Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 11 novembre 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 26.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Messieurs.

6 Madame la Greffière, veuillez, je vous prie, appeler l'affaire.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

8 Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre

9 Momcilo Krajisnik.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

11 Avant de demander à l'huissier de faire entrer le témoin dans la salle

12 d'audience, je souhaiterais me tourner vers les deux parties avant le

13 contre-interrogatoire.

14 La Chambre exprime sa préoccupation concernant la façon dont les éléments

15 de preuve ont été présentés au cours de cette semaine. La Chambre remarque

16 que, principalement concernant le dernier témoin, l'affaire ne doit pas

17 être décidée sur la base d'impression sans avoir des bases factuelles très

18 claires et très bien établies. La présentation d'opinion et d'analyse d'un

19 témoin ne fait qu'informer la Chambre sur le fait que ce témoin s'est forgé

20 une opinion, ou a pu faire une analyse.

21 Mais ce que la Chambre a besoin, c'est d'avoir des faits pour pouvoir

22 forger sa propre opinion et arriver à ses propres analyses. Les parties

23 peuvent très bien comprendre ceci sur la base des questions posées au

24 témoin Bjelobrk.

25 C'est ma première observation.

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1 La deuxième est la suivante : la Chambre a écouté attentivement les

2 observations faites par M. Krajisnik qui a offert certaines vérifications

3 des réponses données par le témoin en produisant des notes sténographiques

4 de réunions et de séances de l'assemblée. La Chambre invite la Défense de

5 nous fournir toutes les parties des notes sténographiques qui pourraient

6 être utiles afin de corriger, ou contredire les réponses données par le

7 témoin ou ce qui figure dans le témoignage écrit du témoin, dans la

8 déposition du témoin, la déclaration. Cela peut être fait concernant

9 certaines parties des déclarations de la déposition orale. La Défense doit,

10 encore une fois, tenir compte du fait que la Chambre se base sur les faits

11 plutôt qu'autre chose.

12 Concernant le procès verbal qui a été traduit, la Chambre invite les

13 parties de se mettre d'accord, à savoir s'elles acceptent les notes

14 sténographiques, si elles acceptent que celles-ci représentent une source

15 d'information fiable, ensuite, elle demandera quelle est la valeur probante

16 de ces parties. Par la suite, la Chambre décidera si oui ou non, elle va

17 admettre ces parties ou cette partie-là des éléments de preuve et si M.

18 Bjelobrk devrait être rappelé pour être entendu de nouveau concernant ces

19 notes sténographiques.

20 Maintenant, concernant une autre observation, voilà c'est s'agissant

21 du contre-interrogatoire de cet après-midi. Monsieur Stewart, la Chambre

22 vous invite de parler des questions de pertinence d'abord, le contre-

23 interrogatoire doit être le plus bref possible, dans la mesure du possible.

24 Eu égard à la connaissance particulière que détient

25 M. Krajisnik, et d'après ce que la Chambre a pu comprendre de ses

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1 observations d'hier, la Chambre permettrait, de façon exceptionnelle, à M.

2 Krajisnik de poser des questions à ce témoin, seulement lorsqu'il a

3 l'impression qu'après avoir consulté son conseil de la Défense, il serait

4 le plus approprié à les poser à ce témoin.

5 A la fin de l'audience d'aujourd'hui, la Chambre statuera sur le fait

6 que le témoin devrait être rappelé pour subir un autre contre-

7 interrogatoire, ou pour faire l'objet de questions supplémentaires, ou non.

8 Ce sont les questions que je voulais attirer à l'attention des

9 parties. Je vais maintenant demander à M. l'Huissier de faire entrer M.

10 Bjelobrk dans la salle d'audience.

11 Monsieur Hannis, veuillez, je vous prie, informer la Chambre d'abord,

12 si le procès verbal de la 8e session tel que nous le trouvons dans le

13 matériel Treanor, dans le document Treanor, s'il représente une copie

14 complète ou non.

15 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, non. En fait, il

16 faudrait y attribuer une autre cote. Elle varie légèrement de la version

17 qui a été présentée à M. Bjelobrk.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, je vous prierais

19 d'attribuer une cote à la pièce qui contient le procès verbal de la 8e

20 session de l'assemblée.

21 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote qui sera attribuée, sera P406.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

24 Monsieur Bjelobrk, puis-je d'abord vous rappeler, que vous êtes encore tenu

25 par la même déclaration solennelle, que vous avez donnée au tout début de

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1 votre témoignage.

2 LE TÉMOIN : BORO BJELOBRK [Reprise]

3 [Le témoin répond par l'interprète]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, vous serez contre-

5 interrogé par Me Stewart qui est le conseil de la Défense.

6 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

7 Contre-interrogatoire par M. Stewart :

8 Q. [interprétation] Monsieur Bjelobrk, bonjour. Lors de votre

9 déposition d'hier -- ou, en fait, lors de votre témoignage donné

10 avant-hier, vous avez fait allusion à un système de protection, qu'avait

11 créé le SDS, n'est-ce pas ?

12 R. Oui, je me souviens de cela, et je vous souhaite bonjour

13 également.

14 Q. Vous avez dit, à la page 85 du compte rendu d'audience de mardi, que,

15 selon vous, il s'agissait d'une idée développée par les dirigeants d'abord,

16 parce que les citoyens ne jouaient pas un rôle particulier ou n'avaient pas

17 vraiment besoin d'une connaissance spéciale; deuxièmement, ce qui découle

18 de l'un des transcripts, vous avez dit que le fait d'avoir tracé une carte

19 dans ce sens-là avait été fait par un cercle très étroit de personnes qui

20 appartenaient -- qui représentaient les dirigeants du SDS en fait.

21 D'abord, lorsque vous avez fait référence au tracé de la carte dans ce

22 sens-là, et je cite vos propos, est-ce que vous aviez en tête une carte

23 spécifique, ou est-ce que vous parliez d'une façon figurative ou parliez-

24 vous d'une carte de façon plus générale ?

25 R. Je faisais allusion à ce qui figure au compte rendu d'audience de cette

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1 séance, où l'on a parlé d'une carte, où on a demandé à trois personnes de

2 vous parler d'une carte, ce n'était pas seulement M. Krajisnik.

3 L'INTERPRÈTE : On pourrait peut-être ajuster le microphone, afin que

4 le témoin puisse parler plus directement devant le micro.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier pourriez-vous

6 ajuster le microphone, s'il vous plaît. Je vous remercie.

7 Veuillez poursuivre.

8 M. STEWART : [interprétation]

9 Q. Votre position est la suivante : s'agissant de votre connaissance

10 concernant la préparation de cette carte, c'est une connaissance qui est

11 dérivée de ce que vous aviez pu entendre lors de cette conservation

12 interceptée ?

13 R. S'agissant de l'été 1991, mes connaissances découlent de nombreuses

14 conversations que j'ai eues avec les députés du SDS. Je n'ai, bien sûr, pas

15 pu avoir une preuve matérielle lors de ces conversations, alors que, lors

16 de ce débat, j'ai pu le faire ici, particulièrement, dans cette salle

17 d'audience.

18 Q. Monsieur Bjelobrk, ce que j'essaie d'établir c'est qu'à l'époque des

19 événements, c'est-à-dire, en 1991 et 1992, vous n'avez jamais été présent

20 lorsque l'on a discuté d'une telle carte ou lorsqu'une telle carte a fait

21 l'objet de discussions par les dirigeants du SDS, n'est-ce pas ?

22 R. Non, je n'ai pas été présent.

23 Q. Lorsque vous dites que le fait d'avoir imaginé une carte de cette

24 façon-là avait été faite par un cercle très étroit de dirigeants du SDS,

25 est-il exact de dire que vous n'avez pas une connaissance personnelle des

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1 personnes qui se trouvaient au sein du SDS ? Vous ne saviez pas de qui il

2 s'agissait, ce que vous nous dites provient des conversations interceptées

3 que vous avez pu entendre ici, n'est-ce pas ?

4 R. Mes conclusions ont été faites à l'été 1991. Je suis d'accord avec vous

5 pour dire que je n'ai pas participé à un tel tracé d'une carte. Je n'ai pas

6 de preuve matérielle, non plus, à cet effet. Mais suite à une série de

7 conversations avec les députés du SDS, et après avoir entendu bon nombre

8 d'informations, et pour être logique, après avoir conclu certaines choses,

9 après avoir vu ce qui s'est passé sur le terrain puisqu'il n'y a pas eu

10 d'incidents, après avoir créé ces nouveaux espaces, j'ai compris que

11 c'était quelque chose qui se passait dans la réalité, que ce n'était pas

12 simplement quelque chose qui avait été imaginé par les gens sur le terrain.

13 Q. Mais ces députés ne vous ont jamais dit, par exemple, qu'ils avaient

14 été directement impliqués quant à l'imagination ou à la rédaction ou au

15 tracé d'une carte en particulier ?

16 R. Je peux seulement faire appel à mes souvenirs, à savoir si quelque

17 chose de ce genre existait clairement, je n'en ai pas entendu. Des

18 conversations, j'ai pu constater qu'on parlait de la régionalisation, comme

19 on l'appelait à l'époque, et que cette régionalisation était dans son état

20 préliminaire. S'agissant de cet état préliminaire, on avait procédé au

21 tracé de nouvelles cartes. Je ne sais pas qui était chargé de ce faire, et

22 je n'y ai pas participé. Par contre, je savais que c'était le privilège

23 d'un cercle très étroit.

24 Q. Mardi, à la page 86 du compte rendu d'audience, lorsqu'on vous a posé

25 une question spécifique concernant le paragraphe 20 de votre propre

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1 déclaration, lorsque vous avez parlé du processus de l'organisation

2 régionale et de la protection, entre autres, vous avez dit : Ils - vous

3 avez fait allusion au SDS - je cite : Vous [comme interprété] formulez les

4 réponses suite aux initiatives d'autres personnes, et qu'ils ressentaient

5 le besoin de répondre à cela en leur défense.

6 Maintenant, lorsque vous avez parlé d'initiatives d'autres personnes, est-

7 ce que vous pouvez nous dire de quelles "autres" personnes il s'agissait ?

8 R. Le partenaire du SDS. Pour définir la réponse, en fait, c'était le SDA

9 et le HDZ. C'était les deux parties. Je vais essayer de vous expliquer un

10 peu plus précisément ce que je considérais comme étant une façon défensive

11 de se comporter. C'était un mécanisme politique bien organisé. On avait

12 l'illusion -- l'impression que l'on ne faisait que réagir aux mouvements

13 des autres, alors qu'il s'agissait d'une initiative, d'une création d'une

14 telle position. C'était la tactique du SDS, la tactique principale. Entre

15 autres, cette tactique a été confirmée par de nombreuses personnes, y

16 compris M. Krajisnik dans son interview qui a été donnée au mois de janvier

17 1992.

18 Q. Mardi, vous avez dit qu'en 1991, une thèse avait été faite, une thèse

19 selon laquelle chaque ethnicité, chaque groupe ethnique aurait son propre

20 gouvernement, ce qui veut dire qu'il y aurait des mécanismes

21 gouvernementaux dans chaque région, et que l'on séparerait les groupes

22 ethniques le long de ces lignes-là. Cette thèse n'excluait pas les membres

23 du SDS, n'est-ce pas ?

24 R. Je souhaiterais que l'on vérifie quelque chose que j'ai déjà dit soit

25 dans ma déclaration, soit dans une des réponses que j'ai donnée devant ces

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1 micros, mais j'ai dit que c'était une thèse du SDS, une thèse exclusivement

2 proposée par le SDS.

3 Q. Vous dites qu'il n'y avait personne en Bosnie-Herzégovine, outre les

4 membres du SDS, qui avait pensé à ce que chaque groupe ethnique ait son

5 propre gouvernement, qui avait envisagé cette possibilité ?

6 R. Pour vous parler des autres partis, chaque parti avait cette même

7 théorie. Le HDZ, chez eux, c'était devenu très important lorsqu'il y a eu

8 un changement avec M. Kljuic. Je crois que c'était à la fin de 1991, au

9 début de 1992. Pour ce qui est du SDA, c'est quelque chose qui s'est vu

10 réalisé au début de la guerre, et je crois qu'au printemps 1993, cela a

11 atteint son apogée. C'est lorsque ce document de travail concernant la

12 République islamique a vu le jour.

13 Q. Vous avez parlé des difficultés qu'avait l'assemblée en Bosnie-

14 Herzégovine à fonctionner, vous avez parlé qu'il y a eu un comportement

15 obstructif, et aux pages 88 et 89 de votre transcript de mardi, lorsque

16 vous avez parlé d'obstructions faites par M. Krajisnik, vous dites au

17 compte rendu d'audience, sur ces deux pages, vous dites : "En dernier lieu,

18 lorsqu'il y a eu un espoir que l'assemblée vote pour la proposition, le SDS

19 ou ses représentants ont dit que seul ce qui a été placé à l'ordre du jour

20 faisait l'objet d'un consensus, et ce n'était que ces propositions-là qui

21 seraient adoptées par les trois groupes ethniques, la deuxième proposition

22 constituait d'un vote de 51 %, et que cela ne serait pas suffisant pour que

23 l'on adopte cette proposition."

24 Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que s'agissant de la

25 période que vous décriviez, qu'il s'agissait d'une époque très tendue, donc

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1 beaucoup de tensions avec des différences très profondes qui existaient

2 entre les différentes nationalités qui étaient représentées à l'assemblée

3 de Bosnie-Herzégovine, et que c'était le problème principal, n'est-ce pas ?

4 R. Tout d'abord, d'après ce que je vois ici au compte rendu, je crains

5 qu'il ne s'agisse pas là d'une citation exacte de mes propos aux pages 88

6 et 89. Je vais essayer de faire de la clarté là-dessus, encore une fois.

7 Il y avait deux situations à l'époque --

8 Q. Pardonnez-moi, je vais vous interrompre pendant quelques instants. Vous

9 avez dit que cela n'était pas une citation exacte. Vous êtes en mesure de

10 vous remémorer les pages 88 et 89 du compte rendu de mardi dernier ?

11 R. Oui. Avec plaisir.

12 Q. Non. C'est une question que je vous ai posée.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bjelobrk, je pense que Me

14 Stewart cite les mots qui sont extraits des comptes rendus. Si vous dites

15 que ceci n'est pas exact, faites le nous savoir de façon à ce que la

16 Chambre de première instance puisse faire vérifier les cassettes. Si vous

17 insistez vraiment et si vous dites que ceci ne correspond pas à ce que vous

18 avez dit, faites le nous savoir, s'il vous plaît, pour que nous puissions

19 vérifier les cassettes.

20 M. STEWART : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. A la

21 deuxième ligne de ce que vous venez de dire, je pense que Me Stewart cite

22 les termes exacts qui ont été retranscrits à cette réunion, mais je crois

23 qu'il s'agissait d'une audience, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr.

25 M. STEWART : [interprétation] Oui, bien sûr, il s'agit d'une réunion, mais

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1 voilà.

2 Q. Oui, Monsieur Bjelobrk, je fais de mon mieux. Je relis de mon mieux et

3 je lis le compte rendu d'audience. A moins que quelqu'un ne propose autre

4 chose, c'est ainsi que je pose mes questions. Comme vous avez dit, vous

5 avez parlé de différences profondes, différences sous-jacentes entre les

6 différentes nationalités représentées au sein de l'Assemblée de Bosnie-

7 Herzégovine, et je crois qu'il s'agissait là de la situation telle qu'on

8 pouvait la décrire à l'époque.

9 R. Je vais vous répondre de façon très précise. Je vous remercie, Monsieur

10 le Président, pour votre intervention.

11 L'assemblée qui s'est tenue pendant l'été était, je crois qu'on pourrait la

12 définir par le fait que les membres du SDS ont quitté l'assemblée avant que

13 le débat n'ait commencé. Après cela, lorsque les différentes assemblées à

14 l'automne ont commencé à préparer l'ordre du jour, autrement dit, il y

15 avait une présidence collégiale qui a préparé l'ordre du jour, et on avait

16 mis à l'ordre du jour que les points sur lesquels les trois partis

17 nationaux arriveraient à un consensus. Le principe de légalité dans les

18 deux cas était de 51%, la règle de majorité requise conformément au

19 règlement. Quoi qu'il en soit, les membres du Parlement du SDS et les

20 dirigeants du SDS aient expliqué que ces décisions ne pouvaient pas être

21 légitimes parce qu'il n'y avait pas une majorité de 51%, et il y ait un

22 certain nombre de gens qui s'opposaient à cela.

23 Une autre question que vous m'avez posé : Cela ne fait aucun doute qu'il y

24 avait une tension grandissante en Bosnie-Herzégovine, en particulier parce

25 que les gens n'aimaient pas tout ceci, le fait que le président de la

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1 république yougoslave avait échoué dans les négociations concernant

2 l'avenir de la Yougoslavie, et qu'il y avait énormément de débats en cours

3 dans les médias et dans le public en général. Ces tensions ont contribué à

4 ces travaux qui n'ont pas été très productifs au sein de l'assemblée. Les

5 questions qui étaient posées étaient des questions auxquelles il était très

6 difficile de trouver une réponse.

7 D'autre part, d'après moi, si vous regardez un autre élément très important

8 de la situation à l'époque, à savoir, les différents rapports entre les

9 peuples, il est important de dire qu'il n'y a pas eu d'incidents majeurs à

10 ce moment là encore.

11 Q. Monsieur Bjelobrk, je me demande si on peut vous remettre, s'il vous

12 plaît, la pièce P385. En anglais, P395A. 395A représente le compte rendu,

13 et 395A.1 représente la retranscription de la conversation téléphonique, et

14 A1 est la version anglaise.

15 Il s'agit là d'une retranscription d'une conversation qui a eu lieu entre

16 Radovan Karadzic et Slobodan Milosevic. A la deuxième page de la version

17 anglaise, je crois qu'on peut commencer, je ne sais pas exactement à quel

18 endroit en B/C/S, mais est-ce que vous voyez

19 M. Milosevic qui dit : "Oui, oui." C'est à peu près à cinq cases plus bas

20 dans la version en B/C/S. Est-ce que vous y êtes ? J'essaie de voir et de

21 vérifier, Monsieur Bjelobrk, si nous avons le même texte. Est-ce que vous y

22 êtes ? M. Milosevic dit : "Oui, oui." Vous y êtes ? Bien, merci.

23 Je vais simplement lire ce qu'il y a au-dessus. M. Karadzic dit : "Non.

24 Nous avons dit que c'était dans le cas où le système constitutionnel

25 s'effondrerait pour autant s'il y a une

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1 constitution --"

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis.

3 M. STEWART : [interprétation] Je m'excuse.

4 M. HANNIS : [interprétation] Je ne suis pas certain que vous avez bien

5 indiqué le bon "da, da." Oui, oui. Je crois qu'il s'agit du "da da", qui se

6 trouve en bas de la page 1.

7 M. STEWART : [interprétation] C'est, en fait, à la page 6 de la version

8 anglaise. C'est Radovan Karadzic qui aurait dit -- M. Hannis et moi-même,

9 vous voyez que notre connaissance de B/C/S est très importante en parlant

10 de "da, da". Nous sommes à la page 6, en bas de la page 6, dans la version

11 en B/C/S. Trois cases plus bas de la page 6 dans la version anglaise, et

12 complètement en bas dans le texte en B/C/S. Pardonnez-moi. Nous essayons de

13 faire concorder la version anglaise et la version B/C/S. Dans la B/C/S à la

14 page 6, quatre cases un peu plus bas, vous avez des cases blanches.

