Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Jeudi 15 mars 2001.)

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 31.)

  3   (Audience publique.)

  4   M. le Président (interprétation): Veuillez annoncer l'affaire.

  5   Mlle Lauer: Affaire IT-97-25-T, le Procureur contre Milorad Krnojelac.

  6   M. le Président (interprétation): Je suis désolé de nous voir de retour

  7   dans cette petite boîte, mais les autres salles d'audience ont été bien

  8   nécessitées. Notamment pour la comparution initiale d'un accusé qui s'est

  9   rendu l'autre jour. Par conséquent, la Chambre I, on en a bien besoin mais

 10   déjà la semaine prochaine nous serons de retour.

 11   Madame Uertz-Retzlaff, vous pouvez procéder.

 12   (Interrogatoire principal de M. Amir Berberkic par Mme Uertz-Retzlaff.)

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 14   Bonjour, Monsieur Berberkic.

 15   M. Berberkic (interprétation): Bonjour.

 16   Question: Avant la suspension d'audience, vous nous avez parlé de la

 17   disparition de Halim Dedovic dans ce groupe d'hommes parti en décembre

 18   1992. Vous avez dit que Fahrudin Malkic surnommé "le Baron" était dans ce

 19   groupe et que Gojko Jokanovic, quant à lui, a évoqué que ces détenus

 20   l'auraient invité plus tard. Que vous a-t-il dit très exactement, M.

 21   Jokanovic?

 22   Réponse: Il a dit très précisément que le "Baron" lui a donné un coup de

 23   fil du Monténégro.

 24   Question: Avez-vous connu ce Baron vous-même?

 25   Réponse: Avant la guerre je ne l'ai pas connu mais, pendant un certain


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  1   temps, j'étais avec lui dans la même pièce.Et lui venait aussi à la pièce

  2   n°16 dans laquelle j'ai été détenu au début.

  3   Question: Plus tard, avez-vous pu le rencontrer une fois de plus, une fois

  4   relâché, ou avez-vous rencontré quelqu'un de ses cousins et membres de

  5   famille?

  6   Réponse: Je ne l'ai jamais rencontré, et j'ai entendu dire qu'il n'ait

  7   jamais apparu nulle part et qu'il était plutôt porté disparu.

  8   Question: Et qui vous a dit cela? Est-ce que vous vous souvenez?

  9   Réponse: Je ne peux pas m'en souvenir. Mais c'est avec plusieurs personnes

 10   que j'ai parlé à son sujet. J'ai même reçu des coups de fil de certains

 11   membres de sa famille très proche, mais je ne peux pas me rappeler très

 12   exactement les personnes avec lesquelles j'ai pu parler.

 13   Question: Et quant à M. Dedovic, l'a-t-on revu vivant? L'avez-vous

 14   rencontré vous-même, ou y a-t-il eu quelqu'un qui l'aurait vu

 15   préalablement et qui l'aurait rencontré. Est-ce que vous avez eu

 16   l'occasion de lui parler?

 17   Réponse: Autant que je le sache, Halim Dedovic lui aussi est considéré

 18   comme porté disparu, on ne l'a jamais vu. J'ai pu parler avec différentes

 19   personnes à Sarajevo, avec les personnes qui ont été intéressées à son

 20   sort. Il s'agissait de ses amis de Foca. Or, eux non plus ils n'ont jamais

 21   pu recueillir aucune information valable et ils ne m'ont rien dit non

 22   plus. Par conséquent, il est considéré comme porté disparu.

 23   Question: Dans ce groupe vous avez dit qu'il y avait aussi Aziz Sahinovic

 24   ou Sahinovic. Qui était-ce?

 25   Réponse: Je sais qu'il travaillait à la banque de Foca. Je l'ai


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  1   personnellement toujours appelé comme banquier. Mais il était d'abord avec

  2   moi dans la pièce n°18. Il a été tabassé à plusieurs reprises. Je crois

  3   que c'était pour des raisons d'argent. On lui a demandé de l'argent ou

  4   est-ce que peut-être il y a eu un détournement de fonds. Voilà pourquoi on

  5   l'accusait. Avec lui, il y avait Tatarevac Medin, surnommé "Mecka".

  6   Il m'a dit personnellement que Savic Jovo, un des gardes, l'a tabassé. Et

  7   cela, à plusieurs reprises.

  8   Question: A quel moment, ce garde Jovo a-t-il tabassé M. Sahinovic, le

  9   savez-vous?

 10   Réponse: C'était au début même de sa détention, peut-être au moins de

 11   juin, début juin.

 12   Question: Avez-vous pu constater des blessures sur le visage de M.

 13   Sahinovic après ces passages à tabac?

 14   Réponse: J'ai vu des hématomes au niveau des yeux, des deux yeux. C'est

 15   tout ce que l'on pouvait voir de l'extérieur de prime abord.

 16   Question: Et vous avez dit qu'il a été tabassé à plusieurs reprises.

 17   Combien de fois d'après vous?

 18   Réponse: Je crois qu'au moins deux ou trois fois, même peut-être plus.

 19   Question: Etait-ce toujours le garde Savic qui le tabassait ou, peut-être,

 20   celui-là l'a tabassé une fois seulement?

 21   Réponse: Je ne peux pas vous le confirmer si c'était toujours le garde

 22   Savic mais, en tout cas, une fois il l'a tabassé et il l'a bien rossé

 23   cette fois.

 24   Question: Et M. Sahinovic, quant à lui, vous a-t-il dit peut-être dans

 25   quel endroit il a été tabassé? Ou peut-être avez-vous pu apprendre vous-


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  1   même de quel lieu de passage à tabac il s'est agi?

  2   Réponse: Il a dit qu'il avait été tabassé pour la première fois dans une

  3   cellule d'isolement, mais il ne m'a pas dit où ces cellules se trouvaient.

  4   Etait-ce dans l'enceinte de la prison, dans le cadre du bâtiment dans le

  5   n°3, ou bien, peut-être dans le cadre des cellules d'isolement qui se

  6   trouvent dans le bâtiment administratif, ça, je ne sais pas, il ne me l’a

  7   pas bien dit.

  8   Question: Monsieur le Président, Aziz Sahinovic est mentionné dans l'Acte

  9   d'accusation, point 5, au n°29.

 10   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Docteur Berberkic, connaissez-vous

 12   Seval Soro?

 13   M. Berberkic (interprétation): Je ne suis pas sûr de pouvoir le dire, mais

 14   je crois qu'il était boucher de formation. Il travaillait dans une

 15   boucherie de Foca, mais je ne pourrais pas vous fournir de plus amples

 16   informations ou plus exactes. Je crois qu'il était là-bas. Mais à quel

 17   moment il disparaît du camp, ça, je ne peux pas vous le situer.

 18   Question: Monsieur le Président, cette personne apparaît sur la liste C au

 19   n°24.

 20   M. le Président (interprétation): Merci.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Connaissez-vous Kemal Isanovic?

 22   M. Berberkic (interprétation): Je connais bien Kemal Isanovic. Il était

 23   garçon dans des pizzerias dont le propriétaire était Adnan Isanovic. Je

 24   l'ai rencontré à plusieurs reprises au KP Dom. Il était dans le bâtiment

 25   n°1, je ne sais pas dans quelle pièce très exactement. A plusieurs


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  1   reprises il a été interrogé.

  2   C'est sur lui que j'ai pu observer ces traces presque standards de

  3   blessures, lorsque quelqu'un était frappé en plein visage. Il s'agit

  4   d'hématomes au niveau du visage, surtout au niveau des yeux. Je n'ai pas

  5   pu remarquer d'autres blessures.

  6   Question: Monsieur le Président, cette personne apparaît sur la liste B30.

  7   M. le Président (interprétation): Merci.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Connaissez-vous Redsad Hadzimesic?

  9   M. Berberkic (interprétation): Je connais bien Resad Hadzimesic surnommé

 10   "Reso". On a fait du foot ensemble, on a été au club d'ailleurs, Sutjeska

 11   club local de football. Lui était au KP Dom dans le bâtiment n°1. Je pense

 12   personnellement qu'il n'a pas été tabassé, je n'ai pas pu remarquer de

 13   blessures sur lui. On l'a emmené depuis le KP Dom, je ne sais pas à quel

 14   moment très exactement et, plus tard, je n'ai jamais eu de nouvelles de

 15   lui.

 16   Question: Monsieur le Président, cette personne apparaît sur la liste B24.

 17   M. le Président (interprétation): Merci.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Docteur Berberkic, Mehmed Sofradzija

 19   a-t-il été détenu au KP Dom?

 20   M. Berberkic (interprétation): Mehmed Sofradzija était un de mes cousins

 21   lointains. Avant la guerre, il était employé de la municipalité de Foca.

 22   Il a été transféré depuis Novi-Sad, autant que je sache. Je ne sais pas si

 23   cette information est très exacte. Il a été transféré par les policiers de

 24   Foca. L'un d'entre eux était Matovic que je connais également très bien,

 25   ancien gardien de but du même club Sutjeska, mais pendant un certain temps


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  1   il était dans les cellules d'isolement près de l'entrée. Donc je ne sais

  2   pas combien de jours, cinq ou six jours.

  3   Plus tard, on l'a transféré au bâtiment n°3 je ne sais pas dans quelle

  4   pièce, peut-être n°18.

  5   Question: A-t-il été tabassé lui aussi? Avez-vous pu remarquer quelque

  6   chose sur lui?

  7   Réponse: Il a été tabassé et comment il était couvert d'hématomes! Je le

  8   connais depuis longtemps et je crois pouvoir dire que, quand même, à ma

  9   connaissance, son visage tout entier était enflé.

 10   Question: A quel moment l'avez-vous vu ainsi blessé? Et où?

 11   Réponse: Je l'ai vu à plusieurs reprises au KP Dom. Je crois d'abord une

 12   première fois, c'était au mois de juillet. Même je l'ai vu lorsqu'on l'a

 13   emmené une dernière fois du KP Dom. J'ai pu communiquer avec lui par la

 14   fenêtre, et j'ai essayé de lui faire comprendre qu'il fallait passer un

 15   coup de fil aux miens pour leur donner de mes nouvelles, juste que je suis

 16   en vie.

 17   Question: Cela veut-il dire que vous avez cru vous, quant à vous, qu'il

 18   allait être échangé et qu'il allait être en mesure de contacter votre

 19   famille, lorsque vous l'avez vu la première fois?

 20   Réponse: Bien entendu. A ce moment-là, nous n'avons pas pu nous faire une

 21   idée autre que les gens, les détenus qui quittaient le KP Dom devaient

 22   être échangés, ou bien, allaient faire un travail en ville, en dehors de

 23   l'enceinte de la prison.

 24   Question: A quel moment Mehmed Sofradzija a-t-il été emmené? Quand l'avez-

 25   vous vu pour la dernière fois?


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  1   Réponse: Ceci pouvait être au cours de la première moitié de septembre

  2   1992.

  3   Question: A-t-il été emmené dans le cadre de ce groupe de gens ou bien a-

  4   t-il été seul à être emmené?

  5   Réponse: Il n'a pas été seul à être emmené, il y avait un groupe de gens,

  6   plus de dix personnes.

  7   Question: Et avez-vous pu entendre quoi que ce soit, plus tard, au sujet

  8   de ce groupe-là pour apprendre leur sort?

  9   Réponse: Autant que je sache de ce groupe de gens, personne n'a donné

 10   signe de vie. J'ai pu parler avec quelqu'un, qui est d'ailleurs son frère

 11   à Sarajevo, qui est à sa recherche toujours, mais sans avoir

 12   d'informations non plus.

 13   Question: A-t-il eu un surnom Sofradzija?

 14   Réponse: Son surnom était Mesa.

 15   Question: Avez-vous eu l’occasion de lui parler pour apprendre par qui il

 16   a été tabassé et en quel lieu il a été battu?

 17   Réponse: Je n'ai pas eu l’occasion de m'entretenir directement avec lui.

 18   Toutes ces conversations ne pouvaient se passer que par la fenêtre au

 19   moment où il quittait le KP Dom. C'est ce que d'ailleurs j'ai dit tout à

 20   l'heure lorsque je vous ai dit ce que je voulais de lui, qu'il me rende

 21   comme service, mais j'ai pu parler avec un autre détenu dans la même

 22   cellule d'isolement. Son nom est Asim, le nom de famille je ne m’en

 23   souviens plus. Il est du village de Sukovac sur la rive gauche de la

 24   Drina, au-dessus de Foca. Asim était avec Mesa dans la même cellule

 25   d'isolement, laquelle cellule d'isolement se trouvait dans le bâtiment


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  1   n°3.

  2   Ils étaient seuls. Asim m'a dit que Mesa a eu peur, très peur, et qu'il

  3   croyait lui-même qu'il n'allait pas survivre. Et qu'il a donné sa montre-

  4   bracelet à Asim pour que l'autre la remette à son fils en souvenir de son

  5   père.

  6   Il a raconté à Asim comme quoi il devait passer environ sept jours dans

  7   cette cellule d'isolement qui se trouve dans le bâtiment, à l'entrée, et

  8   que pendant trois jours il n'a rien eu à boire ni à manger; et que c’est

  9   sa propre urine qu'il a dû boire pour survivre. Asim me l’a dit lorsque

 10   nous étions détenus ensemble dans la pièce n°16, lorsque Asim a été

 11   transféré dans cette pièce. Il ne m'a pas dit par qui l'autre a été

 12   tabassé, il a dit tout simplement qu'il a été menoté à Novi-Sad et que ses

 13   mains et bras étaient tout gonflés et que le policier Matovic a participé

 14   à cette action.

 15   Question: Monsieur le Président, la personne nommée Mehmed Sofradzija est

 16   au B52.

 17   M. le Président (interprétation): Merci.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous connu Salih Mandzo au KP

 19   Dom? Pardon, Salko Mandzo?

 20   M. Berberkic (interprétation): Je crois qu'il s'agit de la personne qui

 21   est surnommée "Kelta", Salko Mandzo surnommé "Kelta". Je ne l'ai jamais

 22   connu personnellement. Autant que je sache il faisait partie du groupe de

 23   travail, mais au début du mois de juin il a été tabassé à plusieurs

 24   reprises, toujours dans les mêmes pièces qui se trouvent près de la porte

 25   d'entrée.


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  1   Question: Comment le savez-vous? Vous avez dit que vous ne l'avez pas

  2   connu personnellement. Avez-vous vu le moment où il a été emmené ou

  3   lorsqu'il était de retour?

  4   Réponse: Je l'ai vu juste au moment où ils l'ont emmené, mais je l'ai vu

  5   aussi de son retour, lorsqu'il a été blessé au visage. A cette époque-là,

  6   il était dans le bâtiment n°1. Il a été sélectionné à plusieurs reprises

  7   et on l'a ramené dans la pièce. Les détenus qui étaient avec moi me l'ont

  8   dit qu'il était surnommé ainsi. Je ne le connaissais pas personnellement

  9   avant. Plus tard, il s'est avéré que c'était par erreur qu'il a été

 10   tabassé, parce qu'ils devaient tabasser une autre personne mais pas lui.

 11   Je ne sais pas si cela était exact ou pas.

 12   Question: Vous avez dit que ceci s'est passé en juin 1992?

 13   Réponse: Je crois que c'était bien en juin 1992.

 14   Question: Et vous avez dit que vous avez pu voir des blessures sur son

 15   visage. De quelles blessures s'agissait-il? Avez-vous pu le voir, pouvez-

 16   vous nous le dire?

 17   Réponse: Il s'agit de blessures qui sont causées par des coups de main ou

 18   d'un (…) asséné aux mains, surtout d'objets contondants . Il s'est agi en

 19   général d'hématomes, enfin, véritables ecchymoses sur le visage.

 20   Question: Vous avez dit que c'est par erreur qu'il a été tabassé, erreur

 21   de personne, on le prenait pour quelqu'un d'autre. Avez-vous pu

 22   l'apprendre plus tard pour qui ils devaient le prendre?

 23   Réponse: Non, je n'ai pas pu l'apprendre. Je ne le sais pas.

 24   Question: Ce schéma de passage à tabac, comment se reflétait-il sur vous-

 25   même du point de vue psychologique?


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  1   Réponse: Pas sur moi seulement, mais sur d'autres détenus également. Nous

  2   avons tous eu peur, peur pour nos propres vies. Vous savez, ces gens-là

  3   qui étaient tabassés et ramenés dans leur pièce se trouvaient dans un état

  4   psychique, physique bien sûr, mais psychique aussi. Et nous tous qui

  5   étions dans la pièce, nous en avons eu peur car chacun de nous croyait que

  6   son tour aller venir. Il me semble que l'on s'y préparait d'une manière ou

  7   d'une autre.

  8   Et tout simplement, les préparatifs consistant à ce que quelqu'un qui se

  9   trouvait sélectionné, on faisait de notre possible pour l'habiller, pour

 10   leur donner des chandails ou une pièce de vêtement de plus pour que ces

 11   coups soient atténués, les coups qu'ils allaient recevoir.

 12   Question: Et de quelle façon avez-vous fait vos préparatifs, à vous, au

 13   cas d'une interrogation ou si votre tour devait venir? Avez-vous fait

 14   quelque chose de concret?

 15   Réponse: Bon, moi aussi, j'ai reçu un chandail qui m'a été passé par un

 16   des détenus que j'ai mis sur moi, parce que je m'attendais à être détenu.

 17   J'ai rédigé une lettre d'adieu à l'intention de ma famille que j'ai remise

 18   à Dzano Hasan qui était dans ma pièce. Je lui ai dit que si lui survit,

 19   qu'il fasse de sorte à ce que, par des canaux quelconques, cette lettre

 20   parvienne au port de ma femme et de mes enfants. Je n'ai pas vraiment été

 21   optimiste quant à ma survie, je crois pouvoir le dire ainsi. Ne serait-ce

 22   que pour parler du premier début de ma détention.

 23   Question: Vous avez déjà fait mention de deux de vos cousins qui étaient

 24   au KP Dom. Y a-t-il eu d'autres cousins à vous qui auraient été détenus

 25   avec vous?


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  1   Réponse: Il y avait deux de mes cousins, l'un d'entre eux s'appelle

  2   Berberkic Adnan, de Miljevina; l'autre Merkez Rasim, il est du village de

  3   Ribare.

  4   Question: Que s'est-il passé avec ces deux cousins? Ont-ils survécu au KP

  5   Dom, à cette détention? Sont-ils en vie?

  6   Réponse: Non, personne d'entre eux n'a survécu, ils sont tous les deux

  7   considérés comme portés disparus.

  8   Question: Au début de votre déposition, vous avez dit que vous avez été

  9   arrêté au même moment que Halil Merkez. Qu'est-il advenu de lui? A-t-il

 10   survécu au KP Dom?

 11   Réponse: Oui, il a survécu, il a fait l'objet d'échange. D'abord, on l'a

 12   transféré à Kalinovik pour y passer un certain temps à la prison de

 13   Kalinovik, pour être échangé ensuite. Il habite Sarajevo maintenant.

 14   Question: Vous avez mentionné également Adnan Salispahic qui, lui, était

 15   arrêté après vous, ou Adnan Dzaferspahic. Qu'est-il advenu de lui?

 16   Réponse: Adnan Dzaferspahic n'a pas survécu, il est considéré comme porté

 17   disparu lui aussi. Il était sélectionné dans le cadre d'un groupe d'hommes

 18   qui étaient au nombre de trente environ. Tous des jeunes gens de 25 à 30

 19   ans, costauds. Les gardes disaient qu'ils devaient partir pour travailler

 20   quelque part, c'est ce qui a été dit.

 21   Question: Et à quel moment ceci s'est-il produit? A quel moment a-t-il

 22   disparu du KP Dom?

 23   Réponse: Je crois que ceci devait être la première moitié de septembre

 24   1992.

 25   Question: Vous avez déjà relaté comment vous avez été tabassé dans la cour


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  1   par les soldats. Avez-vous vu battre également quelques autres détenus

  2   dans la cour même ou peut-être au réfectoire? Vous vous en souvenez peut-

  3   être?

  4   Réponse: Je me souviens d'un détenu, je crois qu'il était épileptique, un

  5   malade. Cela se passait devant la cantine, sur les marches mêmes. Je crois

  6   que celui-là leur demandait de le laisser partir chez lui. Il disait:

  7   "Pourquoi est-ce que je suis détenu ici? Laissez-moi partir chez moi.".

  8   Deux des gardes, Pljevaljcic Zlatko, l'autre s'appelait Perisic, l'ont

  9   battu à coups de pied sur les marches mêmes, ils lui ont asséné plusieurs

 10   coups. Après quoi, ils l'ont introduit dans le bâtiment n°3 pour continuer

 11   de le battre dans le couloir du bâtiment. Je ne sais plus s'ils l'ont

 12   ramené dans la pièce où il était ou dans l'une des cellules d'isolement.

 13   Je crois plutôt qu'on l'a ramené dans sa pièce.

 14   Question: Et où étiez-vous au moment où vous l'avez vu?

 15   Réponse: J'étais dans la pièce n°16, et nous avons pu voir clairement ce

 16   qu'il s'y passait.

 17   Question: Et connaissez-vous le nom de cette personne, de cette victime?

 18   Réponse: Je crois qu'il s'appelle Dzafer Humic, mais je ne suis pas sûr

 19   comme je ne connaissais pas cette personne d'avance, non plus que je n'ai

 20   eu l'occasion de le rencontrer pendant que nous étions détenus au camp.

 21   Question: Vous avez dit qu'il était malade d'épilepsie. A-t-il été en

 22   quelque sorte un handicapé physique?

 23   Réponse: Je ne peux pas, je n'arrive pas à me souvenir pour vous dire s'il

 24   a eu des problèmes pour marcher ou quelque chose dans ce sens-là. Mais en

 25   tout cas, je crois que c'était un malade mental. Enfin, il était


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  1   épileptique. Enfin, malade. Oui, il souffrait des nerfs.

  2   Question: Monsieur le Président, l'accusation pense qu'il s'agit de cet

  3   incident qui était présenté dans l'Acte d'accusation sous le point 5.9.

  4   Pljevaljcic apparaît au n°35 dans la pièce d'accusation P3, et l'autre

  5   Perisic apparaît au n°20.

  6   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous jamais été enregistré par

  8   la Croix-Rouge internationale?

  9   M. Berberkic (interprétation): J'ai déjà déclaré que mon nom ne figure

 10   nulle part dans des listes officielles. Non plus que je n'ai plus voir mon

 11   nom figurer quelque part dans les listes établies par des organismes

 12   officiels tels que la Croix-Rouge internationale ou d'autres organismes

 13   humanitaires.

 14   Question: Le CICR s'est-il rendu au KP Dom? Et si oui, où étiez-vous à ce

 15   moment-là?

