Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1                     Le mardi 1er février 2000

  2                     [Audience publique]

  3                     [Les accusés entrent dans la Cour]

  4                     [Le témoin entre dans la Cour]

  5                     --- L’audience débute à 9 h 36

  6         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Bonjour, Monsieur

  7   le Président.  Affaire IT-95-14/2-T, Le Procureur contre

  8   Dario Kordic et Mario Cerkez.

  9         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je demanderais

 10   au témoin de bien vouloir prononcer la déclaration

 11   solennelle.

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je déclare

 13   solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et

 14   rien que la vérité.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous pouvez

 16   vous asseoir, Monsieur.

 17         TÉMOIN :  SIR MARTIN GARROD

 18         (ASSERMENTÉ)

 19         INTERROGÉ PAR Me NICE (interprétation) :

 20         Q.    Je crois savoir que vous vous appelez Général

 21   Martin Garrod, Sir Martin Garrod, et que vous avez terminé

 22   votre première carrière en tant que Général trois étoiles

 23   dans l’armée britannique commandant les Marins britanniques

 24   de la Couronne, n’est-ce pas ?

 25         R.    C’est exact.


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  1         Q.    Ne parlons pas de retraite mais en tout cas,

  2   vous avez été nommé, dans le cadre de votre carrière, en

  3   tant qu’observateur de l’ECMM et vous avez succédé à Jean-

  4   Pierre Thebault à son poste en tant que chef du centre de

  5   l’ECMM à Zenica, à un moment dans votre carrière ?

  6         R.    Oui, c’est exact.

  7         Q.    En avril 1994, vous avez été nommé chef du

  8   quartier général des représentants de l’Union européenne à

  9   Mostar, n’est-ce pas ?

 10         R.    Oui.

 11         Q.    Pour par la suite être envoyé en tant

 12   qu’envoyé spécial de l’Union européenne à Mostar jusqu’en

 13   décembre 1996 ?

 14         R.    Oui, c’est exact.

 15         Q.    Depuis cette date, vous avez travaillé au

 16   Kosovo ?

 17         R.    J’ai travaillé récemment au Kosovo après

 18   avoir passé encore quelque temps en Bosnie en tant que

 19   représentant de l’Union européenne, mais récemment, j’ai

 20   été envoyé au Kosovo, oui.

 21         Q.    Je demanderais que le résumé de sa déposition

 22   soit passé sous les yeux du témoin et puis, nous avons des

 23   petites piles de pièces à conviction qu’il conviendrait de

 24   lui montrer également.

 25         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  D’abord, le


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  1   résumé.  Y a-t-il une objection de la part de la Défense ?

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Non, Monsieur le

  3   Président.

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Très bien.

  5         Me NICE (interprétation) : 

  6         Q.    Sur la base des années que vous avez passées

  7   en Bosnie, pouvez-vous nous dire de quelle façon les

  8   Croates de Bosnie… quel était l’avis des Croates de Bosnie

  9   par rapport au Président Tudjman de Croatie ?

 10         R.    Ils le considéraient comme un homme très

 11   honorable.  Ils parlaient de lui en l’appelant « notre

 12   Président ».  Les Croates de Bosnie avaient un passeport de

 13   Croatie, ils votaient aux élections croates et chantaient

 14   l’hymne national de Croatie, en d’autres termes s’agissant

 15   des Croates de Bosnie, le Président Tudjman était bel et

 16   bien leur Président.

 17         Q.    Si quelqu’un détenait un poste dans une

 18   entité, pouvait-il en détenir un équivalent dans l’autre

 19   entité ?  Par exemple, prenons le cas de Monsieur Susak.

 20         R.    Oui.  Il y avait pas mal de Croates

 21   d’Herzégovine au sein du gouvernement de Croatie, le plus

 22   connu étant, bien entendu, le Ministre de la Défense, Gojko

 23   Susak, mais il y avait bien d’autres hommes qui détenaient

 24   des postes dans ce gouvernement.

 25         Q.    Dario Kordic :  Pouvez-vous nous résumer


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  1   quelles étaient ses fonctions, en tout cas, pour ce que

  2   vous en avez compris ?

  3         R.    J’ai cru comprendre qu’à l’époque, Dario

  4   Kordic était Vice-président du HDZ et également Vice-

  5   président du HVO.  À mon avis, il était l’homme politique

  6   le plus important, la personnalité politique la plus

  7   importante en Bosnie centrale.

  8         Q.    Oui.  Une phrase si vous le voulez bien au

  9   sujet du HVO.  Je vous demanderais de bien vouloir répondre

 10   à cette question qui se divise en deux parties :  Le HVO

 11   était-il une organisation militaire et exclusivement

 12   militaire, et au cas où vous répondriez non, je vous

 13   demande s’il existait une organisation analogue à ce que

 14   l’on connaît mieux peut-être en Europe ?

 15         R.    Eh bien, le Conseil de Défense croate HVO

 16   était un conseil de défense comme son nom l’indique mais

 17   avait également d’autres responsabilités.  Jadranko Prlic,

 18   par exemple, qui était le ministre de facto de la

 19   République croate d’Herceg-Bosna était Président du HVO et

 20   son adjoint, Kresimir Zubak était Vice-président du HVO. 

 21   Donc, cet organisme était pour l’essentiel un conseil de

 22   défense mais avait également des responsabilités

 23   gouvernementales plus larges et un peu plus tard, HVO est

 24   devenu synonyme d’armée croate.

 25         Q.    Mais pour ceux d’entre nous qui venons, par


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  1   exemple, de pays d’Europe occidentale, y a-t-il une

  2   analogie dans nos gouvernements qui permette de mieux

  3   comprendre ce qu’était le HVO ?

  4         R.    Non.  De nos jours, non.  Je ne peux établir

  5   une comparaison entre le HVO et un quelconque organe

  6   existant dans un pays occidental ou dans un pays européen

  7   de façon générale.  Mais en tout cas, comme je l’ai déjà

  8   dit, le HVO est finalement devenu synonyme d’armée.  Mais

  9   au moment de sa formation, c’était un organisme qui avait

 10   des responsabilités plus larges, comme je l’ai déjà dit,

 11   puisque Jadranko Prlic était de facto Ministre de la

 12   République croate d’Herceg-Bosna tout en étant Président du

 13   HVO.

 14         Q.    Paragraphe 6 de votre résumé de déposition : 

 15   Vous avez fait la connaissance de Anto Valenta, vous l’avez

 16   vu dans son bureau, il y avait des cartes au mur et vous

 17   connaissiez également le livre qu’il avait écrit ?

 18         R.    Oui.  J’ai eu plusieurs rencontres avec Anto

 19   Valento, la plupart du temps dans son bureau à Vitez. 

 20   C’était un expert au sujet du démantèlement ethnique

 21   survenu en Bosnie-Herzégovine et il avait écrit un livre,

 22   sinon davantage, qu’il avait grand plaisir à discuter avec

 23   quiconque était prêt à l’écouter puisqu’il aimait beaucoup

 24   diffuser son point de vue quant à la façon dont la Bosnie

 25   devrait être divisée en trois entités ethniques


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  1   différentes.

  2         Q.    Au cours de votre mission en Bosnie centrale,

  3   vous êtes-vous fait une opinion quant à la façon dont les

  4   Croates de Bosnie centrale considéraient leurs voisins

  5   d’Herzégovine lorsqu’ils comparaient leur sort respectif ?

  6         R.    Il existait sans aucun doute un point de vue

  7   qui m’a été exprimé à plusieurs reprises, parfois avec une

  8   certaine amertume, de la part des Croates de Bosnie

  9   centrale qui disaient de leurs homologues d’Herzégovine que

 10   ceux-ci les avaient abandonnés pour adhérer à la République

 11   croate d’Herceg-Bosna.  Oui, ce point de vue existait, cela

 12   ne fait aucun doute.

 13         Q.    Dans quel secteur les Croates étaient-ils les

 14   plus enthousiastes par rapport à la République d’Herceg-

 15   Bosna ?

 16         R.    Eh bien, on trouvait ce sentiment dans le

 17   sud, sans aucun doute dans la région de Mostar, et ce

 18   sentiment s’est répandu dans toute la partie méridionale de

 19   la Bosnie-Herzégovine.  Donc, ce soutien à la République

 20   croate d’Herceg-Bosna était le plus affirmé dans le sud de

 21   la Bosnie-Herzégovine.

 22         Q.    Le 20 octobre 1993, avez-vous reçu un rapport

 23   de William Stutt au sujet de six soldats de l’armée de

 24   Bosnie-Herzégovine ?

 25         R.    Oui, j’ai reçu un rapport selon lequel six


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  1   soldats de l’armée de Bosnie-Herzégovine avaient été

  2   arrêtés à un barrage routier du HVO non loin de Stupni Do. 

  3   Stupni Do était une enclave musulmane au sud de Vares qui

  4   jusqu’à ce jour était pratiquement restée intacte en dépit

  5   des combats qui faisaient rage.

  6         Q.    Paragraphe 10 de votre déposition :  D’abord,

  7   les aspects généraux.  Combien de temps en total ou combien

  8   de fois au total avez-vous rencontré Kordic à son quartier

  9   général, si vous vous le rappelez ?

 10         R.    Il est difficile d’être précis.  Cela a dû se

 11   passer au moins quatre ou cinq fois, sinon davantage.  Mes

 12   rencontres avec Dario Kordic se sont faites la plupart du

 13   temps à Busovaca dans la maison qu’il avait à Busovaca et

 14   que l’on connaissait en général sous le nom de Nid d’Aigle.

 15         Q.    Était-ce à l’intérieur de la ville ou à la

 16   campagne ?

 17         R.    C’était à deux ou trois kilomètres au sud-est

 18   de Busovaca sur une petite route dans une zone boisée.

 19         Q.    Lorsque vous le rencontriez, était-il en

 20   général seul ou accompagné et si oui, par qui ?

 21         R.    Il y avait toujours des gardes du HVO aux

 22   alentours de la maison.  Je ne me rappelle pas l’avoir

 23   jamais vu seul et c’est Ignac Kostroman, le Secrétaire du

 24   HVO, qui était le plus souvent avec lui.

 25         Q.    Comment Kordic était-il vêtu lorsque vous le


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  1   rencontriez ?

  2         R.    Pour autant que je m’en souvienne, il portait

  3   toujours un uniforme de camouflage mais je ne me rappelle

  4   pas s’il portait des insignes de grade et si oui, je ne me

  5   rappelle pas lesquels.  Mais en tout cas, il était toujours

  6   en uniforme.

  7         Q.    Avez-vous jamais pensé à l’interroger au

  8   sujet de son grade et de sujets de ce genre ?

  9         R.    Eh bien, cela peut paraître étonnant mais le

 10   thème de son grade ne m’est jamais venu à l’esprit comme

 11   étant une question que je pouvais lui poser.  À cette

 12   époque-là, non seulement au sein du HVO mais également dans

 13   l’armée bosniaque, l’aspect civil et l’aspect militaire

 14   étaient très étroitement liés.  Donc, il nous arrivait de

 15   traiter de questions politiques avec des représentants

 16   militaires et des questions militaires avec des

 17   représentants politiques et le grade à cette époque n’avait

 18   donc pas grande importance, le plus important étant

 19   d’évaluer l’influence et l’autorité de tel ou tel homme.

 20         Me NICE (interprétation) :  J’aimerais que l’on

 21   remette au témoin la pile de pièces à conviction, qui doit

 22   être remise également aux Juges.  Ces documents seront

 23   placés sur le rétroprojecteur, de façon à permettre au

 24   public de les voir.

 25         Peut-on remettre toute la pile de documents au


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  1   témoin ?  Il est possible que trois des pièces à conviction

  2   contenues dans cette pile aient déjà été versées au

  3   dossier.  Je vais interroger le témoin au sujet de ces

  4   pièces et si Madame la Greffière ne dispose pas des cotes

  5   de ces documents, nous les lui communiquerons.

  6         Q.    Premier document, la pièce 1255 :  C’est un

  7   rapport quotidien de Zenica daté du 21 octobre.  En page 2,

  8   au milieu de la page 2, y trouvez-vous un rappel d’une

  9   rencontre que vous avez eue avec Dario Kordic et Anto

 10   Valenta ?

 11         R.    Oui, oui, c’est une rencontre que j’ai eu

 12   d’abord avec Anto Valenta.  Puis, il y a eu une deuxième

 13   rencontre avec Dario Kordic.

 14         Q.    Et les deux ont eu lieu sur cette colline ou

 15   en tout cas, dans cette zone légèrement montagneuse ?

 16         R.    Oui.

 17         Q.    Dans ce chalet qui, je crois…

 18         R.    Le chalet de Busovaca.

 19         Q.    Que l’on appelait comment ?

 20         R.    Qui était connu comme Le Nid d’Aigle.

 21         Q.    Très bien.  Eh bien, nous voyons à la lecture

 22   de…

 23         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  À quel passage

 24   faites-vous référence, Monsieur Nice ?

 25         Me NICE (interprétation) :  Deuxième page, milieu


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  1   de la page.

  2         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais quels

  3   sont les mots que vous citez ?

  4         Me NICE (interprétation) :  Je cite :  « Il a

  5   poursuivi en disant que les Croates pouvaient quitter

  6   Zenica. »

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci.

  8         Me NICE (interprétation) : 

  9         Q.    Il a d’abord dit qu’une solution militaire

 10   n’était pas dans l’intérêt de l’État puisque les deux

 11   parties s’équilibraient sur le plan numérique, puis il a

 12   dit qu’il s’attendait à une offensive majeure dans la

 13   vallée de la Lasva dont le but consisterait à s’emparer de

 14   l’usine d’explosifs de Vitez, après quoi il a ajouté que

 15   les défenseurs du HVO étaient bien armés et il a dit : 

 16   « Nous le voyions » – au milieu de la page – « que les

 17   Croates quitteraient Zenica et recommenceraient une vie

 18   nouvelle car ils ne s’y sentaient pas protéger. »

 19         Lui avez-vous demandé si la population pourrait

 20   revenir en cas d’application d’un plan de paix ou de

 21   conclusion d’un plan de paix ?

 22         R.    Oui.  Je lui ai demandé s’il pensait que les

 23   Croates reviendraient à Zenica mais il a dit qu’il pensait

 24   que quelques-uns le feraient sans doute mais que lorsqu’on

 25   quittait une région de son plein gré, il était difficile


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  1   d’y revenir.  Certains reviendraient en cas de conclusion

  2   d’un plan de paix mais ils seraient moins nombreux qu’avant

  3   la guerre et tout dépendrait de la façon dont ils seraient

  4   traités par les Serbes et les musulmans.

  5         Q.    Je ne vais pas vous faire lire toutes les

  6   références contenues dans ce document mais en bas de page,

  7   au bas de la page que nous sommes en train de discuter, il

  8   a dit qu’il déplorait le fait que les musulmans utilisaient

  9   l’alimentation en eau et en électricité comme arme de

 10   guerre et a ajouté que les Croates ne feraient jamais une

 11   telle chose.

 12         R.    Oui, c’est en effet le cas.  Nous avons été

 13   informés en détail au sujet de l’alimentation en eau et en

 14   électricité de Novi Travnik et de la façon dont elles

 15   étaient utilisées.  À cette époque-là, les Croates

 16   souffraient à Vitez d’une pénurie d’électricité et d’eau. 

 17   C’était un problème constant.

 18         Q.    Avez-vous des commentaires quant aux

 19   protestations qu’il a faites en affirmant que les Croates

 20   ne feraient jamais une telle chose ?

 21         R.    Oui, bien sûr.  Il y avait quelque chose

 22   d’inévitable en Bosnie qui nous posait toujours un

 23   problème :  C’était le rapport entre le comportement des

 24   uns et des autres.  Une partie ne faisait pas telle ou

 25   telle chose tant que l’autre partie ne l’avait pas faite et


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  1   cette question d’électricité et d’eau a été la première

  2   concernée par ce genre de comportement, étant donné qu’il y

  3   a eu un combat permanent et nous nous battions en

  4   permanence pour essayer de supprimer cette espèce de

  5   rapport mutuel entre le comportement des uns et des autres

  6   qui posaient de grands problèmes.

  7         Q.    Je vous demanderais de prendre maintenant la

  8   dernière page de cette pièce, deuxième paragraphe ou plutôt

  9   le premier paragraphe entier.  Avez-vous résumé dans ce

 10   paragraphe ou bien y a-t-il un résumé dans ce paragraphe,

 11   suite à la rencontre dont nous avons parlée avec Monsieur

 12   Valenta et Monsieur Kordic, le point de vue des deux

 13   dirigeants civils croates les plus importants de Bosnie

 14   centrale ?

 15         R.    Oui.

 16         Q.    « Ce n’est peut-être pas très étonnant mais

 17   leurs points de vue étaient remarquablement semblables sur

 18   pas mal de sujets, puisqu’ils se rencontraient sans doute

 19   de façon régulière et discutaient de ces sujets l’un avec

 20   l’autre.  En fait, on aurait pu les faire parler d’une

 21   seule voix pratiquement. »

 22         Cette opinion est-elle valable pour cette réunion

 23   en particulier ou pour toutes les réunions que vous avez

 24   eues pendant votre mission ?

 25         R.    Non.  Je pense que pendant toute la durée de


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  1   ma mission, je peux dire m’être rendu compte qu’il y avait

  2   un lien tout à fait remarquable entre Monsieur Kordic et

  3   Monsieur Valenta.  Il ne fait aucun doute, probablement

  4   parce qu’ils ont discuté régulièrement l’un avec l’autre et

  5   qu’ils ont discuté également avec les supérieurs de haut

  6   rang croate, en tout cas, il est remarquable de voir que

  7   leurs points de vue étaient toujours les mêmes.

  8         Q.    Passons maintenant aux informations que vous

  9   avez reçues au sujet du massacre de Stupni Do.  Quand avez-

 10   vous obtenu ces informations, si vous vous en souvenez ?

 11         R.    Je crois que c’était le 24 octobre que nous

 12   avons reçu pour la première fois des nouvelles selon

 13   lesquelles éventuellement, il y avait eu massacre à Stupni

 14   Do.  À ce moment-là, le massacre n’était pas encore

 15   confirmé car le commandant du HVO de la brigade de Bobovac,

 16   Emil Hara, avait interdit l’entrée à Stupni Do à tous les

 17   représentants d’organisations internationales, y compris

 18   aux représentants de la FORPRONU qui, à ce moment-là, était

 19   représentée par le bataillon norvégien.

 20         Q.    Avez-vous été informé de changements de poste

 21   de certaines personnes au pouvoir dans la région de Vares ?

 22         R.    Oui.  Nous avons été informés le 25 que Emil

 23   Hara avait été remplacé par Kresimir Bosic et que Ivica

 24   Rajic avait apparemment le pouvoir à Vares.  Donc, il

 25   semblait qu’il y avait eu mutation au sein du commandement


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  1   du HVO le 25.

  2         Q.    Ce jour-là, avez-vous rencontré Dario Kordic

  3   pour parler d’un autre sujet ?

  4         R.    Oui.  J’avais déjà organisé une rencontre

  5   avec Dario Kordic en vue de discuter d’un problème auquel

  6   nous étions confrontés, à savoir la capture de deux

  7   hélicoptères Medivac appartenant à l’armée de Bosnie-

  8   Herzégovine et saisis à Medjugorje.  Donc, nous avions

  9   prévu de le voir pour discuter de ce problème des

 10   hélicoptères, mais compte tenu des circonstances, j’ai,

 11   bien entendu, évoqué le sujet de Stupni Do.

 12         Q.    Avez-vous, lors de cette réunion…

 13         L’INTERPRÈTE :  Micro s’il vous plaît, Monsieur

 14   Nice.

 15         Me NICE (interprétation) :  Cette pièce peut peut-

 16   être être placée sur le rétroprojecteur ainsi que sous les

 17   yeux du témoin.  Il s’agit d’un document qui a déjà été

 18   versé au dossier par l’intermédiaire d’un autre témoin et

 19   si nous examinons le bas de la première page, il s’agit

 20   d’un compte rendu établi par vous suite à la réunion.

 21         Q.    Nous voyons donc que Kordic a déclaré : 

 22   « Nous sommes tout à fait d’accord qu’il ne doit être

 23   établi aucune relation entre les hélicoptères Medivac et

 24   les prisonniers de guerre. »

 25         R.    Oui.


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  1         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le

  2   Président, une objection par rapport à la façon dont la

  3   question est formulée.  La question était :  Ceci est un

  4   rapport établi par Sir Martin.  Apparemment, ce rapport a

  5   été préparé par un homme répondant au nom de Jeff Beaumont. 

  6   Donc, ce n’est pas un rapport établi par Sir Martin.

  7         Me NICE (interprétation) :  Tout à fait exact !

  8         Q.    Monsieur le Témoin, lorsqu’un rapport est

  9   établi par une tierce personne, comment contribuez-vous à

 10   la définition de son contenu ?

 11         R.    Eh bien, par exemple, si j’allais à une

 12   réunion du genre de celle que nous sommes en train de

 13   discuter, je vais ensuite dans mon bureau, je tape un

 14   exemplaire d’un rapport sur mon ordinateur portable, je

 15   copie ce fichier sur une disquette que je remets à mon

 16   adjoint, qui était à l’époque Jeff Beaumont, et ensuite, le

 17   contenu de cette disquette est réécrit pour devenir le

 18   rapport.

 19         Donc, dans l’établissement de notre rapport

 20   quotidien, j’avais une participation indubitable et

 21   lorsqu’il fallait, j’ajoutais les commentaires du HCR à la

 22   fin du rapport si je pensais qu’il convenait d’appeler

 23   l’attention du quartier général de Zagreb de l’ECMM sur ces

 24   commentaires.  Donc, un rapport comme celui-ci était tapé

 25   par moi nécessairement, puis copié sur disquette afin


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  1   d’être inséré dans le rapport principal.

  2         Q.    Très bien.  Nous voyons au bas de la première

  3   page de ce document une référence au fait qu’il ne doit y

  4   avoir aucune relation, n’est-ce pas, entre les deux sujets

  5   et Kordic exprime son accord ?

  6         R.    Oui.  Il a exprimé son accord quant au fait

  7   qu’il ne devait pas y avoir relation et il a même utilisé

  8   son autorité pour téléphoner à Mate Boban, au Général

  9   Praljak qui était commandant du HVO, commandant militaire,

 10   puis à Petkovic, le chef d’état-major, immédiatement après

 11   mon départ pour obtenir la libération des hélicoptères.  À

 12   son avis, a poursuite de l’évacuation de l’hôpital de Nova

 13   Bila était très importante.

 14         Q.    Lorsque vous l’avez interrogé au sujet des

 15   atrocités commises à Stupni Do, compte tenu des soupçons

 16   qui étaient les vôtres, a-t-il affirmé avoir téléphoné au

 17   Général Petkovic ?  Nous trouvons cela en page 2 de la

 18   pièce.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le

 20   Président, nous apprécierons que le Procureur ne guide pas

 21   le témoin sur ce point particulier.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Il s’agit d’un

 23   rapport.  Donc, il est impossible de critiquer et de

 24   reprocher à l’Accusation la lecture d’un passage du rapport

 25   avant de demander au témoin si ce passage est exact.


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  1         R.    Excusez-moi.  Pouvez-vous répéter votre

  2   question ?

  3         Me NICE (interprétation) : 

  4         Q.    Bien entendu.  Je dois faire des pauses parce

  5   que j’attends que l’interprétation en français ait lieu et

  6   il faut que nous tenions compte de la nécessité de ne pas

  7   épuiser les interprètes qui nous suivent.

  8         R.    Oui.  Je m’excuse.

  9         Q.    Bien.  Si nous jetons un œil sur ce document,

 10   en première page, au sujet de Stupni Do, est-ce qu’on vous

 11   a dit qu’il avait téléphoné à Général Petkovic à Kiseljak

 12   et que ce dernier lui avait dit que rien de mauvais ne

 13   s’était passé et qu’il y avait beaucoup de maisons

 14   incendiées et qu’un grand nombre de soldats portant

 15   l’uniforme et ne portant pas l’uniforme avaient été tués et

 16   que la plupart des civils avaient quitté le village et

 17   qu’ils se trouvaient à Vares désormais ?

 18         R.    Oui.  Il a tout de suite répondu et il a dit

 19   que dès qu’il avait entendu les nouvelles à propos de

 20   Stupni Do qu’il avait téléphoné au Général Petkovic qui se

 21   trouvait à Kiseljak à l’époque et ce dernier lui a dit, du

 22   moins d’après ce que l’on m’a rapporté, précisément ce que

 23   vous avez dit et en effet, cela est exact.

 24         Q.    Si nous nous penchons maintenant sur le

 25   paragraphe suivant, c’est-à-dire la partie de ce paragraphe


Page 13507

  1   où il aurait dit que les allégations des musulmans devaient

  2   être vérifiées, aux termes desquelles il y avait beaucoup

  3   de prétextes d’avancer concernant leur attaque à eux vers

  4   Kopljari et en revanche, ils ont attaqué Stupni Do.  Est-ce

  5   qu’il a dit, donc, qu’il y avait eu une attaque délibérée

  6   contre les civils, quoiqu’il y ait eu des civils qui

  7   n’avaient pas voulu se rendre ?

  8         R.    Oui.  Il avait fait référence au village de

  9   Kopljari.  Nous avons vérifié la chose.  Rien de trop

 10   important ne s’y était passé.  Il avait souligné, en

 11   parlant en sa qualité de militaire et d’être humain, qu’il

 12   condamnait les crimes ou les atrocités commises par quelque

 13   partie que ce soit mais je crois que c’est la seule chose

 14   que je pourrais dire à ce sujet.

 15         Q.    Pour finir, quel a été son commentaire au

 16   sujet de Vares puisque cela a été la chose qui a suivi,

 17   étant donné qu’il y avait de bonnes relations avec le 2e

 18   corps de l’armée de Bosnie-Herzégovine mais cela n’avait

 19   pas plu à certains musulmans qui n’avaient pas souhaité

 20   occasionner des conflits entre le HVO et l’armée de la

 21   Bosnie-Herzégovine ?

 22         R.    Oui, cela est tout à fait exact, notamment,

 23   au nord de Tuzla, dans cette région où il y avait deux

 24   corps d’armée en présence… pardon, où se trouvait le 2e

 25   corps d’armée de l’armée de Bosnie-Herzégovine, où il y


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  1   avait eu un bon rapport entre l’armée de Bosnie-

  2   Herzégovine, commandée par un général bosniaque, et le HVO

  3   de la région de Tuzla.  Ma réponse serait donc :  Oui.

  4         Q.    Aux fins de renforcer ce que vous venez

  5   d’expliquer pour ce qui est de l’élaboration de ces

  6   rapports, je voudrais que vous jetiez un œil sur l’avant-

  7   dernière page et nous pouvons parler des appréciations du

  8   chef du centre régional du HCR où il est question en

  9   dernière page d’un résumé de toutes les questions, lorsque

 10   nous parlons des conditionnements de la réciprocité, où on

 11   avait parlé… ou Dario Kordic s’était déclaré déploré par

 12   cette question des hélicoptères et il avait souligné qu’il

 13   ferait usage de son autorité pour retrouver une solution à

 14   la question.

 15         R.    Oui.  Il a dit que… enfin, Dario Kordic a dit

 16   qu’il avait déploré ces établissements de lien et de

 17   corrélation entre les deux questions et qu’il ferait tout

 18   ce qui est en son pouvoir pour débloquer la situation

 19   relative aux hélicoptères.

 20         Q.    Le document suivant de ce paquet…

 21         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais pouvez-

 22   vous attendre juste un moment, je vous prie ?

 23         Oui, vous pouvez y aller.

 24         Me NICE (interprétation) : 

 25         Q.    Avant que de passer au document suivant,


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  1   indépendamment des promesses qui ont été avancées, combien

  2   de temps s’est-il passé entre la restitution des

  3   hélicoptères ?

  4         R.    Cela a bien duré cinq mois avant que ces

  5   hélicoptères ne soient restitués.

  6         Q.    On va passer au document 1266 qui porte sur

  7   le 26 octobre, qui est un rapport qui avait été préparé par

  8   Monsieur Jeff Beaumont.

  9         Si nous nous penchons sur la page 2 dudit

 10   document, vers le bas de la page, nous pouvons voir une

 11   note partant du rapport qui vous avait été présenté par

 12   William Stutt ?

 13         R.    Oui.  Il s’agit d’une chose qui était en

 14   relation avec le compte rendu au terme duquel le Général

 15   Petkovic aurait envoyé deux ordres, à savoir deux documents

 16   aux unités qui lui étaient subordonnées, qu’il avait

 17   déclaré un cessez-le-feu dans la région de Vares et qu’il y

 18   avait trois officiels de la région de Vares à remplacer : 

 19   Ante Pejnovic, le Président du HVO, Zvonko Duznovic, le

 20   chef de la sécurité, et Ivica Gavran, Président de la

 21   présidence.  Nous avons également découvert que le

 22   commandant de la brigade, Monsieur Bobovac, avait déjà été

 23   limogé.

 24         Q.    Mais est-ce que vous pensez que ces

 25   remplacements avaient quelque chose à voir avec les


Page 13510

  1   événements de Stupni Do ?

