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1 Le mercredi 19 mai 2004
2 [Audience d'appel]
3 [Audience publique]
4 [Les appelants sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
6 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je salue toutes les personnes
7 présentes dans le prétoire et je vais demander à Mme la Greffière d'appeler
8 le numéro de l'affaire.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de l'affaire
10 IT-95-14/2-A, le Procureur contre Dario Kordic et Mario Cerkez.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Je suppose que
12 les parties représentent la même composition qu'hier. C'est établi.
13 Je m'adresse à Messieurs Kordic et Cerkez. Etes-vous en mesure de suivre
14 les débats dans une langue que vous comprenez ?
15 L'APPELANT KORDIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
16 Mesdames et Messieurs les Juges, merci de me poser la question. Oui, je
17 suis en mesure se suivre les débats d'aujourd'hui dans ma langue.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous
19 rasseoir.
20 L'APPELANT CERKEZ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
21 Mesdames et Messieurs les Juges, je comprends tout ce qui est dit et je
22 suis en mesure de suivre les débats.
23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Poursuivons sans
24 plus tarder. Faisons preuve de souplesse pour ce qui est de l'horaire. Vous
25 savez le temps qui est réservé aux parties. Il se peut que la totalité de
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1 ces périodes de temps allouées ne soient pas nécessaires, soyons souple.
2 Disons d'ores et déjà, aujourd'hui, nous n'aurons qu'une heure de pause
3 pour le déjeuner. Ceci devrait nous permettre de terminer dans les temps
4 prévus. Tout d'abord, je vais m'adresser aux parties, en l'occurrence à la
5 Défense de M. Cerkez et à l'Accusation, car il y a encore la question des
6 faits établis ou stipulés s'agissant de la situation familiale. Il y avait
7 une requête à cet effet déposée le 4 mai par la Défense de M. Cerkez. Qu'en
8 est-il ?
9 M. FARRELL : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Messieurs les Juges.
10 Permettez-moi de parler en mon nom propre ainsi qu'au nom de Me Kovacic,
11 nous en avons discuté ce matin et nous avons parcouru le document. Il y a
12 quelques points qui restent en litige, et nous avons convenu d'en reparler
13 à la pause si ceci ne vous dérange pas. Nous vous ferons part de notre
14 décision ce matin, nous essayons de trouver une solution sans
15 l'intervention de la Chambre.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Fort bien. Je pense que je devrais
17 sans tarder donner la parole à l'Accusation qui dispose au plus d'une
18 heure, mais je suppose que vous n'avez pas besoin de tout ce temps, n'est-
19 ce pas ?
20 M. FARRELL : [interprétation] Merci. Je vais d'abord tenter de répondre aux
21 questions posées par M. le Juge Guney hier, ainsi qu'aux questions posées
22 par vous, Monsieur le Président. Ensuite, je vous fournirai quelques
23 commentaires sur les conclusions présentées hier. Mme Jarvis interviendra
24 sur le dernier aspect de notre réponse à l'appel interjeté par M. Cerkez.
25 Tout d'abord, s'agissant de la portée du plan criminel, Monsieur le Juge.
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1 Cette portée géographique, la Chambre de première instance dans son
2 jugement, et ceci reflète l'acte d'accusation, a adopté deux échelons de
3 l'entreprise criminelle commune ou du plan criminel. Il y a d'abord les
4 charges retenues contre l'appelant Kordic. La Chambre dit au paragraphe 827
5 que la Bosnie centrale est au-delà, donc c'est une portée plus large.
6 Ensuite, la Chambre conclut que Kordic a participé à cette portée plus
7 large, cela est dit au 829.
8 Il y a une campagne de persécution qui a été menée dans la municipalité de
9 Vitez, c'est une ventilation de cela, et il y a un paragraphe où on juge
10 Cerkez coupable et la Chambre limite ses responsabilités aux villages qui
11 font partie de la municipalité de Vitez. Dans l'appel interjeté par
12 l'Accusation, je dirais que le fait d'avoir limité la responsabilité au
13 seul lieu où il y avait implication directe de la Brigade de Vitez était
14 une erreur.
15 Les crimes qui étaient à la base de cet accord criminel. L'objectif était
16 de soumettre la population musulmane de Bosnie et c'est un plan qui a été
17 exécuté en ayant recours à des mesures violentes à la force. Les mesures
18 convenues pour parvenir à ce but, se trouvent au paragraphe 827 [comme
19 interprété]. Il fallait attaquer les villes et les villages, ce qui était
20 accompagné de meurtres, de pillages, de détentions et de blessures
21 infligées aux Musulmans de Bosnie. Je reviendrai à la question de savoir ce
22 qui se trouve en dehors de ce plan commun, mais voilà ce qui se trouvait à
23 l'intérieur de ce ou dans le cadre de ce plan commun.
24 Les objectifs de ces plans convenus étaient les mêmes pour ce qui est de
25 cette catégorie élargie de l'entreprise criminelle commune. Vu les éléments
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1 de preuve communiqués, on a vu que ces actes ont été exécutés de façon
2 identique et répétée dans les villes et les villages. Il y a peut-être eu
3 quelques différences au niveau de l'exécution dans l'intensité notamment,
4 mais il y a un dénominateur commun dans ces villes et villages. Il y avait
5 les assassinats, la destruction, le pillage et la détention des Musulmans
6 de Bosnie. Tout ceci se fait en vue de la réalisation de l'objectif ultime.
7 La question suivante concernait la connaissance qu'avait M. Cerkez du plan
8 en tant que tel. Là, il y a deux aspects à notre avis. Le premier c'était
9 que cette connaissance peut être déduite de façon générale de l'ensemble
10 des moyens de preuve et ceci a trait au plan qui se poursuivait et à toutes
11 les activités se déroulant dans la municipalité de Vitez. Il savait qu'il y
12 avait un plan qui visait les Musulmans à Vitez, Stari Vitez et Donja
13 Veceriska parce qu'il a donné l'ordre à ses troupes d'aller dans ces lieux
14 et d'y commettre des crimes. Il savait que ce plan avait une portée plus
15 large que la seule portée pour laquelle il a été jugé coupable par la
16 Chambre de première instance. Il savait qu'il y avait une campagne
17 militaire qui s'effectuait avec la Brigade de Vitez et que ces actes
18 avaient été exécutés par toutes les unités dans la municipalité de Vitez.
19 Je pourrais vous parler des preuves en montrant qu'il y avait connaissance
20 de cela par notamment, des endroits limités où ces actions se sont
21 déroulées et le fait qu'il y avait coordination nécessaire pour les unités
22 militaires. Il y a une attaque qui était le résultat des efforts entrepris
23 par la Brigade de Vitez pour bloquer la Brigade de Busovaca, et il y avait
24 l'appui de l'artillerie venant d'Hrasno depuis la Brigade de Busovaca. Ce
25 n'était pas là un acte individuel qui n'était pas coordonné, il fallait
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1 pour ce faire coordination et coopération.
2 Je ne reviendrai pas de façon détaillée sur la connaissance, mais le fait
3 qu'il a fait rapport à Blaskic, ces rapports concernaient toute la zone. Il
4 est inconcevable que le commandant de la municipalité de Vitez, qui est
5 responsable de toute la zone, qui est responsable pour Sivrino Selo, pour
6 Stari Vitez, pour Vitez, qu'il ne sache pas quel est le plan spécifique
7 pour l'une des parties qui se trouve sous sa seule responsabilité. Comment
8 peut-il faire rapport à M. Blaskic ? Comment M. Blaskic peut-il lui
9 demander des rapports sur Vitez si Cerkez n'a pas connaissance de ce qui se
10 passe. Ses troupes arrivent à la fin de la journée et font une opération de
11 nettoyage. C'est ce qui apparaît, je pense à 17 heures 57 dans le journal
12 de guerre. Il n'arrive pas à Ahmici sans savoir ce que ses troupes vont
13 faire notamment pour les opérations de l'arrestation.
14 Il fait rapport sur ces forces et il dit que le travail est fait à 70 % à
15 Ahmici et Donja Veceriska. On peut supposer que ces
16 70 % ont trait à l'Ahmici et pas à des opérations militaires.
17 Il y a des éléments de preuve plus larges, à l'appui du fait que, M.
18 Cerkez avait une connaissance très claire du plan général concernant la
19 municipalité. On voit que ce sont les résultats de la réunion du 15 avril.
20 D'après l'Accusation, même sans avoir des informations précises, la Chambre
21 aurait pu déduire les circonstances générales qu'il avait cette
22 connaissance; c'était la campagne, c'est ce que faisaient ses troupes et
23 c'était l'information qu'il était censé relayer. De plus, nous avons des
24 informations selon lesquelles il y avait eu un plan le 15, qu'on avait
25 formulé ce plan qui concernait les unités, il y avait Kraljevic, ce sont
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1 les Vitezovi; il y avait Cerkez, c'est la Brigade de Vitez; Ljubicic, c'est
2 la police militaire; et le Témoin AT a dit que Grubesic se trouvait là
3 aussi, et lui c'est la Brigade de Busovaca. Autant d'unités qui ont
4 participé dans la municipalité de Vitez, c'était les unités principales,
5 vous avez Ljubicic qui est la police militaire. Le général Blaskic, est-ce
6 qu'il donnerait un seul ordre à toutes les unités et puisqu'il prendrait
7 Ljubicic à part pour lui donner un ordre séparé ? Regardez la déposition du
8 Témoin AT, il dit que les ordres de Blaskic consistent en ceci et cela. Ce
9 n'est pas là une activité séparée mise au point par Ljubicic plus tard. Il
10 est normal qu'il appelle toutes ses unités, les quatre unités qui vont
11 participer à l'assaut dans la municipalité de Vitez et toutes font rapport
12 à la Brigade de Vitez, il ne dirait pas au commandant de cette zone de
13 responsabilité quels sont ses ordres pour ses unités ?
14 Nous avons aussi des informations du Témoin AT, qui dit que tout à fait à
15 côté de Pirici, je ne sais pas exactement où cela se trouve, mais cela
16 pourrait être moins d'un kilomètre de distance, c'est là qu'il se trouve à
17 moins d'un kilomètre de la Brigade de Vitez. Il a pour responsabilité
18 d'arrêter -- de stopper la FORPRONU ? Pourquoi est-ce qu'on donnerait pour
19 mission spécifique à la Brigade de Vitez de stopper une organisation
20 internationale si ce n'était pas parce que cette brigade sait exactement
21 quelle est la nature de la mission ? Il semble inconcevable qu'un
22 commandant militaire qui donne l'ordre que donne Blaskic ne dirait pas aux
23 restes des effectifs qui coordonnent une action ou une opération militaire,
24 quelle est la nature de cet ordre.
25 Selon certaines informations, le témoignage d'AT, Grubesic était là. Vous
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1 vous souvenez qu'Ahmici a commencé par un pilonnage venant de la colline
2 d'Hrasno. C'était Grubesic, il était à la réunion. AT a dit dans sa
3 déposition que la FORPRONU, elle avait été stoppée aussi de l'autre côté de
4 Kaonik, donc elle avait été stoppée par la Brigade de Vitez d'un côté et,
5 de l'autre côté, elle devait être stoppée par Grubesic, Brigade de
6 Busovaca, d'Hrasno. Pourquoi est-ce qu'on donnerait, en fait, l'ordre
7 d'arrêter, de stopper la FORPRONU des deux côtés s'il n'y avait pas
8 sciemment une activité illégale qui se produisait ? Ce n'est pas par hasard
9 qu'il y a eu réunion ce jour-là, qu'il y a eu coordination. Cette
10 connaissance, il faut la déduire, elle doit être déduite, tout à fait,
11 logiquement quant à la nature des ordres donnés.
12 S'agissant de la portée du plan, qui incluraient les autres crimes. Il y a
13 d'abord le traitement inhumain en application ou visé au chef 31 qui a
14 trait aux conditions de détention. Si, quand on parle de traitement
15 inhumain, on pense aux conditions de détention, la Chambre de première
16 instance n'a pas jugé que ceci faisait partie de l'entreprise criminelle
17 commune. La réponse est négative. M. Cerkez a été jugé coupable sur un
18 fondement différent, à cet égard.
19 Si le traitement inhumain est considéré comme étant le fait d'avoir causé
20 des tranchées, chef 31, les deux infractions se retrouvent au chef 31, la
21 Chambre, une fois de plus, conclut que ceci ne fait pas partie du plan
22 criminel commun.
23 S'agissant de la prise d'otages, c'est pareil. La responsabilité au regard
24 du chef 31 concerne surtout spécifiquement M. Cerkez.
25 S'agissant de la privation de liberté. La Chambre, en fait, conclut que la
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1 détention illégale, que cet acte faisait partie d'un plan criminel commun.
2 S'agissant de la modalité, du mode de responsabilité pour tous ces actes
3 qui relèvent du plan criminel commun, je vous ai dit que ce sont les
4 attaques illicites qui ont pour effet les destructions et les activités
5 illégales dont la détention, ce mode de responsabilité doit être la
6 première catégorie de l'entreprise criminelle commune.
7 De l'avis de l'Accusation, la Chambre n'a pas jugé que c'était le fait
8 d'aider, d'encourager ou que c'était là la qualification qu'il faut tenir,
9 parce qu'ils ont estimé que Cerkez avait davantage qu'une simple
10 connaissance; qu'il partageait en fait l'intention délictueuse de ce plan
11 criminel commun.
12 Cette entreprise criminelle commune aurait pu s'appliquer à plusieurs actes
13 dont les conditions inhumaines. C'était prévisible du fait de la détention
14 mais apparemment ce n'est pas la conclusion qu'a tirée la Chambre de
15 première instance.
16 Enfin, Monsieur le Juge Guney m'avait posé une question quant à la
17 responsabilité pour le fait d'ordonner, de donner des ordres. Au paragraphe
18 831, la Chambre tire des conclusions s'agissant de la campagne de
19 persécution et juge M. Cerkez coupable en qualité de commandant de la
20 Brigade de Vitez car il a participé à ces attaques. La Chambre dit que
21 c'était le point culminant de la campagne de persécution et pour ce qui est
22 de sa contribution, il a participé à cette campagne en assurant le
23 commandement des troupes impliquées dans certains des incidents. C'est en
24 cette qualité qu'il était co-auteur.
25 Il faut comprendre quand on dit "assurant le commandement" qu'il donnait
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1 des ordres. C'était la seule façon qu'il avait de commander ses troupes. La
2 Chambre conclut qu'il était co-auteur. Pour qu'il y ait entreprise
3 criminelle commune, il faut qu'il y ait le fait d'être co-auteur dans cette
4 entreprise et je pense qu'on peut assimiler le fait d'assurer le
5 commandement au fait d'ordonner.
6 Voilà les réponses que je voulais vous fournir, Monsieur le Juge. Je ne
7 sais pas si vous avez d'autres questions. Je serais, tout à fait, prêt à
8 essayer d'y répondre, sinon je passerai à d'autres sujets.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci d'avoir fourni des réponses
10 précises.
11 M. FARRELL : [interprétation] Je vous remercie. Permettez-moi d'ajouter
12 deux commentaires supplémentaires s'agissant des conclusions présentées par
13 mon estimé confrère, et je passerai la parole à Mme Jarvis.
14 Me Kovacic a eu l'obligeance de me fournir un exemplaire du rapport
15 concernant la détention de M. Cerkez et je crois savoir que Me Kovacic va
16 en demander le versement. Je sais que vous l'avez.
17 Nous ne contestons pas le fait que Me Kovacic souhaite le versement au
18 dossier pour que vous ayez ce document, mais lorsque vous allez examiner
19 les informations qu'il contient, ceci concerne sa détention depuis 1997
20 jusqu'à ce jour. Dans une décision récente rendue le 7 mai 2004 par la
21 Chambre d'appel, la preuve de comportement postérieur à la condamnation
22 n'est pas importante. Quant à savoir si la Chambre de première instance a
23 versé dans l'erreur et la conclusion est celle-ci, ce comportement est sans
24 pertinence, s'agissant des questions dont était saisie la Chambre de
25 première instance. Par conséquent, on ne peut pas dire que la Chambre se
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1 serait fourvoyée et la requête déposée par la Défense est rejetée,
2 s'agissant de la demande de versement au dossier d'un tel rapport.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Le Juge Weinberg de Roca, voulez-
4 vous poser une question ?
5 Mme LE JUGE WEINBERG DE ROCA : [interprétation] S'agissant de la réunion du
6 15 avril, est-ce que cette question a constitué un problème ou une question
7 posée dans d'autres procès portant sur le même sujet ? Ou est-ce qu'elle se
8 pose ici, seulement ?
9 M. FARRELL : [interprétation] Il y a eu des informations, mais, dans le
10 cadre d'un huis clos, dans un autre procès. Je ne suis pas autorisé à vous
11 répondre, mais je peux vous dire qu'il y a des documents qui ont été
12 déposés, en la présente espèce, en application de l'Article 115 par voie de
13 requête et la Chambre a rejeté ces documents, a estimé que ces moyens de
14 preuve supplémentaires ne pouvaient avoir d'incidence sur le verdict rendu
15 ici. Mais le dépôt s'était fait sous pli confidentiel.
16 Mme LE JUGE WEINBERG DE ROCA : [interprétation] Je vous remercie.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter une chose.
18 Vous avez bien cité une décision récente de la Chambre d'appel. Cependant,
19 nous sommes face à un certain dilemme. C'est la jurisprudence constante du
20 Tribunal que de dire que c'est important aux fins d'évaluation, mais qu'en
21 est-il de la réinsertion. Il est important de savoir s'il existe encore des
22 liens familiaux, quel a été le comportement récent de l'intimé ou de
23 l'appelant au quartier pénitentiaire. La question n'est pas de savoir si la
24 Chambre de première instance s'est fourvoyée ou pas, le tout c'est de
25 savoir si, ici, les deux parties demandent une nouvelle peine. C'est, sans
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1 nul doute, un facteur déterminant que celui de la réinsertion. Il nous
2 faut, certainement, avoir des informations supplémentaires.
3 M. FARRELL : [interprétation] Permettez-moi de vous répondre de la façon
4 suivante. Si la Chambre d'appel maintient la peine imposée, l'appel
5 Celebici avance que le comportement postérieur à la peine initiale est sans
6 pertinence. On n'a pas la chance d'avoir une meilleure peine parce qu'on
7 s'est bien comporté, c'est du moins la façon que nous avons de comprendre
8 cette décision. Il vous demande une réduction, mais ceci ne vous met pas
9 dans une position où vous allez avoir un procès de novo, mais plutôt de
10 décider si la Chambre de première instance s'est trompée. Si, par ailleurs,
11 cette Chambre doit donner une nouvelle peine, décide qu'il faut changer le
12 mode responsabilité ou, à l'inverse de l'affaire Celebici, où on a renvoyé
13 l'affaire à la Chambre de première instance pour une nouvelle peine.
14 Effectivement, à ce moment-là, vous allez peut-être demander ces
15 renseignements. Mais je pense que s'il y avait une nouvelle peine, et s'il
16 faut tenir compte de son comportement, quel est le rôle que jouerait une
17 nouvelle peine ? Cela serait de lui donner une peine allant de ses crimes.
18 Le comportement postérieur à la première peine, c'est ce que nous avons dit
19 dans l'appel Celebici, cela porte sur les questions de l'exécution de la
20 peine, la façon de savoir comment celle-ci va s'exécuter, s'il s'est bien
21 comporté en prison, il aura de bons points si vous voulez. S'il a un bon
22 comportement après le prononcé de la première peine, il sera peut-être
23 libéré après les deux tiers de l'exécution, mais ceci ne concerne pas sa
24 responsabilité s'agissant des crimes qu'il a commis. C'est ce que nous
25 avons dit dans l'appel Celebici, et c'est de cette façon-là que je
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1 comprends la décision ultime rendue aussi bien dans l'affaire Kvocka, que
2 dans l'affaire Celebici.
3 Je vous remercie. Voilà les points que je souhaitais porter à votre
4 intention. Je vous remercie. Je vous demande l'autorisation de passer la
5 parole à Mme Jarvis pour traiter des derniers aspects de la réponse du
6 Procureur.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous prie, Madame Jarvis.
8 Mme JARVIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Mesdames,
9 Messieurs les Juges. Pour commencer, en réponse à vos questions, Monsieur
10 le Juge Schomburg, s'agissant des conclusions que l'on trouve dans le
11 jugement au sujet du comportement discriminatoire de Cerkez, je vous
12 renverrais au paragraphe 830 et 831. Pour résumer, la Chambre de première
13 instance a déduit la réalité de ses intentions, de sa participation à la
14 compagne de persécution. Ceci est-il acceptable ? Oui, car la jurisprudence
15 du Tribunal est, tout à fait, clair à cet égard. En effet, lorsque tous les
16 moyens de preuve révèlent que c'est la seule déduction à tirer, il est
17 permis d'en déduire la réalité, l'existence de cette intention délictueuse.
18 Dans la grande majorité des affaires, l'absence d'une déclaration expresse
19 de la part de l'accusé, la déduction est le seul moyen de prouver
20 l'existence d'une intention.
21 Les paragraphes 830 et 831 ne sont pas très longs, mais ce sont des
22 paragraphes qui confirment ces conclusions, notamment lorsqu'on tient
23 compte des paragraphes qui précédent où il est question des très nombreux
24 moyens de preuve qui ont permis, à la Chambre de première instance, de
25 parvenir à cette conclusion au sujet de l'existence d'une telle intention.
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1 La Chambre de première instance a, très certainement, démontré, à deux
2 reprises récemment dans l'affaire Vasiljevic et l'affaire Krstic, qu'elle
3 se préoccupait de la suffisance des moyens de preuve pour démontrer
4 l'existence d'une intention sur la base de la connaissance du fait qu'un
5 accusé avait participé à un crime.
6 Quant à la ligne de démarcation entre le fait d'aider et encourager d'une
7 part, et le fait de participer à une entreprise criminelle commune de
8 l'autre, quelle est la situation de M. Cerkez ? Est-elle différente de ce
9 qui a été évoqué dans ces deux affaires ? Dans l'affaire Vasiljevic, la
10 Chambre d'appel n'a pas été convaincue que l'accusé connaissait l'objectif
11 criminel assigné aux meurtres des hommes musulmans sur les rives de la
12 Drina jusqu'à très peu du temps avant la commission des actes en question.
13 Son comportement par la suite, du point de vue de la Chambre d'appel, n'a
14 pas démontré sans équivoque qu'il avait accepté cette intention partagée.
15 Il était, si vous voulez, dans l'ignorance de l'objectif des autres
16 participants à l'entreprise jusqu'à la toute dernière minute. Ce n'est pas
17 le cas de M. Cerkez, il avait les yeux grands ouverts. Il connaissait,
18 parfaitement bien, l'objectif assigné aux attaques auxquelles il a
19 participé et, dans lesquelles, il a engagé ses forces qui visaient la
20 population musulmane pour la seule raison que les membres de cette
21 population appartenaient aux groupes auxquels ils appartenaient, et qu'il a
22 donné l'ordre à ses hommes de commettre les crimes commis.
23 L'affaire Krstic à présent. Encore une fois, la Chambre d'appel a fait
24 preuve d'une grande précaution en examinant les circonstances entourant la
25 participation informée qui pourrait permettre de tirer les conclusions qui
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1 ont été tirées au sujet des intentions de l'auteur des actes concernés.
2 Krstic connaissait l'entreprise visant au génocide qui était menée par
3 l'état-major de l'armée des Serbes de Bosnie à Srebrenica, la Chambre
4 d'appel a estimé que ses actes étaient sans équivoque à ce sujet. En tant
5 que commandant du corps de la Drina, il a autorisé l'intervention de son
6 corps qui a aidé à la commission des meurtres, mais il n'a pas déployé les
7 troupes en vue de commettre, effectivement, des crimes. Ce n'est pas le cas
8 de M. Cerkez. En effet, ce sont les troupes de M. Cerkez, qui étaient
9 commandées par lui, dans sa zone de responsabilité, sur le territoire de
10 Donja Veceriska, Vitez et Stari Vitez qui ont, délibérément, pris pour
11 cible la population musulmane au cours d'actions de nature discriminatoire.
12 Cerkez n'a pas envoyé ses hommes sur le terrain avec instruction de viser
13 avec soin, uniquement, des objectifs militaires. Il les a envoyés sur le
14 terrain avec des ordres express de prendre pour cible les civils musulmans
15 et les maisons musulmanes. Les civils croates et les maisons croates
16 devaient être exclus, ils ne devaient pas être pris pour cible. Il n'y a
17 aucun doute à ce sujet.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre,
19 mais ceci est une affaire, tout à fait, capitale dans le présent procès.
20 Vous venez de dire qu'il a envoyé les hommes sur le terrain avec ordres
21 express de tirer sur les civils musulmans et les maisons musulmanes. Où
22 est-ce que vous trouvez cela dans le jugement ou dans les moyens des
23 preuves qui vous ont été soumis ?
24 Mme JARVIS : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la seule
25 déduction possible sur la base des moyens de preuve. La Chambre de première
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1 instance a admis qu'un plan d'attaque coordonné existait, et ceci,
2 d'ailleurs, va dans le sens de ce qu'a dit mon confrère M. Farrell, il y a
3 quelques instants. Il vous a parlé de la nature de ce plan criminel commun.
4 Cette déduction émane du fait que les crimes, faisant partie de cette
5 entreprise criminelle commune, ont été répétés en de très nombreux
6 endroits, c'est-à-dire dans tous les villages dont il a été question au
7 cours du procès, y compris dans la municipalité de Vitez, y compris dans
8 les villages où la Brigade de Vitez, commandée par M. Cerkez, a mené ses
9 opérations.
10 Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, la Chambre de
11 première instance fait remarquer, au paragraphe 831 du jugement, que les
12 crimes auxquels a participé la Brigade de Vitez ont constitué un moment
13 très important dans cette campagne de persécution. L'Accusation estime que
14 le fait que les atrocités les plus graves aient été commises dans la zone
15 de responsabilité de
16 M. Cerkez n'est pas le fait du hasard. En effet, ce n'est pas le fait du
17 hasard de constater que la brigade a participé à cette campagne, notamment
18 à Vitez, comme démontré par les documents dont il est question aux
19 paragraphes 688 à 702 du jugement : "Ce n'est pas un hasard de constater
20 que dans ces villages, les pires atrocités ont eu lieu," paragraphe 689(D).
21 Ceci est inscrit au jugement. "Ahmici, 70 % exécuté; Donja Veceriska, 70 %
22 exécuté."
23 Non, M. Cerkez savait parfaitement bien qu'il s'engageait ainsi que sa
24 brigade dans une campagne à part entière, et il savait très bien qu'il
25 rendait compte au colonel Blaskic de la progression d'une opération de
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1 nettoyage ethnique dans la municipalité de Vitez. Il avait les yeux grands
2 ouverts, mais il a continué à agir quelles que soient les circonstances.
3 Je souligne, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, que M.
4 Cerkez n'agissait pas dans le vide. Tout Musulman de Bosnie, tout Croate de
5 Bosnie, vivant dans la vallée de la Lasva entre 1992 et 1993, connaissaient
6 la situation. Ils savaient que les tensions s'étaient aggravées entre les
7 deux communautés. Ils savaient que le HVO s'était emparé d'un certain
8 nombre de municipalités à partir de 1992. Ils savaient tout ce qui se
9 passait. Ils connaissaient les actes de violence de plus en plus graves,
10 ainsi que les actes d'intimidation qui étaient commis contre la population
11 musulmane de Bosnie.
