Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 17 mai 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 23.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez donner le

6 numéro de l'affaire s'il vous plaît.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, affaire IT-00-39-T, le

8 Procureur contre Momcilo Krajisnik.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame.

10 Bonjour à toutes et à tous. Je voudrais savoir si l'Accusation est prête à

11 citer son témoin suivant ?

12 M. HARMON : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de mesure de protection ?

14 M. HARMON : [interprétation] Non.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre témoin suivant, c'est ?

16 M. HARMON : [interprétation] Le témoin sera le général John Wilson.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Wilson. Avant que vous

20 ne déposiez dans ce prétoire, aux termes du Règlement de procédure et de

21 preuve, il est prévu que vous fassiez une déclaration selon laquelle vous

22 allez dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Je

23 souhaiterais vous demander de bien vouloir prononcer cette déclaration

24 solennelle qui vous est remise par l'Huissier.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je déclare

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1 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la

2 vérité.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, veuillez prendre place.

4 LE TÉMOIN : JOHN WILSON [Assermenté]

5 [Le témoin répond par l'interprète]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon.

7 M. HARMON : [interprétation] Merci.

8 Interrogatoire principal par M. Harmon :

9 Q. [interprétation] Bonjour, Général.

10 R. Bonjour.

11 Q. Je vais vous poser, Général, un certain nombre de questions tout au

12 long de cet après-midi. Etant donné que nous parlons tous deux la même

13 langue, je vous demanderais de bien vouloir faire une pause avant de

14 répondre à mes questions, car nos propos doivent être interprétés, et si

15 vous répondez trop vite, les interprètes pourraient avoir des difficultés.

16 J'aimerais vous demander de vous souvenir de cela. Je sais que c'est un peu

17 difficile, mais je vous en serais reconnaissant.

18 R. Je ferai de mon mieux.

19 Q. Je voudrais commencer, Monsieur, par résumer votre parcours

20 professionnel. Je vais donner lecture d'un document que j'ai préparé. Je ne

21 vais pas vous demander d'élaborer, mais je vous demanderais à certains

22 moments de me dire si ce que je dis correspond bien à la réalité.

23 R. Bien.

24 Q. Vous êtes né le 27 [comme interprété] mars 1947. Vous êtes militaire de

25 carrière, vous avez servi dans l'armée d'Australie. Vous avez suivi les

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1 cours du Collège royal militaire de 1964 à 1967, et à votre sortie, vous

2 êtes devenu officier, vous êtes devenu lieutenant dans un camp

3 d'artillerie. En 1968, vous êtes parti en Malaisie. Vous faisiez partie de

4 l'infanterie, vous étiez chef de section dans ce pays.

5 En 1970, vous avez été envoyé au Vietnam. Pendant la première partie

6 de votre séjour, vous étiez l'adjoint au commandant d'une compagnie, et

7 ensuite, pendant la deuxième partie de ce séjour, pendant les six mois qui

8 ont suivi, vous avez été aide de camp du commandant des forces

9 australiennes au Vietnam.

10 En 1976, vous étiez commandant de compagnie, et avant de participer à une

11 mission aux Nations Unies en 1984, vous avez, pendant environ six ans,

12 participé à la sélection, la préparation, ainsi qu'à la formation de

13 personnes qui désiraient devenir officiers au sein de l'armée australienne.

14 En 1984, vous avez été envoyé par les Nations Unies pour servir dans une

15 institution qui s'appelle l'Organisation de surveillance de la trêve par

16 les Nations Unies au Liban. Vous étiez chef d'un groupe d'observateurs.

17 Vous étiez lieutenant-colonel et vous avez commandé un bataillon à ce

18 grade.

19 Au milieu des années 1990, vous avez de nouveau participé à une

20 mission au sein des Nations Unies. Vous avez été envoyé à Jérusalem, vous

21 étiez chef en second de l'état-major. Vous étiez colonel, et vous avez

22 participé à un bon nombre d'opérations des Nations Unies, que vous avez

23 contribué à mettre sur pied.

24 Est-ce que vous pouvez confirmer que ceci est exact ?

25 R. Il y a deux corrections que je souhaite apporter si vous me le

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1 permettez.

2 Premièrement, c'est en 1975 que j'ai été commandant de compagnie.

3 En deuxième lieu, pendant que j'étais au Liban, je n'étais pas

4 véritablement commandant de bataillon parce qu'il n'y avait pas

5 véritablement de commandement de bataillon. Il y avait environ 120

6 observateurs militaires des Nations Unies qui étaient placés sous mon

7 commandement.

8 Q. En janvier 1992, vous avez été envoyé en Yougoslavie dans le cadre

9 d'une mission temporaire sous l'égide des Nations Unies. Le 14 janvier

10 1992, vous étiez responsable des officiers de liaison dans le cadre de la

11 mission des Nations Unies en Yougoslavie. Vous aviez pour mission d'établir

12 la liaison entre les Nations Unies et les parties en présence lors du

13 conflit en Croatie. Puis, vous avez participé à des négociations --

14 L'INTERPRÈTE : L'interprète s'excuse, mais nous ne disposons pas du texte

15 en cabine, ce qui rend notre travail extrêmement difficile.

16 M. HARMON : [interprétation]

17 Q. Vous avez participé à des négociations avec M. Goulding, Slobodan

18 Milosevic, Franjo Tudjman, Gojko Susak et cetera.

19 A la mi-mars 1992, vous avez été déployé à Belgrade. Ceci s'est terminé par

20 une mission qui s'intitulait mission MLOY, ainsi qu'une nouvelle mission au

21 sein des Nations Unies, en tant qu'observateur. Vous avez été nommé chef

22 des observateurs des Nations Unies pour la FORPRONU.

23 Pouvez-vous confirmer que ceci est bien la réalité ?

24 R. Oui.

25 Q. Le 22 mars 1992, vous avez été déployé à Sarajevo pour y mettre en

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1 place un poste d'observation de la FORPRONU. Ce poste d'observation a été

2 transféré de Sarajevo à Belgrade, du 16 au 17 mai 1992, en raison de

3 pilonnages importants de la ville. Cependant, vous êtes restés à Sarajevo

4 jusqu'au 24 juin 1992, avec sept observateurs militaires des Nations Unies,

5 ainsi qu'un groupe de 70 soldats français qui faisaient partie d'une force

6 de protection.

7 Au cours de cette période, votre mission était d'assurer la présence

8 des Nations Unies à Sarajevo; deuxièmement, d'assurer la sécurité des biens

9 des Nations Unies à Sarajevo; et troisièmement, de faire la liaison entre

10 les parties en présence.

11 A ce titre, vous avez participé en mai et juin 1992 aux négociations

12 relatives au retrait de la JNA des casernes de Sarajevo, et au

13 fonctionnement de l'aéroport de Sarajevo.

14 Le 24 juin 1994, vous êtes parti à Belgrade avec le QG des observateurs

15 des Nations Unies. Vous êtes parti de ce poste en décembre 1992.

16 Pendant votre séjour en Yougoslavie, vous avez également participé à des

17 négociations, notamment, celles relatives au départ de la JNA de Dubrovnik,

18 et en octobre, on vous a donné pour mission de faire respecter la zone

19 d'exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine; est-ce exact ?

20 R. Oui.

21 Q. En septembre 1992, vous avez été nommé général de brigade. En décembre

22 1992, vous avez été déployé dans le cadre de la conférence internationale

23 sur l'ex-Yougoslavie, qui s'appelait également ICFY. Vous aviez pour

24 mission d'être le conseiller militaire de M. Cyrus Vance. Vous étiez

25 également l'officier de liaison de la FORPRONU au sein de cette conférence.

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1 Vous y êtes resté jusqu'en décembre 1993. Pendant cette période, vous avez

2 également participé aux négociations avec notamment le co-président Cyrus

3 Vance, ainsi que Lord Owen, qui a été ultérieurement remplacé par

4 Stoltenberg; est-ce exact ?

5 R. Oui.

6 Q. Vous avez été décoré pour les services que vous aviez rendus en ex-

7 Yougoslavie, ainsi qu'au Moyen-Orient, par le gouvernement australien. De

8 1994 à 1996, vous étiez commandant d'une académie militaire en Australie,

9 une académie militaire la plus prestigieuse académie militaire d'Australie.

10 En 1997, vous étiez commandant de brigade, une brigade qui comptait quelque

11 5 000 hommes, et vous étiez responsable de la région militaire de Sydney,

12 Australie. En 1998, vous êtes parti à la retraite ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Venons-en au cœur de votre déposition.

15 Revenons au 14 juin 1992 [comme interprété] quand vous avez été nommé

16 responsable officier de liaison de la mission de l'UNMLOY. Pouvez-vous

17 informer les Juges des responsabilités de la mission que vous aviez dans ce

18 cadre ?

19 R. J'étais à la tête de 50 officiers qui ne constituaient pas une

20 véritable mission. Cette mission nous avait été confiée par le secrétaire

21 général de faire la liaison entre les deux parties en présence des deux

22 côtés de la ligne de confrontation et de faciliter la communication. Nous

23 étions aux côtés de la mission de la MCCE, si bien qu'il y avait

24 regroupement entre nos deux missions, entre les missions de ces deux

25 organisations.

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1 Nous devions faire rapport directement à New York sur les violations

2 du cessez-le-feu qui avait été négocié par M. Cyrus Vance le 2 janvier. Il

3 y a eu quelque 200 à 300 violations de ce cessez-le-feu, certaines de plus

4 ou moins grande importance, avec parfois des tirs d'artillerie mais parfois

5 des tirs de tireurs embusqués.

6 Q. Nous allons maintenant remettre aux Juges de la Chambre ainsi qu'au

7 témoin la pièce à conviction 121. Je vais demander à ce qu'elle soit placée

8 sur le rétroprojecteur.

9 M. HARMON : [interprétation] Il s'agit d'une pièce qui a déjà été versée au

10 dossier dans le cadre de la déposition de M. Kirudja. Je souhaiterais

11 attirer votre attention sur cette pièce afin de rafraîchir la mémoire de

12 tous les présents ici.

13 Q. Votre mission avait trait à la Croatie, n'est-ce pas ?

14 R. Oui. Nous n'avions aucune responsabilité pour les activités qui avaient

15 lieu en Bosnie-Herzégovine à l'époque.

16 Q. Au moyen du pointeur que vous avez sous les yeux, pouvez-vous nous

17 indiquer sur le rétroprojecteur les zones où se trouvaient vos officiers de

18 liaison.

19 R. Nous avions 50 observateurs militaires. Il y en avait 40 qui étaient

20 déployés le long de la line de confrontation. Dans le secteur est, ils se

21 trouvaient près de la rivière Danube. Nous avions également des gens qui

22 étaient déployés dans ce qu'on a ensuite appelé le secteur ouest, dans

23 toute la Krajina. Il y avait six liaisons de chaque côté, six équipes de

24 liaison de chaque côté. Cela fait, qu'en tout, il y en avait 12 qui

25 devaient faire rapport à deux QG.

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1 L'un de ces QG était situé à Zagreb, l'autre était situé à Belgrade. Je

2 divisais mon temps entre ces deux QG puisque c'était la mission qui m'avait

3 été confiée par les Nations Unies à New York.

4 Q. Au moment de cette mission, au moment où elle a été mise en œuvre, est-

5 il exact de dire que le conflit de Croatie en était arrivé à une sorte de

6 statu quo, on peut dire que la situation était résolue ? Il y avait

7 notamment des zones protégées par les Nations Unies.

8 R. Quand nous sommes arrivés sur place, il y avait une ligne de

9 confrontation que l'on peut voir sur cette carte, qui ensuite, est devenue

10 la ligne de division. Il se trouvait les différentes zones de protection

11 des Nations Unies. Les forces de la Croatie et la JNA ainsi que les forces

12 serbes de la Krajina, effectivement, étaient statiques le long de lignes de

13 défense, occupaient des positions de défense. Ils menaient des opérations

14 de harcèlement les uns contre les autres. Il y avait, comme je l'ai déjà

15 dit, 200 à 300 violations du cessez-le-feu par jour. On peut dire,

16 qu'ensuite, il y a une certaine normalité qui est revenue.

17 Q. Quels sont les dégâts que vous avez pu constater vous-même et vos

18 observateurs dans les zones où vous étiez déployées ?

19 R. Nos équipes étaient déployées non pas sur la ligne de confrontation

20 mais à l'arrière. C'est en allant voir sur le terrain ce qui se passait

21 qu'on pouvait se rendre compte des dégâts qui, parfois, étaient importants.

22 Même dans les villages où il n'y avait aucune raison pour se faire, on

23 voyait qu'il y avait eu des dégâts importants.

