Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 6 septembre 2004

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Madame la

  6   Greffière d'audience, veuillez appeler l'affaire, je vous prie.

  7   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Il s'agit de l'affaire IT-00-39-T, le

  8   Procureur contre Momcilo Krajisnik.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

 10   Monsieur Harmon, vous représentez le bureau du Procureur ce matin. Etes-

 11   vous prêt à appeler votre témoin suivant ?

 12   M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je le suis.

 13   Bonjour.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois comprendre qu'il s'agit de M.

 15   Biscevic.

 16   M. HARMON : [interprétation] En effet.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre de première instance aurait

 18   fort apprécié de recevoir la déclaration de juin 2002 vendredi dernier, non

 19   pas ce matin.

 20   M. HARMON : [interprétation] Vous parlez de la déclaration du juin 2002, de

 21   la déclaration en langue bosniaque ?

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je fais référence à la déclaration

 23   du bureau du Procureur du 13 décembre 1995. Cette déclaration de 1995 a été

 24   donnée à la Chambre vendredi dernier. Il s'agit d'une autre déclaration,

 25   mais non pas celle de juin 2002. Je crois comprendre qu'il s'agit d'une


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  1   erreur, et c'est pour cela que je voulais savoir ce qu'il en était.

  2   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais évoquer

  3   quelque chose avant que le témoin n'entre dans le prétoire.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  5   M. STEWART : [interprétation] Nous avons reçu, samedi dernier, un document

  6   liminaire supplémentaire. Il s'agissait, en fait, d'un courriel qui

  7   contenait des renseignements supplémentaires. En fait, nous l'avons reçu

  8   dans un format qui était beaucoup plus formel. Je ne me plains absolument

  9   pas si ce n'est que cela contient quelques ajouts. Toutefois, ce qui m'a

 10   été envoyé samedi soir contient des éléments qui sont tout à fait

 11   différents et des éléments de fond, qui sont tout à fait différents et qui

 12   portent sur ce témoin, et qui sont tout à fait différents par rapport à ce

 13   que nous avions compris. Cela est tout à fait vrai lorsque l'on prend

 14   connaissance de la déclaration au titre de l'Article 65 ter. Cela, en fait,

 15   va au-delà et transcende les trois déclarations qui ont été faites par ce

 16   témoin au préalable, notamment, si vous prenez la déclaration qui porte la

 17   signature du 29 juillet 1999.

 18   Vous avez ces documents, Messieurs les Juges, il ne s'agit d'aucune

 19   dissimulation. Je pense qu'il est extrêmement important que le témoin

 20   n'entende pas cette discussion. J'ai un certain nombre de versions de la

 21   déclaration, qui a été signée le 29 juillet 1999. Je les ai moi-même

 22   numérotées. Mais il faut savoir que la note, qui se trouve en bas de la

 23   troisième page dans cette déclaration -- dans la version anglaise de cette

 24   déclaration, c'est le paragraphe qui commence par : "Vrkes et Savanovic

 25   étaient les dirigeants du SDS, qui venaient à cette réunion." Monsieur le


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  1   Président, vous voyez ce paragraphe ?

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Ils ont

  3   indiqué : "Qu'ils n'ont jamais reçu l'ordre de supérieurs."

  4   M. STEWART : [interprétation] Oui, vous voyez ce paragraphe. Le

  5   premier paragraphe qui se trouve dans la fiche d'information supplémentaire

  6   indique : "Que M. Biscevic a eu de nombreuses réunions et a négocié

  7   fréquemment avec les dirigeants du SDS de Sanski Most, fréquemment à propos

  8   de questions pour lesquelles une décision devait être prise. Rasula ou les

  9   autres négociateurs disaient qu'ils ne pouvaient pas prendre une décision,

 10   mais qu'il fallait qu'ils demandent cela à autrui. En fait, la réunion a

 11   été retardée. Ils prenaient la décision et il leur fallait un ou deux jours

 12   pour aller Sarajevo."

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je crois comprendre que

 14   c'est, en effet, l'une des parties essentielles de la déclaration.

 15   Il est tout à fait manifeste que ce genre d'éléments nouveaux et

 16   surprenants ne peuvent pas être acceptés facilement par la Défense  à cette

 17   phase. Je pense qu'une partie de l'explication est comme

 18   suit : étant donné que les ressources sont limitées et que nous avions

 19   demandé aux témoins de venir plus tôt, j'avais cru comprendre, d'après une

 20   remarque de M. Harmon la semaine dernière, que le témoin n'arriverait que

 21   samedi. Je suis entièrement d'accord avec vous et je pense que nous

 22   devrions avoir un peu plus de temps pour étudier la question. Je pense que

 23   nous pourrions commencer et, si cet élément de surprise est tel que vous ne

 24   serez pas en mesure de procéder au contre-interrogatoire complet du témoin,

 25   il est évident que nous vous octroierons un temps supplémentaire, et je


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  1   pense qu'il faudra, en effet, trouver une solution. Je suis d'accord avec

  2   vous, d'après ce que vous m'indiquez maintenant. Bien que je n'aie pas reçu

  3   ces fiches d'information supplémentaires, je suis d'accord qu'il s'agit

  4   d'un tournant radical à propos d'un élément qui est important.

  5   N'hésitez pas à demander à la Chambre une interruption pour que vous

  6   ayez la possibilité de procéder à un contre-interrogatoire à propos de cet

  7   élément.

  8   M. STEWART : [interprétation] Je vous suis reconnaissant, Monsieur le

  9   Président. Compte tenu de votre observation, je n'ai plus besoin d'ajouter

 10   quoi que ce soit pour le moment.

 11   M. HARMON : [interprétation] Pour que tout soit clair, Monsieur le

 12   Président, j'ai rencontré le témoin samedi, à la fin de la matinée. J'ai

 13   parlé de toutes les questions avec lui. J'ai informé le conseil, dès ma

 14   discussion avec Biscevic. Je lui ai envoyé un courriel et, hier, je lui ai

 15   envoyé un mémoire supplémentaire. Voilà quel est l'essentiel de la

 16   situation. Nous n'avons pas d'objection à ce qu'un temps supplémentaire

 17   soit octroyé pour procéder au contre-interrogatoire du témoin. Nous sommes

 18   tout à fait disposés à commencer l'interrogatoire.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu, il y avait également

 20   cette période de weekend. Si le témoin était arrivé deux jours avant

 21   audition, nous nous serions rendus compte de ces différences le premier

 22   jour, mais il est évident que, pendant le weekend, il est beaucoup plus

 23   difficile. Mais il est évident que, si ce genre d'éléments nouveaux

 24   survenait, la Défense pourrait demander à obtenir une solution pour essayer

 25   de régler le problème.


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  1   Monsieur l'Huissier, je vous prie de bien vouloir escorter le témoin

  2   dans le prétoire.

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour. M'entendez-vous dans une

  5   langue que vous comprenez ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je vous entends et vous comprends.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Biscevic, avant que vous ne

  8   commenciez votre déposition au sein de cette Chambre de première instance,

  9   le Règlement de procédure stipule que vous devez prononcer une déclaration

 10   solennelle afin d'indiquer que vous direz la vérité, toute la vérité et

 11   rien que la vérité. Ce texte va vous être donné par M. l'Huissier, et je

 12   vous invite maintenant à prononcer cette déclaration solennelle.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 14   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 15   LE TÉMOIN : FAIK BISCEVIC [Assermenté]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Biscevic.

 18   Veuillez vous asseoir, je vous prie.

 19   Dans un premier temps, M. Harmon, pour l'Accusation, va procéder à votre

 20   interrogatoire.

 21   M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Interrogatoire principal par M. Harmon:

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Biscevic.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  Je commencerai par vous poser quelques questions à votre sujet,


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  1   et je vais résumer quelques éléments biographiques qui vous concernent et

  2   vous demanderai de vous indiquer si cela est exact. Monsieur Biscevic, vous

  3   êtes né le 9 juin 1940, dans la municipalité de Prijedor ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Vous avez vécu le plus clair de votre vie dans la municipalité de

  6   Sanski Most ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Vous êtes Bosnien ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous êtes marié ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Les membres de votre famille sont comme suit : votre épouse ainsi que

 13   vos trois fils ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous êtes dentiste et vous aviez en parallèle une bijouterie à Sanski

 16   Most; est-ce exact ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  J'aimerais dans un premier temps que nous abordions la question

 19   relative à la formation des partis politiques à Sanski Most avant la

 20   guerre. J'aimerais tout d'abord vous demander de nous décrire la

 21   composition ethnique de la municipalité de Sanski Most.

 22   R.  Dans la municipalité de Sanski Most, il y avait différents groupes

 23   ethniques. Les Musulmans qui représentaient la majorité, à savoir, 45 %, 42

 24   % de la population, était serbe et le reste était croate ou encore était

 25   composée de personnes qui n'avaient pas encore décidé quelle était leur


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  1   appartenance ethnique.

  2   Q.  Avant les élections multipartites qui ont eu lieu en Bosnie, il y a un

  3   certain nombre de partis politiques qui ont été créés et qui reprenaient en

  4   fait la division de l'appartenance ethnique. Il y avait le SDS, le SDA et

  5   le HDZ qui étaient les grands partis; est-ce bien exact ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Pourriez-vous me dire, au niveau de la République, qui étaient les

  8   dirigeants du SDS ?

  9   R.  Au niveau de la République, il y avait Krajisnik, Karadzic, Biljana

 10   Plavsic et Nikola Koljevic.

 11   Q.  Dans la municipalité de Sanski Most, est-ce que les partis politiques,

 12   tels que le SDS, le SDA et le HDZ, ont été formés ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pourriez-vous identifier, à l'intention de la Chambre de première

 15   instance, les dirigeants du Parti SDS à Sanski Most ?

 16   R.  Nedeljko Rasula était le président du Parti SDS, et nous avions ensuite

 17   Vrkes, qui a été le secrétaire du SDS et qui est devenu le président, puis

 18   il y avait Vujic -- Drago Vujanic, qui était l'adjoint, je pense que c'est

 19   ainsi qu'il s'appelait. Voilà les trois personnes qui, au départ, ont pris

 20   les décisions pour le SDS et la troisième personne s'appelait Drago

 21   Vujovic.

 22   Q.  Qui étaient les dirigeants du SDA à Sanski Most ?

 23   R.  Les dirigeants du SDS, dans un premier temps, moi-même j'étais le

 24   dirigeant, et il y avait Hivzo Hodzic, qui était président avant moi, et il

 25   y avait Karabeg. Cela c'était, en fait, la direction centrale. Ensuite, il


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  1   y a eu Rasema Cero. Voilà quelle était la situation au début. Ensuite, avec

  2   l'élargissement du parti, il y a d'autres personnes qui sont devenues

  3   membres de cet organe.

  4   Q.  Monsieur Biscevic, combien de temps êtes-vous resté président du SDA à

  5   Sanski Most ?

  6   R.  J'ai été président pendant quasiment un mandat.

  7   Q.  Quand est-ce que ce mandat s'est terminé ?

  8   R.  En 1991 ou en 1992.

  9   Q.  Lorsque vous n'avez plus été président du SDA, est-ce que vous êtes

 10   resté membre du SDA ?

 11   R.  Oui. Je faisais partie du conseil principal et je faisais partie de la

 12   direction centrale du parti.

 13   Q.  Qui étaient les dirigeants du Parti HDZ à Sanski Most ?

 14   R.  Les dirigeants étaient Ante Tunic, Skipa Andjelko, il y avait Ivan

 15   Filipovic. En fait, ils étaient respectivement président, vice-président et

 16   secrétaire.

 17   Q.  A la suite de la formation du SDS à Sanski Most, est-ce que Messieurs

 18   Krajisnik et Karadzic sont venus à la municipalité de Sanski Most ?

 19   R.  Lorsque le SDS a été fondé à Sanski Most, il y a un village, qui est

 20   composé de Serbes exclusivement et, en fait, c'est là que ce parti a été

 21   formé. Je suppose que pour pouvoir qu'il soit créé de la meilleure façon

 22   possible, la direction de Croatie et de Bosnie-Herzégovine et du Kosovo est

 23   venue. Ensuite, M. Karadzic a beaucoup parlé pendant que le parti a été

 24   créé et ils ont apporté leur contribution au parti.

 25   Q.  Est-ce que vous pourriez montrer au témoin la pièce à conviction P115.


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  1   Il s'agit d'une photographie que vous allez également pouvoir voir sur

  2   l'écran. M. Biscevic, êtes-vous en mesure d'identifier cette photographie

  3   et pourriez-vous indiquer à la Chambre où, d'après vous, a été prise cette

  4   photographie ?

  5   R.  C'est une photographie qui a été prise lors de la formation du SDS à

  6   Lusici Palanka.

  7   Q.  Dans quelle municipalité se trouve cela ?

  8   R.  Dans la municipalité de Sanski Most.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez identifier à partir de l'extrême gauche jusqu'à

 10   l'extrême droite, êtes-vous en mesure d'identifier la personne qui se

 11   trouve à l'extrême gauche de la photographie ?

 12   R.  Il s'agit de M. Karadzic, M. Rasula, M. Krajisnik et quelqu'un de

 13   Croatie, Raskovic. La cinquième personne, je dois vous dire que je ne sais

 14   pas de qui il s'agit. La femme est l'épouse de Krajisnik et la personne qui

 15   est debout est un officiel de la municipalité de Sanski Most.

 16   Q.  Pour que tout cela soit très clair, je ne pense pas que vous avez

 17   compris comment je souhaitais que vous identifiiez ces personnes. Je vais

 18   vous donner le nom des personnes depuis la gauche jusqu'à la droite de

 19   l'écran. Si vous nous dites, je ne connaissais personne ou je ne connais

 20   pas cette personne, nous passerons à la personne suivante. Nous allons

 21   commencer par l'extrême gauche de la photographie. Etes-vous en mesure

 22   d'identifier la personne ?

 23   R.  Je ne suis pas en mesure d'identifier la première personne.

 24   Q.  Pour ce qui est maintenant de la deuxième personne qui semble avoir une

 25   barbe et qui est assise à la table, est-ce que vous êtes en mesure


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  1   d'identifier cette personne ?

  2   R.  Oui. Il s'agit d'un représentant de la Croatie qui est venu pour

  3   apporter sa contribution à la formation du SDS à Sanski Most. Il s'agit de

  4   M. Raskovic.

  5   Q.  Nous allons passer à la personne suivante qui est debout et qui semble

  6   tenir une plaquette. Etes-vous en mesure d'identifier cette personne ?

  7   R.  Cet homme qui est debout est M. Krajisnik.

  8   Q.  Si nous continuons vers la droite et que nous passons à l'homme qui se

  9   trouve à côté de lui ?

 10   R.  La personne qui se trouve à côté de lui est M. Nedeljko Rasula.

 11   Q.  Il était le responsable du Parti SDS que vous avez identifié à Sanski

 12   Most, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. Il avait été proposé comme président du SDS et jusqu'à ce moment-

 14   là, il n'avait pas assumé cette fonction et représenté d'autres partis.

 15   C'est à cette occasion que l'on a proposé qu'il devienne président du

 16   parti.

 17   Q.  La femme qui est assise à la table, en fait, ses mains semblent être

 18   quasiment dans une position de prière, êtes-vous en mesure d'identifier

 19   cette personne ?

 20   R.  Il s'agit de la femme de M. Karadzic.

 21   Q.  Qu'en est-il de l'homme qui se trouve à côté de cette femme toujours en

 22   allant vers la droite ?

 23   R.  Il s'agit de M. Karadzic.

 24   Q.  La femme qui est debout. Etes-vous en mesure d'identifier la femme qui

 25   est debout près de M. Karadzic ?


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  1   R.  Il s'agissait d'un de nos officiels, en fait, d'un de nos

  2   fonctionnaires à la municipalité de Sanski Most.

  3   Q.  J'en ai terminé avec la pièce P115.

  4   Monsieur Biscevic, pour ce qui est des buts et objectifs des élections

  5   multipartites, la Chambre de première instance avait entendu que le Parti

  6   communiste avait présenté l'ensemble des candidats. Est-ce qu'il y avait un

  7   accord qui avait été conclu entre eux, le SDS, le HDZ, le SDA, pour vaincre

  8   les communistes, et est-ce que vous pourriez décrire de quel accord il

  9   s'agissait ?

 10   R.  Nous savons que le communisme avait le pouvoir depuis

 11   50 ans en Bosnie-Herzégovine. Il était absolument nécessaire de renverser

 12   le système d'une façon ou d'une autre. La méthode consistait en faire sorte

 13   que les partis nationalistes se rassemblent et forment une association.

 14   C'est justement ce qui s'est passé. Par exemple, personne à Sanski Most ne

 15   savait qui était M. Koljevic ou Mme Plavsic ou M. Karadzic. Nous ne savions

 16   pas qui était

 17   M. Krajisnik. Nous ne savions pas qui était Karadzic, et nous ne savions

 18   qui était M. Ljubo Ganic. Lorsque les listes de candidatures sont arrivées,

 19   une proposition a été émise par le parti indiquant que nous devrions

 20   choisir parmi les différents partis. Ces candidats ont obtenu en grande

 21   partie une majorité au sein de la municipalité et ont pu ainsi assumer le

 22   pouvoir. C'était la recommandation qui venait et qui émanait des instances

 23   supérieures. Nous nous sommes contentés de l'exécuter.

 24   Q.  Lorsque vous parlez d'accord qui venait des instances supérieures et

 25   d'une liste, de quelle liste s'agissait-il, vous, membre du SDA ? Quelle


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  1   liste avez-vous reçue et quelles étaient les instructions qui

  2   accompagnaient cette liste ?

  3   R.  Tous les partis l'ont reçue, non pas seulement nous. Il s'agissait

  4   d'une liste exhaustive de tous les partis. Il était dit, par exemple, qu'au

  5   nom du SDS, telle et telle personne devrait être présentée. Il y avait, par

  6   exemple, d'autres pour le HDZ. Il était dit : "Ne choisissez plus personne

  7   de la liste communiste." La procédure était très, très claire, et c'est

  8   ainsi que nous avons obtenu une majorité des votes.

  9   Q.  Essentiellement, vous avez reçu des instructions, de la part de SDA au

 10   niveau national, qui vous ont indiqué pour qui voter; est-ce exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Est-ce que cela incluait le vote pour les membres du SDS ou du HDZ ?

 13   R.  Oui, pour tous les partis.

 14   Q.  Est-ce que vous avez voté vous-même à cette occasion ?

 15   R.  Oui, j'ai voté.

 16   Q.  Avez-vous reçu des instructions pour voter pour M. Krajisnik entre

 17   autre ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Avez-vous voté en ce sens ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Quels furent les résultats des élections multipartites ? Pourriez-vous

 22   nous expliquer comment ces résultats ont été mis en application dans la

 23   municipalité de Sanski Most ?

 24   R.  Les résultats ont été très bons, très favorables. La Ligue des

 25   communistes n'a pratiquement obtenu aucun vote, quasiment aucun vote. Les


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  1   trois partis nationalistes ont obtenu les voix. Une fois que ces voix ont

  2   été obtenues, le pouvoir au sein de la municipalité a été divisé en

  3   fonction du nombre de voix qui avait été obtenu par les partis individuels.

  4   Etant donné qu'à Sanski Most, la population était multiethnique puisqu'il y

  5   avait 40 % de Musulmans et 42 % de Serbes, le SDS a obtenu la majorité à

  6   Sanski Most et nous le savions, nous ne pouvions rien faire. Il faut savoir

  7   qu'il y avait eu des fraudes puisqu'ils étaient beaucoup plus instruits que

  8   nous. Ils savaient l'importance à obtenir plus de votes, parce que cela

  9   signifie que vous aviez le pouvoir absolu au sein de la municipalité, et

 10   que vous pouviez faire ce que bon vous semblait.