15 M. Milosevic dit : "Dobro." "Oui, oui." Vous y êtes ?

16 R. Oui.

17 [Citation de transcription]

18 "Slobodan MILOSEVIC : Oui, oui, bien. Je crois que ceci serait accepté

19 s'ils étaient d'accord. Comment sont-ils, des hommes de Durakovic ?

20 Radovan KARADZIC : "Et bien, il semble désespérés."

21 Slobodan MILOSEVIC : "Ont-ils voté pour Izetbegovic, sans doute les

22 propositions ?"

23 [Fin de citation]

24 Q. C'est ainsi que cela a été traduit. Je fais une pause ici. Les

25 hommes de Durakovic, cela vous incluait, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. [Citation de transcription]

3 Slobodan MILANOVIC : Ont-il voté pour Izetbegovic sans doute des

4 propositions.

5 Radovan KARADZIC : Non. Ils sont partis hier matin.

6 Slobodan MILANOVIC: Oui."

7 [Fin de citation]

8 Q. En fait, ce qui s'était passé, lorsque Karadzic a dit : "Ils sont

9 partis hier matin," cela signifiait vous entre autres, autrement dit, les

10 hommes de Durakovic, y compris vous-même que vous avez quitté l'assemblée.

11 Vous aviez quitté l'assemblée, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. M. Krajisnik vous a demandé de revenir ?

14 R. Oui.

15 Q. Pourquoi avez-vous quitté l'assemblée ?

16 R. D'abord, lorsque nous avons demandé à intégrer nos propositions à

17 l'ordre du jour, cela a été refusé. Nous avons demandé à pouvoir débattre

18 et ceci nous a été refusé également. Ensuite, nous avons quitté l'assemblée

19 car nous avons estimé que cela allait conduire à une confrontation d'ordre

20 ethnique.

21 Q. Monsieur Bjelobrk, je souhaitais être tout à fait clair quant à la

22 question que je souhaite vous poser. Il ne s'agit pas de quelque chose qui

23 est honteux ou peu honorable. Je ne porte pas de jugement sur le fait que

24 vous ayez quitté l'assemblée.

25 La question que je vous pose concerne les membres de l'assemblée du

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1 parlement qui quittent une séance de l'assemblée de temps en temps parce

2 qu'il y a certainement un nombre de points qui font l'objet de tensions

3 très fortes. Cela fait partie du jeu politique, n'est-ce pas ?

4 R. Non. Cela ne fait pas partie du jeu politique, Maître Stewart. La

5 discussion qui a apporté dans la partie cet après-midi, lorsque le

6 président de la Chambre a pris la parole, je souhaite apporter une

7 clarification ici. Il est tout à fait naturel de pouvoir expliquer la

8 proposition qui est faite. Dans ce cas précis, il était tout à fait

9 impossible pour nous de mettre cette proposition à l'ordre du jour. Il ne

10 s'agit même pas de savoir si on aurait voté pour ou si on aurait voté

11 contre.

12 Un peu plus tôt lorsque vous avez évoqué les tensions qui existaient au

13 sein même de la société, nous savions qu'une telle évolution conduirait à

14 une confrontation entre les partis politiques et les différentes

15 oligarchies. C'est, effectivement, ce qui s'est passé.

16 Q. Monsieur Bjelobrk, parlons de choses vraies. Je crois que c'est une

17 question de procédure, au sein d'un parlement, c'est la même chose.

18 Lorsqu'un député, par exemple, siège et ne fait rien, et ne vote pas, et

19 garde le silence et, s'il part, si vous voulez, du point de vue du vote, du

20 point de vue de la procédure, du point de vue de précision concernant cette

21 procédure ou de résolutions, il s'agit de la même chose, n'est-ce pas ?

22 C'est exactement la même chose.

23 R. Oui. Au plan technique, cela revient au même. Vous avez peut-être

24 raison, mais je pense que nous ne parlons pas ici de l'aspect technique de

25 cette question.

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1 Q. Techniquement parlant, cela est tout à fait juste ?

2 R. Non. Je crois qu'on ne peut pas dire que c'est tout à fait juste. Je

3 pense que vous voulez établir un parallèle avec ma thèse concernant le

4 départ des membres du SDS et la conduite de

5 M. Krajisnik. Dans ce cas-ci, cela ne revenait pas au même. Dans ce cas-là,

6 nous avions encore la possibilité de mettre ce point à l'ordre du jour et

7 d'avoir une solution démocratique si on prenait la parole. Si les membres

8 du SDS, ensuite après que l'ordre du jour ait été adopté, s'ils étaient

9 partis après et non pas avant, cela change les choses beaucoup. Si vous

10 essayez d'établir un parallèle entre un groupe de membres qui quittent

11 l'assemblée et cette situation-là, je crois qu'on ne peut pas vraiment

12 établir de parallèle. C'est différent.

13 Q. Ecoutez, ne vous souciez pas trop de mes comparaisons, Monsieur

14 Bjelobrk, et concentrez-vous simplement sur les questions et vos réponses,

15 s'il vous plaît.

16 Si quelqu'un quitte l'assemblée, que ce soit un membre ou un groupe de

17 personnes, il s'agit là d'un geste politique qui est plus fort que de

18 rester simplement assis à l'assemblée ?

19 R. Non. Dans ce cas précis, nous faisions les efforts pour essayer de

20 prendre la parole pour pouvoir faire valoir notre point de vue.

21 Q. Si vous restez assis, vous pouvez vous exprimez, n'est-ce pas ?

22 R. Non, parce que le point n'avait pas été mis à l'ordre du jour, et

23 conformément à notre règlement, la porte parole du parlement pouvait me

24 dire que je n'avais pas le droit de m'exprimer sur ce point.

25 Q. Je souhaite maintenant faire un raccourci et essayer d'en venir aux

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1 faits, car avec tout le respect que je vous dois, Monsieur Bjelobrk, je

2 vais essayer de suivre ici le conseil du président de la Chambre. Il y a un

3 certain nombre de points qui n'ont pas besoin d'être abordés ici.

4 Est-ce que votre position est la suivante : D'après votre déposition, vous

5 pouvez, à aucun moment, m'indiquer une situation au cours de laquelle le

6 règlement et les systèmes de votes et de procédures au sein de la Bosnie-

7 Herzégovine n'ont pas été appliqués conformément à la loi et à la

8 constitution, n'est-ce pas ?

9 R. Le règlement était respecté. Il est vrai, c'est quelque chose qui a

10 véritablement été appliqué.

11 Q. Poursuivons, Monsieur Bjelobrk.

12 On vous a demandé -- c'est un point qui a eu lieu précédemment, on vous a

13 posé des questions et on vous a demandé si M. Krajisnik exerçait une

14 certaine influence, ou s'il exerçait un certain pouvoir, et s'il pouvait

15 convaincre les membres du SDS qui souhaitaient partir de rester ? C'est le

16 président de la Chambre, M. le Juge Orie, qui vous a demandé si vous aviez

17 connaissance d'un fait particulier - à la page 30 du compte rendu d'hier -

18 s'il y avait un fait qui aurait pu démontrer que M. Krajisnik avait

19 encouragé les membres du SDS à partir ? Vous avez répondu en disant : "Je

20 ne suis pas au courant de cela car les réunions se tenaient au sein d'un

21 club ou parmi les groupes parlementaires. Je ne sais pas ce qui s'est

22 passé." Cela va au-delà du contexte ici.

23 Ceci est -- je crois qu'on peut dire que cela était vrai de façon générale,

24 n'est-ce pas ? Vous n'étiez pas présent, ou vous n'étiez pas présent lors

25 des discussions du club des députés ou des groupes parlementaires. Vous

Page 8353

1 n'étiez pas présent à ces débats du tout, n'est-ce pas ?

2 R. Je n'ai jamais assisté à aucune réunion du groupe parlementaire du SDS.

3 Q. Les débats, qui avaient lieu entre les dirigeants du SDS, et dont

4 quelle que soit la manière dont on définit des débats entre les membres du

5 SDS, étaient toujours à huis clos dans le sens où ces portes-là, les portes

6 de la réunion, elles étaient fermées, n'est-ce pas ?

7 R. Oui.

8 Q. Je souhaite vous poser une question sur ce que vous avez décrit. Vous

9 avez parlé de trois différentes étapes dans le processus de séparation du

10 gouvernement mené par le SDS. Je crois que c'est ainsi que vous avez décrit

11 ceci.

12 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, ceci se trouve à la

13 page 45 du compte rendu d'hier.

14 Q. M. Hannis vous a posé une question. C'est les paragraphes 26 et 27 de

15 votre déclaration. Je vais citer votre réponse. Vous avez décrit le SDS et

16 vous avez dit : "Qu'il s'était engagé dans un processus parallèle et dans

17 un processus de mise en place de structures parallèles." M. Hannis vous a

18 posé la question : "Quels éléments ou quelles preuves vous ont permis de

19 voir ou d'entendre, ou de prendre connaissance en 1991 que le SDS s'était

20 lancé dans ce processus. Si vous avez quelques exemples à nous donner,

21 faites-le, s'il vous plaît." Vous avez répondu en disant : "Je crois qu'il

22 y avait trois étapes dans le processus de séparation du gouvernement mené

23 par le SDS. Au cours de la première étape et au début de l'année 1991, les

24 assemblées où le SDS avait le contrôle ont été agrandies." Ceci a été

25 corrigé, car c'étaient les municipalités qui ont été agrandies, et non pas

Page 8354

1 les assemblées. C'est là où le SDS avait le pouvoir et les municipalités

2 ont été agrandies. Ensuite, vous avez dit qu'il y avait des représentants

3 locaux qui avaient reçu pour consigne de mettre en place la constitution de

4 la Yougoslavie et non pas d'appliquer la constitution de la Bosnie-

5 Herzégovine."

6 Vous avez apporté un éclaircissement là-dessus. Vous avez précisé que les

7 municipalités avaient été agrandies. Quelques pages plus loin, vous avez

8 dit que : "Ces municipalités n'avaient pas été agrandies au sens physique

9 du terme, mais toutes les fois qu'il s'agissait de trouver une solution à

10 un problème, il fallait appliquer la constitution de la Yougoslavie avant

11 d'appliquer la constitution de la Bosnie-Herzégovine."

12 Telle était la situation en 1991. C'est une citation du compte rendu

13 d'hier, à la page 47.

14 Sur ce point, ces consignes qui avaient donné à des représentants régionaux

15 aux fins d'appliquer la constitution de la Yougoslavie signifiaient qu'il y

16 avait un conflit à propos de la constitution de la Yougoslavie par rapport

17 à la constitution de la Bosnie-Herzégovine. C'était une consigne qui était

18 conforme à la loi et conforme à l'Etat dans lequel vous résidiez à ce

19 moment-là, n'est-ce pas ?

20 R. Vous avez tout à fait raison. Vous avez tout à fait raison, Monsieur.

21 Permettez-moi, je souhaite apporter un éclaircissement. La constitution de

22 Bosnie-Herzégovine a été assimilée à la constitution de la Yougoslavie.

23 Avant cette date et pendant de nombreuses années, la fusion de ces

24 constitutions n'a jamais fait l'objet de controverses. Ces deux

25 constitutions ont été fusionnées de façon très harmonieuse.

Page 8355

1 Deuxièmement, dans le domaine qui porte sur les forces de réserves et des

2 Unités de la Défense territoriale, les différentes autorités au sein des

3 organes de la république, il y avait des membres du gouvernement, il y

4 avait le SDS, le HDZ, le SDA. Ces différents partis évoquaient la question

5 de savoir quelle partie des textes de loi devait être adoptée, et le SDS a

6 favorisé le droit fédéral.

7 Mais je puis vous assurer que la question de l'harmonisation, de la fusion

8 de la constitution, était vraiment le moindre de leurs soucis. Ce qui

9 importait, avant tout, était d'unification des Serbes qui a eu un impact

10 très fort sur le fonctionnement du gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Dans

11 de tels cas, par exemple, au niveau des présidents des municipalités, dans

12 les municipalités où le SDS avait le pouvoir car ils n'y avaient qu'eux qui

13 avaient opté pour cette solution-là. Au lieu de passer par le gouvernement

14 de Bosnie-Herzégovine, la présidence de Bosnie-Herzégovine où les membres

15 du SDS étaient aussi représentés, il était tout à fait normal que les

16 solutions soient trouvées à un très haut niveau. Mais il est peu naturel et

17 peu légal que ceci soit opéré ou décidé à l'intérieur d'une structure du

18 gouvernement seulement. C'est ce que j'entendais dans le passage que vous

19 avez cité.

20 Q. Monsieur Bjelobrk, je souhaite brièvement éclaircir ce point, plutôt

21 que de vous poser une question. Je souhaite que la Chambre de première

22 instance comprenne également ma position.

23 Comme l'a proposé le Président de la Chambre, je ne vais pas explorer la

24 question du droit constitutionnel, surtout dans le cas de ce témoin. Il ne

25 s'agit véritablement pas d'un problème essentiel.

Page 8356

1 Monsieur Bjelobrk, vous êtes un homme d'expérience, mais je crois que nous

2 pouvons dire que vous n'êtes pas un avocat et un expert en matière de droit

3 constitutionnel. Je vais laisser ces questions de côté.

4 En revanche, je souhaite vous lire un extrait de la retranscription de la

5 pièce portant le numéro P398.

6 R. Puis-je faire un commentaire, s'il vous plaît ?

7 Q. Monsieur Bjelobrk, je me remets entre les mains du Président de la

8 Chambre.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bjelobrk, la question est de

10 savoir si les solutions ont été adoptées. Il s'agit de savoir comment les

11 solutions ont été trouvées pour essayer de résoudre le conflit ou les

12 différends qui opposaient la constitution de la Fédération, le fédéral, et

13 la constitution des Républiques. Je crois qu'il s'agit que vous ayez tort

14 ou raison, je crois qu'il ne s'agit pas d'un élément essentiel dans cette

15 affaire, bien que cela puisse être considéré comme un fait réel.

16 M. STEWART : [interprétation] P398, la retranscription, si vous voulez, 398.

17 Q. Je vous demande, Monsieur Bjelobrk, de bien vouloir regarder cette

18 pièce. M. Koljevic prend la parole à la première page, et quatre cases plus

19 bas, M. Koljevic dit : "Dites-moi quelque chose. La loi proposée par le

20 gouvernement aux fins d'abroger le droit fédéral a-t-il été adopté ?" Est-

21 ce que vous avez retrouvé cette case, Monsieur Bjelobrk ?

22 R. Oui.

23 Q. [Citation de transcription]

24 "Radovan KARADZIC : Oui, au niveau du gouvernement. Au niveau du

25 gouvernement, c'était ado --

Page 8357

1 Nikola KOLJEVIC : Il allait dire 'adopté' ou quelque chose comme cela.

2 Est-ce que l'assemblée l'a adopté aussi ?

3 Radovan KARADZIC : Non, non. L'assemblée est, en fait, le conseil des

4 Citoyens. Le conseil des Municipalités l'a rejeté un peu plut tôt. Quoi que

5 fasse le conseil des Citoyens maintenant, cela ne sera jamais validé.

6 Personne n'a le droit de faire cela. Personne ne le fera jamais. Cela n'a

7 pas été adopté et nos municipalités ne vont pas y obéir. Ils prennent leurs

8 instructions de Doko de façon régulière.

9 Nikola KOLJEVIC : Cela a-t-il été adopté par l'assemblée ?

10 Radovan KARADZIC : Non.

11 Nikola KOLJEVIC: D'accord. C'est l'élément le plus important.

12 Radovan KARADZIC: Non, cela n'a pas été adopté, et également les

13 municipalités n'agissent pas conformément à cela.

14 Nikola KOLJEVIC: Bien."

15 [Fin de citation]

16 Il y a deux choses que j'aimerais aborder avec vous, Monsieur Bjelobrk. Il

17 s'agit là d'un exemple, je crois que vous serez d'accord avec moi pour le

18 dire, qu'il s'agit d'un exemple d'un cas de quelque chose qui caractérisait

19 la situation politique en 1991, n'est-ce pas ? Il y avait des débats, des

20 désaccords ou de savoir si quelque chose était conforme à la constitution

21 ou non, ou si une des parties agissait conformément à cette constitution ou

22 non. Je crois qu'il s'agissait là d'un des traits saillants de la situation

23 de la vie politique à l'époque, n'est-ce pas ?

24 R. Oui. C'était, effectivement, un des traits saillants de l'époque.

25 Q. En l'espèce, conviendrez-vous avec moi que le point de vue de M.

Page 8358

1 Karadzic était le suivant, à savoir que la proposition, consistant à

2 suspendre la loi fédérale, n'avait pas été adoptée. C'est ce qu'il dit,

3 n'est-ce pas ?

4 R. Pouvez-vous répéter la question, s'il vous plaît ?

5 Q. Je vais être un peu plus clair. Dans cet échange, entre M. Koljevic et

6 M. Karadzic, ce qui ressort c'est que la suspension de la loi fédérale a

7 été approuvée par le gouvernement, mais n'est pas approuvée, ni avalisée

8 par l'assemblée de Bosnie-Herzégovine ? C'est ce qui ressort de cette

9 conversation, n'est-ce pas ?

10 R. Oui, c'est ce qu'il dise.

11 Q. Il est clair également que M. Koljevic et surtout M. Karadzic estiment

12 que cela était adopté, si cette mesure était adoptée, même si cela n'aurait

13 pas force de loi, c'est également ce qui ressort clairement de leurs propos,

14 n'est-ce pas ?

15 R. Je vais vous dire ce que je pense de cela, en ayant à l'esprit ce que

16 vous-même, et le président avez dit. Il y a des institutions --

17 Q. Je vous demande, si vous convenez avec moi, que c'est ce que disent ces

18 deux messieurs, dans la conversation ?

19 R. Si on regarde le compte rendu de ce qu'ils disent, c'est votre

20 interprétation.

21 Q. Non. Je ne vous demande pas s'ils ont raison ou pas, je vous demande

22 simplement de me confirmer que c'est ce qu'ils disent, parce que c'est

23 clair que c'est bien ce qu'ils disent.

24 R. C'est un document du Tribunal. Oui, c'est ce qui est dit dans ce

25 document. Tout à fait.

Page 8359

1 Q. Ce qu'on voit ici, c'est que vu leur point de vue selon lequel la

2 suspension de la loi fédérale n'a pas adopté, quand même si cela avait été

3 adopté, ce ne serait pas valable. Du fait de ce point de vue qui est le

4 leur, ils disent que de toute manière, leurs municipalités ne se plieraient

5 pas à une telle suspension de la loi fédérale, n'est-ce pas ? C'est ce

6 qu'ils disent ?

7 R. Vous me demandez mon opinion, ou est-ce que pour la troisième fois,

8 vous me demandez si c'est bien ce qui est écrit sur le papier que j'ai sous

9 les yeux ?

10 Q. Je vous le demande une troisième fois, oui. Mais c'est au sujet d'un

11 élément bien différent, Monsieur Bjelobrk.

