Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 3 novembre 2008

  2   [Audience d'appel]

  3   [Audience publique]

  4   [L'appelant est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 8 heures 33.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Madame la

  7   Greffière d'audience, puis-je vous demander de citer l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

  9   Bonjour à toutes et à tous. Affaire IT-00-39-A, le Procureur contre Momcilo

 10   Krajisnik.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Puis-je demander à M.

 12   Krajisnik s'il peut m'entendre, s'il peut suivre les débats par le

 13   truchement de l'interprétation.

 14   L´APPELANT : [interprétation] Monsieur le Juge, je peux suivre dans ma

 15   langue et j'entends bien. Je vous remercie.

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

 17   Je vais demander à présent aux parties de se présenter. Pour M. Krajisnik,

 18   son conseil, sur le point de l'entreprise criminelle commune.

 19   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Nathan Dershowitz, conseil sur la

 20   question de l'entreprise criminelle commune.

 21   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] L'Accusation peut-elle se présenter.

 22   M. KREMER : [interprétation] Peter Kremer, Monsieur le Président, je suis

 23   ici devant le bureau du Procureur. M. Matteo Costi est ici avec moi et Mme

 24   Katharina Margetts, commis à l'affaire, et Alma Imamovic-Ivanov qui nous

 25   aide également.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] L'Amicus Curiae.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi. Colin Nicholls, je suis ici en

 28   ma qualité d'Amicus Curiae.


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  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Nous nous sommes réunis ici afin d'entendre des éléments de preuve dans la

  3   procédure d'appel dans l'affaire du Procureur contre Momcilo Krajisnik.

  4   Nous avons prévu d'entendre aujourd'hui MM. George Mano et Stefan

  5   Karganovic qui ont été cités par la Chambre d'appel le 8 octobre 2008 en

  6   application des articles 98 et 107 du Règlement de procédure et de preuve.

  7   Permettez-moi de résumer brièvement les éléments de preuve qui ont été

  8   admis dans le cadre de cette procédure d'appel, et par la suite nous

  9   préciserons dans quel ordre nous entendrons les témoins aujourd'hui.

 10   Premièrement, dans sa décision du 20 août 2008, la Chambre d'appel a reçu

 11   en application de l'article 115 des déclarations préalables de M. George

 12   Mano et M. Stefan Karganovic, les deux présentées par la Défense. La

 13   déclaration de M. Mano est la pièce AD1 ainsi que celle de M. Karganovic,

 14   qui compte la cote AD2.

 15   Dans sa décision du 8 octobre 2008, la Chambre d'appel a reçu sept

 16   documents qui ont été soumis par l'Accusation suite à ses déclarations

 17   préalables. Il s'agit de pièces à conviction AP1 à AP7.

 18   Je souhaite rappeler aux parties que les pièces AD1 ainsi que AD2 tout

 19   comme les éléments de preuve en réplique sont placés sous pli scellé. Par

 20   conséquent, si les parties ou si l'Amicus Curiae souhaite se référer à ces

 21   pièces, il faudra le faire à huis clos partiel.

 22   Ce matin, nous entendrons pour commencer le témoin George Mano.   Il est

 23   cité à la barre en tant que témoin de la Chambre d'appel. L'interrogatoire

 24   principal sera, par conséquent, mené par la Chambre. Par la suite, pendant

 25   45 minutes, M. Krajisnik aura l'occasion de poser des questions à M. Mano.

 26   Par la suite, l'Accusation et l'Amicus Curiae pourront chacun disposer de

 27   45 minutes pour poser des questions.

 28   Nous ferons une pause par la suite et après la pause déjeuner, c'est la


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  1   Chambre qui interrogera le témoin Karganovic qui est lui aussi un témoin de

  2   la Chambre, et nous appliquerons le même ordre que pour la déposition de M.

  3   Mano.

  4   Nous allons, bien entendu, faire les pauses habituelles toutes les une

  5   heure et demie pendant la matinée et pendant l'après-midi. Comme

  6   d'habitude, le temps qui sera alloué aux parties est approximativement avec

  7   l'approbation de la Chambre, il pourra être modifié selon le besoin.

  8   Cela étant dit, je me permets de rappeler aux parties qu'elles ne sont pas

  9   tenues de se servir de la totalité du temps qui a été mis à leur

 10   disposition, et comme toujours, les Juges peuvent avoir besoin de les

 11   interrompre à tout moment pour poser des questions.

 12   A présent que nous avons exposé notre ordre du jour d'aujourd'hui, je

 13   souhaite citer à la barre le témoin George Mano.

 14   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Puis-je m'adresser à la Chambre un

 15   instant pour ce qui est de l'ordre du jour ?

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 17   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] En me fondant sur les ordonnances

 18   émises par la Chambre et sur la base de l'ordre du jour, j'avais supposé

 19   que l'Amicus poserait des questions au témoin sur le manque d'assistance de

 20   la part conseil et que, par conséquent, que des questions relatives à

 21   l'entreprise criminelle commune seraient abordées. Hier soir et ce matin,

 22   j'ai appris que l'Amicus n'en parlera probablement pas et n'abordera

 23   probablement pas ces questions puisqu'il n'est pas tout à fait clair est-ce

 24   que cela relève de la question de responsabilité.

 25   Compte tenu de la situation, avec l'autorisation de M. Nicholls, j'aimerais

 26   prendre dix minutes du temps qui était prévu pour parler de l'entreprise

 27   criminelle commune, si cela n'a pas été couvert par la Chambre au

 28   préalable, au sujet du manque d'aide apporté par le conseil sur cette


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  1   question uniquement. Bien entendu, si nécessaire, je peux demander à M.

  2   Krajisnik de m'accorder dix minutes de son temps au lieu de prendre dix

  3   minutes du temps de M. Nicholls. Je vous remercie.

  4   [La Chambre d'appel se concerte]

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Après avoir entendu mes collègues, nous

  7   sommes arrivés à la conclusion que vous pourriez tout à fait procéder comme

  8   vous l'avez demandé en prenant soit sur le temps de M. Krajisnik ou sur

  9   celui de M. Amicus Curiae.

 10   M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que je peux m'exprimer ? Je n'ai pas

 11   l'intention de contre-interroger l'un ou l'autre témoin pour des raisons

 12   que j'ai déjà exposées à la Chambre, et pour une raison supplémentaire pour

 13   ce qui est du cas de M. Karganovic.

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Je prends cela en

 15   compte.

 16   Bonjour, Monsieur Mano.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, lire la

 21   déclaration solennelle qui vous est remise par l'huissier.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclaration solennellement que je dirai la

 23   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 24   LE TÉMOIN : GEORGE MANO [Assermenté]

 25   [Le témoin répond par l'interprète]

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Mano. Vous

 27   pouvez vous installer à présent. Asseyez-vous.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, est-ce que j'ai


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  1   la possibilité de me référer aux dates si je ne suis pas certain sur les

  2   dates ou sur un fait ?

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien entendu, vous avez notre

  4   autorisation pour le faire.

  5   Questions de la Cour d'appel : 

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pouvez-vous décliner votre identité,

  7   s'il vous plaît ?

  8   R.  George Mano, le 24 juillet 1961, date de naissance.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Quelle est votre

 10   adresse ?

 11   R.  Vous voulez la ville ou la rue ?

 12   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Les deux.

 13   R.  202 Honmachi Hemiji, au Japon.

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Pouvez-vous

 15   maintenant nous rappeler votre CV et votre parcours professionnel.

 16   R.  J'enseigne l'anglais à une université au Japon, cela fait 13 ans que je

 17   réside au Japon. Depuis dix ans, j'enseigne à l'université où je suis

 18   employé aujourd'hui.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Mano, la

 20   Chambre vous a cité en tant que témoin dans la présente affaire du

 21   Procureur contre Momcilo Krajisnik. Du moment que c'est la Chambre qui vous

 22   a cité en tant que témoin, les questions vous seront posées, pour

 23   commencer, par les Juges. Je suis le Juge qui préside la Chambre, c'est la

 24   raison pour laquelle c'est moi-même qui vous poserai les questions en

 25   premier. Par la suite, d'autres Juges vous poseront des questions. Ensuite,

 26   M. Momcilo Krajisnik, le Procureur et l'Amicus Curiae ont la possibilité de

 27   vous poser des questions.

 28   Pour commencer, que pouvez-vous nous dire au sujet du fonctionnement de


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  1   l'équipe de Défense de M. Krajisnik pendant le procès, que pouvez-vous nous

  2   dire du comportement de l'ex-conseil, Nicholas Stewart à ce sujet ?

  3   Premièrement, Monsieur Mano, avez-vous travaillé pour l'équipe de Défense

  4   de M. Momcilo Krajisnik pendant son procès ?

  5   R.  Oui. J'ai été stagiaire à titre bénévole en été de l'année 2004.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous êtes resté membre de l'équipe

  7   pendant combien de temps ?

  8   R.  A peu près pendant trois mois.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] A savoir, plus précisément ?

 10   R.  J'ai commencé le 5 juillet, et mon dernier jour ça été le 24 septembre.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Mis à part cela, est-

 12   ce que vous avez eu ou est-ce que vous avez aujourd'hui une forme de

 13   relation de travail avec M. Krajisnik ?

 14   R.  L'année dernière ou plutôt ou cours de cette année, M. Krajisnik,

 15   lorsqu'il a commencé à se charger de sa propre Défense, il m'a nommé moi,

 16   entre autres, membre de son équipe dans le cadre de la procédure d'appel;

 17   mais je n'ai pas reçu de rémunération, je n'avais pas de salaire.

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Quelles obligations aviez-vous dans le

 19   cadre de votre travail au sein de l'équipe de Défense ?

 20   R.  Vous voulez dire --

 21    M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pendant le procès.

 22   R.  En 2004 ?

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 24   R.  J'avais plusieurs missions, plusieurs tâches. Je devais prendre

 25   connaissance des documents qui avaient été communiqués par l'Accusation qui

 26   portaient sur des faits au sujet desquels l'Accusation et la Défense

 27   étaient appelées à se mettre d'accord. Je préparais les contre-

 28   interrogatoires des témoins de l'Accusation, je rédigeais des notes sur le


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  1   contexte historique de la guerre pour la Défense, et également, je

  2   préparais des listes ou un ensemble d'informations sur des témoins experts

  3   pour la Défense.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Excusez-moi, je n'avais pas mon

  5   microphone allumé. Pourquoi est-ce que vous avez quitté l'équipe de Défense

  6   ?

  7   R.  J'avais un emploi à plein temps au Japon. J'ai accepté de le faire

  8   uniquement pour une période de trois mois.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Pendant votre travail au

 10   sein de l'équipe de la Défense, professionnellement, quel est le type de

 11   relation que vous avez entretenue avec l'avocat de la Défense, M. Stewart ?

 12   R.  J'étais stagiaire, je n'étais pas rémunéré, j'étais un employé

 13   bénévole, si vous voulez, au sein de l'équipe de Défense. Donc c'était mon

 14   chef.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pendant combien de temps est-ce que

 16   vous avez eu des contacts de travail avec M. Stewart dans cette affaire ?

 17   R.  Pendant la totalité du temps que j'ai passé ici, à savoir depuis le 5

 18   juillet jusqu'au 24 septembre.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Une autre question, à présent. Est-ce

 20   que vous avez travaillé ou est-ce que vous travaillez aujourd'hui sur

 21   d'autres affaires dont est saisi ce Tribunal ou un autre Tribunal

 22   international ?

 23   R.  Je suis venu contribuer à une autre affaire brièvement à l'été 2004,

 24   brièvement. J'entends par là que pendant une journée une autre équipe de

 25   Défense m'a demandé si j'étais prêt à les aider à revoir leur mémoire final

 26   devant la Chambre.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] De quelle affaire s'agit-il ?

 28   R.  Je ne me souviens plus du nom de l'affaire, mais c'est Michael Karnavas


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  1   qui était le conseil principal.

  2   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. A présent, je

  3   souhaite vous poser quelques questions au sujet des pièces à conviction, à

  4   moins que mes collègues souhaitent vous poser d'autres questions à ce

  5   stade.

  6   Avant que je ne le fasse, nous allons devoir passer à huis clos

  7   partiel. Merci. Puisqu'il s'agit d'une pièce à conviction qui est placée

  8   sous pli scellé.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 10   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre] 

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Il s'agit de la pièce AD1. Peut-on

 12   soumettre la pièce au témoin, s'il vous plaît.

 13   Monsieur Mano, nous avons ici une lettre qui porte la date du 23 septembre

 14   2004, vous l'avez adressée à M. Van de Vliet du Bureau d'aide judiciaire et

 15   de détention de ce Tribunal. Est-ce que vous pouvez vous familiariser avec

 16   le contenu de cette lettre pendant un instant. Est-ce qu'il s'agit bien

 17   d'une lettre que vous avez rédigée ?

 18   R.  Oui, il semblerait que c'est tout à fait la lettre que j'ai rédigée.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce qu'au mieux de vos

 20   connaissances, cette lettre reflète la vérité ?

 21   R.  Oui, au mieux de mes connaissances, cela est le cas.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Mano, je souhaite à présent

 23   attirer votre attention plus précisément sur la page 3 de cette lettre où

 24   il est dit que des éléments de preuve convaincants permettent de penser que

 25   M. Stewart ne devrait pas être autorisé à s'occuper de cette affaire en

 26   tant que conseil principal.

 27   Est-ce que je peux en déduire que vous êtes arrivé à cette conclusion sur

 28   la base de la Défense faite par M. Stewart devant la Chambre, à savoir


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  1   qu'il ne savait pas si oui ou non M. Krajisnik était innocent ?

  2   R.  Oui. J'aurais dû dire que ces déclarations en plus de tous les autres

  3   éléments devraient permettre à qui que ce soit de se convaincre qu'il ne

  4   devrait pas s'occuper de cette affaire. Mais, cette déclaration à l'époque

  5   n'était pas appropriée, elle n'aurait jamais dû être prononcée. Un conseil

  6   compétent ne l'aurait pas fait.

  7   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pouvez-vous nous expliquer dans quelles

  8   circonstances, M. Stewart a fait cette déclaration ?

  9   R.  j'ai rédigé cela, mais cela a été fait pendant un échange d'arguments

 10   oraux. Je ne suis pas certain si c'était pendant une présentation orale.

 11   Pendant un contre-interrogatoire d'un témoin me semble-t-il, il est en

 12   train de s'adresser à la Chambre, je ne me souviens plus de circonstances

 13   précises, mais M. Stewart a fait cette déclaration.

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Un autre paragraphe de cette lettre, en

 15   bas de la première page, et puis cela se poursuit en page 2 de votre

 16   lettre, vous dites que M. Stewart souhaitait se mettre d'accord avec

 17   l'Accusation sur des faits qui à votre avis allaient porter préjudice à la

 18   Défense de M. Krajisnik, et vous citez un exemple, un exemple pour ce qui

 19   est d'un leader de la pègre serbe. Est-ce qu'il y a d'autres exemples pour

 20   ce qui est de ces points d'accord posés par M. Stewart ?

 21   R.  Oui, je souhaite préciser que c'était le deuxième jour de ma présence

 22   devant le Tribunal, c'est à ce moment-là que j'ai reçu cette liste de

 23   points d'accord, de faits faisant objet d'accord pour que je l'examine. M.

 24   Stewart et un ou deux autres membres de l'équipe allaient rencontrer

 25   l'Accusation pour discuter de ces faits, pour voir s'ils pouvaient faire

 26   l'objet d'un accord. Il me semble que c'est dans l'après-midi que nous nous

 27   sommes rencontrés, et clairement il m'a semblé que M. Stewart allait se

 28   mettre d'accord sur beaucoup de choses qui allaient porter un préjudice


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  1   sérieux à la Défense de M. Krajisnik, qui ne pouvaient pas, ne devaient pas

  2   être confirmées. Donc le lendemain matin j'ai demandé à M. Stewart de le

  3   rencontrer pour lui parler de mes préoccupations et pour lui demander de se

  4   pencher de manière un peu plus approfondie sur des faits sur lesquels ils

  5   allaient se mettre d'accord.

  6   Donc je l'ai rencontré, me semble-t-il, tard au cours de cette

  7   matinée du 8 juillet, et au fond, ce qu'il m'a dit, c'est que je ne

  8   comprenais pas comment fonctionnait la Chambre, comment fonctionnait le

  9   Tribunal, et que ce n'était pas très important de savoir sur quels faits

 10   ils allaient se mettre d'accord parce que ceci n'allait pas être

 11   préjudiciable à l'affaire. Cela ne m'a pas semblé très convainquant, mais

 12   je ne pouvais rien dire ou faire à ce sujet puisque je n'étais pas en

 13   position de le faire, et je pensais qu'il n'allait jamais m'inviter à

 14   nouveau à être présent pendant ces réunions.

 15   Mais plus tard dans la journée il y avait une autre réunion, et il

 16   avait la sensation qu'il n'avait pas suffisamment de membres de son équipe,

 17   équipe de la Défense. Donc il m'a demandé de venir les rejoindre. Donc j'y

 18   suis allé, c'était une réunion avec l'Accusation. Il y avait M. Harmon, M.

 19   Tieger, et M. Gaynor. Et il y avait un point qui m'a vraiment préoccupé, où

 20   il a été dit que cet homme qui était à la tête de la pègre serbe était

 21   membre du SDS. Et j'ai dit : Mais comment savez-vous qu'il était membre du

 22   SDS, est-ce que vous avez découvert sa carte de membre ? Est-ce que c'est

 23   de manière publique qu'il a affirmé qu'il était membre du SDS ? Et M.

 24   Harmon a dit : Non, mais il a travaillé de manière très proche avec des

 25   membre du SDS. Moi j'ai répondu : Mais ce n'est pas ce qui est dit ici. Et

 26   M. Harmon a dit : O.K. je vais le retirer. Et M. Stewart a répliqué : Non,

 27   non, laissons cela figurer ici. C'est après que M. Harmon dit qu'il allait

 28   rayer la mention qu'il était membre du SDS.


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  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Je souhaite

  2   aborder un autre point à présent, page 1. Vous dites que M. Stewart a

  3   reconnu dans le prétoire qu'au moment où il a accepté d'agir en tant que

  4   conseil principal, qu'il n'avait qu'une connaissance superficielle des

  5   faits de l'affaire, "connaissance qu'aurait une personne intelligente" ?

  6   R.  Il me semble que j'ai mal repris ses propos. Je pense qu'il a dit

  7   : Ce qu'en sait un profane moyen. Je pense que vous pouvez trouver cela

  8   lorsqu'il prend la parole oralement, le 16 juillet, je pense qu'il dit

  9   cela.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Puis par la

 11   suite vous dites que M. Stewart, là encore je cite votre lettre, " a ajouté

 12   très peu à ces éléments."

 13   Mis à part les exemples que vous citez dans votre lettre, est-ce que

 14   vous pouvez étayer votre affirmation par autre chose ?

 15   R.  Il y avait beaucoup de points d'accord avec l'Accusation.

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais mis à part cela, mis à part les

 17   points d'accord avec l'Accusation --

 18   R.  Vous voulez des exemples précis ?

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Lorsque vous dites qu'il a apporté très

 20   peu pour élargir ses connaissances, qu'il a fait très peu pour que ses

 21   connaissances soient plus vastes.

 22   R.  Là, sur-le-champ je ne peux pas vous citer d'exemple concret.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Page 2 de votre lettre, le

 24   dernier paragraphe vous dites que M. Stewart a traité M. Krajisnik comme

 25   son ennemi. Sur quelle base vous êtes arrivé à cette conclusion ?

 26   R.  Certains commentaires qu'il a faits devant moi en privé. Pendant que

 27   nous étions dans la voiture ensemble un jour, il m'a dit qu'en Angleterre

 28   les avocats disent que le client est leur ennemi, et il y a eu plusieurs


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  1   occasions, devrais-je dire, où il s'est plaint de M. Krajisnik en privé.

  2   C'est ce qui m'a incité à faire ces déclarations.

  3   Q.  Page 2 de votre lettre, vous dites là encore que M. Stewart, je vous

  4   cite, "s'est peu attaché à l'issue de cette affaire, de ce procès." Puis

  5   vous dites qu'il a passé du temps à l'étranger au lieu de se préparer pour

  6   l'affaire. Est-ce que vous pouvez expliquer cela ?

  7   R.  Oui. Le 14 juillet il a demandé qu'il y ait un report d'audience, puis

  8   le 16 juillet il y a eu un échange d'arguments oraux pour demander un

  9   report, et il a demandé trois mois pour se préparer pour l'affaire. Puis

 10   quand on a rejeté sa requête, il est parti passer ses vacances en Croatie

 11   pendant neuf jours, et souvent il était absent pendant une journée, deux

 12   journées, pendant que moi j'étais là. Il a fait un voyage en Espagne

 13   également en septembre, du 18 septembre il est parti pour huit jours. S'il

 14   était véritablement si préoccupé par des problèmes de temps, pourquoi est-

 15   ce qu'il s'offrait des vacances. Puis tout le reste on s'en occupait de

 16   manière désorganisée, aléatoire. Je n'avais pas la sensation que

 17   véritablement il se préoccupait d'organiser au mieux la Défense de son

 18   client.Je ne sais pas si cela répond à votre question.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Mano, pourriez-vous nous dire

 20   si vous êtes arrivé à quelque moment que ce soit de parler des sujets que

 21   vous venez d'aborder directement avec M. Stewart ou avec les Juges de la

 22   Chambre, avant l'envoi de cette lettre ?

 23   R.  Il était très difficile de parler à M. Stewart. Comme je l'ai dit dans

 24   ma lettre, il employait un ton très condescendant avec les personnes dont

 25   il estimait qu'elles étaient inférieures à lui. Donc évoquer ce genre de

 26   sujets avec lui était très difficile.  Il a pu arriver une ou deux fois que

 27   j'ai fait quelques suggestions lorsque je pensais que la Défense allait

 28   dans la mauvaise direction, et il a immédiatement rejeté ces suggestions.


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  1   Comme je le dis dans ma lettre, toutes les personnes qui travaillaient avec

  2   lui ont cessé, à un moment ou à un autre, de lui donner des conseils car il

  3   ne les acceptait pas. A moins qu'une idée ne vienne de lui, il n'était pas

  4   prêt à la mettre en œuvre.

  5   Il y a autre chose que je voudrais dire. Je pense que Chrissa Loukas avait

  6   quelques problèmes également. Je sais qu'elle a demandé à ne plus

  7   travailler sur l'affaire peu de temps avant mon départ. Donc je crois

  8   qu'elle aussi avait des problèmes, des problèmes avec Me Stewart, je veux

  9   dire.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous le croyez ou est-ce que Me Loukas

 11   vous l'a confirmé, elle vous a dit ce qu'elle pensait de Me Stewart ?

 12   R.  Elle a exprimé de la frustration à une ou deux reprises, et un incident

 13   s'est produit que j'étais censé connaître. Je suis venu au Tribunal un

 14   week-end pour vérifier mes courriels sur internet car je n'avais pas chez

 15   moi une liaison internet permanente, et j'ai trouvé une lettre au Tribunal,

 16   une lettre de Me Loukas dans laquelle elle demandait à un organisme

 17   juridique d'Australie la possibilité de devenir conseil principal dans

 18   l'affaire Krajisnik. Je crois que c'était bien ce que disait cette lettre.

 19   Mais il serait préférable que vous lui posiez la question vous-même. Je

 20   pense que je suis la seule personne en dehors de Me Loukas qui est au

 21   courant.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Il y a une question que j'aimerais vous

 23   poser. Est-ce que vous voudriez dire quoi que ce soit d'autre au sujet des

 24   questions évoquées dans la lettre ? Des questions que je n'ai pas

 25   mentionnées moi-même jusqu'à présent.

 26   R.  Il y a une chose que je devrais dire, cela ne figure pas dans cette

 27   lettre, mais dans une lettre ultérieure à M. Van der Vleit à savoir que,

 28   comme je l'ai déjà dit, la Défense était très désorganisée. Apparemment, il


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  1   n'y avait aucun plan quant à la façon de procéder. Tout ce qui concernait

  2   la Défense était un feu prêt à prendre et à s'éteindre. Donc c'était une

  3   autre de mes préoccupations.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] M. le Juge Meron souhaite poser une

  5   question.

  6   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Mano, vous avez parlé de

  7   plusieurs absences de Me Stewart. Excusez-moi, je n'avais pas branché mon

  8   micro. Monsieur Mano, vous avez dit que Me Stewart avait été absent du

  9   procès à plusieurs reprises. Dans ces périodes d'absence, que se passait-il

 10   ? Est-ce que c'est Me Loukas qui assurait la Défense pendant les audiences

 11   ou est-ce que les audiences étaient suspendues ?

 12   Q.  Au mois d'août, par exemple, aucun prétoire n'avait été réservé.

 13   C'était donc une période que nous pouvions utiliser pour mener nos propres

 14   recherches. Et lorsque Nicholas Stewart est parti, la plupart d'entre nous

 15   ont continué un travail de recherche.

 16   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc le travail ne s'est pas poursuivi

 17   pendant ses absences.

 18   R.  Non, les audiences n'avaient pas lieu pendant son absence, en effet.

 19   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Mano, j'aimerais vous demander

 21   s'il vous est arrivé à quelque moment que ce soit de discuter de la teneur

 22   de votre lettre avec M. Karganovic ou un autre membre de l'équipe de

 23   Défense ?

 24   R.  De cette lettre-ci ?

 25   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 26   R.  Oui, j'en ai discuté avec M. Karganovic.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] A quel moment, avant d'expédier cette

 28   lettre ?


Page 366

  1   R.  Non. Pas avant de l'expédier. Il ne faisait pas partie de l'équipe à ce

  2   moment-là.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Quand est-ce que vous en avez discuté

  4   avec M. Karganovic ?

  5   R.  C'était je pense un an plus tard à peu près ou même encore plus tard.

  6   Au moment où il a pris ses fonctions de commis aux audiences pour M.

  7   Krajisnik. Je ne sais pas à quel moment cela a eu lieu exactement, mais

  8   c'était par la suite.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que vous êtes au courant que M.

 10   Karganovic avait rédigé une déclaration le 16 octobre 2007 dans laquelle on

 11   trouve des accusations contre Me Stewart ?

 12   R.  Je ne sais pas à quel moment cela s'est passé. Mais je sais qu'il avait

 13   l'intention d'écrire une lettre. Cela étant, je n'ai pas vu cette lettre.

 14   Je n'en connais pas la teneur. 

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous avez dit avoir discuté avec M.

 16   Karganovic de la teneur de votre lettre. Quand vous l'avez fait, est-ce que

 17   c'était avant le 16 octobre 2007 ou après ?

 18   R.  C'était probablement avant, et je me rappelle qu'il m'a dit à ce

 19   moment-là avoir vu ma lettre dans un dossier lorsqu'il a pris ses fonctions

 20   de commis aux audiences. Mais encore une fois, je n'en suis pas sûr

 21   totalement. Il faudrait que vous lui posiez la question à lui. La première

 22   fois que je lui ai parlé de cela, quoi qu'il en soit, c'était beaucoup plus

 23   tard.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Que voulez-vous dire par beaucoup plus

 25   tard ?

 26   R.  Beaucoup plus tard que la date d'expédition de ma lettre à M. Van der

 27   Vleit mais avant la date que vous avez évoquée en octobre 2007.

 28   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc avant cette date-là ?


Page 367

  1   R.  Oui, entre les deux.

  2   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc vous avez discuté avec M.

  3   Karganovic avant qu'il envoie sa lettre du 16 octobre 2007.

  4   R.  C'est exact.

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions pour le

  6   moment à moins que mes collègues en aient. Monsieur le Juge Shahabudeen,

  7   vous en avez ?

  8   M. LE JUGE SHAHABUDEEN : [interprétation] Monsieur Mano, lorsque vous avez

  9   discuté avec M. Karganovic du contenu de votre lettre, avait-il le moindre

 10   rapport professionnel avec l'affaire à ce moment-là ?

 11   R.  Oui. Il était commis aux audiences à ce moment-là.

 12   M. LE JUGE SHAHABUDEEN : [interprétation] Il l'était.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Madame la Juge Vaz.

 14   MME LE JUGE VAZ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 15   Monsieur Mano, bonjour.

 16   R.  Bonjour.

 17   MME LE JUGE VAZ : [interprétation] Je vais revenir un petit peu en arrière.

 18   Je voulais, s'il vous plaît, que vous nous précisiez en ce qui concerne Mme

 19   Louas. Vous dites que vous vous êtes rendu un jour au Tribunal, un jour

 20   férié, et qu'il y avait une lettre de Mme Loukas demandant à devenir

 21   l'avocat principal dans l'affaire Krajisnik. C'est bien ce que vous avez

 22   dit ?

 23   R.  J'ai dit que c'était un fax. Oui, c'est une lettre envoyée par fax, en

 24   effet.

 25   MME LE JUGE VAZ : [interprétation] Et comment avez-vous pu accéder à ce fax

 26   ?

 27   R.  La page était dans la machine, dans le fax, physiquement.

 28   MME LE JUGE VAZ : [interprétation] Très bien. Et vous en avez parlé avec


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  1   Mme Loukas ?

  2   R.  De la lettre ?

  3   MME LE JUGE VAZ : [interprétation] Oui.

  4   R.  Non, je ne l'ai pas fait.

  5   MME LE JUGE VAZ : [interprétation] Très bien, je vous remercie.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Ceci met un terme aux

  7   questions des Juges. Nous nous tournons maintenant vers M. Krajisnik pour

  8   savoir s'il a des questions à poser à M. Mano. Monsieur Krajisnik, c'est à

  9   vous. Vous pouvez le faire si vous le souhaitez.

 10   Contre-interrogatoire par M. Krajisnik :

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Mano.

 12   R.  Bonjour.

 13   Q.  Dans la lettre que vous avez envoyée au représentant de OLAD, vous

 14   formulez un certain nombre de critiques à l'égard de mon conseil. Je vais

 15   reprendre ces critiques à l'instant même si M. le Juge Pocar vient d'en

 16   parler lui-même.

 17   Vous avez déclaré, vous avez écrit que Me Stewart ne connaissait pas

 18   le contexte historique des affrontements qui ont éclatés en Bosnie-

 19   Herzégovine. Donc voici ma question : quel est votre domaine de

 20   spécialisation sur le plan professionnel ?

 21   R.  J'enseigne à l'université au Japon. La matière principale que

 22   j'enseigne est l'anglais, je l'enseigne aux étudiants de l'université au

 23   Japon. Mais les quatre premières années que j'ai passées là-bas,

 24   j'enseignais également l'histoire moderne de l'Europe de l'est. J'ai une

 25   maîtrise en histoire avec spécialisation dans le domaine des Balkans.

 26   Q.  Donc vous, vous êtes formé, si je puis utiliser ce terme, en histoire,

 27   et vous avez étudié et appris la situation dans les Balkans dans la période

 28   qui va de 1980 à 1995, n'est-ce pas -- ou de 1990 à 1995, vous connaissez


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  1   cette histoire.

  2   R.  Je la connais assez bien.

  3   Q.  Merci beaucoup. Dans votre lettre, vous dites que Me Stewart refusait

  4   d'accepter tout conseil lié à ses connaissances insuffisantes du contexte

  5   historique des Balkans. En tant qu'homme qui avait plus de connaissances

  6   que lui dans ce domaine, avez-vous essayé de compenser l'insuffisance de

  7   son savoir ?

  8   R.  Je n'ai jamais rien dit de ce genre, mais il m'est arrivé de le

  9   corriger. D'ailleurs, comme je l'ai indiqué, ce n'était pas seulement au

 10   sujet du contexte histoire des Balkans que Me Stewart n'acceptait aucun

 11   conseil, cela s'appliquait à tous les domaines. Il n'acceptait jamais de

 12   recevoir des conseils d'une personne qu'il estimait inférieure à lui.

 13   Q.  Dans votre lettre, si j'ai bien compris, vous dites qu'il avait un

 14   rapport méprisant à l'égard de ses collaborateurs éventuellement désireux

 15   de lui donner des conseils. Mais que pensez-vous du rapport qu'il

 16   entretenait avec vous ?

 17   R.  Oui, il l'était.

 18   Q.  Vous avez dit également qu'il manifestait peu d'intérêt pour l'affaire

 19   Krajisnik; ceci est-il exact ?

 20   R.  C'était mon impression.

 21   Q.  Je vais vous demander autre chose : vous avez dit ici qu'il avait des

 22   contacts fréquents sinon quotidiens avec l'Accusation. Avait-il également

 23   des contacts avec les employés travaillant dans le prétoire ou avec les

 24   Juges de la Chambre de première instance ? Est-ce que vous pourriez nous

 25   dire s'il les rencontrait éventuellement ?

 26   R.  D'abord, je ne sais pas si j'ai parlé de contacts fréquents sinon

 27   quotidiens avec l'Accusation s'agissant de lui. Mais eu égard à la réalité

 28   des faits, il les rencontrait pendant plusieurs jours d'affilée, et j'ai su


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  1   qu'il recevait des courriels de membres de l'Accusation pendant la période

  2   en question.

  3   Mais s'agissant des Juges de la Chambre, je ne sais pas.

  4   Q.  Savez-vous s'il s'est adressé par écrit aux Juges de la Chambre eu

  5   égard à quelques problèmes qu'il aurait pu rencontrer pendant son travail ?

  6   R.  Vous voulez dire en dehors des documents juridiques tels que requêtes,

  7   objections ou ce genre de choses ?

  8   Q.  Je vais être plus précis. Est-ce qu'il s'est adressé aux Juges de la

  9   Chambre de première instance pour émettre des objections ou se plaindre du

 10   fait qu'il n'avait pas de bonnes conditions de travail et qu'il avait

 11   besoin d'une intervention des Juges de la Chambre à ce sujet ?

 12   R.  Il a déposé une requête en suspension le 14 juillet, et il a présenté

 13   des arguments oraux liés à cette requête le 16 juillet. Bien entendu,

 14   oralement, il a fait un certain nombre de déclarations que chacun peut

 15   lire. Ceci est de notoriété publique. Il arguait du fait qu'il fait avait

 16   besoin de plus de temps, que ses collaborateurs étaient surchargés de

 17   travail de même que lui. Comme je l'ai dit, c'est de notoriété publique,

 18   chacun peut le lire.

 19   Q.  Très bien. Avec l'autorisation des Juges de la Chambre d'appel,

 20   j'aimerais appeler votre attention sur un certain nombre de documents qui

 21   ont été préparés à votre intention. J'aimerais que nous comparions un

 22   certain nombre de passages de ces documents avec ce que vous avez dit. Je

 23   vous renvoie --

 24   M. KREMER : [interprétation] J'ai reçu une liasse de documents ce matin, je

 25   ne sais pas si les Juges en disposent. Peut-être n'ont-il pas encore été

 26   distribués.

 27   Sur la base des remarques préliminaires formulées par M. Krajisnik à

 28   l'instant, je crois comprendre qu'il s'apprête à verser au dossier, par le


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  1   biais de M. Mano, des documents qu'il ne connaît absolument pas. C'est ce

  2   que confirme sa déposition. Or, comme nous le savons, ces documents ont été

  3   rédigés ultérieurement à la période où M. Mano a travaillé pour l'équipe de

  4   Défense.

  5   La Chambre étant en possession de ces documents par application de la

  6   disposition 115 et n'ayant encore rendu aucune décision à ce sujet, je

  7   pense que ces documents ont trait à la déposition potentielle de Me Stewart

  8   et de Me Loukas ainsi que d'Alexander Zahar. J'élève une objection par

  9   rapport à la moindre question portant sur ces documents étant donné que le

 10   témoin ne les connaît pas.

