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1 Le mardi 1 juin 2004
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez, je vous
6 prie, donner le numéro de l'affaire.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] L'affaire IT-00-39-T, le Procureur
8 contre Momcilo Krajisnik.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
10 Monsieur Harmon, êtes-vous prêt à continuer l'interrogatoire principal de
11 M. Kirudja ?
12 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous reprenons après trois jours de
14 suspension. Je salue tout le monde dans ce prétoire.
15 Je demande que l'on fasse rentrer le témoin dans le prétoire.
16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
17 LE TÉMOIN : CHARLES KIRUDJA [Reprise]
18 [Le témoin répond par l'interprète]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kirudja. Veuillez vous
20 asseoir. Je me permets de vous rappeler comme je l'ai fait vendredi
21 dernier, que vous êtes toujours lié par la déclaration solennelle que vous
22 avez prononcée au début de votre déposition.
23 Monsieur Harmon, c'est à vous.
24 Monsieur l'Huissier, pouvez-vous déplacer de quelques centimètres le
25 rétroprojecteur pour que M. Harmon puisse voir
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1 M. Kirudja ?
2 Interrogatoire principal par M. Harmon : [Suite]
3 Q. [interprétation] Monsieur Kirudja, bonjour.
4 R. Bonjour.
5 Q. Nous en sommes restés vendredi à l'examen d'une pièce à conviction,
6 pièce à conviction de l'Accusation 141. Une lettre de Radomir Pasic, maire
7 de Bosanski Novi, qui vous était adressée et qui vous informait que 1 233
8 personnes supplémentaires souhaitaient quitter la municipalité. J'aimerais
9 maintenant que nous passions à une nouvelle pièce à conviction, la pièce de
10 l'Accusation 142 qui date de trois jours plus tard.
11 Monsieur Kirudja, je vous demanderais d'examiner rapidement cette pièce à
12 conviction qui se divise en deux parties. D'abord, une page de garde où
13 l'on trouve votre signature, ensuite, un mémo de Paolo Raffone.
14 Reconnaissez-vous ces documents, Monsieur Kirudja ?
15 R. Oui.
16 Q. Monsieur Kirudja, vous receviez des renseignements au sujet de ce qui
17 se passait en Bosnie. J'aimerais que nous parlions de la deuxième partie de
18 cette pièce à conviction, à savoir, un mémo émanant de M. Raffone en date
19 du 8 juillet 1992, qui avait pour
20 objet : "L'arrivée de réfugiés en provenance de Bosanski Novi." Je me
21 permets de lire un passage de cette pièce pour le compte rendu d'audience,
22 je cite :
23 "Le 7 juillet 1992, un groupe de 18 personnes est arrivé dans le secteur
24 nord en provenance de Bosanski Novi. Ils demandaient protection et
25 assistance pour traverser le CFL en direction de Zagreb et d'autres pays
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1 étrangers. Le responsable des affaires civiles a interrogé les membres du
2 groupe, a organisé leur passage le
3 8 juillet 1992. Les renseignements suivants reposent exclusivement sur les
4 déclarations de ces personnes qui ont demandé à garder l'anonymat pour des
5 raisons de sécurité.
6 A Bosanski Novi (BH), le groupe ethnique musulman, 28 % de la population a
7 continué à subir la persécution, des déportations et des intimidations de
8 la part de groupes armés serbes. Le début de la crise remonte à la fin du
9 mois d'avril 1992. Les personnes interrogées ont fait savoir que tous les
10 Musulmans résidant dans la ville ainsi que dans les villages voisins,
11 étaient prêts à quitter la région pour se rendre en Croatie ou vers
12 d'autres destinations européennes. Par le passé, nous avons déjà rendu
13 compte du fait que le stade de Bosanski Novi était l'un des endroits où des
14 centaines de personnes avaient été retenues pour être interrogées avant de
15 se rendre vers des destinations inconnues."
16 La référence est faite à un rapport inconnu.
17 "Tous les Musulmans, d'après ce que l'on apprend, sont contraints à signer
18 des documents leur demandant de quitter volontairement la région des les
19 conditions suivantes : laisser derrière elles tous leurs biens personnels,
20 y compris voiture, effets personnels, et cetera; jurer qu'elles quittent la
21 région de façon permanente et qu'elles ne reviendront jamais à leur
22 domicile. Sous réserve de respect de ces conditions, ces personnes
23 reçoivent une déclaration du commandant local du TDF de la milicija ou du
24 maire, leur permettant de quitter leur municipalité de résidence. En
25 général, elles ont obligation de partir dans la direction de Dvor. On
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1 apprend que les autorités locales de Dvor ne semblent pas surprises de
2 l'arrivée de ces personnes déplacées. Elles démontrent même une coopération
3 importante pour leur faciliter le voyage vers des territoires sous contrôle
4 croate.
5 "Une stratégie calculée de 'nettoyage' de la région de ces Musulmans semble
6 s'être intensifiée depuis le début du mois de
7 mai 1992; incendies de maisons, déportations, exécutions sommaires, tirs à
8 l'intérieur des maisons, et cetera, illustrent la situation actuelle dans
9 les villes et villages situés au nord de la frontière de Bosnie-Herzégovine
10 (Bosanski Novi, Bosanski Kostajnica et Bosanska Dubica). On apprend que la
11 milicija ne semble pas intervenir. Certains maires et d'autres Serbes
12 travaillant dans les municipalités sont également cités comme essayant
13 d'aider les Musulmans à quitter leur domicile en toute sécurité. A Bosanski
14 Novi, la police militaire est citée comme ayant établi son QG à l'hôtel
15 Una, et l'on parle de tortures particulièrement violentes à l'intérieur de
16 l'hôtel.
17 "Les personnes interrogées pensent que les dirigeants politiques savent ce
18 qui se passent. Certaines d'entre elles attestent du fait que certains
19 représentants politiques d'haut niveau au sein du parti SDS, sont connus
20 comme ayant donné des ordres pour que des actions soient engagées contre
21 les Musulmans. Certains des réfugiés parlent de politique de représailles
22 en raison du fait qu'un Serbe a été abattu sur la ligne de front. Ce
23 pourquoi un homme musulman a été tué. Tous les hommes interrogés ont été
24 détenus plusieurs jours sur le stade de Bosanski Novi avant d'être
25 expulsés. Ils parlent du fait que tous les jours, 30 nouveaux détenus
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1 arrivaient sur le stade. Lorsque le stade était plein, les gardes ont
2 emmené certaines de ces personnes ailleurs vers des destinations inconnues.
3 Certains témoins rapportent qu'au cours des 15 premiers jours du mois de
4 mai, quelque 200 personnes ont été emmenées hors du stade pour être
5 abattues non loin de là. Sur la base de ces entretiens, les personnes
6 interrogées ont estimé que quelque 5 000 personnes allaient sans doute
7 traversé le pont séparant Bosanski Novi de Dvor dans les jours qui y
8 viennent."
9 Cette lettre est signée de M. Raffone. Il y est dit que sa transmission "a
10 été autorisée par Charles Kirudja," coordinateur aux affaires civiles.
11 Tout d'abord, pouvez-vous nous dire très rapidement ce que "Charles Kirudja
12 a permis de transmettre" ?
13 R. A ce moment-là, nous sommes toujours sous mandat dans le cadre du plan
14 Vance et de l'existence de ces hommes protégés par les Nations Unies. Tous
15 les documents qui traversent la ligne frontière de ces zones, doivent
16 obtenir l'autorisation de transmission afin qu'il soit indiqué qu'elle fait
17 partie du mandat ou qu'elle n'en fait pas partie. Lorsque nous avons été
18 saisis de cette question des réfugiés qui provenaient de la Bosnie du Nord
19 en traversant Dvor pour arriver dans le secteur en question, à savoir,
20 lorsque nous avons appris tous les éléments de preuve dont je vous ai parlé
21 au cours des derniers jours, nous devions le faire savoir à notre QG pour
22 que celui-ci soit au courant que cela constituait un facteur de
23 déstabilisation à l'intérieur du secteur. Lorsque ces réfugiés sont arrivés
24 dans le secteur et ont demandé à le traverser, ils ont été interrogés. En
25 résumé, ce qui est écrit dans cette lettre, rend compte de la situation
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1 dépeinte par eux, et le rapport a été écrit par la personne que j'ai
2 chargée de le faire, à savoir, en l'espèce, M. Raffone.
3 En effet, lorsque le problème était suffisamment sérieux, je faisais deux
4 choses. Je pouvais simplement signer le document moi-même parce que j'avais
5 décidé qu'il s'agissait, éventuellement, d'une question pertinente. Mais,
6 dans des situations telles que celles-ci, je souhaitais que le travail de
7 base soit réalisé par quelqu'un d'autre que moi. Quelquefois, je
8 travaillais avec ce responsable pour établir le rapport, notamment, sur le
9 plan de son contexte. Ensuite, je signais l'autorisation de transmission.
10 Autrement, les questions auraient pu être posées quant aux raisons pour
11 lesquelles un de nos responsables avait passé du temps hors de la zone sous
12 notre mandat, ce qui aurait risqué de lui mettre face à des conséquences
13 négatives pour sa carrière de la part de ses chefs.
14 Q. Ces renseignements, Monsieur Kirudja, vous donnent des renseignements
15 complémentaires sur la nature de l'organisation des événements en Bosnie à
16 l'égard des non-Serbes, n'est-ce pas ?
17 R. A ce moment-là, en fait, ce n'était pas des renseignements
18 complémentaires. Il n'y avait rien qui pouvait nous permettre de tirer de
19 véritables conclusions. Cela nous apportait quelques informations
20 fragmentaires qui pouvaient, éventuellement, nous permettre d'aller vers
21 des conclusions. Il y a très peu d'éléments dans tout cela sur lesquels
22 j'aurais pu appeler l'attention de quiconque à l'époque.
23 Cependant, j'aimerais vous parler des choses qui suivent. Comme vous le
24 voyez, nous parlons de 18 personnes qui souhaitent nous parler. Nous leur
25 assurons l'anonymat de façon à ce qu'elles aient tous l'attitude de parler
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1 ouvertement en nous disant ce qu'elles ont vu. Nous commençons à vérifier
2 si leurs dires corroborent les informations reçues par nous précédemment.
3 Au quatrième paragraphe de ce mémo, vous constaterez que ces 18 personnes
4 nous parlent d'éléments que nous avons déjà trouvés décrits, vendredi
5 dernier, dans la lettre qui était adressée par M. Pasic et sur laquelle ces
6 personnes étaient interrogées.
7 Comme vous le constaterez, on parle de la nécessité pour ces personnes de
8 laisser derrière elles tous leurs biens, de jurer de ne jamais revenir dans
9 la région, mais on parle toujours de leur départ comme "volontaire", ce qui
10 explique les guillemets volontaires, entre guillemets, parce que
11 manifestement tout ceci nous prouve que ce départ n'avait rien de
12 volontaire.
13 Vous constaterez que les pressions s'accumulent sur ces personnes, qu'elles
14 craignent pour leurs vies. Si vous tournez la page, vous verrez que tout
15 cela indique l'existence d'une stratégie visant à nettoyer cet endroit. Le
16 mémo et les annotations que j'y ai apportées nous montre que dans la zone
17 où nous nous trouvons, c'est-à-dire, dans une zone tout à fait centrale,
18 cette zone protégée par les Nations Unies, toutes ces personnes se
19 regroupent.
20 Q. Fort bien. Merci, Monsieur Kirudja. Passons à la pièce suivante, pièce
21 143 de l'Accusation. Nous allons y consacrer quelques instants.
22 Monsieur Kirudja, on voit votre nom et vos initiales à la fin de ce
23 document. Le reconnaissez-vous ?
24 R. Oui.
25 Q. Ce document porte la même date que le mémo de la pièce précédente, à
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1 savoir, la date du 9 juillet. L'objet est : "L'aide aux réfugiés de la zone
2 protégée par les Nations Unies." J'aimerais vous donner lecture, et donner
3 lecture au compte rendu d'audience du premier paragraphe, je cite :
4 "Le 8 juillet 1992, M. Nogolica, président du gouvernement du bureau de la
5 Croatie pour la FORPRONU, à Zagreb, m'a transmis la position du
6 gouvernement croate sur le sujet des réfugiés de Bosnie-Herzégovine. Il
7 convient de s'occuper des réfugiés à l'endroit où ils se sont sauvés à
8 l'intérieur de la zone protégée par les Nations Unies, mais il ne faut pas
9 les diriger vers des territoires sous contrôle croate où il n'existe aucune
10 possibilité de loger des réfugiés."
11 Monsieur Kirudja, le 9 juillet, la position croate est tout à fait simple.
12 La Croatie dit : "Ne nous envoyez pas de réfugiés," n'est-ce pas ?
13 R. La position exacte de la Croatie est la suivante : Si ces réfugiés
14 arrivent dans votre secteur, c'est-à-dire, le secteur où se trouve les
15 Nations Unies, c'est là qu'ils doivent restés.
16 Q. Pourquoi la Croatie a-t-elle adopté cette position ?
17 R. A ce moment-là, les Croates se trouvaient face à un problème plus
18 important, à savoir, comment récupérer ces zones, à savoir, les quatre
19 secteurs qui avaient été pris par ce qu'il est convenu d'appeler les Serbes
20 locaux pour que ces territoires se retrouvent à nouveau sous la
21 souveraineté de l'état croate. Il était tout à fait clair que c'était là
22 leur souci principal, la clé de voûte de leur préoccupation. Tout ce que
23 nous faisions devait aller dans le sens de cette préoccupation qui était la
24 leur. C'est le premier point.
25 Le deuxième point, c'est que le secteur sous protection des Nations Unies
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1 avait été évacué de tous ces habitants non-Serbes par le passé.
2 Ces gens qui étaient des gens intelligents, savaient qu'il y avait toujours
3 déplacement de population. Par conséquent, la Croatie nous donne sa
4 position, et nous dit de la façon la plus claire qui soit, qu'elle
5 n'encourage pas les évacuations, que ces personnes, si elles arrivent dans
6 le secteur dont nous nous trouvons, ne seront pas autorisées par eux à
7 aller plus loin. Il était tout à fait clair que la Croatie aurait préféré
8 que personne n'arrive pour commencer dans le secteur sous protection des
9 Nations Unies. A cela, la Croatie ne pouvait rien, puisque le secteur en
10 question était sous mandat des Nations Unies. Le maximum que pouvait faire
11 la Croatie, c'est de dire ce qu'elle a dit, à savoir que ces réfugiés
12 restent là où ils sont, point final. Comme vous le constaterez, tout cela
13 constitue également un changement.
14 Q. Fort bien. J'aimerais maintenant que nous passions à la pièce de
15 l'Accusation 144, pièce suivante.
16 Monsieur Kirudja, veuillez jeter un oeil sur ce document, je vous prie. Il
17 porte la date du 12 juillet 1992, l'auteur de ce document est Jens Brosted.
18 Le reconnaissez-vous, ce document ?
19 R. Oui.
20 Q. Pour le résumé, je dirais que ce résumé traite de deux réunions dont
21 l'une s'est tenue le 7 juillet et l'autre, le 8 juillet. J'aimerais
22 commencer par appeler votre attention sur le paragraphe 8 où il est
23 question d'une réunion qui a eu lieu le 7 juillet 1992. Je lis le passage
24 suivant pour le compte rendu d'audience, je cite :
25 "Le 7 juillet 1992, une réunion s'est tenue entre le maire, le numéro 2 de
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1 la mairie et le président de l'assemblée de Dvor, ainsi qu'un membre
2 représentant chargé de la coopération avec la FORPRONU, le vice-président
3 de l'assemblée de Bosanski Novi, et des représentants de la CIVPOL et de la
4 compagnie danoise. Le problème des réfugiés de Bosanski Novi a été évoqué
5 comme étant un problème auquel il convenait d'apporter une solution
6 immédiate pour éviter tout affrontement armé. Selon le rapport danois au
7 sujet de cette réunion, le représentant de Bosanski Novi a informé les
8 personnes présentes que la municipalité avait établi deux critères à
9 appliquer aux personnes désirant quitter la région. Premièrement, ces
10 personnes devaient signer une déclaration selon laquelle elles quittaient
11 la région volontairement et de façon permanente, et deuxièmement, elles
12 devaient certifier qu'elles avaient vendu et échangé ou fait don de leurs
13 maisons et de leurs autres biens immobiliers à une tierce personne. Le
14 représentant de Bosanski Novi a fait savoir que les demandes de 1 300
15 familles, qui remplissaient ces critères, avaient été examinées. Ce qui
16 d'après eux faisaient au total 3 000 à 5 000."
17 Là encore, on voit ces deux critères décrits dans le rapport du bataillon
18 danois et qui indiquent qu'il était exigé de ces personnes qu'elles disent
19 quitter la municipalité une bonne fois pour toute, c'est un critère dont
20 vous aviez déjà eu connaissance, n'est-ce pas ?
21 R. Oui. On le citait un peu partout et il devait de plus en plus connu.
22 Q. Maintenant, le 8 juillet, une autre réunion se tient. On en parle au
23 paragraphe 3 de ce mémo. Les participants à cette réunion sont identifiés
24 comme étant le maire adjoint, le chef de la milicija, de la police, ainsi
25 que des participants de la CIVPOL, et un certain commandant Rand de la
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1 Compagnie danoise, n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. Maintenant, si nous passons au paragraphe 11 de ce mémo. On y parle
4 toujours de la réunion du 8 juillet au paragraphe 11. Je lis le passage qui
5 suit pour le compte rendu d'audience. Je cite : "Le chef de la police a
6 déclaré que la question des réfugiés durait déjà depuis huit à dix jours,
7 mais que, suite à l'augmentation importante du nombre de ces réfugiés,
8 cette question était devenue un problème. De nombreuses personnes avaient
9 déjà échangé leurs maisons avec des Serbes de Croatie, le maire adjoint ne
10 souhaitait pas supputer quant à ce qui pouvait avoir motivé ces personnes
11 dans leur désir de partir, mais plus tard il a proposé de donner son avis
12 personnel. Certaines de ces personnes auraient été déçues par la politique
13 d'Izetbegovic, notamment, après les combats de Cazin et de Kladusa dans la
14 région, ainsi que par le retour des blessés et tués serbes qui avaient
15 provoqué la peur des Musulmans de la région quant à des actes de vengeance
16 lorsque ces tués et blessés faisaient partie de leurs familles. Quand les
17 discussions sont devenues plus ouvertes, ils n'ont pas contesté que les
18 déclarations des réfugiés, quant à leur désir volontaire de quitter la
19 région. Ils n'ont pas contesté qu'il était permis de se poser des questions
20 quant à la sincérité des déclarations des départs volontaires de la part de
21 ces personnes."
22 Est-ce que ceci concorde avec la conclusion que vous aviez déjà tirée ?
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, pour le compte rendu
24 d'audience, je pense que c'était un lapsus de votre part, mais vous avez
25 dit que les personnes déplacées dans la politique, alors qu'en fait, il
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1 convenait de dire qu'elles avaient été déçues par la politique
2 d'Izetbegovic.
3 M. HARMON : [interprétation] Oui, je vois. Merci de cette correction. C'est
4 exact.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder.
6 M. HARMON : [interprétation]
7 Q. Si nous passons à la dernière partie du paragraphe, nous voyons la
8 phrase suivante qui se lit comme suit : "Quand je leur ai demandé de
9 confirmer que les maires de Bosanski Novi et de Banja Luka étaient apparus
10 à la télévision de Banja Luka aux informations en déclarant que les
11 Musulmans et les Serbes ne pouvaient plus vivre ensemble, ils ont répondu
12 que ce n'était pas le maire, mais le chef de la cellule de Crise de Banja
13 Luka que l'on avait vu à l'écran, à savoir, M. Radoslav Brdjanin."
14 Cette citation, selon laquelle les Musulmans et les Serbes ne pouvaient
15 plus vivre ensemble, est-ce que vous l'aviez déjà entendue, Monsieur
16 Kirudja ?
17 Q. Je crois que, vendredi, j'ai dit que nous ne l'avions entendu que trop
18 souvent. Dans ce mémo que vous venez de lire, souvenez-vous que c'est Jens
19 Brosted qu'il l'a écrit. Lui aussi l'a entendu, il ne fait pas que
20 l'écrire.
21 Q. Il l'a entendu à la télévision ?
22 R. Dans les médias ou dans des déclarations de seconde main.
23 Q. Très bien.
24 R. Il a entendu deux choses. On lui demande "ce qui se passe dans la
25 région," et lorsque c'est un Serbe qui parle, il entend très souvent cette
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1 expression : "Nous ne pouvons pas vivre ensemble." C'est quelque chose que
2 j'ai déjà évoqué à plusieurs reprises ici, et qui est démontré dans ce
3 document.
4 Q. Quel effet pensez-vous que ce genre de déclaration pouvait avoir sur la
5 situation en Bosnie ?
6 R. Je ne pense pas qu'elle en avait parce que nous parlons ici --
7 Q. Les effets sur les émissions de télévision, pouviez-vous avoir des
8 informations à ce sujet ?
9 R. Non.
10 Q. Très bien.
11 R. Parce qu'il s'agit de quelqu'un qui parle d'une allocution dans une
12 pièce où nous nous trouvons, mais que nous n'avons pas vu.
13 Q. Fort bien. J'aimerais maintenant que nous passions à la pièce suivante,
14 Monsieur Kirudja, pièce de l'Accusation 145. Nous passerons très rapidement
15 sur cette pièce.
16 Nous avons vu dans un certain nombre de pièces déjà des références à
17 l'arrivée de personnes au nombre de plus en plus important qui souhaitaient
18 passer par la zone protégée par les Nations Unies pour se rendre vers la
19 Croatie. Ce mémo en date du 13 juillet est annexé à un mémo de M. Raffone.
20 Vous reconnaissez ces deux documents ?
21 R. Oui. Etant entendu que seul mon nom et mon autorité étaient utilisés.
22 Ceci était devenu une pratique routinière puisque ma signature n'apparaît
23 pas en première page ou à l'intérieur de ce document. C'est un document de
24 routine qui est envoyé en mon nom.
