Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 16 mai 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 17.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour. Si j'ai bien compris, nous

6 avons résolu nos problèmes techniques.

7 M. le Greffier, pourriez-vous, s'il vous plaît, citer l'affaire.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-00-39-

9 T, le procureur contre Momcilo Krajisnik.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, M. le Greffier.

11 Avant de poursuivre, j'ai cru comprendre que M. Krajisnik a travaillé sur

12 les textes qui se trouvent au P64A, intercalaire 698. J'aimerais juste

13 l'afficher à l'écran. Si j'ai bien compris, Monsieur Krajisnik, tout

14 d'abord, je tiens, bien sûr, à vous rappeler que vous êtes encore tenu par

15 la déclaration solennelle que vous avez faite au début de votre déposition

16 -- que vous avez essayé de faire je crois hier. Vous avez essayé de voir si

17 vous pouviez déchiffrer le paragraphe 10 de ce document qui est très

18 difficile à lire.

19 LE TÉMOIN : MOMCILO KRAJISNIK [Reprise]

20 [Le témoin répond par l'interprète]

21 Si je pouvais demander à Mme l'Huissière de mettre le fruit de vos

22 travaux sur le rétroprojecteur, nous allons voir d'abord le texte qui est

23 difficilement lisible - c'est l'original - ensuite, le transcript

24 dactylographié du texte à la fois en alphabet cyrillique et en alphabet

25 latin. Est-ce que les interprètes le voient ? Première chose que j'aimerais

26 vérifier, ce sera peut-être faire cela après la pause, après avoir donné

27 aux deux parties l'occasion d'étudier ce texte. Ils s'accordaient pour dire

28 que c'est bien le texte lu par

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1 M. Krajisnik et pour se mettre d'accord sur l'interprétation de ces textes.

2 Je pense qu'il serait peut-être bon d'en faire quelques photocopies, et au

3 cours de la pause, les conseils assistés, bien sûr, de leurs assistants

4 linguistiques, du moins ceux qui peuvent lire et comprendre le B/C/S,

5 pourront voir si ce qui est écrit est bien correct. Je n'entends pas

6 d'objection.

7 Monsieur le Greffier, s'il vous plaît, pouvez-vous récupérer le

8 document, le photocopier en deux exemplaires, les donner aux parties, peut-

9 être faire aussi quelques copies supplémentaires pour que les interprètes

10 dans les cabines aussi aient ce document. Ensuite, nous pourrons tous

11 vérifier si la traduction, telle qu'elle se trouve à l'intercalaire 696.1

12 [comme interprété] est bel et bien la traduction exacte, tout du moins une

13 traduction fiable.

14 Monsieur Stewart, maintenant, vous avez la parole.

15 M. STEWART : [interprétation] Oui, c'est une explication qui pourrait être

16 raisonnable, mais qui pourrait être erronée quand même. Nous allons voir si

17 nous sommes d'accord sur la traduction donnée.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout à fait. C'est le but de l'exercice.

19 M. STEWART : [interprétation] Nous ferons cela dès que nous pouvons.

20 Interrogatoire principal par M. Stewart : [Suite]

21 Q. [interprétation] Maintenant, Monsieur Krajisnik, bonjour. Nous en

22 arrivons au 10 mai, du PV en question qui est le PV de la session du

23 Conseil de sécurité national et du gouvernement de la République serbe de

24 Bosnie-Herzégovine. Il s'agit, bien sûr, d'un document qui se trouve dans

25 le P64A, classeur 22, intercalaire 617.

26 M. STEWART : [interprétation] Le numéro ERN est le 01245315.

27 Q. Monsieur Krajisnik, nous savons qu'il allait y avoir une session de

28 l'assemblée le 12 mai à Banja Luka. Cela, c'est déjà inscrit au PV. Nous

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1 savons aussi que vous veniez juste de revenir d'un déplacement, d'un

2 déplacement que vous aviez effectué avec le

3 Dr Karadzic et le Pr Koljevic, déplacement en vue d'aller négocier avec la

4 Communauté européenne. Tout d'abord, juste avant la session de l'assemblée

5 qui était prévue pour le 12 mai, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire

6 quel était l'état de la situation en ce qui concerne les pourparlers

7 Cutileiro avec la Communauté européenne ?

8 R. Les négociations avec Cutileiro étaient gelées, avaient juste été

9 gelées juste avant la réunion de l'assemblée.

10 Q. Gelées, gelées. Pour quelle raison et de quelle manière ?

11 R. La Communauté européenne avait interrompu les négociations, et ce, pour

12 une période indéfinie. Sans doute, parce que lors de la dernière réunion,

13 comment dire ? Il n'y avait pas vraiment eu les résultats attendus. C'est

14 pour cela que nous avons lancé cet appel lors de la session.

15 Q. La suspension des négociations était-elle reliée d'une façon ou d'une

16 autre avec des problèmes de cessez-le-feu ou des violations alléguées de

17 cessez-le-feu ?

18 R. Je ne me souviens pas exactement quelles étaient les raisons, mais

19 elles avaient été formulées par la Communauté européenne. Enfin, en un mot,

20 ils avaient interrompu, ou du moins, suspendu les négociations. Mais pas à

21 long terme, mais à court terme. C'était la décision qui avait été prise.

22 Je pense que cette réunion à laquelle M. Izetbegovic n'a pas voulu assister

23 parce que le cessez-le-feu avait été violé, il a dit qu'il protestait, et

24 que pour exprimer son mécontentement, il a décidé de ne pas venir. Si je me

25 souviens bien, quelqu'un d'autre est venu à sa place. Enfin, tout a été

26 expliqué de façon très différente par notre camp.

27 Q. Avez-vous eu la même réaction et la même opinion que le

28 Dr Karadzic en ce qui concerne la suspension de ces pourparlers avec la

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1 Communauté européenne ? Etiez-vous d'accord ?

2 R. M. Karadzic, M. Koljevic et moi-même, étions du même avis. Nous

3 voulions que les négociations se poursuivent le plus vite possible.

4 Q. Parmi les autres, personnalités éminentes des Serbes de Bosnie, y

5 avait-il quelqu'un qui aurait des vues différentes ou qui avait une opinion

6 divergente ?

7 R. Les gens qui étaient à Pale et qui avaient participé à ces réunions

8 consultatives partageaient notre point de vue. Je crois qu'ils étaient tous

9 d'accord. Néanmoins, il y a toujours quelqu'un qui émet des doutes quant à

10 savoir si on peut arriver à quoi que ce soit par le biais des négociations.

11 Comme ils le disaient à l'époque, les Musulmans étaient en train de saboter

12 les négociations. C'était quand même des opinions assez isolées. Les gens

13 disaient cela parce qu'ils étaient inquiets, ce n'était pas vraiment

14 pertinent. Tout le monde voulait que les négociations se poursuivent le

15 plus rapidement possible. Ou disons-le autrement : une majorité écrasante

16 voulait cela. Il y avait peut-être une toute petite minorité qui n'était

17 pas d'accord. Je ne me souviens pas du tout de qui cela peut bien être.

18 Q. Comment est-ce que les Musulmans -- enfin, tout d'abord, j'aimerais

19 savoir si, à votre avis, aussi, il était correct de dire que le côté

20 musulman était en train de saboter les négociations ?

21 R. Nous avions confiance. Enfin, en tout cas, j'avais confiance. Là, je

22 parle uniquement, bien sûr, de ce que je pensais. Oui, on était à peu près

23 certains qu'ils étaient en train de faire cela, que les Musulmans ne

24 voulaient pas de négociations. Cela ne les intéressait pas. La Bosnie-

25 Herzégovine était déjà reconnue, et au travers des négociations, il y

26 aurait une transformation de la Bosnie-Herzégovine, ce qui n'était pas du

27 tout dans leur intérêt. Donc, on avait ce doute. On ne sait pas si on était

28 corrects à 100 %, mais c'était assez logique d'émettre ce doute. Du coup,

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1 cela nous confortait dans notre certitude, qu'ils ne voulaient pas de

2 négociations et qu'il y avait violation du cessez-le-feu de leur part de

3 façon incessante.

4 Q. Qu'en est-il des Croates à ce moment-là ? Etaient-ils en train

5 d'appuyer, en train de s'opposer ou en train même de saboter les

6 négociations en cours ?

7 R. Le côté croate travaillait activement à bien rassembler leur territoire

8 ethnique, leur propre territoire ethnique. Ils n'étaient vraiment pas

9 opposés à la poursuite des négociations. Disons que le scénario du pire en

10 aurait fait un camp neutre. Finalement, ils étaient plutôt en faveur des

11 négociations plutôt que de leur arrêt. De plus, pour eux, c'était tout à

12 fait acceptable d'avoir une troisième entité en Bosnie-Herzégovine.

13 Q. Au cours de ces pourparlers avec la Communauté européenne, avant qu'ils

14 soient suspendus, il y a la situation de guerre prévalente en Bosnie-

15 Herzégovine en dehors de Sarajevo; a-t-elle été discutée ?

16 R. Vous voulez dire lors des séances de négociation ? C'est cela, lors de

17 la conférence en tant que telle, ou est-ce que vous faites référence à

18 Pale ?

19 Q. Non, je parle des négociations avec M. Cutileiro et la Communauté

20 européenne, des représentants de la Communauté européenne.

21 R. Oui, parce que l'autre camp, quand je parle de l'autre camp, je parle

22 des Musulmans mais ils donnaient toujours des raisons. Ils pensaient que

23 les négociations ne devraient pas continuer, parce que le cessez-le-feu

24 était violé, parce qu'il y avait une guerre, parce que là il fallait

25 arrêter la guerre, ils ne pourraient faire des choses uniquement une fois

26 que la guerre serait terminée. Il y avait des accusations mutuelles qui

27 étaient lancées des deux côtés. La Communauté européenne a essayé d'agir

28 en tant qu'arbitre et de clarifier un peu les choses, et au moins d'être

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1 objective. Bien sûr, nous les accusés, ils nous accusaient. Comment dire,

2 c'est comme cela que cela se passait. Il y avait des accusations mutuelles

3 de part et d'autre.

4 Q. Y a-t-il eu accord ou imposition d'un cessez-le-feu concernant des

5 endroits qui se trouveraient en dehors de Sarajevo ?

6 R. Je crois qu'ici vous avez l'occasion de lire le programme de M.

7 Karadzic. Le 12 avril, il y a eu un cessez-le-feu qui a été signé, qui

8 était valable pour toute la Bosnie-Herzégovine. On s'était mis d'accord

9 pour la cessation des hostilités mais cela s'appliquait principalement à

10 Sarajevo. Comment le dire ? Comment vous expliquer ? C'est là qu'il y avait

11 les combats les plus violents et toute la Communauté européenne et toute la

12 communauté internationale avaient les yeux braqués sur Sarajevo. Je

13 reprends, je reprends. La plupart des objections faisaient valoir que le

14 cessez-le-feu était sans cesse violé à Sarajevo. C'était en effet les

15 objections qui étaient soulevées lors de la conférence. Vous avez raison.

16 Q. Avant la séance de l'assemblée qui, nous le savons, s'est tenue le 12

17 mai à Banja Luka, y a-t-il eu un jour ou un moment quelconque en mai,

18 tentative peut-être d'organiser une séance de l'assemblée préalable à celle

19 de Banja Luka ?

20 R. Si je me souviens bien, il y a, comment dire ? L'information existe,

21 j'en suis sûr mais je n'ai pas pu vérifier avec qui que ce soit. J'avais

22 prévu une réunion à Pale, à Jahorina en fait, et un petit nombre de députés

23 s'y sont rendus, parce que les députés venant de Banja Luka, de la Krajina,

24 ne pouvaient pas venir. Quand on n'a pas réussi à se retrouver à tous, tous

25 ceux qui étions déjà à Jahorina, tous les députés et moi-même, nous nous

26 sommes rendus à Banja Luka. Je ne me souviens plus très bien comment nous

27 sommes rendus à Banja Luka, mais dans le PV, j'ai vu, cela c'étaient les

28 remarques de M. Karadzic que nous nous y étions rendus par avion, à Banja

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1 Luka en avion. Je sais très bien comment on programme ces séances. Je sais

2 très bien ce qui se passe quand on participe. Chaque fois que j'ai voulu en

3 parler à un député pour vérifier si c'était bien avéré, personne ne

4 semblait s'en souvenir. Pourtant, je me souviens qu'il y avait eu cette

5 session qui avait été prévue. On n'a pas réussi à atteindre le quorum et

6 ensuite on était tous revenus à Banja Luka pour que la session se tienne le

7 12 mai, mais à Banja Luka.

8 Q. Dns les jours précédant la session de l'assemblée à Banja Luka, vous

9 travaillez tous les jours dans l'enceinte du bâtiment Kikinda, n'est-ce

10 pas, Monsieur Krajisnik ?

11 R. Oui.

12 Q. Vous y habitiez aussi ?

13 R. Oui, j'ai oublié de le dire. Ma famille et moi-même vivions au

14 Panorama, dans une chambre, dès le départ. C'est là que nous résidions.

15 Tous les autres avaient des chambres à Kikinda. Pas tous, mais la plupart

16 d'entre eux étaient logés au Kikinda. Au début, j'ai cru que j'étais moi

17 aussi logé au Kikinda, mais, non, j'ai toujours resté au Panorama dès le

18 départ, jusqu'à mon arrestation.

19 Q. Nous avons entendu des dépositions déjà à propos de la façon dont vous

20 travaillez au Kikinda. Mme Cenic d'ailleurs a déposé, vous en souvenez,

21 Monsieur Krajisnik ? Elle a décrit la configuration du Kikinda avec les

22 bureaux. Vous étiez d'un côté du couloir, le Dr Karadzic de l'autre côté du

23 couloir. Est-ce que sa description de la configuration des bureaux est

24 correcte, Monsieur Krajisnik ?

25 R. Oui, oui. On avait tous une petite chambre chacun. Ce n'est pas un vrai

26 bureau quoi que ce soit. Ce n'est pas comme une suite. C'était juste une

27 petite Chambre qui était prévue pour des touristes en vacances. Il avait

28 une chambre, j'en avais une autre, M. Koljevic enfin, tout le monde en

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1 avait une, et on avait une chambre un petit peu plus grande aussi, 12

2 mètres carrés à peu près. Cela c'est la grande pièce qui faisait 12 à 15

3 mètres carrés. On avait cette chambre un petit peu plus grande, qui était à

4 l'étage, qui nous servait de salle de réunion. La secrétaire avait aussi

5 une petite pièce adjacente à celle-ci. Il n'y avait pas de portes de toute

6 manière entre les pièces adjacentes. C'était comme cela qu'on s'est

7 organisé à l'époque.

8 Q. Mais vous, vous aviez la secrétaire de l'assemblée qui vous aidait,

9 n'est-ce pas ?

10 R. Oui. La secrétaire de l'assemblée était feu M. Milos Savic.

11 Q. Où travaillait-il ?

12 R. C'était la même chose. Il avait une chambre, une chambre où il était

13 logé, où il travaillait. Il y dormait, il y travaillait. Je pense qu'au

14 départ il était au Kikinda. Puis ensuite, il a aussi été transféré au

15 Panorama mais il a toujours travaillé au Kikinda, jusqu'à ce que l'on s'en

16 aille plus tard. Quand on était au Kikinda, il travaillait au Kikinda. Je

17 vous parlais de ces nuits. Enfin, plus tard il a plus passé ses nuits au

18 Panorama. Il dormait au Panorama mais il a toujours travaillé au Kikinda.

19 Q. Voici la question qui va être exprimée en termes assez généraux. Si

20 vous avez besoin qu'on la définisse plus, surtout dites-le nous. Dans les

21 jours qui ont précédé cette réunion de l'assemblée à Banja Luka, du côté

22 des Serbes de Bosnie, qui est-ce qui était en charge de la guerre.

23 R. Vient un moment quand la présidence, à la suggestion, -- je pense que

24 c'est à la suggestion de qui que ce soit d'ailleurs, cela n'a pas

25 d'importance, mais c'est certain qu'ils n'ont pas, que ce n'est pas une

26 décision qu'ils ont pris de leur propre chef, en tout cas, ils ont proclamé

27 l'établissement de la Défense territoriale serbe. Il s'agissait de

28 personnes armées et tout le monde s'est rangé du côté de son propre camp

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1 ethnique. Hier, je vous ai parlé de la présence de l'armée populaire de

2 Yougoslavie, mais jusque-là, jusqu'au 12 mai, je crois que jusqu'à

3 l'attaque contre la colonne et jusqu'au siège de la caserne de la JNA, je

4 pense vraiment que la JNA était vraiment neutre, du moins dans la mesure de

5 ses possibilités. Ensuite, ils se sont vraiment occupés uniquement d'eux-

6 mêmes. Comment obtenir les ressources dans les casernes et ils se sont

7 préparés en fait à se retirer, c'est-à-dire que les personnes qui ne

8 venaient pas de Bosnie-Herzégovine se préparaient à se retirer. Je suis

9 presque certain qu'à ce moment-là, jusque-là la JNA n'avait pas pris aucune

10 mesure active pour avantager les forces territoriales serbes à moins que

11 des casernes soient attaquées ou qu'ils soient eux-mêmes attaqués. Ceci a

12 été confirmé d'ailleurs dans la conversation entre M. Smajic et le général

13 Gagovic, enfin le colonel Gagovic d'ailleurs.

14 Il y a des preuves pour cela. Il y a cette colline au-dessus de la

15 caserne de Lukavica qui était la seule caserne sur le territoire serbe,

16 cette colline qui s'appelait Mojmilo. Il y avait des forces musulmanes qui,

17 très souvent, visaient les casernes, et parfois il y avait bien sûr des

18 réactions. Cela c'est ce qui se passait là-bas. Pour ce qui est de

19 Rajlovac, la JNA y était ainsi que les territoriaux armés et la population

20 civile aussi. Je ne sais pas vraiment qui a réagi à quoi. Quand il y a eu

21 l'attaque de la caserne, tout le monde a été attaqué. C'est ce dont je me

22 souviens et c'était mon opinion de ce qui s'était passé à cette époque-là.

23 De ce qui est la JNA, les tankistes, les équipes d'artillerie,

24 normalement tous ces gens-là venaient de la zone, cela était la règle. La

25 règle était que quand la guerre avait éclaté, chacun restait dans sa propre

26 zone. On ne peut pas exclure la possibilité que ces gens aient utilisé des

27 équipements de la JNA, pour en revanche, exécuter une mission de leur

28 propre chef. La politique générale de la JNA, la théorie en tout cas,

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1 c'était d'être parfaitement équidistant de chaque côté et de jouer le rôle

2 d'intermédiaire. Cela je le sais, suite à la conversation que j'ai eu avec

3 Monsieur Kukanjac, qui était totalement convaincu qu'il arriverait à

4 conserver son rôle et à jouer le rôle qui lui avait été dévolu et rien de

5 plus. Quand les gens devenaient parfaitement irréalistes, il disait : "Non

6 mais voici ce que je peux faire et voici ce que je ne peux pas faire," et

7 cetera, et cetera. Il était sans arrêt en train de rappeler quel était son

8 champ de compétences.

