Page 12965
1 Le mercredi 26 janvier 2000
2 [Audience publique]
3 [Les accusés entrent dans la Cour]
4 [Le témoin entre dans la Cour]
5 -- L’audience débute à 9 h 42
6 LA GREFFIÈRE (interprétation) : Bonjour, Monsieur
7 le Président. L’affaire est IT-95-14/2-T, Le Procureur
8 contre Dario Kordic et Mario Cerkez.
9 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous en
10 prie, Monsieur Kovacic.
11 TÉMOIN : DZEMAL MERDAN
12 (SOUS LE MÊME SERMENT)
13 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me KOVACIC :
14 Q. Général, bonjour. Nous allons poursuivre.
15 J’espère que nous n’allons pas être très long.
16 Me KOVACIC (interprétation) : Je vais demander de
17 présenter au témoin le document Z908/1 et puis les pièces à
18 conviction Z903, 906.1, Z965.1 et 1226.1.
19 Q. En attendant les documents, Général, le
20 premier document que nous allons voir est l’information
21 concernant le commandement conjoint pour la Bosnie centrale
22 et le commandement pour Vitez. La FORPRONU l’appelait la
23 commission conjointe de Vitez.
24 908 : Vous avez déjà vu ce document. Il était
25 quelquefois devant vous. Il s’agit des noms des personnes
Page 12966
1 qui ont été nommées au commandement conjoint. On en a
2 parlé à plusieurs reprises avant qu’on ne parvienne à un
3 accord. On en a déjà parlé. Lors des réunions, il y a eu
4 une attitude qui a été adoptée selon laquelle il fallait
5 proposer les officiers au commandement conjoint qui ne
6 s’étaient pas compromis dans les conflits et notamment du
7 point de vue ethnique. Est-ce que vous êtes d’accord avec
8 moi ?
9 R. Non, et notamment, on n’en a pas parlé lors
10 des réunions.
11 Q. Par conséquent, on n’a pas en quelque sorte
12 posé des conditions selon lesquelles il fallait faire
13 attention quelles sont les personnes qui allaient être
14 membres de ces commandements ?
15 R. Non. On n’a pas parlé de ça. Nous avons
16 tout simplement accepté les propositions qui sont venues de
17 la part des parties.
18 Q. En ce qui concerne le commandement de Vitez,
19 il y avait Mario Cerkez – la fonction n’est pas bonne, tout
20 au moins en ce qui concerne la période – et puis Marijan
21 Skopljak également qui était Chef de la Défense à Vitez.
22 Est-ce que vous pouvez confirmer que c’était les deux noms
23 qui ont été proposés du côté de Vitez à ce niveau du
24 commandement conjoint ?
25 R. Le commandement conjoint siégeait dans le
Page 12967
1 bâtiment des PTT à Travnik. Les commissions locales
2 conjointes étaient formées au niveau des municipalités ou
3 des brigades. Pour ce qui est des réunions du niveau
4 local, Mario Cerkez s’y rendait. Je pense que Marijan
5 Skopljak également y était mais je me souviens que Mario
6 Cerkez était pratiquement tout le temps présent.
7 Q. Par conséquent, il s’agissait des deux
8 personnes et des noms dont on parle ?
9 R. Oui, en général.
10 Q. Par conséquent, nous parlons maintenant de ce
11 niveau de Vitez et c’est comme ça qu’on a commencé la
12 coopération, n’est-ce pas ?
13 R. Oui, c’est exact.
14 Q. Pourriez-vous maintenant jeter un coup d’œil
15 sur le document 903, Z903 ? Si vous voulez bien parcourir
16 le document et voir quelles sont les signatures. En
17 dernière page, vous voyez « Cerkez » et « Kalestura ».
18 C’est un ordre qui date du 11 mai, tout de suite après la
19 mise en place de la commission, cette commission conjointe,
20 Cerkez et Kalestura, met en place la commission. Il y a
21 des noms qui sont cités. L’objectif c’est de résoudre un
22 certain nombre de questions qui n’ont pas été résolues, le
23 statut des blessés, d’autres questions également.
24 Est-ce que vous serez d’accord avec moi pour dire
25 que les quatre noms représentent les deux du côté croate et
Page 12968
1 deux du côté musulman, enfin, de l’armée ?
2 R. Oui.
3 Q. Par conséquent, c’est une commission qui a
4 commencé ses activités, n’est-ce pas ? Elle a commencé à
5 fonctionner ?
6 R. Il y avait un certain nombre de réunions qui
7 ont été organisées et lors de ces réunions, au nom de la
8 commission conjointe, Monsieur Franjo Nakic et moi-même
9 nous y avons siégé. Il y avait effectivement des réunions
10 qui ont été tenues au niveau local.
11 Q. Nous sommes, par conséquent, d’accord. Nous
12 allons être précis. Nous n’allons pas faire de
13 commentaires. On n’en a pas besoin. La commission a
14 fonctionné. Elle a même fait un certain nombre de tâches
15 qui étaient assez difficiles ?
16 R. La commission a effectivement fonctionné sur
17 le terrain. Si véritablement elle a effectué tout ce qui
18 est marqué, je ne peux pas le confirmer.
19 Q. Mais vous pouvez quand même dire qu’elle
20 s’est vraiment donnée beaucoup du mal ?
21 R. Oui.
22 Q. À titre d’illustration, un autre document que
23 la commission a élaboré au cours de son travail c’est
24 Z965.1. Dans ce document, nous pouvons voir également les
25 signatures. Vous êtes bien d’accord qu’il s’agissait bien
Page 12969
1 de cette commission, la commission qui est le résultat de
2 l’ordre que nous avons vu ?
3 R. Oui.
4 Q. Le document en dit suffisamment. Nous
5 n’allons pas en donner lecture. On voit quelles sont les
6 activités, quelles étaient les compétences de la
7 commission. Vous êtes bien d’accord que c’est la
8 commission dont il s’agit ?
9 R. Oui.
10 Q. Par conséquent, la commission conjointe, par
11 conséquent, avait fonctionné ?
12 R. La commission conjointe a développé ses
13 activités sur le terrain.
14 Q. D’accord. Est-ce que vous avez vu d’autres
15 rapports de la commission à cette époque-là ?
16 R. Il y avait un certain nombre de rapports. Je
17 ne peux pas l’affirmer. Je ne peux pas vous dire ce que
18 j’ai vu mais c’est il y a longtemps.
19 Q. Entendu. Donc, vous pouvez mettre à côté, si
20 vous voulez, les documents que nous avons vus.
21 Un moment donné lors de votre déposition le
22 premier jour, vous avez dit que le 15 avril sur la route de
23 Vitez en direction de Zenica, vous avez vu au niveau de
24 Kaonik, à côté d’un local dénommé Sunce, le soleil, 350
25 soldats du HVO qui étaient vêtus des uniformes noirs. Vous
Page 12970
1 vous en souvenez ?
2 R. Oui.
3 Q. Cette localité, étant donné que vous
4 connaissez cette localité, c’était en dehors de la
5 municipalité de Vitez ?
6 R. Oui, c’est exact.
7 Q. Merci. Lors de votre déposition également, à
8 un moment donné, vous dites que les patrouilles
9 villageoises n’étaient pas sous le contrôle de l’armée. À
10 ce propos, j’avais quelques petites questions pour
11 éclaircir quelque chose. Est-ce que vous considérez que
12 les patrouilles villageoises étaient organisées de manière
13 autonome ?
14 R. Au niveau du village, oui.
15 Q. Entendu, et au-dessus de ce niveau-là,
16 c’était la Défense territoriale d’une certaine façon qui a
17 essayé de soumettre les patrouilles villageoises sous son
18 contrôle ? Je parle de la Défense territoriale qui a été
19 actuellement surveillée par la partie musulmane, tout au
20 moins en ce qui concerne la municipalité de Vitez.
21 R. La Défense territoriale ne s’est jamais
22 véritablement chargée des patrouilles villageoises.
23 Q. En ce qui concerne l’initiative pour
24 organiser les patrouilles villageoises, elle a été donnée
25 par qui ? Nous parlons des deux côtés. Nous parlons
Page 12971
1 également du côté croate et du côté musulman. Qui avait
2 donné cette initiative ?
3 R. Je ne le sais pas.
4 Q. Maintenant, une question tout à fait
5 concrète : D’après vous, qui a organisé les patrouilles
6 villageoises au cours de 1992 ?
7 R. Je suppose que c’était des villageois eux-
8 mêmes, compte tenu un certain nombre d’incidents criminels
9 qui arrivaient à ce moment-là.
10 Q. C’est pour se protéger. C’est pour se
11 protéger d’un certain nombre d’intrusions et des groupes de
12 criminels, n’est-ce pas, et pour se protéger ?
13 R. Oui, je le pense.
14 Q. Général, en ce qui concerne les patrouilles
15 villageoises, dans un grand nombre de villages, et
16 notamment en ce qui concerne le secteur de la municipalité
17 de Vitez, elles étaient mixtes au début. Au début, tous
18 les villageois organisaient les patrouilles par, forcément,
19 uniquement les musulmans d’un côté et les Croates de
20 l’autre côté : Est-ce que vous êtes d’accord avec moi ?
21 R. Dans un certain nombre des villages, c’est
22 vrai, mais par la suite, ces patrouilles se sont séparées.
23 Q. Sur la base nationale ?
24 R. Oui.
25 Q. Êtes-vous d’accord : Est-ce que vous avez
Page 12972
1 entendu – pour être très précis – est-ce que vous avez
2 entendu dire qu’il y avait un certain nombre de cas où les
3 patrouilles s’étaient séparées, puis ensuite, ils se
4 rassemblaient encore une fois, puis se reséparaient pour
5 la deuxième fois, en d’autres termes, qu’ils réagissaient
6 aux événements qui avaient lieu dans leur milieu
7 restreint ?
8 R. Je n’ai pas de telles informations mais il
9 n’est pas impossible que ce soit comme ça.
10 Q. Un moment donné lors de votre déposition
11 également, vous avez dit qu’avant le mois d’avril 1993, le
12 HVO disposait d’artillerie de grande envergure et vous
13 pensez que cette artillerie a été localisée auprès de la
14 carrière à côté de Vitez. Quelques questions à ce sujet-
15 là.
16 L’armée de Bosnie-Herzégovine dans la municipalité
17 de Vitez avait également l’artillerie, n’est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce qu’en le disant, vous avez pensé aux
20 obusiers à 152 et 122 millimètres qui, à cette époque-là,
21 existaient, dont le calibre était connu à cette époque-là ?
22 R. Je ne sais pas. À quelle partie pensez-
23 vous ?
24 Q. Mais est-ce que le HVO disposait de
25 l’artillerie de ce calibre : des obusiers de 155 et 122
Page 12973
1 millimètres ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que vous vous souvenez qu’entre le 3e
4 corps d’armée et la zone opérationnelle – nous parlons de
5 la période qui a précédé avril 1993 et dont vous avez parlé
6 également – qu’entre les deux commandements, et ceci pour
7 appuyer la ligne de front qui se trouvait à Vlasic, il a
8 été convenu et chaque partie avait mis à la disposition un
9 obusier pour les placer au niveau de la carrière et à côté
10 de Mosunj ? Est-ce que vous vous souvenez de ça ?
11 R. En automne 1992, nous avons essayé de former
12 l’artillerie conjointe mais on n’a pas réussi.
13 Q. Par conséquent, vous voulez dire qu’il n’y
14 avait pas deux obusiers, que chaque partie avait donné un
15 obusier, et qu’on n’a pas véritablement placé ces deux
16 obusiers sur la ligne de front à Vlasic entre la zone
17 opérationnelle et le 3e corps d’armée ? Donc, vous
18 affirmez que ceci ne s’est jamais passé ?
19 R. Nous nous sommes mis d’accord justement d’y
20 aboutir mais ce n’était que la lettre morte sur le papier.
21 Q. Vous êtes militaire, moi, je ne le suis pas,
22 et du point de vue exploitation, cette distance de 25
23 kilomètres à Vlasic a été un endroit, une localité idéale
24 pour placer les obusiers de 155 et 122 millimètres ?
25 R. Au cours des entretiens, nous avons proposé
Page 12974
1 d’autres positions. Le HVO n’a jamais accepté.
2 L’artillerie a été déployée. Comme ceci correspondait au
3 HVO, ils n’ont jamais entendu nos propositions et accepter
4 nos propositions.
5 Q. Général, pour ce qui est d’artillerie, des
6 pièces d’artillerie de ce type et de cette force, ces
7 pièces ne sont pas destinées au combat pour les petites
8 distances autour du village ou de l’endroit, de la localité
9 en question ?
10 R. Ça c’est vrai. C’est pour les longues
11 distances.
12 Q. C’est, par conséquent, pas pour la ville ?
13 R. Mais je ne suis pas d’accord avec vous parce
14 que ça dépend également des positions des pièces
15 d’artillerie.
16 Q. Mais vous êtes d’accord avec moi pour dire
17 qu’il s’agit des pièces d’artillerie qui sont utilisées
18 pour des combats à longue distance ?
19 R. Mais de toute façon, si vous déployez cette
20 artillerie à Vitez, elle peut également être utilisée pour
21 les bombardements de Vitez.
22 Q. Mais en ce qui concerne ces entretiens, vous
23 êtes bien d’accord pour dire que ces obusiers étaient sous
24 le contrôle de la zone opérationnelle de la Bosnie
25 centrale ?
Page 12975
1 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Êtes-vous en
2 mesure de répondre à cette question, Général ? Sous quel
3 commandement se trouvait cette artillerie qui se trouvait à
4 l’extérieur ou de l’autre côté plus exactement ou est-ce
5 que vous ne pouvez mettre que des spéculations à ce
6 propos ?
7 R. Monsieur le Président, je ne sais pas qui
8 avait commandé ces pièces d’artillerie. Je pense que
9 c’était le commandant de l’unité d’artillerie mais je ne
10 connais pas le nom et je ne connais pas le prénom.
11 Me KOVACIC (interprétation) : Merci. Nous
12 pouvons poursuivre.
13 Q. Le document Z1226.1 : J’aimerais attirer
14 votre attention maintenant sur le troisième paragraphe,
15 « CC Travnik », dans les parenthèses, point (1). Il
16 commence avec : « HC a rencontré Monsieur Merdan. » Je ne
17 sais pas si vous voyez le paragraphe dont je parle.
18 Messieurs les Juges, je pense que j’ai fait une
19 confusion. C’est le Procureur qui a versé le document. Je
20 pensais qu’il s’agissait de la traduction en croate. Mais
21 il faut que je donne quelques explications, Général. Je
22 pense qu’il s’agissait véritablement également d’un
23 document dont vous avez la traduction en croate.
24 On parle dans ce document d’un entretien qui a eu
25 lieu entre le représentant de l’ECMM avec vous, et en
Page 12976
1 dernière phrase, il est dit que vous avez parlé des
2 tentatives de Monsieur Abdic de mettre en place une
3 province autonome en Bosnie occidentale et que cet effort
4 déployé par Monsieur Abdic avait pour but un certain nombre
5 d’intérêts personnels et que de toute façon, il était voué
6 à l’échec.
7 Qui était Monsieur Abdic, s’il vous plaît ?
8 Pourriez-vous nous le dire ?
9 R. Je ne sais pas. À quelle période pensez-
10 vous ?
11 Q. C’était le 30 septembre 1993 et vous en
12 parlez, par conséquent, avant que Kakanj est tombée.
13 R. À mon avis, Monsieur Abdic, à ce moment-là,
14 se trouvait à Krajina occidentale.
15 Q. Par conséquent, c’était tout à fait à l’ouest
16 de Bosnie, Bihac, n’est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce que c’est la partie de Bosnie, pour
19 qu’il n’y ait pas de malentendu, qui s’appelle Cazinska
20 Krajina ?
21 R. Ça fait partie de Bosnie-Herzégovine.
22 Q. Mais ça fait partie de Bosnie-Herzégovine
23 mais en tant que région dénommée Cazinska Krajina ?
24 R. C’est effectivement la région de Bosnie-
25 Herzégovine et c’est la population qui avait dénommé cette
Page 12977
1 région Cazinska Krajina.
2 Q. Mais vous savez très bien qu’il y avait des
3 conflits qui se sont déclenchés entre l’armée de Bosnie-
4 Herzégovine et les forces de Monsieur Abdic : Est-ce que
5 c’est exact ?
6 R. Oui, c’est tout à fait exact.
7 Q. Merci. Mon confrère vient de me rappeler que
8 ce que nous savons, tout le monde ne le sait pas. Fikret
9 Abdic est un musulman, n’est-ce pas ?
10 R. Oui, c’est exact.
11 Q. Lors de votre déposition, Général, à un
12 moment donné, vous dites également que vous avez reçu un
13 certain nombre d’informations par transmission Paket. Est-
14 ce que c’était des liaisons qui étaient primitives ou
15 éventuellement sophistiquées ? Au niveau technique,
16 technologique, à quel niveau on peut dire que transmission
17 par Paket se trouve ?
18 R. À cette époque-là, c’était tout à fait au
19 sommet.
20 Q. Par conséquent, il s’agissait de transmission
21 sophistiquée, très développée, de pointe ?
22 R. Oui.
23 Q. Est-ce que vous êtes au courant que la zone
24 opérationnelle de Bosnie centrale avait utilisé également
25 de tels types de liaisons par rapport aux autres enclaves
Page 12978
1 telles Kiseljak et Vares ? Est-ce que vous étiez au
2 courant ? Est-ce que vous l’avez appris ultérieurement ?
3 R. Le HVO disposait de mêmes types de
4 transmission. Je pense que le HVO avait des types de
5 transmissions qui étaient de pointe et supérieures par
6 rapport à l’armée de Bosnie-Herzégovine.
7 Q. Merci. Général, on mentionne le nombre
8 différent des effectifs du 3e corps d’armée. Par
9 conséquent, je parle de la période de mois de juillet-août
10 1993. On a également cité 20 000 soldats du 3e corps
11 d’armée en été 1993. Est-ce que ce sont les effectifs qui,
12 d’après vous, sont des effectifs réels ?
13 R. Je ne peux pas vous le dire avec précision
14 mais je pense effectivement qu’ils étaient au nombre de 20
15 000.
16 Q. Pourriez-vous maintenant voir un autre
17 document ?
18 Me KOVACIC (interprétation) : Je vais demander à
19 l’huissier de distribuer ce document. Vous avez les deux
20 textes : le texte croate et la version anglaise également.
21 Q. Les deux premières pages, Général, sont en
22 langue croate. Si vous voulez bien parcourir le texte. Il
23 y a la signature, la date. Général, est-ce que vous êtes
24 d’accord pour dire que c’est le document que vous-même en
25 personne, vous avez délivré ?
Page 12979
1 R. Si vous permettez, je vais juste lire le
2 document un petit moment.
3 LA GREFFIÈRE (interprétation) : La cote sera
4 D55/2.
5 Me KOVACIC (interprétation) :
6 Q. Général, je ne vais pas vous interrompre.
7 Vous pouvez me dire à quel moment on peut commencer.
8 R. D’accord mais on peut toujours commencer.
9 J’ai déjà lu.
10 Q. Il s’agit, par conséquent, dans le document
11 de dire que l’armée était préparée pour la guerre et pour
12 passer un hiver long et dur : Est-ce que c’est vrai ?
13 R. C’est exact ce que vous dites. C’est bien
14 marqué mais j’ai une observation à faire en ce qui concerne
15 cet ordre. J’ai normalement signé tous les documents comme
16 Commandant, ce qui n’est pas marqué ici.
17 Q. Général, est-ce que vous voulez dire que ce
18 n’est pas vous qui avez rédigé le document ?
19 R. C’est mon état-major qui l’avait préparé.
20 C’est ma propre signature.
21 Q. Entendu ! Il s’agissait d’une circulaire
22 également qui a été destinée à plusieurs commandements et
23 là ici, c’est l’en-tête « commandement de Vitez », n’est-ce
24 pas ?
25 R. Oui.
Page 12980
1 Q. Par conséquent, vous l’avez destinée à ces
2 unités, à la 325e unité et d’autres unités dont il a été
3 question hier lors de votre déposition ?
4 R. Non.
5 Q. C’était une autre unité ?
6 R. C’était aux états-majors de la Défense
7 territoriale que cet ordre a été destiné.
8 Q. Entendu ! Encore une autre question,
9 Général. Hier, vous avez mentionné le 3e corps d’armée à
10 plusieurs reprises, la structure du 3e corps d’armée. Mais
11 qu’est-ce qui se passait avec le 7e corps d’armée qui
12 également opérait dans cette même région ? Depuis quand il
13 opérait en Bosnie centrale ?
14 R. Je ne peux pas me souvenir exactement de la
15 date. Il y a un ordre archivé en Bosnie centrale. Le 7e
16 corps d’armée a été mis en place au moment où le 3e corps a
17 été séparé en deux. Par conséquent, c’est une partie du 3e
18 corps qui a été transformée en 7e corps d’armée et ces deux
19 corps d’armée ont eu deux zones d’opération différentes.
20 Q. Est-il vrai, Général, qu’un certain nombre
21 d’éléments du 7e corps d’armée était resté sur les points
22 de contact avec la vallée de la Lasva, l’enclave de la
23 vallée de la Lasva, Vitez, si vous voulez, plus précisément ?
24 Est-ce que c’est vrai ?
25 R. En partie, oui.
Page 12981
1 Q. Serions-nous d’accord pour dire qu’autour de
2 l’ensemble de cette enclave, Novi Travnik, Vitez et
3 Busovaca, se trouvaient des unités du 3e corps d’armée et
4 plus tard, du 7e corps d’armée de Bosnie-Herzégovine ?
5 R. Avant que le 7e corps d’armée n’ait été mis
6 en place, les unités du 3e corps d’armée ou tout au moins
7 une partie des unités s’y trouvait. Une fois que le 7e
8 corps d’armée a été créé, il y avait également des éléments
9 du 7e corps d’armée car la majorité des forces du 3e corps
10 d’armée et du 7e corps d’armée était affectée et déployée
11 face à l’agresseur sur la Bosnie-Herzégovine.
12 Q. Par conséquent, nous parlons du mois d’août
13 1993, globalement parlant ?
14 R. Je ne pourrais pas le confirmer. Je voudrais
15 vous demander de consulter les notes, les ordres qui
16 existent et qui sont consignés dans les archives.
17 Q. Vous l’avez déjà dit mais nous sommes quand
18 même d’accord que ceci était à peu près en été 1993 ? Vous
19 ne pouvez pas préciser quelle date, quelle période très
20 précise mais c’était l’été ?
21 R. Je ne pourrais pas l’affirmer.
22 Q. Merci. Général, dites-moi encore une chose à
23 ce propos, s’il vous plaît. À la fin de l’été ou début
24 septembre, pour parler plus précisément, 1993, les
25 effectifs du 3e et 7e corps d’armée qui encerclaient la
Page 12982
1 vallée de la Lasva, les forces de l’armée de Bosnie-
2 Herzégovine qui étaient déployées autour de l’enclave
3 avaient 30 000 personnes ?
4 R. Je ne sais pas si vous pensez au nombre
5 d’habitants ou au nombre de soldats.
6 Q. Mais je pense au nombre de soldats.
7 R. Je ne suis pas d’accord avec vous.
8 Q. Vous voulez dire qu’il y en avait moins ?
9 R. Oui, certainement.
10 Me KOVACIC (interprétation) : Je vais terminer
11 comme ça mon interrogatoire.
12 R. Merci.
13 RÉINTERROGÉ PAR Me NICE
14 (interprétation) :
15 Q. Général, j’aurai quelques questions à vous
16 poser encore et pour certaines, vous pourrez répondre très
17 brièvement. Tisovac, y êtes-vous allé en personne et si
18 oui, qui avez-vous vu ?
19 R. Je ne suis pas allé à Tisovac en personne
20 pendant la durée des opérations de guerre mais je connais
21 très bien Tisovac car je m’y suis trouvé à de nombreuses
22 reprises.
23 Q. En bref, est-ce un lieu assez reculé sur un
24 terrain boisé et non loin d’un élevage de poissons ?
25 R. Oui, c’est exact, à quatre kilomètres de
Page 12983
1 Busovaca à peu près. À Tisovac, à ce moment-là, il
2 existait effectivement un élevage de poissons.
3 Q. Vous nous avez dit qu’après avoir été arrêté
4 et frappé, Glavocevic vous avait transmis des excuses.
5 Nous savons que la pièce numéro 100, que nous n’avons pas
6 examinée, était le document signé par Kordic qui
7 réglementait votre arrestation. Nous ne l’avons pas
8 regardé en détail mais dans ce document, trouve-t-on un
9 mot, ne serait-ce qu’un mot, d’excuse au sujet de votre
10 arrestation ?
11 R. Non. Cela ne m’a pas été transmis.
12 Q. Que vous a-t-il dit, Monsieur Glavocevic, au
13 nom de Kordic lorsqu’il est venu vous voir ?
14 R. Je ne me rappelle pas tous les détails mais
15 pour l’essentiel, il m’a dit qu’il regrettait ce qui
16 s’était passé et qu’un tel événement n’aurait pas dû
17 survenir.
18 Q. Mais il n’y a eu aucune explication pour
19 justifier votre arrestation ?
20 R. Non, je n’ai pas, à ce moment-là, reçu la
21 moindre explication.
22 Q. Vous avez parlé d’un homme dénommé Bruno
23 Susnja. Pouvez-vous nous expliquer en un mot de qui il
24 s’agit et pourquoi vous déclarez qu’il importerait qu’il
25 soit entendu par la Chambre ?
Page 12984
1 R. Bruno Susnja est un habitant de la
2 municipalité de Busovaca avec lequel j’ai eu à plusieurs
3 reprises l’occasion de parler avant la guerre. Je sais que
4 Bruno Susnja est celui qui a fondé le parti HDZ à Busovaca
5 et, si je ne me trompe, il en a été le premier président à
6 Busovaca. Y compris en 1991, j’ai eu plusieurs contacts
7 avec Bruno Susnja. Je pense que cet homme avait des
8 positions très réalistes et lorsque le danger d’une
9 agression contre la Bosnie-Herzégovine s’est fait jour,
10 nous en avons parlé à plusieurs reprises.