25 Q. L'objet de ce mémo de M. Raffone, et le fait que "20 autobus, à bord
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1 desquels se trouvaient des réfugiés de Bosanski Novi, traversent la
2 frontière vers les territoires sous contrôle croate en passant par le
3 secteur nord." Je lis brièvement un passage de ce mémo de M. Raffone. Je
4 cite :
5 "Aujourd'hui, un groupe avancé de personnes en provenance de Bosanski Novi
6 est arrivé à la porte de la Compagnie danoise de Dvor, et a annoncé que, le
7 mercredi 15 juillet à midi --"
8 Ici encore, on voit une description de la politique croate de l'époque,
9 nous y reviendrons dans quelques minutes, mais ici vous apprenez qu'un
10 nombre important de personnes risque d'arriver chez vous. C'est bien cela ?
11 R. Cela n'a rien de nouveau. C'était devenu tout à fait habituel, c'est la
12 raison pour laquelle d'ailleurs les responsables envoyaient des rapports à
13 ce sujet en mon nom comme des documents de routine. Cela n'avait rien de
14 nouveau. Nous sommes le 13 juillet, or la situation remonte au 26 mai. Le
15 problème était déjà devenu tellement important que mes responsables
16 l'avaient tout à fait compris. C'est un problème qui n'a rien de nouveau,
17 il ne fait que s'intensifier.
18 Q. Fort bien. Maintenant regardons la pièce suivante, pièce de
19 l'Accusation 146 datant du 13 juillet également. Cette pièce est soumise à
20 la Chambre à titre de complément de la pièce suivante. Monsieur Kirudja, il
21 y est question de 5 000 Musulmans réfugiés de Bosanski Novi, un
22 renseignement dont vous disposiez déjà, n'est-ce pas ?
23 Reconnaissez-vous ces trois documents --
24 R. Exact.
25 Q. -- qui font parties de la pièce à conviction de l'Accusation 146 ?
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1 R. Exact.
2 Q. Il y est question également de l'arrivée potentielle imminente de 5 000
3 Musulmans déplacés de Bosanski Novi, n'est-ce
4 pas ?
5 R. Exact. Seulement avant d'aller vers une autre destination. Il est
6 question du CICR, nous essayons de compléter les renseignements avec ce que
7 nous apprenons là, ce mémo est adressé au CICR, mais traite à peu près de
8 la même question.
9 Q. Fort bien. Revenons à la pièce de l'Accusation 147, à présent.
10 M. HARMON : [interprétation] Ce document, Monsieur le Président, Messieurs
11 les Juges, a un rapport avec les paragraphes 122 à 126 de la déclaration
12 préalable écrite de M. Kirudja.
13 Q. Voudriez-vous, Monsieur Kirudja, jeter un coup d'œil à cette pièce 147,
14 avant que nous ne parlions de son contenu. Reconnaissez-vous la pièce à
15 conviction 147, Monsieur Kirudja ?
16 R. Oui.
17 Q. Dans cette pièce nous avançons d'une semaine à peu près, n'est-ce pas ?
18 R. Exact.
19 Q. Nous avons là trois documents dont l'un est particulièrement important,
20 puisqu'il démontre un changement dans la politique de la Croatie. Je fais
21 référence à la lettre de Franjo Greguric, qui était premier ministre de la
22 Croatie, et qui est mentionné à la dernière page de cette pièce à
23 conviction.
24 J'aimerais donner lecture d'un passage de ce document pour le compte rendu
25 d'audience, après quoi je vous demanderais vos commentaires. Il s'agit
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1 d'une lettre du premier ministre de Croatie, Franjo Greguric datant du 21
2 juillet 1992 [comme interprété], objet, réfugiés et adressée au haut
3 commissaire du HCR à Zagreb. Je ne vais lire qu'une partie de cette pièce à
4 conviction. Je cite :
5 "Cher Monsieur. Nous avons reçu votre lettre décrivant la situation
6 actuelle de 'nettoyage ethnique' à Bosanski Novi, telle que rapportée par
7 votre groupe d'hauts responsables du HCR à la mission de Zagreb qui se sont
8 rendus dans la zone concernée. Comme vous le savez, la République de
9 Croatie a fait beaucoup plus que nos capacités ne nous le permettaient,
10 pour s'occuper de 407 500 réfugiés de Bosnie-Herzégovine, en leur
11 fournissant un logement temporaire en République de Croatie. Le
12 gouvernement croate, dans cette situation d'urgence, permettra en tant que
13 dernier recours à ce groupe de 407 000 réfugiés, citoyens musulmans de
14 Bosanski Novi, de pénétrer en Croatie."
15 Cette lettre de M. Greguric représente un changement complet d'attitude de
16 la part de la République de Croatie, n'est-ce pas, qui adopte une attitude
17 inverse de ce qui a été précédemment ?
18 R. Manifestement son attitude est modifiée, mais de façon réticente et
19 temporaire en raison de la situation d'urgence. Nous ne la considérons pas
20 comme un changement complet de position.
21 Q. Qu'est-ce qui a provoqué ce changement ?
22 R. A ce moment-là, le problème était devenu permanent et gênait tout le
23 monde. Manifestement, Monsieur Greguric dit à M. Mendiluce, qu'il a reçu
24 une lettre de ceux qui travaillent sous les ordres de M. Mendiluce, qui
25 l'informaient, pour autant que je l'ai compris, du fait que le danger
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1 s'était accru pour les personnes qui se trouvaient dans les zones
2 contrôlées par les Serbes, ou sur le terrain de football, ou quelque part
3 dans la région et qui souhaitaient partir. A ce moment-là, il semble
4 convaincu que ces personnes étaient en danger de mort, et que cela
5 suffisait pour autoriser leur passage par la zone protégée par les Nations
6 Unies. Ce qui constitue une modification par rapport à la position
7 antérieure de la Croatie, qui estimait que ces personnes ne devaient pas
8 entrer dans la zone protégée par les Nations Unies.
9 Q. J'aimerais maintenant lire, pour le compte rendu d'audience, le
10 paragraphe 123 de votre déclaration écrite.
11 R. Je n'ai pas le document sous les yeux, je n'ai pas ma déclaration.
12 M. HARMON : [interprétation] Monsieur Kirudja, peut-être pourrait-on vous
13 remettre cette pièce à conviction 120 ?
14 Q. Paragraphe 123, Monsieur Kirudja, que je cite -- en ce moment, je cite
15 : "Ayant obtenu l'accord des autorités croates qui acceptent les réfugiés
16 bosniaques, nous nous apprêtons à présent à traiter le problème logistique
17 de l'évacuation du transport de ces personnes. Je reste opposé au transfert
18 de ces personnes hors de Bosnie, considérant que ceci est une complicité
19 dans le nettoyage ethnique qui va très certainement reprendre, mais
20 j'estime qu'une fois que les autorités croates ont accepté le déplacement
21 des réfugiés et que le HCR a accepté d'organiser leur transit avec l'aide
22 de la FORPRONU, nous pouvons modifier quelque peu notre position. Il m'est
23 apparu clairement que si nous acceptons le déplacement de ces Musulmans à
24 partir des zones sous contrôle serbe de la Bosnie, les autorités serbes de
25 Bosnie considéraient ceci simplement comme un premier 'round', et
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1 demanderaient bientôt que nous évacuions les non-Serbes de leur territoire
2 jusqu'au moment où celui-ci sera totalement nettoyé."
3 Pourquoi, Monsieur Kirudja, estimiez-vous que ceci encouragerait les
4 autorités bosniaques à continuer le nettoyage ethnique ?
5 R. Voyez-vous, à ce moment-là, vous avez entendu les témoignages qui
6 commencent le 29 mai, il est question de 4 000 et même de plus de 4 000
7 réfugiés. Lorsque le maire vient nous voir, M. Pasic, lorsqu'il vient nous
8 voir la première fois, les nombres cités par lui au sujet de Bosanski ne
9 concernent que Bosanski Novi, disons le village de Blagaj, et ils sont déjà
10 de 13 000. A ce moment-là, les renseignements commencent à filtrer à partir
11 des réfugiés eux-mêmes, à partir des coups de téléphone reçus dans mon
12 bureau, et provenant du maire Kupresanin, que dans des télégrammes envoyés
13 par lui, il était déjà question de 15 000 réfugiés sortant de la région.
14 C'est ce qu'il dit au téléphone. Je parle de lui comme évoquant les régions
15 allant de Bosanska Krupa, à Sanski Most, Prijedor et Kljuc. C'est dans ces
16 conditions qu'il parle de 15 000 personnes qui arrivent et de 15 000 autres
17 qui sont peut-être en train de partir.
18 Ces chiffres avaient commencé à Sanski Most, Prijedor et Kljuc, et c'est
19 dans ces conditions qu'il parle de 15 000 personnes qui arrivent et de
20 15 000 autres qui sont, peut-être, en train de partir.
21 Ces chiffres étaient tels que lorsqu'il dit que 4 000 personnes reçoivent
22 l'autorisation, manifestement, nous savions que le phénomène n'allait pas
23 s'arrêter là. Je partais du principe que ces 4 000 n'étaient que les
24 premières 4 000 personnes autorisées à passer et qu'elles ne seraient pas
25 les dernières, que cela n'était que le début d'un processus.
Page 3182
1 Q. Pouvons-nous, maintenant, passer à la pièce 148 de l'Accusation.
2 Monsieur Kirudja, ce document faisait partie de la pièce qui est datée du
3 22 juillet 1992. Reconnaissez-vous ces documents ?
4 R. Oui.
5 Q. Je vais lire un extrait de votre mémo daté du 22 juillet, un seul
6 extrait, où je fais référence au passage BB et CC. L'objet de ce mémo est :
7 "Le transit ou le passage des réfugiés de Bosanski Novi à travers le
8 secteur nord.
9 "BB : Le commandant du secteur a remis un plan concernant le passage de
10 quelques 4 000 personnes. Le HCR a demandé au Bataillon danois de fournir
11 de l'essence pour 53 autocars, 200 véhicules, de même que deux ambulances
12 et un véhicule de remorque.
13 "CC : Le HCR recommande que la FORPRONU ne soit pas associé à une telle
14 opération d'évacuation des Musulmans et autres minorités sur les
15 territoires protégés des Nations Unies. Au cours des négociations avec les
16 autorités locales qui ont duré quatre jours, du 18 au 21 juillet, le HCR a
17 toujours dénoncé cette politique d'expulsion basée sur le "nettoyage"
18 ethnique et religieux et va continuer à dénoncer cette politique."
19 Monsieur Kirudja, ce passage sur le territoire du secteur nord a-t-il,
20 effectivement, eu lieu ?
21 R. Oui.
22 Q. Monsieur Kirudja, à la place de ces 4 000 réfugiés, d'après vos propres
23 estimations, combien de personnes ont traversé le secteur nord ?
24 R. Notre estimation approximative était de l'ordre de 9 000. Ceci a duré
25 toute la journée. Cela a commencé tôt le matin avant 8 heures, nous étions
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1 à un croisement à Turanj, et nous étions encore à cet endroit-là, après 22
2 heures du soir. Notre estimation approximative était 9 000, 9 000 ont
3 traversé le territoire.
4 Q. Il ne s'agissait pas de Serbes ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous avez dit, il y a quelques instants, que vous pensiez que ce serait
7 une de mes premières demandes. Je vais maintenant me tourner vers votre
8 déclaration écrite, page 128, de façon à ce que ce soit consigné au compte
9 rendu d'audience : "Le 8 août, j'ai rencontré l'envoyé spécial du HCR, M.
10 Jose Maria Mendiluce, pour parler avec lui de l'approche qu'il fallait
11 adopter eu égard au niveau de la vague de réfugiés qui devait traverser le
12 secteur nord. A ce moment-là, un rapport de la police civile des Nations
13 Unies à Dvor avait estimé que le nombre de personnes qui souhaitaient
14 traverser le secteur nord représenterait 8 000 réfugiés. En l'espace de
15 quelques jours, cette estimation est passée à 28 000. Il nous est apparu
16 clairement que les Nations Unies ne pouvait pas refaire la même opération
17 d'évacuation que celle qui avait eu lieu un peu plus tôt, voire, encore
18 moins, une opération d'une telle ampleur. Pour ce faire, cela signifierait
19 que l'on participerait directement à un processus répréhensible de
20 'nettoyage ethnique' prôné par les Serbes de Bosnie. Le HCR a adopté la
21 position suivante : il ne fallait pas succomber à toute forme de
22 'chantage'. Il s'agissait là d'une réponse aux autorités serbes qui
23 alléguaient que les Nations Unies devait assister sur cette évacuation, je
24 cite : 'ou les Musulmans allaient souffrir'."
25 Pourriez-vous nous parler davantage de ce chantage ? Pourquoi est-il fait
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1 mention, ici, du mot chantage ?
2 R. Oui. Lorsque les autorités croates ont, un petit peu, relâché les rênes
3 et ont autorisé cette première évacuation, c'est parce que ces réfugiés ou
4 ces personnes déplacées étaient menacées. On menaçait de leur faire du mal.
5 On entendait sans cesse des menaces de façon indirecte, ou c'étaient des
6 menaces non dissimulées, voire quelquefois dissimulées : c'est de votre
7 responsabilité. Vous pouvez trouver une solution très rapidement à ce
8 problème. Si vous ne faites rien, ces personnes souffriront. Nous avons
9 estimé que la pression était très forte. Il s'agissait même d'un chantage,
10 ce genre de pression qui venait des personnes qui souhaitaient que ces
11 personnes traversent le secteur nord. De façon à que nous puissions les
12 aider, que nous devions leur porter assistance dans ce transfert, et c'est
13 comme cela que j'ai qualifié ce terme-là, je l'ai qualifié comme étant
14 quelque chose qui ressemblait à un chantage pour que cela ne se reproduise
15 pas.
16 Q. D'où émanaient ces menaces ? S'agissait-il de personnalités
17 politiques ?
18 R. C'était un certain nombre de choses que l'on entendait de façon assez
19 régulière. C'étaient des membres de la cellule de Crise. Selon eux, ces
20 personnes devaient "partir de leur plein gré". Ces personnes devaient faire
21 don de leurs biens, quelque soit la personne qui prenait la parole, que ce
22 soit une municipalité ou quelqu'un d'autre, on entendait toujours le même
23 refrain. C'est cela que je veux dire.
24 Q. Dans votre déclaration écrite au paragraphe 130, je vais simplement la
25 résumer. Cela est apparu un peu plus tard, il semble que la demande portant
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1 sur l'évacuation de 28 000 réfugiés a été abandonnée. Maintenant, si je me
2 tourne vers le paragraphe suivant de votre déclaration, on peut lire ce qui
3 suit : "Les Serbes de Bosnie sont, néanmoins, revenus vers nous, nous
4 demandant d'assurer l'évacuation de quelques autres 5 000 Serbes de la
5 région. Le même jour, une réunion s'est tenue au cours de laquelle cette
6 question a été débattue. Les personnes suivantes étaient présentes : M.
7 Pasic, le maire de Dvor; M. Deganovic, un représentant du Parti
8 démocratique serbe, le SDS de Bosanska Kostajnica; M. Dorin, un
9 représentant du SDS de Kostajnica; M. Murid Saflic, un représentant des
10 Musulmans de Bosanska Kostajnica. M. Deganovic a dit qu'ils avaient une
11 liste de quelque 5 000 personnes dans la municipalité de Bosanska
12 Kostajnica qui souhaitaient quitter la région. Il alléguait que jusqu'à ce
13 jour, il n'y avait pas eu de massacre dans la municipalité, mais que les
14 gens avaient peur de se déplacer librement. Il alléguait qu'après
15 l'évacuation des Musulmans de Bosanski Novi, les Musulmans de Bosanska
16 Kostajnica ont, également, décidé de quitter la région."
17 Pourriez-vous nous donner vos commentaires sur ce paragraphe en question,
18 en particulier sur ce qui s'est passé dans cette municipalité, celle de
19 Bosanska Kostajnica ?
20 R. Cette réunion était la seconde, au cours de laquelle, on a vu M. Pasic
21 venir nous rencontrer. Je crois que le 19 août était une date importante,
22 ou aurait dû l'être. S'il s'agit d'un paragraphe important, c'est celui-ci.
23 M. Pasic, il est maire de Bosanski Novi, et qu'à l'ouest de Bosanski
24 Kostajnica d'où viennent ces représentants ? Je ne sais pas si vous avez la
25 carte à l'esprit.
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1 Q. Pardonnez-moi, mais je vais vous interrompre.
2 R. Alors --
3 Q. Pardonnez-moi, mais la déclaration clairement déclare que M. Deganovic
4 est un représentant du Parti démocratique serbe du SDS, et M. Dorin est le
5 représentant du SDS. Vous avez parlé d'un représentant des Musulmans, M.
6 Murid Saflic ?
7 R. Oui.
8 Q. Y avait-il un autre Musulman de Bosanska Kostajnica ?
9 R. Oui, le seul qui est noté ici. Si je n'ai noté que le nom d'une
10 personne, c'est qu'il n'y avait qu'une seule personne. Je ne me souviens
11 pas toujours avec certitude de noms de différentes personnes. Cela remonte
12 à quelques 14 années. Les événements eux-mêmes ne sont plus clairs dans ma
13 tête, les noms de personnes l'aient moins.
14 Q. Oui, j'entends bien ce que vous dites.
15 R. Le représentant musulman Saflic vient de Bosanska Kostajnica, et il
16 parle ici des 5 000 personnes qui souhaitent quitter la municipalité de
17 Bosanska Kostajnica. C'est ce à quoi j'ai fait allusion, étant donné que je
18 connais cet endroit. Kostajnica est bien à l'est par rapport à Bosanski
19 Novi. On parle ici de Topusko. On est tout à fait à l'est, et c'est là que
20 se tiennent les réunions de la Compagnie danoise. Vendredi, nous avons
21 parlé des réunions tenues par la compagnie danoise lorsqu'ils ont parlé des
22 exécutions dans la rue et le fait que les personnes sont tuées dans la rue.
23 Ici, nous avons affaire à un représentant musulman de cette région. Il dit
24 les assassinats ou les meurtres n'ont pas eu lieu, il n'y a pas eu de
25 meurtre. Les gens ont peur de se déplacer. Au fond, il n'est pas libre de
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1 dire ce que nous avions dit nous-même aux Serbes au cours de cette réunion,
2 nous-même nous faisions partie de la FORPRONU. Les observateurs militaires
3 et nous-même nous leur avons dit : "Il y a les personnes qui sont exécutées
4 dans la rue, il y a les personnes portées disparues." Nous pouvons dire
5 cela, mais lui ne pouvait pas.
6 La manière dont nous interprétons cela, c'est de dire nous sommes sous
7 pression. On veut assurer le passage de 5 000 réfugiés. C'est cela que cela
8 veut dire au fond.
9 Q. Je vais essayer de clarifier un point eu égard à cette déclaration. M.
10 Deganovic, qui était le représentant du SDS, d'après cette déclaration-ci,
11 M. Deganovic précise que des massacres avaient eu lieu, mais d'après votre
12 témoignage le représentant musulman a confirmé ce qu'a dit M. Deganovic ?
13 R. Si je regarde mon journal, je peux clarifier ceci. J'ai tout le monde
14 qui dit quoi dans mon journal. Je peux clarifier ce point, si vous voulez.
15 Q. La Chambre a peut-être des questions à vous poser, mais cela me
16 convient. La Défense également souhaitera peut-être vous poser d'autres
17 questions également.
18 R. D'accord.
19 Q. Si vous voulez bien, nous allons passer à la pièce suivante P149.
20 M. HARMON : [interprétation] Cette pièce, Monsieur le Président, porte sur
21 les paragraphes 138 à 146 de la déclaration écrite de M. Kirudja.
22 Q. Monsieur Kirudja, reconnaissez-vous les documents qui composent la
23 pièce P149 de l'Accusation ?
24 R. Oui.
25 Q. Je vais maintenant évoquer le paragraphe 138 de votre déclaration
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1 écrite. Il s'agit ici d'une autre réunion qui s'est tenue le 19 août. Je
2 vais maintenant vous lire les paragraphes 138 et 139 pour les besoins du
3 compte rendu d'audience.
4 "En effet, le 19 août, le HCR et les affaires civiles ont reçu à Tapusko
5 une délégation de neuf représentants composée à la fois de Serbes et de
6 Musulmans de Sanski Most, Bosanski Krupa, et Prijedor."
7 Il s'agit là de municipalités en Bosnie, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Je poursuis : "Toutes les personnes présentes venaient de Bosnie et
10 comprenaient les personnes suivantes : Vlado Vrkes, président du SDS à
11 Sanski Most; Dragan Majkic, chef de la police de Sanski Most; M. Besim
12 Islamcevic, représentant des Musulmans et des Croates disposés à quitter
13 Sanski Most; et M. Esad Hasanovic, le reprsésentant des Musulmans et des
14 Croates basés à Sanski Most, disposés à quitter Bosanski Krupa. Des
15 représentants de Prijedor étaient également présents, mais je n'ai pas
16 leurs noms. Ils étaient également présents, Hans Linshol et Lars Neilsen,
17 représentants sur le terrain du HCR."
18 Paragraphe 139 : "La délégation souhaitait convaincre les Nations Unies de
19 modifier sa politique eu égard aux évacuations en masse associées au
20 'nettoyage ethnique' et d'aider à l'organisation d'un autre convoi à
21 travers le secteur nord qui permettrait d'évacuer jusqu'à 11 000 personnes
22 'candidats' musulmans pour les évacuations de Sanski Most, 8 000 de
23 Prijedor, et 600 de Bosanska Krupa. On m'a remis une liste tapée à la
24 machine comportant 7 782 noms de ceux qui étaient déjà 'prêts' à quitter
25 'de leur plein gré'."