12 M. Cerkez n'est pas simplement arrivé dans la municipalité de Vitez le 15
13 avril 1993. Il avait, avant cela, commandé en tant que numéro deux de
14 l'état-major de Vitez, et il avait également agi en tant que numéro deux de
15 la Brigade Stjepan Tomasevic à partir d'octobre 1992 et jusqu'à février
16 1993. Ceci figure au paragraphe 594 du jugement. A partir de mars 1993, il
17 commandait la Brigade de Vitez.
18 Il se trouvait sur les barricades d'Ahmici en octobre 1992, et plus d'un
19 témoin au cours du procès a attesté du fait que M. Cerkez avait proféré des
20 menaces graves, parlant de mettre le feu à la municipalité si la barricade
21 n'était pas déplacée. Ceci figure aux paragraphes 532 à 533. L'Accusation
22 enfin, dans son mémoire ultime avant le procès, au paragraphe 93, évoque ce
23 fait.
24 Au fur et à mesure que les rapports se dégradaient entre les Croates de
25 Bosnie et les Musulmans de Bosnie en janvier 1993,
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1 M. Cerkez a commencé à menacer de pilonner Vitez si l'ABiH n'acceptait pas
2 les exigences du HVO. Ceci figure au paragraphe 594.
3 Le soir du 15 avril, M. Cerkez a assisté à la réunion de la commission
4 conjointe qui a traité des incidents survenus jusqu'à ce moment-là, et a
5 fourni des assurances qui ont permis de croire qu'il n'y aurait pas
6 d'attaque du HVO. Ceci figure dans les éléments de preuve liés au Témoin G,
7 et au paragraphe 609 du jugement.
8 La duplicité de ce comportement est bien apparue à la Chambre de première
9 instance, référence paragraphe 610 du jugement, où les Juges font remarquer
10 que cet après-midi-là, Cerkez a assisté à la réunion des commandants
11 militaires, Pasko Ljubicic, Anto Sliskovic, Darko Kraljevic, et que c'est à
12 cette réunion que l'attaque dans la municipalité de Vitez le lendemain
13 matin, a été planifiée.
14 Veuillez prendre en compte, Mesdames, Messieurs les Juges, le rôle de la
15 Brigade de M. Cerkez par rapport à Ahmici. M. Farrell vient de souligner ce
16 fait. Ce rôle consistait à empêcher la FORPRONU d'entrer dans Ahmici. Il
17 connaissait les ordres liés à un objectif de nettoyage ethnique. Je prie
18 les interprètes de m'excuser pour mon débit trop rapide.
19 La Brigade de Vitez s'est trouvée à Ahmici plus tard le 16 avril, et a
20 participé à l'arrestation des civils musulmans dans ce village. M. Cerkez a
21 rendu compte de la progression de la campagne à Ahmici. Il est apparu
22 manifestement aux yeux de tous qui ont constaté les conséquences de
23 l'opération d'Ahmici qu'un massacre avait eu lieu dans ce village. Est-ce
24 que M. Cerkez a exprimé son horreur ? Est-ce qu'il s'est dit scandalisé ?
25 Est-ce qu'il a exigé des explications ? Est-ce qu'il a refusé d'être
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1 associé à ce qui allait suivre de la part du HVO ? Il n'a rien fait de tout
2 cela. En fait, en mai 1993, nous voyons que M. Cerkez est de nouveau irrité
3 par rapport à l'ABiH et menace de mettre le feu à Kruscica. Ceci figure au
4 paragraphe 694 du jugement.
5 Veuillez également prendre en compte les moyens de preuve liés à M.
6 Breljas, paragraphe 807(i) du jugement, où l'on voit que des vagues
7 coordonnées de pillages se produisent sous l'effet des actions des membres
8 de la Brigade de Vitez et de Vitezovi. Cerkez commandait cette brigade. Que
9 pensait-il de tout cela ?
10 Ajoutez à cela le rôle joué par M. Cerkez dans l'emprisonnement et la
11 commission de crimes lié à la détention. Le fait que M. Cerkez ait commandé
12 la Brigade de Vitez n'est rien par rapport au mauvais traitement subi par
13 les détenus musulmans, et tout cela est pertinent pour apprécier
14 l'intention discriminatoire globale qui s'est manifestée à ce moment-là.
15 Ce qui est plus grave encore, c'est que, lorsqu'on examine les moyens de
16 preuve liés à la participation personnelle de M. Cerkez à ces mauvais
17 traitements vis-à-vis des détenus, je parle du paragraphe 784(b du
18 jugement. Egalement, du paragraphe 801, on voit que la Chambre de première
19 instance a admis les moyens de preuve liés au Témoin AT, selon lesquels M.
20 Cerkez, en tant que commandant de la Brigade de Vitez, avait envoyé les
21 prisonniers musulmans creuser des tranchés. (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
Page 553
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, M. Cerkez n'a pas
4 agit dans le vide. Il savait parfaitement bien qu'une campagne de
5 persécution était en cours contre la population musulmane bosniaque de
6 Vitez. Il a continué à y participer en déployant, notamment, ses troupes
7 dans cette région afin et dans le but d'exécuter les actes qui étaient
8 destinés à constituer une violation des droits fondamentaux des Musulmans,
9 et ce, pour la simple raison que les Musulmans appartenaient au groupe
10 auquel ils appartenaient.
11 Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, j'aimerais revenir
12 brièvement à la question que vous avez posée au sujet du fait que j'aurais
13 trouvé ou pas des arguments à l'appui de l'affirmation que M. Cerkez avait
14 effectivement déployé ses troupes dans le but d'obtenir, de ses hommes, la
15 commission d'actes criminels sur le terrain. Encore, au paragraphe 830, la
16 Chambre de première instance a estimé que les unités sous ses ordres
17 avaient participé à des actes de persécution. Monsieur le Président,
18 Mesdames, Messieurs les Juges, j'affirme qu'il est impossible d'interpréter
19 autrement ce qui s'est passé, et que ceci montre de façon très
20 convaincante, qu'il connaissait parfaitement l'objectif du déploiement de
21 ses troupes, et que cet objectif était la commission de crimes faisant
22 partie de l'entreprise criminelle commune.
23 Un point de procédure, je vous prie, Monsieur le Président. J'ai parlé de
24 la déposition du Témoin AT. Or, il faut expurger cela du compte rendu
25 d'audience, page 17, ligne 14.
Page 554
1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Madame la Greffière, pouvez-vous
2 veiller à cela, je vous prie.
3 Mme JARVIS : [interprétation] Excusez-moi, il s'agit de tout ce paragraphe.
4 Merci. Toutes mes excuses pour n'avoir pas pensé à cela.
5 Monsieur le Président, un dernier point, si vous me le permettez. Les
6 motivations de M. Cerkez vis-à-vis des actes qui ont été commis, le fait de
7 savoir si personnellement il était animé par une haine due à des motifs
8 ethniques n'a guère d'importance, car le fait de savoir s'il tirait une
9 satisfaction personnelle de la campagne de persécution ou s'il a agit parce
10 qu'il voulait garder son emploi. Tout cela n'a guère d'importance. En
11 effet, la Chambre d'appel Krnojelac fait remarquer au paragraphe 100 que :
12 "L'intention criminelle partagée, pour être prouvée, n'exige pas que soit
13 démontré la satisfaction personnelle du co-auteur ou son enthousiasme ou
14 son initiative personnelle dans la commission des crimes faisant partie de
15 l'entreprise criminelle commune." En effet, les normes appliquées
16 s'agissant de démontrer l'intention sont appliquées à tous les membres des
17 unités militaires organisées concernées. Ce n'est pas un individu qui peut
18 agir avec le but de commettre une infraction par rapport aux droits
19 fondamentaux de la personne pour la seule raison que cette personne
20 appartient à un groupe politique ou religieux. Le fait qu'elle porte
21 l'uniforme ou qu'elle fonctionne dans le cadre d'une hiérarchie ne peut pas
22 exonéré le responsable de la responsabilité par rapport à ce crime.
23 Monsieur le Président, si l'un ou l'autre ici entretient le moindre doute
24 quant au fait que M. Cerkez partageait les intentions en question, nous
25 parlerons du fait que, bien sûr, il portait des vêtements civils au moment
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1 où il a organisé et donné des consignes à un groupe d'hommes de se rendre à
2 un endroit précis pour commettre des crimes, mais qu'il exerçait une
3 position de commandement, et que ceci ne peut en aucun cas réduire la
4 portée de son intention partagée. En fait, cela aggrave encore l'importance
5 des actes commis par lui. En tant que commandant, il était chargé d'une
6 responsabilité particulière : celle de protéger les normes de la décence
7 humaine au cours d'un conflit armé. Il s'est servi de sa position de
8 commandement pour agir exactement dans le sens inverse.
9 Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, ceci m'amène à la fin
10 de mon propos au sujet de l'intention délictueuse vis-à-vis de la campagne
11 de persécution. J'ai maintenant encore quelques remarques à faire sur la
12 question du conflit armé international.
13 Deux points, en fait, Monsieur le Président, qui émanent de questions
14 posées par le Juge Pocar à mes confrères hier, et ceci, au sujet du test
15 lié au contrôle global.
16 Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges, la raison pour
17 laquelle la Chambre d'appel Tadic a estimé que le test de contrôle effectif
18 dans l'affaire Nicaragua n'était pas le test adapté, c'est que la Chambre
19 d'appel a examiné la situation de la pratique judiciaire à ce moment-là et
20 a conclu que l'objectif de déterminer si oui ou non il convenait
21 d'attribuer les actes d'un groupe militaire ou paramilitaire à un état
22 était le critère pertinent par rapport au droit international coutumier, et
23 que ce critère ne pouvait se fonder que sur le concept de contrôle global.
24 Le contrôle effectif, qui était le critère appliqué dans l'affaire
25 Nicaragua, de l'avis de la Chambre d'appel, pouvait s'appliquer à d'autres
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1 catégories d'individus ou de groupes qui n'étaient pas organisés de la même
2 manière, mais pas aux groupes militaires et paramilitaires. Le critère du
3 contrôle global, de l'avis de la Chambre d'appel, est celui qui s'applique
4 dans le droit international coutumier lorsque ce genre d'acte a été commis.
5 C'est la raison pour laquelle la Chambre d'appel Tadic a admis que l'accusé
6 Tadic pouvait être condamné sur la base de ce critère pour les actes qui se
7 sont produits en 1992.
8 Deuxièmement, le rapport entre ce Tribunal et la Cour internationale de
9 Justice. Ce sujet a déjà été traité par la Chambre d'appel Celebici, au
10 paragraphe 24 de son arrêt. La Chambre d'appel en question a rejeté
11 précisément les arguments selon lesquels le Tribunal était lié et tenu de
12 suivre les décisions de la Cour internationale de Justice. Il n'y a aucun
13 rapport hiérarchique entre ces deux instances et aucune raison imposant à
14 ce Tribunal de ne rien décider qui s'écarte des conclusions prises par
15 l'autre Tribunal au sujet du droit appliqué.
16 Le principe du nullum crimen sine lege, encore une fois, il a été examiné
17 et traité par la Chambre d'appel Aleksovski, paragraphes 126 à 127 de son
18 arrêt. La Chambre d'appel en question a déclaré que cet argument, dans la
19 présente affaire, était identique aux arguments que vous avez déjà entendus
20 en appel et qu'il convenait de ne pas faire d'erreur d'interprétation sur
21 ce principe. En effet, rien dans ce principe n'empêche d'interpréter le
22 droit comme l'a fait la Chambre de première instance en l'espèce. La même
23 appréciation s'applique aux arguments évoqués par M. Cerkez.
24 M. Cerkez a, en effet, présenté des arguments au sujet des moyens de preuve
25 nombreux examinés par la Chambre de première instance qui lui ont permis de
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1 conclure que le conflit armé était bien un conflit international. Il n'a
2 pas commenté les très nombreux moyens de preuve sur lesquels la Chambre de
3 première instance s'est appuyée pour parvenir à la conclusion que la
4 Croatie avait exercé un contrôle global. Je ne veux pas rentrer dans les
5 détails de tous ces arguments, mais je suis à votre disposition si vous
6 avez des questions particulières à me poser, bien entendu.
7 Je vous remercie. Ceci met un terme aux arguments de l'Accusation.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Je donne
9 maintenant la parole à la Défense de M. Cerkez.
10 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Je commencerai par répondre brièvement, en fait très brièvement, aux
12 arguments qui ont été présentés par l'Accusation hier et aujourd'hui dans
13 ce prétoire, après quoi mon confrère me succédera pour parler de
14 l'entreprise criminelle commune, ou plutôt, des arguments de l'Accusation
15 aujourd'hui qui, en fait, manifeste une légère modification par rapport aux
16 arguments qu'elle a développés au cours du procès en première instance.
17 Maintenant, je m'exprimerai en Croatie, si vous le voulez bien. Ceci est
18 plus facile pour moi.
19 Hier, il a été dit que le combat qui a eu lieu au sujet du temps qui s'est
20 écoulé entre le moment où Cerkez a été convoqué à la noce à laquelle il
21 participait pour se rendre au QG en ville. Le moment de sa déposition était
22 important. J'ai pris la parole, en première instance, pour développer un
23 certain nombre d'arguments qui tous s'appuyaient sur les moyens de preuve
24 existants. Un moyen de preuve existe pour démontrer à quel moment la noce
25 devait avoir lieu et il y a un autre moyen de preuve, la pièce 610, qui
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1 montre exactement à quel moment la réunion était prévue au QG.
2 Ces pièces à conviction sont la pièce D94/2, le témoignage de Stipo Ceko,
3 page 2 349; l'affidavit de Ruza Ceko; la déposition de Drago Pranjes,
4 compte rendu d'audience page 26 127; et il y a également un moyen de preuve
5 direct. Je sais bien que c'est une pièce à conviction de qualité différente
6 en l'espèce, mais il convient tout de même de la mentionner. Il s'agit de
7 la déposition du Témoin V1 dans l'affaire Kupreskic, page 1 136 du compte
8 rendu d'audience. Ce sont des moyens de preuve qui se complémentent les uns
9 les autres et qui prouvent, sans l'ombre d'un doute, où se trouvait Cerkez
10 au moment en question.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre,
12 mais je suppose que vous savez parfaitement bien que des dépositions faites
13 dans d'autres affaires ne peuvent pas compter au nombre des moyens de
14 preuve sur lesquels nous nous fondrons pour procéder à notre appréciation
15 des faits, n'est-ce pas.
16 M. KOVACIC : [interprétation] Absolument, Monsieur le Président, mais je
17 pensais qu'il y avait tout de même quelques chances hypothétiques au moins
18 que la Chambre d'appel puisse, proprio motu, prendre en compte certains
19 éléments que l'on trouve dans ces documents, mais bien sûr, il ne s'agit
20 pas de moyens de preuve en l'espèce.
21 Cependant, les autres moyens de preuve, la déposition de Stipo Ceko, Ruza
22 Ceko, et les documents à l'appui de ces dépositions sont des documents qui
23 montrent, sans l'ombre d'un doute, que le mariage avait été prévu au moment
24 indiqué, c'est-à-dire, deux mois avant, et le fait est que Cerkez, par
25 conséquent, n'a pas pu, le jour en question, se rendre à la réunion où il
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1 est présumé que le plan aurait été établi.
2 Je reviens maintenant un peu en arrière parce que l'Accusation a beaucoup
3 parlé de cela dans tous ses aspects. L'Accusation a beaucoup parlé de cette
4 réunion comme constituant un moment tout à fait crucial, s'agissant
5 d'établir le plan en question. Cerkez - je dois le souligner, et nous
6 l'avons répété à de nombreuses reprises en première instance - était au
7 courant des opérations militaires menées dans la vallée de la Lasva et à
8 Vitez le 16 avril. Ses informations, il les a acquises dans la journée.
9 Nous pouvons parler de ce qui s'est passé tôt ce matin-là. Cerkez a reçu
10 une partie des ordres verbalement durant la nuit. Il ne savait pas - et
11 aucun moyen de preuve ne permet de le démontrer - que des crimes étaient
12 planifiés et qu'ils devaient être commis.
13 Ici, j'aimerais dire quelques mots élémentaires. Dans le jugement, il est
14 dit très clairement que s'agissant d'Ahmici, Cerkez a été acquitté. Le fait
15 que l'Accusation ait établi un lien entre la présence de ces unités à
16 certains endroits et la commission de certains actes, que nous disions que
17 les moyens de preuve présentés ne prouvent pas ce fait, de tout façon, est
18 une question tout à fait différente. Nous disons que le 16 avril, le crime
19 d'Ahmici n'a rien à voir avec Cerkez ou les unités sous ses ordres.
20 A ce propos, je voudrais revenir sur le paragraphe 689 du jugement. J'en ai
21 parlé hier. L'Accusation a repris ce sujet dans sa réponse. Dans ce
22 paragraphe du jugement, nous trouvons un certain nombre de sous-
23 paragraphes, (a) à (f), qui constituent la base d'un certain nombre de
24 conclusions tirées par la Chambre.
25 Pour ma part, j'ai évoqué les moyens de preuve dont on trouve mention aux
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1 sous-paragraphes (a) et (c) du paragraphe 689 du jugement. Le point (a), on
2 n'en fait pas état dans la procédure. Le (c), à notre avis, est lié à la
3 question de l'authenticité. Nous en avons parlé en première instance. Rien
4 dans les moyens de preuve ne prouve l'authenticité des moyens évoqués à
5 (c). Je ne vais rentrer dans le détail aujourd'hui. Je le rappelle, nous
6 avons, souvenez-vous de cela, détaillé nos arguments sur ce sujet dans
7 notre requête, page 53 et 59 de notre mémoire en appel. Nous avons
8 également répondu aux arguments du Procureur à ce sujet, pages 30 à 38 et
9 page 49 de notre mémoire.
10 S'agissant à présent des éléments qui sont évoqués au (b) du paragraphe 689
11 du jugement par l'Accusation, j'aimerais rappeler aux Juges de la Chambre
12 d'appel les conclusions que l'on trouve au paragraphe 698 du jugement. Il
13 est question à ce niveau d'un grand nombre d'éléments importants, y compris
14 les diverses citations qui figurent, les divers documents qui sont cités,
15 les divers moyens de preuve qui sont cités, au (d) du paragraphe 689.
16 J'invite également les Juges à relire l'intégralité de (e) et (f) du même
17 paragraphe. De quoi s'agit-il là ? La Chambre de première instance a
18 manifestement admis les moyens de preuve de l'Accusation, le témoignage de
19 Josip Zuljevic, ou plutôt, je vous prie de m'excuser, les arguments de la
20 Défense, bien entendu, et les moyens de preuve de la Défense, notamment la
21 déposition de Josip Zuljevic, qui a été cité ici même hier, qui a été
22 admise par la Chambre de première instance. Car lorsque la Chambre de
23 première instance rejette les arguments de la Défense, elle le dit
24 expressément.
25 Josip Zuljevic décrit en détail les événements. Dans cette déposition
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1 intégralement acceptée par la Chambre de première instance, il est question
2 d'un certain nombre de détails.
3 Zuljevic a dit que le 16 avril au matin, le chaos le plus grand régnait,
4 que Blaskic exige de Cerkez et de ses subordonnés, qui étaient les seuls
5 représentants locaux connaissant bien la situation sur le terrain à ce
6 moment-là, de fournir des informations au sujet de cette situation.
7 Zuljevic a dit explicitement, je cite, "On nous a dit d'appeler nos
8 voisins, nos amis, les responsables de service dans d'autres unités pour
9 obtenir des renseignements par tous les moyens possible. Nous devions
10 transmettre ces renseignements à Blaskic." Ceci est tout à fait clair, ceci
11 est confirmé par le paragraphe que je viens de citer. La Chambre de
12 première instance a très bien compris la chose. C'est la raison pour
13 laquelle, dans le jugement, aucun lien n'est établi entre Cerkez et Ahmici
14 au paragraphe 689 du jugement sur lequel je reviens une nouvelle fois.
15 Il apparaîtrait que Cerkez se trouvait à Ahmici; cependant, les Juges en
16 première instance ont bien compris la valeur, la signification,
17 l'importance du moyen de preuve dont je viens de parler, car vous voyez
18 qu'ils ne poursuivent pas dans le sens en question. Le paragraphe 689. J'ai
19 lié à ce paragraphe deux documents qui ont été évoqués par moi hier dans ce
20 prétoire ainsi que d'autres renseignements, montrent clairement, comme le
21 fait la déposition de Josip Zuljevic, que Cerkez ne peut pas être lié à
22 Ahmici. Je rappelle paragraphe 689 du jugement, le témoignage de Zuljevic,
23 importance des renseignements qui établissent toute la clarté sur ce point,
24 et qui venaient des hommes sur le terrain.
25 Le village de Donja Veceriska, maintenant. Il a été dit que
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1 70 % du travail avait été fait. Ceci est le meilleur renseignement qu'on
2 puisse invoquer à ce sujet. Non, attendez. Je regarde le document, c'est
3 Blaskic qui s'exprime. Avançons, passons à autre chose. Je pense qu'il
4 n'est pas utile de s'appesantir sur ce point, car de toute façon, les
5 arguments du Procureur ne tiennent pas.
6 Le Procureur affirme que Cerkez a été vu le 15 avril dans la soirée à
7 l'hôtel. C'est le Témoin AT qui dit cela. Nous ne le contestons pas. Il est
8 venu après la réunion. Le Témoin AT se trouvait à l'hôtel. Effectivement,
9 il pouvait le voir. Lui, il est venu après la réunion militaire. Le fait
10 que le Témoin AT l'a vu, ne suffit pas pour dire qu'il a été prouvé, qu'il
11 est possible de conclure qu'il a assisté à la réunion qui a eu lieu à
12 l'hôtel, puisque l'hôtel était un lieu public où les troupes se
13 regroupaient. Ceci ne peut pas nous permettre de conclure qu'il a été à la
14 réunion, et encore moins ce qui a été dit lors de la réunion. Personne ne
15 le sait, aucune preuve concernant cela n'existe.
16 Le Témoin AT lui-même a dit un peu plus tard dans sa déposition que la
17 première fois que les meurtres des hommes ont été mentionnés, a été
18 seulement lors de la réunion qui a eu lieu à Nadioci; après le départ des
19 militaires et non pas au préalable, au quarter général de la police
20 militaire.
21 A un moment donné, je ne sais pas si c'était une erreur de la part du
22 Procureur, lorsqu'il a dit que le Procureur était d'accord pour dire que
23 Cerkez était à Kruscica. C'était son poste auquel il a été déployé ce jour-
24 là. Ce jour-là, il n'y a pas eu d'affrontement entre les deux armées. Ce
25 village n'a même pas été attaqué. Si le Procureur est d'accord pour dire
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1 que Cerkez a été à Kruscica, compte tenu des ordres qui ont été donnés au
2 quartier général de la brigade, dont ce que là, il est évident que Cerkez
3 ne pouvait être ailleurs les premiers jours du conflit.
4 Ils ont attiré l'attention sur un point du paragraphe 688. Mais 688, porte
5 simplement sur un certain nombre d'arguments; il ne s'agit pas d'une
6 conclusion là-dedans. Ensuite, référence faite des faits, au paragraphe 595
7 du jugement. La Chambre de première instance a constaté que la Brigade de
8 Vitez a été constituée le 24 mars 1993, et que Cerkez était son commandant.
9 Oui, nous sommes d'accord. Nous avons admis cela dans le mémoire préalable
10 au procès déjà. Nous soulignons le fait que la brigade a été constituée
11 seulement vers la fin du mois de mars. Compte tenu de conditions de vie et
12 les circonstances générales qui régnaient à l'époque, nous ne pouvons pas
13 s'attendre qu'entre fin mars et le 16 avril, la brigade pouvait être
14 totalement organisée.
15 Nous avons entendu une référence aux bataillons de cette brigade qui ont
16 été déployés dans des villages différents, ceci est lié la pièce Z653. Au
17 moins dix témoins, y compris le Témoin Bertovic, témoins qui ont vécu et
18 qui ont travaillé là-bas, et le Témoin Bertovic a été un témoin tout à fait
19 impressionnant. Ces témoins-là ont expliqué quelle était la signification
20 de ce document. Ce document servait simplement à titre d'information,
21 c'était l'évaluation de ce Témoin Bertovic concernant les possibilités
22 potentielles de mobiliser les troupes de certains villages afin de
23 remplacer ceux qui se trouvaient sur la ligne de front contre la JNA. Il
24 n'y avait pas de bataillon. Nous avons passé beaucoup de temps au cours du
25 procès concernant cela, et la Chambre de première instance a compris cela
Page 564
1 complètement. Elle a accepté. Maintenant le Procureur revient sur ce même
2 sujet.
3 Ce document n'a absolument pas la valeur et la signification que le
4 Procureur lui prête. Nous devons lire les déclarations de témoins qui
5 indiquent clairement ce que ce document souhaite dire, et la Chambre de
6 première instance a accepté cela. Nous pouvons voir cela sur la base de
7 leurs conclusions.
8 Ensuite, le Procureur fait référence au paragraphe 596 du jugement portant
9 sur le fait qu'il y avait plusieurs bataillons au sein de la brigade. Je ne
10 souhaite pas élaborer sur ce point. Mais je souhaite simplement attirer
11 votre attention sur le paragraphe 26(a), à la page 58 de mon mémoire. Dans
12 ce paragraphe 596, référence est faite au colonel Duncan, qui dit qu'il
13 suppose qu'il y avait plusieurs bataillons. Mais Duncan est venu à Vitez au
14 mois de mai lorsqu'effectivement, il y avait plusieurs bataillons au sein
15 de la brigade. Duncan ici dit explicitement qu'il supposait que la brigade
16 avait plusieurs bataillons. Effectivement, c'était le cas en mai, mais non
17 pas en avril. Or, c'est le mois d'avril qui fait l'objet de l'acte
18 d'accusation.
19 Il est possible de parler seulement de cette période-là, lorsque l'on parle
20 de la culpabilité éventuelle de M. Cerkez.
21 En ce qui concerne le niveau de l'organisation de la brigade, je souhaite
22 attirer votre attention sur notre mémoire d'appelant, paragraphe 26, page
23 58, et nous souhaitons attirer votre attention notamment sur les témoins
24 Badrov, Sajevic, Ceko et Bertovic.
25 Paragraphe 696 où la conclusion contenue dans ce paragraphe a été indiquée
Page 565
1 par le Procureur, nous sommes d'accord avec tout ce qui est écrit dans ce
2 paragraphe.
3 Le Témoin Buffini y est cité, et l'on y parle de la commission mixte de
4 Busovaca qui avait pour but de maintenir le cessez-le-feu. Cette
5 commission a d'ailleurs, et de nombreux éléments de preuve corroborent
6 cela, a commencé à fonctionner seulement vers le 21 avril. Je ne suis pas
7 sûr en ce qui concerne la date tout à fait. Effectivement, Cerkez a
8 participé au travail de cette commission en tant que représentant du HVO à
9 Vitez puisque Blaskic l'a nommé à ce poste.
10 On peut voir dans ce paragraphe que dans cette commission également a été
11 représenté Franjo Nakic, qui était le chef d'état-major avec Blaskic ou
12 Mario Cerkez en fonction des sujets qui ont été débattus là-bas. Il n'y a
13 rien de répréhensible là-dedans, et je ne vois pas ce à quoi le Procureur
14 veut en venir.
15 Mon éminent collègue, M. Farrell, a également mentionné les paragraphes
16 807, sous-paragraphes 1 à 2 portant sur les chefs d'accusation 41, le plan
17 commun. Je pense que ceci n'est pas du tout approprié car les charges
18 contre Cerkez, portant sur la destruction et les pillages se limitent au
19 mois d'avril 1993. Or, ces deux paragraphes portent sur les incidents qui
20 ont eu lieu en octobre 1993 et janvier 1994. Or, s'agissant de ces
21 périodes-là, Cerkez n'a pas été accusé et il ne s'est pas défendu par
22 rapport à cela. Il n'existe pas de lien entre cela et le chef 41.
