Page 3188
1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14/2-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
3
4 Jeudi 3 Juin 1999
5 LE PROCUREUR
6 du TRIBUNAL
7 c/
8 Dario KORDIC et Mario CERKEZ
9 L'audience est ouverte à 11 heures 50.
10 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)
11 Mme Ameeralie (interprétation). – Bonjour Messieurs les Juges,
12 il s'agit de l'affaire IT-95-14/2-T, le procureur contre Dario Kordic et
13 Mario Cerkez.
14 M. le Président (interprétation). – En tout premier lieu, je
15 tiens à présenter mes excuses à toutes les personnes présentes. Je n'étais
16 pas ici à 11 heures. Malheureusement, l'autre procès s'est poursuivi
17 jusqu'à 11 heures 30. Je tiens à remercier les interprètes en particulier
18 car, malheureusement, une équipe différente n'était pas prévue. Ils ont
19 donc travaillé depuis 9 heures ce matin et n’ont eu qu'une toute brève
20 pause. Merci pour ce qui est de leur compréhension de la situation.
21 Nous avons reçu ce document relatif aux arguments évoquant des
22 procédures possibles. Je l'avoue ; je n'ai pu le lire ce document qu'entre
23 deux témoins ou plutôt qu'entre audiences. En d'autres termes, je ne lui
24 ai pas accordé tout le poids qu'il mérite. Mais je reconnais qu'à première
25 vue ce sont là des idées intéressantes qui nous sont exposées, des idées
Page 3189
1 qu'il s'agira peut-être d'étudier plus avant. Le tout est de savoir si, au
2 beau milieu d'un procès, le moment est bien venu pour étudier toutes ces
3 possibilités, ou si ce ne sont pas des questions à revoir dans le cadre
4 d'une plénière où l'on peut examiner d'un regard nouveau les articles du
5 Règlement afin de voir si cette démarche serait indiquée pour le
6 Tribunal ; par exemple l'idée selon laquelle il faudrait peut-être se
7 départir de recours relevant du système civiliste ou du système de la
8 Common Law et que l'on parle plutôt de recours disponibles au Tribunal.
9 Ceci devra peut-être être laissé en temps utiles à la Chambre
10 pour savoir quels sont les témoins à appeler à la barre ou pas, en vertu
11 du dossier d'audience. Mais tout ceci nécessite des travaux à un stade
12 préliminaire, peut-être de la part du Juge responsable de la mise en état.
13 Je pense que c'est la personne qui serait la mieux placée pour régler ces
14 questions.
15 M. Nice (interprétation). – Je vais essayer de vous convaincre
16 du fait que non seulement, ce sont des idées intéressantes, mais qu'elles
17 sont nécessaires pour ce procès, qu'elles relèvent de vos compétences
18 actuelles et qu'il n'est donc pas nécessaire qu'une plénière procède à des
19 modifications de la procédure.
20 Avant de vous faire parcourir le plus vite possible ces
21 arguments, permettez-moi de vous faire par d'une remarque personnelle. Il
22 faut énormément de temps à ceux qui se sont aguerris dans un système
23 juridique particulier pour se débarrasser de ce système, soit pour
24 l'oublier, soit pour comprendre les autres principes de droit dans
25 d'autres systèmes, ou tout simplement aussi voir le Règlement du Tribunal
Page 3190
1 et quelles en sont les dispositions.
2 Je m'aventure à suggérer à titre anecdotique, puisque nous avons
3 surtout des avocats venant des Etats-Unis et du Royaume-Uni ou d'Etats qui
4 faisaient partie du Commonwealth, ceci a entraîné des idées peut-être
5 injustifiées, à savoir que l'on interprète à la lumière de la Common Law
6 quand ce n'est pas toujours nécessaire.
7 J'ai éprouvé des difficultés, mais je crois quand même être
8 parvenu à comprendre les différentes démarches, notamment des avocats
9 civilistes, par rapport à ce que nous considérons dans les systèmes de
10 Common Law, être de l'ouï-dire. Cette distinction qui existe entre les
11 deux systèmes est très importante, distinction qui est reconnue aussi bien
12 dans l'arrêt Tadic sur l'ouï-dire que dans la décision Aleksovski sur
13 l'admissibilité d'éléments de preuve.
14 Je pense -je peux me tromper bien sûr- que la distinction, on
15 peut la gérer au mieux de cette façon. Pour un civiliste, tout peut être
16 élément de preuve à produire par un témoin que ce soit le couteau
17 ensanglanté trouvé sur le lieu du crime ou l'alcootest ou le souvenir qu'a
18 un témoin de ce qu'il a vu ou un morceau de papier écrit par la personne
19 décédée, par l'accusé, ou un document qui serait une déclaration de témoin
20 décrite par une tierce personne. Dans le système civiliste, on ne
21 catégorise pas les éléments de preuve qui peuvent être produits par un
22 témoin au prétoire alors que dans le système de Common Law, nous sommes
23 tellement formés par les règles relatives à l'ouï-dire que nous avons
24 tendance à penser d'autres façons, que nous tendons à penser que seuls les
25 éléments de premières mains peuvent constituer des preuves et c'est tout à
Page 3191
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3192
1 fait erroné. Et si là, effectivement, c'est un préjugé de la part des
2 avocats de Common Law, il faut l'écarter.
3 Je crois d'ailleurs que la Chambre Aleksovski l'a fait dans la
4 plupart de ses décisions, ne serait-ce que par le libellé de la première
5 partie du jugement que par sa démarche. La Chambre Aleksovski dit que tout
6 ce qu'un témoin peut produire sera une preuve.
7 Dans ce sens, ce que je propose en guise de démarche pour ce qui
8 du problème des villages attaqués, à se stade, relève bien des articles du
9 Règlement de ce Tribunal. Je comprends que le Juge Robinson a émis un avis
10 dissident dans la Chambre Aleksovski. Je comprends les préoccupations
11 qu'il avait par rapport à la production d'éléments de preuve, qu'on
12 pourrait catégoriser d'ouï-dire dans un autre système. Cette production, à
13 son avis, ne s'est pas faite dans l'affaire Aleksovski.
14 Nous, nous avons paré à ce problème grâce à notre proposition.
15 Est-ce que vous me permettez désormais de les parcourir le plus
16 succinctement possible en gardant à l'esprit, bien sûr, ces premières
17 remarques ?
18 Je demande qu'à tout stade...
19 M. Bennouna. – Je pense que, dans la compréhension du
20 Président May et dans la mienne aussi, je dois le reconnaître, nous
21 pensions que c'était une proposition générale que vous faisiez sur la
22 manière de conduire le procès de manière à faire que le procès soit le
23 plus rapide possible et, bien sûr, de manière à ce la justice soit la
24 mieux administrée possible.
25 Si je vous comprends bien, il y a là des considérations d'ordre
Page 3193
1 général, qui sont une chose, sur lesquelles nous pouvons travailler, nous,
2 en tant que Juges responsables et membres de ce Tribunal, dans d'autres
3 instances ; et il y a une proposition qui concerne notre procès, ce procès
4 et qui est relative plus particulièrement aux attaques des villages.
5 C'est-à-dire, ce que nous avons appelé les différents… Ce me sont pas les
6 preuves qui concernent les chefs d'accusation -si je puis dire- directs,
7 mais tout ce qui concerne un certain nombre de comportements criminels ou
8 plutôt d'actes qui se sont déroulés dans différents villages en Bosnie
9 centrale.
10 Ce que vous proposez est plutôt relatif à cela. Et cela
11 reviendrait peut-être dans votre catégorisation aux catégories E, peut-
12 être.
13 Je pense que la chose se présente différemment. Je pense que le
14 Président May aussi bien que moi-même, nous ne sommes pas obligés
15 d'attendre la plénière pour en décider.
16 Donc c'est bien dans ce contexte-là, c'est tout ce qui est
17 attaques contre les villages. Et une façon de procéder qui consisterait à,
18 pour ces choses qui sont du back-ground, tout un certain nombre de preuves
19 sur l'arrière-plan général de l'acte d'accusation, le contexte général, je
20 crois que, dans ce cas-là, nous sommes prêts à voir cela plus directement,
21 notamment à voir les déclarations ; à ce moment-là, en ayant entendu -si
22 je comprends bien- la défense et l'accusation, prenant en compte les
23 déclarations, décider à l'intérieur de ces déclarations quels sont les
24 témoignages nécessaires à entendre à partir des déclarations, y compris,
25 éventuellement, des témoignages des enquêteurs eux-mêmes.
Page 3194
1 Est-ce que je vous ai bien compris ? Je m'excuse de vous avoir
2 interrompu, mais ça nous permettrait de mieux préciser la base de notre
3 discussion pour avancer et vous laisser à ce moment-là nous exposer votre
4 argumentaire.