9 La situation était à peu près comme je vous l'ai présentée.

10 Q. Comment avez-vous compris ceci, et je m'efforcerais d'être le

11 plus concret possible, Monsieur Krajisnik, pour ce qui est de cette période

12 qui a précédé à la session de Banja Luka et nous sommes en train de parler

13 du 9, 10, 11 mai 1992. Comment avez-vous, en personne, compris la situation

14 militaire telle qu'elle se présentait dans Sarajevo ?

15 R. Je suis du même avis à présent qu'à l'époque. Lorsqu'il y a eu

16 conflit, chacun s'est déplacé à ses frontières ethniques. Il y a eu certes

17 des déplacements à Ilidzanska Opstina et Rajlovac ainsi que dans Grbavica

18 même. D'une manière générale, chacun s'est déplacé à la frontière de sa

19 cité. Les Serbes se sont retrouvés à la périphérie, les Musulmans, eux,

20 dans la ville. Au-delà du centre de la ville, il y avait Hrasnica, un assez

21 grand territoire séparé par la présence de l'aéroport. Là où ils se sont

22 arrêtés le 4, 5, ou 6 avril, c'étaient plus ou moins les territoires

23 ethniques. Mon point de vue, c'était de dire que cela était plutôt logique.

24 Dans un espace ethnique, plus ou moins grand, il se peut qu'il y ait eu des

25 enclaves, d'autres groupes ethniques, s'agissant des territoires contrôlés

26 par les Serbes, mais d'une manière générale, le reste était peuplé par des

27 Serbes. Comme je vous l'ai expliqué, le territoire de la ville était plus

28 en propriété des Serbes que les Musulmans mais du point de vue de la

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1 population, c'était tout à fait le contraire. Il se peut que dans les

2 banlieues, ils aient été 20 % et 80 % à occuper le centre de la ville. Il y

3 a eu une proportion inversée, ce qui fait que le territoire n'a pas

4 représenté le même pourcentage que la population puisque celle-ci se

5 trouvait majoritairement dans les banlieues, dans les secteurs ruraux.

6 Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question. Si ce n'est pas le

7 cas, je demeure à votre disposition pour le faire.

8 Q. D'après vous, à l'époque, quelles sont ces forces serbes qui se

9 sont trouvées à la périphérie de Sarajevo, pour reprendre vos propres

10 termes.

11 R. C'étaient des gens qui vivaient dans ces cités. C'étaient des

12 gens qui habitaient tout simplement là. Je ne sais pas s'il y a eu des gens

13 venus d'ailleurs. Ce que je sais pour sûr, c'est que chacun défendait pour

14 le moins son propre territoire. Ceux de Vraca, le leur, de Zabrdje le leur,

15 et ainsi de suite. Au point de jonction entre ces différentes forces, s'il

16 n'y avait pas un village à eux, on demandait l'aide d'un village avoisinant

17 qui se trouverait aux côtés de cette partie musulmane pour préserver

18 ensemble la ligne de démarcation, qui est en fait la ligne du conflit armé.

19 Q. S'agissant des collines autour de Sarajevo, d'après vous, quels

20 sont les effectifs qui s'y sont trouvés déployés ?

21 R. A un seul endroit dans Sarajevo qui se trouvait sur la route que

22 je vous ai tracée, non loin de Grbavica, c'étaient les Serbes qui avaient

23 prédominance. Dans les autres secteurs, il y avait une prédominance

24 musulmane.

25 S'agissant des endroits où se trouvaient les Serbes, ce sont des endroits à

26 partir desquels il pouvait être tiré sur Sarajevo. Pour ce qui est des

27 autres points où il y a eu prédominance musulmane, il ne pouvait être ciblé

28 que la périphérie. Et là, les effets, les pertes, étaient moindres. C'est

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1 la raison pour laquelle l'image l'a emporté aux termes de laquelle les

2 Serbes ont étaient les seuls à tirer et à dominer les hauteurs de Sarajevo.

3 Quand ils ont tiré sur Lukavica, Rajlovac et les autres parties, comme

4 c'était des parties moins peuplées - et pourtant ils ont bien tiré et ils

5 ont bien tué des gens aux fusils à lunettes et autrement - cela n'a pas été

6 frappant à ce point-là. J'ai consulté, entre-temps, des généraux qui s'y

7 connaissent bien plus. Je puis vous dire quels sont ces endroits et quels

8 sont les endroits où eux ont eu des positions dominantes sur les hauteurs

9 de Sarajevo. On peut le voir aisément sur la carte que je vous ai fournie,

10 cette ligne de démarcation notamment.

11 Q. Monsieur Krajisnik, je vous prie de vous limiter un moment aux forces

12 serbes. Vous nous avez indiqué, qu'à un moment donné, les Serbes l'avait

13 emporté dans la proximité de Grbavica. On va laisser de côté les autres

14 secteurs pour le moment. D'après vous, quelles sont les forces qui se sont

15 trouvées là-bas à ce point donné dans le temps, j'entends bien Grbavica,

16 avec prédominance de ces forces ?

17 R. Un petit rectificatif. Ce n'est pas les Serbes qui avaient prédominance

18 à Grbavica. Ils étaient dans une espèce de trou. C'est sur le sommet de

19 Grbavica qu'il y a une route qui s'appelle Vraca. Là, il y avait un poste

20 de police avec une école spéciale de la police, et à un endroit déterminé

21 sur cette route, les Serbes avaient tenu une position prédominante. Alors,

22 entre Grbavica et Lukavica, à ce point élevé à ce moment-là, les Serbes

23 avaient une prédominance nette. Je sais quelles sont les forces qui se

24 trouvaient là-bas. Il y avait les forces de la police. Je sais aussi qu'il

25 y avait les effectifs de la Défense territoriale, à savoir, de ce peuple

26 armé. C'est ce que je sais qu'il y avait là-bas. Une fois que Grbavica a

27 été prise, c'est à ce moment-là que la JNA s'y est installée. Mais pour ce

28 qui est de la prise ou de la libération de Grbavica, je crois pouvoir dire

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1 que l'armée populaire yougoslave n'y a pas pris part du tout.

2 Q. En ce moment-ci, nous sommes encore en train de parler de la période

3 qui a précédé à la tenue de cette assemblée à Banja Luka. Dans le

4 commandement militaire de ces effectifs serbes tels que vous les avez

5 décrits, y avait-il quiconque de ce commandement de -- enfin, appartenant à

6 ce commandement militaire, qui se trouvait non loin de Grbavica ?

7 R. Il n'y avait personne du commandement militaire. C'était le

8 commandement de la Défense territoriale. Il y avait une conversation

9 téléphonique entre un membre du MUP et un membre de la Défense territoriale,

10 datée du 7 mai, avec moi. En ma qualité de député, en ma qualité d'habitant

11 à Sarajevo, je voulais savoir ce qui se passait à Sarajevo. A ce moment-là,

12 il a indiqué que quelqu'un avait été descendu de la colline en direction de

13 Grbavica. C'est à Grbavica qu'il y avait le plus de militaires, donc

14 prédominance serbe pour libérer, comme on l'a dit à l'époque, ce territoire

15 par les Serbes. Cela a échoué. Il y a eu beaucoup de morts. Je voulais

16 savoir ce qui se passait. L'un de ces hommes-là m'avait dit qu'il monterait

17 chez nous pour me raconter ce qui s'était passé.

18 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

19 [Le conseil de la Défense se concerte]

20 M. STEWART : [interprétation] Merci.

21 Q. Monsieur Krajisnik, je vous ai demandé s'il y avait quiconque de ceux

22 qui faisaient partie du commandement militaire dans un sens large du terme.

23 Je n'avais pas à l'esprit la distinction entre l'armée et la Défense

24 territoriale. Alors, j'espère que vous comprenez maintenant cette question.

25 Ce que je voulais savoir, c'est s'il y avait quiconque à commander ces

26 effectifs serbes qui se trouvaient à proximité de Grbavica ?

27 R. Non. C'est un bon exemple qui montre, que de leur propre initiative,

28 ces membres de la Défense territoriale ont été emmenés vers les points en

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1 contrebas. C'est la raison pour laquelle ils ont échoués et il y a eu tant

2 de morts. En ma qualité d'habitant de Sarajevo, je voulais savoir ce qui

3 s'était passé. Alors, si quelqu'un avait organisé et conduit ces hommes à

4 la perte, je l'aurais contacté pour qu'il réponde de cela. Mais personne

5 n'avait dirigé ces hommes-là dans leur descente. Je me souviens. C'est ce

6 qu'on peut déduire de la conversation que j'ai mentionnée. C'était une

7 véritable aventure qui s'est terminée de façon tragique. Je disais donc que

8 la JNA était de l'autre côté de la colline à Grbavica. Elle n'y a pas pris

9 part. Ce sont ces hommes-là qui se trouvaient là-bas, qui pensaient qu'ils

10 allaient pouvoir le faire à la légère. Je ne sais pas du tout qui s'était.

11 La conversation que j'ai mentionnée montre bien que ce n'était pas la

12 police non plus. Je ne sais pas du tout qui est-ce qu'il l'a fait, ou

13 plutôt qui est-ce qui l'a organisé, cela.

14 Q. A l'époque, Monsieur Krajisnik, la direction des Serbes de Bosnie à

15 Pale, vous aviez estimé que vous preniez part à une guerre, que vous étiez

16 en train de conduire une guerre ?

17 R. C'était clair à nous yeux que de constater que la guerre avait commencé.

18 Là, point d'ambiguïté du tout.

19 Q. Vous, à savoir, la direction des Serbes de Bosnie à Pale, vous êtes-

20 vous efforcés de développer et de mettre en place une stratégie coordonnée

21 pour combattre dans cette guerre ?

22 R. Je vais d'abord parler de moi-même. Le fait de m'être intéressé à tout

23 cela a été dû à ma qualité d'habitant de Sarajevo. J'étais intéressé et

24 j'étais en plus député issu de ce territoire. En ma qualité de citoyen,

25 j'ai également voulu savoir s'il y avait des morts, des blessés et de

26 quelle façon la situation se présentait. C'était l'approche qui était la

27 mienne au problème. Vous avez pu voir qu'il y avait une Défense

28 territoriale. M. Karadzic était censé coordonner le MUP, la Défense

Page 24107

1 nationale et la Défense territoriale. Il n'a pas réussi à le coordonner,

2 parce que chaque point, chaque village, chaque endroit, a vu ses habitants

3 se camper sur des positions aux fins de se défendre.

4 Si tant est qu'il y a eu des ordres qui auraient été donnés non pas sous

5 forme écrite mais d'une façon autre, cela se réduisait à l'organisation

6 d'une défense pour ne pas faire l'objet de crimes et pour ne pas y avoir de

7 morts. La politique, elle visait à faire son travail, à savoir, poursuivre

8 les négociations, faire mettre un terme à la guerre et aboutir à une

9 solution. C'est la raison pour laquelle il y a eu des accords de cessez-le-

10 feu qui ont constamment été signés pour faire lieu de cessation de la

11 guerre. Parce qu'il est beaucoup plus facile de négocier lorsqu'on ne vous

12 tire pas dessus plutôt que d'avoir une bataille faisant rage sur le terrain

13 alors que l'on serait en train de négocier une solution politique à table.

14 Alors, il n'y a pas eu de stratégie du tout à l'époque. La guerre se

15 déroulait, et nous avions espéré que la JNA jouerait son rôle, qu'elle

16 finirait bien par nous défendre si nous étions attaqués et que la Défense

17 territoriale - c'était plutôt le peuple armé, ce n'était pas une Défense,

18 c'était une population armée - et chacun était censé préserver ses propres

19 lignes. A l'époque, je n'ai jamais entendu quiconque dire qu'il y aurait eu

20 des actions, des activités ou des déplacements actifs. Je vous parle de la

21 période qui s'étire jusqu'au 12 mai, date à laquelle où l'armée de la

22 Republika Srpska a été mise en place. De vous dire si quelqu'un a fait cela

23 de sa propre initiative, c'est une autre question. Mais je n'ai jamais

24 entendu quoi que ce soit de dit de la part de M. Karadzic, de M. Koljevic

25 ou de Mme Plavsic, et notamment, pas de la part du commandant de la défense

26 ou du ministre de la Défense.

27 Q. Qui a été le commandant de cette défense ?

28 R. Le ministre de la Défense était M. Subotic. Le commandant de la Défense

Page 24108

1 territoriale, sur un plan formel quoique très peu de temps, cela a été un

2 certain Lukic. Je n'arrive plus à me souvenir de son prénom. C'est ce que

3 nous avons eu comme personnalité avec des fonctions. Il n'y a rien eu

4 d'autre. La personne qui était censée coordonner leur activité était M.

5 Karadzic. Vraiment, lui non plus n'a pas été à même d'établir une

6 coordination quelle qu'elle soit.

7 Q. Vous venez de parler de M. Lukic.

8 A part les personnes que vous venez de mentionner, est-ce que vous

9 aviez considéré à l'époque, comme étant une espèce de commandant haut gradé

10 dans les échelons militaires pour ce qui est des Serbes de Bosnie qui se

11 battaient contre les Musulmans, et bien entendu, dans divers secteurs

12 contre les Croates ?

13 R. La seule force armée qui existait était la police. Cette police avait

14 son ministre, M. Stanisic. Pour ce qui est du reste, il n'existait aucune

15 force armée du tout. Tout ce que nous avons pu entendre ici au sujet

16 d'armées privées ou de paramilitaire, tout ce qui s'est passé, s'est passé

17 dans l'organisation d'une population locale préoccupée, qui n'avait

18 probablement pas la force de défendre leur territoire. Je ne me souviens

19 pas à l'époque qu'il y aurait eu des personnes de sollicitées dans les

20 cercles que vous mentionnez à Pale.

21 Q. Jusqu'au moment où il s'est tenu cette assemblée à Banja Luka, M.

22 Mladic est-il venu à Pale pour s'entretenir au sujet de ce qui se passait

23 sur le terrain en Bosnie-Herzégovine ?

24 R. Pendant une brève période - je ne me souviens pas exactement de sa

25 durée, mais c'était avant la tenue de l'assemblée, avant que M. Mladic ne

26 devienne le commandant de l'état-major - je dirais qu'il avait remplacé M.

27 Kukanjac et qu'il était devenu commandant de la 2e Région militaire. Et je

28 sais qu'il s'est trouvé à Lukavica. Une fois, je me trouvais moi-même à

Page 24109

1 l'aéroport ou à Lukavica, je me suis entretenu avec je ne sais trop qui, et

2 c'est alors que je l'ai rencontré, que nous nous sommes entretenus. Dans

3 ses entretiens avec nous, son rôle ne s'est pas avéré important. Bien que

4 sachant déjà qu'il serait nommé commandant, il a procédé à certaines

5 coordinations. Avant Banja Luka, avec M. Ostojic, il a visité l'Herzégovine

6 et Kalinovik. C'est ce qu'il a expliqué à cette réunion. Cela signifie

7 qu'il avait des moyens de communication. Je ne sais pas maintenant s'il

8 nous a informés de ce qui se passait sur le terrain. Je ne me souviens pas

9 d'avoir eu à nous asseoir à table avec M. Mladic avant le 12 mai pour qu'il

10 nous informe des évolutions sur le terrain. Lui, il s'était concentré sur

11 la libération des casernes et l'évacuation de ces casernes qui n'avaient

12 pas encore eu lieu. Il l'avait fait avec les représentants de la JNA de

13 Belgrade. C'était là le gros de ses activités. Nous étions intéressés par

14 le fait de savoir comment les gens de ces casernes allaient s'en sortir. Il

15 l'a fait dans sa régie à lui, sans que nous ayons exercé une influence

16 quelconque de notre part, tant de notre part que de la part du

17 gouvernement.

18 Q. Pendant cette période qui a précédé à la tenue de cette session en

19 Banja Luka, est-ce que d'autres représentants éminents de l'armée - et je

20 parle des forces armées dans le sens le plus large du terme, Monsieur

21 Krajisnik - alors, est-ce que l'un quelconque de ces hauts gradés serait

22 venu à Pale pour vous informer de ce qui se passait sur le terrain ?

23 R. Je ne m'en souviens pas. Ce que je peux vous dire, c'est qu'ils

24 n'avaient pas l'obligation, les représentants de la JNA n'avaient pas

25 l'obligation de nous informer. Pour autant que je m'en souvienne, ils ne

26 nous informaient pas. Ce qu'ils pouvaient faire, c'était, de leur plein

27 gré, nous indiquer comment se présentait la situation. Ils étaient déjà

28 dans la phase où ils ont identifié, du côté musulman, un adversaire

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1 complémentaire. Parce qu'ils avaient déjà dit que ceux-ci avaient lancé un

2 communiqué pour le blocage des casernes et le siège de ces casernes avec

3 coupure des voies de communication de la JNA. Mais je ne me souviens pas de

4 quelqu'un qui serait venu nous fournir des informations, parce que cela

5 aurait été son devoir ou parce qu'il l'aurait voulu. Il se peut que de

6 notre côté à nous, il y ait eu des initiatives pour apprendre ce qui se

7 passait et ce qu'ils faisaient, mais le résultat a été plutôt maigre.

8 Q. Si quelqu'un, à l'époque, vous a posé la question de savoir qui étaient

9 vos commandants militaires, pour ce qui est des Serbes de Bosnie,

10 qu'auriez-vous répondu ?

11 R. J'aurais répondu que nous n'avions pas de commandants militaires et je

12 dirais que chaque municipalité agissait de façon distincte. Je croyais

13 qu'il y a avait un commandant de la Défense territoriale et je croyais que

14 c'était le ministre de la Défense, mais j'ai vu que ces gens n'avaient

15 aucun pouvoir et qu'ils ne pouvaient rien faire. La seule force qui était

16 censée nous défendre, à laquelle nous prêtions foi, c'était la JNA. Je vous

17 parle maintenant de la situation telle qu'elle se présentait dans la

18 pratique.

19 Q. Quand est-ce qu'on a entamé la planification de la mise en place d'une

20 armée des Serbes de Bosnie ?