 16   Réponse: Pendant ma détention au KP Dom, à deux reprises, des employés

 17   s'étaient rendus une première fois le 23 juillet 1993, et une seconde fois

 18   en août de la même année.

 19   Question: Et où étiez-vous quand ils sont venus?

 20   Réponse: La première fois, le 23 juin 1992, on a placé un groupe d'entre

 21   nous -nous étions douze-, dans un véhicule. On nous a donc fait monter

 22   dans un véhicule, et on nous a emmenés jusqu'au sous-sol de la boulangerie

 23   qui se trouvait à côté du KP Dom. On nous y a emmenés le matin, nous

 24   sommes restés à cet endroit jusque dans l'après-midi à peu près. Nous

 25   étions douze.


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  1   Le Témoin FWS-111 était là, le Dr Aziz Torlak, le témoin FWS-146. Je sais

  2   qu'on était douze en tout, il y avait d'autres détenus également. Nous

  3   sommes restés à cet endroit un certain temps. Ensuite, le garde qui nous

  4   gardait nous a ramenés au KP Dom à pied. Il était armé. On avançait en

  5   file indienne deux par deux, et il nous a emmenés au KP Dom jusqu'à

  6   l'entrée principale.

  7   Mais très vite, il y a un des policiers qui est sorti de la guérite et qui

  8   a commencé à insulter ce garde en lui disant, en lui demandant pourquoi il

  9   nous ramenait alors qu'il n'avait reçu aucun ordre dans ce sens. Alors, à

 10   ce moment-là, on nous a rapidement ramenés au sous-sol de la boulangerie.

 11   Devant l'entrée du KP Dom, nous avons pu voir une Land-Rover avec des

 12   indications indiquant que c'était la Croix-Rouge. Il était évident qu'on

 13   nous avait cachés et le garde qui nous accompagnait ne le savait pas. Ce

 14   n'est qu'au soir que l'on est revenu nous chercher pour nous ramener dans

 15   les salles où nous étions précédemment.

 16   (L'interprète signale que le témoin a dit 1992.)

 17   Question: Oui, je voulais justement vous le demander. Vous avez dit que

 18   c'était le 23 juin 1992. Est-ce que c'est bien exact ou est-ce que vous

 19   vous êtes trompé?

 20   Réponse: Non, c'est le 23 juin 1993. Je crois que je l'ai dit, je crois

 21   que je me suis corrigé.

 22   Question: Vous avez dit qu'en août 1993, la Croix-Rouge était de nouveau

 23   venue. Où étiez-vous? Que s'est-il passé à ce moment-là?

 24   Réponse: En août 1993, nous avons appris par l'intermédiaire d'un certain

 25   nombre de gardes que la Croix-Rouge internationale allait venir. Ils ont


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  1   même fait nettoyer les lieux par des détenus pour se préparer à la visite.

  2   Mais le matin de cette journée, on est venu nous chercher encore. On nous

  3   a fait monter dans un camion militaire. On nous a fait monter donc dans ce

  4   camion qu'ils ont fermé. Pljevaljcic Zlatko un garde armé était avec nous.

  5   Et à ce moment-là, on nous a amenés à Brioni qui est une localité qui se

  6   trouve sur la rive droite de la Cehotina. Ça se trouve à trois ou quatre

  7   kilomètres de Foca. Et là, il y avait…, avant il y avait une ferme. Avant

  8   la guerre et pendant la guerre également. Ils avaient des activités

  9   agricoles à cet endroit.

 10   On nous a fait entrer dans une sorte de grange, un hangar, et on nous a

 11   ordonné de nettoyer le poulailler où il y avait des poules avant la

 12   guerre. On y a passé la journée. Là encore, c'étaient les mêmes douze

 13   personnes que l'on avait cachées dans le sous-sol de la boulangerie.

 14   Le soir, à la tombée du jour, on nous a ramenés. Sur le parking devant

 15   Brioni, on a vu la même Land-Rover de la Croix-Rouge et on a pensé qu'ils

 16   revenaient, qu'ils étaient déjà revenus de leur visite au KP Dom. Et cela

 17   s'est confirmé.

 18   M. le Président (interprétation): Je serais intéressé, Madame Uertz-

 19   Retzlaff, de vos informations sur la composition de ces douze détenus. Je

 20   vous serais reconnaissant de porter des questions à ce sujet au témoin.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le témoin, vous avez

 22   mentionné un certain nombre de personnes qui figurent sur la liste. Vous

 23   avez également parlé du Dr Torlak. Mais les autres personnes qui

 24   composaient ce groupe, qui étaient-ce? De quel genre de personnes

 25   s'agissait-il?


Page 3939

  1   M. Berberkic (interprétation): Eh bien, je dirai que c'étaient des

  2   intellectuels bien que le FWS-146 était là aussi. Or, lui, on ne peut pas

  3   vraiment dire que c'était un intellectuel. Le Pr Husein Lojo était là.

  4   Safet Avdic, un directeur, administrateur. J'ai déjà mentionné FWS-111, et

  5   je crois qu'il y avait FWS-71.

  6   Question: Vous nous dites qu'à l'exception de FWS-146, tous ces gens

  7   étaient des intellectuels. Est-ce qu'il s'agissait de ce que l'on pourrait

  8   qualifier de notables?

  9   Réponse: Il s'agissait d'un groupe d'intellectuels et de personnes très

 10   connues à Foca. Des personnes très connues, des hommes d'affaires qui

 11   jouissaient d'une très bonne réputation, et puis aussi des gens qui

 12   occupaient des postes importants à Foca.

 13   On se demandait pourquoi on nous isolait, nous douze, pourquoi on nous

 14   plaçait à cet endroit. On s'est posé la question et on s'est dit que

 15   c'était peut-être en préparation d'un échange. Mais, en fait, on avait

 16   peur. On avait peur que l'on soit un groupe manipulé d'une façon

 17   différente.

 18   Question: Vous nous dites que vous étiez isolés. Est-ce que cela veut dire

 19   que ce groupe de douze personnes auquel vous apparteniez était dans une

 20   salle à part au KP Dom?

 21   Réponse: Oui. Oui, on était dans le bâtiment n°13, dans une salle, dans

 22   une pièce séparée.

 23   Question: Et depuis quand étiez-vous à cet endroit, dans cette pièce

 24   isolée?

 25   Réponse: Après le départ de Dzevad Lojo, il était le directeur de la mine


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  1   à Miljevina, donc ça c'était en mars 1993. Ensuite, ils nous ont séparés

  2   dans ce groupe de douze personnes et nous ont mis dans cette pièce, dans

  3   le bâtiment n°3.

  4   Question: Est-ce qu'il ne vous est jamais arrivé de demander aux gardes

  5   pourquoi on vous avait ainsi séparé du reste des prisonniers?

  6   Réponse: On a parlé à beaucoup de gardes qui étaient chargés de nous

  7   garder, mais personne ne pouvait nous donner d'information fiable. Ils ne

  8   faisaient que des suppositions, un petit peu comme nous. Et c'est ce

  9   qu'ils nous ont dit, ils nous ont dit: "Ah oui, ils sont en train de vous

 10   préparer pour quelque chose", mais on ne savait pas ce dont il s'agissait.

 11   Question: Merci.

 12   Docteur Berberkic, nous allons maintenant parler d'un certain nombre

 13   d'employés du KP Dom. Mais qui était le directeur du KP Dom pendant votre

 14   détention?

 15   Réponse: Pendant que j'étais là, le directeur était Milorad Krnojelac dit

 16   "Mico".

 17   Question: Qui était le directeur avant la guerre?

 18   Réponse: C'était un autre Serbe que je connaissais très, très bien. Mais

 19   là, sur le moment, je n'arrive pas à me souvenir de son nom. Peut-être

 20   plus tard j'arriverai à m'en souvenir.

 21   Question: Cette autre personne qui était le directeur avant M. Krnojelac,

 22   est-ce que vous l'avez vue au KP Dom pendant votre détention?

 23   Réponse: Non. Non, je ne l'ai jamais vue bien que je la connaisse très,

 24   très

 25   bien.


Page 3941

  1   Question: Est-ce que vous avez parlé avec les employés du KP Dom au sujet

  2   de ce directeur, cet ancien directeur, et de la raison pour laquelle il

  3   avait été remplacé?

  4   Réponse: Il s'appelle Radojica Tesevic, c'était lui le directeur du KP Dom

  5   avant la guerre. Il parlait avec les gardes, mais on en discutait aussi

  6   avec nous, on se demandait ce qui avait pu lui arriver, pourquoi il était

  7   parti. On a reçu des informations par l'intermédiaire des gardes serbes.

  8   Et apparemment -d'après ce qu'ils disaient-, il n'était pas d'accord avec

  9   la stratégie, la politique du SDS et il a refusé d'être directeur du KP

 10   Dom, alors que ce poste lui avait été offert. Donc il était devenu

 11   directeur de l'exploitation agricole de Brioni.

 12   Question: Qui vous a dit cela? Vous parlez de gardes. De qui parlez-vous

 13   exactement?

 14   Réponse: Comment vous dire? Il y avait quelqu'un avec qui j'étais en bon

 15   terme. (expurgé), mais je ne peux pas vous (expurgé)

 16   (expurgée).

 17   Question: Pourquoi?

 18   Réponse: Je pense que cela pourrait lui causer des problèmes à cause de

 19   son rôle dans toute cette affaire, à cause de son comportement envers les

 20   détenus.

 21   Question: Est-ce que vous seriez prêt à écrire son nom sur une feuille de

 22   papier? De cette façon, nous ne prononcerions pas son nom mais nous

 23   serions en mesure de pouvoir le lire sur cette feuille de papier.

 24   Réponse: Oui.

 25   M. le Président (interprétation): Il faudra, Monsieur le témoin, que ce


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  1   nom soit montré à l'accusé. Est-ce que vous comprenez cela?

  2   M. Berberkic (interprétation): Non, je ne le savais pas.

  3   M. le Président (interprétation): Ceci présente un véritable problème.

  4   Mais si le témoin a l'impression que cette personne pourrait avoir des

  5   difficultés, peut-être faut-il éviter de demander ces informations même si

  6   c'est important.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, c'est important. Mais il faut

  8   que nous demandions au témoin si, dans ces conditions, il est prêt à

  9   écrire ce nom.

 10   M. le Président (interprétation): Je crois que la réponse qu'il a donnée

 11   est négative.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il a dit: "Non, je n'étais pas au

 13   courant.".

 14   M. le Président (interprétation): Non, mais c'est en l'observant que je

 15   vous ai dit cela. Peut-être faudrait-il mieux lui poser la question

 16   directement?

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Après ce que je vous ai dit, est-ce

 18   que vous êtes toujours prêt à écrire son nom sur une feuille de papier? Ou

 19   est-ce que vous ne souhaitez pas le faire, sachant maintenant que l'accusé

 20   obtiendrait cette information?

 21   M. Berberkic (interprétation): Je ne peux pas le faire.

 22   M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, je pense que mon

 23   éminente confrère sera d'accord avec moi. Dans la déclaration que nous

 24   avons, et que l'accusé a pu voir également, le témoin a déjà donné son

 25   nom. Donc il nous a déjà donné la source de cette information. Je peux


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  1   vous donner le numéro de page.

  2   M. le Président (interprétation): C'est très utile de votre part, Maître

  3   Bakrac, de nous donner cette information. Je pense, Madame Uertz-Retzlaff

  4   que, dans ces circonstances, il n'y a pas de problème à condition que la

  5   déclaration ne soit pas rendue publique puisque les déclarations ne sont

  6   jamais rendues publiques. Puisque Me Bakrac…, on vous fournit ces

  7   déclarations sous la condition que vous ne les rendrez pas publiques au

  8   delà de ce qui est nécessaire pour vous permettre de mener votre enquête

  9   en l'espèce. Donc, à l'heure actuelle, cette déclaration n'est pas

 10   publique en tant que telle.

 11   Vous souhaitez ajouter quelque chose?

 12   M. Bakrac (interprétation): Non, Monsieur le Président. Mais je voulais

 13   simplement vous indiquer qu'en BCS, ceci figure à la page 9 de la

 14   déclaration. Et pour ce qui est de la déclaration en anglais, cela figure

 15   à la page 10.

 16   M. le Président (interprétation): Merci de nous le signaler.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vois que le témoin, dans sa

 18   déclaration, mentionne la personne qui lui a donné des informations au

 19   sujet du KP Dom et des incidents au KP Dom, mais il n'a pas dit que cette

 20   personne était…

 21   M. le Président (interprétation): Un garde.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il ne dit pas que c'est cette

 23   personne qui lui a dit que M. Tesevic avait été remplacé. Donc c'est pour

 24   cela que je n'avais pas réalisé que c'était la personne dont il parlait.

 25   M. le Président (interprétation): Peut-être serait-il utile que vous


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  1   présentiez sa déclaration au témoin, afin que les choses soient bien

  2   claires et que l'on sache exactement ce qu'il a dit.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je souhaiterais demander à l'huissier

  4   de communiquer au témoin sa déclaration dans le classeur, c'est le

  5   document qui porte la cote d'identification ID326. Dans la version en

  6   anglais, je crois que c'est à la page 9, Monsieur le Président.

  7   Je vous serais reconnaissante de bien vouloir présenter au Dr Berberkic

  8   cette page de sa déclaration. Celle-ci.

  9   Au milieu de cette page, Monsieur, vous trouvez une phrase relative à des

 10   informations qui vous ont été communiquées par quelqu'un qui était au KP

 11   Dom. Est-ce que vous voyez ce nom?

 12   M. Berberkic (interprétation): (expurgé)

 13   (expurgée).

 14   M. le Président (interprétation): Dans ces conditions, je pense que l'on

 15   pourrait faire écrire le nom de cette personne sur une feuille de papier,

 16   puisque je ne veux pas que la déclaration soit versée au dossier en tant

 17   que telle. Le bout de papier en question pourra être versé au dossier sous

 18   scellés. De cette façon, tout sera bien clair. En tout cas, cela ne sera

 19   pas rendu publique.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Docteur Berberkic, est-ce que vous

 21   avez bien compris?

 22   M. Berberkic (interprétation): Oui. Oui, je comprends.

 23   (Le témoin écrit le nom sur le papier.)

 24   M. le Président (interprétation): Par mesure de sûreté, je pense qu'il

 25   faut expurger la réponse qui figure aux lignes 23 et 24.


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  1   Le document portera la cote P438 et sera versé sous scellés. P438.

  2   Oui, c'est bien le document en question.

  3   Je vais expurger un extrait du compte rendu d'audience. Vous avez bien vu

  4   Madame Uertz-Retzlaff?

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, oui, mais je ne comprends pas.

  6   M. le Président (interprétation): Parce que si ceci était rendu publique,

  7   ceci ferait comprendre à tous exactement ce que nous ne voulons pas faire

  8   savoir.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je comprends.

 10   M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, je vous prie de

 11   m'excuser, je me permets de vous interrompre mais je crois qu'après tout

 12   ceci, il serait juste que l'on présente à la défense ce qui figure sur

 13   cette feuille de papier. Nous partons du principe que c'est ce dont nous

 14   venons tous de parler. Mais quoi qu'il en soit, nous souhaiterions pouvoir

 15   jeter un coup d'oeil sur cette feuille de papier.

 16   M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, je vous prie de

 17   m'excuser. Je n'avais pas réalisé qu'on avait omis de vous montrer cette

 18   feuille de papier. Bien entendu que vous avez le droit de la voir et de

 19   (expurgé). Ceci

 20   étant dit, ce que je viens de dire doit également être expurgé.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Docteur Berberkic, vous dites que

 22   pendant votre détention, le directeur du KP Dom était M. Krnojelac. Est-ce

 23   que vous avez obtenu des informations quant aux noms de ceux qui ont nommé

 24   M. Krnojelac à ce poste?

 25   M. Berberkic (interprétation): On en discutait entre prisonniers au camp.


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  1   Et d'après ce qui se disait, c'était le commandement militaire qui avait

  2   nommé Krnojelac au poste de directeur.

  3   Question: De quel type d'information parlez-vous?

  4   Réponse: Dans la salle où je me trouvais, la salle n°16, il y avait des

  5   gens qui connaissaient Krnojelac, qui étaient intéressés, qui voulaient

  6   peut-être essayer de parler avec lui pour parler de notre situation

  7   précise, de découvrir pourquoi on avait été arrêtés, et pour essayer

  8   d'améliorer nos conditions de vie. Je crois que ces gens-là avaient des

  9   informations un peu meilleures que les miennes. Je pense à Dzevad Lojo, le

 10   directeur de la mine de Miljevina, l'autre Dzevad Lojo, le directeur de

 11   Maglic.

 12   Question: Est-ce que certains des employés de la prison confirmaient cette

 13   information? Ou bien, est-ce que c'étaient simplement là des supputations

 14   qui circulaient parmi la population des détenus?

 15   Réponse: Je ne me souviens pas et je ne peux pas dire avec certitude si

 16   les gardes ont confirmé cette information, mais je crois que moi,

 17   personnellement, en discutant avec Gojko Jokanovic, donc on s'est parlé de

 18   cette question à deux ou trois reprises. Il a confirmé le fait

 19   qu'effectivement, c'était le commandant militaire qui avait nommé

 20   Krnojelac. Quant aux gardes, je ne leur ai pas parlé.

 21   Question: Est-ce que vous vous souvenez du moment où vous avez eu cette

 22   conversation avec Gojko Jokanovic?

 23   Réponse: Non, je ne me souviens pas exactement.

 24   Question: Est-ce que vous connaissiez M. Krnojelac avant la guerre?

 25   Réponse: Non. Non je ne le connaissais pas, je ne l'avais jamais vu avant


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  1   la guerre.

  2   Question: Est-ce que vous l'avez vu au KP Dom?

  3   Réponse: Oui, je l'ai vu à plusieurs reprises. Ou plutôt, je l'ai vu

  4   souvent.

  5   Question: Et comment saviez-vous que c'était lui puisque vous ne l'aviez

  6   pas vu avant?

  7   Réponse: Eh bien, des gardes, enfin des gens, plutôt des détenus me l'ont

  8   dit, ceux qui étaient dans la salle n°16. Ils m'ont dit parce qu'ils le

  9   connaissaient bien. Il y en avait parmi eux qui avaient travaillé avec

 10   lui, d'autres le connaissaient, le fréquentaient précédemment. Voilà.

 11   Question: Et quand il vous est arrivé de le voir dans la prison, quelle

 12   était sa tenue vestimentaire?

 13   Réponse: Eh bien, il portait un uniforme vert-olive, il avait un couvre-

 14   chef. Je crois que c'est ce qu'on appelle "titovka" ou "partizanka", c'est

 15   ce genre de couvre-chef. Je crois qu'il avait un pistolet dans un holster.

 16   Question: Vous nous parlez de son couvre-chef, est-ce que c'était un genre

 17   de couvre-chef qui était porté par tous les soldats ou par certains

 18   soldats bien précis?

 19   Réponse: Je crois que c'était le genre de couvre-chef que portaient les

 20   partisans pendant la Deuxième Guerre mondiale.

 21   Question: Donc quand vous l'avez vu en uniforme militaire, avez-vous pu

 22   remarquer des galons ou des insignes indiquant quel était son grade sur ce

 23   couvre-chef?

 24   Réponse: Je ne peux pas l'affirmer à cent pour cent. Je pense qu'il avait

 25   des grades, mais je ne peux pas vous confirmer lesquels.


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  1   Question: Comment saviez-vous qu'il était le directeur? D'où teniez-vous

  2   ces informations? Comment pouviez-vous le savoir à l'époque?

  3   Réponse: J'ai déjà dit plus tôt que nous avons essayé d'améliorer notre

  4   situation. Nous avons demandé aux gardiens de nous mettre en contact avec

  5   un responsable, avec une personne responsable qui serait à même

  6   d'améliorer notre situation, pour améliorer notre statut, notre situation.

  7   A chaque fois, on nous disait que c'était lui le responsable, que c'était

  8   lui la personne qui était habilitée à améliorer notre situation, à

  9   résoudre ces problèmes.

 10   Question: Vous avez dit que vous l'avez vu au KP Dom, que vous l'avez vu

 11   souvent. A quel moment le voyiez-vous d'habitude?

 12   Réponse: A différents moments. Au début, cette cantine dans laquelle nous

 13   mangions, eh bien, nous la partagions avec le personnel du KP Dom, les

 14   gardiens, etc. Donc au début, au mois de juin, au mois de juillet, il

 15   venait en compagnie d'autres gardes pour prendre son petit-déjeuner, son

 16   déjeuner, son dîner. Nous pouvions donc le voir à partir de nos fenêtres,

 17   donc souvent dans la matinée, au cours de la journée, et parfois dans

 18   l'après-midi.

 19   Question: Vous avez parlé du mois de juin et du mois de juillet. Est-ce

 20   que vous vous référez à nouveau à l'année 1992?

 21   Réponse: Oui, 1992.

 22   Question: Et après les mois de juin et juillet 1992, est-ce que vous avez

 23   continué à le voir aller prendre ses repas à la cantine, ou bien, est-ce

 24   que cela s'est arrêté?

 25   Réponse: Je pense que c'était devenu plus rare. Mais il y avait des


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  1   alertes, ce qu'on appelait les alertes dans les camps. Je pense qu'il y a

  2   eu trois alertes au cours de mon séjour dans le camp.

  3   Donc à ce moment-là, tous les gardiens, c'était la direction du camp,

  4   venaient parfaitement équipés, équipés pour la guerre, armés au KP Dom et

  5   dans l'enceinte du KP Dom. C'est à cette occasion-là que nous avions

  6   l'occasion de le voir dans l'enceinte de la prison portant un uniforme

  7   militaire ou un uniforme de camouflage. Cela dépendait des fois.

  8   Question: Est-ce que vous vous souvenez des mois où ces alertes se sont

  9   produites?

 10   Réponse: Pour deux alertes, je m'en souviens à peu près. La première s'est

 11   déroulée au mois de décembre 1992. Et la deuxième, au moment où Ekrem

 12   Zekovic s'est enfui au mois de juin 1993.

 13   Question: Et la troisième alerte?

 14   Réponse: Je ne me souviens pas de la troisième. Je pense que cela aurait

 15   pu se passer en automne 1992, au début de l'automne.

 16   Question: Vous avez dit que les employés venaient complètement armés. Que

 17   pensiez-vous par là? Que voyiez-vous?

 18   Réponse: Ils portaient des uniformes militaires ou bien les uniformes de

 19   camouflage. Ils portaient des fusils automatiques, donc ils étaient armés

 20   parfaitement équipés pour la guerre portant des bottes, des couvre-chefs.

 21   Question: Et que faisait-il, que comprenait cette alerte?

 22   Réponse: Eh bien, souvent il déployait les soldats, les soldats qui

 23   circulaient dans le camp pour monter la garde. Ils montaient la garde

 24   devant le bâtiment, le bâtiment où nous étions enfermés.

