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1 Le jeudi 8 décembre 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 25.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon après-midi à tous. Le Greffier,
6 pourriez-vous citer l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de l'affaire
8 IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
10 On m'a appris qu'il y avait des changements dans la présentation des
11 témoins.
12 M. STEWART : [interprétation] Tout à fait. Le prochain témoin, puisqu'on
13 pense qu'on n'a pas besoin de tout l'après-midi pour en terminer avec Mme
14 Hrvacanin. Ensuite, il y aura M. Sakolovic. Je donne son nom parce qu'il
15 n'a pas de mesures de protection. Nous avons décidé, et c'est pour cela que
16 je vous en informe tout de suite que ce témoin ne sera pas cité par la
17 Défense.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous avez un témoin prévu
19 pour lundi ? Je pense que ce sera difficile.
20 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi ?
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui sera le témoin suivant ? Il était
22 prévu --
23 M. STEWART : [interprétation] Pour lundi.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela va être difficile de le faire venir
25 plus rapidement. Nous comprenons bien --
26 M. STEWART : [interprétation] Il n'est pas pratique d'accélérer un peu sa
27 présentation.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.
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1 M. TIEGER : [interprétation] Pour qu'on comprenne bien du côté de
2 l'Accusation ce qui se passe avec le témoin suivant, quand le problème a
3 été soulevé, je crois que c'est il y a quelques jours, deux jours environ,
4 et on a retardé un peu les discussions sur l'opportunité des écritures 65
5 ter, nous, on a évoqué le fait qu'on voulait savoir si on serait capable de
6 commencer immédiatement notre contre-interrogatoire juste après la
7 conclusion du témoignage de
8 M. Micic -- bien sûr, on essaie de faire de notre mieux. Mais étant donné
9 les dates qui ont été demandées pour les écritures, on n'est pas encore
10 vraiment sûr de -- bien sûr, on fait tout notre possible pour le faire à
11 temps.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Juges préfèreraient qu'on en termine
13 d'abord avec le témoignage de Mme Hrvacanin -- et qu'ai-je dit --
14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président --
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. TIEGER : [interprétation] Je ne voulais pas lancer la discussion
17 compliquée.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une fois qu'on en aura terminé avec ce
19 témoin, on parlera de procédures. Ce serait immédiatement après la pause ou
20 revenir le vendredi, si ce n'est pas vendredi, ce sera lundi. Enfin, on
21 verra cela après le témoignage de Mme Hrvacanin.
22 Monsieur Tieger, êtes-vous prêt à continuer le contre-interrogatoire du
23 témoin de Mme Hrvacanin ?
24 M. TIEGER : [interprétation] Tout à fait.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Il faudrait emmener le témoin
26 dans le prétoire.
27 Maître Tieger, avec le conseil des 60 %, il vous reste environ une
28 demi-heure. Il n'y a pas d'autre témoin, bien sûr, juste après elle, mais
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1 ce serait bien quand même que les choses soient équilibrées pour les deux
2 parties. Donc, vous avez encore à peu près 30 minutes.
3 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'apprécie le
4 conseil.
5 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon après-midi.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bon après-midi.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon après-midi, Madame Hrvacanin. Peut-
9 être que ceci n'est pas nécessaire, mais j'aimerais vous rappeler quand
10 même que vous êtes toujours sous serment, le serment que vous avez fait au
11 début de votre témoignage, de dire uniquement la vérité, toute la vérité et
12 rien que la vérité.
13 M. Tieger va poursuivre son contre-interrogatoire.
14 Maître Tieger, vous avez la parole.
15 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 LE TÉMOIN : SLOBODANKA HRVACANIN [Reprise]
17 [Le témoin répond par l'interprète]
18 Contre-interrogatoire par M. Tieger : [Suite]
19 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Hrvacanin.
20 R. Bonjour.
21 Q. Me Stewart vous a posé des questions sur le SDS et sur le conseil
22 principal, et si j'ai bien compris, vous avez dit que c'était un parti
23 démocratique, qu'il n'y avait pas d'ordonnances ou de directives. J'ai bien
24 compris ?
25 R. Tout à fait. C'est cela.
26 Q. Pour vous, ce n'était pas une organisation hiérarchique où émaneraient
27 des politiques, des instructions, enfin, tout cela venant du haut du parti,
28 qui seraient disséminées vers le terrain et qui devraient être suivies. Ce
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1 n'est pas ce type d'organisation, selon vous; c'était plutôt comme un club.
2 C'est cela ?
3 R. Un mouvement plutôt. On dirait plutôt que c'était un mouvement plutôt
4 qu'un parti, au départ en tout cas.
5 Q. Ce prétoire a déjà eu la possibilité de voir beaucoup de témoignages,
6 voir aussi beaucoup d'éléments de preuve, des conversations entre des
7 différents officiels du parti. Je voudrais juste attirer votre attention
8 sur quelques extraits. Tout d'abord, à l'intercalaire 21, on voit une
9 discussion, une conversation très exactement qui s'est tenue le 26
10 septembre 1991, entre le Dr Karadzic et M. Stanic.
11 M. TIEGER : [interprétation] C'est sous cote P899, si ma mémoire ne me
12 trompe pas.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre liste dit que c'est le P729 [comme
14 interprété], intercalaire 387, ce n'est pas --
15 M. TIEGER : [interprétation] C'est l'intercalaire 21.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est le 21. J'ai fait une erreur.
17 Donc, c'est --
18 M. TIEGER : [interprétation] Pour les interprètes, je tiens à dire que
19 l'extrait dont je vais donner lecture se trouve à la page 0323-5899,
20 environ au milieu de la page.
21 Q. Après le début de la conversation, c'est une discussion entre Dr
22 Karadzic et M. Stanic sur les activités des membres du SDS de cette
23 municipalité, puis le Dr Karadzic dit la chose suivante :
24 "Dis-leur que je vais licencier le comité et je nommerai d'autres
25 personnes. Dis-leur. Ce n'est pas la première fois que je vais le faire. Je
26 vais licencier les imbéciles qui ne mettent pas en œuvre les politiques du
27 parti. Ils peuvent aller au SPO, cela ne me dérange pas. Mais, je ne veux
28 pas que cela se passe comme cela dans mon propre parti."
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1 Maintenant, je vais vous lire un extrait d'un document qui nous a été
2 montré précédemment sous la cote P898, autre conversation qui a eu lieu en
3 septembre 1991, qui implique le Dr Karadzic. Là, il parle à des gens qui
4 sont à Prijedor.
5 M. TIEGER : [interprétation] Pour les interprètes encore, je vous donne les
6 références. Cela peut être trouvé sous le ERN 03233006.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si on pourrait avoir la cote ?
8 M. TIEGER : [interprétation] C'était distribué séparément, en fait.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
10 M. STEWART : [aucune interprétation] Très bien.
11 M. TIEGER : [interprétation] C'est mon erreur. Cela n'avait pas encore été
12 distribué, mais vous l'avez maintenant.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
14 M. TIEGER : [interprétation] J'aurais dû le noter.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
16 M. TIEGER : [interprétation] J'ai indiqué l'extrait qui va être lu dans le
17 compte rendu B/C/S. Pour ce qui est de l'anglais, cela se trouve à la
18 troisième page de cet extrait de conversation. C'est le 0110476.
19 Q. Là, le Dr Karadzic parle encore une fois à des personnes sur le
20 terrain. Il parle des problèmes de terrain. Il dit : "Ils n'ont qu'aller se
21 faire foutre. Ils n'ont qu'à avoir leur propre parti. Ils n'ont qu'à s'en
22 aller. Ceux qui ne veulent pas obéir à Sarajevo n'ont qu'à démissionner.
23 Vous n'avez qu'à écrire un article et leur dire : C'est un parti qui a
24 quand même des dirigeants et des exécutants. Ils n'ont qu'à aller faire
25 voir."
26 Il continue : "Vous n'avez qu'à leur dire que s'ils ne veulent pas
27 obéir à une politique du parti et mettre en œuvre ses politiques, et s'ils
28 veulent en revanche mettre en œuvre leur propre politiques, ils n'ont qu'à
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1 signer ici, et ils n'ont qu'à aller faire leur place dans la municipalité,
2 et on mettra d'autres personnes à leur place."
3 Madame Hrvacanin, je voudrais attirer votre attention sur d'autres réunions
4 importantes où on a beaucoup parlé de la discipline au sein du parti comme,
5 par exemple, le club départemental, une réunion qui a eu lieu le 28 février
6 1992. Les Juges ont vu cela, cet homme, M. Karadzic, qui parle avec eux
7 avec énormément d'emphase sur le fait qu'on n'a besoin que les personnes
8 qui font partie du parti et adhèrent véritablement aux politiques du parti.
9 Mais sachant ce que vous avez entendu, j'ai une question à vous poser. Vous
10 nous avez expliqué hier, - bon, c'est difficile pour vous, je crois, de
11 parler de tout cela - que vous avez supprimé énormément de choses et
12 contrôlé énormément de choses, tout ce qui s'était passé avant le conflit
13 et pendant le conflit. Vous avez voulu les effacer. J'aimerais savoir pour
14 ce qui est de la hiérarchie du parti, de la discipline au sein du parti, de
15 cette nécessité de suivre la ligne des dirigeants du parti, si c'était
16 l'une de ces choses que vous avez voulu éliminer à votre esprit ?
