Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL                     AFFAIRE N° IT-95-14/2-T

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3                           Lundi 12 Juillet 1999

  4                 L'audience est ouverte à 14 heures 30.

  5               (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

  6   Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour, Messieurs les Juges.

  7   7Affaire IT-95-14/2, le Procureur contre Dario Kordic et Mario Cerkez.

  8   M. le Président (interprétation). - Maître Scott ?

  9   M. Scott (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

 10   D'après mes notes, nous en étions au paragraphe 54 du plan général du

 11   résumé.

 12   Témoin J, nous en étions arrivés, je crois, à un certain stade

 13   d'un point de vue chronologique, à savoir celui de janvier 1993.

 14   J'aimerais m'y attarder quelques instants, s'il vous plaît. Diriez-vous

 15   aujourd'hui qu'en janvier 1993, les Musulmans de Busovaca n'avaient pas de

 16   liberté de circulation et que les seules personnes ou les seules forces

 17   qui jouissaient de cette liberté de mouvement, de circulation étaient les

 18   forces du HVO, police et soldats ?

 19   Témoin J (interprétation). - C'est exact. Quelques-uns d'entre

 20   nous pouvaient circuler, mais uniquement en cachette. Si l'on était plus

 21   de deux, trois ou quatre, on ne pouvait pas être ensemble ; on ne pouvait

 22   pas s'assembler. C'était impossible.

 23   M. Scott (interprétation). - J'attire votre attention sur la

 24   nuit du 21 janvier 1993. Est-il exact que Mirsad Delija a été tué lorsque

 25   des soldats du HVO ont frappé à sa porte, puis, quand lui, Delija, est


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  1   sorti sur le balcon pour voir qui frappait à la porte et qu'à ce moment où

  2   il est sorti, qu'il a été tué par balles ? Peut-être qu'il a été tué sur

  3   le coup ou qu'il est décédé suite à ses blessures ?

  4   Témoin J (interprétation). - C'est exact : il a été tué

  5   immédiatement.

  6   M. Scott (interprétation). - Au cours de cette même soirée, est-

  7   il exact que vous-même étiez chez vous dans votre maison de Busovaca, que

  8   vous regardiez la télévision ? Vers 10 heures 15, vous avez entendu des

  9   bruits de pas à l'extérieur ; ensuite, il y a eu une explosion forte qui a

 10   brisé une grande fenêtre de votre salon ? Et au moment où vous avez tenté

 11   de vous enfuir, vous et votre famille, on a brisé la porte d'entrée et des

 12   individus se sont présentés comme étant des policiers du HVO qui l'ont

 13   fait, n'est-ce pas ?

 14   Témoin J (interprétation). - C'est exact, c'est exactement comme

 15   cela que cela s'est produit.

 16   M. Scott (interprétation). - Ces membres de la police du HVO

 17   sont-ils entrés dans votre maison ou, plus précisément, ont-ils tiré des

 18   coups de feu à l'intérieur de votre maison ?

 19   Témoin J (interprétation). - Oui, ils ont tiré.

 20   M. Scott (interprétation). - Est-il exact également de dire,

 21   Témoin J, qu'au moment où vous avez quitté la maison, vous avez pu tirer

 22   quelques balles grâce à une arme que vous aviez et que vous-même et votre

 23   famille avez passé la nuit dans des bois qui se trouvaient aux environs du

 24   village ?

 25   Témoin J (interprétation). - C'est exact.


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  1   M. Scott (interprétation). - Plus tard, mais au cours de cette

  2   même soirée, est-il exact que vous n'avez pas pu identifier les personnes

  3   qui s'adonnaient au pillage et que vous n'avez pas pu apercevoir les

  4   insignes portés par ces hommes ? Cependant, vous avez pu apercevoir que

  5   ces hommes portaient des uniformes de camouflage et que ces hommes

  6   s'identifiaient eux-mêmes en disant qu'ils étaient membres de la police

  7   militaire du HVO, n'est-ce pas ?

  8   Témoin J (interprétation). - C'est exact, je n'ai pas pu le

  9   voir, mais je l'ai déduit d'après ce que j'en ai entendu dire ; ils ont

 10   dit : "Policiers du HVO. Ouvrez !" Et ils ont commencé à tirer.

 11   M. Scott (interprétation). - Et, au cours de cette même période,

 12   ils ont volé un certain nombre d'objets de votre maison, n'est-ce pas,

 13   notamment votre Golf Volkswagen et d'autres appareils électroménagers ?

 14   Témoin J (interprétation). - Oui, ils ont pratiquement déménagé

 15   tout ce que j'avais à l'intérieur de la maison. Il n'y avait plus rien

 16   après.

 17   M. Scott (interprétation). - Toujours au cours de cette soirée,

 18   un peu plus tard, donc nous sommes passés au 22 janvier 1993, est-il exact

 19   que vous avez aperçu trois hommes portant des uniformes, qui sont venus à

 20   nouveau chez vous, dans ce que vous pensez être une Mercedes noire ? Est-

 21   il exact que ces hommes sont également entrés chez vous et que, d'après ce

 22   que vous avez vu, ils ont également pris des objets qui se trouvaient à

 23   l'intérieur ?

 24   Témoin J (interprétation). - Oui, vers trois heures, c'est

 25   qu'ils ont fait : ils ont terminé leur besogne.


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  1   M. Scott (interprétation). - Et plus tard, au cours de la

  2   matinée du 22 avril, vous avez pu revenir chez vous et voir que,

  3   directement après, tous les objets qui étaient en votre possession avaient

  4   été volés ?

  5   Témoin J (interprétation). - C'est exact.

  6   M. Scott (interprétation). - Le 23 janvier, cette même maison a-

  7   t-elle été criblée de balles ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui. De balles à une distance de

  9   vingt ou trente mètres, depuis la route. On a bien vu des traces, oui :

 10   des traces de balles.

 11   M. Scott (interprétation). - Et au cours de la nuit, entre le 22

 12   et le 23 janvier, avez-vous aperçu d'autres actes de pillage perpétrés par

 13   des membres du HVO, dans la ville de Busovaca ?

 14   Témoin J (interprétation). - Oui.

 15   M. Scott (interprétation). - Au cours de la même nuit, le HVO a-

 16   t-il posé des explosifs dans deux cafés qui se trouvaient à Busovaca ?

 17   Témoin J (interprétation). - Oui. Il s'agissait de deux cafés

 18   et, dans les nuits qui ont suivi, il y a eu de plus en plus d'explosions.

 19   Les nuits étaient très difficiles à vivre. Dans la journée, le calme

 20   régnait quand même ; c'était plus agréable.

 21   M. Scott (interprétation). - J'attire votre attention sur la

 22   nuit du 23 au 24 janvier 1993 : que s'est-il passé -je parle de votre

 23   maison- plus précisément au cours de cette nuit-là ?

 24   Témoin J (interprétation). - On a mis le feu à ma maison, on a

 25   entendu une détonation, et elle a brûlé rapidement.


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  1   M. Scott (interprétation). - Est-il exact que cela a été la

  2   première maison musulmane à avoir été détruite à Busovaca ?

  3   Témoin J (interprétation). - Oui, c'était la première maison

  4   musulmane à Busovaca.

  5   M. Scott (interprétation). - Il s'agit bien de la même maison

  6   dont vous avez parlé jeudi, et vous avez dit que cette maison était à

  7   150 mètres de celle de Dario Kordic, n'est-ce pas ? Est-ce que bien

  8   exact ?

  9   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est à environ cette

 10   distance-là qu'elle se trouvait.

 11   M. Scott (interprétation). - Monsieur, avez-vous obtenu des

 12   informations vous permettant de déterminer qui avait participé à ces actes

 13   de terrorisme, à savoir de faire exploser votre maison et y avoir mis le

 14   feu ?

 15   Témoin J (interprétation). - Oui.

 16   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous nous en dire plus ?

 17   Témoin J (interprétation). - J'ai vu une voiture blanche

 18   appartenant au frère de Dario. A l'intérieur se trouvaient

 19   Aleksandar Ruzic, qu'on appelait "Aco", et quelques autres personnes que

 20   je ne connaissais pas, mais ces deux-là, je les connaissais, c'est eux qui

 21   ont incendié ma maison.

 22   M. Scott (interprétation). - Vous avez déclaré avoir aperçu une

 23   voiture blanche, mais je ne sais pas très bien si nous avons compris

 24   quelle était l'importance de ce renseignement. Pourquoi est-il important

 25   de préciser qu'il s'agissait d'une voiture blanche ?


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  1   Témoin J (interprétation). - A à cet instant précis, ce n'est

  2   que le frère de Dario Kordic qui avait une telle voiture.

  3   M. Scott (interprétation). - Et a-t-on aperçu cette voiture aux

  4   environs de votre maison au moment où elle a été détruite ?

  5   Témoin J (interprétation). - Oui, elle a été aperçue. C'est mon

  6   beau-frère, le frère de mon épouse, qui l'a vue. Sa maison se trouve à une

  7   dizaine de mètres de la mienne.

  8   M. Scott (interprétation). - Et par la suite, au cours de cette

  9   même soirée, je crois que deux autres boutiques musulmanes de Busovaca ont

 10   été détruites par explosifs, n'est-ce pas ?

 11   Témoin J (interprétation). - Oui, un ou deux magasins par nuit

 12   étaient détruits. On lançait des grenades et les magasins étaient pillés

 13   jusqu'au 25. Cela se produisait donc toutes les nuits.

 14   M. Scott (interprétation). - Peut-on dire également qu'au cours

 15   de la nuit du 25 janvier 1993, ou peut-être disons la nuit entre le 24 et

 16   le 25, la plupart de ceux qui restaient à l'époque des magasins et

 17   boutiques musulmans ont été détruits par explosifs, et je parle notamment

 18   de votre boutique ?

 19   Témoin J (interprétation). - Oui, toutes les boutiques ont été

 20   incendiées et pillées.

 21   M. Scott (interprétation). - Et vous souvenez-vous comment votre

 22   magasin en particulier a été détruit ?

 23   Témoin J (interprétation). - On a lancé une grenade à main. Il

 24   s'agissait de la maison de Jovic*. Moi, je possédais ces locaux qui me

 25   servaient de magasin. C'était au centre même de la ville. Mon cousin


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  1   également possédait un magasin à côté et il a également été détruit et

  2   pillé au même moment.

  3   M. Scott (interprétation). - J'attire maintenant votre attention

  4   sur la matinée suivante, du 25 janvier. Est-il exact que vers 5 heures 30,

  5   6 heures du matin, des sirènes de pompiers se sont déclenchées à Busovaca

  6   et qu'il y a eu de nombreux tirs, et ce matin-là vous avez appris qu'il y

  7   avait un certain nombre de tireurs isolés et qu'il y avait également un

  8   certain nombre de tirs d'artillerie qui sont tombés sur la ville ?

  9   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est exact, on a entendu

 10   l'alerte et, tout de suite après, on a entendu des tirs de tous côtés, des

 11   tirs très intenses.

 12   M. Scott (interprétation). - De l'endroit où vous vous trouviez

 13   au cours de la matinée du 25, avez-vous pu apercevoir les soldats du HVO

 14   en train d'attaquer Busovaca ?

 15   Témoin J (interprétation). - On pouvait les voir, on pouvait

 16   voir les tireurs embusqués sur des immeubles, qui se trouvaient sur des

 17   immeubles, ainsi que ceux qui tiraient à partir des collines. Ils

 18   faisaient venir de l'artillerie, des armes antiaériennes. On entendait des

 19   tirs de tous côtés.

 20   M. Scott (interprétation). - Ce matin-là du 25 janvier, avez-

 21   vous pu identifier un certain nombre d'unités militaires ou de formations

 22   militaires d'après les insignes portés sur des uniformes ?

 23   Témoin J (interprétation). - Ce matin-là, non, le matin en

 24   question. Mais par la suite, lorsqu'ils nous ont assemblés sur la place

 25   dans le centre de la ville, on pouvait voir et moi, j'ai vu de mes yeux


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  1   les insignes du HVO, du HOS et de la Brigade Runolist.

  2   M. Scott (interprétation). - Est-ce que vous avez obtenu des

  3   informations vous permettant de déterminer l'origine de cette Brigade

  4   Runolist. Où était-elle basée ?

  5   Témoin J (interprétation). - Je ne disposais d'aucune

  6   information, mais il était clair qu'ils n'étaient pas de notre région.

  7   Leur accent était différent, c'était l'accent des gens de Herzégovine.

  8   M. Scott (interprétation). - Très bien. De façon générale, au

  9   cours des différentes choses dont vous nous avez parlé notamment jeudi

 10   dernier et aujourd'hui, vous avez dit que chaque fois qu'il y avait une

 11   opération menée par le HVO, eh bien généralement ces forces du HVO étaient

 12   également constituées d'individus qui ne venaient pas de Busovaca, n'est-

 13   ce pas ?

 14   Témoin J (interprétation). - C'est exact. Vitez, Travnik,

 15   Kiseljac, de Herzégovine. Ils venaient de partout.

 16   M. Scott (interprétation). - Je demanderai à l'huissier de vous

 17   soumettre les pièces Z 1 529 et 1 564. Je crois qu'elles ont déjà été

 18   distribuées, Messieurs les Juges. Je crois qu'il y a des exemplaires pour

 19   les conseils de la partie adverse.

 20   (L'huissier s'exécute.)

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est bien cela.

 22   M. Scott (interprétation). - Tout d'abord, j'attire votre

 23   attention, pour le compte rendu, sur la pièce Z 1 529. Avez-vous aperçu

 24   cet insigne ou cet écusson au cours du mois de janvier 1993, le 25 plus

 25   précisément ?


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  1   Témoin J (interprétation). - Oui.

  2   M. Bennouna (interprétation). - Peut-on utiliser le

  3   rétroprojecteur, s'il vous plaît, pour les Juges ?

  4   M. Scott (interprétation). - Pardon, Monsieur le Juge, je

  5   croyais qu'il avait été placé sur le rétroprojecteur, je n'avais pas

  6   regardé. Très bien. Alors revenons quelque peu en arrière. En ce qui

  7   concerne ce que vous voyez sur l'écran, Témoin J, nous avons fait

  8   référence à la pièce Z 1 529. C'est bien l'écusson qui se trouve sur la

  9   partie droite de l'écran, n'est-ce pas ?

 10   Témoin J (interprétation). - Oui.

 11   M. Scott (interprétation). - Bien. Et le 25 janvier 1993, avez-

 12   vous également aperçu l'écusson qui se trouve sur la même image et qui

 13   porte la cote 2 564 ?

 14   Témoin J (interprétation). - Oui.

 15   M. Scott (interprétation). - Vous avez vu ces deux écussons le

 16   25 janvier, n'est-ce pas, à Busovaca ?

 17   Témoin J (interprétation). - C'est exact, oui.

 18   M. Bennouna. - Est-ce qu'on peut avoir un peu plus de précisions

 19   du témoin ? Est-ce que ces badges du HV et de l'armée croate, et du HVO,

 20   de l'armée bosno-croate, si on peut dire, est-ce que..., du Conseil de

 21   défense croate, est-ce que ces deux badges étaient portés en même temps

 22   par la même personne ? Par des personnes différentes ? Et quelle était la

 23   proportion, si le témoin peut dire, qu'est-ce qui dominait, des personnes

 24   qui portaient l'un ou l'autre ? Je souhaiterais savoir un peu plus de

 25   précisions.


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  1   M. Scott (interprétation). - Bien sûr, Monsieur le Juge.

  2   Témoin J, vous avez entendu la question posée par M. le Juge

  3   Bennouna ; lorsque vous avez vu ces écussons sur différents uniformes,

  4   étaient-ils portés sur un seul uniforme, par exemple un sur une épaule et

  5   l'autre sur l'autre, ou bien avez-vous vu un écusson par uniforme, ou par

  6   personne ?

  7   Témoin J (interprétation). - Il n'y avait qu'un écusson par

  8   personne. Soit celle du HVO, soit de la HV. Il y avait beaucoup plus de

  9   personnes qui portaient des insignes du HVO ; un petit nombre de personnes

 10   portaient les insignes de l'armée croate. De Croatie.

 11   M. Scott (interprétation). - Merci. Est-il exact que la

 12   population, ou la majeure partie de la population musulmane de Busovaca

 13   était rassemblée, a été rassemblée et menée à la place centrale, en plein

 14   centre de la ville ?

 15   Témoin J (interprétation). - Je ne pourrais pas dire qu'il

 16   s'agissait de la majeure partie de la population, on était au nombre de

 17   quatre-vingt-dix environ et, effectivement, on était rassemblés sur la

 18   place et les autres quartiers et les autres rues ont déjà été fouillés et

 19   les gens ont été envoyés à Kaonik donc nous, nous étions en fait le

 20   dernier groupe de quatre-vingt-dix personnes qui avons été menées jusqu'à

 21   la place.

 22   M. Scott (interprétation). - Très bien. Vous venez de mentionner

 23   Mahala. Etait-ce un quartier musulman dans Busovaca ?

 24   Témoin J (interprétation). - Oui. Là où nous nous trouvions, il

 25   n'y avait que des Musulmans.


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  1   M. Scott (interprétation). - Très bien. Ces événements se sont

  2   donc produits le 25 et je crois que vous avez vu une femme musulmane ou

  3   plusieurs femmes musulmanes, plusieurs enfants musulmans également, qui

  4   quittaient leur foyer à peu près au moment où les soldats du HVO ont été

  5   aperçus mettant le feu à certaines maisons, n'est-ce pas ?