 25   Question: Avez-vous vu M. Krnojelac participer à des alertes?


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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Pourriez-vous nous décrire ce que vous l'avez vu faire?

  3   Réponse: Il était présent surtout au moment de la deuxième alerte, au

  4   moment où Zekovic s'est enfui, il était là, il était présent. Je pense que

  5   c'était lui qui déployait les soldats, il avait une espèce de rôle de

  6   commandement.

  7   Question: Etait-il présent au cours de la première alerte qui s'est

  8   déroulée en automne 1992?

  9   Réponse: Je ne l'ai pas vu à cette occasion-là.

 10   Question: Et au mois de décembre 1992? La deuxième alerte?

 11   Réponse: Décembre 1992, c'était la première alerte dont je me souviens. La

 12   deuxième alerte c'était au moment où Zekovic s'est enfui et c'est là qu'il

 13   a été présent. Je pense que vous vous êtes trompée.

 14   Question: Donc la première alerte dont vous vous souvenez au mois de

 15   décembre 1992, est-ce que M. Krnojelac était présent au cours de cette

 16   alerte? Et est-ce que vous l'avez vu? Et si vous l'avez vu, que faisait-

 17   il?

 18   Réponse: Je ne me souviens pas de sa présence pendant cette première

 19   alerte.

 20   Question: Et la deuxième alerte par rapport à M. Zekovic, est-ce que M.

 21   Krnojelac était aussi armé, complètement armé -comme vous avez dit?

 22   Réponse: Il était présent et je pense qu'ils avaient tous des armes

 23   automatiques.

 24   Question: Que s'est-il passé à cette occasion-là, donc la deuxième alerte

 25   concernant Zekovic? Qu'avez-vous vu ou étiez-vous et qu'est-ce que vous


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  1   avez vu et que s'est-il passé?

  2   Réponse: Je pense que Zekovic s'est enfui pendant un après-midi. Peut-être

  3   au début du mois de juillet 1993, le 4 ou le 7 juillet 1993. Quand ils ont

  4   appris sa fuite, on a entendu les sons d'une sirène qui a sonné l'alerte.

  5   Et très rapidement, nous avons pu voir à travers nos fenêtres les gardiens

  6   arriver en courant dans l'enceinte de la prison, armés des armes

  7   automatiques. Sans doute qu'ils étaient en train de chercher les traces de

  8   Zeko pour voir par où il était passé. Ils ont inspecté l'enceinte de la

  9   prison, ils ont tout de suite retiré le groupe de travail qui était en

 10   train de travailler quelque part et ils les ont placés dans des pièces,

 11   dans les dortoirs.

 12   Question: Avez-vous vu M. Krnojelac à cette occasion-là?

 13   Réponse: Pas que ce jour-là, mais le lendemain quand on a attrapé Ekrem

 14   Zekovic.

 15   Question: Et où étiez-vous au moment où vous l'avez vu?

 16   Réponse: Nous étions alignés sur le stade dans l'enceinte de la prison.

 17   Tous les prisonniers de toutes les pièces étaient alignés. On nous a donc

 18   fait sortir dans la cour de la prison. Ekrem Zekovic était debout devant

 19   nous, à peu près à 5, 6 mètres de distance. Derrière lui se tenait Savo

 20   Todovic surnommé "Bunda", Milorad Krnojelac, Mico, et tous les gardiens du

 21   KP Dom étaient présents également.

 22   Question: Oui. Et que s'est-il passé donc dans cette cour?

 23   Réponse: Savo Todovic a délivré un discours. Il a dit à peu près ce qui

 24   suit, je pense que je m'en souviens très bien, il a dit: "Devant vous se

 25   trouve Ekrem Zekovic qui a fait une tentative de fuite du camp de


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  1   concentration -ou bien de la prison comme vous aimez l'appeler-, mais il

  2   n'a pas réussi. Il a été attrapé dans un village parmi les femmes et les

  3   enfants. Il n'y a pas eu de force, de violence utilisée vers… Ces

  4   prisonniers n'ont pas été traités avec violence d'aucune sorte, ce qui

  5   prouve l'humanité de l'armée serbe. Nous savons que ce n'était qu'un

  6   essai, un premier essai pour une fuite organisée que préparent les

  7   intellectuels.

  8   Cependant, vous n'avez aucune chance d'y arriver, de vous enfuir. A partir

  9   d'aujourd'hui, vos repas sont réduits à un tiers. Vous n'avez plus droit

 10   aux soins médicaux de quelque sorte qu'il soit. Ce qui veut dire que ni le

 11   Dr Berberkic, même le Dr Berberkic n'a le droit d'aider aucun prisonnier.

 12   Vous n'avez pas le droit de parler à aucun gardien, de quelque façon que

 13   ce soit, vous n'avez pas le droit de regarder par la fenêtre.

 14   Et maintenant, vous allez tous retourner dans vos dortoirs. Vous allez

 15   prendre tous les médicaments et les autres objets qui ne vous

 16   appartiennent pas. Les gardiens vont venir ramasser tout cela.".

 17   Question: Pendant que M. Todovic faisait ce discours, où se trouvait M.

 18   Krnojelac?

 19   Réponse: Il se tenait près de lui, à côté de lui, avec les autres

 20   gardiens.

 21   Question: A-t-il réagi d'une façon quelconque à ce que disait M. Todovic?

 22   Réponse: Pour autant que je me souvienne, il n'a pas prononcé un seul mot,

 23   mais je pense qu'il approuvait son discours en hochant sa tête. Mais il

 24   n'a pas dit un seul mot.

 25   Question: Et quand vous êtes retournés dans vos pièces, est-ce que tout ce


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  1   qu'a dit M. Todovic s'est vraiment produit, cette espèce de punition

  2   collective? Est-ce que l'on vous a pris les médicaments? Est-ce que les

  3   rations de nourriture ont été réduites? Est-ce que vous n'aviez plus le

  4   droit de traiter les détenus?

  5   Réponse: Oui. Dès que nous sommes entrés dans les pièces, peut-être une

  6   vingtaine de minutes plus tard, les gardiens sont arrivés en prenant

  7   toutes nos affaires, tous nos objets. Nous avons donné des médicaments,

  8   des cigarettes, tout ce que nous avions, ce que nous utilisions, ce que

  9   nous avions fabriqué pour nous faciliter le séjour là-bas. Tout ce que

 10   nous avons écrit, ou les bouquins, du matériel imprimé. Tout ce que nous

 11   avions, ils nous ont tout pris.

 12   Et ce jour-là, nous n'avons pas du tout reçu de la nourriture pour autant

 13   que je me souvienne. Je pense que nous n'avons pas reçu de nourriture le

 14   jour où Zekovic s'est enfui, et même pas le jour qui s'en est suivi. Nous

 15   avons reçu de la nourriture que le jour d'après. Nous avons reçu le petit

 16   déjeuner et, en plus, les rations de nourriture ont été réduites comme

 17   Todovic l'avait promis. Je pense que cette situation a duré pendant un

 18   mois à peu près.

 19   Question: Très bien. Et vous avez dit que vous avez vu M. Krnojelac à

 20   d'autres occasions au KP Dom. Est-ce que vous l'avez jamais vu pendant la

 21   soirée, dans la soirée?

 22   Réponse: Je pense qu'il venait dans l'enceinte de la prison et dans le

 23   bâtiment administratif dans la soirée. Mais je ne suis pas sûr de l'avoir

 24   vu dans l'enceinte de la prison dans la soirée, mais je pense que oui.

 25   Question: Et pourquoi le pensez-vous? Sur quoi vous vous fondez pour le


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  1   dire?

  2   Réponse: Je déduis cela sur la base du comportement des gardiens qui nous

  3   gardaient, puisqu'ils nous disaient qu'ils devaient faire attention,

  4   puisque le directeur était soit dans l'enceinte de la prison, soit dans le

  5   bâtiment -comme ils disaient. Cela voulait dire que nous devions nous

  6   tenir tranquilles, que nous devions faire attention à ce que nous faisions

  7   et que nous n'avions pas le droit de communiquer avec eux.

  8   Question: Vous souvenez-vous du moment où les gardiens vous ont dit cela,

  9   à quel moment ils vous ont fait ces observations?

 10   Réponse: Eh bien, cela s'est produit sans arrêt dans le camp. Cela

 11   dépendait évidemment du caractère des gardiens, s'ils avaient peur ou non,

 12   s'ils étaient courageux ou non. Mais on observait bien cette peur qui

 13   existait parmi les gardiens. Ils avaient peur du directeur. En tout cas,

 14   pendant toute la période où moi j'y ai séjourné. Donc, je ne pourrais pas

 15   vous déterminer cela dans le temps. C'était permanent.

 16   Question: Vous avez dit que les gardiens éprouvaient une certaine peur du

 17   directeur. Est-ce que vous pourriez préciser cela? Est-ce qu'ils avaient

 18   peur de lui ou est-ce qu'ils le respectaient? Pourriez-vous préciser cela?

 19   Réponse: Ils avaient peur de commettre une erreur et d'être envoyés sur le

 20   front à cause de cette erreur. Je pense que les gardiens qui m'ont traité

 21   de façon moins rude, eh bien, je pense qu'ils n'étaient pas appréciés par

 22   le directeur ou la direction en général et que certains d'entre eux

 23   avaient été envoyés sur le front, sur la ligne de front. Et comme ils

 24   craignaient cela, comme ils avaient peur de cela, c'est sans doute pour

 25   cette raison-là qu'ils ont réagi de la sorte.


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  1   Question: Et comment savez-vous que ces gardiens qui vous traitaient de

  2   façon moins rude n'étaient pas appréciés par le directeur?

  3   Réponse: Un d'entre eux, qui a aidé beaucoup de gens, avait été envoyé sur

  4   le front pendant une quinzaine de jours. Et nous l'avons remarqué

  5   immédiatement, nous avons remarqué immédiatement son absence. Nous nous

  6   sommes demandés, nous avons posé des questions pour savoir ce qui lui est

  7   arrivé. Cependant, il est rentré, il est retourné dans le camp. Vers Noël

  8   1993, moi, j'étais dans la pièce n°18, et les gardiens se sont rassemblés

  9   dans la pièce qui leur était réservée dans le bâtiment n°3. Ils ont passé

 10   toute la nuit à chanter, à discuter entre eux.

 11   C'est à ce moment-là que j'ai appris que Maric Ivanovic des gardiens donc

 12   était présent. J'ai pu reconnaître leurs voix. C'est vrai qu'il faisait

 13   nuit, je ne pouvais pas voir mais j'ai pu reconnaître leurs voix. Ils

 14   discutaient entre eux concernant la situation dans le camp, de leur

 15   position, de la position des prisonniers, etc. Ils avaient manifestement

 16   bu, pas mal. Ils se sont même disputés entre eux. Moi, j'ai entendu

 17   clairement le gardien Maric dire à peu près la chose suivante: "Qu'est-ce

 18   que j'en ai à faire, moi? Moi, je n'ai battu personne, je n'ai tué

 19   personne, alors que vous, vous l'avez fait.". Et il a ajouté: "Quelqu'un

 20   va répondre pour cela.".

 21   Question: Ce gardien Maric, c'est la personne sous 103, sous la liste P3.

 22   M. le Président (interprétation): Je ne suis pas sûr que le témoin ait

 23   vraiment répondu à votre question. Mais peut-être que nous pourrions

 24   revenir là-dessus après la pause, car nous souhaitons toujours savoir quel

 25   rapport cela a avec l'accusé. Vous avez demandé au témoin: "Comment


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  1   saviez-vous que ces gardiens qui vous ont traité de façon moins brutale,

  2   n'étaient pas populaires avec le directeur? Comment vous le saviez?".

  3   Et maintenant, on nous a dit qu'on a envoyé quelqu'un sur la ligne de

  4   front et qu'ensuite, ce quelqu'un est retourné. Mais si vous voulez

  5   vraiment vous appuyer là-dessus, il faudrait que le témoin en dise plus

  6   que ce qu'il a dit.

  7   Nous allons prendre la pause jusqu'à 11 heures 30.

  8   (L'audience, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 35.)

  9   M. le Président (interprétation): Je dois m'excuser parce que, si retard

 10   il y a, c'est que le témoin prochain nécessitera quelques mesures de

 11   protections. Mais voilà des choses qui arrivent ici. Madame Uertz-Retzlaff

 12   vous pouvez procéder.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Vous

 14   avez dit, avant la suspension d'audience, que certains gardes étaient

 15   impopulaires aux yeux du directeur, quant à eux, avaient peur d'être

 16   renvoyés sur le front. Pouvez-vous nous dire comment ils étaient

 17   impopulaires? Vous nous avez donné un exemple d'un garde qui a été

 18   effectivement envoyé sur le front. Pouvez-vous nous dire quelque chose de

 19   plus pour compléter cette réponse?

 20   M. Berberkic (interprétation): Je crois qu'il aurait été d'abord

 21   strictement interdit de communiquer avec nous et de nous communiquer

 22   quelque forme de secours que ce soit. Quant à moi, pendant que j'ai été

 23   détenu, j'ai été gardé même par cinq gardes qui étaient mes voisins et

 24   avec qui j'ai pu essayer de bavarder un petit peu, de trouver (inaudible)

 25   quelconque. Des fois j'y arrivais, d'autre fois je n'y arrivais pas.


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  1   D'aucun d'entre eux avait pris le pli de me passer une tranche de pain

  2   mais en disant strictement, en me rappelant que je devais être très

  3   prudent, que je devais garder le silence là-dessus et que je ne devais

  4   surtout pas le dire à qui que ce soit.

  5   Quelque fois, ce n'était qu'une conversation silencieuse et par la

  6   gestuelle, par un mime quelconque. Toute communication autrement dit entre

  7   moi-même et les gardes, on essayait et on devait la garder secrète.

  8   Question: Comment savez-vous que ces gardes qui n'ont pas été si durs, à

  9   qui il a été interdit de communiquer, comment savez-vous qu'ils n'ont pas

 10   été très bien vus aux yeux de la direction, c'est-à-dire de M. Krnojelac?

 11   Réponse: Les deux de mes voisins m'ont dit directement qu'il leur a été

 12   interdit de communiquer avec les détenus parce qu'ils risquaient d'avoir

 13   des problèmes. Par exemple, s'ils passaient un morceau de pain à quelqu'un

 14   ou s'ils communiquaient de quelque autre façon que ce soit. Je crois que

 15   Gojko Jokanovic, quant à lui, nous l'a répété à plusieurs reprises lorsque

 16   nous avons tenté de lui parler, de l'arrêter là pendant une seconde dans

 17   le préau pour lui demander une aide quelconque. Lui répondait tout

 18   simplement par un geste très large qu'il fallait le suivre et qu'il ne

 19   pouvait certainement pas nous venir en aide.

 20   Question: Comment savez-vous que c'était justement M. Krnojelac qui était

 21   en fait quelqu'un qui pouvait évidemment influer sur les éventuelles

 22   conséquences que pourraient courir les gardes?

 23   Réponse: Les gardes nous ont dit tout simplement, ils n'ont pas spécifié

 24   le directeur, ils parlaient d'administration, ils parlaient de direction.

 25   Et qu'ils risquaient évidemment de se faire réprimander et d'avoir des


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  1   problèmes avec la direction.

  2   Question: Et vous avez dit que l'un des gardes a été en réalité envoyé sur

  3   le front. De quel garde s'agissait-il et à quel moment cela s'est-il

  4   produit?

  5   Réponse: C'est le garde qui préalablement m'a rendu des services. Je ne

  6   sais pas à quel moment ceci s'est produit, mais nous avons eu une

  7   information sur leur relève sur le front toutes les quinzaines. Je pense

  8   que c'était bien cela.

  9   Question: Vous avez décrit également la situation où vous avez entendu

 10   deux gardes serbes discuter en buvant pour Noël 1993. Vous vous référez là

 11   au Noël orthodoxe?

 12   Réponse: Oui, il s'agissait du 6 janvier 1993. Je me souviens que c'était

 13   Noël parce que le lendemain, lorsque nous nous sommes rendus au petit

 14   déjeuner, un de ces gardes m'a offert une gorgée d'eau-de-vie.

 15   Question: Vous avez mentionné le nom du garde Maric en disant que vous

 16   avez… Monsieur le Président, je me suis trompé tout à l'heure: il ne

 17   s'agit pas du garde n°103 sur la liste, il s'agit du garde n°63 sur la

 18   liste. Le garde au n°63 est une femme.

 19   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pouvez-vous me dire à qui il a dit,

 21   ce garde-là: "C'est toi qui a tué?".

 22   M. Berberkic (interprétation): Je crois que c'était le garde Obrenovic qui

 23   était avec eux. D'autres gardes avec aussi. Mais je suis certain que

 24   c'étaient ces deux-là et Obrenovic avec eux.

 25   Question: Monsieur le Président, Obrenovic est cité au n°46 dans la pièce


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  1   à conviction P3.

  2   Vous nous avez parlé de cette conversation que vous avez pu entendre à

  3   Noël. En réponse à ma question, lorsque je voulais savoir qui c'étaient

  4   ces gardes, qui faisaient preuve de moins de brutaliter, qui étaient

  5   impopulaires, comment tout ceci vous le voyez enchaîner à cette question-

  6   là?

  7   Réponse: Est-ce que vous pensez à ce cas-là qui s'est produit?

  8   Question: Non. Ma question est la suivante, tout à l'heure, je vous ai

  9   posé la question suivante: comment savez-vous que les gardes étaient

 10   impopulaires aux yeux du directeur et qu'ils devaient être envoyés sur le

 11   front? Vous nous avez parlé ensuite de cet incident qui s'est produit pour

 12   le réveillon de Noël. Alors, je voulais savoir comment tout ceci pouvait

 13   avoir quelque chose de commun avec ma question ou tout simplement si

 14   c'était quelque chose qui, à ce moment-là même, vous passait par la tête?

 15   M. le Président (interprétation): Puis-je peut-être suggérer de poser la

 16   question suivante: ce garde-là qui vous a permis de prendre une gorgée

 17   d'eau-de-vie, est-ce ce garde-là qui lui avait dit ce qui aurait pu se

 18   produire si jamais on savait, etc.?

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez entendu la question du

 20   Président? Pouvez-vous répondre à cette question?

 21   M. Berberkic (interprétation): Je ne peux pas répondre à cette question.

 22   Je ne m'y retrouve absolument pas dans ce que vous me voulez. Je dirais

 23   qu'il s'agit de choses qui sont beaucoup plus complexes et qu'il n'est pas

 24   si aisé de répondre à cette question.

 25   D'après moi, la période la plus dure de mon séjour était justement juin,


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  1   juillet, août, septembre 1992. Et ce qui s'est produit notamment me semble

  2   être le résultat. Je crois qu'après cela, la situation a grandement

  3   changé. Pourquoi? Je ne saurais vous le dire.

  4   Pourquoi la situation a tellement changé dans la prison? Il me semble

  5   qu'il y a eu lieu de dire qu'ils se sont démarqués les uns par rapport aux

  6   autres. Souvent, on les a entendu se disputer entre eux. Surtout,

  7   c'étaient les gardes qui étaient moins brutaux à notre égard, qui

  8   attaquaient les autres. Pourquoi? Je ne le sais pas. Probablement que les

  9   évolutions étaient plutôt fort défavorables à leur égard.

 10   Quant à moi, je sais qu'évidemment le Tribunal est censé procéder suivant

 11   certains règlements, à la recherche et en vue d'établir des pièces à

 12   conviction. Mais pour parler du rapport qu'ils observaient à l'égard des

 13   détenus, pour parler des gardes, cela a évolué. Des fois, ils étaient

 14   vraiment d'une grande brutalité, mais pour changer ensuite.

 15   Il faut savoir appréhender le camp dans son ensemble. Dans son ensemble,

 16   vous devez voir le camp dans toute sa durée parce qu'il y a des périodes

 17   où il y avait moins de brutalité et d'autres où les gens étaient beaucoup

 18   plus rudes à notre égard.

 19   Question: Permettez-moi de vous arrêter une seconde ici pour passer à une

 20   autre question. Non, plutôt, essayons de voir si les jours de week-end

 21   vous avez pu remarquer que M. Krnojelac était dans le camp ou peut-être

 22   uniquement pendant les jours ouvrables.

 23   Réponse: Je ne peux pas me souvenir pour vous le dire, pour vous répondre

 24   à cette question avec certitude s'il était présent également pendant les

 25   jours de week-end.


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  1   Question: Lorsque vous le voyiez, était-il d'ordinaire seul ou y a-t-il eu

  2   des personnes en sa compagnie? Et si oui, qui?

  3   Réponse: Il était en général en compagnie de deux personnes. L'une d'entre

  4   elles étant Savo Todovic surnommée "Bunda", et l'autre étant Mitar

  5   Rasevic.

  6   Question: Quelle était la fonction exacte remplie par M. Todovic dans le

  7   camp?

  8   Réponse: Je crois qu'il a été chargé de s'occuper des détenus et de tout

  9   ce qui les concernait. Je veux parler de leur statut dans la prison. Il a

 10   été préposé à l'organisation du travail, à veiller sur la discipline.

 11   C'est lui qui était responsable de structurer les groupes de travail,

 12   d'ordonner à ceux qui devaient travailler dans telle ou telle section du

 13   bâtiment. Je crois que c'était pour ainsi dire une espèce d'officier

 14   d'opération. C'était lui aussi qui devait décider de ceux qui devaient

 15   être emmenés pour être installés dans des cellules d'isolement, pour

 16   ensuite être tabassés, etc.

 17   Question: A cette fonction, à savoir celle d'une personne chargée d'être

 18   officier d'opération -nous parlons de M. Todovic-, pouvez-vous nous dire

 19   qu'elle lui permettait d'avoir des contacts avec tous les détenus serbes

 20   et musulmans à la fois?

 21   Réponse: Oui, je crois qu'il a été chargé de s'occuper à la fois des

 22   détenus serbes et musulmans.

 23   Question: Que portait-il sur lui du point de vue vestimentaire lorsque

 24   vous le voyiez?

 25   Réponse: Il avait un uniforme vert, gris-vert olivâtre, et il avait


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  1   également une espèce de manteau avec un collier noir.

  2   Question: Lorsque vous parliez tout à l'heure de couleur "gris-vert

  3   olivâtre", vous voulez dire par là qu'il s'agissait d'un uniforme

  4   militaire?

  5   Réponse: Oui, c'était un uniforme militaire.

  6   Question: Vous avez dit que vous avez vu M. Krnojelac avec lui. D'après ce

  7   que vous avez pu voir, pouvez-vous dire qui était supérieur entre eux?

  8   Krnojelac ou Todovic?

  9   Réponse: Supérieur dans quel sens? L'un à l'autre ou est-ce que vous

 10   pensez à d'autres choses?