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1 Comment avez-vous réagi à cette réunion ? En particulier, comment avez-vous
2 réagi lorsqu'on vous a remis une liste de quelques 7 000 Musulmans ?
3 R. Maintenant, je me suis quasiment habitué à la nature répétitive de
4 cette requête. Tout ce que j'entendais était devenu quelque chose je
5 m'attendais. C'était devenu une question de routine jusqu'au moment où on
6 m'a remis une liste imprimée. A l'époque, les ordinateurs imprimaient sous
7 forme de spirale, et c'était un document épais comme cela qui était
8 ressorti de cette réunion.
9 Les noms étaient énumérés par l'ordinateur. On les voyait défiler à partir
10 du numéro 1, et on pouvait avancer rapidement et arriver jusqu'en bas de
11 l'écran. Aussi, je voulais m'assurer qu'il s'agissait bien de 7 789. Ils
12 étaient par ordre chronologique. Il y avait certain nombre de commentaires
13 dont je ne me souviens pas exactement, car, malheureusement, c'est le seul
14 document dont je ne sais pas ce qu'il est advenu. Il était toujours sur mon
15 étagère derrière mon bureau, et je n'ai jamais revu ce document. Je ne sais
16 pas pourquoi ce document a disparu, mais peut-être que c'est lorsque nous
17 avons quitté les lieux, personne n'a fait attention à ce document lorsque
18 nous sommes partis.
19 Q. Le président du SDS de Sanski Most, M. Vrkes, vous a également parlé
20 des circonstances qui décrivaient ce qui avait permis aux Musulmans de
21 cette municipalité de quitter Sanski Most. Je fais référence au paragraphe
22 141 de votre déclaration écrite. Il disait également et je le cite :
23 "'Nous leur avons proposé une déclaration qu'ils puissent signer'. La
24 déclaration en question stipulait que les signataires quittaient la région
25 de leur plein gré, qu'ils ne souhaitaient pas revenir dans la région, et
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1 qu'ils laissaient leurs biens aux autorités dans les différentes régions
2 qu'ils quittaient. Il est stipulé que les signataires quittaient la région
3 de leur plein gré, qu'ils ne souhaitaient pas revenir dans la région et
4 qu'ils laissaient leurs biens aux autorités dans les différentes régions
5 qu'ils quittaient."
6 Ceci ressemble pour beaucoup au processus du nettoyage ethnique que vous
7 avez clairement identifié à Bosanski Novi, n'est-ce pas ?
8 R. Oui. C'est ce que j'entendais par là. Tout ce que j'entendais était
9 répétitif. Ce n'est pas exactement la même chose qu'à Bosanski Novi. Il y
10 avait un représentant à Bosanski Novi aussi. C'était le même groupe de
11 personnes qui répétaient toujours la même chose. Bien que nous ayons des
12 échanges réguliers avec eux, bien que nous étions en rapport continuel avec
13 eux, ils nous disaient toujours la même chose. Ces réunions étaient des
14 réunions extrêmement courtoises. J'écoutais simplement ce qui m'avait déjà
15 été dit auparavant. Je leur avais clairement indiqué qu'elle était notre
16 position. Je leur avais déjà dit; ce n'était pas la peine de le réitérer,
17 et même reposer toujours les mêmes questions.
18 Q. Monsieur Kirudja, pensez-vous que 11 000 candidats Musulmans environ
19 ont quitté la municipalité de Bosanski Most, Bosanski Krupa et Prijedor ?
20 Pensez-vous qu'ils ont quitté ces municipalités de leur plein gré ?
21 R. Ils se relayaient. Le représentant de Sanski Most me disait qu'il y en
22 avait 11 000. Le représentant de Bosanski Krupa me disait qu'il y en avait
23 600. Chacun parlait de sa région respective. Ils disaient : "Nous avons
24 tellement de demandes, toutes ces personnes ont signé ces documents, tout
25 fonctionne." Ensuite, le caractère systématique de cette opération ne
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1 laissait plus l'ombre d'un doute. Chacun présentait sa partie. Si la
2 personne venait de Prijedor, elle parlait de la municipalité de Prijedor;
3 si elle venait de Sanski Most, elle parlait de Prijedor. La personne qui a
4 parlé du nombre le plus important de réfugiés était Sanski Most : 11 000.
5 Q. Pensiez-vous que ces personnes quittaient de leur plein gré ?
6 R. Ce ne faisait plus aucun doute. Je prenais des notes. Il ne s'agissait
7 pas de croire que c'était de leur plein gré. Nous avions déjà suffisamment
8 échangé de points de vue. Cela ne posait pas l'ombre d'un doute.
9 Q. Au paragraphe 142 de votre déclaration, on lit comme suit : "Les
10 représentants du HCR et la politique du HCR qui précisait clairement que le
11 HCR ne permettrait pas aux personnes d'être déplacées, mais plutôt qu'elle
12 aiderait les personnes dans les régions où elles habitaient, dans leurs
13 lieux de résidence."
14 Monsieur Kirudja, quelle était la réaction de Vrkes à cette proposition ?
15 R. Il a écouté de façon très polie. Ils ont écouté les représentants du
16 HCR. Ils ont demandé aux représentants du HCR et moi-même de répéter les
17 grandes lignes de notre politique. Nous leur avons dit que nous assurerions
18 leur garde, leur protection. Nous voulions parler directement et
19 clairement, et nous voulions que les représentants s'entretiennent avec
20 eux, exactement ce qui est indiqué ici. Comme je vous l'ai dit vendredi,
21 ceci permettait de souligner notre politique. Nous disons également que le
22 HCR ne voulait pas les aider; ils voulaient seulement aider les personnes
23 sur le lieu de résidence. Si ces personnes ne sont pas déplacées plus loin,
24 il n'y a pas d'autres tentatives visant à déplacer les personnes; nous
25 voulons les aider. Le HCR m'a dit cela.
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1 Q. La réaction de M. Vrkes à cette offre d'aide et d'assistance pour aider
2 les personnes de Bosnie ?
3 R. Il écoutait toujours cela. Il ignorait complètement ce qui était dit.
4 Q. Maintenant, vous avez évoqué, vous savez, cette réunion où les deux
5 Musulmans étaient présents, M. Islamcevic et M. Hasanovic, la délégation
6 des trois municipalités de Bosnie. Pourriez-vous décrire un petit peu à la
7 Chambre comment ceci s'est passé ?
8 R. Ils souhaitaient entendre le point de vue de ces personnes. La présence
9 de ces personnes démontraient clairement que ceci indiquait clairement que
10 nous avions affaire à un conditionnement des mentalités ici. Ils étaient en
11 présence de leurs homologues serbes des municipalités et des mêmes
12 municipalités d'où ils venaient. Ils étaient là, ils écoutaient. Ils
13 écoutaient ce que les Serbes leur disaient. Ils disaient que les gens
14 voulaient quitter de leur plein gré, qu'ils devaient partir. Lorsque
15 c'était à leur tour de prendre la parole, ils disaient qu'ils étaient
16 traités tout à fait correctement. Ils n'ont jamais utilisé de termes
17 provocants. Ils faisaient très attention pour dire qu'ils voulaient
18 toujours être traités "correctement". Je ne sais pas ce qu'entendait le
19 terme exactement. Ils disaient toujours qu'ils étaient traités
20 "correctement". Nous avons besoin de sortir d'ici avant l'hiver. Nous avons
21 des membres de notre famille en Europe. Nous souhaitons partir. Ils
22 disaient ceci sur un ton résigné.
23 Q. Si nous passons maintenant à la pièce elle-même, P149, je vais lire la
24 dernière phrase, le paragraphe 12, qui se lit comme
25 suit : Il s'agit d'un paragraphe qui parle de cette réunion en question,
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1 celle à propos de laquelle vous venez de témoigner.
2 "A la fin de la réunion, la délégation est partie en estimant que les
3 Nations Unies posait un obstacle à ce que l'un d'entre eux a appelé, je
4 cite : 'un geste humanitaire des Serbes envers les Musulmans par
5 l'intermédiaire d'un processus démocratique'."
6 Pourriez-vous nous en parler davantage, s'il vous plaît ?
7 R. L'exposé qui nous avait été fait était le suivant : Ils tentaient de
8 nous convaincre que c'était quelque chose qui a été fait de façon
9 systématique. C'est la raison pour laquelle on a évoqué le terme, ici,
10 processus démocratique. Il ne s'agissait pas de réfugiés; il s'agit de
11 personnes qui en avait fait une demande expresse, des candidats qui
12 souhaitaient partir volontairement. Ils pouvaient vendre leurs biens ou
13 remettre leurs biens à l'état, voire même faire une bonne action. C'étaient
14 les termes utilisés. Ils faisaient montre d'une grande équité envers tout
15 le monde. Il s'agissait d'une question de détail, du respect de la loi.
16 C'était quelque chose qui n'était pas menaçant; c'était une question de
17 routine. C'était un processus tout à fait adapté. Nous avions entendu tout
18 ceci auparavant. Les conclusions que nous avions tirées étaient quelque
19 chose que nous tirions lorsqu'ils n'étaient pas présents. Nous avions perçu
20 la nature de leurs agissements. Nous savions que c'était quelque chose que
21 nous ne pouvions pas soutenir. Nous ne pouvions apporter notre soutien à
22 cela. Nous avons envoyé des admonestations au maire. Ils ont tout ignoré.
23 C'est la raison pour laquelle, lorsque le HCR les a convoqués à une
24 réunion, le HCR a simplement répondu en disant : "Nous ne pouvons porter
25 assistance qu'aux personnes in situ, dans leur lieu de résidence." Une fois
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1 que le HCR avait clairement indiqué sa position, que rien n'avait bougé,
2 cela signifiait qu'ils savaient que nous n'allions pas coopérer. A la fin
3 de la réunion, ils avaient compris que nous n'allions pas organiser ce
4 transfert.
5 Q. J'aimerais passer au mois de septembre, et vous présenter la pièce à
6 conviction suivante, la pièce P150.
7 Monsieur Kirudja, il s'agit d'un document en date du 5 septembre 1992.
8 C'est un document qui porte votre nom et vos initiales à la fin. C'est un
9 document intitulé : "Rapport spécial de situation, addendum numéro 5."
10 Pourriez-vous, dans un premier temps, indiquer aux Juges de la Chambre ce
11 qu'est un rapport de situation, quel est son objectif ?
12 R. Messieurs les Juges, vous avez vu bon nombre de memoranda. Il s'agit de
13 memoranda qui sont adressés aux directeurs auxquels je présentais mes
14 rapports, ou aux responsables du HCR, ou aux responsables d'autres ONG.
15 Comme vous l'avez vu, il s'agit, en fait, de rapport de situations qui
16 portent sur un sujet et qui attirent leur attention sur le dit sujet.
17 Nous rédigions ces rapports. Nous indiquions quel était la date et nous
18 devions également écrire ce que l'on appelait un rapport de situation. Cela
19 était, en général, rédigé à la fin de la semaine. A la fin de la semaine,
20 nous faisons le point de la situation de tous les événements à propos
21 desquels nous avions présenté un rapport. Nous faisions un exercice
22 analytique concerté et c'est cela que nous appelions un rapport de
23 situation, où l'abréviation était un "sitrep". Cela était important puisque
24 ce rapport de situation avait une distribution beaucoup plus large que la
25 distribution restreinte des autres rapports.
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1 L'analyse d'un rapport de situation est en quelque sorte beaucoup moins
2 détaillée, mais représente beaucoup plus une évaluation. Le 5 septembre,
3 j'avais décidé de rédiger un rapport de situation parce que beaucoup de
4 choses avaient été dites, beaucoup de rapports discrets avaient été
5 envoyés, et je voulais les compiler pour présenter une vue d'ensemble de la
6 situation telle que nous la voyons.
7 Q. A la première page de ce rapport de situation spéciale, et au
8 paragraphe 2 plus précisément, il est question de la frontière entre la
9 Bosnie-Herzégovine qui peut-être divisée en deux segments. D'ailleurs nous
10 en avons parlé au début de votre témoignage.
11 R. Oui.
12 Q. Vous avez une partie de la frontière qui représente la véritable
13 frontière internationale, et l'autre qui est le segment ou la partie qui
14 divise la Bosnie, qui était contrôlée par les Serbes de Bosnie, et le
15 secteur nord qui était contrôlé par les Serbes de Croatie, ce qui
16 fondamentalement signifie qu'il n'y avait pas de frontière; est-ce bien
17 exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Si vous prenez le paragraphe 9 de ce document qui est intitulé : "Le
20 segment de la frontière serbe," vous voyez que vous avez écrit : "La
21 deuxième partie de cette frontière sépare deux territoires qui sont
22 contrôlés par les Serbes des deux côtés. Cela se trouve sur le territoire
23 du Bataillon danois, pour ce qui est des opstinas de Dvor et de Kostajnica.
24 Derrière cette partie, vous avez cinq opstinas de la Bosnie, à savoir,
25 Bosanski Novi, Sanski Most, Prijedor, Banja Luka, et Bosanski Dubica où le
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1 phénomène de 'nettoyage ethnique' a été remarqué."
2 Passez maintenant au paragraphe 10, et je commencerais par la deuxième
3 phrase : "Un flux d'individus ou de personnes arrive quotidiennement à
4 Dvor, en passant par Bosanski Novi, en provenance de Prijedor et de Sanski
5 Most. Il s'agit de personnes qui demandent qui sont des réfugiés. La police
6 civile des Nations Unies estime qu'entre 30 à 50 personnes traversent la
7 frontière vers Dvor, et ce quotidiennement. Au cours des dernières
8 semaines, la tendance est telle que cela permet de suggérer une
9 augmentation du nombre de personnes qui pénètrent sur le secteur pour
10 demander protection et assistance."
11 Monsieur Kirudja, ces personnes qui franchissaient la frontière faisaient
12 l'objet des briefings de la part des personnes qui opéraient dans le
13 secteur nord; est-ce exact ?
14 R. C'est exact.
15 Q. Ces personnes faisaient état des mêmes faits que nous avons entendus au
16 préalable.
17 R. Oui. Lorsque vous dites entre 30 et 50, il faut savoir qu'il s'agissait
18 essentiellement de Musulmans, mais il ne s'agissait pas toujours de
19 Musulmans. Lorsque vous aviez un Croate de Bosnie qui arrivait, la séance
20 dudit briefing n'était pas tout à fait la même. On ne vous a pas relaté
21 toujours la même chose.
22 Q. Toutefois, ces personnes s'agissaient essentiellement de non-Serbes qui
23 venaient de Bosnie ?
24 R. Cela ne signifiait pas que les Serbes ne venaient pas. Les seuls qui
25 venaient nous voir lorsqu'ils franchissaient la frontière étaient les non-
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1 Serbes. Les Serbes franchissaient la frontière. Ils n'avaient pas besoin de
2 nous. La frontière n'était pas une frontière pour eux. De temps à autre,
3 ils la franchissaient et ils trouvaient une maison qui était vide, et
4 qu'ils occupaient. Cela ne signifiait pas que les autres n'attiraient pas
5 notre attention.
6 Q. En septembre, lorsqu'il est question de nettoyage ethnique dans les
7 municipalités identifiées dans le paragraphe 9 --
8 R. Pardon ?
9 Q. Je disais qu'en septembre, vous avez reçu des rapports supplémentaires
10 à propos de réfugiés qui venaient du secteur nord. Ils faisaient état de
11 nettoyage ethnique dans les municipalités qui ont été identifiées dans le
12 paragraphe 9; est-ce bien exact ?
13 R. C'est exact.
14 Q. J'aimerais, en fait, vous demander de prendre la pièce à conviction
15 P151, qui porte la date du mois d'octobre, du 8 octobre plus précisément.
16 Monsieur Kirudja, il s'agit d'un document qui porte la date du 8 octobre
17 1992 et, en fait, ces deux documents portent cette date. Reconnaissez-vous
18 les deux documents ?
19 R. Oui.
20 Q. Pour ce qui est du deuxième document dans la pièce à conviction, il est
21 intitulé : "Rapport de situation pour les affaires civiles numéro 7." Est-
22 ce qu'il existe une différence entre un rapport de situation spéciale,
23 telle que celui que nous avons vu au préalable et ce rapport de situation
24 portant sur les affaires civiles ?
25 R. Oui. Il s'agit du rapport de situation que nous rédigions à la fin de
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1 chaque semaine, et dans laquelle nous reprenions tous les événements qui
2 avaient attiré notre attention pendant ladite semaine. Le but ne consistait
3 pas à mettre en exergue un événement, en particulier. Il s'agissait de
4 reprendre tous les événements pour avoir une vision d'ensemble. Ce rapport
5 de situation portait sur ce qui s'était passé sur ces deux parties de la
6 frontière.
7 Q. Pour ce qui est justement de cette pièce à conviction 151, j'aimerais
8 vous demander de prendre le paragraphe 12, dont je vais vous donner lecture
9 aux fins du compte rendu d'audience. Je cite : "Tel que Lord Owen et M.
10 Cyrus Vance ont remarqué lors de leur visite récente à Banja Luka, la
11 pratique, intitulée 'nettoyage ethnique', semble se poursuivre sans
12 interruption. Vers la fin du mois de juillet, le Haut-commissariat aux
13 Réfugiés des Nations Unies a annoncé que les Nations Unies ne
14 participeraient aucunement à quoi que ce soit qui semblerait encourager
15 cette pratique. Plus précisément, les Nations Unies ne participeront pas à
16 la procédure qui consiste à rassembler en masse les réfugiés lorsqu'ils ont
17 quitté leur maison si la cause de ce déplacement est le résultat du
18 nettoyage ethnique. Au cours des dernières semaines, ce principe semble
19 avoir été lésé par :
20 a) le fait que des vagues de petits groupes de réfugiés sont venus
21 quotidiennement au niveau de l'UNPA, et ce en des nombres compris entre 30
22 et 50. Il s'agit pour ce qui est de l'autre principe du non-refoulement du
23 Haut commissariat, le nombre de réfugiés arrivant dans l'UNPA a augmenté
24 lentement, mais de façon constante."
25 J'aimerais vous demander ce que cela signifie, ce principe de non-
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1 refoulement.
2 R. Voilà ce que je crois comprendre. Une fois que vous avez reçu un
3 réfugié du point de vue international, vous ne pouvez pas l'expulser, le
4 refouler à nouveau. En d'autres termes, les réfugiés doivent trouver un
5 refuge à l'endroit où ils arrivent en premier lieu. Vous ne pouvez pas les
6 refouler ailleurs.
7 Q. Très bien. Il s'agit de ceux qui arrivent au mois d'octobre. Il s'agit
8 d'un processus de nettoyage ethnique. Vous avez été témoin des événements
9 depuis avril 1992. Vous avez commencé votre témoignage, vous avez eu votre
10 première réunion avec M. Pasic. Nous sommes maintenant en octobre 1992.
11 Vous avez consulté un certain nombre de pièces à conviction portant sur les
12 contacts que vous avez eus avec différents représentants du SDS et avec
13 différents dirigeants politiques originaires de différentes municipalités
14 en Bosnie. D'après vous, Monsieur Kirudja, est-ce que vous avez eu
15 l'impression que ce qui se passait en Bosnie était organisé, était
16 systématique ?
17 R. A ce moment-là, lorsque je dis à ce moment-là, j'entends la date de ce
18 mémorandum. Disons que dès le mois d'août ou le mois de septembre, il y a
19 une chose qui était très, très claire pour moi; il était évident qu'il
20 s'agissait d'un nettoyage ethnique systématique et organisé dans la zone où
21 nous nous trouvions, que cela avait une incidence surtout, mais pas
22 exclusivement sur les non-Serbes, notamment, les Musulmans. C'était une
23 conclusion qui était absolument indubitable pour nous.
24 Q. Merci.
25 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de
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1 questions supplémentaires à poser à M. Kirudja. Je remarque qu'il est
2 quasiment 10 heures 30.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous en avez terminé avec votre
4 interrogatoire principal. Je me tourne vers la Défense. J'aimerais savoir
5 si la Défense sera prête à procéder au contre-interrogatoire après la
6 pause.
7 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Avant que nous levions la séance
9 pour la pause, j'aimerais demander à M. l'Huissier d'accompagner M. Kirudja
10 hors du prétoire.
11 Monsieur Kirudja, nous allons avoir notre pause qui va durer jusqu'à 11
12 heures moins 5. Ensuite, vous répondrez aux questions posées dans le cadre
13 du contre-interrogatoire.
14 [Le témoin se retire]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kirudja vient de nous présenter
16 son explication du concept de non-refoulement. Ce n'est pas la peine de
17 poser des questions dans le cadre du contre-interrogatoire à M. Kirudja à
18 ce sujet, parce qu'il s'agit d'un concept qui est extrêmement bien connu
19 dans les textes juridiques et qui correspond à des théories juridiques. Les
20 consultations que j'ai menées à bien avec la Chambre, me poussent à croire
21 que la définition de M. Kirudja ne représente pas, ne correspond pas
22 forcément aux principes retenus par la Chambre. Puisqu'il s'agit d'un
23 concept juridique, ce n'est pas la peine, dans le cadre du contre-
24 interrogatoire, de poser des questions à ce sujet au témoin.
25 M. STEWART : [interprétation] Je n'allais pas le faire, Monsieur le
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1 Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne le savais pas, mais je voulais
3 juste préciser cela.
4 M. STEWART : [interprétation] Ce que vous nous indiqué, correspond tout à
5 fait à ce que nous pensions faire. Pas de problèmes.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons avoir notre pause jusqu'à 11
7 heures moins 5.
8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
9 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez poursuivre.
11 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Contre-interrogatoire par M. Stewart :
13 Q. [interprétation] Monsieur Kirudja, vous êtes arrivé dans ce que je vais
14 appeler l'Yougoslavie en avril 1992 et, comme vous l'avez relaté à la
15 Chambre de première instance, le 19 avril, vous vous êtes retrouvé dans le
16 secteur nord où vous avez travaillé pendant plusieurs mois; est-ce exact ?