  6   Témoin J (interprétation). - Oui. La panique régnait, la peur

  7   générale. Toute la population se dirigeait vers le centre-ville, vers

  8   cette place. Ils étaient suivis par des soldats qui mettaient le feu, qui

  9   incendiaient les maisons. Une quinzaine de maisons ont brûlées à cette

 10   occasion.

 11   M. Scott (interprétation). - Savez-vous si des civils musulmans

 12   ont été blessés ou tués au cours de cette journée, la journée du 25 ?

 13   Témoin J (interprétation). - Oui. Il y en a eu beaucoup et c'est

 14   ça, le plus dur. Un tireur isolé qui se trouvait sur un bâtiment très

 15   proche a tué Sedin Merdan.

 16   Un instant, je vous prie.

 17   Ihadec* Mrkic* également a été tué. On a vu dans la rue des

 18   cadavres ; les cadavres de Dzenad Navolic, Nihad* Merdan, Ojic*. A l'autre

 19   bout de la ville, on a tué trois jeunes gens : Nihad Slanovic*, un jeune

 20   homme Adji Begovic* et un troisième dont je ne connais pas le nom. On a

 21   tué sur le pont Sonolar Pajic*, Medjou Selac*. Le professeur de

 22   mathématique a été tué, on l'appelait Budo*, je me souviens. Un monsieur

 23   nommé Jahic* qui avait une cinquantaine d'années, entre 50 et 55 ans ; il

 24   a été tué sur la route de Kaonik, tout près du bâtiment de Vatrostlana*.

 25   M. Scott (interprétation). – Très bien. Pouvez-vous dire la


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  1   chose suivante à la Chambre : y a-t-il eu une quelconque résistance armée

  2   face à l'attaque du HVO qui a eu lieu le 25 janvier ? Y a-t-il eu une

  3   structure de défense organisée de la part des Musulmans de Busovaca ?

  4   Témoin J (interprétation). – Non, on n'a pas tiré, même pas une

  5   balle. Il n'y a pas eu de raison, on n'était pas prêts.

  6   M. Scott (interprétation). – Témoin J, à ce moment-là, étiez-

  7   vous considéré comme étant un membre reconnu et éminent, assez aisé, de la

  8   communauté musulmane de Busovaca ?

  9   Témoin J (interprétation). – Oui, on pourrait le formuler ainsi,

 10   oui.

 11   M. Scott (interprétation). – Et le 25 janvier, n'étiez-vous

 12   qu'un civil à l'époque ? Etait-ce là votre seul statut ?

 13   Témoin J (interprétation). – Oui, on était tous des civils.

 14   M. Scott (interprétation). – Diriez-vous aujourd'hui qu'au cours

 15   de ces événements, plusieurs hommes musulmans -vous-même notamment-

 16   demandaient, criaient au HVO de cesser les tirs ? Mais les membres du HVO

 17   ont totalement ignoré vos appels et ont continué à tirer ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui. Malgré tout ce que l'on a dit,

 19   on les suppliait, ils ont continué à tirer jusqu'à 10 heures du soir. La

 20   panique régnait. Enfin, ils nous ont tous rassemblés sur la place et ce

 21   n'est qu'au moment où nous étions rassemblés sur la place qu'ils ont

 22   arrêté de tirer ; ils l'ont fêté comme s'il s'agissait d'une victoire, ils

 23   s'embrassaient les uns les autres.

 24   M. Scott (interprétation). – Pouvez-vous dire à la Chambre ce

 25   qui s'est passé lorsque toutes ces personnes, environ quatre-vingt-dix,


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  1   ont été rassemblées sur la place ?

  2   Témoin J (interprétation). - Quelques minutes plus tard, un bus

  3   est arrivé ; on a tous embarqué et on nous a conduits à Kaonik, au camp de

  4   Kaonik, dans le hangar. C'étaient des entrepôts militaires. Lorsque nous

  5   sommes arrivés, on a trouvé plusieurs personnes qui s'y trouvaient déjà,

  6   on était au nombre de 200, 300.

  7   M. Scott (interprétation). – Très bien. Témoin J, avant que nous

  8   n'avancions vers les événements qui se sont produits au camp lui-même je

  9   vais vous poser quelques questions.

 10   Lorsque vous étiez sur cette place, y a-t-il eu une tentative de

 11   séparer les femmes et les enfants des hommes ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui. On a séparé les hommes des

 13   femmes. Les femmes et les enfants ont eu l'autorisation de rentrer chez

 14   eux alors que nous, nous étions dans le bus.

 15   M. Scott (interprétation). – En ce qui concerne les hommes

 16   musulmans qui ont été emmenés à Kaonik, y avait-il parmi eux des hommes

 17   très jeunes, à savoir de 14, 15 ans, voire 16 ?

 18   Témoin J (interprétation). – Oui, il y en avait.

 19   M. Scott (interprétation). – Lorsque vous êtes arrivé sur cette

 20   place, quels sont vos souvenirs en ce qui concerne ces bus ? Les bus sont-

 21   ils arrivés avant vous ? Enfin, dites simplement quels sont vos souvenirs

 22   en ce qui concerne les bus.

 23   Témoin J (interprétation). - Le bus est arrivé une à deux

 24   minutes plus tard. Il était certainement garé tout près, et ils

 25   attendaient pour que l'on soit tous rassemblés sur la place pour qu'ils


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  1   arrivent et que l'on embarque dans le bus. Le chauffeur de l'autobus était

  2   Zeljko Vareskovic, que l'on surnommait "Bubreg".

  3   M. Scott (interprétation). – Est-il exact que le camp de Kaonik

  4   se trouve à peu près à 5 kilomètres de Busovaca, et qu'il vous a fallu

  5   environ dix minutes pour y arriver par bus ?

  6   Témoin J (interprétation). - Oui. Environ 5 kilomètres et dix

  7   minutes en bus, oui.

  8   M. Scott (interprétation). – Est-il exact de dire que les

  9   gardes, au camp de Kaonik, portaient des uniformes de camouflage et des

 10   écussons du HVO ? Et, à votre connaissance, certains de ces gardes

 11   venaient-ils de Busovaca ?

 12   Témoin J (interprétation). – Oui, c'est exact.

 13   M. Scott (interprétation). – Très bien. Il y a un instant, vous

 14   avez dit que lorsque vous êtes arrivés sur place, vous et les autres

 15   prisonniers avez été emmenés dans un hangar. Ce hangar faisait-il à peu

 16   près 20 mètres de large sur 50 à 60 mètres de long, 50 à 70 mètres de

 17   long ?

 18   Témoin J (interprétation). – Oui, à peu près.

 19   M. Scott (interprétation). – A ce moment-là, avez-vous appris

 20   que le commandant de cette prison, de ce camp était Zlatko Aleksovski ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est ce que l'on a appris sur

 22   place. On était alignés les uns à côté des autres, le visage tourné vers

 23   le mur. Par la suite, on nous a dit de nous tourner vers le centre de

 24   cette pièce. L'homme qu'on a vu à ce moment-là s'est présenté. Il a dit :

 25   "Je m'appelle Zlatko Aleksovski, je suis le directeur de la prison. N'ayez


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  1   crainte, vous resterez sains et saufs".

  2   M. Scott (interprétation). – Ceci s'est passé le 25 janvier,

  3   n'est-ce pas ?

  4   Témoin J (interprétation). - Oui.

  5   M. Scott (interprétation). – Alors, faisons un pas en avant afin

  6   de bien déterminer la période au cours de laquelle les événements suivants

  7   se sont produits. Je crois que vous avez été libéré de Kaonik aux environs

  8   du 8 février 1993, n'est-ce pas ?

  9   Témoin J (interprétation). - Le 8 février précisément, oui.

 10   M. Scott (interprétation). – Après ces deux semaines, deux

 11   semaines et demie, ou plutôt au cours de cette période, avez-vous appris

 12   si, oui ou non, M. Aleksovski recevait ses ordres d'une personne qui lui

 13   était supérieure du point de vue hiérarchique ?

 14   Témoin J (interprétation). – Oui, c'est certain.

 15   M. Scott (interprétation). – Et qu'avez-vous compris

 16   exactement ?

 17   Témoin J (interprétation). - Monsieur Aleksovski ne faisait

 18   qu'exécuter les ordres. Cela s'est produit à un moment quand on nous a

 19   alignés. En fait, on revenait des tranchées et on était alignés devant le

 20   hangar devant la prison ; on était déjà installés dans les cellules

 21   lorsque Goudel* est arrivé, on l'appelait Petja*. Il a demandé à

 22   Aleksovski qu'une trentaine de prisonniers aillent creuser les tranchées.

 23   Goudel* lui a tendu un papier. Quand M. Aleksovski a vu ce papier, il lui

 24   a dit qu'il ne pouvait pas lui fournir les prisonniers puisque sur le

 25   papier il n'y avait de signature ni de Kordic ni de Sliskovic.


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  1   M. Scott (interprétation). – Excusez-moi, je vais vous

  2   interrompre un instant simplement pour un point de référence. Ce n'est pas

  3   un problème, mais afin que tout soit clair, le témoin est passé maintenant

  4   à des événements qui sont couverts par le paragraphe 155 et les

  5   paragraphes suivants. C'est simplement une question de référence, c'est là

  6   que vous pourrez trouver ce que le témoin est en train de dire.

  7   Témoin J, excusez-moi, je vous ai interrompu. Vous avez dit que

  8   M. Aleksovski répondait de ses actes devant cet officier du HVO, que les

  9   prisonniers ne pouvaient pas quitter les lieux, à savoir la prison, s'ils

 10   n'avaient pas de document signé, soit par Kordic, soit par Sliskovic,

 11   n'est-ce pas ?

 12   Témoin J (interprétation). - C'est exact, oui.

 13   M. Scott (interprétation). - Et quelle a été la réponse de cet

 14   officier à M. Aleksovski ?

 15   Témoin J (interprétation). - Il a dit qu'il n'était pas chargé

 16   d'hommes, mais de bétail, et qu'il n'avait pas besoin de signature de qui

 17   que ce choix. Cependant, Aleksovski a refusé catégoriquement. L'officier

 18   s'en est allé et une quinzaine de minutes plus tard, peut-être vingt

 19   minutes, il est revenu.

 20   Je n'ai pas vu le papier en question, mais lorsqu'il a tendu ce

 21   papier, ce nouveau papier, à Aleksovski, Aleksovski lui a fourni les

 22   hommes dont il avait besoin donc j'en ai conclu que la signature de Kordic

 23   ou de Sliskovic y figurait.

 24   M. Scott (interprétation). - Très bien. En gardant cette

 25   conversation en tête, j'invite les Juges à revenir en arrière pour revenir


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  1   au paragraphe 95.

  2   Est-il exact que lorsque vous êtes arrivé au camp, à cette

  3   prison, au début, ou pendant toute la période que vous y avez passée,

  4   d'ailleurs, si vous avez gardé certains objets au cours de la durée de

  5   votre détention, est-il exact néanmoins que les soldats du HVO ont saisi

  6   plusieurs objets qui appartenaient à des prisonniers musulmans -je parle

  7   notamment de bijoux, d'argent, de montres- ?

  8   Témoin J (interprétation). - Ils se sont emparés de tout : les

  9   objets en or, l'argent, même les chaussures si elles étaient de bonne

 10   qualité, les manteaux en fourrure, des pantalons... tout ce qui était de

 11   bonne qualité, ils s'emparaient de tout. A un moment, un sac a été rempli

 12   d'argent.

 13   M. Scott (interprétation). - Et précédemment, vous avez dit

 14   qu'avant la fin de la journée du 25 janvier, il y avait entre 250 et

 15   300 hommes qui se trouvaient dans ce hangar au camp de Kaonik, n'est-ce

 16   pas ?

 17   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est exact. C'est le nombre

 18   exact.

 19   M. Scott (interprétation). - Et ces prisonniers sont arrivés de

 20   Skradno, Loncari, Strane, Busovaca, n'est-ce pas ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, ils venaient de partout. On

 22   les a amenés de partout.

 23   M. Scott (interprétation). - Nous allons, je crois, passer très

 24   rapidement sur les paragraphes suivants. Vous n'aviez qu'une qualité de

 25   vie extrêmement réduite, n'est-ce pas ? Le confort était pratiquement


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  1   inexistant ?

  2   Témoin J (interprétation). - Il n'y avait absolument pas de

  3   confort, il y avait un hangar, le sol était en béton et on marchait afin

  4   de nous réchauffer un peu. Le 25 janvier, l'hiver, il faisait très froid,

  5   on essayait donc de se réchauffer afin de pouvoir survivre jusqu'au

  6   lendemain.

  7   M. Scott (interprétation). - Et même au début, peut-on dire que

  8   certains des prisonniers musulmans ont été emmenés à l'extérieur du camp

  9   et que lorsqu'ils sont revenus, vous vous êtes rendu compte qu'ils avaient

 10   été frappés ?

 11   Témoin J (interprétation). - Oui. C'était normal, disons.

 12   M. Scott (interprétation). - Qu'ils avaient donc été sortis du

 13   hangar.

 14   Je reviens au début de cette période de détention, au 26 ou au

 15   27 janvier ; est-il exact qu'un soldat du HVO est rentré dans le hangar et

 16   qu'il a lu quinze noms qui figuraient sur une liste qui figurait elle-même

 17   sur une feuille de papier ? Avec votre nom, par exemple ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui. Il y avait quinze noms, le

 19   mien était au n° 14, celui de mon cousin suivait le mien. On est sortis et

 20   ils avaient une sorte de cordon. Ils ont commencé à nous lier, à nous

 21   attacher, donc les treize premiers ont été attachés ; quand mon tour est

 22   venu et celui de mon cousin, il n'y avait plus de corde, donc on est

 23   restés les mains libres. Il y avait encore 5-6 personnes de la famille qui

 24   ont été emmenées pour figurer comme des boucliers humains. On nous l'a dit

 25   d'ailleurs tout de suite, afin d'occuper le village et de faire en sorte


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  1   que les gens se rendent.

  2   M. Scott (interprétation). - Revenons sur certains détails.

  3   Lorsqu'on vous attachait, en fait, qui vous attachait ? Etait-ce le même

  4   Zoko*, ou Zoka*, qui avait conduit le bus jusqu'au camp ?

  5   Témoin J (interprétation). - Zelko s'y trouvait, Pusic* s'y

  6   trouvait. C'était un policier du HVO. Il y avait aussi une personne que je

  7   ne connaissais pas, mais qui savait s'y prendre lorsqu'il s'agit

  8   d'attacher les personnes avec des cordes. J'ai vu également Mirko Cosic.

  9   Je ne sais plus, maintenant.

 10   M. Scott (interprétation). - En ce qui concerne certains des

 11   prisonniers qui ont été attachés à ce moment-là, j'ai essayé de lire cela

 12   pour gagner du temps, mais je ne suis pas sûr...

 13   M. le Président (interprétation). - Je ne crois pas que les noms

 14   vont nous être d'une grande assistance, mais je crois que le frère du

 15   témoin était parmi eux. Lui-même n'a pas été emmené, je crois, à ce

 16   moment-là ?

 17   M. Scott (interprétation). - J'allais y arriver, Monsieur le

 18   Président, afin d'y apporter une certaine précision.

 19   Témoin J, s'il vous plaît, vous avez dit que vous n'avez pas été

 20   attaché, que vos mains n'ont pas été liées parce qu'il n'y avait plus

 21   suffisamment de liens ; avez-vous en fait été emmené à Strane à ce moment-

 22   là ? Avez-vous quitté le camp ?

 23   Témoin J (interprétation). - On ne m'a pas emmené, je suis resté

 24   dans le hangar, dans la prison, alors que les treize autres ont été

 25   emmenés. Ces treize jeunes gens étaient de la ville et on a certainement


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  1   dressé cette liste exprès parce qu'il s'agissait de jeunes gens de la

  2   ville.

  3   M. Scott (interprétation). - Très bien. Mais vous avez dit qu'il

  4   y avait eu une déclaration claire ; l'intention était que ces hommes

  5   devaient être utilisés en tant que bouclier humain, et vous avez entendu

  6   cela au moment où le groupe se trouvait encore dans le camp où vous étiez

  7   vous-même prisonnier, n'est-ce pas ? Vous étiez présent à ce moment-là ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui.

  9   M. Scott (interprétation). - Et pour suivre les instructions de

 10   la Chambre, je ne vais pas tenter de lire les noms de ces individus, mais

 11   peut-on dire que tous ces hommes étaient des hommes musulmans ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui, exclusivement des Musulmans.

 13   Il n'y avait pas de prisonniers d'autre origine.

 14   M. Scott (interprétation). - Il y a quelques autres questions

 15   que je souhaiterais vous poser sur les événements de Strane.

 16   Afin que le compte rendu soit clair, comment se fait-il que vous

 17   ayez obtenu des informations sur les événements qui se sont produits et

 18   sur le sort qui a été réservé aux prisonniers qui ont été emmenés à

 19   l'extérieur du camp ?

 20   Témoin J (interprétation). - Suite à leur arrivée.

 21   M. Scott (interprétation). - Ce sont les hommes qui étaient

 22   également prisonniers, tout comme vous dans le camp ?

 23   Témoin J (interprétation). - On était tous ensemble dans le même

 24   hangar. Lorsqu'ils sont revenus, ils nous ont rejoints, on ne se trouvait

 25   pas encore, on n'a pas encore été déplacés dans les cellules, on se


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  1   trouvait dans le hangar, toujours.

