Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 10712

1 Le vendredi 18 mars 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez appeler

6 l'affaire, je vous prie.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour Monsieur le Président,

8 Messieurs les Juges. Affaire numéro IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo

9 Krajisnik.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie Madame la Greffière.

11 Je souhaite bonjour à toutes les personnes qui sont présentent ici.

12 Je demanderais à Madame l'Huissière de faire entrer le témoin.

13 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, avant de faire

14 entrer le témoin dans la salle d'audience je souhaiterais vous fournir une

15 réponse concernant une session de récolement qui a eu lieu avec le témoin

16 en novembre de l'année dernière. C'était en rapport avec le commentaire

17 qui a été fait concernant la correction de certaines dates.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

19 M. MARGETTS : [interprétation] Il semblerait, après avoir relu les

20 notes, il n'y a pas eu d'indices. C'est-à-dire que dans mes notes je n'ai

21 pas trouvé qu'une telle correction aurait dû être apportée.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Cela nous laisse deux possibilités

23 soit qu'on a omis simplement d'inscrire ceci dans les notes ou on a

24 simplement rien dit. Je ne peux pas savoir quelle en est la situation

25 exacte. Je sais que vous ne pouvez pas me donner d'autres éléments

Page 10713

1 d'information, ni Mme Loukas d'ailleurs. Je vous remercie de l'information

2 que vous nous avez fournie ce matin.

3 Madame Loukas, vous avez votre réponse. Je ne sais pas si cela vous

4 convient ou non. Cela est une autre question.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Si effectivement. Je souhaiterais soulever

6 une autre question très brièvement avant que le témoin n'entre dans le

7 prétoire. C'est qu'en fait notre interprète n'est pas présent à ce moment-

8 ci.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, on m'a informé de cette question.

10 Il semblerait qu'il doit passer par toute la procédure bureaucratique, il

11 sera ici sous peu.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président.

13 Alors que je rentrais ce matin, il était déjà-là en bas mais en tant que

14 conseil de la Défense, on n'a pas le droit de faire entrer les personnes à

15 l'intérieur. Ce n'est que le greffe ou les membres de l'Accusation.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai compris que cette personne, cet

17 interprète sera ici sous peu.

18 Mme LOUKAS : [interprétation] Je trouve cela bien dommage que ce genre de

19 situation se produise.

20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour Monsieur Djokanovic, je

22 vous prie de vous asseoir.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour et merci.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, je souhaiterais

25 vous rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que

Page 10714

1 vous avez prononcée au tout début de votre témoignage lundi de cette

2 semaine.

3 LE TÉMOIN : DRAGAN DJOKANOVIC [Reprise]

4 [Le témoin répond par l'interprète]

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, je souhaiterais d'abord

6 vous dire, la règle de 60 % si vous calculez le tout ne nous ramène pas à

7 cinq heures.

8 Mme LOUKAS : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. J'ai

9 relu le compte rendu d'audience et j'ai compris que l'arithmétique n'était

10 pas mon point fort.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que vous avez reçu le message

12 et vous aurez une demi-heure après la première pause, n'est-ce pas ?

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, c'est bien exact. Monsieur le Président,

14 j'ai bien reçu le message.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre Madame Loukas.

16 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Contre-

17 interrogatoire par Mme Loukas: [Suite]

18 Q. [interprétation] Monsieur Djokanovic, mardi dernier lorsque vous avez

19 déposé devant cette Chambre, vous avez parlé, à la page 29 dans votre

20 déclaration du 15 mars --

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, on vous écoute.

22 M. MARGETTS : [interprétation] La numérotation des pages a été indiqué

23 différemment, c'est-à-dire, nous avons le LiveNote, donc nous n'aurons pas

24 les mêmes numéros de page.

25 Mme LOUKAS : [interprétation] Je crois que l'Accusation est privilégiée

Page 10715

1 d'avoir reçu une version qui comporte une pagination normale. Nous n'avons

2 pas reçu de compte rendu d'audience déjà terminé dans ce sens là.

3 Pour ce qui nous concerne ce que je souhaiterais vous montrer c'est à la

4 page 29, déclaration du 15 mars.

5 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons ici une

6 indication que la première page porte le numéro 10534. On peut peut-être

7 faire un calcul bien simple.

8 Mme LOUKAS : [interprétation] Je suis tout à fait certaine, Monsieur

9 Margetts que vous pouvez faire le calcul comme il le faut.

10 Monsieur le Président, ceci dit j'ai un temps assez limité pour le contre-

11 interrogatoire, je ne comprends pas toutes ces interruptions.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, veuillez poursuivre je vous

13 prie, nous allons trouver la page en question.

14 Est-ce que vous êtes en train de nous dire que vous n'avez pas le

15 LiveNote ?

16 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 M. MARGETTS : [interprétation] Nous ne l'avons pas justement. Nous ne

19 pouvons pas retrouver ce document car nous ne l'avons pas dans nos

20 ordinateurs, mais très bien nous allons simplement faire le calcul nous-

21 même et nous allons le retrouver dans nos documents.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Veuillez poursuivre et nous vous

23 écoutons Madame Loukas.

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci.

25 Q. Monsieur Djokanovic, mardi dernier lorsque vous avez déposé devant

Page 10716

1 cette Chambre, vous avez parlé de personnes qui prenaient des décisions,

2 les décideurs. Vous nous avez parlé de M. Karadzic, vous avez parlé du Pr

3 Koljevic, du professeur Plavsic. Vous nous avez également parlé de M.

4 Krajisnik. Vous les avez évalués sur une échelle d'un à quatre d'une

5 certaine façon. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

6 R. Oui.

7 Q. Vous avez également parlé de l'influence de toutes ces personnes et

8 c'est à la page 32 du compte rendu d'audience, LiveNote. Je dis ceci pour

9 le bénéfice de la Chambre et de l'Accusation. Maintenant vous vous souvenez

10 que vous nous avez parlé de l'influence et justement le Juge Hanoteau vous

11 a posé une question, à savoir ce que vous vouliez dire par influence, vous

12 souvenez-vous de cela ?

13 R. Oui, certainement.

14 Q. Vous avez également parlé de la position qu'occupait le président de

15 l'assemblée ou quelle était la position de cette personne comme étant la

16 personne qui avait le rôle, le deuxième rôle le plus important dans le cas.

17 C'est à la page 34 de la déposition, c'est-à-dire, du transcript LiveNote.

18 Vous souvenez-vous de cela ?

19 R. Oui, bien sûr.

20 Q. Si je ne m'abuse, on vous a également posé cette question concernant

21 l'influence, à la page transcript du compte rendu de mardi. Le Juge

22 Hanoteau voulait savoir d'où venait cette influence, d'où venait ce pouvoir.

23 Vous avez répondu que "Ce pouvoir provenait de l'ignorance et de la

24 médiocrité de ceux qui avaient accepté ces personnes."

25 Vous vous souvenez de cela, n'est-ce pas, Monsieur Djokanovic, d'avoir

Page 10717

1 donné cette réponse.

2 R. Oui, je me souviens certainement et je souhaiterais ajouter encore

3 quelques phrases, si vous me permettez.

4 Q. Monsieur Djokanovic, je vais vous poser encore un certain nombre de

5 questions et par la suite, je vous demanderais d'ajouter ce que vous

6 souhaitez ajouter. Est-ce que cela vous convient, Monsieur Djokanovic ?

7 S'agissant du rôle et du pouvoir qu'avaient ces personnes, le président,

8 vous savez que le président de l'assemblée préside les sessions de

9 l'assemblée; est-ce exact ? Est-ce bien le rôle que joue le président de

10 l'assemblée ?

11 R. Oui, bien sûr.

12 Q. Le président de l'assemblée permet à divers hommes politiques de

13 prendre la parole, n'est-ce pas ?

14 R. Oui c'est exactement comme cela.

15 Q. Des questions sont mises à l'ordre du jour et l'assemblée vote sur ces

16 questions, n'est-ce pas, se prononce ?

17 R. Oui. C'est exactement comme cela que cela se passe.

18 Q. Le président a un vote, n'est-ce pas ?

19 R. Oui. Il n'a pas le vote qui lui permet d'annuler les autres votes ?

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, la question est manquante

21 à la page 6, ligne 2. Le témoin a répondu, bien sûr que non, et la question

22 a disparu.

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voulez-vous, je vous prie, répéter la

25 question. Si vous posez la même question, vous obtiendrez la même réponse.

Page 10718

1 Mme LOUKAS : [interprétation] Effectivement.

2 Q. Bien sûr, le président n'a pas une voix prépondérante, n'est-ce pas ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Le président n'a aucun contrôle sur l'ordre du jour. Il doit présenter

5 les questions. Les questions qui sont présentées par le club des députés,

6 n'est-ce pas ?

7 R. C'est exactement cela.

8 Q. Le président doit présenter ces questions à l'ordre du jour, qu'il soit

9 d'accord avec ces questions ou non, n'est-ce pas ?

10 R. Oui. C'est exact.

11 Q. Si l'on examine le système parlementaire en Bosnie-Herzégovine ainsi

12 que dans l'assemblée séparée de Bosnie-Herzégovine, il y avait de

13 différentes fonctions d'Etat. C'est-à-dire que si l'on examine la

14 présidence, l'assemblée et le gouvernement, ce sont trois choses bien

15 distinctes, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Bien. S'agissant des 14 et 15 octobre 1991, lorsque les Musulmans de

18 Bosnie et les hommes politiques croates de Bosnie ont proposé la

19 proposition d'indépendance, M. Krajisnik devait absolument parler de cela

20 et proposer cette question à l'ordre du jour, car il était le président de

21 l'assemblée, n'est-ce pas, c'était son rôle ?

22 R. Oui, bien sûr.

23 Q. Bien. S'agissant de cette influence dont vous nous avez parlé et le

24 pouvoir qu'avaient ces personnes, vous seriez d'accord avec moi pour dire

25 que M. Krajisnik était perçu comme étant une personne ayant beaucoup plus

Page 10719

1 de pouvoir qu'il en avait puisqu'il apparaissait très souvent à la

2 télévision, dans les médias. Les sessions du parlement étaient télévisées,

3 et puisqu'il présidait l'assemblée, il avait énormément de couvertures

4 médiatiques; est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire cela ?

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, vous venez de poser cinq

6 questions en une phrase.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président. Je vais

8 les scinder. Je suis tout à fait consciente de l'heure qui m'est impartie

9 et le temps coule.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, certainement. Vous ne pouvez pas

11 poser ces questions qui sont aussi complexes s'agissant du parlement de

12 l'assemblée des sessions parlementaires diffusées à la télévision.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président. Merci.

14 Q. M. Krajisnik était perçu comme une personne avec beaucoup d'influence,

15 avec beaucoup de pouvoir et ceci était dû au fait que les sessions du

16 parlement étaient télévisées et étaient diffusées à la télévision, et la

17 couverture médiatique était très importante, n'est-ce pas ?

18 R. C'est exactement comme cela.

19 Q. Concernant ce que vous avez dit, s'agissant de leur donner une position

20 et de l'influence qu'avait chacune de ces personnes, c'est votre point de

21 vue, n'est-ce pas, mais vous permettez que d'autres personnes auraient pu

22 s'être fait une autre opinion de ce système d'échelle que vous avez

23 donnée ?

24 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que cela ne

25 peut pas venir en aide aux Juges de la Chambre de faire appel aux

Page 10720

1 conjectures, c'est-à-dire que l'on demande au témoin d'émettre des

2 conjectures sur certaines choses. Je crois que c'est un point de vue

3 personnel.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. C'est une autre question.

5 Mme Loukas voulait savoir si le témoin croit que d'autres personnes

6 auraient pu avoir d'autres opinions. Si le témoin dit, non, cela ne veut

7 pas dire que c'est une réponse. On peut accepter si le témoin dit, que oui,

8 il s'agit d'une question qui était connue de tous. Il pourrait ainsi vous

9 répondre. Que le témoin réponde non ou oui, cela ne peut pas aider la

10 Chambre à formuler une opinion.

11 Si vous me posez une question, il est certain que j'ai certains points de

12 vue sur certaines questions et vous pouvez poser la même question à une

13 autre personne qui peut également avoir d'autres opinions. Je ne peux pas

14 exclure le fait que d'autres personnes puissent avoir d'autres opinions.

15 Mme LOUKAS : [interprétation] Non, effectivement. Je vous demanderais de me

16 permettre de poser cette question puisque je crois que dans le cadre d'un

17 contre-interrogatoire, je peux poser ce genre de questions, c'est tout à

18 fait pertinent.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est certain que cette Chambre de

20 première instance est tout à fait au courant, que dans le cadre des

21 questions posées au cours d'un contre-interrogatoire, surtout lorsque vous

22 parlez d'un pouvoir, il est vrai que le pouvoir ne résulte pas des

23 fonctions officielles seulement. Il est certain qu'on peut avoir des points

24 de vue divergents et divers concernant le pouvoir, qui est perçu d'une

25 façon ou d'une autre. Vous pouvez poursuivre.

Page 10721

1 Vous pouvez poser cette question. Je vais la permettre.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Vous permettrez la question, donc vous êtes

3 prêt, Monsieur le Président, à accepter le fait que d'être élu est un poids

4 et une influence à la personne dépend bien sûr d'éléments très subjectifs.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est certain que la Chambre évaluera

6 tous ces éléments de preuve. Il est certain que c'est un point de vue

7 personnel de ce témoin, et si c'est étayé par d'autres éléments de preuve

8 ou non nous le verrons. C'est à nous, aux Juges de la Chambre qui

9 détermineront et qui évalueront cette question.

10 Mme LOUKAS : [interprétation]

11 Q. Monsieur Djokanovic, concernant les opinions que vous avez exprimées

12 concernant M. Krajisnik, qui était un décideur principal, c'est simplement

13 un point de vue personnel qui est le vôtre, n'est-ce pas ?

14 R. Vous avez, effectivement, posé plusieurs questions. Je vais essayer de

15 répondre à toutes ces questions dans une même phrase.

16 M. Krajisnik était le président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. Il a

17 hérité de cette situation. Son rôle principal, qui lui a été donné par le

18 côté serbe, était d'empêcher que l'on adopte des lois qui seraient contre

19 la loi et qui seraient anticonstitutionnelles, s'agissant du statut de

20 l'ABiH et de la Serbie. Il s'en tenait à la forme et il n'a jamais violé

21 cette forme. Par contre, son devoir politique il ne l'a pas fait. C'est un

22 fait historique.

23 Sa carrière politique ne s'est pas terminée avec cette défaite lors de

24 l'assemblée en Bosnie-Herzégovine, mais il a gardé une image politique

25 jusqu'à la fin de la guerre de sorte que, lorsque le statut a changé dans

Page 10722

1 la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine, cela était bien clair. Le

2 président de la Republika Srpska de concert avec le président de

3 l'assemblée de la Republika Srpska, c'est-à-dire, le président de la

4 Republika Srpska en consultation avec le président de l'assemblée la

5 Republika Srpska procède à la nomination et nomme un mandataire, une

6 personne qui sera à la tête de la Republika Srpska. Ses agissements en tant

7 que président de l'assemblée étaient définis par le statut.

8 A la veille même de la guerre, en nommant le conseil de Sécurité national,

9 l'influence du Pr Koljevic et du Pour Plavsic, qui en 1990, étaient élus de

10 façon démocratique, au sein de la présidence la Républika de Srpska de

11 l'ABiH, il a été poussé à la troisième place.

12 Q. Monsieur, je ne veux pas vous interrompre, mais je dois vous expliquer

13 que j'ai un temps très limité pour vous poser mes questions.

14 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Margetts.

16 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, le conseil de la

17 Défense a justement interrompu le témoin, alors qu'il fournissait

18 précisément la réponse à sa question. Il ne lui a pas permis de terminer sa

19 réponse.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Je permets au témoin

21 de terminer sa réponse même s'il devrait quand même tenir compte du fait

22 qu'il ne devrait pas trop s'étayer.

23 On vous a posé une question, à savoir quelle était l'activité de M.

24 Krajisnic, en tant que président de l'assemblée, telle que définie par la

25 constitution. Vous nous avez dit qu'à la veille de la guerre, en créant ce

Page 10723

1 conseil national, l'influence du Pr Koljevic et du Pr Plavsic qui, en 1990

2 ou dans les années 1990, avaient été élus de façon démocratique à la

3 présidence de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, il est tombé

4 à la troisième place. Il a été rétrogradé.

5 Est-ce que vous pouvez, je vous prie, terminer cette pensée.

6 M. MARGETTS : [interprétation] Correction au compte rendu d'audience, à la

7 page 10, ligne 20, on fait une référence au conseil national, alors que

8 nous avons entendu qu'il s'agit du conseil de Sécurité national. Le compte

9 rendu d'audience ne reflète pas le mot sécurité.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vous prie de répondre à la

11 question mais de ne pas oublier que le temps nous est bien précieux.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le conseil de Sécurité nationale.

13 Il a été question de cela lors de l'assemblée populaire, le 24 mars à Pale.

14 Il y a eu une proposition que le Dr Karadzic soit nommé en tant que

15 président du conseil. La deuxième place était occupée par le président de

16 l'assemblée du peuple serbe et la troisième place allait aux membres de la

17 présidence. J'ai formulé une objection. J'ai demandé pourquoi est-ce que

18 l'on procédait de la sorte. J'ai estimé qu'il fallait prendre les mesures

19 nécessaires pour que la situation soit plus illégitime.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame Loukas.

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous remercie.

22 Q. Monsieur Djokanovic, concernant le conseil de Sécurité national, il y a

23 eu un débat, justement vous nous avez parlé de Pale, de la session du 24

24 mars 1992. Vous serez d'accord avec moi pour dire, n'est-ce pas, que

25 concernant ces deux questions, M. Krajisnik a partagé votre avis, c'est-à-

Page 10724

1 dire qu'il ne s'agirait que d'un corps consultatif, n'est-ce pas ?

2 R. Lors de cette assemblée, M. Krajisnik a partagé la même opinion, a pris

3 les mêmes positions que moi. Cela n'a duré que quelques jours, et ensuite

4 j'ai perdu de vue ce qui se passerait ce conseil, je croyais qu'il n'était

5 jamais constitué, mais je suis revenu de Pale à Belgrade, j'ai vu qu'il y

6 avait une hiérarchie dans la présidence que j'ai vu à Pale. J'ai vu que les

7 relations, dont j'ai parlé lors des discussions préalables, étaient les

8 mêmes, c'est-à-dire que le président Karadzic était une personne qui avait

9 le plus d'influence -- le président de la présidence, M. Krajisnic avait la

10 même position que M. Karadzic. Krajisnik et Karadzic avaient la même

11 influence.

12 M. Krajisnik était et occupait une place principale. Ensuite, il y avait M.

13 Koljevic et Mme Plavsic. C'était mon opinion. Je crois que plusieurs

14 personnes partageaient mon opinion, tout du moins, les personnes qui

15 étaient à Pale.

16 Q. Monsieur Djokanovic, c'est votre opinion personnelle, est-ce que vous

17 ne croyez pas que d'autres personnes auraient pu avoir d'autres points de

18 vue, ou peut-être percevoir la situation de façon différente ?

19 R. Non, je n'ai jamais entendu d'autres opinions, concernant ce sujet.

20 Q. Monsieur Djokanovic, vous n'êtes pas sérieux, j'imagine, lorsque vous

21 relatez aux Juges de la Chambre qu'il est impossible que quelqu'un d'autre

22 ait pu avoir un autre point de vue que vous ?

23 R. Non, ce n'est pas ce que je dis. J'ai dit qu'à ce jour, je n'ai ni lu

24 ni entendu parler du fait que M. Krajisnik n'avait pas autant d'influence,

25 n'était pas en seconde place, immédiatement après M. Karadzic.

Page 10725

1 Q. Vous serez d'accord avec moi que les évaluations de ce type sont

2 inévitablement impressionnistes ?

3 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, on demande de nouveau

4 au témoin de traiter de questions psychologiques.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, ce témoin nous a dit

6 n'avoir pas entendu les opinions divergentes exprimées. Il n'y a rien

7 d'impressionniste. C'est un fait qu'il a entendu ou non. Je vais poser

8 encore une question additionnelle.