5 M. Nice (interprétation). - Tout à fait. Vous m'avez
6 parfaitement compris, Monsieur le Juge, permettez-moi de le dire. Je n'ai
7 fait que quelques remarques préliminaires en réponse, en partie, à ce que
8 disait le Juge.
9 Mais à propos de la procédure, vous avez raison de penser que ce
10 que nous proposons, c'est une solution par rapport à la question des
11 villages. Ceci peut s'appliquer de façon plus générale certes, mais je
12 vous ai déjà fait part de mes intentions pour ce qui est du reste des
13 témoignages. Je ne vais pas changer mon fusil d'épaule pour le moment,
14 parce que je crois fermement que nous pourrons gérer les dépositions
15 directes concernant Kordic et Cerkez, de façon conventionnelle, mais de
16 façon accélérée, compacte, qui permettra à la Chambre de recevoir les
17 éléments de preuve avec toute la célérité voulue.
18 Effectivement, j'essaie de soumettre une proposition de solution
19 pour ce qui est des villages. Ceci avait été résumé par la Juge May lors
20 de notre dernière discussion, au moment où il m'avait demandé ce qui
21 pouvait se faire si la défense présentait bien toutes les questions. J'ai
22 répondu en disant qu'effectivement il y aurait soit un long procès soit
23 des innovations précédurales.
24 Je vais essayer de m'en tenir à ce que j'ai dit au paragraphe 2,
25 même si nous nous demandons s'il faudra peut-être aller plus loin. Il
Page 3195
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3196
1 faudra, bien sûr, nous faire confiance, car nous faisons l'impossible pour
2 avancer rapidement et de façon compacte, et afin que vous gardiez une
3 maîtrise des débats.
4 Paragraphe 4. Là, je dis que j'ai peut-être trop aisément dit
5 que 300 témoins ou déclarations, c'était trop. Si c'est là ce qu'il faut
6 pour faire la preuve dans ce procès, je crois que la Chambre doit en
7 disposer. Cela ne veut pas dire nécessairement qu'il faut entendre tous
8 les témoins. Cette Chambre pourra bien gérer un procès de cette taille,
9 c'est certain. La Chambre peut aussi régler la question si elle a toutes
10 les déclarations.
11 Le seul obstacle à ce que la Chambre dispose de la totalité des
12 éléments de preuve, ce sont les démarches de la défense qui bénéficie, en
13 fait, de cette inquiétude qu'a la Chambre à propos du nombre des témoins.
14 Plus de 150 de ces témoins portent sur les attaques des villages. Je l'ai
15 déjà dit, si ceci était résumé et accepté, tous ces documents relatifs aux
16 villages pourraient être lus à la Chambre en l'espace d'une heure, à peu
17 près.
18 Le système de Common Law est imparfait. Beaucoup n'en sont pas
19 des adeptes. Cela apporte beaucoup de plaisir aux avocats, mais ce n'est
20 pas pour autant forcément le meilleur système que puisse adopter ce
21 Tribunal. Je parle des difficultés qu'ont les Américains à cause de leur
22 Constitution, qu'ont les Britanniques pour d'autres raisons. Il est
23 difficile pour eux de se débarrasser de leur expérience. Or, il faut le
24 faire.
25 Il faut se souvenir que l'article 89 (B) de notre Règlement dit
Page 3197
1 que : "Dans d'autres cas qui ne sont pas prévus dans cette section, la
2 Chambre appliquera les règles d'administration de la preuve, qui
3 permettent le plus de respecter l'esprit du Statut et des principes
4 généraux du droit".
5 Nous disons que les principes de pratique généraux pour cette
6 affaire doivent être les suivants : il faut qu'il y ait le plus grand
7 nombre d'éléments de preuve possible. La Chambre ne devrait pas éliminer
8 des témoins ou les écourter parce que la défense menace qu'il y ait un
9 procès trop long. J'en parle dans mon paragraphe suivant.
10 Mais je pose une question rhétorique. La façon la plus efficace
11 d'écourter ce procès ne serait-elle pas de dire à la défense : "Fort bien.
12 Maître Nice peut appeler ses 375 témoins et puis la défense commencera en
13 octobre". Ceci forcera la défense à vraiment saisir la réalité. C'est
14 parce la défense comprendra que, si elle fait de l'obstruction, elle peut
15 éliminer des éléments de preuve ; c'est peut-être pour cela que nous nous
16 trouvons dans cette situation.
17 M. le Président (interprétation). – Je ne pense pas que nous
18 allons améliorer les choses si nous faisons de l'affrontement
19 systématique. C'est peut-être frustrant pour l'accusation de voir que la
20 défense n'est pas d'accord ou ne veut pas se mettre d'accord avec elle sur
21 quoi que ce soit. Mais, à ce stade, c'est surtout une question de savoir
22 comment on présente les éléments de preuve. Vous l'avez dit ailleurs.
23 C'est une question qui incombe à l'accusation et au Tribunal.
24 Nous avons eu l'occasion de prendre connaissance de ce
25 document : inutile de nous le faire parcourir dans son intégralité. Mais
Page 3198
1 n'oubliez pas ceci, Maître Nice : c'est une chose de parler de
2 300 déclarations préliminaires, mais l'accusation a pour obligation de
3 présenter une thèse et de la défendre pour autant qu'elle puisse faire
4 l'objet d'un procès de longueur raisonnable et pour autant que ceci ne
5 place pas un fardeau insupportable sur toutes les parties concernées. Et
6 c'est là que nous demandons l'assistance de l'accusation.
7 Je n'imagine pas un seul instant que vous n'ayez pas pensé à
8 tous ces éléments dans votre réflexion, mais il faut le dire publiquement.
9 M. Nice (interprétation). – Je les tiens à l'esprit. Ceci ne
10 fait aucun doute. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour parvenir
11 à des résultats.
12 Pour ce qui est de votre premier point, l'affrontement, je ne
13 demande pas l'affrontement.
14 Dans le paragraphe suivant, que je résume, c'est pour dire ceci.
15 Dans le système de Common Law, les avocats de la défense n'ont pas pour
16 obligation de coopérer. En réalité, c'est l'inverse. Ils ne sont pas là
17 pour aider à l'administration de la preuve contre l'accusé. De facto, dans
18 les faits, une coopération se produit du fait d'un règlement, par exemple
19 le Règlement du Tribunal, ou par certaines règles édictées par une Chambre
20 ou par certaines circonstances. Jusqu'à présent, rien n'a été admis, à
21 part quelques dates. Rien n'a fait l'objet d'un accord.
22 On dit qu'aucune déclaration ne peut être lue, comme si ce
23 n'était le droit que de la défense alors que c'est une décision qui
24 revient aux Juges. Nous ne pouvons pas faire grand-chose d'autre pour ce
25 qui est des domaines de preuve à apporter dans un certain détail. D'où
Page 3199
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3200
1 cette proposition, d'où cette démarche que nous voulons adopter.
2 Et je le répète : si, par exemple, la défense estime que vous
3 devez rationner le nombre de témoins que nous avons. A la fin de la
4 présentation des éléments de preuves à charges, vous disiez qu'il fallait
5 deux témoins par village. Si la défense me demande si j'ai prouvé ma
6 thèse, je dirai que non. Je n'ai pas eu l'occasion de le faire. Je passe
7 du système de Common Law à notre proposition.
8 Je vous rappelle que nous en sommes désormais à une situation où
9 le fait de réduire le nombre de témoins à charge à des périodes plus
10 courtes de déposition, soit par l'adoption ou la lecture d'une déclaration
11 préalable, soit par la déclaration qui soit lue dans la plus grande partie
12 de sa totalité. Je pense que la dernière démarche est la plus rapide, la
13 plus appropriée, et étant donné les compétences dont dispose la Chambre,
14 si elle les utilise et si elle demande à la défense pourquoi celle-ci
15 estime qu'il ne faut pas lire certains paragraphes et pourquoi le
16 paragraphe, par exemple 10, ne peut pas être retenu.
17 J'inviterai également la Chambre à réfléchir pour ce qui est du
18 contre-interrogatoire. Et là, ce n'est pas une critique. Vous avez affaire
19 à des conseils de la défense qui n'ont peut-être pas l'expérience de la
20 procédure particulière du contre-interrogatoire ou qui viennent d'une
21 culture juridique où l'on essaie de discréditer les témoins et que c'est
22 là une pratique acceptable. On a vu des exemples, mais étant donné la
23 nature de ce procès, puisque qu'il faut avancer, la Chambre pourrait dire
24 avant le contre-interrogatoire, peut-être hors présence du témoin :
25 "Qu'est-ce que vous recherchez ? Quel est le problème qui se pose ici ?".