 11   [La Chambre d'appel se concerte]

 12   M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais intervenir pour quelques mots --

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Micro.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, je n'avais pas branché le

 15   micro. Ces documents ont manifestement une énorme importance. Mais la

 16   question qui se pose, bien sûr, consiste à se demander par quel moyen ils

 17   peuvent être versés au dossier. La seule question qui me vient à l'esprit

 18   et qui pourrait être pertinente c'est que ces documents pourraient contenir

 19   des éléments de valeur historique au sujet desquels le témoin pourrait

 20   exprimer une position ou, en tout cas, au sujet desquels le témoin pourrait

 21   apporter une confirmation. Je dis cela, car il est possible que les Juges

 22   de la Chambre se posent la question de savoir si ces documents doivent ou

 23   non être versés au dossier et, si oui, qui doit être responsable de leur

 24   versement.

 25    M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] J'aurais besoin de prononcer quelques

 26   mots également. Il me semble que si les écritures de Me Stewart confirment

 27   la déposition du témoin, le témoin devrait être autorisé à examiner ces

 28   documents pour dire que ce que Me Stewart dit dans ces écritures ou


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  1   l'attitude que l'on peut constater à la lecture de ces documents ou les

  2   déclarations qu'il a faites correspondent toutes avec mes observations dont

  3   je rends compte dans ma lettre; et ceci, bien sûr, serait extrêmement

  4   important pour les Juges de la Chambre d'appel. Si le Tribunal constate

  5   qu'un témoin se dit préoccupé par l'attitude de Me Stewart par rapport à

  6   l'affaire et que des documents écrits ultérieurement le confirment, quoi

  7   qu'il en soit, même si le témoin n'est pas la meilleure personne pour

  8   demander le versement des documents au dossier, ces éléments peuvent avoir

  9   une valeur extrêmement importante pour la Chambre s'agissant de se

 10   prononcer sur la question de l'aide efficace ou non du témoin.

 11   Je vous remercie.

 12   M. KREMER : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre

 13   autorisation, j'aurais quelques mots à dire. Je ne suis pas en désaccord

 14   avec mes collègues de la partie adverse. Les déclarations, dans la mesure

 15   où elles sont pertinentes par rapport à la période pendant laquelle ce

 16   témoin travaillait pour le Tribunal peuvent certainement être présentées.

 17   Mais mon objection concerne le versement de ces documents en tant que

 18   pièces à conviction et le fait que les Juges soient amenés à leur accorder

 19   un poids alors que l'auteur des documents n'est pas la personne qui en

 20   demande le versement.

 21   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Une requête existe actuellement qui

 22   concerne un certain nombre de ces documents, une requête liée à leur

 23   admissibilité. La Chambre ne s'est pas encore prononcée au sujet de cette

 24   requête. Je crois que ces documents ne devraient pas devenir des pièces à

 25   conviction aujourd'hui, mais bien sûr, rien n'empêche M. Krajisnik

 26   d'interroger le témoin au sujet de ces documents sans toutefois lui montrer

 27   ces documents.

 28   M. KRAJISNIK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge. Je vais


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  1   donc me voir contraint de réduire le nombre de mes questions.

  2   Q.  Mais, Monsieur Mano, je vais vous poser une question : quand vous êtes

  3   entré dans l'équipe de Me Stewart, connaissiez-vous Krajisnik ?

  4   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir parfaitement compris votre question. Vous me

  5   demandez si je vous connaissais personnellement ou si je savais qui vous

  6   étiez ?

  7   Q.  Me connaissiez-vous personnellement ? Aviez-vous fait ma connaissance ?

  8   R.  Je ne vous ai jamais rencontré.

  9   Q.  Avez-vous pris contact avec moi de quelque façon que ce soit pendant la

 10   période du procès où vous avez travaillé au sein de l'équipe de Défense ?

 11   R.  Non. En réalité, j'ai demandé à Nicholas Stewart si je pouvais venir

 12   vous rencontrer lors d'une des rencontres régulières qu'il avait avec vous

 13   au quartier pénitentiaire, et chaque fois il me renvoyait une excuse

 14   expliquant pourquoi je ne pouvais pas le faire. J'ai eu l'intention de

 15   venir vous voir seul, mais on m'a dit que je ne pouvais pas le faire sans

 16   l'autorisation du conseil principal. Donc je ne vous ai jamais rencontré au

 17   jour d'aujourd'hui.

 18   Q.  Cela signifie-t-il qu'avant l'envoi de votre lettre, vous ne m'avez pas

 19   consulté pour me demander mon avis au sujet de cette lettre ou obtenir une

 20   forme d'accord de ma part ?

 21   R.  C'est exact. Lorsque j'ai envoyé cette lettre, et je l'ai déjà dit, mon

 22   objectif consistait à vous informer, Monsieur Krajisnik, d'une situation

 23   dont je pensais que vous ne la connaissiez peut-être pas, mais qu'il était

 24   nécessaire que vous la connaissiez.

 25   Q.  Merci bien. A présent, et en espérant que j'aie bien compris, car je

 26   crois comprendre que ces documents ne vont pas être versés au dossier; mais

 27   que je suis autorisé à les utiliser pour en citer quelques passages et

 28   demander à M. Mano si ces passages correspondent à ce qu'il déclare lui-


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  1   même. Avant de vous poser la question, Monsieur Mano, je voudrais demander

  2   confirmation aux Juges de la Chambre. Ai-je bien compris les choses ?

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Krajisnik, vous êtes autorisé

  4   à soumettre des faits ou des déclarations au témoin, et ensuite, vous

  5   demanderez au témoin si cela correspond à ce qu'il en sait.

  6   M. KRAJISNIK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.

  7   Q.  A présent, puisque vous avez ces documents devant vous, pourriez-vous,

  8   s'il vous plaît, retrouver un document qui m'intéresse, le document numéro

  9   3.

 10   Je ne maîtrise pas l'anglais, je vais donc demander à M. Mano de bien

 11   vouloir m'aider, moi, ainsi que les Juges de la Chambre.

 12   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Krajisnik, vous ne pouvez pas

 13   citer les documents en tant que tels. Le témoin n'a pas les documents. Par

 14   conséquent, vous pouvez vous référer aux déclarations, aux faits, et vous

 15   pouvez par la suite demander au témoin de confirmer ou d'infirmer ce que

 16   vous lui soumettez. A l'opposé, vous ne pouvez pas vous référer à des

 17   documents spécifiques, vous ne pouvez pas lui demander de prendre de

 18   connaissance, d'examiner une pièce à conviction puisque le témoin n'a pas

 19   ces pièces à conviction.

 20   M. KRAJISNIK : [interprétation] Je vous remercie.

 21   Q.  D'après certains indices à l'époque, la Chambre de première instance

 22   aurait estimé que M. Stewart était arrogant, désagréable, et que d'une

 23   certaine manière cela portait préjudice à la Défense de Krajisnik. Est-ce

 24   que cela correspond à l'observation que vous aviez faite dans votre

 25   déclaration ?

 26   R.  Je ne sais pas si cela correspond à ma déclaration, mais je suis tout à

 27   fait d'accord avec cela.

 28   Q.  Je vous remercie. De même, on est en droit de penser d'après certains


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  1   indices que la Chambre de première instance lors, d'une réunion -- enfin,

  2   un représentant de la Chambre de première instance aurait eu des critiques

  3   à l'égard de M. Stewart, lui aurait reproché de se servir des pauses

  4   pendant les audiences du procès pour vaquer à ses problèmes personnels et

  5   pour représenter certaines affaires dont il était chargé à Londres. Est-ce

  6   que cet élément est analogue ou similaire à ce que vous avez remarqué vous-

  7   même lorsque vous étiez en contact avec M. Stewart ?

  8   R.  Il ne fait aucun doute qu'il avait un certain nombre de problèmes

  9   personnels, que parfois il s'absentait pour s'en occuper. Il lui est arrivé

 10   de se rendre à Londres, au moins une fois pour autant que je le sache le 21

 11   juillet. Il est allé à Londres, et il me semble qu'il devait s'occuper de

 12   ses affaires professionnelles là-bas. Donc il ne fait aucun doute que cela

 13   s'est produit.

 14   Q.  Je vous remercie. Si je disais à présent que d'après certains indices

 15   qu'il aurait été noté dans un document que la Chambre de première instance

 16   estimait que Me Stewart n'employait pas son temps pour s'occuper de

 17   préparer le procès mais qu'en fait il en chargeait le co-conseil, et que

 18   c'était là l'une des raisons pour lesquelles le co-conseil a donné sa

 19   démission, a quitté l'équipe de Défense, a quitté l'affaire.

 20   Est-ce que c'est quelque chose que vous avez pensé pendant que vous étiez

 21   présent et pendant que vous étiez en contact avec Mme Loukas ?

 22   R.  Je ne sais pas exactement pourquoi Chrissa Loukas a souhaité partir.

 23   Elle ne m'a jamais précisé ses raisons. Mais cela ne me surprendrait pas du

 24   tout si c'était l'une des raisons au moins de son départ.

 25   Q.  Je vais vous demander autre chose. Si je vous soumettais une hypothèse.

 26   Dans le cadre des contacts entre Me Stewart et les représentants de la

 27   Chambre de première instance, il aurait reçu une réponse qu'il note lui

 28   aussi dans ses notes; il dit que non seulement la Chambre de première


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  1   instance mais également le Greffe sont mécontents de son travail car

  2   d'après ce qu'ils disent, il ne serait pas en mesure de bien organiser le

  3   travail de la Défense, de bien gérer, diriger les travaux de l'équipe de

  4   Défense.

  5   R.  Je serais tout à fait d'accord avec cette affirmation.

  6   Q.  Pendant que vous étiez membre de l'équipe de Défense, avez-vous

  7   remarqué que Me Stewart avait élaboré un plan, plan de gestion pour

  8   organiser l'affaire Krajisnik, la Défense de Krajisnik ?

  9   R.  Je n'ai jamais remarqué qu'il y ait eu existence d'un tel plan.

 10   Q.  Mais si vous vous fondez sur votre expérience, d'après vous, Me

 11   Stewart, lorsqu'il faisait certaines choses, lorsque par exemple il faisait

 12   ce que vous avez cité comme exemple à savoir, lorsqu'il décidait d'accepter

 13   des points d'accord, lorsqu'il ne s'agissait pas de faits, d'accords, est-

 14   ce que c'était une décision stratégique ? Est-ce que vous pouvez nous

 15   expliquer quelles étaient les conséquences de ses décisions ?

 16   R.  Je pense qu'il menait la Défense de manière chaotique. Comme je l'ai

 17   déjà dit, je ne pense pas qu'il agissait de manière méthodique mais plutôt

 18   de manière tout à fait aléatoire. Il est arrivé qu'il nous dise dans un

 19   courriel ou lorsqu'il nous appelait, il nous demandait de rechercher

 20   quelque chose sur-le-champ. Donc il fallait qu'on lui procure quelque chose

 21   du jour au lendemain. Donc c'était quelque chose qui venait de manière tout

 22   à fait -- comme une surprise. Ce n'était pas quelque chose qui était prévue

 23   à l'avance. Il ne semblait pas y avoir pensé précédemment.

 24   Q.  Vous dites dans votre lettre qu'il avait du respect pour les gros

 25   couteaux mais pas pour les gros poissons, pas pour les petits. Lorsqu'il

 26   n'estimait pas que quelqu'un était sur un pied d'égalité avec lui, il ne

 27   montrait pas de respect. Est-ce que cela nous montre quelle était

 28   l'attitude de Me Stewart face à la partie adverse ?


Page 378

  1   R.  Oui. Je cite un exemple dans ma lettre. Pour ce qui est de MM. Harmon

  2   et Tieger, il estimait qu'ils étaient sur un pied d'égalité avec lui, mais

  3   ce n'est pas ce qu'il pensait de M. Gaynor ou pour ce qui est d'autres

  4   membres de l'équipe de la Défense. J'ai cité un exemple, M. Gaynor s'est

  5   chargé de la présentation du côté de l'Accusation ce jour-là, et M. Stewart

  6   a quitté la pièce -- peut-être pas ce prétoire-ci, c'était peut-être un

  7   autre prétoire. Il est parti et il a dit à Me Loukas qu'il allait partir

  8   parce que ce jour-là, il n'y avait que du menu fretin dans le prétoire. Je

  9   pense qu'il a dit quelque chose comme ça.

 10   Q.  Vous avez dit que vous vous êtes occupé de préparer les déclarations

 11   des témoins. Comment faisiez-vous cela ? Si j'ai bien compris que vous avez

 12   pris part à cela, comment est-ce que vous prépariez ces déclarations,

 13   quelle est la partie du travail que vous faisiez pour M. Stewart ?

 14   R.  On entendait, on auditionnait des témoins avant qu'ils viennent déposer

 15   devant le Tribunal. Nous recevions des exemplaires de leurs dépositions. Je

 16   devais me pencher sur les dépositions des témoins pour voir s'il n'y a pas

 17   de contradiction ou si, de toute évidence, une déposition n'était pas

 18   erronée ou fausse. Il fallait que je prenne des notes, puis à la fin je

 19   dactylographiais cela et je remettais cela à Me Loukas.

 20   Q.  Vous parlez de témoins de l'Accusation ?

 21   R.  Oui. C'était pendant la présentation des moyens de preuve de

 22   l'Accusation.

 23   Q.  Pour ce qui est des experts, vous avez mentionné des experts à un

 24   moment donné, vous étiez en contact avec Me Stewart. Est-ce qu'il vous a

 25   dit s'il allait citer des témoins experts, quels témoins experts, combien,

 26   et sur quels faits il souhaitait que ces témoins experts viennent faire

 27   leur expertise ?

 28   R.  Brett Taxin a dressé une liste de témoins qui sont déjà venus déposer


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  1   dans d'autres affaires; Taxon était un autre membre de l'équipe. Donc j'ai

  2   préparé un document qui comportait certains noms de ces témoins mais il y

  3   avait également des témoins en plus qui, à mon sens, méritaient d'être

  4   cités. J'ai préparé un petit tract avec les noms de ces témoins potentiels

  5   avec le contenu potentiel de leurs dépositions, des exemplaires de leurs

  6   travaux que j'ai pu trouver sur internet. J'ai remis tout cela à Chrissa

  7   Loukas. Mais pour autant que je le sache, je ne peux pas vous dire si Me

  8   Stewart ait jamais examiné cela, jamais pris connaissance de cela. Je ne

  9   sais pas ce qu'il en a fait. La seule chose que j'ai reçue de sa part pour

 10   ce qui est des témoins experts, je peux -- est-ce que je peux vérifier la

 11   date ?

 12   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 13   M. KREMER : [interprétation] Pendant que le témoin consulte des documents,

 14   dans mon système judiciaire, lorsque le témoin vient dans un prétoire et

 15   fait examiner des documents, les parties doivent avoir la possibilité d'en

 16   prendre connaissance pendant la pause. Est-ce que le témoin peut me

 17   permettre de prendre connaissance de ses notes ?

 18   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Puis-je. Dans mon système judiciaire,

 19   la question est de savoir si le témoin se sert des éléments d'information,

 20   donc, s'il se penche sur un document pour rafraîchir sa mémoire, il

 21   faudrait le mettre à la disposition des parties, mais le reste des pièces

 22   qu'il a sur lui dans le prétoire, pas nécessairement, puisqu'elles sont

 23   simplement là.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien entendu, je suis tout à fait

 25   d'accord. Nous nous référons aux documents dont il se sert, je pense.

 26   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je suis en train de dire uniquement les

 27   documents dont il se sert, et M. Kremer, à la différence de ce que je dis,

 28   me semble-t-il, parle de tous les documents qu'il a sur lui.


Page 380

  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Il me semble qu'il s'agira là

  2   uniquement des documents dont on se sert et qu'on consulte. Ce sont les

  3   documents qu'il faudra communiquer aux parties. Les autres documents

  4   peuvent rester dans la mallette du témoin. Ces documents-là ne devront pas

  5   être communiqués.

  6   Est-ce que vous avez retrouvé la date ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai reçu un courriel le 18 juillet,

  8   c'était un dimanche, s'agissant d'un témoignage d'expert, parce que j'avais

  9   demandé de ne pas me rendre au prétoire le lendemain. C'était un lundi,

 10   parce que j'allais travailler à la bibliothèque de l'Université de Leiden.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Krajisnik,

 12   vous pouvez continuer avec vos questions.

 13   M. KRAJISNIK : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez préparé un certain nombre de documents. Sur la base de ces

 15   documents, Me Stewart était censé prendre une décision sur les témoins

 16   experts à citer. Ma question est la suivante : d'après vous, pour M.

 17   Stewart, était-il difficile de faire le choix, de sélectionner ces témoins

 18   experts ? Est-ce que cela posait un problème technique ?

 19   R.  En fait, je ne peux pas répondre à votre question, mais je peux vous

 20   dire ce qu'il affirme dans ce courriel. Est-ce qu'on peut faire cela ? Est-

 21   ce que je peux donner lecture de ce qu'il dit au sujet du témoignage

 22   d'expert ?

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, je vous en prie.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Il dit :

 25   "Il nous faut adopter l'approche suivante : premièrement, il faut établir

 26   la priorité de nos besoins pour ce qui est de différents domaines.

 27   Deuxièmement, identifier qui sont les experts qui devraient venir déposer

 28   sur ces domaines. Et troisièmement, préparer une cause convaincante pour


Page 381

  1   recevoir une rémunération de la part de la Greffe."

  2   M. KRAJISNIK : [interprétation]

  3   Q.  Je vous remercie. Votre réponse nous convient tout à fait. A présent,

  4   je vous propose de vous poser quelques autres questions.

  5   M. Stewart vous a-t-il dit qu'il avait établi un plan précis pour ce qui

  6   est des témoins experts à citer ou du type de témoins experts à citer ?

  7   R.  Non, il ne l'a pas fait.

  8   Q.  Ma question suivante : avez-vous jamais eu une conversation avec M.

  9   Stewart dans le cadre de laquelle vous avez pu le mettre en garde,

 10   l'avertir de l'importance d'une bonne connaissance du contexte historique

 11   du conflit en Bosnie-Herzégovine ?

 12   R.  J'ai mentionné cela au moins une fois.

 13   Q.  A votre sens, avait-il des connaissances suffisantes sur le confit en

 14   Bosnie-Herzégovine, et en particulier, des connaissances sur la guerre qui

 15   fait l'objet de ce procès ?

 16   R.  Non, il n'avait pas ces connaissances. C'est la raison pour laquelle je

 17   me suis occupé pendant plusieurs semaines à rédiger un document qui était

 18   un résumé du contexte historique du conflit.

 19   Q.  Si j'ai bien compris, vous êtes historien, c'est votre spécialité.

 20   R.  C'est un des domaines dans lesquels je travaille.

 21   Q.  A votre avis, je ne sais pas si c'est une question appropriée, est-ce

 22   que vous êtes qualifié à lui fournir des informations pour combler des

 23   lacunes dans ses connaissances sur la guerre en Bosnie-Herzégovine ?

 24   R.  Je n'ai pas de documents qui diraient que je suis un expert, mais j'ai

 25   suffisamment de connaissances pour pouvoir informer quelqu'un du contexte

 26   du conflit, oui.

 27   Q.  Si je vous ai bien compris, M. Stewart n'acceptait pas vos propositions

 28   ni des propositions qui venaient de la part d'autres collaborateurs


Page 382

  1   lorsqu'il s'agissait de ce type de questions ?

  2   R.  Quelle que soit la question dont on parlait, il n'aimait pas recevoir

  3   des conseils de la part des personnes subordonnées.

  4   Q.  Mais plus concrètement, pour ce qui est du contexte historique, est-ce

  5   que vous pouvez me répondre au juste pour ce qui est de cette question-là ?

  6   Pour ce qui est du contexte historique, il n'était pas disposé à recevoir

  7   de conseils de qui que ce soit là-dessus ?

  8   R.  C'est exact.

  9   Q.  D'après ce que je vois dans votre CV, vous êtes juriste, également.

 10   R.  Je ne suis pas au Barreau.

 11   Q.  Mais est-ce que vous êtes formé en tant que juriste ? Vous avez des

 12   diplômes de juriste ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous diriez à votre sujet que vous êtes qualifié pour apprécier la

 15   qualité du travail d'un avocat dans le cadre d'un procès, comme mon procès,

 16   par exemple ?

 17   R.  Cela dépend. En l'occurrence, je pense que vous n'auriez pas besoin

 18   d'avoir un juriste ayant mes qualifications pour voir que Me Stewart ne

 19   gérait pas la Défense de manière très efficace.

 20   Q.  En tant que juriste, pour enchaîner là-dessus, vous étiez en mesure

 21   d'apprécier la stratégie de la Défense. Estimez-vous que vous étiez

 22   compétent pour apprécier que cette stratégie, soit n'existait pas, soit

 23   était mauvaise ? Et comme on le voit dans une autre déclaration, que

 24   c'était une errance, quelque chose qui manquait d'organisation. Est-ce

 25   qu'en tant que juriste, vous avez pu apprécier cela ?

 26   R.  Mon appréciation se fondait sur une brève période que j'ai passée à

 27   travailler dans un cabinet de juriste aux Etats-Unis. Je dois dire que la

 28   manière dont on agissait dans ce cabinet, c'était très différent de la


Page 383

  1   manière dont a procédé Me Stewart quand il a assuré la Défense de vous,

  2   Monsieur Krajisnik.

  3   Q.  Est-ce que cela correspond maintenant à quelque chose qu'on trouve dans

  4   ces documents que nous n'allons pas proposer au versement aujourd'hui mais

  5   que nous avons communiqués à la Chambre d'Appel où l'on trouve une

  6   conclusion, conclusion tirée par un représentant de la Chambre de première

  7   instance disant que Me Stewart n'était pas un bon organisateur, qu'il n'a

  8   pas bien géré ma Défense ?

  9   R.  Il était mal organisé, et il perdait du temps.

 10   Q.  Très bien. Alors dites-moi, s'agissant de l'entreprise criminelle

 11   commune, est-ce que M. Stewart n'en a jamais parlé avec l'équipe de la

 12   Défense ?

 13   R.  Un de mes collègues, il me semble que c'était Thomas Derrington, il

 14   faudrait que je vérifie dans mes notes, a rédigé un document là-dessus sur

 15   ma proposition parce que quand je suis arrivé, j'ai demandé s'il y avait un

 16   document où étaient reprises les citations sur les principaux éléments de

 17   droit pertinents dans l'affaire; et il m'a dit que cela n'existait pas,

 18   donc il a commencé à en rédiger un. En plus de ce document, je n'ai rien vu

 19   portant sur l'entreprise criminelle commune; et je ne pense pas que j'aie

 20   jamais entendu Me Stewart en parler.

 21   Q.  Pour terminer, Monsieur Mano, il me reste une seule question à vous

 22   poser. Est-ce que vous seriez en mesure de parler un peu plus en détail à

 23   la Chambre de première instance au sujet de ce qui vous a poussé à inciter

 24   à rédiger une lettre sur un homme qui a travaillé avec vous ou pour qui

 25   vous avez travaillé à titre de bénévole pour le critiquer, pour critiquer

 26   son travail ? Qu'est-ce qui vous a incité à insister auprès du Greffe pour

 27   que ce document me soit communiqué, parce que dans sa première version, je

 28   n'en ai pas eu connaissance; et la lettre, vous ne l'avez pas adressée à


Page 384

  1   moi. Vous l'avez adressée au Greffe, et c'est uniquement par le truchement

  2   du Greffe que cette lettre allait m'atteindre. Donc est-ce que vous avez eu

  3   une raison personnelle ? Qu'est-ce qui vous a motivé ? Est-ce que c'est

  4   quelque chose qui portait sur la crédibilité de votre témoignage ?

  5   R.  Vous m'avez posé plusieurs questions, je vais essayer de répondre à

  6   toutes ces questions que vous m'avez posées.

  7   Premièrement, personnellement, je n'ai rien contre Me Stewart, et ce n'est

  8   pas ça qui m'a incité à agir. Je n'éprouve pas le besoin d'agir à son

  9   égard. Mais ce qui m'a incité c'était la terrible injustice que je voyais

 10   se produire contre vous. Certains de mes collègues m'avaient fait part de

 11   leurs doutes portant sur la qualité de votre défense, et ils se confiaient

 12   en privé, mais ils n'allaient rien faire, ils n'allaient pas agir

 13   publiquement. Donc en partie, c'était parce qu'ils dépendaient des

 14   recommandations qu'allait faire Me Stewart pour la suite de leur carrière.

 15   Puisque moi je ne travaille pas dans le domaine du droit et  puisque

 16   j'ai un poste à l'université qui n'est pas problématique, je n'avais pas

 17   besoin de lettre de recommandation de la part de Me Stewart. Donc j'étais

 18   en position de faire quelque chose, je ne voulais pas qu'une injustice

 19   terrible se poursuive. Si je n'en avais pas informé le Greffe ou le

 20   Tribunal, c'est ce qui se serait produit. Lorsqu'on voit qu'un bâtiment va

 21   brûler, il faut faire quelque chose, il faut appeler les pompiers, on ne

 22   peut pas le laisser simplement disparaître dans les flammes. C'est comme

 23   ça, c'est ce que j'ai pensé à ce moment-là.

 24   C'est la raison pour laquelle j'ai pris contact avec M. Van

 25   de Vliet, j'ai rédigé cette lettre que vous avez ici, et je la lui ai

 26   remise parce que je n'étais pas certain pendant combien de temps j'allais

 27   pouvoir lui parler au moment de notre rendez-vous. Je pensais qu'il valait

 28   mieux coucher quelque chose sur papier. Dans ma déclaration, je lui ai dit


Page 385

  1   que je lui remettais cela pour qu'il le fasse traduire, pour que ce soit

  2   remis à M. Krajisnik. Il m'a dit : "Je donne ma parole que ce sera fait."

  3   Mais en fait, il n'a pas tenu parole parce qu'il ne vous a pas remis cela.

  4   La première chose qu'il a faite c'est de remettre cela à Me Stewart, je ne

  5   sais pas ce que Me Stewart lui a dit, je n'ai jamais vu la réponse de M.

  6   Stewart. Je ne sais pas si je peux demander aux Juges de la Chambre de me

  7   le communiquer, ça m'intéresserait de voir quelle a été sa réponse. Mais

  8   toujours est-il qu'il ne l'a pas faite traduire, il ne vous l'a pas remise

  9   contrairement à ce qu'il m'avait promis. Donc il fallait que je trouve un

 10   autre moyen pour vous faire remettre cela, donc j'ai demandé à un

 11   traducteur qui travaille dans une autre affaire de le traduire et j'allais

 12   vous faxer cela, et c'est plusieurs semaines plus tard que vous l'avez

 13   reçue.

 14   M. KRAJISNIK : [interprétation] Je vous remercie, Madame, Messieurs les

 15   Juges.

 16   M. LE JUGE POCAR : [nterprétation] Il est 10 heures. Monsieur le Juge

 17   Guney, vous avez des questions.

 18   M. LE JUGE GUNEY : J'ai une question d'ordre général. Vous avez dit que

 19   vous avez travaillé avec l'ancien conseil de Défense, Me Stewart, pendant

 20   trois mois et d'une manière bénévole. A la lumière des difficultés d'ordre

 21   pratique que vous avez rencontrées pendant ces trois mois, quelle était

 22   votre raison principale, d'abord, d'accepter un tel travail bénévole, et

 23   quelle était votre raison principale de continuer ? Merci.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une très bonne question, car je suis

 25   convaincu que toutes les personnes qui travaillent ici sont poussées par

 26   des motivations différentes. Certains sont poussés par le désir d'une

 27   progression dans leur carrière, et d'autres par un désir d'argent. Pour ma

 28   part, ma carrière n'a aucun rapport avec le travail que j'effectue par le


Page 386

  1   Tribunal et, par ailleurs, je n'ai pas été rémunéré par ce travail.

  2   A l'évidence, c'est ma formation en histoire et ma formation en droit qui

  3   sont à la base de l'occasion que j'ai vue dans ce travail de garder mon

  4   emploi au Japon tout en réalisant ce travail. Je me suis rendu compte que

  5   je ne pourrais pas abandonner mon poste au Japon pour venir travailler ici

  6   de façon permanente; je ne sais pas si j'aurais pu d'ailleurs travailler de

  7   façon permanente ici. Mais j'ai vu une possibilité de passer l'été ici en

  8   tant que stagiaire et j'y ai vu une opportunité d'en apprendre davantage

  9   sur les événements survenus dans les Balkans et également d'acquérir une

 10   certaine expérience en droit, mais cela me permettait également d'utiliser

 11   mes connaissances en droit et en histoire. Donc c'était, à mon avis,

 12   quelque chose de positif.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Juge Shahabuddeen, je vous prie.

 14   M. SHAHABUDDEEN : [interprétation] Monsieur Mano, j'aimerais vous présenter

 15   mes félicitations respectueuses eu égard aux connaissances qui sont les

 16   vôtres dans les domaines de l'histoire et du droit et, si vous me le

 17   permettez, vous présenter un principe, un principe juridique, le principe

 18   qui indique qu'un tribunal n'est pas une institution où se fait l'histoire.

 19   Est-ce que vous avez déjà entendu exprimer ce principe ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'avais jamais entendu cela jusqu'à

 21   aujourd'hui.

 22   M. SHAHABUDDEEN : [interprétation] Peut-être pourriez-vous effectuer

 23   quelques recherches et vous rendant compte des limites qui sont sous-

 24   tendues par cette proposition.

 25   Alors voici la question que je voudrais vous poser : suis-je en droit

 26   de comprendre que le mécontentement éprouvé par vous à l'égard de Me

 27   Stewart vient du fait qu'apparemment il manifestait quelques réticences à

 28   accepter les conseils et qu'il se montrait déplaisant, arrogant et


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  1   condescendant ? Est-ce que ceci résumerait les motifs de mécontentement qui

  2   étaient les vôtres ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il importerait que vous

  4   ajoutiez le mot "désorganisé."

  5   M. SHAHABUDDEEN : [interprétation] "Désorganisé," oui, oui. J'admets tout à

  6   fait d'inclure ce terme.

  7   J'en arrive à ma dernière question. Auriez-vous la moindre idée de

  8   l'endroit où se trouve Me Stewart aujourd'hui ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en ai pas la moindre idée.

 10   M. SHAHABUDDEEN : [interprétation] Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] S'il n'y a pas d'autres questions de la

 12   part des Juges, je pense que l'heure est arrivée de faire une pause. Donc

 13   l'heure de la pause est arrivée. Il faut que nous passions au préalable en

 14   audience publique avant de décréter la pause.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à

 16   nouveau en audience publique.

 17   [Audience publique]

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons donc

 19   faire une pause jusqu'à 10 heures 30, heure à laquelle nous reprendrons

 20   l'audience.

 21   --- L'audience est suspendue à 10 heures 05.

 22   --- L'audience est reprise à 10 heures 34.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] L'audience est rouverte, et je me

 24   tourne vers l'Accusation qui va maintenant interroger le témoin.

 25   Contre-interrogatoire par M. Kremer :

 26   Q.  [interprétation] Monsieur Mano –

 27   M. KREMER : [interprétation] Je demanderais que nous passions immédiatement

 28   à huis clos partiel.


Page 388

  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

  3   Juges, nous sommes à huis clos partiel.

  4   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre] 

  5   M. KREMER : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Mano, durant votre déposition ce matin, vous avez dit qu'à un

  7   certain moment vous avez fait traduire votre lettre en serbe avant de la

  8   faxer à M. Krajisnik. Pourriez-vous nous donner la date du jour où vous

  9   avez faxé cette lettre à M. Krajisnik ?

 10   R.  Oui. Le 19 octobre.

 11   Q.  2004 ?

 12   R.  Exact.

 13   Q.  A votre connaissance, M. Krajisnik a-t-il reçu personnellement votre

 14   lettre ?

 15   R.  Je ne sais pas s'il l'a reçue ce jour-là, mais je sais qu'il l'a reçue.

 16   Q.  Très bien. Donc vous savez que M. Krajisnik a eu connaissance des

 17   inquiétudes qui étaient les vôtres par rapport à l'attitude en particulier

 18   de Me Stewart, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  J'aimerais appeler votre attention sur les paroles prononcées par M.

 21   Krajisnik durant une audience tenue en date du 28 février 2005, page 9 603

 22   du compte rendu d'audience, M. Krajisnik déclare ce qui suit, je cite :

 23   "Je dois dire que ce qu'ont dit mes deux conseils ici aujourd'hui, je

 24   l'appuie. Je n'ai pas d'autres commentaires à formuler eu égard aux

 25   services rendus par mes conseils qui sont de très bons avocats."

 26   Donc ce que je vous dis, Monsieur, c'est que M. Krajisnik n'a pas accepté

 27   ce que vous lui disiez eu égard à la compétence de ses conseils puisque,

 28   plus tard, il affirme que ses conseils travaillent de très bonne façon; et


Page 389

  1   il le dit dans le prétoire. Etes-vous d'accord avec cette déclaration ?

  2   R.  Me demandez-vous si je suis d'accord pour affirmer que M. Krajisnik a

  3   accepté mes conseils ? C'est ça votre question ?

  4   Q.  Je vous dis qu'il a repoussé vos questions.

  5   R.  Apparemment, ce jour-là, il a rejeté mes conseils. Mais d'après ce que

  6   j'ai pu constaté au travers des contacts que j'ai eus avec sa fille, en

  7   effet j'ai eu des contacts avec elle par voie de courriels, il ne pouvait

  8   rien faire quant à cette attitude et il a donc décidé de poursuivre dans

  9   les mêmes conditions. Donc c'était plutôt le reflet d'une impuissance de sa

 10   part d'affirmer qu'il allait poursuivre dans les mêmes conditions.

 11   Q.  Combien de temps avez-vous été en contact avec sa fille ?

 12   R.  Je pense que la première fois que j'ai eu des contacts avec elle se

 13   situe sans doute en décembre 2004.

 14   Q.  Et vous avez continué à communiquer avec elle par courriel ?

 15   R.  Je ne dirais pas que je recevais un message toutes les semaines, mais

 16   j'en ai reçu de sa part deux ou trois par an, oui.

 17   Q.  Est-ce que ces communications avaient un rapport avec le procès, et

 18   notamment le pourvoi en appel ?

 19   R.  Parfois.

 20   Q.  Est-ce qu'elle vous apportait des éléments d'information quant à sa

 21   stratégie dans le cadre du pourvoi en appel pendant le procès ?

 22   R.  Non, elle n'est jamais rentrée dans ce genre de détails.

 23   Q.  Nous savons sur la base de votre déposition, que M. Krajisnik a eu

 24   connaissance de la teneur de votre lettre. Est-ce que vous avez envoyé

 25   cette lettre à qui que ce soit d'autre au Tribunal ?

 26   R.  Au Tribunal ? De quelle période parlez-vous ?

 27   Q.  Disons, -- pour commencer, disons 2004.

 28   R.  D'accord. Comme je l'ai dit, l'assistant linguistique d'une autre


Page 390

  1   affaire a traduit ma lettre à ma demande. Donc oui, il y a eu une autre

  2   personne du Tribunal qui a été au courant.

  3   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion d'envoyer votre lettre ou un autre

  4   document aux Juges de la Chambre de première instance ?

  5   R.  Oui, en fait, j'ai envoyé une lettre au Juge qui jugeait l'affaire.

  6   Q.  A quel moment ?

  7   R.  Le 26 novembre.

  8   Q.  Qu'y avait-il dans votre lettre ?

  9   R.  Je crois que j'ai envoyé une copie de la lettre que j'avais adressée à

 10   M. Van de Vliet, aux Juges de la Chambre, ainsi que la réponse de M. Van de

 11   Vliet, ma réponse à sa réponse, puis une brève lettre que j'ai envoyée aux

 12   Juges pour leur dire quelles étaient mes inquiétudes par rapport à la

 13   situation et mon désir de les en informer.