 11   Question: Oui. En ce qui les concernait, oui. C'est à cela que je pensais:

 12   est-ce que vous avez pu remarquer quoi que ce soit dans ce critère-là?

 13   Réponse: Je crois que Krnojelac a été supérieur à Savo Todovic ou,

 14   autrement dit, je pense que Todovic devait exécuter directement soit les

 15   ordres, soit les instructions données par Krnojelac.

 16   Question: Et comment avez-vous pu aboutir à cette conclusion? Avez-vous pu

 17   voir quelque chose ou s'agissait-il tout simplement de leurs fonctions

 18   officielles qui étaient les leurs. Est-ce que vous avez vu par exemple

 19   Krnojelac donner un ordre à Todovic?

 20   Réponse: Non, pas directement. Mais je crois que l'articulation du

 21   commandement du camp était ainsi faite.

 22   Question: Vous nous avez déjà relaté une circonstance au sujet de Todovic

 23   lorsque vous avez pris un morceau de pain. Y a-t-il eu d'autres

 24   circonstances où vous avez pu lui parler?

 25   Réponse: J'ai pu lui parler encore une fois. J'étais à cette époque-là, au


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  1   début même de ma détention, j'étais dans la pièce n°16. Etait-ce bien en

  2   automne 1992? Oui. A cette époque-là, j'étais exténué, je ne pouvais pas

  3   marcher, je me sentais très faible. A plusieurs reprises j'avais des

  4   vomissements, des diarrhées, et j'avais beaucoup de peine pour marcher.

  5   J'avais demandé par l'intermédiaire d'un garde de le rencontrer. Très

  6   brièvement, il m'a parlé dans la salle des gardes du bâtiment n°3. Il

  7   était vêtu d'un uniforme militaire gris-vert olivâtre et il portait

  8   justement ce manteau. Je lui avais demandé de me permettre de travailler

  9   dans le cadre du groupe de travail.

 10   De son côté, il m'a répondu qu'il ne pouvait pas le faire. Il se

 11   contentait de me parler de mon frère -qui à cette époque-là se trouvait à

 12   Sarajevo-, en disant que mon frère était l'un des gardes ou peut-être même

 13   directeur-adjoint d'une prison Oustachi de Sarajevo, et qu'il a pris une

 14   part active dans les responsabilités Oustachi de Sarajevo. Sur ce, je lui

 15   ai répondu tout simplement que moi je connaissais fort bien mon frère et

 16   que ceci ne pouvait être que des inventions pures et simples. Nous étions

 17   seuls à parler. Un garde nous attendait dehors.

 18   Question: Pourquoi avez-vous voulu être transféré dans le groupe de

 19   travail?

 20   Réponse: Pour deux raisons. D'abord, pour pouvoir avoir un morceau de

 21   pain. Deuxièmement, ceci aurait pu me permettre de savoir ce qu'il se

 22   passait en dehors, parce que les gens qui étaient dans le cadre du groupe

 23   de travail avaient des chances de sortir dehors -ce qui était impensable

 24   pour nous autres. Ce qui pesait lourdement sur moi était ce blocus, cet

 25   isolement au niveau des informations.


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  1   Question: Les détenus, quant à eux, ont-ils eu peur de M. Todovic? Avez-

  2   vous vous-même, personnellement, eu peur de lui?

  3   Réponse: Je crois que tous les détenus ont eu peur de lui. Toute les fois

  4   où il faisait apparition dans le préau, nous étions tous paniqués et on se

  5   demandait toujours vers quel bâtiment il allait se diriger. Nous nous

  6   réjouissons tout simplement du fait de ne pas le voir entrer dans notre

  7   bâtiment, parce que nous connaissions le grand pouvoir qui était le sien

  8   et cette capacité qui était la sienne de décider du sort de tous détenus,

  9   et que son influence dans la prison était grande.

 10   Question: Qui était le commandant des gardes?

 11   Réponse: Je crois que c'était Mitar Rasevic.

 12   Question: L'avez-vous vu, le voyiez-vous tous les jours dans la prison?

 13   Réponse: Oui, en général il y était. Toujours présent.

 14   Question: Et que portait-il sur lui?

 15   Réponse: Je crois que lui changeait d'uniforme. Au début, il portait un

 16   uniforme militaire couleur donc vert-gris olivâtre pour le changer plus

 17   tard, pour porter l'uniforme que normalement portaient les policiers à

 18   l'époque d'avant-guerre. Il s'agit d'uniforme de couleur bleue, de couleur

 19   bleue, chemise bleue claire.

 20   Question: A quel moment s'était-il mis à porter cet uniforme bleu?

 21   Réponse: Je crois que ceci pouvait commencer au début de 1993.

 22   Question: Et quant à M. Rasevic, avait-il à faire à la fois avec les

 23   détenus musulmans et aux Serbes?

 24   Réponse: Je suis certain qu'il avait à faire à des Musulmans. Mais quant

 25   aux Serbes, je ne peux pas en être certain.


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  1   Question: Avez-vous jamais parlé à M. Rasevic lorsque vous étiez détenu?

  2   Réponse: A deux reprises j'ai pu lui parler. Une première fois quand

  3   j'étais détenu dans la pièce n°18.

  4   Question: Et approximativement à quel moment cela s'est-il produit?

  5   Réponse: Ceci aurait pu être à mon sens l'automne 1992. En effet, toutes

  6   les nuits il devait venir le soir faire le listing, nous étions obligés de

  7   nous aligner. Alors il y avait un de permanence qui venait, Mitar Rasevic

  8   venait escorté d'un garde. Il faisait alors l'appel nominal. C'est à ce

  9   moment-là qu'il m'a sélectionné de ce groupe-là pour me parler, paraît-il,

 10   pour quelques moments seulement. Le tout pouvait se résumer à la situation

 11   qui régnait dans le camp, me dire qu'il était ami avec mon frère, pour

 12   dire que c'est à l'amiable que Musulmans et Serbes se sont quittés dans le

 13   KP Dom et que ceci était certainement dû au travail de Rasevic et de mon

 14   frère.

 15   Lorsque je lui ai posé une question concernant d'éventuels échanges, il

 16   n'a rien dit là-dessus. Il n'a pas voulu le faire.

 17   Question: Pouvez-vous nous dire un petit peu pour expliquer?

 18   Réponse: Vous m'avez dit pour cette seconde conversation, mais une seconde

 19   fois c'était le 12 août 1993, il est venu dans la pièce où j'étais.

 20   J'étais dans le bâtiment n°3. Il est venu, il est entré, il m'a dit de

 21   ramasser mes affaires, il m'a dit que je devais aller à Sarajevo pour être

 22   échangé, et il m'a dit de passer son meilleur souvenir à mon frère.

 23   C'était à peu près la conversation que nous avons eue.

 24   Question: Permettez-moi de vous arrêter là pour l'instant. Il me faudrait

 25   une explication. En effet, vous nous avez parlé de la première rencontre


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  1   que vous avez eue avec lui, ne serait-ce qu'à en juger d'après le compte

  2   rendu d'audience que nous pouvons lire sur le transcript. Il a dit,

  3   paraît-il, que c'est à l'amiable que Serbes et Musulmans se sont quittés

  4   dans le camp grâce à votre frère et à M. Tesevic.

  5   Qu'est-ce que vous avez voulu dire par là? C'est-à-dire qu'est-ce que lui

  6   voulait dire par là?

  7   Réponse: Je crois qu'il a hautement apprécié mon frère et cela pour

  8   plusieurs raisons. Mais pour ce qui est de l'événement qu'il a évoqué, cet

  9   événement a en vérité eu lieu. Je crois qu'à ce moment-là il était au KP

 10   Dom. Ceci s'est produit début avril 1992, c'est-à-dire avant l'éclatement

 11   des hostilités. Ils ont eu une réunion au KP Dom, à laquelle réunion

 12   l'ensemble du personnel -Serbes et Musulmans- s'est mis à parler pour

 13   décider comment il fallait résoudre le problème de l'organisation. Ils se

 14   sont séparés de façon tout à fait paisible et pacifique, parce que tout ce

 15   personnel-là, l'ensemble des policiers serbes et musulmans, a pu faire

 16   leur choix de leur poste. Tous, ils portaient leur uniforme de policier.

 17   Ils ont pu prendre leurs armes respectivement avec eux.

 18   Question: Merci. Je n'ai pas besoin de détails supplémentaires. Je voulais

 19   simplement savoir à quoi faisait référence M. Rasevic. Mais inutile de

 20   poursuivre dans ce sens. Je voudrais savoir si vous vous êtes plaints des

 21   conditions qui prévalaient au KP Dom ou des passages à tabac?

 22   Réponse: Oui. La première fois que je lui ai parlé, je mentionnais de quoi

 23   il retournait, mais il a dit qu'il n'y pouvait rien. Cela ne relevait pas

 24   de sa compétence. Il a dit à peu près la chose suivante: que cela, c'était

 25   de la responsabilité du directeur, que le directeur était le seul à


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  1   pouvoir décider d'améliorer notre situation. En parlant là de la

  2   possibilité d'améliorer la qualité de la nourriture, la disponibilité de

  3   traitements médicaux, etc. Mais il a dit très clairement que cela ne

  4   relevait pas de sa compétence.

  5   Question: Est-ce que les gardes qui étaient au KP Dom étaient des gardes

  6   qui étaient déjà là avant la guerre, ou bien, est-ce qu'il y avait

  7   d'autres personnes qui faisaient office de gardes?

  8   Réponse: Je crois que, pour la majorité, c'étaient des hommes qui

  9   travaillaient déjà au KP Dom avant la guerre.

 10   Question: Quelle était la tenue vestimentaire des gardes?

 11   Réponse: Ca, c'est une question extrêmement compliquée, parce que ça

 12   dépendait. Au début, quand on a mis en place le camp et quand je suis

 13   arrivé, en mai, juin et même en juillet, août, septembre, je dirai qu'ils

 14   portaient des uniformes militaires vert-olive et ils portaient des armes

 15   automatiques. Plus tard, ils sont passés à des uniformes de camouflage.

 16   Certains d'entre eux, par exemple Micevic, le garde Micevic portait le

 17   véritable uniforme chetnik, y compris la sajkatca, le couvre-chef avec la

 18   cocarde. Je crois qu'il y a un des gardes, Milenko Burilo, qui, pendant un

 19   certain temps, a porté l'uniforme de l'ancienne armée yougoslave.

 20   Je me souviens qu'on s'était demandé où il avait bien pu se procurer cet

 21   uniforme. Je crois qu'après la nouvelle année 1993, en janvier, je crois

 22   qu'à ce moment-là donc ils se sont remis à porter l'uniforme qui était

 23   celui de la police avant la guerre au KP Dom.

 24   Quand je suis parti pour être échangé en août 1993, je me souviens qu'ils

 25   portaient les uniformes bleus qui étaient ceux, avant la guerre, des


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  1   gardes du KP Dom.

  2   Question: Monsieur le Président, la personne qui est mentionnée, c'est

  3   Micevic, ce n'est pas quelqu'un qui figure sur la liste P3 des membres du

  4   personnel. Burilo, quant à lui, est le n°56.

  5   M. le Président (interprétation): Merci.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Les gardes qui s'occupaient des

  7   détenus, les gardes s'occupaient-ils plutôt de tous les détenus serbes ou

  8   musulmans? Ou bien, est-ce qu'il y avait certains gardes qui étaient là

  9   pour garder uniquement les Serbes et d'autres uniquement les Musulmans?

 10   M. Berberkic (interprétation): Ils s'occupaient de tous les prisonniers,

 11   des deux groupes de prisonniers. Je le sais parce que c'est le même garde

 12   qui ouvrait les portes de nos salles de détention pour qu'on puisse aller

 13   manger. Ils en faisaient de même avec les prisonniers serbes qu'ils

 14   faisaient sortir.

 15   Question: Est-ce que les gardes occupaient toujours les mêmes postes, ou

 16   bien, est-ce qu'il arrivait à certains gardes de travailler parfois dans

 17   le bâtiment administratif, parfois dans la partie carcérale du KP Dom?

 18   Est-ce que vous savez si, parfois, ils changeaient de poste?

 19   Réponse: Je crois qu'ils ne changeaient que l'emploi du temps, il y avait

 20   des changements au niveau des emplois du temps, et que certains gardes ne

 21   travaillaient pas dans le bâtiment administratif; ils n'avaient aucune

 22   tâche administrative.

 23   Question: Est-ce que, par exemple, vous avez vu où travaillait Burilo?

 24   Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire s'il avait un poste bien

 25   particulier?


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  1   Réponse: Je ne saurais définir précisément quelle était la nature de son

  2   travail et où il travaillait. Je crois qu'il passait la plupart de son

  3   temps dans l'enceinte carcérale. Par exemple, je ne crois pas qu'il était,

  4   qu'il travaillait dans les bâtiments 1, 2 et 3. En fait, il se déplaçait

  5   dans le camp.

  6   Question: Et Obrenovic, ce garde que vous avez également mentionné, où

  7   travaillait-il? A quel poste l'avez-vous vu travailler?

  8   Réponse: Le garde dénommé Obrenovic était principalement responsable du

  9   bâtiment n°2 pendant que je m'y trouvais, dans la salle 16 et la salle 18.

 10   Il lui arrivait souvent de venir ouvrir la porte qui était fermée à clé

 11   pour nous faire sortir. Et quand j'étais dans la salle n°16, au moins au

 12   mois de juin, ou peut-être au mois de juillet, il est venu me voir dans la

 13   salle n°16 pour demander des béquilles pour Zijad Subasic. J'avais des

 14   béquilles et il me les a prises parce qu'il a dit qu'il en avait besoin.

 15   Enfin, quoi qu'il en soit, il passait la plupart de son temps dans la

 16   salle des gardes, dans le bâtiment n°2. Mais je crois, bien entendu, que

 17   cela dépendait du tableau de permanence des gardes.

 18   Question: Vous nous avez parlé de plusieurs passages à tabac, en

 19   particulier de ceux qui ont eu lieu dans la deuxième moitié du mois de

 20   juin 1992. Est-ce que vous avez pu voir, de vos yeux, des gardes

 21   participer à ces passages à tabac? Etes-vous en mesure de donner les noms

 22   de certains gardes qui sont impliqués dans ces passages à tabac?

 23   Réponse: Je crois que les gardes qui venaient chercher les prisonniers

 24   pendant cette période étaient les mêmes qui les passaient à tabac. Et le

 25   plus souvent, dans les cellules d'isolement situées dans le bâtiment


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  1   administratif. Tout ce qu'on pouvait entendre, c'étaient des cris, des

  2   gens qui appelaient au secours. On entendait aussi bien les voix des

  3   victimes que des gardes, mais on ne pouvait pas très bien voir par les

  4   fenêtres de quels gardes il s'agissait. Ils n'étaient pas possible de les

  5   reconnaître. Mais par les fenêtres, on pouvait regarder, on pouvait voir

  6   et je l'ai fait à plusieurs reprises.

  7   Et j'ai vu des bras levés, levés pour frapper quelqu'un, soit à mains

  8   nues, soit au moyen d'une matraque. Mais il n'était pas possible de

  9   déterminer de quel garde il s'agissait. Je pense qu'il est difficile

 10   d'affirmer avec certitude que c'était telle ou telle personne.

 11   Question: Est-ce que vous vous souvenez des gardes qui sont venus chercher

 12   ces détenus dont nous parlons?

 13   Réponse: Oui. Oui, je me souviens bien des gardes. Je crois que Obrenovic

 14   a fait sortir un grand nombre de détenus et qu'un garde qu'on appelait

 15   "Zuti" -qui veut dire jaune-, et son nom était Dragan. Lui, il a fait

 16   sortir un groupe de gens; donc au moyen d'une liste, il a donné leurs noms

 17   et pendant un certain temps il n'est plus revenu dans la prison.

 18   Question: Vous dites "pendant un certain temps, il n'est plus revenu dans

 19   la prison". Vous voulez dire à partir du moment où les passages à tabac

 20   ont commencé, ou bien, vous parlez d'une période de plusieurs semaines. Je

 21   ne comprends pas bien ce que vous voulez dire par "un certain temps".

 22   Réponse: Eh bien, il a donné des noms qu'il lisait sur cette liste. Il a

 23   fait sortir ces gens à la mi-septembre 1992. Il les a emmenés soi-disant

 24   pour aller cueillir des prunes et ensuite, on ne l'a plus revu pendant

 25   deux semaines. Nous, on a pensé qu'il était parti avec ce groupe de


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  1   prisonniers, on ne comprenait pas pourquoi il n'était plus à la prison.

  2   Voilà la période que je vous décrivais.

  3   Et en juin 1992, c'était essentiellement les gardes qui étaient de

  4   service, qui venaient chercher les prisonniers. J'ai déjà dit précédemment

  5   que Dragan Obrenovic est venu chercher beaucoup de prisonniers comme

  6   Bjalko Pljevaljcic ou plutôt Zlatko Pljevaljcic.

  7   Question: Nous avons déjà parlé d'Obrenovic, c'est le n°46 sur la liste.

  8   Quant à Pljevaljcic c'est le n°35.

  9   Vous nous avez déjà dit, on vous a dit que vous alliez être échangé. C'est

 10   Rasevic qui vous a dit cela, et vous avez déjà dit qu'on vous a fait

 11   sortir du KP Dom le 12 août 1993. Je voudrais savoir si, à l'époque, M.

 12   Krnojelac était toujours directeur de la prison. Je parle du 12 août.

 13   Réponse: Je suis sûr que le directeur était toujours à son poste à ce

 14   moment-là. Il était présent lorsque Ekrem Zekovic s'est échappé puis a été

 15   repris. C'était en juillet 1993. C'est-à-dire un mois avant mon départ du

 16   KP Dom. A ce moment-là, Krnojelac était toujours là.

 17   Question: Est-ce que vous l'avez vu avant votre départ du KP Dom, au cours

 18   de ces deux derniers jours que vous avez passés au KP Dom? Est-ce qu'il

 19   était toujours là? L'avez-vous vu?

 20   Réponse: Non, pas personnellement.

 21   Question: Est-ce que l'on vous a fait sortir tout seul du KP Dom ou

 22   faisiez-vous partie d'un groupe?

 23   Réponse: On m'a emmené, j'étais seul.

 24   Question: Où vous a-t-on emmené?

 25   Réponse: Ils m'ont emmené à la prison de Kula, près de Sarajevo.


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  1   Question: "Ils ont", qui entendez-vous par-là?

  2   Réponse: Eh bien, c'étaient deux hommes qui portaient des uniformes

  3   militaires, ils étaient armés. Ils m'ont fait monter dans un véhicule

  4   militaire, une Golf Volkswagen, et donc ils m'ont fait monter à l'arrière.

  5   L'un d'eux s'est présenté, il m'a dit: "Je m'appelle Zeljko Samardzic et

  6   je suis un Chetnik de Bileci.". L'autre a dit qu'il s'appelait Trivun, il

  7   n'a pas donné son nom de famille.

  8   Question: Et qui vous a remis à ces soldats?

  9   Réponse: C'est le garde Micevic. J'attendais que l'on vienne me chercher

 10   pour cet échange. J'attendais à la réception. J'ai attendu pendant environ

 11   une heure, et c'est Micevic qui m'a remis à ces deux hommes.

 12   Question: Et pendant combien de temps êtes-vous resté à la prison Kula?

 13   Réponse: Exactement un mois.

 14   Question: Est-ce que les conditions qui prévalaient à la prison de Kula

 15   étaient semblables à celle du KP Dom, ou bien, est-ce que c'était pareil?

 16   Réponse: A l'époque, à la prison de Kula, il y avait plus à manger qu'à

 17   Foca.

 18   Question: Au bout d'un mois donc avez-vous été échangé avec un autre

 19   groupe de prisonniers, ou bien, est-ce que cela s'est fait avec vous

 20   uniquement?

 21   Réponse: J'ai été échangé le 12 septembre 1993, pendant la nuit, du côté

 22   du cimetière juif. J'ai été échangé contre un couple âgé, un couple marié

 23   et un Serbe de Foca.

 24   Question: Vous nous avez déjà parlé de vos souffrances en tant que détenu

 25   au KP Dom. Vous avez parlé des souffrances psychologiques, physiques, que


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  1   vous avez endurées. Je voudrais savoir si vous souffrez de séquelles

  2   permanentes ou si vous avez eu des séquelles de longue durée après votre

  3   libération. Est-ce qu'il reste encore quelque chose?

  4   Réponse: Je pense que c'est difficile à vous expliquer, à décrire. Il y a

  5   deux choses qui résultent de tout ce que j'ai vécu au camp. Premièrement,

  6   en ce qui concerne ma santé, mon état physique, cela va très bien.

  7   Heureusement. Mais je crois qu'il existe, il y a le stress. C'est le fait

  8   phénomène du stress post-traumatique, c'est le syndrome du Vietnam; c'est

  9   ainsi que l'on parle de cela dans la communauté médicale. A cet égard, je

 10   ne fais ma exception à la règle à la différence de certains détenus.

 11   Mais il y a quelque chose d'autres dont je soufre, du fait des souffrances

 12   que j'ai endurées, du fait de ce que j'ai vécu. C'est un désir insatiable

 13   de vie, une soif de vie et d'une meilleure vie. Et aussi la conscience

 14   aiguë du fait qu'il y a 400 personnes qui étaient dans ce camp et qui ont

 15   disparu, des personnes qui ne sont plus de ce monde et dont les corps

 16   seront un jour trouvés. Voilà c'est peut-être cela qui m'a aidé à rester

 17   sain d'esprit.

 18   Question: Docteur Berberkic, vous nous dites que vous avez souffert de

 19   stress post-traumatique. Pouvez-vous nous dire exactement de quoi vous

 20   avez souffert, qu'avez-vous remarqué?

 21   M. le Président (interprétation): Quels étaient les symptômes?

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, exactement. Quels symptômes

 23   avez-vous remarqués sur vous-même?

 24   M. Berberkic (interprétation): Eh bien, je souffre d'un blocage mental

 25   dans ma pensée, vous l'avez peut-être remarqué. Parfois cela apparaît


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  1   soudainement, et je suis dans l'impossibilité de dire quand ça va se

  2   passer, ça arrive tout simplement. Et peut-être que c'est déclenché par

  3   quelque chose.

  4   D'autre part, j'ai toujours ressenti de la peur quand je vois un uniforme

  5   de policier ou quand je vois un pistolet. Cela, je l'ai ressenti aussi

  6   bien à Sarajevo que dans le pays où je réside actuellement. Et cela, je

  7   l'ai ressenti aussi ici dans ce pays, et même dans l'immeuble où nous

  8   sommes.