Page 3201
1 J'ose proposer que si nous faisons le point sur les témoins que
2 nous avons entendus, un contre-interrogatoire efficace aurait pu se faire
3 avec beaucoup moins de temps. Le temps qui a été nécessité provient de la
4 pression qui s'exerce sur nous tous. J'espère avoir exposé de façon exacte
5 et je suis sûr que le Juge Bennouna me dira si je me trouve être dans
6 l'erreur sur ce point. Le système civiliste est d'après M. Lopès-Pérez qui
7 a été Juge pendant de nombreuses années et me dit que c'est bien le cas,
8 il y a les deux étapes, le dossier d'instruction, la fonction de
9 l'enquêteur.
10 Les droits qu'ont les parties de dire quels sont les témoins -je
11 dois faire attention- quels sont ceux qui auront donné des déclarations
12 préalables qui vont effectivement devenir des témoins au procès. Tout ceci
13 est résumé ici. Les Juges qui se voient entendre des arguments de la sorte
14 peuvent trancher pour savoir quels sont les témoins qu'ils doivent
15 vraiment entendre au procès et ce qui peut être pris en compte, pour
16 autant que soit consignées au compte rendu d'audience certaines
17 déclarations préalables de témoins.
18 Fort de cette disposition générale présentée aux points 3 et 4,
19 nous proposerions ceci : pour ce qui est des lieux, un dossier préparé.
20 Tulica se trouve être le premier exemple. Tulica est sans doute le plus
21 gros dossier à l'exception d'Ahmici. Ce dossier que vous voyez entre mes
22 mains est sans doute plus volumineux que celui que vous aurez pour la
23 majorité des lieux. Il y a bien sûr non seulement les déclarations
24 préalables des témoins, mais aussi des cartes et des témoignages
25 préalables. C'est un dossier volumineux, mais qui n'est pas indigérable
Page 3202
1 pour des personnes qui sont aguerries dans l'art du droit. Et ceci
2 résumerait les effets de l'enquête pour tous ces documents et je pense que
3 les déclarations des enquêteurs représenteront environ 10 pages.
4 Ce que je propose, c'est que l'enquêteur soit appelé à la barre
5 pour faire le résumé de tous ces documents. Il peut faire l'objet d'un
6 contre-interrogatoire à propos de tous ces documents, à propos des témoins
7 ou de ceux qui ont donné des déclarations préalables, quelqu'un qui avait
8 peut-être des griefs envers l'accusé, pour dire que c'est compatible dans
9 tel cas, que telle personne a un problème d'alcoolisme, quoi que ce soit.
10 L'accusation pourra déterminer quelles sont les personnes ayant donné des
11 déclarations qu'elle avait l'intention de citer à la barre, donner des
12 arguments sur l'opportunité ou la nécessité de les avoir dans le prétoire
13 et en règle générale, si il avait une demande excessive de comparution à
14 l'audience, le Juge, au moment du procès dans le système civiliste dit que
15 la bonne administration de la justice exige qu'il y en ait moins. Parce
16 que la question n'est pas suffisamment importante, nous nous suffirons des
17 déclarations préalables des témoins. Mais il incomberait à la Chambre
18 d'être saisie par la défense et la Chambre déciderait des témoins qu'elle
19 doit appeler. Et pour autant que des passages écrits des déclarations
20 préalables sur lesquelles se fondent l'une ou l'autre des parties ou les
21 Juges seraient lus à l'audience, pourraient ainsi être consignés au compte
22 rendu d'audience, répondant ainsi au principe de l'oralité des débats.
23 Aucun de ces éléments n'est en contradiction des articles du Règlement.
24 Vous avez un témoin qui produit des documents qui deviendront des pièces à
25 conviction. Il peut faire l'objet d'un contre-interrogatoire et on peut
Page 3203
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3204
1 appeler un certain nombre de témoins à la barre.
2 Mais ce qui se serait passé, c'est que l'accusation aurait cité
3 à la barre un témoin qui aurait pris une heure pour présenter son rapport,
4 aurait peut-être appelé l'un ou l'autre témoin qui, d'après le régime
5 actuel, nécessiterait peut-être une heure ou une demi-heure en
6 interrogatoire principal ; et les questions pourraient être circonscrites
7 entre les parties et la Chambre pour déterminer quels autres témoins il
8 faudrait appeler.
9 Ce serait là peut-être une impertinence, mais je le dis à la
10 lumière de ce vous avez dit à propos du Juge de la mise en état, Monsieur
11 le Président.
12 Si vous pensiez que ce serait là un bon projet en général, vous
13 pourriez, par exemple, décider que tel ou tel Juge doit examiner telle ou
14 telle localité dans le détail, mais pas tous les trois. C'est une
15 possibilité que je vous soumets pour réflexion. Mais, en fin d'exercice,
16 ce qu'aurait la Chambre, ce seraient les parties les meilleures, les plus
17 aisément identifiables de ces documents relatifs à un lieu, à un sujet
18 particulier ; et ceci n'aurait pas nécessité un examen trop long.
19 C'est assez semblable à ce qui a été obtenu comme position dans
20 l'affaire déjà citée. Vous avez eu un problème, Juge May, avec un
21 historien parlant de la période contemporaine. Il y a une différence, mais
22 elle n'est pas si grande que cela.
23 Examinez la page 4. C'est pour les passages qu'on a indiqués par
24 une ligne verticale. Les points 13 et 14. Je commencerai peut-être par le
25 haut de la page 4.
Page 3205
1 La Chambre peut décider quels seraient les fournisseurs des
2 déclarations préalables qui devraient être appelés à la barre. La défense
3 pourrait toujours apporter ses commentaires ou ses critiques sur la valeur
4 du témoignage et ceci, avant la lecture de la déclaration préalable.
5 Le 90 (G) : il dit que la Chambre exerce un contrôle sur les
6 modalités de l'interrogatoire des témoins et la présentation des éléments
7 de preuve, de manière à rendre l'interrogatoire et la présentation des
8 éléments de preuve efficaces pour l'établissement de la vérité et pour
9 éviter toute perte de temps inutile.
10 M. Bennouna. – Maître Nice, dans le paragraphe 14, vous nous
11 dites ceci : (en anglais) : "La Chambre devrait demander à la défense
12 d'identifier les questions portant litige"
13 Pour être bien clair sur le contenu de ces propositions, est-ce
14 que vous entendez par là que le dossier, dont vous venez de parler et que
15 vous aurez préparé, serait adressé par la Chambre à la défense et que la
16 défense serait appelée à réagir sur ce dossier, concernant les attaques
17 sur les villages, afin de dire quels sont les faits -qu'on peut dire
18 pratiquement de notoriété publique maintenant, sur ces attaques sur ces
19 villages : certains sont incontestables et ont été déjà exprimés dans
20 d'autres procès ici, ou sont de notoriété publique- et quels sont les
21 faits qui posent problème, qui donnent lieu à discussion et au sujet
22 desquels le dossier est insuffisant ? Est-ce que c'est cela que vous
23 entendez par cette phrase dans le paragraphe 14 ?
24 M. Nice (interprétation). – Ce à quoi je pensais dans cette
25 phrase, c'est peut-être ceci : si, dans les déclarations préalables de
Page 3206
1 témoins, disons, à propos d'une attaque perpétrée contre un village, s'il
2 y a des documents de nature à identifier, par exemple, les écussons du HVO
3 –c'est un postulat-, à l'épaulette ou à l'épaule d'un des soldats, le
4 Tribunal va peut-être demander ou c'est peut-être la défense qui va offrir
5 cette information à la Chambre, va dire que c'est une question en litige :
6 quel était l'écusson, pour autant qu'il y en ait un, qui aurait été porté
7 par la personne qui aurait commis ce crime ? Ce serait là une question
8 d'identification. Et ceci guiderait la Chambre dans la réponse qu'elle va
9 fournir, sans doute à des arguments fournis par la défense qui dira qu'il
10 faudrait des témoins capables d'identifier les écussons ou les badges,
11 pour autant que leurs déclarations soient importantes pour le système de
12 défense.
13 C'est à ce genre d'éventualité que je pensais. Je m'en tiendrai
14 là.
15 Voilà la nature du problème auquel je pensais. Un instant, s'il
16 vous plaît.
17 Et si je vous ai bien compris, Monsieur le Juge, vous vouliez
18 savoir si le dossier serait présenté à la défense ? Effectivement, il le
19 serait. La défense aurait déjà reçu toutes les déclarations préalables et
20 les documents supplémentaires, les cartes vous seraient soumis dans les
21 meilleurs délais.
22 Soit dit en passant, je voudrais ajouter ceci : parce que c'est
23 une proposition importante que je vous soumets ici, je pense que nous
24 pourrions avoir des copies identiques du dossier. Nous pourrions, d'ici à
25 la fin de la semaine prochaine, avoir suffisamment de dossiers de ce
Page 3207
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3208
1 genres qui pourraient être signifiés à la défense et aux Juges. Etant
2 donné qu'il y a des cartes, on ne peut pas le faire du jour au lendemain,
3 mais le gérer d'ici à la fin de la semaine.
