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1 Le jeudi 3 juin 2004
2 [Audience à huis clos]
3 [Passage à huis clos rendu public par décision de la Chambre].
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11 LE TÉMOIN : MILAN BABIC [Reprise]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 Interrogatoire principal par M. Tieger : [Suite]
14 Q. [interprétation] Monsieur Babic, hier avant la fin de nos travaux, nous
15 étions en train de parler avec vous de l'acheminement des armes aux Serbes
16 de Croatie effectué par les autorités de Serbie. Je souhaite vous poser la
17 question de savoir si des officiers de la JNA ont participé à cet
18 acheminement des armes aux Serbes de Croatie.
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ou si vous pouvez nous citer certains
21 officiers de la JNA, en particulier, qui ont participé à cet acheminement
22 d'armes, et est-ce que vous pourrez nous dire quand ceci a été fait ?
23 R. Je suis au courant du colonel Dusan Smiljanic. Il s'est présenté à moi
24 en tant que chef de sécurité du Corps de Zagreb. Cela s'est passé vers la
25 fin juillet, début août 1991.
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1 Q. Le colonel Smiljanic, est-ce qu'il vous a dit lorsqu'il s'est présenté
2 qu'il était prêt et capable de fournir les armes aux Serbes de Croatie ?
3 R. Oui. C'était ce qu'il a offert. Il était le premier à proposer cela.
4 Q. Est-ce que le colonel Smiljanic a, effectivement, fourni ces armes aux
5 Serbes après avoir fait cette offre ?
6 R. Oui. Je suis au courant du fait qu'il a fait cela au moins à deux ou
7 trois reprises.
8 Q. A qui ou à quelle force a-t-il fourni ces armes ?
9 R. Je sais que ceci a été acheminé aux Serbes autour de Knin et à la
10 police de Krajina.
11 Q. Avez-vous également eu une rencontre avec le ministre de la Défense de
12 la Serbie pour ce qui est de la livraison de l'approvisionnement en armes
13 et en matériel.
14 R. Oui.
15 Q. Quand est-ce que cette réunion a eu lieu ?
16 R. En septembre 91.
17 Q. Est-ce que vous avez fait cela une fois ou plusieurs fois ?
18 R. Au moins une ou deux fois en septembre. Après, je l'ai rencontré aussi,
19 mais à cause d'une autre raison.
20 Q. En résultat de vos visites, est-ce que les armes et les équipements
21 militaires ont été fournis aux Serbes de Croatie ?
22 R. Oui, mais je ne suis pas au courant des détails.
23 Q. Monsieur Babic, parlons maintenant des camps d'entraînement dans
24 lesquels les unités armées se sont entraînées. Tout d'abord, dites-nous,
25 s'il vous plaît, si en 1991 des camps ont été établis où l'on entraînait
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1 des formations armées ou des unités armées des Serbes de Croatie ?
2 R. Oui.
3 Q. Où était constitué ce camp ou ces camps ?
4 R. Je suis au courant du camp qui se trouvait au village de Golubic près
5 de Knin, un camp près d'un village Benkovac. J'ai entendu dire qu'il y
6 avait, également, quelque chose à Sumarice, à Banija mais je ne suis pas au
7 courant des détails.
8 Q. Au cours de quelle période existaient ces camps là ?
9 R. Je sais que le camp de Golubic était le premier qui a été constitué,
10 c'était en avril 1991. En ce qui concerne Benkovac, je sais que c'était en
11 été, peut-être en juillet.
12 Q. Qui a constitué ces camps ?
13 R. La Sûreté d'état de Serbie avec Martic.
14 Q. Est-ce qu'il y avait un officiel de la Sûreté d'état serbe qui a
15 participé activement à la constitution ou la gestion des camps ?
16 R. Oui. C'était Franko Simatovic.
17 Q. Je pense que vous avez déjà dit également que Franko Simatovic était
18 subordonné à Jovica Stanisic.
19 R. C'est exact.
20 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité de vous rendre au camp de
21 Golubic ?
22 R. Oui, deux fois, en avril et en mai 1991.
23 Q. Est-ce qu'un officier vous a escorté lors de votre visite du camp ?
24 R. La première fois que j'y suis allé c'était au moment où le camp venait
25 d'être constitué. J'ai été présenté au capitaine Dragan qui a été chargé,
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1 par la suite, de l'entraînement au sein du camp. En mai lorsque j'y étais,
2 j'ai rencontré Franko Simatovic qui était l'hôte et qui était en charge du
3 camp, qui était le chef, et il m'a fait visiter le camp, il m'a raconté ce
4 qui se passait.
5 Q. Quels étaient le nom et le prénom du capitaine Dragan ?
6 R. Il ne s'est jamais présenté ainsi à moi, mais, par la suite, on m'a dit
7 que son vrai nom était Dragan Vasiljkovic, mais lui il se présentait
8 toujours comme "Capitaine Dragan."
9 Q. Je souhaite vous poser une question pour apprendre les détails de ce
10 que vous avez appris au sujet de la question de savoir, qui allaient dans
11 ces camps et quel type d'entraînement l'on y organisait et quel était le
12 degré de l'organisation. Tout d'abord, est-ce que vous pouvez nous dire qui
13 étaient les personnes qui s'entraînaient au camp.
14 R. D'après ce que je pouvais voir et d'après ce qu'on m'a dit là-bas, il y
15 avait de petits groupes de personnes jeunes émanant des municipalités de la
16 SAO Krajina. C'était la Dalmatie du nord, Banija, Lika et Kordun.
17 Q. Est-ce qu'ils émanaient des municipalités différentes de ces régions ?
18 R. Oui, de municipalités différentes.
19 Q. Avez-vous pu voir certains dossiers qui étaient archivés au camp
20 d'entraînement à Golubic pour pouvoir déterminer si les personnes qui s'y
21 entraînaient venaient des municipalités différentes de la région ?
22 R. Oui. L'on m'a montré les archives puisque je souhaitais savoir s'il y
23 avait des personnes de Knin. A ce moment-là, ils m'ont montré leurs
24 archives y compris ce qui concernait la municipalité de Knin.
25 Personnellement, je ne connaissais pas ces personnes dont les noms
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1 figuraient aux archives. C'est M. Nikola Marovic qui était en charge de ces
2 archives et qui était l'adjoint de Martic qui m'a montré ces archives.
3 Q. Est-ce que les personnes qui s'y entraînaient étaient équipées d'armes
4 et d'uniformes ?
5 R. Oui. Ils portaient des uniformes et ils portaient des fusils. On m'a
6 montré aussi des armes sur deux roues, je ne suis plus sûr de ce dont il
7 s'agissait, mais il s'agissait d'une arme antiaérienne avec deux ou trois
8 canons. On m'a montré, également, un train blindé que Frenki faisait
9 construire à l'époque.
10 Q. Est-ce qu'il vous a, également, dit dans quel but on avait recueilli
11 ces armes ou dans quel but les avait-on utilisées ?
12 R. Oui. C'était pour l'armement de ces unités. En ce qui concerne ce canon
13 antiaérien, il a dit que ses hommes l'avaient déjà utilisé à Borovo Selo,
14 le 2 mai, contre la police croate.
15 Q. Avez-vous appris, approximativement, quelle était la durée de
16 l'entraînement et combien de personnes participaient à l'entraînement à un
17 moment donné ?
18 R. Je pense qu'il parlait d'une période brève d'entraînement de 10 à 15
19 jours pas plus. Plusieurs dizaines, peut-être une centaine jusqu'à 200
20 personnes pouvaient suivre cela. Je ne suis pas au courant exactement de
21 cela, mais je dis cela d'après ma propre estimation, puisqu'ils ne m'ont
22 rien dit.
23 Q. Est-ce que vous savez pendant combien de temps le camp de Golubic a
24 continué à fonctionner ?
25 R. Il existait jusqu'en août 1991. Quant à la question de savoir jusqu'à
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1 quand les entraînements se sont déroulés dans ce camp, cela, je ne suis
2 pas, tout à fait, au courant. J'ajouterais, également, que le capitaine
3 Dragan avait, là-bas, une unité permanente qu'il commandait personnellement
4 et de temps en temps, il déplaçait cette unité de Golubic à la forteresse
5 de Knin ou ailleurs dans la Krajina.
6 Q. Qui payait pour les camps ? Qui couvraient les frais ?
7 R. Le MUP de la Serbie.
8 Q. Je crois que vous avez dit que le capitaine Dragan était le principal
9 responsable du camp. Est-ce que d'autres personnes, d'autres entraîneurs
10 lui étaient subordonnés et ont participé à ce processus d'entraînement ?
11 R. Oui. Il y avait plusieurs instructeurs, mais je ne me souviens pas de
12 leurs noms. Ils avaient des surnoms.
13 Q. Est-ce que vous savez si le capitaine Dragan a participé à
14 l'entraînement dans d'autres camps et non pas seulement Golubic ?
15 R. Je sais que par la suite, à partir de 1993, il était responsable de la
16 gestion du camp de Bruska et qu'il commandait une unité permanente, là-bas,
17 à Bruska aussi.
18 Q. Les personnes qui se sont entraînées là-bas, est-ce que par la suite,
19 elles ont commencé à faire partie des unités telles que la police ou la
20 Défense territoriale ou d'autres formations ?
21 R. Ils faisaient partie de la police spéciale ou de ce que l'on appelait,
22 à l'époque, les unités de volontaires.
23 Q. Si je vous ai bien entendu, lorsque vous avez parlé serbe et lorsque
24 vous avez parlé de la police spéciale, est-ce que vous avez employé le
25 terme "milicija" ?
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1 R. Oui, milicija, c'était la police de la Krajina ou la police spéciale ou
2 ce que l'on appelait la police de Martic.
3 Q. Mis à part l'entraînement portant sur les armes et les autres aspects
4 physiques de l'entraînement militaire, est-ce qu'une partie de cet
5 entraînement était consacré à l'endoctrinement, à Golubic ?