23 Ensuite, paragraphe 644, Breljas, on fait référence à Breljas à plusieurs
24 reprises, et on l'a mentionné également aujourd'hui. Nous n'avons pas
25 suffisamment de temps pour entrer dans les détails en ce qui concerne cela,
Page 566
1 mais je souhaite rappeler à la Chambre d'appel que nous avons analysé
2 Breljas en détail et nous avons relevé les incohérences dans sa déposition
3 dans les pages 59, 60, 87, et 100, et également dans les pages 81, note en
4 bas de page 217, ensuite page 87, note en bas de page 226. Je ne vais pas
5 parler plus de cela, mais vous allez voir que ceci est absolu impertinent.
6 Paragraphe 643, colonel Watters. Il y est écrit que le colonel Watters a
7 interrogé le commandant de la Brigade de Vitez de même que le commandant
8 des Musulmans. Ce qui n'a pas été indiqué hier, mais vous pouvez lire cela
9 vous-même et les mots du colonel Watters sont cités, il dit : "Les deux
10 parties disent qu'elles ont été attaquées par la partie adverse."
11 Cette conclusion n'est pas défavorable pour Cerkez. Bien sûr, qu'elles ont
12 été attaquées puisque la guerre a commencé ce jour-là entre ces armées,
13 mais il ne s'agit pas d'attaque contre les civils. Il n'y a pas de telle
14 conclusion dans ce paragraphe.
15 Mais qu'on mentionne ce témoin, qui était un témoin tout à fait
16 intéressant, la Chambre de première instance a tiré beaucoup de conclusions
17 sur la base de sa déposition. Je souhaite également attirer votre attention
18 sur la pièce à conviction D57/1, il s'agit de la lettre de ce témoin à son
19 père, et je cite sa lettre dans mon mémoire d'appelant à la page 104,
20 concernant le prononcé de la peine. Je pense qu'il s'agit là d'un élément
21 humainement le plus valable parmi tout ce qui a été versé au dossier dans
22 ce procès.
23 Ensuite le Procureur a mentionné le témoin Krunoslav Bonic. Nous avons
24 perdu beaucoup de temps au cours du procès, compte tenu du fait qu'il a
25 fallu faire face à une affirmation et nous avons tous perdus beaucoup de
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1 temps face à cela, alors que ceci n'a même pas été pris en compte par la
2 suite par la Chambre de première instance. Je souhaite simplement dire que
3 le Procureur a dit que certaines personnes étaient mentionnées en tant que
4 membres de la brigade, et on a perdu énormément de temps sur ce sujet. Il
5 m'est difficile d'expliquer cela maintenant.
6 Je souhaite simplement vous dire que la Chambre de première instance n'a
7 pas du tout accepté cette logique-là. Deuxièmement dans notre réponse à
8 l'appel interjeté par le Procureur, nous traitons de ces questions aux
9 pages 55 à 73.
10 Aujourd'hui, mon éminente collègue, Mme Jarvis a cité plusieurs conclusions
11 de la Chambre concernant le chef d'accusation 41. Ceci a été mentionné par
12 M. Farrell, hier également. Cependant il n'y a pas de conclusions
13 définitives se basant sur une analyse de fait.
14 Aujourd'hui, nous avons entendu parler du plan de nouveau, et je pense
15 qu'il n'est pas nécessaire que je revienne sur cela. Nous avons eu un long
16 débat au sujet de cela. Maintenant je souhaite simplement dire quelques
17 mots au sujet du blocus du pont.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vais simplement vous dire que
19 vous n'aurez pas encore beaucoup de temps. Vous aviez indiqué au début que
20 vous alliez céder la place à votre collègue également. Je souhaite vous
21 informer du fait qu'il vous reste un grand, cinq à dix minutes.
22 M. KOVACIC : [interprétation] Il me faut encore deux ou trois minutes pas
23 plus.
24 Je souhaite maintenant dire quelques mots au sujet du blocus du pont et sur
25 la base de cela, le Procureur a conclu que Cerkez a participé à un certain
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1 plan.
2 Le Témoin Bertovic a déposé en disant que bien avant que le Témoin AT
3 vienne, le Procureur a demandé au Témoin Bertovic des questions concernant
4 ce blocus. A l'époque, nous ne savions pas pourquoi le Procureur demandait
5 au témoin des questions concernant cette pause, nous n'avons rien entendu
6 avant au sujet de cela. Nous avons appris cela seulement deux mois plus
7 tard lorsque le Témoin AT est arrivé.
8 Le Témoin Bertovic a fourni une explication claire. Ce faisant, il suffit
9 de regarder la carte pour voir qu'il n'est pas du tout nécessaire de
10 fournir cette explication, même si Cerkez avait reçu un tel ordre, même si
11 le pont avait été bloqué, ceci n'aurait aucune utilité parce que de toute
12 façon la FORPRONU pouvait arriver dans la zone depuis ou trois autres
13 directions. Il s'agissait là complètement d'une affirmation absurde et il
14 est très difficile souvent de se défendre des informations absurdes.
15 Je ne vais pas parler du prononcé de la peine parce que nous n'avons pas
16 suffisamment de temps, et je vais céder la place à mon collègue.
17 M. MIKULICIC : [interprétation] Merci, je vais parler de ce qu'a dit le
18 Procureur concernant l'entreprise criminelle commune. Ensuite, concernant
19 la nature du conflit armé.
20 En ce qui concerne la première question, celle de l'entreprise criminelle
21 commune, je souhaite dire dès le départ la chose suivante : le fait de se
22 référer à cette doctrine n'est pas contenu dans l'acte d'accusation ni dans
23 les requêtes soumises avant le procès, ni au cours des dépositions ou
24 d'autres documents, ni d'ailleurs dans le réquisitoire du bureau du
25 Procureur, ni dans le jugement de la Chambre de première instance. C'est
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1 seulement maintenant au cours de la procédure d'appel que le Procureur fait
2 référence soudainement à cette doctrine de l'entreprise criminelle commune.
3 Le Procureur indique que le 15 avril, une réunion a eu lieu au quartier
4 général de Blaskic, réunion à laquelle prétendument M. Cerkez a assisté, et
5 lors de laquelle une conclusion conjointe a été faite liée à l'entreprise
6 criminelle commune.
7 Voici, ce qu'a dit le Procureur concernant cela : "Nous n'avons pas de
8 données exactes concernant cela." Mais notre collègue Mme Jarvis a dit
9 aujourd'hui qu'en appliquant la logique, le raisonnement logique est la
10 seule manière permettant de prouver ce genre d'intention. Sur la base de
11 ces propos, nous pouvons conclure que tout ce qui a suivi dans les propos
12 tenus par le Procureur ne se fonde pas sur une base ferme.
13 Nous n'avons pas entendu un seul participant à cette entreprise criminelle
14 commune. Nous n'avons vu aucun document découlant de cette prétendue
15 entreprise criminelle commune. Nous avons entendu une opinion disant que
16 notre client a été présent à l'hôtel dans lequel cette réunion avait eu
17 lieu. Sur la base de cela, on conclut que notre client a assisté à cette
18 réunion, qu'il a accepté ces buts en tant que ses propres buts, et qu'il
19 est responsable de tout ce qui découle de cette entreprise criminelle
20 commune prétendue.
21 Je pense que c'est ainsi que l'on tire tout un tas de conclusions erronées
22 sur la base d'une thèse erronée. Ceci est tout simplement erroné et
23 inadmissible. Ceci ne se fonde pas dans la réalité, il n'est absolument pas
24 corroboré par les faits et les éléments de preuve qui ont été versés au
25 dossier dans le cadre de l'affaire qui nous intéresse.
Page 570
1 La Défense de M. Cerkez affirme qu'il n'existe ni de preuves directes, ni
2 de preuves indirectes montrant qu'il y avait un plan criminel, et que lors
3 de la détermination de ce plan criminel M. Cerkez était présent, et que M.
4 Cerkez partageait l'intention des personnes qui ont participé prétendument
5 à ce plan, à la création de ce prétendu plan criminel.
6 Je sais que la théorie de l'entreprise criminelle commune est une notion
7 qui a été prise en compte au paragraphe 601 du jugement Krstic, et la
8 Chambre d'appel dans l'affaire Krstic a considéré que ceci était lié à
9 l'Article 7(1) du statut de ce Tribunal. Mais il s'agit ici d'une question
10 juridique. Or, j'affirme qu'il s'agit également d'une question de fait, et
11 j'affirme qu'il n'existe pas de faits permettant de tirer une telle
12 conclusion juridique. C'est pour cela que j'affirme que la participation à
13 l'entreprise criminelle commune n'a pas été prouvée, et que les crimes qui
14 ont eu lieu à Ahmici et dans d'autres endroits dans la vallée de la Lasva
15 ne découlent pas de ce plan prétendument concocté. J'affirme également que
16 mon client n'a rien à voir avec cela.
17 Mon éminente collègue, Mme Jarvis a parlé aujourd'hui de l'intention
18 discriminatoire de M. Cerkez. Elle a dit que la seule manière permettant de
19 tirer des conclusions était l'emploi de la logique.
20 Maintenant, je vais parler de quelques éléments de preuve incontestables
21 qui ont été versés au dossier. De nombreux témoins ont parlé des opinions
22 et des positions de M. Cerkez, qui respectait les différences entre les
23 peuples, qui respectait les gens pour ce qu'ils étaient et non pas compte
24 tenu de leurs convictions religieuses ou autres. Aucun élément de preuve
25 n'a été présenté lors du procès prouvant des idées préconçues de M. Cerkez
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1 vis-à-vis de qui que ce soit, bien au contraire. Le Procureur maintenant
2 nous dit d'appliquer la logique pour tirer ce genre de conclusions.
3 Sur la base de quoi peut-on tirer ce genre de conclusions puisqu'il n'y a
4 pas de faits dans la réalité qui corroboreraient cela.
5 Je souhaite maintenant revenir sur la question que vous avez posée,
6 Monsieur le Président. Vous avez posé la question de savoir d'où venait la
7 conclusion portant sur les ordres exprès donnés par M. Cerkez. Je vais vous
8 répondre.
9 Il n'y a pas de tels ordres donnés de manière expresse, délibérée. Tout
10 d'abord, parce que Cerkez n'a jamais donné ce genre d'ordres, et
11 deuxièmement parce qu'il n'était pas le genre de personne qui aurait --
12 fonctionnait de cette manière. M. Cerkez était un militaire. Il faisait
13 partie de la structure militaire et il exécutait les ordres conformément
14 aux normes internationales de guerre.
15 Je vous remercie de votre attention, et je suis tout à fait prêt à répondre
16 à d'autres questions si vous en avez.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Apparemment, il n'y a pas de
18 questions. Je vais maintenant demander aux parties de préparer leurs
19 devoirs au cours de la pause, c'est-à-dire, d'avoir la suite de la
20 discussion concernant les faits, les points d'accord en ce qui concerne les
21 arguments présentés par Mario Cerkez dans le cadre du contexte lié au
22 prononcé de la peine. Nous avons le rapport de
23 M. McFadden, et nous avons également à marquer la carte qui a été présentée
24 hier. C'est le Greffe qui m'en a informé. Finalement, il nous reste encore
25 un point, c'est-à-dire, les clichés et les documents qui corroborent la
Page 572
1 Défense Kordic. S'il vous plaît, essayez de trouver un accord au cours de
2 la prochaine pause pour que l'on puisse en traiter immédiatement en
3 reprenant nos travaux, ce qui se fera à 11 heures.
4 --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.
5 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.
6 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Comme je l'ai indiqué auparavant,
7 je voudrais --
8 M. FARRELL : [interprétation] -- parlé avec Mme la Greffière d'audience, et
9 je pense qu'elle a une cote pour cette pièce. Je pense que c'est la cote
10 DAC3.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] C'est exact, Madame la Greffière ?
12 Fort bien. La pièce est versée.
13 M. FARRELL : [interprétation] Merci.
14 La deuxième question concerne les rapports du quartier pénitentiaire. Il y
15 en a un pour M. Cerkez et l'autre pour M. Kordic, me semble-t-il. Nous ne
16 nous opposons pas à ce que ces rapports soient déposés tant que vous avez
17 acceptez ce que nous avons dit dans nos conclusions juridiques auparavant
18 quant à la valeur qu'il faut attribuer à ces rapports.
19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous ne les avons pas encore vus.
20 M. SAYERS : [interprétation] Monsieur le Président, j'avais déjà les
21 rapports du directeur --
22 M. FARRELL : [interprétation] -- tant que nos conclusions juridiques ont
23 été acceptées sur la valeur de ceux-ci, je pense que l'autre question ce
24 sont les rapports du Quartier pénitentiaire.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous n'avons pas encore reçu ces
Page 573
1 documents.
2 M. SAYERS : [interprétation] J'ai, en fait, le rapport établi par M.
3 McFadden, nous l'avons reçu hier après-midi et nous voulions demander ce
4 versement.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je suppose qu'il n'y a pas
6 d'objections, vu vos commentaires supplémentaires. Est-ce que vous pourriez
7 photocopier ce document d'ici à la prochaine pause. Je ne sais pas si vous
8 l'avez déjà fait ?
9 M. SAYERS : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Fort bien. Je vais demander à M.
11 l'Huissier de nous transmettre ce document. Quelle sera la cote accordée à
12 ce document, Madame la Greffière ?
13 [La Chambre d'appel et la Greffière se concertent]
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce sera la pièce
15 DAK 4.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pour que tout soit clair, il s'agit
17 du rapport sur le comportement de M. Kordic en date du 18 mai 2004, préparé
18 par M. Timothy McFadden.
19 M. KOVACIC : [interprétation] Permettez-moi d'enchaîner. Nous avons ce même
20 document que M. McFadden a préparé, le 18 mai. Nous l'avons reçu hier et je
21 voudrais que ceci soit, également, versé au dossier.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous en avez déjà des exemplaires à
23 l'intention des Juges ?
24 M. KOVACIC : [interprétation] Oui. Je viens de remettre un exemplaire à la
25 Greffière d'audience.
Page 574
1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il portera quelle cote ?
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote DAC 5.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Fort bien. C'est versé au dossier
4 sous cette référence. Monsieur Farrell, veuillez poursuivre.
5 M. FARRELL : [interprétation] Vous le comprendrez, nous pensons que la
6 Chambre d'appel a, déjà, déterminé qu'il n'est pas possible de tenir compte
7 de ceci. Si notre interprétation n'est pas correcte, vous avez ces
8 exemplaires mais si vous êtes convaincu par notre interprétation, vous avez
9 ces documents et vous ne sauriez vous fonder sur eux.
10 La question suivante ce sont les documents relatifs à la vie privée et au
11 contexte familial de M. Cerkez. Je ne sais pas Maître Kovacic si vous
12 précisez les paragraphes ou si on tiendra compte des écritures dont il est
13 convenu que nous les soumettions aux Juges.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Fort bien.
15 M. FARRELL : [interprétation] Cette écriture, celle du 4 mai, elle a pour
16 titre "Présentation des faits concernant la sentence par M. Mario Cerkez."
17 Le numéro de page du Greffe, c'est le numéro A10.802 et cela va jusqu'à la
18 page A10.897 [comme interprété], paragraphes 1 à 11. Il y a stipulation et
19 accord des deux parties dans les écritures de l'appelant. Il y a le
20 paragraphe 18 qui est convenu et dont vous disposez en bonne et due forme.
21 Il y aussi le paragraphe 23 du rapport qui n'a pas trait à son contexte
22 familial, mais qui a trait au Quartier pénitentiaire et qui avait été
23 soumis avant que ne soit reçue la dernière lettre du Quartier
24 pénitentiaire. Ce qui veut dire que ceci n'est plus une question qui se
25 pose.
Page 575
1 Voilà les faits dont vous avez connaissance. Nous n'avons pas d'objection
2 aux commentaires de conclusion qui se trouvent aux paragraphes 24 à 26 dans
3 le cadre des arguments ou des éléments qui vous sont présentés, s'agissant
4 de ce document. Je vais vérifier auprès de Me Kovacic pour voir si ce que
5 je viens de dire est exact.
6 M. KOVACIC : [interprétation] Oui. Ceci a été déclaré de façon précise. Je
7 remercie mon estimé confrère, est-ce que vous me donnez un instant pour
8 évoquer d'autres paragraphes sur lesquels il n'y a pas de points d'accord.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous en sommes maintenant au stade
10 où nous discutons des faits convenus, des points d'accord et vous êtes
11 d'accord pour dire que les paragraphes mentionnés jusqu'à présent peuvent
12 être considérés comme étant des faits ou des points d'accord entre les
13 parties.
14 M. KOVACIC : [interprétation] Bien entendu.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Ceci est, déjà, versé au dossier de
16 l'appel et c'est considéré comme étant des points d'accord entre les
17 parties. Au moment de la sentence, il faudra que vous évoquiez, à ce
18 moment-là, les autres points que vous vouliez présenter s'agissant de la
19 vie privée et des conditions familiales de M. Cerkez.
20 Je vous remercie. Il y a encore un point qui n'a pas été traité, nous
21 parlons ici des pièces jointes fournies par la Défense de M. Kordic. Est-ce
22 qu'il y a des objections de la part de l'Accusation ?
23 M. FARRELL : [interprétation] S'agissant des clichés qui vous ont été
24 présentés, j'ai dit à mon confrère, que s'agissant de ceux qui vous avaient
25 été présentés, non pas les éléments supplémentaires qui se trouvent sur le
Page 576
1 CD-ROM, mais pour ceux qui étaient présentés, nous n'avons pas d'objection.
2 Un tableau vous a été soumis. De l'avis de l'Accusation, on y parle de la
3 position occupée par l'appelant. Je comprends que la Défense de M. Kordic
4 répondait à une demande de votre part qui voulait que ceci soit précisé,
5 donc pas de problème. Nous pensons que si la Chambre décide d'accepter
6 cette pièce, elle tiendra compte aussi de notre avis, à savoir que ceci ne
7 tient pas compte, fidèlement, du jugement, à savoir s'il y aurait d'autres
8 conclusions factuelles tirées par l'Accusation à cet égard. Voilà notre
9 position.
10 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Ce CD-ROM peut être distribué et il
11 reviendra à la Chambre, au moment de la prochaine pause, de déterminer si
12 elle accepte ou pas ce tableau. Je vais demander à Monsieur l'Huissier de
13 distribuer les CD-ROM, bien sûr avez la réserve que vous avez exprimée ?
14 M. FARRELL : [interprétation] C'est exact. Maître Sayers --
15 [La Chambre d'appel se concerte]
16 [La Chambre d'appel et le Juriste se concertent]
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je reviens, une fois de plus, au
18 CD-ROM. Vous avez fait valoir que ces clichés, qui ont été présentés au
19 moment de l'exposé oral et qui sont gravés sur ces CD-ROM, ne soulèvent pas
20 d'objection de votre part. Compte tenu qu'il y a d'autres clichés qui sont
21 contenus dans ce même CD-ROM, qu'en pensez-vous ? Faut-il que la Défense de
22 M. Kordic fournisse un CD-ROM reprenant uniquement les clichés présentés au
23 moment de l'exposé oral ou est-ce que vous faites confiance à la Chambre
24 d'appel qui ne tiendra compte que des clichés présentés au moment de
25 l'exposé oral ?
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1 M. FARRELL : [interprétation] Je suis sûr que la Chambre est, tout à fait,
2 à même de faire la distinction. Ce ne sont que des conclusions, ce ne sont
3 pas des moyens de preuve. Peut-être une suggestion technique, il serait
4 utile pour le dossier de l'audience que ce qui est repris dans le compte
5 rendu d'audience soit la même chose que ce qui se trouve sur le CD-ROM. Si
6 jamais il y avait un nouvel examen des éléments, il faudrait que ce soit la
7 même chose. Evidemment, ceci pose un peu un problème à la Défense de M.
8 Kordic parce qu'il faudrait graver un nouveau CD, mais je pense que ce
9 serait la meilleure façon de procéder pour veiller à ce qu'il y ait
10 concordance entre le compte rendu d'audience et ce CD-ROM.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que cela va vous poser
12 beaucoup de problèmes, Maître Sayers ?
13 M. SAYERS : [interprétation] La seule difficulté d'ordre logistique, c'est
14 que mes collègues seront absents pendant deux semaines. Il n'y a, comme
15 élément supplémentaire sur ce CD-ROM, qu'un argument que nous n'avons pas
16 évoqué, s'agissant du 98 bis. Manifestement, vous pourrez l'ignorer et il y
17 a une section du CD-ROM qui comprend des points divers. C'est clairement
18 distingué, il est facile d'ignorer la totalité de cette section. A vous de
19 décider, Mesdames et Messieurs les Juges, ces CD ont été gravés, mais nous
20 ne pourrons pas vous donner un autre CD avant deux semaines et demie ou
21 trois pour autant que vous le souhaitiez.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Donnez-nous un instant, s'il vous
23 plaît.
24 [La Chambre d'appel se concerte]
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Donnez-nous un moment, s'il vous
Page 578
1 plaît.
2 [La Chambre d'appel se concerte]
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Après avoir délibéré sur la
4 question, apparemment, il y a deux solutions possibles : soit vous
5 fournissez à la Chambre sur-le-champ des copies sur support papier des
6 clichés que vous avez utilisés au moment de votre exposé oral, soit vous
7 gravez un nouveau CD-ROM sans retard. CD-ROM qui reprendrait les clichés
8 que vous avez présentés au moment de l'exposé oral. Il vous revient de
9 choisir la meilleure solution, la façon la plus rapide de régler la
10 question. Pour la Chambre en tant que telle, c'est peut-être plus facile de
11 recevoir des copies sur support papier.
12 M. SAYERS : [interprétation] Cela sera le cas si c'est votre souhait.
13 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci. Nous attendons de recevoir
14 une copie sur support papier de ces clichés.
15 S'agissant du tableau, nous y reviendrons plus tard.
16 M. SAYERS : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Sans plus tarder, nous allons
18 maintenant entendre l'appel interjeté par l'Accusation. Nous espérons que
19 ce seront des conclusions précises et brèves comme l'Accusation nous
20 l'avait promis hier. Merci.
21 Mme BRADY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous allons
22 faire de notre mieux.
23 Je vais revenir sur le quatrième motif de l'appel interjeté par
24 l'Accusation contre la peine imposée à M. Kordic. Je ne serai pas long.
25 Voici ce que je veux faire. Je veux étoffer la base principale de notre
Page 579
1 appel au regard de sa sentence, en tenant notamment compte des décisions
2 prises en jurisprudence le plus récemment depuis le dépôt de notre appel.
3 Vingt-cinq, c'est une longue peine, c'est certain. C'est beaucoup de temps
4 passé en prison. Pourquoi l'Accusation dit-elle dès lors que la Chambre a
5 imposé une sentence manifestement inadéquate ? Pourquoi l'Accusation
6 demande-t-elle d'augmenter de façon considérable cette peine ? Cette
7 sentence ne reflète pas adéquatement la gravité inhérente des crimes ou le
8 rôle qu'a joué l'appelant dans ces crimes.
9 Vous le savez à grâce à notre mémoire en appel, notre base principale c'est
10 que la sentence ne reflète pas l'ampleur, la portée, l'échelle géographique
11 et temporelle, et la nature extrêmement grave de ces crimes. Hier, lorsque
12 j'ai répondu, j'ai abordé certains des faits de la cause. Ceci ne peut vous
13 fournir qu'un instantané de ce qui ne saurait être qualifié que comme une
14 base de faits incriminés considérables. Nous avons quatre municipalités en
15 Bosnie centrale, Novi Travnik, Busovaca, Kiseljak et Vitez. Ce qui
16 représente des dizaines de villes et de villages. Nous parlons de
17 plusieurs, de nombreux actes de persécutions commis sur plus d'un an au
18 cours desquels des centaines de civils ont été assassinés, des milliers de
19 civils ont dû subir d'autres mauvais traitements, c'est-à-dire, par exemple
20 qu'ils ont perdu leurs foyers parce que leurs maisons étaient brûlées. Ils
21 ont perdu leurs commerces, leurs moyens de vivre, de subsistance, des biens
22 leur ont été dérobés, des lieux de culte ont été brûlés. Ils ont été
23 victimes de rassemblement or, [imperceptible] et placés en détention.
24 Prenons Ahmici, c'est le cas le plus grave où il y a eu des dizaines de
25 victimes, le jour le plus noir de toute l'histoire de cette guerre en ex-
Page 580
1 Yougoslavie.
2 La Chambre le disait aux paragraphes 852 à 853, des infractions d'une telle
3 barbarie ne sauraient être plus graves, et ceux qui ont participé à ces
4 actes doivent s'attendre à une peine d'une sévérité qui soit correspondante
5 à l'indignation de la communauté internationale. Or, de notre avis la
6 sentence ne reflète pas ce principe.
7 La population musulmane a été victime et elle n'aurait pas pu être plus
8 victime qu'elle ne l'a été. Ce qui compte tout particulièrement c'est que
9 ces crimes ont été commis sur une population sans défense. Nous le savons
10 grâce à des affaires comme l'affaire Kunarac, cela a été reconnu aussi dans
11 le jugement portant condamnation de M. Banovic. Il faut tenir compte de la
12 vulnérabilité des victimes lorsqu'on essaye d'évaluer la gravité.
13 Il faut aussi se rappeler que ces crimes se sont commis dans le cadre d'une
14 attitude et d'une action systématique, et on voulait le nettoyage ethnique,
15 on voulait impurer [phon] la HZ HB de ces Musulmans. A notre avis la
16 gravité ne reflète pas non plus le modus operandi impitoyable qui a marqué
17 ces actes de persécution. Le jugement le dit clairement. Les actions ont
18 été déclenchées sur une population musulmane sans défense dès les premières
19 heures pour veiller à ce que cette population soit prise par surprise, et
20 soit dans l'impossibilité de prendre la fuite. De plus, c'est une façon
21 d'opérer qui était impitoyable, pillages, incendies.
22 On pourrait aussi dire que c'est une situation où le jugement Vasiljevic
23 reconnaît et accroît la gravité de l'infraction puisqu'on visait à
24 minimiser la possibilité qu'auraient les victimes de se défendre,
25 effectivement, et on voulait aussi permettre la commission de ces crimes.
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1 Autre facteur très important qui n'a pas été pris en bonne considération,
2 c'est la longue phrase de planification qui était nécessaire pour des
3 crimes d'une telle échelle, principe qui a été reconnu dans le jugement
4 Stakic en ce paragraphe 917. Il y a la gravité des faits qui sont à la
5 base. Je dirais qu'il y a aussi le fait que Kordic connaissait les
6 victimes, notamment, à Busovaca, il faut en tenir compte, ce qui n'a pas
7 été le cas dans le jugement en première instance.
8 L'autre pilier qui intervient dans la gravité de ces infractions porte
9 davantage sur sa participation criminelle et le rôle qu'il a joué dans ces
10 crimes. A notre avis, la sentence ne reflète pas le degré de participation
11 et le mode de sa participation dans ces crimes. Ici aussi, la Chambre de
12 première instance répète qu'elle est d'avis que c'étaient des crimes graves
13 de sa part. Elle fait un commentaire sur le rôle essentiel qu'il a joué.