9 Monsieur Djokanovic, vous avez dit, je cite : "Je crois aussi que beaucoup

10 de personnes partageaient mon opinion." En même temps, vous avez dit

11 n'avoir pas entendu d'autres opinions divergentes. Est-ce que ces

12 nombreuses autres personnes ont expressément dit partager votre opinion ou

13 s'agissait-il, uniquement du fait qu'ils n'ont jamais exprimé une opinion

14 opposée ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai jamais entendu

16 personne qui aurait dit que M. Krajisnik aurait eu bien moins d'influence

17 que M. Karadzic. Bien au contraire, de l'opinion générale, je pense du

18 territoire de la Republika Srpska, son influence était égale à celle de

19 Karadzic, sinon supérieure pendant cette période.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Toutefois, je n'ai pas

21 toujours reçu la réponse à ma question. Vous avez déjà dit n'avoir pas

22 entendu une opinion divergente mais ce qui m'intéresse c'est de savoir si

23 quelqu'un vous a dit expressément partager votre opinion, soit en ce qui

24 concerne les faits, soit en ce qui concerne leur évaluation du pouvoir dont

25 disposait M. Krajisnik. Je comprends bien que les gens ne disaient pas

Page 10726

1 autre chose mais est-ce que quelqu'un a dit de façon affirmative, et oui,

2 nous pensons de la même façon. Nous partageons votre opinion.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces jours-là, M. Koljevic m'a parlé

4 explicitement de cette situation à la présidence sur la trop influence de

5 M. Krajisnik. Mme Plavsic en a fait autant. Un certain nombre de personnes,

6 qui ont été secrétaires comme M. Poplasen, M. Radovanovic, M. Vucabic

7 [phon], tous m'ont parlé à ce sujet et ont tous été d'accord pour constater

8 que M. Krajisnik, avec Dr Karadzic, est la personne la plus influente et

9 quand je le dis, je pense à l'influence sur les députés, la situation

10 politique, mais aussi sur la prise de décisions particulières.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder Maître Loukas.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

13 Q. Monsieur Djokanovic, s'agissait de l'influence de M. Krajisnik, je

14 soutiens, Monsieur Djokanovic, que tout simplement cela n'est pas vrai.

15 R. Vous recevez de l'argent pour défendre votre client.

16 Q. Monsieur Djokanovic, je pense que ce genre de commentaire n'est pas

17 approprié. Je pense que la Chambre sera d'accord avec moi qu'une telle

18 réponse n'est pas appropriée.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, Me Loukas a

20 présenté une allégation d'après laquelle ce que vous venez de dire n'est

21 pas vrai. Au lieu de commenter les raisons pour lesquelles elle vous pose

22 cette question, la Chambre voudrait que vous répondiez à la question. Dites

23 si vous êtes d'accord ou non avec cette allégation, ou présenter une nuance

24 du gris entre le blanc et le noir.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Mme Loukas a dit que je ne disais pas la

Page 10727

1 vérité. Je dis la vérité, rien que la vérité, et j'ai juré, au début, de le

2 faire ainsi.

3 Mme Loukas a le droit de présenter tous les arguments contre mes

4 commentaires et mes déclarations, mes phrases, et la Chambre peut très

5 bien les prendre en compte et me dire, Monsieur Djokanovic, vous ne dites

6 pas la vérité.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 Madame Loukas, il s'agit probablement d'un malentendu. Si quelqu'un

9 n'a pas l'habitude de cette technique de contre-interrogatoire à la

10 différence d'un interrogatoire principal, cela peut confondre le témoin.

11 J'ai compris de sa réponse qu'il n'était pas d'accord avec vous.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Moi aussi je l'ai compris ainsi.

13 Q. Monsieur Djokanovic, mettons au clair certains points. Premièrement,

14 l'objectif de toute cette histoire est d'établir la vérité; vous le

15 comprenez ?

16 R. Oui.

17 Q. Ni vous ni moi, nous n'allons prendre une décision définitive.

18 R. C'est vrai.

19 Q. Tout le processus d'exercice de la justice, ainsi que vous le

20 comprenez, est que les deux parties présentent ce qu'elles en pensent, et

21 ensuite, c'est la Chambre qui prend la décision, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Ceci dit, je vous serais gré si vous m'aidiez dans ce processus de

24 découverte de la vérité en répondant à mes questions sans les commenter.

25 Est-ce que vous m'avez bien compris ?

Page 10728

1 R. Je crois que nous avons tous remarquer, ici dans le prétoire, que j'ai

2 toujours répondu très brièvement. Je n'ai pas voulu abuser de votre temps.

3 Mon intention était la même. Mais il n'y a pas de raison que je ne réagisse

4 pas par un commentaire à une chose si je me sens obligé de le faire.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, bien sûr vous

6 pouvez commenter le contenu, mais vous ne devriez pas commenter les motifs

7 pour lesquels une question vous est posée. Si c'est le devoir de Me Loukas

8 et si elle s'en acquitte bien, ce ne sont pas les choses à propos

9 desquelles nous aimerions entendre des commentaires.

10 En tout état de cause, Maître Loukas, je crois que le témoin a dit

11 avoir très bien compris ce qui se passait ici.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je suis prête à

13 continuer.

14 Q. En parlant de votre déclaration, Monsieur Djokanovic, vous avez répondu

15 à M. Krajisnik concernant les secrétariats de guerre à partir de juillet

16 1992, et concrètement, en ce qui concerne Novo Sarajevo. Je soutiens que ce

17 que je viens de citer n'est pas exact. Est-ce que vous pourriez me dire oui

18 ou non ?

19 R. Ce n'est pas vrai ce que vous venez de dire parce que M. Branko Radan,

20 après un entretien avec moi, est allé M. Krajisnik et s'est mis d'accord

21 avec lui que, je me rende à Novo Sarajevo pour les aider à désigner les

22 secrétaires municipaux.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voudriez-vous, s'il vous plaît, vous

24 rapprocher un petit peu du micro.

25 Mme l'Huissière vous aidera.

Page 10729

1 Permettez-moi de vous demander de me clarifier un point, Monsieur

2 Djokanovic. Me Loukas vous a demandé si vous répondiez à M. Krajisnik

3 concernant les commissions de guerre concernant Novo Sarajevo. Dans votre

4 réponse, vous aviez expliqué que vous étiez envoyé à Novo Sarajevo après

5 les consultations de M. Radan et de M. Krajisnik, et après s'être mis

6 d'accord avec lui. Mais répondre pour quelque chose n'est pas la même chose

7 que quand on envoie quelqu'un à une consultation. La question suivante est

8 de savoir qu'est-ce que vous avez fait une fois à Novo Sarajevo et à qui

9 rapportiez-vous ?

10 Peut-être Me Loukas devrait-elle vous poser une question

11 additionnelle, parce que la réponse ne convient pas entièrement à la

12 question posée.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Je ne manquerai pas de le faire, mais je vais

14 m'occuper d'abord d'une autre question.

15 Q. Monsieur Djokanovic, lors de votre déposition mardi dernier, vous avez

16 dit que vous aviez raconté à M. Krajisnik et à certains autres dirigeants

17 certaines choses. Lorsque hier, nous avons parcouru votre déclaration, vous

18 avez été d'accord de constater ce que vous aviez dit aux enquêteurs était

19 que vous leur aviez transmis des informations générales sur la situation

20 qui prévalait dans les localités que vous aviez visitées, concernant les

21 conditions de guerre, en leur disant que "beaucoup de sinistres choses

22 s'étaient produites." De même hier, à la page 54, nous avons traité cette

23 question, et votre réponse a été : "Oui, de sinistres choses se passaient

24 sur le terrain et avaient l'air de crimes de guerre. J'avais dit clairement

25 ce qu'il fallait faire. Il fallait prendre des démarches, que nous devions

Page 10730

1 organiser une réunion avec ces personnes aussitôt que possible pour voir ce

2 qui se passait sur le terrain."

3 C'était bien votre réponse quand je vous ai posé la question à propos de

4 votre déclaration. Est-ce que cela est vrai ?

5 R. Oui, c'est vrai.

6 Q. En réponse à la question posée par un des Juges mardi dernier --

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, un peu de

8 patience, je cherche la page.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous pouvez nous donner la citation,

10 nous finirons par trouver.

11 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est sur la page 73 de mardi.

12 Q. Votre réponse à la question du Président a été la suivante, et vous

13 l'avez dit aux membres de la présidence : "De retour de Pale, que des

14 personnes étaient tuées, chassées de chez eux en grand nombre, donc

15 massivement, et que c'était l'information que vous aviez reçue. Est-ce que

16 je vous ai bien compris ?" C'était la question. En répondant à la question

17 du Président, vous avez dit : "Oui, vous m'avez très bien compris."

18 Vous souvenez-vous de cet entretien ?

19 R. Bien sûr que je m'en souviens, c'est ainsi.

20 Q. Mais en même temps, lors du contre-interrogatoire, vous avez été

21 d'accord pour dire qu'au fond beaucoup de choses sinistres s'étaient

22 produites.

23 R. Oui, je l'ai dit.

24 Q. Monsieur Djokanovic, il me semble, plus exactement, je soutiens que,

25 vous, en tant que témoin, vous avez tendance à donner des réponses que vous

Page 10731

1 jugez être attendues par ceux qui vous interrogent.

2 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 M. MARGETTS : [interprétation] Ma collègue combine la déclaration de M.

5 Djokanovic d'hier, et je voudrais demander qu'elle décrive entièrement ce

6 qu'il a dit, parce qu'une partie de ce qu'il a dit en réponse à la demande

7 de confirmer sa déclaration est dans cette déclaration; il y a une

8 description plus détaillée que ma collègue a citée.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons s'il y a un fondement pour votre

10 question, Maître Loukas.

11 Monsieur Djokanovic, Me Loukas soutient que vous donnez des réponses que

12 vous jugez attendues par ceux qui vous interrogent. C'est une allégation de

13 sa part. Est-ce que vous pouvez répondre cette question ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement. Lorsque Mme Malone, au début de

15 l'an 2003 a commencé à discuter avec moi à propos des événements en Bosnie-

16 Herzégovine durant la période 1992-1993, elle m'a dit, tout au début, que

17 les enquêteurs connaissaient mon activité complète durant cette période,

18 que j'étais pur dans tout cela, et m'a dit, tout de suite, que je n'étais

19 pas obligé de faire des déclarations devant les enquêteurs du Tribunal de

20 La Haye si je ne voulais pas.

21 J'ai répondu à Mme Malone que, part un jeu de différentes

22 circonstances, je m'étais trouvé dans un rôle particulier durant cette

23 période intéressante, et qu'à mon avis, le droit de ce témoin de ce temps

24 était d'en témoigner. Lorsqu'en décembre 2003 nous terminions notre

25 deuxième déclaration ici à La Haye, c'est seulement après cette déclaration

Page 10732

1 qu'il a été mentionné le nom de celui qui serait jugé et au procès duquel

2 je pourrais comparaître en qualité de témoin. J'ai dit à Me Margetts, qui

3 s'est entretenu avec moi, et à son confrère dont je ne me souviens plus le

4 nom - il est reparti au Etats-Unis, c'est ce qui m'a été dit - j'ai dit que

5 nous ne parlions pas de noms, et du coup, on mentionne un nom. Je voudrais

6 demander à savoir si je pouvais être un témoin du Tribunal et non pas de

7 l'Accusation. Il m'a été dit précisément que des consultations seraient

8 faites et qu'une réponse me serait donnée pendant la journée du lendemain.

9 Effectivement, le lendemain, il m'a été dit que certains précédents

10 ont été faits pour certaines personnes qui avaient bénéficier de ce statut,

11 mais à propos de ma requête, il n'y avait pas lieu de prendre une telle

12 décision parce qu'on attend de moi de n'être qu'un témoin de la vérité, ni

13 de l'Accusation, ni de la Chambre, ni de la Défense, mais un témoin de la

14 vérité. Je l'ai accepté parce que la coopération avec moi était correcte.

15 On m'a posé la question sur les mesures de protection. J'ai répondu

16 qu'il n'y avait pas de besoin de mesures de protection et que je suis prêt

17 à en parler aussi bien devant le Tribunal que publiquement, et que je

18 n'avais pas besoin de mesures de protection. Mais que, dans quelques jours,

19 quand je serais de retour dans mon pays, j'enverrais une télécopie pour que

20 vous ayez un document noir sur blanc. De retour chez moi après la fête du

21 nouvel an, j'avais, effectivement, envoyé un fax en disant que je parlerais

22 clairement, publiquement et sincèrement, et que je n'avais pas besoin de

23 mesures de protection.

24 Que ma déclaration pourrait aider quelque, pourrait ne pas aider

25 quelqu'un d'autre, mais tout cela fait partie de la vie.

Page 10733

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, la dernière réponse vient

2 d'être donnée.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] J'attendais juste la traduction.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas suivi. La dernière ligne

5 était : "Ma déclaration pourrait aider quelqu'un ou avoir un effet

6 contraire, mais c'est la vie."

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

8 Q. Monsieur Djokanovic, vous n'avez jamais dit des choses comme, Il

9 faudrait partir à la guerre, n'est-ce pas ?

10 R. A quelle période pensez-vous ? A l'époque où je donnais ma

11 déclaration ?

12 Q. En 1991.

13 R. Je ne m'en souviens pas. Peut-être l'ai-je dit.

14 Q. Mais certainement vous n'auriez pas dit une chose pareille durant un

15 débat politique, n'est-ce pas ?

16 R. Durant toute cette période, les 1991 et 1992, et cela est visible dans

17 toutes mes interventions publiques, j'étais toujours partisan de trouver

18 une solution par la voie pacifique.

19 Q. Parlant de votre position politique, il a été conséquemment, "Il ne

20 faut pas faire la guerre," n'est-ce pas ?

21 R. Il faut essayer par tous les moyens disponibles d'éviter la guerre.

22 Q. Cela a toujours été votre position, est-ce que cela est vrai ?

23 R. Cela a été ma position depuis mon apparition sur la scène politique

24 jusqu'au début de la guerre.

25 Q. Cette position, vous l'avez défendue même lors des débats politiques à

Page 10734

1 l'assemblée, n'est-ce pas ?

2 R. Evidemment.

3 Q. C'était aussi la position que vous défendiez en assistant aux réunions

4 du club des députés du SDS ?

5 R. Je n'assistais pas aux réunions du club des députés de SDS.

6 Q. Le 18 octobre 1991, vous n'avez pas assisté à la réunion du club des

7 députés du SDS ?

8 R. Vous parlez probablement de la réunion des députés serbes qui avaient

9 quitté l'assemblée de Bosnie-Herzégovine pour se mettre d'accord sur la

10 formation d'une assemblée du peuple serbe. Probablement, j'ai assisté à

11 cette réunion-là.

12 Q. Oui, mais c'était quelques jours seulement après les 14 et 15 octobre

13 1991, après ces journées turbulentes du 14 et du 15. C'est alors que tous

14 les députés serbes se sont réunis et ont tenu une réunion ?

15 R. C'est vrai. Oui.

16 Q. Une réunion a été tenue aussi le 18 octobre 1991 et vous y avez

17 assisté, n'est-ce pas ?

18 R. Probablement, je crois que j'ai assisté à toutes les réunions, à cette

19 époque-là à Sarajevo. C'étaient des réunions de députés pour la coopération

20 pluripartite ou à toutes les réunions, en tout cas, je ne me souviens plus

21 à quelles réunions, vous pensez.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais à présent

23 me référer au document P65, dans le registre. C'est le "folder" 3,

24 tabulateur 50.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

Page 10735

1 Q. Monsieur Djokanovic, cette réunion a été tenue dans la salle bleue du

2 Parlement de Bosnie-Herzégovine, est-ce que cela aide votre mémoire ?

3 R. Je vous rappelle qu'il n'y avait pas de réunion à laquelle je

4 n'assistais pas. Je ne peux que me souvenir concrètement. Je me souviens

5 d'une réunion entre le moment où les députés serbes ont quitté le Parlement

6 de Bosnie-Herzégovine et la constitution de l'assemblée du peuple serbe de

7 Bosnie-Herzégovine. Si vous faites allusion à cette réunion-là, oui, c'est

8 bien celle-ci qui a eu lieu dans la salle bleue.

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous demande maintenant de présenter ces

10 documents au témoin.

11 Q. S'il vous plaît, consultez ce document, Monsieur Djokanovic, et vous

12 verrez que vous y êtes cité comme un des orateurs sur le point 28. Est-ce

13 que vous avez trouvé cela ?

14 R. Oui.

15 Q. Je vais maintenant lire pour la Chambre ce que vous avez dit à cette

16 réunion. En fait, veuillez vous-même lire cela.

17 R. Voici ce qui est marqué : "Dr Djokanovic, le 28e, par ordre

18 d'intervention." Si nous avions eu un plébiciste, trois mois auparavant,

19 maintenant, les choses seraient plus faciles. Ils n'ont pas constitution.

20 Le peuple serbe doit se prononcer pour une constitution du peuple serbe, en

21 Bosnie-Herzégovine, et je crois que nous devons, immédiatement partir à la

22 guerre."

23 C'est ce qui est écrit là.

24 Q. Vous êtes d'accord qu'il a été noté que vous aviez dit, "Qu'il

25 faudrait immédiatement partir à la guerre." Est-ce que vous êtes d'accord ?

Page 10736

1 R. C'est ce qui est écrit, mais il est évident de toute ma crédibilité

2 politique que ces phrases ne sont pas les miennes, parce que, tout de suite

3 après, à la réunion suivante de l'assemblée, je disais qu'à la réunion

4 constituante de l'assemblée du peuple serbe, un certain nombre de députés

5 parlaient de la guerre mais, que la raison a prévalu, que nous devions

6 rechercher une solution politique. Ici, en sautant un seul mot, on aurait

7 le vrai sens. Je pense que nous ne devrions pas aller à la guerre tout de

8 suite. Je profite de cette occasion que M. Miroslav Toholj [phon], quand

9 nous nous sommes rencontrés, quand nous discutions de cette époque-là, il

10 m'a dit : Nous avons tout nettoyé. Alors nettoyé quoi, de quels documents

11 s'agissait-il ? En ce qui me concerne, j'ai pu remarquer aussi dans les

12 sténogrammes de l'assemblée que certaines choses avaient changé, qu'on

13 avait rayé deux ou trois mots.

14 Q. Vous serez d'accord avec moi pour dire que vous avez dit, ou du moins,

15 c'est retranscrit, "Nous devrions entrer en guerre tout de suite."

16 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je fais objection.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question a été répondue. Le témoin

18 dit ce qui est dit ici dans le document.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Bien, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin accepte que ses mots ont été

21 retranscrits dans ce document. Il a dit : "Je crois que nous devons entrer

22 en guerre tout de suite." Ensuite, il explique la raison de ces mots qu'il

23 a utilisés.

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il soutient ceci, en faisant référence à

Page 10737

1 son attitude politique, en général.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Bien, oui.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pour éviter tout malentendu et

4 d'après ce que j'ai compris dans votre explication, dois-je en conclure

5 qu'il est encore possible que vous ayez dit ces mots mêmes ou pensez-vous

6 qu'il y ait eu une mauvaise retranscription.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était probablement une erreur de

8 transcription, par inadvertance. La seule manière dont on peut comprendre

9 ces phrases c'est, je ne crois pas que nous devrions aller en guerre tout

10 de suite. Cela paraît très clairement dans ce qui suit, des les sessions de

11 l'assemblée et que j'étais toujours en faveur d'une solution pacifique des

12 problèmes en Bosnie-Herzégovine, qu'il y avait une lumière au bout du

13 tunnel et que nous devrions essayer de poursuivre ce genre d'objectifs au

14 cours de cette période.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame Loukas.

16 Mme LOUKAS : [interprétation]

17 Q. Monsieur Djokanovic, je voudrais revenir à la séance de vérification

18 avec M. Margetts. Vous nous avez dit, vous avez dit à la Chambre qu'il y

19 avait certaines questions que vous pensiez devaient être corrigées dans

20 votre déclaration et vous en avez d'ailleurs parlé à M. Margetts. C'est

21 essentiellement votre position, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, il y avait quelques éléments qui ne changeaient rien dans la

23 substance de ma déclaration, mais qui ont fait l'objet de commentaires. Je

24 n'ai même pas insisté sur ces points.

25 Q. Néanmoins, bien évidemment les avocats de l'Accusation ont pris note de

Page 10738

1 ce que vous avez dit quand vous étiez en train de faire votre déclaration.

2 R. Oui mais je n'étais pas conscient de ce fait.

3 Q. Quand les avocats sont en train de faire une séance de vérification des

4 faits avec vous, ils ont du papier, un crayon et ils vérifient et ils

5 prennent note de ce que vous êtes en train de dire; est-ce exact ?

6 R. Quand M. Margetts me parlait, il avait toujours un papier et un crayon.

7 Nous parlions de tas de choses, ce que je disais, ce que je déclarais était

8 très détaillé, il était très difficile de tout par écrit. Je n'ai jamais

9 dit grand-chose à ce sujet puisque je savais que si j'allais témoigner

10 devant la Chambre ce serait là le moment où j'allais dire ce que j'avais à

11 dire, que c'était le Tribunal où il fallait discuter toutes ces choses en

12 détail.

