Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 5947

1 Le vendredi 24 septembre 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez appeler

6 l'affaire, je vous prie.

7 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'oublie toujours

8 d'allumer le micro. Je me suis entretenu avec M. Margetts, ainsi qu'avec M.

9 Tieger ce matin.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, il faut d'abord appeler

11 l'affaire.

12 M. STEWART : [interprétation] Je suis vraiment désolé. Je n'avais pas -- je

13 ne m'étais pas concentré. Je croyais que je pouvais vous entretenir là-

14 dessus pendant que l'on appelait l'affaire.

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Affaire numéro IT-00-39-T, le Procureur

16 contre Momcilo Krajisnik.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

18 Monsieur Stewart, je vous écoute.

19 M. STEWART : [interprétation] Vous savez, dans le souci de gagner du temps,

20 voilà, je voulais simplement vous entretenir brièvement là-dessus avant que

21 l'affaire ne soit appelée. Voici, c'est que, pour gagner du temps, je crois

22 qu'il serait peut-être utile de prendre une minute ou deux avant que le

23 témoin n'entre dans le prétoire car je voulais vous entretenir sur des

24 questions d'intendance. Je crois qu'il y a un écho. J'entends 25 personnes.

25 J'entends ma voix multipliée par 25. Je ne sais pas ce qui se passe trop

Page 5948

1 là, ici dans le prétoire.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous savez, c'est simultané -- c'est la

3 simultanéité des choses.

4 M. STEWART : [interprétation] J'essaierai de ne pas être répétitif. Voici,

5 vous vous souviendrez, Monsieur le Président, que notre position dans la

6 déclaration était la chose suivante : une déclaration très longue a été

7 prise par ce témoin, celle qui a été signée au mois d'octobre 2002. Le

8 témoin se réfère à un très grand nombre de documents. Il l'appelle document

9 1, document 2, ainsi de suite, c'est ainsi qu'il appelle ces documents

10 auxquels il fait référence. Simplement pour préciser les points,

11 l'Accusation a pris certaines positions suite à une demande formulée par la

12 Chambre de première instance concernant 92 bis. Ensuite, la liste a été

13 refaite. Il y a certains passages des déclarations du témoin qui font

14 référence à certains documents qui ne sont maintenant pas versés au

15 dossier, qui ne font pas partie des éléments de preuve. J'en ai discuté

16 avec mon collègue il y a quelques instants. Il y a deux façons dont nous

17 pouvons procéder concernant ces passages. J'ai expliqué à l'Accusation ce

18 que je pense. Il m'est égal quelle est la solution que nous prenons. Soit

19 que nous procédons en essayant d'éliminer les documents qui ne font pas

20 partie de la déclaration, alors que -- ce qu'on pourrait faire, c'est qu'il

21 y a quand même des documents qui ne font pas partie maintenant des éléments

22 de preuve, mais que l'on voudra peut-être citer. Voilà la question qui se

23 pose ce matin.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, je vous écoute.

25 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

Page 5949

1 lorsque nous avons préparé la liste des pièces à conviction que nous avons

2 et que nous voulions fournir à la Chambre, nous avons, bien sûr, tenté de

3 ne pas inclure trop de documents. Nous voulions nous limiter aux documents

4 les plus importants seulement. Conformément à notre position concernant la

5 déclaration, nous en sommes très conscients. L'autre facteur, c'est que la

6 déclaration a été versée au dossier en vertu de l'Article 92 bis.

7 Maintenant, si vous voulez que l'on procède sur la base des pièces

8 annexées, et si celles-ci ne sont présentées en tant qu'éléments de preuve,

9 les paragraphes peuvent être éliminés. A ce moment-là, nous allons devoir

10 savoir si les annexes, qui figuraient dans les paragraphes que nous avons

11 éliminés, seraient néanmoins fournies au dossier. Cela prendra quand même

12 un certain temps car il nous faudra revoir tous les documents.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. D'autre part, le témoin est ici

14 pendant une période assez brève. La Défense voudrait sans doute savoir

15 quelle est l'approche que vous allez prendre, car cela pourrait influencer,

16 bien sûr, le contre-interrogatoire.

17 M. MARGETTS : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous choissez d'ajouter des éléments

19 de preuve, des pièces, la Défense devra poser des questions supplémentaires

20 concernant ces pièces. Mais, bien sûr, si vous éliminez certaines parties

21 de la déclaration, à ce moment-là, c'est autre chose.

22 Mais je crois que, puisque vous avez fait votre choix préliminaire

23 concernant les pièces à conviction, à ce moment-là, peut-être de truquer ou

24 couper les parties des déclarations, qui font référence aux éléments de

25 preuve qui ne sont pas versés au dossier, serait peut-être la façon la plus

Page 5950

1 appropriée de procéder. Combien de temps est-ce que vous aurez besoin pour

2 faire cela ?

3 M. STEWART : [interprétation] J'ai peut-être une suggestion pratique

4 qui pourrait peut-être aider la Chambre de première instance ainsi que

5 l'Accusation. Pour ce qui nous concerne, bien sûr, cela c'est si nous

6 pouvons trouver M. Gaynor dans le bâtiment, il ne serait pas trop difficile

7 de procéder avec le prochain témoin. Je crois que M. Margetts n'est pas

8 impliqué concernant le prochain témoin. Ce n'est pas lui qui l'interrogera.

9 A ce moment-là, si vous nous permettez de faire ceci, je pourrai vous

10 demander, Monsieur le Président -- et encore une fois j'essaie de trouver

11 la façon la plus facile à procéder -- si vous voulez commencer un peu plus

12 tard aujourd'hui, on pourrait peut-être faire le travail dans l'entrefaite.

13 Je pourrais certainement terminer le contre-interrogatoire de ce témoin

14 aujourd'hui, mais je crois que cela pourrait -- on pourrait gagner du temps

15 ainsi.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, est-ce que

17 c'est une proposition qui vous êtes acceptable ?

18 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que

19 cela ne devra pas durer autant de temps pour prendre la décision des pièces

20 annexées.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il vous est possible de faire

22 cela ce matin ? Parce que je crois que le témoin ne doit pas partir avant

23 midi de toute façon.

24 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous direz -- vous nous informerez de la

Page 5951

1 solution que vous aurez choisie un peu plus tôt ce matin. Le témoin se

2 trouve toujours à La Haye et, présumément, il n'y aura peut-être pas de

3 questions supplémentaires à lui poser. Si oui, bien sûr, on pourra toujours

4 rappeler le témoin, soit un peu plus tard aujourd'hui ou à une étape

5 ultérieure.

6 M. STEWART : [interprétation] Quand vous dites qu'il n'y a pas d'autres

7 questions, Monsieur le Président, je n'ai pas tout à fait bien saisi.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, il n'y a pas d'autres questions qui

9 résultent du choix que nous avons fait ce matin quand à la façon de

10 procéder.

11 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, ma position est la

12 suivante : que je ne crois pas -- et je vous informe simplement de ce que

13 je pense, à ce moment-là. J'essaie d'évaluer maintenant la direction que je

14 vais prendre. Je crois que le choix n'est pas à faire concernant ce qui

15 doit rester au dossier et ne pas rester au dossier. Je crois que cela ne va

16 pas affecter la durée du contre-interrogatoire. Il est certain que cela

17 peut affecter le cours de mon contre-interrogatoire, mais pas la durée. Si

18 l'on me permet de commencer le contre-interrogatoire au début de la

19 dernière pause --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A ce moment-là, nous allons retarder

21 l'audition de ce témoin, n'est-ce pas, Maître Stewart ?

22 M. STEWART : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président,

23 puisque la dernière session est une session très courte. Ce que je vous

24 propose est la chose suivante : comme M. Margetts vous a dit qu'il n'a pas

25 besoin d'énormément de temps, si vous me permettez de reprendre le contre-

Page 5952

1 interrogatoire de ce témoin au début de la deuxième session, cela pourrait

2 peut-être aider les choses.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts.

4 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, Me Stewart vient de

5 soulever cette question ce matin, et il m'a fallu réfléchir rapidement à

6 savoir combien de temps nous aurons besoin pour passer ces déclarations en

7 revue et voir quelles sont les pièces que nous aimerions proposer. Si vous

8 nous permettez de prendre une pause de dix minutes, à ce moment-là, nous

9 pourrons certainement passer en revue la déclaration et savoir quels sont

10 les paragraphes que nous voulons éliminer.

11 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que ma

12 proposition est préférable car je crois qu'il nous faudra -- il me faudra,

13 en fait, quelques minutes simplement pour évaluer ce que me proposera la

14 Défense -- l'Accusation.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. La session suivante commencerait

16 vers 11 heures. Maintenant, j'aimerais savoir si l'Accusation sera en

17 mesure de faire appeler son prochain témoin. A ce moment-là, nous pourrions

18 peut-être procéder avec l'audition du prochain témoin, interrompre son

19 interrogatoire, et rappeler le témoin que nous avions hier. Qui interrogera

20 le prochain témoin ?

21 M. MARGETTS : [interprétation] Ce sera M. Gaynor. Il est déjà prêt.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il pourrait commencer peut-être

23 maintenant -- pourrait-il commencer maintenant ?

24 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, il peut.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord.

Page 5953

1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Auriez-vous l'obligeance, je vous

3 prie, d'informer M. Gaynor de se présenter dans la salle d'audience et

4 pourriez-vous, je vous prie, appeler votre prochain témoin, qui sera, si je

5 ne m'abuse -- d'abord, y a-t-il des mesures de protection ? Il n'y en a

6 pas, si j'ai bien compris.

7 M. MARGETTS : [interprétation] Il sera de Fejzija Hadzic.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce quelqu'un pourrait expliquer à M.

9 Dzambasovic quelle est la raison pour laquelle il n'est pas appelé à la

10 barre en ce moment-ci, mais qu'il sera rappelé à la barre vers environ 11

11 heures.

12 M. MARGETTS : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

13 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, simplement pour

14 ajouter quelque chose, est-ce que l'Accusation pourrait m'informer aux

15 alentours de 10 heures pour savoir quelle est le position concernant ces

16 questions; c'est ainsi que je pourrais me préparer pour pouvoir procéder

17 vers 11 heures. Je suis vraiment désolé si je fais un peu de bruit car je

18 vais de voir prendre mes documents et cela va durer environ 30 secondes.

19 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons d'abord vérifier si le

21 prochain témoin est déjà arrivé et vous pouvez faire tout le bruit que vous

22 voulez.

23 M. STEWART : [interprétation] Très bien. Je suis vraiment heureux de vous

24 dire -- de vous apprendre que le problème technique des écouteurs est

25 résolu.

Page 5954

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Gaynor, vous êtes arrivé un peu plus

2 tôt que prévu.

3 M. GAYNOR : [interprétation] Pendant que nous attendons le prochain témoin,

4 Monsieur le Président, je pourrais peut-être vous informer dont la façon

5 nous allons procéder.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Gaynor.

7 M. GAYNOR : [interprétation] Il s'agit d'un témoin qui témoignera en vertu

8 de 89(F). Trois déclarations seront fournies : une déclaration du Tribunal

9 pénal international de 1991; en fait, une autre déclaration bosnienne --

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 1991. Le Tribunal pénal international

11 pour l'ex-Yougoslavie, j'ai un peu du mal à comprendre. Le Tribunal

12 n'existait pas à cette époque-là.

13 M. GAYNOR : [interprétation] Effectivement, je crois qu'il y a une erreur

14 de frappe, c'est 1999. Ensuite, il y a une déclaration fournie aux

15 autorités bosniennes -- une déclaration bosnienne qui sera -- qui fera

16 partie de tous les documents et, ensuite, les éléments de preuve de ces

17 documents qui seront scindés en trois parties : d'abord, la première

18 partie, qui a trait aux événements qui ont eu lieu à la fin de l'année 1991

19 et au début de 1992, ensuite, la deuxième partie se concentrera sur les

20 événements qui avait trait à l'arrestation du témoin du 25 juin; et,

21 ensuite, on parlera de la période qui a trait à la détention du témoin, qui

22 va du 25 juin jusqu'au 5 août. En fait, la dernière partie aura trait aux

23 événements du 5 août. Maintenant, la Défense nous a informé qu'elle avait

24 certaines réticences concernant les quatre parties de la déclaration du

25 Tribunal que j'ai identifié un peu plus tôt, Monsieur le Président, et le

Page 5955

1 paragraphe 4 dans son ensemble, le paragraphe 9 et la phrase qui commence

2 par les propos "je crois fermement", paragraphe 25 et, dans son ensemble,

3 le paragraphe 26, qui commence avec la phrase "c'étais le début du

4 nettoyage ethnique". Nous proposons que le témoin soit interrogé sur ces

5 quatre parties que je viens d'énumérer et c'est ainsi que nous pourrons

6 recueillir et entendre parler des faits qui l'ont mené à porter les

7 conclusions qu'il a apportées.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Si je vous ai bien compris,

9 nous allons entendre les éléments de preuve faits de vive voix car,

10 autrement, tout sera un peu confus. Si nous essayons de voir au compte

11 rendu de l'audience, à savoir, ce qui a été admis et ce qui n'a pas été

12 admis en tant que déclaration, cela portera à confusion. Nous aimerions

13 recevoir une copie faisant état des parties pour lesquelles la Défense a

14 émis une objection.

15 M. GAYNOR : [interprétation] En fait, j'ai informé la Défense et, en fait,

16 il ne considère pas que ces paragraphes ne sont pas cohérents, mais nous

17 estimons que ces paragraphes sont admissibles. Pour ce qui est de ces

18 paragraphes et d'autres déclarations du Tribunal ainsi que les déclarations

19 bosniennes, nous avons besoin de quelques précisions faites par le témoin.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Commençons maintenant sur la base du

21 témoignage viva voce. Madame Loukas, c'est vous qui prendrez une décision

22 finale, à savoir s'il faut garder les paragraphes à l'intérieur de la

23 déclaration ou non. Mais, bien sûr, que d'avoir le témoin nous expliquer de

24 viva voce ce qui s'est passé de vive voix à ce moment-là, nous pourrons

25 voir ce qui se passe. Nous attendrons l'interrogatoire du témoin, nous

Page 5956

1 pourrons peut-être, à ce moment-là, voir quelle est votre position

2 concernant ces paragraphes.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Je suis tout à fait heureuse d'accepter cette

4 approche, mais jusqu'à présent, je souhaiterais que cette objection soit

5 maintenue. J'ai également une objection supplément à formuler.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vois maintenant une feuille d'information

8 supplémentaire; je l'ai reçue hier, en fait, de l'Accusation et, dans cette

9 feuille, il y a des éléments de preuves supplémentaires fournies par le

10 témoin. Nous trouvons ici une référence à une réunion Grujo Lalovic. Grujo

11 Lalovic a indiqué qu'il avait reçu des ordres lui venant par ses supérieurs

12 et qu'il avait aussi reçu des ordres provenant de Trebinje, également.

13 Maintenant, de plus, à cela s'ajoute le fait que l'on a dit que la feuille

14 d'information supplémentaire nous dit que le témoin a souffert du syndrome

15 de stress post-traumatique. Maintenant, il y a un ajout, 12 ans plus tard,

16 où il dit qu'il a reçu des ordres provenant ses supérieurs. Si l'on se

17 penche à l'article du règlement dans lequel nous pouvons lire que la

18 Chambre peut exclure des éléments de preuve si la valeur probante ne peut

19 pas assurer un procès juste et équitable, et la valeur probante est

20 largement inférieure à l'exigence d'un procès équitable. Monsieur le

21 Président, il faut évaluer la valeur probante à cette étape-ci, 12 ans plus

22 tard, lorsque l'on parle du grand nombre d'années qui se sont écoulées

23 depuis. En fait, je crois qu'il n'y aura pas un grand nombre de questions

24 dans le cadre du contre-interrogatoire. Le seul problème, c'est que,

25 lorsque nous avons une phrase qui nous dit que, 12 ans après les

Page 5957

1 événements, le témoin a reçu des ordres de ses supérieurs et que l'on nous

2 informe que le témoin a souffert du syndrome de stress post-traumatique,

3 dans ces circonstances-là, Monsieur le Président, avec tout le respect que

4 je vous dois, je souhaiterais vous présenter que vous ne devriez pas

5 permettre cette information supplémentaire, qui nous a été donnée --

6 fournie sur la feuille d'éléments supplémentaires.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela exclu également le fait

8 de poser certaines questions au témoin concernant ce fait ?

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Question donc, que vous ne parlez pas

11 seulement de la déclaration. Mais vous estimez qu'il ne faut pas poser des

12 questions au témoin concernant ce sujet.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Si l'on examine

14 l'Article 89(D), je peux vous dire que ce n'est pas une procédure

15 automatique, c'est-à-dire que des preuves supplémentaires de ce genre ne

16 devraient pas automatiquement être versées au dossier. Il semblerait que le

17 témoin a souffert du syndrome de stress post-traumatique. Je crois que

18 c'est la raison pour laquelle nous ne devrions pas accepter que cet élément

19 de preuve fasse partie du dossier.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons réfléchi sur vos objections.

22 Monsieur Margetts -- Monsieur Gaynor, je me trouve dans la même position

23 qu'il y a cinq minutes. Monsieur Gaynor, la Chambre vous permettra de poser

24 des questions à ce témoin concernant ce sujet, mais n'acceptera pas la

25 partie très précise qu'a mentionnée Mme Loukas. Cela ne sera pas admis en

Page 5958

1 tant qu'élément de preuve écrit.

2 Madame Loukas, je me tourne vers vous pour vous dire que même si une

3 information nous a été fournie douze ans plus tard, cela pourrait également

4 être causé par le fait que certains aspects de moindre importance ont surgi

5 à la surface, que c'est peut-être qu'à l'époque, le témoin n'a pas senti

6 que c'était important de le mentionner à l'époque. Cela pourrait avoir une

7 certaine pertinence. Il est certain que la Chambre, à ce moment-là, portera

8 une attention toute particulière à ce que vous nous avez dit concernant le

9 syndrome de stress post-traumatique dont a souffert le témoin. Nous allons,

10 à ce moment-là, évaluer du mieux que nous le pouvons si les éléments de

11 preuve ont été influencés par le syndrome de stress post-traumatique.

12 Bien sûr, il est certain que si la Chambre prenait le syndrome de stress

13 post-traumatique comme quelque chose qui ne permettrait pas au témoin de

14 témoigner, à ce moment-là, nous perdrions un bon nombre de témoins. Nous

15 n'allons pas l'ignorer toutefois, mais il est certain que le seul fait

16 qu'un témoin ait souffert d'un syndrome de stress post-traumatique ne veut

17 pas dire que le témoin est automatiquement disqualifié en tant que témoin.

18 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous comprends, Monsieur le Président. Je

19 vous remercie.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, êtes-vous prêt à

21 entamer l'interrogatoire du prochain témoin.

22 M. GAYNOR : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous, je

24 vous prie, faire rentrer le prochain témoin dans la salle d'audience.

25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

Page 5959

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Hadzic.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de commencer à déposer en

4 l'espèce, les Règlements de procédure et de preuve exigent que vous fassiez

5 une déclaration solennelle vous engageant de dire la vérité, toute la

6 vérité, rien d'autre que la vérité. Le texte de cette déclaration va vous

7 être présenté par l'Huissière. Je vais vous demander de lire ce qui est

8 écrit sur ce document.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

11 LE TÉMOIN : FEJZIJA HADZIC [Assermenté]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous pouvez vous

14 asseoir, Monsieur Hadzic. Je dois tout d'abord vous dire que le conseil du

15 bureau du Procureur va commencer à vous interroger ce matin. Ensuite, nous

16 allons interrompre cet interrogatoire pendant à peu près une heure, une

17 heure et demie pour terminer la déposition du témoin précédent qui a

18 commencé déjà à témoigner auparavant. Votre déposition va être arrêtée pour

19 à peu près une heure. Ensuite, vous allez pouvoir continuer à déposer plus

20 tard au cours de la journée. Je vous ai dit cela juste pour que vous ne

21 soyez pas surpris au moment où cela arrive. A ce moment-là, je laisse la

22 parole au bureau du Procureur.

23 M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 Interrogatoire principal par M. Gaynor :

25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Hadzic. Je vais vous poser un

Page 5960

1 certain nombre de questions. Je vais lire quelques phrases, et vous pouvez

2 me répondre par un oui ou par un non pour nous dire si les informations que

3 je vais vous donner sont exactes.

4 Vous venez d'un village près de Kalinovik dans la municipalité de

5 Kalinovik. Il s'agit du village de Mjehovina. Vous avez fait votre service

6 militaire à la JNA en 1966 jusqu'à 1967. Au printemps 1992, vous étiez

7 directeur d'une commission d'utilité publique à Kalinovik. A présent, vous

8 êtes à la retraite. Vous avez une femme et trois enfants majeurs; est-ce

9 exact ?

10 R. [inaudible]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hadzic, est-ce que vous nous

12 entendez ? Madame l'Huissière, peut-elle vérifier cela auprès du témoin, ou

13 peut-être que le canal utilisé n'est pas bon.

14 Monsieur Hadzic, est-ce que vous entendez ce que dit M. Gaynor dans une

15 langue que vous comprenez ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'entends tout et je comprends tout.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 M. GAYNOR : [interprétation]

19 Q. Monsieur Hadzic --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, vous avez lu cela très,

21 très rapidement. Peut-être que c'est pour cela que la traduction n'est pas

22 terminée. Nous devrions être plus patients.

23 Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez entendu ce que

24 M. Gaynor vous a dit, ces informations qu'il vous a présentées.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai tout entendu, mais je voudrais vérifier.

Page 5961

1 J'ai été directeur de l'entreprise publique communale.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est la correction que vous

3 souhaitez apporter.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Sinon, tout le reste est

6 correct ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Gaynor.

9 M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais à présent verser au dossier ces

10 documents en vertu de l'Article 89(F) où se trouvent trois déclarations

11 fournies par le témoin.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez le faire.

13 M. GAYNOR : [interprétation] Pourriez-vous attribuer une cote à cette pile

14 de documents.

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce du Procureur,

16 numéro P285.

17 M. GAYNOR : [interprétation] A présent, je voudrais lire le résumé du

18 témoin.

19 Ce témoin est de la municipalité de Kalinovik. La vie harmonieuse

20 multiethnique dans cette municipalité a commencé à changer en 1990 et 1991

21 avec l'arrivée d'un grand nombre de soldats de la JNA, qui sont arrivés

22 dans le camp d'artillerie pour préparer le déploiement en Slovénie et en

23 Croatie. En même temps, le nationalisme serbe s'est vu accroître, de façon

24 graduelle, et à commencer à s'infiltrer dans la vie quotidienne.

