Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL                     Affaire IT-95-14/2-T

  2   POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

  3  

  4                                 LE PROCUREUR

  5                                       C/

  6                                     KORDIC

  7  

  8                           Mercredi 21 juillet 1999

  9                     L'audience est ouverte à 14 heures 36. 

 10                  (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 11   M. le Président (interprétation). - Bonjour.

 12   Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour.

 13   Affaire IT-95-14/2-T, le Procureur contre Dario Kordic et Mario

 14   Cerkez.

 15   M. le Président (interprétation). - Monsieur Stein, vous avez la

 16   parole.

 17   M. Nice (interprétation). - Avant de laisser commencer M. Stein,

 18   j'ai compris que la section chargée des témoins et victimes souhaite

 19   évoquer un certain point.

 20   M. le Président (interprétation). - Oui, Monsieur Donia ?

 21   M. Donia (interprétation). - Monsieur le Président, je voudrais

 22   vous demander de pouvoir parler pendant 5 minutes afin de clarifier les

 23   réponses que j'ai données hier au sujet de la question d'une personne, une

 24   voix.

 25   Si vous souvenez bien, hier, on m'a posé un certain nombre de


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  1   questions -c'est M.

  2   Stein qui me les a posées- un certain nombre de questions, donc, au sujet

  3   d'une citation d'un livre qui s'appelle "Yougoslavie, la mort d'une

  4   nation" par Laura Silber et Alan Little.

  5   Et on m'a posé des questions sur une citation qui se réfère à

  6   cette idée d'une voix par personne au sujet d'Izetbegovic et le HDZ.

  7   M. Stein, suite à une question posée par vous-même, a dit qu'il

  8   s'agissait-là d'un débat absolument crucial au sujet du statut de la

  9   communauté croate.

 10   J'estime, quant à moi, que ce n'était pas un débat crucial, ce

 11   n'était même pas un débat du tout. Je n'avais pas devant les yeux, hier,

 12   le contexte d'où était tirée cette citation, ce livre de Silber et Little.

 13   Et si l'on lit des extraits de ce livre, on se rend compte qu'il

 14   s'agissait d'une question qui n'a été, en fait, que très brièvement d'une

 15   quelconque importance.

 16   Si vous le permettez, je peux placer le livre sur le

 17   rétroprojecteur.

 18   (L'huissier s'exécute).

 19   Je commence ici à la page 209, c'est donc cette citation... sur

 20   la base de cette citation qu'on m'a posé la question hier. Je cite :

 21   "Comme les Serbes, les Croates étaient ulcérés lorsque Izetbegovic a

 22   annoncé en septembre que le SDA s'opposait au principe de la parité

 23   nationale et lorsqu'il a annoncé que le gouvernement suivant serait formé

 24   sur la base du principe d'une personne, une voix". Fin de citation.

 25   J'estime que cette citation est tout à fait fidèle à la réalité.


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  1   Cependant, il faut ajouter quelque chose à cette citation, à savoir la

  2   signification du mot "gouvernement" dans cette citation, ainsi que la

  3   structure à l'époque de ce gouvernement.

  4   Le gouvernement était une institution bien particulière qui

  5   était indépendante de l'assemblée et qui est également complètement

  6   indépendante de la présidence. Il s'agissait d'une institution que l'on

  7   nommait du terme de "Vlada". Il y avait un président dans ce gouvernement,

  8   des vice-présidents et divers ministres.

  9   Donc la proposition d'Izetbegovic n'avait pas trait au vote pour

 10   l'assemblée, ni à la présidence, parce que tout cela était déjà établi par

 11   la Constitution. Sa proposition avait trait à la composition du

 12   gouvernement. Donc cette citation reflète bien les faits.

 13   Cependant, les spéculations qui suivent, les spéculations faites

 14   par les auteurs de l'ouvrage, ce sont les suivantes : ils partent du

 15   principe qu'Izetbegovic parle de l'ensemble des institutions

 16   gouvernementales. Je cite : "Izetbegovic souhaitait jouer en Bosnie le

 17   même jeu que Milosevic avait l'intention de jouer en Yougoslavie". Fin de

 18   citation.

 19   En fait, ceci est vrai, mais uniquement jusqu'à un certain point

 20   parce que ce que Milosevic avait l'intention de faire en Yougoslavie, il

 21   avait l'intention d'instituer un système de vote national pour une

 22   assemblée sur la base du principe "une personne, une voix".

 23   Je reprends la citation : "A moins que les droits civils et

 24   individuels ne soient garantis par les institutions, le vote à la majorité

 25   entraînerait une domination serbe dans l'ensemble du pays".


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  1   Les institutions auxquelles font référence les auteurs ici,

  2   c'est l'ensemble des institutions du pays et je voudrais insister sur le

  3   fait qu'à l'époque, les droits individuels et civiques étaient déjà

  4   garantis par une large gamme d'institutions. Peut-être que ce n'était pas

  5   appliqué, mais les droits étaient en tout cas garantis.

  6   Les auteurs poursuivent, et je cite : "En Bosnie, le même... ce

  7   même principe donnerait aux Musulmans qui représentaient le groupe

  8   ethnique le plus important dans cette République, avec 44 % de la

  9   population, de 4,5-35 millions de personnes, donc, cela donnerait aux

 10   Musulmans le pouvoir, la domination." Fin de citation.

 11   Cela n'aurait pas entraîné de différence par rapport à la fin de

 12   l'époque socialiste.

 13   Ensuite, les auteurs tirent une conclusion très spéculative, je

 14   cite : "La différence, avec ce que se proposait de faire Milosevic pour la

 15   Yougoslavie, c'est que lui il souhaitait mettre en place ce genre de

 16   mesure pour l'ensemble de la Yougoslavie, alors que Izetbegovic

 17   ne souhaitait l'appliquer qu'à la Bosnie".

 18   Et si on lit la fin de la page : "La Constitution de la

 19   République cependant, était telle qu'aucune décision ne pouvait être prise

 20   sans consensus entre les trois groupes qui

 21   constituaient la République." Fin de citation.

 22   Ceci est exact jusqu'à un certain point, puisque les Serbes et

 23   les Croates et les Musulmans étaient reconnus une nation constituante de

 24   la République. Donc la première partie de la phrase est fidèle à la

 25   réalité.


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  1   Cependant, ce que les auteurs disent ensuite, à savoir qu'aucune

  2   décision ne pouvait être prise sans consensus de tous, cela n'est pas

  3   vrai. Et ça, c'est extrêmement important parce que la Constitution qui

  4   était en vigueur à l'époque définissait les communautés nationales, mais

  5   ne leur donnait aucun droit de veto pour les décisions prises soit à

  6   l'Assemblée, soit dans le cadre de la présidence.

  7   On peut trouver un grand nombre d'exemples, aussi bien avant les

  8   élections du 19 novembre 1990 qu'après les élections, où des décisions ont

  9   été prises par ces deux instances, alors qu'une des nations constituantes

 10   de la République s'y opposait formellement.

 11   En d'autres termes, le statu quo était le suivant : les nations

 12   constituantes de la République ne pouvaient pas s'opposer à une décision

 13   et la bloquer. Le consensus n'était pas obligatoire.

 14   Cependant, ce qu'il y a d'essentiel, ici, c'est qu'il est vrai

 15   que les Croates et les Serbes étaient ulcérés par les affirmations

 16   d'Izetbegovic, en septembre.

 17   Malheureusement, hier, M. Stein n'a pas évoqué les phrases qui

 18   suivent, en haut de la page 210. Je cite : "En dépit des tensions

 19   croissantes, les trois partis nationaux, qui se sont réunis à huis clos à

 20   Sarajevo, se sont mis d'accord pour former un front uni contre leur

 21   opposant, à savoir les communistes." Fin de citation. Cet accord a été

 22   élaboré en octobre 1990, avant les élections, et il a résolu le débat du

 23   principe : "une personne, un vote", pour les trois

 24   partis principaux, puisqu'on a décidé que le gouvernement, à savoir le

 25   conseil des ministres, ainsi que divers portefeuilles, se baseraient sur


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  1   le recensement de 1990.

  2   Je ne dispose pas, ici, des documents précis à ce sujet, mais je

  3   suis sûr que vous

  4   pourrez vous-mêmes vous convaincre de la véracité de ce point.

  5   A partir de cet accord, et cela est encore vrai aujourd'hui,

  6   cette question donc de "une personne une voix" a cessé d'être un point de

  7   controverse entre les partis.

  8   Je viens de passer six semaines à passer en revue la presse

  9   quotidienne à Sarajevo, de novembre 1990 à avril 1992. Il s'agissait de

 10   recherches que je faisais pour un autre projet. Et jamais je n'ai vu

 11   évoquer dans la presse cette question du débat sur la question du principe

 12   "une personne une voix" contre le principe de la reconnaissance des

 13   communautés.

 14   Mais il y avait un débat qui apparaissait très clairement, un

 15   débat qui concernait le HDZ. Il ne s'agit pas de la question de "une

 16   personne une voix", il s'agissait de savoir si le HDZ serait un parti qui

 17   représenterait l'ensemble des Croates en Bosnie, à savoir la communauté

 18   nationale -donc dans cette République- ou si le HDZ deviendrait une entité

 19   territoriale définie par les frontières de l'Herceg-Bosna, telles qu'elles

 20   ont été décidées en novembre 1991, avec une loi martiale proclamée le

 21   3 juillet 1992.

 22   Et donc cette entité aurait été placée sous le contrôle du HDZ,

 23   du HVO et de la communauté d'Herceg-Bosna, qui aurait donc obéi au

 24   Président Izetbegovic et répondu de ses actions devant le Président

 25   Izetbegovic.


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  1   Donc il y avait d'un côté des gens qui voulaient que le HDZ

  2   représentent tous les Croates et il y avait, d'autre part, ceux qui

  3   étaient en faveur d'une unité territoriale, d'une entité territoriale qui

  4   aurait exclu environ 250 000 Croates qui n'auraient pas été représentés.

  5   Cette controverse a finalement été résolue grâce à la participation du

  6   régime de Zagreb qui était favorable à l'option territoriale. Cela nous

  7   entraîne dans le contexte des événements dès qu'elle traite l'acte

  8   d'accusation.

  9   Je n'ai pas vu dans les journaux aucun exemple de débat au sujet

 10   du principe "Une personne, une voix", après septembre. Cela est d'ailleurs

 11   évoqué dans cet ouvrage. Je voudrais insister sur le fait que les

 12   citations qui m'ont été lues hier, tirées de cet ouvrage, étaient prises

 13   hors contexte, et que l'on a omis, quand on m'a fait ces citations, de

 14   dire des choses très précises que les auteurs affirmaient.

 15   Si, par exemple, en bas de la page 208, on voit que les auteurs,

 16   disent, je cite : "Les rêves nationaux, l'émergence de partis et de

 17   dirigeants ethniques ne reflétaient pas des haines séculaires, comme cela

 18   a été affirmé plus tard par certains membres désemparés de la communauté

 19   internationale qui s'efforçaient, en vain, de comprendre cette guerre".

 20   Fin de citation.

 21   Or, cette citation ne vous a pas été lue hier. D'autre part, on

 22   n'a pas mentionné les observations des auteurs au sujet de Dario Kordic.

 23   M. le Président (interprétation). - Je crois que nous allons au-

 24   delà de ce qui nous intéresse véritablement. Nous pourrons nous référer à

 25   cet ouvrage s'il en est besoin ultérieurement.


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  1   M. Donia (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

  2   M. le Président (interprétation). - Maître Stein ?

  3   M. Stein (interprétation). – J'ai deux questions d'intendance.

  4   Nous avons substitué de nouvelles copies aux exemplaires D42.

  5   D'autre part, je voudrais parler de la cassette vidéo.

  6   M. le Président (interprétation). - Nous en discuterons une fois

  7   que le témoin aura fini sa déposition.

  8   M. Stein (interprétation). – Je vais commencer par vous poser la

  9   question suivante : est-ce que vous aviez l'ouvrage de Silber lorsque vous

 10   étiez à La Haye, aujourd'hui ?

 11   M. Donia (interprétation). - Je ne me déplace jamais sans lui.

 12   M. Stein (interprétation). – Vous ne vous déplacez jamais sans

 13   lui ?

 14   M. Donia (interprétation). - Je l'avais sur moi quand je suis

 15   arrivé à La Haye.

 16   M. Stein (interprétation). – J'écoute, Monsieur le Juge,

 17   la traduction française, ce qui me permettra

 18   d'aller moins vite que d'habitude. Un peu comme la carte

 19   American Express, vous ne vous déplacez jamais sans elle,

 20   car elle est essentielle pour vous ?

 21   M. Donia (interprétation). - Oui.

 22   M. Stein (interprétation). – Vous ne vous considérez pas comme

 23   quelqu'un qui a pris parti dans cette affaire ? Que ce soit en

 24   faveur d'une partie ou d'une autre ?

 25   M. Donia (interprétation). - Non.


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  1   M. Stein (interprétation). – Regardons brièvement ce que vous

  2   nous avez dit hier au sujet de citations de M. Izetbegovic que je vous ai

  3   lues.

  4   Je ne vais pas les répéter. Mais c'est la seule chose sur

  5   laquelle je souhaite revenir.

  6   Cela avait trait à une citation dans laquelle M. Izetbegovic

  7   dit : "Dans notre Etat, nous vivrons comme il nous conviendra ; personne

  8   ne peut nous dicter la façon dont nous vivrons, etc." Nous avons demandé

  9   quand M. Izetbegovic avait dit cela ou si vous aviez connaissance de cette

 10   citation. Vous avez répondu -je cite- : "Je crois que cela est tiré de la

 11   déclaration islamique qui a été rédigée par M. Izetbegovic."

 12   En fait, j'avance, Monsieur, que cela est tiré d'un discours

 13   prononcé en 1994, prononcé en mai 1994, à La Mecque. Cela, bien entendu,

 14   juste après les accords de Washington.

 15   M. Donia (interprétation). - Puis-je regarder ce document, s'il

 16   vous plaît ? Vous m'avez fait beaucoup de citations, hier, dont vous

 17   affirmez qu'elles viennent de divers ouvrages. Je souhaiterais avoir la

 18   possibilité de lire moi-même exactement ces citations.

 19   M. Stein (interprétation). – Pas de problème.

 20   M. le Président (interprétation). - Quelle importance a la date

 21   de cette citation ?

 22   M. Stein (interprétation). – Pour répondre à votre question,

 23   c'était en 1994 que cette citation a été dite. Est-ce que cela ne donne

 24   pas une image complètement différente ? A partir de 1994, donc, on

 25   voit un peu ce que le dirigeant des Musulmans de Bosnie préconisait,


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  1   dès cette époque.

  2   M. Bennouna. – Pour clarifier, selon ce qu'a dit le témoin, il

  3   nous faudrait des précisions sur le contexte de ce speech, comme vous avez

  4   dit : "speech given in may in Mecca".

  5   (M. le Juge poursuit en anglais.)

  6   Cela est très important. Est-ce que c'était un discours, une

  7   interview personnelle ? Je crois, Maître Stein, qu'il est important de

  8   savoir exactement de quoi nous parlons. Je vous remercie.

  9   M. Stein (interprétation). – D'après le texte dont nous

 10   disposons, il s'agissait d'un discours, discours prononcé par

 11   M. Izetbegovic qui s'adressait donc à des pèlerins et aux héros bosniens ;

 12   discours prononcé en public, à La Mecque, en mai 1994.

 13   M. le Président (interprétation). – Donc le témoin souhaiterait

 14   savoir d'où vous tirez cette information.

 15   M. Stein (interprétation). – Je n'ai qu'un exemplaire, mais je

 16   peux vous le communiquer.

 17   M. Bennouna (interprétation). - Quant ce discours a-t-il été

 18   publié ?

 19   M. Stein (interprétation). – Ce discours a été publié en 1975,

 20   pardon en 1995.

 21   M. Bennouna (interprétation). – Où ?

 22   M. Stein (interprétation). – A Zagreb.

 23   M. Bennouna (interprétation). - Dans quelle publication ?

 24   M. Stein (interprétation). – Cela a été publié, apparemment, au

 25   vu de la première page, par la communauté musulmane de Zagreb.


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  1   M. le Président (interprétation). – Présentez ce document au

  2   témoin, s'il vous plaît.

  3   M. Stein (interprétation). – J'ai placé un post-it au début du

  4   document et les passages importants

  5   sont surlignés en jaune.

  6   M. Donia (interprétation). - Ce que vous me donnez là n'est pas

  7   un discours, c'est un entretien donné à la publication "Liljan",

  8   il s’agit d'un journal de Sarajevo du 10 décembre 1994.