11 J’ai également eu une discussion avec lui en 1992.
12 Je pense que pendant un certain temps, il exerçait une
13 certaine influence dans les milieux du HDZ mais plus tard,
14 il m’a dit que Dario Kordic avait repris tout le pouvoir au
15 sein de ce parti et que Dario Kordic était donc devenu
16 l’alpha et l’oméga de ce parti, non seulement localement
17 mais y compris à un niveau un peu plus large, que c’était
18 lui qui prenait toutes les décisions.
19 Q. S’agissant de ce que vous avez dit à
20 plusieurs reprises quant au fait que le HVO avait le
21 contrôle sur des Arabes qui sont entrés sur ce territoire,
22 pouvez-vous expliquer si le HVO avait le moindre avantage à
23 autoriser les Arabes à venir à cet endroit, à ce moment-là,
24 et si oui, de quelle nature était cet avantage ?
25 R. Une phrase, si vous me le permettez, encore
Page 12985
1 au sujet de Bruno Susnja. J’ai rencontré encore une fois
2 Bruno Susnja à Zenica – je m’en souviens maintenant très
3 bien – un jour où il essayait de s’éloigner de Dario Kordic
4 qui, selon ses dires à lui, avait essayé de le tuer. Donc,
5 il tentait de s’enfuir à Zenica.
6 Maintenant, pour répondre à votre dernière
7 question, j’ai toujours été convaincu que le HVO savait
8 quel était le nombre des Arabes qui pénétraient sur le
9 territoire de la municipalité de Busovaca. Je savais, à ce
10 moment-là, que les Arabes transportaient de l’argent, je ne
11 sais pas exactement par quel moyen, et qu’ils circulaient
12 dans des automobiles de grand prix, notamment dans des 4 X
13 4. Ils étaient très souvent arrêtés aux barrages routiers
14 du HVO et volés.
15 Q. Mais donc, quel aurait été l’avantage pour le
16 HVO de leur permettre de pénétrer sur ce territoire ?
17 R. Dans mes déclarations précédentes, j’ai déjà
18 dit que les enlèvements, lorsqu’ils se produisaient,
19 étaient organisés par un groupe d’Arabes. Ces Arabes, pour
20 autant que je le sache, venaient en tant que représentants
21 d’organisations humanitaires internationales et c’est la
22 raison pour laquelle ils transportaient de si grosses
23 sommes d’argent. Je suis incapable de dire quel était
24 l’avantage pour le HVO de leur permettre de pénétrer sur ce
25 territoire mais je suppose que le motif essentiel
Page 12986
1 consistait à leur voler l’argent qu’ils avaient sur eux et
2 les automobiles qu’ils conduisaient.
3 Q. La fermeture des communications entre
4 Busovaca et Kiseljak avant le 25 janvier : Pouvez-vous
5 nous dire par quel biais cette coupure des communications
6 entre les deux villes a eu lieu ?
7 R. Avant le 25 janvier 1991, et je crois que
8 cela s’est passé le 19 janvier 1991, en fait, Dario Kordic
9 et Ivo Kostroman ont été arrêtés à un barrage routier.
10 Pour autant que j’en aie été correctement informé, Dario
11 Kordic a menacé de tuer les membres de la famille de ceux
12 qui tenaient le barrage. Selon les informations dont je
13 dispose, Kordic et Kostroman ont ensuite été relâchés et
14 ont pu poursuivre leur voyage jusqu’à Busovaca.
15 Dans la nuit du 20 au 21, un incident terrible
16 s’est produit à Busovaca. En effet, tous les commerces
17 privés ont explosé en raison d’une action du HVO et le 21
18 ou le 22, une partie des unités du HVO a pris le chemin de
19 Kacuni et devant le fameux barrage de Kacuni, ces unités
20 ont été arrêtées et je crois que des combats ont éclaté et,
21 ensuite, dans la nuit du 24 au 25, un barrage a été érigé
22 qui n’a pas pu être démantelé jusqu’à ma venue sur place
23 avec le Colonel Stewart qui m’a aidé à en obtenir le
24 démantèlement.
25 Q. Un instant, je vous prie. Un extrait de la
Page 12987
1 déposition du Colonel Stewart vous a été soumis pour examen
2 et je suis en train de chercher ce passage exact mais
3 enfin, j’y reviendrai car, à ce moment-là, vous avez dit
4 que vous ne pensiez pas qu’il pouvait avoir dit ce qui
5 figurait dans cet extrait écrit.
6 Pour le moment, passons à un autre extrait de
7 cette même déposition où il est question du Washington
8 Post. Vous avez confirmé qu’un journaliste vous avez
9 parlé, effectivement, mais l’extrait qui vous a été soumis,
10 dites-vous, repose sur d’autres sources et cet article n’a
11 pas de commentaires de votre part au sujet des propos tenus
12 par ces autres sources.
13 Alors, d’abord, je vous demande si le journaliste,
14 d’après vos souvenirs, a contesté ce que des sources
15 tierces avaient dit quant au fait que vous auriez été
16 l’agent de liaison avec les combattants islamiques
17 étrangers et des questions de ce genre.
18 R. Il est exact que j’ai donné une interview à
19 un journaliste du Washington Post qui est venu dans mon
20 bureau. Il est exact qu’il a vu un petit drapeau iranien
21 dans mon bureau, pas un grand drapeau, comme il l’a dit
22 mais un petit drapeau dans mon bureau. Ce drapeau se
23 trouvait entre le drapeau des États-Unis d’Amérique et
24 celui de la République de Turquie et dans mon bureau, à
25 l’époque, il y avait à peu près 25 drapeaux de très
Page 12988
1 nombreux pays. Ils m’avaient été donnés par des
2 délégations de ces pays qui m’avaient rendu visite.
3 Le journaliste n’a pas dit qu’à ce moment-là, il y
4 avait également dans mon bureau un emblème, un blason de
5 très grande taille de la République de Bosnie-Herzégovine
6 et un blason de l’armée de la Bosnie-Herzégovine.
7 Q. Je ne vous demandais pas vos commentaires sur
8 l’article de façon générale mais ce que je souhaitais
9 savoir c’était si le journaliste vous avait effectivement
10 parlé de ce qui est contenu dans l’extrait qui a été lu par
11 le Conseil de la Défense et si oui, est-ce que vous êtes
12 d’accord ou pas avec ce qui est écrit dans ce passage de
13 l’article ?
14 R. Il est vrai que le journaliste m’a demandé si
15 j’avais des rapports quelconques avec les combattants
16 iraniens et le monde islamique. J’ai dit que je n’avais
17 aucun rapport avec eux.
18 Q. Les Juges constateront que cela ne figure pas
19 dans l’article mais ce qui figure dans l’article, Général
20 Merdan, c’est que, selon le journaliste, vous lui avez dit
21 que le nom des brigades n’était pas important, que vous
22 pouviez avoir une brigade musulmane ou une brigade croate
23 ou une brigade serbe dans la nouvelle armée pour autant que
24 cette brigade combattait en faveur de la Bosnie. Alors, ce
25 passage est-il exact, fidèle à la réalité ?
Page 12989
1 R. Il est vrai que j’ai discuté de ce sujet avec
2 le journaliste. Ce que je voulais dire c’est que le nom de
3 la brigade n’est pas important mais que ce qui était
4 important c’était le but poursuivi par les brigades
5 lorsqu’elles combattaient pour la Bosnie-Herzégovine.
6 Q. On vous a interrogé au sujet d’un passage de
7 la déposition du Colonel Stewart et, en fait, ce qui s’est
8 passé c’est la chose suivante. En page 12371, on lui
9 demande, le Conseil de la Défense lui demande s’il avait
10 dit que le Général Hadzihasanovic et vous-même étiez au
11 moins responsables de l’éclatement des combats le 25
12 janvier. On lui a demandé si les deux hommes étaient
13 d’accord et il répond dans sa déposition : « Je pense que
14 je le lui ai certainement dit. S’ils étaient d’accord ou
15 pas, je ne me souviens pas. » Fin de citation.
16 Ensuite, on lui soumet un passage de son livre
17 « Les Vies brisées » où il parle d’un entretien avec vous.
18 Cela se trouve en page 12372 et il serait préférable sans
19 doute que je lise ce passage.
20 Je cite : « J’avais le sentiment à l’époque que
21 les musulmans étaient principalement responsables des
22 troubles qui avaient éclaté parce qu’ils avaient tué deux
23 soldats croates. Est-ce que les musulmans bosniens
24 souhaitaient vraiment voir éclater une guerre de grande
25 ampleur dans la vallée de Kiseljak ? Il me semblait qu’ils
Page 12990
1 étaient sur la bonne voie sur ce sujet. S’ils l’avaient
2 souhaité, cela n’était tout simplement pas suffisant et
3 quelque chose devait être fait à ce sujet. Merdan a été
4 d’accord. Il a présenté ses excuses et a dit qu’il était
5 prêt à venir en personne pour essayer de résoudre le
6 problème. » Fin de citation.
7 Alors, cette citation est-elle exacte ? C’est
8 celle du Colonel Stewart. Avez-vous un commentaire à faire
9 quant à son exactitude ?
10 R. Au moment que vous venez de citer, Bob
11 Stewart est venu me voir et il m’a accusé, moi, ainsi que
12 le Général Hadzihasanovic, d’avoir entraîné la rupture des
13 communications, d’avoir coupé la route. C’est ainsi que je
14 me suis rendu compte que la route devait être rouverte pour
15 toutes sortes de raisons, la plus importante étant la
16 nécessité de faire circuler l’aide humanitaire provenant de
17 la FORPRONU, et comme j’avais des contacts à ce moment-là
18 avec Bob Stewart, une fois qu’il m’a dit que nous étions
19 coupables de l’érection de ce barrage, j’ai dit que le
20 barrage serait levé. Je l’ai prié de me conduire avec son
21 blindé jusqu’au barrage, où j’ai donné l’ordre de
22 démanteler ce barrage, et après une demi-heure ou une
23 heure, le barrage a effectivement été démantelé et la route
24 a été rouverte.
25 Si Bob a dit que nous étions coupables de
Page 12991
1 l’éclatement des combats dans la vallée de la Lasva, moi,
2 je ne sais pas exactement tout ce qu’il a dit, mais
3 globalement, je pense que c’était un homme bien informé et
4 qu’il savait très bien que nous nous sommes efforcés
5 d’empêcher l’éclatement du conflit, que nous avons tout
6 fait pour réduire les incidents au minimum, de façon à
7 éviter l’éclatement d’un conflit, car nous avions déjà
8 discuté à plusieurs reprises de ce qui signifierait pour
9 l’armée de Bosnie-Herzégovine l’ouverture de deux fronts.
10 Ni alors ni aujourd’hui, il ne nous convient d’avoir deux
11 fronts à défendre. C’est quelque chose qui est négatif
12 pour tout soldat et c’est de cela que nous avons discuté,
13 Bob Stewart et moi-même.
14 Q. Un très bref extrait d’une pièce qui n’a pas
15 été versée au dossier au départ mais a fini par l’être plus
16 tard : la pièce D163/1 qui vous a donc déjà été soumise.
17 Ce document porte la date du 4 octobre 1993 et rend compte
18 donc de la situation à l’époque.
19 À l’intention des Juges, j’indique que ce passage
20 a pour numéro de référence 04225.
21 Je cite : « Dans la zone sous le contrôle du 3e
22 corps d’armée, pas un seul village croate n’a été incendié,
23 selon vous, et pas une seule église n’a été détruite, selon
24 vous. »
25 Que dites-vous de cela ? Est-ce que ces propos
Page 12992
1 sont fidèles à la réalité et correspondent bien à la date
2 du 4 octobre 1993, ces propos qui vous sont imputés ?
3 R. Oui. J’ai dit que pas un seul village
4 n’avait été détruit et que pas une église non plus n’avait
5 été détruite.
6 Q. Était-ce exact ?
7 R. Oui, c’est exact.
8 Q. Je ne vais pas procéder à un exercice qui
9 serait trop artificiel et qui consisterait à attirer
10 l’attention du témoin sur d’autres passages mais la Chambre
11 constatera que ces mêmes auteurs se sont exprimés sur
12 beaucoup de sujets, notamment sur les accusés.
13 On vous a soumis un autre document, le D108/1. La
14 Chambre s’en souviendra. Il s’agit des instructions
15 destinées aux combattants musulmans, document que la
16 Chambre a d’abord reçu sous forme d’extrait et que la
17 Chambre a ensuite reçu dans son intégralité.
18 Vous avez eu l’occasion de consulter quelques
19 extraits de ce fascicule. Est-ce que vous aviez déjà eu
20 l’occasion de consulter ce livre ou fascicule auparavant ?
21 Rappelez-vous, il s’agissait des instructions destinées aux
22 combattants musulmans. Quelques pages vous ont été
23 présentées d’extraits, par exemple, ce qu’il fallait faire
24 s’il y avait mort de civils. C’était un livre religieux.
25 R. Oui. C’est la première fois que j’ai vu ce
Page 12993
1 manuel, ce livre. Je n’ai jamais vu des instructions en
2 question qui ont été données aux combattants musulmans.
3 J’ai dit également que l’auteur de ce livre est quelqu’un
4 qui est formé sur le plan religion. Par conséquent, il
5 peut donner une interprétation meilleure des coutumes et
6 des traditions religieuses. J’ai dit que moi, je suis un
7 fidèle mais c’est Dieu qui sait qui est le meilleur.
8 Q. Est-ce qu’il était coutumier de distribuer
9 des manifestes ou fascicules religieux aux soldats de
10 l’armée de Bosnie-Herzégovine pour leur donner des
11 instructions ?
12 R. Pour ce qui concerne des combattants de
13 l’armée qui étaient de religion musulmane, nous avons parlé
14 de la foi et de la religion. Nous avons permis également
15 aux autres combattants qui avaient une autre confession de
16 s’exprimer sur ce plan-là. On n’a jamais interdit quoi que
17 ce soit à ce niveau-là, même pas maintenant, ceux qui sont
18 soldats au sein de l’armée de Bosnie-Herzégovine. J’ai
19 toujours dit que la confession doit bien évidemment être
20 permise au sein de l’armée. Les imams ont véritablement pu
21 en parler de manière plus précise, mais je sais qu’ils ont,
22 entre autres, également propagé les principes de
23 confession.
24 Q. Encore deux questions. Filipovic a dit qu’il
25 n’était pas à la hauteur et qu’il ne pouvait pas résister à
Page 12994
1 Kordic. Je ne trouve pas exactement le passage pertinent
2 mais vous souvenez-vous de la réponse que vous aviez alors
3 fournie ?
4 R. Oui, je me souviens très, très bien. Filip
5 Filipovic, début 1992, ou mieux encore dès le mois de mai
6 ou fin avril, début mai, faisait partie de l’état-major du
7 district de Zenica. À l’époque, le commandant de Zenica,
8 le commandant de l’état-major de district était Ramiz
9 Suvalic, actuellement Général de brigade à la retraite, et
10 Monsieur Ramiz Suvalic et moi-même, nous nous sommes
11 entretenus ensemble avec Filip Filipovic. Nous savions
12 qu’il était représentant du HVO dans la vallée de la Lasva
13 de la Bosnie centrale.
14 Nous nous sommes entretenus au sujet de former un
15 commandement conjoint. Filip Filipovic aurait dû être le
16 commandant et moi, son adjoint. Filip Filipovic n’était
17 pas d’accord avec cette… il a dit que Dario Kordic n’était
18 pas d’accord avec cette proposition et c’est la raison pour
19 laquelle il ne pouvait pas mettre en œuvre cette idée. Il
20 avait également exprimé ses regrets.
21 À ma connaissance, il a été remplacé par la suite.
22 À plusieurs reprises, j’ai eu l’occasion de le contacter
23 par la suite et un moment donné, je pense qu’on a même… on
24 lui a attribué un poste qui était tout à fait minimisant.
25 Enfin, il était commandant de la compagnie car il avait
Page 12995
1 occupé un poste beaucoup plus important et au moment où il
2 y avait des combats très violents, il a travaillé comme un
3 soldat opérationnel dans la vallée de la Lasva.
4 Q. Vous a-t-il expliqué de façon précise
5 pourquoi il n’était pas en mesure de tenir tête à Dario
6 Kordic ?
7 R. Non. Il ne m’a pas donné des détails. Il
8 n’a pas dit quelles étaient les raisons pour lesquelles il
9 ne pouvait pas véritablement tenir tête à Dario Kordic. Il
10 avait tout simplement précisé qu’il n’était pas d’accord
11 avec les conceptions de Dario Kordic.
12 Q. L’hypothèse vous a été soumise selon laquelle
13 au cours de votre déposition, vous avez minimisé le degré
14 de coopération effective qui se produisait sur le terrain
15 et je pense qu’on impliquait par là que vous aviez
16 poursuivi des objectifs qui n’étaient pas en faveur de la
17 paix dans ces combats que vous meniez. Est-ce que vous
18 avez, de quelque façon que ce soit, minimisé ce degré de
19 coopération dont vous auriez bénéficié avec le HVO ?
20 R. Non. Je n’ai jamais minimisé le degré de
21 coopération avec le HVO. Au contraire, j’ai fait tout pour
22 que cette coopération soit élevée à un niveau le plus élevé
23 possible. J’ai été même disposé de me subordonner, même
24 d’être adjoint de Filip Filipovic, et tout ceci pour
25 pouvoir faire face ensemble à l’agresseur de Bosnie-
Page 12996
1 Herzégovine. Je me suis toujours employé pour qu’il y ait
2 un accord qui convient à deux parties, aussi bien au HVO
3 que l’armée, et même indépendamment de mes propres
4 convictions, j’ai essayé d’aboutir à un accord pour que la
5 paix puisse régner. Indépendamment de tout ce que ma
6 famille a vécu également, j’ai toujours appuyé la lutte
7 pour la paix.
8 Par conséquent, que de vouloir dire que j’ai
9 minimisé mon rôle et le degré de coopération avec le HVO
10 n’est pas absolument exact. Je considère tout simplement
11 que ce qui était possible n’a pas été fait en ce qui
12 concerne la Bosnie centrale et je pense que le HVO n’a pas
13 fait l’effort comme nous l’avons souhaité. Je ne sais pas
14 ce qui s’était passé ailleurs mais je parle de la Bosnie
15 centrale.
16 Q. Des questions vous ont été posées quant à la
17 perpétration ou la commission de crimes de guerre de la
18 part de personnes avec qui vous été associés ou par rapport
19 auxquelles vous aviez un rapport d’autorité. Pourriez-vous
20 dire à la Chambre si vous êtes venu déposer ici de plein
21 gré et si vous avez demandé à bénéficier de mesures de
22 protection, un moment donné ?
23 R. Non, je n’ai pas demandé de mesures de
24 protection, jamais, même pas au moment où j’étais sur les
25 lignes de front et même actuellement quand je me déplace,
Page 12997
1 je ne le demande pas. Je suis convaincu que la vérité doit
2 emporter et je suis fidèle. J’y crois. Je ne pense pas à
3 ma propre vie. Je suis sûr que la vérité doit l’emporter.
4 Me NICE (interprétation) : Je n’ai plus de
5 questions à poser à ce témoin.
6 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
7 remercie, Général. Vous en avez ainsi terminé de votre
8 déposition. Vous pouvez disposer. Merci d’être venu à La
9 Haye pour comparaître devant nous. Désolé que nous n’ayons
10 pas été en mesure de terminer la semaine dernière, ce qui
11 fait que vous avez dû revenir deux fois, mais je vous en
12 remercie d’autant plus.
13 LE TÉMOIN (interprétation) : Merci, Monsieur le
14 Président. Je remercie ce Tribunal honorable. Je suis
15 arrivé ici de plein gré et je suis honoré également d’être
16 cité devant le Tribunal et de pouvoir dire, exprimer ce que
17 j’ai vu et ce que j’ai vécu, de m’avoir permis également de
18 faire mes propres commentaires au sujet d’un certain nombre
19 d’événements dont il a été question devant ce Tribunal. Je
20 suis convaincu que ce Tribunal saura apporter un jugement
21 tel qui est attendu par le monde entier. Je suis prêt
22 également à me mettre à votre disposition à être cité en
23 témoin chaque fois quand il le faudra. Je vous remercie.
24 Me NICE (interprétation) : Le témoin peut quitter
25 le prétoire en compagnie de l’huissier.
Page 12998
1 [Le témoin se retire]
2 Me NICE (interprétation) : Je voudrais un passage
3 à huis clos partiel rapide avant la comparution du témoin
4 suivant.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : D’accord.
6 [Huis clos partiel]
7 [expurgée]
8 [expurgée]
9 [expurgée]
10 [expurgée]
11 [expurgée]
12 [expurgée]
13 [expurgée]
14 [expurgée]
15 [expurgée]
16 [expurgée]
17 [expurgée]
18 [expurgée]
19 [expurgée]
20 [expurgée]
21 [expurgée]
22 [expurgée]
23 [expurgée]
24 [expurgée]
25 [expurgée]
Page 12999
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 12999 – 13006 expurgées – audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 13007
1 [expurgée]
2 [expurgée]
3 [expurgée]
4 [expurgée]
5 [expurgée]
6 [expurgée]
7 [expurgée]
8 [expurgée]
9 [expurgée]
10 [expurgée]
11 [expurgée]
12 [expurgée]
13 [expurgée]
14 [expurgée]
15 [Audience publique]
16 [Le témoin entre dans la Cour]
17 LA GREFFIÈRE (interprétation) : Le pseudonyme de
18 ce témoin sera AD. Ce sera le Témoin AD.
19 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur,
20 veuillez donner lecture de la déclaration solennelle.
21 LE TÉMOIN (interprétation) : Je déclare
22 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et
23 rien que la vérité.
24 TÉMOIN : TÉMOIN AD (ASSERMENTÉ)
25 INTERROGÉ PAR Me NICE (interprétation) :
Page 13008
1 Q. Témoin AD, ce sera désormais de cette façon-
2 là que vous serez nommé dans le cadre de cette procédure.
3 Je vais vous soumettre une feuille de papier. Veuillez
4 confirmer que c’est bien votre nom sans pour autant le
5 lire.
6 R. C’est bien mon nom qui est inscrit.
7 Me NICE (interprétation) : Peut-on fournir au
8 témoin une copie du résumé qui avait été préparé et
9 communiqué à la Défense il y a de cela un certain temps ?
10 Me SAYERS (interprétation) : Dans l’intervalle,
11 nous serions gré à l’Accusation de ne pas poser des
12 questions trop dirigistes au paragraphe 6 parce qu’il y a
13 peut-être un double ou triple ouï-dire, ainsi qu’aux
14 paragraphes 10, 11, 16 et 17. Merci.
15 Me NICE (interprétation) : Outre les sujets
16 évoqués dans le résumé, le témoin nous permettra de
17 produire plusieurs documents et, dans la plupart des cas,
18 il s’agira de références courtes. J’ai des jeux de
19 documents classés dans l’ordre chronologique. Je crois
20 qu’ils ont été communiqués et nous ne sommes pas loin de la
21 pause du matin, je crois que la Défense pourra ainsi
22 consulter ces documents.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Effectivement,
24 il est près de 11 h 00. Nous allons travailler jusqu’à 11
25 h 10 si ceci ne vous dérange pas puisque nous venons juste
Page 13009
1 de commencer la déposition de ce témoin.
2 Me NICE (interprétation) : Fort bien, Monsieur
3 le Président.
4 Q. Témoin AD…
5 Me NICE (interprétation) : Est-ce que la Défense
6 dispose de ces pièces ? Peut-on remettre ces jeux de
7 documents à la Défense ? Peut-on aussi prévoir un jeu pour
8 le témoin ?
9 Q. Témoin AD, parlons de votre formation, de vos
10 premières activités.
11 R. J’étais dans les forces d’artillerie de
12 Manchester et j’étais officier. J’ai quitté au moment où
13 j’ai disposé du grade de Capitaine.
14 Q. Vous avez travaillé pour l’ECMM entre 1993 et
15 1995. [expurgée]
16 [expurgée]
17 [expurgée]
18 [expurgée]
19 [expurgée]
20 R. Oui. [expurgée]
21 [expurgée]
22 [expurgée]
23 Q. Plutôt que d’en parler à la fin, je pense
24 qu’on peut dire que vous avez reçu certains honneurs pour
25 le travail que vous aviez fait en ex-Yougoslavie ?
Page 13010
1 R. Oui. J’ai obtenu la médaille de Membre de
2 l’Empire britannique.
3 Q. En 1993, est-ce que vous aviez surtout
4 affaire avec Blaskic ou Kordic ?
5 R. Surtout avec Tihomir Blaskic.
6 Q. En ce qui concerne Blaskic, qu’aurait-il dit
7 à propos de l’autorité dont il disposait en ce qui concerne
8 Zepce et Vares ?
9 R. Lorsqu’il m’a dit quelle était sa zone de
10 responsabilité, il m’a dit qu’il était le commandant de la
11 zone opérationnelle de Bosnie centrale qui incluait la
12 brigade de Vares, la brigade de Bobovac et la brigade de
13 Zepce mais aussi les brigades de Kiseljak, Vitez et
14 Travnik, même si Travnik, à ce moment-là où je l’ai
15 rencontré, était passé à Vitez pour ce qui est de la
16 brigade, bien sûr.
17 Q. Nous verrons ceci au cours de votre
18 déposition mais peut-on dire que, de façon générale, des
19 poches occupées par des Croates ont commencé à être de plus
20 en plus isolées et qu’est-il advenu des personnes qui se
21 trouvaient dans la position de Blaskic ?
22 R. L’isolement s’est fait de plus en plus grand
23 pour ce qui est de ces commandants qui ne pouvaient plus se
24 déplacer de ces poches. Blaskic ne pouvait plus aller à
25 Zepce ni à Vares, ce qui veut dire que théoriquement, sur
Page 13011
1 le papier, ces brigades se trouvaient sous son
2 commandement. Mais dans les faits, les dirigeants tant
3 politiques que militaires de ces poches ont commencé à
4 s’arroger le pouvoir lui-même et à faire preuve de plus en
5 plus d’indépendance dans les actions qu’ils entreprenaient.