  2   M. Scott (interprétation). - Très bien. Et ces prisonniers,

  3   lorsqu'ils sont revenus, vous ont-ils dit qu'ils avaient été utilisés en

  4   tant que bouclier humain dans le village de Strane, village dans lequel le

  5   HVO avait dit aux Musulmans que si les Musulmans ne déposaient pas les

  6   armes, eh bien ces prisonniers seraient tués ?

  7   Témoin J (interprétation). - C'est exact. D'après ce que mon

  8   frère m'a dit, ils se trouvaient à une quinzaine de mètres des soldats du

  9   HVO, en direction du village et devant les soldats.

 10   M. Scott (interprétation). - Les soldats du HVO étaient derrière

 11   eux, n'est-ce pas ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui.

 13   M. Scott (interprétation). - Je ne vous demande pas de noms ou

 14   de détails relatifs à cet événement, mais est-il vrai que vous avez le

 15   souvenir d'un récit fait par votre frère à votre attention disant la chose

 16   suivante : l'un des soldats du HVO qu'il avait vu au cours de ces

 17   événements était en fait témoin au mariage de votre frère ?

 18   Témoin J (interprétation). - C'est exact. Il ne lui a même pas

 19   jeté un coup d'œil.

 20   M. Scott (interprétation). - Le lendemain, ces mêmes hommes ont-

 21   ils également été utilisés en tant que bouclier humain dans un village

 22   appelé Merdani* ?

 23   Témoin J (interprétation). - Oui, donc cela s'est reproduit. Il

 24   s'agissait des mêmes treize personnes ; ils ont été emmenés vers le

 25   village de Merdani*. D'après ce qu'ils ont raconté, c'était encore pire,


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  1   dix fois pire que ce qui leur est arrivé la veille, puisque qu'ils étaient

  2   alignés sur le pont Zeljes Nitkimost*. On leur a dit qu'on allait les

  3   égorger tous si Merdani* ne se rendait pas, si les habitants de Merdani*

  4   ne se rendaient pas. Ils ont donc été liés, ils ont servi de bouclier

  5   humain pendant toute cette journée.

  6   M. Scott (interprétation). - Très bien. A présent, pouvez-vous

  7   nous dire la chose suivante : au moment où ces prisonniers sont revenus au

  8   camp, après être sortis pour la seconde fois et avoir été utilisés en tant

  9   que bouclier humain, vous et les autres, avez-vous été transférés hors du

 10   hangar et placés dans ce que l'on appellerait sans doute des cellules de

 11   prison ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui, quand ils sont rentrés, on

 13   était tous très contents de les voir revenir sains et saufs ; on a été

 14   placés par la suite dans des cellules qui avaient été aménagées ; je ne

 15   sais pas quand elles ont été aménagées pour servir à cette fin.

 16   M. Scott (interprétation). - Ces cellules faisaient-elles

 17   environ trois mètres sur trois ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui, trois mètres sur trois. On

 19   était vingt-cinq, trente ; dans certaines cellules, on était même plus

 20   nombreux.

 21   M. Scott (interprétation). - Une fois que vous avez été

 22   transférés dans ces cellules, on vous faisait sortir, n'est-ce pas, et on

 23   vous frappait ? Cela est arrivé une fois, en tout cas ?

 24   Témoin J (interprétation). - Toutes les nuits, plusieurs fois

 25   par nuit, si une demi-heure se passait sans que l'on ne me sorte et qu'on


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  1   me batte, c'était bien ; mais cela se produisait chaque nuit.

  2   M. Scott (interprétation). - L'un des individus qui

  3   participaient à ces passages à tabac en tant qu'auteurs était-il appelé

  4   Marelja* ?

  5   Témoin J (interprétation). - Oui, Marelja*. J'ai entendu ce nom

  6   de la bouche des soldats, des gardes du HVO qui se trouvaient à plusieurs

  7   mètres et qui observaient la scène sans mot dire.

  8   M. Scott (interprétation). - A votre connaissance, cet homme,

  9   Marelja*, était-il un garde du HVO ?

 10   Témoin J (interprétation). - Non, non. Ce n'était pas un garde ;

 11   il n'était pas d'origine de Busovaca. C'était quelqu'un que je ne

 12   connaissais pas. Il était peut-être d'Herzégovine : d'après son accent, je

 13   peux le conclure.

 14   M. Scott (interprétation). - Les gardes du HVO se trouvaient à

 15   proximité : ont-ils jamais tenté d'intervenir afin de mettre un terme au

 16   passage à tabac ?

 17   Témoin J (interprétation). - Non, absolument pas. Ils n'ont même

 18   pas essayé de faire quoi que ce soit.

 19   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous dire à la Chambre à

 20   quoi ressemblait votre corps après plusieurs jours de passages à tabac,

 21   tels que je ceux que vous avez subis ?

 22   Témoin J (interprétation). - Ma mâchoire était cassée. Je

 23   n'avais pas de bleus sur mon visage, mais ma mâchoire était cassée ; tout

 24   mon corps était noir de coups. Ce n'était même pas des bleus : j'étais

 25   noir de coups que j'ai reçus.


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  1   M. Scott (interprétation). - Au cours de votre période de

  2   détention à Kaonik, avez-vous remarqué que les personnes qui ont été

  3   emmenées pour être interrogées, avez-vous appris donc que ces différents

  4   interrogatoires avaient lieu, en quelque sorte, sous la supervision

  5   d'Anto Sliskovic ?

  6   Témoin J (interprétation). - Oui, je faisais partie de ces gens-

  7   là.

  8   M. Scott (interprétation). - Comment le savez-vous ? Comment

  9   l'avez-vous appris ?

 10   Témoin J (interprétation). - On m'a emmené personnellement pour

 11   m'interroger dans le bâtiment qui se trouvait à l'entrée du camp. Et deux

 12   enquêteurs, deux inspecteurs de la police du HVO, m'ont interrogé ; leur

 13   supérieur était Anto Sliskovic. Anto aussi venait dans la nuit pour

 14   interroger quelques individus qu'on faisait sortir de leur cellule pour

 15   les emmener dans le bâtiment à l'entrée du camp. Et on les interrogeait

 16   là-bas.

 17   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous nous donner certains

 18   exemples de références, faites par les gardes du HVO à M. Sliskovic, en ce

 19   qui concerne les passages à tabac par exemple ?

 20   Témoin J (interprétation). - Toutes sortes de choses se sont

 21   produites. Un jeune homme, un garde, c'était plutôt un enfant, lorsqu'ils

 22   m'ont emmené, il a dit : "Ta fin s'approche, Anto Sliskovic t'attend,

 23   c'est lui qui va mettre fin à tes jours".

 24   M. Scott (interprétation). - Ces gades du HVO vous ont-ils

 25   jamais dit quelque chose de ce style : "Salutations de M. Anto Sliskovic,


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  1   avec les compliments de M. Anto Sliskovic" ?

  2   Témoin J (interprétation). - Ce n'est pas les gardes qui

  3   disaient cela, mais le jeune homme qui m'emmenait. Il me battait et, à la

  4   fin, il me disait : "Voilà, c'est de la part de Anto Sliskovic, ça  c'est

  5   de la part de Vlado Cosic", etc., etc.

  6   M. Scott (interprétation). - Bien. Je crois qu'il y a eu un

  7   incident au cours duquel vous avez été emmené dans un autre bâtiment, à

  8   l'écart des cellules de prison qui étaient proches de l'entrée du camp de

  9   prisonniers de Kaonik, je crois que vous l'avez mentionné rapidement ?

 10   Témoin J (interprétation). - Oui, à l'entrée même du camp se

 11   trouve donc ce bâtiment avec un étage. On m'y a emmené avec un autre

 12   homme, un jeune homme. C'est lui qu'on a emmené en haut. Au bout d'une

 13   quinzaine de minutes, il est revenu. Ils l'ont battu, c'était évident.

 14   Après, c'était mon tour. Ils m'ont emmené à l'étage.

 15   M. Scott (interprétation). - Avant que vous ne poursuiviez, je

 16   voudrais me concentrer quelques instants encore sur ce bâtiment. A ce

 17   moment-là, aviez-vous obtenu des informations sur l'utilisation qui était

 18   faite de ce bâtiment, sur l'occupation par une quelconque unité ou un

 19   quelconque groupe qui était stationné à l'intérieur de ce bâtiment ?

 20   Témoin J (interprétation). - Oui. A l'entrée même de ce bâtiment

 21   se trouve une cellule d'un mètre sur deux, peut-être un peu plus grande.

 22   Il y avait des barreaux de fer, il n'y avait pas de fenêtre. J'y ai été

 23   enfermé alors que le jeune homme a été emmené à l'étage. J'ai entendu les

 24   soldats du HVO passer à côté de cette cellule. C'était les membres du

 25   peloton d'intervention. Ils étaient une trentaine. Ils étaient installés


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  1   là. Ils m'ont battu, ils m'ont injurié, insulté, me traitant de "balja"*.

  2   M. Scott (interprétation). - Avez-vous pu identifier le

  3   commandant de cette unité sur les lieux à ce moment-là ?

  4   Témoin J (interprétation). - C'était Mirko Cosic.

  5   M. Scott (interprétation). - Et comment avez-vous obtenu cette

  6   information ?

  7   Témoin J (interprétation). - Je l'ai vu personnellement. C'était

  8   un policier au temps de l'ex-Yougoslavie, il avait beaucoup d'expérience

  9   et il occupait le poste du commandant.

 10   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous me dire, et je ne vais

 11   pas tenter de prononcer quoi que ce soit en bosniaque, mais à votre

 12   connaissance, la traduction en anglais ou en français du titre de cette

 13   unité correspond-elle à l'intervention de la punition ?

 14   Témoin J (interprétation). - Ils l'appelaient un peloton

 15   d'intervention. Dès qu'il fallait intervenir, agir rapidement, c'est à eux

 16   qu'on faisait appel.

 17   M. Scott (interprétation). - Avez-vous jamais su si Mirko Cosic

 18   avait un quelconque lien avec M. Dario Kordic ?

 19   Témoin J (interprétation). - Je ne sais pas s'il y avait un

 20   lien, je ne sais pas à quoi vous faites allusion, mais Dario Kordic se

 21   trouvait au-dessus de tout, c'était le commandant de tout, c'est lui qui

 22   donnait les ordres et les instructions.

 23   M. Scott (interprétation). - Je ne sais pas, le lien peut-être

 24   n'a pas été bien utilisé en tant que terme. Je ne parle pas de lien

 25   familial ou de lien d'amitié, mais je voudrais savoir si, par exemple,


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  1   M. Cosic a été jamais vu en la compagnie de M. Kordic.

  2   M. le Président (interprétation). - S'il vous plaît ! S'il vous

  3   plaît, évitons les questions de ce genre.

  4   M. Scott (interprétation). - Très bien. Pouvez-vous dire à la

  5   Chambre si vous avez jamais vu les deux individus dont vous venez de

  6   donner le nom ensemble ?

  7   Témoin J (interprétation). - Je ne pourrais pas dire que je les

  8   ai vraiment vus ensemble, mais que Mirko Cosic et les autres allaient

  9   souvent dans la direction de Tisovtsi* où se trouvait le quartier général

 10   de Kordic, ça je peux le dire, oui.

 11   M. Scott (interprétation). - Bien. Nous passerons à autre chose.

 12   Dans les paragraphes suivants, nous parlons d'autre chose. Les autres

 13   personnes qui ont été emmenées, frappées, qu'on a fait revenir, et à ce

 14   moment-là on vous a emmené aussi au premier étage, n'est-ce pas ?

 15   Témoin J (interprétation). - Oui.

 16   M. Scott (interprétation). - Il y avait cinq soldats du HVO dans

 17   la pièce à ce moment-là ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui. Il y avait cinq soldats dont

 19   trois me tournaient le dos au moment où j'ai pénétré dans la pièce et deux

 20   me faisaient face, je les connaissais, il s'agissait de Petrovic et de

 21   Katava.

 22   M. Scott (interprétation). - Donc pour vous, les choses sont

 23   claires : lorsque vous dites Petrovic, vous voulez parler de

 24   Zarko Petrovic, surnommé de temps en temps Tadija* ?

 25   Témoin J (interprétation). - Oui.


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  1   M. Scott (interprétation). – Et celui que vous avez appelé

  2   Katava*, quel est son prénom ? Est-ce bien Gerko* ?

  3   Témoin J (interprétation). – Gerko, oui. Gelko* oui.

  4   M. Scott (interprétation). – Vous avez bien dit que vous

  5   connaissiez ces hommes, que vous les connaissiez avant ces événements ?

  6   Témoin J (interprétation). – Oui, je les connaissais, je les

  7   voyais souvent. D'ailleurs, j'ai même eu plaisir à les revoir ne sachant

  8   pas ce qui allait m'arriver ensuite.

  9   M. Scott (interprétation). – Ces deux hommes étaient des Croates

 10   et portaient tous les deux, à ce moment-là, un uniforme de camouflage et

 11   les insignes du HVO. Est-ce exact ?

 12   Témoin J (interprétation). – C'est tout à fait cela.

 13   M. Scott (interprétation). – Est-il exact, Monsieur, sur la base

 14   de ce que vous avez déjà dit dans votre déposition, que vous avez

 15   identifié ces deux hommes comme travaillant tous les deux pour Anto

 16   Sliskovic ?

 17   Témoin J (interprétation). – Oui, ils étaient tous les deux sa

 18   main droite, si je puis m'exprimer ainsi, ses collaborateurs les plus

 19   proches.

 20   M. Scott (interprétation). – Dans cette pièce se trouvait une

 21   table que l'on pourrait comparer à une table de ping-pong ou de tennis de

 22   table. Il y avait pas mal d'instruments sur cette table, des instruments

 23   en caoutchouc, en métal, du genre instruments utilisés par la police ?

 24   Témoin J (interprétation). – Oui, c'est tout à fait cela. Il y

 25   en avait six ou sept.


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  1   M. Scott (interprétation). – A ce moment-là, avez-vous subi un

  2   interrogatoire assorti d'un passage à tabac pendant les quelques heures

  3   qui ont suivi, peut-être trois heures ?

  4   Témoin J (interprétation). – Oui. Petrovic et Katava* posaient

  5   les questions, et les trois autres frappaient. Ils frappaient en se

  6   servant de tout ce qui leur tombait sous la main.

  7   M. Scott (interprétation). – Est-ce à ce moment-là que vous avez

  8   eu la mâchoire cassée ?

  9   Témoin J (interprétation). – Oui, à un certain moment, c'est ce

 10   mariljia,* dont j'ai déjà parlé qui est entré dans la pièce et il m'a

 11   envoyé un coup de poing dans le visage, il m'a donc cassé la mâchoire.

 12   Après quoi, Katava…* non, non, non ! Après quoi, c'est Tadija

 13   Petrovic* qui a crié : ne le frappe pas sur la tête ! A partir de ce

 14   moment-là, ils ont cessé de me frapper à la tête. Pour compenser, ils

 15   m'ont démoli dans les autres parties du corps.

 16   M. Scott (interprétation). – J'aimerais demander à M. l'Huissier

 17   de remettre au témoin la pièce à conviction 1862/1. Je demanderai que

 18   cette pièce soit également mise sur le rétroprojecteur.

 19   (L'huissier s'exécute).

 20   M. Scott (interprétation). – Oui, nous commencerons par la

 21   pièce 1862/1.

 22   M. le Président (interprétation). – Maître Scott, vous pouvez

 23   vraiment passer rapidement sur ces éléments. Nous avons déjà vu ces

 24   photographies, ou des photographies très semblables.

 25   M. Scott (interprétation). – J'irai aussi vite que possible,


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  1   Monsieur le Président.

  2   Monsieur le Témoin, pour gagner du temps et sur instruction des

  3   Juges de cette Chambre, je vous poserai des questions très rapides et très

  4   directes au sujet de cette photo. Vous voyez là une photographie aérienne

  5   du camp de Kaonik. J'espère qu'il n'y a pas contestation sur ce point ?

  6   (Signe affirmatif du témoin).

  7   Il y a un chiffre 1 qui est inscrit sur cette photo, à

  8   l'intérieur d'un cercle, et vous avez également le chiffre 2, le

  9   chiffre 3. Ces trois inscriptions ont bien été faites par vous, n'est-ce

 10   pas ?

 11   Témoin J (interprétation). – Oui, le n° 1 correspond au hangar

 12   où nous avons été enfermés au début, le n° 2 correspond aux cellules, à la

 13   prison, et le n° 3 correspond à l'endroit où l'on m'a emmené, cet endroit

 14   où je me suis trouvé au premier étage et où l'on m'a frappé, où se

 15   déroulaient les interrogatoires dans le camp.

 16   M. Scott (interprétation). – Bien, je demanderai maintenant la

 17   pièce 1861/1, j'aimerais qu'elle soit remise au témoin.

 18   (L'huissier s'exécute).

 19   Témoin J (interprétation). – Oui, c'est bien ce bâtiment à

 20   l'entrée.

 21   M. Scott (interprétation). – Cette photo étant toujours sur le

 22   rétroprojecteur, je vous demanderai d'utiliser le pointeur, avec l'aide de

 23   l'huissier, pour montrer de l'extérieur, bien entendu, sur la façade, la

 24   fenêtre de la pièce où l'on vous a emmené et passé à tabac.