  9   Quant aux expériences traumatiques que j'ai subies au camp, ce à quoi j'ai

 10   survécu, bien entendu, je ressens, j'ai des flash-back. Mais je n'irai pas

 11   jusqu'à dire que le syndrome de stress post-traumatique que j'éprouve est

 12   aussi aigu que celui d'autres détenus que j'ai rencontrés après et qui ont

 13   des souffrances bien supérieures aux miennes. La raison pour laquelle ce

 14   syndrome n'est pas aussi aigu chez moi, c'est à cause de ce que je vous ai

 15   expliqué, le fait que j'ai envie de vivre, j'ai envie de connaître des

 16   choses meilleures dans ma vie. Et parce que j'ai envie de faire de ce que

 17   j'ai vécu, de cette expérience que j'ai connue dans le camp, quelque chose

 18   de meilleure, quelque chose de plus utile.

 19   Question: Merci, Docteur Berberkic. Nous n'avons plus de question.

 20   M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, je vous serais

 21   reconnaissant… ou plutôt, je vais moi-même expliquer au témoin le concept

 22   de la pause. Voyons voir comment cela marche.

 23   Monsieur le Témoin, vous avez remarqué que parfois avant de répondre à la

 24   question de l'accusation, vous avez dû attendre pour avoir la traduction

 25   parce que les interprètes ont toujours quelques secondes de retard. Alors


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   1   maintenant, vous allez être contre-interrogé par quelqu'un qui parle votre

  2   langue maternelle, donc il ne sera plus nécessaire d'attendre la

  3   traduction.

  4   Or, en ce qui concerne les traducteurs, ils faut qu'ils continuent malgré

  5   tout à traduire pour nous. Donc, je voudrais vous demander: une fois que

  6   vous avez entendu les questions qui vous sont posées par Me Bakrac, je

  7   vous demande donc de bien vouloir observer une pause afin de permettre aux

  8   interprètes de suivre le rythme. De la même façon que vous, vous avez

  9   toujours observé une petite pause avant de répondre aux questions de Mme

 10   Uertz-Retzlaff. Il serait bon que vous leur donniez la possibilité de

 11   suivre le rythme. Donc observez cette pause avant de répondre aux

 12   questions qui vous sont posées.

 13   Maître Bakrac, c'est à vous.

 14   (Contre-interrogatoire de M. Amir Berberkic par Me Bakrac.)

 15   M. Bakrac (interprétation): Bonjour, Monsieur Berberkic.

 16   La Chambre de première instance en l'espèce -ou plutôt son Président-,

 17   vous a déjà dit mon nom, mais je souhaiterais cependant me présenter. Je

 18   m'appelle Mihajlo Bakrac et je suis l'un des conseils de la défense de

 19   l'accusé, Milorad Krnojelac.

 20   Je vais vous poser un certain nombre de questions et, comme vous l'a

 21   expliqué le Président de la Chambre, il convient que nous observions une

 22   pause avant mes questions et vos réponses.

 23   Premièrement, est-ce que vous vous souvenez que le 14 et le 15 décembre

 24   1998 vous avez fait une déclaration au Bureau du Procureur?

 25   M. Berberkic (interprétation): Oui.


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  1   Question: Excusez-moi, on va faire autrement. Peut-être cela ira mieux,

  2   cela sera plus facile pour vous. C'était la date… Voilà ce qui se passe.

  3   C'est le 14 et 15 décembre 1998, c'est la date de cet entretien. Or, vous

  4   ne l'avez signé, cette déclaration, que le 7 septembre 1999. Vous

  5   souvenez-vous de ce fait?

  6   Réponse: J'ai donné plusieurs déclarations préalables. Et si vous disposez

  7   d'une telle information, elle est sans doute véridique.

  8   Question: Oui, Monsieur. Justement, j'ai voulu vous demander si vous avez

  9   aussi donné, fait une déclaration le 16 septembre 1993 auprès du centre de

 10   sécurité de Sarajevo.

 11   Réponse: Je pense que cette information est exacte également.

 12   Question: Est-ce qu'on vous a donné lecture de ces déclarations

 13   préalables? Est-ce que vous les avez signées de votre plein gré?

 14   Réponse: J'ai lu ces déclarations préalables et je les ai signées de mon

 15   plein gré.

 16   Question: Merci, Monsieur Berberkic.

 17   Est-il exact que dans votre première déclaration, c'est-à-dire la

 18   déclaration préalable que vous avez fournie au Bureau du Procureur, que

 19   vous avez dit que jusqu'à la guerre, le début de la guerre, vous avez

 20   travaillé à l'hôpital en faisant, en exerçant votre profession, et

 21   qu'après le début de la guerre vous avez commencé à soutenir la cause

 22   musulmane? Est-il exact que vous avez dit cela?

 23   Réponse: Je me souviens très bien de ce que j'ai dit. On m'a demandé si

 24   j'ai été membre du SDA. Moi, j'ai répondu que je n'ai pas été membre

 25   d'aucun parti politique, donc pas du SDA non plus. Ensuite, on m'a demandé


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  1   si je soutiens le SDA et moi j'ai répondu que j'ai été sympathisant de ce

  2   parti. Je pense que vous, vous pouvez interpréter cela de la façon dont

  3   vous le souhaitez.

  4   Question: Monsieur Berberkic, moi, je ne souhaite pas faire des

  5   interprétations mais je vous demande ce que vous pensez par la cause

  6   musulmane. J'ai regardé aussi la traduction en langue anglaise, c'est-à-

  7   dire ce qui est écrit dans la langue anglaise. Il est écrit que vous vous

  8   êtes engagé comme un supporter, un souteneur de la cause musulmane. Je

  9   vous demande ce que vous voulez dire par cela.

 10   Réponse: Moi, je n'ai jamais parlé de la cause musulmane, je n'ai jamais

 11   utilisé ce terme. Jamais.

 12   Question: Monsieur Berberkic, cela vous aiderait-il d'examiner -si j'ai

 13   bien compris, vous parlez l'anglais- de vous fournir la version en langue

 14   BCS aussi bien qu'en langue anglaise pour que vous puissiez examiner le

 15   contenu de ces déclarations. Vous avez dit que vous avez lu ces

 16   déclarations préalables et que vous les avez signées de votre plein gré.

 17   Est-il besoin que je vous les présente?

 18   Réponse: Oui, oui. Vous pouvez me les montrer, oui.

 19   M. le Président (interprétation): Pendant que cela se fait, Maître Bakrac,

 20   je ne souhaite pas vous répéter toujours la même chose, mais vous savez de

 21   quelle façon on prend ces déclarations préalables. Ces déclarations

 22   préalables sont prises en langue BCS, ensuite traduites en anglais,

 23   enregistrées en anglais. Ensuite, le témoin signe la version en langue

 24   anglaise et ensuite, pour une raison quelconque, on retraduit cela vers la

 25   langue BCS.


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  1   Donc, les mots, les termes exacts utilisés évidemment dépendent de

  2   l'interprétation. Ce n'est pas vraiment très important pour la Chambre.

  3   Moi, j'accepte ce que vous dites. Il est exact que ceci figure dans la

  4   version en langue anglaise, mais cela ne veut pas dire que le témoin a

  5   véritablement prononcé exactement ces mots en BCS, ces mots-là, exactement

  6   ces mots-là.

  7   M. Bakrac (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Mais nous avons un

  8   problème très important alors, parce que la défense y voit, a un problème

  9   avec cela. Parce que tout ce que nous savons…

 10   M. le Président (interprétation): Oui, vous pouvez m'en dire quelque

 11   chose. Quand j'ai appris que les déclarations étaient recueillies de cette

 12   façon-là, je leur ai dit immédiatement qu'il fallait qu'ils fassent

 13   quelque chose pour changer. Je ne sais pas s'ils peuvent le faire, je ne

 14   sais pas s'ils l'ont jamais fait.

 15   Il est vrai que je n'ai pas encore été juge dans un procès dont les

 16   déclarations étaient prises après mon arrivée ici, mais il est exact que

 17   nous avons attiré l'attention du Bureau du Procureur sur la difficulté que

 18   cela présente, cette façon de prendre les déclarations.

 19   Je sais que vous aussi, vous avez des difficultés à cause de cela. Nous

 20   aussi. Mais je ne pense pas que vous aidez votre client si vous vous

 21   appuyez sur la terminologie exacte, précise, utilisée dans ces

 22   déclarations préalables qui ont été signées. Donc vous pouvez évidemment

 23   avancer vos arguments, mais je ne souhaite pas que l'on passe trop

 24   longtemps là-dessus.

 25   M. Bakrac (interprétation): Je suis d'accord, Monsieur le Président. Mais


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  1   parfois, il est vrai qu'une phrase, si elle est mal interprétée, si elle

  2   avait été dite autrement, cette phrase peut avoir un autre sens.

  3   Mais avec votre permission, pour gagner du temps, est-ce que le témoin

  4   qui, sans doute, pense aussi que je dis la vérité, est-ce que le témoin

  5   peut tout simplement, en quelques mots, nous expliquer ce qu'il a voulu

  6   dire par cela? Je pense que personne n'a de doute quant aux faits que ce

  7   que je viens de lire est bien écrit dans cette déclaration préalable. Tout

  8   le monde sait que c'est écrit là dedans. Alors, je pense que la façon la

  9   plus simple de procéder, ce serait de demander au témoin ce qu'il voulait

 10   dire exactement par là.

 11   M. le Président (interprétation): Oui, mais si je peux vous rappeler, il…

 12   Mais je ne vois pas en quoi cela nous aide vraiment. Même s'il a voté pour

 13   un Etat autonome, je ne vois pas ce que ça nous dit exactement, enfin en

 14   quoi ceci influence son témoignage. Vous pouvez lui demander quelles sont

 15   ses opinions politiques si c'est ce qui vous intéresse, vous pouvez lui

 16   poser cette question-là. C'est cela que vous voulez lui demander?

 17   M. Bakrac (interprétation): Non, Monsieur le Président. Je peux passer à

 18   une autre question alors? Une question qui a un lien avec ma question

 19   précédente.

 20   Est-ce qu'au moment où vous avez quitté l'hôpital, vous avez rejoint les

 21   forces musulmanes d'une façon ou d'une autre?

 22   M. Berberkic (interprétation): Quand j'ai quitté l'hôpital, à deux

 23   reprises je me suis rendu à Ustikolina. C'est un endroit, un village qui

 24   se trouve à peu près à onze kilomètres en aval de la Drina, sur la rive

 25   gauche. Je me suis rendu au dispensaire d'Ustikolina. Et le médecin qui


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  1   travaillait là-bas m'a donné un sac de médicaments que j'ai distribués à

  2   mes voisins au cas où ils en auraient besoin.

  3   Je l'ai dit au cours de ma déposition, j'ai dit que j'ai voté pour l'Etat

  4   indépendant de Bosnie-Herzégovine. Et j'ai aussi dit que je n'ai pas été

  5   membre du SDA ni d'aucun autre parti politique et je pense ne jamais le

  6   devenir de ma vie, alors même que je suis originaire d'une famille

  7   politiquement marquée.

  8   Mon seul but, mon seul désir dans la vie, et c'est comme cela que je me

  9   suis toujours comporté -même à l'hôpital et au début de la guerre-, reste

 10   d'aider les hommes quelle que soit leur origine, quel qu'il soit.

 11   Question: Monsieur, avec votre permission, je vais vous demander, je pense

 12   que la Chambre serait d'accord, qu'elle me permettrait de vous demander de

 13   répondre aux questions que je vous pose de façon précise. Moi, je vous ai

 14   posé la question suivante: est-ce que, à Ustikolina, est-ce que vous avez

 15   essayé de monter un dispensaire?

 16   Réponse: Non.

 17   Question: Est-il exact, Monsieur, que dans votre déclaration préalable

 18   vous avez dit: "J'ai aidé la Défénse territoriale à Ustikolina pour

 19   organiser un dispensaire. J'ai distribué un sac de médicaments et des

 20   bandages aux unités qui gardaient la rive droite de la Drina dans une

 21   région appelée Brdo.".

 22   Réponse: Je n'ai fait qu'apporter des médicaments à ces gens-là, mais je

 23   n'ai pas essayé d'organiser un dispensaire à Ustikolina.

 24   Question: Donc ce que je viens de vous lire n'est pas exact?

 25   Réponse: Moi, je ne me suis rendu dans le dispensaire d'Ustikolina qu'une


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  1   seule fois. Et ce n'est pas moi qui ai organisé le dispensaire à

  2   Ustikolina. Et je dois vous le répéter: je ne sais pas de quelle façon

  3   ceci a pu être écrit dans cette déclaration préalable.

  4   Question: Est-il exact que vous ayez pris un sac de médicaments et de

  5   bandages que vous avez apporté aux unités de la Défense territoriale qui

  6   étaient de garde sur la rive de la Drina qui s'appelle Krcino Brdo.

  7   Réponse: C'est exact, c'est absolument vrai, et je vous l'ai déjà dit

  8   d'ailleurs.

  9   Question: Avez-vous participé aux combats à ces occasions, quand vous avez

 10   apporté ces médicaments à ces unités?

 11   Réponse: Non, jamais.

 12   Question: Pourquoi avez-vous pris un pistolet avec deux chargeurs?

 13   Pourquoi l'avez vous reçu?

 14   Réponse: Pour soit me protéger, soit pour commettre un suicide, pour me

 15   tuer.

 16   Question: Que voulez-vous dire par là "pour me protéger"?

 17   Réponse: Je pense qu'un pistolet n'est pas une arme qui sert à tuer les

 18   autres dans la guerre, pendant les conditions de guerre.

 19   Question: Dites-moi, Monsieur, quel était le calibre de ce pistolet?

 20   Réponse: Je pense que c'était le calibre 9, un pistolet long; je ne sais

 21   pas ce que cela veut dire.

 22   Question: Vous ne saviez pas vous servir d'un pistolet?

 23   Réponse: Je pense que c'était la première fois de ma vie que je tenais un

 24   pistolet entre mes mains.

 25   Question: Saviez-vous vous servir de ce pistolet?


Page 3982

  1   Réponse: Oui, je savais comment le charger, comment l'armer.

  2   Question: C'est tout?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: Et les jumelles, vous les avez reçues en même temps que le

  5   pistolet, ou bien, vous disposiez d'une paire de jumelles avant la guerre?

  6   Réponse: Je tiens cette paire de jumelles d'une personne à qui elles

  7   appartenaient avant la guerre.

  8   M. le Président (interprétation): Les interprètes n'ont pas entendu à qui

  9   appartenaient ces jumelles.

 10   M. Bakrac (interprétation): Moi, j'ai entendu dire le témoin que cette

 11   paire de jumelles a appartenu à son père avant la guerre.

 12   M. le Président (interprétation): Pourriez-vous lui reposer la question

 13   pour que nous soyons sûrs au sujet de sa réponse?

 14   M. Bakrac (interprétation): Monsieur Berberkic, à qui appartenait la paire

 15   de jumelles que vous avez utilisée, comme vous l'avez dit au cours de

 16   l'interrogatoire principal?

 17   M. Berberkic (interprétation): Cette paire de jumelles appartenait à mon

 18   père. Il se l'est procurée une dizaine d'années avant le début de la

 19   guerre.

 20   Question: Et les Musulmans avant le début de la guerre, est-ce qu'ils

 21   étaient organisés d'une certaine façon? Est-ce qu'ils se sont préparés à

 22   ce qui allait se passer?

 23   Réponse: Je pense qu'une certaine organisation a existé, mais moi, je ne

 24   faisais pas partie de cette organisation-là. Et malheureusement, je pense

 25   qu'elle était mauvaise, qu'elle n'était pas très bien organisée.


Page 3983

  1   Question: Pourquoi dites-vous "malheureusement"?

  2   Réponse: Parce que chaque homme a le droit de protéger son Etat d'une

  3   attaque éventuelle.

  4   Question: Vous voulez dire que cet Etat n'était pas l'Etat des Serbes

  5   aussi qui vivaient dans la région?

  6   Réponse: Bien sûr que c'était aussi l'Etat des Serbes. Je le sais, et vous

  7   le savez très bien vous aussi.

  8   Question: Merci, Monsieur Berberkic.

  9   Hier, au cours de l'interrogatoire principal -plutôt avant-hier-, vous

 10   avez dit que le jour du début de la guerre vous vous êtes dirigé vers

 11   l'hôpital et que vous êtes tombé sur des barricades, sur des points de

 12   contrôle. Où se trouvaient ces points de contrôle exactement?

 13   Réponse: Le premier point de contrôle se trouvait à Donje Polje, c'est un

 14   quartier de la ville. Et le deuxième point de contrôle se trouvait à côté

 15   du KP Dom, au niveau du pont sur la Drina, Donje Most.

 16   Question: Est-il exact Monsieur Berberkic, que vous êtes tombé sur un

 17   Musulman qui portait un uniforme de la défense territoriale?

 18   Réponse: Oui; c'est exact.

 19   Question: Pourriez-vous nous expliquer à quoi correspond cet uniforme de

 20   la défense territoriale, comment il est cet uniforme?

 21   Réponse: Je pense que ce sont les uniformes de la police d'avant la

 22   guerre, de couleur bleue.

 23   Question: Vous avez dit que c'étaient des Musulmans pour la plupart qui se

 24   trouvaient à ce point de contrôle. Avez-vous vu un seul Serbe à ce point

 25   de contrôle?


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  1   Réponse: Non, je n'en ai vu aucun.

  2   Question: Et le deuxième point de contrôle, celui qui se trouvait près du

  3   pont sur la Drina, était tenu par qui?

  4   Réponse: Il n'y avait pas d'homme là-bas, je n'en ai pas vu. Il y avait

  5   juste un camion et on pouvait difficilement passer à côté, mais je n'ai

  6   pas vu d'homme armé ou d'homme en général.

  7   Question: Est-ce que le chemin qui menait à l'hôpital passait par là, par

  8   le KP Dom?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit -ou tout

 11   au moins c'est ce que j'ai compris-, qu'au moment où le conflit a éclaté,

 12   jusqu'au 20, c'est-à-dire jusqu'au moment où l'armée serbe est arrivée à

 13   l'hôpital, qu'il n'y avait pas, pendant cette période-là, de médecins

 14   serbes à l'hôpital. Est-ce exact?

 15   Réponse: Non, moi je ne me suis pas exprimé comme cela. J'ai dit que la

 16   plupart des travaux à l'hôpital, dans certains départements, étaient

 17   effectués par les médecins, les infirmiers de nationalité musulmane. Mais

 18   il y avait des médecins serbes à l'hôpital et je n'ai jamais dit qu'il n'y

 19   en n'avait pas.

 20   Question: Et les patients, est-ce que ce n'était que des Musulmans ou y

 21   avait-il des patients serbes?

 22   M. le Président (interprétation): Pendant que le témoin tente de répondre

 23   à votre question, puis-je vous demander, Maître Bakrac, d'observer une

 24   pause vous aussi? C'est-à-dire que vous devriez attendre la fin de

 25   l'interprétation. Je sais que c'est difficile, mais pourriez-vous vous


Page 3985

  1   efforcer de le faire?

  2   M. Bakrac (interprétation): Oui, je m'excuse, Monsieur le Président.

  3   M. Berberkic (interprétation): A l'époque, à l'hôpital, il y avait des

  4   patients serbes, musulmans, et sans doute des Croates.

  5   Question: Merci, Monsieur. Vous avez mentionné une personne qui s'appelle

  6   Adnan Isanovic, vous avez dit qu'elle était blessée à la poitrine et que

  7   le Dr Torlak vous a dit qu'à cause d'un saignement au niveau de la

  8   poitrine, du thorax, il devait être opéré de façon urgente, et vous avez

  9   appris que peu de temps après cette personne avait été fusillée derrière

 10   l'hôpital. Savez-vous si cette personne, cet homme, avait été opéré ou

 11   non?

 12   Réponse: Je pense qu'il n'a pas été opéré, mais je n'en suis pas sûr à

 13   cent pour cent car je ne l'ai vu qu'une seule fois. J'ai parlé avec lui

 14   -c'est ce que j'ai dit d'ailleurs-, mais je pense qu'il n'avait pas été

 15   opéré. Mais je n'en suis pas sûr, je le répète.

 16   Question: Combien de jours après la conversation que vous avez eue avec

 17   les docteurs Isanovic et Torlak, l'hôpital a été occupé par l'armée serbe?

 18   Réponse: Je ne me souviens pas de combien de jours plus tard cela s'est

 19   produit.

 20   Question: Si c'est exact ce que vous venez de me dire, c'est-à-dire que ce

 21   sont surtout les médecins musulmans qui ont travaillé à l'hôpital, pouvez-

 22   vous me dire alors pourquoi cette personne, cet homme, n'a pas été opéré?

 23   Réponse: Non, je ne peux pas vous répondre avec précision car je ne sais

 24   même pas s'il a été opéré ou non. Ou bien, je ne sais pas pour quelle

 25   raison il n'a pas été opéré. Ou bien, s'il a été opéré, je ne sais pas qui


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  1   l'a fait. Je vous ai dit, j'ai clairement dit que j'ai vu cet homme qu'une

  2   seule fois, j'ai parlé avec lui et je ne saurais vous dire s'il a été

  3   opéré ou non.

  4   Question: Monsieur Berberkic, vous êtes médecin; s'il présentait des

  5   saignements au niveau du thorax, pendant combien de temps pouvait-il vivre

  6   sans se faire opérer?

  7   Réponse: Eh bien, cela dépend de la blessure, à quel niveau la blessure se

  8   présente, quelle est l'artère, à quelle vitesse le sang afflue vers le

  9   thorax. Mais en tout cas, si le patient a des difficultés pour respirer,

 10   l'opération est nécessaire.

 11   Question: Merci, Docteur Berberkic.

 12   Vous avez dit que dans votre village, à Josanica, des gardes jointes

 13   avaient été organisées. Avez-vous pris part à ces gardes?

 14   Réponse: Non. Je n'ai jamais de ma vie monté une garde, sauf dans l'ex-

 15   JNA.

 16   Question: Monsieur le Président, ma question suivante va être un peu plus

 17   longue, c'est-à-dire exigera une réponse plus longue que d'habitude. Donc

 18   le moment est peut-être opportun d'arrêter quelques instants plus tôt?

 19   M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur Bakrac. C'est une très

 20   bonne idée, nous allons reprendre à 14 heures 30.

 21   (L'audience, suspendue à 12 heures 58, est reprise à 14 heures 32.)

 22   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Bakrac, vous pouvez

 23   continuer.

 24   M. Bakrac (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 25   Monsieur Berberkic, pouvez-vous me suivre? Vous avez mis votre casque?


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  1   (Signe approbatif de la tête du témoin.)

  2   M. Bakrac (interprétation): Avant la suspension d'audience, il a été fait

  3   mention de la localité de Josanica, lieu de votre origine, et je vous ai

  4   demandé si vous avez participé aux gardes villageoises. Vous m'avez dit

  5   que non. Or, à Josanica y avait-il eu cette défense territoriale, comme

  6   vous l'appelez, composée de Musulmans?

