic aurait pu mettre fin à

 22   la campagne de terreur, il aurait pu mettre fin aux souffrances

 23   quotidiennes de la population civile de Sarajevo. Mais ce qu'il a fait

 24   plutôt, c'est relâcher de manière provisoire pour éviter les frappes

 25   aériennes, facilitant sa poursuite. Il a continué à présider à cette

 26   campagne de terreur pendant deux années supplémentaires quasiment, jusqu'à

 27   ce qu'elle atteignent son paroxysme au moment du printemps et de l'été de

 28   1995, lorsque les forces serbes ont intensifié le pilonnage et les tirs


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  1   embusqués et lancé une série de bombes aériennes modifiées sur la ville en

  2   riposte à des offensives de l'ABiH et des frappes aériennes de l'OTAN.

  3   D'autres exemples où Karadzic exerce un contrôle direct sur le

  4   pilonnage et les tirs embusqués sont invoquées par la Défense et

  5   correspondent avec le fait, qu'en réalité, il modulait la campagne. Par

  6   exemple, au paragraphe 2 983, la Défense indique que c'est à la pièce

  7   P4804, l'ordre d'août 1993 au colonel Prstojevic et au général Gvero de

  8   Karadzic est que "aucun des miens ne doit aller vers la ville" mais cela

  9   démontre également la tentative de Karadzic selon la Défense de respecter

 10   la droit international et de protéger les civils. La Défense passe sous

 11   silence le fait que la justification explicite de Karadzic de cet ordre

 12   n'est pas la protection des civils de Sarajevo mais la protection des

 13   Serbes de Bosnie. Pour reprendre ses termes, c'est ce qu'il a dit à Gvero

 14   lorsqu'il émit cet ordre, si les obus tombaient sur Sarajevo "ce serait le

 15   plus grand malheur qui puisse tomber sur nous en ce moment." P4804. La

 16   Défense passe également sous silence P825, l'exécution par Galic qui date

 17   du même jour, où il cite expressément la menace l'intervention aérienne de

 18   l'OTAN et les négociations politiques en cours comme étant la justification

 19   du fait qu'il faut cesser de pilonner Sarajevo. Comme nous l'avons dit dans

 20   notre mémoire au paragraphe 624, il s'agit d'un autre exemple où Karadzic

 21   exerce un contrôle opérationnel direct sur le pilonnage de Sarajevo afin

 22   d'éviter les frappes aériennes.

 23   De la même manière, l'ordre de Karadzic, D4510 cité au paragraphe 2

 24   971 du mémoire de la Défense, est lié à une pression extérieure comme le

 25   prouve D172.

 26   Donc, une fois de plus, les preuves même invoquées par la Défense

 27   pour prouver que Karadzic cherchait à protéger la population civile montre

 28   tout le contraire. Cela confirme le nombre important d'autres preuves qui


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  1   démontrent que Karadzic et d'autres membres de l'équipe dirigeante des

  2   Serbes de Bosnie modulaient le niveau de terreur, vers le haut et vers le

  3   bas, pour influencer les négociations, sanctionner les Musulmans à la suite

  4   d'actions militaires de l'ABiH ailleurs ou pour réaliser leurs objectifs

  5   politiques d'autres manières. Et je renvoie au paragraphe aux paragraphes

  6   609 ainsi que 620 et 627 de notre mémoire en clôture.

  7   Aux paragraphes 2 997 à 3 000, la Défense affirme que Karadzic a pris

  8   des mesures pour commanditer des enquêtes et sanctionner les crimes liés au

  9   pilonnage et aux tirs embusqués. Les prétendues "exemples" de la Défense

 10   d'enquêtes citées au paragraphe 2 997 ne révèlent pas, en réalité, de tels

 11   cas. Aucun des quatre documents invoqués ne font mention de faits de tirs

 12   sur des civils. Au même paragraphe, la Défense invoque la déclaration de

 13   Milosevic selon laquelle il a soumis 70 rapports criminels, tout en

 14   s'abstenant de relever que lui-même a dit ne pas être capable si l'un de

 15   ces rapports portait sur des faits de tirs sur des civils à Sarajevo.

 16   T33212.

 17   Lors de son discours devant l'assemblée de novembre 1994, P1403, et invoqué

 18   au paragraphe 3 000 du mémoire de la Défense, eh bien, Karadzic, au

 19   contraire de ce que dit la Défense, ne dit pas en fait "qu'il démontrait

 20   qu'il faisait tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher le pilonnage

 21   illégal de la ville". En fait, plutôt que de prendre un passage tel qu'il

 22   est cité par la Défense, si l'on s'attache à la totalité du discours, et ce

 23   discours montre qu'il est clair que Karadzic savait que des soldats ivres

 24   tiraient "sans aucune finalité" des obus sur Sarajevo. Et Karadzic se

 25   plaignait de ce que cela l'avait mis dans l'embarras et constituait un

 26   gaspillage de munition onéreuse. Une telle nonchalance par rapport à une

 27   conduite d'une illégalité criante corrobore le fait qu'à ce stade Karadzic

 28   avait autorisé ces comportements pendant presque deux ans et demi, de


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  1   manière continue, et allait continuer à les autoriser pendant une année

  2   supplémentaire. Ici encore, les preuves évoquées ou invoquées par la

  3   Défense réfutent la thèse qu'elles sont censées étayer. Les preuves

  4   prétendues en réponse au sujet des enquêtes et des sanctions mettent au

  5   jour le fait que Karadzic, Mladic et commandants de la SRK n'ont tout

  6   simplement pas mené d'enquête ou sanctionné le pilonnage et les tirs contre

  7   les civils et constituent une nouvelle illustration de leur intention de

  8   mener de cette campagne criminelle.

  9   Aux paragraphes 2 984 à 2 996, la Défense affirme que Karadzic n'a pas

 10   restreint mais favorisé l'aide humanitaire et des services publics à

 11   Sarajevo. Une grande partie de ces preuves démontre le fait Karadzic

 12   pouvait contrôler l'aide humanitaire et services publics, et semble

 13   indiquer qu'il pouvait le moduler pour contribuer à sa campagne de terreur.

 14   Et si Karadzic déclare que "plusieurs témoins internationaux" confirmaient

 15   son "esprit de coopération" dans ce contexte, les preuves invoquées ne

 16   contiennent aucun fondement à la thèse selon laquelle Karadzic ait coopéré

 17   avec quiconque pour permettre l'acheminement d'aide ou la fourniture de

 18   services publics. Cela n'est pas surprenant à la lumière des observations

 19   constantes des fonctionnaires internationaux sur lesquels Karadzic et les

 20   Serbes de Bosnie contrôlaient le flux des services publics et d'aide

 21   humanitaire, et cela leur permettait de garder la main sur ce que Harland a

 22   appelé le "le robinet de la terreur". Harland, P820, paragraphe 39, voir

 23   également paragraphes 622, et 777 à 782 de notre mémoire.

 24   En résumé, les preuves invoquées par la Défense pour atténuer la

 25   responsabilité criminelle de Karadzic soutiennent la conclusion inverse.

 26   Non seulement Karadzic savait que ses subordonnés répandaient la terreur

 27   chez les civils en tirant toutes sortes de projectiles; des balles, des

 28   bombes aériennes, tout en les privant d'aliments, d'eau et de carburant, et


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  1   en fait, Karadzic contrôlait et modulait sa terreur en utilisant pour sûr

  2   ses objectifs stratégiques. Pendant des mois, aussi atroces les uns que les

  3   autres, pendant trois ans et demi, les civils de Sarajevo étaient à sa

  4   merci, et il ne leur en a témoigné aucune.

  5   Je vais à présent aborder les arguments de la Défense sur la nature de la

  6   campagne. Premièrement, j'ai parlé des preuves au sujet du pilonnage

  7   constant et de tirs embusqués contre les civils, qui, selon certains, selon

  8   de nombreux observateurs avaient pour but de répondre la terreur auprès de

  9   la population civile. La Défense nous présente une explication tout autre,

 10   il ne s'agissait pas de 44 mois de terreur causée par le pilonnage constant

 11   et le pilonnage des civils. Pendant 44 mois, selon la Défense, la SRK s'est

 12   livrée à une campagne précise et légale visant des objectifs strictement

 13   militaires. Cette version des événements se fonde sur l'affirmation des

 14   officiers de la SRK qui sont accusés d'être les premiers responsables de

 15   cette campagne de terreur, notamment des commandants de guerre qui ont été

 16   condamnés pour cela. Mais indépendamment du fait qu'il s'agit d'un récit

 17   qui tire ses propres intérêts, indépendamment du fait que cela est en

 18   contradiction flagrante avec les récits de ceux qui ont vécu la campagne,

 19   en ce compris des militaires chevronnés, et en plus, indépendamment du fait

 20   que cela est contredit par tout ce que le monde entier a pu observer à la

 21   télévision, le récit de la Défense s'effondre sur le poids de ses propres

 22   contradictions. Et donc à lui seul, en outre, donc indépendamment de tout

 23   cela, eh bien, il faut savoir qu'en soi ce récit est intenable.

 24   Il est peut-être temps de faire une pause, Madame et Messieurs les Juges.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous allons avoir une pause de 20

 26   minutes, et nous allons reprendre à 10 heures 17.

 27   --- L'audience est suspendue à 9 heures 58.

 28    L'audience est reprise à 10 heures 18.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Madame

  2   Gustafson.

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Comme je l'ai dit avant la pause, la version de la Défense d'une campagne

  5   militaire censément légale est émaillée de contradictions au point tel

  6   qu'elle en est intenable.

  7   Par exemple, la Défense prétend que des ordres demandant le respect des

  8   normes internationales ont été promulguées et transmis par la chaîne

  9   hiérarchique, que les soldats et officiers étaient formés à cet effet et à

 10   ce sujet et respectaient constamment ces nombres. Par exemple, aux

 11   paragraphes 1 850, 1 852, 1 907, 1 911, 1 948, 1 951 du mémoire de la

 12   Défense. Par ailleurs, la Défense déclare que les soldats et officiers de

 13   la SRK étaient des habitants du lieu, sans formation, ni expérience, et que

 14   ce manque d'expérience et de formation nuisait au commandement et au

 15   contrôle et occasionnait des problèmes fréquents de discipline et de

 16   désobéissance. Paragraphes 2 329 et 2 330. Donc, la Défense, d'une part,

 17   parle d'une campagne militaire intégralement respectueuse du droit

 18   international militaire, une théorie absolument réfutée par le poids des

 19   preuves démontrant le contraire, et, d'autre part, elle avance son deuxième

 20   argument secondaire incohérent qui semble avoir pour but d'expliquer ces

 21   preuves. Cet argument secondaire succombe également face aux preuves

 22   accablantes qui démontrent que la campagne était orchestrée au plus haut

 23   niveau et mise en œuvre efficacement via une structure de contrôle et de

 24   commandement impressionnante, voir notre mémoire aux paragraphes 612 à 642,

 25   682 à 697.

 26   Dans un autre exemple de ce type, la Défense prétend qu'il était impossible

 27   de distinguer les civils des combattants par leurs vêtements et que, de ce

 28   fait, "les forces de la SRK devraient présumer que toute personne


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  1   s'approchant du front et à porter des armes d'infanterie représentait une

  2   menace et pouvait être une cible potentielle." Paragraphes 1 907 à 1 908.

  3   Ailleurs, la Défense prétend que les membres de la SRK prenait toutes les

  4   mesures de précaution nécessaires et s'abstenaient de tirer s'il existait

  5   un risque de tirer sur des civils; paragraphes 1 911 et 1 925. Ici encore,

  6   ces affirmations incohérentes semblent vouloir faire état d'une campagne

  7   militaire légale tout en cherchant à expliquer la masse de preuves

  8   démontrant le contraire. Et, tout en faisant ces allégations sur les

  9   mesures de précaution prétendues qui ont été prises, la Défense balaie de

 10   la main des éléments de preuve contradictoires de ses propres témoins, tels

 11   que Slavko Gengo, qui a admis avoir répondu librement à des tirs en lançant

 12   des obus dans des zones urbaines à plusieurs kilomètres de ces zones en ne

 13   prenant aucune mesure de précaution; pages du compte rendu d'audience 2

 14   9781 à 82. Et alors que la Défense cite Mile Sladoje, aux pages 29781 à 782

 15   [comme interprété] pour avancer que les pertes civiles ne pouvaient

 16   toujours pas être exclues, Sladoje reconnaît que les tirs sur les zones

 17   urbaines comprenaient des pertes civiles fort probable. Mais comme Gengo,

 18   il a affirmé que c'était le problème de l'autre camp, et pas le sien. Page

 19   du compte rendu d'audience 30 573. Gengo et Sladoje, dans leur description

 20   de réponse aux tirs de l'ABiH lorsqu'ils ont lancé des obus sur des zones

 21   peuplées par les civils, en méprisant totalement les risques encourus pour

 22   la population, illustrent un niveau de disproportionnalité [phon] qui

 23   indique une intention de cibler les civils ou des objets civiles. Quoi

 24   qu'il en soit, les éléments de preuve accablants montrent que la grande

 25   majorité des bombardements du SRK à Sarajevo ne ciblent que des civils ou

 26   des zones civiles et ne répondaient même pas à des tirs de l'ABiH. Je vous

 27   renvoie à cet égard aux paragraphes 731 à 732 et 765 à 771 de notre

 28   mémoire.


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  1   Dans le contexte des tirs isolés, aux paragraphes 2 171 à 73, la Défense

  2   affirme que les tireurs isolés du SRK n'ont jamais eu pour mission de

  3   tirer, d'ouvrir le feu sur des civils, et se fonde presque exclusivement

  4   sur des affirmations improbables qui servent leurs propres intérêts de

  5   Galic, de Milosevic, et d'autres officiers du SRK. Ceci inclut au

  6   paragraphe 2 172 des affirmations étonnantes de Dragomir Milosevic, page du

  7   compte rendu 32 821, disant que les tireurs isolés du SRK n'ont jamais

  8   ouvert le feu sur des civils. Une allégation à laquelle la Défense ne croit

  9   même pas, vu que juste avant ce paragraphe-là, la Défense reconnaît des

 10   pertes civiles au moyen de tirs isolés, attribuant cela à des tireurs

 11   isolés incontrôlés. Et quelle est la source de proposition contradictoire ?

 12   C'est encore Dragomir Milosevic.

 13   Ce genre de contradictions imprègne les arguments de la Défense. Dans un

 14   autre exemple, au paragraphe 1 959, le mémoire de la Défense, nous dit "des

 15   évaluations nécessaires ont été menées avant toute campagne de bombardement

 16   afin d'évaluer la possibilité de dommages collatéraux". Là, on cite encore,

 17   Milosevic, page du compte rendu 32 582. Mais Milosevic n'a pas affirmé

 18   cela. En lieu de cela, il a apporté une autre affirmation totalement

 19   incroyable, selon laquelle le SRK n'a jamais tiré sur des zones où des

 20   civils étaient présents, mais il n'a rien dit sur les dommages collatéraux

 21   et leur évaluation. Et au lieu de répéter fidèlement un tel mensonge, la

 22   Défense l'adapte pour qu'elle corresponde à son paradigme de campagne

 23   légitime tout en essayant d'expliquer des éléments preuve totalement

 24   contradictoires.

 25   De même, au paragraphe 1 952, la Défense cite les éléments de

 26   Veljovic, disant que l'on avait interdit aux brigades de tirer sur des

 27   cibles dans des zones telles que Hrasno, Bascarsija, et  l'hôpital. Même si

 28   Veljovic avait mentionné ces emplacements spécifiques dans le passage cité,


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  1   il a continué sa réponse en balayant du revers de la main ces affirmations

  2   selon lesquelles on avait interdit de tirer sur des cibles "en profondeur,

  3   dans la ville ou dans des quartiers urbains", et a attribué les tirs d'obus

  4   qui avaient atterri "sur la ville" à des données incorrectes ou de la

  5   poudre mouillée. Pages 29 282 à 283 du compte rendu d'audience.

  6   C'est encore là un témoignage peu digne de foi que la Défense a

  7   choisi pour en faire quelque chose de plus acceptable.

  8   Au paragraphe 1 937, nous le voyons à l'écran, la Défense [inaudible]

  9   un déni général du fait que les unités du SRK avaient tiré sur l'hôpital de

 10   Kosevo, des écoles, des crèches ou des bâtiments commerciaux, à une

 11   affirmation totalement non pertinente selon laquelle toute décision de

 12   tirer sur ces bâtiments aurait été prise en compte s'il y avait eu des

 13   civils et aurait évalué s'il s'agirait d'une cible militaire qui posait un

 14   danger. Ces affirmations contradictoires sont fondées sur la déposition de

 15   Milosevic, pages du compte rendu 33 136 à 138, où il nie catégoriquement

 16   avoir tiré sur ces emplacements, mais après cela, il a admis avoir tiré sur

 17   ces emplacements dans certaines circonstances.

 18   Un autre effort vain d'expliquer le bombardement du SRK sur des zones

 19   civiles, loin des lignes de confrontation, se retrouve au paragraphe 1 953.

 20   La Défense affirme "que le SRK avait des informations de cibles militaires

 21   au plus profond du territoire du 1er Corps de l'ABiH, notamment des QG, de

 22   commandement". La Défense ne tient pas compte de la déposition de Milosevic

 23   qui nous dit que le SRK n'avait jamais tiré sur des postes de commandement

 24   de l'ABiH. Pages du compte rendu 33 127 à 33 129, un aveu qui correspond

 25   aux observations d'observateurs internationaux. Konings, par exemple, a

 26   expliqué qu'il avait mené l'enquête sur des bombardements près de postes de

 27   commandement de l'ABiH, mais qu'ils étaient rares et que la plupart des

 28   impacts d'obus étaient loin des cibles militaires. Paragraphe 30 de la


Page 47720

  1   pièce P1953.

  2   De même, Fraser a expliqué que pendant toute la durée de sa période à

  3   Sarajevo, l'ABiH et le QG du 1er Corps n'a jamais été bombardé. Pages 8 006

  4   à 8 007.

  5   J'aimerais à présent passer des efforts de cette Défense à inscrire

  6   les éléments enchevêtrés de ces témoins sur le SRK dans sa version des

  7   événements, donc passer de cela aux efforts sporadiques d'inscrire les

  8   documents dans sa version d'une campagne militaire supposément légitime, et

  9   ces efforts s'enlisent dans les contradictions.

 10   Par exemple, au paragraphe 1 944, l'on affirme que "les ordres

 11   répétaient de ne pas cibler les civils". On cite là l'ordre de Milosevic,

 12   pièce D2580. Cet ordre ne dit nulle part que les civils ne devraient pas

 13   être ciblés. Cependant, il dit au paragraphe 4 :

 14   "N'oubliez pas les représailles, les mesures de représailles ou toute

 15   autre question qui doit devenir prioritaire en cas de combat."

 16   Au paragraphe 2, l'ordre instruit également les brigades de ne pas

 17   attendre des décisions de commandement de corps sur des "questions

 18   mineures" telles que "devrions-nous bloquer la FORPRONU ?", ou "devrions-

 19   nous saisir les armes qui sont sous le contrôle de la FORPRONU ?" Et ces

 20   instructions, donc ces ordres de Milosevic, contredisent directement les

 21   allégations de la Défense reprisent ailleurs, par exemple, au paragraphes 1

 22   838 jusqu'au paragraphe 1 844, où la Défense décrit les efforts censés être

 23   sincères des dirigeants pour placer l'artillerie du SRK sous le contrôle de

 24   la FORPRONU et la fidélité presque totale au prescrit de l'accord. Mais, je

 25   dois dire que ces allégations sont également totalement démolies par les

 26   éléments de preuve sur lesquels on se fonde. La seule source de cette

 27   intention sincère supposée des dirigeants serbes de Bosnie de respecter la

 28   zone d'exclusion totale et son accord décrit au paragraphe 1 841 est


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  1   l'affirmation éhontée de Vladimir Lucic à cet effet. Qu'a dit Lucic

  2   cependant lorsqu'on lui a montré des documents contradictoires ? Eh bien,

  3   il disait ne rien savoir et répétait que son unité se trouvait à 70

  4   kilomètres de Sarajevo à ce moment-là et qu'elle faisait face à l'autre

  5   direction; je fais référence là aux pages du compte rendu d'audience 30 792

  6   à 30 797. Là encore, cette partie de sa déposition ne se retrouve pas dans

  7   le mémoire de la Défense.

  8   Au paragraphe 1 932, la Défense cite la pièce D2810. Il s'agit des ordres

  9   censés être stricts du général Galic pour limiter le comportement qui

 10   n'était pas légitime au combat. Comme vous le voyez, cet ordre interdit

 11   l'utilisation d'armes de gros calibre sans préavis. Mais cet ordre ne dit

 12   rien sur la limitation d'un comportement illégitime, et l'exercice du

 13   contrôle du commandant du corps sur les armes de gros calibre, "jusqu'à

 14   nouvel ordre", est totalement cohérent avec les énormes éléments de preuve

 15   qui montrent que la campagne de terreur était contrôlée au niveau central;

 16   paragraphes 614 à 627 et 654 à 659 de notre mémoire.

 17   Le mémoire de la Défense se fonde également sur l'ordre de Mladic qui se

 18   retrouve dans la pièce P2419, et qui reflète la réaction de Mladic

 19   lorsqu'il y a eu découverte du fait que les autorités locales et le

 20   commandant du SRK planifiaient de retirer les armes contrôlées par la

 21   FORPRONU et de les utiliser pour tirer sur des cibles civiles à Sarajevo.

 22   Et la Défense cite cet ordre deux fois, il le décrit même à deux reprises

 23   comme le montre ce transparent. Au paragraphe 1 934, le mémoire de la

 24   Défense cite :

 25   "Le général Mladic a interdit l'utilisation d'armes de plus gros calibre

 26   sur des cibles civiles."

 27   Alors qu'au paragraphe 1 949, le mémoire nous dit :

 28   "Ratko Mladic a interdit de tirer à partir d'armes de gros calibre sur des


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  1   cibles à Sarajevo sans son approbation."

  2   Alors, que nous dit cet ordre, en fait ? La pièce P2419 nous dit :

  3   "J'interdis de tirer avec des armes de gros calibre sur des cibles civiles

  4   à Sarajevo sans mon approbation."

  5   Les termes de cet ordre montrent clairement que tirer sur des civils à

  6   Sarajevo est un comportement accepté, tant que les conditions de Mladic

  7   sont réunies, c'est-à-dire des armes de petit calibre ou l'approbation de

  8   l'état-major principal. Confrontée à cela, la Défense contourne ces termes

  9   pour faire valoir sa cause trompeuse.

 10   La Défense ne tient pas non plus compte des raisons express de cet ordre.

 11   Mladic déclare que le retrait planifié des armes contrôlées par la FORPRONU

 12   pour tirer sur des civils à Sarajevo pourrait "avoir des effets négatifs de

 13   grande envergure sur le peuple serbe." Il ne parle pas d'effets négatifs

 14   que cela pourrait avoir sur les civils à Sarajevo sur qui l'on tire. Et la

 15   pièce P2419 contient également un avertissement manuscrit disant :

 16   "Les équipes des Nations Unies ont été invitées à identifier les actions de

 17   combat visant nos positions de combat."

 18   En d'autres mots, il s'agit encore là d'un exemple de modulation. Mladic

 19   empêche les violations de l'accord de zone d'exclusion totale dans un

 20   effort d'éviter une intervention internationale. Et cela montre davantage

 21   le contrôle centralisé exercé sur cette campagne de terreur.

 22   Là encore, il s'agit encore d'un effort inutile de la part de la

 23   Défense pour inscrire ces éléments de preuve dans sa version de la

 24   campagne.

 25   Aux paragraphes 2 392 à 95, la Défense affirme que le SRK avait été

 26   forcé par l'autre camp de faire la guerre à Sarajevo de la façon dont il

 27   l'a fait. La pièce maîtresse de cet argument est l'affirmation selon

 28   laquelle "des tirs venaient de partout, de toute la ville". Je cite là le


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  1   paragraphe 2 393. Et la Défense cite 101 rapports de combat du SRK entre

  2   1992 et 1994. Lorsque l'on examine vraiment ces rapports, il est clair

  3   qu'ils n'étayent pas les affirmations de la Défense. La grande majorité de

  4   ces rapports font état de tirs de l'ABiH provenant de zones non peuplées où

  5   il y a des positions de l'ABiH telles que le mont Igman, Zuc, Hum, des

  6   positions sur la ligne de front, telles que Butmir, Mojmilo, et Hrasnica,

  7   ou des zones dans le cercle extérieur à des kilomètres de Sarajevo. Seul 16

  8   des 101 rapports de combat indiquent des tirs d'artillerie ou de mortier

  9   provenant du centre-ville. Et malgré les affirmations répétées des témoins

 10   de la Défense disant que l'hôpital de Kosevo et sa zone étaient une source

 11   notoire de tirs de l'ABiH, seul un de ces 101 rapports indique des tirs

 12   sortant venant de cette zone, c'est-à-dire la zone de l'hôpital de Kosevo.

 13   Je cite là la pièce D3411.

 14   Pour la plupart, la Défense n'a pas voulu répondre aux éléments de

 15   preuve apportés par l'Accusation qui contredisent directement sa version de

 16   la campagne. Et les quelques efforts qu'elle a tenté pour se faire

 17   s'effondrent.

 18   Par exemple, au paragraphe 1 962, la Défense affirme, et c'est inné

 19   que "les observateurs des Nations Unies n'avaient jamais demandé aux Serbes

 20   de Bosnie de cesser le feu, et qu'ils n'avaient jamais fait rapport d'une

 21   utilisation illégale de tirs d'artillerie." Et là, on cite les éléments de

 22   preuve de Dusan Skrba. La Défense a pris la déposition d'un témoin, dont

 23   l'expérience était limitée dans le temps, d'un point de vue géographique et

 24   d'un point de vue institutionnel, et on a fait une proposition tout en ne

 25   tenant pas compte du tout des énormes éléments de preuve en l'espèce qui

 26   montraient le contraire, entre autres des reconnaissances de la part de

 27   Galic, Milosevic disant qu'ils avaient reçu des protestations; pages du

 28   compte rendu 37 641 à 44 pour Galic, notamment. Le seul effort direct de la


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  1   part de la Défense pour répondre aux observations persistantes du personnel

  2   des Nations Unies se retrouve au paragraphe 1 960, où la Défense affirme :

  3   "Lorsque le SRK a tiré un petit nombre d'obus pour arrêter uniquement

  4   les tirs ennemis, et donc a fait preuve de retenue, cela, quelque fois,

  5   s'expliquait par des observateurs des Nations Unies comme des tirs de

  6   harcèlement ou de terreur contre des civils, parce qu'ils n'étaient pas

  7   concentrés."