4 M. le Président (interprétation). - C'est le dossier Tulica ?
5 M. Nice (interprétation). – Exactement. Et, puisque j'ai
6 effleuré ce sujet, si cette démarche est retenue par les Juges, comme
7 j'espère que ce sera le cas, ce sera un programme continu : nous allons
8 élaborer ces dossiers pour d'autres localités, ce qui nécessitera beaucoup
9 de temps. Je pense que nous pourrons mener ceci à bien aussi pour après la
10 pause de l'été. Parce que vous savez que nous sommes très occupés déjà
11 avec des témoins déjà retenus jusqu'à l'été.
12 M. le Président (interprétation). - Vous parlez des témoins
13 relevant des premières catégories ?
14 M. Nice (interprétation). – Pour les deux semaines qui viennent,
15 j'ai quelques témoins de municipalités pour lesquels j'aurais un
16 interrogatoire principal plus court et puis, j'en ai qui ont eu des
17 contacts directs avec les accusés. J'espère que nous pourrons être très
18 rapide aussi pour voir avec rapidité nous pouvons effectivement avancer.
19 Après la pause de quatre semaines, nous allons bien sûr avoir
20 McLeod dont il faut toujours faire le contre-interrogatoire. J'espère que
21 nous pourrons avoir des experts. Nous passerons à une autre catégorie de
22 témoins qu'on ne peut pas mettre en doute. Par exemple, l'ECMM, le
23 British Bataillon, ce genre de choses. En quelques semaines, nous pourrons
24 les avoir, ce qui veut dire que d'ici au mois d'août, nous avons déjà un
25 calendrier complet, s'agissant de témoins qui pourraient fournir des
Page 3209
1 éléments de preuve utiles et spécifiques.
2 Si la Chambre retenait cette démarche, elle n'aurait aucune
3 difficulté à reporter à septembre ou octobre les témoins ou les éléments
4 de preuve relatifs aux localités qui pourraient être présentés de cette
5 façon complète et commode.
6 M. le Président (interprétation). – Il serait utile d'avoir un
7 résumé au début du dossier pour déterminer leur contenu.
8 M. Nice (interprétation). – Tout à fait.
9 Voici ma proposition. L'enquêteur qui sera le témoin, va
10 préparer une déclaration ce qui fera ce résumé. Notre estimation pour
11 Tulica, c'est que ce sera un résumé de 10 pages. La défense aura reçu
12 depuis un an et demi un résumé qui accompagne les déclarations factuelles
13 –cela fait à peu près une demie page- et ceci se répète dans la deuxième
14 invitation à passer à des accords que j'ai faites au début de cette année.
15 C'est une des annexes à notre mémoire préalable au procès. Je peux vous
16 dire qu'il y a déjà là un résumé très rapide de Tulica que nous pourrions
17 compléter.
18 (Les Juges se concertent sur le siège.)
19 M. le Président (interprétation). - Maître Nice ?
20 M. Nice (interprétation). - On me rappelle que j'ai omis de vous
21 dire de façon précise que, bien sûr, s'agissant de chacun des lieux ou des
22 villages, nous allons demander que soit appelé à la barre un témoin, peut-
23 être l'enquêteur pour faire un résumé du dossier. L'enquêteur et un
24 témoin, pardon.
25 M. le Président (interprétation). – Oui, mais vous savez qu'il y
Page 3210
1 a une attitude très robuste de l'accusation qui dirait : "Nous allons
2 citer ces témoins et nous avons cité suffisamment de témoins ; nous
3 n'allons pas continuer à répéter les mêmes dépositions".
4 M. Nice (interprétation). – Oui, nous sommes suffisamment
5 robustes pour le faire, si c'est bien ce qui est exigé de notre part.
6 Mais, pour le moment, on semble nous suggérer qu'on ne peut appeler qu'un
7 ou deux témoins ; et la Chambre n'a de cesse de s'inquiéter du temps qui
8 s'écoule. Elle exercerait donc une certaine pression sur nous. Nous, ce
9 qui nous préoccupe, c'est que, pour ce qui est de ces localités, un seul
10 témoin ou deux n'apporteraient peut-être pas toutes les descriptions
11 nécessaires pour administrer la preuve. Nous avons d'autres inquiétudes :
12 le temps serait occupé, pas nécessairement par l'interrogatoire principal,
13 dans la déposition de ce témoin mais que ce temps est si long que ceci ne
14 fait qu'accroître la pression.
15 Notre attente, c'est qu'en fait il y aura peu de choses qui
16 porteront à litige dans ces dossiers. Ce n'est pas le cas chez Blaskic ;
17 là, tout fait l'objet d'arguties, d'arguments pendant des semaines. Et
18 l'accusé a été appelé à la barre des témoins et a reconnu beaucoup des
19 allégations qui avaient été retenues contre lui, qu'il y avait eu des
20 crimes. Et nous voulons éviter une telle situation en vous présentant
21 exactement ce qui compte, ce qui est matériel.
22 A la page 5, j'ai prévu certains des arguments qu'on va peut-
23 être soulever. N'oublions pas qu'à Nuremberg, au paragraphe 17 –nous
24 n'avons pas le surligné ou une quelconque autre façon- à Nuremberg, les
25 Chambres ont admis l'admission au dossier de déclarations sur présence des
Page 3211
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3212
1 témoins ; les déclarations ont servi de base au témoin.
2 Dans l'article 7 de l'ordonnance 7, qui régit les procès
3 suivants, on dit : "Les tribunaux ne seront pas liés par les règles
4 techniques d'administration de la preuve ; ils adopteront et appliqueront
5 dans la plus grande mesure possible une procédure rapide et non technique,
6 pour autant que la valeur probante soit reconnue. Sans limiter les règles
7 générales précédentes, les choses suivantes seront considérées comme
8 admissibles : les déclarations faites sans serment, les dépositions, les
9 interrogatoires, ainsi que d'autres déclarations.
10 Le Tribunal permettra à la partie adverse de mettre en question
11 l'authenticité ou la valeur probante de tels éléments de preuve si le
12 mérite la poursuite de la vérité et l'intérêt de la justice."
13 Voilà une règle de procédure, adoptée pour ces tribunaux, qui
14 disait à l'article 21 : "Les déclarations de témoins peuvent être versées
15 au dossier à la place d'un serment si elles sont considérées comme
16 compétentes, admissibles et de valeur probante". (Fin de citation.)
17 Je reviens à ce que vous disiez après cette brève introduction,
18 Monsieur le Président. Nous devons être robustes dans ce que nous devons
19 prouver, mais en résumant les éléments de preuve, en appelant à la barre
20 un témoin, nous serons et robustes et rapides et nous pourrons faire une
21 économie de temps. Nous allons fournir à la Chambre l'occasion d'aller
22 directement au vif du sujet pour voir quel est le problème, s'il y en a
23 un.
24 Je pense aux objections éventuelles relatives à l'ouï-dire.
25 Inutile de vous rappeler, Messieurs les Juges, la décision Aleksovski et
Page 3213
1 l'avis minoritaire qui fut exposé.
2 Page 6 : ce qui n'est pas indiqué par une ligne verticale. Quand
3 nous avons, la dernière fois, parler de l'ouï-dire, concernant un témoin
4 particulier, il y a eu un échange entre le Juge May et moi-même, à propos
5 de l'effet ou de la signification qu'il y aurait à avoir des difficultés à
6 amener un témoin dans le prétoire et l'effet sur l'admissibilité de
7 preuves par ouï-dire. Nous voulions savoir s'il y a de meilleurs témoins
8 qui soient disponibles. Je pense que ce n'est pas le cas.
9 Mais ceci a déclenché chez moi une réflexion. Le droit a évolué
10 en ce qui concerne l'ouï-dire, notamment au Canada, où l'on parle surtout
11 de la spécificité de la nécessité, ou de l'importance de la nécessité
12 raisonnable, si un témoin n'est pas disponible. J'ai préparé un petit
13 papier là-dessus ; j'espère qu'il sera utile à la Chambre. A un moment
14 donné, tôt ou tard, j'en assurerai la diffusion de telle sorte que, si
15 jamais cette discussion reprend à propos de l'ouï-dire, nous pourrons
16 partir de l'idée que ces aspects juridiques auront été compris et entendus
17 plutôt que d'entraver le déroulement des débats.
18 Et puis, le droit de procéder au contre-interrogatoire ; c'est
19 une autre préoccupation, mais c'est un droit qui n'est pas de contre-
20 interroger ceux qui auraient rédigé des déclarations par ouï-dire.
21 Quelques lignes plus loin, la jurisprudence le dit : "L'ouï-dire est
22 admissible ; il peut constituer un moyen de preuve".