17 R. Monsieur le Président, Monsieur le Procureur, je n'ai jamais eu le
18 moindre problème et je n'ai jamais écouté les autres. De toute façon, je
19 suis ma conscience uniquement. Je ne pense que quiconque était exclu du
20 Parti démocratique serbe parce qu'ils ne faisaient pas ce qu'ils étaient
21 censés faire. Je ne peux pas juger d'autres personnes en disant ce qu'ils
22 ont fait ou n'ont pas fait. C'est la première fois que j'entends parler de
23 ce type de conversations. Jamais auparavant je n'ai entendu le président
24 Karadzic utiliser ce type de vocabulaire. Je suis très surprise. Certes,
25 notre langue est assez fleurie, mais là, il ne faut pas exagérer.
26 Q. Dans les conversations que vous avez entendues, est-ce qu'il
27 était clair pour vous que le Dr Karadzic et tous les personnes avec qui il
28 s'adressait, considéraient qu'il y avait une structure du parti, une
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1 hiérarchie dans le parti selon laquelle les dirigeants du parti donnent des
2 instructions, donnent des ordres, et les autres qui sont en dessous doivent
3 exécuter ?
4 M. STEWART : [interprétation] Il y a plusieurs pages d'extraits et je
5 pense qu'on va un peu trop loin-là. On dépasse la frontière entre la
6 question normale avec réponse du témoin, et cela commence-là à devenir un
7 petit peu une déclaration de l'Accusation plutôt.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Tieger, si vous aviez demandé au
9 témoin notre question, si vous lui avez demandé, par exemple, si pour elle,
10 sur la base des extraits entendus, si
11 M. Karadzic s'en pensait à quelque chose, elle ne peut pas savoir, elle ne
12 peut pas y répondre. Elle pourrait essayer, certes, mais je ne sais pas si
13 on a vraiment besoin d'un témoin pour ces spéculations. Si on a vraiment
14 besoin d'étudier ce qui est contenu dans ces extraits, on pourrait peut-
15 être d'abord savoir quels sont les contacts, et savoir ensuite quelles sont
16 les conclusions qu'on peut en tirer. Mais je pense qu'on est en train de
17 demander au témoin de faire le travail de la Cour. Oui, sur la base de ce
18 qu'elle a entendu, elle considère, elle pense, elle aussi, que M. Karadzic
19 avait quelque chose en tête ou pas.
20 M. TIEGER : [interprétation] Je me suis peut-être mal exprimé alors, mais
21 je parle quand même à un membre du parti ici qui avait des contacts avec le
22 Dr Karadzic --
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Reformulez votre question, s'il vous
24 plaît.
25 M. TIEGER : [interprétation] Bien sûr.
26 Q. Madame Hrvacanin, dans ces extraits qu'on vient d'entendre, le Dr
27 Karadzic donne des instructions à des gens, des gens qui sont dans le
28 parti. Il est en train de leur dire que ses instructions doivent être
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1 suivies, ou sinon, il y aura des sanctions évidentes, n'est-ce pas ?
2 R. C'est ce que vous dites. C'est ce que vous en tirez comme conclusion.
3 Je ne sais pas si c'est bon ou pas, si c'est vrai ou pas. Assez souvent, je
4 n'étais pas d'accord avec le président Karadzic, et je n'ai jamais eu aucun
5 problème à cause de cela. On ne m'a jamais sanctionnée.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Hrvacanin, la question n'est pas
7 de savoir si vous avez été en opposition avec
8 M. Karadzic et si vous avez eu des sanctions, mais de savoir si dans cet
9 extrait M. Karadzic dit, oui ou non : Si vous ne suivez pas la politique du
10 parti, vous n'avez pas votre place ici dans le parti.
11 Voilà la question de Me Tieger. Donc, vous êtes d'accord pour dire que
12 c'est ce que veut dire M. Karadzic ici ou est-ce que vous pouvez comprendre
13 cela autrement ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas comme cela que j'ai perçu la
15 chose, et je ne peux pas le dire. Je ne peux être sûre que de que j'ai
16 entendu et ce que j'ai vu. Je ne peux rien dire sur tous ces extraits.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous n'avez pas de connaissance de
18 tout cela. Mais pour la question suivante, il serait important que M.
19 Tieger sache si vous êtes d'accord pour dire que dans cette conversation M.
20 Karadzic utilise des mots longs qui disent en un mot : Suivez la ligne du
21 parti, sinon, on vous remplace. Est-ce ce qu'il est en train de dire dans
22 cet extrait téléphonique que nous venons d'entendre ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, suite à ce que j'ai entendu, j'ai
24 l'impression que c'est cela.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Tieger.
26 M. TIEGER : [interprétation]
27 Q. Madame Hrvacanin, maintenant je vais passer à un sujet qui est proche.
28 Je ne vais pas continuer sur ce sujet-ci exactement. Vous avez aussi déposé
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1 à propos de votre point de vue sur le pouvoir que M. Krajisnik avait au
2 sein du SDS et de la Republika Srpska et de l'autorité qu'il détenait. Il
3 me semble que vous nous avez dit, de façon générale, qu'il n'était pas la
4 personne la plus haut placée, qu'il n'était pas au conseil principal, pas
5 tout le temps en tout cas, qu'il ne participait pas a toutes les réunions
6 du conseil principal. Je vous paraphrase un peu. Enfin, j'essaie de vous
7 rappeler ce que vous avez dit.
8 J'aimerais vous demander tout d'abord si le pouvoir de M. Krajisnik dans la
9 Republika Srpska et au sein de la SDS a augmenté avec le temps, donc à
10 partir du moment où vous êtes devenue membre du conseil principal jusqu'au
11 moment où vous l'avez quitté. Est-ce que son pouvoir est resté identique ou
12 est-ce que qu'il a augmenté avec le temps ?
13 R. Non. C'est M. Karadzic qui avait le plus de pouvoir au sein de ce
14 conseil principal, et par la suite, il avait du pouvoir en tant que
15 président de l'Etat. M. Krajisnik avait des pouvoirs qui lui étaient
16 propres en tant que président de l'assemblée. En revanche, il ne pouvait
17 pas donner des ordres à qui que ce soit. Il ne pouvait pas démettre qui que
18 ce soit de ses fonctions. Il ne pouvait pas nommer qui que ce soit. Il
19 n'avait pas d'influence sur l'armée et sur la police.
20 Q. Donc, si je vous ai bien compris quand vous avez répondu à ma question,
21 vous vouliez dire que les pouvoirs de M. Krajisnik, tout au moins
22 officiellement, n'ont pas changé pendant cette période où vous, vous étiez
23 membre du conseil principal. Et là, je parle du SDS, et de ce pouvoir dans
24 le cadre du SDS et dans le cadre de la Republika Srpska. D'après ce que
25 vous dites, il n'a pas eu plus ou moins de pouvoir, cela n'a pas changé.
26 M. STEWART : [interprétation] Peut-être faudrait-il rappeler les Juges de
27 la Chambre pendant quelle période Mme Hrvacanin faisait partie de ce
28 conseil principal, puisque cela a commencé assez tôt d'ailleurs par rapport
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1 à la période qui est pertinente pour l'acte d'accusation.
2 M. TIEGER : [interprétation] Oui, effectivement. Mais je vais modifier
3 quelque peu ma question.
4 Q. Est-ce que vous vous souvenez encore de la question ? J'ai voulu vous
5 demander de me répondre à la question, mais en vous concentrant sur la
6 deuxième partie de votre temps au sein de ce conseil principal, à savoir, à
7 partir de la mi-juillet 1991 et ensuite, est-ce que l'autorité et les
8 pouvoirs de M. Krajisnik ont changé en ce qui concerne le SDS et la
9 Republika Srpska pendant cette période-là, c'est-à-dire, à partir de la
10 moitié de l'année 1991 jusqu'à la fin de votre temps au sein de ce conseil
11 principal ?
12 R. M. Krajisnik avait les mêmes pouvoirs à partir de 1991 que jusqu'en
13 1991. Ses pouvoirs n'ont pas changé. Ils n'ont pas été élargis, tout au
14 moins que je sache.
15 Q. Cela veut dire que ses pouvoirs et l'autorité dont il jouissait n'ont
16 pas changé non plus pendant cette période-là, d'après ce que vous dites ?
17 R. Il avait les pouvoirs qui lui étaient conférés par la loi et la
18 constitution. C'est ce qu'il avait. Il n'avait pas plus de pouvoirs parce
19 qu'il était membre, par exemple, du conseil principal. D'ailleurs, il ne
20 pouvait pas en avoir, ce n'était pas possible. Je vous ai dit que le parti
21 avait son propre comité exécutif, et c'est le comité exécutif qui dirigeait
22 les travaux du parti. Que je sache, M. Krajisnik n'a jamais été membre de
23 ce comité exécutif du parti.
24 Q. Vous venez de nous dire, si je vous ai bien compris, que l'autorité
25 dont il jouissait et les pouvoirs qu'il avait étaient limités et d'ailleurs
26 en accord avec le pouvoir qu'il avait jusqu'alors, pas plus pas moins ?