13 Q. Etes-vous en train de dire que M. Margetts ne prenait pas de notes

14 quand vous avez dit qu'il y a eu certains changements par rapport à votre

15 déclaration ?

16 R. Non, non. Ce que j'ai dit c'était que je ne savais pas ce que notait M.

17 Margetts. Autant que je m'en souvienne, il prenait des notes de ce dont

18 nous parlions.

19 Q. Quand vous lui disiez qu'il y avait des changements, il prenait des

20 notes, n'est-ce pas ?

21 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a déjà

22 répondu à cette question.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, le témoin a dit qu'au

24 cours de votre conversation, le témoin a déjà dit que M. Margetts prenait

25 des notes, qu'il avait un stylo, un papier et qu'il prenait des notes.

Page 10739

1 Cette question a déjà été répondue.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Je crois que c'est un petit peu malvenu que

3 ce soit M. Margetts qui soulève une objection sur ce point-ci.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis d'accord avec vous que ce soit

5 quelque peu malvenu.

6 M. Margetts, puis-je vous demander de ne pas soulever d'objection à

7 moins que -- cette objection était un point sur une question posée et une

8 question répondue. C'est une question relativement neutre même s'il s'agit

9 de M. Margetts. Puis-je vous suggérer que dans la mesure où ce n'est pas

10 nécessaire, mais si la question a été posée et répondue n'est pas

11 dramatique de reposer la même question. Puis-je vous demander à ce moment-

12 ci, de ne pas faire marche arrière si je puis dire, mais peut-être d'en

13 revenir à ce qui est absolument nécessaire.

14 M. MARGETTS : [interprétation] Puis-je donner la parole à M. Harmon --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si M. Harmon veut prendre le relais sur

16 cette objection, ce serait certainement apprécié.

17 M. MARGETTS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, je vais vous demander

19 d'abord même s'il n'est pas habituel qu'un autre conseiller de la Défense

20 intervienne.

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Puis-je vous demander, Monsieur le Président,

22 que M. Djokanovic enlève son casque de traduction, parce que je ne crois

23 pas qu'il est approprié qu'il entende ceci.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'essaie de résoudre le problème. Je

25 vois à plusieurs reprises vous avez dit que vous n'aviez pas beaucoup de

Page 10740

1 temps pour votre contre-interrogatoire et vous posez des questions sur le

2 18 octobre 1991 et même deux jours après le 14 octobre, et cetera. Même

3 cette Chambre est dans une mesure si quelque chose s'est produite le 18 de

4 savoir ce qui s'est passé le 14 et le 15. Le témoin a enlevé son casque.

5 Veuillez poursuivre.

6 Mme LOUKAS : [interprétation] La raison pour laquelle j'ai demandé au

7 témoin d'ôter son casque de traduction, et ce que je voulais démontrer ici

8 c'est qu'il y a une question de crédibilité entre M. Margetts et le témoin.

9 Ceci est relativement malvenu. Cela place la Défense dans une position

10 telle qu'elle devra peut-être appeler M. Margetts sur la question de la

11 crédibilité du témoin.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si cela nous aiderait

13 beaucoup. Bien évidemment, s'il y avait une telle demande qui était soumise

14 à la Chambre, nous en déciderions. En même temps --

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'importance et la pertinence de la

17 question est limitée au vu des changements qui ont été apportés.

18 Madame Loukas, veuillez poursuivre.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Au vu de -- Excusez-moi.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au vu des changements apportés à la

21 déclaration dont nous parlons.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une question qui

23 est portée au crédit dont bénéficie le témoin.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame, comme j'ai dit, la pertinence de

25 ce point est limitée. Je n'ai pas dit que ce n'était pas pertinent. J'ai

Page 10741

1 dit que la pertinence de ce point était limitée, veuillez poursuivre, s'il

2 vous plaît.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

4 Si Monsieur Djokanovic veut bien remettre son casque.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 Mme LOUKAS : [interprétation]

7 Q. Maintenant, Monsieur Djokanovic, pour ce qui est de votre rapport avec

8 M. Krajisnik si je puis m'exprimer de la sorte --

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Peut-on montrer à M. Djokanovic sa deuxième

10 déclaration faite en 2003.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle serait la page de la version

12 anglaise, Madame Loukas ?

13 Mme LOUKAS : [interprétation] La page de la version anglaise serait la page

14 10. Il s'agit de la déclaration du mois de décembre.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En B/C/S --

16 Mme LOUKAS : [interprétation] Nous vérifions à l'instant avec l'interprète,

17 Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur Djokanovic, vous avez un exemplaire de votre déclaration

19 devant vous, à la page 10 de la version anglaise et nous vérifions en ce

20 moment à quelle page cela figure dans la version en B/C/S.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, je ne parle pas le B/C/S

22 mais je crois que cela figure à la page 11, si c'était le cas je ne serais

23 pas surpris. Le bas de la page 10 de la version anglaise se trouve au

24 milieu de la page 11 de la version en B/C/S.

25 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vois. Il s'agit du bas de la page 10, en

Page 10742

1 bas de la version en B/C/S qui continue à la page 11.

2 Q. Est-ce que vous avez ce passage devant les yeux, Monsieur Djokanovic ?

3 R. Oui, j'ai les pages 10 et 11 devant les yeux.

4 Q. Ce paragraphe, l'avez-vous lu ?

5 R. Parlez-vous du dernier paragraphe de la page 10 qui continue à la page

6 11 ?

7 Q. C'est bien cela.

8 R. Oui.

9 Q. Avez-vous lu ce paragraphe ?

10 R. Oui. Ici, on fait référence au moment où --

11 Q. D'ailleurs le paragraphe précédent aussi. Peut-être voulez-vous lire le

12 paragraphe suivant.

13 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons du mal à

14 retrouver le paragraphe auquel fait référence Mme Loukas.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la version anglaise, les trois

16 derniers chiffres ERN sont 185, et sur cette page-là, il s'agit du deuxième

17 et du troisième paragraphe.

18 M. MARGETTS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Dans la version anglaise, nous parlons de la

20 page 10, et c'est le deuxième paragraphe entier. Maintenant, je fais

21 référence au premier paragraphe entier qui y figure et au deuxième

22 paragraphe entier.

23 Q. Monsieur Djokanovic, avez-vous relu ces deux paragraphes ?

24 R. Oui, et j'ai également relu le paragraphe précédent.

25 Q. Ce que nous avons dans ces passages c'est que vous dites que Djeric, M.

Page 10743

1 Branko Djeric, vous a demandé de devenir membre du gouvernement; est-ce

2 exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Ensuite, vous dites que vous étiez d'avis que, "quelqu'un avait fait

5 obstruction au vote, et donc je ne suis pas devenu membre du gouvernement."

6 Est-ce que vous voyez ceci ?

7 R. Oui.

8 Q. Maintenant, la phrase suivante dit, je cite : "A cette époque, M.

9 Krajisnik avait établi sa position de manière très ferme." Est-ce exact ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Vous dites que c'est à cause de M. Krajisnik que vous n'êtes pas devenu

12 un membre du gouvernement; est-ce exact ?

13 R. Non, non, du tout. Je ne le tiens pas responsable.

14 Q. Un petit peu plus loin dans ce même paragraphe, vous avez dit : "Il est

15 possible que le premier ministre suggère que je devienne ministre, et

16 l'assemblée a rejeté ceci." Voyez-vous ce passage ?

17 R. Oui, oui.

18 Q. Vous avez dit : "Ils ne pouvaient pas voter contre ma participation au

19 gouvernement ouvertement parce qu'ils n'avaient pas d'arguments qui

20 tenaient. Néanmoins, ils ont créé une situation où il n'y avait pas assez

21 de gens pour voter." Est-ce exact ?

22 R. C'est ce qu'il est dit ici. Ce sont des réponses que j'ai données aux

23 questions des enquêteurs. Mais toute l'histoire porte sur la situation à

24 Zvornik avec M. Djeric. M. Branko Djeric, qui était premier ministre de la

25 République serbe, quand il a entendu que M. Brano Grujic m'avait attaqué

Page 10744

1 verbalement au cours de la réunion précédente, il a dit que j'avais été

2 accusé de crimes de guerre par Alija Izetbegovic, et maintenant, j'étais

3 accusé par Dragan Djokanovic de ces mêmes choses.

4 Cette conversation avec M. Djeric a pris place dans le bâtiment Kikinda où

5 la présidence se trouvait. Djeric et moi-même avons parlé de quelques

6 détails sur quelques points, et après qu'il m'ait proposé de devenir membre

7 du gouvernement, je lui ai demandé, Monsieur Djeric, voulez-vous vraiment

8 que le gouvernement contrôle plus que simplement le parking devant l'hôtel

9 Bistrica à la montagne Jahorina ? Il a dit, Oui. Je n'arrive pas à lutter

10 contre les crimes dont on parle constamment. M. Djeric a répondu, Oui, vous

11 pouvez compter sur mon soutien. Je vais accepter d'être membre de votre

12 gouvernement. Même si nous n'avons pas parlé du département en particulier.

13 Je vais essayer d'obtenir le soutien des membres de la présidence, et je

14 suis relativement sûr que vous aurez le soutien de deux membres de la

15 présidence. Je parlais de M. Koljevic et de Mme Plavsic à l'époque.

16 Ceci était le sujet de notre conversation, et j'ai reconnu que je serais

17 capable de lui offrir du soutien, le soutien de Biljana Plavsic et M.

18 Koljevic, parce que j'avais déjà parlé de ces problèmes sur le terrain et

19 des crimes qui avaient déjà été commis. J'en avais déjà discuté avec eux et

20 je connaissais leur point de vue, donc je comptais sur le fait que Mme

21 Plavsic et M. Koljevic allaient être d'accord, et que M. Karadzic allait

22 accepter.

23 Conformément à ceci, je ne pouvais pas compter sur le soutien de M.

24 Krajisnik parce que je savais qu'il avait des liens très étroits avec les

25 deux ministres qui, à l'époque, étaient ceux qui faisaient l'objet de plus

Page 10745

1 d'accusations, M. Mandic, le ministre de la Justice et le ministre de

2 l'Intérieur, et le ministre de la Police, M. Stanisic.

3 Cet été, il y a eu une réunion de l'assemblée à Bijeljina à laquelle je

4 n'ai pas assisté. Laissez-moi décrire la situation politique à l'époque. Le

5 premier ministre n'avait pas à former un cabinet à l'époque, et l'assemblée

6 a actuellement --

7 Q. Il ne répond pas à ma question.

8 Monsieur le Président ?

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi.

10 Monsieur Djokanovic, laissez-moi relire votre question, Madame Loukas.

11 Votre réponse était si longue que la question n'apparaît plus à l'écran.

12 La question qui vous avait été posée était : Vous avez dit ils ne

13 pouvaient pas le faire ouvertement. Ils ne pouvaient pas m'évincer par des

14 votes ouvertement parce qu'ils n'avaient pas d'arguments contre moi.

15 Néanmoins, ils ont créé une situation dans laquelle il n'y avait pas assez

16 de votants.

17 Madame Loukas, vous demandez au témoin si ceci est exact. Vous lui

18 soumettez cinq, six ou sept éléments et vous lui demandez si ceci est exact.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Il s'agit d'une citation, Monsieur le

20 Président, de sa déclaration.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends bien. Je crois que le

22 témoin pense que ceci a besoin d'explications supplémentaires, sans quoi la

23 question n'aurait pas de raison d'être.

24 Si vous avez des éléments de réponse plus précis, vous êtes invité à

25 lui poser des questions moins complexes. Vous auriez pu dire plus

Page 10746

1 ouvertement, pourquoi pas ouvertement ? S'il s'agit d'arguments fondés ? De

2 quels arguments s'agit-il ? Mais là, vous donnez tout un éventail de choses

3 auquel le témoin doit répondre. Veuillez poursuivre, Madame Loukas.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je regarde l'horloge

5 et je ne vais plus avoir de temps pour mon contre-interrogatoire.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est pourquoi je vous donne l'occasion,

7 et je vous invite à poser des questions de manière différente, pour avoir

8 des réponses plus facilement, et le témoin saura mieux quoi répondre.

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai peu de temps.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Utilisez ce temps pour poser vos

11 questions au témoin.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je suis prête à

13 poursuivre avec les questions sur ce point.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez poursuivre.

15 Mme LOUKAS : [interprétation]

16 Q. Monsieur Djokanovic, pour revenir à votre déclaration, vous dites :

17 "Ils ne pouvaient pas le faire ouvertement. Ils ne pouvaient pas m'évincer

18 par des votes ouvertement donc ils ont créé une situation où il n'y avait

19 pas assez de votants."

20 Qui est ce "eux" ? De qui s'agit-il?

21 R. Ceci représente l'assemblée entière du peuple serbe, parce que ce que

22 je disais, quand je faisais référence aux problèmes à Zvornik, était un

23 problème politique connu des politiciens de Bosnie-Herzégovine. S'il était

24 question que je devienne ministre, ce que voulait M. Djeric, certains des

25 députés ont fait état de points de vue ou du fait qu'il voyait de manière

Page 10747

1 positive ma nomination - en fait, certains ont même voté pour que je

2 devienne ministre - ce qui reviendrait à dire que le premier ministre

3 devrait former un cabinet, qu'il serait responsable du travail, et que le

4 gouvernement devrait faire son travail conformément à la constitution, ce

5 qui voudrait dire que je serais une personne qui allait parler des crimes

6 de guerre à l'époque.

7 Il est bien connu en politique, si l'on parle de ces problèmes, on

8 "s'autonomine" pour travailler dans un département en particulier. Dans ce

9 cas, en fait, j'étais en train de me proposer de travailler dans ce

10 département et avec les activités entreprises par la Republika Srpska pour

11 traiter du problème des crimes de guerre.

12 Q. Bien. Examinons le prochain paragraphe, s'il vous plaît.

13 Vous dites, par rapport à ceci, sur le fait que vous alliez devenir

14 ministre, vous dites, et je cite : "Plutôt que de voter immédiatement, on a

15 demandé une interruption, et quand les membres sont revenus, il n'y avait

16 plus le quorum et on ne pouvait plus voter."

17 La personne à laquelle vous faites référence là, il s'agit bien de M.

18 Krajisnik n'est-ce pas, parce qu'il était le président de l'assemblée ?

19 Vous êtes d'accord avec ceci, Monsieur Djokanovic ?

20 R. Je n'étais pas dans cette session de l'assemblée, mais on m'a rapporté

21 ce qu'il en est ressorti. J'ai demandé à quelqu'un de la présidence de me

22 donner quelques pages du sténogramme qui faisait justement référence à

23 cette question. Je crois que j'ai donné ce document aux gens qui m'ont posé

24 des questions. Je crois que j'ai le document d'ailleurs si je ne l'ai pas

25 déjà soumis.

Page 10748

1 Cela apparaît également dans l'enregistrement audio de la session de

2 l'assemblée. Je voyais d'ailleurs que quelque chose d'étrange se passait

3 dans la salle de conférence.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question qui vous est posée par Mme

5 Loukas c'était : était-ce M. Krajisnik qui a demandé l'interruption, oui ou

6 non ? Si plus de précisions sont nécessaires, Mme Loukas vous le demandera.

7 Veuillez répondre, Monsieur le Témoin. Peut-être qu'avant cela, sur la base

8 de ce que vous avez vu dans les pages du compte rendu, seriez-vous d'accord

9 pour dire que c'est M. Krajisnik qui a demandé l'interruption de la

10 session ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Krajisnik présidait la session de

12 l'assemblée. C'était lui qui suspendait la session.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes bien d'accord.

14 Veuillez poursuivre, Madame Loukas.

15 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Q. Monsieur Djokanovic, vous tenez M. Krajisnik responsable pour le fait

17 de ne pas vous-même être devenu ministre, n'est-ce pas ?

18 R. En général, ici, je suis simplement en train de parler de la situation,

19 de ce qui s'est passé à l'assemblée. Je ne sais même pas si M. Krajisnik a

20 voté pour moi ou contre moi. Je ne sais pas et je ne le tiens pas

21 responsable de quoi que ce soit, quelle qu'ait été la position qu'il ait

22 prise.

23 Q. Il y a deux paragraphes dans votre déclaration qui parlent de ce point.

24 Monsieur Djokanovic, vous serez d'accord avec moi que vous avez consacré

25 deux paragraphes de votre déclaration sur cette question de ne pas devenir

Page 10749

1 ministre ?

2 R. Sur ce point-là, une déclaration entière aurait été nécessaire pour

3 décrire toute cette période. C'était une période au cours de laquelle une

4 nouvelle politique aurait pu émerger au sein de la République serbe de

5 Bosnie-Herzégovine. Ceci n'est pas seulement lié à ma propre participation

6 au gouvernement, non. C'est lié à cela d'une certaine manière, mais c'est

7 plutôt relié au fait que M. Djeric restait là et qu'il informait le cabinet

8 des éléments avec lesquels il pouvait traiter. C'était une période très

9 difficile, et à ma très grande surprise et à celle de tous les gens de

10 bonne volonté, déjà au cours de la session suivante, M. Djeric a été obligé

11 de soumettre sa résignation.

12 Q. Monsieur Djokanovic, je suis en train de vous soumettre l'idée que vous

13 aviez un certain ressentiment contre M. Krajisnik.

14 R. M. Krajisnik et moi-même avions une communication correcte, si je puis

15 dire, pendant cette période au cours de laquelle j'étais ministre. Après la

16 guerre, j'étais à Pale, et il était membre de la présidence de Bosnie-

17 Herzégovine. Avant cela, il était allé voir mes parents, que je trouvais

18 très aimable de sa part. A mon tour, je lui ai rendu visite, et nous avons

19 eu une conversation très agréable, et il n'y avait aucune tension, de

20 quelque sorte que ce soit, entre moi-même et M. Krajisnik.

21 Q. Monsieur Djokanovic, vous avez, en fait, un certain ressentiment et

22 vous êtes biaisé contre M. Krajisnik parce que vous le tenez responsable

23 pour le fait que vous n'êtes pas devenu ministre; est-ce exact ?

24 R. Non. Je suis devenu ministre par la suite. Je considère M. Krajisnik

25 comme un politicien qui était responsable parce qu'il n'était pas tout à

Page 10750

1 fait concentré, et dans le mémorandum sur la Bosnie-Herzégovine, il

2 s'agissait d'un politicien que les gens respectaient et qui aurait pu faire

3 beaucoup plus que ce qu'il n'a fait et que ce qui s'est produit, mais ce

4 n'est que mon opinion politique sur cette réunion de l'assemblée.

5 Puisque nous sommes en train d'en parler, je crois qu'il y a différents

6 points de vue sur ce que M. Krajisnik a fait. Je crois qu'il était beaucoup

7 plus capable de faire plus de choses qu'il n'a démontré qu'il avait fait ce

8 jour-là. Mais je suis devenu ministre quelques mois plus tard. Ce sont des

9 choses que vous ne comprenez pas. J'ai mentionné ceci comme un détail qui

10 explique le fait que ceci aurait pu être le début d'une nouvelle politique

11 et qui aurait été bien mieux pour nous, et qu'il n'y aurait pas eu de

12 procès à La Haye très probablement.

13 Q. Bien, Monsieur Djokanovic, je crois que ceci est le moment de la pause.

14 Je vais passer à un autre point et je vais continuer à vous interroger

15 après la pause, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, nous allons nous interrompre

17 jusqu'à 10 heures 55.

18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

19 --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, j'ai cru comprendre

21 que vous souhaitiez donner une réponse concernant la question de mesures

22 protégées demandées pour le Témoin KRAJ 60.

23 M. STEWART : [interprétation] Oui, effectivement. Monsieur le Président, je

24 ne sais pas s'il serait plus propice peut-être de vous saisir de cette

25 question plus tard.

Page 10751

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne savais pas si vous vouliez rester

2 ou si vous vouliez simplement nous dire ce que vous aviez à nous dire et

3 repartir. Je vous donnais la possibilité de le dire immédiatement.

4 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, en fait, je voulais

5 faire quelques commentaires en guise d'introduction. Il faudrait peut-être

6 passer à huis clos partiel à ce moment-là. Mais étant consciencieux, je

7 voulais attirer votre attention sur ce fait afin que l'on ne fasse pas

8 d'erreur.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De combien de temps auriez-vous besoin

10 pour ces commentaires en guise d'introduction et -- votre réponse ?

11 M. STEWART : [interprétation] Environ cinq minutes, dix minutes en tout.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est beaucoup.

13 M. STEWART : [interprétation] Pardon, Monsieur le Président, je n'ai pas

14 très bien saisi ce que vous avez dit.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, mais c'est long dix minutes.