6 R. Oui. Tout le monde en parlait d'ailleurs. On disait qu'il s'agissait de
7 lavage de cerveau. Autrement dit, l'on implantait une certaine idéologie.
8 On expliquait, à ces hommes, qu'il ne fallait pas qu'ils appartiennent à un
9 quelconque parti politique, qu'ils devaient seulement s'intéresser aux
10 intérêts nationaux serbes. A mon avis, l'on souhaitait ainsi prendre ses
11 distances par rapport au SDS qui était le parti principal, à l'époque, et
12 l'on souhaitait placer ces personnes-là, exclusivement, sous le contrôle de
13 la Sûreté d'état de la Serbie. Ces hommes-là ont été disciplinés et ce que
14 les autres appelaient le lavage du cerveau de ces personnes faisait qu'ils
15 avaient changé quelque peu.
16 Q. Ces personnes qui s'entraînaient étaient placées sous la direction de
17 cette structure parallèle que vous avez décrite préalablement ?
18 R. Oui. Ces formations parallèles étaient contrôlées par eux, par ces
19 structures parallèles.
20 Q. Quel était le but de l'entraînement et de l'endoctrinement de ces
21 groupes et de l'organisation de ces structures parallèles ?
22 R. Publiquement, on les représentait comme unités armées de la Krajina.
23 Les médias leur faisaient de la pub de manière, tout à fait, bruyante. Le
24 capitaine Dragan a été très médiatisé, et lui-même, il faisait la promotion
25 de ces unités-là. Les médias montraient l'image selon laquelle il
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1 s'agissait là de l'armée de la Krajina, d'une certaine manière alors qu'il
2 s'agissait de formations armées qui ont accompli une certaine tâche que la
3 Sûreté de l'état leur avait confiée. Le but était de procéder à des
4 provocations sans cesse et d'entraîner, dans le conflit, la JNA. Tout
5 d'abord, pour qu'elle sépare les deux camps et, par la suite, cette force a
6 commencé à lancer des opérations offensives contre le camp croate.
7 Q. Monsieur Babic, dans la déclaration qui a été marquée en tant que pièce
8 à conviction, hier, aux paragraphes 10 et 11, vous avez fourni des
9 informations au sujet de la campagne médiatique qui a eu lieu et de son
10 impact à l'époque. Vous avez, également, fait référence à ce que vous avez
11 dit dans l'affaire Milosevic au sujet de la campagne médiatique en Croatie.
12 Pour résumer rapidement, vous dites que la même chose s'est passée en
13 Bosnie. Tout d'abord, l'on a parlé de la menace de génocide en Croatie
14 contre les Serbes, et ensuite, contre les Serbes effectuée par les
15 Musulmans et les Croates en Bosnie, mais avec des effets encore plus forts.
16 Vous parlez du rôle de la propagande et de l'effort visant à persuader les
17 gens qu'une vieille coalition criminelle, qui englobait les Croates et les
18 Musulmans, commençait à revivre. On parlait, dans les médias, de Jasenovac
19 et des crimes de la Deuxième guerre mondiale. Cette campagne a provoqué la
20 peur, la haine et le souhait de se venger. Ceci a été instrumentalisé afin
21 d'obtenir le soutien pour les options qui étaient présentées au peuple
22 serbe comme ce qui allait mettre en œuvre l'approche décrite par M.
23 Karadzic.
24 Tout d'abord, est-ce que vous pouvez nous dire qui contrôlait ces médias
25 serbes ?
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1 R. Slobodan Milosevic, tout d'abord. Il s'agissait des médias en Serbie
2 et, par la suite, également des médias qui ont été créés dans la Republika
3 Srpska, à Pale et à Banja Luka.
4 Q. Ce contrôle, est-ce qu'il s'est également traduit par la nomination et
5 le remplacement des directeurs, rédacteurs en chef des médias effectué par
6 M. Milosevic ?
7 R. Oui. Ils étaient responsables devant lui. C'est lui qui les nommait à
8 leurs fonctions, même si la procédure formelle était, bien sûr, différente.
9 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite attirer
10 votre attention sur la page 13 005 jusqu'à 13 011 qui contient une partie
11 du compte rendu de l'affaire Milosevic, et qui contient des informations
12 plus détaillées concernant le contrôle des médias.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que vous souhaitez verser
14 cette page au dossier en vertu de l'Article 92 bis (D), n'est-ce pas ?
15 M. TIEGER : [interprétation] Effectivement, c'était mon intention, avec
16 l'autorisation de la cour, je souhaite attendre la fin de l'interrogatoire
17 principal et du contre-interrogatoire pour dire exactement quelle partie de
18 ces pages pourrait être utile à la Chambre.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
20 M. TIEGER : [interprétation]
21 Q. Monsieur Babic, à quel moment la JNA a commencé à participer aux
22 opérations de combat en Croatie à une plus grande échelle ?
23 R. A partir du 26 août 1991. La JNA a commencé à agir de manière
24 offensive. C'est elle qui détenait l'initiative jusqu'à ce moment-là entre
25 le mois de mars 1991 et cette période-là. Elle constituait une sorte de
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1 zone tampon entre les deux belligérants. C'est la manière dont il
2 expliquait son rôle, mais, en fait, il s'agissait-là d'une certaine
3 protection fournie à la région de la Krajina.
4 Q. Monsieur Babic, en ce qui concerne les faits, nous avons également
5 cette pièce à conviction versée au dossier hier. Il est écrit qu'à partir
6 du mois d'août, "après l'attaque contre Kijevo, vous avez appris que la JNA
7 et les structures parallèles ne protégeaient pas les Serbes de Croatie,
8 mais avec la TO serbe locale de la Krajina et la police de Martic avaient
9 commencé une guerre pour le territoire afin de créer les frontières
10 occidentales du nouvel état serbe." Vous avez considéré que "ce nouvel état
11 serbe allait se créer également par le biais du déplacement forcé,
12 permanent des populations non-serbes des zones considérées comme des zones
13 serbes en Croatie par le biais d'une compagne discriminatoire de
14 persécution."
15 Est-ce que vous pouvez nous dire de quelle manière ceci a été accompli à
16 partir du mois d'août 1991 ? Est-ce qu'il y avait une manière particulière
17 ou une approche particulière appliquée par ces forces visant à déplacer de
18 manière forcée et permanente les populations non-serbes ?
19 R. Oui. Ce que vous venez de dire a commencé en août 1991, et a duré
20 jusqu'en novembre 1991. C'est le résumé de tout ce que j'ai pu voir et
21 constaté. Excusez-moi, mais quelle était la dernière partie de votre
22 question ?
23 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être il serait
24 opportun, compte tenu de l'heure, de faire la pause maintenant, et de
25 reprendre les débats après la pause.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet. La réponse du témoin
2 risque de prendre quelque temps.
3 Suspension jusqu'à 10 heures 55.
4 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
5 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, la Chambre pendant la
7 pause a réfléchi à la meilleure façon de continuer à traiter la question
8 des mesures de protection, et la Défense est invitée, si elle le souhaite,
9 à présenter ses arguments brièvement par écrit. Nous prendrons ce texte en
10 considération immédiatement, peut-être pendant la prochaine pause.
11 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, pouvez-vous me dire de
12 quelle pause vous parlez exactement ?
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La prochaine pause, par exemple, ou une
14 quelconque interruption de l'audience.
15 M. STEWART : [interprétation] Puis-je vous demander, Monsieur le Président,
16 puisque vous me suggérez de coucher quelques mots sur le papier, à quel
17 moment la Chambre pourrait examiner ces écritures ?
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous ne pouvez pas le faire avant la
19 prochaine pause, nous pourrions, par exemple, vous entendre après la
20 prochaine pause. Nous avons déjà consacré pas mal de temps à cette
21 question. C'est bien sûr une question importante, mais en même temps, il
22 faut que nous avancions. La décision demeure ce qu'elle est pour l'instant.
23 Si d'autres arguments doivent être soumis à la Chambre, nous les recevrons
24 par écrit.
25 M. STEWART : [interprétation] Une requête simplement, Monsieur le
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1 Président, qui je crois découle logiquement de ce qui a été dit jusqu'à
2 présent. Laissons de côté la question de l'annonce. Je crois que les choses
3 n'ont tout de même pas été dites d'une façon tout à fait absolument claire.
4 Pour le moment, nous ne savons pas quelle pourrait être la base éventuelle
5 d'une nouvelle décision. Nous ne savons pas si la poursuite du huis clos
6 repose sur le fait que
7 M. Babic témoigne ici et sur la base du contenu de sa déposition. Nous ne
8 savons pas non plus quel est vraiment le point de vue de la Chambre en ce
9 moment. Si nous avons une suggestion à faire par écrit, nous devrions, je
10 crois, avoir quelque chose à nous mettre sur la danse, si je peut me
11 permets cette expression, au moins de façon synthétique obtenir quelques
12 détails complémentaires quant à la position exacte de la Chambre, quant au
13 fondement de la décision prise par la Chambre de première instance à cet
14 instant parce que si non, nous ne saurions, je crois, traiter de façon
15 intelligente et intelligible de cette question. Comme cela est nécessaire,
16 bien entendu, il faut qu'avant la prochaine pause, très rapidement, nous
17 connaissions ces détails de façon à pouvoir poursuivre dans le sens qui
18 nous est demandé.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je me rends bien compte de cela et
20 nous vous tiendrons informer dans les plus brefs délais, ce qui veut dire
21 peut-être au cours des quinze minutes qui viennent.
22 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 Monsieur Tieger, vous pouvez procéder.
25 M. TIEGER : [interprétation]
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1 Q. Monsieur Babic, avant la suspension vous aviez demandé à ce que l'on
2 vous rappelle la dernière partie de la question que je venais de vous
3 poser. Dans cette dernière partie de ma question, il vous était demandé si
4 vous pouviez nous parler de la façon dont s'étaient déroulées les activités
5 des forces armées impliquées dans l'expulsion sous la contrainte des
6 populations non-serbes, si tant est qu'une façon particulière ait existé ?