  7   M. Berberkic (interprétation): Je crois qu'il y avait un groupe d'hommes,

  8   environ une quarantaine de personnes, mais je ne sais pas comment ils

  9   l'appelaient cette défense.

 10   Question: Etes-vous d'accord avec moi pour dire que dans votre déposition

 11   y figure le chiffre 60?

 12   Réponse: Oui, je crois que cela est possible, peut-être environ 60

 13   personnes.

 14   Question: Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que le

 15   jour où vous avez été blessé, vous étiez parti à la recherche de votre

 16   cousin et que c'est dans ces circonstances que vous avez été blessé. Est-

 17   ce exact?

 18   Réponse: J'étais parti pour chercher mon frère et mon beau-frère.

 19   Question: Je vais vous rappeler, Monsieur Berberkic, que dans votre

 20   déposition donnée au Bureau du Procureur, vous avez déclaré que vous avez

 21   été blessé au moment où vous étiez parti pour rejoindre les hommes de la

 22   Défense territoriale. Qu'y a-t-il d'exact entre ces deux énoncés dans la

 23   déclaration? Et que vous vous êtes perdu dans la forêt, avez-vous dit

 24   aussi.

 25   Réponse: J'ai tenté de retrouver mon frère et mon beau-frère qui se


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  1   trouvaient, eux, dans la forêt et je me suis égaré. Cela est exact, mais

  2   je ne peux pas savoir si eux deux faisaient partie de la Défense

  3   territoriale.

  4   Question: Vous ne pouvez pas le savoir si votre frère et votre beau-frère

  5   étaient membres de la Défense territoriale? N'est-ce pas un peu étrange?

  6   Réponse: Je crois qu’à ce moment-là, la Défense territoriale n'existait

  7   pas en tant que défense d'un groupe organisé sur ce terrain-là.

  8   Question: Tout à l'heure, vous avez dit qu'il y avait environ une

  9   soixantaine de personnes organisées sous forme de Défense territoriale.

 10   Est-ce bien cela?

 11   Réponse: Je crois que c'était un groupe d'hommes qui s'efforçaient de se

 12   protéger. Mais comment ils s'appelaient, je ne peux pas vous le dire avec

 13   certitude.

 14   Question: Lorsque vous avez été blessé, à ce moment-là, votre frère ou

 15   votre beau-frère étaient-ils à vos côtés ou étiez-vous seul?

 16   Réponse: Je n'étais pas seul. Merkez Aziz était avec moi. Pardon, Merkez

 17   Halil. Halil. Et puis, il y avait mon beau-frère Delic Nedzad et un ami à

 18   lui, Dzaferspahic Adnan, mais mon frère n'y était pas.

 19   M. le Président (interprétation): Une seconde, s'il vous plaît.

 20   L'interprète n'a pas bien capté ce dernier nom ou le nom de famille de la

 21   troisième personne.

 22   Nedzad, comment se présentait son nom de famille?

 23   M. Berberkic (interprétation): Delic. Nom de famille: Delic. Delic Nedzad.

 24   M. le Président (interprétation): Je vous remercie beaucoup.

 25   Oui, Maître Bakrac, vous pouvez procéder.


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  1   M. Bakrac (interprétation): Ces questions que vous avez mentionnées, et au

  2   moment où vous avez été blessé, était-il armé?

  3   M. Berberkic (interprétation): Oui.

  4   Question: Au moment où vous avez été blessé, à qui avez-vous remis votre

  5   pistolet?

  6   Réponse: Je l'ai donné à mon beau-frère.

  7   Question: A Nedzad Delic?

  8   Réponse: Oui.

  9   Question: Ont-ils été arrêtés le même jour que vous?

 10   Réponse: Je pense que oui.

 11   Question: Monsieur, étant donné que vous êtes originaire de Josanica,

 12   avez-vous eu connaissance de ce qui aurait pu se passer avec la population

 13   serbe en date du 19 décembre 1992?

 14   Il y a une erreur dans le transcript, il s'agit bien de décembre 1992.

 15   Réponse: J'étais au KP Dom et j'ai entendu dire qu'il y a avait une action

 16   d'attaque contre Josanica et que beaucoup de civils serbes ont été tués.

 17   C'est ainsi que j'ai été informé par les gardes du KP Dom.

 18   Question: Monsieur Berberkic, vous avez dit que, moyennant vos jumelles,

 19   vous avez pu observer l'incident de Filipovici depuis le casernement où

 20   plusieurs personnes ont été emmenées -c'est-à-dire fusillée-, à ce moment-

 21   là. Etait-ce exact?

 22   Réponse: Oui, il est vrai que j'ai déclaré que trois ou quatre personnes

 23   ont été, ou cinq personnes, ont été sélectionnées pour et que j'ai entendu

 24   des coups de feu tirés. Mais s'ils ont tous été liquidés, ça, je ne le

 25   sais pas.


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  1   Question: Et depuis quel emplacement l'avez-vous observé? Où étiez-vous?

  2   Réponse: Il s'agit du village Karadzici qui se trouve sur la rive droite

  3   de la Drina, et qui se trouve au même niveau que les installations

  4   militaires de Filipovici.

  5   Question: Avez-vous pu voir où ces quatre ou cinq personnes ont été

  6   emmenées?

  7   Réponse: On les a emmenées derrière les baraques, les établissements

  8   militaires.

  9   Question: Avez-vous dit, lors de votre déclaration au Bureau du Procureur,

 10   que vous avez entendu dire que plus tard certaines de ces personnes, qui

 11   ont été sélectionnées pour être emmenées derrière les baraques, ont pu

 12   s'évader?

 13   Réponse: Oui, cela est exact. J'ai entendu dire que prétendument une de

 14   ces personnes aurait survécu, parmi ceux-là qui ont été fusillés.

 15   Question: Dans votre déclaration, vous avez dit qu'il y avait plus d'une

 16   personne.

 17   Réponse: Je crois qu'un seul, qu'une seule personne a survécu. Mais vous

 18   savez les gens aiment causer, d'aucuns disent deux, d'autres trois. Moi,

 19   je pense qu'une seule personne a survécu.

 20   Question: Merci, Monsieur. Nous allons maintenant passer au rôle joué par

 21   l'accusé Krnojelac au KP Dom. Je vais vous donner lecture de la partie de

 22   la déclaration faite par vous au Bureau du Procureur, page 6, version BCS,

 23   6e fragment, que vous avez évoqué lors de l'interrogatoire principal,

 24   lorsque vous avez parlé de deux détenus ayant les mêmes nom et prénom,

 25   Dzevad Lojo.


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  1   Vous avez précisé que, d'après eux, le directeur du KP Dom était Milorad

  2   Krnojelac et que c'est lui qui était compétent de cette partie du camp.

  3   "Dans la pièce où j'étais, se trouvaient deux détenus dont le nom de

  4   famille et le prénom était Dzevad Lojo. Les deux ont déclaré avoir parlé à

  5   Krnojelac. Je pense que ceci s'est passé en été 1992, environ trois ou

  6   quatre mois après mon arrivée au KP Dom. Ces deux-là, dont le nom de

  7   famille est Lojo, m'ont dit plus tard que Krnojelac leur a précisé que lui

  8   ne tenait pas sous son contrôle l'ensemble de la situation et que c'est le

  9   commandement militaire qui est chargé de décider de tout. Il a dit que le

 10   personnel du pénitentiaire est au service du commandement militaire et

 11   que, par conséquent, lui, quant à lui, ne pouvait aider mais il a pu

 12   promettre de faire améliorer les conditions de vie du camp.".

 13   Pouvez-vous nous dire ce qu'il y a d'exact de ce que je viens de lire? Par

 14   rapport à ce que vous avez dit ici, lors de l'interrogatoire principal, et

 15   par rapport à ce que vous avez déclaré sous forme de déposition au Bureau

 16   du Procureur?

 17   Réponse: Que veut dire très exactement "OTP"? Qui c'est ce "X"? C'est

 18   quoi?

 19   Question: C'est le Bureau du Procureur.

 20   Réponse: A quel moment, j'ai fait cette déposition?

 21   Question: Vous l'avez faite en date des 14 et 15 décembre 1998, et c'est

 22   le 7 septembre 1999 que vous l'avez lue, signée.

 23   Réponse: Il y a là deux choses tout à fait illogiques. Il y avait Dzevad

 24   Lojo, directeur de la mine de Miljevina qui, lui, connaissait

 25   personnellement Milorad Krnojelac de l'époque d'avant-guerre. Mais un


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  1   autre Dzevad Lojo, à ce moment-là, n'était pas avec moi dans la même

  2   pièce. Je parle de la pièce n°16.

  3   Question: Monsieur, aujourd'hui, vous avez dit encore une fois aujourd'hui

  4   qu'il s'agissait de deux personnes ayant les mêmes nom et prénom, à savoir

  5   Dzevad Lojo, et que ces informations sur la direction du KP Dom, vous les

  6   tenez de ces deux personnes-là.

  7   Réponse: Mais il faut dire qu'à ce moment-là Dzevad Lojo, qui était

  8   directeur de Maglic, n'était pas dans la même pièce. Plus tard, je l'ai

  9   rencontré dans la pièce, dans une autre pièce, la pièce 18.

 10   M. le Président (interprétation): Tachez de ménager une pause, s'il vous

 11   plaît, une fois la question posée ou lorsque vous aurez à reprendre vos

 12   questions. Les traducteurs ont du mal à vous suivre et cela en

 13   (inaudible), s'il vous plaît.

 14   M. Bakrac (interprétation): La substance même des choses ne consiste pas

 15   de savoir s'il était dans la même pièce avec vous. Mais je voulais savoir

 16   tout simplement -et la substance est là dedans-, ce que vous avez appris,

 17   de qui vous tenez cette information. Et qu'est-ce qu'il y a d'exact dans

 18   ce qui a été déposé par vous-même au Bureau du Procureur et ce qui a été

 19   dit aujourd'hui.

 20   M. Berberkic (interprétation): J'ai dit clairement que ces informations,

 21   je les tiens de l'un et de l'autre. Mais je n'ai pas dit qu'à ce moment-

 22   là, ils étaient ensemble tous les deux dans ma pièce, dans la pièce où

 23   j'étais. J'ai ici, seulement sur le transcript, la formulation de ce que

 24   j'ai fait sous forme de déclaration au Bureau du Procureur. Mais je ne

 25   peux pas me rappeler très exactement ce que j'ai dit ce matin,


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  1   aujourd'hui.

  2   Si vous me demandez de vous répondre en détail et de répéter en détail ce

  3   que j'ai dit aujourd'hui, ou ce que j'ai dit il y a deux ou trois ans,

  4   pour définir avec précision la différence qu'il y a -s'il y en a une-,

  5   entre ces deux énoncés, ces deux déclarations.

  6   Question: Je vais essayer de poser la même question de façon plus simple.

  7   Ce que je viens de lire dans votre déposition, est-ce exact? Alors que

  8   vous l'avez déclaré au Bureau du Procureur?

  9   Réponse: Je crois que c'est exact.

 10   Question: Merci, Monsieur. De même, en ce jour, vous évoquez avoir vu

 11   Milorad Krnojelac au KP Dom au cours de la journée, dans les heures

 12   d'après-midi, souvent vers les heures du soir et à deux reprises lorsque

 13   l'alerte fut donnée. Je vais vous rappeler ce que vous avez dit. Je vous

 14   donne toujours lecture de ce qui figure sur la même page, de ce que vous

 15   avez déclaré.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Objection!

 17   M. le Président (interprétation): Oui, allez-y.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je ne sais pas si j'ai bien suivi la

 19   traduction ou si j'ai bien compris. Il n'a pas dit avoir vu Krnojelac dans

 20   les heures du soir. Il a seulement dit avoir entendu de la part des gardes

 21   qu'il devait y être, là. Jamais au cours de l'interrogatoire direct, il

 22   n'a dit l'avoir vu dehors, il a dit juste le contraire.

 23   M. le Président (interprétation): Je me souviens de toute façon qu'il ne

 24   l'a pas dit, qu'il n'a pas dit comme quoi il l'a vu personnellement. Mais

 25   vous pouvez consulter le transcript pour confirmer.


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  1   M. Bakrac (interprétation): Mon collègue Vasic s'en chargera. Je l'ai noté

  2   moi-même, peut-être que la traduction n'était pas bonne à ce moment-là.

  3   Mais, avec votre permission, je peux donner lecture très brièvement, très

  4   rapidement d'une phrase. A lui de confirmer.

  5   "Lorsqu'il s'agit de Krnojelac, je le voyais à la prison, uniquement au

  6   cours de la journée. Quelquefois, lorsqu'il y avait des alertes d'essai

  7   données, il était présent également.".

  8   Par conséquent, ici, vous êtes ponctuel et vous dites formellement que

  9   vous ne le voyiez à la prison qu'au cours de la journée. Est-ce que vous

 10   vous en tenez toujours à cela?

 11   M. Berberkic (interprétation): Je m'en tiens à dire que je le voyais

 12   plusieurs fois par jour, dans les différentes heures de la journée: dans

 13   la matinée, après-midi et au cours de la journée, mais jamais au cours de

 14   la nuit.

 15   Question: Pourquoi, dans aucune de vos dépositions faites jusqu'ici par

 16   vous, vous n'avez pas dit que c'étaient les gardes qui vous auraient dit

 17   qu'au cours de la nuit Milorad Krnojelac était là, puisque vous en parliez

 18   déjà, puisque vous évoquiez déjà ce fait-là?

 19   Réponse: Je dois dire que personne ne m'a posé une question directe pour

 20   savoir d'où je tenais les informations concernant sa venue au camp. Jamais

 21   avant, cette question ne m'avait été posée par personne lors des

 22   dépositions faites par moi, lors des interrogations.

 23   Question: Je suis d'accord avec vous, Monsieur, mais on a dû vous demander

 24   à quel moment Milorad Krnojelac était au KP Dom. Pourquoi n'avez-vous pas

 25   dit que vous déteniez des informations concernant sa venue au cours de la


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  1   nuit? Même si vous ne l'avez pas remarqué, même si vous ne l'avez pas vu

  2   vous-même.

  3   Réponse: Je me dois de dire que je ne crois que ce que je vois. En

  4   principe.

  5   Et qu'à ce moment-là, il ne se pouvait aucunement que je donne une autre

  6   raison. Je crois que c'était une raison tout à fait simple et parfaitement

  7   bien fondée.

  8   Question: Pouvez-vous nous dire, Monsieur, de quel garde il s'agit qui

  9   vous aurait dit que Milorad Krnojelac serait présent in situ, au cours de

 10   la nuit aussi?

 11   Réponse: Je peux vous dire qu'au moins deux d'entre eux me l’ont dit.

 12   Question: Oui, s'il vous plaît, dites-le.

 13   Réponse: Il s'agit de gardes avec lesquels j'ai pu parler. Il s'agit de

 14   (expurgé) et de (expurgé).

 15   M. le Président (interprétation): Je crois que j'ai retrouvé le fragment

 16   auquel vous vous référez. Il s'agit de la page 27 du transcript de

 17   l'audience d'aujourd'hui. Vous avez dit que vous avez pu voir M. Krnojelac

 18   dans d'autres occasions au KP Dom.

 19   "L'avez-vous jamsis vu le soir?

 20   Réponse: Je pense qu'il se rendait dans l'enceinte. Le soir, je ne me

 21   souviens pas l'avoir vu personnellement dans l'enceinte du KP Dom, mais je

 22   pense qu'il s'y rendait.".

 23   Après quoi vient la question: "Sur la base de quoi vous portez ce

 24   jugement?". Alors la réponse était que les gardes étaient beaucoup plus

 25   prudents lorsqu'il était dans l'enceinte.


Page 3996

  1   Voilà ce qu'il a dit. Il n'y a rien qui aurait pu vous suggérer cette

  2   question. Si vous pouvez trouver un autre exemple, alors, allez-y.

  3   M. Bakrac (interprétation): Dans ce cas-là, Monsieur le Président, il ne

  4   me reste qu'à vous présenter mes excuses.

  5   M. le Président (interprétation): Pas à moi, mais vous pouvez procéder.

  6   M. Bakrac (interprétation): Est-ce exact, Monsieur Berberkic, que dans vos

  7   déclarations faites au Procureur vous avez fait mention de vos entretiens

  8   avec Mitar Rasevic?

  9   M. Berberkic (interprétation): Je crois que c'est  exact.

 10   Question: Aujourd'hui, vous nous avez appris le contenu de ces entretiens.

 11   Pourtant, permettez-moi de vous donner lecture de ce que vous avez dit au

 12   Bureau du Procureur, page 8, version BCS, première ligne du premier

 13   alinéa.

 14   "Quelquefois, Rasevic parlait de mon frère aussi. Quelquefois, il pouvait

 15   dire aussi que les ordres lui étaient donnés par le commandement. J'ai

 16   entendu dire que le commandant militaire était un certain Kovac. Le père

 17   des deux détenus, deux frères Cemo, a tenté d'organiser leur échange. Il a

 18   communiqué avec Kovac par l'intermédiaire de radioamateur. Les frères ont

 19   reçu le message que leur père était dans l'impossibilité d'organiser leur

 20   échange, étant donné qu'il a eu des problèmes avec le commandant Kovac.".

 21   Aujourd'hui, vous avez dit quelque chose que vous n'avez jamais dit avant,

 22   à savoir que Rasevic vous aurait dit que ceci relevait de la compétence du

 23   directeur. Qu'y a-t-il d'exact entre ces deux déclarations?

 24   Réponse: Ce que j'ai déclaré aujourd'hui est plus exact que ce qui est

 25   écrit et lu ici. Je me souviens bien de la conversation que j'ai eue avec


Page 3997

  1   Rasevic dans les deux occasions, et ce que j'ai dit aujourd'hui est la

  2   vérité. Pourtant, je pense que c'est par son intermédiaire que pouvait

  3   peut-être se dérouler cette conversation avec les deux frères Cemo, mais

  4   je ne sais pas d'où vient cet énoncé comme quoi le commandant militaire

  5   serait un certain Kovac. Je ne me souviens pas d'avoir pu déclarer quelque

  6   chose de semblable.

  7   Question: Vous ne vous en souvenez pas?

  8   Réponse: Non.

  9   Question: Je vais essayer de rafraîchir votre mémoire. Il n'y a pas qu'à

 10   une occasion seulement que vous lui avez parlé. Vous avez dit aujourd'hui

 11   que vous avez parlé avec l’infirmier Gojko, et je vais vous donner lecture

 12   de ce même passage sur l'autre page.

 13   "Gojko -l'infirmier- a dit que tout ce qui est fait dans la prison doit

 14   être autorisé par le commandant Kovac.".

 15   Cela vous a-t-il rafraîchi votre mémoire ou peut-être, encore toujours,

 16   vous continuez de dire que vous n'avez jamais déclaré quelque chose de

 17   pareil au Bureau du Procureur?

 18   Réponse: Y a-t-il une date quelconque dans laquelle on pourrait peut-être

 19   situer une pareille déclaration de Gojko? Je sais que j’ai dit au Bureau

 20   du Procureur avoir demandé à Gojko de faire quelque chose de son propre

 21   chef pour améliorer la situation, pour nous aider, pour mieux soigner les

 22   détenus, surtout que parmi les détenus il y avait des personnes âgées.

 23   Alors, lui m'a répondu qu'il ne pouvait pas le faire parce que tout

 24   simplement ceci n'a pas été permis par la direction de la prison. C'est ce

 25   que j'ai pu déclarer.


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  1   Pour ce qui est de cette autre déclaration, il me semble, à mon sens, que

  2   quelque chose cloche ici.

  3   Question: Qu'est-ce que qui cloche? Vous ne l'avez pas dit vous? Le Bureau

  4   du Procureur l'aurait-il rédigé à sa guise? Qu'est-ce qui cloche?

  5   Réponse: Je pense qu'il s'agit-là vraiment d'une confusion totale d'énoncé

  6   et de thèse. Il est un Kovac nommé Kovac radioamateur qui a voulu entrer

  7   en communication avec les frères Cemo. Mais pour parler d'un commandant

  8   Kovac, je n'en ai aucune idée.

  9   Question: Par conséquent, vous avez déclaré que Gojko, l'infirmier, aurait

 10   dit que tout ce qui était fait dans la prison doit être autorisé par le

 11   commandant Kovac qui, d'après vous, serait un radioamateur. Où est la

 12   logique là dedans?

 13   Si je vous dis, pour rafraîchir toujours votre mémoire, que le commandant

 14   du groupe tactique de défense territoriale de Foca était toujours Kovac,

 15   vous vous en tenez toujours à ce que vous avez dit tout à l'heure pour

 16   dire et soutenir qu'il s'agissait-là d'un radioamateur nommé Kovac?

 17   Réponse: Oui. Il existe deux personnes nommées Kovac dont l'une est

 18   radioamateur et qui a essayé d'arranger les préparatifs portant échange

 19   des frères Cemo. A ce moment-là, les deux frères étaient détenus avec moi

 20   dans la même pièce et ce sont eux-mêmes qui me l'on dit.

 21   Mais pour ce qui est du colonel Kovac ou quelqu'un d'autre, il y doit y

 22   avoir évidemment soit une erreur de personne soit une confusion de thèses

 23   sur lesquelles on se base.

 24   Question: Mais je vous en prie, Monsieur, vous n'avez qu'à regarder le

 25   transcript: je n'ai jamais prononcé le nom de colonel Kovac. D'où vient


Page 3999

  1   maintenant le colonel Kovac?

  2   Au fait il est colonel, mais je ne sais pas d'où vous tenez tout cela.

  3   Mais cela m'intéresse maintenant.

  4   Réponse: Je répète une fois de plus que je ne connais que ce radioamateur

  5   qui travaillait en vue d'un échange. Il était alpiniste aussi, il venait

  6   au camp. Mais pour parler maintenant d'un colonel Kovac, cela m'est

  7   étranger et inconnu. Peut-être que oui, cet homme-là pourrait porter le

  8   nom de Kovac.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je ne souhaite qu'attirer l'attention

 10   sur le fait que l'avocat a fait mention de colonel Kovac.

 11   M. le Président (interprétation): Il a été certainement commandant, mais

 12   je ne me souviens pas l'avoir entendu dire colonel.

 13   A quoi vous référez-vous? L'avez-vous trouvé cette référence?

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je m'excuse, Monsieur le Président.

 15   Nous n'avons fait que remarquer que ceci a été mentionné, mais c'est le

 16   témoin qui a dit pour la première fois colonel. Excusez-moi.