17 R. C'est exact.
18 Q. Vous veniez de travailler pendant une période assez longue en
19 Afghanistan; est-ce bien exact ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Combien de temps, après votre arrivée en Yougoslavie, avez-vous appris
22 quel allait être le prochain lieu d'affectation ?
23 R. Qu'entendez-vous ? Vous voulez dire entre Afghanistan et Yougoslavie.
24 Je ne comprends pas votre question.
25 Q. Est-ce qu'on vous a dit : "Monsieur Kirudja, votre prochain lieu
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1 d'affectation est l'Yougoslavie" ? Quand est-ce qu'on vous a donné cette
2 information ?
3 R. C'est en mars 1992 que la décision fut prise.
4 Q. Je suppose à l'instar de personnes qui ont le même niveau d'éducation
5 que vous, je suppose que votre connaissance de l'Yougoslavie, votre
6 connaissance sur le passé yougoslave était relativement limitée pour une
7 personne ayant votre niveau d'éducation ?
8 R. Cela dépend ce que vous entendez par quelqu'un qui a un certain niveau
9 d'éducation, mais toujours est-il que je n'avais pas beaucoup de
10 connaissances sur l'ex-Yougoslavie hormis le fait qu'il y avait la
11 résolution des Nations Unies. Evidemment, je connaissais cette résolution,
12 les préparatifs, et cetera.
13 Q. Par exemple, avant que vous ne receviez votre nouveau lieu
14 d'affectation qui était l'Yougoslavie, est-ce que vous pourriez résumer ce
15 que vous saviez de la situation relative à la Bosnie-Herzégovine ?
16 R. Je n'avais pas de connaissances précises. D'après ce que je comprenais
17 et d'après ce que nous comprenions lorsque nous nous sommes préparés pour
18 cette mission, nous savions, en fait, quel était le plan Owen-Vance avec
19 tous les préparatifs. Nous savions, certes, qu'il y a eu un conflit en ex-
20 Yougoslavie dans la zone dont j'ai parlé tout à l'heure. Nous savions que
21 nous allions être déployés dans cette zone, et nous savions essentiellement
22 qu'il s'agissait d'un conflit interne à l'Yougoslavie.
23 Comme je l'ai déjà indiqué lors de mon témoignage, nous supposions qu'en
24 Bosnie-Herzégovine tout se passait bien, notre QG allait être Sarajevo, et
25 nous allions être neutres entre les deux capitales, à savoir Zagreb et
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1 Belgrade. Nous n'avions pas de renseignements bien précis sur la Bosnie-
2 Herzégovine, hormis ce qui est connu.
3 Q. Pour prendre un exemple précis, et autant que vous vous en souveniez,
4 lorsqu'on vous a appris pour la première fois que vous alliez être envoyé
5 en Yougoslavie et affecté en Yougoslavie, saviez-vous, par exemple, qu'il
6 existait une entité en Bosnie-Herzégovine, entité intitulée Republika
7 Srpska ou République Serbe de la Bosnie-Herzégovine ?
8 R. Non. C'était quelque chose que je ne savais absolument pas.
9 Q. Je suppose que cela est souvent le cas lorsque vous êtes affecté à un
10 nouveau pays. Je suppose que vous avez dû apprendre beaucoup de choses très
11 rapidement pour être au fait de la situation au moment de votre arrivée.
12 R. C'est une excellente façon de décrire comment nous avons appris à
13 connaître la situation.
14 Q. Vous avez dit pendant votre témoignage qu'au moment où vous êtes
15 arrivé, je suppose que vous êtes arrivé en Croatie parce que votre base se
16 trouvait en Croatie ?
17 R. Non. En fait, j'avais dit lors de mon témoignage que je suis arrivé en
18 avril, le 6 avril à Belgrade.
19 Q. Je m'excuse. Mais, lorsque vous êtes arrivé dans le secteur nord, votre
20 base personnelle était en Croatie ?
21 R. Non, non. Ma base se trouvait à l'intérieur de ce secteur. En fait,
22 nous avions le QG à Tapusko, à savoir, en Croatie. C'est ce que vous
23 entendiez peut-être.
24 Q. Oui. C'est tout, Monsieur Kirudja ?
25 R. Oui.
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1 Q. Lorsque vous êtes arrivé en Croatie, vous avez dit, dans votre
2 déposition -- et, bien sûr, je cite cela hors contexte -- mais vous avez
3 dit : il n'y avait pas de problèmes apparents en Bosnie. C'est une
4 déclaration, en tant soit peu présomptueuse. Je suppose que personne
5 n'indiquera que cela n'était pas vrai. Lorsque vous indiquez qu'il n'y
6 avait pas de problème apparent en Bosnie, pourriez-vous peut-être nous
7 expliquer pourquoi vous étiez d'avis qu'il n'y avait pas de problème
8 apparent ? Quel était votre point de vue personnel ?
9 R. Si nous comparons la situation à Tapusko où nous nous trouvions basé,
10 fondamentalement, il y avait des indications suivant lesquelles il y a eu
11 des combats récents, des maisons incendiées, des postes de contrôle à
12 chaque kilomètre, mais ce n'est pas le cas en Bosnie. Lorsque je suis
13 arrivé, en fait, du secteur nord, nous sommes arrivés en Bosnie, nous
14 sommes entrés dans ce secteur directement en Bosnie parce que c'était une
15 route où on ne voyait aucun poste de contrôle. Il n'y avait pas de maisons
16 incendiées, il n'y avait pas de maisons qui avaient explosé, il n'y avait
17 rien. Il semblait que la normalité prévalait comparé aux indications de
18 combats récents dans l'endroit où j'étais auparavant.
19 Q. La région croate où vous vous trouviez était consignée à un secteur qui
20 était dévasté par la guerre, alors que la région en Bosnie où vous êtes
21 arrivé, vous a donné l'impression d'être un pays normal, stable où les gens
22 vaquaient à leurs occupations normales ?
23 R. Je vous remercie, c'est exactement ce que j'entendais.
24 Q. Vous indiquez, toujours dans votre déclaration écrite, qu'au début du
25 mois d'avril 1992, l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine avait été
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1 reconnue par de nombreux pays, y compris par l'Union européenne. Il s'agit,
2 en fait, de cette reconnaissance de la part de l'Union européenne et des
3 Etats-Unis, reconnaissance de ce pays qui été présentée le 6 avril 1992,
4 juste avant que vous n'arriviez dans le secteur nord. Vous avez dit que :
5 "Cela a précipité et accéléré la dégradation de la situation en Bosnie, et
6 que cela a eu un impact sur le secteur nord."
7 M. HARMON : [interprétation] Excusez-moi, mais, Maître Stewart, auriez-vous
8 l'amabilité de nous indiquer à quel paragraphe vous faites allusion, ce qui
9 serait extrêmement utile pour M. Kirudja et pour moi-même.
10 M. STEWART : [interprétation] Oui, je m'excuse. Je peux vous aider en la
11 matière et vous indiquer qu'il s'agit du paragraphe 14 -- première ligne du
12 paragraphe 14.
13 Q. En avril 1992, vous êtes-vous rendu compte des sentiments éprouvés par
14 les Serbes à propos de la reconnaissance de l'indépendance de la Bosnie-
15 Herzégovine ?
16 R. Non. L'impact de ces sentiments est devenu manifeste un peu plus tard,
17 en 1993 probablement. Je dois dire qu'à l'époque, nous n'avons pas perçu la
18 force de ces sentiments vis-à-vis de ces événements.
19 Q. Maintenant, avec le recul, reconnaissez-vous que, dans cette région, ce
20 sont des sentiments qui existaient en avril 1992 ?
21 R. Oui, je suis d'accord. Je pense que cela était important et qu'en 1993,
22 j'étais conscient de l'importance de ces sentiments.
23 Q. Le paragraphe suivant, qui est le paragraphe 15 de votre déclaration, à
24 la troisième ligne, il est indiqué : "Il est devenu, ensuite, apparent que
25 les Serbes, qui se trouvaient à l'intérieur de la zone protégée des Nations
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1 Unies, aspiraient à faire partie de ce que l'on connaissait de plus en plus
2 sous le nom de la Grande Serbie, qui, de toute évidence ou apparemment,
3 était inspirée par Belgrade ou coordonnée par Belgrade."
4 La première question que j'aimerais vous poser, elle est comme suit :
5 lorsque vous dites "ce qui est devenu, connu comme un plan pour la Grande
6 Serbie," à quoi faites-vous référence là ?
7 R. Nous faisons partie de la communauté des Nations Unies qui était
8 déployée dans la partie est de cette zone en pleine guerre, et nous étions
9 à l'écoute de ce que disaient les personnes qui vivaient dans ce secteur.
10 Nous entendions, par exemple, des gens qui nous disait : "Nous aimerions
11 pouvoir vivre dans notre propre pays." Je me souviens que, lors d'une de
12 mes dépositions ou lors d'un de mes témoignages, j'avais dit : je suis en
13 tant soit peu perplexe ou intrigué lorsqu'un maire ou un civil du cru me
14 dit, par exemple : "Nous souhaiterions vivre dans notre propre pays serbe."
15 Je dois dire que cela m'intriguait. Je disais : "Vous voulez dire ce
16 secteur ?" Ils disaient : "Non, notre propre pays." On a commencé à voir et
17 à entendre ce genre de réflexion.
18 Q. Vous avez entendu --
19 R. Oui. Les gens commençaient à expliquer ce qu'ils entendaient, à
20 expliquer ce concept.
21 Q. Progressivement, je ne veux pas, par cela, dire que cela s'est fait
22 lentement, mais progressivement, vous avez compris ce que tout cela
23 signifiait ?
24 R. Oui.
25 Q. Ensuite, lorsque vous avez compris ce que cela signifiait, comment est-
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1 ce que vous pourriez décrire ou résumer ce plan, connu par tout le monde,
2 pour la Grande Serbie ?
3 R. Tel que cela se trouve en paragraphe 15.
4 Q. Oui.
5 R. C'est ainsi que je le décrirais.
6 Q. Vous avez ce paragraphe 15, vous avez votre déclaration écrite ?
7 R. Oui, oui, tout à fait. C'est pour cela que je vous dis qu'il y a une
8 phrase dans ce paragraphe 15 qui décrit ce que je voyais.
9 Q. C'est lorsque vous abordez la question de la situation sur la
10 frontière ?
11 R. Oui, effectivement.
12 Q. Il n'aurait pas été surprenant à l'époque, Monsieur Kirudja, que la
13 frontière internationale soit considérée comme une frontière qui laissait
14 passer tout le monde puisque, jusqu'à très récemment, il s'agissait d'un
15 seul et même pays ?
16 R. Oui. Lorsque j'y suis arrivé, peu importe d'où je suis parti pour
17 conduire jusqu'à Bihac, pour des raisons que je n'ai pas évoquées, il se
18 fait que nous devions aller fréquemment à Bihac, ce n'est pas cela qui est
19 important. Ce qui est important, c'est la réponse que je vais vous
20 apporter, à savoir, le 19 mai, pendant les premières semaines de mai,
21 lorsque nous conduisions vers Bihac, il n'y avait absolument aucun
22 problème. Nous voulions nous rendre à Velika Kladusa, les postes de
23 contrôle à la frontière étaient vides. Il n'y avait pas de soldats. C'était
24 une frontière qui était, véritablement, très facile à franchir, mais
25 quelques semaines après, cela n'était plus le cas.
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1 Q. Vous avez eu l'impression que les personnes, qui avaient vécu dans cet
2 endroit toute leur vie, n'ont pas, forcément, tout de suite compris, adapté
3 ou ajusté leur façon de vivre. Ils ne sont pas rendus compte qu'il
4 s'agissait d'une frontière internationale ?
5 R. Je ne comprends pas votre question. Lorsque vous dites les gens,
6 pourriez-vous peut-être développer un peu ?
7 Q. Vous nous dites qu'on pouvait franchir cette frontière internationale
8 très, très facilement.
9 R. Pour nous.
10 Q. Pour vous ?
11 R. Au début, lorsque nous voulions franchir cette frontière, nous pouvions
12 la franchir sans aucune restriction.
13 Q. Cela c'est un élément de la question. Au paragraphe 15, à la fin du
14 paragraphe, vous dites : la frontière internationale était peu étanche et
15 les autorités croates se sont rendus compte assez facilement que cela était
16 utilisé par les Serbes de Croatie pour repeupler, les zones protégées des
17 Nations Unies, de Serbes.
18 La frontière internationale n'était pas étanche pour les personnes ?
19 R. Oui, mais j'ai, également, précisé qu'au bout de quelques semaines,
20 pour les non-Serbes, la frontière est devenue beaucoup plus étanche.
21 Q. Lorsque vous nous parlez de ce plan pour la Grande Serbie et si nous
22 nous plaçons dans le contexte local, au vu de l'endroit où vous vous
23 trouviez, je pense, bien entendu, à votre zone de responsabilité, le
24 secteur nord et je pense aux zones adjacentes en Bosnie-Herzégovine, cela
25 est un aspect, mais lorsque vous avez, véritablement, commencé à comprendre
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1 toute la situation, est-ce que vous vous êtes rendu compte que ce plan qui
2 était connu de tout le monde, ce plan de la Grande Serbie avait une portée
3 beaucoup plus large ?
4 R. Oui, plus tard. J'ai compris, en fait, la dimension beaucoup plus ample
5 et générale dont nous n'avons pas parlé.
6 Q. Cette dimension beaucoup plus ample, beaucoup plus large que vous
7 décrivez, je ne suis pas en train de dire que vous avez obtenu cela, ou
8 plutôt c'est au fil du temps que vous avez finalement pu compiler tout
9 cela, en votre for intérieur.
10 R. Oui.
11 Q. Monsieur Kirudja, on nous demande toujours de ralentir mon rythme, ce
12 dont je me souviens de temps à autre. Mais maintenant, je vois que l'on me
13 demande de vous demander de marquer un temps d'arrêt à la fin de mes
14 questions avant que vous ne répondiez, pour que les interprètes aient la
15 possibilité de faire leur travail.
16 R. Oui, on me rappelle toujours cela. Je vais faire des efforts pour
17 essayer de ralentir mon rythme. Je me rends compte que je ne l'ai pas fait
18 immédiatement.
19 Q. Monsieur Kirudja, je pense que nous appartenons au même club en quelque
20 sorte. Nous devons, tous les deux, faire des efforts pour essayer de ne pas
21 parler trop vite. Je vois que vous vous êtes acquitté de cette tâche de
22 suite, d'ailleurs.
23 Monsieur Kirudja, vous nous avez parlé de ce plan connu de tout le monde
24 pour la grande Serbie qui apparemment était coordonné à partir de Belgrade.
25 Le fait que cela était coordonné par Belgrade, est-ce que c'est quelque
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1 chose qui était évident dès la deuxième partie du mois d'avril 1992 ?
2 R. Non. En fait, dans ce paragraphe lorsque j'ai présenté ma déposition,
3 il y a quand même un ordre chronologique parce que nous étions déjà au mois
4 de mai. C'était apparent, mais cela n'était pas absolument certain. Nous
5 avions de bonnes raisons de croire que cela se passait. Nous commencions
6 véritablement à apprendre ce que cela signifiait, et au moment où le
7 paragraphe a été écrit nous étions au mois de mai. Il est évident que nous
8 faisons allusion à ce mois là, ce que vous voyons à ce moment-là, ce que
9 nous reconnaissions, mais nous n'étions pas encore tout à fait certains de
10 cette coordination ou de cette inspiration de Belgrade. Nous étions en
11 train d'apprendre parce que tous les signes étaient présents.
12 Q. Je ne suis pas en train de réfuter votre terminologie, Monsieur
13 Kirudja, mais j'essaie tout simplement de préciser les choses. Nous
14 pourrions dire que, vers le mois de mai, vous-même et vos collègues, vous
15 commenciez véritablement à vous dire : "Nous commençons à nous poser des
16 questions." Quelle est la force motrice ? D'où est-ce que tout cela vient ?
17 Vous commenciez à vous poser ce genre de questions ?
18 R. Il y avait des signes qui étaient évidents que nous reconnaissions.
19 Nous commencions à nous demander ce qu'ils signifiaient ces signes. Nous
20 étions en train de nous dire qu'il devait y avoir une coordination, par
21 exemple, parce qu'il y avait plusieurs autorités locales avec lesquelles
22 nous avons traité à notre arrivée. D'ailleurs, j'en parle dans ma
23 déclaration écrite. Ces autorités, ces pouvoirs locaux avaient tendance à
24 disparaître de temps à autre. Ensuite, on entendait dire qu'ils étaient à
25 Belgrade. Il s'agissait de Serbes locaux de responsables. Nous pourrions
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1 également voir qu'il y avait eu des changements en fait au niveau de la vie
2 locale. La devise locale avait disparu; le dinar. De toute évidence,
3 quelqu'un payait les factures. Toutes les activités officielles étaient
4 payées. A ce moment-là, la plus grande interaction était militaire. J'ai
5 passé énormément de temps à traiter avec les militaires, avec le
6 commandement de l'armée nationale yougoslave. Les signes existaient. Il est
7 évident qu'il y avait des liens qui passaient, ce que cela signifiait c'est
8 que les signes existaient. Ils étaient là ces signes.
9 Q. Y a-t-il autre chose que vous vous rappeliez précisément qui jetait la
10 suspicion sur Belgrade ?
11 R. Comme je l'ai déjà dit, c'est surtout du côté militaire que les choses
12 ont commencé et, ensuite, elles se sont étendues aux autorités civiles.
13 D'ailleurs, ce n'était pas anormal. C'était quelque chose que nous avions
14 besoin de faire. Nous avions un bureau de liaison à Belgrade parce que les
15 signataires qui avaient autorité au niveau national se trouvaient aussi
16 bien à Belgrade qu'à Zagreb. Cela n'avait rien de totalement anormal. C'est
17 ce qu'il était normal d'attendre.
18 Q. Dans le paragraphe suivant de votre déclaration, à savoir, le
19 paragraphe 16, en fait, avant d'aborder cette question précise, j'aimerais
20 vous en poser une autre, qui découle de ce que vous venez de dire.
21 Vous avez dit aux Juges de la Chambre, et ce de manière très claire, ce
22 qu'étaient vos responsabilités personnelles ainsi que celles du groupe
23 auquel vous appartenez. Si je peux m'exprimer ainsi, est-il permis de dire
24 que même si cette question était très intéressante, et même si c'était une
25 question dont vous parliez fréquemment au cours de vos discussions avec vos
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1 collègues, le fait de déterminer d'où venait la coordination et d'où venait
2 l'origine de cette question, ne relevait pas, en fait, de vos fonctions
3 officielles ou de vos responsabilités officielles ?
4 R. Dans une certaine mesure, cela relevait parce que, si nous devions
5 atteindre notre première priorité qui consistait à démilitariser, à
6 démobiliser et désarmer les formations militaires, cela relevait de notre
7 mandat. La JNA était une structure militaire qui existait précédemment. Par
8 conséquent, il était naturel d'envisager une coordination de la part du QG.
9 Dès lorsque vous remarquez que plutôt que d'aller dans le sens indiqué par
10 votre mandat, vous constatez une transformation de ces unités militaires
11 qui vont dans un sens opposé à celui qui est stipulé dans votre mandat.
12 Vous préférez éviter de penser que l'inspiration de tout cela vient du QG
13 qui a signé la définition de votre mission.
14 Pour répondre à votre question je répondrais, en fait, par oui ou par non.
15 Q. Passons maintenant au paragraphe 16 de votre déclaration écrite, que
16 j'ai annoncée tout à l'heure. Je pense qu'il faut que je décrive le
17 contexte. Cinq lignes à partir du paragraphe 16 de votre déclaration, on
18 constate que vous parlez des documents liés au travail qui était le vôtre
19 dans le secteur nord. Je dis cela pour décrire le contenu de votre
20 déclaration. Vous dites plus loin, je cite : "Mes remarques suivent la
21 présentation et l'examen de cette documentation, et traitent des sujets
22 suivants." Un peu plus loin, nous voyons les mots : "Création des zones
23 protégées par les Nations Unies, retrait de la JNA du territoire croate,
24 rapport de la FORPRONU avec les responsables de la Krajina, de la Republika
25 Srpska dans le secteur nord, et dans une grande mesure à Knin." Vous parlez
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1 de la RSK et de la collusion des Serbes de Bosnie avec les opérations de
2 nettoyage ethnique visant les Musulmans et d'autres non-Serbes de Bosnie
3 septentrionale, qui, bien sûr, constitue le point central des éléments dont
4 vous parlez dans ce passage de votre déposition et dans la présente
5 affaire.
6 Les "Serbes de Bosnie," c'est, bien sûr, un terme particulier qui concerne
7 une personne bosniaque qui est serbe. Cela est la partie facile de ma
8 question. Il est question ici des "Serbes de Bosnie," et je me demandais si
9 vous pouviez être un peu plus précis et aider les Juges de la Chambre en
10 leur disant exactement de quoi vous parlez lorsque vous parlez de "la RSK
11 et de collusion des Serbes de Bosnie."
12 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, cette déposition a été
13 faite en 1999, et les événements dont il est question dans ce document
14 datent de 1992. Il y a un certain résumé qui est à l'œuvre ici, et qui
15 s'appuie sur la mémoire également. Ce paragraphe résume à l'intention des
16 gens qui me parlent, les éléments principaux de ce que j'ai souhaité leur
17 exposer. Les termes utilisés par le conseil de la Défense sont tout à fait
18 exacts, mais ils ont pris une acception un peu plus large au fil du temps.