 25   Témoin J (interprétation). - C'est cela, ici.


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  1   M. Scott (interprétation). – Dans l'intérêt du compte rendu

  2   d'audience, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je dirai que le

  3   témoin a identifié la troisième fenêtre à partir de la gauche du bâtiment,

  4   au premier étage.

  5   Je n'aurai pas d'autres questions au sujet de cette photo, à

  6   moins que les Juges n'en aient eux-mêmes.

  7   M. le Président (interprétation). – Témoin J, j'aimerais vous

  8   poser quelques questions au sujet d'autres personnes dans quelques

  9   instants. Mais avant d'en arriver là, je demanderai quelle est la

 10   pertinence de ces noms, Maître Scott.

 11   M. Scott (interprétation). – La pertinence, Monsieur le

 12   Président, du point de vue de l'accusation, est que ces noms peuvent

 13   constituer des éléments de preuve dans ce procès. En effet, les personnes

 14   dont les noms figurent dans les quelques paragraphes qui suivent

 15   permettent de prouver, d'après l'accusation, l'existence d'une association

 16   étroite avec un certain nombre de personnes qui agissaient sur instruction

 17   et sur ordre de M. Kordic.

 18   Le Témoin J ainsi que d'autres témoins qui ont déjà déposé dans

 19   ce procès ont parlé et identifié un certain nombre de personnes entourant

 20   M. Kordic. Je crois que ce n'est un secret pour personne à ce stade de ce

 21   procès que, le plus souvent, le coeur de l'accusation, le coeur de

 22   l'action du Procureur ne consiste pas à affirmer que c'est M. Kordic qui a

 23   tiré sur des hommes ou mis le feu à tel ou tel endroit de lui-même.

 24   Ce que le Procureur affirme, c'est que des hommes ont travaillé

 25   pour lui sur instructions émanant de lui. Voilà quelle est la base


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  1   matérielle de l'argumentation du Procureur dans ce procès.

  2   M. le Président (interprétation). – J'aimerais que nous

  3   accélérions un petit peu. Ce témoin est déjà dans le prétoire depuis pas

  4   mal de temps et j'aimerais beaucoup qu'il puisse s'en retourner ce soir.

  5   M. Scott (interprétation). – Très bien, Monsieur le Président.

  6   J'irai aussi vite que possible.

  7   Témoin J, pendant le temps que vous avez passé à Busovaca, avez-

  8   vous connu un homme répondant au nom de Vlado Sotic* et qui était en fait

  9   le frère de Mirko ?

 10   Témoin J (interprétation). - Oui.

 11   M. Scott (interprétation). – A votre connaissance, ce M. Sotic*

 12   était-il le chef de la police du HVO à Busovaca, en 1993 ?

 13   Témoin J (interprétation). – C'est absolument cela, du HVO.

 14   M. Scott (interprétation). – Sur la base des observations que

 15   vous avez faites, eu égard à cet homme, pouvez-vous dire aux Juges si vous

 16   avez jamais vu une lettre en métal, un U en métal sur son uniforme ?

 17   Témoin J (interprétation). - Oui, il portait l'uniforme noir, il

 18   portait des armes : il avait le fusil à droite et, de l'autre côté, il

 19   avait le couteau ; il portait également un béret ; et, sur ce béret, la

 20   lettre U.

 21   M. Scott (interprétation). - Pendant le temps que vous avez

 22   passé en Bosnie centrale, à votre connaissance, quelle est

 23   l'interprétation qu'on peut donner de ce symbole, de cette lettre U ?

 24   Témoin J (interprétation). - C'est le symbole des Oustachis, du

 25   fascisme.


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  1   M. Scott (interprétation). - Pendant le temps que vous avez

  2   passé dans cette région, avez-vous également connu un homme répondant au

  3   nom de Gavro Maric ? Pouvez-vous dire aux Juges ce que vous savez de

  4   M. Maric ?

  5   Monsieur le Président, sur instruction du Tribunal, je vais

  6   tenter de poser des questions supplémentaires.

  7   Savez-vous si cet homme a été chef de la défense civile, pendant

  8   un certain temps, sous l'ex-JNA ? Après quoi, en 1993, il est entré dans

  9   ce que vous croyez être une unité de police spéciale, soumise aux ordres

 10   du HVO, dans la région de Busovaca ?

 11   Témoin J (interprétation). - Oui, Gavro Maric, du temps de l'ex-

 12   Yougoslavie, travaillait dans les rangs de la Défense territoriale et de

 13   la défense populaire. Mais, quand le conflit a commencé, quand les choses

 14   ont commencé à mal tourner, il est devenu l'un des commandants de l'unité

 15   de Kordic. Maintenant, ce qu'il commandait exactement, je ne sais pas,

 16   mais il avait un rang un peu supérieur.

 17   M. Scott (interprétation). - Eh bien, passons à Nikica Petrovic,

 18   si vous le voulez bien : était-il également un responsable de la police du

 19   HVO à Busovaca, d'après ce que vous en savez ?

 20   Témoin J (interprétation). - Oui, il l'était.

 21   M. Scott (interprétation). - Savez-vous s'il avait un rôle

 22   particulier à jouer du point de vue des autorisations de déplacement dans

 23   la ville de Busovaca et hors de la ville de Busovaca, pour les habitants ?

 24   M. Scott (interprétation). - Ce n'est pas exactement ce que je

 25   dirais. Il était coordinateur des expulsions de Busovaca. Les gens qui


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  1   sont restés à Busovaca après le conflit, qui ont continué à habiter à

  2   Busovaca après le conflit n'ont pu obtenir une autorisation pour entrer ou

  3   sortir que de lui. Il était le seul qui pouvait fournir ces

  4   autorisations ; c'est ce qu'il faisait.

  5   M. Scott (interprétation). - Avez-vous une connaissance de

  6   première main de cet aspect particulier des choses parce que votre père a

  7   fait une tentative pour sortir de Busovaca ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui, il a essayé à plusieurs

  9   reprises et il n'a jamais obtenu l'autorisation de quitter la ville.

 10   Finalement, Anto lui a donné cette autorisation et il a pu sortir. Donc,

 11   en tout cas d'après ce qu'il dit, il a quitté la ville au dernier moment.

 12   Sinon, il se serait fait tuer.

 13   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges, en vous

 14   fondant sur vos observations personnelles, sur ce que vous avez

 15   personnellement -je ne vous demande pas d'émettre la moindre spéculation-,

 16   en vous fondant sur votre savoir, pouvez-vous dire aux Juges quel était le

 17   genre de rapports qu'entretenait M. Petrovic avec Mario Kordic, du point

 18   de vue du commandement, de la hiérarchie du commandement ?

 19   Témoin J (interprétation). - Dans toutes les armées et au HVO

 20   également, les choses sont très claires et là, c'était le cas : Kordic

 21   était le n° un. Rien ne se faisait sans qu'il en soit informé. Il était

 22   impossible que quoi que ce soit se fasse si lui n'était pas au courant. Il

 23   s'agissait pour les autres de fonctionnaires qui agissaient sur

 24   instructions émanant de lui, qui appliquaient ses idées.

 25   M. Scott (interprétation). - Eh bien, encore un nom, si vous


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  1   voulez bien : Florijan Glavocevic. Était-il exact que cet homme était le

  2   président -et j'utilise vos termes, Monsieur le Témoin- du conseil de

  3   guerre de Busovaca. Était-il donc président de ce que vous avez appelé le

  4   conseil de guerre de Busovaca ?

  5   Témoin J (interprétation). - Oui, cet organisme a été créé et

  6   c'est lui qui s'est trouvé à sa direction. Mais il n'avait absolument

  7   aucune compétence, car il ne pouvait prendre aucune, absolument aucune,

  8   aucune décision sans l'intervention de Dario Kordic.

  9   M. Scott (interprétation). - Puisque nous parlons de ces hommes,

 10   est-il permis de dire, Témoin J, que vous n'aviez aucune connaissance

 11   particulière vous associant à Mario Cerkez, que vous n'aviez aucun rapport

 12   avec Mario vous-même ?

 13   Témoin J (interprétation). - Non, cet homme-là, je ne le connais

 14   pas.

 15   M. Robinson (interprétation). - Le témoin vient de dire que

 16   M. Glavocevic ne pouvait rien faire sans que M. Kordic en soit informé.

 17   Est-ce que le témoin dit cela sur la base de ses connaissances

 18   personnelles ou sur la base de ce qu'il a entendu d'une tierce personne ?

 19   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous répondre au Juge,

 20   Monsieur le Témoin : vous avez entendu la question ?

 21   Témoin J (interprétation). - J'ai une expérience personnelle,

 22   sur laquelle je me fonde, mais je me fonde aussi sur la connaissance des

 23   événements très nombreux qui se sont produits à Busovaca. Il était logique

 24   qu'un homme de ce genre soit numéro un, étant donné sa position. Pourtant,

 25   il ne pouvait rien empêcher, il ne pouvait non plus rien ordonner, rien,


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  1   absolument rien.

  2   M. Scott (interprétation). - Donc tout est clair au compte

  3   rendu : vous faites bien référence en ce moment à Florijan, n'est-ce pas ?

  4   Témoin J (interprétation). - Oui.

  5   M. Scott (interprétation). - Vous êtes donc en train de dire

  6   qu'en vous fondant sur ce que vous avez vu, physiquement, de l'action de

  7   cet homme -et je reviens sur la question du Juge Robinson-, cet homme

  8   était donc censé occuper une positions élevé et pourtant, lorsque vous

  9   l'avez vu agir en ville,…

 10   M. le Président (interprétation). - Maître Scott, le témoin est

 11   en train de faire sa déposition sur ces questions ; permettez-lui, je vous

 12   en prie, de s'exprimer plutôt que de lui souffler les mots qu'il doit

 13   utiliser.

 14   M. Scott (interprétation). - Excusez-moi, Monsieur le Président.

 15   Je ne voulais qu'aider le témoin. Monsieur le Témoin, pouvez-vous

 16   approfondir un peu la réponse que vous avez apportée à la question du Juge

 17   Robinson ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui, j'ai même eu l'occasion un

 19   jour de me rendre dans le bureau de Florijan, à la municipalité ; j'étais

 20   accompagné d'un autre Musulman. Il nous a reçus dans son bureau et nous

 21   avons essayé de parler avec lui d'un certain nombre de choses. Mais il

 22   nous a répondu de la façon la plus claire, à ce moment, qu'il ne pouvait

 23   rien faire tant qu'il n'avait pas consulté M. Dario.

 24   M. Scott (interprétation). - Eh bien, poursuivons.

 25   M. Stein (interprétation). – Puis-je intervenir ?


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  1   M. le Président (interprétation). - Je vous en prie.

  2   M. Stein (interprétation). – Cela a été prévu dans les journaux

  3   qui ont déjà dit, avant le début de ce procès, qu'il y aurait des

  4   allégations de conspiration criminelle et c'est exactement ce que nous

  5   venons d'entendre, il y a quelques instants : conspiration criminelle liée

  6   à des dépositions. Cela nous pose un problème : il s'agit de personnes qui

  7   ne font pas l'objet d'un acte d'accusation, qui ne sont pas considérées

  8   officiellement par ce Tribunal comme des complices de conspiration. Ce qui

  9   me préoccupe un peu, c'est que les réponses sont soufflées au témoin ; il

 10   est largement aidé par le Procureur. En-dehors de toute accusation

 11   officielle, certaines choses sont dites qui pourraient porter préjudice à

 12   notre client.

 13   M. le Président (interprétation). - Maître Stein, je pense que

 14   vous avez remarqué que je veille de la manière la plus sourcilleuse qui

 15   soit à ce qu'il n'y ait pas incitation de réponse apportée au témoin.

 16   M. Stein (interprétation). – Oui, oui.

 17   M. Scott (interprétation). - Sur instruction des Juges, je vais

 18   essayer de procéder le plus rapidement possible en évitant, si possible,

 19   toute objection de la part de la défense.

 20   Témoin J, êtes-vous en train de dire, dans le cadre de votre

 21   déposition, que, pendant que vous étiez à Kaonik, vous avez été emmené

 22   pour creuser des tranchées, trois heures environ la première fois.

 23   Excusez-moi, je m'embrouille un peu : j'essaie d'aller trop

 24   vite.

 25   On vous a emmené à Putis, n'est-ce pas, et vous y avez creusé


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  1   des tranchées. Est-ce exact ?

  2   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est absolument cela.

  3   M. Scott (interprétation). - Et c'est Marko Krilic qui était le

  4   garde qui vous a accompagnés ce jour-là ? Est-ce exact ?

  5   Témoin J (interprétation). - (Signe de dénégation.)

  6   Non, Marko Krilic était l'un des gardes de la prison, si c'est à

  7   cela que vous faites référence. Mais au lieu où nous avons creusé les

  8   tranchées, il ne s'y trouvait pas. Quand on nous a emmenés à Putis, il y

  9   avait des gardiens qui portaient l'uniforme du HVO mais qui venaient de

 10   Vitez avec nous.

 11   M. Scott (interprétation). - Vous avez absolument raison, bien

 12   entendu. Mais, avant de vous emmener sur le terrain et je parle là des

 13   moments où l'on appelait votre nom pour vous faire sortir de la cellule,

 14   êtes-vous en train de dire aux Juges que ces affectations visant à ce que

 15   vous creusiez des tranchées étaient organisées d'une façon quelconque et

 16   que c'est M. Krilic qui se chargeait d'appeler les noms des hommes qui

 17   devaient ensuite aller creuser les tranchées ?

 18   Témoin J (interprétation). - Il est exact que tout cela était

 19   organisé parce que les listes existaient : elles étaient dressées comme

 20   dans les périodes les plus organisées. Donc les noms d'un certain nombre

 21   d'hommes figuraient sur la liste ; simplement, chacun ne savait pas au

 22   départ où il allait être emmené. Ils arrivaient avec la liste des noms et

 23   ils appelaient un certain nombre de noms. Il arrivait aussi parfois que

 24   notre nom ne figure pas sur la liste et qu'on nous appelle tout de même

 25   pour nous emmener avec le groupe des hommes dont les noms figuraient sur


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  1   la liste.

  2   M. Scott (interprétation). - Très bien. Mais on vous a donc

  3   emmenés ce jour-là à Putis et vous y avez creusé des tranchées pendant

  4   toute la journée à peu près, jusqu'à la fin de l'après-midi et puis encore

  5   jusqu'à midi le lendemain, n'est-ce pas ?

  6   Témoin J (interprétation). - C'est tout à fait cela.

  7   M. Scott (interprétation). - Dans le cadre de votre déposition,

  8   êtes-vous en train de dire, comme vous l'avez déjà indiqué, qu'au moment

  9   où l'on vous a libérés -en fait, libérés n'est pas le terme le plus

 10   approprié-, lorsqu'on vous a placés sous la garde d'autres personnes, ces

 11   hommes étaient des hommes différents des gardes précédents, mais c'étaient

 12   des soldats du HVO, n'est-ce pas ?

 13   Témoin J (interprétation). - Oui.

 14   M. Scott (interprétation). - C'étaient des hommes que certains

 15   auraient pu décrire comme des soldats au combat, des soldats combattants ?

 16   Témoin J (interprétation). - Ils possédaient tous l'équipement

 17   militaire complet, ils avaient à chaque instant des armes dont ils se

 18   servaient pour nous viser.

 19   M. Scott (interprétation). - Avant l'incident qui s'est produit

 20   à Putis, les soldats qui vous gardaient en ce lieu provenaient de Vitez et

 21   vous avez eu le sentiment de ne pas être terriblement maltraités à ce

 22   moment-là.

 23   Vous n'avez pas été maltraités, en-dehors du mauvais traitement

 24   que constitue le simple fait d'être emmené creuser des tranchées, je

 25   suppose. Enfin, effaçons cela du compte rendu.


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  1   En tout cas, à part le fait de devoir creuser des tranchées,

  2   avez-vous été frappé ou violenté, ce jour-là ?

  3   Témoin J (interprétation). - Non, aucun des hommes de notre

  4   groupe n'a été maltraité, frappé ou quoi que ce soit d'autre, ce jour-là

  5   et cette nuit. Parce que les soldats venaient de Vitez et se sont

  6   comportés d'une façon tout à fait correcte à notre égard.

  7   M. Scott (interprétation). - Ce même jour, avez-vous également

  8   vu un groupe de quinze soldats du HVO mettre le feu à dix ou quinze

  9   maisons se trouvant le long de la route qui vous menait à Putis ?

 10   Témoin J (interprétation). - Oui. Une quinzaine de soldats

 11   portant l'équipement militaire complet sont passés sur la route où nous

 12   nous trouvions ; ils se sont dirigés vers Putis et ont mis le feu à dix ou

 13   quinze maisons. Après quoi, ils ont rebroussé chemin et sont repassés à

 14   côté de nous.

 15   M. Scott (interprétation). - Les Juges de cette Chambre

 16   remarqueront que nous avons déjà abordé les sujets évoqués dans les

 17   paragraphes suivants.

 18   Je passe donc au paragraphe 159. On vous a emmenés creuser des

 19   tranchées également en un lieu appelé Kula. Ce jour-là, les conditions que

 20   vous avez dû subir ont été bien pires, n'est-ce pas ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, le 6 février 1993, on m'a

 22   emmené à Kula. Et dès mon arrivée, j'ai constaté que mon nom figurait sur

 23   une feuille de papier spécial : on a appelé mon nom et l'enfer a commencé

 24   pour moi.