21 R. On avait laissé entendre, c'est quelque chose que nous n'ignorions pas

22 et il me semble qu'il y avait même une résolution des Nations Unies. Je

23 crois que c'est la partie musulmane qui avait insistée sur ce fait, à

24 savoir que la JNA se devait de se retirer du territoire de la Bosnie-

25 Herzégovine. Je crois qu'une résolution avait déjà été votée, et nous avons

26 été pris de court parce que nous avions pensé que la JNA resterait pendant

27 au moins cinq ans, tel que convenu à Skopje, entre M.Izetbegovic et les

28 représentants du Grand état-major. Cela fait que nous nous sommes trouvés

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1 pris de court parce que l'armée populaire yougoslave allait se retirer et

2 quand on parlait d'armée populaire yougoslave, on entendait par là tous les

3 officiers d'active. Ce qui fait que nous aurions sur les bras une

4 population armée mais non organisée. Nous avons alors contacté, et je m'en

5 souviens de cela, une fois nous avions contacté à Belgrade, je ne sais pas

6 vous donner la date exacte, nous les avions contactés pour avoir des

7 informations sur leur planning. Ils nous avaient promis que la JNA allait

8 rester, or là, elle se retirait. J'ai vu, à ce moment-là, que M. Karadzic

9 avait fait la proposition plus tôt, non excusez-moi, feu Milosevic avait

10 proposé de créer notre armée à nous. On s'est entretenu sur les modalités,

11 sur la façon de le faire, qui est-ce qui la constituerait et lui avait été

12 d'avis que les représentants de l'armée populaire yougoslave ne seraient

13 restés là-bas s'ils n'étaient pas nés sur le territoire de la Bosnie-

14 Herzégovine, à moins que ces gens ne se portent volontaires. Nous étions

15 censés faire des propositions pour ce qui est de savoir qui en serait le

16 commandant pour organiser un état-major et organiser une armée. Je me

17 souviens également, une fois, que lorsque nous sommes allés voir

18 M.Kukanjac, M. Kukanjac s'était entretenu au téléphone avec Monsieur Mladic

19 à Knin.

20 M. Karadzic le mentionne dans une interview, du reste.

21 M. Karadzic avait apprécié, en guise de commandant et en guise de soldat,

22 M. Mladic, parce que très souvent les journaux en ont parlé et comme celui-

23 ci était né en Bosnie-Herzégovine, il a été fait la proposition de le

24 prendre, lui, et les autres officiers de la Bosnie-Herzégovine se sont vus

25 proposer la possibilité de rester sur le territoire de la Bosnie-

26 Herzégovine. Je vais ajouter aussi qu'il n'y avait pas que des Serbes, il y

27 avait toutes sortes de groupes ethniques et ces personnes qui étaient des

28 ressortissants d'autres groupes ethniques nous ont quittés par la suite

Page 24112

1 pour aller faire partie des rangs de l'armée musulmanes par la suite. C'est

2 ainsi que ce processus s'est déroulé.

3 Je pense que nous n'aurions jamais créé d'armée à nous si l'armée

4 populaire yougoslave était restée. La population armée, elle, voulait se

5 placer sous le commandement de l'armée populaire yougoslave. Pourquoi cela

6 ne s'est-il pas fait ? L'armée populaire yougoslave à Sarajevo, et je

7 dirais que M. Mladic, qui avait remplacé M. Kukanjac, n'avait qu'une seule

8 préoccupation en tête, à savoir, sortir les soldats bloqués dans les

9 casernes, avoir des négociations à cette fin. Nous n'avons pas pu

10 s'entretenir avec lui sur quoi que ce soit d'autre.

11 Q. Vous avez dit que lorsque M. Milosevic a proposé de faire en

12 sorte de créer votre propre armée, vous lui avez dit que vous alliez

13 discuter, à savoir, de quelle façon cela pourrait être fait.

14 Vous avez parlé de "nous," est-ce que pourriez-vous nous dire qui

15 étaient présents, qui a pris part à cette discussion.

16 R. Monsieur Stewart, Messieurs les Juges, Messieurs les Procureurs.

17 J'emploie très souvent le "nous" et à ce moment-là, vous croyez sans doute

18 que je parle de "nous" au pluriel et que je m'implique, mais en réalité ce

19 n'est pas le cas. Des fois j'emploie le "nous" sans que j'y aie pris part,

20 sans que j'aie pris part à des préparatifs ou à des conversations.

21 Maintenant dans ce cas-ci, il est peut-être vrai que j'étais là, que nous

22 étions présents, que nous étions les personnes représentant le peuple Serbe

23 de Bosnie-Herzégovine lors de ces négociations. Quelqu'un nous a demandé de

24 venir, nous a convoqué afin que nous puissions être informés des problèmes

25 sur place et, puisque j'ai toujours fait partie de l'équipe des

26 négociateurs de Bosnie-Herzégovine, c'est la raison pour laquelle nous

27 trois, nous n'étions peut-être pas tous les trois ensemble, il y avait

28 peut-être d'autres personnes, je ne le sais pas, je sais que Karadzic était

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1 là, j'étais là, je suis persuadé que M. Koljevic était présent également.

2 Q. Monsieur Krajisnik, à votre dernière réponse, vous avez semblé

3 donner quelques éléments nous permettant de croire que des discussions avec

4 des personnes à l'extérieur du camp de Serbes de Bosnie avaient discuté du

5 principe quant à avoir une armée séparée. Est-ce que c'est de cela que vous

6 parlez ?

7 R. Le principe à l'époque était le suivant : les membres de la JNA,

8 nés en Bosnie-Herzégovine, devaient rester en Bosnie-Herzégovine pour ceux

9 qui le souhaitaient et pouvaient faire partie de notre nouvelle armée. J'ai

10 dit que lorsqu'il a été question de ceci, plus tard, lors de la mise en

11 œuvre de cette idée, au sein de cette armée, il y avait des Musulmans et

12 des Croates qui étaient nés en Bosnie-Herzégovine. Au début ils étaient

13 dans l'armée et plus tard, ils ont quitté l'armée de la Republika Srpska et

14 ils ont rejoint les rangs de l'armée musulmane ou de l'armée croate. Ils

15 avaient quitté l'armée pour peut-être aller à Belgrade où ils étaient reçus

16 et je ne sais de quelle façon on a réglé leur statut.

17 Q. Monsieur Krajisnik, parmi les Serbes de Bosnie, qui étaient les

18 personnes impliquées ou qui avait pris part à ces négociations, à cette

19 planification relative à l'organisation et à la création d'une nouvelle et

20 complètement séparée armée serbe de Bosnie ?

21 R. Je crois que c'était le ministre de la Défense, avec l'aide de l'équipe

22 qui entourait M. Mladic. Je crois que l'organisation, la loi -- nous

23 n'avons pas pris part à la rédaction des lois. Nous n'avons pas pris part à

24 la création -- nous avons adopté la loi qui avait été présentée lors de

25 l'assemblée. Nous avons voté en faveur de cette loi, et mes collègues, si

26 je me souviens bien -- personne d'entre nous n'avons participé à la

27 rédaction de cette loi. Je me souviens du général Kovacevic. Il était

28 juriste et il avait rédigé cette nouvelle loi relative à la défense et à

Page 24114

1 l'armée et à l'organisation ou la réorganisation de l'armée au nom bien sûr

2 de l'état-major, et ce dernier était issu de la Bosnie-Herzégovine, c'est-

3 à-dire, il originaire du territoire de la Bosnie-Herzégovine.

4 Q. Vous avez parlé d'une équipe du ministère de la Défense. C'était M.

5 Subotic. Vous avez dit qu'il y avait une équipe qui entourait M. Mladic.

6 Est-ce que vous pourriez nous dire qui étaient les membres de cette équipe

7 entourant M. Mladic ?

8 R. Je n'étais peut-être pas assez précis, mais voilà ce que je veux dire.

9 C'est que si quelqu'un était en contact avec cette équipe représentant la

10 Republika Srpska, c'était bien le ministre de la Défense. Je suis persuadé

11 que même lui n'ait pas pu avoir une influence importante quant à la

12 création de ces lois. C'était cette équipe de professionnels qu'avait

13 constituée M. Mladic, c'était cette équipe d'experts qui avait rédigé tous

14 ces documents. J'ai compris plus tard que cette même loi était un peu

15 étrangère pour le ministre de la Défense, et le ministre de la Défense

16 formulait des objections à l'endroit de cette loi, même si cette loi avait

17 déjà été adoptée. Effectivement, il était lié à eux.

18 Q. Monsieur Krajisnik, pensons maintenant aux questions pratiques. Est-ce

19 que vous êtes d'accord pour dire que ces nouvelles armées créées, quelle

20 que soit l'origine de cette armée à l'intérieur d'une autre armée, il doit

21 absolument y avoir des lois et des règlements tels que vous nous avez

22 indiqué, et il faut évidemment prendre des arrangements financiers, des

23 arrangements logistiques ? Il faut avoir des uniformes qu'il faut remettre

24 à ces soldats ? Vous êtes d'accord avec moi pour dire que ces questions

25 pratiques doivent être faites, n'est-ce pas, Monsieur Krajisnik, pour se

26 pencher sur ces questions pratiques ?

27 R. Vous avez tout à fait raison qu'il aurait fallu se pencher sur ces

28 questions pratiques. Lors de cette réunion, je me souviens très bien que

Page 24115

1 j'avais posé une question. J'avais dit : Mais qui payera maintenant ces

2 officiers ? Nous n'avons pas d'argent.

3 Ils ont promis et effectivement, ils ont mené à bien cela, puisque les

4 chefs futurs étaient des gens qui, pendant plusieurs années, avaient été

5 membres de la JNA, et eux, ils allaient payer les officiers d'active, les

6 rémunérer, leur donner la solde, une solde pour ceux qui avaient exprimé

7 vouloir rester de façon volontaire en Bosnie. Cela avait été fait. Pour ce

8 qui est du reste, les réservistes, l'armée, et cetera, tous ces gens, il

9 aurait fallu que plus tard, il aurait fallu s'occuper de cela. Je ne sais

10 pas si plus tard, ils ont effectivement été payés. Pour la plupart d'entre

11 eux, ils n'avaient pas été rémunérés, et beaucoup moins qu'il ne leur est

12 dû.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je poser une question en guise de

14 précision ? Vous avez parlé donc de cette réunion. De quelle réunion

15 parlez-vous exactement ? Est-ce que vous faites référence à la réunion avec

16 M. Milosevic, la réunion lors de laquelle vous avez parlé de l'armée ou

17 est-ce que vous avez dit qu'eux, ils les rémunéraient ? Est-ce que vous

18 parlez de la Serbie et Monténégro, ou de ce qui restait de la Yougoslavie ?

19 C'était ce qui restait de la Yougoslavie qui devait s'occuper du salaire ou

20 des soldes des officiers d'active, même si ces derniers n'avaient pas

21 rejoint les rangs de la VRS ? Est-ce que je vous ai bien compris ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui. Vous avez tout à fait raison,

23 mais je vais élaborer avec votre permission. Ils ne voulaient pas faire

24 cela. Ils considéraient qu'il y avait trop d'officiers. Nous leur avons dit

25 : "La Bosnie-Herzégovine a le droit aux biens de la JNA. Elle a le droit

26 aux fonds de l'armée de la JNA, et nous avons maintenant le droit de

27 participer dans cela." C'est pour cela qu'ils ont accepté cette proposition

28 malgré leur gré. Ils ont effectivement respecté leur parole, c'est-à-dire

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1 que les officiers supérieurs de la JNA, les officiers d'active, qui

2 autrefois avaient été membres de la JNA et qui volontairement étaient

3 restés sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine dans l'armée de la VRS,

4 alors eux, ils recevaient des soldes par la JNA, ou plutôt leur service de

5 finances.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci. Veuillez poursuivre, je vous

7 prie.

8 M. STEWART : [interprétation]

9 Q. Monsieur Krajisnik, puis-je vous poser une question pour préciser ce

10 point ? M. Bozidar Antic avait été nommé ministre de l'Economie, en

11 anglais, c'est tout du moins ce que nous avons. Est-ce qu'il avait

12 également été ministre des Finances ou était-ce quelqu'un d'autre qui

13 occupait ce poste ?

14 R. Non, non. M. Antic était ministre de l'Economie, alors que le ministre

15 des Finances s'appelait Momcilo Pejic.

16 Q. Monsieur Krajisnik, je vois que cela figure au PV du 27 avril [comme

17 interprété]. C'était le premier ministre adjoint. Il était chargé des

18 questions de finances et de l'économie, c'est marqué "et des questions

19 économiques," n'est-ce pas ?

20 R. Oui, oui. Excusez-moi. Il était vice-président du gouvernement, chargé

21 des questions financières, alors que le ministre des Finances était une

22 autre personne. Vous avez raison. Je crois que c'était Petra Markovic, une

23 dame. Mais le vice-président était également chargé de ces questions

24 financières. C'était M. Pejic.

25 Q. Merci, Monsieur Krajisnik.

26 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je regarde l'heure et

27 je me demande s'il est opportun de prendre la pause ?

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est l'heure de la pause. Nous

Page 24117

1 reprendrons nos travaux à 10 heures 55.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

3 --- L'audience est reprise à 11 heures 04.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais passer à huis clos

5 partiel pour quelques instants, je vous prie.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

7 le Président.

8 [Audience à huis clos partiel]

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6 [Audience publique]

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, vous pouvez continuer.

8 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

9 Q. Monsieur Krajisnik, pourrait-on examiner le PV de la réunion du 10 mai

10 1992, qui se trouve sous vos yeux depuis quelques instants. D'abord,

11 Monsieur Krajisnik, dites-nous si vous vous souvenez si vous avez assisté à

12 cette réunion du 10 mai ?

13 R. J'ai pris connaissance de ce PV, et je suis presque convaincu de ne pas

14 y avoir assisté. Mais s'agissant d'une réunion consultative avec le

15 gouvernement, oui, là, je me souviens d'y avoir participé. C'était peut-

16 être à une date qui a précédé celle-ci. Mais je crois que je n'ai pas

17 assisté à cette réunion. Je peux vous dire que j'ai pris connaissance de ce

18 qui figurait à l'ordre du jour puisque toutes les questions me sont

19 connues.

20 Q. Lorsque vous avez fait référence à une réunion consultative avec le

21 gouvernement, c'est une réunion consultative entre le gouvernement et qui

22 exactement ?

23 R. Cette réunion qui est intitulée réunion conjointe du conseil et du

24 gouvernement, une telle réunion s'était déjà déroulée, une telle réunion

25 avec l'équipe de négociations et le gouvernement. Je ne sais plus trop

26 combien il y avait de personnes présentes, mais je sais qu'il y a eu une

27 réunion consultative concernant les préparatifs pour une réunion de

28 l'assemblée.

Page 24119

1 Q. Quelle est la différence, en pratique, entre une réunion consultative

2 et une réunion du type que vous avez déjà mentionné, donc cette réunion

3 consultative, et une réunion telle qu'enregistrée dans ce PV, donc la

4 différence entre ces deux types de réunions ?

5 R. Il n'y a pas énormément de différence entre ces deux types de réunions.

6 Mais ici, dans ce PV, il y a certaines décisions qui sont consignées. Je ne

7 me souviens pas, que lors de cette réunion consultative, on ait abordé ces

8 questions qui figurent au PV. Quelqu'un a écrit ce PV subséquemment,

9 ultérieurement, et a indiqué ce qui a été dit lors de cette réunion où on a

10 évoqué toutes ces questions. En fait, il n'y avait pas énormément de

11 différence entre les deux. Mais tout ce que je veux dire, c'est que toutes

12 ces dispositions qui sont abordées ici, je ne me souviens pas d'avoir

13 participé à la discussion de ces dispositions. Plus tard, il y a eu des

14 missions accordées à plusieurs personnes. Je ne me souviens pas d'avoir

15 nécessairement pris part à cette réunion. On parle de

16 M. Kalinic à la deuxième page, par exemple, et autres.

17 Q. Je vois qu'on a décidé que le 12 mai, une session de l'assemblée allait

18 être tenue, et on a proposé également l'ordre du jour pour cette assemblée.

19 Vous avez pris part aux préparatifs de cet ordre du jour; est-ce que c'est

20 exact ?

21 R. Oui, oui. Oui, effectivement, comme je l'ai déjà dit. Il devrait s'agir

22 de la réunion qui s'est déroulée à Jahorina - cette réunion dont je suis le

23 seul à m'en souvenir - et par la suite, ils ont eu une réunion, une réunion

24 a été tenue avec eux et moi. J'étais peut-être présent. Et là, on a répété

25 ce qui devait être à l'ordre du jour. J'ai pris part à la rédaction des

26 points évoqués à l'ordre du jour, et j'ai même signé un document à

27 l'exception d'un point de l'ordre du jour qui avait été envoyé aux députés.

28 Q. Le premier point, pour que tout soit limpide, bien sûr, c'est l'ordre

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1 du jour proposé pour la session de l'assemblée au point 1A. On lit :

2 "Rapport sur les questions politiques et les questions de la guerre." Ceci

3 avait été fait par le président du Conseil de sécurité national. Velibor

4 Ostojic était le responsable, était la personne qui devait préparer ou

5 rédiger ce rapport avec l'assistance de M. Stanisic, le ministre de

6 l'Intérieur, M. Subotic, de la Défense nationale. Pourquoi M. Ostojic,

7 pourquoi est-ce que c'était lui à qui l'on avait demandé de préparer ce

8 rapport ?

9 R. M. Ostojic est de par sa profession linguiste. Il a fait des études en

10 littérature et langue serbe, le serbo-croate, comme on l'appelait à

11 l'époque. Il était très actif avec M. Karadzic au sein du parti, qu'il a

12 collaboré de très près avec lui. Egalement, il était au gouvernement, donc

13 un des rares membres ministres membre du SDS. C'est ainsi qu'il a été

14 choisi. On lui a demandé de rédiger ce rapport au nom de M. Karadzic car il

15 s'exprimait très bien. Maintenant, comment pouvait-il rédiger ce rapport ?

16 Voilà, c'est qu'il aurait pu rédiger toutes les informations qui sont

17 connues par d'autres membres du gouvernement, le ministre de la Défense, le

18 premier ministre, et cetera. Lui, il rédigeait des rapports de façon

19 technique, c'est-à-dire qu'il ne détenait pas les informations, toutes les

20 informations pour qu'il puisse rédiger ce rapport de son propre chef. Non.

