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1 Le vendredi 27 janvier 2006
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous. Monsieur le Greffier de
7 l'audience, veuillez s'il vous plaît appeler l'affaire.M. LE GREFFIER :
8 [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il s'agit de l'affaire IT-00-
9 39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
11 Maître Josse, est-ce que vous êtes prêt à poursuivre l'interrogatoire du
12 témoin ?
13 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais vous rappeler, Monsieur
15 Savkic, que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous
16 avez faite au début de votre déposition, qui était de dire la vérité et
17 toute la vérité, et rien que la vérité.
18 Maître Josse, c'est à vous.
19 M. JOSSE : [interprétation] J'ai oublié hier d'introduire Dragan Markovic,
20 qui nous aide dans notre équipe. Il nous aidera pour ce qui est de la
21 présentation d'un CD plus tard.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bienvenue.
23 LE TÉMOIN : TOMISLAV SAVKIC [Reprise]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 Interrogatoire principal par M. Josse: [Suite]
26 Q. [interprétation] Monsieur Savkic, lorsque nous avons terminé
27 hier, je vous posais des questions concernant la distance entre Vlasenica
28 et Milici, et vous avez dit à la Chambre que vous viviez essentiellement à
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1 Milici, qu'il était très difficile de se rendre à Vlasenica. Mais nous
2 savons que vous étiez à Vlasenica le 14 avril pour la séance de
3 l'assemblée; c'est bien cela, n'est-ce pas ?
4 R. Oui. La séance tenue le 14 avril, je ne sais pas le numéro de
5 cette séance.
6 Q. Et quand a été la fois suivante après cela que vous êtes allé à la
7 ville de Vlasenica ?
8 R. Vraiment, je ne parviens pas à m'en souvenir, mais cela fait pas mal de
9 temps après cela, peut-être que c'était 20 jours plus tard ou peut-être,
10 30, peut-être davantage.
11 Q. Pour autant que vous le sachiez, les actes de violence, comment se
12 sont-ils déchaînés dans votre municipalité ? Comment est-ce que cela a
13 éclaté ?
14 R. Les violences se sont accrues parce qu'il y avait beaucoup de sabotages
15 et d'embuscades qui ont eu lieu au cours de cette période sur les routes
16 principales --
17 Q. Arrêtez ici, s'il vous plaît.
18 R. -- j'en ai déjà parlé.
19 Q. Lorsque vous parlez de "cette période," que voulez-vous dire
20 exactement, comme période ? Quelle date exacte ?
21 R. Je pense à la période qui va de la fin du mois d'avril et l'ensemble de
22 tout le mois de mai.
23 Q. Il se peut que vous ayez mentionné les sabotages et les embuscades dans
24 un contexte légèrement différent, mais je ne vous demande pas d'être
25 précis. Maintenant, qu'entendez-vous par sabotages et embuscades ?
26 R. Je pense à des sabotages, à des embuscades sur la route principale de
27 Vlasenica-Milici-Zvornik et Bratunac. La mine de bauxite de Milici, cette
28 route qui conduit Skelani, la route régionale fait également partie de
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1 cela. Lorsque nous parlons de sabotage, j'ai déjà dit que plus tard, il y
2 avait eu le pont de Nova Kasaba, qui avait été détruit. C'était sur la
3 route principale. J'ai parlé également de l'un des tunnels, la route
4 régionale vers la mine, et le fait que la route ait été bloquée par des
5 troncs d'arbres après le tunnel.
6 Toutefois, tout au long de cette période, des formations armées, tout
7 particulièrement dans le village de Zutica dans la direction de Rudnik,
8 constituaient des barrages, coupaient les routes, arrêtaient les camions
9 qui transportaient la bauxite et aussi arrêtaient des bus qui
10 transportaient des voyageurs. L'incident le plus grave s'est produit le 21
11 mai, je crois, lorsque dans ce même village, une formation armée a arrêté
12 un petit camion TAM qui transportait des civils. Ce type de camion peut
13 porter trois tonnes et il était recouvert d'une bâche et on s'est servi
14 d'explosifs.
15 Cette fois-là, deux femmes ont été tuées, si je me rappelle bien et
16 aussi un petit enfant -- en fait, non un jeune homme de 17, 18 ans, et je
17 crois également cinq hommes. Cela a été la première fois que j'ai vu, en
18 fait, l'apparence des victimes, lorsque des personnes ont été tuées par des
19 explosifs ou massacrées. Je crois que deux enfants et un homme ont réussi à
20 échapper de ce petit camion ainsi qu'une femme qui a réussi à s'échapper.
21 Q. Je --
22 R. Un autre incident important a eu lieu --
23 Q. Je vous arrête là. Quelques éléments. Au cours de cette période, pour
24 commencer, qui va de la mi-avril, disons, jusqu'à la fin du mois de mai,
25 personnellement qu'est-ce que vous faisiez ?
26 R. J'avais deux emplois. Une consistait à diriger tout ce qui concernait
27 la sécurité -- le service du génie, là où c'était nécessaire. Par exemple,
28 j'étais la personne qui a fait débloquer cette route après que le tunnel a
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1 été miné parce dans la JNA, je faisais partie du génie. C'était le type de
2 tâche que j'avais à faire le cas échéant, s'il était nécessaire de vérifier
3 s'il y avait des mines ou d'en éliminer les effets. C'était de cela ce dont
4 je m'occupais parce qu'il y avait déjà un chaos étendu dans cette région et
5 je donnais aussi des conseils pour ce qui était de fortifier des positions
6 ainsi que d'autres questions qui avaient trait à la protection des
7 villages, comme le ferait le génie. C'était en fait ma tâche.
8 Q. Maintenant, ces actes de violence que vous avez commencé à décrire,
9 comment est-ce que vous en avez été informé. En d'autres termes, quelles
10 ont été vos sources d'information à l'époque ?
11 R. J'ai vu tout cela de mes propres yeux. J'ai déjà dit que j'ai vu le
12 pont de Kasaba, et j'ai décrit la façon dont il a été détruit. J'ai aussi
13 dit que personnellement j'étais responsable de m'occuper de dégager les
14 routes et les endroits où il y avait eu les explosions. J'ai utilisé les
15 engins de construction et de terrassement de la mine pour débloquer la
16 route.
17 Lors d'une embuscade particulière, toutefois, à Zutica, j'étais celui qui
18 personnellement a vu au centre médical de Milici lorsque ces personnes ont
19 été amenées, quand on les a sorties des véhicules dans lesquels elles
20 avaient été amenées. Je les ai vues personnellement. La personne qui a
21 réussi à en échapper, son nom est Radomir Ilic et son surnom est Kratki. Il
22 nous a raconté tout ce qui s'était passé ce jour-là à Zutica.
23 Quand nous parlons de l'embuscade à Konjevic Polje, je crois que ceci a eu
24 lieu le 26 mai. Comme je l'ai déjà dit, nous avons continué à travailler.
25 La société a continué de fonctionner comme société. Nous avons continué de
26 transporter le minerai à Glinica et Birac, ceci par rapport à la période
27 précédence où, selon la période, les camions partaient et partaient en
28 colonne de 20 à 50 camions. La formation musulmane ou l'organisateur
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1 principal était la personne dont on a déjà parlé, Ferid Hodzic; l'unité
2 militaire déjà formée pour laquelle nous avons vu un document, c'était la
3 16e Brigade musulmane, les membres de cette brigade à Konjevic Polje ont
4 préparé une embuscade pour ce convoi, lors de son retour de Zvornik
5 lorsque --
6 Q. Je vous prie de vous arrêter. Maintenant je vais --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse.
8 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a précisé, il y a quelques
10 minutes, ce qu'il décrivait c'était depuis le début d'avril jusqu'à la fin
11 du mois de mai.
12 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre a entendu qu'une prise de la
14 municipalité avec un appui militaire avait eu lieu le 23 ou 24 avril. Pour
15 mieux comprendre la déposition de ce témoin, je pense qu'il serait très
16 utile de savoir quand ces événements ont eu lieu, et s'il y avait déjà un
17 conflit armé ou tout au moins cette prise de contrôle, quel que soit le
18 terme que vous vouliez employer, si elle avait déjà eu lieu ou pas. Parce
19 qu'elle était la cause de cela ? Qu'est-ce qui l'a causée parce que la
20 déposition, jusqu'à maintenant, tend à dire : "Voilà, tout ce qui s'est
21 passé" et je considère que c'est une explication de la situation qui pourra
22 rendre les choses plus claires pour la Chambre, beaucoup plus facile pour
23 la Chambre de comprendre les événements qui ont suivi, mais vous
24 comprendrez que nous avons besoin un peu d'avoir l'ensemble du contexte
25 pour comprendre pleinement ce dont il s'agit. C'est cela que la Chambre
26 souhaiterait avoir, c'est comprendre pleinement la situation.
27 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, je suis tout à fait
28 disposé à faire le nécessaire. Je voudrais ajouter qu'à ce stade, comment
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1 j'ai l'intention de présenter la déposition du témoin par rapport à ce qui
2 s'est passé au cours de la guerre en 1992, comme ceci est devenu apparent
3 déjà, et dont il a une connaissance très détaillée. Comme d'habitude, il
4 est difficile de démêler ce qui est témoignage direct, témoignage de
5 seconde main ou de troisième main. La Défense a quelques documents pour
6 l'aider et je les proposerais à la Chambre, mais j'utilise ce terme avec
7 prudence pour dire qu'il faut voir, parce que sans cela, cela va prendre
8 beaucoup de temps. Mais vos préoccupations précises, cela, je suis, tout à
9 fait, prêt à y déférer.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre, Maître Josse.
11 M. JOSSE : [interprétation]
12 Q. Maintenant, Monsieur Savkic, avant que nous n'examinions les incidents
13 précis dont vous dites qu'ils ont eu lieu au cours des hostilités dans le
14 courant de 1992, la Chambre, cela se comprend, voudrait que vous replaciez
15 la description des événements que vous avez déjà mentionnés dans une sorte
16 de contexte. Dans une certaine mesure, j'ai essayé de le faire en vous
17 demandant où vous vous trouviez matériellement à ce moment-là.
18 Est-ce que vous étiez militaire, il n'y a pas de contestation, est-ce
19 que c'était entièrement aux mains des Serbes et sous le contrôle des
20 Serbes ? Commençons par cela.
21 R. J'ai déjà dit avant le partage à Milici, avant cette affaire, lorsque
22 le pouvoir a été pris à Vlasenica, la municipalité de Milici a été formée
23 sans qu'il y ait d'éléments ethniques ou d'importance par groupes ethniques
24 et elle avait son propre conseil exécutif et les autres organes
25 nécessaires.
26 Je voudrais néanmoins préciser au président de la Chambre, juste pour
27 lui rappeler, que lorsque nous parlons de paramilitaires, d'organisations
28 paramilitaires et d'armements, alors, j'ai dit que dès septembre 1991, en
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1 particulier en février et mars 1992, dans le village de Djile et cet autre
2 village, Zutica, il y avait tous ces éléments qui se sont produits. C'est
3 exactement la même chose, l'apparition de formations armées, les personnes
4 qui arrêtaient les travailleurs, les faisaient repartir, qui les
5 insultaient, qui arrêtaient et détournaient des camions. Cette affaire dans
6 le village de Zutica a eu lieu au mois de février et aussi en mars.
7 Q. Qu'en est-il des parties de la municipalité qui, d'après le protocole,
8 avaient été accordées aux Musulmans pour qu'ils puissent les diriger. Avez-
9 vous la moindre idée de ce qui s'est passé là du point de vue de la prise
10 de contrôle ?
11 R. Si vous pensez aux villages qui sont géographiquement restés dans la
12 municipalité de Milici, j'en ai déjà mentionné quelques-uns. Chaque
13 incident qui a eu lieu comme, par exemple, celui de Djile, a été débattu,
14 discuté. Par exemple, très souvent, la direction, les dirigeants --
15 Q. Je vais vous arrêter encore une fois. Je vous arrête encore une fois.
16 Il est vrai, n'est-ce pas - j'espère qu'on va me permettre de guider
17 sur ce point - pour autant que vous étiez concerné, après qu'on soit mis
18 d'accord sur le protocole concernant la municipalité, la municipalité de
19 Vlasenica n'existait plus et il y avait donc deux ou trois entités
20 distinctes, et vous avez parlé seulement de l'entité de Milici. Je vous ai
21 bien compris ?
22 R. Je parlais de Milici maintenant, la municipalité de Milici. Pour autant
23 que cela nous ait concerné, il s'agissait d'une municipalité qui était
24 totalement licite, la municipalité de Milici.
25 Q. Est-ce que vous avez été en mesure de parler en confiance, avec
26 autorité, en ce qui vous concerne, par rapport à ce qui s'est passé, ce qui
27 était à l'époque la municipalité de Vlasenica, après le 14 avril 1992 ?
28 R. J'ai déjà dit que je ne peux parler que sur la base de conversations
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1 qui ont suivi et d'articles ou de causeries avec des Serbes mais aussi avec
2 des Musulmans qui sont revenus après 1995 à Vlasenivca. C'est de cela que
3 je peux parler. Je n'étais pas présent personnellement, je n'étais plus
4 présent. Les renseignements étaient essentiellement les suivants : après
5 que Vlasenica a été prise et que les organes du pouvoir aient été formés
6 dans l'ensemble du secteur --je parle du reste du territoire maintenant, la
7 ville de Vlasenica et les villages avoisinants, je ne parle pas de
8 l'enclave de Cerska. Donc, toute tentative qui était faite là pour former
9 les autorités, ceci a été fait et l'assemblée a commencé à fonctionner à
10 nouveau. Le conseil exécutif -- le nouveau conseil exécutif. Quelques jours
11 ont été nécessaires pour constituer ou reconstituer le poste de sécurité
12 publique parce que ce chef qui venait, en fait, de Milici, ne voulait plus
13 y retourner. Très vite, il a repris le nouveau poste de sécurité à Milici.
14 Donc, il y a eu tentative et c'était une tentative couronnée de
15 succès. Toutefois, pendant cette période, il y avait malheureusement des
16 personnes, et c'est pour cela que la dernière fois j'ai cité cet écrivain
17 célèbre qui a gagné le prix Nobel de littérature même si le Juge Président
18 a fait une remarque à ce sujet, mais dans des situations aussi confuses,
19 parfois ce sont les mauvais qui apparaissent à la surface. En l'occurrence,
20 comme le dit cet écrivain, ce sont des personnes qui n'attendent que le
21 moment où une situation se créera pour -- ils ne vont pas essayer de
22 contribuer à une solution de la situation mais --
23 Q. Non, c'est de ma faute. Je pense que la présentation de mon côté
24 aurait pu être meilleure.
25 M. JOSSE : [interprétation] Je présente mes excuses, Monsieur le Président,
26 mais ceci pourra peut-être aider.
27 Peut-on mettre ceci sur le rétroprojecteur, s'il vous plaît ?
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière.
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1 M. JOSSE : [interprétation]
2 Q. Monsieur Savkic, pendant que l'huissière est en train de placer le
3 document sur le rétroprojecteur, il faut que vous écoutiez très
4 soigneusement les questions que je vous pose et que vous essayiez de
5 répondre à ces questions précises. Je suis sûr que les Juges se rendent
6 bien compte que vous avez beaucoup à dire, beaucoup de renseignements que
7 vous souhaitez leur communiquer, mais il vaudrait que vous vous efforciez
8 de répondre à la question posée. Le comprenez-vous ?
9 R. Oui.
10 Q. Pour commencer, vous avez un pointeur là. Pourriez-vous désigner
11 Milici ?
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous, s'il
13 vous plaît, aider le témoin de façon à ce qu'il utilise son pointeur sur le
14 rétroprojecteur plutôt que sur son écran ?
15 Monsieur Savkic.
16 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
17 M. JOSSE : [interprétation]
18 Q. C'est un peu plus au sud-ouest, n'est-ce pas, de l'endroit où vous avez
19 pointé ?
20 R. Ceci se trouve au sud-est ou plutôt un peu plus à l'est par rapport à
21 Vlasenica. Si c'est cela que vous vouliez dire.
22 Q. Bien. Pouvez-vous maintenant nous montrer la ville de Vlasenica ?
23 R. [Le témoin s'exécute]
24 Q. Approximativement maintenant, avec le pointeur, pouvez-vous nous dire
25 où se trouve la frontière de la nouvelle municipalité de Milici, cette
26 municipalité qui a été établie sur la base du protocole signé en avril
27 1992 ?
28 R. La frontière va d'ici à peu près, ce que je montre, au travers de ce
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1 petit village de Pribinici; ensuite cela passe par Vuksici, un petit
2 village aussi; puis Buljevici, Vandzici, Rogosija, Metaljka; et encore un
3 autre village qui n'est pas sur la carte. Mais là où est écrit Sadici
4 Donji, il y a aussi Sadici Gornji, puis Korita; cela passe ensuite par
5 Danici [phon], Drakulici, Bakici, Donji -- ensuite, on traverse ici la
6 rivière de Zeleni Jadar; on compte aussi toute cette zone qui est la zone
7 de Zagradje; puis, cela repasse par les frontières de l'ancienne
8 municipalité dans la direction de Han Pijesak, de Rogatica, de Srebrenica.
9 Ensuite est la frontière en direction de Srebrenica, dois-je le répéter, et
10 la municipalité de Bratunac.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ce n'est pas facile quand on lit le
12 transcript d'essayer de comprendre exactement ce dont on parle. Peut-être
13 que pendant la pause le témoin pourrait tout simplement délimiter la carte.
14 Cela nous aiderait grandement.
15 M. JOSSE : [interprétation] Je suis d'accord avec vous.
16 Q. Maintenant, Monsieur le Témoin, pourriez-vous maintenant nous montrer
17 la frontière entre la municipalité serbe de Vlasenica et la municipalité
18 musulmane de Vlasenica ?