14 Mais au moment de la sentence, la Chambre de première instance n'a pas…
15 Suffisamment tenu compte de ces questions.
16 Il n'est pas nécessaire de vous rappeler ce que dit la Chambre de première
17 instance Stakic au paragraphe 918, je vous fais la citation : "Comme c'est
18 le cas des crimes de col blanc, l'auteur qui se trouve derrière l'auteur,
19 l'auteur qui porte les gants blancs, il doit aussi être puni pour ce qu'il
20 fait en fonction des circonstances de la cause."
21 Or, ici, c'est bien le cas. Le rôle que Kordic a joué dans tout ceci. Il a
22 ordonné, il a planifié, il a préparé, il a été à l'origine, quelquefois il
23 a dirigé ces événements, la plupart du temps de façon indirecte. Vu
24 l'ensemble de ces actes criminels et dans leur totalité, il est au sommet
25 de cette pyramide de crimininalité et il mérite une peine plus lourde.
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1 Je m'intéresse maintenant au deuxième fondement de notre appel, à savoir
2 que la sentence imposée ne tient pas suffisamment compte de son poste et
3 des pouvoirs qu'il avait en tant que dirigeant politique en Bosnie centrale
4 et de l'abus qu'il a fait de sa position. La Chambre de première instance a
5 bien constaté au paragraphe 853, que le fait qu'il était dirigeant
6 aggravait l'infraction, mais nous estimons que la peine imposée ne tient
7 pas suffisamment compte du poste très élévé qu'il avait en tant que
8 dirigeant politique dans la région, et c'est là un facteur aggravant.
9 Même s'il s'est déplacé ou a évolué sur plusieurs titres et
10 qu'effectivement ses fonctions ont évolué, se sont accrues au fil de
11 l'année, nous le savons très bien, il était président du HDZ de Busovaca et
12 il était vice-président de la Présidence de la HZ HB pendant toute cette
13 période. Ce poste, ces fonctions ne sont pas à notre avis traduites dans la
14 peine qu'il a reçue.
15 De même, cette sentence ne tient suffisamment compte des abus qu'il a fait
16 de ce poste. Au moment où il a contribué au plan criminel commun, et
17 lorsque grâce à ce plan, il a ordonné, planifié, dans toute leur ampleur,
18 ces crimes commis contre les Musulmans de Bosnie à Busovaca et dans les
19 alentours. Plusieurs exemples ont été donnés de ces abus d'influence et
20 d'autorité afin que soient commis des crimes. A notre avis, cette trahison,
21 cet abus de confiance doit se répercuter dans la peine qu'il lui sera
22 imposée.
23 Pour ce qui est de la question de son rôle sur le plan militaire, et pour
24 savoir s'il faut que ceci intervienne pour accroître la peine, ceci a fait
25 l'objet d'une controverse qui a perduré dans ce procès, dans cette affaire,
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1 pas seulment au niveau du jugement mais ici aussi à l'appel. Kordic ne
2 disposait pas d'autorité militaire formelle, dans ce sens qu'il n'était pas
3 dans la voie hiérarchique ou même comme le disait la Chambre de première
4 instance comme s'il avait la possibilité matérielle d'empêcher et de punir.
5 Cependant, la Chambre de première instance tire plusieurs conclusions
6 importantes quant à la portée réelle de ses fonctions ou de son pouvoir
7 militaire. Je vous renvoie au paragraphe 530, où la Chambre dit qu'il avait
8 un rôle très clair de dirigeant dans les combats. Là, il utilise son
9 autorité militaire de façon très directe. Je vous renvoie également au
10 paragraphe 532, pour ce qui est du blocus du barrage à Ahmici. Non pas pour
11 déterminer sa responsabilité pénale, mais la Chambre là, reconnaît que
12 l'épisode, l'incident du barrage d'Ahmici, c'est qu'il avait à ce moment-
13 là, une autorité, un pouvoir militaire réel.
14 Je vous renvoie également au paragraphe 585, où la Chambre dit qu'il était
15 impliqué dans l'attaque de Busovaca en tant que dirigeant exercant tant un
16 pouvoir militaire que politique de façon très directe.
17 Au paragraphe 642, où Dario Kordic, en sa qualité de dirigeant politique
18 local a été considéré par les Juges de la Chambre de première instance
19 comme ayant participé à ce dessein commun, à ce plan commun destiné à
20 lancer une attaque militaire contre un certain nombre de localités dans la
21 vallée de la Lasva. Si les Juges ont émis ce jugement, c'est principalement
22 en raison du rôle qu'il a joué en tant que planificateur et intisgateur de
23 ces actes.
24 Enfin, je renvoie les Juges de cette Chambre d'appel aux conclusions que
25 l'on trouve dans le paragraphe 767 du jugement, qui repose sur des moyens
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1 présentés par un certain nombre de témoins internationaux en l'espèce. La
2 Chambre de première instance a entendu les témoins qui étaient le colonel
3 Stewart, le lieutenant- colonel Watters, le général de brigade Duncan, qui
4 ont tous parlé dans des termes très clairs du lien existant entre le
5 militaire et le politique. Le général de brigade Duncan a déclaré que si
6 les opérations militaires relevaient de la responsabilité de Blaskic, la
7 planification était la tâche de Kordic. Au paragraphe 767, les témoins en
8 question ont conduit la Chambre de première instance à émettre la
9 constatation suivante, à savoir que ces témoignages de témoins
10 internationaux apportent : "Un appui certain aux arguments de l'Accusation
11 puisque, comme il était permis de le penser à l'avance, l'exercice du
12 pouvoir militaire était soumis à l'autorité politique." Dans les termes
13 même de l'Accusation, Blaskic ne pouvait faire son travail tout seul sans
14 obtenir le feu vert de Kordic.
15 Nous avons également les arguments de l'appelant qui nous dit que sa
16 responsabilité n'a pas été prouvée en application de l'Article 7(3). Dans
17 ces conditions comment se fait-il que ce facteur ait été pris en compte ? A
18 notre avis, la question de définir le fondement de l'établissement de sa
19 responsabilité ne doit pas être confondu avec ces deux facteurs, à savoir,
20 les facteurs pris en compte par la Chambre de première instance, s'agissant
21 de son autorité militaire qui sans considérer comme susceptible d'aggraver
22 la sanction prononcée à son encontre. La Chambre de première instance n'a
23 pas considéré qu'il y avait responsabilité au titre de l'Article 7(3) parce
24 qu'elle était convaincue de sa capacité matérielle à prévenir ou punir.
25 Mais ce n'est pas selon ces principes qu'il a été sanctionné. Il n'a pas
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1 été puni pour le rôle qui a été le sien en tant que dirigeant mais pour
2 l'apport très positif, l'apport tout à fait objectif à la commission du
3 plan criminel, du dessein criminel ou de l'entreprise criminelle comme on
4 peut l'appeler, par l'intermédiaire, par le truchement des crimes qui ont
5 été commis.
6 Messieurs les Juges, je vous rappellerai encore une fois le jugement de la
7 Chambre de première instance Stakic, j'aimerais vous en lire un passage.
8 S'agissant de l'accusé M. Stakic, la Chambre de première instance a
9 considéré comme facteur aggravant principal en l'espèce la position de
10 supérieur qui était la sienne. "Savoir si les circonstances objectives
11 étaient telles que la Chambre de première instance pouvait raisonnablement
12 conclure que des actes spécifiques entraient bien dans le cadre de
13 l'Article 7(1) ou 7(3), et savoir si une condamnation pouvait être
14 prononcée en application de l'Article 7(1) est l'élément à discuter et la
15 position de l'accusé dans la hiérarchie, une position supérieure
16 lorsqu'elle est prouvée au-delà de tout doute raisonnsable doit être pris
17 en compte en tant que facteur aggravant. Cependant, "et c'est le point le
18 plus important, "le facteur aggravant est identique que l'accusé soit
19 considéré comme ayant satisfait aux exigences établissant sa responsabilité
20 au titre de l'Article 7(3) ou qu'il ait simplement été prouvé qu'il
21 détenait une position de supérieur."
22 Ceci reflète bien notre position sur cette question.
23 Enfin, dernier fondement de notre appel contre la sentence de M. Kordic,
24 c'est le suivant. En effet, cette sentence s'écarte considérablement des
25 autres sentences prononcées par d'autres Chambres de première instance de
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1 ce Tribunal, notamment, la sentence pronconcée contre M. Blaskic pour des
2 circonstances assez semblables, même si elles ne sont pas identiques, pour
3 des crimes assez semblales. L'Accusation reconnaît que cette sentence
4 prononcée contre Blaskic, à savoir 45 ans d'emprisonnement est en cours de
5 réexamen pouisque l'arrêt en appel n'a pas encore été prononcé.
6 Indépendamment de cela, et connaissant les différentes formes de
7 responsabilité imputées, Blaskic, responsabilité prise en compte au titre
8 de l'Article 7(3), alors que pour Kordic, la responsabilité est prise en
9 compte au titre de l'Article 7(1). Il y a tout de même, en dépit de cela,
10 un lien important entre les crimes commis par le HVO et d'autres crimes. A
11 notre avis, indépendamment du principe d'individualisation de la sentence,
12 il ne doit pas y avoir de contradictions importantes dans la façon de punir
13 deux auteurs d'actes criminels lorsque les conditions dans lesquelles les
14 crimes et les infractions ont été commis sont très semblables. Dans le cas
15 qui nous intéresse, il y a un autre argument intéressant, à savoir que la
16 Chambre de première instance a estimé qu'il existait un rapport entre
17 Kordic et Blaskic, compte tenu du fait qu'ils faisaient tous deux partie
18 des autorités du même centre de pouvoir et qui plus est Kordic était
19 supérieur à Blaskic dans ce centre de pouvoir. Le rapport entre les deux
20 hommes est assez complexe et le principe doit être appliqué avec soin. Je
21 pense que l'on est en droit de résumer les choses en disant que la Chambre
22 de première instance a adopté la position de l'Accusation quant au fait que
23 Blaskic n'avait pas pu faire son travail tout seul, sans obtenir le feu
24 vert de Kordic.
25 Voilà les trois fondements de notre pourvoir en appel. J'aimerais,
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1 également, ajouter quelques mots, peut-être plus généraux, sur les
2 principes mêmes de la sentence.
3 A notre avis, pour ce genre de crimes, l'objectif de dissuasion et de
4 rétribution doit jouer un rôle important. Dissuasion, aussi bien au sens
5 général qu'au sens pédagogique. La sentence doit être le reflet, tout à
6 fait clair, de la répulsion ressentie par la communauté internationale par
7 rapport à ces crimes et de la condamnation de la part de la communauté
8 internationale de ces crimes. Le rôle de réhabilitation ou de rééducation
9 est également un facteur dans le prononcé de la peine. M. Farrell a,
10 également, parlé de ce point de vue et de ce que la Chambre a fait à cet
11 égard. Si vous décidez de prononcer une autre peine à l'encontre de M.
12 Kordic, nous sommes d'avis que la réinsertion ou réhabilitation ainsi que
13 la rééducation de l'auteur de ces crimes est un facteur important à prendre
14 en compte, notamment, en l'espèce, et que la rétribution et la dissuasion
15 doivent passer au deuxième plan par rapport à ces objectifs de réinsertion
16 et de rééducation. Ce qui ne veut pas dire que ces deux concepts ne doivent
17 pas jouer un rôle capital à une autre étape de la sanction.
18 Nous en restons, absolument, à la position qui est la nôtre. Ces crimes
19 sont d'une telle gravité qu'ils exigent une peine beaucoup plus importante.
20 Si les Juges de la Chambre d'appel sont invités à prendre en compte les
21 principes de réinsertion et de rééducation, ils sont, également, invités,
22 par conséquent, à prononcer une peine de prison très longue avec un minimum
23 recommandé, qui pourrait être un résultat efficace de ce point de vue, et
24 satisfaire à toutes les exigences d'une sanction. Voilà la position, qui a
25 déjà été prise d'ailleurs, par les Chambres d'appel Tadic et Stakic.
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1 Excusez-moi, je vous demande un instant.
2 [Le Conseil de l'Accusation se concertent]
3 Mme BRADY : [interprétation] Mesdames, Messieurs les Juges, nous remarquons
4 que l'affidavit de l'épouse de M. Kordic atteste des conditions familiales
5 dans lesquelles il vivait. Ce document est entre votre main, ainsi que le
6 rapport au sujet du comportement personnel de M. Kordic émanant de M.
7 Timothy McFadden. Comme nous l'avons déjà dit, nous n'élevons aucune
8 objection au versement au dossier de ces deux documents, aussi longtemps
9 que ces documents sont traités conformément à notre position au sujet de
10 ces principes de dissuasion et de rétribution par rapport au principe de
11 réinsertion.
12 Dans à notre mémoire en réponse, nous admettons qu'un certain nombre de
13 facteurs ont été présentés du point de vue de la loi comme étant la base
14 possible de circonstances atténuantes, et que, notamment, les conditions de
15 vie familiale font partie de cette définition. Mais, dans notre mémoire en
16 réponse, nous développons notre position, à savoir que la Chambre de
17 première instance n'a commis aucune erreur effective dans l'exercice de son
18 pouvoir discrétionnaire en n'accordant aucun poids à ces éléments. De même,
19 ces éléments ne devraient pas empêcher les Juges de la Chambre d'appel
20 d'imposer une sentence beaucoup plus lourde.
21 La Chambre d'appel Celebici, au paragraphe 847 de son arrêt, fait observer
22 que, dans certaines circonstances, la gravité du crime peut être si
23 importante que les circonstances atténuantes ne sont plus à prendre en
24 compte et qu'une peine très lourde est justifiée en dépit de ces
25 circonstances atténuantes.
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1 Nous réitérons notre position que les crimes examinés ici sont d'une
2 gravité exceptionnelle et que les circonstances atténuantes ne devraient
3 être que très peu prises en compte, sinon pas du tout. Cette proposition a
4 déjà été étayée par la Chambre de première instance Stakic, au paragraphe
5 926 du jugement où celle-ci dit considérer que de très nombreux moyens de
6 preuve parlent en faveur de l'accusé, de la personnalité du docteur Stakic.
7 Il est question également de sa situation maritale qui mérite d'être prise
8 en considération, mais néanmoins, le poids à apporter à ces éléments doit
9 toujours être examiné à l'aune de la gravité des crimes commis.
10 A notre avis, la même démarche devrait être adoptée par les Juges de la
11 Chambre en l'espèce.
12 Ceci m'amène à la fin de mon propos, je propose de donner la parole à M.
13 Farrell. A moins que vous n'ayez des questions, Mesdames, Messieurs les
14 Juges.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pas de questions.
16 Mme BRADY : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Monsieur Farrell, vous avez la
18 parole.
19 M. FARRELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. L'appel
20 interjeté par l'Accusation contre M. Cerkez se divise en deux parties.
21 D'abord, première partie, l'acquittement vis-à-vis des crimes commis à
22 Ahmici et les chefs d'accusation pour lesquels l'Accusation demande à la
23 Chambre d'intervenir pour prononcer une déclaration de culpabilité, se
24 trouvent au paragraphe 3.6 du mémoire de l'Accusation.
25 Le deuxième aspect de l'appel interjeté par l'Accusation, il porte sur la
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1 sentence prononcée contre M. Cerkez. Je ferais remarquer simplement,
2 s'agissant de l'appel vis-à-vis de la sentence, que celui-ci se divise
3 également en deux parties. Je ne vais pas rentrer dans les détails des
4 arguments développés vis-à-vis de la sentence. Le mémoire est, tout à fait,
5 clair à cet égard et relativement concis, d'ailleurs. L'argument principal
6 c'est que, manifestement, il y a manque de correspondance entre les crimes
7 commis et la sanction au vu de cette sentence de 15 ans. L'Accusation
8 estime que, compte tenu du rôle joué par M. Cerkez, qui était un rôle très
9 important dans cette campagne de persécution dont il a été jugé coupable,
10 non seulement par sa participation personnelle mais en tant que membre
11 d'une entreprise criminelle commune, cette peine devrait, très
12 certainement, être supérieure à 15 ans.
13 Les affaires qui ont suivi la présente affaire, et il y en a eu un certain
14 nombre, donnaient lieu à des décisions de prononcé de peine qui, en fait,
15 ne correspondent pas à la peine prononcée en l'espèce. Nous demanderons aux
16 Juges ici présents, de ne prendre en compte que certaines de ces affaires.
17 Il y a eu plaider coupable de la part de Banovic, Nikolic, et autres, et
18 les sentences dans ces affaires, où il était question de crimes importants
19 également, même si c'étaient des crimes de nature différente, tout de même,
20 du point de vue de leur importance, ils présentaient une similitude avec
21 l'affaire qui nous intéresse. M. Banovic, qui a participé directement à des
22 crimes moins graves du point de vue de leur importance, a, néanmoins, été
23 condamné à 23 ans, alors que M. Cerkez qui, à notre avis, exerçait des
24 fonctions importantes et hiérarchiquement importantes dans des situations
25 où des crimes plus graves ont été commis n'a été condamné qu'à 15 ans.
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1 Le jugement Vasiljevic, la Chambre d'appel, dans cette affaire, a prononcé
2 une peine de 15 ans qui se centrait sur une responsabilité dans le cadre de
3 l'aide et du soutien apportés à environ cinq assassinats. La peine
4 prononcée contre M. Cerkez est de 15 ans pour un crime qui est de nature
5 beaucoup plus grave.
6 Le deuxième aspect de l'appel interjeté par l'Accusation, il s'agit
7 simplement de ce qui s'est passé à Ahmici et, à notre avis, à cet égard,
8 les Juges de la Chambre d'appel devraient aggraver la peine prononcée. En
9 effet, ce n'est pas un motif d'appel isolé, évidemment, on ne peut pas
10 reprocher à la Chambre de n'avoir pas pris en compte Ahmici dans les
11 circonstances dans lesquelles la chose s'est faite, mais nous demandons que
12 l'Accusation soit entendue, aujourd'hui, en appel s'agissant du crime
13 d'Ahmici et que celui-ci soit pris en compte en tant qu'élément autonome en
14 vue de prononcer une peine plus lourde. Compte tenu d'une position
15 différente sur la responsabilité à cet égard.
16 J'aimerais, à présent, rentrer dans le détail de cette question d'Ahmici.
17 Je demanderais aux Juges de se pencher sur le paragraphe 831 du jugement.
18 Comme vous le savez, un appel a été interjeté contre l'acquittement par
19 l'Accusation, appel destiné à obtenir une condamnation qui remplacerait cet
20 acquittement, nous estimons que, sur la base du Statut de ce Tribunal et
21 des conclusions tirées par la Chambre de première instance, la chose est
22 possible si le droit est appliqué correctement. En effet, nous pensons
23 qu'une condamnation doit être prononcée sur ce motif d'appel car, à notre
24 avis, il y a eu erreur sur les faits. C'est la raison pour laquelle nous
25 avons interjeté appel vis-à-vis des conclusions de la Chambre de première
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1 instance. Il n'y a aucune nécessité d'entrer dans le détail des faits
2 concrets, mais sur la base de ces faits, nous pensons que le résultat de la
3 réflexion doit être différent.
4 En effet, dans l'affaire Tadic, un appel a été couronné de succès, appel
5 contre un acquittement en raison d'une erreur de faits et pas d'une erreur
6 de droit. Ceci démontre bien que la Chambre d'appel a toute autorité pour
7 intervenir.
8 Au paragraphe 831 du jugement, on y trouve les conclusions eu égard à la
9 responsabilité sur la base d'un certain nombre de faits. Nous lisons ce qui
10 suit, je cite : "La Chambre de première instance a considéré que Cerkez en
11 tant que commandant de la Brigade Viteska avait participé aux attaques sur
12 Vitez, Stari Vitez et Donja Veceriska, même si l'attaque sur Ahmici n'a pas
13 été pris en compte."
14 La première phrase indique que M. Cerkez occupait un poste de
15 responsabilité. Il commandait une brigade qui avait participé à des
16 attaques dans la municipalité et il commandait cette brigade qui plus est.
17 L'élément distinctif entre les condamnations prononcées eu égard aux villes
18 et municipalités citées plus haut et le jugement prononcé au sujet
19 d'Ahmici, c'est simplement qu'il n'a pas participé, dans le deuxième cas,
20 au début de l'attaque. C'est ce que l'on trouve au paragraphe 703 du
21 jugement.
22 Poursuivons la lecture du paragraphe 831, je cite : "Le moment était un
23 moment culminant dans la campagne de persécution. L'accusé a joué un rôle
24 dans cette campagne en commandant les troupes qui ont été mêlées à certains
25 des incidents." Cette troisième phrase est très claire. Il a participé à
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1 une entreprise criminelle commune. Il a rempli son rôle dans cette campagne
2 ou cette entreprise par le biais des hommes qu'il commandait en prenant
3 certaines mesures. Sa responsabilité se situe dans le cadre d'une
4 entreprise criminelle commune de persécution, il a joué un rôle dans cette
5 entreprise commune par le biais d'actes, tout à fait, précis qui se situe à
6 Vitez, Stari Vitez et Donja Veceriska.
7 Suite de la lecture du paragraphe 831, je cite : "En tant que tel, il était
8 co-auteur et a manifesté l'état d'esprit le mens rea nécessaire qu'il est
9 permis de déduire en l'espèce de sa participation à la campagne."
10 Ce que la Chambre de première instance a fait à ce niveau, de l'avis de
11 l'Accusation, c'est juger, à très juste titre, qu'il était membre et co-
12 auteur d'un dessein commun qui se caractérise par une campagne de
13 persécution et qu'il y a joué son rôle et que ce rôle était une
14 participation directe et démontre bien sa contribution personnelle.
15 J'aimerais, maintenant, parler d'autres conclusions que l'on trouve dans le
16 jugement mais ce paragraphe suffit à lui seul, à mon avis, pour que
17 l'acquittement d'Ahmici soit transformé en condamnation. En effet, il est
18 considéré comme ayant été membre d'une entreprise criminelle commune, il
19 est considéré comme ayant participé à une campagne de persécution, ayant
20 joué un rôle personnel dans cette campagne, et avoir eu l'état d'esprit,
21 l'intention délictueuse nécessaire.
22 Le droit relatif à l'entreprise criminelle commune ou au dessein commun est
23 cité par cette Chambre de première instance. Je ne vais pas entrer dans les
24 détails. Au paragraphe 397, il y est évoqué, à juste titre, qu'il faut,
25 pour que cette entreprise criminelle commune existe, prouver les éléments
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1 qui ont été définis dans l'affaire Tadic et que la participation, même si
2 elle est limitée, doit s'illustrer par une contribution personnelle à
3 l'exécution du plan en question. Nous trouvons cela au paragraphe 385, où
4 il est question de planification, d'intention de participer et de commettre
5 délibérément des actes qui conduisent directement et de façon importante à
6 la commission d'un crime. Ce sont les conclusions de la Chambre de première
7 instance au sujet de la planification. Cette Chambre de première instance
8 établit le droit en matière d'aider, de concourir à, ou encourager et cite
9 l'arrêt Tadic où il est question d'actes destinés à aider, encourager ou
10 appuyer moralement et soutenir la commission des crimes avec des résultats
11 effectifs.
12 Au paragraphe 703 du jugement, la Chambre évoque les moyens de preuve liés
13 aux attaques de trois villages et déclare que l'accusé a participé aux
14 attaques sur Vitez, Stari Vitez et Veceriska. Ceci est déduit de sa
15 présence à la réunion militaire du 15 avril 1993, il y a également un
16 documentaire qui existe sur ce plan, et il y a également les entrées dans
17 le journal de bord de l'officier de service.
18 La Chambre poursuit au paragraphe 783 en disant ce qui suit, je cite :
19 "Cependant aucun moyens de preuve n'a permis de convaincre la Chambre de
20 première instance au-delà de tout doute raisonnable que l'accusé ait été
21 responsable du début de l'attaque sur Ahmici, le 16 avril, cette
22 responsabilité étant celle du bataillon de la police militaire qui n'était
23 pas sous son commandement."
24 Sur quoi mettons l'accent ici ? A mon avis, on met l'accent sur
25 l'application de l'Article 7(1) du statut. La Chambre n'applique pas la
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1 doctrine du dessein commun mais déclare l'accusé coupable à la fin du
2 jugement. La dernière phrase stipule qu'il n'était pas responsable du début
3 de l'attaque sur Ahmici. A ce sujet, je dirais que sur la base des faits
4 pris en compte, il est permis de déduire qu'il a joué un rôle au début de
5 l'attaque.
6 Deuxièmement, il avait un rôle à jouer à Ahmici compte tenu des rapports
7 qu'il recevait et qu'il renvoyait au colonel Blaskic. Troisièmement, il
8 avait un rôle à jouer puisque les hommes sous ses ordres ont participé aux
9 opérations d'arrestation à la fin de la journée. Ceci n'est pas le plus
10 important. Il n'importe pas de savoir s'il a participé directement ou pas à
11 l'attaque d'Ahmici. Ce qui importe, c'est qu'il ait été membre d'une
12 entreprise criminelle commune et que dans cette partie du plan, il savait
13 qu'il contribuait, par ses actes, à la réalisation globale du plan dans
14 cette municipalité.
15 En tout cas, c'est l'avis de l'Accusation. Finalement, la Chambre se
16 penchera sur le fait de savoir si le bataillon de police militaire était
17 sous son commandement ou pas et sur la détermination exacte de
18 l'application de la brigade au début l'attaque, mais de l'avis de
19 l'Accusation, c'est sur la base de la responsabilité qu'il convient de se
20 prononcer, et cette responsabilité est prouvée par sa participation au plan
21 criminel commun.
22 Paragraphe 691, la Chambre de première instance conclut, après avoir
23 examiné les ordres qui ont été cités à la page précédente, page 236, j'ai
24 parlé de ces ordres hier, la Chambre tire ces conclusions, et à mon avis il
25 est tout à fait clair que M. Cerkez a participé à toutes les attaques qui
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1 ont eu lieu dans la municipalité de Vitez. Le colonel Blaskic était le
2 subordonné direct de M. Cerkez et c'était la personne responsable de la
3 municipalité de Vitez et de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. En
4 cette qualité, il demande au commandant de la Brigade de Vitez de rendre
5 compte. Ce qui est encore plus important, c'est ce que l'on lit au sous-
6 paragraphe (C) de la page 236, à savoir "achever le travail dans les
7 villages de Donja Veceriska, Ahmici, Sivrino Selo, et Vrhovine." Il n'est
8 pas dit à cet endroit, comme l'appelant l'a fait remarqué : pourriez-vous
9 vérifier ce qui se passe le terrain avec les hommes qui sont sur place, et
10 voir si vous pouvez obtenir des renseignements qui pourraient être mis à
11 notre disposition, et M. Cerkez peut vous aider à obtenir ces
12 renseignements. S'agissant de la façon dont la hiérarchie a été respectée
13 au niveau du commandement, ce n'est pas ce qui est écrit à ce niveau du
14 texte. Il est question d'achever le travail dans ces villages et de s'en
15 emparer complètement, et c'est un ordre. Le rapport envoyé ensuite stipule
16 : "Au sujet de l'ordre relatif à la suite des opérations de combat," il y a
17 eu des opérations de combat menées par la Brigade de Vitez, et dans cette
18 zone de responsabilité précise, il est tout à fait clair que les rapports
19 en question traitent bien d'opérations militaires survenues à un endroit
20 précis.
21 J'ai déjà parlé des faits évoqués dans les rapports du colonel Blaskic, à 2
22 heures 50. Il parle du fait que la ville de Vitez a été nettoyée, il parle
23 du fait que 50 Musulmans se trouvent dans la cellule du poste de police de
24 la brigade. Je vous ai déjà présenté hier un moyen de preuve émanant de la
25 première instance qui montre que le poste de police de la brigade se trouve
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1 à Vitez à 300 mètres à peine du QG de l'appelant.