6 Q. Est-ce que ceci a modifié la chaîne de
7 commandement officielle ?
8 R. Non. Quand on voit l’organigramme, ce n’est
9 pas le cas mais ceci a modifié les commandements, en tout
10 cas, la façon dont les ordres étaient appliqués. Ça se
11 faisait de façon beaucoup moins efficace.
12 Q. Je vais prendre la première phrase du
13 paragraphe 5 puisque l’autre concerne une date ultérieure.
14 Est-ce qu’il y a des informations sur la question de savoir
15 s’il y a eu des participations d’unités de la HV ?
16 R. Il y avait des rumeurs persistantes dans ce
17 sens. Les dirigeants de ma mission étaient informés à
18 Vienne, aussi les responsables…
19 Me SAYERS (interprétation) : Objection à des
20 rumeurs de ce type. Je ne pense pas que ceci contribue à
21 trouver une solution au problème dont la Chambre est
22 saisie.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Passons à
24 autre chose.
25 Me NICE (interprétation) :
Page 13012
1 Q. Quand avez-vous rencontré pour la première
2 fois et à quel endroit avez-vous rencontré le Général
3 Praljak ?
4 R. En mars ou avril. Ce fut une rencontre brève
5 sur le terrain, sur une crête en surplomb de Prozor. Je
6 l’ai rencontré plus tard.
7 Q. Nous parlerons de cela plus tard.
8 Paragraphe 6 : En juin 1993, avez-vous participé
9 à l’évacuation de blessés de l’hôpital de Travnik ?
10 R. Oui.
11 Q. Pourriez-vous nous en parler ? Est-ce qu’il
12 y a eu un accord ? Comment y est-on parvenu ?
13 R. J’avais rendu visite à l’hôpital de Travnik
14 et il fallait à tout prix évacuer les blessés les plus
15 graves. La situation était particulièrement mauvaise à
16 l’intérieur de l’hôpital. L’ECMM et les Nations unies ont
17 commencé à négocier un accord qui permettrait aux
18 musulmans, aux dirigeants musulmans et croates de nous
19 autoriser à assurer l’évacuation de l’hôpital. Nous avons
20 eu une réunion avec le Général Blaskic, des réunions avec
21 le Général Blaskic, avec le Général Merdan du 3e corps
22 d’armée. Donc, nous avions un accord théorique de leur
23 part permettant l’évacuation de l’hôpital de Travnik pour
24 emmener les blessés dans d’autres hôpitaux, les Croates
25 devant être emmenés à Nova Bila et les musulmans à Zenica.
Page 13013
1 L’exécution de cette mission s’est avérée plus
2 difficile que prévue parce que nous avions prévu le
3 transport de ces blessés. Nous avons quitté l’hôpital mais
4 nous nous sommes approchés à Dolac du premier point de
5 contrôle tenu par le HVO où nous avons été arrêtés.
6 Nous avions 14 blessés très graves et c’est à
7 dessein que j’avais sélectionné ces blessés. Ça vous
8 paraîtra peut-être un peu bizarre mais il nous fallait, me
9 semblait-il, une combinaison de personnes, de femmes,
10 d’enfants, d’hommes et nous voulions avoir aussi bien des
11 Croates que des musulmans pour mener cette opération à bien
12 et pour améliorer le sort de ces malheureux.
13 Nous avons été arrêtés par le HVO à ce point de
14 contrôle qui ne nous a pas laissés passer. J’ai commencé à
15 négocier avec eux en faisant manifestement référence à
16 l’accord que nous avions obtenu avec les dirigeants de la
17 communauté croate mais ceci n’a pas fait changer d’avis les
18 personnes qui se trouvaient à ce point de contrôle.
19 Les négociations se sont poursuivies, ont perduré
20 et j’ai fini par convaincre le commandant du HVO à Dolac de
21 prendre contact avec ses dirigeants parce qu’il m’a dit
22 qu’il ne respectait pas les ordres de Tihomir Blaskic, que
23 Blaskic n’était pas son commandant. Il a donc quitté
24 l’endroit. Il l’a quitté, il n’est pas revenu pendant très
25 longtemps.
Page 13014
1 J’ai essayé de voir si ceux qui restaient au point
2 de contrôle me permettraient de passer sans leur commandant
3 mais cela n’a pas été le cas. Ce commandant est revenu.
4 Il avait dû voir quelqu’un mais je ne sais pas qui et il a
5 dit qu’il ne serait pas possible de permettre à la totalité
6 du convoi de passer, même si moi, je serais autorisé à
7 emmener uniquement les membres croates du convoi.
8 J’ai refusé d’obtempérer. J’ai repris les
9 négociations mais la situation s’est envenimée. Des
10 menaces ont été proférées contre les personnes qui
11 m’accompagnaient et j’ai décidé de rebrousser chemin.
12 Me NICE (interprétation) : Peut-on remettre au
13 témoin la carte 2781.2 ? Désolé de ne pas avoir veillé à
14 ce que cette carte soit préparée avant le début de cette
15 déposition.
16 Q. En attendant l’arrivée de cette carte, Témoin
17 AD, dites-moi, aviez-vous la preuve de ce que certains
18 groupes exerçaient une influence particulière dans cette
19 région ou preuve des liens qu’ils pouvaient avoir ?
20 Me SAYERS (interprétation) : Je m’oppose à la
21 formulation de cette question et aussi à ce qui est dit au
22 paragraphe 6. Apparemment, il y a au moins ici du double
23 ouï-dire puisqu’on parle de personnes qui, apparemment,
24 étaient employées par le témoin. Ce n’était pas d’autres
25 moniteurs mais c’était d’autres personnes qu’il payait et
Page 13015
1 je pense que c’est un type de déposition qui est
2 particulièrement inutile. Nous nous opposons à ceci en
3 application de l’Article 89(D).
4 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Nice, vous
5 devez établir la base qui vous permettra de poser enfin
6 votre question.
7 Me NICE (interprétation) : Je vais aborder ceci
8 en deux volets, en deux étapes. Voyons d’abord si le
9 témoin peut retrouver ce point de contrôle. S’il le
10 trouve, on pourra montrer cette partie de la carte sur le
11 rétroprojecteur.
12 Q. Désolé de ne pas vous avoir donné l’occasion
13 d’examiner cette carte avant votre comparution au prétoire.
14 R. Je crois qu’il faudra voir cette partie de la
15 carte.
16 Q. Effectivement. Utilisez le pointeur.
17 R. Travnik n’est pas sur cette carte. La route
18 de Travnik à Vitez, vous la voyez [indication du témoin].
19 Il y a un carrefour où il y a une route qui part vers le
20 nord et par des voies détournées sur Zenica. C’est ce
21 qu’on appelait le point de contrôle Dolac chez nous. Juste
22 à l’ouest de cette route, c’est là que je suis arrivé au
23 point de contrôle tenu par le HVO.
24 Q. Merci. Je vous avais d’abord posé une
25 question que je vais ventiler en deux volets. Répondez par
Page 13016
1 oui ou par non. Est-ce qu’il y avait des preuves de
2 l’influence que pourraient exercer des groupes – ne les
3 nommez pas – des groupes qui fonctionnaient dans cette
4 région ?
5 Me SAYERS (interprétation) : Objection. C’est
6 sur cela que porte la question parce qu’on parle de
7 preuves. Je pense que ce n’est pas de cette façon-là qu’on
8 va préparer une question posée, le fondement d’une
9 question. Il faut dire ce que c’est, quelles étaient les
10 personnes qui étaient là, quelles étaient les sources
11 fiables qui avaient été sur place, qui avaient été
12 utilisées pour conclure qu’il y avait peut-être des preuves
13 de liens établis avec ces groupes dont nous parlons.
14 Me NICE (interprétation) : Eh bien, c’est ce que
15 je pourrais faire mais je peux le faire d’une autre façon,
16 comme le suggère Me Sayers.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Allez-y.
18 Me NICE (interprétation) :
19 Q. S’agissant de groupes qui détiendraient une
20 quelconque autorité, était-ce quelque chose que vous saviez
21 vous-même en personne ou est-ce que d’autres vous
22 l’ont dit ?
23 R. Je savais qu’il y avait des éléments ayant
24 des liens assez souples avec le HVO.
25 Q. Comment le saviez-vous ? Dites-nous comment
Page 13017
1 vous l’avez appris. Est-ce que vous l’avez appris du fait
2 de vos activités propres ou est-ce que vous avez parlé avec
3 des gens ?
4 R. Nous avons eu des groupements de personnes
5 armées, souvent très bien équipées en armes et souvent
6 portant le même uniforme, ce qui n’était pas le cas pour
7 tout le HVO, et ces personnes ont, bien sûr, attiré notre
8 attention. Nous avons essayé de savoir qui ils étaient et
9 le nom de deux groupes…
10 Q. Un instant, un instant. Ils portaient des
11 uniformes. Qu’est-ce qu’il y avait de particulier à propos
12 de ces uniformes ?
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Il y a une
14 plainte qui émane des cabines parce que vous ne ménagez pas
15 de pauses entre les questions et les réponses. Veuillez ne
16 pas oublier cela, Monsieur le Procureur, Monsieur le
17 Témoin. Tout doit être interprété dans le prétoire. Merci
18 de ralentir le débit. Poursuivez.
19 Me NICE (interprétation) : Excusez-moi.
20 Q. Ils portaient, vous dites, un uniforme
21 particulier. Quel était-il ?
22 R. Ce n’était pas tellement l’uniforme qui était
23 particulier mais le fait qu’ils portent tous le même
24 uniforme qui a attiré notre attention parce que dans
25 certaines contrées, on constatait que vous aviez un membre
Page 13018
1 du HVO qui portait un pantalon civil et une vareuse
2 militaire ou le contraire. Donc, les choses ont évolué,
3 les choses établies mais au départ, il était manifeste que
4 tout le monde ne disposait pas d’un uniforme mais il y
5 avait des groupes qui semblaient être mieux dotés en
6 équipements ou en uniformes que d’autres et là, il y avait
7 une présence d’une unité qui n’existait pas dans d’autres
8 formations du HVO. C’est pour cela que ces unités ou ces
9 personnes nous intéressaient.
10 Q. Répondez par un oui ou non. Est-ce que ces
11 groupes étaient connus sous une dénomination quelconque ?
12 R. Oui.
13 Q. Et comment avez-vous appris ces noms qu’on
14 leur avait donnés ? Ne nous dites pas lesquels ils sont.
15 R. Eh bien, nous l’avons appris en demandant aux
16 gens du coin, aussi par le biais de contacts que nous avons
17 eus avec les forces de la FORPRONU.
18 Q. Est-ce que des soldats vous ont jamais dit
19 quel était ce nom ou l’auraient utilisé devant vous ?
20 R. Non.
21 Q. Vous avez reçu des informations de diverses
22 sources. Est-ce qu’elles parlaient toutes des mêmes noms
23 pour ces groupes ?
24 R. Oui.
25 Q. Autre volet de la même question générale :
Page 13019
1 Répondez toujours par oui ou par non. Avez-vous appris
2 l’existence de liens existant entre ces groupes et telle ou
3 telle personne ?
4 R. Oui.
5 Q. Sans citer la personne, par quel moyen avez-
6 vous eu vent de ces informations ?
7 R. Eh bien, par le biais de questions posées aux
8 locaux, aux gens du coin, par des vérifications, par tous
9 les moyens qui nous permettaient d’obtenir des informations
10 par un peu la voie dérobée sur la nature de ces groupes et
11 sur l’identité de ces personnes.
12 M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) : Qui
13 étaient ces personnes du coin, ces habitants ?
14 R. C’était une question ?
15 Me NICE (interprétation) :
16 Q. Oui. Qui étaient ces personnes ?
17 R. C’était des employés que nous avions qui
18 étaient d’origines diverses. Nous avions des musulmans,
19 des Croates, des Monténégrins et d’autres, des Slovènes.
20 Q. Que faisaient ces personnes qui travaillaient
21 sous vos ordres ?
22 R. Nous avions des interprètes, des chauffeurs,
23 des personnes chargées de l’administration. Ils
24 constituaient une seule source.
25 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je pense que
Page 13020
1 c’est recevable. Je suppose qu’il n’y aura pas
2 contestation à propos du fait que c’était des groupes qui
3 fonctionnaient et qui opéraient au niveau local. Le litige
4 ne porte pas sur cela, bien sûr, mais sur la deuxième
5 partie de cet élément, n’est-ce pas ?
6 Me SAYERS (interprétation) : Tout à fait.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous acceptons
8 cette partie comme étant recevable et puis nous allons
9 procéder à la pause.
10 Me NICE (interprétation) :
11 Q. Avant de vous poser une question de détails,
12 en voici une autre. Vous avez reçu les informations de
13 différentes sources sur les personnes avec qui ces groupes
14 avaient des liens : Est-ce que là aussi il y avait une
15 cohésion, une uniformité dans ces informations ?
16 R. Oui.
17 Q. Comment s’appelait ces groupes et comment
18 s’appelaient les personnes avec qui ils avaient des liens ?
19 R. Ces groupes c’était les Jokeris et les
20 Apostolis et la personne qu’on citait le plus souvent en
21 rapport avec eux c’était Dario Kordic.
22 Q. Toujours sur ce même sujet : Vous étiez sur
23 le terrain à ce moment-là. Hormis Blaskic et Kordic, est-
24 ce que vous étiez au courant de l’existence d’autres
25 dirigeants locaux, dirigeants à qui pouvait s’adresser
Page 13021
1 n’importe qui, n’importe quel commandant comme Blaskic
2 notamment, pour recevoir des instructions ?
3 R. Non, pas en Bosnie centrale parce que là, il
4 y avait une chaîne de commandement qui avait été installée.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Pause d’une
6 demi-heure. Nous reprendrons à midi moins le quart.
7 --- Suspension de l’audience à 11 h 15
8 --- Reprise de l’audience à 11 h 50
9 Me NICE (interprétation) :
10 Q. Paragraphe 7 du résumé de la déposition. Il
11 pourrait être bon que l’on remette au témoin la pièce 1031
12 qui a déjà été versée au dossier et qui n’est pas dans la
13 pile de documents qui se trouvent sur la table – 1031.
14 Monsieur, est-il exact que le 8 ou le 9 juin, vous
15 vous êtes rendu dans un secteur situé au nord de Guca
16 Gora ?
17 R. C’est exact.
18 Q. Nous savons que Monsieur Morsink a élaboré un
19 rapport en rapport avec cette visite. Les Juges ont déjà
20 examiné ce rapport. Monsieur, aviez-vous un point de vue à
21 ce moment-là au sujet de la réalité ? Considériez-vous
22 qu’elle était minimisée ou surestimée s’agissant des
23 atrocités imputées aux Croates de Bosnie ?
24 R. La direction des Croates de Bosnie avait
25 laissé entendre qu’il y avait eu des actes de nettoyage
Page 13022
1 ethnique, des atrocités qui avaient été commises et que des
2 sites culturels avaient été violés. Nous avions des
3 difficultés à accéder à ce secteur mais pour essayer de
4 déterminer la validité de ces allégations, nous avons
5 entamé des négociations avec l’armée de Bosnie-Herzégovine
6 et j’ai finalement réussi à traverser les villages situés
7 autour de Brajkovici et de Guca Gora, entre Guca Gora et
8 Zenica.
9 Nous sommes allés dans l’église et nous avons
10 découvert qu’elle n’avait subi aucune destruction. Aucun
11 lieu de culte n’avait été violé. Il n’y avait pas de
12 Croates à cet endroit. Visiblement, tout le monde avait
13 quitté le village mais des destructions étaient visibles
14 dans la mesure où certains lieux avaient été pillés sans
15 toutefois que les maisons soient détruites. Notre
16 évaluation globale lors de cette visite et de visites que
17 nous avons rendues dans d’autres villages dans la région de
18 Dolac et à Guca Gora c’est que les allégations au sujet des
19 destructions étaient exagérées mais il y avait eu de
20 nombreux déplacements de population.
21 Q. À présent, si les Juges ont sous les yeux la
22 pièce 1031 et si le témoin a ce texte sous les yeux
23 également, cela lui rappellera sans doute le résumé élaboré
24 par [expurgée] en page 1.
25 Si nous prenons le premier paragraphe de la page
Page 13023
1 2, nous voyons, Témoin AD, n’est-ce pas, que vous faites
2 référence en particulier au village de Ovcarevo, cinq
3 lignes à partir du bas dans ce paragraphe ?
4 R. Oui, en effet. Je l’ai trouvé, oui.
5 Q. Vous y dites que ce village a été déserté
6 après avoir été pillé par l’Armija et vous poursuivez en
7 disant que la FORPRONU a fait savoir que le village de
8 Dolac était déserté, qu’il y avait encore des maisons en
9 feu et que plus de 100 maisons avaient été incendiées dans
10 ce village ?
11 R. C’est exact.
12 Q. À la troisième et dernière page de ce
13 document, nous voyons le titre « Commentaires » et il y est
14 stipulé que : « Le déplacement des Croates civils »… je
15 prie les interprètes de m’excuser. Ce document n’est pas
16 sur le rétroprojecteur et il ne peut pas l’être en raison
17 des mesures de protection demandées par le témoin. Donc,
18 je vais lire lentement ces quatre lignes.
19 Je cite : « Le déplacement des civils croates
20 vers la zone de Vitez, puis vers la zone de Busovaca et de
21 Novi Travnik, est important et significatif. Les motifs de
22 ce déplacement sont moins clairs mais semblent avoir un
23 rapport avec le fait que les habitants pensaient que des
24 Mujahedins avaient commis des atrocités. Après enquête,
25 aucun élément de preuve n’a été trouvé pour corroborer ce
Page 13024
1 fait. » Fin de citation.
2 Monsieur, estimiez-vous que certains villages
3 croates avaient été évacués en raison des allégations liées
4 aux atrocités des Mujahedins ?
5 R. Oui, notamment dans le village de Ovcarevo.
6 Il était manifeste que les déplacements des populations
7 croates avaient été organisés. Dans le cas de Ovcarevo,
8 les Croates de Bosnie se sont dirigés vers le nord, vers
9 les lignes serbes, ce qui nous a intéressé car cela
10 démontrait les contacts, la confiance et les relations qui
11 existaient avec les Serbes. Dans d’autres secteurs,
12 notamment dans les villages dont j’ai déjà parlé, ceux qui
13 étaient situés entre Guca Gora et Zenica, il est apparu que
14 les habitants s’étaient déplacés avant les combats, ce qui
15 est tout à fait compréhensible, mais nous pensons que dans
16 certains cas, on a dit à la population de partir et la
17 raison pour laquelle on leur a dit cela c’est qu’il était
18 souvent répété que les Mujahedins allaient commettre des
19 atrocités. Donc, la population devait partir avant.
20 Q. Paragraphe 8. Compte tenu du grand nombre de
21 documents qui ont déjà été présentés, je ne traiterai que
22 d’un point en rapport avec ce paragraphe.
23 Lors de l’incident lié au convoi de Tuzla le 11
24 juin, par qui le problème a-t-il été résolu du côté
25 croate ?
Page 13025
1 R. Il a été résolu grâce à des négociations
2 directes avec Dario Kordic. Tihomir Blaskic était impliqué
3 également car c’est lui qui avait donné les premières
4 garanties pour assurer la liberté de circulation mais
5 celles-ci n’ont pas été respectées. Donc, Jean-Pierre
6 Thebault a entamé des négociations directes avec Dario
7 Kordic.
8 Q. Merci. Paragraphe 9. Je vous renvoie à la
9 première pièce qui se trouve dans la pile que vous avez
10 devant vous. Ce document deviendra la pièce à conviction
11 1076.1. Il s’agit d’un rapport spécial au sujet de Travnik
12 en date du 19 juin, élaboré par vous-même et une autre
13 personne.
14 Nous voyons à la deuxième page, au paragraphe 4 de
15 ce rapport, un passage où vous dites que Guca Gora a établi
16 un modèle de comportement qui devait se retrouver dans
17 toutes les allégations à venir. Premier aspect de ce
18 modèle : un nettoyage ethnique à grande échelle ; deuxième
19 aspect : des destructions massives ; troisième aspect : des
20 atrocités généralisées.
21 Vous poursuivez en parlant de l’enquête et des
22 déplacements de population. Avez-vous d’autres
23 commentaires à formuler à ce sujet ?
24 R. J’ai simplement déclaré que l’enquête menée
25 au sujet de Guca Gora a également permis d’établir un
Page 13026
1 modèle de comportement, à savoir que la population part,
2 pour commencer, et ensuite, on constate que les forces
3 croates ont ordonné l’évacuation des villages avant
4 l’éclatement des combats.
5 Je dis également que les dommages subis par les
6 maisons sont réduits au minimum et qu’à ce moment-là, nous
7 n’avons qu’une preuve d’atrocités, et je dis donc que les
8 articles de presse publiés à ce moment-là semblent
9 grossièrement exagérés.
10 Q. La pièce suivante qui, je crois, se trouve
11 dans la pile est datée du 17 août. Vous l’avez sous les
12 yeux ?
13 R. Oui.
14 Q. Au paragraphe 2, nous trouvons un passage qui
15 reprend ce que vous avez déjà dit. C’est un résumé des
16 opérations quotidiennes établies par vous et plutôt que de
17 lire ce paragraphe, je vous prierais, à l’intention des
18 Juges, d’en résumer le contenu en disant qui était le
19 Général Praljak.
20 R. J’ai rencontré le Général Praljak lors d’une
21 longue réunion qui a duré deux heures. C’est ce qui est
22 écrit ici. Nous avons discuté de la situation et de sa
23 position dans la zone où il opérait. Le Général Praljak
24 avait servi dans les forces de l’armée de Croatie à Vukovar
25 et je crois que son passé n’était pas directement lié à des
Page 13027
1 actions militaires mais il était réputé comme étant un
2 soldat compétent. À ce moment-là, il commandait les forces
3 situées dans le secteur de Prozor. Il prétendait avoir eu
4 des responsabilités beaucoup plus importantes mais s’être
5 rendu compte que sa présence était nécessaire à cet
6 endroit, c’est-à-dire à l’endroit où les actions se
7 déroulaient, dans la région de Prozor-Gornji Vakuf, sur ce
8 front-là.
9 Je l’ai interrogé au sujet de son passé, de son
10 appartenance à l’armée de la République de Croatie, et je
11 l’ai également interrogé au sujet des allégations que nous
12 entendions fréquemment au sujet de son implication dans
13 l’armée de Croatie. Le Général Praljak a nié tout cela.
14 Il a nié avoir fait partie des forces de l’armée de Croatie
15 opérant en Bosnie-Herzégovine mais a déclaré que des hommes
16 comme lui, originaires de Bosnie-Herzégovine, étaient
17 revenus en Bosnie-Herzégovine considérant cela comme leur
18 devoir de combattre pour la cause croate.
19 Q. Dans le passage de votre rapport où nous
20 trouvons une référence générale quant au fait que l’armée
21 de Croatie ferait tout pour vaincre les musulmans, y
22 compris bloquer le passage de l’aide humanitaire pendant
23 l’hiver et interrompre l’alimentation en eau, il y a un peu
24 plus bas une référence quant au fait que si ces vallées ne
25 pouvaient pas être gagnées par voie de négociation, une
Page 13028
1 alliance militaire avec les Serbes serait constituée afin
2 de s’en emparer par la force. Ces citations sont-elles
3 exactes ?
4 R. C’est l’interprétation que j’avais des
5 événements. Je n’ai pas mis de guillemets mais il était
6 clair pour moi que c’était sa position.
7 Q. Je n’ai pas encore demandé que toutes ces
8 pièces à conviction soient conservées sous scellé. Je vous
9 prie de m’en excuser mais je le demande maintenant au
10 greffe.
11 La pièce suivante, la pièce 1176.2. La précédente
12 était la pièce 1172.2. Alors, Témoin AD, je pense que
13 cette pièce, la 1176.2, vous l’avez vue pour la dernière
14 fois hier et vous ne l’aviez pas vue avant ?
15 R. C’est exact.
16 Q. Il y a un autre document que nous avons
17 recherché sans succès. Il y est fait référence dans le
18 résumé de la déposition du témoin et je crois savoir qu’une
19 partie de la pièce 1176 correspond au souvenir que vous
20 avez de cet autre document ?
21 R. J’ai eu une rencontre avec Dario Kordic à la
22 fin du mois d’août. Cette pièce que nous avons sous les
23 yeux porte la date du 21 août. Donc, la rencontre s’est
24 déroulée avant le document dont j’ai le souvenir mais il a
25 été impossible de retrouver le document précédent. En tout
Page 13029
1 cas, il y avait eu un pilonnage à Zenica et c’était la
2 cause de notre rencontre.
3 Q. Mais parlez-vous de la pièce 1176 ?
4 J’aimerais que vous parliez d’abord de la pièce 1176 et
5 nous parlerons de l’autre rapport en temps utile.
6 R. S’agissant de la pièce 1176, il apparaît
7 clairement à la lecture de ce que j’ai écrit que j’ai eu
8 une rencontre d’ordre général avec lui pour discuter de la
9 structure du commandement, des niveaux d’ancienneté de tel
10 ou tel homme et que je voulais vérifier un certain nombre
11 d’informations avec ce que j’avais entendu dans les
12 rencontres avec le Général Praljak.
13 À la fin de cette rencontre, j’ai estimé que Dario
14 Kordic avait perdu le contact avec la réalité. Mon
15 sentiment au cours de cette réunion est qu’il ne se
16 comportait pas comme aurait dû le faire un responsable
17 politique de son importance. J’ai acquis le sentiment
18 qu’il semblait relativement isolé, ce qui était peut-être
19 dû en partie à l’environnement dans lequel cette réunion a
20 été organisée.
21 Je me suis rendu dans la maison où se trouvait
22 Monsieur Kordic mais j’ai acquis l’impression que ce que je
23 voyais n’avait pas grand rapport avec la réalité sur le
24 terrain et que lui était davantage influencé par ce que
25 j’appellerais de la propagande.
