Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Jeudi 14 septembre 2000)

  2   (Audience publique)

  3   L'audience est ouverte à 9 heures 35.

  4   (Le témoin, M. Zvonimir Bekavac, est introduit dans le prétoire.)

  5   M. le Président (interprétation): Le témoin peut-il prêter serment?

  6   M. Bekavac (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  8   M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.

  9   Oui, Maître Kovacic?

 10   M. Kovacic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 11   Bonjour, Monsieur Bekavac. Merci d'être venu suite à notre demande.

 12   Tout d'abord, pour le compte rendu, veuillez décliner votre identité, nous

 13   dire la date et le lieu de votre naissance.

 14   M. Bekavac (interprétation): Je suis Zvonimir Bekavac, né le 2 janvier

 15   1943 à Vitez. Je suis marié, père de deux enfants. Je suis ingénieur de

 16   l'organisation du travail et, en ce moment, je suis retraité. Je réside à

 17   Vitez.

 18   Question:   Monsieur Bekavac, vous avez vécu à Vitez toute votre vie. Est-

 19   ce exact?

 20   Réponse:    Oui.

 21   Question:   Pendant combien de temps avez-vous travaillé dans l'entreprise

 22   qui fait partie du complexe que l'on appelle SPS?

 23   M. Bekavac (interprétation): J'y ai travaillé environ trente ans.

 24   M. le Président (interprétation): Tant que l'on est en train de parler de

 25   ça, Maître Kovacic. Parfois, on parle de cette société en disant Vitezit


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  1   et parfois en disant le SPS. Est-ce que nous pourrions comprendre mieux le

  2   lien entre les deux?

  3   M. Kovacic (interprétation): C'est justement ce que j'allais faire

  4   puisqu'enfin nous avons un témoin qui y a passé trente ans. Monsieur

  5   Bekavac, est-ce que vous pourriez relater aux Juges, en quelques phrases,

  6   ces détails concernant l'organisation de cette société, de ces plusieurs

  7   sociétés, de toutes ces sociétés qui se trouvent à cet endroit, et

  8   notamment ce qui s'est passé aussi au moment où l'entreprise, l'usine a

  9   cessé de fonctionner, en 1992.

 10   M. Bekavac (interprétation): Eh bien, suite à un décret du gouvernement de

 11   l'ex-RSFY, l'entreprise a été créée en 1950, qui s'appelait d'abord 202

 12   -il s'agissait d'un code- et, par la suite, l'entreprise a reçu le nom de

 13   Slobodan Princip Seljo.

 14   Question:   Excusez-moi, l'abréviation est SPS?

 15   Réponse:    Oui, SPS. Cette entreprise SPS produisait surtout de la poudre

 16   pour la JNA. Tout de suite après la création de l'entreprise SPS, la

 17   production des explosifs a été déclenchée aussi, de même que la production

 18   des engins explosifs, des fusées. Par la suite, dans les années 60-65,

 19   l'entreprise SPS s'est vue transformée, à savoir qu'il y a eu une fusion

 20   entre le SPS et le système commercial Unis de Sarajevo. Après cela,

 21   plusieurs transformations ont eu lieu, de telle sorte que, lorsque le SPS

 22   a commencé à faire partie de Unis Sarajevo -avec deux ou trois autres

 23   entreprises qui produisaient les produits pour les besoins de la JNA de

 24   l'époque-, à Vitez, il y a eu une transformation où deux autres

 25   entreprises ont été créées: le Vitezit pour la production des explosifs et


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  1   des fusées et Sintevit qui produisait surtout des produits chimiques et

  2   plastiques. Ces trois entreprises ont existé jusqu'à l'an 1993.

  3   Entre-temps, je souhaite ajouter que ces entreprises se sont séparées

  4   suite à un référendum par rapport à Unis Sarajevo -là, je parle des

  5   sociétés à Vitez- et les raisons étaient surtout économiques et

  6   commerciales, puisque beaucoup de personnes qui faisaient partie de Unis

  7   ont compris que les fonds affluaient vers Sarajevo et les employés ne le

  8   souhaitaient pas. En fait, il faut savoir que le SPS, suite à la signature

  9   des accords de Washington, ne fonctionnait plus compte tenu de la

 10   situation économique extrêmement difficile. A ce moment-là, c'est

 11   seulement la production des explosifs qui a continué son activité, avec la

 12   production des explosifs dans une moindre mesure. Donc cette partie de

 13   l'entreprise a continué à fonctionner et s'appelle Vitezit. Maintenant,

 14   tout le complexe à Vitez, tout ce qui reste du complexe à Vitez s'appelle

 15   Vitezit.

 16   Question:   Merci. Afin de mieux comprendre les choses, nous allons

 17   apporter quelques clarifications. Vous avez mentionné le fait que, suite à

 18   un référendum qui a été voté lors d'une assemblée des employés, vous vous

 19   êtes séparés par rapport à Unis. Quand ceci s'est-il produit?

 20   Réponse:    Je ne suis pas tout à fait sûr, mais ceci s'est produit

 21   certainement quatre ou cinq ans avant le début de ces conflits. Je le

 22   crois, je ne suis pas sûr de la date exacte.

 23   Question:   En tout cas, vers la fin des années 80?

 24   Réponse:    Oui, absolument.

 25   Question:   Est-ce que cette décision était conforme à la législation


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  1   yougoslave de l'époque?

  2   Réponse:    Absolument, puisqu'il s'agissait là de la volonté exprimée par

  3   les employés eux-mêmes.

  4   Question:   A ce moment-là, il faut dire peut-être également que la

  5   société était une propriété sociale, ce qu'on appelait la "propriété

  6   sociale" chez nous?

  7   Réponse:    Oui.

  8   Question:   Est-ce qu'on peut dire également que, selon la terminologie

  9   officieuse de la population à Vitez, la population appelle normalement

 10   tout ce complexe de l'usine Vitezit ou SPS?

 11   Réponse:    Pour la plupart, les gens appellent cela SPS, puisque c'est

 12   avec cette appellation-là que la société a été créée en 1950.

 13   Question:   Merci. Pour en terminer, peut-être pouvons-nous ajouter

 14   quelque chose: nous avons déjà présenté une carte ici et il n'est peut-

 15   être pas nécessaire que l'on entre dans des explications détaillées selon

 16   la carte. Mais est-ce que vous pouvez nous dire approximativement quelle

 17   est la surface couverte par le complexe de cette usine, par exemple en

 18   comparaison avec le centre ville? Est-ce qu'il s'agit d'une surface plus

 19   grande ou moins grande?

 20   Réponse:    Je pense que c'est une surface plus grande que le centre

 21   ville.

 22   Question:   En ce qui concerne ces unités se trouvant à cet endroit, au

 23   cours des vingt dernières années, il s'agissait du complexe commercial le

 24   plus important?

 25   Réponse:    Oui et il employait le plus grand nombre de personnes.


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  1   Question:   Combien d'employés y avait-il?

  2   Réponse:    A un certain moment, il y en a entre 2000 et 3000, mais ce

  3   nombre changeait.

  4   Question:   Merci. A quoi ressemblait la structure nationale, la structure

  5   ethnique des employés de l'usine?

  6   Réponse:    La structure ethnique des employés reflétait la structure

  7   ethnique des habitants de la région. Il est possible également de vérifier

  8   cela, mais j'affirme et j'assume toute la responsabilité en disant que

  9   c'était le cas.

 10   Question:   En 1992, avant que le conflit n'éclate, est-ce qu'il y a eu un

 11   déséquilibre dans cette structure ethnique?

 12   Réponse:    Je pense que, jusqu'au début du conflit 1993, les choses

 13   étaient plutôt normales, même s'il y avait quelques tensions, puisque des

 14   tensions se ressentaient déjà dans la municipalité de Vitez et ailleurs en

 15   Bosnie-Herzégovine, mais la production s'est poursuivie jusqu'au début du

 16   conflit.

 17   Question:   En ce qui concerne la direction de l'usine, est-ce que celle-

 18   ci a adopté une certaine politique ou attitude lors de la création du

 19   système multipartite? Lorsque les gens sont devenus de plus en plus

 20   politisés, est-ce que la politique influençait la direction?

 21   Réponse:    La direction de l'usine a décidé que la politique et les

 22   politiques ne devaient pas se mêler à la production et au travail de

 23   l'usine, notamment compte tenu du fait qu'ils produisaient de la

 24   nitroglycérine, l'un des explosifs les plus dangereux existant. C'est pour

 25   cela qu'ils ont pris cette décision qui était la bonne à mon avis de ne


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  1   pas permettre à la politique d'influencer le travail. C'est pour cela que

  2   nous avons pu éviter d'avoir des accidents au sein de l'usine, alors que

  3   ceux-ci s'étaient produits une dizaine ou une quinzaine d'années

  4   auparavant en provoquant beaucoup de victimes.

  5   Question:   Monsieur Bekavac, est-ce que vous avez jamais entendu dire que

  6   la direction de l'usine au cours de l'année 1992 a proposé aux employés de

  7   signer une sorte d'acte d'allégeance par rapport au HVO?

  8   Réponse:    Non, je n'ai jamais rien vu de tel et je suis sûr que ce genre

  9   de choses n'existait pas, au moins en ce qui concerne mon usine.

 10   Question:   Durant cette période 1992 et surtout le début de l'année 1993,

 11   l'usine perdait ses marchés, n'est-ce pas?

 12   Réponse:    Oui, l'usine perdait son marché. Par exemple, la Serbie était

 13   un grand marché qui a été perdu, mais il faut savoir également que c'était

 14   le cas des marchés en Bosnie-Herzégovine. Les marchés en Bosnie-

 15   Herzégovine étaient plutôt dispersés.

 16   Question:   Est-ce que vous pouvez nous dire qui étaient vos clients

 17   principaux en 1992 ou au cours de la deuxième moitié de l'année 1992?

 18   Réponse:    Là, nous sommes déjà en train de parler de la situation où la

 19   guerre sévissait en Bosnie-Herzégovine, donc les marchés étaient ceux où

 20   il était possible d'acheminer la marchandise. En ce qui concerne les

 21   explosifs et les poudres, je sais qu'ils étaient envoyés vers Visoko,

 22   Tuzla, Bugojno, Tacanj, Hrasnica, Sarajevo, etc. Il s'agissait là des

 23   régions contrôlées à l'époque par l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO,

 24   comme par exemple Vitez aussi; Vitez était l'une de ces régions.

 25   M. Kovacic (interprétation): Je souhaite que l'on remette au témoin un


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  1   document qui a été versé au dossier dans le cadre de l'affaire Kupreskic

  2   concernant les livraisons des produits à l'usine Vitezit.

  3   (L'huissier s'exécute.)

  4   Monsieur Bekavac, lorsque vous aurez reçu ce document, veuillez l'examiner

  5   quelque peu. Bien sûr, en ce qui concerne les dates et les quantités, vous

  6   ne serez pas à même de nous les confirmer, mais est-ce que vous pourriez

  7   nous dire si ceci est conforme aux informations dont vous disposiez à

  8   l'époque?

  9   Quelle est la cote?

 10   Mme Thomson (interprétation): Il s'agira du document D113/2.

 11   M. Kovacic (interprétation): En ce qui concerne la colonne à gauche, nous

 12   y voyons les localités ; tout le reste sont les spécificités, la quantité,

 13   le prix, etc. Compte tenu des localités, des endroits où les produits ont

 14   été délivrés -il s'agit des endroits que vous avez mentionnés tout à

 15   l'heure-, est-ce qu'il s'agit des endroits où les produits étaient

 16   délivrés, conformément à ce qui est écrit dans ce document à savoir au

 17   cours de la période à partir du mois de mai jusqu'à décembre?

 18   M. Bekavac (interprétation): Oui, c'est exact. Il s'agit des endroits où

 19   l'on livrait les produits à ce moment-là. Je pense que le document est

 20   tout à fait correct en ce qui concerne la question.

 21   Question:   D'après vos souvenirs, est-ce qu'à ces endroits-là, c'est

 22   l'armée de Bosnie-Herzégovine qui contrôlait la région et à d'autres

 23   endroits le HVO?