2 Enfin, il ne peut y avoir aucun doute de l'avis de l'Accusation quant au
3 fait que l'appelant a participé à l'exécution du plan, plan qui résulte de
4 la deuxième réunion militaire dont il est question au paragraphe 610 du
5 jugement, et que sa participation a été une participation directe. Le droit
6 relatif au projet commun ou à la planification d'un certain nombre de faits
7 doit intervenir. En fonction de ce droit, l'appelant doit être condamné.
8 Des conclusions multiples ont été tirées dans le jugement au sujet du rôle
9 joué par la Brigade de Vitez dans toutes ces actions. Je ne me référerai
10 qu'à quelques-unes d'entre elles.
11 Au paragraphe 612 du jugement par exemple, on discute le rôle joué par la
12 Brigade de Vitez dans le plan commun. L'une des fonctions de la Brigade de
13 Vitez, la Chambre de première instance l'a admis en admettant la déposition
14 du Témoin AT qui parle de préparation. L'une des fonctions de la Brigade de
15 Vitez était d'empêcher les forces de la FORPRONU d'entrer à Ahmici, ceci
16 avant l'attaque au moment où la décision d'attaquer a été prise, donc la
17 veille. Il n'est pas besoin de démontrer l'implication directe à une
18 entreprise criminelle commune, mais le fait d'empêcher la FORPRONU
19 d'atteindre Ahmici compte tenu des ordres de tuer, donnés par Blaskic,
20 ordre de tuer, d'expulser et d'incendier les maisons, dans ces conditions
21 en tant que membre du plan, l'appelant doit être considéré comme
22 responsable. En tant que participant direct, il était chargé de veiller au
23 succès de l'opération de l'attaque sur Ahmici en empêchant la FORPRONU
24 d'avancer, ce qui démontre très clairement que ce facteur à lui seul
25 démontre la contribution de l'appelant à l'attaque sur Ahmici, soit par le
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1 biais de l'entreprise criminelle commune, soit et cela c'est une certitude
2 au niveau d'aider et encourager.
3 La Chambre fait remarquer dans son jugement que lorsque Pasko Ljubicic
4 contacte AT, Pasko Ljubicic reproche à Cerkez le fait d'avoir laissé passer
5 les hommes de la FORPRONU. Pasko Ljubicic commandait la police militaire
6 qui opérait à Ahmici, et il se plaint de cela auprès de Cerkez. Ce que AT
7 déclare, c'est que la réponse de Cerkez n'existe pas en fait, il ne dit pas
8 qu'il n'avait aucune fonction à remplir, mais il s'exprime différemment. Je
9 vais chercher ce passage. Le reproche qui est fait, c'est que numéro deux
10 au niveau hiérarchique ait permis à la FORPRONU de passer. Il n'y a aucun
11 déni de responsabilité à ce niveau-là, rien qui prouve qu'il n'ait pas joué
12 un rôle dans tout cela, et ceci c'est ce que dit le Témoin AT.
13 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] A quel passage dans le jugement
14 faites-vous référence exactement ?
15 M. FARRELL : [interprétation] Paragraphe 692. Regardez le début du
16 paragraphe 692 qui est assez long, qui comporte un certain nombre de sous-
17 paragraphes. Au début, nous lisons : "L'Accusation a produit des éléments
18 de preuve illustrant la réaction de M. Cerkez à ces événements." Au (d), il
19 est question de la réponse aux protestations de Pasko Ljubicic quant au
20 fait que la FORPRONU a été autorisée à passer le 16 avril 1993. Cerkez dit
21 que ce n'est pas sa faute, mais la faute de Bertovic. Ensuite, les
22 explications relatives au barrage, et à la présence de la FORPRONU. Si nous
23 admettons la déposition d'AT, bien entendu. Or, la Chambre de première
24 instance a estimé que la déposition du Témoin AT, au sujet de la
25 préparation était crédible, on doit, dans ces conditions, admettre la
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1 participation, donc l'accord au plan avant le début de l'attaque,
2 l'affectation d'une tâche avant le début de l'attaque, et les fonctions qui
3 ont été mises en œuvre par rapport à Ahmici, et accepter le fait et ceci
4 indépendamment des explications données par rapport à la possibilité de la
5 FORPRONU de détourner le barrage.
6 De très nombreux moyens de preuve démontrent l'aspect coordonné de la
7 campagne, campagne militaire coordonnée qui a eu pour résultat des
8 persécutions. C'est la conclusion objective que l'on peut tirer de l'examen
9 des faits aux environs de 5 heures 30, 6 heures du matin dans un grand
10 nombre de lieux, Vitez, Stari Vitez, Kruscica, Donja Veceriska, Ahmici. Des
11 crimes ont été commis dans chacun de ces villages. Tous démontrent l'aspect
12 coordonné de cette compagne de persécution, notamment le fait que quatre
13 personnes se soient réunies le 15 avril, quatre personnes qui sont, vous
14 vous en souviendrez, Pasko Ljubicic, qui se trouve à Ahmici, M. Cerkez.
15 Selon M. AT, Grubesic, souvenez-vous du rôle joué par Grubesic, qui a fait
16 démarrer le pilonnage sur Ahmici, rôle au stade initial de l'attaque.
17 Souvenez-vous également de la déposition du Témoin AT qui a dit que M.
18 Grubesic, en tant que commandant de la Brigade de Busovaca devait empêcher
19 la FORPRONU de se rendre dans le village si elle venait de Busovaca.
20 Finalement, comme je l'ai déjà dit, on trouve cela dans le journal de
21 guerre, page 1755, la Chambre de première instance y a fait référence. Je
22 vais vous citer le passage dans un instant. Il s'agit du paragraphe 656
23 auquel la Chambre de première instance a fait référence en ce qui concerne
24 ses conclusions. A 17 heures 55, le 16 avril 1993, il est indiqué que des
25 informations se trouvent dans le registre où il est dit Dusko, Cerkez et
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1 Pasko. Dusko, à notre avis, est Grubesic. Il a été dit que Grubesic
2 assistait à la réunion du 15. Son rôle était de bloquer le passage de la
3 FORPRONU. Il était en charge de l'artillerie. Pasko Ljubicic et Cerkez,
4 bien sûr, c'est l'accusé. Ensuite, il a dit que le HVO continuait à arrêter
5 les gens. Le Procureur considère qu'il s'agit là de la Brigade Viteska.
6 La Chambre de première instance a constaté qu'il existait des attaques
7 organisées du HVO dans ces zones. La Chambre de première instance a
8 constaté que la Brigade Viteska était en plein combat, et que Mario Cerkez
9 était le commandant de cette brigade. Le Chambre de première instance a
10 constaté qu'il y avait des éléments de preuve clairement indiquant que
11 Mario Cerkez, en tant que commandant de la Brigade Viteska, participait aux
12 attaques contre Vitez, Stari Vitez, et Veceriska. La Chambre a constaté que
13 sa participation se déroulait au point culminant de la campagne de
14 persécution, qu'il a joué un rôle important, et qu'il a contribué à cette
15 campagne en commandant ses troupes dans le cadre de ces incidents. La
16 Chambre de première instance a constaté qu'il a assisté à la réunion
17 militaire du 15 avril, lors de laquelle Blaskic lui a donné des
18 instructions. La Chambre a également constaté qu'il faisait partie de
19 l'attaque coordonnée. La Chambre comptait sur les rapports selon lesquels
20 Blaskic demandait d'un rapport émanant de la municipalité de Vitez, y
21 compris sur Ahmici.
22 La Chambre de première instance a constaté également que dans les
23 situations où M. Cerkez a participé aux attaques en tant que commandant de
24 la Brigade Viteska, il a commis cela avec l'intention de commettre des
25 crimes en tant que co-auteur dans le cadre de la campagne.
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1 Ce qui me ramène au paragraphe 831. La Chambre de première instance a aussi
2 constaté qu'il "a participé aux attaques au point culminant de la campagne
3 en tant que co-auteur au dessein commun, et qu'il a joué son rôle dans la
4 campagne en commandant les troupes avec l'intention délictueuse
5 nécessaire."
6 Sur la base de ces constatations, et si l'on applique de manière appropriée
7 les critères portant sur la planification où l'entreprise criminelle
8 commune, la Chambre de première instance a erré et aurait dû prononcer une
9 condamnation pour Ahmici.
10 Ceci est la fin des arguments de l'Accusation. Je vous remercie de votre
11 attention.
12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci. Est-ce que je peux vous
13 proposer, Maître Sayers, de répondre en ce qui concerne le prononcé de la
14 peine ? Est-ce que 20 minutes vous suffiront ?
15 M. SAYERS : [interprétation] Nous sommes prêt, tout à fait.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci.
17 M. SAYERS : [interprétation] Il y a trois choses. Est-ce que quelqu'un
18 pourrait brancher notre ordinateur ici ? Deuxièmement, je souhaite dire à
19 la Chambre d'appel que M. Kordic ne va pas aujourd'hui prendre la parole en
20 vertu de 84 bis [comme interprété], et je souhaite employer les 15 minutes
21 qui lui ont été attribuées pour présenter nos arguments, si ceci est
22 acceptable du point de vue de la Chambre d'appel.
23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je ne le pense pas. Excusez-moi. Je
24 vois que mon ordinateur avait un problème également. Ceci n'a rien à voir
25 avec l'article que vous avez mentionné tout à l'heure. Normalement, la
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1 Chambre d'appel donne l'opportunité à la personne accusée de s'adresser à
2 la Chambre d'appel au sujet de ce qu'il souhaite lui relater. Dans le
3 "civil law", on parle de cela en tant que "final word", déclaration finale.
4 Vous ne pouvez pas remplacer cela par la présentation de vos propres
5 arguments, puisque vous êtes limité dans votre réponse à l'appel du
6 Procureur par rapport à la condamnation, qui selon le Procureur devrait
7 être plus sévère. Vous avez 20 minutes.
8 M. SAYERS : [interprétation] Vingt minutes, Monsieur le Président ?
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Maximum, oui.
10 M. SAYERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La Chambre
11 d'appel, à notre avis, devrait prendre en considération les points soulevés
12 par le Procureur de la manière tout à fait précise. Il revient au Procureur
13 de démontrer que la Chambre de première instance a commis une erreur claire
14 dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire relatif au prononcé de la
15 peine. J'ai préparé une présentation, mais les ordinateurs, apparemment, ne
16 fonctionnent pas.
17 [La Chambre d'appel et la Greffière se concertent]
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je viens d'apprendre que ceci ne
19 peut pas être fait depuis la cabine. Un technicien doit venir. Je pense que
20 si vous avez préparé des transparents, il ne serait pas juste, vis-à-vis de
21 vous, de ne pas les employer. Peut-être nous pourrions renverser l'ordre.
22 Je me demande si je pourrais me tourner vers la Défense de M. Cerkez, et
23 proposer qu'ils commencent leur propre présentation.
24 Etes-vous prêt, Maître Kovacic ?
25 M. KOVACIC : [interprétation] Je ne suis pas vraiment prêt, mais je pense
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1 que je peux le faire quand même. Juste une minute, s'il vous plaît.
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien sûr.
3 M. KOVACIC : [interprétation] Je pense que je peux le faire, Monsieur le
4 Président.
5 Tout d'abord, ce que je souhaite dire, c'est que nous avions un grand
6 nombre de répétitions et, bien sûr, c'est la conséquence nécessaire, car
7 d'un côté le Procureur au cours de la journée d'hier, et un peu ce matin a
8 fait des commentaires concernant ses réponses à l'appel de Cerkez. Toute à
9 l'heure, il a présenté ces arguments concernant l'acquittement de Cerkez
10 pour Ahmici. Pourquoi est-ce qu'on tourne en rond à cause des faits. En ce
11 qui concerne les deux questions, les questions se résument à celle de
12 savoir si, premièrement, les faits ont été établis de manière exacte;
13 deuxièmement, s'ils ont été interprétés de manière exacte; et seulement
14 troisièmement, nous avons la question de savoir quelles sont les
15 conclusions à en tirer.
16 Vous avez déjà entendu notre position concernant les éléments de preuve
17 cruciaux portés contre Cerkez pour le condamné de son unité à Kruscica et
18 Donja Veceriska. En fond, il s'agit de la même question que celle dont on a
19 parlée déjà aujourd'hui. Le point le plus important est celui qui est lié à
20 l'existence d'un plan. Encore une fois, ceci nous ramène au Témoin AT. D'un
21 côté, nous avons la déclaration du Témoin AT concernant cette fameuse
22 réunion. Ce témoin affirme que la réunion a eu lieu. Il ne sait pas ce qui
23 a été décidé lors de cette réunion, donc nous ne savons pas quel est le
24 plan qui a fait l'objet des discussions lors de cette réunion. Cependant,
25 ce que le Témoin AT sait, et ce qu'il dit plus tard dans sa déposition, la
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1 première fois que les meurtres ont été mentionnés dans le cadre de cette
2 action, c'était par la suite lors de la réunion à Nadioci, à laquelle seule
3 la police militaire a assisté. Quel est le lien entre cela et la
4 connaissance du plan de la part de Cerkez ? Il n'existe pas d'éléments de
5 preuve, ni de conclusions de la Chambre établissant un lien quelconque
6 entre Cerkez et la police militaire qui lui permettrait d'apprendre quelque
7 chose. Il est tout à fait clair, sur la base de l'ensemble de la procédure
8 qu'après cette réunion de la police militaire, la police militaire quitte
9 le bâtiment du commandement de Blaskic, quitte l'hôtel, pour aller ailleurs
10 au bungalow de Nadioci pour y développer son opération. Il n'existe pas de
11 preuve indiquant que Cerkez pouvait être au courant de cela ou suivre la
12 suite des événements.
13 Deuxièmement, en ce qui concerne la crédibilité de ce témoin. Mesdames,
14 Messieurs les Juges, je dois répéter ici que, compte tenu de tout ce qui a
15 été dit par Me Sayers concernant ce témoin, je ne souhaite pas répéter les
16 choses. Il s'agit là d'un témoin qui n'est pas crédible. C'est quelqu'un
17 qui a été condamné pour mensonges et meurtres, et ceci peut être corroboré
18 par des documents. D'un côté, il dit qu'il n'a pas été à cette réunion.
19 D'autre part, nous avons un témoin concernant lequel le témoin a peut-être
20 dit qu'il a assisté à cette réunion. C'est le commandant Grubesic de
21 Busovaca. Grubesic est venu devant ce Tribunal, et il a dit qu'il n'a pas
22 assisté à cette réunion.
23 En ce qui concerne la deuxième déclaration que Cerkez a assisté à cette
24 réunion, nous avons l'élément de preuve D161 où il est établi que Cerkez
25 n'a pas assisté à cette réunion. Tout d'abord, sur la base de tous ces
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1 éléments de preuve, il est clair que Cerkez n'a pas assisté à cette
2 réunion.
3 Deuxièmement, s'il a assisté à cette réunion, il n'existe absolument aucune
4 preuve portant sur le prétendu plan criminel adopté lors de cette réunion.
5 Si un plan militaire a été adopté, d'accord, nous pouvons trouver cela
6 acceptable. Pourquoi ? A cause des quatre ordres que je vous ai montrés
7 hier; D62, D343/1, 6, 7 et 8. Là, il s'agit d'un plan militaire adopté de
8 manière tout à fait légitime.
9 Si une partie de ce plan militaire justifiée est devenue autre chose à
10 Ahmici, cela est une autre affaire. Pourquoi ? Je ne le sais pas. Le 4e
11 Bataillon de la police militaire qui a été envoyé à dépasser ces
12 instructions selon les ordres, cela c'est complètement incontestable. En ce
13 qui concerne les autres unités qui ont reçu les ordres, à mon avis, elles
14 n'ont pas dépassé leur prérogative. D'ailleurs, la zone de responsabilité
15 de mon client, la zone pour laquelle il est responsable c'est seulement
16 Kruscica et le sud d'Ahmici.
17 Nous avons entendu beaucoup de témoins, des témoins tout à fait crédibles
18 qui ont déposé en disant que rien de tout ne s'est passé à Kruscica n'était
19 répréhensible.
20 Le Procureur a parlé de M. Cerkez du fait qu'il aurait assisté au recueil
21 des informations. Voici ce que je souhaite dire : lorsqu'il recueille
22 vraiment des informations ou lorsque ses subordonnés recueillent les
23 informations le 16 avril, émanant de l'ensemble de cette région chaotique
24 pour les transmettre à Blaskic, selon la hiérarchie militaire normale, le
25 subordonné transmet les informations qu'il reçoit à son supérieur
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1 conformément à l'ordre qu'il a reçu de son supérieur. D'ailleurs ceci est
2 corroboré par des dépositions tout à fait claires. Par exemple, le Témoin
3 Zuljevic, je pense qu'il s'agit là du paragraphe 698 du jugement, il
4 recueille des informations.
5 Or, cette assistance après que l'on constate qu'il existait prétendument un
6 plan criminel, et après les crimes commis à Ahmici, est-ce que cette
7 assistance de Cerkez dans le recueil des informations après les crimes,
8 est-ce que ceci constitue le fait d'être complice ou le fait d'encourager
9 ou insister à la commission d'un acte criminel ?
10 Est-ce que vous pourriez me dire, s'il vous plaît, Monsieur le
11 Président, combien de temps il me reste ?
12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous avez au total une heure et
13 demie. Il nous reste maintenant dix minutes jusqu'à la pause, et ensuite
14 nous allons reprendre nos travaux dans une heure. Vous avez une heure et
15 dix minutes à votre disposition.
16 M. KOVACIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Je
17 vais utiliser mon temps jusqu'à la pause et, ensuite, après la pause peut-
18 être mon co-conseil prendra la parole.
19 Ensuite, le Procureur a encore une fois attiré votre attention sur le
20 paragraphe sur lequel nous avons déjà passé beaucoup de temps, à savoir,
21 689(c). Il vous renvoie de manière erronée à la page 236. Or, à cette page,
22 nous avons la pièce à conviction mentionnée par moi plusieurs fois,
23 notamment Z692.3. Nous contestons l'authenticité de cette pièce à
24 conviction. Je souhaite redire que plus de 4 600 documents ont été versés
25 au dossier au cours du procès, et la Défense n'a pas contesté
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1 l'authenticité de tous les autres documents sauf celui-ci.
2 Je souhaite attirer votre attention sur le fait qu'il existe environ 70
3 ordres de Blaskic versés au dossier dans cette affaire. Tous ces ordres
4 sont les ordres de même nature que l'ordre 692.3, ordres portant sur une
5 action militaire et sont tout à fait détaillés et précis. Or, ce
6 malheureusement ordre 692.3, j'essaie de le situer. Le voilà. Est-ce que
7 l'on pourrait le placer sur le rétroprojecteur avec l'aide de l'huissier,
8 s'il vous plaît.
9 Un ordre aussi bref déterminant une action militaire n'est jamais sorti du
10 commandement de Blaskic. Jamais sur les 70 ordres de combat de Blaskic
11 versés au dossier dans cette affaire, aucun ordre ne ressemblait à cela.
12 Deuxièmement, si l'on compare cet ordre à ces 70 ordres de Blaskic,
13 l'aspect physique de cet ordre est totalement différent.
14 Troisièmement, du point de vue militaire, tout simplement il est
15 impossible. Ce serait complètement absurde pour plusieurs raisons. Ici, il
16 est dit à la Brigade de Vitez d'aller à Sivrino Selo. Tout d'abord, dans le
17 chaos du procès, aucune déposition, aucun document n'a jamais mentionné le
18 fait que le HVO aurait essayé de conquérir Sivrino Selo. Jamais et nulle
19 part. J'invite le Procureur à faire des recherches dans toutes ses bases de
20 données et il arrivera à la même conclusion. Jamais ceci n'a été évoqué. Le
21 fief de la partie adverse s'y trouvait, et le HVO ne pouvait pas conquérir
22 cet endroit. Il n'y songeait même pas.
23 Deuxièmement, on l'envoie à Ahmici. C'est l'ordre qui a été donné soi-
24 disant à 10 heures 30. Ahmici, vous avez vu sur la carte quelle est cette
25 région. Il y a Ahmici, Nadioci, et Pirici. Sur le plan militaire, il s'agit
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1 ici quand même d'une affaire militaire. C'est complètement absurde. C'est
2 comme si maintenant j'envoyais mes forces aux Pays-Bas. Où cela ?
3 Militairement, bien sûr, c'est très important. Vers Ahmici, depuis la
4 direction nord ou sud, et cetera, prend ces positions, voici tes tâches, et
5 cetera, et cetera. Il n'y a pas de description de tâches. Or, Blaskic n'a
6 jamais émis un ordre de ce type sans donner la description détaillée et
7 précise des tâches liées à l'activité militaire en question.
8 Je pense que maintenant nous pouvons retirer le document du
9 rétroprojecteur.
10 Quatrièmement, cet ordre a été présenté par le Procureur à deux témoins, à
11 Stipo Ceko et au commandant Bertovic, au cours de leur déposition devant ce
12 Tribunal. C'était la première fois que la Défense a vu cet ordre. Comme je
13 l'ai déjà dit, j'étais un peu pris de court. Je ne trouve pas immédiatement
14 le compte rendu d'audience, mais de toute façon, je peux retrouver cela
15 plus tard. Puisque Bertovic, au cours de sa déposition, a fait une très
16 bonne évaluation de ce document et, plus tard, ce document était montré au
17 témoin Zuljevic. Pardon, tout à l'heure, j'ai mentionné le nom erroné.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Ai-je raison de dire que vous
19 faites référence à la note en bas de page, 1393, portant sur ce document,
20 où il est écrit : "S'agissant de cet ordre, Anto Bertovic a dit lors du
21 contre-interrogatoire qu'il serait nécessaire d'avoir trois bataillons
22 puissants pour accomplir cela" ?
23 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, tout à fait. Plus tard, Bertovic a
24 expliqué cela. Si mes souvenirs sont bons, il a été surpris par ce
25 document, et l'autre témoin aussi d'ailleurs.
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1 Je pense que, compte tenu de ce que je viens de dire, l'authenticité de ce
2 document est absolument inexistante. Même si l'on admettait que ce document
3 était authentique, encore une fois, il n'y a pas de lien entre Cerkez et un
4 quelconque plan, parce que visiblement le plan a dû être créé avant la
5 création de ce document.
6 Point suivant, important à mon avis : le Procureur, comme ceci a été fait
7 dans le jugement également, considère que les événements qui ont suivi, les
8 événements du 16 avril, montrent le caractère du plan. Ceci sous-entend une
9 thèse que tous les plans, ici les plans du HVO ou du colonel Blaskic, se
10 réalisaient toujours par la suite de manière tout à fait conforme à ce qui
11 était initialement prévu. A mon avis, il n'est même pas nécessaire
12 d'analyser à quel point ceci n'est pas vrai. Vous savez, hier, je me suis
13 levé ici. J'avais une idée dans ma tête, mais les choses ne se sont pas
14 déroulées de manière tout à fait conforme à ce que j'avais prévu. Nous
15 sommes tous au courant de ce genre de situation. Cela arrive à tout le
16 monde. Comment peut-on conclure que ce qui s'est passé le 16 avril démontre
17 que c'est ce qui a été exactement planifié en avance ? Je pense que,
18 s'agissant de l'existence de ce plan, il faudrait avoir quand même des
19 éléments de preuve plus solides que cela.
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Le moment est opportun pour
21 procéder à une pause, je pense. Nous allons lever l'audience jusqu'à 13
22 heures 30 de l'après-midi.
23 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 30.
24 --- L'audience est reprise à 13 heures 37.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Veuillez vous asseoir.
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1 Bonjour. Deux points pratiques. Tout d'abord, la Chambre a pris une
2 décision suite aux arguments présentés par l'Accusation. La Chambre recevra
3 les copies des documents imprimés préparés par la Défense de Kordic, des
4 tableaux. Cependant, il ne s'agira pas d'éléments de preuve nous
5 n'attacherons aucune valeur probante à ceci et nous sommes pleinement
6 conscients des arguments avancés par l'Accusation à savoir que ces
7 documents ne reflètent pas de manière exacte le jugement. Il s'agira
8 simplement d'un élément à l'appui, un élément supplémentaire qui nous
9 permettra de nous rappeler les arguments avancés par cette partie. Par
10 conséquent, il ne convient pas de donner une cote à ce document et la
11 Défense Kordic pourra distribuer le document.
12 Nous allons poursuivre pendant les 70 minutes qui sont devant nous, une
13 heure et 10 minutes. C'est la Défense de Cerkez qui pourra répondre aux
14 arguments de l'Accusation. Je vous en prie.
15 M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
16 J'espère pouvoir en terminer même en moins de temps que le temps qui nous a
17 été imparti.
18 En réalité, je peux le dire en quelques mots. Il me faudra dix minutes à
19 peu près pour aborder quelques points qui ne sont pas très longs, pour
20 répondre à l'Accusation. Par la suite, mon collègue Mikulicic prendra la
21 parole pour dire quelques points supplémentaires au sujet de la question de
22 ce plan, dans le cadre de l'intention et de l'entreprise criminelle
23 commune, et par la suite très brièvement moi-même je parlerai de la peine
24 elle-même.
25 Pour ce qui du document Z6923, j'en ai parlé en détail mais je tiens à
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1 rappeler la Chambre du fait que ce document a été versé au dossier après un
2 long voyage effectué en six ans de Bosnie aux archives de Zagreb. Aucun
3 fait ne nous permet de savoir exactement où ont été conservées ces archives
4 pendant ces six années. Nous savons que divers services de renseignement
5 s'intéressaient à cela, et se sont occupés de cela mais nous n'avons pas de
6 faits à l'appui. Le fait est qu'à la fin ces documents sont arrivés à
7 Zagreb en l'an 2000, ou y étaient en l'an 2000 et qu'en janvier de l'an
8 2000 le gouvernement croate a ouvert les portes des archives au Procureur,
9 et là, vraiment j'insiste que le Procureur a eu accès à l'ensemble des
10 archives, un accès illimité dans les bureaux du HIS, l'un des services de
11 renseignement croate. Ensuite, le gouvernement croate a décidé d'enlever le
12 sceau du secret de l'ensemble de ces documents, et ces documents ont été
13 conservés depuis dans les archives nationales, et c'est là que le Procureur
14 a continué à effectuer ses enquêtes et ses recherches et les avocats de la
15 Défense y ont travaillé eux aussi. Mais pour tout le monde cela été une
16 tâche extrêmement dure, les archives n'étant absolument catégorisées,
17 classifiées. Vous pouviez dans un lot trouver tout de suite un document qui
18 vous était intéressant, et vous pouviez tout aussi bien en parcourir une
19 centaine sans trouver quoi que ce soit qui vous intéresse. D'après certains
20 éléments d'information, il y avait quatre kilomètres de long de documents
21 dans ces archives.
22 Enfin, quoiqu'il en soit, ces documents sont arrivés de Zagreb. Le
23 Procureur a cité un témoin, l'un de leurs analystes le témoin Prelec, qui a
24 évoqué la source et l'origine de ce document. Nous ne contestons pas le
25 fait que ce document vient des archives de Zagreb, cependant ce témoin a
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1 confirmé deux points. Tout d'abord qu'il n'en savait rien du sort de ce
2 document, ni de son authenticité, mis à part le fait qu'il a été repéré
3 dans les archives de Zagreb. Un deuxième point, à savoir que ce témoin a
4 confirmé quelque chose qui a eu un impact sur la procédure, à savoir que le
5 Procureur et ce, pour ce qui est de l'essentiel, ou de la majeure partie
6 des documents retrouvés à cet endroit, et qui concerne la Brigade Vitez,
7 que dès le mois de mai de l'an 2000, le Procureur avait en sa possession
8 ces documents, alors que nous n'avons pas reçu communication de ceci.