16 M. STEWART : [interprétation] Dix minutes, Monsieur le Président. C'est une

17 question fort importante.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Veuillez poursuivre et essayez

19 d'être le plus bref que possible.

20 Monsieur Harmon.

21 M. HARMON : [interprétation] En fait, je viens de donner la permission à M.

22 Gaynor de partir il y a quelques instants. C'est lui qui allait être saisi

23 de cette question particulièrement importante à son égard.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. En fait, la raison pour

25 laquelle j'ai soulevé la question de cette façon-ci, que j'ai permis à M.

Page 10752

1 Stewart d'agir de la sorte, c'est que je ne voulais pas qu'il attende une

2 heure pour rien.

3 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je pourrai rester

4 jusqu'à la prochaine pause, et à ce moment-là, nous pourrons peut-être

5 faire tout cela après.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, nous allons laisser

7 cela à plus tard.

8 Pour l'instant, il faudrait faire entrer le témoin. Madame l'Huissière, je

9 vous prie de faire entrer le témoin.

10 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, Mme Loukas

12 poursuivra son contre-interrogatoire. Veuillez poursuivre, Madame Loukas.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Q. Monsieur Djokanovic, revenons maintenant à ce que nous disions juste

15 avant la pause. Vous avez déclaré, à la page 35, ligne 8, que cela fait

16 référence plus particulièrement à l'assemblée du peuple serbe, car ce que

17 j'avais dit concernant les problèmes de Zvornik, était une question

18 politique bien connue parmi les hommes politiques dans la Bosnie-

19 Herzégovine serbe et donc si j'étais pour devenir ministre cet été, M.

20 Djeric voulait que je devienne ministre, et --"

21 L'INTERPRÈTE : Le conseil de la Défense a lu le passage beaucoup trop

22 rapidement.

23 Q. Vous vous rappelez de ce que vous avez dit juste avant la pause,

24 Monsieur Djokanovic, n'est-ce pas, concernant ces deux questions ?

25 R. Oui, les choses se sont déroulées de la façon dont je les ai décrites il

Page 10753

1 y a quelques instants, avant la pause.

2 Q. Bien, Monsieur Djokanovic, vous dites être une personne qui, au cours

3 de cette période, c'est-à-dire à partir du mois de juin, étiez une des

4 personnes qui parlaient des crimes de guerre. Vous parliez énormément de

5 crimes de guerre à l'époque; vous évoquez cette question.

6 R. Au cours de cette période, j'ai été préoccupé par la question de la

7 formation des commissions de guerre, mais pour ce que j'ai vu sur le

8 terrain, j'avais informé les membres de la présidence et j'en avais

9 également parlé au premier ministre de cette situation, ce qui aurait dû

10 élever les niveaux d'alerte auprès des personnes qui auraient dû faire

11 quelque chose. J'avais de très bonnes relations avec le Dr Koljevic et Mme

12 Plavsic au cours de cette période et j'avais beaucoup d'influence. Je

13 pouvais, à ce moment-là, initier une nouvelle politique sur le territoire

14 de la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine.

15 Q. Donc, Monsieur Djokanovic, au cours de cette période, vous nous dites

16 avoir été un héro des crimes de guerre, comme l'a dit la Défense.

17 R. Non. Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai essayé, comme je vous l'ai

18 expliqué, je voulais qu'un nouveau corps exécutif soit créé, qui agirait en

19 accord avec la constitution eu égard aux crimes de guerre et eu égard aux

20 crimes dont les gens parlaient. J'en parlais, moi. Je n'ai pas évité le

21 sujet. Je n'ai pas évité d'aborder ce genre de problème. M. Djeric m'a

22 offert un poste en tant que ministre pour les questions concernant les

23 vétérans de guerre et les victimes de guerre.

24 Q. Monsieur Djokanovic, le fait est que vous n'étiez pas en train de

25 parler à toutes les personnes. Vous n'avez pas parlé à toutes les personnes

Page 10754

1 auxquelles vous aviez pu parler des crimes de guerre au cours de cette

2 période, à toutes les personnes auxquelles vous auriez pu parlé, vous

3 n'avez pas averti tout le monde, au cours du mois de juin et après ?

4 R. J'ai parlé aux personnes qui étaient dans mon entourage. J'en ai parlé

5 avec les personnes pour lesquelles j'estimais qu'ils pouvaient faire

6 quelque chose, qui pouvaient changer certaines choses.

7 Q. L'un des organes dans notre société qui puisse faire une différence,

8 qui puisse initier le changement, c'est les médias. Est-ce que vous

9 relatiez aux médias ce que vous vouliez dire ? Vous êtes-vous entretenu

10 avec les médias ?

11 R. Non. Je n'ai pas senti que toutes les possibilités avaient été

12 utilisées au sein de l'établissement politique de la Republika Srpska. Je

13 croyais que si j'avais eu le soutien de Plavsic et Koljevic pour une

14 nouvelle politique, et que si j'avais obtenu le soutien du premier ministre,

15 étant donné qu'il était le premier premier ministre, je croyais que

16 plusieurs choses pouvaient être réglées par les institutions. Je savais

17 qu'il n'y avait pas de statut de limitation pour les crimes de guerre et je

18 ne croyais pas que j'avais suffisamment de temps pour en parler dans les

19 médias. Mais j'ai fait tout ce que j'ai pu en passant par les institutions

20 de la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine. J'ai fait de mon mieux pour

21 essayer d'établir un système d'Etat. Je dois dire qu'il s'agissait d'une

22 période au cours de laquelle tous les éléments d'Etat n'étaient pas

23 complètement fonctionnels, et ma politique était basée sur la constitution

24 des autorités civiles dans les municipalités, afin d'établir une

25 communication verticale entre les municipalités et la présidence pour

Page 10755

1 l'assemblée et le gouvernement, afin que tout le monde puisse jouer leur

2 rôle au sein d'une constitution, et que tout ceci devait être encore une

3 fois conforme à nos politiques.

4 J'ai deux documents dans ma poche, que j'ai préparés pour ce procès. Je

5 croyais que ces documents étaient importants. L'un d'eux représente le

6 procès-verbal original d'une réunion. Je crois que vous l'avez parmi vos

7 documents. Il s'agit de la proclamation aux citoyens de Bosnie-Herzégovine

8 datée du 5 novembre 1991. Lorsque nous avons fait appel à tous les citoyens

9 de Bosnie-Herzégovine afin qu'ils puissent prendre part aux plébiscites et

10 se prononcer en faveur de la Yougoslavie.

11 Q. Cela ne semble pas être une réponse à ma question, Monsieur.

12 R. Non, non. Je viens de répondre à votre question. Dans cette

13 proclamation, et j'ai la signature originale du Dr Karadzic. Il appuie mon

14 initiative visant à appeler tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine afin de

15 voter pour une Yougoslavie, de rester en Yougoslavie. La politique serbe

16 était très claire dans ce sens. Nous voulions tous nous rendre au

17 plébiscite afin que nous puissions rester au sein d'une Yougoslavie unie.

18 Les Serbes ne voulaient pas quitter la Yougoslavie. Nous avions également

19 la constitution de la République serbe de Bosnie-Herzégovine.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, si j'ai bien Mme

21 Loukas, elle vous disait que la dernière partie de réponse ne répondait

22 plus à sa question.

23 Je comprends, Madame Loukas, que le début de la réponse du témoin

24 répondait néanmoins à votre question. C'est ce que j'ai cru comprendre.

25 Mme LOUKAS : [interprétation] Permettez-moi de relire ma question, Monsieur

Page 10756

1 le Président.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parliez des médias et vous avez

3 demandé au témoin s'il s'était adressé aux médias. Le témoin vous a

4 expliqué pourquoi il ne s'était pas adressé aux médias, et qu'il ne l'avait

5 pas fait.

6 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien. Mais puisque, maintenant, nous

7 parlons du plébiscite de 1991, il semblerait que le témoin s'est assez

8 écarté de la réponse.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il semblerait que c'est néanmoins

10 légèrement éloigné de votre question.

11 Mme LOUKAS : [interprétation]

12 Q. Monsieur Djokanovic, vous nous avez dit, dans le cadre de votre

13 témoignage, que vous croyiez que les alliances de M. Krajisnik, c'est-à-

14 dire que le fait que M. Krajisnik s'appuyait sur la constitution et à la

15 légalité du processus de l'assemblée le 14 et 15 octobre 1991, vous

16 estimiez que ce n'était pas assez.

17 R. Son engagement à l'époque n'était pas suffisant, mais ce n'est pas

18 important pour ce qui me concerne. Je voulais simplement vous dire que nous

19 voulions avoir un environnement sain.

20 Q. Vous pouvez, Monsieur, me dire si vous êtes d'accord ou non; c'est

21 tout. Nous n'avons pas beaucoup de temps.

22 R. Mais j'ai répondu à votre question. M. Krajisnik, ce soir-là, a

23 respecté la forme. Il a complètement respecté la constitution de la RSFY et

24 également les procédures de l'assemblée; il a tout respecté. C'était tout à

25 fait clair. Je l'ai dit à plusieurs reprises au cours de mon témoignage.

Page 10757

1 Mais en tant qu'homme politique, j'ai dit qu'il aurait pu faire encore plus

2 eu égard à ses capacités. C'est une opinion personnelle. Mais, comme je le

3 disais, cela n'était pas important pour ce qui me concerne. Je voulais que

4 l'on crée un environnement juridique. Sur la base de ce plébiscite et la

5 constitution que nous avions proclamée, nous avions copié plusieurs

6 paragraphes de la charte des droits de l'homme, et je voulais que cela

7 figure dans notre constitution et que tous les organes suivent cette

8 constitution.

9 Q. [interprétation] Veuillez répondre à ma question.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, si vous demandez au

11 témoin s'il a parlé de cela et s'il est une personne, vous lui avez posé

12 s'il était une personne, il vous parle en tant que personne et il vous dit

13 qu'il a parlé de ces questions-là. Vous ne pouvez pas blâmer le témoin de

14 ne pas vous dire que oui il est une personne, et qu'il a témoigné dessus.

15 C'est-à-dire que vous posez des questions de telle façon que vous ne

16 devriez pas être surprise si le témoin prend un peu plus de temps pour vous

17 répondre. Mais vous pouvez éviter cela.

18 Mme LOUKAS : [interprétation] Je n'accepte pas votre commentaire, Monsieur

19 le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, néanmoins, veuillez poursuivre.

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Je n'avais pas demandé au témoin s'il était

22 une personne.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, votre question disait : êtes-vous

24 une personne ?

25 Mme LOUKAS : [interprétation] Non, non, je n'ai pas demandé au témoin s'il

Page 10758

1 est une personne.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que le transcript dit

3 néanmoins. J'essaie de retrouver le passage. Vous avez dit : "Dans tous les

4 cas, Monsieur Djokanovic, vous étiez une personne et vous avez témoigné,

5 vous pensiez --

6 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, vous êtes une personne qui pensait. J'ai

7 fait une incise. Vous êtes une personne, virgule, qui a témoigné dessus et

8 qui aviez une opinion.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en fait, c'est ce que vous vouliez

10 lui demander ? S'il était une personne qui avait témoigné dessus ?

11 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui. Je lui avais demandé s'il était une

12 personne qui, à l'époque, avait témoigné et qui avait parlé de cela.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Poursuivez.

14 Mme LOUKAS : [interprétation]

15 Q. Monsieur Djokanovic, le fait est que vous êtes d'avis que M. Krajisnik

16 aurait dû outrepasser le parlement, c'est-à-dire aurait dû aller au-delà du

17 parlement et aurait dû s'adresser, c'est-à-dire aurait dû donner des

18 conférences de presse et organiser des manifestations extraparlementaires,

19 n'est-ce pas ?

20 R. J'en ai déjà parlé. Je ne voudrais pas insister plus longuement dessus.

21 M. Krajisnik a respecté la forme ce soir-là. Mon opinion, en tant que

22 participant, je l'ai déjà dit à cette Chambre, est qu'il n'a pas utilisé

23 toutes les possibilités. Il y avait d'autres façons démocratiques d'agir.

24 Il aurait pu organiser des manifestations, organiser des conférences de

25 presse, informer le peuple, et c'est cela que je voulais dire. Il n'a pas

Page 10759

1 utilisé toutes les ressources qu'il aurait pu.

2 Je ne veux pas donner l'impression que j'ai quelque chose contre M.

3 Krajisnik, pas du tout. M. Krajisnik et moi-même, comme je l'ai déjà dit,

4 nous avions toujours des relations très correctes, et ce que j'ai fait au

5 cours de cette période était d'essayer de contribuer à la paix, et je

6 voulais respecter la constitution. Ici, on peut lire : "Les droits de

7 l'homme. Les citoyens de la Republika Srpska sont égaux dans le droit, et

8 les tâches, et la protection légale --"

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous interromps, Monsieur le Témoin.

10 En écoutant votre réponse, il semblerait que vous confirmez que c'est bien

11 ce que vous avez dit, et c'est ce que Mme Loukas voulait savoir.

12 Veuillez poursuivre, Madame Loukas.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci.

14 Q. Monsieur Djokanovic, je souhaiterais que l'on parle de la période qui a

15 suivi le mois de juin 1992. En juin 1992, vous n'avez pas parlé de crimes

16 de guerre publiquement, n'est-ce pas ?

17 R. J'en avais parlé à chaque fois que j'ai pu en parler. J'en ai parlé

18 avec les personnes de Zvornik, les avisant et les avertissant clairement

19 qu'elles pouvaient être tenues responsables de cela. J'ai parlé aux membres

20 de la présidence. Je n'ai pas parlé dans les médias de cela. Je crois que

21 toutes ces personnes étaient suffisamment intelligentes pour comprendre ce

22 que je voulais dire en quelques phrases.

23 Q. Monsieur Djokanovic, vous ne vous êtes pas adressé aux médias

24 concernant les crimes de guerre en juin 1992, n'est-ce pas ?

25 R. Je n'ai pas eu la possibilité d'en parler dans les médias. J'étais à

Page 10760

1 Pale, et le seul média qui existait là-bas c'était la télévision de la

2 Republika Srpska qui existait encore dans sa forme embryonnaire. C'était un

3 service au service de la présidence. Je n'ai pas vu la nécessité d'accorder

4 des interviews à la télévision. Je croyais que c'était à la présidence, aux

5 corps juridiques, de faire quelque chose, et non pas à moi. En fait, nous

6 n'en avions pas, proprement dit.

7 Q. Qu'en est-il des journaux ?

8 R. Non, non, nous n'en avions pas. J'aurais pu aller à Sarajevo, cela est

9 vrai.

10 L'INTERPRÈTE : Mme Loukas pourrait-elle répéter sa question, nous ne

11 l'avons pas entendue, les phrases se sont entrecoupées.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre question, s'il

13 vous plaît ?

14 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, merci.

15 Q. Qu'en est-il de Glass Podrinje ?

16 R. Oui. Glass Podrinje est un quotidien local de Sabac. Quand j'étais à

17 Zvornik, la journaliste de ce quotidien s'est entretenue avec moi. J'ai

18 retrouvé cette interview plusieurs mois plus tard. Il s'agissait d'un

19 quotidien local. J'ai oublié d'en parler.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, la question ne figure pas

21 au compte rendu d'audience. En outre de cela, sur le canal 4, j'entends le

22 B/C/S et non pas l'anglais. Bon, c'est réparé, j'entends l'anglais. Votre

23 question était de savoir quel est le quotidien Glass Prodinje.

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, c'est le fait, bien.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On a répondu à la question. Veuillez

Page 10761

1 poursuivre.

2 Mme LOUKAS : [interprétation]

3 Q. Monsieur Djokanovic, je souhaiterais vous montrer un document.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Je crois avoir informé l'Accusation du fait

5 que j'allais me servir de ce document. J'ai également quelques exemplaires

6 pour les Juges de la Chambre ainsi que pour le Greffe, en anglais, bien

7 sûr.

8 Q. Monsieur Djokanovic, avez-vous le document sous les yeux ?

9 R. Oui, oui.

10 Q. Monsieur Djokanovic, il s'agit d'une interview que vous aviez accordée

11 à ce journal en tant que commissaire au niveau de la république pour un

12 certain nombre de municipalités de la région de Bihac, de la République

13 serbe de Bosnie-Herzégovine. Est-ce bien ce document-là que vous avez sous

14 les yeux ?

15 R. Oui, oui, effectivement.

16 Q. Il y a également une photographie vous représentant, est-ce exact ?

17 R. Oui.

18 Q. Lorsque vous avez accordé cette interview, vous disiez la vérité,

19 j'imagine, n'est-ce pas ?

20 R. J'ai toujours dit la vérité. Il s'agit d'un entretien qui a eu lieu

21 avec Mme Petkovic, une journaliste. J'ai deux commentaires à faire. Je n'ai

22 pas autorisé le texte, dans le sens où elle a mené une interview avec moi,

23 dans le sens d'autoriser, je voulais dire qu'elle ne me l'a jamais montré

24 après l'interview. J'ai essayé de le retrouver pendant plusieurs mois, car

25 je ne savais pas qu'est-ce qu'elle avait écrit et ensuite, j'ai eu quelques

Page 10762

1 doutes lorsque je l'ai vu être assise avec Marco Pavlovic quelques heures

2 après notre entretien. C'est la raison pour laquelle j'ai essayé de mettre

3 la main sur ce document. Non, je ne l'avais pas vue après l'interview.

4 Q. Mais, Monsieur Djokanovic, vous n'avez jamais demandé qu'il y ait des

5 corrections apportées à l'époque, n'est-ce pas ?

6 R. Les journaux avaient publié cet article. J'ai dit aux enquêteurs du

7 Tribunal que, s'agissant de cet entretien et de l'entretien pour un journal

8 local de Bratunac, ces deux entretiens que je n'avais pas autorisés, c'est-

9 à-dire que quelques mots ont été ajoutés et ces mots ont changé

10 complètement le sens de ce que j'ai voulu dire.

11 Q. Le journaliste vous pose la question suivante : "La guerre en Bosnie-

12 Herzégovine a créé l'impossibilité d'une coexistence de peuples

13 constitutifs car les gens ne peuvent plus vivre ensemble comme il est de

14 plus en plus évident."

15 Pourriez-vous donner lecture aux Juges de la Chambre lorsque vous

16 avez répondu à cette question, dans le cadre de cet entretien, tel qu'il

17 est écrit et publié dans cet article ?

18 R. Vous pensez à la dernière question.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vu la dernière réponse, vous

20 pouvez lui demander soit de lire ce qui est écrit dans le journal ou nous

21 dire ce qu'il a dit durant cet entretien. Décidez-vous. Vous lui avez

22 demandé de lire ce qu'il avait dit.

23 Mme LOUKAS : [interprétation] En effet.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vu sa réponse précédente,

25 cette question est un peu trop complexe. Il ne peut faire que lire ce qui a

Page 10763

1 été écrit.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien.

3 Q. Monsieur Djokanovic, d'après ce que dit la journaliste,

4 Mme Petkovic, vous auriez dit, je cite : "Dans les municipalités où

5 fonctionnent la République serbe de Bosnie-Herzégovine, tout le monde a le

6 droit à la liberté de déplacement, telle est la situation dans la

7 municipalité serbe de Zvornik. Les Musulmans qui veulent se retirer de

8 cette région, ils peuvent le faire en toute sécurité. A cette fin, des

9 autocars sont à leur disposition de Zvornik, et ceux qui veulent être

10 transportés de façon organisée, ils peuvent le faire. La plupart des gens

11 partent en Subotica. Chacun a le droit de protéger sa famille. Nous

12 reconfirmons que les Serbes respectent le principe humanitaire et qu'ils ne

13 forcent personne à quitter les territoires qui sont sous leur contrôle.

14 Tout peut-être vérifié. Les Serbes veillent à la paix, respectent les

15 droits de tous les peuples, y compris le droit du peuple serbe d'avoir son

16 état et de l'organiser conformément à la loi et façon démocratique."

17 Monsieur Djokanovic, qu'est-ce qui ne répond pas, dans cet entretien,

18 à ce que vous avez dit ?

19 R. Dans ce passage, tout a été correctement dit, mais il y a un

20 détail : c'est une interview donnée après que j'ai rencontré les gens de la

21 cellule de Crise. C'est mon commentaire à la suite de mes entretiens avec

22 la cellule de Crise, mais avant que je ne m'entretienne avec certains

23 citoyens de Zvornik. Je viens avec une plate-forme pour le travail des

24 commissions. A aucun moment, je ne doutais d'elles, ni des autorités

25 locales de vouloir respecter les droits de l'homme.