 24   Réponse:    En ce qui concerne Visoko, c'était l'armée de Bosnie-

 25   Herzégovine, Tomislavgrad et Vitez, le HVO et l'armée de Bosnie-


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  1   Herzégovine ; Novi Travnik aussi le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine,

  2   Travnik la même chose ; Tuzla, c'était surtout l'armée de la Bosnie-

  3   Herzégovine ; Bugojno, l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO ; Teslic,

  4   l'armée de Bosnie-Herzégovine alors que Teslic, je crois, est contrôlée

  5   par l'armée de la Republika Srpska.

  6   Question:   Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que vous livriez les

  7   produits à tous ceux qui étaient à même de les payer et d'organiser la

  8   reprise des produits?

  9   Réponse:    Oui, l'organisation de la réception des produits constituait

 10   un problème plus important encore, mais au fond ce que vous dites et vrai.

 11   Ce sont ces deux points qui étaient les plus importants.

 12   Question:   Très bien! Nous allons revenir à un autre point concernant la

 13   structure ethnique, mais je souhaite tout d'abord que l'on s'attarde à des

 14   questions ayant trait à la production encore un peu. A quel moment, s'il

 15   vous plaît, d'après vos souvenirs, est-ce que la quantité des produits

 16   s'est diminuée?

 17   Réponse:    Eh bien, la production a été diminuée dès que l'agression des

 18   Serbes contre la Bosnie-Herzégovine a été entamée, puisqu'à ce moment-là,

 19   les routes vers la Serbie ont déjà été fermées et c'est à ce moment-là que

 20   la production a chuté et ceci s'est poursuivi de plus en plus. Ce qui

 21   restait, c'était le marché de la Bosnie-Herzégovine. Bien sûr, en 1993, le

 22   marché de la Croatie existait encore, mais ça, c'est la situation qui

 23   régnait après l'agression et qui avait changé puisque auparavant la plus

 24   grande partie de la production allait en Serbie.

 25   Question:   Si j'ai bien compris, il y avait des livraisons organisées


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  1   même au cours de l'année 1993?

  2   Réponse:    Oui, même au cours de l'année 1993, il y a eu quelques

  3   livraisons, mais c'était assez difficile, surtout pour des raisons de

  4   transport. Mais parfois, de petites quantités étaient livrées par ci par

  5   là. Je ne connais pas tous les détails de cela en ce qui concerne

  6   exactement la quantité et les clients.

  7   Question:   Très bien. Vous nous avez décrit les produits de l'usine, mais

  8   est-ce que vous pouvez nous dire s'il y avait vraiment des produits finis,

  9   par exemple des obus ou d'autres engins explosifs qui pouvaient être

 10   utilisés tout de suite après leur sortie de l'usine?

 11   Réponse:    Non. Le SPS produisait surtout la poudre. Il faut savoir que

 12   la poudre constitue le carburant des armes ; il s'agit du cœur des armes,

 13   donc d'un élément très très important qui était produits de manière la

 14   plus importante en ex-Yougoslavie dans cette usine. En ce qui concerne les

 15   produits finis, ils n'étaient pas du tout produits dans cette usine. Il

 16   s'agissait des produits qui devaient par la suite être rassemblés avec

 17   d'autres pièces pour constituer un produit fini et cet assemblage avait

 18   lieu dans d'autres usines.

 19   Question:   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'en Bosnie-

 20   Herzégovine, dans le cadre de l'ex-Yougoslavie, il existait une chaîne

 21   technologique établie entre toute une série d'usines qui produisaient

 22   différentes pièces. Par exemple, dans les unes, les munitions étaient

 23   produites, dans d'autres des pièces, des armes. Ensuite, c'est seulement

 24   par le biais du travail de toutes ces usines que le produit fini était

 25   créé?


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  1   Réponse:    Oui.

  2   Question:   Est-ce que vous pourriez nous mentionner certaines usines dans

  3   cette chaîne technologique qui employaient par exemple votre produit?

  4   Réponse:    En ce qui concerne plus ou moins l'ensemble de l'industrie

  5   militaire en ex-Yougoslavie, en ce qui concerne les considérations

  6   stratégiques, il faut savoir que cette production militaire se trouvait

  7   surtout en Bosnie-Herzégovine pour des raisons dans lesquelles il n'est

  8   pas nécessaire de rentrer en ce moment. Mais afin de compléter un produit,

  9   il existait un nombre d'usines qui participaient à cet travail. Par

 10   exemple au sein du SPS, comme on l'a dit, la poudre était produite. Les

 11   pièces en métal telles que les douilles, les obus, etc. étaient produites

 12   ailleurs, les fusées à Bugojno, les capsules à Pobjeda Gorazde, les

 13   munitions des armes légères, des fusils dans une ville (que l'interprète

 14   n'a pas compris) et les instruments dans une autre usine. Donc, il

 15   s'agissait d'une chaîne où personne n'était complètement indépendant, tout

 16   le monde était lié afin d'arriver aux produits finis.

 17   Question:   Les problèmes sont apparus donc surtout en 1992 ; ils se sont

 18   accentués en 1992. Mais dites-nous: est-ce qu'à ce moment-là, conformément

 19   à un accord passé avec les clients, on a fait quelque chose afin de

 20   permettre au SPS de produire des produits finis?

 21   Réponse:    Oui, compte tenu du fait que, dans la municipalité de Vitez,

 22   aucun conflit n'avait éclaté encore, l'on utilisait des systèmes

 23   différents afin de permettre d'acheminer des pièces en métal et d'autres

 24   pièces jusqu'à Vitez pour y constituer les produits finis que l'on

 25   pourrait livrer par la suite au HVO et à l'armée de Bosnie-Herzégovine.


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  1   Question:   Merci. Encore un point concernant la structure ethnique à

  2   l'usine dont on a parlé tout à l'heure. Est-il exact de dire également en

  3   ce qui concerne la direction de l'entreprise SPS qu'elle reflétait encore

  4   une fois la structure ethnique qui existait dans la région de Vitez?

  5   Réponse:    Oui, c'était tout à fait exact parce que, à cette époque-là,

  6   pour parler politique, c'était la Ligue des Communistes qui était au

  7   pouvoir jusqu'à un certain moment (1992 – 1993). Ils ne permettaient,

  8   quant à eux les communistes évidemment, qu'il soit quelque conflit que ce

  9   soit entre Serbes, Musulmans, etc.

 10   Question:   Vous voulez parler justement du niveau de la direction?

 11   Réponse:    C'est bien du niveau de la direction dont je parle.

 12   Question:   Parmi vos collègues, parmi le personnel employé dans

 13   l'industrie, avez-vous eu des gens que vous fréquentiez personnellement?

 14   Réponse:    Oui et comment? C'était une affaire tout à fait normale.

 15   Question:   Est-ce que vous pouvez mentionner le nom de quelqu'un qui

 16   aurait été votre voisin et votre ami et votre collègue, avec qui vous avez

 17   travaillé à l'usine?

 18   Réponse:    Un des responsables qui est passé par toutes les fonctions,

 19   qui a occupé toutes les fonctions à la municipalité, et connu pas mal de

 20   responsabilités et fonctions à l'industrie, et à un moment donné le

 21   directeur général, Hasan -le nom de famille n'est pas interprété. C'était

 22   un de mes meilleurs amis et voisin.

 23   Question:   C'était votre ami donc?

 24   Réponse:    Oui, bien sûr, ami, et je me souviens qu'avant la guerre nous

 25   étions à réveillonner à Dubrovnik.


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  1   Question:   Voulez-vous répéter le nom de famille pour le greffe?

  2   Réponse:    (expurgé), économiste diplômé.

  3   Question:   Je vous remercie. Maintenant, passons à d'autres thèmes.

  4   Avez-vous eu une maison de repos?

  5   Réponse:    Oui, j'avais une petite maison de repos au mont de Zabrde à 7

  6   ou 8 kilomètres de Vitez.

  7   Question:   Etiez-vous isolé sur ce mont-là ou peut-être y avait-il une

  8   agglomération du genre de maisons de repos?

  9   Réponse:    Oui, c'était une petite agglomération de maisons de repos.

 10   Question:   Y a-t-il eu des problèmes à cette époque-là?

 11   Réponse:    Non.

 12   Question:   Vous vous êtes rendu souvent à cette maison, résidence

 13   secondaire, que vous avez eue?

 14   Réponse:    Oui, mais cela devenait de plus en plus rare.

 15   Question:   Y a-t-il eu des pillages, des cambriolages ou des dévastations

 16   quelconques, des dégâts qui auraient été portés à votre domaine?

 17   Réponse:    Oui, cela arrivait, étant donné qu'il y avait très peu de

 18   gens, les gens n'y résidaient pas. C'était réservé au repos, à la

 19   récréation. Quant à ma petite maison, elle a été cambriolée à deux

 20   reprises et on a pris pas mal de choses de ma maison.

 21   Question:   Avez-vous entrepris quoi que ce soit, vous, groupe de

 22   propriétaires qui étiez là, pour vous prévenir?

 23   Réponse:    Oui, les samedis et dimanches, on se rassemblait là-haut pour

 24   savoir ce qu'il fallait faire, parce que c'est moyennant de grands efforts

 25   qu'on a pu faire construire ces résidences secondaires. C'étaient de


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  1   toutes petites maisons, coûteuses quand même, alors nous nous sommes dit

  2   peut-être, une idée a été lancée par quelqu'un qu'on aurait pu se mettre

  3   là-haut pour monter la garde en quelque sorte. On a même engagé des

  4   chasseurs qui auraient pu le faire à notre place contre un modique

  5   salaire. Alors nous avons entendu dire que le HVO demandait à la

  6   municipalité de Vitez un terrain pour l'entraînement de ses membres. Vous

  7   savez, pour ce qui est de la population, c'étaient des gens qui étaient

  8   peu familiers avec les armes et avec les manœuvres, etc., alors que, déjà

  9   à cette époque-là, à Vlasice et au pied de Vlasic, du mont Vlasic, des

 10   combats ont eu lieu déjà. Mon fils s'y est rendu d'ailleurs à quelques

 11   reprises. Nous avons soutenu cette idée quant à nous et plus tard cette

 12   idée sera réalisée.

 13   Question:   Pourquoi avez-vous soutenu cette idée?

 14   Qu'est-ce qu'il y avait de si utile et de bon pour vous là-dedans?

 15   Réponse:    C'était tout simplement pour nous une bonne idée, parce que

 16   cela nous permettait de protéger nos biens, parce qu'une fois, je me

 17   souviens que, non loin de ma maison, les soldats ont surpris quelqu'un qui

 18   avait cambriolé une maison et qui se préparait à en faire autant pour une

 19   autre. C'était un jeune homme de Kruscica. La police était venue, on a

 20   dressé un procès-verbal et je crois qu'il avait une citation à comparaître

 21   devant le juge d'infraction. Nous étions musulmans, croates et serbes qui

 22   avions ces résidences secondaires et on pouvait également s'y réfugier,

 23   parce que nous étions davantage en sécurité. Je m'y étais rendu à

 24   plusieurs reprises. C'est comme cela que j'ai pu savoir qu'il ne

 25   s'agissait que d'un entraînement, une instruction donnée aux soldats.


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  1   Question:   Je vous remercie. Avez-vous connu une personne nommée Marko

  2   Lujic avant la guerre?

  3   Réponse:    Bien sûr que oui. J'étais son chef.

  4   Question:   Quelle était sa profession?

  5   Réponse:    D'abord c'était un travailleur sorti d'un collège pour

  6   ouvriers qualifiés en matière de chimie. Ensuite, il a terminé une autre

  7   école en agronomie et c'était un pyrotechnicien. Il était responsable

  8   justement de l'élaboration de tests en laboratoire.

  9   Question:   A-t-il eu quelque connaissance en matière d'artillerie,

 10   pouvait-il lui-même manipuler les pièces d'artillerie, etc.?

 11   Réponse:    Non.

 12   Question:   Au moment où la production en temps de guerre a été organisée,

 13   vous étiez à l'usine?

 14   Réponse:    Oui, c'est cela.

 15   Question:   Qui a été nommé chef de cette production à des fins de guerre?

 16   Réponse:    Marko Lujic a été nommé responsable au nom de l'office du

 17   Département de la Défense de la municipalité de Vitez.

 18   Question:   Vous vous souvenez que, plus tard au cours de l'été, c'est le

 19   Département de la Défense du HVO comme étant une instance supérieure, qui

 20   s'était chargé de la responsabilité et qui a pris pratiquement en ses

 21   mains cette production?