 14   Q.  Est-ce que vous avez obtenu une réponse des Juges de la Chambre de

 15   première instance ?

 16   R.  J'ai obtenu une réponse dans laquelle ils disaient qu'ils n'allaient

 17   pas examiner les documents envoyés par moi parce que je ne travaillais pas

 18   au Tribunal et qu'ils n'étaient pas habilités à recevoir des éléments

 19   d'information de personnes extérieures au Tribunal.

 20   Q.  Qu'est-ce qui vous a poussé à envoyer une lettre aux Juges de Chambre

 21   de première instance pour exprimer vos positions, pour leur faire part de

 22   vos impressions ?

 23   R.  Ceci m'a été suggéré. J'ai pensé en effet, étant donné la réponse que

 24   j'ai reçue de M. Van de Vliet, que quelqu'un d'autre au Tribunal devrait

 25   être au courant de cela, et en particulier les Juges.

 26   Q.  Qui vous a laissé entendre cela ?

 27   R.  C'était un autre conseil de la Défense.

 28   Q.  Qui ça ?


Page 391

  1   R.  Michael Karnavas.

  2   Q.  Est-il permis de dire, Monsieur Mano, que vous n'avez aucune compétence

  3   professionnelle vous permettant d'émettre un commentaire au sujet de la

  4   façon de gérer ou de préparer une affaire importante au pénal ?

  5   R.  Non, je dirais qu'il n'est pas permis de le dire.

  6   Q.  Donc vous affirmez que vous avez une grande expérience dans les

  7   affaires pénales importantes, et que vous aviez cette expérience en 2004 ?

  8   R.  Si vous me demandez si j'avais de l'expérience dans la préparation

  9   d'une affaire importante au pénal, je répondrais non. Non, en effet, je

 10   n'ai pas ce genre d'expérience.

 11   Q.  Et vous n'avez jamais pratiqué le droit, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je travaille pour un cabinet d'avocats aux Etats-Unis. J'y ai travaillé

 13   pendant une brève période.

 14   Q.  Combien de temps ?

 15   R.  Trois mois.

 16   Q.  En tant que stagiaire ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Je vais à nouveau vous poser la question : vous n'avez jamais pratiqué

 19   le droit durant votre vie, n'est-ce pas ?

 20   R.  En tant que conseil au pénal, non.

 21   Q.  Vous n'avez jamais pratiqué le droit pénal dans votre vie, n'est-ce pas

 22   ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Vous n'avez jamais cité à comparaître un témoin dans un prétoire,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Vous n'avez jamais présenté de plaidoirie ou de réquisitoire dans un

 28   prétoire, n'est-ce pas ?


Page 392

  1   R.  Non.

  2   Q.  Vous n'avez jamais préparé la déposition d'un témoin expert, n'est-ce

  3   pas ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Donc, lorsque vous avez rejoint l'équipe de Défense de M. Krajisnik le

  6   5 juillet 2006 --

  7   R.  Non, j'ai rejoint l'équipe le 6 juillet 2004.

  8   Q.  Le 6 juillet 2004. Vous aviez donc derrière vous trois mois de travail

  9   en tant que stagiaire dans un cabinet d'avocat aux Etats-Unis, n'est-ce pas

 10   ?

 11   R.  Exact.

 12   Q.  J'ai décrit pendant votre déposition un certain nombre de missions que

 13   vous avez accomplies pendant cette période où vous étiez stagiaire. Peut-

 14   être pourriez-vous les passer en revue une par une afin de nous les

 15   remettre en mémoire.

 16   R.  D'accord. La première, comme je l'ai dit, c'était la mission consistant

 17   à obtenir un accord sur les faits entre l'Accusation et la Défense. Si je

 18   ne me trompe, deux ou trois séries de faits ont été exposées durant la

 19   première semaine. Après cela, quelle était la mission suivante ? La mission

 20   suivante a sans doute consisté à préparer le contre-interrogatoire d'un

 21   témoin; après quoi, si je ne m'abuse, j'ai travaillé à la préparation de

 22   l'audition d'un témoin expert, et ce, pendant plusieurs semaines, si je me

 23   souviens bien; après quoi il y a eu la préparation d'un autre contre-

 24   interrogatoire de témoin. Je ne m'en souviens plus très, très bien. Puis

 25   j'ai travaillé à la rédaction d'un document de contexte pendant plusieurs

 26   semaines, et la dernière mission que j'ai accomplie, si je me souviens

 27   bien, a consisté à préparer le contre-interrogatoire d'un témoin.

 28   Q.  Il me semble donc que l'on vous assignait des missions bien précises


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  1   avec des objectifs bien précis, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Quel était le nombre de personnes travaillant dans l'équipe durant

  4   l'été 2004 ?

  5   R.  Cela variait. Le nombre de personnes faisant partie de l'équipe variait

  6   car il y avait des stagiaires qui partaient, d'autres qui arrivaient. Il y

  7   a en avait qui étaient déjà présents avant mon arrivée et qui sont partis

  8   avant mon départ. D'autres sont arrivés avant que je ne parte et sont

  9   partis après mon départ.

 10   Je pense que quand je suis arrivé, en dehors de Nicholas Stewart, il y

 11   avait Chrissa Loukas, Tatjana Cmeric, la commis aux audiences. Il y avait

 12   également Andre Junovic, Mika Dixon [phon], et puis un autre stagiaire,

 13   Thomas Derrington. Et il y avait quelqu'un qui s'appelait Karen Brackman

 14   [phon], que je ne connaissais pas très bien. Donc voilà, je crois, le

 15   nombre de personnes travaillant au sein de l'équipe à la fin du mois de

 16   juillet.

 17   Q.  A votre connaissance, est-ce qu'il y avait également des enquêteurs qui

 18   travaillaient sur le terrain dans la région ?

 19   R.  Je crois qu'il y avait un enquêteur, en effet.

 20   Q.  Y avait-il des consultants ou des conseillers qui travaillaient pour Me

 21   Stewart et Chrissa Loukas ?

 22   R.  Qu'entendez-vous par là exactement ?

 23   Q.  M. Neskovic, par exemple ?

 24   R.  D'accord. Si vous vous penchez sur les arguments présentés oralement le

 25   16 juillet, l'Accusation a évoqué le nom de M. Neskovic à ce moment-là; et

 26   Nicholas Stewart a dit -- je ne voudrais pas le citer de façon erronée, en

 27   tout cas, il a prononcé des mots qui semblaient indiquer qu'il avait très

 28   peu de contacts avec M. Neskovic car si je parle bien du même M. Neskovic


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  1   que vous, c'était quelqu'un qui ne parlait que la langue serbe, et Me

  2   Stewart ne parlant pas le serbe, ses contacts avec M. Neskovic, lorsqu'ils

  3   avaient lieu, se faisaient par le biais d'un interprète et par écrit.

  4   Q.  Mais il agissait toujours en tant que conseiller à l'époque, n'est-ce

  5   pas ?

  6   R.  Oui, mais dans un cadre très limité.

  7   Q.  Ces autres stagiaires et ces autres personnes qui travaillaient dans

  8   cette affaire avaient des missions bien précises, comme vous, n'est-ce pas

  9   ?

 10   R.  Oui, bien sûr.

 11   Q.  Ces missions étaient clairement définies ?

 12   R.  Pour accomplir une mission, je suppose qu'elle doit être clairement

 13   définie. Je ne sais pas comment on pourrait accomplir une mission qui ne

 14   serait pas clairement définie.

 15   Q.  D'accord. Votre lettre date du 23 septembre 2004. Quand l'avez-vous

 16   rédigée ?

 17   R.  Je ne saurais vous le dire exactement, mais j'y ai sans doute consacré

 18   la veille ou les deux jours précédents.

 19   Q.  Avez-vous examiné des éléments écrits, des notes, des transcriptions,

 20   des documents pour préparer cette lettre ?

 21   R.  A ce moment-là, je ne m'en souviens pas, mais je ne saurais le dire. Je

 22   ne sais pas.

 23   Q.  Est-ce que quelqu'un vous a aidé à établir cette lettre ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Est-ce que vous avez discuté de la teneur de cette lettre avant de la

 26   signer et de la remettre à M. Van de Vliet ?

 27   R.  Discuté avec qui ?

 28   Q.  Avec n'importe qui.


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 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   R.  Non. Pas que je sache, non.

  2   Q.  Quand vous avez écrit cette lettre, vous commencez bien cette lettre

  3   par les deux mots "Je crois," n'est-ce pas ?

  4   R.  Je vous demande une seconde. Je voudrais retrouver un exemplaire de

  5   cette lettre, car je ne l'ai pas sous les yeux en ce moment-là.

  6   Q.  Je vous en prie. Certainement.

  7   R.  Voilà. J'ai l'exemplaire de la lettre sous les yeux, maintenant.

  8   Q.  Donc, dites-moi si je me trompe, je vous prie. Ce que je vous disais,

  9   en tout cas, c'est mon avis, dans cette lettre on ne trouve qu'une opinion

 10   de profane au sujet de la qualité de travail de gestion de Nicholas Stewart

 11   au sein de l'équipe de Défense à l'époque, puisqu'en septembre, cela

 12   faisait trois mois à peine que vous faisiez partie de cette équipe. Vous y

 13   étiez arrivé en juillet, donc de juillet à septembre 2004.

 14   R.  Est-ce que c'était une question ?

 15   Q.  Oui. Etes-vous d'accord avec ce que je viens de dire ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Je vais citer le premier paragraphe assez long qui commence par les

 18   mots : "…une connaissance des faits de la part d'une personne moyennement

 19   intelligente." Je suppose après avoir entendu votre déposition ce matin que

 20   vous vous rendiez compte que ce que permettaient de penser ces mots de Me

 21   Stewart était inexact, n'est-ce pas ? C'est bien cela ?

 22   R.  Vous m'avez demandé il y a un instant si j'avais des notes ou des

 23   documents. Je pense que je n'avais aucune note, aucun document sur moi.

 24   Donc c'est de mémoire que je vais vous rappeler ce qu'il a dit dans la

 25   salle. Depuis, j'ai relu les arguments présentés oralement le 16 juillet et

 26   ce que vous dites n'est peut-être pas tout à fait exact, à quelques mots

 27   près.

 28   Q.  La Chambre peut vérifier au compte rendu, mais pourquoi avez-vous écrit


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  1   ce que j'ai cité si vous n'aviez pas vérifié que c'était bien les mots

  2   précis utilisés par lui ?

  3   R.  Je ne crois pas l'avoir écrit dans mes notes.

  4   Q.  Mais vous êtes d'accord que c'était inexact ?

  5   R.  En effet.

  6   Q.  D'accord.

  7   R.  Mais la citation n'est pas exacte.

  8   Q.  Et vous avez utilisé des citations ailleurs. Au bas de la deuxième

  9   page. Vous parlez de Me Stewart et vous dites, je cite : "…il a déclaré

 10   dans le prétoire devant les Juges qu'il ne savait pas si", ensuite vous

 11   mettez le nom de M. Krajisnik entre parenthèses et vous poursuivez en

 12   disant : "s'il était au courant ou pas." Est-ce que vous avez relu la

 13   citation au compte rendu d'audience avant de venir ici aujourd'hui ?

 14   R.  Non, je n'en avais pas le temps.

 15   Q.  Je peux vous citer ce passage.

 16   R.  Hm-hm.

 17   Q.  Mais j'ai quelques difficultés à le trouver.

 18   R.  D'accord.

 19   Q.  Donc, je vous dis, Monsieur, que cette citation est également inexacte.

 20   R.  D'accord. Je ne sais pas. Je citais de mémoire, donc il faudrait que je

 21   vérifie par moi-même. Si vous m'en laissez le temps, je pourrais revenir

 22   peut-être devant vous avec cet élément d'information plus tard.

 23   Q.  Vous n'avez rien sur vous aujourd'hui qui puisse vous permettre de

 24   vérifier si la citation attribuée à Me Stewart était exacte ou pas; c'est

 25   bien ça ?

 26   R.  Je n'ai rien sur moi ici aujourd'hui, en effet.

 27   Q.  A l'époque où vous prépariez la rédaction de votre lettre, sachant

 28   qu'elle allait être remise au Greffe et qu'elle attaquait Me Stewart, vous


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  1   n'avez pas pris le temps de vérifier si cette situation était exacte,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  D'abord, je n'attaquais pas Me Stewart; deuxièmement, ce n'était pas

  4   une question de prendre le temps pour faire quelque chose, je n'avais pas

  5   le temps.

  6   Q.  Je vous dis, Monsieur, que toutes les autres citations que vous faites

  7   sont également inexactes.

  8   R.  Vous pouvez le dire. Je ne sais pas à quelles citations vous faites

  9   référence.

 10   Q.  Le problème des sous-fifres, par exemple, ou du menu fretin. Vous

 11   dites, je cite : "Je ne vais pas rester ici, il n'y a ici que des sous-

 12   fifres." Est-ce que vous auriez pu commettre une erreur en reprenant cette

 13   citation ?

 14   R.  Il a utilisé ces mots, il a utilisé les mots de sous-fifres.

 15   Q.  Mais les a-t-il utilisés dans le contexte que vous présentez, Monsieur

 16   ?

 17   R.  Il les a utilisés dans ce contexte.

 18   Q.  Alors vous laissez entendre en citant ces propos que vous attribuez à

 19   Me Stewart dans lesquels il aurait utilisé les mots de menu fretin, qu'il

 20   manifestait une attitude condescendante à l'égard de M. Gaynor et de tous

 21   les autres substituts plus jeunes du Procureur qui travaillaient dans cette

 22   affaire; c'est bien cela ?

 23   R.  Oui. En tout cas, à l'égard de M. Gaynor. Je ne saurais parler de tous

 24   les autres substituts plus jeunes du bureau du Procureur.

 25   Q.  Est-ce que cela vous surprendrait, Monsieur, que Me Stewart se soit

 26   trouvé dans le prétoire en présence de M. Gaynor à plusieurs reprises et

 27   qu'il ait lui-même contre-interrogé le témoin interrogé au principal par M.

 28   Gaynor ?


Page 399

  1   R.  Pourquoi est-ce que cela me surprendrait ?

  2   Q.  Vous avez laissé entendre qu'il aurait été en dessous de sa dignité de

  3   se trouver dans le prétoire en présence de professionnels aussi jeunes et

  4   peu expérimentés.

  5   R.  Il n'avait peut-être pas d'autres possibilités que d'être dans le

  6   prétoire face à M. Gaynor.

  7   Q.  Vous dites que ce jour-là il a manifesté une attitude condescendante en

  8   ne se trouvant pas dans le prétoire aux côtés de Me Loukas lorsque M.

  9   Gaynor interrogeait un témoin ?

 10   R.  Je ne vois pas où est la question.

 11   Q.  Je vous dis, Monsieur, que Me Stewart se trouvait dans le prétoire les

 12   quatre jours suivants après que M. Gaynor a entendu ce témoin le 26 juillet

 13   2004, et que Me Stewart était dans le prétoire les quatre jours suivants et

 14   a mené le contre-interrogatoire d'un témoin important qui a été entendu au

 15   principal par un autre substitut assez peu expérimenté, Stephen Margetts.

 16   Est-ce que vous pensez qu'il aurait mieux utilisé son temps dans le

 17   prétoire à contre-interroger un témoin entendu par M. Gaynor ou par Me

 18   Loukas que de faire autre chose que de préparer l'audition d'un témoin très

 19   important ?

 20   R.  Je ne dis rien de ce genre. Je dis simplement qu'il a prononcé ces mots

 21   lorsqu'il a quitté le prétoire.

 22   Q.  En vous fondant sur un commentaire rapide qui était peut-être une

 23   plaisanterie, vous avez décidé qu'il manifestait une attitude

 24   condescendante à l'égard de tous les substituts jeunes du bureau du

 25   Procureur; c'est bien cela ?

 26   R.  Je n'ai pas interprété ses propos comme l'expression d'une

 27   plaisanterie.

 28   Q.  Vous avez remis votre lettre à M. Van de Vliet. Est-ce qu'il vous a


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  1   répondu ?

  2   R.  Quand ?

  3   Q.  Une fois qu'il a reçu votre lettre de votre part.

  4   R.  Nous avons eu à ce moment-là une conversation à ce sujet dans son

  5   bureau, oui.

  6   Q.  Est-ce qu'il vous a envoyé quoi que ce soit par écrit à quelque moment

  7   que ce soit pour vous expliquer ce qu'il avait fait de votre lettre, s'il

  8   en avait fait quelque chose ?

  9   R.  Oui. Le 4 octobre, j'ai reçu de lui un fax.

 10   Q.  Très bien. Que disait ce fax ?

 11   R.  Un instant, je vous prie. Est-ce que vous voulez le lire ou le résumer

 12   à mon intention ? Comment est-ce que vous voulez --

 13   Q.  Peut-être pourriez-vous nous donner le sens de ce fax.

 14   R.  Pour l'essentiel, il disait qu'après avoir entendu les explications de

 15   Me Stewart, il pensait que je n'avais pas passé suffisamment de temps avec

 16   Me Stewart pour être habilité à formuler le genre d'évaluation que j'ai

 17   formulée quant à son travail et qu'il n'était pas prêt, à ce moment-là, à

 18   expédier cette lettre à M. Krajisnik.

 19   Q.  Bien. Vous avez ressenti la nécessité d'adresser cette lettre à M.

 20   Krajisnik vous-même. Est-ce que c'est à ce moment-là que vous avez décidé

 21   de faire traduire la lettre et de l'envoyer à M. Krajisnik ?

 22   R. C'est exact, en effet.

 23   Q.  D'accord.

 24   R.  Mon objectif n'était pas simplement de remettre cette lettre entre les

 25   mains de M. Van de Vliet. Mon objectif était que cette lettre arrive entre

 26   les mains de M. Krajisnik.

 27   Q.  Mais si tel était votre objectif, pourquoi est-ce que vous n'avez pas

 28   eu recours à la procédure que vous avez utilisée finalement, à savoir


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  1   remettre ce document à M. Krajisnik en serbe ?

  2   R.  De moi-même ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?

  3   Q.  Vous avez réussi à faire traduire cette lettre.

  4   R.  Oui, mais si j'avais pensé à cela dès le départ, je l'aurais fait.

  5   Q.  Vous avez dit que vous aviez prévu une réunion avec M. Van de Vliet et

  6   que vous aviez préparé cette lettre dans le but d'avoir quelque chose à

  7   discuter durant cette réunion, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, parce que comme je l'ai dit, je ne savais pas si je pourrais

  9   m'entretenir avec lui longtemps. Donc je pensais qu'il serait préférable

 10   que j'aie quelque chose par écrit au cas où éventuellement il m'aurait dit

 11   : "Je n'ai qu'une minute à vous consacrer, qu'avez-vous à me dire ?" Dans

 12   ce cas-là, j'aurais pu lui répondre : "Voici une lettre. Prenez-en

 13   connaissance et dites-moi ce que vous en pensez."

 14   Q.  Est-ce qu'avant de rédiger cette lettre vous avez demandé à Me Stewart

 15   de pouvoir discuter avec lui quant à vos positions s'agissant de vos

 16   problèmes précis qui avaient surgi, au moins dans votre esprit, durant la

 17   période où vous avez travaillé comme stagiaire ?

 18   R.  Je pense que nous en avons déjà parlé ce matin. J'ai tenté d'émettre

 19   des objections à plusieurs reprises, mais après plusieurs tentatives de ce

 20   genre et plusieurs rejets de sa part, j'ai abandonné toute tentative de

 21   donner des conseils à Me Stewart, tout comme l'ont fait mes collègues,

 22   d'ailleurs.

 23   Q.  Est-ce que vous avez remis à Me Stewart une copie de votre lettre avant

 24   de l'envoyer ou de la remettre à M. Van de Vliet ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Ceci est implicite à la lecture du courriel de M. Van de Vliet, on peut

 27   comprendre qu'il a communiqué au moins certains éléments d'information

 28   contenus dans votre lettre à Me Stewart, n'est-ce pas ?


Page 402

  1   R.  C'est exact, il lui a montré la lettre, oui.

  2   Q.  Très bien. Me Stewart a réagi, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est exact.

  4   Q.  Je vais vous lire une page du compte rendu d'audience, page 9 599 de

  5   l'audience du 28 février 2005. Me Stewart dit, et c'est consigné au compte

  6   rendu, je cite :

  7   "J'ai été soumis personnellement aux plus viles attaques de la part

  8   d'un ancien membre de mon équipe qui a proféré des accusations dépourvues

  9   de véracité quant à la façon dont j'utilisais le temps à ma disposition

 10   pendant une suspension des audiences, quant à la charge de travail que

 11   j'accomplissais dans la présente affaire en affirmant que je n'y

 12   travaillais pratiquement pas, Monsieur le Président." Je m'arrête là. Je

 13   vous dis, Monsieur, que ceci est la réaction de Me Stewart à votre lettre;

 14   c'est bien ça, n'est-ce pas ?

 15   R.  Je ne sais pas si c'est bien cela, mais il est possible que ce le soit,

 16   oui.

 17   Q.  S'agissant de ce qu'il a déclaré eu égard au travail qu'il

 18   accomplissait dans l'affaire Krajisnik, il est dit ici qu'il n'en a

 19   pratiquement pas fait. En dehors de l'exemple de son voyage à Londres

 20   pendant une journée, vous n'avez aucun autre fait à citer qui permettrait

 21   de penser qu'il travaillait sur d'autres affaires pendant le temps où vous

 22   étiez stagiaire dans son équipe, n'est-ce pas ?

 23   R.  Il a dit, en fait, au cours d'arguments présentés oralement le 16

 24   juillet 2004, il a dit qu'il continuait à avoir une clientèle à Londres et

 25   que l'affaire Krajisnik n'était pas la seule affaire sur laquelle il

 26   travaillait.

 27   Q.  Est-ce que vous avez compris qu'il avait été inclus dans cette affaire

 28   un an avant à peine, et qu'il essayait de se libérer de sa clientèle


Page 403

  1   extérieure lorsqu'il a pris en charge l'affaire Krajisnik en tenant les

  2   représentants du Tribunal informés de la façon dont il utilisait son temps

  3   ?

  4   R.  En fait, il a été introduit dans l'affaire Krajisnik plus d'un an

  5   avant, et je savais qu'il essayait de s'extraire de ses obligations dans

  6   son cabinet d'avocats à Londres, oui.

  7   Q.  Mais revenons à ma question. Vous ne connaissez qu'un seul exemple, le

  8   voyage à Londres qui n'a duré que 15 jours, qui ait été lié à des affaires

  9   professionnelles, n'est-ce pas ?

 10   R.  Il a effectué un autre voyage à Londres en septembre quand il est allé

 11   en Espagne, il est allé en Espagne le 8 septembre. Selon le courriel dont

 12   je dispose, il prévoyait de passer le dernier jour de ce voyage à Londres

 13   avant de revenir à La Haye. Je ne sais pas combien de temps il est resté à

 14   Londres.

 15   Q.  Vous ne savez pas ce qu'il a fait à Londres non plus, n'est-ce pas ?

 16   R.  Non, Monsieur.

 17   Q.  D'accord. Alors comment se fait-il qu'en septembre 2007, vous en êtes

 18   arrivé à envoyer un fax à M. Krajisnik au quartier pénitentiaire auquel

 19   vous avez annexé votre lettre ?

 20   R.  En 2007 ?

 21   Q.  Oui. Le 13 septembre 2007, vous lui avez envoyé une copie de votre

 22   lettre.

 23   R.  Apparemment, il avait égaré l'exemplaire précédent que je lui avais

 24   envoyé, donc il m'a prié de lui en envoyer un autre.

 25   Q.  Qui vous l'a demandé ?

 26   R.  Je crois que c'était M. Krajisnik en personne.

 27   Q.  Vous avez dit également que vous vous étiez entretenu avec M.

 28   Karganovic, n'est-ce pas ?


Page 404

  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Combien de fois avez-vous parlé à M. Karganovic avant septembre 2007,

  3   date à laquelle vous avez envoyé la lettre à M. Krajisnik ?

  4   R.  Je ne sais pas, mais Steve et moi sommes amis.

  5   Q.  Depuis combien de temps êtes-vous amis ?

  6   R.  Depuis que j'ai commencé à travailler au TPIY.

  7   Q.  Est-ce que vous avez maintenu des contacts réguliers avec lui au cours

  8   des années ?

  9   R.  Je présente mes excuses pour la rapidité du débit aux interprètes. Il a

 10   interrompu ses contacts avec moi depuis quelques temps, mais j'ai conservé

 11   plus ou moins quelques contacts avec lui.

 12   Q.  Quand, dans votre souvenir, avez-vous parlé pour la première fois avec

 13   M. Karganovic de votre lettre du 23 septembre 2004 ?

 14   R.  C'était après qu'il soit devenu commis aux audiences dans l'affaire

 15   Krajisnik, mais je ne saurais vous donner un jour précis.

 16   Q.  Quelle était la nature des questions qu'il vous posait au sujet de la

 17   lettre ?

 18   R.  Je crois qu'il exprimait des inquiétudes au sujet de la façon dont Me

 19   Stewart menait la défense, et j'ai évoqué ma lettre dans ce contexte.

 20   Q.  Vous l'avez aidé à rédiger sa lettre du mois d'octobre 2007 ?

 21   R.  Non, je ne l'ai pas fait.

 22   Q.  Est-ce qu'il vous a parlé du fait qu'il avait l'intention de faire

 23   cette lettre ?

 24   R.  Je pense que j'ai déjà dit aujourd'hui que je savais qu'il allait

 25   rédiger la lettre en question, mais je ne l'ai jamais vue; je n'en connais

 26   pas la teneur. Je ne sais rien au sujet de cette lettre.

 27   Q.  Je vous soumets que l'accusé et l'appelant en l'espèce, M. Krajisnik, a

 28   des connaissances d'expert, des connaissances de première main concernant


Page 405

  1   le contexte des événements qui se sont produits en Bosnie-Herzégovine

  2   jusqu'en 1995.

  3   R.  Je suis d'accord avec cela.

  4   Q.  Pour vous, il ne fait aucun doute que MM. Stewart et Krajisnik ont

  5   évoqué cela régulièrement, ont parlé des préparations et du déroulement de

  6   l'affaire ?

  7   R.  Je ne le sais pas de première main, je ne sais pas quelle a été la

  8   fréquence de leurs rencontres, mais je suppose qu'ils ont parlé de

  9   l'affaire.

 10   Q.  M. Stewart allait recueillir l'avis sur les éléments historiques de

 11   l'affaire dans la mesure où il ne les comprenait pas, il allait chercher

 12   l'avis de M. Krajisnik ?

 13   R.  Je suppose qu'il aurait suivi son avis, son conseil.

 14   Q.  M. Krajisnik était là pour lui donner ses conseils. C'était ça ma

 15   question.

 16   R.  Oui, il était disponible, tout à fait.

 17   Q.  Très bien. M. Neskovic était là également ?

 18   R.  Oui, il était disponible.

 19   Q.  Avant que vous ne critiquiez M. Stewart, ses lacunes, à savoir qu'il ne

 20   connaissait pas le contexte historique et politique de l'affaire Krajisnik,

 21   est-ce que vous avez eu l'occasion de vous pencher sur le contre-

 22   interrogatoire mené par Me Krajisnik avec le Témoin 623 qui est venu

 23   déposer du 20 au 23 septembre 2004 ?

 24   R.  Excusez-moi, qui était ce témoin ?

 25   Q.  Je ne peux pas vous donner le nom.

 26   R.  Oui, très bien. Il est possible que j'aie eu à examiner le témoignage

 27   de ce témoin ou les dépositions faites par ce témoin.

 28   Q.  Vous auriez donné votre avis à Me Stewart pour son contre-


Page 406

  1   interrogatoire ?

  2   R.  Généralement, ce que je faisais, c'était de dactylographier mes

  3   commentaires et je les remettais à Me Loukas.

  4   Q.  C'est elle qui les remettait au conseil qui allait contre-interroger si

  5   ce n'était pas elle qui allait se charger du contre-interrogatoire ?

  6   R.  C'est ce que je suppose.

  7   Q.  C'est elle qui s'occupait de cette partie-là du travail, de préparer le

  8   contre-interrogatoire ?

  9   R.  Je ne sais pas si j'utiliserais les mêmes termes que vous, mais je

 10   dactylographiais mes commentaires, je les remettais à Me Loukas.

 11   Q.  Lorsqu'il s'agissait des témoins qui venaient déposer sur des affaires

 12   politiques, Patrick Treanor, par exemple, l'expert, et pour ce qui est de

 13   son contre-interrogatoire en avril 2004 par Me Stewart, est-ce que vous

 14   avez pu revoir cela avant de formuler vos commentaires ?

 15   R.  Non, pas avant que je fasse mes commentaires.

 16   Q.  Mais pourquoi est-ce que vous avez fait cela ?

 17   R.  Ce qui m'intéressait c'était la déposition de M. Treanor parce que

 18   j'avais demandé à Chrissa Loukas sur quelles bases on avait accepté tous

 19   ces témoins. M. Krajisnik -- il n'y avait aucune preuve démontrant que M.

 20   Krajisnik n'avait jamais commis le crime d'ordonner à qui que ce soit de

 21   tuer quelqu'un ou qu'il ait même été présent dans nombre de municipalités

 22   et de sites mentionnés par l'Accusation. Une question typique qu'aurait

 23   posée un avocat américain, c'est la même que j'ai posée, à savoir sur

 24   quelle base est-ce qu'on citait ces témoins. Me Loukas ne m'a pas dit sur

 25   quelle base M. Treanor venait déposer.

 26   Q.  Vous vous êtes quand même penché sur le contre-interrogatoire de Me

 27   Stewart, indépendamment de ce qu'elle vous a dit ?

 28   R.  J'avais déjà lu les documents de M. Treanor, les documents qu'il avait


Page 407

  1   fournis en tant que témoin expert, parce que j'étais en train de préparer

  2   les témoins experts pour notre client.

  3   Q.  Très bien. Vous n'étiez pas au courant des discussions qui se sont

  4   déroulées au sein de l'équipe de la Défense portant sur la citation des

  5   témoins experts pendant l'affaire Krajisnik ?

  6   R.  Vous voulez dire avant ou après que je sois là ?

  7   Q.  Après votre départ.

  8   R.  Non, absolument pas.

  9   Q.  Donc la seule chose au sujet de laquelle vous pouvez témoigner c'est

 10   que la Défense envisageait de citer des témoins experts qui viendraient

 11   déposer sur certains domaines et que vous avez pris part partiellement à

 12   cet aspect-là du travail ?

 13   R.  C'est exact.

 14   Q.  Vous avez évoqué les points d'accord ou le processus menant à ce que

 15   les parties se mettent d'accord. C'est quelque chose qui était en cours en

 16   juillet 2004 ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Vous étiez présent au à moins deux réunions où il était question de se

 19   mettre d'accord sur des points d'accord ?

 20   R.  Deux réunions.

 21   Q.  Vous avez pu revoir cette liste qui a été proposée, liste dressée de

 22   points d'accord ?

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Comment est-ce que, généralement, l'Accusation proposait chacun de ces

 25   faits à la Défense ? C'était point par point qu'ils étaient soumis à la

 26   Défense avec les déclarations des témoins qui allaient venir déposer là-

 27   dessus; c'est exact ?

 28   R.  Non, je ne dirais pas que c'est exact, parce que parfois il y avait des


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  1   déclarations d'ordre général, des déclarations rédigées par l'Accusation

  2   qui pouvaient se fonder sur les déclarations de plusieurs témoins ou, par

  3   exemple -- en tout cas, ce n'était pas toujours les déclarations d'un

  4   témoin pour un fait proposé.

  5   Q.  Donc, il se pouvait qu'il y ait deux ou trois témoins qui déposent sur

  6   un fait ou sur plusieurs faits ?

  7   R.  Oui. Par exemple, une phrase sur trois ou quatre faits différents.

  8   Q.  Et c'était ventilé, donc chaque fait dans cette déclaration pouvait

  9   être examiné, accepté ou rejeté ?

 10   R.  Oui. Mais il y avait aussi des déclarations qui n'étaient pas

 11   attribuées, il y avait des phrases en plus, et c'était ça qui était le

 12   problème. Ce n'était pas les déclarations des témoins, mais des phrases en

 13   plus ajoutées par l'Accusation.

 14   Q.  Donc, la Défense pouvait rejeter toute déclaration ?

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   Q.  C'était en juillet, le 9 juillet, pendant ce week-end-là, que Nicholas

 17   Stewart et les autres membres de l'équipe de la Défense ont décidé de ne

 18   pas accepter cette liste de faits et qu'ils allaient demander que

 19   l'Accusation cite des témoins pour chacun de ces points ?

 20   R.  Je me félicite que vous ayez soulevé ce point intéressant. Comme je

 21   l'ai déjà dit, Me Stewart semblait rejeter mon avis, mais le vendredi 9

 22   juillet, nous avons eu une de ces réunions plutôt prolongées dans son

 23   appartement qui portait sur l'affaire, et l'autre stagiaire, Thomas

 24   Derrington, qui avait pris part à l'une de ces conversations avec

 25   l'Accusation portant sur les faits faisant objet d'accord, a dit que

 26   l'Accusation semblait se réjouir des accords passés; et c'est ça qui a

 27   semblé avoir un impact très fort sur Stewart, plus que mes objections

 28   lorsque je disais que cela semblait avantager l'Accusation. Donc le fait


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  1   qu'il se réjouissait des résultats, je pense que c'est ça qui l'a incité à

  2   arriver à cette conclusion du lundi, qu'il ne voulait plus prendre part à

  3   cette négociation.

  4   Q.  Très bien. Je ne vais pas vous parler du point de vue de l'Accusation

  5   là-dessus.

  6   R.  Très bien. Si à un autre moment je pouvais le connaître, ce serait

  7   intéressant.

  8   Q.  Mais vous êtes d'accord pour dire que dans la matinée du 12 juillet

  9   2004, Nicholas Stewart a informé la Chambre de manière officielle que toute

 10   conversation, tout contact portant sur les faits faisant l'objet d'accord

 11   pour les deux municipalités qui ont été utilisées à titre de l'exemple

 12   étaient interrompus et que l'Accusation allait devoir démontrer tous ces

 13   faits et qu'ils ne seront pas acceptés par voie de faits faisant l'objet

 14   d'accord ?

 15   R.  C'est exact.

 16   Q.  Je vous remercie.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Kremer, cela fait plus de 45

 18   minutes que vous interrogez le témoin. Je ne voudrais pas exercer de

 19   pression sur vous, mais c'est le temps que vous avez utilisé.

 20   M. KREMER : [interprétation] Je vous présente mes excuses. J'en ai

 21   pratiquement terminé. Merci.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je voulais attirer votre attention là-

 23   dessus.

 24   M. KREMER : [interprétation]

 25   Q.  Vous avez parlé du plan. Personne ne vous a dit quel était le plan de

 26   défense. C'est de ça que vous vous plaignez ?

 27   R.  C'est que personne n'en a parlé avec moi, et je n'étais pas au courant

 28   qu'il y ait un plan.


Page 410

  1   Q.  Mais une manière de voir les choses est qu'on n'en parlait pas avec les

  2   stagiaires.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et que de toute évidence, M. Krajisnik et son équipe de Défense, Me

  5   Loukas et Me Stewart, étaient au courant et savaient comment se présentait

  6   le plan ?

  7   R.  Il faudra leur poser la question à eux. Je ne sais pas.

  8   Q.  Vous ne savez pas. Très bien.

  9   M. KREMER : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] M. le Juge Meron souhaite poser des

 11   questions supplémentaires.

 12   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Mano, est-ce que vous avez

 13   parlé de votre opinion portant sur la qualité du travail de Me Stewart avec

 14   d'autres membres de l'équipe de la Défense, mis à part M. Karganovic, et

 15   comment ont-ils réagi ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'en ai parlé avec Thomas Derrington et

 17   avec Andre Junovic, peut-être aussi avec Chrissa Loukas. Il y a eu des

 18   moments où elle était vraiment sous pression, très stressée.