  2         R.    Ce n’était pas ce qui nous avait été dit mais

  3   il n’y a aucun doute que cela devait être la conclusion à

  4   tirer de la situation et ce en raison des incidents

  5   survenus à Stupni Do.

  6         Q.    Est-ce que vous avez eu d’autres preuves aux

  7   termes desquelles les personnes remplacées avaient quelque

  8   chose à voir avec les événements de Stupni Do ?

  9         R.    Non.  En ce moment-là, je ne le savais pas,

 10   pour ce qui est notamment des noms que je viens de

 11   mentionner.  Non.

 12         Q.    Je voudrais encore vous poser peut-être

 13   quelques questions au sujet des pages suivantes.

 14         Nous tournons la page et le rapport est continué

 15   avec les termes :  « Même si les documents s’avéraient être

 16   authentiques, cela laisserait des doutes concernant les

 17   objectifs visés et du niveau de la chaîne de commandement

 18   militaire au niveau des événements de Stupni Do » ?

 19         R.    Oui.  C’est bien le sentiment que nous avions

 20   eu.  Il ne nous apparaissait pas clairement de quel niveau

 21   au niveau de la chaîne de commandement les ordres avaient

 22   été émis pour le lancement de l’attaque en question.

 23         Q.    Nous pouvons nous pencher brièvement sur le

 24   paragraphe 19.  Nous avons déjà entendu un témoignage là-

 25   dessus.  Je crois que c’est en date du 27 octobre que le


Page 13511

  1   bataillon nordique avait eu accès à Stupni Do.  Ils avaient

  2   trouvé beaucoup de cadavres d’hommes, de femmes et

  3   d’enfants, un village brûlé, enfin, des indices de

  4   torture :  Est-ce bien vrai ?

  5         R.    Oui, cela est exact.  Il nous a fallu pas mal

  6   de temps pour accéder à Stupni Do mais effectivement, le

  7   bataillon britannique a finalement réussi à y accéder en

  8   date du 27 et l’une de nos équipes y avait accédé également

  9   – je crois que c’était Victor 4 – et ils avaient découvert

 10   des scènes terribles à Stupni Do.

 11         Q.    Le document suivant serait le 1284.1.  Il est

 12   question là d’un rapport daté du 3 novembre et d’une note

 13   l’accompagnant relative à l’incident qui porte la date du

 14   30 octobre.  C’est un rapport à vous ?

 15         R.    Oui.  La raison pour laquelle la date est de

 16   deux ou trois jours après l’événement même est due au fait

 17   qu’il m’a fallu du temps pour taper l’ensemble, étant donné

 18   qu’il y a eu beaucoup d’événements et que je n’avais pas eu

 19   le temps de le faire le jour même.

 20         Q.    Nous pouvons nous pencher sur la page 2.  Au

 21   sommet de la page, on voit que c’est écrit en lettres

 22   capitales et cela a trait à une réunion avec le HOM. 

 23   Qu’est-ce que cela représente ?

 24         R.    C’est le chef de la mission d’observation de

 25   la Communauté européenne installée à Zagreb et à l’époque,


Page 13512

  1   la présidence était belge et c’était l’ambassadeur de Baans

  2   qui avait été chef de la mission.

  3         Q.    Vous avez assisté à cette réunion ?

  4         R.    Oui, j’ai été présent à cette réunion.

  5         Q.    Je ne voudrais pas passer au travers de

  6   l’ensemble du texte… oh, pardon !  Je dois faire une petite

  7   pause.

  8         Donc, je ne vais pas passer au travers du texte

  9   entier mais en paragraphe 5, vers le bas de la page :  Est-

 10   ce que Monsieur Kordic a effectivement déclaré que les

 11   victimes de Stupni Do étaient devenues agresseurs… je

 12   m’excuse.

 13         « A-t-il dit que les victimes étaient devenues

 14   agresseurs et puis, a-t-il demandé au chef de la mission

 15   concernant Stupni Do :  Est-ce que cela porterait dommage à

 16   l’image des Croates ? »

 17         La réponse :  « Il a répondu que la République

 18   d’Herceg-Bosna condamnerait toutes les atrocités commises

 19   mais il a ajouté que l’on croyait, que l’on faisait prêter

 20   foi à tout ce qui était dit à la radio musulmane mais

 21   personne ne faisait attention ou ne prêtait attention aux

 22   atrocités commises par la partie musulmane.  Il a dit que

 23   certaines maisons avaient effectivement été incendiées mais

 24   qu’il se pouvait qu’il y ait eu des gens à l’intérieur de

 25   ces maisons mais qu’il ne pouvait pas croire que le HVO


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  1   tuerait délibérément des civils, en ajoutant qu’une action

  2   serait entreprise suite à enquête et que personne ne serait

  3   mise à l’abris de cette enquête. »

  4         D’après ce que vous avez pu apprendre, est-ce que

  5   cette enquête a été menée à terme ?

  6         R.    Nous avons eu des assurances analogues de la

  7   part de Mate Boban et de Monsieur Jadranko Prlic mais pour

  8   autant que je le sache, aucune enquête n’a été conduite par

  9   les autorités croates et personne n’a jamais été amenée

 10   devant la justice pour cette attaque et ce massacre à

 11   Stupni Do et je n’ai pas non plus vu de rapport émanant de

 12   source croate selon lequel l’on aurait déterminé ce qui

 13   s’était passé là-bas.

 14         Q.    À la même page, nous avons un paragraphe 8 où

 15   Kordic déplore le fait que les musulmans utilisent

 16   l’électricité et l’eau à des fins militaires, en expliquant

 17   les positions concernant l’hôpital de Nova Bila et les

 18   pénuries de carburant et de nourriture, et pour ce qui est

 19   des hélicoptères, il dit qu’il avait fait passer plutôt des

 20   coups de fil téléphonique.  Peut-être a-t-il expliqué les

 21   raisons pour lesquelles ces hélicoptères n’avaient pas été

 22   restitués ?

 23         R.    Oui, c’est cela.  Je crois qu’il était

 24   personnellement assez optimiste pour ce qui était de la

 25   restitution de ces hélicoptères, chose qui était d’une


Page 13514

  1   importance cruciale pour ce qui est de l’évacuation

  2   médicale et des liens de réciprocité établis entre les

  3   Croates et les Bosniaques, et ce, de Nova Bila vers Mostar.

  4         Q.    Je voudrais attirer votre attention sur la

  5   partie 6 de cette même page où il a exprimé certaines

  6   opinions – et la Chambre peut en prendre connaissance elle-

  7   même – concernant les Islamistes, le Jihad, où on parle de

  8   Izetbegovic, des chefs religieux derrière lui qui

  9   l’incitent à occuper un maximum de territoire, y compris

 10   Vitez, Travnik et Novi Travnik.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Est-ce que

 12   vous allez terminer avec ce document, Monsieur Nice ?

 13         Me NICE (interprétation) :  Oui.  J’ai juste un

 14   petit passage et je crois que j’aurai fini.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Bien, faites-

 16   le parce que moi aussi j’aurais une question.

 17         Me NICE (interprétation) :  Tout à fait.

 18         Q.    Alors, revenons à la page 9 de ce même

 19   document.  Vers le bas de la page, nous pouvons voir qu’il

 20   est question de vos réunions avec Mate Boban.  S’agit-il

 21   d’un rapport relatif à cette réunion ?

 22         R.    Oui, c’est un rapport relatif à la réunion en

 23   question où je me suis rendu avec l’Ambassadeur Monsieur de

 24   Baans à cette réunion avec Mate Boban et ses proches

 25   collaborateurs, dont Monsieur Vladislav Pogarcic.


Page 13515

  1         Q.    Nous avons un paragraphe ici qui a trait à

  2   Stupni Do où il est question de toutes les personnes tuées

  3   qui étaient soi-disant tous des soldats et que si quelqu’un

  4   s’était mal conduit qu’il serait discipliné et on parle

  5   aussi du village de Kopljari qui avait été effacé des

  6   cartes géographiques et on parle de l’attaque musulmane

  7   contre Vares ?

  8         R.    Oui.  Il avait soi-disant des renseignements

  9   qui confirmaient que toutes les personnes tuées là-bas

 10   étaient des soldats mais ce n’était manifestement pas vrai. 

 11   Mais il avait dit que des mesures disciplinaires seraient

 12   entreprises à l’encontre de tous les responsables et puis,

 13   il avait parlé de Kopljari, en effet.

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur le

 15   Général, pouvons-nous revenir à la partie où vous parlez de

 16   la réunion avec le chef de la mission européenne, pages 2

 17   et 3 de ce document ?

 18         L’une des choses où vous pourriez peut-être nous

 19   aider c’est précisément le rapport entre Messieurs Kordic,

 20   Kostroman et Valenta.  Il apparaît, à partir de ce rapport

 21   sur cette réunion, que Monsieur Kordic aurait été la

 22   personne qui avait pris la parole au nom de la partie

 23   croate.  Est-ce bien vrai ?

 24         R.    Certainement, Monsieur le Président. 

 25   Monsieur Kordic était la personnalité la plus éminente et


Page 13516

  1   Anto Valenta était beaucoup plus âgé que lui.  Il était

  2   plus ou moins, si vous me passez le terme, la figure du

  3   père et je suppose que Dario Kordic se trouvait dans le

  4   début des années 30 de sa vie et Anto Valenta avait au bas

  5   mot 60 ans et il appartenait, donc, à une autre génération

  6   différente. 

  7         Donc, il devait assumer un rôle de conseiller et

  8   le leader était Dario Kordic.  Donc, il apparaissait

  9   inévitable de voir qu’il assumerait un rôle de conduite au

 10   niveau des entretiens avec l’Ambassadeur de Baans.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais est-ce

 12   que cela arrivait aux autres réunions où vous êtes allé ? 

 13   Est-ce que Kordic prenait aussi la parole ?

 14         R.    Oui, tout à fait.  Je ne suis pas allé à

 15   beaucoup de réunions où il y avait en présence Kordic et

 16   Valenta mais lorsque je suis allé à de telles réunions,

 17   c’est Kordic qui avait un rôle de meneur, et si je me

 18   souviens bien, avec des réunions avec le Général Blaskic

 19   aussi, c’est Kordic qui était la force motrice d’ensemble.

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je vous

 21   remercie. 

 22         Dans une phase de ce procès, il serait bon que

 23   nous sachions, que nous apprenions l’âge de Monsieur Anto

 24   Valenta.

 25         Me NICE (interprétation) :  Je crois que nous


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  1   établirons la chose en partant de son livre ou d’une autre

  2   façon.  Je voudrais poser une autre question toujours au

  3   sujet du même document, page 9, paragraphe 7.

  4         Q.    Boban parlait des hélicoptères et il avait

  5   promis que les hélicoptères seraient restitués.  Est-ce

  6   bien vrai ?

  7         R.    Oui.  Je m’excuse, oui, c’est tout à fait

  8   Boban, oui.  Il avait été, en effet, quelque peu irrité par

  9   cette histoire des hélicoptères mais il avait dit qu’il le

 10   ferait et qu’il se rendrait personnellement à Medjugorje

 11   pour que ces hélicoptères soient restitués.  Bien entendu,

 12   il s’est passé encore cinq mois.

 13         Q.    Mais on fait référence au paragraphe 7 de

 14   dires de sa part au terme desquels 12 000 Croates avaient

 15   dû quitter Kakanj jusqu’à Vares et qu’ils n’avaient pas été

 16   aidés par l’ECMM, par la FORPRONU ou par la Croix-Rouge et

 17   qu’ils avaient dû payer aux Serbes pour pouvoir fuir vers

 18   le sud et on parle des hélicoptères pour ce qui était

 19   d’amener le chef de la mission à la réunion.

 20         R.    Oui.  Je ne peux pas vous donner des détails

 21   à propos du déplacement de Kakanj vers Vares parce que je

 22   ne sais pas quand est-ce que cela est arrivé,

 23   effectivement.  Toutefois, il était de fort mauvaise humeur

 24   ce jour-là et il a exprimé des réserves devant le chef de

 25   la mission en disant que nous étions venus le voir rien que


Page 13518

  1   pour l’affaire des hélicoptères, ce qui n’était

  2   manifestement pas vrai.

  3         Q.    Je pense que vous avez également rencontré

  4   Prlic, d’après ce que l’on dit dans ce résumé.  Est-ce que

  5   c’est bien lui qui vous a dit que le gouvernement avait

  6   suspendu quelques responsables du HVO compromis ?

  7         R.    Oui, oui, tout à fait.  Il avait dit qu’il y

  8   avait eu suspension de biens des commandants et que le

  9   Général Petkovic avait eu ordre de procéder à une enquête

 10   et il avait reçu instruction pour créer une commission

 11   spéciale pour ce qui est d’étudier les crimes possibles de

 12   guerre commis, notamment à Stupni Do.

 13         Q.    Je parle du haut de la page 10, paragraphe 2. 

 14   Nous avons déjà parlé du paragraphe 23 de ce résumé. 

 15   Aussi, pouvons-nous passer au document suivant, le 1275,

 16   qui a trait au 31 octobre ?  Ce document a été rédigé, à

 17   mon avis, par Monsieur William Stutt.  S’agit-il d’un

 18   rapport journalier adressé à vous-même ?

 19         R.    Oui, tout à fait.

 20         Q.    Nous pouvons voir qu’il avait rencontré

 21   Monsieur Kresimir Bosic.  Est-ce que vous avez été présent

 22   ?

 23         R.    Non.  Il avait été rencontrer Monsieur Bosic

 24   tout seul.

 25         Q.    En page 1, on dit qu’il était tendu et qu’il


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  1   avait été promu à une nouvelle fonction, de nouvelles

  2   fonctions auparavant.  Il y a un commentaire où l’on dit

  3   qu’il s’agirait d’une mise en fonction délibérée.  Que

  4   pourriez-vous nous donner comme opinion ?

  5         R.    C’est le commentaire de Stutt, d’après ce que

  6   vous pouvez voir, mais je suis d’accord pour dire que cette

  7   nomination surprise avait été effectuée le jour d’après le

  8   massacre à Stupni Do et il semblerait que cette coïncidence

  9   pourrait être considérée comme considérable.

 10         Q.    Nous allons examiner maintenant la page

 11   suivante, paragraphe 5.  Le HCC a reçu une transcription du

 12   constat établi par la police militaire du bataillon

 13   britannique lorsqu’un musulman a été emprisonné pendant

 14   deux jours à Vares avant le massacre de Stupni Do et puis

 15   en même temps, il y a une évaluation établie sur la base de

 16   cette source faite ou peut-être d’autres sources de la part

 17   du bataillon britannique, n’est-ce pas… du bataillon

 18   nordique (se reprend l’interprète) ?

 19         R.    Oui, c’est cela.

 20         Q.    Et cette évaluation, en bref, disait qu’avant

 21   le massacre, les musulmans de Vares étaient arrêtés et

 22   amenés aux écoles, que le massacre a été commis par les

 23   extrémistes du HVO de Kakanj et qu’il fallait encore

 24   étudier cela par le biais des services de renseignements

 25   et, selon certains rapports, les soldats du HVO de Vares


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  1   aidaient les musulmans et les aidaient à s’échapper.  Est-

  2   ce exact ?

  3         R.    Oui, c’est exact.  Nous avons compris que

  4   c’est le HVO qui a lancé l’attaque depuis Kakanj et

  5   Kiseljak et non pas le HVO de Vares et il est clair qu’il

  6   fallait faire la distinction entre les deux, c’est-à-dire

  7   le HVO de Kakanj et de Kiseljak et le HVO de Vares.

  8         Q.    En même temps, des analyses ont été faites

  9   qui ont permis de révéler que, quelques jours plus tard,

 10   Vares est tombée, Vares a été contrôlée par le HVO de

 11   Kakanj et les soldats du HVO de Kakanj ont emprisonné les

 12   musulmans, les ont battus et les ont forcés à chanter des

 13   chants croates et puis après le massacre, trois

 14   fonctionnaires civils hauts placés du gouvernement de Vares

 15   ont été remplacés et les musulmans sont restés emprisonnés.

 16         En ce qui concerne le bataillon nordique, au cours

 17   de son enquête, il a trouvé qu’il y a eu environ 22

 18   prisonniers battus très fermement et ils ont été remplacés

 19   ailleurs, transférés ailleurs ?

 20         R.    C’est exact.

 21         Q.    Très bien ! 

 22         Me NICE (interprétation) :  D’après le livre de

 23   Monsieur Valenta, nous pouvons établir qu’il est né le 28

 24   janvier 1937.

 25         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci.


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  1         Me NICE (interprétation) : 

  2         Q.    Avant d’en terminer de ce document, je pense

  3   que Bosic a clairement indiqué à la page 1 que sa brigade,

  4   la brigade dont il était chargé à l’époque, devait peut-

  5   être se retirer plus vers le sud et que Vares allait être

  6   défendue jusqu’au dernier homme.  Est-ce exact ?

  7         R.    Oui.  Excusez-moi.

  8         Q.    Il n’y a pas de problème.

  9         R.    Oui.  Je suis désolé.  Oui, c’est exact.

 10         Q.    Nous revenons au résumé, paragraphe 26.  Le

 11   bataillon nordique vous a informé de leur évacuation des

 12   musulmans ?

 13         R.    Oui.  Ils nous ont informés qu’ils évacuaient

 14   tous les jours 40 musulmans à Breza, qui était au sud, et

 15   puis ils ont dit qu’environ 200 musulmans de Vares ont

 16   cherché leur refuge auprès du bataillon nordique à cause

 17   des problèmes à Vares.

 18         Q.    Est-ce que vous vous souvenez de la date de

 19   cette information fournie par le bataillon nordique ?

 20         R.    Si je me souviens bien, c’était le 2

 21   novembre.

 22         Q.    Et ce jour-là, est-ce que vous deviez avoir

 23   une réunion avec Kresimir Bosic ?

 24         R.    Pas moi mais le chef du centre de

 25   coordination, William Stutt, devait rencontrer Bosic mais,


Page 13522

  1   en fait, on lui a dit qu’il devait rencontrer Zvonko

  2   Duznovic, qui était le chef chargé de la sécurité et qui

  3   aurait dû être limogé par le Général Petkovic suite au

  4   massacre de Stupni Do.

  5         Q.    En fait, la cause de cela, vis-à-vis de ces

  6   démissions et ces remplacements, était laquelle ?

  7         R.    Eh bien, j’ai certainement eu un doute quant

  8   à la volonté des leaders du HVO de remplacer leur

  9   commandant et de lancer une enquête comme promis.

 10         Q.    Dites-nous ce qui s’est produit les 2 et 3

 11   novembre.

 12         R.    Le 2 novembre, l’armée de Bosnie-Herzégovine

 13   a attaqué Vares.  C’était une opération qui était menée

 14   sans sang puisque le HVO est parti rapidement vers le nord,

 15   à Dastansko, et le 3 novembre, nous avons pu constater que

 16   le HVO avait abandonné Vares, relâché tous les prisonniers

 17   et établi un quartier général du HVO et que le HVO s’est

 18   dirigé vers Dastansko, ce qui se trouvait à un kilomètre à

 19   l’ouest de la frontière avec l’armée de Bosnie-Herzégovine,

 20   avec le territoire contrôlé par cette armée.  Donc, c’était

 21   au nord-est de Vares.

 22         Q.    Vous êtes allé à Vares peu de temps plus tard

 23   ?

 24         R.    J’y suis allé le lendemain avec William Stutt

 25   et j’ai pu constater que l’armée de Bosnie-Herzégovine a


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  1   complètement pris le contrôle du territoire de Vares.  Je

  2   crois qu’ils ont bu pas mal parce qu’ils se comportaient

  3   comme ça, les gens tiraient de leurs fusils automatiques un

  4   peu partout dans la ville et nous avons rencontré le

  5   commandant de l’armée de Bosnie-Herzégovine qui nous a dit

  6   que l’occupation de Vares était le résultat, la conséquence

  7   directe de Stupni Do.

  8         Bien sûr, il s’agissait aussi d’un gain

  9   stratégique important parce que, du point de vue de l’armée

 10   de Bosnie-Herzégovine, avec l’occupation de Vares,

 11   maintenant, ils pouvaient avancer vers Tuzla et Gornji

 12   Vakuf sans devoir traverser les poches contrôlées par le

 13   HVO.  Donc, il y avait quand même un avantage stratégique

 14   important aussi.

 15         Q.    Est-ce que par la suite, vous avez reçu un

 16   rapport concernant un certain Ivica Rajic ?

 17         R.    Oui.  Le 7 novembre, une de nos équipes est

 18   allée assister à une réunion tripartite à Kiseljak afin de

 19   discuter du problème des réfugiés.  Après un discours d’une

 20   demi-heure donné par le Commandant du HVO Ivica Rajic, le

 21   représentant du HCR a quitté la réunion, ce qui a poussé

 22   Rajic à le menacer en disant qu’il ne devait plus jamais se

 23   présenter à Kiseljak.

 24         Me NICE (interprétation) :  Veuillez montrer au

 25   témoin la pièce à conviction 1293.1.  C’est une pièce qui a


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  1   déjà été versée au dossier. 

  2         Q.    Ce document en date du 9 novembre a été

  3   rédigé, si vous regardez la dernière page, par Pen Zenden

  4   Essen (ph.) ?

  5         R.    Effectivement.  Il s’agissait de la personne

  6   chargée des opérations au QG.

  7         Q.    À la page 1, nous voyons que la réunion avec

  8   Dario Kordic y est traitée, un rapport sur cette réunion. 

  9   Je crois qu’il s’agissait de la réunion entre Stutt et

 10   Dario Kordic.

 11         R.    Oui.

 12         Q.    Ce que nous voyons là, à peu près aux deux

 13   tiers de la page, paragraphe 2, c’est que Kordic a dit que

 14   Rajic avait succombé au stress.  Comment est-ce que vous

 15   avez compris cela ?

 16         R.    La manière dont j’ai compris cela était que

 17   ce que Kordic voulait dire c’est qu’en attaquant le

 18   représentant du HCR au cours de cette réunion, qu’il était

 19   sous le stress et que c’est pour cela qu’il l’a menacé en

 20   disant : « Il ne faut plus jamais que tu te montres ici à

 21   Kiseljak. »  C’est comme ça que j’ai compris cela.

 22         Q.    Donc, il a essayé peut-être non pas vraiment

 23   de l’excuser mais il cherchait à expliquer le comportement

 24   de Rajic ?

 25         R.    C’est exact.


Page 13525

  1         Q.    Est-ce que, peu de temps plus tard, vous avez

  2   reçu des rapports concernant des changements de

  3   comportement de Rajic ?

  4         R.    Oui.  Nous avons entendu que le 11 novembre,

  5   Rajic n’était plus le commandant à Kiseljak et qu’il était

  6   remplacé temporairement suite aux instructions données par

  7   le Général Petkovic et puis moi-même, je ne l’ai pas vu

  8   mais l’un de nos teams, une de nos équipes a dit que,

  9   d’après la presse croate, Ivica Rajic avait été remplacé

 10   suite aux ordres émanant de Mate Boban.

 11         Q.    Le paragraphe suivant peut être corroboré par

 12   une pièce à conviction qui a déjà été versée au dossier

 13   mais peut-être que ceci n’est pas nécessaire.  Est-ce exact

 14   de dire, Général, que le 16 novembre, vous vous souvenez

 15   d’une réunion entre Philip Watkins et Slobodan Lovrenovic,

 16   qui était le conseiller de presse de Boban ?

 17         R.    Oui.  Ceci s’est produit à un moment où il y

 18   a eu beaucoup de changements dans la hiérarchie de la

 19   République croate de Herceg-Bosna et puis le poste du

 20   conseiller du Président a été créé.  Donc, il y a eu un

 21   nombre de vice-présidents qui ont perdu leurs fonctions

 22   mais quant à moi, ceci n’a pas changé ma manière de voir

 23   l’importance du rôle joué par Dario Kordic dans la

 24   hiérarchie croate.

 25         Il y a eu beaucoup de changements.  C’était une


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  1   situation qui n’arrêtait pas d’évoluer.  La Communauté

  2   croate de Herceg-Bosna, ensuite, la République croate de

  3   Herceg-Bosna avec le Parlement, les conseils, et cætera,

  4   mais ces changements n’étaient pas importants pour moi.  Ce

  5   qui était important c’était le rôle respectif joué par

  6   certains individus auparavant et le rôle continuait joué

  7   par ces individus.

  8         Q.    Ce même jour, est-ce que vous avez appris

  9   qu’il y a eu un changement quant à la position de Praljak ?

 10         R.    Oui.  Le Général Slobodan Praljak, nous avons

 11   entendu qu’il a été démis de ses fonctions par le Général

 12   Ante Roso et, à l’époque, je croyais que le départ du

 13   Général Praljak pouvait être expliqué d’une part par les

 14   défaites militaires du HVO mais aussi à cause des choses

 15   qui se sont produites à Stupni Do, la chute de Vares et

 16   puis aussi la destruction du Stari Most, c’est-à-dire du

 17   vieux pont à Mostar, qui s’est produite juste une semaine

 18   avant ce changement, le 9 novembre.

 19         Q.    Ce même jour, est-ce que vous avez reçu un

 20   rapport sur l’accès ou le reniement d’accès à Dastansko ?

 21         R.    Oui.  D’après une de nos équipes, ils n’ont

 22   pas pu obtenir l’accès jusqu’à Dastansko.  C’est le HVO qui

 23   ne leur a pas permis cela mais ils ont attendu que le HVO

 24   recevait les munitions de la part de l’armée de Bosnie-

 25   Herzégovine et que 8 000 soldats se trouvaient sur la ligne


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  1   de confrontation.  Dastansko se trouvait tout près de la

  2   frontière avec le territoire occupé par les Serbes.

  3         Q.    Peu de temps plus tard, Darko Gelic et

  4   Blaskic, est-ce qu’ils ont confirmé à Stutt que la position

  5   de Kordic avait changé ?

  6         R.    Non.  Ils ont dit qu’il allait rester le

  7   Vice-président de Boban et que Valenta avait perdu sa

  8   fonction.  Leur explication était qu’il a fallu attendre

  9   avant la nomination de Kordic parce qu’il n’a pas pu

 10   assister à la dernière réunion, à la dernière session de

 11   l’assemblée mais ma conclusion était que la position de

 12   Kordic était restée importante, alors que c’était Valenta

 13   qui se retirait lentement de la scène politique.

 14         Q.    Merci. 

 15         Me NICE (interprétation) :  Un instant, s’il vous

 16   plaît, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.  Encore

 17   une fois, je pense qu’en ce qui concerne le document

 18   suivant, qui a été versé au dossier par le biais d’un autre

 19   témoin, je pense qu’il n’est pas nécessaire d’entrer dans

 20   tous les détails de ce document.

 21         Q.    Est-ce que le 15 décembre, malgré ce que, par

 22   exemple, Philip Watkins vous a dit auparavant quant à la

 23   position formelle de Kordic en tant que membre du

 24   Parlement, quelle a été votre évaluation ?

 25         R.    Encore une fois, ceci n’a pas changé vraiment


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  1   mon attitude puisqu’à l’époque, ils étaient en train de

  2   créer le conseil présidentiel et Kordic est devenu membre

  3   de ce conseil par la suite.  Donc, il n’était plus le Vice-

  4   président.  La fonction a changé de nom.  Il était un peu

  5   difficile de suivre tous ces changements mais moi, je

  6   n’avais aucun doute dans mon esprit quant à la question de

  7   savoir que le rôle de Kordic restait important et qu’il

  8   avait une grande influence au sein de la hiérarchie des

  9   Croates.

 10         Aussi, il y avait un facteur supplémentaire. 

 11   C’est peut-être vrai.  Lovrenovic a avancé une explication. 

 12   Lovrenovic était le porte-parole de Mate Boban et il a dit

 13   que peut-être pour faire partie du gouvernement, il

 14   faudrait que la personne soit à Mostar sans arrêt et puis

 15   il a dit que peut-être un faux message allait être envoyé

 16   si, comme il l’a exprimé, il devait extraire quelqu’un qui

 17   était un héros de guerre en Bosnie centrale pour le faire

 18   venir à Mostar.

 19         Q.    Ce même jour, donc, le 15 décembre, est-ce

 20   que vous avez reçu des informations de la part de Maric et

 21   aussi de Blaskic ?

 22         R.    Oui.  Maric de Busovaca, le Président du HVO

 23   de Busovaca, avait dit que Kordic avait refusé d’accepter

 24   sa position de ministre afin de mieux servir les Croates de

 25   Bosnie centrale et puis Blaskic, qui a vu Stutt plus tôt ce


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  1   même jour, il a dit que clairement, d’après lui, il n’y

  2   avait aucun doute quant à l’importance de Dario Kordic en

  3   Bosnie centrale.

  4         Q.    Nous parlerons maintenant de la fin de

  5   l’année.  Je crois que c’est le 28 décembre d’après un

  6   document qui a été versé au dossier par un autre témoin. 

  7   Est-ce que Darko Gelic a donné des informations concernant

  8   la position de Kordic ?

  9         R.    Oui.  Darko Gelic était l’officier de liaison

 10   à Vitez, officier de liaison de Kordic, et il a dit que

 11   Kordic avait une nouvelle fonction qui était l’adjoint du

 12   chef d’état-major du Général Roso.  Donc, il était le

 13   numéro 3 directement dans la hiérarchie militaire.  Le

 14   Général Roso était au sommet, ensuite, le Général Petkovic,

 15   le chef d’état-major, et ensuite, il y avait Dario Kordic

 16   qui était l’adjoint du chef d’état-major.