12 R. Voilà ce que je pense de tout cela. A savoir s'il y a législation

13 conforme à la constitution, tout cela, c'est quelque chose qui relève des

14 spécialistes du droit, ce n'est pas quelque chose qu'il convient de laisser

15 aux politiques ou à l'homme de la rue.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bjelobrk, ce que vous demande

17 Me Stewart, c'est de savoir, si en lisant cette conversation entre M.

18 Koljevic et M. Karadzic, il vous demande si effectivement ce qui ressort de

19 cela, premièrement, est-ce qu'une loi a été adoptée aux fins de suspension

20 de la loi fédérale ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxièmement, ils disent que même si

23 cela avait été adopté, cela ne serait pas valable. Est-ce que c'est bien ce

24 que vous comprenez à la lecture de cette transcription ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est comme cela que je comprends cette

Page 8360

1 conversation.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien clair. Je vous redonne la

3 parole, Maître Stewart.

4 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Q. Monsieur Bjelobrk, vous conviendrez, n'est-ce pas, que si des

6 personnalités de premier plan - parce qu'effectivement, M. Karadzic et M.

7 Koljevic étaient des personnalités de premier plan - si des personnalités

8 de premier plan dans un parti politique estiment que les actions

9 entreprises par un autre groupe, un autre parti ou le gouvernement sont

10 contraires à la constitution, sont illégales, la conséquence logique c'est

11 de les voir donner pour instructions à leurs municipalités ou à leurs

12 collègues de ne pas obéir à cette mesure ? Est-ce que vous en convenez ?

13 R. Je ne suis pas d'accord. Je pense que, s'il y a illégalité, il faut que

14 cela soit déterminé par le président de l'assemblée ou le président de la

15 république, parce que ce sont eux qui en ont l'autorité. Je ne pense pas

16 que cela soit quelque chose qui puisse être fait par les dirigeants de

17 partis politiques. Ce n'est pas la manière dont on gère les affaires dans

18 un Etat. Ce n'est pas la manière dont on prend les décisions à ce sujet.

19 M. STEWART : [interprétation] Je crois que je suis allé suffisamment loin

20 sur ce point.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement.

22 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

23 Q. Dans votre déclaration, Monsieur Bjelobrk, je ne pense pas vous soyez

24 lésé de quelque manière que ce soit du fait que vous n'avez pas le document

25 sous les yeux. Mais dans ce document, dans cette déclaration, vous parlez

Page 8361

1 de l'initiative de Belgrade. Or, il me semble que c'est quelque chose qui

2 n'a pas été abordé lors de l'interrogatoire principal. Pourriez-vous nous

3 expliquer en quelques mots, Monsieur Bjelobrk, ce que vous entendez, ce que

4 vous comprenez par initiative de Belgrade ?

5 R. L'initiative de Belgrade, c'est une des tentatives qui a été faite pour

6 formuler l'idée d'une Grande Serbie.

7 Q. Comme on peut le déduire logiquement de son nom, cette initiative de

8 Belgrade, elle vient de l'initiative des dirigeants serbes de Belgrade sous

9 la houlette de M. Milosevic, n'est-ce pas ?

10 R. Je ne sais pas dans quel contexte cette initiative a été prise. Cela

11 aurait très bien pu venir de Visegrad ou de Sarajevo. Mais c'est ce que je

12 vous ai dit précédemment.

13 Q. D'après votre déclaration, vous nous dites : "Il y a eu des discussions

14 à ce sujet en septembre, octobre, 1991, et que le SDS a agi en tant que

15 médiateur entre le SDA et les autorités de Belgrade. Les personnes qui

16 étaient à l'origine de cette initiative étaient des gens qui venaient de

17 Belgrade."

18 Je voudrais vous demander, Monsieur Bjelobrk, de réfléchir à la question de

19 savoir, si effectivement, cela venait des dirigeants serbes de Belgrade. Je

20 voudrais que vous le confirmiez.

21 R. Oui, ce sont eux qui en sont les auteurs. Mais vous m'avez demandé ce

22 que je pensais de ce document, quelle qu'en soit l'origine.

23 Q. Monsieur Bjelobrk, vous nous avez dit que le SDS a joué un rôle

24 d'intermédiaire entre le SDA et les autorités de Belgrade. L'initiative de

25 Belgrade, c'était d'accepter ce signe du destin qui se dessinait et qui

Page 8362

1 faisait penser, qu'à un moment donné, la Slovénie ainsi que la Croatie

2 allaient quitter le giron de la Yougoslavie fédérale, n'est-ce pas ?

3 R. Oui. C'est une des positions qui était articulée dans ce texte.

4 Q. Il y a un autre point essentiel, un élément essentiel de l'initiative

5 de Belgrade, c'est que la Bosnie-Herzégovine resterait avec les trois

6 autres républiques, si on exclut la Slovénie et la Croatie, la Bosnie-

7 Herzégovine resterait au sein d'un Etat unique, de l'Etat de Yougoslavie ?

8 R. Oui, c'est exact. C'est également ce qui est dit dans ce document.

9 Q. Monsieur Bjelobrk, il s'agissait là, n'est-ce pas, des points forts,

10 des éléments-clés de l'initiative de Belgrade ?

11 R. J'en ajouterais peut-être un autre, bien que je reconnaisse ce que vous

12 venez de mentionner, ce sont effectivement des points-clés, mais il y a

13 d'autres points que je pourrais mettre en lumière, par exemple, la position

14 des Musulmans dans cette union, dans cette association. C'était un point-

15 clé, un élément-clé pour comprendre ce que pensaient les participants à

16 cette discussion.

17 Q. Monsieur Bjelobrk, pour bien vous comprendre, on avait la Slovénie et

18 la Croatie qui allait quitter la Yougoslavie, et la Bosnie-Herzégovine qui

19 allait rester au sein de la Yougoslavie, si cela c'est un des points

20 essentiels, et pour continuer dans le sens de la réponse que vous avez

21 commencée à me donner, pouvez-vous me donner les autres points-clés de

22 cette initiative, s'il y en a d'autres ? Vous pourriez d'ailleurs au fur et

23 à mesure nous les donner et leur donner un numéro.

24 R. Je n'ai pas le document sous les yeux, je vous parle de mémoire. Je

25 reconnais qu'il y a des éléments importants, ce sont les éléments que vous

Page 8363

1 venez de mentionner. Mais à mon avis, la position des Musulmans dans cette

2 association était également un point fort. Quant à tout le reste, je ne

3 pense pas que c'était très important si on regarde le document de ce point

4 de vue.

5 Q. Évoquons cet élément important que vous évoquez, à savoir, la position

6 des Musulmans dans cette association -- je reprends vos propos. Pouvez-vous

7 développer cet élément-clé de l'initiative de Belgrade, en quoi consistait-

8 il exactement ?

9 R. Ce document qui était une proposition - parce que vous savez que le

10 document n'a jamais été finalisé - il y avait dans cette proposition une

11 disposition au sein de laquelle les Musulmans se voyaient garantir un

12 certain nombre de droits dans cette association. Mais là, je peux vous

13 donner que mon opinion à ce sujet. C'était l'essence du malentendu au sujet

14 de la Bosnie-Herzégovine parce que ces nations constitutives ont été

15 traitées comme si elles n'en étaient pas vraiment les éléments

16 constituants.

17 Q. J'écoute votre réponse et je m'intéresse plus particulièrement à ce que

18 vous nous dites au sujet des Musulmans. Vous nous dites qu'il y avait une

19 garantie, on leur garantissait un certain nombre de droits aux Musulmans,

20 c'est cela ?

21 R. Oui.

22 Q. Mais qu'est-ce qui vous permet de définir cette initiative de Belgrade

23 comme ayant pour objectif la mise en place d'une Grande Serbie ?

24 R. Géographiquement parlant, on nous donne les territoires où les Serbes

25 ont la majorité ou les territoires dont ils souhaitent avoir le contrôle.

Page 8364

1 On ne parle pas de la Croatie, il n'y a pas de Croatie, il n'y a pas de

2 Slovénie. C'était l'idée de la Grande Serbie qui prévalait, et qui allait

3 jusqu'à la frontière Karlobag, Karlovac. Il ne s'agissait de l'idée de la

4 Yougoslavie.

5 Q. Monsieur Bjelobrk, j'assure les Juges de la Chambre, que je ne souhaite

6 nullement me lancer dans un grand débat historique et politique. Mais

7 n'est-il pas exact pour nous donner une idée générale de la situation que :

8 Belgrade, les Serbes, les dirigeants serbes de Belgrade ne souhaitaient

9 nullement chasser les Slovènes et les Croates de la Yougoslavie, ce n'était

10 pas quelque chose qui était dans leur intérêt, n'est-ce pas ?

11 R. Je n'ai jamais dit cela, bien que je ne sois pas prêt à vous dire que

12 je suis d'accord avec vous.

13 Q. C'est la Slovénie et la Croatie qui ont pris elles-mêmes l'initiative

14 de quitter la Yougoslavie, n'est-ce pas ?

15 R. Si vous pensez que l'on peut définir cela de manière bureaucratique,

16 sous forme d'un document, vous avez peut-être raison, mais il y a

17 énormément de choses qui se sont passées pendant ces dix années qui ont

18 entraîné cet événement, ce résultat.

19 Q. Est-ce que d'après vous, cette initiative de Belgrade avait une

20 connotation un petit peu inquiétante, Monsieur Bjelobrk ?

21 R. D'inquiétant ou de mauvais augure ? Si je regarde l'acte^ final

22 d'Helsinki au sujet du caractère intangible des frontières en Europe,

23 effectivement, cette initiative était de très mauvais augure parce qu'elle

24 avait entraîné une modification des frontières internes et externes par

25 rapport à la situation antérieure.

Page 8365

1 Q. De quelle modification parlez-vous ?

2 R. Disons que les autorités de Belgrade ont joué un rôle, ont contribué à

3 modifier les frontières extérieures de la Yougoslavie.

4 Q. Vous nous parlez là du départ de la Slovénie et de la Croatie de la

5 Yougoslavie, n'est-ce pas, de la fédération ?

6 R. Oui, j'en suis convaincu. Je suis catégorique. J'ai des arguments

7 permettant de prouver que ce sont les autorités de Belgrade qui en sont

8 responsables. Permettez-moi de finir, je voudrais dire qu'au bout du

9 compte, l'idée, c'était aussi de modifier les frontières intérieures.

10 Q. Essayons d'être aussi clair et simple que possible. Si j'ai bien

11 compris votre réponse, vous venez de nous dire qu'un des éléments

12 inquiétants des initiatives de Belgrade, c'est que cette initiative a

13 entraîné la modification des frontières extérieures de la Yougoslavie du

14 fait de l'exclusion, de la perte de la Slovénie et de la Croatie. Est-ce

15 que j'ai ainsi résumé fidèlement vos propos ?

16 R. Je vais cesser d'utiliser les termes tels "qu'inquiétant," ou autre, ce

17 que vous avez fait le premier jour. Cette initiative de Belgrade, c'est un

18 des éléments qui ont contribué au démantèlement de la Yougoslavie qui s'est

19 produit ultérieurement.

20 Q. Partant du postulat, qu'à un moment donné la Croatie et la Slovénie

21 allaient quitter la Yougoslavie, si on prend cette hypothèse au départ, on

22 peut dire que l'initiative de Belgrade a préservé ce qui restait de la

23 Yougoslavie, du mieux qu'on pouvait, n'est-ce pas ? Enfin normalement, cela

24 aurait dû avoir ce résultat, cette conséquence.

25 R. Ma position, c'était que c'était la création d'une Grande Serbie.

Page 8366

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, nous sommes en train de

2 procéder à une analyse en profondeur de la situation du point de vue

3 politique plutôt qu'autre chose. Quand on demande à une femme pourquoi elle

4 est partie de chez elle, pourquoi elle a quitté son foyer, elle répondra

5 toujours que c'est à cause de son mari. Si on pose la question au mari, il

6 répondra que lui, son seul souci, c'était de conserver la famille intacte.

7 Mais comme vous le savez, si on regarde ce qui se passe dans la vie

8 habituelle, c'est très difficile de savoir où se trouve la vérité ou qui a

9 raison, qui a tort, qui est en tort. Tout dépend de l'analyse de chacun et

10 de l'opinion qu'on a sur ce qui s'est passé. Or, c'est exactement ce que

11 l'on est train de faire ici. Les positions sont très claires, M. Bjelobrk

12 nous dit que certaines initiatives ont eu un impact sur ce qui s'est passé

13 plus tard. Je pense que ce sera aux historiens de finalement donner la

14 réponse.

15 M. STEWART : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. En

16 fait, j'allais poser une question pour en terminer de ce sujet, et c'est la

17 suivante, Monsieur Bjelobrk.

18 Q. Au paragraphe 28 de votre déclaration, au sujet de toute cette

19 question, vous nous dites : "Le concept du maintien de la Yougoslavie a été

20 utilisé par les dirigeants serbes comme une espèce d'écran pour cacher leur

21 véritable politique," par là, vous entendez la politique de la Grande

22 Serbie.

23 Vous parlez "d'un écran", Monsieur Bjelobrk, cela sous-entend quelque chose

24 d'inquiétant, de secret avec des intentions peu louables ?

25 R. Une fois encore, je le répète, je vais essayer d'éviter ce genre de

Page 8367

1 qualifications en vous répondant. Ce qui se trouve maintenant à l'est de la

2 Bosnie-Herzégovine, cela s'appelle la Serbie et le Monténégro. Avant, cela

3 s'appelait Yougoslavie. C'est ce qui résulte de la Yougoslavie qui existait

4 dans les années 1980. Cette évolution de la situation nous montre que ce

5 n'était effectivement qu'un écran, un écran derrière lequel se cachait un

6 objectif, celui de la Grande Serbie.

7 M. STEWART : [interprétation] Je ne veux pas continuer à poser de questions

8 au témoin sur ce sujet.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au sujet du paragraphe 28, on peut y

10 lire, document en date du 12 août, on voit : "D'autres discussions au sujet

11 de la proposition ont eu lieu en septembre, octobre 1991." J'ai un peu de

12 mal à m'y retrouver par rapport à ce que vous nous avez dit, vous.

13 M. STEWART : [interprétation] Mais vous venez de lire le paragraphe. Peut-

14 être que je suis un petit fatigué, mais je ne comprends pas où vous voulez

15 en venir.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "En août 1991 a eu lieu la première

17 réunion au sujet de l'initiative de Belgrade. J'ai montré ce document. Ce

18 document est en date du 12 août." Ensuite, un peu plus loin, on lit quelque

19 chose aussi d'août 1991, mais au début, on nous parle du 12 août 1992. J'ai

20 un peu de mal à suivre la chronologie.

21 M. STEWART : [interprétation] Oh, je comprends. Je comprends où vous voulez

22 en venir. Mais je n'avais pas remarqué, excusez-moi. Le témoin pourra sans

23 doute nous confirmer qu'il s'agissait d'une erreur.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis, vous êtes debout.

25 M. HANNIS : [interprétation] Effectivement, Maître Stewart a raison. Il

Page 8368

1 faut demander au témoin de le confirmer. Je pense que c'est une faute de

2 frappe.

3 M. STEWART : [interprétation] Oui, parfois les choses sont tellement

4 évidentes qu'on ne les voit même pas. Effectivement, j'ai lu

5 automatiquement 1991, et pas 1992, vu la logique.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 M. STEWART : [interprétation]

8 Q. Monsieur Bjelobrk, je vais vous donner une lecture, lentement comme on

9 me le demande souvent lorsque je lis d'un extrait de votre déclaration, je

10 cite : "En août 1991 a eu lieu la première réunion au sujet de l'initiative

11 de Belgrade." On parle de 1991. Tout le monde en convient. Je continue la

12 citation : "On m'a montré un document en date du 12 août 1991 dans lequel

13 est exposée la position de base des Serbes, et notamment, le fait que le

14 maintien ou la préservation de la Yougoslavie est une condition préalable à

15 toute solution pacifique et démocratique de la crise yougoslave."

16 Il semble, pour nous tous, que la date devrait être celle du 12 août 1991,

17 et pas celle du 12 août 1992. Est-ce que vous en convenez avec moi ?

18 R. Oui.

19 Q. Merci beaucoup.

20 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, de nous avoir

21 signalé cette petite discordance dans la déclaration du témoin.

22 Q. Monsieur Bjelobrk, quand vous avez déposé hier, page 52 du compte rendu

23 d'audience, je le signale, M. Hannis vous a demandé, je cite : "Aux

24 paragraphes 26 et 27 de votre déclaration, vous parlez d'un processus

25 parallèle. Vous parlez également de régionalisation, et vous en avez

Page 8369

1 d'ailleurs déjà parlé dans une de vos réponses parce que vous avez parlé de

2 la création des régions autonomes serbes. Vous souvenez-vous du moment où

3 ceci est devenu de notoriété publique ou l'homme de la rue en a eu

4 connaissance, ou du moment où il y a aurait eu une annonce faite

5 publiquement dans les médias au sujet de ces régions autonomes serbes ?"

6 Vous avez répondu, je cite : "La population n'a été informée de cette

7 politique de régionalisation, comme on l'appelait au sein du SDS, qu'au

8 moment où ces organisations sont apparues. D'autre part, ceci a souvent été

9 invoqué dans la presse, dans les médias indépendants. Il n'y a pas eu

10 d'annonce officielle, mais on peut interpréter différentes discussions

11 entre différents hommes politiques ou dans un compte rendu d'audience

12 préalable."

13 L'INTERPRÈTE : Les interprètes s'excusent, mais Me Stewart lit d'une

14 façon extrêmement particulière, ce qui est très difficile de le suivre.

15 L'interprète est dans l'incapacité totale de comprendre ce qu'a dit Me

16 Stewart.

17 M. STEWART : [interprétation]

18 Q. Monsieur Bjelobrk, quelle que soit la position, ce processus, cette

19 régionalisation, la création de régions autonomes serbes, ce n'est pas un

20 processus secret que l'on pouvait cacher à la population ?

21 R. Bien entendu, cela ne pouvait pas être caché, mais c'était illégal de

22 toute façon.

23 M. STEWART : [interprétation] Je ne sais pas à quelle heure nous avons

24 commencé, le moment est peut-être bienvenu de faire la pause.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous avons commencé tard à cause

Page 8370

1 des difficultés techniques. Effectivement, l'heure est venue de faire la

2 pause jusqu'à 4 heures 10.

3 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

4 --- L'audience est reprise à 16 heures 18.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, veuillez poursuivre.

6 M. STEWART : [interprétation] J'ai déjà glissé quelques mots à M. Hannis de

7 la chose suivante, et je me demandais si la Chambre de première instance me

8 permettrait une petite pause à 16 heures 45. Il s'agit de certaines

9 questions pratiques qui ne peuvent être résolues demain, car c'est un jour

10 férié, et je ne peux pas le faire après 17 heures aujourd'hui. Je n'ai pas

11 pu résoudre ces petits problèmes au cours de la pause, car j'ai dû passer

12 la pause avec M. Krajisnik.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certainement. Je vous accorde le temps,

14 peut-être cinq minutes. Nous suivrons l'horloge.

15 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

17 M. STEWART : [interprétation]

18 Q. Monsieur Bjelobrk, vous avez dit lors de votre déposition, mais il y a

19 également quelques mots qui se trouvent à ce propos dans votre déclaration

20 même, alors que maintenant, je souhaiterais vous citer un extrait du compte

21 rendu d'audience de la journée d'hier. En fait, ce que vous avez dit, c'est

22 la chose suivante : vous avez parlé d'une différence qui existe entre le

23 personnage public de M. Krajisnik et la personne qu'il était lorsqu'il se

24 trouvait en privé, lorsqu'il s'entretenait en privé avec d'autres

25 personnes. C'est ce que vous avez dit dans le cadre de votre témoignage

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1 d'hier.