 19   M. LE JUGE MERON : [interprétation] S'agissant de Mme Loukas, c'est la

 20   question que j'allais vous poser, est-ce que vous pourriez plus précisément

 21   nous relater une conversation que vous auriez eue avec elle ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas --

 23   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous avez dit qu'à plusieurs reprises

 24   vous lui avez parlé, vous aviez la sensation qu'elle était préoccupée de la

 25   qualité du travail de Défense. Est-ce que plus précisément vous pourriez

 26   nous évoquer ça ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Si seulement je pouvais me souvenir d'un

 28   exemple, mais cela fait quatre ans. Si j'avais couché cela sur papier,


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  1   j'aurais pu le partager avec vous, mais là, rien ne me vient à l'esprit.

  2   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

  3   Président.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Abordons maintenant la question de la

  5   Défense de Me Dershowitz. L'Amicus Curiae, d'après ce que j'ai compris, ne

  6   souhaite pas prendre la parole.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est exact.

  8   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Donc, Maître

  9   Dershowitz, vous pouvez vous-même poser quelques questions si vous le

 10   souhaitez, à présent.

 11   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

 12   Président. Je dois reconnaître que je suis un petit peu embarrassé d'avoir

 13   tous ces fils, tout cet équipement que je dois brancher, le microphone en

 14   même temps pendant que je suis debout, pendant que je parle; mais je ferai

 15   au mieux compte tenu des circonstances.

 16   Contre-interrogatoire par M. N. Dershowitz :

 17   Q.  [interprétation] Monsieur Mano, lorsque vous avez rejoint l'équipe, Me

 18   Stewart, est-ce qu'il a jamais pris le temps d'évoquer avec vous la

 19   stratégie ou l'objectif de la Défense ?

 20   R.  Non, il ne l'a pas fait.

 21   Q.  En votre présence, est-ce qu'on n'a jamais évoqué la stratégie et les

 22   objectifs de la Défense, est-ce que Me Stewart ne l'a jamais fait ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Ai-je raison de dire que vous n'avez jamais entendu une conversation

 25   portant sur la charge, la preuve de l'Accusation eu égard à l'entreprise

 26   criminelle commune; et vous n'avez jamais entendu non plus ce qui serait

 27   contesté par la Défense eu égard à l'entreprise criminelle commune ?

 28   R.  C'est exact.


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  1   Q.  Est-ce que j'ai également raison --

  2   M. KREMER : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, Maître Dershowitz.

  3   Seulement, je me demande s'il est approprié que ces questions soient

  4   posées, même si M. Mano n'est pas un témoin hostile à l'accusé. Au fond,

  5   c'est Me Dershowitz qui apporte des éléments de preuve et c'est le témoin

  6   qui témoigne, le témoin qui dit oui ou non. Je soulève mon objection quant

  7   à la forme des questions. Peut-être que les questions devraient être un

  8   petit peu moins directrices.

  9   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je pense que c'est un témoin de la

 10   Chambre, ce n'est pas un témoin de la Défense.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Quoi qu'il en soit, est-ce que vous

 12   pourriez poser des questions moins directrices.

 13   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je vais m'y employer, Monsieur le

 14   Président.

 15   Q.  Vous avez dit que vous avez préparé un rapport sur des experts.

 16   R.  C'était plus qu'un rapport. C'était tout un classeur.

 17   Q.  Et c'est Me Stewart qui vous a demandé de faire cela ?

 18   R.  Il me semble que la proposition est venue de moi.

 19   Q.  Et le même vaut pour ce qui est du contexte historique que vous avez

 20   rédigé ?

 21   R.  Il me semble.

 22   Q.  Mais vous n'en avez jamais parlé avec Me Stewart avant que vous ayez

 23   rendu ce travail ?

 24   R.  Non. Vous voulez dire, est-ce que j'aurais dû l'entreprendre ou non ?

 25   Q.  Oui.

 26   R.  Non.

 27   Q.  Dans le pays où je travaille, on dit parfois que ce qui appartient au

 28   passé pour une personne, parfois se traduit dans le présent pour une autre


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  1   personne. Alors lorsque vous avez préparé ce document sur l'histoire, est-

  2   ce qu'il couvrait la période allant de 1990 à 1992 ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que c'est la période couverte par l'acte d'accusation ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Donc pour ce qui est des événements qui se situent dans l'histoire,

  7   vous y avez également englobé des événements qui étaient pertinents et qui

  8   étaient substantiels pour l'acte d'accusation ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Il est possible que je vous ai déjà posé cette question, mais pour

 11   autant que vous le sachiez, le seul document que vous ayez vu et qui porte

 12   sur les critères juridiques à satisfaire eu égard à l'entreprise criminelle

 13   commune, c'est le document qui a été préparé sur votre demande ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Il semblerait que vous souhaitez affirmer que pour la plupart du

 16   travail - et je vais en venir à la question des préparatifs précédant le

 17   contre-interrogatoire - que la plupart du travail que vous avez fait, vous

 18   l'avez fait sur votre propre initiative; ce n'est pas sur demande qui

 19   serait venue de la part de Me Stewart ou quelqu'un d'autre, de la part de

 20   l'équipe de la Défense ?

 21   R.  Je ne sais pas si je dirais "la plupart," mais beaucoup de travail,

 22   c'est moi qui a été à l'origine de l'initiative.

 23   Q.  Mis à part ces documents pour préparer le contre-interrogatoire, deux

 24   autres points sur lesquels vous avez travaillé, c'est le contexte

 25   historique et c'est la liste des personnes que vous avez dressée qui

 26   pourraient être potentiellement des témoins experts ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Et personne ne vous a parlé d'une approche possible quant au choix de


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  1   témoins experts et comment ils pourraient s'inscrire dans la Défense, est-

  2   ce exact ?

  3   R.  C'est exact.

  4   Q.  Est-ce que vous connaissez personnellement si le document que vous

  5   appelez le rapport historique ou le document que vous avez préparé pour

  6   dresser la liste de témoins experts, ou le document préparé portant sur des

  7   points juridiques eu égard à l'entreprise criminelle commune, est-ce que

  8   l'un quelconque de ces documents a jamais été examiné de manière

  9   approfondie par Me Stewart ?

 10   R.  Je ne sais pas.

 11   Q.  Vous n'avez reçu aucun feedback de la part de Me Stewart pour ce qui

 12   est de la teneur de ces documents ?

 13   R.  C'est exact.

 14   Q.  Est-ce que vous savez si vous-même ou un autre membre de l'équipe de

 15   Défense ayez jamais reçu la demande de rédiger un document portant sur le

 16   rappel historique, mais du point de vue de la Défense ou de la

 17   participation de M. Krajisnik à des événements pendant la période 1990 à

 18   1992 ?

 19   R.  Non, je n'ai pas vu ça pendant que j'étais là.

 20   Q.  Pour ce qui est du travail que vous avez fait pour préparer les témoins

 21   pour le contre-interrogatoire, vous avez évoqué des éléments, des

 22   informations. La matière première, c'était des dépositions des témoins pour

 23   vous ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Qui avait recueilli ces dépositions ?

 26   R.  Il y avait des enquêteurs dans la plupart des cas, dans la plupart des

 27   cas que j'ai vus.

 28   Q.  Et ces enquêteurs, c'étaient des enquêteurs de la Défense ou du


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  1   Procureur ?

  2   R.  Je pense que c'était soit des enquêteurs du Procureur ou des enquêteurs

  3   du Tribunal, quelque chose comme ça.

  4   Q.  Donc vous n'aviez pas de matière première que vous auriez examinée

  5   avant les contre-interrogatoires qui auraient reflété les documents émanant

  6   de la Défense ou reprenant un point de vue de la Défense ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Et vous ne saviez pas -- lorsque vous faisiez ce travail de

  9   préparation, il n'y avait pas de documents qui vous ont été communiqués,

 10   qui auraient permis de penser qu'ils sont venus directement de la part de

 11   M. Krajisnik ?

 12   R.  Une liste de questions a été demandée à M. Krajisnik pour un témoin.

 13   Mais je n'ai pas vu cette liste de questions, mais je sais qu'on lui a

 14   demandé de la faire.

 15   Q.  Mais vous ne vous êtes pas servi de cette liste afin de préparer les

 16   documents que normalement vous prépareriez pour le contre-interrogatoire;

 17   est-ce exact ?

 18   R.  C'est exact.

 19   Q.  Donc si je vous ai bien compris, les lignes directrices, les axes sur

 20   la base desquels vous avez préparé les documents pour le contre-

 21   interrogatoire, c'était uniquement des documents qui figuraient dans les

 22   dépositions fournies par le Procureur, et vous cherchiez uniquement de voir

 23   des éléments où il y avait un manque de cohérence par rapport à ce que le

 24   témoin allait dire dans ses dépositions ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Il n'y avait rien vous permettant d'estimer jusqu'à quel point la

 27   déposition d'un témoin était inexact ?

 28   R.  Rien.


Page 416

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pourriez-vous poser des questions moins

  3   directrices, s'il vous plaît, puisque vos questions sont très directrices

  4   de nouveau.

  5   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je vous présente mes excuses. Je vais

  6   essayer de ne pas le faire.

  7   Q.  En répondant à une question posée par la Chambre -- sommes-nous à huis

  8   clos partiel ? On vous a demandé de vous pencher sur l'avant-dernière

  9   phrase, page 3, où il est dit : "Cette déclaration devait suffire en tant

 10   que preuve convaincante à qui que ce soit démontrant que Me Stewart ne

 11   devrait pas continuer de s'occuper de l'affaire."

 12   R.  Dans cette lettre, je fais part de plusieurs de mes préoccupations, à

 13   savoir qu'il a des lacunes, il n'a pas de connaissances suffisantes, il

 14   refuse de recueillir ou d'accepter l'avis de qui que ce soit, il ne

 15   s'intéresse pas personnellement à l'issue, c'était tous ces éléments

 16   ensemble.

 17   Q.  Lorsque la Chambre vous a posé des questions sur l'intérêt qu'il

 18   portait à l'issue de l'affaire, je pense que vous avez dit que vous n'aviez

 19   aucun exemple concret à l'esprit, mais vous aviez des impressions

 20   générales. Vous pouvez expliquer ?

 21   R.  Oui. Il m'a dit des choses pendant qu'on était ensemble dans sa voiture

 22   ou quand j'avais la possibilité de lui parler en tête-à-tête. Il me faisait

 23   comprendre qu'en fait ce n'était pas très important pour lui s'il perdait

 24   ou s'il gagnait cette affaire.

 25   Q.  Un autre commentaire qu'il aurait fait et qui correspond à cela, de

 26   manière générale ?

 27   R.  Je suis certain qu'il y en a eu. Là, je n'ai pas cité verbatim ses

 28   propos. Je ne me souviens pas de ses propos très précisément.


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  1   Q.  Mais mis à part les mots qu'il a effectivement employés, est-ce que

  2   vous êtes certain de cette impression et de votre réaction à ses questions

  3   ?

  4   R.  Oui, tout à fait.

  5   Q.  M. Kremer vous a demandé si vous étiez au courant d'un commentaire qui

  6   a été formulé par M. Krajisnik -- je retire cette question. M. Kremer vous

  7   a demandé si M. Krajisnik a dit en février 2005 qu'il était satisfait du

  8   travail de son équipe de Défense et que cela semblait montrer qu'il a

  9   rejeté votre avis, il n'a pas accepté votre avis. Vous avez également

 10   compris que M. Krajisnik a dit qu'il souhaitait se représenter lui-même, et

 11   que si cela se produisait, que ça ne pouvait pas aggraver les choses. Est-

 12   ce que cela semble que ce que vous aviez dit était quelque chose qu'il

 13   avait pris en compte ?

 14   R.  Oui, je pense.

 15   Q.  On vous a posé plusieurs questions au sujet de la précision de vos

 16   citations. Est-ce que vous pourriez nous dire si en substance, chacun de

 17   ces éléments qui figurent --

 18   M. KREMER : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Maître Dershowitz,

 19   pour cette interruption, mais je me lève simplement parce que j'ai du mal à

 20   comprendre quel rapport il y a entre cela et l'entreprise criminelle

 21   commune. Me Dershowitz a un rôle tout à fait précis à jouer, il a posé deux

 22   questions relatives à l'entreprise criminelle commune, et ce sont des

 23   questions qui auraient dû être posées par Me Dershowitz, il le sait bien;

 24   donc je me lève pour élever l'objection que j'élève dans ce cadre.

 25   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] J'aimerais avoir la possibilité de

 26   répondre à cela, Monsieur le Président. La condamnation prononcée en espèce

 27   reposait uniquement sur l'entreprise criminelle commune. Dans la mesure où

 28   le conseil n'était pas prêt de façon générale, et je pense que le témoin


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  1   présent ici a indiqué d'une façon certaine que le conseil ne s'était

  2   absolument pas préparé à la possibilité que l'entreprise criminelle commune

  3   soit la base de la condamnation; or, elle l'a été. Donc cette absence de

  4   préparation et de travail sur la question de l'entreprise criminelle

  5   commune est, à mon avis, un élément indispensable du dossier pour se

  6   prononcer sur l'efficacité ou la non-efficacité du conseil. L'absence

  7   d'efficacité du conseil ne peut être déterminée de façon abstraite. Elle a

  8   un rapport avec la nature précise des condamnations prononcées. Par

  9   conséquent, se préparer à travailler sur un élément A alors que l'accusé

 10   est condamné sur un élément B montre, à mon avis, une absence totale de

 11   pertinence. On doit se préparer à ce qui sera la base de la condamnation de

 12   l'accusé. Or, en l'espèce, il semble qu'aucune préparation n'a été faite eu

 13   égard au thème de l'entreprise criminelle commune. Il n'y a pas eu de

 14   travail pertinent sur l'entreprise criminelle commune. J'ai encore

 15   seulement trois questions à poser.

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Posez vos questions, mais

 17   essayez d'être plus précis.

 18   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation]

 19   Q.  Je vous demande une nouvelle fois si les références que vous avez

 20   présentées étaient tout à fait précises et si les guillemets se

 21   justifiaient autour des mots consignés par écrit. Je vous demande donc si,

 22   finalement, ces citations étaient exactes.

 23   R.  Sur le fond, elles sont exactes.

 24   Q.  Mais vous les avez faites de mémoire, n'est-ce pas ?

 25   R.  Exact.

 26   Q.  M. Kremer vous a posé deux autres questions. L'une consistait à vous

 27   demander si Me Stewart pouvait rencontrer M. Krajisnik pour vérifier un

 28   certain nombre de faits matériels. Est-ce que vous avez une information


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  1   quelconque quant au fait de savoir si Me Stewart a effectivement obtenu des

  2   éléments d'information de M. Krajisnik en dehors de l'exemple que vous avez

  3   fourni où il était question des questions posées au cours du contre-

  4   interrogatoire ? Est-ce que vous vous êtes informé si au cours d'un

  5   entretien qu'il aurait pu avoir avec M. Krajisnik, il lui aurait posé des

  6   questions au sujet de faits liés aux accusations présentées par le bureau

  7   du Procureur ?

  8   R.  Je ne sais rien sur ce sujet personnellement, non.

  9   Q.  Même question au sujet de M. Neskovic.

 10   R.  Neskovic ?

 11   Q.  Neskovic, est-ce qu'il existe quoi que ce soit qui indiquerait qu'il

 12   était disponible. Est-ce que, personnellement, vous auriez été informé du

 13   fait que Me Stewart aurait demandé des éléments d'information à M. Neskovic

 14   et utilisé ces éléments par la suite ?

 15   R.  Non. En fait -- c'est le contraire. Si vous vous penchez sur les

 16   arguments présentés oralement par Me Stewart à partir du 16 juillet 2004,

 17   lorsque l'Accusation évoque le nom de M. Neskovic en disant qu'il a facturé

 18   le Tribunal pour un nombre incroyablement élevé d'heures de travail, Me

 19   Stewart déclare, je cite : "Je n'étais pas au courant." Il poursuit en

 20   disant que M. Neskovic est en Bosnie, qu'il ne parle que serbe, que Me

 21   Stewart est à La Haye et qu'il ne parle qu'anglais, et que les quelques

 22   rares fois où il a eu des contacts avec lui, cela s'est passé par le

 23   truchement d'un interprète ou de documents écrits.

 24   Q.  Dernier sujet. M. Kremer vous a interrogé au sujet de la déclaration

 25   proposée sur les faits et il a dit que la procédure normale consistait à

 26   entendre des témoins indiquant qu'ils étayaient la déclaration. Est-ce que

 27   vous avez une idée, parce que c'est une allégation qui consiste à dire

 28   qu'un témoin témoignera sur des faits significatifs, qu'est-ce qui indique


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  1   que le témoin est crédible, premier point; et deuxième point, est-ce que

  2   vous avez la moindre idée quant à l'admissibilité d'un témoignage, après

  3   quoi je poursuivrai.

  4   R.  C'est une bonne question. Comme je l'ai dit, l'Accusation poursuit sur

  5   la base de ce qu'a dit le témoin. Donc il y a pas de choses qui, dans ces

  6   écritures, pourraient soulever des objections.

  7   Q.  Donc ce n'est pas seulement sur le fond, mais également sur la

  8   procédure que vous contestez les choses, n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est exact.

 10   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je n'ai plus de questions. Je vous

 11   remercie, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Avant de conclure -- M. le Juge

 13   Meron a d'abord des questions, après quoi j'en aurai quelques-unes.

 14   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Une question simplement, Maître

 15   Dershowitz. Nous savons que le témoin a travaillé trois mois au Tribunal en

 16   qualité de stagiaire. Il est possible que le problème de l'entreprise

 17   criminelle commune n'ait pas fait l'objet d'un travail complémentaire dans

 18   cette période.

 19   Est-ce que c'est la conclusion que nous devrions être amenés à tirer,

 20   le fait que le témoin ne puisse se rappeler aucun travail accompli au sujet

 21   de l'entreprise criminelle commune ne pourrait-il pas signifier qu'un

 22   travail a été accompli sur ce sujet à un autre moment ?

 23   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Monsieur le Président, c'est que, tout

 24   de même, une question se pose. Cela ne résout pas la question. Si vous avez

 25   un laps de temps où la seule personne qui élabore des dossiers c'est M.

 26   Mano, et ce, à sa demande, et si vous ajoutez à cette déclaration celle de

 27   Me Loukas qui a dit à certains moments que les priorités de la Défense

 28   n'étaient pas définies de façon précise sur le plan juridique, cela suffit,


Page 422

  1   je pense, à se poser au moins des questions quant au travail accompli par

  2   Me Stewart sur l'entreprise criminelle commune. La seule façon de répondre

  3   à cette question d'une façon plus ou moins certaine consisterait peut-être

  4   à faire témoigner Me Stewart. Quand on rassemble tous ces éléments, on est

  5   tout de même fortement en droit de penser que le travail n'a pas été

  6   accompli de façon satisfaisante.

  7   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Suite à cette question, Maître

  8   Dershowitz, est-ce que, compte tenu du temps limité que le témoin a passé

  9   au sein de l'équipe de Défense et du fait qu'il a été affecté à des

 10   missions bien particulières, ce dont il a déjà parlé qu'il avait un

 11   objectif bien déterminé, est-ce que vous n'excluriez pas la possibilité que

 12   ce témoin ne s'est pas vu confier des tâches plus importantes, et donc

 13   n'était pas associé de très près à la préparation de la Défense simplement

 14   parce que le conseil principal n'avait pas suffisamment confiance en lui ou

 15   en ses compétences juridiques et légales, et ne souhaitait donc pas

 16   l'associer de façon plus étroite à son travail ?

 17   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Monsieur le Président, il ne fait aucun

 18   doute que c'est peut-être le cas. Mais lorsqu'on autorise deux témoins à

 19   déposer sur une question très déterminée, on maîtrise tout de même les

 20   éléments d'information issus de ces deux auditions. Il y a d'autres témoins

 21   qui pourraient sans doute être entendus pour se faire une idée plus

 22   globale, plus complète. Je suis tout à fait d'accord avec vous que

 23   l'audition de deux témoins ne suffit pas à se faire une idée globale, mais

 24   il y a Me Stewart, Me Loukas et il y a d'autres personnes -- enfin, ce

 25   n'est pas à moi de me prononcer sur ce point. Mais je suis tout à fait

 26   d'accord avec vous, on ne peut pas tirer certaines conclusions très

 27   précises sur des bases aussi limitées que celles-là, car ces deux témoins

 28   ne couvrent pas non plus toute la période. Mais encore une fois, je pense


Page 423

  1   que la raison qui a motivé l'organisation de l'audience d'aujourd'hui c'est

  2   qu'il existe un nombre suffisant de documents qui permettent de penser

  3   qu'il y a tout de même un problème et qu'il vaut la peine d'explorer les

  4   faits pour se faire une idée sur ce problème. Je n'ai sans doute pas

  5   entièrement répondu à votre question, en tout cas, ma position c'est que

  6   deux témoins ne suffisent pas à résoudre complètement le problème.

  7   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur le Juge Shahabudeen, à vous.

  8   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Monsieur Mano, je vous prierais

  9   de me dire si l'impression que je vais vous communiquer maintenant est

 10   erronée, car j'ai acquis le sentiment en vous entendant témoigner que les

 11   notes relatives au contexte historique que vous avez mises par écrit

 12   constituaient, en fait, un récit très circonscrit des événements qui se

 13   sont déroulés sur une période de un ou deux ans et n'abordaient pas les

 14   événements antérieurs à cela; c'est bien ça ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas exact. J'ai établi le

 16   contexte du conflit en allant jusqu'à la période antérieure à la Seconde

 17   Guerre mondiale.

 18   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Mais jusqu'où êtes-vous allé

 19   dans le passé lorsque vous avez rédigé cette note ? Est-ce que vous diriez

 20   10 ans ou un siècle ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Comme je l'ai dit, j'ai fait démarrer mon

 22   document relatif au contexte à la période immédiatement antérieure à la

 23   Seconde Guerre mondiale, donc j'ai couvert disons une période de 60 à 70

 24   ans.

 25   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Merci.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Une question, Monsieur Mano, pour

 27   préciser un point qui peut-être n'a pas été suffisamment clairement exposé

 28   dans les débats jusqu'à présent.


Page 424

  1   Vous disiez que l'on vous a confié le travail de préparer les témoins

  2   pour le contre-interrogatoire. Mais d'après certaines choses qui ont été

  3   dites, j'ai cru comprendre que vous prépariez les documents qui devaient

  4   être utilisés au contre-interrogatoire.

  5   Alors qu'en est-il exactement, quelle était la nature exacte de la

  6   mission qui vous était affectée eu égard à la préparation des contre-

  7   interrogatoires ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. Comme je l'ai dit, en général, je

  9   recueillais des dépositions orales ou, en tout cas, quelque chose

 10   d'approchant, donc des déclarations faites par les témoins; et on me

 11   demandait de relire ces déclarations pour essayer d'y trouver des

 12   contradictions ou des éléments manifestement erronés.  Après quoi, je

 13   dactylographiais mes observations personnelles sur ce plan et je remettais

 14   le document à Me Loukas.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] D'accord. Je vous remercie. Ceci met un

 16   terme à l'audition de M. le Témoin, M. Mano. Monsieur Mano, vous pouvez

 17   sortir du prétoire avec l'aide de M. l'Huissier.

 18   J'aimerais que nous revenions maintenant en audience publique.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à

 20   nouveau en audience publique.

 21   [Audience publique]

 22   [Le témoin se retire]

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Avant de lever l'audience de ce matin,

 24   j'aimerais aborder un point particulier. La Chambre d'appel a reçu ce matin

 25   une requête de M. Krajisnik qui demande, en rapport avec l'audience de

 26   mercredi prochain, qui demande à pouvoir déposer au dossier la déclaration

 27   préalable de Radovan Karadzic en application de l'article 92 ter du

 28   Règlement. Bien entendu, la Chambre d'appel va devoir se prononcer sur ce


Page 425

  1   point, mais je demanderais à l'Accusation si elle a un commentaire à faire.

  2   M. KREMER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avons des

  3   représentants qui discutent de la question en ce moment. Je les

  4   rencontrerai pendant la suspension d'audience et je serai, je l'espère, en

  5   mesure de déposer ce document dans la journée.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Nous levons

  7   l'audience jusqu'à cet après-midi, et la Chambre d'appel rendra son arrêt

  8   plus tard.

  9   L'audience est levée. Nous reprenons nos débats pour l'audition du Témoin

 10   Karganovic à 14 heures.

 11   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 11 heures 49.

 12   --- L'audience est reprise à 14 heures 04.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Nous allons

 14   continuer notre audience.

 15   Mais pour ceux qui ne l'ont pas entendu, je tiens à présenter des

 16   remerciements à l'Accusation pour la réponse adressée en réponse à la

 17   requête de M. Krajisnik pour ce qui est de l'autorisation de présenter le

 18   document en application du 92 ter. Les Juges de la Chambre d'appel se

 19   pencheront sur la question et fourniront une réponse, pour annoncer leur

 20   décision avant la fin de la session de cet après-midi.

 21   Peut-être pourrions-nous -- Oui, M. Krajisnik. Vous voulez quelque chose ?

 22   L'APPELANT : [interprétation] Messieurs, Madame les Juges, avec votre

 23   autorisation, peut-être serait-il bon avant de rendre une décision au sujet

 24   des écritures présentées par l'Accusation, d'entendre au nom de moi-même et

 25   de M. Dershowitz, des raisons complémentaires qui pourraient vous être

 26   utiles pour la prise de votre décision de ce jour.

 27   [La Chambre d'appel se concerte]

 28   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je viens de consulter mes collègues.


Page 426

  1   Oui, bien entendu, nous pouvons le faire, mais je ne voudrais pas que nous

  2   entamions à présent un long débat; et pour autant que nous l'ayons compris,

  3   cela se ferait au détriment du temps de la Défense si celle-ci souhaite le

  4   faire, s'il y a donc des explications à apporter.

  5   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. M.

  6   Krajisnik m'a demandé de juste expliquer un paragraphe dans la réponse où

  7   il est dit que M. Krajisnik n'a pas fourni de raisons quelles qu'elles

  8   soient pour lesquelles cela se trouverait être dans l'intérêt de la

  9   justice. La raison pour laquelle il a voulu que ce soit fait par le biais

 10   d'un document est précisément le fait qu'il s'est défendu lui-même, et il

 11   est préoccupé par le fait de savoir s'il aura la possibilité, la latitude

 12   de poser des questions dans des secteurs qu'il trouve importants, et si

 13   cela se trouve être vrai et s'il a des documents à cet effet, comme M.

 14   Kremer peut contre-interroger et comme M. Nicholls a également l'intention

 15   de contre-interroger et comme j'ai moi-même l'autorisation de contre-

 16   interroger, entre nous trois, les Juges de la Chambre auront suffisamment

 17   de possibilités ou d'opportunités pour ce qui est de rendre un jugement au

 18   sujet de la crédibilité de M. Karadzic.

 19   M. Krajisnik m'a demandé de vous l'expliquer sur un plan juridique. Je vous

 20   en remercie.

 21   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Y a-t-il des réactions à ce

 22   sujet de la part de l'Accusation.

 23   M. KREMER : [interprétation] Nous sommes préoccupés par l'iniquité de ce

 24   versement d'un document en application du 92 ter sans pour autant demander

 25   ou de savoir ce que M. Krajisnik entend par aspects importants de cette

 26   déclaration. Nous avons reçu notification du fait qu'il allait témoigner

 27   sur tous ces points. Certaines de ces notifications ne sont pas détaillées,

 28   ne sont pas suffisamment élaborées pour que nous puissions avoir un contre-


Page 427

  1   interrogatoire effectif. Nous devons savoir entendre de la bouche du témoin

  2   ce qu'il va dire, comment il va le dire, afin que nous puissions être à

  3   même de contester de façon appropriée tant sa crédibilité, tant la teneur

  4   de ce qu'il dit. C'est ce que je vous apporterais comme réponse.

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Les Juges de la

  6   Chambre vont prendre en considération --

  7   [La Chambre d'appel se concerte]  

  8   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] On vient d'attirer mon attention sur un

  9   point mis en exergue par M. Dershowitz, il y a quelques instants. Vous avez

 10   dit que vous aviez obtenu l'autorisation d'interroger. Vous vouliez dire

 11   poser des questions complémentaires après le contre-interrogatoire ?

 12   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je voulais juste savoir si tout le

 14   monde avait bien compris la procédure.

 15   Alors nous allons prendre ceci en considération, à savoir nous allons

 16   prendre en considération les arguments présentés par les parties en

 17   présence. 

 18   Je ne sais pas si M. Nicholls a quelque chose à dire au sujet des points

 19   évoqués par les parties.

 20   M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'ai rien à ajouter. Le document a, de

 21   façon évidente, une valeur probante pour ce qui est du point de vue de la

 22   Chambre et du point de vue du conseil; cela ne peut pas être un élément de

 23   preuve si le témoin ne l'a pas dit à partir de son pupitre de témoin.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Qu'entendez-vous par là, Monsieur

 25   Nicholls ? Si ce document est versé au dossier en application du 92 ter,

 26   c'est dans le dossier.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne dis pas que ceci devrait être versé au

 28   dossier comme pièce à conviction. Il serait utile aux Juges de la Chambre


Page 428

  1   de l'avoir sous la main, et le témoignage ou les propos doivent être

  2   recueillis de la bouche du témoin ici à partir du pupitre de témoin.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Excusez-moi, Maître Nicholls, mais je

  4   dois vous expliquer la procédure. Si une déclaration est versée au dossier

  5   en application du 92 ter du Règlement de procédure et de preuve, ce

  6   document devient une pièce à conviction. Bien entendu, on prendra en

  7   considération cela avec le contre-interrogatoire et sa teneur. Alors, ce

  8   document remplit l'office d'un interrogatoire principal, il a la même

  9   valeur; et il doit donc faire l'objet d'un contre-interrogatoire ou de

 10   questions complémentaires. Le tout est donc partie de cette pièce à

 11   conviction.

 12   M. NICHOLLS : [interprétation] Donc en ma qualité d'ami de la Chambre, je

 13   n'ai plus rien à ajouter.

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

 15   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je voudrais juste tirer au clair. En

 16   application du 93 ter, il n'y a aucune indication au sujet de l'intérêt de

 17   la justice; c'est au 89(F) qu'il est question des intérêts de la justice.

 18   Donc il y a là deux règles ou deux articles différents. Je voulais mettre

 19   cela en exergue.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais nous connaissons le Règlement,

 21   Monsieur Dershowitz.

 22   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Vous devez le connaître mieux que moi,

 23   j'en suis certain. 

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc nous allons nous réserver le droit

 25   de rendre une décision suite à cette requête. Et je propose que nous

 26   continuions l'audition du témoin Karganovic.

 27   M. KREMER : [interprétation] Juste avant que de commencer, Monsieur le

 28   Président, j'ai une question qui découle de notre interrogatoire et du


Page 429

  1   contre-interrogatoire du témoin de ce matin. A cet effet je voudrais

  2   soulever une question, à savoir entendre si M. Dershowitz, dans la mesure

  3   où il aurait des questions au sujet de l'entreprise criminelle commune,

  4   devrait poser ou avoir l'opportunité de poser des questions après les Juges

  5   de la Chambre et qu'ensuite j'aie l'opportunité de poser des questions à M.

  6   Karganovic suite aux questions posées par les Juges de la Chambre. Et

  7   partant de l'expérience de ce matin, je crois que le procès n'est pas tout

  8   à fait équitable vis-à-vis de M. Dershowitz, pour ce qui est de sa

  9   possibilité de poser des questions à un témoin aussi enclin à la thèse de

 10   la Défense. Il s'agit donc d'un témoin de la Chambre, et je crois que c'est

 11   ainsi que de cette façon l'on devrait réhabiliter la procédure

 12   d'interrogatoire du témoin suite aux questions posées à l'occasion du

 13   contre-interrogatoire. C'est ce que j'aurais à dire.

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vois que mes collègues sont

 15   également de cet avis. Peut-être devrions-nous poursuivre de la sorte. Donc

 16   nous allons demander à M. Dershowitz de prendre la parole avant le

 17   Procureur. Et bien entendu, il est sous-entendu le fait que M. Dershowitz

 18   doit se limiter aux questions liées à l'entreprise criminelle commune.

 19   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

 20   d'objection. Je veux être sûr d'être en train d'utiliser le temps imparti à

 21   Me Nicholls, et non pas --

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, cela est exact.

 23   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Faites entrer le témoin.

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour, Monsieur Karganovic.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 28   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous prie de nous donner lecture de


Page 430

  1   la déclaration solennelle qui vous est tendue par le huissier.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  3   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  4   LE TÉMOIN : STEFAN KARGANOVIC [Assermenté]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Karganovic.

  7   Vous pouvez vous asseoir.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  9   Questions de la Cour d'appel : 

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Veuillez décliner votre identité et

 11   votre date de naissance, s'il vous plaît.

 12   R.  Je m'appelle Stefan Karganovic. Je suis né le 16 juin 1950.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Quelle est votre adresse ?

 14   R.  Mon adresse aux Pays-Bas se trouve être Usselinexstraat 60, à La Haye.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Pouvez-vous nous parler de votre

 16   circuit ou de votre éducation ainsi que de vos occupations antérieures et

 17   de votre occupation présente.

 18   R.  Oui. J'ai fréquenté l'Université de Chicago aux Etats-Unis. J'ai un

 19   diplôme de philosophie. Ensuite, je suis allé à l'Université de l'Indiana,

 20   à la faculté de droit. Je suis diplômé de cette faculté de droit. J'ai

 21   travaillé en qualité de juriste et j'ai également eu une compagnie à moi

 22   dans les années '80; j'ai également travaillé comme interprète, tant par

 23   écrit que de façon orale.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Monsieur Karganovic, les Juges

 25   de la Chambre vous ont convié à témoigner dans cette procédure en appel

 26   dans l'affaire du Procureur contre Krajisnik.

 27   R.  Oui.

 28   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Etant donné que c'est les Juges de la


Page 431

  1   Chambre qui ont demandé à ce que vous veniez, c'est d'abord les Juges qui

  2   vont vous poser des questions.

  3   R.  Je vous en remercie.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et comme je suis en train de présider

  5   aux travaux de cette Chambre, je vais d'abord vous interroger moi-même. Il

  6   y aura les questions des autres Juges. Ensuite, vous serez interrogé par M.

  7   Krajisnik, puis par la Défense, à savoir le conseil de la Défense M.

  8   Dershowitz; et ensuite le Procureur et l'Amicus de la Chambre, pour finir,

  9   s'il souhaite poser des questions.

 10   Alors, pour être concret, nous allons vous poser des questions sur ce que

 11   vous savez nous dire au sujet des activités déployées par l'équipe de la

 12   Défense de M. Krajisnik à l'occasion du procès ainsi qu'au sujet de la

 13   conduite de l'ex-conseil de la Défense, Nicholas Stewart, au sujet de ce

 14   procès.

 15   R.  Très bien, Monsieur le Président. Mais je dois vous faire remarquer que

 16   je ne vois rien du tout sur mon écran. Il serait peut-être utile de me

 17   laisser voir la transcription et peut-être pourrais-je donc suivre mieux

 18   les questions et les réponses. Voilà. Merci.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Avant que de vous poser des questions,

 20   une petite chose. Je vous ai demandé votre adresse.

 21   R.  Oui.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que vous voulez que l'adresse

 23   soit maintenue au compte rendu ou est-ce que vous voulez que ceci soit

 24   expurgé.