 17         Q.    Je vais vous montrer la pièce à conviction

 18   1344, le document suivant dans la liasse de documents.  Il

 19   s’agit ici d’un document qui a été rédigé par Michael

 20   O’Donnell, n’est-ce pas ?  Est-ce que vous pouvez nous dire

 21   quelque chose sur lui ?

 22         R.    Michael O’Donnell était notre officier chargé

 23   des opérations pendant une certaine période.  Il

 24   appartenait à l’armée irlandaise.

 25         Q.    À la première page de ce document – nous


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  1   pouvons lire au chapitre « Situation politique » –

  2   paragraphe 1, il est dit que :  « L’ECMM a rencontré Ivo

  3   Tokic, le Président de la municipalité de Tomislavgrad, et

  4   qu’ils ont discuté du statut de Boban.  Tokic disait que

  5   l’Union européenne contribuait aux rumeurs concernant le

  6   remplacement de Boban après avoir présenté le document en

  7   14 points au Président Tudjman. »

  8         Est-ce que vous pouvez nous dire quelque chose là-

  9   dessus ?

 10         R.    Tout à fait.  Je pense que c’était Mijo

 11   Tokic.  Il y a une petite erreur.  Il était à Tomislavgrad. 

 12   Nous savons qu’il y a eu un document en 14 points qui a été

 13   présenté au Président Tudjman.  Nous n’avons pas vu ce

 14   document, pourtant mais Tokic, qui était le Président,

 15   donc, de la municipalité de Tomislavgrad, il a dit à

 16   Watkins que, selon ce document, le progrès des négociations

 17   de paix dépendait du remplacement de Mate Boban mais, comme

 18   je l’ai déjà dit, je n’ai jamais vu ce document en 14

 19   points et, donc, c’est une information émanant purement de

 20   Mijo Tokic.

 21         Lui, il avait l’air convaincu du fait que des

 22   mesures étaient prises afin de remplacer éventuellement

 23   Mate Boban.

 24         Q.    Donc, est-ce que vous croyez que la

 25   suggestion que l’Union européenne contribuait à ces rumeurs


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  1   était vraie ou pas ?

  2         R.    Tout à fait honnêtement, je ne sais pas. 

  3   Comme je l’ai déjà dit, on avait tendance en Bosnie

  4   centrale de ne pas pouvoir suivre toutes les informations

  5   sur le plan international.  Donc, je ne pouvais pas être au

  6   courant de cela et savoir si c’était vrai ou pas.

  7         Q.    Zoran Maric, le maire de Busovaca, est-ce

  8   qu’il a fait une suggestion ce même jour ?

  9         R.    Oui.  Il a suggéré ou bien, plutôt, il a dit

 10   que le Ministre des Affaires étrangères de Croatie, Mate

 11   Granic, avait proposé que l’on crée une zone protégée dans

 12   la vallée de la Lasva et puis il a dit également que si

 13   l’armée de Bosnie-Herzégovine poursuivait son offensive,

 14   les Croates de Bosnie n’avaient pas d’autres alternatives

 15   que de créer par la force deux corridors de Gornji Vakuf à

 16   Novi Travnik et de Kiseljak jusqu’à Busovaca par le biais

 17   des moyens militaires ou politiques.

 18         Q.    Nous parlerons, donc, maintenant de la fin du

 19   mois de janvier 1994 et nous examinerons deux documents :

 20   d’un côté, le document 1364 et puis le document 1364.6.

 21         Si nous examinons le document 1364.6, veuillez

 22   d’abord jeter un coup d’œil sur ce document et expliquer ce

 23   que vous pouvez concernant ce document.  Je crois que vous

 24   l’avez communiqué vous-même hier.

 25         R.    Le deuxième ?


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  1         Q.    Oui.

  2         R.    Oui, oui. 

  3         Q.    Qu’est-ce que vous pouvez nous dire sur ce

  4   document ?

  5         R.    Ce document est peut-être quelque peu bizarre

  6   et confus.  C’est parce que, comme je l’ai déjà dit, moi,

  7   j’ai tapé ces rapports concernant les réunions sur mon

  8   propre ordinateur portable et ensuite, je les ai amenés et

  9   donnés à mon adjoint afin qu’il les intègre aux rapports

 10   clés mais, malheureusement, je n’ai pas pu trouver le

 11   rapport lui-même qui intégrait ce manuscrit. 

 12         J’ai réussi à trouver le manuscrit.  Je sais que

 13   c’est mon manuscrit à moi, mon document à moi parce que

 14   c’est tout à fait mon style et puis je me souviens d’une

 15   remarque qui se trouve vers la fin de la deuxième page

 16   lorsque j’ai demandé si la Communauté croate de Herceg-

 17   Bosna allait être annexée par la Croatie, que dans ce cas-

 18   là, Kordic a répondu que les Serbes allaient rejoindre la

 19   Serbie, allaient être annexés par la Serbie dans ce cas-là

 20   mais il a dit que si les musulmans annonçaient leur

 21   indépendance, nous n’allons certainement pas nous joindre à

 22   la Chine.

 23         Donc, je reconnais cette phrase et c’est pour cela

 24   que je reconnais ce document mais je ne suis pas sûr quant

 25   à la date.  Ça doit être la date du 30 janvier ou autour de


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  1   cette date.

  2         Q.    Très bien !  En fait, on arrive maintenant à

  3   une période de deux semaines où il n’y a pas de document

  4   émanant de l’ECMM.  Maintenant, nous allons retourner au

  5   premier de ces deux documents, 1364.  Tout d’abord, quelle

  6   est la source de ce rapport ?

  7         R.    C’est un rapport émanant du quartier général

  8   de Zagreb qui a été envoyé tous les jours à tous les

  9   centres régionaux.

 10         Q.    Veuillez examiner la page 2, paragraphe 6. 

 11   On y trouve une référence à la visite de l’ECMM à DHOM.

 12         R.    Oui.  C’était l’adjoint du chef de mission

 13   chargé des opérations qui est allé à Travnik.  À l’époque,

 14   c’était un Grec puisque les Grecs étaient à la présidence

 15   de l’Union européenne et nous avons eu une rencontre avec

 16   Dario Kordic.

 17         Q.    Vous-même, est-ce que vous avez assisté à

 18   cette réunion ?

 19         R.    Oui, oui, tout à fait, j’y ai assisté.

 20         Q.    Oui.  Veuillez maintenant examiner le

 21   paragraphe 6 et nous dire ce qui s’est produit.

 22         R.    Nous avons eu une discussion intéressante. 

 23   Dario Kordic a souligné les droits historiques des Croates

 24   en Bosnie et puis, en fait, ce n’était pas une réunion

 25   importante du point de vue du fond.  C’est surtout que


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  1   l’adjoint du chef de mission obtenait des informations,

  2   recueillait des informations auprès de ses interlocuteurs

  3   mais je me souviens que Kordic a fait un long discours sur

  4   les droits historiques des Croates en Bosnie centrale et

  5   qu’il a accusé les musulmans des problèmes qui étaient en

  6   cours et puis il a parlé aussi du fondamentalisme musulman

  7   et de volonté de créer un État islamique en Europe.

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Peut-être le

  9   moment est venu pour la pause ?

 10         Me NICE (interprétation) :  Tout à fait.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous allons

 12   procéder à une pause d’une demi-heure.

 13         --- Suspension de l’audience à 11 h 00

 14         --- Reprise de l’audience à 11 h 34

 15         M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  [Hors

 16   microphone]

 17         Me NICE (interprétation) :  Eh bien, il faut que

 18   je reprenne pour le compte rendu.  Oui, Monsieur le Juge,

 19   j’ai l’intention de reprendre l’examen de ce document.

 20         M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Eh bien,

 21   quand vous y reviendrez, je poserai la question à laquelle

 22   je pensais.

 23         Me NICE (interprétation) : 

 24         Q.    Nous examinions le document 1364 en date du

 25   28 janvier, Général, avant la pause et je crois que nous


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  1   avons entendu à peu près tout ce que je souhaitais que vous

  2   nous disiez mais si nous lisons la première page, nous

  3   voyons un certain nombre de protestations de la part de

  4   Kordic qui portent, notamment, sur la sélectivité de la

  5   distribution de l’aide humanitaire par le HVO… par le HCR

  6   (se reprend l’interprète).

  7         Était-ce un sujet récurrent de la part de l’une ou

  8   l’autre ou des deux parties belligérantes ?

  9         R.    C’était un thème récurrent, les protestations

 10   venant principalement du côté croate.  Ces protestations

 11   portaient sur le fait que le gros de l’aide humanitaire

 12   était distribuée aux Bosniens et que l’aide humanitaire

 13   servait, en fait, à alimenter l’armée de Bosnie-

 14   Herzégovine.

 15         Q.    Merci.  Cette réunion a fait l’objet d’un

 16   compte rendu rédigé par un tiers et dans le corps du texte,

 17   il est fait mention du DHOM de l’ECMM mais c’est une

 18   réunion à laquelle vous avez assisté, n’est-ce pas ?

 19         R.    Oui, c’est exact.

 20         Q.    Vous en avez un souvenir de première main ?

 21         R.    Oui, j’en ai un souvenir de première main, un

 22   souvenir personnel.  Je me souviens que le chef adjoint de

 23   la mission était en visite et que nous avons réagi ensemble

 24   et eu diverses réunions ensemble.

 25         Q.    Revenons maintenant au document 1364.6 dont


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  1   vous avez déjà parlé quelque peu, document dactylographié à

  2   l’exception de « 30 janvier 1994 », écrit à la main au

  3   stylo rouge.  Qui a écrit cela ?

  4         R.    C’est mon écriture.  Lorsque j’ai relu ce

  5   document, j’ai ajouté cette date en haut de la page mais,

  6   comme je l’ai déjà dit, c’était manifestement ma

  7   contribution à un rapport de plus grande taille portant sur

  8   un jour ou une semaine mais, malheureusement, je n’ai pas

  9   pu retrouver un exemplaire du rapport définitif.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le

 11   Président, pour le compte rendu juridique, c’est la

 12   première fois que nous voyons ce document dans le prétoire

 13   aujourd’hui.  Merci.

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, le

 15   Procureur a dit l’avoir remis à la Défense, je pense, hier,

 16   ce qui explique la chose.

 17         M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  La

 18   question que je souhaitais poser au témoin est la

 19   suivante :  Peut-il proposer une explication quelconque

 20   pour justifier le fait que sa contribution n’a pas été

 21   intégrée au rapport principal comme c’était le cas pour ses

 22   autres contributions ?

 23         Me NICE (interprétation) :  Puis-je répondre à

 24   cela ?

 25         M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Oui.


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  1         Me NICE (interprétation) : 

  2         Q.    Je vous demande, Monsieur le Témoin, d’abord

  3   quelle est la provenance physique du morceau de papier que

  4   vous avez apporté au Tribunal hier.  Où ce papier a-t-il

  5   été conservé jusqu’à votre arrivée à La Haye ?

  6         R.    Je conservais certains de mes documents de la

  7   période de Bosnie mais, bien entendu, tout cela s’est passé

  8   il y a longtemps.  Un grand nombre de rapports n’ont pas

  9   été conservés.  Je ne possédais pas celui-ci lorsque j’ai

 10   été interrogé pour la première fois par les enquêteurs du

 11   Tribunal mais je l’ai trouvé par la suite parmi les papiers

 12   que j’avais chez moi et, comme je l’ai déjà dit, ce n’est

 13   pas un rapport complet.  Manifestement, c’est ma

 14   contribution à un rapport plus important et je reconnais

 15   mon écriture et, comme je l’ai déjà dit, je me rappelle

 16   particulièrement bien la remarque concernant la Chine.

 17         Q.    Pour que tout soit clair, les lettres « 30

 18   JAN 1994 » au stylo rouge, est-ce quelque chose que vous

 19   avez écrit ou que vous pensez avoir écrit à l’époque des

 20   faits ou que vous avez ajouté plus tard ?

 21         R.    Je ne peux pas me rappeler si je l’ai écrit

 22   au moment des faits ou plus tard au moment où je me suis

 23   efforcé de mettre de l’ordre dans mes papiers.

 24         Q.    Mais ce n’est pas quelque chose que vous avez

 25   écrit ces derniers jours ?


Page 13538

  1         R.    Non, non, non, pas du tout.  Non, non.

  2         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous aimerions

  3   bien comprendre les choses.  Ce papier se trouvait au

  4   milieu des papiers que vous avez conservés, Sir Martin, à

  5   votre départ de Bosnie ?

  6         R.    Oui, oui, mais bien entendu, une très grande

  7   quantité d’eau a coulé sous les ponts depuis ce jour-là et

  8   je n’ai pas conservé tous mes papiers car il y a eu pas mal

  9   d’autres choses qui se sont passées.  Mais quand j’ai passé

 10   en revue l’ensemble des documents que j’avais en ma

 11   possession, entre le moment où j’ai été interrogé par les

 12   enquêteurs et ma venue ici aujourd’hui, j’ai découvert ce

 13   document.  J’ai pensé qu’il pouvait être utile.  C’est

 14   pourquoi je l’ai apporté avec moi aujourd’hui.

 15         M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Mais, Sir

 16   Martin, pouvez-vous nous dire si vous avez découvert

 17   d’autres documents du même genre que vous avez tapé sur

 18   votre ordinateur personnel portable et qui n’ont pas été

 19   inclus dans des rapports de plus grande taille ?

 20         R.    Non.  La plupart de mes contributions écrites

 21   ou dactylographiées ont trouvé leur chemin jusqu’au rapport

 22   définitif de plus grande taille qui était diffusé au bout

 23   d’une quinzaine de jours en général mais je vous ai déjà

 24   dit qu’il y a certains rapports de l’ECMM sur lesquels je

 25   n’arrive pas à mettre la main.  Malheureusement, ils se


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  1   situent dans la période qui nous intéresse.

  2         Me NICE (interprétation) : 

  3         Q.    Vous nous avez dit que cette contribution

  4   dont nous sommes en train de parler a bien été insérée dans

  5   un rapport mais que c’est ce rapport que vous ne pouvez pas

  6   retrouver ?

  7         R.    Je suis tout à fait certain que cette

  8   contribution a trouvé sa place dans un rapport définitif

  9   car c’est un passage assez significatif.  Il n’a pas pu

 10   être laissé en dehors du rapport.  Je pense qu’il doit

 11   s’agir d’un rapport quotidien ou d’un rapport hebdomadaire

 12   ou d’un autre document que nous avions l’habitude de

 13   diffuser et que nous appelions évaluation hebdomadaire.

 14         Q.    Je pense qu’il devait s’agir d’une évaluation

 15   hebdomadaire.

 16         Je reviens à ma question suivante, celle des

 17   efforts déployés pour retrouver les documents de l’ECMM qui

 18   n’ont pas encore été retrouvés.  Ces efforts se

 19   poursuivent.  Nous en avons un exemple.  Je pense que la

 20   semaine dernière, un document particulier a été recherché

 21   auprès d’un pays-tiers mais si ces documents ont été

 22   largement diffusés, il semble tout de même que quelques-uns

 23   d’entre eux soient difficiles à retrouver.

 24         La question suivante, Général, c’est la suivante : 

 25   Le document avait des références qui pourraient nous


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  1   permettre d’en déterminer la date pour voir si elle

  2   coïncide avec celle du 30 janvier ou pas.  Si vous regardez

  3   le milieu de la page, vous y trouvez une référence au fait

  4   que Kordic a parlé de l’échange de Dubravica, l’échange des

  5   corps qui s’est produit à Dubravica et il a dit qu’il

  6   espérait que cela se passerait ce jour-là.  Avez-vous pu

  7   déterminer le jour ou la date de l’échange de corps à

  8   Dubravica ?

  9         R.    Dans mon agenda, l’endroit où je notais les

 10   rendez-vous, j’ai consigné « échange de corps constaté le

 11   1er février », ce qui, bien sûr, se situe deux jours plus

 12   tard.  Il est possible qu’il s’agisse d’un ajournement,

 13   d’un retard ou que ce soit à peu près la date qui a été

 14   prévue à l’origine.  Je ne peux donc pas expliquer la

 15   différence entre le 1er février, pour laquelle j’ai noté

 16   « échange de corps », et cette date du 30 janvier.

 17         Q.    Si nous allons un peu plus loin dans notre

 18   recherche, nous pouvons dire que vous n’avez pas votre

 19   agenda sur vous mais que vous avez produit ce document hier

 20   et lorsque des questions de dates se sont posées, vous avez

 21   téléphoné en Angleterre et demandé à votre femme de

 22   rechercher cet agenda ?

 23         R.    J’ai appelé ma femme pour qu’elle recherche

 24   mon agenda que j’ai conservé mais bien sûr, il n’y a pas de

 25   notes au sujet des réunions.  Ce sont simplement des


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  1   rendez-vous qui sont consignés dans cet agenda.  Elle n’a

  2   pas pu le retrouver mais… elle n’a pas pu retrouver une

  3   mention du mois de janvier mais elle m’a dit avoir retrouvé

  4   la mention « échange de corps » pour le 1er février et

  5   comme je l’ai dit, il est possible que l’échange de corps

  6   ait été retardé ou que ce soit la date d’origine, auquel

  7   cas la date du 30 janvier n’est pas 100 pour cent exacte. 

  8   Il conviendrait de lire « 1er février » à la place du « 30

  9   janvier ».  Je crains de ne pas pouvoir expliquer la

 10   différence.

 11         Q.    Revenons à votre méthode d’élaboration des

 12   documents de ce type.  Lorsque vous aviez un entretien ou

 13   une discussion avec une personnalité, dans ce cas Kordic,

 14   preniez-vous des notes manuscrites sur le moment, au moment

 15   où vous discutiez avec la personne en question ou plus tard

 16   dans votre véhicule ou est-ce que vous réalisiez

 17   l’entretien ou la discussion et tapiez le document à

 18   l’ordinateur une fois revenu à l’endroit où vous résidiez ?

 19         R.    Normalement, je prenais de brèves notes sur

 20   le moment mais j’essayais de ne pas passer tout mon temps à

 21   écrire parce que je pensais que cela empêchait la qualité

 22   de l’échange avec la personne avec laquelle je parlais. 

 23   Donc, j’avais l’habitude de m’appuyer sur quelques brèves

 24   notes et sur ma mémoire pour ensuite taper un rapport sur

 25   la base de ce qui était encore frais dans mon esprit.


Page 13542

  1         Q.    Par cette méthode, vous avez écrit donc la

  2   première phrase dont nous venons de parler au moment où

  3   Kordic vous a expliqué ce qu’il pensait.  Pouvez-vous nous

  4   dire de quoi il s’agissait ?

  5         R.    Oui.  Il m’a dit qu’il était chef d’état-

  6   major adjoint du HVO et qu’il était numéro 3 dans la

  7   hiérarchie, c’est-à-dire en-dessous de Roso, chef du HVO,

  8   et du Général Petkovic qui était le chef d’état-major.  Il

  9   a dit également être Vice-président du HDZ avant la

 10   création de la République croate, c’est-à-dire Vice-

 11   président de Mate Boban.  Il a dit aussi être membre de la

 12   chambre des représentants et Ignac Kostroman était avec lui

 13   comme d’habitude.  Il s’est présenté comme étant

 14   Secrétaire-Général du HDZ, Kostroman disant également être

 15   membre de la chambre des représentants.

 16         Q.    Nous pouvons, bien sûr, lire l’intégralité du

 17   document plutôt que de consacrer du temps à le compulser

 18   ici dans ce prétoire mais il y a quelques passages qui ont

 19   fait l’objet éventuellement de notes de votre part.

 20         Fin du deuxième paragraphe de la première page : 

 21   On y trouve une note au sujet de la protestation émise

 22   s’agissant de la distribution de l’aide humanitaire.  Puis,

 23   dans le paragraphe suivant, il est question de l’échange

 24   des cadavres à Dubravica.  À ce sujet, Kordic déclare que

 25   l’armée de Bosnie-Herzégovine a créé des difficultés.  Je


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  1   vous demande qui vous avez un quelconque souvenir quant à

  2   des obstacles qui se seraient opposés à la bonne marche de

  3   cet échange.

  4         R.    Oui.  Dans la périphérie de la région Vitez-

  5   Dubravica, il y a eu des engagements féroces entre les

  6   Croates et les Bosniens, engagements militaires.  Des

  7   allégations ont été faites au sujet d’atrocités qui

  8   auraient été commises.  Nous avons déployé tous nos efforts

  9   avec le bataillon britannique pour pénétrer dans le no

 10   man’s land et emporter les cadavres afin de procéder à un

 11   échange de cadavres.  Il y a eu des retards du côté

 12   bosnien.  Je ne me rappelle pas exactement pourquoi mais

 13   finalement, tout cela s’est résolu au bout de quelques

 14   jours.

 15         Q.    Si nous lisons maintenant le paragraphe qui

 16   se trouve au bas de la première page ainsi que les deux

 17   autres premiers paragraphes de la page 2, donc, lecture

 18   rapide, pouvez-vous nous dire en quelques mots ce que

 19   Monsieur Kordic a dit au sujet de l’influence des

 20   Mujahedins et de l’Islam ?

 21         R.    Eh bien, il expliquait une nouvelle fois les

 22   inquiétudes éprouvées par les Croates au sujet des

 23   objectifs poursuivis par les Bosniens.  Il rapportait les

 24   mises en garde au sujet de l’intégrisme islamique et au

 25   sujet de l’appui que… et parlait de l’appui apporté aux


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  1   Bosniens par certains pays arabes ou musulmans qui les

  2   encourageaient à créer un État musulman en Bosnie.

  3         Q.    En page 2, avant-dernier paragraphe – c’est

  4   le paragraphe dont vous avez déjà parlé dont vous aviez un

  5   souvenir de première main, cette phrase au sujet du fait

  6   qu’il n’y aurait désir en la Chine – juste en-dessous, il

  7   déclare que les objectifs militaires de l’armée de Bosnie-

  8   Herzégovine consiste à créer une république musulmane de

  9   grande taille, en fait, aussi grande que possible :  Est-ce

 10   exact ?

 11         R.    Oui, c’est exact.  Il a dit très précisément

 12   que les musulmans souhaitaient s’emparer de la vallée de la

 13   Lasva, de Zepce, de Kiseljak, de Makljen, du pont de

 14   Makljen, de Prozor et de la vallée de la Neretva.

 15         Q.    À la dernière page de ce document, il

 16   reproche les Mujahedins pour l’érection des barrages

 17   routiers sur la Route Diamant pour l’arrêt et le pillage de

 18   certains convois.  Il affirme qu’un Iranien a été tué la

 19   veille à Zepce.  Le rapport se conclu avec Kordic déclarant

 20   ne souhaiter aucun mal aux musulmans et disant qu’ils

 21   avaient… mais disant que les Croates avaient le droit de se

 22   défendre et expliquant que sa famille vivait à Busovaca.

 23         Q.    Paragraphe 44, s’agissant des événements de

 24   fin janvier-début février, nous passerons à un autre

 25   document, Z1419.  C’est le suivant dans votre pile et c’est


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  1   un document général qui a été écrit à la fin de votre

  2   mission, n’est-ce pas ?

  3         R.    C’est exact.

  4         Q.    En avril 1994, c’est la date à laquelle ce

  5   document a été écrit ?

  6         R.    Oui.  J’ai quitté Zenica peu de temps après…

  7   je l’ai écrit peu de temps après avoir quitté Zenica

  8   lorsque je suis allé à Mostar.

  9         Q.    Le sujet dont traite ce document c’est la

 10   période janvier-février 1994 et les allégations de présence

 11   de l’armée croate, de l’armée de Croatie dans ce secteur. 

 12   Nous trouvons une référence à cela à la page 2 du document,

 13   paragraphes 10 et 14 ?

 14         R.    Oui.  À la fin janvier ou au début du mois de

 15   février, nous avons commencé à recevoir des informations

 16   selon lesquelles l’armée de Croatie était venue à l’appui

 17   du HVO en Bosnie-Herzégovine.  Il y a eu pas mal de

 18   dénégations également mais nous avons fait plusieurs

 19   observations visuelles et personnellement, j’ai vu

 20   plusieurs convois de l’armée de Croatie sur les routes de

 21   montagne partant de Tomislavgrad pour aller vers Prozor.

 22         Ces convois, ces véhicules n’avaient pas de

 23   plaques d’immatriculation le plus souvent mais les insignes

 24   « HV » de l’armée de Croatie étaient clairement visibles et

 25   Prlic a reconnu en fait la présence de troupes de l’armée


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  1   de Croatie en Bosnie mais il a dit qu’il n’y avait que 2

  2   600 volontaires nés en Bosnie parmi ces hommes, des

  3   volontaires qui étaient revenus, comme il l’a dit, pour

  4   défendre leur pays.

  5         Q.    Lorsque vous avez vu de vos yeux ces convois,

  6   en dehors du fait qu’ils ne portaient pas de plaques

  7   d’immatriculation, quel était leur aspect ?  Ces véhicules

  8   avaient-ils l’air d’être utilisés comme des autobus pour

  9   transporter des hommes ou à d’autres fins ?

 10         R.    La plupart d’entre eux transportaient des

 11   soldats.  D’autres transportaient des pièces d’artillerie

 12   et des mortiers.

 13         Q.    Paragraphe 10 sur la même page, un peu plus

 14   haut :  Un commentaire au sujet de Praljak et de Roso, si

 15   vous le voulez bien.  Je vous demande d’abord :  Quel était

 16   le passé de Praljak ?

 17         R.    Praljak avait un passé de militaire et il

 18   avait travaillé dans les médias et était un homme qui

 19   aimait beaucoup Shakespeare.  Il avait été remplacé par le

 20   Général Roso qui était un soldat de carrière et avait servi

 21   de nombreuses années dans la Légion étrangère française.

 22         Q.    La nationalité de Praljak, si vous la

 23   connaissez ?

 24         R.    Croate.

 25         Q.    Paragraphe 45 :  Je crois que vous avez


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  1   appris l’élection de Ivan Bendaer et d’autres hommes au

  2   Parlement ?

  3         R.    Oui.  Philip Watkins, qui se trouvait être à

  4   Mostar à ce moment-là, en tant que chef du centre de

  5   coordination de Mostar, a assisté à une session

  6   parlementaire de la République croate d’Herceg-Bosna le 17

  7   février, date à laquelle Ivan Bender a été élu Président de

  8   ce Parlement et Dario Kordic élu en tant que l’un des trois

  9   Vice-présidents du Parlement.

 10         Q.    Document suivant, le document 1385 :  C’est

 11   un rapport quotidien portant sur le 21 février et portant

 12   la signature d’Eric Bailo ?

 13         R.    Oui.  C’était celui qui était l’officier

 14   chargé des opérations à ce moment-là.  Il était responsable

 15   de l’élaboration des rapports quotidiens.

 16         Q.    Page 2 – pas mal de mots sont soulignés – il

 17   y est question d’une visite d’un officier commandant le

 18   bataillon britannique et accompagné du chef du HCR et

 19   d’autres personnes en vue de discuter de la liberté de

 20   circulation des convois de la FORPRONU et du HCR.

 21         Si nous lisons très rapidement ce passage, je vous

 22   demanderais, Monsieur, qui a mené cette réunion et qui l’a

 23   organisée.

 24         R.    Oui.  C’est une réunion qui a été organisée

 25   par l’officier commandant le bataillon britannique et par


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  1   le chef du HCR.  L’objet principal de cette réunion était

  2   de protester fermement contre l’action des autorités

  3   croates en Bosnie centrale qui faisaient de plus en plus

  4   obstacle à la liberté de circulation des convois du HCR et

  5   d’autres convois.

  6         Donc, pour l’essentiel, le but était de protester

  7   vivement contre l’empêchement à la liberté de circulation,

  8   contre les obstacles opposés à l’entrée des convois du HCR

  9   en Bosnie centrale et il était aussi question de parler du

 10   transfert des blessés de Stari Vitez et de se plaindre au

 11   sujet du lien qui était établi entre l’alimentation en eau

 12   de Novi Travnik et le transfert des blessés de Stari Vitez.

 13         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais nous

 14   avons déjà entendu et obtenu des éléments de preuve à ce

 15   sujet hier.

 16         Me NICE (interprétation) :  Très bien.

 17         Q.    Quel était le rôle joué de Kordic, à votre

 18   avis, au cours de cette réunion par rapport à son rôle dans

 19   d’autres réunions auxquelles vous aviez assisté ?

 20         R.    Blaskic était Président, c’était tout à fait

 21   clair, mais il était aussi clair que c’est Kordic qui

 22   commandait sur le terrain du côté croate.

 23         Me NICE (interprétation) :  Oui, Monsieur le

 24   Président, nous en avons déjà entendu parler et nous

 25   n’avons pas besoin d’en parler davantage.


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  1         Q.    Avez-vous appris, Monsieur le Témoin, la

  2   démission de Boban à peu près à ce moment-là ?

  3         R.    Oui.  Nous avons appris que Mate Boban avait

  4   démissionné mais Dario Kordic, tout à fait manifestement,

  5   était encore l’homme qui tirait les ficelles en Bosnie

  6   centrale, même si Ivo Lozancic, Président du HVO à Zepce,

  7   commençait à devenir une personnalité importante sur le

  8   plan politique mais c’est Dario Kordic qui était encore à

  9   la direction.