19 Quand nous étions sur le terrain au début de notre mission, la RSK
20 n'existait pas et n'était pas censé exister. RSK signifie République de
21 Krajina serbe. C'est quelque chose qui a été créé, par la suite, et c'est
22 par ces termes qu'ils se décrivaient eux-mêmes à peu près à la fin de cette
23 année là. Au début, nous les appelions "les Serbes de Bosnie" ou les
24 "Croates de Bosnie", mais plus tard, RSK est devenu une façon abrégée que
25 j'utilise dans ce paragraphe pour désigner les Serbes de Bosnie.
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1 Du côté bosniaque -- du côté bosnien, nous n'avions pas de termes pour
2 faire références à ces personnes. Au début, nous les appelions résidants de
3 Bosnie-Herzégovine jusqu'à ce que, lors d'une rencontre que j'ai eue avec
4 M. Pasic, un terme soit utilisé qui était un peu plus précis. C'était au
5 mois de mai lorsque nous étions à cette réunion, et je lui ai demandé :
6 "Qui sommes-nous ?" Parce que vous êtes à Dvor, et vous parlez de questions
7 relatives à Bosanski Novi qui relèvent de plusieurs juridictions, et qui,
8 en fait, dépassent les frontières internationales. C'est, à ce moment-là,
9 qu'il a parlé d'une nouvelle réalité en parlant de la République serbe de
10 Bosnie-Herzégovine.
11 Cette terminologie était très évolutive, très fluide et ce qu'il y a
12 d'intéressant dans ce passage de ma déposition, c'était que, pour la
13 première fois, j'essayais de préciser un peu -- d'aller dans le détail au
14 fur et à mesure que le temps passait.
15 Q. J'aimerais maintenant que nous abordions d'autres points de votre
16 déposition. Je cherche le numéro du chapitre. En fait, à ce niveau de votre
17 déposition, vous parlez en termes assez généraux qui pourraient être
18 considérés comme les têtes de chapitre ?
19 R. Oui, plus au moins.
20 Q. Au paragraphe 16 toujours, ma question portera sur le général Nikovic.
21 Lorsque vous en avez terminé de vos rapports avec lui, quelle était
22 l'appréciation que vous vous faisiez de lui ?
23 R. Très positive. En tant qu'officier, le général Spiro Nikovic m'a
24 impressionné comme étant un homme très intègre et, finalement, quelqu'un
25 qui faisait du mieux qu'il pouvait pour atteindre les résultats qui lui
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1 étaient imposés dans les ordres qu'il recevait. C'était ce genre de
2 personne.
3 Q. Passons maintenant au paragraphe 27 de votre déclaration écrite, je
4 vous prie en haut de la page 7. Vous y parlez précisément de l'échange que
5 vous avez eu avec le général Nikovic. Vous posez des questions au sujet
6 d'un certain nombre de personnes de Karlovac qui pourraient peut-être
7 obtenir un sauf conduit pour se rendre en Bosnie-Herzégovine et le général
8 Nikovic vous répond : "Jamais," et il ajoute : "Ils affirment être
9 Musulmans, mais ils ne le sont pas. Ils ont entraîné en Autriche et
10 Allemagne. Nous leur préparerons un concert s'ils tentent de traverser la
11 frontière."
12 Comment est-ce que vous situeriez cet échange précis dans votre
13 appréciation généralement positive du général Nikovic que vous venez
14 d'ailleurs de formuler ?
15 R. En fait, c'est une partie des raisons pour lesquelles j'ai émis cette
16 appréciation positive. Il ne parle pas à moi, il parlait d'une façon très
17 directe, il était jovial par certains côtés, mais un peu menaçant par
18 d'autres. Il n'a laissé planer aucun doute quant au fait que ces personnes
19 rassemblées sur le terrain de football étaient un sujet différent. C'est un
20 autre terrain de foot-là, Messieurs les Juges, il s'agit de Karlovac.
21 Q. Oui.
22 R. Qui ne se trouve pas en Bosnie. Il s'agit de Karlovac. C'étaient des
23 personnes qui étaient arrivées à bord de leurs véhicules et qui
24 souhaitaient rentrer en Bosnie en passant par le secteur nord,
25 pratiquement, l'inverse de la situation dont nous sommes en train de
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1 parler. Il ne s'agissait pas de réfugiés, c'étaient des gens qui voulaient
2 rentrer. Il m'a regardé, et il m'a dit d'aller leur dire qu'il s'apprêtait
3 à leur organiser un concert. J'ai dit : "Mais vous n'allez pas jouer de la
4 musique ?" Il a
5 répondu : "Non. Ils comprendront ce que cela signifie." C'était quelqu'un
6 qui parlait, de façon très directe, et il ne laissait pas planer de doute
7 sur la signification de ses propos.
8 Q. Si nous passons aux paragraphes 30 et 31 de votre déclaration, nous
9 voyons une situation un peu différente quant à la façon dont vous décrivez
10 l'attitude du général Nikovic. Vous dites, à peu près six ou sept lignes à
11 partir du début du paragraphe 30, on trouve la phrase qui commence par
12 "specifically". Vous la trouvez, quatre lignes à partir du bas du
13 paragraphe 30, à peu près ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous dites "précisément" ici, et vous parlez du général Nikovic : "Il
16 semblait bien disposé pour que le mandat des Nations Unies soit mis en
17 œuvre de façon équitable et complètement. Par conséquent, les accords
18 conclus par la FORPRONU et Belgrade s'appliqueront à la Krajina Serbe."
19 Au paragraphe 31, phrase suivante de votre déclaration, vous dites : "Il
20 s'est avéré cependant que les Serbes locaux avaient un ordre du jour
21 différent. Il est devenu plus tard tout à fait clair à nos yeux que les
22 Serbes avaient l'intention de consolider leur emprise sur le territoire
23 contesté de Croatie."
24 Pouvons-nous estimer que dans ces deux phrases, il est fait, à chaque fois,
25 référence aux Serbes locaux, à savoir aux Serbes de Croatie ?
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1 R. Oui.
2 Q. A votre avis, ce sont eux qui semblent enfreindre légèrement le plan
3 Vance ?
4 R. Exact.
5 Q. Plus loin, vous décrivez toujours dans le paragraphe 31 des aspects
6 plus militaires de la question, vous dites à peu près cinq lignes à partir
7 du bas, je cite : "Ainsi les Serbes locaux" et là il s'agit toujours des
8 mêmes Serbes locaux, n'est-ce pas ?
9 R. Exact.
10 Q. "Ainsi les Serbes locaux ont apparemment continué à créer leurs forces
11 de Défense territoriale dès le départ de la JNA, et ont plus tard fortifié
12 leur police pour la transformer en force de police qu'il était difficile de
13 ne pas remarquer." Plus loin, vous parlez du fait que les véhicules
14 militaires ont été repeints, que les uniformes ont été changés pour devenir
15 des uniformes bleus. Vous dites, ensuite, en haut de la page 8 : "Outre,
16 les nouveaux uniformes bleus de la milicija, à savoir, de la police, une
17 force parallèle porte toujours les uniformes verts de camouflage de
18 l'ancienne JNA." Vous décrivez certains membres de ces forces parallèles,
19 et vous reparlez des Serbes locaux qui justifient le maintien de ces forces
20 armées à l'époque.
21 La première question que je vous pose consiste à vous demander si vous
22 saviez ou si vous aviez un idée assez précise de l'identité de ceux qui
23 contrôlaient ces forces parallèles et leurs activités ?
24 R. Oui.
25 Q. A votre avis, qui était-ce ? A votre avis ou d'après ce que vous
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1 pensiez ?
2 R. Je résumerai ma question, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
3 que vous trouvez détaillée d'ailleurs aux paragraphes suivants 34 et 35 de
4 ma déposition avec les noms des unités. Pour l'instant, je résumerai
5 simplement suite à la question du conseil de la Défense.
6 Le secteur dans lequel nous étions déployés, secteur qu'il s'agit
7 d'ailleurs du secteur nord ou du secteur sud, faisait partie d'une
8 structure de commandement qui existait avant notre arrivée. C'était le
9 système ancien que l'on connaissait sous le nom de 10e Corps. Le QG se
10 trouvait à Bihac, et c'est là que le général Spiro Nikovic avait son
11 quartier général. Nous avons passé beaucoup de temps à essayer d'y mettre
12 en œuvre les plans de démobilisation de toutes ces unités. Ces unités, et
13 maintenant je reviens au secteur nord uniquement, avaient trois structures
14 de commandement. L'une était connue sous le nom de Kordun, sous le
15 commandement d'un colonel Cedo Bulat. Le deuxième, le Kordun couvrait un
16 certain nombre de municipalités. Je ne vais pas rentrer dans les détails.
17 La deuxième partie du commandement était connue sous le nom de Banja et
18 couvrait également un certain nombre de municipalités, donc Dvor et
19 Kostajnica, et c'était un général monténégrin, qui n'a pas gardé ses
20 fonctions plus de quelques semaines, qui commandait cet élément. Plus tard,
21 cet élément est tombé sous le commandement d'un colonel qui s'appelait le
22 colonel Tarbuk, qui a exercé ses fonctions plus longuement que le
23 précédent.
24 Au sud du secteur, dans la municipalité de Slunj et de Plaski, on trouvait
25 le commandement de Lika, qui avait deux quartiers généraux : une partie à
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1 Korenica, et en raison des frontières qui n'étaient pas entièrement
2 couvertes par Korenica, une partie ailleurs.
3 Oui, je savais qui était le commandant de la région.
4 Q. Vous dites, et je parle du paragraphe 33 de votre déclaration écrite,
5 que le général Nikovic vous a informé de la date du retrait de la JNA, du
6 secteur protégé par les Nations Unies, en nous disant qu'il s'agissait du
7 25 mai 1992. Est-ce que vous saviez par qui cette date avait été établie ?
8 R. Oui. Une fois que nous avons été prêts à mettre en place les éléments
9 principaux du plan Vance exigeant la démobilisation, la démilitarisation et
10 la remise des armes pour stockage de celles-ci, nous avons entamé des
11 négociations en vue de la démobilisation et de la démilitarisation au sein
12 du 1er et 2e Secteurs. Il est apparu qu'il fallait agir secteur par secteur
13 jusqu'au niveau du général Satish Nambiar, le commandant suprême. Nous
14 avons également rencontré tous les autres commandants serbes du secteur
15 sud, du secteur ouest, du secteur est. Il y avait coordination entre les
16 sièges des différents commandements. Il fallait également coordonner
17 l'action entre les deux capitales, Belgrade et Zagreb, en vue de cette date
18 de démilitarisation simultanée qui avait été fixée au 25 mai dans tous les
19 secteurs.
20 Q. J'aimerais vous interroger au sujet d'un incident que vous décrivez au
21 paragraphe 38 de votre déclaration écrite et qui est survenu à la fin du
22 mois d'avril. Vous y dites, je cite : "Je remarque également que le 30
23 avril est la première fois où nous avons rencontré des gens qui ont quitté
24 la Bosnie sous la contrainte." D'après ce que vous dites, il s'agit d'une
25 famille. J'aimerais tirer un point au clair avec vous. Vous dites que le
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1 père de cette famille était détenteur d'un passeport turc, que la mère
2 était yougoslave, née à Splitska dans la ville de Bosanski Novi et qu'il y
3 avait une fille. Pouvons-nous comprendre que cette fillette était un enfant
4 en bas âge, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous dites, toutes ces personnes résidaient en Suisse. Pouvez-vous nous
7 expliquer quel était, en fait, le lieu de résidence principal de ces
8 personnes et d'où elles essayaient de partir pour se rendre où ?
9 R. Je dirais qu'en fait, normalement, cet événement aurait dû être tout à
10 fait normal et anodin, un événement de la vie quotidienne. C'était un homme
11 qui avait un emploi à Neuchâtel, en Suisse. Son épouse était revenue à
12 Splitska, et ils étaient venus en voiture pour une raison que nous ne
13 connaissons pas jusqu'à Bosanski Novi. Ils essayaient de ressortir en
14 compagnie de leur fille. Ils étaient en train de commencer à éprouver des
15 craintes pour leur sécurité et même pour leurs vies. C'est cela qui a
16 appelé notre attention. Nous avons commencé à trouver cela assez anormal
17 parce que lorsque ces personnes sont arrivées dans le secteur, les Serbes
18 du secteur ont continué à les traiter de la même façon, à susciter chez eux
19 des craintes pour leurs vies. On était au milieu de la nuit, le chef de la
20 police civile des Nations Unies m'a appelé, et ces personnes étaient
21 tellement effrayées, que nous sommes allés dans un hôtel de Vojnica et que
22 nous avons placé un garde de la police des Nations Unies devant la porte de
23 ces personnes, qui faisaient partie d'une famille des plus normales. Nous
24 avons commencé à parler avec ces personnes. Nous leur avons demandé ce
25 qu'il y avait de tellement compliqué dans ce qu'elles étaient en train de
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1 faire. C'est ce que je relate dans ce paragraphe. C'est à cette occasion
2 que nous avons, pour la première fois, reçu des signaux qui nous ont fait
3 comprendre que quelque chose d'anormal se passait.
4 Q. J'essaie de tirer tout cela au clair. Ces personnes voulaient rentrer
5 en Suisse, n'est-ce pas ? C'était cela leur objectif.
6 R. Oui.
7 Q. Le père était peut-être rentré chez lui à partir du lieu où il
8 travaillait, c'est-à-dire, de Suisse ?
9 R. Il peut sembler que tel était le cas, mais je ne suis sûr de rien parce
10 que ces personnes s'efforçaient de sortir de Bosanski Novi pour retourner
11 en Suisse où elles habitaient à moins que le fait qu'il travaillait.
12 Q. Mais de la façon dont vous avez décrit les choses jusqu'à présent, il
13 semble que leurs problèmes ont commencé lorsqu'elles sont arrivées dans le
14 secteur nord.
15 R. C'était un problème qui existait depuis quelque temps déjà. Ces
16 personnes avaient ressenti l'existence d'un danger depuis quelque temps et
17 l'avaient exprimé au cours de leurs entretiens avec nous. Lorsqu'elles sont
18 arrivées dans notre secteur, au lieu de se sentir davantage en sécurité,
19 elles ont continué à se sentir plus ou moins comme avant. Nous avions du
20 mal à comprendre pourquoi.
21 Q. Vous dites que ces personnes ont dû quitter la Bosnie sous la
22 contrainte. J'aimerais que cela soit clair, Monsieur Kirudja, en fait, ce
23 n'est pas une question que je vous pose, c'est un complément à ma question
24 précédente. Ces personnes auraient quitté la Bosnie sous la contrainte, ce
25 qui signifierait que la contrainte avait été exercée à leur encontre en
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1 Bosnie, avant leur entrée en Croatie, n'est-ce pas ?
2 R. C'est l'impression distincte que nous avons obtenue suite à nos
3 contacts avec ces personnes.
4 Q. Vous avez déclaré que très manifestement, ces personnes souhaitaient se
5 rendre en Suisse où travaillait le père, n'est-ce
6 pas ?
7 R. Oui.
8 Q. J'aimerais que vous décriviez, à l'intention des Juges de la Chambre,
9 d'où venait cette contrainte dont vous avez l'impression qu'elle existait,
10 dans le cadre d'un voyage de retour en Suisse, alors qu'elles avaient pu
11 quitter la Bosnie. D'où venait la contrainte vécue par ces personnes en
12 Bosnie ?
13 R. Lorsqu'elles sont arrivées dans notre secteur, Maître, il était clair
14 qu'elles ne pouvaient pas sortir de notre secteur. Les Serbes s'efforçaient
15 de les mettre en état d'arrestation. Je parle des Serbes qui se trouvaient
16 dans notre secteur. A Vojnic, lorsqu'elles ont été placées dans une chambre
17 d'hôtel, ces personnes auraient quitté la chambre d'hôtel pour se rendre en
18 prison si nous n'étions pas intervenus pour les placer dans un endroit plus
19 sûr. Nous avons essayé de demander à ces personnes pourquoi elles ne
20 pouvaient pas partir. La première chose qu'elles m'ont répondue, c'est que
21 l'épouse et son mari pouvaient partir s'ils abandonnaient leur voiture.
22 Moi, j'ai répondu aux personnes qui leur imposaient de laisser derrière
23 elles leur voiture, que ce couple avait besoin de la voiture pour continuer
24 son voyage. Ces personnes m'ont dit que c'était une exigence qui leur était
25 faite pendant tout le voyage, à plusieurs endroits. Cela se passait à
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1 Vojnic où ces personnes risquaient d'être mises en état d'arrestation.
2 Q. Vojnic se trouve dans le secteur nord, n'est-ce pas ?
3 R. Exact. Mais tout ce que ces personnes souhaitaient, c'était traverser
4 le secteur nord pour poursuivre leur voyage avec tous les objets personnels
5 et leur voiture.
6 Q. Lorsque vous dites qu'il est apparu évident que les autorités serbes
7 locales ne toléraient pas leur présence, ils ne voulaient pas assurer leur
8 sécurité, nous ne parlons pas ici de la définition exacte de ces autorités
9 serbes dans cette partie de la Croatie, nous parlons bien du secteur nord,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Certainement, du secteur nord.
12 Q. Lorsque vous parlez de responsables, pourriez-vous être plus précis en
13 définissant plus précisément les autorités serbes locales -- je vais vous
14 parler ici.
15 R. J'ai rencontré personnellement ce couple, et j'ai traité de ce problème
16 avec elle depuis le début pour essayer de comprendre ce qui se passait.
17 J'ai été le seul à demander à la police d'assurer leur sécurité. Il
18 s'agissait de notre police. Je veux dire de la police civile qui devait
19 faire ce qu'il fallait pour que ces personnes se sentent en sécurité.
20 J'étais, également, la seule personne qui pouvait se rendre au poste de
21 police de Vojnic pour demander pourquoi ces personnes ne pouvaient pas
22 partir. Oui, j'ai été impliqué directement dans le problème.
23 Q. Vous parlez un peu plus loin dans votre déclaration écrite, à partir
24 des paragraphes 41 et 42 de la situation du général Nikovic. Vous dites
25 qu'il reçoit une lettre qui lui est, personnellement, adressée. Je pense
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1 que c'est bien la même personne que celle dont vous parliez tout à l'heure.
2 Au paragraphe 43 de votre déclaration, je saute les paragraphes précédents.
3 Au paragraphe 43, vous dites : "La JNA a des problèmes parce que certaines
4 unités locales refusent de remettre leurs armes." Un peu plus loin, vous
5 dites : "J'ai compris que cela signifiait qu'il existait une résistance de
6 la part des Serbes de la Krajina locale au plan établi par lui, en vue
7 d'une démobilisation et d'une démilitarisation éventuelle de la zone sous
8 protection des Nations Unies." A ce moment-là, nous sommes à trois semaines
9 de la date fixée pour le retrait de la JNA, n'est-ce pas ?
10 R. Exact.
11 Q. Plus loin, vous dites que : "Le général a relaté avec un plaisir, tout
12 à fait, apparent la dernière bataille à laquelle se sont livrées les forces
13 de la JNA, et cetera." Vous dites qu'il y avait huit brigades de l'armée
14 croate en Herzégovine occidentale et aux environs de Bosanski Brod et
15 Derventa : "Cette déclaration est explicite, elle montre pourquoi lui-même
16 et les autres Serbes locaux justifient le besoin d'organiser le départ de
17 la JNA." Je ne vais pas insister là-dessus, mais le général Nikovic et les
18 Serbes locaux, vous les mettez dans la même catégorie, n'est-ce pas ? Vous
19 considérez le général Nikovic comme un Serbe local ?
20 R. Oui. A ce stade oui, parce qu'il commandait les Serbes locaux.
21 Souvenez-vous que je vous ai dit que tous les secteurs étaient sous son
22 commandement.
23 Q. Encore une fois, il semble ici, que vous parliez des Serbes locaux
24 comme d'une seule et même catégorie. Vous parlez toujours des Serbes de
25 Croatie ici ?
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1 R. Oui. Maître, je ne sais pas de quel paragraphe de ma déposition vous
2 parlez exactement dans vos derniers propos.
3 Q. Excusez-moi, je parlais du paragraphe 43.
4 R. Non. Je veux dire le fait que nous l'ayons considéré comme non-Serbe
5 par la suite. Il est parti de lui-même. Il a dit qu'il était intégré à ceux
6 qui n'étaient pas des Serbes locaux, et il a été relevé de son
7 commandement.
8 Q. Il se trouve, M. Kirudja, que vous avez, tout à fait, raison quant à
9 l'orientation de mes questions. Page suivante, M. Kirudja.
10 R. Oui, merci.
11 Q. Nous parlons là du départ du général Nikovic, de son remerciement
12 brutal, si je peux m'exprimer ainsi. C'est à la dernière ligne du
13 paragraphe 44 de votre déposition. En tant que commandant du 10e Corps qui
14 se retirait, vous interprétez cela comme une manifestation du fait que son
15 commandement, dans la hiérarchie militaire serbe, est modifié désormais.
16 Ma première question est la suivante. Vous parlez de la hiérarchie du
17 commandement militaire serbe, aviez-vous l'impression très claire que cette
18 décision de renvoyer brutalement le général Nikovic a été prise par la
19 hiérarchie militaire ?
20 R. Maître, cela fait suite à la dernière question que vous m'avez posée.
21 J'ai parlé, en réponse à votre dernière question, de coordination à partir
22 de Belgrade dans la mesure où j'essayais de déterminer quel était le signal
23 militaire le plus fort dans la région. Cette coordination était normale
24 compte tenu de la situation. Il y avait un commandant qui, il y a à peine
25 quelques semaines, avait été chargé de réaliser la démilitarisation et la
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1 démobilisation des anciennes Unités de la JNA en application du mandat des
2 Nations Unies. Il produit un plan, tout à fait, complet qui devait être mis
3 en œuvre dans les deux à trois semaines suivantes. Tout d'un coup, il est
4 brutalement limogé.
5 Le simple bon sens permet de penser qu'il est assez anormal qu'il soit
6 limogé avant d'avoir terminé son travail. Bien sûr, une fois son travail
7 terminé, une fois la démobilisation accomplie, il pouvait rentrer chez lui.