  8   Alors, cela décrit faussement les éléments de preuve des

  9   professionnels de l'armée et des professionnels des Nations Unies qui ont

 10   convenu que le SRK avait pour habitude de tirer un ou deux obus dans des

 11   zones civiles, et ce, de façon aléatoire, sans aucun objectif militaire, et

 12   que la seule explication était de cibler des civils.

 13   Konings, par exemple, l'a expliqué, il nous dit que les tirs

 14   concentrés seraient nécessaires pour détruire une cible militaire, alors

 15   que ce qu'il avait observé à plusieurs reprises étaient que des obus

 16   atterrissaient de n'importe quelle cible militaire "sans aucun schéma

 17   purement militaire, on ne faisait que tirer dans la ville et on savait très

 18   bien que l'on toucherait quelque chose." Je fais référence là à la pièce

 19   1953, paragraphes 30, 35, 38 et 96.

 20   Ou comme Brennskag l'a expliqué :

 21   "De par mon expérience, des tirs uniques ne font pas partie d'une

 22   offensive militaire normale. Il n'y a pas d'avantage militaire précis. Ceci

 23   me montre ou me prouve que l'objectif de ces tirs n'était pas d'arriver à

 24   toucher des cibles militaires mais de terroriser la population civile."

 25   Pièce 1851, paragraphe 31.

 26   Il a ajouté que cela était arrivé à plusieurs reprises en juin 1995, et

 27   qu'il y a eu plusieurs pertes civile et purement civiles.

 28   Notre mémoire reprend également cet exemple aux paragraphes 731 à 732. Les


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  1   bombardements référencés illustrent ce modèle de tirs ou un petit nombre de

  2   coups dans des zones civiles. Par exemple, l'élément G5 nous dit que plus

  3   de dix personnes qui faisaient la queue pour puiser de l'eau ont été tuées

  4   par un tir de mortier unique qui a explosé. Ou l'élément G6 qui nous dit

  5   que des tirs de mortier sur Alipasino Polje ont tué six enfants qui

  6   jouaient dans la neige. Ou l'élément G8, un tir de mortier explose au

  7   marché de Markale et fait plus de 60 victimes et en blesse plus de 140.

  8   Il n'y a aucune retenue lorsque des obus mortels ont été lancés dans les

  9   zones peuplées par des civils, sans aucune fin militaire. Ceci visait

 10   visiblement le fait de répandre la terreur parmi la population civile.

 11   Lorsque ces affirmations ont été faites sur une soi-disant retenue de la

 12   SRK, la Défense fait fi simplement des éléments de preuve, à savoir des

 13   bombardements indiscriminés de la SRK sur la ville, bombardements qui ont

 14   eu lieu pendant toute la durée de la campagne, bombardements au cours

 15   desquels "les tirs pleuvaient sur tout Sarajevo." Van Lynden qui le décrit

 16   à G2 pièce P926, paragraphe 55. Ou les bombardements coordonnés de façon

 17   très précise à la fois le 24 décembre 1992 et le 7 janvier 1993,

 18   bombardements au cours desquels à minuit précise chaque fusil bosno-serbe,

 19   mortier, et chars ont été déployés dans un tir de barrage massif "sur toute

 20   la longueur et largeur de la ville," même si "il n'y avait que très peu de

 21   cibles militaires à Sarajevo qui pouvaient être visées par des armes

 22   lourdes pendant l'obscurité." Tucker, P4203, paragraphes 109 à 114.

 23   D'autres exemples dans notre mémoire en clôture aux paragraphes 727 et 736.

 24   La Défense fait valoir qu'il y a eu une campagne précise, prudente, et

 25   légitime qui ne peut même pas correspondre à un début d'explication pour

 26   ces bombardements massifs et indiscriminés de la SRK. La Défense raconte sa

 27   version de cette campagne comme s'il s'agissait d'événements qui ne

 28   s'étaient tout simplement pas produits.


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  1   La version de la Défense au sujet de la campagne ne permet pas d'expliquer

  2   les incidents de pilonnage et de tirs isolés, et événements qui illustrent

  3   le caractère systématique de ces tirs contre des civils qui, visiblement,

  4   n'exerçaient que des activités civiles : des enfants qui jouaient, des

  5   femmes qui ramassaient de l'eau, des civils qui allaient faire leurs

  6   courses ou rechercher l'aide humanitaire, très éloignées d'une quelconque

  7   cible militaire ou action militaire. Confrontée à ces éléments de preuve,

  8   la Défense a fait venir deux témoins expert : Mile Poparic et Zorica

  9   Subotic, qui ont élaboré des théories compliquées pour établir que la SRK

 10   n'est pas responsable d'un quelconque tir de tireurs embusqués, mortiers,

 11   ou tirs d'artillerie, et à l'égard des bombes aériennes modifiées, qu'il

 12   s'agissait d'armes précises qui pouvaient être lancées seulement contre des

 13   cibles militaires. A l'annexe C de notre mémoire, nous avons expliqué

 14   comment ces théories relèvent de la conjecture, et sont peu fondées. Nous

 15   avons dans certains cas estimé que ces exemples étaient tout simplement

 16   absurdes. Confer paragraphes 7, 12, 43 à 47. Et nous avons abordé leurs

 17   théories concernant les faits répertoriés, certains faits, nous avons fait

 18   un échantillonnage des faits répertoriés de la Défense que nous avons

 19   analysés, paragraphes 9, 11 et 45.

 20   Aujourd'hui, je vais parler de la façon dont ces méthodologies viciées sont

 21   omniprésentes dans les analyses concernant les faits cités dans les annexes

 22   au sujet des pilonnages et tirs embusqués et d'autres exemples cités par la

 23   Défense et faits répertoriés par la Défense dans son mémoire en clôture.

 24   Un des arguments soulevés par la Défense à différents moments de son

 25   mémoire en clôture comprennent ces faits répertoriés, le fait que les

 26   autorités de Bosnie étaient responsables des attaques contre leur propre

 27   peuple dans l'idée de provoquer une intervention militaire. Aux paragraphes

 28   1 968 à 1 979, 2 181 et 2 311.


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  1   La Défense fait valoir que "plusieurs incidents de ce genre se sont

  2   produits", paragraphe 1 976, cet argument constitue rarement une analyse

  3   véritable d'événements réels. Dans la plupart des cas, les éléments

  4   présentés par la Défense sont fondés sur des rumeurs et ne constituent que

  5   de vagues allégations qui vont au-delà du domaine des connaissances des

  6   témoins individuels, confer les témoins qui n'ont que peu de crédibilité.

  7   Notamment les affirmations vagues de Milosevic, de Galic, de Sarenac cités

  8   au paragraphe 1 976, et de Milorad Sehovac dans sa déclaration qui dit

  9   avoir entendu "des rumeurs" à cet effet mais n'avait "pas d'information

 10   directe." D2633, paragraphe 38, cité au paragraphe 2 181.

 11   La Défense déforme et dénature également les éléments de preuve. Par

 12   exemple, pour étayer son allégation au paragraphe 1 976 que l'ABiH a

 13   pilonné des installations civiles dans le but de faire porter la faute à

 14   tort à la SRK, la Défense cite trois rapports de combat de la SRK, aucun de

 15   ces rapports nous dit quoi que ce soit au sujet du fait que l'ABiH tirait

 16   sur sa propre population, D3411, D3424, et D3442.

 17   La Défense dénature également toute une série d'éléments de preuve à

 18   charge, notamment les éléments présentés par Harland, Thomas, Mole, et

 19   Fraser. Dans un exemple typique, la Défense affirme au paragraphe 1 972 que

 20   Fraser "se souvient même du fait que des soldats français ont rencontré une

 21   équipe de télévision musulmane qui ont filmé une attaque mise en scène en

 22   présence d'enfants, pour que ceci soit utilisé à la télévision contre les

 23   Serbes."

 24   Dans la réalité des choses, Fraser ne se "souvenait" pas de cela. Il a dit

 25   dans sa déposition qu'il avait entendu des récits à cet effet, mais qu'il

 26   n'avait jamais vu un film de ce genre. Page du compte rendu d'audience 8

 27   051.

 28   La Défense poursuit en affirmant que "l'appréciation de Fraser était que


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  1   les autorités musulmanes étaient coupables d'avoir pris pour cible des

  2   civils," en laissant entendre manifestement qu'il faisait référence au fait

  3   qu'elles avaient pris pour cible leur propre population. Cependant, Fraser

  4   a dit dans le paragraphe cité de façon très claire que ceci n'était pas le

  5   cas. Il a dit ne jamais se souvenir qu'il y avait une quelconque politique

  6   de l'ABiH visant à prendre pour cible leurs propres civils. Page du compte

  7   rendu d'audience 8 054.

  8   Comme l'a expliqué Jeremy Bowen et comme le veut la logique, il eut été

  9   impossible de garder secret une théorie du complot comme celle-ci et

 10   certainement une partie importante de cette campagne si elle avait été mise

 11   en œuvre par l'ABiH, le monde entier aurait été au courant maintenant.

 12   Confer la déposition de Jeremy Bowen, P2068, paragraphe 39. Et la Défense a

 13   fait ses allégations au sujet du fait que l'ABiH avait pris pour cible ses

 14   propres civils à Sarajevo, qui constitue la pièce maîtresse de sa thèse,

 15   une poignée d'affirmations vagues et en définitive font surface et étayent

 16   les éléments de preuve présentés par l'Accusation, à savoir que la SRK

 17   était responsable de la majorité écrasante des attaques contre les civils

 18   de Sarajevo avec quelques exceptions peut être négligeables; mémoire en

 19   clôture de l'Accusation au paragraphe 795.

 20   Au vu de preuve et réfutable sur la campagne de tirs embusqués de pilonnage

 21   de la SRK, l'argument de la Défense défie toute logique. Il y avait cette

 22   campagne de la SRK, tout effort déployé par les autorités de Bosnie pour

 23   prendre pour cible leur propre peuple pour qu'ils puissent à tort leur

 24   faire porter la faute eut été une stratégie fort risquée, qui n'aurait

 25   porté aucun avantage politique. La seule façon concevable dans laquelle les

 26   autorités de Bosnie auraient pu imaginer provoquer une intervention

 27   militaire de l'Occident de cette manière eut été à ce moment-là de mettre

 28   en scène un massacre à grande échelle. Mais lorsque de telles théories du


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  1   complot sont écartées du domaine de la conjecture et appliquées aux faits

  2   réels, tel qu'a tenté de le faire Subotic concernant G9 [comme interprété],

  3   eh bien, les explications qui en résultent sont complètement déconnectées

  4   de la réalité. Et je vais parler de ces théories déconnectées dans quelque

  5   temps.

  6   Pour ce qui est de certains faits répertoriés, la Défense présente des

  7   arguments analogues pour dire que l'Accusation n'a pas prouvé que la balle

  8   ou l'obus provenait du territoire de la SRK. Cependant, ces arguments se

  9   concentrent de façon inadéquate sur l'analyse balistique de l'événement en

 10   question. Même si la Chambre devait constater que les éléments de

 11   balistique présentés à eux seuls correspondant à un ou plusieurs faits

 12   répertoriés ne permettent pas d'établir de manière concluante qu'il

 13   s'agissait effectivement de l'origine du tir qui provenait du territoire de

 14   la SRK, ceci n'équivaut pas à un manque de preuves. Même si chaque

 15   événement de tirs isolés et de pilonnages, par exemple, si on en tient

 16   compte, les éléments de preuve balistiques indiquent clairement et non pas

 17   de façon concluante que l'origine du tir provenait du territoire détenu par

 18   la SRK. Cet élément de preuve cadre avec un ensemble de preuves plus

 19   important, preuves corroborantes que nous avons mis en exergue à l'annexe C

 20   de notre mémoire en appel. Par exemple, de nombreux incidents, d'analyses

 21   balistiques indiquent qu'il y avait des sources notoirement connues pour

 22   indiquer que la SRK prenait pour cible les civils. Les endroits indiqués au

 23   niveau des attaques de tireurs embusqués et de pilonnages ne cadrent pas

 24   avec le cadre plus général des régions dans laquelle la SRK prenait

 25   régulièrement pour cible les civils. Un nombre important d'attaques et de

 26   pilonnages impliquait des tirs de mortier et d'artilleries multiples. De

 27   même, des nombreux événements de tirs isolés impliquaient des feux répétés

 28   au même endroit, soit avant ou après que la victime ait été touchée. Et un


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  1   tel comportement ne cadre tout simplement pas avec la théorie précisant que

  2   les auteurs tentaient à tort de faire porter la faute à la SRK, et pour ce

  3   qui est des tirs et des multiples tirs de balle, ceci augmenterait

  4   grandement le risque de détection et ne serait pas vraiment avantageux pour

  5   eux. Au niveau de chaque événement répertorié, que ce soit par la nature ou

  6   leur effet, ceci cadre avec les éléments de preuve irréfutables pour

  7   indiquer qu'une campagne de la SRK pendant trois ans et demi de pilonnages

  8   et tirs embusqués a été menée contre la population civile.

  9   En outre, les incidents répertoriés ont fait l'objet d'enquêtes, et ce, de

 10   façon professionnelle et compétente par des professionnels locaux, et ces

 11   résultats, dans de nombreux cas, ont été corroborés par des enquêteurs

 12   indépendants des Nations Unies et les experts indépendants. Pour ce qui est

 13   d'un des incidents isolés, il n'y a pas d'éléments de preuve crédibles pour

 14   laisser entendre que ces enquêtes ont été manipulées d'une manière ou d'une

 15   autre. Il n'y a pas non plus d'éléments de preuve indiquant que cela

 16   relevait de la responsabilité de la Bosnie. Et comme je l'ai déjà indiqué,

 17   les éléments de preuve montrent que les autorités de Bosnie n'auraient pas

 18   pu prendre pour cible leur propre population civile avec quelle que

 19   régularité que ce soit, et pour ce qui est de la majorité des faits

 20   répertoriés, ils n'auraient pas eu un mobile concevable pour le faire. En

 21   résumé, l'affirmation qui consiste à dire que les autorités de Bosnie

 22   auraient pu être responsables de certains de ces faits répertoriés en se

 23   fondant sur une analyse individuelle et peu concluante des analyses

 24   balistiques est pour le moins une notion qui relève de la conjecture, et

 25   ceci ne donne pas lieu à un quelconque doute raisonnable.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, quelle est votre position, Madame

 27   Gustafson, concernant les éléments de preuve qui font allusion au fait que

 28   les tirs de la part de l'ABiH et visant la FORPRONU pour provoquer des


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  1   représailles et pour qu'il y ait une intervention de la part des

  2   internationaux ?

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, Monsieur le

  4   Président. Il existe des éléments de preuve à cet effet. Encore une fois,

  5   ceux-ci se fondent sur des rumeurs et sont des allégations vagues. Et il y

  6   a eu des confessions qui ont été obtenues après que les personnes en

  7   question ont été torturées pour un événement allégué.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous disposons d'éléments de preuve de

  9   la part des internationaux également.

 10   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est exact. Alors, il existe des éléments

 11   de preuve à cet effet. Mais la différence, Monsieur le Président, c'est

 12   qu'il s'agirait à ce moment-là de tirs qui visaient les Nations Unies. Ce

 13   serait -- bon, je ne sais pas quel est l'avantage que l'on peut tirer de

 14   cela, peut-être pour provoquer une intervention de la FORPRONU, par

 15   opposition au fait de tirer simplement sur d'autres civils. Il y a un

 16   caractère systématique que nous avons analysé au niveau d'une centaine

 17   d'événements qui pourrait, en fait, présenter un avantage, mais dont le but

 18   serait de provoquer une intervention internationale. Donc, je crois que le

 19   mobile derrière ces deux types d'attaques serait tout à fait différent.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, nous avons donc passé outre cette

 21   question-là, mais s'agissant de la difficulté qui consiste à faire la

 22   guerre dans un cadre ou dans une zone urbaine, l'accusé a cité un exemple

 23   d'un mortier mobile. Estimez-vous qu'il existait des mortiers mobiles du

 24   côté de l'ABiH ? Et, si oui, à quel type de réaction vous attendez-vous du

 25   côté des Bosno-Serbes et comment riposteraient-ils dans le cas de telles

 26   attaques ?

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, il existe des éléments de preuve tout

 28   à fait manifestes que l'ABiH disposait de quelques mortiers mobiles, de


Page 47733

  1   Wilson et Dzambasovic, par exemple, parlent qu'ils disposaient d'une

  2   poignée d'armes de ce type. Et pour ce qui est de la riposte de la SRK, à

  3   ce moment-là, l'exemple qui a été fait plus tôt, où Wilson a remarqué qu'il

  4   y avait quelques tirs sortants et qui provenaient du côté de l'ABiH, et il

  5   y a une riposte correspondant à 200 tirs éparpillés dans une zone urbaine

  6   très importante. Il a estimé que la riposte était tout à fait

  7   disproportionnée, et là, c'était le cas d'un mortier mobile. Et la riposte

  8   illustre une intention qui n'est pas une intention de riposter, mais de

  9   prendre pour cible des civils. Dans ce même exemple, dans ce même passage,

 10   j'ai parlé de Richard Mole, de sa déposition et d'une des observations

 11   qu'il a faites, à savoir que la disposition du terrain, lorsqu'il y a eu

 12   riposte, eh bien, cela semblait indiquer que l'unité -- enfin, il y avait

 13   une forte probabilité pour que l'unité ne soit plus au même endroit, ce qui

 14   signifie dans ce cas qu'il y avait des tirs de mortier mobile et que le

 15   mortier peut être tiré, et ensuite on peut rapidement déplacer l'endroit où

 16   se trouve le mortier. Donc, une riposte même à retardement, à ce moment-là,

 17   serait l'illustration d'une intention qui consisterait à prendre pour cible

 18   des zones civiles.

 19   Il y a différentes méthodes qui consistent à cibler une équipe de

 20   mortiers mobiles. On peut leur tirer dessus s'ils sont dans la ligne de

 21   mire des tireurs embusqués de la SRK, ce qui, bien sûr, est beaucoup moins

 22   bien précis, mais peut être efficace s'il s'agit de riposter à une attaque

 23   d'un mortier mobile.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Alors, je souhaite parler maintenant de

 26   l'argument de la Défense aux paragraphes 2 163 à 2 167 de l'Accusation, et

 27   que l'expert en matière de tirs embusqués de l'Accusation ne pouvait pas

 28   conclure s'agissant des faits répertoriés qu'on pouvait déterminer


Page 47734

  1   l'emplacement exact d'où la balle avait été tirée. Par conséquent,

  2   l'Accusation fait valoir que ceci doit être rejeté dans son intégralité.

  3   Paragraphe 2 167. La Chambre a précisément demandé à l'Accusation de

  4   répondre à cet argument.

  5   Tout d'abord, la Défense a déformé les conclusions de van der Weijden pour

  6   un certain nombre de faits répertoriés, notamment F1, F3, F6, F9 et F12,

  7   van der Weijden a soit conclu que l'on ne pouvait conclure qu'il y avait

  8   qu'une seule provenance de tirs possible ou conclure que cela excluait

  9   toute possibilité raisonnable que les tirs provenaient du territoire détenu

 10   par l'ABiH; aux paragraphes 19, 27, 29, 36, 38, et dans chacun, ces

 11   conclusions concordent avec le fait que les tirs provenaient des positions

 12   de mortier de la SRK bien connues.

 13   Quoi qu'il en soit, les arguments de la Défense constituent ici l'exemple

 14   de type d'erreur et des erreurs commises dans les analyses auxquelles je

 15   viens de faire référence. La Défense tente de façon inconvenante à tirer

 16   des conclusions en se fondant simplement sur un des aspects des éléments de

 17   preuve. La Défense ignore les conclusions de van der Weijden et ne tient

 18   pas compte de l'ensemble des éléments de preuve concernant chaque fait

 19   répertorié à l'annexe C de notre mémoire en appel, et de ne tient pas

 20   compte des autres facteurs qui penchent fortement en faveur de la

 21   responsabilité de la SRK que je viens d'évoquer.

 22   Donc, si les Juges de la Chambre sont satisfaits de la réponse que

 23   j'ai donnée, je souhaite maintenant parler des arguments de la Défense sur

 24   les événements répertoriés en tant que tels. Etant donné que je ne dispose

 25   que très peu de temps, je souhaite simplement vous présenter un échantillon

 26   et être claire, parce que des allégations non fiables et conclusions non

 27   fiables sont omni présentes dans les arguments de la Défense sur ce point.

 28   Comme je l'ai dit à F1, 13 décembre 1992, l'attaque contre une petite fille


Page 47735

  1   de 3 ans, Anisa Pita, qui s'est déchaussée devant sa maison. Comme je l'ai

  2   précisé, van der Weijden a conclu à Baba Stijena que le seul endroit

  3   possible de l'origine du feu était indiqué à la pièce P1521, page 16,

  4   T6995, et 6996. La Défense conteste ce fait, car elle affirme qu'il n'y

  5   avait pas les lignes de mire depuis Baba Stijena à l'endroit où la petite

  6   fille a été touchée, en se reposant sur l'analyse de la ligne de mire de

  7   Poparic. Il s'agit là de paragraphes 2 184, 2 185; D4884, paragraphes 26,

  8   28. Cependant, Poparic s'est fondé dans son analyse de la ligne de mire sur

  9   une visite sur les lieux en 2010. La Défense ignore, ne tient pas compte de

 10   ce qu'il dit à l'époque, la maison a été rénovée, il n'était plus possible

 11   de se mettre debout, ni de s'accroupir à l'endroit exact où se trouvait la

 12   victime; T39267.

 13   Donc, son analyse sur la ligne de mire est par conséquent

 14   complètement viciée.

 15   La Défense fait valoir au paragraphe 2 186 qu'il s'agissait là "de la

 16   déduction la plus raisonnable", et qu'Anisa Pita a été blessée dans un

 17   échange de coup de feu et que cela se fonde en fait sur une conjecture

 18   totale de la part de Poparic, parce qu'à un moment donné, les parents de la

 19   victime ont dit avoir entendu plusieurs tirs. Anisa Pita a sans doute été

 20   touchée par une balle qui a ricoché lors de l'échange de tir; D4884,

 21   paragraphe 31.

 22   Au paragraphe 2 187, la Défense se fonde sur la déposition de Milos

 23   Skrba, qui affirme que la brigade, la 1ère Brigade de Sarajevo n'avait pas

 24   de tireurs embusqués pendant toute la durée de la guerre; D2344, paragraphe

 25   11. Skrba affirme que non seulement cela est peu crédible, mais que cela

 26   est contredit par Miletic, un autre témoin à décharge du bataillon Skrba,

 27   qui a expliqué que le bataillon n'avait qu'une escouade de tireurs

 28   embusqués subordonnés au commandant; D2519, paragraphe 31. Quoi qu'il en


Page 47736

  1   soit, Skrba étaient d'accord avec tous les faits sous-jacents qui

  2   précisaient que la SRK pouvait tirer sur l'enfant. A savoir, Baba Stijena

  3   était une position fortifiée de la SRK, tenue par les forces de la SRK, qui

  4   possédaient des fusils, des fusils automatiques et semi-automatiques; 29

  5   184 à 29 194.

  6   En quelques mots, cette petite fille de 3 ans qui était bien

  7   évidemment une civile, a été prise pour cible depuis une position qui se

  8   trouvait dans la ligne de mire, qu'ont considéré les témoins à décharge,

  9   était tenue par les forces armées de la SRK, armées avec les armes

 10   nécessaires pour tirer sur cet enfant.

 11   Je souhaite maintenant passer à l'incident F4 du 3 septembre 1993, le

 12   fait d'avoir le tir de Nafa Taric et de sa petite fille de 8 ans.

 13   La Défense fait valoir au paragraphe 2 200, qu'il y avait une ligne

 14   de mire depuis la rue Ozrenska à l'endroit du fait répertorié, et qui se

 15   fonde sur le rapport de Poparic. Cependant, Poparic se repose sur des

 16   photos qui de ses propres vœux ont été prises depuis l'autre côté de la rue

 17   par rapport à l'endroit où a eu lieu l'événement en question. D4884,

 18   paragraphe 56, images 44 et 45. Ainsi, Poparic a élaboré son analyse de la

 19   ligne de mire aux paragraphes 56, 59 en se fondant simplement sur ces

 20   photos, et ceci n'est pas pertinent du tout. Quoi qu'il en soit, la Défense

 21   reconnaît au paragraphe 2 204, qu'Ivana Krndlja, que cette rue où les

 22   victimes ont été touchées est clairement visible depuis les soi-disant

 23   positions de tir, citant ainsi des éléments de preuve qui comprennent la

 24   photographie D2431. La Défense fait valoir au paragraphe 2 204 que cet

 25   endroit n'était pas visible depuis les positions de la 4e Compagnie. Ceci

 26   n'est pas pertinent. Les témoins à décharge et un membre de la 4e

 27   Compagnie, Slobodan Tuseveljak, a dit dans sa déposition que cette

 28   photographie a été prise depuis les positions tenues par la 2e Compagnie,


Page 47737

  1   le bataillon de la 2e Compagnie, et de la 1ère Brigade mécanisée de

  2   Sarajevo, étaient positionnés un peu plus bas dans la rue Ozrenska depuis

  3   cette position; pages du compte rendu d'audience 29 956, 29 957; D2431, 65

  4   ter 23967.

  5   A titre de comparaison, D2431 et D666, une photographie prise par van

  6   der Weijden qui a précisé à quel endroit se trouvait le fait en question,

  7   démontrent à quel endroit se trouvait le lieu exact de l'attaque était

  8   clairement visible depuis la position de cette 2e Compagnie.

  9   Mais finalement, la Défense a fait valoir au paragraphe 2 202 que van

 10   der Weijden n'a conclu que ce qui s'était passé à la rue Ozrenska se

 11   trouvait à 1 104 mètres de l'événement en question, et que ceci déforme la

 12   déposition de van der Weijden car, en fait, la distance de la rue Ozrenska

 13   au fait en question était de 825 mètres. T7130 et 7131.

 14   Je vais maintenant passer à F5, les tirs du 2 novembre 1993 sur

 15   Ramiza Kundo, qui portait de l'eau. La Défense fait valoir que ce lieu

 16   d'incident était visible depuis les positions de l'ABiH au paragraphe 2

 17   210, et qui se fonde sur les affirmations de Poparic dans son rapport.

 18   Cependant, lors du contre-interrogatoire, Poparic était d'accord qu'on

 19   pouvait voir les obstacles à gauche et à droite de l'endroit où avait été

 20   trouvé la victime, et ceci est dépeint dans son rapport à l'image 50. Vous

 21   voyez un mur de béton à gauche, et le mur, plus une tour radio qui

 22   constituait un tunnel naturel. Poparic convient en disant que "tout champ

 23   de tir serait limité par ce tunnel, ce tunnel naturel". Page 39 233.