 22   Réponse:    Oui, je m'en souviens bien, et Marko Lujic a eu un supérieur.

 23   Question:   Mais il restait toujours à l'usine?

 24   M. Bekavac (interprétation): Oui, il restait toujours là pour être chargé

 25   de la production en temps de guerre, mais il a eu un supérieur.


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  1   M. le Président (interprétation): Monsieur Bekavac, voulez-vous expliquer

  2   quelles étaient très exactement les occupations de M. Marko Lujic. Vous

  3   avez dit qu'il était pyrotechnicien. C'est ce que nous avons reçu sur le

  4   transcript en version anglaise. Qui dit pyrotechnicien, c'est quelque

  5   chose qui a lieu à des feux d'artifice. Peut-être que vous n'avez pas

  6   pensé très exactement cela. Pouvez-vous nous dire très exactement quelles

  7   étaient les occupations de M. Marko Lujic ?

  8   Réponse:    Je peux bien, Monsieur le Président.

  9   Nous avons eu un polygone dans l'entreprise, dans l'enceinte de l'usine,

 10   où devaient être testés, examinés nos produits. La poudre est une matière

 11   très sensible et la poudre ne peut pas être livrée par l'usine, quitter

 12   l'enceinte de l'usine avant d'être examinée, testée sur le polygone

 13   intérieur de l'usine. Et pour que je sois encore plus clair: sur le

 14   polygone, on le fait aussi à banc d'essai, tout comme on fait toujours sur

 15   terre la simulation du futur vol d'un pilote chargé de piloter un avion.

 16   C'est ainsi, moyennant ces simulations, que nous avons pu tester nos

 17   produits. Etant donné qu'il s'agit de poudres dont le point de combustion

 18   est très élevé, ces occupations-là devaient se faire sous la

 19   responsabilité de pyrotechniciens. Vous avez tout à fait raison de dire

 20   que ça rappelle les feux d'artifice, car les effets en sont tout comme les

 21   feux d'artifice.

 22   Marko Lujic, quant à lui, a commencé par des travaux pour parler de

 23   l'élaboration, des travaux qui sont les siens, très simples, mais, chemin

 24   faisant, il était devenu contremaître, responsable de cette besogne-là.

 25   C'est lui qui pratiquement s'est chargé de la surveillance de l'ensemble


Page 24746

  1   des travaux et, jusqu'en 1993, voilà en quoi consistaient ses occupations.

  2   Il était donc chef d'un groupe de travailleurs, d'ouvriers qui ont

  3   travaillé avec lui.

  4   Question:   Monsieur Bekavac, avez-vous eu une connaissance quelconque

  5   quant aux activités de Lujic en dehors de l'usine, toujours dans cette

  6   période 1992-1993?

  7   Réponse:    Peu ou prou. Qu'est-ce que j'en sais? Il s'occupait de

  8   l'acquisition de certains moyens dont ils avaient besoin -peut-être des

  9   amorces- depuis Gorazde, etc. Mais c'est une affaire dont je préférerais

 10   ne pas trop me mêler.

 11   M. Kovacic (interprétation): Monsieur le Président, je suis prêt

 12   maintenant à passer à un autre thème. Mais, étant donné qu'il s'agit de

 13   questions tout à fait délicates quant à notre témoin et étant donné le

 14   lieu où il réside maintenant, je vous prie maintenant d'ordonner un huis

 15   clos partiel, étant donné que le témoin nous a dit qu'il ne souhaiterait

 16   pas faire mention de quelques noms ou de quelques données qui le

 17   concernent.

 18   M. le Président (interprétation): Très bien. Nous passons à huis clos.

 19   (Audience à huis clos)

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 13   Page 24747 – 24753 expurgées – audience à huis clos.

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 17   [expurgée]

 18   [expurgée]

 19   (Audience publique)

 20   Mme Thomson (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 21   M. Kovacic (interprétation): Donc nous sommes de nouveau en audience

 22   publique.

 23   Monsieur Bekavac, si vous voulez mentionner d'autres noms ou d'autres

 24   éléments dont vous ne voulez pas qu'ils soient communiqués, dites-le nous,

 25   mais je ne pense pas que ce sera le cas.


Page 24755

  1   Est-il exact de dire que votre mère avait en partie déménagé dans la

  2   maison de (expurgé). Pourquoi?

  3   M. Bekavac (interprétation): Eh bien, je le lui avais proposé; elle ne vit

  4   plus aujourd'hui, malheureusement, mais je dois vous dire que c'était une

  5   femme très courageuse. C'est elle qui a pris l'initiative; elle a dit: "Je

  6   vais aller dormir chez eux, dans leur maison, de telle sorte que, si

  7   quelqu'un vient, s'il se passe quoi que ce soit, je pourrai en fait

  8   protéger la maison". Elle est donc allée s'installer dans la maison de

  9   notre voisin où elle a passé un certain temps, notamment la nuit. Elle n'y

 10   restait pas la journée, mais c'est là qu'elle allait pour passer la nuit

 11   et je pense qu'elle a ainsi contribué à leur protection, en grande partie.

 12   Question:   Et qui voulait-elle protéger en faisant cela?

 13   Réponse:    Eh bien, surtout mes voisins, les protéger de ces groupes

 14   d'extrémistes et de tous ces éléments incontrôlés. Les habitants de Rijeka

 15   veillaient sur leurs maisons, ils pouvaient avoir de trente à soixante-dix

 16   ans -c'était à peu près la tranche d'âge- et pas un seul de leurs cheveux

 17   n'a été touché, mais je sais qu'il y avait, par contre, quelques groupes

 18   qui rôdaient. L'un de mes voisins avait un magasin d'alimentation. Dès que

 19   la guerre a commencé, quelques jours plus tard, quelques personnes ont

 20   fait irruption là, je ne sais pas si c'était l'unité spéciale. De toute

 21   façon, tout le monde affirmait qu'ils constituaient une unité; ces gens-là

 22   ont confisqué toutes les bières, les saucisses, toute la nourriture.

 23   Question:   Merci. Est-ce que (expurgé), à un moment donné, a

 24   quitté Rijeka? S'il l'a fait, à quel moment l'a-t-il fait?

 25   Réponse:    Oui, il l'a fait. C'est un épisode tout à fait émouvant. Je


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  1   dois dire qu'il y a eu beaucoup d'honnêteté entre nous et (expurgé). Vers

  2   le milieu du mois de juin, il est venu à ma porte d'entrée; il m'a dit:

  3   "Voisin, j'ai pris une décision: je vais quitter Rijeka et partir pour

  4   Zenica avec ma famille. - Pourquoi? - Je pars parce que je vois bien que

  5   vous aussi, vous êtes en danger; ils savent bien que vous nous protégez.

  6   Je pars à cause de toi. Merci de tout ce que tu as fait pour nous". Et

  7   moi, je lui ai donné cent marks allemands et je lui ai dit: "Au moins tu

  8   as un petit peu d'argent; comme ça, tu pourras peut-être te débrouiller".

  9   Question:   Merci. Une dernière question: il est donc rentré chez lui

 10   après la guerre?

 11   Réponse:    Oui.

 12   Question:   Et il y vit toujours aujourd'hui?

 13   Réponse:    Oui.

 14   Question:   Vous avez parlé de ce voisin qui avait un magasin

 15   d'alimentation; est-ce qu'il s'appelait Vlado Baskarat?

 16   Réponse:    Oui, mais ça, c'est le papa.

 17   Question:   Et le fils, c'était Anto Baskarat, n'est-ce pas?

 18   Réponse:    En fait, c'était lui le propriétaire officiel, mais je ne sais

 19   pas s'il vivait encore.

 20   Question:   Eh bien, précisons ceci à l'intention des Juges: est-ce qu'il

 21   était croate, est-ce qu'il était d'appartenance ethnique croate?

 22   Réponse:    Oui.

 23   Question:   Est-ce qu'il vous est arrivé de rencontrer Cerkez à Rijeka par

 24   la suite?

 25   Réponse:    Oui, je l'ai rencontré à quelques reprises à Rijeka; il venait


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  1   à l'administration des forêts. Après le conflit, on a établi des

  2   structures de commandement pour assurer la défense à cet endroit et je

  3   l'ai rencontré plusieurs fois, parce que ma maison, la cour est adjacente,

  4   jouxte les bâtiments de cette administration.

  5   Question:   Est-ce que M. Cerkez, à cette occasion, vous a demandé de

  6   faire quelque chose de particulier?

  7   M. Bekavac (interprétation): Eh bien, on était là à bavarder, on se

  8   connaissait bien puisqu'on avait tous les deux travaillé à l'usine. Nos

  9   rapports ont toujours été tout à fait corrects, puisque nous nous

 10   connaissions du lieu de travail. On parlait souvent de la situation et lui

 11   aussi était inquiété de ce qui se passait, surpris également parce que, du

 12   côté croate, tout était désorganisé. Nous craignions pour nos vies, pour

 13   celles de nos familles.

 14   Je me souviens parfaitement d'une fois où nous étions sur les marches du

 15   bâtiment de l'administration des forêts; il m'a dit: "Zvonko, pour éviter

 16   tout problème, toi qui es un homme sérieux, parle à certains habitants de

 17   Rijeka, parle à tous les Musulmans qui sont restés, essaie de les

 18   protéger, ne permets pas que quelques idiots, quelques imbéciles causent

 19   des problèmes et des difficultés". Ceci m'a donné une forme de

 20   responsabilité morale mais aussi un soutien moral.

 21   Par la suite, j'ai parlé avec ma mère, à d'autres de mes amis, afin

 22   d'assurer la protection des personnes qui étaient restées jusqu'au milieu

 23   du mois de juin; certains sont restés un peu plus longtemps, d'autres sont

 24   restés tout court, de sorte que personne dans mon environnement immédiat

 25   n'a été tué.


Page 24758

  1   M. le Président (interprétation): Monsieur Bekavac, vous parlez d'une

  2   conversation que vous avez eue avec M. Cerkez. Pourriez-vous nous la

  3   situer dans le temps?

  4   M. Bekavac (interprétation): Cette conversation avec M. Cerkez a eu lieu

  5   entre le 16 avril et le 1er mai, le 16 mai, 1er avril au cours de cette

  6   quinzaine la plus importante.

  7   M. Kovacic (interprétation): Est-ce que vous ne vous êtes pas trompé,

  8   Monsieur?

  9   M. Bekavac (interprétation): Est-ce que j'ai parlé du 16 mars, oui, oui,

 10   du 16 mars, effectivement.

 11   Question:   Alors, c'est le 16 mars?

 12   Réponse:    Oui, je crois que le congrès commençait le 16 avril; oui, je

 13   me suis trompé; c'est un lapsus. Donc, entre le 16 avril et le 1er mai,

 14   environ, à savoir l'époque où il n'y avait pas encore de contrôles bien

 15   établis pour toutes ces questions, il y avait une absence de contrôle.

 16   Ici, je parle de la région de Rijeka.

 17   M. Kovacic (interprétation): Alors, si je vous ai bien compris, vous ne

 18   vous souvenez pas de la date précise?

 19   Réponse:    Moi, je pense que c'était au cours des quinze ou vingt

 20   premiers jours. Je ne me souviens jamais des dates précises.

 21   M. Nice (interprétation): Merci. Une toute dernière question: vous avez

 22   dit connaître Cerkez, avoir travaillé dans la même usine, "qu'il habitait

 23   tout près de chez moi". Bien sûr, pourriez-vous nous préciser ceci: à vol

 24   d'oiseau, à quelle distance se trouve sa maison?

 25   Réponse:    200 mètres, 250 mètres.


Page 24759

  1   Question:   Est-ce que vous le rencontriez en-dehors du travail? Est-ce

  2   que vous vous voyiez, vous vous fréquentiez?

  3   Réponse:    Je le voyais souvent à l'usine et puis notre travail était tel

  4   que souvent nous coopérions. Nous passions beaucoup de temps ensemble:

  5   Mario aimait faire de la montagne, nous sommes allés à Zabrde où il y

  6   avait la possibilité de balades en montagne ou d'escalade. Nous avons

  7   toujours passé d'excellentes journées.

  8   Question:   Revenons sur un point, Monsieur Bekavac. Je ne sais pas si

  9   cela était suffisamment clair: vous avez eu cette conversation avec Mario

 10   Cerkez, vous nous l'avez relatée mais dites-nous quelle est la nature de

 11   cette conversation. A quel titre Mario s'est-il adressé à vous: est-ce

 12   qu'il vous parlait en tant que commandant ou est-ce que vous aviez

 13   simplement une conversation entre deux pairs?