25 Le témoin a remarqué que les soldats de la JNA ont commencé à porter

Page 5962

1 des nouvelles uniformes avec des insignes serbes dans la municipalité --

2 sur les bâtiments municipaux ont été brandis de drapeaux serbes.

3 Les soldats de la JNA, quand ils étaient en état

4 d'ébriété, ils tiraient avec leurs armes en l'air souvent en direction de

5 la mosquée, et le témoin considérait que ce comportement était visé à

6 utiliser les Musulmans. Les Musulmans n'étaient pas armés, et ils ne

7 pouvaient pas s'opposer à un tel comportement des soldats de la JNA.

8 Le SDS a commencé à dominer la politique -- la scène politique locale, et

9 le témoin était au courant d'un certain nombre de visite de Radovan

10 Karadzic dans la région. Les relations entre le SDS et le SDA se sont

11 détériorées. Il est devenu de plus en plus clair que la JNA a commencé à

12 armer les Serbes du cru. Cette armée, au début, n'était pas -- le fait de

13 les armer n'était pas couverte au début, mais, plus tard, la JNA les

14 faisait au vu et su de tout le monde en utilisant les camions de la JNA qui

15 distribuaient les armes dans les maisons. Il y avait aussi des Unités des

16 Volontaires serbes qui ont été formées.

17 Au mois d'avril et au mois mai 1992, le témoin a compris que le canon

18 d'artillerie était positionné avec leur canon dirigé vers le village

19 musulman de Golubici. Une plainte a été formulée auprès du général Ratko

20 Mladic, qui était originaire du village de Bozanovici une ville près de

21 Kalinovik. Le témoin a entendu que le général Mladic a promis aux

22 villageois musulmans qu'ils allaient être en sécurité. On a déplacé ces

23 canons, mais, au mois d'août 1992, on les a remis au même endroit.

24 Un commandant de la police musulmane et ses collègues musulmans ont

25 été obligés à signer la déclaration de loyauté vers les Serbes. Les

Page 5963

1 policiers qui ont refusé de le faire devaient rendre les armes, ce qui ont

2 fait. Ensuite, la police serbe a commencé les arrestations pour aucune

3 raison apparente.

4 Le témoin avait l'impression que la vie était devenue

5 complètement intolérable dans Kalinovik, et ce qui résultait de la campagne

6 qui s'est déroulée à Serbinje [phon] dix jours auparavant. Les

7 représentants du SDS ont pourtant donné des assurances, indiquant que la

8 population non-serbe allait être en sécurité. De l'autre côté, les

9 autorités serbes ont continué les arrestations et les mauvais traitements.

10 Le 25 juin 1992, un grand nombre de Musulmans ont reçu une note écrite leur

11 demandant de se présenter pour une obligation de travail. Le témoin et de

12 nombreux autres Musulmans ont répondu à cette convocation, et se sont

13 présentés devant l'assemblée municipale de Kalinovik où on les a demandés

14 d'attendre l'arrivée de Grujo Lalovic, qui était le président du SDS à

15 Kalinovik et le président du comité exécutif. Il y avait beaucoup de

16 policiers autour de l'assemblée municipale, et la police avait bloquée

17 toutes les routes qui menaient. Les Musulmans, qui se sont présentés à

18 cette convocation et d'autres qui ne sont pas venus, ont été amenés par la

19 police à Kalinovik dans l'école élémentaire de Kalinovik, où ils ont été

20 placés en détention jusqu'au 6 juillet 1992. Gojko Lalovic, qui était chef

21 de la Défense civile de Kalinovik, est venu à l'école et a dit aux détenus

22 musulmans qu'ils étaient détenus pour leur propre sécurité, et qu'ils

23 allaient être libérés bientôt.

24 Le 6 juillet 1992, ces détenus ont été déplacés dans un dépôt de munitions

25 vidé à Jelasacko Polje, ils ont été surveillés par des gardes pendant que

Page 5964

1 cela se faisait. Ensuite, ils ont été détenus à cet endroit, et surveillés

2 de près. Le témoin était détenu à cet endroit pendant -- presque un mois.

3 Le 1er août 1992, les détenus qui se trouvaient dans ces dépôts, on a

4 entendu des rafales d'armes automatiques, et ils ont vu que les maisons de

5 Musulmans de cet endroit étaient brûlées. Il s'agissait des maisons se

6 trouvant dans le hameau de Karaula dans le village de Jelasca. Le témoin a

7 vu des femmes, des enfants, et des vieillards du village qui marchaient à

8 travers Jelasacko Polje en direction de Kalinovik. Le jour suivant, les

9 détenus ont vu les maisons de Musulmans dans le village que l'ont continu à

10 brûler. Il y avait un homme qui donnait de l'eau aux détenus, et il leur a

11 dit, que tous les Musulmans de villages avoisinants étaient détenus dans

12 l'école élémentaire de Kalinovik.

13 Le 5 août 1992, un groupe d'à peu près 15 détenus étaient appelés à sortir

14 du dépôt de munitions, et on les a amenés quelque part. Plus tard, au cours

15 de la même journée, le témoin et d'autres détenus ont appris qu'ils

16 allaient faire l'objet d'un échange. Un garde leur a pris tous les objets

17 de valeur, leur a liés les mains derrière leur dos avec -- dans leur dos

18 avec du fil de fer, et a passé à tabac plusieurs d'entre eux. Les détenus

19 ont été montés à bord d'un véhicule et, ensuite, à nouveau, passés à tabac,

20 et on les a faits monter dans des camions. Un convoi de trois camions, où

21 se trouvaient des détenus escortés par une police -- par une voiture de

22 police, s'est dirigé vers -- sous la route de Foca. Le premier camion était

23 conduit par un Musulman, et il n'y avait pas de gardiens serbes à

24 l'intérieur. C'était au cas où il y aurait de mines sur la route. Au cours

25 de la route, les détenus, qui se trouvaient dans le camion du témoin,

Page 5965

1 étaient forcés de chanter des chansons nationalistes serbes. Le convoi

2 s'est arrêté à Ratine dans la municipalité de Foca, où tous les détenus,

3 sauf le témoin, ont été exécutés.

4 Le témoin va parler de cet incident. La déposition de ce témoin est

5 pertinente quant au point 9.1 de l'annexe B de l'acte d'accusation

6 concernant aussi -- au point concernant les lieux de détention 18.2, 18.3

7 et 18.4 et qui figure à l'annexe C de l'acte d'accusation, et aux

8 informations concernant les mosquées, aux points 14.1, 14.2 de l'annexe D

9 de l'acte d'accusation.

10 Je voudrais que l'on montre au témoin la première pièce à conviction. Il

11 s'agit de la pièce P286.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce à conviction P286.

14 M. GAYNOR : [interprétation]

15 Q. Monsieur le Témoin, vous avez sous vos yeux une carte, et cette carte a

16 été signée par vous. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre

17 ce qui figure sur cette carte, et ce qui signifie la lettre A, et la lettre

18 B ?

19 R. Là, on voit justement ce dépôt de munitions où nous étions. C'est la

20 lettre A qui montre cela, et la lettre B montre cet endroit dans le village

21 de Ratine où ils ont tué ces gens-là.

22 Q. Monsieur, dans votre déclaration -- dans le paragraphe 4 de votre

23 déclaration - vous n'avez pas besoin de la regarder - Monsieur le Témoin,

24 vous avez dit, et je vais vous citer : "Et tous, que les Serbes ont fait

25 aux gens de Kalinovik, faisaient partie d'un plan plus général contrôlé à

Page 5966

1 un niveau plus élevé --"

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Je souhaite soulever un objection.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voudriez que le témoin ne lise pas

4 sa déclaration pendant qu'on lui pose cette question; est-ce que --

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, exactement. Si le Procureur souhaite

6 établir la base pour ce paragraphe, dans ce cas-là, il ne convient pas de

7 lire le texte de ce même paragraphe.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Quand j'ai dit que je m'attendais à

9 ce que le Procureur parle de cela en posant des questions directes au

10 témoin lui demandant de témoigner de vive voix, évidemment, j'ai pensé que

11 la lecture de sa déclaration préalable n'est pas un procédé convenable.

12 M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Dans ce cas-là,

13 je vais expliquer les objections soulevées par la Défense à la fin de

14 l'interrogatoire.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

16 M. GAYNOR : [interprétation] Messieurs, je voudrais attirer votre attention

17 sur le paragraphe 23 de la déclaration fournie au bureau du Procureur.

18 Q. Monsieur, dans la déclaration que vous avez fournie au bureau du

19 Procureur de ce Tribunal, vous avez parlé de la visite d'un groupe de

20 Chetniks. Vous avez dit qu'au moment où ce groupe de Chetniks est arrivé de

21 [comme interprété] Kalinovik, vous avez eu tellement peur que vous étiez

22 prêt à partir, mais que les représentants du SDS vous ont rassuré en vous

23 disant qu'ils étaient contrôlés par le SDS --

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Je pense que le Procureur n'a absolument pas

25 besoin de lire le texte entier, intégral du paragraphe uniquement pour

Page 5967

1 rafraîchir la mémoire du témoin et pour lui poser une question précise.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit là de trouver la meilleure

3 façon de procéder, la plus efficace. Attendez voir.

4 Monsieur Gaynor, cela dépend de votre objectif. S'il s'agit d'un point de

5 départ pour les questions qui vont venir, vous pouvez éventuellement

6 répéter ce qui est écrit dans la déclaration, mais, si vous voulez poser

7 des questions vraiment au sujet de cette déclaration, essayez de voir ce

8 que vous voulez obtenir vraiment. Est-ce que vous voulez obtenir des

9 détails supplémentaires, ou avoir une autre version ? Enfin, faites très

10 attention. Je ne vous dis pas de ne pas lire. Cela, vraiment, dépend de

11 l'effet que vous souhaitez produire. Si vous pensez que la réponse pourrait

12 se trouver justement dans la question suivante que vous allez poser, dans

13 ce cas-là, il n'est vraiment pas convenable de lire le texte de la

14 déclaration. En revanche, si vous lisez cela pour introduire quelque chose

15 de nouveau, un élément nouveau, vous pourrez continuer.

16 M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ici, il y a un

17 certain nombre d'éléments qui ne sont pas très clairs dans la déclaration.

18 C'est pour cela que j'ai attiré l'attention du témoin.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, vous pouvez le lire.

20 M. GAYNOR : [interprétation] Bien.

21 Q. Monsieur le Témoin, comme je vous ai dit, un groupe de Chetniks est

22 venu vous rendre visite, et les représentants du SDS vous ont dit que ces

23 Chetniks étaient contrôlés par le SDS. La première question que je vous

24 vais vous poser : à quel moment cela s'est produit ?

25 R. Un groupe de Chetniks de Miljevina, avec Pero Elez à leur tête, est

Page 5968

1 venu à Kalinovik. A ce moment-là, Grujo Lalovic, le président du SDS, est

2 venu nous voir pour nous dire que nous ne devions pas nous inquiéter, que

3 nous allons pouvoir rester en toute sécurité, que rien n'allait nous

4 arriver. Justement, il nous a répété encore une fois que nous devions

5 rendre toutes nos armes personnelles et de service pour être encore plus en

6 sécurité.

7 Q. Quand vous avez parlé de cette réunion qui a eu lieu avec M. Lalovic,

8 est-ce que vous pouvez nous dire à quelle date cette réunion a eu lieu ?

9 R. Je pense que cela s'est produit le 5 mai 1992, dans la soirée.

10 D'ailleurs, Lalovic était un collègue, ou plutôt une relation de travail,

11 puisque lui, il était au conseil municipal, et moi, je travaillais dans

12 l'entreprise communale. Nous avions de rapports professionnels.

13 Q. Est-ce que vous avez participé, personnellement à la réunion qui a eu

14 lieu le 5 mai 1992 avec M. Lalovic ?

15 R. Oui, comme tous les autres habitants du village.

16 Q. Dans votre déclaration, vous avez dit, quand on vous a dit de ne pas

17 vous inquiéter, puisque les Chetniks étaient sous le contrôle du SDS, qui

18 vous a dit cela ?

19 R. Grujo Lalovic.

20 Q. Les Chetniks, sont-ils restés à Kalinovik après cette date-là ?

21 R. Non, ils sont partis pour Miljevina.

22 Q. Est-ce que vous avez eu l'impression que M. Lalovic et le SDS

23 contrôlaient ce groupe de Chetniks ou non ?

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je soulève une

25 objection quant à la façon dont la question a été posée. Le Procureur

Page 5969

1 devrait demander au témoin ce qu'il a vu, ce qu'il a entendu, ce qu'il

2 sait. Poser des questions au témoin quant à l'impression qu'il a eue au

3 sujet de quelque chose, nous ne pensons pas que cela nous fasse avancer à

4 quoi que ce soit, et nous ne pensons pas que cela puisse aider les Juges de

5 la Chambre pour aboutir à leur conclusion.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. De l'autre côté, ce n'est pas la

7 peine d'établir les bases pour des impressions du témoin si le témoin n'a

8 pas d'impression du tout, s'il n'a pas de point de vue. Je ne pense pas que

9 cette question ne soit pas acceptable. Il est vrai que si le témoin dit

10 oui, et il faudrait poser d'autres questions pour voir quelles sont les

11 bases factuelles pour ce qu'il avance.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Même comme cela, je dirais qu'il s'agit là

13 d'une question qui guide le témoin. Je pense que quelque soit sa réponse,

14 oui ou non, il va répondre de la façon dont le Procureur le souhaite.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne pense pas du tout que ce soit le

16 cas. Monsieur Gaynor, vous avez choisi tout d'abord d'établir les faits,

17 ensuite, de poser des questions au témoin pour voir quel est son point de

18 vue à ce sujet, s'il est d'accord ou non. C'est votre choix, mais cela

19 étant dit, je vous laisse faire.

20 A part le fait qu'on vous ait dit que les Chetniks étaient contrôlés par le

21 SDS, est-ce que vous avez vu quoi que ce soit d'autre qui corroborerait

22 ceci ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Le lendemain, les gens sont partis de

24 Kalinovik, et personne n'était plus là. Il n'y avait que des gens qui ne

25 portaient pas d'uniforme, qui étaient de Kalinovik, qui étaient là, mais

Page 5970

1 personne de l'extérieur. C'est pour cela que j'ai eu l'impression qu'ils

2 étaient placés sous l'autorité de la cellule de Crise de la municipalité de

3 Kalinovik.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Gaynor.

5 M. GAYNOR : [interprétation]

6 Q. Monsieur, pouvez-vous nous dire ce que M. Lalovic vous a dit

7 précisément le 5 mai 1992 ?

8 R. Il nous a dit qu'il nous garantissait la sécurité, la sécurité de nos

9 vies, pour nos familles, pour notre travail, que nous pouvions continuer à

10 nous comporter normalement, aller travailler et respecter les décisions

11 prises par l'assemblée municipale. J'ai continué à faire mon travail. J'ai

12 continué à coopérer avec les gens de la municipalité, avec les dirigeants.

13 J'avais l'impression que la situation allait rester la même, que rien

14 n'allait changer, et j'ai fait confiance à ces garanties, les garanties qui

15 nous ont été fournies.

16 Q. Est-ce qu'il vous a dit qu'il parlait sur sa propre initiative pour

17 lui-même, ou au nom de quelqu'un d'autre ?

18 R. Il a dit qu'il parlait au nom des organes qu'il représentait, à savoir,

19 le comité municipal du SDS, le comité exécutif de l'assemblée municipale de

20 Kalinovik et tous les autres organes publics qu'il représentait.

21 Q. A-t-il dit si ces organes ont reçu les instructions de qui que ce soit

22 d'autre ?

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Je pense à

24 nouveau que l'on pose là une question qui guide le témoin. Le fait que l'on

25 demande au témoin de répondre par un oui ou par un non, n'exclut pas la

Page 5971

1 possibilité, enfin, le fait qu'il s'agissait là d'une question tendancieuse

2 qui induit le témoin, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, cette question est tout à fait

4 acceptable. L'objection est rejetée. Vous pouvez continuer, Monsieur

5 Gaynor.

6 M. GAYNOR : [interprétation]

7 Q. Je vais répéter ma question. Monsieur Grujo Lalovic, vous a-t-il dit

8 oui ou non, que ces organes recevaient des instructions de qui que ce soit

9 d'autre ?

10 R. Oui.

11 Q. A-t-il dit d'où venaient ces instructions ?

12 R. Il a dit que Kalinovik dépendait du SAO Trebinje. Il a dit que les

13 instructions leur venaient de M. Vucurevic, de la Région autonome de

14 Trebinje, la Région autonome serbe.

15 M. GAYNOR : [interprétation] Je voudrais que l'on montre au témoin la pièce

16 suivante du Procureur.

17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P287.

18 M. GAYNOR : [interprétation]

19 Q. Monsieur, reconnaissez-vous ce document ?

20 R. Oui.

21 Q. Qu'est-ce que c'est ?

22 R. C'est un certificat en date du 8 mai 1992, au moment où j'ai fourni à

23 la police de Kalinovik mon arme personnelle. Tous ceux qui avaient, à

24 l'époque, rendu leurs armes personnelles, avaient reçu une attestation

25 similaire.

Page 5972

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a une erreur quant à la

2 date ? Puisque la date est le 8 septembre, ce qui me cause des problèmes.

3 M. GAYNOR : [interprétation]

4 Q. Monsieur, pourriez-vous revérifier la date qui figure sur ce reçu, sur

5 cette attestation ?

6 R. C'est moi qui ai fait l'erreur, excusez-moi, il s'agit du

7 9 mai 1992.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela nous résout le problème du mois,

9 mais pas du jour. Pourriez-vous, s'il vous plaît, examiner l'original du

10 document --

11 M. GAYNOR : [interprétation]

12 Q. Monsieur, pourriez-vous à nouveau vérifier la date qui figure sur ce

13 document.

14 R. Ceci ressemble plus au chiffre 9 qu'au chiffre 8. C'est dommage que

15 ceci ne soit pas le document original que j'ai pourtant chez moi. Là, on

16 peut mieux voir ce qui est écrit.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Cela va. Cela va suffire, ce n'est

18 pas un problème extrêmement important.

19 M. GAYNOR : [interprétation]

20 Q. Monsieur, ici, d'après ce reçu, on voit que vous avez rendu votre

21 pistolet. Est-ce que vous avez gardé d'autres armes que vous n'auriez pas

22 rendues ?

23 R. Non.

24 Q. Les Musulmans de votre village ont-ils également restitué leurs armes ?

25 R. Oui.

Page 5973

1 Q. Savez-vous si un Serbe aurait lui aussi rendu ses armes ?

2 R. Non.

3 Q. La restitution des armes par les Musulmans s'est faite dans quelle

4 période de temps approximativement ?

5 R. Cela s'est passé au cours de la première quinzaine du mois de mai 1992.

6 Q. Pourquoi avez-vous tous accepté de restituer vos armes ?

7 R. Nous avons accepté parce qu'il nous a été dit que nous serions soumis à

8 des fouilles, parce qu'ils étaient à la recherche d'armes, et qu'il était

9 plus sûr pour nous de rendre nos armes de notre plein gré. Il était tout à

10 fait clair qu'avec un pistolet ou un fusil, nous ne pouvions faire de mal à

11 personne, mais seulement aggraver la situation qui était déjà très tendue.

12 Q. Dans votre déclaration -- j'aimerais renvoyer les Juges de la Chambre

13 au paragraphe 16 de la déclaration écrite déposée au Tribunal. Dans votre

14 déclaration, Monsieur, vous parlez de l'armement de la population serbe.

15 Vous dites que des camions de la JNA encerclaient les villages serbes et

16 livraient des armes aux gens chez eux à la maison. Ma première question est

17 la suivante : est-ce que, personnellement, vous avez vu des camions de la

18 JNA encerclés des villages serbes et déposer des armes ?

19 R. Un jour, j'étais en tournée d'inspection pour vérifier les

20 canalisations d'eau sur le front. J'ai vu un véhicule militaire et des

21 caisses remplies de munitions et d'armes qui étaient déchargées devant

22 cette maison. Cette maison se trouvait à une centaine de mètres des

23 canalisations d'eau.

24 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de la personne qui habitait dans

25 cette maison ?

Page 5974

1 R. Serbe.

2 Q. Comment savez-vous que cette maison était une maison appartenant à des

3 Serbes ?

4 R. Je le savais parce que je connaissais les habitants. Kalinovik est un

5 petit village. On connaissait les propriétaires de chaque maison, les

6 habitants de chaque maison et même chacun des enfants de ces familles.

7 Q. Y a-t-il eu d'autres incidents qui vous ont permis de penser que la JNA

8 était en train de livrer des armes à la population serbe ?

9 R. Il y en a eus. J'aimerais revenir à ce jour où se fêtaient le Noël

10 serbe et la nouvelle année serbe. A ce moment-là, dans les villages

11 environnants de Kalinovik, il y a eu davantage de coups de feu tirés que

12 pendant un véritable combat. Ils avaient tellement d'armes, chacun pouvait

13 utiliser ces armes au cours d'une fête telle que celle-là.

14 Q. Parlez-vous du Noël serbe, de la nouvelle année serbe du début 1992 ?

15 R. Oui.

16 M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

17 j'aimerais maintenant vous renvoyer au paragraphe 17 de la déclaration

18 écrite déposée au Tribunal.

19 Q. Monsieur, dans votre déclaration, vous avez dit que vous aviez vu des

20 pièces d'artillerie visant le village de Golubici, et que des protestations

21 ont été faites auprès du général Ratko Mladic. Qui était l'auteur de ces

22 protestations auprès du général Mladic ?

23 R. Le général Mladic est arrivé dans son village natal à bord d'un

24 hélicoptère accompagné de Velibor Ostojic. C'est à ce moment-là que nous

25 nous sommes plaints à lui. Il avait invité des habitants musulmans du

Page 5975

1 village de Golubici qui étaient juste à côté. Il leur a parlés, et nous

2 nous sommes plaints à lui. Ce jour-là, le même jour, il a ordonné le

3 retrait des pièces d'artillerie. Ces armes, des cannons antiaériens sont

4 restés en mon village. Je n'ai pas assisté à cette rencontre, mais j'en ai

5 entendu parler de la bouche de pas mal de personnes, y compris mes voisins,

6 et des orthodoxes serbes qui m'ont dit avoir participé à cette rencontre et

7 avoir entendu Mladic dire cela.

8 Q. Est-ce que vous avez vu des pièces d'artillerie visant des villages

9 serbes ou des maisons serbes ?

10 R. Non.

11 M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

12 j'aimerais vous renvoyer au paragraphe 13 de la déclaration écrite déposée

13 au Tribunal.

14 Q. Monsieur, vous avez dit avoir été informé du fait que Radovan Karadzic

15 a rendu visite à plusieurs reprises au village de Kalinovik. Comment avez-

16 vous été informé de ces visites ?