9 Il s'agit là de l'égalité des armes qui est en cause. Deux de nos témoins
10 se sont vu montrer ces documents. D'abord, le Témoin Bertovic, avant la
11 déposition du Témoin AT et Bertovic a fourni l'explication qui convenait.
12 Je ne voudrais pas m'étendre sur ce document. Nos arguments figurent dans
13 nos écritures. Dans notre mémoire en appel, nous avons soulevé l'objection
14 de l'authenticité de ce document déjà, et j'ai dit aujourd'hui que si on
15 examinait ce document, on l'a examiné d'une manière approfondie, comme
16 toute Chambre se doit de procéder, et on voit, tout de suite, que ce
17 document ne correspond pas aux critères établis.
18 Un deuxième point, le paragraphe 612 a également été cité du jugement. Il
19 s'agit de la tâche qui a été confiée à la Brigade Vitez d'empêcher la
20 FORPRONU d'atteindre Ahmici ainsi que d'autres localités. C'est un argument
21 qui a été beaucoup utilisé par le bureau du Procureur. J'en ai parlé dans
22 mon mémoire, mais je tiens à insister, ici, sur le fait que c'est le Témoin
23 AT qui a avancé cela. Vous savez ce que nous pensons de ce témoin, à savoir
24 qu'il n'est pas crédible, mis à part les événements d'Ahmici, mais pour ce
25 qui est du reste, nous ne pensons pas qu'il sera fiable. Personne d'autre
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1 n'a évoqué cette histoire, ici, dans le procès. C'est la seule et unique
2 fois où nous en avons entendu parler. Cela, c'est le premier point.
3 Un deuxième point : cette affirmation est à la fois illogique et
4 impossible, à savoir, compte tenu de l'endroit où se trouvent les axes de
5 Vitez et d'autres installations de Vitez, il n'y avait aucun moyen pour que
6 la Brigade Vitez puisse bloquer l'accès à qui que ce soit à Ahmici, car
7 c'est à l'est et à l'ouest que la FORPRONU avait d'autres bases. Même s'il
8 y avait eu un blocus, or, le Témoin Bertovic, à qui l'Accusation a posé des
9 questions à ce sujet, l'a rejeté de manière catégorique. L'affirmation
10 était que c'était précisément Bertovic qui tenait ce blocus près du pont
11 d'Impregnacija Tout simplement, ceci est impossible et ne tient pas debout.
12 La chose la plus difficile, c'est de présenter des contre-arguments à des
13 affirmations totalement impossibles et absurdes. Je ne vois pas comment le
14 faire.
15 Pour ce qui est du Témoin Bertovic que je cite sans cesse parce que je
16 pense que c'était un témoin très impressionnant, très frappant, et on le
17 voit dans le jugement. Alors, mon collègue a dit pour Bertovic qu'il était
18 l'assistant de Cerkez. Il ne fait aucun doute et ceci ressort, à la fin, de
19 sa déposition et de nombreux éléments de preuve, qu'il était commandant
20 d'une compagnie de la Brigade Vitez. A l'époque, à ce moment-là, c'était la
21 seule compagnie au sein de la Brigade Vitez. C'était en avril.
22 Ce qui m'amène à un autre argument qui a été mentionné de manière indirecte
23 aujourd'hui lorsqu'on a cité un paragraphe du jugement et, hier, le
24 Procureur l'a présenté sur le rétroprojecteur. Il s'agit de la pièce Z653.
25 J'ai rappelé que pendant le procès, à d'innombrables fois, on a pu voir ce
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1 document et la Chambre n'en a tiré aucune conclusion. Le Témoin Bertovic,
2 encore une fois, a déposé au sujet de ce document. Je pense que c'est lui-
3 même qui l'avait rédigé ou préparé. Je crois qu'il l'a mentionné. C'était,
4 en fait, un examen du potentiel de mobilisation aux fins de mobiliser des
5 soldats par relève qui devaient se rendre sur la ligne de front, face à
6 l'armée des Serbes de Bosnie. En l'espèce, c'était bien connu que c'est un
7 principe de relève qui a permis au HVO de couvrir ce secteur de défense
8 face à la VRS.
9 Bertovic, en tant que chef de compagnie au sein de cette brigade en était
10 précisément chargé. Il a déposé en détail à ce sujet, au sujet de la
11 composition des relèves, et c'était pour lui un argument afin de convaincre
12 son commandant Cerkez, du potentiel, des capacités qu'il avait en réalité.
13 Il a dit, dans sa déposition, qu'en fin de compte, il a toujours rencontré
14 des problèmes lorsqu'il lui fallait 60 à 70 hommes pour remplir une équipe
15 de relève.
16 Pour ce qui est de la Brigade Vitez et là, encore, il y a beaucoup
17 d'éléments de preuve versés au dossier, jusqu'au conflit, elle faisait
18 partie de la Brigade de Stejpan Tomasevic et, par la suite, elle est
19 devenue une brigade autonome. Sa seule tâche, sa seule mission a été de
20 garder ses lignes de front face à la VRS. Elle n'avait jamais été formée,
21 elle n'avait jamais été totalement organisée, et jamais n'était prête pour
22 combattre dans le village ou dans la localité.
23 Je saisi l'occasion, je vous ai dit avant l'interruption de séance, qu'en
24 l'espèce, aucun autre élément de preuve ne montre que Sivrino Selo aurait
25 constitué une cible pour le HVO. Mon éminent collègue de l'Accusation m'a
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1 rafraîchi la mémoire pendant la pause. Il m'a effectivement rappelé que le
2 Témoin AT l'a déclaré, à savoir que la Brigade Vitez ou plutôt que sa
3 police militaire était stationnée à Sivrino Selo. Je ne me souviens pas
4 précisément, mais toujours est-il que cette localité-là est mentionnée en
5 tant que l'endroit où il y avait des activités du HVO.
6 Je vous prie d'accepter mes excuses et de me corriger. Mis à part cet ordre
7 693, ceci a été mentionné, mais cela a été dit par un témoin dont nous
8 contestons réellement la crédibilité. Si tel est le cas, c'était vraiment
9 un seul élément complémentaire d'information à cet effet. Même si c'était
10 vrai, de toute façon, rien ne s'est produit à Sivrino Selo, et Sivrino Selo
11 n'est pas, non plus, incriminé comme étant l'un des lieux où des crimes
12 auraient été commis.
13 C'était une possibilité offerte à l'Accusation et aux Juges dans leur
14 jugement, de dire que la Brigade Vitez se trouvait à divers endroits, y
15 compris à Sivrino Selo. On le montre par rapport à Ahmici. On peut toujours
16 discuter du Témoin AT, de sa crédibilité, mais nous ne pouvons pas recevoir
17 cet élément de preuve parce que nous pensons que ce n'est pas suffisant.
18 En plus de ce que je viens de dire, et je pense que le moment est opportun,
19 compte tenu des arguments présentés en appel par l'Accusation au sujet de
20 la position de Cerkez d'un point de vue juridique pour ce qui est du crime
21 d'Ahmici. Je me permettrais de rappeler ceci, le chef d'accusation a
22 changé, jusqu'à présent, constamment, à l'encontre de Cerkez pour ce qui
23 est du crime d'Ahmici où l'Accusation portait à l'encontre de Cerkez. Je
24 dois dire que même en appel, l'Accusation maintient cette attitude, ce qui
25 rend très difficile à Cerkez de se défendre. Je dois dire que cette
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1 situation prévaut en l'espèce depuis le premier jour. Mon collège Sayers a
2 parlé de la stratégie de la cible fuyante ou mouvante.
3 Je vais préciser la situation. Dans l'acte d'accusation modifié,
4 l'Accusation affirme que c'est de manière directe que Cerkez est impliqué,
5 a participé aux crimes d'Ahmici et que cela ressort des chefs 5, 6, 14 à
6 20, 40 à 42 et 44.
7 Dans les propos liminaires de l'Accusation depuis le début du procès, au
8 fond, pages 95, 96 et 31, l'Accusation affirme deux choses. Premièrement,
9 ils disent que le HVO a commis le crime d'Ahmici, et à l'appui de cette
10 affirmation, on mentionne deux unités mais pas la Brigade Vitez.
11 L'affirmation est celle que le HVO a commis telles et telles unités du HVO
12 mais la Brigade de Vitez n'est pas mentionnée [comme interprété]. C'est ce
13 que le Procureur a dit dans le prétoire au tout début du procès, au moment
14 où il présente sa cause, sa thèse et au moment où nous commençons à
15 comprendre contre quoi nous devrons nous défendre, compte tenu du fait que
16 l'acte d'accusation n'était pas précis.
17 En outre, pendant la présentation des éléments de preuve de l'Accusation,
18 l'Accusation continue d'essayer de prouver que la Brigade de Vitez a pris
19 part aux opérations d'Ahmici du 16 avril, et l'Accusation propose le
20 versement de nouvelles preuves. Vers la fin de la présentation des éléments
21 de preuve de la Défense, plus précisément le 12 octobre de l'an 2000,
22 transcript page 26 518, et les pages suivantes, il y a deux affirmations.
23 L'Accusation dit comme suit, je vais donner lecture de cela.
24 "Cerkez a été impliqué avec ces hommes dans une partie du plan général
25 mais, ce n'était pas une brigade en particulier qui se serait rendue sur
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1 les lieux pour tuer tout le monde à Ahmici."
2 Un deuxième point :
3 "Une fois que le boulot sale a été fait, il est possible que la Brigade
4 Viteska a été déployée pour garantir la sécurité des positions. Il n'y a là
5 aucune incompatibilité entre les deux."
6 Permettez de dire ce qui a été déclaré le 12 octobre, la veille de la
7 déposition d'AT.
8 En réplique, l'Accusation n'a rien modifié, donc nous supposons qu'elle
9 maintient sa position. Dans son mémoire en clôture, l'Accusation maintient
10 plus au moins la même position, car il y est dit que la Brigade Viteska sur
11 ordre de Cerkez n'a pas participé à l'action d'Ahmici, mais que lui Cerkez
12 a participé à ce plan, et qu'il a joué un certain rôle. C'est au paragraphe
13 252 du mémoire en clôture de l'Accusation.
14 Commencez les appels. Dans son mémoire en appel, l'Accusation revient en
15 fait, comme nos collègues le diraient, retour à la case départ, que la
16 Brigade Viteska a pris part, activement, aux crimes commis à Ahmici le 16
17 avril 1993. Bien entendu, lorsque nous nous défendons, et nous présentons
18 toujours la même thèse, mais je dois dire que ceci nous devient difficile
19 car, à chaque fois, les actes sont qualifiés d'une manière différente, et
20 dès qu'on a l'impression que certains éléments de preuve manquent
21 complètement de pertinence, et la situation change et soudain ces éléments
22 de preuve deviennent, particulièrement, pertinents alors que nous ne les
23 avons pas contestés, au moment voulu.
24 Pour répondre aux arguments qui ont été présentés en appel par l'Accusation
25 pour ce qui est de la participation alléguée de Cerkez à Ahmici, ce que je
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1 proposerais, c'est que ce moyen d'appel, présenté par l'Accusation, soit
2 rejeté et qu'il ne soit pas discuté pour ce qui est du fond car, à la fin
3 du procès, l'Accusation avait, expressément, renoncé à cette affirmation
4 que Cerkez ou son unité était présent à Ahmici. D'après le droit
5 conventionnel, je ne peux entendre et interpréter ces déclarations que
6 comme une modification de l'Accusation. En substance, c'était bien cela,
7 car à partir de la participation directe de la Brigade Viteska à Ahmici, le
8 12 octobre, vers la fin du procès, l'Accusation revient sur sa thèse pour
9 revenir, encore une fois, à sa première thèse par la suite, et je crois que
10 ceci n'est pas acceptable. Je demanderais que la Chambre d'appel envisage
11 de rejeter l'appel de l'Accusation pour ce qui est d'Ahmici sans rentrer au
12 fond de la question.
13 Je me propose à présent de donner la parole à mon confrère M. Mikulicic
14 concernant le sujet que j'ai déjà cité, je reprendrai la parole pour cinq
15 minutes au maximum pour ce qui est du jugement prononcé. Bien entendu, s'il
16 n'y a pas de questions à poser de la part des Juges.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Maître Mikulicic, à vous.
18 M. MIKULICIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Mesdames et
19 Messieurs les Juges.
20 Mesdames et Messieurs les Juges, dans ce prétoire, il y a par-dessus notre
21 tête ou au-dessus de nous, tout le temps, une espèce de plan qui flotte
22 comme une bannière, et cela nous crée pas mal de désagréments à nous tous,
23 autant que nous sommes. Cela semble être comme la volonté de Dieu. Ce n'est
24 pas établi, mais cela à l'air de flotter dans l'atmosphère. Si vous me
25 permettez, j'aimerais revenir à des faits.
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1 L'Accusation affirme que notre client faisait partie d'une entreprise
2 criminelle qui a été créée et fondée pour persécuter la population
3 musulmane en Bosnie-Herzégovine. Le plan s'est concrétisé à l'occasion de
4 cette réunion litigieuse pour ce qui est de sa tenue en date du 15 avril
5 1993, notamment au poste de commandement occupé par le colonel Blaskic.
6 Nous avons déjà entendu bon nombre d'arguments disant quels sont les
7 éléments de preuve qui indiqueraient que cette réunion a eu, premièrement,
8 lieu; deuxièmement, qui a été présent à celle-ci; et troisièmement, quelles
9 en ont été les conclusions et quelles ont été les décisions prises à
10 l'occasion de cette réunion. Ce que j'affirme en toute responsabilité ici,
11 une fois de plus, c'est que dans la procédure de présentation des éléments
12 de preuve, il n'a pas été montré, ne serait-ce qu'un seul élément de preuve
13 qui au-delà de tout doute raisonnable parlerait de l'objet de cette réunion
14 et des personnes présentes à cette réunion, tout comme des décisions qui
15 auraient été prises.
16 Je reviens à présent au jugement dans l'affaire Krnojelac où l'on a établi
17 des normes pour ce qui est de que l'Accusation était censée prouver afin
18 que l'on puisse juger comme établies l'existence d'une forme de
19 responsabilité et de culpabilité quelconque. Bien sûr, ces conditions se
20 trouvent être cumulatives, le Procureur doit, en effet, prouver quel est le
21 planning en place, quelle est sa finalité. Il doit identifier les autres
22 participants, à savoir les autres auteurs, et il se doit de prouver la
23 catégorie de culpabilité que l'on reproche à l'accusé.
24 Je tiens à vous rappeler les normes adoptées dans le jugement de l'affaire
25 Krstic où il est, directement, question de ce qui suit, la présence seule
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1 ne suffit pas pour permettre la conclusion de l'existence d'une
2 culpabilité.
3 Nos confrères du bureau du Procureur, dans leur introduction, se sont
4 référés aux paragraphes 703 et 831 du jugement où la Chambre de première
5 instance affirme qu'il n'est pas possible de conclure, au-delà de tout
6 doute raisonnable, de la responsabilité de notre client pour ce qui est du
7 crime Ahmici. C'est la raison pour laquelle, il se trouve être acquitté de
8 ce crime, de ce chef.
9 Que fait mon confrère, il réinterprète cette position-là, cette position
10 figurant dans le jugement de première instance pour en tirer une conclusion
11 inverse. En réalité, il détermine l'existence d'un planning et il impute la
12 responsabilité de ce crime, une fois de plus, à mon client.
13 Si l'on se penche, maintenant, sur l'acte d'accusation initial. Nous
14 verrons que l'acte d'accusation mentionne des termes, les termes d'aider et
15 encourager pour ce qui est de la perpétration d'un délit au pénal, nulle
16 part, à aucun endroit il fait état de cette catégorie pénale pour ce qui
17 est de la responsabilité afférente à une entreprise criminelle commune. Le
18 jugement, quant à lui, au paragraphe 397 se réfère à une doctrine qui est
19 celle de l'intention concertée et parle des formes d'assistance et de
20 soutien. Ce ne sont pas là des catégories unilatérales ou du même type.
21 J'ai à l'esprit ici, notamment, le jugement Blaskic, paragraphe 288 où il
22 est dit qu'il doit être fait une distinction entre aider et encourager
23 d'une part et d'autre part, un dessein commun.
24 Je reviens maintenant au jugement Krnojelac, datant du 15 mars 1992,
25 paragraphe 75 où il est dit : "Qu'une personne qui ne fait qu'aider et
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1 encourager l'auteur d'un délit doit, forcément, être conscient de son
2 intention de commettre un crime, alors qu'un co-auteur dans une entreprise
3 criminelle commune doit, forcément, partager l'intention, le dessein avec
4 l'auteur principal pour citer la version originale."
5 Par conséquent ce que j'affirme, c'est que dans cette affaire il n'y a
6 point d'éléments de preuve qui nous feraient conclure, a) que mon client
7 ait été présent à la réunion ou un dessein criminel commun aurait été
8 établi; et (b) il n'y a pas de preuves pour ce qui est d'un dessein
9 criminel du tout; et (c) il n'y a pas de preuves aux termes desquelles mon
10 client, quand bien même il aurait été présent à cette réunion et quand bien
11 même il y aurait eu dessein criminel commun, aurait, pour sa part, partagé
12 l'intention criminelle des autres participants.
13 Ce qui est exact, c'est qu'au sujet de l'existence d'un dessein, il peut
14 être tiré des conclusions ou vice versa pour ce qui est de certaines formes
15 de perpétration d'actes criminels qui deviendraient une forme habituelle de
16 perpétration. Penchons-nous toutefois sur ce qui se passe au niveau de
17 notre affaire à nous.
18 Le point central se trouve être, bien entendu, le crime d'Ahmici, c'est un
19 point de fait qu'il y a eu, au-delà de tout doute possible, perpétration
20 d'un crime de guerre là-bas, une action militaire a connu une escalade pour
21 se solder par des exécutions de civils, de femmes et d'enfants innocents
22 dans les caves de leurs maisons là où ils s'étaient cachés dans le courant
23 des combats et des opérations militaires.
24 Une telle forme et de telles conséquences ne se sont retrouvées dans aucun
25 autre événement de la vallée de la Lasva. Ahmici constitue, véritablement,
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1 un cas isolé, un cas à part. Un incident malheureux, un crime de guerre
2 terrible pour lequel au-delà de tout doute possible, les auteurs doivent,
3 forcément, être punis. Parmi les auteurs, il n'est point mon client, à moi.
4 Vous avez entendu des arguments pour ce qui est du tempore acti et de
5 l'endroit où se trouvait mon client, de l'emplacement physique où il se
6 trouvait. Vous avez entendu, également, des arguments par lesquels la
7 Défense avait contrecarré, de façon explicite, les positions adoptées par
8 l'Accusation pour ce qui est de l'existence d'une entreprise criminelle
9 commune ou d'un dessein commun. Il vous appartiendra à vous, Mesdames et
10 Messieurs les Juges, de prendre une décision qui sera la vôtre. J'estime,
11 pour ma part, que la Chambre de première instance, dans ce segment-là du
12 moins pour ce qui est de la responsabilité afférente aux crimes d'Ahmici, a
13 adopté une décision, tout à fait, justifiée à savoir qu'il n'y a point
14 d'arguments pertinents qui pourraient nous faire conclure le contraire.
15 C'est par ces dires que je propose de mettre un terme à ma partie de la
16 réplique, aux dires de l'Accusation. S'il y a des questions, bien entendu,
17 je me mets à votre disposition, je suis, tout à fait, disposé à y répondre.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il n'y a pas de questions. Je vous
19 remercie pour votre exposé et je crois que M. Kovacic va vouloir maintenant
20 finaliser.
21 Maître Kovacic.
22 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vais être
23 très, très bref. Excusez-moi, je vais quand même parler Croate, c'est plus
24 facile pour moi.
25 Tout d'abord, pour les besoins du compte rendu d'audience, je tiens à dire
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1 que nous maintenons, en totalité, les écritures en appel que nous avons
2 présentées, notamment, du point de vue de la sentence prononcée et nous
3 n'aurons rien à ajouter, à ce titre-là. A ce sujet, nous en avons parlé
4 tout à l'heure, je tiens à dire que nous avons présenté des écritures en
5 date du 4 mai. Pour ma part, j'estimerais que cela constituerait une bonne
6 pratique parce que l'un des critères pour ce qui est de la procédure de
7 prononcé de sentence devant être suivi par la Chambre, c'est précisément
8 l'individualisation d'une peine prononcée.
9 Je tiens à dire clairement que nous sommes, entièrement, d'accord avec la
10 pratique plus ou moins incontestée au niveau du Tribunal où il est affirmé
11 que la peine doit être prononcée, compte tenu des éléments de prévention,
12 de punition, de la gravité du délit et l'on passe à l'individualisation de
13 la peine, une fois prise en considération les autres composantes à savoir
14 les circonstances atténuantes et aggravantes pour ce qui est de la personne
15 elle-même. Bien entendu, en premier lieu, ce potentiel de réinsertion
16 sociale de cette personnalité. Nous sommes d'accord avec ces principes-là
17 et nous tenons à ce que la Chambre pèse et soupèse attentivement les
18 choses, pour arriver à un équilibre qui n'est pas facile à établir.
19 Mais pour ce qui est de nos écritures datées du 4 mai, nous voulions mettre
20 l'accent sur deux éléments. D'abord, le Juge de la mise en état d'appel,
21 nous a donné l'opportunité de le faire, de présenter des renseignements
22 personnels ou concernant la famille de l'accusé, et cetera, et de passer
23 sur des caractéristiques plus vastes de l'individu pour parler de l'arrière
24 fond, des origines et de certains éléments qui se sont propres au caractère
25 de l'accusé.
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1 Nous avons entendu les positions de l'accusation et nous estimons que ce
2 sont là des éléments dont la Chambre d'appel doit tenir compte pour prendre
3 sa décision d'une façon attentive, en tenant compte, non seulement dans des
4 circonstances atténuantes mais tout aussi bien de la capacité de l'accusé à
5 se réintégrer, à se réinsérer dans ce tissu social. Je ne vais pas parler
6 de la criminologie moderne et des aspects qui sont cités dans la
7 littérature de ce côté-là.
8 Parlant de la "criminologie," je pourrais peut-être me référer également à
9 la "pénologie."
10 Ceci me fait penser à la conclusion au point 470 du jugement. Les Juges ont
11 résumé quelques renseignements au sujet de l'accusé et ils ont indiqué que
12 bon nombre de témoins de l'Accusation et de la Défense ont parlé en termes
13 positifs de l'accusé pour ce qui est de l'absence de préjugés le
14 concernant. Je situerais le témoin Stewart qui s'est exprimé en termes
15 positifs au sujet du caractère de celui-ci, pour affirmer de façon
16 explicite qu'il s'agissait d'une personne tout à fait décente et honorable,
17 en se référant, bien entendu, à l'accusé Cerkez.
18 Je ne voudrais pas capitaliser sur ces écritures mais je voudrais attirer
19 l'attention des Juges sur le point 21 des écritures où Cerkez, dans sa
20 volonté de se montrer changé et de se montrer désireux de participer à la
21 recherche de la vérité pour ce qui est de ces tristes événements de la
22 vallée de la Lasva. Il a, à ce sujet, dans ce contexte, proposé à
23 l'Accusation de se faire témoin dans l'affaire Hadzihasanovic et autres,
24 parce que dans l'acte d'accusation, il a pu lire au sujet de certains
25 événements dont il a estimé pouvoir être témoin direct. Il a même proposé à
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1 l'Accusation si besoin était, de procéder à une sorte d'expertise pour ce
2 qui est de la bonne compréhension des documents, à savoir placer les
3 documents disponibles dans un contexte déterminé.
4 Cette proposition s'est vue rejetée, malheureusement. Pour ce qui est
5 desdites écritures, le comportement Cerkez montre qu'il s'agit d'une
6 personne tout à fait disposée à respecter la loi, les réglementations et
7 les conventions en place. Cela se trouvait être confirmé de nos jours par
8 la lettre rédigée par le directeur de l'unité de détention. A ce sujet, je
9 dirais que c'est là un élément de grande valeur. Je ne pense pas que cela
10 ait été écrit de façon routinière mais j'ai l'impression que tout mot y est
11 bien soupesé. Je précise également que le directeur de cette unité de
12 détention, M. McFadden, se trouve être l'un des experts reconnus en matière
13 de pénologie au sein de l'Europe, que je connais personnellement depuis
14 sept ans. Une fois de plus, je tiens à vous rappeler que M. Cerkez est
15 arrivé à l'unité de détention alors qu'il s'y trouvait un nombre
16 relativement petit d'accusés. La Défense a eu l'opportunité de connaître
17 l'administration et le personnel de l'unité de détention. Maintenant, bien
18 entendu, les choses ont évolué et c'est devenu bien plus grand, de par la
19 taille et de par le nombre de personnes.
20 Je tiens à saisir l'occasion, puisque je suis en train de profiter du temps
21 qui m'est imparti pour dire autre chose.
22 Compte tenu du nombre et du grand nombre d'arguments, de part et d'autre,
23 dans cette affaire, je tiens à demander à la Chambre de ne pas perdre de
24 vue le principe de beneficium cohesionis, qui a été reconnu dans l'appel,
25 interjeté dans l'affaire Kupreskic. Ce que j'ai à l'esprit, notamment, ici,
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1 c'est le fait que la défense de Kordic a présenté plusieurs éléments
2 importants pour ce qui est des qualificatifs juridiques. Il n'y a pas de
3 collision entre les deux défenses ici présentes, pour ce qui est de leurs
4 positions, et les éléments présentés en faveur de l'accusé Kordic peuvent
5 être interprétés pour ce qui est de l'accusé Cerkez, si tant est que ces
6 éléments-là sont pris en considération.
7 Pour ce qui est de la sentence, je proposerais également, encore, à la
8 Chambre de prononcer une peine appropriée, adéquate et notamment, compte
9 tenu du fait que les chefs 35 et 44 de l'acte d'accusation seront annulés.
10 Nous croyons également qu'il y aura une annulation de cette double
11 culpabilité en application des Articles 7(1) et 7(3) de l'acte d'accusation
12 pour ce qui est des chefs allant du 3 au 44. Je propose que, pour ce qui
13 est de ce volume nettement amenuisé, réduit des chefs d'accusation, il soit
14 procédé à une diminution proportionnelle et appropriée de la peine. Si tant
15 est que nous avons réussi, du moins pour ce qui est de ces certains motifs
16 d'appel, de présenter des raisons pour ce qui est d'une réduction
17 complémentaire de la peine. Je vous remercie de votre attention et je
18 précise que j'en ai fini avec la présentation de mes arguments.
19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous n'avons pas de questions, nous
20 vous remercions. Nous pouvons maintenant continuer avec les réponses de
21 l'équipe de l'accusé Kordic. Comme nous l'avons déjà indiqué, vous avez 30
22 minutes pour l'exposé de vos arguments.
23 M. SAYERS : [interprétation] Je dois avouer, Monsieur le Président, que
24 ceci me soulage grandement. Je vais commencer par dire que nous sommes
25 convaincus du bien-fondé de l'approche non pas pour ce qui est du niveau de
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1 généralités, mais pour ce qui est de quatre sujets précis. Quelles sont les
2 normes appliquées, quelles sont les constatations de la Chambre de première
3 instance, quels sont les éléments de preuve et quelles sont les conclusions
4 de cette Chambre de première instance ? Partant de là, la question qui se
5 pose, c'est de savoir si la Chambre de première instance a erré en
6 prononçant une peine extrêmement lourde de 25 ans de prison. A notre avis,
7 il n'y a pas eu d'erreur.