 14   Réponse:    Je pense que c'est simplement une conversation d'homme à

 15   homme, entre deux personnes. Même s'il était commandant, moi, je n'ai pas

 16   fait la différence: ce qui comptait pour moi, c'était qu'il souhaitait

 17   assurer la protection des gens, c'est ce qui comptait le plus.

 18   M. Kovacic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur. Je n'ai plus de

 19   questions à vous poser.

 20   M. le Président (interprétation): Monsieur Sayers?

 21   M. Sayers (interprétation): Pas de question pour ce témoin, Monsieur le

 22   Président.

 23   M. le Président (interprétation): Monsieur Nice?

 24   (Contre-interrogatoire du témoin, M. Zvonimir Bekavac, par Me Nice)

 25   M. Nice (interprétation): Parlons peut-être de l'usine. Je vais demander à


Page 24760

  1   Mme la greffière de nous fournir deux pièces: la pièce Z 2160 et une autre

  2   pièce dont j'ai donné la cote.

  3   (La greffière s'exécute.)

  4   M. Nice (interprétation): Ce plan vous montre l'usine, n'est-ce pas, à

  5   gauche? Vous nous l'avez dit vous-même, Monsieur, le terrain couvert par

  6   cette usine est aussi grand que la surface de Vitez, voire plus grande.

  7   Dites-moi, est-ce qu'on utilise de l'acide dans le processus de

  8   fabrication de l'usine?

  9   M. Kovacic (interprétation): Je crois que le témoin a un problème de

 10   casque ou peut-être pour voir. Il faut peut-être lui indiquer qu'il doit

 11   examiner le plan qui se trouve sur le rétroprojecteur.

 12   M. Nice (interprétation): Je reviens à ma question: des acides, quels

 13   qu'ils soient, interviennent, n'est-ce pas, dans le processus de

 14   fabrication de l'usine?

 15   Réponse:    Oui.

 16   Question:   Par exemple, vers le milieu d'avril 1993, il y avait sans

 17   doute de grosses réserves d'acide dans cette usine?

 18   Réponse:    C'est vrai, mais je ne pense pas que c'était beaucoup de

 19   réserves. Je n'ai pas d'information, de chiffre exact mais il y avait des

 20   acides. Ce n'est pas dans ce domaine que je travaille, je ne m'y connais

 21   pas bien parce que ça, c'est la fabrication de nitroglycérine et cela ne

 22   me concernait pas directement.

 23   Question:   Mais lorsqu'on parle de réserves, on parle de tonnes,

 24   véritablement de tonnes d'acide qui étaient stockées?

 25   Réponse:    Sans doute.


Page 24761

  1   Question:   Il y avait aussi du carburant stocké à diverses fins sur le

  2   périmètre de l'usine, n'est-ce pas?

  3   Réponse:    Il y avait, bien sûr, un hangar, un entrepôt pour les

  4   véhicules de transport, pour les réserves de carburants. Vous savez, c'est

  5   une grosse usine, je ne peux pas vous dire exactement ce qu'il en était de

  6   ces réserves.

  7   Question:   Pourriez-vous nous aider de façon tout à fait générale,

  8   Monsieur, en nous indiquant où se trouvaient ces réservoirs d'acide et les

  9   réservoirs de carburants? Utilisez pour ce faire le pointeur, pour autant

 10   que vous puissiez le faire?

 11   (Le témoin indique à l'aide du pointeur.)

 12   Réponse:    C'est si petit ici, l'échelle est tellement réduite que je ne

 13   m'y retrouve pas facilement, même si je suis expert pour ce qui est de la

 14   configuration de l'usine. La partie des ateliers où il y avait l'acide se

 15   trouvait sur la partie supérieure du terrain, en direction du mont Zabrde,

 16   mais je ne vois pas exactement sur la carte où cela se trouve. Disons que

 17   c'est par ici.

 18   (Le témoin indique la partie gauche du terrain.)

 19   Vraiment l'échelle est très réduite, je le répète. A droite, nous sommes

 20   vers l'entrée; oui, en haut, à droite, parce que le carburant était séparé

 21   de l'acide. Les réservoirs d'acide et les réservoirs de combustibles

 22   étaient distants d'environ un kilomètre.

 23   Question:   Mais les réservoirs d'acide se trouvaient sans doute vers le

 24   bout, vers l'extrémité de la surface du terrain de l'usine, vers Donja

 25   Veceriska, n'est-ce pas?


Page 24762

  1   Réponse:    Non, non, sur la partie plus élevée, pas vers le bas. L'acide

  2   était sur la partie la plus élevée en direction Zabrde; c'est là que ça se

  3   trouvait, à côté des ateliers de fabrication de nitroglycérine.

  4   Question:   Fort bien. Nous avons vu, le témoin l'a indiqué. Une autre

  5   question à propos de l'usine. Vous voulez ajouter quelque chose, Monsieur?

  6   M. Bekavac (interprétation): Oui. Cette carte, je ne la vois pas parce que

  7   l'échelle est vraiment tellement réduite, elle est trop réduite. Je peux

  8   vous expliquer toutes sortes de choses et vous pourrez vérifier sur la

  9   carte, mais vraiment l'échelle est à ce point petite ici que je ne peux

 10   rien vous montrer.

 11   M. le Président (interprétation): Je ne sais pas: est-ce que c'est

 12   important, Monsieur Nice? Si ce n'est pas le cas, passons à autre chose.

 13   M. Nice (interprétation): Parlons encore de l'usine à notre témoin qui

 14   nous a dit qu'au moment où on arrive au 15 décembre 1992, il n'y avait

 15   pratiquement plus de travail à l'usine et qu'il y avait eu pratiquement

 16   arrêt de travail, parce qu'il y avait pénurie de matières premières et que

 17   90% des ouvriers avaient reçu comme instruction de rester à la maison.

 18   Etes-vous d'accord avec cet état de choses?

 19   M. Bekavac (interprétation): J'ai dit qu'en 1992, c'est-à-dire à partir du

 20   début de l'agression serbe, il y a eu une forte chute, une chute rapide de

 21   la production. Par la suite, en 1992, cela s'est poursuivi. On a produit

 22   un peu, mais dans une moindre mesure. En 1993, comme je l'ai déjà dit à

 23   l'avocat pour ce qui est des produits finis, il y a eu des retraits, une

 24   distribution des listes ou des produits en vertu de la liste qui m'a été

 25   montrée.


Page 24763

  1   Question:   Vous avez parlé du fait que des Musulmans perdaient leur

  2   emploi parce qu'il y avait une pression. En tout cas, vous vous êtes

  3   exprimé sur cette question. Est-ce qu'il ont perdu leur emploi parce

  4   qu'ils étaient musulmans? C'était une grosse entreprise, n'est-ce pas?

  5   Est-ce que vous pouviez voir ce qui se passait partout?

  6   Réponse:    Je ne peux vous parler que de ce que je connais. Vous savez,

  7   nous sommes une petite ville et tout se sait. Les nouvelles circulent vite

  8   dans une petite ville. Donc ce n'était pas du tout cette pratique qui

  9   était en cours.

 10   Question:   Mais aurait-il été possible que, dans des ateliers de

 11   production à Vitezit, là, on exigeait que les gens marquent leur

 12   allégeance au HVO et, faute de le faire, qu'ils étaient simplement

 13   licenciés ou mis sur une liste d'attente?

 14   Réponse:    C'est la première fois j'apprends cela, que j'entends cela;

 15   c'est vous qui me le dites. Je trouve cela absurde, je n'ai jamais entendu

 16   de telles choses. Si cela se passait, c'était vraiment incognito, à l'insu

 17   de tous; cela ne s'est pas su. Il est absurde de croire que quiconque

 18   aurait signé ce type d'acte d'allégeance.

 19   M. Nice (interprétation): Est-ce que nous pourrons passer rapidement à

 20   huis clos partiel?

 21   (Audience à huis clos partiel)

 22   [expurgée]

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  5   [expurgée]

  6   (Audience publique)

  7   Mme Thomson (interprétation): Nous sommes en audience publique.

  8   M. Nice (interprétation): Merci.

  9   Je vais m'assurer que j'ai bien compris ce que vous disiez à propos de

 10   l'usine. Les armes en tant que produit fini étaient produites à Vitez,

 11   même si tout ne se passait pas au sein d'une seule et même usine. C'était

 12   réparti sur plusieurs ateliers de production. Est-ce exact?

 13   M. Bekavac (interprétation): Non. Le produit fini -et je parle ici de

 14   façon générale, je ne parle pas particulièrement de fin 1992 - 1993-, ce

 15   que nous produisions nous allait vers l'atelier de finition et la finition

 16   dans 90 % des cas se faisait à Vogosce, "Pretis", à Valjevo en Serbie.

 17   Question:   Est-ce qu'on peut nous montrer la pièce 1220.2? Nous allons

 18   examiner la page de garde, puis nous allons examiner le point 11, peut-

 19   être à la page 11. J'essaie de trouver le passage correspondant en BCS.

 20   Est-ce que vous pourriez me donner la version en BCS afin que je trouve le

 21   passage qui m'intéresse?

 22   (L'huissier s'exécute.)

 23   M. Nice (interprétation): Apparemment, c'est plus difficile à trouver, ce

 24   passage, que je ne m'y attendais.

 25   Monsieur le témoin, examinez en particulier ces deux pages que va vous


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  1   remettre l'huissier. Il s'agit d'un document qui a été préparé par le

  2   bureau de la Défense à Vitez en septembre 1993, document que l'on décrit

  3   comme étant une évaluation des conditions militaires, politiques,

  4   économiques et autres en temps de guerre. Le document est long mais, si

  5   l'on place la page 11 de la version anglaise sur le rétroprojecteur, vous,

  6   Monsieur Bekavac, vous verrez sur la page qui vous a été remise dans

  7   l'original une liste qui commence par "600". Est-ce que vous voyez "600

  8   projectiles pour des lance-roquettes multiples"? C'est en bas de la page

  9   pour vous.

 10   M. Bekavac (interprétation): J'essaie de voir la date.

 11   Question:   Oui, oui. Ca va. Il faudra peut-être que vous alliez à la page

 12   précédente, parce que, dans votre version, cela se répartit sur deux

 13   pages. Prenez la page précédente, remontez de trois paragraphes et vous

 14   verrez qu'il y a là un paragraphe court qui se lit comme suit en anglais:

 15   "La production en temps de guerre avait été organisée avant que ne

 16   commence le conflit avec les forces musulmanes. Elle avait été organisée

 17   illégalement, vu la présence d'effectifs musulmans dans la production à

 18   finalité spéciale". Fin de citation.

 19   Pourriez-vous nous aider à comprendre davantage ce paragraphe, qui figure

 20   dans ce rapport préparé en septembre 1993 par le bureau de la Défense de

 21   Vitez? Pourquoi est-ce qu'on avait organisé la production en temps de

 22   guerre de façon illégale, vu la présence de membres du personnel d'origine

 23   musulmane?

 24   Réponse:    Je ne pense pas que ceci soit exact, ce n'est pas exact,

 25   surtout quand je vois qui est l'auteur de ce document. La véritable


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  1   production en temps de guerre a commencé dès les premiers jours. C'est ce

  2   qu'on dit ici. En tout cas, moi, quand je me suis rendu à cette usine de

  3   production en temps de guerre pour travailler aux poudres, on m'a demandé

  4   d'organiser la production des poudres et de trouver du personnel qui soit

  5   à même d'assurer cette production, donc je peux vous dire que ce qui est

  6   dans ce texte n'est pas correct. Je ne sais pas sur quoi ce texte porte,

  7   mais il n'est pas exact.

  8   Question:   Paragraphe suivant. Ici, on parle de production de temps de

  9   guerre organisée dès les premiers jours du conflit avec les forces armées

 10   et on dit que c'était organisé par le bureau de la Défense de la

 11   municipalité de Vitez, ceci conformément avec les autorités de Vitez qui

 12   avaient désigné des directeurs ou des représentants des firmes pour le

 13   temps de guerre.

 14   Réponse:    Eh bien la production en temps de guerre a été organisée vers

 15   le début du mois de mai et je parle de ce qui me concerne personnellement;

 16   pour la production de guerre, le directeur était bien sûr à la tête et il

 17   y en avait d'autres qui s'occupaient des explosifs alors que, moi, j'étais

 18   responsable de la production des poudres. En d'autres termes, ceci ne

 19   s'est pas passé sitôt après le début du conflit. Vous aurez peut-être un

 20   document qui précise à quel moment j'ai commencé mes fonctions de

 21   production de guerre parce que, si je n'étais pas là, il n'était pas

 22   possible la production.