 24   Quoi qu'il en soit, dans son rapport Poparic a tracé un champ de tir

 25   au-dessus de ces obstacles, ce que l'on peut voir à l'image 53 de son

 26   rapport que vous voyez maintenant. Comme vous le voyez, Poparic a décrit un

 27   large champ de tir couvrant quasiment 60 degrés, un champ de tir qui ne

 28   tient aucun compte de l'existence de ce tunnel naturel étroit qu'il avait


Page 47738

  1   lui-même reconnu comme limitant la ligne de mire. Cette omission a permis à

  2   Poparic d'élargir ce champ de tir suffisamment plus au sud, comme vous le

  3   voyez, pour bien inclure également du territoire détenu par l'ABiH. Lorsque

  4   on l'a mis devant cette contradiction entre l'existence d'un tunnel naturel

  5   et le large espace qu'il a représenté ici, Poparic a reconnu en disant :

  6    "Oui, bien sûr, tout ceci doit être considéré comme n'étant pas

  7   totalement exact, mais il ne peut pas y avoir un grand écart, si vous

  8   voulez". Pages 39 233 à 39 234.

  9   L'argument de la Défense est donc fondé sur une analyse peu fiable, comme

 10   ils le reconnaissent, et il n'y a aucune raison de remettre en cause le

 11   champ de tir calculé par van der Weijden, et cette pièce est la pièce

 12   P6364, qui indique le champ de tir calculé par van der Weijden pour ce

 13   fait, il s'agit de ce triangle vert qui a été superposé sur le champ de tir

 14   tracé par Poparic. Les pages du rapport de van der Weijden figurent à

 15   l'image juste en dessous. Comme vous le voyez donc, il n'existe en fait

 16   aucune ligne de mire depuis le territoire détenu par l'ABiH au sud tel

 17   qu'avancé par la Défense.

 18   Et van der Weijden a également exclu le territoire proche juste au sud-

 19   ouest du lieu des événements étant donné que la pente dans la route

 20   bloquait la vue des positions qui étaient placées plus loin; pièce 1621,

 21   paragraphe 37.

 22   Enfin, au paragraphe 2 210 la Défense dit qu'il n'existait pas de ligne de

 23   mire depuis les positions de la SRK, ils se fondent sur le paragraphe 72 du

 24   rapport de Poparic, et ceci est contredit d'ailleurs par Poparic lui-même

 25   qui a reconnu l'existence d'une ligne de mire depuis le territoire détenue

 26   par la SRK.

 27   Aux pages du compte rendu d'audience 38 955 à 38 956.

 28   Alors, je vais maintenant passer au fait F6, le tir qui a atteint Sanija


Page 47739

  1   Dzevlan alors qu'elle se rendait chez elle à Dobrinja à vélo juste après

  2   être sortie ou s'étant écarté d'une barrière de protection au niveau du

  3   pont. C'est un autre exemple des conclusions de van der Wiejden, et il a

  4   conclu que la seule possibilité raisonnable pour l'origine de la ligne de

  5   mire -- pardonnez-moi, l'origine du tir était une position de la SRK. Il a

  6   conclu qu'il n'y avait qu'un autre bâtiment à partir duquel on pouvait

  7   avoir cette ligne de mire, c'était l'église orthodoxe, un appartement qui

  8   était entre les mains de l'ABiH et qui se trouvait à 350 de l'endroit où il

  9   y a eu l'attaque. Cependant, il a exclu ceci comme étant l'origine du tir

 10   parce qu'il était peu probable que les troupes de l'ABiH --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi. Le bouton ne

 12   s'enclenche pas. Nous avons vraiment des problèmes techniques. C'est la

 13   deuxième fois.

 14   Toutes mes excuses, Madame. Nous n'arrêterons pas de travailler et nous

 15   regrettons que vous nous entendions pas. Vraiment désolé. Toutes nos

 16   excuses.

 17   Mme GUSTAFSON : [interprétation] van der Weijden a exclu le bâtiment détenu

 18   par l'ABiH à 355 mètres de là comme source de tir étant donné qu'il était

 19   fort peu probable que les troupes de l'ABiH qui étaient placées se seraient

 20   intéressées au pont et sachant que des troupes de la SRK étaient

 21   stationnées dans le bâtiment juste de l'autre côté de la route à l'est;

 22   P1621, page 50. Il a également éliminé les espaces ouverts environnants car

 23   le tireur aurait été exposé à des tireurs de chaque côté. Page 7 133.

 24   Les affirmations de la Défense au paragraphe 2 217 que la balle dans ce cas

 25   aurait dû être tirée 0,99 secondes juste avant que la victime n'apparaisse

 26   au-delà de la barrière se fondent uniquement sur les supputations peu

 27   fiables de Poparic. Par exemple, sur cette photo, image 59 de son rapport,

 28   Poparic a calculé la longueur approximative de ce qu'il croit être le


Page 47740

  1   modèle de voiture présentée dans un article "Wikipedia" pour calculer la

  2   distance approximative parcourue par Mlle Dzevlan après avoir passé la

  3   barrière et juste avant d'être tuée par balle. Il estime ensuite le temps

  4   qu'il a fallu à Mme Dzevlan pour pédaler sur cette distance alléguée en se

  5   fondant sur la prétendue vitesse moyenne atteinte à bicyclette par une

  6   femme de 35 ans selon des études médico-légales d'accident de la route sans

  7   présenter aucune référence; D4884, paragraphes 79 et 88.

  8   La Défense avance encore au paragraphe 2 218 que van der Weijden convient

  9   qu'il y a d'autres possibilités que le ciblage intentionnel de civils en

 10   l'espèce. Mais ceci fait fi des explications de van der Weijden sur

 11   lesquels ce n'est pas la conclusion qu'il tire parce que Mlle Dzevlan

 12   aurait pu être visible juste avant d'arriver sur le pont, ce qui aurait

 13   permis au tireur de prévoir sa réapparition. Pages 7 137 à 7 138. Et ce

 14   fait bat en brèche les calculs de Popovic [comme interprété] déjà peu

 15   défendables du moment du coup de feu par rapport à l'apparition de la

 16   victime alors qu'elle sortait du pont, et tout ça est vidé de son sens, un

 17   point que la Défense n'a pas du tout pris en compte.

 18   La Défense dit au paragraphe 2 218 que van der Weijden reconnaît que

 19   l'absence de preuve concernant la balle et le calibre jetait le doute sur

 20   l'origine du coup de feu, et ceci est une totale déformation des propos de

 21   van der Weijden. Van der Weijden n'a reconnu que le fait qu'il avait dû

 22   estimer le calibre de la balle mais il ne reconnaît pas que ceci représente

 23   une spéculation concernant l'origine du feu. Transcript 7 138 à 7 139.

 24   Je poursuis, Monsieur le Président ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si ça vous convient, nous prendrons la

 26   pause.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous prendrons la pause d'une vingtaine


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  1   de minutes, et nous reprendrons l'audience à 11 heures 38.

  2   --- L'audience est suspendue à 11 heures 18.

  3   --- L'audience est reprise à 11 heures 40.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Je vois que nous avons un nouveau membre de votre équipe, Monsieur Tieger ?

  6   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Comme je vous l'ai indiqué précédemment,

  7   Mme Pack est avec nous, et elle vous reparlera concernant Srebrenica dans

  8   peu de temps.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Veuillez poursuivre, Madame Gustafson.

 11   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci.

 12   Et je voudrais revenir aux tirs isolés. F11 et F14, F15 et F16 [comme

 13   interprété]. Toutes ces attaques se sont produites le long de la route

 14   principale près du virage en S des rails de tram dans une portion de la

 15   route que l'on avait appelée "Sniper Alley". Comme nous l'avons dit dans

 16   notre exposé au paragraphe 1 322 [comme interprété], les éléments de preuve

 17   démontrent qu'il y a eu des attaques délibérées de la SRK sur les civils.

 18   Les tirs isolés de Grbavica vers Zmaj od Bosne était de notoriété publique.

 19   Les enquêtes confirment que la Défense a essayé de minimiser ces éléments

 20   qui sont visés sur des supputations qui sont spéculatives et fondées sur

 21   des méthodes non scientifiques.

 22   Je reviens sur F11, c'est aussi en lien avec l'une des questions posées par

 23   la Chambre. L'attentat F11 est le deuxième de trois attaques à la

 24   mitrailleuse qui ont eu lieu dans la même zone en quelques minutes

 25   seulement le 8 octobre 1994. Un autre tram a essuyé des tirs de

 26   mitrailleuse juste avant l'attentat F11, et quelques minutes après un

 27   groupe de piétons a été pris pour cible.

 28   La Chambre a interrogé l'Accusation de clarifier une contradiction entre


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  1   les faits déjà jugés 2932, qui dit que "les tirs provenaient de la

  2   direction du bâtiment Metaljka", et P2421, rapport de l'ONU disant que les

  3   tirs provenaient d'un groupe de maisons proche du cimetière juif.

  4   J'aimerais revenir sur la question plus théorique de la Chambre quant à

  5   savoir ce que doit faire la Chambre lorsque les preuves à charge

  6   contredisent un fait déjà tranché. A cet égard, la jurisprudence est claire

  7   : des faits déjà examinés ayant pour objet un constat judiciaire sont des

  8   présomptions et il est laissé en fin de compte à la Chambre d'en apprécier

  9   la pertinence et la valeur à la lumière de l'ensemble des éléments de

 10   preuve. Je vous renvoie à la décision de la Chambre d'appel Karemera du 16

 11   juin 2006, paragraphe 42; également la décision de la Chambre de première

 12   instance dans l'affaire Popovic du 26 septembre 2006, paragraphe 21; et la

 13   décision de la Chambre de première instance dans l'affaire Krajisnik du 24

 14   mars 2005, paragraphe 17.

 15   Toutefois, en l'instance, la position de l'Accusation présentée dans

 16   notre mémoire, appendice 16, paragraphe 18, est que le tram sur lequel on a

 17   tiré dans l'attentat F11 a été ciblé à partir d'un tireur embusqué de la

 18   SRK au sud de la rivière Miljacka. Ceci est appuyé par tous les éléments de

 19   preuve crédibles, y compris AF2932 et le rapport de l'ONU P2421.

 20   Je vous renvoie maintenant à cette photographie, P6018. C'est une photo qui

 21   a été prise à partir du sud, orientée donc vers le nord du site de cet

 22   événement. Nous avons maintenant la même photo sur laquelle nous avons

 23   indiqué un certain nombre d'endroits pour aider la Chambre de première

 24   instance. Cet événement a eu lieu sur Zmaj od Bosne, soit au croisement

 25   avec la rue Franje Rackog, qui est l'endroit numéro 2 sur cette

 26   illustration, ou au croisement avec la rue Djure Danicic, qui est l'endroit

 27   numéro 1. Ces numéros ont été placés pour votre facilité, ils correspondent

 28   aux cartes de la FORPRONU dans le rapport de la FORPRONU sur cet événement


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  1   et indiquent certaines des positions occupées par les observateurs de l'ONU

  2   au moment de l'attentat; P2421, et la carte est aux pages 4 et 5 de

  3   l'original en français.

  4   L'élément de preuve KDZ090, à savoir P481, pages 6 à 9; P436 et P437; ainsi

  5   que le rapport des enquêteurs locaux, P1907, page 2; ainsi que les faits

  6   déjà jugés AF2924 et 2932, définissent l'endroit de cet attentat F11 comme

  7   étant l'endroit numéro 2 avec le bâtiment Metaljka qui figure ici comme

  8   constituant la source du tir. C'est une conclusion qui a été entérinée par

  9   van der Weijden; P1629, pages 89 à 91.

 10   P2421, il s'agit là du rapport de l'époque de la FORPRONU ainsi que

 11   l'identification de ces différents endroits par Barry Hogan, P1028, aux

 12   fins du tracé des différentes positions sur la carte; P2191 précise

 13   l'endroit de l'événement comme étant l'endroit numéro 1. Il y a une

 14   certaine incertitude quant au lieu précis de l'attentat dans ce cas,

 15   incertitude compréhensible sachant que le tram se déplaçait de l'est à

 16   l'ouest quand il a essuyé les coups de feu. Je vous renvoie à van der

 17   Weijden à 7 175 à 7 176.

 18   La conclusion de la FORPRONU que c'est l'endroit numéro 1 qui fut le lieu

 19   de l'attentat est étayée par les observations faites par le personnel de la

 20   FORPRONU sur place; P2421, pages 2 à 6, et l'analyse balistique. Plus

 21   particulièrement, la FORPRONU avait également analysé des sillons frais

 22   dans le sol à l'endroit numéro 1, P2421, pages 3 à 7. Ces différents

 23   sillons sont tous dirigés vers la maison numéro 14 proche du cimetière

 24   juif, P2421, pages 3 à 8, et nous en ferons l'endroit à peu près, l'endroit

 25   de cette maison figure également sur l'illustration que vous avez sous les

 26   yeux. L'angle d'entrée des balles dans le tram qui ont été analysées par la

 27   FORPRONU, lorsqu'on les superpose avec cet endroit 1, indique toujours la

 28   même origine du tir; P2421, page 3.


Page 47744

  1   van der Weijden n'a pas exclu ce scénario, à savoir que ce tram a été

  2   attaqué au lieu numéro 1, auquel cas le tir aurait provenu des positions de

  3   la SRK dans la zone à l'ouest du cimetière juif, mais il a plutôt penché en

  4   faveur de l'endroit numéro 2, étant donné le temps de l'exposition au feu

  5   et le retard des témoins sachant que ceux-ci essuyaient également des coups

  6   de feu. P1621.

  7   Alors, s'il existe en effet une certaine incertitude quant à l'endroit

  8   précis de l'origine des coups de feu, incertitude également de l'endroit

  9   précis de l'attentat, la Chambre n'a pas à trancher l'endroit précis car,

 10   indépendamment de savoir si l'attentat a eu lieu à l'endroit numéro 2 ou 1,

 11   en tout cas, il est certain que le tir provenait de positions de la SRK au

 12   sud de la rivière Miljacka, ceci car tout d'abord, ces deux endroits

 13   étaient exposés à des positions occupées par des tireurs embusqués de la

 14   SRK qui étaient bien connus depuis l'endroit numéro 2, bâtiment Metaljka;

 15   et l'endroit numéro 1, les maisons détenues par la SRK près du cimetière

 16   juif. Ensuite à titre alternatif, le fait que ce tir provenait de cette

 17   petite bande de territoire détenue par la Bosnie entre les rails de tram et

 18   la rivière n'est pas une alternative raisonnable, car il aurait fallu que

 19   le tireur ait mitraillé ce tram à partir d'une position qui se trouvait

 20   juste de l'autre côté de la rue par rapport au tram, donc au su et au vu

 21   des passagers et de nombreux membres du personnel de l'ONU qui étaient là

 22   pour suivre les activités des tirs embusqués à l'époque. Il s'agit là d'une

 23   théorie fort implausible [phon] et illogique et qui n'est étayée par aucune

 24   preuve crédible, et qui a été d'ailleurs rejetée de façon explicite par M.

 25   van der Weijden. Il a expliqué que si le tram avait essuyé des coups de feu

 26   à partir du territoire de l'ABiH au sud, le tireur aurait dû être à 25

 27   mètres, ce qui est un scénario "totalement illogique", c'est les termes

 28   qu'il a utilisés, sachant qu'il y avait la présence bien connue de la


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  1   presse internationale à l'Holiday Inn, vous voyez le bâtiment jaune sur

  2   l'image. Page 7 175.

  3   Quoi qu'il en soit, il s'agit vraiment de la théorie qui a été défendue par

  4   l'expert de la Défense Poparic, qui dit que les coups de feu dans ces trois

  5   attentats de cette journée provenaient du bâtiment du Conseil exécutif qui

  6   figure à l'image; transcript page 39 252.

  7   La théorie de Poparic est éminemment biaisée pour un nombre de raisons.

  8   Tout d'abord, selon cette théorie de Poparic, deux trams et puis ensuite un

  9   groupe de piétons ont essuyé des tirs de mitrailleuse de façon répétée à

 10   partir d'une position se trouvant juste en face dans la rue par rapport aux

 11   trams, au su et au vu de tout le monde, et personne ne l'aurait vu. Ces

 12   tirs de mitrailleuse répétés n'auraient pas été vus non plus par le

 13   personnel de lutte contre les tirs embusqués de l'ONU qui s'est positionné

 14   juste devant le bâtiment du Conseil exécutif et parmi d'autres endroits et

 15   qui, justement, surveillaient ce type d'activités dans la zone. P2421.

 16   Il y a également des risques de détection certains pour ce tireur, il

 17   aurait dû se trouver au rez-de-chaussée ou un étage très bas du bâtiment,

 18   étant donné l'angle très fermé, 9 degrés par rapport à l'horizontal de

 19   l'angle de trajectoire de la balle vers le tram. Ceci a été conclu par la

 20   FORPRONU suite à des examens des impacts de balle dans le tram; P2421.

 21   La définition de la trajectoire de la balle de la FORPRONU contredit

 22   donc la théorie de Poparic, car il parlait d'un angle très ouvert de

 23   descente des balles, il parlait de 45 à 60 degrés, analyse fondue sur la

 24   taille et la forme d'un nuage de poussière qu'il avait vu sur une vidéo,

 25   pages 39 252 à 53. Lorsqu'on l'a confronté à sa propre contradiction,

 26   Poparic a changé sa théorie à l'instant en disant que "l'angle pourrait

 27   être entre 2 et 80 degrés." Pages 39 261 à 39 263. Et la théorie de Poparic

 28   n'offre aucune explication des impacts ou des sillons de balles récents


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  1   constatés par les enquêtes des Nations Unies au point 1, après les tirs sur

  2   ces civils qui incriminaient la position du SRK, la maison 14. Poparic n'a

  3   pas tenu compte de cela et a plutôt tiré des conclusions [phon] basées sur

  4   la forme des nuages de poussière et son interprétation hasardeuse du geste

  5   d'un soldat de la FORPRONU sur une vidéo dont il n'a pas écouté la bande-

  6   son. C'est notre mémoire en clôture, annexe C, paragraphe 11.

  7   La théorie de la Défense n'est qu'un nouvel avatar à peine modifié de

  8   la théorie du complot original que Mladic avançait aux fonctionnaires des

  9   Nations Unies à la suite de protestations immédiatement après les faits.

 10   L'affirmation de Mladic selon laquelle le tir provenait du Holiday Inn, que

 11   vous voyez ici, qui se trouvaient en face du tram, une position de tir tout

 12   à fait impossible, a été réfutée immédiatement par les Nations Unies, et

 13   vous pouvez trouver cela au P867, page 2.

 14   Après avoir eu 20 ans pour réfléchir, la Défense n'a rien trouvé de

 15   mieux que la théorie du siège du Conseil exécutif. Et la seule conclusion

 16   raisonnable est que les tirs visant le tram lors de l'incident F11 venaient

 17   d'un territoire sous le contrôle du SRK au sud de la Miljacka. Relevons

 18   également que pour les autres attaques de tram dans la zone, la Défense a

 19   avancé d'autres théories toutes aussi invraisemblables selon lesquelles les

 20   tirs provenaient de bâtiments situés dans un pourtour immédiat.

 21   Par exemple, pour le F8, elle prétend que l'on a tiré sur le tram

 22   depuis précisément le siège du Conseil exécutif; D4884, paragraphes 123,

 23   124. Pour F15, elle prétend que le tram a été mitraillé depuis le toit du

 24   Musée de la Révolution. De l'autre côté de la rue, à gauche de l'Holiday

 25   Inn ou d'autres bâtiments non nommés proches. Page 39 281, 39 282. Et F16,

 26   elle prétend que de multiples balles ont été tirées depuis le Conseil

 27   exécutif ou le musée; page 38 931.

 28   Donc, selon la Défense, les membres de l'ABiH tiraient de manière


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  1   répétée sur leurs propres civils devant leurs yeux, devant la presse

  2   internationale et les Nations Unies. Et comme l'indique notre analyse de

  3   ces événements dans notre mémoire, ces théories sont totalement contredites

  4   par des preuves contenant des analyses d'experts et des récits de témoins

  5   oculaires. Ces théories implausibles [phon] de la Défense ne font que

  6   donner plus de crédit aux preuves attribuant au SRK la responsabilité de

  7   ces attaques.

  8   Je voulais à présent parler des incidents de pilonnage énumérés en

  9   annexe. J'ai parlé du fait que la version de la Défense au sujet de la

 10   campagne ne parvient pas à expliquer les bombardements massifs

 11   indiscriminés de la ville par le SRK. Pour les deux bombardements décrits

 12   dans les annexes G1, G2, cette incapacité se traduit par des arguments

 13   futiles portant sur la procédure. Pour le G1, la Défense, de manière

 14   incroyable, continue à insister pour dire que cet incident n'est pas le

 15   pilonnage massif de Sarajevo approximativement à partir du 28 mai, mais un

 16   seul tir de mortier sur la rue Vase Miskin le 27 mai 1992. Cette

 17   affirmation est directement contredite par le libellé de l'acte

 18   d'accusation et a fait l'objet de notifications nombreuses de l'Accusation

 19   et de la Chambre selon lesquels l'événement de la rue Vase Miskin n'est pas

 20   G1, sans parler du fait que l'accusé lui-même a explicitement reconnu que

 21   l'événement de la rue Vase Miskin n'est pas couvert par l'acte

 22   d'accusation. Pages 6 394 et 28 867 du compte rendu d'audience.

 23   L'authentique G1 qualifié par Slobodan Milosevic de bombardements sanglants

 24   et criminels consiste en un pilonnage indiscriminé et intense de la ville

 25   commandé personnellement par Mladic avec l'aide de Karadzic, le soutien de

 26   Karadzic. Nous en parlons au paragraphe 727 de notre mémoire de clôture.

 27   La Défense invoque également le fait que Mladic ait nié à l'époque

 28   l'authenticité de conversations interceptées dans lesquelles il ordonne à


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  1   ses subordonnés de tirer sur les zones civiles de Sarajevo les 28 et 29 mai

  2   1992; D207, invoqué, oui, aux paragraphes 1 995 et 96.

  3   Il est évident que Mladic trahit sciemment la vérité lorsqu'il dit

  4   que ces conversations interceptées ont été fabriquées par des acteurs qui

  5   pouvaient imiter "votre voix, ma voix, celle de n'importe qui", car il

  6   savait que les conversations étaient sous écoute. Ces trois conversations

  7   interceptées ont été authentifiées de manière fiable. Il s'agit de la pièce

  8   confidentielle P1154, pages 69 à 73.

  9   Pour G2 --

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de poursuivre, j'ai une question

 11   au sujet de G1, mais avant de la reposer, je voulais demander si vous

 12   pouviez nous re-projeter votre photo.

 13   Une question à l'intention de la Défense. Dans votre mémoire final, vous

 14   parlez du bâtiment MIS. Est-ce que c'est le bâtiment, la façade rouge dont

 15   on a parlé ? Je pose la question parce que nous n'avions jamais entendu

 16   parler de bâtiment MIS.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] F ou G ? Je ne comprends plus très bien. Il

 18   faudrait que je consulte. Il s'agit de l'événement F, n'est-ce pas ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, les tirs embusqués, le bâtiment

 20   MIS. Vous pouvez nous répondre plus tard.

 21   Pour en revenir avec l'événement F11, Madame Gustafson. Est-ce que l'on

 22   peut dire que pour l'Accusation on ne pouvait pas identifier la source des

 23   tirs dans ce cas-ci ?

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Nous

 25   ne pouvons pas identifier la source précise des tirs compte tenu des

 26   preuves contradictoires au sujet de l'endroit exact de l'attaque. Mais,

 27   comme je l'ai dit, cela n'entache nullement nos moyens de preuve.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et le rapport des Nations Unies, P2421,


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  1   je me souviens qu'à l'époque les Nations Unies disaient que les tirs

  2   venaient de très proche dans la mesure où le bruit était intense. Est-ce

  3   que pourriez peut-être répondre à cela également.

  4   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je ne sais pas

  5   ce qu'ils entendent par "très proche", mais selon moi, c'est leur

  6   conclusion, c'est que la source des tirs était située à 600 mètres, donc je

  7   ne pense pas que l'on puisse vraiment parler de source de tirs extrêmement

  8   proches dans ce contexte.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 10   Pour ma question au sujet du G1, je vous propose de passe brièvement à huis

 11   clos partiel.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 13   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous pouvons poursuivre.

 20   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vais à présent aborder G2. Lors de la

 21   toute dernière phase de ce procès de cinq ans, l'accusé prétend pour la

 22   première fois dans son mémoire que l'incident G2 est également suffisamment

 23   précis pour qu'il puisse y répondre correctement. Cette contestation de

 24   l'acte d'accusation dépasse le délai de plusieurs années, et la Défense

 25   n'offre aucune explication au fait qu'elle n'a pas été soulevée

 26   précédemment et montre pas que cela a nui effectivement à ses intérêts. Et

 27   nous avons donc notre réponse du 11 septembre 2014 donné une réponse

 28   similaire à celle que nous avions donnée pour d'autres contestations de


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  1   l'acte d'accusation.

  2   Au paragraphe 1 998, la Défense prétend que l'acte d'accusation ne contient

  3   qu'une référence --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce que cette décision

  5   au sujet d'un défaut de l'acte d'accusation a été déposée ?

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Nous l'avons reçue au début de cette

  7   session.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Donc l'accusé au paragraphe 1 998 déclare

 10   que l'acte d'accusation ne contient pas de référence chronologique ou

 11   géographique précise, et cet argument est spécieux car autant la date que

 12   le lieu sont précisés.

 13   Dans aucune des nombreuses requêtes contestant l'acte d'accusation, dont

 14   une remonte à seulement il y a quelques semaines, l'accusé n'a soulevé la

 15   question, ce qui indique qu'il a jamais considéré que ce manque de clarté

 16   existait. Et son propre mémoire indique qu'il comprend effectivement

 17   l'Accusation car il propose une ligne de défense à son sujet. Notamment, il

 18   prétend que les opérations de combat du 6 juin avaient pour but de

 19   repousser les attaques de l'ABiH; paragraphe 2 001.

 20   Toutefois, même si l'on accepte l'existence de certains combats dans la

 21   zone de Sarajevo le 6 juin, cela ne peut pas expliquer les tirs

 22   d'artillerie sauvages, éparpillés, qui ont frappé toute la ville, le

 23   pilonnage nocturne massif de la ville au moment où peu de cibles militaires

 24   étaient visibles et le fait que le pilonnage ait surtout touché des parties

 25   de la ville dépourvues de cibles militaires apparentes faisant de

 26   nombreuses victimes civiles. Et tout cela peut être lu dans le détail dans

 27   notre mémoire aux paragraphes 728 et 729.