 25   M. Scott (interprétation). - Savez-vous, s'agissant des hommes


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  1   du HVO qui se trouvaient à Kula, des hommes sous la garde desquels vous

  2   vous trouviez ce jour-là, saviez-vous peut-être d'où ils venaient ?

  3   Témoin J (interprétation). - Il y en avait quelques-uns de

  4   Busovaca, mais ceux qui ont commis ces sévices, qui nous ont maltraités

  5   n'étaient pas des habitants de Busovaca. Je ne les connaissais pas ; il y

  6   en avait même un qui était un Serbe. Je crois qu'il s'appelait

  7   Nedeljkovic, ou quelque chose de ce genre. Il y en avait d'autres avec moi

  8   qui le connaissaient. C'est lui qui s'est comporté de la pire façon dans

  9   les différentes violences et les différents sévices que nous avons subis.

 10   M. Scott (interprétation). - Quand on vous a emmenés à Kula, ce

 11   jour-là, connaissiez-vous personnellement certains des autres, grâce à

 12   certains des autres prisonniers qui avaient déjà été emmenés creuser des

 13   tranchées en divers endroits et, notamment, à Kula ? Aviez-vous appris de

 14   leur bouche que Kula était l'un des endroits les pires ?

 15   Témoin J (interprétation). - Oui, oui, chaque fois qu'un groupe

 16   revenait de Kula, les hommes étaient tabassés, ils avaient les côtes

 17   cassées ; ils avaient été violentés de diverses façons et avaient en fait

 18   subi des défoulements généralisés. On ne peut pas imaginer tout ce qu'on

 19   leur avait fait.

 20   M. Scott (interprétation). - Lorsqu'on vous a emmenés à Kula, on

 21   vous a fait descendre du camion et on vous a donné l'ordre de creuser à

 22   cinq centimètres à peu près d'un gros hêtre, n'est-ce pas ?

 23   Témoin J (interprétation). - Oui, j'ai compris. On m'a donc

 24   donné l'ordre de creuser une tranchée à 20 ou 30 centimètres d'un arbre

 25   qui avait un diamètre de 50 à 60 centimètres de diamètre. C'est ce qu'on


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  1   appelle un tronc chez nous et il m'était absolument impossible de creuser

  2   une tranchée à une proximité telle d'un arbre aussi important. Je ne

  3   pouvais pas, je n'avais pas la force de déplacer cet arbre, donc je voyais

  4   bien que je ne pouvais pas creuser cette tranchée et eux ne m'ont pas dit

  5   d'arrêter : ils m'ont regardé avec le plus grand plaisir, en se défoulant,

  6   ils m'ont regardé faire des efforts sans succès. C'est seulement au bout

  7   d'un certain temps qu'ils ont accepté que j'aille creuser ailleurs.

  8   Témoin J (interprétation). - Pour que le compte rendu soit tout

  9   à fait exact, je lis -au compte rendu en anglais- 50 à 60 mètres de

 10   diamètre pour cet arbre. Est-il exact, Monsieur le Témoin, que le diamètre

 11   était de 50 à 60 centimètres ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui, de 50 à 60 centimètres.

 13   M. Scott (interprétation). - Eh bien, avançons, si vous le

 14   voulez bien.

 15   Après cela, on vous a emmené, après vous avoir séparé du groupe,

 16   en un endroit différent. On vous a dit de vous dévêtir : vous l'avez fait,

 17   vous avez simplement gardé sur vous vos sous-vêtements. Et l'homme dont

 18   vous avez dit qu'il était un Serbe vous a ordonné de chanter un chant qui,

 19   comme vous l'avez dit, était insultant à l'égard des Croates. Est-ce

 20   exact ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, il m'a emmené derrière le

 22   tronc d'un chêne de grande taille, il m'a ordonné de me dévêtir ; c'est ce

 23   que j'ai fait, je suis resté en sous-vêtements et, à ce moment-là, il m'a

 24   ordonné de chanter. Comme je ne chantais sans doute pas à voix

 25   suffisamment haute pour son goût, il a recommencé à me frapper avec la


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  1   manche d'une pioche et m'a ordonné de chanter plus fort ; après quoi, j'ai

  2   donc chanté plus fort cette chanson insultante.

  3   M. Scott (interprétation). - Et quand vous avez chanté cette

  4   chanson insultante pour les Croates, à voix plus haute, certains soldats

  5   croates se sont-ils approchés de vous et vous ont-ils frappé ?

  6   Témoin J (interprétation). - Oui, deux soldats croates, deux

  7   soldats sont arrivés et m'ont frappé sans merci pour que je chante encore

  8   mieux cette chanson insultante.

  9   M. Scott (interprétation). - A ce moment-là, vous avez continué

 10   à creuser des tranchées. Est-il exact, Témoin J, qu'à la mi-journée, trois

 11   soldats du HVO se sont approchés de vous et ont fait semblant de vous

 12   brûler la barbe que vous portiez à ce moment-là ?

 13   Témoin J (interprétation). - Oui.

 14   M. Scott (interprétation). - Oui, c'est exactement comme cela

 15   que cela s'est produit. Ils ont allumé des journaux, un journal, et ils

 16   l'ont approché de ma barbe ; tout le monde a ri. C'est comme s'ils

 17   plaisantaient, comme s'ils jouaient avec moi. Ils m'ont enlevé mon béret ;

 18   il faisait froid et je portais toujours quelque chose sur ma tête. Ils

 19   l'ont brûlé. Le matériel duquel était fait mon béret ne pouvait pas

 20   brûler.

 21   M. Scott (interprétation). - Passons quelques paragraphes pour

 22   arriver à la question suivante.

 23   Vous avez été à Kula, vous avez creusé des tranchées, entre

 24   autres ; c'est ce que vous nous avez dit au cours de ces dernières

 25   minutes. Avez-vous eu la possibilité de vous plaindre auprès de certains


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  1   soldats et de leur dire que vous ne devriez pas recevoir le traitement qui

  2   vous était réservé ?

  3   Témoin J (interprétation). - Oui. Dans l'après-midi, à un moment

  4   donné, Condra -je crois que son prénom est Josip, on travaillait ensemble

  5   dans la même entreprise- et M. Gadarski sont passés. Comme on se

  6   connaissait bien, je me suis plaint ; je lui ai dit ce qui m'arrivait. Ils

  7   m'ont écouté de manière amicale, bienveillante. Ils m'ont dit qu'ils

  8   allaient entrer en contact avec M. Kordic afin d'améliorer les conditions

  9   pour nous tous, pour  tous les prisonniers, d'améliorer les conditions

 10   dans lesquelles nous creusions des tranchées, etc., mais qu'eux,

 11   personnellement, ne pouvaient rien faire pour nous.

 12   M. Scott (interprétation). - Par la suite, au cours de cette

 13   même journée, un garde du HVO, du nom de Hosovac, vous a-t-il emmené, est-

 14   il venu jusqu'à vous, vous a-t-il emmené en haut de la colline, avec votre

 15   pelle et votre pioche, et vous a-t-il dit de creuser un trou à une

 16   soixantaine de mètres de l'orée du bois ?

 17   Témoin J (interprétation). - Oui. Oui. Pendant toute la journée,

 18   on m'a maltraité et on me menaçait de faire venir une personne du nom de

 19   Hosovac, que cette personne viendrait et qu'à la tombée de la nuit, tout

 20   serait fini. Il est effectivement arrivée à la tombée de la nuit. Il m'a

 21   emmené à une cinquantaine, une soixantaine de mètres, il m'a dit que

 22   j'allais réparer quelque chose, j'avais une pelle, je lui ai demandé ce

 23   qu'il fallait que je creuse ; il n'y avait pas de tranchées à cet endroit-

 24   là. Il m'a dit : "Espèce d'imbécile, tu sais très bien qu'il faut que tu

 25   creuses" et voilà, je pensais que c'était la fin.


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  1   M. Scott (interprétation). - Vous pensiez que vous étiez en

  2   train de creuser votre propre tombe ?

  3   Témoin J (interprétation). - Oui, exactement. C'est à ça que je

  4   pensais.

  5   M. Scott (interprétation). - Peut-on soumettre au témoin la

  6   pièce 2116, s'il vous plaît ? Peut-on la placer sur le rétroprojecteur

  7   également ?

  8   (L'huissier s'exécute.)

  9   Témoin J (interprétation). - C'est l'écusson qu'il portait sur

 10   la manche de ces vêtements.

 11   M. Scott (interprétation). - Et ce Hosovac portait un uniforme

 12   noir, un béret noir avec un écusson que l'on voit sur la pièce 2116,

 13   n'est-ce pas ?

 14   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est exact.

 15   M. Scott (interprétation). - C'est tout, j'en ai terminé. Merci.

 16   Afin de faire une synthèse de ces événements, suite à la

 17   tournure qu'ont pris les événements, vous avez pu parvenir à un certain

 18   accord avec cet individu, à savoir que vous alliez lui remettre deux

 19   anneaux en argent et un peu d'argent que vous aviez réussi à conserver au

 20   camp de Kaonik et qu'en échange, cet homme devrait assurer votre

 21   protection et la protection des autres au cours de la période que vous

 22   deviez passer à Kula. C'est bien l'accord, n'est-ce pas, que vous aviez

 23   conclu avec lui ?

 24   Témoin J (interprétation). - Oui.

 25   M. Scott (interprétation). - Et, en fait, il vous a protégés,


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  1   vous et les autres, pendant tout le reste de la soirée. Et, le lendemain,

  2   lorsqu'on vous a ramenés à Kaonik, vous lui avez effectivement donné ces

  3   deux anneaux et un peu d'argent, n'est-ce pas ?

  4   Témoin J (interprétation). - Oui. Je lui ai donné les deux

  5   anneaux et un peu d'argent.

  6   M. Scott (interprétation). - L'huissier peut-il soumettre au

  7   témoin la pièce 1870.1, s'il vous plaît ?

  8   (L'huissier s'exécute.)

  9   Peut-on la placer sur le rétroprojecteur ? Elle y est déjà,

 10   merci. On ne voit pas très bien le surligneur utilisé.

 11   Mais, Témoin J, tout en haut de cette pièce, vous voyez qu'il y

 12   a des traits d'un surligneur jaune ; je parle de la partie supérieure de

 13   cette carte : voyez-vous ce trait qui a été ajouté au-dessus, qui indique

 14   Putis ou Strane ? C'est bien là que vous creusiez les tranchées pour la

 15   première fois ? Vous nous en avez parlé cet après-midi.

 16   Témoin J (interprétation). - Oui, de Strane à Putis, en passant

 17   par Gavrine Kuce, et de l'autre côté de la route.

 18   M. Scott (interprétation). - Par rapport à la ville de Busovaca,

 19   si vous regardez juste en dessous, n'est-ce pas, on voit apparaître la

 20   ville de Busovaca ?

 21   Témoin J (interprétation). - Il est difficile de voir la ville

 22   de Busovaca depuis Putis, depuis la zone de Putis où nous nous trouvions.

 23   M. Scott (interprétation). - Excusez-moi, je ne dis pas que l'on

 24   pouvait voir la ville de Strane, physiquement, sur le terrain, mais je

 25   parlais de la pièce à conviction. Je crois que Putis se trouve à peu près


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  1   à 6 heures par rapport à la ville de Busovaca, donc absolument au sud ?

  2   Témoin J (interprétation). - Oui.

  3   M. Scott (interprétation). - Et, à la droite de cette position-

  4   là, on voit des traits qui ont été ajoutés au surligneur également. Je

  5   crois que c'est la région de Kula, où il y a également un creusement de

  6   tranchées, n'est-ce pas ?

  7   Témoin J (interprétation). - Oui, oui, c'est Kula.

  8   M. Scott (interprétation). - Très bien, j'en ai fini avec cette

  9   pièce. Merci. Pourriez-vous parler aux Juges d'une situation très précise

 10   au cours de laquelle on vous a ramené à Kaonik ? Etait-ce à partir de Kula

 11   ou de Putis, quand on vous a ramené à Kaonik et que... C'était Kula, c'est

 12   cela ?

 13   Témoin J (interprétation). - Oui.

 14   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous nous dire, en vos

 15   propres mots, ce qui s'est passé ?

 16   Témoin J (interprétation). - Non, en fait, c'était Putis : c'est

 17   de Putis qu'il s'agissait. On était alignés, on formait une colonne, les

 18   gardes nous encerclaient. Ils nous escortaient pour nous ramener à Kaonik,

 19   dans le camp. Sur le pont de Kaonik, un véhicule se dirigeait à notre

 20   rencontre ; c'était un véhicule de la Forpronu des Nations Unies. Je ne me

 21   souviens plus exactement, un cameraman et un reporter sont descendus de ce

 22   véhicule, ainsi que quelques membres des Nations Unies. Quand ils ont posé

 23   la question au garde qui se trouvait en tête de colonne de savoir où ils

 24   nous emmenaient, qu'est-ce qu'ils faisaient avec nous, etc., le garde a

 25   répondu : "Moi, je ne sais pas, je ne peux pas te répondre, je ne suis pas


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  1   en mesure de te répondre ; moi-même, je suis forcé de le faire".

  2   M. Scott (interprétation). - Nous avons parlé de la situation à

  3   Kula. Mais était-ce le jour même ou le lendemain que certains des

  4   prisonniers qui vous ont remplacés à Kula, qui ont creusé des tranchées,

  5   ont été tués au cours de ces activités ? Cette information est-elle

  6   arrivée jusqu'au camp ?

  7   Témoin J (interprétation). - Oui, nous étions une trentaine qui

  8   avions été ramenés au camp et 17 nouveaux prisonniers nous ont remplacés à

  9   Kula. Cela s'est passé le 7 février. Le 8 au matin, ils ont été ramenés,

 10   eux aussi, de Kula : ils avaient tous été battus, ils étaient

 11   méconnaissables. Deux d'entre eux, en fait, trois avaient été tués. Ils ne

 12   sont pas rentrés : Jasmin Sehovic, Nermin Elezovic et, je crois, un

 13   certain Mustapha de la région de Kacuni, eux n'ont pas été ramenés. Et

 14   l'échange, qui était prévu pour le 8, n'a pas pu être effectué puisque

 15   trois personnes manquaient ; évidemment, puisqu'ils avaient été tués.

 16   La Croix-Rouge a insisté : ils voulaient absolument que l'on

 17   retrouve où ils se trouvaient, ce qui leur était arrivé.

 18   M. Scott (interprétation). - Témoin J, je crois que nous avons

 19   fait un grand pas en avant. Je voudrais que nous revenions en arrière.

 20   M. le Président (interprétation). - Maître Scott, il nous faudra

 21   prendre une pause très rapidement. En arrivez-vous à la fin de vos

 22   questions ?

 23   M. Scott (interprétation). - Oui, je crois, je crois que j'ai

 24   encore dix questions à peine.

 25   M. le Président (interprétation). - Nous levons l'audience pour


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  1   15 minutes.

  2         L'audience, suspendue à 16 h 13, est reprise à 16 h 32.

  3   M. Scott (interprétation). - Vous avez appris quelques jours

  4   avant le 8 février 93 qu'il y avait eu un échange entre le HVO et les

  5   Musulmans ?

  6   Témoin J (interprétation). - Oui.

  7   M. Scott (interprétation). - J'allais vous demander la chose

  8   suivante avant la pause. La Croix-Rouge a rendu une visite à Kaonik,

  9   c'était le 2 février 1993 plus ou moins, je pense.

 10   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est exact, effectivement. La

 11   Croix-Rouge nous a tous enregistrés.

 12   M. Scott (interprétation). - L'huissier pourrait-il vous montrer

 13   la pièce 2 716, s'il vous plaît ?

 14   (Le document est remis au témoin.)

 15   Vous voyez cette pièce plus précisément sur le rétroprojecteur à

 16   côté de vous. Vous avez la version en BCS sous les yeux, sur le

 17   rétroprojecteur. Est-ce bien un certificat de la Croix-Rouge ou un

 18   exemplaire de ce certificat portant sur le fait qu'on vous a aperçu à

 19   Kaonik ou qu'elle vous a enregistré vers le 2 février 93 ?

 20   Témoin J (interprétation). - C'est exact.

 21   M. Scott (interprétation). - Je demanderai que cette pièce soit

 22   déposée sous scellés parce que, bien entendu, elle porte le nom du témoin

 23   qui demande une certaine protection.

 24   A votre connaissance, la Croix-Rouge a-t-elle eu la possibilité

 25   de se rendre compte de toutes les circonstances, des conditions régnant à


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  1   la prison de Kaonik, ou bien y a-t-il eu simplement certains prisonniers

  2   qui ont pu faire l'objet de visites de la Croix-Rouge ? Tous les

  3   prisonniers ont-ils été emmenés, rassemblés afin qu'ils puissent voir les

  4   représentants de la Croix-Rouge ?

  5   Témoin J (interprétation). - Dans le couloir qui se situait

  6   entre les rangées de cellules se situait la table où nous mangions et on

  7   autorisait quelques-uns d'entre nous à échanger quelques mots avec les

  8   représentants de la Croix-Rouge. Nous autres, nous n'étions autorisés qu'à

  9   remplir les formulaires afin d'être enregistrés par la Croix-Rouge.

 10   M. Scott (interprétation). - Bien. A cause de ma question, nous

 11   avons fait un pas en avant dans le temps.