8 Trois semaines avant la fin de ce travail, il est limogé brutalement. C'est
9 cela qui est important. C'est de là que nous avons pensé que quelque chose
10 avait changé.
11 En l'espèce, lorsque vous parlez de commandement militaire, il y avait un
12 lieutenant-général sur place. Il suffisait d'une étoile pour faire partie
13 des dirigeants militaires de la région. Vous voyez qu'à certains moments,
14 il était difficile pour nous d'établir une distinction claire entre le
15 militaire et le politique.
16 Q. Pourriez-vous ajouter quelque chose à ce que vous avez dit au sujet des
17 conditions dans lesquelles le général Nikovic a été limogé, notamment, des
18 motifs de ce limogeage.
19 R. Oui. Il a été limogé brutalement, cela c'est une chose mais je me
20 rappelle également qu'on m'a dit : "Allez dire au général Nikovic que si
21 jamais il met le pied ici, nous l'arrêterons." Alors, vous voyez tout cela
22 était assez bizarre. C'est un général trois étoiles. Il y a un colonel qui
23 est bien inférieur à lui dans la hiérarchie militaire qui, non seulement
24 m'annonce qu'il a été limogé, mais, en outre, qu'il est persona non grata
25 dans la région. Je n'ai pas pris cela à la légère. Je me souviens que
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1 c'était la nuit. J'ai décidé parce qu'on m'a demandé si je voulais lui
2 transmettre le message, j'ai répondu, oui. J'ai dit, oui, je suis, tout à
3 fait, d'accord pour aller lui transmettre ce message.
4 J'ai pris ma voiture à 20 heures à peu près pour me rendre à Bihac et
5 essayer de le voir, en lui disant que des propos menaçants avaient été
6 tenus à son encontre, et que s'il n'obtempérait pas à ces menaces, il
7 risquait d'être arrêté. En tout cas, j'ai ressenti, de tout cela, le
8 sentiment très net que quelque chose avait changé, avait beaucoup changé.
9 Q. Vous lui avez transmis cette impression, n'est-ce pas, M. Kirudja ?
10 Puisque vous venez de me dire que vous respectiez beaucoup le général
11 Nikovic. Est-il exact que nous sommes en droit de comprendre de ce que vous
12 venez de dire que vous ressentiez déjà des sentiments personnels assez
13 intenses à son égard, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, car j'estimais qu'il faisait correctement et de façon très droite
15 ce que nous attendions de lui, et ce qu'il était censé faire. Nous lui
16 avions demandé un plan de démobilisation, il nous l'avait fourni. Il avait
17 établi la date. Il avait fait tout cela. Qui avait-il dans tout cela que
18 nous aurions pu ne pas apprécier ? C'était dans le cadre du travail qui
19 était le mien dans la région.
20 Q. En revanche, M. Lazarevic n'était pas quelqu'un que vous appréciiez
21 beaucoup, n'est-ce pas ?
22 R. C'est au fil des années que j'ai appris un certain nombre de choses à
23 son sujet. A l'époque, je ne faisais que commencer à considérer qu'il était
24 un obstacle. Il était un élément déstabilisateur, mais je ne savais pas
25 encore tout ce qu'il en était. C'est seulement des années plus tard que
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1 j'ai appris tout ce qu'il y avait à apprendre à ce sujet.
2 Q. Vous dites que le général Nikovic a apprécié l'avertissement que vous
3 lui avez transmis. Pourriez-vous nous dire ce qu'il lui est arrivé par la
4 suite et d'abord immédiatement après ? Savez-vous ce qu'il est advenu du
5 général Nikovic ?
6 R. Il n'a fallu que quelques jours pour qu'il rende son tablier, si je
7 puis utiliser cette expression, à savoir qu'il rende son uniforme et
8 retourne chez lui. Ensuite, il ait disparu de mes tablettes jusqu'à 1994,
9 fin 1994, date à laquelle je me trouvais à Belgrade où j'exerçais des
10 fonctions différentes. Il m'a rendu une visite de courtoisie dans mon
11 bureau en m'apportant une bouteille de vin, et il m'a expliqué qu'il était
12 retourné à Montenegro.
13 Q. Dans votre déclaration écrite, paragraphe 46, vous parlez d'un jour où
14 un problème particulier s'est posé. Vous aviez une interprète musulmane,
15 Indira Kulenovic. Vous parlez de cela, et vous dites un peu plus loin, six
16 lignes plus bas, au paragraphe 46, je cite : "Je suis allé au poste de
17 police de Vrgin Most --" Vous dites : "Le poste de police avait établi une
18 liste de chefs d'accusation à l'encontre de l'interprète, au nombre
19 desquels se trouvaient les charges suivantes," et vous dites qu'elle est
20 entrée en Krajina avec des papiers valables puisqu'elle avait un travail,
21 et cetera. Vous continuez la description de la chose. Monsieur Kirudja,
22 j'ai une question à votre intention. Est-ce que les choses étaient aussi
23 simples que cela ? Est-ce qu'elle était simplement accusée en tant
24 qu'étrangère ?
25 R. En fait, Maître, c'est le premier indice que j'ai eu de ce genre de
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1 chose. Ce serait la meilleure façon de décrire la situation. Mme Kulenovic
2 est une habitante de la région d'origine musulmane, et elle habite Tapusko.
3 Elle a été recrutée en tant qu'interprète dans des conditions tout à fait
4 normales. Elle est arrêtée par le chef de la police de Vrgin Most. J'arrive
5 un peu plus tard vers la fin de la journée. Je vais droit au poste de
6 police pour savoir de quoi elle est accusée. Le premier mot que je vois,
7 c'est "étrangère". Vous voyez, cela a attiré mon attention parce que si
8 j'associais ce mot aux dernières exigences que Lazarevic m'avaient
9 transmises, exigences d'obtenir une autorisation de la République Serbe de
10 Krajina avant de recruter ces habitants particuliers, il y avait
11 vérification du passeport, et on nous disait qu'on vérifie les passeports
12 de tous les étrangers en République Serbe de Krajina. Le terme "étranger"
13 n'était tout de même pas un terme élégant. Il faisait partie de
14 l'accusation principale retenue contre cette interprète et c'est de là que
15 j'ai déduit qu'elle n'était peut-être pas en sécurité, qu'il serait
16 préférable que j'organise son transfert vers Bihac où elle était née, et
17 que je charge le bureau de liaison de cette opération.
18 Q. Ensuite, vous dites au paragraphe 47 que suite à cet incident
19 impliquant Mme Kulenovic, il est devenu tout à fait évident à vos yeux que
20 les responsables locaux de la République de Krajina Serbe agissaient de
21 concert. Est-il permis de dire que vous aviez apprécié le fait qu'ils
22 agissaient de concert puisque tant qu'ils le faisaient en respectant les
23 obligations de leur contact avec votre organisation ?
24 R. Non, Maître, non. C'est là que se situe le problème. Selon le mandat
25 qui était le nôtre, nous ne trouvions dans l'opstina, dans la municipalité
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1 en raison uniquement de pouvoir que nous octroyons ce mandat, ce qui
2 signifiait que le maire et le chef de la police étaient les autorités avec
3 lesquelles nous traitions à Vrgin Most. Le maire s'appelait Obradovic, et
4 le chef de la police, Djuro Skaljac. La République Serbe de Krajina a été
5 un élément nouveau dans toute cette situation. Je n'étais pas censé
6 m'attendre à une action de concert entre moi et la République Serbe de
7 Krajina de quelque façon que ce soit. Si je souhaitais discuter de la
8 question de la démobilisation ou des nouveaux déploiements à Vrgin Most,
9 j'allais voir la maire et le chef de la police. En tout cas, c'est de cette
10 façon que je pensais devoir travailler au début de ma présence sur place
11 avec cette municipalité et toute autre municipalité d'ailleurs. Dans ce
12 paragraphe, on me parle pour la première fois de la République Serbe de
13 Krajina. On me parle du gouvernement et du quartier général à Knin, et
14 c'est là que se situe le problème.
15 Q. Dans vos contacts, parce que manifestement vous étiez dans une
16 situation telle que vous aviez les contacts avec les responsables locaux,
17 est-ce que, d'une certaine façon, vous avez refusé de reconnaître le
18 caractère officiel des responsables de la RSK ?
19 R. Maître, je dirais les choses de la façon suivante : je n'utiliserais
20 pas le mot refusé parce qu'ils étaient mes homologues lorsque nous
21 traitions avec eux. Je ne voulais pas les offenser, mais je voulais
22 continuer à avoir des contacts avec eux selon les modalités qui m'avaient
23 été fixées comme étant les modalités de mes contacts avec eux. S'ils
24 insistaient pour parler de République de Krajina, j'ai, bien entendu, les
25 nouveaux mots qui étaient utilisés, mais j'ai considéré qu'ils
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1 caractérisaient une situation de facto. Si cette situation de facto
2 existait puisque je ne voulais offenser personne, je pensais que nous
3 devrions traiter avec eux dans ces conditions, mais que nous n'adopterions
4 pas trop rapidement la même dénomination qu'eux. Nous ne parlerions pas
5 d'état comme ils cherchaient à l'obtenir de nous.
6 Q. Lorsque vous avez rencontré pour la première fois
7 M. Slobodan Lazarevic, c'était pratiquement le moment où vous êtes arrivé
8 dans le secteur nord en avril, n'est-ce pas ?
9 R. En effet. D'après ce qu'il nous a dit, il avait d'abord travaillé à la
10 MCCE, au sein de la Mission des observateurs européens. Selon ce qu'il nous
11 a dit, il avait d'abord travaillé avec eux avant de venir travailler chez
12 nous.
13 Q. Vous avez dit, cela se trouve au paragraphe 21 de votre déclaration
14 écrite qu'il était responsable de liaison entre les autorités serbes
15 locales et les Nations Unies. A ce moment-là, vous n'aviez pas connaissance
16 de l'existence de la RSK ou d'un gouvernement qui n'aurait pas été reconnu
17 par vous et qu'il se serait trouvé à Knin ?
18 R. En effet, mais, lorsque je l'ai rencontré, il n'était plus responsable
19 de la liaison pour la RSK. Il avait rempli ces fonctions pendant quelques
20 semaines.
21 Q. Est-ce qu'il a continué dans une certaine mesure à remplir ces
22 fonctions de liaison pour d'autres responsables serbes locaux ? J'utilise
23 le mot opstina au pluriel, et mon assistance semble choquée par le fait que
24 je mets un pluriel à ce mot. Je vais continuer à le faire, néanmoins je
25 n'ai pas d'autres moyens.
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1 R. Il venait au travail en uniforme de camouflage complet jusqu'à la mi-
2 juin. C'était le bras droit du commandant Cedo Bulat pour le commandement
3 de Kordun, ce qui signifiait qu'il avait au moins autant de pouvoir que le
4 commandant de Kordun dans les différentes municipalités, donc opstinas,
5 dont vous avez parlé, à savoir, celles qui relevaient de Kordun, c'est-à-
6 dire, de Vojnic à Slunj.
7 Q. Au paragraphe 48, vous parlez de M. Lazarevic. Vous faites souvent
8 allusion à lui, et dans les mêmes termes que vous venez d'évoquer, à
9 savoir, le fait qu'il portait un uniforme de camouflage de son grade, vous
10 dites qu'il tenait souvent des discours enflammés. La grande joie -- les
11 mentors, qui étaient ces mentors?
12 R. Monsieur le Président, je dois dire que j'étais toujours le
13 destinataire de ces propos, quelle que ce soit la partie qui se trouvait
14 offensée. Le caractère de ces discours, de discours enflammés, cela venait
15 du côté croate qui dirigeait la radio, par exemple de Petrova Gora en
16 direction de Zagreb. Si vous êtes à Petrova Gora vous pouvez voir toute la
17 ville de Zagreb. M. Lazarevic diffusait quelque chose sur la République
18 serbe de Krajina. Ce qui était reçu à Zagreb et on se demandait : "Ce que
19 ces Serbes faisaient, pourquoi tenaient-ils des discours aussi enflammés,"
20 et c'était, évidemment, perçu de l'autre côté comme cela.
21 Lorsqu'il est monté dans cette tour radio, cette station de radio, à la
22 grande joie de toutes les personnes présentes, lorsqu'il tenait ce genre de
23 discours.
24 Q. Vous dites qu'après, M. Lazarevic a développé des contacts avec le
25 colonel Bulat, le commandant des forces de la RSK, dans la région de
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1 Kordun. Il a développé des liens étroits. Quelle était la nature de vos
2 contacts et de vos échanges avec le colonel Bulat ?
3 R. Très étendus. Car dans les premiers mois je me trouvais dans la région,
4 il y a de mes collègues du service des affaires civiles et d'autres
5 services qui m'aidaient pour les questions policières. J'étais toujours
6 présent, dans ces réunions, en présence des généraux qui commandaient ce
7 secteur. En présence de toutes les parties qui avaient été convoquées en
8 vue de démobiliser les armées le long des lignes de confrontation, à
9 l'intérieur du secteur en question. Pour démobiliser la région de Kordun,
10 nous avons eu un nombre très important de réunions avec le colonel Bulat
11 dans son propre QG. Il s'agissait du QG militaire. Il y avait également les
12 QG des différentes brigades aux alentours où je me retrouvais au moins deux
13 ou trois fois par semaine, dans les premiers mois, en tout cas.
14 Q. Vous parlez au paragraphe 49 de votre déclaration, vous parlez des
15 efforts déployés par les représentants de la RSK avec Lazarevic agissant
16 comme facilitateur. Il s'agissait de compromettre ou de corrompre le
17 premier commandant du secteur. La première question que je souhaite vous
18 poser : le colonel Bulat était une des premières personnes que l'on
19 associait à ces tentatives de corruption ou de compromission avec le
20 premier commandant du secteur ?
21 R. Toutes les fois que nous nous réunissions, nous nous réunissions dans
22 différents endroits, dans différentes maisons. Chaque fois. le colonel
23 Bulat est un soldat comme la plupart des soldats, lorsqu'ils parlent entre
24 eux ils sont le plus souvent, font l'économie de leurs paroles. Ils ne
25 parlent pas trop, ne sont pas trop loquaces. On ne se met pas en avant
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1 lorsqu'on parle de choses extraordinaires, il laissait tout cela aux soins
2 de Lazarevic. Si vous voulez, c'est la plupart des explications
3 complémentaires fournies, il laissait ceci entre les mains de Lazarevic.
4 Q. Je crois qu'un avocat de l'armée correspond assez bien à la description
5 que vous venez de faire.
6 Vous avez parlé de tentative de compromission ou de corruption du premier
7 commandant du secteur, il s'agit du général Bulat; est-ce exact ?
8 R. Oui, c'est exact.
9 Q. Je suppose qu'il s'agit de tentatives, n'est-ce pas, puisque ceci n'a
10 pas été confirmé, vous confirmez cela Monsieur Kirudja ?
11 R. Oui.
12 Q. Comment ceci et comment cela se présentait-il ? Comment se proposait-il
13 de corrompre, de compromettre le commandant en question ?
14 R. Lazarevic a vraiment tout fait pour que le général soit à l'aise. Il
15 était là, il a aidé mais le général connaissait bien son devoir et son
16 métier. Il venait quelquefois même 16 fois, et il répétait à chaque fois ce
17 qu'il voulait. Il venait à ces réunions et par sa voix qui portait,
18 Lazarevic disait où en était la mobilisation, c'est ce que je voulais hier.
19 Il essayait de retarder les choses. Il voulait que ce soit fait, c'est à
20 cela que je faisais allusion. Il avait tendance à faire retarder les
21 choses. Il ne réussissait pas. Le secteur était démobilisé.
22 Q. Pouvons-nous maintenant passer au paragraphe 64, s'il vous plaît, de
23 votre déclaration écrite. Il s'agit là de quelque chose qui représente des
24 éléments clé. Je crois vous montrer l'accord dans la déposition que vous
25 venez de faire. Il s'agit là d'une réunion, qui s'est tenue le 26 mai 1992,
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1 avec M. Borojevic, le maire de Dvor, le chef de police de Dvor, et cetera.
2 Tout d'abord vous étiez informé, vous avez trouvé cela étrange que vous
3 étiez informé par le maire de Dvor que le maire de Bosanski Novi demandait
4 un passage dans la Krajina pour les Musulmans ?
5 R. Oui. Effectivement j'ai trouvé cela étrange.
6 Q. Le point de départ est que le maire de Dvor se trouvait dans votre zone
7 de responsabilité, faisait partie de votre secteur, n'est-ce pas, le maire
8 de Bosanski Novi ne l'était pas.
9 R. C'est exact.
10 Q. Simplement en ce qui concerne ce point précis, pourquoi était-il
11 seulement étrange que cette demande vous parvienne de quelqu'un qui se
12 trouvait dans votre zone de responsabilité ?
13 R. Maître, je dois vous dire que nous étions là dans un autre but. C'était
14 différent. La présence des Nations Unies dans la région de Dvor, et tout
15 cela il l'a complètement mis de côté. Il a parlé de quelque chose qui se
16 passait au-delà de la frontière, où nous n'avions pas établi de présence
17 des Nations Unies. Cela n'était pas entre parenthèses, s'il vous plaît.
18 C'est devenu en fait le point principal à l'ordre du jour. Cela m'indiquait
19 qu'il y avait un intérêt réel ici, que ma mère et un collègue me l'avaient
20 dit par exemple, quelque chose que vous dites dans une réunion. "Ah, il est
21 vrai, je souhaite faire une digression entre parenthèses, cette demande m'a
22 été remise, et cetera, et si vous voulez bien, nous allons retourner à
23 l'ordre du jour." Non. Cela ne se serait pas passé comme cela. C'était
24 effectivement l'ordre du jour.
25 Q. Le maire de Bosanski Novi est évidemment M. Pasic. A ce moment-là,
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1 c'est inscrit en noir et blanc, j'ai peut-être oublié mais avez-vous déjà
2 rencontré M. Pasic à ce moment-là ?
3 R. Non.
4 Q. Ce qui vous avait été proposé vous l'avez refusé, car comme vous l'avez
5 dit dans votre témoignage au paragraphe 67 de votre déclaration, il semble
6 que vous avez clairement indiqué quel était votre point de vue. Vous avez
7 estimé qu'il s'agissait de quelque chose de très peu satisfaisant et qu'il
8 est inapproprié que ceci passe par vous ?
9 R. Non, Maître. Ce que j'ai clairement indiqué à l'époque, ce n'était pas
10 le manque de satisfaction et la voie de communication par laquelle cela
11 transitait. J'estimais que ce n'était pas croyable. A ce moment-là je ne
12 savais rien. Il me dit ceci et lorsque je l'interroge, il n'avait pas de
13 réponses toutes faites. Il sentait bien que je ne le croyais pas. Comme
14 j'ai relaté ceci, à ce moment-là, il sentait bien que je ne le croyais pas.
15 Il a traversé la pièce où nous étions réunis dans une salle de conférence à
16 côté de son bureau, il prend le téléphone et il appelle le maire Pasic, et
17 si vous ne me croyez pas, vous pouvez lui parler.
18 Q. Vous étiez malheureux à cause de cela, une des raisons de votre
19 attitude, à ce moment-là, c'est que vous avez considéré qu'il s'agissait
20 d'une information de troisième main. C'était le maire de Bosanski Novi qui
21 parlait. Il parlait à propos des Musulmans et cela venait du maire de Dvor
22 et du maire de Bosanski Novi ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Vous avez eu l'occasion de vous entretenir avec le maire de Bosanski
25 Novi pour passer de l'information de troisième main à l'information de
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1 deuxième main, est-ce exact ?
2 R. C'est exact.
3 Q. Vous n'avez pas saisi cette occasion pour essayer de passer de
4 troisième à deuxième main ?
5 R. Non. J'estimais que je n'étais pas prêt à ce moment-là. Comme je le
6 pensais, Monsieur le Président, comme je l'ai dit à l'autre avocat, il faut
7 comprendre les mécanismes de fonctionnement des Nations Unies. J'avais un
8 cadre qui avait, clairement, délimité ma zone de responsabilité. Ceci, il
9 est vrai, était quelque chose que j'avais à l'esprit.
10 Q. Au paragraphe 68, vous dites qu'après cette réunion, après cela, vous
11 en avez conclu, vous dites à la fin du paragraphe 67, que n'avez jamais
12 appelé Pasic mais que vous l'avez rencontré peu de temps après. Au
13 paragraphe 68, vous dites : "Après cette réunion, j'en ai conclu que les
14 maires de Dvor et de Bosanski Novi agissaient de concert." Vous parlez,
15 ici, du moment qui a suivi la réunion du 26 mai. Vous ne parlez pas après
16 avoir rencontré Pasic, n'est-ce pas ?
17 R. Non. J'en ai conclu que le maire de Dvor s'intéresse plus
18 particulièrement à ceci et ce n'est pas anodin.
19 Q. Pardonnez-moi, je recherche mon dossier.
20 Après votre réunion avec le maire de Dvor et les autres personnes qui
21 l'accompagnaient mais ceux-ci ne comprenaient pas M. Pasic. Vous dites au
22 paragraphe 68, j'en ai conclu que ces deux maires agissaient de concert et
23 souhaitaient organiser une évacuation massive sous le couvert d'une
24 assistance humanitaire, commençant par quelque 5 000 résidants musulmans de
25 Bosanski Novi.
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1 Lorsque vous avez fait un rapport à propos de cette réunion, ou les notes
2 suite à cette réunion se trouvent dans la pièce P125. Je crois qu'il va
3 falloir vous remettre ce document.