 11   Etant donné que le SDS a obtenu le plus grand nombre de voix, M.

 12   Nedeljko Rasula, qui était d'ailleurs le président du SDS, a demandé alors

 13   d'être nommé maire. Nous avons marqué notre accord. La fonction de

 14   président du parti a ainsi été donnée à Vrkes. Il faut également savoir que

 15   ce fut la première division de pouvoir qui a été faite, et les postes ont

 16   été octroyés en fonction du nombre de voix. Il a fallu nommer les gens à

 17   différents organes. A l'époque, le SDS était l'organe le plus important. Il

 18   voulait avoir le poste de chef du MUP et le poste de chef de la section

 19   militaire. Il y avait s'agissait des deux postes qui étaient les plus

 20   importants au sein de la municipalité. Ils ont dit qu'il fallait qu'on leur

 21   octroie ces postes. Ils ont fini par les obtenir d'ailleurs.

 22   Q.  A la suite des premiers résultats électoraux, comment

 23   est-ce que vous décririez la relation entre les partis du SDS, du HDZ et du

 24   SDA à Sanski Most ?

 25   R.  Au début, les relations étaient tout à fait cordiales. Il y a eu cette


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  1   euphorie de la victoire sur les communistes. Le maire et la personne qui

  2   était le président du SDS, puis il y a un autre poste qui a été donné au

  3   SDA, puis un autre poste qui a été donné au HDZ. Très vite, les premiers

  4   conflits sont apparus parce que le SDS présentait de plus en plus de

  5   requêtes. Il voulait toujours recevoir ce qui ne leur appartenait pas par

  6   droit, donc il y a eu une certaine discorde politique entre ces trois

  7   partis.

  8   Q.  Lorsque cette discorde est apparue, lorsque ces différences sont

  9   apparues, comment ont-elles été réglées ? Quelles furent les méthodes

 10   utilisées pour essayer de trouver une solution à ces différences qui

 11   étaient apparues ?

 12   R.  J'étais président du SDA. Suad Sabic était représentant ou président

 13   des parlementaires, et M. Karabeg était président du conseil exécutif. Au

 14   sein du SDA, nous avons pris des décisions tout à fait régulières qui n'ont

 15   pas été contestées. Il y a toujours eu des problèmes dans le rapport avec

 16   le SDS. Chaque fois qu'il y avait un conflit, il nous était impossible de

 17   nous entendre sur la position adoptée. Ce qu'il faisait alors au SDS, c'est

 18   dire qu'il était impossible pour eux de dire oui avant de consulter les

 19   membres du parti. Au début, ceci ne nous a pas posé de problèmes car nous

 20   avons pensé que c'était tout à fait normal. On s'est demandé qui ils

 21   devaient consulter, mais nous n'avons jamais appris quelles étaient les

 22   personnes que ces hommes voulaient consulter. Ce qui est vrai, c'est qu'à

 23   la réunion suivante, ces personnes étaient présentes et avaient des

 24   décisions disant qu'il était possible de parvenir à un accord sur telle ou

 25   telle position.


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  1   Q.  Au cours de cette période, lorsqu'il y a eu ces négociations, lorsque

  2   ces différences sont apparues entre, d'un côté le SDS et de l'autre le HDZ

  3   et le SDA, je suppose, que vous, vous négociez avec le chef du SDS à Sanski

  4   Most, M. Rasula, et avec toutes les personnes qui occupaient des postes de

  5   pouvoir au sein du SDS.

  6   R.  C'est exact. Il avait pour avantage, le fait qu'outre son poste de

  7   président du SDS, il était maire. Ses décisions étaient respectées et

  8   appliquées, dans le sens que lui désirait puisqu'il était maire. C'est lui

  9   qui avait la responsabilité de la politique menée dans la municipalité et

 10   pas seulement de la politique menée par le SDS.

 11   Q.  Lorsqu'il y avait des désaccords sur des questions importantes,

 12   lorsqu'il fallait venir à un compromis avec le SDA, savez-vous si M. Rasula

 13   est parti de Sanski Most pour se rendre ailleurs ?

 14   R.  M. Rasula était maire et n'était pas obligé de justifier ce qu'il

 15   faisait. Il n'avait à dire à personne où il allait. Effectivement, toutes

 16   les semaines, il allait quelque part sans nous dire où. C'était ce qui

 17   s'est passé. De façon courante, il partait pour des déplacements

 18   d'affaires. Il avait un chauffeur. Il avait sa propre voiture de fonction.

 19   Il pouvait aller où il voulait. Il ne devait pas nous donner

 20   d'explications.

 21   Q.  Savez-vous s'il est allé à Sarajevo, à Banja Luka ou ailleurs de Sanski

 22   Most ?

 23   R.  Oui, la plupart du temps, il allait à Sarajevo et à Banja Luka, parce

 24   que c'est là que se trouvaient les niveaux supérieurs des autorités

 25   gouvernementales.


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  1   Q.  M. Rasula, n'a-t-il jamais dit qu'il avait reçu des ordres de ses

  2   supérieurs ? Je suppose que ce n'est pas le cas. Est-ce que vous et

  3   d'autres membres du SDA, vous avez tenté de savoir qui consultait M.

  4   Rasula ? Lorsque vous avez fait cette tentative, comment M. Rasula a-t-il

  5   réagi ?

  6   R.  Nous n'avons jamais eu de doute. Nous nous sommes dits qu'il allait

  7   voir les niveaux supérieurs de pouvoir. Lorsqu'il

  8   disait : "Il est impossible de prendre une décision sans avoir l'avis de

  9   quelqu'un plus haut que moi," nous savions que c'était quelqu'un de son

 10   parti qu'il allait voir. Finalement, nous avons appris que ce n'était pas

 11   le cas et qu'il allait voir quelqu'un.

 12   Q.  Avez-vous pu finir par apprendre qui il allait voir ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  A un moment donné, vous avez parlé des rapports qui existaient entre

 15   les différents partis politiques; le HDZ, le SDS, le SDA. Au départ, ces

 16   rapports étaient tout à fait cordiaux, puis la situation a évolué, a

 17   changé. Vous avez dit que le SDS formulait de plus en plus d'exigences.

 18   Est-ce que vous vous souvenez d'une conversation que vous avez eue avec le

 19   secrétaire de M. Rasula, conversation au cours de laquelle elle vous a

 20   exprimé de façon directe certains commentaires ?

 21   R.  La situation est devenue plus tendue. Un jour, il y avait entre autre

 22   point à l'ordre du jour, un point qui disait que Sanski Most devrait être

 23   intégré dans la région de la Krajina occidentale dont le centre se trouvait

 24   à Banja Luka. Nous avons réagi, de façon rigoureuse, en refusant de nous

 25   voir intégrer à cette région car la plupart des municipalités faisaient


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  1   déjà partie de la région de Banja Luka. Nous, nous savions que le centre de

  2   toutes ces idées serbes se trouvait à Banja Luka. Nous étions censés

  3   parvenir à un consensus entre les différents partis. Nous sommes passés à

  4   une autre pièce pour essayer de parvenir à un tel accord. Lorsque nous

  5   avons commencé à discuter du sujet, nous voulions que Bihac soit le centre.

  6   Le SDS a proposé comme centre, Banja Luka. M. Lukic, qui est diplômé en

  7   économie, le secrétaire de M. Rasula, il était secrétaire du comité

  8   principal du parti. Il était aussi parlementaire à l'assemblée municipale.

  9   Il m'a dit ceci : "Faik, on ne veut pas vivre avec les balija dans l'Etat

 10   d'Alija. Nous allons tous mourir, mais pas toi." J'étais tout à fait

 11   étonné, abasourdi. Je savais que c'était un intellectuel, je ne savais pas

 12   ce qui voulait dire : "Qu'est-ce qui s'est passé ? Qu'est-ce qui pourrait

 13   arriver dans une tel Etat ?" Il n'a pas répondu. Il s'est contenté de dire,

 14   "Nous allons tous mourir si nous continuons de vivre dans l'Etat des balija

 15   et d'Alija.

 16   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire si le terme de "balija" est un terme

 17   péjoratif ?

 18   R.  Oui, c'est un terme tout à fait péjoratif pour désigner les Musulmans

 19   de Bosnie.

 20   Q.  Parlons, si vous le voulez bien, de la guerre en Croatie. Elle était en

 21   cours. Les Juges de la Chambre ont entendu parler de ces événements.

 22   Pouvez-vous nous dire les faits qu'a eus la guerre en Croatie sur Sanski

 23   Most pour ce qui est de la stabilité qui pouvait y régner ?

 24   R.  Sanski Most se trouve dans la partie occidentale de la Bosnie tout près

 25   de la frontière avec la Croatie. Evidemment, les événements de Croatie ont


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  1   eu une incidence certaine sur Sanski Most, puisqu'il y avait la guerre en

  2   Croatie. Nous le savions, nous l'avons ressenti. Il y a eu des volontaires

  3   du SDS qui ont voulu rejoindre les rangs de la JNA pour lutter dans cette

  4   guerre. Ils passaient une quinzaine de jours sur le front. Au retour, ils

  5   buvaient. Ils étaient ivres, ils étaient barbus, ils avaient les cheveux

  6   longs, ils portaient cette cocarde à la tête. Ils avaient tous des

  7   Kalachnikovs. En général, quand ils revenaient, ils tiraient en l'air pour

  8   manifester leur joie. Ils buvaient. Il y avait des provocations. Pour nous,

  9   ce n'était pas agréable du tout. C'est moins qu'on puisse dire. La

 10   population de la municipalité de Sanski Most a été priée de rejoindre les

 11   rangs de la JNA. Nous, lorsque nous avons vu ce qui se passait, nous avons

 12   dit aux Musulmans et au HDZ que nous n'allions pas répondre à cet appel, à

 13   la mobilisation qui consistait à aller faire la guerre en Croatie, que si

 14   on en allait être mobilisé dans la municipalité de Sanski Most, nous le

 15   ferions, mais si ce n'était pas le cas, nous n'accepterions d'aller nulle

 16   part.

 17   Ensuite, ce qui s'est passé, c'est que la JNA, lorsqu'elle s'est

 18   rendue compte que les gens ne répondaient pas à la mobilisation a dit ceci

 19   : "Ceux qui refusent l'appel doivent remettre leur uniforme, leurs armes,

 20   et ces hommes seront rayés de la liste de mobilisation." Nous avons dit :

 21   "D'accord." Ceci a donné l'occasion aux Serbes en âge de combattre d'être

 22   mobilisés dans la JNA.

 23   Voici comment cela se passait. Lorsque ces hommes revenaient de la

 24   ligne de front, ils ont gagné en audace. Ils buvaient. Ils tiraient en

 25   l'air comme d'habitude. Ils se livraient aux mêmes provocations, mais en


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  1   plus, à Sanski Most, pendant la nuit, des commerces qui appartenaient aux

  2   Croates et aux Musulmans ont été plastiqués. Cela a été le cas d'une

  3   vingtaine de commerces. On n'a jamais découvert les auteurs de ces méfaits.

  4   Je vous ai dit que le chef du MUP, c'était un membre du SDS, et la section

  5   militaire avait à sa tête également un membre du SDS. Nous avons demandé à

  6   ces hommes d'organiser des patrouilles communes, conjointes pendant la nuit

  7   pour voir qui était l'auteur de ces faits. Ces hommes nous ont dit : "Ne

  8   vous mêlez pas de nos affaires. Nous savons ce que nous faisons. Dès que

  9   nous avons découvert les auteurs, nous vous dirons qui ils sont."

 10   Parallèlement, lorsque les Musulmans et les Croates ont refusé de se

 11   laisser mobiliser, un ordre est venu du commandement de Belgrade ou de

 12   Banja Luka disant qu'il fallait trouver toutes les armes de la Défense

 13   territoriale qui se trouvaient dans des locaux ou d'entreprises ou de

 14   communautés locales afin qu'elles soient remises à la section militaire

 15   plutôt que de rester entre les mains des citoyens. Il y avait des gardes

 16   qui surveillaient plusieurs locaux commerciaux et ces hommes ont été

 17   désarmés également. On a désarmé de toutes les façons possibles la

 18   population.

 19   Q.  Je suppose qu'on a pratiquement rien fait si j'ai bien compris ce que

 20   vous nous avez dit, qu'on a rien fait pour essayer de calmer ou de

 21   contrôler ces soldats qui revenaient du front de Croatie. Vous avez dit de

 22   ces soldats qu'ils "déstabilisaient" la situation dans votre municipalité.

 23   C'est bien cela ?

 24   R.  Vous avez tout à fait raison. A leur retour, ces hommes avaient les

 25   pleins pouvoirs car ils avaient l'uniforme de la JNA et ils avaient des


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  1   espèces des bandeaux, des brassards blancs, noirs ou rouges. Les civils ne

  2   pouvaient rien dire car ces soldats pouvaient tirer sur eux sans excuses,

  3   sans prétextes et ce sont ces hommes qui ont semé l'instabilité en ville.

  4   Q.  Est-ce qu'en avril vous avez vu arriver une unité de la JNA à Sanski

  5   Most ?

  6   R.  Sarajevo nous a fait savoir qu'un convoi important de la JNA traversait

  7   la Bosnie. Ce qui est intéressant de noter c'est que ce convoi, il est

  8   parti de Jasenovac. Tout fut éteint pendant la nuit. Les véhicules ont

  9   parcouru une région peu habitée où il y avait moins de Musulmans mais nous

 10   savions que ce convoi se déplaçait. Nous les avons suivi à partir de

 11   Bosanska Dubica. Nous avons suivi les mouvements de ce convoi. Ils sont

 12   partis le soir et ils sont arrivés sur le territoire de Sanski Most, à

 13   Lusici Palanka plus exactement. Un jour ou deux plus tard, je pense, M.

 14   Rasula nous a invités, moi et les autres dirigeants du SDA, et il nous a

 15   dit qu'il y avait des représentants de la JNA qui venaient à cette réunion,

 16   une réunion qui s'est tenue pendant la journée. M. Basara est venu. Le

 17   commandant Zeljaja est venu de Prijedor. Le capitaine Dragan, lui est venu

 18   de Banja Luka et on nous a dit que ces hommes étaient arrivés sur le

 19   territoire de Sanski Most. Apparemment, nous a-t-on dit, on voulait donner

 20   l'occasion aux hommes de se reposer, après toute une période sur la ligne

 21   de front pour réparer et nettoyer leurs armes. Et on nous a dit aussi que

 22   ceci n'avait rien à voir avec ce qui se passait à Sanski Most.

 23   D'après lui, ces hommes ne faisaient qu'exécuter des ordres --

 24   Q.  Monsieur Biscevic, je vais vous poser une question. Vous dites qu'ils

 25   sont arrivés dans le village de Lusici Palanka. Est-ce que c'est un village


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  1   serbe ?

  2   R.  Oui, à 100 %.

  3   Q.  Est-ce qu'ils ont établi leur base ? Est-ce qu'ils ont établi un QG

  4   dans ce village ?

  5   R.  Cela on ne l'a pas appris. Tout ce qu'on a appris, c'est que les

  6   troupes étaient déployées et qu'il y avait, sur les hauteurs autour de

  7   Sanski Most, des postes d'observation dans les villages où il y avait une

  8   population majoritairement serbe. C'est là que toutes les armes ont été

  9   déployées. Il est intéressant de relever que plus tard, au moment de nos

 10   réunions, M. Basara était toujours présent en qualité de représentant du

 11   gouvernement. S'il y avait un conflit, un désaccord à cette réunion, il

 12   nous disait : "C'est nous qui garantissons la paix. Nous nous ne menons pas

 13   de politique mais nous allons empêcher qu'éclate le moindre conflit car

 14   nous sommes ici pour défendre les intérêts de tous les groupes ethniques à

 15   Sanski Most." Voici ce qu'il avait coutume de nous dire.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Biscevic, la dernière question

 17   posée consistait à savoir si dans ce village il y avait un quartier général

 18   qui avait été établi. Au début de votre réponse, vous avez commencé à

 19   parler de cela et puis vous avez parlé de ce que faisait M. Basara, des

 20   attitudes qu'il a adoptées, de sa présente aux réunions. Vous savez que

 21   nous sommes ici pressés par le temps. Cela n'était pas le sens de la

 22   question. Je vous demande d'écouter ce qu'on vous demande. M. Harmon, en

 23   vous posant la question, vous demandait s'il y avait un quartier général.

 24   S'il veut vous parler de M. Basara, il vous posera une question dans ce

 25   sens. Ecoutez les questions et essayez d'y répondre. Merci.


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  1   M. HARMON : [interprétation]

  2   Q.  Les Juges de la Chambre voudraient entendre des éléments de preuve

  3   relative à l'arrivée de la JNA et à la nature des effectifs de la JNA à

  4   Sanski Most, mais vous avez parlé de M. Basara. A votre connaissance quel

  5   était son grade ? Quelle était sa fonction dans la JNA lorsque cette unité

  6   de la JNA est arrivée à Sanski Most ?

  7   R.  Il était commandant.

  8   Q.  Est-ce qu'il y avait des officiers qui étaient subordonnés aux ordres

  9   de M. Basara et qui eux, étaient originaires de Sanski Most, si c'est le

 10   cas, qui étaient-ils ?

 11   R.  Il y avait M. Vukic, capitaine de Tuzla. Nous l'avons rencontré

 12   lorsqu'il y a eu une attaque sur Sanski Most. Il y avait des réservistes,

 13   des habitants de Sanski Most qui avaient des grades, des grades qu'ils ont

 14   conservés lorsqu'ils ont été mobilisés. Ce sont les grades qu'ils

 15   occupaient lorsqu'ils ont rejoint l'armée.

 16   Q.  Avant l'intervention de M. le Président Orie, vous avez dit que les

 17   représentants de l'armée, notamment, M. Basara, avaient dit que l'armée

 18   était sur les lieux pour protéger les intérêts de tous les groupes

 19   ethniques, est-ce que c'était là la position adoptée publiquement par la

 20   JNA, face à l'opinion publique ?

 21   R.  Je pense que oui.

 22   Q.  A votre avis, est-ce qu'en fait il y avait un autre programme qui était

 23   poursuivi par les membres de la JNA, et si c'est le cas, quel était ce

 24   programme ?

 25   R.  Le temps allait montrer qu'en fait ils poursuivaient des objectifs tout


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  1   à fait différents. C'est devenu clair comme le jour. Ils avaient pour

  2   intention d'occuper de façon militaire cette région de la Bosnie

  3   occidentale.

  4   Q.  Dans les prochaines questions que je vais vous poser, je vais

  5   m'intéresser au rôle de la JNA et au rôle qu'a joué le SDS pour armer les

  6   citoyens serbes de Sanski Most. Quels furent les rôles joués respectivement

  7   d'après vous et pouvez-vous nous dire ce que vous, personnellement vous

  8   avez vu, s'agissant de la façon dont les citoyens serbes de Sanski Most ont

  9   été armés ?

 10   R.  Ils ont cessé de se cacher. Il y avait des hélicoptères qui arrivaient

 11   tous les jours, que ce soit dans les communautés locales ou sur les

 12   terrains de jeux, à Sanski Most, c'est ce que le MUP faisait. Ils ont

 13   emménagé un bus. En fait, ils ont remplacé les fenêtres par des plaques de

 14   métal et ce véhicule a été utilisé pour distribuer aux Serbes des armes

 15   dans les villages serbes. Cela s'est passé chaque jour.

 16   Q.  Est-ce que vous, vous avez vu des hélicoptères atterrir dans des

 17   villages serbes ? Vous avez vu ce bus ?

 18   R.  J'ai vu des hélicoptères, mais personne n'a osé s'approcher. J'ai vu

 19   Mico Krunic, c'était un policier à la retraite qui avait la responsabilité

 20   de ce bus. J'ai vu ce bus se déplacer tous les jours.

 21   Q.  Qu'est-ce qu'il y avait dans ce bus ?

 22   R.  Des armes.

 23   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges ce qui s'est passé à une réunion qui s'est

 24   passée à Kruhar, un village ? Dites-nous d'abord quel était le groupe

 25   majoritaire dans la population de Kruhar, et dites-nous aussi ce qui s'est


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  1   passé dans ce village, notamment en ce qui concerne la remise d'armes.

  2   R.  Ce village de Kruhar est un village serbe. Il s'y est tenu une réunion.

  3   Mais il y avait aussi trois maisons de Croates. Les citoyens croates sont

  4   allés à cette réunion lorsqu'elle a été convoquée, sans savoir ce dont on

  5   allait parler. M. Rasula est venu et il a dit, aux habitants de cette

  6   communauté locale, ceci : "Je suis à même de vous donner des armes en

  7   l'espace de deux heures, armes avec lesquelles vous pourrez faire la guerre

  8   pendant cinq ans." Ce citoyen croate était abasourdi. Il ne savait pas ce

  9   qui se passait. Mais dès que la réunion s'est terminée, ce citoyen est venu

 10   nous dire ce qu'avait dit M. Rasula.

