Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 16 janvier 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Les Juges de

6 la Chambre vous souhaitent leurs meilleurs vœux pour la nouvelle année.

7 Monsieur le Greffier, je vous demanderais d'appeler l'affaire.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

9 les Juges. IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik. Merci.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Monsieur Harmon, est-ce que vous

11 êtes prêt à poursuivre le contre-interrogatoire de

12 M. Pasic ?

13 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Tout à fait.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci. Madame l'Huissière, je

15 vous prierais de faire entrer le témoin dans la salle d'audience.

16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Pasic. Je vous prie de

18 vous asseoir.

19 Monsieur Pasic, nous aimerions vous souhaiter une bonne année depuis le

20 banc des Juges, et je souhaiterais vous rappeler que vous êtes encore lié

21 par la déclaration solennelle que vous avez donnée avant cette année. Même

22 si c'était en 2005, cette déclaration est encore -- vous êtes encore tenu

23 par cette même déclaration même en 2006.

24 LE TÉMOIN : RADOMIR PASIC [Reprise]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

26 Monsieur Harmon, je vous prierais de commencer.

27 M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

28 Contre-interrogatoire par M. Harmon : [Suite]

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Pasic.

2 R. Bonjour.

3 Q. Monsieur Pasic, avant la fin de l'audience et avant les vacances, nous

4 parlions des Musulmans qui étaient expulsés du village de Japra, de la

5 vallée de Japra. Cette expulsion a eu lieu le 23 et le 24 mai 1992. Ces

6 villageois se sont retrouvés dans le village de Blagaj. Selon une pièce de

7 la Défense, D115, page 9, nous avons cette traduction en langue anglaise.

8 Bien sûr, des négociations concernant le statut de la population musulmane

9 ont été discutées, et on a eu des discussions avec les organes de la RAK et

10 le gouvernement serbe, la Krajina et la FORPRONU. Concernant ces

11 négociations, si vous vous souvenez, une conversation a eu lieu avec M.

12 Kupresanin.

13 Selon cette pièce 119 [comme interprété], la pièce de la Défense à la page

14 10, le gouvernement de la RAK et le gouvernement de la République Serbe ont

15 été demandés de déterminer où vous arrivez à une décision concernant le

16 statut des Musulmans à Blagaj. La réponse qui a été donnée était de savoir

17 s'il était possible de faire l'échange de ces personnes contre les Serbes

18 capturés ailleurs en Bosnie. Vous nous avez dit que vous avez parlé de

19 cela. Il y a eu des discussions. Le rapport conclut que selon les personnes

20 de Blagaj, des mesures avaient été prises pour permettre aux personnes de

21 se diriger en direction de Banja Luka. Cela été fait le 8 juin.

22 Maintenant, Monsieur Pasic, le point de vue des dirigeants serbes de

23 Bosnie, y compris les dirigeants de la RAK, M. Kupresanin, était que les

24 Musulmans devaient être expulsés de cette région, n'est-ce pas ?

25 R. Votre question est quelque peu longue, mais j'ai compris à la fin de

26 votre question ce que vous avez dit. Toutefois, ce n'était pas la position

27 prise par ces derniers. Si vous avez lu le rapport attentivement le rapport

28 de la cellule de Crise, vous verrez qu'on peut y lire qu'on a simplement

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1 pensé à la possibilité d'un échange potentiel. On a discuté de la question,

2 mais il n'y a pas eu de conclusion d'apportée. Personne n'avait pris une

3 décision définitive concernant cela. Etant donné que la guerre faisait rage

4 dans l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine à l'époque, j'estime que ce que

5 vous avez parlé, cette possibilité qui avait été discutée n'était qu'une

6 possibilité. On n'avait pas pris de décision concrète.

7 Q. Monsieur Pasic, la question que je vous ai posée, c'était à savoir si

8 le point de vue ou la position générale des dirigeants de la RAK était que

9 les Musulmans devaient être expulsés, n'est-ce pas ? N'était-ce pas la

10 position prise par les dirigeants de la Région autonome de la Krajina, et

11 plus particulièrement M. Kupresanin ? Est-ce que vous êtes au courant de

12 cette position ?

13 R. Non, je ne sais pas tel qu'il s'agissait d'une position ouverte

14 générale, que les Musulmans devaient être expulsés. Cela m'est tout à fait

15 inconnu ce que vous me dites maintenant.

16 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais passer

17 à l'onglet 16. Il s'agit d'une pièce de l'Accusation, P107, P187 plutôt.

18 Pourrait-on remettre un exemplaire à M. Pasic, je vous prie. Je

19 souhaiterais attirer l'attention des Juges à la partie 5 de la page 2 de la

20 traduction en langue anglaise.

21 Q. Monsieur Pasic, pour le compte rendu d'audience, le document que l'on

22 vous montrera s'agira d'une pièce de l'Accusation, 187. Il s'agit d'un

23 secret militaire, rapport confidentiel émanant du 1er Corps de la Krajina,

24 datant du 31 mai 1992. Il s'agit d'un combat -- d'un rapport de combat

25 régulier signé par le général et le commandant du 1er Corps de la Krajina,

26 le commandant général Momir Talic. Je souhaiterais attirer votre attention

27 à la page 5, au point 5 en B/C/S' qui se trouve à la page 2 en B/C/S. Je

28 souhaiterais vous donner lecture de ce passage.

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1 "Après les activités de Kozarac, Kljuc et Sanski Most, quelques conscrits

2 de nationalité musulmane avaient demandé de partir de leur unité. Ils ont

3 exprimé leur insatisfaction relative à la destruction massive des villes.

4 Le fait que les Musulmans et les Croates avaient répondu à la mobilisation,

5 les conscrits de nationalité serbe qui avaient évité de répondre à l'appel

6 avaient été acceptés dans l'unité avec un peu de -- sans beaucoup

7 d'enthousiasme. Cela a fait une certaine influence sur le moral des

8 troupes, et cela a rendu une déclaration encore pire pour ce qui est dans

9 les médias les SDS et les dirigeants de la Région autonome de Bosanska

10 Krajina. Donc, ont exprimé leur insatisfaction dans les médias concernant

11 cette expulsion des Musulmans et des Croates de cette région."

12 Est-ce que vous voyez ce passage, Monsieur Pasic ?

13 R. Je n'ai pas tout à fait bien saisi votre question. Qu'est-ce que vous

14 voulez que je voie exactement ?

15 Q. Est-ce que vous avez lu, est-ce que vous avez compris ce que j'ai dit ?

16 "Cela a empiré les choses après ce qu'on a lu dans les médias, après les

17 positions prises par les dirigeants serbes, s'agissant que tous les

18 Musulmans et Les Croates devaient être expulsés de cette région." Est-ce

19 que cela rafraîchit votre mémoire concernant la position qu'avaient pris

20 les dirigeants de la RAK à l'époque concernant les Musulmans qui se sont

21 trouvés séquestrés à Blagaj ?

22 R. Il est tout à fait clair que -- je ne sais pas si vous avez bien

23 compris ma position et la fonction que j'occupais à l'époque. Si ce que

24 vous me dites est tout à fait juste, il ne s'agit pas d'une information qui

25 aurait pu me parvenir. Je n'avais absolument aucune connaissance de cette

26 information; je n'avais pas suivi les événements de cette façon-là. Je ne

27 sais pas si ce qui est écrit est tout à fait juste ou non, mais il est tout

28 à fait vrai, ce que je peux vous dire, c'est que je n'avais pas

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1 connaissance de ce que vous m'avez lu ici.

2 Q. Est-ce que vous avez pris part aux négociations qui ont eues lieu avec

3 les représentants musulmans qui se sont trouvés séquestrés à Blagaj ? Est-

4 ce que vous avez participé aux discussions, à savoir, ce qui devrait leur

5 arriver, quel serait le sort qui leur serait réservé ?

6 R. Je ne sais pas de quoi vous parlez. Ils n'étaient pas séquestrés à

7 Blagaj. Pas du tout. Ils n'étaient pas séquestrés. Il s'agit d'un village,

8 un espace, où pendant un certain temps, ces personnes se sont trouvées.

9 Donc, des parties supérieures du village, il y a certains Musulmans qui se

10 trouvaient là. J'ai négocié avec ces personnes effectivement.

11 Q. Est-ce que vous avez eu des négociations avec Sifet Barjaktarevic,

12 parmi d'autres personnes ?

13 R. Oui, oui. C'était l'une des personnes avec laquelle je menais des

14 négociations.

15 Q. Mais il a expliqué aux autres représentants que ces derniers voulaient

16 retourner dans leurs villages, dans la vallée de la Japra, n'est-ce pas ?

17 C'était l'une de leurs positions ?

18 R. Non. L'une des positions de Sifet Barjaktarevic et de

19 M. Sefer Halilovic était de dire que ces derniers voulaient quitter ces

20 territoires pour plusieurs raisons. J'ai déjà expliqué les motifs qui les

21 poussaient à devoir -- à vouloir partir.

22 Q. Est-ce que vous êtes en train de nous dire, Monsieur Pasic, qu'ils

23 n'ont jamais exprimé le désir de retourner -- de regagner leurs demeures

24 dans la vallée de la Japra ? Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de

25 nous dire ?

26 R. A l'époque, si je ne m'abuse, ils avaient demandé de partir de ces

27 territoires pour plusieurs raisons. L'une de ces raisons était justement

28 ces conversations qui ont eu lieu avec M. Kirudja qui se trouve à Topusko,

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1 qui se trouve en Croatie présentement. Je crois qu'ils ont également mené

2 des négociations. Ils s'étaient entretenus avec M. Kirudja à une reprise au

3 moins.

4 Q. Mais le fait est, Monsieur, que les Musulmans n'avaient pas eu --

5 n'avait pas obtenu la permission de regagner leurs demeures, n'est-ce pas ?

6 R. Non, ce n'était pas du tout le cas.

7 Q. Je souhaiterais attirer l'attention des Juges et la pièce de

8 l'Accusation, 739 qui se trouve à l'onglet 17. Monsieur le Témoin, je vous

9 prierais de prendre l'onglet 17, et je souhaiterais attirer votre attention

10 à un rapport du 1er Corps de la Krajina en date du

11 1er juin, qui a été signé par le colonel Milutin Vukalic. Il s'agit d'un

12 rapport relatif à la situation relative à la sécurité dans la région.

13 Voilà, Monsieur le Témoin, je vais vous donner lecture d'une partie du

14 premier paragraphe de ce rapport, qui se trouve à la page 1 en B/C/S, page

15 1 en anglais. Je vais commencer vers le milieu du paragraphe. "Une partie

16 de la population musulmane et croate est en train de partir. La région de

17 la Bosnie Krajina a émis une décision pour aider le départ de ces Serbes de

18 la Bosnie centrale, et des endroits qui sont près -- particulièrement

19 habités par les Musulmans et les Croates, et leur permettra de partir, de

20 déménager. Ceux qui partirons ne pourront plus retourner, n'auront plus le

21 droit de retourner.

22 C'était la position adoptée par les dirigeants politiques de la RAK, n'est-

23 ce pas, concernant cette région, Monsieur Pasic ?

24 R. Je suis en désaccord avec votre position, Monsieur pour la raison

25 suivante : j'ai déjà expliqué que nous n'avions pas beaucoup de contact

26 avec les représentants de la RAK, de la Krajina ou avec d'autres dirigeants

27 de la république. Pour ce qui est de ce genre de positions adoptées et

28 prises, je n'ai absolument aucune connaissance de cela. Je n'ai jamais su

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1 qu'une quelconque personne devait quitter ces territoires, voire sous

2 pression. Je n'ai pas du tout connaissance de ce genre de choses.

3 Q. Monsieur Pasic, vous avez pris part aux négociations. Vous avez été

4 présent lors des réunions où des représentants de la région étaient

5 présents, et les résultats de ces réunions avaient été transmis à la

6 cellule de Crise de la RAK. En fait, vous avez placé des demandes, vous

7 avez eu quelques exigences, et vous avez transmis cela aux représentants

8 d'autres municipalités. Vous souvenez-vous, Monsieur Pasic, qu'au mois de

9 juin 1992, vous avez pris part à ce genre de négociations ? Vous avez

10 participé à ces réunions-là ?

11 R. Je ne me souviens pas de quelles réunions. Je veux dire, je ne sais pas

12 de quelles réunions vous parlez. Il y avait plusieurs réunions.

13 Q. Est-ce que vous avez été présent lors des réunions où les dirigeants

14 politiques d'autres municipalités n'avaient été présents au mois de juin,

15 réunions lors desquelles vous avez parlé de la situation sur le terrain,

16 qui prévalait dans votre municipalité, y compris la situation concernant

17 les Musulmans et les Croates qui habitaient dans vos municipalités ?

18 R. Les mois de mai et de juin étaient des mois très difficiles pour la

19 municipalité de Novi Grad et de Bosanski Novi. Je ne me souviens vraiment

20 pas de réunions. Je sais que j'ai passé la majeure partie du temps dans mon

21 bureau pour des raisons objectives car la sûreté n'était pas assurée. Il

22 était assez difficile de se déplacer d'une municipalité à l'autre. Il est

23 tout à fait possible qu'il y ait eu de réunion de ce type, mais je ne me

24 souviens vraiment pas d'une réunion concrète lors de laquelle on aurait

25 discuté de ce genre de choses.

26 M. HARMON : [interprétation] Je souhaiterais que l'on montre au témoin une

27 nouvelle pièce. Il s'agit d'une pièce qui ne se trouve pas dans les

28 documents qui ont déjà été distribués. C'est une nouvelle pièce.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de ce faire, Monsieur Harmon, vous

2 avez dirigé notre attention à l'intercalaire 17. J'ai eu du mal à trouver

3 le passage que vous avez lu au témoin.

4 M. HARMON : [interprétation] Intercalaire 17. C'est au premier paragraphe,

5 vers le milieu du premier paragraphe.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais l'intercalaire -- l'onglet 17, je

7 n'ai pas de troisième paragraphe. Je ne peux pas trouver ce passage au

8 milieu.

9 M. HARMON : [interprétation] C'est un document du 1er Corps de la Krajina en

10 date du 1er juin 1992, intercalaire 17.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais mon document porte la date du

12 9 juin 1992. Il ne s'agit donc pas du même document.

13 M. HARMON : [interprétation] Je vais m'assurer, Monsieur le Président, que

14 le bon document soit placé sous l'onglet 17.

15 Bien. Maintenant, pour l'instant, je souhaiterais que l'on montre la pièce

16 de l'Accusation, 739.

17 Pourriez-vous, je vous prie, Madame l'Huissière, distribuer les copies de

18 ce document.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, je vous prie.

20 M. HARMON : [interprétation] Il s'agit ici de document, Monsieur Pasic, qui

21 porte le titre "Intermunicipal --

22 M. JOSSE : [interprétation] Est-ce que l'accusé pourrait avoir le document

23 également.

24 M. HARMON : [interprétation]

25 Q. C'est un document qui porte la date, Accords intermunicipaux dans la

26 région de Sana et de la Una, le 14 juin 1992, midi. Ceux qui étaient

27 présents ce sont les représentants de Bosanska Krupa, Bosanski Petrovac,

28 Bosanski Novi, Bosanska Dubica, Prijedor, Sanski Most. Vous verrez

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1 également une liste de sujets qui devaient être abordés lors de cette

2 réunion. Si vous passez à la dernière page, Monsieur Pasic, dernière page

3 de ce document, vous verrez une liste manuscrite de noms de personnes qui

4 ont pris part à cette réunion. Je souhaiterais attirer votre attention sur

5 le numéro 11. Est-ce que c'est bien votre nom et votre signature qui

6 figurent ? Au point 11, on voit votre nom, n'est-ce pas ?

7 R. Il s'agit bien de mon nom. Il s'agit de ma signature, mais je n'ai pas

8 participé à cette réunion. Je n'ai jamais été à Korcanica. Je crois qu'il

9 s'agit d'un endroit qui se trouve à

10 Grmac [phon], mais je ne m'y suis jamais rendu.

11 Q. Nous allons passer à un autre document assez brièvement. Je

12 souhaiterais attirer votre attention sur le contenu de ce document,

13 Monsieur Pasic, et je souhaiterais vous demander de nous dire si cela

14 rafraîchit votre mémoire.

15 Parmi les personnes présentes, il y avait M. Nedeljko Rasula, au numéro 2;

16 M. Anicic, au point 3; Simo Drljaca, au numéro 13; au numéro 21, Vlado

17 Vrkes. Dites-nous si ces noms rafraîchissent votre mémoire.

18 R. Non, je ne me souviens vraiment pas de m'être jamais trouvé à

19 Korcanica. Il y a eu des réunions qui se sont tenues à Sanski Most. Certes,

20 je me souviens de certaines réunions, mais s'agissant de réunions qui aient

21 eu lieu à Korcanica, je ne me souviens vraiment pas d'une telle réunion.

22 Q. Passons maintenant à une autre pièce, et ensuite, Monsieur Pasic --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas encore attribué une

24 cote à ce document que vous venez de montrer au témoin, Monsieur Harmon.

25 Monsieur le Greffier, je vous écoute.

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

27 Juges, il s'agira de document qui portera la cote P1030.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] P1030.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 1030. Très bien.

2 M. HARMON : [interprétation]

3 Q. Je souhaiterais que l'on passe maintenant à

4 l'intercalaire 18, Monsieur Pasic. Intercalaire 18, il s'agit d'une pièce

5 de l'Accusation qui porte la cote P192. Il s'agit d'intercalaire 343 de la

6 pièce Hanson P529. C'est un document qui est daté du 7 juin 1992, de Sanski

7 Most. Ce sont des conclusions qui ont été adoptées à la suite d'une

8 réunion, qui y ont participé des représentants politiques des sous-régions

9 et des municipalités de Bihac, Bosanski Petrovac, Srpska Krupa, Sanski

10 Most, Prijedor, Bosanski Novi et Kljuc. Ce sont des conclusions qui ont été

11 envoyées à la cellule de Crise et à la Région autonome de Banja Luka, aux

12 dirigeants de la République de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo et au 1er Corps

13 de la Krajina. Il s'agit de document qui présente une série de requêtes.

14 Une série de positions également était établie. Je vais maintenant

15 identifier deux positions qui avaient été prises.

16 Au point 4, Monsieur Pasic, vous verrez que les représentants politiques

17 des municipalités que j'ai énumérés ont présenté un certain nombre de

18 requêtes. Ils ont demandé à ce que le 1er Corps de la Krajina à Banja Luka,

19 et plus particulièrement le général Tadic du 1er Corps de la Drina, purge le

20 1er Corps de la Krajina des Musulmans et des Croates. Si l'on passe au point

21 6 de ce rapport, encore une fois, je vais vous donner lecture : "Les sept

22 municipalités de notre sous-région sont d'accord pour dire que les

23 Musulmans et les Croates devraient partir de nos municipalités jusqu'à ce

24 que l'on arrive à un niveau selon lequel l'autorité serbe sera maintenue et

25 mise en œuvre sur notre territoire et dans nos municipalités. Jusqu'à ce

26 que cela ne soit fait, nous demandons à ce que la cellule de Crise de la

27 Région autonome de Krajina fournisse un corridor pour le passage et la

28 relocalisation des Musulmans et des Croates en direction de la Bosnie

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1 centrale et de l'état indépendant d'Alija de Bosnie-Herzégovine puisqu'ils

2 ont voté pour cela. Si les dirigeants de la Région autonome de la Krajina à

3 Banja Luka n'arrivent pas à résoudre ce problème, les sept municipalités

4 escorteront de façon militaire tous les Musulmans et les Croates à

5 l'extérieur des municipalités du centre de Banja Luka."

6 Monsieur Pasic, ce sont des requêtes, des demandes, qui ont été formulées

7 auprès des autorités serbes pour que l'on puisse maintenir et mettre en

8 œuvre ce que l'on demande ici. Est-ce que vous vous souvenez de cette

9 réunion ?

10 R. Il m'est difficile de me rappeler de cette réunion. Je sais avoir

11 participé à certaines réunions de Sanski Most. Maintenant, à savoir si

12 c'était effectivement cette réunion-là à laquelle j'ai participé, je ne me

13 souviens pas. En fait, non. Effectivement, je peux vous dire qu'à Sanski

14 Most il y a eu certaines réunions auxquelles j'ai participé. Je ne me

15 souviens pas quelles sont ces réunions auxquelles j'ai participé

16 présentement, maintenant, mais je peux vous dire que pour la réunion

17 précédente dont vous m'avez demandé, je suis tout à fait certain de ne pas

18 avoir pris part à cette réunion.

19 Q. Si nous passons à la pièce suivante, Monsieur Pasic, l'intercalaire

20 numéro 19, je voudrais voir si ceci pourrait rafraîchir vos souvenirs,

21 Monsieur Pasic.

22 Intercalaire 19, Messieurs les Juges et Monsieur Pasic, c'est un extrait

23 d'un livre. Ce livre : "C'est un crime que d'oublier un crime, Sanski Most,

24 et la guerre de 1992 à 1995." C'est un crime que d'oublier un crime, par

25 Zilhad Kljucanin et Hazim Akmadzic.

26 Il y a un extrait dans lequel vous noterez la version en B/C/S se

27 trouve -- voir, il se trouve la page 96 n'a pas été traduite. J'ai remarqué

28 ceci hier soir.

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1 Monsieur Pasic, si vous regardez ce texte --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous aurions peut-être besoin

3 de la sortir du texte.

4 M. HARMON : [interprétation] Il faut effectivement la retirer. La page 96

5 doit être retirée. J'ai remarqué qu'elle n'avait pas été traduite.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'elle a déjà reçu un numéro ?

7 M. HARMON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier ?

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce serait le P1031, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci commence à la page 97.

11 M. HARMON : [interprétation] Ceci devrait normalement commencer à la page

12 95, Monsieur le Président. Ensuite, il y a 96, qui est la page qui est non

13 traduite.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. On commence à

15 la page 95 et on va à la page 97.