 10         Q.    Dernier document, le 1417, en date du 13

 11   avril 1994, rapport journalier pour le 13 avril.  Nous

 12   voyons à la dernière page que c’est un rapport rédigé par

 13   Monsieur Stutt.  Ce rapport traite d’une rencontre avec

 14   Monsieur Stutt, n’est-ce pas, entre Monsieur Stutt et le

 15   Père Bozo ?

 16         R.    Je crois que c’était un membre de son équipe

 17   qui était présent.

 18         Q.    Pouvez-vous nous résumer ce qui s’est passé ?

 19         R.    Il a rencontré le Père Bozo…

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le

 21   Président, Messieurs les Juges, je crois que ce document

 22   parle de lui-même.  À l’évidence, il a été élaboré par un

 23   moniteur de l’ECMM.  Le témoin n’a pas de connaissances

 24   personnelles au sujet de la teneur de ce document.  Donc,

 25   cela me semble une perte de temps que de l’entendre sur ce


Page 13550

  1   point.

  2         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Pouvons-nous

  3   traiter des points sur lesquels nous aurons des preuves

  4   directes ?

  5         Me NICE (interprétation) :  Oui, vous aurez des

  6   preuves directes mais nous pensions qu’il était préférable

  7   d’en traiter aujourd’hui plutôt que de le laisser à plus

  8   tard.

  9         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, nous

 10   attendrons les preuves directes.

 11         Me NICE (interprétation) :  Très bien, Monsieur le

 12   Président.

 13         Q.    Monsieur le Témoin, Mile Plujic a-t-il eu un

 14   échange avec vous à un certain moment ?  Pouvez-vous nous

 15   en parler ?

 16         R.    Oui.  Lorsque j’étais à Mostar, l’acte

 17   d’accusation contre Dario Kordic et l’acte d’accusation

 18   contre le Colonel Blaskic ont été émis en novembre 1995, je

 19   pense.  Nous avons eu une rencontre consultative avec Mile

 20   Plujic, qui était Président du HDZ à Mostar.  Il est venu

 21   me voir.  Il était très en colère au sujet des actes

 22   d’accusation.  Il a protesté très vivement et il a dit une

 23   phrase que je me rappelle très bien qui était la suivante :

 24   « Il faut que vous vous rappeliez que Kordic était notre

 25   Churchill. »  Fin de citation.


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  1         C’était une remarque très significative pour moi

  2   qui indiquait manifestement le respect porté à Monsieur

  3   Kordic de la part des Croates et qui m’indiquait également

  4   l’importance du poste qui était le sien aux yeux des

  5   Croates, notamment, bien sûr, en raison du rôle joué par

  6   lui en Bosnie centrale.

  7         J’avais toujours pensé que Dario Kordic était très

  8   proche de Mate Boban.  J’ai toujours cru qu’il avait un

  9   lien de famille, un lien par mariage à Mate Boban, bien que

 10   je n’en aie pas eu la preuve.

 11         Q.    Et enfin, même si peut-être vous en avez déjà

 12   parlé, pendant toute la durée du conflit, pouvez-vous nous

 13   dire quel est le jugement que vous avez porté sur le rôle

 14   concret, la position réelle de Dario Kordic sur le plan

 15   militaire, si vous vous êtes formé une opinion à ce sujet ?

 16         R.    Comme je l’ai déjà dit en Bosnie, le

 17   militaire et le politique étaient très proches, très liés. 

 18   À mes yeux, il était tout à fait clair que Dario Kordic

 19   était la personnalité politique de pointe, le numéro 1

 20   politique pour les Croates en Bosnie centrale mais il

 21   avait, bien entendu, également des responsabilités

 22   militaires et je dis une nouvelle fois que l’aspect

 23   militaire et l’aspect politique étaient extrêmement liés.

 24         Q.    Merci.

 25         Me NICE (interprétation) :  Nous n’avons plus de


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  1   questions à ce stade.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie,

  3   Monsieur le Président.

  4         CONTRE-INTERROGÉ PAR Me SAYERS

  5         (interprétation) :

  6         Q.    Bonjour, Monsieur Martin, Sir Martin.  Je

  7   suis Stephen Sayers, l’un des avocats représentant Monsieur

  8   Dario Kordic, et je me propose de vous poser plusieurs

  9   questions dans le courant de cet après-midi.  Derrière moi,

 10   vous pouvez voir les avocats du deuxième accusé, Monsieur

 11   Cerkez, et je ne sais pas si, par la suite, il pourrait

 12   avoir des questions à votre intention.

 13         Pour commencer avec quelques détails, je me

 14   propose de vous poser des questions d’ordre général d’abord

 15   concernant les institutions dont vous avez parlé et

 16   concernant les fonctions des personnes que vous avez

 17   mentionnées au cours de votre interrogatoire principal puis

 18   je m’efforcerai de procéder de façon chronologique,

 19   traverser les événements que vous avez déjà passés avec

 20   l’Accusation au niveau des réunions avec Monsieur Kordic et

 21   autres personnes que vous avez mentionnées au cours de

 22   votre interrogatoire et si jamais l’une des questions

 23   venant à être posée n’était pas claire, ce serait de ma

 24   faute et non pas un manque de compréhension de votre côté.

 25         D’une façon générale, j’ai bien compris que vous


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  1   avez été le responsable du centre de coordination sis à

  2   Mostar et que vous avez occupé ces fonctions à partir du

  3   mois de juin 1993 jusqu’à vers la fin du mois de septembre

  4   ?

  5         R.    Oui.  Dès que je suis arrivé en Bosnie, j’ai

  6   été envoyé à Mostar et c’est là que j’ai passé mes trois

  7   premiers mois de séjour.

  8         Q.    Il s’agit, en fait, des derniers jours de ce

  9   qu’on avait appelé la Communauté croate de Herceg-Bosna et

 10   la mise en place d’une République croate de Herceg-Bosna,

 11   c’est-à-dire vers le 28 août 1993, n’est-ce pas ?

 12         R.    Oui, c’est cela.

 13         Q.    Vous êtes devenu ensuite chef du centre

 14   régional de la mission d’observation de Zenica et vous avez

 15   repris les fonctions de votre prédécesseur, Monsieur Jean-

 16   Pierre Thebault, il me semble, en date du 14 octobre 1993 ?

 17         R.    Oui.  Il faudrait peut-être ajouter que la

 18   zone de responsabilité que j’avais en charge couvrait

 19   toutes les régions croates et bosniennes de Bosnie.  En

 20   d’autres termes, les régions croates et bosniennes de la

 21   Fédération, exception faite de Sarajevo, Bihac et trois

 22   poches, à savoir Zepa, Gorazde et Srebrenica.

 23         Q.    Vous nous avez entretenu de votre zone de

 24   responsabilité en votre qualité du centre régional de

 25   Zenica, n’est-ce pas ?


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  1         R.    Oui.

  2         Q.    Vous avez été dans cette zone-là le nouveau

  3   responsable du centre régional depuis neuf jours seulement

  4   lorsque l’incident de Stupni Do est intervenu ?

  5         R.    Oui, c’est cela.

  6         Q.    Et vous parlez le croate vous-même ?

  7         R.    J’ai essayé d’apprendre par moi-même.  Je ne

  8   suis pas très professionnel.  Je comprends pas mal et je

  9   parle très mal et très lentement.

 10         Q.    Mais est-ce que l’on peut dire que vous avez

 11   fait recours à des services d’interprètes pour vos

 12   entretiens ?

 13         R.    Certainement.

 14         Me SAYERS (interprétation) :

 15         Q.    Je voulais vous poser plusieurs questions

 16   d’ordre général concernant la composition de la mission

 17   d’observation de la Communauté européenne mais je crois que

 18   la Chambre a entendu beaucoup de témoignages là-dessus et

 19   je vais passer à la question suivante, à savoir que la

 20   situation militaire générale que vous avez connue et reçue

 21   lorsque vous vous trouviez à cette fonction disait que les

 22   Croates étaient sur la défensive et, notamment, dans la

 23   région de Zenica.

 24         R.    Oui.  On pourrait dire ainsi.  Pour aider

 25   cette Chambre, je dirais que les trois zones que j’avais


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  1   dans ma zone de responsabilité étaient très différentes.  À

  2   Tuzla, les Bosniens et Croates se battaient ensemble contre

  3   les Serbes.  En Bosnie centrale, les Croates et les

  4   musulmans se battaient entre eux et dans la partie sud, les

  5   principaux combats se déroulaient à Mostar.

  6         Q.    Vous serez d’accord avec moi pour dire,

  7   Monsieur, que la situation kaléidoscopique est fort

  8   complexe pour ce qui est des alliances et des oppositions

  9   ou orientations politiques entre ces parties-là ?

 10         R.    Oui, tout à fait.

 11         Q.    Est-ce que l’on pouvait résumer la situation

 12   dans laquelle se sont trouvés les Croates lorsque vous avez

 13   pris vos fonctions ?  Est-ce que l’on pourrait dire, donc,

 14   à ce sujet que jusque vers la mi-novembre 1993, une fois

 15   que vous aviez déjà assumé ces fonctions depuis un moment,

 16   que les Croates étaient assez comprimés dans trois poches

 17   géographiquement assez isolées, à savoir Vitez, Busovaca et

 18   Kiseljak et la ville de Zepce ?

 19         R.    Oui, c’est cela.

 20         Q.    Et la poche de Vares a disparu en raison de

 21   l’attaque de l’armée de la Bosnie-Herzégovine en début du

 22   mois de novembre ?

 23         R.    C’est cela.

 24         Q.    Vous avez mentionné lors de l’interrogatoire

 25   principal l’entretien que vous avez eu avec Mate Boban et


Page 13556

  1   le sujet, enfin, l’un des sujets de ce dernier avait été le

  2   départ de 12 000 Croates de Kakanj.  Vous avez également

  3   mentionné que vous n’étiez pas particulièrement au courant

  4   des faits à ce sujet mais est-ce qu’on pourrait vous aider

  5   si l’on vous dit qu’il y avait une offensive des forces

  6   musulmanes sur Kakanj à partir du 9 juin au 13 juin 1993

  7   qui a résulté de cet exode de réfugiés ?

  8         R.    Oui, je serais d’accord mais, inévitablement,

  9   j’étais lié à Mostar et je n’ai pas prêté une attention

 10   détaillée à la Bosnie centrale.

 11         Q.    Bien sûr, Sir Martin.  Ce n’est, donc, que

 12   depuis octobre que cela est devenu votre zone de

 13   responsabilité ?

 14         R.    Oui.

 15         Q.    Mais n’est-il pas vrai que l’un des leaders

 16   des bandes qui avaient été contrôlées par Ivica Rajic, qui

 17   était lui-même commandant autoproclamé sous le surnom de

 18   Dzeljo et que vous mentionnez dans l’un de vos rapports et

 19   que ce monsieur était émigré de Kakanj lorsqu’il avait été

 20   expulsé avec les 12 000 autres réfugiés en juin 1993 ?

 21         R.    Oui, cela pourrait être vrai.

 22         Q.    Est-ce que vous vous souvenez du fait que le

 23   chef de cette bande que l’on appelait les Apostolis avait

 24   été tué à Bilalovac par les forces musulmanes ?

 25         R.    Je ne pense pas le savoir.  Je ne suis pas


Page 13557

  1   sûr de le savoir.

  2         Q.    Vous avez dit que les composantes politiques

  3   et militaires étaient entremêlées.  Je crois que c’est bien

  4   le terme que vous avez utilisé.  Qui avait été le chef

  5   politique du côté musulman en Bosnie centrale ?

  6         R.    En fait, en Bosnie centrale, j’avais consacré

  7   mon attention aux personnalités du côté militaire et je me

  8   suis entretenu de ces questions politiques avec les

  9   commandants bosniens et je crois que Mirsad Ceman était

 10   Président du SDA dans la région et j’ai eu une ou deux

 11   rencontres avec lui mais la principale autorité ou la

 12   principale force motrice du côté bosniaque était le côté

 13   militaire.  Du moins, c’était mes principaux interlocuteurs

 14   lorsque je m’efforçais à réaliser des résultats.

 15         Q.    Mais est-ce que Monsieur Ceman avait eu des

 16   fonctions militaires quelconques ?  A-t-il donné des ordres

 17   à l’armée de Bosnie-Herzégovine ?

 18         R.    Je ne l’ai jamais vu à quelque réunion qui

 19   avait des composantes militaires en tant que partie

 20   prenante.

 21         Q.    J’essaie de laisser la possibilité aux

 22   interprètes de me rattraper.  Donc, vous avez eu affaire

 23   avec le Général Enver Hadzihasanovic et le Général Mehmed

 24   Alagic, n’est-ce pas ?

 25         R.    Oui.


Page 13558

  1         Q.    Vous avez trouvé que c’était des hommes de la

  2   ligne dure ?

  3         R.    Oui.

  4         Q.    En fait, vous considériez qu’ils étaient

  5   représentants de la ligne dure dans la direction des

  6   musulmans ?

  7         R.    Oui.  Leur orientation était plutôt

  8   unilatérale.

  9         Q.    Dans votre rapport, page 2, qui a été versé

 10   au dossier en sa qualité de pièce à conviction Z1419.

 11         R.    Oui.  Je peux dire que Hadzihasanovic venait

 12   de Zvornik et que Alagic venait de Sanski Most et les deux

 13   m’ont dit à plusieurs reprises qu’ils ne cesseront de se

 14   battre tant qu’ils ne pourront pas revenir dans leur

 15   localité natale.

 16         Q.    Du moins en attendant que, du point de vue

 17   militaire, ils ne reprennent contrôle sur les territoires

 18   qu’ils avaient contrôlés avant la guerre ?

 19         R.    Oui, mais il y avait Hadzihasanovic à Zvornik

 20   et Alagic à Sanski Most mais ils avaient été très

 21   déterminés pour ce qui était de la continuation de la

 22   lutte.

 23         Q.    Mais vous aviez considéré que les musulmans

 24   avaient fort bien appris la leçon des Serbes et qu’ils

 25   avaient compris qu’ils devraient être en possession de neuf


Page 13559

  1   dixièmes des lois pour réussir aux tables de négociations ?

  2         R.    Oui.  Ils ont certainement assimilé la leçon

  3   avant de venir négocier.  Ce sont les Serbes qui leur ont

  4   montré l’exemple, enfin, donné l’exemple en étant en

  5   possession des neuf dixièmes du territoire contrôlé.

  6         Q.    Sir Martin, permettez-moi de vous demander

  7   quelque chose au sujet de Kakanj.  Du 9 au 13 juin, il y a

  8   eu une offensive.  Peut-être n’êtes-vous pas

  9   personnellement au courant mais n’est-il pas vrai qu’il y

 10   avait eu une offensive simultanée dans la région de Travnik

 11   du 8 au 12 juin 1993 et nous avons entendu il y a quelques

 12   jours un témoin qui nous avait dit que quelques 20 000

 13   réfugiés ont été le résultat de cette offensive, des

 14   réfugiés croates ?

 15         R.    Oui, cela est exact.  Je n’ai pas peut-être

 16   de réponse détaillée à vous donner au sujet de ces deux

 17   campagnes militaires.

 18         Q.    Mais est-il vrai aussi qu’en même temps ou

 19   peut-être pas en même temps mais juste après, il y avait eu

 20   une offensive militaire vers Bugojno et Fojnica et ces deux

 21   municipalités avaient été prises par les forces musulmanes,

 22   ce qui a résulté par des dizaines de milliers de réfugiés

 23   de Croates de Bosnie ?

 24         R.    Oui, cela est exact.

 25         Q.    Outre l’offensive de Vares qui a résulté par


Page 13560

  1   la chute de Vares, il y en a eu encore deux que vous avez

  2   mentionnées en page 2 de votre rapport.  Vous pouvez vous

  3   pencher dessus.  Je crois que la première a eu lieu le 22

  4   décembre, donc, juste avant Noël de 1993, lorsqu’il y a eu

  5   une attaque principale des musulmans contre la poche de

  6   Vitez et Busovaca.  Vous le savez ?

  7         R.    Oui.

  8         Q.    Cela a résulté par bien des victimes du côté

  9   croate ?

 10         R.    Oui, c’est exact.

 11         Q.    Je vois que le transcript dit que l’offensive

 12   a été lancée contre les musulmans.  En fait, il faut dire

 13   que c’est les forces musulmanes qui ont lancé cette

 14   offensive ?

 15         R.    Je m’excuse.

 16         Q.    Mais revenons à la ligne 4, à la page 66.  En

 17   fait, ce sont les musulmans qui ont organisé cette

 18   offensive ?

 19         R.    De quelle page s’agit-il ?

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous savons de

 21   quoi il s’agit.  Donc, ne vous attardez pas dessus.

 22         R.    Je m’excuse.  Donc, il y a eu une grande

 23   offensive lancée en ligne 4…

 24         Me SAYERS (interprétation) :

 25         Q.    Cela dit…


Page 13561

  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Non, non, mais

  2   c’est le transcript qui prête à confusion et l’avocat de la

  3   Défense parle du transcript.

  4         R.    Ah bon !

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Je m’excuse pour les

  6   erreurs de transcript, Monsieur le Président.

  7         Q.    Donc, dans cette seconde offensive, Sir

  8   Martin, lorsqu’en date du 9 janvier, on avait lancé une

  9   offensive contre Vitez, Busovaca et la poche de Santici,

 10   l’objectif a été de contrôler la route principale

 11   d’approvisionnement ?

 12         R.    Oui.

 13         Q.    Fort bien !  Est-ce que vous saviez qu’il y

 14   avait une technique de nettoyage de maisons en maisons et

 15   que cela a résulté par la mort de bien des civils croates ?

 16         R.    Oui.

 17         Q.    Je vais peut-être laisser cela un peu de côté

 18   pour vous demander, concernant les références que vous avez

 19   faites au niveau de votre témoignage relatif au HVO, est-il

 20   vrai que dans la période d’août 1992 jusqu’à la création de

 21   la République croate de Herceg-Bosna, le Président du HVO

 22   avait été Monsieur Jadranko Prlic à Mostar ?

 23         R.    Oui.

 24         Q.    Est-ce que vous vous souvenez des discussions

 25   que vous avez eues avec des Croates d’influence à Mostar


Page 13562

  1   tel que Vladislav Pogarcic concernant les intentions de la

  2   mise en place de cette organisation du HVO ?  Était-ce un

  3   organisme permanent ou temporaire ou juste temporaire pour

  4   le temps de guerre ?

  5         R.    J’ai eu des discussions avec Vladislav

  6   Pogarcic mais nous n’avons jamais discuté des raisons de la

  7   création du HVO qui, d’après son appellation même, étaient

  8   évidentes.  C’était un conseil de défense.

  9         Q.    Oui, mais défense contre les Serbes qui

 10   avaient lancé de grandes offensives tout au large de cette

 11   nouvelle République nouvellement créée en date du 6 mars

 12   1992 :  Est-ce bien vrai ?

 13         R.    Oui.

 14         Q.    Est-ce que vous avez jamais fourni l’effort

 15   de faire une évaluation vous-même pour ce qui était des

 16   attributions du Président du HVO là-bas ?

 17         R.    Non.  Concrètement, non, je ne l’ai pas fait.

 18         Q.    Permettez-moi de passer à un autre sujet.  Je

 19   pense que cela ne prête pas à controverse.  Il y avait

 20   trois Vice-présidents du HVO.  Il y avait Stipo Ivankovic

 21   en premier qui a été nommé à ses fonctions en même temps

 22   que le Dr Prlic qui avait été Président.  Est-ce que vous

 23   avez rencontré Monsieur Ivankovic ?

 24         R.    Oui.  Je suis au courant de cette personne

 25   mais je n’ai jamais rencontré cette personne.


Page 13563

  1         Q.    Le deuxième Vice-président était Anto Valenta

  2   et il avait été nommé le 17 mai.  Vous l’avez rencontré,

  3   n’est-ce pas ?

  4         R.    Oui, mais attendez une minute.  Je dois

  5   vérifier.  Cela est possible mais je ne me souviens pas si

  6   Valenta m’avait, effectivement, dit qu’il était Vice-

  7   président du HVO.

  8         Q.    Fort bien !  Le troisième Vice-président est

  9   le monsieur que vous avez mentionné également, à savoir

 10   Monsieur Kresimir Zubak.  Est-ce que vous avez rencontré ce

 11   dernier à Mostar avant la création de la République croate

 12   de Herceg-Bosna ?

 13         R.    Oui.

 14         Q.    Est-ce que vous saviez qu’il était Vice-

 15   président du HVO ?

 16         R.    Oui.  En fait, je pense que je l’ai mentionné

 17   dans mon témoignage principal.

 18         Q.    Est-ce que vous saviez que Monsieur Kordic

 19   n’avait jamais été Vice-président du HVO ?

 20         R.    Moi, j’avais été convaincu qu’il l’était.

 21         Q.    Permettez-moi de vous dire que les seules

 22   fonctions officielles qu’il avait assumées au sein du HVO

 23   avaient été celles de membre du comité du personnel où il a

 24   été nommé en novembre 1992, je crois.

 25         R.    Mais vous parlez du HVO ?


Page 13564

  1         Q.    Oui, tout à fait.  Est-ce que vous avez déjà

  2   entrepris des pas ou des démarches pour vous informer pour

  3   ce qui était de savoir quelles étaient les attributions

  4   d’un Vice-président du HVO ?

  5         R.    Non.  Je n’ai jamais examiné ou je ne me suis

  6   jamais penché sur la question des attributions de Messieurs

  7   Prlic, Zubak ou des autres, non.

  8         Q.    Fort bien !  Lorsqu’il s’agit du parti

  9   politique du HDZ en Bosnie-Herzégovine, vous saviez, je

 10   pense, que Monsieur Mate Boban avait été Président de ce

 11   parti politique à l’époque dont nous traitons dans cette

 12   affaire ?

 13         R.    Oui.

 14         Q.    Et je crois que vous avez identifié et

 15   reconnu, donc, Monsieur Kordic en sa qualité d’un des Vice-

 16   présidents de ce parti politique.  Est-ce que vous savez

 17   combien de Vice-présidents du parti il y avait à l’époque ?

 18         R.    Non, je ne le sais pas.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que nous

 20   pouvons verser au dossier une pièce à conviction ? 

 21         Q.    Je ne sais pas si vous avez vu une copie de

 22   ceci et si vous étiez au courant de l’existence d’autres

 23   vice-présidents.

 24         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais le témoin

 25   vient de dire qu’il ne savait pas combien de vice-


Page 13565

  1   présidents il y avait au HDZ, et donc, il n’y a pas de

  2   raison que vous l’interrogiez là-dessus.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.  Je pense que

  4   cela pourrait être correct mais je voudrais communiquer au

  5   témoin notre position.

  6         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais quel est

  7   votre sujet ?

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Il y avait cinq

  9   Vice-présidents en novembre 1992 et Monsieur Kordic était

 10   l’un d’eux.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Bien !

 12         Sir Martin, savez-vous quelque chose à ce sujet ?

 13         R.    Même si j’avais, enfin, supposé, je crois

 14   qu’il y en avait eu six.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous pouvez,

 16   donc, présenter ces éléments de preuve.

 17         Me SAYERS (interprétation) : 

 18         Q.    Est-ce que vous avez rencontré Monsieur Mile

 19   Akmadzic ?

 20         R.    Non, je ne pense pas.

 21         Q.    Et Monsieur Martinovic ?

 22         R.    Oui.  J’ai connu Monsieur Martinovic.

 23         Q.    Et Monsieur Zivkovic ?

 24         R.    Oui.

 25         Q.    Pour ce qui est de la création de la


Page 13566

  1   République croate de Herceg-Bosna en août 1993, je crois

  2   que vous deviez savoir qu’à l’époque, des négociations

  3   internationales avaient évolué, notamment en commençant par

  4   le Plan de Vance-Owen internationalement sanctionné et en

  5   début 1993, il y avait des progrès d’effectués et le plan

  6   avait été approuvé en août 1993, et s’agissant de ce plan –

  7   je crois que la Chambre a déjà entendu des témoignages à ce

  8   sujet – je crois que la substance de ce plan consistait en

  9   la création et la mise en place de trois parties

 10   constituantes sur des bases ethniques qui seraient des

 11   parties constituantes également de la République de Bosnie-

 12   Herzégovine.

 13         Est-ce que cela est exact ?

 14         R.    Oui.

 15         Q.    Si j’ai bien compris, la position prise par

 16   la communauté internationale était celle de faire en sorte

 17   que chacune de ces républiques serait autonome avec des

 18   représentants élus constituant une sorte de gouvernement

 19   central où chacune des constituantes nommerait ses

 20   représentants ?

 21         R.    Oui.  En ligne générale, c’est bien cela.

 22         Q.    Mais vous saviez, Sir, que le Dr Prlic avait

 23   été nommé aux fonctions de Premier ministre, à savoir

 24   Premier ministre du gouvernement de la République croate de

 25   Herceg-Bosna et qu’un certain nombre de ministres avaient


Page 13567

  1   été nommés également ?

  2         R.    Oui.

  3         Q.    Pour autant que vous le sachiez, Monsieur

  4   Kordic n’avait pas été nommé ministre lui-même ?

  5         R.    Pour autant que je le sache, non.

  6         Q.    Monsieur Prlic n’avait pas été nommé avec lui

  7   ?

  8         R.    Pour autant que je le sache, non.

  9         Q.    Est-ce que vous saviez qu’il y avait deux

 10   remplaçants, deux adjoints du Premier ministre, le premier

 11   était Monsieur Prlic de Zepce et l’autre, c’était Jozo

 12   Martinovic ?

 13         R.    Maintenant que vous le dites, cela me

 14   rafraîchit la mémoire mais je ne serais pas en mesure de me

 15   rappeler de tous les détails d’un coup.

 16         Q.    Pour autant que je le sache moi-même, vous

 17   saviez que Monsieur Boban avait assumé les fonctions de

 18   Président de la Communauté croate de Herceg-Bosna ?

 19         R.    Oui.

 20         Q.    Il l’a été jusqu’à [l’interprète : date

 21   inaudible] ?

 22         R.    Oui.

 23         Q.    Il avait été membre du conseil présidentiel. 

 24   Est-ce que vous saviez quelles étaient les personnes

 25   nommées dans ce conseil ?    


Page 13568

  1         R.    Je ne me souviens pas mais je sais que Dario

  2   Kordic avait été nommé à une période mais je ne saurais

  3   vous dire à quelle date.

  4         Q.    Mais laissez-moi vous dire que Monsieur

  5   Kordic n’avait pas été nommé dans ce conseil jusqu’en

  6   octobre 1994.

  7         R.    C’est exact.

  8         Q.    Est-ce que vous saviez que le 10 décembre

  9   1993… (l’interprète se reprend) le 10 septembre 1993, à

 10   l’époque où le Général Ante Roso avait été commandant en

 11   chef du HVO et Ivo Lozancic, que vous avez décrit et

 12   mentionné, qui avait été commandant en chef à Zepce ?

 13         R.    Oui.

 14         Q.    Saviez-vous que ces deux personnes faisaient

 15   partie du conseil présidentiel ?

 16         R.    Maintenant que vous me le faites penser, oui,

 17   mais je n’aurais pas songé à la chose moi-même.

 18         Q.    Est-ce que vous savez que Monsieur Kordic

 19   n’avait pas fait partie du conseil présidentiel à l’époque

 20   où vous avez été chef du centre de Zenica ?

 21         R.    Je savais qu’il faisait partie du conseil

 22   mais je ne suis pas sûr de la date à laquelle il l’a fait.

 23         Q.    Maintenant que nous traitons du gouvernement,

 24   est-ce que vous saviez que le gouvernement de la République

 25   croate de Herceg-Bosna était constitué par un Président et


Page 13569

  1   une chambre de représentants, un Parlement ?

  2         R.    Oui.

  3         Q.    Fort bien !  Je suppose aussi que vous saviez

  4   que la première session de cette chambre des représentants

  5   a eu lieu en date du 20 novembre 1993 et je crois qu’à

  6   l’époque, vous aviez eu une réunion avec un représentant

  7   chargé de la  presse du Président Mate Boban, un certain

  8   Slobodan Lovrinovic ?

  9         R.    Oui.

 10         Q.    Et je crois que vous aviez de bonnes

 11   relations ?

 12         R.    Oui, de bonnes relations régulières.

 13         Q.    Et je crois qu’en date du 20 novembre, vous

 14   aviez constaté que le Général Roso avait remplacé le

 15   Général Praljak en sa qualité de commandant en chef des

 16   forces du HVO au large de la Bosnie-Herzégovine ?

 17         R.    Je pense, oui, que cela a eu lieu une semaine

 18   après la destruction d’une mosquée.

 19         Q.    J’ai encore une question au sujet de Praljak. 

 20   Est-ce que vous saviez qu’il était originaire de Capljina

 21   en Bosnie-Herzégovine ?