21 C'était plutôt un rapport technique rédigé pour que M. Karadzic puisse le

22 présenter, même si plus tard, il n'avait pas lu le rapport, mais il l'avait

23 improvisé. Il a improvisé ce rapport à l'assemblée sans le lire, sans en

24 donner lecture. Je parle de

25 M. Karadzic.

26 Q. 6B, concernant l'obligation des autorités serbes à l'endroit des

27 organismes internationaux humanitaires, le Dr Kalinic, est-elle [comme

28 interprété] responsable ? Est-ce qu'on pensait aux autorités serbes de

Page 24121

1 Bosnie ou est-ce que c'était destiné à d'autres personnes ?

2 R. Ici, on parle du ministre des Affaires sociales et de la Santé, M.

3 Kalinic. Nous l'avons mentionné, parce qu'il était chargé d'établir les

4 liens avec les organismes internationaux, humanitaires internationaux qui

5 étaient, premièrement, le HCR des Nations Unies et la Croix-Rouge

6 internationale et peut-être d'autres organismes internationaux. Donc, il

7 s'agit ici du gouvernement de la République serbe de Bosnie-Herzégovine et

8 de son ministre.

9 Q. Maintenant, Monsieur Krajisnik, si on pouvait passer à la deuxième

10 partie de ce PV, là où on passe au point 8. C'est la deuxième partie. Vous

11 voyez que cela commence par : "La commission d'Etat pour l'échange des

12 prisonniers."

13 R. Oui.

14 Q. Il faudrait maintenant que nous regardions la décision 9B, décision

15 d'accorder une subvention à partir du budget pour la municipalité de Pale,

16 étant donné : "Que cette municipalité est totalement surchargée de réfugiés

17 et doit dépenser, faire face à d'énormes dépenses ayant trait à

18 l'hébergement des entités resituées sur Pale et choses de la sorte."

19 La situation des réfugiés à Pale était en train d'empirer par rapport à ce

20 que vous nous avez décrit au début de la semaine ? Enfin, je pense que

21 c'est au début de cette semaine, hier, en fait.

22 R. Oui. Les choses étaient en train d'empirer, puisque déjà dès le départ,

23 les choses étaient difficiles. Disons que cela avait légèrement empiré. Il

24 suffit de dire que c'était déjà très difficile au départ et que cela ne

25 s'est pas amélioré, puisqu'il y avait de plus en plus de réfugiés qui

26 arrivaient de Sarajevo vers pale.

27 Q. Merci, Monsieur Krajisnik. Nous pouvons maintenant laisser tomber ce

28 document et aborder la 16e Session de l'assemblée du peuple serbe.

Page 24122

1 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit ici, bien sûr, de la pièce P64A,

2 intercalaire 612, numéro ERN 00847711.

3 Q. Monsieur Krajisnik, j'ai annoté énormément de chiffres dans les marges,

4 pas forcément parce que je vais vous poser des questions sur chaque point,

5 mais la plupart des discours sont extrêmement longs. Il est assez difficile

6 de trouver le passage en donnant juste le début de la phrase, parce qu'il y

7 a énormément de contributions venant de différentes personnes, puis il y a

8 des discours qui sont extrêmement longs et qui dépassent la page. Donc,

9 vous avez beaucoup de petites annotations en marge. J'espère qu'on va

10 pouvoir s'y retrouver facilement.

11 R. Je ne pense pas avoir eu une copie annotée avec des lettres. Je n'en

12 trouve pas dans la marge.

13 Q. Il y a quelque chose --

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart. Monsieur Stewart, il

15 me semble que M. Krajisnik a reçu la copie qui nous émane du Greffe. Je ne

16 sais pas si elle est annotée. Je pense qu'elle n'est pas annotée

17 d'ailleurs. Monsieur Krajisnik, c'est bien cela, elle n'est pas annotée ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

19 M. STEWART : [interprétation] Oui. Visiblement, voilà ce qui, en effet, ce

20 qui s'est passé.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait rendre cette copie au

22 Greffier et lui donner une copie, un exemplaire qui porte les annotations

23 que vous avez effectuées, Monsieur Stewart.

24 M. STEWART : [interprétation] Tout à fait. Je vous remercie.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] S'il s'agit bien du 1A, je l'ai déjà trouvé.

26 M. STEWART : [interprétation]

27 Q. Oui, Monsieur Krajisnik, en effet, cela commence avec A.

28 Malheureusement, je pense qu'il n'y a pas assez de lettres dans l'alphabet

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1 latin pour toutes ces annotations. Donc, à la fin, vous avez aussi des

2 numéros. Enfin, nous allons voir.

3 Monsieur Krajisnik, nous avons déjà entendu parler de cette réunion, bien

4 sûr. J'aimerais que vous passiez immédiatement à l'annotation F en marge

5 que vous trouverez en page 7. Il me semble que dans la version anglaise,

6 c'est à la page 13.

7 R. J'ai trouvé.

8 Q. Il s'agit de l'intervention de M. Karadzic. Cela fait déjà un moment

9 d'ailleurs qu'il a pris la parole. Il fait rapport sur la guerre. Le

10 passage qui nous intéresse commence par : "Le côté serbe en Bosnie-

11 Herzégovine." L'avez-vous trouvé ?

12 R. Oui.

13 Q. "Le côté serbe en Bosnie-Herzégovine, la présidence, le gouvernement,

14 le Conseil de la sécurité national que nous avons établi, ont formulé les

15 priorités stratégiques, c'est-à-dire, les objectifs stratégiques du peuple

16 serbe." Monsieur Krajisnik, avant de parler des objectifs qui, certes sont

17 quelque chose que nous connaissons bien ici, j'aimerais vous poser la

18 question suivante : comment ces buts stratégiques ont-ils été formulés afin

19 d'être présentés lors de cette réunion de l'assemblée à Banja Luka. Qui

20 s'en est occupé, comment, quand, quelle procédure a été utilisée ?

21 Pourriez-vous nous parler un petit peu de l'élaboration de ces fameux buts

22 stratégiques ?

23 R. Comme je vous l'ai dit, il y avait eu la session de Jahorina et nous

24 avons contacté Banja Luka et un certain nombre de députés. En retour, nous

25 avons eu deux informations. Premièrement, qu'ils ne pouvaient pas venir à

26 Pale, ils ne pouvaient franchir les obstacles et deuxièmement, nous en

27 avons conclu que nous en étions arrivés à un point où finalement, certains

28 députés préféraient ne pas participer à l'assemblée mais continuer à faire

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1 ce qu'ils continuaient. Il y avait plus d'un mois qui s'était écoulé.

2 Chacun avait sa propre région autonome, avait un pouvoir quelconque.

3 L'opinion générale était que la guerre était terminée, qu'on avait fait

4 tout ce qu'on avait pu avec l'autre côté pour obtenir une solution

5 politique et qu'il n'y avait plus rien à discuter avec eux. C'était très

6 important. On avait un peu l'impression qu'on nous avait trahis, que

7 quelqu'un ne voulait pas respecter l'accord que nous avions élaboré et qui

8 avait été incorporé en principe comme quoi il fallait transformer la

9 Bosnie-Herzégovine. On avait laissé tomber l'idée de rester en Yougoslavie.

10 Comme il y avait des députés déjà à Jahorina, on a décidé tous de

11 nous rendre à Banja Luka directement, tous ces députés et M. Mladic était

12 là d'ailleurs puisqu'il était censé être nommé commandant en chef de

13 l'état-major principal. M. Karadzic et M. Koljevic étaient là aussi, Mme

14 Plavsic, en revanche, était absente. Il y avait des représentants du

15 gouvernement aussi et nous étions en train d'envisager comment poursuivre

16 les négociations, surtout étant donné que la suspension des négociations

17 avait été annoncée, qu'après la dernière séance, la communauté

18 internationale avait interrompu les négociations. L'idée, enfin du moins

19 c'est ce que les gens, ce que les gens disaient : On ne sait pas ce qu'on

20 lui fait, ces négociations, on ne sait pas quels sont les objectifs, on ne

21 sait pas où on va. Je le sais parce que j'y ai participé. Alors qu'on

22 préparait la session, on s'est dit : "Ce que l'on a dit à M. Cutileiro, on

23 devrait l'écrire. On devrait l'écrire pour que ceux qui nous écoutent

24 savent pourquoi on se bat." Quand je dis "se battre," je vous rappelle ici

25 tout ce qui s'est passé lors des conférences précédentes puisqu'il y avait

26 des rumeurs, de la désinformation. Les gens disaient : Ils ont trahi ceci,

27 ils ont trahi cela, ceci n'est plus sur la carte, personne ne sait ce qu'il

28 fait et tout cela parce qu'il n'y a pas eu de sessions. Tout ce qui est sur

Page 24125

1 la carte, s'il vous plaît, je tiens à vous le dire, Messieurs les Juges,

2 tout ce qui était sur notre carte, que nous avons donnée à M. Cutileiro a

3 été pris en compte, mis à part un objectif supplémentaire, c'est-à-dire, le

4 corridor. C'étaient les négociations avec la communauté croate à Graz. Le

5 problème, c'est le territoire. Il fallait qu'il y ait continuité de

6 territoire avec le corridor. Les représentants serbes ne voulaient pas

7 qu'il y ait une région serbe qui n'ait pas de continuité territoriale.

8 Il y a eu une réunion consultative, et ce ne sont pas du tout ce

9 qu'il y a dans ce PV ici, mais nous nous sommes tous réunis et nous avons

10 formulé de façon assez concise nos objectifs pour être sûrs qu'on sache

11 exactement où on allait et que quelqu'un ne puisse plus tout d'un coup

12 partir sur une tangente, pour nous lancer ensuite dans des débats sans fin.

13 Nous avions dit séparation, ensuite nous avons dit corridor, ensuite nous

14 avons dit Sarajevo, et cetera. On les a pris en revue l'un après l'autre.

15 Je peux vous expliquer les objectifs stratégiques d'ailleurs, et je

16 peux vous expliquer exactement ce que nous voulions présenter aux députés.

17 Q. Monsieur Krajisnik, il faudrait peut-être rester, ne pas perdre le fil

18 de cette intervention. Je vais vous poser des questions de toute façon qui

19 vous donneront amplement le temps de parler de chaque objectif l'un après

20 les autres, il ne faut pas les expliquer. Il faudrait bien que vous

21 attendiez mes questions, cela nous permettra garder le cap.

22 R. Je n'allais pas tout expliquer de toute façon, mais je vous remercie.

23 Vous êtes en effet responsable de l'interrogatoire. Allez-y.

24 Q. Voilà ce que je tiens à vous poser, Monsieur Krajisnik : cette réunion

25 consultative à laquelle vous faites référence, vous dites que ce n'est pas

26 ce qui est reflété ici dans ce PV, mais vous parlez d'une réunion

27 consultative qui aurait eu lieu à Pale, c'est cela ?

28 R. A Jahorina, en fait. Quand je vous ai expliqué, je m'en souviens très

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1 bien quand je vous l'ai expliqué, on a bien vu qu'on n'avait pas atteint le

2 quorum, on a quand même décidé des mesures à prendre et c'est là qu'on

3 s'est mis d'accord là-dessus. A mon avis, avant la réunion, il fallait

4 qu'on ait quelque chose, tout cela est au PV. De toute façon, le cabinet,

5 lui, avait eu une séance séparée, et ensuite, nous nous sommes retrouvés

6 pour la réunion.

7 Q. Qui était présent pour cette réunion préalable à la réunion de

8 l'assemblée où les buts stratégiques ont été définis de la façon que vous

9 nous avez décrite ?

10 R. Je ne suis pas vraiment certain, mais il me semble que c'étaient les

11 personnes habituelles, M. Karadzic, M. Koljevic, M. Djeric, moi-même, les

12 ministres. Je ne suis pas vraiment certain, mais je suis presque certain

13 qu'il s'agissait des députés qui étaient arrivés. Ils ont participé à la

14 réunion parce qu'on n'était pas en train de parler de secrets, enfin je

15 n'en suis pas certain.

16 Q. Serait-il possible que M. Djeric n'ait pas été impliqué dans

17 l'élaboration de ces objectifs stratégiques ?

18 R. Je ne crois pas. Peut-être, peut-être. Il se peut qu'il y ait eu une

19 séance du gouvernement qui se soit tenue simultanément, mais je n'en suis

20 pas certain. Je dois dire que je sais qu'il y avait un groupe de personnes

21 présent, je sais que j'y ai participé. Je sais quel était le but de la

22 réunion, quant à savoir exactement qui était présent et vous donner une

23 liste exacte des personnes présentes, là je ne peux pas.

24 Q. Avant cette réunion consultative, y avait-il eu des discussions à

25 propos de la nécessité d'avoir ces fameux objectifs stratégiques ? Ici, je

26 parle d'une période se déroulant sur les quelques semaines ayant précédé la

27 réunion en question ?

28 R. Absolument pas. C'est lors de cette réunion, c'est une façon de se

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1 préparer pour l'assemblée. On savait bien qu'on allait nous demander

2 pourquoi on combattait là-bas, ce qu'on faisait là-bas. On s'est dit, on va

3 établir ces buts stratégiques. On s'est mis d'accord là-dessus. Je ne sais

4 pas si c'est d'ailleurs porté au compte rendu. M. Karadzic a présenté

5 l'idée, a fait la proposition, et il avait sur un morceau de papier déjà un

6 résumé des buts stratégiques.

7 Q. Vous avez fait une réponse assez longue, il y a quelques minutes.

8 Messieurs les Juges, ici nous sommes en train de traiter d'un point qui est

9 à la ligne 10 de la page 31. Vous nous avez dit il y a eu peu de temps que

10 "l'opinion générale était que la guerre était terminée." Avez-vous vraiment

11 dit cela ? Pouvez-vous souvenir de ce que vous avez dit ?

12 R. J'ai dit que nous avions contacté les députés à Banja Luka, et après,

13 nous avons eu l'impression que dans de nombreuses zones, les gens pensaient

14 qu'ils ne pouvaient plus y avoir recours à la négociation, qu'il n'y avait

15 plus de guerre, que chacun avait son territoire. Les gens commençaient à

16 agir comme si tout était terminé. C'est cela que je voulais dire et c'était

17 en liaison avec la conversation téléphonique que nous avions eue avec nos

18 députés à Banja Luka. C'est l'impression qu'on a eue.

19 C'étaient des municipalités où on ne ressentait pas la guerre comme

20 vous pouvez la ressentir à Sarajevo ou aux alentours de Sarajevo.

21 Q. Monsieur Krajisnik, pour en revenir au PV de la session de l'assemblée

22 de Banja Luka, du 12 mai, je tiens à vous parler d'abord du premier

23 objectif.

24 Pour en revenir, il faudrait que nous arrivions à trouver l'annotation en

25 marge où il y a un C. Normalement, cela devrait être à la page 3 du

26 document en B/C/S, et la page 8 du document en anglais.

27 R. Oui, oui.

28 Q. On va utiliser cela comme repère et ensuite, pour ce qui est de

Page 24128

1 l'anglais, il faudra descendre environ de 30 lignes. Il y a une référence à

2 M. Izetbegovic. Son nom est en lettres majuscules. Il est facile à repérer.

3 Ensuite, il y a un passage où il est dit : "Le peuple serbe n'acceptera pas

4 la Bosnie unitaire d'Alija Izetbegovic. C'est avec cela en tête que nous

5 sommes arrivés à la conférence tenue sous l'égide de l'Union européenne à

6 propos de la Bosnie-Herzégovine."

7 Avez-vous trouvé le passage ?

8 R. Oui, j'ai bien vu le passage en effet.

9 Q. Très bien.

10 R. Cela commence avec : Pendant la Deuxième Guerre mondiale, et ensuite,

11 mais ont accepté notre proposition pour une conférence sur la Bosnie-

12 Herzégovine.

13 Q. Tout à fait, c'est cela. Ensuite, cela continue et je cite : "Lors de

14 cette conférence, nous avons rapporté un grand succès politique en obtenant

15 l'approbation de la communauté internationale, en l'espèce, la Communauté

16 européenne, pour une Bosnie-Herzégovine en trois parties, par opposition à

17 une Bosnie-Herzégovine unitaire, une Bosnie-Herzégovine très complexe,

18 consistant de trois Etats nations, de trois Etats constitutifs dont les

19 relations et les liens seront plus ou moins forts. Nous voulions des liens

20 faibles et les Croates voulaient des liens faibles, alors qu'en Europe, ils

21 voulaient que ces trois Etats constitutifs aient des liens forts. Ce n'est

22 pas très important. Ce qui est important, pour ce qui est de la politique,

23 nous avons enfin obtenu la reconnaissance de notre désir légitime, qui est

24 d'avoir notre propre unité étatique au sein de la Bosnie-Herzégovine, et

25 personne n'a le droit de le contester. Ils peuvent contester un village ou

26 une municipalité ici ou là, mais personne ne peut plus contester notre

27 droit à avoir notre propre unité étatique, notre propre organisation

28 d'Etat, notre propre entité en Bosnie-Herzégovine."

Page 24129

1 Monsieur Krajisnik, le Dr Karadzic a présenté la chose aux députés. Dans sa

2 présentation, y avait-il quand même possibilité d'interprétation ? Est-ce

3 que les députés pouvaient interpréter les termes du Dr Karadzic quand il

4 parlait d'un état indépendant et souverain pour les Serbes au sein d'une

5 Bosnie, un Etat reconnu internationalement ? Ou parlait-il de quelque chose

6 qui serait plutôt un Etat de Bosnie-Herzégovine reconnu internationalement

7 et consistant de trois parties ?

8 R. Je vous ai donné l'ambiance de la réunion. M. Karadzic a très

9 clairement déclaré ce que nous avions obtenu lors de la conférence. Nous

10 avions obtenu une solution tripartite. On ne devait plus parler de Bosnie-

11 Herzégovine en tant qu'Etat reconnu internationalement, parce qu'en termes

12 politiques, à l'époque, ce n'était pas du tout une idée populaire. Il a

13 très clairement dit : "Nous avons obtenu notre propre Etat constitutif."

14 Cela c'était autorisé, on pouvait énoncer cela mais ce serait au sein d'une

15 Bosnie-Herzégovine qui serait constituée de trois unités constitutives.

16 Quant à savoir comment elle serait reliée avec des liens plus ou moins

17 lâches, c'est un autre problème. Il est évident, il n'y a aucun doute sur

18 ce qu'a dit Karadzic. Il a essayé de présenter la chose et d'interpréter la

19 chose de façon à emporter l'approbation des députés qui eux étaient

20 furieux, et se sentaient trahis parce que la Bosnie-Herzégovine avait été

21 reconnue. C'était son interprétation des choses. Il déclarait très

22 clairement quand même ce qui avait été obtenu lors de la conférence. La

23 Bosnie était acceptée et au sein de cette Bosnie, notre unité constitutive

24 avait été acceptée.