16 M. HARMON : [interprétation]

17 Q. Maintenant, Monsieur Pasic, si vous regardez la page 99 en B/C/S, on

18 cite les personnes suivantes qui auraient été présentes à la réunion. Ce

19 sont les chefs de municipalités sous-régionales qui se sont réunis le 7

20 juin. Il dit, je vais vous lire peut-être que ceci rafraîchit votre

21 mémoire : Nedeljko, Bogodan Latinovic, Dragan Ivanovic, Simo Cisiovic,

22 Gojko Kliskovic [phon], Mladen Lukic, Racko Novakovic, Radomir Pasic, Milan

23 Kurjacic [phon], Simo Drljaca, Mile Damjanovic, Bosko Nikovic, Milan

24 Kovacevic, Grujo Boric, Milomir Stahic et Vlado [inaudible]. Est-ce que

25 ceci vous aide à vous rappeler les choses, Monsieur Pasic, pour savoir si

26 vous avez, oui ou non, participé à cette réunion à Sanski Most où il y

27 avait ces représentants politiques des municipalités, qui sont identifiés

28 dans ce rapport ?

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1 R. Je vous ai déjà dit que j'ai participé à certaines réunions à Sanski

2 Most, mais je ne sais pas si l'une d'entre elles correspond précisément à

3 ce dont on parle ici. Je ne peux pas le dire. Je ne peux pas me rappeler.

4 Je me rappelle qu'il y a eu des réunions à Sanski Most auxquelles j'ai

5 participé, mais je ne peux pas dire si cette réunion-ci, j'y ai participé

6 ou non. Je ne peux pas être sûr.

7 Q. Concentrons-nous sur le point numéro 6, Monsieur Pasic, parce que ce

8 point numéro 6 est quelque chose d'essentiel. Pour l'essentiel, il s'agit

9 d'une demande qui est assortie d'une menace. Cette demande est adressée aux

10 dirigeants de la RAK pour assurer l'existence d'un corridor pour la

11 réinstallation des Musulmans et des Croates de Bosnie Centrale. Si les

12 dirigeants de la RAK ne résolvent pas le problème, alors les sept

13 municipalités menacent de conduire tous les Musulmans et Croates sous

14 escorte militaire à partir de leurs municipalités respectives. Est-ce que

15 vous avez participé à cette réunion où une menace a été proférée; oui ou

16 non ? Je sais que vous avez participé à certaines réunions à Sanski Most.

17 Est-ce que vous avez participé à celle-ci, à cette réunion-ci ?

18 R. Comme je l'ai déjà dit, j'ai participé à certaines

19 réunions. Quant au type de menaces dont vous venez de parler, vraiment, je

20 n'en n'ai pas connaissance et je ne me souviens pas si dans ce contexte il

21 y a eu quiconque qui ait parlé de déplacement de Musulmans hors de Bosanski

22 Novi ou de Novi Grad, en l'occurrence, comme on l'appelait à l'époque.

23 Q. Monsieur Pasic, si vous n'avez pas assisté à cette réunion, qui était

24 le représentant politique de votre municipalité qui aurait participé à

25 cette réunion ?

26 R. Vous demandez quelque chose que je ne sais vraiment pas. Je vous dis

27 que je ne peux pas me souvenir. Il y a longtemps que cela s'est passé.

28 C'était très difficile pour moi de me rappeler ce qui s'est passé au jour

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1 le jour à chaque moment. Je me rappelle que j'ai participé à certaines

2 réunions. Quant à savoir si j'ai participé à celle-ci ou à d'autres, je ne

3 sais pas vraiment. Je ne peux pas même me rappeler mot à mot quelles

4 étaient les conclusions qui ont été adoptées. Certaines conclusions ont été

5 adoptées par la suite par un groupe de travail dont je n'étais pas membre.

6 Je répète, ceci est quelque chose que je ne peux ni soutenir ni nier. Je ne

7 peux pas dire si cela a eu lieu ou si cela n'a pas eu lieu. Je ne peux tout

8 simplement pas me souvenir. Ma mémoire ne me sert pas si bien que cela.

9 C'est très difficile pour moi de dire si j'ai participé ou non à une

10 réunion de ce genre. Pour autant que je puisse m'en souvenir, ces personnes

11 qui sont allées à ces réunions de Novi Grad indépendamment de moi. Personne

12 n'a demandé qu'il y ait une réinstallation forcée de la population de Novi

13 Grad. Les solutions ont été évoquées sur la manière de voir comment on

14 pouvait aider ces gens et comment résoudre la situation. C'était cela le

15 contexte.

16 Toutes les réunions appelaient à trouver une solution sur la manière de

17 résoudre la situation à Novi Grad. Notre proposition, c'était qu'il devrait

18 y avoir des voies pacifiques, sans victimes, et que ceux qui souhaitaient

19 partir se voient donner les moyens de partir et qu'on fasse preuve de

20 compréhension pour leurs demandes. Cela dit, la dernière fois, je vous ai

21 dit que c'était là notre idée. Si nous avions voulu expulser des Musulmans,

22 nous aurions pu trouver des moyens plus faciles, mais ce n'était pas notre

23 objectif. Ce n'était pas l'idée.

24 Q. Monsieur Pasic, si nous passons maintenant à l'intercalaire suivant,

25 numéro 20, pièce à conviction de l'Accusation, numéro 529 et intercalaire

26 426.

27 Monsieur Pasic, c'est là un document -- est-ce que vous reconnaissez

28 ce document comme étant un document qui porte votre signature ?

Page 19786

1 R. Ceci n'est pas très lisible. C'est une très mauvaise copie.

2 Q. Monsieur Pasic, ce document est daté du 8 juin. Vous avez eu la

3 possibilité de jeter l'œil sur le fond de ce document et la teneur. Au bas,

4 il y a une signature mal reproduite; je suis d'accord avec vous. Ce qui est

5 dactylographié, c'est le nom Radomir Pasic. C'est un élément qui vous aide

6 --

7 M. JOSSE : [interprétation] Pourrais-je demander où se trouve l'original,

8 ou tout au moins la copie à partir de laquelle cette copie-ci a été faite ?

9 M. HARMON : [interprétation] Je n'ai pas la réponse à portée de la main,

10 Monsieur le Président, mais je vais me renseigner et essayer d'obtenir

11 l'original.

12 M. JOSSE : [interprétation] Je pense que le

13 contre-interrogatoire sur ce point devrait cesser jusqu'au moment où le

14 témoin aura vu l'original en obtenant, en particulier, compte des passages

15 illisibles dans la traduction. Telle est notre position.

16 M. HARMON : [interprétation] Notre position est que la teneur de ce

17 document est claire, et que le témoin devrait être en mesure -- est peut-

18 être en mesure de l'examiner lui-même, de le voir et de se rappeler si ce

19 document est quelque chose qu'il a diffusé, même s'il ne parvient pas à

20 bien voir la signature.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, la Chambre permet à M.

23 Harmon de demander au témoin s'il a des souvenirs d'avoir émis une telle

24 décision avec cette teneur, avant de savoir s'il reconnaît ceci comme étant

25 sa signature pour le moment.

26 M. JOSSE : [interprétation] Je comprends. Je vous remercie, Monsieur le

27 Président.

28 M. HARMON : [interprétation]

Page 19787

1 Q. Monsieur Pasic, pouvez-vous répondre à cette question ?

2 R. Pourriez-vous, s'il vous plaît, me fournir un exemplaire, une copie

3 meilleure ? Parce qu'il y a de nombreux mots que je n'arrive pas à lire

4 ici. Il faudrait d'abord que je puisse lire un texte correct. A ce moment-

5 là, je serais en mesure de vous dire si oui ou non j'ai fait quelque chose

6 le concernant. Si vous avez un meilleur exemplaire, pourriez-vous, s'il

7 vous plaît, me le donner ?

8 M. HARMON : [interprétation] Oui, j'ai un exemplaire ici. Je ne sais pas

9 s'il est meilleur que celui qui se trouve devant le témoin, mais je vais

10 lire à partir de la traduction, et ceci pourrait être en mesure d'aider le

11 témoin.

12 M. JOSSE : [interprétation] Je voudrais reprendre cette question encore une

13 fois.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 M. JOSSE : [interprétation] Ce problème de la traduction est quelque chose

16 d'important ici en ce qui concerne des passages illisibles. Evidemment, on

17 pourrait résoudre beaucoup mieux la question en ayant un meilleur

18 exemplaire qui serait fourni.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr. S'il y a un meilleur

20 exemplaire, une meilleure copie, ce serait préférable de l'avoir. En même

21 temps, tout en traduisant ce document, il semble que les interprètes aient

22 pu lire, tout au moins, la plus grande partie du document. Et d'après ce

23 que j'entends de la traduction, ceci donne un contexte suffisant pour que

24 le témoin puisse se rappeler si oui ou non il a émis une telle décision,

25 même s'il ne parvient pas à se souvenir sur -- se souvenir de chacun des

26 mots qu'elle contient.

27 Monsieur Pasic, pourriez-vous essayer de faire de votre mieux pour lire à

28 partir de ce document. Faites de votre mieux. Même si chaque mot n'est pas

Page 19788

1 parfaitement lisible, pourriez-vous, s'il vous plaît, essayer de vous

2 familiariser avec cette partie du document qui, disons, la partie la plus

3 lisible. La plus grande partie est lisible, en l'occurrence.

4 M. HARMON : [interprétation]

5 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité de lire ce texte, Monsieur

6 Pasic, texte que j'ai fait mettre devant vous ? Je peux le lire. Si vous

7 n'arrivez pas à la lire trop bien, je pourrais lire une partie.

8 M. JOSSE : [interprétation] J'ai supposé que le Président lui demandait de

9 le lire à haute voix.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je n'ai pas demandé au témoin de

11 faire cela, mais je pense, enfin je peux imaginer que l'Accusation pourrait

12 être essentiellement intéressée par les deux derniers paragraphes de ce

13 document.

14 M. HARMON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce ne sont pas les parties qui sont les

16 plus difficiles à lire dans ce document.

17 M. HARMON : [interprétation] Et le deuxième paragraphe, Monsieur le

18 Président.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et le deuxième paragraphe. M. HARMON :

20 [interprétation] Pour autant que je puisse lire ce qui a été traduit pour

21 moi.

22 Q. Monsieur Pasic, je voudrais vous orienter en ce qui concerne ce

23 document. Je vais essayer de vous aider pour qu'on puisse accélérer les

24 choses. C'est un document qui a été émis par la cellule de Crise de

25 Bosanski Novi le 8 juin 1992, et qui est adressé aux habitants de Blagaj et

26 de la vallée de Japra. La question, c'était donc une information. Je vais

27 vous lire parce que peut-être que cela pourra accélérer les choses. Une

28 partie de ces mots sont illisibles, mais il y en a d'autres qui sont

Page 19789

1 lisibles. Je vais les lire. "Le

2 7 juin 1992, vous avez été informé par la Croix-Rouge de Bosanski Novi de

3 l'examen de certains problèmes concernant le départ de Musulmans du

4 territoire de Bosanski Novi, de la municipalité de Bosanski Novi. Au cours

5 des trois derniers jours, il y a eu des opérations de guerre dans les bois

6 près de Blagaj, ayant pour objectif de -- en ce qui -- concernant les

7 groupes terroristes musulmans, l'élimination de groupes musulmans

8 terroristes." Il y a du texte qui manque ici.

9 "En tant que membres -- et comme les membres de l'armée serbe sont engagés

10 dans ces tâches 24 heures sur 24, il est" - puis illisible - "des familles

11 serbes sont en danger. Il y a un véritable danger." Et puis à nouveau

12 illisible -- "population de Blagaj."

13 Ensuite, paragraphe suivant : "Départ par la Croatie et Slovénie organisé

14 par la FORPRONU, qui a été tenté sans succès. Le passage vers Banja Luka

15 demeure libre. Nous vous avisons donc que nous sommes prêts à fournir ce

16 qui est nécessaire pour un départ paisible, pacifique et sûr de la

17 population musulmane de ce secteur. En vue d'assurer votre sécurité, il est

18 nécessaire de former une colonne prête à partir immédiatement. La cellule

19 de Crise et la Croix-Rouge sont prêtes à aider avec des véhicules, des

20 vivres et d'autres nécessités. Si ces propositions sont rejetées, la

21 cellule de Crise ne sera plus en mesure de garantir la sécurité des

22 Musulmans dans le secteur." Le président de la cellule de Crise, Radomir

23 Pasic. Ensuite, il y a une signature.

24 Est-ce que vous vous rappelez avoir émis ce document, Monsieur Pasic ?

25 R. Je vous ai déjà dit que la cellule de Crise -- bon, j'étais président

26 de cette cellule de Crise, mais je ne prenais pas de décisions tout seul,

27 de façon indépendante. C'était la cellule de Crise qui prenait les

28 décisions.

Page 19790

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question qui vous a été posée est de

2 savoir si vous avez émis ce document, si en êtes l'auteur. Personne ne vous

3 a demandé si vous avez pris une décision tout seul ou non. Donc, la

4 première question est : est-ce qu'il s'agit là bien d'une décision qui a

5 été prise sous une forme quelconque, qui aurait été émise par vous ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne peux pas me rappeler. Si c'est cela

7 votre question et si vous voulez une réponse brève, tout ce que je peux

8 dire, c'est que je ne me souviens pas de cela.

9 M. HARMON : [interprétation] Bien.

10 Q. Nous allons maintenant aller de l'avant.

11 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je suis en train

12 d'essayer d'obtenir le document original dont nous nous occupons

13 maintenant. J'espère que nous pourrons l'obtenir au cours de cet

14 interrogatoire. Si c'est le cas, je le présenterai au témoin, et peut-être

15 qu'il pourra encore reconnaître sa signature.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

17 M. HARMON : [interprétation]

18 Q. Monsieur Pasic, le 8 juin, en fait, lorsque cette information, ce texte

19 particulier a été émis, la situation militaire à Bosanski Novi était

20 pleinement sous le contrôle militaire, n'est-ce pas ?

21 R. Non, pas complètement sous contrôle de l'armée. Je vous ai dit la

22 dernière fois, que nous avions eu beaucoup de problèmes avec les

23 paramilitaires, les formations paramilitaires. Nous avions fait tout ce que

24 nous pouvions faire pour éviter des effusions de sang, et qu'il y ait des

25 actions incontrôlées. Je vous ai déjà dit que nous ne pouvions pas à 100 %

26 exercer un contrôle de façon à assurer la sécurité, et que nous avions de

27 nombreux problèmes avec les formations paramilitaires qui se trouvaient là.

28 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, la pièce suivante

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1 figure à l'intercalaire numéro 21. Il faudrait qu'on lui attribue un

2 numéro.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour l'intercalaire 21, Monsieur le

5 Président, il s'agira de la pièce P1032. Il s'agit là d'un rapport de

6 combat régulier qui est daté du 9 juin 1992.

7 M. HARMON : [interprétation] Je ne vais pas montrer au témoin ce document

8 précis. Je vais simplement appeler l'attention des membres de la Chambre

9 sur trois paragraphes de ce document ainsi que sur le document suivant. Il

10 s'agit du document qui est --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, vous traitez cela comme étant

12 une pièce à conviction qui fait partie du contexte, et vous la lisez de

13 façon à voir si le témoin aurait des observations, des commentaires à faire

14 s'il en a la possibilité.

15 M. HARMON : [interprétation] Je serais heureux de faire cela. Il s'agit du

16 P1032.

17 Q. Témoin, pour votre information, il s'agit aussi comme je l'ai dit de

18 l'intercalaire 21. Il s'agit d'un rapport du commandement de la Corps de la

19 Krajina, rapport militaire secret daté du 9 juin. C'est un rapport, le

20 combat ordinaire qui est adressé à l'état-major principal de l'armée BH de

21 la République de Serbie, et c'est signé par le général Talic. Dans le

22 paragraphe 1, à peu près deux tiers du texte anglais : "Les membres dits

23 Bérets verts ont été séparés en plus petits groupes, et ont tenté d'entrer

24 -- de prendre les municipalités Prijedor, Sanski Most, Kljuc, Bosanski Novi

25 et d'entrer en Krajina.

26 Si nous allons à la deuxième partie, pour ce qui est de la préparation aux

27 combats, à mi-paragraphe, il est dit qu'il y a des opérations de nettoyage,

28 et la poursuite de groupes qui tentaient de faire une percée par Cazin

Page 19792

1 Krajina qui se poursuit dans les municipalités de Prijedor, Sanski Most,

2 Kljuc, Bosanski Novi.

3 Numéro 23, [comme interprété] la situation sur le -- la rubrique de la

4 situation sur le terrain, il est dit que la situation dans le territoire et

5 la zone d'opération des combats est contrôlée, est sous le contrôle de

6 l'armée.

7 Si nous passons maintenant au paragraphe 8 de ce document, à la page 2 en

8 anglais--

9 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais objecter.

10 J'ai des plus fortes objections à cela. Si mon confrère souhaite qu'il y

11 ait des éléments de preuve présentés en réfutation, à ce moment-là, le

12 Règlement le prévoit. La Chambre a déjà dit que les documents qui

13 intéressent le contexte, si l'Accusation souhaite les présenter à ce

14 moment-ci, il faut le faire avec la plus grande prudence. Il faut que nous

15 ayons la possibilité de faire des observations ou des commentaires et de

16 présenter des conclusions à leur sujet. Si l'Accusation va présenter

17 document après document, il faut pouvoir poser des questions pour savoir si

18 son nom apparaît sur l'un quelconque de ces documents. Je ne peux pas

19 objecter à cela. Mais c'est tout à fait autre chose que ce que fait

20 actuellement mon confrère comme procédure qu'il adopte. Je pense qu'il est

21 nécessaire que les choses soient correctement présentées et expliquées.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends que M. Harmon veut utiliser

23 ce document de façon a vérifier l'exactitude de la dernière réponse du

24 témoin qui a dit qu'il n'y avait pas un contrôle militaire total.

25 M. HARMON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que la façon qu'il convient de

27 faire cela, c'est que M. Pasic ait la possibilité de lire ce document, que

28 son attention soit appelée sur ces parties du document selon lesquelles M.

Page 19793

1 Harmon pense que la dernière réponse du témoin est contredite par ce texte,

2 et voir s'il change d'avis ou si ces souvenirs sont différents ou si ceci

3 donne lieu à des observations. Toutefois, il me semble également bon

4 d'appeler l'attention plus particulièrement du témoin sur certaines

5 parties, de façon à ce qu'il n'ait pas besoin de lire la totalité du texte

6 où notamment des parties ne seraient pas pertinentes en même temps. Les

7 choses vont trop vite pour le témoin pour procéder de la sorte.

8 Par conséquent, Monsieur Harmon, vous avez demandé au témoin de porter son

9 attention sur la dernière partie du premier paragraphe.

10 M. HARMON : [interprétation] C'est exact.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et bien, --

12 M. HARMON : [interprétation] La moitié du paragraphe de la partie 2 du

13 deuxième paragraphe concernant les opérations de nettoyage. Ensuite, il y a

14 le paragraphe 3.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, fournir

16 au témoin un exemplaire de ce document en indiquant de façon précise dans

17 la marge là où il faut examiner le texte. Ensuite, après la suspension de

18 séance, on donnera la possibilité au témoin de faire des commentaires sur

19 ce document à la lumière de la dernière réponse qu'il a faite. Si vous avez

20 des documents analogues --

21 Oui, Maître Josse.

22 M. JOSSE : [interprétation] Pendant que l'on fera tout cela, pourrais-je

23 demander l'aide de mon éminent confrère, s'il pouvait essayer d'obtenir

24 l'original de la pièce P1030, parce que je voudrais poser des questions à

25 ce sujet lors des questions supplémentaires, et je pense que la Chambre

26 aura besoin de l'original.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est le --

28 M. JOSSE : [interprétation] Le document qui nous a été remis ce matin pour

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1 la première fois. 14 juin 1992, un document concernant des accords

2 intermunicipaux.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Harmon. Monsieur Harmon,

4 pourriez-vous aider Me Josse à cet égard.

5 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je suis juste en

6 train d'indiquer par écrit pour le témoin quelles sont les parties

7 pertinentes.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, je comprends. Tout ceci fait

9 beaucoup de choses à faire en même temps, n'est-ce pas ?

10 M. HARMON : [interprétation] Bien. Si maintenant je pouvais avoir l'aide de

11 l'Huissière, je pourrais maintenant transmettre ce document au témoin.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que nous pourrions laisser

13 cela pour la première suspension afin que le témoin ait un peu plus de

14 temps pour examiner le document, Monsieur Harmon.

15 M. HARMON : [interprétation] Bien. Je voudrais appeler l'attention des

16 Juges sur cela. J'ai un autre document sur lequel je voudrais également

17 appeler votre attention, et que je vais marquer pour ce qui est des

18 passages intéressants. Le témoin pourra là encore faire ses commentaires

19 après la suspension.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. HARMON : [interprétation] Le document suivant, Monsieur le Président,

22 figure à l'intercalaire 22. Je le marque également pour le témoin. C'est

23 daté du 10 juin 1992. Il s'agit d'un rapport du commandement du 1er Corps de

24 la Krajina adressé au Grand état-major de l'armée de la République de

25 Serbie, signé par le général Talic. Et je voudrais appeler votre attention

26 sur la partie 4 de ce document.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être que nous pourrions

28 envisager de suspendre un peu plus tôt la séance. Est-ce que tout ceci

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1 concerne le contrôle par l'armée, le contrôle militaire et la présence de

2 paramilitaires ou de Bérets verts ou --

3 M. HARMON : [interprétation] Oui. Cette partie traite d'éléments de preuve

4 qui concernent ce moment-là.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 M. HARMON : [interprétation] D'après ces rapports, la situation était sous

7 contrôle militaire. Il y a donc des indications à ce sujet dans les deux

8 rapports militaires secrets émis par le général Talic.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, la Chambre envisage le

12 point de savoir s'il ne serait pas plus approprié d'avoir maintenant une

13 brève suspension de séance de façon à donner la possibilité au témoin

14 d'examiner ces documents. Si vous avez des questions du même genre, des

15 questions analogues par la suite, alors dans ce cas-là, peut-être vaudrait-

16 il mieux attendre et voir quelle est la documentation qui doit être lue ou

17 relue au cours de la suspension, et de façon de voir combien de temps il

18 faudrait pour le témoin pour cela.

19 M. JOSSE : [interprétation] Pourrais-je faire un bref commentaire de

20 caractère logistique.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 M. JOSSE : [interprétation] Je souhaiterais beaucoup, lorsque M. Pasic aura

23 lu les documents, avoir une brève suspension. Comme j'y suis encouragé par

24 la section de Protection des Victimes et des Témoins, je voudrais pouvoir

25 lui parler brièvement avant qu'il ne continue à déposer si l'emploi du

26 temps de la Chambre le permet. J'aurais besoin d'environ 20 minutes à ce

27 moment-là, je suppose.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends.