7 R. Oui. Ce que j'ai, déjà, dit s'est renouvelé. Je me suis rendu compte
8 qu'il y avait un schéma et des motifs qui étaient toujours les mêmes pour
9 expliquer ce genre d'action. Au départ, il était demandé à la population
10 croate de quitter les lieux dans le cadre d'un ultimatum. Cela s'est passé
11 une fois. Le plus souvent la chose se passait en l'absence de tout
12 ultimatum, à savoir que les forces de la milicija, de la police de la
13 Krajina et de la Défense territoriale provoquaient la population sur les
14 territoires habités par des Croates. Ensuite, la JNA se trouvait impliquée
15 dans ce conflit et avait recours à l'artillerie et aux armes lourdes. Après
16 quoi, la population croate se trouvait contrainte de s'enfuir.
17 C'était une façon d'obtenir l'expulsion de ces personnes, les choses se
18 passaient le plus souvent ainsi. Quant aux raisons pour lesquelles la JNA
19 s'impliquait dans la chose, elles étaient de nature différentes. Parfois,
20 la JNA le faisait de sa propre initiative, c'est ce qui s'est passé au
21 moment du blocus des casernes qui a été utilisé pour mener une guerre
22 locale et déplacer la ligne du front vers la partie croate.
23 Au cours de cette opération, la population croate soit s'est enfuie, soit
24 était expulsée.
25 Q. Vous avez parlé de Kijevo il y a quelque instant. Kijevo apparaît
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1 également dans le relevé des faits. Vous rappelez-vous quel jour,
2 exactement, Kijevo a été attaqué ?
3 R. Je n'ai pas été au courant de l'attaque au moment où elle a eu lieu. Je
4 l'ai apprise un peu plus tard, mais le même jour.
5 Q. Où vous trouviez-vous ce jour-là ?
6 R. Chez Milosevic.
7 Q. Etait-ce à Belgrade ?
8 R. Oui, à Belgrade. C'était lui qui m'avait convoqué.
9 Q. M. Milosevic vous a-t-il dit s'il savait qu'une attaque avait eu lieu
10 contre Kijevo ou était sur le point d'avoir lieu ?
11 R. Il m'a fait comprendre qu'il le savait puisqu'il m'a dit, là-bas les
12 choses ne sont pas terminées ? Au départ, il m'a appris qu'il allait
13 renvoyer Frenki en Krajina parce que moi, je m'étais plaint du comportement
14 de Frenki. Je crois que c'était là le motif de sa convocation. Il m'a
15 d'abord demandé qu'est-ce qu'il y a de nouveau à Knin, et je me suis plaint
16 du fait que la police croate malmenait les Serbes. J'ai demandé si la JNA
17 pouvait protéger ce village de la même façon qu'elle l'avait déjà fait,
18 c'est-à-dire, en constituant une zone tampon. Il m'a dit à ce moment-là :
19 est-ce que la question n'est pas déjà réglée ? C'est ainsi que j'ai compris
20 qu'il était au courant.
21 Après la réunion qui a eu lieu chez lui, j'ai appris que Kijevo avait été
22 attaqué et que la JNA avait agi, sur ce territoire, en obtenant le
23 déplacement de la ligne du front d'une quinzaine ou d'une vingtaine de
24 kilomètres, sans doute. Qu'elle avait agi différemment de ce qu'elle avait
25 fait jusqu'à ce moment-là. C'est ce que j'ai constaté le lendemain.
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1 Q. Lorsque vous êtes retourné dans la région de Knin, avez-vous eu la
2 possibilité de constater ce qui s'était passé à Kijevo ?
3 R. Oui, j'y suis passé puisque la maison où je suis né se trouve de
4 l'autre côté. Je suis passé par Kijevo le lendemain. Le village était
5 détruit. On voyait les résultats de l'action de l'artillerie sur les murs
6 des maisons et on pouvait constater que la région était désormais sous le
7 contrôle des forces du 9e Corps de la JNA.
8 Q. Avez-vous eu, également, la possibilité de voir, d'assister à des
9 combats dans la région de Kostajnica, en septembre 1991 ?
10 R. Oui, je suis passé en venant de l'autre côté, en venant du côté
11 bosniaque. Ce jour-là sur la rive opposée de la rivière, j'ai vu des
12 explosions dans un village qui je crois s'appelle Kozibrod qui se trouve
13 non loin de Kostajnica. J'ai demandé à l'homme qui m'accompagnait ce que
14 cela voulait dire, et il m'a dit que c'était des mortiers de calibre 110 si
15 je ne me trompe qui étaient en train d'opérer. Des obus tombaient tout près
16 du village et dans le village. J'ai assisté à cela en septembre 1991.
17 Q. Plus tard, en novembre 1991 avez-vous eu la possibilité de traverser la
18 région et de voir ce qu'il était advenu des villages croates de cette
19 zone ?
20 R. Oui. Je suis passé par là, et j'ai vu que, pratiquement, tous les
21 villages étaient détruits et abandonnés, c'est-à-dire qu'il ne s'y trouvait
22 plus aucun habitant.
23 Q. A présent, j'aimerais vous poser une question au sujet d'un officier de
24 la JNA. Est-il arrivé un moment où vous vous êtes rendu compte que Ratko
25 Mladic était devenu commandant de la VRS, c'est-à-dire, de l'armée des
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1 Serbes de Bosnie ?
2 R. Oui, en 1992. Je ne sais plus exactement à quel moment. C'était juste
3 avant l'été, peut-être au mois de mai.
4 Q. Le connaissiez-vous déjà depuis la Croatie ?
5 R. Oui.
6 Q. Quelles étaient ses fonctions en Croatie lorsque vous avez fait sa
7 connaissance ?
8 R. Il commandait l'état-major du 9e corps de la JNA.
9 Q. Vous avez parlé des opérations militaires destinées à expulser la
10 population non-serbe. Savez-vous si Ratko Mladic a participé à ces efforts
11 militaires dans le cadre des fonctions qu'il exerçait en Croatie ?
12 R. Oui, je suis au courant d'opérations militaires qu'il a menées et qui
13 ont entraîné l'expulsion d'habitants croates.
14 Q. Je vous demanderais d'abord si vous pouvez nous dire dans quels
15 endroits cela s'est passé ?
16 R. C'était toute la région où opérait militairement le 9e Corps et,
17 notamment, à Kijevo et un peu plus loin dans la direction de Sinj; la
18 région de Drnis également, de Sibenik et de Zadar.
19 Q. Vous avez déjà dit que les événements de Kijevo avaient eu lieu au mois
20 d'août. Est-il exact que les opérations militaires ont eu lieu en septembre
21 à Sinj, en septembre à Drnis et en octobre à Zadar ?
22 R. Oui.
23 R. Excusez-moi de vous interrompre. Dans les environs de Zadar, ces
24 opérations avaient commencé plus tôt, peut-être au mois de septembre. Cela
25 s'est passé autour de Benkovac.
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1 Q. Monsieur Babic, vous avez dit que dans les environs de Zadar, les
2 opérations avaient commencé plus tôt, peut-être au mois de septembre,
3 autour de Benkovac, et je crois que vous avez prononcé le nom d'une autre
4 localité mais l'interprète ne l'a pas entendu.
5 R. En octobre, ces opérations se sont rapprochées de Zadar. Vers la fin
6 septembre, elles ont atteint Obrovac, toujours dans la direction de Zadar,
7 de l'autre côté. C'est dans l'axe qui va à Maslenica.
8 Q. Eu égard à Kijevo, je crois vous avoir déjà entendu dire qu'un
9 ultimatum avait été lancé au villageois pour qu'ils quittent le village et
10 que l'artillerie était entrée en action pour les contraindre à partir, en
11 fait; est-ce exact ?
12 R. Oui. C'est Martic qui est à l'origine de l'ultimatum qui a été lancé
13 quelques jours avant l'attaque de l'artillerie de la JNA. Personnellement,
14 j'étais opposé à cela puisque j'étais président de la municipalité, des
15 autorités locales. En dépit de mon opposition, une dizaine de jours plus
16 tard, l'attaque de la JNA a, tout de même, commencé. Après quoi, j'ai été
17 informé du fait que la police, les hommes de Martic ainsi que la Défense
18 territoriale locale avaient participé à cette opération.
19 Q. Avez-vous rencontré ou vu Mladic dans la région durant les opérations
20 militaires qui s'y sont déroulées ?
21 R. Deux jours plus tard, je l'ai vu, effectivement, ou plutôt le
22 lendemain, il me semble. Oui, le lendemain. Le deuxième jour de ma
23 présence, le troisième jour de l'attaque, peut-être. Il me semble que
24 c'était le 28 ou le 29.
25 Q. Eu égard aux événements qui se sont déroulés dans la région de Sinj,
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1 Mladic vous a-t-il dit quelque chose personnellement au sujet de sa
2 participation à ces événements ?
3 R. Oui. Ces événements se sont déroulés plus tard, une ou deux semaines
4 plus tard. Je ne sais pas exactement. Après les événements de Kijevo.
5 Mladic a raconté, en fait, il se vantait, d'une certaine façon, d'avoir
6 ordonné à M. Jerko Vukas qui, à un certain moment, avait été président de
7 la municipalité de Knin et qui, à ce moment-là, était un fonctionnaire du
8 ministère de l'Intérieur en Croatie. Il lui avait ordonné, personnellement,
9 de détruire un barrage routier. Mladic lui avait ordonné de supprimer ce
10 barrage pour ouvrir la voie aux effectifs du corps d'armée. C'est ce que
11 j'ai entendu de sa bouche.
12 Q. D'après vous, quel était l'objectif poursuivi dans cet ordre donné au
13 président de la municipalité, de personnellement détruire un barrage
14 routier plutôt que d'envoyer des soldats pour le faire ?
15 R. Il se vantait. De cette façon, il faisait preuve de sa puissance. On
16 peut dire, d'une certaine façon, qu'il humiliait en quelque sorte l'homme
17 qu'il souhaitait forcer à détruire le barrage. C'est tout simple, il
18 faisait montre d'arrogance.