 11   Q.  Je vais vous donner lecture d'une citation.

 12   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 13   c'est une citation qui vient la pièce de l'Accusation 65,  intercalaire

 14   221. C'est ce que le général Milan Gvero dit à la 34e séance de l'assemblée

 15   des Serbes de Bosnie, le 29 septembre 1993. Il fait un discours à

 16   l'assemblée des Serbes de Bosnie, et voici ce qu'il dit, je le cite : "Le

 17   SDS et les organes de l'Etat établi ont été les principaux contributeurs à

 18   l'armement en armes légères des Serbes, ce qui a, grâce à l'appui et à la

 19   collaboration de beaucoup de Serbes, des officiers commandants dans la JNA

 20   sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, dans les Départements des Services

 21   militaires et avec l'aide de d'autres institutions politiques en Serbie. Je

 22   pense à la République fédérale de la Yougoslavie."

 23   Q.  Est-ce que cette citation, que je vous ai donnée de M. Gvero,

 24   cadre bien avec ce que vous avez vu en matière d'armement de la population

 25   dans votre municipalité à Sanski Most ?


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  1   R.  Oui, oui, c'est tout à fait concordant.

  2   Q.  Pendant que la JNA armait les Serbes et qu'il y avait coordination avec

  3   le SDS, est-ce que les Musulmans et les Croates ont exigé des armes, eux

  4   aussi, en ont demandé à la JNA ?

  5   R.  Mais non, mais non.

  6   Q.  Est-ce que la JNA leur a donné des armes ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Parlons d'un autre sujet. C'est la prise de contrôle du MUP et de la

  9   Défense territoriale. Pourriez-vous dire aux Juges ce qui s'est passé,

 10   s'agissant de la prise de contrôle dans ces organes particuliers ?

 11   Pourriez-vous décrire ce qui s'est passé, à l'intention des Juges.

 12   R.  M. Rasula, Nedeljko Rasula, est venu devant le MUP. Il avait des

 13   effectifs avec lui, armés de Kalachnikovs. Il a dit : "A partir de

 14   maintenant, c'est le MUP serbe, le MUP de l'Etat serbe de la Krajina

 15   occidentale. Tous les Croates, tous les Musulmans qui sont prêts à signer

 16   cet acte d'allégeance signeront ou ils partiront." Un seul Croate l'a fait.

 17   Les autres ont refusé, et ils ont dû quitter le bâtiment. Ils en ont été

 18   chassés.

 19   Q.  Cette prise de contrôle du poste de police, qu'est-ce que cela a eu

 20   comme effet sur la municipalité ?

 21   R.  Il y a eu d'autres réunions politiques plus tard, et nous avons dit que

 22   s'ils prenaient le contrôle du MUP et le contrôle du bureau de la Défense

 23   territoriale, qui est au rez-de-chaussée dans le même immeuble, nous avons

 24   dit que le SDA ou le HDZ devait prendre ce bâtiment. Ils ont refusé,

 25   puisqu'il n'y a pas eu d'accord, nous avons décidé de prendre le contrôle


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  1   du bâtiment de l'assemblée municipale.

  2   Q.  Vous dites "nous". C'est qui "nous" ?

  3   R.  C'est le SDA, le HDZ et les employés du MUP qui n'avaient pas signé cet

  4   acte d'allégeance.

  5   Q.  Y a-t-il eu de la violence ? Est-ce qu'on s'est servi de la force pour

  6   procéder à cette prise de contrôle du bâtiment municipal ?

  7   R.  Et bien, les délégations ont eu des réunions pendant deux jours, les

  8   représentants du SDS et nous. Il nous était absolument impossible de

  9   trouver un accord. C'est alors que, le lendemain, au soir, des soldats

 10   armés se sont rassemblés devant le bâtiment municipal. Juste à côté du

 11   bâtiment municipal, il y avait le bâtiment des PTT, ainsi que le bâtiment

 12   abritant un hôtel. Nous avions remarqué que c'est là qu'il y avait des nids

 13   de tireurs embusqués. Il y avait également des nids de mitrailleuses. Le

 14   square était encerclé de soldats. Ils avaient pris la municipalité. Nous

 15   nous trouvions dans la municipalité, et eux, ils étaient tout autour. Vers

 16   dix heures du matin, Rasula a appelé par téléphone, et il a dit : "Quittez

 17   la municipalité dans les dix minutes qui suivent; sinon, vous serez brûlés

 18   vifs, et on détruira le bâtiment municipal." C'est ainsi qu'on a lancé

 19   projectile d'une Zolja, et le bâtiment municipal a été détruit.

 20   Q.  Combien de personnes se trouvaient au bâtiment municipal lorsque cette

 21   Zolja avait été tirée ?

 22   R.  Il y avait environ de 30 à 40 personnes, pas plus, je crois.

 23   Q.  Vous étiez présent ? Vous étiez là ?

 24   R.  Non, j'étais en voyage, et je n'ai pas passé cette nuit-là à cet

 25   endroit-là.


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  1   Q.  L'information que vous nous donnez est basée sur le ouï-dire, en fait,

  2   ce sont des personnes qui étaient présentes dans le bâtiment municipal qui

  3   vous ont relaté les faits.

  4   R.  Oui, le lendemain matin, ils racontaient l'événement le lendemain, et

  5   il ne s'est rien passé de spécial puisque la journée était assez calme.

  6   Mais ce qui est intéressant, c'est que, ce jour-là, en fait, le matin, on

  7   avait vu, sur le square hissé un drapeau de l'Etat serbe de la Bosnie

  8   occidentale. Ce même drapeau était hissé également sur le bâtiment du MUP.

  9   Cela représentait une sorte de légalité à leur prise de pouvoir.

 10   Q.  Pouvez-vous vous souvenir de la date de la prise de contrôle du

 11   bâtiment municipal ?

 12   R.  Je crois que c'était le 19 avril. C'est à ce moment-là que l'on a lancé

 13   cette attaque contre la mairie.

 14   Q.  Quelle était l'importance que l'on accordait à ces drapeaux ? Vous

 15   dites que des drapeaux étaient hissés un peu partout dans la municipalité.

 16   Quelle était en fait l'importance de cette prise de pouvoir du bâtiment

 17   municipal ou de la mairie ? Est-ce que cela a changé la structure dans la

 18   municipalité de Sanski Most, pour ce qui a trait au HDZ ?

 19   R.  C'est que le pouvoir est tombé entre les mains du SDS. Nous n'avions

 20   plus le droit d'entrer à l'intérieur de la mairie ou de nous présenter.

 21   Q.  Est-ce que l'on a fait quelque annonces, disant que, concernant les

 22   lois qui allaient être appliquées maintenant dans la municipalité de Sanski

 23   Most ?

 24   R.  Le lendemain matin, ils nous ont dit que M. Talic de Banja Luka

 25   viendrait pour tenir une réunion. Effectivement, il est venu, et il a dit


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  1   qu'il garantissait la sécurité à tous les citoyens de Sanski Most, que

  2   c'était la JNA qui allait garantir la sécurité à tous les citoyens. Par

  3   contre, le lendemain matin, puisque le SDS avait procédé à la prise de

  4   pouvoir, simplement sans l'approbation de personne ou sans avoir

  5   préalablement consulté personne, ils ont pris le contrôle de la radio de

  6   Sanski Most. Le directeur de cette radio était un Musulman. Ils ont pris le

  7   contrôle des PTT. Le directeur du PTT était un Croate. C'est eux qui

  8   représentaient le pouvoir. Ils disposaient d'argent également. La

  9   propagande, après ce jour-là, était de donner des annonces partout sur

 10   Sanski Most, c'est-à-dire que l'on annonçait tout cela à la radio.

 11   Q.  Monsieur Biscevic, le HDZ et le SDA, est-ce que ces partis étaient des

 12   partenaires pour ce qui est du pouvoir démocratique à Sanski Most ?

 13   R.  Le SDA et le HDZ n'avaient absolument aucun pouvoir, aucune notoriété.

 14   Q.  Maintenant, vous avez parlé du fait qu'un bon nombre de personnes, les

 15   non-Serbes s'étaient vus démis de leurs fonctions, tout ceux qui étaient et

 16   qui occupaient des postes importants. Maintenant, selon vous, les efforts

 17   déployés pour désarmer la population non-serbe, la population de Sanski

 18   Most, suite à la prise du contrôle de la mairie de Sanski Most, au mois

 19   d'avril 1992. D'abord, dites-nous, y a-t-il eu une campagne lancée afin de

 20   procéder au désarmement de la population non-serbe de Sanski Most ? Si oui,

 21   pourriez-vous nous décrire de quelle campagne il s'agit, de quelle façon

 22   cette campagne s'est-elle vue voir le jour ?

 23   R.  La campagne était quotidienne. On faisait des annonces à la Radio Sana,

 24   par exemple, le hameau d'Otok, lundi à 5 heures de l'après-midi, mettons,

 25   on disait à tel et tel point de contrôle. Tous les citoyens étaient obligés


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  1   d'apporter toutes les armes légales qu'ils possédaient légalement ou

  2   illégalement. Egalement dans mon hameau, nous avions dû remettre toutes les

  3   armes que nous avions. Nous avions des armes de chasse, nous n'avions rien

  4   d'autre. Il y avait une automobile civile avec une remorque. C'est là qu'on

  5   lançait les armes. Il y avait également un homme qui portait un uniforme

  6   militaire. Il ne donnait absolument aucune attestation pour prouver que

  7   nous avions remis nos armes. C'était la pratique quotidienne. Partout il y

  8   avait la population croate et musulmane. Les patrouilles se déplaçaient

  9   pour prendre les armes que les gens possédaient soit légalement ou

 10   illégalement.

 11   Q.  Maintenant, cette question de désarmement des villages non-serbes, est-

 12   ce que c'est arrivé également dans les villages serbes de Sanski Most ?

 13   Est-ce que vous vous souvenez ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Les endroits qui étaient identifiés pour faire l'objet de désarmement,

 16   est-ce que cela a été fait à la radio ? Vous avez dit que c'était par la

 17   radio que l'on informait les citoyens où se rendre pour rendre leurs armes,

 18   que ce soit des armes qu'ils possédaient de façon légale ou illégale.

 19   Comment aviez-vous appris les lieux où vous deviez vous rendre ?

 20   R.  Outre le fait qu'ils avaient annoncé des points de contrôle à certains

 21   endroits où il avait annoncé où se trouvaient les points de contrôle, tous

 22   les jours, on nous disait que toutes les armes légales et illégales

 23   pouvaient être rapportées dans les bureaux du MUP, et que les personnes

 24   pouvaient simplement remettre leurs armes, et qu'aucune conséquence

 25   fâcheuse ne leur arriverait.


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  1   Q.  Vous avez remis vos armes, est-ce que vos fils ont remis également les

  2   armes qu'ils avaient en leur possession ?

  3   R.  Moi-même et mon fils aîné, nous étions des chasseurs. Nous disposions

  4   d'armes légales, et nous les avions remises à ce

  5   moment-là.

  6   Q.  Est-ce que vous aviez reçu un reçu quelconque attestant que vous avez

  7   bel et bien remis votre arme de chasse ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Pourriez-vous décrire à la cour brièvement les événements concernant le

 10   désarmement de Trnova. D'abord, dites-nous, Trnova ou Trnovo, quel genre de

 11   village est-ce ?

 12   R.  Il s'agit d'un village assez grand dont la majorité des citoyens

 13   étaient Musulmans. Quelqu'un les avait avisés qu'à Trnova, il y avait deux

 14   canons. Ce qui était intéressant, c'est qu'ils disaient toujours :

 15   "Rapportez vos armes. Rapportez vos armes," cela voulait dire soit un

 16   revolver ou un fusil. Ils affirmaient que les Musulmans et les Croates

 17   étaient complètement armés. Ils n'avaient jamais dit : "Venez transporter

 18   vos armes." Une fois, ils avaient entendu dire que, dans le village à

 19   Trnova, il y avait deux canons. Ils ont demandé à ce que l'on transporte

 20   ces deux canons, qu'on les amène. Chez les Musulmans, le ramadan, lorsque

 21   le ramadan arrive le soir, c'est à ce moment-là que la population commence

 22   à manger, la population musulmane. C'est grâce à ce canon que l'on

 23   annonçait à l'aide d'un coup de canon que l'on pouvait commencer à manger.

 24   C'était la raison pour laquelle nous avions ces deux canons. Lorsque les

 25   Musulmans ont entendu dire qu'il fallait remettre les canons, il y avait un


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  1   homme qui était presque un peu bête, un peu fou. Il aimait bien allumer les

  2   allumettes. C'est à ce moment-là qu'il s'est porté volontaire pour aller

  3   remettre ces canons.

  4   M. STEWART : [interprétation] Objection. Monsieur le Président, j'aimerais

  5   simplement faire un commentaire. Mme Cmeric confirme quelques écarts

  6   concernant cette dernière réponse du témoin. C'est une réponse qui est

  7   traduite en anglais. Elle ne peut pas être très bien comprise.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. J'ai remarqué que dans la

  9   feuille d'informations supplémentaire qui nous a été remise, lorsqu'on

 10   parle de canon, on parle d'un canon, d'une arme. Il faudrait peut-être voir

 11   avec le témoin s'il peut nous préciser ce fait.

 12   M. HARMON : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur, lorsque nous nous sommes entretenus samedi dernier, vous nous

 14   avez décrit cette arme comme étant un canon.

 15   R.  C'était un canon, effectivement. Nous l'appelions canon.

 16   Q.  L'information que les Serbes avaient reçue à l'effet qu'il y avait deux

 17   canons, non pas deux armes, mais deux canons dans le village de Trnava,

 18   est-ce que c'est bien cela l'information qu'ils avaient reçue, c'était

 19   qu'il y avait deux canons ?

 20   R. Oui, c'est cela. Ils affirmaient qu'il y avait deux canons.

 21   Q. Ensuite, vous nous avez décrit un homme qui, si je peux vous citer

 22   littéralement : "Est un peu fou, est un peu dérangé." Vous nous avez dit

 23   que c'était lui qui a amené ce canon fait en cerisier, qu'il avait remis

 24   aux autorités serbes.

 25   R.  Oui. Il a transporté ce canon, et il l'a remis entre les mains de la


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  1   police.

  2   Q.  Très bien. Je crois que c'est une description des événements un peu

  3   précise plutôt que ce que l'on a dans la traduction. Maintenant, permettez-

  4   moi de vous poser une autre question concernant ceci, Monsieur Biscevic.

  5   Concernant cette demande, cet appel de remettre les armes, le gouvernement

  6   local, les autorités locales et la JNA, quelles étaient les assurances

  7   qu'elles fournissaient aux personnes qui devaient remettre leurs armes ?

  8   R.  Ils garantissaient de façon verbale d'assurer la sécurité des citoyens

  9   de Sanski Most.

 10   Q.  A la suite de ces annonces faites à la radio et à la suite des demandes

 11   que l'on a faites à l'endroit des Musulmans et des Croates de Sanski Most

 12   pour remettre leurs armes, lorsque les attaques ont commencé contre Sanski

 13   Most au mois de mai, à la fin du mois de mai 1992, est-ce que la plupart

 14   des villages non-serbes avaient été désarmés à ce moment-là ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Très bien. De nouveau, je souhaiterais attirer votre attention sur la

 17   période qui a suivi la prise de contrôle de la mairie. Ensuite, vous nous

 18   avez dit que les combats ont commencé et vous nous avez également décrit un

 19   événement lors duquel deux

 20   non-Serbes se sont vus démis de leurs fonctions. Vous nous avez parlé du

 21   directeur de la station radio, et vous nous avez également parlé d'un

 22   Croate qui était à la tête du SDK. Est-ce qu'il y avait d'autres non-Serbes

 23   qui avaient été démis de leur position, qui avaient été licenciés ?

 24   R.  Tous les Musulmans et les Croates de la municipalité de Sanski Most

 25   avaient été démis de leurs fonctions. Il y avait un, par exemple, un soldat


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  1   devant l'hôpital, les médecins et les infirmiers, infirmières croates ne

  2   pouvaient plus entrer dans l'école pour ce qui est de l'école également.

  3   Partout où les Musulmans et les Croates travaillaient, ils avaient perdu

  4   leur emploi. Ils étaient simplement licenciés du jour au lendemain.

  5   Q.  Qui était responsable de cela ?

  6   R.  C'était soit Rasula ou Vrkes, qui venait accompagné de soldats pour

  7   procéder au licenciement de ces personnes.

  8   Q.  Maintenant, je souhaiterais attirer votre attention sur l'attaque qui a

  9   été lancée contre Mahala. C'est une attaque qui a eu lieu le 26 mai 1992.

 10   D'abord, dites-nous, le Mahala, est-ce que c'est une partie musulmane de la

 11   ville de Sanski Most ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance, que s'est-il

 14   passé à la suite d'une annonce faite à la radio concernant la population de

 15   Mahala ? Qu'est-ce que les gens devaient faire ? Qu'avaient demandé les

 16   autorités de Sanski Most aux Serbes de faire ?

 17   R.  Il fallait rendre les armes aux points de contrôle. A chaque fois, ils

 18   disaient : "Remettez vos armes; sinon, l'armée viendra chercher les armes."

 19   C'était une excuse pour faire ce qu'ils ont fait.

 20   Entre le 25 et le 26, il y a eu une attaque lancée contre Sanski

 21   Most. On tirait de part et d'autre. J'avais passé toute cette nuit-là dans

 22   mon garage avec ma famille. Le Dr. Mehmed Alagic était avec moi. Il avait

 23   été tué plus tard. J'avais également ma femme et mes enfants avec moi. Le

 24   lendemain matin, vers 7 heures du matin, l'attaque s'est arrêtée. On a

 25   entendu une annonce à la radio disant que Gornji Mahala n'avait pas remis


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  1   ses armes. Un ultimatum avait été donné, l'ultimatum selon lequel il

  2   fallait remettre les armes avant 11 heures du matin; sinon, ils allaient

  3   lancer une attaque contre Gornji Mahala. Ils nous ont dit qu'ils allaient

  4   chercher les armes de ces extrémistes, comme ils l'ont dit, alors que la

  5   situation était bien différente. Il y avait dans les trois hameaux qui

  6   précèdent Gornji Mahala. Ils étaient habités par des populations

  7   musulmanes. Les soldats ont fait irruption dans toutes les maisons des

  8   trois villages qui précèdent Gornji Mahala. Ils ont tué toutes les

  9   personnes qui ne sont pas sorties de leur maison. Quand toutes les

 10   personnes qui étaient sorties à l'extérieur se sont trouvées devant leur

 11   maison, on a emmené toute cette population qui est sortie de leur demeure

 12   devant ce complexe, un complexe où l'on procédait à la formation de

 13   chauffeurs.

 14   C'est de là qu'on a transféré certaines personnes à la prison

 15   centrale. D'autres personnes avaient été immédiatement expulsées dans les

 16   autobus. A ce moment-là, il y avait une colonne de cinq bus dans lesquels

 17   ont avait placé les habitants. Ce jour-là, lorsqu'on parle de l'attaque

 18   contre Mahala, a eu lieu à partir de 11 heures, et elle a duré jusqu'à la

 19   soirée ou la nuit. Tout était déjà terminé. Ce jour-là, 192 maisons avaient

 20   été pillées, brûlées, incendiées, détruites complètement. Je répète, donc

 21   192 maisons avaient été complètement détruites. Pour ainsi dire, la Gornji

 22   Mahala était détruite complètement, rasée au sol.

 23   Kuzelj était un habitant de Gornji Mahala. Il s'était caché dans un

 24   trou d'homme. Ils l'avaient trouvé là pour le tuer. Il y avait un autre

 25   habitant qui est sorti de la grange. I voulait laisser sa vache sortir à


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  1   l'extérieur. Ils l'ont tué. Il y avait un autre homme qui est passé par les

  2   champs pour aller au polygone. Ils l'ont tué également. Chaque personne qui

  3   était restée derrière s'était faite tuée.