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1 Monsieur Harmon, est-ce que quelque chose d'analogue à ce qui vient de se

2 passer va se faire pour d'autres documents et commentaires à la lumière des

3 réponses du témoin ? Est-ce que c'est quelque chose à quoi nous pouvons

4 nous attendre ?

5 M. HARMON : [interprétation] Nous pouvons nous attendre à cela pour au

6 moins deux documents Monsieur le Président. Il y a d'autres documents --

7 deux autres documents.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deux autres documents ?

9 M. HARMON : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, nous allons continuer pour le

11 moment. Vous pouvez poursuivre, et le témoin pourra jeter un dernier coup

12 d'œil au document qui est à l'intercalaire 21 et à l'intercalaire 22, mais

13 peut-être également aux autres documents, aux autres intercalaires au cours

14 de la prochaine suspension.

15 M. HARMON : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

17 M. HARMON : [interprétation] Je pourrais appeler votre attention sur

18 l'intercalaire 22 qui a besoin d'un numéro de pièce à conviction.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier, ce serait ?

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce serait la P1033, Monsieur le

21 Président.

22 M. HARMON : [interprétation] Ce document particulier, je voudrais appeler

23 l'attention au paragraphe 1, aux lignes qui se trouvent au bas de ce

24 paragraphe, "Groupes de Bérets verts tentant de se retirer vers Cazin

25 Krajina, qui sont encore présents dans les municipalités de Prijedor,

26 Sanski Most, et Bosanski Novi."

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

28 M. HARMON : [interprétation] La deuxième partie commence à la troisième

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1 ligne : "Dans le secteur de Prijedor et les municipalités de Bosanski Novi,

2 opération de nettoyage, le fait de capturer et écraser des groupes ennemis

3 qui tentent de faire une percée vers la Cazin Krajina se poursuit."

4 Sous-paragraphe 3, première phrase : "Situation générale dans la zone de

5 responsabilité et la zone d'opération des combats se trouve sous le

6 contrôle de nos forces."

7 Et au sous-paragraphe 8, deuxième phrase : "Contrôle total -- le

8 contrôle total du territoire a été réalisé ainsi que le nettoyage de la

9 section ainsi que les opérations visant à désarmer l'ennemi, qui se

10 poursuivent avec pas mal de succès."

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez indiqué, plus particulièrement

12 surligné ces parties pour le témoin.

13 M. HARMON : [interprétation] Oui.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 M. HARMON : [interprétation]

16 Q. Monsieur Pasic, est-ce que ceci est bien une évaluation par les

17 militaires de ce qui se passait dans votre municipalité à l'époque ? Est-ce

18 que vous êtes d'accord avec cette appréciation, cette évaluation, ou est-ce

19 que vous n'êtes pas d'accord avec cette appréciation des militaires, du

20 général Talic et du 1er Corps de la Krajina ?

21 R. Le général Talic avait son bureau à Banja Luka. C'est à une centaine de

22 kilomètres de Novi Grad. Souvent, je n'étais pas d'accord avec les

23 évaluations militaires, surtout quand il s'agissait de la sécurité sur le

24 terrain, de sorte que je ne suis pas d'accord avec l'affirmation prétendue

25 de M. Talic, que vous venez de me présenter. Je vous dis que la situation

26 sur le terrain était telle que je vous ai décrite, qu'il n'était pas

27 possible d'exécuter des contrôles en permanence. Ce n'était pas possible

28 justement à cause de l'existence de ces unités paramilitaires.

Page 19798

1 Est-ce que M. Talic voulait obtenir quelque chose du point de vue

2 politique en écrivant ce qu'il écrivait, je ne saurais vous le dire. Je ne

3 voulais pas participer à de telles conversations. Je ne pouvais pas faire

4 des évaluations semblables. Je n'étais pas compétent pour le faire. Je peux

5 vous dire ce que j'ai vécu, ce que j'ai vu et ce dont je me souviens. Je ne

6 peux vous dire rien d'autre. C'est tout ce que ce que je peux vous dire. Je

7 ne peux pas évaluer la situation. Je ne peux pas vous dire si ce qui est

8 dit ici est vraiment objectif ou subjectif, s'il s'agit là justement

9 uniquement du point de vue de M. Talic ou autre chose, mais je considère

10 que ce que vous venez de me lire, c'était quelque chose de tout à fait

11 subjectif, et que souvent M. Talic, justement, écrivait quelque chose et

12 qu'il décrivait une situation qui ne correspondait pas à la situation

13 réelle sur le terrain.

14 Q. Nous allons revenir sur l'intercalaire numéro 20, l'information

15 diffusée aux citoyens de Blagaj et Japra, la vallée de Blagaj et Japra, où

16 on décrit les opérations qui ont eu lieu dans la forêt près de Blagaj où il

17 est dit qu'au fond, pour assurer la sécurité des Musulmans, il faut qu'ils

18 partent.

19 Voici la question que je vous pose : vu les opérations de guerre qui ont eu

20 lieu dans la forêt, dans la vallée de la Japra, qu'elles étaient les

21 mesures que vous avez prises vous, ou bien la Défense territoriale, ou bien

22 l'armée pour assurer la sécurité des villages serbes ?

23 R. En ce qui concerne la sécurité, les missions de la sécurité, ces

24 missions relevaient du QG de la Défense territoriale de la police aussi

25 dans la mesure du possible évidemment. Il n'était pas possible, vu la

26 situation qui existait sur le terrain et même dans toute la Bosnie-

27 Herzégovine et dans la municipalité de Novi Grad, il était impossible de

28 mettre des garanties envers qui que ce soit, qu'il s'agisse de la

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1 population musulmane ou serbe, puisqu'il s'agissait d'une situation

2 complètement chaotique, où il n'était absolument pas possible de dire si on

3 allait pouvoir assurer la sécurité avec qui que ce soit. Personne ne

4 pouvait maintenir des affirmations pareilles, et la situation du point de

5 vue de la sécurité ne pouvait pas être garantie. Ces garanties, de toute

6 façon, ne pouvaient pas être émises. C'est ce que je voudrais vous

7 expliquer.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, pourquoi vous ne

9 répondez pas à la question ? On vous a demandé quelles étaient les mesures

10 que vous avez prises. M. Harmon vous fait état de la situation telle

11 qu'elle est présentée dans ce document, document qui n'a pas été vérifié

12 encore. Dans ce document, il est dit que des mesures ont été prises pour

13 assurer la protection des habitants des villages musulmans. Il y est dit

14 qu'il est plus sûr pour les Musulmans de déménager, de partir. Il vous a

15 demandé si vous avez pris des mesures semblables à l'égard de la population

16 serbe dans la région habitée par des Serbes. Est-ce que vous pourriez

17 répondre à cette question, s'il vous plaît.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, j'ai compris que vous m'avez posé une

19 question au sujet de la sécurité des villages serbes.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais quelles sont les mesures que

21 vous avez prises justement pour protéger cette population-là ? M. Harmon

22 vous a dit, en vue de ces opérations de guerre qui ont eu lieu dans les

23 bois et dans la vallée de la Japra, quelles sont les mesures que vous avez

24 prises, vous, la Défense territoriale, l'armée ou la police pour assurer la

25 sécurité des villages serbes et par rapport justement aux mesures. D'après

26 le contexte de ces documents, il s'agit des mesures qui ont été prises par

27 rapport aux villages musulmans. Donc, est-ce que vous avez pris des mesures

28 semblables, ou bien quelles sont les mesures que vous avez prises

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1 concernant la sécurité des villages serbes pour assurer la sécurité de la

2 population serbe de ces villages serbes ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas de mesures particulières

4 que nous aurions prises dans ce contexte-là. Je sais que le QG de la

5 Défense territoriale et la police, ils exécutaient leur mission habituelle.

6 C'était exactement le but de l'opération. Ces deux institutions devaient

7 s'occuper de l'ordre. Ils devaient faire régner l'ordre aussi bien sur le

8 territoire serbe que sur le territoire musulman. Je ne me souviens pas de

9 mesures particulières concernant les territoires serbes ou les territoires

10 habités par la population serbe. Je ne me souviens pas de l'existence des

11 mesures particulières concernant cette population-là. Cela je ne m'en

12 souviens pas à présent.

13 M. HARMON : [interprétation]

14 Q. Vous conviendrez qu'aucun villageois serbe de la vallée de la Japra n'a

15 demandé à quitter son village et de partir vers un endroit où ils seraient

16 plus en sécurité; est-ce que j'ai raison ?

17 R. Non. Vous devriez connaître la configuration du terrain dans la vallée

18 de la Japra. Vous devriez connaître aussi les endroits habités par les

19 Serbes et le pourcentage de la population.

20 Q. Monsieur Pasic, je vous ai posé une question précise. Est-ce que les

21 habitants des villages serbes de la vallée de la Japra ont demandé à

22 quitter la vallée pour aller dans un endroit plus sûr; oui ou non ?

23 R. Je ne saurais vous répondre par un oui ou par un non, parce

24 qu'effectivement, il y a eu aussi des Serbes qui sont partis. Mais ceci ne

25 correspond pas à un ordre. Ils partaient pour répondre à un sentiment

26 personnel de sécurité. C'est vrai qu'il est arrivé que les Serbes aussi

27 quittent leurs maisons.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, on ne vous a pas demandé

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1 s'il y a eu des familles serbes qui ont quitté leurs foyers; on vous a

2 demandé si on leur a demandé de quitter leurs villages pour aller vers un

3 autre endroit. C'était cela la question. Est-ce que vous n'avez jamais dit

4 aux villageois serbes : Quittez vos foyers. Partez ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je viens de dire qu'il y avait eu de tels

6 ordres, mais il est arrivé, certes, que des gens quittent leurs foyers

7 justement pour des raisons de sécurité.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, la réponse c'est non, on ne leur a

9 pas demandé cela. Evidemment, vous auriez pu ajouter ce que vous vouliez

10 ajouter, mais la réponse à la question, c'est qu'on ne leur a pas demandé

11 cela. Ensuite, vous auriez pu ajouter ce que vous vouliez ajouter, ce que

12 vous pensiez être pertinent. J'ai compris que vous ayez répondu, on ne leur

13 a jamais demandé cela, mais il y en a eu qui sont partis de leur propre

14 gré. On parle de familles serbes. Est-ce que je vous ai bien compris ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crains que non, parce que vous

16 m'interrompez souvent, et j'ai du mal à m'exprimer, à vous expliquer quelle

17 était la situation vraiment. Je crains que je vais omettre quelque chose,

18 des informations très importantes pour en arriver à la vérité vraie. Je

19 vous prie de ne pas me poser des questions qui exigent des réponses très

20 brèves, oui ou non, puisque c'est absolument impossible de répondre par de

21 telles réponses de cette façon-là.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, la seule chose que j'ai

23 fait, c'est de vous demander tout d'abord de répondre à la question, et

24 ensuite d'ajouter éventuellement quelque chose que vous auriez pu

25 considérer comme pertinent du point de vue du contexte puisque la question

26 qui vous a été posée était assez simple. On vous a demandé si vous n'avez

27 jamais demandé aux familles serbes, ou bien, si on n'a jamais demandé aux

28 familles serbes de quitter leurs foyers. Si je vous ai bien compris, on ne

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1 leur a pas demandé cela, mais il y en a eu tout de même qui sont partis,

2 qui ont quitté leurs foyers. Si je vous ai mal compris, corrigez-moi, s'il

3 vous plaît. Si je vous ai bien compris et si vous jugez utile d'ajouter

4 quelques informations, faites-le, s'il vous plaît, je vous en prie.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Je dois dire que ceci n'a

6 pas été fait dans ce contexte-là, mais il y a eu des informations diffusées

7 sur les ondes de la radio, dans les médias, en demandant à la population

8 serbe de ne pas participer aux opérations militaires. Il s'agissait pour

9 eux d'évaluer eux-mêmes la situation du point de vue de la sécurité,

10 puisque nous, au niveau de la municipalité, nous n'étions absolument pas en

11 mesure de donner des garanties ni aux Serbes ni aux Musulmans. Je dois dire

12 que ceci ne concernait pas les Serbes ou les Musulmans. Il s'agissait là

13 d'une information d'ordre général qui a été diffusée à la population de la

14 municipalité de Bosanski Novi et de Novi Grad. Nous n'avons pas adressé ces

15 informations aux Serbes ou aux Musulmans; nous avons tout simplement essayé

16 d'attirer l'attention de la population sur la situation telle qu'elle

17 prévalait. A chaque fois que l'on pensait que les conflits pourraient

18 dégénérer, qu'il fallait séparer ces populations, les éloigner les uns des

19 autres. Ceci concernait aussi bien les Serbes que les Musulmans. De telles

20 informations ont été diffusées sur les ondes de la radio. C'est vrai que ce

21 n'était pas toujours possible de les entendre, parce qu'il est arrivé qu'il

22 n'y ait pas des moyens de communication ou bien qu'il n'y ait pas

23 d'électricité. Mais ce sont les genres de choses dont je vous ai parlé, les

24 types d'informations qui ont été diffusées.

25 M. HARMON : [interprétation]

26 Q. Monsieur Pasic, nous allons parler des événements qui se sont

27 déroulés le lendemain de la diffusion de cette information. Là, je parle du

28 déplacement d'un grand nombre de Musulmans qui sont partis par trains, par

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1 autocars, et qui ont quitté votre municipalité.

2 Je pense qu'on parle de cela dans le document D115, qui se trouve à

3 la page 15 en anglais. Je vais vous lire ce document :

4 "Puisqu'il y a des tensions et des pressions effectuées sur la population

5 dans la région, et qu'il n'y ait absolument pas possible de leur remettre

6 des garanties, les mesures appropriées ont été prises pour déplacer la

7 population en direction de Banja Luka. Ceci a été fait le 8 juin."

8 Là, il s'agit d'un rapport de la cellule de Crise, le document D115.

9 On parle du déplacement des Musulmans effectué par des wagons ou les

10 trains ?

11 R. Oui, on parle de la façon dont cela a été fait, comment cela s'est

12 passé.

13 Q. Monsieur Pasic, je vous ai parlé des mesures tout à fait concrètes. On

14 parle du déplacement de la population musulmane, qui est partie en trains.

15 Vous avez répondu que cette mesure a été prise.

16 Je voudrais vous dire que les Juges de la Chambre ont entendu parler de ce

17 déplacement de la population et des circonstances dans lesquelles ceci

18 s'est déroulé, y compris des meurtres des Musulmans qui ont eu lieu à

19 l'endroit où on a forcé les Musulmans à monter dans ces trains, y compris

20 les meurtres qui ont eu lieu [comme interprété]. On a entendu parler des

21 intimidations, des tirs en l'air qui ont été tirés, des vols de biens

22 personnels. On a entendu dire qu'il n'y a pas eu de nourriture, qu'il n'y a

23 pas eu d'eau, qu'il n'y avait pas des endroits où on pourrait faire ses

24 besoins, que ces gens n'étaient pas protégés, qu'il n'y avait pas d'aide

25 médicale qui était proposée à ces gens qui étaient forcés à monter dans ces

26 trains et forcés de quitter leurs municipalités.

27 Est-ce que vous êtes au courant de cela ? Est-ce que vous savez dans

28 quelles circonstances exactement ces citoyens musulmans de Bosanski Novi

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1 ont été forcés à monter dans les trains et partir de la municipalité ?

2 R. Je n'ai pas de telles informations. C'est vrai qu'il y a eu des

3 conflits dans la vallée de la Japra, mais je n'ai jamais entendu dire qu'on

4 a forcé les gens à monter dans les trains puisque je n'étais pas là. Je

5 n'étais pas présent. Ce n'est qu'une raison pour laquelle je ne suis pas au

6 courant de cela. D'autres raisons, c'est que le QG de la Défense

7 territoriale m'a informé que ces gens n'ont pas été forcés à monter dans

8 les wagons. Au contraire, ils sont partis suite aux négociations avec M.

9 Barjaktarevic et Hamzagic. Ils ont demandé à partir comme cela parce qu'il

10 n'était pas possible de partir par la Croatie. Donc, ils sont partis vers

11 la Bosnie centrale. Ils n'étaient pas vraiment prêts à l'accepter, à

12 accepter cette possibilité-là parce qu'ils avaient peur d'être mobilisés

13 dans la Bosnie centrale. C'est la seule raison pour laquelle ils n'étaient

14 pas vraiment d'accord de partir vers la Bosnie centrale parce qu'ils

15 préféraient évidemment partir en Croatie.

16 Q. Je vous ai demandé si vous étiez au courant de cela. Vous avez répondu

17 à ma question. Vous nous avez dit plus tôt que vous n'étiez pas présent au

18 moment où les citoyens musulmans de votre municipalité ont été forcés à

19 monter dans les wagons. Est-ce que qui que ce soit d'autre de la cellule de

20 Crise a été présent à ce moment-là ? Là, à nouveau, je fais référence au

21 document D115. On parle d'un certain Mile Damjanovic, commandant du QG

22 municipal de la Défense territoriale; Dragomir Kutlija, le chef du poste de

23 sécurité publique; M. Latinovic, qui était chargé de la sécurité et de la

24 santé, la protection médicale; Dragomir Drazic, chargé de

25 l'approvisionnement en nourriture pour les réfugiés.

26 Est-ce que ces personnes ont été présentes au moment où les Musulmans

27 de votre communauté ont été forcés à monter dans ces trains ?

28 R. La façon dont vous m'avez posé la question, je devrais vous répondre

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1 par l'affirmative, mais je ne suis pas en mesure de le faire, puisque vous

2 m'avez énoncé toute une série de faits avec lesquels je ne saurais être

3 d'accord. Je pense que ceci ne correspond pas à la vérité. Les Musulmans, à

4 l'époque, n'ont pas été forcés à monter dans ce train, et ils n'ont pas été

5 délogés par la force par le QG de la cellule de Crise.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, M. Harmon voulait savoir

7 s'il y a eu des membres de la cellule de Crise qui ont été présents au

8 moment où on a fait monter ces gens dans le train.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais juste avant, il m'a dit quelque

10 chose, et je ne peux pas l'accepter.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends. Je comprends tout à fait.

12 M. Harmon continue à dire -- persiste à dire, qu'il s'agit d'un mouvement

13 forcé, enfin, qu'on les a forcés à monter dans le train. Et vous, vous

14 dites qu'ils sont partis de leur plein gré. Ce n'est pas la peine

15 d'insister là-dessus. Mais les Juges de la Chambre, et pas seulement M.

16 Harmon, les Juges de la Chambre aussi souhaitent savoir s'il y a eu des

17 membres de la cellule de Crise qui ont été présents au moment où ces gens

18 ont été placés dans ce train. - et je vous prie de bien vouloir faire

19 attention aux termes que je viens d'utiliser - au moment où on les a fait

20 monter dans le train ou sont entrés dans ce train.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais répondre à la question que vous venez

22 de me poser. En ce qui concerne les gens dont vous venez de me donner les

23 noms, je ne me souviens pas de la présence de ces gens. Je pense qu'on m'a

24 dit que le chef du QG de la TO, Radislav Sekulic, était présent. Je pense

25 que c'était lui qui a dirigé cette opération à Blagaj au moment où cela a

26 été fait. En ce qui concerne les autres noms, les noms des personnes que

27 vous venez de lire, je ne sais pas s'ils étaient présents à aucun moment de

28 cette journée-là. Je ne sais pas, tout simplement.

Page 19806

1 M. HARMON : [interprétation]

2 Q. Est-ce qu'ils vous ont fait un rapport quant à la façon dont tout cela

3 s'est déroulé, dont ces Musulmans étaient placés dans le train ? Est-ce

4 qu'ils vous ont dit que tout cela s'est déroulé dans l'ordre, sans

5 incidents violents, sans violence ? Est-ce que c'est l'information qu'on

6 vous a donnée ?

7 R. Non. Comme je vous ai indiqué tout à l'heure, et bien, c'est le

8 commandant du QG de la TO, M. Damjanovic, m'a dit que ces gens ont été

9 placés dans les wagons sans utilisation de la force -- enfin, sans qu'il y

10 ait eu recours à la force. Mais il ne m'a pas dit quelle était la situation

11 dans la partie supérieure du village. Il ne savait pas s'il y a eu des

12 échanges de tirs ou non. Il m'a dit qu'il était tout à fait possible qu'il

13 y ait eu des paramilitaires. Vous savez, c'est un village qui est assez

14 étendu. Il n'était pas en mesure de contrôler la situation dans tout le

15 village. Il m'a uniquement parlé de la situation à la guerre ferroviaire de

16 Blagaj. Il m'a raconté de quelle façon ces gens ont été placés dans les

17 wagons dans le train. C'était lui qui était responsable de ces opérations-

18 là au nom de la cellule de Crise.

19 Q. Monsieur Pasic, je veux revenir sur le document P529, à l'intercalaire

20 20. A l'avant-dernier paragraphe, quand on parle du déplacement de la -- ou

21 du départ de la population musulmane, il est dit que : "La cellule de Crise

22 et la Croix-Rouge sont prêtes à aider avec des véhicules, la nourriture et

23 avec tout autre besoin éventuel." Donc, dans ce document qui est tapé à la

24 machine, signé par Radomir Pasic, enfin le nom de Radomir Pasic est

25 dactylographié dans ce document, votre nom. Monsieur Pasic, quelles mesures

26 vous avez prises pour faire en sorte que les gens qui ont été placés dans

27 ce train et qui étaient en train de quitter la municipalité, donc des

28 citoyens musulmans de votre municipalité, qu'ils aient suffisamment de

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1 nourriture, d'eau et de médicaments, qu'on assure aussi les toilettes dans

2 le train, et cetera ?

3 R. Je vous ai déjà dit qu'il y a eu une décision prise par la cellule de

4 Crise, où il s'agissait de s'assurer pour que les gens montent dans les

5 wagons, au moins jusqu'à Doboj. Il s'agissait là d'un voyage de trois ou

6 quatre heures puisque normalement ils devaient sortir à Doboj. La Croix-

7 Rouge devait justement faire en sorte qu'il y ait un minimum de conditions

8 en ce qui concerne le pain, la nourriture, l'eau. Mais je ne sais pas qui

9 s'est acquitté de cette mission. Je ne me souviens pas des personnes qui

10 ont fait cela. On peut dire que ce volet-là était assuré. Il s'agissait de

11 leur donner quelques denrées élémentaires, de la nourriture, l'eau,

12 jusqu'au moment -- d'assurer cela jusqu'au moment où ils devaient

13 normalement passer sur le territoire, à l'époque, contrôlé par l'armée

14 musulmane et politiquement contrôlé par les Musulmans à partir de Doboj. Il

15 s'agit là d'une distance de

16 150 kilomètres qu'il s'agissait de traverser en train. Nous ne pensions pas

17 que ceci allait durer plus longtemps que cela.