19 Q. Sur la base des contacts que vous avez pu avoir avec M. Milosevic, avec
20 le Dr Karadzic, dont nous parlerons de façon plus détaillée un peu plus
21 tard, je vous demande si vous savez si ces deux hommes connaissaient le
22 rôle joué par Mladic en Croatie ?
23 R. Oui, certainement.
24 Q. Avez-vous eu la possibilité de rencontrer Vojislav Seselj en Croatie ?
25 R. Oui.
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1 Q. Connaissez-vous le concept ou l'idée de Grande Serbie ?
2 R. Oui. C'était le programme politique de Seselj.
3 Q. Est-ce une idée identique ou différente de l'idée défendue par
4 Milosevic, à savoir, tous les Serbes dans un seul et même état ?
5 R. Je dirais que c'est une idée similaire, pas identique parce que l'idée
6 de Seselj était plus précise, beaucoup plus précise.
7 Q. A-t-il défini les frontières de la Grande Serbie, à savoir, cet état où
8 tous les Serbes devaient vivre ensemble ?
9 R. Oui.
10 Q. M. Seselj a-t-il adopté une position particulière par rapport aux non-
11 Serbes habitant dans les territoires qu'il considérait comme faisant partie
12 de la Grande Serbie ?
13 R. Il les considérait comme des étrangers et tout ce qu'il a fait a
14 montré, très clairement, qu'il avait l'intention de les écarter, en tout
15 cas, à en juger par ce qu'il a fait en Vojvodine. D'après ce que j'ai vu,
16 également, de son comportement par rapport à la Bosnie. A l'époque, il ne
17 pouvait plus, sans risque, voyager en Bosnie en raison de ce qu'il avait
18 dit des Musulmans. Je ne me souviens plus, aujourd'hui, des mots exacts
19 qu'il a prononcés à ce sujet. Je ne pourrais pas les citer.
20 Q. Était-il considéré, de façon générale, comme quelqu'un qui était
21 favorable à toute mesure susceptible de faire partir les non-Serbes des
22 territoires considérés comme faisant partie de la Grande Serbie ou des
23 territoires qui étaient considérés comme étant des territoires serbes ?
24 R. Vous pouvez répéter votre question.
25 Q. Absolument, je suis désolé, ce n'était pas très clair. Etait-il, de
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1 façon générale, considéré comme quelqu'un qui était favorable ou qui
2 préconisait des mesures destinées à faire partir les non-Serbes des régions
3 considérées comme régions serbes ?
4 R. Il parlait de la grande Serbie comme d'une Serbie homogène. A partir de
5 ce qu'il disait et à partir de son comportement également, j'ai constaté
6 qu'il avait une position hostile à l'égard des populations non-serbes.
7 C'est en tout cas de cette façon que j'ai vécu la chose.
8 Q. M. Milosevic soutenait-il Seselj ?
9 R. Oui. Il faisait son éloge. Seselj le soutenait lui aussi.
10 Q. Seselj avait-il des volontaires serbes en Croatie ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-il venu en Krajina pour rendre visite à ses volontaires ?
13 R. Oui.
14 Q. Savez-vous dans quelle condition il est arrivé en Krajina ou qui a
15 facilité sa visite ?
16 R. Il est arrivé et reparti en hélicoptère. C'est Marko Milovanovic, le
17 ministre de la Défense de la République de Serbie qui a organisé ces deux
18 voyages.
19 Q. L'hélicoptère appartenait-il à la JNA ?
20 R. [inaudible]
21 Q. Excusez-moi, je n'ai pas entendu votre réponse.
22 R. Oui.
23 Q. Avez-vous appris de la bouche même de Seselj qu'il était allé là-bas
24 pour rendre visite à ses volontaires ?
25 R. Oui, il me l'a dit personnellement.
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1 Q. Monsieur Babic, étant donné le rôle qui était le vôtre en tant que
2 dirigeant des Serbes de Krajina, avez-vous eu la possibilité de rencontrer
3 des membres des dirigeants serbes de Bosnie, que ce soit au niveau local,
4 régional ou au niveau de la république ?
5 R. Oui.
6 Q. D'abord pouvez-vous nous dire qui étaient certains des dirigeants
7 régionaux dont vous avez la connaissance ?
8 R. Andjelko Grahovac, Brdjanin, le Dr Vukic, Miro Mladjenovic, Vojo
9 Kupresanin, et peut-être d'autres dont je ne me rappelle pas le nom
10 aujourd'hui.
11 Q. Quels dirigeants au niveau de la république avez-vous rencontré ?
12 R. Radovan Karadzic, Biljana Plavsic, Nikola Koljevic, Momcilo Krajisnik,
13 Velibor Ostojic, et d'autres encore.
14 Q. Avez-vous eu la possibilité de constater de quelle façon les dirigeants
15 au niveau de la république avaient une influence les uns sur les autres.
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que vous aviez la possibilité d'observer une interaction entre
18 les dirigeants régionaux et les dirigeants au niveau de la république ?
19 R. Oui.
20 Q. Avez-vous également eu la possibilité d'entendre de la bouche des
21 dirigeants régionaux et au niveau de la république ce qu'ils considéraient
22 quelles étaient les personnalités qu'ils considéraient comme les
23 personnalités les plus importantes au sein du SDS et des structures
24 gouvernementales de la Republika Srpska ?
25 R. Radovan Karadzic, Momcilo Krajisnik, Nikola Koljevic, et Biljana
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1 Plavsic, c'était les quatre personnes qu'ils considéraient comme les plus
2 importantes. C'était les dirigeants principaux.
3 Q. Au sein de ce groupe de quatre dirigeants principaux, y avait-il une
4 personne, en particulier, qui aurait pu être considérée comme la
5 personnalité la plus importante à moins qu'il y en ait eu deux ?
6 R. On considérait que Radovan Karadzic et Momcilo Krajisnik étaient les
7 deux personnalités les plus importantes.
8 Q. Pourriez-vous nous indiquer combien de fois grosso modo vous avez eu la
9 possibilité de rencontrer M. Krajisnik pendant la période 1991 et 1992 ?
10 R. Quatre fois, je pense. Quatre fois. Oui.
11 Q. A ces occasions qui sont d'ailleurs précisées de façon détaillée dans
12 votre déclaration écrite, avez-vous eu l'occasion de voir M. le Dr Karadzic
13 et M. Krajisnik échanger des contacts l'un avec l'autre ? Est-ce qu'il y
14 avait une interaction entre ces deux personnes ?
15 R. Oui. Ils étaient ensemble.
16 Q. Est-ce que ces observations correspondaient à l'information que vous
17 aviez acquise de la part des dirigeants de la république et des dirigeants
18 régionaux à propos de ces deux personnes qui étaient les deux personnalités
19 les plus importantes ?
20 R. Oui, et plus tard j'ai également eu des renseignements et des
21 informations qui ont confirmé cela.
22 Q. Est-ce que vous mentionnez les contacts que vous avez eus par la suite
23 avec M. Krajisnik ou les observations de M. Krajisnik après 1992, ou est-ce
24 que vous faites allusion à quelque chose d'autre ?
25 R. Oui, lorsque je l'ai vu après 1992.
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1 Q. Est-ce que le Dr, ou plutôt je vais me reprendre. Combien de fois,
2 grosso modo, avez-vous rencontré le Dr Karadzic ?
3 R. Je l'ai rencontré à plusieurs reprises. Je l'ai rencontré plus de dix
4 fois, mais je ne me souviens pas du nombre exact de fois.
5 Q. Lui avez-vous parlé parfois au téléphone ?
6 R. Oui.
7 Q. Quels étaient la teneur générale et l'objectif de ces réunions et de
8 ces appels téléphoniques ?
9 R. Essentiellement je recevais des instructions, des conseils, des
10 renseignements relatifs à des objectifs politiques, et cela pouvait porter
11 également sur l'évolution politique du moment.
12 Q. Est-ce que le Dr Karadzic et M. Milosevic étaient des collaborateurs
13 proches l'un de l'autre ?
14 R. Oui. Ils étaient très, très proches, d'après ce que j'ai pu constater.
15 Q. Est-ce que les dirigeants serbes de Bosnie partageaient le point de vue
16 de M. Milosevic, pour ce qui était du fait que tous les Serbes devaient se
17 trouver dans un seul et même état ?
18 R. Oui.
19 M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais que l'on puisse montrer au témoin
20 une pièce à conviction qui avait été marquée au préalable pendant le
21 témoignage de M. Treanor, bien que je n'en connaisse pas le numéro exact.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, mais --
23 M. TIEGER : [interprétation] Nous en avons des exemplaires.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Treanor a présenté un nombre assez
25 important de documents.
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1 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons essayer de trouver ce
3 document et peut-être que nous pourrions utiliser ce temps à bon escient
4 pour donner à M. Stewart l'information dont il a véritablement besoin, et
5 ce, urgemment.
6 Maître Stewart, vous souhaitiez connaître le point de vue de la Chambre ?
7 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le moment, nous ne savons toujours
9 pas si les événements à Belgrade, et j'entends par là les événements qui se
10 sont déroulés le 5 mai, nous ne savons pas, disais-je, si ces événements
11 ont été, en fait, ourdis pour créer une atmosphère d'intimidation - cela
12 n'est pas encore très clair, bien que cela puisse être une possibilité - un
13 climat d'intimidation qui pourrait influencer la déposition et la teneur
14 des preuves qui vont être présentés par M. Babic.
15 Le fait est que certains de ces éléments qui sont protégés, et ce, pour un
16 certain temps, pourraient avoir été connus dans des milieux qui suivent de
17 très près les affaires du Tribunal, mais cela n'empêche pas la Chambre si
18 elle le considère judicieux, compte tenu de l'intérêt des personnes et de
19 l'intégrité des poursuites, de faire en sorte que cela ne soit pas connu du
20 public, au moins, en tout cas, jusqu'à ce que la Chambre puisse comprendre
21 davantage l'origine de l'incident du 5 mai et au moins jusqu'à ce que la
22 Chambre ait pris des mesures afin de communiquer directement avec l'Unité
23 des Victimes et des Témoins, et ce, afin de pouvoir recevoir les
24 renseignements les plus récents et de pouvoir connaître les résultats de
25 cette enquête. Voilà ce que je voulais vous dire pour le moment.