 22         R.    Non.

 23         Q.    Vous avez déjà décrit les conversations que

 24   vous avez eues avec Monsieur Philip Watkins, le chef du

 25   centre de coordination de Mostar.  Il a assisté à la


Page 13570

  1   session du Parlement de la République croate de Herceg-

  2   Bosna le 17 février 1994 ?

  3         R.    Oui.

  4         Q.    Vous avez dit qu’il vous a appris que c’est

  5   Ivan Bender qui était élu au poste du Président du

  6   Parlement, n’est-ce pas ?

  7         R.    C’est exact.

  8         Q.    Je crois que vous avez dit également,

  9   Monsieur, que vous aviez l’impression que Monsieur Kordic

 10   était, lui, au poste de Vice-président du Parlement et

 11   qu’il était l’un des six Vice-présidents ou bien l’adjoint

 12   du Président ?

 13         R.    Oui, tout à fait.

 14         Q.    Est-ce que vous saviez qu’il n’y avait que

 15   deux adjoints du Président, l’un était Monsieur Kordic et

 16   l’autre était une personne de Bihac, à savoir Vlado Santic

 17   ?

 18         R.    Non.  Moi, j’ai l’impression qu’il y avait

 19   trois Vice-présidents et qu’il était l’un des trois Vice-

 20   présidents.

 21         Q.    Très bien !

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Je souhaite que l’on

 23   attribue la cote au document suivant et qu’on le place sur

 24   le rétroprojecteur.  J’aurai une seule question à ce sujet.

 25         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Il s’agit du


Page 13571

  1   document D174/1.

  2         Me SAYERS (interprétation) :

  3         Q.    Il s’agit ici de la traduction du document

  4   publié dans Narodni List en 1994, au mois de mars.  Est-ce

  5   que vos observateurs avaient accès à Narodni List ?

  6         R.    Probablement mais je ne peux pas l’affirmer

  7   avec exactitude.

  8         Q.    Très bien !  Si l’on examine maintenant ce

  9   document – puisque vous comprenez la langue croate, vous

 10   pouvez également vous pencher sur l’original en croate qui

 11   est en annexe de ce document – est-ce que ceci rafraîchit

 12   votre mémoire si vous trouvez ici que Monsieur Kordic et

 13   Monsieur Santic ont été nommés au poste d’adjoint du

 14   Président par le Président Ivan Bender ?

 15         R.    Oui, mais je ne me souviens pas avoir vu ce

 16   document.

 17         Q.    Très bien.  Merci.  Je n’en ai plus besoin. 

 18   Vous avez parlé de la démission de Monsieur Boban en

 19   février 1994.  N’est-ce pas vrai que les Croates avaient

 20   l’impression qu’il s’est retiré pour des raisons tout à

 21   fait honorables ?

 22         R.    Je pense que les Croates n’ont pas fait

 23   preuve de beaucoup de réactions vis-à-vis de cela.  Moi, je

 24   m’attendais à une réaction plus forte et j’ai l’impression

 25   que tous les Croates ont accepté sa démission.


Page 13572

  1         Q.    Je souhaite maintenant attirer votre

  2   attention sur la page 15 de votre déclaration de février

  3   1998.  Vous dites quelque chose de différent maintenant. 

  4   Je crois qu’à l’époque, vous avez dit que Mate Boban s’est

  5   retiré de son poste de Président de la République croate de

  6   Herceg-Bosna et les Croates de la Bosnie centrale n’ont pas

  7   eu beaucoup de réactions vis-à-vis de cela.  Ils avaient

  8   l’impression qu’il s’est retiré pour des raisons honorables

  9   parce qu’il avait d’autres choses importantes à faire.

 10         Est-ce que c’est votre avis encore aujourd’hui ?

 11         R.    Oui.

 12         Q.    Merci.

 13         R.    Peut-être je peux ajouter quelque chose à

 14   cela.  Moi, je ne sais pas – j’ai entendu dire mais je ne

 15   peux pas prouver cela – que Tudjman a été soumis à des

 16   pressions dans le cadre des négociations de paix selon

 17   lesquelles il a fallu qu’il remplace Monsieur Boban.  Moi,

 18   tout ce que je peux dire c’est que j’étais étonné de voir à

 19   quel point les Croates ne réagissaient pas fortement mais

 20   quant à la question de savoir quelles étaient les raisons

 21   de son départ, je ne peux pas vous dire plus.

 22         Q.    Très bien !  Parlons d’autres choses. 

 23   D’après les rapports que vos assistants vous envoyaient de

 24   Mostar, vous ne saviez pas s’il y avait… d’après ces

 25   rapports, vous avez cru qu’il n’y a pas eu de poste de


Page 13573

  1   vice-président de la République croate de Herceg-Bosna ?

  2         R.    Moi, c’est ce que j’avais cru comprendre.  Je

  3   croyais que Dario Kordic avait été nommé au poste de Vice-

  4   président.  Peut-être je me trompais.

  5         Q.    Veuillez maintenant examiner la pièce à

  6   conviction 1331.0.  Je crois que ce document a déjà reçu

  7   une cote. 

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous

  9   pourriez montrer cela à Sir Martin ?

 10         R.    J’ai l’impression que je n’ai pas ce

 11   document.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur l’Huissier,

 13   veuillez placer cela sur le rétroprojecteur, s’il vous

 14   plaît, page 1.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  C’est un

 16   document confidentiel, nous dit la greffière d’audience. 

 17   Donc, il n’est pas possible de le placer sur le

 18   rétroprojecteur.  Pourquoi est-ce que vous avez besoin de

 19   cela ?

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Tout simplement

 21   parce que Monsieur Lovrenovic informe l’ECMM du fait que le

 22   conseil présidentiel a été créé parce que la Communauté

 23   croate de Herceg-Bosna n’a pas de vice-président et, donc,

 24   le conseil présidentiel a été créé en tant qu’organisation

 25   alternative qui fournira le soutien au bureau du Président


Page 13574

  1   Mate Boban.

  2         Q.    Est-ce que cela vous rafraîchit la mémoire ?

  3         R.    Oui.  En effet, j’ai l’impression que j’ai

  4   mentionné cela dans ma déclaration parce que j’ai cité

  5   Monsieur Lovrenovic qui a dit que le fait d’extraire

  6   Monsieur Kordic de la Bosnie centrale enverrait le mauvais

  7   message, un faux message.

  8         Q.    Très bien.  Merci.  Je crois aussi que vous

  9   saviez que votre HCC à Mostar a reçu plusieurs fois

 10   l’information concernant, par exemple, la création de la

 11   République croate de Herceg-Bosna et de la nomination de

 12   Monsieur Kordic au poste de l’adjoint du Président du

 13   Parlement.  Vous saviez qu’il était juste l’un des membres

 14   normaux du Parlement ?

 15         R.    Je pense qu’il était quand même plus

 16   important que les autres.  Il avait un rôle extrêmement

 17   important dans la hiérarchie des Croates.

 18         Q.    Je comprends cela mais vos représentants vous

 19   ont informé à Mostar du fait que Monsieur Kordic n’était

 20   que l’un des élus du Parlement ?

 21         R.    Ça, c’est exact.

 22         Q.    Merci.

 23         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Me Sayers, je

 24   ne vois pas pourquoi vous parlez de cela.  D’après le

 25   témoin, il a dit que cette personne était importante à la


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  1   fois dans la partie civile et militaire du HVO et qu’il

  2   avait des contacts avec les militaires pour donner des

  3   instructions politiques, pour parler des matières

  4   politiques.  Nous avons déjà entendu des preuves à ce sujet

  5   et, si je ne me trompe, ceci n’a pas été contesté.  Je ne

  6   vois pas ce que vous essayez de prouver.

  7         Est-ce que vous acceptez qu’il y avait des

  8   contacts entre les responsables civils et militaires qui

  9   coordonnaient leurs politiques ou bien est-ce que vous

 10   contestez cela ?

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Nous contestons

 12   cela.  Nous considérons que Monsieur Kordic était une

 13   personnalité importante en Bosnie centrale.

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Il n’est pas

 15   nécessaire d’entrer dans tous les détails.  Vous avez déjà

 16   exprimé votre position selon laquelle il était un leader

 17   politique important mais la question est la suivante : 

 18   Est-ce que vous acceptez qu’au sein du HVO, les affaires

 19   civiles et militaires étaient entremêlées, comme le témoin

 20   l’a affirmé ?

 21         Me SAYERS (interprétation) :  La réponse à votre

 22   question, Monsieur le Président, en ce qui concerne le

 23   témoignage de Sir Martin est que nous ne pouvons pas

 24   accepter cela.  Tout au début du HVO, lorsque le HVO a été

 25   créé par le biais d’un décret émanant de Mate Boban en date


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  1   du 8 avril 1992, à cette époque-là, je pense qu’il serait

  2   possible de dire que les aspects, les fonctions civiles et

  3   militaires au sein du HVO étaient plutôt entremêlées à

  4   cause du fait que c’était une organisation qui était en

  5   pleine évolution.

  6         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Parlons de

  7   cela.  Donc, ceci a été créé en avril 1992 et pendant

  8   combien de temps est-ce que vous acceptez qu’il y a eu ce

  9   genre de liens ?

 10         Me SAYERS (interprétation) :  C’est très

 11   difficile.  Si vous me demandez quelle est mon opinion…

 12         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Non, je ne

 13   demande pas votre opinion.  Je demande quelle est votre

 14   affirmation.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Moi, je considère

 16   que ces fonctions étaient entremêlées jusqu’à la création

 17   du HVO en tant qu’organisation militaire.  Donc, nous

 18   pourrions parler dans ce cas-là des mois de juillet, août

 19   1992, moment auquel le Colonel Blaskic a été nommé au poste

 20   du chef ou bien du commandant de la zone opérationnelle de

 21   Bosnie centrale et c’est la période pendant laquelle Sir

 22   Martin était à Zenica.

 23         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Donc, cela

 24   veut dire qu’après cette date, selon vous, ces fonctions

 25   civiles et militaires n’étaient plus entremêlées ?  Dites-


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  1   nous ça directement, s’il vous plaît.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  D’après nous,

  3   pendant cette période, la période des faits, il n’y a pas

  4   eu ce genre de liens.  Ce n’était pas entremêlé.  L’aspect

  5   militaire était séparé de l’aspect civil puisque le Colonel

  6   Blaskic était directement subordonné à son supérieur, au

  7   chef de l’état-major à Mostar.

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Dans ce cas-

  9   là, posez la question directement.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.

 11         Q.    Est-ce qu’il est exact de dire que le

 12   quartier général principal du HVO était à Mostar ?

 13         R.    Oui.

 14         Q.    Le commandant en chef, pendant votre mandat,

 15   était au début le Général Slobodan Praljak et ensuite, le

 16   Général Ante Roso ?

 17         R.    Oui.

 18         Q.    Est-ce qu’il est exact de dire qu’en ce qui

 19   concerne l’organisation militaire du HVO, il y a eu le

 20   quartier général et au-dessus du quartier général, les

 21   forces militaires étaient organisées selon ce que l’on

 22   appelait les zones opérationnelles ?  En Bosnie centrale,

 23   il y avait le Commandant Blaskic qui était chargé de cette

 24   zone opérationnelle, n’est-ce pas exact ?

 25         R.    Absolument mais à mon avis, ceci se passait


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  1   aussi à travers un contrôle politique pendant toute cette

  2   période et, d’ailleurs, il faut que les choses soient ainsi

  3   parce que les militaires sont responsables devant les

  4   politiques.

  5         Q.    Je comprends mais le Colonel Blaskic ne vous

  6   a jamais dit, ni à vous, ni à vos associés, à vos

  7   observateurs, qu’il prenait les ordres de la part de

  8   Monsieur Kordic ?

  9         R.    Non.

 10         Q.    Et d’ailleurs, il n’y a pas eu de rapport au

 11   sein de l’ECMM indiquant que les choses se passaient de

 12   cette manière-là parmi tous ces rapports envoyés aux

 13   centres régionaux ou au quartier général à Zagreb, et

 14   cætera ?

 15         R.    Non, mais bien sûr, il y a une structure de

 16   commandement militaire mais au-dessus de cette structure

 17   militaire, il y a le contrôle politique et moi, j’ai

 18   toujours été convaincu que ceci était le cas en Bosnie et

 19   ceci ne me surprend pas du tout parce que c’est l’état

 20   normal des choses.

 21         Q.    Je comprends mais…

 22         M. LE JUGE ROBINSON (interprétation) :  Les

 23   interprètes demandent que vous ralentissiez, Monsieur

 24   Sayers.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.


Page 13579

  1         Q.    N’est-ce pas exact que, tout comme dans

  2   chaque autre organisation, hiérarchiquement, Monsieur

  3   Blaskic était responsable devant son supérieur immédiat qui

  4   était le chef d’état-major à Mostar ?

  5         R.    Oui, c’est exact.

  6         Q.    Si nous descendons maintenant cette chaîne de

  7   commandement, et je crois que vous connaissez les détails

  8   de cette structure militaire, est-ce qu’il est exact de

  9   dire qu’au sein de chaque zone opérationnelle,

 10   l’organisation militaire se basait sur les brigades

 11   constituées selon les municipalités ?

 12         R.    Oui, c’est exact mais je souligne qu’à

 13   n’importe quel stade, les politiques peuvent avoir la

 14   priorité en ce qui concerne la prise des décisions vis-à-

 15   vis des militaires et c’est tout à fait correct, c’est tout

 16   à fait normal.  Donc, ceci était valable pour chaque

 17   échelon de la chaîne du commandement.  Donc, les militaires

 18   étaient là afin de soutenir les politiques.

 19         Q.    Est-ce qu’il est exact de dire que vous

 20   n’avez pas eu de discussion avec le Président Boban, ni

 21   avec le Dr Prlic, ni aucun autre leader politique, pour

 22   autant que vous le sachiez, en ce qui concerne la chaîne de

 23   commandement, la manière dont les ordres étaient donnés ?

 24         R.    Non, effectivement, je n’ai pas parlé de cela

 25   avec Monsieur Boban, ni avec d’autres leaders politiques,


Page 13580

  1   non.

  2         Q.    Très bien !  Autre question :  Vous n’avez

  3   jamais vu Monsieur Boban et Monsieur Kordic ensemble,

  4   n’est-ce pas ?

  5         R.    Non.

  6         Q.    Très bien !  Vous avez parlé des liens de

  7   famille dont on parlait entre Monsieur Kordic et Monsieur

  8   Boban.  Ce que je suggère c’est qu’effectivement, il n’y a

  9   pas eu ce genre de liens entre eux, c’était tout simplement

 10   des rumeurs qui circulaient au sein de la population ?

 11         R.    Oui, c’est exact.  Tout simplement, c’est ce

 12   que je croyais pendant assez longtemps mais je n’avais pas

 13   de preuve à ce sujet.

 14         Q.    J’ai juste quelques questions concernant

 15   l’étendue géographique de l’influence politique de Monsieur

 16   Kordic.  Vous ne pensez pas que son influence s’étendait

 17   jusqu’à Mostar, n’est-ce pas ?

 18         R.    Non.  Je pense qu’il était très influent

 19   simplement dans les zones de Tuzla, de la Bosnie centrale

 20   et de l’Herzégovine.  Ça, c’est en ce qui concerne

 21   l’influence en général mais il était surtout influent

 22   politiquement en Bosnie centrale.

 23         Q.    Je comprends mais il n’avait pas énormément

 24   d’influence à Mostar, n’est-ce pas ?

 25         R.    Non, sauf le fait qu’il était une


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  1   personnalité politique très importante en Bosnie centrale. 

  2   Donc, à mon avis, il pouvait être entendu et obéi à Mostar

  3   aussi.

  4         Q.    Mais il n’a jamais participé au gouvernement

  5   de Mostar, n’est-ce pas ?

  6         R.    Non.

  7         Q.    Vous ne l’avez jamais vu à Mostar à aucun

  8   moment pendant votre mandat à Mostar ?

  9         R.    Pendant que j’étais à Zenica, non.

 10         Q.    Très bien !  Je n’ai que quelques questions

 11   de plus concernant la personnalité.  Je crois que vous avez

 12   déjà mentionné et décrit suffisamment le Président Boban. 

 13   Parlons maintenant de Monsieur Prlic.  D’après vous,

 14   c’était l’homme politique croate le plus impressionnant

 15   parmi tous ceux que vous avez rencontrés ?

 16         R.    Oui.  C’est ce que j’ai écrit dans mon

 17   rapport.

 18         Q.    En ce qui concerne Monsieur Zubak, je crois

 19   que lui, il était le représentant du gouvernement de la

 20   République croate qui a, effectivement, signé les Accords

 21   de Washington, n’est-ce pas ?

 22         R.    Non, je ne pense pas que ce soit correct. 

 23   C’est Prlic et non pas Zubak qui a signé l’Accord de

 24   Washington.

 25         Q.    Ceci s’est produit un an plus tard ?


Page 13582

  1         R.    Oui, un an plus tard.

  2         Q.    On vous a posé des questions concernant les

  3   commentaires de Monsieur Kordic sur la création d’un État

  4   islamique fondamentaliste dans la République de Bosnie-

  5   Herzégovine.  Est-ce qu’il serait exact de dire que

  6   pratiquement tous les leaders croates vous disaient la même

  7   chose et qu’ils le disent encore aujourd’hui ?

  8         R.    Oui, y compris le feu Président Tudjman qui

  9   était tout à fait paranoïaque vis-à-vis du fondamentalisme

 10   musulman.  J’ai parlé de cela aussi avec les généraux, par

 11   exemple, Alagic et Hadzihasanovic, qui souvent étaient avec

 12   moi, devant moi en train de boire du slivovitz et ils ne

 13   ressemblaient pas à de bons musulmans et lorsque j’avançais

 14   ce genre de propositions, lorsque je les transmettais, ça

 15   les faisait rire mais il s’agissait là d’un sujet récurrent

 16   avancé par les Croates et aussi par l’Église catholique. 

 17   Les représentants de l’Église m’en ont parlé plusieurs fois

 18   aussi.

 19         Q.    Donc, est-ce qu’il serait exact de dire qu’il

 20   n’y avait rien de particulièrement bizarre ou excentrique

 21   dans les propos avancés par Monsieur Kordic puisque les

 22   représentants du gouvernement croate le faisaient

 23   régulièrement ?

 24         R.    Non.  Les opinions sur le fondamentalisme

 25   islamique étaient partagées par la plupart des leaders


Page 13583

  1   croates.

  2         Q.    Très bien, Monsieur.  Vous avez décrit quatre

  3   ou cinq réunions que vous avez eues avec Monsieur Kordic,

  4   pour autant que vous vous en souveniez, peut-être qu’il y

  5   en a eu plus.  Vous avez dit que vous n’avez jamais demandé

  6   à Monsieur Kordic s’il détenait un poste militaire, s’il

  7   avait un grade militaire et puis vous ne lui avez jamais

  8   demandé s’il avait l’autorité d’émettre des ordres non

  9   plus, n’est-ce pas ?

 10         R.    Non, effectivement, je ne lui ai jamais posé

 11   cette question.

 12         Q.    Et vous ne l’avez jamais vu en train

 13   d’émettre, de donner des ordres militaires ?

 14         R.    Non, je ne l’ai jamais vu en train de faire

 15   cela.

 16         Q.    Aucun commandant militaire croate de Bosnie

 17   ne vous a jamais dit que Kordic avait ce pouvoir, cette

 18   autorité ?

 19         R.    Non.

 20         Q.    Très bien, Monsieur.  Très bien !  Le sujet

 21   suivant que j’avais selon mes notes concerne la position de

 22   Monsieur Kordic mais je crois que nous avons suffisamment

 23   parlé de cela.  À ce moment, Sir Martin, je souhaite que

 24   l’on progresse chronologiquement si possible.

 25                     [La Chambre discute]


Page 13584

  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui, Me

  2   Sayers.  Excusez-moi, nous étions en train de nous

  3   consulter.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le

  5   Président, j’allais procéder maintenant de manière

  6   chronologique avec Sir Martin.  Peut-être nous pourrions

  7   procéder à une pause d’abord.

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Tout à fait. 

  9   Nous allons avoir une pause jusqu’à 2 h 30. 

 10         Monsieur Martin, je vous dirai la même chose que

 11   je dis à tous les témoins.  Il ne faut pas que vous parliez

 12   à qui que ce soit de votre déposition jusqu’à la fin de

 13   votre déposition et ceci se rapporte aussi aux membres du

 14   Bureau du Procureur.  Veuillez rentrer à 2 h 30, s’il vous

 15   plaît.

 16         --- Suspension de l’audience à 12 h 55

 17         --- Reprise de l’audience à 14 h 35

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Me Sayers,

 19   vous avez la parole.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, Monsieur le

 21   Président.

 22         Q.    Bonjour à nouveau, Sir Martin.  Le premier

 23   événement au sujet duquel vous avez témoigné

 24   chronologiquement, ce sont les deux réunions que vous avez

 25   eues le 21 octobre 1993, l’une avec Monsieur Valenta,


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  1   l’autre avec Monsieur Kordic.  Il est permis de dire,

  2   n’est-ce pas, Monsieur, que vous étiez accompagné au moment

  3   de ces réunions par votre moniteur V1, Nick Turnbull,

  4   n’est-ce pas ?

  5         R.    Lors de ma rencontre avec Dario Kordic, c’est

  6   certain mais je ne suis pas sûr s’il était… ah oui !  C’est

  7   le HCC de Travnik qui était avec moi quand j’ai rencontré

  8   Anto Valenta, effectivement, c’est exact.

  9         Q.    Il s’agissait de Monsieur Watkins à ce

 10   moment-là, n’est-ce pas ?

 11         R.    Monsieur Watkins à ce moment-là, oui, en

 12   effet.

 13         Q.    Monsieur Turnbull était le moniteur V1

 14   affecté spécialement à la région de Vitez-Busovaca, entre

 15   autres, n’est-ce pas ?

 16         R.    C’est exact.

 17         Q.    Donc, à ce moment-là, alors que vous occupiez

 18   votre nouveau poste depuis moins d’une semaine, c’est lui

 19   qui connaissait le mieux la situation militaire et

 20   politique dans la région, n’est-ce pas ?

 21         R.    Non.  C’est Watkins qui avait passé le plus

 22   de temps dans la région.  Il s’y trouvait depuis environ un

 23   an.  C’est lui qui avait le plus d’expérience au sujet de

 24   la région.

 25         Q.    Vous avez dit dans votre déposition que


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  1   Monsieur Kordic possédait une maison à l’extérieur de

  2   Busovaca qui était désignée sous le nom de Nid d’Aigle.  À

  3   quoi faisait référence ce surnom ?

  4         R.    Je ne sais pas si ce surnom de Nid d’Aigle

  5   était donné par les Croates mais c’était sans aucun doute

  6   le nom qui était donné à cette maison par la communauté

  7   internationale.

  8         Q.    Saviez-vous que le quartier général de la

  9   brigade de Bobovac était également désigné sous le nom de

 10   Nid d’Aigle par la communauté internationale et, notamment,

 11   par le bataillon britannique ?

 12         R.    Je n’ai jamais entendu désigner la brigade

 13   sous ce nom.  Cela, c’est certain.

 14         Q.    Vous avez dit que Monsieur Kordic avait

 15   exprimé son avis quant à la possibilité pour les Croates de

 16   retourner à Zenica à la fin des hostilités, n’est-ce pas ?

 17         R.    Oui.

 18         Q.    À ce moment-là, Zenica était une ville

 19   contrôlée par les musulmans, n’est-ce pas, totalement

 20   contrôlée par les forces armées dépendant de l’Armija,

 21   n’est-ce pas ?

 22         R.    C’est exact.

 23         Q.    Vous saviez, n’est-ce pas, Monsieur, que les

 24   forces armées du HVO dans cette ville avaient été vaincues

 25   au cours des combats du mois d’avril et que les deux


Page 13587

  1   brigades du HVO stationnées dans cette ville avaient été

  2   éliminées ?

  3         R.    Oui.

  4         Q.    La situation, si j’ai bien compris, était la

  5   suivante, la position exprimée par Kordic était la

  6   suivante, à savoir que les Croates ne retourneraient pas

  7   nécessairement dans leur maison qu’ils avaient quittée

  8   parce que, premièrement, ils l’avaient quittée de leur

  9   plein gré, et deuxièmement, ils risquaient de ne pas se

 10   sentir protégés s’ils revenaient dans une ville qui n’était

 11   pas sous le contrôle du HVO, défense croate, n’est-ce pas ?

 12         R.    Oui.  Il y avait un grand nombre de Croates

 13   qui se trouvaient encore à Zenica mais, bien entendu, ils

 14   étaient beaucoup moins nombreux qu’avant.

 15         Q.    Et il ne fait aucun doute que ce point de vue

 16   exprimé par Monsieur Kordic était parfaitement raisonnable

 17   étant donné les circonstances, n’est-ce pas ?

 18         R.    Eh bien, c’était son point de vue.  Il a dit

 19   qu’il était peu probable qu’un grand nombre de Croates

 20   retournent chez eux, à moins d’être sûr d’être bien traités

 21   par les Serbes et les musulmans.

 22         Q.    Les enquêteurs travaillant pour le Bureau du

 23   Procureur vous ont interrogé au sujet des commentaires

 24   suivants qui vous indiquaient que Monsieur Kordic

 25   préconisait une espèce de division permanente de la


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  1   République de Bosnie-Herzégovine sur des bases ethniques,

  2   n’est-ce pas ?

  3         R.    Oui.

  4         Q.    Et vous avez répondu que dans ces

  5   commentaires, il n’y avait rien qui vous indiquait que

  6   Monsieur Kordic souhaitait une division de la Bosnie-

  7   Herzégovine sur ces bases, en trois parties ?

  8         R.    Je crois que je l’ai dit.  Les mots que j’ai

  9   prononcés ont été : « Je ne crois pas que les mots utilisés

 10   en tant que tels aient indiqué sa volonté d’une division

 11   selon les trois groupes ethniques. »

 12         Q.    En page 6 de la déclaration que vous avez

 13   faite devant les enquêteurs du Bureau du Procureur il y a

 14   deux ans, vous avez dit, répondant à la question de savoir

 15   si le point de vue exprimé par Monsieur Kordic préconisait

 16   une division permanente de la Bosnie-Herzégovine, vous avez

 17   dit – je cite : « Ma réponse consiste à dire que je ne peux

 18   pas dire que les mots utilisés par Monsieur Kordic en tant

 19   que tels indiquent son souhait de voir une division de la

 20   Bosnie-Herzégovine selon les trois groupes ethniques. » 

 21   Fin de citation.

 22         R.    Oui.  J’ai dit que je croyais avoir dit cela. 

 23   C’est ce que je viens de dire.  C’est exact.

 24         Q.    Cela est resté le cas pendant toute la durée

 25   de votre mission en Bosnie-Herzégovine, n’est-ce pas ?


Page 13589

  1         R.    Oui.

  2         Q.    On vous a également montré un exemplaire d’un

  3   rapport journalier, Monsieur, soumis par la RC de Zenica le

  4   21 octobre, le document Z1255.  Vous l’avez sous les yeux ?

  5         R.    Oui.

  6         Q.    C’est au cours de cette réunion que vous

  7   dites en page 2 du rapport, vous avez donc eu une réunion

  8   avec Monsieur Dario Kordic, Vice-président de la HC de

  9   Bosnie centrale.  C’est exact ?

 10         R.    Oui.

 11         Q.    Et vous le décrivez comme l’une des deux

 12   personnalités les plus influentes pour les civils en Bosnie

 13   centrale ?  On voit cela en page 6.

 14         R.    Oui.

 15         Q.    J’aimerais appeler maintenant votre

 16   attention, Sir Martin, sur l’incident lié à Stupni Do. 

 17   J’en ai terminé avec l’examen de ce document.  Merci

 18   beaucoup.

 19         R.    Très bien !

 20         Q.    J’aimerais que nous procédions avec

 21   précaution pour parler de ces événements.  Le premier

 22   incident dont j’aimerais parler se situe avant Stupni Do et

 23   le deuxième a trait au rapport de l’ECMM qui concerne le

 24   marché noir, le troisième ayant trait aux enquêtes qui ont

 25   été réalisées par le bataillon norvégien et d’autres après


Page 13590

  1   l’incident.

  2         Passons au premier sujet.  Stupni Do se trouve sur

  3   une colline dans une petite vallée qui surplombe, donc, la

  4   principale route d’approvisionnement menant à Vares, n’est-

  5   ce pas ?

  6         R.    Exact.

  7         Q.    Et avant de parler de la localisation

  8   physique de Vares, disons que Stupni Do se trouve en haut

  9   de la vallée, n’est-ce pas ?

 10         R.    Oui.

 11         Q.    Entourée, donc, de collines et de massifs

 12   assez élevés qui cernent la ville et gênent un peu la

 13   pénétration dans la ville par cette route principale qui

 14   passe à côté de Stupni Do, n’est-ce pas ?

 15         R.    Oui.

 16         Q.    Vous avez déjà témoigné, Monsieur, au sujet

 17   des événements survenus dans un village dénommé Kopljari. 

 18   Saviez-vous que ce village avait été attaqué par les forces

 19   musulmanes le 22 octobre 1993 à 5 h 30 du matin environ ?

 20         R.    Je savais qu’il y avait eu une attaque mais

 21   j’ai également été informé que rien de grave n’était

 22   survenu à cet endroit.

 23         Q.    Saviez-vous que, selon le bataillon

 24   norvégien, en tout cas, des combats intenses s’étaient

 25   déroulés dans cette ville et que tous les civils en avaient


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  1   été exclus ?  D’ailleurs, ce n’est pas une ville mais un

  2   village.  En tout cas, saviez-vous que tous les civils

  3   avaient été exclus de ce village par les forces de l’Armija

  4   ?