2 R. Oui.

3 Q. Monsieur Bjelobrk, en tant que politicien d'expérience, homme politique

4 d'expérience, n'est-il pas exact de dire que c'est tout à fait normal que

5 l'on présente certaines différences entre une façon publique de se

6 présenter et une façon privée. C'est-à-dire que lorsqu'un homme politique

7 s'entretient en privé avec certaines personnes, c'est tout à fait différent

8 que lorsque ce même homme politique parle dans les médias ou parle de façon

9 publique ?

10 R. Ce n'est peut-être pas un bon exemple de vous parler de moi-même, mais

11 dans la vie privée ainsi que dans la vie publique, je suis exactement la

12 même personne. Je connais un bon nombre d'hommes politiques qui font la

13 même chose.

14 Q. Vous en avez-vous vu beaucoup, n'est-ce pas, Monsieur Bjelobrk, des

15 hommes politiques qui se comportent de la même façon en public qu'ils le

16 font dans la vie privée?

17 R. Oui. J'ai eu, par exemple, la chance de rencontrer M. Pertini, qui est

18 un excellent membre politique italien, et j'ai rencontré un très grand

19 nombre d'hommes politiques européens. Je n'ai jamais pu voir ou déceler une

20 quelconque différence entre la façon qu'ils se comportaient publiquement et

21 en privé.

22 Q. Monsieur Bjelobrk, vous avez peut-être rencontré des hommes politiques

23 qui se comportaient de la même façon dans la vie publique et dans la vie

24 privée et qui --

25 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi exactement ce que Me

Page 8372

1 Stewart voulait dire.

2 M. STEWART : [interprétation]

3 R. Je ne sais pas si j'ai bien compris votre question.

4 Q. Ce n'est pas grave, Monsieur Bjelobrk. Je vais retirer ma question.

5 S'agissant de M. Krajisnik, est-ce que vous aviez des commentaires ? Est-ce

6 que vous n'avez pas apprécié la façon dont M. Krajisnik s'est comporté avec

7 vous, avec d'autres personnes pour ce qui est de sa personne privée ou en

8 privé ?

9 R. Je ne me plains de rien. Je vais employer le terme que le

10 Président de cette Chambre a dit, il a parlé de jeux politiques. Mais les

11 personnes qui ont pu travailler de très près avec M. Krajisnik, ils ont pu

12 comprendre quelles étaient les dimensions, quelle était la portée de

13 différentes décisions qu'il avait prises, et j'ai essayé d'analyser son

14 interview qu'il avait accordé en janvier 1992. J'ai essayé de voir de

15 quelle façon il a parlé dans la vie publique de cette façon-là, alors que

16 d'autres personnes que j'ai connues, d'autres hommes politiques ont pu

17 déceler cela même avant janvier 1992. Les médias n'ont pas,

18 malheureusement, pu voir de quoi il en était avant cette interview de

19 janvier 1992.

20 Q. Vous vous êtes rencontrés avec M. Krajisnik. Il y a eu une

21 réunion. Vous en parlez au paragraphe 32 de votre déclaration, et si on dit

22 qu'au mois de mars 1992 vous l'avez rencontré, une conversation a eu lieu

23 lors de laquelle M. Krajisnik et M. Lazovic étaient présents, la

24 conversation se déroulait entre vous trois. Est-ce que vous vous souvenez

25 de cela ?

Page 8373

1 R. Oui.

2 Q. Y avait-il d'autres personnes présentes, outre vous-même, M.

3 Krajisnik et M. Lazovic ?

4 R. Nous n'étions que nous trois présents lors de cet entretien.

5 Q. Vous dites dans votre déclaration, au paragraphe 32,

6 que : "M. Krajisnik a fait référence aux intellectuels serbes qui

7 prétendaient qu'ils ne pouvaient plus vivre avec d'autres nationalités dans

8 le même pays".

9 M. Krajisnik n'avait-il pas, en fait, été d'accord avec les

10 intellectuels serbes ? Il était d'accord avec eux, avec ce groupe

11 d'intellectuels serbes dont il a fait référence ici ?

12 R. Je n'ai pas compris cela pour dire que M. Krajisnik n'était pas

13 d'accord avec les intellectuels serbes. Contrairement à cela, l'une de ses

14 questions était à savoir pourquoi nous ne n'assisterions pas également à

15 cette réunion d'intellectuels serbes qui avait lieu à l'hôtel Holiday Inn.

16 Q. Mais ce n'était pas le point de vue de M. Krajisnik. Ce n'était

17 pas un point de vue qu'il exprimait concernant ces trois nationalités. Il

18 n'a jamais dit clairement que ces trois nationalités, les Serbes les

19 Croates et les Musulmans ne pouvaient pas vivre ensemble dans un même pays,

20 n'est-ce pas ?

21 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, pourrait-on situer

22 ceci, pourrait-on avoir une date ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Certainement. C'est en 1992, au

24 mois de mars 1992.

25 M. STEWART : [interprétation] Ce n'était pas le point de vue de M.

Page 8374

1 Krajisnik ?

2 R. J'ai dit qu'à ce moment là, il avait fait référence à ce qu'il a

3 expliqué pour être le point de vue des intellectuels serbes.

4 Q. Mais cela ne répond pas à ma question, Monsieur Bjelobrk. Je vais

5 essayer de la reformuler une troisième fois. Ce n'était pas le point de vue

6 de M. Krajisnik que les trois nationalités ne pouvaient pas vivre ensemble

7 dans un même pays ?

8 R. Cela ne faisait pas l'objet de cette réunion. C'était à savoir quelle

9 était notre position face aux intellectuels serbes et leurs positions, et

10 deuxièmement, pourquoi n'avons-nous pas accordé notre appui au SDS.

11 Q. Essayez d'être un peu plus précis, Monsieur Bjelobrk. Lors de cette

12 réunion, Monsieur Bjelobrk, M. Krajisnik n'a pas exprimé les points de vue

13 suivants, à savoir que les trois nationalités ne pouvaient pas vivre

14 ensemble dans un même pays.

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Vous avez également fait allusion à une autre réunion, à une réunion

17 tout à fait différente. Vous avez parlé d'un sujet tout à fait autre, tel

18 que vous nous l'avez décrit. Vous nous avez dit que vous avez pu aller vous

19 entretenir avec M. Krajisnik, concernant un problème financier. Vous avez

20 dit que vous étiez le président d'un syndicat Sarajevo, qu'il y avait de

21 l'argent que l'on devait transférer de Belgrade à Sarajevo. Je crois qu'il

22 s'agissait d'une somme de 50 millions de dollars; est-ce exact ?

23 R. Oui, c'est exact.

24 Q. Concernant cette question, que s'attendait-on de M. Krajisnik ?

25 R. Nous nous attendions du président de l'Etat, ainsi que du président de

Page 8375

1 l'assemblée, de nous permettre, d'entrer en contact avec les autorités de

2 Belgrade qui étaient compétentes et qui avaient la responsabilité de cette

3 entreprise qui avait cette dette de 50 millions de dollars. Je présume que

4 c'était tout à fait clair. Nous étions intéressés que cette dette soit

5 réglée car cela touchait directement les salaires des employés.

6 Q. Est-ce qu'effectivement, vous avez obtenu l'aide que vous cherchiez ?

7 R. Du président de l'assemblée nous n'avons pas reçu un appui. Nous

8 n'avons pas reçu son aide. Mais s'agissant du gouvernement, d'une partie du

9 gouvernement, oui.

10 Q. Spécifiquement ou précisément, qu'est-ce que vous demandiez à M.

11 Krajisnik de faire ? Qu'est-ce que vous n'avez pas obtenu ?

12 R. Nous avions demandé qu'il fasse en sorte que nous puissions obtenir une

13 réunion avec les personnes compétentes à Belgrade et qu'il assure un

14 transport vers Belgrade.

15 Q. Est-ce que vous avez demandé à M. Krajisnik de s'occuper de cela ?

16 R. Non. Nous n'avons pas demandé à M. Krajisnik d'organiser tout cela.

17 Mais nous lui avons demandé d'exercer son influence afin qu'il puisse faire

18 en sorte qu'une interview nous soit accordée par ces personnes qui avaient

19 la compétence de nous aider.

20 Q. Est-ce que vous nous dites qu'il vous a déçu ? Il n'a pas fait ce que

21 vous lui avez demandé de faire ?

22 R. Non.

23 Q. En fait la question a été résolue de façon satisfaisante, n'est-ce pas

24 ?

25 R. Oui. Cette même soirée, le gouvernement a fait une intervention et

Page 8376

1 l'argent a été transféré à cette entreprise. Si vous voulez avoir tous les

2 détails, à 2 heures de l'après-midi, un avion s'est rendu à Belgrade,

3 ensuite une réunion a eu lieu, et le soir même l'argent avait été transféré

4 et se trouvait dans les comptes de l'entreprise.

5 Q. Est-ce que, M. Krajisnik ne s'est pas comporté d'une façon propice

6 pendant cette réunion ? Est-ce que vous avez des commentaires négatifs à

7 faire concernant son comportement ?

8 R. J'ai donné, dans ma déclaration, mon point de vue concernant la réunion

9 que nous avions eue chez lui.

10 Q. Laissons de côté votre déclaration, je vous demande seulement de

11 répondre à ma question. Est-ce que M. Krajisnik ne s'est pas comporté d'une

12 bonne façon pendant cette réunion ?

13 R. Oui. J'ai dit qu'il avait soulevé la question suivante. Il a demandé

14 qui n'aimait pas Belgrade, alors que nous n'étions pas venu parler de cela.

15 Q. De quelle façon cette question a été posée ? Comment se fait-il qu'il

16 ait posé cette question, qui n'aimait pas Belgrade, Monsieur Bjelobrk ?

17 Qu'est-ce qui a mené à ce commentaire ? Pourquoi a-t-il fait ce

18 commentaire ?

19 R. C'est à M. Krajisnik que vous devriez demander cette question. Je vous

20 dis seulement que la seule provocation que nous avions, c'est-à-dire que

21 nous voulions que cette dette envers une entreprise vers une autre soit

22 faite, et nous insistions pour que les autorités gouvernementales nous

23 aident à résoudre cette question. Mais sinon, il n'y a avait aucune

24 provocation, à savoir, nous ne voulions pas ouvrir un débat concernant ce

25 que les uns aiment, ce que les autres n'aiment pas.

Page 8377

1 Q. Monsieur Bjelobrk, je vous pose la question puisque c'est vous qui

2 étiez présent. Vous vous souvenez de la réunion. C'est la raison pour

3 laquelle je vous pose la question. Est-ce que vous êtes en train de me dire

4 que vous ne vous souvenez pas de ce qui a mené à cette question ? Qu'est-ce

5 qui a fait en sorte qu'il pose cette question, qui aime Belgrade, ou qui ne

6 l'aime pas ?

7 R. Je me souviens très bien que cette question a été évoquée par M.

8 Krajisnik, et c'est ce que j'ai déjà dit.

9 Q. Monsieur Bjelobrk, vous vous souvenez, qu'est-ce qui a fait en sorte,

10 qu'est-ce qui a mené à cette question ?

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a déjà répondu à trois

12 reprises. Il a dit, nous avons soulevé la question de la dette. M.

13 Krajisnik a dit : Est-ce que vous êtes contre Belgrade ? C'est ce que j'ai

14 compris du témoignage du témoin. Mais, Monsieur Bjelobrk, si je m'abuse, je

15 vous prierais de me le dire ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez bien compris, Monsieur le

17 Président.

18 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, si je le puis, le

19 témoin dit toujours que le président a bien compris le témoignage. Tous les

20 témoins disent cela.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, vous avez déjà posé

22 cette question à plusieurs reprises. Vous avez posé déjà la même question

23 hier. De quelle façon, est-ce que cette question est venue sur le tapis et

24 le témoin a répondu, déjà à plusieurs reprises, que c'est une question qui

25 a été évoquée par M. Krajisnik. Quand ils ont évoqué la question de cette

Page 8378

1 dette, c'est à ce moment-là, qu'il a répondu de cette façon-là.

2 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Stewart.

3 M. STEWART : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Président,

4 je crois que le témoin n'a pas répondu à cette question.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, veuillez poursuivre.

6 M. STEWART : [interprétation] Nous pouvons lire au compte rendu d'audience,

7 Monsieur le Président, et nous saurons très bien, à ce moment-là, ce que le

8 témoin a dit et ce que le témoin n'a pas dit.

9 Q. Monsieur Bjelobrk, vous avez fait allusion au conseil national d'Equité

10 et vous avez dit que l'idée de créer cette instance, c'était afin de parler

11 des questions d'égalité ethnique dans un cercle très restreint de personnes.

12 Monsieur Bjelobrk, je vous demande, est-ce que vous êtes en train de dire

13 que, selon vous, quelque chose d'inadéquat avait été fait ? Est-ce que l'on

14 a manipulé, manigancé quelque chose lorsque l'on a créé cette instance ?

15 R. J'ai cru avoir bien expliqué. Il y avait une présidence et, dans son

16 sein, elle était composée de deux participants de chaque peuple, de chaque

17 nationalité, et deux participants qui appartenaient aux autres. Ils

18 devaient résoudre toutes les questions qui avaient trait à l'égalité

19 nationale. Une constellation très semblable à celle-là existait au sein de

20 l'assemblée-même. Il y avait des instances qui avaient la compétence de

21 rendre des décisions légitimes concernant l'égalité nationale.

22 Le conseil a été établi pour pouvoir donner son rôle de -- pour conseiller,

23 pour pouvoir donner conseil aux instances qui étaient impliquées dans un

24 processus décisionnel. Je suis d'accord avec ceux qui disent que ce n'était

25 pas une instance appropriée, ou la façon appropriée de résoudre ces

Page 8379

1 problèmes brûlants.

2 Q. Est-ce que vous êtes en train de nous dire que, selon vous, c'était un

3 cercle qui était trop restreint ?

4 R. Non, ce n'est pas ce que je veux dire, mais la question de l'égalité

5 nationale avait été retirée des organes qui étaient créés pour prendre les

6 décisions là-dessus. C'est-à-dire qu'en pratique très souvent, lorsque le

7 problème n'a pas été résolu, soit par le président ou par l'assemblée,

8 c'est à ce moment-là que ces questions qui avaient trait à l'égalité

9 ethnique et qui étaient restées non résolues seraient, par la suite,

10 envoyées au conseil d'égalité ethnique.

11 Q. J'essaie simplement de bien vous comprendre, Monsieur Bjelobrk, est-ce

12 que vous êtes en train de nous dire que le conseil d'égalité nationale

13 avait été créé pour prendre des décisions, mais qu'il n'a pas été critique

14 envers le fonctionnement de cette entité ?

15 R. Non, je voulais simplement dire que la présidence et l'assemblée

16 s'attendaient d'avoir des résultats de cette instance.

17 Q. Monsieur Bjelobrk, l'idée derrière l'existence de cette instance

18 n'était-elle pas justement d'essayer de résoudre ces problèmes au sein d'un

19 tout petit groupe, un groupe restreint plutôt que de présenter ces

20 problèmes à l'assemblée, sans avoir préalablement débattu tout de ce qui se

21 passe ?

22 R. Vous avez déjà interprété l'idée derrière cet organe. Malheureusement,

23 cet organe est devenu un obstacle pour résoudre ces problèmes.

24 Q. Car il y avait des désaccords au sein de l'organe même, est-ce que

25 c'est exact ?

Page 8380

1 R. Oui.

2 Q. Vous avez fait référence à un article dans un quotidien appelé

3 Oslobodjenje et c'est une allusion que vous apportez au paragraphe 55 de

4 votre déclaration, et au compte rendu d'audience. Vous en avez parlé assez

5 brièvement, mais dans le compte rendu d'audience, le témoin se renvoie au

6 paragraphe 55 de sa déclaration. Ce n'est pas un élément de preuve, ce

7 n'est pas une preuve orale qu'il a fournie à ce moment-là.

8 M. STEWART : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, de

9 trouver ce passage. J'essaie de trouver le passage, Monsieur le Président -

10 -

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, pour vous aider,

12 l'article d'Oslobodjenje a été versé au dossier et à part d'un résumé assez

13 bref de ce que dit l'article, la Chambre préfère examiner l'interview-même,

14 et si on peut trouver les propos du témoin dans l'interview, c'est très

15 bien; sinon, la Chambre se fiera sur sa propre lecture.

16 M. STEWART : [interprétation]

17 Q. Vous avez fait un certain nombre de commentaires dans votre

18 déclaration, Monsieur Bjelobrk, concernant les quelques questions qui

19 figurent dans l'article.

20 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il serait tout à fait

21 approprié, je crois que l'on montre au témoin la version en B/C/S.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certainement.

23 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que l'heure

24 approche. L'heure à laquelle je voulais prendre quelques minutes ou cinq

25 minutes.

Page 8381

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je vous donne cinq minutes.

2 Nous allons faire une petite pause de cinq minutes, et nous reprendrons nos

3 travaux à 16 heures 50.

4 --- La pause est prise à 16 heures 43

5 --- La pause est terminée à 16 heures 51.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre. Vous avez réussi à

7 passer vos coups de fil.

8 M. STEWART : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. J'ai

9 réussi à tout régler. Je n'aurais pas pu le faire sans cette pause, donc je

10 l'apprécie beaucoup. Merci.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

12 M. STEWART : [interprétation]

13 Q. Monsieur Bjelobrk, j'étais sur le point de vous poser une question sur

14 cet article. Je veux vous poser une question sur cet article : "Nous sommes

15 des Balkans, après tout," c'est la pièce P404. Vous aurez besoin d'utiliser

16 la version en B/C/S.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose, Monsieur Stewart, qu'une

18 partie n'a pas été traduite, ce qui semble indiquer qu'il s'agit d'une

19 interview de M. Krajisnik, car cela n'apparaît pas dans la traduction. Il

20 n'y a pas de désaccord entre les parties sur le fait qu'il s'agisse d'une

21 interview de M. Krajisnik ?

22 M. STEWART : [interprétation] Le fait que ce soit de

23 M. Krajisnik n'est pas contesté. Mais cela se fonde sur une interview avec

24 M. Krajisnik. C'est sur l'original. Oui, on voit même une image de lui,

25 donc cela ne fait pas l'ombre d'un doute.

Page 8382

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxième point, si vous regardez la page

2 5 du texte anglais, la question est posée : "Et pourquoi les Serbes ne

3 souhaitent-ils vivre dans une Bosnie-Herzégovine indépendante ?" Si vous

4 regardez le texte original, il s'agit plutôt d'une question que M.

5 Krajisnik se pose à lui-même, qu'une question qui lui a été posée par un

6 journaliste. Dans l'original, on peut voir tout en haut, quasiment en haut

7 de la quatrième colonne.

8 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Si tout le monde est d'accord

10 là-dessus, nous n'avons pas besoin de faire de remettre une version

11 expurgée.

12 Veuillez poursuivre, je vous prie.

13 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'espère que l'on

14 ne posera pas de problème. Je crois que l'exemplaire que M. Krajisnik a

15 devant lui n'est pas très lisible, mais il y arrive à peu près. Il va nous

16 dire s'il n'arrive pas à tout lire. J'ai moi-même également un petit

17 problème. Je suis sur le mauvais canal, mais j'ai mis les mauvais écouteurs.