18 Q. Monsieur Pasic, dans ce document il est dit que c'est la cellule de

19 Crise qui est prête à faire parvenir la nourriture et tout autres besoins.

20 Quelles sont les mesures concrètes que vous avez prises pour s'assurer à ce

21 que les personnes dans le train disposent de suffisamment de nourriture, et

22 qu'on puisse subvenir aux besoins essentiels de cette population civile

23 dans le train ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, vous avez dit que la

25 cellule de Crise est prête à aider avec la Croix-Rouge pour fournir des

26 véhicules, de l'eau, de la nourriture, enfin pour répondre aux besoins les

27 plus essentiels de cette population.

28 Est-ce que vous pourriez nous dire qui était vraiment en charge de

Page 19808

1 cela du point de vue opérationnel ? Qui devait faire cela ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne le volet

3 opérationnel, il y avait des personnes qui étaient chargées de cela, dans

4 la mesure où il y avait une boulangerie à l'époque qui fonctionnait. Il y

5 avait quelqu'un qui était sûrement en charge de cela pour faire venir le

6 pain, les boulangeries. Je pense que c'était quelqu'un de la cellule de

7 Crise, mais je ne suis pas sûr. Peut-être qu'il y avait aussi une personne

8 de la cellule de Crise. Je ne sais pas comment tout cela s'était déroulé du

9 point de vue opérationnel, mais je sais qu'on avait évoqué la possibilité

10 et la nécessité de le faire justement.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez discuté de la nécessité de

12 fournir du pain. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle est cette

13 organisation de la Croix-Rouge dont vous parlez ? Est-ce que c'était la

14 Croix-Rouge internationale, la Croix-Rouge locale, au niveau de la

15 république ? Quelle était cette organisation ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il s'agissait là de l'unité

17 municipale de la Croix-Rouge. Cela étant dit, je ne sais pas s'il y a eu

18 des représentants de la Croix-Rouge internationale. Je sais qu'ils ont pris

19 part à certaines opérations, mais je ne sais pas quelles opérations. Je ne

20 m'en souviens pas. C'est vrai qu'il existait à l'époque aussi une unité de

21 la Croix-Rouge internationale, mais je ne sais pas s'ils ont vraiment pris

22 part à cette opération. Je pense qu'ici on fait référence surtout à la

23 Croix-Rouge locale, puisqu'à l'époque les communications n'étaient pas très

24 bonnes. Je pense que c'était peu probable qu'on ait fait référence à

25 l'époque à la Croix-Rouge internationale. Je pense qu'il s'agissait là

26 surtout de la Croix-Rouge de l'unité locale de la Croix-Rouge.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette unité locale de la Croix-Rouge au

28 niveau municipal, et bien, est-ce qu'au sein de cette organisation il y

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1 avait des Croates, des Musulmans et des Serbes, ou bien est-ce qu'il

2 s'agissait là d'une organisation où il y avait un seul groupe ethnique ?

3 Là, je parle vraiment de la composition de l'organisation au moment où

4 l'opération a eu lieu.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il y a eu des Musulmans aussi. Je

6 pense qu'il y avait une femme, mais je ne me souviens pas de son nom, à

7 présent.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je vous ai bien compris ?

9 Est-ce que vous venez de dire, que d'après votre meilleur souvenir, il y

10 avait une personne, une femme musulmane qui travaillait au sein de la

11 Croix-Rouge et qui a participé à l'opération menée par la Croix-Rouge à

12 l'époque, et vous ne vous souvenez pas du nom, du prénom de cette personne-

13 là ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne les autres besoins --

16 mais je vais vous poser une autre question tout d'abord. En ce qui concerne

17 les véhicules, l'aide en véhicules, est-ce que vous savez si la cellule de

18 Crise, est-ce que vous vous souvenez si la cellule de Crise a fait quoi que

19 ce soit dans ce sens ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne les véhicules, je pense que

21 rien n'a été fait. Ces gens sont partis en train. Ils ont pris le train,

22 puisqu'à l'époque, c'était très difficile d'emprunter les routes. De toute

23 façon, il n'y avait pas assez d'essence. On manquait de tout à l'époque.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui s'est occupé du transport par le

25 train ? Est-ce qu'il y a eu un train, des trains qui ont attendu ces gens

26 pour qu'ils partent ? Qui a préparé les trains ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, les trains étaient la propriété des

28 chemins de fer de la République serbe de Bosnie-Herzégovine. Je ne sais pas

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1 qui a fait cela exactement. C'est probablement quelqu'un de la cellule de

2 Crise chargé de cela qui entrait en contact avec les chemins de fer pour

3 acheminer le train vers Blagaj. Et c'est là que les gens sont entrés dans

4 le train, sont montés dans le train. Je ne sais pas qui s'est occupé de ce

5 volet-là. C'est quelqu'un du chemin de fer, j'imagine, et quelqu'un qui

6 était responsable de cela au sein de la cellule de Crise. Il y a eu des

7 négociations pour faire en sorte qu'il y ait train. On sait que c'était la

8 façon la plus sûre pour ces gens-là de partir.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit à deux reprises que vous

10 pensiez, mais n'importe qui peut faire des suppositions. Est-ce que cela

11 veut dire que vous ne vous souvenez plus du nom, ou bien est-ce que vous ne

12 savez pas si c'était vraiment la cellule de Crise ? Pourquoi vous faites

13 des suppositions ? Qu'est-ce que vous dites exactement ? Qu'est-ce que vous

14 pensez ? Quelle était la situation exactement ? Qu'est-ce qui s'est passé

15 exactement ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout à fait logique de penser, de

17 supposer que c'est quelqu'un de la Cellule de Crise qui a fait ces

18 négociations. Ce n'est pas moi; cela, je le sais. Quelqu'un de la cellule

19 de Crise a dû discuter avec les gens des chemins de fer pour faire en sorte

20 qu'il y ait un train pour faire partir ces gens-là dans la mesure des

21 circonstances qui prévalaient à l'époque.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Harmon.

23 M. HARMON : [interprétation] Est-ce le moment opportun pour faire un pause.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement.

25 Monsieur Pasic, on va vous fournir le document que nous avons mentionné

26 tout à l'heure. Il y a un certain nombre de phrases dans ce texte qui ont

27 été surlignées par le Procureur. M. Harmon considère qu'il est nécessaire

28 que vous nous fassiez part de vos réflexions, de vos commentaires par

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1 rapport à ces phrases surlignées, et ceci relève de la question du contrôle

2 militaire. Je vais vous demander d'examiner ces documents pendant la pause,

3 et s'il y a quoi que ce soit que vous souhaitez ajouter par rapport aux

4 réponses que vous avez déjà fournies - puisque vous avez effectivement

5 donné quelques explications déjà, ou vous pensez -- concernant le rapport

6 de

7 M. Talic, et bien, vous êtes tout à fait libre à le faire, et vous allez

8 pouvoir le faire après la pause.

9 En même temps, je pense que M. Josse attend. Il s'agissait du document du

10 14 juillet -- juin, n'est-ce pas ? Le document qui a un nom, mais le nom

11 est écrit clairement mais la signature n'est pas très claire.

12 M. JOSSE : [interprétation] Il s'agit du document qui figure à

13 l'intercalaire 20, P1030. Je vais parler aussi avec mon collègue de

14 l'Accusation.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre une pause

16 jusqu'à 11 heures 05.

17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.

18 --- L'audience est reprise à 11 heures 17.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, pour ce qui est des

20 documents, est-ce que vous pouvez nous donner des nouvelles ?

21 M. HARMON : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Le

22 premier document est un document qui se trouve à l'intercalaire 20. C'est

23 l'information datée du 8 juin. J'ai une meilleure copie, Monsieur le

24 Président, Messieurs les Juges. Je vais montrer cette copie à M. Pasic. Il

25 semblerait que quelqu'un aurait signé à sa place. Je vais donc lui montrer

26 ce document. J'aurais besoin de le revoir, mais je vais lui montrer le

27 document, et je vais m'assurer qu'un meilleur exemplaire soit disponible à

28 une étape ultérieure.

Page 19812

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien.

2 M. HARMON : [interprétation]

3 Q. Monsieur Pasic, il s'agit d'un document -- information datée du 8 juin

4 --

5 M. JOSSE : [interprétation] Pourrait-on examiner le document avant qu'il ne

6 le place, c'est-à-dire, M. Pasic pourrait-il examiner le document avant

7 qu'il ne le place sur le rétroprojecteur.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous vouliez le voir vous-même ?

9 M. JOSSE : [interprétation] Non, non, non. J'ai déjà vu le document. Mais

10 je voulais que le témoin prenne connaissance du document avant qu'il le

11 place sur le rétroprojecteur.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

13 M. HARMON : [interprétation] Il semblerait qu'à côté du nom, nous pouvons

14 retrouver le mot "za," qui veut dire "pour", à la place de --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous essayons de voir sur le

16 rétroprojecteur, mais --

17 M. HARMON : [interprétation] Dès que le témoin aura terminé d'examiner le

18 document, nous pourrions peut-être demander au témoin de placer le document

19 sur le rétroprojecteur afin que vous puissiez en prendre connaissance,

20 Messieurs les Juges. Si vous voulez, je vais également pouvoir vous le

21 remettre, Messieurs les Juges. Cela ne fonctionne pas. Il semblerait --

22 Permettez-moi de poser quelques questions à M. Pasic avant de lui poser un

23 certain nombre de questions.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si nous --

25 M. HARMON : [interprétation]

26 Q. Monsieur Pasic, le document qui se trouve sous vos yeux est un document

27 qui se trouve à l'intercalaire P20. Au bas de la page, nous pouvons voir

28 votre nom, et à coté de la signature, on peut voir le mot "za," "pour," au

Page 19813

1 coin inférieur gauche. Ensuite, nous pouvons lire une signature. On voit

2 une signature qui est lisible. Pouvez-vous identifier cette signature,

3 Monsieur Pasic ?

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourrait-on avoir le document sur le

5 rétroprojecteur afin de pouvoir suivre. Monsieur Pasic, veuillez, je vous

6 prie, remettre le document à

7 Mme l'Huissière. Vous allez néanmoins pouvoir examiner l'original, mais

8 nous pourrions le suivre avec vous sur le rétroprojecteur.

9 M. HARMON : [interprétation] Ce n'est pas tout à fait clair, Monsieur le

10 Président, sur le rétroprojecteur. Pourrais-je remettre peut-être les

11 exemplaires aux Juges de la Chambre avec votre permission ?

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est peut-être mieux, car nous sommes

13 en train d'essayer de voir. Mais malheureusement, nous ne voyons pas très

14 bien.

15 M. HARMON : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, remettre ce

16 document aux Juges de la Chambre. Merci.

17 Madame l'Huissière, veuillez, je vous prie, retourner le document au

18 témoin. Par la suite, je vais le reprendre. Je vais m'assurer que les Juges

19 de la Chambre disposent d'une meilleure copie de ce document.

20 Q. Maintenant, Monsieur Pasic, est-ce que vous pouvez reconnaître la

21 signature qui se trouve au coin inférieur droit ?

22 R. Malheureusement, il s'agit d'une copie beaucoup trop mauvaise. Je

23 n'arrive vraiment pas à reconnaître la signature. Je peux seulement

24 supposer, je le répète, qu'une personne de la cellule de Crise ait signé à

25 ma place, mais je ne sais pas qui.

26 Q. Est-ce que vous pouvez lire la signature ? Est-ce qu'elle est lisible ?

27 R. Si je pouvais la lire, je pourrais vous dire de qui elle s'agit, mais

28 je n'arrive vraiment pas à retrouver les lettres, la relire justement.

Page 19814

1 C'est ce que j'essayais de dire. Il arrivait parfois que l'on signe à ma

2 place. C'est ce que j'essayais d'expliquer.

3 Q. Très bien. Merci, Monsieur Pasic. Lorsqu'un document est signé à votre

4 place en tant que président de la cellule de Crise, est-ce que l'on vous

5 remettait un exemplaire de ce document normalement, dans le cadre de la

6 façon dont les choses se déroulaient ?

7 R. C'était habituel, mais les choses se déroulaient de façon vertigineuse.

8 Les choses se déroulaient tellement rapidement qu'il arrivait des fois que

9 l'on omette de me remettre un document. Il est tout à fait nécessaire que

10 je voie ce document. Ils étaient censés me les remettre, mais il arrivait

11 souvent de ne pas prendre connaissance de tous les documents qui soient

12 signés à ma place.

13 Q. Oui, mais il s'agissait de quelque chose d'assez important. C'est la

14 population musulmane qui devait être déplacée du village de Blagaj. Donc,

15 il s'agit d'un événement important. Ce document qui était signé à votre

16 place, n'auriez-vous pas dû le voir ?

17 R. Cette façon de déplacer les Musulmans, je savais qu'on avait essayé de

18 déplacer les Musulmans de cette façon-là. Je l'ai déjà affirmé. Je n'avais

19 pas tous les détails pour ce qui est de la façon dont l'exécution a été

20 faite. Je sais que les Musulmans se déplaçaient par trains, pour ce qui est

21 des habitants de Blagaj. Mais je répète de nouveau, pour certaines choses,

22 comme certains faits faits par la cellule de Crise, pendant une journée, on

23 pouvait avoir deux ou trois conclusions d'apportées. Des décisions étaient

24 adoptées peut-être deux ou trois fois par jour. Il arrivait de ne pas

25 toujours voir ces documents. Si j'étais absent, par exemple, il m'aurait

26 été impossible de voir un document, de prendre connaissance d'un document.

27 Q. Très bien. Comme je l'ai déjà dit, je vais m'assurer que les Juges de

28 la Chambre puissent être saisis d'un meilleur exemplaire.

Page 19815

1 Maintenant, passons à autre chose.

2 Etant donné que nous avons parlé de la pièce de la Défense 115, ici,

3 il y a au moins deux références aux pages 9 et 10 en langue anglaise, qui

4 sont relatives aux discussions qui ont été faites concernant la population

5 de Blagaj, étant donné qu'on ait discuté du problème, qu'on a essayé de

6 trouver une solution à ce problème. Nous pourrons voir, par exemple, à la

7 page 10, que l'on fait référence au fait qu'on en ait déjà parlé

8 auparavant. Le gouvernement de la RAK, le gouvernement de la République

9 serbe de Bosnie-Herzégovine, a essayé de prendre une position décisive

10 concernant la population musulmane. Donc, il est tout à fait clair, il

11 découle clairement de ce rapport de la cellule de Crise, qu'un dialogue

12 avait été entamé entre les représentants de la cellule de Crise de votre

13 municipalité et les représentants à un niveau supérieur de la RAK et à un

14 niveau supérieur également au sein de la République serbe. Les dirigeants

15 de la Republika Srpska, ils étaient tout à fait au courant de la situation

16 dans votre municipalité. Après que les Musulmans aient quitté votre

17 municipalité par trains, est-ce que vous et les autres membres de la

18 cellule de Crise, est-ce que vous avez informé les membres, les dirigeants

19 serbes de Bosnie à Pale et à Sarajevo concernant le sort qui avait été

20 réservé aux Musulmans ?

21 R. Vous avez posé une question à plusieurs volets. Je vais répondre

22 d'abord à la dernière question -- au dernier volet de votre question. Je ne

23 me souviens pas du tout si nous pouvions entrer en contact avec les

24 dirigeants serbes de Pale. Je ne sais pas non plus à quel moment ils aient

25 reçu cette information. Je ne sais pas si les dirigeants de la Republika

26 Srpska et à quel moment ils aient été informés de cette situation, mais je

27 crois que ce n'était pas très longtemps après l'événement en question. Je

28 pense que ce n'était pas possible de les informer immédiatement en raison

Page 19816

1 des questions techniques.

2 Q. Monsieur Pasic, d'après ce document, il apparaît qu'il était tout à

3 fait clair que les membres de votre municipalité étaient en mesure d'avoir

4 des pourparlers avec les représentants du gouvernement serbe du Republika

5 Srpska et de la Région autonome de la Krajina pour ce qui est de la

6 situation de Blagaj puisqu'on a fait référence en ce rapport. On parle de

7 la cellule de Crise. Donc, il y a clairement eu des communications, des

8 échanges entre ces niveaux supérieurs. Lorsque vous nous dites que les

9 communications ne se faisaient pas, qu'il n'y avait pas de communications,

10 Monsieur Pasic, selon moi, nous pouvons voir qu'un certain nombre de

11 communications se faisaient entre vous et les dirigeants des échelons

12 supérieurs.

13 Je vous demanderais de vous concentrer bien clairement et de répondre

14 clairement à ma question. A quel moment avez-vous informé les dirigeants,

15 les Serbes de Bosnie au niveau républicain ? A quel moment les avez-vous

16 informés du sort qui était réservé aux Musulmans de Blagaj ? Lorsque je

17 parle de "vous," je fais référence à vous personnellement et aux membres de

18 la cellule de Crise.

19 R. Les communications se faisaient, mais elles n'étaient pas très bonnes.

20 C'est justement cela qui m'avait beaucoup bouleversé en tant qu'homme. Je

21 ne sais pas à quel moment la cellule de Crise a pris connaissance de cet

22 événement. Je ne sais pas, en fait, à quel moment un membre de la cellule

23 de Crise ait informé les dirigeants de Pale. Je ne le sais pas quand, mais

24 cette information a sans doute été d'abord envoyée à quelqu'un à Banja

25 Luka. Mais je ne sais pas à quel moment non plus.

26 Q. A qui est-ce que cette information a été envoyée à Banja Luka ? Que

27 pouvez-vous nous dire concernant le déplacement des Musulmans de votre

28 communauté dans le sens de -- à qui est-ce que vous l'avez dit ? Qui avez-

Page 19817

1 vous informé à Banja Luka de ce déplacement, de cet événement ?

2 R. Je n'ai pas dit que c'était moi qui les avais informés, mais je présume

3 que quelqu'un ait dû recevoir cette information. Je ne sais pas qui.

4 Toutefois, je ne sais pas s'il s'agissait de Kupresanin ou de quelqu'un

5 d'autre. Je n'oserais pas maintenant à mettre des conjectures. Je ne

6 pourrais pas affirmer à ce jour d'aujourd'hui. Je ne peux pas l'affirmer

7 avec certitude. Je ne peux pas vous donner de nom. C'était sans doute

8 quelqu'un qui avait reçu cette information. Quelqu'un a informé quelqu'un,

9 mais je ne sais pas qui.

10 Q. Quelqu'un a été informé. Est-ce que vous savez qui a informé cette

11 personne ? Est-ce que c'était vous personnellement ? Quelqu'un de la

12 cellule de Crise ?

13 R. Je viens de le dire. Je ne sais vraiment pas qui et quand a informé qui

14 et quand. Mais quelqu'un de la cellule de Crise a probablement informé

15 quelqu'un. Je répète de nouveau qu'il était tout à fait impossible

16 d'informer toutes les personnes de tous les détails car vous avez des

17 journées composées de 24 heures. Il arrive tellement de choses d'une minute

18 à l'autre. Il peut arriver plein d'événements qui se déroulent

19 immédiatement. Donc, je ne sais pas à qui cette information avait été

20 transmise. Je ne peux pas vous dire qui transportait les informations à

21 qui. Voilà.

22 Q. Si je vous demandais, Monsieur Pasic, de nous dire si vous ou d'autres

23 membres de la cellule de Crise, avez-vous informé une quiconque personne au

24 niveau républicain concernant le déplacement des Musulmans de Blagaj, vous

25 ne pourriez pas nous le dire ?

26 R. Il ne s'agit pas d'un déplacement de Musulmans de Blagaj. J'ai déjà

27 répondu à votre question. J'ai déjà dit que je ne me souvenais pas à quel

28 moment ils en avaient été informés. Comme j'ai déjà dit, les

Page 19818

1 communications, le système n'était pas très bon, n'était pas très fréquent.

2 Justement, j'étais particulièrement touché, bouleversé par cette chose, car

3 les communications ne se faisaient pas de façon régulière. Il y avait

4 énormément de personnes, d'intervenants, de personnes impliquées, qui ne

5 savaient pas ce qui se passait sur le terrain. Moi-même, je n'arrivais pas

6 toujours à savoir ce qui se passait dans la vallée de Japra à tous moments,

7 et avoir une idée précise des événements qui se déroulaient à cet endroit

8 et dans le secteur.

9 Q. Monsieur Pasic, ces wagons, à bord desquels sont montés ces Musulmans,

10 se trouvaient à quelle distance de votre bureau ?

11 R. De 10 à 11 kilomètres de nos bureaux.

12 Q. Fort bien. Maintenant, Monsieur Pasic, dites-nous, après le déplacement

13 des Musulmans à bord des wagons, est-il juste de dire que la majorité de la

14 population musulmane de la municipalité de Bosanski Novi n'y était plus,

15 n'était plus là, n'était plus présente à Bosanski Novi ?

16 R. Je n'ai pas tout à fait bien saisi votre question. Pourriez-vous la

17 répéter, je vous prie.

18 Q. Certainement. A la suite des événements qui sont survenus, dont nous

19 parlions, donc le déplacement des Musulmans à bord de ces trains, trains

20 qui sont partis de la municipalité de Bosanski Novi, la majorité de la

21 population musulmane a été déplacée, ne s'y trouvait plus, elle n'y était

22 plus. Donc, la majorité de la population musulmane de votre municipalité

23 avait été déplacée.

24 R. Ils n'ont pas été déplacés ni en majorité ni en minorité. Ce groupe de

25 personnes qui étaient parties - je n'ai pas de précision à vous donner

26 concernant le nombre - mais si nous parlons de la population musulmane de

27 la municipalité de Novi Grad, il s'agissait d'un nombre très petit de

28 personnes qui avaient quitté la municipalité de Novi Grad. Je le répète

Page 19819

1 dans la municipalité de Novi Grad, il y avait environ 14 000 Musulmans, de

2 14 000 à 14 500 Musulmans. C'était une partie infime qui se déplaçait, qui

3 est partie de 2 à 3 000 seulement.

4 Q. Parlons des 750 hommes qui sont revenus à Bosanski Novi. Je crois

5 qu'ils sont revenus le 11 juin 1992. Il s'agissait d'un groupe d'hommes qui

6 se trouvaient à bord de ces trains et qui sont retournés à Bosanski Novi.