24 Q. Qu'était-il arrivé à la population civile ?

25 R. Il y avait très peu de gens sur le terrain vu le nombre de maisons dans

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1 les villages. On m'a dit que la plupart de ceux qui restaient étaient des

2 Serbes.

3 M. STEWART : [interprétation] Une petite observation. Le témoin parle d'une

4 ligne sur la carte qu'il nous indique. On ne voit pas très bien de laquelle

5 il s'agit. Est-ce qu'on pourrait le préciser pour le compte rendu

6 d'audience.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement. C'est une bonne

8 suggestion. Je crois que le témoin fait référence à la ligne bleue.

9 M. HARMON : [interprétation] Oui. Egalement, il fait référence au secteur

10 est que l'on voit sur la carte et au secteur ouest que l'on voit également.

11 M. STEWART : [interprétation] C'est simplement qu'à un moment donné, on a

12 parlé de cette ligne sur la carte. On n'a pas précisé de laquelle il

13 s'agissait.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agissait de la ligne bleue.

15 M. HARMON : [interprétation]

16 Q. Dans vos discussions avec les officiers de liaison croates, est-ce

17 qu'ils faisaient des prévisions sur ce que serait un conflit en Bosnie-

18 Herzégovine ?

19 R. Oui. Dans des conversations à brûle-pourpoint, ils disaient que si le

20 conflit devait passer de Croatie en Bosnie-Herzégovine, les conséquences

21 seraient beaucoup plus graves que cela avait été le cas en Croatie. Cela

22 m'a beaucoup surpris à l'époque parce que j'ignorais qu'il était possible

23 que le conflit s'étende. Il me semblait que les conséquences en Croatie

24 étaient déjà assez graves. J'avais du mal à croire que cela pourrait être

25 encore pire.

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1 Q. Quand vous avez eu cette conversation, avec qui vous l'avez eue ?

2 R. Il y avait deux Croates de l'état-major. Ils étaient membres du bureau

3 de liaison de Zagreb. Ils avaient été nommés pour faire la liaison avec les

4 Nations Unies, les forces des Nations Unies. Je ne me souviens pas de leurs

5 noms.

6 Q. Est-ce que vous avez également eu une conversation semblable avec le

7 commandant du corps de la JNA de Banja Luka ?

8 R. Oui. En février, je suis allé voir, au sud de la rivière, le poste de

9 commandement avancé au bout du secteur ouest. On s'est interrogé sur le

10 rôle de notre mission. Je lui ai indiqué que j'avais entendu des rumeurs

11 selon lesquelles la JNA désarmait les non-Serbes en Bosnie-Herzégovine. Il

12 a reconnu, qu'effectivement, cela avait eu lieu, que c'étaient des éléments

13 incontrôlés qui étaient ainsi désarmés. Il a exprimé ses préoccupations en

14 disant que si le conflit devait se déclencher en Bosnie-Herzégovine, la

15 chose serait extrêmement grave.

16 Q. J'aimerais que nous passions maintenant à la pièce à conviction 527 qui

17 est un recueil de carte. J'aimerais qu'on l'ouvre à la page 2, et qu'on

18 place cette page sur le rétroprojecteur.

19 M. HARMON : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, baisser la carte

20 sur le rétroprojecteur.

21 Q. Vous nous dites que vous vous êtes entretenu avec le commandant de la

22 JNA de Banja Luka, et vous avez parlé du désarmement des non-Serbes. Avec

23 cette carte que vous avez sous les yeux, et avec le pointeur, pouvez-vous

24 nous indiquer la zone dont il a parlé quand il a dit qu'il désarmait la

25 population non-serbe ?

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1 R. A l'époque, pas plus qu'aujourd'hui, j'ignorais la zone de

2 responsabilité précise de ce chef de corps. Dans nos contacts avec lui,

3 j'ai interprété ses propos lors de cette conversation, comme concernant

4 cette zone du nord de la Bosnie-Herzégovine près de Bijeljina, la poche de

5 Bihac, une zone qui descendait jusqu'à Banja Luka. Je pensais que c'était

6 sa zone de responsabilité et ce dont on parlait.

7 Q. Est-ce qu'il a expliqué pourquoi la JNA procédait à des opérations de

8 désarmement ? Est-ce que vous pourriez élaborer un peu sur ce point ?

9 R. D'abord, j'avais entendu dire effectivement, que la JNA désarmait des

10 non-Serbes. Les officiers de liaison croates me l'avaient fait savoir.

11 D'autre part, je l'avais appris par ce qui figurait, ce qui était publié

12 dans les médias, ce qu'on faisait traduire, et cetera. Puis, je le savais

13 suite au contact avec la population croate qui avait des parents au nord de

14 la Bosnie-Herzégovine. J'en ai parlé comme cela dans la conversation même

15 si cela ne concernait pas directement sa zone de responsabilité. Nous non

16 plus nous n'avions pas de mission en Bosnie-Herzégovine. Je lui ai dit que

17 nous étions au courant du fait qu'il y avait des activités inhabituelles en

18 train de se produire. Il a répondu, effectivement, qu'ils étaient en train

19 de désarmer des gens, des "éléments incontrôlés."

20 Q. Maintenant, est-ce que vous pourriez nous dire, - parce que je vous ai

21 posé la question et vous avez déjà répondu, - pourriez-vous nous dire ainsi

22 qu'aux membres de la Chambre, approximativement quand ces conversations ont

23 eu lieu en gros ?

24 R. En gros, je pense que c'était en février 1992.

25 Q. Est-ce que vous avez évoqué la question avec lui du fait que la JNA

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1 envoie la population serbe en Bosnie ?

2 R. Je pense que cela faisait partie de la même conversation, tout au moins,

3 j'ai compris que c'était l'un des éléments dont il parlait, de ceux qu'ils

4 désarmaient et que les autres étaient en train d'être armés. Je ne peux pas

5 me rappeler sa réponse à cet égard.

6 Q. En ce qui concerne les renseignements qui vous étaient fournis à

7 l'époque, sur la fait que la JNA armait la population serbe, est-ce que

8 vous avez reçu des rapports en ce sens ?

9 R. Comme je l'ai déjà dit, nous avons été amenés à croire ceci par des

10 commentaires qui étaient faits par des officiers de liaison croates et par

11 des rapports dans les médias, par des commentaires par la population civile,

12 les contacts avec les officiels de l'ONU et les membres de la population.

13 Q. Général Wilson, sur la base des renseignements que vous receviez

14 concernant la situation en Bosnie, est-ce que vous avez recommandé un

15 déploiement des observateurs militaires de l'ONU en Bosnie du Nord et dans

16 d'autres secteurs où il y avait des tensions, en Bosnie-Herzégovine ?

17 R. Il y a un prélude à cela, un préambule, dans ce sens, qu'une fois

18 qu'elle était établie, les observateurs constituent les éléments de la

19 FORPRONU, et les quartiers généraux de la FORPRONU devaient être situés à

20 Sarajevo. Il devait y avoir également des observateurs militaires déployés

21 à Bihac, à Mostar, dans les régions de Bihac et de Mostar, pour surveiller

22 ce que l'on prévoyait qui se passerait en décembre 1991, ainsi que des

23 zones où il y avait des tensions et des conflits de groupes ethniques. Du

24 côté de la mi-mars, lorsque la FORPRONU a été déployée, il est devenu clair

25 qu'il y avait des tensions ethniques très importantes dans ce secteur, au

Page 13040

1 nord de la Bosnie-Herzégovine. J'ai fait une recommandation au commandant

2 de la force, une recommandation par écrit, selon laquelle nous devrions

3 modifier le déploiement des observateurs militaires, en reprenant certains

4 de ceux qui étaient déployés à Bihac, et en faisant toute une série

5 d'équipes dans le nord de la Bosnie-Herzégovine, où ils pourraient

6 surveiller les activités en cours. Cette demande, ou cette proposition que

7 j'ai faite n'a pas obtenu un accord. Nous avons, par la suite, été de

8 l'avant en avril avec un déploiement d'observateurs à Bihac, ainsi qu'à

9 Mostar.

10 Q. Je voudrais changer de sujet, et appeler votre attention sur les

11 communications et types d'information dont vous disposiez. Je vais vous

12 demander, on s'entend là-dessus, général Wilson, de façon à remplir la

13 mission de l'ONU en ex-Yougoslavie, était-il pour vous essentiel ainsi que

14 pour d'autres qui conduisaient ces opérations, d'être pleinement informés

15 de l'évolution du développement sur le terrain ?

16 R. Oui. Dans toute opération de maintien de la paix, où effectivement

17 l'opération militaire et les renseignements militaires sont essentiels, de

18 sorte que le commandement puisse prendre des décisions éclairées, informer,

19 anticiper les événements, et utiliser les ressources limitées qui sont

20 généralement à la disposition de la façon la plus efficiente. Une des

21 façons de la faire, est évidemment en recueillant le maximum d'informations

22 que l'on peut, en ce qui concerne l'environnement militaire. C'est ce qu'on

23 appelle le renseignement. En termes de l'ONU, on appelle cela

24 "renseignement militaire." C'est une fonction extrêmement importante. Je

25 voudrais dire quelque chose à ce sujet. La FORPRONU, dans les premiers

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1 temps, n'était pas très formée à cela, mais l'UNMLOY, c'était la première

2 mission a essayé très fort d'obtenir ce type de renseignement.

3 Q. Bien. Est-ce que vous pourriez décrire aux membres de la Chambre les

4 sources d'informations que vous aviez reçues ou que vous receviez et que

5 vous acceptiez ?

6 R. Il y avait des rapports de routine qui étaient fournis par toutes les

7 unités militaires le long de la voie hiérarchique. D'habitude, c'était fait

8 quotidiennement, sauf s'il y avait un incident important qui, à ce moment-

9 là, donnait lieu à un rapport direct. Il y avait des visites de personnes

10 qui passaient par là. Il y avait des missions spécifiques qui étaient

11 établies pour des personnes pour aller trouver un certain nombre de

12 renseignements concernant des éléments géographiques, des itinéraires,

13 d'infrastructures, et ainsi de suite, pour aller s'occuper de telle ou

14 telle difficulté locale ou le seigneur de la guerre locale. Nous devions

15 également suivre la presse tant internationale que locale, et glaner toutes

16 les informations que nous pourrions obtenir. Il y avait beaucoup de

17 communication inter organes; le HCR, la mission militaire de la Communauté

18 européenne, les différentes organisations humanitaires dans certains cas.

19 Il y avait des contacts formels avec la population, et il y avait des

20 réunions quotidiennes ou hebdomadaires ou même mensuelles.

21 Les partie également tiennent à vous dire ce que fait l'autre, ce

22 que fait l'adversaire. Il faut parfois prendre cela avec un grain de sel,

23 mais il y avait beaucoup de renseignements utiles et précieux qui pouvaient

24 être tirés de cela.

25 Q. Comment --

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1 R. Voilà pour l'essentiel.

2 Q. Comment se fait-il, général Wilson, que tous ces renseignements étaient

3 analysés, et comment pouvait-on déterminer s'ils étaient fiables ?

4 R. Au quartier général de la FORPRONU et de la mission militaire, il y a

5 avait un service au sein du quartier général qui s'occupait du

6 renseignement militaire et qui traitait toute cette information.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je remarque, Monsieur Harmon, que la

8 traduction est presque toujours de quelques lignes en retard.

9 M. HARMON : [interprétation] Bien.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, il faut ralentir.

11 M. HARMON : [interprétation] Bien.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais, tout d'abord, que l'on en

13 termine avec la traduction. Peut-être, qu'à ce moment-là, on pourra

14 poursuivre, mais à une allure peut-être un peu moins vive.

15 M. HARMON : [interprétation] Bien. Si je pouvais être informé de ce que

16 fait la traduction française, je vais écouter le canal français. Est-ce que

17 c'est le 3, le numéro 3 ou le numéro 5 ?

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est le numéro 5.

19 M. HARMON : [interprétation]

20 Q. Général Wilson, je vais écouter maintenant le canal français. Il y aura

21 des pauses plus longues entre mes questions et vos réponses, de sorte que

22 je vais vous demander vous-même si vous pouviez faire des pauses.

23 R. Je vais essayer de parler un peu plus lentement.

24 Q. Général Wilson, dans le cours des renseignements que vous receviez,

25 est-ce que vous aviez notamment des rapports concernant le nettoyage

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1 ethnique en Bosnie-Herzégovine par des forces serbes, ou qui seraient

2 connus par les forces serbes ?

3 R. Oui, nous en recevions.

4 Q. Est-ce que vous connaissez bien le terme "nettoyage ethnique" ou

5 "purification ethnique" ?

6 R. Oui.

7 Q. Qu'est-ce que vous comprenez par cette expression de "nettoyage

8 ethnique", et qu'est-ce que vous compreniez à l'époque en 1992, que voulait

9 dire cette expression ?

10 R. Je comprends que cela voulait dire le transfert par la force d'une

11 population qui était expulsée d'un secteur soit par menaces ou violences

12 véritables.

13 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quand vous avez, pour la

14 première fois, reçu des rapports en ce sens, et concernant quelle zone où

15 il y avait, disait-on, du nettoyage ethnique aurait eu lieu ? Si vous

16 voulez attendre un instant, je vais vous faire signe.