 25   R.  Pour le moment, je suppose que c'est une adresse tout à fait

 26   officielle, bien que je me propose d'aller à Belgrade, et là, je réside

 27   dans la maison de ma tante. Je peux vous donner cette adresse-là aussi. Si

 28   vous souhaitez l'avoir, je serais heureux de vous la donner.


Page 432

  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Non. C'est pour ce qui est de

  2   l'audience publique, peut-être voudriez-vous que cela ne soit pas rendu

  3   public, ou alors vous ne voyez pas d'inconvénient.

  4   R.  Non, je n'y vois pas d'inconvénient.

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bon. C'est très bien. Merci.

  6   Alors, je vais maintenant demander à l'huissier de présenter au témoin une

  7   pièce à conviction, la pièce AD2, qui se trouve être une pièce à conviction

  8   confidentielle. Et avant que de commencer à poser des questions au témoin

  9   sur cette pièce à conviction, je demanderais au greffier de nous faire

 10   passer en audience à huis clos partiel.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs et Madame les Juges, nous

 12   sommes en audience à huis clos partiel.

 13   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre] 

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 15   Monsieur Karganovic, ce document, comme vous pouvez le voir, est une

 16   déclaration datée du 16 octobre 2007.

 17   R.  En effet.

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que vous voulez un instant pour

 19   en prendre lecture ou estimez-vous ne pas en avoir besoin ?

 20   R.  Etant donné que c'est moi qui l'ai écrit, je pense connaître le

 21   document.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Paragraphe 1.

 23   R.  Mais il y a une petite rectification que je voudrais apporter. Au

 24   paragraphe 1, les années devraient être déplacées d'une unité en arrière.

 25   C'est une erreur de frappe, j'imagine.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc, paragraphe 1.

 27   R.  Oui. Il faut lire avril 2005 jusqu'à mai 2006.

 28   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien, merci.


Page 433

  1   Alors, pouvez-vous nous confirmer que c'est bien vous qui avez rédigé ces

  2   déclarations ?

  3   R.  Oui.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] J'ai remarqué qu'au paragraphe 3,

  5   quatre lignes à partir du bas, le mot "Stewart" a été barré à la main et

  6   remplacé par Loukas. Alors, pouvez-vous nous dire lequel des deux noms est

  7   bon ?

  8   R.  Loukas. Je me suis une fois de plus trompé en frappant, et j'ai corrigé

  9   à la main; et j'ai paraphé cette correction.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Avec cette modification près, pouvez-

 11   vous nous confirmer que cette déclaration, au meilleur de vos

 12   connaissances, est la vérité ?

 13   R.  Oui. Pour ce qui est de la version B/C/S, cela l'est certainement. Pour

 14   ce qui est de la traduction, je ne peux que je me fier à l'exactitude de la

 15   traduction.

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bon, c'est tout à fait correct. Alors,

 17   pouvez-vous nous dire si c'est bien vous qui avez présenté ces faits et ce

 18   qui donnait sujet à préoccupation au sujet de ce qui se trouve dans cette

 19   déclaration à l'intention des Juges de la Chambre ?

 20   R.  Pour être tout à fait exact, je l'ai présentée à M. Krajisnik, et je

 21   crois que c'est M. Krajisnik qui a présenté cela aux Juges de la Chambre.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc, cela veut dire que vous n'avez

 23   pas présenté ce document aux Juges de la Chambre.

 24   R.  Non, je ne l'ai pas envoyé directement à la Chambre, non.

 25   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Alors pouvez-vous nous expliquer

 26   pourquoi avez-vous décidé de ne pas présenter ces faits pendant le procès

 27   même ?

 28   R.  C'est une bonne question. Il ne m'est jamais venu à l'esprit, pour être


Page 434

  1   tout à fait honnête à votre égard, Monsieur le Juge, et j'imagine qu'une

  2   fois que tout est terminé, vous êtes en train de décanter vos impressions

  3   et vous faire une idée cohérente de tout ceci. Pendant le procès, vous êtes

  4   occupé, vous n'avez pas le temps de réfléchir.

  5   Je n'ai pas songé à le faire pendant le procès même.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc, vous avez envisagé de présenter

  7   ces faits une fois que le procès s'est terminé.

  8   R.  Oui, oui.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et à aucun moment avant la fin de ce

 10   procès vous n'avez envisagé de présenter ces faits-là, des faits de ce type

 11   aux Juges de la Chambre ?

 12   R.  Non.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Je viens de remarquer

 14   -- enfin, j'ai remarqué que d'après cette déclaration, vous avez travaillé

 15   en faveur de l'équipe ou pour l'équipe de la Défense de M. Krajisnik à

 16   partir d'avril 2005 jusqu'à mai 2006.

 17   R.  Oui.

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et ce, conformément au rectificatif que

 19   vous avez apporté aux dates ?

 20   R.  Oui.

 21       M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Paragraphe 6, vous dites que vous

 22   êtes allé en compagnie de M. Stewart rendre visite à M. Krajisnik dans son

 23   unité de détention des Nations Unies en automne 2005. Pouvez-vous nous

 24   expliquer ces dates ? Est-ce qu'il s'agit ici aussi de rectifier ou -- est-

 25   ce que c'est l'automne 2006 ou est-ce que c'est l'automne 2005 ?

 26   R.  Dans quel paragraphe avez-vous dit, Monsieur le Juge ?

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Paragraphe 6.

 28   R.  Six.


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  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'est la fin du paragraphe 6.

  2   R.  Là, je suis complètement dans la confusion. Parce que si l'on --

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais si vous déplacez les dates au

  4   paragraphe 1 --

  5   R.  Oui, oui, oui.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] -- il faut faire la même chose pour le

  7   reste de la déclaration.

  8   R.  Non, je ne pense pas que ceci doit être déplacé ou modifié. Si nous

  9   sommes en train de parler de l'automne, cela devrait forcément être 2005.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc cette date reste ?

 11   R.  Je pense que oui. Oui, parce que j'ai quitté l'équipe en mars ou avril

 12   2006, à savoir deux ou trois mois avant la fin du procès. C'était donc en

 13   2006.

 14   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous avez quitté l'équipe en mars ou

 15   avril 2006, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais au paragraphe 1, il est dit que

 18   vous y êtes resté jusqu'à mai 2006. Alors laquelle de ces dates est la

 19   bonne ?

 20   R.  Laissez-moi me pencher une fois de plus. Mai. C'est probablement mai.

 21   Je ne suis pas tout à fait certain de la date. Ça s'est passé avant que M.

 22   Krajisnik n'ait commencé à témoigner lui-même. Donc cela peut fort bien

 23   avoir été le mois de mai.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Il y a plusieurs autres paragraphes

 25   avec des dates.

 26   R.  Oui.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Parcourons-les ensemble pour voir si

 28   ces dates sont exactes --


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  1   R.  D'accord.

  2   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] -- ou si elles doivent faire l'objet

  3   d'un réexamen compte tenu de ce rectificatif que vous avez apporté au

  4   paragraphe 1. Au paragraphe 2, vous parlez d'avril 2004, donc ça devrait

  5   être 2005 ?

  6   R.  Oui.

  7   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Ça c'est une chose facile à rectifier.

  8   Qu'allons-nous faire maintenant du paragraphe numéro 5 ? Il y est question

  9   de l'automne 2005.

 10   R.  Je crois que ceci est exact.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc ceci est exact.

 12   R.  Oui, c'est l'année dans laquelle j'ai commencé à travailler.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Dans le même paragraphe, on dit mai

 14   2005.

 15   R.  Vous voulez dire paragraphe 7, Monsieur le Juge ?

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Non, paragraphe 5. Ligne 5. C'est la

 17   ligne 3 en page 2. Vous dites que : "Ce n'est qu'en mai 2005," et cetera.

 18   "Ce n'est qu'en été 2005," dit la version en B/C/S.

 19   R.  Je crois que cela est exact.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'est exact.

 21   R.  Hm-hm.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Cela devrait donc s'appliquer aux deux

 23   lignes en dessous, à savoir fin automne 2005.

 24   R.  Oui.

 25   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Ceci donc est exact.

 26   R.  Hm-hm.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Au paragraphe 6, vous avez une date qui

 28   est été 2005.


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  1   R.  C'est correct --

  2   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'est bon.

  3   R.  Oui, je dirais que c'est bon.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Au début du paragraphe 7, ligne 1, vous

  5   dites mai 2005.

  6   R.  Une fois de plus, je pense que cela est la bonne.

  7   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'est bon.

  8   R.  Hm-hm.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je pense que c'est tout.

 10   R.  D'accord.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Alors nous avons au moins tiré au clair

 12   les dates qui figurent dans ce document.

 13   Maintenant, une question qui concerne encore les dates. L'Amicus

 14   Curiae a fait valoir le fait que Mme Loukas avait démissionné au mois de

 15   juillet 2005; est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 16   R.  Je suis certainement d'accord pour dire qu'elle est partie et qu'elle

 17   ne travaillait plus dans notre équipe à partir du mois de juillet 2005.

 18   Cela étant dit, je ne sais pas quelle était la date officielle de cela. Je

 19   sais qu'elle est restée encore quelques semaines pour essayer de travailler

 20   un peu avec M. Josse pour qu'il se familiarise avec l'affaire puisqu'il a

 21   été nommé pour la remplacer en tant que co-conseil. Je ne sais pas si

 22   pendant ces quelques semaines si elle était encore officiellement co-

 23   conseil, oui ou non. Je ne connais pas sa date de démission exacte.

 24   Toujours est-il que, physiquement, elle est restée à La Haye jusqu'à la fin

 25   du mois de juillet 2005, elle est restée travailler au sein de l'équipe

 26   jusqu'à la fin de juillet 2005.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Effectivement, maintenant que les dates

 28   sont corrigées, un certain nombre de contradictions que j'ai relevées dans


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  1   votre déclaration ont été éclaircies, donc je n'ai pas besoin de revenir

  2   là-dessus.

  3   Mais je vais vous poser une autre question maintenant.

  4   R.  Je vous en prie. 

  5   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Si vous regardez le troisième

  6   paragraphe, là vous dites que le travail de l'équipe de la Défense tenait

  7   de l'improvisation.

  8   R.  Oui.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que vous pourrez nous

 10   donner les bases sur lesquelles vous fondez ces conclusions.

 11   R.  Oui. A l'époque où moi j'ai commencé à travailler dans cette équipe de

 12   Défense, nous n'avions pas de plan de travail précis. A l'époque, ce que

 13   l'on faisait surtout c'était de réagir aux moyens du Procureur, ensuite il

 14   s'agissait d'organiser la Défense, la présentation des moyens de M.

 15   Krajisnik. On avait l'impression qu'on allait d'une situation de crise à

 16   une autre, d'une urgence à une autre, et on devait très souvent demander

 17   d'avoir la prolongation des délais. On n'avait pas vraiment d'idée claire

 18   sur le point suivant, sur ce que nous allions faire après, et nous n'étions

 19   pas toujours sûrs d'être prêts à faire face à cela, d'ailleurs.

 20   En ce qui concerne les éléments de la défense, je pense que là on a

 21   très bien vu qu'il s'agissait là de l'improvisation parce que l'on n'avait

 22   pas vraiment un système clair quand il s'agissait de citer les témoins. Il

 23   n'y avait pas de critères précis pour sélectionner les témoins de la

 24   Défense pour répondre aux différentes thèses du Procureur ou pour faire

 25   valoir les thèses de la Défense.

 26   Donc il n'y avait pas vraiment un plan cohérent du travail de la

 27   Défense, c'est en tout cas ce que j'ai pu remarquer, moi.

 28   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Quelles étaient exactement vos tâches


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  1   au sein de l'équipe de la Défense ?

  2   R.  Mes tâches étaient doubles, pour ainsi dire. Puisque je parle le B/C/S,

  3   j'avais à faire beaucoup d'interprétation et beaucoup de traduction. Quand

  4   il s'agissait d'interpréter, il s'agissait surtout de me rendre, avec M.

  5   Stewart, Mme Loukas ou M. Josse, au quartier pénitentiaire pour parler avec

  6   M. Krajisnik. Mais là, il s'agissait de traduire, d'interpréter. Puis il y

  7   avait beaucoup de documents qui venaient de M. Krajisnik qui étaient en

  8   B/C/S et il fallait les traduire vers l'anglais pour que les conseils

  9   comprennent de quoi il s'agit. Il y avait aussi beaucoup de documents qui

 10   venaient des enquêteurs sur le terrain en Bosnie, et ces documents-là, il

 11   fallait aussi les traduire pour que les conseils comprennent de quoi il en

 12   était. C'était une portion importante de mon travail.

 13   Ensuite, j'ai été aussi présent dans le prétoire pour servir de lien

 14   entre les conseils et l'accusé.

 15   Au-delà de cela, je devais aussi organiser les documents, les

 16   apporter au conseil ou bien au barreau hollandais parce que c'est là que

 17   nous avions le gros de nos dossiers, il y avait aussi une armoire que nous

 18   utilisions là-bas. J'ai essayé de savoir à tout moment où se trouvent les

 19   documents, de les localiser et ensuite, au fur et à mesure qu'on en avait

 20   besoin, de les apporter au conseil. Puis aussi, j'ai créé des dossiers,

 21   pour ainsi dire, au sujet des différents sujets, des différents thèmes ou

 22   témoins.

 23   Aussi étais-je responsable de faire les liens avec des témoins potentiels

 24   dans l'ex-Yougoslavie. Mais ensuite, c'est une autre personne qui s'en est

 25   occupée. J'ai dû le faire pendant un certain temps.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que cela veut dire que vous

 27   étiez en mesure de suivre tout ce qui se passait au sein de l'équipe de la

 28   Défense ?


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  1   R.  Oui, oui, en effet. On pourrait dire cela, mais quand on dit "tout,"

  2   c'est peut-être une notion un peu large. Nous avions nos réunions, une

  3   fois, hebdomadaires et on se rencontrait tous, tous les membres de

  4   l'équipe, on parlait des choses qui restaient à faire, des choses comme

  5   cela; mais il y avait aussi quelques éléments de nature privée entre, par

  6   exemple, M. Stewart et Mme Loukas pendant qu'elle faisait partie de

  7   l'équipe ou bien ensuite, il y avait les mêmes modèles de conduite avec M.

  8   Josse. Je pense que là c'était tout à fait normal que je ne sois pas au

  9   courant.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vais vous poser quelques questions

 11   concrètes. Au niveau du paragraphe 5, vous parlez des désaccords au sein de

 12   l'équipe de la Défense quant aux témoins à citer, aux témoins potentiels.

 13   Ces désaccords existaient entre qui et pour quelle raison ?

 14   R.  Ces désaccords existaient surtout entre M. Krajisnik et M. Stewart. M.

 15   Krajisnik avait une idée pratiquement pendant toute la durée du procès des

 16   meilleurs témoins à citer alors que M. Stewart avait ses propres idées,

 17   donc ce n'était pas toujours facile d'harmoniser ces deux points de vue

 18   souvent opposés.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Dans ce même paragraphe, vous dites que

 20   la Défense n'a cité que 20 témoins alors que l'Accusation en a cité 200.

 21   Pourriez-vous expliquer comment cela affecte la façon dont s'est comporté

 22   M. Stewart ? Est-ce que c'est lui qui avait pris cette décision-là ?

 23   R.  La réponse claire et évidente à la question que vous me posez c'est que

 24   c'était lui qui était le principal conseil de la Défense et que c'était à

 25   lui de planifier et d'organiser la Défense de M. Krajisnik. Ce sont les

 26   choix qu'il a faits quand il s'agit du nombre de témoins aussi. Ensuite, on

 27   peut se poser la question de savoir si c'était une bonne décision, une

 28   mauvaise décision, et cetera. Mais en tout cas, la décision lui


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  1   appartenait, c'est lui qui l'avait prise.

  2   C'est vrai que le fait que M. Krajisnik ait témoigné, cela a pris

  3   aussi du temps de la Défense et cela a réduit le nombre d'autres témoins

  4   qu'on aurait pu citer à la barre. Ceci a influé, évidemment, sur le temps

  5   imparti à la Défense, effectivement, il faut le dire.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] On va passer au paragraphe 6.

  7   R.  D'accord.

  8   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Là, vous dites que M. Stewart avait

  9   avoué qu'il n'avait aucune idée de comment construire la Défense. Dans le

 10   paragraphe 9, vous dites que l'équipe de la Défense n'avait pas un plan, un

 11   plan de défense, une stratégie. Est-ce que vous dites qu'aucun membre de

 12   l'équipe - pas seulement M. Stewart, mais aucun membre de l'équipe -

 13   n'avait une idée claire de comment organiser, planifier cette défense ?

 14   R.  C'est une bonne question. Je vais tout d'abord parler du paragraphe 6

 15   que j'écris là.

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 17   R.  Est-ce que là vous parlez de ce qui s'est passé au niveau du quartier

 18   pénitentiaire ? 

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 20   R.  Très bien. Là, je ne fais que citer ce que M. Stewart a dit. C'est

 21   quelque chose qui a été dit en présence de M. Josse. Vous pouvez décider de

 22   la valeur à donner à cette déclaration.

 23   En ce qui concerne le paragraphe 9, vous avez tout à fait raison. Là,

 24   j'étais plus général. Là, je parle de l'équipe de la Défense.

 25   Peut-être que dans mon esprit c'est M. Stewart qui était le

 26   représentant de cette défense dans le sens où c'est lui qui prenait toutes

 27   les décisions importantes et définitives, puis j'ai jugé aussi d'après ses

 28   interactions avec M. Krajisnik. Il insistait que c'était lui qui devait


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  1   décider de la façon dont conduire la défense et organiser la défense. Peut-

  2   être aurais-je dû être plus précis -- mais voilà ce que j'ai voulu dire.

  3   Moi je parlais de M. Stewart comme de la personne qui était le responsable

  4   de l'organisation de la défense et de la défense.

  5   Je ne dis pas que d'autres membres de l'équipe de la Défense

  6   n'avaient pas leur mot à dire, mais ils n'avaient pas autant d'expérience

  7   d'avocat au barreau que M. Stewart et évidemment que lui, en tant que

  8   principal conseil de la Défense, il aurait pu discuter avec les autres

  9   membres de son équipe. Ceci ne lui aurait pas fait de mal; mais pour une

 10   raison ou pour une autre, nous n'avons vraiment jamais eu de discussions

 11   d'équipe au niveau des questions de stratégie quant aux choses qu'il reste

 12   à faire, et cetera. Tout ce dont on discutait, c'était comment mettre en

 13   œuvre quelque chose dont on avait déjà décidé. Il s'agissait de faire les

 14   choses pratiques, d'exécuter, et pas vraiment d'être impliqués dans le côté

 15   stratégique.

 16   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Maintenant, je voudrais parler du

 17   témoin expert que vous avez mentionné dans votre paragraphe 9.

 18   R.  Oui.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous dites que M. Stewart ne pensait

 20   pas que les témoins experts auraient pu clarifier certains points en

 21   l'espèce.

 22   R.  Oui.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pourriez-vous nous dire pourquoi M.

 24   Krajisnik n'était pas d'accord avec M. Stewart par rapport à ce point

 25   précis ?

 26   R.  M. Krajisnik n'était absolument pas d'accord avec M. Stewart là-dessus.

 27   Il n'était pas d'accord, tout d'abord, et je ne peux que vous dire ce que

 28   je l'ai entendu dire, M. Krajisnik sera le mieux à même pour répondre à vos


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  1   questions. Mais d'après ce qu'il m'a dit, il n'était pas d'accord et il

  2   s'est plaint --

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Parce que vous, vous étiez

  4   l'interprète, n'est-ce pas, si je vous ai bien compris --

  5   R.  Exactement, mais je --

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] -- donc vous avez entendu les uns et

  7   les autres --

  8   R.  Oui, oui, exactement. Je n'ai jamais essayé de lire dans les pensées de

  9   qui que ce soit. Je vous raconte ce que j'ai entendu, ce que j'ai dû

 10   traduire, puis vous avez cette personne qui peut vous répondre aux

 11   questions de toute façon. M. Krajisnik disait, plusieurs fois, il l'a dit

 12   plusieurs fois, il répétait cela, il a dit que le Procureur a présenté

 13   énormément de témoins experts. Il a pensé qu'il était très bizarre qu'un

 14   thème aussi complexe dans ce cas où il s'agit de choses très complexes, que

 15   la Défense ne présente pas son propre témoin pour contester les thèses du

 16   Procureur. Il ne pouvait pas comprendre la logique de cela. Il parlait en

 17   tant que laïc, en profane, mais il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas

 18   pourquoi il n'allait pas pouvoir présenter un témoin expert puisqu'il avait

 19   passé pas mal d'années ici, il a pu observer ce qui se passait dans

 20   d'autres procès, et il a cru comprendre, d'après ce qu'il disait, que

 21   c'était tout à fait courant pour la Défense de présenter ses témoins

 22   experts, pour quelque raison que ce soit.

 23   Donc, il ne pouvait le comprendre, tout simplement. Il ne comprenait

 24   pourquoi cela n'était pas fait dans ce cas précis.

 25   Donc, tout d'abord, il pensait que si le Procureur avait présenté un

 26   témoin expert pour les questions militaires, de médias, de démographie,

 27   portant sur la destruction de monuments culturels, et cetera, et cetera, il

 28   fallait que la réponse soit réciproque et que la Défense puisse présenter


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  1   autant de témoins experts pour répondre à ces allégations.

  2   Et M. Stewart n'était pas d'accord avec ça, M. Krajisnik a donc dit

  3   que dans ce cas, il allait demander qu'il n'y ait que deux témoins experts

  4   de la Défense.

  5   Donc, un expert en démographie, puisque la question de déplacement de la

  6   population est une question extrêmement importante en l'espèce. Et puis,

  7   aussi, il a demandé que l'on cite un expert sur la constitution, un expert

  8   juridique qui peut examiner la structure gouvernementale de la Republika

  9   Srpska, et ensuite, expliquer clairement aux Juges quelle était vraiment sa

 10   fonction, quelle était vraiment sa position, ce qu'il pouvait faire, ce

 11   qu'il ne pouvait pas faire par rapport à ce qui figurait dans l'acte

 12   d'accusation.

 13   Mais cela n'est pas passé non plus. Donc M. Krajisnik a continué à

 14   négocier, comme d'habitude. Il a dit d'accord, je laisse tomber les témoins

 15   experts, mais il faut absolument que l'on présente le témoin expert

 16   démographe.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Donc l'expert en démographie

 18   avait été identifié.

 19   R.  Oui.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'était le Dr Radovanovic.

 21   R.  Oui.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] On l'a contactée mais on ne l'a pas

 23   citée à la barre.

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Etait-ce une décision de M. Stewart,

 26   est-ce que c'est lui qui a décidé de ne pas la citer à la barre, et si cela

 27   est vrai, quelles sont les raisons pour lesquelles M. Stewart n'avait pas

 28   cité Mme Radovanovic à la barre ?


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  1   R.  C'est moi qui ai servi d'officier de liaison en quelque sorte, puisque

  2   Mme Radovanovic ne parlait pas suffisamment l'anglais pour communiquer

  3   directement avec M. Stewart. Donc, j'ai tout l'échange épistolaire ou des

  4   e-mails avec elle, où l'on discutait de la possibilité qu'elle dépose,

  5   qu'elle vienne témoigner en tant que témoin expert. Et M. Stewart -- et je

  6   suis vraiment désolé d'utiliser les mots qui peuvent paraître un peu

  7   émotionnels, mais je dois le dire, je dois dire qu'il a accepté, mais

  8   vraiment en grinçant des dents; il a réfléchi, plutôt, à la possibilité de

  9   prendre ce témoin expert, le Professeur Radovanovic.

 10   Donc, il lui a envoyé une lettre, il lui a demandé ce qu'elle pouvait

 11   faire, ce qu'elle ne pouvait pas faire. Elle lui a répondu, et je me

 12   souviens de cette première lettre ou les deux premières lettres qui étaient

 13   assez froides, puisque M. Stewart avait posé des questions sans pour autant

 14   le vouloir. Parce que moi, j'ai grandi aux Etats-Unis et je sais que ce

 15   n'est pas la Grande-Bretagne, mais je crois comprendre quelle est la

 16   mentalité britannique, peut-être mieux que quelqu'un en Serbie. Donc, je ne

 17   pense pas qu'il a vraiment voulu être comme ça, mais c'était assez froid,

 18   quand même. Il était un peu hautain, il n'a pas vraiment montré

 19   suffisamment de respect par rapport à son travail, à ce qu'elle pourrait

 20   faire, la valeur qu'elle pourrait ajouter.

 21   Et elle a répondu de la même façon. Froidement, aussi. Donc, tout cet

 22   échange épistolaire ne s'est pas très bien passé dès le début. Il y a eu

 23   encore quelques lettres, et ensuite, M. Stewart a tout simplement décidé de

 24   ne pas la citer ou de faire quoi que ce soit d'autre au sujet des témoins

 25   experts.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je comprends. Je vais parler d'autres

 27   choses, je vais aborder un autre thème.

 28   Avant d'écrire votre déclaration, est-ce que vous avez discuté du contenu


Page 447

  1   de cette déclaration avec quoi que ce soit avant de la faire ?

  2   R.  Non.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Tout particulièrement, vous n'en avez

  4   pas discuté avec M. Mano.

  5   R.  Non, absolument pas. Et je pourrais ajouter que je savais que M. Mano

  6   n'était pas content non plus avec la façon dont se déroulait le procès,

  7   mais je n'ai pas parlé de mes griefs ou de ce que j'allais mettre dans ma

  8   déclaration avec lui; et on n'a pas comparé nos déclarations.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] J'ai encore quelques questions à vous

 10   poser.

 11   En ce qui concerne le procès proprement dit, saviez-vous que M. Stewart

 12   avait négocié avec le Procureur un certain nombre de points d'accord, et

 13   c'était au cours de la phase préalable au procès ?

 14   R.  Non, non. Je n'étais pas du tout au courant de cela.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'était au mois de juillet 2004.

 16   R.  C'était avant que je ne rejoigne l'équipe.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais vous ne saviez pas que cela s'est

 18   produit ?

 19   R.  Je sais que c'était une procédure tout à fait courante ici. J'aurais pu

 20   imaginer que cela se fait ici aussi dans cette affaire, mais je n'avais

 21   rien à faire avec ce processus, et je n'avais aucune connaissance de ces

 22   faits qui ont fait l'objet d'un accord.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien. Une autre question que je

 24   voudrais vous poser. Vous, personnellement, vous connaissez M. Mano.

 25   R.  Je le connais, comment dire, virtuellement, je dirais. Pas

 26   personnellement. Parce qu'au moment où je suis arrivé ici, où j'ai rejoint

 27   l'équipe de M. Krajisnik, lui, il partait. Donc, on peut dire qu'on a

 28   travaillé ensemble quelques jours. Et en effet, je me souviens qu'avant de


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  1   partir au Japon, il avait invité toute l'équipe de la Défense, et moi y

  2   compris, à dîner dans un restaurant japonais. Et voilà, c'était le seul

  3   contact important, social que j'ai eu avec lui à l'époque.

  4   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous voulez dire que M. Mano a quitté

  5   le Tribunal, il avait quitté le Tribunal au mois d'avril 2005 ?

  6   R.  Il est parti très peu de temps après que je sois parti. Donc, on

  7   n'était pas là, ensemble, en tant que membres de l'équipe de la Défense

  8   pendant très longtemps. Je l'ai rencontré dans cette pièce réservée au

  9   conseil de la Défense. On nous a présentés, et puisque nous sommes tous les

 10   deux originaires des Etats-Unis d'Amérique, nous avons échangé quelques

 11   propos, des civilités, mais on ne s'est pas vraiment fréquentés pendant

 12   qu'on était à La Haye. C'est vrai qu'on est allé une fois au restaurant

 13   japonais, ensuite on s'est donné nos adresses e-mail, et de temps en temps,

 14   on s'est envoyé des e-mails. Parfois, m'a-t-il appelé du Japon, ce que j'ai

 15   interprété comme un signe de solitude de sa part dans un pays étranger.

 16   Il m'a parlé de sa famille, de son frère, de son travail, puisqu'il était

 17   prof d'anglais là-bas. Après cela, la première fois que je l'ai vu, c'était

 18   aujourd'hui quand je suis parti déjeuner; lui aussi, il passait, et on

 19   s'est dit bonjour, et c'est tout.

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc, vous avez dit que M. Mano avait

 21   invité tous les membres de l'équipe au restaurant japonais, à un dîner dans

 22   un restaurant japonais.

 23   R.  Oui.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce que M. Stewart y est allé ?

 25   R.  Non. Non, non. Il n'y est pas allé, puisqu'il n'a invité que les

 26   assistants, pour ainsi dire.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc, pendant cette période très

 28   limitée pendant laquelle vous avez eu à connaître M. Mano, est-ce que vous


Page 449

  1   avez eu l'impression ou est-ce que vous avez eu une idée des rapports qui

  2   prévalaient entre M. Mano et M. Stewart ?

  3   R.  Pendant que j'étais là, je n'ai pas vu qu'il y avait des problèmes. Il

  4   n'y avait pas vraiment de signes, de problèmes quelconques. Donc non,

  5   effectivement, je n'ai rien là-dessus.

  6   Q.  Est-ce que je peux vous demander si vous et M. Mano avez jamais discuté

  7   de la façon dont M. Stewart s'est comporté en tant que conseil de la

  8   Défense ?

  9   R.  Oui.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et quand cela ?

 11   R.  Depuis qu'il est parti, au téléphone. Parfois il m'appelait et je

 12   savais qu'il était assez proche avec la fille de M. Krajisnik, Milica, il

 13   l'appelait souvent, il parlait avec elle souvent au téléphone. Donc

 14   effectivement il me demandait comment se passait le procès. Au cours des

 15   questions, au fil des questions posées, on pouvait détecter une certaine

 16   dose de souci pour comment cela se passe et comment se tient M. Krajisnik

 17   et cetera et quelle sera l'issue définitive ?

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc vous avez discuté de cela après la

 19   fin ?

 20   R.  Oui.

 21   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc pas pendant qu'il était là ?

 22   R.  Non, il n'y avait pas besoin pour cela.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et c'est M. Mano qui a pris

 24   l'initiative de vous contacter ?

 25   R.  C'est toujours lui qui m'appelait du Japon. Moi je n'ai jamais appelé.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais est-ce que vous avez parlé de la

 27   possibilité de faire quelque chose, entamer une action ou quoi que ce soit

 28   puisque vous avez discuté au téléphone ou par échange de courriers de la


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  1   conduite de M. Stewart ? Donc est-ce que vous avez l'impression qu'il y

  2   avait quelque chose à faire, qu'il fallait faire quelque chose ?

  3   R.  M. Mano m'a dit qu'effectivement il avait déjà fait quelque chose, lui.

  4   Il m'a dit que pendant qu'il avait été là avant que je n'arrive, qu'il

  5   avait remarqué des choses qui le préoccupaient par rapport à la conduite de

  6   M. Stewart et il m'a dit qu'il avait écrit une lettre. Je ne sais pas si

  7   c'était une lettre qui avait été envoyée à M. Krajisnik ou bien au Greffe.

  8   Mais dans cette lettre, il énumérait les raisons de cette lettre, des

  9   choses qui le préoccupaient. Et il m'a dit qu'il avait aussi demandé que

 10   cette lettre soit traduite par le B/C/S et ensuite montrée à M. Krajisnik,

 11   parce que lui, il est né aux Etats-Unis et je ne pense pas qu'il parle le

 12   B/C/S.

 13   Donc il a écrit la lettre en anglais. Il a demandé que l'on traduise cette

 14   lettre et qu'on la montre et communique à M. Krajisnik pour bien lui

 15   montrer qu'il était préoccupé de son sort. Mais cela était fait, je pense.

 16   A la fin, je pense que le Greffe a montré la lettre à M. Stewart et lui a

 17   donné la possibilité d'écrire une lettre en guise de réplique.

 18   Donc voilà, c'est ce que je sais au sujet de ses préoccupations dans ce

 19   domaine. Ce que je sais aussi, c'est que M. Krajisnik, d'après ce qu'il m'a

 20   dit, l'appelait de temps en temps au moment des fêtes et cetera, et M. Mano

 21   ne parle que très peu le serbe; alors que la fille de M. Krajisnik parle

 22   assez bien anglais. Donc c'est comme cela qu'ils ont pu communiquer, je

 23   pense.

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc toutes ces informations que vous

 25   nous donnez maintenant, la source des informations c'est M. Mano ou est-ce

 26   que vous tenez ces informations d'une autre source ?

 27   R.  Non, non, non. Tout cela vient de M. Mano. Je n'ai pas d'autre source

 28   d'information.


Page 451

  1   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et à quel moment avez-vous exactement

  2   appris de l'existence de cette lettre, de la lettre de M. Mano ?

  3   R.  Je suis désolé, je ne peux pas vous fournir une date exacte, mais cela

  4   s'est produit au cours de la période qui a suivi son retour au Japon. Donc,

  5   nous sommes en train de parler de --

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais combien de temps s'est-il passé,

  7   parce que vous nous avez déjà dit auparavant qu'il est parti aussitôt après

  8   votre arrivée, et vous, vous êtes arrivé en avril ?

  9   R.  Oui, en avril 2005.

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Combien de temps après avez-vous eu

 11   vent de la lettre ?

 12   R.  Je ne sais pas; un mois je dirais.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc quelques mois ?

 14   R.  Oui, quelques mois.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bon. Alors ça peut être l'automne --

 16   R.  Non.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Peut-être l'été 2005 ?

 18   R.  Oui, probablement.

 19   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 20   Je crois que le Juge Meron a des questions pour vous. Je vais lui donner la

 21   parole.

 22   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Karganovic,

 23   merci pour votre déclaration ou vos dires d'aujourd'hui. Vous avez été

 24   impliqué sans doute dans l'affaire en tant qu'assistant de M. Krajisnik,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc vous êtes aujourd'hui témoin --

 28   R.  Oui.


Page 452

  1   M. LE JUGE MERON : [interprétation] de M. Krajisnik.

  2   R.  Non, je crois qu'on m'a dit que j'étais témoin de la Chambre.

  3   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous avez une fonction double en tant

  4   que témoin et en tant qu'assistant à l'époque. Alors, je voudrais que vous

  5   nous disiez de qui était l'idée que vous rédigiez ceci ?

  6   R.  La mienne.

  7   M. LE JUGE MERON : [interprétation] C'était votre idée. Non pas celle de M.

  8   Krajisnik ?

  9   R.  Non.

 10   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc ce n'est pas celle de M. Mano.

 11   R.  Non, certainement pas celle de M. Mano.

 12   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Alors peut-être cette information

 13   englobe-t-elle ses déclarations en réponse au Président, et je crois que

 14   vous avez dit que ce sont des informations que vous avez obtenues de la

 15   part de M. Mano ?

 16   R.  Non.

 17   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

 18   R.  Non, je n'ai pas dit cela. L'information que j'ai rédigée, ce sont mes

 19   observations.

 20   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Bon. Et quelles sont alors les

 21   informations que vous avez obtenues de la part de M. Mano ?

 22   R.  Au sujet de cette préoccupation de la part de M. Mano et au sujet de la

 23   lettre rédigée par M. Mano avant que je retourne à La Haye et ceci, au

 24   sujet de M. Krajisnik.

 25   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais les informations dans la

 26   déclaration sont des informations à vous.

 27   R.  Oui. Pour ce qui est de la période de temps, cela couvre la période de

 28   temps où j'ai été chargé de l'affaire et cela n'a rien à voir avec M. Mano


Page 453

  1   ou sa présence.

  2   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous avez dit que vous avez été commis

  3   à l'affaire d'avril 2004 à mai 2005.

  4   R.  Nous avons rectifié les années. Vous devez aller une année en plus,

  5   ajouter une année de plus.

  6   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Alors, cinq et six.