  5         R.    Je savais qu’il y avait eu des combats à

  6   Kopljari mais je ne savais pas qu’il y avait eu des morts. 

  7   Bien entendu, nous avions des questions plus sérieuses à

  8   traiter à ce moment-là.

  9         Q.    Saviez-vous que toutes les maisons, tous les

 10   bâtiments de Kopljari avaient été détruits et incendiés ?

 11         R.    J’étais au courant qu’il y avait eu des

 12   destructions mais compte tenu de l’échelle comparative par

 13   rapport à Stupni Do, il s’agissait de quelque chose de

 14   mineur.

 15         Q.    J’aimerais vous montrer un rapport journalier

 16   élaboré par le centre régional de Zenica le 21 mars 1994. 

 17   Sir Martin, cette date est encore dans les délais de la

 18   durée de votre mission, n’est-ce pas ?

 19         R.    J’ai été envoyé en Angleterre pour des

 20   raisons médicales à la fin du mois de mars et je ne me

 21   rappelle pas exactement la date de mon départ mais ce que

 22   vous dites est possible.

 23         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Ce document est

 24   enregistré sous la cote D175/1.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Merci.


Page 13592

  1         Q.    J’aimerais, Monsieur, appeler votre

  2   attention… même si ce document n’est pas numéroté, nous

  3   l’avons reçu du Procureur.  Il semble se composer de quatre

  4   pages et il y a un sous-titre dans ce document, le mot

  5   « humanitaire ».

  6         Me SAYERS (interprétation) : Peut-on placer cette

  7   page précisément sur le rétroprojecteur, Monsieur

  8   l’Huissier ?  Merci.

  9         Q.    Vous voyez à la fin du paragraphe où on lit :

 10   « L’ECMM s’est rendu à Lipnica » la phrase suivante qui se

 11   lit comme suit : « L’ECMM s’est également rendu à Kopljari

 12   et a constaté que tous les bâtiments avaient été détruits

 13   et que le village était inhabité. »  Fin de citation.

 14         Cela vous rafraîchit-il la mémoire, Sir Martin ?

 15         R.    Je ne me rappelle pas avoir lu ce rapport et

 16   je ne me rappelle pas à quel moment je suis retourné en

 17   Angleterre pour des raisons médicales, bien que je sache

 18   avec certitude que cela s’est passé à la fin du mois de

 19   mars.  En tout cas, je ne me rappelle pas avoir eu ce

 20   rapport sous les yeux.

 21         Q.    Merci.  Le deuxième document que je vous

 22   demanderais d’examiner, Monsieur, est une pièce à

 23   conviction déjà enregistrée sous la cote D123/1.  Il s’agit

 24   d’un bulletin de renseignements militaires émanant du

 25   régiment du Yorkshire et du Prince de Galles et daté du 27


Page 13593

  1   octobre 1993. 

  2         Me SAYERS (interprétation) : Je prierais Monsieur

  3   l’Huissier de prendre la page 2 de ce document, en haut de

  4   la page.

  5         Q.    On y voit une référence à une conversation

  6   que le commandant du régiment du Prince de Galles, 1er

  7   bataillon, a eue avec le Colonel Merdan et qui portait sur

  8   Kopljari.  Apparemment, l’impression fournie par Monsieur

  9   Merdan était que cette attaque était une action punitive et

 10   qu’elle ne préjugeait pas d’une attaque plus générale sur

 11   Vares dans son ensemble.

 12         Avez-vous discuté avec des membres du bataillon

 13   britannique au sujet de l’attaque sur Kopljari et de sa

 14   description en tant qu’action punitive par les forces

 15   attaquantes ?

 16         R.    Non.

 17         Q.    Saviez-vous qu’il y avait eu une attaque ?

 18         R.    Je ne savais pas que c’était une attaque

 19   destinée à constituer une action punitive, non.

 20         Q.    Répondant aux questions de l’interrogatoire

 21   principal, Monsieur, vous avez dit que l’ECMM a vérifié ce

 22   qui s’était passé à Kopljari et que, je reprends vos

 23   paroles, « rien de significatif n’a émané ».  Alors, les

 24   informations selon lesquelles tous les bâtiments avaient

 25   été détruits et selon lesquelles tous les civils avaient


Page 13594

  1   quitté la localité était quelque chose qui n’était pas

  2   significatif à vos yeux ?

  3         R.    À vous entendre, il semble que l’événement

  4   ait été très grave mais, bien sûr, il y avait des choses

  5   plus graves qui se passaient à l’époque.  Donc, il se

  6   posait un problème de priorités.

  7         Q.    Sir Martin, je me rends bien compte qu’il y a

  8   un problème d’échelles et il est tout à fait certain que

  9   des choses terribles se sont passées des deux côtés, n’est-

 10   ce pas, au cours de cette guerre civile ?

 11         R.    Oui.

 12         Q.    Très bien !  Eh bien, j’aimerais maintenant

 13   aborder avec vous le sujet de Stupni Do en tant que porte

 14   d’entrée du marché noir.  Je me demande si je peux demander

 15   que l’on vous montre la pièce à conviction suivante.  Je

 16   crois qu’elle a déjà été versée au dossier du procès par

 17   l’Accusation.  Il s’agit de la pièce Z1281, document daté

 18   du 2 novembre 1993, et qui est un rapport journalier du

 19   centre régional de Zenica.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur l’Huissier,

 21   je vous prierais de bien vouloir placer la première page où

 22   on voit le titre « CC Travnik » sur le rétroprojecteur. 

 23   C’est cela.  Merci.

 24         Q.    Sir Martin, ce document, vous l’avez vu, bien

 25   sûr, à un certain moment.  L’avez-vous examiné au moment où


Page 13595

  1   vous prépariez votre déposition d’aujourd’hui ?

  2         R.    Non, non, pas précisément ce document.

  3         Q.    Eh bien, relisons-le ensemble.  Apparemment,

  4   le chef du centre de coordination de Travnik avait

  5   rencontré Monsieur Mahmutovic, membre du groupe

  6   opérationnel de l’Armija à Dabravine et, à titre

  7   d’information pour les Juges de cette Chambre, j’ajoute que

  8   Dabravine se trouve à quelques kilomètres à peine de Vares,

  9   le long de la grande route, de la route principale, n’est-

 10   ce pas ?

 11         R.    Oui.

 12         Q.    N’est-il pas exact que Dabravine était le

 13   quartier général de la présidence de guerre en exil dirigé

 14   par une femme répondant au nom de Mervana Hadjimurtezic ?

 15         R.    Pour autant que mes informations sont

 16   exactes, c’est le cas, oui.

 17         Q.    Selon le chef du centre de coordination de

 18   Travnik qui, je crois, était le Colonel Stutt, à ce moment-

 19   là, Stupni Do était la porte d’entrée locale en Bosnie sur

 20   le territoire contrôlé par l’armée des Serbes de Bosnie, ce

 21   qui en faisait un centre très lucratif du point de vue du

 22   marché noir, notamment. 

 23         Il est vrai, n’est-ce pas, que plusieurs rapports

 24   de l’ECMM liés à ces activités de marché noir dans la

 25   région de Stupni Do ont été rédigés et lus en temps utile ?


Page 13596

  1         R.    Oui et, bien sûr, j’en ai parlé à la fin de

  2   mon rapport, du rapport résumant ma mission.

  3         Q.    Malheureusement, nous n’avons pas pu

  4   localiser ou, en tout cas, nous n’avons pas reçu ce rapport

  5   mais ce n’est pas un secret, n’est-ce pas, c’était un fait

  6   assez bien connu que Stupni Do se trouvait tout près des

  7   lignes de front qui se trouvaient face aux forces des

  8   Serbes de Bosnie et que c’était, donc, un canal utilisé

  9   pour la circulation du marché noir ?

 10         R.    Ce sont des allégations qui ont été proférées

 11   à l’époque, effectivement.

 12         Q.    Et en fait, selon un membre de l’Armija, le

 13   fait de communiquer cette information à votre organisation

 14   est lié à cela car les personnes tuées à Stupni Do ont été

 15   exécutées délibérément pour leur participation au marché

 16   noir.  Le saviez-vous ?

 17         R.    Comme je l’ai dit, j’y ai fait allusion dans

 18   mon rapport à la fin de ma mission en disant que c’était

 19   une cause possible de l’attaque sur Stupni Do.

 20         Q.    Très bien !  Les informations qui vous ont

 21   été communiquées peu de temps avant le massacre de Stupni

 22   Do étaient que le HVO local exigeait des restrictions au

 23   marché noir et avait reçu une réponse très fermement

 24   négative de la part des résidents de Stupni Do :  Est-ce

 25   exact ?


Page 13597

  1         R.    C’est une allégation qui a été faite par un

  2   OG de Bosnie-Herzégovine.

  3         Q.    Pourriez-vous passer à la page 3 de ce

  4   document, Monsieur, ou la page 4 ?  Excusez-moi.  Ce

  5   document n’est pas numéroté mais on y voit une référence

  6   vers la fin qui porte sur la discussion de ce sujet avec le

  7   Général Hadzihasanovic.

  8         Premier paragraphe complet, Monsieur, nous lisons

  9   – je cite : « Le Général Hadzihasanovic a dit au HOM que

 10   Vares était connu comme un centre de marché noir et que des

 11   gangs et des groupes de trafiquants y ont été envoyés pour

 12   maintenir la tension. »  Fin de citation.

 13         Qui était le chef de la mission à qui le Général

 14   Hadzihasanovic a communiqué cette information, Monsieur ?

 15         R.    J’aimerais jeter un coup d’œil au rapport si

 16   je puis le faire.

 17         Q.    Absolument.

 18         R.    Cela a été dit dans le cadre d’une réunion

 19   avec le HOM, le chef de mission mais je peux vérifier parce

 20   qu’il y est fait référence à… HOM, c’est le chef de la

 21   mission de l’ECMM.

 22         Q.    Ma question est la suivante :  Vous rappelez-

 23   vous, à ce moment-là, qui était ce chef de mission ?

 24         R.    À ce moment-là, en novembre, c’était

 25   l’Ambassadeur de Baans.


Page 13598

  1         Q.    Très bien !

  2         R.    Mais j’essaie de me rappeler exactement de

  3   quelle réunion il s’agit.  Il doit s’agir de la réunion du

  4   30 octobre, date à laquelle il est arrivé à Zenica et nous

  5   avons eu une rencontre avec Hadzihasanovic, entre autres,

  6   mais je peux vérifier plus précisément.

  7         Q.    Vous rappelez-vous avoir assisté à cette

  8   réunion ?

  9         R.    Oui.  J’ai sans aucun doute participé à cette

 10   réunion.

 11         Q.    Vous rappelez-vous avoir vu le document dans

 12   lequel le Général Hadzihasanovic confirme ces rumeurs de

 13   marché noir à Stupni Do et, étant commandant du 3e corps

 14   d’armée, il en parle officiellement ?

 15         R.    Oui.  J’ai dit dans mon rapport que

 16   Hadzihasanovic avait affirmé que des gangs et des groupes

 17   de trafiquants avaient été envoyés dans la région pour

 18   maintenir la tension.  Oui, je l’ai dit.

 19         Q.    Merci. 

 20         Me SAYERS (interprétation) : J’en ai terminé

 21   également avec ce document.  Je vous remercie de votre

 22   assistance.

 23         Q.    Parlons maintenant d’un des commentaires qui

 24   figure dans l’un des rapports de fin de mission du 18 avril

 25   1994, pièce à conviction Z1419, si je ne m’abuse.


Page 13599

  1         La conclusion que vous tirez au paragraphe 5 de la

  2   première page…

  3         R.    Je vous en prie, un instant que je retrouve

  4   ce document.

  5         Q.    Au paragraphe 5, page 1…

  6         R.    Oui.

  7         Q.    Vous dites que : « Il est probable que la

  8   décision d’organiser l’opération de Stupni Do a été prise à

  9   un niveau relativement peu élevé de la hiérarchie.  Il est

 10   possible que le massacre ait été provoqué par le refus des

 11   musulmans de Stupni Do de payer davantage au HVO local sur

 12   les profits qu’ils tiraient de leurs opérations de marché

 13   noir.  En tout cas, c’est la rumeur qui circule. »

 14         R.    Oui.  C’est ce que j’ai écrit à l’époque et

 15   cela correspond au document que nous venons d’examiner.

 16         Q.    Et ce point de vue est toujours le vôtre

 17   aujourd’hui ?

 18         R.    Aujourd’hui encore, je ne sais pas qui a

 19   donné les instructions pour le massacre de Stupni Do.

 20         Q.    Mais rien n’est intervenu dans les six

 21   dernières années à peu près qui ait pu vous convaincre de

 22   tirer une conclusion différente de celle que l’on voit

 23   exprimée au paragraphe 5, à savoir, et je reprends les mots

 24   utilisés par vous – je cite : « Il est probable que la

 25   décision d’organiser l’opération a été prise à un niveau


Page 13600

  1   relativement peu élevé de la hiérarchie. »

  2         R.    Non.  Ces dernières années, rien n’est venu

  3   s’ajouter aux informations dont je disposais pour

  4   déterminer qui avait provoqué l’opération et le massacre.

  5         Q.    Ou modifier votre point de vue de quelque

  6   façon que ce soit à ce sujet ?

  7         R.    En effet.

  8         Q.    Merci.  Un détail chronologique à présent, je

  9   vous prie.  Si j’ai bien compris, une fois qu’il a été

 10   connu qu’un grand nombre de personnes ont été tuées à

 11   Stupni Do, Monsieur, des tentatives ont été faites par vos

 12   moniteurs pour accéder à Stupni Do et, si j’ai bien

 13   compris, une fois que la nouvelle du massacre a été connue,

 14   le commandant de la brigade Bobovac qui, à ce moment-là,

 15   était Emil Hara, a empêché les observateurs de l’ECMM de se

 16   rendre à Stupni Do ?

 17         R.    C’est exact.  En fait, même l’unité de

 18   l’armée, le bataillon britannique, n’a pas pu y pénétrer et

 19   nous avons été empêchés d’y pénétrer, à moins qu’une unité

 20   de la FORPRONU n’y entre également.

 21         Q.    Oui.  Merci.  En fait, ce que je voulais dire

 22   c’est que l’accès au village a été interdit sur ordre de

 23   Emil Hara qui était à l’époque le chef de la brigade de

 24   Bobovac, n’est-ce pas ?

 25         R.    Exact.


Page 13601

  1         Q.    Suite à cet incident, nous savons, car vous

  2   l’avez dit dans votre déposition et cela n’est pas

  3   contestable ou contesté, que Monsieur Emil Hara a été

  4   limogé et remplacé par Kresimir Bosic en tant que chef de

  5   la brigade ?

  6         R.    Oui, oui.

  7         Q.    Saviez-vous, Monsieur, que deux jours avant

  8   les combats de Stupni Do, la population civile du village

  9   avait reçu l’ordre de l’évacuer et que c’est Mervana

 10   Hadjimurtezic, Présidente de la présidence de guerre en

 11   exil, qui avait donné cet ordre ?

 12         R.    Non, je ne pense pas que j’étais au courant

 13   de cela.  Non.

 14         Me SAYERS (interprétation) : Monsieur l’Huissier,

 15   peut-on remettre au témoin le document suivant : rapport du

 16   10 février 1994, pièce D118/1, qui est un rapport des

 17   Nations unies au sujet de Stupni Do ?

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je ne me

 19   rappelle pas ce document.  Fait-il référence à l’ordre

 20   d’évacuation du village ?

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Le témoin a

 23   dit qu’il ne s’en rappelait pas.  Donc, il n’y a aucune

 24   raison de lui montrer ce document.  Vous pourrez revenir

 25   sur ce point en temps utile.


Page 13602

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le

  2   Président, plusieurs points sont évoqués dans ce document

  3   et je peux vous dire de quoi il s’agit exactement. 

  4   Premièrement, ce document stipule que les résidents de

  5   Stupni Do ont été avertis et qu’il leur a été conseillé de

  6   quitter le village le 22 octobre, deuxièmement, qu’il y

  7   avait 36 soldats dans le village, troisièmement, qu’une

  8   enquête était réalisée, apparemment, par des représentants

  9   de la FORPRONU et qui avait démontré l’existence de 193

 10   survivants, dont tous ont été interrogés.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Sir Martin,

 12   pouvez-vous dire quelque chose à ce sujet ?

 13         R.    Je ne remets pas tout cela en cause.  Je ne

 14   saurais dire quel est le nombre exact des survivants mais

 15   je ne le remets pas en cause si cela est stipulé dans un

 16   rapport des Nations unies.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Je renvoie les Juges

 18   à la pièce à conviction D118/1 qui est un document assez

 19   bref et qui dit exactement ce que je viens de rappeler.

 20         Q.    Sir Martin, vous avez déjà fait référence à

 21   des ordres émanant, apparemment, du Général Petkovic et je

 22   crois qu’ils ont été annexés à des rapports de l’ECMM. 

 23   J’aimerais, si je puis me permettre, vous rafraîchir un peu

 24   la mémoire.

 25         Il s’agit de deux ordres dont j’ai des exemplaires


Page 13603

  1   ici, des copies.  L’un a déjà été enregistré comme pièce à

  2   conviction Z1285 et le deuxième ordre, daté du 24 octobre

  3   1993, doit encore recevoir une cote.

  4         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document porte

  5   la cote D176/1.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous

  7   pourriez présenter également une copie de la pièce à

  8   conviction Z1258, s’il vous plaît ?

  9         Q.    Sir Martin, je voudrais juste attirer votre

 10   attention sur le premier document, à savoir le Z1258 qui

 11   représente la copie d’un ordre de Milivoj Petkovic en date

 12   du 23 octobre 1993 à ses subordonnés au HVO de Vares,

 13   n’est-ce pas ?

 14         R.    Oui, c’est cela.

 15         Q.    Et cela autorise les commandants du HVO de

 16   Vares de révoquer de leurs fonctions trois personnes du

 17   commandement, Anto Pejcinovic, ensuite, Zvonko Duznovic et

 18   ensuite, Monsieur Gavran ?

 19         R.    Absolument.

 20         Q.    Il dit aux commandants HVO qu’il doit

 21   enquêter la responsabilité de certains Croates pour ce qui

 22   est des villages musulmans.  Concernant les renseignements

 23   incomplets que nous avons reçus, il semblerait qu’il y ait

 24   eu un nettoyage ethnique de la population :  Est-ce exact ?

 25         R.    Oui, tout à fait.


Page 13604

  1         Q.    Pour informer la Chambre de première

  2   instance, je crois que Monsieur Pejcinovic était Président

  3   du HVO de la municipalité de Vares ?

  4         R.    Oui.

  5         Q.    Monsieur Duznovic était chef de la police

  6   militaire ?

  7         R.    Oui.

  8         Q.    Monsieur Gavran était chef de la police

  9   civile ?

 10         R.    Oui, tout à fait.

 11         Q.    Le deuxième document portait sur la brigade

 12   de Bobovac, émis par le Général Petkovic en date du 24

 13   octobre 1993, ordonnant la cessation de toutes les

 14   activités de combats contre la FORPRONU et le libre passage

 15   pour tous les véhicules, n’est-ce pas ?

 16         R.    Oui.

 17         Q.    Et ces choses-là réfèrent, donc, à ces

 18   questions.  Je crois que j’en ai fini avec ce document.

 19         Il s’avère, Sir Martin, que sans que le Général

 20   Petkovic le dise, il a, évidemment, eu aussi l’autorité

 21   d’éliminer des membres du gouvernement civil ?

 22         R.    Oui.

 23         Q.    Dans ces circonstances concrètes ?

 24         R.    En effet.

 25         Q.    Si nous pouvons dévier notre attention de ces


Page 13605

  1   ordres, est-ce que vous pouvez nous dire si vous saviez

  2   qu’une enquête de médecine légale avait été effectuée à

  3   Stupni Do par des pathologistes, photographes, enquêteurs

  4   militaires,et qu’on a filmé des enregistrements vidéos ?

  5         R.    Oui.  Je sais qu’il y a eu une enquête qui

  6   avait été effectuée mais je n’ai jamais vu le rapport tout

  7   entier.

  8         Q.    Mais est-ce que vous saviez également si ces

  9   résultats de l’enquête avaient été remis au HVO ?

 10         R.    Non, je ne le savais pas.

 11         Q.    Est-ce que vous avez vu le rapport de la

 12   FORPRONU datant du 31 mars 1994 envoyé à Monsieur Blewitt

 13   qui avait été Procureur adjoint de ce Tribunal ?

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais pourquoi

 15   le témoin aurait-il vu tout cela ?

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Je voulais juste

 17   savoir si, oui ou non, il l’avait vu.

 18         R.    Non.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Dans ce cas, nous

 20   allons continuer sans nous attarder davantage sur la

 21   question.

 22         Q.    Nous allons traiter maintenant de l’entretien

 23   que vous avez eu avec Monsieur Kordic en date du 25

 24   octobre, à savoir quelques jours après le massacre.  N’est-

 25   il pas exact de dire que votre observateur le Colonel


Page 13606

  1   Weckesser avait demandé, puisqu’il savait que vous aviez eu

  2   une réunion avec Monsieur Kordic ce jour-là, d’en traiter

  3   avec lui ?

  4         R.    Je ne me souviens pas qu’il me l’ait

  5   mentionné mais, de toute manière, je m’apprêtais à soulever

  6   la question.

  7         Q.    Est-ce que vous vous souvenez, une fois que

  8   vous avez entendu parler de l’incident de Stupni Do, que

  9   Monsieur Kordic avait appelé le Général Petkovic pour

 10   savoir ce qui s’était passé ou pensez-vous plutôt que

 11   Monsieur Kordic se soit déjà entretenu auparavant avec le

 12   Général Petkovic avant que vous n’ayez soulevé la question

 13   ?

 14         R.    C’est bien ce que j’ai compris.  Il m’avait

 15   dit qu’il avait téléphoné au Général Petkovic dès qu’il

 16   avait entendu parler du massacre de Stupni Do.

 17         Q.    N’était-il pas inhabituel qu’un chef

 18   politique contacte un chef militaire pour apprendre quelque

 19   chose concernant une action militaire ?

 20         R.    Non, bien sûr.

 21         Q.    Et vous avez dit que le Général Petkovic se

 22   trouvait à Kiseljak lorsque Monsieur Kordic l’avait appelé

 23   ?

 24         R.    Oui.  Je pense que c’est ce qui s’est passé.

 25         Q.    D’après ce que Monsieur Kordic vous a dit,


Page 13607

  1   c’est à peu près ce que le commandant en second de toutes

  2   les forces armées militaires du HVO lui avait dit ?

  3         R.    Oui, le chef d’état-major.

  4         Q.    Et il avait condamné les atrocités qui

  5   avaient été commises quelle que soit la partie qui les ait

  6   commises ?

  7         R.    Oui, c’est ça.

  8         Q.    Alors, si nous poursuivons dans l’ordre

  9   chronologique que nous avons suivi, je crois que la réunion

 10   suivante avec Monsieur Kordic a eu lieu en date du 30

 11   octobre 1993 avec Monsieur l’Ambassadeur de Baans, chef de

 12   la mission belge ?

 13         R.    Oui.

 14         Q.    Et Monsieur Kordic vous a répété à cette

 15   réunion que la République croate de Herceg-Bosna condamnait

 16   officiellement ces atrocités, quel qu’ait été l’auteur de

 17   ces atrocités ?

 18         R.    Oui.

 19         Q.    Il vous avait dit qu’ils allaient

 20   entreprendre des actions supplémentaires suite à l’enquête

 21   et que personne ne serait protégé ?

 22         R.    Oui, Monsieur.

 23         Q.    Vous avez rencontré le Président Boban à

 24   Mostar le jour même ?

 25         R.    Oui.


Page 13608

  1         Q.    Avec Monsieur Jadranko Prlic, président, ou

  2   plutôt Premier ministre de la République croate de Bosnie,

  3   n’est-ce pas ?

  4         R.    Oui.

  5         Q.    Alors, ces gens-là vous ont dit que si des

  6   atrocités avaient été commises, que les auteurs en seraient

  7   punis ?

  8         R.    Oui.

  9         Q.    Et les deux vous avaient dit qu’ils allaient

 10   suspendre les commandants militaires qui auraient été

 11   impliqués ?

 12         R.    Oui.

 13         Q.    Monsieur Rajic a été par la suite suspendu ?

 14         R.    Oui.

 15         Q.    Je crois que Monsieur Prlic vous a dit par la

 16   suite que le gouvernement avait ordonné au Général Petkovic

 17   de procéder à une enquête détaillée pour ce qui est des

 18   événements de Stupni Do ?

 19         R.    Oui.

 20         Q.    Il vous a également dit que le Ministre de la

 21   Justice avait créé une commission particulière qui

 22   traiterait des crimes de guerre ?

 23         R.    Oui, mais comme je l’ai dit, aucune de ces

 24   promesses n’a été réalisée.

 25         Q.    Et vous savez qu’une commission avait été


Page 13609

  1   mise en place en date du 28 octobre 1993 de la part de la

  2   République croate de Herceg-Bosna ?

  3         R.    Oui.  Je sais qu’une commission a été mise en

  4   place mais nous n’avons eu aucun résultat.

  5         Q.    Partant des documents que vous allez voir, je

  6   crois que nous pourrons rafraîchir votre mémoire concernant

  7   les membres de la commission en question. 

  8         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document

  9   portera la cote D177/1.

 10         Me SAYERS (interprétation) :

 11         Q.    Sir Martin, ce document signé par Jadranko

 12   Prlic, Premier ministre de la République croate de Herceg-

 13   Bosna, on y voit qu’il y est fait nomination d’une

 14   commission pour l’enquête des crimes de guerre sur le

 15   territoire de la Bosnie-Herzégovine ?

 16         R.    Oui.

 17         Q.    Certains de ces noms vous sont connus ? 

 18   Monsieur Pogarcic, nous l’avons déjà cité, Monsieur

 19   Kostroman également.  Est-ce que vous connaissiez Marinko

 20   Skolic (ph.) ?

 21         R.    Non.  En fin de compte, sur toute la liste,

 22   les noms connus sont ceux de Pogarcic et de Kostroman.

 23         Q.    Fort bien !  Si nous poursuivons, donc, suite

 24   à la chute de Vares en novembre, en date du 2 novembre, je

 25   crois que vous avez rencontré le commandant de l’armée dans


Page 13610

  1   cette région.  Il s’agissait de Monsieur Avdo Zubak ?

  2         R.    Oui.

  3         Q.    En date du 4 novembre ?

  4         R.    Oui, exactement.

  5         Q.    Et vous avez dit qu’avec la chute de Vares,

  6   l’armée pourrait rejoindre le 2e, 3e et 4e corps d’armée,

  7   c’est-à-dire que l’armée pourrait rejoindre ces corps

  8   d’armée et obtenir un avantage stratégique ?

  9         R.    Oui, c’est ce que j’ai dit.  C’était mon

 10   appréciation militaire.  Il avait dit, en effet, que cela

 11   représentait la conséquence directe du massacre de Stupni

 12   Do et moi, j’ai pensé que cela fournissait à l’armée un

 13   grand avantage stratégique pour ce qui est du ralliement

 14   des troupes en passant par Tuzla et Gornji Vakuf sans

 15   passer par les poches du HVO.

 16         Q.    Mais je crois que dans les réponses que vous

 17   avez faites aux enquêteurs il y a deux ans de cela, en page

 18   10, vous aviez dit qu’il ne faisait aucun doute que le 2e

 19   et 3e corps d’armée avaient été prêts à lancer une grande

 20   attaque contre Vares avant même les atrocités de Stupni Do

 21   pour réaliser leur avantage stratégique ?

 22         R.    Oui, mais je ne sais pas quels avaient été

 23   leurs objectifs stratégiques.  Il y avait certes des

 24   indices qu’il y avait des préparatifs en cours.

 25         Q.    Cet incident de Stupni Do leur a fourni


Page 13611

  1   l’opportunité qu’ils demandaient, qu’ils recherchaient pour

  2   rechercher les commandants de l’armée pour lancer une

  3   offensive contre Vares ?

  4         R.    Oui.  Cela leur a donné une raison tout à

  5   fait valable.

  6         Q.    Fort bien !  Le rapport que vous avez

  7   présenté en date du 3 novembre 1993…

  8         R.    Oui.  Le 3 novembre, quoi ?

  9         Q.    Oui.  Je crois qu’on peut lui donner le

 10   numéro 1282.

 11         R.    Oui, tout à fait.

 12         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  C’est le

 13   document 1284, en fait.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie,

 15   Monsieur le Président.

 16         Q.    Si vous voulez bien jeter un œil sur la

 17   deuxième page, on y parle d’un réunion avec le chef de la

 18   mission.  C’est l’Ambassadeur de Baans ?

 19         R.    Oui.

 20         Q.    Et Monsieur Dario Kordic, chef du bureau

 21   déplacé, c’est-à-dire disloqué… délocalisé, pardon (se

 22   reprend l’interprète) ?

 23         R.    Oui.  Je peux juste supposer que Dario Kordic

 24   avait utilisé pour lui-même cet intitulé de représentant ou

 25   officier de la présidence délocalisée pour ce qui est,


Page 13612

  1   donc, de la présidence de la Herceg-Bosna.