  9   M. Stein (interprétation). – Je crois que vous regardez le

 10   mauvais document.

 11   (Le témoin parcourt les documents transmis par M. Stein.)

 12   Pendant que le témoin lit le document, je dirai à l'attention

 13   des Juges que nous en possédons 4 exemplaires pour les Juges ; si vous

 14   voulez, nous pouvons les faire distribuer.

 15   Il s'agit d'une copie, non pas de l'ouvrage dans son

 16   intégralité, mais de ce discours.

 17   M. le Président (interprétation). – J'espère que vous n'allez

 18   pas rentrer dans le détail de tout ce qui a été dit hier, vous n'allez pas

 19   reprendre tout ce qui a été dit hier.

 20   M. Stein (interprétation). – Non, je n'ai pas cette intention.

 21   M. le Président (interprétation). – Laissons Me Stein proposer

 22   ce document.

 23   M. Stein (interprétation). – Il me semble qu'il en manque un

 24   exemplaire pour mon adversaire, mais nous veillerons à ce que cela soit

 25   rétabli.


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  1   Mme Ameerali (interprétation). – Le document est enregistré sous

  2   la cote D44/1.

  3   M. Stein (interprétation). – Monsieur Donia, en avez-vous

  4   terminé avec votre lecture ?

  5   M. Donia (interprétation). - Oui.

  6   M. Stein (interprétation). – Pouvons-nous, maintenant, ne plus

  7   nous consacrer exclusivement aux documents que vous avez sous les yeux,

  8   mais à une question qui est liée aux élections de 1990.

  9   Vous serez sans doute d'accord avec moi pour dire que les

 10   élections de 1990 ont complètement transformé le paysage politique de

 11   Bosnie ?

 12   M. Donia (interprétation). - Oui.

 13   M. Stein (interprétation). – Et en fait, vous avez fait

 14   remarquer que ces élections démontraient une très grande et remarquable

 15   cohérence avec les élections multipartites précédentes en Bosnie, celles

 16   de 1910 et de 1920.

 17   M. Donia (interprétation). - Oui.

 18   M. Stein (interprétation). – Chacun des groupes ethniques ayant

 19   voté, pour l'essentiel, en faveur des représentants de son groupe

 20   ethnique.

 21   M. Donia (interprétation). - En pourcentages importants.

 22   M. Stein (interprétation). – L'observation que vous aviez faite

 23   à l'époque était que les hommes politiques ont rétabli un modèle de vie

 24   politique fondé sur la coalition au sein de l'assemblée bosniaque et ce,

 25   dans un effort vain pour créer une formule applicable à l'avenir politique


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  1   bosniaque et susceptible de satisfaire toutes les parties.

  2   M. Donia (interprétation). - Je n'ai émis aucun commentaire par

  3   écrit au sujet des élections de 1990, à l'époque. Donc je me demande d'où

  4   vous tirez les mots que vous avez lus.

  5   M. Stein (interprétation). – Je lis ces mots dans votre livre,

  6   page 211. Et je vous dirai plus précisément, Monsieur, que...

  7   M. Donia (interprétation). - Je conviens que cela est tiré de

  8   mon livre, mais cela n'a pas été écrit en 1990 comme vous semblez

  9   l'indiquer.

 10   M. Stein (interprétation). – Votre livre est paru en 1994, mais

 11   a traité des élections de 1990.

 12   M. Donia (interprétation). - Oui.

 13   M. Stein (interprétation). – Eh bien, je voudrais savoir si vous

 14   pouvez nous expliquer ceci : le vainqueur des élections pour le SDA était

 15   M. Fikret Abdic, n'est-ce pas ?

 16   M. Donia (interprétation). - Celui qui a obtenu le plus de voix

 17   pour la présidence a été Fikret Abdic.

 18   M. Stein (interprétation). – Oui, vous avez été beaucoup plus

 19   précis que je ne l'ai été moi-même, et vous

 20   avez raison. Mais il s'est avéré finalement, que

 21   c'est M. Izetbegovic qui est devenu Président de la présidence.

 22   Comment cela s'est-il passé ?

 23   M. Donia (interprétation). – Je ne sais pas.

 24   M. Stein (interprétation). – Pardon ?

 25   M. Donia (interprétation). – Je ne sais pas.


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  1   M. Stein (interprétation). – Et ma dernière question sur ce

  2   sujet, Monsieur, est la suivante : vous faites remarquer dans votre

  3   ouvrage que -je cite : "De nombreux nouveaux dirigeants suscitaient la

  4   crainte et les soupçons chez les membres des minorités nationales, à

  5   l'intérieur des frontières de la République." Fin de citation. C'est une

  6   observation que vous avez faite en 1994 et qui portait sur les élections

  7   de 1990 ?

  8   M. Donia (interprétation). - C'est une observation qui portait

  9   sur la République socialiste fédérative de Yougoslavie et ces diverses

 10   Républiques constitutives, en effet.

 11   M. Stein (interprétation). - Très bien.

 12   Maintenant, très brièvement, pouvons-nous résumer les diverses

 13   positions des partis politiques, suite aux élections de novembre 1990, eu

 14   égard à l'avenir de la Bosnie ? La position serbe était favorable soit à

 15   une confédération, soit à une sécession, est-il permis de dire cela ?

 16   M. Donia (interprétation). - Non.

 17   M. Stein (interprétation). - Monsieur Malcolm, en page 223 de

 18   son livre, fait observer, je cite : "Au début de 1991, Milosevic déclarait

 19   publiquement que 'Si la moindre tentative était faite pour remplacer la

 20   structure fédérale de la Yougoslavie par des dispositions confédérales

 21   beaucoup moins fermes, il chercherait à annexer des régions entières en

 22   Bosnie et en Croatie".

 23   Etes-vous en désaccord avec cela ?

 24   M. Donia (interprétation). - Non, je suis d'accord avec cela,

 25   mais je suis en désaccord avec votre déclaration, à vous, qui ne dit pas


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  1   la même chose que ce que vous venez

  2   de lire.

  3   M. Stein (interprétation). - Et quelle est la partie de ma

  4   déclaration avec laquelle vous n'êtes pas d'accord, Monsieur le Témoin ?

  5   M. Donia (interprétation). - Pourriez-vous la répéter, je vous

  6   prie ?

  7   M. Stein (interprétation). - Non, mais poursuivons pour tenter

  8   de voir si nous pouvons nous mettre d'accord sur la position croate.

  9   M. Bennouna. - Maître Stein, vous faites dire, et je crois que

 10   c'est là-dessus que le témoin n'était pas d'accord, qu'il y a plusieurs

 11   positions.

 12   (L'orateur poursuit en anglais).

 13   C'est cela que vous avez demandé. Qu'entendez-vous par

 14   succession ?

 15   (L'orateur poursuit en anglais).

 16   Je comprends ce que signifie "confédération", mais je ne

 17   comprends pas très bien ce que vous voulez dire par "succession" ou

 18   sécession. Par rapport à quoi ?

 19   M. Stein (interprétation). - Eh bien, reprenons cette question,

 20   je l'avais de toute façon mal formulée, je la reprends, Monsieur le

 21   Témoin.

 22   Convenez-vous du fait que la position serbe était favorable à la

 23   confédération, et je ne cite qu'une seule possibilité ?

 24   M. Donia (interprétation). - Non.

 25   M. Stein (interprétation). - Qu'avez-vous cru comprendre dans ma


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  1   question ?

  2   M. Donia (interprétation). - J'ai cru comprendre que vous n'avez

  3   pas compris ce qu'avait écrit Malcolm.

  4   M. Stein (interprétation). - Très bien.

  5   Quelle était la position serbe en 1991 par rapport à la Bosnie ?

  6   M. Donia (interprétation). - Comme il le dit dans le passage que

  7   vous avez lu, la position serbe, à savoir donc celle de Milosevic et du

  8   SDS, était favorable soit à une Yougoslavie

  9   centralisée -et ce n'est pas une confédération de la

 10   Yougoslavie, c'est une Yougoslavie centralisée- donc favorable soit à une

 11   centralisation soit à la sécession de la communauté serbe et à la création

 12   d'une grande Serbie, à la fin de la communauté serbe distincte.

 13   M. Stein (interprétation). - Il faut donc revenir sur la

 14   question précédente. Mais la position croate, Monsieur le Témoin, était

 15   favorable à la création d'une fédération, n'est-ce pas ?

 16   M. Donia (interprétation). - La position du HDZ a, en fait,

 17   changé au cours de l'année 1991.

 18   M. Stein (interprétation). - En novembre 1991, quelle était-

 19   elle ?

 20   M. Donia (interprétation). - Novembre 1991 est une bonne date.

 21   M. Stein (interprétation). - Je souhaite entendre ce qu'était la

 22   position croate ?

 23   M. Donia (interprétation). - Non, car il n'existe pas une seule

 24   position croate, comme je vous l'ai déjà dit.

 25   M. Stein (interprétation). - Dans ce cas-là, votre réponse ne


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  1   m'importe pas, Monsieur. Je ne la prends pas.

  2   M. Nice (interprétation). - Eh bien, cela me préoccupe un peu de

  3   voir que l'on n'autorise pas le témoin à répondre à la question qu'on lui

  4   a posée.

  5   M. le Président (interprétation). - On peut la lui reposer dans

  6   les questions supplémentaires.

  7   M. Nice (interprétation). - Ce qui me préoccupe aussi un petit

  8   peu, c'est qu'on lui pose des questions sans qu'il ait le document sous

  9   les yeux.

 10   M. le Président (interprétation). - Moi, ce que j'aimerais

 11   beaucoup, voyez-vous, c'est que cet interrogatoire se termine.

 12   M. Stein (interprétation). - Pourrions-nous tourner notre

 13   attention, à présent,

 14   Monsieur, sur la réponse apportée par le gouvernement central de Bosnie-

 15   Herzégovine à l'agression serbe ?

 16   Vous admettez, n'est-ce pas, Monsieur, M. Izetbegovic a déclaré

 17   au début du mois d'octobre que : la Bosnie-Herzégovine était neutre,

 18   qu'elle ne prenait pas parti entre les Serbes et les Croates ?

 19   M. Donia (interprétation). - Pouvez-vous préciser l'année, je

 20   vous prie ?

 21   M. Stein (interprétation). - 1991.

 22   M. Donia (interprétation). - Oui, et je dirais que telle était

 23   la position de la présidence, en tout cas de la majorité de la présidence

 24   de Bosnie-Herzégovine.

 25   M. Stein (interprétation). - Eh bien, nous progressons beaucoup,


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  1   Monsieur.

  2   J'aimerais que nous nous consacrions à un autre sujet,

  3   maintenant. Vous avez fait une autre observation, dans votre livre, au

  4   sujet de la guerre en tant que telle, c'est-à-dire des combats sur le

  5   terrain. Vous avez fait remarquer -et je paraphrase ce que vous avez

  6   écrit- que dans les premiers jours de la guerre les unités qui

  7   combattaient avec l'armée bosniaque étaient exclusivement des unités

  8   composées de brigades musulmanes. Est-ce exact ?

  9   M. Donia (interprétation). - Oui.

 10   M. Stein (interprétation). - Les travaux de recherche montrent

 11   qu'en fait, il y avait des gens extérieurs à la région qui sont venus en

 12   Bosnie pour combattre dans cette guerre.

 13   M. Donia (interprétation). - Ce que vous venez de dire est

 14   différent de la déclaration que vous avez lue dans mon livre.

 15   M. Stein (interprétation). - Eh bien, je lirai directement ce

 16   que vous avez écrit dans votre livre. Page 267, je cite : "Les combats

 17   contre les unités croates en Bosnie centrale ont été

 18   principalement le fait de brigades musulmanes et de forces

 19   gouvernementales musulmanes (l'interprète se reprend)... et de forces

 20   gouvernementales bosniaques. Et dans cette région, les forces

 21   gouvernementales sont devenues presque exclusivement musulmanes". Fin de

 22   citation.

 23   La question que je vous pose, Monsieur, est la suivante : d'où venaient

 24   ces brigades musulmanes ?

 25   M. Donia (interprétation). - Eh bien, elles avaient plusieurs


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  1   origines différentes. D'abord, lorsque la mobilisation a eu lieu, donc au

  2   moment où l'on pouvait commencer à s'attendre à l'éclatement des

  3   hostilités, la mobilisation s'est faite sur un mode territorial.

  4   Par conséquent, des unités de la force de défense territoriale

  5   ont existé qui, en très grand nombre, étaient multiethniques. Et ces

  6   forces de la défense territoriale étaient musulmanes et croates en

  7   Herzégovine, alors que nombre d'entre elles à Sarajevo étaient composées

  8   de Musulmans, de Croates et de Serbes.

  9   Et au fil du temps, la tendance s'est manifestée à singulariser

 10   davantage sur le plan ethnique au sein de ces unités, et ce, pour toutes

 11   les parties. D'abord parce que les hommes qui n'appartenaient pas au

 12   groupe ethnique majoritaire ont commencé à quitter ces unités et en

 13   d'autres cas, ils en étaient expulsés.

 14   Donc voilà la première origine de cette réalité : d'abord, donc,

 15   tendance à la création d'unités armées qui étaient plus monoethniques

 16   qu'auparavant et qui, parfois, ont donné pour résultat des unités purement

 17   croates ou des unités purement musulmanes.

 18   Deuxième raison, deuxième source de ce phénomène : les brigades

 19   musulmanes qui ont été créées à partir du début de l'année 1992 par

 20   notamment des dirigeants de la Défense territoriale ou du MUP, c'est-à-

 21   dire le ministère des Affaires intérieures.

 22   M. Stein (interprétation). - J'aimerais vous demander très

 23   précisément si ces hommes auxquels vous avez fait référence englobaient,

 24   en leur sein, les hommes que l'on appelait les "Mudjahidin".

 25   M. Donia (interprétation). - Le terme "Mudjahidin" a été


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  1   fréquemment utilisé par des commentateurs croates comme terme péjoratif

  2   pour désigner les membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Donc, pour des

  3   yeux croates en tout cas, tous ces hommes étaient des

  4   Mudjahidin.

  5   M. Stein (interprétation). - Soyons plus précis, si vous le

  6   voulez bien.

  7   Y a-t-il eu des hommes qui ont combattu au sein de l'armée de

  8   Bosnie-Herzégovine et qui étaient originaires de l'extérieur de la région,

  9   c'est-à-dire de pays islamiques ?

 10   M. Donia (interprétation). - A ma connaissance, ils étaient très

 11   peu nombreux.

 12   M. Stein (interprétation). - Cela signifie-t-il qu'il y en avait

 13   quelques-uns ?

 14   M. Donia (interprétation). - Oui.

 15   M. Stein (interprétation). - D'où venaient ces hommes, sur la

 16   base de vos travaux de recherche et de vos études ?

 17   M. Donia (interprétation). -Je ne sais pas.

 18   M. Stein (interprétation). - Vous avez dit, dans votre livre et

 19   dans votre déposition dans l'affaire Blaskic, que les membres des unités

 20   musulmanes irrégulières et de groupes musulmans terrorisaient les civils

 21   dans les zones sous contrôle gouvernemental au cours du printemps 1992. Ma

 22   première question : affirmez-vous toujours cela ?

 23   M. Donia (interprétation). - Oui.

 24   M. Stein (interprétation). - Et ma deuxième question : pourriez-

 25   vous nous donner davantage de détails à ce sujet ?


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  1   M. Donia (interprétation). - Je crois que la déclaration parle

  2   d'elle-même.

  3   M. Stein (interprétation). - Le livre que vous avez sur votre

  4   table décrit, en page 331, certaines de ces forces ; j'aimerais que vous

  5   relisiez ces passages. Il est possible que nos éditions ne soient pas

  6   identiques ; donc pouvons-nous les comparer, tout d'abord ?

  7   M. Donia (interprétation). - J'espère que vous l'avez acheté,

  8   aussi, ce livre !

  9   M. Stein (interprétation). - Nous en avons acheté plusieurs !

 10   Nous y reviendrons plus tard, sur ce point précis, mais nous sommes

 11   en train de lire, en page 331, cette édition. Je crains que ce ne

 12   soit pas la même que la vôtre.

 13   M. Donia (interprétation). - En effet, je crains que ce ne soit

 14   pas la même.