17 R. C'est un membre du conseil municipal du SDS qui travaillait avec moi

18 qui me l'a dit. Il m'a informé de tout cela, parce que j'étais employé par

19 la municipalité. Je cherchais à obtenir une promotion. Je travaillais

20 chaque fois qu'il y avait nécessité d'intervenir sur les équipements

21 publics. D'ailleurs, c'était mon devoir. Cet homme m'a dit à plusieurs

22 reprises que M. Karadzic était venu à Kalinovik pour participer à la

23 création du conseil municipal du SDS, mais je n'ai pas participé à ces

24 rencontres moi-même.

25 M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais que l'on soumette au témoin la

Page 5976

1 pièce à conviction suivante, je vous prie, et je demande une cote pour

2 cette nouvelle pièce à conviction.

3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce à conviction P288.

4 M. GAYNOR : [interprétation]

5 Q. Monsieur, comme vous le voyez à la lecture de ce document, il s'agit

6 d'un procès-verbal établi par le conseil de guerre de l'assemblée

7 municipale de Kalinovik, à la fin d'une séance tenue le

8 17 mai 1992, demandant que l'on vérifie quels étaient les hommes en âge de

9 porter les armes d'appartenance ethnique musulmane qui résidaient dans la

10 municipalité de Kalinovik. Ce document établit qu'un rapport doit être

11 rendu au secrétariat à la Défense nationale entre le 20 et le 25 mai 1992.

12 Est-ce que, personnellement, vous vous êtes fait connaître au secrétariat

13 chargé de la Défense nationale entre le 20 et le 25 mai 1992 ?

14 R. Comme j'avais déjà mon affectation de guerre dans le cadre de

15 l'obligation de guerre à laquelle nous étions tous soumis, je savais que

16 j'étais censé continuer à travailler auprès de l'entreprise publique

17 municipale pour laquelle je travaillais pendant toute la guerre. Je n'avais

18 pas besoin de me faire connaître pour être affecté où que ce soit. Tous les

19 autres Musulmans qui avaient d'autres affectations de guerre, ce sont faits

20 connaître au bureau municipal du secrétariat de la Défense nationale.

21 Q. Monsieur, vous voyez au dernier paragraphe de ce document, que l'on

22 peut lire ce qui suit, je cite : "Après s'être faits connaître auprès du

23 secrétariat à la Défense nationale, il leur sera interdit de quitter la

24 municipalité sans autorisation, et ils seront tenus de se rendre auprès des

25 postes de sécurité publique à Kalinovik, Ulog et Polje deux fois par

Page 5977

1 semaine."

2 Est-ce que vous vous êtes rendu au poste de sécurité publique ?

3 R. Je me suis rendu au poste de sécurité publique de Kalinovik deux fois

4 par semaine.

5 M. GAYNOR : [interprétation] Je demande maintenant que l'on soumette au

6 témoin la pièce à conviction suivante, et je demande une cote pour ce

7 document.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose qu'il s'agira de la pièce

9 P289.

10 L'INTERPRÈTE : Signe affirmatif de la tête de la Greffière

11 d'audience.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

13 M. GAYNOR : [interprétation]

14 Q. Monsieur, dans ce document qui porte la date du

15 11 juin 1992, vous pouvez voir que le commandant, le colonel Ratko Bundalo

16 déclare ce qui suit, je cite : "Sur la base de la décision prise par

17 l'état-major du commandement de la République serbe de Bosnie-Herzégovine,"

18 et il poursuit en disant, au paragraphe 1, je cite : "Le territoire des

19 municipalités de Kalinovik et de Trnovo est déclaré de guerre."

20 Au paragraphe 3, il interdit l'entrée de civils dans la région où des

21 combats sont en cours. Je vous pose à présent, Monsieur, la question

22 suivante : le 11 juin 1992 ou aux environs de cette date, quels étaient les

23 quartiers de Kalinovik qui, d'après ce que vous savez personnellement,

24 étaient le lieu de combat ?

25 R. D'après ce que je sais, il n'y a pas eu de combats particuliers sur le

Page 5978

1 territoire de la municipalité de Kalinovik. Les combats se déroulaient sur

2 le territoire de la municipalité de Trnovo et de Nevesinje, parce que c'est

3 là que se sont rendus les volontaires de Kalinovik. Sur le territoire de la

4 municipalité de Kalinovik, il n'y a pas eu de combats.

5 Q. Au paragraphe 2 de ce document, nous lisons, je cite : "Le déplacement

6 de la population, sur le territoire qui renferme la zone des combats, est

7 limité à moins d'un accord préalable du commandant de la zone."

8 La question que je vous pose est la suivante : est-ce que, personnellement,

9 vous aviez toute liberté de circulation dans les environs de Kalinovik, à

10 ce moment-là, je vous dire autour de la municipalité ?

11 R. S'agissant de se déplacer dans les environs de Kalinovik, la sécurité

12 était assez bonne. J'ai circulé dans la région pour faire mon travail;

13 cependant, il n'était pas possible de se rendre à Ljut, à Konjic et dans

14 d'autres villages, parce que là, il y avait des pièces d'artillerie qui

15 étaient positionnées et des lignes de défense sur la route. Il y avait des

16 endroits où la liberté de circulation était limitée, sinon totalement

17 supprimés. La population musulmane qui souhaitait sortir de Kalinovik ne

18 pouvait pas obtenir une autorisation pour ce faire. Certaines personnes ont

19 traversé la forêt pour quitter le village, alors que d'autres, ceux qui

20 sont restés ont subi un sort différent.

21 Q. Vous avez dit qu'il y avait des Musulmans qui souhaitaient quitter le

22 village et qui n'obtenaient d'autorisation pour quitter la municipalité.

23 Qu'en était-il de la population serbe ?

24 R. Les Serbes vivaient là. Ils n'avaient aucune nécessité de quitter

25 Kalinovik pour aller dans les endroits où la population musulmane est

Page 5979

1 allée. Pour eux, il était normal d'aller à Foca, Nevesinje, Gacko. Ce sont

2 les endroits qui ont été leurs destinations.

3 Q. Vous dites que la population musulmane souhaitait quitter le village de

4 Kalinovik. Pourquoi avait-elle ce désir ?

5 R. Comme je l'ai dit, parce que la situation s'était modifiée, des soldats

6 étaient arrivés en très grand nombre à Kalinovik. Nous, Musulmans du

7 village, nous ne recevions aucune aide humanitaire. Nous avons commencé à

8 nous rendre compte qu'il n'y avait aucune possibilité pour nous de

9 continuer à vivre dans ce village. Il y en avait qui ont commencé à avoir

10 peur, qui ont quitté la région. Ceux qui avaient moins peur sont restés,

11 mais c'est la mort qui les attendait.

12 Q. Vous avez dit que les Musulmans avaient peur. De quoi avait-il peur

13 exactement ? Cette peur était-elle simplement due à l'absence d'aide

14 humanitaire ?

15 R. Non, parce qu'au gouvernement local, il n'y avait plus aucun Musulman

16 qui pouvait les défendre. Le poste de sécurité était devenu un poste

17 monoethnique, et toutes les instances du pouvoir étaient devenues

18 monoethniques. Tous ceux qui travaillaient dans ces instances municipales

19 et qui avaient accès à des informations venant d'en haut, tous les

20 fonctionnaires aussi qui travaillaient au secrétariat à la Défense

21 nationale, au bureau de la comptabilité publique ou ailleurs, ont reçu des

22 armes. Les Musulmans de ces instances ont été renvoyés chez eux où ils

23 étaient censés attendre qu'on les rappelle au travail. Par conséquent les

24 gens perdaient leur travail, et se rendaient bien compte qu'il n'y avait

25 plus aucune condition convenable d'existence.

Page 5980

1 M. GAYNOR : [interprétation] J'aimerais que l'on soumette au témoin la

2 pièce à conviction suivante.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une cote d'abord.

4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

5 P290.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

7 M. GAYNOR : [interprétation]

8 Q. Monsieur, ce document est intitulé : "République serbe de Bosnie-

9 Herzégovine, municipalité de Kalinovik, secrétariat municipal à la Défense

10 nationale." Il porte la date du 25 juin 1992. Reconnaissez-vous ce

11 document ?

12 R. Oui. J'ai reçu également un document identique à celui-ci, mais je l'ai

13 perdu pendant la guerre. En tout cas, je l'ai reçu.

14 Q. Le document que vous avez reçu était-il identique à celui-ci à part le

15 nom de la personne qui figure sur celui-ci ?

16 R. Oui, c'était le même formulaire. Les formulaires étaient tous

17 identiques; simplement, on inscrivait le nom à la main.

18 Q. Quand avez-vous reçu cette convocation ?

19 R. J'ai reçu cette convocation le 25 juin 1992, à 13 heures à peu près, au

20 moment où je suis rentré à la maison, un peu plus tôt que d'habitude. J'ai

21 trouvé cette convocation qui m'attendait, convocation que me demandait de

22 me faire connaître auprès du secrétariat de la Défense nationale.

23 Q. Savez-vous qui a apporté cette convocation chez vous à la maison ?

24 R. J'ai vu Gojko Lalovic, qui distribuait ces convocations à d'autres

25 personnes. Il était accompagné de son chauffeur, Badnjak Mihajlo, surnommé

Page 5981

1 Miha.

2 Q. Vous avez dit dans votre déclaration écrite, au

3 paragraphe 1, qu'après avoir reçu cette convocation qui portait la

4 signature de Nedzo Banjanin, vous vous êtes rendu au bâtiment de

5 l'assemblée municipale. Vous y avez trouvé des policiers en grand nombre

6 qui encerclaient le bâtiment. Vous vous souvenez quels étaient les insignes

7 que portaient ces policiers ?

8 R. Les policiers d'active portaient l'uniforme que l'on portait avant la

9 guerre, et les policiers de réserve portaient l'uniforme d'hiver, un

10 uniforme bleu marine. Ils portaient également des bérets bleus, et il y

11 avait un drapeau tricolore sur le bord de ce béret. Je connaissais tous ces

12 hommes parce que nous avions grandi ensemble.

13 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de tous ces policiers ?

14 R. Serbe.

15 Q. Vous avez déclaré que pendant votre détention dans les locaux de

16 l'école primaire Kalinovik, vous étiez gardé par de nombreux policiers

17 ainsi que par d'autres gardes. Quelle était leur appartenance ethnique ?

18 R. Serbe.

19 Q. Quelle était l'appartenance ethnique des détenus ?

20 R. Musulmane.

21 Q. Etaient-ils tous Musulmans ?

22 R. Ils étaient tous Musulmans.

23 Q. Monsieur, au paragraphe -- j'aimerais renvoyer les Juges au paragraphe

24 3 de la déclaration en bosnien du témoin, datant du

25 19 février 1993.

Page 5982

1 Monsieur, vous avez déclaré que le 1er août 1992, pendant votre détention

2 dans l'entrepôt de poudre à canon, vous avez vu des femmes, des enfants et

3 des personnes âgées que l'on expulsait du village de Jelasca, juste en face

4 de Jelasacko Polje. Vous étiez à quelle distance de ces femmes, de ces

5 enfants et de ces personnes âgées ?

6 R. Toutes ces personnes se trouvaient à peu près à 500 mètres de nous. Au

7 moment où elles sont arrivées tout près de l'entrepôt, nous avons cessé de

8 les voir parce que nous étions de l'autre côté. C'est à cet endroit que

9 toutes ces personnes ont été chargées à bord des véhicules.

10 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de ces femmes, de ces enfants et

11 de ces personnes âgées ?

12 R. Musulmane.

13 Q. Comment savez-vous que toutes ces personnes étaient musulmanes ?

14 R. Je le sais, parce que j'étais marié à l'époque, et toutes ces personnes

15 faisaient partie de la famille de ma femme.

16 Q. Pourriez-vous, en quelques mots, nous dire quels parents proches de

17 votre épouse se trouvaient dans ce groupe ?

18 R. Il y avait sa mère, ses deux sœurs, sa tante et leurs familles ainsi

19 que deux autres tantes du côté paternel, des oncles, leurs enfants, et

20 cetera.

21 Q. Vous avez dit que le 2 août 1992 les incendies de maisons musulmanes se

22 sont poursuivis à Jelasca. Comment savez-vous que ces maisons étaient des

23 maisons musulmanes ?

24 R. Parce que je les connais. Je connais ce village. La plupart des détenus

25 venaient de ce village. Ils ont parlé, voyez-vous. Ils m'ont dit, telle et

Page 5983

1 telle maison appartient à telle et telle personne, telle et telle autre

2 maison appartient à telle et telle autre personne. Je connaissais, moi-même

3 personnellement, toutes ces maisons. Nous pouvions voir ce qui se passait à

4 travers les ouvertures parce que la porte de l'endroit où nous nous

5 trouvions était une porte à barreaux. Il y avait également la fenêtre à

6 travers laquelle nous pouvions voir.

7 Q. Monsieur, j'aimerais vous renvoyer à la date du

8 5 août 1992. Dans vos déclarations écrites, vous avez dit en détail que

9 vous êtes parti dans un convoi sous escorte policière de l'entrepôt de

10 munition de Jelasacko Polje jusqu'à votre arrivée à Ratine et à Foca.

11 Parlons du moment où le convoi s'est arrêté à Ratine. Que s'est-il passé à

12 ce moment-là ?

13 R. Quand le convoi s'est arrêté, les hommes en uniforme qui se trouvaient

14 à bord de notre véhicule, qui nous gardaient, nous ont donné l'ordre de

15 descendre tous du véhicule. Ils nous ont dit qu'il ne fallait pas tenter de

16 nous évader parce qu'ils allaient tirer sur nous. Nous n'étions pas assis à

17 bord de ce véhicule; nous étions entassés comme des sardines. Nous sommes

18 descendus du véhicule, à ce moment-là, un soldat en uniforme est arrivé,

19 qui a dit que tout était prêt. On nous a ordonné de descendre et d'aller

20 dans une étable. Pendant que je descendais, j'ai vu tout près de moi un des

21 membres de ma famille qui était complètement ensanglanté. Il n'était pas

22 avant au bord du même véhicule que moi. Je l'ai reconnu. J'ai vu également

23 d'autres prisonniers qui descendaient d'autres véhicules et que je

24 reconnaissais. Nous avons pris le chemin de l'étable dans laquelle on nous

25 avait donné l'ordre d'entrer. Nous y sommes entrés un par un. A ce moment-

Page 5984

1 là, il y a eu une sélection qui a été faite, parce qu'on disait aux hommes

2 plus jeunes de nous tourner le dos. Une fois qu'ils l'avaient fait, l'ordre

3 a été donné de tirer des salves dans leur direction. J'ai été frappé

4 d'ailleurs à l'arrière du genou par une de ces balles. Je suis tombé au sol

5 et j'ai fait semblant d'être mort.

6 Lorsqu'ils ont arrêté de tirer, pensant que nous étions tous morts,

7 ils ont supprimé les liens qui ligotaient les mains de quatre jeunes gens,

8 et leur ont donné l'ordre de jeter nos corps dans l'étable, après quoi, ils

9 seraient libérés. Les jeunes gens ont commencé à faire ce travail. Ils ont

10 jeté mon corps dans l'étable. Il y avait un peu d'huile sur le sol, j'ai pu

11 me glisser, j'ai pu me déplacer en glissant, alors qu'ils continuaient à

12 jeter des corps dans l'étable. J'ai rampé sur le côté, et j'ai évité ainsi

13 que d'autres cadavres ne tombent sur moi.

14 Lorsque, finalement, ils ont fini de jeter les cadavres dans

15 l'étable, ils ont emmené un homme dont je sais bien que c'était un membre

16 de ma famille. Je l'avais vu un peu avant, complètement couvert de sang.

17 Ils ont tiré sur lui. Ils ont tué également trois des jeunes gens qui,

18 avant, avaient jeté les cadavres dans l'étable. Ils ont permis au quatrième

19 de survivre. Ils lui ont donné l'ordre de verser de l'essence sur nos

20 corps. Il a refusé de le faire. A ce moment-là, ils ont tiré sur lui, et

21 ils ont jeté dans l'étable un produit en feu et ils ont mis le feu à

22 l'étable, après quoi ils sont partis; ils sont remontés dans leur véhicule,

23 et ils sont partis.

24 Lorsque j'ai entendu qu'ils étaient partis, j'ai réussi à me relever.

25 Je suis resté au fond de l'étable, mais il y avait une ouverture à cet

Page 5985

1 endroit.

2 Lorsque je me suis rendu compte que j'allais survivre, j'ai réussi à

3 m'échapper de l'étable. Je suis allé jusqu'au ruisseau. J'ai essayé

4 d'enlever les liens qui ligotaient mes mains. J'étais incapable de le

5 faire, mais j'ai trouvé une branche et avec l'aide de cette branche, j'ai

6 réussi à me libérer de mes liens.

7 Vous verrez, j'ai encore les traces des fils de fer autour de mes

8 poignets. J'ai également une blessure à la tête près de l'arcade

9 sourcilière. J'ai réussi à panser mes plaies et, ensuite, je me suis

10 évanoui. Je ne sais pas combien de temps je suis resté inconscient, mais,

11 après quelque temps, je suis revenu à moi et, sachant qu'il y avait encore

12 pas mal d'habitants dans les villages des environs, j'ai commencé à marcher

13 dans cette direction.

14 Aux premières heures du matin, j'ai vu des convois de réfugiés. Je ne

15 savais pas qui ces gens-là étaient, mais, parmi eux, j'ai reconnu un homme.

16 Je me suis approché de lui et il m'a aidé. J'avais de nombreuses blessures.

17 Mon visage était complètement tuméfié. J'avais des traces, des marques de

18 brûlure. Toutes ces personnes se sont occupées de moi. On a soigné mes

19 plaies. J'ai passé quelque temps à cet endroit après quoi j'ai été

20 transféré dans le territoire libéré. J'y ai retrouvé ma famille. J'ai

21 continué à subir des soins médicaux et, ensuite, je suis allé à Zenica.

22 Q. Combien d'hommes ont été tués à Ratine, approximativement ?

23 R. A bord du camion, il y avait 24 hommes avec moi, et un autre homme

24 encore, donc cela fait 25. J'ai réussi à m'enfuir, ce qui veut dire que 24

25 personnes ont été tuées. A la mi-1999, des exhumations ont eu lieu dans les

Page 5986

1 environs de l'étable, des fouilles, et on a réussi à retrouver six cadavres

2 qu'on a identifiés. On a également retrouvé de nombreuses douilles de

3 balles, et les fils de fer qui avaient servi à ligoter les mains des

4 prisonniers, et les restes également de ces jeunes gens qui avaient jeté

5 les cadavres dans l'étable, ce qui veut dire que 24 hommes ont été brûlés à

6 cet endroit ou tués.

7 Je ne sais pas si le Procureur souhaite que je décrive ce qui s'est passé

8 entre le 1er et le 5. Vous aimeriez que j'en parle ?

9 Q. Non, ce n'est pas nécessaire. Merci. Cela figure dans votre déclaration

10 écrite.

11 Puis-je vous poser la question suivante : les hommes tués à Ratine, quelle

12 était leur appartenance ethnique ?

13 R. Musulmans.

14 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de ceux qui ont tiré sur ces

15 Musulmans ?

16 R. Serbes.

17 Q. Quel uniforme portait ces hommes s'ils portaient un uniforme ?

18 R. Ils portaient un uniforme de camouflage, et c'est Pero Elez et Zeko

19 Vukovic qui dirigeaient ces hommes.

20 Q. Combien d'hommes ont été tués détenus avez-vous dans cet entrepôt de

21 poudre à canon ?

22 R. Nous étions 85.

23 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de ces détenus ?

24 R. Musulmane.

25 Q. Parmi ces 85 hommes, combien y en a-t-il qui sont vivants aujourd'hui ?

Page 5987

1 R. Aucun survivant n'est connu, à part moi.

2 Q. Monsieur, j'aimerais simplement, maintenant, vous poser quelques

3 questions générales.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, si vous pensez pouvoir

5 terminer votre interrogatoire en deux minutes, d'accord, sinon, il serait

6 préférable de faire la pause.

7 M. GAYNOR : [interprétation] Faisons la pause dans ce cas, Monsieur le

8 Président.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous

10 escorter le témoin hors du prétoire.

11 Monsieur le Témoin, nous allons faire une pause de 25 minutes, mais, comme

12 je vous l'ai déjà dit un peu plus tôt, cette pause pourrait durer un peu

13 plus longtemps dans votre cas car nous devons entendre un autre témoin

14 juste après la pause. Mais je suppose, Monsieur le Témoin, que nous

15 pourrons reprendre votre interrogatoire un peu plus tard ce matin, ce qui

16 veut dire à peu près dans deux heures. D'accord ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, d'accord.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Madame l'Huissière, veuillez

19 escorter le témoin hors du prétoire. J'aimerais que nous passions

20 maintenant quelques très brefs instants à huis clos partiel avant la pause.

21 [Le témoin se retire]

22 [Audience à huis clos partiel]

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 5988

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 [Audience publique]

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant la pause, nous étions à huis clos

25 partiel, et c'est, à ce moment-là, que j'ai demandé aux parties de

Page 5989

1 s'entretenir sur une possibilité d'un accord. Si vous désirez ne pas passer

2 à huis clos partiel, nous pouvons le faire; si oui, nous pouvons également

3 vous entendre en audience publique.

4 M. HANNIS : [interprétation] Je crois qu'il serait plus propice de passer à

5 huis clos partiel, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Passons maintenant pour

7 quelques instants à huis clos partiel.

8 [Audience à huis clos partiel]

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 5990

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 5991

1 (expurgée)

2 [Audience publique]

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, il est confirmé sur notre

4 écran que nous sommes maintenant en audience publique. Je vous écoute,

5 Monsieur Stewart.

6 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il y a quelques

7 instant, je me suis entretenu avec M. Hannis, concernant la pause de cinq

8 jours. Nous aimerions, effectivement, avoir la même semaine -- nous sommes

9 d'accord pour la même semaine que l'Accusation. Je comprends qu'il y a des

10 difficultés insurmontables et, à ce moment-là, il est impossible de

11 surmonter des problèmes insurmontables.

12 Je comprends très bien, mais ce n'était pas ce dont nous avons parlé

13 initialement quoique nous aimerions peut-être faire une proposition

14 pratique. Je me demandais si la Chambre de première instance accepterait

15 d'ajourner pendant les deux semaines en question. Est-ce que cela pourrait

16 aider toutes les parties ? C'est ce que nous avions à vous proposer. Je

17 pense que peut-être une pause ou une interruption de deux semaines pour que

18 l'on résolve plusieurs questions serait peut-être une bonne idée. Voilà

19 notre proposition.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci.

21 Nous avons interrompu l'interrogatoire principal de M. Hadzic et

22 j'aimerais savoir si la question des pièces annexées concernant le document

23 précédent a été résolue au cours de la pause. Le contre-interrogatoire de

24 ce témoin n'a pas encore été terminé.