27 R. Oui, vous m'avez très bien compris.
28 Q. Est-ce que vous n'avez jamais entendu d'autres personnes dire au sein
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1 du SDS ou d'autres organes politiques de la Republika Srpska que M.
2 Krajisnik avait un certain degré de pouvoir et d'autorité qui allait au-
3 delà de ses fonctions strictement parlant, au-delà de ce qui était prévu
4 par la loi, au-delà de ses compétences d'ailleurs ?
5 R. Non, je n'ai jamais entendu dire cela.
6 Q. Pourtant les Juges de la Chambre ont entendu des témoins dire que M.
7 Krajisnik et le Dr Karadzic étaient les deux dirigeants de plus haut niveau
8 des Serbes de Bosnie, qu'ils fonctionnaient en tant qu'un duo et que c'est
9 de cette façon-là qu'ils exerçaient leur pouvoir, tout au moins en partie.
10 Les gens qui leur étaient subordonnés et qui devaient mettre en œuvre leurs
11 politiques les voyaient comme cela. N'est-ce pas exact, Madame Hrvacanin,
12 que vous aussi, vous saviez qu'il y avait des gens importants qui
13 travaillaient pour M. Krajisnik - là, je ne parle pas uniquement de gens
14 qui faisaient partie de l'assemblée - mais de gens importants au sein du
15 SDS ou des cercles politiques de la Republika Srpska qui étaient ses
16 hommes, qui travaillaient pour lui ? Vous n'avez pas entendu dire cela,
17 Madame Hrvacanin ?
18 R. Excusez-moi, la question est un peu bizarre. Ses hommes, vous parlez de
19 ses hommes. Vous savez, j'étais en bons termes aussi bien avec M. Krajisnik
20 qu'avec M. Karadzic, mais je ne pensais pas comme eux pourtant. On ne
21 partageait pas forcément les mêmes idées. Si vous fréquentez quelqu'un,
22 cela ne veut pas dire forcément que vous pensez exactement de la même
23 façon. Sans doute y avait-il des gens qui se vantaient travailler pour
24 quelqu'un, qui le disaient pour s'en vanter. C'est ce que je pense au
25 moins. Surtout quand on n'a pas une très haute opinion de soi-même, on se
26 vante de ces choses-là, vous savez. Mais en ce qui me concerne, je ne vois
27 pas pourquoi le fait de travailler pour Krajisnik ou quelqu'un comme cela
28 vous donne plus de popularité. Je pense que M. Krajisnik était connu dans
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1 le peuple serbe. Il était populaire. Mais cela ne veut pas dire qu'il avait
2 du pouvoir. Je ne pense pas qu'il avait du pouvoir. C'est ce que je pense
3 en tout cas. Peut-être que je me trompe, mais en tout cas, c'est comme cela
4 que je pense.
5 Q. Je vous remercie de votre réponse, mais vous n'avez pas vraiment
6 répondu à la question que je vous ai posée, à savoir -- tout d'abord, je
7 vous ai dit qu'il y avait des gens qui ont déposé et qui ont dit qu'ils
8 travaillaient pour M. Krajisnik et qu'ils ont aidé à mettre en œuvre la
9 politique et les instructions de M. Krajisnik et du Dr Karadzic. Je vous ai
10 demandé si vous saviez qu'il y avait de tels gens, des gens qui
11 travaillaient pour M. Krajisnik et pour M. Karadzic et qui mettaient en
12 œuvre leurs politiques ?
13 R. Je ne sais pas si c'était vraiment la même politique. Je ne suis pas
14 sûre si M. Krajisnik et M. Karadzic avaient exactement les mêmes idées
15 politiques. C'est vrai qu'ils faisaient partie du même parti politique et
16 qu'ils appartenaient au même peuple, mais je ne saurais vous dire qui était
17 l'homme de qui, qui travaillait pour qui. Je pense que nous partagions tous
18 cette même mission, à savoir de créer quelque chose, ce quelque chose qui
19 devait devenir un Etat sans communisme. Je n'ai pas d'autres informations.
20 Peut-être qu'il y avait de tels hommes, mais en tout cas, je ne les
21 connaissais pas.
22 Q. Je pense que nous devrions examiner à présent, l'intercalaire 13, mais
23 je vais vérifier. Je ne suis pas sûr.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est bien cela, donc le 13. Mais
25 ce document n'a pas encore de cote.
26 M. TIEGER : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur le Greffier.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document
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1 recevra la cote P1018.
2 M. TIEGER : [interprétation]
3 Q. Madame Hrvacanin, comme vous pouvez le voir, ce document qui figure à
4 l'intercalaire 13 et qui est devenu le document P1018, c'est le procès-
5 verbal d'une session commune des quatre comités de coordination du SDS sur
6 le territoire de la Krajina. Cette session s'est tenue le 23 juillet 1993,
7 et vous, vous avez été présente à cette réunion-là. Au cours de cette
8 réunion, il y a eu une discussion au sujet d'une visite faite par M. Jovo
9 Mijatovic, et un certain nombre de participants de la réunion ont discuté
10 justement de cette visite. Vous, à la page L0057505 en anglais et à la page
11 00423669 en B/C/S, vous avez pris la parole.
12 M. TIEGER : [interprétation] Pour les interprètes et pour vous être utile,
13 nous allons commencer par le début de vos propos. Vous avez dit : "Quand
14 j'ai entendu un certain nombre de choses ici, si je n'avais pas été membre
15 du conseil principal, je penserais que je rêvais. Je condamne tous les
16 membres du conseil principal qui ne me supportent pas dans mes points de
17 vue radicaux."
18 Q. Ensuite, vous continuez, Madame Hrvacanin, et vous dites que vous avez
19 une opinion qui est différente des opinions des autres. C'est à la fin dans
20 la version en anglais où vous dites : "En ce qui concerne le statut,
21 j'étais la seule qui avais un point de vue qui était différent des autres
22 personnes qui étaient membres du conseil principal."
23 Vous dites que c'est probablement parce que vous étiez une femme. Ce
24 que vous aviez proposé, comme il est dit ici, c'est que le président du
25 parti ne devrait pas nommer un tiers des membres du comité exécutif, et
26 personne ne vous a appuyée là-dessus.
27 Ensuite, je voudrais attirer votre attention sur quelque chose de très
28 particulier. Vous dites qu'il n'y avait pas d'assistant du président du
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1 parti et vous dites : "Excusez-moi, mais tous les partis du monde ont un
2 remplaçant, un numéro deux, mais notre président n'en veut pas. Il veut
3 avoir le contrôle absolu sur tout et il a peur d'une possibilité de
4 diversion."
5 Vous parliez de M. Karadzic là, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Ensuite, vous dites : "Il est représenté par le président du comité
8 exécutif, tel que Jovo Mijatovic."
9 Quand vous dites : "Il est représenté par le président du comité
10 exécutif," vous voulez dire en réalité que le Dr Karadzic, en tant que
11 président du parti, est représenté par Jovo Mijatovic, qui est le président
12 du comité exécutif, n'est-ce pas ?
13 R. Oui. C'est ce que j'ai voulu dire. Enfin, je voulais dire que M.
14 Mijatovic ne pouvait pas représenter le conseil principal puisqu'il était
15 membre de l'assemblée, donc il fallait qu'il travaille pour l'assemblée et
16 pas pour le comité exécutif, alors qu'il figurait là comme président d'un
17 comité régional.
18 Q. Nous allons continuer. Je vois que vous avez pu lire, mais les Juges
19 ne l'ont pas peut-être encore lu. Vous dites : "Je présente mes excuses au
20 président, mais je ne peux pas accepter l'opinion de quelqu'un qui est en
21 réalité l'opinion de quelqu'un qui travaille pour lui, parce que nous
22 savons pour qui il travaille, pour Krajisnik, le président de l'assemblée.
23 Je lui ai dit cela moi-même, et nous ne sommes pas des ennemis pour autant.
24 J'ai mes opinions et lui, il a d'autres opinions."
25 Madame Hrvacanin, n'est-il pas exact que vous saviez qu'à partir du moment
26 où le Dr Karadzic voulait envoyer quelqu'un pour mettre en œuvre sa
27 politique, la personne qu'il envoyait, dans ce cas particulier, c'était la
28 personne qui travaillait pour M. Krajisnik ? Vous avez dit vous-même, c'est
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1 parce qu'il s'agissait là du numéro un et du numéro 2 et ils partageaient
2 exactement les mêmes points de vue.
3 M. STEWART : [interprétation] Je pense qu'il faudrait être prudent en
4 posant cette question. Puisque dans ce paragraphe, on dit : "Madame
5 Hrvacanin, n'est-il pas exact que vous saviez qu'à chaque fois que le Dr
6 Karadzic voulait envoyer quelqu'un," et là, on pose une question d'ordre
7 général au témoin, qu'à chaque fois, il envoyait quelqu'un qui travaillait
8 pour le compte de M. Krajisnik. Je pense qu'il faudrait dire clairement
9 s'il s'agissait d'une question de l'ordre général ou d'une question
10 particulière, qui concerne un point en particulier.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais dire que justement dans la
12 deuxième partie de la question, M. Tieger a dit qu'il allait utiliser cet
13 exemple concret --
14 M. TIEGER : [interprétation] Je vais reprendre si vous voulez.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- mais il n'est pas encore clair,
16 Monsieur Tieger, s'il s'agissait là d'une affirmation de l'ordre général ou
17 si vous vous êtes concentré uniquement sur cet exemple-là.