19 R. La municipalité serbe de Vlasenica allait de cette frontière entre la
20 municipalité nouvellement créée de Milici et la municipalité de Han Pijesak
21 jusqu'à où commence la frontière avec la municipalité de Kladanj. C'est là
22 où commence la frontière de la municipalité de Sekovici, ici à peu près sur
23 la carte. Ensuite, ce sont des villages serbes de Lukici, de Simici. Puis,
24 il y a un ruisseau qui ne porte pas de nom, et ensuite, la ville de
25 Vlasenica. Dans la ville de Vlasenica, il y a une frontière particulière,
26 et après Vlasenica, il y a d'autres villages serbes vers la route menant à
27 Milici, et après, il y a la partie qui va vers la rivière Zeleni Jadar.
28 C'est la partie nord-ouest de la municipalité de Vlasenica. C'est la plus
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1 petite municipalité par rapport aux autres municipalités de cette région.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je crois qu'on va essayer de voir
3 si on peut avoir une carte, puis vous demander peut-être pendant la pause
4 de délimiter avec un crayon exactement les différentes zones, ce serait
5 beaucoup plus simple pour tout le monde.
6 Monsieur Josse, vous pouvez continuer.
7 M. JOSSE : [interprétation]
8 Q. Bien. Maintenant prenons, par exemple, le 20 avril 1992, vous êtes à
9 Milici. Est-ce que vous saviez exactement ce qui se passait du côté
10 musulman de la municipalité de Vlasenica ?
11 R. Comme je l'ai dit, c'est le chef de la police qui, bien sûr, venait
12 tous les soirs -- donc il venait me voir à tous les soirs, on conversait,
13 on échangeait des informations. Enfin, on se parlait, puisqu'on était amis
14 après tout. C'est sur la base ce que la police savait que j'étais informé
15 plus ou moins de ce qui se passait dans la plupart des endroits de cette
16 enclave, vers Cerska parce que c'était très important pour nous, c'était
17 important pour le transport du minerai puisque ce minerai empruntait la
18 route de Zvornik et l'enclave juste contiguë à cette route.
19 Q. La Chambre voudrait savoir si vous saviez s'il y avait eu une prise
20 éventuelle de contrôle ?
21 R. Quant à savoir si je l'ai appris le 20 ou 21, au cours de la nuit entre
22 le 20 et 21 ? Oui, bien sûr, je l'ai appris. Je vous en ai donné les
23 détails la dernière fois d'ailleurs. J'ai appris qu'il y avait eu une prise
24 de contrôle a posteriori, deux ou trois jours après quand tout était déjà
25 établi.
26 Q. Il y a quelques minutes, j'ai un peu résumé toutes les informations que
27 vous avez obtenues au cours de plusieurs années pour essayer de bien
28 comprendre ce qui s'était passé dans différents villages serbes au cours du
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1 conflit, et surtout ce qui c'était passé dans ces villages serbes pendant
2 le printemps et l'été 1992. C'est bien vrai ?
3 R. Oui.
4 Q. On peut dire justement que vous possédez beaucoup de détails sur tous
5 ces incidents et vous pouvez vraiment nous en donner beaucoup sur certains
6 de ces incidents, nous donner beaucoup de détails. Je vous demande
7 délibérément des questions qui sont extrêmement larges et assez vagues.
8 R. Oui, oui. C'est vrai. Je pourrais le faire, tout à fait.
9 Q. Maintenant, on va justement rentrer dans les détails en regardant
10 différents documents.
11 M. JOSSE : [interprétation] Si vous pouviez vous tourner vers l'onglet 11.
12 Il s'agit d'un rapport venant du poste de sécurité civile de Milici. C'est
13 signé par M. Bjelanovic. C'est bien le chef de la base de sécurité à
14 laquelle vous faisiez allusion précédemment, M. Bjelanovic ?
15 R. Oui.
16 Q. Je crois que c'est vous qui avez apporté ce document, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Comment l'avez-vous obtenu ?
19 R. C'est sur la base de ce document, dans ce document on ne voit pas la
20 date à laquelle il aurait été rédigé. Je pense que c'est un document qui a
21 été rédigé par le chef de la police, sans doute pour le compte du centre.
22 Il m'a été donné quand j'étais président de la municipalité, enfin il
23 aurait dû m'être soumis, c'est normal. Il s'agit d'un document que je
24 possède depuis un bon moment.
25 Il se rapporte sur la période de guerre. Tout ce que je suis capable
26 de vous dire, c'est si je l'ai reçu avant de devenir président de
27 l'assemblée municipale ou même avant, je ne m'en souviens plus. C'est l'un
28 des documents où l'on a essayé de donner une présentation un peu
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1 professionnelle des pertes encourues, des victimes, et on voit quelles sont
2 les dates impliquées.
3 Q. Pourriez-vous nous dire, si vous le savez, bien sûr, le but que
4 poursuivait M. Bjelanovic quand il a rédigé ce document. Pourquoi a-t-il
5 rédigé ce document ?
6 R. Oui, je sais pourquoi il l'a préparé. Il l'a rédigé pour faire un peu
7 le bilan pour que l'Accusation et pour que les enquêteurs surtout sachent
8 où commencer pour ce qui est des rapports sur les crimes. Jusqu'avant, on
9 avait des informations uniquement par les survivants. Déjà à ce moment-là,
10 il y avait déjà des affaires en cours. Il y avait des gens qui étaient
11 arrêtés, des gens qui avaient été membres de formations musulmanes
12 militaires ou paramilitaires qui avaient fait des déclarations, qui avaient
13 tendance d'ailleurs à confirmer ce qu'avaient déjà déclaré les survivants
14 de ces malheureux accidents ou incidents. Je pense que c'était un des buts
15 de M. Bjelanovic.
16 L'autre point, c'est qu'on essayait aussi de faire le bilan de tous ceux
17 qui avaient perdu la vie au cours des événements sur le territoire de la
18 municipalité de Milici.
19 Q. Je ne vais pas vous demander de passer en revue chacun de ces incidents,
20 l'un après l'autre. En regardant ces huit incidents qui sont décrits ici,
21 vous êtes-vous rendu sur le site d'un de ces incidents mais ce, juste après
22 qu'il soit arrivé pour voir un peu les choses de vos propres yeux, voir un
23 petit peu ce qui s'était passé, pour voir un peu les suites de ce qui
24 s'était passé ?
25 R. Est-ce que je peux regarder peut-être pour voir un petit peu quels sont
26 les incidents qui sont cités ici ? Oui, oui, je ne suis jamais allé là où
27 il y a eu l'embuscade sur le convoi de camions à Konjevic Polje parce qu'on
28 ne pouvait plus y aller, puisque les formations contrôlaient la zone, on ne
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1 pouvait pas y aller. Je suis allé dans tous les autres endroits. Pour ce
2 qui est de Podravanje, qui ensuite a été annexé à la municipalité de Milici,
3 un peu plus tard, j'y étais là, en personne.
4 Q. Elle se trouve où exactement dans le document ?
5 R. Je vais vous le dire. C'est la page 5, numéro 8, attaque musulmane sur
6 le village de Podravanje et sur la mine de Bracan. J'y étais.
7 Q. Alors qu'est-ce que vous faisiez là pendant l'attaque ? Vous y étiez ?
8 R. Le 22 septembre, on m'a dit d'aller préparer une nouvelle mine, enfin,
9 qui soit près de l'ancienne mine et qui était vers le canyon. Il n'y avait
10 pas beaucoup de mineurs qui travaillaient à la mine et il fallait s'assurer
11 qu'ils travaillent en toute sécurité. J'y suis allé le 23 septembre,
12 c'était une espèce de dépôt. C'était un endroit où il y avait déjà des
13 terrassements et j'étais en train de préparer les travaux pour la mine.
14 J'étais là avec deux officiers de sécurité de la mine, qui étaient là aussi,
15 des gardes. Je n'ai pas réussi à tout préparer. Je suis resté dormir là sur
16 place. Et le matin, mais très tôt à l'aube, on s'est rendu sur place pour
17 en terminer avec ce qu'on devait faire. Quand on a commencé à travailler,
18 il y a eu une attaque qui arrivait de toute part. La mine était attaquée
19 ainsi que le village serbe de Podravanje, où il y avait plus de cent
20 familles, qui est adjacent à la mine.
21 Des formations musulmanes sont arrivées très rapidement et ont pris le
22 contrôle de la mine elle-même, du puits de Bracan, qui est sur une colline,
23 qui surplombe un petit peu le puits central de Podracan. Et là, le combat a
24 continué autour de la mine dans le village de Podravanje et ce, pendant
25 toute la journée jusqu'à la nuit.
26 Simultanément, certains des gardes de sécurité, qui étaient à la mine de
27 Bracan, sont arrivés sur notre mine, là où on était. Ils nous ont dit ce
28 qui s'était passé à Podracan, et ils nous ont dit qu'il y avait des gens
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1 qui avaient été tués en haut sur la colline au cours de la nuit et pendant
2 la nuit. Les habitants du village de Podravanje sont arrivés en masse dans
3 les villages.
4 Les villageois nous ont raconté des choses épouvantables. Pendant la
5 nuit, on a remarqué -- je me rappelle d'une autre chose que je voulais vous
6 dire, quand les forces qui nous attaquaient, qui n'attaquaient pas
7 uniquement cet endroit-là mais d'autres endroits aussi, ils ne criaient pas
8 pour la Bosnie-Herzégovine mais ils avaient toujours une espèce de slogan,
9 de cris de bataille, de cris de guerre. Je ne peux pas vraiment dire ce que
10 c'était. Il faut vraiment l'entendre. Il y avait cette espèce de cris de
11 guerre, Allahu Akbar. Tout le monde savait très bien ce qu'ils voulaient
12 dire. Tout le monde savait très bien que c'était ce cri de guerre. Et le
13 jour suivant, plutôt au fur et à mesure que la nuit se déroulait, toute la
14 zone était totalement en plein chaos mais malgré tout, une unité a réussi à
15 nous rejoindre vers le puits central Podracan.
16 Le jour suivant, le lendemain, avec cette unité, nous avait rejointe.
17 On n'avait pas beaucoup de villageois de Podravanje qui n'étaient pas
18 venus. On s'est dit qu'on allait aller les rechercher et voir ce qui leur
19 était arrivé, pour qu'ils nous rejoignent, pour essayer de re-capturer le
20 village de Podravanje. C'était un village très étendu, environ 100
21 kilomètres carré. Malheureusement, il y a qu'environ 18 villageois qui ont
22 rejoint nos rangs. On avait peur. On s'est dit qu'il y avait peut-être des
23 conflits entre habitants, entre villageois.
24 A Bracan, sur ce puits de mine, près d'une maison qui appartenait à
25 un homme appelé Bozo, on a rencontré deux ouvriers, enfin deux gardes, deux
26 gardes de la mine. On arrivait à peine à les reconnaître. Ils avaient l'air
27 de petits enfants de loin, et quand on s'est approché, on s'est rendu
28 compte pourquoi ils avaient cet air-là, parce que les deux, près de la zone
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1 de leur abdomen et des organes génitaux, il y avait des petits morceaux de
2 bois, des braises, ce qu'on voit quand on fait un feu de camp. Le dessous,
3 la partie, cette partie de leurs corps était comme en cendre. D'ailleurs,
4 on les avait enflammés.
5 On a aussi entendu que dans le hameau de Nikolici, il y avait six
6 blessés, qui avaient été blessés et on a réussi à évacuer certains des
7 cadavres. On a vu qu'il y avait des familles entières qui s'étaient fait
8 massacrer. Il y avait la famille Marinkovic, particulièrement, le père, la
9 mère et les deux garçons. Plus tard, les fameux six blessés, dont je vous
10 ai parlé plus tôt, ont été trouvés mais ils étaient déjà morts.
11 Pendant tout le conflit, quand on parle des formations qui viennent
12 de Srebrenica, pas celles qui viennent de Bratunac, Vlasenica et cetera,
13 avec ces formations de Srebrenica, on trouvait très souvent deux cadavres
14 l'un à côté de l'autre. L'un était en état correct et l'autre était
15 totalement massacré. On n'a [imperceptible] pourquoi les militants
16 comprennent pourquoi c'était toujours comme cela. C'était difficile pour
17 les Serbes d'admettre que parfois, ils étaient obligés de laisser leurs
18 blessés derrière eux. On s'est rendu compte ensuite que c'étaient les
19 blessés qui étaient massacrés. Alors que si on trouvait des cadavres, là,
20 les unités ne faisaient rien. Cela, c'étaient les formations de Srebrenica
21 qui agissaient de la sorte. Les Musulmans de Srebrenica qui agissaient de
22 la sorte, qui massacraient les blessés.
23 Q. Très bien, Monsieur Savkic, je vais vous arrêter --
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, j'ai quelques
25 questions à poser pour mieux comprendre.
26 Monsieur Savkic, je comprends bien, certes, que retourner à ces
27 événements épouvantables, est très difficile pour vous. Ce que vous nous
28 dites -- vous nous relatez vraiment des atrocités. Cela dit, j'aimerais
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1 vous poser quelques questions simples d'abord.
2 Vous nous parliez du village de Podravanje. Vous avez dit que vous
3 étiez présent, personnellement, au cours de l'attaque. Vous nous avez dit
4 que Podravanje avait ensuite été annexé à la municipalité de Milici. Quand
5 vous y étiez, quand il y a eu l'attaque, Podravanje faisait partie de
6 quelle municipalité nouvellement établie ? Il était de quel côté ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] A cette époque, Podravanje faisait
8 partie de la nouvelle municipalité de Milici.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela veut dire quoi
10 exactement quand vous dites que "Podravanje a ensuite été annexé à la
11 municipalité de Milici" ? Pourquoi est-ce que vous avez dit, "ensuite" ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis peut-être mal exprimé. Podravanje
13 avant -- non, attendez que je reprenne tout cela, pour être clair.
14 Pendant cette période, jusqu'à la fin 1992 -- pendant toute la période,
15 tous les villages serbes sur le territoire de la municipalité de Srebrenica
16 ont été incendiés, rasés, pillés, et la population que les Musulmans
17 pouvaient massacrer a été massacrée. A la fin 1993, à part trois petits
18 villages, Petrici, Kalimanici et Crvica avaient été incendiés. Donc
19 Podravanje, jusqu'au 24, faisait partie de la municipalité de Milici.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne comprends pas très bien pourquoi
21 est-ce que vous avez dit que : "plus tard, elle a été annexée à Milici". Si
22 vous avez dit que c'était plus tard, cela signifie qu'auparavant elle
23 n'était pas annexée à Milici.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends. Je comprends. Quand je disais
25 "plus tard," cela veut dire quand la municipalité de Milici a été formée.
26 C'est facile à voir sur le document, on voit bien que Prodravanje ne
27 faisait pas partie de cela, puisque cela faisait partie de la municipalité
28 de Srebrenica. Quand tous les villages dans la municipalité de Srebrenica,
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1 tous les villages serbes, ont été brûlés par les formations musulmanes de
2 Srebrenica, à ce moment-là, cet endroit a été rattaché à la municipalité de
3 Milici et d'ailleurs tous les citoyens étaient d'accord.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je vous ai bien compris, à
5 savoir que Podravanje, dans le système existant à l'époque, Podravanje ne
6 se trouvait pas sur le territoire de la municipalité de Vlasenica, mais sur
7 le territoire de la municipalité de Srebrenica, n'est-ce pas ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ma deuxième question est la
10 suivante, et je voudrais être sûr que j'ai bien compris votre témoignage,
11 vous avez dit que votre tâche était de poser des mines à proximité de la
12 mine de minerai. Bien sûr, en anglais, il y a deux fois le mot "mine," qui
13 veut dire en même temps la mine et des mines, est-ce que je vous ai bien
14 compris à savoir qu'il s'agissait des mines posées à la proximité de la
15 mine de minerai pour la protéger, la mine qui faisait partie de
16 l'entreprise où vous travailliez ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai dit que le
18 champ de mines se trouvait dans la partie qui allait vers le défilé de la
19 rivière Jadar vers l'endroit où se trouvait une sorte de dépôt de déchets,
20 des déchets qui étaient extraits de cette exploitation de minerai et
21 déposés dans cet endroit.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que cela se trouvait
23 également sur le territoire de Srebrenica, cet endroit où vous avez posé
24 des mines ou sur le territoire de l'ancienne municipalité de Vlasenica ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela se trouvait sur le territoire de
26 l'ancienne municipalité de Vlasenica, parce que la partie centrale de la
27 mine se trouvait sur le territoire de la municipalité de Vlasenica.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le village se trouvait sur le territoire
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1 de la municipalité de Srebrenica et la mine se trouvait sur le territoire
2 de Vlasenica, n'est-ce pas ?
3 Oui, c'étaient mes questions.
4 Vous pouvez continuer, Monsieur Josse.
5 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 M. MARGETTS : [interprétation] Nous venons de recevoir la copie de la carte
8 qui a été utilisée --
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous allons demander au témoin
10 durant la pause que -- je vous remercie.
11 M. JOSSE : [interprétation] Je prie qu'on accorde une cote à ce document.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote D137 pour l'onglet 11.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par rapport à cela, permettez-moi de
15 vous demander, Monsieur Savkic, compte tenu du fait qu'il s'agit de la
16 liste des victimes civiles pour lesquelles vous dites que cette liste a été
17 établie aux fins de procéder aux recherches ultérieures -- est-ce que des
18 listes similaires ont été faites pour les victimes civiles qui n'étaient
19 pas Serbes ou d'appartenance ethnique serbe ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'il s'agissait des préparatifs pour
21 engager des poursuites pénales, c'est-à-dire, pour l'instruction menée par
22 les autorités compétentes. Quand il s'agit des incidents, des événements
23 survenus dans des villages musulmans, je sais qu'il y avait des
24 instructions qui avaient été ouvertes par rapport à cela.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, je ne parle pas uniquement des
26 villages musulmans. Je pense également aux victimes qui n'étaient pas
27 Serbes sur le territoire contrôlé par les Serbes.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant la période dont on parle, si on parle
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1 toujours du mois de septembre. Pendant cette période, la ligne de front
2 existait déjà entre les enclaves serbes et les enclaves musulmanes, si je
3 peux m'exprimer comme cela. C'est ainsi que pendant cette période, il n'y
4 avait pas de victimes, excepté les victimes parmi les membres de l'armée.