8 La charge de la démonstration est du côté de l'Accusation pour ce qui est
9 de l'erreur éventuelle dans l'exercice des prérogatives de la Chambre de
10 première instance pour ce qui est du prononcé de la peine.
11 Nous tenons à préciser que M. Kordic s'est vu acquitté de tous les chefs
12 d'accusation découlant de l'Article 7(3). Il y a eu à un moment donné, des
13 éléments en fonction de l'Article 7(3) et nous n'avons pas épargné nos
14 efforts pour ce qui est de l'exercice d'une autorité militaire de la part
15 de Kordic. La conclusion de la Chambre de première instance a été
16 contraire.
17 L'un des témoins principaux, du côté militaire pour l'Accusation, le
18 lieutenant-colonel Stewart, du Bataillon britannique dans le secteur de
19 Vitez, a estimé que Kordic a été personnellement impliqué dans la
20 perpétration de crimes de guerre. La Chambre de première instance n'a pas
21 été d'accord avec cette allégation mais la Chambre a d'autre part conclu
22 qu'il ne s'agissait pas d'un commandant militaire. Kordic n'a pas été un
23 supérieur hiérarchique. Comme je l'ai déjà dit, je ne vais pas entrer dans
24 tous les détails pour répéter ce qui a déjà été dit, mais, pour répéter
25 l'essentiel, je préciserais que la Chambre de première instance a conclu
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1 que c'était là, un leader politique régional. Il n'a pas exercé de contrôle
2 effectif sur le plan militaire à l'égard des forces du HVO. Il n'a pas
3 occupé les échelons les plus hauts parmi les Croates de Bosnie pour ce qui
4 est des instructions politiques, il n'a pas œuvré à la réalisation d'une
5 campagne de persécution du point de vue des conclusions de la Chambre de
6 première instance, et il n'en a pas été l'architecte.
7 Pour ce qui est du prononcé de la sentence, les limites, sont très
8 controversés. L'obligation de l'appelant consiste à démontrer qu'il y ait
9 eu des erreurs commises par la Chambre de première instance dans les
10 limites de l'intervention et de celles-ci.
11 Il fait partie des obligations de la Chambre de première instance
12 d'individualiser la peine prononcée en vertu l'Article 24(2), c'est un
13 droit qui est de nature discrétionnaire et concerne les circonstances de
14 toutes affaires, en l'espèce. Il n'est pas particulièrement utile de
15 comparer les peines prononcées à l'intention des différents accusés dans
16 différentes affaires. C'est ce que constitue la situation au niveau de la
17 pratique de ce Tribunal.
18 La charge de la preuve revient à l'appelant, et c'est à l'appelant de
19 démontrer que la Chambre de première instance s'est sortie du cadre de ses
20 pouvoirs discrétionnaires. C'est ce que l'Accusation doit prouver en
21 l'espèce.
22 Pour ce qui est du premier argument disant que la Chambre de première
23 instance a erré pour ce qui est de prendre en considération la gravité des
24 délits, les deux paragraphes montrés sur l'écran, pour ce qui est de ce que
25 la Chambre de première instance a fait. Il a été pris en considération la
Page 629
1 gravité des peines au pénal, des délits au pénal. C'est la raison pour
2 laquelle, ici, le Procureur est en position difficile si l'on dit que la
3 Chambre de première instance a failli pour ce qui était de son devoir de
4 prendre en considération tous les facteurs pertinents.
5 La deuxième opinion de la Chambre de première instance dit que la Chambre a
6 erré parce qu'elle n'a pas accordé le poids à attribuer à la position de
7 Kordic, ses attributions et ses responsabilités. La thèse serait celle de
8 dire que Kordic avait occupé une position élevée sur le plan politique,
9 mais nulle part il n'a été spécifié quelle était cette position, pour ce
10 qui est du rôle militaire. On dit qu'il a eu un rôle, mais on ne dit pas
11 quel type de rôle. Alors, il a dirigé des attaques, il aurait exercé une
12 autorité militaire, mais ce sont là, des points de vue de nature générale.
13 L'Accusation dit qu'il a eu erreur pour ce qui est de la position de Kordic
14 en tant que leader politique, mais penchons-nous sur ce que dit le
15 paragraphe 853. Le fait qu'il ait été un leader aggrave sa position et la
16 peine. Mais une fois de plus, il y a des facteurs pour lesquels
17 l'Accusation affirme que l'erreur revient à la Chambre de première instance
18 parce qu'elle n'a pas pris en considération les éléments aggravants pour
19 supposer la peine. Il appartient à l'Accusation de prouver qu'il y a eu des
20 attributions militaires et des attributions du point de vue politique du
21 côté de l'accusé. Ceci, à la lumière de son allégation au terme de laquelle
22 cela constituerait des circonstances aggravantes et la chose doit être
23 prouvé au-delà du doute raisonnable. Une fois de plus, le Procureur s'est
24 trouvé dans une difficulté, étant donné qu'il y eu acquittement de M.
25 Kordic en application l'Article 7(3), lequel acquittement, à notre opinion,
Page 630
1 était tout à fait inévitable, étant donné les éléments de preuve qui ont
2 été présentés et dont je vais parler dans quelques minutes.
3 La position de Kordic en tant que vice-président du HZ HB, quels pouvaient
4 être les pouvoirs militaires qui auraient été laissés à cette position ?
5 Nul. Quels étaient ses pouvoirs ? Ses pouvoirs étaient ceux du vice-
6 président, de la présidence qui était purement parlementaire, comme nous le
7 savons. Il y a deux choses ici. Tout d'abord, il y a le Procureur qui a
8 présenté un expert en droit constitutionnel, le Dr Ribicic qui en a parlé.
9 Ensuite, le Dr Ribicic a parlé et a expliqué que la présidence du HZ HB se
10 constituait non seulement d'un président et deux vice-présidents, Bozo
11 Rajic et M. Kordic, mais qu'il avait un secrétaire, M. Kostroman, et il y
12 avait encore 31 responsables au niveau des municipalités civils du HVO.
13 Cela avait constitué la présidence.
14 Pour ce qui est des documents concernant le HZ HB, tous ces documents
15 expliquent de quelle façon fonctionnaient les institutions. Vous avez, ici,
16 la pièce à conviction D181/1, y compris les modalités de fonctionnement de
17 la présidence qui indique quelles étaient les attributions du vice-
18 président, qui était de nature purement parlement.
19 Le vice-président de la vice-présidence n'avait aucun pouvoir militaire, et
20 le Dr. Rebicic l'a reconnu. Mate Boban était président du HZ Herceg-Bosna.
21 C'était le commandant suprême du HVO. D'ailleurs, c'est Perica Jukic, en
22 personne, qui était le vice premier ministre de la HR HB, ce qui confirme à
23 quel point il est important de faire la différence entre ces deux postes.
24 J'aimerais, s'il vous plaît, huis clos partiel pour quelques minutes.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.
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1 [Audience à huis clos partiel]
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11 [Audience publique]
12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous pouvez continuer.
13 M. SAYERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le second de
14 Blaskic.
15 "Q. Est-ce que M. Kordic avait des fonctions de commandant militaire ?
16 R. Non, il n'avait aucune implication dans ce domaine. Il s'agissait de
17 Filipovic là.
18 Q. Maintenant, passons à Palavra. On y revient encore une fois, cent fois
19 sur le métier. Remettez votre ouvrage. Qui a désigné Palavra à son poste ?
20 R. Blaskic. Le colonel Palavra a attesté que la police militaire était
21 subordonnée au commandement de la zone opérationnelle de Bosnie centrale
22 dans le cadre d'une hiérarchie classique. Le colonel Palavra atteste du
23 fait qu'il recevait ses ordres de son supérieur, le colonel Blaskic.
24 Q. Vous receviez vos ordres directement du colonel Blaskic, chef de la
25 zone opérationnelle de Bosnie centrale ?
Page 633
1 R. Oui."
2 La Chambre se souviendra qu'il s'agissait d'un témoin de la Chambre qui
3 avait été convoqué par les Juges de la Chambre de première instance.
4 "Q. Avez-vous jamais reçu des instructions ou des ordres ou quoi que ce
5 soit d'autres de Kordic ?
6 R. Jamais."
7 Personne n'a jamais dit que les Jokeri étaient sous l'autorité ou le
8 commandement de Kordic, ce à quoi il donne. Il répond par l'affirmative. La
9 question qu'on lui pose ensuite et à laquelle il donne une réponse
10 positive, c'est que cela concerne également l'adjoint Vladimir Santic, qui
11 n'a jamais essayé d'affirmer que Kordic était impliqué dans les affaires de
12 la police militaire.
13 Enfin, on demande à Palavra si Kordic avait une autorité de commandement
14 dans la police ou autre. Il répond, non.
15 Colonel Vukovic, prédécesseur de Pasko Ljubicic : "Je n'ai jamais reçu les
16 ordres d'un politique quel qu'il soit. J'avais ma propre chaîne de
17 commandement."
18 Négociations de cessez-le-feu. M. Kordic était tellement important, un
19 personnage tellement important dans la chaîne de commandement qu'il devait
20 donner le feu vert aux opérations militaires. Si c'est le cas, si cela
21 c'est vrai, comment se fait-il qu'il n'a jamais participé aux négociations
22 de cessez-le-feu ? Alors examinons le témoignage suivant. Le lieutenant-
23 colonel Stewart, au sujet de Novi Travnik et des combats qui ont eu lieu.
24 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent que Me Sayers ne fait aucune
25 pause, ne signale pas qui parle. Les interprètes s'excusent par avance de
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1 la qualité, peut-être, médiocre de leur travail.
2 M. SAYERS : [interprétation] "Personne n'a jamais demandé à Kordic de
3 participer au cessez-le-feu ?
4 "C'est exact." Je voulais que Blaskic soit tout le temps sur le terrain"
5 dit le colonel Stewart.
6 Nous avons expliqué à la Chambre d'appel comment fonctionne une
7 chaîne de commandement normal dans une organisation militaire. D83/1,
8 D84/1, Z715, on voit qui, dans la chaîne de commandement, donne les ordres
9 de cessez-le-feu suite à un accord d'Izetbegovic. C'est l'état-major qui
10 reçoit les ordres. Ces ordres ont été ensuite communiqués aux zones
11 opérationnelles. On voit dans une pièce que nous avons montrée, Z615,
12 L'INTERPRÈTE : La fin de l'intervention de Me Sayers n'est pas traduisible.
13 M. SAYERS : [interprétation] Nous en sommes informés par le colonel
14 Stewart. Nous n'avons pas besoin de Kordic parce qu'il y avait là les
15 représentants du commandement militaire.
16 Est-ce que Mate Boban, président de la HZ Herceg-Bosna, a-t-il jamais
17 délégué une autorité militaire quelle quelle soit à qui que ce soit ? A ce
18 sujet, les éléments de preuve sont frappants. Personne ne les conteste.
19 C'est Srecko Vucina qui était le chef du bureau de la présidence. C'est lui
20 qui nous le dit.
21 J'aimerais faire une petite diversion pour rappeler à la Chambre d'appel,
22 bien qu'elle n'aille pas besoin que je le lui rappelle en détail, mais que
23 le fait qu'un civil ait une influence ne suffit pas pour engager sa
24 responsabilité pénale. Il faudrait montrer que ce civil avait suffisamment
25 de pouvoir et la possibilité d'exercer un contrôle sur les forces
Page 635
1 militaires. Ceci on le reconnaît dans le jugement, paragraphe 424 du
2 jugement, où on reprend tout à fait exactement le droit tel qu'il
3 s'applique. En cas de dirigeants civils, l'autorité, telle qu'elle est
4 perçue, n'est pas suffisante. Elle peut simplement indiquer qu'ils ont de
5 l'influence. Comme l'a dit la Chambre de première instance dans Naletecic,
6 la question qui se pose, c'est de savoir si un accusé a le pouvoir
7 d'exercer un contrôle sur les forces qui sont placées sous ses ordres ou
8 qu'elles seraient placées sous les ordres. Au paragraphe que je viens de
9 citer, on voit que Kordic n'avait pas le pouvoir de contrôler les forces du
10 HVO, et j'insiste auprès de la Chambre d'appel qu'il s'agit d'une
11 conclusion qui n'est frappée d'appel du côté de l'Accusation. Vu les
12 éléments de preuve que nous avons passés en revue, Kordic affirme que ceci
13 est tout à fait compréhensible. Que tout appel de cette conclusion serait
14 condamnée à l'échec inévitablement.
15 Maintenant, passons au HVO. Quelle était la position de Kordic au sein du
16 HVO ? Les éléments de preuve à ce sujet ne sont pas contestés. Il n'avait
17 aucun poste au sein du HVO et de sa structure. Le premier ministre, c'était
18 Prlic. Il y avait trois vice-présidents, Stipo Ivankovic, Zubak, et
19 Valenta. Quelle était la position occupée par Kordic, s'il en occupait une
20 au sein du HVO ? Ici, les éléments de preuve sont aussi limpides que pour
21 ceux qui précèdent. Il était membre de la commission chargée du personnel
22 qui comptait cinq personnes, et à la tête de laquelle se trouvait le
23 ministère de la Justice, Zoran Buntic, ministère de la Justice du HZ HB, et
24 Buntic, comme on voit ici à l'écran, nous a dit qu'autant qu'il pouvait
25 s'en souvenir ce comité ne s'est jamais réuni.
Page 636
1 Permettez-moi, je vous prie, de passer à huis clos encore deux minutes ?
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.
3 [Audience à huis clos partiel]
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15 [Audience publique]
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous avez la parole.
17 M. SAYERS : [interprétation] Autre poste, président du HDZ de Bosnie-
18 Herzégovine à Busovaca. Oui. Oui, dans une certaine mesure, parce qu'après
19 avril 1992, il n'occupait plus ce poste. M. Kordic avance que le poste
20 qu'il occupait avant avril 1992 n'a absolument aucun rapport avec les
21 conclusions rendues par la Chambre de première instance, ni avec aucun des
22 faits incriminant en l'espèce.
23 Niko Grubesic nous l'a expliqué. Il nous a dit qu'après qu'il a quitté ce
24 poste, il a été remplacé par Florijan Glavocevic pendant une brève période
25 de temps, qui lui-même a quitté ce poste et a été remplacé par Zoran Maric
Page 637
1 au poste de président de HDZ de Bosnie-Herzégovine.
2 M. Kordic ne venait que très rarement aux réunions de ces instances.
3 Président de la communauté régionale de Travnik. De quoi s'agissait-il ?
4 Nous n'avons que très peu de preuves au sujet de cette instance du côté de
5 l'Accusation. On ne savait très bien quels étaient les pouvoirs de ce
6 président. Il semble que ce poste n'a existé que pendant quelques mois, et
7 qu'il s'agissait là d'une organisation des plus informelles.
8 Dirigeants politiques régionaux en Bosnie centrale. Cela, c'est intéressant
9 dans une certaine mesure. Comme vous vous en souviendrez, l'une des
10 propositions, l'une des solutions de paix proposée pour la Bosnie-
11 Herzégovine, c'était le plan Vance-Owen qui avait pour objectif de diviser
12 la Bosnie en cantons. On avait proposé un gouvernement intérimaire,
13 provincial, avec un gouverneur, un conseil, et cetera, avec dans la
14 province 10, la Bosnie centrale. On proposait un gouvernement constitué de
15 10 personnes, un gouvernement intérimaire. Si Kordic était véritablement le
16 dirigeant politique de la Bosnie centrale, on se serait attendu à ce que ce
17 soit lui qui soit proposé comme gouverneur et, non, c'est pas lui, c'est le
18 maire de Bugojno, Vladimir Soljic, qu'on a proposé pour ce poste. Kordic
19 était un des cinq membres croates envisagés pour ce gouvernement
20 intérimaire. Il y avait quatre Musulmans dans ce gouvernement intérimaire
21 et un Serbe.
22 Vice-président de la HR HB, il s'agit là peut-être de la constatation la
23 plus sidérante de la Chambre de première instance, parce que ceci ne repose
24 sur aucune preuve légitime, puisque ce poste n'existait pas. L'expert en
25 matière de droit constitutionnel de l'Accusation nous l'a dit le Dr
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1 Ribicic. On lui a posé la question, il n'y avait pas de poste de
2 vice-président de la communauté croate de l'Herceg-Bosna, il a répondu :
3 "Oui c'est vrai." C'est Kordic qui a dû présenter tous les documents
4 constitutifs au sujet de la HR HB à la Chambre de première instance. Il l'a
5 fait. Pièce D183/1 et suivante. Il n'y avait de poste de vice-président qui
6 était prévu dans cette institution. Le Dr Ribicic reconnaît également que
7 M. Kordic n'était pas membre du gouvernement d'Herceg-Bosna. De plus, il
8 n'était pas non plus membre du conseil présidentiel. C'est Perica Jukic qui
9 était membre de ce conseil. Il a déclaré expressément que M. Kordic n'avait
10 aucun rôle au sein du gouvernement de la HR HB; il en était simplement un
11 des députés.
12 Pourtant, au paragraphe 761, on considère qu'il était vice-président,
13 pourquoi ? Parce qu'on s'appuie sur un document de la MCCE, préparé par le
14 colonel Stutt, pièce Z1311 au centre de Travnik. Apparemment, on aurait dit
15 au colonel Stutt que Kordic était le vice-président. Quand on lui a demandé
16 pourquoi il a répondu que c'était difficile de répondre à cette question,
17 que ses informations, il les tenait du colonel Blaskic, de celui qui était
18 le colonel Blaskic, qui avait reconnu devant Stutt que lui même n'était pas
19 un homme politique, qu'il n'avait pas suivi l'évolution politique avec soin
20 et qu'il était un simple soldat. Ceci a été confirmé par la pièce D143/1.
21 Le Colonel Stutt a reconnu, je cite : "On ne savait pas vraiment ce que
22 faisait Kordic. Parfois, c'est un petit peu gênant de demander aux gens ce
23 qu'ils font exactement." Quelle est l'erreur qui a été commise s'agissant
24 des facteurs aggravants ? Qu'est-ce qui a été prouvé au-delà de tout doute
25 raisonnable ? Quelles sont les circonstances aggravantes qui ont
Page 639
1 effectivement été prouvées ici ? Rien, aucune. La seule circonstance
2 aggravante, c'est celle qui a été définie par la Chambre de première
3 instance, qui consiste à dire que M. Kordic était un dirigeant politique.
4 Le paragraphe 853 montre clairement que c'est ce qui a été retenu comme
5 circonstance aggravante contre lui.
6 S'agissant de la peine très longue prononcée contre le général Blaskic,
7 nous n'avons rien à dire à ce sujet, sauf à rappeler à la Chambre d'appel
8 ce que nous avons dit à ce sujet dans notre mémoire, à savoir, que nous en
9 sommes face à deux affaires complètement différentes. On a considéré que le
10 général Blaskic était responsable au titre de l'Article 7(3). La période
11 concernée était beaucoup plus longue. Il a été considéré responsable d'un
12 plus grand nombre de crimes, comme par exemple, le camion piégé de Stari
13 Vitez, l'attaque contre Grbavica. Il a été déclaré responsable de crimes
14 qui ont eu lieu dans la zone de Kiseljak. C'était lui, effectivement, qui
15 était le chef militaire de la totalité du secteur. Nous nous appuyons sur
16 les sources juridiques que connaît parfaitement la Chambre, qui ont été
17 résumées dans Krstic il y a un mois, selon lesquelles on ne peut pas
18 véritablement fixer de lignes directrices pour déterminer la peine, étant
19 donné que chaque Chambre doit avoir la liberté de définir la peine comme
20 elle l'entend, et que ceci varie d'un cas à l'autre.
21 En conclusion, nous avançons qu'il n'y a eu aucune erreur distincte,
22 facilement décernable ici. Il n'y a pas eu d'abus du pouvoir
23 discrétionnaire de la Chambre. La peine très lourde qui a été prononcée
24 contre M. Kordic, en partant du principe que tous les faits qui se
25 trouvent dans le jugement sont confirmés, nous estimons que ce n'est pas le
Page 640
1 cas, ne permettent pas d'identifier d'erreur manifeste. Il n'y a pas eu
2 d'abus de pouvoir de la part de la Chambre.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pas de questions. Je vous remercie
4 beaucoup de votre intervention.
5 Nous allons maintenant avoir une dernière pause. Après la pause nous aurons
6 trente minutes de réponse par l'Accusation. Ensuite, les accusés, s'ils le
7 souhaitent, pourront intervenir et parler aux Juges de la Chambre d'appel.
8 Je vous invite à nous retrouver dans ce prétoire à
9 15 heures 15.
10 --- L'audience est suspendue à 14 heures 50.
11 --- L'audience est reprise à 15 heures 24.
12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous reprenons. Je donne la parole
13 de nouveau au Procureur.
14 Mme BRADY : [interprétation] Merci. Il n'y a qu'un petit nombre d'arguments
15 que je souhaite soulever en réponse à la Défense. En premier lieu, nous
16 savons pertinemment que la charge de la preuve qui nous incombe est très
17 lourde et qu'elle consiste, au niveau de l'appel, à respecter les critères
18 d'examen de l'appel pour montrer que la peine prononcée a été inadéquate.
19 Nos arguments avaient pour objectif de montrer que la Chambre s'était
20 trompée, avait fait une erreur facilement identifiable en prononçant cette
21 peine, ceci à cause de la gravité des actes, à cause du rôle de l'accusé et
22 du fait que la Chambre n'a pas pris en compte le rôle politique de l'accusé
23 ainsi que l'autorité militaire dont il était manifeste qu'il était investi
24 dans la région. A aucun moment, il n'est possible de dire que notre
25 position est incohérente, si avec le fait que nous reconnaissons également
Page 641
1 qu'une Chambre de première instance a un pouvoir discrétionnaire qui est
2 large lorsqu'elle détermine la peine. Cela n'est pas contradictoire avec le
3 fait que chaque affaire est unique quand il s'agit de prononcer une peine.
4 En quelques mots, l'argument sur la gravité des faits. Notre principal
5 argument, c'est qu'en dépit des références qui sont faites au jugement, à
6 la gravité des crimes commis et à sa culpabilité en l'espèce, je parle de
7 Kordic, nous estimons que la sentence, la peine qui a été prononcée, montre
8 que la Chambre de première instance s'est simplement contentée de reprendre
9 pour la forme dans son jugement, ces mots de gravité sans en tenir
10 véritablement compte. Je vous rappelle mes arguments de ce matin ainsi que
11 ceux qui figurent dans notre mémoire.
12 Maintenant, notre deuxième argument, la position et les pouvoirs dont il
13 était investi et la manière dont il abusé de cette position et des pouvoirs
14 qui étaient les siens. La plupart des arguments qui ont été présentés par
15 la Défense, avaient pour objectif de replaider les constatations sur les
16 faits telles qu'elles sont présentes dans le jugement de la Chambre de
17 première instance. Nous, notre appel, il repose sur la chose suivante :
18 Nous estimons qu'il s'agit d'une circonstance aggravante, ceci, sur la base
19 des constatations que la Chambre a rendu sur les faits, aussi bien pour ce
20 qui est de la nature de ses fonctions politiques, de son poste de
21 dirigeant, mais aussi, c'est très important, peut-être plus important,
22 l'autorité militaire qui était la sienne et qui a été constatée par la
23 Chambre de première instance. Ce matin, j'ai fait référence au jugement,
24 aux constatations qui s'y trouvent. Je souhaiterais également vous renvoyer
25 à la liste que nous avons faite de ses pouvoirs, du pouvoir de Kordic dans
Page 642
1 notre mémoire d'appel, pages 58 à 64. A cet endroit, nous indiquons, nous
2 répertorions toutes les conclusions, toutes les constatations au sujet de
3 ses pouvoirs, de ses responsabilités, du rôle qu'il a pu joué vu le pouvoir
4 qui était le sien.
5 Me Sayers, cet après-midi, quand il est intervenu, a fait référence à des
6 éléments de preuve dont la Chambre de première instance a fait l'examen
7 avant de les rejeter, plus particulièrement lorsqu'il s'agit de l'autorité
8 militaire qui était la sienne. Je ne peux insister trop lourdement sur le
9 fait que notre appel concernant la peine prononcée repose sur les propres
10 conclusions de la Chambre sur les faits concernant son rôle militaire. Nous
11 avons tout à fait saisi la différence entre l'Article 7(1) et l'Article
12 7(3) et la responsabilité qui en découle. Nous n'essayons nullement, ici,
13 de revenir sur le fait qu'il a été acquitté au titre de l'Article 7(3).
14 Quand on examine la majorité des arguments qui ont été présentés cet après-
15 midi, quand vous allez le faire vous-mêmes, nous ne vous demandons pas de
16 considérer comme une circonstance aggravante éventuellement, le lien qui
17 est le sien avec le commandement exercé par Blaskic, les crimes qui ont été
18 commis, la possibilité de les prévenir ou de les empêcher, et cetera. C'est
19 tout à fait différent ce que vous nous disons. Nous vous disons qu'un chef
20 militaire, au titre de l'Article 7(3), doit avoir une peine, doit recevoir
21 une peine plus importante lorsqu'il a une position hiérarchique supérieure,
22 en particulier lorsqu'il exerce une autorité militaire et lorsqu'il fait
23 abus de ces pouvoirs en jouant un rôle tel que cela a été son cas dans la
24 planification des crimes et en ordonnant ces crimes.
25 Tout ce qui a été dit cet après-midi au sujet des éléments de preuve
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1 présentés par Filipovic, Palavra, Vukovic, vous devez les rejeter, parce
2 que ces éléments de preuve n'ont aucune pertinence. Ils avaient trait à son
3 commandement militaire qu'il exerçait du point de vue purement militaire.
4 Au paragraphe 767, la Chambre rend un certain nombre de conclusions sur
5 l'autorité militaire qu'il exerçait. C'est le cas également au paragraphe
6 768. Cela n'a rien à voir avec ses fonctions militaires, parce que c'est
7 sur ces fonctions, les fonctions militaires qu'il aurait eues qu'ont déposé
8 les témoins que j'ai mentionnés à l'instant.
9 Je voudrais vous renvoyer aux conclusions rendues par la Chambre au sujet
10 de son autorité militaire. Cela se retrouve dans la totalité du texte du
11 jugement. Pour ce qui est des titres qui étaient les siens, des fonctions
12 qu'il a occupées sur le plan politique, je répète que nos arguments
13 reposent sur les conclusions rendues par la Chambre de première instance.
14 Pour nous, nous insistons sur ce fait, ce n'est pas le titre simplement qui
15 compte, c'est les fonctions, le pouvoir, l'autorité tels qu'ils se sont
16 manifestés, et dont il a fait preuve lorsqu'il a rempli les fonctions dont
17 relevaient ces titres. Si l'intimé, maintenant, souhaite plaider à nouveau
18 tous ces éléments et souhaite demander à la Chambre d'appel de réexaminer
19 tous ces éléments de preuve, j'aimerais vous renvoyer afin de voir
20 exactement les fonctions, les titres qui étaient les siens, j'aimerais vous
21 renvoyer à l'annexe 10 du mémoire en clôture de l'Accusation. Vous
22 trouverez en détail un tableau reprenant toutes ses fonctions et toutes ses
23 attributions.