7 Vous souvenez-vous de cela, Monsieur Pasic ?

8 R. Oui, tout à fait. Je me souviens que la population masculine, mâle, qui

9 se trouvait à bord de ces wagons et qui sont revenus - je ne sais pas s'il

10 s'agissait de ce chiffre-là, s'il s'agissait effectivement de 750

11 personnes. Je crois qu'il y avait moins d'hommes que cela. Je ne peux pas

12 vous donner le chiffre exact. Toutefois, je sais qu'ils sont retournés

13 depuis Doboj, et ils sont retournés à Bosanski Novi et à Novi Grad. Ils ont

14 été renvoyés.

15 Q. Monsieur Pasic, je présume que vous étiez étonnés vous et les autres

16 membres de la cellule de Crise en les revoyant de retour. Maintenant,

17 Monsieur Pasic, ces hommes sont retournés dans votre municipalité. Qui

18 avez-vous contacté à la suite de cela pour savoir la raison de leur

19 retour ? Lorsque je parle, vous, Monsieur Pasic, je parle de vous ou des

20 membres de la cellule de Crise.

21 R. Je l'ai déjà mentionné préalablement. Nous étions étonnés. C'était tout

22 à fait inattendu. Nous n'avions pas prévu ce genre d'événement. Je crois

23 que l'information avait été reçue par câble, par train. Ce sont des lignes

24 de transmission qui arrivaient à nous transmettre ces informations. Le

25 train était resté derrière Maglaj en direction de Doboj, et ces hommes --

26 Q. Je n'ai pas besoin d'obtenir tous ces détails, Monsieur Pasic. Je

27 voudrais savoir, lorsque les hommes sont retournés dans la municipalité de

28 Bosanski Novi, qui avez-vous informé au sein de la RAK ? Quels sont les

Page 19820

1 échelons supérieurs ? Qui sont les dirigeants au niveau républicain, au

2 niveau du gouvernement, que vous avez contactés pour les informer, si vous

3 avez contactez qui que ce soit pour parler du retour de ces hommes ?

4 R. Oui, bien voilà, justement, je voulais vous le dire. Je l'ai déjà dit

5 précédemment que nous étions livrés à nous-mêmes. Nous n'avions personne à

6 qui nous pouvions nous informer, avec qui nous pouvions nous entretenir. Il

7 nous fallait tout seul prendre des décisions, et les bonnes décisions. Nous

8 étions en position dans laquelle nous n'avions -- nous ne savions plus quoi

9 faire. Il nous fallait décider de ce que nous allions faire de ces hommes

10 qui étaient revenus.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, je vous interromps.

12 Pourquoi ne répondez-vous pas aux questions de façon simple et directe.

13 Est-ce que vous avez contacté quelqu'un ? Est-ce que vous avez contacté les

14 dirigeants, les échelons supérieurs soit vous ou un autre membre de la

15 cellule de Crise ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que non, et je crois qu'au sein de la

17 cellule de Crise, personne n'ait essayé de contacter les échelons

18 supérieurs non plus.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela répond à la question. Je vous

20 remercie. Veuillez poursuivre, je vous en prie, Monsieur Harmon.

21 M. HARMON : [interprétation]

22 Q. Monsieur Pasic, vous nous avez dit, que personnellement, vous ne vous

23 êtes jamais rendu au stade pour voir où se trouvaient ces hommes. Il

24 s'agissait du stade Mlakve.

25 Les Juges de la Chambre ont entendu des témoins en l'espèce disant que les

26 détenus n'avaient pas suffisamment d'aliments. Ils n'avaient pas

27 suffisamment non plus de couvertures. Il n'y avait que deux toilettes. Il

28 n'y avait pas de savon. Il n'y avait pas d'attention médicale. Les détenus

Page 19821

1 musulmans se faisaient passer à tabac de façon aléatoire. Ils étaient

2 soumis à des humiliations. Les Juges de cette Chambre ont entendu des

3 témoins disant que certains détenus avaient fait des signaux, des SOS,

4 avaient essayé d'attirer l'attention des soldats de la FORPRONU en

5 signalant des SOS pour leur demander de leur venir en aide. Certaines

6 personnes avaient perdu

7 20 kilos pendant leur détention sur le stade.

8 Maintenant j'aimerais savoir, qu'est-ce que vous avez à nous dire ?

9 M. JOSSE : [interprétation] J'aimerais savoir pourquoi cette question

10 inclut un si grand nombre de détails. Mon éminent confrère aurait pu

11 simplement demander, pourquoi -- enfin, il aurait pu poser une question

12 beaucoup plus simple. Si mon éminent confrère voulait rafraîchir la mémoire

13 du témoin en lui soumettant tous ces détails, il aurait fallu le faire de

14 cette façon-là.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement, Monsieur Harmon, vous

16 pourriez peut-être d'abord présenter au témoin ces éléments, lui demander

17 d'abord s'il avait conscience de ce qui se passait. Ensuite, il faudrait

18 expliquer au témoin ce que vous voulez poser comme question en faisant

19 cette espèce de préambule afin qu'il n'y ait pas de malentendu. M. Harmon

20 essayait de dépeindre la situation.

21 M. HARMON : [interprétation]

22 Q. Monsieur Pasic, est-ce que vous étiez au courant de ce qui se passait.

23 J'ai déjà décrit les circonstances dans lesquelles se sont trouvés ces

24 détenus musulmans sur le stade ? Est-ce que vous saviez que les

25 circonstances étaient telles ?

26 R. Je n'avais pas connaissance de ces circonstances. Je crois que ces

27 circonstances n'existaient pas non plus. Je crois que le traitement n'était

28 pas tel. Je ne serais pas d'accord avec votre question précédente, et je

Page 19822

1 n'ai jamais reçu d'information s'agissant les mauvais traitements de ces

2 détenus.

3 Q. Quelles sont les démarches, quelles sont les mesures concrètes que vous

4 avez prises vous-même ou d'autres membres de la cellule de Crise pour

5 s'assurer que ces détenus soient bien traités, les hommes qui étaient

6 détenus sur le stade ? Est-ce que vous avez pris des mesures nécessaires

7 pour vous assurer de leur bien-être ?

8 R. S'agissant du bien-être de ces hommes, justement, j'ai déjà déclaré

9 auparavant pour des raisons de sécurité, ils avaient été cantonnés sur ce

10 stade, car il y avait un danger des formations paramilitaires, un danger

11 pour eux, car s'ils étaient retournés dans leur demeures, ils auraient

12 sûrement eu des problèmes avec les formations paramilitaires.

13 Troisièmement, c'était pour leur propre bien qu'ils étaient placés sur ce

14 stade. On m'avait informé, on m'a informé que ces derniers recevaient des

15 repas des casernes où se trouvaient les soldats, qu'ils mangeaient la même

16 nourriture, qu'ils avaient les mêmes repas que -- dont bénéficiaient les

17 soldats. Il était tout à fait également acceptable que les membres de la

18 famille de ces derniers puissent leur apporter des repas. Il y avait

19 également des Serbes qui étaient amis avec ces Musulmans. Donc, ils avaient

20 le droit de leur apporter des denrées alimentaires, des vêtements et tout

21 ce dont ils avaient besoin. Ensuite, le stade Mlakve se trouve en direction

22 de Krupa sur Una. Et objectivement et techniquement, il aurait été tout à

23 fait impossible de faire des messages SOS de l'autre côté de la Una, de la

24 rivière Una. Il aurait été impossible qu'une quelconque personne voit ces

25 SOS. Ce sont deux choses qui sont tout à fait non vraies. Vous êtes mal

26 informé, et on vous a mal informé.

27 Q. Je voulais savoir, Monsieur Pasic, quelles sont les mesures concrètes

28 que vous avez entreprises pour vous assurer que ces hommes détenus sur le

Page 19823

1 stade soient bien traités. Voilà ma question. C'est une question fort

2 simple.

3 R. Je ne sais pas si je n'ai pas bien répondu à votre question; j'avais

4 l'impression d'avoir répondu à votre question. Si vous voulez, je peux

5 préciser.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, vous avez dit

7 qu'on s'est assuré que tout ce dont ces hommes avaient besoin leur serait -

8 - enfin que tous les soins leur seraient apportés, mais vous n'avez pas de

9 détails opérationnels; est-ce que j'ai bien compris votre réponse ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. En fait, vous savez, cela n'avait pas été

11 planifié à l'avance, si vous voulez, il n' y avait pas eu de préparations,

12 de préparatifs faits à l'avance, car c'était quelque chose de tout à fait

13 inattendu, de nouveau.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je ne parle pas de préparatifs.

15 D'abord, j'essaie simplement de résumer votre propre témoignage. Si j'ai

16 bien compris, vous n'avez pas de connaissance personnelle, vous ne savez

17 pas si on a commandé de la nourriture, du pain, du savon, des vêtements, et

18 cetera. Mais on vous a informé que tout était sous contrôle, et qu'on

19 s'assurera du bien-être de ces personnes. Est-ce que c'est bien ce que vous

20 nous avez dit ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Voilà, vous avez bien saisi ce que j'ai

22 bien voulu dire. Voilà. D'ailleurs, je l'ai dit.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Poursuivez, Monsieur Harmon.

24 M. HARMON : [interprétation]

25 Q. Monsieur Pasic, à l'époque, quand ces hommes étaient détenus sur le

26 stade de Mlakva, Mlakve, tout ce secteur sous lequel se trouvait le 1er

27 Corps de la Krajina, y compris Bosanski Novi, était sous le contrôle

28 militaire du 1er Corps, n'est-ce pas ? Est-ce que c'est exact ?

Page 19824

1 R. Non, ce n'est pas exact.

2 M. HARMON : [interprétation] Si vous le permettez, pour la pièce suivante,

3 je souhaiterais que l'on passe à l'intercalaire 23, c'est-à-dire, la pièce

4 à conviction de l'Accusation, 193. J'ai surligné une partie de cette pièce,

5 et a été montrée au cours de la suspension d'audience à M. Pasic. Je

6 voudrais me référer -- vous référer, Messieurs les Juges, à ces passages

7 surlignés.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, avez-vous eu l'occasion

9 de lire les documents pertinents et plus particulièrement les parties qui

10 ont été surlignées ?

11 LE TÉMOIN : [Le témoin opine]

12 M. HARMON : [interprétation] Ce document, le P193 est un rapport secret

13 daté du 14 juin 1992, émanant du commandant militaire du 1er Corps de la

14 Krajina, et présenté au Grand état-major de l'armée de la République de

15 Serbie, et c'est signé par la général de division Momir Talic. J'appelle

16 l'attention des Juges sur le

17 premier paragraphe complet, 5 lignes à partir du bas où on lit :

18 "L'ensemble de la zone de responsabilité est pleinement sous le contrôle de

19 l'armée."

20 Je voudrais également appeler votre attention -- enfin, permettez-moi de

21 demander au témoin plutôt, Témoin Pasic, est-ce que vous êtes en désaccord

22 avec le général Talic quant à son évaluation, telle qu'il l'a adressée au

23 Grand état-major de la VRS ?

24 R. Oui, c'est bien cela. Je ne suis pas d'accord. En ce qui concerne la

25 municipalité de Novi Grad, je ne peux pas parler pour les autres. Je ne

26 suis pas bien placé pour le faire.

27 Q. En fait, ces personnes qui ont été gardées dans un stade n'étaient pas

28 autorisées à retourner à leurs villages, n'est-ce pas, c'est bien cela,

Page 19825

1 c'est exact, Monsieur Pasic ?

2 R. Non, ce n'est pas exact. J'ai déjà parlé de cet aspect. J'ai dit que

3 pour des raisons de sécurité on les avaient mis là, et qu'il y avait ce

4 danger que leurs vies soient mises en danger par des paramilitaires et non

5 pas par l'état-major de la Défense territoriale, mais par ces petits

6 groupes de personnes qui échappaient à tout contrôle, et qui ne pouvaient

7 pas être contrôlées parce c'était un secteur très vaste, et sur lesquelles

8 nous ne pouvions pas assurer leur sécurité. J'ai déjà dit cela cinq ou dix

9 fois.

10 Q. Ma question était de savoir s'ils n'étaient pas autorisés à retourner à

11 leurs villages, n'est-ce pas, Monsieur Pasic ?

12 R. Ce n'est pas ainsi.

13 Q. Est-ce qu'ils étaient autorisés à retourner à leurs villages, Monsieur

14 Pasic ?

15 R. Je ne sais pas si vous m'avez compris. Je vous ai dit les raisons pour

16 lesquelles quand ils sont arrivés de Doboj, pour quelles raisons on les a

17 installés dans le stade. Je répète donc que ce n'était pas un question de

18 permettre ou de ne pas permettre aux gens d'aller à leurs villages; c'était

19 un cas de situation de sécurité et de savoir dans quelle mesure il était

20 sûr pour ces personnes de retourner chez eux ou ailleurs.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, question très claire en

22 ce qui me concerne. Qui décidait de prendre ou non le risque de se

23 soumettre à des violences de ces groupes paramilitaires ? Est-ce que vous

24 avez dit : Rentrez chez vous si vous le voulez, mais soyez conscients du

25 fait que c'est dangereux là-bas, ou est-ce que vous avez dit : Pour des

26 raisons de sécurité, nous ne pouvons pas vous autoriser à rentrer chez vous

27 parce que c'est trop dangereux là-bas ? Lequel des deux ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai fait ni l'une ni l'autre de ces

Page 19826

1 choses. La cellule de Crise, je crois, ainsi que le centre sécurité

2 publique, c'est-à-dire, la police et l'état-major de la Défense

3 territoriale ont eu à faire face à une situation dans laquelle il fallait

4 prendre des décisions. Mais quoi faire ? Ils ne savaient pas eux-mêmes. On

5 a cherché une solution. La solution qui a paru la plus appropriée et la

6 plus acceptable, à ce stade, à ce moment-là, dans le temps, était la moins

7 douloureuse, la moins pénible. Alors, je ne sais pas qui a fait la

8 proposition. En tous les cas, la proposition a été accueillie. C'était très

9 dangereux pour ces personnes de retourner chez eux, parce que la Défense

10 territoriale ne pouvait pas leur fournir de sécurité, de garanties. La

11 police n'était pas non plus en mesure de leur donner des garanties. Donc,

12 c'était pour ces raisons que ni -- aucune des deux questions telles que

13 vous les avez formulées n'a été posées. La seule question qui a été posée,

14 était de savoir comment fournir des moyens de sécurité pour ces personnes.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, s'ils souhaitaient

16 rentrer à leurs villages, est-ce qu'ils étaient autorisés à y aller ? Oui

17 ou non.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas de renseignement à ce sujet parce

19 que ces personnes voulaient déjà aller à Doboj. Je n'avais pas de

20 renseignement sur le point de savoir s'ils voulaient retourner dans leurs

21 propres maisons ou pas, et ils ne savaient pas s'ils allaient ou non.

22 C'était quelque chose qu'ils ne pouvaient pas prévoir, tout comme nous ne

23 pouvions pas prévoir nous-mêmes. Donc, c'est quelque chose que ces

24 personnes ne savaient pas à l'époque, et nous ne savions non plus ce qui

25 allait se passer.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là encore, qu'ils aient pu prévoir oui

27 ou non, est-ce que oui ou non quelqu'un aurait pu leur dire -- ils auraient

28 pu avoir des idées concernant certains risques. Maintenant, s'il vous

Page 19827

1 plaît, donnez-nous une réponse claire, à moins que vous ne nous disiez : Je

2 ne sais pas. Alors, bien sûr, vous ne savez pas. Je vous demande s'ils

3 étaient autorisés à rentrer chez eux s'ils souhaitaient le faire, rentrer

4 dans leurs maisons, leurs domiciles s'ils voulaient le faire ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous l'ai déjà dit; je ne sais pas. Je ne

6 sais pas si cette question leur a été posée à ces gens-là; je n'étais pas

7 là, je n'étais pas présent. Je ne sais pas si quelqu'un leur a posé cette

8 question.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ne savez pas. Premièrement, ils

10 auraient pu être demander ceux qui étaient en charge ou responsables de

11 leur sécurité. Ce que je comprends, en fait, c'est que vous ne savez pas si

12 on leur a -- s'ils n'ont jamais demandé à rentrer chez eux, si on ne leur a

13 jamais offert une possibilité de rentrer chez eux. Tout simplement, vous ne

14 le savez pas.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je sais, c'est que la majorité de ces

16 personnes, lorsqu'elles sont arrivées de Doboj, et ont été installées dans

17 le stade, immédiatement ou deux ou trois jours plus tard, la plus grande

18 partie de ces personnes a été relâchée mais pas pour aller chez eux. Ils

19 ont été installés auprès d'amis en ville, parce qu'il y avait certaines

20 mesures de sécurité, et de sûreté là, plutôt que dans les villages où ils

21 vivaient dans la vallée de Japra. La plupart de ces gens ont été autorisés

22 à quitter le stade et aller habiter auprès de membres de leurs familles ou

23 d'amis. Il y a même eu le cas des Serbes qui ont fourni pour eux des

24 conditions de sécurité et de sûreté et de refuge dans leurs propres

25 domiciles.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Harmon.

27 M. HARMON : [interprétation]

28 Q. Monsieur Pasic, je voudrais appeler votre attention maintenant sur un

Page 19828

1 autre paragraphe du document P193. Il s'agit d'un paragraphe à la page 3,

2 paragraphe juste au-dessus du

3 sous-paragraphe 3 du document. Comme vous voyez, Monsieur Pasic, je vais

4 lire cette portion : "La situation la plus difficile concerne les Musulmans

5 croates réfugiés dans le secteur de la RAK Krajina, leur sécurité et le

6 fait de leur fournir des vivres. La tentative de les expulser vers la

7 partie centrale n'a pas réussi à cause des difficultés de transport et la

8 résistance rencontrée pour ce qui était de quitter les lieux où ils

9 résidaient."

10 Monsieur Pasic, la raison pour laquelle les Musulmans ont été gradés et

11 détenus dans le stade de Mlakve était de façon à trouver une solution à

12 leur expulsion de votre municipalité; n'est-ce pas le cas ? N'en est-il pas

13 ainsi ?

14 R. Non, ce n'est pas le cas.

15 Q. Ces hommes qui sont restés dans le stade de Mlakve jusqu'au 23 juillet

16 1992, on nous informe ici -- nous avons des éléments de preuve ici,

17 Monsieur Pasic, qu'ils n'ont été relâchés qu'après avoir signé un document

18 disant, un, qu'ils ne retourneraient pas à Bosanski Novi, et deux, qu'ou

19 bien, ils échangeraient leurs propriétés, ou bien en faisaient don à la

20 municipalité. Est-ce que vous êtes au courant du fait qu'un type de

21 document de ce genre a existé, Monsieur Pasic ?

22 R. Ce type de document, comme vous venez de nous en parler, je n'en ai pas

23 connaissance. Ce que je sais, c'est que des personnes ont vendu ou ont

24 échangé leurs biens, donc ont résolu leur statut au point de vue propriété,

25 mais qu'ils avaient signé un document disant qu'ils ne reviendraient pas.

26 Cela je n'en ai pas connaissance. Je voudrais répéter, je crois que cela a

27 été une question de sujet de discussion où la cellule de Crise a permis aux

28 gens de partir volontairement, et je crois que la cellule de Crise, pour

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1 des raisons que l'on connaît, a voulu confirmer ceci, a voulu obtenir

2 confirmation du fait qu'ils quittaient les lieux de leur propre gré, comme

3 ils avaient effectivement été payés de le faire. Donc, ceci devait régler

4 la question des droits de propriété. Ceci veut dire qu'il n'y avait plus à

5 en traiter. Au cours des conflits et après les conflits, par les formations

6 paramilitaires de la vallée de Japra, dans certains cas, des biens ont été

7 détruits, et la cellule de Crise a considéré -- nous avons considéré, la

8 cellule de Crise a considéré qu'il était possible -- enfin, qu'il était

9 impossible, s'ils partaient, qu'il était impossible de protéger leurs

10 biens, que les autorités municipales aient pu protéger leurs biens. C'est

11 pour cette raison qu'on leur a demandé de traiter de cette manière, dire

12 s'ils voulaient quitter la région. On ne donnait pas des garanties que nous

13 serions en mesure de veiller et de sauver leurs biens, mais s'ils étaient

14 en mesure de trouver une solution pour le problème de propriété soit en

15 vendant, soit en procédant à des échanges, alors, la possibilité était là

16 pour eux de sauver leurs propriété jusqu'au moment où ils pouvaient

17 revenir. C'est une forme de solution à leur statut de propriété et des

18 problèmes de propriété de cette manière.

19 Q. Monsieur Pasic, approximativement --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, M. le Juge Hanoteau

21 aimerait poser une question.

22 M. LE JUGE HANOTEAU : Ce stade autour duquel nous tournons depuis quelques

23 minutes, je voudrais savoir où se trouvait ce stade ? Est-ce qu'il était

24 excentré de la ville, ou est-ce qu'il était dans la ville ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était environ 3 à 4 kilomètres du centre de

26 la ville.

27 M. LE JUGE HANOTEAU : Votre occupation professionnelle était au centre de

28 la ville ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE HANOTEAU : Vous ne vous êtes jamais rendu à proximité de ce

3 stade, à aucun moment ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je suis allé travailler, enfin c'était

5 dans la direction opposée, de l'autre côté de la ville, de sorte que je

6 n'avais pas besoin de passer par cette partie de la ville. J'ai déjà

7 souligné que je ne suis pas allé au stade, parce que cette partie de la

8 ville -- ou plutôt, la partie opérationnelle de ces tâches était confiée à

9 l'état-major de la Défense territoriale et à la police, de sorte que cette

10 partie qui dépendait de l'état-major de la Défense territoriale.