 15   M. Stein (interprétation). - Eh bien, je vais citer précisément.

 16   Le sujet du débat est la 7ème Brigade musulmane. Je cite : "Cette brigade

 17   était explicitement bosnienne plutôt que musulmane à son origine. Ses

 18   officiers étaient hostiles aux Occidentaux, ils portaient des insignes

 19   islamiques, de longues barbes, et se saluaient par les termes arabes

 20   "al-salam-maliekum" -"soyez avec moi, je vous prie"-. Leur famille, leurs

 21   enfants, allaient dans des écoles islamiques et leurs épouses et leur

 22   filles portaient de plus en plus souvent le voile en public". Fin de

 23   citation.

 24   La première question que je vous poserai, Monsieur, est la suivante :

 25   saviez-vous qu'il existait une 7ème Brigade qui opérait dans la


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  1   région ?

  2   M. Donia (interprétation). - Oui, je le savais.

  3   M. Stein (interprétation). - Et l'ouvrage de Silber décrit-il

  4   fidèlement à la réalité cette 7ème Brigade ? Je vous pose la question sur

  5   la base de vos connaissances.

  6   M. Donia (interprétation). – En gros, je répondrai oui.

  7   M. Stein (interprétation). – Madame Silber poursuit, phrase

  8   suivante, je cite : "Pour la première fois, un nationalisme xénophobe,

  9   pro-musulman s'affirmait avec vigueur en Bosnie. La politique de tolérance

 10   multiethnique, affirmaient les officiers de la 7ème Brigade musulmane,

 11   avait abouti à la destruction du peuple musulman. Il était temps que les

 12   Musulmans prennent les choses en mains, non pas en tant que Bosniens mais

 13   plus précisément, plus clairement, en tant que Musulmans", (fin de

 14   citation).

 15   M. Donia (interprétation). - Je ne peux pas être totalement

 16   d'accord avec cette affirmation.

 17   M. Stein (interprétation). – Excusez-moi, Monsieur ?

 18   M. Donia (interprétation). – Je ne suis pas d'accord.

 19   M. Stein (interprétation). – Vous ne l'êtes pas ?

 20   M. Donia (interprétation). – Non.

 21   M. Stein (interprétation). – Nous en arrivons au dernier point

 22   de ce débat, car je crois que pour conclure ce débat il est important de

 23   discuter de la situation des réfugiés qui, sans aucun doute, a perturbé un

 24   petit peu la situation démographique de la Bosnie. Alors, parlons de cela.

 25   Vous conviendrez avec moi, n'est-ce pas, qu'en avril 1992, et à


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  1   partir de cette date, notamment tout au long de l'année 1993, les grandes

  2   villes de Bosnie ont vu affluer un grand nombre de réfugiés.

  3   M. Donia (interprétation). – Oui. Je daterai d'ailleurs le début

  4   de ce phénomène à une période bien antérieure.

  5   M. Stein (interprétation). – Quand verriez-vous le début de ce

  6   phénomène ?

  7   M. Donia (interprétation). - On a vu affluer un grand nombre de

  8   réfugiés dans les grandes villes de Bosnie au cours de l'été 1991, pendant

  9   la guerre en Croatie.

 10   M. Stein (interprétation). – Et selon les observations que vous

 11   faites dans votre livre, et je vous demanderai de les commenter, moins de

 12   trois semaines après que la Communauté européenne ait reconnu

 13   l'indépendance de la Bosnie, le HCR -organisme des Nations Unies- a estimé

 14   que 370 000 Bosniaques s'étaient transformés en réfugiés.

 15   A la date du 2 juin, ce nombre avait atteint 750 000, et à

 16   l'automne 1992, la guerre en Bosnie avait produit deux millions de

 17   réfugiés, soit pratiquement la moitié de la population de Bosnie, selon le

 18   recensement de 1991. Sont-ce là les chiffres qui correspondent à vos

 19   travaux de recherche les plus récents ?

 20   M. Donia (interprétation). - Les chiffres que vous venez de

 21   citer sont les chiffres représentatifs de la totalité des réfugiés. A

 22   cette époque-là, une majorité de ces réfugiés n'étaient pas en Bosnie.

 23   M. Stein (interprétation). – Mais un million d'entre eux sont

 24   restés en Bosnie,

 25   n'est-ce pas ?


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  1   M. Donia (interprétation). – C'est exact, oui.

  2   M. Stein (interprétation). – Et vous avez dit estimer, dans

  3   votre livre, je suis sûr que vous êtes encore d'accord aujourd'hui, que

  4   les réfugiés présents en Bosnie se sont heurtés au besoin urgent de la

  5   population civile qui n'avait pas assez de nourriture ou de biens de

  6   consommation courante.

  7   M. Donia (interprétation). – Oui, c'est exact.

  8   M. Stein (interprétation). – Maintenant, avançons jusqu'au

  9   printemps 1993, si vous le voulez bien.

 10   Vous avez dit estimer qu'il y avait environ un million de

 11   réfugiés en Bosnie à ce moment-là, n'est-ce pas ?

 12   M. Donia (interprétation). – Oui.

 13   M. Stein (interprétation). – Il est possible que ce que nous

 14   disions, vous et moi, soit identique, mais je voudrais garantir que nous

 15   le situons bien dans le contexte.

 16   La Commission des droits de l'homme des Nations Unies a déclaré

 17   qu'à partir du 17 novembre 1993, sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, il

 18   y avait plus de 2,1 millions de personnes déplacées, soit près de 40 % de

 19   la population enregistrée au cours du recensement 1991. Nous parlons là de

 20   la totalité du territoire yougoslave, n'est-ce-pas ? Oui ? Non ?

 21   M. Donia (interprétation). – Vous parlez du Haut Commissariat

 22   des Nations Unies pour les Réfugiés et pas de la Commission des droits de

 23   l'homme des Nations Unies ; mais pour le reste je suis d'accord avec votre

 24   déclaration.

 25   M. Stein (interprétation). – Si l'on poursuit la lecture, on lit


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  1   que 800 000 environ sur ces 2,1 millions sont estimés avoir cherché refuge

  2   à l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine, alors que les autres ont cherché

  3   refuge à l'intérieur du pays.

  4   M. Donia (interprétation). – Je crois qu'il est permis de dire

  5   que le processus dont

  6   nous parlons est assez typique. Quand on devient réfugié à cause d'actes

  7   d'hostilité, on commence par chercher refuge dans une localité voisine, et

  8   ensuite, finalement, on se retrouve en dehors de la Bosnie, à l'étranger.

  9   M. Stein (interprétation). – Et le million ou le million trois

 10   cent mille, selon la période considérée, d'individus qui se sont

 11   transformés en réfugiés en Bosnie, se déplaçaient, se sont parfois

 12   déplacés plus d'une fois ?

 13   M. Donia (interprétation). – Oui. D'ailleurs, ils se déplacent

 14   toujours aujourd'hui.

 15   M. Stein (interprétation). – Bien entendu.

 16   Alors si l'on a ces chiffres à l'esprit, je vous demanderai de

 17   nous dire si les travaux que vous avez effectués peuvent nous apporter des

 18   renseignements sur cet aspect lié à la vie quotidienne. Au cours de la

 19   guerre, toute l'infrastructure s'est vue démantelée en Bosnie-Herzégovine,

 20   n'est-ce pas ?

 21   M. Donia (interprétation). - Je ne dirai pas cela exactement

 22   ainsi. Les infrastructures se sont vues considérablement affaiblies déjà

 23   avant la guerre. Elles fonctionnaient à un niveau minimal. Et leur

 24   fonctionnement, pendant la guerre, a dépendu grandement des circonstances

 25   locales. Autrement dit, il y a certains endroits pour lesquels je dirai


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  1   que ce que vous venez d'affirmer est absolument exact.

  2   M. Stein (interprétation). – Bien.

  3   M. Donia (interprétation). - Et pour d'autres endroits, je dirai

  4   que ces infrastructures ont continué à fonctionner de façon satisfaisante

  5   parce qu'elles fonctionnaient de façon minimale avant la guerre.

  6   M. Stein (interprétation). – Donc, il ne fait aucun doute que

  7   des services tels que l'eau, l'électricité, le gaz, l'essence, eh bien,

  8   tous ces biens étaient moins disponibles pendant la guerre.

  9   M. Donia (interprétation). - En effet, oui.

 10   M. Stein (interprétation). – Et les services municipaux tels que

 11   la police, des pompiers, des ambulances, les services d'urgence ont tous

 12   été affectés par la pénurie en hommes, parce que les hommes étaient

 13   envoyés sur le front.

 14   M. Donia (interprétation). - De façon générale, ces services

 15   d'urgence ont mieux fonctionné que d'autres services municipaux plus

 16   routiniers disons. Quoi qu'il en soit votre déclaration était exacte, je

 17   crois.

 18   M. Stein (interprétation). - Très bien. La monnaie a été

 19   dévaluée, le système monétaire s'est écroulé.

 20   M. Donia (interprétation). - Cela s'est passé un peu avant la

 21   guerre, je dirais.

 22   M. Stein (interprétation). - Et cela a continué pendant la

 23   guerre ?

 24   M. Donia (interprétation). - Oui. Le Mark allemand est devenu la

 25   devise en cours dans le pays bien avant la guerre et est demeuré la devise


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  1   en circulation au moins dans les régions contrôlées par l'armée de Bosnie-

  2   Herzégovine. Dans d'autres cas, dans les zones contrôlées par la Croatie,

  3   c'est la Kuna, la devise croate, qui est la devise en circulation.

  4   M. Stein (interprétation). - Et les services d'Etat, les

  5   services fédéraux, c'est-à-dire les retraites, les services de santé, les

  6   programmes en faveur des handicapés ont été ralentis ou négativement

  7   affectés par la guerre, également ?

  8   M. Donia (interprétation). - Les retraites étaient déjà payées

  9   avec retard avant la guerre. Cela n'a fait que s'aggraver pendant la

 10   guerre et aujourd'hui les arriérés sont encore assez importants. Donc je

 11   ne crois pas qu'on puisse dire que ces retards puissent être jugés comme

 12   étant la conséquence de la guerre.

 13   M. Stein (interprétation). - L'observation donc est exacte, mais

 14   la cause est peut-être un peu différente, n'est-ce pas ! Les école aussi

 15   ont été affectées par la guerre ?

 16   M. Donia (interprétation). - Oui.

 17   M. Stein (interprétation). - Elles ont été fermées ? 

 18   M. Donia (interprétation). - La plupart des écoles ont continué

 19   à fonctionner dans une mesure surprenante d'ailleurs pendant la guerre.

 20   M. Stein (interprétation). - Très bien, mais le personnel était

 21   amené à se rendre sur le front, n'est-ce pas ?

 22   M. Donia (interprétation). - Oui.

 23   M. Stein (interprétation). - La radio, la télévision, les

 24   journaux ne fonctionnaient que de façon sporadique ?

 25   M. Donia (interprétation). - Ceci est un domaine où l'on peut


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  1   dire que le fonctionnement a continué et s'est peut-être même intensifié

  2   pendant la guerre.

  3   M. Stein (interprétation). - Pour tous les médias ?

  4   M. Donia (interprétation). - En divers endroits, il y avait des

  5   problèmes d'accès bien sûr, mais on connaît bien l'histoire d'Oslobodenje

  6   qui a continué à paraître pendant toute la guerre à Sarajevo. Et, dans

  7   certains cas, les publications ou les émissions se sont développées au

  8   lieu d'être affectées négativement.

  9   M. Stein (interprétation). - Et que diriez-vous des zones

 10   rurales ?

 11   M. Donia (interprétation). - Eh bien, en général, les médias, la

 12   radio en tout cas, atteignaient les zones rurales sans problème. Les

 13   journaux ont commencé à être lus par certains secteurs de la population

 14   qui ne les lisaient pas du tout par le passé.

 15   M. Stein (interprétation). - J'ai cru comprendre que les prisons

 16   ont été ouvertes ou, pour être plus précis, on a laissé sortir les

 17   prisonniers avant de fermer leurs portes parce qu'on ne pouvait plus les

 18   entretenir ?

 19   M. Donia (interprétation). - C'est une déclaration très

 20   générale, très large, que je n'accepterai pas pour l'ensemble de la

 21   Bosnie-Herzégovine, non.

 22   M. Stein (interprétation). - Mais vous l'accepterez sans doute

 23   pour... Vous admettrez de dire que cette déclaration est

 24   partiellement exacte ? Certaines prisons ont été

 25   ouvertes.


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  1   M. Donia (interprétation). - Je ne sais pas quel textes vous

  2   lisez.

  3   M. Stein (interprétation). - Vous ne connaissez pas d'exemple,

  4   Monsieur, où une prison a été fermée, a fermé ses portes, a mis la clé

  5   sous la porte, et les prisonniers ont été libérés ?

  6   M. Donia (interprétation). - Non.

  7   M. Stein (interprétation). - Vous n'avez pas entendu parler de

  8   cela ?

  9   M. Donia (interprétation). - Si ! Il y a un autre aspect de la

 10   vie quotidienne, c'était les grâces qui étaient régulièrement prononcées

 11   par la présidence, cela remonte aux années 1970.

 12   M. Stein (interprétation). - D'après votre étude, avez-vous pu

 13   constater également que les cours ont été fermées en Bosnie-Herzégovine

 14   pendant la guerre ?

 15   M. Donia (interprétation). - Oui, beaucoup de tribunaux, mais

 16   pas tous. C'est un domaine où il a été très difficile de continuer à

 17   fonctionner.

 18   M. Stein (interprétation). - Et les usines ont été fermées ?

 19   M. Donia (interprétation). - On ne peut pas dire fermées, mais

 20   déjà avant l'année 1991, il y en a eu beaucoup qui ont eu des difficultés

 21   de fonctionnement à cause du coût élevé de l'électricité, à cause des

 22   problèmes concernant les matières premières, en ce qui concerne les

 23   difficultés pour obtenir les moyens de production appropriés. Beaucoup

 24   d'usines ont été détruites et démantelées pendant la guerre. Donc, en

 25   général, la capacité de production, du point de vue industriel, dans ces


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  1   usines, sauf peu d'exceptions, a été anéantie.

  2   M. Stein (interprétation). - Et il y a eu une pénurie de

  3   nourriture, n'est-ce pas ?

  4   M. Donia (interprétation). - Oui, sauf quelques exceptions, cela

  5   s'appliquait à la plus grande partie de la Bosnie-Herzégovine.

  6   M. Stein (interprétation). - Vous seriez d'accord avec moi pour

  7   dire également

  8   qu'au printemps 1993 les tensions, entre les groupes ethniques, étaient

  9   extrêmement élevées ?

 10   M. Donia (interprétation). - Oui.

 11   M. Stein (interprétation). - Ces tensions et ces peurs, parfois

 12   et à certains endroits, ont été caractérisés par des sentiments tels que

 13   la terreur, la peur et la paranoïa ?

 14   M. Donia (interprétation). - Oui.

 15   M. Stein (interprétation). - Vous serez d'accord avec moi pour

 16   dire, n'est-ce pas, qu'à votre avis les forces armées des trois camps ont

 17   commis des atrocités avant le printemps 1993 ?

 18   M. Donia (interprétation). - Oui.

 19   M. Stein (interprétation). - Ce fait et ce phénomène a renforcé

 20   les tensions et l'incertitude en Bosnie centrale ?

 21   M. Donia (interprétation). - Oui, partout en Bosnie-Herzégovine.

 22   M. Stein (interprétation). - Vous avez affirmé qu'en avril 1993

 23   un ultimatum a été lancé ?

 24   M. Donia (interprétation). - Oui, le 3 avril 1993.

 25   M. Stein (interprétation). - Si j'ai bien compris, la base de


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  1   cette affirmation que vous avez faite se trouve dans les journaux ?

  2   M. Donia (interprétation). - La base sur laquelle j'ai tiré la

  3   conclusion qu'il s'agissait d'un ultimatum se trouve d'abord dans le

  4   langage du projet d'accord entre M. Boban et M. Izetbegovic, vu les délais

  5   imposés dans le cadre de cet accord, la nature de la résolution qui avait

  6   été adoptée par le HVO au cours d'une séance le 3 avril 1993,

  7   ensuite la réponse à l’ultimatum dans les

  8   médias, à la fois en Croatie et dans les médias

  9   internationaux, y compris même le Tanjug l'agence de presse yougoslave et,

 10   finalement, le fait que le porte-parole du HVO a réitéré cet ultimatum au

 11   cours de la conférence de presse du 16 avril 1993.

 12   M. Stein (interprétation). – Pouvez-vous dire quel

 13   était le nom du porte-parole ?