4 Je n'ai pas l'intention de relire ce document pour qu'il soit consigné au
5 compte rendu d'audience, je pense que tout y est déjà. Simplement, c'est
6 pour vous rafraîchir la mémoire. Il s'agit bien de votre écriture. Si vous
7 pouviez nous relire la première page, s'il vous plaît. Je ne veux pas
8 passer la seconde. Tout y est. C'est votre note qui est datée du 26 mai
9 1992. Je pense que tout ceci a déjà été consigné au compte rendu
10 d'audience.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kirudja, je crois qu'on vous
12 demande de lire cette première page.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] A voix basse ou à voix haute. Vous souhaitez
14 que je lise à voix haute ou à voix basse.
15 M. STEWART : [interprétation] Oui, il peut la lire à voix basse.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien. C'était là ma question.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.
18 M. STEWART : [interprétation]
19 Q. Les trois dernières lignes, s'il vous plaît : "Nous apprécierions si le
20 HCR pouvait nous aider à obtenir des informations de première main et des
21 informations concises et précises" car vous avez déjà parlé de ces éléments
22 d'information concernant ce récit, "la FORPRONU apprécierait également un
23 conseil et coopération avec le HCR concernant le traitement, la solution à
24 trouver à ce problème. Nous avons quelque indications en vertu de quoi ce
25 récit pourrait avoir des ramifications politiques."
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1 Au paragraphe 68 de votre déclaration, vous dites en conclusion qu'ils
2 organisaient une évacuation massive sous le couvert d'une opération d'aide
3 humanitaire. Il me semble que vous avez un peu sous- estimé ceci dans votre
4 rapport écrit.
5 R. C'est exact.
6 Q. La raison pour laquelle vous avez sous-estimé ceci ?
7 R. C'était une raison d'ordre interne. C'est la première fois que les
8 détails m'avaient été fournis par le maire Borojevic, pas simplement à
9 propos des 5 000 réfugiés, mais à propos du fait que nous devions filmer ce
10 passage. Nous avons eu tous les éléments d'information de cet homme. Rien
11 ne figure dans ce document. Ceci a été distillé à 5 000 Musulmans. Les
12 Serbes leur avaient promis un passage en toute sécurité dans le secteur
13 nord des Nations Unies et on leur assurait ce transfert en Allemagne et en
14 Autriche. Le siège en interne ne souhaite pas avoir des informations de ce
15 type diffusées à tout un chacun. Il s'agit d'abord de comprendre de quoi il
16 s'agit et quelle est la teneur essentielle de ce genre d'information.
17 A ce moment-là, je travaillais toujours avec un représentant du HCR dans
18 mon bureau, un membre de leur personnel. Par conséquent, c'était le but de
19 ceci. Je voulais, également, faire en sorte que le personnel du HCR soit
20 déployé rapidement dans cette zone.
21 Il ne s'agit pas de minimiser ceci. Il s'agit simplement de faire en sorte
22 que ces éléments soient diffusés au compte-gouttes.
23 Q. Lorsque vous parlez du QG des Nations Unies, est-ce que vous parlez de
24 votre propre centre des Nations Unies à Zagreb ou est-ce que vous entendez
25 par là ?
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1 R. Oui.
2 Q. Vous ne parlez pas de New York ou de Genève, n'est-ce pas ?
3 Au paragraphe 74 de votre déclaration, vous parlez ici que vous avez une
4 réunion avec M. Pasic. Le 27 mai, si nous pouvons relire votre déclaration.
5 Le 27 mai. Vous, en présence d'une délégation serbe, il y a un représentant
6 de Bosnie-Herzégovine qui est présent et vous demandez ce qui a changé à
7 Bosanski Novi ? Pourquoi les Serbes et les Musulmans ne pouvaient pas
8 cohabiter ensemble ? Ensuite, M. Pasic vous répond, pardonnez-moi, je
9 devrais peut-être lire l'ensemble du paragraphe.
10 "Pasic a répondu d'anciens officiers de police qui étaient Musulmans ont
11 refusé de signer un serment d'allégeance envers le nouveau gouvernement.
12 J'ai demandé à quel moment ce nouveau gouvernement avait été créé et
13 pourquoi le fait de ne pas signer un serment d'allégeance était devenu une
14 exigence. Pasic a répondu, je ne sais pas exactement à quel moment ce
15 nouveau gouvernement serbe a été créé, mais c'était avant le début de la
16 reconnaissance internationale de la Bosnie-Herzégovine. J'ai cru comprendre
17 que cela signifiait que le maire ne savait pas exactement à quelle date
18 cette République serbe de Bosnie-Herzégovine avait été créée."
19 Tout ceci n'est pas très clair, Monsieur Kirudja, mais on parle bien de
20 l'existence de ce nouveau gouvernement. C'est quelque chose qui était
21 nouveau pour vous à ce moment-là ?
22 R. Oui, très certainement. C'était quelque chose de tout à fait nouveau
23 pour moi.
24 Q. Peut-être que vous ne vous souvenez pas de la date exacte, Monsieur
25 Kirudja, je suppose qu'à un moment donné ou un autre, vous avez appris que
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1 sous une appellation légèrement différente, il s'agissait de la République
2 serbe de Bosnie-Herzégovine, mais que ceci avait été créé le 9 janvier
3 1992 ?
4 R. Maître, je ne savais pas cela. Peut-être que vous voulez établir un
5 lien avec ceci et un autre témoignage -- première page de ce témoignage, on
6 parlait d'une nouvelle réalité en Bosnie-Herzégovine. La première personne
7 à attirer notre attention là-dessus était M. Spiro Nikolic, lorsqu'il nous
8 expliquait ce qu'il allait laisser derrière lui, ce qui allait le
9 remplacer. Lorsque je lui demandais de quoi s'agit-il, j'ai utilisé les
10 termes proches de ceux qu'a utilisé le général Pasic. Il a parlé d'une
11 "nouvelle réalité". L'ex-Yougoslavie, a-t-il dit, sera remplacée par six
12 pays, et il a cité ces six pays. Il y a un paragraphe qui fait référence
13 dans ce témoignage --
14 Q. Oui.
15 R. -- qui cite ces pays. Si vous regardez ce paragraphe, il a gardé la
16 Bosnie-Herzégovine dans sa totalité. Il n'a pas divisé la Bosnie-
17 Herzégovine en différents pays. Il l'a appelé Bosnie-Herzégovine. Sur la
18 liste, il y avait la RSK.
19 Q. Au paragraphe 2 [comme interprété] de votre déclaration.
20 R. Je ne me fie de mémoire.
21 Q. Effectivement. C'est, effectivement, ce qui est dans votre propre
22 paragraphe.
23 R. Très bien. Lorsque ce maire a parlé de cette "nouvelle réalité", j'ai
24 voulu lui poser la question et lui demander de quoi il s'agissait. C'est à
25 ce moment-là qu'il a introduit ce terme de déconstruction de la Bosnie-
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1 Herzégovine en nommant la République serbe de Bosnie-Herzégovine. Dans ce
2 sens-là, c'était nouveau pour moi à ce moment-là.
3 Q. Bien évidemment, la reconnaissance par la communauté internationale de
4 la Bosnie-Herzégovine a eu lieu le 6 avril 1992. Par conséquent, la
5 création est que la reconnaissance internationale a eue lieu quelques trois
6 mois auparavant. Vous n'aviez pas entendu parler de la Republika Srpska, en
7 tant qu'entité à ce moment-là.
8 R. C'est exact.
9 M. STEWART : [interprétation] A ce moment-là, je me demande si le moment
10 est opportun pour faire une pause.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous allons suspendre l'audience
12 jusqu'à midi cinquante. J'ai une question à vous poser, Maître Stewart : la
13 Défense a-t-elle l'intention de verser des documents à votre dossier ?
14 M. STEWART : [interprétation] Oui, nous avons un document que nous
15 souhaitons verser. C'est un seul feuillet.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous remettre ce document au
17 Greffe au cours de la pause, pas à nous forcément.
18 M. STEWART : [interprétation] Bien sûr. Je n'avais pas l'intention de le
19 faire, mais je vais certainement le faire.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons suspendre l'audience jusqu'à
21 treize heures moins dix.
22 --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.
23 --- L'audience est reprise à 12 heures 56.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, poursuivez.
25 M. STEWART : [interprétation]
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1 Q. Monsieur Kirudja, est-ce que nous pourrions prendre le paragraphe 81 de
2 votre déclaration écrite, qui se trouve à la page 21 ? Vous dites :
3 "Pendant ce type de réunions," vous faites état d'une réunion avec le
4 commandant du secteur. Vous dites : "Durant ce type de réunion avec les
5 représentants militaires croates et serbes, les deux camps indiquaient
6 souvent que des terroristes les infiltraient par entremise de la ligne de
7 confrontation. Nous avons entendu cela qui a été répété à maintes reprises
8 par les Serbes."
9 Est-ce que ce sont les deux parties, les deux camps qui avaient avancé cet
10 argument ?
11 R. Oui. Les deux parties sur la frontière internationale de la Bosnie
12 puisqu'il s'agit ici de l'enclave de Bihac.
13 Q. Oui, vous le dites dans la première phrase. Vous nous dites que les
14 Serbes l'ont indiqué à maintes reprises. Est-il exact de dire que les
15 Croates l'ont indiqué fréquemment également ?
16 R. Non, pas fréquemment, mais de temps à autre.
17 Q. Finalement, vous vous êtes rendu compte. Vous le dites : "Que cela soit
18 vrai ou non, ils formulaient cette revendication essentiellement pour
19 justifier leur refus continu de désarmement tel qu'exigé par le plan
20 Vance."
21 Vous n'êtes par en train de suggérer que ce qui a été dit à propos de ces
22 infiltrations n'était pas vrai ?
23 R. Il faut voir ces incidents dans le contexte. Car, parfois, on nous
24 avait dit que des personnes étaient passées par la frontière, qu'il y avait
25 une infiltration, et pendant des jours et des jours, on ne voyait aucune
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1 preuve de ce qui était avancé. De temps à autre, il y a des personnes qui
2 ont été arrêtées, qui ont été appréhendées après avoir franchi la
3 frontière. Il y a eu, par exemple, un incident important qui s'est produit
4 en août ou en septembre. En deux ou trois jours, 600 Musulmans se sont
5 retrouvés dans la prison à Glina parce qu'ils avaient essayé de franchir la
6 frontière à partir de l'enclave de Bihac vers Slunj.
7 Il y a eu des moments où nous avons eu des preuves. A d'autres reprises, on
8 nous a dit qu'il y avait des terroristes. Nous faisions de notre mieux.
9 Nous avons déployé des efforts pour essayer de trouver les preuves. C'est
10 pour cela que je dis que cela soit vrai ou non.
11 Q. J'aimerais vous demander de prendre la pièce à conviction P133. Est-ce
12 que vous pourriez transmettre cette pièce à conviction ? Il s'agit de votre
13 mémorandum du 16 juin. En l'occurrence, cela s'est passé quelque 11 jours
14 après cette réunion à laquelle vous avez fait allusion. Cette réunion, vous
15 en parliez au paragraphe 80 de votre déclaration écrite. Si vous prenez le
16 paragraphe premier du mémorandum qui est attaché, que l'on trouve après la
17 page du garde, vous voyez que vous avez la date du 16 juin. Vous voyez
18 également qu'il est écrit au paragraphe premier : "La situation humanitaire
19 à Bihac se détériore très rapidement. La réunion convoquée le
20 1e juin 1992 à Bihac sur la demande des observateurs militaires des Nations
21 Unies et du maire de Bihac, a été une tentative afin d'alerter la
22 communauté internationale sur le fait qu'un désastre, une catastrophe
23 humanitaire va se produire, des éléments armés de la zone terrorise la
24 population des deux côtés de la frontière. Il y a eu toute une suite
25 d'assassinats, de mouvements en masse forcés de la part de personnes et
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1 d'autres activités horribles de représailles qui ont été consignées par la
2 FORPRONU."
3 Il s'agit de la situation qui prévalait vers la mi-juin 1992 dans ce que
4 vous décrivez là ?
5 R. Oui.
6 Q. J'aimerais vous demander de consulter le paragraphe 87 de votre
7 déclaration écrite toujours. Il s'agit d'ailleurs exactement du document
8 que nous venons de consulter, paragraphe 87 : "Le 16 juin, j'ai présenté un
9 rapport au QG de Zagreb." Vous vouliez insister aussi clairement que
10 possible le besoin urgent pour une opération humanitaire. Vous continuez en
11 disant : "D'après moi, les histoires serbes sur les atrocités commises par
12 les Musulmans tel que le fait que 40 Serbes ont été passés au fil du sabre
13 sur une période de deux jours, font partie d'un effort concerté de la part
14 des dirigeants serbes des deux côtés de la frontière afin de décrire les
15 Musulmans comme dangereux."
16 Monsieur Kirudja, cette histoire qui porte sur le passage au fil de l'épée,
17 au fil du sabre de 40 Serbes sur une période de deux jours pourrait avoir
18 été vraie, n'est-ce pas ?
19 R. C'est exactement ce que j'avais dit tout à l'heure. Lorsqu'on nous
20 racontait quelque chose, nous faisions de notre mieux pour obtenir les
21 preuves. Dans ce cas d'espèce, en dépit de ce que nous avions voulu, nous
22 avions voulu une information à propos de ces 40 personnes, qu'importe qu'il
23 s'agisse de Serbes ou de Musulmans d'ailleurs, mais nous voulions savoir ce
24 dont il s'agissait, mais nous n'avons pas obtenu lesdits renseignements.
25 Ce n'était pas une plainte, ce n'étaient pas des griefs qu'ils
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1 présentaient, c'était une observation suivant laquelle il y avait une
2 tendance de la part des Serbes de parler de ces atrocités. Cela n'était pas
3 toujours suivi de preuves.
4 En fait, dans le paragraphe que vous venez de lire où il s'agit de non-
5 Serbes, nous voyons quelle est la réalité, la réalité non pas pour les
6 Serbes, mais pour les autres qui essaient d'obtenir une protection; les
7 Serbes, les 40 Serbes auxquels vous avez fait référence.
8 Si vous prenez le document, si vous prenez la fin du paragraphe, il y avait
9 dans la zone de Dvor, du côté de la frontière, parce qu'il ne faut pas
10 oublier que les Serbes contrôlaient les deux côtés de la frontière. C'est
11 cela les difficultés auxquelles je faisais état. Ils nous racontaient que
12 quelque chose s'était produit, ensuite, ils disaient : "Nous avons géré la
13 situation." Voilà ce qu'ils me disaient.
14 Q. Si vous prenez le paragraphe 98 de votre déclaration écrite, il s'agit
15 d'une citation de votre rapport qui est la pièce P139. Je pense qu'il est
16 beaucoup plus commode de consulter votre déclaration écrite.
17 Vous indiquez ce qui suit : "Nous pensons que les détenus du terrain de
18 football ne représentent que la pointe de l'iceberg pour ce qui est des
19 actions concertées de la part des autorités serbes locales en Bosnie-
20 Herzégovine qui essayent d'établir une république serbe de Bosnie-
21 Herzégovine où il n'y aurait aucun Musulman. Ce sont seuls les maires, la
22 police et le TDF de Bosanski Novi qui agissent de concert avec leurs
23 homologues, et cetera, et cetera."
24 Est-il vrai, Monsieur Kirudja, qu'à l'époque, vous ne saviez pas qui
25 participait à ces événements ? Est-il vrai que vous ne saviez pas s'il y
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1 avait des instructions qui étaient données depuis Sarajevo ou Pale par un
2 dirigeant ou la direction du SDS ?
3 R. Il est exact de dire que je n'avais pas établi le lien direct entre
4 Pale et ces événements.
5 Q. Lorsque je dis Sarajevo ou Pale, pour préciser un peu mon propos, je
6 préciserais que la direction du SDS s'est déplacée de Sarajevo à Pale au
7 début du mois d'avril, le 10 avril 1992. Je ne sais pas si vous le savez
8 maintenant ?
9 R. Oui, c'est pour cela que tout à l'heure je vous ai parlé de Pale dans
10 ma réponse.
11 Q. Très bien.
12 Hier après midi, lors de votre déposition, une question vous a été posée
13 par le président de la Chambre de première instance, M. Orie -- en fait, il
14 ne s'agissait pas d'hier après midi. J'espère qu'hier après midi, vous avez
15 pu apprécier votre jour férié. Il s'agissait de vendredi après midi, en
16 fait, une question vous a été posée à propos de la pièce P140. Je
17 souhaiterais que ce document vous soit donné. Il s'agit d'un rapport de la
18 part de M. Paolo Raffone que nous avons entendu un certain nombre de fois.
19 Il s'agit, en fait, d'informations qui ont été transmises par vous.
20 J'aimerais vous demander de prendre l'avant dernier paragraphe du
21 mémorandum où on dit que le président du conseil exécutif et le vice-
22 président de la cellule de Crise de Dubica ont annoncé la décision récente,
23 prise par la cellule de Crise, approuvée par le parlement de la Republika
24 Srpska de la Bosnie-Herzégovine, à propos du fait qu'il faut démanteler la
25 structure du SDA et faire en sorte de placer tous ses membres sous
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1 contrôle.
2 Ma première question sera comme suit : est-ce que cela correspond à quelque
3 chose que vous aviez appris vous-même personnellement, ou est-ce que cela
4 correspond à un rapport qui vous a été fourni par M. Raffone ?
5 R. Oui, c'est le deuxième cas qui correspond à la réalité. c'était un
6 rapport de M. Raffone.
7 Parce que, Maître, il faut bien comprendre que, lorsqu'il se trouve à cette
8 réunion, il écoute les orateurs par le truchement d'un interprète et il
9 prend note de ce qu'il a entendu. C'est tout. Il entend les orateurs, il
10 prend des notes et il présente un rapport et, d'ailleurs, il a donné le nom
11 du représentant ou des représentants dans ledit mémorandum.
12 Q. Savez-vous s'il existait des procédures au sein du parlement ou de
13 l'assemblée de la Republika Srpska ? Je ne sais pas comment on l'appelait,
14 à l'époque. Savez-vous s'il y a eu des procédures de ratification, d'aval
15 ou d'approbation pour les décisions prises par ce communiqué, par cette
16 cellule de Crise ?
17 R. Pas autant que je sache.
18 Q. Savez-vous si les organes locaux ont dû approuver cela, et je pense à
19 des organes au sein de la Republika Srpska ?
20 R. Non, je ne le sais pas.
21 Q. Je souhaiterais, maintenant, vous montrer un document.
22 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit, Messieurs les Juges, du document
23 dont j'ai parlé juste avant la pause. Nous allons fournir des exemplaires
24 de ce document à Mme Philpott juste avant la pause. Il s'agit d'un seul
25 feuillet. C'est un document en B/C/S. Nous avons une traduction officieuse,
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1 mais au vu du temps qui nous avait été imparti nous n'avons pas eu la
2 possibilité de le faire traduire. Je pense que ce document est en train
3 d'être traduit par le service de la traduction, ou plutôt Mme Cmeric
4 transmettra ce document au service de traduction dès que nous aurons
5 terminé notre audience aujourd'hui.
6 Vous voyez qu'il s'agit d'un simple feuillet, il n'est pas très long.
7 Lorsque j'étais ici la semaine dernière, il y a une procédure qui a été
8 adoptée en vertu de laquelle Mme Cmeric qui lit beaucoup mieux que moi le
9 B/C/S, c'est le moins que l'on puisse dire, peut donner lecture de ce
10 document et les interprètes peuvent interpréter ce document.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 M. STEWART : [interprétation] Les interprètes auront un exemplaire du
13 document en B/C/S.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, si Mme Cmeric voulait bien nous
15 donner une lecture lente de ce document, nous pourrions ainsi avoir
16 l'interprétation de ce document.
17 M. HARMON : [interprétation] Je m'excuse est-ce qu'il y a un numéro qui a
18 été donné à ce document ?
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la première fois que nous venons
20 d'obtenir ce document puisque ce document n'a pas encore de traduction
21 officielle.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction de
23 la Défense D15.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, lorsque nous entendrons
25 l'interprétation, nous verrons ensuite si la traduction officieuse pourra
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1 être utile, s'il n'y a quasiment pas de différence, il est évident que nous
2 pourrons avoir un D15.1
3 M. STEWART : [interprétation] Je peux donner cela à M. Harmon, il s'agit de
4 ma traduction.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon n'a pas reçu de
6 traduction. Je pense que nous pouvons même le placer sous le
7 rétroprojecteur, afin que nous puissions lire ce document.
8 M. STEWART : [interprétation] Oui, mais la traduction, c'est une traduction
9 de deux pages.
10 Je m'excuse, je n'avais pas branché mon micro. Le document est un seul
11 feuillet, alors que la traduction comporte deux pages.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons si nous arrivons à voir ce
13 document. Pourriez-vous suivre la traduction et l'interprétation vers
14 l'anglais pour que vous puissiez, au fur et à mesure, monter le document
15 sur le rétroprojecteur.
16 Mme CMERIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 "République serbe de Bosnie-Herzégovine, assemblée municipale de Bosanski
18 Novi. Numéro de référence 01/1 -- et écrit à la main,
19 023-120/92. Date : 16-6 1992."
20 Le texte se lit comme suit, je cite : "Sur la base de l'Article 186.52 du
21 statut de la municipalité de Bosanski Novi (Journal officiel de la
22 municipalité de Bosanski Novi", numéro 21/90), l'assemblée municipale de
23 Bosanski Novi, lors de la séance tenue le 16-6 1992, adopte ce qui suit :
24 Conclusions :
25 "I. 1. On accepte le rapport au sujet du travail de la cellule de Crise de
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1 la municipalité de Bosanski Novi et on vérifie les conclusions, les ordres
2 et autres décisions adoptées par cette cellule de Crise.
3 "2. Eu égard à la population musulmane sur le territoire de la
4 municipalité de Bosanski Novi, les positions prises, par le comité
5 municipal du SDS, sont acceptées :
6 "- au sujet du fait que les citoyens de nationalité musulmane peuvent
7 déménager hors du territoire de la municipalité de Bosanski Novi,
8 volontairement et de façon organisée et civilisée.