25 Q. Monsieur Krajisnik, on peut dire quand même que vous et vos co-

26 négociateurs, c'est-à-dire, le Dr Karadzic et le Pr Koljevic, compreniez

27 très, très bien à ce moment-là, n'est-ce pas, que M. Cutileiro, le

28 représentant de la Communauté européenne et ses acolytes, si je puis dire,

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1 eux ne pensaient absolument pas à un Etat séparé et reconnu

2 internationalement qui serait uniquement un Etat pour les Serbes de Bosnie,

3 n'est-ce pas ?

4 R. Non. Non, bien sûr. Dès le départ, il a été très clair que la Bosnie-

5 Herzégovine serbe, la Bosnie-Herzégovine croate et la Bosnie-Herzégovine

6 musulmane, cette alliance d'Etats bosniaques, aurait au plus une

7 indépendance et une autonomie interne et rien de plus. L'entité qui

8 chapeauterait le tout serait bien sûr la Bosnie-Herzégovine, reconnue

9 internationalement. Cela, ce n'était pas contesté. D'ailleurs, certes

10 pendant la guerre, il y a de propositions venant de la communauté

11 internationale, mais nous y reviendrons.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous n'avons pas très bien compris,

13 puisque dans la réponse, M. Krajisnik commence par : "Absolument pas," mais

14 dans sa réponse, je vois bien qu'il est d'accord avec votre proposition

15 selon laquelle le but n'était pas du tout une des états séparés et reconnus

16 internationalement, mais un seul état. M. Krajisnik opine du chef. Donc, je

17 vois qu'il est d'accord avec vous.

18 M. STEWART : [interprétation] Oui, vous m'avez volé les mots de la bouche,

19 puisque j'allais, en effet, demander à M. Krajisnik si sa réponse allait

20 bien dans le sens de ce que j'avais dit. Je vous remercie. Je poursuis.

21 Q. Monsieur Krajisnik, d'après vous, est-ce que les députés présents à la

22 session de l'assemblée à Banja Luka ont-ils compris aussi clairement que

23 vous ce qui était proposé, donc ce point qui est quand même essentiel ?

24 R. Oui, tout était clair pour tout le monde. Certains des députés ont fait

25 de beaux discours, des discours enflammés, du fait de différents désirs qui

26 s'exprimaient. Si les Musulmans abandonnaient ce compromis, on n'aurait

27 plus rien à faire avec eux. Mais tout le monde avait bien compris ce que

28 disait le Dr Karadzic. Tout le monde a compris parfaitement. A chaque

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1 séance, on nous donnait des informations, et on disait qu'on avait

2 abandonné l'idée de la Yougoslavie, qu'on avait accepté le compromis, qu'on

3 était d'accord pour que la Bosnie-Herzégovine devienne une entité reconnue

4 internationalement.

5 Q. Monsieur Krajisnik, vous nous dites que pour les députés la chose était

6 claire. Vous avez bien compris ce que vous en disiez en tant que

7 négociateur, mais que cela dit, il y avait quand même une certaine

8 résistance de la part des députés à accepter. Ils avaient compris, mais ils

9 avaient du mal à l'avaler, si je puis dire.

10 R. Je vais être tout à fait clair. A partir du moment où nous avons

11 procédé à un changement de politique et où nous avons laissé entendre que

12 nous ne pourrions pas nous conformer à la décision plébiscitaire qui était

13 celle de rester en Yougoslavie, les objections formulées de façon

14 permanente disaient pourquoi avez-vous fait cela ? Nous, sans cesse, avons

15 expliqué que cela a été un compromis. Ils n'ont pas pu faire le deuil de

16 cette idée de rester en Yougoslavie. A chaque fois qu'une chance, une

17 opportunité se présentait au Parlement, on a pu entendre des propos de ce

18 gendre de la bouche des députés. Pourquoi ici ? Cela s'est vu suscité par

19 l'idée qu'ils avaient d'avoir été trahis au niveau de l'accord. Alors, on a

20 renoncé à la Yougoslavie. On avait une Bosnie indépendante avec une unité

21 constitutive avec reconnaissance internationale. Alors, ils avaient eu

22 cette reconnaissance internationale mais sans la transformation souhaitée,

23 ce qui fait que les effectifs, les forces qui disaient : Vous négociez

24 vainement avec la partie adverse, parce que jamais ils ne s'en tiendront à

25 ce qui a été convenu. Vous avez tout fait pour rien. J'improvise. Les gens

26 disaient : Cessons de négocier et allons-nous … et là, ils s'arrêtaient.

27 Ils mettaient un point, parce qu'ils ne savaient pas trop où aller. Est-ce

28 que c'était un état indépendant qu'ils voulaient ou autre chose ? C'était

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1 là la réponse qu'on apportait à la tâche inachevée à laquelle nous étions

2 aboutis une fois que nous avions accepté la solution de compromis et changé

3 de politique.

4 La guerre venait de commencer, donc l'atmosphère en était arrivée à

5 une surchauffe.

6 Q. Monsieur Krajisnik, je vais d'abord vous demander ce qui suit : est-ce

7 que vous seriez à même de confirmer le fait, qu'entre vous et le Dr

8 Karadzic, il n'y a pas eu, à ce moment-là, d'opinion divergente pour ce qui

9 est des objectifs stratégiques, n'est-ce pas ?

10 R. Vous posez toujours la question entre le Dr Karadzic et moi-même. M.

11 Karadzic, M. Koljevic, M. Buha et moi-même, qui avons été les négociateurs,

12 très souvent, il n'y a eu aucune différence et divergence entre nous. Vous

13 avez raison. Entre Karadzic et moi, il n'y a pas eu de divergence. Non

14 seulement entre nous deux, il n'y en a pas eu non plus entre les autres qui

15 avaient également pris part aux négociations.

16 Q. Certes. Monsieur Krajisnik, la raison pour laquelle je vous pose cette

17 question : c'est que le Dr Karadzic a présenté aux députés les objectifs

18 stratégiques à cette réunion. Vous venez de la confirmer. Lorsqu'il

19 s'agissait de ce tout premier objectif, est-ce qu'il faisait partie de vos

20 intentions - et quand je dis vous, je parle du groupe que vous venez de

21 mentionner - donc, a-t-il fait partie de vos intentions au cas où il y

22 aurait des divergences entre le premier des objectifs et ce que vous aviez

23 espéré obtenir par le biais des négociations appelées Cutileiro ou pas ?

24 R. Messieurs les Juges, Monsieur Stewart et Monsieur le Procureur, quand

25 on parle de diverger, je dirais que le fondement du plan Cutileiro était

26 celui-là. Quand on parlait des séparations à mettre en place, il fallait

27 faire des frontières entre les unités constitutives, faute de quoi, il n'y

28 aurait pas d'unités constitutives. On ne sait pas délimiter si l'on ne

Page 24133

1 trace pas des cartes. Il ne s'agissait pas de séparer les peuples, mais de

2 séparer les territoires. Ici, c'est formulé de façon très maladroite. En

3 substance, il s'agissait de dire, là-bas, il y aura la Bosnie-Herzégovine

4 musulmane, et ici, il y aura la Bosnie-Herzégovine croate, alors qu'ici, il

5 y aura la Bosnie-Herzégovine serbe. Il a été question d'une clé ethnique

6 mais non pas de façon exclusive. Il s'agissait de créer des unités

7 constitutives. Elles ne sauraient être mises en place sans qu'il y ait une

8 délimitation des territoires. C'est maintenant une autre chose que

9 d'entendre parler les gens d'une séparation des peuples. Les peuples ne

10 seraient être dissociés les des autres s'il n'y a pas une délimitation des

11 territoires. L'essentiel, c'était de tracer des lignes pour délimiter ces

12 unités constitutives. Je le sais, parce que ceux qui disent qu'il n'en a

13 pas été ainsi ont tort. Je sais que c'est l'approche qui a été la nôtre.

14 Quand on parle maintenant de séparer les peuples, cela ne voulait pas dire

15 qu'on allait envoyer quelqu'un dans la lune et que les autres resteraient

16 là. Il s'agissait, au sein de la Bosnie, de faire, de tracer des lignes de

17 démarcation. Je sais exactement ce que nous avons fait et ce que nous

18 avions à l'esprit ce faisant.

19 M. STEWART : [interprétation] Messieurs les Juges, je veux poser une

20 question pratique, parce que je ne suis pas sûr d'avoir placé cela sur

21 notre liste. Très bientôt, pas tout de suite, mais très bientôt, je

22 voudrais que M. Krajisnik puisse disposer de la pièce P47, qui est une

23 gazette officielle où il est fait état des six objectifs stratégiques. Nous

24 n'en avons pas besoin tout de suite, à l'instant, mais je demanderais à M.

25 le Greffier d'avoir l'amabilité de pêcher ce document dans les liasses

26 qu'il a.

27 Q. Monsieur Krajisnik, je vais vous poser la question en la formulant de

28 façon quelque peu différente : est-ce que ce premier objectif stratégique

Page 24134

1 devait constituer ou pas, quoi que ce soit de plus, que ce qui a été

2 proposé à l'occasion des négociations Cutileiro ?

3 R. C'est en pleine et entière responsabilité de ce je dis, que j'affirme,

4 que dès le début cela a été convenu. Il n'y aura pas de Yougoslavie, il

5 sera procédé à une dissociation interne et il sera élaboré des cartes des

6 différentes unités. La chose n'a jamais été contestée. Il a été précisé que

7 ces unités seraient surtout serbes, surtout musulmanes, surtout croates et

8 non pas exclusivement serbes, exclusivement musulmanes ou exclusivement

9 croates. C'était impossible. M. Cutileiro avait proposé non pas de nettoyer

10 certains territoires pour faire un Etat serbe, mais de faire des unités

11 avec une majorité ou des majorités de population à tel ou tel endroit. Je

12 lui ai dit : Les Musulmans ont peur de rester en Yougoslavie. C'est ce

13 qu'ils nous ont dit. Nous, nous avons estimé que nous avions des raisons de

14 redouter cette Bosnie unitariste, parce qu'on était déjà systématiquement

15 mis en minorité, qu'adviendrait-il ultérieurement si nous venons à ne pas

16 avoir une unité constitutive. Si vous ne voulez pas d'un côté la

17 Yougoslavie, nous voulons notre unité constitutive, comme il a été créé des

18 frontières municipales ou des frontières départementales. C'était cela la

19 signification. Je vous affirme en toute responsabilité qu'il en a été

20 ainsi. J'ai prêté l'oreille à bon nombre d'interprétations, mais je vous

21 affirme que ces interprétations sont certainement erronées.

22 Q. Monsieur Krajisnik, revenons maintenant à ce procès-verbal de la

23 session de l'assemblée, page 13 en anglais, page 7 dans votre version. Nous

24 en étions tout à l'heure à la lettre F. Nous aurons à revenir souvent sur

25 ce passage, puisque le Dr Karadzic y présente les six objectifs

26 stratégiques qui sont les siens. On les passera en revue l'un après

27 l'autre. Maintenant, si vous voyez le deuxième objectif stratégique après

28 ou à côté de la lettre F en marge.

Page 24135

1 R. Oui, je le vois.

2 Q. "Le deuxième objectif stratégique, à savoir, le corridor entre la

3 Semberija et la Krajina, c'est une chose pour laquelle il nous faudra faire

4 certains sacrifices. Cela revêt une importance stratégique pour le peuple

5 serbe, parce que cela intègre les pays serbes. Non pas seulement la Bosnie-

6 Herzégovine serbe, mais la Bosnie-Herzégovine serbe, la Serbie, les Krajina

7 serbes avec la Bosnie-Herzégovine serbe et la Serbie. C'est là un objectif

8 stratégique très haut placé qu'il nous faut réaliser, car il ne saurait y

9 avoir de Krajina, de Krajina bosniaque, de Krajina serbe et d'alliance des

10 terres serbes si nous ne mettons pas en place ce corridor qui nous

11 intégrera et qui permettra le passage, sans entrave, d'une partie d'un

12 hectare à l'autre."

13 Monsieur Krajisnik, il était, de façon évidente, que ce que vous

14 souhaitiez, c'était établir des liens entre la partie serbe de la Bosnie-

15 Herzégovine moyennant l'existence d'un corridor. C'est ce que vous aviez

16 comme objectif ?

17 R. Oui. Je peux vous expliquer la rhétorique utilisée par

18 M. Karadzic, si tant est que cela vous intéresse.

19 Q. En fait, ma question visait justement à passer sur ce sujet, Monsieur

20 Krajisnik. Donc, allez-y.

21 R. La Krajina de Bosnie, à Banja Luka, entre avril et le

22 12 mai, s'est trouvée complètement bouclée. Il y a même, dans les journaux,

23 le fait que 12 bébés avaient péri pour cause d'absence d'oxygène. Il y a eu

24 cette espèce de tension au niveau des députés et de la population de la

25 Krajina bosniaque. Et cette impression qui était la leur d'être bouclée,

26 qui voulait assurer une liaison avec d'autres parties et les parties

27 adverses, à savoir, musulmanes et croates, croates en l'occurrence ici, ne

28 les laissait pas passer. Il s'agissait, par exemple, d'emprunter

Page 24136

1 l'autoroute mais de se faire escorter par la FORPRONU. Tout cela est tombé

2 à l'eau. Il y a eu beaucoup de négociations pour ce qui est du passage à

3 assurer aux fins de ne pas rester dans un ghetto.

4 Aux fins de surmonter ce type de situation, nous nous sommes

5 entretenus de ce corridor avec les Croates, suivant des principes

6 d'échanges géographiques de territoires à Graz. M. Karadzic met en place un

7 objectif nouveau qui n'a pas été avancé jusque-là. Vous verrez, Monsieur le

8 Juge, sur les cartes, pour constater la présence de certains villages en

9 bleu, vert et jaune, où l'on a estimé que l'on pourrait procéder à des

10 échanges aux fins d'avoir un territoire compact. Il manquait des bouts de

11 territoires serbes pour rattacher le tout. Nous nous sommes entretenus avec

12 les Croates pour ce qui était de concessions à faire au niveau de Kupres.

13 M. Karadzic dit

14 ici : Il nous faudra forcément sacrifier certains territoires. Il parlait

15 politique, il ne parlait pas champ de bataille. Alors, ce corridor

16 permettait un passage au travers des territoires d'autrui pour permettre

17 d'établir la liaison. S'agissant des personnes que nous étions allés voir,

18 qui étaient pleines d'amertume, parce qu'elles s'étaient trouvées dans un

19 ghetto, donc encerclées. C'est la raison pour laquelle l'on a présenté ici,

20 chose que je comprends parfaitement bien, alors que d'autres personnes qui

21 n'auraient pas à leur disposition la totalité des informations,

22 risqueraient de considérer cela comme étant incompréhensible.

23 Q. Monsieur Krajisnik, vous dites que vous vous êtes entretenus au sujet

24 de ce corridor avec les Croates à Graz. A-t-il eu des débats avec eux ou

25 des discussions avec la partie musulmane au sujet d'un tel corridor ?

26 R. Pas à ce moment-là. Je peux vous donner des exemples ultérieurs où il a

27 été dressé même une carte de ces corridors. Il est fait référence à la

28 solution qu'on avait envisagée avec les Croates. Cela, je peux vous la

Page 24137

1 montrer cette carte. Je dirais qu'il y a toujours eu un problème au niveau

2 de Brcko. On a même proposé de passer par le territoire croate, d'assurer

3 un passage par le territoire croate et faire un pont pour faire passer les

4 Musulmans sous le pont et nous sur le pont. Il y eu toutes sortes de

5 combines ou de combinaisons. Parce qu'on ne pouvait pas résoudre le

6 problème avec les Musulmans autrement, parce que le problème s'est toujours

7 posé au niveau de Brcko. Comment faire assurer un pontage pour ce qui est

8 du problème de Brcko. A ce moment-là, nous ne nous sommes pas entretenus

9 avec les Musulmans, parce qu'ils ne voulaient pas négocier, ils voulaient

10 garder un statu quo. Ils avaient obtenu un Etat indépendant, et ils

11 n'étaient plus du tout intéressés par les négociations.

12 Q. Dans sa description de ce deuxième objectif stratégique tel que

13 présenté ici, le Dr Karadzic englobe, de façon évidente, une notion de

14 jonction des parties serbes de la Bosnie-Herzégovine. Il le dit. Je me

15 réfère notamment à la quatrième ou cinquième ligne qu'on a comptée du haut,

16 ligne trois en version anglaise. Il dit que : "Cela constitue, que cela

17 revêt une importance stratégique des plus grandes pour le peuple serbe,

18 parce que cela intègre les terres serbes non seulement de la Bosnie-

19 Herzégovine serbe, mais de celles de cette Bosnie-Herzégovine serbe avec la

20 Serbie." Quelque peu plus loin, dans le même paragraphe, il dit que :

21 "C'est un objectif stratégique de la plus haute importance, parce que sans

22 l'atteindre, il ne saurait y avoir de Krajina, de Krajina bosniaque, de

23 Krajina serbe ou d'alliance des terres serbes."

24 Que voulait, selon vous, dire le Dr Karadzic en se référant de cette

25 alliance des terres serbes ?

26 R. Pour proposer un projet aux députés, ces députés se disant constamment

27 qu'il faudrait regagner le giron de cette Yougoslavie, de cet Etat commun,

28 M. Karadzic procède par étapes, et leur parle d'abord des solutions

Page 24138

1 adoptées en Bosnie. A l'avenir, si l'opportunité se présentait, cela

2 constituerait une alliance des territoires serbes. La Krajina serbe, la

3 Krajina bosniaque, la République serbe et la Serbie. Il le fait à des fins

4 politiques. C'est aux fins de réaliser cela que vous allez d'ailleurs le

5 voir, quels ont été les débats qui se sont déroulés au Parlement. Vous

6 verrez quelles ont été les résistances vis-à-vis de toutes négociations

7 avec ceux qui nous ont trahi pour ce qui était de la transformation de la

8 Bosnie. Ils étaient même très en colère à l'égard de la Communauté

9 européenne, qui avait vu tout ceci d'un œil favorable. Il y a eu une

10 rhétorique de nécessaire. Il a fallu mettre cela dans un emballage

11 doucereux pour que la pilule amère passe. C'est par la suite qu'il avait

12 envisagé des négociations. C'était cela, l'objectif.

13 Si les Serbes devaient décider de vivre avec la Serbie ou pas, ou la

14 Krajina serbe avec la Serbie, tous jusqu'au dernier, ou la grande majorité

15 et c'est presque sûr, auraient opté en faveur de vivre avec les Serbes de

16 Serbie, plutôt qu'avec les Croates ou les Musulmans de Bosnie. C'est un

17 droit naturel. Maintenant, si vous êtes amenés à conduire une politique

18 réaliste, et si vous savez qu'il y a des circonstances internationales qui

19 vous posent des limites, et si vous avez une situation interne telle

20 qu'elle se présentait, il fallait expliquer. C'était difficile d'expliquer

21 cela à des personnes qui souhaitaient autre chose. C'est la raison pour

22 laquelle la rhétorique en question s'était avérée nécessaire à ce moment-là

23 et ultérieurement pour essayer de rapprocher les gens d'une évolution

24 réaliste à adopter, parce que nous n'étions pas les seuls en Bosnie.