18 Q. Monsieur Bjelobrk, dans votre déclaration vous faites état d'un certain

19 nombre de points, points portant sur cet article ou cette interview. Vous

20 dites que votre réaction était négative, et vous donnez les raisons pour

21 lesquelles votre réaction était négative. En premier lieu, je dirais que M.

22 Krajisnik déclare qu'il est impossible pour la Bosnie-Herzégovine de rester

23 unitaire. C'est le terme en anglais, alors que la Yougoslavie est en plein

24 démantèlement. Vous dites qu'il pose un ultimatum par rapport au destin de

25 la Bosnie-Herzégovine et qu'il se fonde sur ses propres idées politiques.

Page 8383

1 Il est vrai que ce que M. Krajisnik dans la traduction : Il est impossible

2 -- ou on rapporte qu'il est dit qu'il était impossible pour la

3 Bosnie-Herzégovine de rester unitaire si la Yougoslavie se désintègre.

4 Monsieur Bjelobrk, je crois que c'était un point de vue partagé par un

5 certain nombre de personnes à l'époque, n'est-ce pas ?

6 R. D'après moi, c'était inhabituel, bien qu'il y ait eu d'autres

7 déclarations publiques, de ce type, mais elles étaient peu communes et ne

8 correspondaient pas au point de vue communément présenté.

9 Q. Monsieur Bjelobrk, vous n'avez pas de raison pour croire qu'il ne

10 s'agissait pas d'un point de vue tout à fait honnête présenté par M.

11 Krajisnik ?

12 R. Non, je n'ai aucune raison de croire cela.

13 Q. Lorsque vous dites qu'il pose un ultimatum, où trouvez-vous qu'il

14 s'agit d'un ultimatum ?

15 R. En regard du numéro 55.6, je décris et je fournis une explication. Si

16 nous avons une guerre ou un changement dramatique, cela correspond à un

17 ultimatum.

18 Q. Je vous remercie de m'avoir fourni cette explication. Oui, voyez-vous,

19 je regardais un autre passage qui n'était pas le 55.6. Vous parlez d'un

20 passage qui se trouve en haut de la page 3 de la version anglaise,

21 quasiment en haut de la page, le terme qui dit : "Maintenant, il nous reste

22 deux alternatives, soit la guerre, soit" -- nous ne trouvons pas le terme

23 "dramatique" ici, comme vous venez de le dire. Ou : "Une transformation. Ce

24 qui signifie, ou qui implique un accord entre les trois communautés

25 nationales."

Page 8384

1 Monsieur Bjelobrk, ceci est exprimé dans ce document, et la question que je

2 vous pose, c'est qu'il ne s'agissait pas d'un ultimatum; il s'agissait de

3 l'évaluation faite par M. Krajisnik de la situation, n'est-ce pas ?

4 R. Vous pouvez l'appeler comme vous voulez. Je vais essayer de vous

5 expliquer ce qu'il en était puisque j'ai habité en Bosnie-Herzégovine. Je

6 crois que vous vivez dans un pays semblable. Lorsqu'on sait à quel point la

7 population en Bosnie-Herzégovine était mixte. Il y avait que très peu de

8 place pour une communauté monoethnique, ou en tout cas, un groupe ethnique

9 qui dominerait les autres. Tous les accords que vous avez évoqués et

10 auxquels vous avez fait allusion font référence aux déplacements

11 volontaires, ou non volontaires, d'une partie de la population. C'est ce

12 que vous impliquez, et je ne crois pas que cela rentre dans le groupe

13 d'idées que l'on peut, tout simplement, présenter autour d'une table.

14 Q. Monsieur Bjelobrk, il s'agit ici du mois de janvier 1992, et c'était un

15 point de vue assez répandu. On disait que la Bosnie-Herzégovine ne pouvait

16 pas rester en l'état ?

17 R. Je n'avais pas l'impression que c'était un point de vue communément

18 répandu. Je ne souhaite pas vous faire perdre votre temps. Une analyse a

19 été faite par la communauté internationale. Vous avez les conclusions de la

20 communauté internationale et les choses n'étaient pas ainsi, comme vous le

21 dites. Le climat politique à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine était tel

22 qu'il y avait un groupe qui était en faveur de la transformation ou du

23 changement des structures internes du pays de la Bosnie-Herzégovine, mais

24 sous la même appellation. Je ne suis pas d'accord avec vous pour dire qu'il

25 s'agit d'un point de vue communément répandu.

Page 8385

1 Q. Je ne souhaite pas entrer dans les détails ici. Vous connaissez jusqu'à

2 un certain point les discussions en rapport avec le plan Cutileiro ?

3 R. Oui. J'ai eu connaissance de ces discussions en partie.

4 Q. Le plan Cutileiro n'a pas évoqué, tout simplement, la question d'un

5 statu quo ?

6 R. Non. Le plan n'a pas envisagé un statu quo, mais à la manière dont je

7 l'ai compris, ce plan ne divisait pas la Bosnie-Herzégovine selon les

8 critères ethniques, non plus.

9 Q. Des déclarations publiques et officielles ont été faites par d'autres

10 nationalités, n'est-ce pas, qui reconnaissaient expressément l'éventualité

11 d'une guerre ?

12 R. Je dois reconnaître que je ne me souviens pas des déclarations

13 particulières qui aient été faites hormis celles faites par le SDS. Je ne

14 m'en souviens pas au jour d'aujourd'hui. Je me souviens d'autres personnes

15 qui avaient pris la parole sur le sujet vers le mois de février 1992.

16 Q. Vous souvenez-vous de ce qui s'est passé en 1991, lorsque M.

17 Izetbegovic, et je vais essayer de le citer aussi précisément que possible

18 qu'il ne sacrifierait pas la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine pour

19 avoir la paix. Vous souvenez-vous de ceci ?

20 R. Oui, je me souviens de cette déclaration.

21 Q. Le deuxième point que vous évoquez au 55.2, vous dites que : "M.

22 Krajisnik déclare que c'est inévitable que d'établir des distinctions entre

23 les trois communautés nationales en Bosnie-Herzégovine et que l'assemblée

24 du peuple serbe ne souhaitait pas l'exprimer à haute voix." Vous dites

25 ceci : "Vous déduisez quelles qu'aient été les décisions prises par le SDS

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1 auparavant, ce qui se passait menait à une coupure entre les trois

2 communautés nationales. Néanmoins, ils ne souhaitaient pas que ceci soit

3 clairement expliqué."

4 Monsieur Bjelobrk, si on regarde ce qu'a dit M. Krajisnik ou, en tout cas,

5 les propos qu'on rapporte à ce sujet. Sous le deuxième titre, si vous

6 voulez bien confirmer ceci. Sous le titre "La formation de la République du

7 peuple serbe en Bosnie-Herzégovine a fait l'objet de nombreuses critiques."

8 C'est cette page-ci et la page suivante. Je crois que c'est l'extrait que

9 vous avez mentionné.

10 R. Si vous pouvez m'aider, s'il vous plaît, ceci est en très petits

11 caractères, et même avec mes lunettes, je ne peux pas lire ce texte. Je

12 vous demande de bien vouloir me remettre une autre version plus lisible,

13 s'il vous plaît.

14 M. HANNIS : [interprétation] J'ai une version, un tout petit peu plus

15 lisible.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez bien la remettre à M.

17 Bjelobrk, s'il vous plaît.

18 Monsieur Bjelobrk, nous avons attiré votre attention sur ce que

19 j'appellerais la réponse à la deuxième question. La question est soulignée

20 selon Me Stewart, vous pourriez lire ceci en anglais si le témoin n'est pas

21 en mesure de lire le texte qu'il a sous les yeux.

22 M. STEWART : [interprétation] Il est vrai que les caractères sont assez

23 petits.

24 Le passage en question précise : "Ceci a été déclaré comme", la question

25 qui lui avait été posée : "Pourriez-vous nous expliquer comment on peut

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1 envisager au sein d'une constitution au sens légal du terme, quelles sont

2 les frontières et comment les autorités seraient organisées avec succès ?"

3 La réponse : "On a déclaré qu'il s'agissait là d'une conséquence, autrement

4 dit, l'expression du désir du peuple serbe de rester à l'intérieur d'un

5 Etat unique de la Yougoslavie, en même temps que la Serbie et le Monténégro,

6 le SAO de Krajina et les autres régions serbes. Il est certain que ceci

7 était une réaction aux avancées faites par les deux autres communautés

8 nationales en Bosnie-Herzégovine. Le protocole qui avait été voté de façon

9 illégale, ainsi que le programme politique et de même que la proposition de

10 projets illégaux et non conformes à la constitution aux fins d'obtenir la

11 reconnaissance et l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. C'est quelque

12 chose que le public connaissait déjà et il y a deux raisons pour lesquelles

13 un bon nombre de gens n'étaient pas certains, ou ne savaient pas. Ils ne

14 savaient pas grand-chose à propos de la République du peuple serbe en

15 Bosnie-Herzégovine. Ils ne savaient pas ce que cela voulait dire. Ceci

16 n'était pas dit à haute voix parce que l'assemblée du peuple serbe estimait

17 qu'il fallait établir une certaine démarcation entre les trois communautés

18 nationales en Bosnie-Herzégovine et que ceci était inévitable. Un Musulman,

19 un Croate et un Serbe de Bosnie sera constitué et sera le résultat même de

20 cette démarcation; cependant, en aucun cas, un Etat ne sera constitué aux

21 dépens de l'autre. La deuxième raison tient en fait que bon nombre de gens

22 qui ont eu accès à ces explications sur ce qu'est la République du peuple

23 serbe en Bosnie-Herzégovine n'ont pas pris ceci au sérieux et on doit leur

24 expliquer clairement qu'il s'agit là de quelque chose de très sérieux de la

25 part du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine, quelque chose que l'on va leur

Page 8388

1 imposer. Il s'agit d'une invitation, il s'agit de proposer un Musulman, un

2 Croate en Bosnie-Herzégovine, s'il s'agit d'une invitation demandant aux

3 Musulmans et aux Croates de faire partie de la Bosnie-Herzégovine."

4 Q. Etes-vous d'accord avec moi, Monsieur Bjelobrk, pour dire qu'en premier

5 lieu, ce qui semblait avoir été rapporté comme étant la réponse de M.

6 Krajisnik en disant très clairement qu'aucune des nationalités ne doit

7 avoir priorité sur l'autre, ne doit dominer l'autre ou une des deux

8 autres ?

9 R. Je vais vous dire ce que j'en pense. Si M. Krajisnik insiste sur une

10 Bosnie-Herzégovine bosnienne, croate et serbe, on a déjà, à ce moment-là,

11 cette idée qui transparaît, autrement dit, l'appellation de ces trois

12 peuples.

13 Malheureusement, la Bosnie-Herzégovine est un pays qui, sur un plan

14 territorial, est un pays qui a une population mixte. Vous avez certainement

15 entendu parler et dire qu'avant la guerre, un tiers des mariages était des

16 mariages mixtes où les femmes et les maris venaient de groupes ethniques

17 différents. Cette idée aurait du mal à mûrir, car dans certains bâtiments,

18 différentes familles de différents groupes ethniques vivaient ensemble. Un

19 pays multiethnique était quelque chose qui, raisonnablement, ne pouvait pas

20 être mis en śuvre facilement. Un pays comme la Bosnie-Herzégovine a quelque

21 80 % de son territoire occupé par une population mixte. Cette idée

22 impliquerait automatiquement qu'il faille réinstaller ou déplacer un

23 certain nombre de gens que ce soit de façon volontaire ou forcée. C'est la

24 raison pour laquelle, aucune personne raisonnable n'aurait pu favoriser

25 cette idée-là.

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1 Q. Je souhaite maintenant parler du point suivant, 55.4, M. Krajisnik, la

2 question que je vous pose : "Pourriez-vous préciser la question des

3 frontières ?" Votre commentaire de votre déclaration, c'est : "Krajisnik

4 décrit les frontières comme étant les endroits où des Serbes ont établi des

5 régions autonomes, là où ils sont majoritaires et dans la région où ils

6 étaient majoritaires avant le génocide commis contre eux au cours de la

7 dernière guerre." Monsieur Bjelobrk, je reconnais qu'il s'agit là d'une

8 déclaration exacte de ce qui figure dans l'article, sous le

9 titre "Pourriez-vous préciser quelles sont les frontières". Ensuite, vous

10 poursuivez, vous faites un commentaire, et vous dites : "Ils aimeraient

11 remodeler l'histoire", et cetera.

12 Ce que vous émettez, est-ce que vous êtes d'accord avec moi, c'est une

13 phrase que je vais lire en anglais, cinq à six lignes plus bas, sous le

14 titre "Pourriez-vous préciser quelles sont les frontières". "La ligne de

15 démarcation très nette n'a pas été définie. Ceci fera l'objet d'un accord

16 entre les trois communautés nationales où les régions et les territoires

17 sont à déterminer."

18 Vous admettez que ceci a été omis de votre résumé au regard du numéro 55.4

19 de votre déclaration ?

20 R. Il est vrai que cela ne figure pas dans la déclaration, mais je

21 considère que cela n'est pas pertinent. La polémique portait sur

22 l'indépendance. A savoir comment cette indépendance allait être mise en

23 śuvre, il s'agit là d'une question secondaire. J'ai parlé ici de la thèse

24 dans son ensemble, et je ne parlais pas de sa mise en śuvre.

25 Q. Autrement dit, vous dites que cela n'est pas pertinent, que Krajisnik,

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1 comment son opinion a été rapportée, déclare ou dit très expressément que

2 la démarcation de ces régions fera l'objet d'un accord entre les trois

3 communautés nationales ?

4 R. Oui. Il est peu pertinent de savoir quels seront les participants à cet

5 accord. D'après moi, ce type de proposition est contraire à toute idée des

6 civilisations et des procédures démocratiques.

7 Q. Votre point suivant, 55.5, la manière dont vous l'avez dit, c'est M.

8 Krajisnik, qui : "-- déclare qu'à un moment donné, il n'était pas au stade

9 du démantèlement de la Bosnie-Herzégovine. De manière implicite, il

10 déclarait qu'auparavant, il n'avait pas exprimé leur volonté de démanteler

11 la Bosnie-Herzégovine. Maintenant, il était disposé à le faire."

12 Cela, Monsieur Bjelobrk, je suppose, sous le titre : "Pourriez-vous

13 préciser les frontières ?" ou "Il s'agit de frontières administratives qui

14 permettent de créer les conditions où les Serbes seraient leurs propres

15 patrons à la même manière où les Musulmans et les Croates pourraient l'être

16 également. Il n'y a que certaines fonctions qui seraient unitaires sur

17 l'ensemble du territoire de la Bosnie-Herzégovine. C'est dans ce sens,

18 qu'il y avait un réel désir de ne pas démanteler la Bosnie-Herzégovine mais

19 de la transformer. La Bosnie-Herzégovine ne doit, en aucun cas, être

20 assujettie à d'autres républiques ou d'autres états."

21 Vous déduisez, d'après cet extrait, dans le contexte de cet article, vous

22 en déduisez que M. Krajisnik disait qu'avant, lui et le SDS ne souhaitaient

23 pas assister au démantèlement de la Bosnie-Herzégovine, mais qu'ils étaient

24 disposés à le faire maintenant, et qu'il s'agit là d'une lecture erronée de

25 cette interview et de cet article.

Page 8391

1 R. Je vais essayer de vous expliquer ceci brièvement. Vous avez mal

2 compris, je crois, mal interprété le contexte. Pendant une centaine

3 d'années, la Bosnie-Herzégovine n'était pas simplement un calcul

4 mathématique et le total de trois ghettos ethniques que l'on avait mis

5 ensemble. Toute proposition de division ne peut pas simplement correspondre

6 à une division de quelques trois ghettos. Il faut véritablement entrer dans

7 les appartements des gens pour comprendre. A ce moment-là, ce processus n'a

8 plus rien à voir avec un processus démocratique.

9 Q. Je souhaite que tout ceci soit très clair, Monsieur Bjelobrk. Vous

10 parlez de votre évaluation, vous donnez votre point de vue sur ce que M.

11 Krajisnik et le SDS avaient à l'esprit, c'est-à-dire, quelque chose

12 d'irréalisable; c'est cela, n'est-ce pas ?

13 R. Non, il ne s'agit pas simplement du fait que c'était irréalisable. Tout

14 d'abord, la guerre a prouvé que l'on peut forcer les gens à faire des

15 choses, toutes sortes de choses si on a des armes. Si vous parlez de ce qui

16 est possible, et de ce qui est impossible. Mais cela ne fait pas l'objet de

17 notre débat ici. On parle des droits de l'homme. Si vous innovez une idée

18 politique, mais la question est de savoir si on respecte les droits de

19 l'homme. Je ne suis pas avocat, et je n'interprète pas la constitution. Ce

20 n'est pas mon rôle ici, mais c'est quelque chose de base. Il ne faut pas

21 entamer les droits de l'homme acquis jusqu'au jour d'aujourd'hui. Si vous

22 faites quelque chose dans cette veine-là, vous intervenez au niveau des

23 droits de l'homme déjà acquis par les citoyens de Bosnie-Herzégovine.

24 Q. Etes-vous d'accord, Monsieur Bjelobrk, pour dire que beaucoup

25 d'énergie, beaucoup de temps ont été consacré par un certain nombre de

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1 gens, et ce n'est pas peu dire, les négociations internationales en 1991 et

2 au début de l'année 1992, voire plus tard, et tout ceci a été consacré à

3 une transformation en quelque sorte de la Bosnie-Herzégovine et pour

4 permettre aux trios nationalités de cohabiter à l'intérieur d'un seul et

5 même Etat.

6 R. Oui.

7 Q. Et que la transformation qui avait été envisagée au cours de ces

8 négociations internationales signifiait que des changements assez radicaux

9 auraient dû être opérés au sein de certaines entités, ceci à cause des

10 différentes nationalités en présence.

11 R. Permettez-moi de dire ceci. Il n'y avait pas un seul participant

12 international qui a participé à ces réunions qui visaient à trouver une

13 solution. Personne n'a jamais dit qu'une des solutions était la guerre.

14 Q. Au paragraphe 53 de votre déclaration, vous dites, je cite, enfin vous

15 dites que dans votre travail au sein de l'assemblée, vous êtes arrivé à la

16 conclusion que Krajisnik était consulté par les députés du SDS sur toutes

17 les questions : "Lorsqu'il y avait des contestations qui étaient

18 susceptibles de se produire au sein du parlement, les députés du SDS

19 s'adressaient toujours à Krajisnik pour obtenir une réponse, même si c'est

20 en réalité le président du groupe parlementaire auquel ils auraient dû

21 s'adresser dans ce cas de figure."

22 Monsieur Bjelobrk, pouvez-vous nous donner un exemple d'une de ces

23 situations conflictuelles au cours de laquelle les députés ont demandé son

24 avis à M. Krajisnik ?

25 R. Moi-même, j'ai interrogé les députés du SDS au sujet de leur

Page 8393

1 déclaration à laquelle je ne pouvais pas me montrer d'accord. J'ai demandé

2 à ce que l'on me fournisse des éclaircissements. Je leur ai demandé quel

3 était le soutien dont ils bénéficiaient au sein du groupe parlementaire du

4 SDS. Je leur ai demandé si c'était le chef du club parlementaire ou le

5 président du groupe parlementaire qui avait donné son accord. Souvent on

6 m'a dit que cela avait été confirmé avec Krajisnik.

7 Q. Monsieur Bjelobrk, je vous serais reconnaissant de bien vouloir essayer

8 de nous donner un exemple.