 23   Question:   Une question qui porte sur ce document et l'une qui ne le

 24   concerne pas. J'aurais voulu terminer ceci avant la pause. Sautons un

 25   paragraphe et revenons au paragraphe qui commence par des chiffres.


Page 24767

  1   Vous voyez qu'on dit qu'avec la production des matières premières et des

  2   fournitures techniques bien organisée, les choses suivantes ont été

  3   produites en deux mois. On parle de 600 lance-roquettes, de 5000 obus; il

  4   y a d'autres chiffres qui figurent, dont 3000 kilos de poudre produite à

  5   l'intention de la République de Croatie, 1000 kilos de poudre pour des

  6   besoins locaux.

  7   Cette description de l'effort de guerre est-elle exacte?

  8   Réponse:    Vous utilisez le terme "conditions de guerre". Vous savez que

  9   la guerre faisait rage partout, partout: l'armée de Bosnie-Herzégovine

 10   faisait ses préparatifs, les autres aussi. Les conditions étaient

 11   difficiles et les conditions de guerre régnaient partout, sur tout le

 12   territoire.

 13   Maintenant vous mentionnez ces chiffres. On ne dit pas que ces quantités

 14   ont été produites, on dit qu'il y a eu production, c'est-à-dire que, par

 15   exemple, les éléments de production métallique sont venus vers les

 16   montagnes de Gorazde, ils ont été chargés à dos de cheval parce que Vitez,

 17   à l'époque, était encore en terrain libre. Ici, on dit ici simplement

 18   "terminés", c'est-à-dire que les éléments étaient arrivés, par toutes

 19   sortes de voies détournées, d'autres usines à la nôtre et étaient arrivés.

 20   Mais ce n'était pas une véritable production.

 21   Question:   Est-il exact de dire que votre volume de production était tel

 22   que vous avez, par exemple, pu produire 3000 kilos de poudre pour la

 23   République de Croatie? Vous étiez le responsable, Monsieur: pourriez-vous

 24   nous aider là-dessus?

 25   M. Bekavac (interprétation): Cette production s'est faite; quant à savoir


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  1   si elle a été acheminée vers la Croatie en ce moment-là, impossible de le

  2   dire. Je ne sais pas si cette production est allée. Cela, c'étaient les

  3   services commerciaux qui décidaient. Mais si l'on parle de 3000 kilos,

  4   est-ce que vous vous rendez compte qu'on peut produire cette quantité à

  5   Vitez en un seul jour; nous avions une capacité énorme. Il était possible

  6   de faire 1500 tonnes par an.

  7   M. le Président (interprétation): Nous allons faire une pause; ne parlez à

  8   personne pendant la pause. Nous allons reprendre à 11 heures 35.

  9   M. Bekavac (interprétation): Fort bien. Merci, Monsieur le Président.

 10   (La séance, suspendue à 11 heures 5, est reprise à 11 heures 35.)

 11   M. le Président (interprétation): Oui. Monsieur Nice ?

 12   M. Nice (interprétation): Le document que nous venons d'examiner, est-ce

 13   qu'il est clair que le bureau de la Défense municipale prenait des

 14   décisions en ce qui concerne ce qui devait se passer avec les produits de

 15   vos usines ?

 16   M. Bekavac (interprétation): Je ne le sais pas, j'étais employé au sein de

 17   la production et je recevais mes ordres directement de la direction de

 18   l'usine, mais je n'étais pas un homme politique, donc je ne le sais pas.

 19   Question:   Savez-vous suffisamment de choses sur le processus de la

 20   distribution et de la livraison des matériels afin de pouvoir nous dire,

 21   en ce qui concerne Vitez qui est une petite ville, si les matériels

 22   émanant de l'usine finissaient entre les mains de la Brigade de Vitez?

 23   Réponse:    Comme je l'ai dit, j'étais actif au sein de la production,

 24   mais quant à savoir à qui étaient destinés les produits finis, cela ne me

 25   concernait pas. Je voyais certaines personnes avec des insignes, puis je


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  1   voyais parfois des véhicules avec des plaques d'immatriculation de Tuzla,

  2   Bugojno, Konjic, Sarajevo, etc. J'ai déjà mentionné ces villes.

  3   Question:   Très bien. En ce qui concerne le dernier point sur ce sujet,

  4   je souhaite vous poser une question concernant la poudre. Il s'agit là

  5   d'un matériau extrêmement dangereux. Je suppose que ce produit était gardé

  6   dans des conditions de sécurité extrême.

  7   Réponse:    Ceci était entreposé suite au règlement relatif à ce genre de

  8   produits. Il y avait toujours des équipes de personnes chargées de

  9   sécurité. La pièce était toujours fermée à clef.

 10   Question:   Donc cela veut dire que, si quelqu'un souhaitait obtenir 250

 11   kilos -par exemple- de poudre à canon, cette personne devait avoir une

 12   autorisation à le faire, afin de le faire de manière régulière ?

 13   Réponse:    Bien entendu, c'est sous-entendu.

 14   Question:   Certainement l'une des personnes qui étaient, l'une des

 15   organisations qui étaient votre client était également le Département de

 16   la Défense municipale ?

 17   Réponse:    Tout d'abord, moi je ne livrais les produits à personne. Je

 18   travaillais au service de la production, alors que le service commercial

 19   s'occupait des livraisons. Chez nous, c'était clairement défini qui

 20   faisait quoi. Moi, je travaillais dans un autre secteur. Si en privé

 21   j'apprenais quelque chose, c'était autre chose, mais c'était une affaire

 22   privée dans ce cas-là.

 23   Question:   Avez-vous appris d'où émanait la poudre à canon employée par

 24   le camion piégé à Vitez?

 25   Réponse:    Je ne sais pas. Je suppose que c'étaient des explosifs et non


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  1   pas de la poudre à canon.

  2   Question:   Vous avez entendu parler de ce camion piégé. Vous savez que

  3   c'était un acte de terrorisme. Je suppose que vous savez que, dans votre

  4   ville, des explosifs étaient disponibles, des explosifs qui pouvaient être

  5   employés dans le cadre d'un tel acte dans votre ville ?

  6   Réponse:    Bien sûr, des explosifs ont été employés, mais quant à la

  7   question de savoir comment les explosifs ont été obtenus, il faut savoir

  8   que ceci s'est produit en temps de guerre. Il y a eu des extrémistes qui

  9   se déplaçaient facilement sans aucun contrôle. Les gens perdaient la vie

 10   facilement, donc il ne faut pas s'étonner non plus si quelqu'un avait

 11   réussi à s'emparer de ce genre de matériel, puisqu'à ce moment-là la

 12   priorité de tout le monde était de sauvegarder sa propre vie.

 13   M. Nice (interprétation): Je ne souhaite pas lancer un débat là-dessus. Je

 14   souhaite que l'on montre la pièce 544.2, il s'agit d'un nouveau document.

 15   (L'huissier s'exécute.)

 16   Juste quelques questions concernant les armes et quelques autres sujets.

 17   M. Kovacic (interprétation): Un point technique, s'il vous plaît, Monsieur

 18   le Président, Messieurs les Juges. Je ne suis pas sûr que nous ayons reçu

 19   précédemment le document dont il a été question jusqu'à maintenant, 1220,

 20   le rapport sur la production de guerre.

 21   M. Nice (interprétation): Je sais que ce document avait été présenté

 22   précédemment dans le cadre de la déposition d'un autre témoin. Je vous

 23   dirai la cote tout à l'heure.

 24   M. Kovacic (interprétation): Si tel a été le cas, la cote a été différente

 25   à l'époque.


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  1   M. Nice (interprétation): Je vais en parler tout à l'heure.

  2   En ce qui concerne ce document, Monsieur le témoin, il s'agit d'un

  3   document émanant du même auteur, Marjan Skolpjak. La date est celle du 15

  4   mars 1993. Nous pouvons voir que c'est envoyé au commandement de la zone

  5   opérationnelle de la Bosnie centrale et au SPS. Il s'agit d'un rapport sur

  6   la mise en œuvre, la livraison et la distribution de produits stratégiques

  7   d'importance spéciale pour la défense.

  8   Dites-nous, s'il vous plaît, en ce qui concerne cette phrase où il est dit

  9   qu'il s'agit de produits stratégiques d'importance spéciale pour la

 10   défense, est-ce une manière habituelle de décrire les armes?

 11   M. Bekavac (interprétation): Vous savez, la nourriture est quelque chose

 12   de normal, d'habituel, même si parfois c'est quelque chose de plus

 13   important. En ce qui concerne nos produits à nous, on disait toujours

 14   qu'il s'agissait de produits stratégiques, tout comme parfois en parlant

 15   d'un Etat on dit qu'il s'agit d'une position stratégique, etc.

 16   Question:   Je comprends cela. Je vais vous interrompre, mais nous pouvons

 17   voir ici qu'il est écrit, conformément à la conclusion de la direction du

 18   HVO Vitez : "Nous vous demandons de manière urgente de nous envoyer un

 19   rapport par écrit sur la mise en œuvre de toute livraison et distribution

 20   des produits stratégiques d'importance spéciale pour la défense entre le 5

 21   mars 1993 et le 15 mars 1993. Nous vous demandons également de nous dire

 22   qui vous a donné l'autorisation, pour quels produits, quel client et

 23   quelle quantité en ce qui concerne la période susmentionnée."

 24   N'est-il pas vrai tout simplement que cela prouve que les produits finis

 25   d'importance stratégique étaient fournis par l'usine SPS en mars 1993?


Page 24772

  1   Réponse:    D'après les documents que nous avons pu voir, il est clair que

  2   certains produits au début de l'année 1993 étaient livrés en moindre

  3   quantité à certains clients. Ils étaient donc livrés.

  4   Je ne comprends pas suffisamment bien votre question. Je ne sais pas ce

  5   que vous souhaitiez obtenir à travers ces questions-là.

  6   Question:   Peut-être que vous pouvez nous donner une meilleure

  7   interprétation de ces documents par rapport à nous. C'est pour cela que je

  8   m'adresse à vous pour m'aider. Vous nous avez dit tout à l'heure que vous

  9   étiez seulement à même de fournir des pièces jointes, des parties des

 10   armes qui devaient être rassemblées par la suite.

 11   Je suggère que ce document montre tout à fait clairement que les armes

 12   complètement terminées étaient distribuées et livrées au HVO en mars 1993,

 13   avant le début du conflit et de manière importante, n'est-ce pas?

 14   Réponse:    Ce n'est pas exact. Nous devons dire que l'usine à Vitez est

 15   une usine chimique; nous n'avons pas les équipements et les machines qui

 16   existent à Novi Travnik "Bratstvo" par exemple ou "Pretis" Vogosce, etc.,

 17   qui pouvaient rassembler et distribuer ce genre de produits et j'ai déjà

 18   expliqué cela. Il fallait rassembler ces pièces-là. Nous faisions parfois

 19   de l'assemblage, même si nous n'avions pas le personnel professionnel.

 20   C'était fait par des amateurs.

 21   Question:   Et c'était rassemblé sur le même site, n'est-ce pas, au SPS?

 22   Réponse:    Oui. D'ailleurs, cela se voit d'après le document qui a été

 23   distribué par la défense précédemment.

 24   Question:   Merci. Je souhaite que l'on examine maintenant rapidement la

 25   pièce à conviction 1166.2. Il s'agit d'un document relatif à une date plus


Page 24773

  1   avancée dans le temps. Il s'agit du 16 août de la même année. Encore une

  2   fois, il s'agit d'un document de la direction du HVO de Travnik; il s'agit

  3   d'une requête concernant le matériel et les équipements techniques. Il y

  4   est décrit quels sont les besoins en ce qui concerne les munitions, les

  5   balles, etc.

  6   Est-ce qu'il s'agit là du type de matériel qui était rassemblé, même si

  7   c'était fait de manière tout à fait non professionnelle, dans votre usine?

  8   Réponse:    Ce n'est pas ce que ce document signifie. Il s'agit ici des

  9   requêtes que je ne peux pas commenter. Il s'agissait des requêtes émanant

 10   d'un niveau supérieur par rapport au mien. Mais, ici, on voit qu'il est

 11   question des balles, etc. Or les balles sont des produits finis qui

 12   n'étaient pas rassemblés chez nous.