 28   Je vais à présent aborder l'événement G4, l'attaque au mortier du 1er juin


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  1   1993, qui a touché un groupe de 200 personnes assistant à un match de

  2   football à Dobrinja. Aux paragraphes 2 002 à 2 008, la Défense se fonde

  3   entièrement sur la déposition de Subotic pour dire que seul un obus, plutôt

  4   que deux, ont été tirés à l'occasion de cet événement et ils ont été tirés

  5   depuis le côté bosnien de l'ABiH de la ligne de front. Subotic a reconnu

  6   que si un obus avait été tiré par l'ABiH dans ce cas, il aurait dû être

  7   tiré depuis une distance maximum de 200 mètres, devant un bloc

  8   d'appartement dans un quartier résidentiel. Ce qui n'est absolument pas une

  9   hypothèse plausible.

 10   D'abord, il est inconcevable que l'ABiH ait pu tirer deux obus de mortier

 11   sur sa propre population à partir d'une distance de 200 mètres au maximum

 12   dans une zone densément peuplée lors d'une journée ensoleillée, à un moment

 13   où un groupe important de civils s'était rassemblé pour assister à un match

 14   de football sans avoir été vus ni entendus. Qui plus est, si l'on tire de

 15   si près, eh bien cela signifie qu'on a le risque que l'obus retombe sur

 16   soi. Hammill  explique que la zone de danger pour un obus de mortier de 81

 17   millimètres est de 250 mètres.

 18   Qui plus est, la Défense explique au paragraphe 2 007 que l'obus n'aurait

 19   pas pu être tiré depuis des positions de la VRS. Et cela se fonde sur

 20   l'analyse de Subotic qui est clairement non fiable. Par exemple, elle

 21   estime sur la base de son examen d'un cratère datant d'il y a 17 ans, sans

 22   aucun stabilisateur, "qu'il ne fait aucun doute que l'angle de descente

 23   était supérieur à 65 degrés." D3542, paragraphe 44.

 24   Cette affirmation est contredite par la propre déposition de Subotic car

 25   dans un autre contexte, elle a expliqué que si le "cratère est un bon

 26   cratère" et je cite, elle n'était que de déterminer "très

 27   approximativement" l'angle de chute. Je cite là la page compte rendu 38

 28   360. Même si un rapport des Nations Unies a enregistré clairement deux


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  1   cratères sur les lieux, pièce P1053, page 9, la Défense insiste sur le fait

  2   que ce n'est pas le cas et se fonde sur l'affirmation bizarre de Subotic

  3   disant que plus de deux ans et demi après cette attaque quelqu'un a creusé

  4   de façon inexplicable un deuxième cratère dans l'asphalte à la main;

  5   paragraphe 2005 et pièce D3542, paragraphe 38.

  6   En résumé, la théorie de la Défense se fonde sur une analyse, et cela est

  7   patent, qui n'est pas fiable et se fonde aussi sur l'idée qu'une équipe de

  8   mortier de l'ABiH a commencé une mission suicide afin de tirer sur sa

  9   propre population d'un poste adjacent sans avoir été détecté.

 10   Passons à l'événement G7, 4 février 1994, trois obus de mortier ont atterri

 11   parmi un groupe de civils qui faisaient la queue pour obtenir de l'aide

 12   humanitaire à Dobrinja.

 13   Dans ce cas-là, les experts balistiques ont analysé les cratères et ont

 14   utilisé des méthodologies bien établies et ont déterminé que les obus

 15   venaient du territoire du SRK à l'est.

 16   La Défense avance, sur la base de l'analyse de Subotic, que cette

 17   évaluation est très fausse, et qui vient d'une erreur de 90 degrés environ,

 18   et que les obus ont été tirés du territoire de l'ABiH au nord; pièce D3542,

 19   paragraphes 86 et 87.

 20   Lorsque Subotic a mené son analyse, il n'y avait plus de restes de quel que

 21   cratère que ce soit, et seules des photos de piète qualité et des séquences

 22   vidéo étaient à disposition. A la lumière de cela, elle a simplement

 23   [inaudible] les méthodologies bien acceptées, et a commencé à passer en

 24   revue les éléments de preuve.

 25   Par exemple, elle a présumé en se fondant sur cette photo, qui est la pièce

 26   1710, page 23, reproduite dans la pièce D3542 du rapport, que la tache

 27   noire sur l'aire de jeu que l'on voit, en bas à gauche de l'écran, était en

 28   fait une parcelle de terre. Ensuite, elle a déclaré sur la base des mêmes


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  1   photos que cette terre a été jetée sur l'aire de jeu par un impact d'obus.

  2   Elle a ajouté à ces suppositions que la terre avait été entassée, tassée,

  3   et qu'un obus précédent a dû atterrir tout près pour modeler le sol, et

  4   qu'ensuite c'est le deuxième obus qui a laissé cette trace-là. Elle a

  5   ensuite affirmé qu'elle pouvait déterminer le sens des tirs d'un obus qui

  6   ont provoqué ces traces de terre en examinant l'orientation de la terre sur

  7   la photo. Alors, sur la base de cette analyse de la terre, elle a conclu

  8   que l'obus venait du territoire de l'ABiH, et qu'en conséquence les

  9   enquêteurs ont masqué l'existence de l'un de ces deux obus. Pièce D3542,

 10   paragraphes 80 et 81.

 11   Pour l'obus qui a atterri de l'autre côté de l'aire de jeu, nos enquêteurs

 12   sur les lieux ont observé que l'empennage avait été fiché dans une

 13   direction est-ouest, ce qui corrobore le sens des tirs déterminés par

 14   l'analyse des cratères; pièce P1710, page 9. Cet empennage est repris ici,

 15   nous l'avons entouré, image 78 de la pièce D3542, et, d'après la Défense,

 16   au paragraphe 2 044, en se fondant sur la théorie de Subotic, même si

 17   l'empennage était fiché dans un sens est-ouest, l'obus est venu du nord.

 18   Subotic pensait "l'empennage avait déjà touché la surface, a fait ricochet,

 19   et s'est retrouvé à cet endroit-là". Page 38 276 du compte rendu.

 20   En d'autres mots, elle a affirmé, et cela est tout à fait impossible, que

 21   l'obus venait de l'est, a fait ricochet, et ensuite a réussi à se

 22   réorienter vers cet endroit-là et se ficher fermement dans l'asphalte et a

 23   fait face à l'ouest -- désolée, elle a dit, et cela a été impossible, que

 24   l'obus venait du nord, et pas de l'est, comme je l'ai dit.

 25   Pour couronner le tout, Subotic a déclaré que cette image d'un autre

 26   empennage révèle l'existence d'une lettre N, aux polices romaines, de

 27   l'empennage. On lui a montré un élément comparatif de cette image arrêtée

 28   avec une photographie de meilleure qualité, pièce P6324, et elle a convenu


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  1   qu'il n'y avait pas de lettre N qui était visible sur la photographie, mais

  2   elle a refusé d'admettre que cette photographie était une image plus claire

  3   et a refusé de revenir sur sa théorie de la lettre N, une théorie que la

  4   Défense continue à avancer au paragraphe 2 045 de son mémoire.

  5   Pour cet événement, la Défense a remplacé des méthodologies

  6   scientifiques bien éprouvées par une théorie du maquillage, un empennage

  7   qui a été propulsé par magie, et une image qui vient de nulle part.

  8   Passons à l'événement G8, 5 février 1994, massacre de Markale. Des

  9   enquêteurs locaux des Nations Unies ont déterminé que l'obus avait été tiré

 10   avec un azimut d'environ 18 plus ou moins 5 degrés. L'équipe d'experts en

 11   balistique de Zecevic a mesuré un angle de 60 degrés plus ou moins 5 pour

 12   l'angle de chute.

 13   Sur la base de la profondeur de l'empennage qui est fiché, là,

 14   Zecevic a exclu la possibilité d'une des trois charges et a conclu en

 15   conséquence que la portée était de 4 500 à 6 500 mètres, bien au-delà de la

 16   ligne de confrontation qui se trouvait à 2 600 mètres. Cette conclusion est

 17   confirmée par d'autres éléments de preuve qui sont repris au paragraphe 59

 18   de l'annexe C de notre mémoire.

 19   La Défense remet en question deux éléments principaux à ces

 20   conclusions. Tout d'abord, la distance de l'emplacement de tir n'a pas dû

 21   être établie parce que le cratère qui a été changé ne permettait pas de

 22   mesurer un angle de chute précis. Et, deuxièmement, la Défense affirme que

 23   l'on ne peut déterminer d'où le mortier a été tiré à partir de la position

 24   de l'empennage dans le cratère; paragraphe 2 096. Alors, dans un effort de

 25   mettre à mal le calcul de l'angle de chute de Zecevic au paragraphe 2 096,

 26   la Défense se fonde sur les éléments de preuve d'Allsop, disant que l'angle

 27   de l'empennage fiché ne peut pas être nécessairement le même que l'angle de

 28   la trajectoire au moment de l'impact. La Défense ne tient pas compte,


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  1   cependant, qu'Allsop a confirmé la fiabilité du calcul de l'angle de chute

  2   de Zecevic. A la page 29 508 du compte rendu, après avoir convenu que

  3   l'angle de chute a dû être de 35 à 50 ou 85 degrés, on lui a demandé lors

  4   de sa déposition qu'il a donnée à cette Chambre de première instance qu'il

  5   incluait une marge d'erreur de 10 degrés, alors que lui, avait identifié

  6   une marge d'erreur de 35 degrés. Sa réponse était oui. La question :

  7   "Il s'agit là d'une marge d'erreur assez généreuse; êtes-vous

  8   d'accord ?

  9   La réponse :

 10   "Oui.

 11   "Q.  Même si l'on devait accepter le point que vous avez abordé dans

 12   votre rapport, ce que j'avance c'est que l'impact possible sur la

 13   trajectoire du projectile provoqué par l'un de ces points pendant les 50

 14   centimètres où il y a eu déplacement à grande vitesse avant de s'enficher

 15   dans le sol a été bien largement pris en compte dans cette marge d'erreur

 16   de plus de 33 %?

 17   "R.  Oui."

 18   L'expert de la Défense a confirmé la fiabilité du calcul de l'angle

 19   de chute de 55 à 65 degrés de Zecevic, la Défense n'a pu que contester le

 20   calcul de la vitesse de Zecevic basé sur la profondeur de l'empennage qui

 21   était fiché dans le sol. La Défense se fonde encore une fois sur le rapport

 22   d'Allsop et ignore le fait qu'Allsop avait convenu que plusieurs de ces

 23   objections théoriques ne pouvaient pas s'appliquer en l'espèce. Je vous

 24   réfère à l'annexe C, paragraphe 60 de notre mémoire. Mais quoi qu'il en

 25   soit, l'expert de la Défense Subotic pensait qu'un empennage fiché dans le

 26   sol veut dire que l'obus doit avoir été tiré avec au moins une charge

 27   trois; page du compte rendu 38 456. Zecevic a également expliqué qu'avec

 28   une charge trois, un empennage pouvait ou ne pouvait pas, peut-être que


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  1   oui, peut-être que non, être enfiché, mais que si un empennage était

  2   enfiché cela impliquait un minimum de trois charges; pages 12 174 à 12 175

  3   du compte rendu.

  4   Tenant compte des éléments de preuve qui seraient les plus favorables

  5   envers la Défense, en se fondant sur des aveux de leurs propres témoins, à

  6   savoir à supposer un lancement éventuel avec des charges de trois, quatre

  7   charges à un angle maximum de 65 degrés, ce qui se traduit par une distance

  8   de tir possible la plus proche de cela, la distance correspondante

  9   correspondrait environ à 3 600 mètres; P2317, page 6, et ceci se situe

 10   encore tout à fait l'intérieur du territoire de la SRK.

 11   Dans son mémoire en clôture, aux paragraphes 2 091 à 2 091, la Défense se

 12   plait à analyser le manquement de l'Accusation à indiquer une quelconque

 13   neutralité ou qualification de la part d'Allsop. La Défense n'a absolument

 14   pas compris l'argument en question, à savoir qu'Allsop a confirmé la

 15   fiabilité de la conclusion-clé de Zecevic à l'angle de descente.

 16   La seule possibilité offerte à la Défense en l'espèce concerne une théorie

 17   du complot qui implique un obus de mortier placé à un angle prédéterminé

 18   sur une place de marché où il a beaucoup de monde, une explosion statique,

 19   un événement qui aurait été mis en scène, et ils auraient placé des corps,

 20   des cadavres, et l'empennage, et ils auraient fiché manuellement

 21   l'empennage dans le goudron avec une pelle. Nous avons abordé cette théorie

 22   avec David Harland, décrit comme particulièrement bizarre, au paragraphe 45

 23   de l'annexe C de notre mémoire. Maintenant, G9, 22 décembre 1994, deux obus

 24   d'artillerie de 76 millimètres qui ont touché le marché aux puces de

 25   Bascarsija.

 26   La thèse de la Défense essentielle, aux paragraphes 2 119 à 2 121, avance

 27   que cette attaque a été entièrement mise en œuvre. Cette thèse exige que

 28   les Juges de la Chambre admettent que les autorités de Bosnie aient réussi


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  1   à placer un obus d'artillerie et une pile de TNT au milieu de cette place

  2   du marché très encombrée et qu'ils auraient réussi à faire exploser à

  3   distance sans que cela ne puisse être décelé par quiconque. Ensuite,

  4   pendant deux heures et 40 minutes, alors que les enquêteurs étaient sur les

  5   lieux, D554, page 2, ils ont réussi à mettre en scène une dissimulation

  6   élaborée, y compris l'excavation du cratère dans le goudron; paragraphe 2

  7   120.

  8   Ce qui est censé avoir été être fait sous les yeux de représentants

  9   officiels des Nations Unies qui ont assisté à l'enquête, D554, page 2; 2126

 10   [comme interprété], paragraphe 47, qui apparemment n'ont rien remarqué.

 11   La Défense a également avancé quelque chose de contradictoire et a estimé

 12   qu'il n'avait pas été établi que l'origine du tir provenait de la partie

 13   bosno-serbe plutôt que la partie bosno-musulmane, paragraphe 2 122, et ils

 14   se reposent ici sur des conclusions dans d'autres affaires.

 15   Les éléments en l'espèce montrent néanmoins que ces obus ont été tirés

 16   depuis un fusil ou à partir d'un fusil B-1, 76 millimètres, de la région de

 17   Trebevic/Vidikovac sur le territoire de la SRK. Telle a été la conclusion à

 18   laquelle sont parvenus les enquêteurs à l'époque, se fondant non seulement

 19   sur une analyse balistique, mais également sur le fait que plusieurs

 20   personnes avaient entendu les obus qui était tirés depuis ce secteur, D554,

 21   de Trebevic.

 22   En outre, la VRS tenait des positions de tir à Vidikovac pendant toute la

 23   durée de la guerre. A l'annexe C, paragraphe 61 du mémoire en clôture de

 24   l'Accusation. La SRK possédait au moins 14 fusils de 76 millimètres B-1

 25   dans le secteur de Sarajevo, P5056, y compris un dans le secteur de

 26   Hresa/Vidikovac et plusieurs près de Lukavica; P1021. Entre-temps, D779, un

 27   ordre de mars 1995 de la SRK précise que le 1er Corps de l'ABiH ne

 28   possédait qu'un seul fusil B-1 de 76 millimètres qui se trouvait dans le


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  1   secteur de Bijela Ljeska. Et cette carte de la SRK, P1021, identifie

  2   l'emplacement dudit fusil. A gauche, vous trouverez la partie agrandie de

  3   la carte où l'emplacement est identifié. Et ici, le T signifie "le haut" ou

  4   "fusil" en B/C/S et clairement fait référence à un fusil de 76 millimètres.

  5   Et à droite de l'image, il est clair que ce fusil se trouvait au sud-ouest

  6   de Sarajevo et en dehors de la ville encerclée, et donc inaccessible aux

  7   forces de l'ABiH.

  8   Ceci est confirmé de surcroît par la pièce P5968. Au mois de janvier 1994,

  9   un ordre d'attaque de la SRK qui identifie les pièces d'artillerie connues

 10   de l'ABiH à Sarajevo, et n'énumère pas un seul fusil B-1 de 76 millimètres.

 11   Il n'y a pas un seul élément de preuve crédible indiquant que la

 12   responsabilité de l'ABiH serait engagée en l'espèce. Tous les éléments de

 13   preuve pertinents concernant cette attaque, outre les éléments de preuve,

 14   montrent qu'il y a eu un modèle récurrent d'attaques menées par la SRK et

 15   pointent vers la responsabilité de la SRK.

 16   Ce qui m'amène à parler de G19, le 28 août 1995, le massacre de Markale.

 17   Concernant cette attaque et contrairement aux affirmations de la Défense,

 18   les éléments de preuve excluent manifestement la possibilité que l'obus ait

 19   pu être tiré du côté de l'ABiH, de la ligne de confrontation. Les

 20   observateurs militaires qui se trouvaient à des postes d'observation à

 21   proximité n'ont vu ni entendu aucune activité de tir provenant du

 22   territoire de l'ABiH. Si cela avait été tiré depuis les lignes bosniennes,

 23   cela aurait certainement été entendu par des personnes qui se trouvaient à

 24   OP1; Konings P1953, paragraphes 23, 90, 91, et T9308, 9310. Pour Konings,

 25   Smith, Turkusic et Higgs, le poste d'observation OP1 signifiait que

 26   l'origine du tir se trouvait sur le territoire de la SRK. Paragraphe 65 de

 27   l'annexe C du mémoire en clôture de l'Accusation.

 28   Le propre expert de la Défense, Subotic, était d'accord pour dire que le


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  1   fait que les UNMO n'ont pas entendu le mortier sortant "écartait" la

  2   possibilité que l'obus ait pu être tiré depuis le territoire de l'ABiH;

  3   D3551, paragraphe 111 et 114(e).

  4   En outre, même si la Défense au paragraphe 2 148 se fonde sur l'affirmation

  5   de Demurenko pour avoir personnellement exploré "des milliers de mètres

  6   carrés sur l'ensemble de la pente" du mont Trebevic et n'a pu constater

  7   aucun éventuelle position de mortiers de la SRK, même Demurenko ne pensait

  8   pas qu'il s'agissait là d'une affirmation plausible. Page du compte rendu

  9   d'audience 29 928.

 10   L'autre théorie de la Défense est encore une explosion mise en scène et une

 11   explosion statique telle qu'élaborée par Subotic est typiquement sans

 12   fondement. Par exemple, la Défense fait valoir aux paragraphes 2 140 à 2

 13   141 qu'il y avait des empennages multiples qui ont été retrouvés sur les

 14   lieux et que cela se fonde essentiellement sur la comparaison de Subotic

 15   des différentes images montrant différentes orientations de l'amorce de

 16   l'empennage à partir duquel elle a conclu que ceci était très semblable,

 17   mais qu'il s'agit en réalité d'empennages différents; D3551, paragraphe

 18   103. Et cette image, la figure 108 du rapport, montre ses comparaisons et

 19   l'orientation des amorces.

 20   Cependant, lorsqu'on a remis l'empennage dans le prétoire à Subotic, elle

 21   était d'accord pour dire qu'elle pouvait déplacer l'amorce librement avec

 22   ses propres doigts; pages du compte rendu d'audience 38 574 et 38 579. A-t-

 23   elle concédé à ce moment-là qu'il y avait une théorie d'empennages

 24   multiples et quasi-authentiques qui ont été retrouvés sur les lieux et que

 25   ceci était sans fondement ? Non. Elle a, encore une fois alors qu'elle

 26   était là, élaboré la théorie du complot en insistant qu'il est "certain"

 27   qu'après les faits, "quelqu'un avait délibérément vissé et dévissé

 28   l'anneau." Pages du compte rendu d'audience 38 592 à 38 593.


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  1   Au paragraphe 2 127, la Défense fait sienne les conclusions de

  2   Subotic qui sort clairement son champ de compétences déclarées disant qu'il

  3   n'y avait pas suffisamment de sang sous le corps de la victime qui

  4   correspondrait à la taille de sa blessure; D3551. Mais ni la Défense ni

  5   Subotic n'appuie son rapport qui expliquait sa théorie. Et Karadzic, dans

  6   le contre-interrogatoire de M. Turkusic concernant ces mêmes images, a

  7   expliqué sa position. Karadzic disait que l'essentiel de ces corps était en

  8   fait de vieux cadavres qui avaient été jetés sur la scène, "mis en place

  9   aux fins de mise en scène de cette explosion." Pages 9 093 à 9 096.

 10   Ainsi, la Défense nous dit très clairement qu'à la suite de cette

 11   explosion, les autorités de Bosnie avaient réussi à transporter des

 12   cadavres stockés, ramassés auparavant avec des blessures qui

 13   correspondaient grossièrement aux blessures suites à l'explosion d'un

 14   mortier sur la scène de l'explosion et les avait mis en place au milieu du

 15   carnage, et ceci aussi au su et au vu de dizaines, douzaines de témoins,

 16   sans avoir été vu. Comme M. Turkusic l'a dit lorsque cette théorie lui a

 17   été présentée, il a dit ce type de "spéculation", c'est le terme qu'il a

 18   utilisé, "est la seule chose qui pourrait être encore plus monstrueuse que

 19   la scène elle-même". Page 9 096.

 20   Je passe maintenant aux bombes aériennes modifiées. Comme nous l'avons dit

 21   dans notre mémoire vers la fin de cette campagne de terreur, le SRK a

 22   commencé à lancer des bombes aériennes modifiées sur la ville. Ce sont là

 23   des armes très destructives et hautement imprécises qui ont été utilisées

 24   pour terroriser la population civile. Paragraphes 772 à 776.

 25   La Défense prétend au paragraphe 2 389 que l'Accusation n'aurait

 26   jamais contre-interrogé Subotic sur ces incidents, ces bombes aériennes

 27   répertoriées et se serait livrée plutôt à des "théories théoriques

 28   futiles", mais ceci est non seulement faux, mais est hors champ.


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  1   L'Accusation a dit à Subotic que pour chaque incident répertorié, elle a

  2   dit que son analyse "des cibles les plus probables" consiste à voir où

  3   était tombé le projectile et ensuite essayer de trouver un objet militaire

  4   proche. Subotic a confirmé cela. Elle a expliqué, car on ne lui avait pas

  5   donné des documents de la VRS à l'appui de son analyse de la cible la plus

  6   probable, analyse, "qui n'avait rien à voir avec une doctrine militaire ou

  7   quoi que ce soit de ce type". Elle a également défini ses prétendues

  8   cibles, "car chacune se trouvait soit sur la trajectoire ou proche de la

  9   trajectoire du projectile". Page 38 533 à 38 535.

 10   L'interrogatoire révèle donc qu'il n'y a pas eu de base factuelle

 11   indépendante sous-tendant cette thèse des cibles les plus probables. Et

 12   ceci, d'ailleurs, démontre que l'analyse de Subotic sur la précision des

 13   bombes aériennes était tout à fait circulaire, car elle se fonde sur une

 14   analyse fondée sur la distance entre le point d'impact et la cible la plus

 15   probable; D3540, paragraphe 151. En d'autres termes, Subotic a identifié

 16   les objets les plus proches du point d'impact de la bombe aérienne dont

 17   elle pouvait éventuellement dire qu'il avait une quelconque utilité

 18   militaire, et ensuite elle affirme qu'il s'agissait de la cible visée par

 19   la bombe aérienne. Et elle conclut que les bombes aériennes étaient précise

 20   puisqu'elles atterrissaient tellement proche de ces objets, objets qu'elle

 21   identifie parce qu'ils étaient proche de l'impact. Dans son mémoire, la

 22   Défense s'accroche à cette méthodologie circulaire, exemple au paragraphe 2

 23   382, tout en n'expliquant pas comment deux armes imprécises, des fusées non

 24   guidées et des bombes aériennes, seraient rendues plus précises en les

 25   tirant ensemble, et ceci de manière totalement improvisée.

 26   Et la Défense fait fi également des différentes raisons pour

 27   lesquelles les bombes aériennes étaient encore moins précises que les armes

 28   qu'ils transportent, raisons que nous avons expliquées dans notre mémoire


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  1   au paragraphe 708. La Défense fait l'impasse également sur le fait que ses

  2   propres témoins l'aient reconnu, tel que Veljovic, qui a reconnu que les

  3   bombes aériennes modifiées pouvaient manquer leurs cibles de loin et donc

  4   ne pouvaient être utilisées dans des zones urbaines. On ne pouvait les

  5   utiliser car il y avait "un risque de pouvoir abattre nos propres hommes ou

  6   des civils." Pages 29 269 à 29 270. Ou Demurenko qui a dit dans une

  7   interview que ces bombes aériennes modifiées étaient des armes constituées

  8   d'éléments liés qui atterrissaient "où Dieu le voulait". P5925, page 3.

  9   Et la Défense fait l'impasse également sur des confirmations de

 10   l'époque de l'imprécision de ces armes présentées par le SRK, P1310, et

 11   rapport du SRK expliquant que lorsqu'un lancement de bombes aériennes

 12   modifiées avait été avorté suite aux risques de tomber sur des soldats du

 13   SRK qui étaient à un demi kilomètre de la cible.

 14   Les arguments de la Défense concernant les tests et la vérification

 15   des éléments constitutifs des BAM, aux paragraphes 2 349, 2 354 et 2 385

 16   sont sans pertinence. La question est que ces BAM constituaient une

 17   combinaison fort imprécise d'éléments tout aussi imprécis, improvisés.

 18   Et la thèse selon laquelle ces BAM auraient fait l'objet de --

 19   paragraphes 2 550, est fondé uniquement sur un témoignage vague et pro domo

 20   de Milosevic qui, en tous les cas, n'a donné aucune indication de la nature

 21   de ces prétendus tests. P32771 à 32773.

 22   Et même si ces éléments de preuve de test étaient pris au premier

 23   degré, c'est loin d'équivaloir à ce que l'expert de la Défense Andjelkovic-

 24   Lukic a dit concernant des essais qui auraient dû durer 7 à 8 ans pour de

 25   nouveaux systèmes d'armes. T31494.

 26   La Défense avance des arguments non étayés par les preuves disant que

 27   l'ABiH avait utilisé des BAM, ceci est fondé sur des thèses non étayées par

 28   les preuves vagues par des officiers du SRK, qui défendent leurs propres


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  1   intérêts et ceci n'a aucun lien, même lointain, avec les événements

  2   répertoriés ou non.

  3   La Défense fait donc l'impasse aussi sur les preuves à charge disant

  4   que l'ABiH n'avait pas utilisé et ne disposait pas de BAM à Sarajevo, page

  5   705 de notre mémoire, et la Défense a reconnu dans son mémoire que le SRK

  6   avait tiré des BAM au cours de G10, G11 et G12.