Page 10764

1 Q. Monsieur Djokanovic --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, votre microphone,

3 s'il vous plaît.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, certainement.

5 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

6 Mme LOUKAS : [interprétation]

7 Q. Monsieur Djokanovic, cette interview date du 25 juin, est-ce

8 exact ?

9 R. C'est l'interview qui a été publiée le 25 juin, mais elle a été

10 faite le jour où je suis venu à Zvornik, porteur de ces trois documents.

11 Là, je me suis rendu dans la mairie et je suis venu sans être invité à la

12 session de la cellule de Crise. Je leur dis que j'avais vu de vieilles

13 personnes traverser le pont pour se rendre à Mali Zvornik et je leur ai

14 demandé pourquoi ils le faisaient. Ils m'ont répondu que probablement, ils

15 cherchaient abri chez leurs familles à Mali Zvornik et que beaucoup

16 prenaient le car pour Subotica. De sorte que dans mon entretien avec ce

17 journaliste, j'avais fait mention, en essayant de comprendre et puis

18 d'expliquer ce que j'avais vu, pourquoi ces gens s'acheminaient à pied vers

19 la Serbie. A ce moment-là, je ne doutais point des bonnes intentions des

20 personnes de Zvornik.

21 Q. Lorsque vous dites que plus tard vous avez appris des nouvelles

22 informations, pourquoi n'avez-vous pas saisi les médias après coup ?

23 R. Je n'avais pas la possibilité de saisir les médias. C'est une

24 journaliste que je connaissais d'avant, je l'ai vue à Zvornik. Elle avait

25 travaillé à Radio Zvornik et nous avions commencé tout à fait spontanément

Page 10765

1 à en parler. Je n'avais pas cherché la journaliste. J'ai voulu une fois

2 rentrer à Pale, en discuter avec les gens de la présidence. Pourquoi

3 j'allais saisir les médias avant de m'entretenir avec la centrale ? J'avais

4 des moyens techniques d'allez à Belgrade et de parcourir les médias pour en

5 parler. Je ne l'ai pas fait, je ne le ferai même pas maintenant.

6 Q. Monsieur Djokanovic, avez-vous dit à cette journaliste ce que vous

7 croyez qu'elle espérait entendre de vous ?

8 R. Non. Le mieux serait de trouver l'original, les notes des entretiens

9 qu'elle a eus avec moi. Je vous ai dit qu'une heure après mon entretien,

10 j'ai vu cette journaliste en compagnie de Marko Pavlovic, un membre de la

11 cellule de Crise.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, la question a été,

13 si vous aviez dit à cette journaliste ce que vous croyez qu'elle espérait

14 entendre de vous.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai voulu être correct et j'attendais

16 que la journaliste soit correcte aussi, à savoir, quand elle prépare son

17 texte qu'elle vienne me voir surtout que c'était un temps délicat, et non

18 pas tout de suite de parler au membre de la cellule de Crise, Marko

19 Pavlovic.

20 J'ai retenu ce moment. Ils étaient assis sur une terrasse et ils se

21 sont parlés et j'ai eu un doute.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, j'interprète cette

23 réponse de façon à ce qu'à ce moment-là le témoin n'était pas guidé par une

24 éventuelle volonté de répondre aux intérêts de la journaliste ?

25 Je vous prie de poursuivre dans ce sens.

Page 10766

1 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien.

2 Q. Monsieur Djokanovic, tout simplement vous ne nous dites pas la vérité

3 quant à savoir si les crimes de guerre ont été déclarés, ont été --

4 R. Non, je n'ai pas dénoncé les crimes de guerre aux médias. Je ne l'ai

5 pas fait, je ne le ferais pas maintenant non plus. Il n'était plus logique

6 et j'aurais fait autant, je serais rentré voir les membres de la présidence.

7 Je peux peut vous répondre à toutes les questions avec un oui ou un

8 non, mais s'agissant de ces choses cruciales, je dois vous expliquer les

9 choses. Tout simplement, nous en avons parlé à Pale avec tous les membres

10 de la présidence. Je ne me souviens pas si le 16 au soir, Branko Djeric

11 était présent mais si ce n'était pas le 16, je lui ai parlé en tête-à-tête

12 plusieurs jours après, quand il m'avait proposé de devenir membre du

13 gouvernement.

14 Q. Monsieur Djokanovic --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, je vais vous posez une

16 question.

17 Mme LOUKAS : [interprétation] Certainement.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a compris de toute évidence à

19 votre question quant à la dénonciation des crimes de guerre en pensant

20 qu'il devait les dénoncer à Pale. Est-ce que vous le pensiez vraiment ainsi,

21 parce que vous avez dit au témoin, d'abord que vous ne dites pas la vérité

22 quant à la dénonciation des crimes de guerre et cela a enchaîné directement

23 sur les questions concernant la presse et son interview. Mais sur la base

24 de sa réponse, j'ai l'impression qu'il ait compris que vous pensiez à la

25 dénonciation des crimes de la guerre auprès des politiciens. Est-ce que

Page 10767

1 vous avez pensé à cela ?

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, je pensais à la dénonciation des crimes

3 de guerre à Pale.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, poursuivez.

5 Mme LOUKAS : [interprétation]

6 Q. Monsieur Djokanovic, vous avez pu faire plus que vous n'avez fait,

7 n'est-ce pas ? Ne serait-ce qu'en qui concerne les crimes de guerre de

8 cette époque-là ?

9 R. Oui. Si j'avais pu, j'aurais certainement fait davantage.

10 Q. Vous ne l'avez pas fait ?

11 R. Peut-être je ne savais pas le faire à l'époque. Peut-être ne

12 connaissais-je pas les voies appropriées pour faire parvenir cela jusqu'au

13 public.

14 Maintenant, quand je reviens en arrière, certainement j'aurais pu

15 faire pas mal d'autre chose. Vous avez raison. J'aurais dû saisir les

16 médias bien avant, cela j'aurais pu le faire. J'avais une communication

17 libre jusqu'à Zvornik. J'aurais pu partir à Belgrade, organiser une

18 conférence de presse pour les journalistes étrangers, mais nous avions des

19 affaires dans la direction de la Republika Srpska sur la constitution du

20 nouveau gouvernement après la démission de Branko Djeric. J'espérais que le

21 nouveau gouvernement allait mettre en place une politique nouvelle et que

22 nous allions nous opposer en tant que système aux crimes de guerre. Je ne

23 cherchais pas la publicité, je ne cherchais pas l'image de héros. J'étais

24 quelqu'un qui a voulu confronter ces problèmes tout en étant conscient de

25 l'impopularité de cette démarche. Tout ceux qui m'avaient entendu en parler

Page 10768

1 savaient très bien que c'était impopulaire et qu'il valait mieux être

2 opportuniste.

3 Q. Monsieur Djokanovic, dans votre interview et dans vos déclarations

4 données à l'Accusation, elles sont deux, ainsi que pendant votre

5 interrogatoire principal cette semaine, vos dépositions, vos déclarations

6 sont toutes colorées de ce fait, du fait que vous souhaitez remettre la

7 responsabilité de vous-même, de vous en tant que commissaire de guerre. Ce

8 que je vais vous dire maintenant est que, ce que vous avez dit de M.

9 Krajisnik, concernant l'information sur les crimes de guerre et concernant

10 les commissions de guerre, vous avez fait tout cela pour vous assurer que

11 vous ne serez pas accusé. Vous avez ainsi fourni à l'Accusation précisément

12 ce que l'Accusation vous a demandé. Qu'est-ce que vous en dites ?

13 R. Pendant tout le temps de mes entretiens avec les enquêteurs du Tribunal,

14 je leur disais que je faisais partie de cette direction, que c'était ma vie

15 que même maintenant cela m'accompagne. Je n'en parle pas comme d'une chose

16 qui serait périphérique. Cela faisait partie de moi-même.

17 Vous pouvez imaginer ce que cela veut dire se trouver dans une

18 situation dans laquelle je suis. Je suis ici à témoigner, et que mon allié

19 politique et mon ami, M. Krajisnik, se trouve de l'autre côté. Jamais en

20 aucun moment les enquêteurs - et ils en sont parfaitement conscients - est-

21 ce que je ne me suis jamais justifié. Je faisais partie de cette politique.

22 Je cherche seulement à expliquer ce que je faisais et ce que j'ai voulu

23 faire. Si, dans tout cela, il y a une culpabilité pour moi, j'accepterai

24 immédiatement.

25 Vous m'avez demandé si j'avais pu faire davantage. Maintenant, quand

Page 10769

1 je regarde en arrière, oui, j'aurais pu, j'aurais pu risquer ma tête. Mais

2 ne croyez-vous pas que je suis en train de le faire maintenant

3 précisément ?

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si votre micro avait été branché, on

6 aurait pu vous entendre dire que vous n'avez plus de questions.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

8 Pour terminer maintenant mon contre-interrogatoire, conformément à la règle

9 90(H), je devrais dire que la déposition soutenant que M. Krajisnik, en sa

10 qualité de membre de la présidence, était informé sur les crimes de guerre,

11 la déposition concernant la position d'influence de M. Krajisnik dans le

12 cadre de l'hiérarchie, concernant sa position à l'égard des crimes de

13 guerre, tous ces aspects de cette déposition de M. Djokanovic sont de

14 nature à montrer que vous, Monsieur Djokanovic, vous essayez d'inculper M.

15 Krajisnik pour sauver votre propre peau.

16 C'est ce que je vous dis, Monsieur Djokanovic.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous espérez que M.

18 Djokanovic vous réponde ?

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'entends qu'il

20 me réponde. Je pourrais ajouter même que :

21 Q. Je suppose que vous n'êtes pas d'accord avec moi, Monsieur Djokanovic.

22 R. J'ai fait ce que j'ai pu faire dans le cadre du système de la politique

23 de la Republika Srpska. Quand j'ai vu que tous les moyens étaient épuisés,

24 j'ai démissionné et j'ai quitté cette politique. Je suis resté encore un

25 certain temps, parce qu'aux termes de la constitution, je devais

Page 10770

1 m'acquitter de cette tâche. Mais en ce qui concerne les crimes de guerre,

2 j'aurais dû faire davantage à l'époque.

3 Comme vous m'avez dit, les médias, j'aurais dû saisir les médias là où je

4 pouvais le faire, organiser les conférences de presse, et en parler.

5 J'aurais dû aller au camp de Prijedor, essayer, tout au moins, d'y aller,

6 quand j'ai lu dans les médias que ce camp existait. Tout cela j'aurais dû

7 faire et je ne l'ai pas fait.

8 Q. Monsieur Djokanovic, vous n'avez pas discuté avec M. Krajisnik sur les

9 crimes de guerre. Je vous le dis et je suppose que vous n'êtes pas d'accord

10 avec moi, et il suffit de répondre par un oui ou un non.

11 R. J'ai discuté avec M. Krajisnik à ce sujet. Du reste, nous avons eu

12 l'occasion, tous, de nous entretenir à ce sujet aux sessions de l'assemblée

13 de la Republika Srpska.

14 Mme LOUKAS : [interprétation] Nous n'avons plus de questions.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

16 Maître Loukas, même sans venir d'un pays de la "common-law," j'ai toujours

17 interprété la Règle 90(H) comme une règle qui vous impose de présenter vos

18 arguments au témoin, et non pas qu'à la fin de votre contre-interrogatoire,

19 vous confrontez le témoin en soutenant que, tout le temps, il n'a pas été

20 conséquent. Mais c'est une question d'ordre technique. Je me félicite

21 d'avoir mal interprété cette règle 90(H).

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, c'est quelque chose

23 qui est individuellement interprété par chaque avocat représentant chacune

24 des parties.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Même quand vous avez dit n'avoir

Page 10771

1 plus de questions, vous avez continué à l'interroger. Il est un peu

2 difficile de le comprendre --

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vois.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais peu importe. Je ne pense pas que ce

5 soit une question cruciale en ce moment. Mais peut-être vous pourriez en

6 réfléchir un petit peu.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, mon seul point est

8 ceci.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 Mme LOUKAS : [interprétation] Lorsque l'on traite de questions de cette

11 nature --

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] J'ai juste voulu être sûre en ce qui concerne

14 la règle 90(H) --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis en train de parler de l'heure

16 qu'il est, de savoir comment nous avons utilisé notre temps. Je ne pense

17 pas que ce soit une affaire trop importante pour la Chambre en ce moment.

18 Mme LOUKAS : [interprétation] Effectivement. C'est une règle de ce Tribunal,

19 et nous croyons que la Défense doit s'en tenir --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je préfère ne pas continuez puisque nous

21 --

22 La parole est à l'Accusation.

23 M. MARGETTS : [interprétation]

24 Nouvel interrogatoire par M. Margetts :

25 Q. [interprétation] Docteur Djokanovic, en répondant hier aux questions

Page 10772

1 sur le comportement des membres des cellules de Crise et s'ils appliquaient

2 ou pas leur pouvoir pour remettre leur pouvoir à quelqu'un d'autre. C'est

3 sur les pages 57 et 58 du transcript d'hier.

4 En répondant à cette question, vous avez dit que, dans les municipalités

5 que j'avais visitées, ils avaient accepté la décision quant à la mise en

6 place des commissions.

7 M. MARGETTS : [interprétation] Je vous prie de montrer maintenant à M.

8 Djokanovic ses déclarations.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les avons-nous ?

10 M. MARGETTS : [interprétation] Au lieu de lui montrer les déclarations --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 M. MARGETTS : [interprétation] Il vaudrait peut-être mieux que je lise ces

13 déclarations, pour ne pas perdre du temps.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Faites.

15 M. MARGETTS : [interprétation] Je vais lire maintenant sur la page 15 de la

16 déclaration du témoin, le cinquième paragraphe, les deux premières phrases.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pensez à la première ou à la

18 deuxième déclaration ?

19 M. MARGETTS : [interprétation] Je pense à la première déclaration.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. MARGETTS : [interprétation]

22 Q. Docteur Djokanovic, dans votre déclaration, vous avez dit ce qui suit,

23 je vais vous le lire et cela vous sera traduit, alors je vous prie de faire

24 un commentaire.

25 Vous avez dit : "Quand je me suis rendu dans les municipalités, j'étais

Page 10773

1 porteur des décisions formelles signées par Karadzic, et les représentants

2 des cellules de Crise étaient prêts à se plier à cette ordonnance. Les

3 locaux m'écoutaient, se sont réorganisés, et ont commencé à se comporter en

4 conformité avec ces instructions."

5 R. Même si j'ai retrouvé une situation d'une autonomie assez poussée, je

6 dois dire qu'il n'y avait pas eu d'opposition, du moins pas publique, ni

7 dans les entretiens avec moi, d'opposition à la mise en œuvre de cette

8 décision, sur la mise en place des commissions. Mais de toute évidence, ils

9 avaient tout fait préalablement pour ne pas mettre en œuvre la décision

10 préalablement publiée dans les médias sur la mise en place des présidences

11 de Guerre.

12 Q. Docteur Djokanovic, quel jour, cette décision, a-t-elle été publiée, à

13 savoir, la décision sur les commissions de guerre ? Quand elle a été

14 publiée dans le journal officiel ?

15 R. En parlant de la publication de la décision, c'était la décision sur la

16 mise en place des présidences de Guerre.

17 La décision sur les commissions de guerre dont je parlais, il

18 s'agissait pour une personne physique de Pale d'aller sur le terrain et de

19 constituer un organe qui serait lié au parlement. Je n'avais pas le temps -

20 - que cette décision soit publiée dans le journal officiel, et je l'ai

21 prise sur le document original. Je l'ai prise et je l'ai emportée sur moi

22 sur le terrain.

23 Q. Docteur Djokanovic, que pensiez-vous de la décision de la présidence de

24 mettre en place les présidences de Guerre ?

25 R. Je croyais que ce n'est qu'une cosmétique, qu'au fond rien ne changeait.

Page 10774

1 Il fallait changer de firme. Il ne faillait plus que cet organisme s'appel

2 cellule de Guerre, mais présidence de Guerre. Je crois que, même sur le

3 terrain, ils le considéraient ainsi aussi et ils ne jugeaient pas

4 nécessaire de changer leur raison sociale.

5 J'ai voulu faire quelque chose de substantiel, de créer au niveau de

6 la municipalité un organe qui était directement lié à la présidence de la

7 république et que cet organe constitue une assemblée municipale.

8 Q. Hier, on vous a posé la question sur l'ampleur de l'autonomie des

9 cellules de Crise, et concrètement, on vous a demandé ce que vous aviez

10 entendu à ce propos, sur les communications, quand vous êtes allé à la

11 présidence. Qu'est-ce qu'on vous a dit quant à la communication avec les

12 cellules de Crise ? Je parle de la communication entre les cellules de

13 Crise et la présidence, communication qui existait avant que, vous, vous

14 arriviez à Pale le 10 juin 1992.

15 Je voudrais vous montrer trois documents.

16 M. MARGETTS : [interprétation] Deux sont des pièces à conviction, 529, l'un

17 porte le tabulateur 158, et à l'autre, 193. L'autre document est la pièce à

18 conviction P54.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait mettre la version

20 en anglais sur le rétroprojecteur.

21 M. MARGETTS : [interprétation] Nous avons également des exemplaires pour

22 les Juges, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, dans ce cas.

24 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, le document auquel je

25 voudrais faire référence en premier est en train d'être distribué

Page 10775

1 maintenant. Le deuxième document auquel je ferai référence est celui du 6

2 mai, et le troisième, celui du 5 juin.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Margetts.

4 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, celui que je voudrais

5 d'examiner en premier, c'est la pièce 529, intercalaire 193.

6 Je crois que vous avez un exemplaire de ce document. C'est le procès-

7 verbal de la réunion du conseil de Sécurité national qui est daté du 28

8 avril 1992. J'ai des exemplaires ici si vous n'en avez pas.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, c'est le seul que nous

10 n'avons pas devant nous. Je crois que vous avez distribué un ensemble de

11 documents, mais pas celui-ci, pour autant que je puisse voir. Il est

12 préférable d'ailleurs de distribuer, en premier, les documents auxquels

13 vous allez faire référence en premier lieu, et ensuite, les suivants.

14 Nous avons, devant nous, le procès-verbal de la réunion du conseil de

15 Sécurité national et le gouvernement de la République serbe de Bosnie-

16 Herzégovine daté du 28 avril.

17 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

18 Si l'on pouvait placer les documents devant le témoin, s'il vous plaît.

19 Q. Docteur Djokanovic, si je peux vous demandez de regarder le titre du

20 document que vous avez devant les yeux et de dire s'il s'agit ou non du

21 procès-verbal de la réunion du conseil de Sécurité national avec le

22 gouvernement de la République serbe de Bosnie-Herzégovine qui s'est tenue

23 le 28 avril 1992, et que je vais vous faire référence --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, puis-je vous demander,

25 est-ce que vous vous attendez à ce que le témoin vous dise qu'il s'agit du

Page 10776

1 procès-verbal, qu'il était présent durant cette réunion ou --

2 M. MARGETTS : [interprétation] Non, il n'y était pas.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je viens de lire le titre.

4 M. MARGETTS : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, vous êtes en train de

6 demander au témoin si cela vient du procès-verbal, alors qu'il vient de le

7 dire. C'est ce que le document dit. Il n'y a aucun besoin de lui poser

8 cette question.

9 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

11 M. MARGETTS : [interprétation]

12 Q. Docteur Djokanovic, voulez-vous vous tourner à la dernière page du

13 document que vous avez devant vous. Est-ce que vous voyez que ce document a

14 été signé par le Dr Radovan Karadzic ? Voyez-vous cela ?

15 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, pourrais-je également

16 avoir un exemplaire du document que nous examinons.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame Loukas, vous y avez

18 parfaitement droit.

19 M. MARGETTS : [interprétation]

20 Q. Docteur Djokanovic, est-ce que M. Radovan Karadzic vous a jamais montré

21 des exemplaires de procès-verbaux de réunions du conseil de Sécurité

22 national ?

23 R. Non, jamais. J'ai vu ce document pour la première fois lorsque je

24 parlais aux enquêteurs du Tribunal.

25 Q. Docteur Djokanovic, je voudrais que vous examiniez le paragraphe 9 du

Page 10777

1 document. Je remarque qu'il y est dit que : "Ces rapports ont été adoptés

2 sur le travail de la cellule de Crise et des autorités municipales."

3 Est-ce que Radovan Karadzic vous avait jamais dit qu'il avait reçu de tels

4 rapports sur le travail de la cellule de Crise et des autorités

5 municipales ?

6 R. Non, nous n'avons jamais évoqué un tel sujet. Je n'ai découvert cela

7 que quand je suis venu à Pale. Au cours de l'assemblée précédente, M.