 14   M. Donia (interprétation). - Vaso Vegar.

 15   M. Stein (interprétation). – Répétez.

 16   M. Donia (interprétation). - Vaso Vegar.

 17   M. Stein (interprétation). – Nous n'allons pas entrer dans tous

 18   les détails en ce qui concerne ceci, mais nous allons quand même nous

 19   attarder sur certains détails. Tout d'abord, je souhaite vous soumette une

 20   pièce à conviction.

 21   M. le Président (interprétation). - Il s'agit de quelle partie

 22   de l'interrogatoire ?

 23   M. Stein (interprétation). – Il s'agit de l'ultimatum.

 24   M. le Président (interprétation). - Par rapport à

 25   l'interrogatoire principal ?


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  1   M. Stein (interprétation). – Cela est inclus dans le rapport

  2   d'expert de ce témoin.

  3   M. le Président (interprétation). - Mais où cela se trouve-t-il

  4   dans le rapport ?

  5   M. Stein (interprétation). – Je pense que c'est vers la fin.

  6   M. le Président (interprétation). - Si vous souhaitez procéder

  7   au contre-interrogatoire à ce sujet, il va falloir que vous nous disiez de

  8   quelle partie du rapport vous parlez ?

  9   M. Stein (interprétation). – Cela se trouve aux pages 41, 42, 43

 10   et 44.

 11   M. le Président (interprétation). - Attendez, je souhaite

 12   d'abord trouver ceci. Vous souhaitez poser des questions sur quelle partie

 13   du rapport ?

 14   M. Stein (interprétation). – Je me limiterai à la page 43 et à

 15   la conclusion tirée qu'il s'agissait d'un ultimatum.

 16   M. le Président (interprétation). - Oui, veuillez le faire le

 17   plus vite possible.

 18   M. Stein (interprétation). – Très bien. Vous avez lu ?

 19   M. Donia (interprétation). - Oui.

 20   M. Stein (interprétation). – Avant le 15 avril, saviez-vous que

 21   des crimes graves

 22   ont été commis à l'encontre des Croates en Bosnie centrale ?

 23   M. Donia (interprétation). - Il y a eu un nombre de conflits, y

 24   compris les conflits entraînant des pertes civiles, des deux côtés

 25   opposés, en Bosnie centrale, avant le 15 avril.


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  1   M. Stein (interprétation). – Je souhaite vous montrer un

  2   organigramme et vous poser la question de savoir si cela reflète une

  3   partie des crimes commis contre les Croates de Bosnie centrale, en

  4   avril 93 ?

  5   Mme Ameerali (interprétation). - Il s'agit du document D45/1.

  6   M. le Président (interprétation). - Auparavant, avant de voir si

  7   le témoin est d'accord ou pas avec cela, il va falloir peut-être prévoir,

  8   Maître Stein, la possibilité de verser ceci au dossier d'une autre

  9   manière.

 10   Monsieur, si vous pouvez exprimer votre accord avec cela, dites-

 11   le, mais si vous n'êtes pas en mesure de le faire, dites-le également.

 12   M. Donia (interprétation). - Je pense que je ne suis pas

 13   qualifié pour juger de la validité de ce rapport.

 14   M. le Président (interprétation). - Très bien. Veuillez remettre

 15   cela à Me Stein de nouveau.

 16   M. Stein (interprétation). – Merci, Monsieur le Président. Nous

 17   trouverons un autre moyen de le verser au dossier.

 18   L'un des témoins dans cette affaire, M. McLeod, a dit, le 14 mai

 19   -il s'agit de la page 4 du compte rendu d'audience-, que : "Les événements

 20   qui se sont produits vers la mi-avril, avant le 16 avril, indiquent qu'il

 21   y a eu des tensions pendant une longue période, entre ces deux groupes

 22   ethniques en Bosnie centrale. Et tout cela a explosé le matin du

 23   16 avril." Fin

 24   de citation.

 25   Cela est conforme à votre opinion concernant le niveau de


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  1   tension qui existait en Bosnie centrale avant le 15 avril, n'est-ce pas ?

  2   M. Donia (interprétation). - Je crois que la première phrase que

  3   vous avez lue serait conforme à ma façon de comprendre cette affaire. Mais

  4   je ne serai pas d'accord avec la seconde phrase.

  5   M. Stein (interprétation). – Savez-vous, Monsieur, que le

  6   15 avril 1993, un commandant de brigade du HVO, dont le nom était Totic, a

  7   été enlevé à Zenica et certains de ses gardes du corps ont été tués ?

  8   M. Donia (interprétation). - Non.

  9   M. Stein (interprétation). – Vous ne le saviez pas ?

 10   M. Donia (interprétation). - Non.

 11   M. Stein (interprétation). – Savez-vous qui est le lieutenant-

 12   colonel Robert Stewart ?

 13   M. Donia (interprétation). - Oui.

 14   M. Stein (interprétation). – Il était le commandant du Bataillon

 15   britannique en Bosnie centrale, durant cette période ?

 16   M. Donia (interprétation). - Oui, d'après ce que j'ai pu

 17   comprendre.

 18   M. Stein (interprétation). – Le colonel Stewart a témoigné

 19   devant ce Tribunal et il a exprimé l'avis -je cite- : "Pour moi, il est

 20   clair que l'enlèvement de Totic..."

 21   M. le Président (interprétation). - Mais vous voulez en venir

 22   où ? Le témoin vous a dit qu'il ne le savait pas. Il n'y a pas de raison

 23   de lui poser d'autres questions concernant cet enlèvement. Vous pouvez

 24   poser ce genre de questions à d'autres témoins ou à vos propres témoins.

 25   Mais, si le témoin dit qu'il n'est pas au courant, il n'est pas nécessaire


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  1   d'entrer dans les détails.

  2   M. Stein (interprétation). – Je ne souhaitais pas parler de

  3   ceci, mais d'autre chose. Je vais essayer de reformuler ma question.

  4   Votre opinion est la suivante : que les événements qui se sont

  5   produits vers la mi-

  6   avril ont été le résultat des menaces diffusées par les médias.

  7   M. Donia (interprétation). - Monsieur, mon affirmation concerne

  8   la situation politique et je n'ai pas exprimé d'avis concernant les

  9   opérations tactiques et militaires des unités, soit le 16 avril ou à aucun

 10   autre moment. J'ai noté, simplement noté, que le HVO qui contrôlait la

 11   région à l'époque et qui avait la possibilité d'employer des mesures

 12   faisant partie d'un état d'urgence, que le HVO avait publié une sorte

 13   d'ultimatum. Et cela a été interprété en tant que tel, à l'époque, par un

 14   grand nombre d'observateurs dans la région, à la fois des acteurs locaux

 15   et des observateurs de l'extérieur. C'est ce que j'ai voulu dire.

 16   M. Stein (interprétation). – Moi, je voudrais parler des acteurs

 17   locaux. Vous, vous n'avez pas parlé avec les acteurs locaux sur le

 18   terrain, n'est-ce pas ?

 19   M. Donia (interprétation). - Non, je n'ai pas parlé de cela dans

 20   mon rapport. Je ne dis pas avoir parlé avec eux et cela sort du champ de

 21   mon interrogatoire, de ma déposition.

 22   M. Stein (interprétation). – Vous avez dit que votre rapport

 23   concernait la situation politique -vous l'avez dit tout à l'heure- et que

 24   vous n'avez pas exprimé d'avis sur les opérations militaires et

 25   stratégiques des unités, ni le 16 avril ni à aucun autre moment. Donc,


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  1   d'après votre réponse, vous parlez sur un plan théorique, mais vous n'avez

  2   jamais parlé avec les individus sur le terrain.

  3   M. le Président (interprétation). - Il a répondu à cela.

  4   M. Stein (interprétation). – Monsieur, dans votre livre, vous ne

  5   mentionnez pas du tout cet ultimatum ?

  6   M. Donia (interprétation). - C'est exact.

  7   M. Stein (interprétation). – Saviez-vous également, Monsieur,

  8   que l'accord

  9   d'avril 93 a eu pour résultat un commandement conjoint ?

 10   M. Donia (interprétation). - Je ne serai pas d'accord pour le

 11   caractériser en tant qu'accord ; ceci a été signé, mais n'a jamais été

 12   soutenu, signé de quelque manière que ce soit

 13   par l'armée de Bosnie-Herzégovine ni par le gouvernement de Bosnie-

 14   Herzégovine. En ce qui concerne le commandement conjoint, c'était une idée

 15   créée bien auparavant, dès le début de l'année 92.

 16   M. Stein (interprétation). – Mais, arrêtez... Etes-vous d'accord

 17   avec cette partie de ma phrase ?

 18   M. Donia (interprétation). - Je ne suis pas du tout d'accord. Je

 19   vous ai entendu dire que le résultat de l'accord était la création du

 20   commandement conjoint.

 21   M. Stein (interprétation). – Et en ce qui concerne le

 22   commandement conjoint ?

 23   M. Donia (interprétation). - Et vous avez dit que c'est l'accord

 24   qui a entraîné l'établissement du commandement conjoint ?

 25   M. Stein (interprétation). – Je vais maintenant lire une


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  1   déclaration de Zemo Merdan, qui était le général au poste de chef d'état-

  2   major de l'armée de Bosnie-Herzégovine, de Sarajevo. Dans ses déclarations

  3   données au Bureau du Procureur, il a dit : "Le 2 avril 1993, un accord a

  4   été signé entre Mate Boban et Alija Izetbegovic, énonçant un nombre de

  5   conditions et de termes. La base de cet accord était le travail effectué

  6   par la commission conjointe dont je parlerai tout à l'heure. J'ai assisté

  7   aux négociations qui ont mené à cet accord.

  8   Dans l'accord formel, il a été dit, entre autres, que les unités

  9   originaires d'une région extérieure par rapport à la région où elles

 10   étaient déployées devaient quitter les lieux dans un délai de trois jours.

 11   Cela s'est fait surtout à cause du fait que les soldats de la HV étaient

 12   dans la région. La preuve se trouvait dans le fait que l'un d'eux avait

 13   été tué sur la route entre Vitez et Busovaca.

 14   En ce qui concerne le quatrième point de cet accord selon lequel

 15   il a été décidé de

 16   créer un commandement conjoint, réunissant le HVO et l'armée de Bosnie-

 17   Herzégovine, le commandement conjoint a été créé vers la fin du mois

 18   d'avril ou bien au début du mois de mai 1993, avec le HVO à Travnik. Et il

 19   a fonctionné pendant environ 15 jours jusqu'au conflit à

 20    Travnik qui a éclaté en mai.

 21   Le but de ce point d'accord était la tentative de nous unifier à

 22   l'encontre de l'ennemi commun qui était l'armée des Serbes de Bosnie".

 23   M. le Président (interprétation). - Est-ce que vous êtes capable

 24   d'absorber ces informations ?

 25   M. Donia (interprétation). - Oui, tout à fait.


Page 5094

  1   M. le Président (interprétation). - Très bien.

  2   M. Stein (interprétation). - Donc, au moins, d'après le Général,

  3   il y a eu un accord et il y a eu un commandement conjoint ?

  4   M. Donia (interprétation). - En général, l'histoire est vraie.

  5   Je crois qu'il se trompe en ce qui concerne les dates. Je pense qu'il a

  6   placé les événements trois semaines avant qu'ils ne se soient produits. Il

  7   s'agissait du 3 et non pas du 2 août. Le Président Izetbegovic est rentré

  8   de Zagreb à Sarajevo le 27 mars. Et le 3 avril, il a présidé une réunion

  9   du gouvernement de Bosnie-Herzégovine et il a rencontré l'ambassadeur

 10   français. Il n'était pas à Mostar, c'est-à-dire le lieu où l'accord a

 11   prétendument été signé. Il n'était pas au courant de ce projet d'accord.

 12   Mais, par la suite, après le cessez-le-feu qui a été organisé

 13   vers le 22 ou le 23 avril, il y a eu des discussions concernant cet

 14   accord. Le Bataillon britannique a essayé d'organiser ce cessez-le-feu.

 15   Et, à ce moment-là, il y a eu de nouvelles discussions à ce sujet. Donc,

 16   ma meilleure interprétation serait tout simplement qu'il se trompe de

 17   date. Et si j'ai raison, cela veut dire que ces propos n'ont pas de

 18   pertinence par rapport à l'ultimatum.

 19   M. Stein (interprétation). - Si vous n'avez pas raison ?

 20   M. Donia (interprétation). - Oui.

 21   M. Stein (interprétation). - Est-ce que cette conclusion que

 22   vous avez tirée concernant ce prétendu ultimatum... Est-ce que des

 23   historiens raisonnables pourraient être en désaccord avec cette

 24   affirmation ?

 25   M. Donia (interprétation). - Je pense que les preuves sont tout


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  1   à fait bonnes, mais il y aura toujours des personnes qui seront en

  2   désaccord ; je pense que les historiens raisonnables seront d'accord avec

  3   moi.

  4   M. Stein (interprétation). - Mais quelques historiens ne seront

  5   pas d'accord avec vous.

  6   M. Donia (interprétation). - Quelques historiens, effectivement,

  7   ne seront pas d'accord avec moi et puis quelques avocats non plus.

  8   M. Stein (interprétation). - En conclusion, je souhaite vous

  9   poser la question suivante. Dans son livre le colonel Stewart exprime

 10   l'opinion que je vais vous lire, je cite : "La Bosnie est certainement

 11   plus complexe que personne ne puisse imaginer. Il y a beaucoup plus que

 12   trois camps : Serbes, Croates et Musulmans, dont on entend parler dans les

 13   médias. Il y a des factions dans les groupes, il y a des groupes dans les

 14   factions. Et ces éléments différents ont provoqué une situation qui

 15   ressemble le plus à une anarchie". Ceci est tiré du livre de Stewart. Est-

 16   ce que vous l'avez lu ?

 17   M. Donia (interprétation). - Oui.

 18   M. Stein (interprétation). - Seriez-vous d'accord avec une telle

 19   conclusion ?

 20   M. Donia (interprétation). - Je pense que cela peut s'appliquer

 21   à différents lieux et périodes en Bosnie-Herzégovine. Je pense que sa

 22   caractérisation générale rend cet ultimatum du 3 avril encore plus

 23   étrange, étant donné qu'il s'agissait-là d'une des rares périodes durant

 24   cette guerre pendant laquelle l'administration civile et militaire avait

 25   annoncé -auparavant- son intention de lancer une opération militaire.


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  1   M. Stein (interprétation). - Savez vous que le colonel Stewart

  2   nous avait dit que le HVO n'était pas préparé pour les événements qui se

  3   sont produits dans la vallée de la Lasva, le 15 avril ?

  4   M. Donia (interprétation). - Non.

  5   M. Stein (interprétation). - Je n'ai plus de questions à poser. 

  6   M. le Président (interprétation). - Maître Mikulicic, vous avez

  7   besoin de combien de temps, étant donné que dans 5 minutes nous

  8   procèderons à la suspension d'audience ? Est-ce que vous souhaitez que

  9   nous la fassions maintenant ?

 10   M. Mikulicic (interprétation). - Oui, je pense que ce serait

 11   mieux et ensuite j'aurai besoin d'une demi-heure.

 12   M. le Président (interprétation). - Très bien. Nous suspendons

 13   l'audience pendant 15 minutes.

 14         L'audience, suspendue à 15 heures 55, est reprise à

 15         16 heures 17.

 16   M. le Président (interprétation). - Maître Mikulicic, vous avez

 17   la parole.

 18   M. Mikulicic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

 19   Bonjour, Monsieur Donia. Je m'appelle Goran Mikulicic.

 20   M. Donia (interprétation). – Oui.

 21   M. Mikulicic (interprétation). - Je suis avocat à Zagreb, et

 22   dans la présente affaire, avec Me Kovacic, je défends les intérêts de

 23   Mario Cerkez, le deuxième accusé. Je prends la liberté de vous poser

 24   quelques questions et je vous demanderai de bien vouloir y répondre en

 25   fonction de vos souvenirs.


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  1   Monsieur Donia, avant d'en arriver aux questions que j'ai

  2   inscrites sur un papier qui est sous mes yeux, j'aimerais revenir sur deux

  3   questions qui, à mon avis, n'ont pas été

  4   suffisamment éclaircies dans votre déposition, jusqu'à présent.

  5   Le premier de ces sujets est un sujet dont vous avez parlé il y

  6   a très peu de temps, au début de cette après-midi, quand vous avez dit que

  7   le HVO, sur les territoires où il avait établi sa compétence, avait

  8   décrété ce que vous avez appelé la loi martiale. Pouvez-vous nous

  9   dire à quoi vous pensiez en utilisant ces termes ?