  4   Q.  Lorsque vous dites "ils les ont tués", que ces gens se sont fait tués

  5   par "eux", au pluriel, "ils", c'étaient qui ?

  6   R.  C'étaient les Musulmans qui étaient restés derrière.

  7   Q.  Lorsque vous dites que "ils les ont tués", qui a tué les habitants

  8   musulmans ?

  9   R.  Ce sont les Serbes qui portaient des uniformes militaires.

 10   Q.  Est-ce qu'une annonce avait été faite concernant des draps ?

 11   R.  Oui. Lorsque cette attaque contre la Gornji Mahala devait avoir lieu,

 12   on a fait une annonce disant que tous les Musulmans qui   avaient porté un

 13   acte allégeance à l'Etat serbe, devaient hisser des draps sur le toit de

 14   leur maison. C'est ainsi qu'un très grand nombre de Musulmans et de Croates

 15   avaient hissé ces draps sur le toit de leur maison. Ils voulaient de cette

 16   façon-la démontrer qu'ils étaient loyaux. C'était un prétexte que les

 17   soldats serbes ont utilisé pour savoir quelles étaient les maisons

 18   musulmanes et croates. C'est ainsi qu'ils ont tué toutes les personnes qui

 19   se trouvaient à l'intérieur de ces maisons. Ils n'ont pas détruit les

 20   maisons serbes grâce à ces draps.

 21   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure

 22   arrivée. Il serait peut-être propice de prendre notre pause. Souhaiteriez-

 23   vous que je poursuive jusqu'à 10 heures 30, Monsieur le Président ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est l'heure prévue pour la pause,

 25   effectivement, 10 heures 30.


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  1   M. HARMON : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Biscevic, je vais maintenant vous poser encore quelques

  3   questions concernant la date du 27 mai 1992. Est-ce qu'effectivement, ce

  4   jour-là, vous vous êtes fait arrêter ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Pourriez-vous nous parler de votre arrestation, je vous prie ?

  7   R.  J'ai déjà dit que cette nuit-là, je l'avais passée dans le garage.

  8   J'étais avec ma famille et le Dr Mehmed Alagic. Vers 7 heures du matin, on

  9   a arrêté de tirer. Tout s'était calmé. Il y avait une accalmie. Nous sommes

 10   arrivés dans la cuisine. On a mangé quelque chose. Par contre, vers 11

 11   heures du matin, ils ont annoncé qu'une attaque aurait lieu contre Gornji

 12   Mahala si jamais on ne remettait pas les armes jusqu'à cette heure-là. A 11

 13   heures du matin, on a entendu d'autres coups de feu. Nous nous sommes

 14   abrités dans le garage de nouveau. On tirait de part et d'autre. Il était

 15   très dangereux que l'on lance un obus sur notre maison. Comme chez moi, ma

 16   maison n'était pas très solide, nous sommes allés nous cacher dans le

 17   garage. Après 11 heures, l'attaque a été lancée. Avant cela, mon fils m'a

 18   dit : "Regarde, papa, il y a énormément de soldats. On n'attaque pas notre

 19   quartier à nous." Je n'avais pas porté vraiment attention. Après 11 heures,

 20   lorsque nous sommes retournés dans le garage, nous avons entendu que

 21   quelqu'un avait détruit la porte d'entrée en donnant un coup de pied à la

 22   porte de notre maison. Ma femme est sortie à l'extérieur. Quand elle est

 23   sortie du garage pour voir ce qui se passait, ils lui ont dit : "Il faut

 24   que Faikan se présente immédiatement. Nous avons eu une réunion. Ensuite,

 25   je me suis habillé et, lorsque je suis sorti, j'ai vu qu'il y avait l'armée


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  1   partout. Il y avait quatre véhicules et une Mercedes blanche se trouvait

  2   devant mon portail. Ils m'ont mis entre deux personnes. Il y avait deux

  3   autres personnes à côté de moi, c'étaient des soldats qui portaient un

  4   uniforme. Il y avait quelqu'un devant moi également et un chauffeur.

  5   Lorsque je me suis assis à bord de ce véhicule, ils m'ont dit qu'ils

  6   avaient reçu l'ordre de me menotter et c'est ainsi que mes mains ont été

  7   menottées.

  8   Q.  Où est-ce que l'on vous a emmené ?

  9   R.  On m'a d'abord emmené au MUP, ensuite, c'est là qu'on m'a mis dans le

 10   couloir et on m'a dit de me tourner contre le mur et il y avait beaucoup de

 11   soldats qui injuriaient, qui criaient. Ensuite, après un certain temps, ils

 12   m'ont mis de nouveau à bord de ce véhicule et ils m'ont emmené dans le

 13   village de Magarice, c'est ainsi que s'appelle ce village. Il s'agit d'un

 14   village qui se trouve en périphérie de Sanski Most et sur une élévation,

 15   sur une colline, et lorsque je suis arrivé là, là-haut dans ce village,

 16   lorsqu'ils m'ont sorti et m'ont fait sortir du véhicule, lorsque je suis

 17   arrivé, ce que j'ai vu d'abord c'est qu'il y avait un très grand nombre de

 18   soldats à cet endroit. Il y avait beaucoup de personnes qui se déplaçaient

 19   par là. C'est, en fait, là que j'ai su plus tard que c'était leur QG.

 20   Lorsque je suis arrivé, j'ai vu qu'il y avait une carte de Sanski Most. Il

 21   y avait un litre de cognac et à cette table, M. Basara était assis à cette

 22   table ainsi qu'un autre officier. J'ai su plus tard qu'il s'agissait du

 23   capitaine, le commandant major Lukic. Je leur ai dit bonjour. Je suis sorti

 24   de ce véhicule. Lui, il m'a injurié. Il m'a dit : je nie ta mère de balija.

 25   Ensuite, il a dit aux soldats : pourquoi est-ce que vous l'avez menotté par


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  1   en avant ? Vous devriez le menotter en lui mettant les mains derrière le

  2   dos et serrer les menottes très fort.

  3    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Biscevic, vous savez on vous a

  4   seulement posé la question : où est-ce que l'on vous a emmené ? Là vous

  5   êtes en train de me décrire le comportement d'autres personnes. Ce n'est

  6   pas vraiment nécessaire. Je ne dis pas que ce n'est pas important et nous

  7   comprenons très bien que pour vous c'est une chose de très important, mais

  8   nous avons quelques contraintes temporelles. Je vous demanderais bien de

  9   vous concentrer et d'écouter les questions posées par M. Harmon.

 10   M. HARMON : [interprétation] En fait, Monsieur le Président, j'allais

 11   justement poser cette question. En fait, M. Biscevic répond sans que je lui

 12   pose toutes les questions que je voulais lui poser en réalité.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. On a l'impression que M. Biscevic

 14   sait très bien les questions que vous allez lui poser, mais je comprends

 15   que vous n'allez pas lui reposer la question puisqu'il nous a fait un récit

 16   de cet événement, et nous voulons éviter bien sûr toute répétition.

 17   Veuillez poursuivre, je vous prie.

 18   M. HARMON : [interprétation]

 19   Q.  Vous étiez en train de nous décrire, Monsieur, les événements qui ont

 20   suivi votre arrivée. Vous nous avez dit qu'il y avait un officier qui

 21   n'était pas d'accord avec le fait que vous étiez menotté par en avant et

 22   qu'il fallait menotter vos mains derrière votre dos. Maintenant, décrivez-

 23   nous ce qui s'est passé ensuite.

 24   R.  Ensuite il s'est levé et il m'a emmené juste à côté de ce camp sur une

 25   clairière et là j'ai vu qu'il y avait énormément de soldats qui se


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  1   déplaçaient par là. Il y avait également des coffres militaires, un mètre

  2   de haut et dix mètres de long et c'est là qu'il y avait des canons, les

  3   canons dans lesquels on met des obus et grâce auxquels on peut atteindre la

  4   ville. J'ai vu qu'en fait c'est de là qu'ils avaient lancé leur attaque

  5   contre la ville. J'avais l'impression qu'on menait vraiment les attaques de

  6   cet endroit-là.

  7   Ensuite il m'a dit : "Vous voyez ce que vous avez fait de Sanski

  8   Most. Vous voyez ce que vous avez fait. C'est à cause de vous que tout ceci

  9   est ainsi." Lorsque je suis revenu deux soldats m'ont pris et ils m'ont

 10   emmené dans un verger et c'étaient deux soldats qui étaient censés me faire

 11   passer à tabac. Ensuite ils m'ont passé à tabac à ce point-là que j'ai

 12   défait les menottes qui attachaient mes mains derrière le dos. Ensuite,

 13   lorsque je suis revenu, le capitaine m'a fait asseoir derrière une table et

 14   il m'a dit : "Prends un bout de papier et écris." Je ne savais pas quoi

 15   écrire.

 16   Q.  Permettez-moi de vous interrompre ici parce qu'effectivement, c'est une

 17   bonne heure pour prendre la pause. Je voulais revenir à votre récit. Vous

 18   dites que vous avez été passé à tabac. Pourriez-vous nous dire combien de

 19   temps a duré ce passage à tabac ?

 20   R.  C'est bien difficile de déterminer la durée précise, mais je dirais que

 21   c'était environ une demi-heure.

 22   Q.  Combien y avait-il de soldats dans cette zone, à cet endroit où vous

 23   avez été emmené ?

 24   R.  Partout où je regardais, je voyais des soldats.

 25   Q.  Est-il exact de dire que vous pouviez, depuis cet endroit-là, regarder


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  1   vers le village de Sanski Most parce que ce village se trouvait en

  2   contrebas ?

  3   R.  C'est une élévation et il n'y a pas de forêts entre eux et c'était de

  4   ce point, et c'est ainsi que l'on voyait très bien Sanski Most.

  5   Q.  Vous nous avez dit qu'à ce moment-là, les soldats semblaient bombarder

  6   Sanski Most depuis cet endroit-là.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que l'on pouvait envoyer des obus depuis Sanski Most vers cette

  9   élévation, vers ce point depuis lequel les soldats serbes tiraient ?

 10   R.  Non, non, non, ils chantaient, ils riaient, ils buvaient, ils étaient

 11   joyeux. Il n'y avait absolument aucune menace et c'était impossible de ne

 12   les atteindre par aucun obus, aucune balle.

 13   Q.  Je vous remercie.

 14   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, le moment est opportun

 15   sans doute pour prendre la pause.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Merci, Monsieur

 17   Harmon. Nous allons prendre notre pause jusqu'à 11 heures moins cinq.

 18   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 19   --- L'audience est reprise à 10 heures 57.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, poursuivez, je vous

 21   prie.

 22   M. HARMON : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Biscevic, avant de poursuivre et avant que vous ne

 24   récapituliez les événements du 27 mai, j'aimerais, en fait, revenir en

 25   arrière et vous poser une ou deux questions à propos de la période relative


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  1   aux élections multipartites. Après les élections multipartites ou avant ces

  2   élections, avez-vous eu la possibilité de rencontrer l'accusé, M.

  3   Krajisnik ?

  4   R.  Je l'ai fait à une reprise.

  5   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire à l'intention de la Chambre de

  6   première instance les circonstances de cette rencontre ? Est-ce que vous

  7   pouvez-nous dire qui vous a présenté ? Où est-ce que cela s'est fait et

  8   quand est-ce que cela s'est fait ?

  9   R.  Après les élections, j'étais le président du parti. M. Rasula était le

 10   président de son parti. Lorsque nous nous sommes rendus à Sarajevo

 11   ensemble, nous avons fait la connaissance de M. Krajisnik. On me l'a

 12   présenté. Ce fut la seule fois que j'ai eu un contact avec lui, ce ne fut

 13   pas une conversation. Nous avons tout simplement été présentés mais je

 14   savais qu'il s'agissait de M. Krajisnik.

 15   Q.  Qui vous a présenté à M. Krajisnik, est-ce que c'est M. Rasula qui vous

 16   a présenté à M. Krajisnik ?

 17   R.  Oui, oui.

 18   Q.  Nous allons revenir sur cette journée du 27 mai 1992. Vous étiez en

 19   train de nous dire qu'après avoir été passé à tabac, vous êtes revenu et on

 20   vous a demandé de vous mettre debout à côté d'une table. Un capitaine vous

 21   a donné une feuille de papier et vous a demandé d'écrire, est-ce que vous

 22   pouvez, maintenant, nous relater ce qui s'est passé à partir de ce moment-

 23   là ?

 24   R.  Je ne savais pas ce que j'étais censé écrire. Il est venu près de moi.

 25   Il a pris cette feuille de papier et il a tiré un coup de feu près de mon


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  1   oreille et il a dit : "Voilà ce qui t'attend avec ta famille si tu ne lis

  2   pas ceci." Je ne savais pas ce que ceci signifiait. D'abord j'avais été

  3   passé à tabac et je ne savais pas ce dont il s'agissait.

  4   Q.  Que s'est-il passé après qu'il vous a donné cette feuille de papier ?

  5   R.  Une fois de plus, les deux soldats m'ont emmené -- m'ont mis dans la

  6   voiture et m'ont emmené à la station radio de Sanski Most qui se trouvait

  7   dans le centre de la ville.

  8   Q.  Qui contrôlait la station de radio à l'époque ?

  9   R.  Le SDS.

 10   Q.  Qu'est-il advenu à la station de radio ?

 11   R.  A la station de radio, on m'a mis près d'un bureau. On m'a donné une

 12   feuille de papier qui contenait le texte que j'étais censé lire au micro et

 13   c'est ce que j'ai fait.

 14   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 15   j'aimerais que nous entendions, maintenant, la pièce à conviction -- la

 16   prochaine pièce à conviction de l'Accusation. Il s'agit d'une cassette

 17   audio et nous avons le compte rendu afférant à cette cassette. Je peux

 18   attirer votre attention sur le moment où cela commence, mais je ne sais pas

 19   si vous avez déjà des exemplaires de ces comptes rendus. S'ils peuvent être

 20   distribués, je pourrais ainsi indiquer aux Juges de la Chambre les passages

 21   que nous allons entendre. De même, si vous pouviez fournir à M. Biscevic un

 22   exemplaire du compte rendu en B/C/S, je vous prie.

 23   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'aimerais attirer votre

 24   attention sur deux extraits importants de ce compte rendu. Nous avons, dans

 25   un premier temps, le premier extrait qui commence à la page 5, vous voyez


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  1   que cela a été placé dans un encadré gris et cela va jusqu'à la page 7.

  2   Q.  Monsieur Biscevic, je vous dirais à titre d'information que le premier

  3   extrait que nous allons entendre se trouve à la page 9 de la version en

  4   B/C/S et va jusqu'à la page 11. Ensuite, nous marquerons une pause, et nous

  5   aurons le deuxième extrait qui correspond à ce qui se trouve en encadré

  6   gris dans la version anglaise, il s'agit de la page 9 jusqu'au début de la

  7   page 10. Pour la version en B/C/S, Monsieur Biscevic, il s'agit de la page

  8   15 à 16, il s'agira du deuxième extrait.

  9   M. HARMON : [interprétation] Nous allons, dans un premier temps,

 10   avoir le premier extrait et vous allez voir que nous allons juste commencer

 11   deux paragraphes avant le début de ce qui se trouve dans l'encadré gris qui

 12   est intitulé : "Voix de femme". Nous allons avoir une voix de femme, puis

 13   une voix d'homme et, ensuite, nous aurons la voix de M. Biscevic.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 15   M. HARMON : [interprétation] Ensuite, nous aurons une voix d'homme qui

 16   terminera le premier extrait, donc j'aimerais demander que nous puissions

 17   entendre le premier extrait.

 18   Q.  Monsieur Biscevic --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que les interprètes ont

 20   également reçu des exemplaires de ce compte rendu.

 21   M. HARMON : [interprétation] C'est exact.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons pouvoir écouter cet extrait.

 23   [Diffusion de cassette audio]

 24   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "Sinon, à 18 heures 10 exactement,

 25   nous allons commencer à tirer sur le village. Si cet ordre n'est pas


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  1   respecté, nous n'assumerons aucune responsabilité morale ou matérielle pour

  2   les conséquences de ces tirs.

  3   Voix mâle : Les forces armées serbes ont capturé les extrémistes les

  4   plus importants, Musulmans et Croates dans la municipalité de Sanski Most,

  5   l'extrémiste le plus important, Faik Biscevic, qui a essayé de s'échapper

  6   de la ville. Cet extrémiste va parler maintenant à la population musulmane

  7   et croate, à la radio pour expliquer les raisons, qui les ont poussés la

  8   guerre.

  9   "Annonce que tous les Musulmans et les Croates rendent toutes les

 10   armes qu'ils possèdent, de façon licite et illicite, qu'ils se rendent à

 11   l'armée serbe et au gouvernement parce qu'il s'agit d'une ville serbe. Pour

 12   éviter que les soldats aient à utiliser la force pour localiser et

 13   confisquer les armes, je pense qu'il vaut mieux que ces armes soient

 14   données volontairement; sinon, Sanski Most et Sana vont continuer à être

 15   détruites jusqu'à la capitulation finale. C'est pour cela que nous

 16   demandons aux citoyens de Sana, aux Musulmans et aux Croates, de donner

 17   leurs armes immédiatement, ce qui serait beaucoup mieux que de continuer à

 18   voir cette ville continuer à être détruite. C'est pour cela que je demande

 19   sans aucun retard que toutes les armes soient transmises et données aux

 20   autorités serbes légitimes. Cela doit être fait immédiatement. Les armes

 21   doivent être données afin d'éviter la destruction de la ville pour laquelle

 22   j'assume la plupart de la responsabilité. C'est pour cela que je demande à

 23   tous les Musulmans et aux Croates de rendre immédiatement leurs armes et de

 24   reconnaître les autorités serbes légitimes, afin que les autorités

 25   légitimes puissent commencer à fonctionner aussi rapidement que possible,


Page 5525

  1   et pour que la destruction de la ville puisse se terminer. Les forces

  2   armées serbes garantissent la sécurité de tous les citoyens musulmans et

  3   croates. Je recommande à tous les extrémistes d'Alija et de Tudjman de le

  4   faire. Sanski Most, je leur demande de ne pas conduire leur population à un

  5   bain de sang.

  6   Moi-même, Redzo Kurbegovic, Mirzet Karabeg, Suad Sabic, Hasib Kamber,

  7   Ferid Burnic, Enver Burnic, Nihad Kljucanin, Ekrem Medic, Nedzad Muhic,

  8   Eniz Sabanovic, Ahmed Paunovic, Hase Osmancevic, Fahrudin Prsic, Arif

  9   Hodzic, Hidajet Dudic, Arif Muhanovic, Fikret Agic, Muhamed Smajlovic,

 10   Muhamed Arapovic, Mehmed Alagic, Ibro Pasic, Omer Krupic, Enesa Kurbegovic,

 11   Ibro Krickovic, Vahid Fajda Badnjevic, Safet Avdic, Vahid Handanagic, Suad

 12   Cehic, Ismet Ico Avdic et ses deux frères, Tale Zahirovic, Muharem

 13   Handanagic, Taib Crnkic, Hamza Rekic, Fuad Kurbegovic, Osman Talic, Dervis

 14   Hamzic, Elhad Talic et Basic. Je ne connais pas son prénom, mais je sais

 15   qu'il travaille à Borac Travnik à Lusci Palanka, et qui sont responsables

 16   pour tout ce qui s'est passé récemment.

 17   C'est pour cela que nous nous sommes préparés sur les ordres des

 18   forces armées serbes de venir parler à notre population et d'être jugés par

 19   nos peuples au cours des prochains jours. Je vous assure que le

 20   commandement des formes armées serbes va mener à bien ses activités armées

 21   à Sanski Most, et a été forcé à voir ce genre d'attitude, et a été forcé à

 22   cause de nos mensonges et de notre hypocrisie. J'exhorte tous ceux qui sont

 23   avec moi à se joindre à moi et à se rendre au commandement des forces

 24   armées serbes, étant donné que nous voulons absolument mettre un terme au

 25   carnage de notre population.