8 Karadzic a dit qu'ils avaient discuté de problèmes de sécurité, mais jamais

9 de problèmes du conseil de Sécurité national.

10 Q. Puis-je vous demander d'examiner le document suivant, daté du 6 mai

11 1992.

12 M. MARGETTS : [interprétation] Pourrait-on placer le document devant le

13 témoin.

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote du document, s'il vous plaît.

15 M. MARGETTS : [interprétation] Je crois qu'il s'agit de la pièce à

16 conviction P54, intercalaire 529, qui je crois est également la pièce à

17 conviction 529, intercalaire 200.

18 Q. Docteur Djokanovic, dans le premier paragraphe de ce document, il est

19 dit que : "Sur la base de la décision du conseil de Sécurité national de la

20 République serbe de Bosnie-Herzégovine, certaines décisions ont été

21 prises."

22 Est-ce que Radovan Karadzic ou qui que soit d'autre d'ailleurs, vous a dit

23 que la cellule de Crise de Bratunac avait pris des décisions qui mettaient

24 en œuvre des décisions prises par le conseil de Sécurité national ?

25 R. Non.

Page 10778

1 Q. Docteur Djokanovic, je voudrais que vous examiniez le document suivant,

2 s'il vous plaît, qui est un document qui porte la date du 5 juin 1992 et

3 qui est marqué à l'attention du président de la présidence de la République

4 serbe de Bosnie-Herzégovine, et les auteurs duquel sont la cellule de Crise

5 de Novo Sarajevo. Il s'agit de la pièce à conviction numéro 529,

6 intercalaire 158, le titre de ce document est "Rapport d'activités."

7 Est-ce que Radovan Karadzic vous a jamais dit qu'il a reçu un rapport de la

8 cellule de Crise au Novo Sarajevo, seulement quelques jours avant votre

9 arrivée pour travailler à Pale ?

10 R. Non, non, nous n'avons pas parlé.

11 Q. Ayant vu ces trois documents, Docteur Djokanovic, considérez-vous que

12 Radovan Karadzic vous a informé complètement sur la relation des

13 communications avec les cellules de Crise ?

14 R. Il y a que deux points qui peuvent avoir une importance. Novo Sarajevo

15 a des communications territoriales, directes avec Pale et les représentants

16 de la cellule de Crise, à Novo Sarajevo, pouvaient se rendre physiquement à

17 Pale. Ce qui n'était pas le cas pour Bratunac.

18 Q. Pouvez-vous simplement dire au vu de ces documents et après avoir dit à

19 la Cour ce que vous savez sur base de votre connaissance de ces documents,

20 connaissance préalable de ces documents, si Radovan Karadzic vous a informé

21 de façon complète sur la nature des communications avec des cellules de

22 Crise ?

23 R. En examinant ces documents, il est exact de dire qu'il ne m'a pas

24 informé entièrement avant que je ne me rende sur le terrain.

25 Q. Docteur Djokanovic, j'aimerais passer à un autre point et j'aimerais

Page 10779

1 vous demander encore une fois, d'examiner votre déclaration, votre deuxième

2 déclaration.

3 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

4 je crois que vous avez un exemplaire de cette deuxième déclaration.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous l'avons.

6 M. MARGETTS : [interprétation] Cela figure en page 13, à l'avant-dernier

7 paragraphe. Pour Dr Djokanovic, c'est à la page 14 de la version en B/C/S,

8 troisième paragraphe à partir du bas. Encore une fois, Dr Djokanovic n'a

9 pas ce document. Je vais en donner lecture pour les besoins du compte rendu

10 d'audience.

11 Q. Le paragraphe dit comme suit : "La présidence était le commandement

12 Suprême qui commandait les militaires et la police. Quand je suis arrivé à

13 Pale, d'après ce que j'ai vu, j'ai compris qu'il y avait des contacts entre

14 la présidence et le chef d'état-major, tous les jours sur différents

15 points."

16 Est-ce exact ?

17 R. C'était l'impression que j'en avais.

18 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais montrer à

19 Dr Djokanovic, un autre document qui est la pièce P65.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on tout d'abord poser au témoin la

21 question suivante : vous avez dit qu'il s'agissait de vos impressions et

22 votre déclaration dit : "D'après ce que j'avais pu observer, j'ai compris

23 que, et cetera, il y avait des contacts entre la présidence et le chef

24 d'état-major, tous les jours." Qu'avez-vous observé qui vous permet de

25 comprendre que de tels contacts quotidiens existaient ?

Page 10780

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le bâtiment où se trouvait la présidence,

2 nous étions ensemble, toute la journée, du matin jusqu'au soir. Il était

3 impossible ces jours-là de ne pas discuter de questions telles que : Où est

4 Mladic ? Où sont les généraux de l'état-major puisqu'ils étaient à Han

5 Pijesak et nous étions à Pale. Il n'y avait pas de problèmes physiques de

6 communication. Il était également possible de communiquer par téléphone et

7 les lignes téléphoniques fonctionnaient. C'était mon impression mais je ne

8 connais pas de détail, en particulier. Je sais qu'ils se sont parlés, ce

9 jour-là, mais j'avais l'impression qu'ils avaient des communications

10 quotidiennes.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une ligne téléphonique qui

12 fonctionne et je peux appeler les gens dans le monde entier tous les jours

13 mais cela ne veut pas dire que j'ai des communications journalières avec

14 eux. Je veux dire que vous avez dit qu'ils avaient des communications

15 journalières sur base de vos observations. Est-ce que vous pourriez être un

16 petit peu plus précis ? Est-ce que vous avez vu des gens qui entraient dans

17 une pièce ou dans l'autre ? Est-ce que vous avez entendu des gens faire des

18 appels téléphoniques ? J'essaie de trouver des faits qui étayent ce que

19 vous avez dit, quand vous avez dit, "Sur base de mes observations, j'ai

20 compris que, et cetera." J'aimerais savoir quelles sont vos observations ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] A cette à cette époque-là, j'étais présent à

22 plusieurs occasions lorsque Dr Karadzic a parlé au téléphone à M. Mladic.

23 J'ai moi-même parlé à M. Mladic plusieurs fois au téléphone. Si les membres

24 de la présidence sont allés assister à des négociations pour la paix, je

25 restais seul à la présidence et c'est moi qui répondais au téléphone quand

Page 10781

1 les militaires de l'état-major appelaient. J'ai parlé au général Mladic, un

2 certain nombre de fois. Une fois même, général Mladic est même venu en

3 personne à la présidence. Je ne peux pas vous en dire plus.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit que vous avez assisté

5 à des conversations téléphoniques et même que des gens venaient en

6 personne, parfois que vous participiez à ces communications vous-même.

7 La question suivante que j'aimerais vous poser, c'est, vous avez dit tous

8 les jours. Qu'est-ce qui, dans vos observations, vous permet d'étayer

9 ceci ? S'il n'aurait pas eu une telle impression, j'aurais dit, "Je ne

10 crois pas qu'il s'agissait de communications journalières." Je ne peux pas

11 le prouver mais c'était mon impression. Dix ou 15 jours après ma

12 déposition, j'aurais tendance à dire j'étais dans le prétoire tous le jours

13 même s'il y avait des jours de suspension d'audience, c'était mon

14 impression.

15 De ce que je comprends d'après vos dépositions, que sur la base de la

16 fréquence de ces observations, vous aviez l'impression qu'il ne s'agissait

17 pas de communications quotidiennes, au moins, il s'agissait de

18 communications fréquentes. Ce qui vous portait à croire qu'il s'agissait de

19 communications quotidiennes ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est précisément cela, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts.

22 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, merci.

23 J'aimerais maintenant demander que l'on montre au témoin la pièce à

24 conviction P65, intercalaire 17 [comme interprété], nous avons également

25 des exemplaires ici à faire circuler à la Chambre et à la Défense.

Page 10782

1 Q. Ceci est un document qui est une déclaration de fin de guerre qui est

2 datée du 17 décembre 1992, signé par Momcilo Krajisnik.

3 Docteur Djokanovic, étiez-vous présent à une session de l'assemblée le 17

4 décembre 1992, quand cette décision a été prise ?

5 R. Si nous parlons de la réunion de l'assemblée, qui s'est tenue à Zvornik

6 et je pense que nous parlons de celle-là, alors oui, j'y ai assisté.

7 Q. Vous souvenez-vous que cette décision ait été prise ?

8 R. Non. Je ne me souviens pas vraiment.

9 M. MARGETTS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ceci conclut

10 mes questions.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Margetts.

12 Y a-t-il d'autres questions qui surgissent de ces questions

13 supplémentaires ?

14 Mme LOUKAS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien dans ce cas-là --

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisqu'il se peut que les questions des

18 Juges ne puissent pas être répondues en peu de temps --

19 Madame Loukas, M. Krajisnik veut attirer notre attention. Je ne sais

20 pas ce qu'il veut. Je ne sais pas si vous avez remarqué cela -- bien sûr,

21 si vous souhaitez vous pouvez conférer avec l'accusé, si vous voulez

22 bénéficier de l'assistance de l'interprète.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais, conformément à la demande que je

24 vous ai adressée au début de mon témoignage, d'avoir le droit de montrer

25 certaines choses à ce témoin. Je crois que ceci sera très utile. Je crois

Page 10783

1 qu'il y a un malentendu ici.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur Krajisnik, comme

3 je l'ai dit, ceci est permis dans les circonstances exceptionnelles, mais

4 seulement après avoir consulté le conseil de la Défense, et seulement après

5 que vous ayez consulté le conseil de la Défense, je voudrais savoir si le

6 conseil n'a pas d'objection. Tout d'abord, je ne veux pas que vous

7 présentiez les pièces directement au témoin, ou lui poser des questions si

8 nécessaire.

9 Mais tout d'abord, vous devez consulter la Défense pour voir s'il y a une

10 question qui ne peut pas être traitée directement.

11 Monsieur Harmon.

12 M. HARMON : [interprétation] Je crois qu'il ne s'agit que de circonstances

13 exceptionnelles qui permettent ceci. Je n'ai pas vu de circonstances

14 exceptionnelles jusqu'à présent. Deuxièmement, M. Krajisnik a deux conseils

15 à la Défense compétents, à sa disposition.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, nous avons décidé que

17 ce n'était pas en toutes circonstances que nous allions exclure cette

18 possibilité, et je ne dirais pas non immédiatement, et nous allons tenter

19 d'être équitable pour ce qui est de cette décision.

20 Monsieur Krajisnik, nous vous invitons à consulter votre conseil. Peut-être

21 est-il mieux de voir si nous pourrions faire ceci durant la pause, et

22 j'obtiendrai la réponse de votre conseil et de vous-même quant à savoir

23 s'il faut poser des questions supplémentaires et confronter le témoin sur

24 des documents.

25 Nous allons suspendre la séance pendant 20 minutes jusqu'à 13 heures.

Page 10784

1 J'aimerais ajouter que, Monsieur Krajisnik, bien évidemment vos questions

2 ne s'ajoutent pas au temps qui est disponible à la Défense pour le contre-

3 interrogatoire puisque jusqu'à maintenant, c'est de loin plus que la règle

4 des 60 %, le temps qui a été pris, et je ne donne pas de temps

5 supplémentaire à la Défense.

6 Veuillez en discuter avec le conseil de la Défense. Nous allons suspendre

7 l'audience pendant 20 minutes jusqu'à 13 heures.

8 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je simplement

9 poser une question de gestion et d'horaire. Quand Monsieur le Président,

10 Messieurs les Juges, vous proposiez de traiter de cette question en

11 particulier, qui a été mentionnée auparavant pour ce qui est des mesures de

12 protection ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pourrions traiter de cette question

14 maintenant, mais M. Gaynor n'est plus présent. Je suggère que nous le

15 fassions immédiatement.

16 M. STEWART : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, je

17 vous demande pardon de vous interrompre, Monsieur le Président, mais j'ai

18 l'une ou l'autre question pratique dont je voudrais traiter pendant que M.

19 Gaynor se dirige vers le prétoire.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Il y a des questions pratiques qui

21 sont d'une telle urgente qu'elles sont plus importantes que de finir le

22 témoignage de ce témoin ?

23 M. STEWART : [interprétation] Il est très important de les traiter

24 aujourd'hui, Monsieur le Président. Je voulais simplement savoir si M.

25 Gaynor allait trouver son chemin dans le bâtiment.

Page 10785

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin peut trouver son chemin

2 jusqu'au prétoire. Après la pause, vous serez invité à répondre à plus de

3 questions.

4 Monsieur Stewart, je vais vous demander de poursuivre.

5 [Le témoin se retire]

6 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, le calendrier du

7 témoin pour la semaine à venir a changé. Je comprends que l'Accusation,

8 bien évidemment, a beaucoup de difficultés parfois à obtenir des témoins

9 qu'ils comparaissent le jour où ils veulent.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous poser une question ?

11 M. STEWART : [interprétation] Bien évidemment, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci est une question qui doit être

13 discutée en séance ouverte parce qu'autrement, il serait possible pour les

14 parties, immédiatement après la session, dès que nous suspendions

15 l'audience, je suis disponible, d'ailleurs, pour des discussions sur des

16 questions pratiques.

17 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le respect

18 que je vous dois, ces questions doivent être discutées dans le prétoire.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre alors.

20 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il devait y avoir

21 trois témoins en rapport à la municipalité d'Ilijas en particulier. Pour

22 différentes raisons, il est devenu impossible au cours des derniers jours,

23 les choses ont été changées, et bien évidemment, je comprends que M. Harmon

24 fait de son mieux. Je ne suis pas en train de discuter de ceci. Nous devons

25 continuer avec le programme pour la semaine prochaine. Il y a deux témoins

Page 10786

1 d'Ilijas, un qui vient de Kljuc et un de Prijedor. Ceux de Kljuc et de

2 Prijedor sont les témoins qui vont comparaître au contre-interrogatoire.

3 Monsieur le Président, ceci est plus qu'un changement superficiel parce que

4 c'est une manière de diviser le travail entre nous, et Monsieur le

5 Président, il y a une autre discussion qui est commentée par le Tribunal,

6 que je ne veux pas qu'il y ait trop de question de temps qui interfère avec

7 ceci, avec l'équipe de la Défense. Je ne vais pas interroger tous les

8 témoins la semaine prochaine, et Monsieur le Président, il n'est

9 certainement pas pratique pour nous de ce côté d'essayer d'arranger les

10 questions de temps. Je vais parler des témoins la semaine prochaine.

11 Pour ce qui est des deux témoins d'Ilijas, un autre témoin de Kljuc, il y a

12 plusieurs témoins qui ont déjà témoigné, et le premier de ces témoins, nous

13 avons eu donc le cas de Prijedor. C'est un contexte complètement différent

14 de traiter les trois témoins d'une seule municipalité. Je voulais

15 simplement mentionner que, sans entrer dans trop de détail, le témoin de

16 Prijedor, 92 bis, il y a des centaines et des centaines de pages dans le

17 transcript de sa déposition précédente qu'il a donnée avant. Je voudrais

18 que vous me corrigiez si nécessaire, mais je crois qu'il y a eu quatre

19 dépositions auparavant.

20 Monsieur le Président, la raison pour laquelle je mentionne ceci,

21 c'est que je ne sais pas quoi faire. Je suis dans un dilemme. Je dis ceci à

22 la Présidence, à vous Monsieur le Président, Messieurs les Juges

23 aujourd'hui, qu'avec tous ces témoins au cours de la semaine prochaine, et

24 basé sur mon expérience passée, je crois que nous sommes que vendredi, nous

25 avons eu quelques jours. Nous allons faire de notre mieux, et nous espérons

Page 10787

1 que nous serons prêts. J'espère que si je laisse ceci jusqu'à la semaine

2 prochaine, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous allez me dire,

3 et le bureau du Procureur va me dire : Bien, ce témoin est déjà ici, il est

4 venu de Bosnie, nous devons nous occuper de lui. Il ne peut pas retourner.

5 Je suis en train, simplement, de montrer qu'il y a un risque que la

6 Chambre de première instance, Monsieur le Président, parce que j'ai dit

7 qu'il y avait un risque qu'à un certain moment la semaine prochaine, nous

8 devrions dire : Ceci est trop. Nous n'allons pas pouvoir traiter tous les

9 témoins. Nous allons devoir continuer avec tous ces témoins.

10 Monsieur le Président, c'est ce que je suis en train de vous dire

11 maintenant.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, vous devez avoir des

13 mesures protectrices pour KRAJ 60.

14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai indiqué que

15 c'était un élément --

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous devons le faire en séance ouverte.

17 Alors, veuillez le faire.

18 M. STEWART : [interprétation] Puis-je simplement dire que cela prendra dix

19 secondes de votre temps, Monsieur le Président. Messieurs les Juges, sauf

20 si cela se trouve déjà dans votre réponse, ceci n'est pas un supplément

21 oral à votre réponse, c'est notre réponse à la requête.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'en suis conscient.

23 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, ma première question a

24 trait aux Juges de savoir si la Chambre de première instance a eu

25 l'opportunité ou a eu l'occasion, qui est un élément-clé, de regarder au

Page 10788

1 rapport du Haut-Commissariat aux Réfugiés qui a été cité par l'Accusation,

2 de la requête de l'Accusation en rapport avec ceci et avec d'autres

3 témoins ?

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne crois pas que nous ayons eu un

5 rôle dans le rapport présenté; est-ce exact, Monsieur Gaynor ?

6 M. GAYNOR : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne s'agit que des citations.

8 M. GAYNOR : [interprétation] C'est exact. J'ai un exemplaire ici si vous

9 voulez, Monsieur le Président, Messieurs les Juges que je le vous soumette.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voulez-vous, s'il vous plaît, en fournir

11 un exemplaire à la Chambre.

12 M. STEWART : [interprétation] En fait, en résumé, il serait très utile que

13 l'Accusation donne la référence en bas de page, s'il est possible de

14 retrouver le document de cette manière, mais quoi qu'il en soit, Monsieur

15 le Président, nous avons le document.

16 Monsieur le Président, je voudrais attirer votre attention, ainsi que celle

17 des Juges, à l'un ou l'autre point dans le rapport pour ce qui a trait des

18 citations et à la requête.

19 Je voudrais que nous examinions le paragraphe 6, et nous sommes en

20 train de parler d'éléments publics de cette requête. Maintenant, il faut

21 porter une attention "toute spéciale" au passage qui commence par, Monsieur

22 le Président, Messieurs les Juges, que l'on trouve en page 2 du rapport

23 principal. Là, Monsieur le Président, je voudrais simplement remarquer

24 qu'il y a des incidents sur la cinquième ligne, par exemple, en 2002, les

25 témoins du Tribunal pénal international, à deux occasions, ont été l'objet

Page 10789

1 de violence ou la cible d'actes de violence. Je ne veux pas minimiser ceci,

2 Monsieur le Président, mais je voudrais simplement montrer qu'il y a

3 quelques années, ce sont des exemples qui ont été adoptées.

4 L'autre exemple est un exemple qui a eu lieu en mai 2004, le frère

5 d'un suspect de crime de guerre, et cetera, et cetera, deux éléments ici.

6 Un est qu'on a dit qu'il était un informateur et que l'informateur était la

7 cible de violence pour le faire taire. C'est ce que je voudrais faire

8 remarquer ici. Deuxièmement, il apparaît clairement d'après la nature de la

9 description de ce que vous pourriez appeler un élément à haut niveau, ce

10 qui fait référence à Dr Karadzic et à cet informateur. C'est une catégorie

11 toute différente de choses.

12 Jusqu'à présent, sans vouloir minimiser la formulation utilisée dans

13 les rapports du Haut-commissariat aux Réfugiés, c'est la Chambre de mise en

14 accusation et l'expérience de ce Tribunal qui est beaucoup plus pertinent

15 dans ce type de rapport pour une instance qui a des responsabilités

16 beaucoup plus larges et différentes.

17 Jusqu'à présent dans le paragraphe 7 de cette requête, il sera

18 intéressant de regarder la phrase d'introduction devant le passage qui est

19 cité parce que dans le rapport au point 2.2, à la page 3, nous trouvons des

20 lignes dans ce paragraphe qui dit : "Cependant, comme il y apparaît" ici

21 est la citation, et c'est où la citation commence avec la requête. Il a été

22 omis de la situation dans la séance précédente, "dans la plupart des

23 endroits, la sécurité avait été améliorée et que beaucoup de communautés

24 qui retournaient chez elles avaient dit que les relations avec les

25 résidents locaux étaient meilleures et que la police locale agissait de

Page 10790

1 manière professionnelle."