 10   M. Donia (interprétation). – Oui, je crois avoir fait remarquer

 11   qu'il s'agissait d'une disposition émanant de la Constitution, c'est-à-

 12   dire d'une loi martiale liée à la Constitution. Et je faisais référence à

 13   la proclamation du 3 juillet 1992 selon laquelle le HVO devenait

 14   l'autorité suprême temporairement sur le territoire de l'Herceg-Bosna. Et

 15   je faisais référence également à la fusion du pouvoir qui s'est produite,

 16   si je ne m'abuse en novembre 1992, au moment où le chef du HDZ de Bosnie-

 17   Herzégovine, la communauté croate d'Herceg-Bosna et le HVO ont été fondus

 18   en étant représentés par une seule et même personne.

 19   J'ai utilisé l'expression loi martiale pour faire référence aux

 20   dispositions assez peu courantes que l'on trouvait dans ce texte du

 21   3 juillet. Et mon emploi de cette expression peut être non applicable du

 22   point de vue de la Constitution, je n'en sais rien, mais en tout cas, elle

 23   me semble refléter assez fidèlement la situation en vigueur en Herceg-

 24   Bosna.

 25   M. Robinson (interprétation) – Monsieur Donia, quels étaient les


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  1   aspects de cette situation qui vous ont poussé à utiliser les termes de

  2   loi martiale ?

  3   M. Donia (interprétation). – Eh bien, le fait que des fonctions

  4   judiciaires notamment, y compris les fonctions assumées par les tribunaux,

  5   ainsi que d'autres fonctions administratives, se sont vues regroupées sous

  6   la direction d'un organisme militaire.

  7   M. Robinson (interprétation) - Merci.

  8   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, Monsieur le

  9   Juge Robinson a précédé la question que j'avais l'intention de vous

 10   poser, mais je vais tout de même vous la poser de façon très directe.

 11   Pensez-vous que cela signifiait que, sur ces territoires, l'ensemble

 12   des pouvoirs civils ont été suspendus et remplacés par des pouvoirs

 13   militaires ?

 14   M. Donia (interprétation). – Selon mon interprétation, ce n'est

 15   pas tout à fait de cela dont il s'agit, mais plutôt d'une fusion sous

 16   autorité militaire. Je ferai remarquer qu'au nombre des objections

 17   exprimées par les membres du HDZ qui se sont opposés à la création

 18   d'une Herceg-Bosna plus puissante -je crois que je parle ici d'une

 19   proclamation qui a été émise le 4 ou le 5 juillet 1993- ce à quoi ces

 20   hommes faisaient partiellement objection, ce n'était pas à l'existence du

 21   HVO, mais au fait que le HVO s'acquittait désormais de fonctions

 22   administratives.

 23   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, savez-vous que

 24   le concept de HVO recouvrait une composante civile et une composante

 25   militaire ?


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  1   M. Donia (interprétation). – Oui.

  2   M. Mikulicic (interprétation). - Savez-vous, Monsieur Donia, que

  3   la composante militaire du HVO au mois de juillet 1992 a été reconnue

  4   comme composante légitime des forces armées de la République de Bosnie-

  5   Herzégovine ?

  6   M. Donia (interprétation). – Oui.

  7   M. Mikulicic (interprétation). - Eh bien, passons à présent à ce

  8   deuxième sujet qui, à mon avis, est demeuré insuffisamment éclairci.

  9   Vous avez parlé de l'accord conclu entre Alija Izetbegovic et

 10   Mate Boban, qui a été rendu public par le porte-parole Vaso Vegar.

 11   J'aimerais me concentrer sur l'article 2 de cet accord que je me

 12   permettrai de vous lire.

 13   Dans cet article 2, on lit ce qui suit -je cite- : "Toutes les

 14   forces armées du HVO et de la police de la communauté croate de Herceg-

 15   Bosna, ainsi que l'armée de Bosnie-Herzégovine, et la police relevant du

 16   ministère des Affaires intérieures de la Bosnie-Herzégovine qui, en

 17   principe, ont des pouvoirs (?) qui viennent de régions situées en dehors

 18   des frontières de la province, doivent s'identifier et quitter ces

 19   provinces dans un délai de trois

 20   jours ." Fin de citation.

 21   Monsieur Donia, pourriez-vous vous concentrer, je vous prie, sur

 22   les termes "les forces originaires de zones situées à l'extérieur de la

 23   province". A votre avis, quelle est l'interprétation de ces termes ?

 24   S'agit-il de l'ensemble de l'armée de Bosnie-Herzégovine ou

 25   bien des forces qui se sont trouvées sur les territoires du 8ième, du 9ème


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  1   et du 10ème cantons, sans en être originaire ?

  2   M. Donia (interprétation). – Eh bien, je dirai tout d'abord que

  3   je ne peux pas partager la définition que vous donnez de ceci comme étant

  4   un accord, car ce texte n'a jamais été discuté ou adopté par le Président

  5   Izetbegovic. Même dans un article de presse dont l'auteur était le porte-

  6   parole du HVO, je crois que le terme utilisé pour faire référence à ceci

  7   est "projet d'accord" ; un projet d'accord qui n'était pas encore signé

  8   par le Président Izetbegovic.

  9   D'autre part, je ne suis pas en mesure d'interpréter la

 10   signification précise de ce qui est stipulé dans l'article que vous venez

 11   de lire. Je crois que, d'une certaine façon, il apparaît clairement qu'il

 12   devait y avoir une division des forces.

 13   Mais ce que les auteurs de ce texte voulaient dire en utilisant

 14   les termes "originaires de secteurs ou de zones extérieures à cette

 15   province", j'en suis incapable, je ne suis pas habilité à interpréter

 16   l'emploi de tels termes. Je ne sais pas exactement à quoi ils font

 17   référence.

 18   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, dans votre

 19   rapport qui nous a été remis, vous dites sur ce thème particulier que le

 20   texte que nous venons de lire signifie, je cite : "L'ensemble des forces

 21   bosniaques doivent quitter les provinces 3, 8 et 10, où elles étaient

 22   présentes en nombre important." Fin de citation. Et cette affirmation que

 23   vous avez faite, je ne peux que l'interpréter comme elle a été écrite,

 24   c'est-à-dire comme se rapportant à l'ensemble des forces, à toutes les

 25   forces.


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  1   Pourtant, si l'on parle uniquement des forces originaires de

  2   cette région, on parle de

  3   quelque chose d'un peu différent, n'est-ce pas ?

  4   M. Donia (interprétation). – Eh bien, j'aimerais vous renvoyer à

  5   ce qui s'est passé le 16 avril, date à laquelle à une conférence de

  6   presse, M. Vegar a fait la clarté sur les termes de cet ultimatum. A cette

  7   conférence de presse, on lui a demandé si l'armée de Bosnie-

  8   Herzégovine et ces unités présentes dans les provinces 3, 8, et 10,

  9   devaient rendre leurs armes. C'est une question qui lui a été posée à

 10   cette conférence de presse. Il a répondu en disant : "Non". Ce qui est

 11   exigé, c'est soit que les unités de l'armée de Bosnie-Herzégovine se

 12   retirent, soit qu'elles se soumettent au commandement du HVO.

 13   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, peut-être que

 14   j'insiste un peu trop sur ce point, mais c'est un fait qui est très

 15   important. Donc, je vous demande d'être compréhensif et je le demande

 16   également aux Juges de cette Chambre.

 17   Ici, il n'est pas question de ce que vous appelez un ultimatum

 18   adressé uniquement aux forces de la police et de l'armée Bosniaque, mais

 19   également des forces de police et de l'armée croate en Bosnie-Herzégovine

 20   qui ne sont pas originaires des régions ou des provinces 3, 8 et 10.

 21   M. Donia (interprétation). – Je crois que les termes utilisés

 22   parlent de retrait des forces concernées, non pas des provinces 3, 8

 23   et 10, mais des provinces auxquelles ces force n'appartiennent pas. C'est-

 24   à-dire que le concept, ici, c'est que les forces du HVO, s'il y en avait

 25   dans ces provinces, se retireraient des provinces qui étaient affectées à


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  1   la Bosnie-Herzégovine par le plan Vance-Owen.

  2   Et de même, s'il y avait des troupes de l'armée de Bosnie-

  3   Herzégovine ou des unités de la police, du MUP de la Bosnie-Herzégovine

  4   sur le territoire des provinces 3, 8 et 10, eh bien, elles se verraient

  5   contraintes de se retirer de ces provinces.

  6   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, si nous

  7   acceptons votre définition de ce dispositif comme étant un ultimatum, est-

  8   il exact que cet ultimatum a été adressé aussi bien au HVO qu'à l'armée de

  9   Bosnie-Herzégovine ? Parce que les unités de l'une comme de l'autre

 10   devaient se retirer des provinces auxquelles elles n'appartenaient pas.

 11   M. Donia (interprétation). – Les faits précis de l'ultimatum

 12   dépendaient de l'identité des unités qui se trouvaient à tel ou tel

 13   endroit. S'il y avait par exemple, de

 14   nombreuses unités de l'armée de Bosnie-Herzégovine dans les provinces 3,

 15   8 et 10, et qu'il n'y avait pas d'unités du HVO dans les provinces

 16   affectées à la Bosnie-Herzégovine, il se serait agi, en effet, d'un

 17   ultimatum unilatéral. Mais s'il y avait des forces du HVO dans toutes les

 18   provinces affectées au gouvernement central, il ne se serait plus agi d'un

 19   ultimatum unilatéral, mais d'un ultimatum concernant toutes les forces en

 20   présence. Et moi, je ne sais pas exactement quelles étaient les unités

 21   affectées ou présentes dans telle ou telle région à moment-là.

 22   M. Mikulicic (interprétation). – Merci, Monsieur Donia, nous

 23   allons maintenant passer à un autre sujet.

 24   Hier, au début de votre déposition, mon confrère Me Stein, vous

 25   a demandé si, au cours de la préparation de votre rapport, vous avez


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  1   jamais parlé avec Dario Kordic, si vous aviez jamais demandé à

  2   l'interwiever, et s'il est exact que le nom de Dario Kordic n'est pas

  3   présent, n'est pas mentionné dans votre livre de 1994. Et la question que

  4   je vous pose est la suivante : ces mêmes remarques s'appliquent-elles

  5   également à M. Mario Cerkez ?

  6   M. Donia (interprétation). - En fait, vous m'avez posé deux

  7   questions ; la première est : ai-je jamais interviewé ou rencontré votre

  8   client ? A cette question, je réponds non.

  9   Et votre deuxième question est : son nom apparaît-il dans mon

 10   livre ? A cette question, je réponds également non.

 11   M. Mikulicic (interprétation). – Bien, merci. Je prierai

 12   maintenant M. l'Huissier de bien vouloir placer sur le rétroprojecteur la

 13   pièce à conviction qui a pour cote Z1660.

 14   Il s'agit d'une carte de l'ex-Yougoslavie, d'une partie de l'ex-

 15   Yougoslavie dont nous sommes en train de discuter, et j'aimerais donc pour

 16   faciliter nos débats que cette carte soit

 17   placée sur le rétroprojecteur avant que je ne pose quelques questions à

 18   M. Donia.

 19   (L'huissier s'exécute.)

 20   Docteur Donai, nous avons donc sous les yeux la carte de l'ex-

 21   Yougoslavie qui,

 22   pour le moment, ne nous intéresse que dans la mesure où elle nous permet

 23   de déterminer les frontières de la République de Bosnie-Herzégovine par

 24   rapport au territoire des Républiques voisines qui, ensuite, sont devenues

 25   des Etats.


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  1   Je vous demanderai donc d'utiliser le pointeur pour nous montrer sur cette

  2   carte quels sont les Etats -puisque les Républiques sont plus tard devenus

  3   des Etats- quels sont donc les Etats frontaliers de la Bosnie-

  4   Herzégovine ?

  5   M. Donia (interprétation). – Eh bien, il y a deux Etats qui sont

  6   limitrophes de la Bosnie-Herzégovine. Premièrement, la République de

  7   Croatie et deuxièmement, la République fédérale de Yougoslavie

  8   reconstituée, c'est-à-dire composée de la République du Monténégro, de la

  9   République de Serbie de la Voïvodine qui a été annexée à la République de

 10   Serbie en 1990.

 11   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, dites-nous

 12   d'abord rapidement de quel territoire provenait le gros de l'agression

 13   commise contre la Bosnie-Herzégovine. Et ce disant, je pense à l'agression

 14   de l'armée populaire yougoslave et des unités armées paramilitaires serbes

 15   et monténégrines.

 16   M. Donia (interprétation). - L'agression est venue à la fois de

 17   la République de Croatie, et s'agissant des unités paramilitaires

 18   monténégrines et serbes et de l'ex-armée populaire yougoslave, je

 19   comprends bien votre question. Je dirai que l'agression a été dû à des

 20   troupes irrégulières du Monténégro, et de paramilitaires Monténégrins qui

 21   ont pénétré en Herzégovine, ainsi que de forces qui ont traversé la

 22   frontière avec la Serbie.

 23   L'agression est venue également de l'intérieur de la Bosnie-

 24   Herzégovine, en raison des unités de la JNA et de nombreuses unités

 25   paramilitaires serbes, et dans certains cas, de


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  1   forces de la Défense territoriale reconstituée.

  2   Ai-je bien répondu à votre question ?

  3   M. Mikulicic (interprétation). – Bien sûr, mais je vous

  4   demanderai encore un

  5   éclaircissement. Quand vous avez dit que l'agression était venue également

  6   en partie de la République de Croatie, conviendrez-vous avec moi que

  7   l'agression est venue de parties, de secteurs de la République de Croatie

  8   qui, à ce moment-là, était sous le contrôle des unités paramilitaires

  9   serbes et de certaines parties de l'armée populaire yougoslave ?

 10   M. Donia (interprétation). – Oui, en effet. Elles en faisaient

 11   partie.

 12   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, conviendrez-

 13   vous avec moi, par conséquent, que les frontières avec la Serbie et le

 14   Monténégro d'une part, c'est-à-dire du côté sud-est, et d'autre part les

 15   frontières avec la Croatie, tenues en partie par l'armée populaire

 16   yougoslave, étaient pratiquement fermées aux citoyens ou ressortissants de

 17   la République de Bosnie-Herzégovine ? Il n'y avait donc pas de circulation

 18   au niveau de ces frontières. Est-ce exact ?

 19   M. Donia (interprétation). - Pourriez-vous définir un peu mieux

 20   la période dont vous parlez ?

 21   M. Mikulicic (interprétation). - Je parle avant tout de la

 22   période qui va de 1992 à l'accord de Dayton.

 23   M. Donia (interprétation). - Je dirai qu'à partir du début de

 24   l'été 1992, c'est une déclaration que l'on peut faire effectivement de

 25   façon générale, affirmation qui est sans doute valable pour une période


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  1   allant un peu au-delà de l'accord de Dayton.

  2   M. Mikulicic (interprétation). - Mais, tout de même,

  3   Monsieur Donia, la population de Bosnie-Herzégovine recevait de l'aide

  4   alimentaire, elle recevait des médicaments, des vêtements, des réfugiés

  5   traversaient les frontières. Alors, conviendrez-vous avec moi que,

  6   lorsqu'on parle de passage des frontières, on parle exclusivement du

  7   passage de

  8   la frontière entre la République de Bosnie-Herzégovine et la République de

  9   Croatie ?

 10   M. Donia (interprétation). - En grande partie. Il y avait de

 11   l'aide qui arrivait par la voie aérienne. Je ferai remarquer que je suis

 12   toujours entré en Bosnie-Herzégovine, pendant la

 13   guerre, en passant par Zagreb. Il y avait en fait de grandes quantités

 14   d'aides humanitaires qui passaient par la République de Croatie pour se

 15   rendre en République de Bosnie-Herzégovine avec, très souvent, un fort

 16   pourcentage de ces aides qui était confisqué par des forces de l'armée

 17   croate ou du HVO, au moment de leur entrée en Bosnie-Herzégovine.

 18   Mais, pour le reste, je serais d'accord avec vous : tout ce qui

 19   entrait en Bosnie-Herzégovine entrait majoritairement par la République de

 20   Croatie.

 21   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, vous

 22   conviendrez avec moi que la République de Croatie a, le lendemain de la

 23   proclamation de l'indépendance de la République de Bosnie-Herzégovine,

 24   reconnu cet Etat ; et que la République de Croatie a été le premier Etat

 25   au monde à envoyer un ambassadeur dans Sarajevo occupée, durant la guerre


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  1   qui faisait rage en Bosnie-Herzégovine ? Est-ce exact ?