23 Le commentaire sur le pacte international sur les droits civils
24 et politiques : dans le commentaire, on dit : "La formulation qui dit
25 d'examiner ou de faire examiner tient compte de la différence existant
Page 3214
1 entre les différents systèmes juridiques et, en particulier, entre les
2 systèmes contradictoire et inquisitoire, où, effectivement, on accorde le
3 même respect à l'accusé grâce à l'interrogatoire de témoins."
4 Le droit au contre-interrogatoire ne peut constituer une
5 objection même si celle-ci sera sans doute soulevée : il y a le droit au
6 contre-interrogatoire. Inutile de m'étendre là-dessus.
7 Page 7 et lorsque vous allez trancher sur la question quand vous
8 aurez examiné la totalité des arguments. Ici, je parle de la réception et
9 de la lecture de la déclaration par les Juges avant toute déposition. Page
10 7, je fais le résumé de décisions prises par d'autres chambres qui ont
11 estimé à diverses fins qu'on peut faire lecture de déclarations préalable
12 et y faire référence dans le cadre de jugement. Mais à la page 8, je
13 voulais parler d'une question singulière qui est peut-être assez
14 difficile. A plusieurs reprises, paragraphe A à paragraphe D, la défense
15 nous dit que jamais, elle n'acceptera de déclaration préalable de témoins.
16 Ce n'est pas à la défense de décider. Je crois que la démarche
17 de la défense traduit bien l'expérience du système de Common Law puisque
18 qu'ils ont peut-être raison de croire qu'ils ont ce droit, mais en fait,
19 la question doit être étudiée par les Juges. Je crois qu'il est vexant et
20 absurde de suggérer que les enquêteurs de cette institution font preuve de
21 mauvaise foi. Il y a eu de telles allégations qui ont été proférées
22 effectivement et je tiens à laisser entendre comment on pourrait y parer.
23 Difficile de savoir quelle expérience pourrait aboutir à la conclusion que
24 des officiers de police ou d'autres sont poussés à la corruption par la
25 volonté délibérée de gagner à tout prix, dans les attaques les plus
Page 3215
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3216
1 récentes et ces modifications procédurales avaient été prévues grâce à un
2 échange de correspondances.
3 Dans une récente lettre, la défense refusait d'admettre
4 certaines déclarations préalables de témoins. Elle disait ceci : ce ne
5 sont pas vraiment des déclarations de témoins. C'est plutôt une
6 compilation, ponctuelle, ad-hoc, de ce que ces témoins auraient évoqué
7 comme sujets avec l'enquêteur et teintée de telle façon à affecter de
8 façon négative les intérêts de l'accusé. Ce sont en fait les déclarations
9 des enquêteurs plutôt que les déclarations de témoins stricto sensu.
10 Ce n'est pas la première fois qu'on les a qualifiés de la sorte.
11 Référence est faite au témoin Mujezinovic qui a fourni une déclaration
12 signée et qui, au moment du contre-interrogatoire de l'affaire Blaskic, a
13 dit qu'il avait demandé quelques corrections, corrections qui ne lui
14 avaient pas été accordées.
15 En premier lieu, à la lumière de la démarche adoptée par les
16 conseils de la défense s'agissant de cette déposition, de ce témoignage-
17 ci, j'ai l'intention de fournir, donc de soumettre au contre-
18 interrogatoire, les personnes qui ont recueilli cette déclaration
19 préalable du témoin afin que la défense puisse affirmer à ce témoin ce
20 qu'elle affirme dans sa lettre. Nous verrons où se trouve la vérité. Est-
21 ce que c'est une action totalement erronée commise par l'enquêteur ou
22 l'avocat ou un préjugé, un malentendu se fondant sur une mauvaise
23 interprétation. D'autres enquêteurs sont à disposition. Si on insistait
24 sur ces suggestions, à notre humble avis, elles devraient être soumises au
25 témoin.
Page 3217
1 La Chambre remarquera peut-être que, mis à part ce moyen de
2 preuve particulier, lequel concernait la description d'un état médical
3 consigné dans une déclaration, mais qui n'avait pas été fait sien, à
4 quelque degré de certitude que ce soit, par le témoin, il a dit : "Mais
5 comment peut-on être sûr de cela ?" -je pense-, cela mis à part, il n'y a
6 pas eu ou pratiquement pas eu de contre-interrogatoire qui soit fondé sur
7 des incohérences, des contradictions se trouvant dans des déclarations
8 préalables.
9 Si l'on suggère vraiment que cette institution-ci a fondé tous
10 ses actes d'accusation sur des déclarations de ce type, il faudrait régler
11 cette question une fois pour toutes, quelle qu'en soit la conséquence. Je
12 permettrai à ces témoins d'être contre-interrogés. Je crois que j'ai à peu
13 près tout dit pour ce qui est de cette proposition.
14 A notre avis, le système ordinaire et conventionnel, si robustes
15 que nous soyons, ne servira pas au mieux vos intérêts si une objection
16 constante limite le nombre de documents que vous avez à votre disposition
17 pour juger. La proposition n'est aucunement en contradiction avec le
18 règlement, s'insère fort bien dans la jurisprudence du Tribunal et
19 permettra à tous les Juges d'avoir la meilleure idée possible de la
20 situation dans les meilleurs délais.
21 M. le Président (interprétation). – Maître Nice, je voudrais que
22 l'on voit un peu comment on va procéder. Jusque à peu près 13 heures 10,
23 je pense que nous pouvons continuer. Puis nous allons devoir suspendre car
24 nous avons un autre dossier cet après-midi.
25 M. Nice (interprétation). – Il me reste quelques petits points.
Page 3218
1 M. le Président (interprétation). – Page 9 ?
2 M. Nice (interprétation). – Pages 8 et 9. Il s'agit du
3 calendrier pour la suite.
4 M. le Président (interprétation). – Peut-on y passer
5 maintenant ?
6 M. Nice (interprétation). – Il s'agit de la page 9, au
7 chapitre c. On cherche à ajouter 4 témoins à la liste des témoins et leurs
8 noms figurent ici. Ils ont été prévus sur la liste. Leurs déclarations ont
9 été résumées dans le résumé des témoins qui a été présenté le 3 mai. La
10 totalité de ces déclarations ont été communiquées à la date du 10/7 ainsi
11 que les traductions les concernant à la date du 10/9.
12 L'article 66 (A) prévoit que les déclarations de tous les
13 témoins que l'accusation a l'intention de citer à la barre doivent être
14 communiquées à l'intérieur d'une période de temps qui est décrite, prévue
15 et que les déclarations des témoins complémentaires devraient être
16 communiquées quand la décision est prise de citer à la barre ces témoins.
17 Ceci donc prévoit la possibilité de citer des témoins supplémentaires et
18 j'ai toujours dit que nous continuons notre enquête et que nous aurons
19 peut-être besoin de citer d'autres témoins.
20 Il existe également l'article 73 bis (E) qui correspond à cela.
21 La Chambre a décidé d'insister sur un autre respect de cette règle, à la
22 date du 26 février, et les témoins de l'accusation ont été communiqués,
23 enfin leurs noms, ainsi que les éléments complémentaires qui se limiteront
24 à de nouveaux éléments dans l'enquête qui se poursuit.
25 S'agissant des témoins de Zepce, la liste des témoins a été
Page 3219
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3220
1 communiquée le 5 avril. Il s'agit de témoins qui ont été entendus par le
2 Bureau du Procureur. Donc je dis bien que la date est le 5 mars. Il s'agit
3 de témoins qui ajoutent de nouveaux éléments d'information et qui parlent
4 des actes qui ont été perpétrés pour ce qui est de la persécution et de
5 mauvais traitements infligés à la population musulmane de la municipalité.
6 Au sous-paragraphe 4, ce témoin cité peut aussi parler des liens qu'avait
7 Kordic avec Zepce. La défense ne sera pas lésée si ces témoins sont
8 ajoutés à la liste : puisqu'elle aura vu l'entièreté des déclarations,
9 elle aura eu le temps de se préparer puisqu'elle saura que ce témoin cité
10 est un témoin que nous avons l'intention d'appeler à la barre parmi les
11 témoins selon cette ligne établie, dans ces semaines où nous parlerons des
12 témoins qui ont eu des contacts directs avec l'accusé.
13 L'ajout de ces témoins ne va pas prolonger la durée du procès, à
14 la lumière des mécanismes procéduraux que nous pourrons mettre en place.
15 De toute façon, quels que soient les mécanismes de l'expression de la
16 preuve retenus par cette Chambre, si ces témoins sont supérieurs à
17 d'autres qu'on aurait pu appeler à la barre également, cela veut dire que
18 les témoins les moins performants seront oubliés. Et ceci pourra s'ajouter
19 à cette bibliothèque de documents disponibles aux Juges. Dans l'intérêt de
20 la justice, tous les éléments de preuve pertinents pouvant être obtenus
21 doivent être retenus.