17 R. Il est difficile d'être précis. Mon estimation, c'était que cela aurait

18 été vraisemblablement vers la fin du mois de mars et certainement tout au

19 long d'avril 1992. Pour ce qui est des secteurs particuliers dont on

20 parlait, c'est essentiellement dans les médias, mais aussi au niveau de la

21 Mission militaire de la Communauté européenne, on parlait de la région

22 autour de Bijeljina et jusqu'à la vallée de la Drina.

23 Q. D'après les renseignements contenus dans les rapports que vous receviez,

24 quels étaient les groupes qui étaient victimes affectées par ce nettoyage

25 ethnique ? Pouvez-vous attendre juste un instant, Général, s'il vous plaît.

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1 R. Je comprenais ces rapports comme voulant dire que c'était des éléments

2 non-Serbes de la population qui étaient expulsés de ces secteurs.

3 Q. D'après les rapports que vous receviez, quel était le groupe ethnique

4 qui était responsable de ce nettoyage ethnique ?

5 R. C'était des Serbes.

6 Q. Vous-même, personnellement, est-ce que vous êtes allé à Bijeljina pour

7 aller observer ce qui s'était passé pour la population ?

8 R. Oui. Je suis allé à Bijeljina en mars, où je n'ai pas remarqué plus

9 particulièrement des troubles, mais je suis passé également du côté du 13

10 mai, et il était très clair qu'il y avait eu des dommages importants à la

11 suite des dommages subis par ce village.

12 Q. Dans ces premiers rapports, avez-vous reçu des renseignements

13 concernant la participation des groupes particuliers à ce nettoyage

14 ethnique ?

15 R. On m'a rendu compte, je crois très probablement par des contacts

16 personnels avec les médias, que ces activités avaient été menées par des

17 groupes des milices avec l'aide de la JNA, qui assurait la sécurité, un

18 périmètre de sécurité, tandis que ces milices entraient dans le village, se

19 livraient à certaines activités pour intimider la population et les

20 incitaient à partir.

21 Q. Est-ce que ces groupes milices n'ont jamais été identifiés selon un

22 nom ?

23 R. Il y en a deux qui ont été mentionnés. Le premier portait comme nom

24 Arkan, et le deuxième, c'était les Aigles blancs. Ces deux groupes

25 déployaient leurs activités dans ce qui est devenu par la suite ce qu'on a

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1 appelé l'UNPA, la zone de Protection de l'ONU.

2 Q. Est-ce que, personnellement, vous en avez observé certains membres de

3 ces groupes de miliciens ?

4 R. Je crois que c'était pendant février j'ai observé certains membres de

5 l'organisation d'Arkan à Knin. Ils étaient bien vêtus. Ils avaient une

6 bonne présentation, presque militaire, semblaient disciplinés, et étaient

7 acceptés par la population locale. Ils ne donnaient pas l'impression de ne

8 pas être là où ils auraient dû.

9 Q. Si nous pouvons passer maintenant à la pièce à conviction suivante,

10 général Wilson. Il s'agit d'une nouvelle pièce qui est un rapport final qui

11 porte pour titre : "Rapport final sur la tournée après de la FORPRONU,

12 rédigé par le général de brigade, J.B. Wilson," daté du 15 novembre 1992.

13 Général Wilson, est-ce que vous reconnaissez ce rapport, et est-ce que vous

14 pourriez dire aux Juges de la Chambre de première instance ce dont il

15 s'agit précisément ?

16 R. Oui. A la fin de ma tournée avec la FORPRONU, on m'a demandé de

17 présenter deux rapports : l'un aux Nations Unies, avec un résumé de mon

18 expérience vécu et des recommandations concernant peut-être des mesures

19 correctives pour l'avenir -- façons dont on pourrait mieux réaliser

20 certains objectifs. Le deuxième était un rapport à mes autorités nationales,

21 rendant compte de mon activité au cours des 12 mois écoulés. Ce rapport

22 était adressé à mon supérieur immédiat en Australie. C'était une personne

23 qui était très au courant des activités en Bosnie, en ex-Yougoslavie, et

24 c'était quelqu'un qui me connaissait personnellement.

25 M. HARMON : [interprétation] Je vais tout d'abord demander un numéro de

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1 pièce à conviction pour ce document, parce que j'étais un peu trop rapide

2 en procédant sans numéro.

3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ceci sera la pièce P720, présentée par

4 l'Accusation.

5 M. HARMON : [interprétation]

6 Q. Général, je voudrais attirer votre attention sur deux paragraphes; les

7 paragraphes 6 et 7. Paragraphe 6, c'est un long paragraphe qui décrit

8 certains aspects particuliers des opérations en Croatie. Pourriez-vous me

9 dire si ce paragraphe 6 s'applique à la Croatie, à la Bosnie-Herzégovine,

10 ou si elle s'applique aux deux ?

11 M. STEWART : [interprétation] Pourrais-je remarquer qu'il n'y a pas

12 apparemment de traduction de cette pièce. M. Harmon le sait, et, très

13 évidemment, il serait nécessaire de pouvoir incorporer et donner un rythme

14 qui convient pour incorporer ces documents dans les questions telles

15 qu'elles sont faites afin que M. Krajisnik puisse suivre la question.

16 M. HARMON : [interprétation] Oui, je suis tout à fait prêt à donner lecture

17 du paragraphe 6 lentement, pour qu'il soit inscrit au compte rendu.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

19 M. HARMON : [interprétation] Ensuite, je poserais la question.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous nous fournirez une traduction

21 en B/C/S --

22 M. HARMON : [interprétation] Nous avons demandé une traduction en B/C/S. Je

23 vais essayer de l'obtenir aussi rapidement que possible. Je n'ai pas encore

24 pu l'avoir.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

Page 13047

1 M. HARMON : [interprétation] Je vais la lire.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, si vous voulez bien la lire

3 lentement --

4 M. HARMON : [interprétation] Oui.

5 Q. Général, je vais vous lire le paragraphe 6 aux fins du compte rendu,

6 lentement, et j'attendrai avant de vous poser la question. J'attendrai que

7 la traduction soit terminée.

8 Au paragraphe 6, sous le titre : "Situation du point de vue

9 opérationnelle."

10 "Une analyse complète de la situation opérationnelle de la FORPRONU va au-

11 delà de la portée du présent rapport. Il s'agit d'une situation compliquée

12 et dynamique et volatile. Le plan Vance de démilitarisation des zones en

13 Croatie qui étaient précédemment occupées par l'armée populaire yougoslave,

14 la JNA, a été arrêté à partir de juin 1992. Divers groupes de miliciens se

15 sont faits jour à partir de la JNA, qui passaient pour des forces de

16 'police.'

17 "Quelque 16 000 'policiers' existent dans les quatre secteurs de la

18 FORPRONU dans un secteur, dans une zone dans laquelle avant la guerre, il y

19 avait peut-être un maximum de 2 000 policiers. Des armes lourdes (les chars,

20 l'artillerie, et cetera) ont été placées sous 'double verrous' ou 'double

21 cadenas', mais ils demeurent bien équipés pour des armes légères. En dépit

22 de la présence de la 'police' serbe, et de 11 bataillons de la FORPRONU, il

23 y a eu un effondrement total du droit et de l'ordre. Le nettoyage ethnique,

24 et tout ce qui va avec, se poursuit et, pour la plus grande partie, est

25 effectué par les forces de 'police.'

Page 13048

1 "Le système judiciaire n'est pas en mesure ou ne veux pas exercer des

2 poursuites dans des cas de meurtre qui sont pleinement documentés par des

3 enquêteurs de la police UNCIVPOL. Les dirigeants politiques répondent

4 clairement aux directives de Belgrade, et obéissent clairement les

5 directives de Belgrade, et s'oppose de façon active aux tentatives faites

6 par le FORPRONU de s'acquitter de son mandat. En outre, les tentatives

7 faites par la FORPRONU pour désarmer entièrement ces milices n'ont pas

8 réussies."

9 Est-ce que ce paragraphe, général Wilson, s'applique à la Croatie, à la

10 Bosnie ou aux deux ?

11 R. Il s'applique uniquement au secteur où se trouvait les UNPAs, les zones

12 de Protection de l'ONU.

13 Q. Ce sont des secteurs en Croatie, par conséquent.

14 R. Effectivement. Il s'agit de la Croatie.

15 Q. Je voudrais maintenant attirer votre attention sur le paragraphe 7 du

16 rapport définitif, et je vais le lire à nouveau lentement, et ensuite je

17 pourrais poser les questions.

18 "La situation en Bosnie-Herzégovine (BH) continue de se dégrader. Il

19 y a d'épouvantables violations des droits de l'homme par toutes les parties,

20 et en particulier, par les forces serbes. Des opérations militaires

21 classiques à grande échelle continuent, en vue de réaliser une division

22 ethnique de la République. Des forces de l'ONU déployées à Sarajevo sont

23 soumises à des tirs réguliers par toutes les parties, et il y a des

24 victimes tous les jours. Les 6 000 soldats de l'ONU qui sont déployés en

25 Bosnie-Herzégovine depuis le début de novembre, qui avaient pour tâche

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1 d'escorter les convois UNHCR, vont bientôt devoir reprendre les tâches

2 supplémentaires, et on s'attend à ce que ce ne soit pas le dernier

3 déploiement de soldats en Bosnie-Herzégovine. Malgré tous les efforts

4 déployés par le HCR, ce sera un hiver très dur en Bosnie-Herzégovine, avec

5 peut-être 100 000 morts dans la population civile, comme on peut le

6 prévoir."

7 Général Wilson, je voudrais appeler votre attention sur la deuxième

8 phrase du paragraphe 7. Vous parlez de "violations épouvantables de droit

9 de l'homme par toutes les parties, mais en particulier par les forces

10 serbes." Lorsque vous avez écrit cela, de quoi vouliez-vous parler, lorsque

11 vous disiez des "violations épouvantables ou lamentables" ?

12 R. Je voudrais tout d'abord dire, je voudrais souligner que ce rapport est

13 un synopsis, un résumé, très concis de 12 mois d'activités opérationnelles,

14 écrit et adressé à une personne qui avait une bonne connaissance et

15 compréhension de ce qui se passait en Bosnie-Herzégovine et, effectivement,

16 dans l'ex-Yougoslavie au cours des 12 derniers mois. Mais, dans la deuxième

17 phrase, en fait, je veux parler du fait qu'il y a eu un nettoyage ethnique

18 extensif, très développé, dont il y avait de nombreuses preuves dès

19 novembre 1992, du fait que des parts importantes de la population de

20 Bosnie-Herzégovine avaient été déplacées, par rapport aux zones où ils

21 résidaient. Dans de nombreux cas, ceci avait été fait avec la force brutale.

22 Il y avait eu un usage de la force sans discrimination contre des zones

23 urbaines et contre une population civile, constituant de graves violations

24 des conventions de Genève. Il y avait eu également des dommages importants

25 causés aux infrastructures, un très grand nombre de réfugiés, et il

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1 semblait que dans le cas de nombreuses opérations militaires, ceci était

2 effectué sans tenir aucun égard pour la population civile.

3 Dans cette phrase, je suis en train d'essayer de dire de façon

4 résumée, qu'en fait, les trois parties en présence dans ce conflit étaient

5 coupables d'excès, mais qu'il y avait des éléments de preuve

6 particulièrement forts à l'époque selon lesquels il y avait, de la part des

7 forces serbes, des opérations "systématiques et soutenues" et qui avaient

8 eu pour résultat des violations importantes des droits de la population

9 civile. Il y avait eu aussi à ce moment-là, on avait suggéré que les

10 prisonniers de guerre avaient été maltraités.

11 Je crois, qu'en fait, c'est cela que je voulais dire par cette phrase

12 qui résumait cela.

13 Q. Je vous remercie beaucoup, général Wilson. Je voudrais maintenant

14 passer à la phrase suivante : "Des opérations militaires classiques sur une

15 grande échelle se sont poursuivies en vue de réaliser une division ethnique

16 de la République." Lorsque vous avez rédigé cette phrase, vous parliez des

17 opérations militaires de qui ?

18 R. Je veux parler des trois parties qui possèdent des opérations

19 militaires. Par "à grande échelle", je veux dire qu'il y avait une ligne de

20 confrontation qui représentait 5 000 kilomètres de longueur, et qu'il y

21 avait probablement auprès d'un demi million de soldats qui participaient à

22 cela des trois côtés. Le processus, lui-même, concernant le fait de diriger,

23 contrôler et soutenir ces opérations et des opérations d'un tel niveau ne

24 pouvait être décrit que par le mot "grande opération". Je veux parler du

25 fait de réaliser une division ethnique sûre. Je me réfère à des actions par

Page 13051

1 des forces croates et serbes pour découper des zones ethniquement purifiées

2 dans ce territoire de l'ex-Yougoslavie ou de la Bosnie-Herzégovine.