Page 13030
1 Q. À la lecture de votre rapport du 21 août,
2 nous voyons qu’il a parlé du Général Merdan comme du
3 principal criminel de guerre ?
4 R. C’est exact.
5 Q. Il a évalué les capacités du HVO d’une façon
6 que vous avez considérée comme non-réaliste ?
7 R. Oui. C’est ce qui m’a amené à penser, comme
8 je viens de le dire, qu’il n’avait plus de rapport avec la
9 réalité car au cours de cette réunion, il a estimé que le
10 HVO allait regagner le terrain perdu et effectué une
11 jonction entre l’enclave de Kiseljak, l’enclave de Vares et
12 l’enclave de Busovaca, ce qui était très peu réaliste car à
13 ce moment-là, le HVO était en position défensive et n’avait
14 pas pris d’initiative offensive, ou en tout cas, n’en
15 manifestait pas la capacité.
16 Donc, une telle évaluation m’est apparue comme
17 étant celle de quelqu’un qui n’avait guère de rapport avec
18 la réalité militaire mais j’ai admis qu’il avait une
19 position à exprimer, une déclaration à faire. Cela étant,
20 j’ai continué à considérer que ses propos n’avaient guère
21 de rapport avec la réalité sur le terrain à ce moment-là.
22 Q. Il vous a dit que Boban, Praljak, Petkovic,
23 Tole, Martic, étaient la hiérarchie, n’est-ce pas ?
24 R. Oui, c’est exact. L’arrivée du Général
25 Praljak sur ce territoire avait posé le problème de son
Page 13031
1 lien de supériorité ou d’infériorité par rapport au Général
2 Petkovic, qui était le commandant du HVO. Le Général
3 Petkovic n’avait pas eu de très bons résultats, comme on
4 peut le voir, à l’extérieur de la Bosnie centrale. Il
5 avait perdu des territoires, perdu du terrain, et le
6 Général Praljak apparaissait comme quelqu’un qui était
7 destiné à le remplacer.
8 Donc, il était important d’établir la hiérarchie
9 et, comme je le dis dans mon rapport, Dario Kordic a
10 déclaré que la ligne hiérarchique allait de Kordic à Boban
11 puis à Praljak, Petkovic, Tole et Martic. Tole était un
12 commandant à Travnik, je crois, mais il se peut que je me
13 trompe.
14 Q. Avant que nous passions à un autre document,
15 il importe que nous examinions le paragraphe 8 que j’ai
16 déjà annoncé lorsque j’ai parlé de l’isolement de plus en
17 plus grand des enclaves. En effet, dans ce paragraphe 8,
18 vous formulez un certain nombre de commentaires que nous
19 n’allons pas examiner dans le détail mais j’appelle
20 toutefois votre attention sur l’ensemble de ce paragraphe.
21 S’agissant du sentiment d’isolement éprouvé par le
22 commandement à Vares, vous dites que ces hommes étaient
23 d’abord sous le commandement de Blaskic plus que sous celui
24 de qui que ce soit d’autre ?
25 R. Oui, c’est exact. C’est ce qui avait été
Page 13032
1 dit. L’isolement des enclaves impliquait que les
2 commandants n’obtenaient pas beaucoup d’informations quant
3 à ce qui se passait dans les enclaves. Ils en recevaient
4 quelques-unes. Il existe des preuves qui indiquent qu’ils
5 avaient des liens avec ces enclaves mais ils n’avaient pas
6 la possibilité de s’y rendre physiquement et c’est la
7 raison pour laquelle, puisque l’organisation que je
8 représentais pouvait accéder assez facilement aux enclaves,
9 n’étant pas une organisation chargée de fournir des
10 informations mais simplement chargée d’apporter l’aide
11 qu’elle pouvait aux populations, c’est la raison pour
12 laquelle il leur importait de me faire savoir quelle était
13 la hiérarchie qui les reliait.
14 Nous avons souvent donné des informations pour
15 avoir l’autorisation d’accéder à la région. C’est ainsi
16 que j’ai rencontré des gens comme Dario Kordic et le
17 Colonel Blaskic qui avaient très envie d’avoir notre avis
18 sur la situation dans ces enclaves.
19 Q. Nous passons rapidement maintenant à la pièce
20 suivante, la pièce 1178.1, datée du 23 août. Prenons
21 d’abord le paragraphe 8 intitulé : « Évaluation ». Nous y
22 trouvons vos commentaires quant au fait que l’absence d’une
23 carte publique, indiquant publiquement quelles étaient les
24 propositions à Genève, est également une farce. Cela nous
25 donne une idée du contexte et vous dites ensuite que les
Page 13033
1 détails disponibles permettent de penser que Vares et Zepce
2 sont tombés entre les mains des musulmans.
3 Nous prenons ensuite le paragraphe 2 intitulé :
4 « Activités politiques » où nous voyons une référence à
5 quelqu’un qui a rencontré Pejcinovic. Était-ce vous ?
6 R. Non, mais un membre de mon équipe.
7 Q. Et il vous a rendu compte ?
8 R. Oui. J’étais dans mon bureau. Ils sont
9 venus me rendre compte.
10 Q. Nous voyons qu’à ce moment, des protestations
11 intenses étaient formulées quant à l’avenir de Vares,
12 décidé à Genève.
13 R. C’est exact.
14 Q. Pièce suivante, 1185.1… 1185.3 (se reprend
15 l’interprète) en date du 28 août. C’est un rapport élaboré
16 par vous et en bas de la première page, il est question
17 d’une rencontre dans ce texte à laquelle vous avez assisté.
18 R. Oui. Le chef adjoint du centre régional
19 venait d’être nommé et, donc, nous voulions le présenter à
20 certaines des personnalités les plus importantes de la
21 région. J’ai parlé au Colonel Blaskic. Je lui ai demandé
22 quel était son point de vue sur les propositions de Genève
23 et, comme cela a été dit dans le document 1178.1, ce plan
24 de Genève suscitait la plus grande confusion sur le
25 terrain.
Page 13034
1 Lorsque j’ai posé la question au Colonel Blaskic,
2 il a dit que Dario Kordic était celui qui s’exprimait
3 lorsqu’il était question d’idées, alors que lui-même ne
4 parlait que de la réalité concrète. J’ai ensuite formulé
5 un commentaire en disant que Dario Kordic, à mon avis,
6 était la personnalité politique la plus importante du HDZ
7 en Bosnie centrale et qu’il était considéré comme
8 contrôlant le HVO depuis longtemps. Je lui ai dit que son
9 influence sur Blaskic était considérée comme significative,
10 sinon complète.
11 Puis-je ajouter quelque chose ?
12 Q. Sur le même sujet ? Dans ce cas, oui.
13 R. C’est sur le même sujet mais il s’agit du
14 document 1178, la visite des membres de mon équipe à Vares.
15 Ces membres de mon équipe ont reçu une lettre du maire de
16 Vares concernant les propositions de Genève et la
17 proposition que Vares tombe sous le contrôle musulman.
18 Cette lettre a été donnée à l’ECMM. La lettre était
19 adressée à Monsieur Tudjman, Monsieur Boban et Monsieur
20 Kordic.
21 Q. Merci. Nous en avons parlé hier,
22 effectivement. Je suis désolé de ne pas en avoir parlé ici
23 tout à l’heure.
24 La pièce suivante est en date du 30 août, je
25 pense… en date du 31 ? Oui, il s’agit du 31 août et de la
Page 13035
1 pièce 1178.2, deuxième page, paragraphe 6, alinéa qui
2 commence par V1 ou Victor 1.
3 R. Oui. Victor 1 était mon équipe qui
4 fonctionnait dans la région. Dans la région de Vitez,
5 Travnik, Busovaca, les membres de cette équipe essayaient
6 de parvenir à Kruscica, village proche de Vitez, village
7 occupé par des musulmans. C’était un village important
8 parce que tout le ravitaillement de guerre acheminé vers
9 Zenica et vers la région venait de Kruscica.
10 Nous avons souvent essayé de parvenir à ce
11 village. Nous y sommes quelquefois parvenus mais nous
12 n’avons pas pu franchir le point de contrôle du HVO qui
13 menait au village et nous avons parlé au commandant du HVO
14 à Vitez à ce propos, l’officier de liaison dont le nom ne
15 figure pas dans ce paragraphe mais il s’agissait de Darko
16 Gelic. Cet officier de liaison nous a dit que le Colonel
17 Blaskic rencontrait des brigades avec le Commandant Mario
18 Cerkez, Commandant de la brigade de Vitez qui ne répondait
19 pas, qui n’obéissait pas plus exactement, à ses ordres.
20 Q. Passons au paragraphe 11 du résumé. Nous
21 allons aborder un événement qui n’a pas fait l’objet d’un
22 rapport. En tout cas, nous n’avons pas de rapport à ce
23 propos même si nous avons essayé d’en obtenir une copie.
24 Il se peut que ce rapport date du 3 septembre. Est-ce que
25 vous vous souvenez de ce rapport et ce souvenir que vous en
Page 13036
1 avez cadre-t-il avec le contenu d’un rapport précédent ?
2 R. C’est exact. À cette occasion-ci, à
3 l’occasion de cette réunion, ceci s’est produit après un
4 incident, le pilonnage de Zenica. Mon organisation était
5 basée à Zenica. Dans l’avant-soirée, je ne me souviens
6 plus de quel jour, un obus est tombé à l’extérieur d’un
7 café, causant des victimes. Nous avons décidé de nous
8 rendre sur place afin de voir s’il était possible de
9 recueillir des éléments de preuve sur la nature et
10 l’origine des morts.
11 Manifestement, il y avait eu explosion mais on
12 avait demandé que quiconque disposant d’expérience en
13 artillerie se rende sur les lieux afin de procéder à une
14 analyse et de voir s’il était possible d’analyser tel ou
15 tel cratère causé par les explosions. La personne qui
16 s’est chargée de cette enquête était belge, je m’en
17 souviens. C’était un observateur belge et il était
18 officier d’artillerie.
19 Cet homme a été en mesure de détecter deux éclats
20 d’obus et quelquefois, il est possible de déterminer
21 l’angle de la trajectoire par la façon dont l’obus touche
22 le sol, c’est-à-dire qu’il y a, à ce moment-là, des lignes
23 qui sont creusées et il a été ainsi possible de déterminer
24 la trajectoire, l’origine. Il a aussi trouvé des douilles,
25 ce qui lui a permis de déterminer le calibre.
Page 13037
1 Fort de ces deux éléments, il a été en mesure de
2 déterminer d’où venait l’obus et en traçant une trajectoire
3 donnant une idée de la portée de l’arme qui avait décoché
4 ce tir, nous avons eu des informations sur l’origine
5 possible. Cet obus pouvait venir d’une région contrôlée
6 par les forces croates et nous avons, en fait, été capables
7 d’être un peu plus précis s’agissant du village qui est à
8 proximité de cette arme. Je pense qu’il s’agissait du
9 village qui se trouve au nord de Busovaca et qui s’appelle
10 Granice.
11 J’ai saisi cette occasion pour poser des questions
12 à Monsieur Kordic, pourquoi il pilonnait Zenica. Il a nié
13 toute action de ce genre. Je me souviens fort bien avoir
14 un certain avantage sur lui puisque nous, nous détenions
15 ces informations et que j’avais aussi une expérience en
16 tant qu’officier d’artillerie.
17 J’ai discuté avec lui. Je lui ai expliqué
18 pourquoi, pour nous, il était évident qu’en fait, les tirs
19 venaient d’un territoire croate et je lui ai même donné le
20 nom du village, ce sur quoi il a rétorqué qu’il y a une
21 équipe d’artillerie frustrée par la situation difficile
22 dans laquelle se trouvaient les Croates, à ce moment-là,
23 qui avait décidé, de son propre chef, de tirer mais
24 qu’aucun ordre n’avait été donné dans ce sens. Ce fut là
25 un des sujets de discussion de la réunion.
Page 13038
1 Je me souviens d’autres choses si ceci vous
2 intéresse.
3 Q. Nous n’avons pas encore le texte mais
4 continuez.
5 R. Ceci porte sur l’alimentation en eau, là
6 aussi pour le village de Kruscica. Au moment où les
7 Croates et les musulmans le voulaient, ils coupaient
8 l’alimentation et ceci a eu des effets très délétères sur
9 la population croate de Vitez. Nous avions des pourparlers
10 incessants qui réussissaient souvent après un ou deux jours
11 de négociations mais le problème se reposait sitôt après.
12 Monsieur Kordic s’inquiétait fort de cette
13 situation. Je me suis mis à l’écoute de ses préoccupations
14 que je comprenais. Je lui ai expliqué que nous avions
15 essayé de trouver une solution au problème mais qu’il
16 fallait pour ça pouvoir accéder au village. J’ai demandé à
17 Monsieur Kordic qu’il nous soutienne afin que nous
18 puissions entrer dans ce village, afin qu’il nous aide
19 plutôt que de faire obstruction.
20 Je crois que là, après quelques jours, là aussi,
21 nous avons réussi à rétablir l’alimentation mais il est
22 ironique de constater que c’était la même source
23 d’alimentation que celle qui valait pour Zenica, grosse
24 ville musulmane. Les musulmans de Kruscica ne voulaient
25 sans doute pas trop compromettre leurs congénères de Zenica
Page 13039
1 mais il se produisait souvent que les deux parties au
2 conflit coupent l’eau.
3 Q. Avant de quitter ce document qui n’a toujours
4 pas fait surface, quel autre souvenir avez-vous qui
5 cadrerait avec un rapport précédent ?
6 R. Eh bien, il y a ce sentiment d’isolement, ce
7 sentiment que Monsieur Kordic, en fait, avait un scénario
8 qu’il lisait mais qui ne correspondait pas à la réalité du
9 terrain.
10 Q. Pièce suivante : Il s’agit de la pièce 1245
11 en date du 12 octobre. Je crois que l’examen de cette
12 pièce pourra être très bref. Page 2, me semble-t-il, on
13 fournit quelques références. Je pense que vous aurez peut-
14 être un commentaire s’agissant du paragraphe 8. Ce n’est
15 pas votre rapport ?
16 R. Non. Ce n’est pas un rapport que j’ai
17 élaboré mais qu’une de mes équipes a rédigé et il concerne
18 une route qui avait été plastiquée par le HVO, cette route
19 allant de Visoko à Kiseljak. Ceci s’était produit à
20 proximité du quartier général de la FORPRONU et a compromis
21 l’accès de tous les membres de la FORPRONU à la région et
22 nous tenions absolument à savoir pourquoi on avait placé
23 des explosifs sur la route et cette route devait aussi être
24 réparée.
25 Le Colonel Blaskic avait donné ordre que soit
Page 13040
1 réparée la route mais, manifestement, cet ordre a été
2 ignoré. Il a été ignoré par le Commandant de brigade Ivica
3 Rajic. Vous voyez ici le commentaire de l’équipe 3, V3 :
4 « Le Colonel Blaskic aurait donné directement ordre à Rajic
5 d’assurer la réfection de la route afin qu’elle soit
6 ouverte à la circulation ». Il poursuit en disant que :
7 « Il ne devrait pas y avoir de lien à établir entre cet
8 incident et l’incident d’évacuation de l’hôpital. »
9 Rajic n’a pas obéi à cet ordre et il y a eu
10 plusieurs jours de pourparlers qui furent nécessaires afin
11 de savoir à quel moment cette route serait réparée et on
12 m’a dit à plusieurs reprises que Rajic ne suivait pas les
13 ordres de Blaskic.
14 Q. Pièce suivante : Il s’agit de la pièce 1246.
15 De qui émane ce rapport ?
16 R. C’est un rapport de contexte établi par
17 l’équipe 3. C’est l’équipe qui s’occupait de la zone de
18 Kiseljak et aussi, à un moment donné, elle s’est occupée de
19 Vares.
20 Q. Pour insérer ceci dans la chronologie des
21 événements, nous sommes au 13 octobre. Vers le milieu de
22 la première page, est-ce qu’on analyse ce qui s’est passé
23 au village de Rotilj ?
24 R. Oui. On y parle de la situation qui prévaut
25 s’agissant des musulmans qui y demeuraient. On y dit que
Page 13041
1 pratiquement tous les musulmans qui restaient dans ce
2 village… on parle de 800 personnes qui avaient été emmenées
3 plutôt dans le village de Rotilj où elles étaient, à toutes
4 fins utiles, retenues à titre d’otages en vue d’un échange
5 futur et on disait que la situation était très mauvaise
6 pour les musulmans, notamment aussi dans le village de
7 Palez, que le nettoyage ethnique se poursuivait et que les
8 musulmans n’étaient pas en sécurité dans la région.
9 Q. Pièce suivante : 1284.2 en date du 3
10 novembre. Je crois que c’est le premier d’une série de
11 documents parlant notamment de la position occupée par
12 Kordic. Est-ce bien exact ?
13 R. Oui, tout à fait.
14 Q. Ou, disons, de la situation qu’il commençait
15 à occuper ?
16 R. Oui. À ce moment-là, je ne suis plus Chef du
17 Centre de Coordination de Travnik. Je suis devenu Chef de
18 la Coordination dans la région de Mostar et je couvrais, à
19 ce moment-là, une région allant jusqu’à Tomislavgrad,
20 Jablanica, et puis ce qui m’intéressait c’était l’évolution
21 de la République croate de Herceg-Bosna, de la façon dont
22 la Communauté croate de Herceg-Bosna s’était transformée en
23 République. Nous tenions vivement à établir la hiérarchie
24 qui prévalait pour savoir qui détenait les positions de
25 pouvoir.
Page 13042
1 À l’occasion de cette réunion-ci, j’ai rencontré
2 Ivan Bender avec deux de mes équipes. C’était le Président
3 du Neum qui se trouve sur la côte dalmate et il m’a donné
4 une idée des positions-clés. Il y avait Mate Boban comme
5 Président et il m’a dit à l’époque qu’un des Vice-
6 présidents était Dario Kordic.
7 Par la suite, apparemment, il y a eu certains
8 doutes sur la position exacte occupée dans cette nouvelle
9 République par Dario Kordic et nous avons mené une enquête
10 – la Bosnie centrale l’a fait aussi – pour voir si Monsieur
11 Kordic avait ou non les faveurs des autorités.
12 Q. Parlons du document suivant, le 1289.1.
13 C’est un rapport consacré à la République croate de Herceg-
14 Bosna en date du 8 novembre 1993. On y trouve les
15 fonctions officielles. On voit Mate Boban, Dario Kordic,
16 Ignac Kostroman. Est-ce exact ?
17 R. Oui.
18 Q. Là aussi, pour essayer de reconstituer la
19 chronologie, avec toutes mes excuses pour ne pas vous avoir
20 signifié ces documents plus tôt qu’hier soir, je crois
21 qu’on peut examiner maintenant le numéro 13 du résumé.
22 Quand s’est produite l’attaque contre Mostar ?
23 R. Je pense que ça s’est produit le 9 novembre.
24 Q. Vous avez émis un avis sur la nature de cette
25 attaque ?
Page 13043
1 R. Oui. Nous avions affaire avec Mostar est et
2 Mostar ouest. Mostar est, bien sûr, c’était les autorités
3 musulmanes et à l’occasion d’une visite, nous avions été
4 avertis du fait qu’une attaque était dirigée contre le
5 Stari Most, le vieux pont de Mostar qui était un lieu
6 protégé par les Nations unies.
7 Pour obtenir une source d’information, je me suis
8 adressé à la hiérarchie militaire de Mostar ouest pour leur
9 demander ce qu’il en était et ils nous avaient dit qu’il y
10 avait une équipe de chars renégate qui avaient été
11 responsables de cette fête. Bien sûr, tout ceci était
12 surveillé par la communauté internationale, cette équipe
13 dissidente ayant été apparemment l’auteur de cet acte.
14 Quelques jours plus tard, le pont a été détruit et
15 là, en guise d’explication, il m’a été dit que c’était là
16 aussi une équipe dissidente mais la réponse était peu
17 crédible car nous avions assisté sur plusieurs jours à
18 cette attaque menée contre le pont et si ça avait été
19 vraiment des soldats dissidents, je suppose que la
20 hiérarchie aurait pu enrayer toute action de ce genre, ce
21 qu’ils n’ont pas fait, et le pont a été finalement détruit.
22 Tout ceci, je pense, a été enregistré sur vidéo.
23 Q. Revenons à la chronologie des événements
24 telle que nous la montrent les documents. Nous avons
25 ensuite le document 1306.1. C’est un rapport en date du 16
Page 13044
1 novembre 1993. Au bas de la première page, on voit quelle
2 était votre interprétation des faits, à savoir que Kordic
3 et Valenta ne détenaient plus des fonctions mais étaient
4 des délégués.
5 R. Oui. Monsieur Slobodan Lovrenovic, qui était
6 le conseiller en matière de presse de Mate Boban, m’avait
7 dit que Valenta et Kordic, même s’ils semblaient détenir
8 des positions d’autorité dans d’autres réunions, ne les
9 occupaient plus mais restaient des délégués.
10 Quelles étaient leurs fonctions précises, ceci
11 nous intéressait, bien sûr, nous à Mostar mais nous
12 n’étions pas les seuls. Il y avait l’équipe qui restait
13 toujours en fonction en Bosnie centrale et j’ai dit qu’il
14 fallait faire des références croisées pour savoir quels
15 étaient les rapports de force entre Blaskic, Valenta et
16 Kordic. Il fallait faire une telle analyse pour savoir
17 comment se présentaient les rapports de force.
18 Q. Ceci nous amène à la pièce 1311.1 qui date du
19 18 novembre. Le sujet est quelque peu différent.
20 Abordons-le à la page 2 : « Évaluation des hélicoptères ».
21 R. Oui. La question des déplacements
22 d’hélicoptères nous préoccupait beaucoup puisque nous
23 étions censés appliquer cette zone d’interdiction aérienne.
24 Il y avait eu des accords selon lesquels il fallait essayer
25 d’assurer l’évacuation des Croates de l’hôpital de Nova
Page 13045
1 Bila, qu’il fallait assurer une coordination entre cela
2 avec l’évacuation des musulmans blessés à Mostar est.
3 Les négociations étaient ardues mais elles ont
4 débouché sur un accord selon lequel deux hélicoptères
5 appartenant aux forces musulmanes allaient se déplacer vers
6 Medjugorje et moi, je me trouvais à l’hôpital de Mostar
7 est. Nous avons réussi à transporter les blessés dans les
8 ambulances et c’est à ce moment-là que nous avons appris de
9 nos observateurs de Medjugorje qu’il se produisait un
10 incident près de la piste d’atterrissage. Des femmes et
11 des enfants s’étaient rassemblés auprès des hélicoptères
12 qui avaient déjà atterri et nous avons reçu des
13 informations selon lesquelles les hélicoptères ne seraient
14 pas autorisés à quitter la région. Nous avons donc annulé
15 le programme d’évacuation pour cette journée-là. Les
16 blessés ont été replacés à l’hôpital.
17 Q. Est-ce que c’est uniquement dans cette ville
18 qu’on a eu ce phénomène de femmes et d’enfants qui se
19 rassemblaient ?
20 R. Ça s’est produit plus d’une fois et ceci
21 était vrai des deux communautés, musulmane et croate. À
22 chaque fois que c’était nécessaire afin de mettre en
23 exergue un problème particulier, de faire valoir un grief
24 précis, on utilisait souvent les femmes et les enfants soit
25 pour empêcher le passage de l’aide ou pour empêcher tout
Page 13046
1 accès et ceci nous a beaucoup compliqué la vie, à nous,
2 organisations internationales, parce que si vous avez
3 affaire à des femmes ou des enfants, la chose est beaucoup
4 plus sensible, tout le monde est alerté. Il était
5 important de savoir ou de veiller, plutôt, à bien réagir à
6 la situation mais, effectivement, dans ce cas-ci, des
7 femmes et des enfants ont été utilisés de façon délibérée.
8 Q. Vous rappelez dans votre évaluation qu’en
9 empêchant des hélicoptères d’atterrir, ils avaient, en
10 fait, immobilisé pratiquement 50 pour cent des forces.
11 R. Effectivement. On se demandait pourquoi ils
12 ne voulaient pas l’évacuation de cet hôpital, pourquoi les
13 Croates étaient intervenus pour empêcher une telle
14 opération. Il y avait une explication simple pour un
15 militaire. C’est qu’une action rapide avait permis à
16 pratiquement 50 pour cent des hélicoptères appartenant à
17 l’armée de Bosnie-Herzégovine d’être neutralisés. C’est
18 simplement un commentaire que nous fournissons. Il se peut
19 qu’il n’y ait pas eu une motivation particulière.
20 Q. Je vais revenir plus tard à la question des
21 hélicoptères. Nous n’avons plus que trois ou quatre
22 documents à examiner, trois plus exactement.
23 Nous avons d’abord le 1330 qui concerne le 13
24 décembre. Première page, vous rencontrez une fois de plus
25 Lovrenovic et cette fois-ci, vous lui posez des questions à
Page 13047
1 propos de Kordic et il vous répond qu’il est certain que
2 Kordic n’est plus Vice-président, n’est plus qu’un membre
3 ordinaire du Parlement, même s’il a une discussion à propos
4 de cette prise de position. Puis, il dit que puisqu’il
5 devait être tout le temps à Mostar et pour sortir de là
6 quelqu’un qui était un héros de la guerre serait là un
7 mauvais signe à donner.
8 R. Effectivement, c’est ce qu’il m’a dit. Il
9 parlait de la qualité des fonctions occupées par Monsieur
10 Kordic et là, comme je le dis dans mon rapport, il estimait
11 que si Kordic occupait une position plus élevée, il devrait
12 quitter son fief pour aller à Mostar et que ceci ne sera
13 pas bien perçu par la Bosnie centrale. L’idée a été
14 abandonnée. C’est du moins ce que m’a dit Monsieur
15 Lovrenovic à cette occasion.
16 Q. Document suivant : Il s’agit de la pièce
17 1342.1. Première page, vers le milieu de cette page, il
18 fait état d’un rapport ayant eu lieu entre le HCC et l’ECMM
19 avec Drago Maric. On rappelle que Kordic était ancien
20 Vice-président de la Communauté croate de Herceg-Bosna,
21 qu’il est parlementaire mais qu’il n’a pas de fonctions
22 particulières.