22 Mais, à ce stade, je demanderai simplement que ces quatre
23 témoins soient ajoutés et, surtout pour le dernier, qu'ils puissent être
24 appelés ici, dans deux semaines ou la semaine suivant la semaine
25 prochaine. Etant donné les limites imposées en matière de temps, je
Page 3221
1 pourrai peut-être retenir les questions de procédure qui demeurent pour un
2 autre moment.
3 M. le Président (interprétation). - Nous allons nous saisir de
4 cette requête : nous entendrons la défense sur d'autres questions par la
5 suite.
6 Y a-t-il une quelconque objection à cette demande visant à
7 ajouter quatre nouveaux témoins en vertu du 73 bis (E) ?
8 M. Sayers (interprétation). - Au nom de M. Kordic, il y a une
9 objection : je tiens à le préciser. Depuis trois mois, le départ relatif
10 au nombre exorbitant de témoins à charge a préoccupé cette Chambre. Celle-
11 ci a émis plusieurs ordonnances relatives à l'obligation qu'a le Procureur
12 de déterminer quels sont ces témoins et d'utiliser le libellé du 73 bis.
13 Il faut déterminer les témoins qu'elle a l'intention d'appeler.
14 Afin de permettre plus facilement un survol des ordonnances
15 rendues par la Chambre à cet égard, j'ai pris la liberté –et ce serait
16 peut-être utile pour vous- de résumer par date et contenu les ordonnances
17 déjà rendues par cette Chambre à ce propos. Je les ai ici à votre
18 intention, Messieurs les Juges.
19 M. le Président (interprétation). – Oui, oui, donnez-nous ce
20 document.
21 M. Sayers (interprétation). - Je vais les parcourir dans l'ordre
22 chronologique, me contentant de dire : voilà, nous sommes six ou sept
23 semaines après l'ouverture du procès et nous faisons face à une autre
24 requête qui vise non pas à diminuer le nombre de témoins mais plutôt à en
25 ajouter. Et le Procureur, dans ses déclarations liminaires, a parlé "d'un
Page 3222
1 cas subtil, d'une affaire subtile". Mais déjà la preuve en est apportée
2 depuis sept semaines de procès.
3 Au départ, cette liste des témoins, d'après mon décompte
4 personnel, était de 361 témoins communiqués, ainsi que sept
5 supplémentaires non communiqués ; ceci effectivement nous en donne 378.
6 Mais, en fait, cela n'est pas simplement quatre témoins
7 supplémentaires que le Procureur voudrait ajouter à sa liste, si j'ai bien
8 compris. Nous avons tous les jours de procès, aujourd'hui faisant
9 exception, bénéficié d'une fraîche quantité de documents considérable.
10 Cela s'est poursuivi au-delà du 17 mai.
11 Je vous fournis deux exemples à ce propos. Voici deux accusés de
12 réception, deux reçus que nous avons reçus, il y a trois jours :
13 52 déclarations préalables, Messieurs les Juges. Puis, hier, nous avons
14 reçu un autre accusé de réception pour dix déclarations, dont deux
15 témoins, M. Hairudin Hindic et M. David Pinter, qui n'apparaissent nulle
16 part, qui ne figurent nulle part dans la liste de témoins que nous avons
17 reçue.
18 La déclaration de M. David Pinter, par exemple, a été
19 recueillie, il y a trois jours, par le Procureur. Apparemment, nous avons
20 affaire à une liste de témoins à charge qui comporte au moins 374 témoins,
21 si pas plus. La Chambre l'a remarqué dans son ordonnance du 26 février.
22 L'acte d'accusation initial a été confirmé le 9 novembre 199?.
23 Et il y a eu confirmation de l'acte modifié en septembre 1998. Cela veut
24 dire que ce processus se poursuit depuis déjà quatre ans et que l'enquête
25 qui l'a précédé –nous le savons par la déposition d'un de ces témoins- que
Page 3223
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3224
1 l'enquête, elle, se poursuit depuis au moins mai 1993. L'accusation, ce
2 processus de mise en accusation se poursuit depuis au moins six ans.
3 Ce que j'aimerais dire, avant de parcourir rapidement les
4 ordonnances rendues par cette Chambre, c'est que, tôt ou tard, le
5 processus de communication doit s'arrêter. Je le dis en tant que
6 bénéficiaire de ces nombreux documents que nous recevons au beau milieu du
7 procès. Ceci limite grandement notre capacité et le temps que nous avons
8 pour examiner d'autres questions ou d'autres mesures qui nous
9 permettraient de mieux coopérer avec l'accusation par rapport à des
10 accords préalables. Nous y œuvrons, nous essayons de nous mettre d'accord
11 sur certains points, par exemple, sur les documents de base qui nous ont
12 été soumis. Mais ils ont été présentés de telle façon qu'il est difficile
13 de savoir ce qu'il y a là-dedans.
14 Ne serait-ce qu'aujourd'hui, nous avons présenté à Me Nice, en
15 prenant la lettre Z, nous avons essayé de voir ce qu'il y avait qui
16 pourrait faire l'objet d'un accord dans le document de base pour aussi
17 présenter des objections spécifiques et ainsi accélérer le procès. Nous
18 avons aussi essayé de répondre à ce troisième point d'accord, à savoir la
19 préparation d'une déclaration simple de faits, plutôt que d'avoir des
20 opinions, des avis qui pourraient accélérer la présentation des preuves
21 concernant le pilonnage de Zenica, le 19 avril, par exemple.
22 Ce que je veux dire, c'est qu'étant donné ce flux incessant
23 d'informations qui nous arrivent, il est difficile, voire impossible de
24 prévoir le coup : on essaie de se débattre et de rester à flot, car ceci
25 prend des proportions tentaculaires. Avec ce déluge, ce torrent
Page 3225
1 d'informations, comment travailler à ce qui mérite notre travail et pour
2 garder ceci dans des proportions raisonnables ? Nous voudrions parler de
3 ce qui est vraiment en jeu ici : vous l'avez dit hier, ce sont des crimes
4 de guerre qui sont en jeu et non pas la politique. Or, c'est avec l'acte
5 d'accusation modifié que nous devons travailler.
6 Je vais donc parcourir les ordonnances rendues par la Chambre.
7 Le 13 janvier, vous avez dit qu'il y aurait conférence de mise en état le
8 11 mars 1999 et vous avez demandé au bureau du Procureur de déposer une
9 liste de témoins comme l'exige l'article 73 bis (B-4), pour cette
10 conférence se tenant le 11 mars.
11 Une audience s'est tenue le 16 février. On a demandé au
12 Procureur si toutes les déclarations préalables avaient été fournies à la
13 défense. Si ce n'était pas le cas, est-ce qu'il y en aurait beaucoup ou
14 peu ? Réponse de Me Nice : "Quant à savoir s'il y en aura peu ou beaucoup,
15 je crois qu'il y en aura beaucoup." Cela, c'est une observation qui a été
16 donnée et qui est une source d'inquiétude pour des raisons évidentes de
17 notre part.
18 S'agissant de l'ordonnance du 26 février...
19 M. le Président (interprétation). – Nous avons reçu le document.
20 Pourriez-vous simplement nous indiquer les points importants ?
21 M. Sayers (interprétation). – Je pense que c'est l'ordre du
22 1eravril qui est le plus important. Deux extensions ont déjà été accordées
23 au Bureau du Procureur de la part de la Chambre. Déjà au préalable, le
24 Tribunal a déclaré que nous devions recevoir ces déclarations, mais à la
25 date du 1eravril, cette Chambre a décidé que toute déclaration qui n'a pas
Page 3226
1 été communiquée conformément à cet ordre peut être exclue. Donc, si le
2 procureur ne communique pas complètement les documents à la défense, tous
3 les noms de tous les témoins qu'il a l'intention de citer à la barre et ce
4 avant la date limite du 17 mai. Donc, je trouve que cette ordonnance est
5 parfaitement claire. Elle ne peut pas être plus claire. C'est pour la
6 troisième fois que des délais supplémentaires ont été accordés au Bureau
7 du Procureur par la Chambre.
8 M. Bennouna (interprétation). – Maître Sayers, avez-vous reçu
9 ces communications à la date du 17 mai ?
10 M. Sayers (interprétation). – Concernant la déclaration de
11 monsieur... Je ne souhaite pas citer le nom. Je ne sais pas s'il s'agit
12 d'un témoin qui bénéficie de mesures de protection ou non. Mais s'agissant
13 du premier témoin qui figure dans cette ordonnance, non, nous ne l'avons
14 pas reçu à la date du 17 mai. Alors que visiblement, c'est du 11 avril que
15 date cette déclaration. Nous avons reçu un résumé de la déposition du
16 témoin et cela a été contenu dans le résumé des déclarations des témoins
17 que nous avons reçues le 3 avril. Mais apparemment, ce témoin devait
18 constituer un maillon important entre notre client et les crimes qui lui
19 sont reprochés.