  7   R.  Oui.

  8   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Ceci que vous avez exprimé, c'est une

  9   préoccupation grave ?

 10   R.  Hm-hm.

 11   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pendant que vous étiez membre de cette

 12   équipe de la Défense, avez-vous exprimé ces préoccupations à qui que ce

 13   soit d'autre ou est-ce que vous avez gardé cela pendant toute cette période

 14   de temps ?

 15   R.  J'ai discuté de certaines de ces préoccupations, nous les avons

 16   partagées --

 17   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Avec qui ?

 18   R.  Avec Kelly Pitcher, c'est une jeune femme qui était assistante au sein

 19   de l'équipe, et c'est elle qui a été chargée du bureau que nous avions au

 20   sein du barreau ou de l'Association des avocats néerlandais. Nous nous

 21   sommes entretenus au sujet de la direction qu'était en train de prendre la

 22   Défense; on a parlé de la façon dont les choses étaient faites, et cetera.

 23   J'ai eu des conversations à ce sujet avec Mme Loukas, parce qu'elle aussi

 24   se trouvait être fort préoccupée pendant toute la période où j'ai séjourné

 25   ici et où cela coïncidait avec la période où elle a été co-conseil aussi.

 26   Elle a à plusieurs reprises exprimé sa préoccupation.

 27   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous en êtes-vous entretenu avec le

 28   conseil, M. Stewart ?


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  1   R.  Non.

  2   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pourquoi pas ?

  3   R.  Avec tout le respect que je dois à l'égard de ces messieurs qui sont

  4   ici, je pense qu'il y avait une espèce de barrière, si je puis m'exprimer

  5   ainsi. C'était M. Stewart qui l'avait édifiée. Je vais peut-être me servir

  6   d'un autre mot : d'un filtre. Donc compte tenu de la présence d'un filtre,

  7   c'est un mot plus atténué, nous avons pu passer de bien des choses au sujet

  8   de l'affaire et au sujet de choses qui n'avaient rien à voir avec

  9   l'affaire, il y avait une partie qu'il avait gardée pour lui-même en guise

 10   d'élément qui était son domaine, sa chasse gardée, un élément où il voulait

 11   garder un contrôle plein et entier, et qui ne donnait pas matière à

 12   contradiction. Alors cela a été sous-entendu, il ne donnait aucune

 13   instruction, mais il n'autorisait personne à accéder à cet espace avec ses

 14   propositions.

 15   Cela pourrait être une caractéristique d'un autre système en matière

 16   de droit, celui de la Grande-Bretagne, et qui ne m'est pas si bien connu.

 17   Mais en Amérique, les gens parlent de tout et de toutes choses au bureau.

 18   Les dirigeants encouragent les membres de leurs équipes à parler, à

 19   s'entretenir des choses, et c'est ainsi que l'on recueille des idées qui

 20   surviennent pour que l'on apporte des solutions meilleures. Mais nous

 21   sommes en train de parler ici d'une tradition différente, je ne peux pas

 22   juger de celle-ci. C'est la situation telle que je l'ai constatée. Je ne me

 23   suis pas senti à l'aise lorsqu'il fallait aborder M. Stewart, et pas même

 24   lorsque nous étions seuls, en tête-à-tête; lorsque nous étions en train de

 25   prendre un café, je ne pouvais pas lui dire : "Hey, Nicholas, que penses-tu

 26   de ceci ou de cela ? Est-ce que c'est la bonne chose à faire ?" Il a créé

 27   cette ambiance et on ne se sentait pas à l'aise en procédant de la sorte.

 28   D'un autre côté, nous avons eu une relation assez bonne, même amicale


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  1   qui allait au-delà de la relation de bureau. C'était une sorte de paradoxe,

  2   si on peut le dire.

  3   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc, c'est la personne la plus haut

  4   placée avec qui vous avez parlé de vos préoccupations relatives à la

  5   qualité de la représentation ou de la Défense de M. Krajisnik était Mme

  6   Loukas.

  7   R.  Oui. Là, il s'agissait d'une communication à deux voies. Et c'est elle

  8   qui m'a aussi parlé de ses préoccupations.

  9   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Est-ce que votre déclaration dit

 10   clairement que vous vous êtes entretenu au sujet de vos préoccupations avec

 11   Mme Loukas, parce que vous l'avez mentionné à plusieurs reprises, mais vous

 12   ne le dites pas de façon explicite.

 13   R.  Je ne suis pas sûr. Je ne pense pas l'avoir indiqué.

 14   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le Juge Guney.

 16   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Monsieur Karganovic, j'ai deux

 17   questions à vous poser.

 18   La première est celle-ci : vous avez quitté l'équipe de la Défense avant la

 19   fin de son travail. Qu'avez-vous fait entre-temps ? Est-ce que vous êtes

 20   resté en contact avec les membres de l'équipe de la Défense ? Ceci est la

 21   première question.

 22   R.  Oui.

 23   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] La deuxième question, c'est celle-ci :

 24   l'Accusation affirme que vous étiez impliqué dans la présentation de

 25   fausses allégations à un témoin de la Défense Davidovic, à l'occasion du

 26   contre-interrogatoire pendant le procès.

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Pouvez-vous nous en dire davantage à ce


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  1   sujet ? Merci.

  2   R.  Pour ce qui est de votre première question, c'était ce que j'avais fait

  3   une fois que j'ai quitté.

  4   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Oui, c'est cela.

  5   R.  Alors c'est bien la question ? Quand j'ai quitté l'équipe de la

  6   Défense, ma mère, mon cousin, et moi sommes partis en Serbie. Nous y avons

  7   passé l'été.

  8   Pour ce qui est de votre deuxième question, M. Davidovic a été un témoin de

  9   l'Accusation qui était en réalité un témoin très important de l'Accusation

 10   puisqu'il a présenté des allégations très graves au sujet de M. Krajisnik.

 11   Il s'agit ici d'un ex-haut fonctionnaire du ministère de l'Intérieur

 12   fédéral de la Yougoslavie, à savoir de la police. C'était donc un

 13   responsable au sein du ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska, et

 14   il me semble qu'il exerçait ses fonctions à Bijeljina.

 15   Les enquêteurs de M. Krajisnik en Bosnie ont trouvé des informations

 16   portant préjudice à M. Davidovic. Il y a eu une allégation disant que M.

 17   Davidovic, pendant qu'il a occupé des fonctions de pouvoir à Bijeljina

 18   pendant la guerre, à l'époque où il avait exercé des fonctions officielles,

 19   aurait extorqué de l'argent et des biens de la part d'une personne, un

 20   individu qui vivait là-bas. Il s'agit d'une femme qui était un médecin. Je

 21   le pense. Je n'en suis pas tout à fait sûr. Il faudrait que je me

 22   rafraîchisse la mémoire à ce sujet-là.

 23   Donc, ces enquêteurs qui intervenaient pour le compte de M. Krajisnik ont

 24   laissé entendre qu'il fallait se pencher sur cet aspect pour trouver ou

 25   découvrir s'il y avait de la vérité dans ce type d'allégation. Et Mme

 26   Loukas m'a dit de contacter la personne en question -- je pense qu'à

 27   l'époque, cette personne se trouvait à Sarajevo ou dans les environs de

 28   Sarajevo, pour vérifier s'il y avait de la vérité dans ce type


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  1   d'allégation.

  2   Je l'ai fait. Nous avons eu une conversation amicale, et j'ai transmis à ce

  3   médecin les dires partant desquels elle et sa famille avaient subi des abus

  4   de la part de M. Davidovic pendant le conflit, et cela a été nié. Alors

  5   j'ai accepté cette réponse que j'ai obtenue et j'ai communiqué le résultat

  6   de cette conversation à Mme Loukas.

  7   Le jour d'après ou deux jours après, le Procureur a dit dans le prétoire,

  8   chose qui était parfaitement vraie, que j'avais contacté ce médecin pour me

  9   renseigner au sujet de ces allégations.

 10   Mais j'ai agi en application des instructions émanant de Mme Loukas. Je

 11   n'ai pas fait ce coup de fil de ma propre initiative, je l'ai fait pour

 12   obtenir des informations que le co-conseil aurait trouvé utiles pour

 13   l'affaire, et j'ai conduit cette conversation d'une façon professionnelle

 14   et très polie.

 15   Cela n'a rien à voir avec le fond des allégations. Donc, je n'ai pas généré

 16   l'information. C'est une information qui nous a été communiquée. Et mon

 17   devoir au sein de l'équipe de la Défense a consisté à procéder à cette

 18   vérification seulement.

 19   M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Merci.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

 21   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] J'ai l'impression que les Juges n'ont

 22   plus de questions à vous poser. Je me demande donc s'il serait peut-être

 23   approprié de faire une pause, parce que nous allions de toute manière la

 24   faire dans une quinzaine de minutes. Peut-être aurons-nous le temps de

 25   discuter de la deuxième question à débattre pendant cette pause. Alors nous

 26   allons faire une pause maintenant, et nous reprendrons dans, disons, 25

 27   minutes. Cela signifie à 16 heures moins 20.

 28   --- L'audience est suspendue à 15 heures 13.


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  1   --- L'audience est reprise à 15 heures 48.

  2   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous allons poursuivre notre audience.

  3   Je rappelle les parties en présence que nous sommes à huis clos partiel,

  4   nous sommes en train de parler de ce document qui porte la cote AD2, et

  5   nous allons donner la parole à M. Krajisnik pour contre-interroger le

  6   témoin sur une durée totale de 45 minutes -- enfin, il peut partager son

  7   temps avec M. Dershowitz s'il le souhaite, et il y aura une dizaine de

  8   minutes en plus pour M. Dershowitz s'agissant de l'entreprise criminelle

  9   commune.

 10   A vous, Monsieur Krajisnik.

 11   Contre-interrogatoire par M. Krajisnik :

 12   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Karganovic.

 13   R.  Comment allez-vous, Monsieur Krajisnik.

 14   Q.  Dans votre déclaration, vous avez fourni plusieurs observations portant

 15   sur le travail de M. Stewart; est-ce bien exact ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Il me semble que les Juges de la Chambre se sont penchés sur la partie

 18   de ce que vous avez eu à connaître et de vos conclusions qui les

 19   intéressait. Moi, je me propose de vous poser des questions sur l'élément

 20   ou les éléments qu'il vous a été donné d'entendre de la bouche de Mme ou

 21   Mlle Loukas. Je vais dire qu'à l'occasion d'une conversation avec elle, il

 22   vous a été donné la possibilité de constater de grosses divergences entre

 23   Mme ou Mlle Loukas et M. Stewart. Pouvez-vous indiquer aux Juges de la

 24   Chambre ici présents en quoi consistaient ces grandes divergences ?

 25   R.  Certes. La divergence fondamentale, la plus accentuée, était celle de

 26   la voir, Mlle Loukas, a été gênée de ce qu'elle avait perçu comme un manque

 27   de théorie ou de stratégie de la Défense pour ce qui est de la définition

 28   du principe qui serait susceptible d'aider l'équipe de la Défense à établir


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  1   leurs propres priorités, à savoir de déterminer les objectifs à court et à

  2   long termes, et ainsi de suite. Elle s'est donc sentie frustrée, c'est

  3   l'impression que j'ai eue, et ce, d'une façon dont quelqu'un peut se sentir

  4   frustré lorsqu'il n'est pas à même de faire ce qu'il sent être correct dans

  5   ces circonstances. Quand je dis correct, c'est professionnellement correct

  6   que je l'entends. Donc c'était sur le plan professionnel qu'elle était

  7   frustrée. Je crois que c'était la façon la plus succincte que je puis

  8   exprimer la chose. C'est l'impression que je me suis faite.

  9   Q.  Vous avez dit qu'elle a dit qu'elle ne souhaitait pas partager la

 10   culpabilité du résultat catastrophique qui allait avoir lieu. Vous

 11   souvenez-vous alors de sa façon d'intervenir auprès des Juges de la Chambre

 12   ? A-t-elle dit quelque chose de similaire lorsqu'elle a présenté sa

 13   démission auprès des Juges de la Chambre ?

 14   R.  Pour ce qui est de la première partie de votre question, je peux citer

 15   ce qu'elle a dit d'un mot à l'autre. Elle a effectivement dit

 16   "catastrophique." Je ne paraphrase pas. C'est le mot utilisé par Mlle

 17   Loukas dans sa conversation avec moi.

 18   Pour ce qui est du deuxième segment de votre question, je vous dirais que

 19   j'étais probablement là-bas, mais je ne m'en souviens pas. Je ne me

 20   souviens pas de ce à quoi vous faites allusion. Tout simplement, je ne m'en

 21   souviens pas.

 22   Q.  Si maintenant je vous dis que dans un certain nombre de documents et

 23   dans les notes de M. Stewart prises à l'occasion de rencontres avec les

 24   représentants des Juges de la Chambre, M. Stewart lui-même a prononcé ce

 25   type de qualificatif. Il a dit : "Si je n'ai pas les ressources qu'il faut

 26   dans la situation dans laquelle je me trouve, je peux m'attendre à des

 27   résultats catastrophiques." Alors avez-vous ressenti chez M. Stewart aussi

 28   une forme de préoccupation ?


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  1   R.  Au risque de - et là, je suis hésitant à le dire et je ne voudrais pas

  2   vous décevoir - il faut que je sois tout à fait sincère et dire à la

  3   Chambre ce que je sais ou ce que j'ai remarqué de façon fiable; je ne peux

  4   pas, bien entendu, lire les pensées de M. Stewart, je ne sais pas dans

  5   quelle mesure, en son for intérieur, il a été préoccupé ou pas, et je ne

  6   peux pas dire que dans une conversation  quelle qu'elle soit avec moi il

  7   ait exprimé un sentiment d'appréhension vis-à-vis de l'issue possible de ce

  8   procès. Je n'arrive pas à m'en souvenir.

  9   Une fois de plus, je tiens à dire que je déteste parler de la sorte avec

 10   tout le respect que j'ai pour M. Nicholls. C'est une autre culture, une

 11   autre mentalité, si vous le comprenez. Les Anglais ont une certaine

 12   attitude qui a l'apparence d'une attitude désinvolte. Ils disent oui -- on

 13   s'en sortira. Alors il m'est difficile de dire comment il se sentait en son

 14   for intérieur, qui sait. Je ne suis pas Anglais, il est difficile pour moi

 15   de le dire.

 16   Il se peut que M. Stewart ait ressenti de la préoccupation au sujet de

 17   cette possible issue de ce procès, mais il ne l'a jamais vraiment exprimée

 18   à mon égard en ces termes.

 19   Q.  Votre réponse est celle de dire qu'il n'avait pas exprimé de

 20   l'inquiétude.

 21   R.  Pas devant moi.

 22   Q.  Fort bien. Merci. Est-ce que M. Stewart, dans les conversations que

 23   vous avez eues, vous aurait confié quel est le type de défense juridique

 24   qu'il avait eue à conduire auparavant en Angleterre ? Est-ce que c'était au

 25   pénal, est-ce que c'était en matière commerciale ou dans d'autres types

 26   d'affaires ?

 27   R.  J'ai essentiellement pu supposer au sujet de quoi il a eu à intervenir

 28   en Angleterre partant des conversations que j'ai eues avec lui et des


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  1   commentaires qu'il a faits. D'ailleurs, on peut le voir sur le réseau

  2   internet, je crois qu'il a fait beaucoup de droit en matière commercial, de

  3   droit en matière de sports et de choses de ce type. De même, chose que je

  4   trouve admirable, je pense qu'il a été impliqué dans des organisations

  5   internationales au niveau de la promotion des droits de l'homme au Moyen-

  6   Orient. Je pense qu'il s'agissait du Kurdistan ou d'un pays de ce genre.

  7   Q.  Merci. Alors pourriez-vous maintenant répondre hypothétiquement ? Est-

  8   ce que M. Stewart n'aurait pas été inquiété par l'issue de ce procès parce

  9   que peut-être ne l'a-t-il pas compris ?

 10   R.  Cette question alternative que vous posez, à savoir de dire s'il avait

 11   compris le procès en question, je pense en avoir parlé dans ma déclaration,

 12   ce n'est pas une question de spéculation ou d'hypothèse. Je l'ai entendu

 13   dire à M. Josse, à l'unité de détention, qu'il ne comprenait pas cette

 14   affaire et qu'il était complètement perdu, qu'il ne savait pas comment

 15   évaluer les choses et il ne savait pas non plus comment conduire la

 16   défense.

 17   Q.  Si je vous dis à présent que dans les notes de M. Stewart, il y a une

 18   déclaration d'un représentant de la Chambre où il lui aurait été fait

 19   reproche d'avoir surchargé de travail Mlle Loukas alors que lui, il vaquait

 20   à des affaires à Londres et à d'autres affaires à titre privé, est-ce que

 21   cela corrobore ce que vous en savez et l'expérience que vous avez eue ?

 22   R.  Oui. Je n'ai pas connaissance du document que vous évoquez, mais la

 23   thématique est une chose que je n'ignore pas. Partant de mes propres

 24   observations pendant que Mme Loukas était ici, il m'a semblé que quel

 25   qu'ait été le partage du travail effectué entre eux, c'est elle, au final,

 26   qui en faisait plus que ce qui serait sa juste part. Mais pour dire vrai,

 27   je ne sais pas comment ils avaient convenu des choses au début du procès,

 28   est-ce que le partage du travail était à 50/50, 60/40, 70/30 ou quoi que ce


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  1   soit d'autre. Je ne sais pas quel a été leur arrangement privé, mais il est

  2   certain qu'elle a été surchargée de travail; et elle m'a communiqué à moi

  3   une très grande frustration et préoccupation à ce sujet. Elle se sentait

  4   faire l'objet d'un abus, pour être tout à fait franc à votre égard. C'est

  5   définitivement et absolument la vérité.

  6   Pour ce qui est maintenant de ses autres activités professionnelles, je

  7   sais qu'à plusieurs reprises, non seulement lorsque Mlle Loukas était ici,

  8   mais pendant toute la période de mon mandat ici, il avait coutume de passer

  9   plusieurs jours à Londres aux fins, comme il le disait, de parachever des

 10   affaires en cours où il avait été impliqué.

 11   Je ne sais pas si cette pratique a persisté pendant la période avant que je

 12   ne rejoigne l'équipe, mais c'est à plusieurs occasions ce qu'il a dit

 13   pendant que j'étais là.

 14   Q.  M. Stewart vous avait dit qu'il n'était pas au fait de l'affaire, est-

 15   ce qu'il a fait ce qu'il fallait faire pour se familiariser avec l'affaire

 16   ou est-ce qu'il a continué à improviser sans s'intéresser vraiment au

 17   contexte de l'affaire et à l'affaire ?

 18   R.  Si vous voulez, je vais répondre de façon plus détaillée parce que, par

 19   la suite, j'ai appris quelque chose de la bouche de M. Josse, et je pense

 20   que c'est quelque chose qui est pertinent par rapport à la question que

 21   vous m'avez posée. Je pense que c'est comme cela que ça fonctionne en

 22   Grande-Bretagne. Nous n'avons pas ce partage en Amérique avec différents

 23   avocats qui plaident et les avocats qui ne plaident pas. En Angleterre,

 24   vous avez les avocats qui font tout le travail préparatoire, ensuite on le

 25   sert sur un plateau en or à l'avocat plaidant. C'est lui qui va présenter

 26   tout cela au Juge.

 27   Je pense que M. Stewart est le produit de ce système. Il se voyait comme un

 28   avocat plaidant et, à la lumière de cette explication que j'ai eue par la


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  1   suite de M. Josse, qui m'a expliqué comment fonctionnait le système

  2   britannique, à l'époque je ne le connaissais pas, je ne connaissais pas

  3   tous ces détails, moi je me suis toujours demandé ce que c'était que cet

  4   avocat plaidant et quelle était la différence entre l'avocat plaidant et

  5   l'avocat tout court. Donc rétrospectivement, j'ai appliqué ce modèle à la

  6   situation, et ceci a jeté de la lumière sur sa conduite parce qu'il

  7   s'attendait à ce que les autres membres de son équipe ainsi que son co-

  8   conseil, qu'ils soient des avocats qui courent, ceux qui préparent les

  9   dossiers. Lui, il se voyait comme l'avocat plaidant qui présentait tout

 10   cela aux Juges et qui s'adressait directement aux Juges.

 11   Pour répondre à votre question, plus directement, je n'ai jamais eu

 12   l'impression qu'il n'a jamais essayé de se familiariser avec le contexte de

 13   la crise yougoslave et de se familiariser avec la nature même de ce

 14   conflit. Peut-être que je me trompe, mais c'est l'impression que j'ai pu

 15   avoir.

 16   Chez lui, j'ai vu deux ou trois œuvres de journalistes portant sur ce

 17   sujet, pas plus, pas d'ouvrages sérieux. Au cours des entretiens que j'ai

 18   pu avoir avec lui, je n'ai jamais eu l'impression qu'il connaissait à fond

 19   ce sujet, le contexte historique politique du conflit.

 20   Q.  Maintenant, une question portant sur la documentation. Moi, quand j'ai

 21   reçu la décision de la Chambre d'appel, j'ai reçu aussi des archives très

 22   volumineuses. Ceci m'est parvenu dans le quartier pénitentiaire. Est-ce que

 23   vous savez d'où cela vient, ces archives, ces documents?

 24   R.  Non, je ne sais absolument pas de quoi vous parlez.

 25   Q.  Je vais être plus précis. Est-ce que vous savez qu'avant M. Stewart, il

 26   y avait un autre conseil et c'était M. Brashich ?

 27   R.  Oui, je le sais.

 28   Q.  Est-ce que maintenant vous comprenez un peu mieux la question que je


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  1   vous ai posée ? Est-ce que ce sont les archives qui ont été héritées pour

  2   ainsi dire de M. Brashich ?

  3   R.  D'accord, je vois. Donc vous parlez des dossiers à l'époque du procès ?

  4   Oui, de façon indirecte, je suis au courant de cela; je dirais plutôt que

  5   là il s'agit de ouïe-dire. J'ai entendu parler de cela.

  6   Donc apparemment, au moment où M. Stewart a été nommé en tant que

  7   conseil principal de cette affaire, il a demandé à M. Brashich de lui

  8   communiquer l'affaire, de lui communiquer tous les dossiers. Il a reçu

  9   plusieurs boîtes de dossiers. Il s'agissait donc de documents communiqués,

 10   et cetera, qui étaient pertinents sans doute pour l'affaire et nombreuses

 11   boîtes sont restées fermées, n'ont jamais été ouvertes. Là, vous pouvez

 12   tirer vos propres conclusions.

 13   Q.  Maintenant, une question très précise. Est-ce que M. Stewart et votre

 14   équipe de la Défense, est-ce que vous avez eu la possibilité d'étudier tous

 15   ces documents ?

 16   R.  Je dois vous rappeler que je suis arrivé au mois d'avril 2005, et avant

 17   cela, il y a eu des choses qui se sont passées. Donc je ne peux pas vous

 18   dire ce qui s'est passé avant, mais pendant que moi j'y étais, le seul

 19   contact que j'ai pu avoir avec ces documents, ce sont les documents qui se

 20   trouvaient dans notre bureau dans l'Association des avocats du barreau

 21   hollandais. J'avais pour mission qui m'a été transmise par M. Stewart, il

 22   s'agissait de Noël 2005, de passer du temps là-bas et de passer en revue

 23   beaucoup de documents, des documents qui étaient éparpillés un peu partout,

 24   il y en avait même par terre, et de voir si j'y voyais des choses

 25   importantes. Là, il y a le mot qu'il utilisait vraiment, il ne me vient pas

 26   à l'esprit mais ce qu'il a dit c'est de me débarrasser du reste, de le

 27   jeter. C'était à peu près ce qu'il m'a dit. Donc c'est peut-être vrai que

 28   j'ai vu de tels documents.


Page 466

  1   Q.  Est-ce qu'un quelconque membre de l'équipe de la Défense vous a jamais

  2   dit que ces documents, les documents communiqués par M. Brashich et par les

  3   Procureurs ont été étudiés ?

  4   R.  Non. Cela ne veut pas dire que cela n'a jamais été fait mais en tout

  5   cas, on me l'a pas dit.

  6   Q.  Ici, vous avez dit quelque chose que d'autres personnes ont dit

  7   d'ailleurs aussi, que de nombreuses boîtes contenant des documents n'ont

  8   jamais été ouvertes; on ne les a même pas ouvertes, on n'a jamais examiné

  9   ces documents.

 10   R.  Je peux vous dire ce que j'ai entendu de M. Stewart par exemple. Il a

 11   dit que M. Brashich avait envoyé de nombreuses boîtes contenant des

 12   documents, que de nombreuses boîtes sont arrivées des Etats-Unis d'Amérique

 13   scellées, dans le même état où les boîtes étaient au moment où elles ont

 14   été envoyées ou communiquées à M. Brashich. C'est ce que je sais à ce

 15   sujet.

 16   Q.  Vous avez mentionné M. Josse, c'est le deuxième co-conseil de M.

 17   Stewart, et vous avez dit que M. Stewart l'avait envoyé en mission en

 18   Bosnie et que c'était la première fois qu'il se trouvait dans les Balkans.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges si vous avez appris de M. Josse s'il a pu

 21   faire quoi que ce soit vu ses maigres connaissances en la matière au sujet

 22   de la Bosnie, et cetera ?

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vais vous interrompre un instant, M.

 24   Karganovic. Vous écoutez la langue que parle M. Krajisnik donc pour vous

 25   c'est facile de répondre immédiatement. Mais ce que vous devriez faire

 26   c'est de faire une petite pause pour permettre aux interprètes de finir

 27   leur interprétation avant de commencer à répondre parce que si vous ne

 28   faites pas cela, les interprètes ne peuvent pas interpréter les deux


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  1   personnes, les questions et vos réponses.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc, vous m'avez demandé si M. Josse a réussi

  3   à faire quoi que ce soit en Bosnie, quoi que ce soit d'utile. Vous pouvez à

  4   peine vous attendre que quelqu'un qui se trouve dans la position dans

  5   laquelle se trouvait M. Josse, qu'il rentre d'un voyage et qu'il vous dise

  6   : "Bon, me voilà, je n'ai rien fait." Evidemment, il ne l'a pas dit comme

  7   cela, mais avant d'y aller et au cours de la période avant même que l'on

  8   prenne la décision de l'y envoyer, au cours de différents entretiens que

  9   j'ai pu avoir avec M. Josse, il a fait comprendre que lui et son épouse

 10   aimaient bien voyager, même s'ils n'ont jamais voyagé en dehors de

 11   l'Angleterre exception faite peut-être de la France, et qu'il ne s'est

 12   jamais rendu dans les Balkans, et qu'il ne connaissait pratiquement rien

 13   sur les choses, les situation, et cetera là-bas. Donc il était complètement

 14   novice dans cela, et vous pouvez imaginer ce qu'il a pu comprendre vraiment

 15   parce qu'il ne pouvait pas apprendre tout cela entre-temps; il ne pouvait

 16   pas comprendre tout ce qui se passe, quels étaient les contextes, et

 17   cetera, entre-temps.

 18   Est-ce que je peux m'exprimer librement, peut-être me livrer à des

 19   hypothèses, Monsieur le Président ?

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, allez-y. Cela dépend, évidemment.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne vais rien dire de terrible, mais je

 22   vais vous dire une conclusion qui me semble logique. M. Stewart avait une

 23   personne dans son équipe qui parlait la langue, le B/C/S; donc M. Jolovic

 24   parlait aussi bien l'anglais que le B/C/S. Je pense qu'il était né à

 25   Belgrade, qu'il avait fait ses études en Angleterre, et il connaissait très

 26   bien la situation sur le terrain. Donc j'ai été vraiment étonné, très

 27   étonné qu'il ait décidé d'envoyer M. Josse en Bosnie. Il m'a demandé si je

 28   connaissais qui que ce soit qui parlait anglais et qui pourrait agir en


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  1   tant qu'interprète de M. Josse. J'ai trouvé un ami qui a pu le faire et

  2   cela a fonctionné. Mais j'ai trouvé cela vraiment étrange qu'il n'envoie

  3   pas un membre de l'équipe qui s'y connaît un petit peu, déjà.

  4   Cet ami que je recommandais en Bosnie, il a bien fait son travail,

  5   mais c'était quelqu'un qui avait fait des études dans un autre domaine. La

  6   seule qualification qu'il avait c'était de parler les deux langues.

  7   Donc j'ai été très étonné par ce choix qui me paraissait très étrange à

  8   l'époque.

  9   M. KRAJISNIK : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Karganovic, vous avez dit aux Juges de la Chambre que la

 11   Défense avait présenté 20 témoins. Pourriez-vous dire aux Juges de la

 12   Chambre, si vous vous en souvenez, combien y avait-il de déclarations

 13   préalables de potentiels témoins qui auraient pu venir déposer ?

 14   R.  Il y en avait au moins 200, et je les ai toujours dans mon ordinateur.

 15   Q.  Maintenant, une autre question. Vous, en tant qu'équipe de la Défense,

 16   comment vous avez planifié ces 20 témoins, c'est-à-dire de les citer, de

 17   les faire venir, justement ces 20 témoins-là.

 18   On vient de me dire que votre chiffre, enfin le chiffre de 200 témoins,

 19   qu'il ne figure pas au compte rendu d'audience. Pourriez-vous, s'il vous

 20   plaît, répondre ?

 21   R.  Oui, j'ai dis qu'il y avait à peu près 200 déclarations préalables de

 22   témoins potentiels recueillies par les enquêteurs sur le terrain, c'étaient

 23   les enquêteurs de M. Krajisnik. On devait travailler sur cette base, et

 24   j'ai encore dans mon ordinateur toutes ces déclarations préalables.

 25   Q.  Comment avez-vous organisé la venue de témoins ? Comment les avez-vous

 26   choisis ? D'après quels critères ?

 27   R.  Au début, ceci fut l'objet des négociations intenses entre M. Krajisnik

 28   et M. Stewart, et il y a là des désaccords fréquents. Apparemment, il y


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  1   avait des gens qui ne pouvaient pas venir à cause des problèmes familiaux,

  2   parce qu'ils étaient malades, ou ils pouvaient venir, mais plus tard. Donc

  3   il y avait toujours des petits problèmes de fonctionnement, si vous voulez.

  4   Mais quand on dit "planifier," quand vous utilisez ce mot, je peux vous

  5   dire que je n'ai pas aperçu l'existence d'un plan. C'était au hasard que ce

  6   choix s'est fait. Et pour illustrer cela, voici un exemple : à peu près au

  7   mois de janvier 2006, l'équipe de la Défense était dans une situation assez

  8   désespérante parce qu'on ne savait pas comment citer les témoins, selon

  9   quels critères, que faire. Donc Nikolas a dit à la personne qui était

 10   responsable des témoins : "Prenez cette liste et passez-la en revue par

 11   ordre alphabétique et voyez qui vous pouvez contacter et qui peut venir."

 12   Q.  Monsieur Karganovic, pourriez-vous dire aux Juges si M. Krajisnik a

 13   jamais donné sa propre liste de témoins éventuels à M. Stewart et si, sur

 14   la base de cette liste, si vous avez fait vos résumés ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que vous avez cité les témoins sans que M. Krajisnik soit au

 17   courant de ce processus, est-il exact qu'il en a été informé par la suite,

 18   après coup ?

 19   R.  Il y a eu des surprises pour M. Krajisnik effectivement, et cela est

 20   arrivé souvent. Tout cela a été l'œuvre du hasard. Parfois, il consultait

 21   M. Krajisnik, dans le sens où il lui disait qui allait être cité, et

 22   parfois, quelqu'un était cité en se présentant à la grande surprise de M.

 23   Krajisnik, alors que M. Krajisnik pensait qu'une autre personne allait être

 24   citée à la barre. Il pensait d'ailleurs que cette autre personne aurait été

 25   mieux à même de témoigner en sa faveur.

 26   Q.  Monsieur Karganovic, maintenant je veux essayer de rafraîchir votre

 27   mémoire. Est-ce que M. Krajisnik a jamais demandé à M. Stewart de lui

 28   communiquer la liste des témoins qu'il entend citer ?


Page 470

  1   R.  Oui.

  2   Q.  L'a-t-il jamais reçue ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que M. Krajisnik a reçu de la main de M. Stewart la liste des

  5   témoins que M. Stewart avait l'intention de citer ?

  6   R.  Je ne suis vraiment pas sûr de cela. C'est vrai que l'on modifiait

  7   souvent la liste des témoins, mais j'ai tout cela dans mon ordinateur.

  8   La liste de témoins, c'était quelque chose qui était très fluctuant, cela

  9   changeait tout le temps. Donc c'est très difficile pour moi de vous fournir

 10   une réponse précise à ce sujet.

 11   Q.  Bien. Maintenant, je vais vous poser une autre question : est-ce que M.

 12   Krajisnik a demandé à M. Stewart de lui expliquer ce dont il avait besoin

 13   pour contester les allégations qui figuraient dans l'acte d'accusation ?

 14   R.  Oui, bien sûr.

 15   Q.  Est-ce que cela s'est produit à plusieurs reprises ?

 16   R.  Oui, un certain nombre de fois, effectivement.

 17   Q.  Comment M. Stewart a-t-il réagi à cela ? A-t-il jamais fourni une

 18   réponse ?

 19   R.  Excusez-moi, mais apparemment ma réponse précédente n'a pas été saisie

 20   au compte rendu d'audience. J'ai dit : "Plusieurs fois même."

 21   Je n'ai jamais été présent quand M. Stewart aurait fourni une réponse

 22   complète à cette question.

 23   Q.  J'espère qu'on est d'accord pour dire que vous étiez le seul à

 24   interpréter mes entretiens avec M. Stewart. Etes-vous d'accord ?

 25   R.  Oui. Mais il ne faut pas oublier qu'il y a eu d'autres personnes qui

 26   parlaient le B/C/S, qui se sont jointes à l'équipe, M. Sladojevic, et puis

 27   d'autres personnes. Donc par la suite, alors qu'on était déjà en 2006,

 28   c'est vrai qu'on se rendait au quartier pénitentiaire de façon alternative.


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  1   On ne peut pas dire que j'étais la seule personne qui servait d'interprète.

  2   Q.  Mais vous dites que pendant que vous serviez d'interprète, M. Stewart

  3   n'avait pas fourni de réponse à M. Krajisnik; autrement dit, il n'a pas

  4   répondu à sa question de savoir ce dont il avait besoin pour réfuter les

  5   allégations de l'acte d'accusation ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre où se trouvait la

  8   différence de point de vue entre M. Krajisnik et M. Stewart ?

  9   R.  Il y avait une différence de fond dans leurs approches respectives à

 10   savoir, M. Krajisnik peut-être comme ferait un homme d'affaire, insistait

 11   pour que la Défense ait un plan, une stratégie. Il analysait de façon très

 12   détaillée les preuves du Procureur, l'acte d'accusation, et il essayait de

 13   trouver des réponses adéquates et efficaces qu'il s'agissait de présenter à

 14   travers les moyens de la Défense. Comme je l'ai dit dans ma déclaration,

 15   dans un des paragraphes, j'ai dit qu'après la pause du mois juillet en

 16   2006, on avait à peu près deux mois avant de reprendre le procès. Et

 17   pendant cette période, et ceci jusqu'en septembre, je pense que j'avais

 18   pris une dizaine de jours de congé au mois de septembre, je me suis rendu

 19   en Turquie avec un cousin à moi. Donc entre cette période-là et le mois de

 20   septembre, j'ai rendu visite souvent à M. Krajisnik, en compagnie de M.

 21   Stewart bien sûr, au quartier pénitentiaire, et il y avait deux ou plutôt

 22   trois sujets principaux dont on parlait.

 23   Tout d'abord, il y avait quelque chose qui a été mis à l'ordre du

 24   jour par M. Krajisnik. C'était de voir quel était le plan de la Défense, la

 25   stratégie.