3 Q. Un peu plus tôt, vous avez parlé "d'opérations militaires à grande

4 échelle qui s'étaient poursuivies en vue de réaliser une division ethnique

5 de la Bosnie," non, excusez-moi, "une division de la République," votre

6 réponse était, en partie, que : "Je me référais à toutes les parties." Est-

7 ce que dans votre déposition, vous appliquez ceci également aux musulmans,

8 aux gouvernements, aux autorités du gouvernement bosniaque ? Est-ce qu'à

9 votre avis ils cherchaient également à réaliser une division ethnique sur

10 le terrain ?

11 R. Non, en fait, je ne me réfère pas aux musulmans en l'espèce, parce

12 qu'ils avaient déclaré leur position politique de façon très claire, et qui

13 était qu'ils voulaient conserver une Bosnie-Herzégovine entièrement

14 intégrée du point de vue ethnique et mélangée du point de vue ethnique.

15 Ceci était clair à l'époque en 1992 et tout au long de 1993, pendant les

16 négociations de paix à Genève.

17 Q. Quand vous avez rédigé cette conclusion succincte, est-ce que c'était

18 sur la base de vos observations personnelles, de vos contacts avec des

19 dirigeants des diverses parties ? Est-ce que c'était basé sur les rapports

20 que vous aviez reçus de tiers responsables ou fiables ? Sur quoi vous

21 basiez-vous ?

22 R. Je me basais sur tous les éléments dont je disposais; mes observations

23 pendant près de 12 mois à FORPRONU, mes contacts personnels avec les

24 dirigeants politiques au niveau le plus élevé. Il y avait eu également de

25 nombreuses déclarations qui avaient été faites par des autorités serbes

Page 13052

1 responsables, tant des autorités militaires que politiques. Ils disaient

2 que leur but était de découper une république pour la population serbe en

3 Bosnie-Herzégovine; qu'ils ne pouvaient plus vivre avec les autres

4 nationalités; que la population serbe devait être protégée contre

5 l'agressivité des Musulmans, ou les Turcs, comme on les appelait; et qu'il

6 n'y avait aucun avenir pour une Bosnie-Herzégovine unie, mais qu'il y avait

7 une nécessité d'établir une république serbe indépendante.

8 Q. Bien. Général Wilson, je voudrais maintenant passer à une question

9 différente. Vous êtes resté à Sarajevo depuis le 22 mars jusqu'au 30 avril,

10 et vous avez quitté le théâtre de l'opération pendant deux semaines pour

11 des raisons personnelles. Puis, vous êtes revenu, je crois le 13 mai 1992;

12 c'est bien cela ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Pourriez-vous décrire aux membres de la Chambre de première instance

15 quelle était la situation à Sarajevo lorsque vous êtes revenu, et si vous

16 pouviez, en quelque sorte, concevoir votre réponse en ce qui concerne la

17 manière dont vous êtes revenu.

18 R. Le 13 mai, je suis allé de Belgrade à Sarajevo par la route jusqu'à

19 Bijeljina, Tuzla, par l'itinéraire le plus direct à Sarajevo.

20 Lorsque nous sommes arrivés à Sarajevo, il était clair qu'il y avait

21 des échanges de coups de feu d'armes légères, qui continuaient en ville,

22 qui avaient lieu en ville, et qu'il était nécessaire de négocier notre

23 entrée en ville par un point de contrôle tenu par les Serbes. La situation

24 en matière de sécurité à Sarajevo s'était considérablement détériorée au

25 cours des deux semaines de mon absence. Lorsque je suis revenu au QG de la

Page 13053

1 FORPRONU, on m'a fait un rapport sur les activités qui s'étaient déroulées

2 pendant mon absence. Un grand événement qui s'était déroulé, avait été

3 l'évacuation du QG de la JNA. On avait tenu une embuscade autour du convoi

4 d'évacuation et kidnappé le président Izetbegovic. Ces événements, avaient

5 de toute évidence, contribué à une détérioration de la situation de

6 sécurité à Sarajevo.

7 Q. Pourriez-vous décrire les événements qui se sont déroulés le jour

8 suivant, le 14 mai 1992, à Sarajevo ?

9 R. Le 14 mai, des hostilités très fortes se sont déclarées tôt le matin

10 dans la zone juste autour de Dobrinja, où je vivais dans un appartement

11 civil, mais aussi dans tous les quartiers de Sarajevo. D'après mes

12 observations, j'ai pu au moins voir des attaques par l'infanterie, des

13 attaques par artillerie et l'emploi de forces blindées. Pour autant que

14 j'aie pu en juger, je crois que peut-être 5 à 10 000 tirs se sont produits

15 dans la ville ce jour-là. Il était impossible de sortir du bâtiment où je

16 me trouvais. Nous avons été contraints de demeurer dans le calme et de

17 rester aussi discrets que possible pendant cette journée.

18 Q. Général Wilson, vous décrivez ici beaucoup de tirs et de pilonnages.

19 Pourriez-vous expliquer à la Chambre quelles étaient les armes lourdes qui

20 étaient disponibles pour les Serbes autour de Sarajevo et dans Sarajevo le

21 14 mai 1992, quels types d'armes étaient présents ?

22 R. Vu les tirs sur le terrain, certainement, ces armes étaient

23 d'artillerie de calibre de 22 millimètres, des mortiers de

24 160 millimètres, des mortiers de 82 millimètres, des tanks et des tirs

25 d'armes antiaériennes utilisées également de la terre.

Page 13054

1 Q. Pourriez-vous décrire le type d'armes lourdes qui étaient disponibles,

2 qui étaient entre les mains des forces du gouvernement de Bosnie à Sarajevo

3 ce jour-là, à votre connaissance ?

4 R. D'après mes observations, la présidence des forces de Bosnie n'avait à

5 sa disposition que des petits éléments d'artillerie, des petites armes.

6 J'ai appris par la suite, qu'ils avaient effectivement, essentiellement,

7 des mortiers mais pratiquement pas d'artillerie, juste quelques tanks.

8 C'était une force armée légère qui devait faire face à une force qui

9 l'assiégeait, très bien armée.

10 Q. Avez-vous été en mesure de déterminer qui tirait, de qui émanait

11 l'essentiel des tirs d'artillerie qui arrivaient sur Sarajevo ?

12 R. Je n'ai pas été en mesure d'observer les positions de tirs elles-mêmes.

13 On savait à l'époque et à ce moment-là, que la ville était entourée par les

14 forces serbes par quelques éléments restants de la JNA. C'est très

15 difficile de dire à quel moment toutes les forces de la JNA ont été

16 évacuées de la zone. D'après la complexité, la sophistication des

17 opérations qui étaient menées à l'époque, je suppose que la JNA était

18 demeurée sur le terrain au moins jusqu'à l'évacuation des derniers

19 baraquements de la JNA de Sarajevo.

20 Q. Avez-vous eu ou émis un jugement, général Wilson, quant au pilonnage de

21 Sarajevo le 14 mai et dans les journées qui ont suivi immédiatement le 14,

22 quant au volume de tirs et les cibles qui étaient utilisées ? Quelle

23 conclusion en avez-vous tiré ?

24 R. Je décrirais l'utilisation de l'artillerie comme étendue, faite sans

25 discrimination et excessive. J'ai participé à des opérations militaires

Page 13055

1 conventionnelles en tant que soldat, et je n'avais jamais vu des tirs aussi

2 lourds, l'utilisation de forces d'artillerie de cette ampleur, et notamment

3 jamais contre des cibles civiles. Dans beaucoup de cas, les cibles ne

4 semblaient avoir aucune valeur ou aucune importance militaire; celles qui

5 ont été sélectionnées, en tout cas, entre mai et juin 1992.

6 Q. En conséquence, du pilonnage d'artillerie qui s'est déroulé le 14 mai

7 1992 à Sarajevo, quelles ont été les mesures prises par la FORPRONU ?

8 R. Je crois qu'une décision avait été prise avant cette date de déplacer

9 le QG, de l'éloigner de Sarajevo, parce qu'il n'était plus pratique à des

10 fins opérationnelles de maintenir le QG à Sarajevo. Donc, le 16 et 17 mai,

11 au moment où l'état-major de la FORPRONU a pu quitté les bâtiments dans

12 lesquels elle était logée autour des tirs, le QG a été évacué vers

13 Belgrade. Comme vous l'avez indiqué dans votre introduction, dans la

14 présentation que vous avez faite de moi, je suis resté derrière avec une

15 force d'à peu près

16 80 personnes de la FORPRONU pour maintenir une présence à Sarajevo.

17 Q. J'ai dit précédemment qu'une partie de votre mission à Sarajevo

18 consistait à assister les parties par les bons services des Nations Unies;

19 c'est exact ?

20 R. C'est exact.

21 Q. J'aimerais maintenant en venir à deux incidents au moment où vous avez

22 assuré les bons services des Nations Unies pour aider les parties. Le

23 premier de ces événements était l'évacuation des casernes de la JNA à

24 Sarajevo. Pouvez-vous décrire à la Chambre combien de casernes se

25 trouvaient là, et quel était leur état au cours des mois de mai et juin, et

Page 13056

1 quelle a été le centre des négociations.

2 R. Il y avait trois casernes de la JNA dans l'enceinte de la ville à

3 l'époque. La première caserne était celle du maréchal Tito, l'autre, par la

4 suite, on l'appelait le camp de l'Ours, et la troisième a été la première à

5 être évacuée. J'en ai oublié le nom d'ailleurs, mais elle était située près

6 de Hrazna [phon].

7 Les trois casernes abritaient beaucoup de troupes de combat si mes

8 renseignements étaient exacts. Il y avait énormément d'élèves officiers,

9 des familles, et il y avait beaucoup d'équipement dans ces casernes. Les

10 casernes étaient entourées par les forces de la présidence de Bosnie, et il

11 y avait régulièrement des tirs embusqués, des échanges de tirs dans la zone

12 avoisinant ces casernes. Je crois que l'essentiel des aménités,

13 l'électricité, l'eau avait été coupé. Les forces de la JNA décrivaient

14 leurs circonstances comme étant "extrêmement inconfortables."

15 Q. Général Wilson, à quel moment ces négociations ont-elles eu lieu à peu

16 près ?

17 R. Les négociations ont eu lieu environ entre la mi-mai jusqu'au 2 ou 3

18 juin. Elles ont été dirigées par le colonel Hougland, un officier des

19 Nations Unies Finlandais. Il facilitait les discussions entre les parties.

20 Il m'arrivait de participer à ces réunions pour voir comment elles se

21 déroulaient. Ma première intervention importante au cours de ces réunions,

22 a été un moment où le plan d'évacuation faisait l'objet d'un accord. J'ai

23 veillé à ce que ce soit un plan opérationnel, et je lui ai donné mon accord

24 final.

25 Q. Pourriez-vous, à l'attention des Juges, identifier les parties qui

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1 participaient à ces négociations, en commençant par les Serbes de Bosnie,

2 puis la JNA, et ensuite, les forces du gouvernement de Bosnie ?

3 R. La JNA était représentée par un général de la JNA. Je crois que son nom

4 était Boskovic. Il était de formation officier des forces aériennes, de

5 l'armée de l'air. Je crois qu'il avait travaillé dans le renseignement. Il

6 était assisté par un officier de liaison des Nations Unies auprès de la JNA,

7 le colonel Kadja [phon]. Je crois que c'est comme cela qu'on le prononce.

8 Pour l'évacuation des casernes du maréchal Tito, qui représentait une

9 opération d'ampleur, le général Panic, le commandant de la JNA, est venu de

10 Belgrade, et a personnellement participé aux négociations.

11 Du côté bosniaque, du côté de la présidence bosniaque, il y avait le

12 ministère de la Défense, M. Doka [phon]. Il était assisté par un

13 représentant de l'armée dont le nom m'échappe -- deuxième commandant.

14 Mme Plavsic participait aux négociations. A l'époque, la présidence de

15 Bosnie ne voulait pas négocier avec le parti serbe. Il ne voulait pas leur

16 accorder aucune foi politique. Mme Plavsic était considérée comme un

17 interlocuteur acceptable, je crois, parce qu'elle était également membre de

18 la présidence bosniaque. Ils acceptaient qu'elle participe à ces

19 négociations.

20 Le général Mladic était également participant actif à ces négociations même

21 si, généralement, il ne participait pas aux réunions dans ce bâtiment du

22 PTT. Nous allions discuter des questions avec lui à Lukovica.

23 Q. Au cours de ces négociations, général Wilson, est-ce que vous étiez en

24 contact fréquemment avec les parties qui participaient à ces négociations ?

25 R. Oui, j'étais en contact avec elles de manière quotidienne. Je voyais

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1 Mme Plavsic, le général Boskovic, et cetera, quotidiennement.

2 Q. Est-ce que vous pourriez résumer les positions respectives des partis

3 lors de ces négociations ?