 13   Question:   Vous êtes ici en tant que témoin expert en la matière. Donc

 14   veuillez m'expliquer la chose suivante: dans quelle partie de la région de

 15   Vitez pouvait-on terminer la production des balles, des fusils, des

 16   mitraillettes, etc.? Où est-ce qu'on pouvait les produire ou les

 17   compléter?

 18   Réponse:    Je ne sais pas tous les détails concernant l'usine mais, de

 19   toute façon, ceux-ci n'étaient pas complétés dans l'usine puisqu'il

 20   n'était pas du tout nécessaire de compléter ce genre de produits. Un fusil

 21   arrive en tant que fusil; nous ne devons pas le compléter de manière

 22   supplémentaire et la même chose vaut pour une balle.

 23   Question:   Très bien. Un autre point en ce qui concerne ce document. A la

 24   fin, il est dit: "Après l'avoir obtenu, veuillez placer le matériel à la

 25   disposition du département logistique du commandement de la zone


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  1   opérationnelle de Bosnie centrale et certainement pas aux brigades

  2   individuelles ou aux municipalités". C'est ce qui est dit.

  3   Vous, par contre, vous dites que vous avez produit la poudre à canon, mais

  4   est-ce que la même approche avait été adoptée en ce qui concerne la

  5   distribution de vos matériels à vous?

  6   Réponse:    Il faut faire une distinction entre ce qui se passait avant et

  7   après le conflit. Avant le conflit, c'était distribué plus librement un

  8   peu partout en Bosnie-Herzégovine. Après le conflit, nous avons participé

  9   à l'effort de guerre et notre priorité était notre propre défense.

 10   Question:   Ce n'est pas la réponse à ma question. Ma question est la

 11   suivante: cette approche adoptée par le département logistique de la zone

 12   opérationnelle de Bosnie centrale, d'après vos souvenirs, est-ce que

 13   c'était conforme à l'approche adoptée en ce qui concerne la distribution

 14   de votre poudre à canon?

 15   Réponse:    Je produisais cela mais, quant à la question de savoir où ce

 16   produit était livré et distribué et de quelle manière, suite au début du

 17   conflit, je ne connais pas ces détails-là. Mais bien sûr que nous ne

 18   souhaitions pas le livrer aux ennemis, sinon ceci se retournerait contre

 19   nous en forme de boomerang.

 20   Question:   Est-ce que vous savez si les documents, portant sur

 21   l'obtention de ce genre de documents, étaient envoyés au bureau de M.

 22   Kordic comme par exemple c'était le cas de ce document?

 23   Réponse:    Je ne sais pas: il s'agit de politique de haut niveau ici. En

 24   ce qui concerne les gens normaux, ils considèrent partout dans le monde,

 25   je suppose, que les hommes politiques sont informés des choses. Je suppose


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  1   que quelqu'un a envoyé cela à M. Kordic. Peut-être M. Kordic l'a demandé,

  2   mais je ne peux que faire des suppositions.

  3   M. Nice (interprétation): Veuillez examiner maintenant rapidement la pièce

  4   à conviction 1419.1. Lorsque nous examinerons ce document, il faudra

  5   également se rappeler des formulaires et des documents qui existent dans

  6   le document D113/2.

  7   M. Naumovski (interprétation): Je n'ai pas d'objection, mais simplement

  8   une correction par rapport au compte rendu d'audience. A la page 41, ligne

  9   5, le témoin a dit: "Peut-être M. Kordic ne l'a pas demandé." Il a dit:

 10   "…ne l'a pas demandé." Peut-être les interprètes n'ont pas bien entendu.

 11   Le témoin peut-il confirmer cela?

 12   M. Bekavac (interprétation): Oui, c'est ce que je suppose.

 13   M. Naumovski (interprétation): Nous pouvons corriger cela dans le compte

 14   rendu.

 15   M. le Président (interprétation): Excusez-moi, mais je n'ai pas compris le

 16   sens: "Partout les hommes politiques prennent connaissance des documents,

 17   peut-être quelqu'un lui a envoyé cela. Peut-être M. Kordic l'a demandé,

 18   mais je ne peux faire que des suppositions."

 19   Monsieur Bekavac, est-ce que c'est ce que vous avez dit?

 20   M. Bekavac (interprétation): Non.

 21   M. le Président (interprétation): Qu'avez-vous dit?

 22   M. Bekavac (interprétation): La première partie, je l'ai dite, mais j'ai

 23   dit: "Je suppose que certainement il ne l'a pas demandé" puisque, chez

 24   nous, en ce qui concerne les hommes politiques, déjà dans l'ancien

 25   système, on envoyait des informations, des documents aux hommes politiques


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  1   pour qu'ils soient au courant des choses. C'est ma supposition.

  2   M. le Président (interprétation): Quelle est la signification? Cette

  3   déclaration n'a aucun sens.

  4   Vous dites: "Partout les hommes politiques sont au courant de genre de

  5   document et quelqu'un l'a envoyé, peut-être M. Kordic l'a envoyé. Je ne

  6   peux que supposer cela." Il s'agit là d'une réponse qui a un sens mais

  7   dire que "peut-être M. Kordic ne l'a pas demandé" n'a aucun sens. Est-ce

  8   que vous êtes sûr que c'est ce que vous avez dit à l'origine?

  9   M. Bekavac (interprétation): Je l'ai dit tout simplement parce que,

 10   personnellement, je ne connais pas du tout M. Kordic, mais je le connais

 11   en tant qu'homme politique. Il était un homme politique en Bosnie

 12   centrale. Je sais que souvent on le voyait à la télévision, etc. C'est ce

 13   que j'ai dit. J'ai dit également que je supposais, puisque M. le Procureur

 14   m'a posé la question de savoir si je savais que M. Kordic l'avait reçu,

 15   moi, j'ai dit: "Je ne sais pas. Peut-être qu'il l'a reçu que je suppose

 16   qu'il ne l'a pas demandé. C'est ce que je suppose."

 17   (Les Juges se concertent sur le siège.)

 18   M. le Président (interprétation): Très bien .

 19   M. Nice (interprétation): Pièce 1419.1: il s'agit d'un document en date du

 20   24 avril 1994, émanant du Département de la Défense de Travnik, qui est

 21   envoyé à Puljic, qui concerne la production de guerre au cours de la

 22   période entre août 1993 et mai 1994. Si nous examinons, par exemple, ce

 23   qui figure au numéro 30 et par la suite, il est dit qu'il y a eu telle ou

 24   telle quantité de poudre à canon, etc. Est-ce que cela concerne donc la

 25   période au cours de laquelle vous étiez actif au sein de la production?


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  1   M. Bekavac (interprétation): Ici, il est question de poudre à canon, mais

  2   je ne sais pas si j'ai participé à la production de ces quantités

  3   mentionnées.

  4   Question:   Mais avez-vous l'impression que ces données sont correctes?

  5   Réponse:    Je ne peux pas l'affirmer avec exactitude; tout ceci s'est

  6   passé il y a huit ans. Je ne peux pas être sûr.

  7   Question:   Est-ce que vous deviez fournir les rapports sur la production

  8   hebdomadaire, qui étaient envoyés à la direction de la défense? C'est

  9   d'ailleurs ce qui est écrit au fond, en bas de page. Est-ce que vous

 10   envoyiez les rapports à la direction chargée de la Défense une fois par

 11   semaine?

 12   M. Bekavac (interprétation): Il s'agit ici de la production de guerre,

 13   suite au début du conflit. Moi-même, j'envoyais les rapports sur la

 14   production à mon supérieur direct, c'est-à-dire le directeur. C'est mon

 15   supérieur qui contactait la direction en ce qui concerne la production de

 16   guerre.

 17   Puis-je ajouter quelque chose, Monsieur le Président?

 18   M. le Président (interprétation): Oui.

 19   M. Bekavac (interprétation): En ce qui concerne ces quantités-là, il faut

 20   savoir que notre production souvent ne dépendait pas directement des

 21   besoins réels, mais souvent nous produisions certaines quantités pour les

 22   entreposer par la suite. Ici, nous ne pouvons donc pas dire qu'il s'agit

 23   des quantités relatives aux produits finis car, parfois, avec certaines

 24   sortes de poudre, il est possible de produire des centaines et des

 25   centaines de balles. Il faut savoir que, parfois, une quantité tout à fait


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  1   insignifiante de poudre est suffisante pour une balle. Parfois, il s'agit

  2   de 5, 10 ou 20 grammes.

  3   M. Nice (interprétation): Merci. Je souhaite que nous examinions tout à

  4   fait brièvement maintenant la pièce à conviction 1246.1. Il s'agit d'un

  5   document qui a déjà été versé au dossier en date du 13 octobre, émanant du

  6   commandement de Vitez, signé par Mario Cerkez. Dans le premier paragraphe,

  7   il est dit: "Sur la base du travail d'aujourd'hui dans l'entreprise SPS,

  8   il est clair que le niveau de production chute parfois et est stable

  9   parfois".

 10   Ensuite, les difficultés sont décrites et nous pouvons voir dans les

 11   paragraphes 5: "Nous vous avertissons du fait que vous devez terminer les

 12   conflits personnels et les désaccords, parce que cela n'aboutira à rien.

 13   Vous devez en traiter plus tard et permettre à tous les matériels et à

 14   tous les potentiels humains d'être utilisés dans la production du SPS".

 15   Est-ce que vous vous souvenez que M. Cerkez a participé à cette activité

 16   visant à se mêler directement dans les affaires du SPS?

 17   Réponse:    Il s'agit ici simplement d'un avertissement. A mon avis, il ne

 18   s'agit pas d'une intervention directe, il ne s'agit pas du fait qu'il se

 19   mêlait directement de nos affaires. Puisque selon la date, ici, nous

 20   pouvons voir que cela concerne seulement la Brigade de Vitez. En ce qui

 21   concerne le point 5, j'ai l'impression qu'il essayait de calmer la

 22   situation. En ce qui concerne la production qui chutait, il faut savoir

 23   qu'il était prévu que d'autres personnes reçoivent certaines quantités des

 24   produits, y compris l'armée de Bosnie-Herzégovine, puisque je vois qu'il

 25   s'agit là du mois de janvier 1994.


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  1   Question:   Monsieur Bekavac, je souhaitais laisser tomber ce sujet, mais

  2   votre réponse me pousse à vous poser une autre question. Même si j'ai

  3   identifié que ce document émanait du commandement de Vitez, je n'ai rien

  4   dit par rapport à la Brigade de Vitez: je vous ai simplement posé la

  5   question concernant M. Cerkez alors que, dans votre réponse, vous avez

  6   mentionné vous-même la Brigade de Vitez. Pourquoi l'avez-vous fait?

  7   Réponse:    Je l'ai dit parce que j'ai vu la signature de Mario Cerkez et

  8   c'est parce que, d'après votre question, il était impliqué qu'il le

  9   demandait uniquement pour les besoins de la Brigade de Vitez. Or, ce n'est

 10   pas vrai: il s'agit d'un avertissement où il nous instruisait à produire

 11   et à travailler, compte tenu des besoins de toute la Bosnie-Herzégovine et

 12   des besoins à la fois de l'armée de Bosnie-Herzégovine et du HVO. C'est

 13   pour cela que j'ai mentionné.

 14   Question:   Alors ma question serait la suivante: M. Cerkez s'est-il mêlé

 15   des affaires de votre usine à ce point-là? C'est-à-dire on fait mention de

 16   métaux, on parle de femmes qui ont été employées, etc. Comment se fait-il

 17   que M. Cerkez ait pu être en possibilité de rédiger ce document?

 18   Réponse:    Ecoutez, je vois pour la première fois ce document. Je ne sais

 19   pas si c'est lui qui l'a rédigé. Il n'y a rien de mal que je puisse en

 20   déduire quant à ce document. La guerre se déchaînait tout autour et les

 21   Serbes étaient sur le point de percer du haut de Vlasic; on s'attentait à

 22   ce jour-là où Vitez serait attaqué. Moi-même, si seulement j'en avais eu

 23   la possibilité, j'aurais évacué mes enfants et ma famille de Vitez.