 12   Il y a quelques minutes, vous avez dit qu'un groupe de

 13   prisonniers musulmans avait été emmené à Kula afin de remplacer votre

 14   équipe de travail, si je puis dire, et que lorsque ces hommes ont été

 15   ramenés, deux ou trois d'entre eux, des prisonniers, avaient été tués. En

 16   tout cas, c'est ce que vous avez appris de la bouche des vivants.

 17   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est exact.

 18   M. Scott (interprétation). - Vous êtes vous rendu compte plus

 19   tard, au cours de la journée ou peut-être à 5 heures du matin, le

 20   lendemain matin, que des personnes étaient frappées dans le couloir près

 21   de votre cellule et que c'est ce qui vous a réveillé. C'est bien exact,

 22   n'est-ce pas ?

 23   Témoin J (interprétation). - Oui, c'est exact. Cela s'est

 24   produit dans le couloir qui se situait entre deux rangées. Le couloir se

 25   situait donc entre les cellules et on entendait des bruits, les cris de


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  1   quelqu'un qu'on passait à tabac. Je frappais à la porte pour demander

  2   d'aller aux toilettes. Le garde est venu pour m'ouvrir la porte parce que

  3   c'était ce qu'on faisait d'habitude. J'ai vu que les policiers du HVO

  4   commandés par Nikesa Babic, Nikesa est son surnom, qu'ils frappaient

  5   l'homme qu'on dénommait Hosovac, ainsi que deux autres hommes qui nous

  6   maltraitaient à Kula.

  7   M. Scott (interprétation). - Afin que le compte rendu soit bien

  8   clair, vous avez dit "cet homme du HOS", c'était M. Hosovac ?

  9   Témoin J (interprétation). - Oui. Hosovac de Kula.

 10   M. Scott (interprétation). - Et après avoir observé la situation

 11   et après avoir partagé vos impressions avec d'autres, pouvez-vous nous

 12   dire quelles ont été vos conclusions quant aux raisons pour lesquelles ces

 13   soldats du HVO avaient été frappés ou semblaient avoir été frappés ?

 14   Témoin J (interprétation). - Cette nuit-là à Kula, un des gardes

 15   membres du HVO a eu peur, il s'est demandé ce qui était arrivé aux deux

 16   jeunes gens. Par la suite, on a appris que les deux étaient certainement

 17   tués, Nermin et l'autre. Pour le troisième, on n'en était pas sûr. Les

 18   policiers du HVO l'ont ramené à la prison. L'or et l'argent qu'on a

 19   trouvés sur eux nous ont été rendus à la fin, mais il ne s'agit que d'une

 20   goutte d'eau dans un océan. A nos yeux, ce n'était qu'une mise en scène.

 21   D'après ceux qui sont restés dans le camp, ces personnes ont été mises en

 22   liberté le même jour.

 23   M. Scott (interprétation). - A votre avis, le HVO et sa police,

 24   sa police militaire, souhaitaient-ils que les Musulmans assistent à ce

 25   genre de scène pour penser que les individus étaient effectivement punis ?


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  1   Témoin J (interprétation). - Ils le faisaient exprès afin de

  2   nous montrer qu'ils contrôlaient tout, qu'ils suivaient des règles. En

  3   quelque sorte, ils voulaient nous prouver qu'ils se comportaient comme il

  4   faut.

  5   M. Scott (interprétation). - Mais outre cet événement

  6   particulier dont vous venez de parler à l'instant, au cours de votre

  7   période de détention qui a duré deux semaines et demie à peu près, et

  8   suite à toutes ces choses que vous nous avez racontées, avez-vous jamais à

  9   aucun moment vu d'autres soldats du HVO, des gardes du HVO soumis à des

 10   sanctions disciplinaires ou bien punis, ou bien interrompus dans les actes

 11   qu'ils perpétraient à ce moment-là, actes qu'ils perpétraient à l'encontre

 12   des prisonniers ?

 13   Témoin J (interprétation). - Absolument pas. Cela n'a jamais

 14   même était consigné dans un acte quelconque du HVO que quelqu'un devrait

 15   être puni pour un acte quelconque qu'il avait commis. Non.

 16   M. Scott (interprétation). - Au cours de la matinée du 8 février

 17   1993, vous et certains autres des prisonniers musulmans avez été

 18   rassemblés au camp de Kaonik, donc en son sein, et échangés ce jour-là,

 19   n'est-ce pas ?

 20   Témoin J (interprétation). - Oui.

 21   M. Scott (interprétation). - Et à l'époque de cet échange et de

 22   cette libération, il y a eu un retard, comme vous nous l'avez dit il y a

 23   quelques instants, parce que deux , sinon trois des hommes qui étaient

 24   connus de la Croix-Rouge étaient introuvables ou n'ont pas pu être

 25   identifiés à cette date au camp de Kaonik.


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  1   Témoin J (interprétation). - Oui, ils se trouvaient encore à

  2   Kula. L'échange n'a pu se produire que deux ou trois heures après. Il a eu

  3   lieu quand même à la fin, mais les hommes en question se trouvaient encore

  4   à Kula, tués.

  5   M. Scott (interprétation). - Est-il exact de dire qu'au cours de

  6   cet échange, le 8 février 1993, se trouvaient là Aleksovski, Sliskovic et

  7   Zarko Petrovic ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui.

  9   M. Scott (interprétation). - Je n'ai plus de questions,

 10   Messieurs les Juges.

 11   M. le Président (interprétation). - Merci.

 12   Monsieur Naumovski, c'est à vous.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

 14   Monsieur J, permettez-moi de me présenter. Je m'appelle

 15   Mitko Naumovski, je suis le conseil de la défense de M. Dario Kordic.

 16   Puisque nous nous comprenons très bien tous les deux, je vous

 17   prie juste d'attendre un tout petit peu avant de me répondre afin de

 18   permettre l'interprétation de ma question.

 19   Monsieur J, veuillez me répondre à quelques questions d'ordre

 20   général.

 21   Avant la guerre, vous étiez commerçant. Vous aviez une boutique.

 22   Quel est votre métier actuellement ?

 23   Témoin J (interprétation). - Je suis chauffeur de taxi.

 24   M. Naumovski (interprétation). - Etiez-vous membre du SDA ?

 25   Témoin J (interprétation). - Oui.


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  1   M. Naumovski (interprétation). - Pendant tout ce temps ?

  2   Témoin J (interprétation). - Oui.

  3   M. Naumovski (interprétation). - Avez-vous des fonctions au sein

  4   du SDA de Busovaca ?

  5   Témoin J (interprétation). - Non.

  6   M. Naumovski (interprétation). - A la date du 8 février 93, vous

  7   avez quitté Busovaca et vous vous êtes rendu à Zenica ?...

  8   Témoin J (interprétation). - Oui, à Zenica.

  9   M. Naumovski (interprétation). - Suite à votre arrivée à Zenica,

 10   on vous a attribué un poste au sein de l'armée de Bosnie-Herzégovine,

 11   n'est-ce pas ?

 12   Témoin J (interprétation). - Non. Pendant deux mois, jusqu'à la

 13   fin du mois de mai, donc ça fait trois mois, j'avais du mal à bouger, je

 14   suivais un traitement médical, donc je n'ai pas été contacté par l'armée.

 15   J'étais en très mauvais état.

 16   M. Naumovski (interprétation). - Est-ce que cela veut dire que

 17   vous n'étiez pas du tout soldat ou uniquement pendant cette période

 18   jusqu'à la fin du mois de mai ?

 19   Témoin J (interprétation). - Jusqu'à la fin du mois de mai.

 20   M. Naumovski (interprétation). - Donc, après mai 1993, vous

 21   étiez membre de la 333ème brigade ?

 22   Témoin J (interprétation). - Oui.

 23   M. Naumovski (interprétation). - Votre réponse est positive ?

 24   Témoin J (interprétation). - Oui.

 25   M. Naumovski (interprétation). - Est-ce qu'en tant que


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  1   militaire, vous vous rendiez dans la région de Busovaca ?

  2   Témoin J (interprétation). - Oui. Bien sûr, j'étais à Kula, donc

  3   soldat sur la ligne.

  4   M. Naumovski (interprétation). - Pouvez-vous nous préciser la

  5   période ?

  6   Témoin J (interprétation). - A partir du mois de mai jusqu'à la

  7   fin de la guerre. J'ai même été dans l'espace de délimitation, entre les

  8   lignes.

  9   M. Naumovski (interprétation). - Donc, pendant tout votre

 10   service militaire, pour dire ainsi, vous vous trouviez à Kula, depuis fin

 11   mai 1993 jusqu'en 1994 ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Etiez-vous membre de la ligue

 14   patriotique ?

 15   Témoin J (interprétation). - Oui.

 16   M. Naumovski (interprétation). - Quand êtes-vous devenu membre

 17   de la Ligue patriotique ?

 18   Témoin J (interprétation). - Au début de l'année 1992.

 19   M. Naumovski (interprétation). - Où ?

 20   Témoin J (interprétation). - A Busovaca.

 21   M. Naumovski (interprétation). - Combien de temps avez-vous été

 22   membre de la Ligue ?

 23   Témoin J (interprétation). - Pendant deux ou trois mois

 24   uniquement. Une dizaine de jours après le 9 mai, je n'étais plus membre de

 25   la Ligue.


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  1   M. Naumovski (interprétation). - Qui était le commandant de la

  2   Ligue patriotique à Busovaca ?

  3   Témoin J (interprétation). - On n'avait pas de commandant.

  4   C'était un groupe d'une trentaine de jeunes gens. J'étais à leur

  5   direction, entre autres personnes ; on essayait d'organiser quelque chose.

  6   Pour être tout à fait clair, à l'époque la Ligue patriotique... J'ai

  7   mentionné Florijan Glavocevic dans ma déclaration, j'ai parlé de cet

  8   événement lorsque je voulais me mettre à leur disposition afin d'aider

  9   autant qu'on pouvait. Il fallait être unis pour la défense parce que le

 10   danger venait des Serbes et de la JNA, mais on n'a pas accepté notre

 11   offre. Monsieur Dario Kordic a refusé.

 12   M. Naumovski (interprétation). - On abordera le sujet concernant

 13   M. Florijan Glavocevic plus tard. Mais puisque vous en parlez déjà, vous

 14   avez dit apparemment que le danger venait des Serbes, au printemps 1992 ?

 15   Témoin J (interprétation). - Oui. Oui, apparemment.

 16   M. Naumovski (interprétation). - Donc, vous, personnellement,

 17   vous estimez que le danger ne venait pas des Serbes ?

 18   Témoin J (interprétation). - A Busovaca, non.

 19   M. Naumovski (interprétation). - Et pour ce qui est de la

 20   Bosnie-Herzégovine, du territoire de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, là, absolument oui.

 22   M. Naumovski (interprétation). - Puisque nous parlons de la

 23   Ligue patriotique, vous êtes-vous rendu à Mehurici, où la Ligue

 24   patriotique a été créée pour la zone de Bosnie centrale ?

 25   Témoin J (interprétation). - Non.


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  1   M. Naumovski (interprétation). - Cependant, la Ligue patriotique

  2   était structurée : il y avait des unités, le commandement, etc.

  3   Témoin J (interprétation). - On pourrait le formuler ainsi, mais

  4   on n'avait absolument pas de commandant ; personne ne nous donnait des

  5   ordres. On s'étaient organisés afin d'organiser la défense de Busovaca,

  6   afin de prévenir ce qui est malheureusement arrivé par la suite.

  7   M. Naumovski (interprétation). - Je suis très curieux de savoir

  8   qu'est-ce qui est écrit sur le papier ?

  9   Témoin J (interprétation). - Ce sont les noms des personnes qui

 10   ont été tuées.

 11   M. Naumovski (interprétation). - A Busovaca ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Est-ce que je vous ai posé la

 14   question concernant la ligue patriotique pour la Bosnie centrale ? Pouvez-

 15   vous nous dire si vous aviez des contacts avec Ibrahim Puric * qui était

 16   le commandant pour la Bosnie centrale ?

 17   Témoin J (interprétation). - Non, je ne le connais pas. Même

 18   aujourd'hui, je ne le connais pas.

 19   M. Naumovski (interprétation). - Vous parliez du commandement de

 20   la Ligue patriotique : vous avez dit que vous étiez en quelque sorte le

 21   commandant d'un groupe ?

 22   Témoin J (interprétation). - Oui.

 23   M. Naumovski (interprétation). - Quelles étaient les autres

 24   personnes qui étaient à la tête de ce groupe ?

 25   Témoin J (interprétation). - Je ne sais pas qui était mon


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  1   successeur.

  2   M. Naumovski (interprétation). - Dervis Sarajlic peut-être ?

  3   Témoin J (interprétation). - Non. Ce n'était qu'un des

  4   dirigeants de ce groupe d'une trentaine de jeunes gens qui voulaient

  5   introduire un certain équilibre.

  6   M. Naumovski (interprétation). - S'agissant de la période dont

  7   il est question, les soldats de la Ligue patriotique avait un siège,

  8   organisaient des exercices. Mais où ?

  9   Témoin J (interprétation). - C'était dans la caserne des

 10   pompiers, mais ils n'organisaient pas d'exercices. Il n'y avait pas

 11   d'entraînement.

 12   M. Naumovski (interprétation). - Où était leur siège ?

 13   Témoin J (interprétation). - Dans la caserne des pompiers.

 14   M. Naumovski (interprétation). - Mais pourquoi vous avez décidé

 15   de former ces groupes, de vous organiser à Busovaca même, au début de

 16   l'année 1992 ?

 17   Témoin J (interprétation). - L'ambiance était très mauvaise. Il

 18   était de notre devoir d'organiser quelque chose, d'équilibrer la situation

 19   afin d'empêcher que les événements se déroulent de la façon dont ils se

 20   sont déroulés par la suite. On n'a pas réussi, malheureusement.

 21   M. Naumovski (interprétation). - Mais, précisez-moi, pour

 22   défendre, pour organiser la défense contre qui ?

 23   Témoin J (interprétation). - Pour organiser la défense contre

 24   qui ? Si vous voulez... Comment vous dire ? Nous défendre contre qui ?

 25   C'est ridicule !


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  1   M. Naumovski (interprétation). - Peut-être que c'est ridicule,

  2   mais je vous prie d'y répondre, de répondre à ma question.

  3   Témoin J (interprétation). - Tout d'abord, je dois souligner que

  4   la Ligue patriotique, le groupe qui se trouvait à Busovaca, on en a

  5   organisé nous-mêmes, sans ordre émanant d'instances supérieures. Non, on

  6   n'avait pas de tels contacts. Ce que nous essayions de faire, c'était

  7   d'établir des relations avec des Croates afin d'avoir une certaine base

  8   pour les négociations, mais nous ne possédions pas d'armes, nous n'étions

  9   pas une force armée.

 10   M. Naumovski (interprétation). – Je n'ai pas très bien compris.

 11   Il me semble que vous n'avez pas répondu à ma question. Il s'agissait de

 12   la défense contre qui ?

 13   Témoin J (interprétation). - La JNA.

 14   M. Naumovski (interprétation). – Tout à l'heure, vous avez dit

 15   qu'il était apparemment l'ennemi.

 16   Témoin J (interprétation). - Si, maintenant, vous regardez sur

 17   la carte la municipalité de Busovaca et les municipalités limitrophes, le

 18   danger ne venait pas des Serbes ; vous en conviendrez.

 19   M. Naumovski (interprétation). – Mais la JNA a bombardé

 20   Busovaca, n'est-ce pas ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, nous sommes d'accord. C'est

 22   comme cela que cela s'est produit.

 23   M. Naumovski (interprétation). – Donc il s'agit de l'attaque

 24   directe ?

 25   Témoin J (interprétation). - Oui.


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  1   M. Naumovski (interprétation). – Etiez-vous armé ?

  2   Témoin J (interprétation). - Oui.

  3   M. Naumovski (interprétation). – C'était votre arme

  4   personnelle ?

  5   Témoin J (interprétation). - Oui.

  6   M. Naumovski (interprétation). – Veuillez juste attendre un

  7   petit instant avant de répondre, je vous prie. Quel type d'armes

  8   possédiez-vous ?

  9   Témoin J (interprétation). - Un Scorpion, un pistolet du type

 10   Scorpion.

 11   M. Naumovski (interprétation). – Avec combien de balles ?

 12   Témoin J (interprétation). - Cela dépendait : vingt ou trente

 13   balles.

 14   M. Naumovski (interprétation). – Mes questions sont plutôt

 15   d'ordre chronologique, donc j'essaierai de suivre l'ordre de vos réponses

 16   lors de l'interrogatoire. Donc, pour ce qui est des armes qui se

 17   trouvaient dans les casernes situées dans la municipalité de Busovaca,

 18   est-ce que vous aviez un rôle particulier à jouer justement dans la

 19   répartition concernant les casernes ?

 20   Témoin J (interprétation). - Non.

 21   M. Naumovski (interprétation). – Donc vous n'avez pas

 22   d'information concernant les conditions dans lesquelles la caserne de

 23   Draga a été attribuée au HVO, et celle de Kacuni à l'armée de Bosnie-

 24   Herzégovine ?

 25   Témoin J (interprétation). - Pour ce qui est des conditions, il


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  1   me semble que c'est facile d'en déterminer les raisons puisqu'à Silus* se

  2   trouvent majoritairement les Musulmans. Le HVO n'essayait même pas de

  3   s'emparer de cette caserne. Pour ce qui est des deux autres casernes que

  4   vous avez mentionnées, je ne sais pas qui a participé aux négociations,

  5   s'il y a eu des négociations. Je sais qu'on a célébré cet événement

  6   lorsque nous nous sommes emparés, lorsque les Croates se sont emparés des

  7   armes.