4 R. La position de la JNA était de mettre en œuvre l'évacuation immédiate

5 de leurs forces à n'importe quel prix et aussi rapidement que possible. La

6 position de la présidence était d'essayer de négocier pour que les forces

7 soient libérées, qu'elles obtiennent des armes et des munitions, et qu'il y

8 ait certaines concessions faites aux activités d'ordre humanitaire dans

9 l'enceinte de la ville. La position des Serbes de Bosnie était de rendre

10 une réalité la libération des forces de la JNA, de laisser sortir les

11 forces de la JNA des casernes, mais pas si cela voulait dire qu'il fallait

12 rendre les armes aux forces de la présidence. Le général Mladic tenait

13 particulièrement à ce point. Il ne voulait pas rendre les armes.

14 Q. Au cours de ces négociations, est-ce que vous avez eu l'occasion de

15 comprendre la réflexion ou la pensée de Mme Plavsic et du général Mladic

16 sur les arguments qu'ils présentaient, la position qu'ils représentaient

17 par rapport à leur peuple ?

18 R. Oui. Mme Plavsic, tout comme le général Mladic, réaffirmaient sans

19 cesse des arguments qui avaient été invoqués à maintes reprises sur les

20 menaces que cela représentait pour le peuple serbe, la nécessité de

21 défendre le peuple serbe, la nécessité d'établir un état serbe séparé, le

22 fait que les opérations militaires visaient simplement à protéger les

23 Serbes ou à défendre les forces militaires qui avaient été déployées.

24 Q. Ont-ils exprimé leur opinion sur les populations musulmanes ou non-

25 Serbes au cours de ces négociations ? Vous les ont-ils avancées à vous

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1 personnellement ?

2 R. Pas vraiment au cours des négociations elles-mêmes, mais peut-être en

3 aparté ou lorsqu'on abordait d'autres questions. Je me répète. En tout cas,

4 leur préoccupation essentielle était vraiment la cause du peuple serbe, la

5 défense du peuple serbe, et le fait que le peuple serbe était menacé par

6 une population non-serbe.

7 Q. Très brièvement, pour nous rapprocher de cette partie-là de votre

8 témoignage, quelle a été l'issue de ces négociations ? Quelle a été l'issue

9 de ces négociations ? Ne vous attardez pas sur ce point, mais décrivez

10 simplement brièvement à la Chambre dans quelle manière ces négociations ont

11 abouti.

12 R. Deux des casernes, celle du maréchal Tito et la première, ont été

13 évacuées. Les autres casernes, celle qu'on a connue par la suite sous le

14 nom de "Bear Camp," a fait l'objet d'une opération qui a été mal exécutée,

15 et 30 personnes ont été portées disparues. On ne sait pas si elles ont été

16 tués ou pas. En tout cas, il est sûr que cette opération ne s'est pas bien

17 déroulée du fait de mauvais plan et d'une mauvaise exécution.

18 Q. Vous avez également participé à un deuxième round de négociations où

19 les Nations Unies ont assisté les parties. C'étaient les négociations qui

20 visaient à ouvrir l'aéroport de Sarajevo. Est-ce que vous pourriez dire aux

21 Juges à quel moment ces négociations ont eu lieu, général Wilson.

22 R. Ces négociations ont eu lieu environ entre le 2 et le

23 5 juin 1992.

24 Q. Pourriez-vous dire aux Juges, de manière générale, quel était

25 l'objectif de ces négociations ?

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1 R. L'objectif des négociations était d'ouvrir l'aéroport de Sarajevo, afin

2 que l'approvisionnement, l'aide humanitaire, puissent être acheminés vers

3 Sarajevo et dans la zone voisine.

4 Q. Qui avait le contrôle de l'aéroport au moment où les négociations se

5 déroulaient ?

6 R. J'aurais du mal à le dire de manière précise. C'était une association

7 des forces serbes de Bosnie et de la JNA. Je suppose que la JNA était

8 toujours fortement présente à cet endroit.

9 Q. Général Wilson, pourriez-vous identifier les personnes membres de la

10 communauté internationale qui ont pris part à ces négociations ?

11 R. M. Cedric Thornbury, qui était un haut responsable de la FORPRONU, il

12 était l'autorité politique. Il est arrivé de Belgrade, je crois, le 2 juin,

13 le 1er ou le 2 juin. Il était, en fait, le participant aux négociations à

14 titre militaire dans cette équipe de négociation.

15 Parfois, un impliqué des affaires civiles, M. Razek, si je ne m'abuse,

16 je crois que c'était son nom, un propre officier d'état-major, un

17 commandant irlandais, Murphy, participait également à ces réunions.

18 Q. Qui représentait les Serbes de Bosnie dans ces négociations ?

19 R. Les Serbes de Bosnie étaient au départ représentés par

20 M. Karadzic, Mme Plavsic, et le général Mladic.

21 Q. Est-ce qu'une autre personnalité politique par la suite a participé à

22 ces négociations du côté des Serbes de Bosnie ?

23 R. Le dernier jour des négociations, le 5 juin, M. Koljevic et --

24 Q. M. Krajisnik --

25 R. J'ai un trou --

Page 13061

1 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, Messieurs

2 les Juges. Le rôle de M. Harmon n'est certainement pas de remplir les vides

3 mentaux dans la tête du témoin. Le témoin a dit qu'il avait un trou --

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon.

5 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je ne crois pas qu'il y

6 ait de conflit sur les personnes qui étaient présentes à ces réunions. Je

7 voulais simplement interroger le général Wilson précisément sur les

8 contacts qu'il a eu avec M. Krajisnik au cours de ces réunions. Le fait

9 qu'il ait eu un trou momentané me parait justifier, tout à fait, mon

10 assistance.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il a effectivement mentionné le nom

12 de M. Koljevic, et je crois qu'il faudrait faire preuve de plus de prudence

13 et de vigilance avant de suggérer le nom de M. Krajisnik. Parce que même si

14 cela n'apparaît pas sur le compte rendu d'audience, effectivement, lorsque

15 vous avez présenté le témoin, vous nous avez parlé de M. Koljevic, et c'est

16 vous qui lui avez posé la question de la présence de M. Krajisnik.

17 M. HARMON : [interprétation] Oui, c'est exact. Effectivement, je lui ai

18 posé la question sur M. Krajisnik.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Elle n'apparaît pas sur le compte rendu

20 avant l'intervention de M. Stewart.

21 M. STEWART : [interprétation] Le terme n'est peut-être pas l'intervention,

22 Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà, c'est un conflit sur les termes

24 en anglais.

25 Monsieur Harmon, je crois qu'il est clair que vous devez faire preuve de

Page 13062

1 plus de prudence ici avant de susciter un nom pour raviver la mémoire d'un

2 témoin.

3 Poursuivez.

4 M. HARMON : [interprétation]

5 Q. Général Wilson, pourriez-vous décrire, brièvement, pour le Président et

6 les Juges, les questions dont il était débattu quant à l'ouverture de

7 l'aéroport de Sarajevo.

8 R. Tout d'abord, la présidence avait refusé de rencontrer la partie des

9 Serbes de Bosnie dans une négociation quelle qu'elle soit. Il s'agissait

10 d'assurer la navette. C'était la diplomatie de navette entre la base

11 militaire de Lukavica et le bâtiment de la présidence. La position de la

12 présidence était que non seulement l'aéroport devait être ouvert, mais,

13 également, toutes les armes lourdes, serbes, devaient être retirées de

14 Sarajevo.

15 La position serbe était que si les Serbes devaient rendre l'aéroport,

16 à ce moment-là, ils continueraient à en assurer le contrôle. Au cours des

17 négociations, en fait, jusqu'au dernier moment, les Serbes formulaient les

18 propositions et des contre-propositions qui, en fait leur permettaient de

19 maintenir leur contrôle sur l'aéroport, de manière aussi discrète que ce

20 soit. C'est simplement lorsque M. Cedric Thornbury a dit que ces

21 propositions étaient inacceptables et que les négociations ne pourraient

22 pas aboutir, c'est seulement à ce moment-là que les Serbes finalement ont

23 cédé du terrain et ont donné leur accord pour que l'aéroport soit remis aux

24 Nations Unies conformément à l'accord qui avait été signé par les deux

25 parties, mais sur des bouts de papier séparés, le 5 juin.

Page 13063

1 Q. Est-ce que ces négociations portant sur l'ouverture de l'aéroport ont

2 été pour vous la première occasion de rencontrer

3 M. Krajisnik ?

4 R. J'avais peut-être rencontré M. Krajisnik, au début, à Sarajevo, dans

5 mes premiers jours à Sarajevo, au moment où un membre éminent de l'état-

6 major de la FORPRONU a été reçu par les membres de la présidence de Bosnie,

7 mais je ne me souviens pas de sa présence à ce moment-là. Je me souviens,

8 en revanche, de sa présence le dernier jour, lors des négociations sur

9 l'aéroport.

10 Q. Pourrez-vous décrire son rôle, dans ces négociations ?

11 R. Il était essentiel dans ces négociations. De toute évidence, il

12 participait à une dynamique de groupe, mais il était toujours consulté. Il

13 participait à des discussions en aparté, dès qu'il y avait des pauses. A

14 mon sens, il a été essentiel dans l'accord final, sur la remise de

15 l'aéroport aux Nations Unies.

16 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je vais passer à un

17 sujet différent et il ne reste que quatre minutes.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement. On pourrait, peut-être,

19 pendre une pause anticipée. Nous allons lever la séance jusqu'à 16 heures

20 10.

21 --- L'audience est suspendue à 15 heures 43.

22 --- L'audience est reprise à 16 heures 19.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je vous redonne la

24 parole.

25 M. HARMON : [interprétation]

Page 13064

1 Q. Général, poursuivons notre discussion au sujet des négociations

2 relatives à l'aéroport. Quand vous avez participé à ces négociations, avez-

3 vous eu de nouveau la possibilité d'entendre le point de vue des Serbes de

4 Bosnie ? Est-ce qu'ils vous l'ont répété ? Je parle des prises de position

5 qui avaient trait à la population non-serbe et aux ambitions territoriales

6 des Serbes de Bosnie, et des discussions dont vous avez déjà parlé ?

7 R. Je ne peux pas m'en souvenir avec précision. Ce sont des questions qui

8 ont été réitérées à de très nombreuses reprises, chaque fois qu'il y avait

9 des discussions de ce type.

10 Q. Au cours des discussions relatives à l'aéroport, aux négociations

11 relatives à l'aéroport, est-ce que vous vous êtes entretenu avec Mme

12 Plavsic au sujet de la détention des civils ?

13 R. Oui. Oui, j'avais reçu des informations de la part de la présidence de

14 Bosnie selon lesquelles des prisonniers civils avaient été emmenés au sud

15 de Sarajevo, étaient maintenus prisonnier dans un tunnel ferroviaire, ou

16 plutôt, un tunnel routier, et on s'inquiétait du sort de ces personnes, et

17 on m'a demandé de soulever la question devant Mme Plavsic. Je lui en ai

18 parlé. Elle a reconnu effectivement que les Serbes de Bosnie avaient fait

19 des prisonniers, mais elle a dit qu'ils s'agissaient des personnes en âge

20 de porter les armes, et que ces personnes avaient été arrêtées pour

21 qu'elles ne participaient pas aux combats. Elle m'a dit que les personnes

22 concernées étaient bien traitées. Elle a, d'autre part, rétorqué également

23 que la présidence de Bosnie avait des prisonniers dans les caves du

24 bâtiment de la présidence.

25 J'ai proposé d'enquêter sur ce point, mais lorsqu'il s'est s'agit d'aller

Page 13065

1 sur place pour se rendre sur les lieux, il y avait toujours des obstacles

2 qui se présentaient. Comme de tout manière ceci ne faisait pas partie de ma

3 mission, et qu'il y avait d'autres priorités, je ne me suis finalement

4 jamais rendu sur les lieux en question.

5 Q. Général, ce que vous dites c'est qu'elle a reconnu que les Serbes de

6 Bosnie détenaient des prisonniers. Est-ce que vous étiez en train de parler

7 à ce moment-là de prisonniers de guerre ou de civils ?

8 R. J'ai parlé des civils, et elle a répondu en disant qu'eux, ils avaient

9 fait prisonniers par mesure préventive des personnes en âge de porter les

10 armes.

11 Q. Au cours de ces discussions, avez-vous eu la possibilité de vous faire

12 une idée générale des relations existantes entre les dirigeants politiques

13 et le général Mladic lors des négociations relatives à l'aéroport ?

14 R. Oui.

15 Q. Pouvez-vous dire aux Juges quelles étaient globalement de manière

16 générale les relations qui existaient entre le général Mladic et les

17 dirigeants politiques serbes de Bosnie ?

18 R. Il s'agissait semble-t-il de relations tout à fait cordiales. Ils

19 étaient tous assez à l'aise, décontractés. Ils échangeaient librement des

20 informations. Le général Mladic n'avait pas peur de manifester son

21 désaccord avec les dirigeants politiques serbes de Bosnie, mais au bout du

22 compte, il affirmait que lui, il était subordonné aux dirigeants politiques

23 et qu'il devait suivre leurs instructions.