  2   M. Donia (interprétation). - Oui.

  3   M. Mikulicic (interprétation). - Et, de même, après un certain

  4   temps, à Zagreb, capitale de la République de Croatie, l'ambassade de

  5   Bosnie-Herzégovine a ouvert ses portes. Est-ce exact ?

  6   M. Donia (interprétation). - Oui.

  7   M. Mikulicic (interprétation). - Est-il exact, Monsieur Donia,

  8   que, pendant toute la période dont nous sommes en train de parler, c'est-

  9   à-dire à partir du moment même où l'ambassade croate a été créée à

 10   Sarajevo et où l'ambassade de Bosnie-Herzégovine a été créée à Zagreb, à

 11   partir de ce moment-là, ces deux ambassades ont travaillé sans

 12   interruption ?

 13   M. Donia (interprétation). - Oui.

 14   M. Mikulicic (interprétation). - Etes-vous au courant du fait,

 15   Monsieur Donia,

 16   qu'en 1993, dans l'ambassade de Bosnie-Herzégovine à Zagreb, il existait

 17   une représentation militaro-économique, un bureau des affaires militaires

 18   et économiques, ainsi qu'un département logistique du grand quartier

 19   général des forces armées de Bosnie-Herzégovine, ainsi qu'une

 20   partie du quartier général de Split ?

 21   M. Donia (interprétation). - Je n'étais pas au courant au sujet

 22   du bureau de Split, mais j'étais au courant du bureau de Zagreb.

 23   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, je vous

 24   demanderai de bien vouloir regarder le document que je vais vous

 25   soumettre, que j'aimerais verser au dossier en tant que pièce à conviction


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  1   et que vous pourrez commentez. Je demande l'aide de Monsieur l'huissier.

  2   (L'huissier s'exécute.)

  3   Mme Ameerali (interprétation). - Ce document est enregistré sous

  4   la cote D32/2.

  5   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, je vous

  6   demanderai de bien vouloir lire ce document au préalable.

  7   M. Donia (interprétation). - Oui.

  8   M. Mikulicic (interprétation). - Est-ce que vous êtes d'accord

  9   avec la constatation que cette instance a fonctionné, le 15 juillet 93,

 10   auprès de l'ambassade de la République de la Bosnie-Herzégovine à Zagreb ?

 11   M. Donia (interprétation). - Je ne suis vraiment pas habilité

 12   pour confirmer la validité de ce document, je n'ai aucune raison pour

 13   douter de sa validité en ce qui concerne la stratégie adoptée par la

 14   République de Bosnie-Herzégovine à l'époque. Mais je ne peux vraiment pas

 15   donner une quelconque validation à ce document en tant que tel.

 16   M. Mikulicic (interprétation). - Merci. Monsieur Donia, tout à

 17   l'heure, en réponse à des questions de mon collègue, Me Stein, vous avez

 18   parlé des réfugiés, de leur sort, de leur nombre, le tout en tant que

 19   conséquences de la guerre en Bosnie-Herzégovine. Je souhaite

 20   aborder ce sujet brièvement encore une fois.

 21   Est-ce que vous serez d'accord avec moi pour dire,

 22   Monsieur Donia -et ici je dispose des données publiées par le bureau

 23   chargé des réfugiés et des personnes déplacées du

 24   gouvernement de la République de Croatie-, qu'en ce qui concerne le

 25   territoire de la Bosnie-Herzégovine, vers la fin de l'année 1992, environ


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  1   285 000 réfugiés provenant de cette région se trouvaient sur le territoire

  2   de la République de Croatie ?

  3   M. Donia (interprétation). - Je crois qu'en effet ce chiffre

  4   reflète la réalité et c'est l'idée que je m'étais fait de la situation.

  5   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, est-ce qu'au

  6   cours de vos études, vous avez trouvé certaines données indiquant que le

  7   gouvernement de la République de Croatie expulsait les réfugiés venant de

  8   Bosnie-Herzégovine ?

  9   M. Donia (interprétation). – Non, je n'ai pas connaissance

 10   d'incidents de ce genre.

 11   M. Mikulicic (interprétation). – Est-ce qu'au cours de vos

 12   études, Monsieur Donia, vous avez appris que la République de Croatie

 13   durant cette période, donc fin 92-93 et 94, a confisqué de quelque manière

 14   que ce soit les biens des personnes physiques ou morales venant de Bosnie-

 15   Herzégovine, et se trouvant sur le territoire de la République de

 16   Croatie ?

 17   M. Donia (interprétation). – Je ne peux pas répondre à cette

 18   question, je n'ai pas fait de recherches dans ce domaine, je ne peux pas

 19   répondre.

 20   M. Mikulicic (interprétation). – Très bien. Est-ce que vous

 21   savez, Monsieur Donia, également que la République de Croatie, dans ses

 22   hôpitaux, a fourni des soins médicaux à un grand nombre personnes

 23   provenant de Bosnie-Herzégovine ? Là, je parle explicitement des Musulmans

 24   de Bosnie.

 25   M. Donia (interprétation). - Une fois encore, je ne connais pas


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  1   vraiment la situation dans ce domaine. J'imagine que des soins médicaux

  2   ont été apportés dans les camps de réfugiés, et que des installations

  3   étaient fournies et que le HCR et d'autre organisation de ce

  4   genre ont fourni ce genre de service, y compris du point de vue de la

  5   République de Croatie.

  6   Mais là, ce ne sont que des suppositions de ma part.

  7   M. Mikulicic (interprétation). – Je comprends, Monsieur Donia.

  8   Peut-être vous

  9   n'avez pas bien compris ma question. Je ne parlais pas, ici, des

 10   camps de réfugiés, je parlait des hôpitaux réguliers. Concrètement, est-ce

 11   que vous savez que la clinique, l'hôpital de Split, au cours de l'année

 12   1992 et 1993, a hospitalisé presque 4 000 personnes de nationalité

 13   musulmane, provenant de Bosnie-Herzégovine ?

 14   M. Donia (interprétation). - Je ne connaissais pas ce chiffre.

 15   M. Mikulicic (interprétation). – Très bien. Monsieur Donia, vous

 16   serez d'accord avec moi pour dire qu'au cours de l'année 92, 93 et 94, il

 17   y a eu de nombreuses réunions entre les chefs d'Etat, ou les représentants

 18   gouvernementaux des Républiques de Croatie et de Bosnie-Herzégovine ?

 19   M. Donia (interprétation). - Oui.

 20   M. Mikulicic (interprétation). – Comment caractériseriez-vous

 21   ces rencontres ? Est-ce que ces rencontres étaient rares ou fréquentes ?

 22   M. Donia (interprétation). -  Je pense que ça dépendait des

 23   périodes. En 1992, c'est certain, il y avait des contacts très réguliers,

 24   très fréquents. Ils sont devenus moins fréquents au cours de l'été et du

 25   printemps 1993. Mais je crois qu'il y a eu des contacts, des réunions à


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  1   des niveaux extrêmement différents. Il est donc difficile de donner, de

  2   faire une généralisation au sujet de la fréquence de ces rencontres entre

  3   les ministères, les représentants des ministères, les chefs d'Etat, etc.

  4   M. Mikulicic (interprétation). – Je comprends. Monsieur Donia,

  5   est-ce que vous savez que le Parlement croate a adopté une déclaration

  6   concernant les conflits qui ont éclaté en Bosnie centrale entre la

  7   population croate et musulmane ? Et dans cette déclaration, le Parlement a

  8   explicitement demandé l'arrêt de ces conflits.

  9   M. Donia (interprétation). - Non.

 10   M. Mikulicic (interprétation). – Est-ce que vous savez, Monsieur

 11   Donai, que le Président croate, Franjo Tudjman, au mois d'avril 1993, a

 12   lancé un appel demandant l'arrêt des

 13   conflits en Bosnie centrale, conflit entre la population croate

 14   et musulmane ?

 15   M. Donia (interprétation). - Oui.

 16   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, je vais vous

 17   demander de bien vouloir examiner un document concernant, justement, cet

 18   appel lancé par le Président Tudjman que je souhaite verser au dossier.

 19   Donc je demanderai de l'aide de l'Huissier pour remettre ce

 20   document au témoin.

 21   (L'huissier s'exécute.)

 22   Mme Ameerali (interprétation). – Ce document porte la

 23   cote D33/2.

 24   M. Mikulicic (interprétation). – Je souhaite attirer votre

 25   attention sur le dernier paragraphe de ce document.


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  1   M. Donia (interprétation). - Oui.

  2   M. Mikulicic (interprétation). – Veuillez faire un commentaire

  3   bref sur ces événements et la rencontre qui a eu lieu à Zagreb le 24 avril

  4   1993 sous les auspices de Lord Owen <=.

  5   M. Donia (interprétation). - En fait, j'en ai parlé lorsque j'ai

  6   répondu à une des questions de Me Stein.

  7   A la suite des épisodes de violence qui ont eu lieu le 16 avril,

  8   dans la semaine qui a suivi, la communauté internationale s'est engagée

  9   pour mettre en place un cessez-le-feu sur le terrain en Bosnie centrale.

 10   Et la communauté internationale s'est efforcée d'appliquer les

 11   dispositions du plan Vance-Owen.

 12   On se souviendra que Boban avait signé cet accord en janvier, et

 13   que Izetbegovic l'avait déjà signé en mars avec certaines réserves. Ce

 14   document, donc, reflète les efforts qui ont été entrepris pour faire

 15   avancer le processus, effort qui venait donc de la communauté

 16   internationale.

 17   M. Mikulicic (interprétation). – Merci. Entre autre chose, ce

 18   document se réfère

 19   également aux rencontres qui ont eu lieu entre les deux chefs

 20   d'Etat, n'est-ce pas ?

 21   M. Donia (interprétation). - Il indique… Dans la version

 22   anglaise que j'aie, on peut lire que les représentants croates et

 23   musulmans en Bosnie-Herzégovine ont exprimé, ont dit qu'ils étaient prêts

 24   à s'engager, mais on n'indique pas expressément l'Etat dont ils sont

 25   originaires ou s'il s'agit d'un accord entre Etats. Peut-être que je ne


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  1   regarde pas le bon extrait de ce document ?

  2   M. Mikulicic (interprétation). – Peut-être vous avez mal compris

  3   ma question. Ma question concernait le fait de savoir si, à Zagreb, il y a

  4   eu une rencontre à laquelle ont assisté le Président Izetbegovic, le

  5   Président Tudjman et Lord Owen, la réunion dont il est question dans ce

  6   document.

  7   M. Donia (interprétation). – Désolé, mais je ne vois dans ce

  8   document, aucune référence à une rencontre entre ces trois personnes.

  9   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, le président

 10   Tudjman a lancé cet appel le 22 avril 1993 ; dans la dernière phrase de ce

 11   document, il est dit qu'il salue la volonté des leaders croates et

 12   musulmans en Bosnie-Herzégovine, Mate Boban et Izetbegovic, de rencontrer

 13   à Zagreb Lord Owen. Et le président Tudjman a assisté à cette réunion ; ma

 14   question portait sur ce fait. Est-ce exact ?

 15   M. Donia (interprétation). - Je ne sais pas si la réunion…

 16   J'imagine que cette réunion a eu lieu mais, dans ce document, je ne vois

 17   aucun élément qui puisse me permettre de dire que le président Tudjman ait

 18   assisté à une réunion auparavant.

 19   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, nous allons

 20   laisser de côté ce sujet pour le moment et tourner notre attention sur le

 21   dernier domaine qui sera abordé dans le

 22   cadre de mon contre-interrogatoire.

 23   Vous avez étudié l'histoire des Balkans et, notamment,

 24   l'histoire de la Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous pouvez nous dire, si

 25   l'on remonte loin dans le passé, combien de


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  1   guerres ont été menées dans cette région ? Et je ne demande pas

  2   le chiffre exact, mais une opinion générale à ce sujet.

  3   M. Donia (interprétation). - Pour répondre, je commencerai par

  4   dire que les deux guerres les plus importantes au XXème siècle, qui ont eu

  5   lieu sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ont été des guerres de

  6   grande ampleur, extrêmement sanglantes, qui ont fait un grand nombre de

  7   victimes. Et je parle de la deuxième guerre mondiale, ainsi que de la

  8   guerre qui a fait rage dans les années 90.

  9   Pour ce qui est de la 1ère guerre mondiale, eh bien, il y a eu

 10   peu de combats sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Si l'on regarde

 11   la période précédente, votre question, en effet, est très intéressante,

 12   mais je ne sais pas si je peux vraiment y répondre sans y réfléchir un peu

 13   plus. Mais on peut dire qu'il y a eu des conflits armés sporadiques et des

 14   guerres qui ont eu lieu au fil des siècles.

 15   Il s'agissait de guerres de natures différentes : certaines

 16   étaient de nature territoriale, qui avait trait aux frontières ; il

 17   s'agissait parfois de simples escarmouches, de conflits de faible

 18   ampleur ; d'autres avaient une ampleur beaucoup plus grande. Certains

 19   pourraient considérer que l'invasion par l'Empire austro-hongrois, en

 20   1878, constituait un épisode militaire extrêmement important pour ce qui

 21   est du XIXème siècle.

 22   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, compte tenu des

 23   guerres entre deux états différents, qui ont eu lieu dans cette région au

 24   cours de l'Histoire, est-ce que vous avez rencontré l'exemple, dans le

 25   cadre de vos études, d'une situation où, pendant la guerre entre deux


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  1   Etats, les rapports diplomatiques entre ces mêmes deux Etats, pendant

  2   l'ensemble de la durée des opérations de guerre, se poursuivaient sans

  3   interruption ? Est-ce que vous avez vu

  4   un tel exemple déjà ?

  5   M. Donia (interprétation). - C'était très caractéristique au

  6   début que les relations diplomatiques soient maintenues alors même que le

  7   conflit faisait rage.

  8   M. Mikulicic (interprétation). - Est-ce qu'au même moment où la

  9   guerre sévissait entre les deux Etats, l'un des Etats fournissait des

 10   services à l'autre Etat, avec lequel il a été en guerre, en fournissant

 11   les médicaments, la nourriture, l'équipement, etc. ? Est-ce que vous avez

 12   rencontré un tel exemple ?

 13   M. Donia (interprétation). - Une fois de plus, dans les périodes

 14   précédentes, on a vu ce genre de choses se produire. Exactement le genre

 15   de choses que vous venez de décrire.

 16   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, à votre avis,

 17   vous, en tant qu'historien et qui a fait des recherches à ce sujet,

 18   d'après vous, quelle est la cause de la guerre en Bosnie ? En Bosnie

 19   centrale ?

 20   Excusez-moi de vous interrompre, mais là, pour être tout à fait

 21   précis, je parle du conflit entre les Croates et les Musulmans.

 22   M. Donia (interprétation). - En un mot, je pense qu'on peut

 23   répondre par Karadjordjevo. C'est un événement qui a été déterminant pour

 24   la communauté croate, qui s'est transformé sous la direction du régime de

 25   Zagreb et qui a décidé de se tailler un territoire qui serait dominé donc


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  1   par le HVO et qui serait à 100 % croate.

  2   M. Mikulicic (interprétation). - C'est votre attitude, n'est-ce

  3   pas, Monsieur Donia ? Professeur ?

  4   M. Donia (interprétation). - C'est ma réponse à votre question

  5   quand vous me demandez quelle est la cause principale du conflit.

  6   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, connaissez-vous

  7   une personne nommée Muhamed Sacirbey ?

  8   M. Donia (interprétation). - Je ne le connais pas

  9   personnellement, mais je sais qui

 10   c'est.

 11   M. Mikulicic (interprétation). - Pourriez-vous dire aux Juges

 12   quelle était la fonction que cette personne exerçait en 1993 ?

 13   M. Donia (interprétation). - En octobre 1993, je crois qu'il est

 14   devenu ministre des Affaires étrangères et il l'est resté jusqu'au moment

 15   de Dayton. Auparavant, je ne sais pas exactement quelles étaient ses

 16   fonctions, avant octobre 1993... Ah oui, il a été ambassadeur auprès des

 17   Nations Unies, avant de venir au ministère des Affaires étrangères.

 18   M. Mikulicic (interprétation). - Donc M. Muhamed Sacirbey était

 19   l'ambassadeur permanent représentant la République de Bosnie-Herzégovine

 20   auprès des Nations Unies. Est-ce exact ?

 21   M. Donia (interprétation). - Oui.

 22   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, ai-je raison si

 23   je conclus que la fonction de base de l'ambassadeur permanent d'un Etat

 24   auprès des Nations Unies, que sa tâche principale, est d'articuler la

 25   politique et les attitudes de l'Etat qu'il représente devant la communauté


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  1   internationale, donc de formuler les attitudes officielles de l'Etat qu'il

  2   représente ? Est-ce que vous seriez d'accord avec une telle affirmation ?