5 Je vous parle des incidents qui sont survenus pendant la période du mois de
6 mai, indépendamment du fait qu'il s'agissait des victimes du côté serbe ou
7 du côté musulman, donc il y avait des enquêtes pénales menées par rapport à
8 cela.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que je devrais comprendre
10 que cette liste est une liste exhaustive c'est-à-dire que cette liste
11 englobe les victimes musulmanes qui étaient victimes des infractions
12 pénales ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette liste ne contient pas les noms des
14 victimes musulmanes.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ce n'est toujours pas clair. Est-ce
16 que vous voulez dire que pendant la période dont on parle sur le territoire
17 contrôlé par les Serbes, il n'y avait pas de victimes musulmanes, des
18 instructions pénales, des activités pénales, qu'il n'y avait qu'eux de
19 victimes lors des activités de combat ? Je ne sais pas comment comprendre
20 votre déposition dans ce sens-là. Nous sommes en train de parler de la
21 période -- ou au moins ce rapport couvre la période de la fin du mois 1992
22 et du mois de juin, mi-juin, du mois de septembre, le 24 septembre. Il ne
23 m'est pas tout à fait clair. Ce que vous dites, à savoir s'il y avait des
24 victimes non-Serbes -- qui n'étaient pas Serbes et que vous avez appelé les
25 victimes des activités criminelles ou pénales pendant cette période-là ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà expliqué que cette liste a été
27 établie après les événements. J'ai également dit quand il s'agit du mois de
28 septembre, quand il s'agit de l'incident survenu à Podravanje que déjà
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1 alors la ligne de front a été créée et c'était comme pendant la Première
2 guerre mondiale, il y avait des tranchées des deux côtés. C'était une
3 guerre de tranchées et si on parle du mois d'avril et du mois de mai,
4 toutes les victimes, les victimes serbes et les victimes musulmanes pendant
5 cette période de temps ont été inhumées. Lorsqu'il s'agit des victimes
6 musulmanes pendant cette période-là, je sais que le poste de police a mené
7 des enquêtes criminelles et s'adressait au parquet par la suite quand il
8 s'agissait de crimes ou d'infractions pénales graves. Je sais qu'il y avait
9 des enquêtes pénales qui ont été menées et que les parquets compétents en
10 étaient informés.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela ne nous donne pas quand
12 même de réponse définitive par rapport à ma question, c'est-à-dire, si
13 cette liste contient également les noms des victimes qui n'étaient pas
14 Serbes, est-ce qu'il existait des listes similaires qui englobaient les
15 noms des victimes qui n'étaient pas Serbes, des victimes de ces infractions
16 pénales ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas par rapport à ce contexte-là,
18 mais je sais qu'il y avait des listes. Mais maintenant, je ne peux pas me
19 souvenir d'où provenaient ces listes, mais ces listes elles existaient.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
21 Maître Josse, vous pouvez continuer.
22 M. JOSSE : [interprétation] Je vais revenir au document à l'intercalaire
23 11. Mais maintenant, je vous prie de regarder à l'intercalaire numéro 10 et
24 de lui accorder une cote.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera D138. Le document intercalaire
26 10 aura la cote D138.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.
28 M. JOSSE : [interprétation]
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1 Q. Monsieur Savkic, c'est un rapport ayant trait aux incidents que vous
2 avez décrits en détail. A la page 2, il y a une description plus large en
3 anglais, une description de l'incident même. Est-ce que vous saviez ce qui
4 s'était passé quand il s'agit de ce rapport ?
5 R. Je ne sais pas ce que le parquet municipal de Vlasenica a fait après
6 avoir reçu ce rapport pénal. Je sais qu'il y avait des dépositions faites
7 par les survivants, c'était tout, rien d'autre n'a été fait par rapport à
8 ce rapport pénal.
9 Q. Je voudrais qu'on revienne maintenant à l'intercalaire 11, et à propos
10 de cela, je voudrais vous poser deux questions.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais Maître Josse, je vois que dans
12 ce rapport pénal est mentionné le nom de Naser Oric, c'est le premier nom
13 mentionné.
14 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est la même personne contre
16 laquelle l'acte d'accusation a été établi ?
17 M. JOSSE : [interprétation] Je pense que oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, je m'adresse à l'Accusation.
19 Est-ce que cela fait partie de l'acte d'accusation, cette partie qui
20 concerne M. Oric ?
21 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas comparé
22 ces deux documents, mais sous les yeux j'ai l'acte d'accusation établi
23 contre Naser Oric, je vais vérifier cela pendant la pause.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ces activités de Naser Oric
25 ont été incluses dans l'acte d'accusation, mais je ne pense pas qu'il nous
26 faille plus d'explications. Mais je vois que le témoin voudrait nous dire
27 quelque chose par rapport à cela.
28 Oui, Monsieur Savkic, vous avez la parole.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Si je me souviens bien de l'acte
2 d'accusation établi contre Naser Oric, vous allez vous souvenir que quand
3 il s'agissait des personnes qui ont été tuées que c'est honteux par rapport
4 à ce village serbe et il y en avait d'autres de ces villages serbes sur le
5 territoire de Srebrenica qui ont été incendiés. Cela, c'est certain.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela va être vérifié.
7 Bien sûr, Maître Josse, même si cette attaque n'a pas été incluse dans
8 l'acte d'accusation, je ne suis pas au courant par rapport au contenu de
9 cela, il faut jeter un peu plus de lumière là-dessus.
10 M. JOSSE : [interprétation] Pourrais-je faire une remarque en ce sens.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 M. JOSSE : [interprétation] L'Accusation a communiqué ce document à la
13 Défense conformément à l'article 68 il y a quelque temps. Je viens de
14 comprendre que le document a été déjà traduit à deux reprises et a été
15 communiqué récemment conformément à l'article 68.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
17 M. JOSSE : [interprétation] Ces deux traductions --
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de continuer. La raison
19 principale pour laquelle j'ai posé des questions là-dessus, à savoir s'il y
20 a des contestations ou des convergences par rapport aux atrocités commises
21 par les forces musulmanes pendant cette période-là dans cette région, il
22 s'agit du mois septembre 1992.
23 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de
24 continuer parce que j'espère qu'il y aura encore beaucoup de choses --
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, allez-y --
26 M. JOSSE : [interprétation] -- ayant trait à cela et je pense qu'il y a
27 beaucoup de choses qui sont contestées.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, continuez.
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1 M. JOSSE : [interprétation]
2 Q. Monsieur le Témoin, il y a encore deux choses à savoir par rapport à
3 l'intercalaire 11, plus précisément l'avant-dernier paragraphe où il est
4 question d'un enregistrement audio de la conversation entre ce présumé
5 Naser -- cette personne présumée s'appeler Naser et l'unité de Bjelanovic.
6 Savez-vous quelque chose de cela ?
7 R. Oui. M. Bjelanovic Radomir devait être un témoin de l'Accusation dans
8 l'affaire contre Naser Oric. Malheureusement, il s'agit d'un homme qui a
9 des problèmes cardiaques et qui a eu plusieurs infarctus. Il a répondu à
10 l'appel de l'Accusation pour déposer. Il y avait deux dépositions. Lors de
11 la deuxième déposition, il a commencé à saigner du nez et de la bouche, et
12 le Tribunal dispose de l'information ayant trait à cela. Cette audition a
13 été une audition publique, et je l'écoutais par le biais des stations radio
14 à l'intérieur de la mine, et les formations musulmanes ont pris certaines
15 de ces stations radio. Cet entretien s'était mené entre Naser et le chef,
16 concernait la libération d'un certain nombre de prisonniers qui ont été
17 capturés par les forces musulmanes après l'attaque contre la mine et
18 Podravanje, et qui ont été par la suite emmenés à Srebrenica.
19 Q. La deuxième question concerne généralement les points énumérés à
20 l'intercalaire 11. Je pense que vous avez déjà dit que par rapport à tous,
21 peut-être pas tous les incidents mais beaucoup d'entre eux, que vous pouvez
22 donner d'autres détails si on vous le demande ?
23 R. Oui.
24 M. JOSSE : [interprétation] Il serait peut-être utile pour la Chambre,
25 Monsieur le Président, que je guide le témoin en lui posant des questions
26 concernant ses activités pendant toute la guerre.
27 Q. Il est vrai, n'est-ce pas, que vous étiez officier de réserve au sein
28 de la JNA, et qu'à peu près le 6 avril 1992, vous avez rejoint la VRS ou ce
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1 qui devait devenir par la suite la VRS ?
2 R. Oui, mais j'ai dit que j'avais d'autres activités au sein de
3 l'entreprise bauxite. C'est ce qui est écrit dans mon livret militaire.
4 Q. Oui. Vous étiez, et c'est clair ce que vous avez dit, que vous étiez
5 membre de l'unité du génie et vous êtes resté au sein de l'armée jusqu'au
6 1er novembre 1993, c'est ce que vous avez déjà dit à la Chambre au début de
7 votre témoignage, jusqu'au moment où vous êtes devenu président de la
8 municipalité de Milici ?
9 R. Oui.
10 Q. Je pense qu'il est exact de dire qu'au mois de novembre 1992, vous êtes
11 devenu commandant du bataillon et que vous n'étiez plus membre de l'unité
12 du génie, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Je voudrais vous poser une question concrète, après quoi, après la
15 pause, nous allons revenir sur des points qui sont contenus dans
16 l'intercalaire 11.
17 Par rapport à la maison de Dom Kulture à Milici, est-ce que vous savez à
18 quoi servait, pendant l'année 1992, cette maison ?
19 R. Au mois d'avril et au mois de mai, j'ai déjà dit quelle était la
20 situation à Milici. Il ne faut pas que je répète tout cela encore une fois.
21 Milici était la dernière grande ville où vivaient majoritairement les
22 Serbes. Avant la guerre, il y avait une dizaine de familles qui vivaient
23 dans des immeubles et qui étaient Musulmans. Ils étaient soit ingénieurs,
24 soit artisans, et le reste était les Serbes. De Milici vers Nova Kasaba,
25 sur la route qui mène vers Nova Kasaba, il y a deux enclaves musulmanes de
26 l'un et de l'autre côté de la route. Les gens voulaient passer des nuits à
27 Milici. Il arrivait parfois que des délégations de Sarajevo serbes,
28 délégations artistiques ou culturelles ou sportives, et nous parlons de la
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1 période du mois d'avril et de mai, de la période avant le 26 mai, avant
2 cette embuscade à Konjevic Polje, les membres de ces délégations nous ont
3 demandé de passer la nuit là-bas.
4 Je pense qu'Ilija Kadic, je pense que c'était son nom, qui était à l'époque
5 président de Sarajevo serbe était membre de ces délégations également. Il y
6 avait des gens de Sarajevo, il y en avait entre 150 et 180 et ils allaient
7 à Novi Sad. Ils nous ont demandé de les loger pour passer la nuit, il y
8 avait des enfants également au sein de ces délégations et des femmes. On
9 les a logés dans des maisons, ensuite dans la maison de santé. Pour ce qui
10 est des hommes faisant partie de ces délégations, on nous a logés dans des
11 endroits où il n'y avait que des paillasses. Ces paillasses étaient
12 disposées sur la scène de la maison de culture à Milici, et l'autre partie
13 de ces hommes ont été logés à l'école primaire, dans une village voisin, le
14 village de Derventa.
15 Après et même avant ce qu'il n'arrive, nous ne voulions pas poser des
16 problèmes par rapport à cela, c'est-à-dire, aux demandes des gens qui
17 voulaient passer la nuit à Milici, mais non pas dans les maisons des
18 citoyens de Milici. Parmi ces citoyens serbes, il y avait également des
19 Musulmans et des Croates. Il n'y avait aucun problème pour qu'ils soient
20 logés dans des maisons serbes. Le lendemain, si la situation était bonne
21 sur la route, ils partaient.
22 C'était uniquement à cette fin que la maison Dom Kulture a été utilisée. En
23 tout cas, il y a une personne qui venait pour inspecter tous les bâtiments.
24 C'était un officiel de l'UNHCR, qui venait pour inspecter les lieux. Je
25 pense que le nom de cette personne a été noté à l'époque au moment où il
26 faisait cela.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, je vois qu'il est 10
28 heures 30 maintenant. Il est peut-être venu le moment propice à faire une
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1 pause.
2 M. JOSSE : [interprétation] Ce serait un moment approprié.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je prie les parties d'essayer de
4 m'aider. J'ai parcouru le document, intercalaire 11, qui est le document
5 D136 [comme interprété] et l'intercalaire 10, qui est D138. Dans ce dernier
6 document, il est décrit l'attaque contre Podravanje et il est dit que 27
7 habitants de Podravanje ont été tués. Comme il est dit dans le document, il
8 s'agissait "principalement des femmes et des personnes âgées, et des
9 personnes qui défendaient le village."
10 Peut-être que vous devriez d'abord parcourir l'original pour voir, parce
11 que s'il s'agissait principalement des femmes et de personnes âgées et des
12 personnes qui défendaient leur village, il m'est un peu difficile de
13 comparer cela avec l'autre document.
14 En même temps, nous disposons des informations par rapport à D137. Plus
15 particulièrement, je pense à la traduction en anglais surtout, je pense
16 aux pages 6 et 7 où il est dit qu'il s'agissait des personnes âgées, des
17 personnes qui avaient plus de 60 ans, et lorsqu'on regarde la date de
18 naissance de ces personnes, nous pouvons voir qu'au moins quatre personnes
19 âgées figuraient parmi ceux qui ont été tuées, au moins quand il s'agit de
20 ces premières 13 personnes mentionnées ici. Quant aux autres, nous n'avons
21 pas beaucoup d'informations relatives à leur âge. Sur la deuxième liste de
22 12 personnes, je ne vois aucune personne qui a plus de 60 ans.
23 Je suppose que sur la base des premiers noms des personnes sur cette
24 liste, il devrait être possible de voir quelles étaient ces personnes. Par
25 exemple, je suppose que Mira, c'est une femme. Si le prénom finit par un
26 "a," j'ai remarqué cela, dans ce cas-là, il s'agit d'un prénom féminin.
27 Parfois, nous avons même d'autres indicateurs, par exemple, sous le nom 9,
28 Mira, "fille." Ensuite, on a un autre prénom à côté duquel il est
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1 mentionné, épouse, et cetera, et cetera.
2 Je voudrais savoir, et peut-être que les parties pourraient se mettre
3 d'accord par rapport à cela, c'est-à-dire, non particulièrement à l'âge,
4 mais aussi au sexe des victimes, pour voir s'il s'agissait principalement
5 des femmes et des personnes âgées, et dans quelle mesure cela correspond
6 aux informations que nous pouvons trouver dans l'intercalaire 11. Je vous
7 prie de parler de cela et de voir quels sont les prénoms féminins, quels
8 sont les prénoms masculins, parce que la Chambre voudrait avoir des
9 informations là-dessus.
10 M. JOSSE : [interprétation] Je suis un peu inquiet par rapport à la
11 traduction. M. Karganovic pourrait peut-être m'aider parce qu'il n'est pas
12 clair par rapport à l'anglais, si le mot "mostly", principalement, ou s'il
13 ne s'applique qu'aux hommes et aux personnes âgées et aux personnes qui
14 défendaient le village.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est ce que j'ai essayé
16 d'expliquer. Si nous voyons le mot "principalement," que cela veut dire que
17 la majorité d'entre eux étaient ces trois catégories de victimes, en tout
18 cas, vous pouvez nous donner, peut-être, des informations approximatives
19 par rapport aux victimes et au nombre de femmes qui étaient parmi les
20 victimes. Nous ne pourrons vous demander de nous dire des informations par
21 rapport aux gens qui défendaient le village parce que je ne peux pas
22 imaginer une femme de 70 ans en tant que quelqu'un qui aurait défendu le
23 village, même s'il y a des femmes âgées qui sont très, très courageuses.
24 Nous allons faire une pause maintenant qui va durer jusqu'à 11 heures.
25 --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.
26 --- L'audience est reprise à 11 heures 05.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Josse êtes-vous prêt à
28 poursuivre ?
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1 M. JOSSE : [interprétation] Bien, de façon très utile, M. Harmon a été
2 d'accord pour effectuer la recherche que vous avez demandée, Monsieur le
3 Président, de sorte qu'il y a procédé, je peux dire, de façon très
4 soigneuse et il est en mesure maintenant de faire savoir à la Chambre les
5 résultats de cette recherche.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 M. MARGETTS : [interprétation] En ce qui concerne la pièce D137 et
8 l'incident de Podravanje, la liste apparaît aux pages 6 à 7 --
9 --
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
11 M. MARGETTS : [interprétation] -- du document D137, il s'agit de six femmes
12 dans ces deux regroupements. Ce groupement de 1 à 13 qui -- cela se
13 poursuit sur les pages 6 et 7 --
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, je prends la page 6, 9, 10, et
15 ensuite 7, 13 --
16 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 12, 14 [comme interprété] ?M. MARGETTS :
18 [interprétation] Nous avons inclus 2, 6 et 9.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'avais une question, un point
20 d'interrogation en ce qui concerne mon texte.
21 M. MARGETTS : [interprétation] C'était seulement pour 2, 6 et 9.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et Milija n'est pas un prénom de femme ?
23 M. MARGETTS : [interprétation] Non.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être --
25 M. JOSSE : [interprétation] Peut-être que vous pourriez demander à M.
26 Savkic --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
28 Monsieur Savkic, ce premier nom, Milija, est-ce que c'est un nom d'homme ou
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1 un nom de femme ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] A quelle page, s'il vous plaît ?
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dernière page -- enfin d'une façon
4 générale, est-ce que "Milija Vasic" -- le texte dit "Milija Vasic."