2 C'est une phrase relativement importante que nous avons omise, et

3 étant donné la base de cette requête publique d'attirer l'attention de la

4 Cour aux difficultés de la sécurité en Bosnie. Ceci est lié à la quatrième

5 phrase, quatre ou cinq lignes plus loin dans le passage mentionné, "il y a

6 des incidents sérieux ou graves qui continuent à se produire dans certains

7 domaines."

8 Maintenant, encore une fois, le rapport du Haut-commissariat aux

9 Réfugiés traite dans des termes assez généraux de l'obligation du parti

10 d'obtenir des mesures de protection dans ce cas, et d'être plus spécifique

11 par rapport à ces questions, et de nous indiquer s'il s'agit bien, ici,

12 d'un des éléments qui justifie ces mesures.

13 Jusqu'à présent, en ce qui concerne la citation dans le paragraphe

14 numéro 9 -- je ne vais pas mentionner le paragraphe 8 parce que je ne veux

15 pas prendre de votre temps pour quelque chose qui n'est pas spécifiquement

16 la citation dont le paragraphe 8 n'est pas directement lié aux éléments de

17 preuve qui intéressent le Tribunal. C'est une remarque générale qui, je

18 voudrais dire, fait référence -- et ces incidents ne sont pas connus dans

19 beaucoup de pays d'Europe et encore moins ailleurs dans le monde.

20 Dans le paragraphe 9, la citation-là, la phrase d'introduction, qui

21 est la page 8 du rapport même, la phrase d'introduction dit très clairement

22 qu'il s'agit d'une question particulière qui a trait à la relocalisation et

23 qui s'appelle "l'alternative de fuite interne ou de relocalisation." C'est

24 le premier grand paragraphe qui figure à la page 8 du rapport. "Les

25 victimes de crimes de guerre et des témoins qui témoignent devant les cours

Page 10791

1 locales et le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, le

2 concept d'une fuite interne ou d'une alternative de relocalisation ne doit

3 pas être considérée comme importante d'après le point de vue du

4 Haut-commissariat aux Réfugiés."

5 Ils s'occupent en l'instance du fait qu'un petit pays ou un pays

6 relativement petit comme la Bosnie-Herzégovine est simplement en train de

7 passer quelqu'un vers une autre partie du pays, et que cela ne résolue pas

8 le problème, s'il y avait un problème au début. Mais cela ne vous dit pas

9 quel était le problème au début.

10 Je voudrais simplement commenter sur cette référence qui est celle

11 qui est citée dans le passage où il parle d'eux, et je cite : "Parce que le

12 nombre de criminels de guerre inculpé est insuffisant et qu'en substance,

13 la protection donnée au témoin ou dans le cas d'un témoin qui retourne dans

14 l'ABiH serait probablement exposé à des risques sérieux de sécurité" --

15 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le conseil veut bien ralentir, un tout

16 petit peu, s'il vous plaît ?

17 M. STEWART : [interprétation] Je vais ralentir. "Victime au témoin de

18 crimes de guerre qui retourne en BiH sera exposé à de graves risques de

19 sécurité quand il se retrouve dans l'endroit de relocalisation."

20 Pour l'objectif de ce Tribunal de première instance, qui n'est pas celui

21 qui est établi dans le rapport écrit, bien évidemment, qui est d'une

22 terminologie beaucoup trop large. Cela ne peut pas être universellement

23 vrai. Il n'est pas facile de voir pourquoi une victime qui n'est pas un

24 témoin ou un témoin potentiel est particulièrement exposé à ces risques.

25 Il y a des remarques en rapport avec ce rapport qui sont mises en avant, si

Page 10792

1 vous voulez, ou qui font état d'un fondement général pour l'application de

2 ces mesures. Nous aimerions bien également, avant que nous passions très

3 rapidement à un autre domaine, je crois qu'il serait plus approprié d'aller

4 en huis clos partiel. J'aimerais souligner que la Défense recommande

5 instamment de corriger l'approche qui incombe à la partie qui demande les

6 mesures protectrices pour avoir la meilleure idée générale, et la Chambre

7 de première instance de ne pas donner une image partielle qui mettrait la

8 charge sur l'autre partie de revenir à la suite et dire : Non, ce n'est pas

9 juste. Il ne faudrait pas traiter cette demande de mesures protectrices

10 comme une simple procédure contradictoire. C'est l'obligation de tous ceux

11 qui sont concernés par cet objet, l'Accusation, la Défense, bien évidemment,

12 la Chambre de première instance de s'assurer que le nature publique du

13 procès est confinée au minimum pour ce qui est des remarques introductives

14 --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, nous avons également la

16 partie française, et j'ai reçu un message que j'aimerais vous demander de

17 ralentir.

18 M. STEWART : [interprétation] Bien évidemment, Monsieur le Président, je

19 vais le faire. Je vous demande de m'excuser. J'ai toujours peur de prendre

20 plus de temps que nécessaire, et je réalise que d'aller trop vite cela

21 n'aide personne. Je ralentis, Monsieur le Président, je ralentis comme je

22 peux, mais je voudrais qu'à ce moment-ci, il serait approprié dans ma

23 demande d'entrer dans une audience à huis clos partiel.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons entrer à huis clos partiel.

25 [Audience à huis clos partiel]

Page 10793

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 10793 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 10794

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 10794 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 10795

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 10795 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 10796

1 [Audience publique]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. La demande qui vient d'être faite

3 en l'absence du témoin doit encore être examinée. Je vais au témoin de bien

4 vouloir quitter le prétoire, mais de rester à proximité.

5 [Le témoin se retire]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question de l'organisation de la

7 semaine prochaine et du calendrier pour la semaine prochaine, et des

8 mesures de protection octoyées au témoin 060, seront prises en

9 considération par les Juges immédiatement après cette session, c'est-à-

10 dire, que nous voudrons savoir même si la décision n'est pas prise en

11 séance ouverte, vous en serez informés, vous serez informés des

12 conséquences de notre décision.

13 La Chambre voudrait d'abord clôturer l'examen de ce témoin et une

14 question qui restait pendante, c'était de savoir si M. Krajisnik avait des

15 questions à poser. Je comprends également qu'il voulait confronter le

16 témoin avec certains documents.

17 Monsieur Stewart, vous avez été consulté par M. Krajisnik.

18 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, bien sûr. Merci

19 de m'en avoir donné l'occasion.

20 Monsieur le Président, ma position est la suivante : puis-je vous le dire

21 immédiatement, puisque ceci est encore une fois une situation dans laquelle

22 je suis en conflit ouvert et public avec mon client, j'aimerais lui

23 demander de m'excuser. Lui, il comprend ceci, comprend que nous soyons en

24 désaccord. Ici, en l'occurrence, nous sommes en désaccord, et c'est

25 malheureux, très malheureux. Mais dans ma demande aux Juges ici, je

Page 10797

1 voudrais faire appel à ce critère : si Mme Loukas, en finissant le contre-

2 interrogatoire, à la pause, se serait tournée vers moi, comme nous le

3 faisons souvent, nous nous tournons l'un vers l'autre pour avoir notre

4 point de vue sur des questions respectives, si elle s'était tournée vers

5 moi et m'avait demandé, Si nous regardions ces questions ici ou là. Disons

6 que le contre-interrogatoire n'était pas fini et que nous étions encore

7 dedans, et si nous soumettions ces documents supplémentaires, si elle

8 m'avait suggéré de faire ce que M. Krajisnik se propose de faire maintenant,

9 j'aurais dit à Mme Loukas, Non, ceci est une des circonstances où nous

10 laissons les choses où elles en sont. C'est notre décision et c'est notre

11 manière de traiter l'affaire. Je n'attends pas de désaccord de surgir entre

12 Mme Loukas et moi-même, comme d'ailleurs cela n'arrive pas en général entre

13 nous.

14 Voilà mon critère, Monsieur le Président. C'est moi qui dirige cette

15 affaire, avec l'assistance efficace de Mme Loukas, et ce n'est pas une

16 circonstance où nous trouvons que l'affaire ne devrait pas être dirigée par

17 nous-mêmes, même si l'accusé veut se défendre. Nous comprenons très bien la

18 position de notre client, mais nous ne sommes pas d'accord avec lui,

19 Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, y a-t-il quelque

23 chose que vous aimeriez ajouter à ce que M. Stewart vient de dire ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges. Je ne souhaiterais pas que l'on pense que je suis insatisfait du

Page 10798

1 travail de mes conseils. Je considère que Mme Loukas a fait un travail

2 extraordinaire hier, et je pense que et j'espère que les Procureurs ne vont

3 pas m'en tenir rigueur, mais je crois qu'elle a perdu beaucoup de temps.

4 A cause de cela, elle n'a pas pu poser toutes les questions qu'elle

5 aurait voulu. Ce témoin n'est pas ici donc je peux vous dire ce que je

6 pense de lui. Il est sûr de ce qu'il dit, mais il se trompe, et je voulais

7 aider aux Juges de la Chambre de tester sur un témoin si c'est bien pour

8 déterminer la vérité. Car si la vérité est trouvée, cela nous servira tous.

9 J'ai abordé tous ces sujets avec Mme Loukas, mais c'est qu'il y a un

10 certain nombre d'arguments très importants qui restent à aborder, c'est-à-

11 dire que, par exemple, je voulais poser la question si quelqu'un a fait

12 quelque chose après que le témoin les ait informé des crimes commis. Car il

13 y a des documents qui existent à l'appui. Deuxièmement, il faudrait savoir

14 si M. Krajisnik était membre de la présidence ou non. C'est cela qu'il

15 faudrait également établir. Voilà la question principale, car tout ce dont

16 le Procureur m'accuse, ce témoin a répété. Je crois que j'ai d'excellents

17 conseils de la Défense, mais malheureusement on ne leur a pas permis de

18 faire leur travail aujourd'hui. Vous l'avez vu vous-même, Monsieur le

19 Président, Messieurs les Juges.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Stewart.

21 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une situation

22 lamentable. Si vous prenez l'hypothèse que je vous ai présentée lorsque Mme

23 Loukas et moi-même nous nous étions entretenus sur le fait de ne pas avoir

24 de contre-interrogatoire, nous ne nous retrouverions pas ici. Nous voulions

25 ne pas explorer certaines zones, mais la Chambre de première instance a

Page 10799

1 rendu une décision. Elle nous a forcés à procéder au contre-interrogatoire.

2 C'est la raison pour laquelle nous vous demandons, Monsieur le Président,

3 Messieurs les Juges, de retirer cette décision fort destructrice.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai invité M. Krajisnik de prendre la

5 parole, car il avait demandé de prendre parole, et j'avais vu qu'il s'était

6 concerté avec vous. Mais je voulais savoir s'il maintenait, s'il voulait

7 poser un certain nombre de questions. Je comprends tout à fait bien que

8 vous n'êtes pas heureux avec la décision prise, et nous verrons si la

9 décision peut être éventuellement changée.

10 Mais, Monsieur Krajisnik, je voudrais être bien clair là-dessus.

11 C'est-à-dire que, lorsque nous avons dit que, dans certaines circonstances

12 exceptionnelles, nous vous permettrons de poser des questions, c'était

13 seulement si, par exemple, votre connaissance de la région, votre

14 connaissance des choses, serait plus pratique pour nous, afin que vous

15 puissiez poser la question. Mais ce qui arrive ici, c'est que la situation

16 est complètement différente. Ce n'est pas plus pratique de vous entendre

17 poser une ou deux questions sur certains points précis, eu égard à votre

18 connaissance précise des faits. Nous nous retrouvons dans une situation

19 fort opposée. Il semblerait que vous n'êtes pas en accord avec les conseils

20 de la Défense et avec la façon dont ils ont mené le contre-interrogatoire.

21 Vous avez choisi d'être représenté par deux conseils de la Défense,

22 plus particulièrement, eu égard à ce que vous avez dit plus tôt, nous vous

23 avons entendu dire que vous les avez choisis. Mais en l'espèce, si vous

24 n'aviez pas des conseils de la Défense, vous auriez pu avoir la possibilité

25 de présenter votre propre défense. Mais outre certains problèmes techniques

Page 10800

1 qui peuvent être réglés en posant une ou deux questions supplémentaires,

2 telles, par exemple : vous souvenez-vous encore de la plaque numérologique

3 d'une telle ou telle voiture ? Vous souvenez-vous de la couleur du

4 bâtiment ? Si le témoin, bien sûr, vous dit : le bâtiment était bleu, et

5 vous savez pertinemment qu'il s'agissait d'un bâtiment d'une autre couleur,

6 à ce moment-là, vous pouvez établir certains faits.

7 Mais maintenant, nous nous trouvons dans une situation dans laquelle

8 deux stratégies de la Défense eu égard à ce témoin précis semblent se

9 présenter, et c'est à vous de résoudre ce problème avec vos conseils, car

10 nous ne pouvons pas nous retrouver dans une situation où la Chambre ne vous

11 permettra pas de poser des questions supplémentaires à un témoin.

12 C'est-à-dire, votre demande a été rejetée. Votre requête est rejetée,

13 la requête de poser des questions supplémentaires.

14 Je vous écoute, Monsieur Krajisnik. Vous voulez ajouter quelque

15 chose ?

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il

17 ne s'agit pas d'un changement de stratégie. Car, s'il s'agissait de

18 changement de stratégie.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, je vous interromps,

20 car une décision a été rendue. Nous allons procéder avec ce témoin. Je ne

21 vous permettrai pas de rouvrir le débat sur la question sur laquelle une

22 décision a été rendue.

23 Madame l'Huissière, je vous prierais de faire entrer le témoin dans le

24 prétoire.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

Page 10801

1 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

2 Questions de la Cour :

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Djokanovic, le Juge Canivell

4 souhaiterait vous poser un certain nombre de questions.

5 M. LE JUGE CANIVELL : Quand vous êtes revenu de Zvornik à Pale et vous avez

6 communiqué aux membres du leadership qui étaient à Pale ce que vous avez

7 connu à Zvornik, quelle a été la réaction qui a été suivie et que vous avez

8 vue, enfin, les personnes avec lesquelles vous aviez communiqué tout cela ?

9 R. Ils n'ont pas donné leur aval pour ce qui venait de se passer à Zvornik.

10 Ils m'ont demandé de me rendre sur le terrain le plus tôt possible pour

11 apporter d'autres documents concernant la nomination des commissaires. Ces

12 documents avaient été signés le 17, au matin. J'étais revenu le 16 au soir.

13 J'ai entretenu les membres de la présidence là-dessus, et c'est à ce

14 moment-là qu'on a signé les documents quant à la nomination des

15 commissaires. Je crois que je me suis rendu immédiatement sur le terrain

16 pour remettre ces documents dans les municipalités en question.

17 J'en avais justement parlé avec le Dr Karadzic juste avant la

18 préparation des réunions de tous les commissaires dans les municipalités

19 mentionnées, le Dr Karadzic, le général Mladic et moi-même, et j'ai dit au

20 Dr Karadzic qu'il lui fallait faire attention lorsqu'il s'entretenait avec

21 ces personnes là-bas. Sur le terrain, toutes sortes de choses étaient

22 arrivées. Je lui ai dit que je ne crois pas que ces fonctionnaires

23 municipaux ne savaient pas ce qui s'était passé. J'ai dit que cette réunion

24 serait très importante un jour.

25 Le Dr Karadzic a accepté mes propositions. Il a apporté un dictaphone pour

Page 10802

1 cet entretien et il a enregistré tous les propos qui ont été prononcés lors

2 de cette réunion.

3 M. LE JUGE CANIVELL : -- vu à cette réunion ?

4 R. Nous étions ensemble. Nous étions assis l'un à côté de l'autre, Mladic,

5 Karadzic et moi. Le Dr Karadzic était assis au centre. D'un côté, il y

6 avait le général Mladic, et de l'autre côté, il y avait moi-même, juste à

7 côté de M. Karadzic. Nous étions cette délégation qui était venue

8 s'entretenir avec les représentants des municipalités en question.

9 M. LE JUGE CANIVELL : Je ne sais pas si nous parlons du même moment. C'est-

10 à-dire quand vous rentrez de Zvornik, à la mi-juin de 1992, vous avez

11 rapporté aux personnes qui étaient là-bas, le leadership de la Republika

12 Srpska, parmi lesquelles, bien entendu, M. Krajisnik aussi, et vous n'avez

13 pas observé d'autres réactions particulières, à ce moment-là, de leur

14 part ?

15 Simplement que M. Krajisnik a pris une machine pour enregistrer ce

16 que vous avez dit, c'est tout ?

17 R. J'étais absolument certain que les messieurs de la présidence

18 partageaient mon opinion pleinement concernant les questions sur le terrai.

19 Je n'ai jamais, à aucun moment, remarqué autre chose. Je n'avais pas autant

20 d'énergie.

21 M. LE JUGE CANIVELL : Pardonnez-moi de vous interrompre. Cela veut dire que,

22 s'ils partageaient vos opinions, c'est qu'ils savaient déjà ce qui était

23 arrivé. Mais, Monsieur, peut-être pas par le menu, mais ils savaient

24 qu'est-ce qui s'était passé à Zvornik.

25 R. Je ne crois pas qu'ils aient été au courant des détails, mais je crois

Page 10803

1 qu'ils avaient une conscience. Ils savaient ce qui se passait sur le

2 terrain.

3 M. LE JUGE CANIVELL : Je vous remercie. Cela me suffit.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Je souhaiterais ajouter quelque chose

5 concernant cette question. Il me semblerait qu'il y a peut-être quelque

6 confusion. A la page 87, ligne 9, on dit : "Le Dr Karadzic a accepté, il a

7 apporté un dictaphone à cette réunion, se référant au Dr Karadzic. Ensuite,

8 lorsque vous lisez ce qui figure à la page 87, ligne 25, vous avez dit que

9 M. Krajisnik a apporté un dictaphone pour enregistrer.

10 Il semblerait que, d'une part, on fait référence à M. Karadzic, et

11 après, on se réfère à M. Krajisnik comme étant la personne qui avait

12 apporté ce dictaphone. Il semblerait qu'il y a un malentendu là, car la

13 première référence initiale se rapportait au Dr Karadzic.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez, je vous prie, préciser ce

15 point. Qui avait le dictaphone ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, justement, je l'ai remarqué sur l'écran.

17 C'est le Dr Karadzic, c'est lui qui avait le dictaphone. C'est le Dr

18 Karadzic. Je parlais du Dr Karadzic avec le dictaphone.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

20 Le Juge Hanoteau a une ou deux questions.

21 M. LE JUGE HANOTEAU : Regardez votre "Witness Statement Number 2." Est-ce

22 qu'on peut le lui mettre sous les yeux.

23 [interprétation] Déclaration 2, page 6, s'il vous plaît.

24 [en français] Vous avez cette page sous les yeux, page 6 ?

25 R. Oui.

Page 10804

1 M. LE JUGE HANOTEAU : En tout cas, dans la version anglaise, il est

2 indiqué :

3 [interprétation] "L'attitude des députés à la suite de ce qui s'était

4 passé sur le terrain voulait dire que ces questions n'avaient pas été

5 soulevées en tant que points de l'ordre du jour lors de l'assemblée au

6 niveau de la République."

7 [en français] Est-ce que vous voulez dire que les députés avaient

8 connaissance de ce qui se passait sur le terrain et qu'ils préféraient ne

9 pas en parler ?

10 R. Il aurait été incroyable qu'ils n'aient pas su. La plupart de ces

11 députés étaient en continuité membres des cellules de Crise et devaient

12 continuellement faire leur travail de député. Ils ont été élus en 1990. On

13 savait très bien la localité de laquelle venait chacun des députés. Il

14 avait, bien sûr, l'obligation de se soucier de ce qui se passait sur la

15 localité d'où il avait été élu par le peuple.

16 Lorsque, aujourd'hui, j'ai parlé de ma non nomination au gouvernement,

17 c'est là que j'ai mis l'accent de toute cette histoire, non pas si je

18 devais devenir ministre ou pas.

19 M. LE JUGE HANOTEAU : Ma question est : à votre avis, ils avaient fait le

20 choix délibéré de ne pas en parler publiquement ? Ils étaient au courant,

21 mais ils ont fait le choix de ne pas en parler ?

22 R. J'en suis absolument sûr.

23 M. LE JUGE HANOTEAU : Deuxième point, s'il vous plaît. Voulez-vous vous

24 reporter à la page 8. Vous avez, à l'avant-dernier paragraphe, vous

25 indiquez :

Page 10805

1 [interprétation] "Karadzic et les autres dirigeants n'ont pas réagi

2 assez fortement aux crimes de guerre. Si à ce moment-là, les dizaines de

3 personnes qui étaient impliquées dans cela avaient été mises devant un

4 procès, les choses auraient eu un autre résultat."