25 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, avant que M. Margetts

Page 5992

1 répond à cette question, nous avions une proposition. M. Gaynor, comme il

2 ne lui reste que dix à 15 minutes pour compléter l'interrogatoire principal

3 du témoin qu'il a entamé d'interroger, à ce moment-là, cela pourrait peut-

4 être permettre à Mme Loukas d'avoir un temps supplémentaire à propos de

5 cette question.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que la Défense est d'accord avec

7 cette proposition ?

8 M. STEWART : [interprétation] Oui. En réalité, cela nous mène à la pause

9 suivante.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais, à ce moment-là, sur la base

11 de vos observations hier, nous avons compris que le contre-interrogatoire

12 ne pourrait être complété aujourd'hui, de toute façon.

13 M. STEWART : [interprétation] J'ai l'impression que nous sommes en train de

14 faire des concessions depuis ce matin. C'est bien, il n'y a pas de

15 problème.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre est d'accord avec M. Stewart

17 et je crois qu'il serait très difficile d'expliquer au témoin que nous

18 avons reporté le témoin de ce matin. Il nous serait peut-être mieux de

19 procéder avec ce témoin-là. Il serait difficile de lui expliquer quelle est

20 la raison pour laquelle, maintenant, nous devons de nouveau le demander

21 d'attendre quelque peu. Je crois qu'il est mieux de continuer le contre-

22 interrogatoire de notre témoin que l'on avait prévu comme premier témoin de

23 ce matin.

24 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je l'apprécie.

25 Merci, Monsieur le Président.

Page 5993

1 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

2 M. STEWART : [interprétation] Je pourrais soulever quelques questions,

3 Monsieur le Président, pendant que l'on entend que le témoin ne se

4 présente. Nous avons attiré l'attention au centre pénitencier des Nations

5 Unies, vendredi dernier, sur le fait que le Témoin 608 et, en fait, il y a

6 tout ce mystère autour du Témoin 608. En fait, cela n'a pas encore été

7 livré à M. Krajisnik. Nous avons fait quelques demandes supplémentaires et

8 j'ai fait d'autres demandes au cours de la dernière demi heure. Je ne sais

9 ce qui arrive, effectivement, mais, ce n'est qu'une semaine plus tard que

10 les documents, que nous avons livrés pour M. Krajisnik, ne lui sont

11 parvenus qu'une semaine après.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Quelles que ce soit les

13 informations que vous avez concernant cette question, je vous demanderais

14 de la donner au Greffier, afin que votre observation soit bien notée.

15 M. STEWART : [interprétation] Vous savez, on vient en aide d'une façon

16 régulière au quartier pénitencier. Nous n'avons jamais eu de vrais

17 problèmes sérieux.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Il n'y a absolument aucune

19 hésitation; vous pouvez certainement informer le Greffier concernant cette

20 question.

21 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pourrais-je

22 mentionner juste une autre chose concernant M. Harmon ? Il m'a informé par

23 e-mail ce matin -- malheureusement je ne souviens pas si c'était la nuit

24 dernière ou ce matin, ou enfin hier soir ou ce matin. Mais je lui ai

25 demandé s'il pouvait m'informer de ce qui en est pour le témoin qui est

Page 5994

1 réservé pour lundi prochain, M. Kljuic, c'est le Témoin 526. Il a dit qu'il

2 m'informerait de ce qui en serait le témoin devrait être présent lundi.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Une attention toute

4 particulière sera faite concernant cette demande, qui est la vôtre,

5 Monsieur Margetts.

6 M. MARGETTS : [interprétation] Je vous remercie.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement, nous répondrons le

8 plus tôt que possible.

9 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. M. Dzambasovic, veuillez

11 vous asseoir, je vous prie.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais vous rappeler que vous

14 êtes encore tenu par la déclaration solennelle que vous avez donnée au

15 début de votre témoignage.

16 LE TÉMOIN : ASIM DZAMBASOVIC [Reprise]

17 [Le témoin répond par l'interprète]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le conseil de la Défense reprendra

19 maintenant votre contre-interrogatoire. Veuillez poursuivre, Maître Stewart

20 Contre-interrogatoire par M. Stewart : [Suite]

21 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 Excusez-moi, Monsieur le Président, en essayant de rapprocher le micro, je

23 viens de voir que j'ai éliminé le transcript de l'écran. Bien maintenant.

24 Q. Bonjour, M. Dzambasovic. Dans votre déclaration, qui a été signée au

25 mois d'octobre 2002, il s'agit d'une déclaration assez longue. A la page 4,

Page 5995

1 de cette déclaration, il y a un paragraphe dans lequel vous dites,

2 concernant le fait de savoir qui a participé dans cet effort de bloquer la

3 mobilisation, je me souviens que les gens, qui avaient pris part, faisaient

4 partie du SDS et du SDA de leurs organisations dans les municipalités. Je

5 me souviens, également, que toute autorité juridique et légale de la

6 municipalité avait procédé à l'obstruction de la mobilisation.

7 Pourriez-vous nous expliquer, je vous prie : que voulez-vous dire par

8 la phrase : "Toutes les autorités juridiques des municipalités" ? C'est ce

9 qui m'intéresse.

10 R. C'est à ce moment-là que, pour la première fois, dans l'histoire de

11 l'ex-Yougoslavie -- l'histoire de la JNA, il est arrivé l'événement suivant

12 : c'est que l'autorité civile et les organes du MUP procédaient à

13 l'obstruction de la mobilisation. Jusqu'à cette époque-là, toutes les

14 mobilisations faites avaient toujours été faites par un appui absolu des

15 organes du pouvoir indépendamment de qui il s'agit. A ce moment-là, des

16 partis qui venaient d'être créés après les élections multipartites, avaient

17 pris place sur l'estrade. Au lieu d'avoir un appui, comme normalement cela

18 a toujours été fait, nous avions eu et senti que notre travail avait été

19 complètement obstrué par les organes des autorités, par les autorités, en

20 fait, locales pour ce qui est de notre brigade. C'est la raison pour

21 laquelle nous avons informé le commandement du

22 4e Corps de Sarajevo. Le commandement du 4e Corps de Sarajevo devait rendre

23 les comptes au commandement de Belgrade. A l'époque, nous ne savions pas du

24 tout ce qui se passait. Pour nous, soldats professionnels, cela

25 représentait une surprise toute particulière.

Page 5996

1 Q. Un peu plus loin dans votre déclaration, à la page 9, il y a un

2 paragraphe au bas de cette page. En anglais, on peut lire, "Les choses ont

3 empiré avec le temps, concernant la reddition des armes de la JNA et le

4 retrait de la JNA, ainsi de suite."

5 C'est votre évaluation, Monsieur Dzambasovic, n'est-ce pas, là, la

6 position, effectivement, que vous ne connaissez pas en réalité ? Vous ne

7 savez pas, personnellement, si des représentants officiels, des

8 représentants hauts gradés serbes avaient pris part à la planification de

9 cette organisation, n'est-ce pas ?

10 R. Non, ce n'est pas tout à fait cela. A l'époque, je ne savais pas

11 officiellement que le tout avait été organisé par le sommet politique et

12 militaire. Plus tard, j'ai vu des documents reliés à cela. La raison pour

13 laquelle j'ai fait cette évaluation, c'est que je peux le confirmer par les

14 documents que j'ai vus plus tard. Je ne sais pas si vous avez ces

15 documents, mais je les ai vus. Je crois que les enquêteurs avec lesquels je

16 me suis entretenu, ils avaient la possibilité de voir ces documents. De

17 façon officielle, les autorités militaires, les supérieurs militaires, le

18 QG, suite à la décision faite par le sommet militaire, avaient reçu l'ordre

19 que toutes les armes, l'équipement et le matériel des centres où les

20 Musulmans et les Croates étaient majoritaires, devaient être disloqués ou

21 devaient être déplacés. Ce sont des documents officiels. Je vous parle de

22 cela maintenant, alors qu'en 1991 et 1992, je n'avais pas connaissance de

23 ces documents. Par la suite, beaucoup plus tard, j'ai eu connaissance des

24 faits, j'ai vu les documents, Effectivement, en pratique, c'est ainsi que

25 les choses se sont déroulées. La mise en place de ces ordres suivant les

Page 5997

1 documents qui existaient, ont été faits -- ont eu lieu. La mise en place a

2 eu lieu en 1991 et 1992. Il y a des documents officiels pour le confirmer.

3 Q. Monsieur Dzambasovic, depuis les événements qui se sont déroulés au

4 début des années 1990, vous avez fait un travail considérable. Vous avez pu

5 vous entretenir avec un bon nombre de personnes qui avaient fait une

6 recherche concernant les événements qui se sont déroulés en 1991 et 1992,

7 n'est-ce pas ?

8 R. Oui, c'est exactement cela.

9 Q. Lorsque j'emploie le mot "considérable" dans le sens où vous avez fait

10 un travail considérable, c'est un terme assez large. Je veux dire que vous

11 avez beaucoup travaillé là-dessus,

12 n'est-ce pas ?

13 R. J'ai beaucoup travaillé sur des analyses professionnelles de ces

14 documents officiels par rapport à ce que j'ai vu dans la pratique et par

15 rapport aux événements que j'ai vus en tant que témoin oculaire. J'ai été

16 témoin des événements. Je me suis également basé sur ce que j'ai pu

17 entendre de mes collègues soit provenant du commandement supérieur ou des

18 collègues qui étaient à mon niveau. C'est ainsi que j'ai pu arriver aux

19 conclusions auxquelles je suis arrivé.

20 Q. La réponse à ma question est oui, n'est-ce pas ? En fait, vous avez

21 fourni un travail assez important concernant cette question, vous avez

22 beaucoup travaillé là-dessus ?

23 R. Je dois dire que la réponse est affirmative d'une certaine façon.

24 J'explique. On m'a demandé -- les organes supérieurs, le tribunal et le

25 ministère de la Défense m'ont demandé de travailler sur ces documents.

Page 5998

1 Q. En réalité, vous êtes employé présentement en tant qu'enquêteur pour ce

2 qui est d'une autre affaire devant ce Tribunal ?

3 R. Oui.

4 Q. Il s'agit de l'affaire dans laquelle le Défendeur --

5 [Le conseil de la Défense se concerte]

6 M. STEWART : [interprétation]

7 Q. M. Halilovic, est seul, n'est-ce pas ? Il est accusé en tant qu'accusé

8 Halilovic.

9 R. C'est exact.

10 Q. Monsieur Dzambasovic, pourriez-vous nous dire depuis quand êtes-vous

11 engagé a enquêter dans cette affaire ? Vous êtes un enquêteur de l'équipe

12 de la Défense dans l'affaire Halilovic,

13 n'est-ce pas ?

14 R. Oui. Depuis le mois de septembre, depuis le

15 26 septembre 2003.

16 Q. Est-ce que vous êtes à la tête de l'enquête qui était effectuée pour la

17 Défense de cet accusé ?

18 R. C'est le Greffier du Tribunal qui m'a nommé de façon officielle en tant

19 qu'enquêteur de l'équipe de la Défense de Safer Halilovic, et ce, depuis le

20 mois de septembre de l'année dernière.

21 Q. Je comprends que vous avez été assigné, vous avez obtenu ce titre de

22 façon officielle. Vous êtes l'enquêteur en chef, n'est-ce pas, de l'équipe

23 de la Défense; est-ce exact ?

24 R. Je ne sais pas comment les avocats avec lesquels je travaille me

25 voient.

Page 5999

1 Q. Très bien. Ne passons pas trop de temps là-dessus, Monsieur

2 Dzambasovic. En deux phrases, pourriez-vous nous expliquer de quoi il

3 s'agit dans cette affaire-là ?

4 R. Cette affaire est liée aux événements qui ont eu lieu en 1993 dans la

5 vallée de la Neretva. Pour ce qui est de Grabovica et Uzdol, il s'agit de

6 villages qui étaient composés majoritairement de Croates. Selon l'acte

7 d'accusation, c'est là que le crime a eu lieu.

8 Q. M. Safer Halilovic, votre client, qui est-il en une phrase ou deux,

9 dites-le nous ?

10 R. Il était le commandant de l'ABiH. Dans ce cas bien concret, pour ce qui

11 est de la période pour laquelle l'acte d'accusation a été rédigé, il était

12 le chef du QG, alors que le commandant était un autre homme, le général

13 Delic.

14 Q. Monsieur Dzambasovic, je n'essaie pas du tout de vous attaquer en vous

15 posant la question suivante, mais est-ce que je peux résumer la chose de la

16 façon suivante ? Vous avez dit avoir vu des événements vous-même, en tant

17 que témoin oculaire. Dans votre déclaration, il est clair que nous pouvons

18 voir que vous étiez sur place et que vous avez vu certaines choses. Lorsque

19 vous exprimez des points de vue concernant les événements qui se sont

20 déroulés en 1991 et 1992, n'est-il pas exact de dire que vos conclusions

21 représentent une synthèse de ce que vous avez vu à l'époque, conjuguées

22 avec votre travail; avec le travail que vous avez fait sur ces questions

23 depuis, n'est-ce pas, et ce, en consultant d'autres collègues, après avoir

24 lui bon nombre de documents, n'est-ce pas ?

25 R. Je ne considère pas que vous m'attaquez. Vous ne pouvez certainement

Page 6000

1 pas m'attaquer pour ce que j'ai écrit dans la déclaration. Ce sont des

2 activités, des événements pour lesquels j'ai été témoin oculaire. Il n'y a

3 absolument personne et, si

4 M. Milosevic était ici, il pourrait confirmer toutes mes citations car les

5 événements sont authentiques, les citations également. Concernant mes

6 conclusions pour ce qui est des événements que j'ai vécus, que j'ai vus,

7 pour lesquels j'avais entendu parler à l'époque, il est certain que tout

8 ceci est appuyé par les analyses des documents que j'ai faites

9 subséquemment. Les documents confirment ce que j'avais vu à l'époque, ce

10 que j'ai vécu à l'époque et ce dont j'ai été témoin à l'époque.

11 Q. Monsieur Dzambasovic, dans votre déclaration à la page 11, vous dites,

12 je cite : "Je fournis un document; c'est le document numéro 2. Ce document

13 émane de l'assemblée du Peuple serbe. Il est daté du mois de décembre 1991.

14 Ce document parle des organisations et des Unités du SDS serbe.

15 Maintenant, Monsieur le Président, il s'agit d'un paragraphe comme il

16 a été indiqué pendant la pause, qui suggère que l'on avait dit qu'il nous

17 faudrait le tronquer. Dans un certain sens,

18 M. Margetts a soulevé cette question-là, à savoir, si ce passage devrait

19 être versé au dossier ou non.

20 Maintenant, Monsieur le Témoin, ce document porte la date du mois de

21 décembre 1991. Vous avez décrit ce document comme un document émanant de

22 l'assemblée du peuple serbe. C'est le document qui est connu sous le nom de

23 la variante A et la variante B, n'est-ce pas ?

24 R. Est-ce que vous posez des questions à moi ?

25 Q. Monsieur Dzambasovic, oui, c'est à vous que je pose cette question. Si

Page 6001

1 jamais je m'adressais à quelqu'un d'autre, je le dirais. Je vous pose cette

2 question. Veuillez y répondre, je vous prie.

3 R. Ce document et plusieurs autres documents qui datent de 1991, je les ai

4 vus en 1991 parce que -- pour quelques raisons. Je ne sais pas si vous avez

5 eu ces documents, mais mon collègue, le commandant Krstovic, a été nommé

6 ministre de la région de Romanija. J'ai été étonné quand j'ai vu les

7 documents plus tard. J'avais vu certains documents plus tôt et d'autres

8 documents plus tard. Le document qui nommait mon collègue au poste de

9 ministre de la Défense, je l'ai vu pendant que j'étais encore dans la JNA.

10 Q. Ce document -- je demanderais que l'Accusation nous aide là-dessus. Il

11 s'agissait des variantes A et B.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, je ne sais pas si

13 vous voulez que l'on vous confirme ce fait ou non --

14 M. STEWART : [interprétation] Une confirmation serait plus facile.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On a parlé de ce document à la page 11.

16 Est-ce que c'est ce qui figure déjà au dossier ? Ce sont les variantes A et

17 B.

18 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, c'est bien cela. Monsieur le Président,

19 c'est bien difficile. Il lui est bien difficile de répondre sans avoir une

20 déclaration sous les yeux et les annexes en question.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les parties se sont mises d'accord. Il

22 s'agit bien des variantes A et B de ce document, qui date du mois de

23 décembre 1991.

24 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vous

25 remercie, Monsieur Margetts, de nous avoir élucider sur cette question.

Page 6002

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

2 M. STEWART : [interprétation] Je vous ai posé cette question, Monsieur

3 Dzambasovic, parce que, plus loin dans votre déclaration, dans un

4 paragraphe qui est resté d'ailleurs dans cette déclaration, vous en parlez

5 à nouveau; vous évoquez la question de ce document, variantes A et B.

6 C'est pour cela justement que je voudrais que l'on présente au témoin

7 le document P66 qui figure parmi les pièce à conviction en l'espèce depuis

8 très longtemps.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, pourriez-vous

10 trouver ce document P66 ?

11 M. STEWART : [interprétation] On vient de me dire qu'en réalité ce document

12 n'y est pas. Veuillez m'accorder un instant, s'il vous plaît.

13 [Le conseil de la Défense se concerte]

14 M. STEWART : [interprétation] J'ai été un peu confus, car il s'agit du

15 document en réalité qui porte la cote P65, mais qui se trouve dans le

16 dossier 6. Dans ce dossier, il s'agit du document 66.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 M. STEWART : [interprétation] C'est très difficile d'avoir en tête les

19 cotes de tous ces documents et de les retrouver.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'imagine que vous souhaitez présenter

21 au témoin la version en B/C/S de ce document.

22 M. STEWART : [interprétation] Oui. Je pense qu'il serait utile que le

23 témoin ait sous les yeux un exemplaire de sa déclaration qu'il a fourni au

24 mois d'octobre 2002. Il s'agit là de cette longue déclaration du témoin, la

25 plus longue qu'il ait donnée.

Page 6003

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

2 M. STEWART : [interprétation] En B/C/S

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous la voulez en B/C/S.

4 M. STEWART : [interprétation] Oui, je pense que oui.

5 Q. On vous a déjà montré ce document, le document, variantes A et B,

6 n'est-ce pas ?

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il l'avait.

8 M. STEWART : [interprétation] Merci.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

10 M. STEWART : [interprétation]

11 Q. Tout d'abord, Monsieur le Témoin, je vais vous poser une question. Je

12 pense que je peux la poser même si ce paragraphe vient de votre

13 déclaration. Dans votre déclaration, vous décrivez ce document en tant

14 qu'un document émanant de l'assemblée du peuple serbe. Vous êtes bien

15 d'accord que ceci n'est pas exact, c'est-à-dire qu'il n'y a rien sur le

16 document qui indique qu'il provient de l'assemblée du peuple serbe, n'est-

17 ce pas ?

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dzambasovic --

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problèmes, vous pouvez vous exprimez,

20 je vous entends. Je suis en train de chercher quelque chose.

21 M. STEWART : [interprétation] Je pense que le Président voulait peut-être

22 savoir si c'était un sandwich que vous cherchiez dans votre attaché-case ou

23 autre chose.

24 L'INTERPRÈTE : Le témoin a dit qu'il cherchait un stylo.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai pensé --

Page 6004

1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai un peu trop de kilos pour manger un

2 sandwich, vous savez.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous demander de ne pas écrire

4 quoi que ce soit sur les documents qui figurent parmi les pièces à

5 conviction ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ne vous inquiétez pas. Je n'écrirai rien sur

7 les documents.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Pourriez-vous répéter la question, s'il vous

10 plaît ?

11 M. STEWART : [interprétation]

12 Q. Oui. Aucun problème. Tout d'abord, rien sur ce document n'indique qu'il

13 émane de l'assemblée du peuple serbe, et je vous demande de me donner si

14 vous -- de nous dire si vous êtes d'accord là-dessus ou non.

15 R. D'après l'intitulé du mémorandum, il s'agit du parti démocratique

16 serbe de Bosnie-Herzégovine de son conseil principal, donc peut-être me

17 suis-je mal exprimé. Il s'agit donc du conseil principal du SDS. Si j'ai

18 dit que ce document émanait de l'assemblée, c'est parce que cette assemblée

19 justement est mentionnée souvent dans le texte où il est dit que

20 l'assemblée allait prendre une décision, et cetera. Mais, vous savez, je ne

21 pense pas que ceci fait l'objet d'une quelconque contestation. On voit très

22 bien, en lisant le document, qui est l'auteur du document.

23 Q. Très bien. Vous venez de répondre justement à la prochaine question que

24 je voulais vous demander -- vous poser. La source de ce document, c'est que

25 vous dites être la source du document est une conclusion que vous tirez du

Page 6005

1 contenu même du document. C'est sur cela que vous vous basez. Vous n'avez

2 pas d'autres informations à ce sujet.

3 R. C'est exact.

4 Q. Dans votre déclaration, est-ce que vous l'avez sous vos yeux ?

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, le témoin a la déclaration.

6 M. STEWART : [interprétation] Bien. Je ne sais pas de quelle page, il

7 s'agit en version B/C/S.

8 Q. Toujours est-il, que c'est à peu près à la moitié de la page, de la

9 page où vous énumérez 23 documents ou 23 points -- des missions en réalité

10 qui ont été données. Est-ce que vous avez trouvé cela ?

11 R. Oui. En effet.

12 Q. Très bien. Ensuite, deux ou trois paragraphes plus loin, vous parlez de

13 votre journal, et vous dites : "Quant à elle, l'entrée, le peuple doit

14 décider de ne pas utiliser leurs vacances," et là, vous parlez du point 10,

15 dans le document du SDS, variantes A et B, où le plan indique, je cite :

16 "Organiser et informer toutes personnes serbes de ne pas utiliser leurs

17 congés payés dans la période à venir, et de ne pas voyager."

18 Je me souviens très bien, là je cite : "Que ce point était soulevé

19 par le colonel Milosevic." Vous pouvez voir cela au niveau du point 11, où

20 il est dit : "Quelles unités devaient être remises à niveau des critères et

21 des standards de la JNA en ce qui concerne le nombre de personnes figurant

22 dans chacune des unités en tant de guerre." Ensuite, il y est écrit : "11.

23 Préparations à faire. Des conditions organisationnelles et autres, et

24 cetera, et cetera." Ensuite, la deuxième entrée, de l'entrée qui suit,

25 indique : "Renforcer les Unités de guerre, conformément aux spécialités de

Page 6006

1 la JNA." Est-ce que c'est à cela que vous faisiez référence quand vous

2 parliez de la remise à niveau des unités pour correspondre au standard et

3 critères de la JNA ?