11 Personnellement, je n'y suis pas allé pendant cette période "because people

12 --

13 M. LE JUGE HANOTEAU : Parce que vous n'aviez pas la permission pour vous y

14 rendre ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, je ne sais pas vraiment si j'avais

16 besoin d'une autorisation, d'une permission pour être très franc. Mais

17 laissez-moi répéter que compte tenu des problèmes qui ont surgi de façon

18 quotidienne, il y avait une sorte de répartition des tâches dans cette

19 partie de la ville, de sorte que je n'ai pas ressenti le besoin

20 personnellement d'aller là-bas. Je ne savais pas qu'elle aurait été

21 l'utilité de ma présence au stade si j'y étais venu en personne. J'ai cru

22 et j'ai fait confiance aux personnes qui s'occupaient de cette partie de

23 ces tâches. Je voudrais répéter que c'était l'état-major de la Défense

24 territoriale qui s'occupait de ces questions, de voir tous les côtés

25 opérationnels pour voir qu'il y avait des vivres, de l'eau, l'hébergement,

26 et tout le reste. Ce n'était pas mon travail. Je n'avais pas à faire le

27 tour du stade. D'ailleurs, il aurait été impossible pour moi d'aller

28 m'occuper de tous ces aspects, de toutes ces questions. Même d'un point de

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1 vue théorique ou pratique, ce n'était pas faisable pour tout ce qui était

2 en train de se passer à ce moment-là. Il ne m'était pas possible

3 personnellement en tant que président de la cellule de Crise d'aller y

4 prendre part et de voir ce qui se passait. Je pense que c'était impossible.

5 M. LE JUGE HANOTEAU : Justement. C'est la même question concernant le

6 transfert des Musulmans par le train. Est-ce que vous pouviez voir comment

7 était constitué ce train ? Où est-ce que cela s'est passé ? Cela s'est

8 passé à la gare elle-même ? Le départ de ce convoi, il a eu son origine

9 où ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était là que ces personnes sont montées dans

11 le train, 10 ou 11 kilomètres du centre environ, à Blagaj. Il y avait une

12 personne de l'état-major de la Défense territoriale qui était chargée de

13 cette partie de l'opération. Je pense que c'était un homme dont le nom

14 était Radoslav Sekulic, et je crois que son poste était chef de l'état-

15 major de la Défense territoriale. C'était l'homme qui s'occupait des

16 opérations. Je voudrais répéter que je n'y étais pas présent moi-même;

17 c'est ce que j'ai déjà dit.

18 M. LE JUGE HANOTEAU : Si vous aviez eu la volonté ou la curiosité ou le

19 souci d'aller voir comment se passaient les choses, est-ce que vous auriez

20 pu aller voir comment était constitué ce convoi et de quelle manière les

21 choses se passaient ? Est-ce que vous aviez matériellement la possibilité

22 d'y aller ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que matériellement, d'une façon ou

24 d'une autre, il n'y avait pas toutes les garanties de sécurité pour y

25 aller, parce qu'il y avait beaucoup de choses qui se passaient tous les

26 jours et tout déplacement constituait un risque. On pouvait mettre sa vie

27 en danger de sorte que j'aurais, moi-même, été exposé à la même situation,

28 même si j'avais souhaité y aller, si j'avais souhaité y aller, si j'avais

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1 voulu y aller. J'aurais couru un danger en allant d'un côté comme de

2 l'autre. Oui, il y avait du danger, parce qu'après tout, il y avait une

3 guerre en cours. Il y avait des unités régulières qui portaient des armes,

4 et également quelques petits groupes paramilitaires qui interceptaient des

5 véhicules sur les routes, et des Serbes sur les routes même. Il y avait

6 donc de grands risques pour ce qui était de se déplacer, de se rendre

7 quelque part à l'époque.

8 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que vous considériez ces familles musulmanes

9 et ces Musulmans comme vos concitoyens ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr. Je les considérais comme étant les

11 mêmes citoyens que moi, indépendamment de leur origine ethnique. Ce n'était

12 pas une situation que j'avais préparée ou sur laquelle j'avais le pouvoir

13 de décision. Il y avait certaines choses qu'on ne pouvait pas contrôler.

14 Bien entendu, tout à fait normalement, nous avions à faire face à une

15 situation dans laquelle nous-même, nous étions exposés aux dangers. Dans le

16 centre-ville, nous étions en danger, là où se trouvait le bâtiment de la

17 cellule de Crise de la municipalité, de sorte qu'il y avait des situations

18 de ce genre. Je voudrais répéter qu'on ne pouvait pas exercer le contrôle

19 sur quoi que ce soit. On ne pouvait pas non plus faire la tournée de ces

20 secteurs de la ville et se trouver sur les lieux à différentes localités.

21 Donc, je n'y étais pas. Je n'étais pas présent pour ces événements non

22 plus.

23 M. LE JUGE HANOTEAU : Simplement, Monsieur, permettez-moi cette question.

24 Vous aviez des responsabilités à cette époque-là, administratives,

25 politiques, importantes. Vos concitoyens - et je parle là des Musulmans, et

26 vous les appelez bien comme cela - vos concitoyens sont placés dans une

27 situation extrêmement difficile, et probablement à deux reprises; au moment

28 de ce départ par un convoi de trains, puis, pour d'autres, un peu plus tard

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1 dans ce stade. Vous ne pensez pas que -- est-ce qu'un Juge peut

2 s'interroger sur le fait que vous n'ayez pas - parce que vous aviez des

3 pouvoirs - que vous n'ayez pas pris la décision de réunir des militaires ou

4 des gens de la TO, qui auraient pu vous protéger et que vous auriez voulu

5 aller voir sur place ce qui se passait ? Est-ce que cela ne peut pas

6 apparaître quelque chose d'assez surprenant quand il y a 700 personnes

7 enfermées dans un stade ou quand il y a quelque milliers de personnes qui

8 sont embarquées sur des trains, s'agissant de vos concitoyens, s'agissant

9 de vos responsabilités, est-ce que je peux être surpris que vous n'ayez pas

10 mis tout en œuvre pour aller contrôler ce qui se passait ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] On ne peut pas dire, si j'ai bien suivi votre

12 question, que j'étais indolent ou inactif à l'égard de tout cela. Mais il

13 faut que je répète, j'avais cette autorisation spéciale. Il était tout

14 simplement matériellement impossible pour moi en tant que président de la

15 cellule de Crise, de faire la tournée de l'ensemble du secteur du terrain.

16 C'est un aspect.

17 Le deuxième est celui-ci : je n'étais pas seul dans la municipalité. Il y

18 avait d'autres personnes importantes qui avaient des fonctions-clés,

19 notamment ces personnes qui étaient à l'état-major de la Défense

20 territoriale, au quartier général, la police, de sorte qu'il y avait

21 d'autres aspects opérationnels pour lesquels le chef de la police venait en

22 premier; le commandant de la Défense territoriale, par ailleurs, et

23 d'autres personnes de ce niveau, la police civile, par exemple, ou l'armée,

24 pour garantir l'ordre public, la loi. C'était cela qu'ils étaient chargés

25 de faire, qu'on leur demandait. C'était la tâche qu'ils accomplissaient, de

26 sorte que ce n'était pas à moi qu'il appartenait à ce moment-là de le

27 faire.

28 Je ne sais pas, mais je veux encore répéter que ni au stade ni au

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1 village de Blagaj - parce que je considérais que c'était aux personnes qui

2 avaient ces fonctions opérationnelles de le faire - et qu'en ce qui me

3 concernait, je ne pouvais pas contribuer de façon utile à quoi que ce soit.

4 Je n'aurais pu être qu'un observateur passif, et je n'avais pas pu

5 contribuer à quoi que ce soit. Il était superflu pour moi d'apparaître

6 autrement qu'un observateur passif. Je ne sais pas dans quelle situation je

7 me serais trouvé. J'étais simplement un soldat régulier dans l'armée.

8 Certaines choses dans cette partie de la ville, lorsqu'il s'agissait

9 de question opérationnelle, la police, l'armée, vraiment, je ne suis pas

10 intervenu dans des choses de ce genre. Je ne me suis pas mêlé, et je ne

11 vais pas me mêler des choses de ce genre. Ce n'était pas nécessaire.

12 C'était des questions opérationnelles. Quelqu'un devait s'en occuper en ce

13 qui concernait leur poste et leur position en tant que membre de la cellule

14 de Crise. Donc, ces personnes de la police ou de la Défense territoriale

15 avaient cela à faire. C'est pour ces raisons que je n'y suis pas allé à ce

16 moment-là. C'est pour cela que j'ai considéré que c'est à ces personnes qui

17 étaient censées le faire. C'était des tâches tout à fait normales dans le

18 cours normal de leurs fonctions.

19 Il faut faire confiance aux personnes, si vous avez confiance dans

20 les gens. Si, évidemment, vous n'aviez confiance en personne, on ne pouvait

21 rien faire à la situation difficile de ce genre. Pour ces nombreuses

22 raisons, il n'était pas nécessaire pour moi de rendre une visite à ces

23 différents endroits, dans ces différents lieux.

24 Comment pourrais-je expliquer tout cela ? Je pourrais dire -- je ne

25 veux pas dire que je n'étais pas inquiet ou que cela ne me préoccupait pas,

26 ce problème. C'était une situation difficile, bien sûr. C'était difficile

27 d'expliquer, c'est difficile à expliquer maintenant, indépendamment de ce

28 qui se passait en 1991 dans cette année. Mais il y avait certaines choses

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1 qui étaient impossibles. On ne pouvait pas avoir d'influence sur certaines

2 choses. On ne pouvait pas aller voir personnellement tout sur les lieux ou

3 parler personnellement aux personnes et prendre des décisions personnelles

4 ou tirer des conclusions personnelles dans une situation donnée.

5 C'était un grand problème, c'est vrai. C'est ce que j'ai déjà dit en

6 parlant à des représentants de la population musulmane, d'une certaine

7 manière, j'étais du côté des civils. Je cherchais des solutions de ce côté-

8 là pour faire tout ce que l'on pouvait et tout le possible pour ces

9 personnes afin qu'elles puissent, d'une façon qui ne soit pas douloureuse,

10 d'une façon qui fut volontaire, d'après leur demande, puissent partir.

11 C'était vraiment leur objectif. Leur but n'était pas d'aller en Bosnie

12 centrale comme j'ai dit.

13 Je ne vais pas répéter les raisons de cela. Leur objectif était la

14 Croatie. Ils voulaient aller en Croatie, parce qu'ils avaient pour la

15 plupart d'eux de nombreux amis et parents qui vivaient d'abord là-bas ou

16 qui travaillaient là-bas, d'une façon ou d'une autre, en tant que

17 travailleurs invités, comme nous les appelons.

18 Je voudrais répéter que je me centrais sur cette partie civile, ce

19 caractéristique civil des tâches plutôt que du côté militaire des choses.

20 C'est peut-être la raison pour laquelle, maintenant 13 ans plus tard, je ne

21 vais pas essayer de trouver des justifications à ce qui s'est passé, mais

22 je vous dis tout simplement ce qui s'est passé.

23 M. LE JUGE HANOTEAU : Quand vous précisez, je me cantonnais en

24 quelque sorte à des responsabilités civiles dans un climat tel que celui

25 que vous venez de décrire, de dépeindre, dans quel secteur vous estimiez à

26 ce moment-là que vous deviez limiter vos interventions en tant que

27 président de cellule de Crise ? Dans quel domaine pensez-vous que vous

28 aviez à agir si vous n'aviez rien à voir avec la sécurité de vos

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1 concitoyens et avec la façon dont les choses se passaient pour la partie

2 musulmane de votre population ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai bien compris votre question,

4 pour commencer, je voudrais dire que je considère -- ou vous considérez que

5 j'avais des pouvoirs très étendus, des autorisations très étendues, mais

6 que je n'avais pas. Je n'avais pas d'autorisation d'habilitation ou de

7 compétences ou de pouvoirs spéciaux. Malheureusement, personne ne me les a

8 attribués. Je ne les avais pas, et je n'étais pas en mesure de les prendre

9 moi-même et de décider moi-même, dans un sens ou dans un autre, sur

10 certaines questions et prendre des décisions personnellement. De sorte que

11 ce n'était pas une question de mon appréciation objective ou subjective des

12 choses. Je ne pouvais pas me trouver dans cette situation. Je n'ai jamais

13 été en mesure personnellement, en tant que Pasic, de prendre une décision

14 ou une conclusion sans que cette question ait d'abord été examinée par les

15 autres membres de la cellule de Crise pour trouver une solution adéquate.

16 Nous nous considérions comme étant une équipe. C'était du travail d'équipe,

17 ou disons, un organe qui était là pour trouver des solutions. Entre nous,

18 nous nous étions répartis les fonctions, les tâches, qui était chargé de

19 qui, de quoi, et de faire quoi. C'est pour ces raisons, tout simplement,

20 ces choses se sont passées.

21 Certaines personnes n'ont jamais apparu. Il se trouve que dans certaines

22 négociations j'apparais, mais de même, je n'apparais pas lorsque d'autres

23 questions ont été discutées ou examinées ou d'autres choses se passaient.

24 Il y avait ce partage de tâches au sein de la cellule de Crise. J'étais

25 simplement le président de la cellule de Crise, mais je n'étais pas en

26 mesure de décider dans un ou dans l'autre si quelque chose me plaisait ou

27 ne me plaisait pas. Parfois, sur de nombreuses questions, j'aurais pu ne

28 pas être d'accord. Mais si c'était la position prise par la majorité, à ce

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1 moment-là, évidemment je devais me tenir à cette décision et adopter la

2 position de la majorité dans les conclusions qu'ils avaient prises. Je ne

3 veux pas dire des questions essentielles mais au moins des questions

4 opérationnelles. Il se pouvait qu'il y ait eu différentes manières dont on

5 aurait pu faire les choses­ Peut-être que je n'aurais pas été d'accord avec

6 la décision prise par la majorité, mais il fallait bien que je l'accepte.

7 Personnellement, je n'avais pas de pouvoirs spéciaux, de compétences

8 spéciales. Comme membre de l'assemblée municipale et président de la

9 cellule de Crise, je veux dire, mes fonctions, mon mandat n'était pas

10 supérieur à celui de quelqu'un d'autre ou des compétences de quelqu'un

11 d'autre ou des pouvoirs de quelqu'un d'autre. Je n'avais pas de plus grands

12 pouvoirs ou de force de pouvoirs politiques ou quoi que ce soit. S'ils

13 pensent que je n'étais vraiment en mesure de prendre des décisions de façon

14 arbitraire ou autre, les choses ne se passaient tout simplement pas comment

15 cela.

16 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci, Monsieur.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, j'ai quelques questions

18 à poser au témoin.

19 Monsieur Pasic, j'ai un certain nombre de questions assez brèves à vous

20 poser, et j'aurais voulu obtenir des réponses assez brèves aussi.

21 Est-ce que vous n'avez jamais visité ce stade avant ou après les

22 événements, même après la guerre, le stade dont nous avons parlé?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant la guerre, je suis allé au stade, oui.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne la disposition de ce

25 stade, est-ce qu'il existe des tribunes pour le public de plusieurs étages,

26 donc une espèce de tribune, de construction en guise de tribune, qui sert

27 aux spectateurs ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. D'un côté, il existe des tribunes qui

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1 sont tournées vers la Croatie, vers la rivière Una. Là, en guise de

2 barrière, vous trouverez des cyprès, des arbres très hauts de quelques

3 mètres de hauteur qui bornent un peu ce stade. C'est du côté est de stade.

4 Mais de l'autre côté, on peut bien voir le stade à partir de la ville. Là,

5 vous avez une bonne visibilité. Donc, vous avez une bonne visibilité d'un

6 côté, et puis de l'autre côté, la visibilité n'est pas aussi bonne.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous ai juste demandé de quel côté du

8 stade se trouvait cette tribune réservée au public. Si je vous ai bien

9 compris, c'était juste d'un côté du stade. D'ailleurs, cela se présente

10 assez souvent dans le stade. Est-ce que vous avez dit que c'était du côté

11 ouest du stade ? Est-ce que je vous ai bien compris ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Enfin, nord-ouest, plutôt. Je dirais que

13 c'est plutôt nord-est que ouest.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Vous avez parlé de la rivière Una.

15 Quelle est la distance qui sépare le stade de la rivière Una ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette rivière se trouve tout près, à 40, 50

17 mètres du stade. Peut-être même pas tant que cela. Enfin, c'est à ce

18 moment-là que la rivière tourne. Elle tourne un peu. Elle ne coule pas de

19 façon droite. Elle ne coule pas en ligne droite à cet endroit-là.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez parlé de cette clôture, de

21 cette haie qui a quelques mètres de hauteur. Quand vous dites quelques

22 mètres, il s'agit de 3, 4, 5 mètres ? Quelle est la hauteur de cela ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit qu'à côté des tribunes, il y

24 avait une haie de cyprès qui avait quelques mètres de hauteur. D'ailleurs,

25 cette haie était assez dense, de sorte que l'on ne pouvait pas voir à

26 travers ces arbres.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. De quel côté se trouvait cette

28 clôture, enfin cette haie ? Est-ce qu'elle était en face de la galerie du

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1 public ou bien du même côté ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était sur le côté, je dirais plutôt au nord,

3 en direction d'une partie de Novi Grad. Je pense que cette haie se trouvait

4 à peu près au nord alors que les tribunes étaient placées au nord-ouest. Il

5 y a aussi une toute petite partie de cette haie qui se poursuit de l'autre

6 côté des tribunes, mais là, elle est bien moins importante.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on placer sur le rétroprojecteur ce

8 dessin, Madame l'Huissière, s'il vous plaît.

9 Madame l'Huissière, pourriez-vous, s'il vous plaît, agrandir ce dessin.

10 Enfin, pourriez-vous faire en sorte que le dessin tout entier figure sur

11 les écrans de nos ordinateurs. Placez-les de la sorte que l'on puisse voir

12 en entier.

13 Monsieur Pasic, j'ai fait un dessin de ce qui devrait être ce stade de

14 foot, et puis d'un côté, j'ai placé les galeries du public. Pourriez-vous

15 nous dire de quel côté se trouve la rivière Una ? Est-ce à droite ? A

16 gauche ? En haut ? En bas ? Cette rivière, la rivière Una, qui se trouvait

17 à peu près à une quarantaine de mètres de là, pourriez-vous nous dire où

18 est-ce qu'elle se trouve ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me le permettez, je pourrais même le

20 dessiner sur ce même dessin.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Je serais bien

22 heureux de vous voir faire cela.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] La rivière Una, elle coule un peu comme cela,

24 dans cette direction-là. C'est la rivière Una. Ici, vous avez aussi un

25 stade plus petit. Ici, la rivière est tout près. Donc, la tribune se trouve

26 là. Ici, à peu près à ce niveau-là, en demi-cercle, juste derrière les

27 tribunes, on trouve cette haie qui a quelques mètres de hauteur. A peu près

28 ici, en cette direction-là, on trouve Novi Grad. Et ici au sud, je pense

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1 que là c'est le sud, ici c'est ouest et nord-ouest, et ici normalement

2 c'est la partie orientale. Et là se trouve la route principale qui mène

3 vers Bosanska Krupa. A peu près ici, à ce niveau-là, où l'on peut entrer au

4 stade, c'est là que se trouve l'entrée. De ce côté-là, je dirais que l'on

5 peut aussi voir la continuation de cet espace vert qui protège un peu le

6 stade.

7 Il y en avait aussi de ce côté-là, mais ce n'était pas aussi dense.

8 Cela n'était pas aussi haut. Cette haie n'était pas aussi haute. Je pense

9 que là il s'agissait des distances de 15, 20 mètres à peu près. Cette

10 partie-là était fermée. On pouvait à peine voir là-dedans. Peut-être de

11 l'avion on pouvait voir ce qui se passe dans le stade, et d'ici, à partir

12 de la route, qui passait par là, oui on pouvait effectivement avoir une vue

13 sur le stade. Mais ici, au sud-est, ici on ne pouvait rien voir parce qu'il

14 y avait les maisons. Il y avait des maisons qui étaient là.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, je vous ai dit que

16 j'allais vous poser des questions brèves.

17 Je vais vous poser des questions qui me semblent être les plus pertinentes.

18 Pourriez-vous déplacer un peu le dessin de sorte que nous puissions voir la

19 partie supérieure du dessin. Pourriez-vous nous dire de quelle façon

20 continue a coulé la rivière Una, parce que si cela s'arrête à peu près --

21 le cours de la rivière.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ici que la rivière tourne en quelque

23 sorte en demi-cercle. Elle continue à couler tout droit. La partie

24 bosniaque est un peu élargie là, alors que là, plus haut, cela se rétrécit.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que tout ce qui se trouve à

26 droite du stade, tout cela est le territoire bosniaque ou bien le

27 territoire de la Republika Srpska ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ici se trouve la Republika Srpska, et de

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1 ce côté-là la Croatie.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des collines du côté

3 croate, ou bien est-ce que c'est plutôt plat ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout près de la rivière, vous avez des

5 vallées. Donc, c'est assez plat. D'ailleurs, il y a plus de champs du côté

6 croate que de l'autre côté. C'est vrai qu'ils ont aussi quelques collines,

7 mais ces collines ne sont pas bien élevées.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'ils pouvaient avoir une vue

9 entre le stade et les collines ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Si l'on regarde d'ici, non. C'est impossible

11 de voir quoi que ce soit à cause de ces tribunes qui sont très élevées. Si

12 vous regardez d'ici, vous ne pouvez voir rien d'autre que les tribunes et

13 le ciel. Il est impossible de voir quoi que ce soit de ce côté-là,

14 impossible de voir ce qui se passe par terre, si l'on regarde d'ici.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En direction vers que j'ai appelé, enfin

16 en direction nord, serait-il possible de voir quelque chose depuis les

17 collines qui se trouvent de l'autre côté de la rivière ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez de cet endroit ici ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je parle de la direction qui va vers là-

20 haut. Si l'on traverse la rivière et on regarde plus en haut, est-ce qu'il

21 est possible de voir quoi que ce soit ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, parce que d'un côté, vous avez la haie

23 qui est là, et ensuite, vous avez le but. Il y a un filet très important

24 qui empêche les balles de passer de l'autre côté du stade. Ce filet a une

25 quinzaine de mètres de hauteur. Donc, il est impossible de voir quoi que ce

26 soit à ce niveau-là. Aussi parce qu'il y a une espèce de barrière tout de

27 même qui empêche la vue. Vous savez, c'est une construction sportive. C'est

28 un stade, un stade de foot.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cette haie existe toujours ?

2 Est-ce qu'elle clôture toujours ce stade ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Elle existe au jour d'aujourd'hui

4 encore.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais montrer au témoin cette

6 pièce, la pièce P82. Je voudrais que l'on montre au témoin la version non-

7 annotée. Voilà. Couvrez le texte, s'il vous plaît, qui figure, la légende

8 qui figure en bas de la photo. Merci.