24 Paragraphe 829, on nous dit que c'était le dirigeant politique des Croates
25 de Bosnie centrale. Aucune phrase ne peut mieux expliquer quelle était sa
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1 position. Maintenant, passons à l'argument de l'appelant au sujet de la
2 disparité de la sentence de Blaskic et celle de Kordic. Bien entendu, il y
3 a des différences entre l'affaire Kordic et l'affaire Blaskic, leurs
4 déclarations de culpabilité reposent sur des faits différents,
5 effectivement. Il y a beaucoup d'éléments dans cette affaire qui font que
6 l'affaire Blaskic peut présenter un intérêt ici. Non seulement ce sont les
7 mêmes crimes qui sont mis en cause, les mêmes crimes à la base de tout
8 cela. Même si Kordic n'a pas été condamné au titre de l'Article 7(3), le
9 fait qu'il a été reconnu coupable au titre de l'Article 7(1), montre que
10 c'était lui qui était dans les coulisses, que c'est lui qui tirait les
11 ficelles, que c'est lui qui a planifié, qui a ordonné les crimes qui ont
12 été commis par les soldats qui étaient sous les ordres de Blaskic.
13 Enfin, dernière chose, la Chambre de première instance a rendu des
14 conclusions très détaillées au sujet des relations qui existaient entre
15 Kordic et Blaskic. Elle a conclu que leur relation était soit une relation
16 de subordination, soit qu'au tout du moins, il y avait là partage du
17 pouvoir, partage de l'autorité à titre égal. Nous estimons qu'il ne faut
18 pas qu'il y ait de différences importantes entre les peines prononcées au
19 final contre ces deux accusés, contre ces deux criminels, Kordic et
20 Blaskic.
21 Pour finir, l'intimé a analysé la jurisprudence du Tribunal à ce jour,
22 comme elle se prononçait uniformément contre la parité, contre les
23 arguments de proportions entre les différentes peines prononcées et la
24 manière dont la Chambre d'appel doit examiner les peines prononcées. Bien
25 entendu, nous reconnaissons que les peines prononcées se situent dans une
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1 fourchette. On voit apparaître un certain nombre de fourchettes. Nous en
2 sommes qu'au début, en particulier pour un certain type de crimes, pour un
3 certain type d'auteurs de ces crimes. Il est difficile, on ne peut pas
4 véritablement déterminer pour tel crime, quelle peine il convient de
5 prononcer. Il n'y a pas de science exacte pour l'instant à ce sujet. Il est
6 vrai que la Chambre d'appel a rejeté pour certaines affaires, l'idée de
7 copier d'autres affaires. Cependant, elle n'a pas rejeté l'utilité de
8 comparer au moins les affaires entre elles. Dans certaines affaires, comme
9 par exemple, Furundzija et Jelisic, il est important de voir que la Chambre
10 d'appel a reconnu expressément que l'on pouvait très utilement comparer
11 deux affaires telles que celles-là, justement lorsque les circonstances
12 dans lesquelles se sont déroulés les faits incriminés sont semblables, et
13 que les auteurs de ces crimes sont semblables. Dans n'importe quel système
14 judiciaire, il est intéressant d'avoir une certaine cohérence dans les
15 peines prononcées. Cela recouvre également notre système, le Tribunal. J'en
16 ai terminé de mon intervention, à moins que vous n'ayez des questions.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie, Madame Brady.
18 Monsieur Farrell, s'il vous plaît, vous avez la parole.
19 M. FARRELL : [interprétation] Monsieur le Président, je répondrai
20 brièvement, ou je présenterai une duplique brève à la réplique que nous
21 avons entendue de la part des conseils pour
22 M. Cerkez. Je ne pense pas que mes éminents collègues aient mal compris nos
23 arguments, mais notre appel se fonde sur les faits tels qu'ils ont été
24 constatés. Mes éminents collègues ont procédé en se fondant sur l'idée
25 qu'il n'y avait pas de plan, que M. Cerkez n'était pas impliqué et qu'il
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1 n'a même pas été déclaré coupable pour les crimes de Vitez ou de Stari
2 Vitez. Ils ont contesté les éléments de preuve reçus par la Chambre. En
3 substance, ils ont argué que la Chambre de première instance a tout mal
4 fait, mal compris. Telle est peut-être leur position. Nous dans notre
5 appel, nous nous référons aux faits tels que constatés par la Chambre de
6 première instance. La question est de savoir s'ils ont été mal interprétés,
7 et ce, pour une raison différente, à savoir que l'accusé aurait dû être
8 déclaré coupable en tant que membre d'une entreprise criminelle commune.
9 Quelques points qui concernent la procédure. En substance, la Défense a
10 répété son moyen d'appel pour ce qui est du document Z692.3. Ceci ne répond
11 pas aux arguments de l'Accusation présentés en appel, parce que cela ne
12 présente pas pour quelle raison en se fondant sur les constatations et les
13 conclusions de la Chambre, la Chambre a eu raison de déclarer que l'accusé
14 n'était pas coupable d'Ahmici. Comme ceci a été dit, il y a eu beaucoup
15 d'éléments de preuve que vous pouvez examiner, qui peuvent aussi vous être
16 présentés. Au fond, il s'agit simplement pour la Défense de prouver le bien
17 fondé de leur propre appel, à savoir que ce document aurait dû être reçu.
18 Il a été discuté aussi pour ce qui est de ce document du fait qu'il y a
19 d'autres éléments de preuve, par exemple, que le Témoin AT a laissé
20 entendre qu'il nie que la direction d'attaque de la brigade Vitez était
21 vers Sivrino Selo. Le document suivant auquel il s'est référé à la Chambre
22 de première instance, au paragraphe 689(D), évoque l'artillerie, qui elle
23 a, constamment, attaqué Sivrino Selo. Je relève que le conseil pour M.
24 Cerkez n'a pas contesté ce document pour ce qui est de son authenticité.
25 Le journal de guerre, pour la date du 18 avril, à 12 heures 02, dit qu'il y
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1 a une requête faite par Mario, lui demandant d'ouvrir le feu contre Sivrino
2 Selo. Ceci fournit un soutien à Pasko, parce qu'il se trouve à l'extérieur
3 de Sivrino Selo. Le conseil de M. Cerkez a indiqué que l'Accusation a
4 modifié sa thèse, qu'au début, dans l'acte d'accusation, dans le mémoire
5 préalable au procès, il y avait une position différente par rapport à la
6 thèse qui est présentée en appel. Mon éminent collègue s'est référé à
7 certains passages qui sont tirés du mémoire préalable au procès. Il a cité
8 des éléments. Si j'ai bien relevé, il a dit que Cerkez était impliqué avec
9 ses hommes dans un plan généralisé, mais que sa brigade en particulier,
10 n'était pas sur les lieux, là, au début de la matinée. C'est exactement ce
11 qui constitue la constatation, la conclusion de la Chambre de première
12 instance. Il dit aussi que Cerkez était partie prenante au plan, et qu'il y
13 a joué un rôle. Ceci correspond au mémoire en clôture de l'Accusation.
14 C'est la position de l'Accusation; elle n'a pas été modifiée. Il y a eu un
15 commentaire fait par le conseil de M. Cerkez disant que M. Cerkez a offert
16 sa coopération pour aider l'Accusation, et pour venir déposer en tant que
17 témoin dans l'affaire Hadzihasanovic.
18 Avec tous mes respects, ceci aurait dû être présenté sous forme de requête
19 en application du 115, et l'Accusation aurait pu répondre à cela.
20 L'Accusation estime maintenant que M. Cerkez, que le conseil de M. Cerkez,
21 quand il a fait cette proposition, que le bureau du Procureur estimait
22 qu'il avait des doutes fondés très importants, des préoccupations pour ce
23 qui est de la véracité de ce que seraient éventuellement les propos de lui
24 en tant que témoin. Par conséquent, on n'est même pas allé au fond de la
25 question.
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1 M. FARRELL : [interprétation] Un certain nombre d'arguments actuels ont été
2 soulevés. Comme je l'ai dit, des arguments disant qu'il n'y avait pas de
3 plan, que M. Cerkez n'était pas au courant de ce qui se passait, qu'il n'y
4 a pas eu de crimes, que le crime d'Ahmici était une opération militaire qui
5 a connu une escalade, et qu'à la fin, des crimes ont été commis pendant des
6 combats ou des opérations militaires qui se sont produites à Ahmici à
7 l'époque.
8 Je vous prie de vous pencher sur les conclusions, non pas lorsque vous
9 aurez examiné l'appel de l'Accusation et non pas aux arguments présentés
10 par les conseils. Enfin de compte, des conclusions montrent irréfutablement
11 qu'il y avait un plan. Il n'est pas imaginable que l'attaque aurait pu se
12 produire de cette façon, de cette ampleur dans autant de villages suivant
13 le même principe que des centaines de personnes aient pu être tuées, des
14 milliers détenus, qu'il y a eu une destruction à assez grande échelle à
15 l'encontre seulement des Musulmans, et que des maisons croates n'auraient
16 pas pu être touchées. Il est inconcevable d'imaginer que ceci aurait pu
17 être par pure coïncidence. Tout s'est passé au même moment, mené par des
18 unités indépendantes à 5 heures 30 du matin. C'est un même plan qui a donné
19 lieu à des mêmes morts. Ceci n'était pas possible sans préparation. On
20 n'aurait pas pu détenir des personnes si on n'avait pas planifié cela à
21 l'avance. Je pense que c'est tout à fait clair ce que le Témoin AT a dit.
22 Les conclusions de la Chambre sont tout à fait claires, à savoir qu'il y
23 avait un plan, que M. Cerkez a intentionnellement et délibérément participé
24 à ce plan. Il y a une seule conclusion qui peut être tirée des faits tels
25 qu'ils ont été établis; il n'y a pas eu d'erreur de droit. J'en ai terminé.
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1 Je présente mes excuses aux interprètes, et je suis prêt à répondre à vos
2 questions.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il n'y a pas de questions. A la fin
4 de ces procédures d'appel, l'un des derniers points, il nous reste à
5 inviter les accusés à prendre la parole. Cependant, entre temps, je tiens à
6 souligner qu'il ne faudrait pas faire une confusion entre cette dernière
7 prise de parole avec l'Article 84 bis. Pour un accusé, il existe la
8 possibilité de s'adresser en personne à la Chambre sur quelques points
9 qu'il souhaite. Ceci permet à la Chambre de se faire une opinion et d'avoir
10 une impression directe de l'accusé qui n'apparaît plus ici tout simplement
11 comme un objet de la procédure criminelle, mais aussi en tant que son
12 sujet. Par conséquent, on accédera à cela, on respectera ce droit réservé
13 aux accusés de prendre la parole pour une dernière fois si les accusés le
14 souhaitent, bien entendu. La seule chose qui concerne l'Article 84 bis, et
15 la différence entre cet article et cette prise de parole, est qu'un accusé
16 ne sera jamais contraint à le faire, s'il ne le souhaitait pas.
17 La Défense de M. Kordic, est-ce que votre client souhaite prendre la
18 parole ? Vous en avez parlé, Monsieur Sayers.
19 M. SAYERS : [interprétation] Oui. M. Kordic ne souhaite pas s'adresser à la
20 Chambre, telle est sa décision. Un tout dernier point, quelque chose que
21 nous avons omis, l'Accusation, apparemment, n'a pas d'objection à ce que
22 nous présentions cela, donc, avec l'autorisation de la Chambre, je le
23 remets à l'Huissier.
24 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Si j'ai bien compris M. Kordic,
25 vous avez renoncé à votre droit de prendre la parole une dernière fois.
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1 L'APPELANT KORDIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le
2 Président. Je vous remercie de votre amabilité, mais je ne souhaite pas
3 prendre la parole. Dans la totalité des propos qui ont été exposés tout au
4 long de cette procédure, j'y souscris et je les accepte.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.
6 Puis-je m'adresser au conseil de M. Cerkez ?
7 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque j'ai informé
8 mon client de cette possibilité, il a dit qu'il se réjouissait de cette
9 possibilité de pouvoir enfin dire quelques mots au sujet de son attitude,
10 de l'attitude qu'il a réservée à cette procédure et il serait ravi de
11 pouvoir le faire.
12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous prie, s'il vous plaît, pour
13 que nous puissions bien vous entendre, je vous prie de prendre place, là où
14 s'installe généralement les témoins. Je vous prie de rester debout. Vous
15 n'agissez pas, ici, en qualité de témoin, vous êtes toujours un accusé au
16 regard de la procédure. Je vous en prie.
17 L'APPELANT CERKEZ : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames,
18 Messieurs les Juges, je tiens à vous remercier de m'avoir offert cette
19 occasion de m'adresser à la fin de ce procès vraiment très long à vous.
20 Tout d'abord, je tiens à dire que le seul plan que j'ai eu, Monsieur le
21 Président, le 15 avril 1993, c'était de me marier à l'église avec mon
22 épouse Slavica. Mon commandant, Blaskic, était au courant de cela. C'est
23 cela la vérité, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges.
24 D'emblée, je tiens à vous dire que je ne cherche pas à éviter d'assumer ma
25 part de la responsabilité pour tout ce qui s'est produit pendant le
Page 651
1 conflit, Le conflit qui a opposé les Musulmans de Bosnie, les Bosniens et
2 les Croates dans ma ville natale, dans Vitez. En dépit d'un acte
3 d'accusation très étendu pour ce qui est de la période incriminée et des
4 actes et de l'espace, tout ce qui s'est produit, tout s'est produit en
5 quelques jours en avril 1993, et ce, à quelques localités seulement sur le
6 territoire de la municipalité de Vitez. Monsieur le Président, je souhaite
7 affirmer publiquement, en toute sincérité, mes regrets pour chacune des
8 victimes, victimes d'un conflit malheureux qui a éclaté entre les Musulmans
9 de Bosnie, des Bosniens et des Croates dans la vallée de la Lasva en 1993.
10 Je suis pleinement conscient du fait que ceci n'aidera pas les victimes,
11 mais j'espère que leurs familles ainsi que leurs amis accepteront ces mots
12 en tant que mots de regret, en tant qu'un sincère regret.
13 Je sais que beaucoup de personnes ont trouvé la mort, qu'il y a eu beaucoup
14 de victimes dans une mesure plus ou moins grande. Il y a beaucoup de
15 personnes qui ont perdu leurs foyers, et ce, parfois sans raison et parfois
16 même à l'extérieur des théâtres des opérations. Je suis profondément
17 affligé de cela. Je suis conscient que je dois assumer une part de la
18 responsabilité, si ce n'est parce que j'étais soldat dans les rangs de
19 l'une des parties belligérantes. Même si ce conflit était une conséquence
20 d'autres événements qui a échappé à mon contrôle, qui a échappé à mon
21 influence, et je regrette d'y avoir participé.
22 Monsieur le Président, je considère que je suis responsable de tout ce qui
23 s'est produit du 16 avril 1993 jusqu'au 21 avril 1993 dans la zone de
24 responsabilité qui était la mienne, qui était placée sous ma
25 responsabilité. Elle l'a été déterminée, précisée par un ordre émanant du
Page 652
1 commandant de la zone opérationnelle de Bosnie centrale, à savoir, Blaskic,
2 qui en date du 16 avril 1993, a précisé cela à 1 heure 30 du matin.
3 Monsieur le Président, il s'agit de l'ordre que vous avez pu examiner ici,
4 D60/2. Cet ordre précise ma zone de responsabilité de manière très claire.
5 La zone où je suis responsable en tant que commandant de la Brigade Vitez,
6 au cours de quelques journées d'importance décisive.
7 Monsieur le Président, vous avez vu que Blaskic, dont le commandement était
8 basé à Vitez, a émis des ordres écrits le 16 avril 1993 à toutes les unités
9 existantes du HVO dans le secteur de Vitez, et que chacun de ces ordres
10 déterminent précisément les zones de responsabilité pour chacune des
11 unités. Je ne suis pas à l'origine de ces ordres. Je ne les ai pas émis,
12 qui plus est, jamais, au grand jamais, je n'ai donné d'ordres au Vitezovi
13 ou à 4e Brigade de la police militaire.
14 J'admets toute responsabilité pour tout ce qui s'est produit dans ma zone
15 de responsabilité, telle qu'elle a été précisée par l'ordre. La Brigade
16 Vitez, qui était dans une phase de création, et cela ne faisait que 23
17 jours de la date de sa création, a reçu l'ordre d'empêcher une éventuelle
18 tentative des forces de l'ABiH qui concernait le village de Kruscica et de
19 Vranjska, qu'ils n'opèrent une percée de ces localités-là vers la ville de
20 Vitez. En passant, je relève, Monsieur le Président, que le village de
21 Kruscica est mon village. C'est là que résidait ma famille, mes parents,
22 mon épouse ainsi que mes enfants.
23 J'ai exécuté cet ordre au mieux du possible dans les circonstances telles
24 qu'elles prévalaient à l'époque. Le témoin Anto Bertovic, ainsi que
25 d'autres témoins, ont déposé en détail à cet effet. Des soldats qui étaient
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1 placés sous mes ordres ont été déployés à plusieurs endroits stratégiques
2 entre le village de Kruscica, le village Vranska et la ville même de Vitez.
3 Cependant, une tentative de percée par l'ABiH n'a pas eu lieu, et moi-même,
4 je n'ai pas donné l'ordre, non plus, à mes soldats d'attaquer les forces de
5 l'ABiH à Kruscica et à Vranska.
6 Monsieur le Président, le 21 avril 1993, j'ai reçu un ordre de la part de
7 mon commandant, Blaskic, de constituer des secteurs qui allaient s'étendre
8 le long des frontières de la municipalité de Vitez, et jusqu'aux accords de
9 Washington, cette ligne a été maintenue, jusqu'au printemps 1994. Pendant
10 toute cette période, les soldats qui étaient placés sous mes ordres ont
11 maintenu cette ligne de front et ont riposté et repoussé de nombreuses
12 attaques menées par l'ABiH dont la mission était de s'emparer de la vallée
13 de la Lasva, et en particulier, de la ville de Vitez à cause de l'usine des
14 explosifs qui s'y trouvait.
15 C'est l'une des usines les plus importantes du genre sur le territoire de
16 l'ex-République socialiste fédérative d'Yougoslavie. Il n'y a pas de
17 données et on ne me l'a pas non plus reproché, qu'un crime quel qu'il soit
18 ait été commis pendant cette longue période qui va du 21 avril 1993 jusqu'à
19 la fin du mois de septembre 1993, la période couverte par l'acte
20 d'accusation.
21 Monsieur le Président, je n'ai pas l'intention en disant cela de me
22 défendre, de présenter des arguments pour me défendre devant cette Chambre.
23 En citant cela, je voulais tout simplement dire qu'en tant que soldat,
24 qu'en tant que commandant de la Brigade Vitez, à des moments décisifs ou
25 des moments incriminés, j'ai effectué, j'ai conduit mes missions
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1 conformément aux ordres que j'ai reçus. En tant que soldat, Monsieur le
2 Président, j'estime que je peux être tenu responsable uniquement des
3 secteurs où ont agi des soldats placés sous mes ordres ou sous ma
4 responsabilité.
5 On n'affirme pas dans l'acte d'accusation que le moindre crime ait été
6 commis là où j'étais responsable, que cela concerne les localités ou les
7 périodes où j'étais responsable.
8 Monsieur le Président, après avoir pris connaissance de l'acte
9 d'accusation, après des préparatifs très brefs, je me suis rendu
10 volontairement ici. Je savais ce qu'on me reprochait et je savais que je
11 n'avais pas commis de crimes, des crimes qui me sont reprochés. Je savais
12 aussi que mes soldats subordonnés ne les ont pas commis, non plus. Je
13 savais que j'allais être en mesure de me défendre. Monsieur le Président,
14 je rappelle que le HVO a organisé les volets civils et militaires, les
15 structures civiles et militaires dans une quarantaine de municipalités.
16 Chacune des municipalités a mis sur pied une brigade "R". C'était des
17 unités de réserve qui étaient complétées par la mobilisation des
18 réservistes. Moi, j'étais à la tête de l'une de ces unités de ce type-là,
19 du type "R." Aucun commandant d'une unité municipale du HVO ne s'est vu
20 accuser devant ce Tribunal, si ce n'est moi, je suis le seul.
21 Malheureusement, dans la municipalité où était créée ma brigade, le crime
22 d'Ahmici a été commis, et c'est ce crime qui a déclenché une enquête, un
23 acte d'accusation qui était au cœur de ce procès. J'ai été acquitté de ce
24 crime parce que la Chambre de première instance a établi que mon unité ne
25 s'y est pas trouvée au moment incriminé.
Page 655
1 Je répète, je me suis rendu délibérément, volontairement, et je supposais
2 que je n'allais pas être déclaré coupable pour ce crime, car j'espérais que
3 la vérité allait montrer ce qui s'était passé, et que la vérité allait être
4 établie.
5 En tant que citoyen de Bosnie, en tant que membre du HVO, j'éprouve de la
6 honte et je suis aussi blessé par des constatations, par des faits qui se
7 sont produits, à savoir qu'il y ait eu des crimes commis par le HVO dans la
8 vallée de la Lasva. Je me réfère, tout d'abord, aux crimes d'Ahmici. Bien
9 entendu, je n'endosse pas la responsabilité pour cela, mais il s'agit là
10 d'événements qui n'auraient pas dû se produire. Ma décision, ma position
11 est que je n'ai pas pu l'empêcher, que ce soit en tant qu'être humain ou en
12 ma qualité de militaire. Ces crimes n'ont pas été commis par des hommes
13 placés sous mes ordres, c'est ce qui me console.
14 Monsieur le Président, je viens d'un milieu traditionnel où il n'y avait
15 pas d'intolérance religieuse ou ethnique. Dans mon cercle le plus étroit
16 d'amis, il y avait, à la fois, des Musulmans de Bosnie, des Serbes, des
17 Romes et d'autres. J'ai toujours apprécié les gens d'après leurs prises de
18 vue et d'après leurs actes et non pas d'après leur origine ou leur
19 appartenance raciale, ethnique ou religieuse. C'est ainsi que j'ai été
20 élevé dans ma famille, à l'école, dans ma collectivité, dans ma société, et
21 ce sont les principes que j'ai respectés.
22 Rien dans ma vie de m'a rendu près à conduire des guerres telles que cela
23 s'est passé entre 1992 et 1994, parce que la guerre en Bosnie a commencé en
24 1992, tout comme bon nombre de mes compatriotes, j'ai été dans la
25 confusion, j'ai été frustré par l'incompréhension de la situation et des
Page 656
1 causes de cette guerre. En personne, j'ai appuyé une idée fondamentale qui
2 a été celle de la création de cet honorable Tribunal, ici. J'apporte mon
3 soutien aux efforts qui sont déployés en vue de condamner les individus qui
4 ont perpétré des crimes durant les conflits en Bosnie-Herzégovine, et ceci
5 précisément pour la raison qui est celle que j'avance à présent, afin que
6 les peuples ou les collectivités ne soient pas stigmatisés par la
7 responsabilité collective. C'est la seule des raisons qui m'a motivé à me
8 rendre, de mon propre gré, à ce Tribunal.
9 Monsieur, Mesdames les Juges, je ne pense que l'un quelconque des témoins
10 qui a témoigné ici ait dit quoi que ce soit à mon encontre. Au contraire,
11 bon nombre de Musulmans et autres, ont dit qu'ils ne voyaient pas en moi
12 une personne avec des préjugés ethniques, ou autres. Cela m'a soulagé
13 pendant mon séjour ou ma détention de sept longues années.
14 J'ai été un citoyen moyen. J'ai fait des études secondaires. Je me suis
15 trouvé un emploi dans une administration municipale d'abord, et dans
16 l'usine appelée Slobodan Princip Seljo. Je n'ai jamais été condamné pour
17 quelque infraction que ce soit et encore moins pour un délit pénal. J'ai
18 travaillé à Vitez. J'ai trois filles, la cadette est à l'école primaire et
19 les deux autres sont des étudiantes. Mon aînée est déjà mariée, elle a un
20 fils. Elle va avoir un deuxième enfant prochainement.
21 La deuxième fille est une bonne étudiante. Elle sera bientôt diplômée, tout
22 comme son époux. L'autre fille est Nikolina est étudiante à la faculté de
23 droit à Split. Après la guerre, j'ai déménagé vers cette belle ville de
24 Split en Croatie. Nous avons décidé de déménager, ma femme et moi, dans le
25 désir unique de faire en sorte que nos filles puissent bénéficier d'un
Page 657
1 avenir meilleur, avenir que nous ne voyons pas se présenter de la sorte en
2 Bosnie.
3 Mesdames et Messieurs les Juges, je crois que vous allez comprendre que mon
4 temps de détention me pèse lourd, étant donné que ces limitations de
5 liberté, je ne les ressens pas comme étant nécessairement dues, et j'ai
6 fait cela en raison des relations saines dans ma famille, celles qui
7 prévalent dans ma famille. Je suis convaincu que je serai acquitté pour les
8 choses dont je ne suis pas responsable. Pour ce qui est de ce dont je
9 m'occupe dans ma cellule, c'est la peinture. C'est cela à quoi je me suis
10 voué pendant les trois années écoulées.
11 Mais la chose la plus difficile pour moi, c'est de ne pas avoir été à même
12 de passer toutes ces années avec mes filles pour être présent durant leur
13 enfance. C'est une chose que j'ai manquée et c'est une peine qui aura été
14 la mienne même si le Tribunal, ici présent, et la Chambre ici présente,
15 m'acquittaient de tous les chefs d'accusation. Je m'attends, Mesdames et
16 Messieurs les Juges, à une décision équitable de votre part. Je veux croire
17 que vous allez soupeser équitablement tout ce qui est à mon avantage, et
18 tout ce qui est à mon détriment. Je suis certain que votre décision sera
19 juste. Bien entendu, j'aspire à la liberté. Je n'attends qu'une chose,
20 c'est le jour où je serai à même de regagner ma famille, de retrouver ma
21 femme, mes filles et le petit enfant que j'ai déjà pour me promener sur le
22 littoral de Split, sur les quais de Split et ce littoral qui est le plus
23 beau du monde. Je voudrais également visiter le reste de ma famille dans ce
24 beau pays montagneux de Bosnie-Herzégovine.
25 Mesdames et Messieurs les Juges, je vous remercie de m'avoir fourni
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1 l'opportunité de m'adresser à vous en public et je vous remercie également
2 pour la patience dont vous avez fait preuve.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie M. Cerkez. Vous
4 pouvez vous rasseoir.
5 Ceci met un terme à l'audition des appels dans cette affaire. Il me reste
6 encore à remercier toutes les personnes présentes pour la préparation de
7 l'affaire, et en particulier, les parties en présence pour leurs
8 contributions précises tant qu'au niveau de la phase préalable à l'appel,
9 et pendant les auditions au cours des trois journées écoulées. Je tiens
10 également à remercier tout le personnel, qui a effectué les préparatifs des
11 auditions, ainsi que les interprètes, et autres qui se trouvent en arrière-
12 scène mais qui ont fait que tout ceci ait pu être possible, et que nous
13 puissions nous comprendre les uns, les autres.
14 Ce que je puis promettre, s'agissant du cadre temporel dans lequel l'arrêt
15 sera prononcé, je crois que je ne peux pas faire de promesse, mais je pense
16 que tout un chacun est conscient de la complexité de l'affaire et je pense
17 qu'il est dans l'intérêt de toutes les parties en présence que nous nous
18 efforcions d'être aussi précis que possible, et il n'est point de doute que
19 cela nous demandera quelque temps.
20 Une fois de plus, je tiens à vous remercier les uns et les autres pour
21 votre participation à ces audiences. L'audition des appels se trouve
22 terminée jusqu'à nouvel ordre.
23 --- L'audience est levée à 14 heures 06.
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