Page 5526

  1   "Sehovci, Poljak, Sasina, Pobrijezja et Caplje doivent collecter

  2   toutes les armes obtenues légalement et illégalement à tous les habitants à

  3   8 heures demain. A 8 heures, ils vont les amener à la station de sécurité

  4   publique de Sanski Most."

  5   [Fin de la diffusion de cassette audio]

  6   M. HARMON : [interprétation]

  7   Q.  Pour ce qui est de cette transmission, il s'agit d'une partie du compte

  8   rendu qui vous est attribué. Vous avez entendu la transmission. Est-ce

  9   qu'il s'agit de votre voix ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que c'est la déclaration que l'on vous a forcé à lire le 27 mai

 12   1992 ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce que vous avez rédigé vous-même cette déclaration et est-ce que

 15   quelqu'un l'a rédigée, vous l'a donnée ?

 16   R.  Elle m'attendait sur ce bureau.

 17   Q.  Est-ce que vous avez les informations sur la personne qui est l'auteur

 18   de cette déclaration ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Je vais, maintenant, vous faire entendre la deuxième partie, le

 21   deuxième passage, pages 15 à 16, pour vous, Monsieur Biscevic, et il

 22   s'agit, en fait, pour la version anglaise qui se trouve dans l'encadré

 23   gris. Si nous pouvons commencer. J'aimerais vous poser quelques questions à

 24   ce sujet. Nous allons entendre ce deuxième extrait.

 25   [Diffusion de cassette audio]


Page 5527

  1   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "Leurs armes licites et illicites aux

  2   autorités serbes pour ne pas devenir la proie d'extrémistes musulmans ou

  3   croates parce que cela va avoir pour conséquence la souffrance d'innocents.

  4   Nous avons montré qui nous sommes, ce que nous sommes. Notre peuple a

  5   compris ce que nous faisions et n'a plus aucune confiance en nous. C'est

  6   pour cela que je vous demande de réagir et de répondre à l'armée serbe

  7   légitime aux autorités serbes légitimes. L'armée serbe a déjà fait quelques

  8   annonces et nous a donné la possibilité de nous rendre. De grâce, écoutez

  9   cet appel et donnez -- rendez vos armes au commandant de l'armée serbe où

 10   j'ai été depuis deux jours maintenant. Je suis absolument personnellement

 11   convaincu qu'il s'agit de l'armée la plus humaine que je n'ai jamais

 12   rencontrée.

 13   La responsabilité pour toute la tristesse et la souffrance infligée

 14   au peuple musulman et croate est de notre ressort, car nous n'avons eu ni

 15   l'intuition ni l'intelligence pour tendre la main de la réconciliation au

 16   peuple serbe qui a si généreusement fait ce geste vers nous. Les mots que

 17   je prononce maintenant sont mes propres mots. Les officiers et soldats des

 18   forces armées serbes avec qui j'ai passé les deux derniers jours m'ont aidé

 19   à voir la vérité, annonce écrite par Faik Biscevic."

 20   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 21   M. HARMON : [interprétation]

 22   Q.  Pour ce qui est du deuxième extrait que nous venons d'entendre,

 23   Monsieur Biscevic, est-ce qu'il s'agissait là de vos propres mots ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Pourriez-vous expliquer dans quelle circonstance a été préparée cette


Page 5528

  1   déclaration ?

  2   R.  Le deuxième jour, on m'a fait sortir de la pièce où j'étais. Ils m'ont

  3   assis à un autre bureau. Le capitaine m'a donné ce deuxième texte. Parce

  4   que la deuxième fois, je ne me suis pas rendu à la station de radio. J'ai

  5   lu cela à Magarice. Je ne savais pas que cela allait être diffusé sur la

  6   radio Sana. Plus tard, cela a été diffusé, effectivement. Cela a été

  7   diffusé de telle façon que les gens ont pensé que je m'étais trouvé à la

  8   station radio.

  9   Q.  J'aimerais vous poser une question. Les sentiments qui sont décrits

 10   dans ces deux extraits correspondent-ils à vos propres sentiments et

 11   émotions, ou est-ce que vous avez, essentiellement, été forcé à exprimer ce

 12   genre de sentiment lors de ces diffusions ?

 13   R.  A l'époque, je n'ai pas eu l'occasion de le voir. D'aucuns pouvaient

 14   dire que ces textes avaient été rédigés par un expert qui avait un

 15   objectif, qui aspirait un objectif. Je n'avais rien à avoir avec la

 16   rédaction de ces deux textes et la formulation de ces deux textes. Je l'ai

 17   tout simplement lu.

 18   Q.  Après avoir lu le premier texte, on vous a emmené à la station radio,

 19   vous avez lu le texte. Que vous est-il arrivé ensuite ?

 20   R.  Une fois de plus, on m'a mis dans une voiture. Ce ne sont pas les

 21   soldats qui m'ont placé dans la voiture, mais un policier que je

 22   connaissais personnellement. Il m'a emmené dans une Golf, et il m'a amené

 23   vers Magarice. Il y a une partie de la route qui est bitumée alors que

 24   l'autre ne l'est pas. Nous nous sommes arrêtés sur la partie bitumée. Il

 25   m'a dit que l'armée allait s'occuper de moi. Lorsque je suis sorti de la


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  1   voiture, les soldats m'ont vu, et ont

  2   dit : "Voilà un balija." Ils voulaient, en fait, m'égorger. Il y en a un

  3   qui était très, très agressif, qui a maudit ma mère balija, et qui m'a dit

  4   que : "Ton beau-frère et sa sœur étaient morts à Sarajevo," que cela était

  5   l'occasion idéale pour lui pour qu'il puisse prendre sa revanche. Lorsque

  6   le policier s'est rendu compte de ce qui se passait, je suppose que ces

  7   ordres étaient de m'emmener à Magarice en vie. Il m'a refait monter dans la

  8   voiture et il m'a conduit jusqu'en haut de Magarice.

  9   Q.  Magarice est le village où se trouvait l'armée serbe de Bosnie et où se

 10   trouvait le colonel Basara; est-ce bien exact ?

 11   R.  Oui, c'est là où se trouvaient le commandement et leur intendance. La

 12   cuisine se trouvait là également.

 13   M. HARMON : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir le numéro de la

 14   pièce à conviction pour les comptes rendus et les cassettes avant de

 15   poursuivre ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame la Greffière d'audience.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction P274

 18   pour la cassette. Pour le compte rendu, nous aurons P274A pour la version

 19   originale en B/C/S, et P274.A.1 pour la version anglaise.

 20   M. HARMON : [interprétation] Je vous remercie.

 21   Q.  Lorsque vous êtes revenu à Magarice, est-ce que vous pourriez nous dire

 22   comment vous avez été traité, s'il vous plaît ?

 23   R.  Lorsque les deux soldats m'ont emmené à Magarice, la voiture se

 24   trouvait à quelque 15 mètres. Ils m'ont fait marcher jusqu'à la prison.

 25   J'avais cassé mes menottes, ce qui les a surpris. Ils m'ont lié les mains


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  1   avec une corde. Ils m'ont plus porté qu'ils ne m'ont autorisé à marcher.

  2   Lorsque nous sommes arrivés, le capitaine n'était pas là. Il n'y avait que

  3   Basara. Il a dit : "Ne faites pas cela. Amenez cet homme en prison." Ils

  4   ont dit : "Non, Il doit rester conformément aux ordres qui ont été donnés

  5   par le capitaine Vukic." Ils m'ont emmené dans une salle qui servait pour

  6   la salaison et la séchage de la viande. Il s'agissait d'une pièce en bois

  7   avec des graviers par terre. Ils m'y ont jeté. C'est là que je suis resté

  8   pendant deux jours.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez décrire les conditions dans lesquelles vous avez

 10   vécues pendant ces deux jours ? Est-ce qu'il y avait de l'eau ? Est-ce que

 11   l'on vous a donné de la nourriture ?

 12   Est-ce que vous pourriez être bref également ?

 13   R.  Non, il n'y avait pas de toilettes. On ne m'a amené aucun vivres. Je

 14   n'ai pas eu d'eau. Je n'ai même pas eu la possibilité de m'allonger. Je

 15   devais rester assis. Je ne pouvais pas non plus me lever. J'ai été tout le

 16   temps à moitié éveillé. Ce n'est que le deuxième jour, vers minuit, que les

 17   deux hommes, qui avaient été emmenés au même endroit plus tard ainsi que

 18   moi-même, avons été sortis. Ils nous ont mis dans trois véhicules

 19   différents. Je me trouvais assis au milieu. Il y avait, de part et d'autre,

 20   des soldats armés qui portaient des Kalachnikovs, et le troisième soldat se

 21   trouvait à l'arrière. Ils avaient tous leur fusil dirigé vers moi. Je pense

 22   qu'ils avaient peur que j'essaie de m'enfuir. Ils m'ont emmené à la prison

 23   centrale à Sanski Most.

 24   Q.  Combien de temps êtes-vous resté à la prison centrale de Sanski Most ?

 25   Jusqu'à quel jour y êtes-vous resté ?


Page 5531

  1   R.  J'y suis resté jusqu'au 27 août, je pense.

  2   Q.  Pourriez-vous décrire vos conditions de détention à la prison centrale

  3   de Sanski Most ?

  4   R.  Lorsque je suis arrivé à la prison centrale à Sanski Most, il était

  5   minuit passé. Dans ma cellule, j'ai retrouvé tous les dirigeants qui

  6   avaient été placés avant moi. La salle faisait

  7   4 mètres sur 2. Elle avait une porte en fer, une porte métallique. Il y

  8   avait une ouverture qui correspondait auparavant à une fenêtre. C'était

  9   simplement recouvert avec de la tôle. Il y avait quelques trous qui avaient

 10   été percés, des trous de 4 millimètres. C'était notre seule source d'air.

 11   Il n'y avait pas d'électricité. La plupart du temps, il n'y avait pas

 12   d'eau. Au début, on nous faisait sortir trois fois par jour pour nous

 13   donner à manger, pour que nous puissions faire nos besoins. Ensuite, ils ne

 14   l'ont même plus fait.

 15   Q.  Je vais, maintenant, vous montrer les deux pièces à conviction

 16   suivantes. Je vous demanderais d'avoir l'amabilité d'identifier ces

 17   photographies. Dans un premier temps, nous allons commencer par la première

 18   photographie.

 19   M. HARMON : [interprétation] J'aimerais avoir un numéro pour cette

 20   photographie.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la photographie qui porte

 22   le numéro ERN 01249099. Il s'agit du numéro P275.

 23   M. HARMON : [interprétation] Si vous pouviez avoir l'autre photographie qui

 24   pourrait être montrée au témoin. Je suppose qu'il s'agira de la pièce P276.

 25   Ensuite, je pourrais reprendre mon interrogatoire principal.


Page 5532

  1   Q.  Monsieur Biscevic, nous allons commencer par la première

  2   photographie qui correspond à la pièce à conviction P275. Est-ce que vous

  3   êtes en mesure d'identifier cette photographie et de nous dire à quoi elle

  4   correspond ?

  5   R.  Il s'agit du couloir de la prison centrale. Vous pouvez voir deux

  6   cellules. La troisième cellule se trouve derrière la porte en vert qui est

  7   une porte en fer également. Tout au bout du couloir, vous pouvez voir

  8   l'entrée des toilettes.

  9   Q.  Nous allons, maintenant, prendre la pièce P276. Est-ce que vous

 10   pouvez identifier cette pièce à conviction ?

 11   R.  Là, c'est la porte en fer. Il n'y avait pas d'air. Vous pouvez

 12   voir la tôle par laquelle nous pouvions respirer. C'était cela le plus gros

 13   problème car nous n'avions pas suffisamment d'air pour respirer.

 14   Q.  Pour ce qui est de cette tôle perforée, il s'agissait de la seule

 15   source d'aération dans l'endroit où vous avez été détenu ?

 16   R.  C'était, effectivement, la seule source.

 17   Q.  Combien d'hommes se trouvaient dans cette cellule avec vous ? Il s'agit

 18   de la cellule qui est décrite dans la pièce à conviction P276.

 19   R.  Tous les jours, il y avait des interrogatoires qui avaient lieu. Ils

 20   emmenaient de nouvelles personnes. Le chiffre variait. Nous avons été

 21   jusqu'à 20 personnes parfois. Il n'y avait pas d'air. Nous étions tout le

 22   temps debout. En général, on tournait en rond. On formait un rond pour qu'à

 23   tour de rôle nous puissions nous rapprocher de cette tôle et des

 24   perforations pour pouvoir respirer.

 25   Q.  Vous avez été emmené à cette prison de Sanski Most le


Page 5533

  1   29 mai ou aux alentours du 29 mai, je suppose, et vous y êtes resté

  2   jusqu'au 27 août. N'avez-vous jamais été, officiellement, inculpé, ou est-

  3   ce que les autres personnes qui se trouvaient dans cette cellule ont été

  4   également officiellement inculpées ?

  5   R.  A cette époque, lorsque nous nous y trouvions, nous avons été

  6   interrogés. Il n'y a jamais eu d'inculpation officielle dressée contre

  7   quiconque.

  8   Q.  Lorsque vous êtes arrivé dans la prison de Sanski Most et lorsque vous

  9   êtes allé dans cette cellule, est-ce que vous pouvez identifier certaines

 10   des personnes qui se trouvaient dans cette cellule ?

 11   R.  A l'époque où je suis arrivé, il y a Jakupovic. Il y avait Suad Sabic,

 12   Redzo Kurbegovic. Il y avait également Redko Ceric, c'était un ingénieur.

 13   Il y avait un Croate qui travaillait à la banque. Il a fait partie du

 14   premier groupe à y être emmené. Malheureusement, je ne me souviens plus de

 15   son nom de famille.

 16   Q.  Ces détenus, est-ce qu'il s'agissait de personnes civiles, de soldats ?

 17   Quel était leur statut ?

 18   R.  Il s'agissait essentiellement de dirigeants de parti. Il y avait

 19   également des personnes qui n'avaient rien à voir avec la partie. Par

 20   exemple, Jakupovic était l'une de ces personnes. Le Croate dont je vous ai

 21   parlé n'avait rien à voir avec aucun des partis. Il s'agissait

 22   essentiellement d'intellectuels.

 23   Q.  Pour revenir à ma question, Monsieur Biscevic, est-ce qu'il

 24   s'agissait de soldats ? Est-ce qu'il s'agissait de personnes civiles, ou

 25   est-ce qu'il s'agissait de combattants armés ?


Page 5534

  1   R.  Non, non, il s'agissait de personnes civiles.

  2   Q.  Pourriez-vous nous fournir une description générale des conditions

  3   sanitaires, qui ont été mises à votre disposition et à la disposition des

  4   autres prisonniers dans cette cellule et ce, pour toute la durée de la

  5   période de votre détention ? Je ne parle pas seulement des conditions

  6   sanitaires; je parle également de la nourriture qu'on vous donnait.

  7   J'aimerais savoir si vous aviez la possibilité de prendre des douches, s'il

  8   y avait des toilettes. Vous pourriez peut-être résumer cela à l'intention

  9   de la Chambre de première instance.

 10   R.  Lorsque nous sommes arrivés, il n'y avait rien que des cellules. La

 11   dernière pièce, la pièce que vous voyez au fond, était la pièce des

 12   toilettes. C'était assez salle, en désordre. Il y avait beaucoup de papiers

 13   qui avaient été jetés là, les toilettes étaient utilisées. La pièce qui se

 14   trouvait avant était pleine d'excréments et de papiers. Pour pouvoir

 15   utiliser les toilettes, il a d'abord fallu que nous les nettoyions avec nos

 16   mains. Nous étions nombreux et les cellules étaient pleines, ce qui fait

 17   que cette seule et unique toilette ne pouvait pas être utilisée comme elle

 18   était censée être utilisée. Derrière notre cellule, ils nous ont obligé à

 19   creuser des trous de deux mètres de profondeur. Ils avaient quelques deux

 20   mètres de long et 1,60 mètres de largeur. Ils avaient placé des planches de

 21   bois et cela faisait office de toilette pour nous. Pendant les 60 jours,

 22   j'ai eu la possibilité de me laver une fois vers la fin de mon séjour. Ce

 23   que je vous dis c'est que pendant la période de 60 jours, je n'ai pas pu me

 24   changer et je n'ai pas non plus pu me laver.

 25   Q.  Est-ce que les mêmes conditions prévalaient pour les autres détenus qui


Page 5535

  1   se trouvaient dans cette cellule ?

  2   R.  Il y avait trois cellules. Ces conditions étaient valables pour tous

  3   les détenus. La situation était exactement la même pour toutes les

  4   personnes qui se trouvaient dans les cellules.

  5   Q.  A la suite de votre détention dans la prison de Sanski Most, avez-vous

  6   maigri ?

  7   R.  J'ai maigri de 32 kilos pendant cette période de 92 jours.

  8   Q.  Connaissez-vous un homme qui répond au nom d'Emir Seferovic ?

  9   R.  La plupart des dirigeants ont été capturés et ont été emmenés au tout

 10   début de la période. Hasan Kamber, qui était le secrétaire du parti, et

 11   Emir Seferovic, qui était une personnalité religieuse, ont été amenés dans

 12   la troisième cellule, quelques 20 jours plus tard. Lorsqu'ils sont arrivés,

 13   c'est Seferovic qui avait le plus souffert parce que c'était une

 14   personnalité religieuse. Ils le faisaient sortir beaucoup plus que nous

 15   pour lui donner des vivres. En fait, ces vivres c'étaient les restes des

 16   plats destinés aux officiers et, la plupart du temps, il s'agissait de

 17   viande de porc. On lui donnait cette viande de porc et le forçait à manger

 18   de la viande de porc. Ils se moquaient de lui. Ils le bafouaient. Ils le

 19   ridiculisaient, en disant : "Regardez le Hodza, regardez comment il mange

 20   de la viande de porc."

 21   Q.  C'était un Hodza qui venait d'un village ou de Sanski Most ?

 22   R.  Il venait de Vrhpolje.

 23   Q.  Pendant votre période de détention et pendant la période de détention

 24   de M. Seferovic et d'autres, est-ce que d'autres détenus ont été passés à

 25   tabac ?


Page 5536

  1   R.  Oui. C'était une pratique quotidienne. N'importe qui pouvait nous

  2   passer à tabac. Nous bénéficions d'un traitement spécial et conformément

  3   aux règles, seule la personne responsable avait les clés. Mais toutefois

  4   après les heures de travail, ils emmenaient les soldats et ces soldats nous

  5   passaient à tabac. Cela était notamment valable pour Seferovic parce qu'ils

  6   sont arrivés après nous. Seferovic et un autre homme, Komber.

  7   Q.  Qui était responsable de ces passages à tabac ? Est-ce que vous pouvez

  8   identifier l'unité à laquelle appartenaient ces personnes qui vous

  9   passaient à tabac ?

 10   R.  Nous ne savions qui elles étaient. Toute personne qui voulait nous

 11   passer à tabac le faisait.

 12   Q.  Est-ce qu'il s'agissait de civils, de soldats, de membres de la

 13   police ? Est-ce que vous pouvez peut-être éclairer notre lanterne et nous

 14   dire à quelles unités appartenaient ces personnes ?

 15   R.  Ces hommes portaient l'uniforme militaire.

 16   Q.  Est-ce qu'à un moment donné, au cours de votre détention à la prison de

 17   Sanski Most, vous avez eu l'occasion d'examiner M. Emir Seferovic, le

 18   hodza ?

 19   R.  Je vous l'ai déjà dit, nous avons bénéficié d'un traitement spécial. En

 20   15 minutes, nous devions sortir, déjeuner et aller à la toilette et nous

 21   devions rentrer aussitôt dans les cellules. Les cellules étaient

 22   verrouillées ou une cellule était verrouillée et une autre était ouverte.

 23   La Croix rouge internationale est venue. Un de ses représentants est venu

 24   et nous avons eu l'autorisation de sortir dans la cour, un après l'autre.

 25   Ils nous ont emmenés dans la cellule où il y avait ce représentant et nous


Page 5537

  1   avons pu lui parler.