9 Monsieur Pasic, cet endroit vert, ce point vert que l'on voit à la fin des

10 tribunes, est-ce bien le territoire croate ? Est-ce que nous parlons de la

11 même chose ? Est-ce que cet espace vert, cet endroit vert qui est au-dessus

12 de la tête de cette dame qui figure sur la photo, est-ce bien le territoire

13 croate ou le territoire de la Republika Srpska ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, je dirais plutôt que c'est le territoire

15 de la Republika Srpska.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Il semblerait que la rivière que

17 vous avez montrée sur votre dessin, qu'elle s'est déplacée un peu, n'est-ce

18 pas ? Puisque là, vous avez une ligne qui n'est pas la ligne de vue, enfin

19 la vue qui n'est pas parallèle avec la tribune mais qui tourne plutôt vers

20 la gauche. Et si vous regardez la ligne que vous avez dessinée sur votre

21 dessin, elle se termine en Croatie.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, je ne suis pas très fort en

23 géographie, mais si vous aviez une carte, un plan de la ville, je pense

24 cela serait fort utile de l'examiner. Vous savez, c'est un fait que l'on ne

25 peut pas changer. C'est facile d'obtenir au jour d'aujourd'hui à l'aide des

26 cartes ou des prises de vue, d'avoir une idée claire et sans ambiguïté sur

27 la situation telle qu'elle existait.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison de

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1 dire que l'on ne peut pas en aboutir à des conclusions définitives sur la

2 base d'un dessin, le dessin d'une rivière fait à la main. Donc, il est

3 difficile de tirer des conclusions définitives sur la base d'un tel dessin

4 improvisé.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, est-ce que vous avez

7 des cartes détaillées de la région ?

8 M. HARMON : [interprétation] Je vais le vérifier.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Puisque pour vérifier les

10 conclusions auxquelles nous avons abouti sur la base de ces dessins, pour

11 vérifier ces conclusions, ce que nous en avons conclu sur la base de ce

12 dessin, nous voudrions avoir ces cartes. Parce que j'imagine que le cours

13 de la rivière Una n'a pas changé au cours de quelques années, et le stade

14 est toujours au même endroit. Ces informations supplémentaires pourraient

15 nous aider. Peut-être que la Défense a des informations à ce sujet --

16 M. HARMON : [interprétation] Je regarde, Monsieur le Président, une carte -

17 -

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- parce que nous voudrions tout

19 simplement avoir une carte détaillée, un plan détaillé de la configuration

20 du terrain.

21 M. JOSSE : [interprétation] Je vais m'en informer.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

23 M. JOSSE : [interprétation] Je suis tout à fait favorable à cela vu ce que

24 l'on a demandé au témoin.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr. De toute façon, je ne pourrais

26 pas déterminer la position de la rivière sur la base de ce qu'a dit le

27 témoin. Mais je pense qu'il est tout à fait utile de vérifier la

28 description du témoin par rapport à une carte, à une bonne carte de la

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1 région.

2 M. JOSSE : [interprétation] Je vous remercie.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je regarde l'heure. Il

4 est 12 heures 30. Vu le temps que vous avez déjà passé à contre-interroger

5 ce témoin, il me semble qu'il ne vous reste plus de temps, Maître Harmon, à

6 ce que je sache.

7 M. HARMON : [interprétation] Vous me demandez de combien de temps j'ai

8 encore besoin ?

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. J'ai commencé à vous poser cette

10 question-là, ensuite, j'ai changé ma question et j'ai fait une observation,

11 à savoir, j'en suis arrivé à la conclusion que vu le temps que vous avez

12 déjà passé à contre-interroger ce témoin, il ne vous reste plus de temps

13 pour continuer.

14 M. HARMON : [interprétation] Je vous demanderais de me permettre de

15 poursuivre mon contre-interrogatoire pendant encore une quinzaine de

16 minutes, puisque j'ai encore quelques questions très importantes à poser à

17 ce témoin.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, vous avez besoin de

20 combien de temps pour les questions supplémentaires ?

21 M. JOSSE : [interprétation] J'ai besoin d'à peu près une demi-heure.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une demi-heure. Monsieur Harmon, je vous

23 accorde encore deux minutes, ensuite, nous allons prendre une pause.

24 Ensuite, M. Josse va pouvoir utiliser le temps qui lui reste pour poser ses

25 questions supplémentaires.

26 Je voudrais tout de même d'abord demander que l'on attribue une cote

27 à mon dessin.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du document C-1.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, le stade de foot avec les

2 annotations du témoin. Il s'agit de mon dessin auquel s'ajoutent les

3 annotations du témoin, de M. Pasic.

4 M. HARMON : [interprétation]

5 Q. Monsieur Pasic, à peu près le 20 juin 1992, vous avez reçu une lettre

6 vous informant du transfert massif de la population, un transfert forcé de

7 la population à grande échelle, basé sur les critères ethniques ou de race.

8 Ceci a été déclaré comme étant un crime contre l'humanité, puisque je fais

9 référence aux documents qui figurent à l'intercalaire 24.

10 M. JOSSE : [interprétation] Je suis désolé de vouloir être aussi précis,

11 mais M. Pasic doit tout d'abord avoir la possibilité d'examiner ce document

12 avant de répondre.

13 M. HARMON : [interprétation] Je pense que M. Pasic a déjà parlé de ce

14 document. Il a dit qu'il a bien reçu cette lettre. Moi, j'ai tout

15 simplement voulu l'aider.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, vous avez parlé de la

17 date du 20 juin, ensuite, vous parlez de cet

18 intercalaire 24 et les documents qui y figurent.

19 M. HARMON : [interprétation] Oui. C'est une lettre qui a été envoyée à M.

20 Pasic en date du 20 juin. Je pense qu'il a parlé de cela.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je la vois.

22 M. HARMON : [interprétation] En réalité, il s'agit de la date du 22 juin.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a une lettre du 20 juin. Est-ce que

24 vous avez reçu une telle lettre avec le contenu qui correspond à ce que

25 vient de dire M. Harmon ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait me montrer cette

27 lettre ? Je ne sais pas ce qui figure exactement dans cette lettre.

28 M. HARMON : [interprétation]

Page 19846

1 Q. Examinez, s'il vous plaît, le document qui figure à l'intercalaire 24.

2 Vous allez trouver un document qui correspond à ce que je viens de dire.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les derniers chiffres de ce document

4 sont les chiffres 449.

5 M. HARMON : [interprétation] Je ne suis vraiment pas sûr que le témoin a le

6 bon document devant lui.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on le placer sur le rétroprojecteur.

8 Les trois derniers chiffres de la cote de ce document, qui figurent en haut

9 à droite du document, sont les chiffres 449, 4-4-9. Et cette lettre

10 commence à la deuxième page.

11 M. HARMON : [interprétation] Je pourrais peut-être donner mon exemplaire au

12 témoin.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

14 M. HARMON : [interprétation]

15 Q. Monsieur le Témoin, je voudrais attirer votre attention sur le document

16 que Mme l'Huissière est en train de vous donner. Je voudrais attirer votre

17 attention sur le cinquième paragraphe de cette lettre, qui figure à la

18 quatrième page en B/C/S.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous l'avez trouvé, Monsieur

20 Pasic ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, j'essaie de le lire.

22 M. HARMON : [interprétation]

23 Q. Monsieur Pasic, est-ce que vous avez reçu un exemplaire de cette

24 lettre ?

25 R. Vous voulez dire à l'époque ?

26 Q. Oui.

27 R. Oui, je pense l'avoir reçu. C'est vrai que j'ai parlé avec M. Kirudja,

28 et je pense avoir reçu cette lettre.

Page 19847

1 Q. Le message que l'on peut lire dans ce cinquième paragraphe, c'est

2 quelque chose que vous avez pu apprendre aussi plus tôt, au cours de

3 différents contacts que vous avez pu avoir avec les représentants de la

4 communauté internationale; est-ce exact ou non ?

5 R. Je ne vois pas ce que vous voulez dire. Vous voulez dire que c'est

6 exact qu'il ait écrit cela, ou bien est-ce que vous me demandez si c'est

7 exact que j'ai fait des propositions ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, voulez-vous, s'il vous

9 plaît, écouter la question qui vous a été posée. On vous a demandé si au

10 cours des contacts que vous avez eus auparavant avec les représentants de

11 la communauté internationale, si on a fait allusion au cours de ces

12 contacts au fait que le transfert massif et forcé de la population, sur des

13 bases ethniques ou raciales correspondait à un crime contre l'humanité.

14 Est-ce qu'on vous a indiqué cela auparavant ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas de cette façon-là.

16 M. HARMON : [interprétation] Je voudrais attirer votre attention sur

17 l'intercalaire 24 [comme interprété], une lettre en date du 22 juin. Je

18 suis désolé, parce que je n'ai pas beaucoup de temps.

19 M. JOSSE : [interprétation] Je soulève une objection puisque là, il n'est

20 pas le moment de faire les discours. Il s'agit là d'un contre-

21 interrogatoire.

22 M. HARMON : [interprétation] Je vais vous répondre à cette question si vous

23 me permettez un instant. Monsieur Pasic, dans ce document qui figure à ce

24 même intercalaire, on peut lire : "Je vous prie de bien vouloir trouver ci-

25 joint une lettre qui a été envoyée au maire de Bosanski Novi par un

26 représentant de la communauté internationale. Cette lettre, et notamment

27 son cinquième paragraphe, est censée renforcer ou mettre l'accent sur le

28 message qui lui a été transmis à plusieurs reprises oralement à lui et à

Page 19848

1 ses collègues à Dvor."

2 Est-ce que vous acceptez cette affirmation ?

3 R. Je ne peux pas vous répondre de façon affirmative.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, vous n'avez pas

5 répondu de façon précise. On vous a demandé si on vous a déjà dit cela, si

6 on vous a déjà passé ce message auparavant. Vous avez dit non, pas vraiment

7 de cette façon-là, pas de la même façon. Ensuite, M. Harmon vous a présenté

8 une lettre, un document dans lequel

9 M. Kirudja envoie une copie de la lettre dont nous avons parlé auparavant,

10 et dit que cette lettre était là pour accentuer le message qui vous a été

11 transmis de façon répétée à vous et à vos collègues. Apparemment, M.

12 Kirudja a dit qu'il a évoqué cette question à plusieurs reprises avec M.

13 Pasic. Est-ce que vous acceptez cette affirmation oui ou non ? C'est bien

14 là la question.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] J'accepte qu'on en a parlé, que nous avons

16 discuté de cela et que je connais même quelques dispositions du droit

17 international, ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire, si vous

18 voulez. Kirudja peut écrire ce qu'il veut. D'ailleurs, il avait le droit

19 d'écrire ce qu'il voulait.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je dois comprendre que vous

21 avez répondu tout à l'heure comme suit : oui, on a évoqué cette question au

22 cours de nos différents entretiens, mais pas exactement de la même façon ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est à peu près ce que j'ai dit.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aurais préféré avoir cette réponse

25 immédiatement et pas après.

26 M. HARMON : [interprétation]

27 Q. Monsieur Pasic, les Musulmans qui ont été transférés le

28 22 juillet 1992, je voudrais vous poser une question là-dessus.

Page 19849

1 Le 22 juillet, vous avez dit qu'un grand nombre de Musulmans avaient quitté

2 la ville à bord d'un convoi. Au mois de juillet 1992, la situation

3 militaire sur le terrain était stable. Il n'y avait pas de problèmes.

4 L'armée avait un contrôle total sur Bosanski Novi, n'est-ce pas ? Le 15

5 juillet, une semaine avant le transfert massif de ces personnes. Je vous ai

6 montré un document. Je l'avais surligné. Vous avez eu la possibilité

7 également de l'examiner au cours des vacances judiciaires.

8 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je fais référence à

9 l'intercalaire 26.

10 R. J'ai déjà dit que la situation n'avait jamais été sous le contrôle

11 total, dans le sens qu'elle n'était jamais sûre. Mais les choses étaient

12 légèrement meilleures qu'au début. Peut-être pour un degré, mais on ne

13 pouvait pas garantir, s'agissant des questions dont on a déjà discuté,

14 garantir la sécurité de tout ce monde.

15 Q. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je souhaiterais attirer

16 votre attention sur le deuxième paragraphe, deuxième phrase. Il s'agit d'un

17 rapport du 15 juillet, du 1er Corps de la Krajina, secret militaire qui est

18 relatif à la zone de responsabilité du

19 1er Corps de Krajina, signé par le colonel Milutin Vukelic. Deuxième

20 paragraphe, première phrase : "Après avoir évalué la situation politique et

21 de sécurité, la BiH [comme interprété] ne peut plus parler d'une situation

22 de crise ou de conflit."

23 En bas de la page 1, en commençant par cinq lignes --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons déjà établi, Monsieur Harmon,

25 quatre, cinq, six ou sept fois, que M. Pasic -- nous savons quelle était

26 son impression de ce qui est sûr, ce qui est contrôlé par les militaires,

27 par l'armée. Sa perception de ces faits-là n'est pas la même que la vôtre,

28 n'a pas le même poids qu'un commandement militaire. Je crois que nous avons

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1 là deux concepts différents. Ce qui est sûr pour vous n'est pas

2 nécessairement sûr pour lui, et cetera. Je ne sais pas s'il est nécessaire

3 d'insister une huitième, neuvième et dixième fois sur ce point.

4 M. HARMON : [interprétation] Je voulais simplement attirer l'attention des

5 Juges de la Chambre au fait que le 1er Corps de la Krajina avait une autre

6 opinion de la situation qui avait trait à la sécurité. Permettez-moi

7 d'aller plus loin.

8 Q. C'est dans ce contexte-ci, Monsieur Pasic, que vous avez mené des

9 négociations urgentes avec les représentants de la FORPRONU concernant le

10 transfert des personnes qui avait eu lieu le

11 22 juillet 1992. Au cours de votre témoignage, dans le cadre de votre

12 interrogatoire principal, vous nous avez dit que vous aviez pris part

13 personnellement aux négociations avec les représentants des Nations Unies,

14 y compris Jean-Claude Concolato, et que ces discussions avaient eu lieu le

15 18 juillet.

16 R. Oui. Je sais qu'il y avait eu des pourparlers. Je ne sais pas si

17 c'était effectivement le 18 juillet. Mais effectivement, il y a eu des

18 pourparlers.

19 Q. Au cours de ces négociations, les représentants des Nations Unies

20 demandaient que les Musulmans puissent revenir et regagner leurs demeures,

21 retourner chez eux, et vous n'avez pas acquiescé à leur demande.

22 R. Que les Musulmans voulaient regagner leurs demeures, qu'ils voulaient

23 retourner chez eux ? Je ne sais pas si j'ai bien compris votre question.

24 Q. J'ai dit que les représentants des Nations Unies ont demandé que les

25 Musulmans soient en mesure de retourner chez eux et que vous n'avez

26 acquiescé à leur demande; est-ce exact ?

27 R. Non. Je ne pouvais pas leur refuser cette demande puisque ce n'était

28 pas de ma compétence. Je parlais de la situation sur le terrain. J'avais

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1 justement proposé aux représentants des Nations Unies avec lesquels je

2 m'étais entretenu, je leur avais demandé de s'entretenir avec les

3 représentants des Musulmans, avec les familles de ces Musulmans. Je leur ai

4 dit que nous ne serions pas présents, et que c'était à eux de voir quelle

5 était la situation réelle, si ces derniers voulaient effectivement partir

6 ou non et s'il y avait quelqu'un qui les forçait à partir. Donc, c'était

7 aux représentants des Nations Unies, c'était à M. Jensen, ou Jean-Claude,

8 je ne sais plus comment il s'appelait. Il y avait ces deux personnes-là et

9 une troisième personne également. C'est eux qui s'entretenaient avec moi le

10 plus. C'étaient mes interlocuteurs, et c'étaient eux qui ont pu s'assurer

11 de tout cela. J'ai dit que je ne voulais pas donner certains noms, mais il

12 y avait des personnes qui pouvaient le confirmer pour ce qui est des

13 Musulmans.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je vous arrête ici. Je

15 présume que vous avez des documents à montrer.

16 M. HARMON : Oui, Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demanderais de terminer assez

18 rapidement après la présentation de ces documents.

19 M. HARMON : [interprétation] Oui, effectivement, c'était mon dernier point.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. HARMON : [interprétation]

22 Q. En fait, vous n'avez pas acquiescé à la demande des représentants des

23 Nations Unies, demande relative à avoir une rencontre des représentants des

24 Nations Unies avec les Musulmans. Est-ce que c'est exact, Monsieur Pasic ?

25 R. Non, non. Je leur avais dit qu'ils devaient eux-mêmes s'entretenir avec

26 les Musulmans. J'ai été l'initiateur de cette demande. C'était mon idée à

27 moi. C'était moi qui leur avais dit qu'ils devaient aller rencontrer les

28 Musulmans et qu'ils devaient s'entretenir avec eux. Je leur ai dit que je

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1 ne serais pas présent, nous ne serions pas présents, et qu'eux-mêmes

2 devaient aller s'entretenir avec les Musulmans sans ma présence, alors que

3 vous avez affirmé le contraire. Ce que j'ai dit était la vérité.

4 Q. Messieurs les Juges, je souhaiterais attirer votre attention sur le

5 document qui se trouve à l'intercalaire 27.

6 Monsieur Pasic, à l'intercalaire 27, je vais vous donner lecture d'un

7 document, de ce document qui a trait aux discussions que vous avez eues

8 avec la représentation des Nations Unies et avec

9 M. Jean-Claude Concolato.

10 C'est un article de la Presse associée de Zagreb portant la date du 29

11 juillet, et j'en donne lecture. "Les Nations Unies ont été contraintes à

12 prendre part au nettoyage ethnique de la ville bosnienne quand les

13 Musulmans [comme interprété] ont menacé de faire du mal aux Musulmans qui

14 se trouvaient sur le stade, un représentant a dit mercredi. Jean-Claude

15 Concolato a critiqué les autorités serbes dans la ville de Bosanski Novi

16 alors qu'il se préparait à quitter en compagnie de représentants des

17 Nations Unies pour les Réfugiés à Zagreb qu'il a mené depuis 1991 [comme

18 interprété]. 'Nous avons été forcés de prendre part à une politique

19 monstrueuse de nettoyage ethnique.' C'est ce qu'a dit ce dernier lorsqu'il

20 a été interviewé par la Presse associée. Le 23 juillet, 7 000 Musulmans

21 paniqués ont quitté Bosanski Novi avec une population d'environ 40 000

22 habitants dans un convoi organisé par les Nations Unies. Ils ont pu prendre

23 que quelques effets personnels avec eux. Ils sont arrivés à Karlovac, en

24 Croatie, où plusieurs d'entre eux ont été emmenés par la suite en

25 Allemagne. Nous sommes retournés [comme interprété] à Bosanski Novi en

26 juillet, le 18 juillet, et lorsque ce dernier est retourné le

27 18 juillet à Bosanski Novi, il a voulu s'assurer que les Musulmans

28 pouvaient rester dans leurs demeures et dans leurs hameaux qu'ils

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1 occupaient depuis des générations. Il a dit qu'il avait essayé de mener des

2 négociations pour qu'un tel arrangement soit fait avec les représentants

3 serbes de la ville, et le maire de la ville et les autorités locales lui

4 ont dit clairement que cela n'était pas possible car si les Musulmans

5 revenaient, cela pourrait représenter un danger. La nuit qui a suivi, deux

6 explosions se sont fait entendre près du ghetto. 'J'ai compris que ces

7 incidents faisaient partie des négociations.' Il s'agissait d'une localité

8 qui était dominée par les Serbes. Le maire de Bosanski Novi, qui a été

9 identifié comme étant

10 M. Pasic, 'insistait sur le fait qu'il ne pouvait pas s'occuper de ces

11 gens, que si nous ne nous occupions pas d'eux, nous les Nations Unies,

12 qu'eux, ils ne pouvaient absolument rien faire pour eux.' C'est ce qu'a dit

13 Pasic, qui a refusé de garantir la sécurité des Musulmans sur le terrain,

14 alors qu'une guerre civile était en train de se dérouler. Il a également

15 dit qu'il avait refusé de permettre aux Musulmans de passer la nuit là. Il

16 a également dit que 'les personnes se trouvaient emprisonnées à cet

17 endroit-là,' dans un ghetto, et qu'il y avait un corridor que l'on

18 bloquait."

19 N'est-il pas exact que ce dernier a dit cela ?

20 M. JOSSE : [interprétation] Il s'agit d'une citation alléguée.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, effectivement, il

22 s'agit d'un récit allégué, n'est-ce pas ?

23 M. HARMON : [interprétation] Oui, d'accord. Très bien.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous faire des commentaires,

25 Monsieur le Témoin.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

27 M. HARMON : [interprétation]

28 Q. Dites-nous ce que vous en pensez.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons écouté attentivement ce que

2 vous avez dit, mais il découle de la réponse précédente que vous, Monsieur,

3 vous allez certainement nier la véracité de ce qui a été dit dans cet

4 article, cette coupure de presse. Pouvez-vous vous expliciter là-dessus.

5 Qu'est-ce que vous avez à faire comme commentaire ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas ce que M. Concolato a écrit et

7 je ne me souviens pas de cet article. L'article est assez long. Je ne peux

8 pas le résumer en une phrase. Mais effectivement, des négociations avaient

9 eu lieu. Maintenant, à savoir si les Nations Unies avaient participé au

10 nettoyage ethnique, je ne le sais pas.

11 M. Concolato l'a dit. Je ne peux rien ajouter là-dessus. Je sais ce que

12 j'ai fait. Je sais ce que j'ai pu faire. Je sais que je m'étais efforcé à

13 aider ces gens. Maintenant, comment les représentants des Nations Unies ont

14 évalué mes efforts, je ne le sais pas.

15 Il s'agit d'une évaluation subjective, à savoir si quelqu'un a décrit

16 la situation de cette façon-là pour essayer de se dégager de toute

17 responsabilité, je le ne sais pas. C'est peut-être la raison pour laquelle

18 ce texte a été écrit comme cela. A plusieurs reprises, devant ce Tribunal,

19 j'ai réitéré que ces négociations avaient eu lieu. Je sais que vous ne

20 croyez peut-être pas que nous avions les meilleures intentions, mais nos

21 intentions étaient les meilleures. Nous voulions, je voulais, la cellule de

22 Crise voulait aider ces personnes de quitter de façon dignifiée, digne,

23 calme et pacifique, et c'était la raison pour laquelle nous avions organisé

24 ceci. Pour ce qui est des représentants des Nations Unies, vous m'avez

25 donné lecture d'un article, je ne sais pas quelle était leur évaluation. Je

26 vois, d'après votre lecture, ce qu'ils avaient pensé de la situation, mais

27 je ne peux pas faire d'autres commentaires là-dessus.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, vous avez une

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1 dernière question que je vous permettrai de poser à ce témoin.