 26   Ensuite, il y avait deux points qui étaient toujours mis en avant par

 27   M. Stewart : le budget, donc la question financière. Le deuxième point,

 28   c'était de ne plus permettre à M. Krajisnik de poser des questions lui-même


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  1   aux témoins.

  2   Donc c'était un dialogue de sourds, et j'étais au milieu de tout

  3   cela. Je servais d'intermédiaire. Aucun des deux côtés n'entendait l'autre,

  4   ne faisait pas trop attention à ce que l'autre disait. C'était deux mois

  5   extrêmement difficiles pour moi. C'était une sorte d'agonie.

  6   Q.  Maintenant je vais vous poser une autre question. Vous avez dit ici que

  7   vous n'avez pas publiquement parlé de cela, de ce qui figure dans votre

  8   déclaration préalable et que vous ne l'avez pas fait parce que tout

  9   simplement vous ne vouliez pas nuire aux rapports qui existaient ou changer

 10   ces rapports, les rapports qu'il y avait entre vous et M. Stewart.

 11   Mais je veux vous poser une question qui va peut-être vous paraître

 12   un peu bizarre. Vous, en tant qu'un juriste professionnel, est-ce que vous

 13   ne pensiez pas que vous vous deviez d'être loyal envers M. Stewart et que

 14   c'est pour cela que vous ne pouviez pas publiquement parler de comment se

 15   passent les choses, et cetera ?

 16   R.  Je ne sais pas comment vous définissez la loyauté, mais il est vrai que

 17   j'ai sympathisé avec Nicholas puisque c'est une personne sympathique,

 18   gentille. Si vous me posez la question de savoir si je ne voulais pas le

 19   blesser, oui, peut-être, peut-être qu'il y avait de ça; mais en même temps,

 20   je ne pense pas que j'avais suffisamment de recul pour réfléchir à tout ce

 21   qui se passait pendant le procès, je ne pouvais pas assembler toutes les

 22   pièces du puzzle et me dire c'est dans l'intérêt que je fasse ceci ou cela.

 23   Même si l'on ne prend pas en compte la question de loyauté ou des

 24   sentiments personnels, ce n'est que par la suite, quand j'ai écrit cette

 25   déclaration pour la Défense de M. Krajisnik, pour cet appel, j'ai compris

 26   qu'il fallait que j'écrive cela, que c'était ce que je pensais.

 27   Q.  Vous avez assisté au procès, vous avez été dans le prétoire. Est-ce que

 28   vous avez été présent au moment où Krajisnik a dit qu'il n'était absolument


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  1   pas d'accord avec M. Stewart et quand il s'est adressé aux Juges de la

  2   Chambre pour faire part de ce désaccord publiquement ?

  3   R.  Quand vous avez demandé que M. Stewart soit démis de ses fonctions ?

  4   Q.  Oui.

  5   R.  Oui, j'étais là.

  6   Q.  Est-ce qu'on peut en tirer la conclusion que je n'étais pas d'accord

  7   avec ce que faisait M. Stewart ?

  8   R.  Oui, je pense que c'est la seule possible conclusion qu'on peut en

  9   tirer.

 10   Q.  Bien. Je vous remercie. Maintenant, puisque nous n'avons que très peu

 11   de temps encore, je vais vous demander ceci : quand vous avez rejoint

 12   l'équipe de M. Stewart, vous êtes arrivé là sur quelle recommandation --

 13   parce qu'ici, c'est tout à fait logique, normal, que le conseil principal

 14   nomme ses collaborateurs. Est-ce que ceci a été fait par M. Stewart au

 15   moment où vous, vous avez été trouvé ? Est-ce que c'est lui qui vous a

 16   embauché ?

 17   R.  Oui, c'est lui qui m'a engagé, évidemment. C'est la procédure --

 18   Q.  Attendez, un instant.

 19   R.  Je peux --

 20   Q.  Allez-y.

 21   R.  Mais je peux élaborer. Je pense que vous m'avez demandé comment il m'a

 22   trouvé. Il me connaissait d'avant. On s'est rencontrés à plusieurs reprises

 23   au moment où il a été saisi de cette affaire. Je travaillais comme

 24   interprète freelance pour le Tribunal et je me suis rendu avec lui au

 25   quartier pénitentiaire pour rencontrer M. Krajisnik et pour lui servir

 26   d'interprète, et c'est justement au moment où on débattait de la question

 27   de savoir s'il allait devenir le conseil de M. Krajisnik oui ou non. Donc

 28   il me connaissait. Apparemment, il n'était pas content avec mon


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  1   prédécesseur, et il m'a passé un coup de fil. Il m'a dit qu'il était en

  2   train de chercher des candidats à la fonction et qu'il en avait un qui

  3   était peut-être intéressé. Il m'a demandé si moi, si je serais

  4   éventuellement intéressé et, le cas échéant, si j'étais disponible.

  5   Q.  Vous avez dit que vous n'aviez aucun conflit avec M. Stewart et qu'il

  6   n'était pas en colère contre vous; est-ce exact ?

  7   R.  J'espère qu'il n'est pas fâché contre moi. Je ne vois pas de raison

  8   pourquoi il le serait.

  9   Q.  Fort bien. Merci. Je suis en train de répéter tout ce que vous avez dit

 10   dans votre déclaration.

 11   Alors une petite question, mais auparavant, une introduction au sujet

 12   de la déclaration que vous avez faite auprès des Juges au sujet des

 13   experts. Vous avez dit qu'à plusieurs reprises j'avais insisté sur la

 14   détermination d'un assez grand nombre d'experts parce que j'avais estimé,

 15   de par la logique des choses, que si le Procureur avait cité non pas cinq,

 16   six, mais neuf experts, j'ai estimé que nous devions en faire comparaître

 17   neuf. On a ramené ce chiffre à moins que cela. On dit chez nous si on ne

 18   sait pas ce qui est bien, il faut voir ce qui est cher.

 19   Alors quand M. Stewart a vu que le Procureur avait cité des juristes

 20   de grand renom et s'ils ont cité neuf experts, qu'est-ce qui l'a incité à

 21   ne pas en citer un seul, notamment du fait d'avoir des papiers où l'on voit

 22   le Juge Orie faire objection et demander pourquoi on ne cite pas à

 23   comparaître des experts ? Alors quelle est votre opinion sur la raison pour

 24   laquelle M. Stewart n'a pas cité à comparaître d'experts ?

 25   R.  Je préférerais m'en garder au niveau de la présentation empirique des

 26   choses. Je vous ai déjà dit quelle a été l'explication apportée par M.

 27   Stewart dans la multitude de mots qu'il a proférés à ce sujet pour ce qui

 28   est des motifs de sa décision de ne pas citer à comparaître de témoins


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  1   experts. Je pense que c'est la meilleure des réponses que je pourrais vous

  2   donner, parce que si j'allais au-delà ce serait des hypothèses que je

  3   formulerais personnellement parce que ce ne serait pas bon.

  4   Q.  Mais est-ce que vous pouvez répéter votre réponse, s'il vous plaît,

  5   parce que je ne comprends pas. Quelle est la raison pour laquelle il n'a

  6   pas cité à comparaître des témoins experts s'il avait dessous les yeux un

  7   exemple où il y avait le Procureur qui en citait neuf ? Est-ce qu'il a

  8   estimé que c'était une stratégie de sa part ? Est-ce que c'était autre

  9   chose ? Est-ce que vous pouvez, partant des alternatives que vous

 10   envisagez, nous en fournir quelques-unes sans pour autant vous perdre en

 11   conjectures ?

 12   R.  Je n'ai certainement pas eu l'impression qui serait celle de dire que

 13   sa décision de ne pas citer de témoins experts aurait était un résultat

 14   d'une stratégie sophistiquée. Il a motivé la chose en disant simplement que

 15   de son point de vue, ils ne contribueraient en rien à la substantifique

 16   moelle de la cause défendue par la Défense, et M. Josse a été présent à

 17   plusieurs reprises lorsque Nicholas avait présenté ce type d'opinion. C'est

 18   tout ce que je pourrais vraiment dire à ce sujet, la seule déclaration

 19   faite à ce sujet par lui-même et qui pourrait être considérée comme une

 20   source d'explication, pour autant que cela vaille une explication.

 21   Q.  Merci. Je crois avoir terminé une minute avant le temps imparti.

 22   M. KRAJISNIK : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.

 23   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Krajisnik.

 24   Le Juge Shahabuddeen a une question.

 25   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Monsieur Karganovic, si vous

 26   avez été chargé de l'affaire ou si vous aviez conduit votre affaire vous-

 27   même, auriez-vous cité à comparaître les 200 témoins que vous avez

 28   mentionnés auparavant ou auriez-vous quelque peu débroussaillé ?


Page 476

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, je me sens tout à fait honoré

  2   d'entendre une question hypothétique qui dirait qu'aurais-je fait si

  3   j'étais chargé de l'affaire. Je ne pense pas avoir la possibilité de le

  4   faire, mais merci de l'envisager. Alors, bien entendu, je ne citerais pas à

  5   comparaître la totalité de ces 200 témoins, je crois que j'aurais quelque

  6   peu réduit la liste. Je ne pense pas que nous devrions citer à comparaître

  7   un témoin pour chaque témoin de l'Accusation. Je crois que la qualité est

  8   préférable à la quantité.

  9   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Alors juste une question de

 10   suivi : j'ai été frappé par votre déclaration disant que M. Stewart a

 11   simplement dit : "Suis la liste suivant l'ordre alphabétique," et ce serait

 12   à peu près cela, à nous de voir sur qui on mettra notre grappin."

 13   Vous avez dit plus tard que cette liste a constamment été en état

 14   d'élaboration et de modification. Il y a eu constamment un état de

 15   fluidité. Est-ce que cela signifie qu'il ne se serait pas conformé à la

 16   décision concernant l'ordre dans lequel les témoins étaient censés être

 17   cités à comparaître partant d'une règle mécanique où on devrait les citer

 18   au pif, il se serait donc référé à d'autres critères ? Quelles sont vos

 19   observations à ce sujet-là ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas eu l'impression qu'il ait eu des

 21   critères. Je me suis conformé à ses instructions et j'ai suivi l'ordre

 22   alphabétique, et ce, par pur désespoir, car en termes simples, le critère

 23   était celui de l'absence de critère. Il s'agissait d'une perte de temps

 24   pure et simple. C'était la réaction qui a été la mienne s'agissant de cette

 25   instruction.

 26   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Mais puis-je dire d'abord que

 27   j'ai commencé à vous poser des questions en vous demandant de vous pencher

 28   sur la question comme si vous étiez chargé de l'affaire vous-même. Je


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  1   reconnais à part entière que vous n'avez pas été chargé de l'affaire vous-

  2   même.

  3   Mais je voudrais attirer votre attention sur ce qui suit : vous vous

  4   êtes référé à Mlle Loukas, et vous vous êtes souvenu d'une déclaration

  5   qu'elle a faite où ceci se solderait par une catastrophe. Alors j'aimerais

  6   un peu vous apporter de la lumière sur mes propres pensées. Je ne pense pas

  7   que vous l'ayez dit qu'elle ait dit cela à M. Stewart ou à l'intention des

  8   Juges de la Chambre, elle l'aurait dit à vous.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Elle l'a dit pour sûr à moi-même. Elle m'a dit

 10   - et je vais un peu étoffer mes propos - elle m'a dit qu'il lui semblerait

 11   que l'issue de ce procès serait catastrophique et qu'à titre professionnel,

 12   elle ne voulait pas être associée à cela, et cela a été l'une des raisons

 13   principales de sa décision de quitter l'équipe.

 14   Maintenant, pour ce qui est de l'autre dimension que comporte votre

 15   question, cela se réfère à ce que M. Krajisnik a demandé. Je suis sûr

 16   d'avoir été présent lorsqu'elle a dit ce qu'elle a dit en annonçant

 17   l'intention qui était la sienne de quitter l'équipe. Je ne sais pas quelle

 18   est la terminologie exacte dont elle s'est servie, mais personnellement, je

 19   ne me souviens pas qu'elle se soit servi du mot "catastrophe," mais la

 20   chose est tout à fait simple. On peut vérifier le compte rendu. Si elle n'a

 21   pas dit le mot "catastrophe," je suis certain qu'elle a dû dire quelque

 22   chose de dramatique.

 23   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Mais elle ne s'est pas servi de

 24   ce mot à l'intention de M. Stewart ou du Juge de la Chambre. C'est ça, ma

 25   question.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de la Chambre -- et j'imagine

 27   que j'étais présent lorsqu'elle s'est adressée aux Juges de la Chambre à ce

 28   sujet. Je ne me souviens pas qu'elle ait utilisé ce mot-là. Pour ce qui


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  1   est, par contre, de ses échanges avec M. Stewart, cela n'a pas été dit en

  2   ma présence à moi. A titre privé, je ne saurais vous le dire.

  3   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

  4   Je vais maintenant me tourner vers M. Dershowitz qui va brièvement

  5   interroger le témoin au sujet des questions relatives à l'entreprise

  6   criminelle commune.

  7   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Contre-interrogatoire par M. N. Dershowitz :

  9   Q.  [interprétation] Monsieur Karganovic, je voudrais commencer par la fin

 10   et revenir vers le début.

 11   Alors imaginons un peu que vous étiez maintenant chargé de conduire

 12   l'opération de la Défense, est-ce que vous pensez que les témoins qui ont

 13   véritablement été cités à comparaître étaient bien ceux qui étaient les

 14   plus qualifiés, et est-ce que vous estimez qu'ils ont été choisis en raison

 15   de décisions stratégiques qui disaient que ce serait eux qui aideraient le

 16   plus à la réalisation des objectifs poursuivis par la Défense ?

 17   R.  Ma réponse à votre question est non. Bon nombre des témoins que nous

 18   avons cités à comparaître ont peut-être été qualifiés pour parler de

 19   questions à l'échelle microscopique, à savoir d'événements survenus dans

 20   une municipalité dont personne n'a jamais entendu parler. Mais s'agissant

 21   de l'image plus large ou des questions déterminantes dans l'affaire, ils

 22   n'avaient que très peu, sinon rien à dire, donc leur témoignage n'a eu

 23   aucun impact.

 24   Ce que je peux vous dire c'est qu'à un moment donné nous nous sommes

 25   entretenus au sein de l'équipe de la Défense d'une idée qui consisterait à

 26   convier plusieurs témoins de haute voltige qui ont été impliqués dans les

 27   négociations politiques avant et pendant le conflit pour démontrer que M.

 28   Krajisnik avait été tourné vers la recherche d'une solution pacifique pour


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  1   ce qui est des questions qui étaient en train de faire en sorte que la

  2   Bosnie vienne à être déchirée, et ces noms m'ont semblé être tout à fait

  3   logiques.  Cutileiro, très important. Stoltenberg, également très

  4   important.  Mitsotakis, ex-premier ministre de la Grèce. Tout à fait par

  5   hasard, un cousin à moi se trouve à avoir épousé une Grecque, il vit à

  6   Crête dans la ville de Kanji [phon], et c'est justement un voisin et ami de

  7   M. Mitsotakis. Alors quand on en a parlé, j'ai contacté cette cousine, elle

  8   a dit : "Bien sûr, je vais m'entretenir avec lui. Il sera heureux

  9   d'accepter une invitation à témoigner." Peut-être au moins lui on aurait pu

 10   le trouver. Je suis certain que si on avait contacté M. Cutileiro et M.

 11   Stoltenberg, probablement auraient-ils répondu de façon affirmative. Alors

 12   il en a été question à plusieurs reprises, on en a discuté pendant un

 13   moment, puis on a tout laissé tomber et on a fait venir des gens de

 14   municipalités tout à fait inconnues, mais on n'a pas fait venir Cutileiro.

 15   Q.  Est-ce que vous voulez dire qu'il n'y a pas eu d'évaluation stratégique

 16   dont vous auriez eu vent pour ce qui est de ne pas citer les témoins que

 17   vous venez d'énumérer ?

 18   R.  Je n'en ai pas connaissance.

 19   Q.  Pour ce qui est maintenant des témoins experts, je suppose que vous

 20   auriez procédé à une expurgation de la liste des experts, mais saviez-vous

 21   si cette décision de ne pas citer à comparaître de témoin expert a été

 22   prise pour des raisons stratégiques uniquement ?

 23   R.  Je ne peux imaginer aucune raison raisonnable de nature stratégique

 24   pour le faire, mais je ne pouvais pas lire dans les pensées des autres.

 25   Q.  Savez-vous nous dire s'il y a eu des interviews avec ces témoins

 26   experts et est-ce que la teneur de ce dont ils pourraient témoigner aurait

 27   été mis à disposition avant que décision ne soit prise de ne pas les citer

 28   à comparaître ?


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  1   R.  Je n'ai pas connaissance du fait qu'il y ait eu un contact avec un

  2   expert potentiel et encore moins une interview, mis à part Mme Radovanovic

  3   dont j'étais au courant. Cette décision de ne pas citer à comparaître ces

  4   autres témoins experts hypothétiques a été prise sans pour autant que l'on

  5   ait contacté ces gens-là, non pas parce qu'on aurait considéré qu'ils

  6   n'étaient pas qualifiés ou qu'ils n'auraient pas été à même de faire un bon

  7   rapport ou quoi que ce soit de ce genre. Jamais il n'a été fait l'effort de

  8   trouver ces experts, et de les interviewé ou pas.

  9   Q.  Vous avez témoigné en disant que vous n'aviez pas connaissance de la

 10   stratégie ou de l'objectif de cette équipe de la Défense. Alors j'aimerais

 11   maintenant que nous nous concentrions sur la question relative à

 12   l'entreprise criminelle commune.

 13   R.  Fort bien.

 14   Q.  Est-ce que M. Stewart, en votre présence, aurait abordé la question de

 15   ce que le Procureur aurait eu à prouver pour établir qu'il y a eu

 16   l'existence d'une entreprise criminelle commune et ce que les Défenses ou

 17   la Défense sont à même de faire pour empêcher la preuve de cette entreprise

 18   criminelle commune ?

 19   R.  Non. La chose la plus rapprochée de ce que j'aurais pu entendre de la

 20   bouche de Nicholas pour entamer un débat sérieux sur la façon dont il

 21   s'agirait de préserver M. Krajisnik d'une destruction complète, c'est un

 22   commentaire que j'ai eu l'occasion d'entendre en unité de détention, à

 23   savoir que ce que nous devrions essayer de faire c'est d'établir le plus

 24   possible de distance entre M. Krajisnik et le Dr Karadzic. En d'autres

 25   termes, il devrait s'agir d'activités distinctes de personnes travaillant

 26   et vivant, sur le plan personnel, d'une façon différente et distante l'une

 27   de l'autre, et que cela pourrait et devrait être un élément important pour

 28   ce qui est de l'exonération de M. Krajisnik d'une responsabilité ou d'une


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  1   culpabilité excessive qui pouvait être constatée au cas où l'on percevrait

  2   qu'il y ait eu association proche entre lui et le Dr Karadzic.

  3   C'est la seule discussion ou le type de discussion dont j'ai eu à entendre.

  4   Q.  Mais est-ce que ce type d'intervention a été spécifiquement tourné vers

  5   l'entreprise criminelle commune ou est-ce que c'était une conversation plus

  6   de nature générale ?

  7   R.  C'était plus de nature générale comme conversation. J'ai entendu

  8   Nicholas mentionner l'entreprise criminelle commune à quelques reprises

  9   seulement. Cela n'a pas été le sujet qui se serait trouvé au centre de

 10   l'attention. Et c'est comme à la guerre. Vous ne savez pas où l'ennemi va

 11   vous attaquer, mais la Défense était plus préoccupée par la question

 12   relative à la présidence élargie et à ce mécanisme-là de responsabilité

 13   plutôt qu'à celle de l'entreprise criminelle commune. Ce qui fait que nous

 14   avons passé plus de temps à parler du fait de savoir s'il y a eu une

 15   présidence élargie ou pas et sur le fait de savoir si M. Krajisnik avait

 16   quoi que ce soit à faire avec, plutôt qu'avec l'entreprise criminelle

 17   commune.

 18   Q.  Vous avez répondu à une question de M. Krajisnik pour ce qui est

 19   d'informations détaillées au sujet de la Défense. Alors, est-ce que vous

 20   avez, à quelque moment que ce soit, évoqué la question lorsque vous êtes

 21   intervenu en tant qu'interprète au sujet d'éléments ou de composantes de

 22   cet aspect de l'entreprise criminelle commune et est-ce que le conseil de

 23   la Défense vous aurait expliqué de quoi il s'agit ?

 24   R.  Oui, cela était le cas.

 25   Q.  Mais est-ce qu'il a obtenu une réponse à cette question en votre

 26   présence ?

 27   R.  Non. Je ne me souviens pas qu'à quelque moment que ce soit, il ait

 28   obtenu une réponse cohérente.


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  1   Q.  Mais a-t-il posé la question à plusieurs reprises ?

  2   R.  Pour sûr.

  3   Q.  Avez-vous connaissance du fait que l'on aurait confié des missions,

  4   quelles qu'elles soient, pendant cette période de un an et un mois lorsque

  5   vous avez été chargé commis à l'affaire, est-ce qu'il aurait été donc

  6   confié comme mission à l'un quelconque des membres de l'équipe de la

  7   Défense de se pencher sur la question de l'entreprise criminelle commune en

  8   tant que concept, concept en matière de droit pour procéder à une analyse

  9   factuelle de cette entreprise criminelle commune en terme d'activité de la

 10   Défense ?

 11   R.  On n'a pas attiré mon attention là-dessus; je ne l'ai pas remarqué.

 12   Q.  Vous avez eu des rencontres avec M. Stewart et au moins une fois par

 13   semaine il y a eu des rencontres de l'équipe où il a été débattu de

 14   questions de démarches à entreprendre, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et jamais à l'occasion de ces réunions avec M. Stewart, pendant ces

 17   réunions hebdomadaires, il n'a été question de l'entreprise criminelle

 18   commune ou il n'a été débattu des questions de droit relatives à un travail

 19   factuel qui devait être effectué pour se pencher sur l'entreprise

 20   criminelle commune, n'est-ce pas ?

 21   R.  Pour ce qui est de cette dernière partie de votre question, je pourrais

 22   dire qu'il y a eu le concept qui a été vaguement mentionné, mais je pense

 23   que réellement, pour ce qui est de prendre en considération de façon

 24   sérieuse la théorie et la pratique de ces aspects-là, non. Pas en ma

 25   présence, et pas à ma connaissance.

 26   Q.  Est-ce que M. Stewart aurait essayé d'assurer de votre part une

 27   information, quelle qu'elle soit, au sujet de ce que vous avez appris de la

 28   période allant de 1990 à 1992, et vous a-t-il quand que ce soit demandé de


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  1   rédiger une documentation qui constituerait les positions de la Défense ou

  2   l'approche de la Défense s'agissant de la période en question ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Savez-vous nous dire si on aurait demandé à qui que ce soit d'autre de

  5   le faire pendant que vous étiez commis à l'affaire, c'est-à-dire pendant

  6   une année et un mois ?

  7   R.  Non, je ne sais pas.

  8   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions.

  9   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Les Juges n'ont pas

 10   de questions. Je vais maintenant me tourner vers M. le Procureur, M.

 11   Kremer, pour son contre-interrogatoire.

 12   Contre-interrogatoire par M. Kremer :

 13   Q.  [interprétation] Monsieur Karganovic, peut-il être dit ou serait-il

 14   juste de dire que l'approche de la Défense lorsqu'elle a présenté des

 15   éléments de preuve pour parer aux éléments de l'Accusation, a-t-elle

 16   consisté à prouver toute chose ?

 17   R.  Est-ce que vous pouvez être plus clair ?

 18   Q.  Rien n'a été accepté ou admis et le Procureur a dû prouver tout élément

 19   de faits figurant à l'acte d'accusation contre M. Krajisnik, n'est-ce pas ?

 20   R.  Maintenant je crois comprendre votre question. Nous allons revenir à la

 21   question des faits admis. Je n'ai pas été impliqué dans ce processus. Je

 22   suis arrivé un peu trop tard pour pouvoir vous apporter une réponse

 23   compétente à votre question.

 24   Q.  Mais vous pouvez accepter la déclaration que je viens de faire, à

 25   savoir qu'il n'y a pas eu un seul fait admis qui aurait été accepté, et

 26   serait-il juste de dire à ce titre, que la Défense, du moins pour ce que

 27   vous avez pu voir vous-même, a eu à prouver toute chose, à savoir que

 28   l'Accusation est tenue de prouver toute chose ?


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  1   R.  Cela est une conclusion possible et probablement exacte.

  2   Q.  Fort Bien. Alors s'agissant de la Défense, vous avez évoqué la question

  3   de la présidence élargie. Cela certainement était l'une des questions dont

  4   il a été activement débattu non seulement de la présentation des éléments à

  5   charge par l'Accusation mais aussi à l'occasion de la préparation des

  6   éléments à décharge, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et vous avez parlé de la distance à faire établir entre M. Krajisnik et

  9   M. Karadzic. Je suppose que la Défense avait considéré que le rôle de M.

 10   Karadzic dans tout ceci était quelque chose de bien plus grave que le rôle

 11   joué par M. Krajisnik, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je crois qu'il serait plus juste de dire que la Défense, étant donné

 13   qu'elle n'a pas eu une image aussi claire concernant le rôle joué par M.

 14   Krajisnik, mais qui fait que la Défense, et là j'entends en substance M.

 15   Stewart, qui sait quelle est la façon qu'il a pu avoir de voir l'image

 16   qu'il s'était faite du rôle du Dr Karadzic ? Je crois qu'il a dû se dire ce

 17   qui suit : Tant que M. Krajisnik est présenté dans ses fonctions

 18   officielles de président du parlement sans aucune responsabilité exécutive,

 19   aussi longtemps que cela sera fait, aussi longtemps il sera en position

 20   avantagée.

 21   Q.  Juste. Alors l'Accusation s'est efforcée de présenter M. Krajisnik de

 22   la sorte, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, en tant que président du parlement sans autre responsabilité

 24   d'importance.

 25   Q.  Justement. Donc c'est ce que disait en substance, la Défense de M.

 26   Krajisnik en appel. C'est le fondement de l'appel. On dit que : "Les Juges

 27   de la Chambre de première instance ont erré et qu'ils n'avaient exercé

 28   aucune attribution." Est-ce vrai ?


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  1   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas

  2   si j'ai là matière à objection. Mais je crois que M. Kremer n'est pas celui

  3   qui a pour tâche à parler de l'appel, et je crois que c'est M. Krajisnik

  4   qui a fait appel. M. Karganovic est en train de nous parler de la chose. Je

  5   crois que c'est cela qui est en train d'être déterminé.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je ne peux qu'émettre des hypothèses. Je

  7   peux témoigner sur ce que j'ai contacté, sur les observations pendant le

  8   procès. Bien sûr, je suis au courant de l'appel interjeté par M. Krajisnik,

  9   mais il ne m'appartient pas de commenter à ce sujet.

 10   M. KREMER : [interprétation]

 11   Q.  Mais est-ce que vous auriez aidé M. Krajisnik à rédiger son appel ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Vous êtes en train de nous dire dans votre témoignage d'aujourd'hui que

 14   ce dont vous parlez aujourd'hui est une espèce d'addendum à l'appel

 15   interjeté par M. Krajisnik; est-ce que cela ne contribue pas à son appel ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Je veux laisser entendre que la déclaration que vous avez rédigée a été

 18   rédigée une fois que vous avez discuté de la chose avec M. Krajisnik et une

 19   fois que vous avez débattu de tous les fondements qu'il a pu évoquer dans

 20   son appel lorsque vous l'avez aidé à ce faire.

 21   R.  Non. Non, ce n'est pas exact. J'ai rédigé ma déclaration tout seul, je

 22   n'ai pas fait référence à son appel ni à ses fondements d'appel. Ça s'est

 23   basé sur les observations qui sont les miennes lorsque j'étais commis à

 24   l'affaire pendant le procès.

 25   Q.  Mais moi je vous dis la chose dans ces termes-ci. Je vais vous citer :

 26   "Je vais décrire mon expérience et mes impressions, les impressions qui ont

 27   été les miennes pendant que j'étais membre de son équipe de la Défense à

 28   l'occasion du procès au principal et qui se réfèrent à des déclarations


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  1   faites par M. Krajisnik lorsqu'il a rédigé son appel."

  2   R.  Hm-hm.

  3   Q.  Ce que je veux laisser entendre, c'est que votre déclaration a été

  4   cousue de façon à ce qu'elle s'adapte aux fondements en appel de M.

  5   Krajisnik que vous avez rédigée ensemble, ou plutôt qu'il a rédigée avec

  6   votre assistance. Etes-vous d'accord ou pas ?

  7   R.  Je ne suis pas d'accord. Peut-être y a-t-il compatibilité entre ma

  8   déclaration et l'appel interjeté par M. Krajisnik, mais ma déclaration n'a

  9   pas été générée de façon à ce que cela corresponde à son appel.

 10   Q.  Mais lorsque vous avez rédigé votre déclaration, aviez-vous eu devant

 11   vous la déclaration de M. Mano qui a été rédigée le 23 septembre 2004 ?

 12   R.  Je ne me souviens pas avoir lu sa déclaration. Et du reste, ça n'a pas

 13   influé sur mes impressions.

 14   Q.  Donc vous n'avez pas recueilli dans la déclaration de M. Mano la

 15   suggestion qui serait celle de dire que M. Stewart était plutôt

 16   désintéressé par le contexte historique et factuel de l'affaire ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Vous n'avez pas pris dans la déclaration de M. Mano la partie où M.

 19   Stewart avait visité des capitales, où il était allé travailler à Londres ?

 20   R.  Je n'avais pas besoin de l'aide de M. Mano ou lire sa déclaration pour

 21   mettre en exergue ces faits-là. Il a suffi que je le remarque, et du reste

 22   les autres membres de l'équipe de la Défense ont remarqué la même chose.

 23   Q.  Pour ce qui est de Me Loukas, vous avez dit pour ce qui est de la

 24   question Davidovic que vous lui avez communiqué à elle les résultats de

 25   votre conversation avec le docteur qui était l'époux ou l'autre docteur

 26   dont l'équipement aurait disparu.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et qu'avez-vous dit à Me Loukas au sujet de cette conversation par


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  1   téléphone ?

  2   R.  Je lui ai dit que le docteur avait dit que cette extorsion alléguée de

  3   la part de M. Davidovic n'a pas eu lieu, que le docteur a nié l'allégation

  4   avancée par les enquêteurs de M. Krajisnik.

  5   Q.  Très bien. Et vous étiez dans le prétoire lorsque cette allégation a

  6   été soumise à Davidovic au sujet de ce fait; c'est exact ?

  7   R.  Je suis certain que je me suis trouvé là.

  8   Q.  Lorsque Mme Loukas a soumis cette allégation à ce monsieur en sachant

  9   que c'était faux, est-ce que vous avez cherché à corriger le compte rendu

 10   d'audience ?

 11   R.  Mais je ne pense pas qu'il m'appartenait d'intervenir de cette manière-

 12   là pendant le procès. Me Loukas était en train de mener l'interrogatoire.

 13   Q.  Donc vous êtes en train de dire que vous étiez au courant d'un

 14   comportement contraire à la déontologie, et de la part de Me Loukas ? Est-

 15   ce que vous en avez fait part à Me Stewart ?

 16   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Je soulève une objection. Ceci suppose

 17   que Me Loukas était au courant du fait qu'il s'agissait d'une déclaration

 18   fausse parce que la victime la niait. Tel a été le cas mais pas

 19   nécessairement. Il est possible que tel n'ait pas été le cas. Donc il n'est

 20   pas correct de poser cette question.

 21   M. KREMER : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous avez dit à Me Stewart que vous étiez préoccupé par le

 23   contre-interrogatoire, qu'il y avait des objections qui étaient sans cesse

 24   soulevées par l'Accusation ?

 25   R.  La Défense, à savoir Me Loukas et Me Stewart, les deux étaient au

 26   courant de l'issue de mon appel téléphone; c'était des spéculations au

 27   sujet de M. Davidovic pensant que c'était une personnalité aussi puissante

 28   et intimidante que peut-être ces gens avaient été atteints par lui, et


Page 489

  1   qu'ils n'osaient pas en parler. Donc c'était leur position.

  2   Q.  Vous étiez au courant du fait, parce que vous vous êtes trouvé dans le

  3   prétoire, qu'après le 27 juin 2005, Me Stewart a retiré quelques questions

  4   spécifiques sur la base du fait qu'elles étaient dénuées de fondement ?

  5   R.  Je n'en ai pas de souvenir précis, mais si vous le dites je suppose que

  6   cela figure en compte rendu d'audience, mais je vais simplement souligner

  7   que je n'avais rien à voir avec cela puisque ce n'était pas à moi

  8   qu'appartenait la gestion de l'affaire.

  9   Q.  Vous n'avez jamais agi en tant qu'avocat ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Dans votre CV, vous dites que vous avez agi en tant que conseil, en

 12   tant que défenseur, mais ce n'est pas exact ?

 13   R.  Il est exact de dire que j'ai travaillé pour le bureau des défenseurs

 14   en Californie; et j'ai inséré cela dans mon CV.

 15   Q.  Donc il y a une erreur dans votre CV lorsqu'il est dit que vous avez

 16   travaillé en tant que défenseur dans la municipalité de San Diego; ce n'est

 17   pas vrai ?

 18   R.  Je ne suis pas certain que vous ayez raison, parce que dans la mesure

 19   où nous nous occupions des affaires qui relèvent des défenseurs, nous

 20   étions payés par ce bureau, le bureau de l'Etat de Californie.

 21   Q.  Mais vous vous référez au district de San Diego, et d'après la lettre

 22   que j'ai reçue, j'ai appris que ce bureau n'a été créé qu'en 1988. Donc

 23   vous n'auriez pas pu travailler pour eux entre 1991 et 1994. Comment est-ce

 24   que vous expliquez cela ?

 25   R.  Je n'ai pas besoin de l'expliquer puisque très clairement c'était le

 26   département du bureau du défenseur de Californie dans le district de San

 27   Diego, et c'est là que j'ai travaillé et c'est ce que j'ai cité.

 28   Q.  Oui. Mais vous dites dans votre CV également que vous avez un cabinet


Page 490

  1   privé, mais en fait vous ne l'aviez pas en tant qu'avocat ?

  2   R.  Où cela ?

  3   Q.  1992 à 2001.

  4   R.  C'était à Seattle.

  5   Q.  Washington ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et vous dites également que vous avez été assistant juridique dans

  8   l'équipe de Défense Dragan Obrenovic. Mais vous ne l'étiez pas ?

  9   R.  Si, je l'ai été.

 10   Q.  Une lettre a été rédigée par Eugene Wilson. Vous connaissez David

 11   Eugene Wilson ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Je pense que vous avez vu sa lettre.

 14   R.  D'accord.

 15   Q.  Avant de vous poser la question, est-ce que vous lui avez jamais dit

 16   que vous auriez été avocat ou que vous auriez travaillé dans le domaine du

 17   droit ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Dans une lettre que M. Wilson a rédigée à M. Petrov dans l'affaire

 20   Popovic, il dit :

 21   "Dans son entretien avec moi, M. Karganovic m'a dit qu'il était avocat

 22   enregistré et qu'il a un diplôme de droits soit dans l'Etat d'Illinois soit

 23   dans l'Etat d'Indiana, et que "par la suite il a travaillé comme avocat en

 24   Californie comme défenseur; et qu'il ne pratiquait plus le droit parce

 25   qu'il ne s'y plaisait plus et qu'il préférait travailler comme interprète

 26   dans les langues serbe et espagnole." Il a dit : "Je n'ai pas cherché à

 27   vérifier cela" parce qu'il vous a engagé en tant qu'interprète, donc il n'a

 28   pas cherché à voir si vous aviez des diplômes de droit.