18 M. TIEGER : [interprétation]
19 Q. Madame Hrvacanin, je vous ai demandé tout d'abord si vous saviez
20 s'il y avait des gens qui travaillaient pour M. Krajisnik et qui aidaient à
21 mettre en œuvre les politiques de M. Krajisnik et de M. Karadzic. Et là,
22 nous trouvons un exemple, n'est-ce pas, de quelqu'un qui travaillait pour
23 M. Krajisnik et qui était envoyé par le Dr Karadzic pour mettre les
24 instructions et les politiques que partageaient le Dr Karadzic et M.
25 Krajisnik, tous les deux ?
26 R. Je peux vous dire ce qui suit : M. Mijatovic, c'était un député, et il
27 est tout à fait normal qu'un député mette en œuvre la politique de
28 l'assemblée nationale et qu'il ait des contacts avec le président de
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1 l'assemblée nationale, tout comme moi, je devais mettre en œuvre la
2 politique et suivre la politique du Dr Radovan Karadzic. Je devais exécuter
3 un certain nombre de missions à ce sujet. M. Mijatovic était membre du
4 comité exécutif. Je ne sais pas qui lui a donné l'ordre de devenir un
5 président régional. Je ne le sais pas, et d'ailleurs j'ai été contre cela;
6 vous avez pu le lire. D'ailleurs, j'ai fait une objection quant au statut
7 qui permettait au président de proposer un tiers des membres du comité
8 exécutif. Mais cela étant dit, je ne pourrais pas dire de façon
9 affirmative, celui-ci travaillait pour celui-ci et un autre travaillait
10 pour un autre. Je pense que nous nous devrions tous travailler pour obtenir
11 un même but et en même temps respecter l'hiérarchie. Un député devait
12 répondre à
13 M. Krajisnik et je devais répondre au président du parti. Ce sont deux
14 choses différentes là. D'un côté, vous avez le pouvoir exécutif, et de
15 l'autre côté, le pouvoir politique; donc, deux choses différentes,
16 séparées.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, pour mieux comprendre
18 la réponse du témoin, je vais lui poser une question.
19 Est-ce que vous avez dit là que les députés répondaient à M.
20 Krajisnik, d'après l'hiérarchie qui prévalait, l'hiérarchie du système, et
21 ils étaient les subordonnés de M. Krajisnik ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, d'ailleurs, ils ont prêté serment dans
23 l'assemblée.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il fallait qu'ils pensent comme le
25 président de l'assemblée, enfin, qu'ils partagent ses idées, ses opinions ?
26 M. STEWART : [interprétation] J'hésite à soulever une objection quand il
27 s'agit d'une question venant de la Chambre. Si la question venait du bureau
28 du Procureur, effectivement, j'aurais dit immédiatement qu'il s'agissait
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1 d'une question directrice, mais je dois tout de même soulever une
2 objection, puisque les questions directrices venant des Juges sont bien
3 plus dangereuses que les questions directrices venant du Procureur à cause
4 de l'autorité dont vous êtes revêtus.
5 Quand Mme Hrvacanin a dit : "Les députés répondaient à M. Krajisnik,"
6 il aurait été bien plus simple de lui demander de dire une explication,
7 c'est-à-dire, de lui demander de nous dire ce qu'elle voulait dire
8 effectivement par cette phrase-là.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous auriez préféré que je pose cette
10 question-là. Ceci figure au compte rendu d'audience effectivement, Monsieur
11 Stewart.
12 Maître Tieger, vous pouvez continuer.
13 M. STEWART : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, justement,
14 je voudrais ajouter quelque chose : "Dans le passé, les Juges nous ont dit
15 que je ne devrais pas poser des questions directives," c'est-à-dire, vous
16 nous avez demandé de restreindre le plus possible les objections soulevées
17 suite aux questions posées par les Juges. Cette instruction nous a été
18 donnée de façon générale, et je voudrais le dire.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas de doute là-dessus. Mais,
20 Monsieur Tieger, vous pouvez continuer.
21 Mais, je vais poser quand même une question supplémentaire au témoin,
22 puisque ma dernière question je peux dire qu'elle est restée sans réponse.
23 Madame le Témoin, pourriez-vous nous dire ce que vous vouliez dire
24 exactement quand vous avez dit qu'ils avaient prêté serment à l'assemblée ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela a une importance, parce que cela veut
26 dire que les députés doivent répondre au président de l'assemblée. Ils
27 doivent lui rendre compte pour les missions qui sont les leurs. Je ne pense
28 pas qu'ils s'acquittaient de leur mission pour leur propre compte. Je ne
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1 saurais vous répondre. Peut-être qu'il y avait des gens qui exécutaient des
2 missions pour leur propre compte. En tout cas, je ne saurais vous répondre
3 là-dessus. Je ne saurais le dire.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Normalement, ils ne devraient pas le
5 faire puisqu'ils avaient prêté serment, n'est-ce
6 pas ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Un petit nombre de députés effectivement
8 étaient à la fois les fonctionnaires du SDS et les députés. Ils n'étaient
9 pas nombreux. Je pense que M. Mijatovic, par exemple, avait cette double
10 casquette. Il y en avait peut-être d'autres, mais je ne m'en souviens pas.
11 Je ne me souviens pas d'autres députés qui auraient eu une fonction
12 particulière au sein du SDS.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez pas répondu là à ma
14 question, Madame. Je vous ai posé une question bien précise, à savoir,
15 quand vous avez dit : "Les députés devaient être d'accord avec le président
16 de l'assemblée sur un certain nombre de choses et ils devaient lui répondre
17 concernant ce qu'ils faisaient."
18 Ensuite, vous avez dit : "S'ils faisaient quelque chose de façon
19 indépendante, de leur propre chef, dans ce cas-là je ne sais pas; c'est
20 quelque chose dont je ne peux pas parler vraiment, est-ce qu'il y avait des
21 gens qui faisaient des choses pour leur propre compte."
22 Ensuite, je vous ai demandé si je vous ai bien comprise, à savoir, si
23 vous ne vous attendiez pas à ce qu'un député agisse de son propre gré ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez très bien comprise.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Tieger -
26 - en revanche, M. le Juge Hanoteau a une question.
27 M. LE JUGE HANOTEAU : Madame le Témoin, j'aurais besoin d'une
28 clarification. Je reprends la question du président de la Chambre. Il dit
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1 ceci :
2 [en anglais] "Mr. Tieger, just to better understand --"
3 [interprétation] "M. Tieger, pour mieux comprendre la réponse du témoin,
4 êtes-vous en train de dire que les députés devaient répondre à M.
5 Krajisnik, afin que dans le système hiérarchique, ils étaient subordonnés à
6 M. Krajisnik ?"
7 "Oui, et ils ont prêtés serment à l'assemblée."
8 [en français] J'aimerais que vous clarifiiez votre réponse quand vous
9 dites que les députés sont subordonnés à M. Krajisnik. Qu'est-ce que vous
10 entendez par là ? Pour moi, je n'ai pas bien compris ce que vous vouliez
11 dire, et je vous remercie de bien vouloir répondre à mon interrogation ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais été député, mais, Monsieur le
13 Juge, je vais essayer de vous répondre de quoi il s'agit. Je pense que tous
14 les députés doivent se mettre d'accord parce qu'ils sont élus par le
15 peuple, et donc ils doivent se mettre d'accord sur les questions
16 politiques, sur leur travail, sur les lois, sur toutes les questions en
17 cours. Je ne pense pas qu'ils étaient vraiment subordonnés à M. Krajisnik,
18 mais, en tout cas, il fallait qu'ils le tiennent informé, qu'ils
19 l'informent de ce qu'ils faisaient. Evidemment, ils devaient absolument le
20 faire. Ils ne pouvaient rien faire sur le terrain sans en informer le
21 président. Mais, il y en avait pourtant qui n'en faisaient qu'à leur tête.
22 M. LE JUGE HANOTEAU : Oui, je vois. Est-ce que cela signifie pour vous qu'à
23 l'intérieur de l'assemblée ils étaient tenus par un lien de subordination à
24 M. Krajisnik ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ils étaient tous égaux; ils n'étaient pas
26 subordonnés. En revanche, le président de l'assemblée, c'est lui qui devait
27 coordonner les travaux de l'assemblée et diriger l'assemblée, donc,
28 normalement, il devait être informé de ce que faisaient ces députés, que je
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1 sache. Enfin, je ne connais pas grand-chose à ce sujet.
2 M. LE JUGE HANOTEAU : Je vois. Pouvez-vous nous éclairer sur le type de
3 serment que prêtaient les députés à l'assemblée ? Vous avez dit :
4 [en anglais] "They gave their oath at the Assembly"
5 [en français] Est-ce que vous en savez quelque chose ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était un serment où ils disaient qu'ils
7 prêtaient serment, qu'ils juraient de travailler honnêtement, qu'ils
8 allaient respecter la vérité, et cetera. Cela ressemble fort à cette
9 déclaration solennelle que j'ai faite ici au début de ma déposition. Je ne
10 me souviens pas vraiment du texte de ce serment, mais je sais qu'il en
11 avait un à partir du moment où vous commencez à travailler pour
12 l'assemblée, vous devenez député. Il fallait prêter serment.