23 R. C’est exact. Maric était le Chef du Bureau
24 d’Information de la République croate de Herceg-Bosna. Il
25 travaillait dans le même bâtiment, bâtiment qu’occupait le
Page 13048
1 gouvernement, donc, dans le même bâtiment que Monsieur
2 Zubak et Monsieur Prlic. Là aussi, nous essayions de
3 déterminer la position exacte occupée par Kordic.
4 Apparemment, une récompense était donnée à
5 Monsieur Kordic pour des événements qui s’étaient produits
6 en Bosnie centrale. C’est du moins ce que nous pensions
7 mais on nous a répondu qu’il n’occupait pas de fonctions
8 ministérielles ou autres mais qu’il était membre du
9 Parlement. On fait constamment référence aux informations
10 qu’obtenait l’équipe de Travnik, informations selon
11 lesquelles Kordic, qui avait été Vice-président de la
12 Communauté croate, devait aussi être Vice-président de la
13 République croate de Herceg-Bosna mais l’information que
14 j’ai recueillie dans la région de Mostar était qu’il était
15 délégué sans pour autant avoir de fonctions. À Travnik, on
16 estimait qu’il avait encore ces fonctions.
17 Q. Paragraphe 14 du résumé : Veuillez relater
18 dans vos propres termes ce qui s’est passé en janvier 1994.
19 Vous pourrez préciser la date grâce au document si vous ne
20 vous souvenez pas de cette date vous-même mais en janvier
21 1994, avez-vous vu une partie d’unités militaires sur la
22 route de Zenica à Mostar ?
23 R. Oui. En qualité de Chef de la Coordination à
24 Mostar, j’avais assisté à une réunion à Zenica à laquelle
25 participaient tous les chefs de centres régionaux. Martin
Page 13049
1 Garrod était avec moi lorsque je rentrais de Zenica à
2 Mostar et sur la route qu’on a appelée la Route du
3 Triangle, nous avons été retardés. Nous avons dû arrêter,
4 nous mettre sur le bas côté pour laisser passer une unité
5 militaire en formation.
6 Nous avons vu les véhicules aussi bien que les
7 soldats arborant des emblèmes ou insignes de la HV et
8 c’était pour moi la première fois que j’avais des preuves
9 tangibles, en tant que témoin oculaire, des rumeurs qui
10 circulaient depuis plusieurs mois selon lesquelles il y
11 avait une participation ou une implication de la HV. Le
12 convoi était de taille assez significative.
13 Si je m’en souviens bien – j’ai écrit un rapport à
14 l’époque mais je ne sais pas si vous l’avez – je pense
15 qu’il y avait environ 50 véhicules. Nous avons été
16 retardés d’au moins 20 minutes, voire plus, vu le passage
17 de ce convoi et le matériel que nous avons vu dans ce
18 convoi comprenait de l’artillerie transportée. On avait
19 des D130 millimètres et d’autres pièces d’artillerie
20 également. Il y avait d’autres armements. Il y avait des
21 lance-roquettes à canons multiples et nous avons observé
22 des emblèmes de la HV sur les véhicules, notamment une tête
23 de tigre, et nous avons pensé qu’il s’agissait là d’une
24 unité venant de Split, unité de la HV venant de Split. Un
25 rapport a été rédigé à cet égard.
Page 13050
1 Q. Pourriez-vous nous dire à peu près combien il
2 y avait d’hommes dans ce convoi ?
3 R. Je pense que c’était de taille supérieure à
4 celle d’un bataillon. Donc, je dirais de 800 à 1 000
5 hommes.
6 Q. Nous n’avons pas pu retrouver ce rapport mais
7 je vais vous demander d’examiner le document suivant, le
8 1361, rapport en date du 19 janvier. Est-ce que c’est vous
9 qui l’avez rédigé ou est-ce une de vos équipes ?
10 R. C’est une de mes équipes qui a fait ce
11 rapport, l’équipe Mike 4. Elle couvrait la zone de
12 Tomislavgrad, notamment, au nord et à l’est.
13 Q. Parlons d’abord de la première page. Est-ce
14 que ceci nous donne des indications sur la date à laquelle
15 vous avez fait ces observations et sur le rapport à
16 proprement parler ?
17 R. Il y est dit que M4, cette équipe confirmait
18 mes propres observations en tant que Chef du Centre
19 régional HRC et on parle d’un rapport du 18 janvier. Donc
20 là, effectivement, nous savons exactement quand nous avons
21 fait ces observations. Eux aussi avaient constaté ces
22 déplacements de la HV sur la Route du Triangle. Ils disent
23 avoir vu quelques 20 véhicules chargés de soldats. Les
24 plaques d’immatriculation avaient été enlevées mais on
25 voyait encore les termes « Hvratska Voijska » qui étaient
Page 13051
1 écrits sur le côté des véhicules et ces observateurs ont
2 dit avoir vu des canons d’artillerie, 15 soldats en bons
3 uniformes qui se trouvaient sur le côté de la route et qui
4 portaient eux aussi des emblèmes du HVO. Ces observateurs
5 tout à fait perspicaces ont même constaté que l’un avait le
6 grade de lieutenant-colonel et tous ces véhicules et ces
7 soldats se dirigeaient vers Prozor.
8 Q. Est-ce que vous connaissez le croate pour
9 nous dire ce que veut dire «Hrvatska Voijska » ?
10 R. Armée de Croatie.
11 Q. Merci. Parlons de façon générale des
12 déplacements d’hélicoptères. En avez-vous observé ?
13 R. Personnellement, j’ai vu un hélicoptère
14 atterrir ou descendre dans la région de Vitez, vers une
15 carrière au nord de Vitez, position ou territoire tenu par
16 le HVO. Nous avions déjà reçu plusieurs rapports. La
17 FORPRONU avait vu un hélicoptère dans la région. Moi, j’ai
18 vu cet hélicoptère en descente rapide en direction de cette
19 carrière. C’était un hélicoptère de la HV ou du HVO.
20 C’était un hélicoptère croate qui transportait des
21 personnes et sans doute aussi du matériel de ravitaillement
22 entre des territoires tenus par les Croates en Bosnie-
23 Herzégovine.
24 Je sais que deux personnes utilisaient ces
25 hélicoptères. Il y avait un certain Jozo Leutar. Cet
Page 13052
1 homme, quand je l’ai rencontré pour la première fois, était
2 commandant de la brigade de Travnik pour le HVO. Cette
3 brigade de Travnik était désintégrée à la suite d’un
4 engagement avec l’armée de Bosnie-Herzégovine, avait battu
5 en retraite et avait amené, notamment, Monsieur Leutar à
6 Vitez.
7 J’ai revu Monsieur Leutar par la suite. Il était
8 assez en mauvaise forme. Je lui ai demandé ce qu’il
9 faisait. Il m’a dit qu’il allait être muté à Mostar et je
10 lui ai demandé comment il allait aller à Mostar puisque la
11 route était coupée et je ne peux pas vous dire franchement…
12 il a répondu qu’il allait utiliser l’hélicoptère.
13 Évidemment là, c’est peut-être un peu ironique mais enfin,
14 je me trouvais à Mostar, j’assistais à une des premières
15 réunions de la République croate de Herceg-Bosna. J’avais
16 été convié par Monsieur Jadranko Prlic, le Premier
17 Ministre, afin que j’y sois en qualité d’observateur.
18 Monsieur Mate Boban a pris la parole. Monsieur
19 Kostroman a fait son apparition. Je le connaissais parce
20 qu’à chaque fois que je rencontrais Monsieur Kordic,
21 Monsieur Kostroman était toujours présent. C’était un
22 conseiller politique mais il semblait également occuper un
23 poste, je crois que c’était celui de secrétaire, à la
24 Communauté croate de Herceg-Bosna. Donc, c’est quelqu’un
25 dont nous souhaitions vérifier le poste dans la République
Page 13053
1 croate de Herceg-Bosna.
2 En tout cas, avant de commencer à s’exprimer
3 devant cette conférence organisée à Mostar, la personne qui
4 l’a présenté a dit qu’il était arrivé par des moyens
5 secrets et de Bosnie centrale. La Bosnie centrale était
6 une enclave à l’époque. Il était donc impossible d’en
7 sortir en voiture. Le seul moyen d’en sortir, c’était
8 grâce à des dispositions particulières avec l’aide de la
9 FORPRONU pour des réunions extraordinaires, grâce au
10 transport de la FORPRONU, soit en utilisant un hélicoptère.
11 Dans ce cas précis, la FORPRONU n’avait pas
12 participé au transport de Monsieur Kostroman. Il n’a donc
13 pas dit qu’il avait utilisé un hélicoptère mais c’est la
14 conclusion que j’ai tirée quant au mode de transport qu’il
15 avait utilisé.
16 Q. Avant que nous ne parlions d’une rencontre
17 que vous avez eue avec Monsieur Kordic en novembre 1994,
18 j’aimerais que vous nous disiez ce que vous pensiez des
19 positions occupées par Monsieur Blaskic, Monsieur Kordic et
20 si possible aussi par Monsieur Valenta. Avant d’en parler
21 librement, je vous réfère tout de même à votre résumé
22 s’agissant de ce qui s’est passé à Stari Vitez, un incident
23 qui pourrait avoir sa place ici et que vous ne vous êtes
24 rappelé que récemment.
25 R. Oui. Stari Vitez était une enclave dans
Page 13054
1 laquelle résidaient des musulmans.
2 Q. Oui, oui. Nous en avons entendu parlé déjà.
3 R. Eh bien, nous avions besoin d’accéder jusqu’à
4 ces communautés isolées, qu’elles soient musulmanes ou
5 croates, et nous avions des difficultés à nous rendre à
6 Stari Vitez. J’avais donc demandé à Blaskic l’autorisation
7 de m’y rendre pour voir ce qui s’y passait. Blaskic ne
8 semblait pas pouvoir me donner immédiatement la possibilité
9 de m’y rendre mais il m’a dit qu’il discuterait avec
10 certains et reprendrait contact avec moi. Le lendemain,
11 effectivement, nous avons pu entrer dans ce secteur mais,
12 en tout cas, lui avait dû s’adresser à quelqu’un d’autre.
13 Puis-je passer à la suite ?
14 Q. Oui, je vous en prie.
15 R. Ce que moi, j’ai compris de la position
16 occupée par Monsieur Tihomir Blaskic et, d’ailleurs, c’est
17 ce qu’il disait très clairement, il disait être le Chef de
18 la zone opérationnelle de Bosnie centrale et lorsque je lui
19 ai demandé quelles étaient exactement ses responsabilités,
20 il m’a répondu que sa zone opérationnelle était divisée en
21 trois groupes opérationnels et que dans son secteur de
22 responsabilité se trouvaient Travnik, Kiseljak, Busovaca,
23 Vares et également Zepce.
24 Cela ne semblait faire aucun doute et, d’ailleurs,
25 les habitants de Zepce le considéraient comme leur
Page 13055
1 commandant. D’autres éléments de preuve le prouvent. Je
2 crois que sur le papier, il avait également un commandement
3 à Sarajevo, bien qu’il ait été totalement isolé là où il se
4 trouvait. Donc, nous n’avons jamais vérifié exactement
5 quel était le degré de contrôle qu’il exerçait à Sarajevo,
6 compte tenu de la situation à ce moment-là.
7 S’agissant de Monsieur Kordic à présent, celui-ci
8 utilisait fréquemment le titre de Colonel pour parler de
9 lui mais à mon avis, il était surtout Vice-président de la
10 Communauté croate de Herceg-Bosna et un homme politique
11 très important en Bosnie centrale. Dans la dernière
12 période, je l’ai rencontré alors qu’il occupait un poste
13 différent. Je crois que nous allons en parler dans
14 quelques instants.
15 Maintenant, je voudrais parler de Monsieur Valenta
16 qui lui aussi occupait un poste au sein de la Communauté
17 croate de Herceg-Bosna. Je crois que c’était celui de
18 Vice-président mais je peux me tromper. En tout cas, grâce
19 à mes rencontres avec lui, j’ai pu constater que nous
20 parlions toujours de sujets politiques, de démographie, de
21 déplacements de population prévus ou passés, historiques,
22 déplacements de population à venir.
23 Il avait son siège au quartier général de la zone
24 opérationnelle qui se trouvait à Vitez dans un hôtel et, de
25 temps à autre, il se trouvait avec Monsieur Blaskic lorsque
Page 13056
1 je devais rencontrer ce dernier. Il semblait donc très
2 certainement être un responsable politique nommé à un poste
3 déterminé au quartier général. Voilà, je crois que c’est
4 tout ce que j’ai à dire au sujet de ces trois hommes.
5 Q. Vous avez eu une deuxième rencontre avec
6 Kordic. À quelle date ? Que vous rappelez-vous de ce que
7 vous vous êtes dit ? Nous n’avons retrouvé aucun document
8 écrit pour vous aider à vous souvenir.
9 R. Toutes nos discussions jusqu’à présent sont
10 liées à la mission que j’ai effectuée en Bosnie en 1993
11 mais plus tard, je suis sorti de Bosnie et j’ai passé
12 quelques mois en Croatie avant d’être nommé au poste de
13 Chef du Centre régional de nouveau en Bosnie, ce qui me
14 donnait autorité sur toutes les activités de l’ECMM en
15 Bosnie depuis Tuzla en Bosnie centrale jusqu’en
16 Herzégovine.
17 Lorsque j’occupais ces fonctions, j’ai rencontré
18 Monsieur Kordic à Mostar. À ce moment-là, il ne faisait
19 aucun doute qu’il était Président du HDZ en Bosnie-
20 Herzégovine. Je l’ai donc rencontré à ce moment-là.
21 J’étais accompagné par un représentant britannique du
22 bureau du Commonwealth qui était en visite dans la région.
23 Nous avons rencontré Monsieur Kordic et un autre
24 homme dont je ne me rappelle pas le nom et nous avons parlé
25 des actions qui se déroulaient, à ce moment-là, car les
Page 13057
1 musulmans et les Croates de Bosnie avaient créé une
2 fédération à cette époque-là et nous souhaitions vérifier
3 dans quelle mesure cette fédération allait tenir.
4 J’ai discuté avec Monsieur Kordic, donc, et je me
5 rappelle qu’il a dit très clairement qu’il considérait que
6 l’accord des musulmans pour entrer dans cette fédération
7 était un succès mais qu’il se demandait combien d’autonomie
8 ils allaient autoriser aux communautés isolées. Lorsque je
9 parle de communautés isolées, je veux parler de Zepce,
10 Usora et de la zone située dans les environs de Tuzla.
11 Donc, il se posait des questions quant au degré
12 d’autonomie qu’il se verrait autorisé à exercer, compte
13 tenu de l’action de la police croate dans cette région et
14 je l’ai, bien sûr, interrogé au sujet de la position croate
15 dans cette fédération. Il a répondu que les Croates
16 voulaient le succès de la fédération.
17 Je me rappelle l’avoir interrogé au sujet d’un
18 canton particulier qui était exclusivement croate. J’ai
19 demandé pourquoi le gouvernement de ce canton n’avait pas
20 été créé, élu ou mis en place si les Croates étaient tant
21 désireux de voir la fédération réussir. Dans ce cas-là,
22 visiblement, il n’aurait pas eu de difficulté à mettre en
23 place ce canton. Il a déclaré qu’il y avait des progrès
24 mais que ces progrès s’effectuaient pas à pas.
25 J’ai également parlé avec lui de son poste en tant
Page 13058
1 que Président du HDZ et des rapports qu’il pouvait y avoir
2 entre le HDZ en Bosnie et le HDZ en Croatie. Je ne me
3 rappelle pas franchement le contenu exact de sa réponse
4 mais je m’en serais sans doute souvenu si sa réponse avait
5 été particulièrement expressive. En tout cas, la question,
6 je la lui ai posée. Si cela vous intéresse, je me rappelle
7 que la presse croate m’a demandé une interview par la suite
8 mais que j’ai refusée.
9 Q. Nous allons donc continuer à rechercher ce
10 document pour tenter de le retrouver, j’espère que nous le
11 ferons mais vous pensez que c’est au Danemark que ces
12 rapports peuvent se trouver. Donc, si nous ne les trouvons
13 pas au Danemark, nous risquons de ne les trouver nulle
14 part ?
15 R. Oui, je pense que c’est au Danemark. Ils ont
16 eu une distribution très large. Maintenant, qui les
17 détient en ce moment, je ne sais pas.
18 Q. Avez-vous vu Cerkez souvent ? Avez-vous eu
19 beaucoup affaire à Cerkez ?
20 R. Je l’ai rencontré en de nombreuses occasions
21 mais en général, je déléguais cette responsabilité à des
22 membres de mon équipe, de l’équipe Victor 1 qui opérait
23 dans la zone de Vitez et Cerkez était commandant de la
24 brigade de Vitez. Donc, je l’ai sûrement rencontré mais
25 pas très, très souvent.
Page 13059
1 Q. Encore une question au sujet du pilonnage de
2 Zenica et de la date de ce pilonnage. Je vous ai parlé
3 d’une date en septembre et je crois que vous avez dit ne
4 pas vous rappeler exactement la date mais vous rappelez-
5 vous la date au moins approximative de ce pilonnage ou, en
6 tout cas, la date de l’élaboration du rapport qui en
7 traitait et que nous recherchons ?
8 R. Oui. Je crois que le pilonnage a eu lieu à
9 la fin du mois d’août et que la rencontre que j’ai eue
10 s’est déroulée au début du mois de septembre, première
11 semaine de septembre, je crois. Nous essayions également,
12 à ce moment-là, d’entrer dans Zepce au début du mois de
13 septembre et j’ai, donc, quelques difficultés à me rappeler
14 exactement les dates mais c’était à peu près à ce moment-
15 là.
16 Me NICE (interprétation) : C’est la fin de mon
17 interrogatoire, Monsieur le Président.
18 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Eh bien, c’est
19 le moment de nous séparer. Suspension jusqu’à 14 h 30.
20 --- Suspension de l’audience à 13 h 00
21 --- Reprise de l’audience à 14 h 35
22 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Sayers,
23 vous avez la parole.
24 Me SAYERS (interprétation) : Merci, Monsieur le
25 Président.
Page 13060
1 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me SAYERS
2 (interprétation) :
3 Q. Bonjour, Témoin AD.
4 R. Bonjour.
5 Q. Je m’appelle Stephen Sayers. Je suis l’un
6 des avocats qui représentent Dario Kordic et je vais vous
7 poser quelques questions cet après-midi. Derrière moi,
8 vous voyez Me Mikulicic qui représente l’autre accusé,
9 Monsieur Cerkez, et je ne crois pas qu’il aura des
10 questions à vous adresser mais si cela devait être le cas,
11 elles seront très courtes.
12 Alors, un point de détail pour commencer si vous
13 le voulez bien. J’ai placé sur le rétroprojecteur un
14 document qui a déjà été enregistré comme pièce à conviction
15 D52.2 et je vous demanderais de bien vouloir nous montrer
16 la principale route d’approvisionnement qui va de Travnik
17 vers le sud-est, c’est-à-dire jusqu’au village de Dolac.
18 Vous le voyez ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-il exact que c’est là que se trouvait le
21 barrage routier où vous avez été arrêté en route vers
22 Travnik en rapport avec le convoi ?
23 R. Oui, c’est exact.
24 Q. Donc, c’est un endroit beaucoup plus proche
25 de Travnik que vous ne l’avez dit au cours de
Page 13061
1 l’interrogatoire principal, n’est-ce pas ?
2 R. Je crois que c’est le même carrefour. Nous
3 ne regardons pas tout à fait la même carte. Sur la carte
4 que nous avons vue ce matin, Travnik n’était pas indiqué.
5 Il était un peu à l’ouest de la carte et j’ai placé un
6 point à l’endroit où je croyais que se trouvait le
7 carrefour de Dolac. Pour être tout à fait clair, je dirais
8 qu’il s’agissait bien du carrefour de Dolac.
9 Q. Pour être tout à fait clair, sur la pièce à
10 conviction 52.2 où j’ai identifié le carrefour de Dolac,
11 vous voyez le nom de Dolac inscrit, n’est-ce pas ?
12 R. Oui, c’est exact.
13 Q. Cet endroit se trouvait dans la zone qui
14 relevait du commandement du Colonel Filip Filipovic, n’est-
15 ce pas, qui commandait la brigade de Travnik ?
16 R. Oui. Il commandait la brigade de Travnik et,
17 à ce moment-là, le HVO avait quitté Travnik pour se diriger
18 vers le nord, vers la ligne qui séparait le HVO des Serbes
19 et également dans une autre direction vers Vitez où se
20 trouvait une ligne de front.
21 Q. La raison de ce déplacement était due à une
22 offensive importante des forces musulmanes qui a duré du 8
23 juin au 12 juin dans la région de Travnik, si je ne
24 m’abuse. C’est à ce moment-là également que vous avez pris
25 vos fonctions de Chef du Centre de Coordination à Travnik,
Page 13062
1 n’est-ce pas ?
2 R. Je suis arrivé à Travnik juste avant
3 l’éclatement des combats. En fait, j’essayais d’obtenir la
4 conclusion d’un accord entre une structure de commandement
5 conjoint qui existait à Travnik et dont faisait partie le
6 Colonel Filip Filipovic. Cette tentative a échoué et les
7 forces de l’Armija ont effectué une percée dans la région
8 de Travnik à ce moment-là.
9 Q. Est-il permis de dire, Monsieur, que vous
10 avez effectué votre premier voyage avec le convoi et que
11 vous vous êtes trouvé à ce barrage routier que vous avez
12 décrit au cours de l’interrogatoire principal au moment où,
13 sur le plan militaire, la confusion la plus grande régnait
14 sur le terrain ?
15 R. C’était sans aucun doute un moment où, sur le
16 plan des activités militaires, la confusion régnait,
17 effectivement.
18 Q. Vous rappelez-vous, Monsieur,
19 qu’immédiatement avant l’incident que vous avez décrit,
20 immédiatement avant le début de l’offensive des forces
21 musulmanes, le Général Hadzihasanovic avait, en fait,
22 refusé de participer à une réunion de la commission
23 conjointe en disant qu’il était trop tard pour des
24 négociations ?
25 R. Je ne me rappelle pas cela avec précision
Page 13063
1 mais je puis dire que je n’ai pas rencontré Hadzihasanovic
2 à Travnik. Son représentant était le Commandant Mehmed
3 Alagic qui était mon interlocuteur principal.
4 Q. J’aimerais vous montrer un bulletin
5 d’information militaire qui vous rafraîchira sans doute la
6 mémoire.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Sayers,
8 avant de poursuivre, je vous informe que les interprètes
9 vous demandent à vous et au témoin de bien vouloir parler
10 un peu moins vite.
11 Me SAYERS (interprétation) : Témoin AD, puisque
12 nous parlons, vous et moi, la même langue, il est important
13 de ménager une pause entre la question et la réponse. Je
14 m’y efforcerai pour ma part. Merci.
15 LA GREFFIÈRE (interprétation) : Ce document est
16 enregistré sous la cote D164/1.
17 Me SAYERS (interprétation) : J’en ai terminé avec
18 la carte. Je vous demanderais maintenant de placer la page
19 numéro 00273957 sur le rétroprojecteur. Pour le compte
20 rendu d’audience, j’indique qu’il s’agit d’un bulletin
21 d’information militaire numéro 38 daté du 6 juin 1993 et
22 émanant du Régiment du Prince de Galles, Régiment du
23 Yorkshire.
24 Q. Une référence est faite au village de
25 Ovcarevo où vous vous êtes rendu, où 3 000 personnes
Page 13064
1 déplacées ont été trouvées par les troupes britanniques,
2 ont tiré sur ces personnes à partir des positions
3 musulmanes de Turbe et c’est la raison qui a été avancée
4 pour justifier leur demande de déplacement vers Nova Bila.
5 Avez-vous été informé de cela par le bataillon britannique,
6 Monsieur, [expurgée] ?
7 R. J’avais des relations étroites avec le
8 Régiment du Prince de Galles mais je ne me rappelle pas
9 avoir reçu cette information particulière.
10 Q. Page suivante, Monsieur : Vous y trouvez une
11 énumération des événements qui ont précédé immédiatement le
12 début du conflit, notamment aux paragraphes 11 et 12.
13 Au paragraphe 11, il est observé que les deux
14 parties souhaitaient que le Colonel Blaskic et le Général
15 Hadzihasanovic assistent à une réunion organisée plus tard
16 et que c’était une demande réitérée.
17 Au paragraphe 12, il est observé par l’armée
18 britannique que Blaskic acceptait de participer à cette
19 réunion mais que Hadzihasanovic, malgré l’intervention du
20 BHC, a maintenu sa position précédente en disant qu’il
21 était trop tard pour des négociations. Il a affirmé qu’il
22 avait le plein appui du Général Halilovic s’agissant de
23 l’expression de cette position. Étiez-vous au courant de
24 cela ?
25 R. Non. Les négociations se poursuivaient sans
Page 13065
1 aucun doute à Travnik en présence de représentants de la
2 commission conjointe, c’est-à-dire et du HVO et de l’Armija
3 mais, à ce moment-là, je ne savais pas que cela se passait.
4 Q. Pour en terminer avec cette série de
5 questions, je vous demande si vous n’étiez pas au courant,
6 alors que vous meniez vos investigations dans la première
7 et la deuxième semaines du mois de juin, du fait que les
8 forces de l’armée de Bosnie-Herzégovine avaient, en fait,
9 refusé de négocier avec les représentants supérieurs du
10 contingent croate.
11 R. Non, je n’étais pas au courant de cela
12 précisément.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Sayers, si
14 vous passez à un autre document, je constate que celui-ci
15 porte déjà une cote en Z. Fait-elle partie des pièces
16 déposées par l’Accusation ?
17 Me SAYERS (interprétation) : Ce document fait
18 partie de la pile dont j’ai déjà parlé mais n’a pas encore
19 été versé au dossier, Monsieur le Président, mais cela ne
20 me dérange absolument pas que ce document soit versé au
21 dossier en tant que pièce Z1201.2 ou sous une autre cote.