  3   M. Donia (interprétation). - C'est indéniablement une de ses

  4   fonctions.

  5   M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur Donia, je vous prierai

  6   maintenant d'examiner un document et je demanderai l'aide de l'huissier.

  7   Ce document a été rédigé par M. Muhamed Sacirbey, le représentant

  8   permanent auprès des Nations Unies, en date du 21 avril 1993.

  9   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la version en

 10   original de ce document est plutôt mauvaise et difficilement lisible ;

 11   c'est pour cela que la défense a constitué une copie plus facilement

 12   lisible pour pouvoir mieux suivre le document.

 13   Mme Ameerali. – Le document portera la cote D34/2.

 14   (L'huissier s'exécute.)

 15   M. Mikulicic (interprétation). – Veuillez lire la deuxième page,

 16   étant donné que la première page est plutôt illisible.

 17   Je vous demanderai d'abord de lire ce document et ensuite, je

 18   vous poserai une question, ou bien je vous demanderai de faire un

 19   commentaire.

 20   M. Donia (interprétation). - Bien.

 21   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, situons ce

 22   document dans le temps. Ceci s'est produit donc cinq jours après la

 23   tragédie d'Ahmici.

 24   M. Donia (interprétation). - Oui.

 25   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, est-il exact de


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  1   dire, donc, que M. Muhamed Sacirbey, pour lequel vous étiez d'accord pour

  2   dire qu'il formulait les attitudes officielles du Gouvernement de la

  3   Bosnie-Herzégovine en parlant -là je parle du quatrième paragraphe- en

  4   parlant du conflit en Bosnie centrale, il a dit que c'était le conflit

  5   entre les leaders locaux qui n'aurait jamais éclaté si l'aide humanitaire

  6   était plus appropriée dans le territoire de la Bosnie centrale ?

  7   M. Donia (interprétation). - J'ai dit qu'une de ses fonctions,

  8   c'était de représenter la position officielle de son Gouvernement. Et je

  9   note votre lecture du paragraphe.

 10   M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur Donia, je vous

 11   remercie. La défense n'a plus de questions pour ce témoin.

 12   M. Nice (interprétation). - J'ai quelques questions à évoquer.

 13   D'abord, pour parler de ce dernier document, avez-vous d'autres

 14   observations à faire au sujet de cette déclaration que nous venons de

 15   lire, au sujet de sa validité ou non ?

 16   M. Donia (interprétation). - Je note que l'on voit, ici, exposé

 17   un objectif de longue date de la République de Bosnie-Herzégovine qui tend

 18   à voir lever l'embargo sur les armes. C'est le principal objectif de ce

 19   document. Il ne s'agit pas de donner une qualification au conflit, mais

 20   d'obtenir une levée de l'embargo de septembre 1991.

 21   M. Nice (interprétation). - Revenons maintenant aux questions

 22   précédentes qui vous ont été posées hier. Tout d'abord, la question

 23   relative à l'intégrité de votre rapport et à la

 24   validité de vos recherches. Lorsque vous avez commencé à

 25   travailler sur cette région, aviez-vous des sympathies particulières pour


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  1   une des parties ou non ?

  2   M. Donia (interprétation). - Non.

  3   M. Nice (interprétation). - Aviez-vous des liens avec cette

  4   région ?

  5   M. Donia (interprétation). - Lorsque je l'ai indiqué, en parlant

  6   de moi-même, ma famille est américaine et a des origines hollandaises.

  7   Donc je n'ai aucun lien familial de quelque sorte que ce soit avec

  8   l'Europe de l'Est.

  9   M. Nice (interprétation). - On vous a posé des questions sur

 10   votre participation, ou votre travail, avec la Fondation nationale sur la

 11   paix. S'agit-il d'une institution qui est connue pour sa partialité ?

 12   M. Donia (interprétation). – Je ne sais rien de cette Fondation

 13   nationale pour la paix, sauf qu'ils ont permis ma visite en Yougoslavie en

 14   1994.

 15   M. Nice (interprétation). - On vous a posé un certain nombre de

 16   questions au sujet de certaines critiques qui ont été émises à l'encontre

 17   de votre travail. Et pour nous aider à examiner ceci, j'ai ici un certain

 18   nombre de documents que je vais peut-être demander à l'huissier de

 19   communiquer tout d'abord aux Juges, ensuite, au témoin.

 20   (L'huissier s'exécute.)

 21   Les documents portent des numéros de pièces à conviction

 22   différents. Si vous pouviez, s'il vous plaît, donner une liasse au

 23   témoin... merci.

 24   Il y a, d'autre part, une liasse qui est destinée aux Juges et

 25   une liasse pour chacun des accusés, ou des représentants de la défense.


Page 5122

  1   J'ai surligné certains passages afin de faciliter les choses et

  2   puis, bien entendu, parce que ce sont des passages sur lesquels je

  3   souhaite interroger le témoin.

  4   Tout d'abord, la critique qui a été émise par M. Kislinger –et

  5   pas Kissinger- le 12 septembre 1994 ; est-ce que cette critique a trait à

  6   votre livre "Une tradition trahie" ? Dans

  7   le premier paragraphe, vous êtes défini comme un expert sur

  8   l'Islam sous le règne des Habsbourgs.

  9   M. Donia (interprétation). - Oui.

 10   M. Nice (interprétation). - Dans le paragraphe du bas, on peut

 11   lire la caractéristique de la Bosnie, le mélange bosniaque est un

 12   phénomène urbain qui est bien connu. Si on passe à la page suivante, le

 13   passage qui vous a été lu par M. Stein est indiqué en rouge ; mais il n'a

 14   pas lu la première page, qui indique que la vision de Donia et de Fine de

 15   la Bosnie-Herzégovine est tout à fait intéressante, mais que la

 16   présentation de cette vision est assez perturbante.

 17   Au dernier paragraphe, on peut lire : "Il reste que Vulliamy,

 18   Donia et Fine nous permettent de mieux connaître ce qui a été perdu en

 19   Bosnie et soulignent la distance qui peut exister entre la connaissance et

 20   le bon sens politique. Leurs efforts sont extrêmement utiles parce que la

 21   guerre de Bosnie a contribué à effacer beaucoup du passé. Les conquérants

 22   peuvent faire sauter les pierres, ils ne pourront jamais éteindre le génie

 23   de la mémoire historique".

 24   Une traduction en français a été fournie, mais nous pouvons

 25   maintenant passer au document Z 1677.3. Il s'agit d'une critique faite par


Page 5123

  1   M. Legvold, et l'on vous reproche d'avoir écrit une sorte de manuel

  2   scolaire.

  3   M. Donia (interprétation). - Justement, c'était mon objectif

  4   quand j'ai écrit ce livre !

  5   M. Nice (interprétation). - Je reprends la suite de la critique

  6   qui vous a été faite ; je reprends ce qui vous a été dit dans le cadre des

  7   questions qui vous ont été posées à ce sujet. On vous a donc lu cette

  8   ligne pour suggérer que la critique n'était pas très favorable.

  9   Je cite un autre passage : "Avec beaucoup d'assurance, ils

 10   combattent une conception populaire qui est stupide. Non seulement ils

 11   nous font comprendre que la Bosnie a existé comme une entité en tant que

 12   telle pendant de très nombreuses années, avec des

 13   frontières qui sont restées les mêmes plus longtemps que la

 14   Croatie ou la Serbie".

 15   Ensuite je passe au paragraphe suivant : "Ce livre ne comprend

 16   que 270 pages et il ressemble plus à un manuel scolaire qu'autre chose.

 17   Ceci est bienvenu puisqu'il permet aux parties en présence de mieux

 18   comprendre ce qui s'est passé".

 19   Je passe donc maintenant à la critique suivante, qui a été émise

 20   par M. Fuad Ajami le 7 août 95. Si on regarde à la troisième page un

 21   résumé d'une critique de votre travail… Connaissez-vous M. Ajami ?

 22   M. Donia (interprétation). - Oui.

 23   M. Nice (interprétation). - Qui est-ce ?

 24   M. Donia (interprétation). - Il travaille à l'école des études

 25   internationales de John Hopkins ; il est souvent appelé à intervenir à la


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  1   télévision, et j'estime que c'est un universitaire exceptionnel et

  2   quelqu'un qui a une vue très exacte de ce qui se passe dans les pays

  3   musulmans et dans les pays du Moyen-Orient.

  4   M. Nice (interprétation). - Je lis ce que j'ai surligné : "Dans

  5   un des récits les meilleurs sur l'histoire de la Bosnie-Herzégovine et de

  6   l'ex-Yougoslavie, "Trahison d'une tradition", les historiens Robert Donia

  7   et John Fine nous..." etc., et ensuite il poursuit en analysant votre

  8   livre.

  9   Nous passons maintenant à la page suivante ; une critique de

 10   Abbas Milani. Le connaissez-vous ?

 11   M. Donia (interprétation). - Non.

 12   M. Nice (interprétation). - Dans quelle publication cette

 13   critique a-t-elle été publiée ?

 14   M. Donia (interprétation). - Dans le San Fransisco Chronicle.

 15   M. Nice (interprétation). - Je cite : "En s'efforçant

 16   d'identifier les traditions de la société Bosnienne au travers de son

 17   histoire, John Fine et Robert Donia explorent les racines

 18   historiques de la société bosniaque depuis l'arrivée des tribus

 19   slaves au XIème et XIIème siècles jusqu'à l'effondrement de la Yougoslavie

 20   socialiste".

 21   Je passe ensuite à la page suivante, qui a été surlignée, où la

 22   personne qui a écrit cet article dit -je cite- : "Les auteurs essaient

 23   d'être le plus impartiaux possible". Je cite également : "Ils sont

 24   érudits, ils sont impartiaux dans leur livre "la Bosnie-Herzégovine :

 25   trahison d'une tradition" et ils mettent en lumière de manière éclatante


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  1   ce qu'a été l'histoire de la Bosnie et la généalogie du conflit actuel".

  2   Je passe maintenant au document suivant Z 1677.6, un article de

  3   M. Fuad Ajami, qui traite une fois de plus de votre livre. Si l'on se

  4   reporte à la troisième feuille de ce document, une phrase a été surlignée

  5   en rouge, le reste en jaune. Je cite : "Cette histoire, qui est une

  6   invention, qui est le résultat de la vanité" etc...

  7   Ensuite : "On peut mieux comprendre la situation de la région

  8   grâce au travail du journaliste britannique Noël Malcolm ; le travail

  9   extraordinaire des historiens américains Robert Donia et John Fine".

 10   Donc on voit ici une appréciation très positive de votre

 11   travail, qui se poursuit d'ailleurs dans les pages suivantes, et j'ai

 12   surligné ces passages en jaune. Je passerai au dernier document plus tard.

 13   Donc voici les critiques qui ont été faites à l'encontre de vos travaux.

 14   M. Donia (interprétation). - Oui.

 15   M. Nice (interprétation). - Les gens qui ont fait ces critiques,

 16   qui sont-ils ? Des pairs ? Des supérieurs etc. ?

 17   M. Donia (interprétation). - Dans la majorité des cas, ce sont

 18   des gens qui ont étudié la région depuis plus longtemps que moi : des

 19   pairs, donc.

 20   M. Nice (interprétation). - Nous avons une pièce à conviction

 21   sur laquelle je ne

 22   vais pas m'étendre très longtemps. On vous a demandé quelle était la

 23   représentation, dans les pays autres que l'ex-Yougoslavie, du parti des

 24   Musulmans de Bosnie. Etes-vous au courant du fait que, dans d'autres pays,

 25   il y a eu des représentants du HDZ ?


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  1   M. Donia (interprétation). - Oui. C'est quelque chose qui a été

  2   fait par les trois parties en présence.

  3   M. Nice (interprétation). - Je vous demande maintenant de

  4   regarder la troisième pièce ; pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

  5   M. Donia (interprétation). - "Joyeux Noël, Bonne année 90".

  6   M. Nice (interprétation). - De quoi s'agit-il ?

  7   M. Donia (interprétation). - Il s'agit du journal du HDZ.

  8   M. Nice (interprétation). - Je vous demande maintenant de

  9   tourner la page. Vous verrez qu'il y a des parties surlignées qui font

 10   référence à l'Amérique. Je crois ensuite qu'il y a une page avec des

 11   photos, ensuite, on voit l'Australie, la Suède. D'autre part, il y a des

 12   articles, des rapports qui proviennent de groupes ailleurs dans le monde ?

 13   M. Donia (interprétation). - Oui, l'Australie, en effet.

 14   M. Nice (interprétation). - On vous a posé des questions au

 15   sujet du président Tudjman sur le fait qu'il ait revu un texte qu'il avait

 16   écrit parce que cela avait provoqué de la colère parmi certaines

 17   nationalités. Est-ce que vous avez entendu parler d'une émission de

 18   télévision dans laquelle il a parlé de sa femme ?

 19   M. Donia (interprétation). - Non.

 20   M. Nice (interprétation). - Est-ce qu'il y a d'autres exemples

 21   qui vous sont connus où le président Tudjman a provoqué la colère de

 22   certains groupes de personnes ?

 23   M. Donia (interprétation). - Non.

 24   M. Nice (interprétation). - Le terme de "bosnien", vous nous

 25   l'avez défini dans son acception actuelle : est-ce qu'il a été utilisé de


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  1   façon différente auparavant ?

  2   M. Donia (interprétation). - Il a été utilisé de façon très

  3   différente auparavant. Il y a beaucoup d'exemples. Les historiens de

  4   Bosnie, les historiens bosniens se sont efforcés de définir justement ces

  5   acceptions, mais on trouve dans l'histoire les mêmes problèmes

  6   qu'aujourd'hui, c'est-à-dire qu'à l'époque, le terme de "bosnien" faisait

  7   référence très clairement aux Musulmans de Bosnie. Parfois, cela est très

  8   clair, mais parfois, on ne voit pas très bien s'il s'agit des Musulmans de

  9   Bosnie-Herzégovine ou des habitants de Bosnie-Herzégovine. Mais on voit

 10   des exemples dans l'histoire où les gens se définissent comme des Bosniens

 11   et d'autres comme des Bosniaques.

 12   Et il s'agit parfois d'exemples où les personnes concernées sont

 13   des Musulmans de Bosnie.

 14   M. Nice (interprétation). - On vous a posé des questions au

 15   sujet d'un certain nombre de réunions faisant intervenir des dirigeants

 16   politiques. On vous a parlé, bien entendu, de Karadjordjevo. Est-ce qu'il

 17   y a aussi une réunion qui a eu lieu à Grac et une réunion à Tikvac ?

 18   M. Donia (interprétation). - A Karadjordjevo, les deux chefs

 19   d'Etat se sont réunis pour parler de la division de la Bosnie-Herzégovine.

 20   Et cela a été suivi, le 6 mai 1992, par une réunion entre Mate Boban et

 21   Radovan Karadzic, à Grac. Et cela a mené à un accord qui a été publié et

 22   qui fait référence à la frontière de Banovina de 1939. Ils acceptaient

 23   dans cet accord de travailler ensemble, dans la coopération. Ensuite, il y

 24   a eu un certain nombre d'autres réunions : en juin, le président Tudjman a

 25   rencontré les Croates de Bosnie-Herzégovine, le 30 juin et, ensuite, le


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  1   20 juin, il a rencontré les Croates de Bosnie. Ensuite, il a essayé de

  2   mettre en place cette politique de division.

  3   M. Nice (interprétation). - Avez-vous parlé de Tikvic ?

  4   M. Donia (interprétation). - (Inaudible.)

  5   M. Nice (interprétation). - On vous a posé un certain nombre de

  6   questions au sujet

  7   des efforts qui ont été entrepris pour créer un Etat musulman. Avez-vous

  8   connaissance vous-même d'efforts ou du moins de documents qui reflètent

  9   des efforts entrepris pour "catholiciser" la région de Bosnie-

 10   Herzégovine ?

 11   M. Donia (interprétation). - Pour "catholiciser" la région de

 12   Bosnie-Herzégovine ? Non.

 13   M. Nice (interprétation). - Ce que j'entends par là, c'est-à-

 14   dire prendre des mesures pour encourager l'utilisation de symboles

 15   religieux, de symboles catholiques.