  2   Cette fois-là, j'ai vu Emir et il a dit qu'il avait mal à la

  3   mâchoire. Sa mâchoire avait été brisée et il lui était impossible de fermer

  4   la bouche. Je suis dentiste de profession, j'ai pu m'approcher de lui pour

  5   l'examiner. J'ai vu que la mandibule avait été brisée et que l'os était

  6   brisé et que c'était ce qui expliquait ses douleurs. Mais je n'ai rien pu

  7   faire d'autre. J'ai pu simplement constater que sa mâchoire avait été

  8   brisée.

  9   Q.  Est-ce que vous avez revu, M. Seferovic par la suite ?

 10   R.  Pas vivant.

 11   Q.  Passons à la pièce suivante, la pièce de l'Accusation 277, je pense.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien cela.

 13   M. HARMON : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez ici une constatation d'identification d'un corps. Cela s'est

 15   fait le 2 juin 1998 à Sanski Most. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que

 16   représente ce document et pouvez-vous relater aux Juges les circonstances

 17   dans lesquelles ce document a été rédigé ?

 18   R.  J'ai le document en anglais. Est-ce qu'il y a une traduction en B/C/S ?

 19   Oui, c'est bien cela. Je vois l'original, c'est le constat que j'ai

 20   rédigé. Il y est apparu que dans le village de Trnovo, il y avait un

 21   cimetière. On y a retrouvé deux corps. Asim Kamber, le frère d'Hasan

 22   Kamber, m'a demandé si je pouvais me rendre sur les lieux pour identifier

 23   les corps. J'ai dit que oui et j'ai vu que l'un des corps avait la

 24   mandibule brisée. Il m'a demandé si c'était le corps de son frère. Lorsque

 25   j'ai examiné les corps, j'ai vu qu'il y avait une fracture de la mâchoire


Page 5538

  1   gauche et j'ai dit que c'était le Efendi hodza. Lorsque j'ai examiné le

  2   deuxième corps, lorsque nous l'avons fait, nous avons vu qu'il y avait un

  3   certificat de la Croix rouge.  Nous avons vu que le premier, c'était le

  4   secrétaire qui avait aussi une fracture à la mâchoire gauche, mais, lorsque

  5   j'ai examiné Emir, il avait une fracture de chaque côté de la mâchoire.

  6   Q.  Ce que nous avons ici, c'est le constat officiel de l'identification de

  7   M. Emir Seferovic ?

  8   R.  Oui. C'est un constat officiel.

  9   Q.  Restons sur cette question. Pendant votre séjour à la prison de Sanski

 10   Most, est-ce que vous avez eu l'occasion de voir des dirigeants serbes de

 11   Bosnie qui effectuaient une visite à la prison ?

 12   R.  Je vous l'ai dit. Nous, nous étions dans un angle de la cour et il y

 13   avait une cuisine où mangeaient les soldats, les policiers et les

 14   officiers. Nous avons vu au départ, Nedeljko Rasula qui allait manger. Nous

 15   n'avons pas eu de contact avec lui, puisqu'il se trouvait dans la cuisine.

 16   Q.  Est-ce qu'il était à même de voir les détenus ?

 17   R.  Bien sûr.

 18   Q.  Auparavant, lorsque vous avez parlé de la prison, vous avez dit qu'à

 19   votre arrivée, il y avait beaucoup d'intellectuels. Avez-vous dit qu'ils

 20   étaient à la prison de Sanski Most ? Qu'est-ce que vous voulez dire lorsque

 21   vous parlez d'intellectuels ?

 22   R.  Je veux dire des gens qui ont fait des études universitaires.

 23   Q.  Les détenus de la prison de Sanski Most, est-ce que c'étaient des

 24   dirigeants de communauté non-serbe ?

 25   R.  Il y avait les dirigeants du SDA, des intellectuels qui n'avaient rien


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  1   à voir avec le parti aussi.

  2   Q.  Quel fût le sort réservé aux dirigeants, aux personnalités importantes

  3   de la communauté non-serbe de Sanski Most ?

  4   R.  Bon nombre d'entre eux ont été tués. Tous ont été chassés de Sanski

  5   Most.

  6   Q.  Savez-vous pourquoi ces gens ont été tués ?

  7   R.  Sans doute voulaient-ils, à Sanski Most, une région qui soit pure sur

  8   le plan ethnique.

  9   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges où vous êtes allé après avoir quitté la

 10   prison de Sanski Most ? Quand êtes-vous parti de la prison ?

 11   R.  Le 27 août vers dix heures. Un officier de permanence est venu nous

 12   dire de prendre nos affaires car nous allions quitter les cellules, et

 13   lorsque nous sommes sortis, nous avons vu qu'il y avait des gens qui

 14   sortaient des autres cellules. Un autocar avait été emmené dans la cour. On

 15   a ouvert les portes et on nous a dit de monter, un à un, et de nous asseoir

 16   dans ce véhicule.

 17   Q.  Il y avait combien de personnes qui sont ainsi montées dans ce

 18   véhicule ?

 19   R.  Une douzaine, je dirais à ce moment-là. Nous parlons de ces gens qui

 20   ont eu ce traitement spécial.

 21   Q.  Une fois à l'intérieur du bus, où êtes-vous allés ?

 22   R.  Lorsque nous sommes monté dans le bus, d'abord nous sommes allé à la

 23   prison de Krinks. C'était un endroit dans la zone industrielle où il y

 24   avait beaucoup de détenus. Ils avaient été détenus comme nous et c'est

 25   alors que nous avons été emmenés à Manjaca.


Page 5540

  1   Q.  Auparavant, dans le cadre de votre déposition, vous avez dit que vous

  2   aviez trois fils. Pourriez-vous nous dire ce que vos fils faisaient ? Quel

  3   était leur emploi à ce moment-là, c'est-à-dire, en mai 1992 ?

  4   R.  Mon fils aîné, Haris, était dentiste. Il avait son cabinet à Sanski

  5   Most. Edin et Nedim, des jumeaux, avaient commencé à étudier la

  6   stomatologie à la faculté de science dentaire et ils étaient dans leur

  7   quatrième année.

  8   Q.  En mai 1992, est-ce qu'ils ont été arrêtés ?

  9   R.  On a rassemblé les gens à Sanski Most. J'ai été emmené à la prison,

 10   alors que mes fils ont été amenés dans ce hangar.

 11   Q.  Qu'est-ce qui est arrivé à vos trois fils ?

 12   R.  Mon fils aîné, Haris, et l'un des jumeaux, Nedim, ont été emmenés le 6

 13   juin. Ils se trouvaient dans le premier convoi qui est allé à Manjaca. Le

 14   premier convoi organisé. Ils ont été amenés en camion et quand ils sont

 15   arrivés sur les lieux, il y avait des passages à tabac partout. Je pense

 16   que six ou sept de nos concitoyens étaient en train d'être battus. Mon

 17   fils, Haris Biscevic, a été appelé et il a été emmené dans un camion. On

 18   les a faits partir de Manjaca et on ne sait toujours où tous ces hommes

 19   sont partis.

 20   Q.  Est-ce que vous avez reçu des nouvelles de votre fils depuis ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Qu'est-il advenu de votre autre fils ?

 23   R.  L'autre, il est resté à Sanski Most. Le 7 juillet, lors d'un dernier

 24   rassemblement, six camions ont formé un convoi pour aller à Manjaca. Il se

 25   trouvait dans un des camions qui allait chercher des détenus de Betonirka.


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  1   Il y avait une bâche qui était fermée, alors que les autres camions étaient

  2   des camions sans bâche. Ils avaient été rassemblés à 10 heures. Ils ne sont

  3   seulement arrivés à 17 heures à Manjaca. On les a gardés sous cette bâche

  4   pendant toute la journée sans air sans eau. Les gens suffoquaient en masse

  5   sous cette bâche, mais mon fils était dans un autre camion. A leur arrivée

  6   à Manjaca,lorsqu'on s'est rendu compte que des gens avaient été asphyxiés,

  7   les administrateurs du camp étaient pris de panique, mais il y en avait

  8   quatre qui montraient encore des signes de vie, et ils appelaient à l'aide.

  9   Mon fils étant médecin, il a réagi, et il a essayé de leur rendre la vie en

 10   faisant la respiration artificielle. Mon fils a été après remis dans un

 11   camion. Ils ont été emmenés dans une direction inconnue. Nous avons trouvé

 12   un cimetière où ceux qui avaient été asphyxiés avaient été enterrés et ces

 13   quatre qui avaient survécu ainsi que mon fils, on ne sait toujours pas où

 14   ils sont.

 15   Q.  Comment s'appelle ce fils ?

 16   R.  Edim Biscevic.

 17   Q.  Une nouvelle pièce.

 18   M. HARMON : [interprétation] Excusez-moi, Madame la Greffière

 19   --

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P278. La version

 21   en anglais portant la cote 278.1.

 22   M. HARMON : [interprétation]

 23   Q.  Cette pièce montre votre troisième fils, Nedim Biscevic, pourriez-vous

 24   nous expliquer dans quelles circonstances ce document a été rédigé ?

 25   R.  Il arrivait que des officiers viennent de Banja Luka au camp. Ils


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  1   faisaient l'appel de certains détenus qui devaient sortir. Mon fils s'est

  2   trouvé parmi ceux qui ont été appelés. Je n'étais pas là à ce moment-là.

  3   Ces hommes ont été placés dans une voiture. Kupresanin, qui était le

  4   président de l'assemblée de la Krajina, était le responsable et ils l'ont

  5   emmené chez ma sœur à Banja Luka.

  6   Q.  Est-ce que vous avez obtenu une copie de ce document de votre fils ?

  7   R.  Oui. C'est un document officiel qui dit qu'il a été libéré du camp de

  8   Manjaca. On voit la signature du responsable qui a donné l'autorisation.

  9   Q.  Sur ces fils que vous avez, c'est ici, le seul qui ait  survécu à

 10   la guerre.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pourriez-vous en quelques mots parler de ce qui est arrivé à votre

 13   femme à cette époque-là ?

 14   R.  Je vous l'ai dit, ils ont tous été rassemblés à Sanski Most. Elle a été

 15   emmenée à Krinks et c'est de là qu'on a pris les femmes et les hommes de

 16   plus de 60 ans, qu'on les a mis dans des bus pour aller à Bosanska Krupa.

 17   Elle est arrivée à Velika Kladusa où elle a dû passer cinq mois, après

 18   quoi, elle a été emmenée en Croatie.

 19   Q.  Vous êtes resté a Manjaca jusqu'à quand ?

 20   R.  Jusqu'à la fin du mois d'août.

 21   Q.  Avant d'être relâché de Manjaca, est-ce qu'on vous a présenté un

 22   formulaire -- un document que vous étiez censé signé ?

 23   R.  Non, cela n'a pas été le cas pour moi. Mais tout le monde a dû signer

 24   un document, disant qu'on ne pouvait pas rentrer en Bosnie car, si on

 25   revenait en Bosnie, on allait être tué.


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  1   Q.  Qui vous a remis ce document ?

  2   R.  C'était un responsable du camp.

  3   Q.  Est-ce que vous êtes depuis retourné dans la municipalité de Sanski

  4   Most ? Est-ce que vous y habitez aujourd'hui ?

  5   R.  Aussitôt après la libération, je suis rentré à Sanski Most. Je parle de

  6   la libération de Sanski Most, et c'est là que je vis aujourd'hui.

  7   Q.  Je vais vous montrer une pièce, la P209.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans l'intervalle, je voudrais demander

  9   des précisions au témoin. Vous avez dit, Monsieur, être resté à Manjaca

 10   jusqu'à la fin du mois d'août. Si je vous ai bien compris, vous êtes arrivé

 11   à Manjaca le 27 août. Est-ce que cela veut dire que vous n'y avez passé que

 12   quelques jours ?

 13   LE TEMOIN : [interprétation] Non, non, jusqu'au mois de novembre, jusqu'au

 14   mois de novembre. C'était un lapsus.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. C'est maintenant plus clair.

 16   M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour que tout soit clair, la pièce 209,

 18   nous en avons parlé vendredi. Elle n'est plus confidentielle, n'est-ce pas,

 19   sous pli scellé ?

 20   M. HARMON : [interprétation] C'est exact. Je ne sais pas si la Défense

 21   dispose d'un exemplaire. Si ce n'est pas le cas, on pourra peut-être mettre

 22   sur le rétroprojecteur la version en anglais afin que la Défense voie ce

 23   document lorsque je pose mes questions au témoin. Monsieur l'Huissier,

 24   placez sur le rétroprojecteur la page de garde de ce document pour que la

 25   Défense la voie, puis tournez la page et placez la deuxième page sur le


Page 5544

  1   rétroprojecteur.

  2   Q.  Veuillez examiner ce document, Monsieur Biscevic. Il a déjà été

  3   versé au dossier. Il a été préparé en mai 1993 par le ministère de

  4   l'Intérieur de la Républika Srpska. C'est une liste de citoyens qui ont été

  5   déplacés et envoyés dans la zone couverte par le secteur. Vous voyez, sous

  6   la rubrique Sanski Most, page 2. A la rubrique IV, on voit : "Déplacés

  7   24 000 Musulmans; 3 000 Croates; serbes installés, 5 000." Est-ce que c'est

  8   là le reflet fidèle de la situation ? Je parle du nombre de non-Serbes qui

  9   ont été expulsés de la municipalité de Sanski Most.

 10   R.  Oui, je pense que ce sont là des chiffres tout à fait précis.

 11   Q.  Fort bien, merci. Passons à un autre sujet, la question des

 12   établissements consacrés à la religion qui existaient à Sanski Most avant

 13   le début du conflit en mai 1992. Combien y avait-il, à peu près, de

 14   mosquées et d'églises catholiques dans la municipalité de Sanski Most ?

 15   R.  Il y avait 26 mosquées, quatre églises catholiques, que toutes

 16   ont été totalement détruites. Pas une seule église serbe n'a été détruite

 17   jusqu'à ce moment-là et après la libération.

 18   Q.  Lorsque vous avez été arrêté et emmené sur les hauteurs, là où

 19   vous avez rencontré le colonel Basara, là où vous pouviez voir les villages

 20   dans la vallée, est-ce que vous avez pu voir une mosquée qui avait été

 21   détruite ?

 22   R.  Le commandant Vukic m'a posé la question. Il m'a dit : "Est-ce

 23   que tu vois la mosquée de Trnovo ?" On la voyait de partout. J'ai dit :

 24   "Non." Il m'a dit : "Et bien, tu ne la verras plus jamais parce qu'elle a

 25   été détruite."


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  1   Q.  Avant le pilonnage du quartier de la Mahala, avant l'attaque de

  2   Sanski Most, est-ce qu'elle était intacte cette mosquée ?

  3   R.  Oui, bien sûr.

  4   Q.  Une dernière chose -- un dernier sujet. Veuillez confirmer certaines

  5   pertes. Parlons de l'effet que ces crimes ont eu sur vous, sur des membres

  6   de votre famille. Parlons de pertes matérielles que vous avez subies. Si

  7   j'ai bien compris - vous me corrigerez si j'ai tort - vous étiez un homme

  8   bien nanti avant le conflit à Sanski Most, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je voudrais énumérer des éléments d'une liste, et je vous demanderais

 11   simplement de confirmer ce que je dis. Pertes matérielles, il y avait,

 12   notamment, votre maison, votre cabinet dentaire et votre équipement

 13   dentaire de l'installation qui soient -- ont été détruites ou incendiées.

 14   Vous aviez une bijouterie. Elle a été pillée et incendiée. Vous aviez de

 15   l'or pour une valeur de 200 000 marks. Cela faisait partie de ce que vous

 16   aviez dans la bijouterie. Cela a été volé. Vous aviez aussi une résidence

 17   sur la rivière, elle a été pillée. Vous aviez une ferme avec deux maisons

 18   et deux étables. Ces bâtiments ont été pillés et détruits. Vous aviez

 19   beaucoup de bétail, 130 moutons, 60 chèvres, trois vaches, 600 poulets,

 20   deux veaux, cinq chiens, tous détruits et tués. Vous aviez de l'équipement

 21   agricole, un camion, un tracteur et d'autres équipements agricoles volés.

 22   Vous aviez un bus volé. Vous aviez une Mercedes, une Fiat, deux jeeps,

 23   autant de véhicules qui ont été volés. Ces pertes matérielles sont évaluées

 24   à environ un million de marks allemands. C'est bien cela ?

 25   R.  Au moins -- au bas mot.


Page 5546

  1   Q.  Vous avez parlé de la perte tragique de deux de vos fils, au cours de

  2   ces événements. Pourriez-vous, si vous le voulez, bien sûr, parler de

  3   l'effet que la perte de deux de vos fils a eu sur vous et sur les membres

  4   de votre famille qui ont survécu.

  5   R.  Il faut bien vivre. Après ce qu'on a vécu dans les camps, la terreur,

  6   on n'est pas mort. Mais c'est à peu près la même chose, c'est pire encore.

  7   Les enfants ne sont plus là, c'est pire encore. On ne sait pas où ils sont.

  8   Si au moins on pouvait les enterrer comme des êtres humains, des gens

  9   normaux. On suit les nouvelles qui parlent de fosses communes. J'étais un

 10   homme riche. Après avoir quitté le camp, maintenant je dois vivre et je ne

 11   puis vivre qu'avec des médicaments.

 12   Q.  Quel a été l'effet de cette tragédie sur votre femme ?

 13   R.  Elle subit cela stoïquement. Elle pèse 45 kilos aujourd'hui et

 14   elle vit comme elle peut.

 15   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges qu'elle fut l'effet de c'est crimes sur le

 16   tissus social de Sanski Most ?

 17   R.  Nous buvions et nous avirons des rapports tout à fait harmonieux dans

 18   une communauté pluriethnique. J'avais beaucoup de Serbes parmi mes amis.

 19   J'avais une famille mixte. La fille de ma sœur avait épousé un Serbe.

 20   C'était tout à fait normal. Aujourd'hui, ces liens sont rompus. On commence

 21   petit à petit à renouer des liens ou à établir un contact. Des gens

 22   rentrent chez eux, réintègrent leur foyer, personne ne les embête, mais ils

 23   peuvent vivre librement à Sanski Most.

 24   Mais ceux qui ont commis des crimes, ils ne peuvent pas rentrer tout

 25   simplement. Leurs maisons sont abandonnées. C'est horrible à voir. Les


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  1   retraités n'ont pas d'argent et ils vivent comme ils peuvent survivre dans

  2   leurs maisons et ils n'ont pas de couverture et ils ont des espèces -- ils

  3   n'ont pas de retraite non plus. Je pense que ceux se remettent peu à peu,

  4   mais cela va durer longtemps.

  5   Q.  Quel a été l'effet de ces crimes sur la communauté serbe de Sanski

  6   Most ? Qu'est-ce que vous pouvez en dire aujourd'hui ?

  7   R.  Si les dirigeants serbes, qui se trouvaient dans cette zone de la

  8   Fédération, s'ils pouvaient rentrer à Sanski Most, cela me plairait. A ce

  9   moment-là, ces gens verraient ce qui s'est passé parce que ceux, qui ne

 10   sont pas coupables, en subissent les conséquences aujourd'hui. Ils ne

 11   supportent pas les dirigeants qu'ils avaient alors et je voudrais que ceux-

 12   là, les dirigeants viennent voir ce qu'ils ont fait à leur propre

 13   communauté, aux Serbes. Je suis chasseur et, la semaine dernière -- la

 14   semaine dernière, il y a un homme qui a trouvé la mort dans un village

 15   serbe. Un homme a enterré cet homme qui était mort et -- il est resté

 16   debout, là toute la journée. Il y a un homme qui est resté mort, sans vie,

 17   toute la journée et il n'y avait personne pour l'enterrer. Cela c'est la

 18   faute de ces dirigeants-là, c'est cela qu'ils ont fait à leur communauté.

 19   Q.  Je n'ai pas d'autres questions à poser. Ceci met fin à mon

 20   interrogatoire principal.

 21   Je vous remercie, Monsieur Biscevic.

 22   R.  C'est moi qui vous remercie.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Biscevic, voudriez-vous qu'on

 24   fasse une petite pause, ou est-ce que vous êtes en mesure de continuer ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, continuons. Il n'y a pas de


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  1   problème.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  3   Maître Stewart, est-ce que vous êtes prêt à commencer votre contre-

  4   interrogatoire ?