9 "- que sont, strictement, interdites toutes activités qui risqueraient
10 d'entraîner un déménagement forcé de la population.
11 "- que les personnes qui se trouvent au centre d'accueil du stade de Mlakve
12 doivent être traitées de façon humaine et selon les règlements relatifs aux
13 personnes privées de liberté et aux prisonniers de guerre.
14 "3. Il est demandé à la cellule de Crise de la Défense territoriale de
15 prendre rapidement toutes les mesures nécessaires et d'entreprendre toutes
16 les actions nécessaires pour constituer une brigade avec ces bataillons de
17 l'armée de la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine.
18 "4. Il est ordonné au poste de sécurité publique de Bosanski Novi et au
19 commandement de la police militaire, sur le territoire de la municipalité
20 de Bosanski Novi, de maintenir l'ordre public et la paix, et de faire
21 régner la sécurité pour les habitants.
22 "II. Ces conclusions seront publiées dans : "Le Journal officiel de la
23 municipalité de Bosanski Novi."
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
25 Mme CMERIC : [interprétation] Merci.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là où il y a des modifications, pour
2 autant qu'elles aient une importance particulière, elles seront prises en
3 compte. Je veux dire, par exemple, remplacement du mot "adapté" par
4 "accepté", ou du mot "vérifié" par "confirmé", et le "centre d'accueil de
5 la traduction provisoire" est devenu "centre de regroupement." Au premier
6 tiret du petit 2, on lit, dans la traduction officieuse, que les citoyens
7 de nationalité musulmane peuvent déménager, alors que, dans la traduction
8 des interprètes, il est dit qu'ils ont l'autorisation de déménager. En
9 dedans de cela, les différences ne sont que très peu significatives.
10 M. STEWART : [interprétation] Oui. Je pense que les différences sont
11 vraiment secondaires pour ne pas dire insignifiantes, "humanely" au lieu de
12 "humanly", par exemple, en anglais.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a deux points peut-être, par
14 exemple, à la première ligne, nous voyons 011/ et, dans la lecture, il a
15 été question de 023, mais nous pourrions peut-être penser qu'il s'agit de
16 823. Je ne sais pas très bien comment on enseigne la rédaction de ce genre
17 de signe à l'école.
18 Deuxième point.
19 M. STEWART : [interprétation] Je ne me souviens pas non plus, Monsieur le
20 Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Selon la région, la notation et la façon
22 de consigner par écrit est peut-être différente.
23 Deuxième point, la date qui est traduite à l'instant comme étant celle du
24 16 juin, alors que M. le Juge El Mahdi, en tout cas, a quelque doute quant
25 au fait qu'il s'agit réellement du 16. Le deuxième chiffre pourrait être
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1 différent d'un 6.
2 M. STEWART : [interprétation] Je le lirais plutôt comme un 8, Monsieur le
3 Président. Si M. le Juge El Mahdi pense qu'il peut s'agir d'un 8, je dirais
4 que je partage son point de vue. Ceci est tout à fait possible.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est vraiment une façon de lire les
6 choses différemment plutôt qu'un problème d'interprétation.
7 M. STEWART : [interprétation] Je ne sais pas quel est le meilleur
8 exemplaire de ce texte dont nous disposons, mais le 023 semble bien être
9 023 car il semblerait que les numéros aillent de 23 à 120. Cela
10 commencerait à 023 et pas à 823 dans ce cas-là. Si cela a une importance
11 quelconque, nous pourrons vérifier, Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à autre chose pour le moment.
13 Nous obtiendrons une traduction définitive, et nous pourrons travailler sur
14 la base de cette traduction provisoire.
15 M. STEWART : [interprétation] Tout ce que je peux dire, c'est qu'elle
16 ressemble à une traduction provisoire.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas qui en est responsable,
18 mais elle mériterait --
19 M. STEWART : [interprétation] Tout à fait. Merci, Madame Cmeric.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaitais simplement remercier la
21 personne chargée de la traduction qui vient d'être faite sans même savoir
22 qu'il s'agissait de Mme Cmeric. Veuillez procéder.
23 M. STEWART : [interprétation]
24 Q. Monsieur Kirudja, les questions qui me restent ne devraient pas prendre
25 trop de temps. Est-ce que vous avez déjà vu ce document ?
Page 3254
1 R. Non.
2 Q. Est-ce que vous avez un souvenir ou une quelconque connaissance au
3 sujet de ce document ?
4 R. Non. Cela me rappelle d'après la teneur de ce document, une partie d'un
5 document que nous avons déjà examiné vendredi dernier, celui dans lequel le
6 même Radomir Pasic s'adressait au responsable de la coordination des
7 affaires civiles près du secteur nord. Je demanderais si la chose est
8 possible, d'avoir le document sous les yeux, car je voudrais vérifier la
9 date. Le document qui m'a été montré vendredi, il comporte un sceau, et il
10 est signé par lui en tant que président de la cellule de Crise. Le document
11 m'est adressé au QG du secteur. Il est partiellement traduit en anglais.
12 Vous pourrez constater vous-même que l'exemplaire de la traduction est
13 d'assez mauvaise qualité. Il y a également un exemplaire en serbe.
14 M. HARMON : [interprétation] Oui. J'ai ce document sous les yeux. Je peux
15 aider les Juges de la Chambre. Il s'agit de la pièce à conviction 141. La
16 date qui figure sur ce document est celle du 6 juillet 1992.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] 6 juillet 1992. J'ai écouté l'échange qui
18 vient d'avoir lieu. J'ai écouté la traduction qui vient d'être faite d'un
19 document où il est question de la date du 18 ou du 16 --
20 M. STEWART : [interprétation]
21 Q. Juin ?
22 R. Juin.
23 Q. Oui.
24 R. Le contenu de ces deux documents est intéressant du fait de leur
25 similitude, ainsi que d'un certain nombre de légères différences.
Page 3255
1 Q. Oui. Que souhaitez-vous faire ?
2 R. Oui. J'aimerais commenter certaines de ces différences et de ces
3 similitudes, car elles me paraissent importantes. Si l'on peut me donner le
4 deux documents, je vous prie.
5 M. STEWART : [interprétation] Peut-être que je pourrais récupérer la
6 traduction officieuse du document, traduction en anglais. Il s'agit du
7 document que nous venons juste de consulter ou peut-être que ce document
8 pourrait être placé sur le rétroprojecteur, peu importe. J'aimerais que
9 l'on choisisse l'une ou l'autre des solutions, Monsieur le Président.
10 Q. Nous allons commencer par les similitudes, Monsieur Kirudja ?
11 R. Oui. Voilà les similitudes que j'ai remarquées. Au paragraphe 2 de la
12 traduction, premier petit alinéa où il est dit que les citoyens de
13 nationalité musulmane peuvent partir de la municipalité de Bosanski Novi de
14 leur plein gré et de façon organisée et civilisée. Là, je peux dire qu'il y
15 a une similitude avec le document qui porte la date du 6 juillet, document
16 qui a été publié un mois plus tard. Dans le paragraphe où il est dit : "Les
17 gens qui auront la possibilité, l'autorisation d'abandon du territoire de
18 la municipalité de leur plein gré en direction de zones inhabitées en
19 République de Croatie." J'ai l'impression que cela est très, très
20 semblable, puisque vous avez l'idée suivant laquelle le mouvement est un
21 mouvement de plein gré, de façon organisée et civilisée. Là, il y a une
22 différence, parce que dans la lettre de juillet, il demande exactement que
23 ce mouvement soit organisé. En juin, dans votre document traduit, cela ne
24 s'est pas passé de toute évidence. Il dit simplement que cela est sur le
25 point de se passer, que cela va être organisé et civilisé. Voilà la
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1 différence qui est une différence légère.
2 Dans le mémorandum du 6 juillet, le P141, il -- au paragraphe dont je vais
3 vous donner lecture, il a été traduit, et il est -- le paragraphe n'a pas
4 été très bien traduit, mais il est dit : "La propriété foncière sera
5 préservée sur la base d'un échange avec les citoyens de nationalité
6 réfugiée et les réfugiés de la municipalité de Bosanski Novi qui viennent
7 de la République de Croatie, de la République de Slovénie, puisque ont
8 laissé leurs propriétés dans les pays mentionnés. Un nombre moins important
9 de citoyens musulmans et d'autres nationalités sont partis ou ont donné
10 comme cadeau leurs propriétés pour lesquelles ils avaient tous les
11 documents officiels. Les citoyens de nationalité musulmane sont en train de
12 prendre tout leurs biens, meubles, mobiliers."
13 Si vous pouvez déplacer un peu le rétroprojecteur, vous voyez que vous avez
14 dans le deuxième alinéa des documents que vous venez de lire et qui porte
15 la date du 18, une phrase suivant laquelle : "Toute activité qui serait
16 destinée à une expulsion de force de la population est strictement
17 interdite." Voilà une différence importante. Un mois plus tard, il n'est
18 fait aucune référence à une interdiction d'expulsion de force.
19 Troisièmement, les personnes qui se trouvent au centre de réception au
20 niveau du stade, seront traitées de façon humaine, seront traitées en toute
21 humanité. Je pense qu'il s'agit de personnes qui ont été privées de liberté
22 et de prisonniers. Nous voyons qu'un mois plus tard, dans la lettre qui
23 nous est donnée, aucun de ces deux éléments n'apparaît. Bien au contraire,
24 l'accent est mis sur la vente des propriétés, sur l'échange des propriétés.
25 Voilà les similitudes et les différences que je vois. Je l'avais mentionné
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1 vendredi. J'avais dit que la lettre du 6 juillet suit la lettre, une autre
2 lettre envoyée à M. Pasic, lettre qui porte la date du 20 juin. Nous lui
3 indiquons que ce qu'il a planifié ne peut absolument pas être accepté par
4 nous; cela en date du 20 juin. Je vous remercie, Monsieur le Président,
5 Messieurs les Juges.
6 Q. Je vous remercie, Monsieur Kirudja. J'aimerais vous demander de
7 consulter autre chose. Donnez-nous un petit moment, Monsieur le Président.
8 Je pense que vous avez déjà témoigné dans deux affaires devant ce Tribunal
9 si je ne m'abuse. Est-ce bien exact ?
10 R. Oui, c'est exact, Maître.
11 Q. Dans l'affaire Milosevic et dans l'affaire Brdjanin ?
12 R. C'est exact.
13 M. STEWART : [interprétation] Dans l'affaire Brdjanin -- voilà ce que je
14 souhaiterais faire, Monsieur le Président. Il y a un passage qui comporte
15 quelque quatre pages. Il s'agit du témoignage de
16 M. Kirudja dans l'affaire Brdjanin. Voilà ce que je me propose de faire
17 avec votre autorisation, je vais donner lecture aussi rapidement que
18 possible sans oublier de donner la possibilité aux interprètes de faire
19 leur travail.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous poser une question,
21 Maître Stewart. Je suppose que nous n'allons pas terminer aujourd'hui,
22 d'autant plus que vous venez de nous dire que vous allez donner lecture de
23 quatre pages.
24 M. STEWART : [interprétation] Non, non, nous allons terminer.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Même si vous lisez lentement, nous
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1 allons terminer dans une demi-heure.
2 M. STEWART : [interprétation] C'est justement parce que j'ai l'intention de
3 terminer aujourd'hui, que j'ai cet exemplaire avec moi.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, je vous prie.
5 M. STEWART : [interprétation] Il faut que je mette maintenant ma bonne
6 paire de lunettes.
7 Q. Lors de votre interrogatoire principal dans l'affaire Brdjanin, je vais
8 vous donner les références de pages. Il s'agit de la page 14 545, affaire
9 Brdjanin, mercredi 12 février 2003. C'est
10 Mme Korner qui procédait à cet interrogatoire principal. Elle vous pose des
11 questions :
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'aurais aimé avoir quelque chose sur mon
15 écran qui ne comporte rien maintenant. J'aimerais avoir un document, parce
16 que je n'ai pas le document dont il est question.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il n'y a pas d'exemplaire de
18 ce document. Je pense qu'il faut tout simplement réappuyer sur le bouton
19 pour le compte rendu d'audience.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Prenez des notes de certains passages
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque nous, nous avons un écran du
24 compte rendu d'audience. Contrairement à votre écran, nous pouvons
25 retrouver les passages qui ont été lus; ce qui n'est pas votre cas.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est parce que je n'avais plus rien sur
2 l'écran.
3 M. STEWART : [interprétation]
4 Q. Il s'agit de la référence de l'affaire, il s'agit de l'affaire IT-99-
5 36-T. Mme Korner fait état du paragraphe 11 d'un document. Elle dit :
6 "Comme cela a été indiqué dans le rapport de situation, il y avait une
7 frontière internationale qui séparait Dvor et Kostajnica en Krajina des
8 opstinas contrôlés par les Serbes pour Novi et pour ce qui est également du
9 fleuve Una."
10 Je pense qu'il s'agit de ce document.
11 "En sus de ces deux ou trois opstinas, nous avons en Bosnie du Nord Sanski
12 Most et Banja Luka qui tombent sous le contrôle de ce qu'on appelle la
13 République de la Serbie de la Bosnie-Herzégovine. Vous avez également les
14 deux républiques serbes qui sont entièrement tributaires du point de vue
15 économique d'un couloir qui les relie avec la Serbie et le Montenegro. Nous
16 avons de plus en plus de preuves suivant lesquelles il y a une stratégie
17 militaire, une alliance qui est observée, et que la structure militaire sur
18 le terrain donne des signes suivants lesquels Banja Luka peut exercer
19 l'équilibre du pouvoir militaire sur Knin, un peu tout comme le pouvoir
20 était exercé par Belgrade ou a été saisi par Belgrade avant la
21 programmation de la nouvelle Yougoslavie fédérale. Vous avez ensuite le
22 commandant militaire suprême actuel à Knin est à Knin."
23 Nous avons, ensuite, une intervention de M. le Juge Agius.
24 Mme Korner qui continue : "Alors qu'auparavant il y avait une navette
25 incessante entre les deux capitales, nous remarquons la tendance des
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1 autorités locales qui consiste à se retirer de temps à autre à Banja Luka
2 ou à Belgrade lorsque les moments sont critiques. Est-ce que nous pouvons
3 indiquer qu'il y avait des signes militaires suivant lesquels le pouvoir
4 militaire était exercé de Banja Luka ? J'aimerais savoir d'où vous avez
5 obtenu ce genre d'information."
6 Votre réponse à Mme Korner a été que la phrase suivante comprend votre
7 réponse : "Nous remontions la filière des commandants, de ce qui se passait
8 afin de savoir qui avait le pouvoir."
9 Mme Korner, ensuite, intervient et dit : "Pour ce qui est des tendances des
10 autorités locales de se retirer de temps à autre à Belgrade ou à Banja Luka
11 lorsqu'il y avait des moments critiques. Lorsque vous avez traité avec les
12 autorités locales, les autorités politiques, avez-vous eu l'impression
13 qu'elles avaient la possibilité de prendre des décisions ?"
14 Vous avez répondu : "Je peux parler directement pour ce qui est du secteur,
15 parce que j'ai été en relation constante avec eux. Il faut savoir que
16 toutes les opstinas, qui faisaient partie de ce secteur, faisaient partie
17 d'une structure assez complexe avec le versant militaire et le versant
18 civil. Pour ce qui est de versant militaire, nous en avons parlé. Pour ce
19 qui est de l'aspect civil, il y avait des maires, les maires des opstinas
20 A, B ou C, qui avaient également la police, le chef de la police. Vous
21 aviez l'opstina A, B ou C. Ce groupe était le groupe qui avait le moins
22 d'influence. Par ailleurs, il y a des problèmes politiques dont on parlait
23 beaucoup. Il était dit, par exemple : "Nous n'allons pas vivre ensemble de
24 concert avec les Serbes, les non-Serbes. C'étaient ceux qui s'exprimaient
25 de la façon la plus véhémente. En général, les militaires n'avaient pas
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1 l'habitude de prononcer des discours, alors que pour ce qui est du monde
2 politique, la plupart des explications étaient fournies par la structure
3 civile, mais il faut savoir que les mesures étaient prises et l'action se
4 déroulait au niveau des militaires."
5 Question de Mme Korner : "Vous avez dit qu'ils avaient une tendance à se
6 retirer à Banja Luka pour faire quoi ? Ou à Belgrade pour faire quoi ?"
7 Vous avez répondu : "Il faut ne pas oublier que je parle de maire et
8 d'autres personnes qui se trouvent dans le secteur. Ils étaient entourés
9 sur les lignes de front par les Croates en direction de Karlovac, Sisak et
10 Zagreb. Ils se bloquaient, en fait, eux-mêmes. Nous ne l'avons pas
11 mentionné parce que, du point de vue économique, les Serbes étaient
12 bloqués. Ils ne pouvaient pas obtenir leur combustible, par exemple. Ils ne
13 pouvaient pas obtenir la plupart des vivres normaux. Parce qu'il s'agissait
14 d'un état de guerre, l'électricité ne fonctionnait pas, il y avait eu un
15 beaucoup de choses qui avaient été détruites. Il faut savoir que le réseau
16 d'eau, par exemple, ne fonctionnait pas. Il y avait une situation de
17 pénurie même pour les Serbes. S'ils voulaient trouver une solution à ce
18 problème, il fallait qu'ils sortent par le biais de ce corridor vers Banja
19 Luka ou vers Belgrade pour essayer de trouver des solutions aux pénuries
20 qui marquaient leur vie quotidienne."
21 Question : "Lorsque vous traitiez avec les maires de ces secteurs ou de ces
22 zones locales, par exemple, est-ce que vous avez jamais eu l'impression,
23 parce qu'il s'agissait de Dvor ou de Novi Kostajnica, qu'ils devaient
24 recevoir leur instruction de la part de supérieurs ?"
25 Réponse : "Il semblait tous reproduire la même chose, dire la même chose,
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1 dans la même langue. C'est un peu une indication comme lorsque vous avez
2 une chorale ou tous les membres de la chorale chantent à partir de la même
3 partition, qui est partagée entre tout le monde."
4 Question : "Très bien. Est-ce que vous pouvez --"
5 Réponse : "Il y avait très peu de situations qui étaient différentes de
6 celle-ci. Nous pourrions, peut-être, aborder le détail de cela car vous ne
7 pouviez trouver personne qui ne se ralliait pas à la tendance principale."
8 Question : "En sus de la question, je m'excuse d'avoir à vous demander
9 cela, mais j'aimerais que vous indiquiez très clairement ce que vous
10 indiquez aux fins du compte rendu d'audience."
11 Réponse : "Il s'agissait de Serbes à l'intérieur du secteur. En fait, c'est
12 comme si c'était un scénario ou une chorégraphie qui indiquait que Knin
13 était le centre de la coordination pour l'autorité."
14 Question : "Très bien," dit Mme Korner.
15 Réponse : "Si vous vous trouviez à l'intérieur de l'enclave de Bihac, je
16 suppose que je mentionnerais Banja Luka, mais, essentiellement, Belgrade.
17 Question : "Très bien."
18 Ensuite, je vais m'interrompre.
19 Monsieur Kirudja, j'aimerais savoir si, dans cette déposition, que vous
20 avez présentée à la Chambre de première instance dans l'affaire Brdjanin,
21 il y a des éléments de ce que vous avez avancé que vous ne souhaiteriez pas
22 voir repris comme éléments présentés devant cette Chambre de première
23 instance ?
24 R. Maître, j'aimerais scinder ma réponse en deux volets. Pour ce qui est
25 des faits, je suis, absolument, sûr de ce qui a été dit dans cette
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1 déposition. Je m'en tiens à la véracité de mes propos.
2 La deuxième partie de mon intervention, il appartient aux Juristes, aux
3 Avocats et aux Juges de considérer à quel point ces informations seront
4 utiles dans cette affaire.
5 Q. Je pense que la Chambre de première instance sera d'accord avec vous.
6 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
7 questions à poser à M. Kirudja.
8 Q. Je vous remercie.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de décider si vous devez revenir
10 demain, j'aimerais préciser que si vous devez revenir demain, cela sera
11 très très rapide. J'aimerais savoir si vous allez poser des questions
12 supplémentaires, Monsieur Harmon ?
13 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, avec l'indulgence de la
14 Chambre de première instance, j'aimerais examiner la déposition qu'il vient
15 de donner et évaluer cela, ce soir.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
17 M. HARMON : [interprétation] J'aimerais étudier le compte rendu d'audience
18 que je n'ai pas, d'ailleurs, à ma disposition, dans ce prétoire.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez utiliser la prochaine pause
20 qui sera très très longue, donc --
21 M. HARMON : [interprétation] Oui.
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kirudja, j'espère que vous
24 n'aviez pas pris de disposition pour votre voyage cet après midi, et que
25 vous pourrez ainsi revenir demain matin. Je suppose que cela ne sera pas
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1 très très long. Car les Juges auront quelques questions à vous poser, il se
2 peut que l'Accusation ait des questions à vous poser à nouveau. Peut-être
3 que la Défense souhaitera vous poser des questions sur la base des
4 questions qui vous auront été posées par les Juges ou par l'Accusation. Il
5 est absolument évident pour moi -- je vais utiliser mes propos de façon
6 aussi circonspecte que vous le faites vous-même, mais il est absolument
7 évident pour moi que, demain après une heure, voire une heure et demie au
8 plus tard, vous pourrez quitter ce prétoire. Ce qui fait que nous pouvons
9 vous dire, en toute sécurité, que, demain après midi, vous aurez toute
10 latitude pour vous déplacer où que vous vouliez vous déplacer.
11 J'aimerais, à nouveau, vous répéter que vous ne devez, absolument pas
12 parler de ce qui a été dit dans ce prétoire à quiconque et que vous ne
13 devez pas parler, non plus, de votre témoignage.
14 Nous allons lever l'audience jusqu'à demain 9 heures, et nous serons dans
15 le prétoire numéro 1, un prétoire différent de celui-ci.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
17 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 2 juin
18 2004, à 9 heures 00.
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