24 Q. A un moment dans ces négociations, est-ce qu'il y a eu un désaccord vif

25 entre Mladic et Karadzic ?

Page 13066

1 R. Les négociations sur l'aéroport ont duré pendant trois jours, avec des

2 propositions, des contre-propositions, et il était manifeste que le général

3 Mladic était réticent à l'idée de donner de l'aéroport, parce qu'il

4 affirmait que des forces serbes avaient lutté, a été tombées, pour obtenir

5 ce territoire. Il ne voulait pas abandonner l'aéroport, parce qu'il

6 estimait que ces hommes trouveraient cela inacceptable. Il a été inflexible.

7 Le dernier jour des négociations, il était manifeste qu'à moins que les

8 Serbes ne fassent des concessions, on n'arriverait jamais à un accord. Ce

9 dernier jour-là, le Dr Karadzic a fait sortir le général Mladic de la pièce.

10 Ils sont allés dans la pièce de côté. C'était manifeste parce qu'on les a

11 entendu avoir une discussion des plus violentes, discussion extrêmement

12 animée. Quand ils sont revenus dans la pièce, le Dr Karadzic a annoncé que

13 les Serbes étaient prêts à accepter l'accord et Mladic n'a plus fait

14 d'objection.

15 Q. Général, est-ce qu'à un moment donné au cours de ces discussions sur

16 l'aéroport, est-ce que vous avez interrogé directement le général Mladic

17 sur les relations qu'il avait avec les dirigeant politiques ?

18 R. Oui, à plusieurs reprises, à partir de la fin mai et pendant toutes les

19 négociations sur l'aéroport. J'ai demandé au Général Mladic qui était ses

20 supérieurs, et s'il était subordonné, s'il devait répondre de ses actions

21 devant les dirigeants politiques. Il a répondu que c'était le cas au moins

22 trois fois. La raison pour laquelle j'ai évoqué le sujet, c'est que

23 certains des représentants de la JNA, qui avaient participé aux

24 négociations sur la caserne, estimaient que Mladic était incontrôlé, qu'il

25 agissait de manière irrationnelle et indépendante. Or, il m'a dit

Page 13067

1 clairement à plusieurs reprises qu'il relevait de ces dirigeants

2 politiques, qu'il était responsable envers eux.

3 Q. J'aimerais que nous passions maintenant à une nouvelle pièce à

4 conviction qui s'intitule "téléfax crypté," "relatif à une discussion entre

5 Mme Plavsic et le général Mladic," en date du 25 mai 1992.

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

7 P721.

8 M. HARMON : [interprétation]

9 Q. Général, il s'agit d'une pièce que je vous ai montrée avant de venir

10 dans le prétoire, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Est-ce qu'il s'agit d'un document que vous avez vous-même préparé ?

13 R. Oui, c'est moi qui a établi ce document.

14 Q. Dans ce document, on voit se refléter une réunion qui a eu lieu entre

15 vous-même, Abdel Razek, ensuite on voit "CMDT", qu'est-ce que cela veut

16 dire; commandant ?

17 R. Oui.

18 Q. Donc, le commandant Murphy, vous-même, le Général Mladic, et Madame

19 Plavsic à la caserne de Lukavica.

20 Avant d'approfondir l'examen de ce document, je voudrais vous demander une

21 précision. Nous avons les initiales "CMO" qui figurent au paragraphe numéro

22 1, qu'est-ce que cela veut dire ?

23 R. C'est-à-dire "chef des observateurs militaires" de la FORPRONU, cela me

24 désigne puisque j'étais chef des observateurs militaire de la FORPRONU.

25 Q. A la lecture du premier paragraphe de ce document, il semble

Page 13068

1 qu'initialement, cette réunion devait avoir lieu uniquement avec madame

2 Plavsic, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. L'objectif de la réunion, c'était de parler de l'ouverture de

5 l'aéroport de Sarajevo pour l'aide humanitaire, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, autant que je m'en souvienne.

7 Q. Passez maintenant au paragraphe numéro 2 de ce document. Il y a un

8 passage qui m'intéresser plus particulièrement, je vais vous l'indiquer.

9 A peu près au milieu du paragraphe, un petit peu plus bas, il est dit

10 : "L'évacuation devait être réalisée en trois jours, sinon, une action

11 vigoureuse serait entreprise contre Sarajevo." Que signifiait cette

12 phrase ?

13 R. Il s'agissait d'une menace qui avait été proférée par le Général

14 Mladic, menace selon laquelle, si la caserne n'était pas évacuée dans les

15 trois jours, il allait attaquer à l'artillerie lourde la ville de Sarajevo.

16 Il a demandé à ce que cette information soit communiquée au membre de la

17 présidence. Il était très impatient quant à l'évacuation de la caserne, et

18 il n'était pas près à perdre du temps en négociation. Il voulait passer à

19 l'action.

20 Q. Ayant subi d'artillerie intensive le 14 mai 1992, est-ce que vous avez

21 pris cette menace au sérieux ?

22 R. Oui, parce que le général Mladic était connu. C'était un homme dont on

23 savait qu'il faisait ce qu'il disait, que ce soit en bien ou en mal.

24 Q. Maintenant, j'aimerais que nous passion au paragraphe numéro 3,

25 première phrase. Je cite : "Une intervention militaire internationale ne

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1 pourrait que provoquer une catastrophe à Sarajevo, puisqu'en cas d'option

2 militaire, Sarajevo serait rasée." Pouvez-vous expliquer la chose, s'il

3 vous plaît ?

4 R. A l'époque, dans les médias internationaux, on disait que si les Serbes

5 ne modéraient pas leurs attitudes, et s'ils n'ouvraient pas l'aéroport de

6 Sarajevo en particulier, il était possible que l'OTAN lance des frappes

7 aériennes contre les Serbes. Je pense qu'à ce moment-là, le Général Mladic

8 a fait preuve de bravade, et a dit qu'une telle action ne pourrait qu'avoir

9 qu'un impact négatif sur la situation générale.

10 Q. Maintenant, j'aimerais que nous passions au paragraphe 7 du document.

11 Précédemment dans votre déclaration, Général, vous avez dit qu'à plusieurs

12 reprises, vous aviez demandé au général Mladic de qui il relevait. Je vais

13 vous donner lecture du paragraphe 7 du document.

14 Je cite : "En réponse à une question du CMO, le général a nié qu'il

15 ait imposé la loi martiale en Bosnie-Herzégovine. Il a dit qu'il était

16 subordonné au dirigeant politique de ce qu'on appelait la république serbe

17 de Bosnie."

18 Est-ce qu'il s'agit d'un des exemples que vous avez évoqués précédemment

19 dans votre déposition où vous dites qu'il avait tenu de tels propos ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce qu'il a dit cela en présence de Mme Plavsic ?

22 R. Oui.

23 Q. Passons maintenant à la pièce à conviction suivante, c'est dans

24 l'ordre. Est-ce que je pourrais avoir une cote s'il vous plaît ? Il s'agit

25 d'une télécopie chiffrée en date du 30 mai 1992.

Page 13070

1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P722.

2 M. HARMON : [interprétation]

3 Q. Avez-vous une copie de ce document sous les yeux ?

4 R. Oui.

5 Q. Avez-vous eu l'occasion de voir ce document avant de venir déposer

6 ici ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que c'est vous-même qui avez rédigé ce document ?

9 R. Oui.

10 Q. Je signale pour le compte rendu d'audience que ce document est en date

11 de 30 mai 1992, que l'objet du document, c'est un rapport relatif à une

12 réunion entre le colonel Wilson et le général Mladic.

13 M. STEWART : [interprétation] Je souhaiterais que M. Harmon se rappelle que

14 ceci n'a pas été traduit non plus. Une fois encore, nous souhaiterions que

15 l'on ralentisse un petit peu le débit pour que M. Krajisnik puisse suivre.

16 M. HARMON : [interprétation] Oui, c'est ce que j'avais l'intention de

17 faire. J'avais l'intention d'en lire un extrait, le précédent document a

18 été traduit, et je vais donner lecture de ce document, tout comme j'étais

19 en train d'en lire le titre, quand Maître Stewart est intervenu.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois qu'il y a même une mention

21 en néerlandais ici, et que cela a été traduit. Veuillez lire lentement la

22 partie qui vous intéresse dans ce document.

23 M. HARMON : [interprétation]

24 Q. Paragraphe 1, je vais donner lecture du premier paragraphe.

25 Je cite : "Cette réunion a été demandée par le CMO, donc le Chef des

Page 13071

1 observateurs militaires, pour transmettre au Général Mladic l'appel lancé

2 par le Secrétaire général. Code du câble : MSC-369."

3 Qu'est-ce que cela signifie ici ?

4 R. Je ne sais pas exactement quelle est la nature, ou à quoi fait

5 référence ce code, mais j'imagine qu'il s'agissait d'un appel fait par le

6 Secrétaire général, à l'intention des forces serbes pour qu'ils se modèrent

7 à Sarajevo, et en particulier pour qu'ils permettre l'ouverture de

8 l'aéroport de Sarajevo.

9 Q. Passons maintenant au paragraphe numéro 5 de ce document, je vais en

10 donner lecture pour le compte rendu d'audience. Je cite : "Lorsqu'on lui a

11 demandé de confirmer l'offre de son président de retirer toutes les armes

12 lourdes pour les placer hors de portée de Sarajevo, il a répondu qu'il

13 n'avait pas connaissance d'une telle offre, mais qu'il conseillerait à son

14 gouvernement d'accepter et de respecter tous les accords qui seraient

15 conclus."

16 Avez-vous des observations au sujet de ce paragraphe, quant à la

17 position qu'avait le général Mladic, envers les autorités civiles.

18 R. Il s'agit une fois encore d'une répétition de sa position, selon

19 laquelle il était subordonné aux dirigeants civils. Ici, il utilise une

20 manœuvre dilatoire, parce qu'il était probablement ignorant du détail, de

21 l'offre qui avait été faite par le Dr. Karadzic, quant au retrait de

22 l'armement lourd et l'ouverture de l'aéroport de Sarajevo, ou s'il est au

23 courant en tout cas, il n'est pas prêt à en discuter tout de suite, et dans

24 cette enceinte.

25 Q. Général, à partir de vos observations sur la VRS, les contacts entre le

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1 général Mladic et les dirigeants politiques serbes de Bosnie et les

2 observations faites par le général Mladic, en êtes-vous arrivés à une

3 conclusion, quant à la manière dont l'armée des serbes de Bosnie relevait

4 effectivement, et se situait par rapport aux dirigeants politiques en

5 1992 ?

6 R. Le général Mladic était quelqu'un qui avait une très forte personnalité,

7 et qui était capable d'actions autonomes, indépendantes. Mais

8 fondamentalement, il faisait ce que ses maîtres politiques lui disaient de

9 faire.

10 M. HARMON : [interprétation] J'aimerais que nous passions à une pièce à

11 conviction qui a déjà été versée au dossier. Il s'agit de la pièce 64, une

12 pièce à conviction de l'Accusation. C'est un document qui est très long,

13 qui fait plus de 120 pages. J'en ai extrait deux pages, et je vais

14 demander à ce qu'on les distribue.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit de l'intercalaire d'un

16 document, l'intercalaire 24 [comme interprété].

17 M. HARMON : [interprétation]

18 Q. Est-ce que vous avez sous les yeux un exemplaire de ce document ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce que je vous ai donné la possibilité de passer en revue une

21 analyse de la préparation au combat, et des activités de l'armée de la

22 Republika Srpska, il s'agit d'un document extrêmement long, en date du 5

23 avril 1993 ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité de passer en revue le document

Page 13073

1 qui vous est remis là, et qui est un extrait du document précédemment

2 évoqué ?

3 R. Oui, j'ai lu cette partie du document.

4 Q. Ce document que vous avez sous les yeux, ce sont les pages 152 et 153

5 du document que j'ai précédemment évoqué, et il s'intitule, je cite :

6 "Conclusions relatives à l'analyse de la préparation au combat, et des

7 activités ou de l'état de préparation au combat, et des activités de

8 l'armée de la Republika Srpska en 1992." A la page 153, on voit la mention

9 suivante : "Han Pijesak, le 5 avril 1993, commandant suprême des forces

10 armées de la Republika Srpska, Dr Radovan Karadzic."

11 J'aimerais pour le compte rendu d'audience donner lecture d'un passage, à

12 savoir le deuxième paragraphe. Je vais vous demander ensuite vos

13 observations. Il s'agit du deuxième paragraphe, du paragraphe 4, page 153.