4 R. Je dois clarifier cela. Ces 23 missions, qui figurent dans ma

5 déclaration, ce sont les missions, les tâches qui nous ont été confiées par

6 le commandant Milosevic, qui l'a lui reçu du général Kukanjac, le

7 commandant du 2e District militaire. Ce sont les tâches que nous avons

8 reçues tel quelles du commandant du 2e District militaire. Ensuite, je les

9 ai comparées avec les missions qui figurent dans ce document concernant les

10 instructions et l'organisation du peuple serbe, et cetera, et cetera, et je

11 tire mes conclusions comparant ces deux documents, les décisions politiques

12 du peuple serbe ont été réalisées dans l'armée par le biais des différents

13 ordres émanant des commandements militaires.

14 Q. Dans votre déclaration, vous dites qu'au point 11 ou la tâche 11, vous

15 en parlez. Quand vous en parlez, vous ne parlez pas du paragraphe 11, des

16 variantes A et B ?

17 R. Non. Pas du tout. Ceci ne correspond pas au paragraphe 11 de ce

18 document. Dans ma déclaration, il s'agit -- laissez-moi vérifier cela.

19 C'est un point qui parle de l'attitude au combat --

20 Q. Monsieur le Témoin, je pense que je vais pouvoir vous aider. Dans votre

21 déclaration, vous dites en ce qui concerne un point, --

22 R. Poursuivez, je vous prie.

23 Q. Mais les gens doivent se prononcer contre l'utilisation de leurs

24 vacances, ensuite vous parlez de votre journal, page 55, point 11, vous

25 dites : "Je me souviens du point 10 qui se trouve dans les variantes A et

Page 6007

1 B. Je me souviens que le colonel Milosevic en a parlé, et cetera, et

2 cetera. Ensuite, vous parlez de différentes unités." Ceci n'est pas très

3 clair, Monsieur le Témoin, car on ne voit pas vraiment de quels documents

4 vous parlez car, quand vous parlez du point 11 ou du paragraphe 11, on ne

5 sait absolument pas si vous parlez du paragraphe 11 du document, variantes

6 A et B, ou est-ce que vous parlez du paragraphe 11 de votre journal ? Peut-

7 être serait-il utile d'examiner à présent votre journal ? Cela va nous

8 aider. Je pense que vous l'avez sur vous.

9 R. Oui. En effet.

10 Q. Vous l'avez.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts.

12 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, le journal fait

13 partie des pièces à conviction que nous avons l'intention de distribuer aux

14 Juges de la Chambre, et nous allons pouvoir vous le distribuer.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que nous avons déjà reçu ce

16 document. Ces documents figurent parmi les pièces qui nous ont été

17 communiquées.

18 M. STEWART : [interprétation] Oui, effectivement. Il y a toute une pile de

19 documents qui nous a été communiquée, et je l'ai reçu en anglais,

20 d'ailleurs.

21 M. MARGETTS : [interprétation] Peut-on attribuer une cote à ce document ?

22 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'étaient les pièces jointes à la

24 déclaration. Nous ne les avons pas encore numérotées. Nous allons en parler

25 plus tard. Mais nous savons tous qu'à présent nous sommes en train

Page 6008

1 d'examiner le journal intime de ce témoin qui jusqu'à présent n'a pas reçu

2 de cote et qui correspond à ceci. C'est bien cela un document en l'état.

3 Vous pouvez continuer, Maître Stewart.

4 M. STEWART : [interprétation] Je ne sais pas quelle est la meilleure façon

5 de traiter des questions semblables à l'avenir. Mais, apparemment, nous ne

6 nous sommes pas bien pris pour traiter de cela. Nous devrions réfléchir à

7 la façon de procéder à l'avenir. Toujours est-il que je peux continuer.

8 Q. Monsieur le Témoin, vous avez votre journal sous vos yeux. Les numéros

9 de page ne seront pas les mêmes en anglais et en B/C/S, mais à la page 19,

10 sur 30 -- 38 pages qui ont traduites en langue anglaise, à la date du 5

11 février 1992, dans votre journal en serbe, je pense qu'on y voit 24 points

12 qui sont énumérés sous l'intitulé : "Tâches du commandement du 2e District

13 militaire." Est-ce que vous voyez où nous sommes ?

14 R. Oui, oui, oui. D'ailleurs, dans la traduction, c'est écrit : "Point 2,

15 non lisible". Ce qui est écrit ici, c'est : "Empêchez les provocations et

16 être préparé pour une attaque décisive".

17 Q. Donc --

18 R. Vous, vous étiez intéressiez par le point concernant les congés payés,

19 dans mon journal.

20 Q. Le point 12 parle des congés payés. Même si cela m'intéresse beaucoup,

21 Monsieur le Témoin, je suis encore plus intéressé par le point 11.

22 Maintenant, que vous avez ces documents sous vos yeux, quand, dans votre

23 déclaration, vous parlez du point 11, qui spécifie quelles unités doivent

24 être remises au niveau des standards de la JNA, et cetera, est-ce que vous

25 parlez du point qui figure dans le document, variantes A et B, ou du point

Page 6009

1 qui figure -- du paragraphe plutôt qui figure dans votre journal ? Pour

2 commencer, c'est la première question que je vous pose.

3 R. C'est très clair. Les 23 pages, qui figurent dans mon journal, ce sont

4 les pages du commandement du 2e District militaire, qui n'ont rien à voir

5 avec le document que vous venez de montrer concernant l'instruction du

6 comité central du SDS. Les 23 tâches ici n'ont rien à voir avec

7 l'instruction émanant du comité central du SDS. Ici, ce que l'on regarde,

8 ce sont les tâches qui ont été communiquées par le commandement du 2e

9 District militaire à ses unités et ses commandements qui lui sont

10 subordonnés. Mais, si vous les analysez, vous allez voir qu'ils

11 correspondent parfaitement aux décisions politiques du peuple serbe. Ceci

12 corrobore ce que j'ai dit tout à l'heure. La politique serbe s'exerçait, du

13 point de vue pratique, en réalité, par l'armée, par les commandements, par

14 les ordres, par les décisions données aux différents commandements de

15 l'armée.

16 Q. Vous dites, dans votre déclaration, que vous avez, après coup, essayé

17 de trouver des correspondances entre ces ordres que vous avez reçus au mois

18 de février 1992 et les instructions qui figurent dans les documents,

19 variantes A et B, pour voir ce qu'on peut y trouver de similaire. C'est ce

20 que vous avez fait, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, oui, c'est à peu près cela. Justement, je vous ai expliqué cela

22 tout à l'heure. Je vous ai dit que j'ai été témoin, témoin direct de tout

23 cela. Un certain nombre de tâches qui y figurent, je les ai retrouvées dans

24 les documents que j'ai retrouvés plus tard, et il se pourrait que j'en

25 trouve d'autres documents à l'avenir et que j'arrive à d'autres

Page 6010

1 conclusions, peut-être encore plus détaillées. Effectivement, vous avez

2 fait une bonne conclusion au sujet de cette question précise.

3 Q. Plus précisément, quand vous avez essayé de trouver ces

4 correspondances, justement, nous allons nous attarder sur le paragraphe 11.

5 Vous dites, dans votre déclaration, que le paragraphe 11 précise quelles

6 sont les unités qui doivent être remises à niveau pour correspondre aux

7 standards de la JNA. Pourriez-vous nous montrer un document, soit le

8 document, variantes A et B, ou un quelconque autre document, où l'on

9 précise quelles sont ces unités qu'il conviendrait de mettre à niveau des

10 critères -- des standards de la JNA ?

11 R. Vous n'êtes pas un soldat, et cela se voit. Vous savez, toutes les

12 unités devaient être au niveau -- aux normes -- devaient correspondre aux

13 normes de la JNA. Notre tâche principale était d'avoir toutes les unités à

14 un niveau d'aptitude au combat correspondant aux normes en vigueur. Ceci

15 s'appliquait à toutes les unités. Cela voulait dire que toutes les unités

16 devaient avoir un niveau d'aptitude au combat tel qu'elle pouvait être à

17 même de mener à bien leur mission -- les missions de combat, et ceci, en

18 prenant en compte tous les éléments : l'entraînement, la logistique, la

19 tactique, la stratégie, et cetera.

20 Q. Vous avez tout à fait raison, Monsieur le Témoin, je ne suis pas un

21 soldat. Mais ici, ce que je vous demande, puisque nous sommes dans un cadre

22 légal -- juridique, c'est de répondre à mes questions et de ne pas

23 élaborer. Je vous ai posé une question concernant le paragraphe 11. Je vous

24 ai demandé à quel endroit et dans quel document l'on précise quelles sont

25 les unités qui doivent être remises au niveau des normes de la JNA. Où

Page 6011

1 s'est écrit ? Ce n'est pas une question particulièrement militaire.

2 R. Sous le numéro 5, vous avez une illustration de cela. On y lit :

3 "Renforcement des Unités de guerre, en accord avec leurs possibilités

4 réelles." C'est de cela que je parlais. C'est juste un exemple, une

5 illustration. L'Etat et renforcement des Unités de guerre, j'ai écrit cela

6 en utilisant une abréviation "RJ" pour correspondre aux normes des Unités

7 de guerre, et ceci, en accord avec leurs capacités réelles. C'était une

8 tâche.

9 Ensuite, on parle du besoin de moins utiliser les mines et les munitions,

10 de faire des économies et de la nécessité d'équiper les unités pour durer

11 au moins 45 jours, ce qui voulait dire 45 jours de guerre.

12 Q. Monsieur Dzambasovic, ce paragraphe 5 ne dit pas exactement la même

13 chose que ce qui est écrit dans le paragraphe 11. On n'y lit pas quelles

14 sont les unités qui doivent être remises à niveau pour correspondre aux

15 critères de la JNA -- aux normes de la JNA.

16 R. Mais non. Ceci ne peut pas être écrit là -- ici. Je vous ai déjà dit

17 que vous n'allez pas le trouver écrit où que ce soit. Là, il s'agit de la

18 216e Brigade du 4e Corps d'armée. Quand les commandants…

19 d'un district militaire. Vous dites, vous, en tant que soldat, qu'il faut

20 soulever l'aptitude au combat. Nous savons exactement de quoi il s'agit.

21 Cette aptitude au combat consiste en six éléments. Il n'a pas besoin d'en

22 parler plus que cela. Il n'a pas besoin d'énumérer chacune des unités

23 puisque, de toute façon, cet ordre s'applique à toutes les unités du 2e

24 District militaire.

25 Q. Monsieur Dzambasovic, je vais essayer d'abréger tout cela. De toute

Page 6012

1 façon, les Juges de la Chambre sont tout à fait capables de lire, eux-

2 mêmes, les documents, variantes A et B. Je ne veux pas explorer ces

3 documents en long et en travers. Les documents, variantes A et B, que vous

4 ne connaissiez pas au mois de février 1992, à l'époque, vous ne saviez pas

5 que ce document existait au moment où vous avez reçu vos ordres au mois de

6 février 1992 ?

7 R. Oui, c'est exact. A l'époque, je n'avais pas vu ce document. Au moment

8 où mon collègue, M. Krstovic, était nommé au poste de ministre de la

9 Défense de la SAO Romanija, quand j'ai vu ces documents, j'ai toute de

10 suite compris qu'il s'agissait là de la réalisation -- que la mission qui

11 nous a été confiée, était finalement rien d'autre que la réalisation des

12 buts politiques du peuple serbe. Cette mise en œuvre de ce but se faisait

13 par le biais de l'armée.

14 Q. Nous n'allons pas parler de tous les détails de ce document, variantes

15 A et B. Dans ce document figure les instructions qui relèvent du bon sens,

16 n'importe quelle organisation militaire demanderait que des choses

17 semblables soient faites. C'est tout simplement c'est clair, c'est du bon

18 sens, rien d'autre. Par exemple, la protection de ressources matérielles

19 assurait la continuation de la production des services d'importance vitale

20 pour la défense. C'est vraiment -- c'est clair et c'est du bon sens. C'est

21 évident, n'est-ce pas ?

22 R. Non. J'y vois beaucoup d'erreurs. C'est comme cela que je vois les

23 choses. Puisque si vous avez des dépôts de munitions secrets, il faudrait

24 que les trois nationalités en aient,

25 c'est-à-dire, les Musulmans, les Croates, et les Serbes, alors qu'ici, il

Page 6013

1 est dit clairement qu'un peuple va créer des dépôts de munitions secrets.

2 Ceci était tenu secret par rapport aux autres peuples. Ceci n'est pas

3 normal.

4 Q. Ces documents dont vous avez parlé de façon générale, il y a quelques

5 instants, comme censé vous démontrer que le retrait de la JNA et des armes

6 de la Défense territoriale, ainsi que des munitions étaient parfaitement

7 planifiées, organisées par les plus hauts niveaux des responsables

8 politiques et militaires serbes, donc dépendant de ces responsables

9 politiques. Pouvez-vous nous montrer ou nous indiquer quel est le document

10 particulier qui démontre qu'un responsable politique serbe de haut rang a

11 participé à une quelconque opération de planification ou d'organisation ?

12 R. Je ne peux pas vous dire quel est ce document particulier, mais il est

13 absolument exact que l'assemblée du peuple serbe qui est l'instance

14 politique suprême, a pris des décisions de ce genre, comme par exemple,

15 établir des consignes au sujet des entrepôts et des dépôts d'armes. Dans la

16 réalité, tout cela était décidé au niveau politique et a été mis en

17 pratique par l'armée au travers d'ordres émanant de responsables du plus

18 haut niveau au secrétariat fédéral chargé de la Défense nationale à

19 Belgrade. Tout commençait en haut, ensuite, descendait vers le bas de la

20 hiérarchie, vers les unités de rangs inférieurs. Ceci est absolument vrai.

21 Je ne pense pas que quiconque puisse le contester. N'importe qui pourra

22 vous dire la même chose, cette hiérarchie a été créée, et les choses se

23 sont passées de cette façon. Les instances politiques prenaient des

24 décisions, le secrétariat fédéral transformait une décision en ordre, et

25 les responsables politiques faisaient descendre cet ordre du niveau

Page 6014

1 supérieur vers les unités de rangs inférieurs et leurs commandements de

2 long de la filière hiérarchique. C'est tout à fait habituel. Un ordre passe

3 par tous les niveaux de la hiérarchie du haut vers le bas. Il n'y a

4 personne qui pourrait contester cela. Tous les responsables politiques,

5 tous les soldats respectaient cette hiérarchie, et vous diront que c'est

6 ainsi que les choses fonctionnaient. C'était un système tout à fait

7 régulier. C'est de cette façon que les choses fonctionnaient.

8 Q. J'aimerais que tout soit clair, Monsieur Dzambasovic. Vous nous dites,

9 n'est-ce pas, que s'agissant de l'implication des responsables politiques

10 serbes au plus haut niveau dans cette planification et cette organisation,

11 vous avez connaissance d'un appui documentaire à cette fin, qui est d'une

12 notoriété publique. Les documents, dont vous faites état, sont disponibles

13 au public, donc les documents, dont vous parliez il y a quelques instants,

14 les rapports et les décisions de l'assemblée, n'est-ce pas ?

15 R. Oui, oui. Ce sont des documents publics. C'est sur la base de ces

16 documents que j'affirme que des ordres militaires ont été émis. Bien sûr,

17 j'ai eu entre les mains ces ordres militaires. J'ai vu ces ordres

18 militaires. Ils leur libellaient, suivaient le libellé des décisions

19 politiques. Moi-même, je n'ai aucun rapport avec ces responsables

20 politiques. Je n'avais aucun contact avec eux. En tant que soldat de

21 métier, ce n'était d'ailleurs pas mon devoir; cela ne faisait pas partie de

22 mon travail.

23 Q. J'aimerais maintenant aborder un point particulier. Cette très longue

24 déclaration relative à la rémunération des soldats volontaires : "Un tel

25 mode de rémunération n'était pas pratiquée avant 1991, 1992." Vous dites :

Page 6015

1 "Maintenant", vous parlez ensuite de la période de la fin 1991 ou du début

2 1991, en disant : "Ces soldats, qui ont répondu à l'appel de mobilisation,

3 ont été payés."

4 Pouvez-vous maintenant répondre à ce que je vais vous dire dans un

5 instant ? Dans une autre déclaration, nous n'avons pas besoin d'y revenir,

6 vous avez indiqué que d'anciens réservistes avaient été appelés et qu'ils

7 étaient traités exactement de la même façon. Y

8 a-t-il une différence, à vos yeux, entre des réservistes répondant à un

9 appel de mobilisation et des soldats volontaires ? Comment conciliez-vous

10 ces deux choses ? Vous voyez ce que je veux dire ? Vous avez dit il y a

11 quelques instants, dans une déclaration antérieure, que lorsque les hommes

12 étaient appelés dans le cadre de la mobilisation, ils étaient traités

13 exactement de la même façon. On peut penser qu'ils étaient payés de la même

14 façon. Quel rapport avec ce que vous avez dit au sujet du fait que la

15 rémunération de certains soldats s'est faite avant 1991, 1992, que ce

16 n'était pas la pratique courante ?

17 R. Oui.

18 Q. C'est une magnifique réponse, très courte, Monsieur Dzambasovic. En cet

19 instant, je ne vous en voudrais pas de fournir une réponse un peu plus

20 longue. Pourriez-vous, je vous prie, vous expliquer plus en détail ?

21 R. Oui. Ceci est tout à fait clair pour moi. Je vais vous l'expliquer de

22 la façon la plus simple qu'il soit. Dans la pratique jusqu'à 1991, tous les

23 hommes qui répondaient à l'appel de mobilisation, recevaient une

24 rémunération au sein de leurs compagnies. Cela s'appelait un reversement.

25 La compagnie, l'entreprise qui les employait, tout cela était très

Page 6016

1 organisé, envoyait une liste de noms au commandement militaire, une liste

2 des noms des personnes qui étaient employées par elle, qui ont été appelées

3 dans le cadre de la mobilisation ou pour participer à des entraînements

4 militaires. L'armée reversait ces sommes par le biais de l'entreprise à la

5 compagnie. C'était une pratique courante.

6 En 1991 et plus tard, après le premier appel de mobilisation et le

7 deuxième appel de mobilisation, cette pratique n'a plus été respectée.

8 Toute personne répondant à l'appel de mobilisation était payée

9 personnellement, recevait des rémunérations journalières indépendamment du

10 fait que cette personne faisait partie d'une unité régulière ou pas. Le

11 point le plus important, c'est que cet homme était censé rejoindre une

12 unité. On ne s'intéressait plus à savoir qui avait envoyé cet homme dans

13 cette unité. Jusqu'à ce moment-là, cela ne pouvait pas se passer ainsi.

14 Dans la deuxième version, les hommes étaient payés sur place par l'armée,

15 qu'ils aient été membres de cette unité ou pas. Si quelqu'un venait de

16 mars, par exemple, ou de la lune, il pouvait être payé. Ce n'était pas la

17 pratique en vigueur précédemment. C'est pourquoi j'ai dit ce que j'ai dit.

18 Ceci semble contradictoire dans ma déclaration écrite, mais cela ne l'est

19 pas parce que c'est ainsi que les choses se sont passées.

20 Q. Vous parlez des commandants de la Défense territoriale qui rendaient

21 visite au colonel Milosevic, et vous dites que vous vous êtes efforcé de

22 rester officier professionnel pendant tous ces événements. Vous attendiez

23 qu'une solution politique soit élaborée. "Je ne sais pas de quoi ont parlé

24 ces hommes avec Milosevic. Je ne peux dire que rétrospectivement, qu'il

25 semble qu'ils se préparaient avec la partie serbe pour mener une agression.

Page 6017

1 L'objectif était de préparer les conditions de création d'une Grande

2 Serbie." C'est ce que vous avez dit. Lorsque vous utilisez l'expression

3 "création d'une Grande Serbie", pouvez-vous nous dire plus en détail à quoi

4 vous pensez ?

5 R. Oui, je peux le faire.

6 Q. Je vous en prie.

7 R. Bien sûr, puisque j'étais soldat, j'ai participé à l'établissement de

8 plans de guerre au sein de mon unité. En tant que chef d'état-major,

9 j'étais un des auteurs de ces plans de guerre. Nous établissions ces plans

10 de guerre de la façon la plus légale qu'il soit dans des locaux qui étaient

11 destinés à cet objectif. Ces documents étaient tout de même assez

12 confidentiels. Lorsqu'on établissait les plans de guerre, on le faisait

13 dans le cadre du secret. Tous les plans de guerre ont été établis de cette

14 façon, tous ceux à l'établissement desquels j'ai participé jusqu'à ce

15 moment-là.

16 Je participais à leur élaboration. Un jour, vous le trouverez dans mon

17 journal personnel, vous verrez la date, le colonel Milosevic, il était

18 colonel à cette époque, aujourd'hui, il est général, a expliqué que

19 dorénavant de nouveaux plans de guerre allaient être établis. J'ai commencé

20 à m'inquiéter. Comment pouvait-il y avoir de nouveaux plans de guerre,

21 alors que j'étais censé participer à l'établissement de ces plans ?

22 Personne ne pouvait contourner le chef d'état-major. Comme je le dis, de

23 nouveaux plans de guerre ont été établis, rédigés, sans que les officiers

24 non-serbes participent à leur élaboration. Les non-Serbes ne pouvaient plus

25 participé à l'élaboration de ces nouveaux plans de guerre qui contenaient

Page 6018

1 des éléments, peut-être pas identiques, en tout cas, qui correspondaient

2 assez bien aux frontières de la Grande Serbie de façon générale,

3 à 90 %. Il y avait 90 % de coïncidence entre les frontières établies dans

4 ces nouveaux plans et les frontières de la Grande Serbie. Il y était

5 question de combats et d'actions en vue de s'emparer de ces positions et de

6 ces nouvelles frontières. Ces plans de guerre ont été établis sans la

7 participation des officiers qui n'étaient pas Serbes. Seuls les Serbes,

8 soldats et officiers, ont travaillé à l'établissement de ces plans.

9 Voilà quelle était cette version du texte. Tous les officiers non-

10 serbes ont été exclus de ce processus d'élaboration. Nous n'en avions rien

11 su d'ailleurs, jusqu'à ce jour où le colonel nous en a parlé en disant que

12 de nouveaux plans de guerre existaient. Il était impossible que de tels

13 plans aient été établis pour l'ensemble de la guerre car ils se composaient

14 d'une dizaine de fichiers ou de classeurs.