2 M. HARMON : [interprétation] En fait, j'ai une dernière pièce pour ce

3 témoin.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous devons terminer avec ce

5 témoin. S'il s'agit d'une pièce de contexte, à ce moment-là, il n'est peut-

6 être plus nécessaire de poser des questions au témoin.

7 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pourrions peut-être la présenter de

9 façon indirecte et M. Josse va poser des questions supplémentaires. Je

10 demanderais à ce que la pause soit plus brève.

11 Peut-être avec l'aide des interprètes et tous les intervenants, je

12 souhaiterais demander à toutes les personnes ici présentes de nous

13 faciliter la tâche. J'espère que nous allons pouvoir terminer peut-être

14 vers 13 heure 45.

15 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai ici la carte du

16 stade de football.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous avons demandé à ce que

18 cette carte soit présentée --

19 M. JOSSE : [interprétation] Je vais aborder cette question lors de mon

20 contre-interrogatoire.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez, la Chambre essaiera de

22 faire avancer les choses plus rapidement. Est-ce que vous auriez une

23 objection si la Chambre examine ce document qui est plutôt neutre ?

24 M. JOSSE : [interprétation] Très bonne idée, Monsieur le Président, si vous

25 me le permettez de le dire.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre une pause

27 jusqu'à 13 heures 20.

28 --- L'audience est suspendue à 13 heures 01.

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1 --- L'audience est reprise à 13 heures 25.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, nous vous écoutons.

3 Nouvel interrogatoire par M. Josse :

4 Q. [interprétation] Monsieur Le Président, je souhaiterais montrer la

5 carte à tous et à toutes. Le stade se trouve dans le coin inférieur gauche,

6 à côté du numéro 10. Je vois que votre doigt pointe au bon endroit. Ma

7 question est la suivante, eu égard à un certain nombre de questions que

8 vous a posées M. Harmon et M. le Juge Hanoteau, est-ce que cela vous

9 rafraîchit la mémoire quant à la question de visibilité qu'ont alléguée

10 certains témoins qui sont venus déposer devant ce Tribunal avant vous ?

11 R. Oui. Effectivement que cette carte est beaucoup plus juste que celle

12 que j'ai essayé de faire moi-même. J'ai essayé d'expliquer la courbe de la

13 rivière Una. Si nous regardons bien, je crois que ce que nous voyons ici en

14 blanc c'est un plaine, et cela appartient à la Croatie, donc le côté

15 gauche, et à droite, c'était la Republika Srpska.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Devrait-on la mettre peut-être sur le

17 rétroprojecteur. Nous n'avons pas la carte sous les yeux présentement et

18 nous n'avons pas non plus la photo. Pourrait-on placer la photographie

19 P183. Pourrait-on placer cette photo sur le rétroprojecteur afin de savoir

20 de quoi nous parlons exactement.

21 M. JOSSE : [interprétation] C'est, pour ma part --

22 Q. Monsieur Pasic, nous vous écoutons.

23 R. C'est à gauche sur la carte si nous regardons les tribunes. Donc, c'est

24 à gauche sur la carte. Je répète, à gauche ici, il y a une petite île qu'on

25 peut voir, l'île en plein milieu de la rivière. Cela appartient au côté

26 croate. Je veux dire qu'il y a une forêt, c'est une espèce de forêt, ce

27 n'est pas une vraie forêt organisée, mais je crois que c'est comme une

28 espèce de broussaille. Il y a énormément d'arbres de ce côté-là, mais ce ne

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1 sont pas des arbres bien taillés. A droite, c'est une plaine. Je ne sais

2 pas quelle est l'étendue de cette plaine. Je ne sais pas combien elle

3 mesure, mais on peut mesurer en mètres. On peut voir quelle est l'étendue

4 de cette plaine qui se trouve à droite de la Una. Ensuite, il y a des

5 collines qui ne sont pas plus élevées. Mais si nous parlons du côté gauche,

6 la rive gauche de la Una, elle se trouve du côté croate. Je ne sais pas si

7 j'ai bien expliqué. Souhaiteriez-vous que j'apporte d'autres précisions ?

8 M. JOSSE : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions sur le sujet.

9 Je ne sais pas si les Juges de la Chambre souhaiteraient vous poser des

10 questions.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas tout à fait clair. Je ne

12 sais pas ce que nous montre le témoin effectivement. Cette partie verte,

13 nous en avons parlé un peu plus tôt, juste en haut, qui se trouve au-dessus

14 de la tête de la dame si nous regardons la photo, est-ce que vous êtes en

15 train de nous dire que c'est le territoire appartenant à la Republika

16 Srpska, cet espace vert au-dessus de la tête de la dame ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Si nous regardons de ce côté-ci, c'est peut-

18 être plus clair. Encore, je répète, cet espace-ci appartient à la ville.

19 Ensuite, il y a l'autre côté de la ville. Il y a peut-être 7 ou 8 ou 10

20 kilomètres, derrière des collines, et peut-être même dans cette partie-là,

21 en contrebas de la ville, en aval. Les collines sont peut-être à gauche,

22 mais je ne peux vraiment pas m'orienter.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est encore la Republika

24 Srpska, ou bien la carte fait rafraîchir votre mémoire ? La vue de la

25 carte, est-ce que cela change votre récit ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela ne change rien. J'essaie simplement

27 de voir quelle est la réalité. Je ne sais pas d'où cette photo a été prise.

28 Je ne sais pas si la photo a été prise depuis le haut, la partie que l'on

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1 ne voit pas, ou bien est-ce que c'était d'ailleurs. Cela m'est un peu

2 difficile de juger.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vous demander --

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas de quelle façon la personne se

5 tenait.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi est-ce que c'est tellement

7 difficile de dire ? Comment est-ce que cela aurait pu être les deux côtés ?

8 Cela ne peut être qu'à gauche, comme nous le voyons sur mon croquis du

9 stade de football. Les spectateurs ne peuvent pas regarder l'autre côté, à

10 l'extérieur du stade de football. Il est certain que les spectateurs

11 doivent regarder ce qui se déroule dans le stade, n'est-ce pas ?

12 Monsieur Josse, est-ce que la Défense souhaite dire que cette partie

13 verte appartient au territoire de la Republika Srpska ?

14 M. JOSSE : [interprétation] Aucune position n'a été prise. Je ne le sais

15 pas.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Alors, avançons. Monsieur --

17 Ecoutez, avançons.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivons.

20 M. JOSSE : [interprétation]

21 Q. Je souhaiterais complètement changer de sujet, s'il vous plaît,

22 Monsieur Pasic. Je voudrais passer à une autre question, complètement une

23 autre question, Monsieur Pasic. Je voudrais tout d'abord vous poser une

24 question concernant le début de votre contre-interrogatoire de l'an

25 dernier, les questions concernant le document qui comporte la variante A et

26 B que l'on trouve à l'intercalaire numéro 38 du classeur de pièces à

27 conviction. Pourriez-vous, s'il vous plaît, passer à l'intercalaire numéro

28 38. Vous ne l'avez pas devant vous. Je crois que vous avez déposé en disant

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1 que vous aviez vu ce document par le passé, à un moment donné, en 1991-

2 1992. Vous rappelez-vous quand vous avez vu ce document pour la première

3 fois ?

4 R. J'ai dit cela la dernière fois. J'ai dit que je ne pouvais pas être sûr

5 du moment où je l'ai vu pour la première fois, bien que j'aie connaissance

6 de ce document mais je ne peux pas vous donner de date. Si je vous donnais

7 une date, je serais en train de mentir parce que je ne connais pas la date

8 précise.

9 Q. Avez-vous un souvenir quelconque de vous être retrouvé à une réunion à

10 Sarajevo, par exemple, où ce document aurait été

11 remis ?

12 R. J'ai parlé déjà de cela. J'ai dit que je ne me souvenais pas. On en a

13 discuté la dernière fois, et je ne peux vraiment pas m'en souvenir. Je ne

14 sais pas si, lors de cette réunion à l'hôtel Holiday Inn, cela a eu lieu ou

15 pas. Je ne peux pas m'en souvenir. Je suis allé à des réunions du Holiday

16 Inn, mais à titre privé aussi bien que tout à fait indépendamment des

17 questions politiques pour certaines questions. Je connaissais l'hôtel

18 Holiday Inn, mais je ne me souviens pas si j'ai participé à cette réunion.

19 Q. Dans quelle mesure est-ce que ceci a joué un rôle en ce qui concerne la

20 manière dont vous administriez Novi Grad en 1992 ?

21 R. Cela n'a joué aucun rôle. Si je peux dire cela plus ou moins. Enfin,

22 vers la mi-avril, comme je l'ai dit, en gros vers mi-avril, la cellule de

23 Crise a été créée en 1992. Et si vous regardez quand ce document est

24 apparu, nous n'avons pas travaillé conformément à ces instructions ou ces

25 directives parce qu'avant tous ces événements, les autorités

26 fonctionnaient. Comme je l'ai dit, la majorité était aux mains de la

27 population serbe, de la majorité de la population serbe qui vivait là.

28 Donc, le partage des pouvoirs avec le SDA, bon, nous avons eu nos voix du

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1 point de vue pourcentage dans des élections qui avaient été tenues en 1990.

2 Q. Pourriez-vous maintenant, s'il vous plaît, passer à l'intercalaire

3 numéro 5, à savoir, le document P1025. Il y a une partie de ce document qui

4 vous a été montrée la dernière fois ou qui vous a été présentée pour être

5 plus précis la dernière fois. Je voudrais que vous regardiez une ou deux

6 parties de ce document, notamment le deuxième paragraphe, qui dit : "Compte

7 tenu de sa position géographique et stratégique, Bosanski Novi était devenu

8 intéressant pour toutes les parties en guerre, c'est-à-dire, les

9 adversaires du temps de guerre et les adversaires du point de vue

10 idéologique. La partie extrémiste du SDA avait commencé à délivrer des

11 armes sur une échelle massive à des habitants d'origine ethnique musulmane,

12 préparés essentiellement à exécuter les tâches qui leur seraient confiées

13 par le SDA."

14 Est-ce que c'est une observation véridique, véritable ?

15 R. Si vous me permettez de regarder ce texte, cette partie du texte, je ne

16 sais pas de qui émane ce rapport, mais c'est peut-être une interprétation

17 libre. Oui, cela existait. Il y a eu des armes du côté de la population

18 musulmane, et le SDA disposait d'armes avant le conflit. On peut -- vous

19 pouvez le voir. Lorsque les groupes ont été désarmés, ils avaient

20 effectivement des armes militaires. Comme je l'ai déjà dit, cette partie a

21 été faite par les militaires, ou plutôt par l'état-major de la Défense

22 territoriale ou par la police. Je n'ai pas pris part à ces événements, mais

23 j'en ai été informé. Probablement, certaines de ces personnes pourraient --

24 seraient mieux placées pour vous dire combien d'armes ont été trouvées, et

25 qui était chargé de ces armes. Parce que personnellement, je ne me suis pas

26 concentré sur cet aspect puisque cela ne relevait pas de mon mandat.

27 D'après les personnes responsables, il y avait ces armes qui étaient aux

28 mains de la population musulmane.

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1 Q. Troisième paragraphe, il y a un certain nombre de noms de personnes qui

2 étaient mêlées à cela, qui étaient mêlées à des activités paramilitaires

3 musulmanes. Lisez donc ces noms pour vous-même, et pourriez-vous nous dire

4 si vous savez si ces affirmations sont exactes, notamment en ce qui

5 concerne ces noms.

6 R. Je vais répéter. Les renseignements que j'ai reçus d'après lesquels ces

7 personnes, tout d'abord dans les services de Sécurité nous ont informés,

8 c'était les personnes qui étaient les protagonistes principaux de ce type

9 de formation pour ce qui est des armes. Donc, les personnes dont les noms

10 sont énumérés, énumérés ou mentionnés ici sont les mêmes que les personnes

11 que l'on m'a donné à croire faisaient ce genre de choses.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Hanoteau se demande quelle est

14 l'origine de ce document.

15 M. JOSSE : [interprétation] M. Harmon avait traité de cette question la

16 dernière fois.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous --

18 M. JOSSE : [interprétation] C'est dans le compte rendu, Monsieur le

19 Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si nous n'avons pas vu cela, dans

21 ce cas là, je vais m'excuser. Je vous prie de poursuivre.

22 M. JOSSE : [interprétation]

23 Q. A l'intercalaire numéro 10, première page. Je voudrais vous parler de

24 la phrase qui se trouve au milieu du paragraphe numéro 3, immédiatement

25 après qu'on dise dans votre langue [B/C/S] une phrase qui dit : "Il n'y a

26 pas eu de conflits armés dans ce territoire, mais la situation est

27 extrêmement tendue." Ce document est daté du

28 15 mai 1992. Est-il vrai qu'il n'y avait pas eu de conflits armés dans ce

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1 territoire avant le 15 mai 1992 ?

2 R. Je ne sais pas qui a écrit ceci, si ceci a été fait par -- rédigé par

3 le général Talic, et ce qu'il voulait dire lorsqu'il parle de "conflit

4 armé." A mon avis, un conflit armé commence lorsque les premières balles

5 sont tirées. J'ai parlé de cette situation en ce qui concerne la nuit entre

6 le 10 et le 11. La police militaire se trouvait dans le village de Blagaj.

7 Je ne pense pas que j'aie besoin de reparler de tout cela, mais s'il faut

8 que je le fasse, je le ferai. C'était déjà à ce moment-là qu'un conflit

9 armé a commencé. Ce que l'auteur de ce texte voulait dire lorsqu'il dit que

10 le conflit armé a commencé, je ne sais pas. Je ne sais pas ce qu'il voulait

11 dire. Peut-être qu'il avait à l'esprit un conflit à plus grande échelle.

12 Mais cela, c'est mon point de vue subjectif.

13 Q. A l'intercalaire numéro 11, vous avez là un long rapport adressé au

14 poste de sécurité publique de Bosanski Novi. A la page 2 dans les deux

15 langues, dans votre version, c'est la phrase qui se trouve immédiatement

16 avant le paragraphe qui commence par le

17 9 juin 1992. La phrase qui précède, c'est : "Au cours de leur séjour dans

18 le centre de réception, les habitants avaient des chambres, des pièces de

19 salle de sport ou de réception du club de football, qui étaient à leur

20 disposition. On leur a fourni de l'eau et des vivres de façon régulières."

21 Vous nous avez déjà dit que cette information vous avait été transmise pour

22 ce qui était des personnes qui se trouvaient dans le stade de football;

23 est-ce que c'est exact ?

24 R. Oui, c'est ce que j'ai déjà dit deux ou trois fois. J'ai dit comment

25 ceci avait été garanti et comment on leur avait fourni des vivres et

26 d'autres effets.

27 Q. Je voudrais vous demander de regarder un document que nous avons vu

28 pour la première fois aujourd'hui et qui est devenu le P1030. L'Accusation

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1 en dispose et Monsieur le Président. Ce n'est pas vraiment l'original, mais

2 c'est la copie, la première copie ou copie originale si vous voulez. Là

3 encore, Monsieur Harmon tient à ce que ce document ne devienne pas --

4 n'entre pas dans le compte rendu d'audience de la Chambre. Je n'ai pas de

5 problème en ce qui concerne cela, mais j'aimerais bien que le témoin jette

6 un coup d'œil. Vous nous avez dit plus tôt, Monsieur Pasic, que vous ne

7 pensiez pas que votre signature apparaissait au numéro 11. En regardant cet

8 exemplaire-ci, est-ce que c'est toujours votre position ?

9 R. Non. Je n'ai pas dit que ce n'était pas ma signature; j'ai dit que je

10 n'étais pas à Korcanica. Je suis à 100 % sûr de cela. Je ne me suis jamais

11 trouvé à Korcanica. Je ne sais pas si j'y suis avant la guerre; je pense

12 que non. Je crois que ceci est bien mon écriture manuscrite mais j'ai des

13 doutes en ce qui concerne cette liste. Je ne sais pas si quelqu'un a ajouté

14 les lignes qui se trouvent en haut de la page ou est-ce que ceci concerne

15 une autre réunion. J'ai dit que j'étais à des réunions à Sanski Most, que

16 c'étaient des réunions à caractère régional. Il s'agissait essentiellement

17 de briefings sans importance du point de vue juridique. On nous donnait

18 simplement des renseignements sur ce qui se passait dans le territoire de

19 la municipalité et dans les deux municipalités voisines. Ce que je dis,

20 c'est que je n'étais pas à Korcanica. Je n'ai jamais soutenu cela en ce qui

21 concerne le

22 numéro 11. Ce n'est pas mon prénom et ce n'est pas mon nom de famille.

23 Q. Avez-vous eu l'occasion de lire le rapport de cette réunion -- de

24 réunions à Korcanica ?

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La dernière ligne de la dernière

26 question posée au témoin était comme suit -- de la réponse donnée par le

27 témoin était : "Je n'ai jamais dit que sous le

28 numéro 11 ce n'est pas mon nom, ce n'est pas mon prénom." Mais qu'en est-il

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1 de la signature ?

2 M. JOSSE : [interprétation] Puis-je ?

3 Q. Est-ce que c'est votre écriture ? Est-ce que le --

4 R. Oui, c'est bien mon écriture.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà. Je n'étais pas sûr si vous

6 parliez de l'écriture, enfin de la signature ou bien juste de votre nom ou

7 de votre prénom.

8 M. JOSSE : [interprétation]

9 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner le procès-verbal de cette

10 réunion ?

11 R. Je pense que j'ai lu le procès-verbal de cette réunion. C'est vrai

12 qu'il y a un certain nombre de choses qui sont illisibles. Mais je pense

13 avoir lu cela. C'est justement pour cela que je peux vous dire que je ne

14 suis pas au courant de cela. Si l'on peut dire que c'est un document, je ne

15 sais pas vraiment quelle était la force de ce document, la force juridique.

16 C'est vrai qu'il y a eu des réunions entre communales mais pas à Sanski

17 Most et à Korcanica. De toute façon, ces réunions n'avaient aucune valeur

18 juridique, aucun pouvoir, en tout cas en ce qui concerne les réunions

19 auxquelles j'ai assisté moi. Je ne suis pas au courant de la tenue d'une

20 telle réunion.

21 M. HARMON : [interprétation] Excusez-moi. Je voudrais demander à intervenir.

22 Dans la traduction en langue anglaise, il y a une ligne que l'on peut voir;

23 la fonction, la localité, la date. On peut lire trois mots écrits à la main.

24 Peut-être que le témoin peut nous aider.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons voir. Tout en haut -- centre du

26 document - est-ce que le témoin peut lire ce qui figure tout en haut du

27 document. Monsieur Pasic, vous allez voir que tout en haut du document, on

28 peut lire trois mots. Le premier mot ne semble pas être complet. Est-ce que

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1 vous pourriez lire ce qui est dit là dans votre langue ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer. Il me semble qu'ici on peut

3 lire : "Le deuxième accord entre les municipalités," Ensuite, on peut lire,

4 "Korcanica, le 14 juin 1992." C'est en haut à droite.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de nous avoir aidés.

6 Vous pouvez continuer.

7 M. JOSSE : [interprétation] Je suis tout près de la fin vu l'heure.

8 Q. Je vous prie de bien vouloir vous référer à

9 l'intercalaire 23. A la page 4 en B/C/S, deux paragraphes en haut à partir

10 du haut de la page, juste après le début de la troisième section, pourriez-

11 vous lire rapidement pour vous ces deux paragraphes qui figurent à la page

12 3 en anglais parce qu'on vous a posé une question au sujet de cela plus tôt.

13 On y parle de la vengeance, le désir de vengeance venant de l'ennemi qui

14 manque de nourriture, qui augmente le prix, la pauvreté, le désarroi social.

15 Il manque de l'électricité. Il manque de pétrole, de carburant et

16 l'économie qui est paralysée. Est-ce que la situation était mauvaise pour

17 toute la population de la municipalité au mois de juin 1992, Monsieur

18 Pasic ?

19 R. J'en ai déjà parlé, la situation était difficile pour tout le monde,

20 pas seulement pour les Musulmans. Si vous n'avez pas de carburant, si vous

21 n'avez pas d'huile de chauffage, cela veut bien dire que la situation est

22 très difficile, elle est extraordinaire quelle que soit la nationalité de

23 la population pour les Serbes et pour les Musulmans. Vous avez peut-être de

24 la nourriture, mais vous ne pouviez pas la conserver parce que nous

25 n'avions pas d'électricité. Donc, nous nous sommes trouvés dans une

26 situation extrêmement difficile. C'est toute la population, la population

27 toute entière de Novi Grad qui s'est trouvée dans cette situation difficile.

28 M. JOSSE : [interprétation] Je vous remercie. Je vous remercie de m'avoir

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1 permis de poser mes questions, vu l'heure tardive.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas de questions pour vous,

3 Monsieur Pasic. Ce qui veut dire qu'avec ceci se termine votre déposition

4 en l'espèce.

5 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il reste encore quelques documents qui

7 ont besoin de recevoir des cotes, mais nous allons pouvoir en parler demain

8 -- demain après midi.

9 Monsieur Pasic, je voudrais vous remercier d'être venu ici à La Haye, pas

10 seulement une seule fois mais à deux reprises, et au moins je peux vous

11 dire que je suis bien content que vous ayez terminé votre déposition

12 aujourd'hui. Je vous remercie d'avoir répondu aux questions des deux

13 parties et des Juges de la Chambre, et je vous souhaite un bon voyage de

14 retour.

15 Madame l'Huissière, pourriez-vous escorter le témoin, s'il vous plaît.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

17 [Le témoin se retire]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons revenir à huis clos

19 partiel pour juste quelques instants.

20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos

21 partiel, Monsieur le Président.

22 [Audience à huis clos partiel]

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11 [Audience publique]

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- d'avoir pris un quart d'heure de

13 minutes supplémentaires de leur travail au-delà des heures habituelles.

14 Nous levons la séance à présent et nous allons nous retrouver demain à 14

15 heures 15 minutes dans la salle d'audience numéro II.

16 --- L'audience est levée à 14 heures 01 et reprendra le mardi 17

17 janvier 2006, à 14 heures 15.

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