13 M. LE JUGE HANOTEAU : Dernière question, je vous prie. Est-ce qu'à votre
14 avis - c'est votre avis que je demande, votre opinion - est-ce que M.
15 Krajisnik possédait une autorité morale sur ses députés ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr qu'il jouissait d'une certaine
17 autorité morale.
18 M. LE JUGE HANOTEAU : Je vous remercie beaucoup, Madame.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Tieger.
20 M. TIEGER : [interprétation]
21 Q. En partie, c'est justement pour cela qu'il était le numéro deux de
22 l'hiérarchie de la Republika Srpska, donc, juste après le
23 Dr Karadzic, à cause justement de cette autorité dont il jouissait auprès
24 de ses députés ?
25 R. M. Krajisnik était populaire dans cette assemblée tripartite. Il
26 dirigeait très bien les travaux de l'assemblée --
27 Q. Madame Hrvacanin --
28 R. -- et le peuple suivait son travail.
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1 Q. Vous nous avez déjà expliqué cela, Madame. Je voudrais vous demander de
2 bien vous concentrer. Vous venez de dire à M. le Juge que M. Krajisnik
3 jouissait d'un certain degré d'autorité sur ses députés, et je vous ai
4 demandé si cela en partie n'était pas une raison pour laquelle c'était bien
5 le numéro deux dans le cadre de l'hiérarchie en vigueur ?
6 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il s'agit
7 d'une simple répétition de la déposition de Mme Hrvacanin. Ce n'est pas
8 très clair quand on parle de l'assemblée d'ailleurs. On ne voit pas
9 exactement de quelle assemblée on parle.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que vous pourriez reformuler
11 votre question, Monsieur Tieger, et nous dire exactement de quel genre
12 d'assemblée nous parlons.
13 M. TIEGER : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président --
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'était l'assemblée de la
15 Republika Srpska, par exemple ?
16 M. STEWART : [interprétation] Je voudrais dire d'ailleurs que ceci
17 s'applique aussi aux questions et aux réponses qu'elle a données au cours
18 des dernières dix ou 15 minutes.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
20 M. TIEGER : [interprétation]
21 Q. Madame Hrvacanin, quand vous avez parlé de l'autorité qu'avait M.
22 Krajisnik sur ses députés, vous parliez en réalité de l'autorité qu'il
23 avait sur les députés de l'assemblée des Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, c'est tout à fait exact.
25 Q. Ensuite, je voulais savoir si l'autorité qu'avait
26 M. Krajisnik sur les députés de l'assemblée de la Republika Srpska, si
27 cette autorité était l'une des raisons pour lesquelles il était considéré
28 si haut dans la hiérarchie des dirigeants de la Republika Srpska ?
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1 R. Non. Non pas une autorité politique, mais une autorité légale. Il était
2 le numéro deux, mais pour ce qui était d'autorité juridique.
3 Q. Mais n'était-il pas le principal, n'était-il pas le numéro un pour ce
4 qui est de la partie législative ?
5 R. Je crois que le président d'un état est l'homme le plus important. Je
6 ne suis pas juriste moi-même, mais je crois que dans tous les pays, le
7 président d'un pays, d'un état, est le numéro un et la personne principale.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Hrvacanin, pourriez-vous, je vous
9 prie, écouter attentivement aux questions qui vous sont posées ? La
10 question n'était pas de savoir si le président était le numéro un, mais sur
11 le point législatif, est-ce que M. Krajisnik était l'homme qui se trouvait
12 à la tête, le numéro un ? Je crois que M. Tieger fait une référence à la
13 position qu'avait M. Krajisnik en tant que président à l'assemblée.
14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, ce procès dure depuis
15 un an et demi, et nous savons que M. Krajisnik occupait une position
16 spécifique. Il était président de l'assemblée. La Défense ne suggère pas de
17 dire qu'il était le numéro un dans l'assemblée --
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
19 M. STEWART : [interprétation] -- purement pour des questions de formalité.
20 La question va au-delà de cette question. Il faudrait peut-être s'assurer
21 que le témoin comprenne clairement qu'il s'agit de quelque chose d'autre
22 que ce de sa position technique, formelle. Il faudrait présenter au témoin
23 d'une façon claire la question, car je crois que le témoin n'a pas très
24 bien saisi la question.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que M. Tieger se référait à une
26 des réponses qu'a donnée déjà le témoin précédemment, lors de laquelle le
27 témoin a déjà établi une certaine ordre.
28 Mais, Monsieur Tieger, pourriez-vous peut-être lire cela, la réponse du
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1 témoin afin que le témoin puisse se rappeler de ce qu'elle a dit ?
2 Monsieur Tieger, alors que vous êtes en train d'essayer de trouver le
3 passage, on m'informe que l'on devrait lire le passage à 14 heures, 53
4 minutes et 32 secondes.
5 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons déjà eu ce
6 genre de problème auparavant. Les ordinateurs n'ont pas tous la même heure,
7 vous savez. Pourrait-on obtenir la page, je vous prie, et la ligne peut-
8 être ?
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce sera la page 12.
10 M. STEWART : [interprétation] Merci.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La deuxième partie de la page. Je crois
12 que c'est à la ligne 18, mais c'est la question et non pas la réponse du
13 témoin. Je peux peut-être vous orienter quelque peu.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
15 M. TIEGER : [interprétation]
16 Q. Madame Hrvacanin, j'espère que ce micro fonctionne. Je ne sais pas si
17 vous pouvez m'entendre ?
18 R. Oui.
19 Q. Dans la question précédente, je vous ai dit que cette Chambre de
20 première instance avait déjà entendu un témoin, "qui avait expliqué que M.
21 Krajisnik et le Dr Karadzic étaient les deux dirigeants principaux des
22 Serbes de Bosnie. Ils étaient unis en tant que duo, et qu'ils exerçaient
23 leur pouvoir ensemble. Les personnes étaient subordonnées à eux, les
24 personnes qui devaient s'assurer que les politiques étaient mises en
25 œuvre."
26 Ensuite, je vous ai demandé si vous n'étiez pas l'une de ces personnes qui
27 saviez, qui connaissiez comment le système fonctionnait, de quelle façon on
28 mettait en place ce genre de chose.
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1 Vous avez répondu : "Je sais que c'est un peu étrange, mais je m'entendais
2 très bien avec M. Krajisnik et avec M. Karadzic, mais je ne partageais pas
3 les mêmes points de vue ni avec M. Karadzic, ni avec M. Krajisnik. Vous
4 savez, si l'on passe du temps avec deux personnes, avec deux amis, cela ne
5 veut pas dire qu'on partage toujours les mêmes opinions."
6 Vous avez dit ensuite : "Je crois que M. Krajisnik était la personne numéro
7 deux, mais qu'il était très bien connu chez le peuple serbe et qu'il était
8 populaire. Je ne crois pas qu'il avait un pouvoir, mais c'est mon opinion
9 personnelle. C'est ce que je croyais, de toute façon."
10 Ma question visait à savoir la chose suivante : vous avez déjà parlé du Dr
11 Karadzic et de M. Krajisnik. Vous avez dit qu'ils étaient tous les deux
12 très proches l'un de l'autre, qu'ils formaient un duo. Vous avez dit que M.
13 Krajisnik était l'homme numéro deux selon vous, et ensuite vous avez
14 contesté, d'une certaine façon, son pouvoir. Est-ce que c'est ce qui est
15 arrivé lors de cet échange ?
16 R. Oui, c'est ce que j'ai voulu dire. Mais M. Karadzic avait un pouvoir
17 absolu, et je ne crois pas qu'il aurait partagé ce pouvoir absolu avec
18 quelqu'un d'autre. Je crois que ce que je vous ai dit est tout à fait
19 juste. Il est incontestable que l'homme numéro deux était le président
20 Krajisnik. Ce sont deux choses sont bien différentes, pour moi tout du
21 moins. Je ne sais pas si j'ai la compétence nécessaire pour en parler.
22 Q. Mais en 1993, Madame Hrvacanin, vous avez également ressenti -- vous
23 nous avez dit que le Dr Karadzic voulait avoir un pouvoir absolu. Vous nous
24 avez dit qu'il y avait d'autres personnes qui avaient été présentes lors de
25 cette réunion, et que le Dr Karadzic avait essayé, à ce moment-là, de
26 s'assurer que son contrôle soit bien compris en envoyant quelqu'un qui
27 travaillait pour M. Krajisnik. N'est-ce pas là un très bon exemple
28 démontrant les rapports qu'ils avaient dans la hiérarchie de la Republika
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1 Srpska ? N'est-ce pas un bon exemple de leur coopération ?