 16   M. Donia (interprétation). - Je pensais que vous faisiez

 17   référence à un certain prosélytisme catholique, l'établissement d'un Etat

 18   catholique. Je dirais qu'il y a eu certains efforts entrepris pour

 19   encourager la formation et le renforcement d'un clergé en Herceg-Bosna et

 20   qu'on a vu des efforts pour renforcer les églises catholiques, pour

 21   renforcer la culture croate et la religion des Croates. La majorité des

 22   représentants des Franciscains et la hiérarchie catholique à Sarajevo sont

 23   toujours très mécontents de la formation d'une entité purement

 24   territoriale. Ils n'ont pas manqué de dénoncer cette solution qui, à leur

 25   yeux, a passé sous silence la situation des centaines de milliers de


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  1   Croates catholiques de cette nouvelle communauté.

  2   M. Nice (interprétation). - Lorsqu'on vous a posé des questions

  3   sur la participation d'éléments étrangers aux côtés des Musulmans de

  4   Bosnie, est-ce qu'il y a eu également des éléments extérieurs qui se sont

  5   rangés aux côtés du HVO ? ou du HDZ ?

  6   M. Donia (interprétation). - Oui. A de très nombreuses reprises.

  7   Il faut se rappeler que le 15 mai 1992, le Conseil de sécurité a voté une

  8   résolution qui appelait au retrait des troupes étrangères de la République

  9   de Bosnie-Herzégovine, y compris les troupes de la République de Serbie et

 10   de la République de Croatie. Donc il est bien clair qu'à cette époque, le

 11   Conseil de sécurité des Nations Unies estimait qu'il se trouvait des

 12   éléments extérieurs sur le territoire, à savoir des éléments représentant

 13   les forces de Serbie et les forces de Croatie en

 14   Bosnie-Herzégovine.

 15   Dans la même résolution, on en appelle à ce que les forces

 16   paramilitaires soient placées sous le commandement central de l'armée de

 17   Bosnie-Herzégovine. On demande, je crois, plus spécifiquement, qu'elles

 18   soient placées sous le commandement des forces armées de Bosnie-

 19   Herzégovine,.

 20   M. Nice (interprétation). - On vous a posé une question au sujet

 21   des Moudjahidine : est-il un fait qu'il y ait eu des individus, des

 22   mercenaires ou autres, dans les rangs du HVO ?

 23   M. Donia (interprétation). - Oui, il y a eu des mercenaires,

 24   c'est indéniable, des soldats qui venaient d'un peu partout dans le

 25   monde ; il y en avait de communautés croates installées ailleurs dans le


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  1   monde. On a vu la participation d'un certain nombre de mercenaires venant

  2   de pays européens et d'un certain nombre de pays de l'ex-bloc soviétique.

  3   M. Nice (interprétation). - On vous a empêché de donner votre

  4   opinion sur la position croate en novembre 1991 ; vous n'avez pas pu

  5   répondre. Quelle était la position croate, à votre avis ?

  6   M. Donia (interprétation). - La position croate était dans une

  7   phase de transition.

  8   Il n'y avait pas, en fait, une position croate. On voyait

  9   apparaître deux positions différentes : la position des représentants élus

 10   du HDZ, qui avaient été élus aux élections de 1990, Stjepan Klujic, donc

 11   sa position était que la nation croate devait se prononcer en faveur d'une

 12   Bosnie-Herzégovine unifiée et qu'elle devait réaliser ses aspirations

 13   nationales dans le cadre de cette République.

 14   A l'époque, à la fin de la guerre en Croatie, l'accord pour ce

 15   genre de position partait du principe qu'il fallait que la Bosnie-

 16   Herzégovine se sépare de la Yougoslavie. Au même moment, on a vu une

 17   deuxième opinion apparaître, à savoir qu'il fallait qu'il y ait une

 18   partition de la Bosnie-Herzégovine sous forme de cantons, comme

 19   cela avait été avancé par la Communauté internationale.

 20   Et j'ai noté, dans mon rapport, qu'il y avait deux

 21   réactions très différentes à la formation de la communauté croate

 22   d'Herceg-Bosna, par Mate Boban, qui y voyait la réalisation des

 23   aspirations territoriales de la Banovina de 1939. Et puis, il y avait

 24   celle de M. Klujic qui considérait qu'il s'agissait d'une mesure qui

 25   n'était pas appliquée à ce moment-là.


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  1   Donc, en conséquence, avec l'expulsion et les purges du parti

  2   sous la direction du régime de Zagreb, M. Klujic a été obligé de

  3   démissionner, il a été remplacé. La position qui a été adoptée ensuite a

  4   été que la communauté croate d'Herceg-Bosna, avec sa désignation

  5   territoriale, constituait la réalisation des aspirations territoriales

  6   croates en Bosnie.

  7   M. Nice (interprétation). - Le livre du colonel Stewart, vous

  8   l'avez lu. Avez-vous des observations à faire sur ses commentaires, sur

  9   son interprétation de la nature historique de la situation ? Il a été sur

 10   place pendant six mois.

 11   M. Donia (interprétation). - Oui. Ce qu'il dit est très

 12   intéressant, sa compréhension de l'histoire cependant est un petit peu

 13   superficielle. Je ne pense pas d'ailleurs que c'était son but dans ce

 14   livre.

 15   M. Nice (interprétation). - La création d'ambassades mutuelles

 16   par la Croatie et la Bosnie-Herzégovine, est-ce que cela a une

 17   signification particulière ?

 18   M. Donia (interprétation). - Oui. Cela constitue une partie

 19   intégrante de cette politique à deux vitesses qui a été maintenue à

 20   l'époque par le régime de Zagreb envers la Bosnie. Un grand nombre

 21   d'observateurs d'ailleurs se sont prononcés à ce sujet. On a vu un grand

 22   nombre de déclarations, d'appels, de garanties qui ont été émises par le

 23   Président Tudjman, par différents membres du régime de Zagreb, aux fins de

 24   reconnaître les frontières, de reconnaître la légitimité de la Bosnie-

 25   Herzégovine. Et, dans le même temps, on voyait se manifester ouvertement


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  1   l'appui envers les séparatistes, ceux qui avaient des aspirations

  2   territoriales en Bosnie.

  3   Et ceci a mené à la proclamation du 3 juillet 1992, qui a été

  4   considérée par la presse mondiale comme une trahison pour le gouvernement

  5   bosniaque. Itar Tass, l'agence de presse officielle russe, a simplement

  6   déclaré : "Le gouvernement de Zagreb suit maintenant la politique du

  7   gouvernement de Belgrade". Donc, c'est une politique qui est en faveur du

  8   séparatisme, des ambitions territoriales séparatistes des Croates de

  9   Bosnie, et ceci alors qu'en même temps, on voyait se multiplier les

 10   commentaires, les déclarations ainsi que les échanges d'ambassadeurs.

 11   Peut-être parce que ceux-ci étaient requis ou attendus de la Communauté

 12   internationale.

 13   M. Nice (interprétation). - Donc, à votre avis, ce genre

 14   d'activité, ce genre d'action était-ce sincère ou non ?

 15   M. Donia (interprétation). - Il s'agissait de deux stratégies

 16   qui étaient parallèles, de deux voies qui étaient parallèles. Mais je

 17   pense qu'il est difficile de considérer que les proclamations en faveur de

 18   l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine étaient vraiment

 19   sincères, alors que, dans le même temps, on se prononçait en faveur des

 20   aspirations territoriales des nationalistes croates en Bosnie-

 21   Herzégovine,.

 22   M. Nice (interprétation). - Vous avez parlé de deux réunions qui

 23   ont eu lieu en juin, le 13 et le 20 juin.

 24   M. Donia (interprétation). - Oui.

 25   M. Nice (interprétation). - En quelle année ?


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  1   M. Donia (interprétation). - Ces réunions ont eu lieu en 1991.

  2   M. Nice (interprétation). - Ce matin, vous avez commencé par

  3   rétablir un certain nombre de points parce que l'on vous avait fait des

  4   citations un petit peu sélectives de l'ouvrage de M. Little et de

  5   Mme Silber. Vous avez également parlé du fait que Kordic était mentionné

  6   dans ce livre. Est-ce que vous souhaitez ajouter quelque chose à ce

  7   sujet ?

  8   M. le Président (interprétation). - Nous devons nous arrêter là

  9   parce que, s'il y a

 10   des contestations à ce sujet, au sujet de ce livre, à ce moment-

 11   là, il faut que les auteurs soient présents. Est-ce que vous avez encore

 12   besoin de beaucoup de temps ?

 13   M. Nice (interprétation). - Si vous le permettez, je n'ai besoin

 14   que de quelques minutes pour en finir.

 15   Par mesure de clarté, la kuna, cette unité monétaire que vous

 16   avez mentionnée, d'où vient-elle ? D'où tire-t-elle son nom ?

 17   M. Donia (interprétation). - La kuna, c'est un petit animal dont

 18   on utilisait la fourrure ou la peau au moment du royaume médiéval de

 19   Croatie.

 20   M. Nice (interprétation). - Est-ce que ce nom avait été utilisé

 21   auparavant pour désigner une unité monétaire ?

 22   M. Donia (interprétation). - Il a été utilisé pendant la

 23   Deuxième Guerre mondiale, pendant le règne des Oustachis en Croatie. Puis,

 24   il a été repris en 93. Cela a d'ailleurs été très controversé parce que

 25   cela a été considéré comme une menée extrêmement nationaliste du


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  1   gouvernement croate.

  2   M. Nice (interprétation). - On vous a posé un certain nombre de

  3   questions au sujet des médias et des journaux, en particulier. Est-ce que

  4   ces quotidiens ont survécu à la guerre ?

  5   M. Donia (interprétation). - Lesquels ?

  6   M. Nice (interprétation). - Les quotidiens locaux.

  7   M. Donia (interprétation). - La plupart d'entre eux n'ont pas

  8   survécu à la guerre.

  9   M. Nice (interprétation). - Et ceux qui ont survécu à le guerre,

 10   est-ce qu'ils sont de nature politique ?

 11   M. Donia (interprétation). - Eh bien, il y a plusieurs sortes de

 12   journaux. Le plus classique, le plus connu est "Oslobodenje", qui a

 13   continué à paraître pendant toute la guerre, à part un jour, je crois.

 14   Mais il y avait des journaux qui étaient plus ou moins impartiaux.

 15   Certains étaient très valables cependant,.

 16   M. Nice (interprétation). - Je crois que je vais en

 17   rester là. La seule chose que je souhaite mentionner, c'est une

 18   correction.

 19   Une dernière question, si vous permettez. Vous avez parlé de la

 20   17ème Brigade musulmane ; vous n'avez pas été très satisfait de la façon

 21   dont on vous a posé une question à ce sujet.

 22   M. Donia (interprétation). – Il s'agissait de la 7ème Brigade

 23   musulmane.

 24   M. Nice (interprétation). – Oui ?

 25   M. Donia (interprétation). – Non, je n'ai rien à ajouter.


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  1   M. Nice (interprétation). - Ma question va peut-être être un

  2   petit peu compliquée, mais si l'on se rapporte à la page 18 du compte

  3   rendu d'aujourd'hui, M. Stein a lu un extrait d'un de vos livres,

  4   Monsieur Donia. Il s'agissait de la page 267 de votre livre.

  5   Il a lu, mais il a fait une erreur dans la lecture de votre

  6   livre, ce qui pourrait avoir des conséquences regrettables, où il a dit

  7   que les combats entrepris par les unités croates en Bosnie centrale

  8   étaient le fait principalement des brigades musulmanes. Et ensuite, il dit

  9   que ces brigades sont devenues presque exclusivement musulmanes, alors que

 10   votre livre stipule que ce sont les forces bosniennes du gouvernement

 11   bosniaque dans la région qui sont devenues presque exclusivement

 12   musulmanes.

 13   M. Donia (interprétation). – Oui.

 14   M. Nice (interprétation). - Donc vous n'avez pas dit que cette

 15   zone était devenue musulmane ?

 16   M. Donia (interprétation). – C'est exact.

 17   M. Nice (interprétation). - Il y a également une correction que

 18   je souhaite ajouter à la déclaration de Merdan, mais je ne pense pas que

 19   cela ait beaucoup d'importance.

 20   M. le Président (interprétation). – Monsieur Donia, ceci conclut

 21   votre déposition. Merci beaucoup d'être venu comparaître devant le

 22   Tribunal Pénal International. Vous pouvez

 23   disposer.

 24   M. Donia (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

 25         (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)


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  1   M. le Président (interprétation). - Vous allez citer le témoin

  2   suivant demain ?

  3   M. Nice (interprétation). - C'est exact.

  4   M. le Président (interprétation). – Vous aurez besoin d'environ

  5   une heure, est-ce exact ?

  6   M. Nice (interprétation). - Je crois que pour l'interrogatoire

  7   principal, j'aurai besoin de trois quarts d'heure à une heure ; j'espère

  8   pouvoir le faire dans ce laps de temps.

  9   M. le Président (interprétation). - Un des membres du collège

 10   des Juges a vu le film, les deux autres Juges visionneront le film demain

 11   avant l'audience.

 12   Je crois que M. Stein souhaite intervenir.

 13   M. Stein (interprétation). – Merci, Monsieur le Juge. Nous nous

 14   opposons au fait que vous voyez le film ; cela ne fait pas partie d'un

 15   rapport d'expert. Il s'agit d'un film qui parle d'une famille musulmane

 16   dont on ne connaît pas le nom, d'événements qui se réfèrent à une date

 17   qu'on ne connaît pas. Nous n'avons pas pu contacter l'auteur du film :

 18   elle n'est pas sur la liste des témoins, nous n'avons pas pu la contacter.

 19   D'autre part, nous n'avons pas pu contacter Debbie Christie qui

 20   est le producteur ou le metteur en scène, je ne sais pas exactement. Donc,

 21   je ne pense pas que cela soit préjudiciable à votre jugement. Mais quand

 22   vous aurez vu le film dans son intégralité, vous verrez que c'est

 23   regrettable.

 24   M. le Président (interprétation). - Bien. Monsieur Kovacic ?

 25   M. Kovacic (interprétation). – Je n'ai qu'un mot à ajouter :


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  1   nous pensons qu'en ce

  2   qui concerne M. Allcock, son témoignage n'est pas approprié. Ce n'est pas

  3   parce que les documents ne nous ont pas été communiqués en temps utile -je

  4   ne m'oppose pas par principe à ce que l'accusation fasse verser au dossier

  5   ce film d'une façon ou d'une autre- mais il ne faut pas lier le versement

  6   de ce film au témoignage de M. Allcock qui ne fait jamais référence à ce

  7   film dans son témoignage.

  8   M. Nice (interprétation). - Permettez-moi de répondre. Quand

  9   M. Allcock est arrivé il y a quelques jours, il a dit que ce film faisait

 10   partie de recherches sur le terrain qu'il souhaite présenter à l'appui de

 11   ses conclusions.

 12   Or, il ne savait pas que ce film avait été visionné dans le

 13   cadre d'une autre affaire. C'est une pure coïncidence. Il considère que ce

 14   film est un document sur lequel il peut s'appuyer, comme sur n'importe

 15   quel autre document. Il apparaît très clairement que son contre-

 16   interrogatoire ne sera pas terminé demain, et qu'il sera probablement

 17   obligé de revenir la semaine prochaine ou peut-être même en septembre. La

 18   semaine prochaine en tout cas, ce n'est pas possible puisqu'il fait partie

 19   d'un jury de thèse.

 20   Donc, le film ne portera absolument pas préjudice aux accusés

 21   puisqu'ils auront la possibilité de s'y référer dans le cadre du contre-

 22   interrogatoire.

 23   Quant à ce qui concerne l'auteur du film, elle n'est pas sur la

 24   liste des témoins, et je ne pense pas qu'elle pourrait nous aider d'une

 25   façon ou d'une autre. Je sais qu'elle a déjà comparu dans le cadre d'une


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  1   autre affaire, et qu'elle a été appelée par la Chambre et non pas par une

  2   des parties en présence. Bien entendu, si cela s'avère utile, nous

  3   pourrions l'appeler à comparaître et lui poser un certain nombre de

  4   questions.

  5   D'autre part, l'on pourrait se référer au contre-interrogatoire

  6   dans le cadre d'une autre Chambre.

  7   Mais ce document représente le résultat d'une recherche

  8   originale et auquel le témoin peut se référer dans le cadre de son

  9   interrogatoire.

 10         (Les Juges se concertent sur le siège.)

 11   M. le Président (interprétation). - Nous trancherons demain à ce

 12   sujet. Entre-temps, nous allons tous visionner le film avant la journée de

 13   demain et nous vous dirons notre réponse à 14 heures 30.

 14                     L'audience est levée à 18 heures 47.

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