15 Q. Monsieur Dzambasovic, qu'entendez-vous par Grande Serbie ?

16 R. Dans la théorie et dans la pratique, il y a une carte de la Grande

17 Serbie. Je pense que vous en disposez. C'est une carte connue de tous. Cela

18 implique que le territoire sur lequel le peuple serbe vivait ou était censé

19 vivre selon cette théorie, élaborée par l'académie des Arts et des Sciences

20 serbes de Belgrade, qui a été publiée dans cette période, dans ces années-

21 là, donc ce document était connu non seulement en Bosnie, mais dans toute

22 l'ex-Yougoslavie. Il y était dit que les Serbes souhaitaient vivre dans un

23 même Etat, que cet Etat serait le territoire de la Grande Serbie, et que

24 les frontières de cet Etat iraient de Virovitica à Karlovac en passant par

25 Karlobag. De façon générale, c'était la ligne de frontière qui était

Page 6019

1 indiquée. L'endroit où j'étais à ce moment-là n'importe pas vraiment, mais

2 c'était sur la base de ce plan que nous devions travailler. Dans ces

3 renseignements, qui nous ont été donnés et qui ont été rendus publics, nous

4 avons entendu parler très fréquemment de cette conception. C'est la raison

5 pour laquelle ce territoire devait être créé sur la base de ce plan, sur la

6 base de cette théorie relative à la Grande Serbie.

7 Q. Dans votre déclaration écrite en page 27 de la version anglaise, vous

8 dites, je cite : "S'agissant de savoir pourquoi l'armée a été réorganisée,

9 les dirigeants supérieurs serbes ont procédé à cette réorganisation afin de

10 s'assurer que les républiques n'auraient plus de pouvoir ou de

11 responsabilité sur l'armée présente sur leur territoire."

12 Vous parlez des dirigeants supérieurs serbes. En prononçant ces mots, vous

13 pensez au peuple serbe et à Belgrade, n'est-ce pas ?

14 R. Non. Je pense à la direction de l'armée et à la direction serbe en

15 général dans l'ex-Yougoslavie. Lorsque l'armée a été réorganisée en 1988,

16 j'ai parlé de cette réorganisation. Nous, les soldats, avons été informés

17 de cela. Nous étions favorables à cela de façon générale, bien sûr. Nous y

18 étions favorables, parce que les explications qui nous ont été fournies à

19 cet effet nous semblaient normales. Quatre régions militaires ont été

20 créées. Le commandement a été réduit en nombre. L'armée a été rationalisée.

21 Lorsqu'on vous présente des éléments expliqués de cette façon, bien sûr, il

22 faut tenir compte de l'époque. C'était une époque où on parlait beaucoup de

23 rationalisation comme étant quelque chose de mieux. Il fallait réduire le

24 nombre d'échelons dans la hiérarchie, il fallait réduire le nombre des

25 hommes participant au commandement, et cetera. Personne n'a pensé à ce

Page 6020

1 moment-là qu'il y avait d'autres objectifs à cette réorganisation que ceux

2 qui étaient explicités de façon publique. Personne n'a pensé qu'il y avait

3 des objectifs cachés.

4 Théoriquement, il n'est venu à l'esprit de personne que d'autres objectifs

5 pouvaient exister. Dans la pratique, en 1991 et 1992, nous voyons que les

6 régions militaires n'ont pas été respectées, que la Défense territoriale a

7 été balayée et qu'au sein des républiques, tout a été fait pour empêcher

8 que la direction politique de ces républiques puissent avoir une influence

9 sur le commandement des unités ou de la Défense territoriale. Selon la

10 constitution, ce sont les républiques et les provinces qui ont compétence

11 sur la Défense territoriale. Dans le cadre de cette nouvelle

12 réorganisation, tout cela a été balayé. La compétence des républiques a été

13 balayée. Bien sûr, ceci s'est passé sur la base des informations fournies

14 par les services de Renseignements comme cela a été prouvé par la suite.

15 Q. A l'époque, en 1991 et début 1992, vous ne connaissiez pas la

16 participation des dirigeants de haut rang serbes dans ce processus, n'est-

17 ce pas, en dehors de ce qui vous avait été dit publiquement et que tout le

18 monde pouvait connaître ? C'est bien cela, n'est-ce pas ?

19 R. Tout ce que vous dites est très bien. Mais le secrétariat fédéral, là,

20 il faut que je m'explique plus en détail, le secrétaire fédéral Kadijevic a

21 été l'auteur, en 1993, d'un ouvrage dans lequel il décrit tout ce que nous

22 avons vécu, tout ce que nous avons traversé. Il confirme, en 1993,

23 lorsqu'il a publié ce livre

24 intitulé : "Ma vision du démantèlement de la Yougoslavie," que la

25 désintégration --

Page 6021

1 Q. Monsieur Dzambasovic, si M. Kadijevic vient ici pour témoigner sur le

2 contenu de son livre, nous en parlerons. C'est une autre question.

3 M. STEWART : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

4 Président.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est pour cela que je disais --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il des questions supplémentaires

7 du côté de l'Accusation, Monsieur Margetts ?

8 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous avons

9 quelques questions supplémentaires.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Procédez.

11 Nouvel interrogatoire par M. Margetts:

12 Q. [interprétation] Général Dzambasovic, on vous a interrogé au sujet

13 des versions A et B du document, s'agissant du contenu de ce document, on

14 vous a dit qu'il ne se trouvait dans ce document que des choses tout à fait

15 évidentes qui existent de toute évidence dans le cadre de tout conflit réel

16 ou potentiel, que ce sont des éléments de bon sens que n'importe quel

17 organisme militaire aurait mis en œuvre. Etait-il normal que des partis

18 politiques élaborent des documents du genre de ces versions A et B ?

19 R. Ce n'était pas normal. D'ailleurs, ce genre de travail n'a jamais

20 été le travail des instances gouvernementales. Hier, j'ai dit pour cela que

21 tout cela a constitué des précédents, que nous avons été surpris par tout

22 ce qui se passait à ce moment-là. Quand nous avons vu que les instances

23 gouvernementales et politiques se mêlent de choses qui ne seraient venues à

24 l'esprit de personne de considérer comme faisant partie de leur travail,

25 tout cela nous a beaucoup surpris. Tout cela ne relevait pas de la

Page 6022

1 compétence des instances gouvernementales et politiques jusqu'à ce moment-

2 là. C'étaient des choses qui dépendaient de l'armée, ou plutôt du ministère

3 de la Défense. C'était tout à fait nouveau.

4 Q. Général Dzambasovic, on vous a demandé si vous pouviez présenter un

5 document démontrant qu'une personnalité politique de haut rang aurait

6 participé à cette planification et à cette organisation. Est-ce que les

7 versions A et B du document dont nous avons parlé indiquent que des

8 instances importantes, des instances du haut rang du SDS auraient participé

9 à ces travaux de planification et d'organisation ?

10 R. Le conseil Suprême du SDS est évoqué. Maintenant, sur le plan

11 hiérarchique -- sur le plan de la hiérarchie du SDS, je n'ai pas beaucoup

12 de connaissance à ce sujet. Le conseil exécutif ou le conseil Suprême du

13 SDS, cela signifie le conseil Suprême du SDS de Bosnie-Herzégovine. Ce

14 n'était pas un organe municipal; c'était un organe qui se situait à un

15 niveau très supérieur au niveau de la Bosnie-Herzégovine toute entière.

16 Q. On vous a demandé si vous aviez des renseignements précis, démontrant

17 la participation de personnalités politiques à la planification et à

18 l'organisation dont il a été question, et, si tout cela s'est passé sur la

19 base de documents publics, ces versions A et B, étaient-elles des documents

20 publics en 1991 et 1992 ?

21 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vois vraiment

22 pas quel est l'objet de cette question. Est-ce que cette question peut être

23 autorisée car le témoin a dit très clairement qu'il n'avait pas de

24 connaissance particulière dans ce domaine ? Je pense que la question n'est

25 pas valable.

Page 6023

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, n'est-il pas exact

2 que la Défense a interrogé le témoin au sujet de ce qu'il savait dans le

3 cadre de ses questions ?

4 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je retire ma

5 question.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

7 M. MARGETTS : [interprétation]

8 Q. On vous a interrogé au sujet de la création de la Grande Serbie. Vous

9 avez déclaré que les plans de guerre que vous avez connus subséquemment

10 correspondaient, à peu près, aux plans de création de la Grande Serbie, à

11 90 %. Dans quelle mesure ces nouveaux plans de guerre correspondaient-ils

12 à, ce qui est devenue par la suite, la Républika Srpska ?

13 R. Voilà, ces plans de guerre qui ont été établis au plus haut niveau - je

14 ne sais pas si vous en disposez - mais vraiment, leur contenu correspondait

15 en gros avec la description des frontières de ce qu'il est convenu

16 d'appeler la Grande Serbie, au niveau militaire inférieur, parce qu'il y

17 avait des plans de guerre qui étaient établis également au niveau

18 inférieur, au sein des unités. Maintenant, déterminer dans quelle mesure ce

19 qui a été décrit dans ces plans établis au niveau inférieur correspondait

20 avec la description de la Républika Srpska, vraiment, je ne le sais pas

21 parce que je n'ai pas eu sous les yeux ces plans établis au niveau des

22 unités. Ne les ayant pas vus, je ne saurais répondre précisément à cette

23 question. Dans la pratique, je parle de ce qui a été accompli réellement en

24 1992, dans le cadre de la préparation de la guerre, on peut constater

25 lorsqu'on voit les positions qui ont été établies en 1991 parce qu'il y a

Page 6024

1 eu des mouvements d'artillerie, les chars ont été positionnés à certains

2 endroits. On voit bien où ces pièces d'artillerie ont été placées. C'est

3 sur cette base que je dis ce que je dis car c'est la seule façon que

4 j'avais de juger de visu de la situation.

5 Q. On vous a interrogé au sujet de votre participation dans la

6 planification et l'organisation dont on a parlé. Est-ce que Rajko Dukic y a

7 participé ?

8 R. Rajko Dukic y a participé. J'ai eu l'occasion, ou pour être plus

9 précis, j'ai pu rencontrer à de nombreuses reprises tous les dirigeants

10 municipaux dans les municipalités de Rogatica, de Sokolac, de Vlasenica.

11 Dans ma déclaration écrite, je pense que je donne le nom des hommes dont je

12 me rappelle le nom, des hommes qui s'occupaient de politique au sein des

13 organismes municipaux de la Défense territoriale et également des hommes

14 qui travaillaient pour le SDS, à l'époque, dans toutes ces municipalités.

15 J'ai rencontré plusieurs fois toutes ces personnes. Je souligne que puisque

16 vous me posez à nouveau cette question, qu'il est tout à fait absurde de

17 voir ces responsables politiques à différents niveaux et ces instances

18 politiques du pouvoir, s'occuper de choses qui, jusque là, étaient des

19 attributions de l'armée, qui faisaient partie des fonctions normales de

20 l'armée. Ils se sont mêlés à tout, à tous les niveaux, à tous les niveaux

21 des instances politiques. C'était une situation tout à fait inacceptable,

22 complètement absurde. Dans les documents que je vous ai soumis, vous voyez

23 cela de la façon la plus précise qui soit. Il n'est pas question, dans ces

24 documents, d'Unités de la JNA. On parle des Unités du SDS. On parle du

25 commandement de la 2e Région militaire du Kukanjac et des niveaux

Page 6025

1 inférieurs de l'hiérarchie. Ce sont des instances du pouvoir politique qui

2 se sont occupées de cela. C'était absolument absurde; cela n'aurait jamais

3 dû arriver puisqu'il s'agissait d'attributions de l'armée.

4 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres

5 questions.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Margetts.

7 Monsieur le Juge El Mahdi a une question pour le témoin.

8 M. LE JUGE EL MAHDI : Merci, Monsieur le Président.

9 Questions de la Cour :

10 M. LE JUGE EL MAHDI : Je voudrais une clarification. Cela concerne les deux

11 appels de la mobilisation. Le premier appel qui date du 30 juin, je crois,

12 1991, et le second, en septembre.

13 Vous dites que les deux partis politiques ont agi à l'encontre que les gens

14 répondent au premier appel. Vous avez bien cité les deux partis : je veux

15 dire SDS et SDA. Pourtant, vous dites que, concernant le second appel qui

16 est à peu près un mois après le premier appel, les gens, qui ont répondu à

17 l'appel, étaient, en majorité écrasante, des Serbes.

18 Est-ce que le parti -- à votre connaissance, vous avez une connaissance

19 ferme que -- c'est dû à quoi ? Est-ce que le parti a changé ? Est-ce que

20 ces Serbes, qui se sont présentés, répondaient à des directives, ou c'était

21 une réponse à la mobilisation que tout citoyen devrait répondre.

22 R. Merci de cette question, c'est une question très intéressante. C'est

23 exact -- cette constatation est exacte. La première fois, les deux partis

24 politiques au pouvoir ont fait obstruction à la mobilisation. Ceci est

25 absolument exact. Ceci n'est pas contesté. Mais que s'est-il passé la

Page 6026

1 deuxième fois ? La deuxième fois, au moment du deuxième appel à la

2 mobilisation, il y a eu un grand bouleversement dans l'ex-Yougoslavie. Un

3 tournant a été pris car la JNA, à ce moment-là, est devenue, dans la

4 pratique, l'armée d'un seul peuple, à savoir, le peuple serbe. Là encore,

5 parce qu'à l'époque, vraiment, je n'en savais rien que l'armée, dans la

6 pratique, était devenue d'un seul peuple, le peuple serbe, et Veljko

7 Kadijevic, dans son livre, le dit. Je vais le paraphraser : "Il dit que le

8 31 juillet 1991, la JNA s'est transformée," c'est ce qu'il à peu près dans

9 son livre. Ce qui veut dire --

10 M. LE JUGE EL MAHDI : Ma question est précise : est-ce que vous êtes en

11 connaissance de l'attitude du Parti SDS, spécifiquement dans cette

12 question ?

13 R. Oui. Bien, je serai concret. Jusqu'à ce moment-là, pendant la période

14 couverte par le premier appel de mobilisation, le statu du SDS par rapport

15 à l'armée n'était pas défini. Mais, au moment du deuxième appel à la

16 mobilisation, il est absolument évident que le SDS avait déterminé son

17 statu par rapport à l'armée et, à ce moment-là, on a appelé le nombre le

18 plus important d'hommes en les incitant à répondre à l'appel à la

19 mobilisation car c'est, à ce moment-là, que les distributions d'armes ont

20 commencé, que des unités ont été disloquées dans les endroits où les Serbes

21 étaient majoritaires, et cetera. C'est pour cette raison qu'après le

22 deuxième appel à la mobilisation, seuls les Serbes se sont présentés et

23 que, finalement, les unités, dont j'ai parlé, sont devenues exclusivement

24 serbes.

25 M. LE JUGE EL MAHDI : Mais cette information que vous dites, d'où vous

Page 6027

1 l'avez formée, d'où vous l'avez reçue ? Est-ce que vous avez sous la main

2 un argument tangible ?

3 R. C'est en raison du caractère sensible de tout cela que j'ai protesté

4 deux fois auprès du commandant du 4e Corps, le général Djurdjevac, celui

5 qui représentait l'échelon supérieur par rapport à moi. Chacun devait se

6 rendre dans une caserne qui était proche de son lieu de résidence, une fois

7 qu'il avait reçu l'appel à la mobilisation, dans un rayon d'une dizaine ou

8 d'une douzaine de kilomètres. Or, ce qui s'est passé était tout à fait

9 anormal. Au lieu de devoir se rendre à Han Pijesak, il fallait tout d'un

10 coup aller dans d'autres endroits, à savoir, Rogatica, Sokolovic et Milici,

11 par exemple. Tout cela, sous la direction des dirigeants du SDS, en fait,

12 des militants comme ils s'appelaient eux-mêmes, je l'ai vu tout cela, je

13 l'ai vu de mes yeux. Je ne pouvais pas participer à la création d'une unité

14 dans ma propre municipalité; par exemple, à Rogatica, je n'ai plus pu

15 suivre ce qui se passait parce que je n'avais plus accès à tout cela.

16 C'était complètement absurde, c'est quelque chose que j'ai vécu

17 personnellement, que j'ai vu de mes yeux. Les responsables du SDS, que je

18 connais encore aujourd'hui, vous dirait la même chose.

19 M. LE JUGE EL MAHDI : Je n'ai pas d'autre question à poser au témoin. Les

20 parties ont-elles des questions supplémentaires ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'Accusation ?

22 M. MARGETTS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense, Maître Stewart ?

24 M. STEWART : [interprétation] Un détail, Monsieur le Président, car M. le

25 Juge a interrogé le témoin au sujet de la mobilisation.

Page 6028

1 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Stewart :

2 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, vous avez cité des dates un peu

3 différentes, les deux fois que vous avez parlé du premier appel à la

4 mobilisation. La première fois, vous avez dit qu'il s'agissait du 29 juin

5 et, dans une déclaration ultérieure, vous avez parlé du 13 juillet. M. le

6 Juge El Mahdi a compris que, finalement, vous avez fait une synthèse, en

7 parlant du 30 juin. Mais quelle est la date exacte ? Car vous semblez avoir

8 une bonne mémoire des dates. Pourriez-vous nous expliquer cela ?

9 R. C'était un samedi. Est-ce que c'était le 29 ou le 30 juin, je ne peux

10 pas vous le dire exactement, mais, en tout cas, c'était un samedi; cela, je

11 le sais avec certitude. C'est un jour où je suis parti en congé annuel,

12 c'était mon premier jour de vacance, mais je n'ai pas pu, finalement, aller

13 en vacance.

14 Q. C'était la fin du mois de juin et pas la fin du mois de juillet, n'est-

15 ce pas ?

16 R. Oui, oui. Mais, le 31 juillet, j'en ai parlé dans ma réponse à M. le

17 Juge Le Mahdi -- j'ai dit que c'était le 31 juillet que Veljko Kadijevic,

18 dans son livre, a dit que c'est le 31 juillet que l'armée s'est rendue.

19 Vous avez peut-être fait une confusion.

20 Q. M. Dzambasovic, je ne vous demandais qu'une clarification au sujet des

21 dates. C'était la fin de juin et pas la fin du mois de juillet, c'était un

22 samedi, n'est-ce pas ? Finalement, je pense que la date demandée par le

23 Juge El Mahdi est bien celle-là.

24 MR. STEWART : C'est cela. Très bien merci.

25 Questions de la Cour :

Page 6029

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aurais une seule question sur ce

2 sujet. Tous les événements, que vous décrivez aux pages 10 et 11,

3 notamment, évoque la participation du SDS à la création de formation

4 militaire spéciale, et cetera, et tout cela s'est passé après l'appel à la

5 mobilisation du mois de septembre, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, 90 % de toutes ces actions, certaines avaient déjà eu lieu

7 avant, mais celles qui étaient vraiment manifestes, dont je dis que je les

8 ai vues, que je m'en suis rendu compte, toutes ces actions se sont passées

9 après le mois de septembre.

10 Q. Milici, l'importance de M. Dukic dans ces événements, tout cela

11 s'est passé après parce qu'à un certain moment, je crois vous avoir entendu

12 parler du mois de mars.

13 R. Oui, Oui, tout à fait, c'est exact.

14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, le 29 juin est

15 un samedi. Mme Cmeric me le dit.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En général, on part en vacance un

17 samedi, n'est-ce pas, Maître Stewart ?

18 M. STEWART : [interprétation] Oui, ce n'est pas rare.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Dzambasovic, ceci met un terme

20 à votre déposition dans ce prétoire. Je tiens à vous remercier de tout

21 coeur d'être venu à La Haye. J'ai entendu dire que vous aviez d'autres

22 activités dans l'immédiat, mais, si vous rentrez chez vous, je vous

23 souhaite un bon voyage.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous, mes meilleurs vœux.

25 [Le témoin se retire]

Page 6030

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Nous suspendons l'audience

2 jusqu'à 12 h 55, après quoi nous reprendrons l'interrogatoire du témoin

3 dont l'audition a déjà été commencée.

4 Oui, M. Margetts.

5 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, quelques mots

6 au sujet des documents 92 bis, dont nous demandons le versement du dossier.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous pouvons le faire

8 maintenant --

9 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Margetts, concernant cette

11 liasse de documents, si je comprends bien, il existe encore entre les

12 parties concernés, quelles sont les parties qui figurent dans la

13 déclaration et quelles sont les parties qui ne figurent pas dans la

14 déclaration. Mais, vous savez, la Chambre préférait recevoir ces documents,

15 de façon à ce que nous n'ayons pas à chercher dans le compte-rendu

16 d'audience pour trouver quelles sont les parties qui figurent au dossier et

17 qu'elles ne le sont pas. Car il nous faudrait, à ce moment-là, consulter le

18 compte-rendu d'audience, nous préférerions recevoir les annexes au même

19 temps, afin que nous avoir le tout dans le même contexte.

20 MR. MARGETTS : Oui, effectivement. Le conseil de la Défense et moi-

21 même, nous nous sommes mis d'accord sur les paragraphes qui seront éliminés

22 de la déclaration.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Mais la Chambre

24 préférerait recevoir ces déclarations déjà modifiées car, sinon, nous

25 aurons les déclarations, nous les lirons, mais nous n'avons pas toujours en

Page 6031

1 tête, à savoir quels sont les paragraphes qu'il ne faudrait pas lire. C'est

2 la raison pour laquelle j'ai consulté mes collègues pour savoir si une

3 version en une langue serait suffisante. Nous ne lisons pas, normalement,

4 la version en B/C/S. Vous pouvez peut-être le faire simplement en version

5 anglaise. Cela va nous fournir un document qui nous indiquerait quels sont

6 les paragraphes enlevés et quels sont les paragraphes qui restent. Je ne

7 sais pas si la Défense est d'accord avec cela.

8 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois, je

9 m'entends dans les écouteurs. Il y a un écho. Bien. Très bien. Nous nous

10 sommes mis d'accord pour préparer une version finale annotée. Nous estimons

11 qu'il faudrait peut-être faire correspondre les deux versions dans les deux

12 langues toutefois, non pas seulement vous fournir le tout en langue

13 anglaise.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est simplement que

15 j'aimerais savoir, à la lecture du document, qu'est-ce qui figure au

16 dossier et qu'est-ce qui ne figure pas.

17 M. MARGETTS : Oui, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous levons la séance et nous

19 reprendrons nos travaux à midi 55.

20 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je simplement

21 dire que la raison pour laquelle je me suis échappé ce matin, c'était parce

22 que j'avais besoin de faire un travail de recherche. Je ne me suis pas

23 absenté simplement pour aller me promener ou pour être ailleurs. Je vous

24 remercie.

25 --- L'audience est suspendue à 12 heures 36.

Page 6032

1 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, est-ce que vous êtes

3 prêt à continuer le contre-interrogatoire du témoin que vous avez déjà

4 commencé ?

5 M. GAYNOR : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, veuillez, je vous

7 prie, faire entrer le témoin.