22 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Il serait
23 peut-être préférable de lui affecter une autre cote, pièce
24 à conviction de la Défense.
25 Me SAYERS (interprétation) : Je me suis trompé de
Page 13066
1 numéro. Z1020 était le numéro qui convenait. Madame la
2 Greffière, pouvez-vous lui donner une cote en D ?
3 LA GREFFIÈRE (interprétation) : Ce document porte
4 la cote D164/1.
5 Me SAYERS (interprétation) :
6 Q. Témoin AD, j’aimerais maintenant vous poser
7 quelques questions générales et je tenterai de vous
8 renvoyer aux documents. Vous m’excuserez si je ne trouve
9 pas immédiatement les bons documents car je ne les ai vus
10 que ce matin pour la première fois.
11 Si j’ai bien compris, vous aviez passé huit ans au
12 sein de l’armée britannique et démissionné en janvier 1993
13 et vous êtes devenu observateur de la Communauté européenne
14 un mois plus tard : Est-ce exact ?
15 R. C’est exact.
16 Q. Aviez-vous déjà une expérience de l’histoire
17 et de la politique des Balkans dans la période antérieure ?
18 R. Je connaissais l’histoire récente mais je ne
19 m’étais pas rendu dans la région jusqu’à cette date.
20 Q. Est-il permis de dire qu’en dehors de vos
21 connaissances théoriques, vous ne saviez rien des Balkans
22 avant d’y arriver ?
23 R. Avant d’y arriver, je n’avais pas des
24 connaissances très étendues sur le sujet, hormis celles
25 qu’a toute personne éduquée.
Page 13067
1 Q. Très bien ! Est-il exact que la mission
2 d’observation de la Communauté européenne n’avait pas de
3 mandat militaire ?
4 R. C’est exact. Son travail reposait sur un
5 protocole d’accord qui était assez vaste, qui avait une
6 portée assez vaste.
7 Q. L’ECMM ne travaillait pas la nuit, n’est-ce
8 pas ?
9 R. Pourriez-vous répéter votre question ?
10 Me SAYERS (interprétation) : J’aimerais que l’on
11 montre au témoin le document déjà enregistré sous la cote
12 Z1012.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Vous parlez de
14 l’ECMM et de son travail la nuit ?
15 Me SAYERS (interprétation) : Oui.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Ce qui est dit
17 ici c’est que les observateurs de l’ECMM ne travaillaient
18 pas la nuit.
19 Monsieur le Témoin, cela correspond-il à ce que
20 vous saviez ?
21 R. Ils ne circulaient pas dans des véhicules
22 motorisés la nuit, Monsieur le Président.
23 Me SAYERS (interprétation) :
24 Q. J’aimerais vous soumettre trois propositions,
25 Monsieur, qui viennent toutes de documents déjà versés au
Page 13068
1 dossier et produits par l’ECMM.
2 Pièce Z1012, en page 2, nous lisons : « L’ECMM ne
3 travaille pas la nuit. » C’était la première référence et
4 la deuxième consiste à dire que les renseignements
5 militaires sont interdits strictement à l’ECMM. Êtes-vous
6 d’accord avec cela ?
7 R. Interdits par qui ? Nous avions des contacts
8 avec les services de renseignements militaires. Nous
9 transmettions ces renseignements mais nous ne recevions pas
10 des renseignements d’un gouvernement quelconque. Cela
11 étant, nous avions des relations avec la FORPRONU et nous
12 recevions leur évaluation de la situation sur le terrain.
13 Q. Un document déjà versé au dossier sous la
14 cote Z1151.1, daté du 30 janvier 1993 et émanant de l’ECMM.
15 C’est un rapport spécial au sujet de l’armée croate
16 impliquée en Bosnie-Herzégovine.
17 Nous lisons en page 1 – je cite : « Il est très
18 difficile pour l’ECMM de répondre de façon définitive quant
19 aux questions que pose la participation de l’armée croate
20 dans le sud-ouest de la Bosnie-Herzégovine puisque les
21 renseignements militaires leur sont strictement interdits
22 en raison de considérations liées à la sécurité sur le
23 terrain. » Fin de citation.
24 Est-ce une nouvelle pour vous, Monsieur ?
25 R. Eh bien, dans nos activités quotidiennes,
Page 13069
1 nous nous efforcions toujours d’établir la participation de
2 l’armée croate et je n’avais pas connaissance d’un grand
3 nombre d’informations que nous ne recevions pas. Ce que je
4 veux dire c’est que j’avais de très bons contacts en tant
5 qu’organisation avec un certain nombre d’entités. Comme je
6 l’ai déjà dit ce matin, la direction du HVO, notamment,
7 nous informait de ce qui se passait et nous suivions, à la
8 fois par des conversations avec les habitants et en
9 regardant ce que nous voyions, ce qui se passait sur le
10 terrain mais je ne connais pas les informations qui
11 pouvaient provenir de niveaux supérieurs.
12 Q. Très bien ! Il n’y a pas de problème à ce
13 que certaines informations ne vous soient pas disponibles,
14 comme vous l’avez déjà dit mais, apparemment, vous n’êtes
15 pas entièrement d’accord avec ce que dit Jean-Pierre
16 Thebault dans un document dont il est l’auteur. Peut-on
17 dire les choses de cette façon ?
18 R. Je ne suis pas tout à fait au clair quant au
19 sens de ce que vous me demandez lorsque vous parlez de
20 renseignements militaires, à moins que vous parliez d’un
21 accès à ces informations sur la base nationale.
22 Q. Très bien ! Un autre document, Monsieur, qui
23 a déjà été versé au dossier, pièce à conviction Z1040.
24 C’est un document intitulé : « Extrait de matériel
25 politique au sujet des rapports de l’ECMM » et je suppose
Page 13070
1 que vous connaissiez ces documents rassemblés par le
2 quartier général à Zagreb et distribués à toute personne
3 qui pouvait en être un bénéficiaire approprié ?
4 R. C’est exact.
5 Q. Une observation est faite dans ce document du
6 10 juin, en page 9, à savoir que : « Les objectifs à long
7 terme de l’armée de Bosnie-Herzégovine pouvaient sans doute
8 consister à s’emparer de Busovaca et même de Novi Travnik.
9 Il ne fait aucun doute que la guerre sévissait dans cette
10 région, guerre qui a commencé par des combats qui se sont
11 ensuite étendus, combats qui, au départ, visaient les
12 Serbes et qui avaient dégénéré en guerre civile
13 généralisée. »
14 Je suppose que vous êtes d’accord avec ce
15 commentaire ?
16 R. Oui. De façon générale, oui.
17 Q. Les Juges et moi-même aimerions savoir de
18 façon très précise où vous vous trouviez à tel ou tel
19 moment au cours de votre mission en Bosnie-Herzégovine,
20 Monsieur, et j’ai cru comprendre que vous êtes arrivé le 26
21 février 1993, après avoir passé deux jours à Zagreb où vous
22 avez reçu quelques informations de base. Est-ce exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Le premier endroit où vous avez été affecté
25 en tant que moniteur de base, c’est la région de Gornji
Page 13071
1 Vakuf, n’est-ce pas ?
2 R. J’étais censé être basé à Tomislavgrad, en
3 fait, et j’y ai effectivement passé quelque temps mais
4 l’activité principale de l’ECMM était centrée sur la
5 création d’une commission à Gornji Vakuf. Donc, peu à peu,
6 c’est là que le cœur de notre activité s’est déroulée.
7 C’est la raison pour laquelle j’ai été basé à Gornji Vakuf
8 en me rendant à Tomislavgrad à chaque fois que c’était
9 nécessaire, disons un jour par semaine à peu près à titre
10 indicatif.
11 Q. Et vous rendiez compte au Centre de
12 Coordination de Mostar qui était situé à Siroki Brijeg,
13 n’est-ce pas ?
14 R. C’est exact.
15 Q. [expurgée]
16 [expurgée]
17 [expurgée]
18 R. C’est exact. [expurgée]
19 [expurgée]
20 [expurgée]
21 [expurgée]
22 [expurgée]
23 [expurgée]
24 [expurgée]
25 Q. Je crois que vous avez remplacé Monsieur
Page 13072
1 [expurgée] le 14 juin 1993. C’est bien cela ?
2 R. À peu près à ce moment-là mais je ne me
3 rappelle pas la date exacte aujourd’hui.
4 Q. Je me rends bien compte que pas mal de temps
5 s’est écoulé depuis, Témoin AD, mais en tout cas, [expurgée]
6 [expurgée]
7 [expurgée]
8 n’est-ce pas ?
9 R. C’est exact.
10 Q. Vous avez conservé ces fonctions, si je ne
11 m’abuse, jusqu’au 17 octobre 1993, [expurgée]
12 [expurgée]
13 [expurgée] que se trouvait
14 le siège du gouvernement de la Communauté croate de Herceg-
15 Bosna, n’est-ce pas ?
16 R. C’est à peu près à cette date. Moi, je
17 dirais le 27 octobre mais je ne sais pas si la date est
18 particulièrement importante et, effectivement, j’ai été
19 muté au siège de la Communauté croate de Herceg-Bosna
20 autoproclamée.
21 Q. Je vais à présent vous poser quelques
22 questions au sujet du gouvernement de cette République
23 croate de Herceg-Bosna. Que vous le croyez ou non, vous
24 êtes l’un des premiers témoins qui a déposé dans cette
25 affaire et qui détient des connaissances importantes sur ce
Page 13073
1 sujet. D’ailleurs, je vous félicite pour les études que
2 vous avez menées sur ce point.
3 Pour en terminer avec la chronologie de votre
4 participation dans le cadre de votre mission en Bosnie-
5 Herzégovine, vous avez quitté vos fonctions [expurgée]
6 [expurgée] le 3 février 1994.
7 C’est à peu près cela ?
8 R. C’est exact. C’est à la fin de ma première
9 année.
10 Q. Ensuite, vous avez passé plusieurs mois en
11 Croatie, d’avril 1994 jusqu’en août 1994. Après quoi, vous
12 avez pris les fonctions [expurgée]
13 [expurgée] en août 1994 et vous êtes resté à Zenica jusqu’en
14 février 1995. C’est bien cela ?
15 R. Après une restructuration due au Ministère
16 des Affaires étrangères, j’ai été envoyé à nouveau dans
17 l’ex-Yougoslavie, comme vous l’avez dit à très juste titre.
18 J’y suis arrivé en avril et j’ai [expurgée]
19 [expurgée]
20 [expurgée]
21 [expurgée]. Puis, au mois d’août, j’ai été
22 [expurgée] , plus
23 tard, ce Centre a changé son nom pour devenir le [expurgée]
24 [expurgée].
25 Q. Dans le cadre de vos fonctions en tant
Page 13074
1 [expurgée]
2 [expurgée]
3 connaissiez-vous les dispositions du Plan Vance-Owen que la
4 communauté internationale proposait à ce moment-là ?
5 R. L’élaboration du Plan Vance-Owen a eu lieu
6 pendant la période que j’ai passée à Gornji Vakuf et au
7 moment où je suis arrivé à Travnik, nous en étions arrivés
8 à une étape critique dans ce processus. En effet,
9 l’élément serbe avait décidé de ne pas accepter le plan.
10 Donc, sur le terrain, on nous a dit que des tentatives
11 devaient être faites pour appliquer le plan à chaque fois
12 que cela était possible. C’est ce que nous nous sommes
13 efforcés de faire à partir du mois de juin mais notre
14 action a été interrompue quelque peu par les opérations
15 militaires.
16 Q. Ce plan international préconisait la création
17 de 10 cantons déterminés sur des bases ethniques, n’est-ce
18 pas ?
19 R. C’est exact.
20 Q. Est-il exact que dans le canton numéro 10, la
21 région de Travnik, le gouverneur était censé être un
22 Croate, le vice-gouverneur, un musulman et il devait y
23 avoir un gouvernement intérimaire provincial composé au
24 départ de cinq musulmans, quatre Croates et un Serbe ?
25 R. Vous m’avez flatté il y a quelques instants
Page 13075
1 en parlant des connaissances qui étaient les miennes sur le
2 plan politique mais j’aurais beaucoup de mal à me rappeler
3 la répartition exacte de la direction gouvernementale.
4 Cela étant, je me rappelle toutefois que le canton dont
5 relevait Bugojno devait être dirigé par un Croate et je
6 crois que cet homme répondait au nom de Soljic mais je ne
7 me rappelle pas exactement les frontières des cantons qu’il
8 était prévu de créer.
9 Si Bugojno relève bien du canton numéro 10, je
10 suis désolé de ne pas me rappeler le nom exact de ce
11 canton, je peux répondre par l’affirmative à votre question
12 quant au fait que ce canton devait être dirigé par un
13 Croate.
14 Q. Témoin AD, vous avez une mémoire parfaite car
15 je crois que Bugojno relevait bien du canton numéro 10.
16 Dans la pièce Z1034, qui est un rapport spécial de l’ECMM
17 daté du 3 juin 1993, il est fait référence à ce fait. Nous
18 pouvons vous montrer ce document si vous le souhaitez.
19 Je cite : « Le maire de Bugojno, Monsieur Soljic,
20 HVO, vient d’être nommé gouverneur par les Croates de
21 Bosnie et il apparaît à tous, y compris aux musulmans de
22 Bosnie, que c’est un bon début. » Fin de citation.
23 Il s’agit de la province de Travnik, province
24 numéro 10 dans le plan Vance-Owen. Cela vous rafraîchit-il
25 la mémoire, Monsieur ?
Page 13076
1 R. Oui.
2 Q. Très bien ! Avez-vous eu l’occasion de
3 parler de la mise en œuvre de ce plan avec les autorités
4 politiques, qu’elles soient du côté croate ou du côté
5 musulman de Bosnie ?
6 R. Oui. Je me souviens parfaitement avoir
7 organisé une réunion destinée pour le Chef du Centre
8 régional, Monsieur Jean-Pierre Thebault, à Bugojno même.
9 Nous nous y sommes rendus et nous avons rencontré Monsieur
10 Soljic. Je crois que ce jour-là ou la veille, il avait été
11 nommé à ce poste. Nous avons également rencontré certains
12 des dirigeants croates et musulmans de Bugojno. Dzevad
13 Mlaco, si je me souviens bien, était le maire musulman de
14 Bugojno. Il était présent. Je me souviens encore d’une
15 autre personne, un certain Branko Raguz, membre de la
16 Communauté croate de Bosnie.
17 Q. Je suppose que Monsieur Kordic n’avait pas
18 été invité à cette réunion à laquelle devaient assister les
19 chefs des centres régionaux, Monsieur Soljic, ce gouverneur
20 qui venait d’être nommé à ses fonctions et par d’autres ?
21 R. Il a peut-être été invité par Monsieur
22 Thebault.
23 Q. Vous savez s’il a reçu une invitation ?
24 R. Non, je ne sais pas.
25 Q. J’ai une autre question qui porte sur le Plan
Page 13077
1 Stoltenberg-Owen, lequel avait été approuvé en août 1993
2 par la communauté internationale. Ceci cadre-t-il bien
3 avec vos souvenirs ?
4 R. Oui, oui. Effectivement, je me souviens bien
5 du HMS l’Invincible et de toutes les négociations qui s’y
6 sont déroulées.
7 Q. Là, selon ce plan, on envisageait la
8 constitution de trois républiques qui soient basées sur une
9 base ethnique ?
10 R. Oui.
11 Q. Et ceci avait été accepté par la communauté
12 internationale ?
13 R. Ce matin, je vous avais parlé de discussions
14 à Genève mais rappelez-vous, je vous avais dit que sur le
15 terrain, nous disposions de très peu de renseignements
16 quant aux contours précis que devait prendre cette carte et
17 sur le terrain, il y avait des spéculations qui circulaient
18 sur les frontières précises qu’auraient ces trois
19 républiques qui étaient proposées mais moi, je n’avais pas
20 les détails.
21 Q. Je pense que la Communauté croate de Herceg-
22 Bosna a été constituée précisément ce mois-là, en août
23 1993, et c’est en août que la communauté internationale
24 avait approuvé ce plan, n’est-ce pas ?
25 R. Oui, mais j’aimerais ajouter qu’à mon arrivée
Page 13078
1 à Mostar, lorsque j’ai essayé d’en savoir plus long, ça ne
2 faisait que prendre forme. Donc, il se peut,
3 effectivement, que cette communauté ait été créée en août
4 mais je ne suis pas… on parlait de république. Je ne sais
5 pas à quel point la communauté croate était déjà devenue
6 République croate de Herceg-Bosna.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Quel est
8 l’intérêt… quelle est l’utilité de ce point en contre-
9 interrogatoire ? Dans la mesure où il y a litige sur des
10 documents, ne craignez rien, vous aurez amplement
11 l’occasion d’appeler à la barre vos témoins afin de faire
12 la preuve du contenu de ces entités politiques croates, du
13 moment où elles sont entrées en vigueur. Vous aurez vos
14 propres témoins. Vous avez promis 100 témoins de la
15 Défense. Je suppose qu’au moins un de ces 100 témoins aura
16 l’occasion de fournir ces documents.
17 Le temps passe. Ce qui m’inquiète c’est ceci :
18 Est-il utile de poser des questions à ce témoin sur des
19 sujets dont il se souvient peut-être ?
20 Bien sûr, posez-lui des questions sur les
21 documents qui ont été produits par son truchement ou sur
22 des points sur lesquels il a déposé mais s’agissant
23 d’autres questions, je pense qu’il sera préférable d’en
24 traiter différemment. Vous savez que le Règlement précise
25 que le contre-interrogatoire doit porter sur des questions
Page 13079
1 qui découlent de l’examen principal ou pour les autres
2 points, il faut demander l’autorisation de la Chambre de
3 première instance.
4 Poursuivez.
5 Me SAYERS (interprétation) : Bien sûr, à vous de
6 juger, Messieurs, mais je pense que ces questions portaient
7 sur le caractère de jure et de facto de ces entités et je
8 pense qu’ici, on abordait l’aspect juridique. Je pense
9 qu’une bonne partie de sa déposition a été consacrée aux
10 fonctions supposées qu’avait Monsieur Dario Kordic dans la
11 République croate de Herceg-Bosna. Je demande au témoin de
12 se souvenir précisément et que nous pouvons l’aider à s’en
13 souvenir grâce aux documents.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Ceci ne vous
15 sera pas autorisé. Lorsqu’il a parlé de la fonction
16 occupée par Monsieur Kordic, par contraste avec ce qu’il a
17 dit sur d’autres points, eh bien, commencez le 3 novembre
18 en 1993, au moment où il a eu cette conversation avec
19 Monsieur Bender.
20 Libre à vous de poser des questions, certes, sur
21 des liens éventuels avec les deux groupes, Jokeris et
22 Apostolis. Vous pouvez poser des questions sur d’autres
23 sujets qui ont fait l’objet de sa déposition. En outre, il
24 avait estimé que votre client était isolé et coupé de toute
25 réalité mais lorsqu’on parle de la composition de l’armée
Page 13080
1 de Bosnie-Herzégovine ou plutôt, je me corrige, de la
2 partie croate au début de l’année, tout ceci ne fait pas
3 partie de la déposition de ce témoin en interrogatoire
4 principal.
5 Veuillez vous en tenir aux éléments de preuve
6 précis.
7 Me SAYERS (interprétation) :
8 Q. Témoin AD, vous avez parlé de la Communauté
9 croate de Herceg-Bosna qui a précédé immédiatement la
10 création de la République croate de Herceg-Bosna. Vous
11 savez que le Président de cette communauté était Mate
12 Boban, n’est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Je pense que vous avez dit que vous avez,
15 effectivement, eu l’occasion de rencontrer Monsieur Boban,
16 alors que vous étiez [expurgée]
17 [expurgée]. Est-ce exact ?
18 R. Oui. Je me souviens l’avoir rencontré à deux
19 reprises.
20 Q. Et lui, il est devenu le premier Président de
21 la République croate de Herceg-Bosna ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous avez dit que Monsieur Kordic était un
24 Vice-président de la Communauté croate de Herceg-Bosna.
25 Est-ce que vous saviez qu’il y en avait deux Vice-
Page 13081
1 présidents ?
2 R. Oui. Je pensais qu’il y en avait même plus.
3 Beaucoup de vice-présidents ou de personnes s’affirmaient
4 Vice-président. Je savais qu’il y en avait plus qu’un.
5 Q. Est-ce qu’au sein de la Communauté croate de
6 Herceg-Bosna, vous avez essayé de savoir quels étaient les
7 pouvoirs déclarés, les pouvoirs réels de telles personnes
8 dans ces entités ?
9 R. Je ne pense pas l’avoir fait. Ce que j’ai
10 fait c’est m’enquérir des raisons pour lesquelles la
11 communauté croate s’était constituée et m’enquérir aussi
12 sur les personnes occupant des postes de responsabilité et
13 je pense qu’à ces occasions, Monsieur Kordic s’était
14 présenté comme étant un Vice-président de la Communauté
15 croate de Herceg-Bosna mais quant à savoir quelles étaient
16 ses attributions précises, je ne sais pas.
17 Q. Dans votre rapport du 8 novembre, qui a reçu
18 la cote 1289.1, vous parlez d’un Monsieur Vladimir Pogarcic
19 de Mostar. Est-ce que vous avez discuté avec ce Monsieur
20 de la nature de cette Communauté croate de Herceg-Bosna
21 comme étant une entité qui avait été créée à l’occasion de
22 la guerre, qui était de nature transitoire ?
23 R. J’ai eu beaucoup de discussions avec Monsieur
24 Pogarcic et il est certain que j’ai discuté avec lui de la
25 façon dont s’était organisée la Communauté croate de
Page 13082
1 Herceg-Bosna. Ceci se situait en novembre-décembre mais à
2 cette époque-là, ce qui m’intéressait davantage c’était des
3 questions de pouvoir, des personnes de pouvoir, du soutien
4 qui se manifestait autour de Monsieur Boban.
5 J’avais sept ou huit interlocuteurs privilégiés
6 dont Monsieur Pogarcic et je me souviens que la plupart des
7 discussions que j’ai eues avec lui se concentraient là-
8 dessus. Je me souviens aussi avoir discuté avec Monsieur
9 Pogarcic de l’incident de Stupni Do. Cet incident et cette
10 région l’intéressaient tout particulièrement parce qu’il
11 s’appelle Monsieur Pogarcic, Poga étant un village dans la
12 région de Stupni Do, et il m’a expliqué que c’était de là
13 que venaient ses ancêtres et il voulait, bien sûr, savoir
14 ce que nous pensions de ce qui s’était passé à Stupni Do.
15 Q. Certaines questions vous ont été posées à
16 propos du HVO. Savez-vous que Monsieur Kordic n’a jamais
17 eu de poste officiel d’autorité au sein du HVO, que ce soit
18 en tant que Président ou en tant que Vice-président, par
19 exemple ?
20 R. Je sais qu’il lui est arrivé de se présenter
21 comme étant le Colonel Kordic et je l’ai vu en uniforme.
22 Je me souviens l’avoir vu alors qu’il rendait visite à des
23 patients à Nova Bila. Je l’ai vu à la télévision aux
24 actualités. J’ai bien compris qu’il n’avait pas de
25 formation ni d’antécédents militaires mais à des moments
Page 13083
1 comme ceux-là, il y a des gens qui se proclament militaires
2 et prennent du grade.
3 Q. Vous avez parlé du Dr Jadranko Prlic qui
4 était Président du HVO, n’est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Étiez-vous au courant du fait que le HVO
7 comptait trois Vice-présidents : Stipo Ivankovic, Kresimir
8 Zubak et Monsieur Anto Valenta ?
9 R. Je savais que c’était le cas pour Monsieur
10 Anto Valenta. J’ai rencontré Monsieur Zubak mais je ne
11 connaissais pas ses fonctions et lorsque j’ai rencontré
12 Monsieur Zubak pour la première fois, il était Ministre
13 adjoint à la Défense. Il se peut que je me trompe. Il se
14 peut que je le confonde avec Slobodan Bozic.
15 Q. Vous avez parlé de Monsieur Valenta et vous
16 avez dit que Monsieur Kordic était la seule personne vers
17 qui Monsieur Blaskic pouvait se tourner pour prendre les
18 décisions qui étaient nécessaires. Je vais vous demander
19 ceci : Connaissez-vous l’un des rapports qui auraient été
20 rédigés par votre supérieur, Monsieur Thebault, ce rapport,
21 notamment, du 1er mai 1993 ? Il s’agit de la pièce 1941 où
22 il était dit que le HVO est une entité politique, que
23 Monsieur Valenta, Vice-président du HVO, est le numéro 2.
24 Vous en souvenez-vous ?
25 R. Non, je ne m’en souviens pas.
Page 13084
1 Me SAYERS (interprétation) : Peut-on placer ce
2 document sur le rétroprojecteur ?
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vais avoir
4 un entretien avec le juriste de la Chambre.
5 Me SAYERS (interprétation) : Veuillez place la
6 pièce 895.1.
7 Q. Je vous montre l’extrait qui décrit Monsieur
8 Valenta comme étant le Vice-président du HVO, le vrai
9 numéro 2 après Mate Boban, le HVO étant une entité
10 politique. Étiez-vous au courant de cette évaluation alors
11 que vous alliez prendre vos fonctions à Travnik ?
12 R. Non, je ne savais pas que cela avait été
13 écrit. J’avais compris que Monsieur Valenta était Vice-
14 président ou un des Vice-présidents du HVO mais ceci,
15 c’était à un stade ultérieur. J’ai eu plusieurs réunions
16 avec Monsieur Valenta.
17 Q. Témoin AD, j’allais vous poser une question à
18 propos du gouvernement de la République croate de Bosnie-
19 Herzégovine mais vu le commentaire formulé par la Chambre,
20 je vais passer à autre chose.
21 Référence est faite… excusez-moi, je reformule ma
22 question : Est-ce que vous étiez au courant du fait que
23 Monsieur Kordic avait été nommé à la commission chargée des
24 promotions et des désignations au Parlement de la
25 République de Croatie et désignation qui a pris effet le
Page 13085
1 1er septembre ou le 3 septembre 1993 ?