25 Q. Dans la réponse que vous venez d'aborder, vous venez de préciser que

26 c'est ce deuxième objectif que M. Karadzic était censé dire à haute voix.

27 Etes-vous en train de dire que M. Karadzic à cette réunion a en quelque

28 sorte divergé de ce qui a été prévu ?

Page 24139

1 R. Non, non. J'ai dit qu'il était censé donner lecture du deuxième

2 objectif. Il avait des papiers, des textes de rédigés. Il se peut qu'il ait

3 déjà lu cette première phrase, mais le reste n'a pas figuré dans le

4 document. I'l n'a fait qu'interpréter librement et expliquer les raisons

5 pour lesquelles cela était nécessaire, pour que les gens comprennent les

6 raisons pour lesquelles ils s'employaient en faveur de ce corridor. C'est

7 ce que je voulais dire en en parlant.

8 Q. Lors du débat relatif à la formulation des objectifs stratégiques, et

9 nous parlons des débats qui se sont faits en vue de la session de

10 l'assemblée, a-t-il été question de la largeur dudit corridor ?

11 R. Non, parce que nous étions censés en convenir avec la partie croate.

12 Nous avons estimé que cela devait forcément faire l'objet de concertation.

13 On a parlé de 30, de cinq, jusqu'à la largeur qui permettrait le passage

14 d'un autocar. Il y a eu toutes sortes de propositions. Il a été question

15 aussi du trafic aérien qui serait autorisé par-dessus le territoire. Les

16 gens inventaient toutes sortes de choses et proposaient toutes sortes de

17 choses. L'idée maîtresse était celle d'avoir un corridor qui relierait les

18 deux territoires ethniques serbes de la Semberija et de la Krajina. Cela

19 était censé faire l'objet d'une concertation.

20 Q. Vous avez dit que toutes sortes de propositions avaient été mises sur

21 le tapis. Vous voulez dire que cela, ces concertations, étaient en cours,

22 entre vous et les Croates ?

23 R. Non, non. Nous avons eu certains contacts avec des députés. Je crois

24 avoir gardé la chose en mémoire. Lorsque cette assemblée s'est tenue, il se

25 peut que cela se soit fait pendant une pause, et chacun disait ce qu'il

26 pensait devoir faire, jusqu'à la Sava, puis 30 kilomètres, cinq kilomètres,

27 la largueur permettant le passage d'un autocar et ainsi de suite. Cela ne

28 s'est pas dit à la session même. Cela s'est dit dans les couloirs, lorsque

Page 24140

1 vous discutiez à titre informel avec les gens qu'ils vous formulaient

2 toutes sortes de propositions.

3 Q. A l'occasion des entretiens dont vous avez parlé aux Juges de la

4 Chambre, entretiens que vous avez eus déjà avec les Croates à Graz

5 notamment, lorsqu'il a été question de ce corridor, dans quelle mesure a-t-

6 il là-bas été question de la taille de ce corridor ?

7 R. S'agissant de la partie croate, nous avons discuté notamment du

8 regroupement des territoires ethniques serbes dans la Posavina et les

9 territoires ethniques croates. Si, jusqu'à la Sava, on avait des régions

10 serbes, il s'agissait de les rétrocéder aux Croates, et eux nous

11 rétrocéderaient des bouts de territoire qui constitueraient le corridor. Il

12 a été question aussi de l'intérêt qu'ils témoignaient à certains endroits,

13 notamment Kupres. Nous étions tombés en principe d'accord sur le fait de

14 laisser la concrétisation pour plus tard. Bien sûr, il n'était pas question

15 d'avoir un corridor sans l'approbation de la troisième des parties en

16 présence, parce qu'il y avait un mince lambeau où le corridor envisageait

17 passer par des territoires musulmans. Là aussi, il s'agissait d'aboutir à

18 des solutions. Si vous avez les quatre- cinquième de résolus avec les

19 Croates, il resterait une toute petite partie à discuter avec la partie

20 musulmane, parce que ce n'est pas la partie croate qui serait impliquée

21 pour ce qui est des territoires aux environs de Brcko.

22 Q. Est-ce qu'aux entretiens que vous avez eus à Graz, il vous a été donné

23 d'aboutir à un accord général pour dire que le corridor passant par le

24 territoire croate aurait au moins quelques kilomètres de large, à la

25 différence d'un boyau qui ne permettrait que le passage d'un autocar ?

26 R. J'ai parlé de la largeur d'un autocar au figuré, mais je me souviens

27 qu'il y avait eu une proposition de la sorte, et je l'ai gardée en mémoire.

28 Nous avons parlé en termes généraux. Nous ne voulions pas fixer les choses

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1 à titre définitif pour ce qui est de la taille du corridor. Il fallait

2 d'abord résoudre le problème, voir combien de régions bleues il y avait,

3 combien d'autres couleurs il y avait, pour aboutir à une solution.

4 L'essentiel sur quoi les Croates étaient d'accord, c'était de dire qu'ils

5 comprenaient notre problème et ils avaient la bonne volonté d'aboutir à un

6 accord. Le type d'accord était laissé pour plus tard.

7 J'ai aussi oublié de dire ici, à l'intention des Juges de la Chambre

8 et des autres, c'est que nous nous sommes également entretenus sur le droit

9 qui était le nôtre d'avoir une sortie débouchant sur la mer. On en a parlé

10 à Graz et j'ai oublié de le dire. Il y avait aussi le représentant de la

11 Croatie. J'ai complètement perdu cela de vue et ils ont dit que cela serait

12 discuté ultérieurement entre la Croatie et la Bosnie pour aboutir à un

13 arrangement, mais les Croates de Bosnie-Herzégovine n'étaient à même de

14 donner une opinion là-dessus. J'y ai pensé maintenant que vous avez posé la

15 question. Il n'a pas du tout été question d'une largeur quelconque de ce

16 corridor dans nos négociations avec les Croates.

17 Q. A l'occasion de ces négociations de Graz, aviez-vous eu à l'esprit un

18 corridor qui aurait au moins la largeur de quelques kilomètres ?

19 R. C'est à peu près l'idée que nous nous étions faite. Avoir un corridor

20 non pas seulement la taille de la largeur d'une route mais avoir une

21 largeur raisonnable. Je crois que l'on pourrait voir mieux la chose sur une

22 carte dont nous avons discuté. Cela existe dans le livre de M. Owen, publié

23 ultérieurement, sur l'idée que nous nous faisions de ce corridor. Il

24 s'agissait d'un passage par le territoire d'autrui. Cela serait un

25 territoire à nous, mais que nous n'exploiterions pas mais qui servirait de

26 passage, que ce ne soit pas seulement la superficie englobée par la route.

27 Il y a des bouts à côté.

28 Q. Monsieur Krajisnik, je voudrais qu'on vous remette à présent deux

Page 24142

1 documents. Le premier est le P68, intercalaire 16 et l'autre, c'est le P47

2 dont j'ai parlé, il y a quelques minutes à peine.

3 M. STEWART : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je ne sais pas si M.

4 Krajisnik a la bonne page ?

5 Q. C'est un document, vous vous souviendrez certainement que c'est par le

6 truchement de M. Treanor que l'on a présenté cette carte. Elle est assez

7 simple et elle indique les six objectifs stratégiques, et en anglais,

8 s'agissant de cette carte, ce sont les six objectifs stratégiques tels

9 qu'on les a énumérés plus tard dans le journal officiel et c'est pourquoi

10 je souhaiterais que vous preniez le document P47. C'est la version en B/C/S

11 de ce que nous avons en anglais concernant la carte Treanor.

12 Ce que vous avez sous les yeux, c'est P47, le document P47 est le même

13 document que nous avons en anglais, n'est-ce pas, ici, sur la carte de M.

14 Treanor ?

15 D'abord, dites-nous, est-ce que la carte de M. Treanor vous

16 satisfait, dans le sens où est-ce que pour vous elle indique clairement où

17 ces objectifs étaient placés sur le terrain, c'est-à-dire, est-ce que cela

18 reflète de façon très précise ce dont ces objectifs faisaient état ?

19 R. Je crois qu'il y a d'énormes erreurs qu'il faudrait expliquer, la

20 vallée de la Neretva, plus particulièrement et de la Drina. Pour ce qui est

21 de la sortie sur la mer, elle n'est pas très bien représentée ici.

22 Q. Très bien. Essayons de nous concentrer d'abord sur l'objectif numéro 1,

23 il n'est pas représenté sur la carte. L'objectif 2, vous n'avez pas formulé

24 d'objections concernant cet objectif. Il s'agit de l'emplacement de cet

25 endroit et je crois que c'est bien montré. C'est précisément montré sur la

26 carte; est-ce que c'est exact ?

27 R. Oui, il faudrait que ce soit un petit peu plus haut, mais effectivement

28 la Krajina serait liée à la Semberija. Donc --

Page 24143

1 Q. Monsieur Krajisnik, c'est très simplifié. L'objectif 5, par exemple,

2 est énuméré ici. Il n'y a absolument rien qui découle de la description de

3 cet objectif sur cette carte, n'est-ce pas ? Il n'est pas représenté en

4 d'autres mots. On nous dit où se trouve Sarajevo et on nous dit que c'était

5 l'objectif 5; est-ce que c'est exact ?

6 R. Oui, c'est exact.

7 Q. Pour ce qui vous concerne, là où vous avez quelques griefs à formuler,

8 c'est concernant les objectifs 3, 5 et 6; est-ce que c'est exact ?

9 R. Non, 3, 4 et 6.

10 Q. Effectivement, je suis vraiment désolé. C'est un lapsus de ma part.

11 Effectivement, je voulais dire 3, 4 et 6.

12 R. Oui. C'est cela qui est contesté.

13 Q. Très bien, Monsieur Krajisnik. Parlant de ces trois objectifs,

14 examinons d'abord le PV de l'assemblée et voyons ce que M. Karadzic dit

15 concernant le troisième objectif stratégique. Page 13 du document en langue

16 anglaise, page 7 en B/C/S. "Le troisième but stratégique est d'établir un

17 corridor dans la vallée de la Drina, c'est-à-dire, l'élimination de la

18 Drina en tant que frontière entre deux mondes. Nous sommes des deux côtés

19 de la Drina et nos intérêts stratégiques, l'espace où nous vivons se trouve

20 des deux côtés. Nous voyons maintenant la possibilité pour certaines

21 municipalités musulmanes d'être établies le long de la Drina en tant

22 qu'enclaves afin de pouvoir en arriver à leurs objectifs et de respecter

23 leurs droits mais que la ceinture qui se trouve le long de la Drina doit

24 appartenir à la partie serbe de Bosnie-Herzégovine. Nous devons l'utiliser

25 de façon positive et cela nous aide en violant les intérêts de l'ennemi qui

26 souhaiterait établir un corridor qui pourrait les lier à la partie

27 musulmane internationale et rendrait cette zone instable de façon

28 permanente."

Page 24144

1 Monsieur Krajisnik, lorsque cette séance de l'assemblée était tenue, est-ce

2 que vous pourriez nous dire si vous étiez satisfait de la description

3 qu'avait faite M. Karadzic concernant ce troisième objectif stratégique ?

4 R. Non, pas du tout. Je crois qu'il ne l'était pas, lui, non plus. Plus

5 particulièrement, lorsqu'on se concentre sur la deuxième partie de

6 l'explication. Il voulait dire il y aura des enclaves. Il ajoutait qu'ils

7 devraient appartenir à la Republika Srpska mais on ne peut pas avoir nos

8 enclaves à nous, s'il s'agira d'une autre communauté nationale mais il ne

9 voulait pas rencontrer des objections de la part des députés qui venaient

10 de cette partie-là, des députés qui étaient originaires de cet endroit-là

11 de la Republika Srpska.

12 Q. Monsieur Krajisnik, je vais vous demander d'expliquer un peu

13 mieux cette réponse. Vous avez dit que la Republika Srpska doit être

14 ajoutée. Cela ne peut pas être notre enclave si d'autres communautés

15 ethniques y habiteraient. Lorsque vous avez dit cela, est-ce que vous

16 voulez dire que ce que le Dr Karadzic a dit ici, que cela n'exprime pas de

17 façon très précise -- donc, la façon dont c'est consigné dans ce PV, est-ce

18 que pour vous, cela représente des propos qui ne reflétaient pas vraiment

19 les propos du Dr Karadzic ?

20 R. Le Dr Karadzic a dit que la réalisation de cet objectif, c'est-à-dire,

21 de faire en sorte que nous ayons notre corridor dans la vallée de la Drina

22 - dans la vallée, je répète vallée - non pas sur la Drina comme c'est écrit

23 ici. S'agissant de ce corridor - on peut voir que nous on a fait une

24 proposition d'une carte que nous avons remise à M. Cutileiro - on parlait

25 d'enclave, d'enclave musulmane. Nous voyons déjà, s'agissant de savoir,

26 Srebrenica, Zepa, je ne sais trop. Il disait que la Drina ne pouvait être

27 complètement serbe, c'est-à-dire, toute cette ceinture de la Drina ne

28 pouvait pas être serbe. Il aurait dû mettre un point et terminer sa phrase

Page 24145

1 ici. Mais il a voulu élaborer. Pour éliminer des discussions subséquentes,

2 il a dit : Ces enclaves feraient partie de la Republika Srpska, même s'il

3 savait, que selon le plan de Cutileiro, c'était impossible, puisque cette

4 région appartenait à l'autre communauté nationale. Il aurait fallu résoudre

5 ce problème de façon différente; soit rester là, soit l'annexer à d'autres

6 parties, soit faire plusieurs parties, annexer plusieurs parties à leur

7 communauté nationale. Je crois que lui non plus n'était pas d'accord avec

8 ceci, mais c'est ce qu'il a dit. On ne parle pas d'un corridor; on parle

9 d'une frontière, on parle de la rivière Drina comme étant, comme

10 représentant une frontière, alors que le corridor se trouve ailleurs,

11 c'est-à-dire, on a proposé, on a planifié que le corridor se trouvait

12 ailleurs.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, pourriez-vous, je vous

14 prie, demander à M. Krajisnik de nous dire exactement ce que, selon lui,

15 l'objectif numéro 3 devrait être ? D'établir un corridor dans la vallée de

16 la Drina en éliminant la Drina comme étant une frontière séparant les états

17 serbes. Nous voyons que la partie nord de la rivière Drina sépare sur cette

18 carte la Bosnie-Herzégovine de la Serbie. Au sud, la partie sud appartient,

19 elle se trouve à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque nous parlons de la vallée de la

22 rivière Drina, est-ce que nous parlons de l'ensemble de toute la vallée de

23 la rivière Drina ou de la partie sud ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous demanderais de me donner une autre

25 carte, avec votre permission, si vous le pourriez. C'est la fameuse carte

26 sur laquelle on voit en bleu et en vert. Je vous dirai très clairement où

27 cela se trouve. Ou remettez-moi la carte Cutileiro, et je vous expliquerai

28 précisément où cela se trouve. Car sur cette carte-ci, on ne voit rien.

Page 24146

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour autant que les rivières soient au

2 bon endroit, je crois que, Monsieur Krajisnik, vous seriez en mesure de

3 nous expliquer ce que cela voudrait dire en réalité. Il y a peut-être une

4 autre copie de cette carte qui pourrait être utilisée. Nous savons

5 maintenant que le troisième objectif a quelque chose à voir avec la Drina -

6 c'est ce que nous avons compris jusqu'à maintenant - et que l'exercice est

7 le même que Neretva. C'est l'objectif 4, et Una fait partie aussi de

8 l'objectif 4.

9 Est-ce qu'il y a des exemplaires supplémentaires de cette carte ? Car cette

10 carte est déjà versée au dossier.

11 M. STEWART : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que M. Harmon nous tend une

13 copie supplémentaire. On pourrait peut-être reprendre celle-ci. Est-ce que

14 c'est la carte qui a été versée au dossier ? Est-ce que c'est l'original ?

15 Oui. Bien.

16 Monsieur Krajisnik, prenez, je vous prie, un stylo noir. Mais d'abord,

17 indiquez-nous avec le pointeur l'endroit, puis nous vous demanderons plus

18 tard d'apporter des annotations lorsque nous aurons compris précisément.

19 Pourriez-vous, je vous prie, essayer d'expliquer en prenant cette carte-ci,

20 de vous concentrer d'abord sur les municipalités que nous avons là, et

21 pourriez-vous, je vous prie, expliquer si vous pouvez nous dire là où se

22 trouvaient les Musulmans en majorité, les Serbes en majorité. Qu'est-ce qui,

23 selon vous, était une frontière qui représentait les états serbes et quels

24 sont ces états que vous aviez en tête ? Pourriez-vous, je vous prie, nous

25 guider.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Avec votre permission, je souhaiterais

27 expliquer l'objectif au complet. D'abord, ce corridor est censé être ici.

28 Entre eux, Semberija et la Romanija. C'est là. Ici, c'est là que le

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1 corridor était censé être. Voyez-vous qu'à partir d'ici en allant jusque-là,

2 c'est un état serbe. Il n'est pas nécessaire. C'est la Drina, partie serbe.

3 Ici, le long ici, cette partie-là, c'est la Bosnie qui fait frontière avec

4 la Serbie. Voilà la frontière avec la Bosnie. Il n'y a pas de Drina ici.

5 C'est tout à fait différent de dire que la Drina ne devrait pas être une

6 frontière entre deux mondes, comme on le voit ici. Donc, d'ici - voyez-vous

7 ici, ici jusque-là. Là, c'est la Drina qui représente une frontière entre

8 la Bosnie et la Serbie, alors qu'ici, cette partie supérieure, c'est la

9 Drina. Vous avez l'enclave serbe et la Serbie. Il n'a pas été question de

10 ceci. Ici, ce n'est pas la Drina qui établit une frontière avec la Serbie.