8 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

9 LE TÉMOIN : FEJZIJA HADZIC [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 Interrogatoire principal par M. Gaynor : [Suite]

12 Q. [interprétation] Monsieur Hadzic, combien y avait-il de mosquées à

13 Kalinovik en 1992 ?

14 R. Il y en avait quatre. Trois se trouvaient -- trois étaient utilisées --

15 les gens s'en servaient, et l'une n'était pas ouverte avant la guerre.

16 Q. Est-ce que ces mosquées ont été détruites ou endommagées d'une façon ou

17 d'une autre ?

18 R. Avant la guerre, non. Mais pendant la guerre, elles ont toutes été

19 détruites.

20 Q. Quelles sont les mosquées qui ont été détruites ?

21 R. Il y avait la mosquée du village de Jelisica a été détruite, la mosquée

22 d'Ulog a été détruite, celle qui se trouvait à Hotovle également, et la

23 mosquée qui se trouvait dans le village de Kutina, duquel provenait Ratko

24 Mladic a également été détruite.

25 Q. Est-ce que vous avez personnellement vu ces destructions de ces

Page 6033

1 mosquées ? Avez-vous été témoin oculaire de l'événement ?

2 R. Non. Mais j'en avais entendu parler par les citoyens -- résidents de

3 ces villages qui venaient nous le dire. Plus tard, j'ai été à même de voir

4 la destruction par moi-même.

5 Q. Monsieur, dans votre témoignage de ce matin, vous nous avez dit qu'il y

6 a eu une réunion qui a eu lieu le 5 mai 1992, à laquelle Grujo Lalovic a

7 été présent, et il a donné l'assurance, à ce moment-là, aux Musulmans de

8 Kalinovik, qu'ils seraient protégés, que leur vie et leur propriété

9 seraient protégées. Plus tard, vous avez dit, dans votre déclaration, que

10 les Musulmans ont fait l'objet d'emprisonnement, de meurtre, que leurs

11 propriétés avaient été -- que leurs biens mobiliers avaient été brûlés, et

12 ainsi de suite. Pourquoi faisiez-vous confiance à Grujo Lalovic ? Pourquoi

13 aviez-vous cru ses paroles ?

14 R. Vous savez, quand nous avons rencontré Grujo Lalovic, à ce moment-là,

15 aucun bien n'avait encore été détruit. Tout ceci avait commencé à arriver

16 beaucoup plus tard, à la fin du mois de mai et au début du mois de juin. Je

17 me souvenais de ces événements et je me suis rappelé qu'il y avait eu une

18 autre réunion avec Lalovic, le colonel Bundalo, et qu'ils avaient invité

19 les représentants dans le bâtiment de l'assemblée municipale, et c'était

20 les représentants de tous les villages musulmans. C'est à ce moment-là

21 qu'il a été question de réorganiser la vie. Le commandant de la ville et le

22 président du conseil exécutif nous ont donné l'assurance que rien n'allait

23 se passer et que tous les biens seraient intacts. C'est la raison pour

24 laquelle ils essayaient de nous convaincre de ne pas quitter nos villes et

25 villages et nos domiciles.

Page 6034

1 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous donner la date à laquelle cette

2 réunion subséquente a eu lieu ?

3 R. Je ne pourrais pas me souvenir exactement de la date, mais je sais que

4 c'était vers la fin du mois de mai ou peu de temps avant le début des

5 conflits à Trnovo, qui est une municipalité avoisinante.

6 Q. Dans votre déclaration et lors de votre témoignage, vous avez décrit

7 l'armée des Serbes, qui avaient désarmé les Musulmans, la détention des

8 Musulmans, le fait qu'ils avaient incendié les biens mobiliers des

9 Musulmans, et le fait de les avoir tués. Ma première question est la

10 suivante, et répondez, je vous prie, par un oui ou par un non : est-ce que

11 vous vous êtes fait une opinion quant aux activités et à la planification

12 de ces événements ?

13 R. Oui.

14 Q. Selon votre point de vue, de quoi en était-il ?

15 R. A Kalinovik, nous nous entretenions avec les personnes qui détenaient

16 le pouvoir, les personnes qui nous disaient que tous les ordres qu'ils

17 recevaient, ils les recevaient par le biais des institutions compétentes de

18 la République serbe de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire en passant par la

19 Région autonome de Trebinje. Car Grujo Lalovic était membre de l'assemblée

20 de la Republika Srpska, c'étaient les raisons -- nous avons cru, et j'ai

21 pensé qu'il s'agissait d'une action planifiée. Si je reviens en arrière, je

22 me souviens que Ratko Mladic disait à ses voisins que rien n'allait leur

23 arriver. Il avait fait enlever les canons qu'il a remis, par la suite, à

24 ces mêmes endroits. Les autorités serbes à Kalinovik ne s'attendaient

25 vraiment pas à ce que cela arrive. Ils s'attendaient à ce que les choses

Page 6035

1 soient faites de façon beaucoup moins grave.

2 Q. Dans votre déclaration, vous avez dit que : "A Kalinovik, nous nous

3 sommes entretenus avec les personnes qui avaient une influence au sein du

4 gouvernement et du pouvoir." Pourriez-vous nous dire à qui vous faites

5 référence.

6 R. Je pense à Grujo Lalovic, qui faisait ces fonctions dont je ne veux pas

7 répéter. Ratko Bundalo, je me référais à lui. Je pensais également au

8 commandant de la ville, et ensuite, au commandant de la JNA -- des casernes

9 de la JNA, Rade Pavlovic. Je pense aussi aux autres personnes proéminentes,

10 les résidents également de la ville. C'étaient ces personnes-là qui nous

11 offraient leur assurance.

12 Q. Dans votre réponse précédente, vous avez également dit que : "Les

13 autorités serbes de Kalinovik n'ont pas été tenues au courant." Pourriez-

14 vous nous dire qu'est-ce qui vous a fait croire cela ?

15 R. Parce qu'on nous disait une chose et l'on faisait autre chose. Soit

16 qu'il s'agissait de ne pas nous informer du tout des événements, ou on

17 essayait de camoufler les événements en faisant sorte que les uns nous

18 défendent, alors que les autres nous attaquent.

19 Q. Pourriez-vous relater à la Chambre si, suite aux expériences que vous

20 avez vécues en 1992, si l'on vous a diagnostiqué avec quelque type de

21 traumatisme ?

22 R. Oui. Je souffre de stress post-traumatisme -- du syndrome de stress

23 post-traumatique. J'ai consulté les médecins également. J'ai dû également

24 subir une chirurgie, lors de laquelle on m'a enlevé le rein droit qui ne

25 fonctionnait plus.

Page 6036

1 Q. Vous avez dit que votre rein droit a dû être enlevé à la suite de

2 blessures. De quelles blessures parlez-vous exactement ?

3 R. J'ai eu plusieurs blessures. On m'a donné des coups du côté droit, au

4 niveau des reins, et j'ai toujours senti de la douleur au dos, et je ne

5 sais pas si c'est la raison, mais le rein en question qu'on m'a enlevé,

6 était complètement pourri. J'ai également subi des blessures au doigt, et

7 je ne peux pas le bouger, même à ce jour. On m'a donné des coups à la tête.

8 J'ai été blessé par balles à la jambe. Je me souviens toujours de ces

9 coups. A chaque fois que je veux faire quelque chose avec ma main droite,

10 je constate que ma main est déformée, que mon doigt a été fracturé. C'est

11 tout cela qui me fait penser aux événements -- qui me remémore les

12 événements qui ont eu lieu.

13 Q. Est-ce que vous continuez à recevoir des traitements pour le syndrome

14 de stress post-traumatique ?

15 R. Je suis toujours -- je suis suivi par un psychiatre qui me voit à tous

16 les deux mois. Mais je suis dans un état stable présentement. Je prends

17 également des médicaments.

18 Q. Est-ce que vous avez encore quelques problèmes physiques, de la douleur

19 à cause de ces blessures que vous avez subies en 1992 ?

20 R. Oui, bien sûr. Je ressens encore de la douleur physique. Je me souviens

21 également de 68 personnes, de voisins avec lesquels -- de gens avec

22 lesquels j'ai travaillé, avec lesquels j'ai vécu, et qui ne sont plus parmi

23 nous. Je me souviens également de 17 autres personnes de Trnovo -- de la

24 municipalité de Trnovo qui sont également disparues, qui ont été tuées de

25 façon sauvage, et leurs dépouilles n'ont même pas encore été trouvées.

Page 6037

1 C'est tous ces événements-là qui causent cette douleur dans mon cœur.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, j'ai l'impression que

3 le témoin n'a pas très bien saisi votre question, à savoir s'il ressentait

4 encore de la douleur physique.

5 M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

6 Q. Monsieur Hadzic, est-ce que vous avez encore des douleurs ? Est-ce que

7 vous avez de la douleur qui revient constamment ? Est-ce que vous souffrez

8 de douleur chronique de quelque type que ce soit ?

9 R. Oui. Lorsque le temps change, j'ai des maux de tête, car j'ai reçu

10 plusieurs coups à la tête. C'est le genre de douleur physique que j'aie et

11 que je ressens.

12 Q. Le syndrome post-traumatique, est-ce que c'est quelque chose qui a un

13 effet que vous pouvez remarquer ? Pouvez-vous remarquer cet effet sur votre

14 façon de vous rappeler des événements, par exemple, et qui pourrait peut-

15 être vous empêcher de témoigner de la façon adéquate concernant les

16 événements qui sont rappelés ?

17 R. Non. Justement, c'est cela qui m'aide à témoigner. Car je veux que la

18 vérité triomphe. Je ne parle pas seulement au nom de ces personnes -- de

19 toutes ces personnes qui ont été tuées, mais je veux simplement -- je ne

20 parle pas des 80 personnes que j'ai mentionnées, mais je parle également de

21 30 autres personnes qui ont été tuées dans notre village. Il y avait

22 également des gens dans notre colonne, si on pense à un garçon de 18 ans

23 qui attendait son heure d'exécution et qui était juste à côté de moi. Il y

24 avait aussi un autre garçon de 15 ans qui a été tué avec son père. Il est

25 certain que je me souviens de tout cela, et c'est la raison par laquelle je

Page 6038

1 dis la vérité.

2 M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai --

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, avant de poursuivre,

4 je souhaiterais faire un commentaire. Je crois que l'on ne peut pas poser

5 des questions d'ordre médical de ce genre, c'est-à-dire que l'on ne peut

6 pas s'attendre au témoin de nous donner une opinion d'expert concernant son

7 état.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, est-ce que vous avez

9 d'autres questions sur ce sujet à poser au témoin ?

10 M. GAYNOR : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais vous rappeler que vous

14 avez déjà posé toutes les questions nécessaires concernant cette question

15 au témoin. Il n'est plus nécessaire d'insister là-dessus.

16 M. GAYNOR : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. J'aurais

17 juste une question que je souhaiterais poser au témoin concernant la pièce

18 P286.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. C'est la carte.

20 M. GAYNOR : [interprétation] C'est exact.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dois-je comprendre que vous aviez la

22 mauvaise carte ?

23 M. GAYNOR : [interprétation] Non, ce n'est pas -- c'est exactement la même

24 chose. Mais on a attribué un numéro ERN à la carte, et sur la base de

25 l'identification faite par le témoin, quant à l'endroit où il était détenu,

Page 6039

1 nous devons changer la carte. Ce n'est pas la même carte que nous lui

2 avions montrée précédemment.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que vous avez deux

4 cartes, effectivement, mais c'est deux numéros ERN différents ?

5 M. GAYNOR : [interprétation] Oui. C'est que le témoin identifiait le A et

6 le B.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Le A et le B sont au

8 même endroit.

9 M. GAYNOR : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. La carte

10 sans les annotations A et B sont exactement les mêmes. La carte sans les

11 annotations A et B, en fait, et sans la signature du témoin --

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous avons compris. Quel

13 était l'original -- le numéro original ERN --

14 M. GAYNOR : [interprétation] C'était la carte originale qui comportait ce

15 numéro ERN.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que vous avez d'autres

17 questions ?

18 M. GAYNOR : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

20 Madame Loukas, est-ce que vous êtes prête à commencer le contre-

21 interrogatoire de ce témoin ?

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eu égard au temps, je me demandais si

24 vous croyez que vous pourriez peut-être terminer l'audition de ce témoin

25 aujourd'hui -- le contre-interrogatoire du témoin aujourd'hui. Vous savez,

Page 6040

1 qu'on est vendredi. Je me demandais si vous croyez qu'il serait possible de

2 terminer le contre-interrogatoire de ce témoin aujourd'hui.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Je peux donner assurance à la Chambre de

4 première instance, ainsi qu'au témoin, que je suis tout à fait certaine que

5 je pourrai terminer le contre-interrogatoire du témoin dans la demi-heure

6 qui suit.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Commençons et nous verrons

8 jusqu'où nous nous rendrons.

9 Monsieur le Témoin, vous allez maintenant être contre-interrogé par Mme

10 Loukas, qui est le conseil de la Défense.

11 Mme LOUKAS : [interprétation] Un instant, je vous prie, Monsieur le

12 Président.

13 Contre-interrogatoire par Mme Loukas :

14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Hadzic.

15 R. Bonjour, Madame.

16 Q. Monsieur Hadzic, tout d'abord, je voudrais vous faire comprendre des

17 choses. Je ne vais pas vous parler des questions au sujet de ces événements

18 traumatiques que vous avez vécus et dont vous avez déposés, concernant la

19 détention ou les tueries. Ce qui m'intéresse, ce sont surtout les

20 événements antérieurs dont vous avez parlé. Est-ce que vous comprenez de

21 quoi je parle ?

22 R. Oui.

23 Q. Ensuite, une deuxième chose : je pense, et c'est tout à fait

24 compréhensible, que vous avez envie de rentrer chez vous avant le weekend.

25 Je voudrais, si c'est possible, terminer le plus rapidement possible ce

Page 6041

1 contre-interrogatoire. Si je vous pose une question à laquelle vous pouvez

2 répondre de façon brève, essayez de le faire, même en répondant par un oui

3 ou par un non. Si vous pensez que vous avez besoin d'expliquer davantage

4 ces réponses, vous pouvez le faire, mais essayez de le faire de la façon la

5 plus succincte possible pour pouvoir terminer avant cet après-midi et pour

6 vous permettre partir. Est-ce que vous êtes d'accord ?

7 R. Vous savez, je sais qu'on est vendredi. Je sais qu'on a le weekend

8 devant nous, mais je ne souhaite pas me précipiter. Si vous me posez une

9 question, je préfère vous répondre de la façon dont je l'entends, même si

10 cela dure un petit peu plus longtemps.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons nous efforcer de

12 continuer de répondre le plus précisément possible, et nous allons voir

13 comment les choses avancent.

14 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

15 Q. Monsieur Hadzic, dans le paragraphe 7 de votre déclaration -- est-ce

16 que vous avez votre déclaration préalable sous vos yeux ? Je pense qu'il

17 serait convenable de vous la fournir.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien la déclaration donnée au

19 bureau du Procureur du Tribunal pénal international ?

20 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, effectivement.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est 285A.

22 Mme LOUKAS : [interprétation]

23 Q. A présent, vous devriez avoir le paragraphe 7 de votre déclaration

24 préalable sous vos yeux, Monsieur Hadzic, n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

Page 6042

1 Q. Vous dites que vous étiez le directeur de l'entreprise d'utilité

2 publique de votre ville et que vous envoyiez vos factures à Kraljevo en

3 Serbie. Pourriez-vous nous dire de quel type de factures il s'agit ?

4 R. Voyez-vous, vers la fin du mois de novembre 1991, un grand groupe

5 de réservistes sont arrivés à Kalinovik. A leur tête, se trouvait les

6 capitaines de première classe, je ne me souviens pas, un capitaine de

7 première classe dont je ne me souviens pas du nom; il était capitaine de la

8 JNA. Ils étaient hébergés dans la caserne au nord de Kalinovik, et nous

9 avons envoyé des factures par rapport à toute l'eau qu'ils avaient utilisée

10 pendant leur séjour, par la compagnie des eaux de notre ville. Nous sommes

11 passés par le secrétariat fédéral de la Défense nationale. Nous avons

12 envoyé tout cela au poste militaire de Kraljevo, donc toute l'eau qu'ils

13 ont utilisé. Ces moyens étaient transférés sur le compte de mon entreprise.

14 Nous leur avons soumis des services, en quelque sorte.

15 C'est comme cela que j'ai pu avoir des contacts avec eux, avec des soldats.

16 Ils avaient toutes sortes d'opinion politique. Ils arboraient toutes sortes

17 d'insignes, d'uniformes --

18 Q. Excusez-moi de vous interrompre. Je vous ai tout simplement demandé

19 quelles étaient ces factures. C'est un exemple justement de la façon dont

20 nous devons procéder. Vous n'avez pas besoin de me donner tous ces détails.

21 Sinon, ceci pourrait durer très, très longtemps.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas seulement pour vous et pour

23 votre weekend, Monsieur Hadzic, car ces procédures durent très longtemps,

24 et les parties souhaitent connaître des choses qui seront précises. Si on

25 vous demande quelle était la raison de ces factures, et si vous répondez

Page 6043

1 que c'était pour l'eau consommée, c'est largement suffisant. Si Mme Loukas

2 souhaite en connaître davantage de détails, si les factures ont été payées

3 ou non, elle va vous poser la question à ce sujet.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Mme LOUKAS : [interprétation]

6 Q. Monsieur Hadzic, vous avez aussi dit au paragraphe 7, que vous saviez

7 qu'il s'agissait là des unités serbes, puisque vous avez envoyé les

8 factures les concernant à Kraljevo. Pour en arriver à cette conviction-là,

9 vous vous êtes basé sur le fait que la facture de l'eau consommée par ces

10 unités, que vous dites serbes, ont été envoyées à Kraljevo ?

11 R. Oui, mais ce n'est pas seulement cela. Tous les contacts que j'ai pu

12 avoir avec les membres de ces unités, m'ont montré que ces membres étaient

13 de nationalité serbe.

14 Q. Pas tous quand même.

15 R. Pourtant, ils m'ont dit qu'ils étaient tous Serbes. Je n'en ai

16 rencontré qu'un seul qui était Musulman.

17 Q. Bien. Nous allons passer au paragraphe 9. Vous avez dit que vous avez

18 remarqué que les uniformes et les insignes qu'ils portaient, qu'ils

19 arboraient, n'étaient pas vraiment les uniformes habituels portés par les

20 soldats de la JNA. Pouvez-vous nous dire à quel moment vous avez pu

21 apercevoir cela ?

22 R. Je l'ai vu au moment où ces soldats sont arrivés. Hormis l'étoile

23 rouge, ils portaient, ils arboraient aussi d'autres insignes du type aigle

24 à deux têtes, et cetera. Ils ne portaient pas vraiment ces couvre-chefs

25 très souvent.

Page 6044

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous arrêter à nouveau. On vous

2 a demandé à quel moment vous avez remarqué cela. Vous savez, nous allons

3 lire votre déclaration et nous allons apprendre tous ces détails. Mme

4 Loukas voulait tout simplement savoir à quel moment vous avez remarqué

5 cela. Il conviendrait de lui répondre avec précision.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai vu, je l'ai aperçu au moment où ils

7 sont arrivés, où ces unités sont arrivées. Je l'ai vu plus tard aussi.

8 Mme LOUKAS : [interprétation]

9 Q. Vous l'avez quand, pour la première fois ?

10 R. Quand ces unités sont venues à Kalinovik, c'était en 1991, à peu près

11 au mois de novembre, je pense, 1991. Je sais qu'il neigeait à Kalinovik.

12 Q. Dans votre déclaration, vous parlez des uniformes habituels de la JNA.

13 Pourriez-vous nous décrire le style de ces uniformes ?

14 R. Ils arboraient l'étoile rouge, par exemple. A partir du moment où vous

15 n'aviez plus l'étoile rouge, avant les officiers avaient des grades sur

16 leurs épaulettes, plus tard, ils avaient des emblèmes sur leur poitrine

17 indiquant leur grade.

18 Q. Ces nouveaux uniformes, vous dites, déjà en 1991, avaient des aigles à

19 deux têtes en guise d'insignes.

20 R. Oui, c'est vrai. Ils les portaient aussi sur leur poitrine.

21 Q. En ce qui concerne le paragraphe 14 de votre déclaration préalable,

22 vous faites référence au conflit entre le SDS et le SDA. Est-ce que vous

23 avez pris cela d'autres personnes, ou s'agit-il de quelque chose que vous

24 avez vu personnellement, dont vous pouvez témoigner parce que vous l'avez

25 vu ou entendu ?

Page 6045

1 R. Vous savez, ces conflits se sont produits déjà vers la fin de l'année

2 1992 lors de la décision qui a été prise à l'assemblée municipale par la

3 majorité de voix. Il a été décidé que Kalinovik devrait dépendre

4 exclusivement du SAO Trebinje. A ce moment-là, les Musulmans et autres

5 membres de l'assemblée ont quitté la session. C'est à ce moment-là qu'il y

6 a eu la division entre le SDS et le SDA au sujet du transfert de territoire

7 sous la juridiction de Trebinje.

8 Q. Pourriez-vous tout simplement répondre à ma question, s'il vous plaît.

9 Je vous ai tout simplement demandé si l'information contenue dans le

10 paragraphe 14 de votre déclaration est une information, quelque chose que

11 vous avez vu, vous-même, ou bien que vous avez appris par quelqu'un ?

12 R. Non. Je n'étais pas présent à cette réunion, donc je n'ai pas pu le

13 voir. Les dirigeants du SDA et du SDS m'ont parlé de ces divergences.

14 Ultérieurement, puisque le SDA s'est retiré du pouvoir, il y a eu

15 différentes associations de citoyens, et cetera, qui ont été créées.

16 Q. Nous allons passer au paragraphe 16, Monsieur Hadzic. Vous avez parlé

17 de l'armement de la population serbe. Tout à l'heure,

18 M. Gaynor vous a posé un certain nombre de questions à ce sujet. Serait-il

19 correct de dire que ce que vous dites dans le paragraphe 16 est fondé sur

20 le fait que vous ayez vu un camion militaire se diriger vers une maison qui

21 se trouvait à peu près à une centaine de mètres de la pompe à l'eau, une

22 maison habitée par les Serbes, et qu'il y avait aussi beaucoup de tirs en

23 l'air, tirés par des Serbes autour de la période du Noël orthodoxe et de la

24 nouvelle année de 1992, de la Saint-Sylvestre; est-ce exact ?

25 R. Oui.

Page 6046

1 Q. Nous allons passer au paragraphe 21. Vous avez dit que les policiers

2 serbes procédaient à des arrestations arbitraires. L'exemple que vous

3 donnez concernait deux amis à vous, Tahir Panjeta et Paso Mrzic qui ont été

4 arrêtés pendant 15 jours au poste de police, ensuite, ont été libérés sans

5 poursuite. Est-ce que vous savez quelle était la raison pour laquelle, ou

6 qui a été fournie à vos amis concernant leur détention au poste de police ?