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1 Puisque vous avez maintenant visiblement trouvé le document pertinent,
2 Monsieur Tieger, je vous demanderais de poursuivre. Il s'agit du classeur 6
3 et de l'intercalaire 67. Il s'agit des pièces à conviction de M. Treanor.
4 M. TIEGER : [interprétation]
5 Q. Monsieur Babic, je souhaiterais que vous examiniez le document que vous
6 avez maintenant. Il s'agit d'une pièce à conviction, et comme nous l'a dit
7 la Chambre, c'est une pièce à conviction qui se trouve dans le classeur
8 numéro 6, intercalaire 67. Il s'agit d'une lettre du 19 décembre 1991. Il
9 s'agit d'une lettre du président de l'assemblée du peuple serbe en Bosnie-
10 Herzégovine, Momcilo Krajisnik. Connaissez-vous ce document ou cette
11 déclaration ?
12 R. Oui.
13 Q. Je vous avais demandé un peu plus tôt quel était l'objectif du concept
14 consistant à avoir tous les Serbes dans un seul et même état. Est-ce que ce
15 document reprend en quelque sorte l'objectif partagé, l'objectif qui
16 consiste à avoir tous les Serbes dans un seul et même état ?
17 R. Oui.
18 Q. Au quatrième paragraphe de la traduction anglaise, vous voyez qu'il est
19 indiqué : "Tous les Serbes sont engagés dans cette lutte visant le même
20 objectif sous la même bannière, et nous sommes absolument convaincus, tous,
21 de notre victoire."
22 De quoi s'agit-il ? Quel est l'objectif dont il est question et quelle est
23 la victoire dont il est question ?
24 R. Il s'agit d'avoir un état où pourraient vivre tous les Serbes; les
25 serbes de Serbie, les Serbes du Monténégro, de Bosnie et d'Herzégovine et
Page 3400
1 les Serbes de Croatie.
2 Q. Au deuxième paragraphe, la lettre fait état de la vérification du droit
3 historique du peuple serbe à vivre dans un seul état. Dans le cas de la
4 dissolution de la Yougoslavie et de l'indépendance des différentes
5 républiques, la Bosnie y comprise, est-ce que cela signifie que le peuple
6 serbe de Bosnie-Herzégovine ou de Croatie aurait été rapatrié vers la
7 Serbie, ou est-ce qu'il faisait référence à des territoires qui se
8 trouvaient dans les républiques de Croatie et de Bosnie-Herzégovine ?
9 R. Il s'agissait d'une référence aux territoires habités par les Serbes en
10 Bosnie-Herzégovine ainsi qu'en Croatie.
11 Q. Quels étaient les territoires que les dirigeants serbes de Bosnie
12 considéraient comme des territoires où le droit historique du peuple serbe
13 était tel qu'ils pouvaient posséder ou contrôler ce territoire ?
14 R. Le territoire où les Serbes représentaient la majorité de la population
15 à l'époque ainsi que le territoire en Bosnie-Herzégovine où les Serbes
16 représentaient la majorité avant la Deuxième guerre mondiale, à savoir, les
17 territoires où il y a eu génocide de la population serbe, et les
18 territoires où la population serbe représentait une minorité à l'époque.
19 Q. Est-ce que cela était également le point de vue de M. Milosevic tel que
20 vous le compreniez ?
21 R. Le point de vue de Milosevic se scindait en deux parties. Vous aviez
22 d'abord le peuple qui représentait en quelque sorte un principe, à savoir,
23 le peuple avait la possibilité de décider avec qui il voulait être, et vous
24 aviez également la situation qui prévalait à l'époque. Cela signifiait le
25 contrôle sur les territoires jusqu'à ce qu'une solution définitive soit
Page 3401
1 trouvée à la crise yougoslave.
2 Je n'ai pas entendu l'avis précis de Milosevic à propos de ces territoires,
3 à propos de l'endroit où il se trouvait et à propos du fait que la
4 situation qui prévalait devait être préservée. En fait, il s'agissait de
5 maintenir l'état actuel à ce moment-là dans les territoires qui étaient
6 censés faire partie de cet état. Ou, pour m'exprimer un peu mieux : il
7 convenait avec Radovan Karadzic du point de vue de l'approche à adopter par
8 rapport aux territoires de Bosnie-Herzégovine.
9 Q. Vous avez indiqué quel était le point de vue des dirigeants serbes de
10 Bosnie, à savoir, les Serbes en Bosnie avaient le droit et avaient un droit
11 historique par rapport aux territoires où ils avaient été une majorité et
12 où ils étaient, à ce moment-là, une minorité. Avez-vous jamais entendu de
13 la part d'un dirigeant serbe de la Bosnie comment il comptait contrôler ces
14 territoires, notamment, les territoires où les Serbes représentaient une
15 minorité ?
16 R. Je l'ai entendu de la part de Radovan Karadzic.
17 Q. Quand avez-vous entendu cela de la part du Dr. Karadzic ?
18 R. En juillet 1991.
19 Q. Où vous vous trouviez-vous lorsque vous avez entendu cela ?
20 R. Dans le bureau de Slobodan Milosevic, cela pour la première fois. La
21 deuxième fois, je me trouvais à Celinac, en Bosnie.
22 Q. Qui était présent dans le bureau de Milosevic en juillet 1991 lorsque
23 vous avez entendu l'explication du Dr. Karadzic à propos du contrôle qui
24 devait être assuré ?
25 R. Slobodan Milosevic, le Dr. Karadzic et moi-même.
Page 3402
1 Q. Qui avait convoqué cette réunion ?
2 R. J'y avais été invité par Milosevic.
3 Q. Quel était, d'après vous, l'objectif de cette réunion ?
4 R. On m'a indiqué quel était l'objectif de la réunion. L'objectif de la
5 réunion était d'empêcher que je prenne une initiative politique, que les
6 gens de Knin prennent une initiative à propos de la population de Banja
7 Luka pour ce qui était de l'unification de la région serbe de la Krajina et
8 de la région de Knin. Il s'agit de la Krajina de Banja Luka, de la Krajina
9 et de la zone de Knin.
10 Q. Est-ce que M. Milosevic et Karadzic avaient des objections vis-à-vis de
11 cette initiative politique ?
12 R. Oui. Ils avaient de très vives et très fortes objections.
13 Q. Quelles étaient leurs préoccupations ou leurs objections ?
14 R. Cette initiative perturbait le plan qu'ils avaient pour la Bosnie-
15 Herzégovine.
16 Q. Comment est-ce que cette initiative représentait une obstruction par
17 rapport au plan qu'ils avaient pour la Bosnie ?
18 R. Cette initiative supposait que la population de la Krajina de Bosnie,
19 qui était une population majoritairement serbe, décide, sur la base de
20 l'autodétermination, de s'unir avec les Serbes de la région autonome de la
21 Krajina. En ce sens, leur plan était en quelque sorte écarté. Il était du
22 ressort des Serbes d'assurer le contrôle du territoire de la Bosnie-
23 Herzégovine où les Serbes n'étaient pas une majorité. Le principe
24 d'autodétermination de la majorité représentait un obstacle dans leur plan
25 qui consistait à établir le contrôle du territoire où les Serbes
Page 3403
1 représentaient une minorité.
2 Q. Qu'a dit le Dr. Karadzic à propos de la façon dont les Serbes devaient
3 procéder pour obtenir le contrôle du territoire qu'ils considéraient comme
4 devant être serbe ?
5 R. Il a expliqué ce qu'il ferait.
6 Q. Pourriez-vous décrire cela à la Chambre, je vous prie ? Qu'a-t-il dit ?
7 R. Premièrement, il a dit que les Serbes ne devraient prendre aucune
8 mesure qui, aux yeux de la communauté internationale, serait telle que les
9 considérerait comme le facteur qui provoque la crise et le conflit, mais
10 qu'il devait attendre Alija Izetbegovic. Ensuite, il a dit qu'il réglerait
11 ses comptes avec Alija Izetbegovic en expulsant les Musulmans et en les
12 forçant à se rendre vers les vallées et, ensuite, qu'il établirait des
13 liens avec les territoires serbes de la Bosnie-Herzégovine pour avoir un
14 seul et même territoire. Je dois dire qu'il a indiqué, de façon très
15 éloquente, à quel point il avait le contrôle d'Alija Izetbegovic.
16 Q. Qu'entendez-vous ? En quoi s'exprimait-il de façon éloquente et un peu
17 théâtrale ?
18 R. Il a dit qu'il pouvait faire ce qu'il voulait d'Alija Izetbegovic. En
19 fait, il a dit qu'il pouvait se le mettre dans la poche. A Celinac, il a
20 pris le cigare qu'il avait pris de Slobodan Milosevic et il a mis ce cigare
21 dans sa petite poche, le cigare représentait Alija Izetbegovic. Il pouvait
22 faire ce que bon lui semblait, à savoir, le mettre dans une petite poche.
23 C'était, en fait, la teneur générale de son geste.
24 Q. Avant que nous poursuivions et que nous reprenions l'idée de la réunion
25 à Celinac. J'aimerais en terminer avec votre réunion de Belgrade. Est-ce
Page 3404
1 que le Dr Karadzic a indiqué s'il y avait des territoires, à propos
2 desquels, il n'était pas très certain ? Est-ce qu'il a dit qu'il y avait
3 des territoire que lui ou que les Serbes de Bosnie pourraient prendre aux
4 Musulmans ?
5 R. Il a mentionné Zenica. Il a dit : je ne sais pas si je devrais leur
6 prendre Zenica.
7 Q. Est-ce que M. Milosevic vous a dit, à vous personnellement, quelque
8 chose après que le Dr Karadzic ait décrit le processus ?
9 R. Il a dit que je ne devrais pas, en quelque sorte, me trouver sur le
10 chemin de Radovan, que je ne devrais obstruer son chemin.