9 R. Pour exemple, il y a une discussion au sujet des deux mémorandums. Très

10 naturellement, de par la nature des choses, on s'adresse à des gens qui

11 n'ont pas forcément la même opinion, ensuite on regarde comment on est

12 arrivé à ces points de vue.

13 Q. Je vais vous demander d'être un peu plus précis. Nous avons parlé

14 depuis le début de cette affaire d'un nombre incalculable de mémorandums.

15 De quoi parlez-vous exactement ?

16 R. J'ai participé uniquement au débat concernant deux types de questions :

17 au cours de la session de l'été, et au cours de la session parlementaire de

18 l'automne. On a parlé lors de ces débats de ces documents, et je me suis

19 rendu compte après m'être entretenu avec des députés du SDS, qui n'avaient

20 pas les mêmes positions que je me suis rendu compte que c'est au sein du

21 club du SDS, du groupe parlementaire du SDS, que s'étaient forgées ces

22 opinions, et que Krajisnik y donnait son accord.

23 Q. Vous nous parliez de mémorandums, ensuite maintenant vous parlez de

24 "documents." Vous ne nous faites pas beaucoup avancé. De quels documents

25 parlez-vous ? Quels sont ces deux documents dont vous nous parlez, s'il

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1 vous plaît ?

2 R. Je crois que vous disposez des comptes rendus de la session

3 parlementaire d'octobre. Il y a un document qui est intitulé, "Mémorandum",

4 et un autre, "Programme". Je crois qu'il y a un troisième document du SDS

5 qui était en préparation à ce moment-là. Je ne me souviens plus de son nom,

6 mais cela se passait au cours de l'été 1991. Le SDS a présenté un

7 mémorandum. Le SDP a proposé son propre texte qui s'appelait Mémorandum,

8 ensuite, est venu s'y ajouter une résolution. Cela on pourrait le vérifier

9 facilement dans le compte rendu des débats.

10 M. STEWART : [interprétation] Voici un exemple frappant, Monsieur le

11 Président, de ce à quoi je suis confronté cet après-midi avec le témoin --

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, quel est le problème ?

13 Essayons d'être concret. Si je regarde les questions que vous avez posées

14 au témoin, mais, non, peut-être une petite question au témoin tout d'abord

15 de ma part.

16 Les députés du SDS s'entretenaient avec d'autres députés ou avec le

17 président du groupe parlementaire au sujet d'une certaine question. S'il y

18 avait une concertation entre les députés d'un même parti, que peut-on

19 reprocher à une telle manière de procéder ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'est tout à fait correct.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, Maître Stewart, enfin, je ne vois

22 pas très bien où est le problème ici. Je ne suis pas un homme politique.

23 J'ai eu l'occasion, bien entendu, d'observer les hommes politiques et la

24 façon dont fonctionne un parlement, mais quand un problème se pose au sein

25 d'un parti politique, je serais très étonné d'apprendre que les députés

Page 8395

1 d'un même parti ne s'interrogent pas pour savoir quelle est la ligne

2 adoptée par le parti si on en vient à un débat au sein de l'assemblée.

3 Donc, quel est le problème ?

4 M. STEWART : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, parce qu'un tel

5 parti, un parti qui est géré d'une autre manière n'aurait pas de chance de

6 durer très longtemps. En fait, soyons réaliste, parce que j'allais quand

7 même un petit plus loin dans ma question. Soit il est inutile que je pose

8 des questions supplémentaires, soit ce n'est pas réaliste. Mais je pense

9 qu'il va falloir que nous décidions comment nous allons procéder. Il faut

10 que cela se passe en l'absence du témoin.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement, mais comme j'ai dit au

12 début de l'audience, ce sera à la toute fin de l'audience.

13 M. STEWART : [interprétation] Justement à la fin de l'audience, j'aimerais

14 pouvoir répondre à cette question, parler du moins.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, je viens de consulter

17 les deux Juges qui sont à mes côtés, et selon nous, que ce soit M.

18 Krajisnik ou tout le monde, si on regarde le paragraphe que vous avez

19 mentionné, on ne voit pas ce qui est surprenant dans ce paragraphe. Nous

20 demandons donc s'il est nécessaire de poursuivre sur ce point.

21 M. STEWART : [interprétation] Maintenant, vous me dites cela, et je peux

22 dire qu'il est inutile que je pose des questions supplémentaires. Car vous

23 comprendrez que si vous me dites vous-même qu'il n'y a rien d'anormal que

24 l'on puisse détecter dans ce paragraphe quelque chose, qu'il n'y a rien que

25 l'on puisse retenir contre mon client, rien qui sorte du quotidien

Page 8396

1 politique, qui sorte de la normalité politique, à ce moment là, moi, cela

2 me va bien. Je n'ai pas de problème.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre estime qu'il est inutile de

5 poser des questions supplémentaires au sujet de ce paragraphe que nous

6 interprétons de la manière que je viens de vous communiquer.

7 M. STEWART : [interprétation] Permettez-moi de vous poser une question :

8 Est-ce que l'Accusation accepterait que les deux dernières phrases du

9 paragraphe 53 soient enlevées de ce paragraphe ?

10 M. HANNIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président, nous ne sommes pas

11 d'accord.

12 M. STEWART : [interprétation] Puis-je demander à ce que le témoin quitte le

13 prétoire ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vais vous demander, Monsieur le

15 Témoin, de bien vouloir suivre M. l'Huissier.

16 [Le témoin se retire]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de vous laisser poursuivre, Me

18 Stewart, je crois qu'il faut que nous disions très clairement ce que le

19 témoin a dit. Il a dit qu'il avait entendu dire par d'autres témoins que…

20 et cetera. Voilà, le fait.

21 La deuxième question qui se pose c'est de savoir s'il y a quoi que ce

22 soit d'anormal, de déplacé dans cette façon de procéder. Monsieur Hannis,

23 je ne sais pas si vous n'êtes pas d'accord pour biffer ces deux phrases,

24 parce que vous estimez qu'on peut donner une autre interprétation à ce

25 paragraphe.

Page 8397

1 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, nous voulons que ce

2 fait reste là, bien inscrit dans le texte, parce que plus tard, avec

3 d'autres éléments de preuve, on pourra peut-être interpréter ceci d'une

4 manière qui va dans notre sens, c'est à savoir qu'en plus de toute

5 l'autorité qu'il avait du fait de la position de président de l'assemblée,

6 ensuite, de président de la présidence élargie, il avait également de fait

7 un autre pouvoir, et c'est cela qui est montré dans ce paragraphe.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Stewart.

9 M. STEWART : [interprétation] C'est justement ce que je veux dire. C'est

10 pourquoi j'ai posé la question au sujet de la première phrase du paragraphe.

11 Je cite : "Dans le cadre de mon travail à l'assemblée, j'en suis arrivé à

12 la conclusion que Krajisnik était souvent consulté par les députés sur

13 toutes les questions." Moi, cela ne me pose pas tellement de problèmes.

14 Cependant, parce que c'est tout à fait logique du point de vue politique,

15 comme vous l'avez dit vous-même, Monsieur le Président, il y a quelques

16 instants. Mais ensuite, cette phrase suffit en elle-même. Il n'y a pas

17 besoin d'y ajouter les autres phrases. La raison pour laquelle le Procureur

18 veut qu'on y garde les autres phrases, c'est tout à fait simple : C'est

19 pour nous dire que M. Krajisnik avait plus d'autorité et d'influence que

20 tous les autres membres que l'on ne pouvait le penser vue sa position,

21 parce qu'apparemment, c'était lui que l'on allait voir plutôt que celui qui

22 présidait le club des députés. Les députés allaient voir M. Krajisnik. Je

23 comprends très bien M. Hannis. Je comprends très bien pourquoi il ne veut

24 pas qu'on enlève ses phrases, mais c'est pourquoi, moi aussi, je refuse

25 qu'on les laisse.

Page 8398

1 M. HANNIS : [interprétation] Je serais d'accord pour que l'on biffe la

2 toute dernière phrase.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La dernière phrase, c'est l'opinion du

4 témoin. Puisqu'il nous dit simplement qui selon lui on aurait dû consulter

5 en cas de figure. C'est une opinion que l'on voit traduite par cette phrase,

6 pas un fait.

7 Quant à la deuxième phrase, c'est une phrase qui nous présente des faits, à

8 l'exception du nombre de phrases qui est lorsque des conflits étaient

9 censés se produire.

10 Monsieur Stewart.

11 M. STEWART : [interprétation] Non, non, c'est aussi un fait. C'est ce que

12 le témoin affirme, et le témoin fait ses affirmations d'une manière très

13 générale. Il y a beaucoup d'affirmations très générales de cette nature

14 dans sa déclaration qu'on ne peut pas accepter. Je crois que cela ne devra

15 pas figurer dans la déclaration. M. Hannis est très généreux. Il propose

16 qu'on enlève la troisième phrase.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la deuxième phrase qui vous ennuie.

18 M. STEWART : [interprétation] Oui. Cela m'ennuie. Ce qui m'ennuie, c'est

19 que M. Hannis ne veuille pas être aussi généreux pour la deuxième phrase

20 que pour la troisième phrase.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On peut faire entrer le témoin

22 maintenant.

23 M. STEWART : [interprétation] Je dois dire que nous avons une foultitude de

24 mémorandums dans cette affaire. C'est justement de cela que je voudrais

25 parler et je dois d'ailleurs en parler avec

Page 8399

1 M. Krajisnik.

2 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 M. STEWART : [interprétation] Je ne dirai plus à ce sujet maintenant,

5 Monsieur le Président --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bjelobrk, questions au sujet de

7 votre déclaration. Au point 53, vous dites, et je cite : "Lorsque les deux

8 accords étaient susceptibles de se présenter au sein du parlement, les

9 députés du SDS s'adressaient à Krajisnik pour obtenir une réponse."

10 Vous avez parlé de mémorandums. Vous avez parlé de programmes politiques ou

11 autres. Pouvez-vous nous donner d'autres exemples de situations de ce

12 type ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Là, comme cela, à l'instant, non.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela signifie, enfin, ou

15 plutôt, vous nous avez parlé de mémorandums, vous nous avez parlé de

16 programmes. Pouvez-vous être plus précis, dire exactement à quel document

17 vous pensiez ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des documents qui figuraient à l'ordre

19 du jour des débats et qui faisaient l'objet d'un débat par l'assemblée plus

20 tôt au cours de l'été de l'année 1991.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De combien de mémorandums s'agit-il ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait un document qui avait été établi

23 par le Parti de l'Action démocratique. Je pense à la session de l'été 1991.

24 Il y a un document qui venait du SDP. Je crois qu'il y avait également une

25 proposition qui avait été présentée par le SDS à l'époque, mais je n'en

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1 suis pas sûr.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous nous parlez de deux ou trois

3 mémorandums ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les deux que vous identifiez plus

6 précisément ce sont des documents qui venaient du SDA et du SDP ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous être plus précis.

9 Pourriez-vous nous dire quel était le sujet de ces mémorandums ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait de propositions sur la manière

11 de résoudre la crise yougoslave. On y voyait se refléter l'opinion des

12 auteurs des documents. On voyait la manière dont ils envisageaient une

13 solution à la crise yougoslave.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Soyons précis. Je commence par le

15 mémorandum du SDA. Comment savez-vous que les députés se sont adressés à M.

16 Krajisnik -- ethnique -- au moment de décider quelle position il convenait

17 qu'ils adoptent ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] La pratique habituelle veut que les députés

19 aient un club, une espèce de groupe parlementaire avec un président. Le

20 président du club a une autorité, et chaque fois qu'il faut présenter une

21 position, on vérifie si c'est bien la bonne avec le président du groupe.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là, vous êtes en train de nous expliquer

23 comment on aurait dû procéder. La question que je vous pose : c'est comment

24 vous savez qu'ils se sont adressés, ces députés, à M. Krajisnik au moment

25 de déterminer leur position ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Quand j'ai parlé avec les députés du SDS --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous donner des noms, les

3 noms de certains de ces députés ? Si vous ne le savez pas, dites simplement

4 que vous ne le savez pas.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas de noms particuliers à vous

6 donner. Dans d'autres enceintes, j'ai pu donner des noms. Mais je parle de

7 manière générale à ce que j'ai remarqué. Quand on parle à ses collègues,

8 aux autres députés, on voit bien comment une position évolue, comment elle

9 se forge. Apparemment, dès qu'il y avait un problème, ils résolvaient la

10 question avec M. Krajisnik, et pas avec le président du groupe

11 parlementaire.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites "qu'il semblait" résoudre

13 toutes les questions qui se posaient en s'adressant à M. Krajisnik. Vous

14 dites que cela semblait être le cas. Mais à partir de quels éléments

15 pouvez-vous affirmer que c'était le cas ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Par exemple, quand on nous présentait une

17 nouvelle option dans les pourparlers, dans les négociations, je sais qu'ils

18 allaient voir Krajisnik, et pas le président du groupe parlementaire.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comment le savez-vous ? Est-ce que vous

20 les avez vus se rendre dans le bureau de Krajisnik ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils me l'ont dit. C'est ce qu'ils me disaient.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'ils vous l'ont dit ? Est-ce

23 qu'ils vous le disaient avant ou après être allés le consulter ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Cela ne m'intéressait pas après les

25 faits. Je sais que dans le cas de notre groupe parlementaire, de notre

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1 club, s'il y avait une question qui se posait, à ce moment-là, je

2 consultais le président du groupe parlementaire pour savoir exactement

3 comment nous devions formuler notre position. Or, ils disaient toujours,

4 nous, on va consulter M. Krajisnik.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. L'heure est venue de faire la

6 pause. Les parties peuvent, bien entendu, réfléchir de nouveau à leur

7 position sur cette question.

8 Maître Stewart, la Chambre vous a bien entendu, vous estimez que vous avez

9 besoin de plus de temps pour vous préparer. Nous souhaitons que vous

10 continuiez avec vos questions, que vous classerez selon leur importance,

11 ceci après la pause.

12 Nous reprenons à 18 heures.

13 --- L'audience est suspendue à 17 heures 41.

14 --- L'audience est reprise à 18 heures 08.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez continuer.

16 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

17 Q. Monsieur Bjelobrk, au paragraphe 50 de votre déclaration, et je n'en

18 aurai pas pour longtemps à ce sujet, donc peu importe le libellé exact.

19 Mais disons qu'au paragraphe 50, vous parlez du règlement. Vous parlez de

20 M. Krajisnik. Vous nous dites qu'il a mis fin à la 8e séance. Ensuite, vous

21 dites, je cite : "Les membres du SDS quittaient toujours les séances de

22 l'assemblée si le résultat envisageable ou la décision envisagée ne leur

23 convenait pas."

24 Est-ce que, Monsieur Bjelobrk, ce n'est pas ici une exagération manifeste

25 de votre part. Ils ne partaient pas. Ils ne quittaient pas les lieux ou

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1 l'hémicycle chaque fois qu'une décision ne leur convenait pas ?

2 R. Cette conclusion ou mes conclusions, elles reposent sur le fait qu'ils

3 sont partis, les députés du SDS et au cours de la session d'octobre, et au

4 cours de l'été, en 1991. De plus, il y a d'autres cas où les députés du SDS

5 se sont comportés de cette manière, ont adopté cette tactique. C'est ce qui

6 m'a permis d'en arriver à cette conclusion, qui était qu'ils quittaient

7 l'hémicycle dès que les conclusions ne leur convenaient pas. Karadzic dans

8 un des transcripts que nous avons lu ici a dit qu'il fallait que la

9 décision soit légitime, c'est-à-dire que tous les représentants des partis

10 nationaux devaient pouvoir faire connaître leurs positions chaque fois

11 qu'une décision était prise.

12 Q. Je ne veux pas me lancer dans une analyse détaillée de toutes vos

13 réponses, mais vous nous dites qu'ils quittaient les séances de l'assemblée

14 lorsque cela leur convenait. Je ne vais pas vous contre-interroger à l'envi

15 à ce sujet, mais nous pouvons convenir, n'est-ce pas, qu'ils partaient --

16 enfin, nous n'êtes pas en train de nous dire qu'ils partaient chaque fois

17 que cela ne leur convenait pas, qu'ils sortaient dès qu'une décision ne

18 leur convenait pas ? La situation n'était pas ainsi, Monsieur Bjelobrk,

19 n'est-ce pas ?

20 R. Si c'est que vous dites.

21 Q. Non, je ne dis rien.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bjelobrk, soyons précis. A

23 combien de reprises les membres du SDS ont-ils quitté l'assemblée dans la

24 situation que vous venez de nous présenter ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens qu'une fois cela s'est passé au

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1 cours de l'été, et ensuite, au cours de la session d'octobre. Il y a eu

2 d'autres exemples, mais il faudrait que je consulte des documents. Il y a

3 eu d'autres cas de ce genre.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais à peu près. Donnez-nous une

5 approximation, quatre fois, les exemples que vous nous avez donnés et

6 d'autres fois, ou est-ce que cela s'est produit à dix reprises ou à 30

7 reprises ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Disons cinq ou six fois. Ils sont partis cinq

9 ou six fois.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce qu'il est arrivé qu'ils ne

11 quittent pas leurs bancs même si la majorité avait voté contre eux ou avait

12 pris une décision avec laquelle ils n'étaient pas d'accord ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est arrivé. Mais cela se passait

14 lorsqu'il s'agissait de projets ou de projets de lois ou de questions

15 législatives qui n'avaient rien à voir avec ce dont nous parlons.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, c'est que pour Me

17 Stewart, c'était une façon de manifester leur mécontentement, que cela

18 s'est passé quelquefois. Mais que généralement, lorsqu'il s'agissait de

19 questions de moindre importance, ils restaient à leurs places même si la

20 décision risquait d'être prise contre leur propre position. Est-ce que j'ai

21 bien compris ?

22 Poursuivez, Maître Stewart.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je confirme cela.

24 M. STEWART : [interprétation]

25 Q. Dans le même paragraphe, vous nous dites, je cite : "De même, Krajisnik

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1 interrompait les débats et les discussions lorsque cela ne lui convenait

2 pas."

3 J'affirme que cela aussi c'est une exagération, n'est-ce pas ?

4 R. Non. Pour moi, ce n'est pas une exagération.

5 Q. Bon. Soyons précis. A combien de reprises, selon vous, lorsque vous

6 étiez là, à combien de reprises M. Krajisnik a-t-il interrompu les débats

7 parlementaires, mis un terme à la discussion parce que cela ne lui

8 convenait pas ?

9 R. Il existait deux façons d'interrompre les débats. D'abord, c'était,

10 comme je l'ai dit au paragraphe en question, d'interrompre la session. Mais

11 très souvent, on n'interrompait pas les discussions avec la bonne intention

12 de faire des consultations supplémentaires afin de pouvoir poursuivre le

13 bon déroulement de la session. Selon mon expérience, les bonnes intentions

14 se terminaient toujours avec un document, une déclaration disant qu'ils

15 n'étaient pas en mesure de trouver un accord. Il est arrivé que l'assemblée

16 ne prenne pas une position particulière, à cause de cela justement, et ils

17 n'adoptaient pas des décisions.

18 Q. Il manque quelque chose, Mme Cmeric m'apprend, au compte rendu en

19 anglais à la ligne 16, car on entend qu'il s'agissait d'une part ou on a

20 dit qu'il y avait simplement une coupure de la discussion afin de mener

21 certaines consultations supplémentaires.