  5   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que, de toute

  6   façon, M. Biscevic devrait quitter le prétoire.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que vous avez une question à

  8   aborder.

  9   Monsieur l'Huissier -- Monsieur Biscevic, nous avons une question de

 10   procédure à régler que souhaite poser Me Stewart ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problème.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande de quitter le prétoire

 13   quelques instants. Vous pouvez revenir dès que cette question est réglée.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problème.

 15   [Le témoin se retire]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, je vous écoute.

 17   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'allais justement

 18   soulever cette question, qui a été soulevée un peu avant que le témoin ne

 19   commence sa déposition de ce matin. Je reconnais tout à fait pour ce qui

 20   nous concerne qu'il y a maintenant trois versions. Au moins, il y a la

 21   déclaration originale, il y a celle qu'il a fournie pendant le weekend et

 22   une troisième version, celle qu'il a dit -- ces trois versions -- de ce

 23   matin. Ce qu'il a dit ce weekend correspond à ce qu'il a dit ce matin, mais

 24   je dirais que ce qu'il a dit, ce matin et pendant le weekend, est bien

 25   différent de ce qu'il avait dit dans sa déclaration. Je n'ai absolument


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  1   aucune raison de critiquer M. Harmon pour le travail fait pendant le

  2   weekend.

  3   Je comprends très bien que de nouveaux éléments ont surgi pendant le

  4   weekend et c'est que M. Harmon a dit c'est qu'il a fait ce qu'il a pu faire

  5   pendant le weekend. Je ne veux pas du tout contester son travail et

  6   critiquer son travail, mais je voulais simplement dire que, lorsque ce

  7   genre de chose survient, c'est-à-dire, l'Accusation pourrait prendre le

  8   téléphone et parler au témoin -- je sais que nous avons des contraintes

  9   financières, mais cela peut se faire très bien aussi. Ce que j'essaie de

 10   dire, c'est que le fait que les demandes doivent être faits et que les

 11   enquêtes doivent être faites, et que le fait que ce témoin a fait en sorte

 12   que nous devons maintenant revoir la façon dont nous allons poser les

 13   questions, nous avons des éléments de preuve en partie et il faut bien sûr

 14   pouvoir s'ajuster maintenant à ce qu'il a dit. Mais nous devrions pouvoir

 15   avoir la possibilité d'évaluer notre contre-interrogatoire avant

 16   l'interrogatoire du témoin, c'est-à-dire que nous nous étions maintenant

 17   préparés conséquemment suivant la première déclaration. Je crois que la

 18   communication est très importante et il est tout à fait possible de faire -

 19   - d'avoir des contacts avec ces personnes. Nous avons vu que cela ne prend

 20   pas plus d'un jour ou deux. Il y a bien sûr la traduction, mais nous avons

 21   trouvé que normalement cela prend un ou deux jours pour recueillir des

 22   déclarations de témoins. Des fois c'est plus rapide que d'autrefois, cela

 23   dépend si les personnes ont besoin de voyager.

 24   Mais, Monsieur le Président, cela nous met dans une position dans laquelle

 25   nous ne pouvons pas poursuivre le contre-interrogatoire de ce témoin,


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  1   c'est-à-dire que, pendant cette session matinale ou pendant cette session,

  2   bien sûr, matinale pendant cette période, nous allons, bien sûr, reprendre

  3   le 20 septembre.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Harmon.

  5   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, deux commentaires. Il y

  6   a des parties dans la déclaration qui ont trait aux élections et la façon

  7   dont les choses ont été faites, enfin tout ce qui a été fait menant aux

  8   parties, aux élections multipartites, tout ce qui avait été fait pour

  9   prendre le pouvoir d'une élection municipale, le MUP, la guerre en Croatie

 10   et ses effets, l'arrivée de l'armée à Sanski Most, ce qui a été le sujet de

 11   témoignages très longs fournis par plusieurs témoins avant d'autres

 12   témoins.

 13   Si le Témoin 68, je me souviens très bien, a témoigné -- également, un

 14   grand nombre de témoins -- et le Témoin 628 en a parlé énormément. Il y a

 15   également la question de la campagne de désarmement et le Témoin 628 en a

 16   parlé longuement et il y a également la discrimination menée contre les

 17   non-Serbes. J'attire votre attention sur le témoignage du témoin et les

 18   circonstances dans lesquelles M. Biscevic s'est fait arrêter, et la

 19   déclaration qu'il avait donnée par force, qu'il a été obligé de donner à la

 20   radio et, également, dans les conditions dans lesquelles il a passé ses

 21   détentions. La Défense a eu tous ces éléments-là, pendant une période très

 22   longue, les conditions qui prévalaient au camp de Manjaca, ce qui se

 23   passait également au camp de Manjaca. Tout ceci est fourni en détail. Il y

 24   a un grand nombre de questions que l'on peut poser dans le cadre d'un

 25   contre-interrogatoire puisque la Défense avait tous ces éléments en sa


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  1   possession depuis bien longtemps.

  2   Maintenant, il y a aussi les déclarations de M. Biscevic, et ce que M.

  3   Stewart a dit, en bas de la page 3, il a dit : "Les dirigeants du SDS

  4   recevaient des ordres de leurs supérieurs." Cela n'a pas changé pour ce qui

  5   est du témoignage. "Les dirigeants politiques de Banja Luka non plus, ni

  6   les autres visiteurs hauts gradés, ne sont venus à ces réunions qui ont eu

  7   lieu avec le SDS." Cela n'a pas changé non plus. "J'ai conclus que les

  8   dirigeants locaux se sont rendus à Banja Luka pour des réunions, mais je ne

  9   peux pas attester, je ne peux pas donner plus de détails là-dessus."

 10   Effectivement, il n'a pas donné d'autres détails concernant les réunions

 11   qui ont eu lieu à l'extérieur de Sanski Most.

 12   Tout ceci pour dire qu'il y a peut-être une certaine différence quant

 13   aux nuances, mais l'essentiel du témoignage du témoin d'aujourd'hui ne

 14   diffère pas de ce qu'il a dit lors de ses déclarations initiales. Je ne

 15   vois pas pourquoi on devrait reporter le contre-interrogatoire de ce

 16   témoin, et notre position demeure très claire. Nous estimons que le contre-

 17   interrogatoire de ce témoin doit se poursuivre aujourd'hui, eu égard plus

 18   particulièrement au fait que je ne vois pas pourquoi la Défense se sent à

 19   un tel désavantage lorsqu'ils ont reçu ce matin une feuille d'informations

 20   supplémentaires. J'ai compris que l'audition était prévue pour aujourd'hui.

 21   Nous ne siégerons pas demain si j'ai bien compris. Je comprends très bien

 22   que les membres de la Chambre de première instance ne sont pas disponibles

 23   demain. Je ne suis pas non plus disponible pour ce qui est du reste de la

 24   semaine. C'est la raison pour laquelle j'estime que le contre-

 25   interrogatoire doit se poursuivre aujourd'hui, doit continuer, et nous


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  1   devrions couvrir le plus que possible aujourd'hui. S'il y a quelques

  2   questions, simplement qui restent à être débattues plus tard, s'il faut

  3   mener une enquête, nous pourrions reporter certaines parties à plus tard.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  5   M. STEWART : [interprétation] Ce qui a été dit textuellement, initialement

  6   et maintenant, n'est pas la question. Je me suis référé à ce paragraphe

  7   précisément car, si j'ai bien compris avant que ce témoin ne dépose, il y

  8   avait une différence très claire. Mais même sans ce paragraphe, qui se

  9   trouve au bas de la déclaration, il s'agit de quelque chose de tout à fait

 10   nouveau, et il s'agit de nouveaux éléments de preuve. Je ne m'adonne pas

 11   maintenant à une analyse textuelle. C'est complètement autre chose. Comme

 12   vous avez reconnu ce matin, il est tout à fait clair qu'il y a un tournant

 13   de 180 degrés et que ce témoin devient un témoin qui témoigne sur d'autres

 14   éléments qui sont beaucoup plus critiques. Comme je vous ai dit, il y a

 15   quelques instants, Monsieur le Président, c'est tout à fait inapproprié de

 16   compartimenter le contre-interrogatoire. Il y a plusieurs questions que

 17   l'on ne peut pas poser subséquemment. Vous savez très bien, Monsieur le

 18   Président, que chaque témoin se voit évaluer sa crédibilité dans le cadre

 19   d'un contre-interrogatoire. Maintenant, si un témoin change de catégorie et

 20   si l'essentiel de son témoignage change maintenant, outre d'obtenir

 21   l'information nécessaire, il faut, bien sûr, revoir cet aspect-là de la

 22   question également. Si, préalablement, il y avait des questions que l'on ne

 23   souhaitait pas poser, si tout d'un coup maintenant, il y a de nouvelles

 24   questions qui demandent à ce que l'on commence à poser des questions sur un

 25   autre champ, bien sûr, cela change tout pour ce qui est du temps.


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  1   Malheureusement, nous nous trouvons ici sans la possibilité même si je

  2   trouve que c'est malheureux même s'il nous avait été possible de continuer

  3   un peu plus tard pendant la semaine, mais cela laisserait toujours cette

  4   question en suspend, à savoir si le témoin doit rester ici ou repartir.

  5   Mais, en fait, la question est toute autre. Nous ne pouvons pas reprendre

  6   l'audience. Ce n'est pas simplement d'une question d'une heure ou plus pour

  7   obtenir l'information. Nous pourrons certainement consulter notre client,

  8   M. Krajisnik, et nous pouvons obtenir des éléments d'information de la

  9   bouche de notre client. Nous pouvons le faire mais ce n'est pas la façon

 10   appropriée de faire les choses. Là, n'est pas la question. La question est

 11   que nous avons besoin de beaucoup de temps pour faire nos demandes pour

 12   enquêter auprès de nos collaborateurs dans la Republika Srpska. C'est de ce

 13   temps-là que je parle. Il se fait certain que nous allons devoir nous

 14   pencher là-dessus, mais cela ne peut pas être fait en quelques heures.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 16   La Chambre a présent se retirera pour débattre de cette question et

 17   prendre une position là-dessus. Mais, ce matin, lorsque j'ai fait une

 18   observation concernant le tournant de 180 degrés, nous ne savions pas quel

 19   serait le témoignage du témoin à venir. Toutefois, je comprends qu'à ce

 20   moment-ci, dans les déclarations du témoin, le témoin avait dit que les

 21   dirigeants du SDS recevaient des ordres de leurs supérieurs, alors que,

 22   dans la feuille des renseignements supplémentaires, il dit, en parlant des

 23   dirigeants du SDS -- il a dit, et je cite : "Que, très souvent, lorsqu'une

 24   décision devait être prise, il disait aux négociateurs qu'ils ne pouvaient

 25   pas décider par eux-mêmes, mais qu'ils avaient besoin de consulter d'autres


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  1   personnes;" alors que, dans son témoignage d'aujourd'hui, le témoin dit,

  2   concernant ces consultations, qu'il présumait qu'il s'agirait de quelqu'un

  3   de son parti. Par contre, plus tard, il s'est avéré que ce n'était pas

  4   quelqu'un de son parti, mais qu'il s'agissait de quelqu'un d'autre. Même

  5   si, lorsqu'on lui a posé la question, il a répondu, en disant qu'il n'avait

  6   jamais découvert qui c'était, mais, si je comprends bien, ce n'était pas

  7   quelqu'un du parti.

  8   Je crois que ce sont les trois positions qui ont changé, et c'est cela qui

  9   a changé dans la feuille de renseignements supplémentaires.

 10   M. STEWART : [interprétation] J'aimerais faire une observation.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 12   M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le

 13   Président. Je voudrais faire une autre observation s'agissant du contre-

 14   interrogatoire de ce témoin. Je devrais lui poser des questions concernant

 15   les écarts qui figurent dans les trois déclarations : celle d'aujourd'hui,

 16   celle de ce weekend et celle de la dernière déclaration qu'il a fournie par

 17   écrit.

 18   Je ne peux pas commencer le contre-interrogatoire de ce témoin et je

 19   ne peux pas commencer à parler des écarts de ce qu'il a dit pendant le

 20   weekend, ce matin, sans que j'aie eu la possibilité de trouver quelle est

 21   notre position à nous, quelles sont mes instructions. Je ne peux pas

 22   prendre le risque d'explorer ces questions sans savoir quelle est notre

 23   position à nous aux membres de l'équipe de la Défense, et quelle est

 24   l'information à la réponse que j'obtiendrais suite aux demandes faites aux

 25   questions posées concernant ces écarts.


Page 5555

  1   [Là Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons nous retirer à présent, et

  3   la Chambre statuera sur la question du contre-interrogatoire de la Défense

  4   du témoin.

  5   --- La pause est prise à 12 heures 14.

  6   --- La pause est terminée à 12 heures 34.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre accorde la requête de M.

  8   Stewart et lui accorde la possibilité de remettre le contre-interrogatoire

  9   à une étape ultérieure. Mais je dois ajouter qu'une nouvelle information

 10   apparaisse sur une feuille, une information supplémentaire. Même s'il était

 11   nécessaire de faire des demandes supplémentaires ou de faire une enquête

 12   concernant ces nouveaux éléments, cela ne veut pas dire qu'il faut, à

 13   chaque fois, remettre le contre-interrogatoire. Les commentaires faits --

 14   des commentaires d'ordre général faits concernant le fait de compartimenter

 15   le contre-interrogatoire, que cela ne serait pas acceptable, de façon

 16   générale. Ce n'est pas le point de vue de la Chambre.

 17   Pour l'avenir, si cela survient de nouveau -- si une telle situation se

 18   présente de nouveau, cette décision n'est pas contraignante. Elle ne

 19   représente pas un principe général adopté par la Chambre. D'autre part, il

 20   est tout à fait clair également que la Défense n'a pas eu la possibilité de

 21   vérifier certaines choses ou de vérifier avec les personnes avec lesquelles

 22   le témoin aurait pu négocier et parler à l'époque. Comme il n'a pas eu la

 23   possibilité de vérifier auprès des participants si de telles négociations,

 24   de telles réunions ont eu lieu et ce qu'ils ont dit lors de ces réunions,

 25   c'est la raison pour laquelle la Chambre fait droit à cette requête orale


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  1   présentée par la Défense. Il est tout à fait vrai que l'approche du témoin,

  2   ou plutôt que le contre-interrogatoire pourrait en dépendre et pourrait

  3   être affecter, pourrait se voir affecté par ses nouvelles informations.

  4   La Chambre est d'avis que si la Défense commençait à poser des

  5   questions dans le cadre de son contre-interrogatoire, et que même si la

  6   Défense n'a pas la possibilité de vérifier certaines choses, le témoin

  7   pourrait ne pas répondre précisément. Puisqu'il n'y a pas de raison de

  8   craindre que le témoin ne sera pas rappelé à une étape ultérieure, c'est la

  9   raison pour laquelle la Chambre, de façon générale, serait assez hésitante

 10   à renvoyer quelqu'un pour le faire rappeler plus tard, mais, eu égard à la

 11   situation, notre situation d'aujourd'hui et aux considérations pratiques,

 12   la Chambre a que ces droit à cette requête orale de la Défense.

 13   Je souhaiterais maintenant que l'on fasse entrer le témoin. Je vais

 14   lui expliquer brièvement les nouveaux développements.Je l'instruirai en

 15   conséquence de ce qu'il doit faire.

 16   Oui, je vous écoute, Monsieur Harmon.

 17   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je ne savais pas que la

 18   Chambre ferait droit à la requête de la Défense. J'ai néanmoins vérifié

 19   l'horaire. Je voulais simplement vous informer que nous serions disponible

 20   le 30 septembre et le 1er octobre. Ces deux dates que je viens de vous

 21   donner, seraient les deux premières dates qui nous seraient disponibles.

 22   J'apprécierais énormément si la Chambre pourrait informer le témoin que les

 23   membres du bureau de l'Accusation ne peuvent pas s'entretenir avec lui

 24   jusqu'à ce que le contre-interrogatoire ne soit complété. Je crois qu'il

 25   comprendra.


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  1   Je vous remercie.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous dites que les deux

  3   premières dates disponibles sont le 30 septembre et le

  4   1er octobre. Est-ce que vous avez d'autres dates en vue ?

  5   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, ce sont les deux dates

  6   que j'avais en tête puisque je ne crois pas que le contre-interrogatoire

  7   durera plus longtemps.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. L'interrogatoire principal a duré

  9   deux heures et demie. Au début, on nous a dit que l'interrogatoire

 10   principal durerait quatre jours; ensuite, on l'a réduit à deux heures 30.

 11   Je comprends que l'efficacité de 60 % -- ou la règle du 60 % serait peut-

 12   être difficile à appliquer dans cas-ci.

 13   M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Vous nous avez

 14   donné les lignes directrices. Ce que je voudrais dire, c'est qu'il n'est

 15   pas nécessaire de croire qu'une fois cette question éclaircie, que le tout

 16   devrait durer beaucoup plus longtemps. Je crois pouvoir appliquer les

 17   règles du 60 % sans aucun problème.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je crois que -- si nous le

 19   rappelons et que nous l'entendons lors d'une séance matinale, je crois

 20   qu'il sera probablement en mesure de retourner chez lui dans l'après-midi.

 21   Ceci dit, la Chambre n'est pas contrainte par des décisions financières. Ce

 22   n'est pas la raison principale pour laquelle je vais vous dire ce que je

 23   veux dire, mais il ne faut pas nécessairement gaspiller trop de temps ni

 24   d'argent.

 25   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, puisque je suis déjà


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  1   debout, je souhaiterais simplement vous dire que ces dates ne nous causent

  2   aucun problème. Nous avons pris en compte ce que vous avez dit concernant

  3   la compartimentation du contre-interrogatoire. Nous comprenons tout à fait

  4   que vous allez devoir expliquer au témoin la façon dont cela va se

  5   dérouler. Nous vous remercions d'informer le témoin. J'apprécierais que

  6   vous lui disiez seulement l'essentiel.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certainement, je l'informerai de la

  8   raison essentielle pour laquelle nous le ferons revenir.

  9   M. HARMON : [interprétation] Une dernière question avant que le témoin ne

 10   revienne dans le prétoire. M. Stewart nous a informé longtemps avant

 11   l'arrivée du témoin de ce qu'il compte faire pour le restant de la journée.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Stewart, nous vous écoutons.

 13   M. STEWART : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président, je vous

 14   informerai ou j'informerai la Défense de notre prochain témoin.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je présume que le

 16   témoin sera renvoyé chez lui puisqu'il devrait rester 14 jours au moins ici

 17   sinon.

 18   M. HARMON : [interprétation] Je présume qu'il souhaitera regagner sa

 19   demeure.

 20   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On m'informe que la Section pour la

 22   protection des Témoins et des Victimes croyait qu'il s'agissait de la pause

 23   déjeuner, et ont déjà emmené le témoin afin qu'il puisse déjeuner.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre souhaiterait expliquer au

  2   témoin la situation. Bien entendu, nous pourrions attendre 14 heures, et

  3   nous aurons à notre disposition toute une nouvelle équipe d'interprètes et

  4   de techniciens. Il faudrait ensuite qu'ils repartent après cinq minutes. La

  5   Chambre préférerait que les parties restent ici afin que nous puissions

  6   faire venir le témoin au cours des 10 à 15 minutes à venir.

  7   M. STEWART : [interprétation] J'aimerais aborder quelques éléments

  8   rapidement avant que la Chambre ne se retire.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pourrions utiliser utilement ce

 10   temps.

 11   Madame la Greffière d'audience, je suppose que vous allez essayer de faire

 12   en sorte que le témoin revienne, et nous allons pouvoir utiliser ce temps.