2 R. Je ne me souviens pas, Monsieur le Procureur, que je vous ai dit que le
3 président Karadzic avait envoyé quelqu'un pour M. Krajisnik. Il avait ses
4 propres hommes du comité exécutif. Ce sont ces personnes-là qui étaient
5 envoyées, qui faisaient le travail pour lui. Je ne crois pas avoir dit
6 cela. Je crois que cela faisait partie d'une question que vous m'aviez
7 posée. Vous m'aviez demandé si je savais, et cetera, et cetera. Je ne vais
8 pas citer votre question maintenant ou la répéter.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je souhaiterais vous
10 rappeler de la consigne que je vous ai donnée tout au début concernant le
11 temps imparti. Je remarque moi-même qu'il est quelque peu difficile
12 d'obtenir des réponses, mais en même temps je souhaiterais que vous
13 accélériez un peu le pas.
14 M. TIEGER : [interprétation] Très bien.
15 Q. Madame Hrvacanin, je vais vous poser maintenant quelques questions
16 rapides sur un autre sujet. Vous avez parlé de l'amitié que vous éprouviez
17 envers Mme Plavsic. Si je vous ai bien compris, vous avez demandé de
18 rejoindre les rangs de son parti, et la seule raison pour laquelle vous
19 n'aviez pas fait cela, c'est parce que vous ne vouliez pas, à l'époque,
20 changer de parti. Mais sinon, vous n'aviez aucun problème avec Mme Plavsic
21 et vous êtes restées de bonnes amies ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. J'imagine que vous étiez assez près pour connaître les points de vue
24 l'une de l'autre ? Vous saviez quelles étaient les positions qu'elle
25 adoptait, et elle savait quelles étaient les vôtres ?
26 R. Je crois que oui.
27 Q. Outre le désaccord qui existait entre le fait de ne pas avoir adhéré à
28 son parti, est-ce que je peux dire que vos points de vue étaient très
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1 semblables ?
2 R. Oui. Mme Plavsic et moi-même avions des points de vue assez proches.
3 Nous étions en harmonie pour ce qui est de nos points de vue.
4 Q. Au cours de votre déposition, vous nous avez parlé de votre
5 comportement envers les personnes appartenant à d'autres nationalités et
6 pour ce qui est des personnes ayant une autre religion. Maintenant, je
7 présume que vous savez quels étaient les points de vue de Mme Plavsic
8 concernant les Musulmans ?
9 R. Non, pas tout à fait.
10 Q. Permettez-moi de passer à l'intercalaire 38. Je vais faire une
11 référence à ce que vous avez déjà dit -- en fait, c'est plutôt
12 l'intercalaire 46, et j'aurais besoin d'une cote, je vous prie.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, je vous écoute.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] P1019.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
16 M. TIEGER : [interprétation]
17 Q. Il s'agit d'un entretien qui a eu lieu avec Mme Plavsic publié dans
18 Svet le 6 septembre 1993. Ce qui m'intéresse particulièrement, c'est le
19 passage qui se trouve à la page 03017442. M. STEWART : [interprétation] Je
20 vois que c'est l'intercalaire 47, n'est-ce pas, Monsieur le Président ?
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, c'est l'intercalaire 46.
22 M. TIEGER : [interprétation] 46.
23 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, je me suis trompé.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, les trois derniers
25 numéros du numéro ERN en anglais sont 438. Donc, si ce document se trouve
26 chez vous à l'intercalaire 47, à ce moment-là, c'est cela.
27 M. STEWART : [interprétation] Très bien, mais je vais faire abstraction de
28 ce fait.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Merci.
2 M. TIEGER : [interprétation]
3 Q. La partie que je vais vous citer se trouve à la page qui est inscrite à
4 la main, numéro 3. Il s'agit d'Ejub Ganic et de sa déclaration que "les
5 Serbes sont Musulmans d'origine." Mme Plavsic dit vers le milieu : "Et
6 maintenant, il dit que les Musulmans sont des Serbes d'origine. Je vais
7 dire ceci : cela est bien vrai, mais il s'agit de Serbes génétiquement
8 altérés, convertis à l'Islam. Pendant les générations, ce bassin génétique
9 a changé. Ils sont devenus de plus en plus dégénérés, ce qui veut dire que
10 leur comportement et leurs pensées sont différents, puisque cela se trouve
11 déjà dans leurs gènes."
12 Par la suite, elle parle de la religion islamique.
13 Madame Hrvacanin, je ne sais pas si vous saviez quelles étaient les
14 opinions génétiques concernant les Musulmans de Mme Plavsic ? Je crois que
15 vous devez sans doute savoir qu'elle avait des points de vue plutôt
16 désagréables envers les Musulmans ?
17 M. STEWART : [interprétation] Si M. Tieger souhaite citer un passage bien
18 précis tiré de cet entretien, pour être tout à fait juste envers le témoin,
19 il serait montré au témoin le passage avant de donner lecture du passage et
20 de lui poser des questions là-dessus.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je vous écoute.
22 M. TIEGER : [interprétation]
23 Q. Madame Hrvacanin, est-ce que vous saviez que Mme Plavsic avait ce genre
24 de point de vue-là concernant les Musulmans ?
25 R. Non, non, je ne connaissais pas cela. Je sais que Mme Plavsic était
26 mariée avec un Arabe. Elle avait vécu avec lui pendant sept ans. Peut-être
27 que leur mariage n'allait pas très bien et qu'elle les déteste à cause de
28 cela. Je ne sais pas. Mais je sais qu'elle était mariée avec un Arabe et
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1 qu'elle vivait en Libye.
2 Q. Etant donné que vous étiez amie avec Mme Plavsic, dans le cadre des
3 discussions que vous avez eues en tant qu'amies, n'est-il pas exact de dire
4 qu'à un certain moment donné, vous aviez compris qu'elle éprouvait une
5 haine particulière envers les Musulmans ? Vous avez dû le découvrir dans le
6 cadre des rapports que vous avez eus avec elle ?
7 R. Non, pas seulement les conversations. Mais c'est suite à votre question
8 que j'ai pu tirer des conclusions. Voilà. Si elle était mariée avec un
9 Arabe qui était de religion islamique, je ne savais pas qu'elle tenait ce
10 genre de propos. Nous n'avions jamais parlé de ce genre de sujet. Mais
11 j'imagine que cela découle de son mariage. Nous parlions toujours d'autres
12 genres de questions, de sujets.
13 Q. Quand vous vous entreteniez avec Mme Plavsic, y compris lorsque vous
14 avez eu des entretiens avec elle, à savoir si vous alliez rejoindre les
15 rangs de son parti, vous n'avez jamais parlé des Musulmans ?
16 R. Non, non. Avez Mme Plavsic, non, jamais. Elle ne parlait jamais elle-
17 même des Musulmans. Nous discutions du Dr Koljevic. Nous parlions de la
18 situation présente. Comme j'étais impliquée dans toutes sortes
19 d'organisations caritatives, elle essayait de m'aider, de me dire comment
20 faire pour recueillir des fonds. Mais nous n'avions jamais parlé de
21 Musulmans.
22 Q. Vous n'avez jamais entendu ce genre de propos d'ailleurs d'une autre
23 source ? Par exemple, vous n'aviez jamais eu vent des opinions de Mme
24 Plavsic par une autre source ?
25 R. J'ai connu Mme Plavsic pendant deux ans, après 1990. Nous nous sommes
26 connues en 1990. J'ai fait sa connaissance à ce moment-là. Mais nous
27 n'étions pas suffisamment amies pour savoir ce qu'elle pense. C'était une
28 personne très controversée, pour ce qui me concerne.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Hrvacanin, pourriez-vous, je vous
2 prie, répondre aux questions qui vous sont posées. La question était de
3 savoir si vous n'avez jamais eu connaissance du point de vue de Mme Plavsic
4 sur les Musulmans. Veuillez nous dire, oui ou non, vous n'avez jamais eu
5 connaissance de ce que pensait Mme Plavsic concernant les Musulmans ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
7 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas
8 d'autres questions pour ce témoin.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger.
10 Monsieur Stewart, est-ce que vous avez des questions supplémentaires à
11 poser au témoin ?
12 M. STEWART : [interprétation] Non merci, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai moi-même quelques questions,
14 Madame, à vous poser.
15 Questions de la Cour :
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que vous avez dit qu'une
17 présidence élargie n'existait pas, n'est-ce pas ? Pourriez-vous nous
18 expliquer ce que vous vouliez dire par là ? Qu'est une présidence élargie
19 pour vous et pourquoi est-ce que vous avez dit qu'elle n'existait pas ?
20 R. Vous aviez Mme Plavsic et M. Koljevic en tant que vice-présidents du
21 parti, qui avaient été élus lors des élections parlementaires. Mais étant
22 donné que je suis une femme, je voulais que ce soit Mme Plavsic qui
23 devienne présidente de la Republika Srpska. Ensuite, on a soulevé une
24 question lors du comité principal et c'était une motion visant à proposer
25 M. Karadzic en tant que président. C'était lors d'une réunion de
26 l'assemblée du 12 mai 1992 qui a eu lieu à Banja Luka. C'est lors de cette
27 réunion que le président Karadzic a été élu en tant que président de la
28 présidence.
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1 Son arrivée au sein de la présidence représentait, pour moi, une
2 présidence élargie. Ce n'est pas le peuple qui l'a élu, mais il a été nommé
3 de la part des hommes politiques, et on a procédé à son élection lors de
4 cette session de l'assemblée. Bien sûr, c'était à la suite d'une
5 proposition des députés.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez dit : "Il avait rejoint
7 les rangs de la présidence, et que c'était devenu une présidence élargie."