11 Q. Quand a eu lieu la réunion de Celinac ?
12 R. Je pense que cela s'est passé le même jour, le soir du même jour.
13 Q. Quel était l'objectif de cette réunion à Celinac ?
14 R. Le but était que Karadzic me discrédite devant les personnes qui
15 partageaient son point de vue à Banja Luka, et de leur présenter son plan
16 pour la Bosnie.
17 Q. Savez-vous qui a organisé cette réunion ?
18 R. Oui, Radoslav Brdjanin. Il était de Celinac. Je pense que c'est la
19 raison pour laquelle la réunion a eu lieu à Celinac.
20 Q. Est-ce que M. Brdjanin était, également, un dirigeant important
21 régional du SDS, dans la région de la RAK ?
22 R. Oui. C'était le président du conseil régional du SDS. On disait de lui
23 que c'était l'homme de Karadzic.
24 Q. Qui a participé à cette réunion à Celinac ? Est-ce qu'il s'agissait
25 d'une réunion à laquelle ont participé de nombreuses personnes ?
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1 R. Je pense qu'il y avait environ 10 à 15 personnes de Banja Luka et de
2 ses environs. C'étaient des personnes qui appartenaient à la direction
3 régionale. Je ne me souviens pas exactement de qui se trouvaient à cette
4 réunion.
5 Q. Pourriez-vous nous dire ce qui s'est passé à cette réunion ?
6 R. Fondamentalement, Karadzic a répété ce qu'il m'avait dit dans le bureau
7 de Milosevic, mais il l'a fait de façon beaucoup plus théâtrale. Il agitait
8 ses bras, il a expliqué comment il pouvait sortir Alija de sa poche, et il
9 a allumé son cigare. C'était en quelque sorte une véritable représentation
10 théâtrale. Je dois dire qu'il n'y a pas eu beaucoup de discussions à cette
11 réunion. Une fois qu'il a terminé sa représentation en quelque sorte, il
12 n'y a pas, véritablement, eu beaucoup de discussions.
13 Q. Le Dr Karadzic a avancé à nouveau les éléments du plan qu'il avait
14 décrit à la réunion de Belgrade avec M. Milosevic.
15 R. C'est exact. Il a, également, dit que, lorsque cela serait terminé, la
16 Krajina ferait partie du territoire serbe de la Bosnie-Herzégovine.
17 Q. Monsieur Babic, quand vous êtes-vous rendu compte que des membres de la
18 direction serbe de Bosnie parlaient de prise de contrôle de territoires ou
19 de municipalités en Bosnie-Herzégovine ? A quelle date vous êtes-vous rendu
20 compte de cela ?
21 R. A la suite des élections en Bosnie-Herzégovine. Quelques mois après les
22 élections, je me suis rendu à Sarajevo en mai 1991, je me suis rendu à
23 l'appartement du Dr Karadzic et c'est à ce moment-là que je me suis rendu
24 compte qu'il envisageait exercer le contrôle ou établir cette autorité. Je
25 ne peux pas vous dire exactement comment, je ne sais pas s'il s'agissait
Page 3406
1 d'endroits où il avait une majorité politique, je ne sais pas s'il
2 envisageait de forger une coalition avec des partenaires en Bosnie. J'ai
3 remarqué, toutefois, qu'il planifiait quelque chose avec la police.
4 J'étais au courant de ce qui était fait par le SDS dans l'arène politique.
5 Je pense, par exemple, à la création d'associations de municipalités dans
6 la zone, je pense, également, au plan dont m'avait parlé Karadzic à propos
7 du lien à établir entre ces différentes zones.
8 Q. Pourquoi vous êtes-vous rendu dans l'appartement du Dr Karadzic,
9 qu'est-ce qui vous a incité à le faire ?
10 R. J'ai reçu des informations de Martic, Jovica Stanisic avait envoyé un
11 message suivant lequel je devais me rendre à Sarajevo pour voir Karadzic.
12 Il ne m'a pas fourni d'explications, il ne m'a pas dit pourquoi je devais
13 le faire.
14 Q. Est-ce que vous vous y êtes rendu seul, ou est-ce que vous avez voyagé
15 avec M. Martic ?
16 R. Il y a deux ou trois véhicules qui s'y sont rendus. Moi j'ai pris ma
17 voiture. Il a pris sa voiture.
18 Q. Qui était présent dans l'appartement du Dr Karadzic lorsque vous-même
19 et M. Martic êtes arrivés ?
20 R. Jovica Stanisic était présent, ainsi que Velibor Ostojic.
21 Q. Un peu plus tôt, vous avez fait allusion à Velibor Ostojic, pourriez-
22 vous nous dire de qui il s'agissait ?
23 R. C'était l'un des militants du SDS, un associé de Karadzic et je pense,
24 qu'à l'époque, il était ministre de l'Information au sein du gouvernement
25 de la Bosnie-Herzégovine.
Page 3407
1 Q. Que se passait-il lorsque vous êtes arrivé, par la suite ?
2 R. Nous sommes entrés dans l'appartement. On nous a proposé de nous
3 asseoir dans un coin de la pièce. On nous a offert du café. De l'autre côté
4 de la pièce, Stanisic et Karadzic étaient déjà là, ils étaient penchés sur
5 des cartes. Velibor Ostojic a apporté d'autres cartes géographiques. Ils
6 regardaient les territoires des municipalités. Ils parlaient d'une manière
7 que je ne comprenais pas, mais, d'après ce que j'ai compris, ils parlaient
8 de la police. Jovica Stanisic a dit qu'il fallait monter le son de la radio
9 à cause des écoutes soi-disant. Nous n'avons pas passé beaucoup de temps là
10 dedans.
11 Cela s'est terminé vite et nous avons été escortés jusqu'au club des élus
12 du SDS dans l'assemblée de la Bosnie-Herzégovine. Il s'agit d'un restaurant
13 public. Nous y étions et c'était tout.
14 Je ne sais pas si quelqu'un a dit cela ou si je l'ai conclu moi-même, ou
15 peut-être c'est une impression que j'avais, mais j'avais l'impression que
16 nous faisions partie d'une sorte de spectacle organisé à des fins
17 politiques. Karadzic avait besoin de se montrer avec moi apparemment, en
18 public.
19 Q. De quelle manière est-ce que c'était utile au Dr Karadzic d'être vu
20 publiquement avec vous et Martic ?
21 R. C'était utile pour son apparence de nationaliste serbe, je ne sais pas
22 s'il voulait se faire passer pour ce genre de personne, c'est ce que je
23 suppose.
24 Q. Question de clarifier une référence que vous avez faite tout à l'heure,
25 vous avez dit qu'il fallait monter le son de la radio à cause des écoutes,
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1 est-ce que cela veut dire que quelqu'un était préoccupé par des écoutes
2 éventuelles ? Est-ce que quelqu'un a proposé que l'on monte le son de la
3 radio afin d'empêcher cela ? Ou est-ce que vous faisiez référence à autre
4 chose ?
5 R. Oui, justement. Stanisic a dit qu'il fallait monter le son de la radio
6 pour empêcher des écoutes éventuelles. Je pense que c'est Ostojic qui se
7 levait et qui a, effectivement, monté le son.
8 Q. Même si vous avez parlé de vos difficultés d'entendre la nature précise
9 de la conversation qui se déroulait et qui concernait les cartes
10 géographiques, est-ce que vous avez pu voir si les cartes ou entendre si
11 les cartes portaient sur les municipalités au sein de la Bosnie-
12 Herzégovine ? Si oui, est-ce que vous pouvez nous dire de combien de
13 municipalités il était question et dans quelle région ?
14 R. C'était une carte de la Bosnie-Herzégovine où étaient indiquées les
15 municipalités en couleurs différentes, mais je n'ai pas pu voir cela avec
16 précision. J'étais assis à une distance de trois à quatre mètres. Je n'ai
17 pas pu voir cela avec précision.
18 Q. Monsieur Babic, vous avez parlé de vos contacts avec M. Krajisnik après
19 1992, je souhaite vous demander si vous avez eu l'occasion de vous
20 entretenir avec M. Krajisnik en janvier 1995 ?
21 R. Oui.
22 Q. Quelle a été le cadre dans lequel s'est déroulé cet entretien ?
23 R. Ceci s'est fait à cause d'un événement qui s'est passé aux alentours de
24 Knin. Ceci portait sur les opérations effectuées par le HVO et l'armée
25 croate dans le territoire de la Republika Srpska. Le HVO et l'armée croate
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1 avaient lancé une offensive et ils s'emparaient de nouveaux territoires
2 depuis lesquels ils pilonnaient les alentours de Knin. Nous avons demandé
3 d'avoir une réunion à Pale. En fait, c'est Martic qui l'a dit. A l'époque,
4 il y avait également Rajko Lezajic et moi-même. Il y avait une délégation
5 qui est allée à Pale afin de demander aux leaders de la Republika Srpska
6 quelles étaient les mesures qu'ils allaient prendre afin de faire face à
7 cette situation.
8 A cette occasion, je suis allé voir Slobodan Milosevic aussi pour lui
9 demander ce qui se passait. Comme Milosevic a dit qu'il avait, déjà, donné
10 des ordres à Mladic et à Martic pour qu'ils mettent fin à cela. Puisque
11 ceci ne s'était pas produit, nous sommes allés à Pale, par conséquent.
12 Q. Comment avez-vous pu avoir un entretien avec M. Krajisnik ? Cela s'est
13 déroulé dans le cadre de quel événement ?
14 R. Après la réunion officielle, un dîner a été organisé pour nous. Moi, on
15 m'a placé à côté de Momcilo Krajisnik. Nous avons parlé pendant le dîner.
16 Q. M. Krajisnik, est-ce qu'il vous a parlé de Sarajevo et, plus
17 particulièrement, de la séparation ethnique à Sarajevo ?
18 R. Oui. Il a parlé de "Srbco Sarajevo", Sarajevo serbe.
19 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire comment la conversation a commencé et
20 quel a été le sujet de vos discussions ?