Page 491

  1   R.  C'est exact. Il m'a engagé pour que je traduise et que j'interprète,

  2   puis je suis devenu commis à l'affaire et assistant juridique pour lui.

  3   Q.  Vous dites que M. Wilson, qui est associé dans un cabinet de droit et

  4   qui est procureur dans l'Etat de Washington pour l'Etat fédéral, qui a

  5   travaillé pendant huit ans, que lui, il a mal compris ce que vous dites ?

  6   R.  En partie, il a mal compris.

  7   Q.  Lorsque vous avez cessé de travailler pour l'équipe Obrenovic, où est-

  8   ce que vous avez été employé ?

  9   R.  Avec l'équipe Stanisic.

 10   Q.  Pendant combien de temps ?

 11   R.  Pendant à peu près un an et demi.

 12   Q.  Pourquoi est-ce que vous avez cessé de travailler pour eux ?

 13   R.  Parce qu'après le retour de M. Stanisic à Belgrade, il a décidé qu'il

 14   ne souhait plus m'employer, ou plutôt, il y a eu des problèmes de

 15   financement dans cette affaire, et Stanisic n'a pas estimé qu'il pouvait me

 16   rémunérer à titre personnel.

 17   Q.  La lettre de M. Wilson semble nous dire autre chose. Je vais en donner

 18   lecture :

 19   "Je ne vois pas la -- je ne sais pas la date exacte, mais vers 2005, M.

 20   Karganovic m'a téléphoné et m'a dit qu'il avait été renvoyé de l'équipe

 21   Stanisic parce qu'il était en différend avec le client."

 22   Est-ce que c'est vrai ?

 23   R.  Non, je n'ai pas eu un différend avec le client. J'ai donné ma

 24   démission. Je n'ai pas été licencié. J'ai ma lettre de démission que j'ai

 25   envoyée à M. Knoops et il peut le confirmer.

 26   Q.  La raison pour laquelle M. Wilson a envoyé cette lettre à M. Petrov,

 27   c'est parce que vous avez offert de venir déposer dans l'affaire Popovic ?

 28   R.  C'est exact.


Page 492

  1   Q.  Il a envoyé cette lettre parce qu'il avait la sensation que vous alliez

  2   révéler des informations confidentielles ou que vous l'aviez déjà fait à

  3   l'équipe de Défense Popovic, des informations protégées de l'affaire

  4   Obrenovic ?

  5   R.  Oui, c'est ce qu'il a pensé.

  6   Q.  Oui. Quand est-ce que vous avez rencontré pour la première fois

  7   l'équipe de Défense Beara ?

  8   R.  Mais cela fait des années que je les connaissais.

  9   Q.  Oui. Je sais que cette offre a été rédigée en 2008, mais c'était à peu

 10   près une année auparavant que vous leur avez parlé; c'est exact ?

 11   R.  Oui, une année à peu près, je ne suis pas certain.

 12   Q.  Donc c'était vers l'automne 2007 ?

 13   R.  C'est possible.

 14   Q.  Je vous soumets qu'en 2006 vous vous êtes adressé à M. Wilson au sujet

 15   de l'éventualité de votre travail pour l'équipe Beara. Il a dit que le

 16   client n'était pas d'accord; est-ce exact ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  L'équipe Beara s'est adressée au Greffe en fait pour demander

 19   l'approbation. M. Wilson s'est opposé, le client s'est opposé, l'Accusation

 20   s'y est opposée et on vous a répondu par la négative ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Indépendamment des questions de confidentialité avec l'équipe

 23   Obrenovic, un an plus tard, vous vous êtes adressé à l'équipe Beara et vous

 24   avez révélé des éléments confidentiels ?

 25   R.  Non. Je n'allais pas leur révéler des éléments confidentiels, ce

 26   n'était pas mon intention. J'allais aborder les aspects du processus de

 27   négociation où M. Obrenovic aurait pu être soumis à des pressions

 28   inappropriées de la part de l'Accusation. Autrement dit, essentiellement,


Page 493

  1   j'allais proposer de déposer sur ce que le Procureur a dit ou a fait au

  2   sujet de l'accusé et je n'allais pas révéler des éléments confidentiels

  3   issus des conversations.

  4   Q.  Mais vous savez que M. Wilson a envoyé cette lettre à partir du moment

  5   où il avait déjà vu votre offre ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je vais vous en donner lecture :

  8   "Ces notes de récolement montrent que M. Karganovic, sans aucun doute, a

  9   l'intention de violer son obligation en tant que membre de l'équipe de

 10   Défense Obrenovic, l'obligation de préserver la confidentialité de tous les

 11   éléments. Il a indiqué qu'il allait le faire en déposant au sujet de ses

 12   souvenirs de ses communications, y compris les déclarations d'Obrenovic à

 13   son équipe de Défense." Donc il était préoccupé suffisamment, il cherchait

 14   à vous empêcher de révéler ces éléments confidentiels ?

 15   R.  C'est exact.

 16   Q.  Et -- 

 17   R.  Lorsque je me suis penché de nouveau sur cette question, je me suis

 18   rendu compte que j'allais approcher des questions à risque et qu'il allait

 19   être difficile de préserver la confidentialité des contacts avec le client.

 20   Donc j'ai décidé de ne pas déposer dans l'affaire, de ne pas traduire dans

 21   les faits mon intention. Je pense qu'il faudrait reconnaître que j'ai agi

 22   avec beaucoup de précautions plutôt que de me critiquer d'avoir agi de

 23   manière inappropriée.

 24   Q.  La lettre de M. Wilson décrit le récolement avec vous de manière

 25   suivante :

 26   "M. Karganovic fait une description de la session de débriefing de manière

 27   inexacte, de manière à induire en erreur. Il s'agit de quelque chose qui

 28   constitue une insulte non seulement face à M. McCloskey, mais également


Page 494

  1   pour ce qui est des avocats de M. Obrenovic. Cela fait de nombreuses années

  2   que je suis avocat, depuis plus de 40 ans, j'ai été procureur fédéral de

  3   district, j'ai travaillé comme juriste dans l'armée, j'ai été défenseur

  4   dans un cabinet privé. M. Slijepcevic a été avocat pendant plus de 34 ans,

  5   a été juge à Belgrade avant d'être renvoyé par le régime de M. Milosevic

  6   parce qu'il n'a pas souhaité se ranger à la ligne imposée par le régime."

  7   R.  Je comprends très bien que ce sont des commentaires de M. Wilson. Je

  8   pense que M. Wilson est un homme intègre, je le respecte. Toutefois,

  9   l'enjeu pour lui c'était de faire en sorte que je n'entre pas dans des

 10   questions, même de manière très limitée, des questions qui risquaient

 11   d'entraver l'accord de plaidoyer auquel il a participé. Il a des raisons

 12   valables de représenter d'une manière très négative ce que j'allais faire.

 13   Q.  Quel est ce projet de "stichting et de fondation Srebrenica" ?

 14   R.  Il s'agit d'une organisation non gouvernementale qui a été créée à La

 15   Haye, j'en suis le président, et son objectif est d'enquêter sur des crimes

 16   et des victimes des deux côtés du conflit dans la zone de Srebrenica.

 17   Q.  Qui est-ce qui finance ce projet ?

 18   R.  Il est financé par des contributions que nous recevons, puis il reçoit

 19   le soutien logistique du gouvernement de la République serbe.

 20   Q.  Vous avez organisé une conférence à Banja Luka le 24 [comme interprété]

 21   octobre 2008 ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Il semble, dans un reportage qui a été fait depuis cette conférence, là

 24   encore, que vous seriez présenté comme un avocat américain. Je vais vous

 25   donner lecture d'une transcription qui vous attribue certains commentaires.

 26   Je peux le faire afficher, si nécessaire.

 27   R.  Bien.

 28   Q.  Il y a une citation dans Politika -- sur le site de Politika,


Page 495

  1   www.politika.rs, sur cette conférence. C'est vous qui avez organisé ce

  2   symposium international ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Il apparaît que vous auriez dit comme suit :

  5   "Un grand nombre de Bosniens capturés auraient été exécutés à Srebrenica,

  6   et ceci constitue un crime de guerre grave. Toutefois, aucun élément de

  7   preuve ne permet de penser qu'un crime a été commis par la Republika

  8   Srpska. Qui plus est, il n'y a pas d'élément de preuve démontrant que 8 000

  9   Bosniens auraient été tués à Srebrenica, et le nombre de victimes

 10   bosniennes a été accrû pour réduire d'autres par le nombre de victimes

 11   serbes, donc ce dernier numéro a été sous-estimé," déclaré par un juriste

 12   américain, Stefan Karganovic, président du projet historique serbe

 13   Srebrenica.

 14   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Objection. On vous cite comme vous

 15   étant représenté en tant qu'avocat américain, mais en fait, ce n'est pas le

 16   témoin qui se présente ainsi. Donc la question est fondée sur de mauvaises

 17   bases, et je demande qu'on la retire.

 18   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Maître Dershowitz, je commence à être

 19   dérangé un petit peu par vos interventions puisque vous devriez normalement

 20   intervenir uniquement sur des questions de l'entreprise criminelle commune.

 21   Il me semble que vous intervenez sur tout, à présent. Nous avons à présent

 22   des questions qui portent sur la crédibilité du témoin, et il n'est pas

 23   approprié que vous interveniez.

 24   M. KREMER : [interprétation] Juste deux --

 25   Q.  Est-ce que ce sont vos propos ?

 26   R.  Ce que vous avez cité sont, pour la plupart, mes propos.

 27   Q.  Oui.

 28   R.  Cela effectivement traduit mes sentiments, que j'aie employé ces termes


Page 496

  1   ou pas.

  2   Q.  D'accord.

  3   R.  Pour ce qui est de l'autre partie de cette préoccupation, je voudrais

  4   simplement dire que quelqu'un qui est sorti d'une faculté de géologie est

  5   un géologue. Quelqu'un qui est sorti d'une école de comptabilité est un

  6   comptable. Donc je pense que celui qui est sorti d'une faculté de droit est

  7   juriste.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous travaillez maintenant dans le cadre de cette affaire en tant

 11   qu'interprète, traducteur ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Depuis combien de temps est-ce que vous travaillez sur cet appel ?

 14   R.  Pratiquement depuis que le jugement a été prononcé à peu près, très peu

 15   de temps après cela.

 16   Q.  Est-ce que c'est à plein temps, à mi-temps, que vous travaillez ?

 17   Comment est-ce que vous le décririez ?

 18   R.  Cela a varié à différents moments. Il y a eu des moments où j'ai

 19   travaillé à plein temps, par exemple, avec M. Nicholls pendant deux mois.

 20   Il y avait beaucoup de travail. Aussi, il a fallu que je traduise et je

 21   résume de grandes portions du jugement avant qu'il ne l'ait reçu fin 2007,

 22   et cela a aussi exigé des efforts considérables.

 23   Q.  Maintenant, vous travaillez pour M. Nicholls; c'est exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Egalement, on vous a engagé comme faisant partie de l'équipe de Défense

 26   Colin Nicholls à partir du 15 décembre 2006, me semble-t-il, jusqu'au 24

 27   avril 2006 ?

 28   R.  J'étais membre de l'équipe de M. Nicholls. J'ai travaillé avec M.


Page 497

  1   Nicholls, donc normalement, j'aidais M. Krajisnik et je travaillais avec M.

  2   Nicholls avec l'approbation de M. Krajisnik. 

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  Je vois que ma réponse a été consignée.

  5   Q.  Lorsque vous travailliez avec M. Nicholls, vous travailliez également

  6   avec M. Krajisnik ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  M. Nicholls était au courant de cela ?

  9   R.  Oui, tout à fait.

 10   Q.  Quand vous avez commencé à travailler pour M. Nicholls -- quand vous

 11   avez commencé à aider M. Nicholls, il vous a dit qu'il y aurait uniquement

 12   des éléments confidentiels entre lui et le client et que c'étaient des

 13   documents qui ne devaient être communiqués à personne d'autre qui travaille

 14   pour M. Krajisnik; est-ce exact ?

 15   R.  Oui, c'est exact.

 16   Q.  D'après ce que j'ai compris, pendant que vous travailliez avec M.

 17   Nicholls, dans des enveloppes confidentielles qu'il envoyait à M.

 18   Krajisnik, vous ajoutiez des documents qu'il n'avait pas vus et qu'il

 19   n'avait pas autorisé non plus; est-ce exact ?

 20   R.  C'est exact, mais je peux l'expliquer.

 21   Q.  Répondez à ma question, s'il vous plaît.

 22   R.  Oui, c'est exact.

 23   Q.  Vous l'avez fait; c'est exact ?

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   Q.  Mais lorsque M. Nicholls a découvert que vous faisiez cela, il a mis

 26   fin sur-le-champ à votre engagement ?

 27   R.  Oui, pour ce qui est de lui-même.

 28   Q.  Oui. Vous avez continué de travailler pour M. Krajisnik.


Page 498

  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  A un moment, lorsque vous alliez expliquer ce lien au Greffe, vous avez

  3   dit que vous pensiez que même si vous travailliez avec M. Nicholls en étant

  4   payé par le Greffe, votre responsabilité était engagée avant tout face à M.

  5   Krajisnik ?

  6   R.  Il ne fait aucun doute que je me percevais comme étant un assistant de

  7   M. Krajisnik. Pendant cette période, avec tous mes respects pour M.

  8   Nicholls, M. Krajisnik n'arrêtait pas de souligner qu'il voulait se

  9   représenter lui-même, à chaque fois qu'on allait le voir, M. Nicholls et

 10   moi-même, qu'il ne voulait pas que M. Nicholls le représente ou qu'il

 11   rédige son appel et qu'il n'était pas satisfait de la situation où il avait

 12   la sensation que M. Nicholls lui était imposé.

 13   Le rôle que j'avais à jouer dans ce contact entre les deux en tant

 14   qu'interprète se limitait surtout à accompagner M. Nicholls à l'unité

 15   pénitentiaire. Puis l'autre partie de mon travail, c'était de traduire pour

 16   M. Nicholls et au profit de M. Krajisnik un certain nombre de documents que

 17   m'envoyait M. Nicholls. Il s'agissait à la fois de traduction et

 18   d'interprétation; et j'étais rémunéré par le Greffe. Là, vous avez raison.

 19   Mais je n'étais pas payé en tant que membre de l'équipe de M. Nicholls

 20   parce que je n'ai jamais été formellement nommé membre de cette équipe.

 21   J'étais simplement payé en ma capacité d'interprète et de traducteur.

 22   En même temps, j'ai travaillé dans d'autres affaires sans être membre des

 23   équipes de Défense.

 24   Q.  Mais M. Nicholls pensait que vous faisiez partie de son équipe

 25   puisqu'il a mis fin à votre engagement.

 26   R.  Mais ça m'a étonné -- ça m'a semblé très bizarre qu'il mette fin à mon

 27   engagement parce que je n'étais pas au courant et je n'avais aucune raison

 28   de penser qu'il me prenait pour son employé. Si vous lisez la lettre que je


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  1   lui ai envoyée à cette occasion, je pense que vous verrez cela tout à fait

  2   clairement, vous verrez comment moi j'ai perçu la situation.

  3   Q.  Quoi qu'il en soit, c'est le 24 avril 2007 qu'on a mis fin à votre

  4   engagement. Le 25 avril, est-ce que vous avez eu une communication avec M.

  5   Nicholls au nom de M. Krajisnik disant à M. Nicholls que M. Krajisnik ne

  6   souhaitait plus rien recevoir de sa part ?

  7   R.  Il est possible que j'aie envoyé un courriel à cet effet sur la demande

  8   de M. Krajisnik. Si je l'ai fait, c'était sur sa demande.

  9   Q.  Vous seriez d'accord avec moi pour dire que le 3 septembre 2007, M.

 10   Petrov vous avait envoyé une communication disant qu'il n'était pas

 11   d'accord avec votre interprétation disant que vous ne vous sentiez pas

 12   comme étant membre de l'équipe de Défense de Nicholls ?

 13   R.  Je ne vois pas la lettre là, mais je me souviens tout à fait que M.

 14   Petrov ne partageait pas mon opinion là-dessus, sur ce point en

 15   particulier. Mais je souhaite souligner encore une fois que cette

 16   institution, au mieux de mes connaissances - et cela fait cinq ou six ans

 17   que je suis là - qu'ici, lorsque quelqu'un devient membre d'une équipe, une

 18   lettre de nomination est délivrée à cet effet. Je n'en ai jamais reçu, moi,

 19   pour ce qui est de M. Nicholls et de son équipe.

 20   Q.  Quoi qu'il en soit, M. Petrov dit dans sa lettre : "Votre déclaration

 21   disant que vous n'avez jamais été membre de l'équipe de Défense Nicholls

 22   n'est pas exacte, indépendamment du fait que M. Nicholls s'est peut-être

 23   servi uniquement de vos services sur une base ad hoc."

 24   R.  Oui, c'est sa position. Je respecte M. Petrov.

 25   Q.  Le 29 juin 2007, il y a une lettre qui vient de vous. Elle figure à

 26   l'annexe d'une écriture de M. Krajisnik. C'est une lettre suite aux

 27   allégations sur des procédures inappropriées qui sont appliquées, et là,

 28   vous dites que M. Nicholls ne vous a pas donné des instructions correctes


Page 500

  1   pour ce qui est de l'utilisation de l'enveloppe confidentielle. Et d'après

  2   votre réponse cet après-midi, je comprends que vous n'êtes pas d'accord que

  3   vous ayez reçu des instructions sur l'emploi de l'enveloppe confidentielle

  4   et que vous mettiez vous-même des éléments additionnels dans cette

  5   enveloppe et que ceci n'a jamais été approuvé par M. Nicholls ?

  6   R.  Je pense qu'il serait utile que ces documents auxquels vous vous

  7   référez soient versés au dossier pour que la Chambre puisse en prendre

  8   connaissance et qu'elle puisse baser ses conclusions là-dessus au lieu de

  9   se contenter de lire des extraits, parce que dans ma réponse à M. Petrov,

 10   j'ai souligné que même si d'un point de vue technique, du point de vue de

 11   la procédure, cette procédure était prévue pour que des documents soient

 12   communiqués par le défenseur à son client, tout ce que j'y ai mis à

 13   l'intention de M. Krajisnik avait à voir à son affaire. C'était des

 14   documents du type dont on a parlé un peu précédemment; donc, des documents

 15   qui provenaient des traductions que je faisais pour M. Krajisnik lorsque je

 16   faisais des traductions du jugement et des recherches dans le compte rendu

 17   d'audience. Donc, il n'y avait pas de communication privée du tout. Ça,

 18   c'est un premier point.

 19   Un deuxième point, plusieurs fois, lorsque M. Nicholls et moi sommes venus

 20   voir M. Krajisnik à l'unité de détention, j'ai remis des documents

 21   comparables à M. Krajisnik en la présence de M. Nicholls, qui ne s'y est

 22   pas opposé et qui n'y voyait pas d'inconvénient. Donc, mon interprétation

 23   du fait qu'il n'ait pas objecté à cela, c'était qu'il y souscrivait. Il n'a

 24   pas demandé d'examiner ces documents pour vérifier ce que c'était. Donc, il

 25   me faisait confiance qu'il s'agissait de documents qui avaient à voir avec

 26   l'affaire.

 27   Q.  Je vais inviter la Chambre à examiner ces documents qui m'ont été remis

 28   par M. Petrov. Ce témoin utilise pas mal de temps sans rien dire.


Page 501

  1   R.  Excusez-moi.

  2   Q.  Je pense qu'il appartient à la Chambre de trancher la question.

  3   R.  Oui, ce sera le mieux, mais vous dites que je parle sans rien dire, et

  4   ce n'est pas vrai.

  5   Q.  Je pense que nous ne sommes pas d'accord sur la manière de décrire vos

  6   propos.

  7   R.  Mais oui, et je ne suis pas d'accord avec certaines interprétations de

  8   M. Petrov.

  9   Q.  Voyons maintenant votre lettre du 16 octobre 2007.

 10   R.  D'accord.

 11   Q.  Paragraphe 9, et je vais me contenter de faire cela et ce sera terminé

 12   :

 13   "Il semblerait que l'équipe de Défense n'avait pas de plan à partir du

 14   moment où l'équipe de Défense a commencé à présenter ses moyens de preuve.

 15   En fait, cette équipe s'est contentée de réagir à ce que faisait

 16   l'Accusation," et puis vous citez un exemple. Vous dites :

 17   "Par exemple, nous avons parlé de la question de l'armement des Musulmans,

 18   et beaucoup d'éléments ont été réunis par l'accusé afin de prouver que du

 19   côté serbe la réaction n'était pas sans avoir été provoquée, que ce n'était

 20   pas un agresseur qui aurait agi initialement le premier; et donc, qu'il y a

 21   eu réaction à des menaces et des provocations. Donc, sans aucune raison ou

 22   sans aucune explication, Stewart a tout simplement rejeté ce projet."

 23   Alors, est-ce que vous acceptez effectivement qu'il n'y avait pas de

 24   déclaration de l'armée musulmane dans l'affaire Krajisnik ?

 25   R.  Non. Je pense que vous citez un paragraphe qui parle d'un projet tout à

 26   fait spécifique de l'équipe de Défense. A ce moment-là, l'intention était

 27   de réunir un dossier sur l'armement des Musulmans, et ce dossier serait

 28   ciblé sur cette question; et la question serait présentée de telle manière


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  1   qu'on ne se contenterait pas de poser juste quelques questions à tel ou tel

  2   témoin, mais que c'est de manière systématique qu'on s'attacherait à cette

  3   question. Et c'est de cela que je parle ici. Et sous serment, je peux

  4   confirmer cela.

  5   Q.  Vous allez donc être en désaccord avec moi lorsque je dis qu'il y a eu

  6   un contre-interrogatoire assez grand et important pour ce qui est de la

  7   question de l'armement des Musulmans et au niveau des témoins de

  8   l'Accusation ? Et je me réfère aux témoins Deronjic, Ramic, Hasanovic.

  9   N'est-ce pas ?

 10   R.  Bien sûr que je ne vais pas être en désaccord avec vous, mais c'est une

 11   approche tout à fait différente de celle dont je parle. Il s'agit là

 12   d'éléments pris au hasard et non pas de façon systématique pour ce qui est

 13   de la présentation des éléments à décharge.

 14   Q.  Pendant la présentation des éléments à charge, il y a eu également

 15   interrogatoire au sujet de l'armement des Musulmans. Il s'agit du témoin

 16   Savkic, puis du témoignage de Bijelica et autres, n'est-ce pas ?

 17   R.  C'est exact. Toutefois, ici, nous sommes en train de parler d'une

 18   présentation systématique de ce sujet-là, et non pas seulement la

 19   présentation de quelques éléments ou bribes de questions non placées en

 20   corrélation les unes avec les autres.

 21   Q.  Pour ce qui est du nombre de témoins, je vais parler de chiffres, vous

 22   avez dit que certains témoins n'ont pas pu voyager, certains n'ont pas pu

 23   témoigner et certains n'ont pas été désireux de témoigner, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui. Et certains avaient eu peur aussi.

 25   Q.  Certains témoins, peut-être, n'ont pas fourni la quantité de détails

 26   qui semblerait être requise pour présenter une défense sophistiquée, et

 27   c'est peut-être cela que vous aviez eu à l'esprit ?

 28   R.  Moi, je n'étais pas là pour juger du fait de voir cela adéquat ou pas.


Page 503

  1   Q.  Ça, c'était une question pour le juriste, n'est-ce pas, pour les

  2   juristes ?

  3   R.  Oui, c'était aux M. les juristes d'en décider au final.

  4   Q.  Et M. Josse ?

  5   R.  Oui, ou Mme Loukas.

  6   Q.  A l'époque, n'est-ce pas ?

  7   R.  Tout à fait.

  8   M. KREMER : [interprétation] Je ne sais pas quand est-ce que les Juges de

  9   la Chambre voudraient faire une pause. Il me semble que je suis tout à fait

 10   près du temps qui m'est imparti.

 11   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous avez encore cinq minutes.

 12   M. KREMER : [interprétation] Je me demande --

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous n'allons pas faire une pause

 14   maintenant si vous avez l'intention de finir en cinq minutes.

 15   M. KREMER : [interprétation] Laissez-moi consulter mes collègues quelques

 16   instants. J'aimerais avoir un instant.

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Certainement, allez-y.

 18   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 19   M. KREMER : [interprétation]

 20   Q.  Quelques questions encore avant que je n'en finisse. Je suis en train

 21   de me pencher sur une liste des témoins de la Défense qui ont été cités à

 22   comparaître, et vous tomberez d'accord avec moi, je pense, sur le fait que

 23   les Juges de la Chambre ont fourni à la Défense un certain nombre d'heures

 24   limitées pour ce qui est de la présentation des éléments à décharge, n'est-

 25   ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et les décisions ont dû être prises pour ce qui est de savoir qui faire

 28   comparaître et pour combien de temps.


Page 504

  1   R.  C'est clair.

  2   Q.  Alors M. Krajisnik s'était fait déjà une idée avant le début de la

  3   présentation des éléments à décharge pour indiquer qu'il avait souhaité

  4   témoigner, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non, ce n'est pas comme cela que ça s'est passé.

  6   Q.  Non ? Mais M. Krajisnik, à un moment donné, a certes décidé de

  7   témoigner ?

  8   R.  Ça, oui.

  9   Q.  Et son témoignage a duré quelque 40 journées d'audience.

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Cela a fait dépenser un grand nombre d'heures allouées à la Défense,

 12   n'est-ce pas ?

 13   R.  C'est exact. Et dans mon témoignage précédent, j'ai déjà dit exactement

 14   ce que vous venez de dire.

 15   Q.  Fort bien. Alors je suis en train de me pencher d'une façon générale

 16   pour savoir de quoi ont parlé ces témoins. Il y a toute une série de

 17   témoins qui ont parlé de la politique avant la guerre puis même pendant la

 18   guerre, il y a eu des témoins qui ont parlé de négociations politiques avec

 19   la participation de M. Krajisnik et autres au sein de ce gouvernement de la

 20   Republika Srpska, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et il y a eu des témoins représentatifs en provenance des

 23   municipalités, du comité principal du SDS, et cetera ?

 24   R.  Exact.

 25   Q.  Et tous ces témoins ont commenté des différentes questions que la

 26   Défense de M. Krajisnik avait jugée importante, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui. Des commentaires ont été faits sur la plupart des questions

 28   d'importance mais ce qui a brillé par son absence, c'était un traitement


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  1   systématique et coordonné dans l'approche à bon nombre de ces témoins.

  2   Q.  Vous avez donc eu un problème avec le nombre de témoins qu'on a cités à

  3   comparaître. Vous auriez souhaité qu'il soit plus grand, c'est ce que vous

  4   êtes en train de nous dire ?

  5   R.  Non, je n'ai pas fait d'observation au niveau du chiffre mais j'étais

  6   surtout préoccupé par la nature et la qualité de certains de ces témoins.

  7   Et si une fois de plus, sans avoir quelque mérite que ce soit, le faire

  8   façon hypothétique, je m'élevais à la place à laquelle M. le Juge m'a placé

  9   tout à l'heure, peut-être aurais-je exclu certains témoignages et peut-être

 10   aurais-je cité à comparaître certains autres témoins que j'estimais plus

 11   importants, plus pertinents sur certaines questions. Mais, bien entendu,

 12   c'est là une évaluation subjective, il s'entend.

 13   Q.  Mais vous êtes d'accord pour dire que vous n'étiez pas présent pendant

 14   toute la présentation des éléments de la Défense ?

 15   R.  Oui, je suis en train de parler de la période lorsque j'étais là-bas et

 16   la plupart des témoins ont été entendus lorsque j'étais là-bas. Je n'étais

 17   pas là-bas pendant que M. Krajisnik a témoigné lui-même.

 18   Q.  Et vous n'étiez pas présent non plus lorsque ont témoigné la plupart

 19   des témoins de l'Accusation ?

 20   R.  Exact.

 21   Q.  Donc il y a toute une grande partie de l'affaire où vous avez été

 22   absent, et cela influe sur votre possibilité de fournir quelque opinion que

 23   ce soit au sujet de ce que les conseils qui ont été là depuis le début à la

 24   fin auraient dû faire ou ne pas faire, n'est-ce pas ?

 25   R.  Alors, mais allons donc, je suis une personne lettrée. Je sais comment

 26   on se penche sur des choses. Ce n'est pas parce que je n'étais pas présent

 27   sur une partie des événements que je n'ai pas pu rattraper cela; bien

 28   entendu, c'est un grand avantage que d'être présent mais cela ne signifie


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  1   pas que je n'ai pas pu savoir ce qui s'était passé en mon absence.

  2   Q.  Comment avez-vous appris cela ? Vous êtes-vous renseigné auprès de

  3   d'autres ?

  4   R.  Oui. J'ai très bien pu aller sur les pages internet et me pencher sur

  5   les témoignages que j'avais pensé à avoir dû être intéressants. Il y a bon

  6   nombre de façons de rattraper ce que l'on a raté.

  7   Q.  Lorsque vous étiez dans le prétoire en tant que commis à l'affaire,

  8   étiez-vous là tout le temps ? Et vous n'avez probablement pas pu analyser

  9   ou fouiller dans les écritures précédentes dans le dossier ?

 10   R.  Je ne voudrais pas utiliser de propos négatifs au sujet de votre

 11   question mais je voudrais dire quand même que c'est quand même tendancieux

 12   que de le dire. Nous passions cinq heures dans le prétoire; nous avions

 13   d'autres tâches à accomplir à l'extérieur du prétoire mais j'avais du temps

 14   pendant le week-end et au soir pour l'utiliser comme bon me semblait. Et je

 15   ne dis pas que j'ai constamment étudié les témoignages des témoins

 16   précédents mais j'ai dit qu'il y a différentes façons pour une homme de

 17   s'informer sur ce qui s'était passé auparavant.

 18   Q.  Certes, mais pendant à peu près 13 mois d'intervention en qualité de

 19   commis à l'affaire, d'interprète, de traducteur pour l'équipe de Krajisnik,

 20   vous aviez eu un emploi à temps plein.

 21   R.  Oui, j'ai eu un emploi à temps plein.

 22   Q.  Oui, merci.

 23   R.  Mais cela n'exclut pas le fait de pouvoir faire autre chose lorsque ce

 24   travail est terminé.

 25   Q.  Merci.

 26    R.  Je vous en remercie moi aussi.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Monsieur le Juge Shahabuddeen.

 28   Questions de la Cour d'appel :


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  1   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Juste une question, Monsieur

  2   Karganovic.

  3   Cette question se rapporte au témoignage de M. Krajisnik qui a duré pendant

  4   40 jours. Qui est-ce qui a interrogé M. Krajisnik pendant ces 40 jours ?

  5   R.  Je pense que c'était tant M. Stewart que M. Josse.

  6   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Ensuite, à un moment donné, M.

  7   Krajisnik a été interrogé à titre complémentaire. Qui est-ce qui a posé les

  8   questions supplémentaires ?

  9   R.  Vous voulez parler d'une occasion à part ?

 10   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Non, pendant ces 40 journées de

 11   témoignage, il a dû avoir été interrogé à titre complémentaire par un

 12   conseil. Lequel des conseils l'a fait ?

 13   R.  Monsieur le Président, si la finalité de votre question est celle de

 14   savoir si j'ai suivi le témoignage de M. Krajisnik une fois que j'ai quitté

 15   l'équipe, comme je l'ai d'ailleurs dit, très peu de temps après, ma mère,

 16   mon cousin et moi sommes partis en Serbie; donc je n'ai pas été --

 17   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc vous n'êtes pas en position

 18   d'apporter une réponse à cette question.

 19   R.  Non, non.

 20   M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Fort bien.

 21   R.  Je n'ai pas suivi le procès de si près.

 22   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bon. Ceci met un terme au témoignage de

 23   M. Karganovic. Nous vous remercions. Vous pouvez vous retirer. M.

 24   l'Huissier vous raccompagnera.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 26   [Le témoin se retire]

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Avant que de lever l'audience, je

 28   voudrais -- excusez-moi -- peut-être pourrions-nous revenir en audience


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  1   publique.

  2   Sommes-nous en audience publique ?

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes en

  4   audience publique.

  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Donc avant que de lever

  7   l'audience, je voudrais annoncer la décision rendue par la Chambre d'appel

  8   au sujet de la requête présentée par M. Krajisnik. Cela porte sur la

  9   déclaration de Radovan Karadzic. La Chambre d'appel a décidé, conformément

 10   à l'article 92 ter, de faire en sorte que la déclaration annexée à la

 11   requête soit versée au dossier à l'occasion de l'audience qui se tiendra au

 12   5 novembre 2008 à condition, bien entendu, que les préalables prévus par

 13   l'article 92 ter soient réunis; à savoir que M. Karadzic soit présent et

 14   qu'il se rende disponible pour un contre-interrogatoire et pour des

 15   questions en général; et au cas où il attesterait que cette déclaration

 16   écrite reflète bien la teneur de ses propos.

 17   Nous allons en partie modifier l'ordre portant notre calendrier datant du

 18   21 octobre. L'audience va commencer à 9 heures et non pas à 8 heures 30.

 19   M. KREMER : [interprétation] Puis-je --

 20   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Allez-y.

 21   M. KREMER : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre mais j'ai

 22   une question pour ce qui est de cet agenda pour mercredi. Combien de temps

 23   l'Accusation pourrait-elle obtenir pour le contre-interrogatoire, quand

 24   est-ce que nous commencerons notre contre-interrogatoire ? C'est important

 25   pour nous de savoir si nous allons avoir trois heures, six heures ou neuf

 26   heures.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 28   M. KREMER : [interprétation] Autre question que j'ai au sujet de l'audience


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  1   d'aujourd'hui, je remarque que cette ordonnance portant calendrier comporte

  2   un résumé qui aurait dû avoir été présenté le 14 novembre au sujet du

  3   témoignage Karadzic. Mais il n'y a pas eu ordonnance autorisant ceci. Alors

  4   je me demande s'il s'agit d'une omission et il y a aussi ces limites en

  5   matière de nombre de mots. Et je ne sais pas s'il y a donc cette

  6   limitation, enfin, tout ceci ne se trouve être prescrit par l'ordonnance,

  7   et peut-être des instructions seraient-elles souhaitables pour ce qui est

  8   de la longueur de nos écritures à nous.

  9   [La Chambre d'appel et le Juriste se concertent]

 10   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pour cette dernière question, nous

 11   allons redevoir passer à huis clos partiel. Mais pour ce qui est de

 12   l'ordonnance portant calendrier et relative à la journée de mercredi, nos

 13   sessions vont se dérouler comme suit : tout d'abord, nous allons devoir

 14   déterminer si les conditions prévues par le 92 ter sont réunies, et cela se

 15   fera au début même de l'audience. Une fois que ceci sera effectué, les

 16   Juges de la Chambre d'appel ont décidé de faire en sorte que le contre-

 17   interrogatoire de l'Accusation dure une heure et demie, suite à quoi, il

 18   devait y avoir des questions supplémentaires pendant la moitié du temps

 19   imparti à l'Accusation, à savoir pendant 45 minutes. C'est ce que nous

 20   avons convenu.

 21   Je voudrais maintenant que nous retournions à huis clos partiel.

 22   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Attendez, Monsieur le Président,

 23   ces 45 minutes, c'est référence faite à moi-même, n'est-ce pas ?

 24   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui.

 25   M. N. DERSHOWITZ : [interprétation] Merci.

 26   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Alors, pourrons-nous retourner

 27   maintenant à huis clos partiel.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.


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  1   [Audience à huis clos partiel]

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 16   --- L'audience est levée à 17 heures 51 et reprendra le mercredi 5 novembre

 17   2008, à 9 heures 00.

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