22 Mme Cmeric m'a parlé, par contre, d'une phrase manquante en anglais qui

23 voudrait dire que les discussions s'interrompaient afin de pouvoir, pour

24 les bonnes intentions, besoin d'une autre consultation ?

25 R. Oui. Il arrivait d'interrompre les sessions mais dans les meilleures

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1 des intentions afin de pouvoir mener d'autres discussions, pour pouvoir en

2 arriver à un aspect organisationnel, pour améliorer l'aspect

3 organisationnel des séances. C'est dans ce sens là que j'ai parlé de bonnes

4 intentions.

5 Q. Est-ce que vous êtes en train de me dire, alors que M. Krajisnik,

6 intentionnellement, faisait une obstruction intentionnelle afin que les

7 sessions ne se poursuivent pas de cette façon-là ?

8 R. Oui.

9 Q. Monsieur Bjelobrk, vous nous avez décrit ce qui s'est passé.

10 Maintenant, quand il y avait des difficultés et qu'on n'était pas parvenu à

11 un accord au sein de l'assemblée, mais qu'avec les bonnes intentions, il

12 était possible de se retirer, d'en parler et de revenir. Est-ce que c'est

13 en fait ce que vous vouliez dire, est-ce qu'on n'a pu arriver à une

14 solution ? Est-ce que je résume bien ?

15 R. D'abord, non pas tout à fait, parce que le parlement est un endroit,

16 par définition, où l'on peut parvenir à accord. Il faut se montrer d'accord

17 sur des questions. C'était tout à fait normal que si l'on s'attend à ce

18 qu'il y ait une pause, que cette pause soit utilisée pour poursuivre des

19 activités au sein du parlement. C'est dans ce sens-là que je l'ai déjà dit.

20 La deuxième partie qui se rapportait éventuellement aux possibilités afin

21 de trouver des solutions à l'extérieur du parlement, il ouvrait des lignes

22 parallèles, des voies parallèles qui n'avaient rien à voir avec la loi, la

23 législation de l'assemblée.

24 Q. Lorsque vous dites que M. Krajisnik faisait obstruction aux travaux, en

25 empêchant que les sessions ne se poursuivent, pourriez-vous nous expliquer

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1 de quelle façon cela se passait. Est-ce que vous êtes en train de nous dire

2 que si, par exemple, nous examinions le procès verbal, nous pourrions

3 trouver dans ce procès verbal que la session avait été ajournée par le

4 président, par M. Krajisnik, que la séance avait été levée et, quelque

5 part, on pourrait voir que l'on fait référence au fait que la séance est

6 levée et reportée à plus tard afin de pouvoir mener des discussions, ou

7 est-ce que l'on peut voir que la session n'avait jamais repris cette

8 date-là. Est-ce que c'est quelque chose que l'on peut voir au procès verbal

9 de la session ? Est-ce que c'est cela que vous décrivez ? Est-ce que c'est

10 le genre d'obstruction qu'il faisait ?

11 R. Je ne sais pas si l'on peut parler d'une journée en question. Je crois

12 que vous avez cité un exemple, en prenant une journée, le travail d'une

13 journée de la session.

14 Q. Vous avez dit qu'à maintes reprises cela s'est déroulé. Je vous demande

15 si, par exemple, lorsque vous dites que M. Krajisnik a fait obstruction aux

16 travaux de la session, est-ce qu'il a empêché, est-ce qu'il a fait en sorte

17 que la session n'a pas repris ses travaux dans une même journée ?

18 R. Non. J'ai dit qu'il arrivait très souvent qu'il y ait des

19 interruptions, que ces pauses duraient très longtemps. Toujours est-il que

20 nous ne pouvions pas arriver à une conclusion.

21 Q. Lorsque vous parlez d'interruptions assez longues, est-ce que vous

22 parlez d'heures, ou est-ce que vous parlez d'interruptions qui pouvaient

23 durer pendant plusieurs jours ?

24 R. La plupart du temps, c'était des interruptions qui duraient plusieurs

25 heures. Je vais essayer d'être plus clair. Il est démocratique d'offrir une

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1 conclusion à l'assemblée, afin que l'assemblée se déclare pour ou contre.

2 Mais nous avions toujours un problème, en fait, le problème était que nous

3 ne pouvions pas arriver à une résolution de l'assemblée, c'est-à-dire qu'au

4 lieu d'avoir une conclusion par l'assemblée, les pauses étaient longues et

5 très fréquentes, et nous n'arrivions pas à trouver une réponse. Les

6 conclusions n'avaient pas pu être adoptées.

7 Q. Vous est-il jamais arrivé d'être présent, lorsque M. Krajisnik a fait

8 l'objet d'une demande de l'un ou de plusieurs partis de reprendre les

9 travaux de l'assemblée, de la session en question, et qu'il ait refusé de

10 se plier à cette demande ?

11 R. Quand cela s'est passé lors de la 8e session de l'assemblée, c'était

12 lui qui a interrompu la session, et on lui a demandé de reprendre les

13 travaux, et il n'a pas voulu le faire.

14 Q. Vous parlez de la session qui a eu lieu le 14 -- le 10, 11, 12, 13, 14,

15 15 octobre, n'est-ce pas ? Vous parlez de la 8e session ?

16 R. Oui.

17 Q. Nous avons entendu beaucoup de choses concernant cette dernière de

18 votre part. Mais laissons les choses de côté pour l'instant. Est-ce que

19 vous avez déjà été présent lorsque M. Krajisnik, par exemple, lorsqu'on lui

20 a demandé de reprendre les travaux de la session et qu'il ait refusé ?

21 R. Concernant les conclusions, oui, c'était le seul problème. J'ai déjà

22 dit qu'il y avait un autre problème, c'est le problème que j'ai mentionné,

23 c'était le problème de ces innombrables pauses qui ne menaient absolument à

24 aucun résultat concret, qui ne permettaient pas que l'on arrive à des

25 conclusions.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, si vous me permettez,

2 je ne sais pas si vous avez couvert cette question, car j'aurais une

3 question supplémentaire à poser.

4 Par exemple, si vous n'êtes pas parvenus à un accord pendant ces pauses,

5 est-ce que, finalement, on aurait proposé un vote pour la question, qu'est-

6 ce qui s'est passé ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, voilà vous m'avez justement posé cette

8 question de façon beaucoup plus précise. Normalement, lorsqu'on organise

9 une pause afin de pouvoir en arriver à un accord, il est tout à fait normal

10 de présenter cet accord à l'assemblée afin qu'elle donne son point de vue

11 aux autres députés pour qu'ils puissent avoir des idées là-dessus. Mais à

12 chaque fois que quelqu'un avait une proposition à faire, il fallait nous

13 consulter.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez me donner un

15 exemple, d'une question qui était sur l'ordre du jour, ensuite une pause

16 arrivait et en dernier lieu il n'était pas possible de prendre une décision

17 là-dessus. Est-ce que vous pourriez nous donner un exemple concret ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, je vous donne un exemple. Lors de la

19 première et de la deuxième session, il y avait pour objet que l'assemblée

20 de la Bosnie-Herzégovine dise quelle était son opinion concernant la crise

21 yougoslave.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous interromps ici. Nous avons

23 entendu beaucoup d'éléments de preuve concernant cette question très

24 problématique, concernant l'avenir de la Bosnie-Herzégovine, et chaque

25 parti avait une position différente, ils ne pouvaient pas parvenir à un

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1 accord. Outre cela, y avait-il, par exemple, d'autres questions, je ne

2 parle pas de l'avenir d'un Etat ou d'une république, ou de la République de

3 la Bosnie-Herzégovine, mais est-ce que vous pourriez nous donner un exemple

4 d'une autre question, pour laquelle on n'a jamais adopté de conclusion,

5 même si on a pris plusieurs pauses ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux vous évoquer d'autres questions,

7 les autres questions étaient moins importantes et ne provoquaient pas une

8 telle sorte de dissension que celle-ci. Par exemple, si vous prenez la

9 session de l'été, vous verrez qu'en réalité, l'assemblée n'avait pas

10 apporté de conclusions. Au mois d'octobre, l'assemblée n'avait pas non plus

11 -- ne s'était pas prononcée -- n'avait pas adopté une conclusion. Au moins,

12 on aurait pu constater qu'après certains votes que nous étions pour ou

13 contre quelque chose, mais cela n'a même pas eu lieu.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous entends, j'entends votre

15 témoignage. Il me semble, corrigez-moi si je m'abuse, que vos observations,

16 votre déclaration concernant le dysfonctionnement du parlement de

17 l'assemblée est décrite de façon assez générale, qu'en réalité ce mauvais

18 fonctionnement, donc c'était causé par cette grande question, c'est-à-dire,

19 la question principale, à savoir, l'avenir de la Bosnie-Herzégovine.

20 Est-ce que c'était toujours cette seule et même question ? Est-ce que

21 c'était toujours la raison pour tout ceci ? C'était le sujet principal,

22 est-ce que j'ai bien compris ? Vous faites un signe de la tête, mais le

23 compte rendu d'audience ne peut pas en faire état.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'affirme que c'était ainsi.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Stewart.

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1 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Dans votre déclaration au paragraphe 20, vous dites : "Vers le milieu

3 de 1991, il y avait beaucoup de discours des députés du parlement, disant

4 que les Serbes de diverses régions 'devaient se protéger.' On peut voir que

5 l'idée venait du haut des dirigeants du SDS."

6 A ce moment-ci, si je comprends votre phrase, "ils devaient se protéger".

7 Si je dois comprendre ce que vous vouliez dire c'est que c'était ce que ces

8 discours disaient. C'était le teneur de ces propos. Est-ce que c'était

9 exact ? C'est le genre de chose que l'on disait à l'époque ?

10 R. C'était ce qu'on disait, mais c'était également ce qui se passait.

11 Q. L'idée -- vous dites que l'idée venait des dirigeants du SDS, c'est

12 l'idée de se protéger. Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de dire ?

13 R. Non. Je ne parlais pas de l'idée que les dirigeants devaient se

14 protéger. Je ne sais pas si j'ai bien compris votre question, mais ils

15 fallaient protéger ces régions qui étaient majoritairement peuplées de

16 population serbe.

17 Q. Je me suis mal exprimé. Je crois que je n'ai pas été assez clair. Ce

18 n'est pas ce que je voulais dire, Monsieur Bjelobrk.

19 Vous avez dit que vous pouviez voir que l'idée venait des dirigeants du

20 SDS. Je voulais simplement que vous me confirmiez que l'idée que vous

21 dites, vous dites que l'idée provenait des dirigeants du SDS, est-ce que

22 c'était l'idée selon laquelle les Serbes de diverses régions devaient se

23 protéger.

24 R. Oui. Donc c'était fait par les dirigeants du SDS et ceci avait été

25 fondé sur la compréhension des faits, c'est-à-dire, à l'été 1991, il n'y a

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1 pas eu d'incident qui s'est déroulé parmi la population. Il n'y a pas eu la

2 nécessité d'organiser une défense envers quelqu'un qui représentait une

3 minorité de toute façon. Donc, puisqu'on avait nommé la Romanija,

4 l'Herzégovine de l'est, la Bosanska Krajina, en tant que régions qui

5 étaient majoritairement peuplées par une population serbe, il n'y avait pas

6 eu de réunions locales pour que ceci soit réellement fait. Les dirigeants

7 de ce parti, en fait, parlaient du concept même et c'était tout.

8 Q. Si je puis être clair, Il s'agit d'une thèse ici, une thèse qui est la

9 vôtre. Vous n'êtes peut-être pas le seul à avoir présenté cette thèse, mais

10 vous la décrivez comme étant votre thèse, qui se fonde sur un raisonnement

11 et une déduction; c'est exact ?

12 R. Oui. J'ai pris part à ces travaux publics. J'exerçais une certaine

13 fonction et je devais réfléchir à ces questions.

14 Q. Lorsque vous dites que vous pouviez voir que cette idée émanait des

15 hauts dirigeants du SDS, vous n'avez pas une connaissance directe de

16 consignes qui avaient été données à cet effet ?

17 R. Pour une raison bien simple : Car en matière de politique, tout ne

18 passe pas à la télévision.

19 Q. Je crois que vous avez commencé par dire dans votre réponse, vous avez

20 commencé par dire, non, et ensuite, "Pour une simple raison." Peut-être que

21 ceci n'apparaît pas dans le compte rendu en anglais. Je ne sais pas qui va

22 pouvoir confirmer ceci.

23 Vous avez dit lorsque j'ai dit vous n'avez pas de connaissance directe,

24 vous étiez d'accord, et vous avez voulu donner la raison pour laquelle vous

25 n'étiez pas d'accord ? C'est exact ?

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1 R. Oui, vous m'aviez bien compris.

2 Q. Au paragraphe 59 de votre déclaration, vous évoquez : "Je me souviens

3 que Nikola Koljevic a publié un texte sur la réinstallation de certaines

4 personnes qui faisaient partie d'un débat plus large sur la réinstallation

5 de gens." Il n'y a aucun titre ici. Etes-vous en mesure de nous aider et de

6 nous donner quelque chose de plus précis, ici, pour nous permettre de

7 reconnaître un texte de

8 M. Koljevic ?

9 R. Les éléments que j'ai, d'après mon souvenir, ceci avait été publié par

10 le journal de Sarajevo, Oslobodjenje, et je crois que ceci figure à la

11 deuxième page, vers le bas de la page.

12 Q. Oui. C'est très précis, en tout cas, en terme de pages, Monsieur

13 Bjelobrk.

14 R. Oui, vous m'avez parlé d'identification, non ?

15 Q. Non, je marquais mon appréciation, Monsieur Bjelobrk. Je vous remercie

16 d'avoir été aussi précis.

17 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas aller

18 plus loin cet après-midi.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question que je souhaite vous

20 poser, Monsieur Bjelobrk, qui est la suivante : vous nous avez expliqué que

21 vous pouviez voir que les allocutions qui alléguaient que les discours

22 disant que les Serbes devaient se protéger, venaient de dirigeants serbes.

23 Bien, vous avez expliqué que vous n'en voyez pas la nécessité, étant donné

24 la situation sur le terrain, qu'il n'y avait aucun besoin de se protéger.

25 Vous nous avez également dit qu'au sein de l'assemblée, les députés du SDS

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1 faisaient des discours et précisaient, à cet effet, qu'il y avait une

2 réelle nécessité de se protéger. Il s'agit là de deux faits.

3 Qu'est-ce qui vous a porté à croire que cette idée venait des dirigeants du

4 SDS plutôt que d'hommes politiques étrangers, ou du président de la

5 Yougoslavie, ou de ce qui l'en restait ? Qu'est-ce qui vous portait à

6 croire que cette idée venait des dirigeants du SDS ?

7 LE TEMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai essayé de communiquer ce que je

8 savais à ce sujet par rapport de mon expérience. J'ai essayé de porter

9 votre attention sur ce qui avait été fait en Bosnie-Herzégovine; sinon, je

10 pense que l'ensemble du concept sur ce qui se passait en Bosnie-Herzégovine

11 est la question qui nous intéresse ici précisément à cet égard, se fonde

12 sur une influence très grande exercée par la Serbie et la Croatie

13 respectivement, donc, les influences étrangères étaient importantes.

14 Néanmoins --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous interrompre ici. J'ai

16 demandé : la question portait sur des faits bien précis, pourquoi pensez-

17 vous que cette idée venait des dirigeants du SDS ?

18 LE. TÉMOIN : [interprétation] Par le simple fait que ces communautés

19 régionales avaient été créées. Cela signifie que c'étaient les plus hauts

20 échelons du SDS qui avaient autorisé cela. C'est en tout cas ce qui a été

21 communiqué au public.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Communiqué au public, quand et comment ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] R. Au moment ou cela a été rendu public, j'ai

24 déjà parlé de quelque chose de ce genre et le public ne le saurait que

25 lorsqu'on leur dirait. Autrement dit, qu'une session s'était tenue hier,

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1 séance de l'assemblée de la région en question. C'est à ce moment là qu'on

2 découvrait la création de cette communauté régionale et c'était la première

3 fois qu'on le découvrait. Dans les analyses précédentes, les personnes qui

4 étaient proches du pouvoir, les députés ou les hommes politiques arrivaient

5 à avoir des bribes d'information et pressentaient que ce genre de choses

6 allaient arriver. Bien évidemment, ils possédaient beaucoup plus d'éléments

7 d'information que le public. Deuxièmement, si on essaie de comprendre les

8 personnes qui vivent dans une région donnée, vous allez sans doute à ce

9 moment là utiliser des éléments statistiques assez simples pour essayer de

10 comprendre ce qui va arriver à ce groupe de personnes.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends. Tout d'abord, nous

12 parlions d'allocations qui avaient été faites et qui se rapportaient à la

13 nécessité de se protéger, comme on dit, la protection des Serbes, et vous

14 avez dit que ces allocutions, ces discours ou que l'idée de la protection

15 des Serbes venaient des dirigeants du SDS et à la manière dont j'ai compris

16 votre réponse, j'ai compris qu'il y avait un certain schéma ou quelque

17 chose qui avait été mis en place, et que, conformément à cela, cette idée

18 devait obligatoirement venir des dirigeants du SDS au moment où cette idée

19 a été rendue publique.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] R. Précisément.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Hormis cette trame que vous aviez

22 constatée, y aurait-il un autre élément qui vous pourriez présenter à

23 l'appui de cette conclusion.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] R. Si on remonte au mois d'août ou au mois de

25 septembre 1991, j'ai entendu des bribes de conversation des membres du SDS

Page 8416

1 et ces membres du SDS disaient que les Serbes devaient avoir leur propre

2 gouvernement, les Croates de même et les Bosniens de même, et j'en ai

3 déduit sur cette base--

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous avez entendu des gens parler

5 d'une séparation ethnique, mais l'objet de notre débat aujourd'hui est la

6 nécessité de se protéger, et la nécessité de se protéger venait des

7 dirigeants du SDS. Il s'agit là d'unités différentes qui diffèrent de la

8 question de la séparation des groupes ethniques.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Une unité vient toujours d'un petit groupe de

10 gens et dans le temps cette idée peut-être épousée par un certain nombre

11 d'autres personnes, mais quand bien même on analyse la situation sur un

12 plan hypothétique et si on se demande combien de personnes peuvent adopter

13 une idée, en général, cette idée, lorsqu'elle a été présentée pour la

14 première fois présentait un défi. En tant que citoyen, je souhaiterais être

15 protégé, même si je ne suis pas représenté au plan politique, dès que je me

16 sentirais menacé. Néanmoins, lorsque rien ne justifie le sentiment de se

17 sentir menacé, à ce moment là, cette idée de protection ne peut venir que

18 d'un petit groupe de personnes qui placent cette idée là dans un contexte

19 politique et qui travaillent à partir de là.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit que personne d'autre,

21 hormis le SDS, n'aurait pu être ce groupe à l'origine de cette idée.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] R. Oui. Précisément.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit qu'il n'y avait aucun

24 fait que vous pouviez présenter à l'appui de ceci, hormis une trame, hormis

25 -- ou que cette idée était une idée très répandue, hormis le fait qu'elle

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1 était une idée très répandue. Vous n'avez aucune raison particulière pour

2 affirmer que cela venait des dirigeants du SDS et non pas d'un autre groupe.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est le raisonnement logique que j'ai

4 fait.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

6 Monsieur Hannis, avez-vous besoin de poser des questions supplémentaires au

7 témoin.