8 Qui étaient les membres de cette présidence élargie ?
9 R. La présidence élargie était constituée du président Karadzic, du Pr Dr
10 Biljana Plavsic et du Pr Dr Nikola Koljevic.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Mais au même temps, vous nous avez
12 dit -- et je vais essayer de retrouver vos propos au compte rendu
13 d'audience. Vous nous avez dit, lorsque vous parliez de M. Krajisnik, vous
14 avez dit, et je cite : "Il n'était pas un membre de la présidence élargie.
15 Une telle présidence n'existait pas d'ailleurs."
16 Vous venez de nous expliquer toutefois qu'il y avait une présidence
17 élargie composée de M. Karadzic, de Mme Plavsic et de M. Koljevic. Donc,
18 cette présidence élargie existait, n'est-ce pas, ou vous ai-je mal
19 compris ?
20 R. Oui, vous m'avez bien compris. Cette présidence élargie, composée de
21 ces trois membres-là, existait.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Mais en même temps, vous avez dit,
23 en parlant de M. Krajisnik, qu'il n'était pas membre de la présidence
24 élargie, et vous avez dit : "Une telle présidence n'existait pas
25 d'ailleurs."
26 Qu'est-ce que vous vouliez dire par là à ce moment-là, lorsque vous
27 avez donné cette réponse ? Car aujourd'hui, maintenant, il semblerait qu'il
28 y avait eu une présidence élargie, mais qu'il n'existait pas, puisque vous
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1 nous avez expliqué que les trois membres de la présidence faisaient partie
2 de cette présidence élargie. Ils existaient. Vous l'avez également appelé
3 une présidence élargie. Alors, quelle est cette présidence élargie qui
4 n'existait pas ?
5 R. Pour qu'une personne devienne membre d'une présidence élargie, elle
6 doit être nommée par quelqu'un. Ensuite, l'assemblée doit approuver cette
7 nomination. M. Karadzic a été élu à la nomination à la suite d'une
8 proposition du comité centrale, mais pour ce qui me concerne, M. Krajisnik
9 n'a jamais été proposé et cette question n'a jamais été débattue lors des
10 sessions de l'assemblée.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien suivi votre raisonnement,
12 je m'attendrais à ce que vous nous disiez que M. Krajisnik n'était pas un
13 membre de la présidence élargie, mais qu'un tel corps existait, et qui
14 était composée de M. Karadzic, M. Koljevic et de Mme Plavsic. Mais ce n'est
15 pas ce que vous avez dit. Vous, vous nous avez dit, et je répète : "Une
16 telle présidence n'existait pas," et votre phrase précédente fait référence
17 à une présidence élargie.
18 Alors, dites-nous quel est ce corps qui n'existait pas, selon vous ?
19 R. Je pense que c'est dans le contexte de la question qui était de savoir
20 si M. Krajisnik était membre de cette présidence élargie.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit qu'il ne l'était pas, mais
22 vous avez ajouté que ce type de présidence n'existait pas. Puis là, vous
23 avez dit --
24 R. Je suis désolée. Je m'excuse. Je me suis peut-être trompée. Il y a
25 d'abord eu une présidence double, ensuite une troïka, ce qui veut dire
26 qu'elle a été étendue, puisqu'il y a eu une personne de plus. C'est ce que
27 je dis maintenant. Je m'excuse si j'ai fait une erreur précédemment. Je
28 suis désolée d'avoir fait une erreur.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parfait. Donc, vous avez eu connaissance
2 d'une extension de la présidence dans le cadre de circonstances
3 spécifiques ? Ici, cette Chambre de première instance a déjà eu
4 connaissance d'éléments de preuve qui indiqueraient que cette présidence à
5 trois, au titre de la loi, était étendue en temps de conflit, et de
6 nombreuses personnes l'appelaient la présidence élargie. C'est à cela que
7 vous pensiez quand vous avez dit qu'une présidence élargie n'existait pas ?
8 R. J'ai entendu parler d'une décision adoptée par M. Karadzic. Au cas où
9 il y aurait déclaration d'un état de guerre, la présidence devait être
10 élargie pour incorporer le premier ministre et le président de l'assemblée.
11 Mais cela ne s'est jamais réalisé parce qu'il n'y a jamais eu déclaration
12 d'un état de guerre en Republika Srpska.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Mais c'est à cela que vous
14 pensiez quand vous avez dit que ce type de présidence élargie n'existait
15 pas ou aviez-vous --
16 R. Non. Ce que j'avais en tête était la menace imminente de guerre.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand vous avez dit que la présidence
18 élargie n'existait pas, ce que vous aviez en tête c'était la présidence
19 étendue comme celle que vous venez de décrire ou le fait que la présidence
20 à deux allait passer à trois et que c'était cette présidence élargie qui
21 n'existait pas ? Laquelle de ces deux propositions était celle à laquelle
22 vous pensiez ?
23 R. La présidence élargie pour inclure M. Karadzic.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Elle existait ou elle n'existait pas,
25 celle-là ?
26 R. Elle existait. Le président Karadzic avait été élu en tant que chef de
27 l'Etat, alors que Mme Plavsic et M. Koljevic étaient vice-présidents.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez peut-être pas parfaitement
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1 compris ma question. Je vous demandais une question sur la présidence
2 élargie qui n'existait pas. D'après votre dernière réponse, ce n'est pas
3 celle à trois membres à laquelle vous faisiez référence. Donc, c'est la
4 présidence qui comprenait le speaker, enfin, le président de l'assemblée et
5 le premier ministre, présidence élargie qui ne s'est pas réalisée parce
6 qu'il n'y a jamais eu déclaration de guerre en Republika Srpska. C'est ce
7 que vous vouliez dire ?
8 R. La présidence avec le président du parlement et le premier ministre,
9 celle-là n'a jamais existé.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à celle-là que vous faisiez
11 référence quand vous avez donné votre réponse sur le 6 décembre; c'est
12 cela ?
13 R. Oui.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous eu connaissance, à un moment
15 ou à un autre, de la façon dont la présidence qui, elle, existait, de la
16 façon dont elle fonctionnait, et ce, bien sûr, à votre avis ?
17 R. Je n'ai jamais participé à aucune session de la présidence, donc je
18 n'en sais rien.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous ne savez pas s'il n'y avait
20 juste que les trois membres de la présidence qui assistaient à ces réunions
21 ou d'autres personnes ?
22 R. Non.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci pour cette réponse. J'ai une autre
24 question, la dernière. Quand vous nous avez dit que vous ne vouliez pas
25 vous souvenir de certaines choses. Vous avez dit cela après qu'on vous ait
26 posé plusieurs questions sur les six objectifs stratégiques. Alors, très
27 exactement, pour quelle raison -- d'abord, première question : est-ce un
28 des sujets que vous préférez oublier ?
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1 R. Non, ce n'est pas que je ne voulais pas m'en souvenir, mais il y a de
2 nombreuses choses de cette période dont je ne veux pas me souvenir : la
3 faim, les difficultés que j'ai vécues après avoir été expulsée de ma maison,
4 les vagues de réfugiés sur les routes à qui j'ai parlé, ceux que j'ai reçus,
5 ceux à qui j'ai parlé, toutes les personnes qui ont énormément souffert.
6 C'est cela dont je ne veux pas me souvenir. C'est cela que je veux
7 supprimer de ma mémoire. On n'avait pas d'électricité. On n'avait pas d'eau
8 courante. Il faisait froid. C'était l'hiver. On avait rien. On n'avait pas
9 de combustible pour se chauffer. Ma vie était très difficile à cause de ces
10 pénuries. Même encore aujourd'hui, mon mari ne touche pas sa retraite. On
11 ne peut pas retourner dans la ville où nous avions habité avant la guerre.
12 Notre propriété ne nous est pas restituée. C'est toutes ces choses que je
13 veux oublier.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Donc, ce que vous vouliez
15 oublier, ce ne sont pas ces six buts stratégiques ?
16 R. Non.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Suite aux questions des Juges, est-ce
18 que les parties veulent poser de nouvelles questions au témoin ?
19 M. TIEGER : [interprétation] Non.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart.
21 M. STEWART : [interprétation] Juste une.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.
23 M. STEWART : [interprétation]
24 Q. [interprétation] En 1992, est-ce que vous avez eu connaissance, à un
25 moment ou à un autre, du fait que M. Krajisnik se serait rendu à une
26 réunion éventuelle de la présidence étendue ou présidence élargie de la
27 Republika Srpska ?
28 M. TIEGER : [interprétation] Objection. Sur quel fondement pose-t-on cette
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1 question ? Le témoin vient juste de dire qu'elle n'avait aucune idée de qui
2 pouvait bien participer aux réunions de la présidence.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, je vais ajouter cela
4 comme étant une question venant des Juges.
5 M. STEWART : [interprétation] Parfait. Posez la question. Ce serait
6 parfait.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une question.
8 Quand vous êtes partie à Banja Luka, comment avez-vous eu connaissance de
9 ce qui se passait à Pale, puisque, si j'ai bien compris, la présidence
10 était située à Pale ?