14 Je cite : "L'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska a

15 rempli les fonctions d'état-major du commandement Suprême, et dans le même

16 temps, les fonctions de commandement supérieur, chargé des formations

17 opérationnelles, et de formation tactique conjointe, ce qui supposait

18 l'accord du commandement Suprême, pour toutes les missions et les objectifs

19 du combat armé. Cette relation entre les structures de commandement, les

20 organes de gouvernement et le Commandement Suprême, a fait qu'il était

21 impossible pour l'état-major principal de prendre des décisions de son

22 propre chef, et qu'au contraire, toutes les actions, toutes les batailles

23 opérationnelles ont été approuvées politiquement, sur la base des intérêts

24 du peuple serbe, et ont reçu l'aval des autorités suprêmes de la Republika

25 Srpska."

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1 Pourriez-vous faire des observations sur la teneur de ce paragraphe dont

2 j'ai donné lecture, et j'aimerais, plus particulièrement que vous nous

3 parliez des relations entre l'armée de la Republika Srpska, et les

4 structures politiques de la République des serbes de Bosnie.

5 R. Il apparaît très clairement pour moi ici que toutes les opérations

6 militaires étaient menées conformément aux objectifs et aux instructions

7 politiques. Cela nous montrait clairement que l'état-major militaire

8 n'avait pas l'autorité de lancer des opérations indépendantes, ou de

9 prendre des décisions directes, qui auraient été différentes de celles qui

10 avaient été approuvées par les autorités politiques. Ceci s'est produit

11 après les faits. C'est un résumé de tout ce qui s'est passé en 1992.

12 Q. Est-ce que cela correspond à ce que vous avez pu voir sur le terrain

13 vous-même ?

14 R. Oui. Cela correspond avec les discussions que j'ai eues avec le général

15 Mladic, qui m'a dit qu'il était un chef militaire soumis au contrôle

16 politique.

17 Q. Merci. J'en ai terminé de l'examen de cette pièce à conviction, Général.

18 J'aimerais maintenant que nous parlions des autres réunions que vous avez

19 eues avec M. Krajisnik, des autres moments où vous avez eu l'occasion de le

20 voir. Cela s'est passé quand la fois suivante ?

21 R. Ma rencontre suivante avec M. Krajisnik s'est déroulée en 1992, en 1993,

22 en décembre et janvier à Genève. Puisque j'étais le conseiller de M. Cyrus

23 Vance, son conseiller militaire dans le cadre des négociations pour la paix,

24 de la conférence de paix de Genève. M. Krajisnik, lui, a participé en tant

25 que membre de la délégation serbe.

Page 13075

1 Q. Il s'agissait d'une conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie qui

2 a eu lieu à Genève; n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Quel était votre rôle particulier ? Vous dites que vous étiez le

5 conseiller militaire de l'ancien ministre américain des affaires étrangères,

6 Cyrus Vance. Vous étiez ainsi son conseiller politique. Est-ce que vous

7 aviez un autre rôle ?

8 R. Non, j'étais le conseiller militaire de M. Cyrus Vance, et plus tard de

9 M. Stoltenberg, dans le cadre de ces négociations.

10 Q. Pendant combien de temps avez-vous participé à ces conférences

11 relatives à l'ex-Yougoslavie ?

12 R. J'y ai participé presque un an, jour pour jour. De la mi-décembre 1992

13 jusqu'au 1er décembre 1993.

14 Q. Pourriez-vous nous dire qui étaient ceux qui négociaient pour la partie

15 des serbes de Bosnie, au cours de cette conférence ?

16 R. La délégation serbe évoluait au fil du temps. Pendant la plus grande

17 partie de négociations, il n'y avait qu'une délégation qui était restreinte,

18 qui était dirigée par le Dr. Karadzic, et il arrivait que participe

19 également le général Mladic, mais il n'était pas là fréquemment. M.

20 Krajisnik était fréquemment présent. Je ne me souviens pas avec quelle

21 fréquence M. Koljevic ou Mme Plasvic ont participé ou non à ces

22 négociations. En tout cas, c'était les représentants principaux de la

23 partie serbe.

24 Q. Avez-vous eu la possibilité de rencontrer M. Krajisnik, de l'observer

25 au cours de ces négociations ?

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1 R. Je n'ai pas véritablement rencontré M. Krajisnik. Je me suis trouvé

2 présent dans la même pièce que lui à des nombreuses reprises. J'ai eu la

3 possibilité d'observer les négociations comme elles se déroulaient

4 d'habitude. Je n'étais pas assis à la table mais sur une chaise qui était

5 un peu en arrière de la table, et j'étais en mesure d'observer, de prendre

6 des notes sur ce qui se passait au cours de ces négociations.

7 Q. Est-ce que vous avez, comme faisant partie de vos qualifications de

8 conseiller, vos observations, est-ce que vous avez pris la mesure des

9 différents négociateurs ?

10 R. Oui. C'était l'une des responsabilités de ces observateurs, c'était de

11 prendre des notes, c'était de s'assurer qu'à la fin, en fin de compte,

12 lorsque les rapports étaient rédigés, que toutes les questions avaient été

13 couvertes, rien n'avait été oublié, et une partie du processus de

14 débriefing était la participation des différents négociateurs, et il

15 fallait qu'il y ait une évaluation de ce qui était leur rôle.

16 Q. Pourriez-vous décrire quel était le rôle de M. Krajisnik tel que vous

17 l'avez observé, ou tel que vous l'avez apprécié et évalué au cours de ces

18 négociations ?

19 R. M. Krajisnik n'avait pas grand-chose à dire. Je suppose que ceci était

20 dû au fait qu'il ne parlait pas anglais. Mais il est clair qu'il était très

21 souvent consulté, et très prudemment consulté par

22 M. Karadzic, le Dr Karadzic. Il était assis à peu près du côté centre

23 autour du table, et il semblait être un membre très important de la

24 délégation.

25 Q. Tout au long de ces négociations, que ce soit officiellement ou

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1 officieusement dans des conversations officieuses, est-ce que les Serbes de

2 Bosnie ont exposé quelle était leur position en ce qui concernait leurs

3 ambitions territoriales, leurs objectifs territoriaux, et leurs vus

4 concernant les non-Serbes ?

5 R. Oui. Ils avaient clairement indiqué quelle était leur position et de

6 façon très détaillée. Lorsqu'on est venu à négocier sur la carte de la

7 Bosnie-Herzégovine et de la manière dont le territoire pourrait être divisé

8 en différents groupes ou entités ethniques. Il y a eu beaucoup de

9 discussions, d'arguments, à l'appui, en faveur de cette division, de ce

10 partage. Il y avait continuellement une expression des préoccupations

11 serbes pour la sécurité de leur population, et la nécessité d'une

12 république, et cetera.

13 Q. Qu'est-ce qu'ils ont dit en ce qui concernait la possibilité de vivre

14 avec des non-Serbes ?

15 R. A diverses reprises, ils ont indiqué il n'était plus possible pour que

16 ces trois nations continuent à vivre une à côté de l'autre en harmonie en

17 Bosnie-Herzégovine, et qu'il était nécessaire de séparer ces nations à la

18 fois politiquement et matériellement, physiquement, sinon, la population

19 serbe continuera à vivre sous la menace, et que ceci n'était plus une

20 solution viable pour eux.

21 Q. Est-ce que c'est une position serbe en quelque sorte uniforme qui a été

22 prise et soutenue par les négociateurs au nom des Serbes de Bosnie ?

23 R. Oui, c'était bien le cas. Elle a été réaffirmée à maintes fois lors de

24 nombreuses réunions.

25 Q. A ces négociations, qui était les principaux négociateurs au nom de la

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1 communauté internationale ?

2 R. Cela dépendait du sujet, de la question traitée, mais certainement M.

3 Cyrus Vance, dans la période qui va de décembre 1992 jusqu'à

4 approximativement au mois de mai 1993, a véritablement conduit les

5 négociations au nom de la communauté internationale. Puis, au cours de la

6 période qui a suivi au mois de mai 1993, Lord Owen en fait était

7 intellectuellement celui qui dirigeait la conférence.

8 M. Stoltenberg, lorsqu'il est arrivé, a davantage joué un rôle d'appui pour

9 Lord Owen, mais il aurait aussi un certain nombre d'ambassadeurs qui

10 étaient à cette conférence qui ont individuellement procédé à des

11 négociations sur des questions de moindre importance. Mais sur la question

12 de la Bosnie-Herzégovine, d'une façon générale, c'était le co-président qui

13 conduisait ces discussions.

14 Q. Lors des négociations avec les Serbes de Bosnie, est-ce que ces

15 dirigeants des Serbes de Bosnie ont été confrontés avec des accusations de

16 nettoyage ethnique ou de purification ethnique ?

17 R. Est-ce que vous pourriez répéter votre question, s'il vous plaît.

18 Q. Lors des négociations, est-ce que les Serbes de Bosnie ont été

19 confrontés par des allégations, est-ce qu'ils était confrontés par le co-

20 président ou par d'autres qui procédaient à ces négociations pour des

21 allégations de nettoyage ethnique commis par les Serbes en Bosnie ?

22 R. Oui, effectivement. A ce que j'ai compris, cela était un sujet fréquent.

23 A plusieurs reprises, Lord Owen, au cours des négociations, lorsqu'elles ne

24 progressaient pas de façon souple, satisfaisante, rappelait les

25 participants en ce qui concernait leur conduite, et le fait qu'ils ne

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1 respectaient pas les droits de l'homme. Il était très direct à cet égard.

2 Il ne mâchait pas ses mots. Il était un peu comme un maître d'école irrité

3 qui grondait un mauvais élève. Il n'y avait pas beaucoup de diplomatie en

4 l'occurrence.

5 Q. En d'autres termes, il était très direct; c'est exact ?

6 R. Oui.

7 Q. Est-ce que les Serbes de Bosnie avaient à leur disposition des

8 interprètes lorsque Lord Owen et d'autres personnes proféraient de telles

9 accusations ?

10 R. Oui, ils en avaient. Effectivement, au cours des forums il y avait des

11 interprètes qui d'habitude venaient de l'organisation des Nations Unies;

12 toutefois, lors des réunions de groupes de travail moins nombreux, les

13 parties venaient d'habitude avec leurs propres interprètes.

14 Q. Est-ce qu'il vous a semblé que -- non, excusez-moi. Est-ce qu'il vous

15 est apparu que les Serbes de Bosnie comprenaient ce que disait Lord

16 Owen lorsqu'il faisait ces accusations, lorsqu'il portait ces accusions, et

17 lorsque d'autres également le faisait sur cette question de nettoyage

18 ethnique ?

19 R. Le Dr Karadzic comprenait l'anglais très bien, et Lord Owen s'exprimait

20 en anglais. Certainement, tout ce qui était dit de toute manière était

21 traduit. C'était le cas pour toute la délégation serbe. Quant à savoir si

22 c'était traduit en serbo-croate, cela je ne le sais pas.

23 Q. Quelle était la réaction du Dr Karadzic à ces accusations ou

24 affirmations ?

25 R. D'habitude, il affirmait à nouveau la nécessité de défendre la

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1 population serbe, la nécessité d'avoir une république serbe. Les

2 circonstances, en fait, étaient très embarrassantes pour le Dr Karadzic, et

3 je crois que ce l'était également pour sa délégation, parce que Lord Owen

4 était très direct et s'exprimait dans un langage peu châtié, de sorte qu'il

5 y avait un air embarrassé. Mais la partie serbe répondait en réaffirmant

6 cette position.

7 Q. Peut-être pourriez-vous aider les Juges de la Chambre de première

8 instance à comprendre ceci. Comment se fait-il -- enfin, non, je retire

9 cela. --

10 Les discussions qui ont eu lieu à la conférence comprenaient notamment les

11 débats sur les questions de territoire; c'est exact ?

12 R. Oui, c'était l'une des questions. L'autre question importante, celle

13 d'une constitution que la nouvelle entité politique pourrait se servir.

14 Q. Centrons-nous sur les questions d'abord de territoire. Pourriez-vous

15 simplement dire aux Juges de la Chambre, lorsque certaines parties des

16 territoires faisaient l'objet des discussions, est-ce que la question du

17 nettoyage ethnique s'est posée dans le contexte de ces discussions ?

18 R. Je ne suis pas absolument sûr de ce que vous voulez dire par votre

19 question.

20 Q. Bien.

21 R. Pourriez-vous, s'il vous plaît, reformuler votre question ?

22 Q. Est-ce qu'il y avait certaines lignes frontières qui étaient établies

23 et qui étaient discutées lors de ces négociations ?

24 R. Environ 80, 85 % de la division avait fait l'objet d'un accord en gros

25 par les trois parties comme étant une solution acceptable, s'il était

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1 vraiment nécessaire qu'il y ait une division, un partage. L'argumentation

2 portait véritablement sur 10 ou 15 % du reste. Cette discussion a été faite

3 de façon extrêmement détaillée, notamment en disposant des avantages des

4 recensements qui avaient été faits dans le gouvernement de l'ex-Yougoslavie

5 dans cette région. Il y avait des arguments extrêmement détaillés en ce qui

6 concernait des revendications historiques à des zones géographiques très

7 petites. Lorsque le co-président indiquait qu'il y avait une région qui

8 était revendiquée par une partie, qui pouvait contenir une minorité

9 importante d'une autre nation, d'un autre groupe, les trois parties

10 semblaient tout à fait avec l'idée de réinstaller des populations

11 importantes de ces zones contestées. Il n'y a jamais vraiment eu des

12 dénégations des faits sur le terrain, sur le fait que ces zones n'avaient

13 plus leur population d'origine, et qu'elles étaient déjà en cours pendant

14 la guerre de -- en cours de nettoyage ethnique et de réinstallation du

15 population.