8 M. HANNIS : [interprétation] Non. Pas à ce stade, Monsieur le Président.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge El Mahdi a une ou plus d'une

11 questions à vous poser.

12 M. STEWART : [interprétation] Puis-je demander quelque chose, Monsieur le

13 Président ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 M. STEWART : [interprétation] En général, le Juge, bien sûr pose des

16 questions de temps en temps, mais il me semble ici que c'est ce qui se

17 passe, de façon générale, lorsque le contre-interrogatoire est terminé et

18 ce qui n'est pas à mon sens le cas.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que j'aurais dû être plus

21 clair, Maître Stewart. La question que le Juge El Mahdi va poser au témoin

22 est une question que la Chambre de première instance souhaitait poser au

23 témoin avant ce moment-ci et j'ai moi-même oublié de poser cette question.

24 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, cela ne pose aucun

25 problème. Je voulais simplement m'assurer que tout le monde soit d'accord.

Page 8418

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A savoir si le contre interrogatoire est

2 terminé ou pas, c'est encore une question qui mérite une décision.

3 M. STEWART : [interprétation] Oui, bien sûr.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons une question qui va être

5 posée maintenant; ensuite, vous aurez l'occasion de poser la question.

6 M. LE JUGE Le MAHDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 [en français] Monsieur le Témoin, je vous rappelle de la question qui vous

8 a été posée concernant le paragraphe 53 de votre déclaration. Je crois que

9 vous avez devant vous votre déclaration. Le paragraphe 53 dit, et je cite

10 en anglais :

11 [interprétation] "Des fois que les députés étaient en désaccord, des

12 fois que des désaccords surgissaient au parlement, les députés du SDS

13 s'adressaient à Krajisnik pour essayer de trouver une solution, même si le

14 président du club était la personne vers laquelle, elles auraient dû se

15 tourner."

16 [en français] Est-ce que vous pouvez nous communiquer des noms des députés,

17 qui vous ont transmis leur souci de contacter, de se référer à M.

18 Krajisnik ? Est-ce que cela vous vient à l'esprit, les noms ou quelques

19 noms de ces députés ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas très précisément

21 maintenant. Je ne me souviens pas des noms. J'ai essayé d'exposer ma propre

22 perception des choses. Lorsqu'il y avait des points de vue différents, et

23 lorsque j'essayais d'en parler avec mes collègues du SDS, je vérifiais en

24 même temps vers quelle autorité ces personnes se tournaient.

25 M. LE JUGE EL MAHDI : Est-ce qu'ils étaient -- parliez-vous, c'est-à-dire,

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1 d'un député, deux députés, pas plus ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que l'on peut parler de quelque 10 à

3 15 députés.

4 M. LE JUGE EL MAHDI : Pour une période de quelques mois ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] D'une année environ.

6 M. LE JUGE EL MAHDI : Une année, donc, par 15 fois et cela se peut qu'un

7 seul député vous dit, enfin, la même chose, deux ou trois fois ? Il a

8 besoin quand même de voir les choses de près avec le président de

9 l'assemblée ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Lors de ces 15 occasions, voyez-vous,

11 l'assemblée a commencé à travailler avec ces mêmes membres à l'autonome

12 1990, et nous avons travaillé ensemble pendant une année environ. Il y

13 avait une nécessité politique d'être en accord avec les collègues. Chaque

14 fois que l'on discutait de quelque question que ce soit, il fallait évaluer

15 le pour et le contre. Chaque conversation que j'avais eue avec d'autres

16 députés, y compris les députés du SDS, c'est-à-dire, en fait, pour but d'en

17 arriver à cela, de comprendre cela.

18 M. LE JUGE EL MAHDI : Vous avez sûrement discuté avec des membres d'autres

19 partis, par exemple du SDA, du Parti SDA ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

21 M. LE JUGE EL MAHDI : A leur président de club ou à leur président de

22 parti, ou à qui ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, j'ai parlé que de ce qui se passait à

24 l'intérieur de l'assemblée, non pas à l'extérieur, donc, des rapports qui

25 existaient entre les membres à l'intérieur. Je veux être précis. La plus

Page 8420

1 grande autorité au sein du SDS était Radovan Karadzic à l'extérieur de

2 l'assemblée, comme c'était le cas pour Izetbegovic pour le SDA ou comme

3 c'était, par exemple, le président du HDZ pour les membres du HDZ. Mais,

4 enfin, les rapports qui existaient dans l'assemblée même, par exemple il y

5 avait quelqu'un qui avait une fonction nominale, d'abord à l'intérieur, au

6 sein du groupe des députés, mais cela ne voulait pas dire qu'il

7 représentait une autorité parlementaire la plus haute.

8 M. LE JUGE EL MAHDI : Oui, je comprends. Mais au sein de l'assemblée, je

9 crois que le rôle, il me semble - et corrigez-moi s'il vous plaît - le rôle

10 du président du club, c'est en dehors de l'assemblée plutôt qu'à

11 l'intérieur de l'assemblée. Les députés se rassemblent dans leur club, ils

12 peuvent échanger leur point de vue. Mais au sein de l'assemblée, vous-même,

13 je crois que vous pouviez vous adresser au président de l'assemblée ou cela

14 vous a été interdit vous-même ? C'est-à-dire, ce n'est pas interdit qu'on

15 s'adresse au président de l'assemblée.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr que ce n'est pas interdit. Tout à

17 chacun pouvait s'adresser au président de l'assemblée.

18 M. LE JUGE EL MAHDI : Vous vous êtes adressé vous-même au président de

19 l'assemblée ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Nous lui demandions de nous

21 donner la parole, des procédures.

22 M. LE JUGE EL MAHDI : -- en dehors de l'assemblée ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] On peut parler au président de l'assemblée

24 dans le couloir lors des commissions, lors des séances, à l'extérieur, à

25 l'intérieur. C'est ainsi que nous sommes tous des membres des comités de

Page 8421

1 ces différents corps.

2 M. LE JUGE EL MAHDI : C'est à la base de ces dix ou 15 rencontres avec les

3 députés que vous avez formé votre opinion d'une tendance générale.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour être très précis, j'avais l'impression

5 que la première autorité du SDS au parlement c'était M. Krajisnik,

6 l'autorité principale.

7 M. LE JUGE EL MAHDI : C'est votre impression personnelle. Merci beaucoup.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup.

10 Maître Stewart, la Chambre a permis, de façon exceptionnelle, à M.

11 Krajisnik de poser des questions au témoin. Nous avons estimé que c'est une

12 chose que l'on peut lui permettre de faire. Je ne l'ai pas entendu dire

13 quoi que ce soit. Est-ce que cela veut dire qu'il n'a pas de questions à

14 poser à ce témoin ?

15 M. STEWART : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Outre le fait

16 qu'il n'y a plus du tout de temps pour couvrir les questions, M. Krajisnik

17 et moi, nous nous sommes entretenus pendant la première pause, y compris

18 Mme Cmeric. Voici quel est le fruit de notre entretien. Nous ne sommes pas

19 d'accord avec cette décision, Monsieur le Président. Vous vous souviendrez

20 que nous avions eu un débat assez important concernant M. Krajisnik. Mon

21 client avait fait une propre requête, il y a eu tout un débat mené

22 concernant cette question. Il y a encore quelques atomes résiduels de ce

23 désaccord qui reste encore. Mais outre le fait que je suis légèrement en

24 désaccord avec ceci, et que nous nous sommes entretenus avec M. Krajisnik,

25 nous n'avons pas, en fait, voulu que M. Krajisnik pose des questions cet

Page 8422

1 après-midi, ni M. Krajisnik, ni moi-même.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est clair.

3 Monsieur Bjelobrk, je vous demanderais de sortir de cette salle d'audience

4 car nous devons débattre de quelques questions de procédure. Mais je vous

5 demanderais de rester non loin de cette salle d'audience. Cela ne devrait

6 pas durer plus de 10 minutes.

7 [Le témoin se retire]

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, comme j'ai déjà

9 indiqué plus tôt, la Chambre souhaiterait vous accorder la possibilité de

10 nous dire ce que vous vouliez ajouter, et si vous voulez mener un contre-

11 interrogatoire supplémentaire, bien sûr, si vous voulez réfléchir là-

12 dessus, vous avez peut-être certains éléments de la Défense que vous ne

13 désirez pas communiquer de façon publique, car s'il s'agit de quelque chose

14 qui a trait à la procédure, mais vous pouvez faire une demande de passer à

15 huis clos partiel.

16 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, avec tout

17 le respect que je vous dois, effectivement, je demanderais que l'on passe à

18 huis clos partiel.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, passons maintenant à

20 huis clos partiel.

21 [Audience à huis clos partiel]

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12 Pages 8423-8432 –expurgée– audience à huis clos partiel.

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12 (Expurgé)

13 [Audience publique]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si maintenant, nous le sommes.

15 M. STEWART : [interprétation] Je n'ai pas fait le décompte, mais je pense

16 qu'il y a, à peu près, 12 à 15 éléments importants que j'ai identifiés. Il

17 y en a pour lesquels l'Accusation a répondu, vous a répondu à vous-même

18 qu'ils étaient prêts à abandonner ces éléments. Dans d'autres cas,

19 l'Accusation a refusé. Je ne les critique nullement puisqu'ils représentent

20 la partie adverse à la mienne. Mais ils ont présenté des arguments avec

21 plus ou moins de réserve. Mais dans d'autres cas, l'Accusation a, tout

22 simplement, tout bonnement refusé de supprimer certains passages, c'est

23 leur prérogative. Ils peuvent très bien dire que cela représente leur

24 position.

25 Si bien qu'on peut à en arriver à trois conclusions. En premier lieu, nous

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1 nous trouvons avec des points qui restent et qui sont essentiels, je

2 l'estime. Je vous donne ici un résumé pour essayer de vous faire comprendre

3 pourquoi il est essentiel que ce témoin revienne afin que je poursuive ce

4 contre-interrogatoire, mais j'ai déjà signalé les points sur lesquels M.

5 Krajisnik lui-même souhaite intervenir. Le fait est que nous n'avons pas

6 disposé de beaucoup de temps pour nous préparer pour ce témoin, vu le

7 volume considérable de sujets qu'il aborde. Même si on diminue la portée de

8 sa déclaration, cela ne change rien au fait que, j'ai dû travailler sur

9 cette déclaration très longue, ainsi que sur tous les transcripts.

10 J'ai déjà dit hier très clairement qu'on ne pouvait pas s'attendre de

11 manière réaliste à ce que je couvre tous les sujets du contre-

12 interrogatoire aujourd'hui. J'avance, quant à moi, qu'il est tout à fait

13 manifeste, vu ce que je viens de vous montrer, je peux dire que nous avons

14 été très efficace aujourd'hui dans notre contre-interrogatoire, rapide,

15 mais il est manifeste que ce contre-interrogatoire n'est pas arrivé à son

16 terme. Bien entendu, loin de nous l'idée de faire revenir le témoin si cela

17 n'est pas nécessaire, mais, en fait, au bout du compte, ce que nous

18 demandons c'est que le témoin revienne pour qu'on en termine de ce contre-

19 interrogatoire. C'est cela et rien d'autre.

20 Je comprends bien que la Chambre fait tout son possible pour éviter de

21 faire revenir de manière inutile les témoins à La Haye, mais il nous semble

22 que l'on essaie de faire des efforts surhumains pour éviter que M. Bjelobrk

23 revienne, pour que ce contre-interrogatoire se poursuive, alors que c'est

24 complètement impératif. Si c'était demain, si M. Bjelobrk était là,

25 personne n'aurait jamais l'idée de dire qu'il fallait terminer ce contre-

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1 interrogatoire aujourd'hui, appliquer une approche très différente

2 maintenant parce qu'il doit rentrer chez lui, et qu'il faudra qu'il

3 revienne. Je ne pense pas que ce soit la manière appropriée de procéder.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je comprends.

5 Monsieur Hannis.

6 M. HANNIS : [interprétation] Pas d'observation, Monsieur le Président.

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre ne va pas rendre une

9 décision définitive tout de suite. Elle ne va pas dire s'il convient, si le

10 contre-interrogatoire est arrivé à son terme ou pas. En premier lieu, nous

11 demandons aux parties de voir dans quelle mesure elles peuvent trouver un

12 accord sur les sujets que vous avez exposés et sur lesquels vous estimez

13 devoir poursuivre le contre-interrogatoire. Cela est une chose.

14 En deuxième lieu, la Chambre, sur la base de l'issue de toute conversation

15 que pourrait avoir les parties, souhaite se demander si le reste des

16 éléments de preuve par écrit peuvent être versés au dossier. Il s'agit ici

17 de la déclaration d'un témoin qui dépose sur les faits. Donc, il est

18 possible que la Défense et la Chambre en arrivent à la conclusion qu'il ne

19 s'agit pas de faits, mais d'opinions, et que la Chambre décide de ne pas

20 admettre dans sa totalité la déclaration du témoin.

21 Quand nous aurons entendu ce que les parties auront à nous dire, quand nous

22 aurons examiné la déclaration pour savoir s'il convient de la verser au

23 dossier, à ce moment-là, nous verrons quelles sont les questions encore à

24 traiter parce que ce ne sont pas des aspects pécuniaires qui nous dictent

25 nos décisions quand il s'agit de décider si un témoin doit revenir ou pas;

Page 8436

1 cependant, tous ceux qui travaillent au sein de ce Tribunal savent que

2 c'est quelque chose qu'il ne faut pas perdre de vue, étant donné que le

3 financement du Tribunal n'est pas sans difficulté. Il faut que nous

4 trouvions une solution efficace, si bien qu'une liaison vidéo pourrait être

5 envisagée éventuellement pour la poursuite éventuelle du contre-

6 interrogatoire. Je ne vais pas vous donner de réponses tout de suite.

7 Monsieur Krajisnik, je vois que vous souhaitez parler. Il est possible que

8 nous en arrivions au bout de la cassette, donc, essayez d'être bref.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] En premier lieu, je souhaite vous remercier. Je

10 souhaite vous remercier de m'avoir donné l'occasion de m'adresser au témoin

11 et de lui avoir présenté un certain nombre de documents. J'ai été d'accord

12 avec mon avocat car je pensais que cet interrogatoire serait reporté, et

13 j'ai pensé que ceci aurait lieu lors de l'audience suivante. Si ce témoin

14 n'est pas rappelé, pourrions-nous, néanmoins, utiliser ses arguments car

15 vous allez pouvoir clarifier un certain nombre de points. Il s'agit d'un

16 témoin très important. Il n'est pas du SDS, mais il va pouvoir jeter la

17 lumière sur ce qui s'est passé au parlement. Je puis vous assurer,

18 Messieurs les Juges, que vous découvrirez que ce qu'il a dit est faux. Il

19 pense que je suis contre eux, mais j'ai voté en faveur de leurs

20 propositions, et cela il s'en rendra compte.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, c'est la raison pour

22 laquelle nous avons confié la Défense à proposer le texte littéral

23 d'origine des notes sténographiques pour que nous puissions les regarder

24 et, comme je l'ai dit, que nous pourrions prendre une décision en nous

25 fondant là-dessus, à savoir, s'il est approprié ou non de rappeler le

Page 8437

1 témoin pour qu'on puisse le confronter à ces documents là. C'est une

2 décision qui sera prise conformément au document que nous allons recevoir.

3 Je demande à M. l'Huissier de faire revenir le témoin dans le prétoire.

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a plus de cassettes. Je sais

6 comment il est important que tout soit concilié en compte rendu d'audience,

7 néanmoins, je vais m'adresser à M. Bjelobrk, et tout ce que je vais lui

8 dire sera confirmé par écrit. Je souhaite qu'un exemplaire soit envoyé aux

9 parties.

10 Monsieur Bjelobrk, la Défense souhaiterait vous poser davantage de

11 questions dans le cadre de son contre-interrogatoire. La Chambre de

12 première instance n'a pas encore pris une décision sur ce point et n'a pas

13 encore décidé si vous allez être rappelé pour être interrogé davantage. La

14 Chambre de première instance doit encore rendre une décision à cet effet.

15 Nous allons vous informer de la décision qui sera prise par cette Chambre

16 de première instance. Vous n'allez pas devoir rester à La Haye pour

17 l'instant car la Chambre de première instance ne tient pas d'audience

18 demain, qui est un jour férié, et ne tiendra pas d'audience la semaine

19 prochaine non plus. Confirmation peut se renvoyer par écrit. Je vous

20 demande de ne pas parler à personne, étant donné ces circonstances non

21 encore définies. Je vous demande de ne parler à personne du témoignage que

22 vous avez donné, ou que vous donnerez peut-être à l'avenir. Cette consigne

23 s'applique jusqu'au moment où vous recevrez des informations de notre part.

24 Si on précise que nous n'avons pas besoin de vous rappeler, à ce moment-là,

25 vous ne serez plus tenu par cette obligation. Néanmoins, je ne sais pas

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1 s'il est très sage de parler à tout un chacun du témoignage que vous avez

2 fait devant ce Tribunal parce que c'est un témoignage public, mais, dans le

3 cas où vous serez rappelé, ceci s'applique formellement.

4 Est-ce bien clair ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. J'ai tout à fait compris.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. l'Huissier va vous raccompagner. Je

7 vous remercie d'être venu à La Haye. Même si vous ne revenez pas, je vous

8 remercie d'avoir répondu à toutes les questions qui vous ont été posées par

9 cette Chambre. Merci.

10 [Le témoin se retire]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour être tout à fait franc, je

12 m'adresse maintenant aux deux parties. Ceci ne m'est jamais arrivé au cours

13 des dix dernières années, que se passe t-il lorsque nous n'avons plus de

14 cassette pour enregistrer le compte rendu d'audience.

15 M. HANNIS : [interprétation] Je propose que nous ayons un compte

16 rendu lors de l'audience suivante. Je crois que nous pourrions faire un

17 bref résumé de ce qui vient d'être dit une fois la cassette terminée.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais que ce soit bien

19 consigné au compte rendu d'audience que la cassette est terminée et qu'il

20 n'y pas d'enregistrement audio et que, par conséquent, je souhaite être

21 assez bref.

22 Je demande aux parties de bien vouloir ne pas aborder les questions

23 de procédure maintenant. Je ne sais pas si nous avons encore des cassettes

24 vidéo qui peuvent enregistrer quelque chose -- Mme la Greffière vient de

25 me dire que non. Y a-t-il une question urgente que vous souhaitez évoquer à

Page 8439

1 ce moment-ci ?

2 M. HANNIS : [interprétation] Non, pas en ce qui nous concerne.

3 M. STEWART : [interprétation] Je pourrais simplement hocher la tête

4 en signe, pour dire non, mais cela ne ferait aucune différence au niveau du

5 compte rendu.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons donc suspendre

7 l'audience. Nous n'allons pas siéger demain, étant donné que c'est un jour

8 férié pour les Nations Unies. Nous reprendrons le 22 novembre. Je crois que

9 l'audience commencera le matin, pour autant que je m'en souvienne. Je ne

10 sais pas exactement dans quelle salle d'audience ce procès va reprendre.

11 Madame la Greffière …

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous reprendrons l'audience le 22

13 novembre à 9 heures 00, dans la salle d'audience numéro III.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous suspendons l'audience et

15 reprendrons le 22 novembre à 9 heures 00, dans la salle d'audience numéro

16 III.

17 --- L'audience est levée à 19 heures 32 et reprendra le lundi 22 novembre

18 2004, à 9 heures 00.

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