7 R. Je ne sais pas quelle était la raison pour cela. D'ailleurs, il ne la

8 connaissait pas eux-mêmes. Ils ne savaient pas pourquoi ils avaient été

9 détenus au poste de police.

10 Q. Pourriez-vous citer d'autres exemples ou d'autre noms aux Juges de la

11 Chambre pour illustrer ces arrestations à part ces deux amis et qui

12 figurent dans votre déclaration préalable ?

13 R. Voyez-vous, à l'époque, moi aussi j'ai été convoqué pour un entretien

14 d'information, un interrogatoire. Ensuite, j'ai été libéré. Vous voulez que

15 je vous donne des noms des gens ou le nombre ou le nom, qui ont été

16 emprisonnés le 25 juin ?

17 Q. Vous pouvez me donner les noms ou le nombre de personnes.

18 R. En ce qui concerne mon village, Hadzic Hasan, Hadzic Enes, Esed, Hadzic

19 Hadan Ismael, Hadzic -- le témoin va trop vite --

20 Jasarevic Hilmo, Vranovic Salko, Musanovic Safet, Bajric Ibro, Redzovic

21 Rasid. En ce qui concerne --

22 L'INTERPRÈTE : Il est impossible de traduire les propos du temoin.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur, Mme Loukas vous a demandé

24 d'évaluer à peu près le nombre de personnes qui ont été placées en

25 détention. Vous avez dit dans la date du 25 juin. Je sais que vous les

Page 6047

1 connaissez tous, mais, vous savez, il n'est absolument pas nécessaire de

2 connaître les noms de toutes ces personnes, même si les Juges de la Chambre

3 savent qu'il s'agit là des individus que vous connaissiez et qui ont été

4 arrêtés. Vous n'avez pas besoin de nous citer leurs noms puisque leurs noms

5 ne sont pas tellement importants. C'est surtout leur nombre qui est

6 important plutôt que leurs noms exacts.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 25 juin, nous avons été à peu près 71

8 personnes à avoir été placées en détention. Pendant la première journée,

9 une personne a été libérée, une autre s'est échappée par la suite, et une

10 autre personne a été libérée pour des raisons de santé. Ensuite, le 31

11 juillet, 11 nouvelles personnes ont été amenées. Abdurahman Filipovic,

12 médecin de son état, qui, se jour-là travaillait au dispensaire, a été

13 emmené. Ce qui veut dire qu'à la date du 1er août 1992, nous étions au

14 nombre de 85 placés en détention dans ce camp. Car en arrivant à l'école

15 élémentaire, nous avons trouvé sur les lieux encore 14 personnes qui ont

16 été arrêtées à Trnovo. Il y en avait qui étaient employées à la poste, et

17 ils étaient Musulmans.

18 Mme LOUKAS : [interprétation]

19 Q. Vous avez dit, dans ce paragraphe aussi, que vous avez été interrogé,

20 ensuite libéré. De quelle période parlons-nous exactement ?

21 R. C'est à peu près au mois de mai. Je ne me souviens pas vraiment de la

22 date. Je sais qu'un certain Visnjevac est venu me chercher. Il était chargé

23 des enquêtes criminelles. Il est venu me chercher à mon travail. Il m'a

24 emmené au poste de police. Il disait que j'avais des contacts avez les

25 Bérets verts, ce qui était complètement faux; je n'ai jamais eu de contacts

Page 6048

1 avec eux. Si tel avait été le cas, je serais déjà parti de Kalinovik, et je

2 n'aurais pas vécu tout cela.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, savez-vous à peu près

4 pendant combien de temps encore va durer votre --

5 Mme Loukas n'a toujours pas appris pendant combien de temps vous avez été

6 interrogé ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] A peu près une demi-heure.

8 Mme LOUKAS : [interprétation]

9 Q. Dans ce paragraphe, vous dites qu'on vous a crié dessus et qu'on vous a

10 posé des questions stupides. Pourriez-vous nous dire quelles étaient ces

11 questions ? Vous nous avez déjà dit qu'ils vous ont posé des questions au

12 sujet des contacts que vous auriez pu avoir les Bérets verts. Est-ce qu'ils

13 vous ont posé d'autres questions ? Quelles étaient ces questions ?

14 R. Il m'a demandé pourquoi des voisins venaient me voir, pourquoi mes

15 cousins venaient me voir chez moi le soir, et cetera.

16 Q. D'accord.

17 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je regarde l'heure.

18 J'aimerais bien terminer avant cet après-midi. Je pense que ceci est

19 techniquement possible. Je ne pense pas pouvoir terminer en dix minutes,

20 justement parce que les réponses sont un peu longues.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde aussi les techniciens et les

22 interprètes pour leur demander si nous pouvons aussi continuer un petit peu

23 plus longtemps, mais nous n'avons pas réservé la place dans ce prétoire et

24 cette salle d'audience pour cet après-midi. Vous devriez tout de même avoir

25 en tête ces limites. J'espère qu'avec une bonne coopération de la part de

Page 6049

1 tout le monde, nous allons y arriver. Je n'ose presque pas poser la

2 question aux interprètes, mais on ne m'a dit non pour autant.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

6 Q. M. Hadzic, nous allons à présent examiner le paragraphe 23, le

7 paragraphe 24 et le paragraphe 25 de votre déclaration préalable, tout

8 particulièrement, le paragraphe 25. Là, vous faites état de votre vision

9 des choses, de la théorie qui est la vôtre concernant les événements qui se

10 sont produits, n'est-ce pas ? Est-ce exact ?

11 R. Oui.

12 Q. Evidemment, vous allez dire aux Juges de la Chambre que c'est votre

13 opinion, votre point de vue, au fond ?

14 R. Oui.

15 Q. Que vous l'avez fondé sur ce que vous avez vécu à Kalinovik, n'est-ce

16 pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Bien entendu, vous serez prêt à accepter qu'il existe d'autres théories

19 à ce sujet différentes de la vôtre.

20 R. Tout est possible.

21 Q. Nous allons revenir sur le paragraphe 9. Vous y dites que vous croyez

22 avec forte conviction que ces unités, de façon délibérée, faisaient peur.

23 Est-ce que vous le voyez ?

24 R. Oui, en effet. Nous avons eu l'impression qu'ils étaient là pour nous

25 intimider puisqu'ils n'avaient aucun besoin de se rendre à Kalinovik.

Page 6050

1 Q. Pour être vraiment honnête, Monsieur Hadzic, vous acceptez la

2 possibilité qu'il existe d'autres interprétations de la chose à part que

3 ces unités étaient là pour vous intimider ?

4 R. Le temps a montré qu'elles étaient là pour cela. Ils nous disaient

5 qu'ils étaient venus protéger les peuples serbes de Kalinovik. Dans ce

6 village, il y avait à peu près 500 Musulmans dans le village autour de

7 Kalinovik. L'histoire a démontré qu'ils étaient venus justement pour nous

8 intimider, pas pour défendre le peuple serbe.

9 Q. Je comprends cela, Monsieur Hadzic. Vous allez dire aux Juges de la

10 Chambre que votre opinion est basée sur ce que vous avez vu, et c'est comme

11 cela que vous en êtes arrivé à vos conclusions, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Je vais à présent examiner le paragraphe 4 de votre déclaration

14 préalable. Est-ce que vous l'avez sous vos yeux, Monsieur Hadzic ?

15 R. Oui.

16 Q. A nouveau, vous nous faites part de votre opinion, n'est-ce pas ?

17 R. Oui, en nous basons sur les événements qui se sont produits.

18 Q. A nouveau, pour être tout à fait honnête, vous allez devoir accepter le

19 fait que vous n'avez pas de connaissance particulière au sujet des

20 événements qui se sont produits à un niveau très élevé, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, mais je sais pourtant ce qui s'est passé aux gens.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, de façon générale, si la

23 déclaration commence par "je crois, et cetera," les Juges les comprennent

24 comme cela, comme une opinion. Nous ne pensons pas qu'il y a des faits

25 cachés, des intentions cachées derrière cela. C'est tout simplement une

Page 6051

1 impression personnelle du témoin, des choses qu'il nous dit. Pour

2 commencer, je pense que vous n'avez pas besoin de vérifier tout cela avec

3 le témoin, puisque c'est la présomption à partir de laquelle nous partons

4 nous ici, les Juges ce la Chambre.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien. J'ai souhaité tout simplement

6 mettre ceci en évidence pour le compte rendu d'audience.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, je comprends.

8 Mme LOUKAS : [interprétation]

9 Q. Je vais passer à un autre sujet. Je pense, que suite à votre

10 intervention, je n'ai pas besoin d'insister là-dessus. Je vais passer à

11 quelques questions concernant les informations additionnelles.

12 Monsieur Hadzic, vous avez fourni votre déclaration aux enquêteurs du

13 Tribunal pénal international, à peu près, il y a plus de cinq ans, n'est-ce

14 pas ?

15 R. Oui, c'était en 1999.

16 Q. Bien sûr, vous saviez qu'au moment où le Procureur est venu vous

17 parler, qu'il s'efforçait de trouver les responsables de ce qui s'est passé

18 à Kalinovik ?

19 R. Oui.

20 Q. Evidemment, ils vous ont dit de leur dire tout ce que vous saviez,

21 n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Evidemment, ils ont écrit tout ce que vous avez dit ?

24 R. Oui.

25 Q. Par rapport à la déclaration que vous avez fournie au bureau du

Page 6052

1 Procureur, vous avez parlé de beaucoup de choses dont vous avez parlé déjà

2 dans la déclaration que vous avez fournie aux autorités bosniaques. Mais

3 vous leur avez donné aussi quelques informations supplémentaires dont vous

4 vous êtes rappelées plus tard, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Evidemment, les employés du bureau du Procureur qui vous ont interviewé

7 voulaient savoir ce qui vous était arrivé à vous,

8 n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. A l'époque, ils voulaient, bien entendu, savoir si vous disposiez de

11 quelque information que ce soit, qui relevait d'un niveau plus élevé ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous, vous efforciez de dire tout ce que vous saviez, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Il ne s'agissait pas là uniquement de répondre à des questions

16 précises. A chaque fois que vous le pouviez, vous leur fournissiez toute

17 information supplémentaire dont vous disposiez, n'est-ce pas ?

18 R. Oui, que j'ai ajouté aux informations que j'ai fournies aux autorités

19 bosniaques.

20 Q. Oui, effectivement, Monsieur Hadzic. Monsieur Hadzic, vous avez fourni

21 au Procureur des informations supplémentaires hier, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Ces informations supplémentaires comprenaient, n'est-ce pas, le fait

24 que Grujo Lalovic a également dit lors de cette réunion-là qu'il avait reçu

25 des "ordres d'en haut" ? Là, il faisait référence aux ordres reçus de

Page 6053

1 Trebinje; est-ce exact ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous avez fourni ces informations supplémentaires concernant vos ordres

4 venant d'en haut, mais 12 années après les événements; est-ce exact ?

5 R. Non. Déjà en 1992, j'avais fourni ces informations aux autorités

6 bosniaques. Hier d'ailleurs, j'ai vu que le bureau du Procureur disposait

7 de cette déclaration préalable. A l'époque, je parlais de Bosko Govedarica,

8 Nikola Kovac, Grujo Lalovic. Je me suis dit que ces déclarations préalables

9 étaient parties intégrantes de ces déclarations. J'ai réitéré ces

10 informations au bureau du Procureur concernant ces gens qui, à l'époque,

11 avaient ces positions-là.

12 Q. Ceci n'est pas contesté, Monsieur Hadzic, que les deux déclarations

13 bosniaques font partie du matériel fourni par le bureau du Procureur. La

14 question que je vous pose est tout autre : dans ces trois documents, vous

15 n'avez pas parlé de Grujo Lalovic qui aurait dit qu'il a reçu ces ordres

16 d'en haut, par là, qu'il faisait référence aux ordres venant de Trebinje.

17 Vous conviendrez là-dessus ?

18 R. Oui. Lors de la réunion au moment où nous avons restitué nos armes, il

19 nous a dit que cet ordre venait de Trebinje, qu'eux, ils préféraient ne pas

20 le faire, mais qu'ils avaient reçu l'ordre et qu'ils étaient obligés de le

21 faire. Je pense que c'est ce qu'il a dit. Peut-être que la façon de le dire

22 n'était pas exactement la même.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Loukas voudrait savoir si vous êtes

24 d'accord pour dire que cette partie-là, de ce qu'il a dit, de votre

25 déclaration, à savoir qu'il vous a dit cela pendant cette réunion, et que

Page 6054

1 ceci ne figure pas dans vos déclarations préalables précédentes. C'est la

2 première fois que vous nous dites cela. C'est tout ce qu'elle veut savoir;

3 rien de plus.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Sans doute que non. Sans doute que je ne l'ai

5 pas dit auparavant.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Loukas.

7 Mme LOUKAS : [interprétation]

8 Q. Monsieur Hadzic, vous admettez que c'est la première fois que vous

9 dites, 12 ans après les événements, ce que vous venez de dire, que, bien

10 entendu, vous n'en avez fait aucune mention dans votre déclaration écrite

11 recueillie il y a cinq ans; c'est bien cela ?

12 R. C'est ce qu'il apparaît. Je ne sais pas combien vous en avez, mais j'ai

13 fait plusieurs déclarations. J'ai fait une déclaration en particulier

14 devant la commission chargée des enquêtes, où il est écrit en bas du

15 document, en lettre manuscrite, que j'ai reproché tout cela à Grujo

16 Lalovic. Je n'ai pas dit qu'il avait donné l'ordre depuis Trebinje, je n'ai

17 pas dit cela. Vous savez, la situation était très traumatisante quand j'ai

18 fait toutes ces déclarations. A l'époque, je ne l'ai pas dit, mais je le

19 dis ici aujourd'hui.

20 Q. Je me rends bien compte de cela, Monsieur Hadzic, bien sûr, vous avez

21 la possibilité de faire plusieurs déclarations, et vous n'avez jamais fait

22 mention de cela dans aucune de ces déclarations; c'est bien cela ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, c'est clair.

24 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est clair.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons ces déclarations écrites.

Page 6055

1 Vous pouvez poser la même question au témoin cinq fois pour lui dire s'il

2 est d'accord sur le fait que cela ne figure dans aucune de ses

3 déclarations, réellement, cela n'est pas d'une très grande aide pour la

4 Chambre. La chose est tout à fait claire. Vous avez appelé l'attention des

5 Juges sur ce fait, qu'il s'agit d'un nouvel élément que le témoin évoque

6 pour la première fois ici aujourd'hui et qui ne figure pas dans ses

7 déclarations écrites antérieures. C'est tout à fait clair à nos yeux. Il

8 n'est pas nécessaire d'insister sur cette question. Veuillez procéder.

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président, Peut-être

10 ceci méritait-il d'être un peu souligné par rapport aux déclarations

11 antérieures.

12 M. GAYNOR : [interprétation] Comme le président l'a souligné, c'est tout à

13 fait le cas.

14 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci.

15 Monsieur le Président, je regarde l'horloge, et je vois que j'ai couvert

16 tous les domaines qui m'intéressaient, à moins qu'il n'y ait des questions

17 supplémentaires de la part des Juges, je pense que nous avons respecté les

18 délais.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, avez-vous des questions

20 supplémentaires à poser au témoin ?

21 M. GAYNOR : [interprétation] Aucune nécessité, Monsieur le Président. Je

22 vous remercie.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hadzic, les Juges de la Chambre

24 n'ont pas d'autres questions à vous poser. Ceci met un terme à votre

25 déposition au Tribunal. Tout d'abord, je tiens beaucoup à vous remercier

Page 6056

1 d'être venu à La Haye d'aussi loin que vous l'avez fait, et je tiens à vous

2 remercier d'avoir répondu à toutes les questions qui vous ont été posées

3 par l'Accusation et par la Défense. Car la Chambre se rend bien compte,

4 compte tenu du contenu de votre déposition, s'agissant de ce qui s'est

5 passé à l'époque et de ce que vous subissez encore aujourd'hui, comme vous

6 nous l'avez dit, des souffrances qui sont encore les vôtres aujourd'hui,

7 que cela n'a certainement pas dû être chose facile pour vous. Nous

8 apprécions grandement votre venue ici, et vous souhaitons un bon voyage de

9 retour.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ajouterais que, si nous disposions de

12 plus de temps, vous auriez certainement pu nous en dire beaucoup plus, que

13 ce n'est pas par un quelconque manque d'intérêt que nous n'avons pas écouté

14 les détails complémentaires que vous auriez pu fournir. Premièrement, nous

15 avons lu votre déclaration écrite et, bien sûr, il y a également d'autres

16 témoins qui viennent ici. La Chambre dispose de pas mal de renseignements

17 déjà. Je m'imagine bien que si vous aviez dû parler de tout, vous auriez pu

18 parler pendant des heures, sinon pendant des jours ou des semaines, pour

19 évoquer tous ces événements qui ont eu lieu à l'époque. La Chambre est tout

20 à fait consciente de cela.

21 Comme je vous l'ai déjà dit, je vous souhaite un bon voyage de retour.

22 Madame l'Huissière, je vous demanderais de bien vouloir escorter le témoin

23 hors du prétoire.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

25 [Le témoin se retire]

Page 6057

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il des questions de procédure

2 qu'il serait urgent de traiter dans l'immédiat ?

3 M. GAYNOR : [interprétation] Simplement le versement au dossier des pièces

4 à conviction, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ceci sera sans doute assez facile,

6 s'agissant de ce témoin. Nous pouvons le faire tout de suite.

7 Maître Loukas.

8 Mme LOUKAS : [interprétation] Vous souhaitez que nous le fassions

9 maintenant ou lundi matin ?

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pouvons le faire maintenant, mais

11 il y a une complication, n'est-ce pas ?

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il y a ce

13 problème de l'objection que j'ai soulevée par rapport aux parties

14 pertinentes de la déclaration écrite.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Gaynor, la déclaration -- mais

16 Maître Loukas la question est évoquée dans le prétoire, et vous savez quels

17 étaient les passages qui faisaient l'objet de votre objection. Ces passages

18 doivent-ils être supprimés du texte ? Je ne pense pas qu'ils changent

19 beaucoup les choses, mais --

20 M. GAYNOR : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, Monsieur le

21 Président. Me Loukas a évoqué les différents passages au cours de son

22 interrogatoire. Il serait sans doute de bon sens de les conserver dans le

23 texte.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A titre d'éléments de référence parce

25 que vous avez posé des questions s'y rapportant.

Page 6058

1 Mme LOUKAS : [interprétation] En effet, Monsieur le Président, Il y a des

2 éléments qui ont été abordés par le Procureur dans la déposition du témoin.

3 Je suppose que cela ne fait pas de grande différence. Je pense qu'il y a

4 une demi-douzaine de points affectés, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame la Greffière, pourriez-vous

6 nous donner les cotes de ces documents ?

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce à conviction de l'acte

8 d'accusation P285A, déclaration du témoin datant du 31 janvier 1999, et

9 P285A.1, traduction de cette déclaration en B/C/S; pièce P285B, déclaration

10 du témoin datant du 19 février 1993, et P285B.1, traduction anglaise de

11 cette déclaration; pièce P285C, déclaration manuscrite du témoin, et

12 P285C.1, sa traduction anglaise; pièce P286, carte de Kalinovik; pièce

13 P287, reçu datant du 8 mai 1992, confirmant la restitution des armes, et

14 pièce P287.1, traduction anglaise de ce reçu; pièce P288, conclusion de la

15 réunion de l'état-major de guerre de la région de Kalinovik, en date du 17

16 mai 1992, et pièce P288.1, traduction anglaise de ce procès-verbal; pièce

17 P289, ordre émanant du commandant du Groupe tactique, en date du 11 juin

18 1992, et pièce P289.1, traduction anglaise de cet ordre; pièce P290,

19 convocation de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, datant du 25 juin

20 1992, et pièce P290.1, traduction anglaise de cette convocation.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'entends aucune objection. Ces

22 pièces sont admises au dossier. J'aimerais demander aux parties si elles

23 sont prêtes à communiquer entre elles, notamment, parce que pendant le

24 weekend, nous ne siégions pas. La Chambre peut s'intéresser à cela. Je ne

25 dis pas que des difficultés insurmontables ont soudain disparu, mais nous

Page 6059

1 vérifierons s'il existe encore des difficultés insurmontables.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais simplement

3 indiquer que cet après-midi, Me Stewart, Me Cmeric et moi-même participons

4 à une conférence au centre de détention.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Où vous ne pouvez pas emporter votre

6 téléphone portable.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Nous ne sommes pas autorisés à y apporter nos

8 téléphones portables.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez une idée -- mais

10 vous rebranchez vos téléphones une fois que vous quittez les lieux ?

11 Mme LOUKAS : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Notre

12 conférence se tient de 15 heures à 17 heures.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, c'est bon à savoir.

14 Mme LOUKAS : [interprétation] Nous pouvons, ensuite, de nouveau, brancher

15 nos téléphones portables. J'indiquerai simplement rapidement un point, une

16 chose. Il y a un autre aspect qui n'a pas été couvert dans la déclaration

17 que j'ai faite, ni dans les concessions faites par l'Accusation. J'aimerais

18 simplement confirmer cela avec l'Accusation. Nous pouvons en parler lundi

19 matin. Compte tenu des contraintes de temps, vous avez indiqué quelle était

20 la situation exacte, j'ai décidé de n'aborder aucun autre aspect dans la

21 déclaration. Il est tout à fait évident que c'était un fait qui ne méritait

22 pas d'être mentionné. C'est pourquoi je ne l'ai pas fait jusqu'à présent.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En général, la Chambre admet les

24 soumissions des parties comme contenant certains éléments qui n'ont pas

25 figuré dans les déclarations précédentes. Bien entendu, si vous souhaitez

Page 6060

1 revenir sur la question de la crédibilité ou de la fiabilité du témoin,

2 c'est une autre question. En général, le but est d'établir qu'un point ne

3 figure pas dans telle ou telle déclaration, l'interrogatoire s'en suit dans

4 cet ordre d'idée.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] En effet.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, on peut aborder une autre

7 manière de faire, mais ce n'est pas nécessaire dans notre cas.

8 Mme LOUKAS : [interprétation] Non. C'est une question tout à fait

9 différente. Vérifier les choses importantes; cela a été évoqué dans les

10 écritures.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je vous souhaite à tous bon

12 weekend, de retour dans cette salle lundi à 9 heures 00, dans ce même

13 prétoire.

14 --- L'audience est levée à 14 heures 00 et reprendra le lundi 27

15 septembre 2004, à 9 heures 00.

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25