  7   La Défense a dit que le recours à ces BAM "n'était pas l'intention du

  8   SRK ni du commandant du corps de terroriser les civils", paragraphe 2 356,

  9   c'est une manœuvre de diversion. L'acte d'accusation dit que Karadzic et

 10   d'autres membres accusés d'avoir fait de l'ECC étaient animés de

 11   l'intention précise de répandre la terreur.

 12   Et donc, le seul but du déploiement de ces bombes aériennes modifiées

 13   à Sarajevo était de terroriser la population civile, tel qu'indiqué dans

 14   une analyse de l'époque de la FORPRONU indiquant qu'il s'agissait d'armes

 15   de terreur "hautement destructives, imprécises et tuant à l'aveuglette."

 16   P896.

 17   Sans questions de votre part, Mesdames, Messieurs les Juges, voilà

 18   qui termine mon intervention.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons prendre

 20   une pause d'une heure, et nous reprendrons à 1 heure 40.

 21   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 41.

 22   --- L'audience est reprise à 13 heures 45.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, on m'a dit que

 24   l'Accusation avait passé sept heures et 35 minutes jusqu'à présent à

 25   présenter ses conclusions, le temps qu'il vous reste est de deux heures et

 26   25 minutes. Pensez-vous pouvoir terminer vos plaidoiries de clôture dans ce

 27   délai ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Je pense que nous pouvons terminer dans


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  1   les deux heures 25 qui nous restent.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que nous siégerons une heure 15

  3   pour chacun pour la suite, donc nous étendons les séances d'une demi-heure.

  4   Bien, je donne la parole à Mme Pack.

  5   Mme PACK : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  6   Monsieur les Juges. Je vais vous parler de l'entreprise criminelle commune

  7   aux fins d'éliminer la population musulmane bosnienne à Srebrenica.

  8   Karadzic est responsable pénalement des assassinats de plus de 7 000 hommes

  9   et jeunes garçons musulmans de Bosnie et des atteintes graves subies par

 10   des milliers d'hommes, de femmes, et d'enfants musulmans de Bosnie.

 11   Karadzic est responsable pénalement de génocide.

 12   A partir de la nuit du 11 juillet 1995, lui-même et Mladic mettaient en

 13   place les structures et les moyens d'exécution de leur objectif d'éliminer

 14   et de détruire la population musulmane bosniaque à Srebrenica. Plus de 7

 15   000 hommes et jeunes garçons de Musulmans ont été exécutés sommairement en

 16   quatre jours, et le reste de la population, des femmes, de jeunes enfants,

 17   et des hommes plus âgés, ont été expulsés par la force de l'enclave de

 18   Srebrenica en deux jours. Il s'agissait d'opérations délibérées, calculées,

 19   et bien organisées.

 20   Madame, Messieurs les Juges, au cours de cette plaidoirie au cours de son

 21   procès, Karadzic a essayé de minimiser le pouvoir et l'influence qu'il

 22   exerçait en juillet 1995. Mais la vérité est qu'il était président et

 23   commandant suprême des forces armées. Il supervisait les opérations à

 24   Srebrenica. Il a dirigé les opérations à Srebrenica. Il a autorisé et

 25   approuvé chaque étape importante tout au long. Il avait le pouvoir et le

 26   contrôle sur chaque institution de l'Etat qui a participé aux meurtres et

 27   aux expulsions par la force de toute autre personne. Il avait le pouvoir et

 28   le contrôle sur l'armée, la police, et les autorités civiles locales. Ils


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  1   lui ont constamment rendu compte des opérations à Srebrenica. Il a été tenu

  2   au courant constamment du déroulement des événements et des opérations à

  3   Srebrenica. Et son pouvoir garantissait qu'ils coopèrent et qu'ils

  4   coordonnent leurs actions. Son pouvoir garantissait que personne n'ait

  5   jamais ouvert d'enquête sur les meurtres au cours de son règne au pouvoir,

  6   et que les crimes ont ensuite été couverts, que les corps ont été enterrés

  7   à nouveau, et que la communauté internationale ait été tenue à l'écart

  8   jusqu'à ce qu'il soit trop tard.

  9   La Défense de Karadzic a dit qu'il n'était pas au courant et que dès lors

 10   il ne pouvait être animé de la moindre intention. Que son intention de tuer

 11   n'a vu le jour que le 13 juillet après les meurtres à l'entrepôt de

 12   Kravica. Il accuse ensuite Beara, Mladic, et l'état-major principal de la

 13   VRS. Madame, Messieurs les Juges, Beara et Mladic sont coupables, leur

 14   culpabilité n'exculpe en rien Karadzic.

 15   Tout d'abord, je vais vous parler des prétentions de Karadzic selon

 16   lesquelles il dit ne pas avoir été au courant et n'avoir pas eu la moindre

 17   intention. J'aurai l'occasion de développer des arguments concernant sa

 18   participation à la JCE aux fins d'éliminer. C'est de là que l'on pourra

 19   déduire son intention criminelle. Je vous renvoie au mémoire de

 20   l'Accusation, paragraphes 876 à 1 069, où nous présentons toutes les

 21   contributions importantes à cette entreprise criminelle commune d'éliminer

 22   tous les Musulmans bosniaques musulmans, paragraphes 1 096 à 1 100, où nous

 23   parlons de son intention criminel. Je parlerai également des arguments

 24   incroyables développés par la Défense, disant que la conduite de Karadzic

 25   était exemplaire, qu'il n'était pas au courant de ce qui s'était produit de

 26   ces exécutions massives, qu'il n'en ait été au courant qu'après la guerre,

 27   que son plan de tuer les hommes et les garçons musulmans après les meurtres

 28   de Kravica. Et je parlerai également des arguments concernant la JCE


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  1   globale et la JCE tendant à éliminer. Enfin, je vais parler des arguments

  2   de Karadzic sur le chef d'accusation de transfert forcé à Srebrenica. Et,

  3   enfin, je reviendrai au chef de génocide concernant Srebrenica.

  4   Permettez-moi, tout d'abord, de remonter à avant 1995. Il avait longtemps

  5   souhaité l'expulsion de la population musulmane bosniaque de Srebrenica. Je

  6   vous renvoie à la directive 4 et aux paragraphes du mémoire de l'Accusation

  7   paragraphes 414 à 419 et l'appendice A, et le résumé de Podrinje,

  8   paragraphes 2 et 3.

  9   Par cette directive 7, Karadzic avait donné l'ordre d'une attaque soutenue

 10   contre la population civile dans l'enclave de Srebrenica par la privation

 11   et le règne de la peur et la capacité de leurs protecteurs de l'ONU.

 12   Le 28 mai 1995, Karadzic avait donné l'ordre à Mladic de se préparer à

 13   saisir l'enclave de Srebrenica, ensuite il a approuvé une attaque de grande

 14   ampleur. Et le 8 juillet, il a donné l'ordre à Krstic d'aller "en avant

 15   toute". Pièce 4484. Le 9 juillet, il a ordonné l'attaque et la prise de la

 16   ville de Srebrenica. P2276.

 17   Karadzic avait donc l'intention de forcer la population musulmane à quitter

 18   l'enclave de Srebrenica. L'après-midi du 11 juillet, alors que l'armée

 19   entrait à Srebrenica, Gvero, un officier de l'état-major principal, a

 20   appelé Karadzic deux fois pour lui faire rapport. Tout d'abord en disant

 21   que :

 22   "Tout se passait selon le plan, qu'il ne devait pas s'inquiéter.

 23   P4629.

 24   Et 20 minutes plus tard :

 25   "Monsieur le Président, l'argent serbe, l'église serbe et le drapeau

 26   serbe." P4630.

 27   Gvero donc indiquait que le drapeau serbe était ici à Srebrenica. Donc,

 28   Karadzic savait précisément quand Srebrenica est tombée. Mémoire 887 à 889


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  1   [comme interprété]. Cette nuit-là, lui et Mladic ont mis au point les

  2   structures et les moyens pour mettre en place un nouveau plan commun par

  3   rapport à Srebrenica. Il s'agissait de l'entreprise criminelle commune

  4   tendant à éliminer les Musulmans de Bosnie à Srebrenica en tuant tous les

  5   hommes et les garçons et en expulsant par la force la population qui

  6   restait.

  7   Animé de cette intention, Karadzic avait donc bien le plan d'expulser la

  8   population musulmane et son plan a un peu évolué. Les hommes musulmans

  9   devaient être identifiés, séparés de leurs familles, et exécutés. Karadzic

 10   avait donc bien l'intention de les tuer. Karadzic avait l'intention de

 11   détruire la population musulmane bosniaque de Srebrenica. Cette intention,

 12   cette intention génocidaire peut être déduite de ses actions, de ses

 13   paroles, de son pouvoir, de son contrôle sur tout un chacun qui a participé

 14   à l'opération de Srebrenica, son approbation et l'autorisation des actes

 15   perpétrés par ses subordonnés à chaque moment crucial, ses contributions

 16   importantes apportées à l'entreprise criminelle commune tendant à éliminer

 17   la population musulmane bosniaque à Srebrenica.

 18   Karadzic a donc dirigé les opérations de Srebrenica, et le 13 juillet il a

 19   donné l'ordre que les hommes musulmans soient déplacés de Bratunac à

 20   Zvornik, où ils ont été assassinés en cachette. Mémoire de l'Accusation,

 21   paragraphes 959 à 966.

 22   Le 12 juillet à Potocari, l'horrible séparation des hommes et des garçons

 23   musulmans de leurs familles a été entamée. Ces séparations ont fait partie

 24   intrinsèque des opérations de meurtre et d'expulsion par la force. J'y

 25   reviendrai.

 26   Le 13 juillet, Mladic a parlé à Karadzic au téléphone entre 5 heures et 6

 27   heures 40 du soir, s'il y avait des témoins et des photos ont été prises.

 28   Mladic était sur le terrain. Il a dit - il était sur le terrain - que


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  1   Srebrenica était finie. Il fit rapport à Karadzic en disant que l'expulsion

  2   par la force était terminée. En effet, le rapport était précis. Ils ont

  3   parlé de promouvoir Krstic, et Krstic fut en effet promu juste avant 8

  4   heures ce même soir commandant du Corps de la Drina. Karadzic a pris un

  5   décret le lendemain. Mémoire de l'Accusation, paragraphes 949 à 954.

  6   Un peu plus tôt dans l'après-midi, à 3 heures 50, Karadzic avait rencontré

  7   Tomislav Kovac, le ministre de l'Intérieur faisant fonction ou adjoint et

  8   commandant des forces de la police. Je vous renvoie au mémoire de

  9   l'Accusation, paragraphes 441 [comme interprété] à 448 [comme interprété].

 10   Cette réunion a duré 20 minutes. Kovac est parti à 4 heures 10. Ensuite, il

 11   s'est rendu directement sur le terrain. Il a rencontré Mladic à Vlasenica,

 12   à moins de 100 kilomètres de Pale. Vous le verrez sur la carte P4941, page

 13   5.

 14   Les subordonnés de Karadzic, le chef de la police et le chef de l'armée, se

 15   sont réunis le 13 juillet à Vlasenica après que Kovac ait rencontré

 16   Karadzic à Pale. Madame, Messieurs les Juges, cette réunion ne peut être le

 17   fruit du hasard. Et au moment où Kovac et Mladic se sont réunis dans la fin

 18   de l'après-midi du 13 juillet, il y avait plus de 7 000 hommes musulmans

 19   détenus par les Serbes de Bosnie, y compris 6 000 hommes appartenant à la

 20   colonne des hommes qui était partie de Srebrenica la nuit du 11 juillet.

 21   P4945, page 1.

 22   Plus de 1 100 [comme interprété] hommes ont été déplacés vers l'entrepôt de

 23   Kravica où ils ont été assassinés. Et Karadzic a bien sûr dû être informé

 24   des meurtres dans l'entrepôt de Kravica pratiquement tout comme il a été

 25   informé de toute étape importante au courus des opérations de Srebrenica.

 26   Je vous renvoie à l'argument de la Défense, paragraphes 3 031 à 3 038.

 27   La nuit du 13 juillet, Kovac a logé à l'hôtel Vidikovac à Zvornik. C'est à

 28   ce moment-là que le convoi des hommes musulmans s'est arrêté le lendemain


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  1   matin, le 14 juillet, en route vers des sites de détention et d'exécution à

  2   Zvornik. La sécurité de ce convoi était autorisée par la police civile, les

  3   subordonnés de Kovac; paragraphe 982 du mémoire de l'Accusation.

  4   Madame, Messieurs les Juges, de quoi Mladic et Kovac ont-ils pu bien

  5   discuter lorsqu'ils se sont réunis fin de l'après-midi du 13 juillet à

  6   Vlasenica ? De l'opération de meurtre. C'est la seule déduction possible à

  7   l'examen des éléments de preuve car cela s'est produit dans l'heure ou dans

  8   les deux heures après leur réunion, dans l'heure ou les deux heures après

  9   la conversation téléphonique de Karadzic et Mladic, tant Karadzic et Mladic

 10   avaient donné l'ordre de déplacer les hommes et les jeunes gens musulmans

 11   de Bratunac à Zvornik, où ils allaient être tués du 14 au 16 juillet. C'est

 12   la seule déduction possible que vous tirerez, à savoir que Karadzic a

 13   envoyé Kovac sur le terrain pour rencontrer Mladic, pour collaborer dans

 14   cette opération de meurtre et ensuite pour faire rapport, ce qu'il a fait

 15   le 14 juillet.

 16   Vous avez donc des preuves directes de l'ordre donné par Karadzic à

 17   Deronjic pour veiller au déplacement de prisonniers à Zvornik, un appel

 18   téléphonique a été intercepté à 8 heures 10 de l'après-midi le 13 juillet.

 19   Deronjic a dit à Karadzic qu'il y avait à peu près 2 000 hommes détenus à

 20   Bratunac, et qu'il y en aurait encore plus au cours de la nuit. Et Karadzic

 21   a donné des instructions par le biais d'un intermédiaire en code. Vous

 22   pouvez le voir sur la diapositive.

 23   "Toutes les marchandises doivent être placées à l'intérieur de l'entrepôt

 24   avant midi demain.

 25   "Pas dans les entrepôts là-bas mais ailleurs."

 26   Il s'agit de la pièce P6692, page 11 [comme interprété], mémoire en clôture

 27   de l'Accusation, 955 [comme interprété] à 956 [comme interprété].

 28   Karadzic a concédé que ceci s'est déroulé dans son mémoire en clôture, il


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  1   parle des prisonniers. Je veux parler du mémoire en clôture de la Défense,

  2   paragraphes 3 025 à 80.

  3   Pourquoi a-t-il utilisé cet euphémisme ? Pourquoi parler à Deronjic en

  4   langage codé ?

  5   Madame, Messieurs les Juges, cette conversation interceptée ne

  6   constitue pas une preuve pour dire que Karadzic a donné des ordres pour que

  7   les prisonniers musulmans soient emmenés au camp de Batkovic. Je vous

  8   renvoie à son allégation au paragraphe 3 280 du mémoire en clôture de la

  9   Défense.

 10   La seule déduction possible est que Karadzic a donné des ordres à Deronjic

 11   pour s'assurer que les prisonniers soient dissimulés à l'intérieur du

 12   centre de détention de Zvornik, ce qui concorde avec l'ordre précédent de

 13   Mladic à cet effet; paragraphe 995 du mémoire en clôture de l'Accusation,

 14   et avec ce qui s'est passé. Le premier convoi de prisonniers est parti en

 15   direction de Zvornik cette nuit-là, et le reste le lendemain matin. Cette

 16   nuit-là, Deronjic a rencontré les subordonnés de Karadzic de l'armée et la

 17   police, Beara, qui était le subordonné direct de Mladic, et Vasic, qui

 18   était le subordonné direct de Kovac. Deronjic a dit à Beara au sujet des

 19   instructions de Karadzic que les prisonniers devaient être emmenés à

 20   Zvornik. Madame, Messieurs les Juges, la Défense déforme la déposition de

 21   Nikolic au sujet de sa réunion, au paragraphe 3 039 du mémoire en clôture

 22   de la Défense. Il ne s'agit pas de dire que Beara a informé Deronjic de son

 23   plan qui visait à tuer des prisonniers. Note en bas de page 6 398 du

 24   mémoire en clôture de la Défense.

 25   Le sort des prisonniers à ce moment-là était scellé. Discussion entre

 26   Beara et Deronjic, nous intéresse ici. Il s'agit de savoir, non pas où mais

 27   s'ils allaient être tués. Je renvoie à N. Nikolic, page du compte rendu

 28   d'audience 24 678, 24 878.


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  1   Madame et Messieurs les Juges, le CICR a pu accéder aux prisonniers

  2   du camp de Batkovic le 26 juillet. Ils ont été immatriculés, il n'y avait

  3   164 Musulmans de Bosnie et de Srebrenica. Ceci est référencé au mémoire en

  4   clôture de l'Accusation, paragraphe 1 046.

  5   Le 14 juillet dans la matinée, le convoi de prisonniers musulmans a été

  6   arrêté à l'hôtel de Vidikovac de Zvornik, où Kovac a passé la nuit la

  7   veille. Mémoire en clôture de l'Accusation, paragraphes 980 à 983.

  8   Kovac s'est rendu à Bratunac et Srebrenica. Il a rencontré Borovcanin

  9   dont les subordonnés avaient tué les prisonniers à l'entrepôt de Kravica,

 10   la veille, et Dragomir Vasic, chef du poste de sécurité publique de

 11   Zvornik. Confer au paragraphe 942 du mémoire en clôture.

 12   A Pale, Karadzic a rendu une décision déclarant qu'il y avait un état de

 13   guerre à Srebrenica, dans la municipalité de Skelani; P4553, paragraphes

 14   988 à 991 du mémoire en clôture de l'Accusation. Le but était de faciliter

 15   l'emploi du personnel civil et du matériel de l'armée à Bratunac et à

 16   Zvornik pour tuer et enterrer les personnes en question. A 12 heures 40,

 17   Karadzic a rencontré Deronjic, qui avait été nommé commissaire civil de

 18   Srebrenica le 11 juillet. Je vous renvoie au journal de Karadzic P2242,

 19   page 91.

 20   Et Karadzic a certainement dû informer Deronjic, a certainement dû

 21   l'informer de la mise en oeuvre de l'ordre de Karadzic qui lui avait été

 22   transmis, à savoir que les prisonniers musulmans devaient être transportés

 23   à Zvornik avant midi ce jour-là. Et en fin d'après-midi, en fin de journée,

 24   Karadzic a reçu un appel téléphonique du commandant qui se trouvait sur le

 25   terrain. Il a été informé de la colonne d'hommes musulmans. Cet appel a été

 26   entendu par le témoin à charge, Robert Djurdjevic. Paragraphe 1 000 du

 27   mémoire en clôture de l'Accusation.

 28   Ensuite Kovac est retourné à Pale. Il a rencontré Karadzic à 10 heures 45.


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  1   Madame, Messieurs les Juges, la seule déduction raisonnable possible est

  2   que Kovac a informé Karadzic des événements importants qui se déroulaient

  3   alors dans les secteurs de Zvornik et de Bratunac. Il a parlé des

  4   opérations meurtrières et de l'exécution de l'ordre de Karadzic, à savoir

  5   de déplacer les hommes musulmans et les garçons de Bratunac à Zvornik, de

  6   façon à ce qu'ils puissent être tués. Il s'agit du mémoire en clôture de

  7   l'Accusation, paragraphes 943 à 948.

  8   Ce jour-là, les meurtres organisés à Zvornik ont commencé. Environ 1

  9   000 hommes à Bratunac [comme interprété] ont été tués, environ 1 000 hommes

 10   à Petkovci ont été tués.

 11   Madame, Messieurs les Juges, les subordonnés de Karadzic, notamment Mladic,

 12   la police, le MUP et Deronjic, faisaient en sorte que Karadzic était

 13   informé de chaque étape importante du progrès ou de l'avancement des

 14   opérations de Srebrenica, pendant l'attaque, le jour de la chute de

 15   Srebrenica, lorsque la population était déplacée, lorsque des milliers de

 16   prisonniers musulmans ont été détenus, lorsque les prisonniers ont été

 17   transportés à Zvornik et pour y être tués, et cela ne s'est pas arrêté là.

 18   Le lendemain, le 15 juillet, à 10 heures du matin, Beara a été entendu lors

 19   d'une conversation interceptée s'adressant à Krstic. Il a dit, P5074, page

 20   1 :

 21   "Je ne sais pas quoi faire, je suis sérieux. Il y a encore 3 500 colis que

 22   je dois distribuer…"

 23   "Des colis" était un autre euphémisme pour désigner les prisonniers. Beara

 24   expliquait qu'il avait encore 3 500 prisonniers qu'il devait tuer.

 25   Le 16 juillet, lorsque les meurtres de plus de 1 000 hommes à la ferme de

 26   Branjevo se déroulaient, Milenko Karisik, chef du service de la sécurité

 27   publique de la police, s'est rendu à Zvornik. De là, il a informé Karadzic

 28   que le commandant de la Brigade de Zvornik, à savoir Pandurevic avait


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  1   négocié un cessez-le-feu avec l'armée musulmane et qu'un couloir provisoire

  2   pour permettre aux hommes musulmans de passer en territoire détenu par les

  3   Musulmans en sécurité. Karadzic a appelé l'état-major, il était inquiet,

  4   car ceci semblait s'écarter du plan, le plan qui visait à tuer les hommes.

  5   L'état-major devait recueillir sa permission, son approbation. D2002, et

  6   P5076. Mémoire en clôture de l'Accusation, paragraphes 1 002 à 1 011.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous voulez parler de quel type de

  8   permission ? Il fallait recueillir la permission du président pour faire

  9   quoi ?

 10   Mme PACK : [interprétation] Alors pour changer le cours des choses. Il y

 11   avait une opération meurtrière qui se déroulait, le fait d'ouvrir le

 12   corridor signifie que certains hommes et garçons musulmans pouvaient

 13   s'échapper par ce corridor.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'y reviendrai peut-être. Veuillez

 15   poursuivre.

 16   Mme PACK : [interprétation] Karadzic avait le pouvoir de vie et de mort sur

 17   les hommes musulmans de Bosnie et de Srebrenica. Mais il n'a pas exercé ce

 18   pouvoir le 16 juillet pour arrêter les meurtres. Il a appelé ses

 19   subordonnés pour découvrir pourquoi certains hommes musulmans avaient pu

 20   s'échapper.

 21   Vous vous souviendrez certainement que le 6 août, lorsque le monde

 22   entier était au courant de ces exécutions en masse, Karadzic a simplement

 23   exprimé un regret par rapport à Srebrenica, en disant que 9 000 hommes

 24   avaient pu s'échapper. Et il a dit :

 25   "9 000 Turcs armés dans les montagnes, dans les bois, c'est une

 26   division aéroportée, 9 000 personnes, c'était une attaque aéroportée. Et

 27   pour finir 7 000 combattants ont réussi à passer à travers les mailles du

 28   filet. Nous n'avons pas pu encercler l'ennemi et le détruire, car nous nous


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  1   sommes précipités à Zepa". P1412, page 17.

  2   Cette déclaration est la preuve de son intention génocidaire.

  3   Madame, Messieurs les Juges, Karadzic contrôlait l'accès à Zvornik et

  4   à Bratunac et aux sites de crime, mais il tenait la communauté

  5   internationale à l'écart de façon à ce que les meurtres puissent être menés

  6   à bien sans être contrôlés. Mémoire en clôture de l'Accusation, paragraphes

  7   1 022 à 1 026, et 1 034 à 1 039.

  8   Le 17 juillet, il a gracié un petit groupe d'hommes musulmans qui

  9   était resté à Potocari. Après que les dernières femmes et enfants avaient

 10   quitté l'enclave, après que les hommes et les garçons avaient été tués

 11   entre le 13 et 16 juillet, pas pour une quelconque raison humanitaire, mais

 12   simplement pour détourner l'attention de la communauté internationale de

 13   l'enclave. Madame, Messieurs les Juges, il s'agit là d'un de ces ordres

 14   "exemplaires" que cite Karadzic au paragraphe 3 127 de son mémoire en

 15   clôture, il cite la pièce P4390.

 16   Le 17 juillet, lorsque plus de sept [comme interprété] hommes

 17   musulmans avaient été tués et avaient été enterrés, Karadzic a été entendu

 18   à CNN. David Frost, qui l'a interviewé, a posé une question au sujet des

 19   hommes musulmans. Nous pouvons voir cette séquence vidéo.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 22   "Alors qu'en est-il des chiffres que nous avons pu entendre dans les

 23   médias sur les 15 000 personnes, hommes portés disparus, qui n'ont pas été

 24   retrouvés de Srebrenica et que vous les avez quelque part, vous en disposez

 25   quelque part ?

 26   Eh bien, aujourd'hui et hier, nous avons ouvert nos lignes et de

 27   nombreux hommes ont pu entrer en territoire musulman, nombreux d'entre eux

 28   sont des combattants, et notre commandant local leur a permis de passer de


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  1   l'autre côté, ils passent même ce soir. Nombre d'entre eux sont dans les

  2   bois, ils tentent d'atteindre le territoire contrôlé par les Musulmans.

  3   Nous n'intervenons pas. Nous ne souhaitons pas nous battre avec eux parce

  4   qu'ils n'ont pas l'intention de prendre notre territoire. Ils souhaitent

  5   partir."

  6   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  7   Mme PACK : [interprétation] Il s'agit de la pièce P5235, pages 2 et 3.

  8   Vous avez entendu Karadzic dire que les hommes musulmans portés

  9   disparus : Eh bien, que nombre d'entre eux se trouvaient dans les bois et

 10   qu'ils tentaient d'atteindre le territoire contrôlé par les musulmans. Il

 11   mentait, bien sûr. Mais il n'a pas dit à David Frost que : Les hommes

 12   musulmans sont dans le camp de Batkovic, comme je l'ai ordonné le 13

 13   juillet, lorsque j'ai parlé à mon subordonné Deronjic en langage codé.

 14   Pourquoi pas, Madame, Messieurs les Juges ? Parce que telle est sa

 15   thèse. Je vous renvoie au mémoire en clôture de la Défense, paragraphe 3

 16   280. Eh bien, la réponse est simple : parce qu'il savait que ces hommes

 17   étaient morts - il avait approuvé et autorisé leurs meurtres.

 18   Aujourd'hui, il nous dit qu'il ne connaissait pas ou n'était pas au

 19   courant des inquiétudes qu'exprimait la communauté internationale ou, en

 20   tout cas, qu'il ne croyait pas ces allégations. Je vous renvoie au mémoire

 21   en clôture de la Défense, paragraphes 3 129 à 3 142.

 22   Madame, Messieurs les Juges, l'Accusation a abordé la mesure dans

 23   laquelle Karadzic a communiqué avec la presse internationale dans le

 24   mémoire en clôture de l'Accusation aux paragraphes 1 026, 1 037 à 1 039, 1

 25   081 à 1 083.