11 En fait, nous voulions annexer ces régions serbes. Voyez-vous ici ? Vous

12 verrez sur la carte de Cutileiro et sur la nôtre, nous voulions qu'il y ait

13 un corridor le long de la vallée de la Drina. C'est expliqué. Pour ce qui

14 est de la Neretva --

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous souhaiterions avoir l'autre carte,

17 je vous prie, également. C'est la carte colorée, carte en couleurs avec les

18 différents groupes ethniques indiqués afin de pouvoir superposer les deux

19 et voir où se trouvent les majorités.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai ici, si vous voulez.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, c'est la grande carte avec du vert,

22 de l'orange --

23 M. STEWART : [interprétation] P211.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est celle que j'avais en tête.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas celle-ci, non, non. C'est toute la

26 municipalité. Je souhaiterais vous demander de nous donner la petite carte,

27 celle où l'on voit en blanc des parties. J'ai la carte avec moi ici, si

28 vous le permettez, si vous me permettez de la montrer.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Montrez-nous la carte que vous avez en

2 tête. C'est celle-ci que vous aimeriez avoir.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous croyez que vous pourriez peut-

5 être mieux expliquer avec cette carte-là, c'est peut-être mieux, à ce

6 moment-là, de la prendre. C'est la pièce 219 [comme interprété].

7 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, avant de se livrer à cet exercice,

8 lorsque nous serons revenus sur la "map" que nous venons d'utiliser, je

9 voudrais revenir à la partie de cette session d'aujourd'hui pour identifier

10 de façon précise la partie qu'avait montrée M. Krajisnik. Lorsque nous

11 lirons le compte rendu d'audience, il faudra peut-être faire en sorte que

12 le tout soit un peu plus clair.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Nous nous efforcerons. D'abord,

14 nous allons prendre une pause jusqu'à 1 heure moins 10.

15 --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.

16 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, aimeriez-vous d'abord

18 parler du paragraphe 10 de M. Krajisnik maintenant ou est-ce que vous

19 souhaiteriez plus tard ?

20 M. STEWART : [interprétation] Plus tard serait mieux, Monsieur le

21 Président.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. A ce moment-là, revenons à la

23 rivière Drina. Bien. Cela dit, je crois que vous avez une autre carte sous

24 les yeux, n'est-ce pas ?

25 Monsieur Krajisnik, vous nous avez dit qu'il vous est plus facile de

26 nous expliquer ces points en vous servant de ces cartes.

27 Dites-nous je vous prie où se trouve exactement -- ou plutôt, ce qui me

28 préoccupe un peu, c'est que ces cartes ont l'air un peu élargies, ou plutôt

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1 étirées au nord sud. J'ai l'impression que les proportions ne sont pas les

2 bonnes. Je n'ai pas d'exemplaire.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faudrait peut-être la déplacer quelque peu,

4 si vous me le permettez.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 M. STEWART : [interprétation] Ma préoccupation est quelque peu différente

7 que celle de M. Krajisnik --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous, je

9 vous prie, déplacer cette carte ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Un peu vers le haut.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, oui,

12 placer et peut-être plus centrer -- les dimensions nord, sud, est et ouest

13 ne sont pas les bonnes. Il semblerait que c'est quelque peu différent des

14 autres cartes que nous avions. Je ne sais pas ce qui s'est passé avec cela.

15 M. STEWART : [interprétation] Oui, on dirait que le nord sud est un

16 peu étiré dans le sens de la verticale. Cet objectif stratégique a été

17 défini par rapport à une rivière. Il est impossible de voir la rivière sur

18 cette carte, et il me semblerait que cela ne serait pas tout à fait

19 parfait, donc je ne sais pas si M. Krajisnik pourrait peut-être nous

20 l'expliquer alors qu'il poursuit son explication.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en même temps, les Juges ont sous

22 les yeux également la pièce P6816, qui nous permet de voir les rivières.

23 M. STEWART : [interprétation] Oui, oui, certainement, mais si M. Krajisnik

24 pouvait quand même tenir ceci en tête alors qu'il nous explique.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik --

26 M. STEWART : [interprétation] M. Tieger veut dire quelque chose.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

28 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi. Monsieur le Président, je ne sais

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1 pas si cela peut vous aider; j'ai un exemplaire supplémentaire de P293.

2 C'est une copie un peu plus grande. Si la copie est agrandie, je ne sais

3 pas si vous aimeriez la voir.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons maintenant plusieurs cartes.

5 Vous avez P293 ?

6 Monsieur Krajisnik, il y a une carte agrandie qui n'est pas déformée, alors

7 s'il vous est plus facile d'apporter les annotations sur cette grande

8 carte, cela serait peut-être plus utile. Pourriez-vous, je vous prie, le

9 montrer à M. Krajisnik ? Il pourra nous dire si cela lui convient mieux.

10 Monsieur Krajisnik, est-ce que cela vous convient mieux ? Est-ce que c'est

11 plus facile pour vous d'annoter ?

12 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la même carte. Oui, c'est la même carte,

14 mais elle n'est pas étirée, Monsieur le Président, ici non plus. Elle n'est

15 pas étirée, ce n'est pas déformé dans le sens vertical. Cette carte est

16 bonne.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, non, elle quelque peu

18 disproportionnée sur notre écran. Si vous pouvez --

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui, sur l'écran. Oui, c'est vrai,

20 vous avez raison.

21 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que cette carte

22 P293, est-ce que c'est la copie réduite de l'original ? Est-ce que M.

23 Tieger vient de produire la carte agrandie de l'original ? Quel est

24 l'original, la grande carte ou la petite ? Voilà ma question.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Krajisnik va nous fournir des

26 explications en se servant de la carte qu'il a sous les yeux, et

27 poursuivons.

28 Monsieur Krajisnik, c'est à vous, nous vous écoutons.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà l'original. La grande carte, c'est

2 l'original, et les petites cartes, ce sont des cartes plus petites,

3 rapetissées. Les originaux sont entre les mains des messieurs de

4 l'Accusation.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, est-ce que vous

6 pouvez fonctionner avec la carte qui se trouve sur le rétroprojecteur ?

7 Poursuivez, je vous prie. Cessons cette discussion sur les cartes et

8 commençons notre audience. Mais avant d'apporter des annotations,

9 expliquez-nous ce que vous annotez, je vous prie. Le corridor était censé

10 d'où jusqu'où ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Quoi -- celui de Drina, de la Drina, le long

12 de la Drina ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je parle du corridor de la Drina.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà. Environ comme cela. Voyez-vous, suivez

15 mon stylo, c'est environ -- il devait longer ces lignes bleues pour se

16 terminer là où il y a les territoires musulmans.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dites-nous d'abord où se trouvait le

18 corridor. Vous avez commencé à nous élaborer la réponse alors que je ne

19 vous ai posé qu'une réponse très claire.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors voilà, c'est ici, nos territoires à

21 nous, le long de nos territoires, et c'est là où il y a des villages que

22 nous aurions tenté d'essayer de lier avec la Semberija.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Prenez, je vous prie, un marqueur noir

24 et tracez une ligne qui se trouverait au centre du corridor que vous nous

25 avez expliqué. Plus tard, je vais vous demander de faire une ligne en

26 pointillé pour délimiter les frontières du corridor ou la bordure du

27 corridor. Mais pour l'instant, tracez avec une ligne droite, enfin, une

28 ligne pleine, l'endroit.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avions pas

2 défini l'endroit où le corridor était censé aller. Mais nous avions dit

3 comment il serait, comment il était censé aller, c'est-à-dire le long de

4 nos territoires et suivre la vallée de la Drina. Mais pour dire où, c'était

5 une question d'échange de territoires et d'accords. Nous n'avions pas voulu

6 que le corridor se trouve sur les territoires étrangers. C'est pour cela

7 que je vous dis que cette carte est meilleure. Je vais vous expliquer pour

8 la Drina après. Mais je voulais d'abord vous dire ceci. Voilà. Si le

9 territoire était ici, nous ne serions pas allés ici, ici, ici, mais nous

10 aurions suivi la ligne bleue, c'est-à-dire que nous voulions échanger là

11 par exemple où il faudrait passer, nous aurions fait le by-pass.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de dessiner quoi que ce soit,

14 pourriez-vous nous expliquer, nous dire où est-ce qu'il y avait des

15 obstacles potentiels où vous auriez retrouvé le territoire d'autrui ? Où

16 était la problématique ? Où étaient les points problématiques ? Pourriez-

17 vous nous les montrer, je vous prie ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Partout là où il y avait la couleur verte

19 musulmane, là, ici. Par exemple, nous pensions : est-ce que nous pouvions

20 passer par là, mais ce serait un obstacle. Il aurait fallu l'échanger

21 contre les autres territoires qu'on aurait, par exemple, donnés aux

22 Musulmans. Mais je vous dis cela comme cela, par cœur, si vous le voulez.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, bien sûr. Nous savons tous

24 très bien que nous ne parlons pas de corridor précisément défini, mais un

25 corridor qui était censé être situé approximativement le long des lignes

26 que vous nous avez expliquées. Très bien. Maintenant -- y a-t-il un autre

27 exemplaire de cette carte ? Je vais procéder d'une façon tout à fait autre.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois que l'Accusation est la mieux

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1 préparée, donc je la remercie de tout mon cœur.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà ce que je vais faire. J'essaie de

3 comprendre ce que vous nous dites. Je vais essayer moi-même de le tracer

4 sur cette carte que j'aie, cet exemplaire de la carte, et vous verrez plus

5 tard si cela correspond. Vous ajusterez les endroits une fois ajustés, et à

6 ce moment-là, vous pourrez vous-même tracer une autre ligne en guise

7 d'ajustement. Troisième question : lorsque vous avez donné les

8 délimitations du corridor, lorsque vous avez dit où il était censé être

9 approximativement, alors à ce moment-là, vous nous avez dit que c'est un

10 peu au niveau de Sarajevo, un peu au sud, ce que vous avez appelé Romanija.

11 Au début, vous êtes allé encore plus au sud. Est-ce que le corridor était

12 censé descendre encore plus au sud ou est-ce que le corridor était censé

13 arrêter à Sarajevo ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous disons de Romanija jusqu'à Semberija.

15 C'est là, la Drina, donc de Romanija en allant jusqu'en haut. C'était cela,

16 notre objectif stratégique.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois. Je vais essayer d'indiquer

18 approximativement l'endroit que vous nous avez expliqué, là où il fallait -

19 - là où vous vouliez faire un corridor. Pourriez-vous de nouveau nous dire

20 là où il y avait des obstacles potentiels ? Je crois que vous nous avez

21 indiqué un endroit qui se trouve au nord-ouest de Zvornik.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Soit là où il y avait les lignes bleues,

23 ou on aurait passé peut-être par ici, dépendamment de l'accord. Mais voilà

24 un obstacle, voyez-vous, sur cette carte, il est clairement visible qu'il y

25 a un obstacle en vert.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Je vais tracer un cercle

27 autour de la région approximative du premier obstacle. Y avait-il d'autres

28 obstacles rencontrés sur votre chemin vers Romanija ? Je vois que plus au

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1 sud, il y a également une agglomération, une partie en vert.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ici, la Romanija, Monsieur le Président.

3 Ici en bas, cela ne faisait pas partie de notre objectif stratégique, mais

4 voilà la Romanija, il fallait aller vers le haut, vers le nord.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois qu'il y a d'autre -- une couleur

6 verte qui n'est pas vraiment bleue, enfin, est-ce que c'était un obstacle

7 potentiel ? Une agglomération -- je regarde la partie qui se trouve au sud-

8 est d'Olovo.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, ici, il y a une sortie sur la

10 Drina, voyez-vous, ici. Là, ici, il y a des territoires serbes, donc tout

11 ceci aurait fait partie d'un accord. Notre but était de lier les deux,

12 voyez vous, ici et ici, les deux bouts.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Donc, ce qui était vraiment

14 important, c'est d'établir un lien. J'ai compris.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, là ensuite, nous avons des régions

17 qui se trouvent près de la Drina, à l'est de Sarajevo, où il y a ces

18 agglomérations vertes, donc ces zones-là, oui, effectivement.

19 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, qu'est-ce qui était censé

21 arriver avec Srebrenica, Visegrad et Gorazde en bleu ? Pourriez-vous nous

22 montrer Srebrenica ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Srebrenica, c'est ici. Voilà, c'est cette

24 partie-là de Srebrenica et Bratunac. Voici la Zepa et voici Srebrenica.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. D'abord, parlant de Srebrenica

26 et de ses environs. Quelle était l'intention avec cette région-là ? Quelle

27 était votre intention avec la partie qui est partiellement bleue et qui est

28 colorée en bleu ciel ou vert ?

Page 24155

1 LE TÉMOIN : [interprétation] On avait formé une petite municipalité appelée

2 Skelani, qui faisait partie de la municipalité de Srebrenica. Il est tout à

3 fait clair que la partie ici, les Serbes auraient été inférieurs aux

4 Musulmans, donc la partie musulmane aurait été occupée plus par les

5 Musulmans, il y a beaucoup plus de vert que de bleu, ici. Donc Skelani,

6 voilà Skelani. Skelani, ce serait peut-être la partie serbe Skelani,

7 Skelani était une municipalité frontalière.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, de dire que la partie la plus à

9 l'est de la municipalité de Srebrenica à ce moment-là aurait été Skelani,

10 je vais tracer un cercle autour de cette municipalité sur ma carte à moi et

11 je vais l'indiquer à l'aide de la lettre A et du chiffre 2, donc A2.

12 Ensuite, nous descendons vers Visegrad. Il semblerait que Visegrad était

13 également une ville plutôt musulmane. Maintenant, nous nous trouvons

14 maintenant au côté est, enfin, à l'est de la rivière Neretva.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'est de la Drina. Oui, oui. A l'est de la

16 Drina, non pas Neretva.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. De la Drina effectivement, à

18 l'est de Drina. Si nous regardons la couleur, c'est une région très peuplée

19 par les Musulmans. Le troisième objectif stratégique visait quoi avec cette

20 région ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Selon le plan de Cutileiro, c'est ainsi que

22 l'on voyait la partie Rudo, Cajnice, et cette partie-là aurait été annexée

23 aux Serbes, alors que cette partie-ci, tout ceci aurait été remis aux

24 Musulmans. Mais Visegrad, en soi --

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. A moins que vous ne me disiez que

26 le plan Cutileiro n'a pas reflété les objectifs stratégiques, j'aimerais

27 que vous nous disiez ce que l'on faisait avec cette partie-là, avec le but

28 stratégique. A moins que vous me disiez que cela n'avait pas encore été

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1 élaboré en détail à l'époque, mais j'aimerais savoir, conformément à

2 l'objectif stratégique numéro 3, qu'est-ce qui était censé arriver à

3 Visegrad, Rudo, ces deux municipalités ? Donc, qu'arrivait-il à ces deux

4 municipalités ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, la base des objectifs

6 stratégiques, c'est la carte de Cutileiro. Si vous regardez, vous verrez

7 Semberija, Romanija, l'endroit où ils étaient censés être reliés. Vous

8 verrez où se trouvent les zones musulmanes et les zones serbes. Nous avions

9 dit quels étaient nos objectifs, et vous verrez sur le plan de Cutileiro

10 quels étaient les objectifs. Il s'agissait des négociations, et nous avons

11 sur la carte deux interruptions.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais donc le problème avec la carte

13 Cutileiro, c'est que -- bon d'abord, il y a plusieurs cartes Cutileiro,

14 mais je demanderais à M. le Greffier de nous donner la carte D4, D5 et D6.

15 Dites-nous, je vous prie, quelle serait la meilleure carte à consulter pour

16 mieux comprendre les objectifs stratégiques ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a qu'une seule carte Cutileiro. Les

18 autres sont nos cartes. Il y en a quatre, en fait. Il y a la carte

19 musulmane, la carte serbe, la carte croate et la carte Cutileiro. Notre

20 carte montre plus de territoires serbes, et la carte Cutileiro montre des

21 territoires serbes de moindre taille.

22 M. JOSSE : [interprétation] Cela pourrait peut-être être la D7, Monsieur le

23 Président.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien la D7, et non pas la D7B ?

25 M. JOSSE : [interprétation] Je regarde la liste et je vois qu'il y a la D7A

26 et la D7B.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais c'est encore toujours le même

28 problème. Je ne peux pas copier quelque chose sur deux cartes en même

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1 temps. Monsieur Krajisnik, quelle est la meilleure carte ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Celle que vous tenez dans la main droite,

3 c'est la carte musulmane, et l'autre est la carte Cutileiro.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, je vais travailler avec la 7B qui

5 semble me dire en cyrillique : carte Cutileiro. C'est une inscription qui

6 se trouve en bas de la carte.

7 Donc maintenant, sur cette carte Cutileiro, je vois que l'emplacement de

8 Srebrenica au sujet duquel vous avez dit que vous vouliez revendiquer comme

9 un territoire serbe, c'est-à-dire l'est de ce territoire sur le territoire

10 serbe, n'est pas marqué sur la carte Cutileiro comme un territoire serbe.

11 Donc, je vais essayer du mieux que je peux de le montrer.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous m'avez des

13 questions sur le corridor, lorsque je vous ai montré le bleu, les couleurs

14 bleues, je vous ai dit qu'il s'agissait de la municipalité de Skelani qui

15 venait d'être créée. On n'a pas pris des territoires dans le corridor.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que ce corridor qui est là,

17 donc cette portion, ce serait Visegrad, Cajnice, Rudo? J'ai plus ou moins

18 recopié cela de la carte Cutileiro, cela continue, donc j'ai uniquement

19 annoté certaines portions très spécifiques et je n'ai pas pris les détails.

20 Maintenant, le corridor a été clairement défini, en tout cas, pour nous, et

21 nous savons donc à peu près ce qui doit advenir des territoires à l'est de

22 la Drina. Maintenant, sur la base de la carte qui est sous nos yeux en ce

23 moment, pourriez-vous nous expliquer un petit peu où se situait le

24 problème ? Bon, il faut que je revienne à l'objectif 3. La Drina ne doit

25 plus être la frontière séparant des Etats serbes. Pourriez-vous nous

26 expliquer clairement où il convenait d'apporter des modifications ou peut-

27 être n'y avait-il pas besoin d'apporter des modifications, mais pour

28 résoudre ce problème de la Drina qui ne devait plus être une frontière

Page 24158

1 séparant les Etats serbes, pourriez-vous vous exécuter sur la carte, s'il

2 vous plaît, en utilisant la carte qui est située sur le rétroprojecteur ?