2 R. Vous l’aurez compris ce matin, je ne
3 connaissais pas exactement la position exacte qu’il
4 occupait à l’époque, en cette période de transition.
5 C’était intéressant. Nous essayions simplement de savoir
6 s’il avait un poste ministériel, par exemple, ou s’il était
7 simplement parlementaire.
8 Q. Pour évacuer toute confusion, est-ce que vous
9 avez décidé de placer un coup de fil à Monsieur Kordic pour
10 lui poser la question ?
11 R. Je ne pense pas que le téléphone fonctionnait
12 à l’époque. Donc, ce n’était pas aussi simple que cela.
13 Q. Je comprends. C’était une époque difficile
14 mais avez-vous posé la question au Centre de Coordination à
15 Travnik pour que lui soit relayée cette question à Monsieur
16 Kordic ?
17 R. Je crois qu’en marge d’un des documents que
18 nous avons examinés ce matin, vous allez voir une note
19 manuscrite qui dit que Travnik devrait corroborer les
20 informations dont nous disposons. Donc, je suppose que
21 Travnik, comme nous, voulait savoir cela et je crois qu’ils
22 se sont rendus sur place pour essayer d’en savoir plus. Je
23 peux, d’ailleurs, vous en dire plus.
24 J’ai eu une discussion par communication satellite
25 avec le Chef du Centre régional, Monsieur Beaumont, et il
Page 13086
1 était certain, il était convaincu que le poste occupé par
2 Monsieur Kordic dans le nouveau gouvernement était un poste
3 ministériel. Donc, ça veut dire qu’il avait des
4 informations peut-être contradictoires par rapport à ce
5 qu’il y avait.
6 Q. Donc, il y avait, si vous voulez, un manque
7 de concordance entre les informations venant de Mostar et
8 celles venant du Centre de Coordination de Travnik ?
9 R. Nous avions une perception différente par
10 rapport à nos collègues de Bosnie centrale parce que les
11 dirigeants de Mostar nous donnaient une idée différente de
12 ce que cette personne était peut-être sur le terrain.
13 Q. Avez-vous pu vérifier les informations qui
14 figurent dans certains de vos rapports, informations selon
15 lesquelles Monsieur Kordic n’était qu’un parmi 70 délégués
16 parlementaires à Mostar avant la première fonction
17 officielle qui lui a été attribuée, ce dont nous parlerons
18 dans un instant ?
19 R. À la lecture des documents ce matin, je me
20 suis souvenu qu’au moment où j’ai quitté début février la
21 région, j’avais compris la situation comme celle-ci : Il
22 était délégué à partir de Mostar.
23 Q. Il a été nommé au poste de Vice-président du
24 Parlement en février, le 17 février 1994. Il était l’un
25 des deux Vice-présidents ?
Page 13087
1 R. À cette époque, j’étais de retour en
2 Angleterre, je ne m’en souvenais pas mais quand je suis
3 parti, il était… lorsque j’ai refait surface, il était
4 Président du HDZ.
5 Q. Dans certains de vos rapports, on parle d’un
6 conseil du Président ou un conseil présidentiel. Vous
7 souvenez-vous d’avoir discuté de cette entité avec des
8 représentants de la République croate de Herceg-Bosna à
9 Mostar ?
10 R. Oui. C’est bien de cette entité que je
11 parlais lorsque j’avais eu des discussions avec Monsieur
12 Pogarcic. J’avais discuté avec Monsieur Pogarcic mais sans
13 doute avec d’autres personnes, notamment le Premier
14 Ministre de la République croate de Herceg-Bosna, Monsieur
15 Prlic.
16 Q. À votre connaissance – je suppose que ceci ne
17 sera pas contesté – Monsieur Kordic n’a jamais été membre
18 de ce conseil de la présidence ou présidentiel ?
19 R. Je ne me souviens pas avoir vu son nom comme
20 étant le nom d’un des protagonistes principaux.
21 Q. Je pense que c’est Monsieur Lovrenovic qui
22 vous a dit qu’il n’y avait pas de vice-président dans cette
23 république, à l’inverse de la Communauté croate de Herceg-
24 Bosna ?
25 R. Je ne me souviens pas particulièrement. Dans
Page 13088
1 une des déclarations de ce matin, j’ai lu et je me suis
2 souvenu qu’on nous avait donné une répartition, une
3 ventilation de la direction au niveau de la présidence. Il
4 y figurait le nom de Kordic en tant que Vice-président et
5 celui de Kostroman en tant que Secrétaire et ces
6 informations correspondaient tout à fait avec celles que
7 nous recevions du centre régional ou du Centre de
8 Coordination de Travnik.
9 C’est seulement par la suite, lorsque j’ai été
10 voir Monsieur, non pas Rozanovic (ph.) mais Lovrenovic,
11 plutôt. Effectivement, c’est la première personne qui a
12 suggéré qu’il y avait d’autres personnes ou qui a peut-être
13 donné une idée différente de ce que nous avions perçu.
14 Q. Je pense que dans la pièce 1330, dans ce
15 rapport qui date du mois de septembre… pardon, du 15
16 décembre 1993, apparemment, vous avez discuté de ce conseil
17 présidentiel avec Monsieur Lovrenovic, lequel vous a
18 indiqué que c’était des fonctions purement consultatives
19 mais que ces fonctions devaient être davantage précisées
20 parce qu’il fallait un mécanisme destiné à appuyer la
21 république en l’absence du président. Vous en souvenez-
22 vous ?
23 R. Pouvez-vous me donner la cote ?
24 Q. La cote est 1330, document en date du 15
25 décembre.
Page 13089
1 R. Oui. J’ai le document sous les yeux mais
2 nous en avions un autre. Nous avions une liste plus
3 précise où nous voyions figurer le nom de Kordic en tant
4 que Vice-président.
5 Q. Dernière question sur ce point. Voici une
6 hypothèse : Monsieur Kordic n’a jamais été Vice-président
7 de la République croate de Herceg-Bosna. Est-ce que vous
8 le saviez en tant que fait ?
9 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Vous ne pouvez
10 pas présenter ou soumettre ceci en tant que fait. Ce n’est
11 qu’une hypothèse soumise au témoin et le témoin va
12 simplement donner son avis.
13 Monsieur le Témoin, êtes-vous informé sur ce
14 point ?
15 R. Évidemment, la discussion d’aujourd’hui me
16 renvoie aux discussions de l’époque. On se demandait s’il
17 avait un poste d’autorité ou pas. Il a dit aux équipes de
18 Travnik qu’il était Vice-président. Nos premières
19 informations venant de Mostar le confirmaient et ce n’est
20 que plus tard qu’on s’est écarté de cette hypothèse et ces
21 différences ont suscité un intérêt qui n’a jamais cessé.
22 La question était toujours sans réponse au moment où j’ai
23 quitté la région.
24 Me SAYERS (interprétation) :
25 Q. Fort bien ! Je crois que nous ne pourrons
Page 13090
1 pas aller plus loin sur ce point. Passons à un autre
2 sujet. Nous allons parler de la chaîne de commandement des
3 forces armées. Je suppose que vous saviez que le
4 Commandant suprême des forces armées avant la création de
5 la République croate de Herceg-Bosna était Mate Boban ?
6 R. Oui, même si nous étions intéressés par les
7 rapports pressés qu’il avait avec le gouvernement croate.
8 Q. Et vous n’avez jamais élucidé ces questions ?
9 Vous n’avez jamais précisé la relation exacte
10 qu’entretenait Monsieur Boban avec la Croatie ?
11 R. Non.
12 Q. Le grand quartier général ou l’état-major
13 principal de ces forces était à Mostar, n’est-ce pas ?
14 R. Je pense que c’était à Posusje, près de
15 Mostar.
16 Q. C’était, effectivement, le quartier général
17 des forces armées en Herzégovine, n’est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Je pense qu’au départ, le chef de l’état-
20 major était le Général de brigade Milivoj Petkovic ?
21 R. Oui.
22 Q. Qui fut remplacé par le Général Slobodan
23 Praljak vers le milieu de l’année 1993, n’est-ce pas ?
24 R. Nous n’étions pas trop sûrs du poste ou de la
25 fonction exacte occupée par Monsieur Praljak parce que
Page 13091
1 Petkovic, en théorie, est resté commandant et Praljak lui
2 était subordonné mais Praljak n’était pas de cet avis.
3 Q. Et Ante Roso, ce Général est-il devenu
4 Commandant en chef des forces croates en novembre 1993 et
5 est-ce que c’est Monsieur Bozic, Ministre de la Défense de
6 la République croate de Herceg-Bosna, qui vous en a
7 informé ?
8 R. Oui. Je suis allé le voir pour établir une
9 relation de travail avec lui. À ce moment-là, le quartier
10 général s'était déplacé plus vers l’ouest. Je ne me
11 souviens plus de la ville où il s’était installé.
12 Q. Fort bien ! Avez-vous essayé de savoir s’il
13 y avait un code de discipline au sein des forces armées
14 croates ?
15 R. Je n’ai pas particulièrement posé la question
16 mais ce que j’ai posé comme question c’était celle de
17 savoir quels étaient les rapports de certains commandants
18 au sein de la structure de commandement après les combats
19 qui s’étaient déroulés en Bosnie centrale. Il apparaissait
20 clairement que le HVO n’était pas nécessairement très bien
21 vu. Il y avait des discussions entre les dirigeants
22 politiques et militaires et on s’inquiétait que Monsieur
23 Petkovic et Monsieur Stojic, ministres de la Défense,
24 allaient peut-être être mutés ou remplacés car c’était une
25 période tout à fait incertaine et nous étions très
Page 13092
1 intéressés par la question de savoir qui occupait tel ou
2 tel poste.
3 Q. À cet égard, une dernière question. Avez-
4 vous essayé de savoir s’il existait un système de cour
5 martiale ou de procureur militaire mis en place pour
6 sanctionner tout soldat qui s’était rendu coupable
7 d’infractions aux lois et coutumes militaires ?
8 R. Je n’ai pas posé la question directement mais
9 je serais poussé à le croire, ne serait-ce qu’à cause de
10 l’incident où Stari Most, le vieux pont de Mostar, a été
11 pilonné soi-disant par des soldats dissidents. Par la
12 suite, on nous a dit que des personnes avaient été arrêtées
13 qui faisaient l’objet d’une procédure militaire.
14 Normalement, c’est ce qui se passe dans une structure
15 militaire. Il doit y avoir une structure qui s’occupe de
16 la discipline.
17 Q. Mais vous n’avez rien constaté qui vous
18 pousse à conclure le contraire au cours de votre mission en
19 Bosnie-Herzégovine ?
20 R. La seule chose que je dirais en guise de
21 commentaire est que la plupart des autorités ne faisait pas
22 toujours l’objet d’autant de cohésion que ce qu’on pourrait
23 attendre dans une organisation militaire mieux structurée.
24 Q. Parlons un peu de la Bosnie centrale. Vous
25 conviendrez avec moi que le Colonel Blaskic était le
Page 13093
1 Commandant suprême de toutes les forces croates ou du HVO
2 en Bosnie centrale pendant la durée de votre mission ?
3 R. Oui. Il était le Commandant de la zone
4 opérationnelle de Bosnie centrale.
5 Q. Qui avait un contrôle direct sur toutes les
6 opérations militaires pour Vitez, Busovaca, pour ces
7 enclaves-là ?
8 R. Oui, mais parfois, l’interface militaire
9 était très importante et je pense qu’au cours de ma
10 mission, Monsieur Blaskic a fait des allusions à la
11 direction politique plutôt que simplement à la direction
12 militaire.
13 Q. Il est exact, n’est-ce pas, que le Colonel
14 Blaskic ne vous a jamais dit que son pouvoir, ses
15 attributions militaires étaient limitées et que pour avoir
16 l’autorisation de faire telle ou telle chose, il devait
17 demander l’accord de Monsieur Kordic ?
18 R. Mais si, il me l’a dit et je crois que nous
19 avons vu une déclaration tout à fait parlante sur ce point
20 ce matin. Il m’a dit, Monsieur Blaskic, s’agissant de ce
21 qui se passait à Genève : « C’est là un aspect politique »
22 et que Kordic était l’homme à qui je devais m’adresser. Je
23 vous ai dit que cette question de l’interface politique ou
24 militaire est particulièrement intéressante dans la région.
25 Q. Oui, mais moi, je parle de décisions
Page 13094
1 militaires précises qu’il fallait prendre dans les enclaves
2 de Vitez et Busovaca. Blaskic ne vous a jamais dit qu’il
3 avait besoin de l’accord de Kordic pour faire telle ou
4 telle chose dans sa zone de responsabilité ?
5 R. Non. Il ne me l’a jamais dit de façon
6 spécifique mais je sais pourtant que Monsieur Kordic était
7 la personne qui dirigeait certaines négociations
8 militaires.
9 Q. Le Colonel Blaskic ne vous a jamais dit que
10 Monsieur Kordic ait le moindre pouvoir militaire ? Soyons
11 francs.
12 R. Moi, j’ai cru comprendre que Monsieur Kordic
13 avait le grade de Colonel. À l’époque, c’était le même
14 grade que Monsieur Blaskic mais je ne pense pas que le
15 Colonel Blaskic, qui était un militaire de carrière,
16 cherchait l’avis de Monsieur Kordic en matière militaire
17 mais il s’adressait à lui pour des questions plutôt
18 politiques.
19 Q. Tranchons dans le vif. Vous avez dit que
20 Monsieur Kordic était le représentant des autorités
21 politiques dans l’enclave et que Monsieur Blaskic, lui,
22 était l’incarnation du pouvoir militaire : Est-ce exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Je pense qu’il est exact de dire que vous
25 n’avez jamais vu le Colonel Blaskic en train de consulter
Page 13095
1 Monsieur Kordic avant de prendre une décision militaire
2 particulière. Est-ce bien exact ?
3 R. C’est exact.
4 Q. Vous avez aussi parlé d’une occasion ou d’une
5 réunion où Monsieur Blaskic devait consulter quelqu’un
6 avant de prendre une décision mais je ne me souviens plus
7 exactement du contexte. Vous ne savez pas s’il a
8 simplement, pour prendre cette décision, consulté les
9 commandants de sa structure ?
10 R. Il s’agissait de l’accès à Stari Vitez mais
11 je ne sais pas à qui il s’est adressé pour discuter de
12 cette question militaire.
13 Q. Une question à propos du Colonel Siljeg.
14 Vous en avez parlé dans votre interrogatoire principal. Il
15 était Commandant de la zone opérationnelle de Herzégovine
16 pour le nord-ouest de l’Herzégovine, alors que vous étiez à
17 Gornji Vakuf, n’est-ce pas ?
18 R. Oui. Il était à Tomislavgrad. C’était le
19 Commandant de cette zone.
20 Q. Il est indubitable qu’il était aussi le
21 Commandant du rang le plus élevé dans la région, n’est-ce
22 pas ?
23 R. Oui. C’est avec lui que nous avions toujours
24 affaire.
25 Q. Serait-il exact de dire que dans la région de
Page 13096
1 Gornji Vakuf, il ne fallait pas, avant de prendre une
2 décision, consulter Monsieur Kordic ?
3 R. Non.
4 Q. En d’autres termes, son influence politique
5 n’allait pas jusqu’à Gornji Vakuf, pour autant que vous
6 puissiez en juger ?
7 R. La situation n’est pas militaire. Vous
8 voyez, en situation militaire, on peut délimiter les zones.
9 Ce n’est pas le cas en politique. Dans la zone de Bosnie
10 centrale où se trouvait Blaskic, effectivement, cela
11 n’incluait pas Gornji Vakuf, ni Bugojno et je n’ai jamais
12 là fait référence à quelque interaction avec Monsieur
13 Kordic pour cette région.
14 Q. Ceci vaudrait aussi pour la période de votre
15 mission que vous avez passée à Mostar ? L’influence de
16 Kordic n’allait pas jusque là, ne s’étendait pas aux
17 questions militaires qui étaient réglées à Mostar ?
18 R. Je suppose qu’il y avait des personnes de
19 plus haut rang à Mostar qui prenaient les décisions, vu
20 l’isolement de Monsieur Kordic en Bosnie centrale.
21 Q. Vous avez parlé de façon tout à fait
22 intéressante et précise de l’isolement grandissant de ces
23 enclaves croates au fil de l’été 1993. Je pense qu’il est
24 exact de dire que les Croates étaient coincés dans quatre
25 enclaves : Vitez-Busovaca pour commencer ; puis dans
Page 13097
1 l’enclave de Zepce ; et Kiseljak ; la quatrième étant
2 l’enclave de Vares. Est-ce exact ?
3 R. Oui.
4 Q. Je suppose que cet isolement grandissait au
5 fil du temps mais aussi au fil du succès remporté par les
6 offensives musulmanes contre les forces croates au cours de
7 cet été, n’est-ce pas ?
8 R. C’est exact.
9 Q. Par conséquent, en ce qui concerne le rapport
10 au sujet de cet isolement et la manière dont ceci a été
11 conçu en août 1993, pratiquement, ceci correspond mieux que
12 les rapports du mois d’octobre 1993 ?
13 R. Non. En ce qui concerne l’isolement, la
14 situation s’est renforcée. On ne pouvait pas circuler
15 facilement. C’était beaucoup plus difficile. Au moment où
16 moi, j’ai traversé de Bosnie centrale pour passer à Mostar,
17 c’était beaucoup plus critique et la poche de Vares était
18 critique. L’enclave de Zepce était quelque peu plus sûre
19 mais pour des raisons qui sont autres, on est arrivé à
20 aboutir à un accord avec les forces serbes. C’est la
21 raison pour laquelle la situation à ce niveau-là était
22 différente.
23 Q. Nous allons voir maintenant qu’est-ce qui
24 s’est passé au niveau de l’enclave de Vares, si vous voulez
25 bien. Il y avait un degré de frustration assez important
Page 13098
1 qui vous a été exprimé par les représentants et la
2 direction politique à Vares. Je pense que c’était en août
3 1993. Je pense qu’il vous a dit également qu’ils étaient
4 pratiquement coupés par rapport à la direction politique en
5 Croatie. Est-ce que c’est exact ?
6 R. Je pense, effectivement, qu’ils étaient très
7 préoccupés pour tout ce qui se passait à Genève. Ils
8 avaient peur qu’on allait les vendre, que leur territoire
9 allait être remis. Si je me réfère une fois de plus à un
10 document qui a été versé au dossier aujourd’hui, le maire
11 nous a envoyé une lettre dans laquelle on précise qu’ils
12 ont le sentiment qu’ils ont été en quelque sorte vendus.
13 Q. Une dernière question. Vous avez déposé au
14 sujet d’un certain nombre d’informations auxquelles on ne
15 pouvait pas parvenir facilement. Pourrions-nous dire que
16 l’ensemble de ceux qui représentaient la direction
17 politique ou les militaires croates, ils voulaient toujours
18 obtenir des informations, notamment quand il s’agissait des
19 régions telles Vares et autres qui étaient isolées ?
20 R. Oui, c’est vrai. Ceci est vrai également
21 pour la direction musulmane car ils souhaitaient savoir ce
22 qui se passait dans leurs enclaves qui étaient isolées où
23 se trouvaient leurs propres minorités. Effectivement, nous
24 avions des moyens pour satisfaire à leur information. On
25 n’a pas transmis des informations militaires mais je me
Page 13099
1 souviens qu’à Vares, par exemple, on a parlé avec le
2 Colonel Blaskic de ce qui se passait au niveau de la
3 population civile.
4 Q. Est-ce qu’on pourrait dire que, du point de
5 vue du Colonel Blaskic, il lui était extrêmement difficile
6 de savoir ce qui s’était passé avec les Croates à Vares et
7 les musulmans également ne pouvaient pas savoir ce qui se
8 passait avec leur propre population à Stari Vitez ?
9 R. Oui. C’était difficile. Il y avait une
10 certaine communication entre ces deux communautés, ces deux
11 groupes. Je me souviens, par exemple, que j’ai pu voir
12 également un certain nombre de papiers que j’ai reçus par
13 transmission et je pense que c’est par satellite qu’ils ont
14 communiqué entre Zepce et du HVO. Il y avait des
15 possibilités de communiquer mais pas toujours et il n’était
16 pas possible, notamment, de voyager.
17 Excusez-moi, je voulais tout simplement rajouter
18 quelque chose. Ultérieurement, plus tard, et je parle de
19 la période qui a commencé début août, il y a une autre
20 possibilité qui s’est ouverte. Quand les gens de Kiseljak
21 pouvaient circuler plus librement et partout où il y avait
22 la communauté croate qui avait une ligne de front face aux
23 Serbes, on ne pouvait pas isoler les enclaves croates et
24 c’est la raison pour laquelle, je l’ai dit, à Zepce, ils
25 ont essayé d’aboutir à un accord. Ça s’est passé au niveau
Page 13100
1 de l’enclave Zepce. C’est la raison pour laquelle, par
2 exemple, les gens de Kiseljak pouvaient se rendre à Vares,
3 alors que de Busovaca jusqu’à Kiseljak, c’était très
4 difficile pour ne pas dire impossible de s’y rendre.
5 Q. Pourrions-nous passer maintenant à un autre
6 sujet, un sujet qui a été soulevé par le Président ? On va
7 parler des Jokeris. Il y a donc un certain nombre de
8 questions que j’aimerais vous poser et qui concernent les
9 moyens de contrôler ces unités. Est-ce que vous-même, vous
10 avez parlé personnellement avec les commandants de la
11 police militaire à Vitez ?
12 Je vais vous poser la question au sujet de Zvonko
13 Vukovic qui a été commandant de la police militaire
14 jusqu’au 19 janvier 1993. Est-ce que vous aviez eu
15 l’occasion de parler avec ce monsieur ?
16 R. Je ne m’en souviens pas. Je ne me souviens
17 pas des noms. Je sais que j’ai rencontré un certain nombre
18 de représentants des deux côtés mais les gens changeaient,
19 les noms changeaient. C’est la raison pour laquelle
20 j’essaie de m’en souvenir et je sais que j’ai rencontré un
21 certain nombre de personnes.
22 Q. De toute façon, je ne vais pas tester votre
23 mémoire. Je vais vous proposer quelques noms et ceci va
24 peut-être rafraîchir votre mémoire. Est-ce que vous vous
25 souvenez de Pasko Ljubicic ?
Page 13101
1 R. Oui.
2 Q. Il est devenu chef commandant du 4e bataillon
3 militaire depuis le 19 janvier 1993 et il y est resté
4 jusqu’à la fin juillet 1994 ?
5 R. Je ne me souviens pas exactement de la date
6 exacte. Je ne connais pas le nom non plus mais je me
7 souviens en revanche que je ne faisais pas la différence
8 entre le chef de police militaire ou un autre poste qu’il
9 occupait. Je sais que, de toute façon, il y était à un
10 moment donné ou l’autre.
11 Q. Est-ce qu’on pourrait dire, par exemple, si
12 vous êtes au courant, que l’ECMM n’avait pas fait un
13 rapport concernant la structure et la chaîne de
14 commandement au niveau de la police militaire ?
15 R. Non, mais je ne suis pas au courant. Je ne
16 sais pas si, effectivement, il y avait des rapports dans ce
17 sens-là. Je n’ai pas obtenu une tâche dans ce sens-là et
18 je n’ai pas demandé à qui que ce soit dans mon équipe de le
19 faire.
20 Q. Si j’ai bien compris, vous n’avez jamais
21 vous-même rédigé un rapport à ce sujet-là ?
22 R. Il n’est pas impossible que j’en aie parlé,
23 que j’aie parlé de ces noms et qu’ils étaient présents mais
24 je ne me souviens pas avoir fait un rapport tout spécial.
25 En revanche, je me souviens que j’avais écrit des rapports
Page 13102
1 sur les Mujahedins.
2 Q. Et ceci, donc, se réfère au même groupe. Je
3 pense que vous en avez parlé. Est-ce que vous vous
4 souvenez que ce groupe a été placé à Kiseljak et qu’il a
5 été en connexion directe avec Monsieur Ivica Rajic dont
6 vous avez parlé ?
7 R. Je ne me souviens pas de la localité concrète
8 dont vous me parlez.
9 Q. En d’autres termes, si je peux dire, vous
10 n’avez pas vu des notes ou pour mémoire, à ce moment-là,
11 vous n’avez pas rédigé un document au sujet des Apostolis,
12 Apôtres, ou Jokeris, n’est-ce pas ?
13 R. Oui, vous avez raison. On en a peut-être
14 parlé dans le rapport mais personnellement, je n’ai pas
15 fait un rapport à cette intention.
16 Q. Vous n’avez pas parlé avec aucun représentant
17 de cette unité Jokeris ou Apôtres ?
18 R. Si j’ai bien compris, c’était les hommes de
19 la police militaire qui étaient leurs chefs. C’est peut-
20 être avec eux que j’en ai parlé.
21 Q. Est-ce que vous avez parlé avec Palavra qui
22 est venu après Pasko Ljubicic et jusqu’à la fin de la
23 guerre ? Est-ce que vous étiez en contact avec lui ?
24 R. Je ne m’en souviens pas. S’il était une
25 personne-clé, je l’ai rencontré.
Page 13103
1 Q. Messieurs Vukovic, Ljubicic, Palavra,
2 personne n’a dit qu’il a été subordonné à Monsieur Kordic
3 et qu’il devait recevoir des ordres de Monsieur Kordic ?
4 R. Je ne me souviens pas leur avoir posé la
5 question dans ce sens-là.
6 Q. Vous avez parlé d’une source d’information en
7 parlant de ce lien entre Kordic et ses groupes. Est-ce que
8 vos interprètes ou les conducteurs avec lesquels vous étiez
9 en contact ont eu des relations ou des liens avec ces
10 personnes-là et avec qui ils ont parlé ?
11 R. Comme je l’ai déjà dit, on ne s’appuyait pas
12 sur une seule source d’information. La plupart des données
13 nous parvenaient de la FORPRONU. Les déclarations ou les
14 informations qu’on recevait des interprètes c’était tout
15 simplement pris comme quelque chose qui était un point de
16 vue, une opinion qui les concernait.