  8   M. Naumovski (interprétation). – Vous pensez à Kaonik ?

  9   Témoin J (interprétation). - Oui.

 10   M. Naumovski (interprétation). – Je vais vous poser quelques

 11   questions concernant ce sujet. Pour ce qui est des armes qui se trouvaient

 12   à Kaonik, étiez-vous membre de l'équipe qui négociait de la répartition

 13   des armes ?

 14   Témoin J (interprétation). - Non.

 15   M. Naumovski (interprétation). – Donc vous ne disposez pas

 16   d'information directe ?

 17   Témoin J (interprétation). - Je ne sais pas qui faisait partie

 18   de l'équipe qui négociait.

 19   M. Naumovski (interprétation). – Donc vous ne savez même pas si

 20   des négociations ont eu lieu ?

 21   Témoin J (interprétation). - Non.

 22   M. Naumovski (interprétation). – Jeudi dernier, vous avez dit

 23   que Dario Kordic était impliqué dans l'organisation de cette action. Donc

 24   vous disposez quand même de quelques informations, n'est-ce pas ?

 25   Témoin J (interprétation). - A l'époque, pendant toute cette


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  1   période, Dario Kordic se trouvait à la tête de tout.

  2   M. Naumovski (interprétation). – Ma question portait sur Kaonik

  3   exclusivement. Est-ce que vous savez, comment savez-vous que M. Dario

  4   Kordic était impliqué dans l'organisation de l'action de Kaonik ?

  5   Témoin J (interprétation). - Je ne peux pas le savoir

  6   précisément, si c'était Kordic ou quelqu'un d'autre, un de ses hommes. Je

  7   ne peux pas le dire.

  8   M. Naumovski (interprétation). – Devant cette Chambre, vous avez

  9   dit quelque chose : donc votre conclusion concernant Dario Kordic, je vous

 10   prie juste de l'étayer, de donner des explications supplémentaires.

 11   Témoin J (interprétation). - Toute négociation, tout événement,

 12   tout ce qui a eu lieu à l'époque, même les enfants le savaient : Dario

 13   Kordic en était responsable ; il surveillait tout, il contrôlait tout.

 14   M. Naumovski (interprétation). – Excepté cette réponse d'ordre

 15   général que vous avez répétée à plusieurs reprises, je vous prie de me

 16   dire : êtes-vous au courant des détails ? Est-ce que vous pouvez étoffer

 17   un peu votre réponse concernant l'implication de Dario Kordic ? Possédez-

 18   vous des informations ?

 19   Témoin J (interprétation). - Disons que non, je n'en ai pas.

 20   M. Naumovski (interprétation). – Donc vous n'avez pas

 21   d'information. Bien.

 22   Dites-moi si vous vous trouviez sur place lorsque cet événement

 23   a eu lieu, l'événement de Kaonik ?

 24   Témoin J (interprétation). - Mais qui aurait pu se trouver sur

 25   place, puisqu'on était tous chez nous, on n'avait pas l'autorisation, on


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  1   ne pouvait même pas circuler librement ?

  2   M. Naumovski (interprétation). – Le 9 mai 1992, vous ne pouviez

  3   pas circuler librement ?

  4   Témoin J (interprétation). - C'était une puissance, ils

  5   manifestaient leur puissance, leur force.

  6   M. Naumovski (interprétation). – Comment se fait-il alors que

  7   d'autres musulmans étaient sur place lorsque les tirs ont été échangés si,

  8   comme vous le dites, ils ne pouvaient pas circuler ?

  9   Témoin J (interprétation). - Cela, je ne peux pas vous le dire.

 10   M. Naumovski (interprétation). – Saviez-vous que des échanges de

 11   tirs ont eu lieu ?

 12   Témoin J (interprétation). - J'en ai entendu parler.

 13   M. Naumovski (interprétation). – Vous en avez entendu parler,

 14   mais vous ne pouvez pas l'attester personnellement ? Vous avez dit que

 15   vous ne pouviez pas circuler librement au début du mois de mai 92. Je vais

 16   vous dire que, par exemple, un musulman du nom de Mahir Mekic s'y trouvait

 17   à cet endroit précis, avec son camion. Il était dans son camion. Et vous,

 18   vous affirmez qu'il ne pouvait pas circuler ?

 19   Témoin J (interprétation). - Je ne sais pas comment il se fait

 20   qu'il s'est trouvé sur place. Il s'agissait certainement d'un accord qu'il

 21   avait conclu avec quelqu'un d'autre ; je ne sais pas comment il se peut

 22   qu'il se trouvait sur place à cet instant précis.

 23   M. Naumovski (interprétation). – Savez-vous que Dervic* Sarajlic

 24   s'y trouvait ?

 25   Témoin J (interprétation). - Oui, je le sais.


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  1   M. le Président (interprétation). - Il ne s'agit là que de

  2   choses que le témoin a entendues. Par conséquent, les éléments que nous

  3   apporte le témoin ne vont pas nous être d'une grande utilité. Alors, s'il

  4   vous plaît, Monsieur Naumovski, passons à autre chose.

  5   M. Naumovski (interprétation). – Fort bien, Monsieur le

  6   Président.

  7   Monsieur J, vous avez parlé à plusieurs reprises du HVO.

  8   Essayons d'être plus précis. Que signifie pour vous le HVO ?

  9   Témoin J (interprétation). - Le conseil croate de défense.

 10   M. Naumovski (interprétation). – S'agit-il d'une armée, d'une

 11   force armée ou d'autre chose ?

 12   Témoin J (interprétation). - Une force armée.

 13   M. Naumovski (interprétation). – Monsieur J, savez-vous que,

 14   dans la municipalité de Busovaca et dans d'autres municipalités, le HVO

 15   représentait également une autorité civile, du même nom ?

 16   Témoin J (interprétation). - Probablement que oui. Mais moi, je

 17   n'ai pas vu les effets, l'influence de cette autorité civile.

 18   M. Naumovski (interprétation). – Etiez-vous au courant du fait

 19   qu'une autorité civile du nom du HVO existait ?

 20   Témoin J (interprétation). - Les autorités civiles existaient,

 21   bien sûr.

 22   M. Naumovski (interprétation). – Vous avez dit tout à l'heure

 23   que Florijan Glavocevic était le président du conseil de guerre, mais un

 24   organe de ce type n'existait pas.

 25   Témoin J (interprétation). - Il me semble que l'appellation


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  1   était à peu près comme ça, que c'était...

  2   M. Naumovski (interprétation). – Si vous aviez dit qu'il était

  3   président du HVO, cela aurait été compréhensible et ne parlons pas de

  4   conseil de guerre.

  5   Témoin J (interprétation). - Si, un conseil de guerre a bel et

  6   bien existé à Busovaca. Et Florijan Glavocevic était son président.

  7   M. Naumovski (interprétation). – S'agissait-il d'un organe

  8   d'autorité civile ou d'autre chose ?

  9   Témoin J (interprétation). - Il s'agissait d'une autorité

 10   civile.

 11   M. Naumovski (interprétation). – Qu'il s'agisse de conseil de

 12   guerre ou du HVO, est-il exact que des fonctionnaires qui y travaillaient

 13   n'étaient pas exclusivement des Croates, mais qu'il y avait également des

 14   Musulmans ?

 15   Témoin J (interprétation). - Depuis la passation de pouvoir, en

 16   fait, depuis que le HVO s'est emparé du pouvoir, il n'y avait plus de

 17   place pour les Musulmans.

 18   M. Naumovski (interprétation). – Et M. Nezir Huseinspahic qui

 19   était membre du gouvernement du HVO en 1992 ? Voulez-vous, je vous prie,

 20   répondre à ma question ?

 21   Témoin J (interprétation). - Vous avez dit Husein comment ?

 22   M. Naumovski (interprétation). – Nezir Huseinspahic. Il

 23   s'agissait de la direction des affaires de l'administration. Ensuite, une

 24   certaine dame du nom d'Alema était également chef des finances.

 25   Témoin J (interprétation). - Oui.


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  1   M. Naumovski (interprétation). – La mairesse était Mme Rizvic.

  2   Témoin J (interprétation). - Mais personne ne travaillait ; il

  3   ne faut pas nous leurrer. La mère de cette dame, Alema, a été tuée.

  4   Personne ne travaillait.

  5   M. Naumovski (interprétation). – Vous avez donc dit que les noms

  6   que je viens de citer, que ces personnes ne travaillaient pas dans le

  7   gouvernement du HVO après le mois de mai 1992 ?

  8   Témoin J (interprétation). - Bien sûr que non.

  9   M. Naumovski (interprétation). – Lorsque nous évoquions les

 10   autorités tout à l'heure et les organes politiques, savez-vous que

 11   l'assemblée municipale s'est transformée en cellule de crise ? Cela s'est

 12   produit avant la création du HVO.

 13   Témoin J (interprétation). - Oui.

 14   M. Naumovski (interprétation). – Savez-vous qui était le

 15   président de cette cellule de crise ?

 16   Témoin J (interprétation). - Alors, il me semble que c'était

 17   Glavocevic qui était à la tête de cet organe.

 18   M. Naumovski (interprétation). – C'était M. Zoran Maric,

 19   puisqu'il avait occupé le poste de président de l'assemblée municipale

 20   auparavant, suite aux élections ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui, je m'en souviens.

 22   M. Naumovski (interprétation). – Lorsque vous parliez de conseil

 23   de guerre, vous pensiez peut-être à cette cellule de crise ?

 24   Témoin J (interprétation). - Le successeur de Glavocevic était

 25   Zoran Maric, effectivement.


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  1   M. Naumovski (interprétation). – Lorsque nous évoquons les

  2   structures militaires du HVO, savez-vous qui était à la tête du HVO de

  3   Busovaca, donc de la branche militaire du HVO ?

  4   Témoin J (interprétation). - Dario Kordic.

  5   M. Naumovski (interprétation). – Depuis le début, c'était le

  6   premier commandant ?

  7   Témoin J (interprétation). - Il était le premier et le dernier.

  8   C'est lui qui contrôlait tout.

  9   M. Naumovski (interprétation). – Je ne parlais pas de ses

 10   compétences, mais je vous demandais de me citer le nom du commandant.

 11   Témoin J (interprétation). - C'était Dario Kordic.

 12   M. Naumovski (interprétation). – Compte tenu du fait que vous

 13   habitiez à Busovaca pendant toute cette période, que vous connaissez bien

 14   les habitants de Busovaca, que vous savez très bien à quelles dates ont

 15   été créées les brigades, notamment la brigade du HVO ?

 16   Témoin J (interprétation). - Oui.

 17   M. Naumovski (interprétation). – Alors, M. Dario Kordic était

 18   également le commandant de la brigade, s'il commandait tout, comme vous le

 19   dites ?

 20   Témoin J (interprétation). - Chaque brigade a son commandant,

 21   mais chaque commandant a son supérieur aussi, chaque commandant de

 22   brigade. Il s'agit d'une hiérarchie.

 23   M. Naumovski (interprétation). – Je pensais justement à la

 24   hiérarchie et, lorsque je vous ai demandé qui était le commandant du HVO,

 25   vous m'avez dit que c'était Dario Kordic.


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  1   Témoin J (interprétation). - Oui.

  2   M. Naumovski (interprétation). – Mais comment cela ? Il n'y a

  3   pas de hiérarchie alors ?

  4   Témoin J (interprétation). - Non, puisque c'est lui qui est le

  5   commandant suprême, le commandant en chef. C'est lui qui contrôlait tout.

  6   M. Naumovski (interprétation). – Puisque nous évoquons le

  7   commandement, savez-vous qu'un commandement de la zone opérationnelle de

  8   Bosnie centrale a été mis en place ?

  9   Témoin J (interprétation). - Il me semble en avoir entendu

 10   parler.

 11   M. Naumovski (interprétation). – Et vous ne savez pas, vous

 12   n'êtes pas au courant des détails concernant ces zones opérationnelles ?

 13   Témoin J (interprétation). - Non.

 14   M. Naumovski (interprétation). – Savez-vous qui était le

 15   commandant de cette zone opérationnelle ?

 16   Témoin J (interprétation). - Non.

 17   M. Naumovski (interprétation). – Avez-vous déjà entendu parler

 18   du colonel Blaskic, Tihomir Blaskic ?

 19   Témoin J (interprétation). - Oui.

 20   M. Naumovski (interprétation). – Vous avez entendu ce nom dans

 21   quel contexte ? Quelle fonction avait-il ?

 22   Témoin J (interprétation). - Je sais que c'était un général. On

 23   en a beaucoup parlé. On évoquait son nom pour dire qu'il était le

 24   commandant sur place, mais moi, je sais qu'en réalité, ce n'était pas le

 25   cas.


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  1   M. Naumovski (interprétation). – J'essaie de vous comprendre.

  2   Donc vous aviez entendu dire que le colonel Blaskic devait être le

  3   commandant ?

  4   Témoin J (interprétation). - Oui.

  5   M. Naumovski (interprétation). – Mais vous n'êtes pas sûr qu'il

  6   occupait ce poste ?

  7   Témoin J (interprétation). - Certainement sur papier.

  8   M. Naumovski (interprétation). – Donc, à ma question concernant

  9   le commandant de la zone opérationnelle, vous répondez que, du moins sur

 10   le papier, c'était le colonel Blaskic ?

 11   Témoin J (interprétation). - Oui.

 12   M. Naumovski (interprétation). - Et quelle était la profession

 13   qu'il exerçait ?

 14   Témoin J (interprétation). - Non, je ne sais pas.

 15   M. Naumovski (interprétation). - Vous avez dit dans une de vos

 16   déclarations que c'était un militaire de carrière ?

 17   Témoin J (interprétation). - Oui, c'était un officier de la JNA.

 18   M. Naumovski (interprétation). - Donc son métier était celui-là,

 19   donc il était militaire de carrière ?

 20   Témoin J (interprétation). - Oui.

 21   M. Naumovski (interprétation). - Merci. Avant de passer à la

 22   question qui nous intéresse plus particulièrement, Messieurs les Juges,

 23   j'aimerais demander combien de temps il me reste aujourd'hui, s'il vous

 24   plaît.

 25   M. le Président (interprétation). - Environ vingt minutes,


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  1   jusqu'à 5 heures 30. Ensuite, vous aurez demain, mais nous devrons

  2   entendre les arguments relatifs au dossier et, évidemment, laisser une

  3   éventuelle période de contre-interrogatoire de Me Mikulicic.

  4   M. Naumovski (interprétation). - Je ferai de mon mieux pour

  5   raccourcir mes questions le plus possible, mais ce témoin a abordé de

  6   nombreuses questions et j'ai également un certain nombre de questions à

  7   lui poser en réponse à ces questions. Cependant, je ferai de mon mieux.

  8   Passons à des questions différentes, si vous le voulez bien.

  9   Hier, vous avez parlé de M. Dragutin Zvonimir Cicak. Vous avez dit que

 10   c'était votre voisin qui avait une résidence secondaire à quelque 500 ou

 11   600 mètres de votre maison.

 12   Témoin J (interprétation). - Je crois que oui, effectivement.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Votre maison se trouvait dans

 14   la rue Visovacka, je crois, mais je crois qu'il y a deux rues qui portent

 15   le même nom, n'est-ce pas ?

 16   Témoin J (interprétation). - Tisovacka. Tisovacka, c'est le nom

 17   de la rue.

 18   M. Naumovski (interprétation). - Oui, mais je crois que la rue

 19   de M. Dario Kordic porte le même nom, n'est-ce pas ?

 20   Témoin J (interprétation). - Oui, c'était une espèce de

 21   boulevard et ma maison se trouvait là. C'était au Tisovacka, numéro 1.

 22   M. Naumovski (interprétation). - Donc la distance entre votre

 23   maison était de 150 mètres, d'après ce que vous avez dit, peut-être 300.

 24   Ce n'était pas très important. Et puis ces rues convergent l'une vers

 25   l'autre pour se rejoindre et pour n'en former plus qu'une, et ensuite


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  1   cette route se poursuit vers le village de Ravno et ensuite vers

  2   Tisovacka. Vous êtes d'accord avec moi, n'est-ce pas ?

  3   Témoin J (interprétation). - Oui, effectivement.

  4   M. Naumovski (interprétation). - Mais où était cette résidence

  5   secondaire de M. Cicak ?Est-ce que ces deux rues dans lesquelles ces deux

  6   maisons se trouvaient se rejoignaient un peu plus loin ?

  7   Témoin J (interprétation). - Non, je ne crois pas. Je crois que

  8   cette maison se trouvait dans le quartier appelé Bare, si je ne me trompe

  9   pas.

 10   M. Naumovski (interprétation). - Vous parlez de Juriceve Bare ?

 11   Témoin J (interprétation). - Oui.

 12   M. Naumovski (interprétation). - Je demanderai à l'huissier de

 13   présenter cette carte au témoin. Nous pouvons utiliser la pièce que

 14   l'accusation a présentée, la pièce 1 870.1. Posons-la sur le

 15   rétroprojecteur afin que je lui pose des questions. Il s'agit de la carte

 16   présentée aujourd'hui par le Procureur.