 26   Karadzic était au courant des allégations et des inquiétudes des

 27   allégations faites par la communauté internationale et de leurs

 28   inquiétudes. Ce que nous avons pu constater dans l'interview avec David


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  1   Frost le 17 juillet. Je vous renvoie également au mémoire en clôture de

  2   l'Accusation aux paragraphes 1 025, 1 043 à 1 046, 1 071 à 1 074, 1 080 à 1

  3   083.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je marque une pause parce que j'estime

  5   qu'il s'agit d'un passage très important. Eu égard à cette transcription

  6   d'une séance de l'assemblée, page 17, de la pièce 1412, lors de ces

  7   déclarations liminaires, M. Tieger a dit que M. Karadzic était en colère

  8   parce qu'une partie de la colonne avait réussi à s'échapper, et maintenant

  9   vous dites que c'était le seul regret qu'il avait, mais ce n'est pas

 10   quelque chose ou l'expression n'a pas été utilisée dans votre mémoire en

 11   clôture. Veuillez développer cela. D'où vient cet avis que M. Karadzic

 12   était en colère ou qu'il regrettait le fait que certains membres de la

 13   colonne avaient réussi à s'échapper ? Sur quoi vous fondez-vous ?

 14   Mme PACK : [interprétation] D'après le libellé. Eh bien, pour dire que la

 15   seule déclaration qui est fait concernant les milliers d'hommes musulmans

 16   de Srebrenica, eh bien, que cela c'était une division aéroportée. Alors que

 17   9 000 ont réussi à passer et qu'ils sont revenus au sein d'une division --

 18   ils n'ont pas réussi à encercler l'ennemi et les détruire. C'est la même

 19   chose le regret et la colère. Lorsque je parle de "regret" ce que je veux

 20   dire c'est que c'était après les événements de Srebrenica, sa seule

 21   expression d'un quelconque sentiment. La colère, et le regret que certains

 22   hommes musulmans avaient réussi à s'échapper dans le corridor et que

 23   Pandurevic dans son allocution en a parlé devant l'assemblée.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et dans cette allocution devant

 25   l'assemblée il a dit : "Nous n'avons pas réussi à encercler et à détruire

 26   l'ennemi."

 27   En tant que tel ceci n'équivaut pas à un génocide.

 28   Mme PACK : [interprétation] Il ne va pas dire devant l'assemblée, Nous


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  1   n'avons pas réussi, comme nous avons fait avec les 7 000 autres, et de les

  2   exécuter sommairement et de les enterrer dans les fosses communes. Donc, il

  3   s'agit là de la preuve de son intention génocidaire, car il était en colère

  4   que certaines personnes avaient réussi à s'échapper. Donc, il savait que

  5   tous les autres avaient été tués, et donc il s'agit là d'une preuve car ce

  6   qu'il dit il parle de sa colère et de son regret, car chaque homme et

  7   garçon musulman n'a pas été tué. Et son intention était d'éliminer toute la

  8   population bosno-musulmane en tuant les hommes et les garçons. Et donc

  9   certains ont pu s'échapper, et c'est cela qui le mettait en colère.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demande de bien vouloir

 11   télécharger la pièce P5076, conversation téléphonique entre l'état-major et

 12   Palma que vous avez citée.

 13   Alors, en attendant l'affichage dudit document, vous avez également évoqué

 14   la pièce D2002 [comme interprété] où Karadzic aurait appelé l'état-major et

 15   où il est dit que :

 16   "Le président a appelé il y a quelques instants et a dit qu'il avait été

 17   informé par Karisik que Pandurevic avait organisé le passage des Musulmans

 18   en ce territoire-là."

 19   Au vu de cela, j'ai quelques difficultés à interpréter une ou deux phrases

 20   qui se trouvent au début de cette conversation interceptée. Ici, les gens

 21   de l'état-major -- dit : Je dois obtenir la permission du patron principal

 22   et du chef d'Etat. Vous avez évoqué cela, et moi je vous ai dit que j'y

 23   reviendrais. En sachant que la colonne était déjà passée en territoire

 24   musulman, alors quel type de permission avaient-ils besoin, je veux parler

 25   de quel type de permission de l'état-major ?

 26   Mme PACK : [interprétation] Alors, nous constatons que dans la chronologie

 27   des événements au niveau des conversations interceptées, que l'état-major

 28   envoie Popovic pour qu'il aille parler à Pandurevic, et Karisik est dans la


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  1   région. Il découvre ce qui s'est passé avant. Semble-t-il que l'état-major

  2   est au courant. L'information parvient à Karadzic. Il répond. Il contacte

  3   l'état-major. Et manifestement, il faut comprendre ce qui se passe dans le

  4   secteur de Zvornik pour pouvoir s'assurer qu'il y a approbation parce qu'il

  5   y a un changement -- il y a le 9 juillet, il y a Tolimir qui avait --

  6   l'état-major avait proposé à Karadzic d'attaquer la ville si les conditions

  7   étaient réunies et Karadzic a donné son approbation. Il s'agissait là d'un

  8   changement au niveau de l'opération militaire concernant l'ordre de

  9   l'attaque de Krivaja 95, il s'agissait : De prendre le contrôle de la

 10   ville. Et son approbation était nécessaire, comme elle l'était le 9

 11   juillet, et comme elle l'était à tout moment ou à chaque fois qu'il y avait

 12   une décision importante qui devait être prise lors des opérations de

 13   Srebrenica.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, cette permission avait-elle un

 15   quelconque lien avec la colonne ?

 16   Mme PACK : [interprétation] Oui, tout à fait. Ceci devait permettre le

 17   passage de la colonne. Et l'état-major téléphone et souhaite savoir ce qui

 18   se passe parce qu'il a été informé quasiment en temps réel et assez

 19   rapidement par Karisik parce que Karisik est avec Pandurevic. Ils étaient

 20   ensemble à Zvornik; chose que nous avons  entendu. Et il a une information

 21   de première main qu'il communique à Karadzic. Nous savons que cette

 22   information est exacte car nous avons vu que Vasic l'en informe quasiment

 23   en même temps, qu'il avait la capacité d'en informer Karadzic, et que cet

 24   appel a eu lieu, que Karadzic a reçu l'information, que l'information lui

 25   provenait de ses différentes sources, il avait différents canaux de

 26   communication. Et lorsqu'il a reçu cette information-là, avant même que

 27   l'état-major était tout à fait au courant de ce qui se passait, il a

 28   répondu à ce moment-là à cette information qu'on lui avait communiquée, il


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  1   est rentré directement en contact avec l'état-major.

  2   C'est ainsi, en tout cas, nous le décrivons dans le mémoire en clôture de

  3   l'Accusation aux paragraphes 1 002 à 1 011. Ces actions étaient censées

  4   s'écarter de façon superficielle du plan qui consistait à mener à bien ces

  5   meurtres. Pandurevic n'avait pas recueilli l'approbation de Karadzic et/ou

  6   de l'état-major de la VRS, donc il fallait contacter Pandurevic puisqu'il

  7   fallait l'approbation de Karadzic.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'en tiens là. Merci, Madame Pack.

  9   Mme PACK : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je vais regarder

 10   le compte rendu pour savoir où j'en étais.

 11   Alors, j'allais parler des ordres exemplaires. Mesdames, Messieurs les

 12   Juges, je vais parler des trois allégations précises faites que j'ai

 13   évoquées au début de ma présentation : les ordres de Karadzic étaient

 14   exemplaires. C'est ce qui est allégué au paragraphe 3 127 du mémoire en

 15   clôture de la Défense. Il note sept décisions et ordres au paragraphe 3

 16   127. Il n'y a rien d'exemplaires dans ces ordres. Les cinq premiers ordres

 17   sont abordés dans le mémoire en clôture de l'Accusation. L'ordre du 9

 18   juillet, P2276, est traité aux paragraphes 876 à 879. Il s'agit de l'ordre

 19   d'attaquer la ville de Srebrenica. La décision du 11 juillet, D2055 et

 20   P2994, se trouve aux paragraphes 900 à 908. Il s'agit de décisions visant à

 21   mettre en place les structures civiles de Srebrenica.

 22   Karadzic avait nommé son subordonné, Miroslav Deronjic, pour s'occuper des

 23   civils musulmans. Il s'agissait de quelqu'un qui avait déjà procédé à des

 24   nettoyages ethniques et qui était un vétéran. Karadzic n'avait pas

 25   l'intention lorsque ses ordres étaient assortis d'instructions d'adhérer au

 26   droit international humanitaire. Et le droit humanitaire n'a en réalité pas

 27   été respecté par ses subordonnés, et pas du tout. Il s'agissait d'une

 28   adhésion feinte au respect du droit international. Il s'agit ici de ce


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  1   qu'il dit au mémoire de l'Accusation, aux paragraphes 879, 902. Il en va de

  2   même pour la décision du 14 juillet, P4553. C'est la déclaration de l'état

  3   de guerre. J'en ai parlé. Nous traitons de cela au paragraphe 988 jusqu'à

  4   991 dans notre mémoire.

  5   L'amnistie accordée aux fonctionnaires musulmans locaux de Potocari,

  6   la Défense invoque P4390, est traitée aux paragraphes 1 030 à 1 033 du

  7   mémoire de l'Accusation.

  8   Karadzic invoque deux ordres supplémentaires. Le premier, P4967, daté

  9   du 22 juillet. A la note de bas de page 6510 du mémoire de la Défense. Le 

 10   22 juillet, c'est-à-dire après le déplacement forcé de la population

 11   musulmane de Bosnie. Il faut la lire dans le contexte de la pièce de

 12   l'Accusation P4966. A ce moment-là, vous vous rendrez compte que cela

 13   traite du vol de victuailles et d'équipement de la base des Nations Unies à

 14   Potocari après le départ des Nations Unies. Deronjic a dit qu'il

 15   obtiendrait un ordre de Karadzic pour s'occuper du problème, et il l'a fait

 16   presque immédiatement. C'est ce que montre la lecture conjointe de la pièce

 17   P4967 et P4966.

 18   Ensuite, le deuxième ordre est la pièce à conviction P4968, note de

 19   bas de page 6511 du mémoire de la Défense, daté du 25 juillet 1995. Ici,

 20   encore, il date d'après le déplacement forcé de la population musulmane de

 21   Srebrenica. Il porte sur le passage de convois humanitaires vers les

 22   Musulmans à Gorazde, pas Srebrenica, et ne comporte aucune justification

 23   humanitaire. Il s'agit simplement d'assurer le passage des convois d'aide

 24   humanitaire vers les Serbes installés dans d'autres zones et d'empêcher les

 25   forces de l'OTAN de bombarder les positions de la VRS. Ce document montre

 26   que Karadzic était en contact téléphonique direct avec Krstic et que

 27   lorsqu'un ordre venait de Karadzic, l'armée était censée obéir.

 28   Sous menace de poursuite, c'est ce que dit le document :


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  1   "Nous allons prendre des mesures disciplinaires contre…" et suite de

  2   la citation, "et intenter des poursuites contre ceux qui s'opposent à

  3   l'accomplissement ou la réalisation des obligations du Corps de la Drina."

  4   Deuxième allégation spécifique que je vais aborder, Monsieur le

  5   Président, est la suivante : Karadzic dit qu'il ne savait rien car les

  6   rapports écrits qui lui parvenaient ne faisaient aucune référence à

  7   l'exécution de prisonniers de Srebrenica. Mémoire final de la Défense,

  8   paragraphe 3 083 à 3 085 et 3 091 à 3 107. Il a convoqué des témoins pour

  9   confirmer qu'il ignorait totalement tout cela, des témoins tels que Kovac,

 10   Tolimir et Gordan Milinic, qui sont des menteurs, des génocidaires et

 11   d'infâmes suppôts. Nous avons décrit les lignes du compte rendu,

 12   officielles et officieuses, qui mènent à Karadzic, aux paragraphes 843

 13   [comme interprété] à 854 du mémoire. Je vais réitérer la position du

 14   Procureur : Karadzic était tenu informé lors des opérations de Srebrenica

 15   par téléphone et contact personnel avec ses subordonnés dans l'armée, dans

 16   la police, et au sein des autorités civiles locales, et ces contacts

 17   téléphoniques et personnels étaient complétés par des rapports écrits.

 18   L'état-major principal soumettait des rapports écrits à Karadzic au sujet

 19   des prisonniers. Je renvoie au mémoire de l'Accusation, au paragraphe 852.

 20   Le 12 juillet, Karadzic a été informé que la VRS et le MUP, leurs

 21   unités plus exactement "avaient organisé des embuscades pour détruire les

 22   extrémistes musulmans qui ne s'étaient pas rendus." P3054, pages 3 et 4.

 23   Le 13 juillet, Karadzic a été informé que des hommes musulmans

 24   s'étaient rendus "en très grand nombre". P4464, page 3. Le 14 juillet,

 25   Karadzic a été informé que les unités du Corps de la Drina "nettoyaient le

 26   terrain" et faisaient prisonniers des "nombres importants de fugitifs

 27   musulmans". P4457, page 3.

 28   Sur la seule base de ces rapports écrits, Karadzic était au courant


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  1   de l'existence de grand nombre de prisonniers. Où pensaient-ils donc qu'ils

  2   avaient été emmenés ? Au camp de Batkovic ? Karadzic déclare qu'il n'avait

  3   aucune raison de savoir, à la mi-août, qu'un nombre important d'hommes et

  4   de garçons musulmans avaient été exécutés. Je renvoie au mémoire de clôture

  5   de la Défense, paragraphe 3 111. Mais il a reçu un rapport de la commission

  6   d'échange des prisonniers de guerre daté du 12 août 1995, qui disait qu'il

  7   ne se trouvait pas plus que quelques centaines d'hommes musulmans de

  8   Srebrenica au camp de Srebrenica [comme interprété]. P4975, pages 2 et 3,

  9   et je renvoie au mémoire de l'Accusation, paragraphe 1 047, note de bas de

 10   page 3782.

 11   Et, de fait, entre août et la fin décembre 1995, seuls 170 Musulmans

 12   du camp de Batkovic ont été échangés. P5440.

 13   S'il ignorait véritablement les crimes de Srebrenica, pourquoi

 14   Karadzic n'a-t-il pas donné l'alarme en août 1995 ? Où se trouvaient les

 15   hommes et garçons de Srebrenica ? Pourquoi Karadzic n'a-t-il pas alors

 16   ordonné une enquête ?

 17   A présent, je vais aborder ce que dit la Défense sur le moment où le

 18   projet de meurtre est apparu. Je renvoie au mémoire de la Défense,

 19   paragraphes 2 449 à 2 518. Karadzic cherche à esquiver toute responsabilité

 20   des meurtres de l'entrepôt de Kravica et même des meurtres à Zvornik pour

 21   les faire endosser aux prisonniers musulmans qui ont cherché à fomenter une

 22   "mutinerie", dit-il, à l'entrepôt de Kravica, ce qui a déclenché le

 23   massacre de plus de 1 000 hommes. Je renvoie au mémoire de la Défense,

 24   paragraphes 2 450, 2 451 et 2 518.

 25   Des meurtres organisés ont été commis le 13 juillet sur la rivière

 26   Jadar, à l'entrepôt de Kravica, dans le pré de Sandici et à l'école de Luke

 27   près de Tisca. Ces meurtres organisés sont décrits dans la description des

 28   événements de Srebrenica, paragraphes 49 à 79. Nous avons expliqué pourquoi


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  1   ils ont été commis aux fins de la réalisation de l'entreprise criminelle

  2   commune visant à éliminer. Nous avons expliqué pourquoi les meurtres de

  3   l'entrepôt de Kravica ont été prémédités, organisés et commis dans

  4   l'accomplissement de ce plan. Je ne vais pas répéter cet argumentaire qui

  5   figure dans notre mémoire.

  6   Toutes les preuves indiquent l'existence d'un plan visant à tuer les

  7   hommes et garçons musulmans de Srebrenica, qui a été exécuté à Potocari,

  8   dès le moment où les hommes et garçons ont été séparés de leurs familles le

  9   12 juillet. Nous abordons cela dans la description de Srebrenica,

 10   paragraphes 14, 19, et 23, et 25 à 27. C'est ce qui avait été annoncé à

 11   Momir Nikolic lors de ses conversations avec Popovic, Kosoric et Jankovic,

 12   le matin du 12 juillet. Ces conversations sont décrites dans le mémoire de

 13   l'Accusation, aux paragraphes 916 à 919. Je ne vais pas entrer dans les

 14   détails. Et, Madame, et Messieurs les Juges, c'est ce qui s'est

 15   effectivement produit, le mémoire de la Défense n'a fait naître aucun doute

 16   raisonnable à ce sujet.

 17   Je vais à présent aborder quatre sujets. Premièrement, les meurtres sur la

 18   rivière Jadar; deuxièmement, les communications interceptées invoquées par

 19   la Défense; troisièmement et quatrièmement, la séparation des Musulmans,

 20   des hommes et garçons musulmans.

 21   Premièrement, les meurtres sur la rivière Jadar. La Défense prétend qu'ils

 22   n'ont pas condamné ni effectué une constatation de fait sur la base de la

 23   déposition de KDZ065 sur l'exécution sur la Jadar le 13 juillet. Voir

 24   mémoire de la Défense, paragraphe 2 494 à 2 495. Nous avons abordé les

 25   meurtres de la rivière Jadar et les aspects du témoignage de KDZ065, ils

 26   sont corroborés dans la description des événements de Srebrenica;

 27   paragraphes 49 à 53. Je vous renvoie également aux paragraphes 39, 40 de

 28   cette même description des événements de Srebrenica.


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  1   En tout état de cause, nous affirmons que les preuves de la Défense ne

  2   remettent pas en cause, n'annulent pas les faits jugés autour de cet

  3   événement au motif d'absence de crédibilité, de fiabilité. La Défense ne

  4   peut remettre en cause un fait jugé que lorsqu'on introduit des "preuves

  5   contraires qui sont fiables et crédibles". Je vous renvoie au paragraphe 42

  6   de la décision de la Chambre d'appel, le 16 juin 2006, sur l'appel

  7   interlocuteur de l'Accusation sur la décision de constat judiciaire dans

  8   l'affaire Karemera.

  9   Et nous avons traité des preuves de la Défense dans la description de

 10   Srebrenica et dans le tableau de crédibilité des témoins, annexe F, pages

 11   184 et 194, 195.

 12   Toutefois, si vous estimez que les faits jugés relatifs à la rivière

 13   Jadar doivent être annulés et que vous estimez que la déposition de KDZ065

 14   n'est pas corroborée, comme nous le disons, à ce moment-là nous abordons

 15   votre question 8, comme l'a prévu M. Tieger. Je vais vous donner lecture de

 16   la question.

 17   "Quelle est la position de l'Accusation en ce qui concerne l'utilisation de

 18   preuve au titre de l'article 92 non corroborée aux fins de constatations

 19   factuelles ou constatations de faits ?"

 20   Pour répondre à cette question, je renvoie au mémoire de la Défense, au

 21   paragraphe 2 494, au sujet de la rivière Jadar. Il est exact de dire que la

 22   Chambre de première instance dans l'affaire Blagojevic a refusé d'effectuer

 23   une constatation de fait sur la base de preuve 92 bis non corroborée, et

 24   cela portait sur les meurtres en annexe et énumérés sur la rivière Jadar.

 25   Toutefois, il existe une jurisprudence du TPIY pour justifier l'idée selon

 26   laquelle la Chambre peut invoquer une systématicité dans des événements

 27   similaires ou corollaires pour corroborer, pour trouver une force

 28   corroborative suffisante pour justifier une condamnation. Et, je parle


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  1   spécifiquement ici des meurtres sur la Jadar, notamment annexe EA1 de

  2   l'acte d'accusation, en particulier, je vous renvoie au jugement en appel

  3   Kupreskic, aux paragraphes 329 à 332. La Chambre d'appel a estimé qu'une

  4   preuve basée sur une systématicité peut offrir la corroboration nécessaire

  5   aux autres formes de preuves présentées lors du procès.

  6   Cette approche concorde avec l'approbation d'une condamnation de la

  7   Chambre d'appel de Stakic au chef du meurtre de 77 Croates à Brisevo, des

  8   circonstances qui étaient les seules preuves soutenant la constatation

  9   admise au titre de l'article 92 bis. Ici, comme pour l'événement de Stakic,

 10   l'un des nombreux meurtres justifiant les condamnations pour les chefs

 11   d'extermination, et persécution constituait précisément dans cet événement.

 12   Je vous renvoie au paragraphe 200 de ce jugement.

 13   Et vous pouvez, vous devriez faire un même constat de fait en ce qui

 14   concerne l'incident ou l'événement de la Jadar. Les exécutions sur la Jadar

 15   le 13 juillet étaient analogues aux autres meurtres organisés du même jour

 16   à l'entrepôt de Kravica, au pré de Sandici, et à l'école de Luke. Les

 17   meurtres organisés contenaient tous les mêmes éléments communs. Les auteurs

 18   étaient des forces serbes de Bosnie, les victimes étaient des Musulmans de

 19   Bosnie, les meurtres appelaient une coordination entre des forces de la VRS

 20   et du MUP, des bus ont été utilisés pour transporter les victimes vers les

 21   sites d'exécution, et les meurtres ont eu lieu dans le contexte d'une

 22   opération ou de l'opération de meurtre. Les similarités et la suite des

 23   événements dans ces meurtres et la preuve qu'ils sont tous liés permettent

 24   de corroborer le récit de KDZ065. C'est ce que nous voulions dire au sujet

 25   de cette question qui porte sur la rivière Jadar.

 26   Deuxièmement, en ce qui concerne le projet de meurtre, la Défense invoqué

 27   une conversation interceptée, D2197, au paragraphe 2 468, du mémoire en

 28   clôture de la Défense. Cette conversation interceptée relève que Beara a


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  1   dit à 11 heures 25 le 13 juillet, que les prisonniers seraient envoyés à

  2   Batkovic. Cela ne correspond pas aux véritables intentions de Beara. Les

  3   prisonniers n'ont pas été envoyés à Batkovic. Beara était à l'époque un

  4   participant actif de l'entreprise criminelle commune visant à éliminer.

  5   Dans une conversation interceptée une heure avant, à 10 heures 09, il a

  6   donné des instructions au sujet de la détention d'hommes musulmans à

  7   Konjevic Polje et a déclaré que les Musulmans se tuent eux-mêmes. On lui a

  8   dit cela, il a répondu :

  9    "Excellent, qu'ils continuent, merde." Voilà, c'est D2204, page 2,

 10   et P5354, page 3.

 11   Je vais aborder les deux derniers sujets ensemble. Le mémoire de la

 12   Défense indique premièrement qu'il existait des efforts visant à trier et à

 13   enregistrer des prisonniers, ce qui montre que l'existence d'un plan de

 14   meurtre à partir du 12 juillet n'est pas la seule conclusion raisonnable à

 15   tirer de ces preuves. Deuxièmement, il n'existe aucune preuve de

 16   confiscation systématique de documents d'identité. Je renvoie aux

 17   paragraphes 2 470 jusqu'à 2 479, et 2 511 du mémoire de clôture de la

 18   Défense.

 19   Il n'existait en fait aucun processus de tri digne de ce nom. Je renvoie à

 20   la description de Srebrenica, paragraphe 22. Les jeunes hommes, les enfants

 21   étaient séparés de leurs familles à Potocari. C'est le témoignage de

 22   Rutten, il a dit que des enfants, de 2 ans parfois, étaient séparés. P3948,

 23   paragraphe 49; et compte rendu d'audience T22040 et 22046. Et il y a

 24   également le témoignage de Kingori, P4140, paragraphes 170 et 171. Et je

 25   vous renvoie également à la déposition de Sera Ibisevic, P401, page 8; et

 26   de Samina Salcinovic [phon], P404, page 13. Aucun effort n'a été consenti,

 27   sauf à Nova Kasaba, et j'y reviendrai, pour consigner les identités des

 28   prisonniers musulmans qui avaient été mis en détention. Il existe des


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  1   preuves de la confiscation systématique de documents d'identité et ces

  2   documents ont été détruits. Le 12 juillet, Boering a vu des cartes

  3   d'identité, passeports, éparpillés dans un coin à la maison blanche à

  4   Potocari. P3969, pages 122 à 123 et page 183. Le 13 juillet, Rutten a vu

  5   des tas de cartes d'identité, de passeports à même le sol, à l'extérieur de

  6   la maison blanche. P3948, paragraphes 55, 63 et 89. Il a déclaré que des

  7   enfants, parfois aussi jeunes que 12 ans, ont été forcés sous la menace des

  8   armes à rendre leurs cartes d'identité. Compte rendu d'audience 22 040. Il

  9   a observé que l'on brûlait les documents d'identité des garçons et hommes

 10   musulmans le soir du 13 juillet. P3948, paragraphe 66, et compte rendu

 11   d'audience 22 041, 22 042 et P3961. Le 12 juillet, Kingori a vu que les

 12   hommes étaient obligés de remettre leurs cartes d'identité. P4140, aux

 13   paragraphes 173, 174 et compte rendu d'audience page 22 813. Il a dit que

 14   ça signifiait beaucoup :

 15   "Cela indiquait que quelque chose de grave allait se produire…",

 16   P4140, paragraphe 175.

 17   Il existe des preuves de confiscation systématique ou d'élimination

 18   systématique des cartes d'identité à l'extérieur de Potocari, à Bratunac.

 19   Je renvoie à la déposition KDZ039; P3940, page 28. A Konjevic Polje, le 13

 20   juillet, je renvoie au témoignage de KDZ065, P336, pages 12 et 13; et

 21   KDZ045, compte rendu d'audience page 22 679 jusqu'à 22 680 et 22685.

 22   Karadzic invoque la déposition de deux survivants; paragraphe 2 511

 23   du mémoire de la Défense. Premièrement, KDZ039 qui s'est fait retirer sa

 24   carte d'identité à Bratunac. J'ai déjà parlé de sa déposition. L'autre,

 25   KDZ167, il ne s'est pas vu retirer ses documents d'identité à Potocari et à

 26   Bratunac. C'est vrai. Il avait aussi laissé sa carte d'identité chez lui.

 27   Référence P354, pages 73 et 74.

 28   Madame, Monsieur les Juges, j'ai parlé tout à l'heure de Nova Kasaba.


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  1   Mladic a dit à des prisonniers de Nova Kasaba le 13 juillet qu'ils seraient

  2   échangés, que ce n'étaient pas des criminels, qu'ils iraient déjeuner à

  3   Bratunac, qu'il organiserait des groupes pour récupérer les blessés dans

  4   les bois, et que les personnes décédées seront enterrées là où leurs

  5   familles le voudraient. Et dans ce contexte, il a ordonné à ses soldats

  6   d'établir une liste de prisonniers. Une caméra a filmé cela pendant qu'il

  7   le disait. Ensuite, ses soldats ont roué de coups, ont frappé, ont donné

  8   des coups de pied à un prisonnier avec des crosses de fusil. L'un l'a

  9   abattu d'un pistolet. Mladic n'a pas réagi. Karadzic se fonde sur ces

 10   éléments de preuve n'est un mensonge éhonté de Mladic pour prouver qu'il

 11   n'y avait pas de plan pour tuer les hommes. Non. Je fais référence au

 12   mémoire de la Défense, paragraphe 2 474; et le descriptif de Srebrenica,

 13   paragraphe 43, le fait jugé 1623; le témoignage de KDZ333, la pièce P4342,

 14   pages 10 et 11.