 17   M. le Président (interprétation): Ca va.

 18   M. Bakrac (interprétation): Avec votre permission -évidemment cela ne nous

 19   mène nulle part-, mais avec votre permission, permettez-moi de donner

 20   lecture d'une phrase simple pour dire qu'il n'y a pas d'erreur sur la

 21   personne. "Quelquefois Rasevic aurait dit… Rasevic quelquefois parlait de

 22   mon frère et j'ai pu entendre dire aussi, quelquefois par Rasevic, qu'il

 23   recevait tous les ordres du commandement. J'ai entendu dire qu'un certain

 24   Kovac était le commandant militaire.".

 25   Je ne vois pas ce qu'il y a d'ambigu ou qui ne serait pas clair.


Page 4000

  1   M. Berberkic (interprétation): Je dois répéter une fois de plus que j'ai

  2   parlé à Enver Cemo et avec l'autre Cemo.

  3   Question: Je ne vous parle pas, Monsieur, de Cemo. Je vous parle de ce qui

  4   a été dit au sujet de cet entretien avec Rasevic. Pouvez-vous me dire si

  5   oui ou non?

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je dois une

  7   fois de plus faire une objection. Dans une déposition préalable, le témoin

  8   n'a pas évoqué d'avoir parlé de Rasevic. Le témoin n'a dit que: "De temps

  9   en temps, Rasevic me disait avoir reçu des ordres de commandement. J'ai

 10   entendu que le commandant était un certain Kovac, et le père des deux

 11   frères détenus Cemo a essayé d'organiser des préparatifs en vue

 12   d'échange.".

 13   M. le Président (interprétation): Tout ceux qui donnent lecture font en

 14   sorte de débiter de plus en plus rapidement, c'est difficile de suivre

 15   pour les traducteurs.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le père des deux frères Cemo détenus

 17   a essayé d'organiser un échange de ses fils, et il a essayé en

 18   communiquant avec Kovac par le biais d'une radioamateur. Voilà ce qu'il a

 19   été dit dans la déposition.

 20   C'est ce que je voulais souligner. Moi, d'ailleurs, pour ma part…

 21   M. le Président (interprétation): Peu importe vers où tout cela nous-mène.

 22   Maître Bakrac, vous essayez de faire exactement ce que M. Vasic essayait

 23   hier et où j'ai essayé de l'arrêter, à savoir rechercher trop de variantes

 24   entre le résumé et la déclaration. Si cela porte sur quelque chose qui ne

 25   serait pas important, pertinent, c'est superflu.


Page 4001

  1   La majeure partie des détails porte sur des questions d'ordre périphérique

  2   et de nature à ne pas nous aider. Le témoin n'a fait que peaufiner son

  3   témoignage et peut-être à utiliser les mots en les réduisant vraiment, et

  4   peut-être que vous pouvez vous en tenir à des questions pertinentes pour

  5   essayer de tirer au clair les différences entre les déclarations et le

  6   témoignage lors des interrogatoires.

  7   M. Bakrac (interprétation): Je crois, Monsieur le Président, que cette

  8   question concernant la ligne de commandement et des compétences pourrait

  9   être évidemment une question qui n'est pas pertinente. Mais lorsque mon

 10   honorable collègue a essayé de donner lecture du texte, il y a là des

 11   points et lorsque l'on dit: "J'ai entendu dire que le commandant militaire

 12   était un certain Kovac.". Et puis après, on dit...

 13   M. le Président (interprétation):Un peu plus lentement, si vous plaît.

 14   M. Bakrac (interprétation): Mais s'il y a là vraiment une confusion pour

 15   parler des deux frères Cemo: "Gojko l'infirmier m'a dit pour tout ce qui

 16   se fait à la prison on doit avoir la permission du directeur.". Là, je

 17   n'ai guerre besoin de parler des frères Cemo. Il y a un point. Et puis, il

 18   y a un nouveau fragment qui traite d'une autre question. Je ne demande au

 19   témoin que de répondre si peut-être le Bureau du Procureur n'a pas bien

 20   rédigé ce qu'il a dit lui-même en déposant.

 21   M. le Président (interprétation): Je ne sais pas, mais il me semble que

 22   vous nous emmenez jusqu'à un point où ceci semble être important. Or nous

 23   avons fait un très long voyage pour y parvenir. Vous pouvez toujours

 24   continuer pour ce qui est de cette chaîne de commandement. D'accord, mais

 25   tant que vous n'avez pas lu cette partie, cela me semblait n'avoir rien à


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  1   voir avec ce qui nous intéresse nous. Si un commandant existe ou un

  2   colonel Kovac qui était chargé d'être responsable de ce qui se passait au

  3   KP Dom, essayez de l'établir, de le constater, mais essayons de faire en

  4   sorte de ne pas laisser de côté sans laisser de côté certaines variantes

  5   qui n'ont pas trop de pertinence.

  6   M. Bakrac (interprétation): Oui, bien sûr. Mais le conseil de la défense

  7   va dans ce sens-là où il trouve que le fait de tirer au clair cette partie

  8   de la question lui semble pertinente.

  9   Monsieur, je vous ai donné lecture de cette seconde phrase, de cette

 10   seconde déposition où vous avez déclaré que Gojko, l'infirmier, vous

 11   aurait dit que pour tout ce qui se fait dans la prison il faut avoir la

 12   permission du commandant Kovac.

 13   M. Berberkic (interprétation): Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît, à

 14   quel moment cette déposition a été faite et à qui je l'ai faite?

 15   Question: Vous l'avez faite les 14 et 15 décembre 1998 devant le Bureau du

 16   Procureur et c'est le 7 septembre 1999, date de la lecture par conséquent

 17   de la signature.

 18   Réponse: Je ne peux pas confirmer l'exactitude de cette déclaration.

 19   Question: Par conséquent, vous ne l'avez jamais dite au Bureau du

 20   Procureur?

 21   Réponse: En ce moment, si je ne peux pas confirmer la validité de cette

 22   déclaration, c'est-à-dire que je ne peux pas être sûr de l'avoir dit de

 23   cette façon-là.

 24   Question: Docteur Berberkic, je vais vous rafraîchir la mémoire encore un

 25   petit peu en disant comme suit: Page 12 de la même déclaration, dans le


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  1   second alinéa, première phrase, vous avez dit comme suit: "En juin 1993,

  2   lorsque la Croix-Rouge était en visite au KP Dom, nous étions douze à être

  3   cachés. Enver Cemo a vu une liste où figuraient les douze noms.". La liste

  4   a été signée par Marko Kovac.

  5   S'agit-il maintenant du radioamateur qui aurait signé la liste des noms,

  6   c'est-à-dire portant sur l'action moyennant laquelle vous avez été caché?

  7   Réponse: Je ne sais pas de qui il s'agit, mais cette information est

  8   exacte et c'est bien ma déclaration. Mais pour dire qui serait Marko

  9   Kovac, je ne peux pas le faire.

 10   Question: Merci. Vous avez dit aussi ce que vous avez repris lors de

 11   l'interrogatoire principal, que Gojko Jokanovic vous aurait dit

 12   personnellement qu'il était dans l'impossibilité de vous aider étant donné

 13   que ceci était interdit par la direction. Est-ce exact?

 14   Réponse: Cela est exact. Et il l'a répété à plusieurs reprises, il ne l'a

 15   pas dit seulement une fois.

 16   Question: Dans votre déclaration que nous lisons à la page 7, vous avez

 17   dit: "Un infirmier serbe nommé Gojko était chargé de s'occuper de nous. Le

 18   Dr Torlak et d'autres médecins détenus lui ont demandé de l'aide, alors

 19   qu'il leur a répondu qu'il ne leur a pas été permis de l'aider.".

 20   Vous n'avez pas dit, ici, que c'est vous-même qui lui avait parlé et vous

 21   ne lui avez pas dit non plus, ici, qu'il lui était interdit par la

 22   direction de porter secours.

 23   Réponse: Cette déclaration est exacte. Je ne sais pas pour quelle raison

 24   je ne l'ai pas dit à cette occasion-là, mais il n'y a pas que le Dr Torlak

 25   ou Karovic ou Berber qui auraient parlé avec Gojko. Tout le monde parlait


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  1   avec lui, moi aussi.

  2   Je suis là pour soutenir absolument que c'est exact, et pour soutenir une

  3   fois de plus qu'il lui a été interdit par la direction de porter secours.

  4   Il a dit le mot "uprava", direction. Il n'a pas prononcé de noms, non plus

  5   que j'ai insisté, moi, pour en savoir davantage parce que ce serait de

  6   trop.

  7   Question: Puisque nous parlons déjà de l'infirmier Jokanovic, vous avez

  8   dit entre autres que les détenus se rendaient à l'infirmerie pour chiper

  9   des médicaments. Est-ce vrai?

 10   Réponse: C'est exact. C'était de cette manière, et une des manières qui

 11   nous permettaient d'avoir des médicaments en cas d'urgence. La seule façon

 12   de le faire, c'était de le cacher à sa vue, de façon qu'il ne sache pas

 13   que nous avions ces médicaments en notre possession.

 14   Question: Qui vous a emmené à l'infirmerie?

 15   Réponse: Les gardes qui étaient de service ce jour-là.

 16   Question: Pourquoi vous ont-ils emmenés là-bas puisque c'était interdit,

 17   puisqu'on avait interdit à Gojko de vous aider? Pourquoi était-il là tous

 18   les jours puisqu'il n'avait pas le droit de vous soigner?

 19   Réponse: Je ne vois vraiment pas ce que je pourrais répondre à cela. Je

 20   n'ai pas de point de vue particulier en ce qui concerne cette question,

 21   mais je pense, je pense seulement. Et d'ailleurs, je l'ai dit

 22   précédemment, il a essayé de faire tout ce qu'il pouvait et tout ce qui

 23   était en son pouvoir, et qu'il aurait pu avoir des ennuis de ce fait. Il

 24   m'a dit à plusieurs reprises…

 25   Question: Mais, moi, je vous demande pourquoi on vous a emmené à


Page 4005

  1   l'infirmerie? Les gardes auraient pu dire au représentant de

  2   l'administration qu'ils vous aidaient, qu'on vous amenait à la clinique.

  3   Réponse: Les gens se plaignaient de divers maux et avaient besoin de soins

  4   de façon urgente. Je parle de la qualité des soins médicaux. Je crois que

  5   la qualité des soins prodigués n'étaient pas appropriée, et elle n'était

  6   pas au niveau que méritaient ces détenus.

  7   De nouveau, je répète que Gojko faisait tout ce qui était en son pouvoir.

  8   Question: Merci, Monsieur. Maintenant, j'aimerais que vous me disiez la

  9   chose suivante: est-ce que vous connaissiez le Dr Dobrilovic? Vous avez

 10   parlé du Dr Vladicic, Dr Kostovic, Dr Dragovic. Est-ce que vous connaissez

 11   le nom du Dr Dobrilovic?

 12   Réponse: Le Dr Dobrilovc, je crois qu'il s'appelle Milovan de son prénom.

 13   Question: Oui.

 14   Réponse: Je crois qu'il est venu à la prison une fois ou deux, mais je ne

 15   me souviens pas. Je crois qu'il est venu deux ou trois fois.

 16   Question: Vous nous dites que vous pensiez que ces médecins venaient une

 17   fois par semaine. Est-ce que vous pensez qu'il est possible qu'ils aient

 18   pu venir deux fois par semaine?

 19   Réponse: Je crois que ce n'était pas aussi régulier. Je ne pense pas que

 20   c'étaient deux fois par semaine.

 21   Question: Docteur Berberkic, vous avez dit ici qu'on vous a emmené en

 22   cellule d'isolement à cause d'une paire de chaussettes que vous vous étiez

 23   confectionnée vous-même. Est-ce exact?

 24   Réponse: C'est exact. C'est exact.

 25   Question: Pourquoi n'avez-vous jamais mentionné la chose précédemment ni


Page 4006

  1   au Bureau du Procureur ni au centre de sécurité de Sarajevo?

  2   Vous nous dites que vous avez passé la nuit dans la cellule d'isolement,

  3   une seule nuit, lorsqu'il y a eu l'incident relatif à une tranche de pain.

  4   Cela non plus, vous ne l'avez jamais dit à quiconque.

  5   Réponse: Je vais répéter ce que j'ai déjà dit: ils ne m'ont sans doute pas

  6   posé la question et, à ce moment-là, moi, je ne m'en suis pas souvenu non

  7   plus.

  8   Question: Monsieur Berberkic, combien de fois avez-vous été en cellule

  9   d'isolement?

 10   Réponse: Une seule fois. A cause de la paire de chaussettes que je m'étais

 11   confectionnée. L'autre fois, je ne suis pas allé en cellule d'isolement,

 12   je ne sais pas d'où vient cette déclaration. Il y a sans doute eu

 13   confusion dans les termes ou on se mélange un petit peu au niveau du

 14   temps. Je ne sais pas.

 15   Question: Vous avez dit que Savo Todovic vous a emmené manger le jour où

 16   il y a eu cet incident: "Todovic m'a envoyé à la cantine. Il m'a dit que

 17   je pouvais manger, mais je n'ai pas pu manger beaucoup. Et ensuite, on m'a

 18   envoyé en cellule d'isolement.". Fin de citation.

 19   Avez-vous eu une réponse à cela, Docteur Berberkic?

 20   Réponse: Je n'ai été en isolement qu'une fois, et je crois que c'était à

 21   cause de cette paire de chaussettes. A savoir si c'est peut-être à cause

 22   de cet autre incident, je ne sais pas. Mais je crois que c'est à cause de

 23   cette paire de chaussettes, en fait j'en suis convaincu. Comment cela se

 24   fait que l'on parle d'autre chose maintenant, je ne sais pas.

 25   Question: Il y a quelques instants, Monsieur Berberkic, on parlait de


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  1   nourriture. Est-il exact que, pendant votre détention au KP Dom, il

  2   régnait une pénurie générale en matière de nourriture?

  3   Réponse: Non, non, non, il n'y avait pas pénurie d'alimentation.

  4   Question: Je vais vous lire une partie de votre déclaration. Je me reporte

  5   à la page 6, en version BCS. Il s'agit du dernier paragraphe, une seule

  6   phrase: "Le fait que nous ayons peu de nourriture n'avait rien à voir avec

  7   le fait qu'il y avait pénurie générale en matière d'alimentation".

  8   Réponse: Vous savez ce que je crois? Je crois que la traduction en anglais

  9   est erronée, en tout cas il y a une mauvaise compréhension. J'ai dit à

 10   plusieurs reprises qu'il y avait suffisamment à manger, qu'il y avait de

 11   la nourriture en stock, qu'il y avait de la farine au sous-sol de la

 12   boulangerie. On a passé un jour, mais que cette nourriture n'est jamais

 13   arrivée jusqu'aux détenus. Je maintiens cette déclaration et toutes les

 14   responsabilités que cela implique.

 15   Vous me posez une question de nature tout à fait équivoque, il y a

 16   quelques instants. Et ce que vous m'avez lu, on peut l'interpréter de

 17   façon différente. On peut l'interpréter d'une façon positive et d'une

 18   façon négative. Vous me demandez si c'est exact. Moi, je ne veux pas

 19   interpréter la phrase pour vous. Moi, ce que j'ai dit, c'est qu'il n'y

 20   avait pas de pénurie alimentaire, mais vous ne nous dites pas si c'est en

 21   ville ou dans la prison.

 22   Question: Bon, d'accord, je vais vous poser la question: en ville.

 23   Réponse: Est-ce que vous pouvez répéter la question, s'il vous plaît, dans

 24   son intégralité?

 25   Question: Bien. Je veux savoir: est-ce que dans la ville de Foca, pendant


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  1   votre détention, il y avait pénurie alimentaire?

  2   Réponse: Je pense que non.

  3   Question: Vous avez parlé de nourriture et vous avez dit que dans

  4   l'entrepôt ou les magasins du KP Dom, vous avez vu des pâtes, du riz, des

  5   conserves. Est-ce que cela veut dire que l'on ne vous a jamais servi de

  6   pâtes, de riz ou de conserves?

  7   Réponse: On avait pratiquement tout le temps des pâtes, des macaronis et

  8   du riz. Mais, en ce qui concerne les conserves, on ne recevait pas de

  9   nourriture en conserve, et surtout rien; jamais de jambon, de saucisson,

 10   ce genre de chose, non. Et la qualité de la nourriture est facile à

 11   déterminer, étant donné que tous les détenus ont perdu énormément de

 12   poids.

 13   Question: Merci. Vous avez parlé d'un certain Esad Hadzic. Vous dites

 14   qu'on l'a emmené, on l'a transporté dans une couverture et qu'il est mort

 15   d'une perforation, d'un ulcère à l'estomac. Est-il décédé à l'hôpital ou

 16   bien est-ce qu'il est décédé au KP Dom?

 17   Réponse: J'ai parlé au Dr Torlak quand on l'a fait venir dans la salle où

 18   j'étais détenu. On a parlé d'Esad Hadzic. Je crois qu'il y a eu un

 19   problème avec son ulcère pendant l'après-midi, c'est ce que Torlak m'a

 20   dit, et on l'a transporté à l'hôpital le lendemain seulement. Donc il est

 21   probable qu'il soit décédé à l'hôpital.

 22   Question: Quand vous avez parlé de l'incident dans la cour avec les

 23   soldats, vous nous avez dit que vous pensiez qu'il s'agissait de soldats

 24   venant de Bileca, et que vous avez pensé cela à partir de la manière dont

 25   il s'exprimait.


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  1   Quelle distance y a-t-il entre Bileca et Foca en kilomètres?

  2   Réponse: Je ne sais pas quelle est la distance en kilomètres, mais je sais

  3   qu'il y a des différences dans la manière de parler. J'étais convaincu

  4   qu'il ne s'agissait pas de personnes de Foca. Et sur la base de leur

  5   accent, j'ai pensé qu'il était possible qu'ils soient originaires

  6   d'Herzégovine.

  7   Question: Donc les gens venant d'Herzégovine ont un accent différent des

  8   gens qui habitent à Foca?

  9   Réponse: Il y a une différence.

 10   Question: Combien de temps cet incident a-t-il duré?

 11   Réponse: Je crois qu'en tout cela a duré une dizaine de minutes, en tout

 12   cas pas plus longtemps.

 13   Question: Est-ce que vous passiez juste là ou est-ce que vous étiez à cet

 14   endroit? J'avais cru comprendre que vous aviez dit que vous passiez par là

 15   en allant au réfectoire et venant de la salle de détention.

 16   Réponse: C'est exact que l'on passait, que l'on allait en chemin. Mais

 17   pendant un petit bout de temps, on est resté immobile devant le

 18   réfectoire.

 19   Question: Pourquoi êtes-vous resté là?

 20   Réponse: Parce qu'on s'alignait toujours devant la cantine. Voilà, ça,

 21   c'est une raison. Et la deuxième raison est que les gardes ont ordonné aux

 22   détenus de baisser la tête et de garder la tête baissée.

 23   Question: Et c'est pour cela que vous êtes resté là pendant dix minutes?

 24   C'est ainsi que vous êtes resté pendant dix minutes?

 25   Réponse: Je dois dire que cela m'a paru une éternité, mais je ne pense pas


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  1   que cela ait duré plus de dix minutes, je le répète. Parce que je pensais

  2   qu'ils allaient se servir de leurs armes et tirer.

  3   Question: Mais donc, vous êtes resté là au moins dix minutes, c'est bien

  4   exact?

  5   Réponse: Je n'avais pas de montre me permettant de mesurer l'écoulement du

  6   temps ni rien d'autre. Je n'avais pas non plus d'idée du temps qui pouvait

  7   s'écouler mais, en tout cas, c'est certainement environ dix minutes.

  8   Question: Vous avez parlé de Nedzad Delic, Hasan Dzano et Emir Mandzo. Ces

  9   trois hommes sont-ils originaires du même endroit?

 10   Réponse: Non. Non, mais de localités qui sont très proches l'une de

 11   l'autre.

 12   Question: J'ai bien compris, vous êtes en train de nous dire qu'ils

 13   étaient voisins?

 14   Réponse: Ils viennent de différents villages, mais je le répète, ce sont

 15   des villages qui sont très proches.

 16   Question: Est-ce qu'ils ont été arrêtés le même jour?

 17   Réponse: Nedzad Delic? Non. Non, ils n'ont pas été arrêtés le même jour.

 18   Question: Est-ce qu'ils ont participé aux activités de la défense

 19   territoriale et est-ce qu'ils possédaient des armes?

 20   Réponse: Je crois qu'Emir Mandzo, on l'a amené depuis l'hôpital, depuis le

 21   service de l'hôpital où il travaillait. Hasan Dzano, d'après ce qu'on

 22   disait, apparemment il s'était rendu lui-même. Et Nedzad Delic, mon beau-

 23   frère, lui, il a été arrêté le même jour que moi.

 24   Question: Monsieur Berberkic, merci.

 25   Maintenant, je souhaiterais demander l'aide de l'huissier afin de vous


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  1   présenter le plan du KP Dom, et je souhaiterais que vous me parliez des

  2   cellules d'isolement qui se trouvent dans le bâtiment administratif et

  3   dont vous nous avez parlé. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous indiquer

  4   avec précision où cela se trouve?

  5   M. le Président (interprétation): S'agit-il de la pièce 6/1?

  6   M. Bakrac (interprétation): Oui, effectivement. Ou 6/A, en fait, pas 6/1.

  7   M. Berberkic (interprétation): Il s'agit des pièces 1 et 2.

  8   Question: J'indique pour le compte rendu d'audience que le témoin nous

  9   montre que les cellules d'isolement sont situées dans le bâtiment

 10   administratif, à droite de l'entrée, dans le bâtiment qui porte sur le

 11   plan la mention "bâtiment administratif". Et il s'agit de la deuxième et

 12   de la troisième pièce sur la droite qui sont annotées par les mentions 1

 13   et 2.

 14   Monsieur Berberkic, maintenant, en ce qui concerne la porte métallique

 15   qu'il fallait passer pour entrer dans le bâtiment administratif depuis

 16   l'enceinte carcérale, pouvez-vous, s'il vous plaît, nous montrer ce que

 17   vous appelez la droite du bâtiment et la gauche du bâtiment?

 18   Réponse: Vous voulez dire quand on entre en venant de l'enceinte

 19   carcérale, de l'intérieur?

 20   Question: Oui. Qu'entendez-vous par la droite et par la gauche?

 21   Réponse: Eh bien, la gauche c'est ça, ce bureau, les pièces 1 et 2. Ça, ça

 22   fait partie du bâtiment où se trouvait l'administration et, pour moi, ça,

 23   ce que j'indique ici, donc c'est la gauche. Et la droite se trouve à

 24   l'opposé. Voici la droite et voici la gauche.

 25   Question: Pour le compte rendu d'audience, le témoin nous indique la


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  1   gauche du bâtiment comme faisant partie du bâtiment administratif, là où

  2   on peut voir l'inscription "bâtiment administratif", et on y trouve les

  3   pièces 1 et 2 sur lesquelles figurent l'annotation "bureau".