20 Permettez-moi de vous lire ce qui est dit dans cette
21 déclaration. Il est dit que cet homme a rencontré Dario Kordic à une seule
22 reprise en 1991, où il a été discuté de la division de la Bosnie-
23 Herzégovine. La deuxième fois où Dario Kordic a été rencontré par ce
24 témoin, il portait un uniforme militaire et il a été question du fait que
25 Zepce devait faire partie de l'Herceg-Bosnie. En 1993, ce témoin n'a pas
Page 3227
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3228
1 vu Dario Kordic.
2 Concernant ce témoin très important et son lien avec mon client,
3 il y a un certain nombre de questions qui s'imposent. Premièrement,
4 pourquoi n'y a-t-il pas eu d'audience auparavant avec ce témoin ? Pourquoi
5 ses déclarations ne nous ont pas été communiquées auparavant, d'après
6 l'ordonnance de la Chambre. Deuxièmement, compte tenu de cela, comment
7 peut-on dire que ce témoin est u témoin-clé pour prouver la relation. La
8 même chose vaut pour les quatre autres témoins, Monsieur le Président.
9 Nous n'avons pas reçu un certain nombre de ces déclarations en croate,
10 enfin dans la langue qui est comprise par notre client jusqu'au 21 mai, il
11 me semble. Concernant un autre témoin où la date de la réception de ses
12 déclarations en croate est peut-être le 18 mai. Mais nous n'avons jamais
13 reçu la version en anglais de ses déclarations.
14 Donc, il me semble que l'ordre qui est donné par la Chambre à la
15 date du 1eravril est tout à fait clair et que cela ne peut pas être plus
16 clair. Le Bureau du Procureur mène son enquête depuis 6 ans et nous avons
17 le droit de recevoir ces déclarations avant le début. Nous avions droit
18 avant que le procès ne commence réellement. Donc, nous n'avons pas reçu
19 les déclarations de ces témoins à la date butoir, conformément à
20 l'ordonnance de la Chambre datée du 1eravril. Je vous remercie. C'est tout
21 ce que j'avais à dire.
22 M. Kovacic (interprétation). – Mon collègue vient de dire la
23 plupart des choses que j'avais l'intention de dire, donc je ne serai pas
24 très long.
25 Il me semble qu'un point essentiel ici est le suivant :
Page 3229
1 l'enquête, dans cette affaire, a commencé en 1993. Permettez-moi de ne pas
2 revenir sur la date du premier acte d'accusation, sur la date de l'acte
3 d'accusation modifié, mais le fait est que l'enquête se poursuit. En soi,
4 c'est une contradiction. Bien entendu, puisque cela ne fait pas l'objet de
5 nos débats, je ne reviendrai pas sur les points qui ont fait l'objet de
6 nos discussions depuis le début de ce matin.
7 Mais cela aussi résulte de ce genre d'attitude, à savoir s'il
8 n'y a pas de discipline dans une affaire, dans une procédure, et il n'y en
9 a pas puisque nous ne se savons toujours pas si les communications ont
10 touché à leurs fins ou non et jusqu'à quand on continuera à recevoir de
11 nouveaux documents, alors, on ne peut pas savoir comment va se dérouler ce
12 procès. Nous ne savons pas encore aujourd'hui de combien de témoins il
13 s'agit. Nous ne savons pas non plus si la liste des témoins additionnels
14 va s'arrêter un jour. Nous continuons à recevoir des demandes pour des
15 témoins supplémentaires.
16 Dans le même temps, la Chambre accuse la défense de ne pas faire
17 preuve de coopération s'agissant des accords avec l'accusation. Ce que
18 nous considérons par principe, c'est que l'on peut et l'on doit chercher
19 des accords avec l'accusation. Je pense qu'il n'est pas utile de
20 l'argumenter en particulier. La Chambre sait pertinemment que la défense
21 ne peut pas chercher et accepter des accords tant qu'elle n'a pas
22 l'ensemble des éléments entre ses mains. Ce serait préjudiciable à nos
23 clients et je me joins à la proposition de mon collègue.
24 A savoir, je suggère à la Chambre de ne pas accepter ces témoins
25 s'ils ne sont pas pertinents -et on a vu d'après ce qu'on a entendu des
Page 3230
1 résumés, qu'ils ne sont pas pertinents-, mais pour pouvoir déterminer quel
2 est le dossier factuel qui nous permettra de poursuivre ce procès. Cela
3 fait 26 jours que nous sommes dans ce prétoire et en ces 26 jours, nous
4 n'avons entendu aucun élément pertinent, du moins pour ce qui est de mon
5 client. Je propose à la Chambre de définir avec quels éléments nous
6 poursuivrons ce procès. Je suis d'avis que cela réglera toute une série
7 d'autres problèmes concernant la procédure que nous rencontrons
8 aujourd'hui.
9 M. Nice (interprétation). – Permettez-moi de réagir rapidement
10 afin de corriger plusieurs choses. Une référence a été faite à une enquête
11 menée en 1993. A ce moment, le Tribunal n'existait pas. Les ordonnances
12 ont été observées et l'ont toujours été. Quand nous avons demandé des
13 prolongements, des extensions, c'est à cause de traductions. C'était hors
14 de notre contrôle. J'en ai fait un suivi très important. Il y a des
15 problèmes du côté de la traduction d'où les extensions. On a parlé des
16 déclarations signifiées qui n'étaient pas gérables. 51 sur les 52 était en
17 langue originale. Il y avait un projet déjà un projet de traduction en
18 serbo-croate, mais ils n'étaient pas sous leur forme définitive.
19 S'agissant de la déclaration préalable du témoin, qui a été signée, elle a
20 été communiquée le 17 mai. S'agissant de Maître Kovacic, on savait qu'il
21 ne pourrait pas relever son casier parce qu'il était dans son pays natal.
22 Je le lui ai faxé expressément pour tenir compte de ses problèmes le
23 18 mai.
24 Madame Verhaag, qui s'entretient avec la défense s'il y a des
25 problèmes, fait preuve de la plus grande minutie quand il s'agit de
Page 3231
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3232
1 consigner si tel ou tel document a été envoyé à la défense.
2 Même si la défense de M. Kordic n'envoie jamais d'accusé de
3 réception. Nous, nous envoyons des formulaires, mais ils ne sont jamais
4 renvoyés signés. Cela veut dire que ces documents ont effectivement été
5 communiqués le 17, surtout pour tenir compte des difficultés de Me Kovacic
6 le 18, mais c'était pour lui et par fax. La déclaration de ce témoin
7 intervient dans un domaine qui n'avait pas suffisamment été exploré au
8 moment de l'instruction de l'enquête et la Chambre voudra voir dans la vue
9 d'ensemble des témoins que je lui ai fourni, en date du 12 mai peut-être,
10 que ces témoins pouvaient donner beaucoup de détails, dont et c'est une
11 partie importante de son témoignage en rapport avec Kordic, il pouvait
12 dire qu'il avait entendu dire de sa part que Zepce devait faire partie de
13 l'Herceg-Bosna. Ce n'est pas sans intérêt. C'est important et si ce témoin
14 est entendu, on pourra lui faire parcourir tout le contexte nécessaire et
15 l'amener directement sur ce point, mais sans lui, on n'aura peut-être pas
16 cet élément.
17 M. le Président (interprétation). – C'est à quelle page de la
18 vue d'ensemble ?
19 M. Nice (interprétation). – Page 23. En date du 23 mai. Je ne
20 sais pas si vous l'avez. C'est en caractères gras. Nous n'avons pas
21 d'autre témoin qui montre aussi bien le rapport, le lien entre Zepce et la
22 capacité de l'accusé à déterminer le sort réservé à Zepce. C'est donc un
23 témoin important. Pour ce qui est des griefs généraux formulés à propos
24 des dossiers de base..
25 M. le Président (interprétation). – Inutile d'en parler.
Page 3233
1 M. Nice (interprétation). – Effectivement, mais j'ai fait
2 l'impossible pour tenir compte des besoins de la défense qui n'en a pas
3 bénéficié puisqu'ils n'ont pas voulu étudier les documents et nous avons
4 passé de nombreuses heures la semaine passée à essayer de sérier les
5 documents. Nous l'avons fait pour eux parce qu'ils ne l'avaient pas fait.
6 M. Robinson (interprétation). – Est-ce que vous avez le document
7 préparé par Me Sayers.
8 M. Nice (interprétation). – Oui.
9 M. Robinson (interprétation). – Il y a des requêtes aux fins de
10 report. Combien de ces requêtes sont dues à des problèmes de traduction ?