5 M. JOSSE : [interprétation] Tous les locuteurs B/C/S autour de moi disent
6 que normalement c'est un nom d'homme.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Alors cette question est réglée
8 pour moi.
9 M. MARGETTS : [interprétation] Une autre question, Monsieur le Président,
10 c'est que nous avons revu l'acte d'accusation Oric, et l'incident de
11 Podravanje ne fait pas partie de l'acte d'accusation.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Y a-t-il des incidents qui sont
13 liés dans le temps approximativement à cet acte d'accusation ?
14 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le paragraphe 27
15 de l'acte d'accusation nous renseigne à ce sujet. Il est dit qu'au cours de
16 la période de mai 1992 à février 1993, il y a eu approximativement 50
17 villages et hameaux serbes qui ont été incendiés ou détruits de toute autre
18 manière.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. De la manière dont les choses se
20 présentent dans le texte, il s'agit d'une attaque dirigée contre les
21 civils ? C'est bien cela, Monsieur Margetts ?
22 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
23 Juste pour préciser les choses, la municipalité de Milici n'est pas
24 spécifiquement nommée. Les municipalités où se trouvaient ces 50 Serbes
25 sont décrites comme étant Bratunac, Srebrenica et Skelani.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bon ceci semble être juste de
27 l'autre côté de la limite.
28 Tout au moins, Maître Josse, d'après ce que j'ai compris, l'Accusation est
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1 d'accord qu'au cours de cette période et dans cette région de la
2 république, des actes illicites et des attaques très violentes illicites
3 ont eu lieu contre des civils ?
4 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous pouvons
5 dire ceci pour ce qui est de la position de l'Accusation : tout ce que nous
6 pouvons dire, c'est que les éléments étaient suffisants pour que
7 l'Accusation puisse déposer un acte d'accusation.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je considère que si vous êtes
9 convaincu par vos éléments de preuve, c'est une bonne base pour convenir de
10 cette question avec l'Accusation, n'est-ce pas ?
11 M. MARGETTS : [interprétation] Il faudrait que je consulte des collègues
12 sur la question, mais je ne voudrais pas me prononcer de façon très précise
13 sur ces questions parce que dans l'affaire Oric, cela fait un certain temps
14 depuis que cet acte d'accusation a été déposé et il faut que je puisse
15 consulter l'équipe dans l'affaire Oric.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ceci me semble non pas trop
17 prudent, tout au moins prudent pour le moment.
18 M. JOSSE : [interprétation] En ce qui concerne ce point, je suis
19 heureux, Monsieur le Président, que cette approche ait été prise parce
20 qu'on garde à l'esprit le fait que vous avez demandé avant la suspension,
21 il m'est venu à l'esprit que la Défense devrait demander à l'Accusation de
22 fournir une très grande quantité de documents qu'ils doivent avoir en leur
23 possession concernant les activités d'Oric, ses forces à l'époque et à cet
24 endroit. Je ne peux pas imaginer que la Chambre de première instance
25 souhaite, tout au moins pour ce qui est de la Défense, consacrer beaucoup
26 de temps sur ce point qui, en fait, ne peut pas vraiment être contesté,
27 pour être sérieux.
28 Gardons ceci à l'esprit et ce que vous avez dit à mon confrère, M.
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1 Margetts qui, bien entendu, a été très prudent. Je ne pense pas que je vais
2 continuer dans cette voie plus longtemps, si ce n'est pour un petit clip
3 vidéo que je suis sur le point de faire présenter et sans cela je passerais
4 à un autre aspect --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends que la situation est
6 claire sur la base du fait qu'il s'agit d'événements de notoriété publique,
7 et après avoir discuté de ceci, en avoir débattu devant la Chambre, je
8 pense que c'est très important, parce que sans cela, nous ne pourrions pas
9 cacher aux parties que ceci est venu à l'esprit des Juges de cette Chambre,
10 c'est dire que ces faits sont présentés en faveur des thèses de l'accusé
11 et, par conséquent, il faut apprécier les probabilités, ce pourra être déjà
12 suffisant pour les accepter plutôt que le contraire, cette probabilité
13 qu'il y a eu des attaques sur une grande échelle contre les civils dans ce
14 secteur, plus particulièrement lié à ce document Naser Oric. Ceci rentre
15 dans le domaine des probabilités.
16 M. JOSSE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je veux dire, en
17 fait, là encore, cette pensée m'avait effectivement traversé l'esprit. Bien
18 entendu, la Défense n'a pas besoin de prouver cela de la même manière que
19 l'Accusation pour toute une série de raisons.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
21 J'espère que mes observations, qui sont les observations des Juges de
22 la Chambre, seront suffisantes pour que vous puissiez prêter l'attention
23 voulue, proportionnellement au fait qu'il faut encore faire preuve de
24 prudence après avoir entendu cela.
25 M. JOSSE : [interprétation] Je vous remercie.
26 Q. Maintenant, Monsieur Savkic, le dernier aspect je crois sur lequel je
27 voudrais vous poser des questions, vous avez fourni à la Défense deux
28 enregistrements vidéo qui contiennent un certain nombre d'éléments, de
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1 documents et plus particulièrement, deux enregistrements qui présentent des
2 images extrêmement pénibles de personnes qui, je crois, dites-vous, sont
3 des Serbes, et dont un grand nombre ont été mutilés et massacrés, n'est-ce
4 pas ? C'est un résumé exact, n'est-ce pas, en ce qui concerne de grandes
5 parties de ces deux vidéos, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 M. JOSSE : [interprétation] Il n'y a qu'un extrait, Monsieur le Président,
8 que nous souhaitions vous faire voir. C'est ce qui relève du document de
9 l'intercalaire 4, une brève traduction. Une traduction faite par notre
10 équipe.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous pouvez le faire.
12 M. JOSSE : [interprétation] Il s'agit d'un entretien. Il dit qu'il s'agit
13 d'un pathologiste. Enfin, c'est un médecin local, mais nous allons demander
14 à M. Savkic de faire un commentaire plus tard à ce sujet.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
16 Vous dites qu'il s'agit seulement d'un extrait que vous souhaitez faire
17 visionner. Vous voulez dire aussi qu'il s'agit de limiter l'introduction --
18 enfin la présentation pour versement au dossier uniquement de cette partie
19 ou de l'ensemble ?
20 M. JOSSE : [interprétation] Bien, Monsieur le Président --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande simplement aux fins --
22 M. JOSSE : [interprétation] Oui, pour deux raisons. Premièrement, le reste
23 n'a pas été transcrit.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
25 M. JOSSE : [interprétation] Deuxièmement, c'est la plus brève des deux
26 vidéos. Celle-ci représente plus de 20 minutes; l'autre fait plus de trois
27 heures, et c'est exact, le témoin a déjà dit à la Chambre, a confirmé ma
28 question. La plus grande partie de ces deux vidéos montre simplement des
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1 corps de personnes qui sont mortes, qui ont été massacrées.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien. Tout au moins, ceci est
3 présenté comme élément de preuve et il existe une autre vidéo qui montre
4 cela, même si nous ne l'avons pas vue. Donc, cette déposition, ce
5 témoignage fait toujours partie des éléments de preuve.
6 M. JOSSE : [interprétation] Je vous remercie. Je suis prêt à procéder de
7 cette manière si la Chambre le veut bien.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous pouvez le faire.
9 [Diffusion de cassette vidéo]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne reçois aucune traduction. Est-ce
11 que nous pourrions arrêter la vidéo un instant ?
12 Est-ce que les interprètes ont la transcription du texte ?
13 M. JOSSE : [interprétation] Je pense que ce morceau-ci n'a pas été
14 transcrit.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous dites que c'est les 30 premières
16 secondes -- bon, peut-être que nous sommes d'accord --
17 L'INTERPRÈTE : Nous avons la transcription maintenant disent les
18 interprètes de la cabine anglaise.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que la procédure que nous suivons
20 d'habitude, c'est que l'un des interprètes le lit, puis ensuite, c'est
21 traduit en français. Puis, à ce moment-là, nous pouvons ainsi avoir une
22 interprétation complète en français de façon à avoir ensuite un compte
23 rendu complet en français et l'autre interprète -- parce que suivre le
24 texte est d'habitude impossible -- et il y a un interprète qui vérifie si
25 ce qui a été dit est la même chose que ce que l'on retrouve sur le texte
26 transcrit.
27 Recommençons au début, s'il vous plaît.
28 [Diffusion de cassette vidéo]
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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
2 "Intervieweur : Qui sont ces morts et comment ont-ils été tués ?
3 Pathologiste : Ce sont tous des soldats serbes, essentiellement de
4 Vlasenica, Milici et des villages avoisinants. Ces personnes ont été tuées
5 sur un champ de bataille appelé Rogosinja, qui est dans la communauté
6 locale de Cerska. Ceci a eu lieu le 26 dans la matinée, dans les premières
7 heures de la matinée, entre 6 et 9 heures du matin.
8 Intervieweur : Combien y a-t-il de victimes ici et comment ont-elles été
9 tuées ?
10 Pathologiste : On a ramené 28 corps, huit ou neuf manquent encore ou ils se
11 sont enfuis ou ils sont dans les bois. Ils sont très probablement morts
12 parce qu'on ne les a pas vus dans leurs unités hier.
13 Intervieweur : Comment est-ce que ces personnes ont été tuées ?
14 Pathologiste : Il est très probable qu'un très petit nombre d'entre eux
15 soit tombé vivant entre les mains de l'ennemi. Ce massacre a été commis
16 après sur les cadavres ou sur les soldats blessés. C'est un massacre inouï
17 dans cette région, mais également dans l'histoire de cette région, dans
18 l'histoire des Balkans.
19 Intervieweur : Est-ce que certains de ces corps avaient été circoncis ?
20 Pathologiste : La plupart d'entre eux l'étaient. Aussi, la plupart d'entre
21 eux avaient été tués à la hache. Ils avaient été décapités, les crânes
22 avaient été écrasés. C'est un massacre inouï. On n'a jamais vu cela, ni
23 dans un film ni dans la vie réelle.
24 Intervieweur : Je vous remercie."
25 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
26 M. JOSSE : [interprétation]
27 Q. Monsieur Savkic, pour commencer, savez-vous de quel incident parle ce
28 médecin ?
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1 R. Oui.
2 Q. Où et quand est-ce que ce massacre a eu lieu ?
3 R. Ceci a eu lieu dans un village appelé Rogosija dans la municipalité de
4 Milici au mois de septembre. Je crois, comme l'a dit le médecin, c'était le
5 26 ou autour du 26 septembre. Je ne peux pas me rappeler exactement.
6 Puisque le médecin dit que ce sont des combattants serbes, et que parmi
7 ceux-ci il y avait également des habitants du village sur la base des dates
8 de naissance des personnes qui sont mortes, et plus particulièrement des
9 gens du cru, il est clair qu'il y avait des personnes âgées qui étaient là.
10 Mais pour une famille pour réussir à avoir la possibilité de reconnaître
11 les corps, à ce moment-là, la plupart des victimes civiles, les personnes
12 âgées ou des victimes étaient traitées comme des personnes qui avaient été
13 tuées au combat, de sorte que c'était la seule façon dont les familles
14 pouvaient se procurer des renseignements à ce sujet.
15 Q. Connaissez-vous le nom du médecin qui est questionné ?
16 R. Oui. Il s'agit du Dr Djeric. Il vit à Vlasenica actuellement. C'est
17 l'un des chirurgiens de cet hôpital, et c'est là que se trouvait également
18 à l'époque l'hôpital aussi.
19 Q. Pour le compte de qui est-ce qu'on l'interrogeait ?
20 R. Je n'ai pas fait très attention à savoir qui était celui qui posait les
21 questions, mais je sais que l'un des enregistrements que j'avais c'était
22 quelque chose qui avait été enregistré par un technicien de la radiologie
23 appelé Niko Jovic.
24 M. JOSSE : [interprétation] Pourrais-je demander que l'on attribue une cote
25 à ce document.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
27 Monsieur le Greffier.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D139, Monsieur le
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1 Président. Le transcription en B/C/S n'a pas été fournie, mais nous allons
2 y attribuer un numéro provisoire le D139A, et pour la transcription en
3 anglais le D139A.1.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maître Josse, compte tenu du
5 caractère de ces témoins -- enfin je ne m'adresserai pas directement au
6 témoin -- mais certainement vous êtes conscient du fait que cet
7 enregistrement vidéo soulève certaines questions sur le point de savoir si
8 nous traitons essentiellement de meurtres ou pour -- je peux dire en tous
9 les cas, en ce qui me concerne, d'infractions ou de violations tout aussi
10 horribles de non-respect de personnes qui ont été tuées au combat. C'est
11 quelque chose qui n'est pas devenu clair, et tout au moins la question qui
12 se pose entre civils ou combattants, enfin, tout au moins il y a des
13 questions qui se posent. Je ne sais pas s'il est possible de résoudre ces
14 questions en ayant une réponse vraiment fiable, mais plutôt que de poser
15 toutes sortes de questions difficiles au témoin, je vous laisse
16 l'initiative pour ce que vous souhaiterez clarifier par la suite en ce qui
17 concerne ces questions. Mais c'est différent d'incendier un village, où là,
18 je dirais que clairement pas reçu, ce n'est pas admis, mais comme l'a dit
19 avec prudence l'Accusation, tout au moins les charges concernaient une
20 attaque généralisée contre une population civile. Ici, nous avons un
21 tableau assez différent. Il y a davantage de questions qui se posent à ce
22 sujet. Il vous appartient de voir, mais je pense que vous savez ce que les
23 Juges ont à l'esprit, si ce n'est eux-mêmes tout au moins pour ce qui est
24 de poser des questions au témoin à ce sujet.
25 M. JOSSE : [interprétation] Je vais le faire si vous le permettez alors.
26 Q. Monsieur Savkic, vous avez entendu les observations du Président de la
27 Chambre. Veuillez, s'il vous plaît, écouter attentivement ce que je vais
28 vous dire. Pouvez-vous et je vous demande de répondre par oui ou par non.
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1 Avez-vous connaissance de quoi que ce soit en ce qui concerne les questions
2 qui viennent d'être posées par le Président de la Chambre ?
3 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le village de Rogosija à
4 l'occasion de cette attaque, pas juste là où ces personnes ont été tuées,
5 mais l'ensemble du village a été rasé. Il a été incendié, brûlé. Tout le
6 bétail avait été emmené. Tout a été entièrement détruit.
7 Q. En particulier, en ce qui concerne le fait que les cadavres ont été
8 mutilés, est-ce que vous avez connaissance de façon directe concernant cet
9 incident ou tout autre incident de quelque chose à ce sujet ? Est-ce que
10 vous savez quelque chose directement à ce sujet ?
11 R. Tous ces cadavres, personnellement, comme bien d'autres habitants de
12 Milici, nous avons vu nous-mêmes parce qu'on les a amenés au centre médical
13 de Milici. Plus tard, j'ai vu ces documents, ceux qui sont encore en ma
14 possession, des documents qui émanaient de l'un des commandants des
15 Musulmans, qui dirigeait les formations militaires et qui, malheureusement,
16 a été échangé et qui n'a jamais été tenu pour responsable. Il est encore en
17 vie aujourd'hui. Il avait fait une description précise des événements, de
18 ce qui s'était passé, et de ce que chacun des combattants musulmans avaient
19 fait. Il a lui même déclaré qu'il y avait certains blessés qui avaient été
20 tués par la suite, et il a également donné le nom des personnes qui avaient
21 fait ces tueries.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, je pense que ceci créé un
23 contexte pour la vidéo que nous avons vue et que ceci clarifie à certains
24 égards, que ce n'était pas seulement une opération de combat mais
25 davantage. Notamment parce que du bétail a été emmené, parce que le village
26 a été rasé, et ce sont des choses auxquelles on ne s'attendrait pas dans
27 les circonstances normales sauf on ne s'attend pas à ce que ce soit un
28 nécessité militaire. Tout au moins la dernière partie montre clairement,
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1 tout au moins, que certaines des victimes ne pouvaient pas être considérées
2 comme ayant été prises, par rapport au droit applicable au conflit armé.
3 Veuillez poursuivre.
4 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
5 Q. Je vais maintenant passer à une question plus délicate. Monsieur
6 Savkic, est-ce que vous aviez connaissance de la
7 présence d'unités paramilitaires à Milici depuis le mois d'avril 1992 et
8 après cette période ?
9 R. Milici n'avait pas de formations paramilitaires à l'époque en avril et
10 en mai. Des volontaires venaient individuellement, en d'autres termes, nos
11 habitants qui travaillaient temporairement en Serbie et qui allaient dans
12 leurs villages et rejoignaient les gardes qui voulaient protéger le village
13 ou plus tard rejoignaient des unités qui existaient légalement, les unités
14 des forces armées de la Republika Srpska. Dans un cas, il y a eu quelque 20
15 volontaires qui sont venus. Ils n'étaient pas organisés. C'était en tant
16 que civils qu'ils sont venus, une vingtaine. Ils sont venus et je me
17 trouvais à la mine à l'époque. Ils ont pu être témoins de cruautés qui
18 avaient eu lieu et certains d'entre eux sont partis immédiatement, 17
19 d'entre eux sont restés et se sont trouvés sous la direction du
20 commandement d'une unité qui défendait la mine.
21 Je sais, effectivement, qu'au cours de la guerre, à deux reprises,
22 des unités de moindre effectifs, de 20 ou 30 hommes, sont venus, mais dès
23 qu'ils se sont rendus compte de la nature du terrain où les combats avaient
24 lieu, sont partis, de sorte que tout au long de la guerre. Ces unités de
25 Milici, qui constituaient les forces armées de la Republika Srpska dans la
26 région, n'avaient pas de paramilitaires.
27 Q. Passons à autre chose. Je crois qu'au début de votre déposition, vous
28 nous avez dit que le député de l'assemblée de la Republika Srpska, il est
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1 de Srebrenica, avait été tué le 9 mai 1992.