  2         Q.    Mais est-ce que vous avez connu les

  3   obligations, les tâches de ce bureau-là ?

  4         R.    Oui.  Il avait été, je pense, représentant de

  5   Mate Boban en Bosnie centrale.

  6         Q.    Fort bien !  Si nous nous penchons sur la

  7   page 10 de ce rapport datant du 3 novembre 1993, dans vos

  8   entretiens avec Monsieur Prlic, le président du HVO comme

  9   cela a été précisé dans ce cas-là, et Monsieur Slobodan

 10   Bozic, Ministre adjoint à la Défense, ont réitéré les

 11   ordres du Ministre Petkovic concernant l’enquête ?

 12         R.    Oui.

 13         Q.    Donc, il s’agissait d’une commission qui

 14   devait se consacrer à des enquêtes concernant tous les

 15   crimes, y compris Stupni Do ?

 16         R.    Oui, tout à fait.

 17         Q.    Il y a eu des commandants qui ont été

 18   suspendus de leurs fonctions ?

 19         R.    Oui.

 20         Q.    Est-ce que vous vous souvenez que Monsieur

 21   Jadranko Prlic était toujours Président du HVO en date du 3

 22   novembre 1993 ou pas ?

 23         R.    Je crois qu’il avait été également encore

 24   Président du HVO à cette époque-là.  Je crois bien qu’il

 25   l’était.


Page 13613

  1         Q.    Est-ce que vous saviez, Sir Martin, que le

  2   Colonel Lucic, enquêteur du QG du HVO de Mostar, en

  3   compagnie d’un avocat dénommé Bandic ont tenu des réunions

  4   concernant Stupni Do avec le Lieutenant-Colonel J.W. Koett

  5   à Kiseljak ?

  6         R.    Non.

  7         Q.    Par conséquent, vous ne vous souvenez pas

  8   d’une information de la FORPRONU concernant la consultation

  9   des avocats du HVO avec la FORPRONU et demandant assistance

 10   pour ce qui est des événements de Stupni Do ?

 11         R.    Non.  Je ne me souviens pas d’avoir été

 12   informé et je n’ai jamais vu de rapport découlant d’une

 13   telle enquête.

 14         Q.    Je tiens à vous montrer deux documents.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Est-ce qu’il

 16   s’agit de documents que le témoin a probablement eu la

 17   possibilité de voir ?

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Je ne peux pas le

 19   savoir sans lui poser la question auparavant.

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais ce sont

 21   des choses qu’il conviendrait de prouver d’une autre façon. 

 22   Vous ne pouvez pas poser la question au témoin si lui ne

 23   s’en souvient pas.  Je vous prie de poursuivre.  Vous

 24   pourrez traiter de la question lorsque vous présenterez

 25   vous-même vos éléments de preuve.


Page 13614

  1         Me SAYERS (interprétation) : 

  2         Q.    Est-ce que vous savez, Monsieur le Témoin,

  3   que les journaux croates avaient déclaré que le HVO avait

  4   assumé la responsabilité de l’attaque contre Stupni Do et

  5   que Monsieur Ivica Rajic, en sa qualité de commandant

  6   responsable, avait été indiqué ?

  7         R.    Comme je l’ai dit dans mon rapport, je sais

  8   que les journaux croates avaient mentionné le nom de Ivica

  9   Rajic qui avait été révoqué de ses fonctions sur ordre de

 10   Mate Boban.

 11         Q.    Donc, il n’y avait pas de doute que Monsieur

 12   Rajic, dont le supérieur direct était le Colonel Blaskic,

 13   avait été concerné, enfin, c’est-à-dire considéré comme

 14   responsable ?

 15         R.    Oui.

 16         Q.    C’est donc le Colonel Blaskic qui avait donné

 17   l’ordre direct à Ivica Rajic concernant les barrages

 18   routiers qui se trouvaient dans la zone de Visoko-Kiseljak. 

 19   Est-ce que vous vous en souvenez ?

 20         R.    Non, je ne m’en souviens pas mais je ne vois

 21   pas pourquoi il n’en serait pas ainsi.

 22         Q.    Je voulais juste vous rafraîchir la mémoire

 23   et je crois pouvoir le faire en vous présentant le document

 24   suivant.

 25         Ce que je voulais savoir… c’est le bas de la page,


Page 13615

  1   Monsieur l’Huissier.  Je vous remercie.

  2         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document

  3   portera la cote D178/1.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie.

  5         Q.    Le paragraphe 8 de ce document, qui

  6   représente un rapport fait par une équipe et daté du 11

  7   octobre 1993, dit que le Commandant Blaskic, le commandant

  8   de cette zone opérationnelle de la Bosnie centrale, avait

  9   donné l’ordre à Rajic de réparer la route.  Il n’y a, donc,

 10   aucun doute que Monsieur Rajic était directement subordonné

 11   au Colonel Blaskic dans la hiérarchie militaire ?

 12         R.    Non, et il n’y a rien d’inhabituel dans ces

 13   instructions.

 14         Q.    Absolument.  Est-ce que vous vous souvenez

 15   d’avoir reçu un rapport… j’en ai fini avec ce document.

 16         Est-ce que vous vous souvenez avoir reçu un

 17   rapport de la part du HCC de Mostar, c’est-à-dire de

 18   Monsieur Watkins, qui était passé de Travnik à Mostar

 19   concernant les entretiens qu’il avait eus avec Monsieur

 20   Jozo Maric en date du 6 novembre 1993, et ce au sujet de

 21   l’enquête croate portant sur l’incident de Stupni Do ?

 22         R.    Oui.

 23         Q.    Fort bien !  En page 10 de votre rapport,

 24   Monsieur Maric aurait dit au chef du centre de coordination

 25   à Mostar que l’enquête croate aurait démontré que des


Page 13616

  1   éléments extérieurs avaient… enfin, qu’il s’agissait plutôt

  2   de hors-la-loi de Kakanj et de Kiseljak qui avaient

  3   perpétré le crime en question ?

  4         R.    Oui.  Je crois que c’est ce qui avait été dit

  5   dans ce rapport.

  6         Q.    En fait, d’autres rapports qui ont été

  7   confirmés par des sources disponibles à l’ECMM avaient

  8   également confirmé la chose ?

  9         R.    Oui.  Je pense qu’il n’y a jamais eu de doute

 10   pour ce qui est des auteurs du HVO qui assumaient la

 11   responsabilité des événements et qui provenaient de Kakanj

 12   et de Kiseljak.

 13         Q.    Vous avez dit à la Chambre de première

 14   instance que lors de la réunion entre le Colonel Stutt,

 15   Monsieur Kordic et un certain nombre d’autres personnes, en

 16   date du 8 novembre 1993, qu’il s’agissait de Monsieur Rajic

 17   qui était sous stress et qu’il ne faisait pas de doute

 18   qu’il avait été révoqué de ses fonctions de commandement

 19   par le Général Petkovic aussitôt après ?

 20         R.    Oui, cela est exact.

 21         Q.    Mais la presse croate avait rapporté – je

 22   crois que vous l’aviez bien dit vous-même mais je veux que

 23   nous soyons sûrs – je crois que la presse croate avait bien

 24   précisé que le Général Petkovic avait révoqué de ses

 25   fonctions Monsieur Rajic en fonction d’ordres directs


Page 13617

  1   émanant du président de la République croate de Herceg-

  2   Bosna ?

  3         R.    Oui. 

  4         Q.    C’est-à-dire le Président Mate Boban ?

  5         R.    Oui.  C’est ce que l’on m’a dit mais je n’ai

  6   jamais vu moi-même ces rapports dans la presse mais je n’ai

  7   aucune raison de croire qu’il n’en a pas été ainsi.

  8         Q.    Vous avez témoigné au sujet de deux groupes

  9   d’extrémistes, les Maturices et Apostolis ?

 10         R.    Oui.

 11         Q.    Ces gens-là ont quitté Kakanj au cours de

 12   l’offensive du mois de juin dont nous avons parlé ce matin

 13   ?

 14         R.    Oui. 

 15         Q.    Il s’agissait des Apostolis.  Les Maturices

 16   c’était un groupe de Travnik ?

 17         R.    Oui, tout à fait.

 18         Q.    Est-ce que vous savez qu’en juin, des Croates

 19   avaient été chassés de Travnik ?

 20         R.    Oui, je le sais.

 21         Q.    Vous avez témoigné pour ce qui était de vos

 22   opinions concernant les élections croates de la part de

 23   Croates en Bosnie et n’est-il pas vrai que les Croates

 24   vivant en Slovénie, en Macédoine, aux USA, avaient

 25   également pris part aux élections croates ?


Page 13618

  1         R.    Oui.  La diaspora a voté mais je croyais que

  2   vous parliez de Croates vivant à l’étranger mais là, nous

  3   parlons de Bosniaques dont le pays, la patrie est la

  4   Bosnie-Herzégovine.

  5         Q.    Mais est-ce que vous saviez qu’il y avait un

  6   arrangement entre la République de Bosnie-Herzégovine et la

  7   République de Croatie concernant la double nationalité pour

  8   les deux parties ?

  9         R.    Oui, je suis au courant de la chose et qu’il

 10   avait été accepté que les Croates de Bosnie pourraient

 11   voter aux élections croates.  C’est cela.  Je ne voulais

 12   pas parler de cela.  Le point que je voulais mettre en

 13   valeur c’est que les Croates de Bosnie voyaient en Tudjman

 14   leur Président et non pas le Président de la Bosnie-

 15   Herzégovine.

 16         Q.    Fort bien !  Alors, concernant les troupes du

 17   HVO, le fait est que vous n’avez jamais vu vous-même des

 18   troupes du HV en Bosnie centrale au cours de votre mandat

 19   de six mois dans ce centre régional ?

 20         R.    Oui, j’en ai vu à de nombreuses reprises et

 21   vous ne pouviez pas les manquer entre Prozor et

 22   Tomislavgrad.

 23         Q.    Et dans la poche de Vitez-Busovaca, Monsieur

 24   ?

 25         R.    Non, je ne me souviens pas d’en avoir vu là-


Page 13619

  1   bas.

  2         Q.    Et dans la poche de Vares ?

  3         R.    Non, pas dans la poche de Vares puisque je me

  4   trouvais dans la région entre Prozor et Gornji Vakuf.

  5         Q.    Je souhaite aborder un autre sujet

  6   maintenant,  votre déposition concernant la nomination

  7   prétendue de Monsieur Kordic au poste de l’adjoint du chef

  8   d’état-major, Général Roso.  Je crois que vous venez de

  9   parler également du fait que le Général Roso avait passé 20

 10   ans au sein de la Légion étrangère ?

 11         R.    Je ne sais pas combien d’années mais,

 12   effectivement, il a fait partie auparavant de la Légion

 13   étrangère.

 14         Q.    Excusez-moi si vous avez déjà parlé de cela

 15   mais je veux vous poser la question suivante :  Est-ce que

 16   vous saviez que le Général Roso avait été nommé au poste de

 17   membre de la commission présidentielle le 10 décembre 1993

 18   ?  Il a été nommé par le Président Boban.

 19         R.    Je crois que vous l’avez mentionné.

 20         Q.    Est-ce que vous le saviez ?

 21         R.    Je ne le savais pas à l’époque.

 22         Q.    Est-ce que vous savez si, donc, cette

 23   personne était l’adjointe du chef d’état-major, du Général

 24   Roso, et là, je parle de Monsieur Kordic ?  Est-ce que vous

 25   savez si ses responsabilités portaient sur le domaine


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  1   civil, politique, militaire ou autres ?

  2         R.    Je peux seulement supposer qu’il avait un

  3   double rôle.

  4         Q.    Mais vous n’êtes pas sûr ?

  5         R.    Non, je ne sais pas très exactement quelles

  6   étaient ses responsabilités.

  7         Q.    Et vous ne lui avez jamais posé une question

  8   là-dessus ?

  9         R.    Non.

 10         Q.    Je souhaite vous montrer un dernier document. 

 11   Il s’agit d’un rapport journalier du centre de Zenica qui a

 12   été rédigé vers la fin du mois de décembre 1993.  Ce

 13   document a déjà reçu une cote.  Pardon, je me trompe.

 14         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Ce sera le

 15   document D179/1.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Merci.

 17         Q.    J’ai une question concernant la zone de

 18   responsabilité de Travnik.  Ici, un commentaire a été fait

 19   concernant la visite du représentant de l’ECMM et sa

 20   rencontre avec l’officier de liaison du HVO.

 21         Le commentaire que l’on voit est : « Il est

 22   intéressant de savoir que l’on affirme que Kordic a à la

 23   fois une fonction militaire et politique. »

 24         Est-ce que vous voyez ça ?

 25         R.    Oui.


Page 13621

  1         Q.    Mais il y a aussi un commentaire qui est

  2   comme suit : « On considère qu’il y a des incohérences

  3   entre les rapports différents concernant les fonctions de

  4   Kordic et Valenta. »  Est-ce que vous voyez cela ?

  5         R.    Effectivement.

  6         Q.    Est-ce qu’il est vrai de dire qu’avant ce

  7   document du 28 décembre 1993, d’après l’ECMM, il n’y a pas

  8   eu de rapport qui indiquait que Monsieur Kordic aurait une

  9   fonction militaire ?  C’était la première fois qu’une telle

 10   idée a été mentionnée ?

 11         R.    C’était la première fois mais cette idée

 12   émanait quand même de l’officier de liaison du HVO de Vitez

 13   et, normalement, c’était toujours un interlocuteur fiable.

 14         Q.    Très bien, Monsieur.  L’observateur de l’ECMM

 15   qui a reçu cette information était considéré comme une

 16   personne fiable, lui aussi, n’est-ce pas ?

 17         R.    Oui, mais bien sûr, moi, j’ai entendu parler

 18   de cela par Dario Kordic vers la fin du mois de janvier.

 19         Q.    Très bien.  En ce qui concerne ce document,

 20   c’est le seul document dont vous disposez, le document que

 21   vous aviez dans votre ordinateur, n’est-ce pas ?

 22         R.    Je ne sais pas.  J’ai plusieurs documents

 23   émanant de Mostar.  Probablement que je l’ai quelque part

 24   sur de vieilles disquettes aussi mais il faudrait que

 25   j’examine cela plus en détail pour être tout à fait sûr.


Page 13622

  1         Q.    Je souhaite maintenant attirer votre

  2   attention sur la date du 21 février 1994.  Est-ce que vous

  3   savez si un document a fait état de votre réunion de ce

  4   jour avec Monsieur Kordic ?

  5         R.    Oui.  Je crois que ceci est contenu dans le

  6   document 1385.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Je demanderais à

  8   l’huissier de montrer le document qui a reçu précédemment

  9   la cote 1383.1.

 10         Q.    Ensuite, veuillez placer ce document à côté

 11   du document que vous venez d’identifier, s’il vous plaît.

 12         R.    Très bien.

 13         Q.    Sir Martin, il s’agit là d’un résumé

 14   d’informations militaires que nous avons reçu hier, je

 15   crois, à travers le Colonel Williams.  Je souhaite attirer

 16   votre attention sur le paragraphe 4 où l’on décrit la

 17   réunion qui a eu lieu le 21 février 1994 et l’observation

 18   que l’on y trouve est que même si Monsieur Kordic présidait

 19   cette réunion, il n’y avait aucun doute que Monsieur

 20   Blaskic était beaucoup mieux informé du point de vue

 21   militaire sur tout ce qui avait trait à la poche de la

 22   Lasva et puis, il est dit également qu’en ce qui concerne

 23   la nomination récente de Kordic, peut-être ceci a détourné

 24   son attention dans un autre sens.

 25         Est-ce que vous avez eu la même impression ?


Page 13623

  1         R.    Bien sûr, Blaskic était basé à Vitez et

  2   Kordic était basé à Busovaca.  Donc, il n’y a pas de

  3   surprise.  Il n’est pas surprenant si Blaskic connaissait

  4   mieux la situation de Vitez.

  5         Q.    Et je suppose que vous, vous n’étiez pas

  6   surpris ?

  7         R.    De quoi ?

  8         Q.    Que le Colonel Blaskic connaissait mieux les

  9   détails de la situation.

 10         R.    Non, effectivement.  C’est lui qui contrôlait

 11   les opérations militaires dans la poche de Vitez au jour le

 12   jour.

 13         Q.    Très bien !  Je souhaite maintenant attirer

 14   votre attention à la pièce à conviction 1385 que vous avez

 15   mentionnée, page 9, au fond de la page à droite.  Dans ce

 16   document, l’on mentionne à cet endroit une observation

 17   selon laquelle on voit finalement que la police, d’après

 18   Rajic mais cette fois-ci, c’est Anto Rajic, le chef de la

 19   police militaire, donc, que la police avait reçu des

 20   instructions du Ministre des Affaires intérieures de la

 21   République croate de Herceg-Bosna depuis la signature des

 22   Accords de Genève afin de conditionner le passage de

 23   convois humanitaires à leur propre contrôle.

 24         Est-ce que vous vous souvenez de ce sujet de

 25   discussion ?


Page 13624

  1         R.    Oui.  Maintenant que vous le dites, oui.

  2         Q.    Vous vous souvenez que c’est directement

  3   devant Monsieur Kordic que ces instructions ont été reçues

  4   de la part du Ministre des Affaires intérieures de la

  5   République, n’est-ce pas ?

  6         R.    Oui.

  7         Q.    Monsieur Kordic, par la suite, a accepté de

  8   demander une explication de ces nouvelles instructions

  9   reçues de Mostar, n’est-ce pas ?

 10         R.    Voyons… oui, oui.

 11         Q.    Très bien !  J’ai terminé en ce qui concerne

 12   ce document et nous nous approchons de la fin de cette

 13   partie du contre-interrogatoire.  Vous avez fait un

 14   commentaire à la page 2 de votre rapport que les combats

 15   ont été arrêtés après la signature des Accords de

 16   Washington et puis vous dites que le Général Alagic vous a

 17   fait un commentaire concernant la possibilité de voir le

 18   HVO et l’armée de Bosnie-Herzégovine organiser des

 19   opérations militaires conjointes afin de libérer Maglaj.

 20         R.    Oui.

 21         Q.    Est-ce que ceci s’est produit, effectivement,

 22   au mois de mars 1994 ?

 23         R.    Ce n’était pas vraiment une opération

 24   militaire conjointe.  C’était quelque chose proche de cela

 25   mais pour autant que je sache, il n’y a jamais eu de vraie


Page 13625

  1   opération militaire conjointe entre l’armée de Bosnie-

  2   Herzégovine et le HVO suite à la création de la Fédération.

  3         Q.    Très bien !  En ce qui concerne ce sujet, à

  4   la page 2 de votre rapport, vous avez conclu que les

  5   Croates de Bosnie étaient désespérés, souhaitaient

  6   désespérément établir la paix ?

  7         R.    Oui.

  8         Q.    Et encore aujourd’hui, vous le pensez ?

  9         R.    Oui.  À l’époque, c’est ce qu’ils pensaient.

 10         Q.    En fait, c’était eux qui étaient les premiers

 11   à avoir signé le Plan Vance-Owen, n’est-ce pas ?

 12         R.    Oui, mais il faut savoir que les Croates

 13   trouvaient de nombreux avantages.  Ils obtenaient 25 pour

 14   cent du territoire.

 15         Q.    Oui, mais le fait reste qu’ils ont été les

 16   premiers à vouloir signer le Plan Vance-Owen sans aucune

 17   réserve ?

 18         R.    Oui, tout à fait.

 19         Q.    Juste quelques dernières questions nous

 20   permettant d’éclaircir certains points concernant ce

 21   document.

 22         Je vais vous demander d’examiner maintenant un

 23   rapport du centre de coordination de Travnik.  C’est la

 24   pièce à conviction 1275 et elle est datée du 21 octobre

 25   1993.  Si vous examinez la page 2, vous avez reçu la


Page 13626

  1   demande de faire un commentaire sur les activités de

  2   quelques soldats du HVO ivres de Kakanj et de Vares qui se

  3   sont déroulées à peu près au moment du massacre de Stupni

  4   Do.

  5         Il n’y a aucun doute que lorsqu’on parle du

  6   mauvais traitement infligé par les Croates aux autres, on

  7   parle des pillages et des meurtres aussi dans la région de

  8   Bugojno, n’est-ce pas ?

  9         R.    Oui, mais est-ce que vous pouvez répéter ce

 10   que vous venez de dire ?  Je n’ai pas très bien compris.

 11         Q.    Est-ce que vous êtes d’accord avec moi pour

 12   dire que dans la région de Bugojno, les Croates ont été

 13   soumis aux mauvais traitements qui incluaient les meurtres,

 14   les viols et les pillages ?  Ceci est mentionné vers la fin

 15   de la deuxième page de cette pièce à conviction 1275.

 16         R.    Oui.  Ceci s’est produit en été dans la

 17   région de Bugojno et un peu plus tôt aussi.

 18         Q.    Très bien !  On vous a montré également le

 19   document 1364.  Je souhaite que vous nous fassiez un

 20   commentaire à ce sujet.  C’est un document de forme un peu

 21   bizarre.  Donc, 1364.

 22         R.    Excusez-moi que je le trouve.  Oui, 1364.

 23         Q.    On parle ici d’un dossier de coordination, au

 24   fond du document, du 28 mars ou janvier 1994.  Est-ce que

 25   vous voyez ça ?


Page 13627

  1         R.    Oui.

  2         Q.    D’où émanait ce rapport ?

  3         R.    Si vous regardez en haut de la page, vous

  4   pouvez voir qu’il s’agit du quartier général de l’ECMM à

  5   Zagreb.  Donc, c’est un rapport émanant du quartier

  6   général.  C’est pour cela que l’on ne trouve pas tellement

  7   de détails concernant la situation en Bosnie centrale étant

  8   donné que le rapport couvrait toute la région, y compris la

  9   Croatie, la Bosnie, le Kosovo, la Serbie, et cætera, toute

 10   la zone.

 11         Q.    Sir Martin, je vous remercie d’avoir répondu

 12   à mes questions.  Je n’ai plus de questions à vous poser. 

 13   Merci.

 14         CONTRE-INTERROGÉ PAR Me MIKULICIC

 15         (interprétation) : 

 16         Q.    Bonjour, Sir Martin.  Je m’appelle Goran

 17   Mikulicic et je suis avocat de Zagreb.  Avec mon collègue,

 18   Monsieur Kovacic, je défends le co-accusé dans cette

 19   affaire, Monsieur Mario Cerkez.  Sir Martin, j’ai beaucoup

 20   d’estime pour votre expérience et vos compétences

 21   professionnelles et je souhaite vous poser quelques

 22   questions concernant la situation en Bosnie-Herzégovine. 

 23   Vous pourrez me répondre tout à fait brièvement.

 24         Compte tenu du fait que la Bosnie-Herzégovine est

 25   une communauté multinationale, multiethnique et


Page 13628

  1   multiconfessionnelle – là, je vais paraphraser vos propos –

  2   vous avez estimé que la situation en Bosnie-Herzégovine

  3   était complexe.  Est-ce exact ?

  4         R.    Tout à fait, effectivement.

  5         Q.    Nous savons que la Bosnie-Herzégovine, si

  6   nous négligeons d’autres groupes ethniques de moindre

  7   importance, que c’est un pays constitué de trois entités,

  8   de trois groupes ethniques, à savoir les Serbes, les

  9   Croates et les musulmans, n’est-ce pas ?

 10         R.    C’est exact.

 11         Q.    Parlons maintenant des Croates.  En termes

 12   généraux, je crois que vous serez d’accord avec moi pour

 13   dire que les Croates de Bosnie-Herzégovine peuplent trois

 14   régions surtout, d’un côté, la région au nord-est de

 15   Bosnie-Herzégovine, la région appelée Posavina qui longe la

 16   rivière Sava, n’est-ce pas ?

 17         R.    Oui, tout à fait.

 18         Q.    La deuxième région est la région de la Bosnie

 19   centrale.  C’est une région où se trouve une enclave croate

 20   qui est entourée par des zones où la population musulmane

 21   constitue la majorité.  Est-ce que vous êtes d’accord avec

 22   une telle constatation ?

 23         R.    Oui, tout à fait.

 24         Q.    Et puis troisièmement, il y a la région

 25   peuplée par les Croates qui est l’Herzégovine.  Donc, c’est


Page 13629

  1   au sud-ouest et c’est une région limitrophe à la République

  2   de Croatie ?

  3         R.    Oui.

  4         Q.    Est-ce que vous seriez d’accord avec moi pour

  5   dire que compte tenu de cette position géographique et

  6   stratégique du peuple croate en Bosnie-Herzégovine, nous ne

  7   pouvons pas conclure que ces trois populations avaient

  8   nécessairement les mêmes intérêts et les mêmes buts ?

  9         R.    Oui, je suis tout à fait conscient du fait

 10   que leurs intérêts et buts variaient sans aucun doute.

 11         Q.    Sir Martin, vous avez dit que pendant votre

 12   séjour en Bosnie, il y a eu plusieurs types de conflits

 13   armés qui se déroulaient dans ce pays et là, je parle de

 14   plusieurs combinaisons, de différents conflits inter-

 15   ethniques qui se déroulaient en Bosnie-Herzégovine.  Vous

 16   avez dit qu’autour de Tuzla, les Croates et les musulmans

 17   étaient des alliés qui luttaient contre les Serbes, n’est-

 18   ce pas ?

 19         R.    C’est exact, oui.

 20         Q.    Je suppose que vous serez d’accord avec moi

 21   pour dire que la situation était tout à fait semblable dans

 22   la montagne Vlasic, au-dessus de Travnik, où les Croates et

 23   les musulmans détenaient ensemble la ligne de front contre

 24   les Serbes ?

 25         R.    Oui.  La situation variait selon les régions.


Page 13630

  1         Q.    En Bosnie centrale, vous avez dit qu’il y a

  2   eu un conflit armé entre les Croates et les musulmans. 

  3   D’autre part, dans l’Herzégovine, nous avons pu remarquer

  4   une situation de nouveau où les Croates luttaient contre

  5   les Serbes qui pénétraient depuis le Monténégro et puis

  6   aussi un conflit entre les Croates et les musulmans ?

  7         R.    Oui.  Je crois qu’entre avril et juillet

  8   1992, ils ont lutté ensemble contre les Serbes et ensuite,

  9   au mois de mai, le 9 mai 1993, le conflit entre les Croates

 10   et les Bosniaques a commencé.

 11         Q.    Je souhaite que vous examiniez maintenant la

 12   pièce à conviction que vous avez déjà vue aujourd’hui,

 13   1364.

 14         R.    Oui.

 15         Q.    Veuillez maintenant examiner la page 2 de ce

 16   document, paragraphe 4.  Dans ce paragraphe, l’on mentionne

 17   le fait qu’autour de Bihac, c’est-à-dire le nord-ouest de

 18   la Bosnie-Herzégovine, des conflits armés ont également

 19   éclaté entre les musulmans eux-mêmes.

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Il y a un

 21   problème d’interprétation.  L’on demande aux interprètes de

 22   brancher le micro. 

 23         Veuillez répéter ce que vous vouliez demander en

 24   ce qui concerne ce document.

 25         Me MIKULICIC (interprétation) : 


Page 13631

  1         Q.    Donc, dans le paragraphe 4 de ce rapport de

  2   l’ECMM, il est indiqué qu’autour de la ville de Bihac, dans

  3   la région qui a reçu le nom de la région autonome de Bosnie

  4   occidentale, les musulmans sont entrés en conflit entre eux

  5   et que les efforts ont été déployés afin d’arriver à un

  6   cessez-le-feu et de trouver une solution politique.  Est-ce

  7   que vous connaissiez cette situation ?

  8         R.    Oui, tout à fait.

  9         Q.    Est-ce que vous pouvez tout à fait brièvement

 10   nous expliquer cette situation ?  De quel conflit entre les

 11   musulmans s’agissait-il ?

 12         R.    Eh bien, il s’agit de la chose suivante. 

 13   C’est Fikret Abdic qui a créé cette province autonome de

 14   Bosnie occidentale et qui a fait dissension vis-à-vis de

 15   son gouvernement bosniaque de Sarajevo.  C’est pour cela

 16   que les Bosniens eux-mêmes ne le sympathisaient pas et ces

 17   frictions, ces irritations se sont poursuivies jusqu’à

 18   aujourd’hui.

 19         Q.    Mais rappelez-nous, s’il vous plaît, Monsieur

 20   Fikret Abdic était musulman lui-même ?

 21         R.    Tout à fait.  Effectivement, comme je l’ai

 22   dit, il ne s’est pas rendu populaire au sein de la

 23   population musulmane mais vous avez raison, c’était un

 24   problème interne musulman.

 25         Q.    Donc, si l’on essaie de faire un résumé des


Page 13632

  1   conflits armés qui ont éclaté sur le territoire de Bosnie-

  2   Herzégovine pendant votre mandat sur place, nous pouvons

  3   dire que ces conflits englobaient toutes sortes de

  4   combinaisons entre ces trois communautés que nous avons

  5   mentionnées, les Croates, les musulmans et les Serbes ?

  6         R.    Oui.  Comme je l’ai déjà dit aujourd’hui, la

  7   situation en Bosnie même variait selon les régions et était

  8   tout à fait différente, par exemple, à Tuzla et à Mostar.