21 R. Après l'entretien, j'ai pu comprendre l'essentiel de ce que M.
22 Krajisnik voulait dire. Il parlait de Sarajevo comme d'une ville constituée
23 de groupes ethniques, de Serbes, de Croates et de Musulmans qui ont été
24 séparés de longue date déjà, et qu'ils avaient réussi, par le biais de
25 leurs combats, de séparer une Sarajevo serbe et de la contrôler. J'ai
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1 compris que ce n'était qu'une introduction pour me dire ce qu'il souhaitait
2 me dire à ce moment-là, à savoir que lui, il était originaire de Sarajevo,
3 de Sarajevo serbe, et qu'il était prêt à renoncer à Sarajevo serbe et que
4 moi, je devais renoncer à la Krajina. Il a dit en ce qui concerne la
5 capitale, nous avons Belgrade. Il a dit que je devais renoncer à la Krajina
6 parce que les Américains étaient prêts à donner 6 % de territoire de plus
7 par rapport à ce que le groupe de contact, à l'époque, proposait si on
8 était prêt à lâcher la Krajina.
9 Il s'agissait d'une espèce de marchandage, cela, c'était vraiment
10 l'essentiel de la conversation et de qu'il voulait dire. J'étais estomaqué
11 et j'ai arrêté de lui parler à partir de ce moment-là.
12 Q. D'après ce que vous avez compris, qu'est-ce qu'il suggérait ? Que
13 devait faire les Serbes de Croatie en échange d'avoir cette opportunité de
14 gagner 6 % de territoire de plus par rapport à l'offre du groupe de
15 contact ?
16 R. Il était sous-entendu que les Serbes devaient quitter ce territoire. En
17 fait, dans ce contexte, j'ai entendu une histoire semblable de la part
18 d'Aleksa Buha qui était le ministre des Affaires extérieures de la
19 Republika Srpska en novembre 1994, et émanant de sources différentes. Il
20 s'agissait d'un contexte différent et Momcilo Krajisnik n'a fait que
21 compléter l'histoire en parlant de la sorte avec moi. Bien sûr, dès le mois
22 de mars 1991 et dès les entretiens de Milosevic et Tudjman à Karadjordjevo,
23 on a commencé à parler de ce genre de partage des territoires. Cette
24 histoire s'est terminée pour ce qui est des Serbes de Krajina en 1995
25 lorsque le projet a été adopté de reloger les Serbes au Kosovo. Cela,
Page 3411
1 c'était le contexte général et certaines mesures ont été prises afin
2 d'accomplir cela.
3 Q. Monsieur Babic, vous avez décrit certaines mesures qui ont été prises
4 en Croatie. Vous avez parlé du modèle des opérations militaires que vous
5 avez pu observer et dont vous avez pu recevoir des informations. Est-ce que
6 ce modèle d'opérations, ce type d'opérations militaires se limitait au
7 territoire croate ou est-ce que vous avez vu la reproduction de cela en
8 Bosnie-Herzégovine ?
9 R. J'ai vu et j'ai entendu dire que la même chose se déroulait en Bosnie-
10 Herzégovine.
11 Q. Quand et où avez-vous vu cela en Bosnie-Herzégovine ?
12 R. J'ai vu cela au mois d'août lorsque l'on traversait ledit couloir en
13 allant vers Bijeljina pour assister aux obsèques du Dr Raskovic. Après,
14 j'ai vu cela aussi à Prijedor et à Bosanski Novi. J'ai vu les conséquences
15 de ces événements et certaines personnes m'ont raconté ce qui s'était
16 passé.
17 Q. En général, qu'avez-vous pu voir dans ces régions, y compris Prijedor
18 et Bosanski Novi ?
19 R. J'ai vu des villages musulmans détruits, sans population, ce qui
20 ressemblait à ce que j'avais vu en Krajina en novembre 1991.
21 Q. Puisque vous avez mentionné le couloir, est-ce que les régions, que
22 vous avez traversées et où vous avez pu observer cette dévastation,
23 englobaient également Sanski Most ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que vous avez pu voir également ce qui s'est passé dans les
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1 régions vers Brcko, Bijeljina et autour de Zvornik, Han Pijesak et Pale ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que cela ressemblait à ce que vous venez de décrire ?
4 R. Oui.
5 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
6 souhaite que l'on visionne une séquence vidéo. Je souhaite, également, vous
7 informer du fait que nous allons terminer l'interrogatoire principal
8 pendant cette partie de la séance.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que vous aurez besoin de
10 beaucoup moins de temps que les heures annoncées. Lorsque vous dites cette
11 partie de l'audience, vous parlez de l'audience de ce matin ?
12 M. TIEGER : [interprétation] Oui, je veux dire cette partie de l'audience.
13 Je ne m'attendais pas à ce que j'allais être, presque, embarrassé par le
14 fait que j'allais être plus efficace que prévu.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je ne vous accuse pas du tout.
16 Visionnons la séquence vidéo d'abord. Vous savez que nous allons avoir une
17 pause d'ici 10 minutes. Est-ce que vous souhaitez nous dire que nous
18 n'aurons même pas besoin d'une pause ? Je n'ai pas très bien compris
19 lorsque vous dites cette partie de l'audience. Vous parlez de l'audience de
20 ce matin ?
21 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que nous allons faire une pause à 12
22 heures 25 ou 12 heures 30 ?
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 M. TIEGER : [interprétation] 12 heures 30. C'est ce que j'avais anticipé.
25 Je pense que, d'ici là, j'aurai terminé mon interrogatoire principal.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'accord. J'ai bien compris
2 maintenant. Voyons la séquence vidéo d'abord.
3 [Diffusion de cassette vidéo]
4 M. TIEGER : [interprétation] Cette vidéo contient deux séquences, Monsieur
5 le Président.
6 [Diffusion de cassette vidéo]
7 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
8 cette vidéo a été tournée le long de la route de Prijedor- Banja Luka, en
9 janvier 1996, par le bureau du Procureur. Je n'ai pas proposé que l'on lui
10 attribue une cote au préalable, mais nous pouvons le faire à ce stade.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière d'audience.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P156.
13 M. TIEGER : [interprétation]
14 Q. Monsieur Babic, est-ce que cette séquence que nous venons de voir est
15 semblable aux scènes de destruction que vous avez décrites tout à l'heure
16 ou est-ce qu'il existe des différences que vous souhaitez relever ?
17 R. C'est ce que j'ai vu, oui. Cela ressemblait à cela.
18 Q. Est-ce que vous avez aussi voyagé le long de la route Prijedor-Banja
19 Luka en 1992 ?
20 R. Oui.
21 Q. Monsieur Babic, est-ce que les forces de la RSK ont participé aux
22 combats, aux opérations militaires en Bosnie-Herzégovine en été 1992 ?
23 R. Oui.
24 Q. Où est-ce que c'était le cas ?
25 R. Le long dudit couloir.
Page 3414
1 Q. Le couloir de Posavina ?
2 R. Oui.
3 Q. Quelle était l'importance de ce couloir pour les Serbes de Bosnie-
4 Herzégovine ? Pour les Serbes de Bosnie-Herzégovine ou pour les Serbes de
5 Krajina ?
6 R. L'importance, c'était d'établir un lien avec les territoires serbes.
7 Enfin, le lien entre les territoires serbes de la Bosanska Krajina, de la
8 SAO Krajina, la Serbie et les territoires serbes dans d'autres parties de
9 la Bosnie-Herzégovine.
10 Q. Quelles forces de la RSK ont participé ou sous la direction de qui,
11 ont-elles été placées ?
12 R. Les forces de la Krajina ont été placées sous le commandement de Milan
13 Martic. Il s'agissait d'un mélange de la police et de l'armée. Il
14 s'agissait des forces armées de la Krajina. On peut les définir ainsi.
15 Q. Comment avez-vous appris que les forces armées de la Krajina y compris
16 la police et l'armée et ceux qui étaient sous le commandement de Milan
17 Martic ont participé aux opérations militaires dans ce corridor ?
18 R. J'ai entendu qu'ils y étaient partis. Je les ai vus lorsqu'ils sont
19 rentrés. J'ai entendu également que Goran Hadzic qui, à l'époque, était le
20 président de la République de la Srpska Krajina avait promu Martic au grade
21 de général pour ce qu'il avait accompli dans le cadre des combats dans ce
22 corridor. J'ai, également, entendu cela de la part des gens qui disaient
23 que des combats se déroulaient dans le corridor.
24 Q. Vous avez entendu parlé de cela de la part des gens, vous voulez dire,
25 des gens qui ont participé aux combats ?
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1 R. Oui.
2 Q. Autrement dit, ceux qui avaient été placés sous le commandement de
3 Martic ?
4 R. Oui.
5 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, un instant, s'il vous
6 plaît.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
8 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]
9 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'avais
10 anticipé, ceci met fin à notre interrogatoire principal. Nous pouvons
11 traiter des questions liées aux pièces à conviction, et cetera, mais nous
12 le ferons au moment choisi par la Chambre.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur Tieger. Nous
14 pouvons commencer. Nous aurons une pause également.
15 Monsieur Stewart, est-ce que la Défense est prête à contre-interroger M.
16 Babic ?
17 M. STEWART : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand est-ce que vous serez prêt à se
19 faire ?
20 M. STEWART : [interprétation] Si nous examinons le bon côté des choses,
21 nous pourrons dire qu'aujourd'hui peut-être nous aurons plus de temps
22 qu'initialement prévu. Certainement, nous pourrons commencer le contre-
23 interrogatoire demain matin immédiatement dans la matinée. C'est tout ce
24 que je souhaitais dire parce que je pourrais effectivement dès à présent
25 commencer le contre-interrogatoire. C'est tout ce que je peux vous dire à
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1 ce stade.
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13 Pages 3417-3427 expurgées. Audience à huis clos.