2 R. Oui.
3 Q. Son nom était Goran Zekic ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous étiez le premier député. Vous êtes devenu membre de l'assemblée,
6 mais vous n'avez uniquement prêté serment qu'en septembre de cette année,
7 voire octobre d'ailleurs, quand vous avez assisté à une des séances de
8 l'assemblée à Prijedor ?
9 R. Oui.
10 Q. Je veux vous poser quelques questions sur vos travaux à l'assemblée
11 dans un petit moment. Jusqu'au moment où vous avez réussi à siéger à cette
12 assemblée, pourriez-vous nous donner votre évaluation du contrôle de la
13 direction de la république sur les dirigeants municipaux à Milici ? On
14 parle de l'époque qui commence vers le 14 avril 1992 jusqu'à plus tard.
15 R. En termes pratiques, je peux vous dire qu'il avait très peu d'influence
16 sur nous à cause des sabotages. Souvent on n'avait pas d'électricité, pas
17 de courant, plus de communication. A cause du siège, le fait qu'on soit
18 encerclé, parfois on a été encerclé pendant 12 jours à la suite, surtout
19 fin mars; de ce fait, on était totalement isolé de la partie serbe de la
20 municipalité de Vlasenica.
21 Parfois cela durait deux jours, parfois trois jours. Enfin tout cela a créé
22 énormément de difficultés, d'ailleurs auxquelles j'ai fait référence.
23 Q. Qui dirigeait le côté civil de la municipalité de Milici, une fois la
24 guerre commencée ?
25 R. Le côté civil était dirigé par l'assemblée municipale et le conseil
26 exécutif de la municipalité de Milici.
27 Q. A votre connaissance, y avait-il une cellule de Crise ?
28 R. Suite à tout ce que ce dont je vous ai parlé, sachant que le 13 mai les
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1 cellules de Crise avaient été abolies, je ne sais pas s'il y a une cellule
2 de Crise qui a été élue à Milici. De toute façon, la cellule de Crise à
3 Milici ne s'est jamais réunie, il n'y a jamais eu de séance. Cela ne
4 fonctionnait pas.
5 Q. Soyons clair. N'avez-vous jamais été nommé au sein d'une cellule de
6 Crise à Milici ?
7 R. Je n'en ai jamais été informé. Je n'ai jamais su si j'avais été nommé
8 membre d'une cellule de Crise.
9 Q. En ce qui concerne l'assemblée municipale pour cette même période,
10 faisiez-vous partie de l'assemblée municipale ?
11 R. A l'époque, suite aux événements bien connus dont je vous ai parlé, je
12 n'ai pas siégé lors des séances de l'assemblée pas avant le 1er novembre
13 1993.
14 Q. Mais je vous parle de l'assemblée municipale.
15 R. Oui, oui, moi aussi je parle aussi de l'assemblée municipale de Milici.
16 Je parle des séances de cette assemblée à partir de l'établissement de
17 cette assemblée jusqu'au 1er novembre 1933, quand j'étais président de
18 l'assemblée. Je n'ai pas siégé aucune séance avant le 1er novembre 1993
19 parce que j'avais d'autres choses à faire.
20 Q. Soyons vraiment clair pour lever tout doute éventuel. Vous n'étiez pas
21 membre du comité exécutif non plus, n'est-ce pas ?
22 R. Non.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse. J'ai quelques questions
24 à poser au témoin, questions pour éclaircir son propos.
25 Quand vous parlez de l'assemblée municipale, vous parlez de l'assemblée
26 municipale de Milici. Milici ce n'était pas la même chose que l'ancienne
27 municipalité de Vlasenica ? Alors quelle était la composition de cette
28 assemblée. Comment est-ce que cette assemblée a été mise en place ? Y a-t-
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1 il eu des élections ? Est-ce que c'étaient les personnes qui étaient
2 membres de l'assemblée de Vlasenica qui sont automatiquement devenues
3 membres de l'assemblée de Milici ? Comment est-ce que cela a fonctionné ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. C'est exactement comme cela que cela
5 marchait. Lors de nombreuses réunions, on travaillait sur la division des
6 municipalités. On a aussi abordé le sujet de l'assemblée municipale pour
7 savoir comment elles allaient être constituées, comment elles allaient être
8 exécutées par les députés légitimes qui vivaient dans ces municipalités.
9 Pour augmenter le nombre de ces députés, on s'est mis d'accord pour dire
10 que ceux qui étaient membres de la liste, quel que soit leur parti, mais
11 qui n'étaient pas membres de cette session, pouvaient en devenir membres.
12 Les candidats, qui étaient Serbes et qui étaient sur la liste pour les
13 élections locales, pouvaient être membres ou députés de l'assemblée. Pour
14 ce qui est des Musulmans, les Musulmans de quelques villages qui étaient
15 encore dans la municipalité, j'en ai parlé, eux n'étaient pas inclus parce
16 que le protocole prévoyait que chaque village décide - là, je parle des
17 villages musulmans - donc chaque village, selon le protocole, pouvait
18 décider à quelle assemblée il voulait appartenir pour mettre en œuvre leur
19 droit à l'autodétermination.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien. Vous nous avez dit
21 ensuite que vous n'étiez pas en mesure de siéger aux réunions de
22 l'assemblée municipale de Milici parce que vous aviez d'autres choses à
23 faire, d'autres obligations. A quelle fréquence est-ce que cette assemblée
24 se réunissait ? Je sais que vous ne faisiez partie, vous ne siégiez pas,
25 connaissez-vous la fréquence de ces réunions ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a des procès-verbaux de ces réunions. Il
27 y a les procès-verbaux des réunions aussi du conseil exécutif. Je ne peux
28 pas vous dire exactement comme cela, enfin ils se réunissaient chaque fois
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1 que les circonstances le permettaient.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Jusqu'en novembre, pourriez-vous nous
3 donner un ordre d'idée trois fois, dix fois ? Juste un ordre d'idée.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, vraiment je ne me hasarderais pas à cela,
5 sans doute plus de trois fois quand même. Peut-être trois fois.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, les réunions de l'assemblée
7 municipale, surtout dans ces circonstances, sont des réunions très
8 importantes, n'est-ce pas ? Or, vous ne pouviez pas y participer parce que
9 vous aviez d'autres choses à faire, d'autres obligations. Qu'est-ce qui
10 était si important qui vous aurait empêché de participer à ces réunions ?
11 Vous pouvez nous donner une idée ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous donner un exemple pour illustrer
13 mon propos. Après l'attaque et l'incendie du village de Rupovo Brdo, et le
14 fait qu'il a été rasé, c'est un village serbe, c'était le 9 juin, c'était
15 sur la nouvelle route qui venait d'être construite pour aller à la mine, du
16 coup la mine et le village de Podravanje étaient isolés, ils ne pouvaient
17 plus communiquer avec Milici. Pour atteindre la mine le long de la route,
18 atteindre la mine et le village, il a fallu faire une percée, et cela a
19 commencé peu de temps après l'attaque. Je ne me souviens plus très bien de
20 la date. J'ai été impliqué en tant que membre du génie, parce que comme
21 j'ai dit, j'étais là pour faire du déminage et pour vérifier s'il y avait
22 des champs de mines. C'est exactement ce que j'ai fait.
23 Quand je suis arrivé à la mine, c'est moi qu'on a nommé responsable, enfin
24 je suis devenu le responsable de la défense; donc j'étais commandant de la
25 mine chargé de la défense. J'ai eu ce poste pendant 48 jours. J'avais eu du
26 travail là-bas. Donc pendant 48 jours je ne suis pas rentré à Milici --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous nous donnez beaucoup de
28 détails. Je comprends bien, vous aviez des fonctions et des obligations
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1 envers l'entreprise et vous étiez responsable de la sécurité de la mine, et
2 c'est pour ce fait que vous n'avez pas pu assister aux réunions du conseil
3 municipal; c'est cela ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
6 Encore, Monsieur Josse, il y a encore une chose que j'aimerais demander
7 mais c'est peut-être à vous de le faire. Il me semble que le témoin a parlé
8 du protocole, protocole qui serait utilisé pour savoir qui serait membre de
9 l'assemblée. Or, je n'ai rien trouvé de cette sorte dans le protocole. Il
10 n'est pas besoin de traiter le problème tout de suite.
11 M. JOSSE : [aucune interprétation]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce serait que vous enquêtiez un peu là-
13 dessus pour savoir ce dont on parle.
14 M. JOSSE : [interprétation] Oui, je pense qu'il faudrait mieux voir cela
15 plus tard. On va se pencher sur le sujet quand on aura trouvé quelque
16 chose, on vous le fera savoir.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai peut-être pas vu, mais de toute
18 manière on va vérifier.
19 M. JOSSE : [interprétation]
20 Q. Une chose que j'aimerais, Monsieur le Témoin, que vous éclaircissiez
21 pour nous. C'est évident pour vous peut-être, mais on n'a pas besoin de
22 savoir. Vous avez dit à la Chambre que la mine était quand même une grosse
23 entreprise. Elle employait jusqu'à
24 3 000 personnes à un moment. Donc stratégiquement, c'était un endroit très
25 important.
26 R. Tout à fait.
27 Q. Est-ce que vous vous souvenez du nombre de séances de l'assemblée de la
28 Republika Srpska auxquelles vous avez participé en 1992 ?
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1 R. Trois ou quatre peut-être, si je me souviens bien.
2 Q. Dans quelle mesure où est-ce que vous avez été capable de faire rapport
3 aux dirigeants municipaux de Milici de ce qui s'était passé au niveau de la
4 république suite, bien sûr, aux réunions auxquelles vous avez pu assister ?
5 R. Je me suis rendu assez souvent aux séances de l'assemblée après la
6 première à laquelle je suis allé, je crois que j'en avais raté deux avant.
7 J'occupais un poste de commandement 50 à 100 mètres derrière la ligne de
8 front. Parfois d'ailleurs mon poste était carrément sur la ligne de front.
9 Les gens venaient me chercher, me donnaient des informations. Je montais
10 dans la voiture et j'étais encore en uniforme - nous étions en temps de
11 guerre - donc je montais dans la voiture pour atteindre le lieu où la
12 session se tenait, parce que les sessions à ce moment-là se tenaient un peu
13 partout en Republika Srpska. Souvent, je devais même faire une percée, une
14 percée quasiment militaire pour atteindre la séance. Je suivais ensuite la
15 séance de l'assemblée, mais mon but c'était de revenir au front le plus
16 vite possible. Rappelez-vous, là, on parle d'une période jusqu'à la fin
17 1992, où, dans cette municipalité pratiquement ethniquement pure, 17
18 villages et hameaux ont été rasés, complètement rasés.
19 Q. En tant que membre de l'assemblée et en tant qu'officier serbe servant
20 au sein de la VRS, pouvez-vous nous dire à votre connaissance dans quelle
21 mesure l'assemblée donnait des ordres à l'armée ?
22 R. L'assemblée n'a jamais donné le moindre ordre à l'armée, elle ne lui
23 disait ce qu'il fallait faire. Elle traitait de matières relevant de sa
24 compétence en temps de guerre pour faire adopter des lois, des décisions
25 qui réglementaient les affaires qui nécessitaient des décisions en temps de
26 guerre. L'assemblée, à aucun moment, n'a donné des ordres directs à
27 l'armée.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, je remarque que dans une
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1 de vos questions précédentes vous demandez au témoin comment est-ce qu'il
2 faisait rapport aux dirigeants municipaux de Milici de ce qui se passait au
3 niveau de la République, il n'a pas répondu à cette question. Il nous a dit
4 exactement comment il se rendait aux réunions, et cetera, mais il n'a pas
5 répondu à votre question.
6 M. JOSSE : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.
7 Q. Monsieur le Témoin, la question que je vous ai posée, c'est de savoir
8 comment vous, vous faisiez rapport aux dirigeants de l'assemblée municipale
9 de Milici de ce qui se passait au niveau de la République, donc de ce que
10 vous aviez appris lors des séances auxquelles vous aviez participé, séances
11 de l'assemblée.
12 R. C'était des briefings très courts. En dedans de deux ou trois heures,
13 je faisais un briefing ensuite je retournais immédiatement à mon poste, au
14 poste militaire ou alors parfois quand je venais pour passer la soirée,
15 passer la nuit pour me laver, je pouvais là faire rapport. La façon dont je
16 faisais rapport était dictée par les circonstances de guerre. Je leur
17 disais juste ce qui se faisait à l'assemblée, mais je leur disais surtout
18 ce que les députés avaient dit, les discussions qui avaient eu lieu pendant
19 les pauses. Comme cela, cela leur donnait un peu des informations sur ce
20 qui ce passait dans les autres villes de la Republika Srpska au travers des
21 circonstances.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais poser une question
23 supplémentaire.
24 Pourquoi est-ce que vous parleriez de ce qui se passait pendant les
25 pauses ? A quoi cela servait de relater les discussions qui avaient eu lieu
26 pendant les pauses ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, je relatais les travaux de
28 l'assemblée, c'étaient des gens qui avaient de la famille partout en
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1 Republika Srpska et en Bosnie-Herzégovine. C'était cela qui les
2 intéressait, de savoir ce qui ce passait à droite à gauche, ce qui arrivait
3 aux gens, et cetera. C'est normal, c'est humain de vouloir savoir ce qui se
4 passe ailleurs.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Josse.
6 M. JOSSE : [interprétation]
7 Q. Quand vous êtes devenu membre de l'assemblée, pouvez-vous nous dire si,
8 à votre connaissance, il y avait une présidence élargie en place ?
9 R. Quand je suis devenu député de l'assemblée nationale, il n'y avait pas
10 cette présidence élargie.
11 Avant les séances de l'assemblée, on se rencontrait dans un lieu qui
12 s'appelait le Club des députés, et là tous les membres des partis pouvaient
13 se réunir. Cela dit, l'assemblée n'était pas entièrement Serbe; il y avait
14 quelques Monténégrins. Il y avait des gens-là qui avaient des doctorats, et
15 il y avait deux députés qui n'avaient que le Bac, tous les autres avaient
16 des diplômes de l'enseignement supérieur. Une fois que les membres de la
17 présidence venaient -- mais enfin personne ne nous a jamais parlé de
18 l'existence de cette présidence élargie. Je crois qu'elle n'existait pas.
19 Mais il est logique que certaines choses que l'assemblée proposait, bien,
20 évidemment, le président et le vice-président de l'assemblée dans ces cas-
21 là devaient contacter différentes personnes pour voir comment mettre en
22 œuvre ce qui était demandé. C'est normal. Mais j'espère que c'est comme
23 cela que cela fonctionnait. En tout cas, il n'y avait pas de présidence
24 élargie à l'époque.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Hanoteau a une question.
26 M. LE JUGE HANOTEAU : Qu'est-ce que vous voulez dire,
27 Monsieur :
28 [interprétation] Vous disiez que : "On appelait les membres de la
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1 présidence quelque chose, mais on n'a jamais parlé de l'existence d'une
2 présidence élargie. Parfois on les appelait…"
3 LE TÉMOIN : [interprétation] En serbe, je pense que j'ai été assez clair.
4 Si quelque chose était important, par exemple, adopter une loi importante
5 de ce qui était débattu, est quelque chose qui relevait de la compétence de
6 l'assemblée nationale, il était normal et logique d'entendre ce que les
7 membres de la présidence avaient à dire. Je parle là de la présidence des
8 trois personnes qui faisaient partie de la présidence, la présidence de la
9 Republika Srpska; c'est de cela que je parlais, de rien d'autre.
10 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que vous avez assisté à des cas où un ou
11 plusieurs membres de la "Presidency" sont intervenus à l'assemblée ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez de l'assemblée légale, les
13 sessions de l'assemblée légale ? Dans ce cas oui, bien sûr, il y a eu des
14 cas où un membre de la présidence parlait.
15 M. LE JUGE HANOTEAU : Au "Deputies' Club" ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter, s'il vous
17 plaît ?
18 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que les membres de la "Presidency" se
19 rendaient aussi au Club des députés ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, dans ma réponse précédente, je l'ai bien
21 dit. Quand on parlait de choses importantes -- bien, pas importantes, mais
22 essentielles mêmes, à ce moment-là les membres de la présidence venaient;
23 ils étaient invités au club.
24 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que vous pouvez donner des exemples ou un
25 exemple de sujets qui ont nécessité la présence des membres de la
26 "Presidency" ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne me souviens pas maintenant comme
28 cela à brûle-pourpoint de ces réunions en 1992. Mais je peux vous dire
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1 qu'en 1993, par exemple, quand on était en train de discuter du plan Vance-
2 Owen, là le président a été invité aux réunions des députés à ce fameux
3 club, c'est M. Radovan Karadzic qui était président et il est venu
4 expliquer pourquoi il avait initialisé le plan Vance-Owen à Athènes. C'est
5 un des exemples.
6 M. LE JUGE HANOTEAU : [interprétation] Merci.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je vous comprends bien les membres de
8 tous les partis assistaient à ces réunions au sein du Club des députés ?
9 R. Le Club des députés était composé des députés du SDS, du Parti
10 démocratique serbe. Ensuite du parti qu'on appelait à l'époque, des forces
11 réformatrices d'Ante Markovic. Ensuite, les députés de la Ligue des
12 Communistes de Durakovic et les députés du SPO, c'est-à-dire, le parti de
13 Draskovic, en Serbie, c'est le mouvement serbe, renaissance ou quelque
14 chose comme cela.
15 Il y avait deux députés de ce parti-là.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ils assistaient tous à ces réunions,
17 à savoir, aucun parti n'était exclu de ces réunions au Club de députés ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument, tous ces députés assistaient à des
19 réunions au sein du Club de députés. Ils étaient membres de ce club.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
21 Maître Josse, vous pouvez continuer.
22 M. JOSSE : [interprétation]
23 Q. Cette dernière réponse, que vous avez fournie en répondant à ma
24 question, c'était une longue réponse et par rapport à cela, les Juges vous
25 ont posé des questions et j'ai deux qui découlent des questions des Juges.