 13   M. STEWART : [interprétation] Je vais essayer de parler lentement à

 14   l'intention des interprètes. Dans un premier temps, je voulais juste

 15   préciser un élément. Je vais faire preuve de circonspection lorsque je

 16   m'exprimerai, parce qu'il y a une requête relative à des mesures de

 17   protection pour ce qui est d'un témoin donné. L'autre jour, il y a eu un

 18   certain nombre de discussions à propos de jugements confidentiels et ex

 19   parte. Nous avons compris que M. Tieger disait qu'une décision qui a été

 20   rendue il y a environ quatre ou cinq mois de cela, ne devait pas être

 21   considérée aux fins de cette requête. A l'époque, j'avais dit que cela

 22   n'était pas entièrement clair. J'avais dit que ce n'était pas clair que

 23   personne n'allait utiliser cette décision, si ce n'est, bien entendu,

 24   qu'elle pouvait être reproduite dans le cadre de cette requête. Je dois

 25   vous dire que nous avons un problème, car nous sommes, un tant soit peu,


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  1   préoccupés. Je ne remets absolument pas en question l'intégrité de

  2   quiconque. Pour ce qui est de la requête, à proprement parler, elle fait

  3   référence à la requête ainsi que le fait que la Chambre de première

  4   instance a estimé que le témoin pourrait faire l'objet de représailles, et

  5   cetera, et cetera, ce qui fait que nous sommes, un tant soit peu,

  6   préoccupés à ce sujet, Monsieur le Président. Nous pensons qu'il serait

  7   beaucoup plus judicieux d'en revenir à ce que nous avions dit au départ, à

  8   savoir, nous avions demandé à pouvoir consulter ce document. Nous devons

  9   répondre à cette requête et nous sommes tout à fait disposés à le faire.

 10   Nous souhaiterions pouvoir terminer notre travail à propos de cet élément.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vais essayer de voir ce que nous

 12   pouvons faire. Dans un premier temps, la Chambre de première instance va

 13   essayer d'étudier la question du point de vue de la Défense.

 14   M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque votre réponse devrait être

 16   apportée demain, si nous avons quelques difficultés, nous pourrons examiner

 17   cela cet après-midi et voir si nous pourrons vous transmettre un message

 18   différent.

 19   M. STEWART : [interprétation] Je pense qu'il est important de le faire. Il

 20   est évident que notre travail est déjà fort avancé à ce sujet. Il faudrait

 21   que cela soit fait lorsque le témoin reviendra.

 22   Deuxièmement ou troisièmement, Monsieur le Président, je serai très, très

 23   bref, au sujet justement d'un autre témoin, qui est le témoin 625. Par le

 24   passé, nous avons demandé à maintes reprises s'il y allait avoir un rapport

 25   qui serait présenté.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en fait,

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'en conviens avec vous. Je pense que

  4   nous devons examiner cette question. S'il nous reste cinq à dix minutes

  5   avant que le témoin ne revienne, nous pourrons peut-être passer à huis clos

  6   partiel. Je crois comprendre que nous avons encore dix minutes à notre

  7   disposition. Souhaitez-vous évoquer d'autres éléments, Maître Stewart ?

  8   M. STEWART : [interprétation] Non, j'en ai terminé.

  9   M. HARMON : [interprétation] Pour ce qui est de la requête,

 10   M. Tieger n'est pas présent.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non. Nous traitons maintenant un

 12   autre sujet. Nous allons passer à huis clos partiel. Je pense que le huis

 13   clos partiel sera suffisant.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 12  Page 5562 –expurgée– audience à huis clos partiel.

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 16   [Audience publique]

 17   M. HARMON : [interprétation] Puis-je m'absenter quelques minutes ? Il me

 18   semble que je vais pouvoir intercepter M. Tieger, qui doit être en train de

 19   descendre.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes maintenant en audience

 21   publique.

 22   Le témoin n'est pas encore arrivé. Nous pourrions peut-être avoir une pause

 23   brève, et j'aimerais demander aux parties de rester dans les parages, ce

 24   que la Chambre va également faire, ce qui fait que nous pourrons reprendre

 25   notre audience dès l'arrivée du témoin.


Page 5564

  1   --- La pause est prise à 13 heures 00.

  2   --- La pause est terminée à 13 heures 14.

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Biscevic, je vous présente nos

  5   excuses. A la suite d'un petit malentendu, vous pensiez que vous alliez

  6   pouvoir aller déjeuner, et il semble maintenant que la situation est

  7   différente. Lorsque nous vous avions demandé de quitter le prétoire, la

  8   Défense nous a indiqué, en votre absence, qu'elle souhaiterait disposer de

  9   plus de temps pour pouvoir préparer votre contre-interrogatoire. La Chambre

 10   a étudié la question et a fait droit à la requête de la Défense. Donc je ne

 11   vais pas vous expliquer exactement tout cela, mais voilà quelle est la

 12   situation. Dans des circonstances normales, cela signifierait que vous

 13   devez attendre un ou deux jours jusqu'au moment où le contre-interrogatoire

 14   pourra être mené et terminé. Il est fâcheux de le dire, mais

 15   malheureusement, la Chambre ne va plus siéger à partir de demain et ce,

 16   jusqu'à la fin de la semaine prochaine, ce qui signifie que nous ne pouvons

 17   pas surseoir à votre contre-interrogatoire juste pour un ou deux jours,

 18   mais pour une période de temps beaucoup plus longue. Je suppose -- bien que

 19   je ne sois pas responsable des questions relatives au départ et au retour

 20   des témoins, mais je suppose qu'il sera très vraisemblable que l'Unité des

 21   Témoins et des Victimes vous demandent de revenir à une date ultérieure, ce

 22   qui devrait correspondre à deux semaines environ.

 23   Dans un premier temps, j'aimerais vous demander si vous serez disponible

 24   pour revenir à ce moment-là, à savoir, est-ce que vous serez en mesure de

 25   revenir dans dix à 20 jours ? Est-ce que vous seriez disponible pour


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  1   revenir pour le contre-interrogatoire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je suis dentiste. J'ai mon cabinet. Cela

  3   fut une perte de temps pour moi. J'ai essayé d'être aussi utile que

  4   possible, mais cela a représenté un effort herculéen pour moi. Du fait de

  5   ma mauvaise santé, je ne travaille que trois heures par jour lorsque je

  6   suis chez moi et, au cours des trois derniers jours, j'ai dû travailler

  7   quasiment 24 heures par jour. Dans de telles conditions, je ne serais pas

  8   en mesure de revenir. Je suis ici et je ferai de mon mieux pour vous être

  9   utile.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Biscevic, si je vous disais

 11   que, si vous revenez, il est très, très vraisemblable que vous allez

 12   arriver un jour, que votre -- et que le contre-interrogatoire se passera le

 13   lendemain, et vous serez en mesure de repartir chez vous le même jour; bien

 14   entendu, il faudra voir quelles seront les horaires, mais nous n'aurons pas

 15   besoin de deux jours. Il n'y aura pas de préparation avant le contre-

 16   interrogatoire, donc vous vous contenterez de venir ici dans le prétoire,

 17   il n'y aura pas de préparation, et vous repartirez chez vous. Est-ce que

 18   cela serait envisageable ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse. Je m'excuse vraiment. Je ne peux

 20   pas me déplacer. Je ne peux pas marcher. Je suis un homme malade. Cela a

 21   représenté un effort énorme pour moi, et qui plus est, j'ai dû fermer ma

 22   maison. Mon fils est tout seul. Mais nous ne pouvons pas -- il ne peut rien

 23   faire sans moi. Nous avons un énorme laboratoire. Nous avons un cabinet

 24   dont je m'occupe. Cela a représenté un sacrifice énorme pour moi. Je suis

 25   venu pour vous aider et, malheureusement, je ne pourrais pas revenir.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je suppose que nous

  2   nous trouvons maintenant dans une nouvelle situation, et peut-être qu'il

  3   serait plus judicieux d'en parler en l'absence du témoin.

  4   M. HARMON : [interprétation] Bien sûr. Il existe d'autres possibilités. La

  5   liaison satellite, par exemple, c'est une possibilité. Je ne sais pas s'il

  6   existe d'autres possibilités hormis cela, mais je pense que nous pourrions

  7   envisager cette possibilité.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, si le témoin n'est pas

  9   disponible. Je souhaiterais vous poser une question. Ce que nous avons fait

 10   -- l'une des choses qui a été faite par le Tribunal est que les gens

 11   viennent déposer dans un studio, il y a une liaison satellite. Peut-être

 12   qu'il faudra que vous vous rendiez à Banja Luka, mais ce sera un voyage qui

 13   serait court, et ainsi vous pourrez déposer par le truchement d'une liaison

 14   satellite entre La Haye et la Bosnie-Herzégovine. Est-ce que ce serait une

 15   solution qui vous conviendrait ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Banja Luka est beaucoup plus près, en effet.

 17   Je pourrais envisager de me rendre à Banja Luka si l'on me dit exactement

 18   quand est-ce que je dois venir. Si l'on me donne un créneau précis à

 19   l'avance, je serais disposé à le faire.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il d'autres éléments qui doivent

 21   faire l'objet de discussion en présence du témoin ? Sinon, je vais lui

 22   fournir les instructions suivantes --

 23   M. HARMON : [interprétation] Etant donné que M. Biscevic nous a parlé de sa

 24   vie personnelle, de son problème de santé, de son cabinet de dentiste, je

 25   pense qu'il serait peut-être utile pour M. Biscevic que nous puissions


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  1   envisager les dates où l'on pourra avoir cette possibilité de liaison

  2   satellite à Banja Luka.

  3   M. STEWART : [interprétation] Je pense que le témoin devrait quitter le

  4   prétoire. Nous avons suffisamment discuté en présence de ce témoin, et je

  5   comprends très bien qu'il faille envisager sa commodité personnelle, mais

  6   je ne pense pas que cette discussion, en présence du témoin, est

  7   appropriée.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je pense que nous

  9   allons peut-être aborder des détails qui ne sont pas nécessaires pour le

 10   moment.

 11   Je vais fournir les consignes au témoin.

 12   Monsieur Biscevic, comme vous l'aurez aisément compris, les parties et la

 13   Chambre doivent envisager la procédure à suivre pour votre contre-

 14   interrogatoire. Vous êtes en plein témoignage puisque vous avez répondu aux

 15   questions posées dans le cadre de l'interrogatoire de l'Accusation, mais

 16   vous n'avez pas encore répondu aux questions du conseil de la Défense.

 17   J'aimerais vous indiquer que, pour le moment, vous ne devez parler avec

 18   personne du témoignage que vous venez de présenter. Vous ne devez pas non

 19   plus parler du témoignage à venir. Abstenez-vous de parler à qui que ce

 20   soit à propos de votre témoignage et la section des Témoins et des Victimes

 21   vous informera, et il se peut même d'ailleurs qu'elle vous consulte à

 22   propos de certaines questions, et elle vous informera aussi rapidement que

 23   possible. Ainsi, vous comprendrez rapidement et clairement comment la

 24   Chambre entend procéder. Je sais que vous avez indiqué que vous n'êtes pas

 25   disponible à revenir à La Haye. Cela est expliqué, notamment par votre


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  1   santé et par vos circonstances personnelles, vous envisageriez de pouvoir

  2   répondre aux questions dans le cadre d'une liaison satellite à partir de

  3   votre région.

  4   Pour le moment, j'aimerais vous remercier de vous être déplacé jusqu'à La

  5   Haye, d'autant plus que vous nous avez expliqué que cela n'a pas été très

  6   facile du fait de votre santé et du fait de vos obligations

  7   professionnelles. Je pense que cela n'a pas non plus été très facile du

  8   fait de la situation qui prévaut au sein de votre famille, puisque vous en

  9   avez parlé, et il est évident que la Chambre n'en parlera pas. Mais, de

 10   toute évidence, nous comprenons que cela n'est pas facile pour vous. Vous

 11   pouvez quitter le prétoire. Le Tribunal vous informera de la procédure à

 12   suivre.

 13   Je vous remercie.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je vous prie, de

 16   bien vouloir escorter le témoin hors du prétoire.

 17   [Le témoin se retire]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, que le témoin a quitté le

 19   prétoire, avant d'aborder les autres questions encore en souffrance, je

 20   voudrais donner l'occasion aux parties de s'exprimer, si elles veulent, à

 21   huis clos partiel ou en audience publique, sur les modalités à adopter pour

 22   le reste du témoignage de M. Biscevic.

 23    Monsieur Harmon, vous avez déjà une suggestion. J'avais l'impression que

 24   la Défense voulait intervenir sur ce point.

 25   M. HARMON : [interprétation] Je me contenterai de répéter ce que j'ai dit.


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  1   Dès que M. Biscevic connaît la date, il pourra prendre des mesures pour

  2   tenir compte de ses engagements personnels. C'est tout ce que je voulais

  3   dire.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai décidé de ne pas en dire

  5   avantage suite à votre suggestion, c'est parce que la liaison satellite

  6   nécessite toute une logistique. Il faut la présence de quelqu'un, il faut

  7   qu'il y ait des installations techniques disponibles. C'est pour cela que

  8   je me suis dit qu'il était inutile de poursuivre l'examen de cette question

  9   en présence du témoin. Je suis sûr que Me Stewart aura son avis sur la

 10   question.

 11   M. STEWART : [interprétation] Oui, dans ce sens-ci. Sauf le respect que

 12   nous devons à la Chambre, nous pensons que le témoin est tout naturellement

 13   irrité, l'a manifestée cette irritation. C'est le lot de tout le monde,

 14   irritabilité de devoir revenir. Peut-être qu'il faudrait prendre ceci avec

 15   un peu de circonspection. Il pourra peut-être revenir, revenir à un autre

 16   moment. Désolé d'être aussi dur, mais les inconvénients provoqués à des

 17   témoins, inévitablement, forcément, c'est une des caractéristiques de ce

 18   genre de procès. Il a dit qu'il a un problème de santé. La preuve est,

 19   c'est qu'il n'a pas de problème de santé puisqu'il a pu venir ici.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le simple fait de la présence du témoin

 21   ne signifie pas qu'il n'a pas de problèmes de santé. En tout cas, pas de

 22   problèmes à ce point grave qu'il aurait été empêché de venir une première

 23   fois.

 24   M. STEWART : [interprétation] C'est ce que je voulais dire. Je ne veux pas

 25   ici dire qu'il est en parfait état de santé. Cela, je ne sais pas du tout.


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  1   Cela ne l'empêche pas de venir ici. Je suis tout à fait d'accord avec M.

  2   Harmon. Bien sûr, en toute équité, plus le témoin sait à l'avance qu'il va

  3   être interrogé, mieux ce serait, et nous collaborerons dans la mesure du

  4   possible. C'est vrai de tous les témoins de toute façon. S'agissant d'une

  5   liaison satellite, nous n'avons pas d'avis arrêté sur la question. Il est,

  6   bien sûr, préférable d'avoir le témoin dans le prétoire quand c'est un

  7   témoignage important. Il n'a plus besoin d'être interrogé par l'Accusation,

  8   donc peut-être que ce serait mieux qu'il ne vienne pas.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends que la Défense préférerait

 10   qu'on rappelle le témoin à La Haye, préférerait cette solution à la liaison

 11   satellite. Monsieur Harmon, je suppose que vous, si vous avez fait cette

 12   suggestion, c'était à partir de l'hypothèse uniquement qu'il ne serait pas

 13   possible de faire revenir le témoin à La Haye; c'est bien cela ?

 14   M. HARMON : [interprétation] Est-ce que nous pourrions en discuter à huis

 15   clos partiel, Monsieur le Président ?

 16   M. STEWART : [interprétation] Je n'ai pas du tout suivi. Difficile de voir

 17   pourquoi on doit parler ceci à huis clos partiel. On ne parle pas du tout

 18   de questions de santé du témoin.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons pourquoi M. Harmon demande ces

 20   raisons à huis clos partiel. Ecoutons ces raisons à huis clos partiel.

 21   M. STEWART : [interprétation] Oui. J'ai exprimé ma première réaction. Je ne

 22   peux m'opposer au huis clos partiel.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 19   [Audience publique]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque nous étions à huis clos partiel,

 21   le représentant du bureau du Procureur nous a expliqué ce qu'il savait de

 22   l'état de santé du témoin. Le conseil de la Défense s'est opposé à ce que

 23   ces questions soient abordées à huis clos partiel et il a demandé une

 24   décision, décision que va rendre la Chambre. L'objection principale

 25   soulevée est qu'aucun détail n'avait été communiqué, rien qui n'aurait pu


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  1   être abordé en audience publique. Des explications supplémentaires ont été

  2   fournies par le bureau du Procureur, et la Chambre a établi qu'une partie

  3   des propos tenus à huis clos partiel avaient déjà été dite au cours de la

  4   déposition du témoin. La Chambre va trancher et vous dire s'il est

  5   nécessaire que cette partie du compte rendu d'audience soit rendue

  6   publique.

  7   Ceci mis à part, je pense que la Chambre se demande maintenant comment

  8   procéder. Elle va se demander si elle va chercher à obtenir davantage de

  9   renseignements, peut-être en consultant la section des Victimes et des

 10   Témoins pour savoir s'il est possible de terminer la déposition de ce

 11   témoin par liaison satellite. La Défense se prononçant apparemment

 12   nettement en faveur de la poursuite de la déposition en prétoire. De son

 13   côté, l'Accusation pense qu'il y a de bonnes raisons pour accepter ce que

 14   dit le témoin, à savoir qu'il n'est pas disponible pour être contre-

 15   interrogé à La Haye. Nous allons étudier la question et nous informerons

 16   les parties.

 17   Cette question étant réglée, Monsieur Tieger, je pense qu'il faut

 18   repartir -- repasser à huis clos partiel pour les autres questions.

 19   M. STEWART : [interprétation] Avant de passer à huis clos partiel, puis-je

 20   vous poser une question ? Vous avez dit que la Chambre allait donner une

 21   décision pour savoir si cette partie du compte rendu d'audience là, cette

 22   partie qui correspond au témoignage déjà fait, sera rendu public. Est-ce

 23   que cela veut dire que le reste de ce qui s'est dit à huis clos partiel va

 24   rester à huis clos partiel, ou est-ce que ce n'est pas encore tranché ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais simplement parler de la


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  1   partie qui avait été abordée à huis clos partiel. Si nous allions décider

  2   de la garder à huis clos partiel ou la rendre publique.

  3   M. STEWART : [interprétation] Je comprends. Excusez-moi, enfin, bien sûr,

  4   j'essaie d'être le plus prudent possible, nonobstant les arguments que j'ai

  5   avancés. En l'état, certaines choses ont été dites à huis clos partiel,

  6   mais, après tout le témoin a, en audience publique, expliqué pourquoi il ne

  7   voulait pas revenir, il y a, notamment, parlé de son état de santé, mais

  8   vous savez qu'il est tout à fait courant qu'il faut produire un certificat

  9   médical dans de telles circonstances. Il ne suffit pas qu'un témoin dise

 10   que, pour telle ou telle raison, il ne lui est pas possible de revenir même

 11   s'il est déjà venu une fois. Il faut qu'il y ait une raison convaincante

 12   pour qu'on procède par liaison satellite, davantage qu'un retour du témoin

 13   au prétoire. Je suis partisan ardent de ce que je dis. J'ai invité M.

 14   Harmon à apporter un commentaire, mais ce témoin a parlé de ses activités

 15   professionnelles. Il va perdre au maximum trois heures puisqu'il dit qu'il

 16   travaille trois heures par jour. Disons peut-être six, si on ne peut pas

 17   être aussi rapide que ce que vous avez promis, Monsieur le Président. Mais

 18   il pourrait travailler les trois heures le matin, se déplacer l'après-midi,

 19   que ce soit trois heures ou six heures, peu importe. Les heures de travail

 20   perdues par des témoins, à ce niveau-ci, c'est tout simplement quelque

 21   chose qui est courant. C'est embêtant, personne n'aime ce genre de choses,

 22   mais M. Krajisnik doit répondre de choses quand même assez différentes,

 23   s'il est condamné. Voilà, nous le craignons. Il faudra que le témoin

 24   accepte cet inconvénient.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez apporté d'autres raisons


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  1   expliquant votre souhait de voir ce témoin revenir pour terminer ici sa

  2   déposition.

  3   Pour y aborder les autres questions, il nous faut passer à huis clos

  4   partiel. J'examine les cabines : est-ce que nous poursuivons ? J'espère que

  5   nous pourrons en terminer en dix minutes et ceci nous permettra de ne pas

  6   revenir cet après-midi. J'aimerais savoir s'il y a des problèmes du côté

  7   des interprètes.

  8   Passons maintenant à huis clos partiel.

  9   [Audience à huis clos partiel]

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  9   --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le lundi   20

 10   septembre 2004, à 9 heures 00.

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