11 M. Nice (interprétation). - Si je m'en souviens bien, je n'avais
12 pas ce document à l'avance. Je n'ai pas étudié ce grief général à
13 l'avance. Mais si je me souviens bien, la liste des témoins avait été
14 ordonnée pour une date et puis cela avait été devancé d'une semaine. Nous
15 avons respecté ceci à l'exception de la traduction. Et on a demandé un
16 report pour traduction, ceci a été accordé. Je ne sais pas s'il y en a eu
17 d'autres mais c'était toujours dans le cadre de la traduction.
18 Désolé de ne pas avoir tous les détails au bout des doigts à
19 portée de main. Vous me corrigerez si j'ai tort mais c'était la seule
20 demande de report. Et à l'époque, on a expliqué bien sûr que le problème
21 de la traduction ne peut pas être régi par nous. Mme Verhaag attire mon
22 attention sur la page 4 du document rédigé par Me Sayers. Vous verrez
23 qu'effectivement à gauche pour le 1er avril, il s'agissait d'une
24 ordonnance visant à accorder un report pour cause de traduction. Je peux
25 vous dire ceci, Messieurs les Juges, et je crois vous l'avoir déjà dit,
Page 3234
1 quand la date du 17 mai a été arrêtée, date à laquelle les traductions
2 devaient être prêtes, je vous ai dit que le service traduction lui-même
3 pensait pouvoir accomplir la tâche en ayant ce délai et avait même parlé
4 d'un délai plus court. J'avais demandé une date dont on était sûr qu'elle
5 serait respectée.
6 Personnellement, et Mme Verhaag aussi le fait, plus
7 régulièrement que, moi je suis en contact avec l'unité de traduction et
8 jusqu'au dernier jour, je pense jusqu'au mercredi voire le jeudi de la
9 semaine du 17, on nous a dit que tout était en ordre.
10 Et puis deux problèmes ont surgi au service de traduction : il y
11 a eu une maladie et puis une panne d'ordinateur, si je me souviens bien.
12 Et dès que j'ai appris qu'il y aurait un problème de traduction, j'en ai
13 fait part à la défense, et je crois que tout a été fourni sous réserve de
14 traduction définitive qui ne faisait pas l'objet de l'ordonnance. Tout a
15 été fourni dans la semaine qui s'ensuivit et en fait les arguments ici ne
16 laissent pas la défense. La défense se contente de vouloir exclure alors
17 que ce témoin peut vous donner une meilleure idée que les témoins
18 précédents ; et sont des témoins importants et qu'il n'y a pas la moindre
19 raison pour lesquelles ces témoins ne devraient pas être à la disposition
20 de la Chambre en temps voulu.
21 (Les Juges se consultent sur le Siège.)
22 M. le Président (interprétation). - Quand voulez-vous appeler
23 ces témoins qu'on n'a pas cités, qu'on n'a pas nommés ? Quand voulez-vous
24 les citer?
25 M. Nice (interprétation). - Dans deux semaines, enfin la semaine
Page 3235
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3236
1 suivant la semaine prochaine.
2 M. Bennouna. - Combien de nouveaux témoins avez-vous l'intention
3 de citer à comparaître dans deux semaines ?
4 M. Nice (interprétation). - Dans deux semaines, une seule
5 personne. Et puis les autres trois personnes, et puis la décision qui est
6 de savoir quand et si ils viennent dépend de la décision de la Chambre
7 concernant la procédure et dépendra aussi de nous, concernant l'approche
8 robuste que nous devons adopter de manière général.
9 Donc ces témoins ont été ajoutés à la liste, mais il n'est pas
10 sûr que ces témoins viendront.
11 M. le Président (interprétation). - Quel serait que l'effet de
12 votre approche sur les attaques de village par rapport à ces témoins ?
13 Serait-il nécessaire de les citer ?
14 M. Nice (interprétation). - Je ne sais pas s'il sera toujours
15 nécessaire de les citer, mais ce témoin là, il sera toujours nécessaire
16 parce qu'il constitue un lien. Je ne peux pas anticiper maintenant, mais
17 il pourrait être nécessaire pour résumer l'approche de l'enquêteur. Il
18 pourrait intervenir avec l'enquêteur qui viendra présenter les documents.
19 Si vous me le permettez, je tiens à ajouter bien sûr, mis à part ce
20 témoin, les autres témoins ne seraient cités que sur demande de l'une des
21 parties.
22 M. le Président (interprétation). - La Chambre étudiera
23 l'affaire. La demande sera rejetée. Nous estimons qu'il y a une limite au
24 volume de documents des moyens de preuve. Une limite au volume de
25 documents que peut examiner la Chambre ainsi que la défense.
Page 3237
1 Bien entendu, vous devez néanmoins présenter vos moyens de
2 preuve de la manière la plus efficace. Nous sommes d'avis que vous avez
3 atteint la limite concernant la quantité de documents et d'éléments de
4 preuve.
5 Maître Nice, ne serait-il pas utile de disposer du dossier
6 Tulica ainsi nous aurions une meilleure idée de ce que vous avez à
7 l'esprit mais il faudrait aussi que la défense en dispose.
8 M. Nice (interprétation). - Je n'en n'ai qu'un pour le moment.
9 M. le Président (interprétation). - Inutile d'avoir un seul
10 exemplaire.
11 M. Nice (interprétation). - Nous pourrions peut-être fournir
12 d'ici cet après-midi un deuxième exemplaire, une deuxième copie de la
13 cassette et nous pourrions montrer aussitôt ce dossier à la défense et le
14 mettre à la disposition de la Chambre cet après-midi. Est-ce que ce que ce
15 serait utile ?
16 M. le Président (interprétation). - Tout à fait, faites ce qui
17 vous convient. Voici comment se présente la situation. A l'évidence, nous
18 avons besoin de nous faire une idée de vos intentions puisqu'il faudra
19 étudier ceci avec le plus grand soin, et nous entendrons la défense. Mais
20 il serait peut-être utile Maître Smith que vous ayez une idée plus précise
21 du dossier du Procureur. Nous serons alors tous beaucoup plus concrets. Et
22 nous y reviendrons la semaine prochaine en temps opportun.
23 M. Nice (interprétation). - Je demande un éclaircissement si
24 vous me le permettez : par rapport à votre décision s'agissant de ces
25 quatre témoins, car ceci s'applique à ces témoins-là. Vos termes
Page 3238
1 pourraient s'interpréter de façon générale à savoir qu'aucune requête
2 ultérieure d'ajout de témoin ne sera entendu par la Chambre, si tel est le
3 cas, il faut que nous voyons ce qu'il en est. Mais si votre décision ne
4 s'applique qu'à ces quatre témoins, nous aurons une déposition différente
5 M. le Président (interprétation). - La décision portait sur les
6 quatre témoins. Toute requête ultérieure sera entendue en fonction des
7 circonstances. C'est bien normal.
8 Maître Smith, qui prend la parole en premier lieu ?
9 M. Smith (interprétation). - Question de calendrier : est-ce que
10 vous voulez revenir sur la question de procédure mardi matin. Vous ne le
11 savez peut-être pas, ce que je dis la défense et moi, en particulier,
12 seront grandement aidés si nous savions à l'avance quand nous vous allez
13 reprendre ces questions. Je suis prêt à présenter mes arguments mais le
14 temps ne le permet pas à l'évidence. Il faudrait prévoir peut-être une
15 audience après que nous ayons eu l'occasion de voir ce dossier, mais je
16 crois qu'il serait utile de savoir quand nous allons porter notre
17 attention sur la question.
18 M. le Président (interprétation). - Je vous propose de discuter
19 de ceci par la filière habituelle. Nous entendrons les témoins, si nous
20 avons des témoins mardi. Mais un moment propice dans les jours suivants
21 devrait être retenu à cette fin. Nous pourrons ainsi étudier la question
22 et Me Smith sera informé.
23 M. Kovacic (interprétation). - Monsieur le Président,
24 Messieurs les Juges, nous apprécierons si le Procureur est en mesure de
25 nous dire quels sont les témoins qui seront entendus la semaine prochaine,
Page 3239
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la
14 pagination anglaise et la pagination française
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
Page 3240
1 parce qu'aujourd'hui en une demi-heure avant le début de nos travaux
2 aujourd'hui nous avons entendu deux versions différentes, je ne sais pas
3 quel est le témoin que nous aurons à interroger mardi. Je demanderais donc
4 que nous soient communiqués ne serait-ce que plusieurs noms afin qu'on
5 puisse étudier les différentes possibilités. Je voudrais que ce soit
6 consigné au compte-rendu.
7 M. le Président (interprétation). - Ce sera sans nul doute fait.
8 Nous allons lever l'audience. Est-ce qu'on pourrait rappeler que
9 l'audience suivante devra être repoussée jusqu'à 15 heures, et que nous
10 aurons la pause habituelle du déjeuner et que nous reprendrons nos travaux
11 à 9 heures 45, mardi matin.
12 L'audience est levée à 13 heures 30.
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25