26 Vous avez dit, je cite : "Il est assez logique de voir que l'assemblée
27 s'occupait de certaines chose et que dans certaines situations le président
28 ou le vice-président de l'assemblée prenne contact avec les gens pour
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1 essayer de voir quelle est la meilleure solution."
2 Qu'est-ce vous avez voulu dire par cela, et en particulier, ce qui
3 m'intéresse, c'est de savoir quel était l'emploi de ces mots, "prendre
4 contact avec les gens ?"
5 R. Peut-être que cette expression, "prendre contact avec les gens,"
6 n'était pas une bonne expression. En disant cela, j'ai pensé qu'il était,
7 tout à fait normal d'entendre les opinions des membres de la présidence par
8 rapport aux choses importantes. Une deuxième chose par rapport à cela,
9 c'est que dans l'ancienne Bosnie-Herzégovine et à l'époque, il y avait des
10 députés de l'ancienne Bosnie-Herzégovine. Je n'ai pas assisté à ces
11 réunions mais il était tout à fait normal à l'époque, pendant les réunions
12 préparatoires ou les réunions officielles de l'assemblée, d'inviter les
13 membres de la présidence de Bosnie-Herzégovine. C'est ce que j'ai vu à la
14 télévision à l'époque.
15 Q. J'ai compris dans votre réponse que cela concernait le président de
16 l'assemblée, je m'intéresse plutôt au président de l'assemblée. Si votre
17 réponse est relative au président de la République, les choses sont
18 différentes. Peut-être, pourriez-vous clarifier cela ? Avez-vous pensé au
19 président de l'assemblée ou au président de la République ?
20 R. Je vous prie de me poser la même question, encore une fois, s'il vous
21 plaît, parce que cela ne m'est pas clair. Pouvez-vous me répéter votre
22 question parce que j'ai compris votre question ainsi, c'est-à-dire, cela se
23 reflétait en ma réponse.
24 Q. Je vais essayer. Je vais lire du compte rendu la question qui
25 représente une citation d'une partie antérieure de votre témoignage.
26 Vous avez dit, je ne vais pas citer littéralement. Je vais, peut-
27 être, omettre des mots pour que cela soit plus simple.
28 Vous avez dit et je cite : Il est tout à fait logique pour certaines
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1 choses à l'ordre du jour de l'assemblée que le président ou le vice-
2 président de l'assemblée prenne contact avec les gens pour essayer de
3 trouver les solutions les meilleures.
4 Ma première question, Monsieur Savkic, est la suivante : est-ce que
5 vous vouliez dire justement cela quand vous avez dit cela, tout à l'heure ?
6 R. Dans cette partie que vous venez de citer, si cela concerne nous,
7 les députés du club, le président ou le vice-président de l'assemblée
8 nationale, il est tout à fait logique qu'ils devaient discuter de tout cela
9 avec nous. S'il s'agissait d'autres gens, c'est-à-dire, la présidence, il
10 est tout à fait logique que le président de l'assemblée nationale et son
11 vice-président, ou les deux, consultent la présidence afin de trouver la
12 meilleure solution de certains problèmes.
13 Pour moi, c'était tout à fait normal. Je ne sais pas si cela se
14 faisait comme cela ou pas. Je ne vivais pas avec eux pour le savoir. Quand
15 j'étais le président de l'assemblée municipale, il m'était tout à fait
16 normal de discuter avec le président du comité exécutif avant la séance de
17 l'assemblée municipale pour se mettre d'accord sur certaines choses et
18 surtout pour trouver les meilleures solutions.
19 Q. Je pense que le problème était l'emploi du mot "les gens," c'est-à-
20 dire, prendre contact avec "les gens." Cela veut dire prendre contact avec
21 les membres du Club des députés, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Je vous remercie. Maintenant, Monsieur Savkic, je vous prie de vous
24 reporter au document, c'est-à-dire, à l'intercalaire 15. Il s'agit du
25 document que la Chambre connaît très bien. Cela a été déjà versé au dossier
26 en tant que pièce à conviction. Cela fait partie du document P64. Vous avez
27 déjà eu l'occasion de le voir. Dites-nous quand, pour la première fois,
28 vous avez eu l'occasion de voir ce document ?
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1 R. J'ai vu ce document pour la première fois ici, lorsque je suis arrivé à
2 La Haye, au moment où une personne faisant partie de l'équipe de la Défense
3 me l'a montré.
4 Q. Etiez-vous au courant du fait que certaines instructions circulaient
5 dans les municipalités vers la fin de 1991, à savoir, au début de l'année
6 de 1992 ?
7 R. Par rapport à ces instructions, je peux vous dire que je n'étais pas au
8 courant du tout de ces instructions. Je peux vous dire mon opinion par
9 rapport à cela, si Messieurs les Juges me permettent de fournir mon
10 opinion, sinon je vous ai déjà dit quand, pour la première fois, j'ai vu ce
11 document.
12 Q. Votre opinion est -- enfin, je ne vous demande pas de me dire votre
13 opinion, mais plutôt de me dire par rapport à quoi vous pouvez nous fournir
14 votre opinion.
15 R. Je peux vous donner mon opinion par rapport aux contenus des
16 instructions ici. Je peux vous dire qui a rédigé ces instructions. C'est
17 dans ce sens-là que je peux vous donner mon opinion par rapport à ce
18 document.
19 Q. Sur quelle expérience fondez-vous cette opinion ? Sur quelle expérience
20 personnelle ou connaissance personnelle, votre expérience ou vos
21 connaissances personnelles ?
22 R. J'ai déjà dit que je suis officier de réserve et j'ai eu le diplôme de
23 l'école militaire avec une moyenne de 9,5. Lorsqu'on voit, tout de suite,
24 quand on regarde ces instructions, c'est que beaucoup de choses dans ces
25 instructions ont été citées, de différents plans --
26 Q. Je dois vous interrompre ici pour quelques instants.
27 M. JOSSE : [interprétation] Je vais poser la question suivante au témoin,
28 Monsieur le Président, et la Chambre décidera si, pour cette question, le
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1 contexte est établi.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
3 M. JOSSE : [interprétation] Oui, je ne veux pas --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons déjà entendu des questions
5 relatives aux similitudes.
6 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est comme cela que j'ai compris le
8 témoignage du témoin, à savoir qu'il a reconnu une partie du texte comme
9 étant identique à un autre.
10 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
11 Q. Je m'excuse, Monsieur Savkic, mais je vous ai interrompu par prudence.
12 Dites-nous quelles sont les similitudes que vous avez été en mesure
13 d'établir en lisant ce document.
14 R. Ce document est à tel point similaire et je vais citer des parties de
15 ces autres documents. A tel point similaire avec des manuels scolaires par
16 rapport au sujet de la résistance armée, par rapport au comportement adopté
17 lorsqu'un territoire est occupé par l'ennemi et plus ou moins, ces tâches
18 énumérées ici, par exemple, les tâches de la Défense territoriale, on peut
19 les rencontrer, les mêmes tâches dans toutes les anciennes républiques de
20 la Yougoslavie. L'employé qui a rédigé cela était évidemment un employé qui
21 travaillait soit dans une institution militaire ou dans une école en tant
22 que professeur ou il était employé dans une entité de réserve.
23 Je peux vous donner d'autres exemples. Il y a une différence par
24 rapport à d'autres documents, c'est-à-dire, par rapport à certaines notions
25 liées à l'organisation de l'effectif de réserve de la Défense territoriale
26 et de la protection civile, il y avait des éléments inclus qui se
27 rapportent aux représentants des partis ou à des fonctionnaires.
28 Pour ne pas aller plus en détail, je vais vous dire la chose
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1 suivante, par exemple, à la page 3 du document, le point 6 : "Renforcer
2 l'organisation de l'exécution de la sécurité des bâtiments."
3 C'est quelque chose que vous pouvez trouver dans tous les plans,
4 tous les documents, au niveau municipal, dans tous les manuels de
5 l'enseignement secondaire, et cetera.
6 Ou le point 7, par exemple : "Il faut établir le contrôle et vérifier
7 l'état des réserves de marchandises existantes," et cetera.
8 Cela a été tout à fait recopié des manuels scolaires.
9 Ou par exemple, au point 8 : "Intensifier des activités sur le plan
10 d'information et de la propagande."
11 Les points 6, 7, les points 8, 9. Par exemple, le point 11, vous pouvez le
12 trouver dans d'autres organisations territoriales.
13 Quand il s'agit des mesures de la protection civile, cela a été
14 recopié lettre par lettre. Par exemple, il dit : "Il faut créer des
15 conditions sur le plan organisationnel pour protéger les enfants, les
16 femmes enceintes," et cetera, et cetera.
17 Cela a été recopié des plans des activités de la protection civile.
18 Des deux parties, je pourrais vous citer d'autres exemples. Par exemple,
19 comment former -- c'est à la page 5. Comment former un QG de la cellule de
20 Crise.
21 M. JOSSE : [interprétation]
22 Q. Je pense qu'il faut s'arrêter --
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, nous pourrions continuer
24 mais --
25 M. JOSSE : [interprétation] Oui.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- le témoin nous dit qu'il ne faut
27 parler plus en détail et il nous dit que n'importe quelle personne, qui a
28 le diplôme d'une école secondaire, aurait pu rédiger cela. Je ne pense pas
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1 que cela soit d'une grande utilité à la Chambre parce qu'il ne fallait pas
2 avoir de grandes connaissances pour rédiger cela.
3 M. JOSSE : [interprétation] Je vais continuer.
4 Q. Pouvez-vous --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, je me demande, en
6 regardant cela, il s'agit ici de dix pages, voire six. On ne le répète sans
7 cesse. Pourrions-nous nous mettre d'accord par rapport à la reproduction de
8 cela parce que nous travaillons dans cette affaire et je pense que beaucoup
9 d'arbres auraient pu être sauvée si cette pille de documents, par rapport à
10 la date du 19 décembre, n'aurait pas été copiée.
11 M. JOSSE : [interprétation] Oui. C'est une bonne idée --
12 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
13 M. JOSSE : [interprétation] Maintenant, nous allons regarder
14 l'intercalaire 14 et après l'intercalaire suivant.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
16 M. JOSSE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, c'est
17 un bon conseil.
18 Q. Monsieur Savkic, l'intercalaire 14 parle des six objectifs
19 stratégiques. Nous voyons que cela a été signé par Krajisnik avant que vous
20 ne soyez nommé député. Dites-nous, quand pour la première fois vous avez
21 appris l'existence de six objectifs stratégiques ?
22 R. C'était quand je suis arrivé à La Haye que j'ai appris l'existence de
23 cela, c'est-à-dire, de cet intitulé, "Les objectifs stratégiques."
24 Q. Saviez-vous que des objectifs existaient, généralement parlé ?
25 R. Non. Par exemple, au numéro 2, cela ne s'appelait pas comme cela, cet
26 objectif, l'objectif stratégique. Cela ne portait pas ce nom mais lorsque
27 je me souviens de tout cela, je peux vous dire que je sais ce que cela veut
28 dire mais à l'époque, on ne l'appelait pas comme cela, c'est-à-dire,
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1 objectif stratégique. Il s'agissait d'une autre chose.
2 Q. Je ne vais pas vous demander de vous occuper de ces six différentes
3 choses, en particulier. Je voudrais que vous disiez à la Chambre si ces
4 objectifs, à votre avis, jouaient un rôle important par rapport à la
5 manière dont les Serbes voyaient les choses en 1992 ?
6 R. On peut dire cela ainsi, mais si on me permet, je peux vous donner mes
7 commentaires par rapport à ces objectifs, compte tenu du fait que quand je
8 travaillais avec mes collègues, les députés, j'ai pu les connaître bien
9 tous, ainsi que leur façon de réfléchir. Je peux vous dire pas mal de
10 choses en se basant sur cela, sur le contenu de ce document.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, une partie de la réponse
12 du témoin ne m'était pas tout à fait claire.
13 Monsieur Savkic, vous avez dit et là vous avez parlé du deuxième objectif,
14 à savoir "Le corridor entre Semberija et Krajina."
15 Vous avez dit que vous pensez que vous savez de quoi il s'agit, mais qu'à
16 l'époque personne n'appelait cela un objectif stratégique. S'il ne
17 s'agissait pas d'un objectif stratégique, de quoi il s'agissait à
18 l'époque ? Dites-le-nous. Est-ce que c'était quelque chose qui était
19 important de faire, de créer le corridor non pas parce qu'il y avait des
20 raisons stratégiques, mais pour d'autres raisons ? Comment je devrais
21 comprendre votre réponse, à savoir que vous ne connaissiez pas cela en tant
22 qu'un objectif stratégique ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ce
24 qui figure ici, en fait, la réalité à l'époque était tout à fait autre
25 chose et non pas un objectif stratégique. Je serai bref parce que je sais
26 que nous n'avons pas beaucoup de temps.
27 Il faut que je vous explique cela. Le 5 et le 6 mars, les forces
28 croates sont entrées à Brod, à Derventa, à Modrica. Elles ont occupé toutes
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1 ces villes. Les forces, c'était l'armée croate régulière, c'est un fait
2 historique, il n'y a aucun doute là-dessus. Modrica était sous l'occupation
3 croate, c'est-à-dire sous l'occupation musulmane. Il n'y avait pas de
4 communications du tout entre la Krajina et le monde extérieur. A travers la
5 Croatie, par exemple, ce n'était pas permis, toute l'opinion internationale
6 savait --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Savkic, permettez-moi de
8 vous interrompre ici. Vous êtes en train de décrire - ou au moins vous
9 allez commencer à décrire - les différentes circonstances, je comprends que
10 vous les considérez comme les circonstances pertinentes par rapport à
11 l'existence de ce qui est appelé ici le corridor.
12 Mais voyons d'abord si je vous ai bien compris. Est-ce que vous êtes
13 en train de nous expliquer qu'il ne s'agissait pas seulement d'un objectif
14 stratégique, mais plutôt d'une chose d'une importance vitale pour vous
15 d'avoir un corridor comme cela ? Est-ce que cela serait votre conclusion ?
16 Ou vous avez une autre conclusion que vous pourriez tirer des circonstances
17 que vous avez commencées à nous décrire ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, j'étais en train de vous
19 expliquer la vraie raison et le vrai motif de tout cela. L'objectif a été
20 formulé de la même façon que les autres objectifs. Tout d'abord, ces
21 objectifs reflétaient le désir des députés de différentes régions de la
22 Republika Srpska. Mais j'ai compris que cela ne représentait pas un
23 objectif stratégique, mais plutôt un souhait tout à fait humain et
24 compréhensible.
25 A l'époque où cela a été rédigé à Banja Luka, il y avait un cas
26 relatif aux nouveaux-nés. Il manquait d'oxygène pour alimenter ces nouveau-
27 nés. Notre gouvernement légal s'est adressé à la communauté internationale,
28 au gouvernement croate, via Boban et la communauté croate. Je pense que les
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1 appels ont été adressés aux Musulmans également. Donc tous ces appels leur
2 étaient adressés pour que l'oxygène soit fourni à ces nouveaux-nés et
3 personne n'a fourni d'aide nécessaire. La communauté internationale était
4 au courant du fait que 12 de ces nouveaux-nés étaient morts à cause de
5 cela. Mais la communauté internationale ne savait pas ou ne voulait pas
6 savoir ce qui s'est passé avec les autres bébés nouveau-nés et dans quel
7 état ils se trouvent aujourd'hui.
8 S'il y avait eu de la bonne volonté, on aurait pu créer un corridor
9 humanitaire le long de la rivière Sava, par exemple, un corridor fluvial ou
10 créer un corridor aérien, mais rien n'a été fait. Je ne sais pas qui a
11 proposé, je pense que c'étaient les députés qui ont proposé cela, c'est-à-
12 dire de discuter là-dessus, mais quand on voit que personne ne veut en
13 parler.
14 Pour moi, cela ne représente plus un objectif stratégique, pour moi
15 cela représente quelque chose de tout à fait normal, c'est-à-dire,
16 d'établir une communication pour avoir le corridor, et sur ce corridor il
17 n'y avait que les forces croates régulières et personne d'autre. Je peux
18 vous parler d'autres exemples également.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur, je pense que votre réponse est
20 claire au moins par rapport à cela.
21 Monsieur Josse, vous pouvez continuer.
22 M. JOSSE : [interprétation] Bien.
23 Q. Partiellement à cause de cela, je vais vous poser des questions
24 concernant les autres objectifs, et je pense que je serai bref. Par
25 exemple, le sixième objectif. Commençons par le sixième objectif, c'est :
26 "La sortie de la Republika Srpska à la mer -- l'accès à l'embouchure
27 maritime de la Republika Srpska."
28 Est-ce qu'à votre avis c'était important ?
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1 R. Déboucher sur la mer était probablement le désir des députés
2 d'Herzégovine.
3 En comparant cette expression, c'est-à-dire le sixième objectif qui est le
4 dernier objectif, en le comparant avec le deuxième, je pense que cela
5 n'était pas nécessaire. Je ne sais pas comment cet objectif se trouve ici,
6 mais il est évident que pendant toute la période en question personne n'a
7 essayé d'établir ou de créer cet accès à la mer.
8 Q. Le troisième objectif : "Etablir un corridor le long de la rivière
9 Drina ou de la vallée de la Drina…"
10 Qu'est-ce que vous pouvez nous dire là-dessus ?
11 R. S'il s'agit du corridor, Milici-Konjevic Polje-Bratunac, il s'agit de
12 cette voie de communication, c'est-à-dire de la partie allant vers Zvornik,
13 il est évident que cela reflétait un besoin, un autre besoin, le besoin des
14 citoyens. Il est possible qu'il s'agisse d'un souhait et d'une proposition
15 des députés qui venaient de cette région, c'est-à-dire d'établir un
16 corridor pour que nous puissions sortir de cette partie encerclée. Je
17 suppose que c'était cela.