 15   Deux derniers points sur la question des séparations. Premièrement,

 16   Karadzic se fonde sur une liste de 387 criminels de guerre supposés, daté

 17   du 12 juillet, comme élément de preuve pour montrer qu'il y avait un

 18   véritable processus de tri, et qu'il n'y avait pas de plan de tuer les

 19   hommes. Je fais référence au mémoire de la Défense, paragraphe 2 473 et

 20   pièce D1957. Vous ne pouvez pas déduire cela sur la base de cette liste.

 21   S'il y avait eu un processus de tri véritable, pourquoi tous les hommes et

 22   les garçons qui ont été séparés à Potocari ont-ils été emmenés à Bratunac;

 23   je vous renvoie à la page du compte rendu 22 181. Deuxièmement, Karadzic se

 24   fonde sur les éléments de preuve montrant que Resid Sinanovic a été

 25   interrogé en qualité de suspect de crimes de guerre, mémoire de la Défense,

 26   paragraphe 2 476, et sur le fait que Beara ait dit à Zlatan Simanovic

 27   [phon] [comme interprété] le 12 juillet de voir s'il n'y avait pas de

 28   criminels de guerre qui étaient sous leur garde. Je fais référence là


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  1   encore au mémoire de la Défense, paragraphe 2 477.

  2   Madame, Monsieur les Juges, Sinanovic se trouvait sur la liste à laquelle

  3   la Défense fait référence. D1957. Il apparaît à la ligne 121. Le 13

  4   juillet, il a été interrogé par Zlatan Celanovic, le juriste de la Brigade

  5   de Bratunac. Celanovic s'est rendu compte qu'il n'y avait pas de fondement

  6   pour le garder prisonnier ou pour le poursuivre. Je fais référence là à la

  7   pièce P377, pages 10 et 12, déposition de Cilanovic, et pages du compte

  8   rendu 24 658 et 59 de la déposition de M. Nikolic.

  9   Mais Sinanovic n'a pas été libéré comme à quoi on pourrait s'attendre

 10   lors d'un processus de tri véritable. Il a été détenu à Bratunac. Il a

 11   ensuite été envoyé à Zvornik. Il s'est échappé. Il a échappé aux exécutions

 12   de Kozluk. Il s'est échappé dans le fleuve Drina. Il a été réarrêté,

 13   renvoyé à Zvornik, et puis, il a été assassiné à l'exploitation agricole de

 14   Branjevo ou au centre culturel de Pilica le 16 juillet. Nous reprenons son

 15   histoire dans le descriptif de Srebrenica, aux paragraphes 85 à 88. A part

 16   un groupe de cinq à sept prisonniers qui ont été emmenés parallèlement à

 17   Sinanovic, Celanovic n'a interrogé personne d'autre à Bratunac; pièce P377,

 18   pages 8 et 9, 13, 20, 21 et 76.

 19   S'il y a un doute dans votre esprit quant à l'objectif de la

 20   séparation des hommes et garçons musulmans à Potocari, j'aimerais vous

 21   rappeler le témoignage d'une mère de Srebrenica connue dans cette affaire

 22   sous le pseudonyme KDZ265. Le Témoin KDZ265 a perdu son mari et deux de ses

 23   fils. Elle a décrit le moment où son garçon de 14 ans lui a été enlevé à

 24   Potocari. Elle a déclaré qu'elle a dû passer par une sorte de haie

 25   d'honneur. Et ensuite, à mi-chemin, quelqu'un a dit :

 26   "Popovic, regardez celui-là." Il parlait de son fils. Elle a dit à

 27   son fils :

 28   "Ne t'inquiètes pas, mon garçon, continue."


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  1   L'un des soldats est sortie de la haie d'honneur et a dit à son fils

  2   de se rendre à gauche. Son fils lui a dit :

  3   "Pourquoi moi ? Je suis né en 1981."

  4   Ensuite, elle a déclaré à propos de son fils :

  5   "Il avait une sorte en main et le soldat lui a dit de jeter le sac

  6   vers la droite et de se rendre à gauche, mais je l'ai pris par la main, et

  7   il ne cessait de me répéter 'Je suis né en 1981. Qu'est-ce que vous allez

  8   faire de moi ? Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ?' Et puis, je les ai

  9   implorés, je les ai suppliés. Je leur ai dit : 'Pourquoi vous le prenez ?

 10   Il est né en 1981.' Mais il a répété son ordre. Et je l'ai tenu si fort,

 11   mais il me l'a pris.

 12   "Et ensuite, mon fils a jeté ce sac et le soldat l'a ramassé, l'a

 13   jeté sur une pile à droite, a pris mon fils par la main et l'a tiré vers la

 14   gauche. Il s'est retourné et il a dit : Maman, s'il te plaît, tu peux

 15   prendre mon sac ? Prends mon sac."

 16   Elle a déclaré lors de sa déposition : "C'est la dernière fois que

 17   j'ai entendu sa voix." Pièce P367, pages 13 à 15. Madame, Monsieur les

 18   Juges, les éléments de preuve sur la séparation des enfants suffisent à

 19   établir qu'il n'y avait pas de véritable tri à Potocari.

 20   A présent, Madame, Monsieur les Juges, j'aimerais répondre sur les

 21   chiffres qui ont été avancés. Je vais passer à l'argument de M. Karadzic

 22   s'agissant du nombre d'hommes musulmans de Bosnie qui ont été exécutés.

 23   Paragraphes 2 519 à 2 702 du mémoire de la Défense.

 24   Madame, Monsieur les Juges, la Défense ne tient pas compte de

 25   l'intégralité des éléments de preuve. L'Accusation, dans sa thèse sur le

 26   nombre d'hommes qui ont été assassinés se fonde sur les éléments de

 27   témoins, de conversations interceptées, de documents qui ont été corroborés

 28   par des éléments médico-légaux et démographiques. Je vous renvoie au


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  1   mémoire de l'Accusation, paragraphe 916 à 1 066 et au descriptif de

  2   Srebrenica, paragraphes 14 à 173. Ces éléments de preuve doivent être pris

  3   en compte dans leur intégralité, et non morceau par morceau.

  4   La Défense, dans sa thèse, est confuse, se prête à des conjectures,

  5   n'étaye rien en l'espèce, et étudie les éléments médico-légaux et

  6   démographiques séparément. M. Karadzic avance certaines choses sur

  7   l'incertitude quant au nombre total de victimes de Srebrenica, alors qu'il

  8   n'y a pas d'incertitude. Les arguments principaux de Karadzic sont,

  9   premièrement, que les corps et les victimes de combat sont "mélangées" dans

 10   les forces qui sont liées à Srebrenica et, deuxièmement, que le nombre de

 11   victimes de Srebrenica ne peut pas être déterminé, et que cela ne se

 12   rapproche en aucun cas de 7 000 victimes. Je cite là le paragraphe 2 700,

 13   ainsi que le paragraphe 2 698 à 2 702 du mémoire de la Défense.

 14   Je vais aborder le premier point, le ménage de ces dépouilles. Le

 15   témoignage de témoins, des documents, des conversations interceptées, des

 16   éléments de preuve médico-légaux pris ensemble montrent au-delà de tout

 17   doute raisonnable que toutes les fosses primaires et secondaires de

 18   Srebrenica contiennent exclusivement les dépouilles de victimes

 19   d'exécutions liées à Srebrenica, à l'exception de trois sites à Glogova,

 20   Bljeceva et Liplje 8. Les contenus mélangés de Glogova et Bljeceva ont été

 21   expliqués par Dusan Janc. Je vous renvoie là à la déposition de Janc, pages

 22   du compte rendu 27 016 et 17, ainsi qu'aux pages 27 040 à 27 046, et enfin

 23   à la page 27 060 du compte rendu. Janc n'a pas inclus les dépouilles à

 24   Liplje 8 dans les chiffres de son rapport. Je vous renvoie là à la pièce

 25   P4771 et 4772. Nous avons expliqué pourquoi aucune perte au combat n'a été

 26   enterrée dans les fosses et dans les descriptifs de Srebrenica aux

 27   paragraphes 164 à 168. Comme nous l'avons expliqué, la conclusion

 28   expliquant pourquoi les fosses contenant des victimes d'exécution est


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  1   cohérente avec les éléments médico-légaux parce que, tout d'abord, les

  2   experts médico-légaux de l'Accusation n'ont pas trouvé d'éléments de preuve

  3   étayant que les dépouilles qui ont exhumées des fosses liées à Srebrenica

  4   avaient été des personnes mortes au combat. Deuxièmement, les archéologues

  5   de l'Accusation n'ont pas trouvé d'éléments de preuve montrant que les

  6   fosses liées à Srebrenica avaient été créées sur des sites déjà existants

  7   ou avaient été par la suite rouverts. Troisièmement, la cause au moment du

  8   décès des dépouilles de chacun des sites des fosses primaires et

  9   secondaires viennent soutenir les propos des témoins des exécutions sur

 10   chacun des sites. Quatrièmement, il y a eu des bandeaux, des ligatures dans

 11   les fosses associées à Orahovac, Petkovci, Kozluk et Branjevo. Je vous

 12   renvoie au descriptif de Srebrenica, note de bas de page 699 et au mémoire

 13   de la Défense paragraphes 2 585, 2 639, 2 685 et 2 687. Cinquièmement,

 14   certaines fosses contenaient des objets reliant leurs contenus au site

 15   particulier où les prisonniers ont été tués. Par exemple, le descriptif de

 16   Srebrenica paragraphes 63 et 104 sur l'entrepôt de Kravica et Orahovac.

 17   Sixièmement, il n'y a pas d'éléments de preuve crédibles montrant que les

 18   fosses secondaires contenaient des dépouilles qui auraient été d'autres

 19   dépouilles que celles des victimes des fosses primaires. Je vous renvoie là

 20   aux allégations de la Défense dans son mémoire, au paragraphe 2 605 à 608.

 21   Karadzic passe outre le lien qui existe entre les fosses primaires et

 22   secondaires, à part le lien ADN. Ces éléments de preuve incluent le sol, le

 23   pollen, d'autres objets, ainsi que les éléments de preuve apportés par des

 24   témoins et des documents sur l'opération de "ré-enterrement" elle-même. Je

 25   vous renvoie au descriptif de Srebrenica, paragraphes 63, 103 à 104, 112,

 26   123 et 142 et au mémoire de l'Accusation, paragraphes 1 057 à 1 066.

 27   Madame, Monsieur les Juges, je voudrais passer à un autre sujet. Peut-être

 28   qu'il est temps de faire la pause ?


Page 47797

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Quand nous reviendrons, j'aimerais

  2   entendre votre réponse aussi à l'affirmation de la Défense dans son mémoire

  3   en clôture aux paragraphes 249 à 256, pages 674 et 675.

  4   Oui, Monsieur Tieger.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je utiliser

  6   l'occasion qui m'est donnée d'apporter deux brefs correctifs, maintenant

  7   que nous avons reçu le compte rendu d'hier. A la page 47 670, j'ai fait

  8   référence à la page 87 du mémoire de la Défense, et j'aurais dû parler du

  9   paragraphe 787. Et puis, à la page 47 687, j'ai parlé de la pièce D105, et

 10   j'aurais dû parler de la pièce D1055. Merci.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons à 3 heures 20.

 12   --- L'audience est suspendue à 14 heures 59.

 13   --- L'audience est reprise à 15 heures 22.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer.

 15   Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais commencer par

 16   répondre à votre question. Je ne pense pas que nous devions passer à huis

 17   clos partiel. Je fais référence au numéro de paragraphe. Paragraphe 2 549,

 18   et votre question portait sur les personnes qui sont identifiées dans ce

 19   paragraphe.

 20   Alors, ce que je puis vous dire, c'est que R1, et j'y reviendrai dans un

 21   instant, qu'aucune de ces personnes identifiées ne sont reprises dans les

 22   chiffres que Dusan Janc donne dans son rapport. Tableau 5977, à partir de

 23   son analyse ADN combinée à la liste ICPM. Donc, aucune de ces personnes

 24   n'apparaît dans la liste. Attendez que je retrouve mes références. Veuillez

 25   prendre la référence qui s'y trouve sur les éléments de preuve. On y voit

 26   que le témoin KDZ04t nous dit la chose suivante, il a entendu que cette

 27   personne a été tuée dans les bois, mais ne l'a pas vue de ses yeux. Donc,

 28   ça, c'est sur cette personne-là.


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  1   Ensuite, si nous reprenons la liste du haut vers le bas. Dans la

  2   liste ICPM, qui est la pièce P5913, on ne le retrouve pas dans le chiffre

  3   de Janc.

  4   Ça, c'est pour -- petit B. La personne B n'est pas identifiée et dans

  5   le code de la liste ICPM, vous voyez que cette personne ne se retrouve pas

  6   dans les fosses reprises par Dusan Janc. Donc, voilà pour B.

  7   Ensuite, il y a une deuxième personne B qui ne correspond pas

  8   totalement à un nom dans la liste ICPM. Il n'y a pas de nom du père, en

  9   fait. Donc, il n'y a pas eu d'identification claire dans la liste ICPM pour

 10   cette personne-là.

 11   Et puis, la personne suivante, la personne C, je pense que j'ai déjà

 12   abordé cette personne-là.

 13   Passons à D. La personne D -- eh bien, pour la personne D, il n'y pas

 14   de correspondance exacte par rapport au [inaudible] de la liste ICPM.

 15   Et puis, la personne E et la personne F, c'est deux personnes,

 16   lorsque l'on regarde la liste ICPM, ne se retrouvent pas non plus dans

 17   l'une des forces reprises dans le rapport de Dusan Janc.

 18   Voilà. Je pense que cela répond à votre question. Je l'espère en tout

 19   cas.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci beaucoup.

 21   Mme PACK : [interprétation] Revenons aux arguments de M. Karadzic, au

 22   deuxième argument de M. Karadzic.

 23   L'Accusation avance que plus de 7 000 hommes et garçons musulmans ont été

 24   exécutés. Et cette thèse est étayée par l'intégralité des éléments de

 25   preuve. Nous nous fondons sur quatre grandes catégories d'éléments de

 26   preuve, à savoir d'abord les éléments ADN; deuxièmement, les éléments de

 27   preuve directes sur le nombre de prisonniers qui ont été tués; ensuite, les

 28   éléments de preuve sur le nombre de prisonniers qui ont été capturés; et


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  1   puis, les éléments de preuve démographiques sur le nombre de personnes

  2   portées disparues suite à la chute de Srebrenica.

  3   Passons à la première catégorie, les éléments de preuve ADN, nous avons

  4   discuté de cela dans le descriptif de Srebrenica, paragraphes 169 à 171.

  5   Pour les raisons qui y sont expliquées, le nombre de victimes d'exécutions

  6   identifiées par les profils ADN dans les fosses liées à Srebrenica s'élève

  7   au moins à 5 850. Ce chiffre n'inclut pas les restes humains qui se

  8   trouvaient en surface ni les victimes qui ne découlent pas des non-

  9   exécutions dans les trois fosses conjointes. Ce chiffre fait référence

 10   exclusivement aux chiffres des exécutions connues et des victimes y

 11   afférent dans les fosses. Mais ce chiffre n'est pas un chiffre final pour

 12   les victimes des exécutions de Srebrenica. Au fur et à mesure que plus de

 13   fosses et de dépouilles sont identifiées, et cela va encore avoir lieu dans

 14   les prochaines années, ce chiffre continuera de grossir.

 15   Passons maintenant aux éléments de preuve directs, les éléments de

 16   preuve de personnes qui étaient présentes sur les sites de détention,

 17   d'exécution et d'enterrement étayent directement la thèse de l'Accusation

 18   selon laquelle plus de 7 000 prisonniers ont été exécutés. Et je vous

 19   renvoie là au descriptif de Srebrenica, paragraphes 54, 64, 97, 107, 114,

 20   125, 126, 135 à 138.

 21   Des éléments documentaires et découlant des conversations

 22   interceptées étayent également cette thèse de l'Accusation. L'un des

 23   éléments de preuve les plus évident sur le nombre de prisonniers tués est

 24   la conversation interceptée entre Beara et Krstic à laquelle j'ai fait

 25   référence. Beara a expliqué que le 15 juillet, il avait encore 3 500

 26   prisonniers, qu'il appelait "des paquets", à tuer. Pièce P5074. Cela a eu

 27   lieu après les assassinats de plus de 3 000 hommes et garçons musulmans

 28   lors d'exécutions à Bratunac, Potocari, à l'entrepôt de Kravica, Orahovac,


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  1   et au barrage de Petkovci; mais plus important encore, avant les exécutions

  2   à Kozluk, à l'exploitation agricole de Branjevo, au centre culturel de

  3   Pilica. Je vous renvoie au descriptif de Srebrenica, paragraphes 34, 35, 49

  4   à 79, et 89 à 144. Cela a eu lieu le 15 juillet, à mi-chemin.

  5   Passons maintenant au nombre de Musulmans qui ont été capturés, des

  6   éléments de preuve documentaires, des dépositions, des conversations

  7   interceptées montrent que plus de 7 000 prisonniers ont été capturés après

  8   la chute de Srebrenica. Tous ont été assassinés. Tout d'abord, plus de 1

  9   000 hommes et garçons ont été détenus à Potocari le 12 et le 13 juillet. Je

 10   vous renvoie au mémoire en clôture de l'Accusation, paragraphe 895 et la

 11   déposition de Janjic à P1194, pages 31, 32; et P372, pages 20 à 23.

 12   Deuxièmement, quelque 6 000 hommes musulmans de la colonne se sont rendus,

 13   ont été capturés le 13 juillet. La référence est une conversation

 14   téléphonique interceptée le 13 juillet à 5 heures 30 de l'après-midi, la

 15   P4945, qui dit ceci. Il y a deux correspondants, X et Y.

 16   "Y : Il y en a à peu près 6 000 maintenant.

 17   "X : En âge de porter les armes ?

 18   "Y : "Tais-toi et ne répète pas."

 19   Troisièmement, je vous renvoie à un télex envoyé le 16 juillet par

 20   Christine Schmitz, l'infirmière de Médecins Sans Frontières à Potocari.

 21   Elle disait : Selon Franken, la VRS, "semble avoir plus de 7 000

 22   prisonniers de guerre à Bratunac." Il s'agit de la pièce P4757, page 2.

 23   Je vous renvoie également à la déposition de Franken. La référence

 24   est le paragraphe 1 024 du mémoire en clôture de l'Accusation.

 25   Madame, Monsieur les Juges, je vous renvoie également à toutes les

 26   références qui figurent dans le mémoire en clôture de l'Accusation dans la

 27   note en bas de page 3099.

 28   Enfin, outre les personnes qui avaient été capturées le 13 juillet,


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  1   il y en a des centaines qui ont en plus été capturées et exécutées dans

  2   l'opération de ratissage des jours suivants, y compris à Cerska. Je vous

  3   renvoie au descriptif de Srebrenica, aux paragraphes 145 à 163.

  4   Et enfin, j'en viens aux éléments de preuve démographiques. Les

  5   preuves démographiques de l'Accusation démontrent qu'à partir d'avril 2012,

  6   7 905 personnes ont été portées manquantes à Srebrenica. Je répète : 7 905.

  7   Parmi ces 7 905 personnes qui figurent dans le descriptif de Srebrenica au

  8   paragraphe 172, au moins 5 850 ont été reconnues victimes des exécutions

  9   grâce au profil ADN, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer. Parmi les

 10   personnes qui restent, bien d'autres encore sont sans doute victimes

 11   d'exécution. Cela comprend des hommes dont les restes humains ont été

 12   trouvés à la surface et des hommes dont on n'a pas encore pu découvrir les

 13   dépouilles. Et ceci est vraisemblable étant donné la ténacité avec laquelle

 14   les subordonnés de Karadzic ont cherché à tuer jusqu'au dernier jour les

 15   Musulmans de Bosnie et de Srebrenica qu'ils ont pu capturer, y compris même

 16   après la fin des exécutions massives. Je vous renvoie au descriptif de

 17   Srebrenica, paragraphes 85 à 88, 139 à 140, 151, 163; et la P4965; et les

 18   mémoires de l'Accusation, paragraphes 1 040 à 1 042.

 19   Madame, Monsieur les Juges, les arguments démographiques de Karadzic

 20   aux paragraphes 2 522 à 2 532, ces mémoires sont vagues et conjecturaux et

 21   se fonde sur des estimations larges et imprécises de personnes qui se

 22   trouvaient dans l'enclave, de combien de personnes sont parties pour

 23   Potocari, et combien ont été mis dans des bus pour Kladanj. Karadzic

 24   manipule ensuite ces chiffres de façon trompeuse à l'appui de son argument.

 25   Dernière remarque sur les chiffres. Karadzic ne fournit aucun fondement au

 26   paragraphe 2 568 de son mémoire permettant d'exclure les meurtres

 27   opportunistes de la portée de l'entreprise criminelle commune aux fins

 28   d'éliminer. Ces prisonniers étaient tous destinés à la mort. Le fait que


Page 47803

  1   quelques soldats de la VRS ou du MUP aient pu profiter de ce climat

  2   d'impunité et auraient tué des dizaines de victimes plus tôt qu'ils ne

  3   l'auraient fait sans cela, ne place pas ces crimes hors du champ de l'ECC

  4   aux fins d'élimination.

  5   La suggestion de Karadzic au paragraphe 2 567, selon laquelle les victimes

  6   de l'entrepôt de Kravica devraient être exclues du nombre total des

  7   victimes d'exécution est dénuée de fondement. Même si l'incident des mains

  8   brûlées, selon lui a déclenché le début de meurtres à Kravica, ceci ne

  9   saurait justifier le massacre de sang-froid efficace et méthodologique de

 10   plus de 1 000 personnes.

 11   Madame, Messieurs les Juges, à l'examen de la totalité des preuves, l'on

 12   peut dire quelque 7 000 hommes et garçons musulmans ont été exécutés à

 13   Srebrenica. Je vous renvoie aux paragraphes 173 du descriptif de

 14   Srebrenica.

 15   Je vais maintenant parler de l'une des questions soulevées vendredi, la

 16   question 1, à partir de, je la lis :

 17   "L'Accusation peut-elle préciser sa position en termes simples quant aux

 18   relations entre l'ECC global et l'ECC de Srebrenica, ainsi que la portée de

 19   chacune par rapport aux chefs d'accusation en cause ?"

 20   Le passage des événements que j'ai décrits au début, décrit la

 21   relation entre l'ECC globale et l'ECC aux fins d'éliminer. La directive 7

 22   prouve l'existence d'un plan à partir de mars 1995, dans le cadre de l'ECC

 23   globale, et particulièrement en ce qui concerne l'enclave de Srebrenica.

 24   Ceci prouve l'intention de Karadzic d'expulser par la force la population

 25   civile musulmane de Bosnie de l'enclave de Srebrenica. La relation entre

 26   les deux ECC est évidente, à la lumière des chefs d'accusation 7 et 8, à

 27   savoir déportation et transfert forcé de populations.

 28   Je vous renvoie au paragraphe 75 de l'acte d'accusation. Suite à la


Page 47804

  1   participation de Karadzic à l'ECC aux fins d'éliminer, il est responsable

  2   du transfert par la force et la déportation des Musulmans de Bosnie, des

  3   femmes, des enfants, et des personnes âgées de l'enclave de Srebrenica.

  4   Dans le cadre de l'ECC aux fins d'élimination, nous ne vous demandons pas

  5   de déclarer que Karadzic est responsable de l'expulsion par la force de la

  6   partie civile de la colonne des hommes et des jeunes garçons musulmans qui

  7   ont fui Srebrenica la nuit du 11 juin. Parce qu'à partir du moment où il a

  8   partagé l'objectif criminel d'éliminer les Musulmans de Bosnie de

  9   Srebrenica, son intention concernant les hommes n'était plus de les

 10   expulser, mais de les tuer. Et sa responsabilité pénale doit être classée à

 11   cet effet.

 12   Si vous dites qu'il n'y a pas eu d'ECC aux fins d'élimination, que

 13   Karadzic n'en faisait pas partie, il reste néanmoins responsable de

 14   l'expulsion par la force de la population musulmane de Bosnie, ce qui

 15   inclut les femmes, et les enfants, et les hommes dans le cadre de l'ECC

 16   globale.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr de vous suivre,

 18   Madame Pack.

 19   Au paragraphe précédent, vous dites que dans le cadre de l'ECC aux fins

 20   d'élimination, nous ne vous demandons pas de déclarer que Karadzic est

 21   responsable de l'expulsion forcée de la partie civile de -- ah, vous parlez

 22   de la colonne, d'accord.

 23   Mme PACK : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, excusez-moi, je n'ai pas bien lu.

 25   Mme PACK : [interprétation] Oui, tout à fait.

 26   Je dis qu'à l'époque l'intention était de tuer les hommes. Une fois qu'on

 27   est dans le cadre de l'ECC aux fins d'éliminer.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, très bien, vous parlez de la


Page 47805

  1   colonne, je vous suis maintenant.

  2   Veuillez poursuivre.

  3   Mme PACK : [interprétation] J'allais maintenant parler des autres chefs

  4   d'accusation en cause. Dans votre question, je voulais passer en revue en

  5   ce qui concerne les crimes perpétrés à Srebrenica.

  6   Pour les chefs d'accusation 4, 5 --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, encore une fois --

  8   Mme PACK : [interprétation] Je n'ai pas compris.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- en ce qui concerne la relation entre

 10   les deux ECC, c'est là où je ne vous suis pas tout à fait, c'est que

 11   l'Accusation inclut la section de Podrinje dans le descriptif de

 12   Srebrenica, mais dans l'acte d'accusation, Srebrenica ne figurait pas dans

 13   les municipalités.

 14   Mme PACK : [interprétation] Non, -- bon c'est plus une question de

 15   structure, c'est la façon de présenter les arguments. Je crois que M.

 16   Tieger vous a parlé de la directive 4, la directive 7, et le résumé de

 17   Podrinje.

 18   Mais je dirais qu'en ce qui concerne l'ECC aux fins d'élimination,

 19   tout cela manifeste donc l'existence de l'intention qu'il nourrissait

 20   depuis longtemps d'expulser par la force, ce qui est devenu une intention

 21   d'éliminer, de détruire la population musulmane de Bosnie en tuant les

 22   hommes et en déplaçant tous les autres.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je demanderais à M. Tieger de bien

 24   vouloir expliquer la connotation du fait qu'il est écrit Podrinje dans le

 25   descriptif des municipalités.