17 Q. Mais quand vous parlez de la FORPRONU, est-ce
18 que vous pensez au BRITBAT qui faisait partie intégrante de
19 la FORPRONU et qui se trouvait à Nova Bila ?
20 R. Oui. C’était les gens avec lesquels je
21 coopérais mais la FORPRONU, dans cette région, comprenait
22 d’autres bataillons des Pays-Bas, ensuite, des Belges, et
23 nous avons eu un certain nombre de relations entre nous
24 mais je me suis quand même appuyé un peu plus sur ce que
25 j’obtenais du côté du bataillon britannique mais ce qui
Page 13104
1 était intéressant également au niveau de ce groupe c’est
2 qu’à ce moment-là, il y avait un certain nombre de choses
3 qui se passaient au moment où il y avait des accords qu’on
4 négociait.
5 Par exemple, ceci n’était pas dû parce que
6 quelqu’un était intervenu ou non mais c’est tout simplement
7 parce qu’on avait cru qu’il y avait un certain nombre de
8 groupes qui étaient de hors du contrôle de Blaskic et qui
9 étaient pratiquement sous le contrôle de Kordic.
10 Q. Mais les informations, vos informations,
11 c’est de seconde main et vous ne savez pas absolument sur
12 quoi vous basez vos informations ?
13 R. On pourrait dire que pratiquement, c’est de
14 cette manière-là que nous recevions des informations.
15 Q. Nous pouvons poursuivre. Revenons à la
16 période où vous êtes retourné à Travnik ou plutôt quand
17 vous êtes venu pour la première fois dans cette région.
18 Est-ce que c’était bien la première fois que vous avez pris
19 connaissance de la Bosnie centrale ? C’était au mois
20 d’avril 1993 ?
21 R. Non. J’étais déjà au QG de Monsieur Blaskic
22 quelque peu avant, au moment où il y avait une enquête qui
23 a été menée et qui concernait l’enlèvement des Croates
24 entre Gorniji Vakuf et Travnik. Il y avait un certain
25 niveau de personnes qui ont été enlevées, qui ont disparu.
Page 13105
1 Il s’agissait des Croates initialement et on avait essayé
2 d’enquêter, de voir ce qui se passait.
3 Je me souviens que j’avais emmené avec moi
4 Monsieur Zivko Totic, qui était commandant de la brigade
5 Ante Starcevic et de Gornji Vakuf. Nous sommes allés en
6 Bosnie centrale. Nous avons rencontré les gens. Nous
7 avons parlé à Opara avec les représentants de l’armée de
8 Bosnie-Herzégovine et je me suis rendu en Bosnie centrale.
9 À ce moment-là, c’est un événement dont je me souviens. Il
10 y avait un autre événement également mais c’était une
11 manifestation qui était autre. C’est donc à deux reprises
12 que j’y suis allé.
13 Q. Donc, vous êtes allé à Gornji Vakuf d’abord
14 et vous n’étiez pas expert pour la région de Travnik, de
15 Busovaca avant de vous y rendre, avant d’aller en avril
16 1993, n’est-ce pas ?
17 R. Oui, tout à fait.
18 Q. Au moment où vous êtes arrivé, c’était juste
19 avant l’offensive entre l’armée de Bosnie-Herzégovine et
20 c’était bien à cette époque-là où vous êtes revenu ?
21 C’était juin 1993 ?
22 R. Oui, vous avez parfaitement raison. C’était
23 le début des conflits et ensuite, ça s’est transformé en
24 une offensive.
25 Q. Cette offensive a été déclenchée dans un
Page 13106
1 autre secteur dans la région de Kakanj. Est-ce que vous
2 vous en souvenez ?
3 R. Oui, je me souviens mais c’était avant
4 Travnik, dans le secteur de Zenica, au moment où une
5 brigade croate qui se trouvait à Zenica. Je pense qu’elle
6 était commandée par Monsieur Totic.
7 Q. Totic ?
8 R. Oui, tout à fait, Zivko Totic et je sais
9 qu’il a été enlevé ensuite. Nous avons participé également
10 aux négociations pour sa libération. Je me souviens que
11 nous avons essayé également d’aboutir à un cessez-le-feu à
12 Travnik et ensuite à Kakanj.
13 Q. Pour que tout soit clair au compte rendu, en
14 avril 1993, vous avez compris que les forces du HVO à
15 Zenica ont subi un échec et que la présence du HVO à Zenica
16 n’y était plus ?
17 R. Oui, tout à fait. C’était d’un ordre général
18 et pour des raisons différentes mais ça, c’est vrai.
19 Q. Par conséquent, en juin 1993, le HVO n’était
20 plus à Travnik étant donné que l’armée de Bosnie-
21 Herzégovine a été victorieuse et le HVO a subi un échec
22 également à Kakanj ?
23 R. Oui, mais il y avait quand même un petit
24 écart entre Travnik et Kakanj. C’est à l’ouest de la
25 vallée de la Lasva qu’il y a eu un certain nombre de
Page 13107
1 combats qui ont commencé et qui ont été transférés dans le
2 secteur de Kakanj.
3 Q. Pour savoir à peu près combien il y avait de
4 réfugiés expulsés, est-ce que vous avez une estimation
5 générale en ce qui concerne le nombre de réfugiés expulsés
6 à cause de cette offensive à Travnik ? Nous avons entendu
7 un chiffre entre 2 000 et 5 000. Qu’est-ce que vous en
8 pensez ? Combien il y en avait qui étaient expulsés parmi
9 les Croates ?
10 R. Je pense que c’était 20 000 plutôt que 5 000
11 mais je me souviens du nombre qui sont restés à Travnik ou
12 à Bugojno. C’est entre 2 500 et 4 000, tout au moins au
13 début, mais en ce qui concerne Travnik, c’est un nombre
14 également qui a diminué.
15 Q. Est-ce que l’ECMM avait également une
16 estimation concernant le nombre de réfugiés expulsés à
17 cause de l’offensive de Kakanj ? Nous avons entendu un
18 chiffre de 15 000.
19 R. Je ne m’en souviens pas mais je sais que
20 c’était un grand nombre.
21 Q. Une dernière question. En août et en
22 septembre, il y a eu une autre offensive qui s’était
23 déclenchée. Vous avez parlé de Bugojno. Est-ce que vous
24 vous en souvenez ?
25 R. Oui, tout à fait.
Page 13108
1 Q. Est-ce que vous vous souvenez qu’il y avait
2 des crimes qui ont été commis à Uzdol en septembre 1993 ?
3 Il s’agissait de 35 victimes croates.
4 R. Oui, je me souviens mais à cette époque-là,
5 j’étais en Angleterre. C’est un crime qui a eu lieu. Je
6 m’en souviens. Notre mission était présente. Mon équipe
7 de Gornji Vakuf s’est rendue sur place et je pense qu’ils
8 ont emmené avec eux également une équipe de BBC.
9 Q. Est-ce que vous savez que l’armée de Bosnie-
10 Herzégovine avait entrepris des investigations d’enquête ?
11 Est-ce qu’il y avait quelqu’un qui a été sanctionné ? Est-
12 ce qu’un commandant a été remplacé à cause de cet
13 événement ?
14 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas s’il y avait
15 une enquête officielle. Je ne me souviens pas non plus
16 qu’il y ait eu des changements au niveau de la direction.
17 Q. Nous avons parlé du Convoi de la Joie. Je ne
18 vais pas vous poser des questions car nous avons déjà
19 obtenu beaucoup d’informations à ce sujet-là. Vous allez
20 en être satisfait, j’en suis sûr et certain.
21 Nous allons passer aux réunions dont vous avez
22 parlé en interrogatoire principal. Il y avait eu une
23 réunion que vous aviez avec Kordic le 1er septembre 1993 –
24 vous vous en souvenez probablement – au moment où vous avez
25 dit qu’on avait parlé de cet incident de pilonnage ?
Page 13109
1 R. C’était à peu près à cette époque-là. Je ne
2 suis pas sûr que c’était le 1er septembre mais c’était à
3 peu près à cette époque-là, à ce moment-là.
4 Q. Nous avons ici un document de l’ECMM du 1er
5 janvier… septembre (l’interprète se corrige) de 1993. Je
6 vais essayer de vous le présenter pour rafraîchir votre
7 mémoire.
8 Me SAYERS (interprétation) : Juste pour informer
9 le témoin et la Chambre, je vais faire de mon possible pour
10 terminer d’ici 10 minutes.
11 Q. D165/1. Monsieur le Témoin AD, si vous
12 voulez bien jeter un coup d’œil sur le document, il s’agit
13 d’un résumé qui a été fait par le centre régional de
14 Zenica. Deuxième page, troisième paragraphe, on parle de
15 HCR et les représentants, qu’il y a eu des entretiens assez
16 longs avec Monsieur Kordic qui s’est présenté comme vice-
17 président de la Communauté croate de Herceg-Bosna. Il a
18 été indispensable également de rédiger un rapport.
19 Est-ce que c’est bien vous l’adjoint du centre ?
20 R. Non. Il ne s’agissait pas de la réunion à
21 laquelle j’ai assisté. C’était Monsieur Jean-Pierre
22 Thebault et son adjoint. Je ne me souviens plus qui
23 c’était.
24 Q. Monsieur le Témoin AD, ce n’est pas
25 indispensable de rester plus longtemps sur ce document.
Page 13110
1 Encore quelques questions. Vous avez témoigné du
2 fait que vous avez remarqué des véhicules portant des
3 insignes HV, armée croate, ainsi que des personnes qui
4 étaient vêtues en uniformes portant des insignes armée
5 croate. Est-ce que vous avez parlé avec quelques-uns de
6 ces individus ?
7 R. Non.
8 Q. Il est vrai, par conséquent, qu’il était fort
9 difficile de définir si, véritablement, l’armée croate y
10 était impliquée ou non, s’ils avaient pris part en
11 Herzégovine du sud ou en Bosnie centrale et que de nombreux
12 rapports de l’armée de Bosnie-Herzégovine étaient assez
13 contradictoires en ce qui concerne la présence de l’armée
14 croate et ça ne s’est pas confirmé ou rarement ?
15 R. C’était une région qui était intéressante
16 mais il est vrai également que ce qui était intéressant,
17 c’était plutôt de savoir s’il y avait une quantité ou la
18 qualité. À mon avis, il s’agissait d’une formation qui
19 était professionnelle. Rien de ce que j’ai vu auparavant
20 en observant le HVO. Il s’agissait d’une unité qui était
21 bien équipée, tout à fait différente.
22 Q. Je vous comprends parfaitement mais est-ce
23 qu’on pourrait dire que pendant que vous étiez en Bosnie-
24 Herzégovine, c’est la première fois que vous avez remarqué
25 l’armée où il y avait également des forces du HV ?
Page 13111
1 R. J’ai vu quelques individus mais pas en nombre
2 aussi important et je ne pouvais pas véritablement
3 remarquer si c’était des soldats qui portaient des insignes
4 du HV ou, éventuellement, des volontaires, mais c’est bien
5 la première fois où j’ai vu un nombre aussi important de
6 soldats qui appartenaient à une unité de tel type.
7 Q. Mais est-ce que vous vous êtes informé pour
8 voir quel était le but de cette armée, quelles étaient les
9 tâches qu’elle devait exercer ou bien vous avez tout
10 simplement passé dessus ?
11 R. Non. J’ai fait un rapport, un rapport
12 spécial. Je pense que c’était mi-janvier. Je suis rentré
13 en février mais avec le Chef du Centre, Martin Garrod, nous
14 avons fait un rapport spécial et c’est à ce moment-là que…
15 c’est le rapport qui a été examiné par l’équipe mais qui ne
16 pouvait pas aller plus loin que Prozor à l’époque. En
17 effet, le Chef du Centre régional aurait dû étudier le cas
18 mais je ne sais pas s’il l’a fait.
19 Q. Vous voulez dire que vous ne savez pas ce qui
20 s’était passé par la suite et quel était le résultat
21 également de ces enquêtes ?
22 R. Oui, effectivement. Je ne suis pas au
23 courant et je ne sais pas si l’enquête a été faite.
24 Q. Vous voulez dire que vous ne savez absolument
25 pas où se rendaient ses forces, quelle était leur mission,
Page 13112
1 ce qu’elles devaient faire ?
2 R. Non. Ce serait trop de dire. Ils se sont
3 déplacés par la route principale en direction de Prozor et
4 opposés par rapport à moi, ils se déplaçaient vers la
5 Bosnie centrale. Je n’ai jamais vu auparavant de telles
6 forces personnellement. J’étais soldat, militaire, et j’ai
7 compris qu’il s’agissait de quelque chose de tout à fait
8 autre et différent par rapport à tout ce que j’ai vu
9 auparavant.
10 Par conséquent, ils n’ont même pas essayé de
11 cacher l’identité. Ils ont tout simplement enlevé
12 l’immatriculation, les plaques d’immatriculation. Je ne me
13 suis pas entretenu avec des soldats.
14 Q. Vous n’avez jamais vu des unités de l’armée
15 croate dans l’enclave Busovaca ou en Bosnie centrale
16 pendant l’exercice de vos [expurgée]
17 [expurgée] , n’est-ce
18 pas ?
19 R. Oui, vous avez raison.
20 Q. Encore deux sujets que nous allons aborder,
21 Monsieur. Vous avez rencontré le Colonel Blaskic après la
22 guerre et il vous a informé que Ivica Rajic avait été exclu
23 de son commandement, limogé de son commandement et il
24 serait puni suite à ses activités durant la guerre, n’est-
25 ce pas ?
Page 13113
1 R. Pouvez-vous me rappeler quand cette rencontre
2 avec le Colonel Blaskic aurait eu lieu ? Est-ce au moment
3 où Monsieur Blaskic a pris le commandement du HVO ?
4 Q. Oui.
5 R. Je ne peux pas vraiment dire mais en raison
6 de ce qui s’est passé à Stupni Do, c’est une question qui
7 se pose. En raison également des allégations relatives aux
8 personnes impliquées à Stupni Do.
9 Q. Une dernière question en rapport avec votre
10 rencontre avec Monsieur Kordic en novembre 1994. Il n’a
11 jamais dit quoi que ce soit qui semblait indiquer que les
12 Croates n’étaient pas impliqués dans le développement de la
13 fédération entre les Croates et les musulmans qui résultait
14 du plan de paix, n’est-ce pas ? En fait, il a parlé dans
15 un sens tout à fait contraire en vous disant que les
16 Croates étaient engagés en faveur de la fédération, n’est-
17 ce pas ?
18 R. Oui, c’est exact. Il m’a dit qu’ils étaient
19 engagés en faveur de la fédération. J’ai demandé des
20 preuves de cet engagement. J’ai souligné les disparités
21 entre ce qu’il disait et les signaux qui étaient envoyés
22 dans les actes à la communauté internationale mais il ne
23 m’a certainement donné aucune indication contraire. Il ne
24 m’a rien dit d’autres que les Croates soutenaient la
25 fédération.
Page 13114
1 Q. Il vous a dit que des petits pas étaient
2 nécessaires pour atteindre un objectif plus général, n’est-
3 ce pas, et que ces petits pas seraient faits ?
4 R. C’est exact.
5 Q. Merci beaucoup.
6 Me SAYERS (interprétation) : Je n’ai pas
7 d’autres questions.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Mikulicic ?
9 Me MIKULICIC (interprétation) : Merci, Monsieur
10 le Président. Je n’ai pas de question.
11 RÉINTERROGÉ PAR Me NICE
12 (interprétation) :
13 Q. Quelques questions supplémentaires, Témoin
14 AD, suite à ce que nous venons d’entendre. Les délégués
15 qui allaient à Mostar, en général, étaient-ils élus ou
16 étaient-ils nommés à leurs postes ?
17 R. Il n’y avait pas d’élection dans ce cadre.
18 Ces hommes étaient nommés.
19 Q. On vous a posé des questions au sujet de
20 fonctions politiques par opposition à un rôle militaire. À
21 ce sujet, j’aimerais vous interroger au sujet de Stari
22 Vitez pour commencer. À votre avis, était-il nécessaire en
23 quoi que ce soit que la question qui vous était posée en ce
24 lieu soit ébruitée en dehors de la Bosnie centrale ?
25 R. Je ne pense pas qu’une personne extérieure à
Page 13115
1 la Bosnie centrale aurait pu avoir une connaissance, enfin,
2 aurait pu bien connaître la situation sans informations
3 provenant de tiers. Je pense que le problème aurait pu
4 être résolu grâce à la direction de la Bosnie centrale.
5 Q. En Bosnie centrale, aucun supérieur à Blaskic
6 n’existait sur le plan hiérarchique militaire. C’est bien
7 ce que vous êtes en train de dire ?
8 R. À l’intérieur de la Bosnie centrale, c’est
9 exact. Même s’il est possible de dire que Monsieur Kordic
10 avait un rang égal. Sur le plan militaire, c’était Blaskic
11 qui était le supérieur mais Kordic était parfois consulté
12 sur le plan politique.
13 Q. De façon générale, est-il normal qu’un
14 militaire ne prenne pas une décision lui-même mais consulte
15 quelqu’un d’autre plutôt que simplement de s’adresser à son
16 supérieur dans la hiérarchie militaire ? Y a-t-il une
17 raison pour qu’il n’agisse pas de cette façon ?
18 R. Non.
19 Q. Mais dans le cas de Blaskic, lorsqu’il
20 s’adressait ailleurs, choisissait-il la personne à qui il
21 faisait appel ?
22 R. Non.
23 Q. Les dirigeants militaires de Mostar : Des
24 questions vous ont été posées à ce sujet ainsi qu’au sujet
25 de la participation de Kordic et j’aimerais ajouter la
Page 13116
1 question suivante. Êtes-vous en train de nous dire d’une
2 façon ou d’une autre que les dirigeants militaires de
3 Mostar n’avaient aucune influence ou aucun contrôle
4 politique auquel ils se pliaient ?
5 R. Je pense que les éléments professionnels
6 parmi les soldats s’adressaient à la direction politique.
7 Q. À Mostar, y avait-il des dirigeants
8 politiques à un niveau supérieur à celui de Kordic, à votre
9 avis, ou n’y en avait-il pas ?
10 R. Oui. Il y avait des dirigeants supérieurs à
11 Monsieur Kordic, par exemple, Monsieur Boban et Monsieur
12 Prlic.
13 Q. On vous a interrogé au sujet de la source
14 d’informations qui était la vôtre, les interprètes, les
15 chauffeurs, et cætera. Vous avez parlé de la SFOR et avez
16 dit également recueillir des informations de la bouche de
17 vos interprètes et de vos chauffeurs. De façon générale,
18 pouvez-vous nous être d’une quelconque utilité en nous
19 disant éventuellement d’où les interprètes et les
20 chauffeurs affirmaient tirer, eux, leurs informations ou
21 est-ce une question trop générale pour que vous puissiez y
22 répondre ?
23 R. En général, les informations provenaient de
24 sources très générales.
25 Q. Entre les interprètes, les chauffeurs et la
Page 13117
1 SFOR, quelle était votre source d’informations principale
2 si celle-ci était unique… je vais reformuler : Quelle
3 était votre source d’information principale parmi vos
4 subordonnés si celle-ci était unique ?
5 R. Je n’aimerais pas donner l’impression que
6 nous ne menions pas nos propres investigations. Donc, la
7 FORPRONU était notre point de référence et si je devais
8 dire avec qui je parlais en ayant le moins de doutes quant
9 aux informations reçues, je dirais sans l’ombre d’une
10 hésitation que c’était la FORPRONU et pas les interprètes
11 qui nous traduisaient les propos des commandants de l’armée
12 de Bosnie-Herzégovine, par exemple. Dans ce cas-là, les
13 informations étaient vérifiées.
14 Q. Mais dans le cas qui nous intéresse, avez-
15 vous trouvé qu’il y avait concordance entre plusieurs
16 sources d’informations ?
17 R. Oui.
18 Q. Quel que soit le nombre de camions qui, selon
19 vous, se dirigeaient vers Prozor, un tel déplacement
20 aurait-il dû, à votre avis, être consigné dans un
21 document ?
22 R. Oui.
23 Q. Indiquant l’État d’origine des camions et
24 l’État vers lequel ces camions se dirigeaient s’ils
25 s’apprêtaient à passer dans un autre État, n’est-ce pas ?
Page 13118
1 R. Cela aurait fait l’objet d’un document au
2 niveau de l’organisation militaire. Maintenant, est-ce que
3 ce document aurait été élaboré en raison du passage dans un
4 autre État ? Compte tenu du lien qui unissait le
5 territoire dominé par les Croates en Bosnie et l’État de
6 Croatie, je ne le sais pas avec certitude. Il y avait des
7 contacts politiques, des autorisations politiques qui
8 étaient dispensées mais certainement pas d’actions
9 militaires, de mouvements militaires d’une telle échelle en
10 l’absence d’un ordre ou d’un document militaire en bonne et
11 due forme.
12 Q. Donc, un tel déplacement de véhicules
13 militaires aurait dû être supporté par des documents
14 indiquant les approvisionnements en essence, en denrées
15 alimentaires, et cætera, n’est-ce pas ?
16 R. Absolument. C’est une disposition
17 administrative qui est toujours en vigueur et cela aurait
18 dû être le cas si des déplacements de véhicules de l’armée
19 croate avaient été vus en train de se déplacer en si grand
20 nombre.
21 Q. Si nous partons de l’hypothèse que ces
22 véhicules venaient de Croatie, ce que vous avez dit dans
23 votre déposition, des documents existent qui prouvent
24 l’objectif déclaré ou l’objectif réel de ces véhicules,
25 n’est-ce pas, dans le cas de leurs déplacements ?
Page 13119
1 R. Oui, ils existent mais s’ils existent encore
2 aujourd’hui, je ne le sais pas.
3 Q. Très bien ! Ivica Rajic : Avez-vous un
4 souvenir de la conversation que vous avez eue avec Blaskic
5 à son sujet ?
6 R. C’est un sujet que j’ai pu avoir discuté. Je
7 ne me rappelle pas exactement.
8 Q. Par conséquent, vous ne vous rappelez rien au
9 sujet d’une sanction ou d’une punition qui lui aurait été
10 infligée ?
11 R. Je veux dire que je n’ai qu’un souvenir vague
12 d’une discussion à ce sujet mais honnêtement, je ne peux
13 pas vous donner de détails.
14 Me NICE (interprétation) : C’est la fin de mon
15 interrogatoire.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Témoin AD,
17 merci. Vous êtes arrivé au terme de votre déposition.
18 Merci d’être venu devant le Tribunal International. Vous
19 pouvez maintenant vous retirer.
20 Nous suspendons jusqu’à demain, à moins qu’il y
21 ait un sujet à traiter immédiatement.
22 Me NICE (interprétation) : Je sais quelles sont
23 les difficultés que posent les questions administratives
24 avec un témoin protégé mais il y a deux choses que je puis
25 dire, même en sa présence.
Page 13120
1 S’agissant de la possibilité d’une liaison par
2 vidéo, je pense que je préférerais l’autre alternative au
3 moins pour le moment. Je parlerai au témoin concerné et si
4 je peux obtenir sa présence ici avant la fin de la
5 présentation de nos témoins, il sera entendu assez
6 rapidement, si nous pouvons le faire avant le 10 mars.
7 Bien sûr, nous ne souhaitons pas aller jusqu’au 10 mars.
8 Donc, pour le moment, c’est tout ce que je peux dire.
9 Il y a un résumé qui a été déposé en rapport avec
10 ce témoin et par rapport à l’autre témoin, le résumé que
11 nous utiliserons ne va pas au-delà de ce qui a déjà été
12 montré sur le rétroprojecteur. J’ai extrait un certain
13 nombre de passages que nous utiliserons.
14 [Le témoin se retire]
15 Me NICE (interprétation) : Maintenant, la Défense
16 nous a indiqué, s’agissant d’un témoin qui a déjà déposé
17 dans l’affaire Blaskic le 8 décembre 1997, qu’elle
18 souhaiterait le citer à la barre dans la présente affaire
19 également. Sommes-nous à huis clos partiel en ce moment ?
20 Non ?
21 Je ne suis pas sûr que la Défense soit en mesure
22 de demander qu’un témoin vienne déposer en s’appuyant sur
23 la déposition de ce témoin dans une autre affaire. Peut-
24 être pourrions-nous nous contenter d’un plan de sa
25 déposition. Il pourrait être utile d’examiner ce plan.
Page 13121
1 Nous pourrions le faire cette semaine si, par hasard, nous
2 avons un moment après l’audition de nos témoins.
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
4 interromps, Monsieur Nice. Il nous faut une copie de ce
5 compte rendu si vous voulez que nous rendions une décision
6 à ce sujet.
7 Me NICE (interprétation) : Bien sûr. Je vais
8 m’enquérir auprès du juriste de la Chambre et veiller à ce
9 que cela soit fait. Alors, en style télégraphique, je
10 dirais qu’une demande a été déposée pour permettre
11 l’audition d’un autre témoin qui est supérieur à l’avant-
12 dernier témoin que nous avons entendu ici, supérieur sur le
13 plan de son grade et de son rôle. Je ne suis pas sûr qu’il
14 demandera des mesures de protection mais j’essaie
15 d’anticiper au cas où il le ferait.
16 Pourrions-nous traiter de cela si nous en avons le
17 temps cette semaine ? Une déclaration préalable et une
18 déclaration non signée ont été déposées au Tribunal avec un
19 compte rendu de sa déposition car il a déjà été entendu par
20 une autre Chambre. Nous n’aurons besoin de lui que très
21 peu de temps et il est possible que les Juges de cette
22 Chambre souhaitent savoir où ils peuvent trouver ces
23 documents, les documents liés à ce témoin.
24 Voilà ! C’est sans doute tout ce que j’avais
25 besoin d’évoquer dans l’immédiat de façon à éviter une
Page 13122
1 perte de temps à l’avenir.
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Très bien !
3 Merci. 9 h 30 demain matin.
4 --- L’audience est levée à 16 h 12
5 pour reprendre le jeudi
6 27 janvier 2000 à 9 h 30
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25