18 Il faut que j'établisse un parallèle entre la deuxième partie, c'est-
19 à-dire : "Etablir une frontière sur la Drina," dans ce cas-là, le troisième
20 et le quatrième objectif, c'est-à-dire : "Etablir les frontières le long
21 des cours des rivières Una et Drina," cela ne correspond pas, parce qu'on
22 parle ici de la frontière vers la Serbie, même si, dans la constitution à
23 l'époque, il ne figurait pas "l'Etat serbe" mais l'Etat des citoyens
24 serbes. L'autre Etat, c'est la République de Srpska Krajina. Comment
25 c'était possible de ne pas parler de cela, par exemple, des frontières vers
26 cet autre Etat serbe.
27 Je ne devine pas quelle était la fin de cela. Dans le premier
28 objectif : "Etablir les frontières par rapport à deux autres communautés
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1 nationales." Il n'a pas été dit "les frontières d'Etats," mais il n'a pas
2 été dit l'indépendance d'Etats ou être annexé à un autre Etat, il fallait
3 voir, durant les pourparlers entre les Etats, si cet Etat représenterait
4 une sorte de communauté de différentes nations. Je vois tout cela en tant
5 qu'une série de désirs ou d'une sorte de plate-forme pour procéder à des
6 pourparlers, pour arriver à un compromis. Aucun objectif ici ne dit
7 explicitement qu'il faut procéder à la réalisation de ces objectifs de
8 façon militaire.
9 Je vois tout cela ainsi parce que j'ai rencontré tous ces gens qui ont
10 travaillé là-dessus, et je pense que c'était leurs désirs de parler avec
11 d'autres parties pour arriver à un compromis. Compte tenu du fait que le
12 compromis n'a pas été réalisé, et comme tout cela se passait à Lisbonne et
13 à Sarajevo.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, en gardant à l'esprit
15 votre question, quand je regarde la réponse du témoin, je pense que ce qui
16 est la réponse, que ce qu'il pense débute -- enfin, de toute façon, il
17 s'est vraiment éloigné de la question, sa réponse est extrêmement loin.
18 M. JOSSE : [interprétation] Oui, mais à notre avis, cette réponse est
19 utile. La façon dont il répond à la question --
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous pouvez continuer, bien sûr, à
21 poser des questions là-dessus.
22 M. JOSSE : [interprétation] Je vais passer à autre chose si vous
23 voulez.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela dit je regarde la pendule
25 -- en fait c'est encore autre chose. Cela n'a rien à voir avec ma remarque
26 précédente.
27 Avant de faire une pause, j'ai une question quand même à poser au témoin
28 parce qu'après la pause, je pense qu'on n'aura peut-être passé trop de
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1 temps. On vous a posé des questions et vous avez répondu longuement sur le
2 fameux Club des députés. Ensuite, M. Josse vous a posé d'autres questions;
3 le Juge Hanoteau aussi vous a posé des questions. Les questions du Juge
4 Hanoteau, c'étaient surtout sur qui consultait qui lors des réunions de ce
5 fameux Club des députés.
6 Si j'ai bien compris, le président et le vice-président consultaient les
7 députés avant les réunions publiques pour arriver à trouver une solution
8 acceptable par tous. Cela, c'est une chose. Parfois, la présidence, dans
9 l'exemple que vous avez donné au Juge Hanoteau, c'est le président de la
10 République, M. Karadzic, qui était venu parler avec les députés. Donc il y
11 a eu des consultations entre les députés et le président et le vice-
12 président de l'assemblée et des consultations aussi entre les membres de
13 l'assemblée et la présidence de la république, ou le président de la
14 république, et ce bien sûr quand on débattait de points extrêmement
15 importants. J'ai bien compris ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être que l'interprétation n'a pas été
17 efficace, mais quand j'ai répondu à la question du Juge Hanoteau, j'ai dit
18 : Il y avait des cas où personnellement on avait demandé que le président
19 de la république ou la présidence viennent nous voir à l'assemblée, donc au
20 Club des députés. Je vous ai donné un exemple d'ailleurs, l'exemple du plan
21 Vance-Owen. Ils sont venus nous voir pour nous expliquer pourquoi ce plan
22 avait été initialisé à Athènes. Cela c'est un des exemples que je vous ai
23 donné. Quand c'était une question cruciale, on demandait à la présidence de
24 venir nous voir pour pouvoir entendre un peu leur point de vue, savoir
25 pourquoi ils avaient fait quelque chose ou pourquoi ils avaient évité de
26 faire autre chose. C'était, bien sûr, quand les points débattus étaient
27 essentiels.
28 J'espère que cela répond maintenant à votre question.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout à fait. Suite à la question
2 que vous lui avez posée, Monsieur Josse, je trouve que les réponses du
3 témoin sont extrêmement claires.
4 Nous allons maintenant faire une pause jusqu'à 13 heures et si on pouvait
5 donner au témoin une carte de Vlasenica pour qu'il puisse délimiter les
6 différentes municipalités --
7 M. JOSSE : [interprétation] C'est déjà fait.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est parfait. Merci.
9 Nous y jetterons un coup d'œil après la pause.
10 --- L'audience est suspendue à 12 heures 29.
11 --- L'audience est reprise à 13 heures 05.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons d'abord poursuivre
13 l'interrogatoire du témoin, après quoi j'aurais deux questions à évoquer,
14 qui correspondra à peu près sept minutes à la fin de cette audience.
15 Indépendamment de cela, le témoin nous a fourni hier, ce qu'il a appelé des
16 originaux de documents, qui ont été communiqués aux parties. Je voudrais
17 savoir s'il est nécessaire que nous conservions les originaux en nos mains
18 ou --
19 M. JOSSE : [interprétation] Pas en ce qui concerne la Défense, Monsieur le
20 Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et Monsieur Margetts.
22 M. MARGETTS : [interprétation] L'Accusation n'en a pas vraiment besoin,
23 mais nous nous attendons à ce que --
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin est ici et de toute façon ceci
25 va nous prendre jusqu'à la fin de sa déposition, après ce week-end, c'est à
26 ce moment-là que se terminera sa déposition.
27 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a une nécessité quelconque -- ces
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1 documents vous seront rendus, Monsieur Savkic.
2 Maître Josse.
3 M. JOSSE : [interprétation] J'ai presque fini mon interrogatoire.
4 Q. La carte, Monsieur Savkic, la carte, sur laquelle vous avez tracé
5 certaines lignes, se trouve sur le rétroprojecteur. Peut-être que l'on
6 pourrait allumer le rétroprojecteur. Voilà. Je pense que c'est la façon la
7 plus simple de présenter le document. Je vais vous demander lentement de
8 désigner les noms propres en cyrillique que vous avez ajoutés sur cette
9 carte.
10 R. Voici Milici, ce sont les limites approximatives puisque je n'ai pas le
11 document pertinent. Je n'avais pas le document lorsque j'étais en train
12 d'ajouter cette mention. Ce n'est peut-être pas assez précis, mais cela
13 devrait être ceci. Ceci est la limite entre la municipalité de Milici et
14 ici, il y a certains villages musulmans qui ont eu la possibilité de
15 déclarer à quelles municipalités ils souhaitaient se joindre.
16 Maintenant, voici le territoire d'une partie de cette mine qui est dans la
17 municipalité de Milici ou Vlasenica.
18 Et incidemment, le Juge Président de la Chambre m'a demandé où ce champ de
19 mine était censé se trouver, avoir été posé, et c'est là où j'ai mis ce
20 rectangle noir.
21 Q. Veuillez vous arrêter. Quel est le mot qu'on voit dans le coin en bas,
22 à droite qui est en cyrillique ? Pourriez-vous nous le dire, s'il vous
23 plaît ?
24 R. "Mine."
25 Q. Je vous remercie. Poursuivez.
26 R. Ce territoire-ci où j'ai indiqué municipalité serbe SO de Vlasenica,
27 vous avez ici la limite. La ligne en pointillée, voici. L'ensemble de la
28 zone qui reste est une partie de la ville de Vlasenica. Là où on voit
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1 "Municipalité musulmane de Vlasenica," c'est la zone obtenue par les
2 Musulmans, la municipalité musulmane Vlasenica, ainsi qu'une partie de la
3 ville de Vlasenica proprement dite.
4 Q. Une petite partie de la ligne, en pointillée, au coin droit en haut
5 pour ainsi dire, on voit un endroit où le mot commence par un K, Krezani,
6 pourquoi avez-vous mis une ligne en pointillé, ces petits points ?
7 R. C'était un village serbe. Donja Rasa, Mladinovici et Kresani. C'était
8 un village serbe, mais il se trouve qu'il était demeuré dans un secteur
9 territorial municipal musulman. Je ne me rappelle pas très bien si on leur
10 avait donné la possibilité de déclarer quelle était la municipalité ils
11 souhaitaient être rattachés. C'est la raison par laquelle j'ai mis des
12 petits points. De la même manière, j'ai mis des petits points également
13 pour les deux villages musulmans avec les lignes en pointillé à l'intérieur
14 de la municipalité de Milici.
15 M. JOSSE : [interprétation] Pourrais-je avoir une cote, s'il vous plaît ?
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
17 Monsieur le Greffier.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du D140, Monsieur le
19 Président.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre l'a demandé. Pourriez-vous
21 exceptionnellement, Monsieur le Greffier, vous occuper de faire copier les
22 parties de cette carte pour les Juges ?
23 M. JOSSE : [interprétation] Je vous suis reconnaissant.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
25 Monsieur Josse.
26 M. JOSSE : [interprétation]
27 Q. Avant la suspension de séance, on vous a posé un certain nombre de
28 questions par un certain nombre de personnes concernant le Club des
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1 députés. Je voudrais vous demander quelle était l'influence de M. Krajisnik
2 dans ce Club des députés, s'il vous plaît. Pourriez-vous dire aux membres
3 de la Chambre comment vous appréciez son influence dans cet organe ?
4 R. M. Krajisnik était l'un des égaux dans le Club de députés. Quand je dis
5 "l'un des égaux," c'est quelque chose à quoi j'avais fait déjà allusion. Ce
6 que je voulais dire : c'est que les réunions du Club des députés pouvaient
7 parfois se poursuivre sur trois jours et trois nuits. Les entretiens, les
8 échanges d'opinion prendraient longtemps. Et l'un des députés avait un
9 doctorat en philosophie classique allemande, et il y avait le Pr Buha, et
10 d'autres personnes qui avaient des doctorats, en l'occurrence, chacun
11 d'entre eux, sauf deux personnes qui avaient des diplômes de fin du
12 secondaire. Par exemple, le Pr Buja avait obtenu son diplôme à Heidelberg
13 en Allemagne.
14 Q. Je vous arrête ici. Veuillez vous en tenir à la question posée. Je
15 voudrais que vous vous concentriez sur M. Krajisnik et son influence dans
16 le Club des députés, s'il en avait une.
17 R. Son influence comme je le disais, le profil général des membres était
18 tel que -- je ne veux pas dire que c'était une secte, mais j'ai expliqué ce
19 qu'étaient ces membres du club. Nous pouvions travailler pendant trois
20 jours et trois nuits sans nous arrêter. Il y avait toutes sortes de débats
21 et discussions, d'arguments qui étaient présentés et nous faisions
22 connaître nos opinions. Nous faisions des suggestions, et même il n'y avait
23 personne tel qu'un docteur en philosophie germanique pouvait exercer une
24 influence sur nous. Bien entendu, M. Krajisnik ne pouvait pas non plus.
25 Nous avions le sentiment que tous étaient égaux.
26 Q. Vous avez parlé de l'idée d'une présidence étendue, agrandie. Est-ce
27 que, en fait, vous avez participé à des réunions de la présidence élargie
28 en 1992 ?
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1 R. Monsieur le Président, je ne parlais de présidence élargie. Vous avez
2 mentionné cette idée de présidence étendue pour la première fois. Comme je
3 l'ai souvent dit, pour ma part, je n'ai jamais vu, je n'ai jamais été
4 témoin de l'existence d'une présidence étendue en séance ou même tout
5 simplement existant, en l'occurrence.
6 Q. Mon --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question est de savoir si vous n'avez
8 jamais participé à une séance de la présidence, qu'il s'agisse d'une
9 présidence étendue ou d'une présidence normale est une autre question.
10 N'avez-vous jamais participé à une séance ou une réunion de la présidence ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] De quelle présidence voulez-vous parler ? La
12 présidence de la Republika Srpska ou la présidence de l'assemblée de la
13 Republika Srpska ?
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La présidence de la Republika Srpska.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Jamais. En tant que député, je n'ai jamais
16 assisté à des réunions de la présidence de la Republika Srpska.
17 M. JOSSE : [interprétation]
18 Q. Alors, comment êtes-vous en mesure de dire que M. Krajisnik n'était pas
19 un membre de cet organe ?
20 R. J'ai expliqué cela. Je n'ai jamais entendu dire qu'il y avait quelque
21 chose qu'on devrait appeler une présidence étendue. Cette idée m'est
22 totalement inconnue. Ces termes n'existaient pas. Lorsque nous nous
23 parlions, les uns aux autres, l'idée de présidence étendue n'existait tout
24 simplement pas.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Hanoteau a une question à poser.
26 M. LE JUGE HANOTEAU : Je reviens à ce que nous avons dit il y a un quart
27 d'heure sur les rencontres plutôt informelles, d'après ce que j'ai pu
28 saisir, entre la "Presidency" et le Club des députés. Je voudrais
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1 simplement savoir quelle était votre perception du rôle du président, M.
2 Karadzic, ou du vice-président, s'ils étaient là, dans ces réunions
3 informelles du Club des députés. Vous nous dites : M. Krajisnik était notre
4 "égal." Je suppose que vis-à-vis de la présidence, vous avez une opinion
5 aussi sur le type de rapport qui s'instaurait les députés et les membres de
6 la présidence. Comment cela se passait tout cela, s'il vous plaît ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était d'une façon tout à fait démocratique.
8 Les membres de la présidence pouvaient présenter leurs opinions pendant la
9 discussion. Parfois ils le faisaient, parfois pas. Encore une fois, je
10 souligne, c'était uniquement lorsqu'il s'agissait des réunions très, très
11 importantes du club, et c'est alors qu'on s'occupait des questions vitales
12 pour la Republika Srpska. J'ai déjà dit quand il s'agissait du plan Vance-
13 Owen, c'est nous, les députés qui avons demandé que le président de la
14 république dise ce qu'il a été signé, à savoir, parafé et à quelles fins,
15 et il nous a expliqué cela.
16 Dans d'autres situations, il parlait d'autres choses ainsi que M.
17 Koljevic et Mme Plavsic. Par exemple, au sein de la présidence, il y avait
18 des tâches particulières accordées à des membres de la présidence. Mme
19 Plavsic s'occupait des questions humanitaires, je pense, établissant
20 contact avec les agences des Nations Unies, par exemple, elle s'occupait de
21 cela. Elle en parlait. C'est dans ce sens-là que cela se passait.
22 M. LE JUGE HANOTEAU : Il n'y avait pas d'instructions données par la
23 présidence aux députés ? Il n'y avait pas d'état de relative subordination
24 de ces derniers vis-à-vis des premiers ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est exactement comme cela. Ils
26 étaient intelligents et il ne fallait pas leur donner des leçons, comme on
27 disait à l'époque.
28 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci.
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1 M. JOSSE : [interprétation]
2 Q. Avant que vous ne deveniez un député actif à l'automne de 1992, est-ce
3 que vous connaissiez personnellement M. Krajisnik ?
4 R. Il est possible que nous nous soyons rencontrés en passant par Milici.
5 C'est possible. Mais avant cette date-là, et je l'aurais peut-être vu à une
6 réunion, -- je ne peux pas me souvenir maintenant de cette conférence et
7 j'ai eu l'honneur d'assister à cette conférence; il y avait beaucoup
8 d'intellectuels présents, et c'est à cette occasion-là que j'ai vu M.
9 Krajisnik. Je ne dirais pas que, jusqu'à cette date-là, on se rencontrait
10 souvent. Peut-être qu'on s'est quand même rencontré quelquefois, mais nous
11 n'avons pas mené une conversation longue jusqu'à ce moment-là, c'est-à-
12 dire, au moment où je suis devenu député, bien sûr, je le voyais plus
13 souvent après, lors des réunions.
14 Q. Maintenant, je voudrais parler de la période précédent votre nomination
15 en tant que député en automne 1992. Vous avez décrit que vous aviez des
16 contacts limités avec M. Krajisnik. Je suppose que vous avez lu des
17 articles dans les journaux le concernant, que vous le voyiez à la
18 télévision. Jusqu'au moment où vous aviez des contacts personnels avec lui,
19 quelle était votre impression, c'est-à-dire, comment le voyiez-vous ?
20 R. En tant que président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine à l'époque,
21 je l'appréciais et j'appréciais son travail. Je l'aimais, oui, je peux le
22 dire. Je le respectais ainsi que la plupart des habitants. Non seulement
23 des Serbes, il y avait beaucoup de Musulmans qui, dans leurs commentaires,
24 comparaient toujours M. Krajisnik, et certains "des leurs" en politique.
25 Ils disaient que M. Krajisnik est un homme compétent qui sait présider
26 l'assemblée. Encore une fois, j'aimerais vous dire qu'on l'aimait.
27 Q. Est-ce que votre estimation par rapport à M. Krajisnik a changé après
28 avoir été devenu député ?
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1 R. Non. Il ne s'agissait que d'autres activités parce que lui, il lui
2 était difficile de gérer tout cela, le travail du Club des députés était
3 très complexe parce qu'il y avait beaucoup d'opinions très différentes.
4 C'est pour cela que cela était difficile, la situation était sérieuse
5 également pour s'occuper à la légère des questions importantes à l'époque.
6 Q. Vous avez dit qu'il était très populaire. Comment appréciez-vous le
7 pouvoir qu'il exerçait en Republika Srpska ?
8 R. M. Krajisnik n'avait aucun pouvoir. L'assemblée nationale de la
9 Republika Srpska à l'époque, c'est-à-dire, pendant la période où
10 l'assemblée faisait partie de la Bosnie-Herzégovine,
11 représentait une institution qui jouissait d'une renommée qui donnait
12 l'exemple à tout le monde et tous les députés méritaient d'être respectés.