 26   Monsieur Tieger, vous me suivez ?

 27   M. TIEGER : [interprétation] Oui, je regardais justement l'acte

 28   d'accusation. Pour moi, je vais régler cela assez rapidement, si vous le


Page 47806

  1   voulez bien.

  2   Nous venons de dire que Srebrenica n'était pas dans la liste des

  3   municipalités, mais la structure de l'acte d'accusation est telle que les

  4   municipalités sont définies dans le paragraphe qui parle des persécutions.

  5   Ensuite, Srebrenica figure également, et la même structure s'applique pour

  6   ce qui concerne le transfert forcé. Et, dans le paragraphe que je vous ai

  7   cité hier, l'acte d'accusation dit de façon limpide que Srebrenica fait

  8   partie de l'agi de l'ECC globale avec toutes les municipalités, et les

  9   chefs d'accusation couvrent les persécutions et le transfert par la force

 10   ainsi que les expulsions. Ça figure dans les paragraphes qui traitent du

 11   fait que les municipalités ont été nettoyées sur le plan ethnique à la fin

 12   de 1992 mais pas Srebrenica, qu'il fallait encore conclure, terminer cette

 13   épuration de la Drina, ce que l'on voit dans les attaques sur Cerska et

 14   Konjevic Polje, il y a des paragraphes qui en parlent. Et puis ensuite, on

 15   dit qu'en mars 1995 dans le cadre de l'ECC globale, il y avait un plan, la

 16   directive 7, de prendre Srebrenica.

 17   Donc je dis jusqu'au moment où l'ECC aux fins d'élimination commence,

 18   l'acte d'accusation dit que Srebrenica, comme les municipalités est

 19   couverte par l'ECC globale, et ceci relève de chef d'accusation 3,

 20   déportation et transfert par la force.

 21   J'espère être plus clair. Mais je pourrais, le cas échéant, vous

 22   renvoyer au texte précis, je vous dirais qu'au chef d'accusation numéro 3 :

 23   "Radovan Karadzic est accusé de persécution dans les municipalités

 24   suivantes…", il y a toute une énumération.

 25   Et puis entre parenthèses : "(municipalités), on fait des références

 26   suivantes, ainsi que la persécution des Musulmans de Bosnie à Srebrenica."

 27   Vous trouvez la même chose pour le chef d'accusation numéro 7, au

 28   premier paragraphe qui dit :


Page 47807

  1   "Radovan Karadzic a commis de concert avec d'autres, déportation par

  2   la force des Musulmans de Bosnie et des Croates de Bosnie des municipalités

  3   et de Srebrenica." 

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Madame Pack.

  5   Mme PACK : [interprétation] Madame, et Messieurs les Juges, dans les

  6   différents événements, je crois que ça correspond tout à fait à ce que dit

  7   M. Tieger. Si vous regardez les événements au paragraphe concernant

  8   l'expulsion par la force, aux paragraphes 73 et 74 et 75. Il parlait du

  9   paragraphe 63 [comme interprété], des événements qui ont abouti au

 10   déplacement par la force dans le cadre de l'ECC globale concernant les

 11   Musulmans de Bosnie dans l'enclave de Srebrenica. Et au paragraphe 74, on

 12   parle du plan de mars 1995 manifesté par la directive 7 concernant la prise

 13   de l'enclave et la déportation par la force de la population musulmane dans

 14   le cadre de l'ECC globale. Et au paragraphe 75, on décrit la formation de

 15   l'ECC aux fins d'élimination.

 16   C'est là qu'on voit le lien. Et en ce qui concerne les chefs

 17   d'accusation, j'ai parlé en ce qui concerne l'expulsion par le transfert

 18   forcé. Je vous ai parlé des conclusions que nous vous demandons de tirer --

 19   enfin, je pourrais éliminer les chefs d'accusation l'un après l'autre -- le

 20   4, 5 et 6. Karadzic est responsable de ces chefs d'extermination et de

 21   meurtre; paragraphe 66 de l'acte d'accusation. Il est responsable du fait

 22   d'avoir appartenu à l'ECC aux fins d'éliminations, des meurtres visés à

 23   l'annexe E pour le chef 3, persécution. Il est responsable des meurtres

 24   visés au paragraphe 60(a) et le transfert par la force et l'expulsion des

 25   femmes, des jeunes enfants et de certains hommes âgés, paragraphe 58 de

 26   l'acte d'accusation. Et il est responsable dans le cadre de l'ECC aux fins

 27   d'élimination, je vous renvoie au paragraphe 58 de l'acte d'accusation.

 28   Alors, soyons clairs. Si vous dites que Karadzic a participé à l'ECC aux


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  1   fins d'éliminer, nous vous demandons de déclarer qu'il est responsable des

  2   meurtres au titre de persécution dans le cadre de l'ECC aux fins

  3   d'élimination, en ce qui concerne l'ECC spécifique Srebrenica. Si vous

  4   dites qu'il n'a pas participé à l'ECC aux fins d'élimination, nous dirons à

  5   ce moment-là qu'il serait à titre subsidiaire qu'il est responsable dans le

  6   cadre de l'ECC globale pour les meurtres et le transfert forcé des hommes

  7   et des femmes de ces enclaves. Je vous renvoie aux paragraphes 52, 53 et 57

  8   de l'acte d'accusation.

  9   L'INTERPRÈTE : Est-ce que Mme Pack pourrait ralentir un petit peu ? Merci.

 10   Mme PACK : [interprétation] En ce qui concerne les sévices corporels subis

 11   par les hommes avant leur exécution, au paragraphe 60 de l'acte

 12   d'accusation, Karadzic est responsable du fait de l'ECC aux fins

 13   d'élimination, en ce qui concerne le fait d'avoir terrorisé, infligé des

 14   sévices à Potocari. Egalement au paragraphe 60(e), Karadzic est responsable

 15   dans le cadre de l'ECC aux fins d'élimination.

 16   J'allais maintenant passer au point suivant sauf si je peux encore

 17   clarifier certaines choses.

 18   Très bien. Je vais passer maintenant aux autres arguments présentés par

 19   Karadzic en ce qui concerne les chefs d'accusation 7 et 8, transfert par la

 20   force et déportation. Je traiterai d'abord des deux premiers arguments de

 21   façon brève, et puis je consacrerai un peu plus de temps au dernier.

 22   Tout d'abord, Karadzic nous dit qu'il n'avait pas l'intention d'expulser

 23   par la force les Musulmans de Bosnie de l'enclave, qu'il n'existait pas de

 24   plan d'expulsion. Ceci figure dans le mémoire de clôture de la Défense au

 25   paragraphe 3 308 et 3 315. Karadzic dit qu'il a pris des mesures afin de

 26   veiller à ce que les civils puissent rester à Srebrenica et y soient en

 27   sécurité. Mémoire en clôture de la Défense, paragraphes 3 320  et 3 321.

 28   Madame, Monsieur les Juges, ces arguments sont faux. Karadzic avait


Page 47809

  1   l'intention et le but depuis longtemps, depuis 1992, d'expulser par la

  2   force la population musulmane de Bosnie de l'enclave de Srebrenica, comme

  3   le prouvent les éléments de preuve. Et ces actions manifestent son

  4   intention d'expulser par la force la population. Il a pris la directive 7,

  5   il l'a signée. Il a établi un comité chargé de contrôler la procédure

  6   d'approbation des convois. Je vous renvoie à la pièce D3279 et P4543, et le

  7   mémoire en clôture de la Défense au paragraphe 3 343, note en bas de page

  8   6726, et le résumé de Podrinje, paragraphe 31.

  9   A partir de mars jusqu'à juillet 1995, le plan de Karadzic tendant à

 10   expulser par la force la population civile de Srebrenica a été mise en

 11   œuvre par une série de mesures coercitives. Ces mesures sont décrites dans

 12   le résumé de Podrinje et dans le descriptif de Srebrenica. Il s'agissait

 13   d'actes qui mettaient en œuvre la directive 7. Il s'agissait de limiter les

 14   convois de la FORPRONU et de l'aide humanitaire, au résumé de Podrinje,

 15   paragraphes 33 à 37. Pilonnages et tirs embusqués, résumé de Podrinje,

 16   paragraphes 38, 41. Et l'attaque militaire sur l'enclave, narrative de

 17   Srebrenica, paragraphes 5 à 10.

 18   Ces actes étaient animés par le but et avaient pour effet de rendre la vie

 19   insupportable pour la population musulmane civile comme le prévoyait la

 20   directive 7. Karadzic a approuvé l'attaque menée sur l'enclave. Il a

 21   ordonné la prise de la ville. Il a mis en place les structures civiles le

 22   11 juillet. D2055 et P2994. Et, sans les ordres données le 9 juillet

 23   concernant la protection de la population civile et le 11 juillet

 24   concernant le fait de veiller à ce que la population civile puisse choisir

 25   librement là où elle souhaitait aller, n'était manifestement pas sincère.

 26   Je vous renvoie à l'argument figurant dans le mémoire de la Défense aux

 27   paragraphes 2 403, 2 405 et 3 319.

 28   Karadzic invoque également la déclaration signée à Potocari le 17 juillet


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  1   par Franken et le représentant civil des Musulmans de Bosnie, Mandzic. Il

  2   dit ceci n'indique pas qu'il n'était pas au courant du fait que l'expulsion

  3   de la population musulmane de Potocari s'était faite par la force. Je vous

  4   renvoie au mémoire de la Défense, paragraphes 3 330, 3 337, 3 340 et la

  5   note 6714.

  6   Ces déclarations du 17 juillet ne reflètent pas la réalité de la situation.

  7   Il s'agit d'un subterfuge produit plus tard. Je vous renvoie à notre

  8   mémoire, paragraphes 1 034 et 1 037. Je ne répète pas les arguments qui y

  9   sont développés.

 10   Deuxièmement, Karadzic dit que son ordre de lancer l'attaque et de prendre

 11   la ville de Srebrenica était licite. Mémoire en clôture de la Défense,

 12   paragraphes 2 397 à 99.

 13   L'Accusation a toujours dit que l'enclave Srebrenica n'a jamais été

 14   correctement démilitarisée. L'ABiH y a bien effectué des opérations

 15   militaires à partir de cette enclave. Je vous renvoie au mémoire en clôture

 16   de la Défense, paragraphe 2 397 et aux faits déjà tranchés sur la question

 17   numéros 2 393 et 1 393 et 1 394. Mais tout objectif militaire prétendument

 18   légitime poursuivi par cet ordre d'attaque sur l'enclave est dénué de

 19   pertinence. Il y avait un objectif criminel dans cet ordre d'attaque sur

 20   l'enclave et l'attaque visait à expulser par la force la population civile.

 21   Je vous renvoie à notre mémoire en clôture, paragraphe 863.

 22   La manière indiscriminée et disproportionnée dans l'attaque visait à

 23   terroriser les habitants civils de Srebrenica et de faire naître la peur

 24   pour qu'ils prennent la fuite, et ce fut le cas. Je vous renvoie au

 25   descriptif de Srebrenica, paragraphes 5 à 8.

 26   Troisièmement, et enfin, Karadzic dit que le déplacement de la population

 27   musulmane de Bosnie et de Potocari ne s'est pas fait par la force ou que ce

 28   n'avait pas été l'intention. Et Karadzic dit encore aujourd'hui qu'il croit


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  1   qu'il n'y a pas eu d'expulsion forcée des Musulmans de Srebrenica. Je vous

  2   renvoie au mémoire en clôture de la Défense, paragraphe 3 349.

  3   Et je veux arriver maintenant à certains arguments plus précis de Karadzic.

  4   Tout d'abord, il dit que les Nations Unies et les dirigeants bosno-

  5   musulmans avaient demandé à ce que la population soit transportée à

  6   l'extérieur. Ceci est la preuve à la fois du fait que les Bosno-Serbes

  7   n'ont jamais eu l'intention de contraindre la population musulmane à partir

  8   et que la population musulmane n'est pas partie dans des circonstances

  9   coercitives.

 10   Madame, Monsieur les Juges, tout d'abord l'argument de la Défense, à savoir

 11   sur l'intention de déplacer par la force fait fi du contexte. A partir du

 12   mois de mars 1995, et notamment suite à l'attaque de l'enclave, la

 13   population musulmane de Bosnie et de Srebrenica a fait l'objet d'une série

 14   de moyens coercitifs. Ces actes ont été mis en œuvre par l'ordre de

 15   Karadzic numéro 7, directive numéro 7. Karadzic s'adresse à d'autres

 16   membres de l'entreprise criminelle commune aux fins d'éliminer, Mladic

 17   était au courant.

 18   L'exode massif de la population bosno-musulmane à Potocari ne fait pas

 19   suite à une demande volontaire de la part de la population. Les femmes, les

 20   enfants et les personnes âgées n'ont pas quitté Potocari parce qu'ils

 21   avaient véritablement le choix. La Défense s'appuie sur les enregistrements

 22   vidéo de trois réunions à l'hôtel Fontana à Bratunac et les propos de

 23   Mladic à ces réunions. Mémoire en clôture de la Défense, paragraphes 2 409

 24   à 2 414, 2 420 à 2 422, 2 426.

 25   Madame, Monsieur les Juges, toutes les déclarations de Mladic à ces

 26   réunions ont été faites dans le contexte des menaces qu'il proférait. Le

 27   déplacement des Musulmans de Bosnie, des femmes et des enfants de Potocari

 28   avait été planifié et organisé, comme le rapport de l'état-major à Karadzic


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  1   le 13 juillet :

  2   "Il y a un transfert organisé et planifié de la population de

  3   Srebrenica en direction du territoire contrôlé par les Musulmans."

  4   Pièce P4464, page 3.

  5   Avant la troisième réunion à l'hôtel Fontana, celle à laquelle les

  6   représentants musulmans de Bosnie ont soi-disant exprimé clairement leur

  7   désir de partir, mémoire en clôture de la Défense, paragraphe 2 425, le

  8   Corps de la Drina avait organisé le déplacement de la population musulmane

  9   de Bosnie de Potocari à bord d'autocars en vertu des ordres de Mladic. Je

 10   vous renvoie au mémoire en clôture de l'Accusation, paragraphe 899 et cite

 11   le P4680, P4533 et le D1971.

 12   Je vous rappelle les propos de Mladic lors d'une conversation

 13   interceptée à midi 50 le 12 juillet :

 14   "Et ils ont tous capitulé, ils se sont tous rendus et nous allons

 15   tous les évacuer. Ceux qui le souhaite et ceux qui ne le souhaitent pas."

 16   Ça, c'est la vérité. Il n'y a pas eu de choix véritable. Il s'agit du

 17   P6694 s'agissant de la version publique. Et la version confidentielle porte

 18   la cote P4254.

 19   La Défense, dans son mémoire en clôture, dit pour la première fois

 20   qu'il ne s'agit pas ici d'une transcription exacte. Mémoire en clôture de

 21   la Défense, paragraphe 2 431. Karadzic a eu l'occasion de poser cette

 22   question au Témoin KDZ357 lors du contre-interrogatoire, mais il ne l'a pas

 23   fait. Madame, Monsieur les Juges, je vous renvoie à la déposition de KDZ357

 24   et sa conversation qui a été enregistrée, qui a été réentendue et

 25   transcrite. P4628, pages 30 à 34. Et cela ne fait pas l'ombre d'un doute

 26   qu'il s'agit de la transcription exacte de la conversation de Karadzic

 27   [comme interprété].

 28   Une autre conversation interceptée avec deux autres interlocuteurs,


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  1   au paragraphe 2 428 du mémoire en clôture. Madame, Monsieur les Juges, un

  2   des interlocuteurs ne peut être Mladic. L'intention de Mladic est révélée

  3   par la pièce P6694, la conversation interceptée qui l'identifie comme étant

  4   l'interlocuteur.

  5   Madame, Monsieur les Juges, je vous renvoie au principe juridique sur

  6   ce thème, bien sûr, que vous connaissez, il s'agit de l'accord conclu entre

  7   les commandants militaires et d'autres représentants des parties lors d'un

  8   conflit en tant que tel, ne peut pas considérer que le déplacement est

  9   licite. En outre, l'aide apportée par les agences d'aide humanitaire comme

 10   les Nations Unies, qui facilite les déplacements, en soi, ne rend pas

 11   licite un transfert illicite. Je crois que la Défense est d'accord avec

 12   cela, mais ce n'est pas tout à fait clair sur ce point dans son mémoire en

 13   clôture.

 14   Karadzic dit que dans le cas où la population civile se serait

 15   réfugiée dans la maison ou dans le cas où les Nations Unies ou la

 16   population avaient demandé à pouvoir rester à Srebrenica, il n'y a aucune

 17   preuve précisant que les Bosno-Serbes les auraient néanmoins transportés à

 18   l'extérieur. Je vous renvoie au mémoire en clôture de la Défense,

 19   paragraphe 2 438. La question est fausse, et tout à fait sans fondement. Je

 20   vais vous donner un exemple. Le 13 juillet, les personnes âgées et les

 21   personnes infirmes qui étaient restées à l'hôpital de Srebrenica ont été

 22   contraintes à partir, menacés de mort. Je vous renvoie à un descriptif de

 23   Srebrenica, au paragraphe 30, et la déposition de Kingori, P4140,

 24   paragraphes 185 à 186.

 25   Le 17 juillet, comme l'a rapporté un commandant du Corps de la Drina,

 26   deux femmes sont rentrées de Kladanj et ont été abattues, parce que "elles

 27   refusaient de se rendre et qu'elles avaient pris la fuite." Il s'agit de la

 28   pièce 3994, page 2.


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  1   Ensuite, Karadzic dit : Les Bosno-Serbes n'ont pas contraint les

  2   personnes de Potocari à monter à bord des autocars. Mémoire en clôture de

  3   la Défense, paragraphe 2 432.

  4   Madame, Monsieur les Juges, l'ensemble de l'évacuation par autocars a

  5   été menée en présence et sous la surveillance des forces bosno-serbes qui

  6   avaient pris le contrôle de l'enclave et qui avaient encerclé Potocari. Je

  7   vous renvoie au descriptif de Srebrenica, paragraphes 11 à 27.

  8   La population civile était sans cesse menacée et intimidée.

  9   L'utilisation de chiens ne faisait que renforcer un climat d'oppression. Je

 10   vous renvoie à la déposition de Momir Nikolic, D2081, page 2; Mirsada

 11   Malagic, P356, page 25; P4934, qui est l'ordre de Kovac concernant les

 12   chiens; et Kingori, P4140, paragraphe 158. En outre, KDZ167, P354, page 6;

 13   et Sera Ibisevic, P401, page 2.

 14   La situation à Potocari n'a fait qu'empirer, parce que la population

 15   bosno-musulmane était tout à fait impuissante, vulnérable, et comme le

 16   Bataillon néerlandais, la force des Nations Unies qui devait les protéger

 17   était inopérante. Je vous renvoie au descriptif de Srebrenica, paragraphe

 18   33.

 19   L'évacuation par autocars, l'acte final, a confirmé que la population

 20   bosno-musulmane n'avait pas d'autre alternative que de partir. Les femmes

 21   et les enfants ont également été contraints à monter à bord des autocars.

 22   Je vous renvoie au descriptif de Srebrenica, paragraphe 15. Et des éléments

 23   de preuve décrits au dans ce paragraphe-là, je souhaite ajouter les

 24   références suivantes : Patelski, P4173, paragraphe 25; Kingori au P4140,

 25   paragraphe 172; et Malagic, pages du compte rendu d'audience 23 488 à 23

 26   489.

 27   Madame, Monsieur les Juges, fait marquant : les femmes, les enfants

 28   et les personnes âgées ont été séparés par la force de leurs hommes et de


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  1   leurs garçons. Ces séparations faisaient partie du processus. Je souhaite

  2   vous rappeler la déposition de KDZ265, la mère dont on a enlevé l'enfant de

  3   14 ans alors qu'ils devaient monter à bord des autocars. Rien au sujet de

  4   ce processus ne permettait de dire qu'il y avait un quelconque libre choix.

  5   Madame, Monsieur les Juges, il existe suffisamment d'éléments de

  6   preuve à propos desquels vous devez déclarer Karadzic coupable au titre des

  7   chefs 7 à 8 concernant Srebrenica.

  8   Et pour finir, Madame, Monsieur les Juges, je vais revenir au chef 2,

  9   le génocide. Karadzic avait désigné la population musulmane pour qu'elle

 10   soit anéantie. Ses subordonnés ont retiré les effets personnels des garçons

 11   et des hommes et leurs cartes d'identité. Ceci a été fait de façon

 12   délibérée et de façon méthodique. Ils ont été tués simplement sur la simple

 13   base de leur identité. Ces forces ont provoqué des atteintes graves à

 14   l'intégrité physique et mentale des hommes qui ont survécu par miracle et

 15   aux femmes et aux enfants de Srebrenica, les femmes et les enfants qui ont

 16   été séparés de leurs fils et de leurs pères, de leurs maris et de leurs

 17   frères, qui ont été emmenés de chez elles et leurs vies ont été détruites.

 18   Dans le mémoire en clôture de l'Accusation, nous avons parlé des actes

 19   génocidaires, des meurtres et des atteintes graves à l'intégrité physique

 20   et mentale subies par les hommes, ceux qui ont survécu, les femmes et les

 21   enfants qui supporté les séparations et les meurtres de leurs hommes et de

 22   leurs garçons et que l'on a déplacés de l'enclave de Srebrenica en masse.

 23   Les hommes qui ont survécu et qui ont subi des traumatismes et des

 24   blessures, leur peur, leur angoisse alors qu'ils attendaient de mourir est

 25   inimaginable. KDZ069 a survécu. Il a dit, M. Tieger l'a déjà évoqué. Il a

 26   dit alors que d'autres étaient tués. 

 27   "Je priais qu'on me tue aussi parce que j'éprouvais une très grande

 28   douleur, mais je n'osais pas les appeler. J'ai simplement pensé que ma mère


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  1   ne serait jamais où j'étais, et je pensais que je souhaitais mourir". P339,

  2   page 41.

  3   La souffrance collective de personnes qui ont survécu, de tant

  4   d'hommes et de ces corps portés manquant pendant tellement d'années a été

  5   décrite comme étant le syndrome de Srebrenica. La déposition Ibrahim

  6   Efendic, P4646. Le Témoin Malagic qui a expliqué que lors de la chute de

  7   Srebrenica, ou plutôt "lorsque la ville a été prise par les soldats,

  8   lorsqu'ils ont pris le contrôle, cette soi-disant zone protégée par les

  9   Nations Unies, ont été balayées de la surface de la terre, trois

 10   générations d'hommes de la manière la plus cruelle possible." P356, page

 11   44.

 12   Souvenez-vous de la déposition de KDZ265. J'ai déjà parlé de sa

 13   déposition, dans l'affaire Krstic, lorsqu'elle a déposé, la question lui a

 14   été posée :

 15   "Que pensez-vous qu'il est advenu à votre mari et à vos deux fils ?"

 16   La référence est le P367, page 20.

 17   Donc elle a imaginé son fils, un garçon de 14 ans, elle pensait à lui

 18   avec ses petites mains, qui cueillait des fraises, qui lisait des livres,

 19   qui allait à l'école, et qui allait en excursion. Elle a dit : Tous les

 20   matins, je me réveille, et je me cache les yeux pour ne pas regarder les

 21   autres enfants qui vont à l'école, et les maris qui vont travailler, qui se

 22   tiennent par les mains.

 23   Madame, Messieurs les Juges, les éléments de preuve condamnent M.

 24   Karadzic. Il porte la responsabilité de la douleur et de la souffrance de

 25   ces femmes. Des meurtres, de la douleur, et de la souffrance des hommes et

 26   des femmes, et des enfants à Srebrenica. Il porte la responsabilité de leur

 27   souffrance qui est durable et dévastatrice. Madame, Messieurs les Juges, il

 28   est responsable, il est responsable de génocide.


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  1   Et maintenant, je donne la parole à M. Tieger. Merci.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Pack.

  3   Allez-y, Monsieur Tieger.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Au cours de ce procès, vous avez pu entendre une description de ce

  6   que le président de la Croix-Rouge a qualifié à juste titre de triste

  7   tableau. Dans les municipalités, des communautés détruites, les meurtres

  8   des civils par milliers, les tournants et abus subis dans l'abominable

  9   réseau des camps par des milliers d'autres civils, des centaines de

 10   milliers de personnes expulsées par la force, réduits à la condition de

 11   réfugiés sans toit. Sarajevo, la terreur infligée pendant des années à

 12   toute une capitale européenne par les bombardements meurtriers, les

 13   pilonnages indiscriminés, les hommes, les femmes, et les enfants ciblés un

 14   par un. Les otages, l'utilisation des vies humaines comme monnaie d'échange

 15   sous les yeux du monde entier. Et Srebrenica, dont vous venez d'entendre

 16   parler, la cruauté des exécutions en masse d'hommes et de garçons, combiné

 17   à l'efficacité éprouvée des expulsions en masse du reste de la population.

 18   Les cruautés infligées à d'innombrables victimes l'une après l'autre. Des

 19   tragédies individuelles dont l'ampleur collective dépasse l'entendement. Et

 20   ce qu'ont en commun tous ces crimes, c'est Radovan Karadzic qui, jadis,

 21   s'était fièrement arrogé les mérites de ce que son armée, sa police, ses

 22   autorités civiles avaient fait en exécution de sa politique, mais qui

 23   cherche à présent à s'en dissocier. Le temps est venu pour Karadzic de

 24   rendre compte de ses actes. L'hypocrisie des regrets qu'il a exprimés et de

 25   la "responsabilité morale", je reprends ces termes, qu'il assume pour les

 26   souffrances infligées à ces victimes est dévoilée par la ligne de défense

 27   révisionniste qu'il a orchestrée de longue date. Des affirmations

 28   mensongères qui remuent le couteau dans la plaie de chacune des victimes


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  1   qui vive encore, dont bon nombre souffrent encore aujourd'hui de l'absence

  2   de leurs êtres chers, et de leur physique et morale, et qui tentent encore

  3   aujourd'hui, vaille que vaille au quotidien, d'exorciser ce cauchemar du

  4   passé.

  5   Madame, et Messieurs les Juges, la justice pour toutes ces victimes

  6   n'appelle rien de moins qu'une condamnation à perpétuité.

  7    Ceci met un terme à notre réquisitoire. Merci, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

  9   Nous allons lever l'audience pour aujourd'hui, et demain, nous reprendrons

 10   à 9 heures.

 11   --- L'audience est levée à 16 heures 09 et reprendra le mercredi, 1er

 12   octobre 2014, à 9 heures 00.

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