5 [en français] Je voudrais que vous clarifiiez cette affirmation. Est-

6 ce que cela veut dire qu'à ce moment précis, les leaders, Karadzic et le

7 reste des leaders, pouvaient encore saisir des tribunaux, faire procéder

8 peut-être à des arrestations et faire juger ceux qui rendez des coupables

9 "the war crimes". A ce moment-là, est-ce qu'il était possible d'utiliser

10 l'appareil judiciaire pour faire juger tout de suite, ces actions, pour

11 montrer des exemples, exemples qui auraient permis l'arrêt de ces

12 violences.

13 R. Je suis absolument sûr que pour cette décision, ils avaient un point

14 d'appui dans la volonté du peuple parce que le plébiscite, en 1991, le

15 peuple avait dit qu'il voulait vivre avec les autres, avec les citoyens

16 d'autres nationalités. Sur la base de ces plébiscites, nous avions adopté

17 une constitution qui était explicite aussi. Tous les citoyens de la

18 Republika Srpska sont égaux devant la loi. Nous avions un point d'appui

19 dans la volonté populaire, dans la constitution, et eux, ils avaient

20 préféré être opportunistes envers une petite partie radicale de politiciens

21 et aussi envers une petite portion radicale des citoyens.

22 M. LE JUGE HANOTEAU : Vous n'avez pas répondu tout à fait complètement à ma

23 question. Elle portait aussi sur le point de savoir s'il y avait encore un

24 appareil judiciaire qui était capable de fonctionner que l'on pouvait

25 saisir. Est-ce qu'il y avait des tribunaux qui fonctionnaient encore, qui

Page 10806

1 auraient pu saisis de ces cas ?

2 R. En ce moment-là, il existait un parquet. Il y avait des tribunaux, et

3 il y avait un ministre de la Justice. Dans cette phase se trouvait la

4 constitution des tribunaux au niveau des communes et des districts. Je ne

5 sais pas, mais je sais qu'il y avait le parquet, les tribunaux, la police,

6 le ministère de la Justice et la constitution qui régissait toutes ces

7 questions.

8 M. LE JUGE HANOTEAU : Un autre point, s'il vous plaît, Monsieur, dans votre

9 témoignage numéro 1, c'est l'autre document, je pense que vous l'avez sous

10 les yeux "statement number one", à la

11 page 11, s'il vous plaît, page 11 du texte en anglais.

12 Vous avez à l'avant-dernier paragraphe, non, l'antépénultième, vous

13 avez indiqué : [interprétation] "En juin 1992, Karadzic et Krajisnik

14 avaient le plus d'autorité au sein de la résidence de Guerre. Je crois que

15 Krajisnik contrôlait la majorité des députés au sein de l'assemblée serbe.

16 J'estimais qu'il avait établi un parlement, un parti parlementaire

17 illégal."

18 [en français] Commentez ce que vous entendez par "non legal

19 parliamentary party," s'il vous plaît ?

20 R. Un grand nombre de députés, en ce moment-là, ne bénéficiaient pas du

21 prestige dans leur commune. On leur attribuait la participation différentes

22 affaires "trafic d'armes". Ils avaient perdu leur position. En tant que

23 tel, ils se voyaient donner des emplois à un niveau plus élevé. Au lieu de

24 quitter la politique, ils étaient gratifiés, ils devenaient commissaire de

25 la police, ils devenaient professionnels du parlement, et ainsi, ils

Page 10807

1 devenaient partie d'un lobby qui, dans son activité politique ultérieure,

2 s'appuyait essentiellement sur le président du parlement.

3 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci. Un autre point. Je voudrais que l'on soit bien

4 clair sur votre réponse. Vous avez redit tout à l'heure, et je crois

5 l'avoir compris tout au cours de votre témoignage, que tous les députés de

6 l'assemblée étaient aussi membres des "Crisis Staff". Est-ce que j'ai bien

7 compris, ou est-ce que je commets une erreur ?

8 R. Je n'ai pas d'information précise. J'ai dit que la majorité des députés

9 de l'assemblée populaire, dans leurs localités respectives, étaient membres

10 des cellules de Crise et des commissions municipales. Un grand nombre

11 d'entre eux étaient commissaires de la république en 1992. Ils s'étaient

12 chargés de la constitution des municipalités dans la Republika Srpska.

13 M. LE JUGE HANOTEAU : Qu'ils désignaient par qui ? Pour faire partie de ces

14 "Crisis Staff", ils devaient être nommés par qui ?

15 R. Bien entendu, ils ne pouvaient pas se nommer eux-mêmes. C'était à

16 l'époque où une partie du pouvoir, à l'intérieur de Bosnie-Herzégovine,

17 c'est un des partis au pouvoir sur le territoire qu'ils contrôlaient, qui

18 nommait les cellules de Crise. S'agissant de la Republika Srpska, le seul

19 parti au pouvoir qui avait une influence, c'est ce parti qui mettait en

20 place les cellules de Crise. Il n'avait pas le temps de réfléchir trop sur

21 chaque membre particulier. Il n'avait même pas de références de ces

22 personnes, de sorte qu'il y a eu beaucoup de lacunes. Je pense que ces

23 lacunes n'étaient pas voulues.

24 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que dans les "war commissions" qui ont suivi

25 les "Crisis Staffs", ces mêmes députés ont fait partie de ces nouvelles

Page 10808

1 institutions ?

2 R. En conformité avec la décision sur la mise en place des commissions

3 municipales, est composée le président du parti, au niveau de la commune,

4 un député, quelqu'un des personnalités éminentes des citoyens et quelques

5 industriels importants. Le cinquième membre, c'était un commissaire de la

6 république. Là, nous avons constitué une commission municipale. Par

7 définition, il devait y être un député. Il y avait un commissaire de la

8 république qui comptait s'occuper de toutes ses affaires.

9 Après la constitution des municipalités, je ne sais pas s'il a

10 accompli ces fonctions au niveau de la république.

11 M. LE JUGE HANOTEAU : Mon dernier point, s'il vous plaît. Est-ce que dans

12 ces "Crisis Staff" d'abord, et est-ce que dans ces "war commissions", il y

13 avait quelqu'un qui représentait l'armée et la police ou l'armée ou la

14 police ?

15 R. Absolument non. J'ai dit qu'elle était la formule de constitution de la

16 commission de guerre; un commissaire de la république, un député, un

17 représentant du parti, une éminente personnalité de civils et un industriel

18 éminent.

19 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci beaucoup, Monsieur.

20 M. MARGETTS : [interprétation] Il semble que dans la dernière question, on

21 fait mention des commissions de guerre et des cellules de Crise. Je ne

22 pense que le témoin ait parlé des deux institutions.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous avez compris les doutes

24 exprimés par Me Margetts, si votre réponse couvre également les cellules de

25 Crise et les commissions de guerre, ou bien l'une des deux.

Page 10809

1 LE TÉMOIN : [interprétation] En parlant de la formule de la constitution

2 des commissions de guerre, il s'agit des commissions de guerre. J'ai été

3 explicite.

4 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quant à la question si quelqu'un

6 représentait l'armée, est-ce que cela allait aussi pour cette question ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans les commissions de guerre, il n'y avait

8 aucun membre de ces institutions. Même au terme de la décision, je l'aurais

9 su, en tout cas, si l'un des commandants avait été nommé; commandant de

10 brigade ou quelqu'un de ses collaborateurs.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre. La

12 question était : s'il y avait des représentants d'armée et de la police

13 dans les cellules de guerre [comme interprété] dans la phase précédente.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Les représentants de la police, oui

15 certainement. Il n'y avait pas de représentant de l'armée, parce que

16 l'armée n'était pas constituée de la Republika Srpska. Ce qui ressemblait

17 un petit peu à cela, c'était le secrétariat à la Défense. Probablement, il

18 y avait des représentants du secrétariat à la Défense qui n'est qu'un

19 egment du pouvoir exécutif d'une municipalité. Dans les cellules de guerre,

20 il y avait quelqu'un, des secrétariats à la Défense.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie de votre réponse.

22 J'ai aussi quelques questions à vous poser.

23 D'abord, dans une de vos déclarations, vous faites mention, je

24 l'appellerai l'incident avec Velibor Ostojic. Quand celui-ci avait été

25 sorti de sa voiture par certains paramilitaires. Dans votre déclaration, on

Page 10810

1 peut lire aussi : "Ostojic m'a raconté cet incident. Je pense que c'était

2 la goutte qui a fait déborder le verre, et qui a fait la Republika Srpska

3 d'intervenir."

4 Dites-nous, s'il vous plaît, quand est-ce que cet incident a eu

5 lieu ?

6 R. J'essaie de me souvenir, mais nous sommes bien dans la seconde moitié

7 de 1992.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En d'autres termes, après l'été, est-ce

9 que vous pourriez être encore plus précis, parce que déjà bien dans la

10 seconde moitié, peut-être Noël, peut-être au mois d'août.

11 R. Il y avait de l'herbe; il n'y avait pas de neige.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. La réponse est logique. Peut-être,

13 je ne devais pas mentionner Noël. Or, Noël, ne tombe pas à la même date

14 dans toutes les religions.

15 Auriez-vous dit vers la fin de l'été ?

16 R. [Réponse inaudible]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous pourrions tirer une

18 conclusion de cet incident concernant une conclusion qui arrêterait à la

19 capacité d'intervenir, à savoir, à la capacité de la Republika Srpska

20 d'intervenir, de mettre fin à une situation qui n'était pas bienvenue, ou

21 bien nous ne pouvons pas tirer cette conclusion ? Dans quelle mesure

22 pourrait-on dire que cela était un exemple de cette capacité de la

23 Republika Srpska, ou bien que cela n'en était pas un ?

24 R. Les autorités locales avaient ces possibilités, parce qu'ils avaient

25 pas mal d'éléments de police pour régler cette situation au niveau de la

Page 10811

1 municipalité. Cette occasion a été ratée. Les unités paramilitaires avaient

2 pris de l'envergure, et se sont trouvées dans la position que dans un des

3 ces groupes, il était possible de faire sortir certains membres du

4 gouvernement, et de faire ce qu'ils ont fait, ce qu'Ostojic m'a raconté.

5 La Republika Srpska donc, le leader de la république, bien sûr,

6 disposait d'une unité d'intervention qui était une unité spéciale de la

7 police qui aurait pu faire cette affaire, lorsque la décision était prise,

8 de régler la situation à Zvornik. Il aurait pu -- cela aurait pu être réglé

9 avant.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette décision a été prise à l'assemblée,

11 si je vous ai bien compris, concernant cette intervention ?

12 R. Non, je ne pense pas, Je pense que ces décisions ont été prises au

13 niveau de la présidence au gouvernement, mais je ne suis pas sûr.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je vous remercie, merci de

15 cette réponse. J'ai encore quelques questions liées au rapport du 16 juin

16 1992; rapport présenté à Pale. Jusqu'à présent, j'ai entendu trois

17 éléments; que vous leur avez rapporté que des crimes y avaient été commis;

18 que vous les avez informés que beaucoup de choses mauvaises avaient eu lieu,

19 et que vous les avez informés qu'il y avait eu des meurtres massifs et que

20 des personnes ont été chassées de chez eux.

21 Permettez-moi d'abord de vous poser la question à propos de ce

22 dernier point. Est-ce qu'il s'agissait des éléments d'un groupe ethnique

23 particulier qui aurait été victime de ces meurtres et de ces --

24 R. Il n'y a aucun doute, il s'agissait des Musulmans.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Ma question suivante. Dans votre

Page 10812

1 déclaration, je cite : "Une fois de retour à Pale, j'ai informé Karadzic et

2 Krajisnik sur tout ce que j'avais vu lors de mes visites dans les

3 municipalités et sur les tous les éléments que j'avais appris. Est-ce que

4 votre rapport sur Zvornik, puisque nous nous sommes pal mal occupés de

5 Zvornik, est-ce que cela était quelque chose d'exceptionnel ? Est-ce que

6 cela différait des autres municipalités ? Il y en avait cinq que vous avez

7 visitées. Est-ce que les rapports sur les autres municipalités étaient

8 similaires ou bien différents ?

9 R. En principe, ces informations différaient, parce que l'une de ces

10 municipalités, Sekovici, était majoritairement serbe, de sorte que je n'y

11 avais rien remarqué. La dernière municipalité, c'était la partie de

12 l'ancienne municipalité Skelani, un petit territoire avec peu de Serbes, et

13 qui étaient exposé aux attaques permanentes de par la partie musulmane de

14 la municipalité. Ils contrôlaient une partie du village, et n'arrêtaient

15 pas de se défendre. Je suis souvent allé, et je les ai aidés à constituer

16 leur municipalité pour que l'assemblée populaire de la Republika Srpska

17 vérifie cette mise en place de cette communauté, ce cette commune.

18 Cette petite municipalités a vécu une tragédie, lorsqu'une partie de

19 dirigeants ont été tués lors d'une attaque pas les unités de Naser Oric.

20 Par ailleurs, ils avaient toujours des pertes sur ce territoire qu'ils

21 contrôlaient.

22 Aussi, après ma nomination, la municipalité de Bratunac a été tout le

23 temps exposée aux attaques de Srebrenica, de sorte que pratiquement durant

24 cette période, je me souciais davantage des victimes nouvelles.

25 Mon impression, lorsque je suis venu à Pale en revenant du terrain, a

Page 10813

1 été qu'à Vlasenica, à Zvornik et à Bratunac, des choses semblables

2 arrivaient avec un accent sur Zvornik, parce que Zvornik, je connaissais

3 mieux parce que j'y avais travaillé comme médecin, et j'ai contacté plus de

4 citoyens qui m'ont dit que des choses affreuses étaient arrivées. Ce

5 n'était pas mes impressions; c'est ce que j'ai entendu dire par les

6 citoyens. Les représentants des pouvoirs locaux me disaient qu'ils ne

7 forçaient personne de partir, que les gens partaient d'eux-mêmes. Alors,

8 j'ai posé la question : "Pourquoi des vieux partaient ? Faites de sorte que

9 les vieux restent. Demain, on peut vous condamner de crimes --"

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi seulement -- la situation

11 différait en fonction de la municipalité que vous avez visitée, et vous

12 avez mentionné que cela dépendait de différents éléments, à savoir, s'il y

13 avait une minorité serbe plus ou moins importante. Vous avez dit que, dans

14 deux municipalités sur ces cinq, la situation était différente et que, dans

15 les trois autres, votre impression était qu'elles ressemblaient à celle de

16 Zvornik, même si à Bratunac il a fallu beaucoup de défense, en raison des

17 attaques venant de Srebrenica.

18 C'étaient mes questions. Je remarque qu'à l'heure qu'il est, est-ce

19 qu'il y a une question urgente ?

20 M. MARGETTS : [interprétation] Nous n'avons pas de questions.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Non, Monsieur le Président, si ce n'est --

23 non. En fait, je n'ai plus de questions qui découleraient de ce qui vient

24 d'être dit.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

Page 10814

1 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, Monsieur Djokanovic,

3 ceci termine votre interrogatoire dans ce prétoire. Vous y avez passé une

4 semaine entière, mais pas tous les jours.

5 Je tiens à vous remercier d'avoir répondu à toutes les questions

6 aussi bien de l'Accusation, de la Défense, et de la Chambre. Je vous

7 souhaite bon retour chez vous.

8 Maître Loukas, je suppose que le témoin n'est pas nécessaire pour la

9 proposition des documents au versement.

10 Mme LOUKAS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, je demande à Mme

12 l'Huissière de conduire le témoin.

13 [Le témoin se retire]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'avais l'intention de rendre une

15 décision quant au Témoin 93 bis, ce matin, mais je demanderais aux parties,

16 peut-être d'attendre jusqu'à la fin de la semaine -- jusqu'au début de la

17 semaine prochaine. Il y a un grand nombre de détails dans ce document, et

18 cela nous prendrait peut-être cinq à dix minutes, je crois qu'en ce moment-

19 ci, il ne faudrait peut-être pas trop demander aux interprètes.

20 Ceci dit, je voudrais savoir si les parties seraient prêtes à suivre la

21 proposition de la Chambre, quant à l'ordre du jour de la semaine prochaine,

22 et j'aimerais savoir qu'en est-il du Témoin KRAJ 60, et qu'en est-il des

23 mesures de protection.

24 M. HARMON : [interprétation] M. Stewart a fait un grand nombre de

25 présentations concernant KRAJ 60, et je souhaiterais avoir la possibilité

Page 10815

1 de répondre. M. Gaynor n'est pas présent non plus.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous comprends. Vous aimeriez

3 avoir la possibilité de répondre, de présenter vos arguments. Avec peut-

4 être l'aval des témoins, je demanderais à M. Gaynor d'être très bref. En ce

5 moment-là, nous l'écoutons.

6 M. GAYNOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Je souhaiterais aborder cette question en deux temps, deux mesures. La

8 première partie de cet argument, il sera peut-être plus propice d'en parler

9 en audience publique, et la deuxième partie sera abordée en audience à huis

10 clos partiel.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

12 M. HARMON : [aucune interprétation]

13 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

14 M. GAYNOR : [interprétation] Monsieur le Président, brièvement. M. Stewart

15 a dit dans la présentation de ses arguments, en fait, il a essayé de parler

16 de l'importance du rapport du HCR, et il a dit - sans amoindrir

17 l'importance du rapport - "Je crois que c'est ce qui a été dit devant cette

18 Chambre est beaucoup plus important que le rapport."

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dirais des --

20 M. STEWART : [interprétation] C'est un bon travail et non pas ce sont de

21 jolis mots pour le compte rendu d'audience en anglais.

22 M. GAYNOR : [aucune interprétation]

23 M. STEWART : [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 M. GAYNOR : [interprétation] Notre position est la suivante : en fait, nous

Page 10816

1 aimerions insister sur la neutralité du HCR, selon l'annexe 7 de l'accord

2 de paix, le HCR est une agence qui facilite le retour en Bosnie, et la

3 réintégration des réfugiés en Bosnie, et des personnes qui ont été

4 déplacées. Le HCR est basé en Bosnie depuis 1991, il est composé de dix

5 bureaux régionaux.

6 Pour nous, Monsieur le Président, le HCR est une source d'autorité et

7 c'est eux qui peuvent nous procurer des informations quant à la situation

8 de sécurité en Bosnie-Herzégovine.

9 Deuxièmement, je souhaiterais insister sur le fait qu'il ne s'agit

10 pas d'un vieux rapport, ce rapport a été émis au mois de janvier 2004,

11 effectivement, on y fait référence à quelques incidents qui ont eu lieu en

12 2002 et 2003, et on y réfère également à -- on se réfère également à un

13 certain nombre d'incidents qui se sont déroulés en 2004.

14 La présomption qu'une menace contre les témoins sera moindre, alors avec le

15 temps qui passe, est incorrecte. Il y aura des actes d'accusation, avec le

16 nouveau tribunal créé à Sarajevo, de nouveaux actes d'accusation seront

17 rédigés contre certaines personnes, et les risques de sécurité ne feront

18 qu'augmenter, non pas décroître. La suite de cette Chambre à Sarajevo, qui

19 sera ouverte nouvellement.

20 M. Stewart a également mentionné dans ses arguments, que la situation de

21 sécurité en Bosnie n'est pas parfaite, mais que la situation, quant à la

22 sécurité n'est pas parfaite nulle part. Il a dit que, en fait la situation

23 est meilleure en Bosnie qu'à plusieurs autres endroits. Je souhaiterais

24 répondre de la façon suivante, en disant, dix ans se sont écoulés depuis la

25 guerre en Bosnie, la région essaie de faire partie de la Communauté

Page 10817

1 européenne. Il est tout à fait clair que cela découle du rapport du HCR,

2 que cela n'est pas le cas. La question relative à la sécurité en Bosnie est

3 beaucoup plus sérieuse que dans n'importe quel autre pays occidental, pour

4 dire que la situation n'est pas tout à fait parfaite, et d'amoindrir les

5 vrais risques de sécurité qui existent.

6 Je souhaiterais maintenant passer brièvement à huis clos partiel, avec

7 votre permission, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, passons à huis clos partiel.

9 [Audience à huis clos partiel]

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 10818

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 10818 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 10819

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page 10819 expurgée. Audience à huis clos partiel.

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 10820

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 [Audience publique]

10 Maintenant s'il n'a rien d'autre à soulever, à ce moment-ci, et j'espère

11 que non, nous allons lever la séance, et Mme la Greffière m'a donné toutes

12 les informations quant à l'heure de repris d'audience, quelle heure est-

13 ce ? A quelle heure reprendrons-nous nos travaux ? A 14 heures 15 dans

14 cette même salle d'audience, lundi prochain.

15 --- L'audience est levée à 13 heures 59 et reprendra le lundi 25 mars

16 2005, à 14 heures 15.

17

18

19

20

21

22

23

24

25