13 Les citoyens ne regardaient pas l'assemblée en tant qu'une institution
14 incarnée par M. Krajisnik; au contraire. J'ai déjà dit qu'il était plus
15 populaire que les autres députés. Je ne suis pas sûr si, dans son village
16 natal, il était plus populaire que moi, par exemple, mais il était
17 populaire. C'est ce que j'ai déjà dit, mais je ne vois pas comment il
18 pouvait à l'époque disposer d'un pouvoir quelconque et comment il pouvait
19 exécuter.
20 Q. Je vous remercie.
21 M. JOSSE : [interprétation] Je n'ai plus de questions à vous poser.
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, êtes-vous prêt à
24 commencer le contre-interrogatoire de M. Savkic ?
25 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.
27 Monsieur Savkic, M. Margetts va vous poser des questions maintenant, qui
28 représente le bureau du Procureur.
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1 M. MARGETTS : [interprétation] Je prie Madame l'Huissière de déplacer le
2 rétroprojecteur pour que je puisse voir M. Savkic.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
4 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons une série
5 de pièces à conviction à distribuer, et j'aimerais que ces pièces à
6 conviction soient distribuées maintenant.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
8 Est-ce qu'il y a un index avec ?
9 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois. C'est séparé. La Chambre n'a
11 rien contre le fait que ces activités soient exécutées pendant la pause
12 avant de commencer le contre-interrogatoire.
13 M. MARGETTS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vais penser à
14 cela dans le futur.
15 Contre-interrogatoire par M. Margetts :
16 Q. [interprétation] Monsieur Savkic, bonjour.
17 R. Bonjour.
18 Q. Monsieur Savkic, pendant que mon collègue, Me Josse, vous a posé des
19 questions, vous avez eu l'occasion de dire à la Chambre quelles étaient les
20 positions diverses que vous avez occupées de 1991 jusqu'à la fin de 1995.
21 Maintenant, je voudrais vous poser la question suivante : quelles étaient
22 vos fonctions, les fonctions que vous avez décrites, que vous avez exercées
23 au sein des organes du gouvernement, des organes militaires, et dites-nous
24 s'il s'agissait de la description complète, exhaustive, est-ce que vous
25 nous avez dit toutes les fonctions que vous avez exercées ou il y en
26 d'autres que vous voudriez décrire à la Chambre maintenant ?
27 R. Vous pensez aux fonctions militaires ou aux fonctions au sein des
28 autorités de pouvoir ? Vous pensez à quelles fonctions ? Vous pensez à
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1 toutes les fonctions que j'ai exercées ?
2 Q. Je pense que ma question était tout à fait claire; au sein du parti, du
3 gouvernement et de l'armée. Je pense à toutes ces institutions. C'est ce
4 que j'ai dit.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Commençons par les organes du parti.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant cette période, c'est-à-dire, pendant
7 la période allant à environ -- je ne peux pas vous dire exactement quand
8 c'était, peut-être de la fin de 1991 ou du début de 1992 -- oui, cela
9 pourrait être à partir du début de 1992 où le président du SDS, du Parti
10 démocratique serbe, un monsieur âgé, je parle maintenant du comité
11 municipal de Vlasenica, ce monsieur, il ne pouvait plus parce qu'il était
12 malade et il ne pouvait plus exercer cette fonction. Il était malade et il
13 était âgé. Je pense que c'était pendant cette période que j'ai, mais je ne
14 me souviens pas avec exactitude, je pense que j'ai commencé à exercer cette
15 fonction, fonction du président du SDS à Vlasenica. Si vous avez pensé à
16 cela, c'est ma réponse. M. Josse ne m'a pas posé cette question.
17 Dès que l'organisation des municipalités a été complétée, dès que les
18 municipalités ont été, du point de vue territorial, divisées, je pense que
19 pendant cette période, le Parti SDS ne fonctionnait plus. Toutes les
20 activités ont été gelées, mais je sais qu'après, à Milici, le premier
21 président qui a été élu à l'époque, c'était en 1993. A l'époque j'étais
22 membre de l'armée.
23 Q. Vers la fin de 1995, aviez-vous une autre fonction au sein du
24 parti ?
25 R. En 1993, lorsque les activités ont repris, les activités du parti, oui,
26 j'étais membre. Je suppose -- non, mais certainement, j'étais membre du
27 comité municipal du SDS à Milici, si tant est que ce soit une fonction.
28 Q. Jusqu'à quel moment exactement ?
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1 R. Je suis encore membre du SDS; je l'ai déjà dit.
2 Q. Maintenant --
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une clarification à demander.
4 Vous avez répondu sur votre appartenance au conseil municipal du Parti
5 démocratique serbe de Milici. M. Margetts vous a demandé : Jusqu'à quand ?
6 Vous avez répondu : "Je suis encore membre du Parti démocratique serbe."
7 Vous êtes encore membre du conseil municipal du Parti démocratique serbe ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, à Milici.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
10 Monsieur Margetts, vous pouvez continuer.
11 M. MARGETTS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Si vous pouviez maintenant vous pencher sur les organes de l'autorité.
13 De 1991 à 1995, pouvez-vous, s'il vous plaît, nous citer tous les organes
14 institutionnels dont vous avez fait partie.
15 R. Je n'étais pas membre du moindre organe institutionnel, il me semble.
16 Au cours de cette période, je n'étais membre d'aucune institution
17 gouvernementale. Je ne pouvais pas de toute façon être membre de quoi que
18 ce soit puisque j'étais député. A l'époque, il était possible de faire les
19 deux. Maintenant ce n'est plus possible.
20 Q. Pour ce qui est maintenant des organes militaires, depuis la
21 mobilisation jusqu'en 1991 jusqu'à la fin 1995, pouvez-vous nous énumérer
22 chaque unité dont vous avez fait partie et chaque organe militaire dont
23 vous avez fait partie ?
24 R. Je l'ai déjà mentionné. J'aimerais savoir quelles sont exactement les
25 dates qui vous intéressent.
26 Q. Monsieur Savkic, ce sont les mêmes dates, exactement les mêmes que
27 d'habitude --
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Margetts, il n'a pas entendu la
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1 date, c'est tout. Il vous a --
2 La question c'est : "Depuis la mobilisation jusqu'en 1991," jusqu'à la fin
3 1995.
4 Commençons avec la mobilisation et on va dérouler par ordre chronologique
5 jusqu'à la fin 1995, toutes vos positions militaires, tous vos postes
6 militaires ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Après la mobilisation en 1991, n'avais pas de
8 poste militaire, pas d'obligation militaire, j'étais déployé, certes.
9 J'étais déployé au centre de formation conjoint, 752, c'est un centre à
10 Tuzla où les officiers forment d'autres officiers. Si cela vous suffit.
11 Mais je n'étais pas mobilisé, j'étais déployé. C'était mon unité de
12 déploiement.
13 J'ai dit et d'ailleurs je l'ai déclaré quelque part. Je ne me souviens plus
14 si c'est le 4 ou le 6 avril 1992. Je ne sais plus quelle est la date qui
15 est nommée dans ma brochure. J'ai dit que là, à ce moment-là, j'avais deux
16 casquettes; j'étais employé dans mon entreprise, et quand j'avais du temps
17 de libre, je travaillais à des missions de génie. Tout d'abord, j'étais en
18 charge du bataillon de la réserve dont je m'occupais. Ensuite, c'est devenu
19 un commandement de la ville entière, c'est comme cela que c'était appelé,
20 commandement de la ville entière et j'avais encore les mêmes fonctions.
21 J'ai toujours été chargé quand même du côté génie des opérations. J'ai
22 effectué tout cela jusqu'à la percée vers les mines de bauxite. Là, j'étais
23 commandant en charge de la défense et en B/C/S, c'est Rudnik. Cela c'était
24 depuis fin juin jusqu'au début septembre, et ensuite en fin septembre --
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Savkic, je suis désolé, il va
26 falloir qu'on vous arrête. Je ne sais pas quelle est votre exacte histoire
27 au sein des forces armées, mais malheureusement nous avons quelques points
28 logistiques à traiter. Nous devons terminer à moins le quart. Au moins le
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1 contre-interrogatoire a commencé. On aimerait bien que vous reveniez lundi
2 prochain.
3 Monsieur le Greffier, ce sera le matin, il me semble ?
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Non, c'est une séance de l'après-midi.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce sera l'après-midi. On vous reverra
6 lundi pour le contre-interrogatoire à partir de 14 heures 15. Si vous
7 pouviez suivre, Madame l'Huissière, et je tiens à vous dire, encore une
8 fois, qu'il ne faut pas que vous parliez à qui que ce soit de votre
9 déposition, déposition faite ou déposition à venir. Merci.
10 [Le témoin se retire]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais traiter deux points. Tout
12 d'abord, nous allons peut-être commencer par l'histoire sans fin, une
13 histoire qui n'aura jamais de fin sur les pièces à conviction et la
14 traduction de ces dites pièces.
15 La Chambre de première instance aimerait vous poser des questions en ce qui
16 concerne les pièces à conviction où les traductions ne sont pas complètes.
17 Le 15 décembre, on a demandé aux deux parties d'avoir les traductions de
18 nombreux documents qui avaient déjà été versés au dossier bien avant le 15
19 décembre, et on voulait avoir ces traductions au 15 janvier 2006. On ne les
20 a toujours pas reçues évidemment.
21 Pour ce qui est de l'Accusation, il s'agit des pièces suivantes qui ne sont
22 pas toujours traduites : le P954, depuis le P968 jusqu'au P973, y compris
23 le P973, le P976 jusqu'au P978, y compris cette dernière, ensuite le P992,
24 et le P1008.
25 Côté Défense, voici les traductions qui nous manquent : le D84, D113, D114,
26 et D123. Encore une fois, la Chambre de première instance demande
27 instamment de fournir ces traductions, et là, on vous donne jusqu'au 10
28 février, mais pas plus tard.
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1 Le 15 décembre, on a aussi demandé à l'Accusation de vérifier la fiabilité
2 et la précision de traductions de différentes pièces notamment P851, P852,
3 P877.A. Là, encore, la Chambre de première instance demande instamment à
4 l'Accusation de s'exécuter au moins au 10 février.
5 Depuis le 15 décembre, il y a eu d'autres pièces à conviction qui ne sont
6 pas encore traduites. Alors côté Accusation, il s'agit de la P1034, P1049,
7 et P1050; pour la Défense : D113, D114, D123 et D127 à D129. Là encore, la
8 Chambre de première instance vous demande instamment de lui fournir ces
9 traductions, la date butoir sera le 17 février 2006.
10 Je cherche dans ma liste parce que je vois d'autres numéros qui ont des
11 dates différentes, enfin je continue, on vérifiera ultérieurement.
12 De plus, la Chambre rappelle aux parties que le 17 janvier, ils ont promis
13 de nous donner une version B/C/S de la pièce D106, tous les deux étaient
14 d'accord là-dessus. La version serait ensuite donnée au CLSS pour la
15 traduction. La pièce a été présentée suite à la déposition du témoin
16 Banduka, le 17 novembre. La Chambre considère qu'il y a trop de temps qui
17 s'est écoulé depuis les discussions et demande aux parties de se consulter
18 et de nous donner une version sur laquelle elles seraient d'accord, au 3
19 février ou plus tard.
20 Voici encore des documents qui ont besoin d'une traduction, je vérifie
21 bien, c'est le D113, D114, et cetera. S'il y a besoin de corrections, nous
22 le ferons dès lundi prochain, s'il faut corriger un peu cette liste.
23 Dernier point maintenant que j'aimerais soulever. Il s'agit de la chose
24 suivante : la Chambre de première instance a étudié de près les
25 propositions de la Défense soumises le 20 janvier 2006, en ce qui concerne
26 le déroulement de la présentation des moyens de la Défense, et il y a
27 quelques observations qui sont venus à l'esprit de la Chambre.
28 Tout d'abord, le 26 avril 2005, la Chambre a rendu une ordonnance portant
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1 calendrier pour le reste du procès, donc la Défense auparavant avait
2 déclaré qu'elle préférerait citer l'accusé en tant que son premier témoin,
3 mais lors d'une conférence 65 ter qui s'est tenue le 23 août 2005, le
4 conseil a annoncé que ceci ne serait pas possible.
5 Le 5 octobre 2005, la Défense a déposé une liste provisoire de témoins
6 accompagnée par leurs résumés prévus à l'article 65 ter du Règlement. Selon
7 l'estimation qui avait été donnée ce jour-là, l'accusé devait déposer
8 pendant 175 heures, et c'est uniquement pour l'interrogatoire principal, et
9 il devait déposer sur 56 thèmes différents. Le jour suivant, la Chambre,
10 ici c'est au compte rendu et cela commence à la ligne 17 221, la Chambre a
11 déclaré qu'elle était très inquiète en ce qui concerne le nombre d'heures
12 dont la Défense disait qu'elle avait besoin pour présenter ses moyens,
13 surtout le temps qu'elle avait estimé pour la déposition de l'accusé.
14 Le 15 novembre 2005, la Défense a annoncé que l'accusé commencerait sa
15 déposition, commencerait donc à déposer le 23 février 2006. Le 18 novembre
16 2005, de ce fait, trois jours plus tard, la Chambre a modifié son
17 ordonnance portant calendrier précédent, afin que la Défense ait sept
18 semaines de plus pour présenter ses moyens. Maintenant, la Défense va
19 devoir avoir fini avec la présentation de ses moyens au 28 avril 2006, à
20 moins, bien sûr, qu'elle puisse prévaloir des circonstances
21 exceptionnelles.
22 Le 20 janvier 2006, la Défense a fait part à la Chambre que la date à
23 laquelle elle comptait citer l'accusé à la barre serait le 20 février 2006.
24 La Défense a ajouté qu'elle essayait de réduire la durée de
25 l'interrogatoire principal de l'accusé en utilisant l'article 89(F) du
26 Règlement et les points d'accord qui sont prévus au titre de l'article 65
27 ter (H) du Règlement. La Défense a bien déclaré qu'elle essayait, et là, je
28 les cite, donc la Défense déclarait : "Etant donné que nous avons prévu de
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1 présenter les moyens de la Défense pour en terminer au 28 avril, et la
2 Défense voudrait appeler à la barre 70 témoins." Or, aujourd'hui, le 27
3 janvier 2006, la Chambre a déjà reçu une notification de 20 témoins, y
4 compris l'accusé, 20 témoins qui seront cités par la Défense.
5 La Chambre ici est très inquiète parce qu'il lui semble tout à fait
6 impossible de réconcilier les informations qui lui ont été données sur la
7 présentation des moyens lors des semaines à venir, alors que d'un autre
8 côté la Défense a bien déclaré qu'elle voulait absolument suivre ce qui
9 avait été demandé dans l'ordonnance portant calendrier en ce qui concerne
10 la programmation.
11 La Chambre a fait quelques calculs et pourtant elle était très optimiste.
12 La Chambre est partie d'une hypothèse de base qui était la suivante : la
13 Défense n'appellerait que 18 témoins après l'accusé, témoins qui sont cités
14 dans la présente lettre. Du 20 février au 28 avril 2006, cela représente 48
15 jours d'audience, au maximum, sont exclus les week-ends et les jours fériés
16 des Nations Unies. Ces 48 jours d'audience représentent 160 heures de
17 témoignage. Il faut mettre un peu de temps de côté pour la procédure et les
18 retards éventuels. Même en étant très optimiste et en prenant pour
19 hypothèse que l'examen principal de l'accusé ne dura que 90 heures, ce qui
20 est la moitié du temps que la Défense avait demandé au départ, si l'on
21 prend aussi comme hypothèse que l'Accusation pour son interrogatoire n'a
22 besoin que de la moitié de ce temps et, encore un "et," si les Juges n'ont
23 aucune question à poser, cela représente quand même en tout, 135 heures de
24 déposition et ce, uniquement pour l'accusé.
25 Admettons maintenant que les 18 autres témoins ne prennent que quatre
26 heures chacun, quatre heures pour interrogatoire principal, contre-
27 interrogatoire et questions des Juges, il leur faut quand même encore 72
28 heures pour déposer. Quand on ajoute les 135 heures de l'accusé et ces 72
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1 heures pour les 18 témoins, on en arrive, et voici ce qui est écrit, ce
2 sont mes équipes qui ont fait le calcul, on en arrive à plus de 200 heures.
3 Pour être très précis, à 207 heures. Ce qui est déjà bien plus que le temps
4 disponible de façon réaliste entre le 20 février et le 28 avril.
5 Après tous ces calculs, la Chambre est extrêmement inquiète, car elle ne va
6 pouvoir remplir ses obligations prévues au titre de l'article 73 ter (B) et
7 (C) du Règlement, comme elle le devrait, c'est-à-dire, sur la base des
8 informations que le Règlement oblige la Défense à fournir. La Chambre
9 réitère une fois de plus que c'est maintenant à la Défense de s'organiser
10 et d'organiser la présentation de ses moyens de la façon la plus efficace.
11 Il ne faut citer à la barre que les témoins les plus efficaces, les plus
12 utiles, et il faut les interroger de façon efficace, tout comme il a été
13 demandé exactement la même chose d'ailleurs à l'Accusation lors la
14 présentation de ses moyens.
15 La Chambre demande donc, instamment à la Défense de continuer à
16 programmer la présentation de ses moyens en gardant à l'esprit, à la fois
17 les limites données par l'ordonnance portant calendrier et tout en restant
18 quand même réaliste de l'appréciation de la situation.
19 Ceci conclut les remarques de la Chambre à propos du déroulement de
20 la présentation des moyens de la Défense.
21 Nous pouvons clore cette audience. Je suis désolé, je m'excuse. J'ai
22 pris un petit peu trop longtemps, cette lecture a pris plus que les sept
23 minutes prévues. Mes excuses à tout le monde.
24 --- L'audience est levée à 13 heures 55 et reprendra le lundi 30
25 janvier 2006, à 14 heures 15.
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