  4   Et le témoin identifie la partie droite du bâtiment comme étant sur le

  5   plan ce qui se trouve à gauche de l'entrée principale du KP Dom. Là, où

  6   l'on peut lire les mots "zgrada straze", le bâtiment des gardes.

  7   M. le Président (interprétation): Je dois vous dire, Maître Bakrac, que

  8   quand je relirais ceci dans le compte rendu d'audience demain, je serais

  9   complètement perdu. Pour moi, on a adopté la même perspective que l'autre

 10   jour; c'est-à-dire que le témoin nous raconte ce qu'il voit et décrit les

 11   choses à partir de l'intérieur du KP Dom. Donc quand il montre la gauche

 12   du plan, c'est pour lui la droite du bâtiment. Et inversement, ce qui est

 13   sur la gauche, il le voyait sur la droite parce que lui, il se trouvait à

 14   l'intérieur du KP Dom, vous voyez? Il ne dit rien d'autre maintenant.

 15   M. Bakrac (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur le Président. Ceci en

 16   effet est très utile parce que vous lisez le compte rendu d'audience.

 17   Mais, en fait, je vais poser une autre question pourquoi je viens de poser

 18   cette question au témoin.

 19   Donc Monsieur Berberkic, vous nous avez parlé d'incidents à la page 9 de

 20   votre déclaration. Vous dites, je cite: "Au moment où ces incidents ont eu

 21   lieu, les gardes n'étaient pas à leur poste de travail habituel. C'est

 22   pourquoi je crois que la plupart d'entre eux ont participé. Je suis sûr

 23   que tous ces incidents ont eu lieu au rez-de-chaussée, dans l'aile droite

 24   du bâtiment administratif, là où se trouvent les cellules d'isolement.".

 25   Fin de citation.


Page 4013

  1   M. Berberkic (interprétation): De quels incidents parlez-vous?

  2   Question: Je parle des passages à tabac de détenus que vous avez décrits

  3   lors de votre interrogatoire principal.

  4   Réponse: Cela n'aurait pu être que dans la partie gauche du bâtiment. Il

  5   interrogeait les gens dans la partie gauche du bâtiment.

  6   Question: Donc ce que vous avez dit aux enquêteurs du Bureau du Procureur

  7   dans la déclaration que j'ai déjà mentionnée, donc ce que vous leur avez

  8   dit n'est pas exact.

  9   Réponse: Il y a un détail qui manque, à savoir où vous placez-vous depuis

 10   l'intérieur de la prison ou depuis l'extérieur de la prison?

 11   Question: A partir d'où avez-vous observé ces passages à tabac à partir de

 12   l'intérieur?

 13   Réponse: A partir de la salle n°16.

 14   Question: Cela veut dire que vous observiez ces passages à tabac depuis

 15   l'intérieur. Et vous venez de nous expliquer votre explication au sujet de

 16   la droite et de la gauche, et de ce que vous entendez par partie droite et

 17   gauche du bâtiment d'ailleurs.

 18   Réponse: La gauche du bâtiment, pour moi, cela comprend les pièces 1 et 2.

 19   Question: Dans votre déclaration, vous avez dit que les passages à tabac

 20   avaient lieu dans la partie droite du bâtiment. Alors que dans votre

 21   interrogatoire principal, vous avez dit que cela se passait sur la gauche.

 22   Je voudrais savoir où se trouve la vérité.

 23   Réponse: Cela dépend de la façon dont on formule la question. Par rapport

 24   à l'entrée du KP Dom.

 25   Question: Merci, Monsieur Berberkic. Maintenant, en ce qui concerne les


Page 4014

  1   passages à tabac, vous nous avez dit que vous avez pu voir des gens que

  2   l'on faisait sortir. Est-ce qu'on les faisait sortir individuellement ou

  3   en groupe?

  4   Réponse: Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, me poser une question

  5   directe. Vous voulez dire qu'on les faisait sortir de la salle où ils se

  6   trouvaient ou du KP Dom?

  7   Question: De a salle où ils se trouvaient pour les emmener dans le

  8   bâtiment administratif.

  9   Réponse: Vous parlez de la période de juin, juillet?

 10   Question: La période de juin, juillet. La période dont vous nous avez

 11   parlée.

 12   Réponse: On les faisait sortir en groupe de deux à quatre hommes.

 13   Question: Ces groupes de deux à quatre hommes, est-ce qu'on leur faisait

 14   passer la porte métallique ensemble, ou bien, est-ce que l'on faisait

 15   attendre certains d'entre eux devant la porte métallique? Ou plutôt, est-

 16   ce qu'on leur faisait passer la porte tout de suite ou bien est-ce qu'on

 17   les faisait attendre?

 18   Réponse: Je crois qu'il est arrivé que l'on fasse attendre les détenus

 19   devant la porte avant de les interroger.

 20   Question: Etes-vous en mesure de vous souvenir qui on a fait ainsi

 21   attendre devant la porte métallique?

 22   Réponse: Non, je ne pourrais pas vous le dire, je ne pourrais pas vous

 23   donner de noms. En tout cas, pas avec une absolue certitude.

 24   Question: A quelle heure de la journée commençait-on à venir chercher les

 25   détenus?


Page 4015

  1   Réponse: Généralement, c'était après le déjeuner.

  2   Question: Donc à peu près vers quelle heure?

  3   Réponse: Après 15 heures, je crois.

  4   Question: Vous nous avez dit que ces passages à tabac duraient jusqu'à 22

  5   heures ou 23 heures.

  6   Réponse: Je crois que oui effectivement.

  7   Question: Donc il y avait deux à quatre personnes qui étaient passées à

  8   tabac de 15 heures à 23 heures?

  9   Et pendant tout ce temps, vous entendiez des appels au secours et des

 10   hurlements?

 11   Réponse: Après 15 heures, on ne venait pas chercher seulement un groupe

 12   mais plusieurs groupes; trois, quatre groupes. Donc cela faisait en tout

 13   une quinzaine d'hommes.

 14   Question: Vous nous dites que le 28 juin au soir vous avez entendu des

 15   tirs. D'où provenaient ces tirs? D'où semblaient-ils provenir?

 16   Réponse: Je crois qu'ils venaient des pièces dont je vous ai dit que

 17   c'étaient les pièces 1 et 2, ainsi que de l'extérieur du KP Dom.

 18   Question: Vous nous dites que vous avez entendu au moins cinq tirs. Sur

 19   ces tires, combien venaient des pièces dont vous nous avez parlé et

 20   combien venaient de l'extérieur du KP Dom?

 21   Réponse: Je ne pouvais pas le déterminer avec précision et dire combien de

 22   tirs venaient de l'extérieur et de l'intérieur.

 23   Question: Dans le cadre de votre interrogatoire principal, vous avez

 24   déclaré que le lendemain également vous avez entendu des tirs, mais qu'il

 25   s'agissait là de tirs isolés. Qu'avez-vous entendu par-là?


Page 4016

  1   Est-ce que vous voulez dire que ces cinq tirs que vous avez entendus, le

  2   28, étaient en fait une rafale?

  3   Réponse: Tous les tirs étaient des tirs individuels, il ne s'agissait pas

  4   là de tirs venant d'une arme automatique.

  5   Question: Eh bien, alors, dans ces conditions, que vouliez-vous dire quand

  6   vous avez déclaré que le lendemain vous avez entendu également des tirs et

  7   que c'étaient des tirs isolés?

  8   Réponse: Je crois que j'ai répondu à votre question.

  9   Question: Combien de tirs, avez-vous entendu le lendemain et d'où

 10   venaient-ils?

 11   Réponse: De quel jour parlez-vous?

 12   Question: Je parle de la journée qui a suivi le 28 juin 1992.

 13   Réponse: Je ne pense pas avoir déclaré que j'ai entendu des tirs le

 14   lendemain. Je ne sais pas où est-ce que j'aurais pu déclarer cela.

 15   Question: Vous l'avez dit pendant votre interrogatoire principal, lorsque

 16   la représentante de l'accusation vous a posé des questions au sujet de ces

 17   incidents.

 18   Question: Est-ce que le lendemain vous avez entendu des tirs ou pas?

 19   Essayez de vous en souvenir, s'il vous plaît.

 20   Réponse: Je ne peux pas. Je ne peux pas confirmer cette déclaration avec

 21   certitude.

 22   Question: Merci, Monsieur Berberkic. Veuillez nous dire, s'il vous plaît:

 23   le 28 juin, quand vous avez entendu des tirs, quels détenus avait-on fait

 24   passer par la porte métallique?

 25   Réponse: Je ne connais pas les noms des détenus. Je ne m'en souviens pas,


Page 4017

  1   mais je sais qu'ils faisaient partie d'un groupe de trente hommes que l'on

  2   a fait sortir. Et le nom de ceux qu'on a fait sortir le 28 juin, je ne

  3   m'en souviens pas.

  4   Question: Mais vous vous souvenez que c'était le 28 juin. Vous vous

  5   souvenez que vous avez entendu cinq tirs au moins. Vous vous souvenez que

  6   certains d'entre eux, certains de ces tirs venaient de l'intérieur,

  7   d'autres de l'extérieur du bâtiment. Vous vous souvenez qu'on a fait

  8   sortir une trentaine d'hommes. Mais vous ne vous souvenez pas du nom de

  9   personne?

 10   Réponse: J'ai dit que je ne pouvais pas me rappeler de ces noms avec

 11   certitude. Je peux vous donner des noms, si vous le voulez, mais je ne

 12   veux pas dire des choses dont je ne sois pas absolument sûr.

 13   Question: Merci, Monsieur Berberkic.

 14   Est-ce que vous pourriez nous dire si vous avez jamais mentionné aux

 15   enquêteurs du Bureau du Procureur, ou au centre de sécurité de Sarajevo,

 16   le manteau de M. Uzunovic, et le fait que vous l'ayez obtenu par un

 17   intermédiaire, un peu plus tard?

 18   Réponse: Je pense que oui. Mais même si je ne l'ai pas dit, ma déclaration

 19   au sujet de ce manteau est tout à fait véridique et je la maintiens.

 20   Question: Oui mais vous ne l'avez jamais mentionnée précédemment. Tout du

 21   moins pas dans les déclarations qui ont été communiquées à la défense.

 22   Réponse: Je crois qu'il y a beaucoup de choses que je n'ai pas dites et

 23   que je ne dirai jamais. Donc pour moi, il n'est absolument pas étrange que

 24   des éléments surgissent soudain parce qu'on me pose la question, et parce

 25   que cette question suscite en moi des souvenirs nouveaux. Je ne vois


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  1   absolument rien d'étrange à cela.

  2   Question: Monsieur Berberkic, qu'avez-vous fait de ce manteau lorsque l'on

  3   vous l'a remis, lorsqu'il vous est parvenu d'une manière ou d'une autre?

  4   Réponse: Eh bien, je l'ai porté, je l'ai porté longtemps.

  5   Question: Est-ce qu'il était couvert, tâché de sang?

  6   Réponse: Oui. Oui, il était complètement ensanglanté. Il y avait plein de

  7   tâches de sang dans la partie supérieure, aussi bien sur la gauche que sur

  8   la droite.

  9   Question: Est-ce que c'était un imperméable ou une blouse de médecin?

 10   Réponse: C'était un imperméable qu'on portait pour se rendre sur son lieu

 11   de travail.

 12   Question: Qu'est-ce qui vous a permis de dire que c'était son imperméable

 13   à lui?

 14   Réponse: On travaillait tous les deux dans le même service, et je l'ai vu

 15   porter ce même imperméable dans la prison quand il se trouvait dans le

 16   bâtiment n°1 et quand on le faisait sortir. Il n'y a aucun doute dans mon

 17   esprit quant au fait que ce soit bien le sien. Il n'est absolument pas

 18   possible que cela appartienne à quelqu'un d'autre.

 19   Question: Qui vous l'a donné?

 20   Réponse: Je crois que c'était [expurgé], FWS-76, mais je ne suis pas sûr.

 21   Question: Monsieur le Président, il est 16 heures.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, j'ai une

 23   demande à vous présenter au nom de ce témoin. Nous venons de recevoir un

 24   message de la part de nos collaborateurs qui sont au contact avec l'unité

 25   de protection des victimes et des témoins. On nous informe du fait que ce


Page 4019

  1   témoin doit retourner à son domicile demain. Il doit partir, c'est la

  2   deuxième fois qu'il vient à La Haye, il a passé une semaine ici et,

  3   d'après les informations, il a utilisé tous les congés qui lui sont

  4   fournis par son employeur. Donc il va avoir des difficultés énormes si

  5   nous ne lui permettons pas de rentrer chez lui. Je me demande si on ne

  6   pourrait pas poursuivre aujourd'hui ou peut-être demain?

  7   M. le Président (interprétation): J'aurais apprécié que vous puissiez

  8   évoquer cette question précédemment, puisque nous n'avons pas eu la

  9   possibilité de consulter ce qui importe ici, à savoir ceux qui ont des

 10   règles très strictes quant à leurs horaires de travail.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Mais je ne pensais pas que cela

 12   allait se produire parce qu'on s'était entretenu avec les conseils de la

 13   défense et on pensait ceci: on n'en aurait plus que pour 45 minutes.

 14   D'ailleurs, j'étais juste en train de demander quand est-ce que cela

 15   allait s'arrêter.

 16   M. le Président (interprétation): De combien de temps avez-vous encore

 17   besoin?

 18   M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, je suis désolé, je

 19   m'excuse auprès de mon éminente consoeur, mais il nous est difficile

 20   d'évaluer le temps nécessaire. Les réponses que j'ai reçues m'ont été

 21   données beaucoup plus lentement que je ne pensais. Je pourrais essayer de

 22   réduire la durée des questions qui me restent, et je pense que je pourrais

 23   en terminer en cinq ou dix minutes -si cela est possible.

 24   M. le Président (interprétation): Eh bien, voyons voir si on peut trouver

 25   un accord avec les sténotypistes et les interprètes, dix minutes. J'aurais


Page 4020

  1   aimé qu'il y ait des questions plus pertinentes qui aient été posées au

  2   cours du contre-interrogatoire. Est-ce qu'il y a un problème avec les

  3   interprètes?

  4   Interpréte: Dix minutes, c'est acceptable pour les interprètes?

  5   M. le Président (interprétation): Merci.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président,

  7   mais nous aurions besoin de cinq minutes pour l'interrogatoire

  8   supplémentaire.

  9   M. le Président (interprétation): Bien, enfin, peu importe dix ou quinze

 10   minutes c'est la même chose. Cela ne signifie par pour autant qu'il faille

 11   accélérer le rythme. Essayons plutôt de poser des questions moins longues.

 12   Allez-y, Maître Bakrac?

 13   M. Bakrac (interprétation): Si vous le permettez, je vais essayer

 14   d'abréger. Mais si, Monsieur le Président, vous permettez que sa

 15   déclaration soit versée au dossier à titre de pièce à conviction.

 16   Monsieur Berberkic, vous avez mentionné les personnes qui ont été cachées

 17   de la Croix-Rouge internationale Husein Lojo, Avdic, Lojo Husein et trois

 18   autres personnes FWS-71, respectivement 111 et 146. Est-ce que vous pouvez

 19   vous rappeler encore quelqu'un qui aurait été caché de la Croix-Rouge?

 20   M. Berberkic (interprétation): Je crois qu'il y avait encore le témoin

 21   FWS-162, je ne sais pas si je l'ai mentionné préalablement.

 22   Question: Pouvez-vous vous rappeler encore quelques noms?

 23   Réponse: Le détenu Karovic, mais pas Karovic Ibrahim, mais il y en avait

 24   un autre Karovic.

 25   Question: Et dites-nous si le témoin au n°139 a été lui aussi caché dans


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  1   le même groupe avec vous?

  2   Réponse: Je crois que oui.

  3   Question: Monsieur Berberkic, je vais m'arrêter avec toutes ces questions

  4   pour terminer. Mais dites-moi seulement: à la fin, vous vous êtes servi de

  5   ce manteau au moment où Enes Uzunovic était disparu, c'est ce que vous

  6   nous avez dit. A quel moment il a disparu Enes Uzunovic?

  7   Réponse: Il était dans le groupe de gens disparus depuis la mi-juin à la

  8   fin juin 1992. Mais pour préciser la date et le jour je ne pourrais pas le

  9   faire.

 10   Question: Mais à quel moment avez-vous obtenu ce manteau?

 11   Réponse: Ceci pouvait être peut-être deux mois après.

 12   Question: Je vous remercie.

 13   Dites-moi si M. Torlak était resté au KP Dom après la date du 12 août

 14   1993, au moment où vous êtes parti, vous?

 15   Réponse: Non. Il n'était pas resté. Je crois que c'est le même jour où

 16   Zekovic s'était enfui pour s'évader, que c'était donc en date du 3 ou 4

 17   juillet 1993.

 18   Question: Merci, Monsieur Berberkic. Maintenant, au sortir du KP Kom, est-

 19   ce que vous suivez toujours un traitement de ce stress, contre ce stress

 20   de post-traumatique?

 21   Réponse: Dans le pays que j'habite maintenant, au début, je prenais

 22   certains médicaments. Maintenant je n'en prends plus.

 23   Question: Quel médicament avez-vous pris? Et les avez-vous pris de votre

 24   propre chef étant donné que vous êtes médecin? Ou avez-vous suivi un

 25   traitement suivi et ordonné, administré par un médecin?


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  1   Réponse: J'ai suivi un traitement chez un psychologue et un psychiatre,

  2   c'est le Prozac que j'utilisais comme médicament.

  3   Question: Vous avez un dossier sanitaire ouvert, un fichier chez ce

  4   médecin?

  5   Réponse: Je l'avais mais en ce moment-ci je ne l'ai plus.

  6   Question: Merci, Monsieur le Président. En vue d'économiser le temps, pour

  7   abréger, je voudrais tout simplement attirer votre attention sur le fait

  8   que la déclaration faite au centre de sécurité de Sarajevo par ce témoin

  9   devrait être versée au dossier. Il s'agit de ID326, ID326A et ID327 et

 10   ID327A.

 11   Et je n'ai plus de questions à poser à ce témoin, Monsieur le Président.

 12   M. le Président (interprétation): Qu'est-ce que vous en dites, Madame

 13   Uertz-Retzlaff, quant aux versements au dossier de ces pièces à

 14   conviction?

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je n'ai pas d'objection à faire, mais

 16   je me demande seulement si le conseil de la défense a oublié de signaler

 17   également la déclaration faite au Bureau du Procureur. Aimerait-il bien

 18   que ces pièces à conviction soient versées au dossier?

 19   M. le Président (interprétation): Oui, il a fait mention de deux

 20   documents: 326 et 327.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je n'ai pas d'objection.

 22   M. le Président (interprétation): C'est versé au dossier en tant que P326,

 23   P321, P327 et P327A. Faut-il les faire verser sous scellés, étant donné

 24   qu'il s'agit de noms qui y figurent? Il serait bon et souhaitable que cela

 25   soit versé au dossier sous scellés.


Page 4023

   1   Avez-vous des questions complémentaires en contre-interrogatoire?

  2   (Interrogatoire principal supplémentaire de M. Amir Berberkic par Mme

  3   Uertz-Retzlaff.)

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  5   Mais pour abréger, lors de votre déposition au Bureau du Procureur, a-t-on

  6   utilisé le plan du KP Dom? Vous vous en souvenez?

  7   M. Berberkic (interprétation): Je crois que oui.

  8   Question: L'accusation aimerait également faire entrer au dossier ce plan,

  9   il s'agit de ID329.

 10   M. le Président (interprétation): Avez-vous des objections, Maître Bakrac?

 11   Maître Bakrac (interprétation): Non, je vous remercie.

 12   M. le Président (interprétation): Donc ce sera la pièce à conviction à

 13   verser au dossier P329.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ceci me permet de poser quelques

 15   questions. Je n'ai guère besoin de donner lecture d'une autre partie de la

 16   déposition, étant donné qu'il s'agit maintenant d'une pièce à conviction

 17   versée au dossier, mais je me dois de le faire tout de même. Je dois vous

 18   donner lecture de quelque chose qui vous a été lu par M. Bakrac. Il vous a

 19   donné lecture d'une partie seulement, page 6 pour les traducteurs,

 20   quatrième paragraphe en version anglaise.

 21   M. le Président (interprétation): Quel paragraphe, s'il vous plaît?

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il s'agit donc de la pièce à

 23   conviction P326 où il est dit: "Dire que la nourriture inadéquate nous a

 24   été servie n'a rien à voir pour dire qu'il y avait une pénurie

 25   alimentaire. Les détenus serbes disposaient de suffisamment de nourriture


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  1   et suffisamment de nourriture leur a été servie.".

  2   Vous vous en souvenez, vous, de l'avoir dit?

  3   M. Berberkic (interprétation): Je crois que ceci est exact et je me

  4   souviens de l'avoir dit. Merci.

  5   Question: Ensuite, le paragraphe 5 dans cette même déposition, version

  6   anglaise, cinquième paragraphe, lorsque vous parlez des Lojo et de ce

  7   qu'ils vous auraient dit. Maître Bakrac vous en avait déjà donné lecture

  8   de cette déposition. Les Lojo vous auraient dit plus tard que Krnojelac,

  9   quant à lui, aurait dit qu'il n'était pas en mesure de contrôler la

 10   situation et que c'était le commandement militaire qui devait décider de

 11   tout et que le personnel pénitencier n'était là que pour être au service

 12   du commandement militaire. Il n'était pas en mesure d'aider, mais il a

 13   promis de faire améliorer les conditions de vie du camp. Il n'a pas tenu

 14   cette promesse. L'avez-vous dit?

 15   Réponse: J'ai pu dire quelque chose de semblable, mais est-ce que c'était

 16   cela?

 17   Question: Oui, mais vous souvenez-vous que, du fait qu'après que les deux

 18   Lojo ont parlé avec Krnojelac, que la situation de la nourriture a été

 19   améliorée? Cette conversation pouvait-elle avoir une influence sur

 20   l'amélioration de la qualité de la nourriture?

 21   Réponse: Non. La nourriture n'a pas été meilleure après.

 22   Question: C'étaient les questions de l'accusation en contre-interrogatoire

 23   supplémentaire.

 24   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

 25   Merci, Monsieur, d'être venu pour témoigner. Vous pouvez disposer. Nous


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  1   espérons que plus tard, vous pourrez encore avoir une permission pour

  2   venir. Nous vous remercions d'être venu ici. Nous remercions les

  3   interprètes et les sténotypistes qui sont restés avec nous jusqu'à la fin

  4   de votre témoignage, jusqu'à la fin de l'audience.

  5   Nous suspendons l'audience d'ici lundi, 9 heures 30, si évidemment il n'y

  6   a pas d'intercepteur. Alors, là, nous essayerons de siéger dans la salle

  7   d'audience n°1.

8   (L'audience est levée à 16 heures 15.)

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