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15 [Audience publique]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre a deux décisions à rendre. La
17 première a trait à l'admission du compte rendu Hidic dans le cadre d'une
18 requête déposée au titre de l'Article 92 bis. Il s'agit d'une requête orale
19 présentée par l'Accusation en application de l'Article 92 bis (D), requête
20 présentée au cours de l'interrogatoire du témoin Ahmet Hidic, le 22 avril.
21 Les pages du compte rendu commencent à la page 2 544. L'Accusation nous a
22 demandé d'admettre l'intégralité du compte rendu d'audience relative à la
23 déposition du témoin Hidic dans l'affaire Brdjanin, témoignage qui a duré
24 deux jours et occupé 260 pages de compte rendu. De façon temporaire, ces
25 documents ont déjà reçu une cote en tant que pièces à conviction, à savoir
Page 3429
1 P91 et P92. A l'époque, nous avions réservé notre décision en attente de
2 reproduction du document, car il nous fallait, d'abord, nous prononcer
3 quant aux conditions d'admission de ces documents au titre de l'Article 92
4 bis (D), conditions qui devaient être respectées.
5 Nous avons, désormais, pu parcourir ces deux comptes rendus d'audience et
6 la Chambre s'est convaincue que cette partie de la déposition a pour objet,
7 de prouver la réalité d'un certain nombre d'événements, autres que les
8 actes et le comportement de l'accusé. Il ne s'en suit pas, cependant, que
9 le compte rendu en question doit être admis au dossier. Les parties sont
10 bien conscientes du fait que la Chambre se préoccupe quelque peu du nombre
11 d'éléments de preuve dans la présente affaire, qu'elle souhaite limiter au
12 strict nécessaire afin que toutes les questions puissent être réglées de la
13 façon la plus juste et la plus impartiale qui soit.
14 Lorsqu'un témoin comparaît devant la Chambre pour témoigner, la Chambre a
15 quelque réticence à verser au dossier le témoignage du même témoin dans des
16 affaires antérieures, à moins que la partie, à l'origine de la requête, ne
17 soit en mesure de démontrer que cela comporte un avantage pour les Juges.
18 En effet, le principe majeur est celui de l'économie du temps des Juges. La
19 Chambre doit être informée, de façon précise, de la pertinence exacte des
20 fragments de comptes rendus d'audience qui sont proposés pour versement au
21 dossier. Car si tel n'était pas le cas les Juges consacreraient de très
22 nombreuses heures hors du prétoire à compulser des documents pour
23 déterminer leur pertinence, alors que certains de ces documents
24 risqueraient de n'être que répétitifs par rapport au contenu de la
25 déposition orale.
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1 S'agissant maintenant de la requête afférente à la déposition de M. Hidic,
2 l'Accusation a demandé que soient versées au dossier 260 pages de cette
3 déposition, c'est-à-dire la totalité du compte rendu d'audience reprenant
4 cette déposition, nous y trouvons énumérés un grand nombre de sujets et
5 grand nombre de documents déjà versés au dossier au cours de cette
6 déposition de M. Hidic. Par conséquent, l'Accusation est invitée à indiquer
7 dans quel passage précis du compte rendu d'audience se trouve les éléments
8 dont le versement au dossier est demandé. Ceci peut se faire soit en
9 surlignant les passages du texte, soit d'autre manière. La façon dont la
10 chose se fera par écrit n'a guère d'importance, mais je souhaitais,
11 simplement, montrer qu'il nous fallait savoir quelles étaient les parties
12 du compte rendu d'audience dont le versement au dossier était demandé. Nous
13 aimerions, également, avoir des indications quant aux numéros de paragraphe
14 exacts de l'acte d'accusation, auxquels les parties du compte rendu
15 d'audience en question seraient liées. Nous indiquerons à l'Accusation
16 qu'il convient d'éviter toute répétition. Il est peut-être inutile de vous
17 le rappeler, mais tant que nous n'aurons pas reçu ces pages et tant que
18 nous n'aurons pas rendu notre décision les documents continueront à
19 constituer, de façon temporaire, les pièces à conviction P91 et P92.
20 Je crois que ce que je viens de dire pourrait servir de base au
21 comportement à adopter lors de la présentation de requêtes futures de la
22 part des deux parties.
23 Voilà ce que j'avais à dire au sujet de la déposition Hidic. Nous avons,
24 encore, à rendre une décision, qui sera une décision orale au sujet d'une
25 requête écrite de l'Accusation en date du 21 mai 2004, qui demandait des
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1 mesures de protection pour trois témoins. Je crois comprendre que la
2 Défense n'a pas répondu encore, et ne s'oppose pas, en tout cas, à ce que
3 cette requête soit satisfaite. Ai-je bien compris ? Il n'y a pas
4 d'opposition de la part de la Défense.
5 M. STEWART : [interprétation] On m'informe que nous avons répondu à la
6 requête.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En tout cas, vous avez répondu par
8 écrit.
9 M. STEWART : [interprétation] Apparemment, oui. J'ai dit, on m'informe
10 parce que je n'ai aucune connaissance personnelle de la chose.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etait-ce une réponse en trois courts
12 paragraphes, c'est cela que j'ai à l'esprit. En tout cas, pas d'opposition.
13 Très bien. La chose est claire. J'indique que par écrit ou autrement,
14 l'absence d'objection a été indiquée. Je rends à présent la décision de la
15 Chambre.
16 En application de l'Article 22 du Statut et de l'Article 75(A) du Règlement
17 de procédure et de preuve, la présente Chambre peut ordonner les mesures
18 appropriées à assurer la protection des témoins pour que ces mesures
19 correspondent au droit de l'accusé; et aux fins d'ordonner de telles
20 mesures de protection, la Chambre doit être convaincue de cela sur la base
21 des renseignements fournis par l'Accusation, à savoir que les circonstances
22 justifient l'absence de publicité des débats.
23 S'agissant du témoin 188, (expurgé)
24 (expurgé). Les
25 raisons avancées par l'Accusation sont suffisantes pour qu'il soit fait
Page 3432
1 droit à la requête de l'Accusation qui a demandé la protection de
2 l'identité et de tous les éléments personnels afférant au témoin afin qu'il
3 ne soit pas connu du public et l'autorisation que le témoin dépose avec
4 déformation des traits de visage à l'écran et déformation de la voix.(expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 S'agissant du témoin 144, la Chambre s'est également convaincu que les
10 mesures de protection devaient être accordées sur la base des
11 renseignements émanant de l'Accusation. Ces mesures de protection
12 consistent en une protection de l'identité et de tous les éléments
13 personnels afférant au témoin qui ne seront pas révélés au public et en
14 l'autorisation fournie au témoin de témoigner avec déformation des traits
15 de visage à l'écran et déformation de la voix. Quant à la protection de son
16 identité, il se fera par pseudonyme. Je n'ai pas dit cela d'ailleurs
17 lorsque j'ai parlé du témoin 188, mais bien sûr la même chose s'appliquera
18 à lui.
19 Enfin, le témoin 565. Là encore la Chambre s'est convaincue que les raisons
20 avancées par l'Accusation justifient l'octroi de mesures de protection. Par
21 conséquent, puisque l'Accusation a demandé que l'on s'adresse au témoin
22 lors de toute audience publique et dans toutes les écritures par le biais
23 d'un pseudonyme, à savoir, témoin 565, la chose sera faite, et son identité
24 ainsi que tous les renseignements personnels afférant à ce témoin ne seront
25 pas révélés au public. Le témoin sera autorisé à témoigner avec déformation
Page 3433
1 des traits de visage à l'écran et déformation de la voix. Ces requêtes sont
2 satisfaites et la Greffière est invitée à présent à transmettre la teneur
3 de cette décision à l'Unité chargée des Victimes et des Témoins.
4 S'il n'y a rien d'autre à discuter dans l'immédiat, je m'apprête à lever
5 l'audience. Je n'en suis pas sûr.
6 M. STEWART : [interprétation] Simplement pour vous dire, Monsieur le
7 Président, que nous avons déposé une requête. Je vous le dis parce que ceci
8 a un rapport d'une certaine façon avec le problème de huis clos. Nous avons
9 déposé une requête qui est très courte. Vous la recevrez, Messieurs les
10 Juges, sans aucun doute par les voies habituelles très rapidement.
11 J'ajouterais que tout ce que j'ai dit ce matin doit être mis en rapport
12 avec le contenu de cette requête que nous venons de déposer.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je suppose qu'il s'agit d'une
14 requête confidentielle.
15 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cela est indiqué
16 sur le texte. Excusez-moi, je n'avais pas allumé mon micro. Oui, Monsieur
17 le Président, cette requête comporte la mention confidentielle.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois comprendre que le fait que vous
19 n'aviez pas allumé votre micro soulignait d'ailleurs l'aspect confidentiel
20 de cette requête.
21 Nous suspendons l'audience jusqu'à demain, 9 heures du matin.
22 Madame la Greffière, est-ce dans le même prétoire ? Oui, dans le même
23 prétoire.
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5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous recevrez toutes les informations
6 émanant de l'audience de ce matin.
7 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dès que nous recevrons des informations,
9 et je suppose que nous en recevrons, je donnerais l'ordre d'en informer les
10 parties.
11 Enfin - et là je vous remercierais d'avoir ajouter quelques mots, Maître
12 Stewart, car j'avais également quelque chose à ajouter - la Chambre se
13 penchera également sur l'état actuel des négociations et sur la question de
14 savoir s'il convient de poursuivre les communications. Ce serait peut-être
15 le mot le plus exact, entre les parties. Le cas échéant, les deux parties
16 devraient être disponibles demain après-midi - j'ai bien dit en cas de
17 nécessiter, le cas échéant car nous n'avons pas encore rendu notre décision
18 sur ce point - éventuellement pour une rencontre avec le président dans
19 l'après-midi de demain. N'organisez donc aucun voyage avant 16 heures.
20 Restez à la disposition de la Chambre.
21 Nous suspendons l'audience jusqu'à demain matin 9 heures. J'ai encore un
22 document à signer, suspension jusqu'à 9 heures.
23 --- L'audience est levée à 13 heures 32 et reprendra le vendredi 4 juin
24 2004, à 9 heures.
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