3 Je me concentre donc maintenant sur la partie nord de la Drina, quand il y

4 a un virage, il y a un méandre vers l'est avant qu'il y ait un nouveau

5 méandre vers l'ouest. Enfin, je vais dire les choses autrement parce qu'en

6 fait, là je crois que je suis dans le sens inverse du flux de la rivière,

7 qui va du sud au nord. Enfin, bon. Ici, je parle de la partie nord, donc

8 Bijeljina, Zvornik, Bratunac, et là, la Drina fait frontière entre la

9 Serbie et la Bosnie-Herzégovine.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y avait-il une pomme de discorde, là ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, je vais vous expliquer

12 tout de suite. Dans le plan Cutileiro, il y a des passages où il est

13 question des unités constitutives, où il est prévu d'avoir le droit à des

14 liens spéciaux avec la Serbie et le Monténégro, à savoir, les républiques

15 voisines. Il ne fallait pas que ce soit une frontière avec des passeports

16 pour passer, et cetera. J'ai remis le discours de décembre 1991 fait par

17 Izetbegovic, et il a dit qu'il ne faudrait pas que la Drina soit une

18 frontière pour les Serbes et les Croates, quelle que soit la façon dont on

19 ferait la Bosnie. Donc, la signification, c'est de ne pas faire de la Drina

20 une frontière entre différents mondes. Ensuite, il a été -- cela a été

21 changé pour dire "Etats". Il ne s'agit pas d'une carte, il s'agit d'un

22 droit pour l'établissement de liens. Mis à part du lien étatique, le reste

23 pouvait être fait : culture, éducation, et cetera. Cela ne nuisait pas à

24 l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine. Prenez le plan Cutileiro, vous allez

25 retrouver ces propos, et c'est exactement la signification de cette phrase.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans le plan Cutileiro, je vois dans la

27 partie nord de la frontière entre la Serbie et la Bosnie-Herzégovine, dans

28 son ensemble, à peu près jusqu'à Zvornik, le territoire qui se trouve à

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1 l'ouest de la Drina allait devenir Serbe. De l'autre côté de la rivière, il

2 y a la Serbie. Dans ce cas, la Drina, en fait, traverserait deux

3 territoires qui seraient d'un côté les Serbes de Bosnie, et de l'autre

4 côté, la Serbie.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, il ne

6 s'agit pas de cela. Il y aurait la frontière là, entre la Serbie, la

7 Bosnie-Herzégovine et la Yougoslavie, mais ne pas voir une vraie frontière,

8 ne pas avoir besoin de passeport pour aller de l'autre côté, c'était cela,

9 les relations spéciales qui, dans la partie textuelle de l'accord de

10 Cutileiro, étaient prévues. On pouvait avoir une double nationalité, avoir

11 le droit à la double nationalité. On n pouvait établir des liens de toutes

12 sortes, sauf un lien d'Etat à Etat. Il faudrait donc qu'il y ait une

13 frontière, qu'il y ait passage frontière d'un côté et de l'autre. Mais il y

14 aurait des Serbes de part et d'autre. Mais sans relier les territoires, on

15 aurait pu traverser la frontière à Srebrenica, à Rudo, peu importe. Mais la

16 Drina en tant que telle --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je comprends. La Drina restait là,

18 et la Drina devenait la frontière administrative entre deux Etats, mais

19 elle serait assez transparente. Est-ce que cela signifie que les contrôles

20 aux frontières seraient déplacés vers l'ouest, à la zone de démarcation

21 entre ce qui aurait été la Bosnie-Herzégovine musulmane, ou y aurait-il des

22 contrôleurs aux frontières ou plus du tout de contrôle?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] La frontière administrative de la Bosnie-

24 Herzégovine qui existait pendant la Yougoslavie devenait une frontière

25 d'Etat, et comme à chaque frontière, il s'agissait d'une frontière que l'on

26 traverserait aisément, comme dans l'Union européenne on n'a pas de visa à

27 prendre ou à payer un visa, et cetera. C'était là, la signification,

28 c'était de ne pas la faire remarquer, cette frontière, parce qu'on aurait

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1 besoin normalement de passeport. C'est ce qui avait été prévu dans tous les

2 accords. La partie musulmane avait accepté, les Croates aussi, les Croates

3 alors, cela les arrangeait, les Musulmans aussi, ils avaient accepté, donc

4 vous trouverez le principe d'arrêter.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Cette partie de la Bosnie-

6 Herzégovine orientale qui, si on se base sur la carte Cutileiro,

7 deviendrait musulmane, et là je parle de la zone qui se trouve plus ou

8 moins entre Zvornik et Bratunac, où les territoires musulmans seraient

9 séparés de la Yougoslavie et de la Serbie en tant que telle par la Drina.

10 Là non plus, il n'y aurait pas de contrôle aux frontières, il y aurait donc

11 une frontière qui existerait, qui serait administrative, mais qui serait

12 parfaitement transparente?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Chaque groupe ethnique ou chaque unité

14 ethnique avait le droit d'avoir des liens spéciaux avec autrui, c'était

15 valable pour tout le monde. Il y avait donc ce lien entre la Bosnie et la

16 Yougoslavie. Notre objectif, c'était de ne pas faire au niveau des têtes

17 des Serbes une frontière psychologique entre les Serbes d'un côté et de

18 l'autre de la Drina. Notamment, ici, il était question donc de conserver

19 cette Bosnie-là, et le problème ne se posait pas du tout.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ne répondez pas directement à ma

21 question. Revoilà ma question. La partie de la frontière orientale de

22 l'Etat de Bosnie-Herzégovine, donc là je parle de la zone entre Zvornik et

23 qui va ensuite sur Bratunac, Srebrenica, et cetera, donc toute cette

24 portion, au titre de la carte Cutileiro, serait musulmane. Est-ce que ce

25 serait au Musulmans ensuite de savoir s'ils voulaient avoir des contrôles

26 aux frontières pour vérifier les déplacements des populations ? Est-ce que

27 c'était à eux de prendre la décision, de se mettre d'accord avec la

28 Yougoslavie, par exemple, ou était-il prévu que là aussi, il y aurait une

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1 frontière transparente ? Est-ce que j'ai bien compris que plus au nord et

2 plus au sud -- enfin non, pour ce qui est du sud, ce n'est plus la Drina

3 qui fait frontière. En tout cas, plus au nord, il fallait qu'il n'y ait pas

4 de frontière visible, bien que tout le monde saurait qu'à l'ouest de la

5 rivière, le territoire était serbe ou que ce serait le territoire d'une

6 entité serbe comprise en Bosnie-Herzégovine, et à l'est, ce serait la

7 Yougoslavie. Mais dans cette portion dont on parlait, là où le territoire

8 serait musulman, est-ce que là aussi, la frontière serait invisible ou est-

9 ce que c'était tout simplement aux Musulmans de décider ce qu'ils voulaient

10 en faire ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ceci était à aménager,

12 mais l'unité constitutive musulmane était censée avoir le droit d'établir

13 des accords de passage frontière avec la Serbie. Alors, comment cela serait

14 arrangé, ce serait un accord entre leurs deux unités constitutives et la

15 Serbie. Là où le territoire était à nous, nous aménagerions la question.

16 Aujourd'hui, les services frontaliers sont unifiés. Mais à l'époque, on

17 avait prévu que chaque unité constitutive se charge du contrôle de ses

18 passages frontières.

19 Je crois bien que cela serait fait. Pourquoi ? Parce que d'autant plus

20 qu'en face, il y avait la région du Sandzak, où il convenait à la partie

21 musulmane d'avoir des frontières à régime adouci. Donc, il ne s'agirait pas

22 d'une frontière difficile à passer, mais une frontière aisément traversable

23 où l'on saurait toutefois ce qui appartenait aux uns ou aux autres. Nous,

24 nous parlions au nom du côté serbe, et non pas au nom du côté musulman.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Tout est clair maintenant.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui m'inquiète, Monsieur le Président,

27 c'est votre carte, pour voir si vous avez bien tracé les choses.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Pour ce qui est de la partie

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1 occidentale de Srebrenica, c'est la municipalité -- je ne me souviens plus

2 du nom que vous y aviez donné. Il s'agissait de --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Skelani. Skelani.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Skelani, oui.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela a toujours été une municipalité,

6 puis cela a été supprimé.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais dans le plan Cutileiro, cette

9 municipalité n'existait pas.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai donc noté qu'il s'agissait de

11 Skelani, puisque vous en avez parlé lors de votre déposition.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, cette carte ne reprend pas toute

14 l'histoire, bien sûr, mais elle ne sert que d'illustration à ce que nous

15 avons compris de votre témoignage. Il faudrait maintenant la mettre sur le

16 rétroprojecteur, uniquement la partie orientale de la carte qui est donc

17 pertinente en l'espèce. Alors voici ce que je vais faire. Je vais essayer

18 de vous dire quelles sont les zones qui devraient être reliées par le

19 corridor, Semberija au nord et la Romanija au sud. Je ne donne pas vraiment

20 de détails à savoir où exactement trouver les places. Alors, il y a un

21 obstacle potentiel qui restait à être résolu d'une façon ou d'une autre

22 pour arriver à passer, donc pour faire un véritable corridor. Cela, c'était

23 au titre du 1. Au titre du 2, maintenant, j'ai noté la municipalité de

24 Skelani. Alors, peut-être que les Serbes voulaient qu'elle existe ou aurait

25 voulu qu'elle devienne serbe, mais en tout cas, au titre du plan Cutileiro,

26 elle ne serait pas devenue serbe. Au point 3, j'ai continué un peu vers le

27 sud, et je n'arrive à rien. On sait que dans le plan Cutileiro, cela se

28 serait poursuivi, et cela aurait été serbe. Je ne parle pas de détails,

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1 évidemment, mais ce qui est important, ce qui est essentiel, c'est que pour

2 que la Drina ne serve pas de frontière entre Etats serbes, ce serait une

3 frontière certes d'Etats, mais une frontière aisément franchissable,

4 permettant liberté de mouvement. Il n'y aura pas de contrôle, les échanges

5 culturels pourraient se faire, et cetera, et cetera, donc une frontière

6 molle, presque. Donc, dans la zone entre Zvornik et Bratunac, il y aura une

7 frontière où d'un côté ou trouverait un territoire serbe, et cela aurait

8 été aux Musulmans de décider et de définir le type de frontière qu'ils

9 voulaient ensuite. C'est bien -- j'ai bien compris ? Alors, je ne parle pas

10 des détails, là. C'est juste pour vous donner des grandes idées.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] En substance, oui. Mais le corridor, lui,

12 passerait par ici. Cette partie-ci ne serait pas prise en compte, puisque

13 ce serait une grande enclave musulmane. Cela passerait par ici. Voilà. Ce

14 serait le cheminement. C'était la seule petite objection, mais cela

15 constituait pour l'essentiel un rattachement de nos territoires.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous --

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, ici, cela

18 se situerait quelque peu plus bas. Cette ligne irait un peu plus bas.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai essayé de reprendre ce qui

20 avait été noté sur le plan Cutileiro et je n'ai pas été extrêmement fidèle.

21 Enfin, j'ai fait de mon mieux. Bien. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous

22 rendre la carte ? Bien. Donc, on va la remettre sur le rétroprojecteur,

23 puisque j'ai un tout petit peu modifié les choses. Entre ces lignes en

24 pointillé, donc il y aurait le corridor qui arriverait à faire son chemin

25 de la Semberija d'une façon ou d'une autre. Bon, je l'ai un peu élargi vers

26 le sud, et le corridor arriverait ainsi à relier le nord au sud et à relier

27 la Semberija à la Romanija.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, la Semberija serait reliée suivant

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1 cette ligne. Bon, ce serait fait de façon plus précise, certes. On ne

2 serait pas allé plus vers l'occident, parce que ce serait allé trop loin.

3 Cela ne serait pas bien.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Nous avons mis cela uniquement

5 pour mieux comprendre, et je comprends bien qu'il faudrait -- là où j'ai

6 mis la ligne pointillée vers l'est. Il faudrait donc que ma ligne

7 pointillée soit un plus vers l'ouest -- à l'est, en fait, surtout en ce qui

8 concerne le sud de cette portion de territoire.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] -- passerait par ici, Monsieur le Juge. Voilà,

10 par ici. Là où il n'y a que des territoires serbes, pour qu'il y ait le

11 moins possible d'échange de territoires.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Bon, ce n'est pas une carte

13 d'expert, bien sûr, mais cela sous sert à mieux comprendre ce qui était

14 exactement déterminé au titre de l'objectif stratégique numéro 3.

15 Alors, je ne sais pas si on a encore des soucis avec le reste de l'objectif

16 numéro 3. Je pense que c'est beaucoup moins fort.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de voir la chose suivante.

18 Skelani, c'est moi qui l'ai rajouté. Cela n'a pas fait partie des objectifs

19 stratégiques. Je l'ai ajouté en disant que c'était une municipalité de

20 nouvellement créée. Il n'y avait que le reste qui constituait un objectif

21 stratégique et de faire en sorte que la Drina devienne une frontière molle.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je pense que c'était clair

23 maintenant à partir de votre déposition. Je n'ai rien à ajouter, à part sur

24 cette carte, montré où est Skelani. C'était clair.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, il faudra peut-être

27 marquer cette pièce comme étant une pièce venant de la Chambre.

28 M. STEWART : [interprétation] Oui, TC 1 ou TC --

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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera C 2, Monsieur le Président.

2 M. STEWART : [interprétation] C, est-ce --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, parce que si cela vient à être

4 marqué pour être versé au dossier, il faudrait rectifier. Il faudrait

5 reprendre un peu la ligne.

6 M. STEWART : [interprétation] M. Krajisnik a indiqué des corrections sans

7 les avoir annotées sur la carte. Peut-être que

8 M. Krajisnik pourrait faire un peu de travail ce soir de la carte

9 exactement.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. J'ai bien compris. De toute

11 manière, on ne parle pas des détails ici. C'est juste pour donner un ordre

12 d'idée. On va refaire une autre carte beaucoup plus définie, beaucoup plus

13 précise en précisant exactement la carte Cutileiro.

14 M. STEWART : [interprétation] Oui, il faudra que M. Krajisnik, quand même,

15 soit d'accord avec les annotations sur la carte. Il est tout à fait ravi

16 que vous lui donniez un coup de main, si je puis dire. Il faut quand même

17 aussi pouvoir savoir si ce qui a été fait lui est gré.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si M. Krajisnik n'est pas content, il

19 n'aura qu'à nous le dire, et nous verrons.

20 M. STEWART : [interprétation] Oui, mais dans ce cas-là, peut-être que M.

21 Krajisnik pourrait lui aussi produire une version pendant cette nuit.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai pris --

23 M. STEWART : [interprétation] Bien --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne reste plus de temps --

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte marquée par la Chambre sera le C

26 2.

27 M. STEWART : [interprétation] Pour ce qui est du P293, je voudrais parler à

28 propos de la taille. Si la carte originale est la grande carte, je pense

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1 qu'il faudrait la verser, bien sûr. Pourtant, elle est difficile à

2 utiliser, parce qu'elle est vraiment de très grande taille.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la petite carte qui est versée au

4 dossier. On l'a utilisée. Tout va bien. Si vous considérez qu'il faut

5 absolument avoir la carte agrandie aussi et qu'elle soit versée au dossier,

6 nous sommes d'accord. Il faudrait nous donner des raisons quand même pour

7 justifier tout cela.

8 M. STEWART : [interprétation] Oui, ce n'est pas grand-chose, de toute

9 façon. Il est bien d'avoir la carte la plus grande possible, mais elle

10 n'est pas facile à utiliser quand même. C'est l'Accusation qui a cette

11 carte, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme vous l'avez dit, Monsieur Stewart

13 - et vous aviez d'ailleurs tout à fait raison.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous aviez tout à fait raison. Je

16 suis l'un des Juges. C'est moi le Juge. Enfin, je suis un des trois Juges.

17 Monsieur Krajisnik, si vous pouviez uniquement annoter sur cette carte ce

18 que j'ai annoté, mais en faisant les pointillés plus exactement que moi,

19 avec un stylo rouge. Si vous en n'avez pas, vous pouvez en emprunter un. Si

20 vous pouviez juste affiner ce que j'ai fait, mais en vous limitant à ce que

21 j'ai inscrit sur la carte uniquement.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me permettez que je dise quelque

23 chose, j'aimerais bien.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai parfaitement bien compris. Cette

26 carte, c'est pour permettre une meilleure compréhension vous concernant

27 pour ce qui est du corridor qui suit les territoires serbes. Cela n'a pas

28 été défini. Cela devait faire l'objet de négociations. Vous, vous avez

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1 tracé ceci pour mieux comprendre mes propos. Nous avons suivi les

2 territoires serbes en vue de rattacher la Semberija et la Romanija. Raison

3 pour laquelle cette carte ne devrait pas faire l'objet de versement au

4 dossier, parce que si vous avez compris que cela faisait partie d'un

5 objectif stratégique, si je le dessine, ce ne sera tout de même pas la

6 chose véritable puisque cette carte n'a pas été réalisée. Il faut que vous

7 compreniez que l'objectif était de rattacher la Semberija et la Romanija

8 avec nos territoires à nous, et faire en sorte que là où il y a un

9 problème, ce problème était censé être surmonté par la voie de la

10 concertation.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, le problème, c'est

12 au cas où il y aurait un appel éventuellement. Il faut bien que la Chambre

13 d'appel, le cas échéant, sache exactement ce qu'on a fait. Voici ce que

14 vous allez faire : vous allez conserver la carte pour l'instant. On va vous

15 donner une carte vierge, enfin la même carte mais sans les annotations.

16 Vous pourrez réfléchir ce soir, voir si vous ne pouvez affiner un petit peu

17 les pointillés. Si vous le faites, notez-le clairement sur la carte

18 existante, et nous verrons demain si vous voulez que nous versions cette

19 carte au dossier - enfin, si vous préférez plutôt recopier les annotations

20 avec un marqueur rouge de façon plus affinée sur la carte vierge, faites-le

21 mais faites attention. Ne notez rien d'autre que ce que j'ai fait. Tout est

22 clair ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous le faire tout de suite si vous le

24 voulez.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non. Malheureusement, nous devons

26 en terminer avec cette séance, puisqu'il y a une autre Chambre qui souhaite

27 siéger à notre place.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai cru comprendre qu'on allait me laisser le

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1 feutre pour que je le fasse.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez emprunter notre marqueur. Il

3 est rouge. Monsieur Krajisnik, vous savez, profitez-en, parce que cette une

4 habitude - la Défense a plutôt un stylo noir. C'est très rare d'utiliser un

5 stylo rouge. Profitez-en bien. Ce sera en rouge, puisque c'est vous qui

6 aurez fait les annotations en tant que témoin cette fois-ci.

7 M. le Greffier a reçu un exemplaire qu'il va vous donner avec -enfin,

8 vous allez recevoir par le biais du Greffier ce qui vous est dû.

9 Maintenant, nous pouvons lever la séance jusqu'à mercredi matin, c'est-à-

10 dire, demain 9 heures.

11 L'audience est levée 13 heures 49 et reprendra le mercredi

12 17 mai 2006, à 9 heures 00.

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