 24   Question:   Bon, mais si vous ne le saviez pas, n'insistons pas.

 25   Réponse:    C'était une atmosphère générale qui régnait, c'est-à-dire


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  1   qu'il y avait des tensions, on ne peut pas savoir encore si c'était la

  2   guerre entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO mais la tension

  3   régnait.

  4   Question:   Nous nous éloignons encore. S'il vous plaît, soyez tout

  5   simplement précis. Si vous ne pouvez pas répondre, dites que vous ne

  6   pouvez pas le faire. S'il n'a pas rédigé ce document, dites que vous ne le

  7   saviez pas.

  8   Réponse:    C'est ce que j'ai fait, je ne le savais pas mais, quant à la

  9   rédaction de ce document, je le vois pour la première fois de ma vie.

 10   Question:   Votre seconde résidence, que vous avez à quelques kilomètres

 11   en dehors de Vitez, vous ne l'avez pas remise pour le besoin des unités?

 12   Réponse:    Nous l'avons mise à leur disposition. Ma maison n'a pas été

 13   utilisée mais, malheureusement, elle a été brûlée et incendiée par les

 14   Musulmans.

 15   Question:   Mais la maison n'a pas été utilisée par les soldats pour les

 16   besoins de leur entraînement, leur instruction, etc.?

 17   Réponse:    Non, nous leur avons remis les clefs de la maison, mais je

 18   sais que ma maison n'a pas été utilisée; d'autres l'ont été en pleine

 19   montagne.

 20   Question:   Quant à Marko Lujic, vous ne saviez pas ce qu'il faisait le 16

 21   avril, parce que vous étiez enfermé dans votre cave?

 22   Réponse:    Non, je ne le savais pas.

 23   Question:   Une fois sorti de la cave, vous avez pu constater que vos

 24   voisins musulmans ont été internés: pourquoi ont-ils été internés?

 25   Réponse:    Je ne l'ai pas constaté aussitôt sorti mais plus tard. Vers


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  1   midi, je l'avais appris. En ce qui les concerne, je dirai qu'ils ont été

  2   internés: pour ainsi dire, ils ont été escortés dans des conditions les

  3   plus correctes possible. C'est ce que j'ai appris de la part de mon voisin

  4   (expurgé): tout simplement pour des raisons de sécurité, pour des

  5   raisons de leur propre sécurité, puisque il y a déjà eu un conflit.

  6   Question:   Ils seraient attaqués; mais par qui?

  7   Réponse:    Je vous ai dit qu'à Vitez, il y avait des groupements, sans

  8   contrôle aucun, qui étaient capables de tout faire. C'était le temps où il

  9   était facile de s'approvisionner en armes.

 10   Question:   On y reviendra, mais nous allons poursuivre la logique de

 11   votre énoncé de tout à l'heure. En effet, vous nous disiez que tous les

 12   Musulmans ont été internés pour pouvoir être protégés contre d'autres

 13   groupes. C'est ce que vous vouliez dire?

 14   Réponse:    Oui, avant tout cela et pour cette raison-là.

 15   Question:   Et vous vous fondiez sur quoi pour avoir une idée pareille?

 16   Est-ce une idée à vous-même ou quelqu'un vous l'a soufflée?

 17   Réponse:    C'était une idée à moi, d'abord, et puis la pratique l'a

 18   démontrée, à savoir qu'avant et après les conflits, la veille donc, il y

 19   avait des groupes, il y avait des cas de pillage, de cambriolage, etc.

 20   Question:   De qui venait la décision portant internement des Musulmans,

 21   ces Bosniens herzégoviniens?

 22   Réponse:    Non, non, non. Il n'y avait pas d'Herzégoviniens à cette

 23   époque-là, des hommes d'Herzégovine.

 24   Question:   Bon. Mais, avant que le conflit n'éclate, de qui devaient-ils

 25   être protégés?


Page 24782

  1   Réponse:    On ne peut pas savoir. Il y avait des groupes très variés, il

  2   y avait beaucoup d'armes lorsque les Croates se sont retirés de la région

  3   de Jajce ou d'autres municipalités, que je ne connaissais pas d'ailleurs,

  4   mais il y avait une quantité d'armes et c'était vraiment des temps

  5   dangereux.

  6   Question:   Quant à votre région, le danger y était depuis longtemps déjà.

  7   Les Musulmans pouvaient-ils choisir s'ils voulaient être internés ou bien

  8   leur a-t-on dit: "Ecoutez, on va vous confiner ici, tout simplement pour

  9   vous protéger contre de tels groupes, mais vous êtes libres de rester chez

 10   vous ou pas." Leur a-t-on dit quelque chose du genre ou ont-ils été

 11   internés purement et simplement?

 12   Réponse:    Je ne sais pas ce que l'on a pu leur dire, mais la situation

 13   n'était pas la même avant que le conflit n'éclate. Les Musulmans étaient

 14   en sécurité. Je ne peux pas dire qu'il n'y avait pas d'excès sporadiques,

 15   comme aujourd'hui encore cela se produit. Une fois la situation de conflit

 16   établie, je ne peux pas le savoir, quant à moi, mais peut-être que

 17   quelqu'un avait décidé comme quoi ils devaient être mis en sécurité. C'est

 18   ce que je dis aujourd'hui: que lorsqu'ils étaient dans ces abris, alors,

 19   je dirais que pas un seul cheveu de leur tête n'était touché.

 20   Question:   Monsieur Bekavac, ce que vous dites n'a absolument aucun sens.

 21   C'était le dernier pas entrepris par la prise du pouvoir et qui coïncidait

 22   parfaitement par l'attaque des Musulmans contre Vitez; c'est l'essence

 23   même de l'histoire, n'est-ce pas?

 24   Réponse:    Non, non, non. C'est vous qui le dites ainsi, mais cela ne

 25   s'est pas passé comme cela.


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  1   Question:   Dites-nous les choses, s'il vous plaît.

  2   Darko Kraljevic et ces Vitezovi étaient-ils des gens qui…

  3   M. Kovacic (interprétation): Je vous prie de poser les questions de ce

  4   genre en huis clos, sinon le témoin risquerait de ne pas y répondre.

  5   M. Nice (interprétation): D'accord.

  6   (Audience à huis clos)

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 13   Page 24784 expurgée – audience à huis clos.

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 18   (Audience publique.)

 19   M. Nice (interprétation): J'ai une dernière question: qu'est-ce que c'est

 20   que ces menaces comme quoi on devait faire sauter en l'air toute l'usine

 21   si les Musulmans continuaient d'avancer vers Vitez? Est-ce que vous vous

 22   le rappelez?

 23   M. Bekavac (interprétation): Je m'en souviens d'après la presse; on a pu

 24   lire cela dans la presse et puis la presse croate et les stations de

 25   télévision l'ont diffusé d'ailleurs un petit peu; la presse du monde


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  1   entier aussi d'ailleurs.

  2   Question:   Sans aucun doute, c'était donc une menace dangereuse portant

  3   sur le plastiquage de votre usine ou s'agissait-il tout simplement de

  4   votre usine ou de quelque chose d'autre encore?

  5   Réponse:    C'était une tentative de désespérés, de gens qui, depuis une

  6   année entière, se trouvaient encerclés, entièrement encerclés, comme dans

  7   un ghetto.

  8   M. Nice (interprétation): Je vous remercie.

  9   M. le Président (interprétation): Maître Kovacic. ?

 10   (Questions supplémentaires de Me Kovacic.)

 11   M. Kovacic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Ce sera

 12   vraiment très bref.

 13   Monsieur Bekavac, peut-être une seule question pour illustrer une de vos

 14   thèses que vous avez tenté d'avancer tout à l'heure. Vous avez parlé de

 15   ces groupes d'individus, de particuliers sans contrôle, de soldats sans

 16   contrôle. Dites-nous, s'il vous plaît, votre propre frère a été kidnappé

 17   par un de ces groupes-là?

 18   M. Bekavac (interprétation): Je suis heureux d'en entendre parler. Nous

 19   étions seulement à une occasion, vous et moi, à converser et je peux

 20   répondre devant ce prétoire.

 21   Immédiatement à la veille des conflits, au temps des gardes villageoises,

 22   mon frère se trouvait en contrebas de notre maison à 9 heures 30 pour

 23   faire son tour de garde. Les Musulmans du village de Vranjska étaient

 24   venus par là; ils sont du hameau Pezici et ils ont pris mon frère, l'ont

 25   emmené là-haut; il y a passé deux journées entières, ils l'ont passé à


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  1   tabac. Le hameau Pezici est très haut entre Busovaca et Vitezovi. On

  2   l'avait chargé de sacs pleins de cigarettes et de nourriture; encore avec

  3   cela, chemin faisant, on lui a toujours tiré sous les pieds pour lui faire

  4   peur. Il a vraiment tenu le coup avec grande difficulté. Après, tout

  5   Rijeka, tout Vitez s'étaient élevés pour élever leurs voix en vue de leur

  6   acquittement parce que, sinon, il y aurait eu des problèmes. Quand il

  7   était rentré chez nous, il était couvert de bleus et un œil entièrement

  8   fermé. Une cassette vidéo existe d'ailleurs qui en témoigne de façon assez

  9   illustrative.

 10   Question:   Votre frère était quelqu'un de bien connu, n'est-ce pas?

 11   Réponse:    Oui, c'était un instituteur, un professeur de gymnastique,

 12   vraiment une personne bien connue, réputée et fort aimée à Vitez.

 13   Question:   Je vous remercie. J'ai une autre question portant sur

 14   Sintevit.

 15   Sur cette tentative de présenter la réalité des choses, M. le Juge vous a

 16   demandé pourquoi, dans votre déposition, vous avez dit que, peut-être, il

 17   y a des rapports qui n'ont pas été signés à l'usine ou peut-être à

 18   Sintevit. Dites-nous qui était le directeur chargé de la direction de

 19   Sintevit, en 1993, juste à la veille des conflits?

 20   Réponse:    En 1993, je ne peux pas me rappeler très exactement.

 21   Question:   Et si je vous disais que c'était M. Alija Basic?

 22   Réponse:    Oui, ingénieur de technologie, diplômé. Lui est d'ailleurs de

 23   Travnik, mais il résidait à Vitez.

 24   Question:   De quelle nationalité était-il?

 25   Réponse:    De nationalité musulmane. Je précise: nationalité musulmane


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  1   orthodoxe.

  2   Question:   Est-ce peut-être lui qui licenciait les Musulmans pour

  3   brouiller la situation?

  4   Réponse:    Il se peut mais, à cette époque-là, il était fort lié au parti

  5   SDA, imprégné de politique.

  6   Question:   Nonobstant, il était toujours directeur?

  7   Réponse:    Oui, c'est bien cela.

  8   Question:   Je m'excuse, on parle de Sintevit toujours, comme usine?

  9   Réponse:    Oui, il s'agit bien de Sintevit.

 10   Question:   On a parlé beaucoup de production en temps de guerre, le

 11   document Z1220.2. Vous aviez repris vos activités en mai 1993. Une fois

 12   venu, avez-vous rencontré l'équipe de Marko Lujic ou lui-même?

 13   Réponse:    Autant que je sache et que je m'en souvienne, l'équipe y était

 14   déjà, mais quelles étaient leurs tâches, je ne le savais pas. En tout cas,

 15   tout portait sur la préparation du processus de production.

 16   Question:   Je vous remercie. On a mentionné également le terme de

 17   "conditions de guerre", "en temps de guerre". Puis-je vous demander ceci:

 18   pouvez-vous rappeler à quel moment il y avait une tentative de

 19   bombardement et des survols par les avions de la JNA de la région et de la

 20   ville de Vitez?

 21   Réponse:    Je crois que cela s'est produit en 1993. Ce n'était pas en

 22   hiver, plutôt au printemps ou en été; je ne peux pas vous dire la date

 23   exacte, mais je sais que ce n'était pas en hiver, parce que je sais que je

 24   m'étais trouvé devant ma maison.

 25   M. Kovacic (interprétation): Etes-vous sûr que cela coïncide à peu près à


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  1   la période d'un an avant le conflit musulmano-croate?

  2   Réponse:    Oui.

  3   Question:   S'agit-il de dire qu'à votre usine, les conditions de

  4   processus de travail en temps de guerre étaient toujours en vigueur?

  5   Réponse:    Oui.

  6   Question:   Ces conditions étaient-elles ordonnées petit à petit,

  7   progressivement?