 17   Témoin J, pouvez-vous, s'il vous plaît, nous indiquer à l'aide

 18   du pointeur sur cette carte où se trouvait votre maison, enfin cet

 19   endroit, Juriceve Bare ? On voit Busovaca, ensuite Ravan, mais je suis sûr

 20   que vous connaissez cette carte et que vous vous y reconnaîtrez bien mieux

 21   que moi.

 22   Voilà, ici, quelque part par là.

 23   M. Scott (interprétation). - Donc Juriceve Bare se trouve entre

 24   Busovaca et Ravno, n'est-ce pas ?

 25   Témoin J (interprétation). - Je crois, oui. Je crois.


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  1   M. Naumovski (interprétation). - J'aimerais bien maintenant que

  2   vous nous montriez sur cette même carte le village de Granice. C'est un

  3   peu plus au nord. S'il vous plaît, pourriez-vous descendre un peu la carte

  4   sur le rétroprojecteur afin que nous puissions voir le nord de la carte,

  5   Monsieur l'huissier, s'il vous plaît ? Descendez un petit peu la carte,

  6   descendez la carte sur le rétroprojecteur, s'il vous plaît. Voilà, très

  7   bien. Merci.

  8   Nous voyons le village de Granice. Donc c'est plutôt de l'autre

  9   côté de Busovaca, à deux kilomètres et demi, trois kilomètres de Busovaca.

 10   Témoin J (interprétation). - Oui.

 11   M. Naumovski (interprétation). - Pourquoi vous ai-je montré

 12   cela ? Parce que M. Cicak, au cours de son témoignage ou dans sa

 13   déclaration, a dit qu'il avait une résidence secondaire dans ce village de

 14   Granice qui est un village tout à fait différent de Busovaca, une région

 15   tout à fait différente. Monsieur Cicak l'a dit à la page 1 389 du

 16   transcript [anglais], lignes 18 à 21.

 17   Témoin J (interprétation). - C'est quelque chose que je viens

 18   d'apprendre.

 19   M. le Président (interprétation). - Je crois que c'est une

 20   question de commentaire que vous pourrez faire plus tard. Ce n'est pas au

 21   témoin de témoigner sur ce point-là.

 22   M. Naumovski (interprétation). - Eh bien, j'utiliserai la carte

 23   plus tard. Nous pouvons poursuivre et passer à autre chose. Nous avons

 24   parlé du blé dans les silos, je crois. Ces réserves-là appartenaient à

 25   qui, Témoin J ?


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  1   Témoin J (interprétation). - A l'ex-Yougoslavie.

  2   M. Naumovski (interprétation). - Avez-vous participé aux

  3   négociations quant à la façon dont ce blé devait être utilisé ?

  4   Témoin J (interprétation). - Pas directement.

  5   M. Naumovski (interprétation). - Mais vous nous avez dit que,

  6   selon l'accord, ce blé devait être partagé équitablement, 50/50.

  7   Témoin J (interprétation). - Oui.

  8   M. Naumovski (interprétation). - Mais 50/50 entre qui et qui ?

  9   Témoin J (interprétation). - Entre les Musulmans et les Croates.

 10   M. Naumovski (interprétation). - Vous nous avez parlé d'un

 11   incident où il était question d'un camion, mais je n'ai pas très bien

 12   compris quelle a été votre conclusion finale. S'agissait-il de la quantité

 13   totale de céréales qui devait être partagée et qui a finalement été

 14   partagée entre Croates et Musulmans ?

 15   Témoin J (interprétation). - Non.

 16   M. Naumovski (interprétation). - Alors, qui a profité pleinement

 17   de ces céréales ?

 18   Témoin J (interprétation). - Eh bien, les Musulmans. C'est aux

 19   Musulmans que ces céréales ont été laissées.

 20   M. Naumovski (interprétation). - Merci beaucoup. Nous avons

 21   parlé du silo en tant qu'endroit. Ce silo devait servir d'entrepôt pour le

 22   blé. Savez-vous que, dans ce même silo, il y avait un camp où étaient

 23   détenus des Croates dès janvier 1993 et par la suite ?

 24   Témoin J (interprétation). - Ce n'est pas exact.

 25   M. Naumovski (interprétation). - Ce n'était pas un camp donc ?


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  1   Témoin J (interprétation). - Non. Peut-être une prison, mais pas

  2   un camp.

  3   M. Naumovski (interprétation). - Mais une prison qui détenait

  4   qui ?

  5   Témoin J (interprétation). - Eh bien, moi, par exemple.

  6   M. Naumovski (interprétation). - Comment cela ? Vous parlez des

  7   soldats ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui, moi aussi, j'ai été soldat.

  9   M. Naumovski (interprétation). - Avez-vous purgé une peine de

 10   nature disciplinaire ? Y avait-il eu une faute disciplinaire de votre

 11   part ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Ce devait être quelque chose de

 14   grave puisque vous avez fini en prison.

 15   Témoin J (interprétation). - Cela dépend de l'angle qu'on

 16   adopte, mais je n'y ai passé que six jours.

 17   M. Naumovski (interprétation). - Et vous n'y avez pas aperçu de

 18   civils dans des conditions déplorables ?

 19   Témoin J (interprétation). - Eh bien, les conditions étaient

 20   mauvaises, ça c'est certain, pour moi et pour tous les autres, mais il n'y

 21   avait pas un seul civil à cet endroit et surtout pas des Croates.

 22   M. Naumovski (interprétation). - S'il vous plaît, j'ai quelques

 23   questions relatives à la période de janvier 1993. Vous serez d'accord avec

 24   moi pour dire que la route a été coupée dans la région séparant Kacuni de

 25   Bilalovac en janvier 93.


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  1   Témoin J (interprétation). - Comment ça, coupée ?

  2   M. Naumovski (interprétation). - Eh bien, la circulation ne

  3   pouvait plus passer, il était impossible d'emprunter cet axe routier, en

  4   tout cas pour les véhicules des Croates.

  5   Témoin J (interprétation). - Mais, jusqu'au 25 janvier 1993,

  6   cette route n'a pas été bloquée. Elle a été bloquée au niveau de Zenica.

  7   Il y a des obstacles qui ont été placés sur la route par le HVO.

  8   M. Naumovski (interprétation). - S'il vous plaît, vous dites que

  9   vous étiez civil, un civil, en janvier 93 ?

 10   Témoin J (interprétation). - Oui.

 11   M. Naumovski (interprétation). - A partir de quel moment êtes-

 12   vous devenu un véritable civil, sans aucune tâche militaire à effectuer ?

 13   Témoin J (interprétation). - Mais je n'avais aucune tâche

 14   militaire à effectuer.

 15   M. Naumovski (interprétation). - Mais aviez-vous certaines

 16   tâches militaires à effectuer en 1992, lorsque me vous étiez membre de la

 17   Ligue patriotique ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui, je devais aller sur le front

 19   et j'étais au front à Visoko, en septembre 92.

 20   M. Naumovski (interprétation). - Au sein de quelle unité ?

 21   Témoin J (interprétation). - La 333ème Brigade.

 22   M. Naumovski (interprétation). - Fort bien. C'était ma question

 23   très précisément. Jusqu'à quand avez-vous occupé ce poste de soldat au

 24   sein de cette brigade ?

 25   Témoin J (interprétation). - Pendant quinze jours et, ensuite,


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  1   j'ai été démobilisé.

  2   M. Naumovski (interprétation). - Et on ne vous a pas rappelé ?

  3   Témoin J (interprétation). - Non.

  4   M. Naumovski (interprétation). - Je parle maintenant de la fin

  5   de 1992 et de janvier 1993, en tout cas de la première moitié de ce mois.

  6   La TO avait-elle ses propres unités dans la ville et aux environs ?

  7   Témoin J (interprétation). - Au sein de la ville, non. Seulement

  8   à Kacuni.

  9   M. Naumovski (interprétation). - Et les membres de la TO

 10   allaient de Busovaca à Kacuni et y retournaient ? Est-ce qu’ils y allaient

 11   pour le travail, si je puis dire ?

 12   Témoin J (interprétation). - Non.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Alors, comment faisaient-ils ?

 14   Dites-nous.

 15   Témoin J (interprétation). - On ne nous appelait que s'il était

 16   nécessaire que nous nous rendions sur le front. C'est comme ça d'ailleurs

 17   qu'on m'a mobilisé en septembre. Nous y restions pendant quinze jours

 18   environ, à Visoko, ensuite à Maglaj. On y restait donc quinze jours. On

 19   rendait les armes qui nous avaient été données. On rentrait chez nous et

 20   personne ne nous remobilisait, personne ne nous rappelait.

 21   M. Naumovski (interprétation). - Par conséquent, il n'y avait

 22   pas d'unité armée de la Ligue patriotique ou de la TO dans la ville de

 23   Busovaca, en décembre 1992 et janvier 1993 ?

 24   Témoin J (interprétation). - Dans la ville, non.

 25   M. Naumovski (interprétation). - Mais certaines unités de


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  1   l'armée de Bosnie-Herzégovine armées sont-elles venues en ville à

  2   certaines reprises ?

  3   Témoin J (interprétation). - Oui, cela a été le cas le

  4   22 janvier, lorsque Delija était enterré, Mirsad Delija qui a été tué au

  5   cours de la soirée du 21. Et, d'après mes souvenirs, ils l'ont salué, ils

  6   lui ont fait un salut militaire et, ensuite, ces hommes sont retournés à

  7   Kacuni.

  8   M. Naumovski (interprétation). - Venaient-ils de la ville de

  9   Busovaca ? En étaient-ils originaires ?

 10   Témoin J (interprétation). - Je n'en ai vraiment pas le

 11   souvenir, mais il y avait des gens de Kacuni. Je pense que la plupart

 12   d'entre eux était de Kacuni en fait.

 13   M. Naumovski (interprétation). - Nous parlions de la guerre

 14   contre les Serbes. Certains individus de Busovaca, plus tôt, ont-ils

 15   participé à la guerre en Croatie, lorsque l'ex-Yougoslavie ou plutôt

 16   lorsque l'ex-JNA a attaqué la Croatie, ces individus sont-ils allés en

 17   Croatie de Busovaca -je parle à la fois de Musulmans et de Croates- afin

 18   de se battre contre la JNA et les Serbes ?

 19   Témoin J (interprétation). - Je ne peux vraiment pas apporter de

 20   réponse à cette question.

 21   M. Naumovski (interprétation). - Avez-vous vu à cette époque des

 22   personnes portant des uniformes qui étaient en permission et qui venaient

 23   de Croatie à Busovaca ? Est-ce que ces hommes revenaient, par exemple,

 24   avec des uniformes où étaient fixés des insignes militaires ?

 25   Témoin J (interprétation). - Je ne sais pas, je ne sais pas.


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  1   M. Naumovski (interprétation). - Vous n'avez vu, jamais vu qui

  2   que ce soit revenir en permission et portant un uniforme ?

  3   Témoin J (interprétation). - Je n'en sais rien.

  4   M. Naumovski (interprétation). - Très bien. Poursuivons donc sur

  5   ce point, donc la période de janvier 93. J'ai dit que la circulation a été

  6   interrompue sur l'axe Kacuni/Bilalovac pour les Croates. Savez-vous ce qui

  7   s'est passé le 24 janvier 1993, vers 3 heures de l'après-midi, à Kacuni ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui. Oui, plus ou moins. Il y a eu

  9   un incident.

 10   M. Naumovski (interprétation). - Etiez-vous présent ou vous en

 11   a-t-on parlé ?

 12   Témoin J (interprétation). - On m'en a parlé. Je n'étais pas

 13   présent.

 14   M. Naumovski (interprétation). - Ce jour-là, au poste de

 15   contrôle de Kacuni, deux Croates ont été tués : Ivica Petrovic et

 16   Igor Bogdanovic. Ils étaient dans un véhicule civil. Vous êtes d'accord,

 17   n'est-ce pas ?

 18   Témoin J (interprétation). - Oui, oui.

 19   M. Naumovski (interprétation). - Savez-vous que, quelques jours

 20   auparavant, dans ce même endroit, Ignac Kostroman avait été enlevé ?

 21   C'était l'un des dirigeants majeurs de la population croate dans la

 22   région. En tout cas, il y a eu tentative d'enlèvement.

 23   Témoin J (interprétation). - Ça, je ne sais pas.

 24   M. Naumovski (interprétation). - Donc vous n'en savez rien ?

 25   Témoin J (interprétation). - Non.


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  1   M. Naumovski (interprétation). - Excusez-moi, quelque chose

  2   vient de me revenir à l'esprit. Vous avez dit Mirsad Delija : vous avez

  3   parlé de lui et vous avez dit qu'il avait été tué. Son frère était-il un

  4   des commandants à Kacuni ? Avait-il un frère ?

  5   Témoin J (interprétation). - Oui, il avait deux frères.

  6   M. Scott (interprétation). - L'un de ses frères était-il

  7   commandant à ce poste de contrôle de Kacuni ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui, sans doute ; je n'exclus pas

  9   cette possibilité, mais je n'en suis pas certain, je n'étais pas présent.

 10   M. Naumovski (interprétation). - Merci. Pour en revenir à ce

 11   poste de contrôle -et je pense que nous pourrons terminer la session

 12   d'aujourd'hui sur ce point-, vous avez dit jeudi que vous êtes allé à

 13   Split à la fin de 1992 et qu'il vous fallait un permis qui a été signé par

 14   Niko Grubesic, et que vous êtes parti avec ce permis.

 15   Témoin J (interprétation). - Tout à fait.

 16   M. Naumovski (interprétation). - Donc vous êtes allé à Split,

 17   vous avez passé ce poste de contrôle et je suppose que vous en avez passé

 18   d'autres également au moment de quitter Busovaca. La route, en fait, était

 19   jonchée de postes de contrôle à ce moment-là, si je puis dire. Vous êtes

 20   d'accord ?

 21   Témoin J (interprétation). - Oui.

 22   M. Naumovski (interprétation). - Donc il aurait fallu d'autres

 23   types d'autorisations ?

 24   Témoin J (interprétation). - Je n'avais besoin de rien d'autre.

 25   M. Naumovski (interprétation). - Avez-vous traversé un poste de


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  1   contrôle tenu par l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

  2   Témoin J (interprétation). - Oui.

  3   M. Naumovski (interprétation). - Donc vous deviez avoir certains

  4   documents... ?

  5   Témoin J (interprétation). - Non.

  6   M. Naumovski (interprétation). - Par conséquent, vous avez eu

  7   l'autorisation de passer ?

  8   Témoin J (interprétation). - Oui, parce que si vous quittez

  9   Busovaca, eh bien, vous allez en direction de Novi Travnik, Prozor,

 10   Jablanica, Metkovic et Split.

 11   M. Naumovski (interprétation). - Mais le fait que vous n'ayez

 12   pas besoin d'autorisation de passage, ceci s'appliquait-il à la fois aux

 13   Croates et aux Musulmans ? Je parle d'une autorisation délivrée par

 14   l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 15   Témoin J (interprétation). - Mais, de façon générale, personne

 16   n'avait besoin de ce type d'autorisation, c'est certain.

 17   M. Naumovski (interprétation). - Par conséquent, il y avait une

 18   grande liberté de mouvement, n'est-ce pas ?

 19   Témoin J (interprétation). - Si vous aviez ce papier, oui.

 20   M. Naumovski (interprétation). - J'ai sous les yeux une

 21   autorisation... Que faisons-nous ? Le laissons-nous pour demain ou le

 22   faisons-nous maintenant ?

 23   M. le Président (interprétation). - Allez-y.

 24   M. Naumovski (interprétation). - Merci. L'huissier pourrait-il

 25   distribuer des exemplaires de ces documents : un pour le témoin, un pour


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  1   les Juges, un pour...

  2   Mme Ameerali (interprétation) . - Il s'agit de la pièce D 37/1.

  3   (Le document est remis au témoin.)

  4   M. Naumovski (interprétation). - Il suffit que le témoin voie le

  5   document ; peut-être qu'il n'est pas nécessaire de le mettre sur le

  6   rétroprojecteur. Il s'agit exactement de la même direction, Vitez/Prozor,

  7   qu'on a évoquée tout à l'heure, donc il s'agit d'une autorisation pour les

  8   véhicules et pour les personnes émise par l'état-major municipal de Vitez,

  9   et cette autorisation délivrée en 1992 était à l'attention de

 10   M. Munib Kajmovic, signée par Sefkija Didic. L'avez-vous vu, cette

 11   autorisation ?

 12   Témoin J (interprétation). - Oui.

 13   M. Naumovski (interprétation). - S'agit-il bien d'une

 14   autorisation délivrée par des autorités musulmanes ?

 15   Témoin J (interprétation). - Oui, mais municipalité de Vitez.

 16   M. Naumovski (interprétation). - Mais il s'agit de la même route

 17   que vous avez empruntée vous-même en direction de Prozor et vous n'aviez

 18   pas besoin d'autorisation, vous ?

 19   Témoin J (interprétation). - Non.

 20   M. Naumovski (interprétation). - Mais il s'agit bien de la même

 21   route !

 22   Témoin J (interprétation). - Oui, mais c'est la première fois

 23   que je vois quelque chose de ce type-là.

 24   M. le Président (interprétation). - L'audience est levée jusqu'à

 25   14 heures 30 demain. Monsieur le Témoin J, je vous prie de revenir demain


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  1   après-midi à 14 heures 30, et nous espérons que nous terminerons avec

  2   votre déposition dans la journée de demain.

  3               L'audience est levée à 16 heures 33.

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