11 R. Jusqu'en avril, on pouvait passer par la route. Ils étaient encore à
12 Sarajevo. J'ai quitté Zenica en février pour Banja Luka. Après, on ne
13 pouvait plus que téléphoner pour rester en contact, et c'est comme cela
14 qu'on restait en contact. Plus tard, quand il y a le corridor qui était mis
15 en place, et qu'on a pu à nouveau passer par la route, qu'elle était à
16 nouveau praticable, avant cela, je ne suis pas allée à Pale. Donc, je ne
17 sais pas qui pouvait bien participer aux réunions.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ces communications
19 téléphoniques avec Pale, était-ce possible quand la route était
20 impraticable ?
21 R. Pendant un moment, on a pu emprunter la route. Après, ce n'était plus
22 possible, et pour à peu près un mois, la route a été réouverte.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ma question, c'est de savoir
24 si les communications téléphoniques étaient possibles quand la route était
25 impraticable.
26 R. Oui, oui.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous passé des coups de fil à Pale
28 à ce moment-là ?
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1 R. Très rarement.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De quoi parliez-vous au téléphone ? Quel
3 sujet évoquez-vous quand vous parliez par téléphone avec quelqu'un à Pale ?
4 R. A ce moment-là, j'étais occupée à mettre sur pied le réseau caritatif,
5 donc c'était le grand sujet de conversation pour ma part.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Avez-vous soulevé aussi des points
7 politiques ? Vous parliez de choses de politiques au téléphone ?
8 R. Non, je n'en parlais pas, parce que M. Vukic était président du conseil
9 municipal au SDS de Banja Luka. C'était à lui de tenir ces conversations.
10 Je venais d'arriver en ville. Ils n'avaient pas vraiment confiance. J'étais
11 une nouvelle tête. Ils avaient besoin de temps avant de me faire confiance.
12 J'ai entendu certaines choses, mais c'est toujours par ouï-dire. Je n'ai
13 jamais rien entendu quoi que ce soit directement depuis Pale.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais à ce moment-là, quand vous
15 étiez au téléphone avec Pale, est-ce que vous avez parlé du fonctionnement
16 des institutions de gouvernement ?
17 R. Non.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand vous avez pu à nouveau emprunter
19 la route, combien de fois vous êtes-vous rendue à Pale ? R. Une fois à
20 Banja Luka. Je suis peut-être allée une fois, une fois en deux mois.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une fois à Pale, avez-vous évoqué le
22 moindre de ces sujets ou avez-vous observé quoi que ce soit qui ait eu
23 trait avec les sujets dont je viens de parler, c'est-à-dire, des
24 discussions politiques, le fonctionnement des institutions du
25 gouvernement ?
26 R. [aucune réponse verbale]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que vous êtes en train de faire
28 non de la tête. Cela ne peut pas être transcrit sur le PV. C'est un non,
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1 visiblement.
2 Encore une dernière question : vous dites que vous n'étiez pas du même
3 avis, ni de M. Karadzic, ni de M. Krajisnik. Pourriez-vous nous dire sur
4 quel point vous étiez en désaccord avec soit
5 M. Karadzic, soit M. Krajisnik ?
6 R. Ce n'était pas vraiment des désaccords. Par exemple, quand on rédigeait
7 un nouveau statut, j'ai donné un point de vue un peu féminin. C'est pour
8 cela que je faisais des remarques par rapport à ces statuts. Je disais ce
9 qui à mon avis n'allait pas, ce qui devait être enlevé, en tant que femme.
10 Les autres membres du conseil principal disaient : Elle se moque. Elle
11 riait à ce qu'elle pense. C'était comme cela. C'était des questions très
12 pragmatiques, et c'était des questions sur lesquelles, en tant que femme,
13 je n'avais pas le même point de vue que des hommes. Pour ce qui est de
14 M. Krajisnik, je n'ai jamais été très proche de lui, mais je n'ai jamais
15 été en conflit avec lui non plus. Nous avions une relation polie, basée sur
16 la tolérance. Je pense que M. Krajisnik est une personne très sérieuse. Si
17 je puis dire quelque chose, si j'ai dit quelque chose sur quelqu'un, il
18 avait tendance à dire : Tu est trop stricte, et là, on n'était pas
19 d'accord, et on débattait. J'ai dit : Je vois les choses d'une certaine
20 façon, et vous, Monsieur le Président, voyez les choses d'une autre façon.
21 Mais ce n'était pas des désaccords, ni des conflits, ni des querelles ou
22 des disputes.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous dites que cela portait sur des
24 questions pragmatiques. Ces différences, ces divergences d'opinion
25 n'allaient jamais beaucoup plus loin que ces points très pratiques ?
26 R. C'était cela.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous donner un petit exemple de
28 ce type de points très pratiques sur lequel vous auriez pu avoir une
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1 divergence de vue avec l'un ou l'autre ?
2 R. Par exemple, quand on devait s'exprimer sur les statuts et voter, il y
3 a eu beaucoup de membres du conseil principal qui ne voulaient pas que le
4 président du parti ait autant de pouvoir. Les compétences ont été
5 énumérées, et on avait proposé un tiers. Je n'étais pas d'accord, et je
6 l'ai dit ouvertement, d'ailleurs, au conseil principal. Pendant qu'on était
7 en train de discuter entre nous, d'autres ont dit la même chose que moi.
8 Mais une fois qu'on est passé au vote, évidemment, ils ont levé la main et
9 ils ont accepté le statut, alors que j'ai dit que j'étais contre. M. Radic,
10 qui était membre du conseil principal et président de la ville de Banja
11 Luka, il a dit : Slobodanka a changé d'avis. J'ai dit : Non, je ne change
12 pas d'avis. Je ne veux pas donner autant de pouvoir, autant de compétence,
13 au président du parti.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, c'est eux qui ont changé d'avis
15 quand on est passé au vote ?
16 R. Oui.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez une idée de pourquoi ils ont
18 changé d'avis et pourquoi ils n'ont pas voté avec vous, puisque quand vous
19 aviez parlé entre vous, ils avaient l'air d'être d'accord avec vous ?
20 R. Non, je ne sais pas. Je n'ai pas d'information là-dessus. Je ne sais
21 pas. Je n'ai aucune idée là-dessus. Je ne voudrais pas manquer le respect.
22 Vous êtes tous des hommes ici dans cette salle. Mais, en ce qui nous
23 concerne, les hommes chez nous pensent très différents que les femmes. Les
24 femmes sont plus sceptiques. Les femmes ont tendance à envisager les
25 conséquences de leurs actes, alors que les hommes, ils ont tendance à agir
26 et réagir de la façon dont ils pensent qu'ils réagissent.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On ne peut pas vraiment changer de sexe,
28 et vous ne pouvez pas non plus, d'ailleurs, enfin. Mais je --
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1 M. STEWART : [interprétation] Je pensais que vous alliez poser ma question.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être -- c'est-à-dire, j'ai
3 pensé le faire. Vous pouvez poser votre question puisque j'ai déjà commencé
4 un petit peu préparer le terrain pour ce qui est du contexte, mais je n'ai
5 pas vraiment posé votre propre question.
6 Non, je vais la poser.
7 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poser votre question, Maître Stewart.
9 M. STEWART : [interprétation] Bon, je vais le faire.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il vous plaît.
11 Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Stewart :
12 Q. [interprétation] En 1992, avez-vous eu la moindre connaissance que M.
13 Krajisnik ait participé à une réunion quelle qu'elle soit d'une présidence
14 élargie ou étendue de la Republika Srpska ?
15 R. Non. Aucune connaissance. Ce qui ne signifie pas que quelqu'un n'y ait
16 pas participé s'il en avait le droit. Je n'étais pas députée. J'étais
17 présente lors de session de l'assemblée parce que M. Krajisnik m'avait
18 autorisé à le faire.
19 M. STEWART : [interprétation] Merci.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
21 Ceci conclut votre déposition devant cette Chambre de première
22 instance, Madame Harvacanin. Je tiens à vous remercier de votre patience.
23 Vous avez accepté de rester ici un bon moment, de revenir aujourd'hui
24 puisqu'il n'y avait pas d'audience hier. Vous avez répondu à toutes les
25 questions de toutes les parties, aux questions des Juges aussi. Je vous
26 souhaite un bon retour chez vous. Merci.
27 Madame l'Huissière, pourriez-vous, s'il vous plaît, escorter le témoin hors
28 de prétoire.
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 [Le témoin se retire]
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme je l'ai dit précédemment, cette
4 Chambre ne voudrait pas se réunir demain pour parler de procédure, ne veut
5 pas parler de procédure non plus pour le reste de la journée. On va plutôt
6 le traiter lundi.
7 Si les parties pouvaient dialoguer surtout en ce qui concerne les
8 écritures du 65 ter, et résoudre les problèmes, surtout les problèmes qui
9 ont été exprimés par l'Accusation. La Chambre aimerait le savoir le plus
10 vite possible s'il y a une réponse constructive qui pourrait nous aider
11 pour traiter ces questions de procédures.
12 Nous allons lever la séance jusqu'à lundi prochain, lundi 12 décembre
13 à 14 heures 15, même prétoire, prétoire III.
14 --- L'audience est levée à 16 heures 08 et reprendra le lundi 12
15 décembre 2005, à 14 heures 15.
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