  8   Réponse:    Progressivement. On ne devrait pas dire que c'était le danger

  9   de guerre décrété, mais la situation était telle que, de fait, on

 10   progressait vers les conditions de production en temps de guerre. Qui dit

 11   en temps de guerre dit qu'il fallait ouvrir l'œil davantage quant aux

 12   contrôles, etc.

 13   Question:   C'était juste pour clarifier les termes.

 14   Au début de l'année 1993, quelques mois avant l'éclatement du conflit

 15   entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO, vous avez pu considérer que

 16   les conditions étaient normales ou peut-être celles de temps de guerre?

 17   Réponse:    Pour ce qui est de la production, celle-ci se déroulait

 18   toujours de la même façon, mais les mesures de prudence ont été évidemment

 19   plus rigoureuses. La production était normale, mais les conditions dictées

 20   par l'environnement et par l'ambiance générale ont été telles qu'il a

 21   fallu être davantage prudents. Il s'agit d'une usine vulnérable, très

 22   délicate et vraiment, avec un manquement quelconque, on peut facilement

 23   être source d'une catastrophe insoupçonnée.

 24   Question:   Lorsque vous avez parlé de quantités, de tonnes de produits,

 25   vous avez dit un chiffre à un moment donné. Au sujet de ce chiffre, j'ai


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  1   une question à vous poser. Pouvez-vous nous dire, s'il vous plaît, lorsque

  2   les conditions de production sont normales, dans les années 80, disons,

  3   combien de tonnes de poudre, toutes variétés de poudre confondues,

  4   pouviez-vous produire par an?

  5   Réponse:    Environ un million et demi de tonnes par an… 1,5 mille tonnes

  6   par an.

  7   Question:   Il me semble qu'il y avait un malentendu entre vous et M. le

  8   Procureur. Essayons d'y voir un peu plus clair. Au début de votre

  9   déposition aujourd'hui, vous avez dit que la direction de l'usine avait

 10   une politique selon laquelle, comme vous l'avez dit, "la politique de

 11   parti et d'autres gens que ceux de l'usine ne passerait jamais le seuil de

 12   l'usine". Cela est vrai?

 13   Réponse:    Oui.

 14   Question:   Mais après que le conflit éclate, l'usine n'est plus dirigée

 15   par la même direction qu'avant?

 16   Réponse:    Oui, c'est bien cela.

 17   Question:   Et vous avez dit au cours de votre déposition que "c'est

 18   maintenant une production en temps de guerre qui a été organisée par le

 19   HVO de la municipalité et pour plus tard", n'est-ce pas?

 20   Réponse:    C'est exact.

 21   Question:   Et ce n'est plus la même direction et ce n'est plus la

 22   direction de l'usine comme avant?

 23   Réponse:    C'est exact.

 24   Question:   Et plus tard, à en juger d'après les rapports, on fait mention

 25   de balles, de fusils, etc. Répondez-nous par oui ou par non, très


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  1   brièvement: y a-t-il eu, au SPS, un fusil produit dans l'enceinte de

  2   l'usine?

  3   Réponse:    Non, c'est impossible.

  4   Question:   Y a-t-il eu, à un quelconque moment, dans l'enceinte de

  5   l'usine, une production autre que fusils, lance-roquettes, mortiers, etc.

  6   ou n'importe quelle pièce?

  7   Réponse:    Non, c'est impossible.

  8   Question:   Et une cartouche, une balle?

  9   Réponse:    Non, c'est impossible.

 10   Question:   Monsieur Bekavac, est-il vrai que les armes produites pendant

 11   la guerre, c'est-à-dire dans la seconde moitié de 1993, auraient pu être

 12   diverses catégories de mines ou d'armes, conçues cette fois comme des

 13   produits non militaires mais non finis, à cette époque?

 14   Réponse:    Cela est vrai, c'est avec les essieux de wagon que nous avons

 15   pu produire des mines. Parce que nous étions encerclés et que l'on devait

 16   se défendre, on prenait tout simplement un essieu d'un wagon, construit en

 17   acier de qualité sans pareille. Nos maîtres et ingénieurs s'y sont pris

 18   pour en produire.

 19   Question:   Pouvez-vous dire par là que c'était de l'improvisation, une

 20   production de fortune?

 21   Réponse:    Oui, c'était bien cela.

 22   Question:   Encore une chose, Monsieur Bekavac. On nous a montré plusieurs

 23   documents dont un document qui porte la cote Z1419.1. Puisque ce document

 24   vous a été soumis, je vais vous poser une question: on voit la signature

 25   de Filipovic, chef de la planification et du suivi. Est-il exact que ces


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  1   rapports concernaient la quantité, par exemple, et la fabrication?

  2   Réponse:    Oui.

  3   Question:   Filipovic, est-ce votre commandant de région, un colonel? Est-

  4   ce lui ou est-ce quelqu'un d'autre que ce colonel du HVO?

  5   Réponse:    Oui, je pense que c'est lui.

  6   Question:   C'est un militaire?

  7   Réponse:    Oui.

  8   Question:   Filip Filopovic?

  9   Réponse:    C'est exact. Et l'autre est un ingénieur. Oui, je vois Filip

 10   Filipovic; non, ce n'est pas le bon, ce n'est pas l'homme qui vient de

 11   l'armée, c'était le chef de la planification et de l'analyse. C'était un

 12   ingénieur. Il était également chef du service pour les matières premières.

 13   J'ai été un peu confus par votre question, parce que je savais qu'il y

 14   avait ce colonel. A l'époque, c'était une personnalité bien connue, d'où

 15   la confusion que j'avais faite.

 16   Question:   C'est la raison pour laquelle je vous ai posé la question.

 17   Réponse:    Je vois.

 18   Question:   A droite, on voit une signature; je ne sais pas si vous l'avez

 19   remarquée?

 20   Réponse:    Je n'ai même pas remarqué cette page.

 21   Question:   Je vais vous poser une question maintenant qu'on vous montre

 22   le document. Convenez-vous avec moi du fait qu'à l'époque, cette signature

 23   que l'on voit apparaître sur le côté droit, était la signature de l'homme

 24   qui était responsable du secteur de production? Je vais vous demander

 25   d'examiner la date de ce document.


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  1   Réponse:    Le 26 avril 1994.

  2   M. Kovacic (interprétation): Nous sommes d'accord. Je n'ai plus de

  3   question à poser à ce témoin. Je vous remercie, Monsieur le Président.

  4   M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur Bekavac, d'être venu

  5   déposer devant ce Tribunal. Votre déposition est terminée, vous pouvez

  6   désormais disposer.

  7   M. Bekavac (interprétation): Je vous remercie, Messieurs les Juges.

  8   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

  9   (Questions relatives à la procédure)

 10   M. le Président (interprétation): Maître Kovacic, il nous reste quelques

 11   minutes. Essayons d'en tirer le meilleur parti en examinant la situation

 12   pour le reste de vos témoins. Nous avons reçu votre liste des témoins pour

 13   la semaine prochaine en date du 12 septembre. Je remarque que vous avez

 14   prévu onze témoins, mais l'un d'entre eux a déjà déposé; cela nous en

 15   donne dix. Avez-vous prévu des substitutions?

 16   M. Kovacic (interprétation): Oui, nous avons constaté cette erreur avant-

 17   hier. Un groupe de témoins devrait arriver ce soir; l'autre moitié devrait

 18   arriver mardi prochain et je pense que nous aurons peut-être deux

 19   personnes en plus.

 20   M. le Président (interprétation): Cela nous donne donc douze personnes la

 21   semaine prochaine.

 22   M. Kovacic (interprétation): Espérons-le, Monsieur le Président.

 23   M. le Président (interprétation): J'ai aussi sous les yeux la liste du 31

 24   août où l'on retrouve un total de 66 témoins.

 25   M. Kovacic (interprétation): Oui.


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  1   M. le Président (interprétation): D'après le calendrier que nous avons

  2   annoncé, il reste 22 jours d'audience qui seront consacrés à vos témoins.

  3   Est-ce que vous pourriez peut-être nous préciser le nombre de témoins que

  4   vous allez citer à la barre?

  5   Nous remarquons, en particulier, que vous n'avez fourni à ce jour que deux

  6   déclarations sous serment. Il semblerait que plusieurs de ces témoins que

  7   l'on appelle à la barre pourraient faire d'excellents témoins par

  8   déclaration sous serment. Peut-être allez-vous vouloir envisager cette

  9   question plutôt que de les faire se déplacer à La Haye pour qu'ils

 10   déposent ici devant nous?

 11   M. Kovacic (interprétation): Tout à fait. Je vous dirai tout d'abord que

 12   nous prévoyons une réunion cette après-midi pour que notre équipe revoie

 13   la situation, fasse le point, voie comment nous avons travaillé jusqu'à

 14   présent, ce qui est absolument indispensable pour le temps qui nous reste

 15   ou prévoir certains témoins d'urgence ou de réserve, mais je peux vous

 16   dire quelle est déjà notre impression. Cependant, si vous le souhaitez, je

 17   peux vous faire un compte rendu plus détaillé lundi, lors de notre

 18   prochaine journée d'audience.

 19   M. le Président (interprétation): Parlez-nous des témoins par déposition

 20   sous serment.

 21   M. Kovacic (interprétation): Nous avons beaucoup réfléchi. Il se pose un

 22   problème: en règle générale, vous n'avez pas deux personnes qui parlent

 23   d'un seul et même événement, à moins qu'il ne s'agisse bien sûr de

 24   circonstances qui constituent en fait des faits de notoriété publique.

 25   Cela veut dire que, si nous amenons un témoin qui va nous parler d'un


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  1   événement particulier, il est inutile d'avoir un deuxième témoin qui

  2   parlerait du même événement. On voudra peut-être ajouter un témoin par

  3   déclaration sous serment, mais cela n'aura pas d'incidence sur le temps

  4   consacré aux témoins au cours des audiences. Nous avons déjà quelques

  5   déclarations sous serment qui sont préparées, mais nous ne savons pas

  6   exactement à quel témoin nous pouvons attacher ce récit. S'il est

  7   important et s'il s'agit d'un témoignage important, nous aimons avoir le

  8   témoin sur place.

  9   M. le Président (interprétation): S'il s'agit d'un témoin qui parle d'un

 10   autre village -et là, je parle en mon nom personnel-, il se peut que ce

 11   soit un témoin qui sera plutôt ici pour corroborer quelque chose. Ceci est

 12   à contraster avec des pièces à conviction qui apportent ce type de

 13   coopération.

 14   M. Kovacic (interprétation): Oui, mais vous constatez, Monsieur le

 15   Président, que jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu deux témoins pour

 16   un même village, parce que c'est une restriction logique qui est imposée.

 17   Il n'en demeure pas moins que, pour ce qui est de l'aspect général de la

 18   question, nous avons parlé de 65 témoins pour la dernière liste. Il y a,

 19   dans certaines de ces rubriques, des témoins d'urgence qui sont un peu là

 20   pour intervenir s'il y a un problème avec d'autres témoins. Nous avons

 21   pris cette réserve en compte pour éviter tout argument, par exemple, s'il

 22   y avait un témoin annoncé et qui n'était pas en mesure de venir.

 23   Je suppose que nous pourrons terminer la présentation des moyens de preuve

 24   après 50, moins de 55 témoins. En tout cas, c'est là notre objectif.

 25   M. le Président (interprétation): Fort bien. N'oubliez pas qu'il est


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  1   manifeste que votre progression est bien plus rapide que ce qui avait été

  2   prévu puisque, cette semaine, les témoins ont déposé rapidement, les

  3   contre-interrogatoires ont été assez succincts ; il serait peut-être utile

  4   d'avoir davantage de témoins qui seraient présents. Nous pourrons ainsi en

  5   terminer bien plus rapidement.

  6   M. Kovacic (interprétation): C'est pour cela que nous voulons revoir la

  7   situation cette après-midi, Monsieur le Président.

  8   M. le Président (interprétation): Eh bien, nous aurons le résultat de

  9   cette discussion lundi. N'oubliez pas que nous voulons respecter les

 10   échéances.

 11   M. Kovacic (interprétation): Oui, c'est là notre intention à nous aussi,

 12   Monsieur le Président.

 13   M. le Président (interprétation): Nous allons nous revoir lundi à 9 heures

 14   30.

 15   L'audience est levée jusqu'à demain matin, 9 heures 30.

 16   (Le témoin, M. Zvonimir Bekavac, est reconduit en hors du prétoire.)

17            (La séance est levée à 12 heures 40.)

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