16 Q. Vous avez dit que ces négociations se sont déroulées à partir de

17 décembre 1993; c'est exact, général Wilson ?

18 R. Oui, effectivement.

19 Q. Maintenant, sur la base de vos contacts avec M. Krajisnik, M. Karadzic,

20 Mme Plavsic et M. Koljevic, sur la base des informations dont vous

21 disposiez, est-ce que vous avez formé une opinion en ce qui concerne les

22 relations hiérarchiques au sein des dirigeants serbes de Bosnie ?

23 R. Oui.

24 Q. Quelles ont été vos conclusions en ce qui concernait ces dirigeants ?

25 R. Je crois que le Dr Karadzic et M. Krajisnik étaient les autorités ayant

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1 essentiellement le pouvoir politique au sein de leurs groupes. Tandis que

2 Mme Plavsic et M. Koljevic avaient sans doute une certaine autorité sur le

3 plan politique en ce qui concerne les véritables problèmes, les problèmes

4 importants, c'était M. Krajisnik et le Dr Karadzic qui avaient

5 essentiellement le rôle principal. Je pense que le général Mladic

6 probablement avait également une participation importante, pas seulement du

7 point de vue militaire, mais également peut-être pour ce qui était

8 d'influencer les résultats, l'issue politique. En bref, je pense que la

9 direction politique était dominée par M. Karadzic et M. Krajisnik.

10 M. HARMON : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, général Wilson. Je

11 n'ai pas d'autres questions à vous poser.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Harmon.

13 Maître Stewart, on m'informe que si vous commencez votre contre-

14 interrogatoire maintenant, nous aurions des chances de finir demain, et à

15 ce moment-là, nous aurions beaucoup de temps, puisqu'il n'y a pas d'autres

16 témoins. Monsieur Harmon, est-ce que j'ai bien compris ?

17 M. HARMON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais j'ai

18 eu du mal à vous entendre. Excusez-moi.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que je comprends que le

20 prochain témoin que vous voulez présenter ne sera pas ici avant jeudi ?

21 M. HARMON : [interprétation] C'est exact.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Par conséquent --

23 M. HARMON : [interprétation] C'est exact.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- il n'est pas absolument nécessaire

25 pour le moment de commencer votre contre-interrogatoire, Monsieur Stewart,

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1 alors que d'habitude la Chambre insiste pour poursuivre. Par conséquent, ma

2 question est de savoir si vous souhaitez commencer maintenant votre contre-

3 interrogatoire ou si vous préférez commencer demain matin.

4 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que

5 c'est le matin par rapport à l'après-midi.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 M. STEWART : [interprétation] Mais la question de cette ajustement, la

8 réponse à la question que vous avez posée, Monsieur le Président, je

9 préférais, en fait, commencer demain. Je vous remercie.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bon, alors, Monsieur Wilson, vous

11 allez remarquer que je vous appelle Monsieur Wilson et non pas général

12 Wilson ou Général. C'est simplement une expression lorsque nous adressons à

13 un témoin, quelle que soit sa qualité à l'extérieur, quand il est ici pour

14 déposer, ceci pour aider à la Chambre à découvrir la vérité. Mais ceci

15 n'est pas du tout un manque de respect à votre égard.

16 Vous avez entendu que la Défense préférerais commencer le contre-

17 interrogatoire demain.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre fait droit à la demande

20 présentée par la Défense, ce qui veut dire que nous souhaiterions vous

21 revoir demain à 14 heures 15 de l'après-midi. Je voudrais vous donner pour

22 instruction de ne parler à personne de la déposition que vous avez faite et

23 que vous allez encore faire.

24 Madame l'Huissière, je vous prie d'escorter M. Wilson hors de la salle

25 d'audience.

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1 [Le témoin se retire]

2 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque nous avons un peu de temps qui

4 nous reste, et nous avons également demain, je voudrais traiter de deux

5 questions et d'autres points de procédure demain.

6 Je comprends, Maître Stewart, que vous n'avez pas besoin de toute la

7 matinée, ou, pardon, tout l'après-midi, pour le contre-interrogatoire.

8 M. STEWART : [interprétation] Non, je ne pense pas, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 M. STEWART : [interprétation] Merci.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La première chose que je voudrais porter

12 à l'attention des parties a trait à la procédure pour les interrogatoires

13 des témoins experts. La Chambre n'incline pas dans le sens de faire un

14 nouveau livre des records Guinness pour savoir quel est celui qui est le

15 plus rapide dans l'examen des documents en une heure. L'expérience gagnée

16 par cette Chambre-ci, en ce qui concerne 18 classeurs en trois jours, ou 12

17 classeurs en une journée et demie, n'encourage pas à la Chambre à procéder

18 de la même manière à cet égard. Par conséquent, je voudrais quand même

19 donner quelques directives concernant la procédure pour l'examen des

20 témoins experts. Je vais le faire en six points.

21 Si les parties qui n'ont pas été consultées sur ces points souhaitent

22 brièvement répondre demain, nous aurons un peu de temps pour le faire, en

23 ce qui concerne ces questions de procédure, et elles sont autorisées à le

24 faire.

25 Le premier point, c'est qu'à la suite de l'affirmation du témoin en tant

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1 que témoin expert, le point essentiel de la déposition est le rapport de

2 l'expert.

3 Deuxièmement : l'Accusation reçoit pour instruction de limiter son

4 interrogatoire aux questions qui ont une importance essentielle pour le cas

5 d'espèce et qui sont susceptibles de donner lieu à contradiction ou qui

6 nécessitent des explications, clarifications, illustrations supplémentaires

7 pour ce qui est de la manière dont l'expert est parvenu à l'avis qu'il

8 donne.

9 Troisièmement : les limites concernant les pièces à conviction présentées

10 par l'Accusation. L'Accusation est invitée à présenter les documents

11 auxquels il est fait référence dans le rapport de l'expert, qui sont

12 nécessaires pour réaliser les objectifs du point numéro 2, et, lors des

13 questions supplémentaires, de traiter des questions qui ont été évoquées

14 lors du contre-interrogatoire.

15 Quatrièmement : l'utilisation de pièces à conviction par la Défense. La

16 Défense peut introduire comme élément de preuve, en sus de tous les

17 documents qui émanent d'elle, tous les autres documents à l'appui auxquels

18 il est fait référence dans le rapport d'expert et qui n'ont pas encore été

19 versés au dossier et sur lesquels la Défense se fonde pour procéder à son

20 contre-interrogatoire.

21 Cinquième : le restant de tous les documents qui servent de base au

22 rapport de l'expert ne seront pas admis aux fins d'être versés comme

23 élément de preuves au dossier à moins que l'une des parties, en motivant

24 ses raisons, compte tenu de ce qui précède, le demande précisément, ou à

25 moins que la Chambre elle-même ne le demande expressément.

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1 Sixièmement : en ce qui concerne le point 5, les parties devront

2 suivre les directives de la Chambre pour ce qui a été notamment dit

3 verbalement le 1er mars 2005, T-9606, et le 27 avril 2005, T-12754. Ce sont

4 les références des comptes rendus. Donc, 9606, et pour le 27 Avril, 12754.

5 La question suivante est, Maître Stewart, que la Chambre vous doit

6 une réponse à la demande que vous avez présentée concernant le calendrier,

7 et ce qui est prévu pour les questions visées à l'Article 98 bis du

8 Règlement.

9 La Chambre rappelle que lors d'une séance récente traitant de

10 question d'organisation, le 27 avril 2005, Maître Stewart, vous avez

11 exprimé votre préoccupation selon laquelle la date fixée par l'ordonnance

12 portant calendrier d'avril pour la Défense de présenter ses conclusions au

13 titre de l'Article 98 bis, se rapprochait trop des vacances judiciaires

14 d'été. Maître Stewart avait suggéré qu'une grande partie, voire, presque

15 toutes les vacances de l'été pourraient à ce moment-là être consacrées à

16 des préparatifs des conclusions au titre de l'Article 98 bis, et que les

17 membres de la Défense à ce moment-là auraient très peu de temps pour

18 prendre des congés.

19 Maître Stewart a demandé à la Chambre de faire des commentaires sur

20 ses préoccupations et j'ai promis à Maître Stewart que nous le ferions.

21 L'ordonnance portant calendrier le 26 avril 2005 a prévu que les

22 moyens présentés par l'Accusation se terminent le 22 juillet 2005.

23 A ce stade-ci, nous ne savons pas si les arguments de l'Accusation seront

24 effectivement clos. Dans cette mesure, votre demande, Maître Stewart, est

25 quelque peu prématurée, mais je voudrais bien supposer, aux fins d'en

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1 discuter, que les arguments de l'Accusation seront terminés le 22 juillet,

2 comme prévu.

3 Il y a 16 jours ouvrés dans la période qui va du 22 juillet au 16

4 août. Le 16 août est la journée qui a été réservée pour la présentation des

5 arguments oraux sur la requête en vue d'un acquittement, à supposer qu'il y

6 en ait une. La Chambre n'a jamais eu l'impression que l'équipe de la

7 Défense consacrerait l'ensemble de ces 16 jours de ces vacances judiciaires

8 d'été à travailler à ces conclusions relatives à l'Article 98 bis du

9 Règlement. Ceci dû au fait que la procédure prévue par cet Article 98 bis,

10 telle qu'elle a été amendée cette année, n'a pas des caractéristiques de

11 travail intensif. L'Article du Règlement a été modifié précisément pour

12 garder en perspective cet objectif, afin de réduire la charge de travail

13 que cela pouvait impliquer.

14 La Chambre ne s'attend pas, et en l'occurrence, n'acceptera pas de

15 conclusions écrites concernant la requête, au titre de l'Article 98 bis. La

16 Défense doit simplement aviser la Chambre et l'Accusation à la fin de la

17 présentation des arguments à charge si elle entend ou non présenter une

18 demande d'acquittement. Celle-ci peut être présentée oralement ou par

19 courriel, il est nécessaire de ne donner aucun motif à ce stade. Si la

20 Défense avise la Chambre de son intention de faire une demande

21 d'acquittement, elle sera invitée à le faire verbalement le 16 août. Il y

22 aura la possibilité pour l'Accusation de faire une réponse verbale. La

23 Chambre décidera à ce moment-là de la question, se prononcera sur la

24 question, là encore, oralement, dans les trois jours suivants.

25 Le nouveau cadre des dispositions de l'Article 98 bis de cette

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1 procédure change la nature de la préparation nécessaire, bien que ceci ne

2 diminue pas la responsabilité de la Chambre pour ce qui est d'aboutir à une

3 décision bien pesée, bien considérée. Si la Défense a l'intention de

4 demander un acquittement, elle devrait dès maintenant se préparer à

5 développer les arguments qu'elle souhaite présenter afin de le faire le 16

6 août. Il n'y a aucune raison d'attendre que l'Accusation ait fait entendre

7 son dernier témoin avant que la Défense ne puisse s'occuper de cette

8 question. Effectivement, dès que le dernier témoin de l'Accusation a été

9 entendu, la Défense devrait viser à avoir terminer la présentation de ses

10 arguments concernant l'Article 98 bis.

11 La même chose est vraie en ce qui concerne l'Accusation, qui, d'après

12 la nouvelle procédure, a, en fait, l'obligation d'anticiper les arguments

13 de la Défense et d'y répondre dans un très bref délai. En l'espèce,

14 l'Accusation devrait être prête à répondre à la Défense le jour même où

15 elle entendra les arguments présentés par la Défense. Je pense qu'il est

16 clair que la procédure prévue par l'Article 98 bis amendée du Règlement

17 oblige les deux parties et, en l'occurrence, la Chambre elle-même, à penser

18 au moment-là où les choses devront être revues bien en avant de la date de

19 ce nouvel examen.

20 Etant entendu que la procédure de l'Article 98 bis ne pourrait être

21 un exercice de dernière minute, il en découle que l'intention de la Chambre

22 et que les dates relatives à l'Article 98 bis ont été fixées par

23 l'ordonnance portant le calendrier, que ces dates sont raisonnables.

24 Ceci conclut mes remarques sur la requête présentée par Maître

25 Stewart.

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1 Nous allons lever la séance et nous nous retrouverons demain après-

2 midi, à 14 heures 15, dans même salle d'audience et, Monsieur Stewart, vous

3 commencerez votre contre-interrogatoire.

4 --- L'audience est levée à 17 heures 15 et reprendra le mercredi

5 18 mai 2005, à 14 heures 15.

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