  9         Q.    Donc, d’après votre expérience, il n’était

 10   pas possible d’avoir une approche identique à toutes les

 11   parties de Bosnie-Herzégovine ?

 12         R.    Non.  Bien sûr, en ce qui nous concerne,

 13   nous, au sein de l’ECMM, nous avions des approches

 14   différentes vis-à-vis de Tuzla, de la Bosnie centrale ou de

 15   la Bosnie du sud.

 16         Q.    Très bien.  Je suis curieux de savoir si vous

 17   êtes au courant du fait que Monsieur Fikret Abdic, lors des

 18   premières élections libres après la chute du gouvernement

 19   communiste en Bosnie-Herzégovine, a remporté le plus grand

 20   nombre de votes pour le poste du président de la

 21   république.

 22         R.    Oui, je le sais.

 23         Q.    Parlons maintenant d’un autre sujet, à savoir

 24   le rapport entre la République de Croatie et la République

 25   de Bosnie-Herzégovine.  Est-ce que vous savez que les


Page 13633

  1   rapports diplomatiques entre ces deux États, qui ont eu

  2   lieu en 1992, n’ont jamais été arrêtés, que les rapports

  3   diplomatiques entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine

  4   n’ont pas été rompus même pendant le conflit armé qui a eu

  5   lieu en Bosnie-Herzégovine ?

  6         R.    Oui, je sais que les relations diplomatiques

  7   se sont poursuivies même pendant la période où les rapports

  8   entre les deux pays n’étaient pas harmonieux.

  9         Q.    Très bien !  Sir Martin, vous avez eu

 10   l’occasion de voir le document 1364… (l’interprète se

 11   reprend) 1344 ?  C’est le rapport du centre régional de

 12   Zenica du 30 décembre 1993.

 13         R.    Oui.  J’ai le document devant moi.

 14         Q.    Veuillez examiner maintenant la page 2.  Vers

 15   le haut de la page, il y est écrit que Monsieur Granic qui,

 16   à l’époque, était le Ministre des Affaires extérieures de

 17   la République de Croatie, a suggéré que la vallée de la

 18   Lasva devait être proclamée zone protégée.  Est-ce que vous

 19   savez si une quelconque suite a été donnée à cette

 20   initiative ?

 21         R.    Ma seule information concernant cette

 22   initiative se basait sur ce rapport et sur les propos tenus

 23   par Zoran Maric, le maire de Busovaca.  Je n’ai jamais vu

 24   un document écrit ou officiel relatant cette proposition.

 25         Q.    Très bien !  Dans ce cas-là, nous n’allons


Page 13634

  1   pas nous attarder à ce sujet.  Sir Martin, vous avez dit

  2   que vous avez remarqué vous-même, et ceci est reflété par

  3   le rapport, que vous avez vu des unités de l’armée croate

  4   dans la région de Prozor et de Gornji Vakuf et nous

  5   trouvons une référence à ce sujet dans le rapport du centre

  6   régional ou bien plutôt du centre principal du 18 avril. 

  7   Il s’agit du document Z1419.

  8         R.    Oui.  Il s’agit de mon rapport,

  9   effectivement.  Je l’ai sous les yeux.

 10         Q.    À la page 2, l’on dit que des unités de la

 11   HV, donc, de l’armée croate, ont été remarquées dans la

 12   région de Prozor et de Gornji Vakuf.

 13         Ma question est la suivante :  Il est clair que

 14   l’ECMM souhaitait savoir quel était le rôle de ces troupes,

 15   réfléchissait à ce sujet ?

 16         R.    Oui.

 17         Q.    D’après le rapport, je vois que dans leurs

 18   réflexions, ils essayaient d’établir si leur rôle était

 19   offensif ou défensif.

 20         R.    C’est exact.

 21         Q.    Si nous prenons pour point de départ l’idée

 22   que leur rôle était offensif, d’après le rapport, il est

 23   présumé qu’il pourrait être actif dans trois directions,

 24   depuis Prozor vers Novi Travnik et Vitez, ensuite, vers

 25   Slatine et Jablanica et la troisième direction, vers


Page 13635

  1   Fojnica.  Cependant, il n’y a jamais eu ce genre d’activité

  2   offensive dans ces régions.  Est-ce exact ?

  3         R.    Non.  Je dois souligner qu’ici, il s’agissait

  4   de mon rapport personnel et de mon évaluation personnelle. 

  5   Donc, à mon avis, si une offensive allait être lancée, à

  6   mon avis, ces trois directions auraient été adoptées afin

  7   de mener une offensive étant donné que cette direction

  8   donnait aux Croates de grands avantages stratégiques. 

  9         Cependant, les opérations ont été arrêtées

 10   puisqu’à ce moment-là, l’hiver était extrêmement rude et je

 11   pense que c’est le froid qui a provoqué la fin de ces

 12   opérations.

 13         Q.    Mais il est, donc, exact qu’il n’y a eu

 14   aucune opération offensive, n’est-ce pas ?

 15         R.    Oui, c’est vrai.

 16         Q.    Sir Martin, encore un sujet général, après

 17   quoi je pourrai vous remercier de votre patience, et ce

 18   thème est le suivant : l’accès qu’avait à la région sur le

 19   plan politique la communauté internationale pour apporter

 20   une solution au conflit en Bosnie-Herzégovine.

 21         Depuis le début du conflit en 1992, la communauté

 22   internationale a manifesté un grand intérêt et s’est

 23   montrée très désireuse que ce conflit se règle et vous-

 24   même, vous avez été à l’initiative d’un certain nombre de

 25   dispositions destinées à faire partie de plan de paix.


Page 13636

  1         Ma question est la suivante :  Sir Martin,

  2   connaissez-vous peut-être l’initiative d’un ambassadeur à

  3   la fin de 1992 qui a eu pour résultat une réunion entre

  4   Karadzic, Boban et Izetbegovic dans la villa de Kaonik près

  5   de Sarajevo ?

  6         R.    Je sais que cela s’est passé mais je ne

  7   connais pas le détail des discussions, des débats.

  8         Q.    Pouvez-vous confirmer de façon générale que

  9   ces débats avaient pour thème la répartition et la

 10   distribution de la Bosnie-Herzégovine entre les trois

 11   entités ethniques principales et qui a débouché plus tard

 12   sur le Plan Vance-Owen qui évoquait une division en

 13   provinces ?

 14         R.    Non, je ne suis pas au courant des

 15   propositions dans le détail.  Je connais, bien sûr, le Plan

 16   Vance-Owen de façon générale ainsi que cette disposition

 17   relative à une division en provinces.

 18         Q.    A succédé à ce plan le Plan Owen-Stoltenberg,

 19   ensuite, l’Accord de Washington puis finalement, l’Accord

 20   de Dayton qui a débouché sur la création de la Fédération

 21   comme nous la connaissons aujourd’hui, n’est-ce pas ?

 22         R.    Oui, c’est exact.

 23         Q.    Seriez-vous d’accord avec la thèse selon

 24   laquelle, d’une certaine façon, l’idée commune à tous ces

 25   initiateurs de paix a permis de créer une Fédération dans


Page 13637

  1   laquelle on trouve une entité serbe, d’une part, et d’autre

  2   part, une entité croate ou musulmane ?

  3         R.    Oui, je suis d’accord.

  4         Q.    Seriez-vous d’accord dans ce cas avec l’idée

  5   que cette idée d’une Bosnie-Herzégovine multiethnique était

  6   le point de départ principal de la communauté

  7   internationale dans la réflexion qu’elle a menée pour

  8   supprimer les conflits et instaurer la paix dans cette

  9   région de Bosnie-Herzégovine ?

 10         R.    Je sais qu’il y a des points de vue

 11   divergents sur ce point de vue, notamment de la part des

 12   Croates de Bosnie mais finalement, c’est ce qui a été

 13   conclu et décidé par les trois parties à Dayton.  C’est qui

 14   a permis de ramener la paix dans le pays mais on attend

 15   toujours la restauration de la stabilité.

 16         Q.    Et j’en arrive à la fin de mon interrogatoire

 17   à présent.  Je vous remercie de votre patience, Sir Martin.

 18         R.    Merci.

 19         Me NICE (interprétation) :  Quelques questions

 20   encore.

 21         RÉINTERROGÉ PAR Me NICE

 22         (interprétation) : 

 23         Q.    Général, sur quoi vous êtes-vous fondé pour

 24   vous faire l’idée que vous vous êtes fait quant au fait que

 25   Dario Kordic était Vice-président du HVO ?


Page 13638

  1         R.    Eh bien, c’est une idée qui s’est fixée dans

  2   mon esprit dès le début et je ne saurais dire sur quel fait

  3   repose ce point de vue mais c’est le point de vue qui était

  4   dans mon esprit, cela ne fait aucun doute.

  5         Q.    Ce point de vue n’a pas changé ?

  6         R.    Non.

  7         Q.    Après son départ de la présidence, savez-vous

  8   ce qu’a fait Boban, quelle profession il a exercée ?

  9         R.    Boban est parti pour devenir directeur, je

 10   crois, de Fina Petrol, la plus grande compagnie pétrolière

 11   du pays.

 12         Q.    Sur nomination de qui ?

 13         R.    Je suppose que Franjo Tudjman l’a aidé à

 14   obtenir ce poste mais c’est une supposition.

 15         Q.    La possibilité que Boban et Kordic soient

 16   parents, appartiennent à la même famille, ce sujet a-t-il

 17   été discuté et dans quelle mesure devant vous ?

 18         R.    Il n’était pas largement discuté.  C’est le

 19   Conseil de la Défense qui m’a indiqué que je faisais erreur

 20   dans mon hypothèse mais c’est un sujet qui surgissait de

 21   temps en temps dans les conversations.  Tout le monde

 22   pensait que c’était le cas mais personne ne le savait avec

 23   certitude.  Enfin, on vient de me dire que j’avais tort,

 24   que je m’étais trompé.

 25         Q.    Je pense que les Juges devront prendre des


Page 13639

  1   décisions sur ce genre de sujets mais est-ce que ce sont

  2   des habitants de la région ou des représentants

  3   d’organisations internationales qui ont dit cela ?

  4         R.    Surtout des représentants d’organisations

  5   internationales.

  6         Q.    Merci.  Il a été stipulé qu’aucun Croate ne

  7   vous aurait jamais dit que Kordic avait un pouvoir

  8   militaire mais que dans votre document de janvier 1994,

  9   c’est lui qui vous l’aurait dit.  Il est également stipulé

 10   qu’il n’y a aucun rapport qui détermine son autorité

 11   militaire avant le mois de janvier 1994 mais comment a-t-il

 12   pu vous le dire en 1994 et comment est-ce que cela

 13   correspond avec ce que vous avez vu de vos yeux ?

 14         R.    Eh bien, c’est un officier de liaison du HVO

 15   à Vitez qui me l’a dit et cela n’a pas été une surprise

 16   pour moi.

 17         Q.    Est-ce que cela correspondait avec ce que

 18   vous avez généralement observé sur le plan de son pouvoir

 19   et de son autorité ?

 20         R.    Je ne voyais pas Dario Kordic tous les jours

 21   et, bien sûr, je ne connaissais pas toutes ses actions au

 22   quotidien, ni comment il exerçait ses fonctions.

 23         Q.    Merci.  Je m’appuie à présent sur la pièce à

 24   conviction 2612.5.  On vous a interrogé au sujet des routes

 25   d’approvisionnement, de la principale route


Page 13640

  1   d’approvisionnement et de sa distance par rapport à Stupni

  2   Do.

  3         Je ne vous demande pas une supposition ou

  4   l’expression d’un souvenir mais je vous demande si Stupni

  5   Do était accessible à partir de la grande route, la

  6   principale route d’approvisionnement, à quelle distance le

  7   village se trouvait de la route.  Est-ce qu’elle était en

  8   surplomb, en amont ou en aval de la route ? 

  9         Nous pouvons voir le village sur la carte et vous

 10   pouvez utiliser un pointeur pour vous aider à répondre.

 11         R.    Eh bien, voici la grande route, la principale

 12   route d’approvisionnement qui va vers Vares [indication du

 13   témoin].  Ici se trouve Stupni Do [indication du témoin],

 14   quelques kilomètres carrés autour.  Donc, nous voyons

 15   quelques virages sur la route.  Nous parlons d’un kilomètre

 16   et demi de distance entre la route et le village à peu

 17   près.

 18         Q.    Est-ce que c’est une route qui est d’accès

 19   facile ?

 20         R.    Eh bien, elle tourne pas mal et elle monte

 21   sur la colline.

 22         Q.    Est-ce qu’il y a une différence d’altitude

 23   importante d’un point à un autre ?

 24         R.    Pour autant que je m’en souvienne, c’est une

 25   route assez raide.


Page 13641

  1         Q.    Vous rappelez-vous si, d’une façon ou d’une

  2   autre…

  3         R.    Mais je ne suis jamais allé personnellement à

  4   Stupni Do.  Donc, je ne vous donne pas des informations

  5   dont j’aurais été le témoin oculaire au sujet de Stupni Do.

  6         Q.    Vous ne pouvez, donc, pas nous aider quant au

  7   fait de savoir si les grandes routes d’approvisionnement se

  8   trouvaient en amont ou en aval par rapport à Stupni Do ?

  9         R.    Non, mais si l’on regarde la carte… non, non,

 10   je ne peux pas vous aider sur ce point.

 11         Q.    Merci. 

 12         Me NICE (interprétation) :  Pièce D175.1,

 13   j’aimerais que les Juges puissent au moins jeter un coup

 14   d’œil sur ce document qui est une pièce de la Défense,

 15   merci beaucoup, et qu’on la remette au témoin.  C’est un

 16   document qui devrait permettre aux Juges… je ne vais pas en

 17   lire tous les détails mais enfin, les Juges verront en bas

 18   de première page des commentaires au sujet de Dario Kordic,

 19   au sujet du 21 mars 1994. 

 20         Q.    On trouve une référence ici en bas de page

 21   sur l’utilisation du titre de « Colonel du HVO » par Dario

 22   Kordic.  Cela ne figure peut-être pas dans le rapport que

 23   vous avez soumis à votre départ, avant le congé que vous

 24   avez pris pour raisons médicales, mais est-ce que cela

 25   correspond, oui ou non, à ce que vous avez pu constater


Page 13642

  1   personnellement ?

  2         R.    Il n’y a rien ici qui me surprenne,

  3   effectivement.  Je ne me rappelle pas avoir vu ce rapport

  4   et je crois que je devais être absent à l’époque de sa

  5   rédaction mais il n’y a rien dans ce rapport qui me

  6   surprenne.

  7         Q.    L’idée que Stupni Do avait un rapport avec

  8   les allégations de marché noir, apparemment, les raisons de

  9   ces allégations étaient assez peu claires mais est-ce qu’il

 10   y avait quelque chose que vous ayez vu qui permettait de

 11   corroborer ces allégations ?

 12         R.    Pas que j’ai vu de mes yeux.

 13         Q.    Hadzihasanovic parle d’activités de marché

 14   noir, n’est-ce pas, dans ce village ?

 15         R.    Oui.  Il a dit qu’il y avait du marché noir

 16   dans ce village.

 17         Q.    D’où venait Ivica Rajic ?

 18         R.    Ivica Rajic, je ne sais pas d’où il venait à

 19   l’origine mais il était basé à Kiseljak.

 20         Q.    Kiseljak était-elle sa zone de responsabilité

 21   principale ?

 22         R.    Oui, j’en suis pratiquement certain.

 23         Q.    Vares faisait-il partie de sa zone de

 24   responsabilité ?

 25         R.    Ça, j’en suis moins sûr.  Je crois que Vares


Page 13643

  1   était sous le commandement des forces de Tuzla.  Je ne

  2   crois pas que sa responsabilité allait jusqu’à Vares.

  3         Q.    Vous avez une théorie qui vous a été

  4   présentée au sujet de Stupni Do.  Je vous demande de

  5   répondre par oui ou par non.  Avez-vous entendu parler

  6   d’autres théories qui auraient circulé à l’époque ?

  7         R.    Non, je n’en ai pas entendu parler.

  8         Me NICE (interprétation) :  Les Juges se

  9   souviendront que nous avons déjà parlé de cela, de ces

 10   théories avec d’autres témoins.  Il n’est pas nécessaire de

 11   continuer à interroger ce témoin sur ce point.

 12         R.    Excusez-moi.  Je voulais dire à Stupni Do,

 13   non, pas d’autres théories, non.

 14         Q.    Quant au remplacement de Harah, savez-vous

 15   exactement à quel moment il a eu lieu ?  Était-ce avant ou

 16   après le massacre ?

 17         R.    Je crois, parce qu’il est difficile de le

 18   savoir avec précision, mais je crois qu’il a eu lieu le

 19   lendemain du massacre.

 20         Q.    L’extrait du rapport des Nations unies vous a

 21   été soumis de façon incomplète.  Ce qui était écrit dans le

 22   rapport des Nations unies c’est qu’il y avait une force de

 23   défense composée de 36 soldats de l’Armija provenant de la

 24   région et qui étaient mobilisés pour protéger le village

 25   pendant la nuit.


Page 13644

  1         Des témoins ont parlé de cela devant les Juges en

  2   disant que c’était simplement des hommes qui protégeaient

  3   le village.  Saviez-vous quelque chose de cela ?

  4         R.    C’était certainement… enfin, c’est très

  5   compréhensible pour moi.  Je ne connaissais pas le détail

  6   des chiffres mais cela ne me surprend pas.

  7         Q.    Pièce Z1258, document dans lequel Petkovic

  8   limoge Pejcinovic, Gavran et une troisième personne.  Est-

  9   ce que cela correspond à ce que vous saviez des actions

 10   politiques menées à l’époque ?

 11         R.    Je suis pratiquement certain que les

 12   représentants politiques ont dû participer pleinement à

 13   cette action.  Comme nous en avons entendu parler par la

 14   suite, je suis presque certain que s’agissant de Prlic,

 15   Boban, et cætera, des instructions sont arrivées, des

 16   instructions venant de Prlic et de Boban à peu près à ce

 17   niveau-là.

 18         Q.    Que dites-vous de la possibilité que des

 19   interventions politiques se produisent à quelque niveau que

 20   ce soit du commandement ?  Est-il permis de dire que

 21   quelqu’un a été transféré ou muté de sa zone de

 22   responsabilité vers un autre secteur tel que Vares ?

 23         R.    Je dirais qu’un dirigeant politique, même

 24   s’il ne peut pas donner des instructions militaires, a la

 25   possibilité de s’adresser au haut de la hiérarchie, au


Page 13645

  1   sommet de la hiérarchie politique, donc, de s’adresser à

  2   ses supérieurs les plus importants sur le plan politique

  3   pour dire ce qu’ils pensent et émettre des instructions

  4   très fermes quant aux actions qu’il importe ou n’importe

  5   pas de prendre.

  6         Q.    Encore une ou deux questions et j’en aurai

  7   fini.  Kordic a dit qu’il avait parlé à Petkovic et que

  8   c’est Petkovic qui lui avait raconté ce qui s’était passé

  9   et ce qui avait été découvert à Stupni Do mais vous,

 10   confirmez-vous que Petkovic avait des informations qu’il a

 11   transmises à Kordic ?

 12         R.    Non.  Je ne voyais pas Petkovic de façon

 13   régulière.

 14         Q.    Y avait-il d’autres signes qui permettaient

 15   de penser à un rapport quelconque entre Blaskic et Stupni

 16   Do ?

 17         R.    Pas à ma connaissance.

 18         Q.    Les Croates et leur enthousiasme en faveur de

 19   la paix, à part ce que vous avez déjà dit, les avantages

 20   qui étaient les leurs à ce qu’un plan de paix voit le jour,

 21   au moment dont vous parlez, y avait-il conflit de pouvoirs

 22   sur le terrain ?

 23         R.    Eh bien, les Croates subissaient

 24   manifestement une pression très importante.  Ils perdaient

 25   du terrain en Bosnie centrale et leurs enclaves fondaient


Page 13646

  1   au soleil, l’enclave de Vares.

  2         Q.    Encore une question suite à ce que vous avez

  3   dit à Me Mikulicic.  Les forces croates que vous avez vu

  4   arriver en Bosnie, vous avez dit qu’elles avaient été

  5   arrêtées par l’offensive de l’hiver, par le froid.  Savez-

  6   vous si elles sont reparties de Bosnie et quand ?

  7         R.    Ce que j’ai dit, en fait, c’est que je

  8   pensais que c’était en partie en raison de ce froid glacial

  9   qui régnait cet hiver-là qu’elles ont été arrêtées mais il

 10   est possible également que la menace de sanctions contre la

 11   Croatie ait créé dans leur esprit un avis contraire quant à

 12   leur participation en Bosnie-Herzégovine.  Donc, il est

 13   possible que ce soit les conditions hivernales très dures

 14   et il est possible également que ce soit la menace de

 15   sanctions contre la Croatie qui ait joué un rôle.

 16         Q.    Combien de temps à peu près ces troupes ont-

 17   elles passé en Bosnie avant d’arrêter de faire ce qu’elles

 18   faisaient ?

 19         R.    Je ne me rappelle pas précisément mais je

 20   crois qu’elles ont disparu en mars.

 21         Q.    Et à votre avis, il s’agissait de militaires. 

 22   Donc, des militaires présents dans une région pendant aussi

 23   longtemps doivent être associés à des documents qui

 24   indiquent ce que ces troupes ont fait ou pas fait, n’est-ce

 25   pas ?


Page 13647

  1         R.    Oui, oui.  Étant donné qu’il s’agit de

  2   militaires, absolument.

  3         Me NICE (interprétation) :  J’en ai terminé.

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci, Sir

  5   Martin, d’être venu au Tribunal International pour

  6   témoigner.  Votre déposition est terminée.  Vous pouvez à

  7   présent vous retirer.

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Merci, Monsieur le

  9   Président.

 10                     [Le témoin se retire]

 11         Me NICE (interprétation) :  J’ai encore besoin de

 12   quelques instants, Monsieur le Président, pour des

 13   questions administratives.

 14         Les Juges de cette Chambre vont sans doute

 15   recevoir très bientôt des rapports de John Elford qui

 16   montrent des cartes géographiques.  Les annexes à ce

 17   rapport ont été reproduites cet après-midi et seront

 18   disponibles cet après-midi, donc.

 19         Je crois comprendre que demain, il y a de grandes

 20   chances que les deux témoins que nous souhaitions entendre

 21   seront présents dans le prétoire, le problème ne se posant

 22   pas au moment de leur départ de Bosnie mais à leur entrée

 23   aux Pays-Bas. 

 24         Enfin, ces problèmes semblent avoir été réglés et,

 25   donc, ils devraient être disponibles demain, ce qui nous


Page 13648

  1   permettrait demain de discuter également de la cassette car

  2   l’un des deux témoins prévus pour demain peut témoigner à

  3   ce sujet, le cas échéant, et je crois comprendre que Me

  4   Stein n’a pas d’objection par rapport à cette procédure. 

  5   En tout cas, l’argument relatif à l’admissibilité de cette

  6   preuve doit être traité cette semaine.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Les Juges

  8   avaient l’intention de ne pas travailler, de ne pas siéger

  9   demain après-midi et tout est lié, bien sûr, aux exigences

 10   de ce procès.  Je n’ai pas tout à fait bien compris qui

 11   vous prévoyez d’entendre demain.

 12         Me NICE (interprétation) :  L’un d’entre eux est

 13   un double, dirais-je, de celui que nous avons entendu la

 14   semaine dernière et le deuxième est le témoin qui a produit

 15   la cassette, en tout cas, qui en a fait une copie.  Compte

 16   tenu des objections élevées par la Défense par rapport à

 17   cette cassette, il était utile, me semble-t-il, d’entendre

 18   ce témoin.

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Donc, il est

 20   prévu d’entendre le premier témoin dont vous venez de

 21   parler ?

 22         Me NICE (interprétation) :  Oui, Monsieur le

 23   Président.

 24         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Pendant

 25   combien de temps ?


Page 13649

  1         Me NICE (interprétation) :  Je ne sais pas

  2   exactement mais la moitié de la matinée peut-être.

  3         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  La moitié de

  4   la matinée.  Ensuite, il est prévu d’entendre le témoin qui

  5   parlera de la cassette.  C’est bien cela ?

  6         Me NICE (interprétation) :  Oui.  S’il est

  7   considéré indispensable d’entendre ce témoin, il est

  8   possible de l’entendre et de traiter de la cassette dans le

  9   cadre de son audition, c’est-à-dire de traiter de la

 10   recevabilité de cette cassette.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Et les autres

 12   témoins pour cette semaine ?

 13         Me NICE (interprétation) :  Jeremy Fleming et je

 14   crois que c’est tout.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Quand son

 16   audition est-elle prévue ?

 17         Me NICE (interprétation) :  Jeudi.

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Jeudi ?

 19         Me NICE (interprétation) :  Et nous pourrions

 20   traiter d’autres points également.  Il y a également John

 21   Elford, le créateur des cartes géographiques, que nous

 22   gardions dans notre manche en cas de nécessité.

 23         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Il est

 24   disponible ?

 25         Me NICE (interprétation) :  Oui, si nous en avons


Page 13650

  1   besoin.

  2         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  On pourrait,

  3   donc, l’entendre vendredi matin si nous en avons terminé

  4   avec les autres témoins.

  5         Me NICE (interprétation) :  J’aimerais, toutefois,

  6   appeler votre attention sur ce problème des affidavits. 

  7   Les Juges de cette Chambre se rappelleront… je pense que le

  8   Juge Robinson en entendra parler sans avoir été présent au

  9   moment de ce débat mais, en tout cas, les deux autres Juges

 10   se rappelleront que dans d’autres affaires, des documents

 11   ont été tamponnés par des tribunaux locaux et que ce tampon

 12   local était destiné à authentifier la signature mais cette

 13   pratique n’est plus en vigueur en Bosnie, ce qui prouve

 14   qu’il n’est plus possible pour nous d’utiliser de tels

 15   documents, en tout cas, dans des affaires criminelles,

 16   c’est-à-dire que le tampon en question, s’il est apposé,

 17   n’est plus valable dans le pays d’origine.

 18         Nous croyons comprendre a posteriori qu’il est

 19   peut-être possible de présenter une requête aux autorités

 20   fédérales pour demander la nomination d’un Juge qui

 21   authentifiera les signatures dans l’intérêt de ce Tribunal,

 22   de notre Tribunal.

 23         C’est une requête qui peut être traitée de façon

 24   routinière.  Nous croyons savoir qu’un tel Juge peut être

 25   nommé.  Il peut également être possible de nommer un Juge


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  1   musulman, ce qui permettrait de surmonter les difficultés

  2   auxquelles je viens de faire référence.

  3         Voilà la situation actuelle.  J’en parle pour que

  4   les Juges soient informés.  En effet, si nous adoptions

  5   cette manière de procéder, nous devrions rendre public un

  6   certain nombre de déclarations préalables de témoins à

  7   l’État auquel nous nous adressons.  Or, certaines de ces

  8   déclarations sont couvertes par des mesures de protection.

  9         Il me semble mais je n’en ai pas discuté en

 10   détail, en tout cas, pas avec la Défense, qu’une requête du

 11   Tribunal Pénal International pour demander une telle

 12   nomination serait peut-être plus efficace qu’une simple

 13   requête émanant de nous mais, enfin, je n’ai pas travaillé

 14   beaucoup sur cette question encore.  Nous pourrons, si vous

 15   le voulez, en reparler à la fin de la semaine.

 16         Par ailleurs, les Juges de cette Chambre se

 17   rappelleront les questions posées au sujet de documents

 18   saisis à Mostar.  J’ai dit aux membres de la Défense – je

 19   parle, notamment, des représentants de Kordic – qu’ils

 20   pourraient juger utile de voir ce qui a été révélé dans le

 21   cadre des débats liés à l’ordonnance contraignante de

 22   remise de documents par l’État de la Croatie. 

 23         Vous vous rappellerez que s’agissant de notre

 24   attitude, nous avons dès le départ estimé que tout le monde

 25   devait participer aux débats mais une décision contraire a


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  1   été prise.  Donc, les débats étaient publics mais ils ne

  2   sont pas allés dans le détail et nous pensons que si les

  3   Juges de cette Chambre pouvaient recevoir les extraits de

  4   ces documents relatifs à Mostar afin qu’ils soient

  5   communiqués à la Défense, cela pourrait être une source

  6   d’informations utile.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui, vous avez

  8   cette autorisation. 

  9         Me STEIN (interprétation) :  Cela ne vous surprendra pas

 10   mais j’ai moins d’une minute pour parler de la carte géographique

 11   de Monsieur Elford.  Nous savons que cela repose sur la

 12   déposition de Blaskic, y compris dans l’affaire Blaskic, ce qui

 13   pose des problèmes et il faudra les régler.

 14         S’agissant des affidavits, nous aimerions y

 15   réfléchir avant de répondre.

 16         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  D’autres arguments au

 17   sujet des affidavits car nous manquons de temps ?

 18         Me NICE (interprétation) :  Oui, effectivement.  Cela fait

 19   un an, d’ailleurs, que nous insistons auprès des autorités à ce

 20   sujet.

 21         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Très bien !  9

 22   h 30 demain matin.

 23         --- L’audience est levée à 16 h 25

 24         pour reprendre le mercredi

 25         2 février 2000 à 9 h 30